Le Monde illustré (1857)
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Le Monde illustré (1857). 1890/01/04. 1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numériques d'oeuvres tombées dans le domaine public provenant des collections de la BnF. Leur réutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 : - La réutilisation non commerciale de ces contenus est libre et gratuite dans le respect de la législation en vigueur et notamment du maintien de la mention de source. - La réutilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par réutilisation commerciale la revente de contenus sous forme de produits élaborés ou de fourniture de service. CLIQUER ICI POUR ACCÉDER AUX TARIFS ET À LA LICENCE 2/ Les contenus de Gallica sont la propriété de la BnF au sens de l'article L.2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques. 3/ Quelques contenus sont soumis à un régime de réutilisation particulier. Il s'agit : - des reproductions de documents protégés par un droit d'auteur appartenant à un tiers. Ces documents ne peuvent être réutilisés, sauf dans le cadre de la copie privée, sans l'autorisation préalable du titulaire des droits. - des reproductions de documents conservés dans les bibliothèques ou autres institutions partenaires. Ceux-ci sont signalés par la mention Source gallica.BnF.fr / Bibliothèque municipale de ... (ou autre partenaire). L'utilisateur est invité à s'informer auprès de ces bibliothèques de leurs conditions de réutilisation. 4/ Gallica constitue une base de données, dont la BnF est le producteur, protégée au sens des articles L341-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. 5/ Les présentes conditions d'utilisation des contenus de Gallica sont régies par la loi française. En cas de réutilisation prévue dans un autre pays, il appartient à chaque utilisateur de vérifier la conformité de son projet avec le droit de ce pays. 6/ L'utilisateur s'engage à respecter les présentes conditions d'utilisation ainsi que la législation en vigueur, notamment en matière de propriété intellectuelle. En cas de non respect de ces dispositions, il est notamment passible d'une amende prévue par la loi du 17 juillet 1978. 7/ Pour obtenir un document de Gallica en haute définition, contacter reutilisationcommerciale@bnf.fr.
ALBUM DE
L'ARMÉE FRANÇAISE PAR HENRY DUPRAY
m
ET JULES LAVÉE
NAPOLÉON N E Y PAR
TEXTE
Les soldats, mes compagnons d'armes, réunissaient toutes les verlus militaires. A la bravoure et à l'amour de la gloire, naturels aux «
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Français, ils joignaient un grand respect pour la discipline et une confiance sans bornes en leurs chefs : premier élément du succès. Aussi, en nombre égal, n'ont-ils jamais été battus!. » Mal MARMONT.
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(De l'Esprit (les Institutions militaires/.
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PUBLIÉ PAR
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LE MONDE ILLUSTRÉ
SOCIÉTÉ ANONYME DE PUBLICATIONS PÉRIODIQUES 13, QUAI VOLTAIRE, 13
PARIS
L'ARMÉE FRANÇAISE ALBUM DE (1569-1889)
PAR HENRI DUPRAY ET JULES LAVÉE
ESQUISSES MILITAIRES PAR NAPOLÉON NEY m
L'Ancienne Armée
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-
Infanterie de Ligne L'Armée Nouvelle Gardes Impériales et Royale
- Chasseurs à Pied
L'ANCIENNE ARMÉE chez les différents peuples a toujours été la représentation plus où moins exacte de la nation ou plus précisément de l'état social et de la forme politique du pays selon les époques. C'est ainsi qu'en France l'armée
'ARMÉE
tour à tour féodale, royale, impériale est à présent nationale. Si, comme l'a écrit Montesquieu, l'esprit militaire est le signe caractéristique de la grandeur morale d'une nation, les Français, héritiers des vieux Gaulois, ont justifié à plus d'une aïeul fEfrenn la vérité de cette page glorieuse de leur histoire maxime. N'est-ce pas un qui répond fièrement au sénat de Rome « Dans notre pays nous ne craignons rien, sinon que le Ciel nous tombe sur la tête. » Faut-il rappeler les Gesta Dei liste des Victoires longue la Francos, per et Conqueles, les chances diverses des guerres heureuses et malheureuses, mais où l'honneur français se maintint toujours sauf. Les plus belles pages de notre histoire militaire sont celles où aux diverses époques la France eut à lutter pour la liberté et l'indépendance de la patrie.
aipe,
:
-
I. — Depuis la formation de la Monarchie Française le droit Le prihonneur. de porter les considéré un comme est armes vilège de verser son sang pour la défense commune confère à celui qui en jouit la supériorité sur les pairs. Voilà l'origine de
la plus ancienne noblesse française
:
le temps de la chevalerie
qui sous les deux premières races composa la seule force des armées. Vue à distance la chevalerie jette une sorte de poésie sur des temps qui furent en réalité farouches et grossiers. Toutefois elle exerça sur les mœurs, du XC au XIIC siècle, une influence incontestable. Dans une époque encore barbare la chevalerie exalta le sentiment de l'honneur à un degré inconnu des héros même de l'antiquité. Elle inspira l'amour des belles actions et des prouesses; le désir de la renommée, développa des idées nobles et généreuses, préludant de la sorte à ce qui devint plus tard la courtoisie française. La chevalerie disparue éveille en nos esprits des souvenirs lointains. Par Amadis de Gaule et les Quatre Fils Aymon, elle va du vallon triste et sombre de Roncevaux avec le preux Roland et les douze pairs de Charlemagne, (l'empereur à la tête chenue), jusqu'aux chevaliers croisés de Philippe-Auguste venant délivrer les lieux saints du joug abhorré des infidèles. La chevalerie exclusivement réservée à la noblesse eut une heureuse influence sur les mœurs militaires des premiers siècles de la monarchie jusqu'au retour des croisades. Elle fut l'époque des joutes et des tournois. L'honneur et la galanterie furent pratiqués entre les chevaliers et leurs dames. Jusque-là le peuple n'apparaît pas dans l'histoire militaire de la France. L'émancipation des communes au xn" siècle, qui fut un de ces grands mouvements de notre histoire nationale dont la Révolution de 1789 a été le couronnement et la consécration, porta un coup fatal à la chevalerie par la création des milices communales composées en grande partie d'infanterie. Elles
-
-.
devenues de grandes compagnies, infestaient la France, changeant tour à tour de maîtres. Sous Charles V Du Guesclin les avait conduites au delà des Pyrénées contre Pierre le Cruel, roi de Castille. Mais les grandes compagnies s'étaient reformées. Elles combattaient assez bien tant qu'elles étaient payées. Cestroupes, ou l'indiscipline était extrême, com- mettaient journellement des actes de pillage et de dévastation dans le pays même qui les avait enrôlées. A la paix c'était pis encore. Une fois licenciées, elles ravageaient tout le plat pays, c'est-à-dire ce qui n'était pas à l'abri derrière des rem parts. Fréquemment des bandes armées prirent d'assaut des villes
apparaissent sur le champ de bataille de Bouvines en 1214 et
le rôle de ces troupes à leur début a été fort exagéré. Culbutées d'abord par la chevalerie des princes coalisés contre Philippe-Auguste, elles l'emportèrent à la fin. Leur service était surtout défensif. Les, villes-communes formaient. un' réseau : de forteresses servies par les milices, troupesanalogues à notre armée territoriale actuelle. Elles fournissaient à l'armée offensive- une base solide d'opérations en même temps qu'une excellente troupe de soutien en cas d'insuccès.
-
II. Déjà une importante transformation s'était opérée ouvertes. dans la tactique. L'archer, adroit et leste, robuste et bien La gendarmerie ou cavalerie fut formée à l'aide de quinze campé sur ses jambes ne redoutait plus un chevalier arme de compagnies d'ordonnance composées des hommes les plus toutes pièces, gêné dans ses mouvements et monté sur un vaillants et les plus robustes. La quinzième fut la compagnie lourd destrier bardé de fer. C'est ainsi qu'à Poitiers, à Azinde la garde. Chaque compagnie comptait cent lances garnies, court les archers anglais déciment malgré ses prodiges de c'est-à-dire cent groupes de six hommes chacun, comprenant : valeur notre brillante chevalerie française. L'invention des un chevalier armé de page Jouvarlet lance un l et;; trois archers de sa l'~ance ev-al ier, h armé pa g un e-ou-var un,c armes à feu porta définitivement le coup mortel à la cheva- et un coutillier. Les compagnies d'ordonnance fournirent un lerie. La guerre soutenue contre les Anglais pendant cent ans effectif de neuf mille hommes d'élite, non compris les voloncontribua puissamment à développer le sentiment national. La tàire du temps de guerre. Dès lors le ban et l'arrière-ban ne royauté contre le lutte de la les grands vassaux révoltés, dont fournirent plus qu'une milice extraordinaire convoquée seulerésultat fut de constituer la France monarchique, eut pour con- ment lorsque la gendarmerie suffisait pas à compléter l'effecne séquence de modifier profondément la composition. des tif nécessaire. De cette époque date l'impôt en échange du ,
èrs. flèches.
:
serarmées. vice personnel, impôt qui devint ensuite si impopulaire sous le Sous les premiers Capétiens le roi comme les autres seide taille nom gneurs ne pouvait retenir sous ses bannières pendant plus de L'infanterie fut constituée par im corps de quatre mille quarante jours consécutifs les hommes d'armes et les milices. ich - - -Dâ-ns- ~ffi-de- é- paroisse un '-àÉèh e exempt èi-~mpt de la a Lorsque l'expérience eut démontré la faiblesse de ces réunions taille devait-s'exercer à tirer à l'arc. Il recevait un casque en à hâte et règle, d'hommes rassemblées la temporaires sans fer, un justaucorps en cuir matelassé de laine, une dague, une qui disparaissaient subitement suivant leurs besoins : ce qui ren- épée, et une trousse pour dix-sept carrelets ou arc un, dait impossible toute opération militaire sérieuse, les rois s'occupèrent de créer des troupes régulières et permanentes. Afin. d'accoitre l'importance des troupes à pied, de la A côté des soldats restés fidèles au drapeau fleurdelisé on vit piétaille commé l'appelaient dédaigneusement les chevaparaître les mercenaires soldés avec l'impôt basé sur les fiefs. !lt. craq ueniers, C'est ainsi que l'armée royale, du XIIe au XIIIe siècle, prend sgeatsà7 piecl-partéurs S rc é le grand successivement à sa solde des mercenaires étrangers : maître des arbalétriers, devint après la découverte de la poudre le grand maître de ,notre première artillerie. Ses attriçons, Cottreaux, Aventuriers, Ribauds, Arbalétriers, Vouziers, Cavaliers Albanais, Stradiots, Argoulets, etc. butions étaient fort étendues. Outre la garde et l'administration Afin de stimuler ses troupes le roi Louis IX (Saint-Louis) de la Cour en l'Ost (camp du roi) il avait commandement sur décoration institua- au milieu du XIIIe siècle la plus ancienne les archers, maîtres, d'engins., charpentiers, etc. Les arbalémilitaire dont les historiens français fassent mention. La Cein- triers furent plus tard les servants de la première artillerie fut un ornement Militaire d'une grande richesse, surture chargée d'or et de pierreries, réservèe aux Un siècle plus tard, lorsque la France était encore envahie,; - IV. Louis XI, le; fondateur de notre unité nationale, — l'armée royale reçut un commencement d'organisation soushaï pourtant «des des grands » fut un également et menus compagnies Jean-II. Elle règne-troublé de futle groupée en autant qu'un prince politique. Auteur du guerrier prince' d'ordonnance dont les Bannerets-conservèrent le commandeêtes : Guerres, véritable traité d'art militaire pour Rosier et l'arrière-ban étaient conde la noblesse ment. Mais le ban s'occupa pendant toute la durée de son règne il l'époque,. fondus. De nouveaux-titres succédaient aux anciens. Le mécond'accoître son armée et de perfectionner. ses moyens de agité tentement des Chevaliers devint extrême. Sourds aux appels-du qui se battaient mal, Mécontent francs-archers défense. des roi, ils cessèrent en grand nombre devenir aux armées. il leur substitua six mille mercenaires suisses dont il avait apprécié, en maints combats., la solidité et la. vaillance. Il III. — Une réorganisation-complète du corps des hommes y joignit dix mille hommes levés en France, dont il porta plus tard le nombre à vingt-cinq mille. Il tint sur pied des effectifs d'armes s'imposait a la sécurité royale. Ce fut l'honneur du l'avoir fois plus le passé et fortifia les nombreux quatre de menée l'avoir entreprise de à, et Charles VII roi par que. bonne fin aux États Généraux de 1438. Le gentil compagnon de places comme ne l'avaient jamais fait ses prédécesseurs. Charles VIII, à l'armée Jeanne d'Arc, -la bonne Lorraine, fit: connaître ses volontés que lui laissait son père, ajouta des à la noblesse de France assemblée. On peut dire que le lansquenets, troupe allemande, que conserva Louis XII, le roi Charles V II a été le véritable fondateur de la première père du peuple, afin d'alléger les charges de la nation. François Ier, prince guerrier trop'loué par les poètes et pas assez armée française :; : Charles VII'résolut de débarrasser à tout jamais la France - par les militaires, s'occupa sans trêve de donner à son armée des Grandes Compagnies, en donnant pour la première fois à une organisation rationnelle mieux appropriée à son époque. notre pays une armée permanente et nationale, n'obéissant Par son ordonnance de 1534 François Ier, souvent abandonné qu'au roi et soldée par lui. par ses mercenaires, créa sept légions provinciales qui devaient Le nombre des mercenaires étrangers allait croissant. présenter ensemble un effectif de cinquante-deux mille hommes, dont trente-deux milles hallebardiers et vingt mille arquebuCes bandes d'aventuriers, véritables troupes de brigands, -
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française. seuls chefs.
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CONDÉ A ROCROY (1643)
siers. Les nécessités de la guerre et les divers théâtres des hostilités empêchèrent le roi de réaliser son projet. V. — Henri II reprit la création des sept légions décidée par son père. Mais il se heurta aux mêmes résistances de la part de sa noblesse. En outre, les événements politiques et les guerres de religion obligèrent a suspendre l'organisation déjà préparée et même à licencier les légions déjà rassemblées. Pourtant la nécessité d'une réforme s'imposait. Après la bataille de Saint-Quentin en 1557, Henri II décida la création de nouIX dirigea la formation. Ces Charles corps fils dont veaux son corps prirent le nom de régiments. Il y en eut six d'abord, qui dans l'ancienne armée française portaient le nom glorieux de grands-vieux (Picardie, Piémont, Navarre, Champagne, Normandie, La Marine). Six autres régiments vinrent ensuite qui prirent le nom de petits-vieux (Bourbonnais, Béarn, Auvergne, Flandre, Guyenne, Le Roi). Avec les régiments disparaissent les derniers vestiges de l'armée féodale. Et c'est
Guerrier Gaulois,
VIIe
Milice des
siècle.
communes,
-
La période qui va de Charles IX à Henri IV fut pour l'armée française une époque de transition, pendant laquelle la manière de combattre se modifia profondément. De cette époque date la gendarmerie, destinée à agir parle choc (grosse cavalerie) et la cavalerie légère (chevau-légers) ayant pour arme l'arquebuse et plus tard le mousqueton. L'escadron commença à former l'unité tactique de la cavalerie. Au début il était de quatre à cinq cents chevaux. On le formait seulement au moment du combat. L'infanterie fut armée en grande partie de mousquets, après l'arquebuse qui avait elle-même remplacé la hallebarde, qui resta l'arme des sergents et des caporaux.. L'infanterie manœuvrait sur huit rangs de profondeur. Les piquiers, un tiers de l'effectif, occupaient le centre et les mousquetaires VI.
Arquebusier à pied, 1600.
Voulgier, 1400. XNE
avec raison que l'exposition du Ministère de la Guerre à l'Esplanade des Invalides avait considéré la date de 1569 comme étant en France celle de la création des régiments d'infanterie permanents.
siècle. Suisse,
IPOO..
Fusilier, 1670.
Garde-Française, 1750. Grenadier de la Garde Impériale, 1806. Régiment de Champagne, 1786. :
PREMIÈRE INFANTERIE
les ailes. Les mousquetaires, forts de la supériorité de leur armement, combattaient en tirailleurs et battaient l'estrade. Alors, apparut le bataillon, formation de bataille pour le moment du combat seulement, qui comportait entre mille et douze cents hommes et cessait après l'action. La première artillerie fut une artillerie de position. Les canons étaient trop lourds pour être facilement déplacés. Il n'y avait pas alors de troupes spéciales d'artillerie. Les pièces dissimulées sur divers points de la ligne de bataille étaient la plupart l'artillerie du temps gardées dire Suisses. On peut que les par de campagne n'existait pas encore à cette époque. A partir d'Henri IV, le nombre des régiments s'était accru rapidement. A la mort de Louis XIII on en compsoixantetait trente-trois. Il tard jusqu'à plus eut y en quinze. Sous Louis XIV, l'armée atteignit un développement extraordinaire. Elle était, en 1688, sur un pied de guerre de trois cent quatre-vingt-quinze mille hommes. Pendant la guerre de Succession d'Espagne, de 1703 à 1713, il y eut quatre cent mille soldats sous les drapeaux. L'armée avait reçu de Louvois une organisation complète. A peine pouvons-nous indiquer en quelques mots l'oeuvre immense de ce grand organisateur qui fut un détestable politique.
Il établit le pas cadencé, l'uniforme, donna à l'armée la baïonnette, construisit les magasins de vivres, les casernes, les hôpitaux militaires, créa le corps des ingénieurs, les compagnies d'élite dans les régiments , les corps de hussards, de cuirassiers, de grenadiers à cheval, etc.; les écoles de cadets, les haras de remonte. Il fonda les écoles d'artillerie de Douai, de Metz, de Strasbourg; maintint rigoureusement la discipline et la hiérarchie du commandement ordonna les revues régulières ; créa l'hôtel des Invalides et fit une véritable révolution dans l'armée par l'Ordre du Tableau qui donnait les grades au service et non plus à la naissance.
;
Ces réformes, même les moins importantes, ne furent
pas acceptées par la noblesse sans protestations. Saint-Simon raconte qu'un marquis breton dont l'habillement avait reçu le baptême du feu refusa formellement de se vêtir de l'uniforme, qui dans son esprit portait atteinte aux droits du gentilhomme. Il parut à la revue du roi comme aux jours de bataille, paré des couleurs de la Bretagne. Louis XIV, indigné qu'on osât désobéir aux ordonnances sur l'uniforme, cassa le marquis de Coëtquen à la tête de son régiment.. « Heureusement, Sire, répondit le marquis, que les morceaux me restent. Ils seront bons encore à Votre Majesté. » Il reprit du service pendant la guerre de la Convention d'Augsbourg et fut tué à Steinkerque. L'esprit français ne perd jamais ses droits..,
raux. Mais l'honneur militaire demeurait sauf. L'officier français comme le soldat étaient restés fidèles aux traditions de bravoure et de courtoisie qui se perpétuaient dans nos régiments. A Fontenoy, le comte d'Auteroche interpelle les ennemis : « Messieurs les Anglais, tirez les premiers ». A Crevelt le chevalier d'Assas tombe percé de coups en criant : « A moi, d'Auvergne, voilà les ennemis ! » Au siège de Trêves un officier passe dans la tranchée et demande pour un coup de main douze hommes de bonne volonté. Tout le corps reste immobile: personne ne répond. Trois fois il répète sa demande au milieu du même silence, « Eh quoi, s'écrie l'officier, on ne m'entend pas ! On vous entend, s'écrie une voix, mais qu'appelez-vous douze — hommes de bonne volonté? Nous le sommes tous, vous n'avez qu'à choisir. » C'est l'époque où le lieutenant deVauvenargues, réformé pour ses blessures après la retraite de Prague, écrit dans la retraite ses maximes philosophiques où se trouve parmi tant d'autres celle-ci, bien digne de l'âme d'un soldat : « Les grandes pensées viennent du cœur, » et cette autre qui
Au cœur de la guerre de Succession d'Espagne, à la fin du règne de Louis, XIV, en Allemagne, deux partis se trouvent tout à coup en présence. Du côté des Français est un détachement de Navarre célèbre par cent campagnes glorieuses. — Quid regimentum ? dèmande l'officier ennemi.
--
!
Navarricum ! répondent les nôtres. Diabolicum ! crient les Allemands qui sans plus attendre prennent la fuite, laissant la place à leur ennemi redouté. La seconde partie du règne de Louis XV et les premières années du règne de Louis -XVI virent s'achever l'organisation définitive de l'ancienne armée, dotée alors d'institutions dont plusieurs ont survécu aux révolutions et aux guerres nombreuses que la France a traversées depuis cette époque. Sous Louis XV la politique traditionnelle de la France fut oubliée. Nos alliances, soumises au caprice des ministres complaisants ou des favorites, dépendirent parfois d'une épigramme ou d'une adroite flatterie. Trop souvent les armées confiées à des chefs incapables furent battues par la faute de nos géné-
Infanterie de ligue, 182L Légion,
1816.
Fusilier, 1835.
Grenadier, 1830.
Fusilier, 1850.
1866..;
1870.
-
1875.
-
Voltigeur, 1845.
INFANTERIE DE LIGNE
semble une ironie pour le temps où il vécut protecteurs sont nos talents. »
:
«
Nos plus sûrs
Les ministres de la guerre de cette période furent surtout des
administrateurs : le comte d'Argenson (1743-1757) ; le maréchal de Belle-Isle (1757-1761); le duc de Choiseul (1761-4770) ; le comte de Saint-Germain (1775-1777) ; le comte de Ségur (1780-1787). Les cruelles leçons de la guerre de Sept Ans -ne furent pas perdues. L'armée acheva de s1 organiser et fut alors dotée d'institutions qui ont survécu aux révolutions et aux guerres nombreuses que la France a traversées depuis cette époque. L'Ecole spéciale militaire fut construite au Champ de Mars avec La Flèche pour école préparatoire, remplacée en 1777 par plusieurs écoles militaires de province, réservées aux cadets gentilshommes. Bonaparte sortit de l'école de Brienne, officier d'artillerie au régiment de la Fère. L'école des ingénieurs géographes à Versailles, les écoles de cavalerie datent du même temps. Le recrutement fut modifié. Les enrôlements volontaires enlevés aux capitaines et à leur racoleurs eurent lieu directement par l'Etat, sous la surveillance des intendants. Les milices furent réorganisées en 1779 sous le nom de troupes provinciales, divisées en régiments provinciaux et en bataillons de garnison destinés à former des troupes de seconde ligne. Le conseil supérieur de la guerre nommé en 1787, composé des présidents des comités d'armes, sous la direction d'un maréchal de France, élabora une série de règlements sur l'organisation générale de l'armée, les manœuvres d'infanterie et de cavalerie, le service intérieur, le service en campagne qui entrèrent aussitôt en vigueur. Dans les corps
de troupe les cadres furent fixés, les attributions des divers emplois réglées. Le grade de major, intermédiaire entre les capitaines et le lieutenant-colonel, celui de trésorier et de quartier-maitre, datent de Louis XV. Les régiments reçurent une caisse spéciale ; une masse d'habillement. Le linge et chaussure de la troupe furent réglementés. Les derniers détails de l'uniforme étaient réglés. L'épaulette, devenue plus tard si populaire ( car « porter l'épaulette » a été longtemps le signe du grade militaire) remonte au ministère du comte de
Choiseul. Enfin l'organisation des armées actives en divisions permanentes d'infanterie et de cavalerie à deux brigades fixé3 par l'ordonnance royale du 17 mars 1788 établit en France le système divisionnaire. On lit dans le préambule de l'ordonnance sur l'organisation générale de l'armée : « Le roi veut que ses troupes. soient toujours disposées à entrer en action et qu'elles soient à cet effet'organisées, équipées et pourvues de tous les effets de campement comme elles doivent être à la guerre. » N'est-ce pas là, énoncée il y a un siècle, ce que les armées contemporaines appellent aujourd'hui la mobilisation?
Malheureusement trop souvent les questions de détail firent perdre de vue l'ensemble. Un écrivain militaire put écrire : prennent Les une importance de plus en plus paperasses « grande. » Mirabeau, officier à la veille de laRévolution, ajoutait cette boutade : « Le major, homme de détails, autrefois sans cQmmandement, ne portant pas même le hausse-col, marque distinctive de l'officier combattant, est actuellement officier
supérieur! » C'est déjà l'éternelle question des officiers de plume et des officiers d'épée, résolue dans certaines armées contemporaines mais agitée encore aujourd'hui dans l'armée française depuis un siècle. Un grand nom militaire domine cette époque : celui d'un général habile et d'un écrivain militaire distingué: Maurice, comte de Saxe, maréchal-général de France, titre que seuls avaient porté Turenne et Villars. Le vainqueur de Fontenoy, de Laufeld et de Raucoux a exposé dans son livre des Rêveries ses idées sur les réformes militaires, en tête desquelles il place le service obligatoire : « Il faudrait établir par une loi que tout homme, de quelque condition qu'il fût, serait obligé de servir son prince et la patrie pendant cinq ans. Cette loi ne saurait être désapprouvée, parce qu'elle est naturelle et qu'il est juste que les citoyens concourent également à la défense de la patrie. L'on se ferait même par la suite un honneur et un devoir de servir. Alors ceux qui auraient accompli leur temps verraient avec mépris ceux qui répugneraient à cette loi. » Bien que d'origine étrangère Maurice de Saxe avait le caractère français. Un jour un officier général lui proposait un coup de main dans lequel il faudrait, disait-il, « sacrifier la
vie d'une vingtaine de grenadiers ». Le maréchal indigné lui répondit : « Une vingtaine de grenadiers ! Passe encore si c'était une vingtaine d'officiers généraux. » Aussi inspirait-il à ses soldats une confiance sans bornes. En 1757, un régiment français passait par Strasbourg. Un officier visitant l'église ,Saint-Thomas où se trouvait le mausolée du maréchal de Saxe aperçut deux grenadiers aiguisant leur sabre sur la pierre du tombeau. Très surpris, il interrogea ces militaires. Ils lui répondirent qu'ils espéraient ainsi communiquer a leur arme une vertu particulière pour triompher de l'ennemi. Ce petit fait en dit plus à lui seul que de longs discours.
Quelques années avant la Révolution on avait poussé la minutie jusqu'à placer dans les cours des casernes des horloges à balancier et des échelles géométriques gravés sur les pavés pour atteindre le plus haut degré de perfection dans la régularité et la cadence du pas. L'auteur, le général Duhesme, à qui nous empruntons ces détails, ajoute aussitôt : « La guerre que nous fimes quelque temps après avec des bataillons qui avaient été à peine dégrossis a bien prouvé l'inutilité de tous ces soins. »
Chasseur à peJ, 1855. Légion. Batallion de chasseurs, 1816. Tenue d'Afrique, 1835. Infanterie légère. Voltigeur, 1830. - Chasseur d'Orléans, 1840.
CHASSEURS
Lorsqu'on étudie dans leur ensemble les guerres de Louis XV on est frappé des ressemblances qui existent entre notre époque et les années qui suivirent le traité de Paris (1763), après la désastreuse guerre de Sept Ans. Alors la France ne subit pas comme en 1871 un démembrement territorial. Elle perdit les plus beaux fleurons de sa couronne coloniale : l'Acadie, le Canada, les Indes, etc. La France traversa alors une période de recueillement qui n'est pas sans analogie avec le temps présent. Alors comme aujourd'hui les idées de réorganisation à la prussienne furent en faveur. On déclara que « la baguette de fer » était la cause de nos désastres comme on devait dire cent ans plus tard que « le maître d'école prussien » avait gagné la bataille de Sadowa. » Mensonges ! Les principes militaires mis en pratique par nos ennemis dans leurs guerres heureuses ont été puisés presque tous dans les écrivains militaires français. La véritable supériorité de nos adversaires a consisté uniquement dans la régularité méthodique de leur instruction militaire ; dans la patience laborieuse les règlements réduit ont ils laquelle avec *n une sorte de catéchisme où les leçons des anciens et grands capitaines étaient formulées d'une manière nette et précise, appliquée aux différents La France la de l'art de guerre. cas est la mine précieuse d'où la Prusse a extrait les maté-
A
1860.
1870.
1815.
-
PIED
riaux de sa récente grandeur. Il nous appartient de les lui
reprendre ! Le cœur humain, disait le maréchal de Saxe, est le point de départ de toutes choses à la guerre. Pour bien connaître de celles-ci il faut étudier celui-là au préalable. C'est que l'homme est l'instrument définitif du combat. Constitution, organisation, armement, tactique sont des accessoires si l'on ne tient pas compte de la connaissance exacte du combattant; du facteur moral » que le chef a dans la main au moment « définitif de l'action. Voilà l'importance d'une bonne éducation
militaire. Dans notre armée nationale tous les Français, qu'ils appartiennent à l'armée active ou à l'armée territoriale, ont au cœur l'amour ardent de la patrie et le sentiment réfléchi du devoir. Ils n'ont pas besoin d'aller chercher au delà du Rhin des principes, des idées nouvelles ou des vertus ; mais uniquement des procédés de dressage; des perfectionnements mécaniques ; la persistance dans l'application et dans la préparation des détails. Ces moyens sont à la portée de tous. Ils prendront une grande importance dans la guerre future, que nous devons toujours avoir à la pensée. sans en parler
jamais. L'esprit d'arme, l'esprit de corps, ce levain des actions
héroïques, atteignit dans les régiments de l'ancienne armée des proportions admirables. Officiers et soldats portaient avec fierté sur les parements et les revers de leurs uniformes, les couleurs spéciales à leur régiment qui rappelaient celles du drapeau. La cravate était blanche pour tous les drapeaux de l'armée royale. En ces beaux régiments où les fils venaient servir après les pères, les traditions se perpétuaient intactes et respectées, comme un titre de noblesse dans une même famille. Les générations se transmettaient comme un précieux dépôt les drapeaux, les étendards glorieux, noircis de poudre, criblés de balles ou de boulets ennemis qui avaient conduit le régiment en Allemagne, en Italie, en Flandre, en Espagne, sous Turenne, Gondé, Vauban, Catinat, Villars, Ghevert, Maurice de Saxe, Belle-Isle, ou de' Broglie. Chaque corps avait sur son drapeau son cri de guerre. A Normandie, c'était « Vive Normandie ! - à.Bretagne : « Ça mal qui l'enfonce ! » Champagne garda pendant deux siècles son orgueilleuse devise. Quand un soldat désigné pour une entreprise périlleuse était »
Sapeur de
s
la
République, 1793
tâté sur sa résolution il répondait fièrement : « Je suis du régiment de Champagne ! » Puis il allait mieux se battre, certain d'accroître ainsi la moisson d'honneur de son régiment.
Pour le plus obscur soldat l'armée était déjà l'école du devoir et du dévouement. Un de nos illustres hommes de guerre dont la France gardera longtemps le deuil cruel, le général Chanzy, a dit excellemment en parlant du passé : « Ce ne sont pas nos légendes qui nous ont perdus. Nos légendes sont nos gloires. C'est encore dans ces légendes que nous puisons les grands exemples, les grandes pensées, les grandes convictions qui, sur le champ de bataille, nous inspirent et nous montrent comment on fait son
devoir.
Nous ne pouvions terminer par de meilleures paroles le souvenir trop rapide que nous avons consacré à l'armée de la monarchie française avant de parler de notre armée natio-
nale.
À- p É
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Infanterie de ligne, — Voici
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Infanterie, petite tenue,
Grenadier de la Garde, 1808.
Garde-Française, soldat charpentier/1775. Sapeur, Infanterie Légère,-1-806, Infanterie,'1820. :
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NOUVELLE ARMÉE la « reine des
venir batailles » avec ses cent quarante-quatrerégiments, héritiers des grands-vieux et des petits-vieux; des régiments de l'ancienne monarchie; des demi-brigades républicaines, des régiments de Napoléon, de la monarcîne de Juillet çt du second Empirer Le peuple dit en la voyant passer : la ligne! mot suranné qui a survécu sans raison. Depuis la guerre de Crimée l'infanterie légère a disparu. Ses vingt-cinq régiments, de l'ingauche la placer vinrent à glorieux, si passé se au fanterie de ligne où ils prirent les numéros de soixantede seize à cent. Aujourd'hui notre infanterie se compose cent soixante-deux régiments d'armée active et de cent quarante-cinq régiments d'armée territoriale. Les trente bataillons de chasseurs à pied représentent seuls aujourd'hui l'infanterie légère de l'armée française. L'infanterie est l'âme même de l'armée. Seule de toutes les autres armes elle peut attaquer, défendre et garder une position. Elle porte sa force en elle-même, marche et combat. -
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Une infanterie bien- instruite se concentre et se déploie sans effort : ressort toujours tendu, souple et flexible aux mains du chef habile à tirer parti, de ses ressources.. La résistance aux fatigues et la solidité dans les marches,-l'habitude du terrain dans les manœuvres ; l'habileté et le sang-froid dans le tir, font un soldat instruit. Une tactique de combat simple, permettant d'utiliser toute la puissance- des armes ; le courage opiniâtre et persistant sous les feux de l'ennemi ; l'esprit de discipline chez les soldats ; l'initiative chez les chefs, voilà les qualités fondamentales, voilà quel doit être l'objectif de notre vaillante infanterie française : active, réserve et territoriale.
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En 1792 l'infanterie' de ligne, organisée par l'Assemblée constituante, recrutée par enrôlements volontaires, se composait de 80,000 hommes. Il y avait cent quatre régiments parmi lesquels onze régiments suisses, qui furent licenciés après le 10 août. En outre l'Assemblée constituante avait décrété la levée de 169 bataillons de volontaires nationaux qui formeraient un effectif de 101.000 soldats. Mais l'armée de ligne n'était pas au complet. Le ministre Narbonne avouait
LES GARDES FRANÇAISES (1745)
A
FONTENOY
à l'Assemblée qu'il manquait 51.000 hommes à l'armée régulière, s'affaiblissant de jour en jour et nullement recrutée. Il proposa de combler ce vide en incorporant les volontaires dans les vieux régiments. « La formation des bataillons nalionaux, disait-il, a porté vers ce genre de service la classe précieuse d'hommes qui fournissaient le plus généralement aux recrues. Par leur dévouement les volontaires sont engagés comme de véritables soldats de ligne et soumis au même @ 1. » régime tant que la patrie réclamera leur secours L'Assemblée repoussa cette proposition si simple et si sage à la fois qui nous eût épargné plus d'un désastre, au début des guerres de la République. Nos troupes de ligne numériquement faibles étaient désorganisées par l'émigration des officiers et l'indiscipline des soldats. Sur 9.000 officiers nobles plus de 6.000 quittèrent leur emploi. Les liens de la discipline dans l'armée semblaient rompus. Chez les volontaires ils n'existaient pas encore. Ces derniers étaient en désaccord avec les vieux régiments et se vantaient d'être les vrais soutiens, et, comme disait le député Bruat, les enfants chéris de la liberté. Ils portaient l'habit bleu ; les soldats de ligne avaient conservé l'habit blanc, d'où ces dénominations que les partis exploitaient: les bleus et les blancs. La France traversa alors une crise terrible.
La fusion réclamée par Narbonne fut effectuée'l'année suivante
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par Carnot. Il amalgama les bataillons blancs avec les volontaires nationaux vêtus de ces habits bleus plus tard usés par la victoire » « et forma les demi-brigades de bataille, qui furent le novau des immortelles armées de la République et de fEmpire. Le 17 fructidor VI an la Convention décréta la conscription imaginée par Jourdan, qui appelait sous les drapeaux tous les jeunes gens de vingt et un à vingt-cinq ans et assurait à l'armée un recrutement régulier. Elle devint plus tard très impopulaire par suite des abus des dernières années de l'Empire, lorsque des classes antérieures de conscrits furent de nouveau et plusieurs fois rappelées sous les drapeaux. La conscription a enlevé à la France plus de deux millions d'hommes en moins de dix ans; exactement, 2.123.000. Depuis le 1er septembre 1808 jusqu'au 15 novembre 1813, dix-sept levées eurent lieu, le plus souvent par des sénatus-consultes.
Heureusement la confiance était revenue. L'amour sacré de la patrie enflamma les cœurs. La nation acceptait avec confiance ce nouvel ordre de choses. Elle sut combattre, souffrir et mourir pour la cause de la liberté. La France fut sauvée.
Royal Roussillon, Tambour, 1750. Tambour, 1832. Tambour, 1850. Tambour, 1875. Cornet d'Infanterie Légère, 1812. Ligne, 1809. Tambour-Major, 1840. Clairon, 1875. Clairon, 1823. Demi-Brigade, Tambour, 1793. Tambour-Major, Garde, 1806.
TAMBOURS ET CLAIRONS
Cet ardent patriotisme victoires de la véritable des le secret est Révolution R' : Cobourg, Cobourg ! s'écrie mourant, siège de au « en Charleroi, l fantassin du bataillon de la Moselle : avec tes nombreux un fl orins tu n'aurais pas une goutte de mon sang. Je le verse tout entier aujourd'hui la liberté. » Le 16 sepla République et pour pour tembre 1792, volontaire du corps de Valmy, jours quatre avant un e ermann mande à un de ses amis de la capitale : « Notre armée ne s, occupe beaucoup de l'intérieur; nous ne voyons que les Pruspas SIe lens, de », Le sergent Fricasse, à la nouvelle des premiers succès j,envahisseur, s'écrie : « Avec du courage on vient à bout de tout. » uis il fait à Dieu la prière suivante : Dieu de toute justice, prends « sous ta protection nation généreuse qui ne combat que pour une égalité. » La nation confondait alors dans même amour la. patrie un et la république. Nos armées sont battues non pour la répuse « mais pour la patrie : vivent nos demi-brigades ! » Le mot de Patrie, racontait plus tard Lavalette, faisait battre le coeur. Toutes me les autres idées étaient effacées. Ce sentiment était partagé par tous F eess Français. Notre armée, qui combattait pour son indépendance et Pour sa liberté, qu'ils n'eurent jamais : force ennemis à opposa une ses enthousiasme, qui, selon le mot de Gouvion-Saint-Cyr « suppléa à tout et nous donna la victoire ». Les soldats parlant de la Marseillaise baient « Voilà un air qui a des moustaches! » Les soldats sans solde, distribution manquaient de la moisans he de leurs effets. Beaucoup n'avaient même pas de baïonnette.
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L Rapport du ministre de la guerre du
il janvier 1792.
Employés aux frontières : au nord, sur le Rhin, sur les Alpes, aux Pyrénées ils étaient toujours au bivouac ou dans des trous qu'ils creusaient, et vivaient sur un pays ravagé par la guerre. Les officiers, sortis durang, pauvres comme les soldats, donnaient comme eux l'exemple du dévouement et de l'abnégation. Sac au dos, pas payés, ils prenaient part aux distributions comme leurs hommes et recevaient des magasins les effets d'habillement qui leur étaient indispensables : un habit ou une paire de bottes. Le 14 août 1795 la Convention alloua à chaque officier un uniforme complet et une indemnité en argent de huit livres pour régler tout l'arriéré de la solde. On se rappelle la magnifique proclamation de Bonaparte au début de la campagne d'Italie en 1796 : « Soldats, vous êtes mal nourris, mal vêtus etc. » Quelques jours après, sur le peu d'or qu'il avait apporté il donna quatre louis à chaque général, « ce qui parut un acte de haute générosité Pourtant aucun officier ne songeait à se plaindre de cette détresse ni à détourner ses regards du service. « C'est l'époque de ma carrière, écrivait le maréchal Soult, où j'ai le plus travaillé et où les chefs m'ont paru le plus exigeants. Aussi beaucoup de nos officiers généraux sont plus tard sortis de cette rude école. Dans les rangs des soldats c'était le même dévouement, la même abnégation. » Nos fantassins vainquirent à Valmy, à
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Jemmapes, à Fleurus, à Wattignies, combattirent sur le Rhin et firent la conquête de la Belgique et de la Hollande en plein hiver avec leurs pantalons de toile et souvent en sabots. La façon de combattre de l'infanterie de la République était alors particulière. De cette époque date l'usage des tirailleurs en grandes bandes. L'ennemi rencontré et les colonnes déployées, une foule de tirailleurs s'élançait des bataillons et couvrait aussitôt le front du combat. Une multitude d'actions partielles s'engageait. « Alors, suivant les vicissitudes, derrière eux, du sein des rangs attentifs, palpitant d'émotion, sortaient bientôt des cris impatients : — Il faut du secours à la droite! Les voilà qui ploient en centre. Soutenons, soutenons la gauche ! Et tous, sans attendre l'ordre, criant « En avant! » entraînaient officiers et généraux. Ils se précipitaient au pas de course, se ruant sur l'ennemi déconcerté, qu'ils renversaient par la fureur imprévue d'une attaque aussi soudaine. » Plus tard l'infanterie nouvelle incorporée dans les demi-brigades avec ce qui restait de la vieille armée, lui apportant son audace, lui prenant son organisation, apprit bientôt à manœuvrer devant les armées les plus manœuvrières de l'Europe, formées à l'école de Frédéric II et de ses généraux. Tous, officiers et soldats, élevèrent leurs cœurs à la hauteur des circonstances. Les quatorze armées créées par la Convention délivrèrent la France de l'invasion. C'est grâce à la haute intelligence, à l'infatigable activité de ce capitaine du génie qu'on a appelé justement le Grand Carnot, que la France républicaine dut la création de ses armées victorieuses. Membre du Comité de Salut public, chargé du personnel et du mouvement des armées ; secondé par Prieur (de la Côte-d'Or) et Robert Lindet qui s'occupaient des subsistances, des armes et des munitions, des transports, etc., il fut à hauteur de sa tâche écrasante et mérita le nom « d'Organisateur delà victoire ». Représentant en mission il vint en personne décider de la victoire de Wattignies. Ferme dans ses opinions républicaines, Carnot se tint à l'écart pendant l'Empire. Mais aux heures tristes, quand la France fut de nouveau envahie, au moment où il y avait moins de gloire que de péril à partager la fortune de Napoléon, Carnot donna un noble exemple. Il écrivit en 4814 à l'empereur la lettre suivante, admirable exemple d'un patriotisme mettant son pays au-dessus de ses préférences personnelles. Sire, aussi longtemps que le succès a couronné votre entreprise, je me suis abstenu d'offrir à Votre Majesté des services que je n'ai pas cru lui être agréables. Aujourd'hui que la mauvaise fortune iv met votre constance à une grande épreuve, je ne balance plus à vous. faire l'offre des faibles moyens qui me restent. C'est peu, sans doute, que l'offre d'un bras sexagénaire, mais j'ai pensé que l'exemple d'un soldat dont les sentiments patriotiques sont connus, pourrait rallier à vos aigles beaucoup de gens incertains sur le parti qu'ils doivent prendre et qui peuvent se persuader que ce serait servir le pays que de l'abandonner. Il est encore temps, Sire, de conquérir une paix glorieuse et de faire que l'amour d'un grand pays vous soit rendu. «
« CARNOT. »
Lazare Carnot reçut le commandement de la place d'Anvers qu'il défendit héroïquement jusqu'après l'abdication de Napoléon et qu'il administra avec une intégrité à laquelle les habitants ont rendu hommage en élevant une statue au général français. Il fut ministre de l'intérieur, aux Cent-Jours et promulgua la constitution libérale (article additionnel aux Constitutions de l'Empire) que l'empereur, sur ses conseils, donna à la France à son retour de l'île d'Elbe. Après Waterloo, au moment du départ suprême, Napoléon embrassa son ministre : « Carnot, lui dit-il, je vous ai connu trop tard ! » Membre du gouvernement provisoire en 4815 ; proscrit au retour des Bourbons, il vint se fixer à Magdebourg où il mourut le 2 mai 1823. Le gouvèrnement allemand nous a rendu les restes de ce grand citoyen, de ce grand homme de guerre, en même temps que ceux de la Tourd'Auvergne, « le premier grenadier de France », tué à Neubourg le 1er juin 1800. Ils ont été déposés tous les deux, avec des honneurs militaires, au Panthéon national.
Malgré leur misère nos soldats firent alors — comme toujours — la guerre gaiement. La bonne humeur française
aux armées aidait à passer le temps, ne perdant jamais l'occasion d'une plaisanterie. Raffet, le dessinateur, nous en a conservé quelques exemples : « Le représentant a dit : Avec du fer et du pain on peut aller en Chine. Il n'a pas parlé de chaussures ! » Deux autres dessins nous montrent une troupe d'infanterie arrêtée dans un marais, ayant de l'eau jusqu'audessus du genou. Premier dessin : « Il est défendu de fumer, mais vous pouvez vous asseoir. » Deuxième dessin: « Il est sept heures. Nous les surprendrons à quatre heures du matin ! » Le génie naissant de Napoléon Ier ne tarda pas à briller d'un vif éclat. ,Sa manière de faire la guerre, bien appropriée aux qualités militaires de notre race, plongeait dans un étonnement profond les armées ennemies. Un adjudant-major hongrois, fait prisonnier au cours de la campagne de 1796, déclara ingénument au général Bonaparte qui l'interrogeait « que les troupes françaises étaient toujours et partout à la fois, devant, derrière, sur les flancs, sur la ligne de retraite ; qu'on ne savait plus comment se placer pour combattre ; que ce nouveau mode de guerre était hors de toute règle et de tout usage ; qu'on ne pouvait plus y tenir et que cela devenait réellement insupportable ». Nous ne suivrons pas dans ses glorieuses étapes notre infanterie en Belgique, en Hollande, en Allemagne, en Italie, en Égypte, cette campagne digne des anciens où « du haut des pyramides quarante siècles contemplèrent» nos fantassins, vainqueurs de Mourad-Bey et de sa redoutable cavalerie. Pendant l'expédition de la Haute-Égypte, si pénible sous un soleil de feu, dirigée par Desaix « le sultan-juste », nos soldats arrivés à la première cataracte gravent dans la pierre avec une flèche indicatrice cette inscription: « Route de Paris. » Puis ce fut le passage des Alpes par le Grand Saint-Bernard, sur un point réputé infranchissable, au prix de difficultés inouïes, vaincues. On avait démonté les voitures de bagages et les caissons d'artillerie. Les affûts et les roues étaient portés à dos de mulets ; les canons placés dans des troncs d'arbres creusés. Aux chants patriotiques des soldats se mêlaient les accords de la musique guerrière des régiments. Dans les endroits difficiles, les tambours en battant la charge donnaient une nouvelle vigueur à ceux que la fatigue avait affaiblis. Le grenadier Jean-Roch Coignet a donné de ce passage une description émouvante qui ne le cède en rien au magnifique récit de l'Histoire du Consulat. Le premier Consul put écrire fièrement à Berthier : « César avait tourné les Alpes ; nous les avons franchies. » A partir de Marengo l'épopée se continue. Nos bataillons traversent l'Europe au pas de charge. Le drapeau tricolore flotte tour à tour à Milan, Rome, Vienne, Berlin, Madrid, Lisbonne, Moscou. Quelle admirable époque ! Le drapeau tricolore ne fut pas tout d'abord exclusivement en usage aux armées. Le drapeau d'Arcole, dont Bonaparte fit cadeau à Lannes par une lettre restée célèbre1, était un guidon blanc. Le vert était la couleur favorite de Napoléon. En 1803 il songea un moment à l'adopter comme couleur nationale. La première distribution solennelle des drapeaux eut lieu à Milan le 14 juillet 1797, jour anniversaire de la prise de la Bastille. Elle donna lieu à une grande fête militaire. Les drapeaux républicains portaient, d'un côté, les noms des batailles où s'était particulièrement distinguée la demi-briLe Corps législatif, mon cher Lannes, me donne un drapeau en mémoire de la bataille d'Arcole. Il fut, au cours de cette mémorable journée, un instant où la victoire incertaine eut besoin de l'audace des chefs. Plein de sang et couvert de trois blessures vous quittâtes l'ambulance, résolu de mourir ou de vaincre. Je vous vis constamment, dans cette journée, au premier rang parmi les braves. A la tête de la colonne infernale, vous arrivâtes le premier dans tous les combats. A vous à être le dépositaire de cet honorable drapeau, qui couvre de gloire les grenadiers que vous avez constamment commandés. Salul et Fraternité, 1
BONAPARTE.
fOMINÉ LE
COMMANDANT 1884
A TUYEN-QUAN TU YEN -QU AN
les régiments ne pouvaient emporterfurent brûlés ét les officiers en burent les cendres. Le colonel du 4° de ligne, le duc de Fezensac, nous raconte qu'il emporta l'aigle de son régiment dans le sac d'un officier qui ne le quittait jamais. Là encore, notre infanterie resta digne d'elle-même et combattit avec honneur. A Kraswoë la 2e division du 3e corps (maréchal Ney), formée en colonnes de régiments, marcha droit 55e : La terrible cinquante-cinquième que rien ri arrête. 75° : La soixante-quinzième arrive et bat l'ennemi. Les drapeaux à l'ennemi. Les Russes la virent avec admiration s'avancer républicains étaient surmontés de la piqué., A l'Empire, ils vers eux dans le meilleur ordre et d'un pas tranquille. témoin oculaire, enlevait reçurent l'aigle. La distribution des nouveaux drapeaux eut « Chaque coup de canon, dit un lieu au Champ de Mars le 5 décembre 1804. entières. Chaque pas rendait la mort inévitable et « des files C'est au cours delà campagne de 1805, que furent créées « la marche ne fut pas ralentie un seul instant. » les compagnies de voltigeurs. On choisit les hommes les plus Fezensac, dans ses Souvenirs, remarque combien il importe petits, les plus lestes, et chaque bataillon se trouva encadré que les officiers d'infanterie soient à pied et s'exposent aux entre deux compagnies d'élite : les grenadiers à droite, les fatigues aussi bien qu'aux dangers. Un jour, un soldat murvoltigeurs à gauche. murait, son capitaine lui dit : De quoi te plains-tu? tu es fatigué; je le suis aussi; tu n'as pas mangé, ni moi non plus; A Austerlitz, le 36e régiment, de la brigade Saint-Hilaire, assailli tu as les jambes dans la neige, regarde-moi. Avec un pareil en tête et en flanc par un feu terrible sur le plateau de Pratzen, va langage il n'est rien qu'on ne puisse exiger des soldats, rien plier. L'adjudant Abadie pressent le danger, et se portant à vingt pas d'eux. d'attendre droit soit qu'on en ne s'écrie-t-il, en avant avec le drapeau : « Comme à la manœuvre, Après tant d'années de gloire la fortune abandonna enfin jalonnons la ligne de bataille ! » Et le régiment, rassuré par ce bel exemple, se déploie avec un ordre parfait et enfonce la ligne ennemie. nos armes. Napoléon comme Louis XIV avait trop fait la Dans la même campagne les Français venaient d'occuper la citaLe sol sacré de la patrie fut envahi par les alliés. guerre. delle d'Inspriick. Deux drapeaux que le 76° de ligne avait perdus L'Empereur retrouva toute la puissance de son génie. La dans les Grisons, ce qui était pour ce corps une affliction profonde, de France (1814) égala par la fertilité des combicampagne les furent trouvés dans l'arsenal. Un officier les reconnut, tous naisons la campagne d'Italie (1796) du général Bonaparte. soldats accoururent aussitôt. Lorsque le maréchal Ney les leur fit Nous venons de voir quelle avait été l'infanterie de la rendre avec solennité, des larmes coulaient des yeux de tous les vieux soldats. Les jeunes conscrits étaient fiers d'avoir servi à reprendre grande armée endurcie par quinze ans de guerre. Les jeunes ces insignes enlevés à leurs aînés par les vicissitudes de la guerre. levées de 1813, de 1814 et de 1815 furent en tous points « Le soldat français a pour ses drapeaux un sentiment qui tient de dignes de leurs la tendresse. Ils sont l'objet de son culte, comme un présent reçu de 2 février 1814, pendant la campagne de France, à Rosnay Le sa mère. » , le 132e régiment de ligne, réduit alors à trois cents hommes, Après Iéna, au mois de décembre 1806, le conseil municipal de Paris vota pour les drapeaux des régiments de Prusse et de Pologne avait passé la Moire et battait en retraite,devant une colonne des couronnes de laurier en or, qu'ils conservèrent jusqu'en 1814. ennemie de trois mille hommes. Entraîné par le maréchal MarL'Empereur avait établi dans chaque régiment deux sous-officiers, mont qui se mit à sa tête l'épée à la main, le 132e culbuta la gardiens spéciaux de l'aigle, placés à droite et à gauche. Ils n'avaient dans la Moire. Tout ce qui ne fut pas la jeta ennemie et colonne d'autres armes que plusieurs paires de pistolets, d'autre emploi « que tué ou pris se noya. Dans son rapport à l'Empereur le duc de de veiller froidement à brûler la cervelle de celui qui avancerait la A l'affaire de Rosnay, huit, écrivait : contre Raguse main pour saisir l'aigle ». un nous « ; Le 25 juin 1809, le 84° de ligne et trois compagnies du 9°, retranavons été assez heureux d'arrêter l'ennemi et de le battre. » chés dans le cimetière de Gratz, soutinrent pendant quatorze heures Napoléon ordonna que l'inscription Un contre huit rappelant ce l'effort de 20.000 Autrichiens, appuyés par le canon. Quand on vint serait placée sur le drapeau du régiment. d'armes fait glorieux les délivrer ils firent à l'ennemi 500 prisonniers et lui prirent deux drapeaux. L'Empereur savait récompenser. Le régiment reçut quatre- Le 132e de ligne, un des plus beaux régiments de notre 6e corps d'armée, porte aujourd'hui sur son drapeau la fière devise. vingt-quinze croix de la Légion d'honneur. Le colonel Gambin fut fait A Champaubert (10 février 1814) l'uniforme des fantassins comte .avec une dotation de 20.000 francs de rente-. Napoléon écrivit sur le drapeau du 84e cette glorieuse devise qu'il a encore : « Un consistait plus qu'en une capote grise et un bonnet de police ne contre dix. » d'où le nom qu'on donnait à ces braves forme de - féminine, deux A la bataille d'Ostrowno, pendant la campagne de Russie, Ils étaient Maries-Louises. à peine les commandés jeunes gens : d'appuyer cents voltigeurs parisiens du 9° de ligne reçurent l'ordre et encadrés. Quand le maréchal Marmont parcourut leurs une charge du 16° chasseurs à cheval fournie par Murat en personne lignes, voyant la plupart des pelotons sans officiers, il demanda contre les lanciers russes. Nos cavaliers furent ramenés et les deux cents voltigeurs, seuls entre les deux armées, se retirèrent en -combatà l'un d'eux où était son lieutenant : « — Notre lieutenant, tant; sur un terrain entrecoupé de buissons et de crevasses, mettant Et le sergent? reprit le mais nous n'en avons jamais eu! en fuite les lanciers ennemis. Napoléon, qui les apercevait, s'écria : mais c'est égal. davantage Ne craignez maréchal. Pas Ce — ai les dire je et « sont des enfants de Paris ! Allez leur vus que rien, nous sommes tous là. » Comme alors il leur montrait qu'ils ont tous aujourd'hui mérité la croix de la Légion (l'honneur. » l'ennemi, en leur recommandant de bien ajuster, l'un d'eux ajouLa bataille d'Eylau fut une des plus sanglantes de l'Empire. Un seul fait donnera une idée du carnage effroyable qui eut lieu à Eylau. tait qu'il ferait bien feu, mais qu'il n'était pas sûr de pouvoir Le capitaine, plus tard général Hugo, oncle de Viclor Hugo, comrecharger son arme. Et pourtant quelques heures plus tard mandait dans Je cimetière une compagnie de grenadiers du 56° de enveloppée. qui Ce n'était pas tué était ennemie l'armée ligne, qui fut exposée premier feu de l'artillerie et perdit 81 hommes au tombait entre nos mains avec 24 canons. Le général ennemi sur 85. Tous les officiers furent tués excepté le capitaine Hugo qui, était saisi au milieu des bois par un simple chasseur de six mois atteint d'un biscaïen au bas-ventre, mit dix-huit mois à se guérir. de service. Ce conscrit, malgré les ordres de ses chefs, ne voulut pas lâcher prise qu'il n'eût conduit ce général à l'EmLa campagne de Russie si bien commencée finit par un inoubliable désastre. Certains régiments au retour étaient pereur. Il le lui remit de sa main et Napoléon le décora. En 1815, la cocarde blanche remplaça la cocarde tricolore. réduits à des pelotons de cinquante, trente, dix hommes : offiPlus de 13.000 officiers, brigands de la Loire (!) furent renvoyés ciers, sous-officiers et soldats, Un petit nombre de drapeaux resta aux mains de l'ennemi. Un dessin populaire de Charlet en demi-solde dans leurs foyers. Les effectifs furent réduits Des légions départementales remplacèrent les régiments dont le nous montre des grenadiers enterrant le drapeau sous la neige Pour l'empêcher de tomber aux mains des Cosaques. Ceux que nom ne reparut qu'en 1820. L'infanterie de la Restauration
gade (nom nouveau du régiment), et,de l'autre : R. F. Discipline, obéissance à la loi. Quelques drapeaux, à l'imitation de ceux de la monarchie, reçurent des devises : 18e demi-brigade : Brave dix-huitième, je vous connais. L'ennemi ne tiendrapas devant vous. 25° : La vingt-cinquième s'est couverte de gloire. 32° : J'étais tranquille. La trente-deuxième était
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aînés.
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prit part à la guerre d'Espagne (1823) où fut pris le
Trocadéro. L'expédition de. Morée (1828), où les forces alliées de la France et de la Russie assurèrent l'indépendance de la Grèce, vit la bataille de Navarin; à laquelle l'escadre anglaise refusa de prendre En 1830, après la Révolution de juillet, un grand nombre d'officiers du premier Empire, en demi-solde depuis quinze ans, rentrèrent- dans leurs anciens régiments où ils remplacèrent les officiers légitimistes qui se retiraient; Ils y ramenaient l'esprit d'autrefois. L'infanterie du règne de Louis-Philippe retrouva ses traditions républicaines et ses souvenirs napoléoniens. C'est à elle que revient en- grande partie l'honneur de la conquête de l'Algérie. L'importance des opérations militaires, la nécessité d'entretenir des effectifs considérables dans le pays ne permirent pas à l'infanterie de notre armée, sans réserves, soumise au service de sept ans, de remplir seule cette glorieuse tâche. Des corps spéciaux : chasseurs à pied, zouaves furent créés t
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Cantinièré, 1750.1792..
1811..
1825.'
1845.
les premières campagnes d'Afrique les régiments d'infanterie légère de ligne furent seuls. En 1848, d'infanterie et , au moment de la Révolution. de février, plus de la moitié de Mais pendant
nos régiments (57 sur 100) avait passé en Algérie. Aujourd'hui ceux qui n'ont pas fait campagne en Algérie ou en Tunisie sont l'exception.Les trois provinces d'Alger, de Constantine, d'Oran furent le théâtre d'exploits glorieux pour notre infanterie. Nous en retiendrons deux seulement. Pendant la retraite de Constantine le commandant Changarnier, entouré tout à coup par les Arabes, fait former le éarré à son bataillon : « Ils sont deux mille et vous êtes trois cents ; la partie est égale. » Bientôt l'ennemi est repoussé. Le second de ces épisodes est la mort glorieuse du sergent Blandan, du 26° de ligne. Voici en quels termes le général Bugeaud portait à la connaissance de l'armée d'Afrique ce beau fait d'armes le 14 avril 1842. J'ai à vous signaler un fait héroïque qui à mes yeux « Soldats ! égale au moins celui' de Mazagran. -Là quelques braves résistent à
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Grenadiers .Garde, 1856. Guides, 1860.. Cavalerie, 185)0.
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Cavalerie, 1860;
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Zouaves de la Garde, -1865. 1870.
GATSfTINIÈEES
plusieurs milliers d'Arabes; mais ils sont derrière des murailles, tandis que. dans le combat du 11 avril, 21 hommes porteurs de la correspondance sont assaillis en plaine entre Bou-Farik et Mered par 250 à 300 cavaliers arabes venus de l'est de la Mitidja. Le chef des soldats français, presque tous du 26e de ligne, était un sergent nommé Blandan.., L'un des-Arabes, croyant à l'impossibilité de la résistance d'une si faible troupe, s'avance et somme Blandan de se rendre. Celui-ci répond par un coup de fusil qui le renverse. Alors s'engage un combat acharné. Blandan est frappé de trois coups de feu. En tombant il s'écrie: « Courage, mes amis! Défendez-vous jusqu'à la mort ï » tous, et tous ont été fidèles à son de Sa voix entendue noble été a « ordre héroïque ; mais bientôt le feu supérieur des Arabes a tué ou mis hors de combat seize-de. nos braves, Plusieurs sont morts ; les autres ne peuvent plus tenir, leurs armes; cinq seulement restent debout: Ils défendaient encore leurs camarades blessés ou morts, lorsque le lieutenant-colonel Morris, du 4e chasseurs d'Afrique, arrive de BourFarik avec un faible renfort. la horde de Ben-Salem : « Des deux côtés, l'on se précipite sur elle fuit, et laisse sur la place une partie de ses morts. alliés lui ont vu transporter un grand nombre de « Des Arabes blessés ; elle n'a pu couper une seule tête ; elle n'a pu recueillir un seul trophée dans ce combat, où pourtant elle avait un si grand avantage numérique. v Nous avons ramené nos morts, non mutilés, et leur avons donné
les honneurs de la sépulture. Nos Messes ont été portés à l'hôpital de Bou-Farik, entourés des hommages d'admirationde leurs camarades1. »
Les trois couleurs « retrouvées » promenèrent nos bataillons dans les plaines- de la Mitidja, dans les montagnes de la Kabylie, à Constantine, à Isly, à Zaatcha, à Laghouat. Elles firent la conquête de l'Algérie. A l'ombre de notre drapeau, les fils du souverain grandirent et apprirent la. guerre. C'est alors que se forma cette admirable armée d'Afrique, école de soldats plus que dé généraux, endurcie à la fatigue, entraînée à la employée' la France et avec tant d'heureux a guerre que succès en Crimée, en Italie, au Mexique, etc. L'espace nous manque pour suivre en ses nombreuses campagnes l'infanterie du second Empire. Le 24 juin 1859, après la bataille de Magenta, des officiers interrogèrent un clairon du 85e de ligne sur l'état des pertes de son régiment. « —. Nous avons eu cinq officiers tués,, répond le brave soldat; puis le colonel, M. Veron de Bellecourt, qui a reçu huit blessures ; le lieutenant-colonel et deux chefs de bataillon blessés. Ah ! reprend-il, et le drapeau 1. La statue de Blandan a été placée en 1886 sur la place de Bou-Farik, grâce aux efforts d'un Comité ayant à sa tête le vaillant et dévoué colonel Trumelet. -
LES CHASSEURS D'ORLÉANS
A
SIDI
BRAHIM
(1845)
FASCICULE 1.
que j'oubliais, lui aussi a été blessé ! — Le porte-drapeau?— Non, le porte-drapeau n'a rien eu; mais le drapeau a été blessé et crânement de deux balles. Il avait déjà reçu trois blessures en Crimée en voilà cinq; mais il est encore solide. » Pour ce brave soldat, le drapeau n'était pas une chose, mais un être animé. Quatre régiments d'infanterie portent à la cravate de leur drapeau la croix de la Légion d'honneur. Ce sont les 76e 51e, 99e et 57e. C'est pendant la guerre d'Italie après Magenta, le 14 juin 1859, que l'empereur Napoléon III décida que tout régiment qui prendrait un drapeau ennemi recevrait pour son aigle la croix de la Légion d'honneur. Quelques jours après, à la bataille de Solferino, à la fin de la journée, le 76e de ligne débusquant l'ennemi d'un bois parvint à lui arracher dans sa retraite et à conserver le drapeau du 11e régiment autrichien (prince Windisgraetz)
:
Les dures années que passèrent nos soldats au Mexique enrichirent nos annales de glorieux faits d'armes, et valurent aux drapeaux de deux régiments d'infanterie la croix d'honneur. Le drapeau du 51e fut décoré à la suite du combat de San-Lorenzo, livré pendant le siège de Puebla contre une armée de secours qui essayait de ravitailler la place. A ce combat glorieux pour nos armes furent enlevés à l'ennemi quatorze drapeaux. Le 99e reçut la croix pour le beau fait d'armes d'Aculcinjo où il prit les drapeaux de trois régiments mexicains. La guerre de 1870, si cruelle pour nos armes, a montré pourtant que l'héroïsme de nos soldats restait aussi grand que fortune, par le passé. Écrasée par le nombre, trahie par notre infanterie resta digne de ses devanciers. En voici la preuve : A Gravelotte, le 16 août 1870, le 93e de ligne, assailli par une furieuse charge de cavalerie, vit son porte-drapeau frappé mortellement. Le drapeau restait gisant sur le sol. Le 5e régi-
la
Hussard. Cuirassier. Infanterie, 1808. Voltigeur. Ligne. Carabinier.. Infanterie légère. Aide de Camp. Chevau-Légers, Polonais et Français.
Chasseur à cheval. Gendarme.
Génie.
Carabinier.
Dragon.
Train.
Infanterie de ligne, Grenadier, 1812. Artillerie à pied et à cheval
GRANDE ARMÉE
:
ment de chasseurs, qui vient dégager l'infanterie, retrouva le drapeau et le rendit au colonel du 93e ému et reconnaissant. A Sedan, la bataille terminée, les officiers du 3e de ligne, pour ne pas rendre leur drapeau, en partagèrent entre eux les glorieux débris. Le drapeau du 89e fut enterré dans les fossés de la ville, puis retiré après l'ouverture des portes. A Metz, dont l'héroïque défense devait se terminer par une capitulation dont le commandant en chef subira la honte devant l'histoire, les nobles exemples ne firent pas défaut. A la bataille de Borny, le général Brayer, frappé mortellement, demanda le drapeau du 1er de ligne, afin de mourir en regardant l'image de la patrie. Il le fit porter près de lui et pressa sur sa poitrine, en l'embrassant, cet insigne de l'héroïque régiment. C'est à Metz, le 16 août 1870, à la bataille de Rézonville, que le drapeau du 57e a mérité d'être décoré. L'honneur en revient au sous-lieutenant Chabal. Aidé de quelques hommes de sa compagnie, ce vaillant officier réussit à s'emparer du drapeau du 16e de ligne prussien. Il tua le porte-drapeau allemand et les sous-officiers qui l'environnaient et rapporta à son régiment son précieux trophée. Ce drapeau prussien fut enlevé de haute lutte, les armes à la main, en plein champ de bataille ! En peuton dire autant des drapeaux français volés à nos régiments et
TROUPES DE LIGNE
portés, roulés dans leurs étuis, à l'arsenal de Metz dans des-fourgons d'artillerie? Le 23 janvier 1871, un deuxième drapeau prussien fut également pris par les francs-tireurs du Mont-Blanc. Cette brave compagnie, retranchée dans l'usine de Pouilly, décima par son feu meurtrier le 91e poméranien ou régiment du roi Guillaume. Le porte-étendard allemand tomba tué en voulant entraîner les siens, et les Poméraniens furent obligés de reculer sous notre grêle de balles, abandonnant sur le champ de bataille leur drapeau, qui fut ramassé par le jeune franc-tireur Curtaz, natif d'Annecy. Un grand nombre de chefs de corps brûlèrent leurs drapeaux, malgré les ordres qu'ils avaient reçus, afin de ne pas les livrer à l'ennemi: Le général de Laveaucoupet écrivit aux colonels de sa division : « Faites sortir votre drapeau de l'étui ou plutôt du corbillard où il est enfermé, devant les troupes assemblées. Faites-lui rendre les honneurs pour la dernière fois, et ensuite qu'il soit brûlé. » Notre armée de Metz était digne de la grande armée de 1812, où, nous l'avons vu, pendant la retraite, les officiers brûlèrent leurs drapeaux et en burent les cendres. Communion sublime
!
Après la chute à Sedan et à Metz de nos armées, non pas vaincues en rase campagne,mais investies sous des places fortes par un ennemi dix fois supérieur en nombre, la France se trouva sans armée régulière. Contre toute vraisemblance elle soutint encore la lutte dans des conditions exceptionnellement difficiles, pendant cinq mois d'un rigoureux hiver, avec des succès partagés : surtout elle sauva l'honneur. Il faut reconnaître que si le gouvernement de la Défense Nationale oublia souvent, au préjudice des opérations militaires, dans ses rapports avec les généraux, que « les choses, comme dit Commines, ne heurent point au champ comme elles sont ordonnées en chambre », néanmoins il fit preuve d'une - ardente énergie patriotique. Élévant son âme à la hauteur des circonstances, Gambetta, enflammé des souvenirs de 1792, vint dire au pays que, malgré la perte de nos armées, il né fallait pas cesser de combattre ; que rien n'était désespéré et qu'un peuple ne cède jamais deux provinces sans avoir lutté jusqu'aux limites de ses forces par un « combat à outrance ». Dans les armées de Paris, de la Loire, du Nord et de l'Est, les régiments de mobiles (auxquels nous devons bien un souvenir) combattirent à côté des régiments de marche formés avec les dépôts des régiments d'infanterie. La composition de ces régiments était bonne. Les hommes vigoureux, pleins de bonne volonté, marchèrent au feu quand ils furent guidés, mais ils se laissèrent aller facilement au découragement. Il leur manquait l'habitude de la guerre. Ces jeunes troupes peuvent se comparer aux soldats des premières années de la République. Les - officiers de la garde mobile, nouveaux pour la plupart, avec toutes les qualités et tous les défauts de leurs hommes, manquaient d'instruction et d'expérience. Ils avaient, comme officiers, tout à apprendre. Pour continuer la comparaison il manqua à nos gardes mobiles en 1870 ce qu'avaient trouvé les armées de la République dans les cadres de l'ancienne armée : des chefs ayant fait la guerre ou connaissant déjà le métier des armes. Ce précieux élément de succès est assuré dans les luttes de l'avenir par l'organisation actuelle de notre armée territoriale où tous, chefs et soldats, auront passé par les rangs. La loi sur le recrutement, votée le 24 juillet 1872, que vient de compléter la loi du 16 juillet 1889 nous a donné une armée vraiment nationale. Elle confère aujourd'hui à tous les Français le glorieux privilège qui consacra la plus ancienne noblesse française : le droit pour chacun de verser son sang pour la patrie. Notre infanterie nationale a déjà montré en Tunisie, dans le Sud-Oranais, au Tonkin qu'elle était digne de ses devanciers. Dans les pénibles, colonnes du Sud-Oranais un bataillon du 32e composé de jeunes soldats a fait en 1881, le 13 et le 14 juillet, sous un soleil de feu, quatre-vingt-douze kilomètres à la poursuite de Bou-Amama, avec les cartouches et deux jours de vivres, sans laisser un homme en arrière. Au Tonkin, dans les marches difficilès à travers les rizières du Delta, dans les forêts épaisses de la région montagneuse du haut pays, : nos fantassins, sous un climat meurtrier, ont tenu la campagne, souffrant de privations de toutes sortes, et sont montés hardiment à l'assaut des hautes murailles de Sontay et de Bac-Ninh. Dure aux fatigues, vaillante au combat, notre infanterie exécute aussi en campagne des œuvres d'utilité publique. Elle l jette des ponts, construit fend des rochers, perce des forêts, des routes comme firent autrefois-ses aînées en Hollande, en Égypte, en Dalmatie, où la plupart des voies de communication datent de l'occupation française. En Algérie il n'est pas rare de rencontrer des inscriptions gravées dans le roc disant au voyageur les noms des régiments qui firent la route. Les officiers d'infanterie viennent étudier dans des écoles spéciales les travaux de campagne du génie. Cette intervention est devenue encore plus importante par suite de l'adoption dans l'armée française du système des ponts et viaducs militaires démontables et portatifs inventés par le lieutenant-colonel Henry,
ancien aide de camp du général Chanzy. Les remarquables expériences faites à Versailles et sur le chemin de fer d'Orléans ont montré que grâce au système de ce savant officier, l'infanterie est actuellement en mesure de jeter en quelques heures, avec une facilité inconnue jusqu'à ce jour, sur les rivières les plus larges et les ravins les plus profonds, des ponts métalliques aussi résistants que des ouvrages définitifs. La plus importante application du système Henry a été la construction en cinquante heures d'un grand pont stratégique mobilisable de 600 mètres de long sur le Var, pour assurer les communications du camp retranché de Nice avec l'armée des Alpes. Cette opération, conduite sans arrêt avec une énergie et une précision - « extraordinaires, fait grand honneur aux officiers et soldats du génie et du 159e régiment d'infanterie qui ont rivalisé de zèle, d'intelligence et de dévouement dans l'exécution des travaux. A là suite de ces manœuvres décisives le système du lieutenant-colonel Henry a été adopté pour les ponts de routes stratégiques comme il l'avait déjà été pour la construction des ouvrages d'art sur les voies ferrées.
Chasseurs à pied.
— Dernier représentant de l'infanterie légère; le plus récent des corps de l'armée nouvelle. Il date de la conquête de l'Algérie. Son histoire est toute récente et son passé déjà très glorieux. Le chasseur à pied est lui-même « son propre ancêtre », pour rappeler un mot célèbre du maréchal Lefebvre. Les bataillons de chasseurs à pied étaient, jusqu'en ces derniers temps, un des sanctuaires où l'esprit de corps banni de l'armée (mais qui y a reparu) avait trouvé un asile. L'expression « pur de garance », qui servait aux chasseurs à exprimer qu'ils n'avaient jamais porté le pantalon rouge, avait le don d'horripiler les fantassins. Elle était l'exagération d'un sentiment excusable de la part des vieux chasseurs, n'ayant jamais servi « dans la ligne » qu'ils trouvaient bien inférieure en tous points « à l'arme des chasseurs ». Pourtant les chasseurs à pied ont eu des aïeux. Sans remonter au delà du règne de Louis XV, il existait alors une compagnie de chasseurs dans chaque bataillon d'infanterie. Les chasseurs à pied de la garde des Consuls formèrent deux régiments de la vieille Garde impériale. Napoléon portait le plus souvent l'uniforme vert des chasseurs de la Garde, de préférence à tous les autres. Les chasseurs à pied actuels datent du règne de Louis-Philippe. Sur l'initiative du duc d'Orléans, une ordonnance royale du 14 novembre 1838 créa, à titre d'essai, un bataillon de tirailleurs caserné à Vincennes. Ils furent longtemps appelés du nom de leur protecteur. et de leur garnison: chasseurs d'Orléans et chasseurs de Vincennes. Ils reçurent une carabine à balles forcée (système. Delvigne-Poncharra). Leur formation était sur deux rangs, ordre rendu nécessaire par la courte dimension de leurs carabines. Aux évolutions de l'infanterie ils ajoutaient la gymnastique et les manœuvres au pas de course, l'escrime à la baïonnette, une pratique spéciale du tir et une nouvelle école de tirailleurs. Aujourd'hui cette instruction est donnée à notre infanterie tout entière. Mais en 1840 on comprendra quelle supériorité devait avoir sur les autres corps de l'armée une troupe aussi bien instruite, dont le recrutement était en outre particulièrement soigné et les officiers choisis. Après une grande revue le roi Louis-Philippe demanda au maréchal Soult son avis : « Sire, répondit: le maréchal, ce n'est pas un bataillon, c'est trente comme celui-là que je voudrais voir à Votre Majesté. » Les vœux du duc de Dalmatie sont aujourd'hui satisfaits. Car trente est précisément le nombre de nos bataillons de chasseurs. Partout où notre armée contemporaine a combattu : en Algérie, à Sébastopol, en Italie, au Mexique, dans la guerre -
PALESTRO
A ZOUAVES
1859)
DE
RÉGIMENT
3me
LE
contre l'Allemagne : aux armées de la Loire et du Rhin, en Tunisie, au Tonkin, les chasseurs à pied ont joué un rôle glorieux. A la traîtresse surprise de Hué, en Annam, où le général de Courcy et son état-major manquèrent d'êtré pris et massacrés, il y a quelques années à peine, c'est le 11e bataillon de chasseurs emmené de France par le général, qui, par sa promptitude à prendre les armes, par le courage et par le sangfroid de ses officiers et de ses soldats, a réparé le désordre causé par cette attaque de nuit et sauvé la situation. Le commandement d'un bataillon de chasseurs à pied est le rêve du tout jeune chef ardent. Pépinière de généraux, les commandants des chasseurs depuis Changarnier jusqu'à Négrier! Écoutez le refrain du 5° bataillon : Cinquième bataillon ventre à terre Commandé par Certain Canrobert.
Déplorable poésie mais glorieux souvenir ! Depuis quelques années l'usage des fêtes militaires a repris dans l'armée. Chaque régiment célèbre un des anniversaires glorieux de son passé. Voilà un heureux symptôme! Par de tels usages les chefs élèvent l'âme de leurs hommes en leur montrant l'au delà de la caserne, les nobles côtés du métier des armes. Ils développent en eux le sentiment moral, se solidarisent avec eux, en leur inspirant la confiance, — élément primordial du succès. — Les chasseurs à pied célèbrent chaque 25 septembre la Sidi-Brahim dans chacun des bataillons. Cet éminentfait d'armes mérite d'être raconté avec détails.
s'élança avec sa petite troupe, — soixante-dix hommes portant une dizaine de blessés, —fit une trouée au travers de la ligne ennemie et s'achemina sur la crête d'une chaîne de collines qui le rapprochait de Djemmaa. L'audace de ce mouvement frappa les Arabes de stupeur. Redoutant le feu des grosses carabines, ils se bornèrent à suivre les Français à distance. La petite-troupe approchait de la ville ; elle était sauvée, quand elle aperçut une source au fond d'un ravin. Le tourment de la soif l'emporta sur le sentiment de la conservation. Nos soldats se débandèrent, malgré les ordres de leurs officiers, pour aller boire, et descendirent dans le ravin où ils furent fusillés par leur ennemi 1.
Le drapeau des chasseurs à pied, unique pour tous les bataillons de l'arme depuis que le bataillon de la Garde n'existe plus, porte inscrits ces noms glorieux : Isly 1844, Sidi-Brahim 1845, Sébastopol 1854-1859, Solferino 1856, et est décoré. C'est pendant la guerre d'Italie que le drapeau des chasseurs à pied a mérité la croix d'honneur. Le 10e bataillon, commandant Bressoles, prit le 24 juin 1859 le drapeau du 66e régiment d'infanterie autrichienne « Gustave Wasa » dans le cimetière de Solferino où le combat fut si acharné. Le sergent Garnier, de la 1re compagnie, qui reçut la croix d'honneur eut la joie de s'emparer du drapeau ennemi, vaillamment défendu par une poignée de braves tombés en le défendant. Ce trophée fut remis au maréchal Baraguey-d'Hilliers qui l'offrit à l'Empereur de la
part du 10e bataillon. Jusqu'en ces derniers temps la garde du drapeau de l'arme
était confiée au bataillon stationné dans le gouvernement militaire de Paris. Mais depuis la mesure excellente ordonnant que les drapeaux assisteront aux manœuvres, le drapeau des chasEn 1845, Abd-el-Kader envahit notre territoire algérien. Le comseurs à pied a été envoyé sur la frontière de l'Est. A l'issue de mandant du poste de Djemmaa-Ghazouat, sur la frontière du Maroc, la revue d'honneur passée le 14 septembre 1889 par le général de le lieutenant-colonel de Montagnac. sortit de son poste avec 62 cavaMiribel près de Saint-Mihiel et qui a terminé les grandes liers et 350 hommes du 8e bataillon de chasseurs. Emporté par sa M. le général de la Hayrie, commandant une des manœuvres, bouillante ardeur, égaré par de faux renseignements, le colonel de divisions du 6° corps d'armée, délégué spécialement par le Montagnac commit l'imprudence de morceler encore sa troupe, laissa ministre de la guerre, faisant former le carré au 2e bataillon de dans le camp le commandant Froment-Goste du 8e bataillon et s'avança chasseurs sur le terrain même de la revue, lui a remis solenavec sa cavalerie, soutenu par deux compagnies de chasseurs. Bientôt un combat inégal s'engagea; Abd-el-Kader était là avec tout son nellement la garde du drapeau des chasseurs. A cette imposante monde. A la première décharge, Montagnac fut blessé mortellement. le général de la Hayrie a rappelé en quelques militaire, cérémonie Tous les chevaux et presque tous les hommes furent atteints. Entoumots aux officiers et aux soldats du 2e bataillon les devoirs que rés par l'innombrable cavalerie et par les réguliers de l'Emir, les leur imposait ce précieux dépôt. Il a puisé dans son âme de chasseurs à pied et les cavaliers démontés gagnèrent un mamelon et soldat l'éloquence de quelques paroles. parties du cœur. se défendirent jusqu'à épuisement complet de leurs munitions. Au bruit de la fusillade, le commandant Froment-Coste était accouru Troupe d'avant-garde, agile, ardente, prompte à l'attaque ; avec une compagnie. Après une héroïque résistance, ce nouveau détasoutien des divisions de cavalerie indépendante ou de l'artilchement fut à son tour détruit jusqu'au dernier homme. Restait la ligne de bataille, les chasseurs à pied ont la de lerie, réserve compagnie de carabiniers du 8e bataillon commandée par le capitaine de Géreaux. Attaqué à son tour, cet officier porta sa petite troupe un uniforme sévère répondant bien à leur rôle. Le pantalon dans le marabout de Sidi-Brahim et s'y barricada. Aux furieuses est bleu à liséré jaune; la tunique noire, les boutons blancs, le képi noir, avec le turban de velours pour les officiers; les attaques des Arabes, la compagnie de Géreaux répondit par le feu de ses grosses carabines qui décimaient les assaillants, dont les plus et galons sont en argent. tresses hardis étaient renversés à coups de baïonnette. Abd-el-Kader, qui Actuellement les bataillons de chasseurs à pied ont reçu dirigeait le combat, le suspendit un moment. II envoya à l'officier dixune double affectation. Le premier groupe se compose de français une sommation écrite, l'engageant à cesser une lutte inutile, tiennent (un corps d'armée), dont plusieurs bataillons huit par capitaine de Géreaux lut la promettant la vie sauve à ses hommes. Le lettre aux chasseurs. Ils répondirent par le cri de « Vive le Roi ! » garnison à proximité de la frontière allemande. Ils ont une Un drapeau tricolore fait double mission : soutenir la cavalerie indépendante de nos avec des lambeaux de vêtements fut hissé sur le marabout. On y pratiqua quelques créneaux à la hâte. On d'armée de l'Est avec les batteries à cheval au début des corps coupa les balles en quatre pour prolonger la défense. hostilités; tenir l'avant-garde des colonnes et servir de rideau L'attaque recommença plus ardente, puis tout à coup s'arrêta pendant la période de concentration. , encore. Le capitaine Dutertre, adjudant-major du bataillon, fait priLe second groupe des bataillons de chasseurs, cantonné à sonnier quelques heures plus tard, s'avança vers le marabout: « Chascourte distance de la frontière italienne, a pour mission la seurs, s'écria-t-il, on va me décapiter si vous ne posez pas les armes, Je viens vous dire, moi, de mourir jusqu'au dernier, plutôt que de garde et la surveillance des passages à travers les Alpes, divivous rendre ! » Sa tète tomba aussitôt ; glorieuse victime, son cousecteurs gardés par autant de bataillons opposés aux sées en rage égala celui de Régulus. Deux fois la sommation fut renouvelée. bataillons alpins italiens. Nos Alpins, c'est le nom que se donLes rangs de ses braves s'éclaircissaient : pas un n'hésita à continuer de montagnes, ont un habillement, un équichasseurs nent le combat. Lassé l'Émir nos avait déjà qui perdu par cette résistance, pement particulier: le feutre tyrolien, une longue pèlerine à plus de monde qu'il n'avait tué de Français depuis le matin, fit cesser le feu, mit capuchon, une chaude vareuse, un pic à glace et des outils ses soldats hors de portée des carabines et enveloppa le marabout d'un cordon de postes qui fermait toutes les issues. Les les chasseurs de chamois. Ils occupent des garnisons comme chasseurs, sans eau et sans vivres, restèrent ainsi trois jours. Enfin le spéciales, à proximité de leur champ d'action. L'hiver des -
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remarqua que l'ennemi s'était relAché de sa vigilance. D'ailleurs les hommes étaient épuisés. Ils aimaient mieux mourir en combattant que de succomber à la faim et à la soif. Géreaux 26 septembre, Géreaux
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1. M. le due d'Aumale, Zouaves et Chasseurs à pied.
Alpins est consacré à d'incessants travaux de topographie, à l'étude minutieuse de la carte et du détail des opérations dont leurs vallées furent le théâtre, afin d'arriver à la parfaite connaissance du terrain. Les sous-officiers et les caporaux suivent des cours spéciaux; les officiers ont des conférences alpines. La belle saison est consacrée aux manœuvres dans la montagne. Les chasseurs alpins demeurent quatre mois, souvent davantage, absents de leurs cantonnements. Ils exécutent des opérations de guerre dans les vallées, gravissent des sentiers abrupts, suivis de leur artillerie de montagne découvrent des passades inexplorés, franchissent des cols réputés infranchissables.. Ils arrivent quelquefois avec armes et bagages à plus de deux mille mètres, bien au delà des neiges éternelles, bivouaquent à des altitudes invraisemblables, mettant parfois, par suite de la difficulté du terrain, plusieurs heures à s'élever de quelques centaines de mètres ; endurcis aux fatigues, émerveillant les généraux qui viennent les visiter et les montagnards. Pendant ces manœuvres dangereuses il arrive — trop sou-
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Fusilier Grenadier 1808.
Génie.
-Gendarme.
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GRANDE ARMÉE
régiments de grenadiers à pied, deux régiments de chasseurs à pied, deux régiments de grenadiers à cheval, deux régiments de chasseurs à cheval, une compagnie de Mameluks, un régiment de dragons, deux régiments d'artillerie, d'élite, un bataillon de marins, un bataillon de vétéune légion de gendarmerie 1. Deux
La jeune Garde fut formée par: deux régiments de tirailleurs-grenadiers, deux régiments de tirailleurs-chasseurs, deux régiments de conscrits-grenadiers, deux régiments de conscrits-chasseurs. Furent créés ensuite : un régiment de fusiliers-grenadiers, un régiment de fusiliers-chasseurs, un régiment de flanqueurs-chasseurs, treize régiments de tirailleurs, treize régiments de voltigeurs, un régiment de dragons, trois régiments de chevau-légers lanciers, quatre régiments des gardes d'honneur, etc. 2.
C'est vraiment des chasseurs à pied, notre infanterie légère, qu'on peut dire : la victoire est dans les jambes de nos soldats in pedite robur !
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Nous - ne croyons pas devoir terminer cette première étude sur l'armée française sans rappeler une institution qui a laissé parmi nous un souvenir glorieux : la garde impériale. Garde impériale. — Par décret du 10 thermidor an XII (24 juin 1804), la garde consulaire devint la garde impériale. Le recrutement de cette garde était excellent. Elle avait pour soldats des vétérans des armées du Rhin, de Sambre-et-Meuse, des Pyrénées,
Aide. de camp du Major-Général. Dragon de l'Impératrice. Officier de Grenadiers, tenue de ville. Artillerie à pied et à cheval. Chasseur à cheval.. Officier d'ordonnance de l'Empereur. Grenadier à cheval.
d'Italie ; des officiers éprouvés et capables ; une discipline sévère. Elle avait pris une part importante au succès de la victoire de Marengo que décida la charge des grenadiers de Kellermann. Bonaparte écrivit le lendemain à Bessières, le commandant en chef : « La garde des consuls s'est couverte de gloire. » La garde impériale fut ainsi formée ; un régiment de grenadiers à pied, un régiment de grenadiers à cheval, un corps d'artillerie, une légion de gendarmerie d'élite, un bataillon de matelots : environ 8.000 hommes, soigneusement choisis dans tous les corps de l'armée. Ce fut la vieille Garde. En 1808 elle était portée à 15.000 hommes 1; en (810 à 35.000 auxquels il convient d'ajouter les 16.000 hommes de jeune Garde créée en 1810 2. En 1814 l'effectif réuni des deux gardes atteignait le chiffre énorme de 112.500 hommes. Ce corps privilégié provoqua au début la jalousie des autres corps de l'armée, qui ne tardèrent pas à rendre hommage à sa valeur et à sa discipline. Terrible sur le champ de bataille à cause de son intrépidité, admirable par son caractère discipliné en pays .ennemi, la
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défendues.
Grenadier à pied. Chevau-Légers Polonais.
Chasseur à pied officier. Garde d'honneur 1813.
rans
vent — que des hommes roulent et tombent dans des précipices Honneur à ceux-là ! Ils ont glorieusement terminé leur vie. Car ils sont morts en préparant la défense de la patrie ! Quel enthousiasme règne en ces bataillons ! Comme ils sont fiers d'être alpins! Ils sont jeunes, ardents, énergiques, pleins de patriotisme!. Sûrement nos vallées alpines seront bien
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VIEILLE GARDE prépondérance de la garde s'imposa bientôt. Dans les plus sanglantes batailles de l'Empire et au plus fort du péril, on vit les régiments de ligne appeler la garde à leur secours, comme un soutien invincible : « Où est la garde? » s'écriaient les soldats avec une anxiété qui cessait à la vue de ses bataillons. La discipline, très sévère dans les régiments de la garde, faisait la force et la considération de ces corps d'élite. Les moindres fautes étaient punies plus sévèrement que dans les régiments de ligne. La discipline de la garde suivait même les soldats hors de la caserne. Il leur était défendu de se promener avec des femmes suspectes, de hanter les mauvais lieux et les cabarets. La promenade du Palais-Royal leur était formellement interdite. Les soldats pouvaient, de jour, traverser le jardin sans s'y arrêter, si c'était leur chemin mais de nuit, jamais. Dans la vieille Garde les soldats se traitaient habituellement de « monsieur » à moins qu'ils ne fussent camarades de lit. La sollicitude de Napoléon s'étendait aux officiers. Au milieu des plus graves occupations de la science ou de la diplomatie il se faisait donner, par les préfets., la liste des jeunes personnes riches, appartenant à l'ancienne aristocratie et s'occupait de les marier aux officiers supérieurs de sa garde. Là ne s'arrêtait pas sa prévoyance. Si l'officier n'était pas assez riche pour la femme qu'il voulait lui faire épouser, il le dotait. Souvent aussi il tenait sur les fonds du baptême les enfants de ses officiers. Un seul jour il fit vingt-quatre « petits Napoléon » d'enfants appartenant aux généraux et aux colonels de sa garde : « Les pères ne sont-ils pas des lions? disait-il. Il ne faut pas laisser périr cette race-là. La France a besoin de nouvelles griffes et de nouvelles dents quand les vôtres seront tombées. » Quand les
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enfants atteignaient l'âge de huit ou dix ans il les plaçait dans les lycées et pourvoyait même aux frais de leurs trousseaux. « Les enfants de mes officiers sont mes enfants. Je dois agir avec eux comme un père de famille. » L'Empereur s'occupait personnellement des cantonnements, des distributions pour sa garde. « Mes grognards ont-ils tout ce qu'il leur faut? Sont-ils contents? » demandait-il fréquemment en campagne. « Ils grognaient, disait-il à Saint-Hélène, mais ils marchaient toujours et ils mouraient. » Dans les premières campagnes la garde donna assez rarement. A Austerlitz elle fut très sérieusement engagée avec la garde impériale russe qu'elle fit reculer. A Iéna la garde impériale à pied voyait avec dépit son inaction, tandis que toute l'armée en était aux mains. Mais à la bataille d'Eylau (1807) qui fut la plus meurtrière de toutes les guerres de l'Empire, cette arme d'élite eut sa revanche. Six bataillons de la vieille garde sous le commandement du général Dorsenne, « le seul homme, disait Coignet, que j'aie vu aussi à son aise au feu en avant du front des régiments, tournant le dos à l'ennemi », marchèrent l'arme au bras à la rencontre de la colonne ennemie parvenue jusqu'au cimetière et la chargèrent à la baïonnette. Napoléon considérait sa garde comme une réserve ne devant êlre
Artillerie à cheval. Artillerie à pied, 1820. Train. Infanterie française, Grenadier.
Infanterie Suisse, 1820.
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engagée qu'à défaut d'autres ressources. Voilà pourquoi, pendant les dernières années de l'Empire, les troupes de ligne étant moins solides, la garde fut plus fréquemment engagée. Elle soutint en grande partiela campagne de 1814 en Champagne. Aux cent jours la garde impériale promptement réorganisée combattit à Waterloo. Elle forma les derniers carrés et tira les derniers coups de feu dé la journée. Un de nos grands poètes magnifiquement tracé le tableau de cet ultime combat de la garde impériale de Napoléon Ier.
a
derrière un mamelon la garde était massée :
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La garde, espoir suprême et suprême pensée ! « Allons! faites donner la garde ! » cria-t-il. Et lanciers, grenadiers aux guêtres de coutil, Dragons que Rome eût pris pour des légionnaires, Cuirassiers, canonniers qui traînaient des tonnerres, Portant le noir kolback, et le casque poli, Tous ceux de Friedland et ceux de Rivoli Comprenant qu'ils allaient mourir dans cette fête, Saluèrent leur Dieu debout dans la tempête. Leur bouche d'un seul cri dit : « Vive l'Empereur Puis à pas lents, musique en tête, sans fureur, Tranquille et souriant à la mitraille anglaise La garde impériale entra dans la fournaise.
!
,
Gendarme des chasses. Chasseur à cheval. Officier de dragons. Hussard. Garde du corps. Grenadier à cheval. Cuirassier.
Lancier.
GARDE ROYALE. — RESTAURATION
-
Un des premiers actes de Louis XVIII fut de rétablir la garde royale rattachée à la maison militaire du roi. Il y eut des mousquetaires noirs, des mousquetaires gris ; 2 compagnies de grenadiers à cheval, 1 compagnie de Cent-Suisses, etc., etc., 6 régiments d'infanterie française, 2 suisses, 1 régiment de lanciers et 1 régiment de dragons. Ce corps privilégié forma un instant le cinquième de l'armée. Il coûtait fort cher (plus de vingt millions), ne rendit aucun service et disparut en 1830 sans aucun passé militaire. Le peuple appelait les militaires de la Garde Royale « les plats d argent», parce qu'ils n'allaient jamais au feu. De nombreux duels eurent lieu entre les officiers de la Garde Royale et les anciens officiers de l'Empire.
Garde royale.
Garde impériale du second Empire.
— Organisée en
1854 sur le modèle de celle du premier Empire. L'infanterie forma un bataillon de chasseurs à pied, 4 régiments de voltigeurs, 3 de grenadiers, un régiment de zouaves. La cavalerie se composa de 6 régi-
ments : carabiniers, cuirassiers, dragons, lanciers, chasseurs, guides et un escadron de gendarmerie. Il y eut 2 régiments d'artillerie un monté, un à cheval et un escadron du train. La garde impériale de Napoléon III s'est montrée digne de son aînée. Pendant le siège de Sébastopol le commandant de Lucinière, des chasseurs de la garde, suivi de quelques officiers et soldats, s empossession, para du petit redan et voulut en prendre officiellement mouchoir blanc pas de drapeau. La ceinture bleue d'un caporal, le d'un officier, un lambeau de foulard rouge furent attachés à la grenadière d'une carabine plantée en terre. Et voilà les trois couleurs qui
flottent au vent. Les balles pleuvent de foutes parts. Le brave de Lucinière tomba mort au pied du drapeau improvisé, mais les renforts arrivaient : la redoute fut prise. Longtemps les chasseurs de la garde ont gardé cette carabine et les lambeaux troués de ce drapeau improvisé. En 1859 pendant la campagne d'Italie la garde combattit vaillamment. A Magenta elle soutint l'effort de toute l'armée autrichienne. Au pont de Buffalora, le 1er grenadiers se trouva exposé à un feu terrible. Bientôt les bonnets à poil de grenadiers morts comblèrent le fossé. Il y eut un moment d'hésitation, un flottement dans la ligne. C'est alors que le colonel de Bretteville se portant à cheval en avant du front s'écria d'une voix tonnante : « Si mes grenadiers reculent, je veux mourir! » L'hésitation était passée : le régiment resta impassible sous les boulets, jusqu'à ce qu'il eût traversé le pont. Faut-il rappeler les glorieux combats de la garde sous Metz? Nous préférons terminer par un souvenir des derniers jours du blocus. D'après une clause de la capitulation de Metz, tous les drapeaux devaient être livrés à l'ennemi!!! Dès que se répandit cette triste nouvelle, une émotion profonde se manifesta dans toute l'armée. Un grand nombre d'officiers, de sous-officiers et de soldats du 1er grenadiers de la garde se portèrent vers la lente du colonel Péan et l'adjurèrent de ne pas livrer le drapeau. Le colonel, profondément triste, partageant les sentiments de ses braves soldats résolut de détruire son drapeau. Les lambeaux, précieuses reliques, furent partagés entre les membres du régiment. Le général Jeanningros, qui commandait la brigade du 1er grenadiers et les zouaves, prévenu, non seulement approuva la conduite du général Péan, mais encore il enjoignit au
colonel des zouaves de l'imiter. Puis il écrivit à son chef cette lettre superbe, digne de Montliic, où passe comme un souffle des temps anciens, et qui consol? des tristesses de l'heure présente. Mon général, Les drapeaux de mes deux régiments ont été détruits par mon ordre : les hampes et les aigles sciées; les morceaux distribués à mes deux régiments. Les drapeaux de ma brigade n' iront pas à Berlin !
9
Le
général JEANNINGROS.
L'infanterie de 1889 est bien digne de ses aînées les armées d'Égypte, d'Allemagne et de Russie; les régiments d'Afrique, de Crimée, d'Italie, de l'armée du Rhin et les armées de province. Elle travaille, elle espère. Renforcée de ses réserves elle sait qu'elle peut compter sur son armée territoriale composée des vétérans de 1870 qui ont cruellement appris la guerre à leur dépens. Ayons foi dans l'avenir Voyez la nouvelle armée quand passe un régiment d'infan-
!.
Artille-ur 1856.
Dragon. -
Génie.
Train.
Voltigeur.
Grenadier.
terie. Il y a dans l'allure de notre fantassin entraîné des signes extérieurs caractéristiques de notre race. Lorsque nos petits soldats défilent au son d'une musique guerrière, avec cet air déterminé, cette démarche élastique et dégourdie, ce caractère d'activité et d'entrain qui est sur leurs traits, dans leur allure, jusque dans les plis de leurs capotes relevées, on se sent remuer. L'étranger: regarde ces hommes avec un étonnement mêlé d'envie. Pendant les grandes manœuvres d'une de ces dernières années, un officier étranger nous avouait, à notre grande joie, qu'il ne pouvait distinguer dans les compagnies les réservistes des hommes de l'armée active, tant la fusion paraissait complète. Le Français reprend vite le tact des coudes au régiment ! A la fin d'une revue, qui ne s'est senti envahi tout à coup d'une émotion profonde quand passe le drapeau, vivante image de la patrie devant lequel les généraux même se découvrent. Il semble qu'on ait le visage frappé par le vent de cette étoffe de soie que des pieds poudreux font marcher. La chair se hérisse, un frisson passe dans nos veines. L'esprit de la France vient de nous effleurer er passant !
Zouave.
Cuirassier. Gendarmes à cheval -
et à pied.
Guide.
Lancier.
Voltigeur, 1866. Chasseur à pied, 1866. Chasseur à cheval.
Grenadier, tenue de ville,.1866. Grenadier 1866.
GARDE IMPÉRIALE — NAPOLÉON
III
-
--.
CAVALERIE 1
L-
-,
- -, -
-
-
.O;;a
———-
:
Cuirassiers
I
-
Carabiniers
Dragons
l'infanterie depuis les trois derniers siècles ou plus exactement depuis la
découverte de la poudre est. devenue la reine dés batailles, la Cavalerie, - formant l'ensemble des troupes combattant à cheval est bien la doyenne des armes. Aujourd'hui, les Cuirassiers représentent seuls à notre époque les chevaliers bardés de fer - du moyen âge, la grosse cavalerie Hussards; Dragons, Chasseurs rappellent des souvenirs pins modernes.. Ils, réveillent en nos esprits
de
,
Chevaiier-banneret, Croisades, 1200. Gendarme,, 1550.
', -
-
Homme d'armes des compagnies
-
Lanciers
Dragon de Saxe,
-
1750.
Carabinier, 1720.
PREMIÈRE CAVALERIE
-
1
-
-.
y -
l'adversaire; détruire ses ponts; couper ses télégraphes; ses chemins de fer ; incendier ses fourrages et ses magasins ; provoquer ainsi dans ses troupes les désordres et les paniques ; tel est le rôle aussi varié que brillant de la cavalerie dans le antes Jetée en avant de l'armée par divisions indépendantes , la cavalerie doit sans cesse fouiller et explorer le pays à service ,-' Sur le champ de bataille, la cavalerie, attentive aux fautes grandes distances. « Une bonne cavalerie a dit Frédéric II, de l'adversaire, observe et contient ses ailes. Toujours sur fait de vous l'arbitre dé la campagne. » -elle échelons, d'éclairéurs, entouréeformée gardes, les en Se maintenir sans cesse en contact avec l'ennemi, dont ses forces et les dispositions lui sont connues; surprendre, battre manœuvre en colonne et se déploie dès qu'elle peut aborder l'ennemi. Elle suit particulièrement les mouvements de la et enlever les éclaireurs et les partisans; réquisitionner les approvisionnements ; reconnaître les cantonnements ; protéger cavalerie opposée, les contient par ses démonstrations et en les convois ; investir les places fortes en préparant autour donne avis au commandant en chef. En même temps elle ne d'elles les installations de l'infanterie ; se porter par des mar- laisse pas échapper les occasions de charger vigoureusement les masses ébranlées ou désorganisées par les vicissitudes ches rapides et hardies les flancs et jusque sur les derrières rapporter; ramasser les déserteurs, arrêter les espions, interroger les habitants, les prisonniers et pénétrer les secrets de
-
Grosse cavalerie,.1793..
Hussard de Lauzun, 1786.
Reître, 1600.
l'ennemi."
Hussards — Chasseurs
les phases joyeuses ou tristes mais toujours glorieuses, des deux derniers siècles de la monarchie française. Ces illustres devanciers ont trouvé dans lés Cuirassiers; dans les Dragons, dans les Hussards, dans les Chasseurs des armées françaises après 1789 de dignes descendants dont la bravoure et. les qualités militaires n'ont jamais cessé de s'affirmer sur tous les champs de bataille, fiers de revendiquer comme leur appartenant la mission d'honneur de leurs aînés de là monarchie. Œil incessamment ouvert, oreille toujours tendue, la cavalerie est à la fois l'organe de la .vision,-de. l'audition et du tact de l'armée. Elle doit tout voir, tout entendre, tout
Cavalerie légère, 1640.
d'ordonnance, 1450.
—
de
d'exploration.
-
-
sur
-
Le passage du Rhin par nos escadrons sons les yeux de du combat. Les réserves ménagent autant que possible leurs Louis XIV, chanté par Boileau,- vanté par certains historiens forces pour la fin de l'action. Il leur appartient de poursuivre militaires qui l'ont appelé « l'action de guerre la plus éclatante à fond, de détruire même avec le concours de l'artillerie à cheval les masses désorganisées de l'ennemi vaincu et de du règne de Louis XIV » a pu être exagéré. Il n'en reste pas moins pour les Cuirassiers du roi le grand honneur d'avoir recueillir ainsi les fruits de la victoire Tel a été de tout temps-, dans les armées bien organisées, franchi sous les yeux de Louis XIV et de Condé le Rhin à la le triple rôle de la cavalerie. C'est ainsi que l'ont compris et nage et d'avoir aussitôt chargé l'ennemi sur la rive opposée. Nous ne suivrons pas notre cavalerie en Flandre, en pratiqué pendant les guerres du premier Empire nos escadrons Allemagne, en Italie ou en Espagne pendant cette glorieuse habilement dressés et conduits par Kellermann, Murat, chevauchée de deux siècles. Lassale, Curély, Pajol, Milhaud, de Brack qui ont accompli A la suite de la période de vingt-six années de calme qui avec eux des prodiges de vigueur et d'audace. La guerre nouvelle a élargi l'action de la- cavalerie. s'étendit de la paix de Paris, 1763 à 1789, notre armée se Appuyée aux forts d'arrêt; aux bataillons avancés sur la fron- réorganisa après les cruelles défaites de là guerre de Sept Ans. La cavalerie ne fut pas oubliée et travailla sérieusement sous tière, elle couvre la mobilisation et la concentration de nos la direction de généraux distingués. corps d'armée pendant la période préparatoire des hostilités. En 1789 la cavalerie françuise comptait 26 régiments de La cavalerie doit être aussi très manœuvrière; habituée à combattre en ligne. Prévoyons les heurts formidables de divisions cavalerie proprement dits, 6 régiments de Hussards, 18 de Dragons, 12 de Chasseurs, en tout 62 régiments et 40.000 de cavalerie opposées, jetées en avant des deux armées. L'avecavaliers. peut-être de véritables batailles rangées, livrées par nir verra la cavalerie soutenue par son artillerie à cheval. A l'époque de la Révolution, lorsque éclata la guerre avec les puissances, la cavalerie française, sans valoir la cavalerie La cavalerie est, selon les cas, l'arme du choc ou de la prussienne entraînée depuis vingt ans par les généraux de vitesse. Malgré les transformations de la guerre moderne, la prédominanc'e. du feu sur le champ de bataille, ce serait une : Frédéric le Grand, avait néanmoins cette instruction parfaite faute tactique de croire que le rôle de la - cavalerie a disparu qui en France ne peut être atteinte qu'à la suite d'une longue s'était amoindri. qui répanCette s'est moins tout erreur ou au due dans notre pays avant'1870 nous a-été- très funeste penLa plus grande partie de nos provinces, en effet, n'est pas dant la guerre franco-prussienne de 1870-1871. Il semblait habitée par des cavaliers de naissance. Nos paysans, nos ouvriers, nos jeunes habitants des villes ne sont pour la pluque notre cavalerie eût oublié ses brillantes traditions militaires où nos ennemis ont puisé de précieux - enseignements part jamais montés à cheval avant d'arriver au régiment. Nous assistons en ce moment en France à un grand mouqu'ils ont plus tard mis en pratique. Aujourd'hui nous sommes revenus à de plus sages idées. vement de Renaissance Physique, de développement, des exerNous ne perdons pas de vue que si, par suite des conditions cices du corps, qui, nous. l'espérons, produira d'heureux résulde la guerre moderne la lance, le sabre, le fusil, le revolver tats. Leur effet se fera sentir dans l'armée et surtout dans la cavalerie devenue alors d'un recrutement plus facile. sont tour à tour l'arme du cavalier : son moyen d'action primordial, sa véritable raison militaire est le cheval, agent unulue Notre cavalerie était en 1792 manœuvrière et bien mon de force et de vitesse d'une véritable cavalerie. C'est par le tée. Lorsque les généraux alliés interrogèrent La Fayette cheval — vérité bien simple — que la cavalerie atteint son - après qu'il eut abandonné ses troupes il répondit fièrement qu'il avait confiance dans la cavalerie française et qu'elle se maximum d'action. Dans la découverte, dans le combat ou la poursuite elle produit tout son effet moral, « Or, dit de Brack, battrait bien. Il disait vrai. Exercée de longue date et dirigée entre deux troupes en présence, l'effet moral n'est pas égal. par des chefs hardis et habiles, par Stengel, par Pully, par Frégeville, par Nordmann, par les officiers qu'on nommait L'une a confiance, l'autre a terreur. L'effet moral est pour les trois quarts dans la puissance de la cavalerie. Ne l'oubliez sous l'ancien régime les officiers de fortune, la cavalerie se pas! En conséquence agissez toujours vigoureusement et rapibattit avec bravoure dès les premières affaires. En réalité dement sur le terrain. Dès que l'ennemi tremble vous pouvez l'émigration fut alors un bienfait pour l'armée française. La plupart des officiers de l'ancien régime étaient « des gentilstout oser. » Les Cuirassiers représentent seuls aujourd'hui dans notre hommes de province, très fiers, mais insubordonnés, communément dépourvus d'instruction ». Les sous-officiers qui les armée la « gendarmerie » de l'ancienne armée. La. cavalerie légère, souvenir des guerres d'Italie, apparut sous Louis XII. remplacèrent étaient plus instruits, plus aptes devenir des chefs. La suite le prouva glorieusement. La Fayette compte Elle comprenait des- « chevau-légers » (cavalleggieri), des stradioli » et des « argoulets ». Puis vinrent les arquebu- parmi les causes de nos premiers succès l'égalité qui permit à « siers à cheval, les carabins sous Henri II. Il y avait encore tous de parvenir. Certes il y eut alors plus d'une ombre au des carabins dans les armées de Louis XIV. Ils ne disparurent tableau. Le désordre et l'incapacité, l'indiscipline et l'ignorance qu'en 1784. se produisirent dans la cavalerie. Mais tout se remit bien vite - Une ordonnanèe de Louis XIII, en date de 1637, organisa en place. L'émigration tourna même au profit de l'instruction des troupes et de leur bon esprit de corps. Soldats, souslés régiments de Hussards. L'arme des Chasseurs à cheval officiers, officiers étaient pleins du même zèle. Sans doute il y. date de Louis XV. Les « Dragons » infanterie montée dans le début ont eu eut alors de la rudesse dans leurs manières. Rien dans les nouveaux régiments de cavalerie ne rappelait par le ton et le pour aïeux les -« arbalétriers à cheval » et les « arquebusiers à cheval». C'est au maréchal de Bris sac que revient l'honneur langage les salons de la capitale. Mais ces hommes se battaient bien. Le reste vint plus tard. « Je ne puis, écrivait Biron, dire d'avoir créé les premiers escadrons de Dragons français. Leur organisation devint définitive en 1668, lorsqu'ils furent armés trop de bien des cavaliers. Ils sont pleins d'ardeur et de patriotisme, prêts à tout entreprendre sous des chefs dont ils ne du mousqueton à baïonnette. La cavalerie française moderne grosse cavalerie, Hussuspectent pas les principes. » sards; Drag.ms, Chasseurs combattit avec honneur dans toutes les guerres de Louis XIII, -de Louis XIV et de Louis XV. Les dénominations princières et provinciales disparurent le 1er janvier 1791. Les régiments ne furent plus désignés que par leur numéro ''i. Essai sur la Philnsophie <1? hc Guerre, par le lieutenant-colonel R. Henry. d'ordre. Bientôt des corps de cavalerie volontaire s'organisèrent : sur-
paix.
à
:
1873. —
Dumaine.
tout Hussards et Chasseurs. Les généraux commandant en chef eurent
-
A diverses reprises NapoléonIer constitua des.corps de cavaauprès, d'eux un peloton de guides. Ceux, du général Bonaparte devinrent plus tard un corps régulier qui prit son rang dans l'armée. La lerie indépendante formés de plusieurs divisions, dont il donna plupart de ces corps de cavalerie, recrutés parmi des jeunes gens le commandement à Mùrat. Il fut ainsi pendant la campagne en riches qui payaient leur uniforme et leur cheval, étaient formés seulede 1806 où notre cavalerie accomplit des merveilles. ment pour la durée de la guerre.. En 1796, le nombre des régiments, de notre cavalerie atteignit 83. Sous lé DirECtoir.e il n'était plus que de 76 Le premier consul Bonaparte, au 7 novembre, s'écoule la période de qui du octobre 7 Dans temps par des formations successives en éleva le nombre à 85. Ces régid'avant-garde cavalerie livra dix-sept combats. Elle ne séjourna notre ments de grosse cavalerie, de Dragons, de Hussards et de Chasseurs jamais plus de vingt-quatre heures dans le même cantonnement. Les firent toutes les campagnesde 1792 à 1800 aux armées de la répudistances parcourues furent de 42 kilomètres par jour, en moyenne blique, sur le Rhin, en Italie, aux Pays-Bas, en Allemagne. Bonaparte certaines journées le double de ce atteignirent et presque pour Égypte leurs emmena avec lui en 19 escadrons démontés, avec armes, selles et harnachements (6 escadrons de cavalerie légère et 13 de dra- chiffre. Mais il faut remarquer que l'équipement du cavalier était plus léger qu'à notre époque et ne comportait pas d'enets de campegons). Ils combattirent d'abord à pied, puis au fur et à mesure' des nombreuses faites par la cavalerie légère lui prises les ment ; que chef, les général guides du remontes servirent à cheval. Les en permirent en maintes circonstances de remplacer les chevaux hors mameluks et les Syriens levés en Égypte servirent de cavalerie d'état de faire un bon service. Enfin les fatigues résultant d'une auxiliaire au corps expéditionnaire, lui rendirent de grands services incessamment poursuivie furent atténuées dans une marche presque cheet se battirent bravement. Ils formèrent plus tard les Chasseurs à large mesure par l'usage presque exclusif des cantonnements. val de la garde consulaire, devenue ensuite la garde-impériale. Le régiment des dromadaires, forme lors de l'expédition en haute Egypte, Un tableauidressé à la date du 7 novembre 1806 par le général Belliardj chef d'état-major général, donne le total des prises faites par fut rattaché parle général en ch'e'f;,.:..:. on se demande pourquoi.-—au le corps de cavalerie de Murât, depuis le 5 octobre (combat de Saallit corps du génie.
-
Cuirassier,
Carabinier de Monsienr, 1807.
: Soldats.
Officiers • • * •
Étendards.
Canons. : Chevaux. Caissons et
fourgons."
975 77 509
18.450 1.438
:
Officiers..
Soldats
Étendards Canons
Chevaux fourgons. Caissons et
Carabinier, 1860.
1810. Cuirassiers, 1875.
Des détachements pris dans les dépôts ou venus de France formèrent la cavalerie de 1813 «t de 1814 qui soutint encore des - combats glorieux. •
.71.897'
Dans ces chiffres la part de la cavalerie d'àvant-garde' fut la suivante
-
Cuirassier
CARABINIERS ET CUIRASSIERS
burg), jusqu'au jour de la capitulation de Lübeck., Ce total se décompose
Cuirassier, 1855.
Carabinier, 1840.
Cuirassier, 1820.
ainsi
1830..
191
12.127 37
-
Ili
4.830 1617'
les camtoutes à importante Notre cavalerie part prit une pagnes du premier Empire après 1806 : en Allemagne, en Espagne, en Russie. La retraite de 1812 acheva la destruction de la magnifique cavalerie qui l'aimée précédente avait passé le Niémen.
L'histoire de notre cavalerie se lie étroitement aux progrès" de l'équitation en France. Nous croyons utile d'en dire ici quelques mots. Jusqu'au xvie siècle l'équitation se pratiqua surtout dans les tournois où les chevaliers bardés de fer, montés sur de lourds coursiers caparaçonnés joutaient avec des lances, armes courtoises. Henri II fut tué dans un de ces tournois par Montgommery. Sous Henri III un gentilhomme dauphinois, M. de Pluvinel importa en France la science du cheval qu'il avait apprise en Italie. Successivement maître des rois Henri III, Henri IV et Louis XIII enfant il forma de nombreux éléves et introduisit le premier dans notre pays les académies équestres qui jouirent d'une grande célébrité jusqu'à la Révolution. Pluvinel remplaça les tournois par les carrousels. Tout en laissant aux exercices équestres un cachet militaire il donna à l'équitation des formes nouvelles. Les pesantes armures cédèrent le pas aux vêtements de velours et à la mode espagnole. Les chevaux andalous, limousins, percherons remplacèrent les lourds-destriers de guerre: Les selles devenues plus légères, tout en conservant encore l'ancienne forme à piquet, permirent à l'écuyer de supporter sans déplacements les sauts les plus violents : « pesadr, croupade, ballotade et capriole »; que le professeur appela airs relevés et -qui ont été conservés dans nos manèges pour donner aux
-
jeunes cavaliers l'habitude des forts déplacements. Les carrousels régulièrement ordonnés firent ressortir en même temps la beauté du cheval, la souplesse et la variété de ses mouvements, l'élégance et la hardiesse du cavalier, la solidité de son assiette. Des quadrilles de costumes et .de couleurs différentes traçaient dans le manège ou la carrière les figures les plus compliquées, exécutant les exercices les plus difficiles. Pluvinel a laissé les règles de son remarquable enseignement dans lé Manège royal imprimé en 1623 et dédié à Louis XIIT. Voulant donner une idée de son dressage rapide le professeur raconte qu'il avait mis en quinze jours le Soleil, cheval d'Espagne et un autre hidet que monta le duc de Vendôme ét qui « fut ajusté en un mois à 'courbetles et a terre à terre. tant .l'animal ayaiii esprit et mémoire». Les pluslmllarits carrousels' eure'nt'liéu sôiis Louis XIII et prmcipalement sous Louis XIV a Paris, devant les Tmlëries en 1662, sur l'immense place qui a gardé jusqu'à nos jours le nom de place du Carrousel; à'Yersâillés en 1664. Deux importantes constructions qui s'appellent encore les Grandes et-les-Petites Ecuries et qui servent de quartiers de cavalerie furent construites devant le .château peur recjvoir chevaux et cavaliers. La gravure, nous a conservé le spectacle de ces fêtes splendides où le roi vêtu d'habits, .magnifiques carracota sur des chevaux superbes; faisant:valoir eiï -des- exercices difficiles sa force el sa grâce de accompli.
cavalier
:I
Pluvinel avait laissé des élèves. Ceux-ci s'appliquèrent surtout à perfectionner l'équitation militaire. Citons les noms de Bourgelat, de la Balme, Nestier, surtout leur maître à tous, le célèbre La Guérinière (1691-1151), le fondateur de l'équitation française. La selle à piquet fit.place à la selle dite royale et à la selle française, encore en usage à Saumur. Après La Guérinière la position de l'homme à cheval se trouva cllangée: « L'assiette du cavalier, moins rigide; ses jambesmoins allongées sur les étriers;le haut de son corps porté plus ; en arrière permirent au cavalier de s'identifier plus intimement avac son cheval,1 aux allures' lés mieux appropriées au service militaire sans perdre en rien la grâce et la distinction de la pose. » de Versailles où se formèrent des générations d'écuyers, enseigna lés deçohs de La Guérinière et du manège qu'il avait crée (École de Cavalerie, 1733Eléments de Cavalerie, 1740). L'école italienne nous avait apporté les airs relevés dont nous avons parlé plus haut: Ilécolefrançaise mieux appropriée au génie de notre race nous donna, les airs bas, plus élégants, et plus gracieux et sous le nom de haute échoie enseigna le piaffer, le passage, lavolte, les pirouettes, les 'assouplissements de tout genre où se révèlent en même temps que l'élégance du cheval la délicatesse du cavalier. la Révolution l'Académie royale fit de nombreux élèves parmi nos officiers de. cavalerie qui imprimèrent à l'instruction hip-
L'école
Jusqu'à i
1830-
luagons. 1S20.
:---
:-
1830.
~O.
-
1810.
187i». •
DRAGUNS
pique de notre ,ar'méc une grande .régularité et une excellente méthode. En 1792, notre cavalerie avait. cette instructionparfaite dont atteindre qu'à la suite petit plus qu'on haut parlé et ne nous avons d'une longue paix. Le dernier écuyer de l'école de Versailles fu:t' le vicomte d'Abzac. Il eut pour successeur le comte d'Aure, dont le nom est resté célèbre et qui a imprimé à l'équitation française une nou-
velle deimpulsion.. §aum:tr devint lé refuse de l-i haute équîlationfrançaise; ;
L'école Le comte d'Aurérla commanda pendant plusieurs années Il préconisa l'équitation anglaise, plus énergiqueet -plus entraînante pour les jeunes officiers.- Il fut lé premier écuyet4 sorti de l'écolede Versailles qui monta en selle anglaise, dont l'usage«'ésf-généralement répandu. Le nombre d>s cavaliers âugménta mais le fravail de manège devenait moins assidu : la science équestre diminua. Baucher vint ensuite apportant une méthode de dressage, résultât dé ses observations et de ses expériences personnelles. Elle fit grand bruit en Europe, mais ne pouvait pas, par son empirisme même,être appliquéè au dressage de : notre cavalerie. La fondation de la Société d'encouragement 'pour l'amélioration des chevaux en France (1830) à eu une grande influencé, en affirmant la supériorité du cheval de pur sang. 7 : Depuis 1870, à Saumur-ét à Pécole supérieure de guerre quelques hommes éminents par leur savoir hippique, citons en particulier les généraux Thoi-nton, de Lhotté, 'de Gallifet ont apporté tout leur soin il l'équitation militaire. L'introduction du cheval de pur sang dans nos écoles de cavalerie est à présent l'expression exacte du- goût et des tendances de l'armée. Aujourd hui le pur sang est recherché par
:
-
nos officiers de préférence à -tout- autre, même lorsqu'il est de sang inférieur. C'est à lui que nos officiers.doi vent cette vigueur, ce brillant dans le saut des obstacles joints à une position correcte et élégante, qui les fait admirer sur le manège comme au champ de manœuvres. L'instruction donnée dans les régiments est bonne, mais il faut surtout avoir préparé au cheval nos jeunes gens quand ils arriveront au régiment. A ce point de vue les concours d'équitation entre les élèves de nos lycées et de nos collèges et des établissements libres doivent être soigneusement encouragés. L'éclat du concours de 1889 organisé par le Comité pour la propagation des exercices physiques dans l'Education, au bois de Boulogne, et où le général directeur de la cavalerie représentait le ministre de la guerre et qui a été si brillant$été surtout une véritable révélation. Il a montré que notre jeunesse, si elle y. est aidée, peut devenir, aussi bien que dans d'autres pays, une pépinière féconde de cavaliers nombreux ethabiles
La cavalerie depuis: 1815 a eu rarement jusqu'en 1870, l'occasion de se produire. Un régiment de chasseurs, le 3°, prit part à l'expédition de Morée. La conquête de l'Algérie, de 1830 à l848/,a été surtout faite par la cavalerie indigène. En Crimée (1854-1856), en Italie (1859), notre cavalerie trop négligée sous Le second Empire eut rarement l'occasion de se manifester, sauf au Mexique.
*
blanche.
Par ce temps de canons et de fusils se chargeant par la culasse il est beau de trouver encore un croyant à l'arme
On comprendra au surplu s que dans les trop courtes esquisses
que nous allons consacrer successivement à nos Cuirassiers, nos Hussards, à nos Chasseurs, àa. nos -1-l ussard s, à nous sera nos Dragons, ons, nos impossible d'insister comme nous l'aurions, désiré sur le passé glorieux de chacune de ces armes, passé dont nous pourrons ici donner seulement une faible idée.
il
Cuirassiers.
-
L'épopée des Cuirassiers de Jemmapes à Reichshoffen est sublime. Sur leurs étendards se lisent tous les noms glorieux de Marengo, Austerlitz, Eylau, Wagram, la grande époque Eckmühl, la Moskowa, Dresde, etc. Pourquoi donc le nom de Waterloo y manque-t-il ? Rougiriez-vous, Cuirassiers d'Exelmans et de Milhaud, dé Michel et de Braüer? Gonneville raconte dans ses Souvenirs un fait qui donne la mesure de l'effroi qu'inspiraient sous l'empire les Cuirassiers. Au début d'une affaire en Allemagne, au petit matin, un régiment de cavalerie ennemie découvrit derrière un pli de terrain un régiment de cavalerie française ayant le manteau bleu des Dragons. Les Cuirassiers portaient alors le manteau blanc. Il s'apprêtait à les charger, les prenant pour des Dragons, quand les Français s'ébranlant, les Prussiens virent reluire les cuirasses. Faisant un prompt demi-tour, la cavalerie ennemie se
:
Comme j'aime mon sabre! » Cette exclamation que Paul de Molènes met dans la bouche d'un de .ses héros militaires est encore le cri du Cuirassier. Dernier représentant de la chevalerie, aux pesantes armures, sa seule arme était récemment encore le sabre droit, « cette terrible lutte » qui porte des coups si furieux. Parlerai-je du petit pistolet lisse « l'assommoir » dont ils étaient armés avant d'avoir reçu le revolver ? Le revolver! Le Cuirassier n'en a cure. Sa confiance
en lui-même et en
«
ses armes
Hussards, 1816
1823.
est digne
1830.
d'admiration.
1860.
1855.
1845.
1870.
1875.
HUSSARDS
chevaux déroba de toute la vitesse de ses terrible déroba de toute la vitesse de ses chevaux au chocterrible au choc qu'elle redoutait. - A notre, époque, où la guerre usinée par nous est devenue : vraiment la guerre de feu, le Cuirassier représente encore le temps héroïque du choc ! Il est le coin vivant qui, malgré les armes à tir rapide, enfonce encore les bataillons ennemis : Reichshoffen nous l'a superbement prouvé. Il faut avoir subi l'approche de l'ouragan qui s'appelle une charge de cavalerie pour sentir cette impression terrifiante, dont rien ne peut donner l'idée. La terre est comme secouée avant qu'on les voie. C'est un grondement qui devient tonnerre, puis un bruit terrible de sabres et de cuirasses entre-choqués. Ils passent. dans un éclair. Où donc est la troupe qu'ils avaient chargée ? Dispersée, foulée aux pieds, émietlée. On la rechercherait en vain. Les Cuirassiers sont invulnérables. A peine si quelques balles ricochant sur les cuirasses atteignent aux bras ou à l'épaule ces centaures rendus alors plus furieux. de Brack général le dit entamée, a « Lorsqu'une charge est bien dans ses « Avant-postes de cavalerie légère », poussez-la à fond, tenez bon : vous réussirez. Une charge a sa minute d élan, sa minute de mêlée, puis celle de l'hésitation et celle de la retraité. Soyez fermes pendant la seconde et la troisième minute; la victoire est à vous. Si vous en profitez bien, cette fois l'ennemi ne prendra pas sa revan-
che de toute la campagne. Il sera démoralisé. Dans la charge le plus persévérant l'emporte. »
Quel admirable livre d'or on pourrait faire avec l'historique des Cuirassiers ! Voici parmi tant d'autres un épisode raconté par.de Brack. Le héros est un soldat..«. A la bataille de la Moskowa un jeune Cuirassier chargea avec son régiment sur la redoute russe qui se trouvait en face de notre aile gauche. La charge fut brillante. Mais les Russes reprirent la redoute et vingt de leurs chevau-légers se jetèrent sur ce brave. Il refusa de se rendre, tua l'officier commandant, reçut dix-sept blessures et revint protégeant la retraite d'un de ses chefs d'escadrons blessé grièvement comme lui. L'Empereur lui donna devant nous tous la croix et fit une pension de cent écus à sa mère. » cavalerie avant 1789 portèrent d'abord Tous les régiments de grosse tD l'abandonnèrent puis la cuirasse peu à peu. Toutefois, à la fin du règne de Louis XV, en 1777, il y avait 24 régiments de cavalerie dont les basofficiers et les cavaliers étaient armés d'un sabre, d'un mousqueton et de deux pistolets. Ils portaient sur la poitrine un plastron de cuirasse ne blessé et que l'habillement ne soit endompour-prévenir qu'il et « magé par son frottement, chaque homme se fournira d'un plastron de forte toile matelassé de bourre et piqué ». En 1788 les bas-officiers n'avaient plus le mousqueton. Ils portaient, comme lee cavaliers, le --..
plastron de cuirasse en fer dans tout le service à cheval. L'usage en persista pendant les premières années de guerre de la Révolution. Le Custine écrit au ministre de la 20 décembre 1792 en effet, le général guerre pour deman der 30.000 couvertures de campement dont ses troupes ont le plus grand besoin. Il propose en même temps certaines modifications de tenue et envoie un modèle d'habillement pour la
cavalerie cuirassée. Il est difficile de savoir à quelle époque la grosse cavalerie a cessé de porter la cuirasse qui ne fut reprise qu'en 1803 à la réorganisation des régiments de cuirassiers. Pendant la période révolutionnaire l'administration de la guerre n'avait pas le temps de s'occuper de questions d'armement ou d'équipement intéressant un corps spécial.
Sa sollicitude s'étendait sur l'armée tout entière. Nous en trouvons la preuve dans une dépêche fameuse, à laquelle onfait souvent allusion mais dont le texte est généralement peu connu. Elle fut envoyée le 4 décembre 1793 par le ministre de la guerre aux défenseurs du territoire. Nous en citons les parties essentielles.
Frères et Amis, comité de Salut public m'a chargé de donner des. ordres pour qu'il fut distribué à chacun de vous une paire de sabots que vous serez invités à porter en dehors de votre service. Cette disposition est une nouvelle preuve de la sollicitude du comité sur tout ce qui peut éloigner des défenseurs de la patrie les incommodités et les
Le
besoins.
-
Les sabots vous offriront la 'chaussure la plus saine dans cette saison. Ils vous garantiront de l'humidité et du froid dans les moments de repos. Ils vous garantiront encore dans les moments de service et de marche, parce que vous aurez pu faire sécher vos souliers. Vous vous empresserezsans doute, frères et amis, de seconder les vœux du comité de Salut public en vous munissant d'une paire de sabots que vous porterez dans tous les moments où le service vous le pérmettra. Les commissaires des guerres sont chargés de vous en délivrer sur votre demande. L'intérêt, des finances de la République, votre propre intérêt , exigent que vous apportiez à la conservation de cette chaussure le même soin que vous devez à tous les autres effets qui sent des rigueurs des saisons. La patrie préviendra toujours vos besoins avec l'attention - et la libéralité d'une mère tendre et reconnaissante des sacrifices que vous faites pour elle. Mais vous devez aussi, en enfants soigneux et économes, ne négliger aucun moyen de lui épargner des efforts et des dépenses. Signe : BOUCHOTTE.
-
vous
Cette dépêche, a été l'origine de la légende des volontaires, « du bataillon de la Moselle en sabots ». Elle fut en réalité adressée à tous les corps de nos armées combattant aux Le nom de Cuirassiers reparaît en 1803. L'intention du premier consul est formelle. « Je désire, citoyen ministre, que vous considériez les Cuirassiers, les Dragons et les Hussards comme formant trois armes différentes et que vous ne me proposiez jamais des officiers de ces corps pour passer d'une arme dans une autre. » Le 16 juillet 1819 une ordonnance du roi Louis XVIII réduisit la cavalerie à 47 régiments dont 6 de Cuirassiers qui prirent les noms de régiments du Roi, de la Reine, du Dauphin, d'Angoulême, de Berri, de Colonel-général. En 1831, après l'avènement du roi LouisPhilippe le nombre des régiments de cavalerie était porté à 50 et celui des Cuirassiers à 10. La même année ils reçurent définitivement le pantalon garance. Le second Empire eut 1-0 régiments de Cuirassiers, outre'les Cuirassiers de la garde. Aujourd'hui notre armée compte 12 régiments de Cuirassiers qui, après avoir été cuirassés et décuirassés, au moins en partie, par suite de tâtonnements et d'expériences, sont de nouveau et resteront, nous l'espérons du moins, définitive-
frontières..
ment cuirassés.
Bien qu'ils n'aient repris leur nom qu'en 1803 les cuirassiers ont joué — sous le nom de grosse cavalerie- un rôle considérable dans les guerres de la Le 7° régiment était à Valmy. D'autres régiments de grosse cavalerie combattirent à Jemmapes, à Fleurus, à Rivoli, à Marengo, à Hohenlinden.
république.
grosse cavalerie de 20e régiments A Marengo les 2e, 6e et commandés par Kellermann étaient placés à l'extrême gauche. de l'armée, village de Marengo. Les dragons autrichiens du gauche à et avant en voulant tourner la gauche française défilèrent un par un à travers le ruisseau de Fontanone, dissimulés par un bois, et se formèrent en
bataille dans une prairie. Le 8e Dragons qui les chargea fut ramené par la deuxième ligne autrichienne. Il se jeta à droite et à gauche
démasquant la grosse cavalerie qui chargea à fond. Les dragons autrichiens surpris se débandèrent. Ils furent précipités dans le Fontanone. Tous ceux qui ne se noyèrent pas furent pris. Un très petit nombre réussit à se sauver.
Les Cuirassiers firent les guerres d'Espagne. Nous avons vu plus haut l'effroi qu'ils inspiraient. Le 13e régiment connu de toute l'armée avait été surnommé l'Intrépide. Il méritait ce titre. A Lérida quatre escadrons avaient chargé et mis en pleine déroute 15.000 Espagnols commandés par O'Donnel. Ces quatre escadrons forts de 450 hommes firent 6.000 prisonniers dont plus de 500 officiers et s'emparèrent de l'artillerie. Voici comment s'accomplit ce' glorieux fait d'armes. La marche de O'Donnel s'était effectuée tellement en secret qu'il était à une lieue de Lérida avant qu'on se doutât de son approche. Le 13e Cuirassiers, qui se trouvait en première ligne du côté où il arriva, ne fut prévenu de sa présence que par les vedettes et au moment où les deux tiers de ses chevaux étaient à l'abreuvoir. Ces chevaux ramenés au galop furent bridés à la hâte, sans qu'on prît même le temps de prendre les portemanteaux qui restèrent sur place. Avec quatre escadrons seulement on se rua sur 15.000 hommes de troupes de ligne munies d'une artillerie suffisante qui resta aux mains de nos Cuirassiers. Toute l'armée d'Espagne professait pour le 13e régiment une admiration dont elle donna souvent des preuves. A Margalef, près de Lérida, en Espagne, le 23 avril 1808, 452 Cuirassiers du 13e régiment, commandés par le chef d'escadron SaintGeorges, attaquèrent les deux divisions Yberola et Peres de l'armée espagnole forte de 7.000 hommes et commandées par O'Donnel. On lit dans le rapport que le général en chef Suchet adressa sur cette affaire au major-général Berthier : « Notre infanterie n'a pas tiré un coup de fusil. Tout l'honneur de la journée revient aux seuls Cuirassiers. L'ennemi a laissé le champ de bataille couvert de ses meilleures troupes. Nous avons fait 5. 617 prisonniers. De ce nombre se trouve le major général Dupuig, qui a été blessé, 8 colonels et 271 officiers. Nous avons pris en outre 3 bouches à feu, 3 étendards et un drapeau; de 6.000 à 7.000 fusils. Notre perte totale s'élève à 23 morts, 82 blessés et 60 chevaux tués. »
Le colonel de Gonneville raconte dans ses Souvenirs qu'à la bataille de Sagonte en Espagne, en 1811, au moment d'enle-
il
était alors capitaine — ver son escadron de Cuirassiers — pour aller franchir un petit mur de pierres sèches et une rigole qui le séparaient de la cavalerie espagnole, pour la charger il fit un signe à ses Cuirassiers. « A ce coup d'œil qui fut compris, car on me regardait attendant un commandement, tous les sabres s'élevèrent en l'air et furent brandis d'une manière si énergique ; il y eut quelque chose de si redoutable, de si intrépide sur ces figures bronzées que je ne doutais pas du succès, et qu'à l'heure où, cinquante ans après, j'écris ces lignes, je sens encore battre mon vieux cœur au souvenir que cela me rappelle. » Nous avons parlé des Souvenirs militaires du colonel de Gonneville. Voici un autre extrait de ces Souvenirs. Il nous donnera la vision exacte d'une des revues de Napoléon 1er, telles que l'Empereur les passait et qui exerçaient tant d'action sur les troupes. Le moindre détail était familier à l'Empereur. Il connaissait l'histoire de chaque corps, sa situation et son esprit particulier. Il donnait au personnel une profonde attention, appelant par leur nom presque tous les officiers et un grand nombre d'anciens soldats, s'attachant avec le soin le plus minutieux à voir si tout était bien en règle et ne donnait prise à aucun reproche. Si l'Empereur était satisfait il récompensait par un gracieux sourire et par de bonnes et flatteuses paroles. Si au contraire la revue lui faisait découvrir des fautes et des négligences, il s'animait, élevait la voix, écrasant d'un regard irrité les coupables quels qu'ils fussent. Cela se passa ainsi à la revue du 6e Cuirassiers que nous raconte le colonel de Gonneville,
Les régiments placés sur une seule ligne attendirent une aucun n'avait probablement encore eu dans la bouche d'autre heure. Puis un groupe de cavaliers apparut à l'horizon et fut mors que celui d'un bridon. C'était ces chevaux qu'il fallait bientôt près de nous. En tête, à cinquante pas en avant àJnn organiser en moins de vingt heures, et faire marcher, monter brillant état-major, se dessinait un homme de la figure et de la par des hommes dont la plupart n'avaient jamais touché un tournure la plus martiale, couvert d'une tunique brodée d'or, cheval ni porté la cuirasse autrement que dans les revues portant un pantalon blanc et des bottes à l'écuyère, demi- passées à pied. C'était problème presque insoluble à réfortes. Une toque de martre à calotte rouge, surchargée de plumes d'autruche noires, ombrageait sa tête. Sur sa poitrine, Tout ce qui composait le personnel du premier escadu côté gauche, un glaive antique était suspendu, supporté par dron passa la nuit à seller et a harnacher les chevaux, c'estdes cordons de soie à la façon des guerriers de l'Orient, et faisait à-dire que les officiers, sous-officiers et brigadiers firent à peu étinceler sa poignée enrichie de pierreries. Le cheval presque près seuls la besogne, les soldats n'ayant pas idée de la manière entièrement caché sous une peau de tigre faisait entendre de dont il fallait s'y prendre, surtout avec de jeunes chevaux joyeux hennissements. Et ses yeux rouges, voilés par la crinière effrayés à la vue des objets qu'on leur mettait sur le dos et flottante, lançaient des éclairs. Je crus que c'était l'Empereur, effrayant les hommes inexpérimentés par leurs mouvements désordonnés et les ruades qui se multipliaient à l'infini, surtout mais ce n'était que Murât, grand-duc de Berg, qui en sa qualité de commandant de toute la cavalerie venait faire à l'Empereur quand il s'agissait de leur mettre la croupière, Je ne crois pas les honneurs de la division. Il passa au galop de la gauche à la qu'il se soit trouvé beaucoup d'officiers de cavalerie respondroite et revint ensuite au pas devant toute la longueur du front, sables qui dans une longue carrière aient eu semblable occas'arrêta à la gauche et attendit. sion de faire les tristes réflexions que je fis pendant cette nuit. L'attente ne fut pas longue : de l'extrémité de la plaine par Toutes les circonstances qui pouvaient amener un désastre laquelle il était arrivé déboucha bientôt un groupe bien autre- devant l'ennemi avec une pareille troupe se présentèrent à ment nombreux. C'étaient d'abord les Mameluks couverts mon imagination. Je ne voyais en elle ni moyens d'attaque ni d'or, dont les chevaux superbes bondissaient, tout en étant moyens de défense et pour seule ressource celle de me faire maîtrisés, comme, s'ils eussent été furieux. Les aides de camp tuer pour me soustraire au déshonneur. Le matin on brida les chevaux et on les sortit un à un avec venaient ensuite et à cent pas en arrière, l'Empereur suivi de le cavalier qui devait les monter et qu'on hissait dessus à son immense état-major. La marche était fermée par l'escadron grand'peine, la cuirasse étant pour lui un surcroît d'embarras. de service des chasseurs de la garde. L'Empereur était loin d'avoir la tournure martiale et terrible du personnage que dans Enfin à travers une foule d'incidents, à neuf heures, l'escadron mon ignorance j'avais d'abord pris pour lui. Il portait une était en bataille et prêt à partir. Comme nous devions passer redingote grise de la plus simple apparence, un petit chapeau pour sortir du faubourg Saint-Georges, où nous étions cantonnés, devant les postes des fortifications extérieures qui à ganse noire, sans autre ornement que la cocarde. La redingote déboutonnée laissait voir des épaulettes de colonel sur nécessairement devaient nous rendre les honneurs, j'eus la malheureuse idée de faire mettre le sabre à la main, pensant le modeste uniforme de petite tenue des chasseurs de sa garde, seul uniforme que depuis l'Empire il ait jamais porté en que mes hommes exécuteraient plus facilement ce mouvement, campagne. Il avait une culotte et une veste blanches et des étant arrêtés qu'en marchant. Les lames sortirent du fourreau bottes à l'écuyère molles. Il montait un admirable cheval arabe avec assez d'ensemble. Mais leur éclat et le bruit qu'elles firent épouvantèrent les chevaux à tel point qu'ils partirent comme gris clair ; la housse et les chaperons de sa selle étaient bordés d'une riche frange de graines d'épinard en or. Les étriers étaient une volée de pigeons, faisant des sauts désordonnés et se plaqués d'or ainsi que le mors et les boucles et la bride. Il débarrassant des cavaliers, dont la plupart se jetaient à terre passa au pas devant notre front en se portant vers la droite. lorsqu'il y avait encore moyen de tenir. Enfin presque tous L'Empereur en arrivant à chaque régiment recevait l'état de furent renversés, et les chevaux, libres de leurs mouvements, situation qu'il remettait au major-général et posait ensuite au excités par les étriers qui leur battaient les flancs et par la carabine restée attachée au porte-crosse, parcouraient en tous colonel les questions suivantes : « Quel est votre effectif? Combien d'hommes aux hôpitaux, aux petits dépôts, malades aux sens les allées Deux heures suffirent à peine pour les rattraper et mes cantonnements ou enfin absents pour toute autre cause ? » Il hommes, relevés sans qu'un seul eût été grièvement blessé, répétait les mêmes questions aux capitaines. Nous défilâmes au trot par escadrons. En arrivant furent replacés dessus comme on les avait placés quelques heures avant. Je fis prévenir les postes qui se trouvaient sur devant l' Empereur, on levait le sabre et on criait : « Vive l'Emnotre passage de ne pas sortir pour nous, et je quittai Hambourg pereur ! » Les cris étaient formidables et la revue parut avoir satisfait celui en l'honneur duquel elle était donnée. En quittant pour me rendre aux avant-postes. Ce qui venait de se passer notre régiment il dit au colonel d'Avenay : « Colonel, à la pre- n'était pas fait pour donner à mes pensées une couleur moins sombre. J'avais surpris sur le visage des habitants témoins de mière affaire, un boulet ou les étoiles de général. » La remonte de notre cavalerie devint très difficile pendant cette déconvenue, des sourires de contentement ironique qui - fureur mis dans Gonneville m'avaient colonel de concentrée. nous une les dernières années de l'Empire. Le conservé aussi le très intéressant tableau des dififcultés que renNous avions fait à peu près deux lieues et aucun incia contraient souvent les chefs de corps pour exécuter les ordres dent nouveau ne nous était arrivé lorsque nous rencontrâmes les résultats que d'état-major apportant contre-ordre à notre départ officier même temps un montre récit Son en reçus. nous peut obtenir à la guerre, un chef énergique et résolu, aux prises pour la Stecknitz. J'adressai mentalement avec ferveur mes remerciements évidente. la dont protection Dieu à parut difficile. me situation d'une avec les nécessités immédiatement retournâmes Hambourg à de réception cent et deux heures Nous à d'assister une l'ordre matin je Un reçus « vingt chevaux qui devait avoir lieu une heure après et de faire après nous y étions réinstallés. l'Etat reprirent Hambourg leurcours habituel pour le à nombre choses de magasins les dans même prendre en temps ce qui nous concernait en y ajoutant l'instruction à cheval que de harnachements nécessaires pour équiper ces chevaux et de grande vigueur. les Dans quinze jours route fis mettre je devait une avec pousser qui en se escadron premier le monter ainsi qui suivirent, les trois autres escadrons reçurent aussi des le lendemain à six heures du matin. Les grandes allées du -faubourg Saint-Georges nous les chevaux. tous excellents étaient sous chevaux Les cent vingt servaient de manège, et par tous les temps et toute la journée sellés, même et ni montés jamais été rapports mais n'avaient
soudre.
qui
.Les
on voyait trotter les classes auxquelles tout le monde assistait. Nous obtînmes en deux mois des résultats tels que le comte de Lowendal, petit-fils du maréchal de France de ce nom et commissaire du roi de Danemark près notre corps d'armée, - étant venu voir un jour exécuter quelques mouvements d'ensemble que j'essayais hors l'enceinte des fortifications, en parut émerveillé. Il me dit que des Français seuls étaient capables de faire en si peu de temps de semblables progrès. » Les Cuirassiers se sont distingués dans les campagnes d'Allemagne et de Russie. Nous ne pouvons citer qu'en hâte et au hasard quelques-uns des glorieux épisodes de leur magnifique
histoire. A la bataille d'Eckmühl, les divisions Nansouty et SaintSulpice, formées de quarante escadrons de Cuirassiers, se déployèrent sur cinq régiments de profondeur pour soutenir la cavalerie légère. Le terrain très accidenté n'était pas favorable à l'emploi de la cavalerie. Cependant, les Cuirassiers se -
Chasseurs
à cheval, 1820, 1830.
portèrent en avant au trot. Leur mouvement était si brillant que l'infanterie du maréchal Lannes, qui défilait sur les hauteurs, s'arrêta pour les applaudir. Les Cuirassiers s'étaient acquis sous l'Empire une véritable puissance morale. On disait alors: Brave comme les Cuirassiers ! La charge des Cuirassiers à Eckmùhl se fit directément, et sur deux régiments de front, les autres suivant les mouvements des premiers. On entendait les officiers encourager leurs soldats et leur crier: « Serrez, cuirassiers, serrez » Un instant avant le choc, les généraux et les colonels poussèrent le cri: « En avant» ! qui fut répété par les cuirassiers. L'ennemi né put résister à ce choc. A la bataille de la Moskowa le général Caulaincourt, à la tête de -la 2° division de Cuirassiers, chargea et culbuta la première ligne ennemie sur la seconde. A la fin de la charge il avait dépassé la grande batterie des Russes. Il se rabattit à -gauche avec le 5° Cuirassiers et entra à sa tête dans la redoute
!.
Chasseurs à cheval, 1845, 1849, 1853.
Chasseur d'Afrique, 1870.
Chasseurs d'Afrique, 1835 et 1840.
CHASSEURS
Chasseurs à cheval, 1869, 1875..
A
CHEVAL -
autrichienne recevant de l'Empereur l'ordre subit de battre en par la gorge. Il y trouva la mort, frappé mortellement par un boulet après avoir fourni cette charge décisive. Il venait de retraite, lança, sous les ordres de Bessières, cinq mille Cuirasremplacer le général Montbrun tué à la tête de cette même siers qui donnèrent à l'armée le temps de se retirer en bon division. Les pertes des Cuirassiers en cette journée furent consi- ordre dans l'île de Lobau. Un seul régiment, le 7c, perdit dans dérables. Les quatre divisions eurent douze cents hommes tués, cette journée 8 officiers, 104 hommes et 68 chevaux. , officiers compris. Le nombre des blessés s'éleva au double. Mais la bataille de Waterloo fut le véritable chant du Les Cuirassiers protégèrent encore la retraite de notre cygne des Cuirassiers du premier. Empire. Il appartenait à ceux de 1870 de montrer qu'ils étaient armée au passage de la Bérézina. Le général Doumerc, avec le 4e et le 5° cuirassiers, fit sur les têtes de colonnes de l'ar- dignes de leurs aînés de 1815. Les Cuirassiers de Reichshoffen évoquèrent le souvenir des Cuirassiers du mont Saint-Jean. mée russe une charge désespérée qui donna le temps à une partie de nos troupes de passer la rivière. Ces régiments furent engagés le 6 août 1870 parce que les réserves d'infanterie étaient épuisées ; parce qu'il fallait, une ': On retrouve les Cuirassiers dans la campagne de 1813: fois encore, assurer le salut de notre armée en retraite. Deux à Dresde, à Wachau, à Leipsick; dans la campagne de France : à Champaubert, à Vauxchamps, à Athis. charges de Cuirassiers eurent lieu dans la journée. La première, 8e et 9e régiments (brigade Michel), vers une heure, à MorsSi le plus souvent « les poitrines d'acier » chargeaient au plus épais de mêlée afin d'assurer la victoire, ces héros bronn, quand la division de Lartigue allait être tournée par sa gauche. Le terrain était peu favorable à une charge. Il desplus d'une bataille se sacrifièrent pour sauver l'infanterie et cendait en pentes assez accentuées vers le Sauerbach et le vilépargner un désastre à l'armée. Les charges superbes des Cuirassiers des divisions d'Espagne et Saint-Sulpice à Essling lage de Morsbronn. Il était parsemé de pommiers et de houn'eurent pas d'autre but. Lannes, engagé au milieu-de l'armée blons qui en faisaient une sorte de verger. « Allez-y comme à
à
la
LES CUIRASSIERS A REICHSHOFFEN 1
Waterloo ! » cria le général, au moment où s'ébranlaient les escadrons. « — Soyez tranquille, dit une voix. Nous savons comment nos pères ont chargé à Waterloo » Les deux régiments prirent le galop et s'élancèrent bride abattue dans la fournaise, vers Morsbronn. Le village était formé d'une longue et étroite rue, irrégulière, bordée de vieilles maisons, dont les toits, des deux côtés en saillie se touchent parfois. Le premier escadron parti à fond de train s'engagea dans le boyau, renversant tout sur son passage. Soudain, à un tournant, une barricade formée de brouettes et de voitures à fourrages .renversées vint arrêter la furieuse charge. Cet obstacle inattendu mit dans les rangs une inexprimable confusion. Fusillés à bout portant par les fenêtres de toutes les maisons occupées par les tirailleurs ennemis nos cavaliers frémissants et superbes tombaient les uns sur les autres, brisant leurs sabres impuissants contre les murs maudits qui cachaient des ennemis invisibles. Les escadrons qui suivaient tournèrent
!.
Chasseur-Lancier, 1817.
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Lanciers de Nemours, 1832, 1840, 1855, 1870.
régiments (brigade Girard), vers trois heures de l'après-midi; la seconde, celle du 2e régiment (brigade de Brauer), à la fin de la journée. Comme à Morsbronn le terrain était excessivement défavorable. De nombreux fossés, bordés d'arbres à hauteur d'hommes, gênaient les mouvements des escadrons, tandis que l'infanterie trouvait un appui dans les vignes et les houblonnières entourées de clôtures. Ces-deux charges furent également très meurtrières. Mais elles arrêtèrent pendant près d'une demi-heure le mouvement en avant des Prussiens, ce qui donna le temps à notre infanterie de gagner les bois et la route de Reichshonen. Le 3e Cuirassiers, le second régiment de la brigade de Brauer ne fut pas engagé. Les pertes énormes éprouvées sous les charges précédentes firent juger qu'il n'y avait pas lieu de continuer à sacrifier ainsi la cavalerie. En cette mémorable journée les, Cuirassiers de 1870 se montrèrent dignes de leurs glorieux aînés de 1815. Le lendemain de la bataille de Reichshoffen., le maréchal de Muc-Mahon, répondant à une question, disait tristement : « Les Cuirassiers ! Il n'en reste plus ! » fois
;
Durrenbach et Walbourg où s'arrêta leur effort surhumain chevauchée fabuleuse. Le 9e régiment avait suivi le 8e. Il atteignit Morsbronn que l'ennemi venait de réoccuper, ne put dépasser le village et fut entièrement écharpé. Les deux régiments comptaient vingt-sept officiers et plus de six cents hommes tués ou blessés. Le lendemain le 9e cuirassiers fut dissous. Les débris des deux régiments formèrent trois faibles escadrons du 1er régiment. La seconde charge eut lieu à El sasshausen en deux
LANCIERS
-
: la première, celle des
Chasseur-Lancier, 1825.
enfin la barricade, sabrèrent ses défenseurs, dégagèrent leurs compagnons et après avoir balayé le village se reformèrentsous la mitraille de l'autre côté et chargèrent de nouveau. Alors commènça une folie sublime. Déchirés par une pluie de fer, les Cuirassiers traversèrent des champs de lin, où les chevaux disparaissaient jusqu'au ventre. Ils firent des trouées dans les houblonnières où culbutèrent cavaliers et montures. Ils chargèrent, ils chargèrent toujours jusqu'à
1er et 4°
Carabiniers. — Depuis la guerre de
1870-1871 les Carabiniers corps d'élite recruté parmi les hommes les plus grands de l'armée française, n'existent plus. Ces régiments, si beaux à la parade pendant les dernières années de leur existence sous le second Empire,avaient • conquis leur droit à la renommée par d'autres succès et par d'autres gloires. Ils furent formés en corps régulier à cheval sous Louis XIV en 1693 et l'histoire des Carabiniers de l'ancien régime est très glorieuse en Flandre, en Italie, pendant les guerres de Louis XIV et de Louis XV. Le Royal-Carabiniers a existé de 1693 à 1758. Les deux régiments des Carabiniers de M. le Comte de Provence (1758-1774) ont été eux-mêmes remplacés par les Carabiniers de Monsieur (17741791). En 1788 ils furent embrigadés. Pendant la Révolution ils se battirent fort bien. Les Carabiniers étaient à Valmy. Plus tard ils se signalèrent à Friedland, à Eckmühl, à Wagram; pendant la campagne de Russie. A la Moskowa, la brigade des Carabiniers chargea en tête de la cavalerie et enfonça tout ce qui osa lui résister. Elle prit part à Waterloo aux charges si brillantes'et si meurtrières dont déjà parlé. A la Restauration (1815) ils redevinrent - nous avons Carabiniers de Monsieur jusqu'en 1824. Sous le règne de LouisPhilippe les Carabiniers furent conservés. Sous le second Empire il y eut deux régiments jusqu'en 1866 où le seul régiment conservé fut rattaché à la garde impériale. Les Carabiniers prirent part au siège de Metz. Le dépôt, qui était à Paris, forma l'escadron du 2e Cuirassiers de marche. Deux autres détachements de l'arme formèrent le
Cuirassiers de marche au 18e corps à l'armée de l'Est ; le second, le 7° Cuirassiers de marche (division Camô) à l'armée de la Loire. Le 4 février 1871 le régiment de Carabiniers fut définitivement licencié et forma le 11e Cuirassiers.
premier noyau du
5e
-
Dragons.
— Belle troupe et glorieux passé ! Ils sont les descendants des Dragons de Condé, de Lauzun, de Boufflers; de ces Dragons d'Espagne du premier Empire « aux chevauchées fabuleuses, terribles à l'ennemi et chéris des belles ». La Grande Mademoiselle nous dit dans ses Mémoires les « que bonnets des Dragons marquent une espèce de bravourequ'on ne distingue pas dans les autres corps ». Et Gentil-Bernard, secrétaire général des Dragons, écrivit un art d'aimer que les trente-deux régiments de l'arme continuent à mettre en pratique. Le Dragon combat à cheval avec le casque et le sabre du cavalier ; à pied avec le revolver et le fusil à tir rapide du fantassin. L'uniforme du Dragon a perdu les joyeuses couleurs du temps passé. Il n'a plus les élégances d'autrefois, avec sa tunique sombre à deux rangs de boutons, ses épaulettes rouges, le pantalon basané, les deux filets à fourrage pendus à la selle, le bidon, le revolver et la Qu'était-ce donc lorsqu'autrefois le Dragon portait l'habit vert, la veste et la culotte chamois, les aiguillettes rouges, le manteau blanc et le casque à la Schomberg ! Mais son rôle s'est élargi. Eclaireur, tirailleur, soldat de ligne, artilleur au besoin, il est tout cela, mais aussi cavalier d'élite. Un peloton le d'obtenir Il vient reconnaissance. bride abattue d'une rentre contact ; l'ennemi est éventé. L'escadron se porte en avant. Il atteint une crête boisée dont il approche avec précaution. Les cavaliers ont mis pied à terre pour fouiller le bois, en organiser la défense et soutenir l'attaque en attendant l'infanterie. De même il garderait un pont et défendrait une ferme. Se glissant dans deisillons comme des couleuvres quelques hommes sont arrivés à bonne portée de l'ennemi. Les plus habiles épaulent leurs armes et visent la batterie qui leur fait face. Elle a ralenti son feu : les servants sont atteints. Vite en selle! Les Dragons, comme une bourrasque, sont déjà sur les canons ennemis et bousculent leur soutien.
:
giberne.
Les Dragons ont eu pour ancêtres les Argoulets et les Arquebusiers à cheval. Le nom de Dragon employé comme soldat spécial , apparaît pour la première fois dans la Satire Ménippée, soixante-dix ans avant la création en France du premier régiment de cette arme. Voici comment s'exprime le Catholicon: « Ces Dragons, dit-il aux gens de la Ligue en parlant des cavaliers du roi de Navarre, parcourent les champs pour prendre tous vos pacquets et lisent par art diabolique tous vos chiffres aussi bien que ceux du roi d'Espagne et du pape, tant subtils puissent-ils être, si bien qu'ils savent toutes vos faciendes et à Rome et à Paris, en Savoye et en Allemagne. » Les régiments de Dragons font remonter leur origine à la bataille de Rocroy, une des plus glorieuses de la monarchie française, si magnifiquement décrite par Bossuet dans l'Oraison funèbre du prince de Condé. Le 1er régiment fut créé en 1645 par le marquis de la Ferté, levé en son gouvernement de Lorraine et formé des compagnies franches du sieur de Fourneau, gentilhomme lorrain; Le régiment fut armé du fusil à baïonnette et instruit à la manœuvre à pied et à la manœuvre à cheval. Les Dragons combattirent comme cavalerie ou , infanterie selon la nature du terrain, se répandant en tirailleurs sur les ailes. de l'armée; harcelant l'ennemi pendant l'action et la retraite ; employés au passage des rivières et des défilés; escortant les bagages et les convois. Leur armement consistait en une arquebuse, un pistolet, une hache suspendue à la selle ; une épée et en même temps une serpe et une bêche pour faire le service des pionniers. Au XVIIe siècle l'arquebuse fut remplacée par le fusil avec la baïonnette. Louis XIV nomma en 1689 Lauzun colonel des Dragons, dont le roi ne cessait d'admirer la tenue et les manœuvres. Leur nombre s'accrut assez rapidement. Lors de la guerre de succession d'Espagne (1702), il y avait déjà 14 régiments. Ils prirent une part glorieuse aux batailles de Hochsteldt" de Ramillies" de Demain, où la France
envahie fut délivrée par le génie de Villars. On vit les Dragons au Pays-Bas, sur le Rhin, en Italie. Le chevalier d'Éon, ministre plénipotentiaire du roi de Sardaigne à Londres fut capitaine au régiment d'Autichamp. Un capitaine de volontaires lui écrivit un jour « que posséder également la politique et l'armée, être capitaine de Dragons et secrétaire d'une illustre ambassade annonçait bien un homme d'une qualité supérieure. » Dans un lettre du duc de Nivernais au duc de Praslin le chevalier d'Éon ajoute en post-scriptum : « Avec mes appointements de secrétaire il n'y a pas ici de quoi boire de la petite bière. Et le Dragon, votre serviteur, ne boit que du vin. » ,
Les Dragons formèrent à eux seuls la moitié de la cavalerie de l'expédition d'Égypte. Elle se composa en effet de 13 escadrons de Dragons, de 6 escadrons de Hussards et de 6 escadrons de Chasseurs embarqués avec leurs harnachements et leurs armes mais sans chevaux. Ils se montèrent successivement avec les chevaux des cavaliers de Mourad-Bey et les ressources du pays en chevaux arabes. C'est en Égypte que Bonaparte créa l'escadron des mameluks qui subsista jusqu'à la fin de son règne. Ce serait une erreur de croire que de 1801 à 1814 ils furent toujours recrutés parmi des Orientaux. En 1815 les mameluks pur-sangs étaient réduits à dix-huit parmi lesquels six seulement étaient devenus officiers et sous-officiers. Le reste était choisi parmi les plus beaux hommes et les meilleurs cavaliers de nos régiments de ligne. Rien d'ailleurs, n'était aussi pittoresque et aussi oriental que le costume des mameluks. L'étendard à queue de cheval, les cimbales, les trompettes ornées du croissant; le harnachement complet du cheval: tout était à la turque. Les officiers et les soldats avaient le pantalon bouffant bleu, la botte de maroquin rouge et l'éperon arabe; la veste verte et le turban blanc surmonté d'une aigrette verte avec cocarde tricolore. Les vêtements élégants, les sabres recourbés, les chamarrures d'or et de soie faisaient rêver aux guerriers de Saladin ou de Mahomet! Les mameluks ont été les très, brillants ancêtres de nos modernes spahis. Mais ils n'avaient d'asiatique ou d'africain que le costume éclatant. Lorsqu'il faisait une entrée triomphale dans une capitale de l'Europe telle que Milan, Berlin, Madrid, Vienne ou Moscou, Napoléon n'oubliait jamais de faire figurer les mameluks en tête de son cortège. A Vienne, en 1805, un Egyptien qui se trouvait par hasard dans cette ville voulut lier conversation avec un de ces soldats qu'il prenait pour un compatriote. Le mameluk, ne comprenant pas un mot de ce que lui racontait son interlocuteur, finit par l'envoyer promener en termes excessivement français, énoncés dans le plus pur idiome des bords de la soit béni! s'écria le musulman en levant les yeux au — Allah ciel. Cet homme a oublié jusqu'au langage de son pays. Ce mameluk ne l'avait pas oublié. Mais il était né au faubourg Saint-Antoine, à Paris et n'avait de commun avec le Coran que le
Seine.
costume..
En Égypte les Dragons ne manquaient jamais, avant d'être attaqués par les mameluks ou de charger sur eux, de tirer une salve de mousqueterie. C'est ainsi qu'ils opérèrent à Salanieh, où ils dégagèrent Lassale et la cavalerie légère aux prises avec 1200 ou 1500 mameluks. Au combat de Thèbes en haute Égypte, Davout commandant la cavalerie du corps expéditionnaire eut avec la cavalerie turque un engagement dans lequel la décharge des Dragons exécutée à bonne portée fit un tel effet que les mamelucks tournèrent bride aussitôt. Les dragons combattirent aussi à Marengo, à Hohenlinden. En 1805 au camp de Boulogne Napoléon organisa des escadrons de dragons à pied en vue du débarquement en Angleterre. Lorsque- contraint par les événements à renoncer à ce projet si longtemps caressé l'Empereur décida de faire la guerre à
l'Autriche, ces escadrons à pied furent réunis à Kehl et à Strasbourg et servirent à assurer le passage du Rhin par les différentes fraction de A Wertingen en 1805, le 1er dragons culbuta deux régiments de cuirassiers ennemis, fit mettre bas les armes à un bataillon hongrois et s'empara de 6 pièces de canon. Les divisions de Dragons Walther et Beaumont prirent une part importante à la bataille d'Austerlitz ainsi qu'au succès d'Iéna. Dans cette campagne de 1806, une des plus belles de l'armée française, les Dragons de Grouchy anéantirent les gendarmes de la reine de Prusse. A Prentzlow ils écrasèrent toute la cavalerie du prince Auguste. « C'est là, disait Murat, que s'est poussée la plus belle charge que j'aie jamais vue. » Les 30 régiments de Dragons du premier Empire portaient le même uniforme vert. Mais les revers et les retroussis de couleurs différentes pour certains d'entre eux permirent de distinguer les régiments les uns des autres. Dans les six premiers ils furent écarlates; dans les six suivants cramoisis. Les numéros de 13 à 18 avaient revers et retroussis rose foncé ; de 19 à 24 jonquille, les six derniers aurore. Les trois premiers régiments de chaque série se distinguaient par les poches en largeur; les trois derniers par les poches en longueur. C'est. en Espagne que fut consacrée définitivement la réputation des dragons. Les divisions Michaud et Latour-Maubourg se couvrirent de gloire à Tudela, à Ocaña, à Medellin. Montbrun et ses Dragons affirmèrent encore en Portugal la brillante renommée de leur arme à la bataille de Fuentes de
l'armée.
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Oñoro. Les mouvements de la cavalerie ont ceci de particulier qu'en raison de leur rapidité et de leur soudaineté un chef habile, ayant du coup d'œil et de la décision, peut en changer subitement la direction et obtenir un immense résultat. A la bataille de Medellin; en Espagne (30 mars 1809) les Dragons de Latour-Maubourg tournèrent l'aile droite espagnole, puis faisant demi-tour vinrent tomber sur les derrières de l'aile gauche ennemie. Attaquée de front par la cavalerie légère de Lassale elle fut prise entre deux feux et détruite. Le général Kellermann à Alba de Tormès en Espagne, culbuta avec sa division de Dragons la cavalerie espagnole, tandis que le colonel Ordener mettait en déroute par un mouvement d'escadrons à droite l'infanterie ennemie et lui prenait cinq canons. Le Dragon combat aussi bien à pied qu'à cheval. Pendant les guerres du premier Empire nous trouvons plusieurs exemples de combats à, pied. A Wertingen, en 1805, un détachement de Dragons de la division Beaumont envoyé pour éclairer la route mit. pied à terre et s'empara du pont par où devait passer la colonne. Quelques instants plus tard, deux escadrons du régiment (le 19e) s'étant engagés dans le village furent assaillis par un feu de mousqueterie très vif. Le général Beaumont fit mettre pied à terre-à ses Dragons qui délogèrent les tirailleurs et occupèrent à leur tour le village. L'infanterie qui arriva une heure après n'eut pas à tirer un coup de fusil. , En 1811 le maréchal Macdonald ayant une colonne composée exclusivement de cavalerie dans une marche sur Barcelone fit mettre pied à terre à deux compagnies du 24e dragons qu'il envoya en flanqueurs occuper les points dangereux à droite et à gauche du col d'Avo par où devait passer la colonne. Cette manœuvre éventa une embuscade préparée dans le défilé par les Espagnols qui, ayant affaire à des troupes de cavalerie n'avaient pas prévu le double rôle des Dragons soldats d'infanterie en même temps que cavaliers. Pendant la .campagne de Russie, l'Empereur- qui s'était imprudemment avancé trop près d'un poste de Cosaques ne fut dégagé à Malo-Jaroslawitz que par une charge à fond d'un escadron des Dragons de lagarde. Les 7e, 13e 16e, 17e, 18e, 23e prirent part à la belle charge de la Moskowa dont le nom est
écrit sur leurs étendards. Les Dragons se distinguèrent aussi pendant la campagne .de France et particulièrement à Champaubert. Le général Kellermann pendant la campagne de 1813 dégagea à la bataille de Bar-sur-Aube avec les Dragons d'Espagne l'infanterie du maréchal Oudinot enveloppée par des forces supérieures et le maréchal lui-même, qui allait être fait prisonnier. Il franchit l'Aube au gué du Saint-Esprit et gravit au galop les hauteurs de Vernancourt hors des vues de l'ennemi, sur lequel il tomba soudain. Les bataillons du prince Wittgenstein furent immédiatement mis en déroute par cette avalanche de cavalerie dont l'opération eut un plein succès. Ils étaient à Waterloo,suivant les Cuirassiers en la charge héroïque du mont Saint-Jean. Sous la Restauration les Dragons furent réduits à 10 régiments. Depuis cette époque leur nombre a varié à diverses reprises. Il s'est accru en dernier lieu par la suppression des lanciers après la guerre de 1870. Le nombre des régiments de Dragons sera bientôt de 32, lorsque les dernières formations seront achevées. Napoléon Ier en 1812, après avoir pendant plusieurs années exclusivement employé les Dragons à cheval, voulut à cause des difficultés de la remonte former des régiments de Dragons à pied. Il ne tarda pas à s'apercevoir de la faute qu'il avait commise et licencia ces régiments. Ils se montrèrent en effet fantassins médiocres et, remontés à cheval, après avoir oublié, firent de piètres cavaliers, vrai « gibier de Cosaques ».
Lanciers.
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l'arme dont l'effet de Brack, dit La lance, est a « moral est le plus puissant et dont les coups sont les plus meurtriers. » Et pourtant les Lanciers ont disparu de notre armée. Conséquence assez inattendue du service universel, qui « a tué le Lancier ». En effet pour devenir lancier, pour posséder à fond le maniement de cette arme étrange et terrible, une grande habitude, des exercices longs et répétés furent toujours considérés nécessaires. On avait jusqu'en ces derniers temps jugé le temps de plus en plus réduit du service militaire comme insuffisant pour instruire un Lancier. Récemment dans certains régiments de Dragons un escadron a été armé de lances comme les Chasseurs sous la Restauration. L'histoire est un perpétuel recommencement. Il arriva en France à la fin du XVIe siècle ce qui arrive aujourd'hui. Déjà sous Henri III l'usage delà lance s'était perdu. Les gentilshommes avaient jusqu'alors fréquenté les académies où ils apprenaient dès leur jeunesse à jouter la lance en main. Lorsque ces jeux chevaleresques furent délaissés la noblesse entra dans les troupes sans avoir appris l'exercice de la lance. Si la lance n'avait pas été remplacée par les armes à feu dans la cavalerie nos escadrons seraient arrivés à un point de perfection et de mobilité que n'atteignirent que longtemps après les cavaliers de Frédéric II. La lance ne reparut sous nos étendards qu'au milieu du XVIIIe siècle dans les guerres d'Allemagne avec les pandours, troupes auxiliaires, cavaliers lanciers que les hommes du Nord savaient apprécier. Apris Tilsitt Napoléon sentit le besoin d'opposer des lances françaises aux lances des uhlans et des cosaques. Il commença par les pays d'origine étrangère. En 1808 un régiment de lanciers rouges fut formé à Varsovie et incorporé dans la Garde Impériale sous le nom de chevau-légers lanciers. L'uniforme en fut éclatant : kurtka bleu de roi; collet, revers, parements et retroussis cramoisis galonnés d'argent ; passe-poils cramoisis sur toutes les coutures. Les épaulettes et aiguillettes furent blanches; le pantalon cramoisi à bande de drap bleu de ciel. Le czapka fut quadrangulaire, cramoisie, avec un soleil de cuivre environnant un N couronné. L'armement était une lance à fanion cramoisi et bleu; un sabre à la houzarde et des pistolets. Quel beau costume d'opéra-comique ! En 1810 vint la création des lanciers rouges. La kurtka fut écarlate avec la couleur distincte bleu de roi; épaulettes et aiguillettes jaunes, pantalon écarlate; czapka rouge. En juillet 1812, au cours de la campagne de Russie un troisième régiment de lanciers rouges fut créé, entièrement composé de Polonais. Les Lanciers furent successivement augmentés. Et l'Empire qui ressuscita cette armé compta un moment douze régiments dont cinq Polonais. Ils ont été bien Français, nos lanciers polonais. Que de noms glorieux ils rappellent ! Leur sang a coulé avec le nôtre à Somo-Sierra,
Somo-Rostro, l'Elster, la Bérézina. La pénible guerre d'Espagne a immortalisé les lanciers. Après le passage dé l'Ebre trois escadrons de lanciers polonais envoyés en avant-garde contre l'armée anglo-espagnole commandée par Palafox la chargèrent intrépidement et la mirent en déroute. Ils ramenèrent cinq pièces de canon. , Le fait d'armes du lieutenant Septeuil en cette même année 1808 près de Saragosse est digne d'être rapporté. Exposé depuis plusieurs heures au feu meurtrier d'une batterie située sur un monticule il perdit patience. Outre son artillerie la redoute était protégée par des charrettes, des chausse-trapes, des abatis, des barricades. Septeuil à la tête de ses lanciers escaladant un plateau escarpé chargea sur la redoute : Et c'était un beau spectacle, dit l'historien, que de voir les lanciers « dans cette grande plaine, se'croisant en tous sens, le corps « courant en avant, la lance baissée, chargeant dans les eaux, dans la montagne, « s'appelant de leurs noms polonais et jurant en allemand contre le « « maudit fantassin qui avait saisi de ses mains nerveuses la lance qui lui entrait dans la poitrine. » « A la fin de l'Empire un régiment de chevau-légers lanciers était attaché à chaque division. La Restauration ne conserva que les lanciers français de la ,garde
sous le nom de chevau-légers lanciers de France. Mais la lance fut laissée aux derniers escadrons de chasseurs à cheval. En 1830 était créé un premier régiment, modèle d'élégance et de goût, organisé par un prince du sang, qui prit le nom de son chef : Lanciers de Nemours. L'expérience ayant été favorable sept régiments de chasseurs furent successivement transformés en lanciers. Ils ont subsisté jusqu'en 1870. En Italie ils se sont fait une belle page et enfin à la bataille de Sedan en 1870 sur le plateau de Floing les Lanciers ont appuyé la sublime charge de la division Margueritte. Après la guerre les Lanciers ont été supprimés et sont devenus suivant leurs numéros dragons et chasseurs. Reviendront-ils jamais?. Qui pourrait en répondre? Mais cette armée glorieuse dont la devise était « Le sabre frappe à deux pas ; la lance atteint à vingt » — cette arme, dernier vestige du moyen âge, méritait au moins un souvenir!
Hussards
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Voilà les hussards viens, Rosette ; Devant la porte ils vont passer. Ma sœur, viens! j'entends leur trompette.
Chante la jeune paysanne de Béranger. C'est que le
,
Musicien, régiment de Lorraine, 1786. Timbalier Dragon de l'Impératrice, 1811. Tambour gendarme du Roi, 1750. Trompette de mousquetaires, 1620. ,. Tambour, dragon d'Orléans, 1775. Timbalier chevau-légers, Garde impériale, 1806. Timbalier, régiment de Condé, 1720. - Musicien, carabinier du Roi. Timbalier, régiment gardes du corps, 1750.
ANCIENNE
hussard était déjà — il l'est resté — avec son coquet .et brillant costume et sa bravoure légendaire, l'idéal parfait du fameux « prestige de l'uniforme ». Sabrer à la hussarde! Faire l'amour à la hussarde ! c'est-à-dire toujours au galop. Le fait est qu'avec leurs pelisses, dolmans, culottes collantes aux couleurs voyantes, aux tons divers : bleu céleste, marron, gris argentin, vert clair, bleu de roi, vert foncé; ornés de soutaches, de broderies, de tresses, de galons, de fourragères; leur ceinture de soie aux vives couleurs, le colback en tête et la sabretache battant leurs talons, ces jeunes hommes bien pris dans leur coquet uniforme avaient vraiment fière mine. Mais lorsque le maréchal de Luxembourg, pendant la campagne de 1693, s'avisa de réunir en compagnies les houzards hongrois, transfuges des Impériaux, épars dans notre armée et les envoya en reconnaissances, il s'en fallait que les hussards d'alors fussent jolis comme leurs petits-neveux. Mais tu dieu ! quels beaux coups de sabre déjà. Le maréchal écrivait à la cour que ces, grotesques cavaliers au langage polonais « entendaient merveilleusement le parti et la grand'garde et battaient l'estrade en perfection ». Au surplus voici leur portrait : « Le houzard à l'air fier et un, peu féroce, avec une espèce de pourpoint qui ne va qu'à la ceinture ; des manches fort étroites et retroussées avec un bouton ;
MUSIQUE -
une grande culotte en pantalon, c'est-à-dire tenant jusqu'au bas des chausses ; des bottines jusqu'aux genoux, sans genouillères et tenant aux souliers arrondis avec de petits talons, quelques-uns même avec des talons de fer. Les chemises des houzards sont fort courtes et ils en changent rarement. C'est pourquoi plusieurs en ont de toile de coton bleu. Leurs manteaux 1 ne sont guère plus longs que leurs pourpoints. Ils les mettent du côté que vient la pluie. Leurs bonnets sont longs, et ils les bordent de peau2. La plus grande partie a la tête rasée et ne laisse qu'un petit toupet à cheveux du côté droit. Leur manière la plus ordinaire de combattre est d'envelopper un escadron ennemi, de l'effrayer par leurs cris et par divers mouvements; ils se lèvent au-dessus de leurs selles et sont dangereux surtout contre les fuyards. » A la fin du règne de Louis XIV il y avait déjà trois régiments de Hussards. Le dernier, donné au roi par l'électeur de Bavière, porta quelque temps le nom de hussards de SaintGsniès. Lorsqu'en 1776 le comte de Saint-Germain réorganisa la cavalerie française il y avait dans notre armée quatre régiments Origine de la pelisse. 2. Origine du colback. 1.
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,;
de Hussards, tous célèbres : Bercheni, Chamborant, Esterhazy, Conflans. Les mœurs étaient déjà raffinées; les hommes moins sauvages, tout en conservant leur caractère étrange. Voici le portrait qu'en donne le continuateur du Père Daniel : « Les officiers sont proprement habillés, chacun selon son goût et sa dignité. Ils sont même magnifiques en habillements, en harnais, en armes, en peaux et en fourrures. Il y en a qui ont quelques lames de vermillon d'argent qui se plaquent du côté droit, pour' marquer par là le nombre de combats où ils se sont trouvés, et une boule d'argent sur la poitrine, quand ils sont acheval, pour marquer la noblesse. » Bientôt, des officiers et des soldats français se mêlèrent aux cavaliers hussards. Sous Louis XV, leur uniforme s'était déjà « civilisé ». Ils avaient la veste à petites basques, à manches étroites, un mantelet de fourrure sur les épaules, le pantalon collant et des bottes molles à revers. La gibecière, appelée sabretache, pendait à leur ceinture. Pour coiffure, ils avaient
un bonnet
de peau.
En 1780, au moment de la réforme de l'armée, le costume des Hussards fut modifié et, à peu de chose près, devint ce qu'il était encore avant la guerre de 1870. Les hussards de Fischer et de La Morlière avaient le shako à aigrette et flamme déployée, la pelisse de drap doublée de peau de mouton, le dolman, une écharpe de laine en ceinture, une sabretache, des bottes larges; le dolman était bleu de ciel. ,A la Révolution les régiments de Hussards prirent des numéros d'ordre. Leur uniforme brillant, leur mission de batteurs d'estrade et de cavaliers d'avant-gardes devait tenter les esprits aventureux et amena en effet aux Hussards beaucoup de volontaires. On vit paraître ainsi une quantité de corps nouveaux. Il y eut les hussards de la Liberté, les hussards Américains, les hussards Braconniers, les hussards de l'Égalité, les hussards volontaires de Paris, les hussards de la Mort, etc., etc. et même les hussards fantassins, qui se battirent fort bien. Au siège de Thionville, en 1793, les trois hussards Bastoul, Houel, Dorbedin s'offrirent de bonne volonté pour porter à Metz une lettre
TROMPETTES Trompettes, hussard, 1195.
Chasseur de garde, 1806.
Grosse cavalerie, 1795.
Dragon de la garde, 1820.
Cuirassier, 1809.
Dragon et Chasseur, 1873.
Hussard, 1840. Cuirassier de la garde, 1800.
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du commandant de place. Ils avaient à traverser toute l'armée autrichienne et une mort à peu près certaine les attendait. Au milieu d'une grêle de balles, ils passèrent au galop devant l'ennemi. Houel et Dorledin furent tués. Bastoul blessé arriva le sabre à la main dans un groupe d'Autrichiens, se battit en désespéré, se dégagea, vola à Metz, sauta à terre, remit d'une main sanglante sa lettre au général français et tomba mort. Voilà de l'héroïsme ! la bataille de Fleurus, parmi les prisonniers se trouvaient quelques hussards de Bercheni, dont une partie avait passé à l'ennemi avec Dumouriez. La loi rendue contre les émigrés pris les armes à la main leur était applicable. C'était la mort. Pas un de nos soldats n'eut la pensée qu'il fût possible de livrer à l'échafaud ceux que nous venions de combattre face à face. Pendant la nuit ils firent échapper les Bercheni. Plusieurs rentrèrent quelque temps après. Cette confraternité militaire se produisit souvent pendant les guerres de la République. A Rivoli l'ennemi, chargé en flanc par deux cents hussards du 1er régiment conduits par Lassale, fut culbuté en désordre. Tout ce qui avait débordé sur le plateau fut précipité pêle-mêle dans le ravin qui y conduisait. Lassale poursuivit les Impériaux, que les accidents du sol forçaient à marcher sans ordre, et les fit reculer au pas de course. Cette retraite fut pour les Autrichiens une véritable déroute à travers les rochers affreux, où ils s'étaient réfugiés pour échapper à Lassale et à ses hussards.
composés de vieux soldats, les anciens hussards royaux. Ils avaient le teint hâlé ; le cuir tanné par les intempéries et les fatigues de plusieurs campagnes. De chaque côté de leur front pendaient de longues cadenettes nattées et garnies à leur extrémité de petits morceaux de plomb en forme de croissant, afin de faire tomber la cadenette plus droite. Beaucoup portaient aux oreilles de larges anneaux d'or. Les pelisses et les dolmans, rouges, verts., orange ou marron, à, tresses blanches; les culottes bleu de ciel, cramoisies, s'étaient usées, fanées à la pluie et aux feux de bivouac. Les schabraques en peau de mouton étaient chauves en bien des endroits. Les shakos de feutre, en forme de cône tronqué et autour desquels était enroulée une flamme bleu de ciel, étaient enfoncés et aplatis. Les fourreaux des sabres et les lames étaient un peu rouillés. Mais les bras étaient solides et les sabres bien effilés ne demandaient qu'à tailler. 1 Tels furent nos Hussards de la République- et de l'Empire. Et si les cadres se rajeunirent, si les cadenettes disparurent, nos Hussards restèrent ce qu'ils ont toujours été, ce qu'ils sont encore: infatigables, ardents, héroïques, véritables cavaliers
La physionomie de nos Hussards à cette époque est curieuse à examiner. Les. régiments étaient presque tous entièrement
Il faut naître en effet cavalierléger. Aucune fonction n'exige à la guerre autant de qualités que celle d'officier de cavalerie
A
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légers.
légère. Constamment livré à lui-même, exposé à des combats fréquents, la plupart du temps inopinés, il répond non seulement de la troupe qu'il commande, mais encore de celles qu'il protège et éclaire. Son métier est rude, mais les occasions de s'y distinguer y sont de tous les jours : « glorieuse compensation qui paie d'autant plus richement ses peines, qu'elle fait plus tôt connaître tout ce qu'il vaut. » Murat nous est apparu plus haut dans une éclatante vision. Sous la République et sous l'Empire, les entraîneurs de cavalerie, les brillants officiers de l'arme ne manquèrent pas: Steingel, Montbrun, Lassale, Colbert, Pajol, Maison, Caulaincourt, Curély, Kellermann. J'en passe et des meilleurs. Napoléon dans sa campagne « Steingel, alsacien, était, a écrit d'Italie, un excellent officier de hussards. Il réunissait les qualités de la jeunesse à celles de l'âge avancé. C'était un véritable général d'avant-postes. Deux ou trois jours avant sa mort, il était entré le premier dans Lézegno. Le général français y arriva quelques heures après, et quelque chose dont il eût besoin tout était prêt. Les défilés, les gués, avaient été reconnus. Des guides étaient assurés. Le curé, le maître de postes, avaient été interrogés. Des intelligences étaient déjà liées avec les habitants ; des espions étaient envoyés dans toutes les directions; les lettres de la poste étaient saisies et celles qui pouvaient donner des renseignements traduites et analysées : toutes les mesures étaient prises pour former des magasins de subsistances pour rafraîchir la troupe, » Nos Hussards étaient pleins d'insouciance. Le lieutenant Roca, le second mari de Mme de Staël, qui fit avec le 2e « Chamborant » les guerres d'Espagne, nous dit que « nos hussards ne demandaient jamais dans quelles contrées on les conduisait. Ils marchaient toujours. Seulement, la géographie de la terre était considérée par eux à un unique point de vue. Le monde était partagé en deux parties : la zone heureuse, où croît la vigne, et la zone détestable, qui en est privée. » En cette brillante pléiade de cavaliers légers le choix est grand. Parlerons-nous du général Curély, celui que de Brack a appelé « son maître » ; dont il a raconté plusieurs des brillants faits d'armes ; dont il a écrit : « Curély était pour moi le type du cavalier léger. » Nous ne pouvons à notre grand regret citer les nombreuses actions d'éclat, de hardiesse, de bravoure, d'à-propos et de coup d'œil militaire qui remplirent la carrière militaire du général Curély. Il était du reste un chef complet. En campagne « il était à la fois le médecin, l'artiste vétérinaire, le sellier, le cordonnier, le cuisinier, le boulanger, le maréchal ferrant de son escadron1 ». A diverses reprises il a été parlé de Lassale, « le type du vrai hussard français », un des héros de la campagne de 1806, qui fut tué à Wagram à trente-trois ans, à la tête de sa division. Sa témérité, son dévouement, sa bonne humeur, sa pipe, ses moustaches ; les pantalons qu'il portait d'une largeur démesurée et les bottes auxquelles il a attaché son nom ont fait de lui une figure légendaire qui n'est pas jugée à sa véritable valeur. Le comte Rœderer nous raconte dans ses Mémoires une conversation avec le général Lassale qui venait alors d'Espagne, se rendant à l'armée d'Allemagne. Voilà la fin de cette conversation :
Car, après tout, pourquoi veut-on se faire honneur, faire son chemin, sa fortune ? C'est pour eu jouir. — Non, pas du tout. On jouit en acquérant tout cela, On jouit en faisant la guerre. C'est déjà un plaisir assez grand! On est dans le bruit, dans la fumée, dans le mouvement ! Et puis, quand on s'est fait un nom, on a joui du plaisir de se le faire. Quand on a fait sa fortune, on est sûr que la femme, les enfants ne manqueront de rien. Tout cela c'est bien assez. Mais aussi je puis mourir demain !
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Général, il faut vous réserver pour les grandes aventures. Il faut arriver là-bas sain et sauf. L — Moi ! J'ai assez vécu. Pourquoi peut-on vivre ? Pour se faire honneur, pour faire son chemin, sa fortune. Eh bien ! j'ai trente-trois ans, je suis général de division. Savez-vous que l'Empereur m'a donné l'an dernier cinquante mille livres de rente? C'est énorme. n'en L'Empereur restera pas là et votre carrière n'est pas finie. — Mais pour jouir de tout cela, il vous faut éviter les dangers inutiles.
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1. Nous ne saurions trop recommander la lecture du livre suivant : Le général Curély. Itinéraire (Van cavalier léger de la grande armée (1793-1819) par le général Thoumas.
Enfin le général de Brack sentant s'il n'y mettait bon ordre
que la postérité ne connaîtrait qu'un Lassale de fantaisie a rétabli la vérité dans une page de ses Souvenirs, écrite avec la fougue du cavalier léger. • toute
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Il est des officiers qui n'ont rien vu (car ne voir qu'en paix, c'est ne rien voir); qui se font soudards pour être, croient-ils, des officiers de cavalerie légère et pour se faire, disent-ils, des Lassale. Qu'ils cessent de se donner tant de peine. On ne se fait pas Lassale, on naît Lassale. Ceux qui ont crayonné au charbon un Lassale de cabaret ne l'avaient jamais vu ou l'avaient regardé de trop bas pour apercevoir sa tête! Qu'ils sachent que le général Lassale, aux talents militaires, à la brillante valeur qui l'ont placé avec justice en tête de tous les généraux de cavalerie légère de l'Empire, réunissait l'esprit le plus élevé, le plus gracieux, les manières les plus parfaites, les plus finement distinguées, l'instruction la plus facile et la plus variée. Lassale n'avait que la surabondance, que le luxe de cette force. Le cachet du bon goût et de la distinction était imprimé sur toutes ses actions, de telle nature qu'elles fussent. Les prétendus Lassale de la paix ne sont que de honteux Falstaff et n'inspirent que pitié et dégoût.
toutes Hussards pris les campagnes. En 1803 Les à part ont le nombre des régiments fut réduit à 10. A Austerlitz se distinguèrent les 2e, 4e 8e et 9e; à léna, les 3e, 5e, 7% 8° et 9e; , à Eylau, les 1er et 3e; à la Moskowa, les 5e, 6e, 7e, 9e et 10e. L'arme des Hussards prit une part importante à la campagne de 1806. A la bataille de Saafeld le prince Louis de Prusse s'était élancé dans la mêlée, vêtu de son brillant uniforme de général, la poitrine couverte de décorations et suivi de son état-major. Il avait pris part à la charge et sabré comme un simple cavalier. Puis vainement avec ses officiers il tenta d'arrêter la déroute de ses escadrons. Peu à peu il se trouva isolé et menacé par quelques hussards français. Il tourna bride. Derrière lui se précipitèrent plusieurs soldats du 10e régiment. Le prince fit volte-face au moment où un sous-officier de ce régiment, le maréchal des logis Guindé, lui cria : « Rendez* vous ou vous êtes mort !» Cette sommation eut pour toute réponse un coup de sabre qui atteignit légèrement Guindé au visage. Le maréchal des logis riposta par un coup de pointe en pleine poitrine. Le prince Louis vint s'enferrer et tomba mort percé d'outre en outre. Il avait déjà reçu plusieurs blessures1. Dans la campagne de France le 3e régiment se battit à Montereau, le 6e à Champaubert. Les Hussards chargèrent aussi à Waterloo. A la bataille d'Isly (1844), le 2e Hussards, l'ancien « Chamborant », tomba comme un ouragan sur l'armée marocaine bientôt dispersée, anéantie. Il y avait aussi à Sidi-Brahim, comme nous l'avons raconté plus haut, un détachement du 2e Hussards (commandant de Cognord). Dans les diverses circonstances où il eut ce régiment sous ses ordres, en campagne ou au camp de Châlons le maréchal Canrobert appelait toujours le 2e Hussards de son nom ancien : « Allons, disait-il ! les Chamborants en avant ! » Sous le second Empire le 1er Hussards fut à Sébastopol; les 1. Le maréchal des logis Guindé du 10e hussards fut nommé chevalier de la Légion d'honneur par l'Empereur à la suite de la bataille. Il fut incorporé peu après dans le régiment des grenadiers à cheval de la garde avec lequel il termina la campagne. Rentré en France en 1807 il suivit son régiment en Espagne en 1808, en Autriche en 1809; où il fut nommé sous-lieutenant en 1812. Il se distingua pendant la retraite de Russie et eut la chance d'échapper au désastre. Capitaine en 1813 pendant la campagne de Saxe et nommé officier de la Légion d'honneur, il périt glorieusement dans la retraite sur le champ de bataille de
Hanau.
Mexique.
2e
et
9e
à Solférino; le
5e
à Puébla, en Crimée, en Italie, au
v, à Sedan. Son colonel
Le 1er Hussards était encore y commanda une charge héroïque qui arracha au roi de Prusse
l'exclamation que nous avons rappelée: « Les braves gens! » Hussards ! Il oblige celui glorieux des Passé entre tous que les vingt régiments de l'arme à se montrer dans l'avenir les dignes successeurs de leurs devanciers pour la lutte future à laquelle la France travaille sans trêve ni repos, voulant la paix mais se préparant à la guerre.
Chasseurs à cheval. —Le plus
récent des corps de l'armée. Derniers venus dans la grande famille de la cavalerie les Chasseurs à cheval, frères cadets des Dragons dont ils sont issus, n'ont pas tardé à rivaliser par leur bravoure et leurs qualités militaires avec les corps plus anciens de la monarchie. Ils furent créés sous le règne de Louis XV sous le ministère du prince de Montbarey. Une ordonnanceroyale du 25 janvier 1779 décida que les 6 derniers régiments de Dragons deviendraient Chasseurs à cheval- « cette nouvelle cavalerie ayant pour objet non de combattre en ligne mais d'éclairer l'armée nationale et de harceler l'armée ennemie ». De cette époque date l'existence distincte des Chasseurs à cheval. Les premiers corps de ce nom étaient essentiellement mixtes, comprenant à la fois des fantassins et des cavaliers. Telles furent les célèbres légions de Fischer et de Grassin. L'uniforme des Chasseurs à leur création rappela leur origine. L'habit à la française, de drap vert foncé était « de la forme des dragons » doublé de serge et sous-poche avec la veste en drap chamois et la culotte de peau fauve. Les boutons en métal blanc étaient timbrés d'un cor de chasse; les parements et les revers cramoisis. L'habit des Chasseurs fut garni à l'épaule gauche d'une épaulette fond blanc losangée de cramoisi. Les Chasseurs portèrent le chapeau et les bottes. Ils furent armés du sabre, du fusil et du pistolet. La housse du cheval était en drap vert foncé, brodé d'un galon de laine à la livrée du roi, c'est-à-dire de couleur jaune. Depuis un siècle l'uniforme des Chasseurs a subi de nombreux changements. Tour à tour, selon les époques, disgracieux et lourd avec les hauts shakos et les cols démesurés des uniformes de la Restauration; élégant et coquet sous le second Empire, au temps des spencers faisant valoir la finesse de la taille, des dolmans et des pelisses et des sabretaches traînantes; la tenue du Chasseur à cheval est le dolman, commun aujourd'hui à toutes nos troupes de cavalerie, excepté les Cuirassiers. Le dolman de notre cavalerie légère est bleu. Seulement les tresses de nos Chasseurs sont noires; celles de nos Hussards sont blanches. La diversité des uniformes des différents corps de cavalerie a disparu de l'armée française. Faut-il la regretter? Oui, sans doute. Elle avait en effet pour résultat de développer l'esprit de corps. Le Chasseur était fier d'être Chasseur; le Hussard d'être Hussard; le Dragon d'être Dragon. Cette noble émulation trouvait sa raison d'être dans le passé glorieux de l'arme. Les jeunes gens, nouveaux venus au corps, dont ils portaient les couleurs et l'uniforme, instruits des belles actions de leurs aînés, brûlaient du noble désir de les imiter. Et c'est ainsi que se transmettaient les traditions dans les régiments de cavalerie, Cuirassiers, Dragons, Chasseurs et Hussards; feu sacré qu'entretenait toujours vivace l'esprit de corps. L'esprit de corps est à l'armée ce que l'esprit de famille est à -.la nation. C'est le lien commun qui maintient la camaraderie, la cohésion, la vitalité, les traditions dans chaque groupe constitué. Il réunit les combattants autour de leur drapeau, symbole de la patrie, emblème du sacrifice et des souvenirs glorieux du corps. Les chefs supérieurs doivent exciter fréquemment ce noble sentiment, tout en veillant qu'il ne dégénère m
pas en esprit de coterie. Dans leurs instructions morales ils doivent faire comprendre à leurs troupes que l'esprit de corps est toujours subordonné au désir de se sacrifier à la gloire commune, véritable amour de la patrie: loi suprême du soldat. Au mois d'avril 1792, lors de la déclaration de guerre aux puissances les Chasseurs à cheval, corps de récente formation, se garantirent mieux que les autres régiments de cavalerie des exemples de désertion et d'indiscipline trop fréquents alors dans l'armée. Le nombre des officiers de Chasseurs qui quittèrent leur emploi fut peu élevé. Pour cette raison les Chasseurs inspirèrent plus de confiance aux généraux, qui les employèrent de préférence dans les premiers engagements livrés à la frontière. Les Chasseurs firent bravement leur devoir. Au malheureux combat de Fontoy (19 août 1792) ils se battirent en désespérés. « Comment, criait un émigré, ces gueux-là osent se défendre! » Vainement on leur offrait la vie sauve. Ils ne voulaient pas accepter de quartier et préféraient mourir en criant : « Vive la liberté ! » Les prisonniers gardèrent une fière attitude, ils ne s'étaient rendus qu'à bout de forces, le corps tout couvert de blessures. L'un d'eux, la mâchoire tout en sang, disait au prince royal, qui trouva ce bon mot très français : « Ils m'ont rasé d'un peu trop près. » Après Valmy, un Chasseur signalé par sa bravoure et fait prisonnier les armes à la main, fut amené devant le roi Frédéric-Guillaume qui, après l'avoir vivement félicité, lui parla des affaires de la France ; déplorant de voir tant de courage au service d'une aussi mauvaise cause. Le Chasseur fit au roile salut militaire et le remerciant. « Quant au reste, citoyen Guillaume, croyez-moi. Là-dessus nous ne pourrons jamais nous entendre! » Le roi, impressionné par la réponse du Chasseur, le fit conduire aux avant-postes et lui rendit la liberté. Pendant la .campagne de 1794 des régiments de Chasseurs(les 2e, 7e, 8e, 10e) constituèrent la principale cavalerie de Desaix. Ce général s'appliqua particulièrement à instruire ses régiments de cavalerie légère avec un soin minutieux, en leur faisant pousser de fréquentes reconnaissances qu'il ne dédaignait pas de diriger lui-même. Sous un pareil maître et à une pareille école, nos officiers et nos Chasseurs devinrent très entendus au service en campagne et accomplirent de hardis coups de main. A Wissenheim le 2e Chasseurs mit en déroute prit, prussien mit fuite et tua tout avant-poste ou en ce qui un se trouvait dans le village. Le général prussien se sauva en chemise, ses culottes à la main, à travers les jardins. L'histoire militaire des Chasseurs à cheval est celle des guerres de la République, du Consulat et de l'Empire. Ils sont mêlés à tous les événements de ces temps héroïques. Les 3e, 6e, 11e et 12e chasseurs sont à Jemmapes (1792); le 5e à Fleurus (1794); le 10e à Castiglione et à Rivoli (1796). Nous avons vu que 6 escadrons de Chasseurs avaient pris part à l'expédition d'Égypte. A Héliopolis ils dégagent un escadron des guides enveloppé par la cavalerie turque et qui allait être anéanti. Le 8e régiment fit avec Masséna la pénible campagne de Suisse et prit part à la bataille de Zurich (1799) Voici quelques noms de colonels de Chasseurs sous l'Empire: Kellermann, Exelmans, Montbrun, Corbineau, Ordener, Colbert, Lepic, Lassale, Latour-Maubourg, Curély, de Brack. pour ne citer que ceux-là. Napoléon Ier portait de préférence l'uniforme vert des Chasseurs de la garde, rendant ainsi un public hommage aux qualités militaires de ses héroïques Chasseurs, toujours prêts à se dévouer. Les Chasseurs prirent part à la bataille d'Austerlitz et furent activement employés pendant la glorieuse campagne de 1806. Ils allèrent à Eylau, à Friedland, à Iéna, à Wagram, à la Moskowa. A Leridale général Auguste Colbert reçut l'ordre d'enlever des batteries ennemies dont le tir était très gênant. Le 10e Chas-
,-
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seurs fut lancé en avant, dépassa le bois, arriva à hauteur des batteries, tourna subitement à droite, tomba sur les pièces et en prit treize. Le 15e Chasseurs, colonel Faverot, formait l'avant-garde de l'armée de Portugal, poursuivant les Anglais après la levée par eux du siège de Burgos. L'arrière-garde ennemie croyant avoir trouvé une bonne position pour combattre se forma en bataille sur deux lignes couvertes par un Ruisseau. Sans perdre un instant, le colonel Faverot mit trois escadrons en bataille face aux Anglais, - tandis qu'un escadron de lanciers de Berg et la légion de gendarmerie se formaient en colonne sur la gauche. Puis, il attaqua l'ennemi. Pendant que Chasseurs et Lanciers étaient aux prises avec les Anglais, les gendarmes prenant comme objectif la seconde ligne ennemie ne lui laissaient pas le temps d'arriver et la culbutaient. Dans la campagne de 1809 le 20e Chasseursvenait de charger les uhlans du prince Charles. Un sous-officier fait prisonnier était emmené par un uhlan qui conduisait en même temps les deux chevaux. Ce sous-officier, rêvant aux moyens de s'échapper, aperçut tout à coup sur le champ de bataille un pistolet perdu. Il était chargé et armé. Le saisir, tuer le uhlan, revenir avec les deux chevaux, fut l'affaire d'un instant pour ce brave sous-officier qui fut chaudement félicité par ses Le 5e Chasseurs, pendant la campagne de Prusse, rencontra tout à coup deux régiments de dragons prussiens à PreussichHaff en janvier 1807. Sans donner à l'ennemi le temps de se reconnaître le 1er escadron se précipita sur lui et le culbuta. Les deux régiments se rendirent à notre escadron. En ces actions de guerre dont nous pourrions citer un grand nombre, nos Chasseurs mettaient en application ce précepte de de Brack que nos cavaliers légers ne sauraient trop méditer: « Tirer son sabre, appliquer les éperons au ventre de son cheval, frapper l'ennemi doit être tout un. » Dans la charge en fourrageurs, à la sonnerie de la charge, le cavalier doit se précipiter en avant dé toute la vitesse de son cheval. Les mieux montés arrivent les premiers sur l'ennemi. Le maréchal de Saxe écrivait: « J'ai toujours ouï dire que ceux qui s'avisent de tirer sont battus. On doit pour la charge partir au petit galop à la distance de cent pas et augmenter le mouvement à mesure qu'on approche. L'on ne doit serrer la botte qu'à vingt pas. Et le mouvement doit être comme un éclair. » Pendant toutes les guerres de l'Empire, la cavalerie française eut la réputation de charger à fond, ce qui est moins aisé qu'on ne serait tenté de le croire : un mouvement instinctif de la main contrariant souvent l'élan du cheval. Pour éviter cet inconvénient les Anglais en Espagne avaient l'habitude de faire décrocher les gourmettes avant de charger. Mais il en résultait souvent un grand désordre. Les cavaliers n'étant plus les maîtres de leurs montures. A toutes les batailles de l'Empire les Chasseurs se signalèrent par des actions éclatantes. A Waterloo le 3e Chasseurs enveloppa Wellington et son escorte, qui ne durent leur salut qu'à la vitesse de leurs chevaux. Sous la Restauration le 3e régiment commandé par le marquis de Faudoas forma seul la cavalerie de l'expédition de Morée en 1828. Après la bataille de Navarin, Ibrahim-Pacha passa en revue le petit corps français. Il demanda au colonel un uniforme, un harnachement et une lance (un escadron par régiment avait en ce moment des lances) pour créer dans son pays un corps sur ce modèle. En 1830 trois escadrons de Chasseurs, un du 13e et deux du 17e détachés du corps expéditionnaire furent le noyau des
chefs.
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chasseurs algériens, depuis chasseurs d'Afrique et de la cavalerie indigène. En Italie en 1859 les 4°, 7e et 13e régiments furent chaudement engagés le jour de Magenta. Les 2e, 4e, 7e, "10e et 13e Chasseurs chargèrent vigoureusement à Solferino. Le 12e régiment envoyé au Mexique y tint brillamment la campagne pendant deux années. Enfin à Sedan, la superbe charge du 6e Chasseurs, de la brigade Tillard arracha au roi de Prusse un involontaire cri d'admiration. Le général de Brack, dont nous avons parlé déjà à diverses reprises, appartient à l'arme des Chasseurs. Il a dédié ses de Cavalerie légère aux officiers et sous-officiers Avant-postes du 8e régiment. Quel livre charmant à lire et à méditer pour un militaire, pour un jeune homme. Avec quel bon sens, quel esprit pratique il est, écrit! Que de sagesse, d'élévation morale; de patriotisme éclairé en ces courtes pages, pleines de science, de cœur, de gaîté et d'esprit français. Quelques chapitres sont de vrais chefs-d'œuvre. (Du chef et de l'officier, —De la discipline. - Des charges.— Du courage,de la lâcheté. — De l'effet moral, du moral.) Voici, dans une note légère le cha-
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pitre: De la pipe.
Il faut tâcher de donner le goût de la pipe au cavalier léger. Pourquoi? Parce qu'elle le tient éveillé. La pipe est une distraction secondaire qui, loin d'éloigner le cavalier de son service, l'y attache et le lui rend moins pénible. Elle endort, elle use l'inutilité du temps et de la pensée et retient l'homme au bivouac près de son cheval. Pendant qu'on y fume sa pipe, assis sur une botte de foin ou d'herbe, personne ne s'avisera d'ôter la nourriture de' ce cheval pour la donner à un autre. On est sûr qu'il mange, qu'il ne reçoit pas de coup de pied. Les provisions de sa besace ne sont pas volées. Puis on s'aperçoit des réparations à faire à son harnachement, de la mauvaise assiette de son paquetage, etc. On garde sans s'ennuyer le cheval d'un camarade, et ce camarade, auquel vous rendez service, va chercher de l'eau, du fourrage, des vivres dont vous avez besoin. Quoi qu'en dise Aristote et sa docte cabale, fumez et faites fumer,
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vos'Chaàseurs!
La cavalerie française se distingue par des qualités militaires opposées. Elle montre tour à tour de la solidité et de l'élan. A Nerwinde (1694), sous la monarchie, elle reste ferme pendant plusieurs heures, exposée au feu de quatre-vingts pièces de canon, arrachant à Guillaume d'Orange, son ennemi, cette exclamation de colère et d'estime : « Oh ! l'inso lente nation ! » A Fontenoy (1745), de six heures du matin à midi, nos cavaliers se maintinrent sous le feu ennemi. Leur calme ne se démentit pas un instant. Des files entières tombaient; personne ne bougea. Tout à coup, à un appel de trompettes sonnant la charge, la cavalerie s'ébranla, se mit au galop et ne tarda pas à rompre « la colonne infernale anglaise. » Sur le champ de bataille de Waterloo lord Wellington voyant charger les Dragons d'Exelmans et de Milhaud se tourna vers son état-major et prononça ce simple mot: « Splendid! » « Savez-vous, disait plus tard le duc de Fer, quelle est la cavalerie d'Europe la mieux douée, la mieux apte à faire la guerre? C'est la cavalerie française, la plus mal montée de toutes. Depuis que j'ai eu personnellement à soutenir l'effort de son audace et de sa persévérance, je n'en connais aucune capable de la surpasser. » Nous avons tous présentes à l'esprit les belles charges de nos Cuirassiers à Morsbronn et à Elsasshausen. Et le roi de Prusse à Sedan ne put s'empêcher de crier en voyant charger notre cavalerie : « Les braves gens !» La vigueur! Voilà la vertu maîtresse de nos combattants fi cheval. Leurs mouvements sont rapides, décidés. Notre cavalerie possède à la fois l'élan et la solidité. -
II FASCICULE
RIVOLI
A LASSALLE
DE HUSSARDS
LES
WATERLOO
A ROUGES
LANCIERS
DES
CHARGE
DERNIÈRE
LA
WATERLOO
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MARÉCHAL
LE
JEMMAPES
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DE
DRAGONS
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L'ÉTENDARD
A SALUT
LE
HUSSARDS
Gendarmerie — Artillerie — Génie — Pontonniers — Train des équipages Services spéciaux
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GENDARMERIE ux jours de revue la Gendarmerie défile en tête : c'est justice. Depuis Louis XIV elle a tenu la droite. L'uniforme des gendarmes du roi était alors d'écarlate chargée de broderies et galons d'or avec parements de velours noir. Pour armes de paix le Gendarme avait l'épée et les pistolets ; la carabine relevé blanc, satin de était L'étendard de temps guerre. en en broderies d'or avec foudre et cette devise : « Partout où l'ordonne Jupiter irrité ! » Salut à la doyenne des armes de France! Son rôle militaire est fini : c'est grand dommage ! 0 les glorieux souvenirs qu'évoquent les noms divers qu'elle a portés! Gendarmerie de France! Et l'esprit revoit la furieuse charge de Fontenoy. Maréchaussée : aussitôt malfaiteurs de tous genres, faulxsaulniers, gentilshommes de grands chemins, malandrins, tire-laine prennent la fuite ! Gendarmerie nationale : et chacun se rassure aussitôt !
Un décret de l'Assemblée Nationale du 22 décembre 1790 reconstitua la Maréchaussée qui prit le nom de Gendarmerie Nationale. Elle forma, militaire orgala de ministre du direction corps la un guerre, sous nisé comme l'armée. Le nom de Gendarmerie, qui rappelait tant de glorieux souvenirs fut donné à la Maréohaussée parce que cette troupe avait toujours fait partie de la Gendarmerie du roi. En même temps les 6.000 hommes des compagnies du centre du guet de la ville de Paris, — les chevaliers du guet, de la « Marjolaine » — composés françaises furent gardes des soldats d'anciens totalité en presque incorporés dans la Gendarmerie. Ils formèrent trois régiments envoyés i es laissées à Paris pour à la frontière en 1792, sauf trois compagnies constituer la Gendarmerie à pied. Elles continuèrent près de l'Assemblée Nationale les fonctions remplies depuis 1789 par la ci-devant compagnie de la prévôté de l'Hôtel, de Ville. Cette garde forma ensuite la Garde de la Convention, qui devint plus tard la Garde du Directoire, noyau de la Garde Consulaire et de la Garde Impériale, comme nous l'avons vu précédemment. En 1801, la Gendarmerie, qui avait conservé la formation en brifut divisée en maréchaussée, l'ancienne , gade, et compagnies de en légions, groupant chacune trois ou quatre départements. En 1812, le le maréchal Moncey, général Gendarmerie (Inspecteur la de corps duc de Conegliano) était réparti en 34 légions (sans compter les 6 légions de l'armée d'Espagne) sur toute l'étendue de l'immense empire français, L'état-major de la 34e légion était à Hambourg1.
Les gouvernements ont changé, les révolutions ont passe, les empires, hélas! se sont amoindris : la Gendarmerie reste debout avec ses traditions son uniforme. Voyez le Gendarme à cheval, bien campé sur sa selle, le tapis bleu bordé d'un galon de laine blanche, avec le faux manteau et les fontes
et.
dernières légions de Gendarmerie tel qu'il figure sur l'Almanach impérial de 1813: 29e légion à Florence, 30e à Rome, 31e à Laybach, 32e à Amsterdam, 33e à Groningue, 34e à Hambourg. 1. Voici le chef-lieu des
triple galon. L'habit à la française a subsisté avec les aiguillettes, les ornements et les boutons blancs. Le ceinturon est de cuir jaune, cerclé de blanc; la doublure du grand manteau est écarlate. Voilà l'uniforme même que donna Louis XV au Gendarme qui l'a conservé jusqu'à nos jours avec le chapeau en bataille. Le chapeau en bataille!. Seul, de tous les corps de l'armée, le Gendarme garde cette coiffure si étrange et si martiale à la fois, qui fut celle des généraux de la République et de l'Empire, époque où les' chapeaux « les fameux chapeaux ferrés » eurent comme les cols des uniformes des proportions démesurées. La Gendarmerie prit souvent part aux campagnes du premier Empire. Il y eut des bataillons de Gendarmerie en Allemagne ; en Espagne, à la triste journée de Baylen, où plusieurs bataillons de Gendarmerie firent partie des malheureux prisonniers de Cabrera. à
De 1809 à 1813, la Gendarmerie d'Espagne livra de nombreux combats aux guérilleros de Mina et aux corps francs qui s'étaient
levés dans toutes les parties de la péninsule. Elle escortait les convois, protégeait les routes, surveillait le pays. En cette guerre atroce où le patriotisme surexcité des Espagnols les poussa trop souvent à des cruautés contre nos soldats, les Gendarmes durent accomplir parfois de terribles représailles qui les rendirent redoutables aux populations. Ils combattirent aussi en bataille rangée. En 1812, pendant la défense de Burgos, les dragons rouges anglais aperçurent au matin une troupe à cheval qui portait une coiffure toute déformée par la pluie et les bivouacs. Ne retrouvant pas dans cette troupe la couleur éclatante et les formes élégantes qui les frappaient dans notre cavalerie, ils crurent avoir affaire à un de ces corps improvisés, qui d'ordinaire sont peu dangereux. Ils allèrent à la charge en caracolant, mais ils revinrent bien plus vite, reconduits, sabrés, écrasés, anéantis par les chapeaux à corne déformés qui n'étaient autre qu'un bel et bon détachement de Gendarmerie. Le général de Brack qui raconte cet épisode ajoute qu'à la suite de cette brillante action tous les Gendarmes furent nommés officiers.
Pendant les guerres d'Afrique la Gendarmerie se distingua à maintes reprises.. Au combat du 5 mai 1841 sur le Chéliff elle se signala par une action d'éclat dont le souvenir doit être conservé
:
Une colonne remontait le Chéliff à la recherche de la cavalerie régulière d'Abd-el-Kader qu'on savait réfugiée chez les Beni Zoug-Zoug. Notre avant-garde était formée par un escadron de 80 Gendarmes, troupe vraiment d'élite que le général Bugeaud et le général duc d'Aumale après lui avaient coutume de mener avec eux comme troupe d'escorte et réserve suprême. Le capitaine Brocqueville commandait ce jour-là l'escadron auquel avaient été joints les Gendarmes maures sous le commandement du capitaine d'Allonville Cette avant-garde se heurta tout, à coup à 200 cavaliers rouges et à 400 hommes des goums ennemis. Les Gendarmes maures com-
mencèrent à tirailler avec eux. Mais M. Brocqueville, après avoir fait prévenir le général de ce qui se passait, serra son escadron, fit placer le fusil à la grenadière et mettre le sabre à la main. Ses trompettes sonnèrent la charge. Puis cette poignée de braves se jeta sur un ennemi dix fois plus nombreux. Les goums cédèrent devant l'impétuosité de l'attaque. Alors les cavaliers rouges là reçurent par une fusillade à portée de pistolet et mettant eux-mêmes le yatagan à la main engagèrent une lutte terrible, dans laquelle leur nombre et leur bravoure individuelle semblaient devoir triompher de notre escadron. L'histoire de nos guerres d'Afrique n'offre rien de plus beau que ce combat de cavalerie. Ce fut une suite de luttes individuelles et d'actions héroïques. Les Gendarmes se battaient un contre quatre. Et s'ils renversaient grand nombre de leurs adversaires, ceux-ci, de leur côté, leur causaient des pertes sensibles. Le brave Brocqueville, la poitrine traversée par un coup de feu, tomba à bas de son cheval. Les réguliers voulurent l'enlever. Les Gendarmes s'élancèrent pour le défendre et vingt duels se livrèrent autour de ce corps inanimé qui resta enfin à nos soldats. Ici un maréchal des logis, percé de deux coups de feu, blessé de plusieurs coups de yatagan, refusa de se retirer du combat et poussa son cheval au plus gros de l'ennemi, suppléant ainsi par le choc à l'impuissance de son bas. Là un Gendarme tombe blessé. Un de ses camarades court à lui, le dégage, lui fait prendre la queue de son cheval, l'entraîne hors de la mêlée, et ce pieux devoir rempli, revient au galop là où le danger est le plus grand. Ce vaillant escadron de Gendarmerie aurait fini par succomber jusqu'au dernier homme, si le 1er chasseurs n'était arrivé à son secours.
Sous le second Empire, la Gendarmerie a été, aussi, employée à l'extérieur. Le bataillon de la Garde Impériale fit le service de tranchée au siège de Sébastopol et eut une affaire glorieuse. Le 7 juin 1855, à six heures du soir, le bataillon de Gendarmerie de la garde, de la division Mayran (2e division du 2e corps) attaqua les Ouvrages-Blancs (redoutes de Volhynie et dé Vladimir), élevés par les Russes sur les hauteurs situées à l'est du ravin du Carénage. Ce bataillon opéra son mouvement avec un ensemble calme et résolu, en terrain découvert, sous une véritable pluie de mousqueterie et de mitraille qui ne réussit pas à arrêter son élan. Il arriva irrésistible sous les parapets, fut reçu par un feu terrible à bout portant et s'empara, malgré la résistance désespérée de l'ennemi, des redoutes qu'il conserva malgré les efforts successifs des Russes pour les reprendre. Les pertes de ce bataillon furent, dans ce combat, de sept officiers tués ou blessés, cent trente-six sous-officiers et Gendarmes tués ou blessés ; pertes énormes pour un seul bataillon. Dans son rapport sur cette opération, le général en chef Pélissier cita la Gendarmerie de la Garde comme un des corps ayant pris la plus large part au succès de cette journée.
Le bataillon de Gendarmerie mobilisé pendant le siège de Paris rendit à la défense les plus signalés services. Il prit une part active à toutes les opérations : en particulier aux batailles de Champigny, du Bourget et de Buzenval. Mais c'est surtout à l'intérieur que les Gendarmes trouvent chaque jour à exercer leur courage et leur dévouement. Recrutés parmi les meilleurs sous-officiers des régiments ils y ont appris les règles de la discipline et de la hiérarchie. Surtout on ne peut méconnaître que dans l'arme de la Gendarmerie existe au suprême degré le sentiment du devoir et l'esprit militaire le plus élevé. Les Gendarmes répartis par petits groupes sur la surface du territoire ne négligent jamais la discipline rigoureuse de leur arme et ne se laissent pas entraîner par le courant des masses. En nos temps troublés le Gendarme est toujours le premier au devoir comme au danger. Il reste à son poste et y meurt au besoin sans reculer d'un
pas.
Le Décret Impérial du 1er mars 1854 peut être considéré comme le code actuel de la Gendarmerie à l'intérieur et aux camps et armées où elle remplit, sous le nom de Prévôté, des fonctions d'ordre et de surveillance. L'article 119 du Décret du 1er mars 1854 a fixé d'une manière éclatante les seules attributions de ce corps d'élite, dont les devoirs ne réclament ni l'ombre ni le mystère, malgré certains préjugés trop répandus. « Dans aucun cas, dit cet article, ni directement, ni indirectement, la Gendarmerie ne doit recevoir de missions occultes de nature à lui enlever son caractère véritable. Son action
s'exerce toujours en tenue militaire, ouvertement et sans manœuvres de nature à porter atteinte à la considération de l'arme. »
Aujourd'hui, dans notre jeune armée où tout le monde passe mais que chacun traverse au pas de course, sans avoir le temps d'y apprendre l'esprit de hiérarchie, de discipline et de dévouement, le Gendarme représente seul le soldat d'une autre époque. Il est l'ancien, le vétéran; il séjourne encore dans l'armée; il s'y marie; il y fait souche de « famille militaire », une espèce qui se perd trop dans notre pays ! Dans chacune des brigades éparpillées sur la surface du territoire, quelle que soit son arme d'origine, qu'il ait été d'abord cavalier, fantassin, canonnier, tringlot, l'ancien soldat est bien vite et demeure toujours le Gendarme, figure sévère et bienveillante et toujours respectée, vivant modèle de modestie, de courage, d'honneur et de dévouement. Salut à la Gendarmerie !
GARDE REPUBLICAINE.
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« La Garde de Paris
chargée de maintenir l'ordre au dedans ne doit pas être privée de concourir à la grandeur de la patrie au dehors. Elle n'en reviendra que meilleure et plus respectée. » Ainsi s'exprime le Décret de 1806 constituant la Gendarmerie Impériale de Paris. Par son recrutement et par son corps d'officiers soumis aux règlements et aux lois militaires elle appartient à l'armée. Si son rôle consiste surtout à garder la capitale) à y maintenir l'ordre, à y faire un service municipal, la Garde de Paris peut montrer aussi un passé militaire glorieux En mai 1789 la police de la capitale fut confiée d'abord aux troupes du guet royal, composées de 800 hommes et de 132 cavaliers de la garde nationale parisienne. Le chevalier du guet, M. de Rulhières, commandait aux deux armes. Après la prise de la Bastille une Garde bourgeoise fut établie. Chaque district devait dresser la liste des « amis de la patrie organisés pour désarmer et anéantir les brigands ». Ces patriotes firent preuve d'un zèle ardent, enrôlant les hommes et même les femmes, si l'on s'en rapporte au billet suivant conservé aux Archives nationales: District de l'abbaye de Saint-Germain des Prés.
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Mademoiselle Dubief, marchande lingère, rue Dauphine n° 31, montera la garde au corps de garde rue Dauphine, au musée, où elle montera la garde à 10 heures précises du matin, le 3 août 1789. Signé : OUDET, capitaine.
Le 22 décembre 1789 la Maréchaussée devint, nous l'avons vu plus haut, Gendarmerie Nationale. Une partie de la garde nationale parisienne forma la Garde Républicaine de Paris. C'est vers cette même époque que la musique de la garde nationale étant restée à la charge de la ville de Paris forma en 1790 le Conservatoire National de musique qui s'est perpétué jusqu'à nos jours1. La Garde Républicaine prit aussitôt les attributions qu'elle a toujours conservées : service d'honneur auprès des autorités, dans les monuments publics, ministères,musées, mairies, théâtres, fêtes publiques et particulières. Un décret des consuls d'octobre 1802 institua la Garde Municipale de Paris et-militarisa encore ce corps d'élite, en exigeant des militaires proposés pour y servir un congé militaire ou cinq ans de campagne pendant la guerre. Les Gardes de Paris furent aussi —. ils le sont encore — assimilés aux Gendarmes, prêtant serment et pouvant dresser procès-verbal.
Disons quelques mots du rôle militaire de la Garde de Paris. En 1804, un bataillon fut envoyé en Hollande, puis en Allemagne. En 1806, il prenait part au siège de Dantzig, puis à la terrible journée de Friedland. En 1808, deux bataillons passèrent en Espagne. Ils formaient à Baylen. l'arrière-garde de la division Dupont et combattirent jusqu'à la dernière minute à ce poste d'honneur. Compris dans la capitulation, ils furent de ces captifs de Cabrera, dont la captivité sur les pontons anglais fut si cruelle et qui furent rendus à La musique de la Garde Républicaine s'est fait d'ailleurs dans le monde entier une réputation artistique qu'elle conservera sans doute longtemps encore.
1
OFFICIER D'ORDONNANCE
DU GOUVERNEUR DE
1870
PARIS
la liberté seulement en 1814. (Sur 27 officiers et 914 hommes de la Garde de Paris, 150 seulement revirent leur patrie.) D'autres détachements de la Garde de Paris combattirent en Asturie pendant cinq ans. Parmi les actions de guerre auxquelles ils prirent part, il convient de citer la défense de Burgos, dont M. Thiers a dit : « Honneur éternel à ces braves gens et à leur chef héroïque, le général Dubreton. » Le bataillon perdit pendant cette guerre de cinq années plus de 450 officiers, sous-officiers et soldats, sur 686 entrés en Espagne. D'un détachement de 150 hommes envoyé en 1811 à Saint-Domingue pas un homme ne revint. Le 1er régiment ayant été compromis lors de la conspiration de Malet (le colonel avait cru véritables les ordres donnés par ce général) fut licencié et devint le 134e de ligne. Envoyé en Allemagne, le nouveau régiment fit ses premières armes à Gœrlitz et à Dresde.
Les Bourbons modifièrent profondément l'organisation de la garde de Paris, dont le service pourtant ne changea pas. En 1830, fidèle gardienne de la discipline, des règlements et de l'honneur militaire, la Garde de Paris combattit pour le roi tant qu'il
Guet à cheval, 1785.
Gendarme, 1806..
1820.
porta ce titre. De 1830 à 1848 elle réprima les nombreuses émeutes du règne de Louis-Philippe et aux journées de février et de juin 1848 servait encore la cause de l'ordre. Pendant la guerre de 1870, formée en régiment mobilisé, la Garde de Paris combattit pendant le siège à Châtillon, au Bourget, à Champigny, à Buzenval. A la fin de la Commune, 3 gardes municipaux furent, assassinés les 23 et 24 mars à la prison de Sainte-Pélagie, et 36 autres le 24 mai, à la Roquette. La Ville de Paris a élevé à ces malheureux soldats un monument commémoratif et expiatoire.
Malgré les noms divers qu'elle a portés : Garde Municipale de Paris, Garde Impériale de Paris, Garde Royale de Paris, Garde de Paris, Garde Républicaine, ce corps d'élite n'a jamais cessé d'être respecté et aimé de la population parisienne qui l'a vu toujours associé à ses fêtes, à ses tristesses et à ses joies. Paris n'oubliera jamais que beaucoup de ces soldats sont tombés victimes du devoir, dans l'accomplissement de leur difficile mission, la garde de l'immense cité: mission avant tout pacifique et tutélaire.
Garde de Paris, à cheval 1860. Gendarmerie départementale, 1875. Garde municipal, 1835. Gendarme de la Seine, 1855. Garde républicaine à pied et à cheval, 1873. 1830. Garde de Paris à pied, 1860. Gendarme, 1855.
GENDARMERIE
ARTILLERIE ous avons jusqu'à présent, dans ces esquisses rapides, essayé de décrire la courageuse intrépidité de notre infanterie sur les divers champs de bataille. Nous l'avons montrée s'élançant au pas de charge, entraînée vers la fusillade et la canonnade ennemie par des chefs vaillants à l'assaut de positions fortifiées, ou supportant, ferme comme un roc, les attaques répétées de redoutables adversaires cherchant en vain à l'ébranler. Nous avons dit les hardies reconnaissances de notre cavalerie légère battant l'estrade ; les charges furieuses de notre cavalerie de ligne; cuirasses, soleil dans un galop casques étincelant au furieux ; les sabres entre-choqués flamboyant au plus épais de la Illélée; tout ce chevaleresque de encore notre armée conserve que
et d'éclatant.
courage est celui que le prince de Ligne nommait au siècle dernier la jolie bravoure française » ; ce que nos ennemis « appellent incomplètement « la furie française », car ils devraient y joindre : la ténacité! Ce
Il nous reste à parler d'une autre bravoure française, bravoure sérieuse et grave comme les troupes qui la pratiquent, les officiers et les soldats des armes dites « savantes », l'artillerie et le génie. Ici plus d'uniformes éclatants: un costume sombre comme les canons noircis qui vont porter au loin la mort. Ternes et sans éclat ces canons qui ne brillent pas gaiement au soleil comme la baïonnette du fantassin ou le sabre du cavalier. Les travaux souterrains de la mine et de la sape ne connaissent pas la lumière du jour. Le courage des artilleurs et des sapeurs est d'une nature spéciale : grave, modeste, réfléchi; tout d'abnégation, aussi éloigné de l'enivrement du champ de bataille que des ivresses de la
charge. Nous allons voir si sous cet aspect nouveau les armes spéciales : l'artillerie et le génie se sont montrées dignes de leurs devancières : l'infanterie et la cavalerie. prépon^7. L'artillerie qui est « la science du canon » voit sa dérance dans la guerre contemporaine s'accroître chaque jour depuis l'emploi des canons se chargeant par la culasse. La puissance des engins, la portée croissante des pièces dont certaines envoient déjà des obus à douze kilomètres ; l'usage des explosifs asphyxiants comme la mélinite et la poudre
sans fumée qui rend l'artillerie à la fois invisible et silencieuse ont vraiment fait de cette arme l'ultima ratio du champ de bataille et des places fortes. Chaque progrès de la science est suivi d'un perfectionnement dans l'artillerie qui aujourd'hui plus qu'à aucune autre époque « entame l'action, dit le règlement, la prépare, la soutient et quelquefois la termine ». Artilleur » mais « Canonnier ». Artiller est pourtant un vieuxmot français. Alain Chartier l'emploie dans l'Histoire de Charles VII avec le sens propre de « rendre fort par art et garni d'outils et instruments de guerre ». Voilà pour l'érudition. car l'artillerie ancienne des Grecs, des Romains, du Moyen Age : la baliste et la catapulte, etc., n'ont avec l'artillerie de 1890, avec l'artillerie de la poudre sans fumée qu'un rapport bien indirect. Par une belle nuit de 1370 un pauvre religieux de l'ordre des Augustins, François Bacon, qui s'occupait dans sa cellule à des expériences de chimie, fit, sans le savoir, de la poudre: mélange détonant formé de soufre, de salpêtre et de charbon. Bacon avait-il réellement inventé la poudre? Non sans doute. Il l'avait retrouvée. Qui peut se vanter en effet « d'avoir inventé la poudre » dicton qui affirme ainsi l'ancienneté d'une découverte qui n'appartient en réalité à personne. Les médecins arabes, les alchimistes du moyen âge, pères de la chimie moderne, connaissaient « la poudre noire ». L'histoire touchante de Barbe, la fille du centurion Alypius, de la 3e légion d'Afrique, dont le catholicisme a fait une sainte, et que les canonniers ont adoptée pour patronne, prouve que déjà au IV° siècle la poudre était inventée. Au temps où il servait en Orient Alypius avait appris d'un brahmane le secret de la « neige indienne » et de « la poudre noire». Quand Hippone fut assiégée par les Vandales, Alypius la défendit avec des moyens nouveaux. Le centurion tué sur les remparts fut remplacé par sa fille Barbe, vierge d'une admirable beauté qui employant les mystérieux secrets de son père, prolongea jusqu'à ses dernières limites la résistance de la ville d'Augustin. Lorsque les Vandalesenvahirent la cité, Barbe se fit sauter plutôt que de tomber vivante aux mains des barbares. Elle mit elle-même le feu aux poudres amoncelées dans les caves de son couvent, emportant avec elle son secret dans la mort et envoyant en même temps dans les airs un grand nombre d'ennemis qui croyaient la tenir déjà. Nos artilleurs, nos marins donnent le nom de « Sainte-Barbe » à leurs poudrières. Nous avons raconté ce récit de la « légende dorée » parce qu'il honore la patronne de nos artilleurs, dont chaque anniversaire est célébré dans tous nos régiments d'artillerie par une de ces fêtes de famille que nous voudrions voir plus nombreuses dans notre armée. Elles y développent en même temps que l'esprit militaire la confiance réciproque entre les chefs et les soldats, indispensable pour vaincre. Il ne faut pas dire
«
Xérès (711) les Sarrasins firent usage de la poudre. Les Indiens, les Chinois la connaissent de toute antiquité. Qu'importe L'apparition de la poudre en Europe au Moyen Age a causé non seulement une révolution dans l' art de la guerre, mais encore elle a joué un grand rôle dans l'histoire du monde. Qui peut dire que l'artillerie du XIXe, bientôt celle A la bataille de
Ans des canons en cuir. Au XVe siècle, les meurtriers engins eurent souvent leur légende. Ainsi le canon de Tours portait de la Bastille à Charenton; celui de Malaga faisait avorter les femmes enceintes. Toujours ils prenaient des noms terribles : Couleuvrine, Serpentine, Passe-Montagne, Aspic, Dragon- Volant, Basilic, Ribaudequin, etc. Disons en passant, que la grenade, oubliée aujourd'hui, fut inventée sous François Ier. Lancée par nos premiers grenadiers, elle était quelquefois de fer ou de fer-blanc, même de bois et de carton. Le pétard fut employé pour la première fois par le roi de Navarre au siège de Cahors en 1580. A un Prussien, électeur de Brandebourg, revient le triste honneur d'avoir employé le premier en 1675 au siège de Stralsund, en Poméranie, les boulets rouges rejetés depuis par le droit des gens avec les boulets chaînés comme un moyen trop barbare de faire la guerre. L'obus au pétrole les a remplacés !
L'histoire de l'artillerie à travers les siècles nous entraînerait trop loin. Nous avons jusqu'ici parlé des canons. Voici
les canonniers. Sous Charles VII et François Ier les Suisses eurent le privilège de servir les canons et de les garder. Ensuite jusqu'à Louis XIII les services de l'artillerie furent confiés à des compagnies licenciées à la paix et la garde des pièces aux corps les plus estimés de l'infanterie : les Grands-Vieux. L'artillerie employée jusqu'alors dans les sièges et derrière les. retranchements fit son apparition en rase campagne au commencement du XVIe siècle. Henri IV à la bataille d'Arques avait de l'artillerie légère qui contribua puissamment au succès de la journée. De 1693, année de Steinkerque, date le doyen des régiments, Royal-Artillerie (canonniers de place, sapeurs, ouvriers en fer et en bois) et quelques années plus tard est créé RoyalBombardier (service des mortiers). Sous la. Régence, en 1720, ces deux régiments et les mineurs furent répartis avec les écoles pratiques d'instruction de l'artillerie. En 1765 dans la liste des régiments d'infanterie, on trouve, sous le numéro 64,le Corps Royal de l'artillerie comprenant luimême sept régiments sous le nom de : Besançon, la Fère, Auxonne, Toul, Grenoble, Strasbourg et Metz, villes qui sont restées pendant deux siècles garnisons d'artillerie. Les procédés du recrutement du corps de l'artillerie, étaient alors les mêmes que pour tout le reste de l'armée. Le document suivant publié par M. le colonel Hennebert, que nous avons lieu de croire authentique, nous montre que le service de l'artillerie n'était pas aussi en défaveur que certains écrivains militaires l'ont cru :
!.
du XXe siècle, avec ses mélanges détonants nouveaux, ses explosifs, sa poudre sans fumée, sans parler des surprises de l'avenir, n'aura aucune influence sur les destinées des Empires ! Le premier usage du canon remonte en France à la bataille, de Crécy, tombeau de la chevalerie française. ,
Au début les armes à feu dites bombardes se manoeuvraient appuyées sur une espèce de fourche. Par la suite elles devinrent d'une longueur démesurée. Le premier usage des canons remonte en France à Philippe de Valois (1335). Froissart décrit ainsi une bombarde qu'il vit au siège d'OudeElle était merveilleusement longue, avait cinq pieds narde : « « de long et jetait pierres grandes, grosses et pesant merveilleusement. Quand cette bombarde décliquait, on l'oyait bien de cinq cc « lieues par jour, et de dix par nuit. Et menait si grand bruit au décliquer qu'il semblait que tous les diables fussent en chemin. » « Après les premiers canons à main, tout petits, vinrent les canons géants. Ils furent d'abord en fer battu, de plusieurs pièces jointes, roulées et coulées comme nos tuyaux de poêle, et reliées par des cercles de fer. On en fit aussi en bois. même à des époques très récentes. En 1793, les royalistes de la Lozère ont remporté une victoire sur les républicains avec des canons eu bois entourés de cercles de fer. On trouva dans l'arsenal dé Saltzburg pendant la guerre de Trente
AVIS A LA BELLE JEUNESSE ARTILLERIE DE FRANCE
Corps royal Régiment de la Fère
Compagnie de Richoufflz De par le Roy,
Ceux qui voudront prendre parti dans le corps royal de l'artillerie, régiment de la Fère, compagnie de Richoufflz, sont avertis que ce régiment est celui des Picards. L'on y danse trois fois par semaine; on y joue aux battoirs deux fois et le reste du temps est employé aux quilles, aux barres, à faire des armes. Les plaisirs y régnent; tous les soldats ont la haute paye; bien récompensés; des places de gardes d'artillerie, d'officiers de fortune à soixante livres par mois d'appointements. Il faut s'adresser à M. de Richoufflz en son château de Vauchelles, près Noyers en Picardie. Il récompensera ceux qui lui apporteront de beaux hommes.
A l'époque de la Révolution en 1789, l'artillerie française
était supérieure à l'artillerie prussienne. fait connu peu — —
Dans tous les mémoires des contemporains revient cette même phrase « L'artillerie française est la première de l'Europe. » Seule de toutes les armes elle n'avait pas été désorganisée par la Révolution. Seule elle avait fidèlement conservé, à travers toutes les agitations, sa discipline, son instruction et son esprit militaire. Il y avait dans le corps de l'artillerie beaucoup d'officiers roturiers dévoués aux idées républicaines. En effet les officiers des armes spéciales étaient dispensés de la preuve des quatre degrés de noblesse exigés par les ordonnances de 1781 et 1788. Les régiments, surtout après le départ des officiers nobles pour l'émigration, étaient presque entièrement républicains. Au 4° régiment, qui tenait garnison à Valence, les capitaines Gouvion, Vaubois, Faultrier, Songis, Ducos de la Hitte, Pernetty, etc.; les lieutenants Bonaparte et d'An-
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thouard s'étaient déclarés pour la Révolution. « Ce régimentci, écrivait le futur Empereur, est très sûr en soldats, en sergents et la moitié des officiers. » Lui-même lisait régulièrement à sa compagnie les articles du Moniteur et s'était fait affilier au club de Valence dont il devint le secrétaire.
charge de cavalerie de Kellermann et la marche en bataille des grenadiers consulaires. A Austerlitz (1805), sur les hauteurs du Santon, Sénarmont établitune batterie de dix-huit pièces contre laquelle vinrent se briser les attaques infructueuses de la droite des Russes. Un officier d'artillerie légère du premier Empire, le colonel Séruzier, nous a laissé de très curieux souvenirs sur son arme. A Austerlitz, à la fin de la journée l'Empereur courut au galop
vers l'artillerie tirant sur les colonnes russes, qui, en pleine retraite, traversaient rétang glacé de Satschau : « Vous perdez du temps à foudroyer ces masses. Il faut les engloutir, tirez sur la glace pour la briser. » Cet ordre fut immédiatementexécuté. Mais les boulets roulaient sur la glace sans l'entamer. Séruzier eut alors l'idée de pointer SOUS un angle très élevé huit obusiers dont les projectiles tombant presque perpendiculairement produisirent l'effet désiré. L'exemple fut imité par les batteries : quinze à seize mille ennemis furent engloutis sous la glace et noyés. » A la bataille d'Aüerstaedt Séruzier commandait l'artillerie de la division Morand, ayant sous ses ordres dix-huit pièces, dont six d'artillerie à cheval. Au moment où il débouchait.sur le champ de bataille il fut chargé par toute la cavalerie prussienne qu'il repoussa en tirant sur elle à mitraille. Mais il y avait sur ce point des milliers de cavaliers. Ils renouvelèrent la charge et cette fois les pièces furent tournées. Il replia alors sur son centre les deux ailes de sa ligne de batteries, plaça dans les intervalles les grenadiers du 91e de ligne, mis à sa disposition comme soutien et forma ainsi une espèce de carré contre lequel vinrent échouer tous les efforts de la cavalerie prussienne. Dans cette bataille Séruzier fut blessé deux fois. Il eut en outre deux chevaux tués sous lui, fut cité à l'ordre de l'armée et nommé chef d'escadron sur Je champ de bataille. Les soldats l'avaient appelé le Père aux Boulets. Ce nom lui resta. L'Empereur en parlant de lui le nommait toujours « Jupiter-Moustache ». Après Eylau (1807) Napoléon visitant le champ de bataille s'approcha de Séruzier. Celuici qui n'avait pas froid aux yeux interrogea l'Empereur de mon artillerie, Sire? Etes-vous content — les emplacements que tu occupais au J'ai Oui, certes. reconnu — nombre des ennemis que tu y as laissés.
L'ancienne monarchie avait beaucoup fait pour l'artillerie Elle mit successivement à la tête de l'arme M. de Vallière, lieutenant général « homme qui avait poussé le service de l'artillerie aussi loin qu'il peut aller » et après Vallière, M. de Gribeauval que la France devrait honorer à l'égal de Vauban. Vallière réglementa sévèrement l'admission et l'avancement dans le corps de l'artillerie, développa les écoles. Les soldats et les officiers tenus sans cesse, en haleine, formés par de continuels exercices, acquirent une forle instruction à la fois théorique et pratique. Gribeauval placé en 1776 à la tête de l'arme avec le titre de premier inspecteur général, connaissant bien les artilleries étrangères, particulièrement l'artillerie autrichienne réputée alors la meilleure, fit atteindre à la nôtre un degré de perfection jusqu'alors inconnu, : « formant, comme il le disait lui-même, une artillerie qui déciderait presque toutes les actions ». L'artillerie forma sept régiments. Chaque compagnie dut prendre soin de son propre matériel. Les mêmes officiers et les mêmes soldats furent attachés constamment Après Eylau, le commandant Séruzier eut, quoique artilleur, aux mêmes pièces. L'infanterie n'aida plus les canonniers qui firent seuls leur service et eurent chacun une mission spéciale. Gribeauval l'occasion de faire prisonnier le fameux Blücher. mourut en 1789, mais il léguait à la Révolution un recueil d'ordonnances qui réglementaient minutieusement tous les détails de l'insgénéral Blücher s'avisa de venir faire le rodomont jusqu'autruction et du service de l'artillerie, un matériel uniforme d'une « .Le près de moi dans la ferme de Reïshausen. Cette ferme était située grande mobilité et d'une solidité à toute épreuve, enfin un corps à la gauche de ma ligne. Un jour que je parcourais les environs, je admirable auquel de sages dispositions et des exercices fréquents m'aperçus de quelques allées et venues extraordinaires dans cette avaient donné l'expérience, la fermeté, la justesse et la rapidité du ferme. Un hussard noir prussien était là en vedette. Aussitôt je fondis tir. Foy témoigne qu'on ne trouvait- que dans l'artillerie française l'universalité des connaissances et la fécondité des ressources. Les sur lui et l'ayant sabré, je le fis prisonnier. Le pauvre diable m'apprit ce que je voulais savoir; que son général (Blücher) s'était établi officiers sortis des écoles spéciales, raconte le duc de Bellune, joidans cette belle maison et qu'il était gardé par une nombreuse gnaient l'instruction la plus solide à l'éducation la plus brillante. Les escorte. » sous-officiers vieillis dans leur emploi formaient une classe vraiment Le colonel raconte ensuite le stratagème qu'il employa pour s'emrespectable ; les soldats étaient l'élite de la population militaire. A Valence le 4e régiment continuait à se montrer aussi docile qu'entreparer du général ennemi. Il se rendit avec huit cavaliers seulement dans la ville de Preuss-Holland, éloignée de trois lieues de la ferme. prenant sur le champ de bataille. Il conserva ses habitudes de suborIl y commanda une réquisition pour 6.000 chevaux, déclarant qu'il la dination et ne permit pas que le moindre excès vînt, flétrir son drales 24 heures ; sinon il emmenait comme otages avec dans voulait peau. de la ville. Ce qu'il avait prévu arriva. ses huit cavaliers les notables Mais la France n'avait pas encore d'arlillerie à cheval. La Fayette Blüchet fut averti. Pendant ce temps, le commandant Séruzier sorla lui donna. « La prompte formation d'une artillerie à cheval est un tant de la ville allait rejoindre 300 cavaliers qu'il avait placés en des plus grands services que le ministre de la guerre puisse rendre à l'armée française. » Les deux premières compagnies d'artillerie embuscade à quelque distance de la ferme, qu'il inveslit de toute part. «.Le général, ainsi que je l'avais prévu, avait été la dupe du piège que volantes (à cheval) furent commandées par les capitaines Barrois et Chanteclair (1793). Le goût de cette arme se répandit très vite. Tous je lui avais tendu. On venait de l'instruire que le commandant de l'artillerie française, accompagné seulement de 9 cavaliers, avait les généraux demandaient de l'artillerie à cheval. Un décret du frappé une réquisition. Il crut faire un coup de maître en donnant 29 avril 1793 proposé par un ancien officier de l'arme, Lacombe l'ordre à tout son monde de se porter de ce côté pour saisir les Saint-Michel, décida que le corps d'artillerie serait augmenté de neuf réquisiteurs et la réquisition, tandis qu'il ne faisait qu'une lourde compagnies de canonniers à cheval. Ce fut le noyau de l'artillerie bévue, puisqu'il éloigna de lui ceux qui pouvaient le défendre et me légère. donna la facilité d'exécuter mon coup de main et de le faire prisonnier ainsi que ses deux fils et toute sa suite. Cela dut le convaincre Napoléon 1" fit grand usage de l'artillerie. Son importance qu'un bon chef doit se mettre à la tête du mouvement qu'il ordonne. alla croissant à partir de 1810 lorsque nos armées firent la guerre donc à mon quartier M. le général Blücher, très capot de J'emmenai des le coudes tact avec de jeunes troupes qui n'avaient plus « » laissé prendre, lui qui passait pour un vieux renard ». s'être de leurs aînées dont parle le maréchal Macdonald. Le prince de Wahlstadt n'a pas pardonné à Séruzier cette avenAprès Arcole (1796) et la conduite de nos batteries (on disait ture dont il parla avec amertume dans ses Mémoires. alors compagnies) le général Bonaparte écrivit au Directoire : Navelet manquèrent artilleurs de (1809) les de Essling (1800) les A Marengo L'artillerie gloire ! A s'est couverte de « » munitions malgré la rupture du pont. Ils tinrent bon cependant canonniers de Marmont assurèrent la victoire préparée par la
légère.
«
sous le feu convergent de 300 bouches à feu de l'armée autrichienne ; avares de leurs dernières charges et tirant à mitraille sur l'ennemi, quand il s'approchait trop. Le lendemain, Napoléon dit aux canonniers rangés en bataille devant leurs pièces : « Braves artilleurs, vous avez été hier les remparts vivants de mon armée ! » A Wagram (1809) deux grandes batteries : une de 100 pièces couvrit au centre les formations de Macdonald et une autre de 75 bouches à feu assura à droite le succès des attaques de Davout. Elles étaient placées toutes deux sous le commandement supérieur du général Sorbier, un des grands généraux d'artillerie du premier Empire avec Gassendi, Sénarmont, Lariboisière, Marmont, Songis, Eblé, Drouot; j'en passe et des meilleurs. A cette journée de Wagram le général Sorbier eut quatre chevaux tués sous lui. Toujours au plus fort du danger, il avait inspiré à ses compagnons d'armes le dicton proverbial : « Brave comme Sorbier. » Il remplaça plus tard, à la tête de l'artillerie de la garde impériale, son ancien camarade Lariboisière, devenu
Train, 1835.
Train, 1820. Artillerie à cheval, 1820.
1830.
premier inspecteur général. Le canon avait pris un développement énorme. On comptait, à la grande armée de 1812, 600 bouches à feu. Toute cette artillerie ne donna pas à la bataille de la Moskowa. Une partie resta en réserve avec l'infanterie et la cavalerie de la garde, mais Sorbier réunit sous son commandement plus de 260 pièces de la division Friant, du corps de cavalerie de Montbrun et de la garde. Il présida ainsi à l'épouvantable canonnade par laquelle Napoléon fit terminer la bataille et causa aux Russes des pertes incalculables. Les Russes tenaient avec un héroïque acharnement contre le feu meurtrier de notre batterie de 120 pièces de canon et tentaient un retour offensif. L'Empereur fit porter à Murat l'ordre de cribler de mitraille les colonnes russes qui s'approchaient. lanquez — Puisqu'ils en veulent encore, dit Napoléon, leur en Il employait toujours l'artillerie par grandes masses. A Lutzen l'Empereur envoya Drouot avec 90 pièces de l'artillerie de la garde se mettre en batterie, sur la droite, en avant du village
f.
!
Train des Parcs, 1845. Artilleur, 1865.
Artilleur, 1840.
ARTILLERIE
A
de Starsiedel. A Bautzen il« joignit à l'artillerie de Marmont toute l'artillerie de la garde qui forma ainsi une batterie de cent quatre-vingts pièçes. Sous l'Empire l'esprit de corps était dans l'artillerie poussé au dernier point. Dans la nuit de la bataille d'Eylau des canonniers avaient été tués dans leurs batteries. Leurs camarades demandèrent et obtinrent la permission de leur rendre les honneurs militaires. Deux canonniers qui n'étaient arrivés qu'après la bataille et qui ne purent alléguer des motifs légitimes d'absence furent condamnés à recevoir la savate sur la fosse des braves morts à leur poste : ce qui fut exécuté en présence d'une partie de l'armée aux applaudissementsde tous, sans que les officiers crussent nécessaire d'intervenir. Lorsque le prince Eugène prit, à Smorgoni après le passage de la Bérézina le commandement, il voulut s'attacher comme aide de camp le major du régiment d'artillerie à cheval de la garde. Celui-ci, fils et petit-fils de canonnier, refusa en disant : « Merci, mon Prince. Je veux rester artilleur. Ma famille a cent trente ans de canon!. » L'étendard de l'artillerie à cheval de la garde, donné par son ancien colonel, le baron Duchand, est conservé au Musée d'Artillerie. Les inscriptions qu'on y lit sont plus éloquentes que vingt discours :
Officier, 1870.
Train des Équipages, 1866.
CHEVAL ET
1880.
Train, 1875.
TRAIN
Milan — Moscou Madrid Berlin — — — Varsovie — Venise — Le Caire. Quelle époque ! Et que le grand poète a eu raison de dire, parlant des soldats de cette immortelle époque, que Vienne
Leur âme chantait dans des clairons d'airain!
Les guerres de la Révolution et de l'Empire s'étaient faites avec les pièces du système Gribeauval, inauguré en 1765. Vers la fin de la Restauration, en 1827, fut mis en service un nouveau matériel dû au maréchal Valée, qui subsista jusqu'en 1858. Pendant les campagnes d'Algérie les nouvelles pièces de montagne, soit les canons, les roues, les affûts, les coffrets, etc., étaient portées à dos de mulet et rendirent les plus grands services. Les canons rayés à l'adoption desquels le général Treuille de Beaulieu prit une part importante ont marqué une révolution dans l'artillerie. En usage à partir de 1858 ils furent employés pour la première fois pendant la campagne d'Italie en 1859; en Chine (1860); au Mexique (1863-1867) avec un plein succès. Pourquoi faut-il que la France se soit laissé devancer par les autres puissances? La Prusse, elle, ne s'arrêtait pas. Depuis la guerre de 1866 elle possédait une artillerie rayée de campagne
se chargeant par la culasse, qui, en 1870, avait déjà reçu de
nombreux perfectionnements. En France, alors que le ministre de la guerre, le maréchal Niel, demandait au Corps législatif un crédit de cent millions pour la transformation de notre artillerie, il lui fut alloué seulement cent vingt mille francs. Nous avons fait la guerre à l'Allemagne avec plus de canons lisses que de canons rayés. Les Prussiens avaient en outre une supériorité numérique d'artillerie de l'aveu même de nos ennemis. La relation de la guerre de 1870-71 par l'état-major prussien donne la répartition de l'artillerie des deux armées au lor août 1870. ARMÉE FRANÇAISE
Canons. Milrailleuses.
780 144
Canons
ARMÉE PRUSSIENNE
j
'}
1.584
Malgré les inégalités du matériel et du nombre, les artilleurs français de 1870 se montrèrent dignes du glorieux passé
Artilleur à pied, 1835.
Sapeur du Génie, 1820. Artillerie
à
pied, 1820.
A Sedan, raconte le général Ducrot, deux batteries accourues à la hâte furent pulvérisées par le feu de cinquante pièces ennemies. D'autres qui les remplacèrent parvinrent à attirer sur elles pendant quelque temps tout l'effort de l'artillerie ennemie, ce qui permit à la cavalerie et à l'infanterie de tenter un dernier effort. Bientôt
la place ne fut plus tenable; les affûts furent brisas; plusieurs caissons sautèrent à la fois et les batteries se retirèrent en abandonnant une partie de leur matériel. A Coulmiers, écrit le général d'Aurelle de Paladines, l'artillerie a dirigé son feu et manœuvre sous une grêle de projectiles avec une précision et une intrépidité remarquables. Au combat de Nuits 18 pièces admirablement servies arrêtèrent pendant toute la journée les Allemands, appuyés de 42 bouches à feu et leur infligèrent des pertes cruelles. A la bataille de Saint-Quentin, à l'armée du Nord, 30 bouches à
Sapeur mineur, 1850.
1850.
Sapeur du Génie, 1850.
ARTILLERIE
A
feu, en batterie sur la hauteur du Moulin-à-tout- Vent, soutinrent avantageusement la lutte contre 50 pièces allemandes jusqu'à la fin de la bataille.
rendirent un éclatant hommage à nos canonniers : « L'éloge de l'artillerie française n'est plus à faire, déclare un écrivain militaire allemand. Elle est admirable. Elle nous a fait grand mal en 1870 ; trop de mal ! Et cependant son matériel était, sous tous les rapports, inférieur au nôtre. Or, pour racheter le vice écrasant de cette infériorité, les braves gens ne craignaient pas de s'approcher de nous à douze cents et même à neuf cents mètres. Notre artillerie a anéanti des batteries françaises au moment où celles-ci ôtaient leur avant-train et, avant qu'elles eussent pu ouvrir leur feu, hommes et chevaux, canons et caissons; tout était frappé, réduit en miettes!. Les survivants tiraient toujours. p L'infériorité numérique de notre artillerie fut compensée dans une certaine mesure par les patriotiques efforts des deux directeurs généraux de la Défense nationale : MM. les généraux Susane et Thoumas : le premier à Paris, le second à Tours et à Bordeaux. Ces deux officiers distingués déployèrent une intelligence pratique et des efforts prodigieux à la hauteur des Enfin" nos ennemis eux-mêmes
du corps. Au début de la guerre, la réserve d'artillerie couvrit à Reichshoffen la retraite de notre armée et s'avança jusqu'en face du village d'Elsasshausen au milieu des Prussiens vainqueurs.
Génie, 1860.
Artilleur, 1870. 1870.
Artillerie de forteresse, 1884.
Génie 1875.
PIED ET GÉNIE
difficiles circonstances que traversait alors, notre pays. Dans la partie non envahie on forma, comme en 1792, des batteries, dont des sociétés particulières des villes, des départements supportèrent les frais d'acquisition. A Paris, des batteries big,,, ter furent créées dans tous les régiments. Des pièces de canon furent mises à la dispositiondes artilleurs de la garde nationale mobile. En province, de nombreux canons furent achetés à l'étranger aux frais de l'État, des départements et des municipalités. A Bordeaux il arriva, par suite des marchés conclus, des canons, des affûts, des munitions jusqu'à la fin du mois de janvier 1871. Des pièces de 7 (système de Reffye) furent fondues et fabriquées à l'aide de souscriptions particulières. A la fin de la guerre notre artillerie avait triplé. Mais il était trop tard. Si nous avons succombé alors, l'honneur, du moins,
a
été sauf. Aujourd'hui notre artillerie n'est plus dans une situation comparable à celle de 1870. Nous avons un matériel de place et de campagne excellent se chargeant par la culasse, dû aux savantes recherches de MM. les colonels de Bange et La Hittolle et qui ne le cède en rien à celui des armées étrangères. Notre personnel est excellent, rompu aux détails du métier, parfaitement instruit, manœuvrier admirable, dévoué à son arme. Le nombre de nos bouches à feu est sensiblement égal
à celui de nos adversaires. Notre artillerie de première et de seconde ligne est prête à entrer en action dans des conditions bien meilleures que celles de 1870. Ayons confiance mais travaillons sans cesse ! Que nos canonniers n'oublient pas que l'artillerie sous ses formes diverses, àpied, montée, à cheval, de forteresse, a figuré avec honneur non seulement sur tous les champs de bataille mais encore a concouru à la défense de tous les forts et forteresses sur lesquels a flotté le drapeau français. Nous l'avons vu employée par grandes masses sous la main puissante de Napoléon 1er. Mais souvent aussi elle fut, elle sera encore éparpillée par simples batteries, par sections, par pièces même en des points quelconques de la ligne de bataille. Elle servira à former des batteries de siège, des batteries de campagne abritées par un simple épaulement de terre. Que d'actes de courage/ de ténacité, d'héroïsme, perdus dans ces combats du canon ; dans ces duels d'artillerie qui la plupart du temps n'ont d'autres spectateurs que les canonniers eux-mêmes !
L'artillerie est, avec le génie, l'arme où le courage à déployer est d'une essence supérieure : calme, patient, réfléchi, tenace,. et consiste souvent à subir — jusqu'au moment décisif - sans y répondre les feux de l'ennemi. Enfin l'artillerie surveille la fabrication des armes. Sous sa vigilante direction ont eu lieu pendant ces dernières années les transformations successives de notre fusil : d'abord le fusil Chassepot (1866); le fusil Gras (1874); le fusil à petit calibre (1886). Elle construit aussi ses établissements; fait elle-même ses canons et ses projectiles et nous approvisionne de poudre sans fumée, avec laquelle l'artillerie, arme-sœur de l'infanterie, sera à l'avenir plus entièrement liée à elle dans toutes les phases du combat. Nous pouvons sans crainte nous reposer sur notre vaillante artillerie pour porter haut et ferme le drapeau de la France en ce jour, auquel il faut penser sans cesse, sans jamais en parler mais en s'y préparant toujours où « la parole sera au canon. »
GÉNIE R E savante comme sa sœur jumelle l'artillerie. Canonnier et Sapeur sortent tous deux en effet du même tonneau. de polygone. Leurs officiers, préparés par les fortes études de la première des écoles supérieures de notre pays, vont se perfectionner en hault savoir à l'école d'application du génie et de l'artillerie. Elle fut longtemps à Metz, de chère mémoire, qui s'appelait alors Metz la Pucelle. Elle est à présent revenue à Fontainebleau, sa ville d'origine. L'école d'application nous fournit chaque année des générations nouvelles de sapeurs et de canonniers, orgueil de la patrie et son espoir. L'art de l'ingénieur militaire remonte à la plus haute antiquité. sans parler des trompettes de Jéricho. Qui dit ingénieur dit malin. Froissard a écrit quelque part d'un grand capitaine : d'engin Il était aigu! » « La fortification du Moyen Age, pleine de ressources et de diversité, fut poussée à la dernière perfection. C'était l'époque des tours et des donjons élevés ; des épaisses murailles aux créneaux massifs. Les forteresses avaient un système compliqué ,de défenses qui résidait surtout dans les ouvrages extérieurs avec les barbacanes, les mâchicoulis, les hourds, les corbeaux, etc. Pierres énormes, sable aveuglant, tisons enflammes, poix bouillante tombaient dru comme grêle après les flèches sur les combattants hardis qui s'aventuraient à descendre dans les fossés ou sur les grappes humaines pendues aux échelles. Mais la science de l'attaque et de la défense des places, si développée dans l'antiquité, inconnue dans les premiers temps de la monarchie, avait perdu tout intérêt. Seuls les combats de mines offraient dans les sièges des occasions recherchées de donner des preuves de courage personnel, véritables combats de champ clos. Dès que les mineurs des deux partis jugeaient, par le bruit, que leurs travaux approchaient, ils en donnaient avis. On se défiait réciproquement et le rendez-vous était indiqué dans le souterrain de la mine. On mettait une barrière à hauteur d'appui, à l'extrémité de la mine des assiégeants. On combattait M
,
alors en nombre égal à la lueur des flambeaux. On ne pouvait se frapper ailleurs qu'aux parties du corps qui dépassaient la barrière. Des juges de combat de chaque côtédécidaient des actions. Les vaincus payaient ordinairement leur défaite par une somme d'argent ou par quelque bijou qui leur tenait lieu de rançon. Quelquefois il leur en coûtait la liberté. L'invention de la poudre et l'usage des canons changèrent. les conditions de la défense. A la fin du quinzième siècle sous Louis XII les tours furent abandonnées pour le tracé angulaire. Le bastion flanquait mieux et donnait moins de .divergence aux feux. Les deux premières villes bastiorinées en France furent Landrecies (sous François 1er) et Hesdin (sous Henri II). La fortification a été de toutes les époques. Dans un grand nombre de nos départements il existe des camps de César, etc., nom donné à des remuements de terre dont le profil subsiste encore. Au cours de la guerre de Cent ans il est souvent question de tranchées, de travault de fossé, de mines et aultres approches, ainsi que de la salade (casque) que nos sapeurs mineurs portent encore dans les travaux de siège. Au contraire des légionnaires romains qui furent les plus grands remueurs de terre du monde, les soldats français répugnèrent longtemps à employer la terre à la défense. Montluc nous raconte qu'ayant envoyé un jour un détachement au travail, leurs camarades, à leur rentrée, les appelèrent pionniers et gastadours, « noms pour soldats de grande mocquerie ». Montluc raconte dans ses mémoires comment les dames de Sienne s'armèrent contre les Français, formant trois compagnies : La première était conduite par Forteguerra, qui était vêtue de violet et toutes celles qui la suivaient aussi, ayant son accôutrement en façon d'une nymphe courte et montrant le brodequin ; la seconde était la signora Piccolomini, vêtue de satin incarnadin et sa troupe de même livrée; la troisième était la signora Livia Fausta, vêtue tout de blanc, comme aussi était sa suite avec son enseigne blanche.
Sous le règne de Henri IV, Sully fut nommé en 1602 surintendant des foptifications. Les ingénieurs devenus plus nombreux reçurent dans leurs brevets les noms d'ingénieurs ordinaires du roi, ingénieurs des camps et armées. Leur service était
ARTILLERIE.
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MISE E
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TERIE
(1870)
ARMテ右 DE METZ
FASCICULE III
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complètement étranger à celui de l'artillerie, ainsi que le prouvent les mémoires de Sully. C'est à Vauban que les ingénieurs militaires durent leur organisation fixe. Si Vauban seul reçut le bâton de maréchal de France, ses directeurs et ses ingénieurs formant un corps particulier conservèrent l'assimilation aux grades qu'ils abandonnaient et des brevets d'officiers réformés leur furent donnés. Sébastien Le Prestre de Vauban indiqua d'une. main sûre les principes nouveaux de la fortification moderne, ima- ! gina les feux croisés, le tir à ricochet; inventa les fortifications rasantes, les parallèles, etc., et posa les règles de l'attaque et de la défense des places. Elles ont subsisté jusqu'à une époque récente. Les règles posées par Vauban n'ont cessé d'être vraies que le jour où la muraille est devenue l'accessoire et le canon le principal. Aujourd'hui la fortification de Vauban ne répond plus aux nécessités de la guerre moderne. Les nouvelles forteresses sont construites d'après des principes nouveaux. Le tracé bastionné existe encore dans toutes les places de guerre anciennement construites, dont les approches sont défendues par une ceinture de forts détachés. Donnons toutefois un souvenir au grand ingénieur, au militaire distingué, à l'éminent écrivain, à l'ardent patriote qui construisit le réseau des places fortes de notre frontière nord-est; qui rendit, comme le disait ce grand ingénieur, « notre pré carré », et qui écrivit la « Dîme Royale », éloquent plaidoyer en faveur des classes malheureuses un siècle avant la révolution française. Vauban répondit fièrement un jour à Louvois, le ministre redouté qui prétendait lui imposer ce que le maréchal ne croyait pas juste : « Dieu m'a fait naître le plus pauvre gentilhomme de France. Mais pour l'honneur et la vertu, je ne crains ni vous, ni le roi, ni personne. » A l'encontre de son adversaire l'ingénieur hollandais Cohorn dont le système consistait à écraser de projectiles les ouvrages et à multiplier les moyens de destruction, le grand ingénieur français mit toujours sa gloire à épargner la vie des soldats. Au commencement du présent siècle Lazare Carnot dans son traité de l'attaque et de la défense des places, avait tracé les grandes lignes de la Fortification Polygonale dont son ami le marquis de Montalembert avait été l'inventeur. Vainement Montalembert méconnu dans son pays, illustre à l'étranger, avait proposé dans les dernières années du dix-huitième siècle un système de fortifications mieux approprié à la puissance de l'artillerie dont l'importance allait croissant. Nos places fortes continuaient à être construites d'après les principes de Vauban exagérés par Cormontaingne, dont le Front nous était encore enseigné à l'Ecole militaire au moment de la guerre de 1870. Les principes de Montalembert furent appliqués par les nations étrangères. Après les guerres du Premier Empire ils établirent suivant le nouveau système les grandes places de Coblentz, Ulm, Rastadt, Posen, Minden, Cracovie. L'éminent général du génie Brialmmont de l'armée belge, consacra les règles définitives de la nouvelle fortification à Anvers, longtemps regardée comme le modèle du genre. Depuis la guerre de 1870 nos places fortes de la frontière ; Nice, de etc. ont été de Lyon, Paris, de retranchés camps nos construits d'après les idées nouvelles de la défense intérieure et des batteries casematées. Vauban fut, avons-nous dit plus haut, le grand ingénieur militaire français avant 1789. Les sapeurs-mineurs de l'ancienne armée acquirent un renom glorieux aux sièges d'Ath, Lille, Douai, Namur, Valenciennes, Saint-Omer, Philipsbourg, Maëstricht, Tournai, Berg-op-Zoom et encore d'autres places fortes. Voici pour l'attaque ! Pousser la défense à ses plus extrêmes limites, voilà ce que doit chercher un commandant de place. Chamilly, l'illustre défenseur de Graves écrivait en 1674 à Louvois: « Le soldat témoigne d'avoir quelque répugnance à
manger des chevaux. L'on fera de son mieuxpour l'y obliger. » Saint-Simon, dans son portrait du maréchal de Boufflers qui défendit glorieusement Lille en 1708, a tracé un admirable portrait du commandant d'une place assiégée. »
L'ordre, l'exactitude, la vigilance, c'était là où il excellait. Il voyait tout et donnait ordre à tout sous le plus grand feu, comme s'il eût été dans sa chambre. Sa prévoyance s'étendait à tout, et dans l'exécution, il n'oubliait rien. Les soins qu'il prit en arrivant pour faire durer les munitions de guerre et les vivres, l'égale proportion qu'il fit garder en tous les temps du siège, en la distribulion du pain, du vin et de la viande, où il présida lui-même, et les soins infinis qu'il fit prendre et qu'il prit lui-même des hôpitaux, le firent adorer des troupes et des bourgeois. Il les aguerrit, je dis les troupes de salade*1 (du génie) qui faisaient la plus grande partie de la garni«
son.
»
Nous ne pouvons raconter tous les sièges dans lesquels se sont signalés depuis deux siècles nos sapeurs du génie. Citons en passant parmi les défenses à outrance : Prague en 1742 avec le maréchal de Belle-Isle et Chevert; Kehl en 1756 ; les deux sièges de Huningue en 1797 avec Abbatucci, en 1815 avec Barbanègre; Mayencc en 1793 avec Kléber; Gênes en 1800 avec Masséna ; Dantzick en 1807 avec Lefebvre, etc. Parmi les sièges d'Espagne celui de Saragosse (1808) fut particulièrement meurtrier. Les Espagnols commandés par Palafox firent une défense à outrance. La ville dut être conquise maison par maison la sape et la mine y jouèrent un grand rôle. Le général du génie Lacoste y fut tué ainsi que de nombreux officiers du corps. Le maréchal Lannes commandait les opérations du siège. En faisant la tournée des postes, il monta sur le toit d'une maison à bonne portée de l'ennemi et regarda les opérations avec sa lunette, servant de point de mire aux tirailleurs ennemis embusqués dans les ruines. Plusieurs balles vinrent siffler à ses oreilles. Lannes se 'fit aussitôt apporter des fusils et riposta lui-même. Il était très bon tireur et abattit plusieurs ennemis si bien que l'ennemi finit par envoyer un obus qui tua un capitaine du génie tout à côté du maréchal. Celui-ci n'en continua pas moins à tirer et redescendit ensuite, aussi impassible que s'il ne s'était rien passé. Les sièges furent nombreux pendant la guerre d'Espagne. Il y avait une quantité de places retranchées qui obligèrent souvent à des sièges réguliers. Nous aurions à citer, outre celui de Saragosse dont nous venons de parler, ceux de Tortose, de Lérida, d'Almeida, de Ciudad Rodrigo, et la vigoureuse défense du château de Monzon, en Aragon, par le garde du génie L'importance du génie s'accrut d'autant. Les bons officiers de cette arme étaient connus par nos généraux qui les estimaient d'une manière particulière et tenaient à les conserver auprès d'eux. Le remplacement par Masséna d'un chef de bataillon attaché au corps du maréchal Ney, remplacement que celui-ci n'avait pas provoqué, faillit amener un conflit entre les deux maréchaux. Je reproduis ici à titre de curiosité une lettre inédite de mon grand-père que j'ai déjà communiquée à diverses personnes
:
;
:
Saint-Jacques.
:
Ciudad Rodrigo, 14 mai 1800.
Monsieur le maréchal, Je suis due et maréchal d'empire comme vous. Quant à votre titre.de prince d'Essling, il n'a d'importance qu'aux Tuileries. Vous me dites que vous êtes le général. Je ne le sais que trop. Aussi lorsque vous ordonnerez à Michel Ney de conduire ses troupes à l'ennemi, vous verrez comme il vous obéira. Mais lorsqu'il vous plaît de bouleverser l'état-major de l'armée formée par le prince de Neufchâtel, vous comprenez que je n'écoute pas plus vos ordres que je ne crains vos menaces. Adieu, monsieur le maréchal, je vous estime et vous le savez. Vous m'estimez et je le sais. Que diable! N'allons pas mettre la zizanie entre nous pour un caprice. Car enfin, comment voulez-vous savoir si votre petit homme lance une bombe mieux que ma vieille moustache, qui est, je vous l'assure, un solide garçon. On dit que le vôtre danse bien, tant mieux pour lui : mais ce n'est pas une raison pour qu'il fasse danser ces enragés d'Espagnols. Et c'est ce qu'il nous faut. MICHEL NEY. 1.
Saint-Simon, Mémoires, t. VI, ch. VIII.
à
1
Le siège de Gênes est un bel exemple de la résistance poussée à ses dernières limites.
(100 canonniers, 30 fantassins et 5 gendarmes) commandés par le général Barbanègrc, fut investie par une armée autrichienne forte de vingt-cinq mille hommes aux ordres de l'archiduc Jean. Barbanègre sommé de se rendre refusa. L'ennemi construisit 28 batteries armées de 130 bouches à feu. La place avait trente canons pour leur répondre. Grâce au patriotisme et au dévouement de la population des abris blindés furent construits partout pour mettre à couvert le
A Gênes, le général Masséna bloqué depuis le 5 avril 1800 avec 18.000 hommes dans le camp retranché de Gênes; ayant des vivres seulement pour trente jours, se rappelant que « le sal ut du pays ou le succès des opérations militaires engagées dépendent de la reddition d'une place avancée ou retardée d'un seul jour », tint bon jusqu'au 4 juin, époque où les vivres firent complètement défaut. « Il nous fera manger les semelles de nos bottes, » disaient les soldats. Masséna obtint d'évacuer Gênes avec les honneurs de la guerre. La garnison était libre d'aller rejoindre le corps de Suchet sur les lignes du Var. En prolongeant sa défense Masséna avait assuré l'entrée en Italie de l'armée de réserve commandée par le premier consul, et Je succès de ses opérations militaires en immobilisant une partie des troupes ennemies. Il quitta Gênes le 4 juin. Le 9 juin le général Lannes gagnait la bataille de Montebello.
matériel, les soldats et les habitants. Bientôt Huningue ne fut plus qu'un monceau de ruines. Aucun courage ne se démentit. Les femmes et les enfants même ne craignirent pas de s'exposer au feu pour porter des munitions sur les remparts. Le 22 août, une explosion fit sauter la redoute Custine, un des ouvrages extérieurs. 400 Autrichiens en profitèrent pour occuper ce petit ouvrage. La garnison les chassa immédiatement. Le 23 août, le général Barbanègre fut sommé de nouveau de se rendre, sous peine de voir incendier la ville. Il refusa. Enfin, le 26 août, un armistice fut conclu et Barbanègre capitula après un bombardement de treize jours, obtenant de sortir avec les honneurs de la guerre. Lorsqu'il défila devant l'archiduc, précédé de deux tambours et suivi de cinquante hommes, seuls restes des glorieux défenseurs de Huningue, l'ennemi ne put d'abord en croire ses
Au mois d'août 1815, deux mois après Waterloo, la place de Huningue qui renfermait seulement une petite garnison de 135 hommes
Section de chemins de fer,
1880. Aérostier, 1880.
Télégraphiste.
Ouvriers de Télégraphe.
Télégraphe militaire.
Employé des Finances, payeur.
Directeur.
SECTION TECHNIQUE
yeux. Mais bientôt rendu à l'évidence, il salua la troupe héroïque de ses acclamations enthousiastes1.
Nous ne pouvons passer sous silence les deux défenses du château de Vincennes en 1814 et en 1815, par le général Daumesnil, qui ayant perdu une jambe en Prusse pendant la campagne de 1806, avait reçu de l'Empereur le commandement de la forteresse. Elles ont été pittoresquementracontées par M. le colonel Hennebert : Aux termes de la capitulation du 30 mars 1814, le matériel de guerre disséminé à l'entour de Paris devait être livré le lendemain matin aux alliés. Que fait Daumesnil? Il sort pendant la nuit de Vincennes avec deux cent cinquante chevaux, les seuls qui lui restent, enlève canons, fusils, munitions et fait entrer le tout dans sa forteresse. Au jour, des généraux alliés se présentent et réclament le matériel qui leur revient de droit. Refus énergique de Daumesnil. Un de ces généraux dit alors à l'entêté gouverneur — Eh bien! général, nous allons vous faire sauter!. Soit, répondit la Jambe de bois. Tenez, voici un magasin où j'ai dix-huit cent mille livres de poudre. Venez, nous sauterons ensemble!. Et si je vous rencontre en l'air, je me fais fort encore de vous sabrer.
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1. Les
:
Capitulations, par le général Thoumas, p. 143.
,
En 1815 les alliés retrouvèrent Daumesnil debout sur les remparts de Vincennes où était encore concentré tout ce qui restait à la France en fait de matériel de guerre. Ils sommèrent de nouveau le farouche gouverneur. — Rendez-moi ma jambe, répondit le vieux soldat : je vous rendrai la place. Sachant bien que la Jambe de bois ne se rendrait pas, Blücher lui fit offrir un million pour prix d'une capitulation honteuse. voilà du propre!. — Ah! ah! répondit Daumesnil, Et s'adressant à l'officier porteur de ces propositions déshonorantes : — Allez, ajoutait-il, allez dire à M. Blücher que mon refus servira de dot à mes enfants. La Jambe de bois ne veut ni se vendre ni se rendre. Cela étant, le général prussien entreprit de détourner les eaux qui alimentaient la forteresse. Des travaux furent entrepris, à cet effet, au village de Montreuil. La situation des assiégés était devenue extrêmement grave, quand Daumesnil fit savoir à Blücher que, plutôt que de se rendre, il se ferait sauter. Et il l'eût fait comme il le disait. Un tel sinistre eût eu des conséquences de tout point incalculables. C'est alors que Blücher eut l'esprit de dire : — Ce diable d'homme!. Il se fâchera bien sûr, si je ne lui mets pas un peu d'eau dans son vin. Les eaux continuèrent de couler à Montreuil et d'arriver à Vincennes.
ou subalternes encore au service parmi ceux qui avaient pris part au grand siège. Déjà en vertu, d'une décision rendue pendant le siège chaque mois compta pour une campagne. Voici, raconté par un témoin oculaire, le récit de la prise de la tour Malakoff, qui détermina la chute de Sébastopol.
Daumesnil ne rendit pas la forteresse qui fut occupée quelques jours après par la garde royale. La période de la monarchie de juillet vit nos sapeurs se distinguer à Alger, à Anvers, à Constantine; celle du second Empire à Bomarsund, à Sébastopol, à Puebla; sous la seconde république à Paris, à Strasbourg, à Belfort et plus tard à Tuyen-Quan. A Sébastopol, comme l'a dit si bien M. le général Saussier, « il n'y eut ni vainqueur ni vaincu » , tant de courage avait été déployé de part et d'autre. Pendant ce difficile siège de 18 mois l'armée française montra une constance, une opiniâtreté, une énergie, une persévérance qui ne se démentirent pas un seul jour pendant les deux rudes hivers que nos troupes passèrent sur le plateau de Chersonèse. L'anniversaire du premier bombardement de Sébastopol (17 octobre) est encore célébré en Russie dans les troupes qui prirent part au siège et dont Tolstoï a retracé avec une si exacte vérité les souffrances et les dangers dans ses Souvenirs de Sébastopol. Par un ukase de 1879 le Tzar a augmenté la solde de tous les officiers supérieurs
Sapeurs. Pompiers de Paris.
Un peu avant midi (le 8 septembre) tout était prêt pour l'assaut. Chacun était à son poste : la division Mac-Mahon (ancienne Canrobert) massée dans les tranchées arrivant aux pieds de Malakoff, la division La Molterouge dans celles vis-à-vis la courtine qui relie Malakoff au petit redan et enfin la division Dulac devant le petit redan. Les régiments de la garde formaient la réserve sous les ordres de Mellinet. Le général Bosquet avait le commandement supérieur de toutes ces troupes. Prélude nécessaire et obligatoire de tout assaut, notre artillerie de siège, formidable comme quantité et qualité, tonna contre la place avec une violence extrême, et sur toute notre ligne à la fois. Il s'agissait de déconcerter ses malheureux défenseurs et de les éloigner le plus possible des remparts que nous devions escalader. A midi précis, heure tenue secrète, mais convenue d'avance entre les
Chef de bataillon de Mobiles, 1870.
Lieutenant de Douanes.
Tenue d'Incendie. Grande tenue.
Douanier, 1865.
Garde-Mobile, 1848.
Douanier mobilisé, 1870.
1870.
Eaux et Forêts. Garde général. Garde Forestier, 1870.
Éclaireur Franchetti, 1870.
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Franc-Tireur, 1870.
CORPS SPÉCIAUX
généraux, le feu cesse instantanément et le général Bosquet qui s'était placé dans la sixième parallèle, la plus rapprochée de la ville du côté du petit redan, entouré alors de son état-major, tire son épée et commande d'une voix forte et menaçante : « Tambours et clairons, la charge! Mes amis, en avant! Vive l'Empereur! » Ce commandement se répète à la fois sur toute la ligne. L'air l'emporte ainsi que les sons de toutes nos musiques et de toutes nos fanfares. Aussitôt les troupes sortent à la fois des tranchées, les officiers en tête, l'épée nue. C'est là le signal, moment solennel! d'un des combats les plus sanglants auxquels il soit possible d'assister, qui a duré toute une journée. Dans les premiers moments de l'assaut nous avons cru tout enlevé et presque terminé par un coup de foudre. Mais les Russes, blottis d'abord pour se garantir de notre feu d'enfer sous des blindages ou sous terre, sont bientôt revenus à la charge. C'est à peine si nous avons pu nous maintenir dans les positions conquises. Heureusement la division Mac-Mahon tenait bon dans Malakoff, où nous avions la consolation de voir flotter le drapeau français. Bientôt nous nous trouvons au milieu d'une véritable tempête de feu. Nous recevions une pluie de projectiles qui nous arrivaient de toutes parts. C'était comme la grêle qui fauche les épis d'un champ1.
La guerre de 1870, il faut avoir le courage de le dire, a donné lieu chez quelques commandants de place à des actes de faiblesse, qui sans approcher des nombreuses capitulations 1. Lettres de Crimée. Souvenirs de
guerre, par Charles Bocher.
signées par les Prussiens en 1807 n'en furent pas moins très regrettables. Il se manifesta même dans les rangs les plus élevés de l'armée et dans la population de certaines villes des tendances funestes, des erreurs coupables en matière d'honneur militaire qui dénotent chez ceux qui les ont commises un affaiblissement du sens moral ou tout au moins une ignorance impardonnable des devoirs du citoyen et du soldat. Les générations nouvelles de notre armée nationale éviteront le retour de pareilles erreurs. C'est dans la famille, c'est à l'atelier, dans les écoles, au lycée que les éducateurs de la jeunesse française devront inculquer profondément l'amour de la patrie, la résignation, le devoir et l'honneur dans l'âme de nos, jeunes gens. Ils trouveront des exemples pendant cette même guerre Strasbourg, Belfort et de 1870 avec trois sièges mémorables Paris. Du 2 novembre 1870 au 13 février 1871 Belfort subit un étroit blocus de 103 jours et à partir du 30 novembre un bombardement des plus violents. Rien ne put ébranler l'énergie du commandant de la place dont la défense a immortalisé le nom le colonel du génie Denfert, ni la vaillance de la garnison composée seulement de 3 bataillons et demi d'infanterie, 2 bataillons et demi de chasseurs à pied et une demi-compagnie du génie. Le reste des troupes était forme
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de mobiles et de mobilisés. La constance de la population de Belfort ne se démentit pas un seul instant pendant les horreurs d'un long bombardement de 73 jours. Belfort ne fut remis aux Prussiens que sur l'ordre du gouvernement français. La garnison obtint les honneurs de la guerre. La brillante défense de Belfort a contribué en grande partie à nous conserver cette patriotique place de guerre. • Si Strasbourg a succombé si l'ennemi victorieux a réclamé il appelle la vaillante cité « la clé de la maison » comme d'Alsace, nous devons rappeler qu'elle ne s'est pas volontairement livrée aux Prussiens. Ils y sont entrés sur les ruines fumantes des incendies allumés par leurs obus. L'humanité, à défaut du droit des gens, fait une loi dans la guerre contemporaine d'atteindre seulement dans un bombardement les œuvres vives de la place, en épargnant autant qu'il est possible les édifices publics, les maisons particulières; de frapper les remparts et non les habitants; les combattants et non les femmes et les enfants. Les Allemands pendant la guerre de 1870 n'eurent pas de tels scrupules.
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Au courant du bombardement de Strasbourg 193.722 projectiles : furent lancés sur la ville ; 600 maisons furent incendiées; des rues, des faubourgs entiers furent détruits. 1.100 personnes (femmes, enfants) furent blessées; 300 tuées. La constance et la fermeté des habitants ne furent pas ébranlées. Le général Uhrich capitula parce que les dehors étaient enlevés; parce que deux brèches étaient praticables. Mais il capitula au milieu des protestations passionnées de la population strasbourgeoise qui ne voulait pas devenir allemande 1.
braves gens que nos frères d'Alsace ! Pourquoi faut-il qu'un maréchal français, bloqué lui aussi en 1870 dans une grande place dé guerre, ne se soit pas inspiré de la noble phrase d'un enfant de Metz, Fabert. Elle est inscrite pourtant sur le socle de sa statue devant laquelle le commandant en chef de l'armée de Metz dut passer bien souvent. Mais il ne la lut jamais ! O les
Si, pour empêcher qu'une place forte que le roi m'a confiée ne tombât au pouvoir des ennemis, il fallait mettre à une brèche ma famille, ma personne et tout mon bien, je ne balancerais pas un moment à le faire. Rappelons enfin que pendant la dernière guerre Paris, dont M. de Bismark avait dit : « Paris capitulera quand il manquera de fraises ! » montra que le chancelier de fer ne le connaissait pas. Étroitement bloqué par les armées allemandes, Paris donna au monde un bel exemple d'énergie morale et tint près de quatre mois, contre toute vraisemblance. Du 17 septembre au 29 janvier la population fut admirable, aussi bien contre le bombardement ennemi qui frappait les édifices publics, les ambulances, les maisons particulières que contre les privations du rationnement qui atteignit les dernières limites. Paris fut bien près de mourir de faim. 25 grammes de viande de cheval, 300 grammes de mauvais pain : telle fut la ration moyenne et journalière d'un habitant de Paris pendant les derniers jours du siège. Sans parler de la peine qu'il fallait se. donner pour avoir sa portion. Paris gardera longtemps le souvenir des longues files de femmes et d'enfants à la porte des boulangeries et des boucheries L'approvisionnement d'une place de guerre est en effet chose capitale pour la prolongation de la défense. Nos aînés le comprenaient bien. Le colonel de Gonneville que nous avons cité à plusieurs reprises au cours de ce travail nous dit à propos (pour les 4.000 chevaux du siège de Hambourg « Le foin d'artillerie et de cavalerie) mal choisi et emmagasiné sans soin partie plus avarié. grande fut jetée dans l'Elbe. La trouva se Comme le temps et l'argent n'avaient pas manqué et que les
!. :
1. Les Capitulations,
par
M. le
général Thoumas, page 47.
ressources du pays qui entoure Hambourg sont immenses en ce genre, le maréchal (Davout) à la suite d'une enquête fit juger par un conseil de guerre un agent comptable reconnu coupable de négligence et de malversation et le fit fusiller. Ce n'était que justice. » Après la guerre de 1870 notre frontière était ouverte, démantelée. Nous devons payer un tribut de reconnaissance à nos officiers du génie. Par leurs travaux exécutés avec autant d'intelligence que de rapidité ils construisirent les nouvelles défenses ; les forts d'arrêt de l'Est et les grands camps retranchés qui mirent en moins de trois années la France en état de résister à une soudaine agression. Le nom du général du génie Séré de Rivière doit rester attaché à la réalisation de cette œuvre de défense nationale, qui a été après lui perfectionnée, complétée, mais dont il avait, d'une main sûre, nettement établi les grandes lignes. La récente guerre du Tonkin ajouté le nom de TuyenQuan à celui des belles défenses soutenues par nos soldats. La jeune armée a montré qu'elle avait hérité des qualités d'énergie et de ténacité dont son aînée donna tant de preuves. Le nom du commandant Dominé est inséparable de celui de la résistance héroïque soutenue par la forteresse de Tuyen-Quan, sur la rive droite de la rivière Claire, à une centaine de kilomètres de la frontière de Chine.
a
Le 24 novembre 1884 la place de Tuyen-Quan, investie par les Chinois, fut déclarée en état de siège. Après de nombreux combats extérieurs, livrés sans grand succès, les assaillants se décidèrent à former un siège selon les règles et procédèrent, le 21 janvier 1885, à l'ouverture de la tranchée. Les troupes du génie ne se composaient que de 8 hommes, dont un caporal et un sergent, de la 2° compagnie du 3° bataillon du 4e régiment. Ces braves gens dont les noms sont à retenir étaient : Bobillot, sergent; Cacheux, caporal; Raymond, Edme, Couzir, Dominique, Védeine et Blanc, sapeurs-mineurs. Le sergent Bobillot fut l'âme de la défense, en dépit de l'exiguïté de ses ressources. Il ne possédait en fait d'outils que 27 pioches, 40 pelles et 3 haches. N'importe, il fit exécuter à l'extérieur un ouvrage de campagne et confectionner 6.000 gabions qui devaient lui servir à faire dans l'intérieur des traverses de défilement. Les Chinois étant venus apposer des madriers contre un des saillants et à l'une des portes de la forteresse pour attacher le mineur en vue de faire brèche en ces points à l'enceinte, le sergent détruisit ces abris et fit aveugler les trous déjà ouverts dans la muraille. Bientôt il soutint une vraie guerre de mines. L'assaillant avait fait un puits à 30 mètres de l'escarpe. On se mit aux écoutes. Le doute n'était plus possible. Le mineur chinois, suivant deux directions distinctes, cheminait souterrainement vers la place. Il ne fut bientôt plus qu'à 7 ou 8 mètres du mur. Mais Bobillot avait entrepris en temps utile deux galeries de contremine et marchait à la rencontre de l'assaillant. Effectivement, le 11 février à 8 heures du matin mineurs et contre-mineurs se trouvèrent face à face. Car un coup de pioche vint crever la mince cloison de terre qui les séparait. Une lutte souterraine s'engagea. On se battit dans les ténèbres, à coups de pelle, à coups de pioche, à coups de revolver. Heureusement Bobillot s'aperçut que la galerie chinoise était au-dessous de la sienne. Il y fit arriver de l'eau et l'inonda. Malgré tout les Chinois conlinuèrent leur travail. Le 12 février ils parvinrent à faire partir un fourneau de mine. La maçonnerie étonnée s'affaissa, mais sans ouvrir de brèche. Le sergent du génie s'empressa nonobstant de relier par une palanque les amorces de la muraille
demeurées saines. Le 13 février à 3 heures du matin, explosion d'un autre fourneau au saillant sud-ouest de l'enceinte. Le mur fut éventré sur une quinzaine de mètres de largeur, mais la brèche était peu praticable. Quoi qu'il ensoit, Bobillot entreprit, en arrière de ces démolitions, la construction d'un retranchement intérieur. C'est pendant qu'il dirigeait ces travaux que le brave sergent reçut une blessuré mortelle. Le siège continua. Les Chinois voulaient, à tout prix, faire brèche à l'enceinte. Le 22 février partit encore un fourneau dont l'explosion fit sauter une trentaine d'hommes, au milieu desquels se trouvait le sapeur Edme. Le 25, les Chinois donnèrent un premier assaut, au cours duquel le sapeur Blanc, qui venait d'être fait caporal, fut atteint de deux balles à la tête. Six autres assauts furieux furent successivement repoussés, ainsi que le premier.
Le 3 mars, quand une colonne française vint faire lever le siège on comptait sept brèches à l'enceinte de Tuyen-Quan..L'assaillant avait encore cinq fourneaux tout chargés et bourrés, prêts à partir. Il était temps d'arriver au secours d'une brave garnison qui avait perdu le tiers de son effectif. Transporté à l'hôpital militaire de Hanoï, le sergent Bobillot y est mort des suites de ses blessures 1.
La statue du sergent Bobillot s'élève aujourd'hui sur une place de Paris. C'est justice! Elle est une consécration de la conduite héroïque de l'intelligent sous-officier du génie. Elle constitue un exemple et un modèle à suivre pour les générationsfutures de notre jeune armée. Nous avons parlé avec détails de quelques-uns des sièges principaux soutenus par nos armées. C'est que dans l'attaque et dans la défense des places le corps du génie joue un rôle prépondérant, qui ne s'arrête pas là et reparaît encore sur le champ de bataille, où il marche intrépidement avec la tête des colonnes, exposé aux premiers feux ennemis. En l'état présent de notre organisation militaire l'officier du génie est certainement le mieux instruit et le plus complet au point de vue de l'instruction professionnelle. Il doit connaître en même temps le service de l'infanterie et celui de l'artillerie, la sape et la mine, l'attaque et la défense des places. Il passe parfois pour moins soldat que ses camarades des autres armes. On se représente volontiers l'ancien polytechnicien malingre, portant des lunettes, le cheveu rare, le dos voûté et la démarche incertaine. C'est tout à la fois une erreur et une injustice : il génie L'officier du est briser. qu'il faut cliché un vieux là a y aussi jeune, aussi vigoureux que ses camarades des autres armes. Un sang généreux coule dans ses veines. Il est vif, ardent, jeune, il est Français! Que de noms célèbres de généraux sortis depuis cinquante ans de l'arme du génie, Duvivier, Cavaignac, La Moricière, Vaillant, Niel, Faidherbe. pour ne citer que les plus illustres ! Voyez sur le champ d'exercice, en terrain varié, une compagnie, un bataillon du génie exécuter les manœuvres d'infanterie, le service en campagne, le tir à la cible. Vous serez émerveillé de l'ensemble, de la précision, de la légèreté, de l'intelligence avec lesquels ces troupes d'élite, formées d'hommes choisis, obéissent aux ordres de leurs officiers dont les commandements sont donnés à propos, selon les règles et le coup d'œil. Allez ensuite au polygone : vous verrez ces mêmes hommes exécuter avec habileté et promptitude les travaux de sape ou de mine, si difficiles et si dangereux. Les soldats du génie sont les plus belles troupes de l'armée. Les hommes pris parmi les plus robustes sont choisis avec soin. De taille élevée, vigoureux, ils ont presque tous un état manuel et sont ouvriers du bois, de la pierre ou du fer. L'uniforme du génie est sévère : noir avec le collet et les parements de velours, tel que Carnot le donna au corps; la tunique seule a remplacé l'habit. Les soldats du génie portent sur le bras gauche divers attributs qui caractérisent leur spécialité. Cette locomotive rouge indique un homme du régiment des chemins de fer dont la mission est, en temps de guerre, de réparer les voies ferrées et les ouvrages d'art et de construire les chemins de fer de campagne2. Ce ballon cousu sur la manche indique un aérostier. Sous l'habile direction de deux officiers distingués, les frères Renard, l'aérostation militaire est devenue une science exacte. La direction de l'homme à travers l'espace n'est plus en question; simple affaire de temps. Nos officiers sont partis à la conquête de l'air. Donnons un souvenir au précurseur de nos distingués camarades; au brave colonel Coutelle, commandant des aérostiers par le colonel Hennebert. 2.- Le régiment des chemins de fer (5° régiment du génie), créé depuis un an à peine, s'est fait déjà remarquer par des travaux et des exercices qui montrent combien cette institution nouvelle est appelée à rendre de grands services. 1. Nos soldats,
sous l'Empire, qui, fier des services rendus par lui et ses soldats à nos armées, écrivait, en style du temps, cette phrase qui sent bien son époque « Je suis fier d'avoir formé les compagnies d'aérostiers ; d'avoir inventé les manœuvres qu'exige la science aérostatique et surtout d'avoir formé des officiers qui sussent à la fois obéir aux ordres des généraux et à ceux des vents qui ne souffrent ni délai ni hésitation. » Les travaux de siège, de défense et d'approche, si périlleux, sont du ressort de l'officier du génie. Que de vieux mots français, de mots à images sont encore employés dans le langage du mineur chef écouteur ; aller aux écoutes ; aveugler ; fasciner; saucisson; camouflet. N'est-il pas d'un autre âge ce passage du rapport du chef du génie au siège de Tuyen-Quan, le sergent Bobillot, qui, à la suite d'une attaque chinoise repoussée, écrit militairement sur son journal « Alors nous leur avons infligé un camouflet. » En campagne la section du génie marche avec l'avantgarde. Elle remue la terre, ouvre les communications, pétarde les murs et fait sauter les grilles. Les premiers coups de feu de l'ennemi sont pour les braves sapeurs, quand se portant en avant ils viennent placer le sac de dynamite dont l'explosion destructive ouvrira le chemin à nos soldats. Chaque jour de bataille le génie paye un 'large tribut de morts et de blessés.
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Le 19 janvier 1871, au siège de Paris, une des colonnes du corps du général Ducrot se trouva arrêtée le matin de la bataille de Buzenval par le mur du parc de Longboyau, qui nous fusillait avec deux étages de feux. Il fallait pétarder le mur. Tandis que le 2e bataillon du 136e régiment d'infanterie précédé de sa compagnie franche suspendait sa marche en avant et se ralliait derrière l'enceinte de la Bergerie, un détachement de dix sapeurs du génie, un caporal et un sergent, commandés par le lieutenant Joseph Beau, accourut au pas gymnastique. Abrités d'abord par le mur de la Bergerie, ils se découvrirent soudain et se portèrent rapidement jusqu'au mur de Longboyau, soit 60 mètres en avant à notre droite. Trois sapeurs tombèrent dans ce court trajet. Les autres arrivèrent au pied du mur et se mirent en mesure de placer leurs sacs de dynamite et de dérouler leur cordeau Bickford. Nous protégions de notre mieux par nos feux ces intrépides travailleurs qui tombèrent l'un après l'autre. Quatre longues minutes se passèrent ainsi. Le lieutenant et trois sapeurs étaient encore debout. Ils tombèrent à leur tour. Presque aussitôt l'explosion se produisit. Quand la fumée se dissipa, une brèche était béante dans le mur du parc. La compagnie franche se précipita en avant. En un instant nous arrivâmes sur la brèche, au pied de laquelle gisaient nos braves camarades. Le lieutenant du génie et ses dix sapeurs avaient été tués. Le sergent, atteint de huit balles, n'avait pas perdu connaissance. On le porta à l'ambulance. Il mourut en arrivant. C'est autour de cette brèche 1, plusieurs fois franchie et repassée au cours de la journée par nos soldats, que s'engagea à diverses reprises une action très meurtrière, où nombre de nos hommes furent atteints. Ainsi le détachement de sapeurs du génie et son officier avait payé tout entier de sa vie sa mission périlleuse. Nous regrettons de ne pas connaître le nom de ces braves soldats et de ne pouvoir citer que le nom de leur lieutenant : M. Joseph Beau, du 3e régiment du génie.
Pendant la guerre de 1870 le corps du génie trouva des auxiliaires dans la population civile de Paris. La Légion du génie de la garde nationale, remaniement du « corps auxiliaire du génie », créée dès le 24 août 1870, fut constituée régulièrement par décret du 7 novembre 1870. Placée sous la direction de MM. Alphand, Viollet-le-Duc et des ingénieurs des ponts et chaussées attachés à la ville de Paris, elle rendit de réels services. On la vit souvent à nos avant-postes, faisant le service de tranchée. Aujourd'hui, le Génie territorial se compose de 18 bataillons affectés chacun à un corps d'armée. Les dépôts de ces bataillons sont attachés aux écoles du Génie de Versailles, Montpellier, Arras et Grenoble. a parlé de cette brèche dans le Journal d'un d'ordonnance. Nous regrettons qu'il n'ait pas connu cet épisode. 1. M. le comte d'Hérisson
officier
Il nous souvient de l'émotion qui faisait battre nos cœurs à l'École militaire quand notre professeur de fortification, un commandant du génie, nous expliquait l'ouverture de la tranchée. Il s'agit, on l'a compris, d'aller à découvert, sur le sol nu, à bonne portée, exposé aux vues directes de l'ennemi, creuser un trou. « Le premier sapeur sort du boyau, pousse devant lui le gabion farci, bouclier volant, donne un coup de pioche. il est tué. Le second sapeur le remplace, donne un second coup de pioche; il est tué. Un troisième sapeur le remplace; il est souvent tué. Mais déjà un trou est creusé. Il s'agrandit. La tranchée est vite amorcée. Bientôt on chemine à couvert. » Ce simple exposé en dit plus que de longs discours. Payons à l'arme du génie le juste tribut d'admiration auquel elle a droit.
Pontonniers.
-
Les pontonniers, chargés d'établir les ponts militaires, sont-ils des artilleurs ou des sapeurs? Question grave déjà résolue chez nos voisins, mais qui n'a pu encore l'être,
Sous-Intendant militaire, 1835.
Commissaire des guerres, 1808.
Intendant militaire, 1820. Inspecteur aux revues,
1812.. CORPS
depuis si longtemps qu'elle s'agite, par les ministres qui se sont succédé. On comprendra donc que nous réservions notre opinion. Actuellement les pontonniers sont rattachés à l'artillerie dont ils forment un des régiments. Les pontonniers datent de la Révolution. Le général Biron organisa militairement en 1792 la corporation des bateliers de la ville de Strasbourg qui devint le bataillon des matelots du Rhin. Ce fut le noyau de nos pontonniers militaires qui rendirent pendant les guerres de la République et de l'Empire les plus grands services. Les inscriptions de leur drapeau se rapportent toutes à cette période : Passage du Rhin (1795); Passage de l'Adige (1801); Passage du Danube (1809); Passage de la Bérézina (1812). Nous ne pouvons à regret entrer dans tous les détails des deux premières opérations. Disons quelques mots des ponts du Danube en 1809. Nous parlerons ensuite de la Bérézina où nos pontonniers se couvrirent d'une gloire immortelle. En 1809 malgré les efforts prodigieux de Napoléon pour
Officier principal d'administration.
Intendant général inspecteur, 1855.
Intendant militaire, 1875.
Adjoint à l'Intendance, 1845.
DE L'INTENDANCE
établir et conserver les ponts de l'île Lobau, sur le Danube, les résultats furent imparfaits. Les travées des ponts de bateaux ou de pilotis furent submergées fréquemment; plusieurs furent coupées. Le dévouement de nos pontonniers réussit très difficilement à rétablir les communications entre les deux parties de notre armée séparées par le Danube. Le nom du général Mouton, que Napoléon fit comte de Lobau, doit être retenu en cette occasion. En 1812 pendant la retraite de Russie les pontonniers sauvèrent les débris de notre armée en établissant sur la Bérézina le 26 et le 27 novembre au prix de fatigues énormes trois ponts qui préservèrent les troupes qui existaient encore d'une destruction totale. Les noms du général Éblé, du colonel Chapelle, du commandant Chapuis, le souvenir de leurs braves soldats doivent être dans tous les cœurs. Les fatigues que subirent les pontonniers dépassent toute croyance. Par un froid mortel, ils travaillèrent dans l'eau jusqu'à la ceinture, pendant toute la construction des ponts, les officiers leur donnant l'exemple. Le désordre et la précipitation de la retraite amenèrent deux ruptures. Le passage des troupes fut interrompu. Le général Eblé sachant combien les pontonniers étaient fatigués, désespérant presque de réunir sur-le-champ le nombre d'hommes
Sous-Intendant, 1880. Contrôleur-Général, 1880. Officier d'Administration, 1880.
ET DU CONTROLE
nécessaire pour travailler avec promptitude à des réparations aussi urgentes, était consterné. Cependant il avait confiance dans le dévouement des pontonniers qui harassés de fatigue dormaient autour des feux de bivouac. Les menaces auraient été infructueuses. La voix de la patrie et de l'honneur pouvait seule se faire « entendre à ces braves qui étaient aussi fortement stimulés par l'attachement et le respect qu'ils portaient au général Eblé. » Les réparations furent faites, le reste de l'armée passa. Six jours auparavant, le 20 novembre à Orcha, l'équipage de pont de 60 bateaux, muni de tous ses agrès, avait été brûlé comme trop encombrant. six jours avant d'arriver à la Bérézina! ! ! Le passage de la Bérésina a un épilogue. Le vaillant général Eblé mourut de fatigue en arrivant à Kœnigsberg le 30 décembre 1812. Sur les 416 pontonniers de la Bérézina 32 seulement revirent la
France.
Les pontonniers paraissent dans l'avenir devoir être remplacés par les sapeurs du génie, qui déjà font les ponts fixes et les ponts de chemins de fer, chargés de la construction et de la réparation rapide des ponts et des viaducs permanents à l'aide d'un matériel métallique. — La construction rapide du pont mobilisable de 360 mètres en acier sur le Var, dont nous avons parlé plus haut (page 12) a démontré que les sapeurs du génie peuvent dès à présent établir en moins de 24 heures un pont stratégique de 200 mètres de long, pourvu que l'armée possède un parc de travées portatives et. d'éléments droits en acier. Le système de ponts portatifs et de viaducs mobilisables inventé parle colonel du génie Henry, pour passage de rivières, par l'emploi
de travées et de piles mobilisables en acier a été adopLé officiellement pour le rétablissement des communications sur les chemins de fer stratégiques ainsi que pour les ponts miliLaires de route et a été mis en pratique dans les régiments du génie1.
Train des Équipages à cheval. — Un vieux mot,
écho des guerres du premier Empire, a, fait fortune sur le train des équipages « Hussards à quatre roues ». Celui qui l'a dit le premier a fait preuve d'esprit sans doute ; il a surtout émis une idée juste. Car si les hussards éclairent les colonnes, assurent leur marche en avant, le train des équipages lui aussi, assure en arrière, à sa façon, la marche de ces mêmes colonnes qu'il ravitaille régulièrement en tout ce qui leur est nécessaire pour continuer les opérations.
:
1. C'est un type des ponts du système Henry (il mailles indivisibles)
qu'a irailé
le constructeur Eiffel, qui rien est pas l'inventeur. Du reste, ces ponts, dits Eiffel, lais-
sent beaucoup à désirer au point de vue de la solidité et se déforment rapidement, ce qui les rend inaptes au service de la guerre.
Infirmier,
1820..1835. 1855
Il nous paraît superflu d'insister sur l'importance capitale des transports dans nos armées contemporaines. « Pas de transports, pas d'armée ! » est un aphorisme d'un laconisme saisissant. Pour être moins brillant le rôle des « hussards à quatre roues » est aussi utile que celui des hussards à cheval. Sous l'ancienne monarchie et jusqu'au XVIIie siècle les officiers qui presque tous appartenaient à la noblesse faisaient suivre leurs troupes par des équipages particuliers. Au début des guerres de la République les transports militaires s'organisent. Chaque bataillon marche avec un équipage attelé composé d'un caisson à 4 chevaux et spécialement employé au transport des bagages des officiers, des objets de campement et de la caisse. Ces voitures reçoivent le nom d'équipages militaires. Plus tard l'usage en devient général. Au début de l'Empire (1804) le service des transports, à l'exception de celui des canons et des munitions de guerre, était exécuté sous le régime de l'entreprise par des compagnies civiles fortement constituées. Les voitures et les harnachements contectionnésparl'Etat étaient pris en compte par les eritrepreneurs, qui en devenaient responsables,
Ambulanciers volontaires, 1870.
1870..
Ambulancier de régiment, 1880. Infirmier, 1875.
Médecin auxiliaire, 1870.
INFIRMIERS ET AMBULANCIERS
pourvoyaient à leur entretien et n'avaient à fournir que le personnel et les animaux. Les parcs étaient Sampigny, Verdun et Châteaudun. L'intérêt d'un entrepreneur est trop souvent en opposition, en campagne surtout, avec les intérêts de l'armée. Je veux faire des transports militaires comme du train d'artillerie. Nous n'avons fait qu'un pas en administration, c'est celui-là, écrit Napoléon dans sa correspondance, 6 mai 1807. » lit plus loin : « Rien n'est vicieux, autant que l'organisation des transports de la compagnie Breidt. Elle fait un mauvais service. Ainsi, par exemple, lorsque j'ai intérêt à ce que les caissons arrivent vite, l'entrepreneur a un intérêt opposé. D'ailleurs rien 11 ®sl absurde comme ces marchés où l'entrepreneur joue à la loterie; où il peut être ruiné sans qu'il y ait de sa faute où gagner un million sans raison. » «
L'Empereur ne tarda pas à réaliser sa pensée pour les équipages militaires. Un décret du 26 mai 1807 organisa le train en bataillons commandés par des officiers du grade de capitaine. Cette organisation militaire du train des équipages s'accomplit sans perturbation dans le service et fut un immense progrès. Le temps passé antérieurement par le personnel au service des compagnies d'entreprise leur fut compté comme service militaire. Au moment de. la campagne de Russie (1812) il existait 22 batailIons du train à 6 compagnies, soit 132 compagnies, plus un bataillon du train léger à 4 compagnies : soit en tout 136 compagnies. Cette solide organisation se fondit dans les neiges de la Russie.
Ses débris, en 1814, formèrent à peine 60 compagnies indépendantes. De l'immense matériel construit sous 1 Empire il restait à peine en 1815, 400 ou 500 caissons que, faute d'hommes et de chevaux, on ne put utiliser pour la campagne d'Espagne en 1823.
Nous ne suivrons pas le train des équipages dans ses transformations successives. Aujourd'hui le corps se composa de 20 escadrons, tous stationnés en France. Chaque escadron a trois compagnies. Le service de l'Algérie est assuré par un certain nombre de compagnies mixtes, rattachées, par l'administration, aux escadrons de
l'intérieur.
d'est en campagne, en colonnes, en Algérie, en Tunisie et au
Tonkin, détaché dans un poste éloigné que l'on peut se rendre un compte exact des modestes et importants services du train des équipages. Chargé du service des convois, du ravitaillement des divers postes entre eux, l'existence de ces braves gens est une fatigue incessante, et souvent un danger. Disséminés la plupart du temps par petits détachements, ces hommes, dont un sous-officier, un simple brigadier ont la responsabilité, assurent un service difficile avec leurs voitures, leurs chevaux ou leurs mulets. Maintes fois le soldat du train, « le tringlot » en Algérie, au Mexique, en Tunisie, au Tonkin a quitté la bride de son cheval et pris son fusil, fait le coup de feu pour protéger son convoi. Qui dira le nombre de têtes de soldats du train coupées par les Arabes?
Le rôle du train des équipages est devenu capital avec les impedimenta obligés que transportent avec elles lés armées de notre temps. Le train est chargé d'assurer le service de santé ; il approvisionne les troupes combattantes de tout ce que la
réquisition ne peut fournir. Il assure les services accessoires : poste, télégraphe, les échelons successifs de convois de vivres; les ambulances de première et de seconde ligne. En un mot l'ensemble des rouages multiples d'une armée dépend du bon fonctionnement du train des équipages. Cet auxiliaire précieux ne parait pas, il est vrai, sur la ligne de bataille. Mais s'il n'a pas la gloire du combat il en assure la préparation. Levant le premier le camp, le soldat conducteur du train arrive souvent le dernier à l'étape avec le convoi. Avant de songer à lui il doit penser aux autres ; assurer toutes les distributions ; vider ses fourgons pour aller de nouveau charger en arrière. La nuit venue, les troupes reposent depuis longtemps les voitures du train roulent encore. Pendant l'action le soldat du train avec les brancardiersmusiciens des régiments et les frères des écoles chrétiennes va sous le feu de l'ennemi, qu'il subit sans y répondre. et qui souvent a fait dans ses rangs des victimes, relever les blessés qu'il amène à ses voitures d'ambulance. Longtemps après la fin du
:
Chirurgien-Major, 1808. Vétérinaire Garde Royale, 1820.
Aide-Major, 1830.
combat on voit les soldats du train conduits par leurs officiers explorer le champ de bataille, recherchant les blessés qui sans eux périraient, faute de soins, abandonnés dans la nuit obscure. Chaque année un certain nombre de soldats de tous les régiments d'infanterie sont envoyés dans les escadrons du train des équipages pour y apprendre la conduite des voitures, tant sont grands nos besoins de transports en cas de mobilisation.
Services spéciaux. — Notre rapide
rentes armes: infanterie, cavalerie, gendarmerie, artillerie, génie qui constituent les combattants, est terminée.., Nous avons essayé, en donnant un souvenir à leur passé militaire, d'indiquer le caractère particulier, les traits spéciaux de chacune de ces armes. Mais il est à côté des troupes combattantes d'autres troupes, d'autres organismes qui, pour ne pas combattre,n'en constituent pas inoins d'indispensables « outils de guerre ». Leur mission, très importante, est de préparer, d'assurer, de compléter le rôle
Pharmacien-Major, 1860.
Chirurgien-Major, 1845.
Vétérinaire, 1835.
esquisse des diffé-
Vétérinaire, 1860..
854.
Chirurgien-Major, 1854.
Aide-Major, 1883.
Médecin principal, 1870.
Chirurgien-Major de 2e classe, 1873.
CORPS DE SANTÉ
des combattants. Énumérons rapidement ces divers services spéciaux : le corps de santé militaire, avec les infirmiers, les vétérinaires, les aumôniers, l'intendance avec ses officiers d'administration, le corps du contrôle ; les interprètes ; le service de la trésorerie, des postes, du télégraphe, etc., etc. Nous regrettons que notre cadre très restreint ne nous permette pas de dire quelques mots sur chacun de ces services et
de leur rendrela justice quileur .est due. Leurs services sontpour l'armée d'une importance capitale. Car tous ils contribuent à un but unique : préparer la guerre "tenir sans cesse en haleine les combattants; amener sur le champ de bataille, à l'heure prévue, le plus grand nombre de soldats en état de santé parfaite, bien nourris, bien armés, approvisionnés en tout : vivres et munitions. Ce but réalisé n'est-il pas un des secrets de la victoire?
MAC MAHON A 1855
M
ALAKOFF
FASCICULE
III
TOULON
A
1793
BONAPAHTE
fARTILL ERIE.
—
LA GARDE DU PARC, EN CAMPAGNE
1870
TUYEN-QUAN
A BOBILLOT 1885
SERGENT
LE
ORLÉANS
A 1429 D'ARC
JEANNE
l
Zouaves
-
Tirailleurs Algériens
-
'V Légion Étrangère
Infanterie legère- d'Afrique — Chasseurs d'Afrique.- Spahis — Écoles Le Cornmandement -
: Généraux, Etats-majors
«Vous êtes les premiers soldats du monde ! » disait aux zouaves le maréchal de Saint-Arnaud dans son ordre à l'armée le lendemain de la bataille de l'Aima, Il n'est pas de troupes en effet dans les différentes armées de l'Europe, ayant une origine aussi récente, qui puissent présenter un passé aussi glorieux,une sérié aussi admirable d'actes de courage ou de dévouement, de résistance aux fatigues et d'héroïque abnégation que les zouaves. ,, quelques esprits chagrins A diverses reprises ont prétendu que les zouaves dont parlait le vainqueur de l'Aima avaient peu à peu disparu de notre armée. « Les derniers zouaves,
Zouaves.
—
disent-ils, sont morts à
!
Plus
de la moitié de l'effectif fut atteint. La moyenne prédite par le général Valée était dépassée. Mais le drapeau tricolore flottait sur Constantine. l'occupation de Médéah les zouaves reçurent avis que le drapeau qui leur était depuis si longtemps promis par le télégraphe leur était enfin accordé. L'ordre du jour, adressé parle général Bugeaud, gouverneur général, au régiment des zouaves à cette occasion eS+. remarquable par la netteté avec laquelle il trace pour le soldat l'accomplissement de son devoir militaire :
Pendant
C'est là une parole bien injuste. Les zouaves du Mexique, de la guerre de 18701871, de la Tunisie et du Tonkin ont prouvé glorieusement la fausseté d'une pareille assertion. La croix d'honneur qui brille à la cravate du troisième régiment a été gagnée au combat de San-Lorenzo, livré pendant le siège de Puebla contre une armée de secours qui essayait de ravitailler la place. Deux drapeaux mexicains dont s'emparèrent les zouaves du 3e régiment méritèrent à leur-aigle la croix de la Légion d'honneur en 1862!.
Je vous remets ce drapeau au nom du roi. Vous devez être dévoués au roi parce qu'il est la personnification de la patrie. Ce drapeau sera pour vous le clocher du-village, le talisman de la vic-i toire. Il ne doit pas rester à la réserve ; vous remporterez au milieu des combats et vous mourrez tous plutôt que de l'abandonner.
furent organisés au mois de mars 1831 "par le général Clauzel pour remplacer les troupes turques au service de la régence, licenciées après la conquête. Le noyau delà nouvelle troupe indigène fut la tribu des Zouaoua; confédération de tribus guerrières du Djurjura. Il,y eut d'abord deux bataillons arabes formés que commandèrent les capitaines Maumet de l'état-major et Duvivier du génie.
Il inaugura-dans notre possession-d'A frique un nouveau système de guerre qui suivi jusqu'au bout avec méthode a amené la pacification complète de l'Algérie. A l'envahissement du territoire par zones et au refoulement des Arabes succéda, la concentration de nos forces dans la province d'Alger, et de ce point le rayonnement graduel avec la plus vigoureuse offensive. La haine,et l'acharnement des partis ne tardèrent pas à faire place à la plus entière confiance. Les premiers succès du général Bugeaud eurent le très heureux résultat de mettre eh relief les qualités militaires des généraux et des officiers dont le nom viendra tout à l'heure sous notre plume : Changarnier, Lamoricière, Canrobert, Yusuf, Morris, etc. Le nouveau gouverneur général, dès son arrivée, mit ses idées en application et fit partager ses vues à tous les officiers placés sous ses ordres. « Ce sont, disait le maréchal Bugeaud, en résumant son système, ce sont les jambes de nos soldats et de nos chevaux qui doivent dominer, et non pas la multiplicité des points occupés. Il y a entre le système des occupations multipliées et le système de mobilité la même différence qui existe entre la portée du fusil et la .portée des jambes. Le fusil ne commande qu'à quelques centaines de mètres ; les jambes commandent dans un rayon de quarante à cinquante lieues. » Quand j'ai èn face de moi, disait-il encore, une force sans « unité, sans science .et sans volonté combinées, je ne compte pas le nombre de mes adversaires. Plus la masse est nombreuse et plus ma victoire est certaine. Que cette masse, apparaisse au bout de ma lunette; qu'elle couvre la plaine comme des grains de sable ou qu'ellehérisse d'une forêt de fer. les hauteurs les plus abruptes, je ne lui laisse pas le temps de pousser son cri de guerre. Si c'est en plaine mes boulets et mes obus y feront de larges trouées, dans lesquelles je plonge mes escadrons comme le seul glaive qui creuse la mort dans la plaie de mon ennemi. Si la montagne lui prêle un abri précaire, je dis à mes fantassins : Enfants, voilà .ces fiers Arabes qui vous défient à la course 1
Solférino
»
Lès Zouaves
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Les campagnes d'Afrique, l'histoire des zouaves en particulier sont remplies d'épisodes de solidarité et de camaraderie réciproque où les soldats se dévouent pour leurs officiers ; où les officiers risquent leur vie pour sauver un de leurs soldats tombé aux mains des Arabes. La liste serait longue de tous les actes d'héroïsme et de courage individuels dont est remplie l'histoire des zouaves. Il faudrait citer dans leur entier les historiques des régiments de zouaves qui constituent de véritables Livres dOr. La veille de l'assaut de Constantine le maréchal Valée, devenu commandant, en chef par la mort du général Damrémont tué à la brèche la veille, demanda au colonel du régiment de marche des zouaves, M. de Lamoricière : Il sera très meurtrier. Si la demain. L'assaut est pour — moitié de vos hommes tombent à la brèche, les autres tiendront-ils ? réponds comme de moi-même, dit Lamoricière. J'en — — Hé bien ! vous aurez le commandement de la première colonne. Le bataillon des zouaves placé en tête des colonnes d'assaut tint fièrement l'engagement pris en son nom par son colonel i
Après Napoléon Ier, la plus grande figure militaire de cé siècle, la plus complète, a été en France celle du maréchal Bugeaud. Elle domine de toute sa hauteur l'histoire de la con., quête de l'Algérie.. r
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Et les sacs pesants laissés sous bonne garde, mes petits soldats déchaînés comme une meute ardente enlèvent à la baïonnette ces mamelons, d'où pleuvent des balles. On perd peu de monde. Et l'ennemi étonné de se voir atteint « corps à corps malgré sa barrière de feu tombe comme les fleurs sous la baguette de Tarquin. » Dans leur langage pittoresque et concis les soldats de l'armée d'Afrique qui adoraient « leur maréchal », résumaient ainsi son système : « Avec Bugeaud il nous faut des jarrets de cerf, des ventres de fourmi et un cœur de lion. » Nommé maréchal de France en 1843, Bugeaud fut fait duc d'Isly l'année suivante (14juillet 1844) après la bataille gagnée contre les Marocains. Il demeura en Algérie de 1836 à 1847. Pendant ces onze années il acheva la pacification du pays et assura la consolidation de notre puissance en Algérie. Le maréchal ne craignait pas de s'occuper des simples détails. Un jour, passant à cheval avec son état-major devant un détachement du 36e de ligne qui exécutait l'école du soldat sous le commandement d'un sous-officier, le maréchal Bugeaud s'arrêta, fit quelques observations sur l'exécution des mouvements. Puis, descendant de cheval, il demanda son arme au sous-officier. Joignant l'exemple au précepte, il exécuta avec une grande précision les divers mouvements du maniement d'armes en les accompagnant d'explications très justes. Voyant le grand ébahissement de son étatmajor et des soldats présents: « Messieurs, leur dit-il, dans notre métier il n'y a pas de petits détails. » Puis, remontant à cheval, il alla continuer l'inspection des positions i. Tous lui savaient gré de savoir parfois oublier son haut rang. Le respect dont il était entouré augmentait encore. Tous savaient que leur sort confié au maréchal Bugeaud ne pouvait être placé en des mains meilleures ni plus dignes. On savait trouver en lui une direction, des ordres précis, un but et en cas de péril le salut de tous. Au mois de mai 1812 le régiment de zouaves fut organisé à trois bataillons, ayant M. Cavaignac pour colonel et M. de Chasseloup-Laubat pour lieutenant-colonel. Lé premier bataillon fut envoyé à Blidah, le seeond à Tlemcen, le troisième à Bône. Ils servirent plus tard de noyau à chacun des trois régiments de zouaves qui sont restés toujours attachés : le 1er à la province d'Alger, le 2e à la province d'Oran, le 3e à la province de Gonstantine2.
une guerre européenne, pénible et meurtrière entre toutes, la réputation africaine des zouaves. Les trois régiments de zouaves firent partie de l'armée d'Orient. Le 1er zouaves envoyé d'abord dans la Dobrutcha y fut décimé par le choléra. En Crimée il prit une part active à la bataille de l'Alma, où la hampe de son drapeau porté par le sous-lieutenant Payan fut brisée. Le sergent-major Fleury en plantant un fanion tricolore sur la tour Malakoff eut la tête emportée par un boulet. A l'assaut du 14 septembre 1855, le 1er régiment de zouaves eut l'honneur d'être tête de la colonne d'assaut du général de Mac-Mahon, qui avait pris comme porte-fanion le caporal Lihiault. Ce même régiment fut choisi pendant l'armistice comme garde d'honneur par le général Pélissier, lorsque le général russe Luders vint rendre visite au commandant en chef de l'armée d'Orient. Quand en mars 1856 le 1er zouaves revint à Alger il avait laissé onze cents hommes sur la terre de Crimée. Le 28 régiment fut très éprouvé à la bataille de l'Aima. Le 7 juin 1855, à l'attaque des ouvrages blancs qui fut une des affaires les plus meurtrières du siège ; à l'attaque infructueuse du mamelon vert, le 18 juin, il donna un magnifique effort. Le colonel, M. Saurin, 2 chefs de bataillon, 14 capitaines, lieutenants et sous-lieutenants, 200 zouaves furent mis hors de combat. Au combat du 12 juin les pertes du régiment furent plus grandes encore. Un capitaine commandait le soir le régiment et un lieutenant chacun des deux bataillons. Le 3° zouaves très engagé à l'Aima eut à la bataille d'Inkermann 11 officiers et 170 zouaves tués. Le capitaine Brincourt, plus tard général de division, y reçut six blessures. A l'attaque du Mamelon vert le 3e régiment eut 15 officiers et 580 zouaves tués ou blessés. A la bataille de Traktir il tint tête pendant une heure aux efforts désespérés de 40.000 Russes qui cherchaient à tourner l'armée française par la vallée de la Tchernaïa. Les effectifs des trois régiments de zouaves furent renouvelés trois fois par des renforts venus d'Algérie.
Pendant les deux tristes années du siège de Sébastopol, les zouaves, privés de toutes distractions sur le plateau de Chersonèse, où le froid sévissait si rigoureux, conservèrent à travers ces épreuves leurs qualités si françaises de gaieté et de belle humeur et improvisèrent des amusements. De ce nombre théâtre militaire d'Inkermann, théâtre était le où furent un commandement, l'action, le énergique dans lent dans Absolu à « combats, deux deux gardes entre de entre représentés trantravail comprendre, cachant qu'il était lent mais décider à parce ce se chée les joyeux vaudevilles des théâtres du boulevard. Les laborieux sous un silence solennel et ne parlant que lorsqu'il s'était décidé, le colonel Cavaignac était estimé de tous, aimé de quelquesarmées françaises avaient déjà, sous la monarchie, du temps uns, redouté par beaucoup.,. Si l'on s'adressait à son cœur, cette du maréchal de Saxe, emmené avec elles des troupes théâtrales. dignité orgueilleuse dont il se plaisait à s'entourer, disparaissait pour le soir de la bataille de suspendit Favart Rappelons-nous que bienveillance toute paternelle 3. » faire place à une Fontenoy (1745) à la porte de la baraque qui lui servait de spectacle salle de cette inscription : « Relâche pour cause de Dans les premières années de la conquête les bataillons n'avaient en colonne ni tente-abri, ni couvertures. Tout victoire ». Les artistes amateurs du théâtre de Sébastopol tiraient l'outillage de bivouac consistait en un grand sac de toile, qui le jour servait aux distributions et la nuit de sac de couchage. d'eux-mêmes toutes leurs ressources : décors, costumes, sules rôles d'amoutenaient moins barbus les jets. Les zouaves lorsqu'ils le s'offraient, pouvaient, le d'une officiers luxe Les de jeunes premières. On y riait de bon cœur. Il arriva reux ou compagnies Les couchaient pied de leurs de mouton. au peau affaire commandé changèrent le service parfois qu'un une ou la alignées le havresac faisceaux, comme pour manœuvre Ils amenaient de la part de la direprésentation. la jour de d'oreiller. Il hommes n'y avait qu'une bête de servant aux celui-ci, simplide superbe le avis dans rection des genre en sa mulet, deux compagnies. Les officiers par somme, âne ou blessés, et plusieurs été tués Deux cité : été ayant amateurs on a répartis sous-officiers, milieu des les hommes, n'aau comme l'on spectacle proposait de donner. obligé de le changer que se nourriture celle de leurs d'autre soldats. vaient pas que argent française, belle humeur la de Voilà vraiment en compbataillons des de En 1852 chacun zouaves servit à former siège Puebla, le de pendant Mexique, Au tant. se souvenant de de faire L'honneur partie de régiment. d'élite cette troupe un devint dès lors l'objectif des meilleurs officiers de notre infan- leur théâtre de Sébastopol, les zouaves installèrent une salle tranchées. officiers Les des arrière du corps de spectacle Kabylie en 1853 dans la L'expédition de orientale montra terie. s'y mêmes trouvèrent plus les expéditionnaire, d'une généraux était digne 1er régiment de succéder le 1er bataillon. au que fois réunis. Mais c'est surtout l'expédition de Crimée qui consacra dans Les- trois régiments de zouaves firent la guerre d'Italie et à Magenta, à Solférino, à PalesMelegnano, distinguèrent à se i. Historique du 36e régiment d'infanterie, par le capitaine Ney. — Valin, tro. Le 2e eut son drapeau décoré pour s'être emparé, le 4 juin C.en, 1879. 1859, à la bataille de Magenta du drapeau du 9e régiment de 2. Il en est de même pour les régiments de tirailleurs algériens, de chasseurs d'Afrique et de spahis dont les 1er, 2e et 3e régiments sont attachés aux provinces ligne autrichien. d'Alger, d'Oran, de Le combat de Palestro donna au 3e régiment de zouaves 3. Comte de Castellane. — Souvenirs de la vie militaire en Afrique.
:
Constantine.
LONGCHAMPS
A ESCADRONS
CARABINIERS
PAR
DÉFILÉ
UN
DANS
TROMPETTES,
une preuve éclatante de l'estime de nos alliés. Il avait été mis par l'Empereur à la disposition de Victor-Emmanuel qui, en adressant au colonel M. de Chabron, la médaille d'or de la Valeur Militaire Sarde, y joignit une lettre très flatteuse. Comme marque de leur reconnaissance les zouaves du 3e régiment nommèrent Victor-Emmanuel « caporal au 3e zouaves, hors cadres ». Le roi d'Italie fut, dit-on, très sensible-à cette marque de haute estime que lui donnaient ses compagnons d'armes dont il plaçait si haut la valeur. Après la campagne d'Italie les trois régiments de zouaves retourn'èrent en Algérie, toujours occupés à achever la pacification de la colonie. Sauf un bataillon du 1er zouaves qui prit part à l'expédition de Syrie en 1861 les zouaves restèrent en Algérie jusqu'à la guerre du Mexique. Le 2e, le 1er et le 3e régiment furent successivementenvoyés en Amérique. Dans cette guerre pénible de marches et de contremarches, d'embuscades, de combats contre les guérilleros qui
rappelaient la guerre d'Afrique ; sous ce climat brûlant les zouaves furent à hauteur de leur réputation et rendirent les plus
signalés services. Pendant le siège de Puebla, au combat. de San-Lorenzo que l'armée assiégeante eut à soutenir contre une armée mexicaine qui tentait de ravitailler la place le sous-lieutenant Henry et le soldat Stum du 3e zouaves enlevèrent chacun un drapeau à l'ennemi. A cette occasion le drapeau du 3e régiment de zouaves reçut à son tour la croix de la Légion d'honneur. De 1867 à 1870 les zouaves furent employés en Algérie à diverses colonnes dans le sud. En 1870, au printemps, le général de Wimpffen livrait, avec le 2e zouaves, un sanglant combat à Aïn-Chair sur la frontière du Maroc. Un jeune sous-lieutenant de zouaves, sorti de l'École l'année précédente, se distingua particulièrement à cette affaire et reçut la croix d'honneur. Il s'appelait Dominé et devait être plus tard l'héroïque défenseur de Tuyen-Quan.
Musique d'infanterie (Garde de Paris), 1890.
Au début de la campagne de 1870 les trois régiments de
zouaves, arrivés directement d'Afrique en Alsace, furent écrasés à la bataille de Wœrth par un ennemi vingt fois supérieur en nombre. Mais les pertes de ces braves régiments disent haut avec quel acharnement ils tinrent jusqu'au bout réduits, au tiers de leur effectif. A Sedan les zouaves qui après Wœrth avaient reçu des renforts furent de nouveau très éprouvés. Ils furent faits prisonniers de guerre avec toute l'armée. Aucun drapeau ne tomba aux mains de l'ennemi. Celui du 1er régiment fut enfoui, le soir de la bataille, dans le jardin de M. Bacot, manufacturier à Sedan. Déterré à la paix, il se trouve dans le musée des zouaves à Coléah. Le drapeau du 2e régiment fut brûlé. Celui du 3e fut rapporté à Paris par le lieutenant-colonel Méric. Le bataillon du 3e zouaves échappé de Sedan et le dépôt des zouaves de la garde formèrent alors le régiment de marche des zouaves, plus tard 4e zouaves, qui fit avec honneur le siège de Paris et mérita après la bataille de Champigny (2 décembre
1870) d'être cité à l'ordre de l'armée. Il faisait brigade avec le 136e régiment d'infanterie qui partagea avec les zouaves les mêmes dangers en cette journée. Plusieurs régiments de zouaves de marche furent créés aux armées de province. Ces dépôts des trois régiments de zouaves avaient été amenés en France pour en faciliter le recrutement le 1er à Antibes, la vaillante cité qui fut si longtemps l'avancée de notre frontière méridionale; le 2e à Avignon; le 3e à Montpellier. Il passa 8. 000 hommes par ces dépôts. Quatre régiments de zouaves furent organisés. Mais ce n'étaient plus les vrais zouaves. Ils combattirent pourtant honorablement à l'armée de la Loire, à Coulmiers, à Artenay, à Cercotte, puis à l'armée de l'Est, à Beaune-la-Rolande, à Villersexel, à Héricourt. Les zouaves tirèrent les derniers coups de feu de la campagne et ne passèrent pas en Suisse. Après la guerre de 1870 les zouaves à peine rentrés des prisons de l'ennemi furent employés avec les troupes encore disponibles en Algérie à la répression d'une insurrection arabe, fomentée par des agents extérieurs. Deux colonnes
:
du peintre Yvon a immortalisée. Suivant la trace du colonel Rose qui les commande ils ont pénétré dans la redoute et pour fermer le passage à tout retour offensif des Russses ils y jettent à l'envi sacs à terre et gabions. Mais durant ce travail un feu terrible atteint les turcos. Les Russes les fusillent à bout portant. Le lieutenant-colonel Roques tombe mortellement frappé ; le souslieutenant de Boyne décharge ses deux pistolets dans la poitrine d'un major russe et échappe par miracle à une décharge générale des ennemis. Les turcos tiennent toujours. Des renforts arrivent. En avant Pour entraîner ses tirailleurs le sergent Mustapha, monta sur un épaulement. Et là, sous une pluie de balles et d'éclats d'obus il joua, invulnérable, sur sa gues'ba, sorte de flûte agreste, un de ces airs arabes qui rappellaient aux Les « Turcos », tel est le soldats africains qu'ils devaient rester dignes de leur patrie, tanTirailleurs algériens. nom populaire de nos tirailleurs indigènes, cette admirable dis que la derbouka (tambour) battait la charge. infanterie algérienne, qui depuis cinquante ans combat avec Au combat d'Inkermann les. tirailleurs se précipitèrent sur notre drapeau sur tous les champs de bataille, donnant à l'ennemi en jetant leur cri aigu qui dominait le bruit de la mêlée. Profitant des accidents du sol ils se rasaient dans les brousses maîtres devenus frères d'armes des gages réitérés de brasailles, pour de là s'élancer avec la rapidité de l'éclair sur la voure et de fidélité. Les premiers indigènes qui après le débarquement de proie qu'ils avaient choisie. Les balles des Russes ne savaient où l'armée française à Sidi-Ferruch le 14 juin 1830 demandèrent les atteindre. Ils chargèrent à la baïonnette, engagèrent avec à servir dans nos rangs furent incorporés dans les zouaves. Mais l'ennemi des luttes corps à corps. Saisis d'admiration à la vue les difficultés de la vie commune entre des Français et des indi- des prodiges de vaillance qu'ils accomplissaient, les Anglais gènes musulmansvivant d'une manière spéciale, attachés à leurs leur criaient : « Bravo Algérianers ! » Dans son rapport sur la pratiques religieuses, imposa la nécessité de séparer les deux bataille le général en chef s'exprima ainsi : « Les tirailleurs nations. Il en résulta quelques froissements. Les indigènes mis algériens, à travers les broussailles, bondissaient comme des à part et devenus l'objet de défiances en éprouvèrent de panthères. Cette journée leur fait honneur, ainsi qu'à leur colol'humeur. Des désertions nombreuses se produisirent. Nos nel de Wimpffen. » de tirailleurs algériens, En 1855 furent créés trois régiments anciens alliés allèrent grossir les bataillons de réguliers d'Abd-elKader. L'infanterie indigène fut licenciée après quelques avec les bataillons des trois provinces. Leur rôle militaire élargi mois d'existence. se continua. Ils prirent part aux dernières expéditions en AfriA l'époque du second siège de Constantine (1837), en préque, particulièrement à celle de la grande Kabylie en 1857. Lors de la campagne d'Italie en 1859 le régiment provisoire sence du grand nombre d'offres de service des indigènes un nouvel essai fut tenté. Un petit corps d'infanterie turque, tel à trois bataillons de 600 hommes pris dans chacune des provinces fut le nom qu'il reçut, fut attaché à l'armée. Il était composé se distingua à Turbigo, au passage du Tessin, où il était tête de surtout de Koulouglis et de Kabyles. Un peloton de cavaliers colonne ; à Robechetto, à Magenta, où furent tués le colonel Laur appelés gendarmes maures sousle commandement du capitaine et le capitaine de Boyne, le héros de Malakoff. Les tirailleurs les appela firent à Paris une entrée d'Allouville futadjoint à ce corps indigène.Yousouph Mamelouk, « les turcos » comme on qui devint plus tard le général Yusuf, fit aux gendarmes mau- triomphale avec les troupes revenant d'Italie. Dès leur rentrée en Afrique les tirailleurs du 1er régiment res ses premières armes. L'expérience réussit pleinement cette furent appelés à faire partie d'une colonne expéditionnaire fois. L'infanterie turque fut, après la prise de Constantine, le contre les Beni-Snassen, puissante tribu marocaine. En 1860, noyau des futurs tirailleurs indigènes. Un premier bataillon d'essai fut réorganisé en 1838 à Cons- trois compagnies furent employées au Sénégal. En 1865, un tantine même par les soins du commandant Mollière. Il était bataillon formé de deux compagnies de chaque régiment fut sur pied en 1839 alors que le duc d'Orléans préparait à Sétif envoyé en Cochinchine et y rendit les plus grands services de 1861 à 1864. La même année le 1er régiment célébra à Blidah son expédition des Bibans. L'uniforme de ces premiers tirailleurs fut analogue à celui des réguliers d'Ald-el-Kader; veste à le 17 novembre une grande solennité militaire. Il reçut un guelmouna (capuchon), en drap marron, soutaché de dessins drapeau en échange de celui qu'il avait hérité du régiment de multicolores large serocial (culotte) bleu foncé, baboudge (sou- Crimée, précieux trophée que la mitraille russe avait mis en liers découverts) et jambes nues. Pour coiffure la chachia (calotte) lambeaux et sur lequel on ne pouvait ajouter les noms glorieux de Turbigo, de Magenta et de Solférino. Quelques mois plus à deux glands de laine bleue. L'uniforme des tirailleurs indigènes a été définitivement tard un bataillon de six compagnies prises par chaque régiarrêté le 14 février 1856. Depuis cette époque il est devenu ment s'embarquait pour le Mexique. Il y combattirent glorieusement : à la Soledad, au siège de glorieusement historique en se montrant sur tous les points du globe. Le costume oriental bleu et jonquille des soldats n'a Puebla, à San-Lorenzo ; toujours, en expédition ou en colonne. pas été modifié chez les Turcos. La tenue des officiers Le drapeau du 1er régiment fut décoré à la suite du combat de indigènes et des sous-officiers et soldats des tirailleurs de San-Lorenzo où le tirailleur Ahmed-ben-Mijoud s'était emparé l'Algérie est la même aux trois bataillons, à l'exception de d'un drapeau mexicain. La compagnie montée opérait, dans la couleur du drap qui forme la fausse-poche de la veste, dit les Terres-Chaudes, avec le bataillon de tirailleurs composé de tombeau, qui fut garance pour le bataillon d'Alger n° 1 ; Soudanais et d'Éthiopiens mis à la disposition de la France par blanc pour le bataillon d'Oran, n° 2; jonquille pour le bataillon le vice-roi d'Égypte et très résistants au climat malsain des côtes. de Constantine, n° 3. L'uniforme de ce bataillon était blanc. Il se battit fort bien Les tirailleurs indigènes firent en. Crimée l'admiration des en diverses circonstances. Un assez grand nombre de ces Soudatrois armées à l'Alma, à lnkermann, a l'assaut du mamelon nais furent même décorés de la médaille militaire. Rapatriés A la gorge de Malakoff, le 8 septembre 1855 ils se préci- après l'expédition du Mexique, quelques-uns de ces soldats pitèrent à rangs serrés avec une furie que le magnifique tableau ont eu une assez curieuse fortune militaire. Plusieurs ont été commandées par des officiers rompus à la guerre d'Afrique furent organisées. Le général Cérez opéra dans la province d'Oran; le général Saussier, dans celle de Constantine. En 1881 les zouaves firent de nouveau colonne dans le sud oranais contre Bou-Amama. En 1888 ils ont envoyé au Tonkin un régiment de marche composé de trois bataillons de mille hommes, pris dans les trois premiers régiments, qui partirent séparément. Le bataillon du 3e régiment accompagnait le général de Courcy à Hué, lors du guet-apens du 5 juillet. Il prit une part glorieuse à la défense de l'escorte du général en chef bloquée dans la citadelle.
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vert.
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GARDE
RÉPUBLICAINE
LE
PELOTON
DES
COURSES
attachés par la suite au corps armé levé par Baker-Pacha dans la région du Haut-Nil pour faire la guerre aux marchands d'esclaves. Enfin ils ont pris du service dans les troupes du Mahdi où la présence de chefs portant sur le burnous la médaille militaire de France avait été considérée d'abord comme inventée par l'imagination des voyageurs. En 1870, les trois régiments de tirailleurs attachés au corps du maréchal de Mac-Mahon arrivés directement d'Afrique sur le champ de bataille de Wœrth, assaillis par un ennemi dix fois supérieur en nombre combattirent avec le dernier acharnement et durent, après avoir perdu le tiers de leurs effectifs, battre en retraite, la rage au cœur. Ils partagèrent avec les cuirassiers l'honneur de protéger la retraite de l'armée. Les balles sifflaient plus épaisses, envoyées par les réserves allemandes. Exécutant un retour offensif; à cheval, agitant son képi en l'air et entraînant ses hommes le capitaine Quantin du 1er régiment leur criait en arabe : « En avant, enfants ! Ce ne sont pas des balles que vous entendez. ce sont des abeilles qui bourdonnent à vos oreilles ! » Au 2me régiment tous les officiers supérieurs étaient atteints : le colonel M. Suzzoni blessé mortellement. Après Reischoffen il n'y avait plus de tirailleurs algériens. Tout ce qui n'avait pas été tué, blessé ou pris s'était dispersé. Beaucoup de turcos se trouvèrent enfermés dans les places fortes de l'Est et servirent d'appoint à leurs petites garnisons. Bitche, Verdun furent dans ce cas. Pendant la retraite de l'armée du maréchal Mac-Mahon sur Châlons il vint des turcos jusqu'à Paris. Ils furent groupés en plusieurs compagnies et envoyés en province avant l'investissement de la capitale. Ils servirent, avec les tirailleurs échappés de Sedan et les dépôts laissés en Afrique, à constituer des bataillons qui formèrent un régiment de marche à l'armée de la Loire. Ce régiment alla dans l'Est avec le général Bourbaki et passa en Suisse. Depuis l'expédition de Tunisie à laquelle ils ont pris une part active les tirailleurs ont un 4° régiment spécialement affecté à la Tunisie. Les tirailleurs algériens ne pouvaient manquer de faire partie de l'expédition du Tonkin. N'avaient-ils pas déjà combattu de 1861 à 1864 en Extrême Asie ? Le 3e régiment a fourni en effet deux bataillons qui se sont signalés aux combats de Knou-Rua, Chu, Noui-Bop, Hao-Ha, etc. A l'imitation des tirailleurs algériens recrutés parmi les Arabes de notre grande colonie, nous avons formé au Sénégal, en Cochinchine et au Tonkin des corps de tirailleurs sénégalais, cochinchinois et tonkinois, dont les visiteurs de l'Exposition universelle de 1889 ont pu voir des représentants à l'Esplanade des Invalides. Ces corps qui relèvent ainsi du Ministère de la marine nous ont rendu de très bons services en permettant de diminuer dans des colonies au climat meurtrier les effectifs des troupes nationales. Comme les autres troupes d'Afrique les tirailleurs algériens feront sans doute partie de la prochaine armée coloniale. L'expérience a prouvé que les régiments de tirailleurs algériens, indépendamment des services de guerre qu'ils ont partout rendus, à l'égal des troupes nationales, sont des écoles où les indigènes viennent apprendre à connaître la France et à l'aimer. Beaucoup d'entre eux, partis de leur tribu avec des sentiments hostiles y sont retournés quelques années après, devenus complètement Français de cœur. -
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A l'époque de la Révolution de 1789, sur les cent-six régiments dont se composait l'infanterie française il y avait vingt-trois régiments étrangers : Suisses, Allemands, Irlandais. Mais ils n'avaient d'étranger que le nom. Recrutés exclusivement de sujets français ils étaient soumis à la même organisation et à la même discipline
Légion étrangère.
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que les troupes nationales. La seule différence était que les commandements ne s'y faisaient pas en français. La Convention nationale dans son manifeste du 20 avril 1792 fit la déclaration suivante : « La nation française adopte d'avance tous les étrangers qui, abjurant la cause de ses ennemis viendront se ranger sous ses drapeaux et consacrer leurs efforts à la défense de la liberté. Elle favorisera même, par tous les moyens en son pouvoir, leur établissement en France. » Les légions étrangères de la première République furent nombreuses. Citons les légions Batave, Germanique (où Augereau fut officier); Italique, Polonaise, Maltaise, etc. Bonaparte créa la Légion Grecque, la Légion Cophte et le Corps des Mamelucks qui formèrent de 1802 à 1814 les escadrons des Guides de la Garde. Dans les armées impériales il y eut plusieurs corps destinés à recevoir les étrangers : le bataillon des déserteurs étrangers, des déserteurs allemands; les vétérans romains; les régiments suisses; la légion Hanovrienne; la légion du Nord, de la Vistule; Portugaise; le régiment Albanais, le bataillon des chasseurs à pied Grecs; les régiments Croates et Illyriens; la légion Irlandaise, etc. Pendant la campagne de Russie un des corps de la Grande Armée était formé des contingents étrangers : Portugais, Espagnols, Hollandais, Saxons, Bavarois, etc., obligés par les traités à combattre à nos côtés. Ces troupes alliées firent d'ailleurs défection aux jours sombres des années 1813 et 1814. La première restauration avait eu un régiment colonel-général étranger, qui devint en 1815 la légion royale étrangère, et prit ensuite le nom de légion de Hohenloë, dissoute en 1821. Il ne resta comme étrangers en France que les régiments suisses de la légion et de la garde royales licenciés après le départ de Charles X et l'avènement de Louis-Philippe. La véritable organisation de la légion étrangère telle qu'elle existe actuellement, remonte seulement à 1830. Le nombre des réfugiés polonais en France fut alors si nombreux que plusieurs bataillons de légion étrangère furent organisés avec les déserteurs étrangers. En dehors de quelques engagements volontaires contractés par de rares Français, les soldats de la légion se recrutent parmi les étrangers qui ont quitté volontairement ou de force leur pays, où ils ne peuvent plus rentrer. Une compagnie de la légion est une tour de Babel où l'on entend parler toutes les langues. Les pays, les rangs y sont confondus. Les professions les plus diverses sont représentées. A l'assaut de Bac-Ninh un ancien prélat étranger que ses camarades appelaient l'évêque, simple soldat à la légion étrangère, donnait sur le champ de bataille l'absolution à ses camarades tombés. Des hommes ayant occupé des professions libérales sont mêlés à des artisans. Les uns et les autres deviennent égaux sous l'uniforme. Ballottés par les vents contraires ces naufragés de la vie sont venus chercher dans nos rangs le repos et l'oubli et retrouvent à l'ombre du drapeau français la paix, la règle, le calme, l'esprit de discipline et jusqu'au sentiment de l'honneur, souvent endormi chez ces rudes natures. Les officiers se divisent en deux catégories : ceux qui servent à titre français ; ceux qui servent à titre étranger. Les premiers, sortis de Saint-Cyr ou de Saint-Maixent, officiers à titre régulier, ont la propriété de leur grade. Ils ont été envoyés à la légion comme dans tout autre corps de l'armée ou ont demandé à y venir par nomination ou promotion, selon les règles officielles de l'avancement dans l'armée - française. A cette catégorie appartiennent tous les officiers supérieurs et les capitaines. Les officiers qui servent au titre étranger sont recrutés parmi les officiers français démissionnaires, ou ayant servi comme officiers pendant une guerre dans des corps auxiliaires. Aujourd'hui ce recrutement se fait surtout avec les officiers de réserve de tous les corps, qui venus de la Tunisie ou du
Tonkin après avoir fait campagne sont admis à la légion à titre étranger. Ainsi après la guerre de 1870 plusieurs officiers de la garde nationale mobile étaient entrés dans la Légion comme officiers à titre étranger 1. Enfin les officiers sortis des écoles militaires de leur pays et qui présentent, outre les garanties morales une instruction militaire suffisante sont admis à servir au titre étranger. C'est le petit nombre. Ils sont inscrits sur les contrôles avec cette mention « venant des officiers des armées étrangères ». Ils reçoivent du ministre de la guerre une commission provisoire et révocable et ne jouissent pas de la loi sur l'état des officiers. 4 La légion étrangère ouverte aux réfugiés de tous les pays est d'autant plus chère à nos cœurs que là seulement peuvent venir s'enrôler sous le drapeau de la France des frères exilés que nous aimons du plus profond de notre cœur, les eunes Alsaciens-Lorrains qui chaque année réussissant à se soustraire au joug détesté de la conscription allemande s'enga-
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gent à la légion. Dans les deux régiments les sous-officiers, adjudants, sergents-majors, fourriers et sergents sont presque tous Alsaciens-Lorrains. Le collet rouge et les étoiles (aujourd'hui la grenade) de la légion étrangère ont paru avec honneur sur tous les champs de bataille depuis cinquante ans : Crimée, Italie, Mexique, France, Algérie, Tonkin. En Algérie elle est intimement liée à l'histoire de la conquête. Elle a pris part à de nombreuses campagnes et réprimé plus d'une insurection. C'est au siège de Constantine (1837) que la légion étrangère, qui venait d'être organisée à deux bataillons reçut vraiment le baptême du feu. Cent légionnaires sous le commandement du capitaine de Saint-Arnaud firent partie de la deuxième colonne d'assaut. Ils laissèrent à la brèche le cinquièmede leur effectif. La réputation de la légion était établie. Un troisième bataillon, puis un quatrième, puis un cinquième furent créés de 1837 à 1840. Enfin en 1841, il y eut deux régiments étrangers
Musique de cavalerie (Guides), 1856.
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à trois bataillons, qui concoururent glorieusement à la paci,: ., fication de l'Algérie. En 1854,- les deux régiments étrangers formant brigade furent envoyés dans le Dobrutscha où le choléra fit dans leurs rangs des ravages meurtriers. Le colonel Carbuccia, commandant la brigade fut enlevé un des premiers. En présence de la désorganisation apportée dans les rangs de la légion par la maladie un bataillon d'élite formé des compagnies de voltigeurs et de grenadiers des quatre bataillons fut seul envoyé d'abord en Crimée. Il prit une part glorieuse à la bataille de l'Alma et mérita une lettre spéciale de félicitations adressée à son chef de bataillon par le général de brigade. Les deux régiménts rejoignirent seulement pendant les opérations du siège. En Italie les deux régiments étrangers faisaient brigade avec le 2e zouavés. A la bataille de Magenta, un deslieutenantscolonels, M. de Chabrières, fut tué l'épée haute. Lors de Parmi ces officiers admis au titre étranger il en est beaucoup qui, ayant obtenu plus tard de servir à titre français ont fait dans notre armée une brillante carrière. 1.
l'entrée à Milan de l'armée française la légion étrangère si brave sur le champ de bataille se fit remarquer par sa belle prestance et son excellente tenue. Au Mexique où la légion passa cinq années, une de ses compagnies accomplit à Càmaron un des plus glorieux faits d'armes des temps modernes. Le 17 avril 1863, à sept heures du matin, soixante-deux hommes de la légion étrangère et trois officiers, MM. le capitaine Danjou et les sous-lieutenants Vilain et Maudet- furent assaillis en route, au moment où ils faisaient le café, par trois escadrons mexicains. Nos soldats formèrent le carré, repoussèrent les assaillants et se retranchèrent dans la ferme de Camaron. Les cavaliers ennemis mirent pied à terre et commencèrent la fusillade. Ils furent bientôt renforcés par trois
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bataillons mexicains forts chacun de quatre cents hommes. Le combat s'engagea bientôt avec une extrême violence. Le capitaine Danjou qui avait fait promettre à ses hommes de tenir jusqu'à la dernière extrémité fut tué vers onze heures du matin. Le sous-lieutenant Vilain prit le commandement. Il fut tué à
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deuxheures. Le sous-lieutenant Maudetle remplaça. La chaleur était accablante. Les légionnaires n'avaient rien mangé depuis la veille. Personne n'avait bu depuis le matin. Pourtant trois sommations de se rendre furent accueillies à coups de fusil par nos soldats qui, épuisés de fatigue, de faim et de soif, garnissaient les brèches et les créneaux. Enfin, vers six heures du soir les Mexicains donnèrent l'assaut. Il y avait onze heures que le petit détachement de la légion étrangère soutenait un héroïque combat. Deux officiers étaient tués; le troisième mortellement blessé. Vingt sous-officiers et soldats avaient été tués ; trente-deux avaient été blessés, sur lesquels sept moururent le lendemain. « Le général mexicain, dit le lieutenant-colonel Niox, ramena à Jalapa ses troupes fort impressionnées des pertes sanglantes que leur avaient coûtées cette victoire1. » Aussi est-ce à bon droit que, sur le drapeau de la légion étrangère, après les noms de Sébastopol 1855, Kabylie 1857,
Cipaye de l'Inde, 1825.
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Tirailleurs annamites.
Tirailleurs sénégalais, 1860.
Colonial, 1829.
Magenta 1859, est inscrit le nom glorieux de Camaron.-Un survivant de ce superbe combat, nommé Brunswick, existait encore à la légion en 1883. La légion étrangère si souvent à l'honneur est toujours à la peine. La loi qui l'organisa dispose en effet « qu'elle ne peut être réunie en armes que hors du territoire. » Toutefois exception à cette règle a été faite en 1870, en province. A la bataille d'Orléans livrée par l'armée de la Loire le 11 octobre, le régiment étranger défendit les Aydes et le faubourg Bannier. Une plaque de marbre a consacré le souvenir de ce combat. La légion combattit encore à Coulmiers, à Cercottes, à Chevilly. Attachée ensuite à l'armée de l'Est, elle fit partie de la garnison de Besançon et réussit ainsi à éviter l'entrée en Suisse. Elle prit aussi part à la répression de la Commune à Paris et fut attachée à la division du général Montaudon. Elle attaqua le pont de Neuilly et prit les Buttes-Chaumont où s'étaient concentrées les dernières bandes de la criminelle insurrection.
Officiers spahis sénégalais, 1815.
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Gendarme de Cochiuchine. Tonkinois.
Sous-officier français et Spahis sénégalais.
Enfin au Tonkin la légion étrangère a montré qu'elle était toujours à la hauteur de sa réputation. Elle a même conquis en Extrême-Orient, où elle n'avait pourtant qu'un seul bataillon, de nouveaux titres à notre estime et à notre admiration. A l'assaut de Son-Tay, sur les cinq capitaines de la Légion l'adjudant-major M. Mehl fut tué, MM. Bergounioux et Conte furent blessés ; le bataillon fort de six. cents hommes pèrdit le sixième de son effectif. La 36 compagnie (Bergounioux) avait donné en tête pour l'assaut. Son sous-lieutenant M. Macquard entra le premier dans la ville après avoir vu tomber à ses côtés l'adjudant-major M. Mehl et tous les hommes de sa section, à l'exception d'un seul. Ce ne fut qu'au bout de cinq minutes que le flot des soldats de la légion se précipita sur les traces des lieutenants Macquard et Poymiro, qui les premiers avaient trouvé un bon passage. A Bac-Ninh la légion fut tête de colonne pour l'assaut. C'est encore au sous-lieutenant Macquard, envoyé en recon-
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1. Historique dit Régiment
étranger.
naissance par le général de Négrier, que revient l'honneur d'avoir pénétré le premier dans la citadelle et hissé, sous le feu de l'ennemi, à la place du drapeau chinois, le drapeau tricolore sur le mirador élancé de la citadelle. A Chu, à Tuyen-Quan, à Thaï-Ko-Ha, à Lang-Son, la légion combattit bravement. Au siège de Tuyen-Quan en particulier les deux compagnies de Borelli et Mouliney (celui-ci tué pendant le siège) furent héroïques. Ces deux compagnies, à l'effectif de huit officiers et de trois cent quatre-vingt-dix hommes, composaient plus de la moitié de la garnison et soutinrent pendant trente jours, dans un fortin mal protégé, les assauts d'un corps de vingt mille Chinois armés de fusils à tir rapide et d'artillerie de siège. Pendant la retraite de Lang-Son qui faillit se changer en un désastre, la légion forma l'arrière-garde et soutint la retraite qui se fit régulièrement grâce au sang-froid de cette troupe éprouvée. Dans la marche pour débloquer Tuyeh-Quan la 3° compagnie du 1er bataillon, capitaine Chaitlin, lieutenant Poymirg
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et sous-lieutenant Macquard, enleva un fortin casematé et flan-
qué d'un blockhaus enterré. Cette attaque décida du sort de la journée. A Min-Bop et à Chu la légion fut admirable. A ce dernier combat la 4e compagnie du 2e bataillon engagée sur les crêtes
tourbe et l'écume des villes ou des campagnes, qui jusqu'à la dernière loi de recrutement venaient chaque année empoisonner l'armée et à présent en sont exclus. Les bataillons d'infanterie légère d'Afrique ont été employés avec succès dans les expéditions lointaines : en Chine, en Cochinchine, au Mexique, au Tonkin, sans compter les campagnes d'Algérie où ils ont acquis un renom immortel par le beau combat de Mazagran, qui reste un titre d'honneur pour ces flétris. Voilà le récit de cet éclatant fait d'armes :
enleva deux forts ennemis. Le capitaine Gravereau fut tué ; le lieutenant Lacroix et le sous-lieutenant Ruspoli furent blessés, ce dernier mortellement. Après la paix signée avec la Cliine la légion fut employée à un rôle moins glorieux mais très pénible : aux opérations contre les pirates ; à la formation de colonnes-mobiles circulant Le 20 octobre 1839, la 10e compagnie vint s'établir à Mazagran. à travers le pays, incomplètement pacifié. repoussait qu'elle décembre Arabes elle 13 fut Le 300 attaquée y par De nombreux officiers d'élite ont appartenu à la légion. Il victorieusement. Nos ennemis durent retirer laissant devant les se convient de citer au premier rang la haute personnalité mili- murs de la ville 120 des leurs dont 80 tués. Mais .cette tentative taire de M. le général Saussier, gouverneur de Paris, le géné- n'était que le prélude d'une attaque plus sérieuse. Le 3 février 1840 ralissime désigné des Armées françaises qui a fait toute sa 8.000 Arabes se jetaient dans la ville abandonnée par ses habitants, carrière militaire, jusqu'au grade de colonel, à la légion étran- et commençaient le siège de la redoute, dans laquelle s'étaient retranchés les 123 chasseurs de la 10e compagnie. Toute la journée du 3 la il alaissé les souvenirs. plus brillants gère où mousqueterie et le canon ne cessèrent de gronder et lorsque arriva la Nous ne pouvons mieux terminer cette rapide esquisse de nuit, il fallut réparer les brèches et mettre la muraille en état de la légion étrangère qu'en citant quelques-uns des beaux vers résister encore. Le 4 au matin, les Arabes reçurent des renforts qui qu'un de ses capitaines, le vicomte de Borelli, lauréat de l'Aca- leur amenaient une deuxième pièce de canon. L'attaque recommença démie française, un des héros de Tuyen-Quan, a consacrés à ses avec une rage que redoublait l'insuccès de la veille. Le 5 au soir une vingtaine de boulets avaient percé les murs. Le d'armes. compagnons mât qui portait le pavillon fut brisé par l'un d'eux. Mais notre drapeau Il serait temps qu'en France on se prît de vergogne A connaître aussi mal la vieille légion, De qui, pour l'avoir vue à sa dure besogne, J'ai la très grande amour et la religion.
.,.. écoutez ceci : « Déserteurs ! Mercenaires ! Ramassis d'étrangers sans honneur et sans foi ! » C'est de vous qu'il s'agit, de vous, légionnaires ! Ayez-en le cœur net et demandez pourquoi? Or
Mercenaires? Sans doute : il faut manger pour vivre. Déserteurs ? Est-ce à nous de faire ce procès ? htrangers? Soit. Après. Selon quel nouveau livre Le maréchal de Saxe était-il donc Français?
flottait encore sur Je minaret à la fin de la journée. Le 6 le feu des Arabes redoubla avec intensité. Lorsqu'ils jugèrent la garnison de Mazagran assez affaiblie par cette fusillade ils s'élancèrent à l'assaut. Déjà quelques-uns se montraient sur le bastion. Dans ce moment critique le capitaine Lelièvre, appelant à lui ses chasseurs, se mit à leur tête et se ruant sur l'ennemi, renversa morts au pied des murailles ceux qui avaient eu l'audace de les escalader. Découragés enfin par une résistance aussi héroïque, les Arabes se retirèrent en désordre. Un feu incessant ne leur permit pas même d'emporter leurs morts. Ainsi finit cette lutte mémorable. Une poignée d'hommes braves et intelligents, retranchés derrière une faible muraille, coupés de toute communication, n'ayant de vivres et de munitions que pour quelques jours, avait arrêté une poignée d'hommes féroces, exaltés par le fanatisme et dont la masse seule eùt ébranlé Mazagran, s'ils avaient osé se ruer sur ses faibles murailles.
à
La 10e compagnie fut autorisée conserver le drapeau criblé de balles qui flottait sur la redoute de,Mazagran pendant Et quand donc les Français voudront-ils bien comprendre Que la guerre se fait dent pour dent, œil pour œil, les journées des 3,4,5 et 6 février 1840. A chaque anniversaire Et que ces étrangers qui sont morts, à tout prendre, de cette dernière journée un ordre du jour lu devant le bataillon Chaque fois en mourant leur épargnaient un deuil? rappelait et rappelle encore ce glorieux fait d'armes. Le drapeau déchiré était criblé de balles. Il avait reçu 124 blesLes grands services qu'a rendus au Tonkin la légion ont sures. déterminé la création, comme en 1840, d'un deuxième régiNous avons dit la composition des bataillons des « Joyeux». ment étranger. Il avait été supprimé après la guerre de Cri- C'est à vrai dire le « Purgatoire de l'Armée ». Commandés par mée. Cette troupe solide servira, avec les régiments d'infan- des officiers d'élite, ces têtes chaudes, ces indisciplinés, natures terie de marine, de noyau à notre prochaine armée coloniale. rudes et indomptées, ont besoin d'être conduits par une main de fer. En temps de paix, ils sont soumis à des travaux d'utilité publique. Ils construisent des chemins, des retranchements. Infanterie légère d'Afrique. — Il existe dans l'armée L'Algérie leur doit une partie de l'admirable réseau de ses française un certain nombre de corps d'épreuve où les mili- routes. Dans la belle campagne des puits artésiens de l'extrême taires ayant subi des condamnations ou sortant des compagnies sud, construits par M. l'ingénieur Jus pendant les vingt-cinq dernières années, les bataillons d'infanterie légère ont travaillé de discipline viennent achever le temps de service qui leur reste à faire ; enfin, ce qui paraît une anomalie singulière, où à presque tous les ateliers de forage. Vienne la guerre, les hommes des bataillons d'Afrique, se contractent des engagements volontaires. Ces corps sont les bataillons d'infanterie légère d'Afrique, un par province. natures déchues mais exaltées, rivalisent de courage et de dévouement. Ils sont aux avant-postes, aux points les plus Les officiers attachés aux bataillons d'Afrique sont choisis parmi les plus vigoureux, les plus énergiques et les plus exposés. Ils courent, ils volent au feu comme des zéphirs. Ils demandent à beaucoup de gloire de leur rendre un peu braves. d'honneur. Ils s'attachent à leur bataillon, à leur drapeau. Il Les bataillons d'infanterie légère d'Afrique ne mériteraient en est parfois qui, après une année entière passée sans punitions pas que nous leur consacrions une pensée si, chaque fois et qui leur donne le droit de rentrer dans un régiment de l'arque la guerre leur a permis de se réhabiliter au feu, les hommes quiles composent n'avaient fait preuve d'une bravoure mée, préfèrent rester à leur bataillon. éclatante et n'avaient mérité par leur bonne humeur et leur De tels sentiments relèvent des hommes. Voilà pourquoi gaîté à se battre le nom de Joyeux. Ces condamnés militaires nous avons consacré ces quelques lignes aux chasseurs des bataillons d'infanterie légère d'Afrique. ne sauraient d'ailleurs être comparés aux condamnés civils, la
E CONSTANTIN
D'AFRIQUE
DE L'ASSAUT
ARMÉE
A LAMORICIÈRE
Chasseursd'Afrique.
Tous
les corps qui ont passé par l'Afrique de 1830 à 1870 ont acquis une réputation plus ou moins grande selon que le hasard leur a permis- de donner des preuves plus ou moins répétées de leur solidité, de leur bravoure. Si tous n'ont pas atteint même renommée c'est que l'occasion leur a manqué. A la guerre il en est souvent ainsi. Tel qui se serait distingué d'une manière éclatante restera dans l'ombre pour ne s'être: pas trouvé à la bonne place au bon moment sérieuse leçon de modestie à méditer par les militaires. heureux, qui seraient enclins à trop d'orgueil. Si les corps permanents d'Afrique: zouaves, tirailleurs, chasseurs d'Afrique, spahis, ont acquis plus de renommée - c'est parce que, en dehors de leur recrutement particulier et sans rien enlever à leurs mérites, ils se sont trouvés plus fréquemment que les autres corps en situation de se signaler. Les Chasseurs d'Afrique portèrent d'abord le nom de chasseurs algériens à leur formation, qui eut lieu quelque temps après la prise d'Alger. L'honneur d'avoir formé les premiers escadrons de cette belle troupe revient aux 12e et 17° chasseurs à cheval, dont les six escadrons constituaient toute la cavalerie du petit corps expéditionnaire qui débarqua à Sidi-Ferruch. Il arriva pour les chasseurs d'Afrique ce qui eut lieu pour les zouaves et les spahis. De tous les régiments de France affluèrent bientôt des demandes d'admission. Les brigadiers, les sous-officiers rendaient leurs galons pour entrer aux chasseurs d'Afrique. il n'y avait pas un escadron qui ne comptât deux ou trois ex-maréchaux des logis chefs comme simples cavaliers. Le premier régiment de chasseurs d'Afrique fut créé à Alger. Peu de temps après un second s'organisa à Oran, puis un troisième à Bône; et enfin un quatrième à Mostaganem. Ce dernier régiment supprimé à plusieurs reprises a été rétabli depuis l'expédition de Tunisie. Il est spécialement affecté à cette province. Sa portion centrale est à la Manouba, près de Tunis. Les trois autres régiments, comme les zouaves, les tirailleurs algériens et les spahis, sont affectés : le numéro 1, à la province d'Alger; le numéro 2, à la r province d'Oran ; le numéro 3 à la province de Constantine. A l'origine la moitié des escadrons de chasseurs d'Afrique étaient armés de la lance. Mais cette arme leur fut retirée quand l'impossibilité de joindre les Arabes, que sa vue seule mettait en déroute, fut démontrée. Le fnousqueton remplaça la lance. L'histoire des chasseurs d'Afrique est entièrement liée à celle de la conquête de l'Algérie. Par leur remonte et par le service d'exploration pour lequel au début ils avaient été spécialement créés ils appartenaient à la cavalerie légère. Les régiments de chasseurs d'Afrique furent toujours des régiments modèles, commandés par des officiers distingués. Servir aux chasseurs d'Afrique était une distinction très enviée. Comptant dans leurs rangs d'anciens sous-officiers ou brigadiers, des jeunes gens de famille comme engagés volontaires, ils constituaient de beaux et solides régiments, bien, tenus, bien remontés, bien instruits, bien entraînés. —
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Le 10 mai 1843, le duc d'Aumale qui commandait la subdivision 'de Médéah était parti de Boghar à la tête de six cents hommesd'infanterie; dont le bataillon de zouaves, une section d'artillerie et cinq cents chevaux. Son objectif était la Smala d'Abd-el-Kader, qu'on lui disait campée aux enyimns de Goudjilah..Parvenu-à ce point de nouveaux renseignements le déterminèrent à se diriger surTaguin avec une partie, la plus légère, de sa colonne. Le, 16 mai, après une course de quatre-vingts kilomètres, le général apprend à l'improviste que la Smala est établie aux sources mêmes du ruisseau de Taguin. qu'elle est là. à moins d'un kilo-
mètre.
Que faire ? Les uns proposent d'attendre au moins les zouaves avant de rien entreprendre. Mais, malgré leur vigueur accoutumée-,
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nos braves « chacals » sont encore à deux lieues en arrière.., .et, d'autre part, quelques traînards de la Smala ont déjà signalé l'approche des troupes françaises. Une heure de retard et la proie convoitée nous échappe ! Que faire? se demandent encore les officiers français. C'est alors que le duc d'Aumale jette les yeux sur les quatre cents cavaliers qui l'accompagnent. Il voit à leur tête les Morris, les d'Allonville, les Yusuf et, plein de confiance en la vigueur de ces officiers émérites, commande résolument : « En avant! » La charge fut irrésistible. Le magnifique tableau d'Horace Vernet au musée de Versailles a consacré le souvenir de ce glorieux fait de guerre. ,
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Parmi tant d'actes de courage et de fermeté les soldats rivalisaient avec leurs officiers. Tel fut le trompette Escoffier, du 2e régiment.
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Dans une charge contre les cavaliers rouges d'Abd-el-Kader le capitaine d'Escoffier eut son cheval tué. Escoffier mit pied à terre et lui offrit le sien. Le capitaine hésita à l'accepter; le combat était violent
et son issue douteuse. Escoffier insista : « Prenez-le, je vous prie, dit-il à son capitaine. Ce n'est pas moi, c'est vous seul qui pouvez rallier l'escadron. » Le capitaine céda enfin. Il sauta sur le cheval d'Escoffier, et celui-ci, fait prisonnier, fut amené devant l'émir, dans sa déira. Il portait sa trompette en sautoir. Ayant reçu l'ordre de jouer une fanfare, il se mit à sonner la charge. Un des chefs s'étant informé de l'appel militaire de cette sonnerie, Escoffier dit à l'interprète : Réponds au capitaine que lorsqu'il entendra musiquer cet air, il n'aura rien de mieux à faire que de tourner bride et de s'enfuir au galop. Le chef, blessé de cette réponse, demanda qu'il fût administré cent eoups de bâton à l'impertinent. dit Abd-el-Kader, il est de mon devoir de me montrer Non, — aussi généreux que les Français, qui ne maltraitent pas les prisonniers arabes. Bien plus, si ce trompette veut se faire musulman, je lui donnerai trois jolies femmes, des chevaux et le grade d'officier dans mes réguliers. Je ne renierai jamais ni ma religion ni mon pays, répondit le trompette. Tu peux me faire couper la tête, mais non pas me rendre
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parjure.
dit l'émir, j'aime à t, elltenre tranquille, d parler ainsi. Ton Sois — refus est glorieux. Ton apostasie serait une honte. Escoffier fut compris dans un échange de prisonniers qui eut lieu peu après et reçut la croix d'honneur, juste récompense de sa bonne conduite
•
l,
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Les chasseurs d'Afrique se montrèrent en Crimée à la hauteur de leur réputation établie. Un peloton de spahis et quelques chasseurs d'Afrique commandés par Paul de Molènes furent seuls envoyés au début des opérations pour servir d'escorte au général en chef. Le général Canrobert aussitôt qu'il eut succédé au maréchal de Saint-Arnaud, se rappelant les services que lui avait rendus en Algérie cette admirable troupe, appéla en toute hâte deux escadrons des quatre régiments. Ils arrivèrent assez à temps pour sauver à Balaklawa (25 octobre 1854) la cavalerie anglaise compromise dans la charge inopportune. dernier des Cardigan ». Pendant le reste de la campagne « du les - chasseurs d'Afrique furent employés au service de reconnaissance qu'ils accomplirent à la. perfection. Fait digne de remarque : pendant le rude hiver de 1855, les chevaux arabes des chasseurs d'Afrique montrèrent plus de résistance que les chevaux des autres races. Ils supportèrent mieux les rigueurs du climat et les privations du blocus de Sébastopol. En 1859, les trois régiments furent embarqués pour l'Italie. A là bataille de Montebello quelques pelotons seulement prirent part à la bataille. Mais à SolférÍno la division tout entière fut® engagée. Elle chargea courageusementpar brigades constituées. l'infant-erie ennemie. Mais l'attaque avait été mal préparée. Cette attaque de cavalerie fut sans Deux escadronsde chasseurs d'Afrique prirent part à-l'ex-
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1. Types
effet..
militaires d'anlan, par le capitaine Blanc.
pédition de Syrie (1862). Au Mexique les sept escadrons de marche prirent part à de nombreux combats et inspirèrent une terreur profonde aux Mexicains qui leur donnèrent le nom de bleus ». A San Pablo del Monte, sous Puebla « bourreaux assiégé, le chasseur Borde du 1er régiment conquit la croix d'honneur pour son étendard en enlevant le drapeau des lanciers de Durango. Attachés à l'armée de Sedan les quatre régiments de chasseurs d'Afrique endivisionnés sous le commandement du général Margueritte prirent part à l'héroïque charge du calvaire d'Illy, le 31 août. Après la mort du général Margueritte tué l'épée haute en avant de sa division la dernière charge fut commandée par le général de Gallifet disent les uns, par le général de Beauffremont disent les autres. Elle fut très meurtrière et arracha au roi Guillaume cette exclamation : « Oh ! les braves gens ! » Aux armées de province trois régiments de marche furent
Légion étrangère, 1875.
Spahis. —
Ainsi que les zouaves les spahis tirent leur nom et leur origine des troupes employées au temps de la
Régence. Certaines tribus guerrières, dites magkzen, étaient lors de la domination turque dispensées de payer l'impôt dont elles étaient chargées d'assurer la rentrée dans les autres tribus. Les cavaliers de magkzen atttachés plus particulière-
Officier arabe.
Zouave, 1870.
Tirailleurs algériens, soldat.
organisés. Mais mal recrutés, mal employés, ils rendirent peu de services. Aujourd'hui que le service obligatoire a nivelé l'armée, les vieux soldats ne sont plus là pour continuer un passé glorieux. Il s'attache encore aux chasseurs d'Afrique dont le recrutement est partout le même que celui de tous les autres régiments de cavalerie, un prestige qui a survécu de la légende passée. Ils restent encore un objet d'émulation pour les jeunes gens appelés à l'honneur d'y servir.
Spahis.
Infanterie de ligne d'Afrique.
ment à la personne des heys étaient les spahis, recrutés aussi parmi les descendants des Janissaires amenés de Constantinople à Alger par les frères Barberousse. Deux éléments divers s'unirent dans la cavalerie d'Afrique pour le succès de nos armes : l'élément français et l'élément arabe, le chasseur et le spahi. Les cavaliers à la jaquette bleue n'auraient pu, malgré leur courage, exécuter seuls les hardis coups de main qui leur ont valu si grand renom. Sur la terre d'Afrique l'Arabe était nécessaire pour lutter contre l'Arabe. Telle fut l'origine des spahis. L'appât du gain attira les cavaliers. Ils eurent une discipline moins sévère que la discipline française et pour tout uniforme un burnous rouge s'enlevant au moindre signe de leur chef. Redevenu Arabe le spahi pouvait alors exécuter toute mission sans exciter de soupçons : tour à tour coureur, éclaireur, limier ou soldat des avant-postes. Des sous-officiers et des officiers français commandèrent ces cavaliers indigènes. Quelques Européens furent admis dans le rang. Ainsi compo-
Officier zouave.
Officiers de tirailleurs algériens.
Spahis, officier français. Spahis, sous-officier français.
Interprète militaire
sée cette troupe a rendu souvent de grands services. « Refuge des pécheurs! » disait-on parfois en souriant, lorsqu'on parlait des spahis. Bien des caractères, en effet, qui auraient eu peine à supporter toute la rigueur de la discipline française, allaient leur demander asile. Aussi souvent rencontrait-on parmi eux des physionomies étranges, des coureurs d'aventures dont la vie ressemble à un récit des temps passés détaché d'un vieux livre et qui ont servi de modèles véritables à Paul de Molènes pour ses récits militaires si vivants et si pleins de charme. L'organisation même des spahis, qui s'est conservée jusqu'à présent, en fait des troupes d'un caractère spécial. Dans chacun des régiments, sur les cinq escadrons un seul peut être considéré
comme réellement militaire : c'est l'escadron mobilisable réuni en garnison dans la main de ses chefs : dit escadron de célibataires. Son nom indique suffisamment sa composition. Les cavaliers qui le composent, Arabes de grandes tentes pour la plupart, c'est-à-dire appartenant à la noblesse indigène, sont encadrés, enrégimentés, astreints au service militaire de nosrégiments de cavalerie. Les autres escadrons dispersés sur le territoire de la
SEDAN
D'AFRIQUE
A MARGUERITTE
CHASSEURS
GÉNÉRAL
LE
province sont répartis par petits groupes et mis à la disposition des généraux, des commandants de cercle ou de colonnes, des officiers du service des affaires indigènes ou chargés de missions spéciales. En territoire militaire le burnous rouge du spahi, cavalier d'escorte ou guide, courrier ou kodja, apparaît toujours en Algérie ou en Tunisie comme annexe du commandement. Enfin, dans la province autrefois frontière de Constantine (avant l'expédition de Tunisie en 1880) deux escadrons de spahis vivent en smalas, surveillent et défendent les limites de nos possessions anciennes. Sur un roc abrupt, dans une position militaire aussi forte que possible, approvisionnée en eau, s'élève le bordj fortifié de la smala. Il renferme l'état-major français, les cadres, les magasins, les approvisionnementsde toutes sortes. Dans la plaine, jusque dans un rayon assez étendu autour du bordj, sont dressées les tentes en poil de chameau des spahis de l'escadron qui vivent là en famille avec leurs chevaux, leurs chiens et leurs bestiaux. Ils cultivent ou font cultiver les terres
Saint-Cyr, 1825-1833.
Polytechnique, 1835.
Ecole d'application, Metz, 1840.
En 1836, le colonel Marey Monge commandait les spahis de la province d'Alger. Il résidait à Boufarik et joignait au commandement de son régiment le titre d'agha de la plaine. Chaque jeudi, le colonel Marey Monge, superbement drapé dans un burnous blanc qui le couvrait de la tête aux pieds, ne laissant voir
Saint-Cyr, 1850.
Saumur, 1835-1850.
que sa haute taille, ses traits réguliers et sa belle barbe noire, faisant piaffer son cheval, s'acheminait vers le marché. Précédé et suivi de ses chaous, il pénétrait sous la grande tente dressée à son intention, s'asseyait sur ses riches tapis et ses coussins moelleux, et, les jambes croisées, recevait les hommages des cheiks. Alors aussi, il savourait le café que le kaoudji officiel lui offrait dans les tasses entourées de filigranes d'or et d'argent, en fumant la longue pipe au bout d'ambre, au tuyau de cerisier et au foyer de terre cuite. En même temps que la foule s'ouvrait devant le cortège pompeux de l'agha de la plaine, une escorte plus modeste, un personnage moins majestueux mais non moins original, se rendait du camp au marché. Cette escorte était celle du caïd, de M. le sous-lieutenant Vergé. Il avait dans ses attributions, outre la justice à rendre, selon les principes rigoureux du Coran, qu'il possédait à merveille, à untendre les doléances des indigènes et à recevoir la chekaïa. Strictement vêtu comme le commun des Arabes, les pieds nus, chaussés dans des babouches, le capuchon de son burnous relevé sur sa tête, montrant à peine sa figure amaigrie, sa barbe rare, ses yeux intelligents, un gros chapelet à la main, le sous-lieutenant Vergé s'acheminait d'un pas lent et monacal vers la tente où, pendant toute la journée, il allait rendre ses arrêts ou régler les différends de ses
justiciables.
qui leur ont été concédées tout autour de leurs tentes par l'autorité militaire et dont ils cherchent à tirer le meilleur parti possible. Leur temps est partagé entre les occupations agricoles et les exercices militaires. En outre, au premier signal ils sont à cheval et se portent aux points de la frontière où leur présence est nécessaire, soit qu'une invasion de notre territoire ait été signalée ou qu'une tribu ait refusé de payer l'impôt, soit pour toute autre raison. Les spahis des smalas sont chargés, en un mot, de la police de nos frontières algériennes. Ils peuvent être comparés aux anciennes troupes autrichiennes des Confins Militaires et aux Cosaques du cordon au Caucase.
Saint-Cyr, cavalerie 1875 et infanterie 1875.
Écuyer professeur.
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Polytechnique, Fontainebleau, 1875.
Les généraux de division Marey Monge et Vergé ont rendu à la France d'éminents services. A cette époque déjà lointaine, dont nous venons d'évoquer le souvenir, plus d'un conte bleu se faisait dans les bivouacs africains sur le colonel-agha et le sous-lieutenant caïd. On racontait en particulier que séduit par le charme simple de la religion musulmane, M. Vergé avait abjuré le christianisme pour se faire mahométan à l'exemple du général Abdallah-Menou, en Égypte. Mais la figure la plus curieuse des spahis, une des plus de la conquête de l'Algérie est certainement celle de originales Yusuf. Entré sous le nom de Yousouph Mameluck comme simple cavalier indigène après la prise d'Alger dans les cavaliers maures devenus plus tard les spahis, il est mort général de division français et grand-officier de la Légion d'honneur. Sa vie est intimement mêlée à la conquête de l'Algérie. Le colonel Trumelet, un glorieux soldat aussi de notre armée d'Afrique, a écrit récemment un beau livre élevé à la mémoire du général Yusuf et dont la lecture est du plus vif intérêt1. 1. Le
général Yusuf, 2 vol. in-8°, par M. le colonel Trumelet. Paris, 1890.
La légende avait entouré la jeunesse de ce beau cavalier. Enfant italien enlevé sur les côtes de l'île d'Elbe à sa famille par des corsaires barbaresques, il avait grandi dans le palais du bey de Tunis. Obligé à dix-huit ans de fuir après une intrigue amoureuse avec une princesse, il avait pu, grâce aux bons offices de son ami Ferdinand de Lesseps, fils de notre ministre à Tunis, sauver sa tête et se réfugier abord d'une frégate française, alors à la Goulette, qui le conduisit à Alger. Yusuf se présentant au général eu chef, M. de Bourmont, avait sollicité l'honneur de servir dans nos rangs. Il fut employé d'abord comme interprète puis comme officier dans les premiers pelotons de cavalerie indigène que nous eûmes en Algérie. A partir de ce moment, Yusuf prit une part très brillante à toutes les expéditions et rendit à nos généraux les plus signalés services en même temps qu'il ne cessait de montrer la plus éclatante bravoure. De 1831 à 1859 Yusuf fut cité vingt-sept fois à l'ordre de l'armée. Il apparaissait dans nos camps comme un cavalier oriental du temps de Saladin. Ses armes resplendissantes, la richesse de son costume et du harnachement de son cheval orné de pierres précieuses, sa jeunesse, la bonne grâce de toute sa personne, sa bravoure éclatante, faisaient une profonde impression sur tous ceux qui l'approchaient. Il fut un moment bey de Tunis, puis rentra dans les cadres à titre français et franchit successivement tous les grades, jusqu'à celui de général de division. En vertu de leur engagement les spahis ne sont pas obligés à combattre hors de l'Algérie. Pourtant en Crimée, en Italie, en Chine, au Mexique, dans la campagne de France (1870-1871), des détachements de spahis se battirent bien. A l'armée de la Loire, les éclaireurs algériens, commandés par le colonel Goursaud du corps d'état-major, combattirent à Sainte-Péravy, à Patay, Josne, Vendôme, Le Mans. Pourtant de la smala d'Ainles spahis parmi éclata insurrection une Guettar, de la province de Constantine, lorsqu'on voulut former la détachement 1870 de l'année de fin la pour à un avec eux France. Cette insurrection fut vite réprimée. Nous avons aujourd'hui quatre régiments de spahis; le 1er à Médéah, le 2e à Sidi-bel-Abbès, le 3e à Batna, le 4e à la Manouba (Tunisie). Les trois premiers régiments ont eu un escadron détaché au Tonkin. En outre le 1er de spahis (Médéah) détache d'une manière permanente au Sénégal unescadron qui prend le nom de spahis sénégalais. Un romancier contemporain a fait dans le Roman d'un Spahi une peinture exacte et poétique tout à la fois de la vie militaire spéciale de ces détachements lointains.
-
Écoles.
-r-. Ce
n'est qu'au milieu du dix-huitième siècle
en 1750, que fut assuré en France par une institution spéciale le recrutement des officiers de l'armée. Jusqu'alors ils avaient été choisis parmi les élèves des Académies, comme on appelait au dix-septième siècle des établissements particuliers d'instruction militaire; parmi les volontaires, jeunes campagne les régiments; parmi les suivre admis à en gens pages du roi ou des princes et parmi les cadets de régiments. Ce recrutement restreint devint insuffisant avec l'accroissement des effectifs. Pour assurer Le complément des cadres le gouvernement fut alors obligé (la noblesse de province devenue pauvre ne pouvant plus payer ses emplois) d'admettre à cause de la vénalité des grades tous ceux qui en acquittaient le montant bien qu'ils ne fussent pas nobles. La classe des officiers allait perdre son caractère aristocratique qu'elle avait toujours conservé sous la monarchie. En 1749 Paris-Duverney conçut le projet de créer une École militaire à Paris. Dans un mémoire adressé à Louis XV en 1750 il démontrait la nécessité de cette création et citait l'exemple d'institu-
tions analogues existant depuis longtemps avec succès à l'étranger. Un édit du 15 janvier 1751, enregistré le 22 par le Parlement, créa l'Ecole royale militaire. Sa destination était l'éducation des gentilshommes pauvres, dont les pères avaient voué leur existence à la carrière des armes. « Nous avons résolu, lit-on dans les considérants de l'édit, de fonder une École militaire et d'y faire élever sous nos yeux cinq cents gentilshommes, nés sans biens, dans lesquels nous préférerons ceux qui, ayant perdu leur père à la guerre, sont devenus les enfants de l'Etat. » Les candidats devaient faire la preuve de quatre générations de noblessse du côté paternel. Ils étaient admis de huit à onze ans. A dix-huit ou vingt ans les élèves devaient être placés dans les régiments. Une pension de 200 livres leur était servie et ils recevaient une décoration « croix des ordres du MontCarmel et de Saint-Lazare », destinée à conserver le souvenir des obligations qu'ils avaient envers le roi et l'État. Linstruction militaire comprenait un enseignement théorique et pratique. Le bataillon était formé en compagnies commandées et encadrées par des élèves gradés qui portaient les titres de : capitaine, lieutenant, sergents, caporaux et anspessades. Le 1er février 1776 l'Ecole royale militaire fut dissoute par le comte, de Saint-Germain, qui lui reprochait de coûter trop cher et de donner à ses élèves une éducation trop luxueuse. Un règlement du 28 mars 1776 répartit les élèves entre dix collèges militaires de province, tenus par des religieux et par des congrégations et situés à Brienne, Effiat, Pont-à-Mousson, Rebais, Tournon, Sorèze, Tiron, Pont-le-Roi, Vendôme et Beaumont. Ce ne fut là qu'une mesure transitoire. Dès l'année suivante l'Ecole royale militaire était rétablie sous le titre de corps des Cadets Gentilshommes, véritables élèves officiers. Ils étaient choisis dans les collèges militaires de province sur le rapport des inspecteurs généraux. Ils devaient être catholiques. La preuve des quatre degrés de noblesse était maintenue. En 1781 un ordre de Louis XVI décida la suppression par extinction des cadets gentils hommes des régiments, qui depuis 1776 avaient, parallèlement au corps des cadets, fourni le recrutement des cadres d'officiers. La compagnie des cadets gentilshommes de l'École militaire de Paris reçut, par le règlement du 19 mai 1784, une organisation absolument militaire. Pour la seconde fois, mais alors définitivement l'École royale militaire fut supprimée ainsi que la compagnie des cadets gentilshommes qui y était placée, le 9 octobre 1787. Elle cessa complètement d'exister le 1er avril 1788. Les élèves ayant l'âge requis furent placés dans des régiments avec le grade de sous-lieutenant. Les autres, au nombre de 86, furent placés dans les dix collèges militaires de province1.
La suppression en 1788. de l'École des Cadets Gentilshommes fut suivie, dans les années subséquentes, de modifications profondes dans l'armée. A partir de 1789 l'émigration lui enleva, ainsi que nous l'avons exposé dans la première partie de ce travail, la plus grande partie de ses cadres. L'aimée royale de la monarchie cessait d'exister. L'armée nationale apparut. La classe instruite des sousofficiers des régiments royaux combla les vides causés par l'émigration. Sous ces chefs nouveaux les armées de la République tinrent tête à partir de 1792 aux redoutables efforts de l'Europe coalisée et repoussèrent l'invasion. Mais il fallait à tout prix assurer pour l'avenir le recrutement des officiers. La Convention le comprit vite. Dès 1793 le Comité de salut public créa l'École des Enfants de Mars décrétant « que les fils de sans-culottes combattant dans les armées de la République seraient seuls admis à l'École militaire et que leur admission serait gratuite ».
École Spéciale Militaire.
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Un décret du premier consul du 1er avril 1802 créa une École spéciale militaire qui fut organisée à Fontainebleau le 28 janvier 1803, conforme au nouveau système de guerre et aux besoins de l'armée: « Je veux, avait dit Bonaparte, doter avec cette école la France d'une pépinière d'officiers généraux. » Établie sur de sérieuses et solides bases,l'École fut véritable-
ment militaire.
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emprunté une partie de ces détails à une excellente monographie de l'École militaire, de Paris par M. l'architecte Georges Farcy. — Daly, Paris, 1890. 1. Nous avons -
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Le 21 mars 1808 l'École fut transférée de Fontainebleau à Saint-Cyr qu'elle n'a jamais quitté depuis. Conformément à la pensée de Napoléon Ier l'École de SaintCyr a été une pépinière d'officiers de tous grades. Depuis bientôt un siècle, elle n'a pas cessé de donner à la patrie des générations sans cesse renouvelées de jeunes hommes dont quelquesuns ont atteint les sommets les plus élevés de la hiérarchie militaire ; pour ne citer que les vivants: les Maréchaux de France Canrobert et Mac-Mahon. La fière devise inscrite sur le drapeau du 1er bataillon de France: « Ils s'instruisent pour vaincre », remplacée depuis la dure leçon de 1870 par celle-ci plus modeste « Ils s'instruisent pour défendre la patrie », trace nettement leur but à tous. Le Saint-Cyrien, pénétré de ses devoirs, fait serment en entrant à l'École de les bien remplir. Aussi chaque année se présentent plus nombreux aux examens de l'École spéciale militaire les jeunes Français jaloux de devenir officiers. Peu à peu le sentiment militaire, que des esprits moroses avaient décrété disparu de notre pays, reparaît vivace mais transformé.
:
École Polytechnique.
L'École Polytechnique est, à bon droit, réputée comme une des institutions scientifiques les plus estimées du monde entier. Œuvre de la Convention, elle s'appela alors École Centrale des travaux publics. Le but de sa création était de fournir à l'État des ingénieurs pour les diverses parties ou applications des sciences. L'Ecole polytechnique est devenue la pépinière de nos armes savantes : artillerie et génie. Avant de prendre rang dans l'armée les futurs officiers du canon et de la sape viennent compléter leur instruction militaire à l'École d'application de Fontainebleau, qui avant la guerre de 1870 était à Metz, de chère mémoire. Les deux années que canonniers et sapeurs passentàl'École d'application sont consacrées, en dehors de leurs études scientifiques plus spécialement militaires, à une instruction professionnelle très étendue; à des travaux techniques appropriés à l'arme; à l'équitation. Aussi quand ils vont rejoindre leurs régiments les jaunes lieutenants d'artillerie et du génie sont-ils solidement instruits. La pratique du métier en fait des militaires complets. Ce sérieux bagage de connaissances facilite plus tard aux officiers de l'artillerie et du génie qui veulent y entrer l'accès du service d'état-major. Ils se présentent aux examens avec une instruction très supérieure à celle de leurs camarades des autres armes. Voilà pourquoi le service d'état-major ouvert aujourd'hui à tous comptera à l'avenir un nombre croissant d'officiers appartenant au génie et à l'artillerie, qui ont déjà l'un et l'autre un état-major particulier. Quelques esprits chagrins ont paru s'en inquiéter : à tort selon nous. Des mesures restrictives basées sur la proportion des armes pour l'entrée à l'École supérieure de guerre, qui écarteraient un certain nombre d'officiers des armes spéciales, seraient injustes et vexatoires. Puis, si les officiers d'état-major sortant de l'École polytechnique sont plus instruits, plus aptes à ces importantes fonctions, tant mieux pour l'armée —
!.
École Supérieure de Guerre.
—
L
École
Sans cesser d'appartenir à leur arme d'origine
le corps fermé d'état-major n'existe plus — les officiers brevetés sont tour à tour employés dans les états-majors et dans les corps de troupe. De la sorte ils ne perdent pas, comme il arrivait autrefois, —
l'habitude du commandement des troupes.
Écoles diverses.
— Nous avons parlé avec quelques détails de nos trois grandes écoles militaires : Saint-Cyr, Polytechnique, École Supérieure de Guerre. Énumérons rapidement les autres. En première ligne : l'École d'application et du génie à Fontainebleau, autrefois à Metz ; l'École d'application de cavalerie, de Saumur, pour les officiers; l'École de Médecine Militaire à Lyon et à Paris. Viennent ensuite les écoles militaires d'armes : Saint-Maixent pour l'infanterie; Versailles pour l'artillerie, le génie et le train des équipages ; Saumur pour la cavalerie; Vincennes pour les services administratifs. Les écoles d'armes sont réservées aux sous-officiers proposés pour l'avancement. Nous avons parlé plus haut du Prytanée militaire de la Flèche. A part l'exercice et le régime militaire il est un vrai lycée pour l'instruction.
Enfants de troupe.
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Les enfants de troupe, « les pupilles de l'armée » comme on les appelait autrefois si joliment, étaient jusqu'en ces dernières années dans un état précaire, isolés, abandonnés dans les régiments. Confiés dans la plupart des corps de troupe à un gradé qui n'avait pas souvent les qualités requises d'un éducateur; relégués dans une salle reculée de la caserne, qui leur servait à la fois de dortoir, de salle à manger, d'étude et de récréation, les enfants de troupe avaient pour leur entretien une allocation annuelle de dix-huit francs; suivaient les cours de l'école ou du collège. Les pauvres enfants poussaient au hasard, selon la richesse du terroir et souvent aussi — il faut le dire à l'honneur de notre corps d'officiers — grâce à la bienveillance éclairée de leurs chefs. Beaucoup d'enfants de troupe, engagés volontaires, sortis des écoles, ont fait plus tard des officiers, même des officiers supérieurs. Mais ils étaient l'exception. La direction, l'appui moral ont manqué à beaucoup d'enfants de troupe pour faire leur chemin. Il en est d'autres qui l'ont fait très brillant, en dehors même de l'armée. Parmi les enfants de troupe citons l'écrivain distingué qui s'appelle J.-J. Weiss: un des maîtres contemporains en l'art d'écrire. Jusqu'à l'âge de dix-huit ans il a figuré comme enfant de troupe sur les contrôles du 76e régiment d'infanterie (1er léger). Actuellement les quatre écoles de Rambouillet, de Môntreuil-surMer, de Saint-Hippolyte-du-Fort et des Andelys reçoivent les enfants de troupe de l'infanterie. d'Autun ceux de la gendarmerie et de la cavalerie. L'École de Billom ceux de l'artillerie et du génie. L'Orphelinat Hériot, institution touchante d'un officier au cœur généreux, élève les fils des vieux serviteurs, pour en faire plus tard des citoyens et des soldats.
L'École
Supé-
rieure de Guerre qui a remplacé l'ancienne École d'application d'état-major est l'Académie de guerre de la France. Ainsi que son nom l'indique, elle constitue notre école d'enseignement supérieur militaire. Les cours qui y sont professés pendant deux ans à des officiers de choix appartenant à toutes les armes et admis par voie de concours sont comparalicenciés fait des L'École de Guerre de Faculté. bles à nos cours et des docteurs militaires qui prennent le titre d'officiers brevetés. Mais ces savants n'en sont pas moins bons militaires: témoin Dominé, le défenseur de Tuyen-Quan; Galliéni, le le Soudan français etc. dans Faidherbe général continuateur du
LE COMMANDEMENT Dans les pages qui précèdent nous avons tenté d'esquisser à larges traits, laissant à chacun d'eux sa physionomie particulière, les différents corps de notre armée: infanterie, cavalerie, artillerie, génie, etc. Il nous reste à parler d'un rouage: le plus important de tous. Car de sa qualité dépendent les revers ou les succès de l'armée entière. Il s'agit du haut commandement: du Ministère de la Guerre, des Généraux et des États-Majors. -
Ministère de la Guerre. — C'est le ministère chargé
de recruter, de tenir en bon état et au complet en personnel et matériel l'armée nationale et d'assurer la défense du territoire à l'aide des ressources du budget de la guerre. Le Ministre de la guerre est le délégué du pouvoir exécutif, spécialement chargé de diriger l'administration de
l'armée.
l'
-
France soit à des militaires, soit à des magistrats ou à des hommes politiques possédant des qualités administratives particulières. C'est ainsi que jusqu'au milieu du dix-huitième siècle les ministres ou secrétaires d'État de la guerre furent choisis, non parmi les officiers, mais parmi les conseillers d'État et les intendants ; non parmi les nobles de vieille souche à qui étaient presque exclusivement réservés les grades supérieurs de l'armée mais parmi les bourgeois anoblis par leurs charges ou par celles que leurs pères avaient exercées. Louvois avait commencé sa carrière dans les bureaux de son père Le Tellier, qui lui-même avait débuté par être maître des requêtes. Chamillard, Voisin, Breteuil furent intendants de province avant d'être chargés du département de la guerre. Or l'expérience a prouvé que cette organisation de l'administration supérieure de l'armée pouvait donner d'excellents résultats lorsque le ministre est un homme instruit et expérimenté et qu'il sait se renfermer dans les limites de la haute mission que lui a confiée le gouvernement. Mais alors il y a grand avantage, lorsque l'administration de l'armée se trouve confiée à un personnage politique, à constituer un chef d'état-major général de l'armée, qui dirige complètement les affaires militaires proprement dites. L'organisation actuelle de notre armée a prévu qu'une loi spéciale réglerait la dignité de maréchal de France. « Que celui qui veut un bâton de maréchal, s'écria à l'Assemblée nationale en 1871, dans un magnifique élan patriotique l'illustre général Chanzy, aille le chercher de l'autre côté du Rhin ! » Le portrait du général qui réunit toutes les qualités du commandement a été tracé d'une main magistrale par l'auteur de l'Esprits des Institutions Militaires. Un général doit avoir cette énergie merveilleuse et cette confiance en soi qui double les forces. Objet de sympathie pour tout ce qui est jeune dans l'armée, il montrera en même temps une grande déférence pour les vieux serviteurs.Il est des connaissances que le temps et l'usage seuls apprennent et qui ne se devinent pas. Mais une trop longue habitude de l'obéissance diminue, plutôt qu'elle ne développe, les facultés du commandement. Sagace appréciateur du prix du temps, seul trésor qui ne se puisse suppléer, le général se dispensera d'écrire beaucoup lui-même. Jamais un bon général n'a beauécrit dans dans les la'tète mouvemen'ts écrit les mouvements de de la guerre. C'est la tête qui laguerre. :Q.uiC'est coup Ce poste élevé a été confié en
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doit travailler et
non
la main.
le général est fidèle à ces principes, s'il remplit les condiSi « tions que je viens d'énumérer, il sera l'objet du respect, de l'estime et de l'affection de ses troupes. Un général, d'ailleurs, doit toujours traiter avec considération tout ce qui porte l'habit de soldat. IL y a dans ce métier quelque chose de si noble; le sacrifice de la vie est si sublime, que ceux qui, par état, sont toujours prêts à l'offrir, ont droit à des égards, même - quand ils méritent un acte de sévérité. Il y a un sentiment de fraternité que fait naître entre gens de guerre la communauté des dangers, des privations, des fatigues et qui n'a rien d'incompatible avec les règles de la hiérarchie et le maintien de la discipline. Alors plus un général oublie sa supériorité, moins le soldat en perd le souvenir. Un général doit être accessible à tout le
-' monde. monde.
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Bien que le service militaire obligatoire pour tous les citoyens ait amené dans la constitution des armées de profondes 1. De l'Esprit des Institutions militaires.
modifications, ce portrait du général, que nous regrettons de ne pouvoir citer tout entier, n'en reste pas moins vrai dans ses grandes lignes. S'adressant surtout aux qualités morales du chef il convient aux généraux de tous les temps et de toutes les armées, quels que soient la tactique, l'armement, l'administration, l'organisation même de ces armées. Il existe en tête de Instruction sur le Service Intérieur du Corps de Troupe (2 novembre 1833), sous ce titre très simple : généraux de subordination », une page admirable, « Principes magnifique préambule à nos règlements ; d'une simplicité guerrière. Cet acte de foi de nos Institutions Militaires devrait être gravé sur des tables de marbre dans chacune des trentesix mille communes de France et aussi dans le cœur de tous les citoyens. Nous le citons textuellement :
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La discipline faisant la force principale des armées il importe que tout supérieur obtienne de ses subordonnés une obéissance entière et une soumission de tous les instants ; que les ordres soient exécutés littéralement, sans hésitation ni murmure; L'autorité qui les donne en est responsable et la réclamation n'est permise à l'inférieur qu'après qu'il a obéi. Mais si le bien du service veut que la discipline soit ferme il veut aussi qu'elle soit paternelle. Toute rigueur qui n'est pas de nécessité ; toute punition qui n'est pas déterminée par le règlement ou que ferait prononcer un sentiment autre que celui du devoir ; tout acte, tout geste, tout propos outrageant d'un supérieur à l'égard de son subordonné, sont sévèrement interdits. Les membres de la hiérarchie militaire à quelque degré qu'ils y soient placés doivent traiter leurs inférieurs avec bonté ; être pour eux des guides bienveillants ; leur porter tout l'intérêt et avoir envers eux tous les égards dus à des hommes dont la valeur et le dévouement assurent leur succès et préparent leur gloire.
Nous avons insisté sur le côté moral parce qu'en effet le commandement dans l'armée est devenu aujourd'hui plus difficile qu'il ne le fut autrefois. Les armées contemporaines que traverse au pas de course la jeunesse de toute la nation ne sont plus composées comme jadis de vétérans consacrant leur vie entière à la profession des armes, ayant une confiance absolue en des chefs sous les ordres desquels ils servent depuis vingt
ans. Il faut savoir être de son époque, Les armées de vieux soldats, qui évoquent tout un passé de gloire, mais avec plus d'une ombre au tableau, ont fait leur temps. Aujourd'hui l'armée, image du pays, exige de ceux qui la commandent des qualités multiples et se montre d'autant plus exigeante que le rang du chef est plus élevé. Hâtons-nous de dire que cette condition est presque toujours remplie, à l'honneur de notre armée, par ses officiers de tout rang. Si dans le monde politique et administratif les choix sont trop souvent le résultat de questions personnelles et du triomphe des partis, il n'en est pas de même dans l'armée. La discipline, la hiérarchie, le sentiment du danger et la gloire du pays maintiennent le respect de la loi et font apprécier, aujourd'hui plus que jamais, la nécessité d'avoir des chefs éprouvés inspirant toute confiance. Dans l'armée française surtout, où le jugement de la masse est très sain, on peut être assuré que nos soldats deviennent excellents quand ils sont dirigés par les chefs les plus actifs, les plus vigilants, les plus braves et les plus instruits. L'avancement, récompense et avantage pour celui qui le reçoit, est aussi une charge et un dépôt. Les désastres, le sang du soldat expient les fautes du général et la honte d'un mauvais choix. Aussi quelle garantie de force et de sécurité la France ne trouve-t-elle pas dans son armée nationale composée de soldats qui tous, sans exception, auront puisé dans la famille et dans l'école la vigueur physique, une solide instruction primaire, la moralité des habitudes, la vivacité de l'intelligence et la fermeté du caractère ? L'histoire a prouvé et l'expérience nous montre chaque jour que dans la race française le citoyen possède une aptitude merveilleuse à subir l'influence salutaire de l'éducation et de la discipline. Avec ces jeunes hommes nos -
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État-major.
généraux et nos officiers n'auront plus qu'à appliquer les règlements avec intelligence et ponctualité pour avoir des soldats sans rivaux. Le perfectionnement de la jeunesse française au triple point de vue physique, intellectuel et moral est pour nous tous un devoir patriotique à l'accomplissement duquel nous ne saurions consacrer trop d'efforts et trop de dévouement. Luther a écrit « que l'ignorance est plus dangereuse pour un peuple que les armes de l'ennemi ». Après ce grand réformateur Montesquieu nous a enseigné « que dans les armées romaines on craignait l'oisiveté plus que les ennemis ». Et de Brack, le cavalier modèle, type achevé de la bravoure et de l'esprit militaire de notre race française, nous dit, après ses illustres devanciers, s'adressant à notre jeunesse militaire : « L'étude est l'arsenal dans lequel vous puiserez vos armes au jour de l'action. Étudier avec soin aide à penser et à agir vite. C'est le secret de l'officier modèle, »
Infanterie de marine, 1840. Officiers, 1855.
Sénégal, 1860.
Artilleurs de la marine, 1850-1880.
— L'état-major qui n'a formé dans notre armée un corps spécial que de 1817 à 1879 est un rouage indispensable qui a fonctionné à toutes les époques et dont l'importance augmente avec la multiplicité des rouages dont se compose une armée. Dans les armées françaises l'état-major doit être envisagé à trois points de vue : 1° Service d'état-major; - 3° État-major général; 3° État-major de l'armée.
Service d'État-major.
— Bien connaître la carte, entendre la partie des reconnaissances, soigner l'expédition des ordres, présenter avec simplicité les mouvements les plus compliqués d'une armée ; pourvoir à ses besoins de toute nature, voilà distinguer l'officier appelé au service d'état-major. doit qui ce
Chef de bataillon, 1860.
Inf. Crimée, 1854.
Napoléon, bon juge en hommes, choisissait les officiers d'état-major parmi les officiers des corps de troupe qui lui paraissaient avoir les aptitudes nécessaires. Aujourd'hui le service d'état-major n'est plus un corps fermé. Il se compose, outre les officiers de l'ancien corps lui-même, des officiers brevetés ayant suivi les cours de l'École Supérieure de Guerre ou subi avec succès les examens du brevet d'état-major qui diffèrent selon les grades de capitaine, de commandant, de lieutenant-colonel et de colonel. Le service d'état-major n'est pas un corps spécial, mais un agent général. On ne peut en donner une idée exacte et précise qu'en le comparant au système nerveux du corps humain, qui loin de fonctionner comme un organe déterminé joue au contraire le rôle d'un agent général. Une correspondanceincessante,presque inconsciente, porte la vie dans toutes les ramifications du mécanisme, comme le système nerveux du corps vivant transmet jusqu'aux organes les plus éloignés l'action du cerveau. Cette émanation intelligente du commandement suprême d'une armée; agent -
Tonkin, 1885.
Infanterie de marine, 1870-1875.
universel d'information, d'impulsion et de transmission reliant constamment la tête avec les instruments d'exécution, c'est l'état-major. les ramifications nerveuses viennent suivant « De même que un ordre hiérarchique aboutir à la colonne vertébrale, centre d'activité directement soumis au cerveau, de même aussi toutes les branches variées du service de l'état-major viennent se rattacher à un tronc commun qui est représenté par le chef d'état-major Le chef d'état-major général d'une armée prend le titre de major général. Sur lui repose la haute responsabilité de réaliser l'exécution des plans du général en chef dont il est l'agent de transmission immédiat. Les qualités d'un bon chef d'état-major sont multiples et d'ordre différent. Il doit surtout se pénétrer de la pensée de son général; s'identifier avec lui autant que possible. Pendant les dix-neuf années qu'il fit la Alexandre même le chef d'état-major, Napoléon eut guerre
général. 1»
Lieutenant-colonel R. Henry. — Essai sur la Philosophie de la Guerre. Beaudouin, Paris, 1879. 1.
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Berthier qui avait servi autrefois dans le corps des ingénieurs géographes ! Alexandre Berthier fut constamment, excepté pendant les Cent-Jours, le chef d'état-major puis le major général du général Bonaparte, plus tard' de l'empereur Napoléon. Berthier posséda à un haut degré la plupart. des qualités d'un bon chef d'état-major. Napoléon a dit de lui dans ses mémoires dictés à Sainte-Hélène
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Il avait toutes les facultés d'un bon chef d'état-major ; il connaissait bien la carte, entendait bien la partie des reconnaissances, soignait lui-même l'expédition des ordres, était rompu à présenter avec simplicité les mouvements les plus compliqués d'une armée. » «
compétent,
Ce -ne sont pas
aussi
là de minces éloges de la part d'un juge
État-major général. Après la guerre de 1870;
on
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Cette nouvelle organisation qui a déjà donné de bons résultats a pris le nom d'étatmajor de l'Armée pour bien marquer qu'elle n'est pas liée aux changements de ministères. L'état-major de l'Armée a pour mission essentielle : la préparation et la mise en œuvre des forces actives nationales pour la défense du territoire. Cette préparation comprend trois grandes branches : 1° L'organisation générale; la répartition en corps d'armée; l'instruction des forces nationales en temps de paix "2'0 L'étude et la préparation des plans stratégiques et des lignes de communication 3° La mobilisation, le transport, la concentration et l'organisation des armées en cas de guerre. De tous les nombreux services que comporte l'état-major de l'armée les plus importants, de création toute récente, sont ceux qui ont pour objet : l'étude des plans de campagne et des
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décrets
comprit enfin en France la nécessité de constituer dès le temps de paix un état-major général pour étudier les plans de campagne et préparer les opérations de guerre. Mais cet état-major général n'était que la première direction du ministère de la guerre et n'avait pas à intervenir dans les grands services de l'armée. C'est pourquoi il s'appelait simplement état-major général du ministre. Depuis le commencement de 1890, M. de Freycinet a cru devoir constituer l'état-major général sur des bases plus larges en étendant considérablement les attributions et l'initiative du chef d'état-major général.
État-major de l'Armée.
théories d'opération; la préparation des plans de mobilisation et des marches des corps d'armée suivant des hypothèses données ; le service militaire des étapes et des chemins de fer, quicomprend la commission supérieure des chemins de fer présidée par le major général et les commissions de réseaux chargées de tous les mouvemènts la commission des voies navigables ; la section de télégraphie et d'aérostation militaires ; les. mesures prises pour le rétablissement rapide des communications par terre et par eau ; le service géographique qui comprend : la géodésie, la topographie, la cartographie, et enfin le service des renseignements et des statistiques étrangères. Toutes ces fonctions importantes et variées, qui exigent un travail considérable et une discrétion à toute épreuve, sont confrées à des officiers supérieurs expérimentés., spécialement choisis dans toutes les armes par le chef d'état-major général et nommés par Les officiers de l'état-major de l'armée sont aidés par des officiers choisis dans les états-majors de corps d'armée, qui viennent chaque année faire un stage de plusieurs mois pour leur instruction. Ainsi constitué et placé sous la direction d'un de nos plus brillants commandants de corps d'armée, l'état-major de l'armée est devenu un véritable Institut militaire ; une grande école pour les futurs commandants de corps d'armée. Grâce aux progrès accomplis depuis quelques années dans tout ce qui touche à la préparation de la mobilisation et de la concentration des armées, il n'est pas téméraire de dire qu'avec le nouvel état-major de l'armée nous n'avons plus rien à envier au grand état-major de l'Allemagne. .:.
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Nous voilà arrivés à la fin de ce rapide travail. Terminons par une réflexion. Les conditions économiques du temps présent ont modifié la forme des conflits entre nations. Le mélange des intérêts des différents peuples rendra sans doute plus rares les guerres futures. Mais les moyens formidables, le choc terrible avec lesquels s'engageront les luttes de l'avenir nous font une nécessité lu qu'à aucune épod'appliquer aujourd'hui avec plus de constance que de notre histoire la devise célèbre « Si tu veux la paix prépare la guerre ! » Répétons avec le maréchal Canrobert à propos de cette redoutable inconnue la phrase, si patriotique et si sage en même temps du doyen vénéré des maréchaux de l'Europe : « Pensons-y toujours mais n'en parlons jamais ! »
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NAPOLÉON
NEY.
L'ALBUM DE L'ARMÉE FRANÇAISE COMPRENDRA QUATRE FASCICULES
I.
II III.
L' Ancienne Armée. La Gendarmerie. L
Artillerie.
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L' Infanterie.
La Cavalerie.
Le dénie.
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Les Services Techniques.
IV. Les Trou pes d'A frique. Coloniales.
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Les États-majors.
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Les Corps Spéciaux.