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Y
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2009
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funding from
University of
Ottawa
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L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
EN
TERRITOIRE MILITAIRE LOUIS DE GRANDMAISON CAPITAINE AU 131^ d'iNFANTKRIK
AVEC UNE LETTRE DU GÉNÉRAL GALLIÉNI
PARIS librairie; E.
PLON, NOURRIT
et
G'«,
plon
IMPRIMEURS-ÉDITEURS
RUEGARANCIÈRE.IO
1898 Totis droits réservés
Ei\
TERRITOIRE MILITAIRE
L'auteur duction gers, y
et
et les éditeurs
compris
Ce volume la librairie'
déclarent réserver leurs droits de repro-
de traduction en France la
Suède
a été
en
et la
dans tous
et
les
pays étran-
Norvège.
déposé au ministère de l'intérieur (section de
juillet
PAniS. T\P. K. l'LON,
1898.
NOURRIT KT
C'*,
8,
RUE CARANCIÈrE.
3938.
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
EN
TERRITOIRE MILITAIRE LOUIS DE GRANDMAÏSON CAPITAINE XV
1
3
1
'^
T)
'
1 .N
FA
M-
E RIE
AVEC UNE LETTRE DU GÉNÉRAL GALLIÉNI
PARIS LIBRAIRIE PLON E.
PLON, NOURRIT et
C'%
IMPRIMEURS-ÉDITEURS
RUE GARANCIÈRE, 1898 Tous droits réservés
10
1)^
A
Monsieur
le
çfénéral Galliem,
gouverneur général
de Madagascar.
Mo> Général,
En
travaillant sous vos ordres à la pacification des
hautes régions
du Tonkin,
j'ai
appris au contact jour-
nalier des populations indigènes niale ne se
campagnes
statistiques,
ou commerciales
des combinaisons financières des
que l'expansion colo-
résume pas tout entière dans des
dans
et
militaires. J'ai acquis la conviction
ce sont précisément les forces
que
morales dont on ne parle
pas et qu'on afTecte trop de négliger qui seules pourraient
rendre un peu de
nos
à
vitalité
entreprises
françaises de colonisation. Si je c'est
me
dans
montrer,
décide à imprimer tardivement ce volume,
le seul
en
but d'affirmer cette conviction
prenant
pour
accomplie par vous dans
le
sujet
territoire
de
et
de
l'œuvre
d'étude
Langson,
qu'elle repose sur des bases raisonnables.
Je n'ai pas et ne puis avoir la prétention d'exposer ici,
mon général,
vos idées sur les choses coloniales, mais
seulement de défendre la
celles
que
je
me
suis faites
pratique de vos principes et de vos procédés.
a
Grandmaiso^'.
1224548
dans
— C'est
vr
—
donc une marque, précieuse pour moi, de bien-
veillance personnelle
que
je viens vous
vous priant d'accepter l'hommage de ce
gnage insuffisant de ration et de
ma
demander en livre,
profonde estime, de
mon dévouement
témoi-
mon
très respectueux.
Ga.\>DMAIS0N,
admi-
Tananarive,
le
11
décembre 1891
Le général Galliem, commandanl en chef le corps d'occupalion et gouverneur général de Madagascar, à Monsieur le capitaine de Gra>dmaiso>", du i3i^ d'infanterie à Coulommiers
Mon cher Vous
de Grandmaison,
savez quel affeclueux souvenir j'ai conservé de
tous ceux qui m'ont secondé dans l'œuvre de pacification et d'organisation qui m'avait été confiée au Tonkin.
dévoué que
C'est grcàce à leur concours et
parmi
ces travailleurs
plus persévérants, lités
ont rendu
Dès efforts
mon que
un de ceux dont
ma
pu
réussir,
les brillantes
qua-
tâche agréable, presque aisée.
arrivée, le
j'y avais
j'ai
vous avez toujours été un des
Tonkin m'avait empoigné les et que j'avais vu prodiguer :
dépensés
autour de moi avaient été couronnés des meilleurs résultats
;
durant près de quatre ans,
j'avais
donné
à la
tâche qui m'avait été confiée sur nos frontières de Chine le
meilleur de
moi-même
:
ce n'est pas sans regret
je l'avais quittée, et ce n'est pas sans
que
émotion que
je
viens de retrouver dans votre livre l'histoire de nos luttes contre l'anarchie qui régnait là-bas, l'exposé des
— méthodes que nous avons la vaincre, si
riches et
—
VIII
pour
suivies
pour préparer à
la
combattre
fécondes.
si
Votre ouvrau;e arrive à son heure
nos idées sur
:
choses coloniales sont assez confuses en France
beaucoup
écrit sur la matière,
beaucoup discuté
aucune svnthèse, basée sur des
faits,
sur
la
de guide pour
on a
:
mais
pouvant
Ces quelques
l'avenir.
les
;
pratique,
n'avait encore condensé des idées générales, servir
et
des régions
la colonisation
pages
seront la révélation de ce dont est capable aujourd'hui l'officier
aux colonies
son rôle dans
la
;
elles
montreront quel doit être
longue période qui
l'œuvre utile et féconde que, seul,
il
suit la
conquête
peut accomplir
trouve parfaitement et clairement exposée
;
et, si
;
s'y
je fais
quelques réserves sur certaines de vos idées personnelles, développées
dans
en somme, que ce sont jours guidé et que
Madagascar,
comme
la
première partie, je puis dire, doctrines qui m'ont tou-
là les
j'ai
mises en application,
je l'avais fait
au ïonkin
:
à
ici,
l'expé-
rience confirmera, je l'espère, leur valeur.
Merci donc de l'hommage que vous m'en
merci du souvenir que vous avez gardé de moi
récompense ne
me
va plus
tion et l'estime des officiers
borateurs
sur
troublées,
aujourd'hui
ces
frontières
de pouvoir vous donner tliie
toute
particulière
Grandmaison,
à
au cœur
que
si
cjue
eus
de Chine,
colla-
naguère
mes sentiments
Ic^
G.
si
heureux
ma svmpamon cher de
marques de
crovez bien,
;
nulle
l'approba-
comme
tranquilles. Je suis
ici les
el
j'ai
faites :
plus alTectueux.
PREFACE
Les Français voya^ont peu, mais quand l'un d'eux hasarde à passer retour
le
la
mer,
il
se
éprouve généralement au
besoin de faire connaître ses impressions et
de donner son avis sur
la politique coloniale. C'est
une
pardonnable. L'activité croissante de produc-
faiblesse
l'accumulation de documents originaux qui en
tion,
résultent répondent
en
effet
à
un
besoin social.
On
s'occupe beaucoup en France de choses coloniales et le
grand public y prend goût. Malheureusement
les
diver-
gences d'opinion et l'âpreté des discussions sont
telles,
entre nos leur
hommes
compétents, qu'il
est
impossible de
emprunter de confiance une théorie de colonisation
toute
faite.
torité
En
l'absence de traditions suivies et d'au-
reconnue en
la
matière, c'est dans
le récit
choses vues et dans la libre discussion des
faits
sur place qu'il nous faut encore aller trier
un
des
observés à
un nos
éléments d'appréciation. L'élaboration de ces matériaux par l'opinion publique produira peut-être avec
un courant
d'idées assez
cohérent
et
assez
le
temps
caractérisé
pour servir de base à un corps de doctrine coloniale mettre
un terme
et
à nos indécisions et à nos tâtonne-
ments. Grandmaison.
1
PRÉFACE
2
Il
donc
est
utile
de dire ce qu'on
le discuter.
ambition que
celle d'apporter à
bution très modeste à d'idées
mise à
la
vu
a
en publiant
Je n'ai pas,
permis de
et
ces notes, d'autre
mon tour une commune de
réserve
la disposition
contrifaits et
de ceux qui s'intéressent à
nos établissements d'Extrême-Orient.
Avant eu
la
bonne fortune de
servir
plus de deux ans sous les ordres directs
jourd'hui général) Gallieni dans j'ai
pu
y suivre dans
et d'organisation des
le détail
pendant un peu
du
colonel (au-
région de Langson,
la
son œuvre de pacification
hautes régions. Ce coin du Ton-
kin était justement en
1
894-1 896
le
champ
furent mis en pratique, sous sa direction,
d'essai
procédés de colonisation qui semblent
et les
où
principes
les
au-
dès
jourd'hui nous promettre à Madagascar des succès auxquels nous n'étions plus accoutumés. C'est à ce titre qu'il
peut être intéressant d'y suivre, dans
étroites
du
confié,
la
commandement
petit
les
limites
territorial qui m'était
première application de ces principes
et
de
ces procédés.
Mais pour en dans leur jour,
ment
local. 11
crire
la
faire il
ne
comprendre
portée et les mettre
sortir
un peu du docu-
en
effet,
seulement, de dé-
s'agit pas,
réorganisation
Tonkin. Ce qu'il
la
nous faudra
d'un territoire
est intéressant d'y
militaire
trouver,
première application méthodique de principes très conds
et les
au
c'est la fé-
éléments d'un progrès d'ordre général.
J'ai essayé
de comprendre, en travaillant à l'œuvre
commune, pourquoi nous avons si médiocrement réussi dans un semblable pays. En comp&rant les efforts aux progrès, les dépenses aux bénéfices, je me suis demandé ce que nous sommes venus chercher en ExtrêmeOrient.
PRÉFACE
Mon
but
est
de faire
Il
ici
connaître
que
possible, la conviction
K
me
je
partager,
et
s'il
est
suis faite sur place.
eût été naturel, peut-être, pour y parvenir, d'apporter dans l'ordre où elles se sont produites, les impres-
sions qui l'ont
peu
peu formée
à
applications pratiques essai
dans
mesurer
le
les
les
Tonkin en
liant
dans leurs
et d'étudier
quelques principes mis en avant d'en
iSg/j-QO,
conséquences générales.
Mais cela eût exigé des développements que ne comporte pas le cadre nécessairement restreint de ce travail.
Obligé de négliger j'ai
dû me borner
intermédiaires
les
les transitions,
et
à présenter d'abord le point d'arrivée,
générales, puis à suivre le détail de leur mise
les idées
un cas particulier. un ambitieux début que de se demander d'abord Qui nous a menés au Tonkin, de rapen pratique dans C'est,
il
est vrai,
action en Extrême-Orient et
peler les phases de notre
de chercher
les
vera peut-être qu'il d'aussi haut
On
causes de son peu d'efficacité.
pas nécessaire de
n'était
pour arriver au
troupartir
détail de l'organisation
mi-
morceau des hautes terres. Devant l'apparente disproportion de ces deux sujets, il viendra sans doute aux lèvres de c[uelques-uns l'ironique remarque du poète litaire et politique
d'un
très
petit
:
Amphora
«
cœpit
simplement que
Je répondrai très n'est pas
de faire
de dire ce que
que dès
un
j'ai
qu'il s'agit
nisation, les
cur iirceus exit
institui...
livre
vu
et ce
dans
que
détails
de
))
prétention l'art,
mais
je crois vrai. J'ajouterai
d'un travail
moindres
ma
les règles
?
social,
comme
la colo-
doivent être la consé-
quence raisonnée de principes directeurs
et
que
l'exa-
PRÉFACE
^,
incii
(le
CCS principes
est
mon
à
sens
la
nécessaire
préface de loule élude coloniale.
Reste
le grief
plus sérieux d'avoir visé trop haut et
abordé sans autorité d'aussi vastes questions. J'aurais
mauvaise grâce à
le
discuter,
lionune d'avoir une opinion fol.
— C'est ce que
le
mais et
de
il
la
est
permis à tout
défendre de bonne
veux essaver.
i
CHAPITRE PRE:MIER impossible dans l'examen des circonstances qui nous ont amenés au Tonkin de découvrir une ligne de conduite arrêtée d'avance. La France a conquis l'Indo-Ghine, en dehors de tout calcul, pour obéir instinctivement à son rôle traditionnel. Aperçu
Il est
—
—
historique.
Que sommes-nous venus engrenage
la
France
prix des sacrifices
au ïonkin ? Par quel amenée à conquérir, au
faire
a-t-elle été
que nous connaissons,
empire
cet
d'Annain que nous n'avions jamais convoité? \ eu
là
l'exécution
d'un plan,
mûri par
un phénomène d'expansion
Est-ce
d'Etat
?
par
voisinage, la facilité de colonisation
le
d'assurer la vie à
Nous serons
un
explicable
ou
trop-plein de population
forcés de reconnaître
que
la
a-l-il
hommes
les
le
besoin
')
volonté des
hommes
a été le plus souvent violentée par les événe-
ments
que
ciales
En
et
ce
ne sont pas des considérations commer-
qui nous ont conduits en Extrême-Orient.
observant la France s'encaser
comme
à re2:ret et
sans projets arrêtés dans cette extraordinaire aventure, les
anciens auraient seulement vu
Fatum », de cette force hommes et les peuples, se «
là
un
caprice de ce
des choses qui, dominant les
un
faisait
jeu de
les
plover à
son implacable fantaisie. Pour nous, peuple chrétien, cette force des choses s'appelle se plaît
France
la «
Providence
»
qui
encore de nos jours à faire 'accomplir par les
œuvres de
civilisation
reuse initiative pour lesquelles
il
la
véritable et de génélui faut
un instrument
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
6
Aucune autre nation ne porte dans son
tliol\.
(!('
les revers
nelle poursuivie à travers les défaillances et
comme aux l'esprit
époques de calme
honorable pour
est assez
d'en répudier
Au moment
de prospérité. Ce rôle
et
ne nous vienne point à
cju'il
la tradition.
de parler du ïonkin,
instant au-dessus des statistiques tions de transit, sans
Nous avons
portance.
complètement désespérer sible
fait
du bon
liis-
profonde d'une mission exception-
loiro la trace aussi
faut s'élever
il
dédouane
et
un
des ques-
en méconnaître d'ailleurs l'implus souvent de ce côté assez
le
fausse route, pour qu'on en vienne à
sens de la France
de découvrir, au fond de
n'est plus pos-
s'il
ses entreprises
d'outre-
mer, encore une étincelle de ce prosélytisme désintéqui est
ressé
la
inarque de notre race
et
en a
fait la
fortune.
Cette étincelle,
il
est vrai, a
bien pâli et
les
préoccu-
pations de cet ordre ne s'avouent plus guère aujour-
La
d'hui.
du nord nous
rapacité des peuples
réputation de gens légers
et
peu
a fait
pratic^ues. C'est
être dans la crainte de justifier leur appréciation
nos
hommes
les
intérêts véritables
une
peut-
que
politiques ont trop souvent perdu de vue
de
la
France,
en
dépouillant
extérieurement son expansion de tout caractère généreux.
Ils
l'action
ont ainsi
morale
sacrifié
et affecté
de parti pris
de
le
le
bénéfice de
négliger, alors
que des
rivaux plus avisés ne reculent devant aucun sacrifice
pour
s'en assurer les avantages.
Xe voyons-nous pas
les
Anglais, exploiteurs admirables et commerçanls de pre-
mier ordre,
s'elTorcer
en toute occasion de dissimuler
leurs préoccupations de lucre et leurégoïsine légendaire
sous des dehors de civilateurs chrétiens désintéressés
')
Pourquoi donc avoir
et
de tuteurs
l'air d'écoliers pris
APERÇU HISTORIQUE en faute il
et
plaider les circonstances atténuantes
de nos entreprises
s'agit
7
les
vue de
la civilisation véritable et
tions?
S'il est
du bien des popula-
cjuelquefois difficile de les justifier par
leurs conséquences immédiates, politic|ues ciales, c'est
c[u'en
chacune
réalité
ou commer-
d'elles porte l'em-
preinte d'une volonté supérieure à celle des
qui
les
quand
plus fécondes au point de
hommes
ont conduites souvent à contre cœur. Nos expé-
ditions coloniales ont toutes gardé de ce conflit la phy-
sionomie d'aventures
engagées par entraînement
et
poursuivies par amour-propre.
Au
surplus, laissons parler les
faits.
Dans
leur sincé-
rité, ils
peuvent seuls nous donner l'impression pro-
fonde
complexe
et
c|ui se
dégage de cette série
presque inconscients, de ce et
d'efforts
mélange d'actions héroïcjues
de pitoyables reculades, de cette supériorité dans
l'action individuelle le plus
souvent paralysée par
le
désordre et l'illogisme dans la direction qui, au Tonkin
comme niale. 11
toire
ailleurs,
forment
la
trame de notre action colo-
ne peut être question d'entreprendre
ici l'his-
de notre empire indo-chinois. Cette lourde tâche
tentera j'espère c[uelque
plume
autorisée
aura mis à leur place définitive
les
quand le temps
événements
et les
hommes. Mais pour répondre à la question posée au début de ce chapitre « Que sommes-nous venus faire au Tonkin? », il nous faut rappeler l'enchainement des circonstances qui ont amené notre établissement défi:
nitif
en i884- Ce sont
faits
connus de tous, aussi
cet
aperçu rétrospectif sera-t-il limité au développement indispensable pour appuyer une opinion.
Dès 1627, un Français,
le
père de Rhodes, avait fondé
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONRIN
8
au Tonkin dos missions dont retrouver
A
cette
sos
époque l'antique dynastie des Le régnait sur
tout l'Annam, de l'empire des siècles
en décadence (Slam
frontières de
vaste
successeurs devaient
cent cinquante ans plus tard.
les traces
Kmers, déjà depuis des
et
Cambodire) jusqu'aux
Chine. Mais l'autorité réelle dans ce
la
rovaume
était
partagée entre deux familles de
vice-rois liéréditaires appelés « Cliua »
au Tonkin sous capitale et les «
:
les « Trlnli
»
main des rois Le dont Hanoï était la Nguyen » dans les provinces du sud.
la
montrent en 1628 le roi Lè-dul-Kv guerrovant au Xord contre les princes féodaux de Langson et de Cao-Bang puis réprimant une révolte du « Seigneur du Sud », Chua de Cocliincliine,
Les annales annamites nous
Nguven-Pliuoc-Nguven ancêtre de seulement
d'hui régnante. C'est
la
dvnastie aujour-
au milieu du
siècle
Lèabandonnnent Hanoï et transportent le siège de leur gouvernement à Hué pour surveiller de plus près les provinces du Sud. dernier que les rois
La connaissance de
ces
notions, trop ignorées des
premiers négociateurs français, nous eût évité de graves
mécomptes.
Il
en ressort en
effet
que toute l'Indo-Chine
française obéit depuis plusieurs siècles
annamites. Le Tonkin, loin d'être,
aux souverains
comme on
l'a
cru,
une conquête récente, est le berceau de l'Annam. Le nom de Tonkin n'existe même pas pour les habitants, et jusqu'à l'extrême frontière de Chine le sol est qualifié
par eux de
occupation teurs,
les
trompés par
Tonkin sous voir
«
Terre
d'Annam
explorateurs et
le
les
nom
où
il
».
Au début
de notre
premiers administra-
fréquentes rébellions menées au
dos anciens rois
un attachement durable
locale, là
les
n'y avait
le
Le,
avaient cru
une ancienne dvnastie plus souvent que prétexte à à
APERÇU HISTORIQUE pillage. Ils
ment
en avaient conclu que
9
Tonkinois
les
n'ai-
pas les Annamites et qu'il y aurait profit à les en
détacher plus encore. La cour de Hué, comprenant
le
parti qu'elle pourrait tirer de cette erreur, se garda de
put obtenir ainsi qu'en i884
la dissiper et
l'Annam
central fût
verrons
combien
séparé de celui
de
?sous
régime nous a
différence de
cette
le sort
du Tonkin.
causé d'embarras et de difficultés dans la suite.
Revenons
De 1770
à nos débuts.
1800 une révolte
à
générale et une invasion des terres basses par les Tav-son
(montagnards de l'Ouest) dévastent
péninsule ou
la
l'anarchie se prolonge pendant de longues années après le
la dvnastie des Le. Aux environs de Chua de Cochinchine Nguyen-Anh qui sera
renversement de
1786
le
plus tard l'empereur Gia-Long, chassé à son tour
et
réduit aux abois, rencontre M^"" Pigneau de Behaine,
évoque d'Adran, missionnaire de Cochinchine
et
du Siam
apostolique
s'ouvre à
et
lui
du
projet
qu'il
demander secours aux Espagnols ou aux HolL'évèque français voit là une occasion provi-
l'orme de landais.
France
dentielle de conquérir à la ce
magnifique empire.
fier
son jeune
fils,
s'embarque pour
à Versailles avec le
et
au christianisme
décide rSguyen-Anh à lui con-
Il
France
la
comte de Montmorin
et
28 novembre 1787. La France promet une corps de débarcpement et piastres.
L'Annam
un subside de cinq
cédera en échange
la
conclut
le traité flotte,
du un
cent mille
baie de
Tou-
rane, l'archipel de Poulo-Condore et garantira le libre exercice
du christiamisme dans
tout l'empire.
Les embarras intérieurs, préludes de
vont empêcher Louis
XYI
mais l'évèque d'Adran ne ture de la France.
Il se
de tenir
ses
la
Révolution,
engagements
;
laissera pas protester la signa-
rend à Pondichéry, arme à 1.
ses
L'EXPANSION FRANÇAISE AU ÏONKIN
10
doux navires, engage des
frais
officiers,
des médecins. Sur ses conseils,
des ingénieurs,
Tarmée annamite
est
reconstituée à Saigon. Avec l'aide de cette poignée de
Français,
Nguyen-Anh reconquiert le royaume d'Annam
jusqu'aux frontières de
la
Chine
et vient
nom
cou-
se faire
ronner empereur à
Hué
Énergique
nouvel empereur, mettant à profit
et actif, le
les conseils et les services s'est
attachés
S
sous le
de Gia-Long.
des quelques Français qu'il
réorganise son empire et
le
gouverne en
paix pendant trente ans. Le souvenir de cette restauration est resté très vivant aux environs de Saigon
où
la
un tomheau magnifique à son bienfaiteur l'évèque d'Adran. La mémoire de cet homme remarcjuable est encore l'objet, chez les Annagratitude de Gia-Long a élevé
mites de Cochinchine, d'un respect presque superstitieux.
Mais
la
reconnaissance
est
guère demander aux nations,
une vertu
même
ne faut
qu'il
en Extrême-Orient.
Les missions furent récompensées des services rendus par cinquante ans de l'excès
notre
même
persécutions incessantes. C'est
de ces violences qui forcera peu à peu
intervention.
Cette intervention sera
du
reste
bien intermittente et dépourvue de sanction pendant la
première moitié du
En 1843
le
siècle.
commandant Lévèque, monlrant
villon français à
le
pa-
Tourane, apprend que cinq mission-
naires attendent la mort à llué.
Il
les
réclame
et
obtient
leur mise en liberté.
et pour ne citer que le plus connu, le codu génie Olivier reconstruisait, d après les types de Yauban cl de Cormontaigne, les citadelles de lAnnani et du Delta du Tonkin qu il nous faudra prendre d'assaut quatre-vingts I.
Entre autres
lonel
ans plus tard.
'
n
APERÇU HISTORIQUE
En
1844»
c'est l'amiral Cécile
l'évèquc français, Ms"" Lefèvre,
qui exige
la
condamné
remise de à
mort
à
Hué.
En
1847,
Gloire
» et «
commandant
^^
La \ictorieuse
Lapierre,
» est à
des remontrances. Tliieu-Tri, le roi
de
le faire
par
un
du moment,
tomber dans un guet-apens. Prévenu
«
à
La
faire
essaye
temps
chrétien indigène, Lapierre brûle et coule en
deux heures
la
annamite avant de quitter ces meurt de colère, dit-on, en appre-
flotte
parages. Thieu-ïri
nant
avec
Tourane pour
la chose, et laisse le
auquel nous aurons à
trône au trop célèbre
faire
Ïu-Duc
pendant trente-deux ans ^
I. Notons en passant l'origine, sous le règne de Tu-Duc, des garnisons chinoises et de la grande piraterie au Tonkin. En 1847. Tu-Duc, pour avoir raison des révoltes incessantes des tribus du Haut-Tonkin, qui supportaient malaisément le gouvernement des mandarins annamites, demande et obtient 1 envoi de garnisons chinoises qui occupent Cao-Bang, That-Ké et Langson. Nous les retrouverons quarante ans plus tard vivant toujours sur le pays que cette charge aura ruiné.
Aux
environs de
1860,
les
bandes formées par
la
grande
insurrection chinoise dite des « Taj-Ping », après avoir dévasté une grande partie de la Chine et mis en péril la cour
de Pékin, étaient venues se heurter près de Shang-Haï au corps expéditionnaire franco-anglais. Elles y avaient subi un premier échec et bientôt leurs débris, dispersés et poursuivis par les généraux chinois, avaient dû chercher un refuge hors des frontières de lEmpire, en particulier au Tonkin. Les Pavillons Noirs, sous la conduite de leur chef Luu-vinh-Phuoc, prirent Laokai et le fleuve Rouge. Les Pavillons Jaunes, moins forts, se contentèrent de Ha-yang et de la rivière-Claire, confisquant à leur profit le transit de ces voies commerciales et se livrant à de continuelles incursions dans les provinces du Delta.
En
1867, Tu-Duc, impuissant à s'en défaire, réclamera de
nouveau laide de la Chine. Un haut mandarin, envoyé de Pékin pour étudier la question, conseillera au souverain annamite d'abandonner Laokai et Ha-yang, moyennant quoi les bandes chinoises s'abstiendront de dévaster
les basses provinces.
FRANÇAISE AU TONKIN
L'EXPAiS'SION
12
Plus hoslilc encore que sation étrangère,
il
de missionnaires français
coup mis à mort
ses prédécesseurs à la
redouble de violence.
et la
et
France
civili-
Une douzaine
espagnols sont coup sur se décide à
envoyer, d'ac-
cord avec l'Espagne, une mission dirigée par M. de
Montignv pour faire des remontrances et exiger un traité. Montignv est reçu par des avanies et il faut avoir recours à 1' « ultima ratio » pour obtenir réparation de cette nouvelle insulte.
Le 3i août i858, une escadre franco-espagnole, sous les
ordres de l'amiral Rigault de Genouilly,
devant Tourane dont faire traîne
fond dans les
mains
les forts
en longueur,
la presqu'île
on
vides,
le
mouille
sont emportés. Mais l'afcorps expéditionnaire se
de Tourane et pour ne pas rentrer
se décide
(i5-i7
fév.
1809) à prendre
Saigon.
Pendant l'expédition de Chine, une franco-espagnole de huit cents Palanca-y-Gutliérez et
le
hommes
petite garnison
avec le colonel
capitaine de vaisseau d'Ariès
nous conserve ce coin de terre au prix d'héroïques efforts. Une armée de c[uinze à vingt mille Annamites,
commandée par
le
vieux maréchal Nguyen-Tri-Phuong,
que nous reverrons au Tonkin, avait étroitement bloqué la ville par une circonvallation de plusieurs kilomètres connue sous le nom de « lignes de ki-hoa » Elle gagnait peu à peu du terrain sur la petite troupe européenne que les fatigues, le climat et les combats réduisaient de .
jour en jour.
Tu-Duc
Il
était
temps que l'expédition de Chine
devra se contenter de cette liuniilianlc solution et c'est modus vivendi que dans toutes nos expéditions au Tonkin nous trouverons les Pavillons Noirs ou Jaunes toujours prêts à donner aux mandarins annamites, contre nous, un ai)pui dont ils se payaient largement sur le pavs.
^^ràce à ce
APERÇU HISTORIQUE
Au
prît fin.
jette trois
retour, ramlral Cliarncr (G février iS6i)
ou quatre mille hommes
après
Saïg^on
i3
jours de
plusieurs
à terre et
débloque
combats acharnés.
L'amiral Bonnard, successeur de Charner, occupe sans peine
les
provinces de My-tho, Bien-IIoa, Bariaet Vinh-
Loni>-.
c
A que kin,
de ces succès
la suite
en présence des embarras
et
un soulèvement presque général au TonTu-Duc demande la paix et on lui accorde un peu
lui
cause
hâtivement
le
premier
traité
de Saigon (5 juin 1862).
Nous gardons Bien-Hoa, My-tho, Saigon
L'Annam
Condore.
ouvrir trois ports au Il
Poulo-
commerce européen.
eût été prudent, avant de s'engager ainsi, de suivre
événements
les
et
s'engage à payer vingt millions et à
c[ui se
dant chrétien de
la
passaient au ïonkin.
Un
descen-
dynastie des Le avait réuni dans
les
du nord des bandes déjà nombreuses et occupait sept provinces du Delta, moins les citadelles. Il a^ait fait faire des ouvertures au gouvernement de provinces
Saigon, réclamant seulement
On
n'en tint pas compte
qualité de belligérant.
la
de cette aventure, qui eût
et
peut-être changé la face des choses, l'idée fausse
que
nam. Le
traité
tionner,
ne
le
ïonkin
de 1862,
fut
il
il
resta seulement
désirait se séparer de l'An-
est à
peine besoin de
jamais observé par
les
le
men-
Annamites qui
ne payèrent pas, n'ouvrirent aucun port et s'emplovèrent dès le premier jour à
nous créer des embarras en
Cochinchine. L'amiral de
l'Annam, possible
:
il
la
Grandière, dès i863, comprit qu'avec
n'v avait pour nous qu'un arrangement
tout prendre. Avant tout, pour assurer à notre
colonie naissante
le
transit de
Doudart de Lagrée imposer
Mé-Kono-,
et signer
il
envoie
notre protectorat
L'EXPANSION FUANÇ.VISE AL TONKIN
i',
sur le
Cambodge
(ii août i863). Puis, sans hésiter et
sans tenir compte des réclamations de Hue,
provinces de Cochincliine,
six
il
occupe
les
organise et prépare
les
notre protectorat sur tout l'empire. Malheureusement
ne sera pas suivie
sa politique
et
nous faudra vingt
il
de sanglantes aventures pour
ans de tergiversations
et
en revenir au plan de
cet
homme
supérieur.
La Gran-
dière est le véritable fondateur de notre empire d'Ex-
trême-Orient
de
et l'artisan
la prospérité
de
la
Cochin-
cliine.
La guerre de 1870 va du porter à notre prestige
un
reste arrêter nos progrès et
tel
coup que Tu-Duc n'hési-
tera pas à offrir la paix à l'amiral de Cornulier Lucinière
movennant
la
restitution pure et simple de toute la
Cochincliine. i\ous arrivons, en directe de la
1872, à
la
première intervention
France au Tonkin. L'amiral Dupré, gou-
verneur de Cochincliine, esprit clairvoyant mais man-
quant de consistance,
dans une situation
se trouvait
diflicih^ Pris entre les ordres très nets
du cabinet de
Paris et le sentiment de sa responsabilité, la passivité
voulue pour
dangereuse, ni les
le
se
n'avait ni
caractère suffisant pour se permettre
audaces fécondes qui forcent
initiative
il
renfermer dans une inaction
prendra
la
les
événements. Son
forme de désobéissances
qu'il s'ef-
force de dissimvilcr- Les réticences, les désaveux et les
habiletés qu'il emploiera
perdre tout l'honneur
pour
et à la
se
couvrir, lui feront
France tout
courageuse entreprise de Dupuis
cl
le fruit
de
la
de l'admirable cam-
pagne de Garnier.
Dans
le
courant de l'année 1872, l'amiral Dupré se
]ilaint officiellement à la
cour de Ilué des massacres de
chrétiens, des pillages et des désordres qui se succèdent
APERÇU HISTORIQUE
Tu-Duc
sans rclàclic au Toiikin.
contre l'aide
les pirates
des habitudes annamites, prend
cour au sérieux «
Bourayne
et
»,
envoie
dans
les
très
mal
mandant Sénèz,
se déclare
chinois de terre et de
du f-ouverneur de Saigon. le
i5
mer
Celui-ci, les
impuissant et
demande
peu au
fait
explications de la
commandant Sénèz
avec le
eaux de Haïphong. Le comreçu, rentre à Saigon.
Depuis l'exploration du Mé-Kong, où Doudart de Lagrée avait trouvé
mort en 18G8, le monde comdu fleuve Rouge. Le Mé-Kong,
la
mercial se préoccupait
ayant été reconnu impropre à l'écoulement des produits
du lunnan vers la mer, on espérait trouver dans le ileuve Rouge une route commerciale relativement facile et plus courte de cinq à six cent lieues que la voie suivie jusque-là par
Un
voyage au
Yang-Tsé
Yunnan,
Yunnan en
187 1.
de munitions pour
En l'appui
la
Shang-Haï.
Il
fait
un premier
avait été bien reçu par
maréchal Ma, vice-roi du une grosse commande d'armes
et le
lui avait confié les
tenait contre les rebelles
sud de
et
Jean Dupuis, avait
mandarins chinois,
les
et
le
Français,
besoins de la guerre qu'il sou-
mahométans des provinces du
Chine.
Dupuis est en France où il demande du gouvernement. L'amiral Pothuau l'encourage
1872,
dans son entreprise, tout en lui déclarant qu'il ne peut conqiter sur ral
Dupré,
une intervention
officielle.
qui s'intéressait
commerciale du fleuve Rouge, reçoit s'engage à lui faciliter l'entrée
A Saigon, l'ami-
vivement à l'ouverture fort bien
Dupuis
et
du Tonkin.
En novembre 1872, après avoir fait ses achats à Hong-Kong, Dupuis, escorté par « Le Bourayne », se présente devant Haïphong avec deux bateaux à vapeur, une chaloupe également à vapeur et une grosse jonque.
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
tG
Les mandarins, étonnés, déclarent qu'ils ne peuvent l'autoriser à entrer
dans
Dupuis attend
la cour.
le fleuve
sans en avoir référé à
pas de réponse, remonte à Hanoï
une
M^'*"
où son arrivée cause
On mande
véritable panique.
français,
ne recevant
([uin/o jours, puis,
en hâte l'évèquc
Puginier, que pour la première
condjle d'honneurs et le Nice-roi lui
fois
on
demande d'interNC-
nir pour éloigner Dupuis. L'évèquc « perd son latin » à evplicpicrau
libre
prince
Hoang
les
avantages du commerce
obtient seulement qu'on s'abstiendra de vio-
il
;
lence en attendant les instructions de la cour.
Dupuis cependant
remonte au Yunnan où 3o
le
avril,
rentre à
il
est
reçu avec enthousiasme,
Mang-Hao, le i6 mars 1873, et Hanoï avec le chargement de huit
son chargement
livre
décide à forcer la consigne,
se
à
grosses barques et i5o soldats chinois
Ma
lui a
donnés
comme
l'eau
que
du
riz,
boit son escorte.
on va
le
on
maréchal
lui crée des
ses
jonques, on
jusc^u'à
empoisonner
embarras de toutes sortes: on coule refuse de lui vendre
que
escorte. Là,
La cour de Hué
s'adresse à
au 2:ouverneur de Saison et même aux Anglais de Hong-Kong pour expulser Dupuis dont la Aie""
PuGfinier,
présence à Hanoï les
remue l'Indo-Chine
Annamites avaient
de sable
allait
le
entière,
comme si
pressentiment cjue sur ce grain
définitivement trébucher
le viel
empire.
du gouvernement annamite et les réclamations de Dupuis qui demande une grosse indemnité, l'amiral Dupré juge qu'il ne peut tarder plus longtemps à intervenir. Le moment lui Devant
paraît
les lettres
pressantes
opportun de réclamer l'exécution des
la libre
navigation du fleuve Rouge. Mais
résoudre à rompre, en brusquant
il
traités
et
ne peut
se
les choses, les
labo-
rieuses négociations entreprises avec la cour dans le but
APERÇU HISTORIQUE d'obtenir
un nouveau
arranger sans
politique. .Espérant tout
traité
compromettre
11
prend
le parti
De désavouer publiquement Dupuis
1°
mettre pour à la
même
par
la
2°
se
17
le faire partir
époque une
et
:
de s'entre-
(tout en lui faisant avancer
somme
de trente mille piastres
Hong-Kong and Sliang-Haï Bank) D'envoyer un commissaire au ïonkin accompagné ;
d'une petite escorte, avec l'ordre d'arranger
Dupuis
ment autant que La duplicité
manions
l'alTaire
mission demi-avouée d'obtenir, pacilique-
et la
du
possible, l'ouverture
un procédé
est
fleuve
Rouge.
que nous
politique
Dupré
assez mal. Les habiletés de l'amiral
et
son double jeu devaient nous mener à un désastre. Si Garnier,
comme on
l'avait dit
aux Annamites,
Tonkln pour expulser Dupuis,
il
avait mission d'imposer l'ouverture il
en donner
fallait lui
données
les
communications
jour complet sur cette
ment
au
du
fleuve Rouge,
moyens. Les instructions
à Garnier, les lettres écrites
de Hanoï,
et
les
allait
devait aller seul. S'il
triste
aux évoques de Hué
à la
affaire.
cour ont
fait
un
Rappelons seule-
les faits.
Le choix du gouverneur de Saigon
porté sur
s'était
Francis Garnier, alors lleutement de vaisseau et ancien
compagnon de Doudart de Lagrée dans son exploration du Mé-Kong, pour remplir les fonctions de commissaire au Tonkin.
C'était
un homme
droit et énergique,
con-
naissant bien l'Annam, grand esprit et grand cœur. 11
en a
Au vingt
fait la
preuve.
milieu d'octobre 1878,
hommes
et
deux
il
quitte Saigon avec cent
petits vapeurs,
tions écrites et verbales assez larges lettre particulière ral
me donne
—
il
les
muni
traduise par ces mots
carte blanche
»
d'instruc-
pour que dans une :
«
L'ami-
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
i8
Il
est
mal reçu
Hanoï où son escorte inspire de
à
la
méfiance. Les mandarins refusent de traiter toute aulre
question que
le
départ de Dupuis et déclarent c^u'à cela
doit se borner sa mission.
Devant
l'attitude
de Garnier,
vieux maréchal Nguyen-Tri-Pliuonf^, notre adver-
le
de Saigon, ne cache pas son intention d'en avoir
saire
raison par la force. •Noirs et
Il
réclame l'assistance des Pavillons
rassemble en hâte des troupes dans
de Hanoï. La situation devient critique vigoureuse peut seule sauver
Le
17 novembre,
Le
le vice-roi blessé à
Avec une
trois jours
20, à 7 heures
minutes de combat
la citadelle
une action
troupe française.
Garnier envoie un ultimatum aux
mandarins leur donnant troupes.
la petite
et
pour licencier leurs
du matin,
la citadelle est
après trente-cinq
emportée d'assaut
et
mort.
une sûreté de vues remarquables, un jour, organise l'administration, prend la responsabilité des événements, se met en rapport avec les mandaj ins provinciaux bien disposés la activité et
Garnier, sans perdre
;
confiance renaît autour de lui. Cependant les Pavillons
Noirs descendaient sur Son-Tay, la province de
Dinh commençait
soulever,
à se
il
fallait
Nam-
aller
de
l'avant.
En tête
quinze jours, quelques
de cent vingt soldats font
Balny d'Avricourt avec
hommes prend Phu-Ly saut la citadelle de
«
hommes la
de cœur à
la
conquête du Delta.
L'Espingole
» et vingt-huit
en passant, puis emporte d'as-
Haï-Duong. L'aspirant Hautefeuillc
un canot à vapeur, monté hommes; il ouvre le feu, saute à terre, se présente avec six hommes le revolver au poing, à la porte de la citadelle, et donne un quart d'heure au commandant de la place qui se rend avec ses deux cents hommes arrive devant ?sinli-Biiih avec
par huit
APERÇU HISTORIQUE
19
de garnison. Garnicr lui-même emporte
la citadelle
de
?sam-Dinli.
A la nouvelle
de ces événements, l'amiral Dupré, bien
recommande
inspiré cette fois, félicite Garnier, lui
la
annonce cinq cents hommes de renfort. Cependant les réguliers Annamites, réconciliés avec
prudence
les
et lui
Pavillons ?Soirs, avaient profité de la courte cam-
pagne dans
Delta pour se rapprocher de Hanoï et
le
former, à quelcjues heures dans cinq à six mille
nord,
le
un camp de
hommes.
Le 17 décembre, Garnier rentre
à
Hanoï avec quatre
mandarins envovés pour reprendre, d'accord avec
du
lui,
va traiter en vainqueur
et
imposer sans discussion aux Annamites, encore sous
le
l'administration
pavs.
Il
coup de son prodigieux succès, toutes
les
garanties
nécessaires.
Le 21 décembre, dans
la
matinée, de nombreuses
bandes sont signalées aux portes de V court,
la citadelle.
Garnicr
avec quelques volées de mitraille et
les disperse
s'élance sur leurs traces à la tète d'une douzaine de
marins quatre à :
le
chemin avec
lui-même sur une centaine de
droite, quatre à gauche,
trois
hommes
suivi à
mètres par un détachement qui ne peut Bientôt
n'a plus
il
que deux
fuyards qu'il rejoint se jettent dans se
laissent dépasser puis
hommes
A
la
même
Balnv d'Avricourt
Ce
fut
heure,
se faisait tuer
sur
de
une catastrophe, Garnier
Rien cependant
de vaisseau
se
querie prend
Les
hautes herbes,
coupent
les têtes et
une autre la
même
était
n'était perdu.
route,
façon.
l'àme de l'expé-
Deux
enseignes
M. Bain de la Cocommandemant militaire, ^L Esmez
partagent le
les
précipitent sur les trois
essoufflés, les renversent,
s'enfuient.
dition.
se
le rejoindre.
soldats derrière lui.
la tâche.
L'KXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
20
la (liroclioii j)ollliqiic.
Grâce au dévouement de Dupuis
ininiédiatenienl sa
(|ui joint
services de toutes sortes
du premier jour
sation
[)elitc
troupe chinoise à
la
surtout aux conseils et aux
j^arnison française, grâce
de
est
M^*" Puginier, la
démorali-
surmontée. Les négociations
sont reprises avec les envoyés de la cour et aboutissent à
une convention honorable sauvegardant nos
droits,
noire honneur et surtout la sécurité de nos partisans
payens
et
chrétiens qui se croyaient couverts par
la
parole de Garnier.
Le gées
janvier 18-4. les signatures allaient être échan-
2
quand parvint inopinément de Haïphong une
dépêche
.signée «
Philastre » ordonnant de suspendre
toute négociation et de remettre sans délai ni condi-
du
tions toutes les citadelles
Delta. Quel était l'auteur
de cette incompréhensible intervention trouvait-il
M. de
au Tonkin
et
comment
se
?
Philastre, inspecteur des affaires indigènes et chef
la justice
indigène en Cochinchine, très versé dans
l'élude de la langue, de la philosophie et des rites anna-
mites roi
d'amitié avec les mandarins de
était lié
Au moment
lui-même.
rendu
à liué à titre
Saigon après
de
l'affaire
Hué
Dupuis,
il
et le
s'était
de négociateur ofiicicux. Rentré à
la prise
de Hanoi,
il
en repart, sur
les
du roi, mais sans mission ofiicielle, pour accompagner au ïonkin les commissaires annamites. En instances
débarquant, sa
il
apprend
propre autorité
la
la
mort de Garnier, prend de
direction des affaires
et
donne des
ordres, pa\ant d'audace.
Avec
les
cinq cents
lastre pouvait, sans
hommes
coup
méditait l'amiral Dupré,
envovés de Saigon, Phi-
férir,
imposer
le
traité
exiger des garanties et
pléter glorieusement la mission de Garnier.
Nous
que
com-
l'avons
APERÇU HISTORIQUE vu dès son tion,
ouvrages
du
Delta.
Il
inaugurait
plus modérés et les plus
les
qualifie depuis de
de cette
de connaître
Politique d'abandon
«
la situa-
de faire évacuer sans conditions
lui
toutes les citadelles les
même
arrivée, avant
prendre sur
2,
épitliète restera
dans
que
ce
là
officiels
ont
La honte
».
au
l'histoire attachée
nom
de Philastre. L'amiral Dupré, dans l'embarras, donne à Philastre pouvoirs qu'il
les
ordres
le
pas attendus et
n'a
lieutenant de vaisseau Balaizeau,
met sous ses commandant
les troupes. Il
faudrait pouvoir suivre dans le détail cette
table débâcle. M^'" Puginier, et
de fléchir Philastre au
neur de
la
France
si
M. Esmez
nom
lamen-
tentent d'éclairer
des intérêts et de l'hon-
gravement compromis. Celui-ci
les
que tout va bien depuis la mort de Garnier, Le pays est tranquille maintenant que ce
reçoit fort mal.
Il écrit
«
flibustier », ce « forban » n'est plus là
le
désordre. L'amiral
aux convenances
;
Dupré
mais voyant que
les
pour y mettre
de
est obligé
le
rappeler
choses tournent
mal il commence lui-même à désavouer Garnier. Haï-Duong avait été évacué le i«^ janvier. M. Balaizeau transmet l'ordre aux commandants de Ninh-Binh et
de
Nam-Dinh de
rendre
les citadelles
:
«
Au
honnête homme, en s'en faisant donner reçu dant on égorge
En
et
».
premier
Cepen-
on brûle sur les talons de nos troupes.
quelques jours plus de quatre cents chrétientés sont
en cendres, païens
cincj à six
mille chrétiens, des centaines de
soupçonnés d'avoir aidé
mandarins qui avaient consenti
les
Français, tous les
à continuer leurs fonc-
Hanoï où sept mort dans l'àme, à
tions sont massacrés jusqu'aux portes de
cents soldats Français assistent, la ces tueries.
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
:>.i
œuvre étant achevée,
Ou('l(|ucs spinainos nprrs, son
signe
IMiilaslrc
avec
une convention abandonnent
laquelle nos troupes
Tonkin sans conditions.
le
une amnistie pour tous
spécifier
promis
])ar
régent Nguycn-van-ïliuong
Je
à notre service
un peu
;
indigènes
les
tard,
Dupuis
et
a soin d'v
11
il
com-
vrai, car
est
il
n'en restait plus.
Tout commentaire amoindrirait l'impression de ce dénouement. La
bonne
foi
l^hilastre
laiblesse, la
lâcheté et le
sont de mauvais procédés de a
preuve de tout cela au
fait
France. Nous
manque de
colonisation,
nom
de
en supportons encore aujourd'hui
la les
conséquences.
Le 17 mars 1874 gon.
deuxième
est signé le
L'Annam nous
traité
de Sai-
reconnaît propriétaires des
six
provinces de Gochinchine (où nous étions définitivement installés depuis dix ans); déclare s'engager à régler sa
politique extérieure sur lleuve
Rouge
voyer dans trois cent
celle
de
quelques ports
et
villes
(1'=''
une l'Annam
traité
à
de Saigon)
et fait
de cinq bateaux à vapeur, cent canons Il est
France
;
ouvre
nous autorise
des consuls avec
hommes. La France remet
vingt millions
la
et
et
le
en-
à
escorte
de
sa dette
de
cadeau au roi
mille fusils.
superflu d'ajouter qu'aucun de ces engagements
ne sera tenu par l'Annam. Les procédés de Philastrc
nous avaient aliéné
Tonkin. Dès
Le
fait
perdre
pour longtemps le
la
le reste
premier jour
fleuve llouge pas plus
de notre prestige
confiance des populations le traité fut lettre
que
les ports
ne
au commerce. Les massacres de chrétiens
et
du
morte.
fut ouvert
et les
provo-
cations à l'adresse de la France ne tardèrent pas à se
multiplier.
intenable.
La
En
situation de nos consuls devint
1877
et
1879
la
peu
à
peu
cour de llué renouait,
APERÇU HISTORIQUE par des ambassades,
Chine que
les liens
même
en
de vassalité vis-à-vis de
la
de 1874 déclarait rompus. Le mar-
le traité
quis Tseng, représentant notifiait
9.?,
temps
du à
Céleste
Empire en Europe,
Paris que la cour de Pékin
refusait de reconnaître ce traité.
Nous
f
voici,
une
fois
encore,
amenés par
la force des
choses à intervenir au Tonkin. L'amiral Cloué, ministre
de
la
marine, v consent à condition qu'on ne deman-
dera pas d'argent.
« Il est
temps,
écrit-il à
M.
le
Mvre de
gouverneur de Cochinchine, de relever
ce
A ilers,
«
prestige de l'autorité française amoindri par nos hé-
nos
défaillances
«
sltations et
«
garder avant tout
«
d'une conquête militaire, etc
«
,
.
de
se
et
cependant
il
le
faut se
lancer dans les aventures
,
«
Pour
«
sur une manifestation matérielle qui n'ait nullement
«
le
«
cependant à
«
moyens de
se faire
accepter, cette attitude doit s'appuyer
mais qui
caractère d'une action militaire, faire
suffira
comprendre que nous avons
faire respecter l'autorité
de
la
France.
les
»
textuellement pour montrer à quoi servent
J'ai cité I
en France
les
leçons de l'expérience.
Le 26 mai 1882, Henri Rivière part de Saigon avec deux compagnies d'infanterie de marine, une section d'artillerie, un détachement de tirailleurs annamites et
des instructions
du gouverneur de Saigon,
lui pres-
crivant de n'agir que « politiquement, pacifiquement,
administrativement
». Il était difficile
de pousser plus
loin l'optimisme.
A
quoi bon reprendre
expédition effets
?
et les
l'histoire
de cette seconde
mêmes causes amènent les mêmes mêmes fautes sont suivies des mêmes reLes
vers qu'en 1870.
Rivière, avec sa poignée
d'hommes,
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKÎN
2',
aux mcmcs extrémités que Garnicr.
est acculé bientôt 11
emporte d'assaut
félicitations
la
citadelle
de Hanoï
reconciliés provisoirement avec les
commun
l'ennemi le
et reçoit des
mais pas de renforts. Les Pavillons
^y'oirs
Annamites contre
descendent sur Hanoi. Rivière
est tué
19 mai au pont de Papier. La mort de Rivière crée enfin en France un mouve-
ment d'opinion suffisant pour justifier une demande de crédits. 11 n'est plus « polititpjemenl,
On
à
le
qu'on va frapper celte
fois,
la division
un ultimatum
Har-
C'est à
Hué
:
avec raison.
de l'amiral Courbet mouille
en baie de Touranc. Le 3i fendant l'entrée de
».
D"*
triumvirat
mand, amiral Courbet, général Bouët.
23,
Chambre
pacifiquement, administrativement
envoie, pour régler railaire,
Le 19 août
la
possible d'agir
les forts
la rivière
de Tuàn-An, dé-
de Hué, sont emportés. Le
très net signifie à la
cour cju'on
est
décidé à aller jusqu'au bout.
La guerre avec l'Annam est officiellement terminée. M. Harmand signe à Hué les préliminaires de i883 suivis en i884 du traité Patenôtre qui régit encore nos rapports avec
^ oilà
Chacun
les
Annamites.
comment nous sommes venus au Tonkin. est libre
de chercher à démêler
ligne de conduite politique
là
dedans une
ou commerciale. Beaucoup
l'ont essavé sans parvenir à se mettre d'accord.
On
a successivement jeté le
éloges, avec
mêlés par
une
blâme ou prodigué
égale injustice, aux
la force des choses,
hommes
les
politiques
plus que par leur volonté
propre, à cette lointaine et coûteuse aventure. Le principe
d'une
expansion
aussi disproportionnée
avec la
i
APERÇU HISTORIQUE vitalilc appareille
du pays
est
25
lui-même
cussions ardentes. Les uns déplorent avec voir dépenser ainsi sans
de dis-
amertume de
et sans profit les forces
nous ne saurions être trop ménagers en pré-
vives dont
toujours
d'éventualités
vision
mesure
l'objet
cherchent à démontrer
menaçantes. D'autres
la légitimité
et la nécessité
de
semblables entreprises à l'aide de considérations politiques
ou
un peu
sociales
subtiles
mais
qu'il est toujours
possible, en lin de compte, de faire cadrer avec les évé-
nements.
Ils
sont dans leur droit.
Pour nous, notre
l'étude des circonstances qui ont
propre à modifier chapitre.
France
pour son
en
établissement
est
pas
conviction affirmée au début de ce
la
elle
poussée
est
y
mais
toujours
toire le prouve.
Du
moralement sur
les
jour où
raidissant contre
comme autrefois ses trois
sa fin sera proche.
en aveugles,
un courant
Son his-
cessera de rayonner
d'appuyer avec
l'expansion catholique, laisser traîner
elle
contre
quelc|uefois
invinciblement*
peuples neufs,
les vieilles nations, et
nous
amené
n'est
Nous acceptons l'expansion parce que la condamnée à l'expansion, elle en a besoin
vivre,
gré
Extrême-Orient,
et
sur
couleurs
Au
lieu de
de perdre, en nous
plus fort que nos volontés
matériel auquel nous avons droit,
humaines,
le profit
ne
pas plus sage de nous faire les complices
serait-il
clairvovants
lourde à
de
la vérité,
la
Providence
')
C'est
une mission
mais féconde pour celui qui l'accepte
franchement. Bien des peuples nous Font enviée depuis des siècles et ne dissimulent pas leur joie de nous la
nous reste àprement disputée de nos jours où les continents servent d'enjeu. Les Anglais elles Allemands sont de redoutables joueurs c£ui ne se font pas faute de
voir mépriser. C'est en effet le seul atout qui
dans
la partie si
Grandmaiso?»
2
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKïN
30
iriclicr à l'occasion. ?Soiis
avons une belle carte
—
ne
la percions pas.
Je ne vois, pour
ma
part,
dans
la
conquête de l'An-
nam, que
l'évolution naturelle, longtemps contrariée,
est
de
vrai,
la
l'évèque d'Adran.
compliquée
et
Il
savait
impuissante
qu'une organisation
comme
Orient, mise en contact direct avec
haute
et
le
celle
une
sociale
de l'Extrême-
civilisation plus
plus active doit nécessairement se dissoudre et
disparaître à la longue. C'est la loi
sens
il
puissante conception civilisatrice de
plus élevé.
Une
fois le
du progrès dans son
premier coup de pioche
donné dans l'édifice branlant et vermoulu de l'empire d'Annam, il fallait le déblayer jusqu'au sol pour permettre à
la civilisation
chrétienne d'y jeter des racines
profondes. Nous avons accompli cet elTort instinctive-
ment, sans en comprendre prévu
les
la
portée et sans en avoir
conséquences. Aussi, bien qu'à tout prendre,
l'entreprise promette de
beaux
résultats,
comme
elle a
donné peu de bénéfices matériels, on voit percer chez beaucoup de ceux qui parlent du ïonkin le ton un peu honteux de gens qui ont fait une mauvaise affaire et s'en défendent faiblement.
jusqu'ici coûté fort cher et
CHAPITRE
II
Les difficultés locales n'expliquent pas au Tonkin nos longs insuccès. Nous voulons exploiter Ils tiennent à une erreur de principe.
—
à l'Anglaise
au
1
lieu
de
civiliser.
Résultats.
—
Nous n'avons su
inspirer confiance ni aux indigènes, ni aux colons, ni aux capitaux.
—
—
Vices administratifs.
Qii'avons-nous superflu
de
fait
au Tonkin depuis i884?
clierclier
médiocrement
Exemples.
réussi.
à
H
serait
démontrer que nous avons
Les difticultés
rencontrées au
début sufiisent-elles pour expliquer notre impuissance à mettre
un peu
nées? Je ne
d'ordre au Tonkin pendant tant d'anpas. Voici
le crois
note politique écrite en i884 apostolique
du Tonkin
quelques extraits d'une
i:)ar
M^^'Puginier^ vicaire
occidental, sur la
demande
des
résume parfaitement l'état de Mais enfin, demandent quelques-uns,
autorités françaises. Elle la question.
«
ce
quels avantages
«
expédition
,
positifs
pour
se
retirera la
dédommager
France de des
cette
sacrifices
Remarquons une fois pour toutes, que j'entends parler non pas de lexpansion pacifique de la race anglo-saxonne
1.
ici
mais de l'exploitation par f Angleterre des pays cpi'elle ne peut L Inde par exemple. songer à peupler. 2. Mo'" Puginier, évèque français de Hanoï, était, au dire de ceux qui l'ont approché, l homme qui connaissait le mieux le Tonkin. On le croira sans peine, car à sa mort, en 1892, il y comptait 34 ans de séjour et 24 ans d'épiscopat. G est le témoin de la première heure, le conseiller des mauvais jours, trop peu écouté malheureusement. 11 a tout vu et tout prévu. Ses notes et sa correspondance sont d'un intérêt de premier Schneiordre. Voir: Vie de J/s^ Puginier, par E. Louvet. der, Hanoï, 1894-
—
—
L EXPANSION
38
AU TONKIN
Fil ANC AISE
«
énormosqu'clle s'Impose? La réponse h cette question
«
est facile
«
pourquoi nous sommes au Tong-King. poser
:
qu'on a engagé qu'on
la règle
miner
si,
qu'il
avant
cette question
examen
moment
ce n'est plus le
d'y
en 1873, on a bien
y avait la
11 fallait
se
Maintenant
aller.
du pays
la dignité
l'afTaire,
demander
se
exige
définitivement. Je ne veux pas exa-
serait trop long. Je
défaut de
de
de venir
fait
me
cet
ici,
contenterai de dire
de bonnes raisons pour y venir. A France, une autre nation l'Angleterre,
l'Allemagne y serait infailliblement venue. « Les avantages qu'on peut d'ailleurs se promettre sont réels et je les crois considérables. Le
un pays
dont
le territoire est
«
est
«
des cultures très variées
« la culture « plateaux
riclie
du
donnent
;
si
la
du maïs, de
riz,
Tong-King
apte à recevoir
plaine est favorable à
canne
la
à sucre, les
à leur tour des produits
non moins
différentes essences de bois, laque,
faux
«
précieux
«
gambicr, gommes, camphre, écorces à faire
«
de Chine, sans parler des mines d'or, de charbon,
:
« d'antimoine,
le
papier
dont on a constaté l'existence au Tong-
un
du
«
King. Ce pays qui
«
fournira suffisamment de bras pour tous les travaux. «
la
En
outre, le
Chine,
le
moitié
immenses
le
faciles
Laos
«
et
ses fleuves,
pour dans
faire
du Su-Tchuen
globe,
ouvre à
pénétrer ses
sud-ouest de
le
Kouang-Si, leYunnan,
le
pour
la
Kouy-Tcheou, de
ces
territoires des produits qui constituent
une
branche de commerce le zinc, le
des plus peuplés
Tong-King, par
France des voies
produits dans
la
est
et
retirer
très lucratif, le cuivre, l'étain,
mercure, etc..
Je m'aperçois que j'entre
un peu dans
l)urement commerciales, mais
il
des questions
faut bien en dire
CAUSES D'INSUCCÈS
29
«
quelque chose, puisqu'on
«
avantages matériels qui pourront compenser
«
crilices
K
Tong-King.
«
pour
«
France doit-elle s'annexer ce pays pour en
«
colonie française,
«
Quel
se
préoccupe en France des les sa-
qu'on demande au pays pour l'expédition du
est
maintenant
le
meilleur
mode
établir notre influence ici et l'y
ou
vaut-il
mieux y
à adopter
maintenir? La
une un pro-
faire
établir
c<
tectorat sérieux et effectif? Je n'hésite pas à dire
«
c'est le
« j'ai
protectorat qui vaut
le
que
mieux. C'est ce que
toujours répondu aux représentants de
la
France
demandé mon avis. La France gagnera à régime, le Tong-Ring aussi. A oici les raisons de
«
qui m'ont
«
ce
«
ma
((
difficultés, elle
«
faudra par conséquent moins de troupes,
«
moins de dépenses
«
En
«
doute,
«
Français
«
le
« «
ments nationaux que l'annexion. Les populations, voyant leurs vœux respectés, seront moins portées à
«
se soulever r
«
pavs, conservant leurs lois et leurs
«
Tong-Rinois seront
«
contents étant moins nombreux,
((
tranquille et se relèvera plus vite des désastres de la
«
guerre, grâce aux relations commerciales c{ui s'établi-
«
ront bientôt sur une grande échelle. Par suite
«
tâche de la France sera bien moins grande,
«
moins coûteuse «
manière de voir
effet,
les
ils
la
France éprouvera moins de
à faire
pour
leur
il
lui
aura
elle
réaliser le protectorat.
Tong-Rinois préfèrent,
conserver ;
:
aura moins de luttes à soutenir,
aucun
sans
autonomie que de devenir
auront moins de répugnances à accepter
protectorat qui les blesse
moins dans leurs
senti-
gouvernés par des mandarins de leur
et
satisfaits
coutumes,
en majorité; le
les
les
mé-
pays sera plus
la
bien
bien moins lonsfue.
L'annexion, au contraire, blesserait davantage 2.
les
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
3o
populations;
les
méconlenls en profileraient pour dans
exciter des soulèvements
dans
la
proximité de
Tonkin qui pour
comme
auraient
ils
trouveraient
population du
un point d'appui un nombre considé-
Gela occuperait
rable de troupes françaises
ils
;
la
de seize millions,
est
la révolte.
veraient
pays
le
Chine, dans
la
nos compatriotes se trou-
;
perdus au milieu d'un pays ennemi
;
continuellement à se tenir sur leurs
gardes et à guerroyer. Pour quatre à cinq ans de lutte cju'il
faudra à l'installation d'un protectorat et au
rétablissement de la tranquillité au Tongking, faudrait au moins dix
il
nous
quinze ans pour assurer
à
l'annexion, et après avoir versé beaucoup de sang, fait
des sacrifices énormes on ne dominerait que sur
un peuple ruiné et toujours Le protectorat
« les
a
populations, de
douce, de
les
je
habituer peu à peu aux rela-
les
et
trument de
la
gion et
langue.
comprend la
et,
par une transition lente
d'habitudes.
ne cesse de
la
transforme
préparer merveilleusement à devenir
Français de cœur
comme
On ne
l'immense avantage, sans choquer
tions avec les Européens et
hostile.
du jour au lendemain.
pas une nation
le dire,
Deux
choses surtout,
sont le meilleur ins-
transformation d'un peuple Si
le
;
gouvernement
la
reli-
français
ses vrais intérêts et qu'il veuille favoriser
prédication
de
l'évangile
et
l'enseignement de
notre langue, j'affirme qu'avant vingt ans, sans violenter personne, ce pays sera chrétien et français. »
En
résumé, nous sommes au Tonkin sans trop savoir
pourquoi
et très
fait définitif
étonnés d'y être. L'occupation est
sur lequel
il
n'est plus
un
temps de revenir.
Acceptons-le et essayons d'en tirer parti.
Une
question
CAUSES D'INSUCCÈS surtout doit être comprise et
de
qu'un épisode,
et l'extinction
de
Chine ne
la
la piraterie,
même
chinoise des frontières, est intimement
la piraterie
liée à
réglée: celle de nos rap-
La guerre avec
ports avec les occupants. sera
3i
notre politique indigène. Le milieu social auquel
nous aurons à
faire
ne paraît pas devoir présenter
à
notre établissement une résistance insurmontable. Nous
un pays peuplé
arrivons dans
troubles et d'insécurité, possédant
fatigué de
et
riche,
un
outillage complet
de gouvernement, défectueux peut-être mais en état de fonctionner. Le peuple y est facile à mener, peu guerrier,
laborieux, sans fanatisme d'aucune sorte et sans
passions vives, bien que très attaché à ses traditions et à sa nationalité. lui et les
La question
religieuse n'existe pas
depuis cinquante ans ont toujours été
du
reste)
pour
innombrables massacres de chrétiens au Tonkin ordonnés par l'autorité
et
(commeen Chine,
menés par
instruite contre les amis de l'étranger,
la classe
nom
au
de
la
annamite menacée. La religion de
vieille civilisation
Bouddha n'a rien à voir dans tout cela les lettrés s'en moquent agréablement et les persécutions ont toujours ;
eu ce caractère de guerre
sociale contre
l'inlluencc
étrangère.
Remarquons en passant que notre façon de nous désintéresser officiellement des cinq cent mille chrétiens
du Tonkin
après avoir
fait
des missions
la
et
de
les «
pendant base
si
lâcher » en toute occasion,
longtemps de
la protection
de nos revendications, nous a
valu une réputation de duplicité très tenace chez
payens qu'on pensait gagner
ainsi.
depuis cent ans les chrétiens sont il
leur est impossible de
ne soient pas
les
Pour
les
les
amis des Français
comprendre que
amis des chrétiens.
les
Annamites,
En
les
;
Français
1880, malgré
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
32 la
dlniiniilion (nTavait sul)l noire prestige après la recu-
lade de 1873 et le discrédit que nous avait valu l'aban-
don de nos
partisans payenset chrétiens
compromis avec
Garnier nous étions reçus sans hostilité, bien qu'avec une ,
certaine défiance.
La masse du peuple, désirant surtout passivement
la tranquillité, attendait
les
événements.
Le régime politique que nous allons adopter en principe est le seul possible: un protectorat qui ne soit ni
une annexion déguisée, de sanction
et
ni
nistration, lui laisse sa
forme
sable ^ Le point de départ,
En
soustrayant
l'Annam
«
il
et
effective,
singulièrement compliquer est
Il
permis de
«
Lanessan^ que
«
traité
la
son personnel respondéfectueux.
est vrai, était
central et la capitale de l'Em-
pire à toute surveillance allait
une suzeraineté dépourvue
qui tout en dirigeant de très près l'admi-
dire,
le
traité
de i884
les choses.
écrit très
justement M. de
cour (d'Annam) trouva dans
le
«
du 6 juin ^1894 non seulement les moyens de nous résister, mais encore une sorte d'encouragement
«
à le faire. »
Le compromis séparant
le sort
des provinces du centre
de celui du Tonkin avait été accepté sur
que
le
ïonkin
qu'il serait facile, ratistes,
de
l'idée fausse
désirait échapper à la tutelle de
en encourageant
le soustraire
ses
complètement
Hué
et
tendances sépaà l'influence de
s'agit bien entendu que des provinces de race 1 Il ne annamite, de beaucoup les plus peuplées et les plus imporles seules du reste dont il était possible de s'occuper à tantes ce moment. Cette remarque nest pas inutile pour éviter 1 apparente contradiction entre ce programme et les principes exposés dans la deuxième partie de ce volume, au sujet de la .
;
« Politique des races ». 2. La colonisation française en Indo-Chine, de Lanessan. Paris, Alcan, i8q5.
I
CIVILISATION ET EXPLOITATION Cette solution était mauvaise
la cour.
demi-mesures. Si on voulait séparer gouverner directement,
et le
ment au
S'il
ment
fallait le
C'était vouloir jouer
d'Annam
cour dons.
faire ouverte-
au plus
le fruit
fin avec la
toujours nous qui per-
et à ce jeu, c'est
au contraire, d'appliquer lovale-
s'agissait,
le protectorat, le
bon sens voulait qu'on l'étendît la main tous les rouages
pour avoir dans
à tout l'empire
qu'on entendait
utiliser.
Cette situation fausse
nous a causé beaucoup d'embarras
qu'un
toutes les
Tonkin de Ilué
transformer en annexion quand
le
mûr.
serait
comme
le
de proclamer un protectorat avec l'arrière-
lieu
pensée de
il
33
détail et la persistance
;
du début
ce n'est pourtant
de nos insuccès tient à des
causes plus générales.
V a
11
dans
deux façons de coloniser
S'implanter dans
1°
le
but de
ralement uni à
la
et
le
et
civilisation inférieure
transformer d'une façon défmitive
matériellement, d'en faire
métropole non par
plus forts
:
un pays de
la
plus durables d'une
force,
un pays
mais par
mo-
civilisé
les liens
communauté de langue,
de religion, d'intérêts. Faire participer loyalement ce pavs aux bienfaits de lui
en
la vie nationale,
faire léijitimement ~
de façon à pouvoir
le
partai^er les cbarofcs. C'est o
l'ancienne école, celle des peuples civilisateurs; 3°
S'imposer dans une contrée riche pour y
tune, sans autre souci que d'exploiter la terre tants
au mieux des
intérêts
faire for-
et ses
commerciaux de
la
habi-
métro-
pole. C'est l'école anglaise, celle des peuples exploiteurs.
Par tradition, nous sommes un peuple
Au temps où
la
civilisateur.
France pouvait encore avouer des
intentions généreuses
et
une politique coloniale con-
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
34
forme aux
instincts delà nation,
monde
quatre coins du
nous avons poussé aux
qu'aucun autre peuple, semant
vigoureux
plus
des rejetons
ainsi sous le ciel, avec
de gens qui n'ont point à ménager
la prodigalité
le
sang des apôtres et des soldats, de nouvelles Frances où soustraite
notre race,
peu
à
peu
ancienne les
les
aux influences qui ont anémié
Français de France,
a
vitalité et ses facultés natives.
conservé son
On
arracher par la force mais pas une n'a
plein gré les liens qui l'unissaient à la
a
pu nous
rompu de
mère
patrie et
toutes ont protesté contre la violence qui leur était faite
en conservant avec une admirable ténacité leur Pourquoi donc irions-nous chercher
caractère national. ailleurs des
modèles de colonisation
et des
exemples à
suivre
Malheureusement, quand nous avons été repris, avec les nations de la vieille Europe, par ce
presque toutes
besoin d'expansion
si
caractéristique de notre
de nos institutions
siècle, l'état
humain nous ont détournés
et
une
des traditions anciennes.
Les résultats matériels obtenus par
maient toutes les convoitises suite
dans
la voie
se
;
il
les
Anglais allu-
fallut se lancer à leur
de l'exploitation coloniale. N'ayant ni
ni les défauts nécessaires pour y réussir,
les qualités
nous avons
fm de
sorte de respect
si
demander
complètement échoué si
la
France
est
qu'il est
permis de
encore capable de colo-
niser.
L'insuccès décourageant de nos expériences tient à
des causes profondes,
en étudiant
les
il
est vrai,
tantes commises,
mais nous pourrons, relever des indices
mal est grave, peut-être pas sans remède. Les symptômes
rassurants, et conclure que
caractéristiques et
les
si le
plus
il
n'est
les
plus
alarmants d'impuissance
CIVILISATION ET EXPLOITATION
.^3
ranémlc de la race cl la ruine une constatation qu'il est malheureusement trop facile de faire et que les étrangers ne manquent jamais de nous jeter h la tète en donnant leur avis sur l'expansion française. Il est délicat coloniale sont, en France,
de
l'initiative individuelle. C'est
de donner une consultation sur cette maladie plivsique et
morale qui nous épuise
et je n'ai
point la prétention
de m'y hasarder. Essayons cependant d'en dire
un mot,
ne fût-ce que pour montrer quelques-unes de
ses
con-
séquences dans nos entreprises de colonisation
et
pour
aftirmer la conviction qu'elle n'est pas incurahle.
Cet égoïsme qui tue
la famille et cette
réelle des caractères sont
de
la
déformation sociale produite à
moule trop tralisées
étroit et trop rigide
à
«
la
troji
le résultat
longue par
pouvoirs publics
»
immédiate
lui
dont
le
de nos institutions cen-
L'individu rendu timide par
l'excès.
embûches journalières que littérale,
déchéance
pour une bonne part
tendent
les
les
innombrables
chacun exige l'exécution
et sans protestation possible
de
ses
exigences propres, use ce qui lui reste d'activité à évoluer au milieu de rouages
Le principal
si
compliqués
et
si
brutaux.
souci de son existence est de se mettre en
règle avec l'administration et son ambition se borne le
lui-même un jour
plus souvent à faire
partie de celte
administration, espérant ainsi vivre à l'abri de ses exigences.
Une
garantie par leurs enfants,
nombre
carrière
dont
afin de les
soigneusement réglementée
devient l'idéal des
l'P^tat
ils
limitent
soigneusement
la vie
chaque jour plus âpre.
Le plus sûr remède aux maladies contagieuses d'air et
démontré, pour
lui
le
soustraire aux incertitudes et aux
dangers d'une lutte pour
changement
et
parents pour
il
suffit, l'expérience l'a
rendre sa
vitalité et
est le
maintes
son
relief,
fois
de
-
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
\C,
Iransplanlor
la race française
plus libre.
et
colonies nouvelles; mais les
dans un milieu plus aéré
Ce milieu devrait
couler de force
il
pourrait être nos
et
ne faudrait pas alors vouloir
uniformément dans
et
Ce
ministratif de la métropole.
formalisme administratif
n'est
le
moule ad-
pas en
effet
de
de tutelle politique cpi'un
et
pavs neuf a besoin pour vivre
progresser, mais d'une
et
large autonomie et d'une véritable liberté économitpie et
commerciale.
On
se
demande comment une
forme au sens commun,
méconnue en France. si
complètement
de principe qui
malheureusement notre politique
D'après l'ancienne école,
mon
aberration n'est à
Cette
sens qu'une consécjuence de l'erreur
domine
con-
ce point
idée, à
être aussi
pr^ut
coloniale.
la colonisation doit être faite
d'abord dans l'intérêt du pays colonisé.
Il
faut travailler
sans réticences et sans arrière-pensée à le rendre tranquille et productif, à tirer profit.
A
devient légitime et la
morale C'est
mener
le civiliser
est faite
en outre
est
il
bon de
pour tout la
le
se rappeler parfois
seule conception qui puisse nous
sens devrait suffire à
le
et durables.
fisant
colonie nouvelle ne devient
un débouché comla
métropole que
un développement économique
pour produire
fruits sur
Le bon
prouver.
mercial et une source de profit pour lorsqu'elle atteint
que
monde.
à des résultats pratic|ues
Une
avant de songer à en
ce prix seulement, l'expansion coloniale
et absorber.
un sauvageon avant de
On
suf-
ne cueille pas de
l'avoir greffé et
amé-
lioré par la culture.
C'est ce principe-là
que nous aurions dû emprunter
aux Anglais, à condition d'en proportionner l'application à nos ressources et à nos capacités.
Pour bien des
CIVILISATION ET EXPLOITATION raisons,
tement
?,-
nous ne sommes pas capables de créer direceux cette transformation matérielle qui
comme
une des ment par est
de
faces
C'est
la civilisation.
l'intermédiaire
donc seule-
des populations indigènes
que nous pourrons produire
ce
faut reconnaître c[ue telles ne sont pas les idées
du
instruites
et cultivées
nécessaire progrès. Il
jour.
On admet
généralement chez nous que
très
la
colonisation doit au contraire procéder avec circonspection et
ne
civiliser
ses
que dans
conquêtes
la
mesure
strictement nécessaire pour en faciliter l'exploitalion. L'instruction des habitants, leur éducation industrielle, cultures à encourager, le commerce, les industries
les
à créer, tout v est calculé à la métropole.
champ ouvert et
Lue
pour ne pas porter ombrage
colonie
nouvelle n'est plus
un
à l'activité féconde des habitants dirigés
demeure, mais un
Instruits et des colons installés à
spéculation et du commerce de l'intérieur. Il est à peine besoin de rappeler combien d'industries susceptibles de prospérer ont été tuées ou entravées au Tonkin dans le seul but de ne pas nuire à des industriels de France. ^N'est-ce pas, du reste, un document caractéristique de cet état d'esprit f|ne cette note relevée dans un numéro récent de la « Revue Française de l'élranger et des colonies », au sujet de l'école professionnelle que le général Gallieni fief
créé au
bénéfice exclusif de
Tananarive
la
Cette
école peut
((
rendre des services à ceux de nos colons
qui établi-
((
ront des
c(
serait-il
venait
I.
de créer
à
industries à
?
^
«
Madagascar
;
mais peut-être
sage de ne pas développer l'éducation indus-
Revue française de l'étranger
1897, no 219,
p.
et des colonies,
i85.
GRA^•DMAIso^•
3
mars
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
38
des Malgaches
pourraient bien devenir
qui
«
lilc'llc
«
raj)ldenient des concurrents
«
merçants
«
et
nous avons
sérieux pour nos
com-
nos colons. Ce n'est pas pour cela que
conquête de Madagascar.
fait la
comme
Gela est dit tout simplement,
d'une vérité courante
»
l'expression
partout admise. Si nous avons
et
sacrifié tant des nôtres et
dépensé tant de millions
là-
profit de la
pour y introduire notre civilisation au colonie. Gardons-nous bien d'instruire les
Malgaches,
ils
bas, ce n'est pas
pourraient compromettre
but de l'entreprise qui de
la
est d'enrichir les
véritable
le
spéculateurs
Supprimons avec ostentation
métropole.
l'escla-
vage du corps, nous ne pouvons faire moins, mais ne
touchons pas à cet esclavage de rance, car
un peuple
ne
éclairé
l'esprit qu'est l'igno-
se laisserait peut-être
que malaisément. Gc sont bien là les préoccupations du colonisateur
exploiter
anglais qui protège ses missions surtout dans les colonies
qui ne
Toutes le
sont pas à lui.
les colonies
joug de
la
Elles
politique.
unes y ont réussi par
la
minent par
détournées.
gressive des
excusables.
métropole aussi bien au point de vue
économique qu'au point de vue
intéressant
sont
anglo-saxonnes aspirent à secouer
des
voies
que de
force,
d'autres
Uien
Quelquess'v
n'est
acheplus
suivre, par exemple, l'éviction pro-
ouvriers,
des contremaîtres et enfin des
ingénieurs anglais, déjà presque complète dans
les fila-
tures de l'Inde.
Pour nous qui savons
coloniser, mais qui ne savons
guère administrer, ce serait pareils errements
;
lolie
que de suivre de
au moment surtout où
eux-mêmes commencent
à
en comprendre
jNotre intérêt, répétons-le bien
les
Anglais
le
danger.
haut, est de favoriser
ERREURS ADMINISTRATIVES largement
le
progrès social
et la
des pavs que nous acquérons.
chercher
le
bien de
la
89
prospérité écononiicjiie
Nous devons avant
tout
colonie et de ses habitants indi-
gènes aussi bien que Français installés à demeure, sans
mesurer parcimonieusement aux uns aux autres la
mieux de
liberté
de
s'établir et
la civilisation et
de commercer au
leurs intérêts. Toute autre conception n'est
En
pas seulement odieuse, elle est maladroite.
de parti pris toute préoccupation écartons ce qui faisait autrefois la force et la vitalité
Mais
il
fallait
comme
nistrer
a.
de notre expansion.
eux,
nous n'avions, dans
le
nous
pourrait faire encore
et
tout prix suivre les Anglais, exploiter
comme
eux.
admi-
Comme
cette voie nouvelle, ni leurs apti-
tudes, ni leur expérience,
ni
traditions natio-
leurs
nous avons réussi seulement
nales,
écartant
civilisatrice,
à leur
emprunter
principe mauvais de leur exploitation sans parvenir
dans
En
la
pratique à copier leur puissante organisation.
l'absence de toute base sérieuse pour asseoir son
œuvre,
le
législateur s'est généralement
contenté de
transporter dans nos colonies les cadres administratifs
de
On
la
métropole avec leurs procédés
aurait
pu
et leurs
mœurs.
cependant prévoir les déplorables résultats
de cette solution. A ouloir coloniser par l'administration est
une conception dangereuse et fausse c'est travailler lois de développement des peuples. ;
en sens contraire des
Le gouvernement d'un pays facteurs sociaux
cjui
s'v
doit être la résultante des
rencontrent
:
races, religion,
instruction, situation économic|ue. Imposer
sans étude
préalable à des pavs neufs et très différents entre eux
une organisation identique Mais quand
serait déjà
cette organisation est
aussi hostile à l'effort individuel
une imprudence.
aussi absorbante et
que
la nôtre, la faute
LFAP.WSION FIIVNÇVISE AU TONKIN
',.)
inexcusable.
dc'vicMiL
La preuve
esl
faite,
du
reste, et
les résultats sont là.
Sans avoir
mœurs
prétention de faire
la
procès de nos
ici le
coloniales j'en voudrais noter quelques-uns des
plus saillants. Reconnaître ses fautes est le
traits les
commencement de
la sagesse.
Le principe fondamental de notre administration
Ln
l'impersonnalité.
fonctionnaire doit être
parfaitem-ent interchangeable, avec
même
Ln
ordre.
est
un rouage
un autre rouage de
changement de personne, dans un
service bien tenu, se fait sans à-coup, sans frottement,
sans arrêt dans la machine. C'est
remplace une autre. ?sotre prétend au
même
idéal
et
une signature qui en
administration coloniale
du personnel
l'instabilité
complète cju'en France. Depuis
est aussi
les
généraux jusqu'aux plus humbles employés, tous fonctionnaires
changent avec
la
même
voyagé, en arrivant au Tonkin, avec
magasin, métis de
femme
et
de
ses
la
un modeste garde-
deux enfants, passait d'un poste à un
et
trouvait désigné
représentait
pour
pour Cao-Bang
l'P^tat
une dépense
à
valente à une année de son traitement.
le
à
les
J'ai
venait en ligne directe de Nouvelle-Calédonie
11
de croire qu'on
difficile
facilité.
Ivéunion qui, accompagné de sa
autre. se
v
gouverneurs
ait
magasin de Cao-Bani;,
été forcé,
!
Son vovagc
peu près équi11
est
vraiment
pour administrer
d'aller chercher
un
titulaire
Xouméa. J'ai
cité
l'espèce,
il
ce
détail
s'agissait
comme
caractéristique.
seulement d'un
Dans
supplément de
dépenses pour l'État. Mais ce qui prend une autre gravité, c'est le
perpétuel changement des fonctionnaires
ERREURS AD.MIMSÏUATIVES
',i
importants, des administrateurs. Les rouages du gou-
vernement ne sont pas cpi'en France,
soigneusement ajustes
aussi
un milieu
s'appliquent mal à
ils
tout dilTérent de celui pour lequel
ont été
ils
questions de personne prennent, bon gré,
une importance dont on ne
social
faits et les
mal
gré,
Un
tient pas assez compte.
changement de gouverneur au Tonkin trouble profondément la vie politique et commerciale et arrête pendant des mois les progrès de la colonisation. (^)uand le nouvel arrivant n'est préparé ni par
ses
connaissances
spéciales ni par ses fonctions antérieures
une
à
tàclie
aussi difticile, fùt-il le plus parfait des administrateurs et le
plus intelligent
hommes,
des
sans défenses aux assiègent
compétitions
bonne
sa
quelques mois qui
lui faut il
un apexposé
est
aux appétits qui
et
Cet apprentissage absorbe
les
sont généralement accordés,
un
foi.
lui
il
pendant lequel
prentissage souvent long,
autre survient et tout est à recommencer. «
blâmer personne,
Je ne veux
Puginier, ni
dès 1886
écrivait
hommes du gouvernement
«
M^''
«
les
«
genres qui ont eu à agir au ïonkin. Je déteste
cc
prit criti([ue et suis le
«
l'autorité.
c(
qui ne passe que quelques mois, tout au plus
«
ou deux, dans un pays
«
connaît pas
«
européen, on ne peut,
«
dans cette situation
«
hommes
«
les
conmiandants en
On
chef, ni
premier à excuser
ne peut, en
la
effet,
comme
et les choses
de
sage de faire
comme
à part toute critique des
il
un milieu qu'un
ne
tout
homme
la politique orientale.
M^'"
de
un an
dont
adéquates sur
idées
erreurs sont donc inévitables Il est
celui-ci,
dis-je, exiger
des
l'es-
les fautes
exiger de quelqu'un
langue, vivant dans
ait
ni
autorités de tous
les
les
Les
»
Puginier
hommes. On
et
les
de mettre
juge mal à
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
A2
but
distance et notre
que
souvent
plus
le
l'impuissance
Une forme
et
justement de
ils
ne sont pas responsables de
faire ressortir
des fautes (pi'on leur reprocbe.
qui
entreprise et
est
quels que
se fonde,
soient
sa
son but, a besoin de crédit; crédit moral ou
matériel.
lui
Il
exposent leurs
croyants qui
faut des
intérêts sur ses chances de succès. Cela s'appelle la con-
Pour une entreprise coloniale
liance.
de vie ou de mort.
lui
Il
c'est
une question
beaucoiq) de confiance
faut
parce qu'elle a besoin de beaucoup de crédit bénéfices sont à longue échéance.
Indo-Chine d'obtenir rendre
le
pavs sur
la
lacontiance des colons et
des capitalistes pour le mettre en valeur,
rons avec un peu plus de détail dans
lement
ici
le
les
donc en
confiance des habitants pour
et prospère,
de nos rapports avec
que
et
s'agissait
Il
le
^ous
parle-
chapitre suivant
peuple annamite, constatons seu-
que nous avons tout
fait
pour éloigner
le
crédit et déûfoùter les colons. c
Interrogez coloniser au
hommes
les
celle d'obtenir des
cessions surprise.
subventions, de spéculer sur
les
con-
ou d'exploiter quelque monopole obtenu par
Tous vous diront que
ne demande rien Il
qui ont essavé de
d'action
Tonkin avec d'autres préoccupations que
à personne,
n'est pas d'entrave
le
vrai colon, celui qui
ne peut arriver à percer.
que l'administration ne
lui rive,
pas de tracasserie qu'il n'ait à supporter.
On
en France avec cette aggravation que
solution de la
plus petite difficulté
demande
six
la
se croirait
mois, car tous
les
ne sont que
les
fonctionnaires entretenus sur place
instruments de l'administration centrale. Toute
affaire
sérieuse se traite en France et c'est ce qui explique en
ERREURS ADMINISTRATIVES
1^3
partie la tendance, signalée déjà, à exploiter les colonies
au bénéfice de ceux qui ne s'expatrient pas, ni ne voyagent pas,
du
des
capital
décourage ainsi
métropolitains.
industriels
le petit capital
On
vivant entre les mains
du colon de bonne volonté, l'industriel qui s'expatrie, le commerçant qui veut fonder un foyer à côté de son comptoir. Tout ce qui fait, en un mot, la vitalité et prépare
la
prospérité d'une colonie. Les gros capitaux
eux-mêmes qu'on entendait favoriser, ne voyant aucune chance deprotit dans une contrée dont la vie économique ne progresse pas,
se portent ailleurs.
Comment, du confiance dans
reste,
le
aurions-nous trouvé crédit
grand public alors
tion centrale refusait obstinément
représentants au ïonkin
et
l'un et l'autre à ses
comme
traitait sa colonie
un enfant prodigue dont on pave
et
c[ue l'administra-
les dettes
de mauvaise
grâce, cjuand elles deviennent trop criardes, mais auquel
on n'ose confier
les
moyens
compte pour gagner ciaire
permanent imposé
peut-être
le
et la liberté
de s'établir à son
sa vie. Cette tutelle, ce conseil judi-
à nos possessions nouvelles, est
plus grand obstacle à leur développement
matériel. J'ai
vu
le
Tonkin gouverné par un homme,
discuté en France, qui les lisières
de
la
avait réussi à relâcher
métropole
et je puis affirmer
surtout à son indépendance d'esprit et à son
très
un peu
que
c'est
manque
complet de traditions administratives c£ue M. de Lanessan doit d'avoir obtenu des résultats cju'on ne peut
méconnaître. L'exagération de ces tendances au point de vue linancier lui a souvent été reprochée.
ne pas partager beaucoup de prouver quelques-uns de retenir
ici, c'est
que par
ses
ses
idées et
actes.
sa seule
On
peut
ne pas ap-
Ce que
je
veux
indépendance admi-
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONlvlN
Ix'i
nislralivc
il
a
pu donner une
colonisation matérielle
comme
d'idées, discutables peut-être,
tique intérieure, pacification.
il
Nous
réelle
mais nettes dans
le
même
verrons
féconde
ses idées
c|ui
n'était pas
du début.
^ .
pour
à la l'or-
une voie nouvelle bonne
foi qu'il est
Dois-jc ajouter que malheureu-
sement en France l'indépendance et
entrer,
en concordance absolue avec
C'est ini gage de
juste de reconnaître
à la
sa poli-
a fait faire de sérieux progrès
ganisation des hautes régions, dans et
impulsion
par la seule application
qu'un fonctionnaire,
comme
de l'Indo-Chine, toujours à
la
le
réelle est chose rare
gouverneur général
merci d'une campagne
de presse ou d'une interpellation, doit-ctre l'homme de
quelqu'un
:
haute administration ou parti politique
qui lui serve de caution en face de l'opinion. Ce qu'il
gagne sur l'administration s'inféodant
donne
là
il
faut qu'il
le
perde en
davantage à son groupe politique.
un maître moins
autoritaire et
Il
mais généralement aussi moins désintéressé que bureaux. Xous voici sur
les
se
moins gênant, les
confins de la politique et je
ne m'y attarderai pas. Je voudrais seulement enlever à réflexions
ces «
le
caractère d'un réquisitoire
fait
de
chic » et les étaver sur quelques exemples.
A oici d'abord son.
Il
le
trop célèbre cliemin de fer de Lang-
n'est question, bien entendu, que de son exécu-
tion matérielle, car je n'ai pas l'intention de pénétrer
dans
I
.
les coulisses financières
Il
n'est
de l'entreprise.
question dans tout ceci que du gouverneur gé-
et qu il ne faut confondre avec 1 homme polili([ue. Leurs idées sur quelques points ne paraissent pas toujours être restées, au moins dans la forme, en concordance absolue.
néral, dont les actes appartiennent au pulilic jîas
ERREURS ADMINISTRATIVES Les voies de fer,
commun ical ion,
constituent
le
En
chemins de
siirtoul les
premier élément de
commerciale d'un pays.
',5
la
mise en valeur
possession depuis treize ans
d'une colonie de douze millions d'habitants nous avons
chemin de
déjà réussi à y construire cent kilomètres de fer.
Mais
inusitée
marche,
faut
il
remarquer pour
que nous l'avons c'est
mer\eilleuse,
malgré il
sans
vouloir
que,
s'il
règlements. L'histoire en
est
fait
;les
justifier cette activité le
et
nous faut à peine l'esquisser.
Vers 1888, l'administration militaire, trouvant
onéreux
le
ravitaillement des troupes dans
Langson, demanda au gouverneur général
la
s'il
ce
très
région de
ne
serait
pas possible d'étudier la jwse de rails Decauville de
Phu-LaniJ^-Thuoni? à Langson. Les études c
but furent un peu sommaires, car
ce
tent déclara
de poser
que rien
les rails
ne devait pas dépasser
i
rance, l'autorisation de et
dans
compé-
n'était plus facile et qu'il suffisait
sur la route mandarine
obtenue en France
faites
le service
on
,3oo, 000 francs.
commencer se
;
Sur
dépense
la
cette assu-
laborieusement
fut
mit au travail. Mais an jour,
on s'aperçut qu'à vingt kilomètres du point de départ il
V avait des montagnes. Je néglige
bien des vicissitudes,
on
refit les
le
les détails.
tracé fut repris par
tronçons qui ne cadraient plus avec
veaux plans, on emporta comme on put
les
en dissimulant l'importance des travaux,
on
arrivait à
et
Après
morceaux, les
nou-
autorisations
en mai 1898
Bac-Lé après avoir posé quarante-C[uatre
kilomètres de voie, dont la moitié en terrain plat. Les travaux, après cet effort, étaient
du
reste
interrompus
faute d'autorisation, d'argent et de travailleurs.
Le gouverneur général, M. de Lanessan, voyant que chemin de fer de Langson marchait sur les traces de celui du Soudan et jugeant avec raison qu'il fallait
le
3,
L'EXPANSION FRANÇAISE AU ÏONKIN
'.6
(Ml lit
Unir, ('iii|)runla do l'ari^ent, se passad'aiitorisalion et
fournir en permanence par
les
corvées cinq à si\
mille travailleurs. Dix-huit mois après, les cinquanlesi\
kilomètres qui restaient à faire en pays très acci-
denté, dilTicilc et peu sur, étaient ouverts. Le chemin
de
fer
marche
et fait ses affaires. Il faut
travail se ressent
de
façon dont
la
il
de reprendre toute
forcé, à href délai,
avouer que
a été conduit.
élargir la voie, car le transit est de
la
le
On sera
ligne pour
beaucoup supérieur
commencées en vingt donné de terribles mé-
à ce qu'on avait prévu. Les études
un peu au
endroits,
comptes
et
hasard, ont
deux tronçons arrivés
à dix kilomètres l'un
de l'autre présentaient dix-huit à vingt mètres de différence de niveau qu'il a fallu racheter par des pentes assez fortes
merciale de
pour diminuer de beaucoup la ligne.
d'avoir servi,
car
la capacité
com-
Le matériel est en morceaux avant
on
avait,
avant toute autre chose,
acheté fort cher, à tite d'économie,
le
matériel déjà usé
de l'exposition de 1S89. Tel quel,
c'est
un
travail utile et le
premier outil
commercial de quelque importance que nous ayons créé là-bas. Mais, n'est-ce pas en petit notre histoire habituelle et n'est-il pas intéressant ce petit l'on
commence
tailler les
tramway que
à poser le long d'une route
troupes
et
(jui se
pour ravi-
transforme à travers mille
avatars en cent kilomètres de
chemin de fer ayant donné
sept cent trente-cin(| mille mètres cubes de déblais ro-
cheux
et
terrassements avec cinq cent soixante-deux
ouvrages d'art
et
soixante-dix-huit bâtiments de ser-
Le tout coûtant dix-huit millions, auxquels il faudra en ajouter quatre ou cinq pour élargir la voie ? Encore sommes-nous très heureux d'avoir abouti à vice.
quelque chose,
le
hasard nous a forcé
la
main. Si une
EIlllELllS
compagnie
ADMINISTRATIVES
t^
sérioiisc s'était présentée, voilà dix ans,
pro-
posant de construire en quatre ans une ligne mieux laite
pour douze millions,
repoussées haut
la
main
ses propositions auraient
et
il
L'histoire de l'hôpital de d'être rappelée.
Il
était
n'y aurait rien de
Hanoï vaut
été
fait.
aussi la peine
urgent de construire un hôpital
militaire à Hanoï, tout le
monde
était d'accord et
dépense décidée. Or, pendant cinq ans,
il
la
a été envové
chacpie année au ministre des colonies deux rapports contradictoires
sur l'emplacement à choisir
service des constructions,
l'autre
Heureusement, en 1891, on eut gouverneur général
le
du
L'hôpital est fait et très beau.
démontrer cju'on avait eu
Que
dire
les
l'idée
Il
était à
tort de choisir
J'ai
de donner au
peu près fmi,
d'Annam, m'assurer
complète.
Au
exemple,
était
tendant à
l'emplacement
des ports
et
l'abandon de nos côtes par
pu, en faisant, au retour
des ports
du
médecins.
du régime des douanes
tatons-en seulement les conséquences affaires et
l'un
droit de trancher ce grave conflit.
qu'il parvenait encore à Paris des rapports
proposé par
:
service de santé.
:
?
Cons-
la stagnation des le
commerce.
du Tonkin,
cjue leur
les escales
décadence
est
début de notre occupation, Tourane, par fréquenté par plusieurs lignes locales,
chacjue semaine
un ou deux vapeurs venaient
v trali-
quer. Aujourd'hui la visite mensuelle d'un petit bateau
allemand
est
plus que suffisante et les courriers des
messageries, que
deux
fois
le service
postal arrête dans cette rade
par mois, n'v prennent rien. Le dépôt de char-
bon qu'on parle d'y
établir, depuis quatorze ans
pour
assurer l'indépendance de nos escadres d'Extrême-Orient est
encore à
l'état
de projet. Le mouvement de Haï-
pliong est insignifiant et celui de Saigon très faible
L'EXPANSION FIVAN(;USE AL TOMvIN
',8
alors
(|iie
Hong-Kong
cl
Singapour regorgent de na-
vires.
une étrange conception pour favocommerce que d'en-
N'est-ce pas aussi
riser les transactions et attirer le
un pays d'une
tourer
barrière de douanes et d'imposer
des droits exorbitants aux navires qui se hasardent à relâcher dans ses ports
')
Alais le produit de ces
tante.
L'augmentation du
trafic et
de
douanes
et
somme impor-
de ces ports représente malgré tout une
la richesse
ne rachèterait que progressivement ce
délicit
du pays dans
le
budget du protectorat. Et comme, pendant leur court S(^our dans la colonie, les gouverneurs généraux n'ont
pas de préoccupation plus impérieuse que celle de mettre sur pied ce budget, aucun d'eux ne peut, l'espoir
même
dans
d'une augmentation d'activité commerciale con-
sidérable mais lointaine, prendre l'initiative d'une
sure qui produirait
En fait,
fait
un
déficit
de procédés financiers je ne retiendrai qu'un
parce qu'il est caractéristique et que
observer de près les suites. L'analogue (hi reste
me-
immédiat.
une
fois
pu en
j'ai
s'était
produit
déjà aux environs de 1889, lors de la
rentrée en France,
si
je
ne
me
trompe, de M. Piquet.
Celui que je rapporte était donc une récidive.
Dans
les
premiers jours de 1890, au
rappel de M. de Lancssan,
le
gagé dans une série de grands travaux face à des
examiner
et
devait faire
je n'ai point à
Quelques semaines après, M. de Lanessan
même
temps que son succes-
M. Rousseau (mort depuis
à Hanoï), s'embarquait
cpiittail
seur,
engagements iinanciers que ici.
moment du
protectorat se trouvait en-
l'Indo-Chine en
à Marseille. à peine,
Lnammc
L'interrègne durait depuis quelques jours
quand subitement parvint
à
Hanoï un
télé-
de Paris contenant l'ordre formel de fermer
EHRELRS ADMINISTRATIVES k's caisses
publiques
et
de surseoir à tous
',.j
pavements
les
jusqu'à l'arrivée du nouveau gouverneur. M. Ilolter-
mann, payeur-général du Tonkin, homme et
d'initiative
de grand sens, mort quelques mois après,
de représenter
les
sa responsabilité lui
répondit par
charge
mes
les
conséquences de cette
permit
se
faillite et
sous
pava quelques dépenses urgentes.
un blâme
deux ou
olTiciel
trois cents francs
On
en mettant à sa
et
de
càblogram-
«
envoyés à ce sujet. M. Rousseau apprenait cette
»
élonnanle mesure en débarquant à Saigon
son pre-
et
mier acte fut d'en réclamer l'abrogation immédiate. Il
trois
n'en
est
pas moins vrai cjue cela avait duré plus de
semaines, pendant lesquelles créanciers et entrepre-
neurs du protectorat avaient eu tout faillite,
le
devant
les
le loisir
guichets fermés. J'avais à ce
soin de la sécurité et
un peu
la
la réu:ion
qu'on achevait
de Doui^-Danu. L'entrepreneur sur un
télégramme de son agent
à
toute hâte, avant justement
Au retour, me disait
Trésor. pavés,
il
faire
surveillance de l'entre-
prise chargée des travaux considérables
dans
de
moment
:
Hanoï v
était
un compte
en
me montrant
«
Le protectorat
descendu en
très fort avec le
mandats im-
ses
me
doit plus de
cent mille piastres (environ 200,000 francs). Si au lieu d'avoir
fait
ordinaire ou
moment
une excellente si
seulement
alTaire j'en avais fait
comme
sous la porte. » à Hanoï,
Il
tant d'autres, qu'à mettre la clef
ajoutait, tellement la débâcle était
qu'il n'aurait
pu
à ce
moment
escompter en banque, à quelque prix que ce papier
une
catastrophe était arrivée au
de mes grosses échéances à paver en France, je
n'aurais eu,
forte
la
du
protectorat.
tue pour longtemps
moins s'étonner en
Une
pareille fausse
le crédit
d'une colonie
fût,
faire
son
manœuvre et
il
faut
présence de semblables aléas de voir
L'EXPANSION FRANÇAISE AL TONKIN
5o
prétentions exorbitantes des entrepreneurs qui se
les
risquent à traiter avec
protectorat et des banquiers
le
qui bii prêtent de l'argent.
Il
faut avouer
que
ces der-
un peu de la situation. Je n'ai jamais vérifié les traités du protectorat avec ses banquiers et n'ai pas qualité pour les apprécier voici cependant une niers abusent
;
anecdote personnelle qui
On
me
paraît instructive.
un
poste d'une certaine impor-
tance à fpiclques beures de
Dong-Dang dans les rocbers la demande du
([ui
devait construire
bordent
la frontière
colonel Gallieni,
le
de Cbine. Sur
gouverneur général avait accorde
quatre mille piastres (onze mille francs environ).
Il
que cette petite somme me serait directement remise, mais régularisée comme les dépenses annexes du cbemin de fer (c'est-à-dire payée avait été décidé, en outre,
par
banquiers du cbemin de
les
fer sur
Après avoir construit
tectorat).
du gouverneur
mandat du prosur la parole
le poste,
général, et ressenti l'incjuiétude expli-
cable, après le krach raconté plus haut, de voir rejeter
mandat
la
dépense, je reçus finalement
fis
présenter. C'est alors qu'on m'expliqua poliment que
sur
un mandat de
payait
que
le
régulier et le
cjuatre mille piastres* le bancjuier n'en
trois mille trois cents
qui
me
furent effecti-
vement versées. Il est certain que de l'argent prêté moyennant une commission de i8 à 20 pour 100 sans compter l'intérêt normal de 5 à 6 pour 100 qui court sur la
que
somme
les
dans nos de gens
totale, n'est pas
donné.
On
peut regretter
opérations de ce genre soient tout à
mœurs
le
et qu'elles
dernier
mot de
la
fait
politique coloniale.
Ai-je trop insisté sur nos misères? Je n'ai les eftleurcr,
entrées
constituent pour beaucoup
craignanl surtout de tomber dans
fait
le
que
travers
ERREURS ADMINISTRATIVES farilo
de
de tonl
In criticjuo
de paiii
que
une
eeci
c'est
pris.
tàclie
5i
Retenons seulement inurate de
i'alre
non
pas de Jurandes choses mais quekpie chose dans nos colonies. 11
est juste
d'encourager sans réserve
la
bonne
volonté de ceux qui essayent, et d'admirer l'éneruic de
ccuv qui réussissent.
CHAPITRE
m
— Causes. — — Irréconciliable de Moyens propres y remédier. L'instruction. — Conclusion: Civilisons nos conquêtes.
Insuccès
(le
noire politique indigène.
Instabilité flans
la classe
hostilité
la directifin.
instruite.
—
à
Nous avons posé avoir nisé. la
ce principe
cpi'il faut,
en colonisant,
comme but innnédiat la prospérité du pays coloOn n'achète plus de nos jours les habitants avec
maison
qu'ils habitent et le
champ
qu'ils cultivent.
Le servage après l'esclavage a disparu de nos c'est
même un
pour démontrer
les
donc impossible de peuplée velle
ou
tropole.
conquêtes de traiter
constitution
la
Le
;
la ciAilisation. Il est
rac([uisition d'une colonie
>i\ante connue l'achat d'une propriété
et
.seul
de ])ossession
un pa\s
mœurs
des clichés les plus généralement utilisés
est
d'un
hel'
au bénéfice de
nou-
la
mé-
but qui légitime une semblaljle prise la
ci\illsé, le
transformation de cette colonie en
bien moral
et
matériel des liabitanls.
Même
en dehors de cette question de droit, du
qu'il
ne peut être question de peupler une colonie,
débordante déjà luais
seulement de
prend sation et
la ;
de la
population,
connue
mettre en valeur,
la
commercial
Tonkin,
le l'acteur social
première place dans l'œuvre de
car
le
moment
la
coloni-
base nécessaire de tout progrès industriel est la tranquillité et la
mique. Nos rapports
prospérité écono-
a> ce les occupants, notre politique
POLITIQUE INDIGÈNE indigène devaient donc constituer
la
53
première préoc-
cupation de nos administrateurs au ïonkin,
Avons-nous mieux
Mallieureusement non. peuple annamite le
en 1886,
une note «
M^""
nous
Il
commerciale
et
fallait la
?
du
confiance
nous n'avons pas su Toblenir. Dès
et
début nous avons
vait
que dans nos
réussi de ce côté
de transformation industrielle
essais
fait
fausse route et voici ce qu'écri-
Puginier à
M^"'
Freppel, député, dans
confidentielle retrouvée après sa
Monseigneur, je vous
le
mort
:
dis sans parti pris, sans
«
intention de critiquer et sans vouloir faire de person-
«
nalités,
ce
ment
«
route sur toute
«
tinue à suivre la
«
l'a
«
J'affirme
«
et
«
dans
et ses
Au
du ïonkin,
question
la
gouverne-
le
représentants ont jusqu'ici
lieu de
la
ligne et
même
gagner
fait
fausse
malheureusement on con-
voie.
la
confiance des habitants, on
vue diminuer, notre influence n'a pas augmenté.
«
France est moins aimée au ïonkin royaume d'Annam qu'elle ne l'était avant notre expédition. Chez un grand nombre l'es-
«
time
que
dans tout
la
le
et l'affection
qui se manifestaient extérieure-
ce
ment ont
fait
c<
de désirer
comme autrefois
c(
on
ce
nombre
ce
d'une manière ostensible, à
ce
movens
ce
II
ce
politique qu'en administration. Je
ce
pété des centaines de
ce
que
place au mépris et à la haine.
redoute
la
souverainement
travaillent, les
Au
lieu
notre action dans le pays et
un
très
uns sourdement, la
les
grand autres
combattre par tous
les
faut nécessairement changer de système tant en
préventions,
fois,
manque
l'ai dit,
je
l'ai
ré-
mais je n'ai rencontré de
connaissance
des
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
o'i
«
liominos et des choses. Je suis convaincu qu'il v a
«
un véritable aveuglement des esprits que Dieu permet pour châtier le royaume d'Annam et un peu la
ce
là
«
France qui a perdu
«
tant de centaines de millions sans obtenir encore au-
«
cun Il
yX%r
résultat définitif. »
Puginicr,
nées et
kin
tant de milliers d'enfants et
n'y a point là d'exagération. L'anarchie véritable
sous
affligeante,
et
ici
le
s'est
de
l'influence
laquelle écrivait
prolongée pendant de longues an-
gouvernement indigène
est
encore au Ton-
plus inquiétant des problèmes.
le
On
en i884, arrêté avec raison
s'était,
Pour
protectorat.
à la
importantes de beaucoup
annamite,
les
seules qui
nous occupaient à ce moment,
plus
forme du
provinces peuplées par la
les
race et les
c'était
le
plus sage. Le traité de i884 vint compliquer les choses
en nous retirant tout contrôle sur était possible
cependant de
avec de la suite dans stable.
Mais
là,
les
la
tirer parti
idées et
de
une politique
métropole impose en
la
permanente,
ses
très
du per-
les eflorls.
com-
les affaires d'exploitation industrielle et
merciale,
Il
la situation
plus qu'ailleurs, l'instabilité
sonnel français devait paralvser tous
Dans
cour de Hué.
effet,
procédés administratifs
et
d'une façon son contrôle.
Si les résultats sont mauvais, cela tient le plus souvent à ce
que
ces procédés
eux-mêmes sont mauvais ou mal du pavs. En fait de politique
appropriés aux besoins
règlements sont muets
et
central est obligé, à contre-cœur
il
indigène,
ment
laisser Il
de
les
l'initiative à ses
faudrait s'en féliciter se faire
sommes
une
gouverned'en
représentants dans la colonie. si
pollli(|uc
loin de compte.
le
est vrai,
chacun d'eux avait et
de
la
suivre.
le
temps
Mais nous
POLITIQUE INDIGÈNE Aprc's avoir rappelé
revenir sur
une tentative
malencontreux
le
cité plus
nos rapports politiques avec
les
A
gouverneur général en
«
traité
de
i884,
de
^I.
haut, résume ainsi
Annamites
:
chaque résident général ou
partir de ce jour,
«
en iS85 pour
faite
traité
Lanessan, dans son ouvrage
«
55
sa guise,
à
fit
piétinant le
de i884 ou en réclamant l'application suivant
caprice des circonstances
«
le
«
régnantes;
«
telles parties
ou
la direction
ou
de l'Annam central, l'autre renonçant
«
aux
«
rection;
«
tout à la cour.
«
aucun respect pour
«
l'Annam
elForts faits par ses prédécesseurs
l'un
promettant
Tous
« résident chef
tout,
au Tonkin
de province diriger
cela sans règle ni
dans cette
l'autre
di-
refusant
ne montrant guère
d'ailleurs
les autorités
central, ni
Tout
des idées
s'efforçant de conquérir telles
l'un
annamites, ni dans et
laissant
chaque
les affaires à sa fan-
méthode ou avec des même temps que les
ce
taisie.
«
méthodes qui changeaient en
«
chefs. Or de i883 à 189 1 il v a eu vingt résidents généraux ou gouverneurs généraux sans parler de
«
« huit résidents supérieurs «
et sept résidents
de ces changements succes-
«
«
du Tonkin
supérieurs de l'Annam
sifs, il
ne pouvait
Le tableau
sortir
qu'une anarchie profonde.
»
n'est pas trop chargé et la conclusion est
exacte. C'est en effet à
une anarchie profonde qu'ont
abouti pendant des années nos tentatives de gouverne-
ment
indigène. Cherchons la cause immédiate de cette
impuissance.
Il
s'agissait
en
chose l'application
i884 de
du
réi^ler
avant toute autre
protectorat et de lui donner sa
forme. Le pavs possédait
un
outillage de gouverne-
L'EXPANSION FRANÇAISE AU ÏONKIN
5G
monl au
coniplel ri en état de fonctionner.
abord
i^rcMnicr
eût
qu'il
siirii
Il
adniinislralir à lari^es mailles, superposé
ment
donc
un réseau
au gouverne-
existant pour en surveiller et en diriger le fonc-
tionnement. Dans aussi
scmljlc
d'établir
pratique
la
les
choses n'allaient pas
sinq)lement. Nos insuccès, nos inconsécpiences,
nos discordes locales elles-mêmes viennent en grande partie de la difficulté d'utiliser le personnel administratif indigène. C'est
encore actuellement une cause per-
manente d'insécurité d'aulant plus dangereuse qu'elle est moins avouée. Les données du problème sont simples, la solution l'est
moins. Fallait-il accepter
digène
et
appartenant à
oITiciels
tel
quel ce personnel in-
gouverner par l'intermédiaire des mandarins classe des lettrés
la
?
Devions-
nous au contraire chercher à former un nouveau cadre
un peu
administratif avec des créatures à nous, choisies partout, parmi les
hommes
nouvel ordre de choses Aujourd'hui,
ment une
la
?
cause
est
entendue. Les
élite intellectuelle
serait impossible,
pour adininislrer l'Etat serait
en France
qui semblaient dévoués au
lettrés for-
en dehors de laquelle
il
de trouver assez d'hommes instruits pavs.
le
Les exclure des charges de
certainement plus dinicilc que d'interdire
les
fonctions publiques à tout
homme
pos-
sédant son brevet de bachelier. Le peuple, en outre, tient
à
ses habitudes,
préfère,
dont
les
malgré tous grades,
du pinceau,
si
il
les
redoute
les
changements,
laborieusement conquis à
inspirent
et
abus, conserver ses mandarins
un
la
pointe
respect traditionnel.
Povu(|uoi donc ne s'en pas reposer entièrement sur
eux du soin de l'administration intérieure? Cela deiiiande explication. Les lellrésel les
mandarins
(cjui
ne
ADMIMSTRVTTON ANNAMITE sont que des lettrés en place) constituent
.-,;
un
corps fermé
auquel on n'accède que par une loniruo fdière d'exa-
mens
et
de stages.
Ils
forment une société
aux dépens du peuple
que
il
ce
L'établissement
titre.
Annam
notre civilisation en
de
une
serait
la
définitif
Le et
de
ruine manifeste
situation exceptionnelle des mandarins.
la
aristo-
la nation.
premier mandarin de son royaume
le
s'honore de
h part vivant
lui,
nettement séparée du reste de
cratie très roi n'est
au-dessus de
et
Ils
de-
viendraient de simples fonctionnaires plus ou moins
peuple mieux instruit de
bien rétribués et
le
leur échapperait
peu
pour
C'est la lutte
et
même
est
donc toute naturelle,
la vie.
Je ne veux point
faire le procès
ici
La réputation de
tion annamite.
qu'on a
d'incapacité
son personnel
ses droits
Leur résistance permanente
merci à nos progrès
et sans
h
à peu.
est
même,
de l'administra-
rapacité, de cruauté
souvent
à
mon
voulu
sens,
faire
exagérée.
Je reproche seulement à ce personnel de nous être irré-
médiablement
hostile.
ment des hommes tier et
leur
mé-
pas plus cruels, dans la praticjue habituelle de la
vie C|ue
moins
Les mandarins sont c-énérale-
intelligents, sachant bien
ne
le
comportent
ne
qu'il
qu'ils croient
s'agisse
les
mœurs de
leur race, à
de défendre leurs privilèges
menacés par
la
civilisation française et
chrétienne; aucune trahison, aucune cruauté, aucune injustice ne lem- covile dans ce cas. Leurs exactions se
limitent souvent à vivre largement sur le pays. C'est
chose tolérée, entrée dans
les
mœurs
et
cessaire, car leurs fonctions sont rétribuées
dérisoire^.
I.
Ces
mœurs donnent
Remarquons en
passant que
les
lieu
du
reste né-
d'une façon
cependant à de
manJarins payés
par
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
:>H
graves abus. lité très
Il
en résulte chez
les
mandarins une véna-
générale et farilenienl explicable. Laisser aux
fonctionnaires leurs services et
soin de fixer eux-mêmes le prix de une marque de confiance que ne mé-
le
ritent pas toujours ceux d'Extrème-Orienl.
On
que
a dit souvent
le
recrutement des mandarins
par voie de concours ouverts à tous devait constituer
une administration démocratique, un personnel rapproché du peuple tendances
et d'idées
et
avec lui. Kien n'est plus inexact.
Les mandarins sortent du peuple
de
terre,
ils
très
en communauté complète de
ne conservent avec
comme un lui
que
arbre sort
les points
contact nécessaires pour en tirer leur subsistance.
cune administration
n'est plus fermée,
plus
de
Au-
oligar-
chique, plus hostile à tous les progrès. Cette sélection très
sévère et cette éducation intellectuelle de forme
immuable
et
compliquée, auxquelles sont soumis pen-
dant de longues années
les
font de la classe lettrée le
résumé
sence de
la
aspirants au mandarinat,
vieille civilisation
et
comme
la
quintes-
annamite. Le manda-
rinat est la clef de voûte des sociétés d'Extrême-Orient; sa
suppression amènerait
social
dont
il
forme
la
la
désagrégation du corps
charpente. Mais la réciproque est
le sont avec la même parcimonie qu'ils Tétaient autrefois le Tripar le gouvernement annamite. A titre d'exemple Cliau (sous-préfet) de Dong-Dang toucliait 2^ piastres par mois, alors qu'il lui en fallait 60 ou 80 pour vivre très modestement dans sa situation. Son premier secrétaire, lettré, pourvu d'un grade de mandarinat, recevait 3 ou 4 piastres, alors que nos « bovs )) étaient payés 8 à Q piastres, un cuisinier 10 à i4 et qu un chef de chantier chinois pour la maçonnerie ou la charpente gagnait de 3o à 5o piastres. C'est une véritable prime à l'exploitation de lindifrène et nous arriverons diflicilcnicnt ainsi à empêcher les mandarins de rançonner le contri-
nous
:
huable.
MANDARINS ET LETTRÉS
:,!)
vraie et les progrès de la civilisai ion occidentale
masses ruineraient peu à peu son prestige
les
et
dans
mena-
ceraient son existence. Toute tentative de transformation profonde et définitive de la race annamite, quelle
que
forme, se trouve donc en fm de compte di-
soit sa
rigée contre cette institution. Les
dès le premier jour ils se
le
mandarins ont
saisi
caractère de cette lutte sociale
et
défendent.
le corps des lettrés n'était que l'ensemble Annamites pourvus d'un brevet proportionné au
Autrefois des
nombre d'examens
qu'ils avaient
pu
réussir et atten-
dant leur nomination aux fonctions publiques. La cour
d'Annam, qui pas plus aujourd'bui qu'en i884
n'ac-
cepte sans arrière-pensée la tutelle de la France, a su tirer parti
de
l'iiostilité
naturelle de toute
truite contre le nouvel ordre de choses.
la classe ins-
Elle
l'a
peu à
peu transformée en un corps politique homogène puissant, en v groupant par des
plus nombreux, quelquefois
examens plus
même
et
faciles et
au moyen d'une
sorte d'enrôlement, tous les représentants de la résis-
tance à l'influence étrangère. Ce corps, devenu de la sorte les
beaucoup plus nombreux que ne
besoins de l'administration,
le
comportent
renferme une foule de
déclassés sans scrupules, aigris par
la
misère, prêts à
toutes les beso2:nes et cru'on tient en haleine en leur
promettant des places
......
après le départ
des Français.
De
tous temps ce personnel a été employé par les
mandarins se
et la
cour aux besognes qu'ils ne pouvaient
permettre ouvertement
présailles
même nages
et
contre nos
:
massacres de chrétiens, re-
adhérents,
rébellion,
piraterie
colportage de fausses nouvelles. Les person-
officiels
peuvent ainsi rester dans
la coulisse, ce
L'FAI'ANSION FRANÇAISE AU TONKTN
Oo
qui leur
con>i('iil
n'étant pas leur
treusement
tous égards, la rébellion ouverte
à
lait.
travaillent en cachette, trai-
Ils
sous les dehors d'une soumission qui va
et
le monde sommes toujours pris.
jusqu'à l'obséquiosité. Tout curieuse, nous y
En
présence de cette situation,
d'accepter franchement,
conserver
en
le
officiel
de près
et
et,
chose
plus sage eut été
le
début, la nécessité de
mandarins en place
les
les surveillant
tement
des
le sait
de
et
se servir d'eux
en ne tolérant pas
le
recru-
des lettrés dans des proportions très su-
périeures aux besoins
du gouvernement. Malheureu-
sement, ceux qui furent aux prises avec
les
dangers
et
les
trahisons de la première heure, frappés de l'hosti-
lité
indéracinable de la haute classe annamite, entre-
prirent de l'éliminer sans précautions et de créer de
toutes pièces
une administration nouvelle. La
ne fut pas heureuse. Les
tentative
improvisés
fonctionnaires
qu'on avait choisis un peu au hasard dans
les
inter-
prètes, les gradés de troupes indigènes, les notables de village, voire
taient de
même
nous
quelquefois
«
les
bovs
»
qui affec-
être dévoués, se trouvèrent sans plus de
moralité que leurs prédécesseurs, incapables en outre et
méprisés des habitants.
Il
fallut v
renoncer.
Cet insuccès contribua aux réactions de en revint sans précautions tration des
mandarins
et
la suite.
On
sans réserve à l'adminis-
lettrés.
Les fonctionnaires indi-
gènes échappèrent bientôt complètement au contrôle des administrateurs français derniers devenir
le
et
on
vit
trop souvent ces
jouet de mandarins retors qu'ils
avaient cru gagner par des concessions de toutes sortes.
Tout
à fait ignorants parfois des choses de
on venait de
les
l'Annam, où
transplanter sans directions et sans sur-
>eillance, cpielques-uns n'hésitaient pas à aclieter leur
M ANDAKINS ET LETTRÉS
(m
tranquillité et la paix apparente de leur circonscription
au prix d'une véritable abdication de leur autorité ou
nième d'une complicité réelle dans les œuvres de ranet de haine des mandarins provinciaux. Sous le
cune
gouvernement heureusement intérimaire d'un M. nal (avril 1890 à février
1
891)
la
lîon-
province de My-l)iic
\ it
publier et afficher dans tous ses villages, des proclamations timbrées
du
donnant à tous
les indigènes,
cachet de la résidence française or-
devenus chrétiens depuis
quinze ans, de retourner au paganisme
mort de
fense sous peine de
nisme. Ce n'est nel,
mais
pu
qu'il ait
Dans
se
heureusement qu'un
là
faisant dé-
au christia-
fait
exception-
honteux
X'cst-il pas
caractéristi(|ue.
est
il
et
se convertir
produire dans une colonie française
d'autres provinces, au lieu d'être tout, les
?
man-
darins n'étaient rien. Conservés en place et responsables
de leurs fonctions, on leur refusait Les résultats étaient
remplir. l'écart,
humiliés quelquefois
usages locaux n'avait
pu
ils
les
aussi
moyens de
les
mauvais. Mis à
et maltraités
au mépris des
emplovaient l'influence morale, qu'on
leur enlever, à nous créer chaque jour de
nouveaux embarras, quand
ils
ne
se
transformaient pas
eux-mêmes en redoutables chefs de rebelles. Cette exagération alternant au gré de chaque résident
ou chef de
que nous avons signalée plus haut, ne pouvait produire, comme ledit M. deLanessan, qu'une cercle avec celle
anardiie profonde.
Il
curieux de noter (pie ces di^ergences de vue
est
trop fréquentes sur la question de l'administration in-
digène furent une des causes qui contribuèrent à pro-
voquer
si
souvent
et militaires
le
déplorable antagonisme entre civils
au Tonkin.
GliANDMAISON
4
I/EXPANSION FRANÇAISE AU TONIvIN
02
Un
« lollro français »
dans une revue de annamites.
lettrés
scepticisme
de ces
«
puliliait
Saïf,'on,
un
en septembre 1895,
article très soigné sur les
v louait la philosophie aimable, le
11
un peu moqueur
et l'absence
Normaliens d'Extrême-Orient
malheureusement
les
connus par deux
classes
»,
de préjugés ajoutant que
mé-
kttrés sont nécessairement
d'Européens:
«
Les mission-
naires et les officiers de l'armée », dont le peu de culture intellectuelle et le
manque de
peuvent symjiathiser avec
souplesse d'esprit ne
l'intellectualité subtile
de
la
haute classe annamite.
Le les
lettré français a raison
de dire que
missionnaires n'aiment pas
exagère
quand
il
oppose
les
les officiers et
mandarins, mais
derniers à la rudesse et au fanatisme des Européens. vérité est
que missionnaires
ment pavé
de
les frais
et officiers
la délicate
La
ont générale-
man-
politique des
darins et les ont trop souvent pris sur
il
de ces
la délicatesse studieuse
le
fait
pour
conserver des illusions sur leurs dispositions.
Avec
la finesse
mites ont eu vite
nos progrès
le
qu'on ne peut leur nier, fait
de discerner
le tort
les
Anna-
que causait
désaccord trop fréquent entre
les
à
auto-
rités civiles et militaires et se sont eflbrcés d'en tirer
parti.
Souvent maltraités,
il
faut l'avouer, surtout
début de notre occupation, par
les militaires, les
au
man-
darins cherchent généralement à se faire bien venir des fonctionnaires les
embûches
civils,
et les
dont beaucoup n'ont pas connu
trahisons des premiers temps.
Ils y arrivcnt généralement au prix d'une obséquiosité qui
leur est naturelle et des plus invraisemblables flagorneries.
Ce premier point obtenu,
étonnante dextérité de toutes tenir
cl
les
ils
profitent avec
une
occasions pour entre-
a\iver les moindres désaccords entre les auto-
LV RELIGION souvent
rites françaises,
même
63
pour
les faire
naître par
de faux rapports ou des bruits liabilemenl répandus, C'est
une tactique qui leur
En
fait,
répétons-le,
a souvent réussi.
nous faut pour
il
le
moment, en
pavs annamite, utiliser l'administralion indigène
telle
qu'elle est en lui faisant loyalement la part d'autorité
de responsabilité
et
conviction que
c'est
une surveillance
qui
lui
revient
;
mais avec
un instrument dangereux,
la
exigeant
très active.
Ce n'est là évidemment qu'une solution provisoire, un « modus vivendi » que nous devons tendre à perfectionner graduellement. Toute action directe avant pour
but de modifier
la classe
dirigeante déjà formée pour la
rapproclier de nous est vouée à l'impuissance.
méliore pas une récolte sur pied, on amende
On
n'a-
le sol et la
récolte suivante est meilleure. C'est sur le milieu social qu'il faut agir
pour l'amener progressivement
à pro-
duire une aristocratie intellectuelle moins réfractaire à notre civilisation que celle des lettrés. Le peuple anna-
mite
est très malléable, très plastique,
ler, l'instruire,
le civiliser.
négligé jusqu'ici, qui aurait
il
faut le travail-
C'est ce travail social trop
dû cependant absorber
la
plus grande part de nos travaux et de nos efforts au
Tonkin.
Deux
cboses surtout, dit M^'' Puginler, sont
leur instrument de transformation d'un peuple ligion et la langue.
bonne
foi
Aucun liomme de bon
le
meil-
:
la re-
sens et de
ne peut contredire à ce programme.
.
Les missions françaises assurent au peuple annamite ces
deux
bienfaits.
C'est l'outil de
excellence et nous l'avions dans
la
colonisation
par
main. Xon seule-
1
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
G/,
ment nous n'avons pas su en
tirer parti,
comment
Aoir
la
France
officielle
mais en éta-
un peu
dianl l'histoire de nos débuts, on est
surpris de
en a usé avec
ses
missions du Tonkin. Nos missions catholiques ne de-
mandent cependant pas
que l'Angleterre accorde
agressive ses
subsides et la protection
les
pasteurs
elle
;
réclament que
n'en ont
la liberté et
si
généreusement à
du reste pas besoin et ne un peu de bienveillance.
(À'tte liberté, cette bienveillance et
quelquefois la plus
simple justice leur ont été mesurées avec une parcimo-
On
nie incroyable. et
peut affirmer que, dans
la
pratique
sous prétexte de neutralité, les chrétientés indigènes
ont été souvent moins bien traitées que
villages
les
païens.
Une
conduite
si
peu conforme
à nos traditions et à
nos intérêts a été dictée quelquefois par des méfiances Certains
d'exportation.
administrateurs, épaves des
luttes électorales, apportant avec
de
la
sions
que des
de
la
tentement pour dans
mis;
portée sociale des missions,
indisposer.
les.
Ce parti pris est rare le arrivants n'ont aucune notion du but
ment un élément de discorde
lléchi
les idées étroites
écoles cléricales.
plus souvent, les et
eux
politique intérieure, ne voyaient dans
Le
les
mandarins
souci,
l'espèce,
et
ils
y voient seule-
une cause de mécon-
qu'ils tiennent à
ne pas
légitime en théorie, mais peu ré-
de
laisser
son autonomie complète
à l'administration indigène, leur fait considérer les dif-
férends entre les missions et les petits mandarins locaux
que
aussi bien
comme
les
disputes entre pavens et chrétiens,
des affaires sans importance relevant seulement
des autorités annamites. juste.
La
classe
profonde que
Ce désintéressement
est
in-
annamite instruite n'a pas de haine plus
celle des chréliens et des
missions (pTelle
1
LA RELIGION considère
avec raison
comme
la
05
seule base solide de
notre prise de possession définitive. partialité
même
de ce genre
est
relative
Demander une im-
aux mandarins dans
les alTaires
une injure au sens commun.
La cause avouée de nos interventions Extrême-Orient a toujours été
successives en
la protection
sionnaires. Laisser égorger par milliers
de nos mis-
les chrétiens
après notre conquête, puis nous en désintéresser officiel-
lement,
est
une
attitude
que
les
indigènes ne peuvent
ou à la mauvaise foi. Elle nous peuple annamite un tort moral considé-
attribuer qu'à la faiblesse a fait
dans
le
rable.
Mais ce n'est être envisagée à
général.
là
qu'un côté de
la
un point de vue
Le changement de religion
question, elle doit
plus large et plus est le
premier
et le
plus important des facteurs de transformation sociale K
1 II n est pas possible de le contester. Les professionnels de l'alheisme aussi bien que les anarcliistes impénitents ne font aucune ditTiculté pour reconnaître, avec Bakounine et tant d autres, que « la relifjiosité )) est le premier sentiment qui élève 1 homme primitit" au-dessus de la brute. Dans les premières phases d'ascension Aers le progrès, des races neuves, chaque stade est marqué par une forme caractéristique du sentiment religieux. Un peu plus tard, quand ces tentatives grossières sont remplacées par des religions proprement dites, chacune d elles peut amener 1 homme jusqu à un certain degré de formation morale et sociale, mais pas plus loin. Si la Chine est resiée depuis des milliers d années dans un état de stagnation sociale presque complète, elle le doit aux rites immuables de son cadre religieux qui lui interdit tout mouvement en avant. Le mahoniétisme a pu mener les Turcs à la conquête du monde, mais ne leur a pas permis le progrès moral nécessaire pour suivre les nations chrétiennes. Leur société en contact avec une civilisation plus haute aurait disparu depuis longtemps sans le parti pris de ses puissants tuteurs qui seul en arrête la décomposition matérielle et le démemljremeiit. C est une loi naturelle qu'il n'est pas en notre pouvoir d éluder. Si nous .
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
GG
Un est
indigène converti par des missionnaires français
aux
trois quarts français, car
il
a
donné
à notre civili-
sation le gage d'attachement le plus profond et le plus
sûr qui
soit.
question
si
Il
faut
claire et
si
amèrement regretter que cette évidente quand on est hors de
France, devienne à ce point délicate et compliquée
quand on y rentre
homme
ofilcielleinent
compromettant pour tout
faire allusion. Parler des
serait risquer
rance tacite dont toire
qu'il soit
en place, d'y
missions
de compromettre
elles bénéficient et ce
la tolé-
silence obliga-
nous mène à de déplorables inconséquences.
Au Tonkin que moite du
nous occupons depuis quatorze ans,
(toute la rive gauche du fleuve Rouge) dépend encore des missions espagnoles. C'est une faute politique très grave. L'indigène converti dans
la
ces régions est là
mi nouveau
pavs
en
effet
chrétien mais pas Français.
travail à faire et
beaucoup de
Il
v a
forces per-
dues, (hiclqucs-unes de ces chrétientés étrangères n'ont
voulons transformer moralement nos clients et nos protégés faisons-leur connaître une religion qui comporte un degré supérieur de civilisation. Quant à la forme de cette religion, nous n'avons pas le choix. Malgré les dénégations intéressées et les tentatives souvent faites pour en détourner lallenlion, il existe un fait indiscutable. L'action politique extérieure des puissances qui visent à une expansion considérable, se confond le plus souvent avec une forme spéciale de propagande religieuse. En France, nous ne pouvons pas avoir d'autres missions nationales que les missions catlioliques. Les établissements prolestants qui pourraient revendiquer ce titre ne trouvent point chez nous les ressources nécessaires pour leur assurer l'indépendance matérielle qui seule pourrait leur donner l'indépendance morale. Il leur faut pour vivre s inféoder aux sociétés bibliques dont les Anglais commencent à inonder la France et se contenter le plus souvent, dans la pratique, du rôle modeste d'annexés de leurs puissantes prnlcctrices, les missions anglaises. :
LA LANGUE pas,
X^-j
au début, caché leurs sympathies pour
De quel
venus par
de nous protéger nous-mêmes de possession avait été glante et générale
?
et alors
le signal
Pour qui ne connaît pas
comprendre comment
la
les
il
est
On
moyens de
prise
povivait
les
mi-
impossible de
métropole n'a pas dès
en main.
le
début
sans expropria-
missions espagnoles et
tion violente racheter les
donner avec
que notre
d'une persécution san-
sères de notre politique intérieure,
pris cette affaire
où,
nous n'étions pas encore capables
force,
la
la rébellion.
un crime dans un pavs
droit leur en faire
les entretenir à
les
des mission-
naires français.
Toutes
les
missions d'un pavs qu'on veut con(|uérir
définitivement doivent être nationales. L'indigène, en
changeant de religion, devient nécessairement
du missionnaire le client
A
;
il
ne faut pas que
le
le client
missionnaire
soit
de l'étranoer.
côté de la religion c'est la langue frmiçaise qu'il
faut répandre dans nos colonies. aussi simple
qu'on
serait tenté
de
La question le croire.
n'est pas
donné
Elle a
lieu souvent à de graves divergences de vues.
On
a dit,
avec quelque raison, que les écoles de Français devien-
nent des manufactures de
débouché que
la
carrière
déclassés
d'interprète.
comme
n'avant Il
serait
donc
prudent de n'arracher au travail des champs pour attirer
les
dans ces écoles qu'un nombre d'indigènes pro-
portionné aux besoins de l'administration
et
du com-
merce. L'objection a de la valeur, aussi n'est-ce point seule-
ment en créant des
écoles d'interprètes
dans
importants que nous répandrons utilement
les centres
la
langue
68
F/EXPANSION FRANÇAISE AL TONKIN
française.
Il
existe
jeunes Annamites,
au Tonkin une classe nombreuse de plus intelligents et les plus labo-
les
rieux, qui consacrent leur vie à la poursuite des grades
de
plus tard aux fonctions
lettrés et
(l'est
eux qu'il
Le moyen
le français.
de
le
d'amener
est facile et
du mandarinat,
à étudier et à parler
peu coûteux.
Il suffit
avantages sérieux aux fonctionnaires con-
faire des
naissant
serait utile
français et de leur
leurs concinrents, en
donner
attendant
le
préférence sur
la
moment où
il
sera
possible de rendre progressivement la langue française
obligatoire pour toutes les fonctions publiques en
com-
mençant par
mon
les
moindres. Cela vaudrait mieux à
sens que d'encourager, les
comme on
l'a fait
au ïonkin,
études des lettrés dans leur forme ancienne et in-
compatible avec notre civilisation, en donnant à leurs
examens un
éclat tout à fait ofilciel
hauts fonctionnaires
par
la
présence des
Xous avons accepté
français.
cadre de l'administration indigène avec son
recrutement
;
il
n'est
changer brusquement
pas plus l'esprit
le
mode de
en notre pouvoir de des
éludes nécessaires
pour Y arriver que d'en détourner sans précautions
la
foule de jeunes gens qui s'y livrent. Obligeons-les seu-
lement pour recueillir dire pour
avoir
le
de leur labeur,
fruit
des places, h
apprendre
c'est-à-
français.
le
Sans produire un déclassé de plus, nous aurons des maîtres d'école capables d'enseigner villages et
une administration avec
le français
dans
les
laquelle les fonction-
naires français pourront enfin s'entendre. '
Mais
la
diffusion
langue ne il
suffit
pas
:
après en avoir assuré la
faudrait songer à doter largement l'Indo-
Chine de l'éducation professionnelle, puis des hautes études pratiques. fiter
Aucun pays
n'est plus
propre à pro-
de cette éducation. Le |)cuple remplira
les écoles
L'INSTRUCTION
locale s'améliorera rapi-
professionnelles et l'induslrie
dement. L'enseignement de macie, de
même
la
la
Gq
la
médecine, de
mécanique, de l'architecture
fortune et
ne manqueront pas.
les élèves
éclairant l'indigène vous le civiliserez.
jeunes gens désireux de percer, il
le
somme
chaque année dans de
la
utiles,
un but
considérable de travail gaspillé
labeur interminable
le
de
En
En donnant aux
goût des études
deviendra possible de dériver peu à peu vers
plus pratique, la
phar-
la
est assuré
préparation aux examens de
sance des caractères chinois et de
et
sans portée
La connaisphilosophie de Conlettrés.
la
fucius y perdra peut-être, mais vous soustrairez ainsi tous les ans un plus grand nombre de jeunes hommes
laborieux f[ui les
et
intelligents à cette formation intellectuelle
rend irrémédiablement réfractaires à notre
lisation.
Le peuple annamite
amené progressivement classe dirigeante, non stérile
du mandarinat
à
se
trouvera de
la
civi-
sorte
produire de lui-même une
plus ligée dans le formalisme
actuel,
mais vivante, instruite
et
susceptible de progrès. Cette transformation n'est pas
une utopie Noir ce
et il sufht,
pour en escompter
que deviennent
France pour v
faire
les
les résultats,
de
jeunes Annamites envoyés en
leur éducation. Quelques années
de notre régime scolaire suflisent à
faire
de ces
man-
darins en herbe des candidats heureux à nos examens universitaires et à nos grandes écoles.
Voilà où est la solution déhnitive de délicate aujourd'hui
la
question
si
du gouvernement indigène. Amen-
moisson sera meilleure. Malheureusement nous ne touchons pas au but, car il faut pour l'atteindre du temps, de la patience et de la suite dans
dons
la terre, la
les idées.
L'EXPANSION FUANÇAISE AU TONKIN
70
Avaiil de
j)ti.sscr
hautes régions,
aux notes dil
il
([uètes.
fortes
peu confuses qui précèdent. Nous avons
lui
Je n'ignore pas
que rencontre
difficile.
colonies, civilisons nos con-
tives
nombreuses
ohjcctions
les
cette théorie.
Nous sommes tellement
tons en nous des svmptômes ciale,
les
nous faut chercher une conclusion
colonisons pour les
:
dans
à l'cludc de la pacilicatioii
si
La discussion en
et
est
désorientés, nous sen-
graves de maladie so-
nous avons jusqu'ici, dans nos nouvelles tentade colonisation,
si
complètement échoué
cju'il est
presque impossible, à l'heure actuelle, de trouver un l'ait
acquis,
un
principe vérifié, pour servir de base à
Notre expérience
cette discussion.
gative et il
est très
s'il
pour
est facile
de dire
hardi d'affirmer
réussir.
»
:
«
:
«
est tout entière
Nous avons mal
né-
agi »,
A oilà ce qu'il faut faire
Essayons cependant.
Nous ne pouvons plus prétendre
à faire des colonies
de peuplement car nous n'exportons pas d'hommes. L'exploitation à la interdite. Elle
mode
anglaise nous est également
répugne à notre caractère, nous n'avons
d'hommes disponibles pour la mener à bien. Nous n'v entendons rien. Nos institutions métropolitaines administratives et commerciales sont plutôt faites pour tuer un pays prospère que pour mettre en valeur un pays neuf. On ne peut guère compter sur une transformation pas assez
intérieure de notre corps social suffisante pour changer
dans un avenir rapproché
les
données du problème.
Faut-il alors proclamer avec quelques-uns que nous
sommes définitivement impuissants
?
Pas encore. Le
français mis en liberté retrouve en partie ses qualités
de race.
11
faut
dans nos colonies
donc poursuivre deux le
Français en liberté
idées et
:
met Ire
lrou\er une
CIVILISONS NOS COLONIES
méthode de colonisation conforme aux facnltés de notre race. Je ne vois qu'une solution colonisons pour les colonies, soustrayons-les, par tous les moyens, aux :
germes morbides de l'air,
donnons-leur de
métropole,
la
décentralisons-les.
Cherchons à en
œuvre de dupes ? Je ne Lue œuvre bonne en de
la civilisation,
l'entreprend.
La
soi,
comme
progrès général
le
ne peut en aucun cas nuire force n'est pas le droit,
que
les
c'est «
la colonisation
temps
mieux
réussi en France.
à celui qui
même
de nos
individus ne peu-
impunément en dehors du
nous que le
là faire
le crois pas.
jours, et les nations pas plus
vent vivre
pavs
faire des
prospères par eux-mêmes, civilisons-les. Sera-ce
droit.
morale
Rappelonsde tous
» cjui a
La protection des
lieux saints et des chrétiens d'Orient a plus fait pour
notre prospérité commerciale c[ue toutes nos colonies
ensemble. Les bénéfices ont diminué répudié
moins
les
vrai
du jour où nous avons
charges de ce protectorat.
que
la
«
Il
n'en est pas
du Le-
francisation » des Échelles
vant et des côtes voisines avait
suffi
pour
faire
de nous
maîtres de la Méditerranée. Ceci prouve que
les
idées grandes et généreuses ne sont
les
pas toujours des
idées de dupes.
Par
menses
ailleurs,
vouloir exploiter à l'anglaise
territoires
les
im-
occupés par nous serait en faire
la
proie immédiate des commerçants allemands et anglais, ce C{ui serait la pire des duperies.
L'objection la plus sérieuse à la théorie civilisatrice est
celle
qu'on pourrait appeler
«
historique »
.
XuUe
part on n'a civilisé les races conquises on les a détruites. ;
Deux
civilisations
étant
mises
avancée ne transforme pas l'autre
en présence, ;
elle la
la
plus
supprime^
FIWNÇAISE AL TONKrV
i;i:XIV\NSION
7? Il
de dlsculcr eu détail
serait trop lon<j;
les
nom-
breuses preuves cpi'on en fournit. Elles sont de valeurs très dilTérentes.
Laissons de côté d'abord l'exterminât ion voulue et
préméditée des races asservies dont ^()ilail il
la
place au soleil. Le
conqnérant con-
le
produit souvent;
s'est
l'ait
ne vaut pas plus contre nous que l'expropriation d'un
essaim d'abeilles par un autre plus fort ou
d'une espèce de fauves, moins
combat que
le
ses faroucbes voisins.
Arrêtons-nous au contraire au cas le
disparition
la
armée pour
bien
le
plus général et
plus caractéristique où les races indigènes, mises en
contact avec la civilisation européenne, se sont corrom-
pues avec une incroyable rapidité,
ont perdu toute
tombées peu à peu dans un
Aitalité et sont
que
faiblesse et d'abjection
naturellement amené à
les
le
colonisateur
tel état
s'est
de
trouvé
balayer de ses nouveaux do-
maines par mesure de salubrité publique. Ainsi définie, l'objection
est forte
mais
;
elle n'est
pas
sans réplique. Il
que
est possible,
en
effet,
colonisateur
le
d'enraver cette démoralisation
apporte avec
lui
;
en outre,
les
exemples généralement invoqués s'appliquent mal au cas qui
Je
nous occupe.
sais
social est tive,
que
les races
rudimentaire
conquises, surtout
prennent avec une
si
leur étal
leur civilisation très primi-
et
facilité
extrême
les
vices
de
leurs conquérants et diriicilemcnt leurs qualités. C'est
un
fait
teur
trop souvent constaté et qui frappe l'observa-
moins perspicace.
le
lleuve
Rouge,
un
lettré
J'ai
boimeteau avec une dextérité auiaieul
fail
honneur
à
vu,
annamite et
un
sur
le
faisant «
bord du jouer
bagou
un professionnel de
la
»
le
qui
bnidieuc
CIVILISONS NOS COLONIES parisienne.
L ne autre
paver l'absinthe
mant que pour ce complète.
Il
La chose
comme
les
il
fond
le
le travail
fini
sucre
pouvait prétendre à
», esti-
piuée
la «
»
de multiplier ces exemples.
Dans une
deux parts
y a
—
sous
« dix il
est naturelle.
la nôtre,
peu par
à
prix,
serait facile
en l'analysant,
veau,
nn de mes administrés IhA dcDong-Dang
fois,
plaindre qn'un cabarelier chinois
\{\\i se
faisait
7.'',
commun
civilisation vieillie
distinctes.
On
trouve,
de principes formé peu
des siècles, le façonnement du
cei'-
sédiments déposés dans l'âme par d'innom-
brables générations chrétiennes. Tout cela se transmet
inconsciemment dans stitue
Mais
proprement
il
faut,
ce
de
la partie saine
la
que nous appelons
pour atteindre
une écume, une couche de
race et con-
« civilisation ».
cette base solide, traverser
vices et de
germes morbides,
produit des fermentations sociales.
Ces germes, cjuand et
que
les parties
vellent plus
la
fermentation devient très active
profondes de
aux sources
la civilisation
ne
se
renou-
ont produites, se déve-
cjui les
On
loppent et empoisonnent peu à peu l'organisme.
comprend combien leur action et
doit être plus
plus funeste sur des sociétés en enfance
amassé au cours des réserves de santé
pour
siècles,
morale
de
et
cjui
résister
vitalité
immédiate n'ont point
au mal,
les
que nous avons
encore. C'est la décomposition sans remède.
La démoralisation rapide
complète des races con-
et
quises, leur effondrement tient
donc
qu'on
à ce fait
les
éléments toxiques de
met en contact d'abord avec
les
nos sociétés.
de créer des besoins nou-
A
Il s'agit,
en
effet,
eaux à ces troupeaux humains
et
pour paver leur consommation
mot de
la civilisation
tliode pratique
:
commerciale.
flatter
GRA^•DMAISO^•
de
—
leurs
les
c'est
On
mauvais
faire là le
produire dernier
connaît la instincts,
5
méles
L'EXPANSION FRANÇAISE AU TONKIN
7'i
empoisonner d'opium,
abrutir d'alcool
les
écraser, prétextant qu'ils vivent de peu, sous
mal rétribué
Gomme
puis
un
les
travail
disproportionné aux forces humaines.
et
comme
offrir ensuite
enseignement, on ne que des théories abstraites sur
la fraternité des peuples, le
code ?Sapoléon, des journaux
contre-poison,
trouve à leur
à
un
est
sou, quelquefois le suffrage universel.., et tout cela
accompagné trop souvent par une leçon de choses
qui en
fait
ressortir le vide et
justice légale, le mépris
du
en souligne
Ce sont des hommes cependant, la
prétention de
voie
et
les civiliser,
que nous avons
nous avons puisé.
l'ironie: l'in-
faljjle.
suivie, les
nous affichons
et si
faut leur enseigner la
il
mener aux sources où
faut leur apprendre notre religion
Il
notre langue, diriger leurs efforts vers des études plus
utiles et leur faire reconnaître notre supériorité
non point en exploitant
de race
leur faiblesse et en aggravant
leurs misères mais en les faisant plus heureux matériel-
lement
et
moralement. Matériellement, en leur rendant
moins dure la leur donnant la
Du dans
reste,
lutte
pour l'existence
nous l'avons
moralement, en
dit, l'objection
Les exemples sont
l'espèce.
;
justice pratique.
de races sauvages
et
s'applique
tirés le
mal
plus souvent
de contrées peu peuplées. Or, notre
empire indo-chinois compte déjà vingt millions d'habitants et nous ne
pouvons songer
à
supprimer
la race
annamite.
Mais
dlra-t-on,
alors,
précautions contre nous
le secret et
si
nous
lui
enseignons sans
de notre supériorité,
elle
en abusera
rejettera l'élément étranger dès qu'elle
n'en aura plus besoin. Servons-nous donc des habitants, dressons-les pour en faire
dons-nous de
les faire
un
penser.
outillage excellent et gar-
CIVILISONS ?sOS COLONIES
;.-,
La réponse est facile « il n'est plus temps », Les Annamites ne sont pas des sauvages. Leur civilisation :
de
est très difTérente
nôtre, mais elle existe. L'ins-
la
du Tonkin que dans plusieurs provinces de
truction primaire dans aussi développée
est
certaines contrées
France. L'instruction secondaire plus en l'aire
à
honneur que partout
un peuple qui
vons en user avec 1°
supérieure y est
et
Xous avons à pou-
ailleurs.
travaille et qui pense. ?sous
lui
de trois façons
:
Entraver l'instruction d'une façon générale, faire
reculer le peuple annamite, le tenir par la force dans l'ignorance, tarir le recrutement des C'est
un peu
Anglais aux Indes. Nous ne
pouvons sa
pas.
l'était le
un
:
hon
voulons pas
Maintenir
ancienne,
et
les
nous ne
le
dans
est plus instruit
peuple hindou. ?sous ne pour-
Ce
gré,
mal
serait
d'ailleurs
la
une solution
gré, les peuples avancent. Les
Anglais commencent à s'en apercevoir 2°
instruits.
cadre suffisant pour remplacer partout
l'indigène instruit.
provisoire
le
Le peuple annamite
masse que ne
rions fournir
hommes
pendant tant d'années
ce qu'ont fait
;
culture intellectuelle dans sa forme
peuple annaméthode suivie jusqu'ici. ]Nous avons vu que cela nous mène à prolonger une situation dangereuse pour notre sécurité. l'y
encourager
et
vouer ainsi
mite à l'impuissance praticpe. C'est
un
C'est perpétuer
tout
le
la
état d'hostilité redoulahle et arrêter
progrès matériel. L'état
social
qui repose sur
mandarinat ne comporte qu'une prospérité agricole relative à l'exclusion de tout
ou commercial
le
très
développement industriel
;
3° Instruire les
Annamites en leur donnant
le
goût
des études pratiques. Introduire peu à peu notre langue et
notre religion
nationales.
Répandre sans arrière-
I;EXP.VNS10N FRANÇVISE au TONKIX
70
pcnsi'o notre civillsalion la sécurité, la
dans
le
peuple.
en résultera:
Il
suppression graduelle des difficultés de
économique
politique intérieure, le progrès
et industriel
pays. Tja nationalité annamite résidant surtout dans
du
perdra peu à peu son relief
la classe lettrée,
tatives séparatistes
et les
ten-
de>iendront moins à craindre.
C'est alors qu'il faudra penser
aux Anglais, méditer
leurs procédés administratifs et commerciaux, délivrer
nos colonies de
qui décourage
la tutelle
les
bonnes
volontés et de la routine qui tue les initiatives. colons, nos
sans
de
cju'il
commerçants
nécessaire de les y pousser, les
soit
s'établir et
de prospérer dans
presque français qui,
quille,
spéculation, arrivera au
rien
me
un pays
s'il
moyens
riche, tran-
rapporte peu
moins dans
demander au budget de
Qu'il
>hos
nos industriels trouveront,
et
la suite à
à
la
ne plus
la mère-patrie.
permis, en terminant cette première
soit
partie, d'affirmer encore et de préciser l'idée
dominante
cjue j'en voudrais voir se détacher. J'ai
cherché à démontrer ([ue nous avons eu tort de
suivre les Anglais dans la forme de leur exploitation coloniale. Je crois «
anglomanie
»
que
nous a
pour une bonne part rendre
stériles.
ce fétichisme irréfléchi, cette fait
mépris pour
de leur égoïsme cauteleux, qui
tort grave. Il a contribué
Mais à coté de leur férocité dans
ploitation, de leur
lité
un
à faire dévier nos efforts et à les
suffit à
les
les
Anglais ont une qua-
expliquer l'extraordinaire fortune de
leurs entreprises et à retarder le règlement
que leur demanderont un jour asservis et ruinés
l'ex-
races conquises,
les
millions
pour l'enrichissement de
la
du compte d'hommes métropole.
CIVILISONS NOS COLONIES L'absence de tout mobile généreux
77
et désintéressé est
racheté chez eux par le respect profond de l'individu
(quand
il
est citoyen anglais),
l'amour
et
l'habitude de
la liberté pratique. A oilà ce qu'il faut leur envier le secret
de leur force
Chaque nation graves
et
triser,
il
ment
et le ressort
;
c'est
de leur puissance.
a ses plaies. ?sous avons les nôtres,
profondes. Si nous avons à cœur de les cica-
ne faut pas nous contenter d'admirer passive-
ce bienfait de la liberté et
comme un
fruit
exotique
et
du
respect de l'individu,
précieux incapable de
s'acclimater sur notre terre de France.
Chacun de nous
doit s'habituer à en faire le but direct de ses efforts et à le
considérer
comme
désormais nécessaire.
morale
fera le reste.
le
terme d'une évolution
?sotre
vitalité
sociale
économique
et
CHAPITRE IV L'organisation des hautes régions clans ses rapports avec la pacification générale.
—
Politique des races.
— Situation dans
la
région
de Langson enfin 1898.
Obligés, le
Delta
comme nous
un
stalu
l'avons vu, de conserver dans
quo plus dangereux
que cjuelques-uns n'ont voulu très
heureuse
traire aussi
et
le
et
plus instable
reconnaître, c'est
une
féconde idée d'avoir entrepris de sous-
complètement que possible
les
hautes ré-
gions à l'influence annamite, de nous attacher plus
étroitement leurs habitants et de nous préparer ainsi des alliés sûrs, aussi bien contre la piraterie extérieure cjue contre les
troubles toujours possibles des basses
provinces. L'occupation militaire complète et l'organisation,
dans ce but, des immenses territoires vagues qui
forment
comme une
ceinture aux riches plaines
du
Delta, devaient avoir pour résultat immédiat d'isoler ces dernières des frontières chinoises. C'était
mortel porté à le
la
grande piraterie en
même
un coup
temps que
plus sûr inoyen d'enlever aux mandarins mécontents
du Tonkin, sinon nuire en
les
la
volonté, au
moins
les
moyens de
privant de leurs auxiliaires habituels,
les
pirates chinois. L'aj)plication régulière de ces vues
ment dans un avenir rapproché,
si
amènera certaineune nouvelle saute
LES HAUTES RÉGIONS
-,,
de vent ne vient pas tout remettre en question, une pacification complète et durable tats
résul-
et bril-
pour rendre l'expérience concluante. Ces principes,
lants
du
du Tonkin. Les
obtenus en 1894-1895 ont été assez rapides
reste, et
procédés de gouvernement qu'ils com-
les
portent ne sont pas nouveaux.
Ils se sont dégagés peu à peu des leçons de l'expérience. Depuis bien des années,
les officiers
qui occupaient
réclamé une à une
indépendance
régions frontières avaient
les
dans
et essayé,
la
de leurs ressources,
et
limite de leur la
plupart des
réformes dont nous allons voir l'application. Mais
au colonel Gallieni que revient l'iionneur de fait
et
c'est
les avoir
accepter après en avoir arrêté les lignes définitives
d'en avoir assuré
dans
les
vues,
le
une netteté pratique
succès avec
une largeur dans
les idées et
dans l'exécution devant lesquelles
M. de Lanessan, d'abord
il
hésitant,
une énergie
faut s'incliner.
ne
s'était
décidé à
entrer dans cette voie que devant les troubles de plus
en plus graves qui dévastaient il
fut
les
hautes régions. Mais
de ne pas reconnaître que, du jour où
serait injuste
convaincu de
la nécessité d'aller juscju'au
ne ménagea au colonel Gallieni ni
moyens
d'action dont
il
au prix
même
la confiance,
avait besoin
parfois des ornières tracées
pour
;
il
il
ni les
sortant résolument
aller
droit
au but,
des dissentiments les plus graves avec
ses conseillers naturels, les chefs des services
torat
bout,
du
protec-
.
Sur plusieurs points, cependant, l'entente complète au début
Lanessan
était
un
et
il
fallut user
n'était pas
de diplomatie. M. de
partisan convaincu des mandarins
annamites. Dès son arrivée, apportant à ce sujet des idées très arrêtées,
situation stable,
il
leur avait
rendu officiellement une
un rang honorable
et la part d'autorité
KN TKKIUTOIIŒ MILITAI KE
8o
que
coni[)orlai('iit
Icnirs
qu'une grande détente presque complète dans de
résultat
une
les
régions
conduite
observée pendant plus de trois ans.
que
rapprochement
le
cédés nous ont darins,
fait
est définitif et
turément, car
la
nier
furent
le
régulièrement
De
là à déclarer
que nos bons pro-
manun peu préma-
des amis sincères de tous les
On
n'y avait qu'un pas.
il
ne peut
pacilication extérieure
basses
de
ligne
cette
On
fondions. et
le fit
sourde hostilité du vieux parti national
nous ménage encore pour l'avenir bien des mécomptes.
En
tous cas, à ce
de présenter
comme
moment,
il
eût été peu politique
but principal des réformes consi-
dérables qu'on réclamait, une assurance à prendre contre
un danger
du jour
qu'il était à l'ordre
On
d'ignorer.
parla donc surtout de l'extinction de la piraterie chi-
une
noise et de la nécessité de donner aux frontières très solide organisation militaire.
C'était,
en
effet,
le
plus pressé. Le rappel des mandarins annamites qui
administraient
les
provinces habitées par
les
Muongs,
démandé
plus tard, ne fut accordé qu'à regret et
peu pour
faire
honneur
à
l'engagement pris de
un
laisser
carte blanche à l'autorité militaire*. C'était cependant le
point capital et la première application principe de gouvernement colonial qui a
officielle
fait ses
d'un
preuves
depuis. Cette mesure figurait,
I.
dans
il
est vrai, depuis
programme du gouverneur
le
général.
deux ans déjà, (Circulaire du
3 scptcml)rc 1891). Mais, à cause des difficultés d'exécution et surtout de Ihostilité déclarée des hauts mandarins annamites qu on ne voulait pas mécontenter, elle était demeurée, jusque-là, lettre morte.
A
moment
encore (fin 1898), sa réalisation immédiate et jugée peu opportune, sinon par le gouverneur administration supérieure général lui-même, au moins par ce
totale
était
1
franc^aise.
POLITIQUE DES RACES
Tout pays,
s'il
81
riche, peuplé et d'une certaine
est
étendue, mais de civilisation encore incomplète (comme
rindo-Chine ou Madagascar) manque de cohésion politique. On y trouve toujours une race conquérante, plus intelligente, plus forte
en train d'exploiter
ou simplement plus
prolifique,
peuplades aborigènes
les
et
de se
substituer à elles, en les refoulant progressivement dans les parties les
moins riches
et
les
moins
du
accessibles
pays.
Au ïonkin, nombre
et
les Annamites venus par mer, avant le une organisation sociale beaucoup plus
avancée, exploitaient depuis des siècles les races primitives après les avoir expropriées des plaines riches.
Ln nouveau conquérant de civilisation
supérieure, se
présentant dans ces conditions, a nécessairement
comme
adversaires irréconciliables ceux qui exploitaient le pays à leur profit, avant son arrivée.
ment de
Son
intérêt est
évidem-
soustraire toutes les races de sang différent à
cette autorité exercée de force et acceptée à contre-cœur,
lien
un double avantage: diminuer
tire
d'autant les
ressources et l'influence de son seul adversaire sérieux
bien venir des peuplades exploitées, en leur
et se faire
donnant spontanément la liberté
le
bien qu'elles prisent
pour chacun d'être administré
jDar
le
plus,
des hommes
de sa race.
On claire
est
en droit de s'étonner qu'une conception
en théorie
et
encore discutée tous
La qualité de la vérité. et la
féconde dans la pratique
les
jours à propos de Madagascar.
ses adversaires habituels
permet,
de leur prêter d'autres préoccupations que
vrai,
si
si
Mais leur argumentation
soit
il
celle
est
de
est parfois spécieuse
question mérite qu'on y insiste.
En
prenant possession d'un pays
tel
que nous l'avons 5.
EN TEUIUTOIIŒ MILITAIRE
82
composé de populations diverses mais pos-
caractérisé,
un
sédant une race dirigeante et
mental, ayant une vie politique,
outillage gouverne-
semble que
il
plus
le
simple, après avoir vaincu cette race, soit de s'entendre
avec elle
de prendre
et
comme
conservant
suite de ses affaires
la
intermédiaire.
Il
y
en
d'hommes
façon de procéder, économie de temps,
la
dans cette
a,
et
de
travail.
Partant do ce principe, nous avons voulu au ïonkin superposer notre autorité à l'ordre existant sans v rien changer, dans l'intention de laisser au gouvernement
annamite
la
charge de
tats
les bénéilces.
la force
les
propriétaire, sous prétexte qu'ils sont
que
ses fermiers s'en plaignent,
déjà de le conserver
comme
C'est cependant ce
il
sans arrière-pensée.
du
tort tout
homme
il
hasardeux
ne viendrait de confiance.
Ils
Si
ce rôle ce n'est pas
y trouvent la possibilité de nous
en soignant leur fortune personnelle.
C'est tout profit. N'ayant plus le travailleur, ils
serait
que nous avons tenté au Tonkin.
mandarins annamites ont accepté
faire
domaines d'un, mal administrés
régisseur et
à personne l'idée d'en faire son
les
nous
Les résul-
ont été naturellement médiocres.
Après avoir occupé par
et
dont
l'administration
entendions seulement réclamer
aucun
intérêt à
ménager
ne reculent devant aucun moyen pour
quitte à rejeter ensuite l'odieux de leurs
l'exploiter,
Dans les provinces Annamites administraient en notre
exactions sur l'autorité française. surtout,
nom
où
les
des populations de race différente, ces exactions
ne connaissaient plus de mesure.
La seule non pas de
ligne politique raisonnable en pareil cas est se
superposer, mais de se substituer à
la
race
dominante, aux exploiteurs précédents, pour toutes
les
POLITIQUE DES RACES affaires
83
de gouvernement. La nouvelle autorité doit
tendre à devenir
entre
le seul lien
les
groupes ethniques
et ne permettre aucun groupement général. En plus
de l'ancienne agglomération politique
en dehors
d'elle
des avantages matériels qu'il retirera de cette conduite, le
colonisateur chrétien y trouvera
un
bénéfice d'ordre
supérieur. La suppression d'un intermédiaire le rappro-
chera des populations et lui permettra de leur assurer,
dans une plus large mesure, un bienfait qui lui seul
pour légitimer toutes
Ce
définitives.
bienfait,
accordé aux vaincus;
les
conquêtes
suffirait à
et les
rendre
faut l'avouer, est rarement
il
c'est la justice.
Xous avons vu qu'en présence de la densité de population et du sentiment national très développé dans le bas Tonkin, la forme du protectorat s'est imposée tout d'abord à notre occupation
et qu'il s'en est suivi l'obli-
gation de conserver en place est inutile et les
de revenir sur
le
les
personnel annamite.
tâtonnements,
les
Il
fautes
déboires que nous a valu l'emploi d'un instrument
aussi défectueux. Les circonstances
dence exige
nous
l'ont
mis de
main il faut donc s'en servir mais la pruque son fonctionnement soit surveillé avec
force dans la
;
;
soin et strictement limité à son rayon d'action obligatoire.
Essayons de montrer
comment
les
populations des
hautes régions pouvaient sans peine lui être soustraites et
quels avantages nous avons tirés de cette réforme^.
I. Le retard apporté à la publication de ce volume permet de constater quels résultats ont donné jusqu'ici ces principes et les procédés d'application qui vont être exposés plus loin. Depuis leur mise en pratique, les hautes régions du II'' territoire n'ont pas cessé de jouir d'une tranquillité complète et les quelques troubles, dont les journaux nous apportent encore parfois lécho, ont toujours lieu en terre annamite et du fait de malfaiteurs annamites. 11 en sera ainsi tant que les hautes
EN ÏEIUUTOIllE MILITAIRE
S',
A
la fin
deuxième
do 1890,
colonel Cjallienl,
le
territoire militaire,
commandant
voulant établir
le bilan
le
de
vingt mois de travaux consacrés à la pacification et au
relèvement de régions qu'il avait trouvées dévastées par la piraterie et
en partie dépeuplées, demanda aux com-
mandants de secteur un relevé des résultats acquis et un exposé des moyens propres à les rendre définitifs. 11 estimait à bon droit que cet examen pouvait seul mettre dans leur jour les principes directeurs de son œuvre et donner pour
la suite les
éléments d'une ligne de con-
duite raisonnable.
Je viens d'écrire nition.
Une des
le
mot
«
innovations
secteur », en voici la défi-
Gallieni fut la création, sous ce territoriaux
peu étendus
commandement
et
plus fécondes du colonel nom, de commandements
les
exactement délimités, où
le
militaire et l'administration politique
réunis dans une seule main, permettaient d'appliquer très
largement ces deux principes fondamentaux de
toute entreprise sérieuse: bilité.
La
l'initiative
et
la
responsa-
division des cercles importants en petits gou-
vernements de ce genre devint
la
base de l'organisation
nouvelle des territoires militaires. C'est l'installation et le
fonctionnement de l'un d'entre eux que nous allons
étudier.
Les notes qui suivent sont extraites en grande partie établi à cette époque pour le secteur de
du mémoire
Doncr-Dani?, dans le cercle de Lan^son. Les indications
topographiques
et les
quelques détails de métier qui à
dessein y ont été conservés, offrent par
eux-mêmes peu
d'intérêt; mais voulant éviter à ce travail le reprocbe,
réglons resteront protégées contre la piraterie chinoise et soustraites à lintluence des Annamites (mars 1898).
SITLATION EN FIN si
iNc,3
85
généralement mérité, d'être de seconde main
et
généraliser trop facilement des observations locales,
m'a semblé intéressant de
Ini
laisser ce
thenticité qui en précise le sens et
J'ajouterai
que
la
sous
il
poinçon d'au-
en limite
la portée.
plupart des procédés d'administration
qui Y sont exposés sont devenus depuis tout à ciels,
de
lait olli-
gouvernement de M. Rousseau. Le secteur
le
de Dong-Dang s'étant trouvé, par suite de sa situation particulière et de l'intérêt
en avance sur
que présentait
sa pacitication,
les circonscriptions voisines, le
mémoire
qui en traite a servi de type pour l'organisation de plusieurs autres.
En
octobre 1898
d'expédients dans
gouverneur
et
depuis longtemps déjà, on vivait hautes régions. L'attention du
les
général en
embarras économiques
M. de Lanessan qui
avait et
été
détournée par des
politiques de toutes sortes.
avait toujours espéré voir la paciti-
cation s'étendre naturellement de l'intérieur vers les frontières, désirait avant tout s'assurer le bénétlce d'une
En
situation nette dans le Delta. sait à voir
attendant,
il
se refu-
autre chose, dans les graves avertissements
qui se succédaient, que des actes de brigandage sans portée et
il
acceptait
difficilement l'expression d'une
opinion différente. Son optimisme dans l'espèce était
compliqué d'un peu de parti
pris et sous prétexte d'ap-
pliquer toutes les ressources disponibles à la mise en
valeur des provinces basses,
cpii
seules,
en
effet,
se
prêtent actuellement à une exploitation productive, on avait,
de propos délibéré, réduit l'occupation des terri-
montagneux à une surveillance tout à fait insuffisante. La consigne était: pas de renforts, pas d'argent, toires
pas d'histoires
EN TERRITOIRE MILITAIRE
80
Le
calcul
ce sujet,
('tait
du
mauvais
fièrent par la suite et
il
fallut le reconnaître.
il
;
de M. de Lanessan
reste, les idées
se
Sur
modi-
semblait, à la fin de son séjour,
en communauté de vues complète avec
le
colonel Gal-
lieni.
Les demi-mesures avaient
fait
leur temps, la situation
s'aggravait tous les jours et, à la fin de 1898, le pays n'était plus tenablc.
Dans
le seul secteur
de Dong-Dang, aux portes de
Langson, où nous allons désormais
fixer
notre atten-
du 34 septembre au 27 octobre, nous avions à enregistrer un gros convoi pillé et six ou huit hommes tués à i,5oo mètres du poste principal, une escorte de
tion,
:
six tirailleurs
sur
un
tonkinois massacrée quelques jovirs après
autre chemin,
un
officier (le
lieutenant Langro-
gnet, de l'infanterie de marine) tué en installant
un
blockaus, sans parler des courriers assassinés, des villages brûlés, des habitants enlevés...
Une
forte colonne conduite par le colonel Servière,
refoulait, vers la fin d'octobre, les grosses
à demeure dans
bandes ins-
les
cirques calcaires de la fron-
tière chinoise à cjuelqucs
heures de Dong-Dang. La
tallées
était
pas moins inquié-
un pays dévasté,
des cantons entiers
en novembre, n'en
situation, tante.
Sur
la frontière,
abandonnés,
les
chemins
assez
peu surs pour rendre
aléatoire le ravitaillement des postes.
De petites
très
escortes,
des courriers, des habitants journellement attaqués et
massacrés.
Dans
l'intérieur, à part
quelques
fusils et
en état de
certains villages possédant se faire respecter, les habi-
tants ruinés, inquiets et sans confiance sont constam-
ment
pris entre les exigences des pirates qui les cxploi-
SITUATION EN FIN
iS.j3
87
tcnt sans pitié-ct les représailles des Français, incapables
de
qui leur font un crime de paver tiihut
les protéger,
aux
pirates.
Comme occupation militaire à
Dong-Dang ne pouvant
:
suffire
une trentaine d'hommes aux escortes
détachements indigènes, répartis dans blockaus de bois
et
de torchis,
isolés,
peine en sûreté et vivant au jour
et
trois
quelques
ou quatre
sans liaison, à
le jour.
que M. de Lanessan, recon-
C'est dans ces conditions
naissant la nécessité d'agir, se décida h tenter
l'essai
grand des réformes appliquées déjà avec succès dans
en le
premier territoire militaire (Sept-Pagodes, Moncaï) par le
colonel Gallieni.
deuxième
Il
l'appela
territoire, lui
et la liberté d'agir.
au commandement du
donna des hommes, de
l'argent
Les résultats ne devaient pas
se faire
attendre. ]Nous avons essayé tout à l'heure de définir le
but
et l'idée
générale de cette réorganisation des hautes
régions dans ses rapports avec la pacification générale, il
nous
reste à
en suivre
le détail
dans
les limites
que
nous nous sommes imposées.
La tâche entreprise pouvait Nettoyer
se
résumer
ainsi
pays des grosses bandes de pirates
le
:
;
proté-
ger efficacement les habitants contre leur retour; les
armer contre
le
brigandage
;
leur inspirer confiance, les
surveiller efPectivemcnt et se les attacher, en améliorant
leur vie.
Nous
allons en étudier le développement dans les
chapitres suivants
l'organisation situation
où nous examinerons successivement
militaire,
économique
l'organisation
et l'avenir possible
de territoire militaire pendant
mation
et
politique,
sa période
de définitive pacification.
la
d'un élément de transfor-
CHAPITRE Y Lutte contre
la piraterie.
— Organisation occupation militaire. — — Utilisation des habitants au point et
Relations avec les Chinois.
de vue militaire.
La par
la
— Armement des
villages.
pacification des haulcs régions
du Tonkiii, occupées
grande piraterie, exige une opération préliminaire,
exclusivement réservée à l'action militaire. La forme de cette action vient d'être étudiée
complète par
le
d'une façon claire
commandant CliabroP,
plus à
et
même
que tout autre d'en parler en connaissance de cause. ?Sous n'aurions rien à ajouter aux conclusions qu'il formule. L'historique de chacune des colonnes chargées
de combattre
les
grosses bandes dans le voisinage de
Dong-Dang demanderait, ments qui
par ailleurs, des développe-
sortiraient de notre cadre.
Contentons-nous
de quelques principes. Les colonnes militaires ne peuvent avoir de détruire
les
bandes pirates. Alors
la
même
prétention cju'elles
le
pourraient, le résultat ne serait pas en proportion avec l'eflbrt
nécessaire car
bandes
est illimité.
le
On
personnel qui alimente ces a
trop souvent,
poursui>i ce résultat, sans succès
du
I. Opérations militaires au ro/^/i///. Chabrol. Paris, Lavauzclle, 1897.
cependant,
reste. C'est
Commandant
une
breveté
LA l'ACIFlCATION
Sy
orrour qui nous a coûté cher. L'action militaire piopic-
ment
dite a
pour but de dissocier
les
rassemblements
organises, de les cbasser de leurs repaires et d'en pour-
suivre les débris pour les les
met
armés
tants
et
sent en détail
sence de
empêcher de
merci de
ainsi à la
se ressouder.
par
la police faite
convenablement soutenus qui
ou
vastes
les
les
occupés
territoires,
détrui-
En
les forcent à quitter le pays.
On
habi-
pré-
par des bandes
puissantes qu'il n'a pas été possible d'isoler, le rôle des
opérations militaires peut se trouver réduit à «
de balai » qui nettoie
le
un coup
pavs dans des limites hxées
d'avance. Cet effort est alors
immédiatement
suivi par
l'établissement d'une ligne de postes provisoires destinée à endiguer le territoire laissé à la piraterie et à permettre le
repeuplement
Dès
c|ue
les
et l'organisation
circonstances
du
terrain reconquis.
permettent une
nouvelle
poussée, la barrière de postes est reportée aux limites
de
la
nouvelle zone balavée. C'est par ce procédé lent
mais sur que nous avons entrepris de refouler peu les restes
toires
de
grande piraterie vers
de Ha-Yang
Dans
les
frontière,
il
nord des
à
peu
terri-
de Bao-Lac.
et
faut v installer
sol
un
par la force, atteint
la
non pas un barrage pro\i-
mais une ligne de postes
constituer
le
contrées limitrophes de la Chine, dès que
de possession du
la reprise
soire
la
llxes, assez forte
obstacle délinitif aux
pour
mouvements
des
bandes. Mais ce dispositif de défense, cjuelque solide et serré qu'on le suppose,
ne
suffirait
jamais à doter
frontière d'une imperméabilité suffisante
pour
la
résister
à la pression de l'inépuisable réservoir de pirates qu'est la
Chine
et
empêcher
l'infiltration des
gandage. Son rôle
est
bandes déjà formées
et
éléments de bri-
donc seulement d'arrêter de forcer
les petits
groupes
les
([u'il
EN TERRITOIRE MILITAIRE
(jo
no
une forme
sous
pciil arrôler, à pc'nétrcr
assez disso-
peu dense pour n'èlrc pas en mesure de
ciée et assez
résister par la force à
une
police indigène solidement
organisée en arrière. Ainsi constituée et soutenue par
population
la
armée, cette organisation présente de
sérieuses garanties de sécurité.
Lne bande môme
forte qui aurait réussi à forcer le passage
subsister dans l'intérieur.
faut,
lui
Il
vivre et se dérober aux poursuites,
habitants
la
pour exercer son industrie,
et,
munication avec venus à rendre
la
en
assez
ne pourrait effet,
pour
complicité des sa libre
com-
Chine. Le jour où nous serons par-
les entreprises
de
la piraterie assez
hasar-
deuses et ses bénéfices assez incertains pour dégoûter bailleurs de fonds qui
les
commanditent
nous serons tranquilles dans
Nous prendrons tière
ici
le
l'organisation
dépendant de Dong-Dang, au
militaire
proprement
les
bandes,
Haut-Tonkin.
du tronçon de fronmoment où l'effort
de disperser
dit vient
et
de re-
fouler les rassemblements pirates établis à demeure.
Après 1893 par
la
colonne du Po-Mou conduite en octobre
le
colonel Servière, le voisinage immédiat de
Dong-Dang
se
trouvait débarrassé de ces rassemble-
ments. Quelques groupes avaient gagné au sud-ouest les
rochers
du Caï-Rinh, que
les
colonnes de décembre
1893-janvier
1894 devaient nettoyer nombreux remontant la frontière vers allés
se
d'où
ils
;
le
d'autres,
reformer dans un canton voisin, continuaient à désoler
Kong jusqu'en mars
1894.
colonne conduite par purgera ces parages
le
les
A cette
rives
plus
nord, étaient le
Ilan-Lu,
du Song-Kv-
époque, une nouvelle
lieutenant-colonel Chapelet,
et y laissera les détachements chargés d'occuper délinitivcment la frontière.
LA PACIFICATION
91
Cependant, ]S'a-Han
et
les clrcpies calcaires des Lung-Qué, entre Léo-Kao (au nord de Dong-Dang), étaient
encore infestés par
les débris
après avoir trouvé
un
au ïonkin
abri
des anciennes bandes qui,
momentané en Chine,
ren-
y signalaient journellement leur présence par quelque tentative de pillage. En décembre traient
et
1893, deux convois escortés sont
semaine
et
attacjués
la
même
en plein jour à quelques kilomètres de Dong-
Dang. En janvier 1894, nn gros village entre Donget Langson est l'objet d'un attaque de nuit. Les
Dang
habitants armés, accourus au
nombre d'une centaine
soutenus par un détachement de
et
garnison, recondui-
la
sent les assaillants en Chine en leur infligeant quelques pertes.
Au cominencement
viennent
même,
coups de
fusil
Il serait
de février des maraudeurs
à la faveur des fêtes
jusque sur
le village
du
«
Têt
menus
sans intérêt de rappeler tous les
de brigandage qui marquent
les
tenir
la
des
faits
derniers eflorts de la
piraterie dans les quatre premiers
pables bientôt de
», tirer
de Dong-Dang.
mois de 1894. Incales quelques
campagne,
groupes armés, encore sur pied, n'opéreront plus cjue
dans
le
voisinage immédiat de la frontière
en Chine d'où
ils
coups de main
et
;
séjournant
ne sortent que pour tenter c|uelques
y rentrant en hâte dès que leur pré-
sence est éventée. Ce sont désormais les progrès d'une
occupation militaire plus complète, cantons de
la frontière,
le
repeuplement des
villages et une amener leur diminution
l'armement des
surveillance très active cpi vont
progressive puis leur disparition complète.
mars 1894, balavant la fron\a-Han, jusqu'au delà du Song-Ky-kong à hauteur de Dong-Ké, que l'occupation militaire du secteur de Dong-Dang prend sa forme C'est après la colonne de
tière depuis
Dong-Dang
et
EN TERRITOIRE MILITAIRE
0^
A\aMl d'aborder
délinitivc.
données snr
([uelques
la
celle organisation militaire
physionomie du pays sont
indispensables.
Le secteur de Doni?-Dan2r
est,
au nord-est
et
sur
un
développement d'une trentaine de kilomètres, limité par
Chine. La ligne frontière depuis
la
la
porte d'Aï-Ro,
au nord du poste de Bao-Lam, court d'abord X.-E.S.-O., à travers
une région de grands mamelons herbeux,
Nam-Quan
Dongun massif rocheux, vient toucher la route de Dong-Dang à Xa-Cham et Cao-Bang (à i,5oo mètres de DongDang) pour remonter ensuite dans une direction générale S.-X. jusqu'au Song-Kv-Kong (poste de Bi-Nhi).
jusqu'à
porte de
la
Dang). Elle
Le
s'infléchit ensuite
territoire chinois
Dang, un
du
saillant très
forme
ainsi,
prononcé
en face de Donc:o
c|ue
la
configuration
n'explique pas. Ce tracé peu naturel a
sol
accepté pour laisser à la Chine la porte de
innombrables
et les
de
(3'^™,700
E.-O. en abordant
dû
fortifications qui barrent la route
de Langson à Long-ïchéou (route impériale de à Pékin), la plus
connue
et
actuellement
De Bao-Lam
à
verte de grands
de
«
brousse
Xam-Quan
mamelons » et à
s'y
la
zone traversée
à
cou-
de Bao-Lam,
les rares
cultures
cachent au fond d'étroits vallons font vivre
A
partir de
Nam-Ouan, la frontière chemine tra>ers vm véritable chaos de rochers
calcaires
porte de
ment
est
enchevêtrés, déboisés, tapis-
seulement quelques hameaux clairsemés. la
Tonkin
peu près inhabités. En dehors
la cuvette assez fertile
qui
le
Chine.
et la
sés
Hué
plus fré-
la
quentée des communications par terre entre
de
être
Xam-Quan
pénible-
en partie boisés. Malgré l'àpreté de ce massif, d'assez
CARACTÈRE DE LA RÉGION
9^
nomlDreux cirques cultivables y pourraient recevoir une population moins rare
que
Les
moins misérable peut-être
et
grands mamelons.
celle des
du
reliefs
sol, collines
de terre ou cimes roclicuses,
protégés contre les agents d'érosion par une végétation très active, ont conservé le plus souvent des profils for
tement dessinés aiguës.
Il
pentes raides, escarpements, pointes
:
en résulte
cjue toutes les régions
montagneuses
du haut Tonkin présentent d'une façon exceptionnellement accusée la physionomie caractéristique des terrains à charpente de calcaire dur. L'altitude habituelle de ces reliefs
ne dépasse guère deux
cents
trois
à
mètres;
quelques-uns d'entre eux cependant peuvent atteindre cincj à six cents le
pays est
mètres.
même
le
:
De
l'autre côté de la frontière,
des traînées de rochers calcaires
souvent boisés, puis, à perte de vue, des grands
mamelons
à la partie
sud de
la
moutonnement fait
province du Quang-Si
le
Les sommets
région des Cent-Mille-Monts. voisina2:e de
le
broussailleux qui ont
\am-Ouan
donner
nom
de
dans
le
hérissent de forts et d'ou-
se
vrages chinois peu redoutables de près mais bien placés
pour frapper l'imagination des habitants. ^lalgré généralement déplorable de ces constructions
armement le
cas.
l'état
et leur
insignifiant elles n'en formeraient pas moins,
un
échéant,
de
tions, c[ue le soir et à la veille
de
Dans toute
la
lequel
il
faudrait
deuxième ligne de
ces fortifica-
porte de
Nam-Quan
la prise
la retraite
se briser l'effort des
avec
obstacle
compter. C'est contre
de
la
de Langson, vint en i885
colonnes françaises.
cette contrée, la population indigène est
même origine cjue celle du haut Tonkin et parle la même langue. Les Chinois l'occupent comme les Anna-
de
mites occupaient Langson
et
Cao-Bang, pour gou-
EN TERRITOIRE MILITAIRE
O'i
vprncr (le
mesures prises dans
ol exploiter. Alals les
le
but
proléger les frontières de l'empire l'ont transformée
en une sorte de confm militaire dont
pour
est assez spéciale
la
physionomie
qu'il soit utile d'en dire
quelques
mots.
On
parle souvent
signer
parages. Le
mot
de
«
réguliers » chinois pour dé-
tiennent
qui
soldats
les
est inexact
dans
garnison
comptant pas dans l'armée régulière, recrutés tenus à r« entreprise
de
la
»
par
les
l'organisation
dans l'ouvrage publié
Famin ^
il
et
ne
entre-
mandarins responsables
Des renseignements
sécurité des frontières.
complets sur
ces
ce sont des mercenaires
;
de cette milice
en 1890 par
est inutile d'y revenir.
très
figurent
commandant
le
Ces mercenaires, gens
sans aveu et sans ressources, venus d'un peu partout et c[uelquefois de très loin,
ne sont habituellement em-
ployés et payés que d'une façon intermittente. Après leur service,
ment
ils
s'établissent
souvent sur place
des villages militaires dans
Leurs mandarins
les
le
y encouragent
et for-
voisinage des forts. et se
constituent de
une grosse réserve d'hommes disponibles qui leur permet en temps ordinaire de réduire leurs effectifs
la sorte
et
de
faire
des économies. Cette réserve,
servait surtout
du Tonkin
au recrutement des bandes
trouvait
sa
il
est vrai,
et la piraterie
meilleure clientèle dans celte
population d'aventuriers. La prospérité de leur avait attiré sur les
trafic
marchés voisins une foule de com-
merçants louches, vendeurs d'opium
femmes, qui ne relevaient pas
le
et
acheteurs de
niveau moral du mi-
lieu.
I.
Au
mandant
Tonkin
et
P. Famia.
sur la frontière du Kn'ang-Si. Paris, Ghallamcl, iSqô.
Com-
CARACTERE DE LA La crainte des incidents de
RÉlilON
r)5
frontière et la panvieté
de notre occupation avaient jusque-là tenu nos postes à distance respectueuse de la Chine.
une zone inoccupée où nisaient
en sécurité
et
surtout à couvrir la retraite
la
leurs
faisaient
postes chinois qui jalonnaient
aventure une colonne
forme
s'était ainsi
Il
pirates et soldats chinois frater-
des
les serrait
affaires.
Les
frontière servaient
la
pirates, c^uand par
de trop près.
Du
reste,
misère endémique dans ces agglomérations mili-
taires, trop considérahles
pour une contrée pauvre qui
ne peut pas
et la
de payer tout ce
les
la solde
nourrir
monde une
Dang de
six à huit
en
activité, faisaient à
nécessité de voler
verrons c^ue l'embauchage
sieurs mois,
façon par trop sommaire
même aux soldats
cents
et
pour
coolies chinois
pendant plu-
en donnant aux pirates sans travail
soldats sans place, le
moven de
et
nous donna
le
et
aux
vivre honnêtement,
diminua dans des proportions considérables dage local
Nous Dong-
vivre.
l'emploi régulier à
répit nécessaire
le
brigan-
pour réor-
ganiser le pays.
Les mandarins eux-mêmes ne négligeaient l'occasion les profits
avouée pour les
pas
à
que leur assurait une bienveillance
pirates. Ils trouvaient
commode délaisser
leurs soldats en congé rentrer ainsi clans leurs arriérés
de solde
et
donnaient aux chefs de bande toutes
facilités
pour leurs opérations au Tonkin movennant l'engage-
ment de ne point
exercer leur profession en territoire
chinois. Cette entente, quelcjuelbis tout à fait explicite, fut la cause principale de l'émigration presc|ue générale
des habitants tonkinois de la zone frontière. Certains villages,
pour trouAcr une tranquillité relative, n'avaient
eu qu'à
se déplacer
de quelques centaines de mètres.
Dès que leurs cabanes en
pailloltes étaient reconstruites
EN TERRITOIRE MILITAIRE
90
de r.iulrc cùlr de
la
borne,
ils
assurée aux villa;^es chinois
jouissaient de rinimunilé à
;
la
condition, bien en-
tendu, de payer tribut au mandarin local qui a oyait d'un
bon œil ce supplément de revenus et ne négligeait aucun moven pour peupler de la sorte son gouvernetiès
ment. Aussi l'exemple tions désertaient en
pour
aller vivre
Pour
avait-il été suivi et les
popula-
masse nos cantons les plus maltraités
en Chine.
tenir tète à
un
aussi
dangereux voisinage, nous
avions au ïonkin quelques postes installés sans plan
d'ensemble
et à
mesure des besoins, pour
la
protection
des voies de communication ou des rares villages encore habités. Ces postes, toujours placés assez loin de la frontière,
avec leurs garnisons insuffisantes, leurs
commu-
nications difficiles, leur autorité nulle sur les habitants,
sans lien entre eux et sans surveillance, rendaient peu
de
services.
Le plus souvent
constitués par cjuelcjues
en paillotes entourées d'une palissade de bambous, étaient toujours à la merci d'un coup de main ou
cases ils
d'un incendie. Les garnisons mal ravitaillées
et à
peine
à l'abri y souffraient beaucoup. Enfin, l'aspect misérable de ces établissements que leur isolement et cjuelcjue
vieux pavillon déteint, flottant au sommet d'une perche
de bambou, distinguaient seuls des pauvres hameaux de la montagne, permettait aux Chinois de répandre
périodiquement
le
bruit vraisemblable de notre prochain
départ
Avant de
fixer la
forme définitive d'une occupation
plus efficace et plus honorable de il
fallait
toire
lit
connaître
le pavs.
procéder à cette étude par
secteurs en formation
el
la frontière chinoise,
Le commandant du les
terri-
commandants
des
leur prescrivit de lui soumettre
ORGANIS.VTION MILITAIRE sans retard leurs propositions.
de
citer ici
textuellement
en février 1894 pour
le
Il
saisir
Mon
colonel, vous
adressé
sur le vif le plan qu'on se
proposait de suivre, et les idées «
semble intéressant cjui lui fut
de Dong-Dang. Ce do-
le secteur
cument permettra de
me
rapport
07
du moment
avez bien voulu
:
me demander
«
un rapport au
«
circonscription de
«
pation qu'il conviendrait d'y adopter. Je viens cl'étu-
«
dier le tronçon de frontière qui
«
étude,
sujet des travaux à exécuter dans la
mon
poste et sur le
me
mode
d'ensemble que
De
regarde.
non encore terminée dans tous
d'occu-
cette
ses détails,
l'honneur de
«
résulte le projet
«
vous soumettre ci-après.
«
ouvrages sur
«
bases
«
prévoir que de la forme définitive à donner à notre
«
occupation.
«
zone militaire solidement appuvée sur des garnisons
«
européennes
«
séjour et le passage de toute bande
«
«
Avant d'aborder
du
le
il
est
la
suffisamment surveillée pour que
et
V soient rendus impossibles.
«
sion, surtout la
fortifiés,
Mais
il
Une
le
un peu nombreuse
partie de celte
mis-
du brigandage, incombe installés dans un petit nombre
répression
aux habitants armés postes.
les
effectifs à
constitution d'une sorte de
ce
de villages
importe de préciser
au point de vue des
travail, tant
Le but proposé
du placement des
question
la
terrain,
j'ai
et
construits à
proximité de nos
nous faut avant tout organiser une
surveillance directe et protéger efficacement les indi-
ce
Il
est
difficile
de
saisir
l'idée
d'ensemble qui a
ce
présidé jusqu'ici au choix des points occupés.
ce
frappé surtout,
ce
mancjue de
dans
l'organisation
lien entre les postes et
(tra:<dmaison
de
On
est
actuelle,
du
la passivité
de
6
EN TFRRITOIRF. MILITAIRE
98 «
noire occupallon. Ce sonl
«
principales de l'inutililé relative des cfTorls 1res réels
«
mais inlcrniillents
«
faits jusqu'ici.
et
là,
je
crois,
les
causes
insuflisamment coordonnés,
Ces postes
blockaus indépendants,
et
semés un peu au hasard, tout en immobilisant d'assez gros etTectifs, sont nécessairement frappés d'impuissance. Cliacun d'eux est censé répondre
d'un séjour «
«
et
aux
nécessités
d'un ravitaillement réguliers, d'une
défense joropre sérieuse et d'une surveillance directe
étendue. L'impossibilité de sacrifier l'une ou l'autre
de ces conditions dans l'établissement d'un poste isolé, fait c[ue le
plus souvent
ils
ne répondent com-
La plupart des chefs de poste leur sécurité, un peu à leur ravi-
plètement à aucune. pensent beaucoup à taillement et pas C'est
du tout à la surveillance des environs.
donc l'ordre
et surtout la vie qu'il faut essaver
d'introduire dans cette organisation morte. c(
«
Le plan proposé comporte 1°
trois sortes
de postes
conscription territoriale (centres de secteur) «
.*2°
:
Les garnisons ou postes principaux avec cirLes postes ou blockaus annexes
«
3° Les postes de garde
ce
Ainsi
le
ou
poste principal de
;
;
petits blockaus.
Dong Dang, comprenant
comme circonscription territoriale le chau de A an L yen, comporterait trois postes ou blockaus annexes :
«
Bao-Lam, Ta-Laï et un ouvrage dans le massif du Po-Mou. Cliacun de ses ouvrages, plus ou moins vaste suivant l'importance de son rayon d'action ou mieux du réseau de chemins dont il doit assurer la
«
surveillance, serait installé dans des conditions de
«
sécurité lui
«
pour
«
liberté
donnant une résistance propre
laisser à la plus
grande partie de
sa
suffisante
garnison
la
de sortir en tout temps. Sa position devrait
ORGAMSAÏION MILITAIRE ((
lui assurer,
en
même
temps que des
facilllés
un commandement
«
taillement suffisantes, des vues et
«
permettant l'usage d'un hotschkiss ou
«
pièce de
-
(.(.
de ravi-
même
d'une
montagne.
Chacun de
ces post-es ann-exes serait complété, sui-
«
vant
c(
blockaus de garde et
ce
mettant
«
garde, mais de tous les points à surveiller.
K
garnison permanente mais relevée tous
c(
Cette obligation de la relève quotidienne ou au moins
«
très fréquente, assurerait
c(
tion dans le ravon
«
réduire à une réserve fixe insis-nifiante le ravitaille-
«
ment
«
la
«
manque
c(
blockaus différeraient complètement des conditions
«
d'installation
« «
nome. Lne simple tour crénelée de quelques mètres carrés, solidement fermée, avec une toiture incom-
«
bustible serait
«
placées sur les
«
«
les besoins,
par des postes de surveillance ou
l'accès facile
Chacun des
un réseau de bons sentiers pernon seulement des blockaus de blockaus de garde aurait une
petits
les jours.
une unité complète d'acdu poste annexe, permettrait de
des postes de garde et surtout donnerait, par
circulation
incessante
qu'elle exige,
la
vie qui
à notre occupation actuelle.
La construction
et
l'emplacement de ces
des blockaus
très
isolés à i^arnison
Ces
suffisante.
chemins mêmes
et
tours
petits
auto-
seraient
aux points de pas-
un
ce
sage obligés, sans préoccupation de leur donner
«
commandement ou une vue
«
partisans aux abords des villages.
«
pas
«
comme
ce
poste annexe pour chaque poste de garde (trois relèves
«
«
La
très étendue.
surveillance serait complétée par des postes de
Tel est l'ensemble de ce dispositif qui n'exigerait
un
effectif considérable.
base de calcul, vino-t
On
pourrait adopter,
hommes
de "arnison au
EN TERRITOIRE MILITAIRE
loo
« «
six hommes) avec une hommes. «
«
réserve de dix ou quinze
de
En
données au secteur de Dong-
ces
a[)|)liquanl
on arriverait aux conclusions suivantes Dan*», D' «
En
présence des travaux et des
effectifs
etc..
demandés
pour une bande de terrain relativement assez et
:
étroite
représentant une trentaine de kilomètres de fron-
tière,
il
faut
remarquer
qu'il
s'agit
d'une prise de
possession définitive de la frontière, que ce tronçon
présente une importance et des difficultés spéciales, qu'enfin
le
plan proposé se prête très bien à
la
réduc-
tion progressive des effectifs par l'abandon successif,
aux partisans, des postes de surveillance. « «
Avant de vous soumettre un projet comprenant
l'ordre d'urgence des travaux à exécuter, je désirerais,
«
mon
te
cerne les bases
«
l'organisation.
colonel, avoir votre approbation en ce qui con-
du
travail et l'économie générale
«
Cette économie peut se résumer ainsi
«
Postes principaux avec garnison européenne,
de
:
commandement
cir-
ée
conscription territoriale et
«
sur tous les postes compris dans la circonscription.
«
garnison
(c
européens.
«
« Postes de surveillance ou petits hlockaus, dépendant directement des postes annexes et alimentés
«
par leur garnison
«
quente.
«
poste annexe.
«
«
«
eflectif
Postes ou htochaus annexes. Ouvrage sérieux à indigène
;
relativement forte,
à relève quotidienne
Réseau de sentiers Les avantages sont
:
avec cadres
ou
très fré-
militaires autour de
i°
chaque
La création non pas d'une
OIIGAMSATION MILITAIRE
loi
(c
ligne mais crime zone assez
«
lance
«
fixes,
«
tivc cjui assure
«
lière des
«
Le remplacement d'une occupation passive par une surveillance vivante, cjuelles que soient par ail-
ce
leurs la valeur et l'énergie des cliets de poste. «
«
«
profonde de surveil-
;
2° L'ordre assuré par le
de tous
classement en catégories leur subordination rela-
les postes et
en
même
temps
renseignements
transmission régu-
la
et l'unité d'action
;
3''
Comme
on
le voit, ce
projet insiste sur la nécessite
de coordonner, avant toute autre chose, l'action des troupes
et
de fixer exactement leur subordination.
Cette préoccupation
avec les idées
remit entre
du
les
était
en concordance absolue
colonel Gallieni
cjui,
dès
le
début,
mains des commandants de secteur
toutes les ressources de leur circonscription. ainsi leur imposer,
dans
les limites
cription, toutes les charges taire et la responsabilité
de
Il
put
de cette circons-
du commandement milidu pavs.
la sécurité
Ainsi fixé sur ses droits et ses devoirs, chacun se mit à l'œuvre.
Il
serait
sans intérêt de détailler
ici
les
opérations et les travaux de chacjue jour, poursuivis
depuis cette époque, pour arriver peu à peu à reconquérir la frontière, à
s'y installer et à faire
entrer dans
domaine de la pratique les principes résumés dans le rapport que nous avons cité. Une esquisse de l'organisation telle que nous la trouvons enfin iSgSsera sufle
fisante.
A et
la
bifurcation des routes de Langson à
de Langson a Long-ïcliéou
porte de Chine de
Nam-Quan),
se
Cao-Bang
(4 kilomètres de
trouve
de Dong-Dang, marché important
le
et siège
la
gros village
de l'admi6.
KN ÏERIIITOHIE MILITAIRE
102
nlslralion iiuligvnc
Uycn. C'est
le
du
cliaii
centre
du
I
(sous-préfecture) de
Van-
secteur, le poste principal.
Les cases de torchis, couvertes en paillottes, qui depuis des années servaient d'habitation à sa petite garnison,
ont été remplacées par de magniliques casernements achevés en mai 1890.
Ils sont occupés par une compaune cinquantaine de soldats indigènes qui forment une solide réserve toujours sur pied et toujours disponible dans la main du commandant du secteur. A quatre kilomètres de Dong-Dang, au point où la
gnie de
la légion et
grande route de Chine entre au Tonkin, un blockaus honorable, solidement construit en maçonnerie, comportant l'usage
d'un hotschkiss
et
une garnison de
commandés par un sergent européen, protège le mouvement, actif déjà et destiné
trente indigènes surveille et
à le devenir davantage, de cette voie importante.
Au
nord-est,
la
région des grands mamelons est
corne de
la
frontière et en
ouvrages chinois d'Aï-Ro
et
de Cao-Cap, par
surveillée,
à
la
de Bao-Lam. Ce poste sert de liaison avec
face
le
le
des
poste
secteur
(Banh-Danh), protège le centre habité de Baoet tient le chemin assez fréquenté qui entre en
voisin
Lam
Chine
à la porte d'Aï-Ro.
facile
de cette partie de
tenir
comme
la
Le parcours relativement frontière a permis de s'en
poste fixe, à celui de
Bao-Lam, dont
la
reconstruction en briques se poursuivait en iin 1895
pour trente indigènes détachement a dû,
et
un
sous-officier européen.
malgré tout,
Ce
pendant plusieurs
comme poste de garde avec six ou huit hommes fréquemment relevés, le petit blockaus en pisé de Coc-Tong. Le sentier qui y passe entre Nam-Quan et Bao-Lam était souvent emprunté par les petits mois, occuper
ORGANISATION MILITAIRE
io3
groupes de pillards en quètc d'un coup à
même
par
envovaienl leur butin sur
de ^»am-Quan. Dans
Coc-Long relevèrent
Au
ou
faire
convois des bandes de l'intérieur qui
les
les
marchés chinois voisins habitants armés de
la suite les
les tirailleurs
de Bao-Lam.
nord-ouest, l'organisation du massif rocheux
à tout prix assurer
difficultés
spéciales.
sécurité
longtemps incertaine, de
si
et
de ses nombreux couloirs présentait des
la surveillance
Bang qui longe
fallait
Il
la frontière à
la
la
route de Cao-
courte distance en sui-
le
pied de falaises rocheuses couvertes de bois et
faites à
souhait pour les embuscades. Les attaques de
vant
convois et de détachements y étaient d'autant plus faciles et fructueuses c[ue tous les mouvements de
troupes et d'approvisionnements destinés aux garnisons échelonnées depuis
Dong-Dang
juscju'au delà de
Gao-Bang doivent l'emprunter. De fait il existe au ïonkin peu de passages où les embuscades et les pillages aient été aussi fréquents que sur ce tronçon de route.
Ln cier
poste annexe important
sert
lage de
commandé
par
un
oflî-
de centre à l'occupation. Placé près du vil-
Xa-Han,
grognet tué
là
il
porte
le
nom du
d'une balle dans
1893, en installant
un blockaus
des repaires que les pirates,
lieutenant
la tète, le
Lan-
26 octobre
provisoire au milieu
refoulés vers
le
nord,
abandonner définitivement. Le poste Langrognet, solidement reconstruit en maçonnerie dans le
allaient
courant de 1895, peut recevoir une garnison de 60 à
70 indigènes avec un officier et deux sous-officiers Quatre postes de garde lui servent d'avan-
européens. cées.
Chacun d'eux
six à
quinze hommes, dont
est
occupé par un détachement de l'officier
de Xa-lian règle
EN TEIUUTOIIIK MU.ITAIIŒ
To',
force
la
1°
servant de liaison avec
et
au nord (en
pisé couvert
en
le
secteur de >ia-cham
tôle, construit
en 1894)
Le blockaus de Bo-Sa au sud, sur un chemin
quente qui échappait à
surveillance
la
(construit en maçonnerie en 1894) 3°
du
secteur.
Le blockaus de Son-Tu sur un chemin venant de
Chine 2"
d'après les inslruclions
fixe la relève,
et
commandant du
le
de ^sa-Han
;
Le blockaus du Po-Mou, destiné
conservé provisoirement contre
;
fré-
à disparaître et
brigandage
;
Le blockaus de Pac-Luong sur la grand'route, moitié chemin entre Dong-Dang et Na-cham. En 4°
à
du
présence
transit
important
et
de
la
circulation
active cju'il faut protéger contre le brigandage toujours possible,
il
a été reconstruit .en 1894 et reste occupé
d'une façon permanente.
La préoccupation de
tenir la frontière et de protéger
et Dong-Dang a du blockaus de Leo-Rao, établi sur un rocher de la frontière et commandant un réseau de mauvais sentiers trop connus des pirates. Ce petit
route entre
la
le
groupe de ISa-Han
décidé la création
ouvrage, construit en maçonnerie, au prix de grands sur
eflbrts,
est
sible,
une pointe rocheuse difficilement accestrès loin en Chine et prend à revers
vu de
tous les vieux ouvrages de
moral
fut-il
Nam-Quan
;
aussi son effet
considérable sur les Chinois qui tentèrent,
dans leur mauvaise humeur, de
faire arrêter les
en chicanant sur le tracé de la frontière.
un
Il
travaux
remplace
poste provisoire établi sur la route, à Ta-Laï, pen-
dant
la
période de pacilication et dépend directement
de Dong-Dang.
En
dehors des chemins créés pour assurer l'accès
direct de tous ces blockaus,
il
fallut
construire et par
ORGANISATION MILITAIRE endroits, tailler dans le roc
geant
Han
Bo-Sa, ]Nacette nouvelle
une influence immédiate
quillité de l'intérieur.
premier
et décisive sur la tran-
Les routes
et le véritable
Pour
pays.
un chemin de rondo lon-
Son-ïu. La surveillance active de
voie eut
le
io5
par Ky-Da, Leo-Kao,
la frontière
et
*
chemins sont
et les
élément de pacification d'un
une occupation
être efficace,
doit
être
vivante et les postes ne doivent être que les points
d'appui d'une circulation incessante.
Léo-Rao
et
Xa-Han, pour ne
citer
que
Le chemin de cet
exemple, fut
tous les jours et pendant plusieurs mois, battu par
ou deux patrouilles
une indépendamment des mouvements de troupe qui
obligatoires,
reconnaissances, escortes
et
s'en servaient journellement.
Cette reprise de possession de la frontière n'alla pas sans quelques froissements de la part des autorités chinoises.
Certaines habitudes, celle par exemple qu'a-
vaient les soldats chinois de circuler au
Tonkin comme
chez eux et d'y marauder à leur aise, furent difficiles à déraciner.
Il
fallut v
coup de patience
et
mettre beaucoup de formes, beau-
beaucoup de fermeté. Le succès ne
s'achète qu'à ce prix et la brutalité
ou
la
hâte sont,
avec les orientaux, d'aussi mauvais procédés que
la fai-
Xous voyant décidés à aller jusqu'au bout de notre droit, les mandarins de la frontière se plièrent
blesse.
cependant sans trop de choses. Ils
un fit
difficultés
nous prêtèrent
même
au nouvel ordre de parfois dans la suite
secours qui ne fut pas inutile. L'un deux surtout
preuve d'une bonne volonté assez
rare
chez
ses
pareils.
Le
nom du
en chef
les
maréchal ou général Sou, commandant
troupes de la frontière dans
le
Quang-Si, a
EN TERRITOIRE MILITAIRE
loG
été souvent prononcé, et ses rapports avec les autorités
françaises sont diversement appréciés.
un mot. On
sant d'en dire
intéres-
Il est
a souvent voulu, surtout
que
dans certains milieux au Tonkin,
ses services et
son influence eussent été fort exagérés. Ses entrevues officielles
que
avec M. de Lanessan et
les relations très suivies
M. Rousseau,
colonel Gallieni,
après
même Ln
cependant, qu'il
colonel
le
ainsi
qu'entretenait avec lui le
furent
Servière,
parfois blâmées avec aigreur. existe
fait
méconnaître. Toute avait la garde fut
de
la partie
rapidement
impossible de
est
frontière dont
la
pacifiée.
il
Le mouvement
des bandes pirates y devint bientôt à peu près nul. ?sous n'avions eu depuis de longs mois
que sur
sérieux à y relever,
alors
Quang-Tong
lunnan
et
du.
aucun incident
les
frontières
piraterie
la
encore ouvertement sous l'œil bienveillant
du
s'exerçait et
avec la
complicité des mandarins.
On
nombre de
pourrait citer
clicz le
commandant
d'arriver à
ramener
rapports entre
faits précis
dénotant
du Quang-Si
le désir
la tranquillité et à établir
de bons
des troupes
deux pays. La meilleure preuve bon vouloir est de se prêter volon-
les
qu'il
donne de
tiers
aux explications directes
ce
et
de
les
provoquer au
un Cbi-
besoin. Gela est tout à
fait
exceptionnel cbez
nois de son rang et
les
mandarins importants sont
généralement introuvables. comparses qui pouvoirs. ditions. les
se
Il est
Sou
se
même
de
ne voit jamais que des
impossible de s'entendre dans ces con-
montre, cause volontiers
occasions de traiter
fecte
On
dérobent à toute discussion, faute de
se plier à
rapports plus faciles
et
les afl'aires
et
recherche
directement.
Il
nos habitudes pour rendre
afles
plus fréquents. J'ai conservé,
MARÉCHAL SOI
LE
comme écrite
107
détail curieux de cette coquetterie,
une
lettre
en français sur du papier exactement semblable
à notre papier officiel avec
1'
En
«
imprimé
tête »
:
EMPIRE CHINOIS
A
Troupes
Loug-Tchéou,
189
le
.
DU
QUA> G-
S
I
Le
Objet
à
La
Directeur Général Sou, Comm^
en
lettre qui n'est
troupes du Quang-Si,
les
cJief
M
du
reste
conduit pour un interprète,
qu'une demande de sauf-
est signée,
avec l'assurance
de sa haute considération.
P.O. Général Le
Sou,
secret ai j^e général,
Vu-Thon G. L'ensemble délicat et
locale à ce
document d'une
ministrative. «
complété par un
est
joli
cachet rouge,
compliqué, qui donne seul un peu de saveur si
complète correction ad-
Cette enveloppe « bulle »
coquille » m'ont fait regretter,
vue artistique,
les
il
et
est vrai,
ce papier
au point de
précédentes enveloppes minces
et
longues, fermées d'une bande rouge et bariolées de signes curieux, contenant
de
soie,
cinq ou six
une
fois pliée,
légère feuille de papier
sur laquelle s'alignent en
colonnes régulières ces petites architectures mystérieuses
qui sont des idées dessinées. Mais cela
coup
les relations
quand on ne
sait
pas
facilite
le chinois.
beau-
EN TERRITOIRE MILITAIRE
ïo8
Lo conimandanl des troupes du Quaug-Sl
est
donc,
extérieurement au moins, très aimable pour
les
Fran-
çais et leur a
souvent rendu service.
Cette attitude a
de quoi surprendre en présence de l'aversion
que ne nous cachent guère
rale
serait
même
inquiétante
ses
n'était
s'il
géné-
si
Elle
collègues.
possible
de lui
trouver une explication.
Au
une
un assez bon calcul. moyenne et plus curieux des
fond de tout
Plus intelligent que
la
de notre civilisation,
détails
le
que notre intention
que
Au
y a
tôt
lieu
ou tard nous réussirons à v
donc de chercher
à enraver
l'exploitation de la piraterie,
pour en
peu
à
tirer profit.
et
convaincre
être chez nous.
établissement
cet
que pourrait il
s'est
Son ambition
dans
la suite
lui rapporter
décidé à
le favori-
serait d'arriver
peu au commandement de toutes
du sud de l'empire
se
réellement de rester au Tonkin
est
jDOur conserver les bénéfices
ser
il
général Sou, en fré-
quentant des Français \ n'a pas tardé à et
cela,
ligne de conduite arrêtée et
les frontières
peut-être à la di-
Quang (Ouang-Si et QuangTong) ou du liunnan. Mais, bien qu'étant déjà un gros personnage, portant tunique jaune et bouton de gnité de vice-roi des deux
jade, sa qualité de militaire lui crée riorité
en face de
mille à
la
une certaine
la caste lettrée,
et
cette infériorité,
Sou
il
infé-
manque de
fa-
cour.
Pour racheter
juste de citer
travaille
de son
avant tout autre, notre consul à relations d amitié que sa parfaite connaissance de la langue chinoise lui a permis de lier avec le général Sou sont vine des causes les plus actives de révolution de ce personnage. Il serait iieureux que les intérêts français à 1 étranger fussent toujours défendus avec autant de capacités et de dévouement. I.
Il est
ici
Long-Tchéou, M. Bons d Anty. Les
LE MARÉCHAL SOL
mieux C'est
à se créer des prolecteurs, liit-ce à l'étranger.
dans ce but qu'il
en
s'efforce
de devenir Persona
du gouverneur général de
(/rata auprès et
tO()
l'Indo-Cliine
de notre ministre à Pékin, espérant bien à l'occasion tirer
quelque
Cet espoir n'est pas chiméricpie
profit.
furent amenées une première demander au gouvernement cliinois l'extension de son commandement. Voici dans quelles cir-
et les autorités françaises fois,
en 1890,
à
constances.
Une
bande venue du Ouang-Tong réus-
assez forte
sissait vers cette
nages de Ké-Bao,
époque
à enlever, près des cliarbon-
un emplové
français,
famille, puis regagnait la Cliine. Les
M. Lyaudev,
et sa
mandarins locaux,
après avoir accueilli les pirates et leur prise, restaient
comme
d'habitude, introuvables.
était
énorme
pour
éviter de
d'industrie.
ne
faisait
et le protectorat
La rançon demandée
se refusait à l'accorder
donner une nouvelle prime à ce genre La responsabilité du gouvernement chinois
pas de doute, mais
il
fallait agir vite et
sans
trop d'éclat afm de ne pas attirer sur les otages enlevés
de cruelles représailles.
Il
fut décidé cju'on tenterait
auprès du général Sou, une démarche officieuse pour lui
demander son intervention. Cette démarche fut faite par le colonel Gallieni accompagné de M. Bons d'Anty, consul de France à Lon2;-Tcheou. J'assistais à l'entrevue.
—
Dès
les
premiers mots, après
les habituelles
Sou déclara sans réticences que les mandarins du Ouans-Tom? avaient un ijros intérêt
congratulations.
dans
l'affaire et
devaient partager les bénéfices éven-
tuels de la bande.
Il
en
était désolé,
mais
se trouvait
dans l'impossibilité de nous rendre service, n'ayant au-
cune autorité dans
la
province voisine. Le colonel
alors entrevoir la possibilité d'obtenir (iR.VNDMAlSOX.
pour
lui le 7
fit
com-
EN TERRITOIRE MILITAIRE
no inaiulenit'iit
du Quang-Tong. Jouant quel-
des troupes
Chinois feignit d'abord d'entrer par
(|ue surprise, noire
condescendance dans cette combinaison, objectant de
difficultés
qu'avec
coimnandemeut des deux provinces,
le
les
chose, puis déclara, en fin de compte,
la
en
il
viendrait à bout.
en
L'afTaire fut
effet
négociée à Pékin.
commission provisoire demandée plus tard, C'est
les
On
accorda la
quelques semaines
prisonniers étaient rendus, sans rançon.
un premier
espère ainsi
et,
Sou qui
succès pour le général
devenir
pacificateur
le
nécessaire
frontière et le garant des bons rapports entre la et le
Tonkin. Une ambition de ce genre nous
avantageuse pour qu'il ne
soit
de
la
Chine
est trop
pas raisonnable de la cul-
tiver.
Malgré réelle,
s'entendre sur
Un
bonne volonté,
cette
n'est pas toujours
il
les petites
11
se mettrait,
mauvaise
soit sa dignité,
mandarin ne a
tort
et
Les entrevues sont donc
pour ne pas
ou
qu'il
la
s'est
«
perdre
la face », le
bien disposé,
trompé.
Cela complique
Lue
anecdote suffira
conversation.
pour montrer comment s'en
quand
il
tire
un mandarin
spirituel
a tort.
Nous venions d'entreprendre Ce
un Euro-
doit jamais avouer devant d'autres Chinois
singulièrement
et
ne peut, sous
en violant cette prescription, une
affaire sur les bras.
toujours publi(|ues
très
pratique de
prétexte, converser sans témoins avec
aucun
qu'il
la
contestations qui surviennent.
mandarin, quelle que
péen.
mais
intéressée
simple dans
le
blockaus de Léo-Kao.
travail inquiétait fort les Chinois et,
pour gagner du
mandarin de _\am-Quan avait à tout hasard avisé ses supérieurs cpie nous voulions consIru'ue un fort en Chine. Le général Sou en écrivit au temps,
le petit
LE M ARÉCFIAL SOU colonel Gallieiii, manifestant
le désir
,
de
traiter la
,
ques-
Le lieutenant colonel Clamoriran, cercle de Langson, fut chargée de cette
tion de vive voix.
commandant
le
démarche
se rendit
et
pagnai, emportant,
Xam-Quan où
à
je
l'accom-
avec les cartes d'abordement, nn
même une
levé à grande échelle et
vue du rocher en
li-
tige.
Le plus simple examen des documents prouver que
le
commandant de
trompé de rocher
s'était
il
fallait
suffisait à
Xam-Quan
Porte de
que nos travaux étaient, Sou ne tarda pas à en être
et
sans conteste, au ïonkin.
convaincu mais
la
sauver « la face. » Après avoir
fumé quelques pipes d'opium et soigneusement examiné crocj[uis et cartes avec ses énormes lunettes rondes à monture d'écaillé, il prit son air le plus souriant pour nous
faire la déclaration suivante
nous sommes des amis ensemble à
vailler
confiance en utile,
lui
endroit,
:
«
Avec
du
non seulement
de construire
je ne
un
fort
deux ou
Après un remerciement,
accompagnée toujours
la
il
trois fois sa est vrai
même
:
«
en cet
m'y oppose pas mais
j'en
le lieute-
nant colonel Clamorgan, pour bien marquer nos reprit
tra-
pays. J'ai toute
vous lui direz que puisqu'il juge
la route,
suis très content. »
le colonel,
nous avons entrepris de
tranquillité
la
et
pour garder
et
droits,
démonstration. La réponse,
d'un coup d'œil
Du moment
qu'il
explicatif, fut s'agit
de
la
du pays, je suis très content que le colonel construise un fort en cet endroit. » 11 ne s'agissait plus que de laisser tomber la conversation et de passer à un sécurité
autre sujet. L'affaire était entendue
et
il
n'en fut plus
question.
Devant
l'attitude de leur chef, les pellls
mandarins
EN TEKRITOIIIK MILITAIRE
II!
de
Ironlièrc avaient
la
ment
cordiales.
dû
fallait
Il
bon cœur.
faire contre fortune
eux étaient fréquentes
INos relations avec
cependant
et extérieure-
de près
les tenir
pour obtenir autre cbose que de vagues protestations.
Au sur
début
surtout,
il
se produisait
souvent
assez
de menus actes de brigandage.
la frontière,
Une
di-
zaine de Chinois, armés de vieux pistolets et de quelques
une
enlevaient
fusils,
un peu de
V faire
femme,
même
ou tentaient
isolé,
un pavsan un hameau pour
arrêtaient
d'incendier
butin. Ces maraudeurs
habituellement de quelque village militaire était
sortaient et
il
nous
souvent possible de connaître, par nos espions en
Chine,
nom
le
meneurs ou au moins du villa2:e. Il demandant la pu-
des
s'ensuivait des réclamations précises,
nition des coupables aux autorités chinoises. Celles-ci
d'ordinaire traînaient les choses en longueur et fmale-
lement n'arrêtaient personne. L'armement des habitants
du Tonkin
cependant un peu réveillé
avait
mandarins qui craignaient des
De
le
fait,
brigandage avait cessé d'une façon com-
plète, lorsque, vers le
mois de mai 1890, une corvée de
quelques soldats indigènes sans armes, passant
de
la frontière près
du blockaus de Léo-Kao,
nuit,
long
Le len-
hameau non armé était attaqué de deux femmes et trois enfants enlevés et conduits
en Chine.
Il
formation
et
la racine.
On
le
le
fut assaillie
à coups de fusil, l'un d'eux resta sur le terrain.
demain, un
les
représailles.
nom
petit
s'agissait il
fit
donc d'une véritable bande en
devenait urgent de couper
le
mal dans
des réclamations assez vives, spécifiant
de quelques-uns des meneurs,
et
indiquant
leur village d'origine. Après s'être fait attendre, la ré-
ponse du mandarin de fallut avoir recours à des
Xam-Quan
fut évasive
moyens plus énergiques.
et
il
MANDARINS CHINOIS Je
venir
fis
un gradé
gènes, né dans le pays
avec ses
;
intelligent
ii3
des troupes indi-
même
celui-là
hommes dans l'embuscade
([ui était
tombé
de Léo-Kao
et lui
expliquai que je verrais sans déplaisir une promenade
nocturne en Chine de c[uinze ou vingt montagnards bien armés
dans
et choisis
partit enchanté de cette
les
cantons de
la frontière. Il
marque de conhance.
Au
bout de trois jours,
mandarin de Xam-Quan m'avisait qu'une bande pirate, venue du Tonkin, avait brûlé un gros village chinois, donné la chasse aux habitants et une
du
lettre
les soldats du poste La nouvelle ne me surprit que médiocrement car j'avais dû, le matin même, faire quelques remon-
poussé l'audace jusqu'à tirer sur voisin.
mon
trances à
«
Condottiere » pour s'être trompé de
village et avoir brûlé celui d'à côté. Je conseillai cepen-
dant poliment à
mesures
mon
très sévères
collègue chinois de prendre des
pour éviter
retour de semblables
le
accidents et lui déclarai qu'il pouvait compter sur
ma
vigilance.
^otre correspondance en resta Sou, informé, et
faisait
décapiter neuf
là.
membres de
nos réclamations, renvovait à et
le
ordonnait que
bande
la petite
oc
Don^-Dau"
1
enlevées
Mais
général
quelques jours plus tard arrêter
têtes
les
les
objet de
femmes
des deux
chefs
fussent exposées à la frontière, soigneusement emballées,
suivant l'usage, dans
une étiquette rouge des
délinquants.
un panier
plein de
sel,
sur lequel
portait en caractères chinois le
Il
avait prié seulement
le
nom
colonel
Gallieni, d'une façon générale et sans insister, de s'em-
ployer à empêcher tants
les représailles
de
la
part des habi-
du Tonkin.
Ce sont
là
des procédés
un peu
vifs qu'il
ne faut en-
M
EN TEURITOIHE MILITAIRE
'4
coiiragcr
Dans l'ocun incursion pluS en Chine, de quelques tonkinois armés, du
que tout
à fait oxcoptionnellomcnt.
casion, cet incident survenant après sérieuse,
ne fut pas inutile pour suggérer
cercle de Cao-15ang,
aux mandarins d'utiles réflexions.
Sans
insister davantage, constatons
frontière
du Quang-Si,
chinoises s'est
il
ne faudrait pas oublier que
Extrême-Orient,
en
autre ressort que l'intérêt suite
forces, les
à retourner
Une
la
est
chose
la
po-
instable, sans
du moment. Du jour où par
d'un changement d'éc^uilibrc dans nos relations
ou dans nos fit
que sur toute
ouverte des autorités
transformée en une neutralité plutôt
bienveillante. Mais litique,
l'hostilité
très
mandarins trouveront leur pro-
aux anciens errements, pas un n'hésitera.
grande suite dans
les idées
pourrait seule don-
ner un peu de consistance au modiis vivendi
si
péni-
blement obtenu.
Quoi
qu'il
advienne dans
axec les Chinois et
le
la suite,
nos rapports suivis
parti pris de cordialité observé
des deux côtés ont beaucoup facilité
notre tâche. La
devenue une
réalité et la per-
frontière aujourd'hui est
manence de notre occupation Les résultats sont
là
n'est plus
mise en doute.
repeuplement, remise en culture,
:
sécurité très réelle depuis les premiers
mois de iSqA-
]Sous V reviendrons.
Le
souci de mettre
nous obbge
un peu d'ordre dans
ces notes
à étudier successivement les principaux fac-
teurs de la pacilication. Cliacun d'eux étant « fonction;)
de tous
les autres,
il
a fallu
dans
de front. L'occupation militaire aussi rapidement son
maximum
n'aurait
les mener pu donner
d'effet, si
elle n'avait
la
pratique
LE RAVITAILLEMENT t'tc
et
appiiyce sur
la
rcorganisalion politique du terrilolrc
accompagnée de toutes
dans
la
mesure du
la liberté
d'action
la
les
mesures propres
à assurer,
possible, le bien-être des troupes et
du commandement.
européens
et indigènes souffraient beauhaute région. La consommation d'hommes
>«os soldats
coup dans
,,5
y était énorme
et tout à fait
disproportionnée avec
les
résulats obtenus.
Xous avons montré la déplorable installation de nos Le manque de logements salubres et le surme-
postes.
nage inqwsé aux garnisons par l'insécurité de leurs abris étaient des causes
permanentes de démoralisation
et
de
maladies.
L'amélioration des casernements, considérables et
les
])endant ces deux ans (1894-1890)
bonne part de dans
le
l'activité
secteur de
constructions
les
travaux de toutes sortes poursuivis
et des
ont absorbé une
ressources dépensées
Dong-Dang. Cet élément de progrès
est assez intéressant
pour mériter quelques développe-
ments dans un des chapitres suivants. Mais
si
nos troupes étaient mal logées,
parfois pas nourries
du
tout.
Le
elles n'étaient
service des subsistances
devait en théorie ravitailler directement et au fur à
sure des besoins, tous les postes.
nombre de magasins entretenus
En
me-
dehors d'un petit
dans, quelques centres
importants, aucunes réserves n'avaient été créées. Ces
magasins
du
reste
étaient
souvent
pourvus de tout. Dans un pavs où cation terie
étaient
ou par
souvent l'état
interrompues
des chemins,
eux-mêmes déles communipar
cette
la
pira-
organisation
donnait tout naturellement de déplorables résultats,
Malgré de
très lourdes dépenses, le ravitaillement régu-
EN TFJIIUTOIIU- MILITAIRE
iiG
nullo part. Les pertes étalent consl-
lier ii'rlail assure'
mique dans Faut-il
véritable disette régnait à l'état endé-
une
tlérables et
garnisons éloignées.
les
d'exagération
')
exemples pour n'être pas taxé
des
citer
Mais ce sont
les postes
touchaient leur ration tous
mentionner. La
En isolé
— une colonne
débloque au bout de neuf jours.
le
— La garnison dès
fait
la piraterie, est investi
à ^il^pro^ iste par de fortes bandes pirates
Langson
les soldats
poste de Plio-Binh-Gia, tout à
le
dans une région tenue par
partie de
où
jours qu'il faudrait
n'en serait pas longue.
liste
juin 189.3,
les
le
3*^
jour réduit
peut
la ration et
vivre jusqu'à sa délivrance, grâce à l'eau
du
ciel
qui
\ient, fort à propos, remplir les trous creusés à la hâte
dans
le sol.
Les quelques kilogrammes de
mirent de subsister la
en
et d'éviter
prévovance personnelle de faisait
A suite
la fin
un
riz
qui per-
désastre étaient dus à
l'officier
commandant qui
acheter d'avance par ses tirailleurs indigènes.
de iSgS,
le
cercle entier de
Cao-Bang, par
d'un retard de convoi, subit pendant plusieurs
semaines une véritable vivaient d'eau
et
de
disette.
Les soldats européens y
riz.
poste même de Dong-Dang, possédant une annexe de magasin, qui aurait dii ravitailler une dizaine d'autres postes ou blockaus, à i5 kilomètres du magasin central de Langson, il m'est
Enfin, dans
le
déjà cependant
arrivé plusieurs fois de ne pouvoir pas faire les distributions réglementaires. 11
faut ajouter
que
le
fractionnement des soldats
européens par petits groupes dans des postes lointains et
d'accès difficile,
où
ils
auraient dû recevoir chaque
jour leur ration en nature, venait encore compliquer
fonctionnement
si
déieclucuv déjà du ser\icedes
>
le
ivres.
LE RAVITAILLEMENT Toutes cos misères ne sont pas
mcnt, d'erreurs de encore d'une
là
L'organe
niallieiireuse-
le fail,
détail facilement réparables.
véritable
Il
s'aient
antinomie administrative.
incapable de remplir sa l'onction.
est
On admet
sans discussion, sur
service de santé,
le
continent, qne
d'une armée (vivres,
auxiliaires
services
,,7
etc..) doivent
être
commandement. \os règlements déjà, consacré ce principe.
Il
les
transports,
subordonnés au
ont, depuis longtem])s
n'en va pas de
même
aux
où l'administration des services administratifs absolument indépendante des autorités militaires.
colonies est
Le ravitaillement des troupes dans les liautes régions du ïonkin serait, en tout état de cause, ime opération nous avons trouvé
moven de
coûteuse
et difticile
rendre
peu près impossible par une dualité aussi pré-
à
judiciable
;
le
au bien-être des troupes qu'aux
intérêts
la
du
protectorat. Cette juxtaposition de pouvoirs indépen-
dants et
et
est
impossible à justitier
existera
et
cependant
le fait existe
longtemps encore, parce que l'ornière est tracée
surtout parce cju'on se heurte, dans l'espèce, à une
administration fermée, à privilèges et son
un mandarinat qui défend
indépendance unguihus
^>ous avons tous
ses
et rostro.
connu au Tonkin des commissaires
coloniaux soucieux avant tout, du bien général
chant à limiter par
leur
amabilité
et cher-
personnelle
inconvénients de cette situation. Ce palliatif
est
les
insuf-
Usant. Le bon sens, à défaut de l'expérience, svdhrait à le
prouver.
faire
Un maçon
marcher
le
auquel on refuserait
le
droit de
porteur de mortier descendrait de son
échafaudage laissant son
mur
Inachevé
et
on trouverait
qu'il a raison. Pourquoi s'obstiner à considérer
commun comme à fait inutile
le
sens
chose nécessaire aux petites gens et tout
aux services publics
?
7.
EN TEIUUTOIUE MILITAIRE
ii8
Les accidents,
lettre et
que
portant
le
même peuvent se produire;
les désastres
du moment que
règlements ont été observés
les
les écritures
à la
sont régulières, les mandarins
bouton du service idoine seront indemnes.
ne sont pas responsables du manque de personnel,
Ils
des
ordres
du commandement, de
du
l'insécurité
pays
Le commandement, de son voyance des
mauvaise volonté. Cependant, colonnes se fondent,
visionnements
se
côté, accusera
les
perdent
leiu"
bommes meurent,
sont affamés,
les postes
F impré-
même
leur inertie, parfois
services,
et tout le
les
les
appro-
monde couvre
sa
responsabilité avec des papiers encombrés de cliilfres et
des procès-verbaux de force majeure.
Je ne veux citer ni été
témoin du
fait
Dans un des
faute de
ni date, mais j'afiirme avoir
:
postes de transit les plus importants de la
liante région, entre
visionnements
nom,
suivant
se
Dong-Dang
et
Cao-Bang,
les
appro-
perdaient en quantités considérables,
magasin pour
préjudice grave pour
le
les
comme nous le verrons
Il en résultait un Devenu responsable,
abriter.
protectorat.
tout à l'heure, de la conservation
commandant le secteur réussit, moyennant une somme minime et tout à fait insuffisante, à construire un magasin convenable en utilisant dans une large mesure les ressources locales. La comptade ces vivres,
l'officier
bilité justifiant
l'emploi de cette petite
somme
ne s'étant
pas trouvée, paraît-il, régulière, les services administratifs
adressèrent des
une forme
observations dans
blessante pour l'officier constructeur. Celui-ci fut couvert
par
ses chefs et,
suivit,
un haut
voir les
au cours de
la
correspondance qui s'en-
fonctionnaire écrivait qu'il eût préféré
approvisionnements
continuer
à
se
perdre
LE RAVITAILLEMENT
1,9
plulôl (|ue d'autoriser la construclion d'un mapasin par
des procédés qui n'étaient pas réglementaires
Cette note caractérise assez bien
de nos administrations
et
il
!
la
largeur de \\\qs
n'est pas
sans intérêt de
Au
voir en passant ce cpie vaut ce rigorisme de forme.
Tonkin,
accordés
les crédits
dans
petites constructions
sur
factures
^
pour
les
les postes
justiticatives
réparations ou
ne sont pa\és
acquittées.
Or,
dans
hrovisse,
on ne trouve pas d'entrepreneurs pour
l'avance
des
faut paver
matériaux ou de
au jour
jour
le
main-d'œuvre
la
— d'où
la nécessité
les
([ue la
faire et
il
d'cnvover
des factures lictivcs pour avoir l'argent avant de faire les
travaux.
le fait.
les
La
— Tout
le
monde
le
sait
faute en est aux règlements
;
tout le
monde
ou à ceux qui
appliquent aussi étroitement. Les fonctionnaires du
commissariat sont mieux que personne, au courant de ces usages,
sont les
mais
règles de la comptabilité publique
les
matériellement appliquées
factures soient lictivcs,
et
pourvu
peu importe que
qu'elles soient d'iui
format régulier.
En
prenant possession du
11°
territoire,
le
colonel
du ravitaillement comme une des plus indispensables prérogatives du commandement militaire, se refusant formellement à accepter pour son compte l'état de clioses existant. 11 l'emGallieni réclama le service
porta de baute lutte. lution de se retirer
s'il
Lanessan passa outre administratifs et prit
Devant son inébranlable réson'obtenait pas satisfaction,
M. de
à l'opposition très vive des services
un
arrêté
qui remettait à
titre
I. Par le service de construction, quand il s'agit de bâtiments militaires. Par les services administratifs, pour les ma-
gasins annexes.
KN TKlUllKJiKi: MILITAIUK
120
d'essai,
dans
Icirilnho.
le II'
le ra\ iladltMiiciil oiilic les
'^nains do l'auloiilé niililalrc.
Celait uno i>rosso cullés
un
On
aflairo.
ne crée pas sans
avoir Aaincu la résistance de principe réi;lé les
difli-
service aussi lourd et aussi complexe. Après et
soiijneuseniont
techniques de l'exploitation,
détails
avoir raison des répugnances
du personnel
surcroît de besogne inattendu et
il
fallut
militaire.
surtout
Ce
la crainte si
générale des responsabilités ne rendit pas très populaire tout d'abord le se plaindre
que
cette
du
nouveau régime.
Il était si
commode de
ravitaillement, sans en avoir la charge,
quiétude compensait bien l'ennui de quelques
privations, dont soutiraient surtout les soldats détachés
dans fit
La bonne volonté cependant ne
les postes isolés.
pas défaut
premiers résultats aidant,
et, les
le service
fonctionna bientôt dans de bonnes conditions. La créalion des secteurs et
groupement des
le
postes facilita
singulièrement l'organisation du ravitaillement qui, du
haut en bas de
l'échelle, fut ajouté
commandement militaire. Le commandant du territoire Langson
les
aux attributions du prenait en charge à
approvisionnements nécessaires aux troupes
sous ses ordres, puis
les
par l'intermédiaire de
Cao-Bang) entre
les
répartissait directement
magasins annexes
ou
(That-Ké,
chefs-lieux de secteur. Les denrées
reçues, dans son magasin, par chaque
commandant de
secteur étaient entretenues et distribuées sous sa responsabilité par \Hi sous-oftlcler chargé de la gestion et
de
la conq)tabilité.
postes et blockaus.
Le secteur
ravitaillait à
Pour réduire
les frais
on s'approvisionnait au moven d'achats pavs, des
a
ivres qu'il produit
tiaux sur pied.
:
son tour ses
de transport,
directs
dans
le
sucre, sel, thé, riz, bes-
LE RAVITAILLEMENT
La
roLiiiioii, 011
péennes dans
gros détachenuMils, des Iroiipcs cviro-
les postes
siniplilier le service
vait
principaux était veiuie du reste
dans une large mesure.
régulièrement cuire
entretenir
12,
le
On
v
pou-
pain, abattre des bœufs et
des cultures maraîchères très fructueuses.
\os soldats ne tardèrent pas
à y trouver
un bien-être
inconnu jusque-là. L'envoi des rations en nature dans
les
postes annexes,
une cause permanente de perles et de difficultés. Les demées n'arrivaient pas ou arrivaient avariées, les réclamations étaient continuelles. Le droit à ces rations fut remplacé, pour tous les Européens détachés des postes principaux, par une indemnité journalière calculée pour chaque souvent éloignés
et d'accès diflicile, était
poste, de façon à couvrir largement le prix de la ration et les frais
de transport. Chacun organisait ensuite son
ravitaillement, faisant prendre et périls
s'il le
des vivres au magasin
du
désirait à ses risques
secteur
rem-
et les
boursant directement.
Dès
les
premiers mois de 1894,
avait fait aligner tous les postes à .
de réserve (suivant leur
sorte à
fois
l'abri
droit
du besoin les
les
la
transports se faisaient
plus favorables. et colis
pour
La dépense était très forte et Le service des transports,
médiocres.
annexe de celui des temps.
et
troupe, donnait lieu depuis longtemps
à des plaintes justifiées.
résultats
à six mois
en farine, vin,
au transport gratuit, des bagages
les officiers et la
les
facilité d'accès)
par an. Les garnisons se trouvaient de
seulement aux époques
Le
colonel Gallieni
Ces réserves étaient renouvelées une
tafia, biscuit
ou deux
le
un an ou
vivres,
L'attribution
d'un abonnement,
fixé
fut
réorganisé
en
même
d'une indemnité représentative
pour chaque poste, en remplace-
EN TKURITOIRE MILITAIRE
122
incnt de ce droit aii\ transports, tout en diiiiliiuaiil les cliarijos
dans
du
permit de conslituer, surtout
protectorat,
troupes indigènes, des « masses
les
dont
»
les
bonis étaient employés à la création progressive dans
chaque poste annexe, d'une réserve de vivres appartenant à la garnison.
^otre cadre ne
lalre saisir les
entre
les
Tcxamen
se prête pas à
méthodes nouvelles. Ce
détaillé
de ces
précède suflira pour
(jui
lignes i-énérales
la
:
en.
remise des services
mains du commandant du
territoire est
le
retour au principe nécessaire de toute entreprise sérieuse
mais
:
il
l'unité de direction. C'est là le point capital, est intéressant
de suivre en outre dans
la l'orme
de l'exploitation, l'application de procédés d'administration trop peu goûtés dans nos colonies.
de décentralisation
etTet
et d'iui
elTort
s'agit
Il
tenté
en
en sens
inverse des tendances de notre régime administratif. ]Nous l'avons noté déjà et déploré, la caractéristique
de ce régime l'Etat
«
est
est l'efl'acement
Providence
Tonkin, puisque tous
les jours,
».
de
c'est
comme un
de l'individu
Le
service
sa ration
soldat
et les
vivres au
lui qu'il est question, devait
père de famille prévoyant,
apporter à chaque soldat, dans
inabordables
son idéal
et
des
les
blockaus
les
plus
plus lointains, son morceau de pain,
de viande
et
ou son chef eût
est vrai, n'arrivait
son verre de vin, sans que
Tout cela, en mauvais état et
à s'en préoccuper.
pas ou arrivait
le il
le
protectorat parvenait, au prix de sacrifices énormes, à faire
mourir de faim
lavait les les
mains, car
ses soldats. elle avait,
L'administration s'en
sur
besoins; quant aux intéressés,
le
papier, prévu tous
ils
n'avaient pas voix
au chapitre. Devant l'impuissance des règlements, fallut avoir recours
au sens commun.
il
LE IIWITAILLEMENT
Ln
123
comme
service public d'entretien,
l'alimentation
des troupes, doit répondre à deux conditions satisfaction
la
de certains droits
assurer
:
sauvegarder
et
les
intérêts de l'État.
La première
sera certainement remplie
si,
après avoir
simplifié les détails et délimité très exactement les droits
on
et les responsabilités,
sur
Pour
satisfaire à la
seconde
et
permettre à l'État de
remplir à bon marché ses obligations,
Le plus sur moven d'y parvenir peut,
ramener
les
à
l'cc
abonnement :
obliofé
c raison
au
«
forfait
de consentir, dans
du déplacement de la
le
lui-même de
L'augmentation
le calcul
tout
Tout
».
moyennant une redevance
ses obligations.
compensée par
du
»,
quand on
nature, de
l'avant droit, qui s'occupe
ses affaires, et l'État qui,
de
faut réduire ses
est d'éviter,
fournitures directes en
monde y gagne se libère
il
surtout limiter sa responsabilité.
frais d'exploitation et
le
pour l'exécution
s'en repose
les intéressés.
qu'il
lixe,
est
de l'abonnement, en
la responsabilité, est
largement
limitation des risques et la suppression
gaspillage.
Gela n'est pas nouveau est
et
l'administration de la guerre
entrée depuis longtemps dans cette voie. Mais nous
parlons
En
ici
fait,
d'administration coloniale.
malgré des chicanes incessantes
et lavérltal)le
rencontrée dans certains milieux
animosité qu'avait
cette expérience, les résultats furent excellents.
tectorat aussi bien
ment
que
les
Le pro-
troupes y trouvèrent large-
leur profit.
Avant de suivre
le
commandant du
secteur dans ses
rapports avec les indigènes, nous pouvons apprécier dès
maintenant
le caractère
de sa fonction militaire.
KN TKKIUTOIKE MILITAIRE
i2\
L(Moiti
(Ml
Un
icSc).")
dans
de Dong-Dang- où
sa capilalo
tiennent garnison sa compagnie de légion au complet et
une quarantaine de soldats indigènes. Cent cinquante ou linh-cô (milice locale) garnissent frontière et occupent huit postes ou blockaus solide-
tirailleurs tonkinois la
ment
installés. Trois oliiciers le
chaque jour et
en règle
secondent dans sa tâche;
reçoit les rapports de ses détachements
il
le service.
Le pavs
connu
est bien
journel-
et
lement exploré. Aucun convoi ou détachement ne sans qu'il en soit avisé.
verse sa circonscription
tra-
Cenv
d'entre eux qui v séjournent passent de droit sous ses
ordres (quand
un
officier plus
ancien ou de grade supé-
commandement). Au conunandement militaire ont
rieur n'en a pas le
dont
services publics
dans ces multiples fonctions
l'aider
des troupes sous ses ordes. et
agent des postes,
des transports,
un
Un
un gradé
français s'occupe de la police,
on trouverait
même
.
là,
.
à
ou piqueurs de route
Dong-Dang un
.Ce qui n'empcche pas
si
on a
fait
commandant du bilité
ces braves gens de
quand
le faut.
il
aussi large, sa part d'autorité,
secteur,
il
a
dû
au
accepter la responsa-
totale de l'entreprise. Sécurité des convois, des
détachements, des
isolés, tranquillité
tection des indigènes,
des villages
un propriétaire qui garde son bien prendre qu'à lui-même si on le vole ou
C'est
mai Jies ne prospèrent
;
pas.
pro-
et
du
ser\ice de la poste et
graphe, police, travaux, ravitaillement, tout
s'en
;
caporal jardi-
plume, niveau ou arrosoir pour reprendre
leur fusil et s'en aller battre la brousse
Mais
emploie pour
gradés européens
caporal est télégraphiste
chefs de chantier
nier.
Il
les
sous-ofiicier gérant des vivres et
d'autres sont
laisser
été joints tous les
a la charge.
il
télé-
le
regarde.
il
ne peut
si
ses
do-
LE BRIGANDAGE A oici
le
cadre
appuvcr
le
repeuplement puis
tique
laS
nous
sur le([uel
militaire
économique du pays. Aucune bande
et
peut pénétrer ou au moins séjourner dans
immédiatement
sans être
une le
allons
réorganisation poli-
la
signalée
pirate ne le
secteur
poursuivie par
et
force militaire sérieuse et toujours prête. C'est bien
but que doit
se
proposer l'occupation militaire. Mais,
après la piraterie, nous allons trouver
brigandage,
le
plaie des provinces voisines de la Chine.
Aussi bien que
la piraterie,
formes différentes suivant
bandes
Les
région.
le
fortes
le
brigandage prend des
degré de pacification d'une et
aux
organisées visent
coups de force fructueux. Pillage de convois d'armes de munitions, exportation en grand de femmes
enlèvement
Ijuffles,
d'Européens
une
valant
et
et
de
forte
rançon.
Après
la
dispersion des groupes importants, les dé-
bris de bande, encore assez forts
pour
travailler à leur
compte, mais mal outillés pour tenir
la
campagne
contre les troupes régulières, se rabattent sur l'exploitation des villages qu'ils nuit,
butin toujours bien accueilli
jjuffles,
ment
attaquent généralement de
pour v ramasser quelques femmes ou quelques
facile
A mesure dense
gereux
et et
et
d'un écoule-
sur les marchés cliinois.
que l'occupation du pays
se
fait
plus
plus active, ce brigandage ouvert devient dan-
peu productif. Les risques surpassent bientôt
il faut y renoncer. C'est alors que le vol main armée se transforme en une industrie véritable où la force n'entre plus guère que comme moyen d'in-
les bénéfices et
à
timidation.
Les régions confinant à peuplées connaissent seules
la
Chine cette
et
suffisamment
dernière forme de
EN TERRITOIRE MILITAIRE
126
brigandage, aussi démoralisante ponr
habitants que
les
Le secteur de Dong-Dang
difficile à extirper.
lui
est
particulièrement propice. .Nous avons, au début de ce chapitre, esquisse sa physionomie topographique et si-
gnalé
la
composition toute spéciale de
l'avoisine.
longent
la
Les chemins
popidation qui
la
plus fréquentés
et les routes les
frontière à courte distance,
commerciale y
assez active,
est
les
circulation
la
abords en sont ro-
cheux, coupés, sillonnés de couloirs et semés de cirques, véritables coupe-gorges envahis par le bois et la brousse.
Tout
est disposé
pour rendre
fructueux
facile et
le vol
main armée. D'autre part, le personnel ne manque pas, c'est une profession qui demande peu d'apprentissage. Les villages chinois de la frontière regorgent, du à
reste,
de sujets
Quand tendre,
c|ui
y sont passé maîtres.
chôme ou que
le travail
ils
la solde se fait at-
vont trouver un de ces petits entrepreneurs
qui prêtent des armes moyennant une grosse part dans les
bénéfices, se
sionnel, très
groupent autour de quelque profes-
heureux de
quête d'un coup à
faire le chef et
se
mettent en
faire.
L'entrepreneur lui-même joint souvent à plusieurs autres professions
Dans
ce cas, les
compte.
En
celles d'indicateur
hommes
arme
qu'il
et
de receleur.
travaillent à son
dehors des vols matériels, qu'ils ne né-
gligent pas, ces industriels ont généralement pour but
de
faire enlever
éclat,
par surprise
et
autant que possible sans
des indigènes aisés, des enfants ou des
aussitôt conduits et séquestrés en Chine.
prochain,
des
intermédiaires
femmes vendeuses de légumes traiter avec les familles le prix
de représailles pour
de
les otages,
femmes marché,
ordinairement
(
et
Au
des
de fruits) viennent
la
rançon. La crainte
empêche
le
plus sou-
LE BRIGANDAGE
127
vont les intéressés de dénoncer ces entremetteuses se
et
de
plaindre avant c[ue l'alVaire soit terminée.
une des formes les plus rémudu brigandage, ce fut aussi de tous temps la
C'est là certainement
nératrices
plus frécpiente dans les pays troublés.
Les
mœurs
de
l'Extrême-Orient rajoutent une note inconnue ailleurs et assez
La mémoire
curieuse.
et les restes des ancêtres
sont l'objet d'un culte réel, le seul à proprement parler
conservé
qu'aient
les
L'ascendant direct, par
chef de famille
le
lant sur sa
maison.
comme
Il
réellement présent
accordant
Ln
un
titre
et veil-
en résulte de bizarres coutumes
nouveau
à son aïeul défunt.
sentiment aussi profond prête à l'exploitation
vu plusieurs
fois
voler les os de son père à
que habitant notable. Ces
;
un mandarin en
entre autres, de récompenser
celle,
j'ai
populations du llaut-Tonkin.
père, après sa mort, est considéré
le
restes, cachés
et
quel-
en Chine, étaient
tenus à sa disposition, moyennant une
somme propor-
tionnée à sa fortune. le caractère
Si
avait fait
sacrilège
d'un semblable vol n'en
même
acte exceptionnel,
dépourvus de tout sens moral,
riers
une
un
chez des aventuil
y aurait eu
là
profession très lucrative à exercer. Lin Tonkinois
n'hésite devant
aucun
sacrifice
pour rentrer en posses-
Le Tong-Doc (gouverneur de i
sion des restes de ses ancêtres.
pour
le
cas s'était produit ""^
classe)
vince de Langson, le vieux Vi-^ an-Li.
de
la
pro-
Quelques vo-
tombe de son père. une bonne affaire, car il dut verser une grosse somme. Mais il est imprudent de s'attaquer à aussi forte partie et Vi-Yan-Li le fit bien voir à ses voleurs. 11 emplova tout ce qu'il avait de richesse, de patience
leurs audacieux réussirent à violer la C-e fut
et
de crédit à se faire livrer
le
principal coupable, puis
es TKRUITUIIŒ MILITAIRE
ij8
dans
sa
père,
il
maison, le
devant
huis clos,
à
mânes de son
les
au milieu d'elTrovables supplices.
périr
lit
—
L'autorité française dut fermer les yeux sur cet acte de piété iiliale
un peu
asiati(pie, qu'elle
du Tonkin
lard et le vice-roi
du vieux mandarin
lit
ne connut
(pie plus
conférer aux cendres
heureusement retrouvées une
si
di-
gnité qu'il n'avait point de son vivant.
De
toutes les
industries dérivées de la piraterie, la
plus développée
certainement
est
femmes. L'esclavage Chine qu'au Tonkin
l'exportation
n'existe cependant et
il
ne
s'agit
des
pas plus en
pas d'une traite com-
parable à celle des noirs en Afrique. Mais
la
population
chinoise des contrées avoisinant la frontière, composée
en majorité d'aventuriers sans famille,
femmes pour
a
besoin
de
s'établir.
L'intérieur de la Chine n'en fournit pas, car la po-
pulation féminine habitants.
En
est très réduite
x"
voyant
par
les
mœurs
des
Chinois, très attachés aux en-
les
fants qu'ils élèvent, remplir
largement envers eux
les
devoirs de la paternité, on a souvent traité les affirma-
mations des missionnaires
sur ce sujet, de légendes
destinées à exciter la pitié et à provoquer la générosité
du public. Les abandons d'enfants nouveau-nés sont fréquents cependant, et
liommes de bonne
foi
fait est
le
affirmé par tous les
avant séjourné dans
les
régions
populeuses de l'intérieur. Cette sélection s'exerce surtout
au
profit des enfants
ne conservent qu'un
petit
mâles
et les familles chinoises
nombre de
filles.
La prépon-
dérance constatée de l'élément masculin dans beaucoup de provinces L'article «
suflirait à le
Femmes
marelles chinois et avantaiijeusement.
les
»
prouver.
est
donc
Tonkinoises
Leur
sort
très s'y
demandé
sur les
vendent toujours
matériel
est
souAcnt
LE BRKJANnAOK meilleur chez leurs nouveaux
Aussi
tranquilles.
maîtres que dans leur
y fondent des
Elles
\lllage natal.
le
nombre
i^ç,
familles
femmes exportées en Chine qui cherchent dans leur patrie, quand mille déjà 11
elles n'y
vivent
et
très restreint des
est-il
ont pas
à
laissé
rentrer
une
fa-
faite.
du reste toujours nécessaire de faire viofemmes annamites pour les expatrier. De vé-
n'est pas
lence aux
ritables agences chinoises les recrutent
peuplés du
Delta et
ques cadeaux
les décident,
beaucoup de promesses,
et
conduire secrètement en Chine.
un
couvrir dans
Dang,
le
dans
village, à
Il
les
cantons
movennant quelà se laisser
m'est arrivé de dé-
quelques kilomètres de Dong-
dernier gîte d'étape d'une de ces agences. Les
sujets raccolés y arrivaient sans attirer l'attention,
jour de marché,
et
attendaient la nuit pour passer
un la
frontière par des sentiers détournés.
Aussi bien que clandestins
le
sont
brigandage ouvert,
fort
sommes désarmés en
difficiles
les
enlèvements
à atteindre
dispensable cependant de faire disparaître,
donner au pays produire
et
et
nous
face de ces désordres c[u'il est in-
la sécurité réelle
dont
il
si
on veut
a besoin
pour
pour progresser.
Là encore,
c'est
aux intéressés
qu'il faut remettre le
soin de leurs affaires. Les habitants sauront se garder et faire la police
chez eux, à condition d'être armés et
soutenus. La distribution de fusils et de munitions aux indigènes avait longtemps soulevé de graves objections.
On
redoutait de fournir ainsi des armes à la piraterie
de favoriser cutée, les
il
la rébellion.
est vrai,
ou
Cette mesure était surtout dis-
par ceux qui connaissaient seulement
provinces basses. Jusque-là, malgré
les eflbrls et les
EN TERRITOIRE MILITAIRE
i.So
tcnlallves de presque tous les oiriclcr s servant liantes reliions, elle n'avait
proportions tout à
Se basant sur le
la
Haut Tonkin,
le
fait
insuffisantes.
colonel Gallieni l'avait inscrite dans
nombre
des plus urgentes.
heureux pour trouver dans
occasion,
chez le général en chef
qui
^
s'en
L'armement immédiat
Il
fut
celte question de l'ar-
mement, comme en toute décidé.
les
eonnaissance des races qui peuplent
son programme, au assez
dans
admise qne dans des
été
et
un appui montra
très sûr
partisan
complet des can-
tons de la frontière fut demandé.
On
l'obtint d'au-
tant plus facilement que la dépense était insignifiante.
Le protectorat possédait une réserve d'excellents fusils modèle 1874 versés par les troupes européennes au mo-
ment où
fut distribué le fusil
modèle 188G
et les
mu-
nitions sont facilement cédées par la métropole qui ne
qu'en
sait
Dès
faire.
début de
le
189/i, les
commandants des
secteurs
déjà formés reçurent fusils et munitions en quantité suffisante
pour assurer dans de bonnes conditions
mement de Les
tous
chefs
commune un recevaient
un
les villages
de
canton
certain fusil et
l'ar-
importants. présentaient
pour
nombre d'hommes
chaque
valides qui
cinquante cartouches. Ces armes
soigneusement cnrei^istrées sont soumises à des revues
Ou
me
déclarer ici une fois pour troupes de 1 IndoChine, M. le général de division Duchemin, n apparaît pas à chaque page de ces notes telle qu'elle s'est constamment montrée, bienveillante, active, toujours prête à soutenir les initiatives et à en donner 1 exemple, cela tient à deux motifs je n'ai I
.
toutes
:
si
il
soit
l'action
permis de
du général en
le
clief des
:
pas qualité pour apprécier les actes militaires du commandement et je n étais pas en situation d'en suivre personnellement le détail.
ARMEMENT DES INDIGÈNES périodiques et la distribution,
du
commune
et
la
mesure
aucune précaution ne
pertes et les vols. piraterie était
Le
La eonnnan-
responsable.
est
avait été faite par le
reste,
dant du secteur dans
en
,3i
qu'il jugeait
pour
fut négligée
prudente éviter les
un acte de indépendamment du
vol d'armes assimilé à
puni de mort
et
cliàtiment des coupables, le village était passible, en cas
de perte, d'une forte amende.
armé, dans fense par
une
solide clôture
blockaus en pisé, lorsque permettait pas, niser
une
Aucun
village
ne lut
premiers temps, sans avoir assuré sa dé-
les
le
et
quelques maisons ou
voisinage d'un roclier ne
comme en beaucoup
sorte de réduit dans
une
d'endroits, d'orga-
grotte.
Les résultats dépassèrent notre attente délai très court
on vit diminuer puis
et
dans un
disparaître le bri-
gandage intérieur. Les liabitants ayant repris confiance ne
se contentaient plus
coups de
fusil.
Des
de recevoir
les
maraudeurs
à
services de garde et de patrouilles
s'organisaient sur les points les plus exposés et
prenait de véritables cliasses au pirate,
on entre-
souvent fruc-
du village commandant du
tueuses, après lesquelles tous les liabitants
venaient en corps faire lioinmage au
secteur de quelque tète à longue tresse.
remplacé
les
Après avoir
cartoucbes brûlées, je récompensais habi-
tuellement leur zèle par une gratification analogue à celle
qu'accorde
le
protectorat pour la destruction d'un
animal nuisible, tigre ou panthère. toutefois, de limiter ces
Dans un pays où
homme
devint prudent,
l'argent est rare et
compte peu, une
fùt-elle sur les épaules est fort
Il
encouragements pécuniaires.
tète
du plus honnête
exposée au coin d'un bois quand
Quehjues
contrebandiers
où
la vie
d'un
qui vaut dix piastres,
d'opium,
coolie chinois, la
nuit tombe.
iiioffensifs
par
KN TKHIllTOIIir. MIIJTAIKF.
i:?2
ailleurs,
pavùrcnt poul-être un peu
de
promenés sur
s'être
soleil.
Entre deux maux, on choisit
victimes,
s'il
Chinois de
de venir
l'imprudence
clior
chemins après
les
le
coucher du
moindre
le
et les
\ en eut, étaient peu intéressantes.
Les
perdirent rapidement l'habitude
la frontière
leurs provisions au Tonkin. C'était le
faire
principal.
L'armement des populations Les cinq cents
fusils distribués
de Don2:-Dano: créaient, entre
dànt du secteur, une
avait
une autre
dans
la
les
utilité.
circonscription
mains du comman-
très sérieuse réserve d'auxiliaires
toujours prêts à marcher. Ces partisans ont depuis
longtemps
ils
étaient
quefois seulement au
on peut heures
à
,
peu nombreux
moment du
Dong-Dang, réunir
les
condition de
Aucun
villages. les
trois jours, sans trop
se
sont produits.
quelques
est limité à
Le gaspillage des
cliasscs
aux fauves. Les
fait
exceptionnels.
vingt mois, sur près de cinq cents fusils, deux seu-
lement ont été volés incendies.
Pour
et
deux premiers, l'un
C'est-à-dire
« auxiliaires » et
deux autres brûlés dans des
ces derniers les pièces
rapportées sans qu'il v
I.
fort utiles à
',
des inconvénients prédits par les adversaires
pertes et les vols de fusils sont tout à
En
armés quel-
Ces auxiliaires sont
emplover judicieusement
de l'armement ne
munitions
et
besoin. Actuellement
cent fusils en quelques
deux cents en deux ou
et
dégarnir
rendu souvent de bons
leurs preuves et
fait
Mais
services.
en
manquât une
fut enlevé près
les
en métal étaient vis.
Quant aux
de Bao-Lam, tout
véritablement comme des transformant, comme on l'a
utilisant
non pas en
les
essaye quelquefois, en soldais de complément.
Voir
1
ouvrage déjà cité du commandant Chabrol, au Tonkin. p. 287.
tions militaires
Opéra-
ARMEMENT DES INDIGÈNES à fait
au dcbut, par un domestique
puis longtemps chez le détenteur
pouvoir compter sur
Le second
fut
cliinois servant
du
emporté par un
-
la
Chine.
»
de passage qui
le village
de Quang-Bv.
«
dans
Nung
de
qui croyait
fusil
Le voleur gagna
lui.
avait reçu l'hospitalité
,33
Après deux mois de recherches,
les
habitants responsa-
bles réussirent à faire arrêter le coupable et ses complices
un marché des environs. aurait pu craindre, et
sur
On
sérieuse,
de donner, en
les
c'était
l'objection la plus
armant, aux communes
importantes, des velléités d'indépendance rixes entre villages.
les
constaté, en
Le
fait,
Il
n'en
deux ans, une
.seule
et
dispute à
en outre, d'avoir reçu des
fusils,
de favoriser Je n'ai pas
fut rien.
main armée.
d'en être res-
ponsables, de
les
diques
appelés quelquefois à marcher avec les
et d'être
présenter à
des
inspections pério-
troupes régulières, créa entre l'autorité française et villages
armés une
les
sorte de lien militaire de subordina-
tion qui les rendait plus dociles et plus maniables.
])e\ant
un
pour assurer
aussi considérable de
effort
notre part
des populations,
la tranquillité
il
était
juste de les faire participer d'une façon plus directe aux
charges de l'occupation.
une
sorte de milice
De
tout temps, le pays a fourni
chargée, sous la
locale
mandarins, d'un service de police
main des
de garde. Ce sont
Linh-Cô. Cette milice, échappant à tout dressage
les
sérieux, ne rendait
aucun
reste très réduite et
on
les
et
hautes régions
aux
service. Elle se
avait,
trouvait
du
en échange, recruté dans
un certain nombre d'hommes
destinés
tirailleurs tonkinois.
Dans
les
premiers mois de
Gra.ndm.'^ison.
189/j, le colonel Gallieni
8
EN TERRITOIRE MILITAIRE
i3/i
une
ohl ('liait rauloiisalioii de lever
compa-
assez forte
gnie de Linli-Cù. dette augmentation élail compensée
par
des tirailleurs encore sous
la libération
Mais, au lieu de avaient que faire,
digène entre
les
il
en forma une véritable troupe in-
mains des commandants de
Recrutés sur place, gradés
clioisls
dans
instruits
compagnie de légion,
la
l'occupation militaire.
constituaient, avec
les
secteur.
commandés par
et
cliements devinrent excellenls et fournirent sérieux à
drapeaux.
les
rendre aux mandarins qui n'en
les
En
un appoint
cas de besoin,
soldats européens,
le
au feu
comme
et
aux
Haut-Tonkin. Les Linh-Gô
de Donff-Dani? s'entendaient à merveille avec naires,
ils
une troupe
mixte remarquablement appropriée au service opérations militaires dans
des
ces déta-
les légion-
ailleurs.
Cette forme donnée au service militaire dans
les
pro-
vinces frontières est avantageuse. Les
Tbôs montraient
une répugnance extrême
de
les
à servir loin
cliez
eux dans
régiments de tirailleurs tonkinois. Le service local
auquel
ils
voir leurs
sont
faits
depuis longtemps
et la certitude
liommes directement emplovés
de
à la protection
de leurs fovers, rendent certainement moins impopulaire
l'impôt
du
sang.
Les
Annamites besogneux
achetés au rabais par les villages tliôs pour payer en qualité de remplaçants, leur dette militaire, deviennent
La surveillance est plus facile et les communes, un autre homme et de paver une amende en cas de désertion, ont intérêt à envover des
rares.
obligées de fournir
gens sûrs.
Mais
il
importe de mesurer cette charge. Car
Linh-Cô entretenus
à frais
communs
d'origine et le protectorat, forment
pendieuse pour
le trésor public,
il
par leur
si
les
commune
une milice peu dis-
n'en est pas de
même
ARMEMENT DES INDIGÈNES pour
populations.
les
Chacun d'eux
i35
devait,
dans
principe, recevoir de son village le riz en nature. naissait
de continuelles réclamations
tion fut, dans la suite, remplacée par
de deux piastres par Cliau de
Van-L yen
annuellement une
homme
au
(secteur de
somme
et celte
Il
le
en
contribu-
une taxe mensuelle
service. De Dong Dang)
ce chef, le
doit verser
de 2,3oo piastres environ,
sensiblement supérieure au total de l'impôt personnel et foncier.
Cette participation directe aux charges de la pacification est juste,
d'exiger si
nous l'avons dit. Mais
il
eût été imprudent
davantage à ce moment, dans une contrée
cruellement éprouvée par
la piraterie.
CHAPITRE VI Rapports avec
habitants.
les
militaire et régime civil.
—
—
—
Régime Organisation politique. Mesures à prendre pour rendre les ré-
sultats détlnitifs.
En examinant
le
le
fonctionnement de notre
un
secteur de la frontière,
la nécessité
d'appuyer cette occupa-
cadre et
occupation militaire dans
nous avons signalé
tion sur la réorganisation politique
du
pays. Ces
opérations ont naturellement été menées de front
sommes la
obligés de les étudier
seconde d'entre
elles, la
ici
;
deux nous
successivement. C'est
réorganisation politique, qui
fait l'objet de ce chapitre. Il
avec
est
indispensable d'abord de faire connaissance
les habitants.
cune des races
A
oici
cjui se
donc quelques notes sur cha-
rencontrent dans
la
région de
Ce n'est point imc étude d'ensemble sur la population du Ilaut-Tonkin que je veux eniroprendre ici et je me contenterai de présenter mes administrés de Lani^son.
Dong-Dang Le
tels cjue je les ai vus.
territoire
du Quang-Si
Haut-Tonkin)
de
Dong-Dang (comme
et toutes les
est habité
par im grand
juxtaposées sans ordre apparent très variables.
la
zone frontière
contrées montagneuses du
et
nombre de
races
dans des proportions
Cela constitue une véritable mosaïque à
laquelle la domination
annamite n'a pu donner, en
RACES DL HAUT TON KIN plusieurs
A
l'exception des
«
el
imminrants chinois, tous
Muongs
»
;
sont qualitlés appellation
par
les les
habi-
Anna-
plutôt méprisante
que n'emploient jamais, en parlant d'eux-mêmes, gens du pavs
les
les
^
La race autochtone race « tho
nu
superficiel.
l'ait
tants des hautes régions
mites de
cohésion très instable
(ju'une
siècles,
vernis tout à
,.V
paraît être dans ces parages la
Tout porte à croire
».
Laotiens, les
Thôs, connue
cpie les
Mans ou Méos, etc.,
représentent
les
vestiges des migrations primitives venues de l'intérieur
pour occuper
la presqu'île
indo-chinoise.
Annamites, rameau détaché de
En
tous cas, les
la race chinoise,
n'y sont
venus, par mer, que beaucoup plus tard. Les Thôs for-
ment de
la
majorité et
la
On
population.
la
partie
la
importante
plus
trouve à côté d'eux, répartis en
proportions très dilTérentes, des \ungs, des
Méos, des Tliô-ti, des Annamites Les
et
Mans ou
des Chinois.
Thôs en qualité de premiers occupants sont du sol réellement
possesseurs de la plus grande partie productif.
posséder
Ils
étaient
les terres
même
primitivement
arrosables produisant le
Casaniers et tranc[uilles,
les
les
seuls à
riz.
Thôs sont habitués de-
puis des siècles à vivre sous la domination des races voisines (Chinois et Annamites). >t'avant
de nationalité
et à
une seule chose
proprement
les
parler,
aucune notion
aucune
touche, leur intérêt.
Ils
religion,
obéissent
I. « Muongs dans son sens le plus répandu chez les gens du Delta pourrait se traduire Sauvaires de la montagne. Ce terme est emplové quelquefois d'une façon un peu plus déterminée en parlant de certaines peuplades de la Rivière Noire. Je donne ici son sens courant le plus hahilucl chez les Aima))
:
mites. 8.
EN TEimiTOIllE MILITAIRE
i38
sans arriiTC-pcnséc à celui qui est fèrent le maître qui les vole
le
le
plus fort et pré-
moins, sans souci de son
costume. Faciles à conduire mais détestant les corvées, igno-
commerce,
le
rare,
mais leur incurable paresse
ils
comme une chose empêche de produire
aiment l'argent
rant
au delà de leurs besoins.
Ils
les
ne refusent pas
le travail
qu'on leur impose, mais ne l'acceptent volontairement à
aucun
On une
aristocratie
taires le
prix.
trouve chez
les
Thôs de
la
région de LanG:son
de village composée de petits proprié-
dont l'influence ne dépasse guère
canton.
Ecartés jusqu'ici des
importantes,
la
commune ou
fonctions publiques
n'ont pas d'instruction et peu d'expé-
ils
rience administrative.
Dans
certains villages,
où
existent
depuis longtemps des familles aisées, on rencontre ce-
pendant un certain nombre d'hommes
que non de
lettrés
faire des fonctionnaires excellents
I.
instruits (bien
au sens annamite du mot)
Par exemple,
le
et
capables
*
Tri-Chau (chef d arrondissement, Tri-
Uyen en pa\s annamite) de Dong-Dang, Huu-viet-Than, (2'' mandarin provincial, chargé de la Langson. Propriétaire aisé du village de Ha-Lung, près de Dong-Dang, il était en 1898 un des rares fonctionnaires nés dans le pays. Intelligent, énergique, connaissant à fond le pays, il a constamment fait preuve de capacité et d un véritable attachement pour nous. Je lui dois personnellement beaucoup de reconnaissance pour les services qu il ma rendus et en particulier pour les renseignements qu il ma fournis sur les races, les
actuellement An-Satt justice) de
mœurs, le caractère et la valeur de nos administrés communs. Tous ceux qui ont vécu au Tonkin savent combien les indigènes répugnent en général à ce genre d'information et bien il est dinicilc de se renseigner et de s'orienter.
L'avancement inespéré de ce lettré,
aux premières charges de
petit la
com-
propriétaire rural,
province, est d
un
non
excellent
LES TIIOS Très amak'urs do distinctions, les
grades
aiment
du mandarinat, armes
les
La race
est
et font
loi)
les
Tliôs reclicrcliont
les titres, les décorations, lis
de bons soldats.
en général vigoureuse
et saine.
sont supérieures à celles des Annamites.
chez les Thôs, la base de la société, cêtres
et
La
le
Les
mœurs
famille est,
culte des an-
remplace à peu près pour eux toute autre praticpie
religieuse.
Très attachés au sants
à l'exclusion
sont-ils
des
pour
t'ont
des agriculteurs sulli-
de toute autre profession
;
aussi,
pour leurs besoins de chaque jour, tributaires
autres le
sol, ils
races,
travail
du
surtout bois
et
des
du
Chinois (par exemple fer, les
briques, les con-
structions, les ustensiles les plus simples).
Moins obséquieux que pris
les
Annamites,
les
Thùs ont
cependant leurs interminables fornuiles de
tesse et leurs marcpies ofilcielles de respect.
poli-
Leur carac-
exemple. Le meilleur procédé de gouvernement par tout pavs encore de récompenser très largement les services rendus. Après lui avoir fait accorder un titre de mandarinat pkis élevé que ne le comportait d habitude sa fonction, une médaille d or et la décoration du dragon de l'Annam, je lavais en plusieurs circonstances slirnalé au colonel Gallieni qui déjà, à la fin de 1894, lui avait lait proposer 1 emploi d An-Satt. emploi qu'il remplit actuellement en attendant peut-être celui de Thuan-Fu (gouverneur de 2^ classe). Il avait fait preuve en la circonstance d un désintéressement qui donne un trait de moeurs curieux de la vie sociale des villages Thôs. Tout en se montrant très reconnaissant de cette ouverture, Huu-viet-Than m avait expliqué qiae dans son village de Ha-Lung, vivait encore le précédent Tri-Chau de Dong-Dang et que ce personnage lui étant supérieur par la naissance, làge et les services, c'est à lui que revenait la dignité offerte; ajoutant que lui-même accepterait la place quand son prédécesseur l'aurait remplie. Les olFres laites à l'autre vieux notable furent acceptées et IIiui-viet-Tlian resta deux ans encore Tri-Chau de est
EN TERRITOniE MILITAIRE
l'io
lère est siinj)lo vl assez droit,
chement
sont ca[)aljles
ils
cl'al
lâ-
montrent volontiers dans leurs rapports une certaine bonhomie communicaet
de confiance
et
qu'on trouve rarement chez
tive
Chine
et
dont
Annamites.
se
parle fort loin en
avec quelques modifications, paraît-il, jus-
qu'au Mc-Kong. Elle tien,
les
langue courante du pays
i.a
elle n'est
se
rapproche beaucoup du Lao-
qu'un
dialecte
ou
même un
patois,
car elle ne s'écrit pas.
L'annamite et
les
gens
est la
un peu
langue
fous les nolaljles
oITiciclle.
instruits la parlent
souvent
cl
la
lisent.
Les Thùs pavent sans trop de difficulté l'impôt quand ils
ont de l'argent, mais leur imprévovance est
que
le
plus souvent
longtemps, le souci
que
les
les
même
échéances,
mettent dans l'embarras. L'économie
de thésauriser leur sont inconnus. Alors
la récolte est
il
est
rare
que
le
et
même
largement suffisante pour assurer
besoins de l'année, soit pas obligé
telle
prévues depuis
ses
pavsan ïhô ne
de s'endetter pour vivre en attendant
la
somme
la
récolte suivante.
Leur caractéristique
paresse et l'imprévovance
;
ils
sont
est
faits
en
pour
être ex-
Ce sont du reste, en général, on voit beaucoup de pauvres chez
ploités et l'ont toujours été.
de braves gens
et
si
eux, on n'y trouve pas de mendiants.
Les
XuNGS sont d'origine chinoise
et
proviennent
de migrations anciennes venues pour cultiver les
le sol
Thôs, décimés par des troubles périodiques,
que ne
suffisaient plus à peupler. Ces migrations se sont pro-
duites peu à peu et sans
aucun caractère de
violence.
Les nouveaux arrivants se contentaient d'occuper terres disponibles,
généralement
les
mamelons
les
et les
LES NUNGS bols
;
i',,
terres arrosables restant
les
aux premiers occu-
pants, les Thôs.
Ce mode
d'installation amiable, par petites fractions,
sur les reliefs
du
sol laissés libres,
trement des Nungs cantons où
ils
et des Tliôs
explique renclicvê-
mêlés dans
dans des villages séparés. Souvent
communes
des s'est
mêmes
même
forment
ils
commune Nung commune ïhô. On ne
à part et parfois la
simplement superposée
à la
pourrait dans ce cas représenter sur toire de la
les
vivent en assez bonne intelligence mais
commune Nung que
une
carte le terri-
par une série d'enclaves
correspondant aux parties élevées du terrain
et figurant
vaguement des courbes de niveau. C'est une véritable difficulté pour l'administrateur nouveau qui cherche naturellement
et sans pouvoir y parvenir à délimiter cantons et à y juxtaposer les communes. Les Xungs sont, du reste, très différents entre eux
les
et
forment moins une race
d'immiiiTations pourrait
actuellement
principaux
unique que de
successives
même
répartir
les
résidu
le
origine.
On
en deux groupes
:
Ceux d'entre eux
qui. arrivés les premiers, ont
pu
trouver des terres à riz encore disponibles. Les derniers
venus, obligés de se contenter des versants de mamelons et
des bois.
Les premiers vivant de la leurs usages.
costume,
se sont
peu
à
peu modelés sur
les
Thôs;
même vie, ils ont adopté leurs mœurs et On les en distingue dilïlcilement même
mêmes
:
qualités,
mêmes
défauts.
Les autres, plus nombreux, ont dû pour vivre,
se
créer des ressources en se livrant à certaines industries
primitives.
Les femmes tissent de grossières
les teignent
pendant
(|ue les
hommes
étolTes et
travaillent le bois
EN TERKITOIIU- MILITAIRE
i/ia
dans le
la forêt. Ils cultivent le
maïs,
le riz
de montagne,
coton, l'indigo.
mœurs
Leurs
sont nécessairement restées plus rudes
et leurs traditions plus vivantes.
moins
que
sîirs
les
frontière, piraté
Thôs,
ils
un peu pour
Moins tranquilles
et
ont, à l'occasion, sur la
leur compte.
Ces Nungs de montagne n'ont pas toujours adopté
annamite (tous
la coiffure
gnon
cachés en partie
et
encore souvent
mode
leur a
la
cheveux relevés en chi-
les
par
un turban).
queue de leurs ancêtres
même
portent
Ils
chinois. Cette
parfois attiré des désagréments.
Il
y
a c|uelques années, plusieurs officiers, insuffisamment
documentés sur de
fort
cette question, ayant reçu l'ordre,
la piraterie, d'interdire
au
sous peine de mort la
circulation des Chinois, avaient prescrit de couper, sans
autre procès, toutes les têtes ornées de ce malencontreux
appendice. Les ?Sungs trouvèrent la mesure
un peu
radicale.
pour compléter
\oici,
Nungs, un
mœurs
fait
la
physionomie
caractéristique.
Il
sociale
des
prouve que leurs
sont en clTet restées rudes et que leur moralité
est intransigeante.
Aux
environs du mois de juin 1895, on trouva dans
l'arrovo de voisin,
enquête sur tatai
Don 2:-Dano; trois femmes
?Sun2:d'un
villasre
attachées ensemble et novées. J'entrepris
une
causes de ce singulier accident et cons-
les
non sans étonnement qu'aucune réclamation ne ne s'agissait donc pas d'une vengeance,
se produisait. Il
comme
ie
l'avais
cru d'abord.
Je crai'mis alors d'v
trouver une sorte de meurtre rituel, reste des chinoises.
en
effet
fait
Une
mœurs
sécheresse désastreuse pour le pays avait
provoqué des démonstrations religieuses tout à
exceptionnelles et je savais d'ailleurs par de vieux
LES ^UNGS indigènes qu'à Langson
noyaient encore,
cas,
femmes dans
les
Chinois, en pareil
peu d'années, ([uelques
y a
Song-Ky-Kong. Le pagodon qui
le
cérémonies, rares
à ces
même,
il
iV'i
servait
souvent
est vrai et le plus
il
chemin de Ky-Lua. femmes pour un pauvre village de la montagne me semblaient cependant une bien forte offrande... clandestines, existe encore sur le
Trois
Dès
premier jour,
le
mon
tendre que
ressés, parents
le
vieux Tri-Chau m'avait
enquête n'aboutirait pas. Tous
ou notables du
un ensemble remarquable d'un
triple
mort
..
.
suicide
:
«
village, déclaraient avec
C{u'on se trouvait en présence
Lui
content faire
lui
triste,
Impossible d'en tirer autre chose
»
en-
fait
les inté-
et je
dus
me
contenter de cette explication douteuse, après avoir,
pour
forme, infligé une amende aux notables qui
la
n'avaient pas rendu compte de la chose. Il
s'agissait
simplement, je
le
sus plus tard, de trois
maris soupçonnant leurs femmes de
au marché
Actuellement,
importante de
la
Xungs forment une
les
population, dans
frontière (la moitié environ). nérale,
nombreux dans
de rochers
s'être trop
amusées
voisin...
et
de bois
les
Ils
les
fraction très
cantons de
la
sont, d'une façon gé-
cantons pauvres, couverts
plus rares dans les vallées riches
;
et cultivées.
Un
peu
un
point
surveillés et bien
de hardis chasseurs, aimant faire
traités, ils
ne formeront
obstacle à la pacification délinitive. les
armes
et
Ce sont
capables de
de très bons partisans.
Les Maxs ou Méos sont rares dans
Dang.
Ils
vivent en véritables
montagneux que
les
le
Cliau de
nomades sur
les
Dong
massifs
Xungs eux-mêmes n'abordent
pas,
EN TEimiTOlIlE MILITAIIIE
i','.
les somincls pour y semer le maïs et le riz de moiilamie, puis transportant ailleurs leurs cabanes de
déboisant
quand
brancliages
une race
belle
la terre
ne produit plus
vigoureuse mais
et
assez. C'est
diriicile à iixer et à
apprivoiser.
Mans ne
J^es
vivent pas toujours en très bonne in-
telligence avec leurs voisins qui les craignent.
déplacements s'opèrent cependant à l'amiable entente avec
de
les autorités
de laquelle
toire
ils
leur est accordé
la
commune
sur
Leurs
et après le terri-
veulent s'établir. Le droit de séjour
moyennant une redevance annuelle
par famille. Mais cette obligation d'avoir recours aux notables Tliôs ou
\ungs
et
de leur paver cette sorte de
tribut occasionne sovivent des dilïicultés.
pour rendre stable une assez forte coMans (/jo ou ôo familles) venant des mondu Mau-8on, de leur reconnaître un territoire
J'avais tenté,
lonie de
tagnes
former une commune commun et administrée par le et d'en
Man). Les
clioses allaient
à part, clief
de
soumise au droit la
tribu (Truong-
bien au début; nos ^lans
semblaient goûter cette autonomie, étaient reconnaissants des i5
ou i8
qu'on leur avait
fusils
soumettaient volontiers au\ inspections ])aiv
des
conliés, se
et vivaient
en
avec leurs voisins. Mais on ne fivc pas facilement
nomades liabitués h cultiver le sol en le déboisant,du lendemain et jaloux avant tout de leur
sans souci
iii(lé|)('iidance.
tôt
Il
est
ou tard leur exode
Les
mœurs
des
à
craindre qu'ils ne reprennent
^
Mans
se
ressentent de leur babituel
I. Dans certaines parties du Tonkin, surtout dans la province de C^ao-Bang, les Mans forment des noyau\ beaucoup pîus iniporlants et plus fixes.
LES MANS
,',:,
isolement dans des massifs dii'licilement abordables.
forment de véritables tribus
et vivent sous le
Ils
régime
d'un droit coutumier patriarcal, en dehors des règle-
ments
et
des lois administratives
(qu'ils
ne croient point
pour eux.
faits
Le Truong-Man. mis en conliance par nos précédentes un jour me prier de lui prêter soixante
entrevues, vint piastres
pour
commerce de l'opium. Je
faire le
quai qu'il aurait peu de clients obtenir une licence lit
entendre, sans
justement de
payer de tout cela.
fait Il
lui expli-
d'abord
fallait
— Sur quoi,
moindre embarras,
utiliser ses fusils et les
hommes en
ses
paver patente.
et
le
et qu'il
il
me
qu'il voulait
remarquables capacités
de contrebande, pour ne rien
fut assez difficile de faire
com-
prendre au vieux montagnard que je ne pouvais guère fonds pour une semblable entreprise. La politesse annamite est naturellement inconnue aux Mans, c|ui se dispensent des salamalecs et des hommages officiels. Leur chef cependant venait rarement à lui fournir des
Dong-Dang une
sans m'apporter, en témoignage d'amitié,
bouteille pleine de miel sauvage. Je lui olTrais
pUis souvent en échange une bouteille de vieil
homme
maigre, à
la
barbe rare
et
rhum:
puis
le
le
au large turban
bleu, après avoir terminé son palabre et secoué sa pipe à petit
dignité,
fourneau de cuivre, prenait congé, non sans pour regagner la montagne escorté des jeunes
gens armés de
De
taille
sa tribu.
movennc, ^ igoureux
avaient bon air.
et
bien pris, ses
Ce sont de hardis chasseurs
hommes
et
surtout
d'infatigables marcheurs, capables de se transformer à l'occasion
en redoutables partisans.
Les Mans ont
la curieuse particularité
d'un soin
et
d"nne recherche dans leurs ^ètcmcnts qu'on ne retrouve Grandmaisom.
9
EN
t'iO
guère chez
MILITAIUE
TEUIilTOIlU-:
surtout chez les Annamites.
les autres races,
Leurs femmes portent des costumes ornés de broderies <le
forme originale Les Tiiù-Ti
et
souvent assez seyants.
sont les descendants des mandarins et
des soldats annamites envoyés,
pour gouverner
et
ment sur
ils
mais ne
place,
occuper ont
il
y a quelques cent ans,
le pays. Installés déllnitive-
souche avec des fenuiies ïhô
fait
fondus. Leur origine constituant
se sont pas
pour eux une sorte de noblesse leur conférait quelques privilèges en voie de disparaître (exemption de corvées,
indépendance relative en
ou de canton ). Ce sont gens plus plus dangereux que
et
intelligents et plus cultivés,
ont hérité de
ils
dans
A faire
fourberie
l'extérieur, rien
passer pour
Dong-Dang
;
ailleurs
ils
villages.
ne distingue ces Thô-ti qui
Thôs auprès de nous,
se fai-
quitte
à
sonner haut leur origine auprès des mandarins
annamites
et
formaient une sorte de franc-maçonnerie
redoutée des autres habitants. sorte à se cacher longtemps. et des officiers
changement
de
Langson,
un
avaient réussi de la
Ils
Bien des administrateurs
n'en ont pas soupçonné l'existence avant
le
était
la
Nous en avions seulement quelques
secteur de
le
forment parfois d'assez gros saient
mais
Xungs. Très jaloux
ne regardent pas aux moyens quand leur
intérêt est en jeu.
familles
commune
chefs de
les Tliôs et les
de leurs prérogatives,
annamite
face des
de
régime de
nommé
Tiiù-ti
à
cette
iSqZj-
Le Tong-Doc
époque,
que longtemps on
^ i-A an-Li,
avait cru
de race
indigène.
Apres au gain
et
sans scrupules, les Thô-ti sont d'au-
tant plus à craindre qu'ils méprisent les races locales
THO-TI ET ANNAMITES et
n'ont aucun attachement pour
i',;
milieu social où
le
ils
vivent.
A une
lieue de
cément de
iSg/j.
dont
riche,
Dono-Dans;, demeurait, au connnen-
un ancien
canton dévasté par pect,
il
fonctionnaire, notable et
village avait été seul respecté
le
Ce
les pirates.
fut arrêté et je
pus
saisir
fait
dans un
ayant paru sus-
chez lui une corres-
jx)ndance considérable ainsi qu'un rôle d'impôts très
bien tenu.
—
11
servait d'indicateur et d'intermédiaire
au principal chef pirate de de faire rentrer pour lui contrée. C'était
se chargeait
la frontière et
redevances de toute
les
unThô-ti qu'on
plus tôt dans la crainte de représailles.
Son
frère et
tous ses parents craignant d'être compromis, avaient reste dès le
premier jour
« pris la
brûlé la maison d'un notable
la
n'avait pas osé dénoncer
brousse
Thô
qu'ils
»,
du
après avoir
soupçonnaient
d'avoir dénoncé le vieux pirate.
Comme
il
convenait de ne pas examiner de trop près
antécédents des habitants de
les
la frontière
qui deman-
daient à rentrer dans leur village, j'autorisai, quelcjues
mois après, sur
les pressantes instances
de Langson, toute
Personne ne
se
la
du Tong-Doc
famille à rentrer chez
montra dans
la suite
elle.
plus souple
et
—
plus
prévenant.
Les Thô-ti sont de véritables Annamites habillés en
Thôs.
Ils
constitueront
une gène
et
quelquefois
un
danger tant qu'ils ne seront pas complètement rentrés dans
le droit
commun. Le
départ des mandarins anna-
mites a porté un coup mortel à leur influence qui ne
peut dans
la
suite
que diminuer
et disparaître
peu
à
peu Les AxxAMiTES n'étaient représentés jusqu'en
189^^1.
EN TERRITOUIE MILITAIRE
i',8
dans
hautes ré<;ions, que par
les
foncllonnaircs et
les
quelques colporteurs. Les grands travaux entrepris
du chemin de
surtout l'ouverture
favorisé l'evodc naturel vers les hautes terres,
du
trop-
plein de population des provinces maritimes. C'est
élément
social
avec
commercial
prudence
dans
semble avantageux d'encourager plus large mesure au point de vue
mais de n'autoriser qu'avec
et industriel,
en masse
Annamites,
si
et l'occupation
une tendance de
régions montagneuses rend,
les
prise de possession
Chinois.
de
la
ce genre
La répugnance de l'Annamite
venait à se produire.
pour
un
compter dans
faudra
11
la colonisation
terre par les
il
la
(pielques années. celte poussée
lequel
et
ont beaucouj)
fer
peu
à craindre
est vrai, cette
il
pour
— La région de Dong-Dang
le
moment. par
est habitée
un grand nombre de Chinois venant d'un peu partout jaune préoccupe
et très dilTérents entre eux. L'invasion
assez les esprits les
pour
qu'il soit intéressant de rappeler
données générales de
la
question.
Les Chinois qui s'établissent au Tonkin,
Amérique et sur toutes les
côtes
habituellement pour chercher fortune
de revoir
la
mère
patrie, vivants
noyau d'immigrants nouvel arrivant
est
s'est
comme
en
du Pacifique, y viennent et
avec l'idée fixe
ou morts. Dès qu'un
formé quelque part,
tout
sur d'y trouver des associations, des
sociétés de secours, des syndicats
de toutes sortes qui
le
reçoivent, le placent et le soutiennent.
Au
Tonkin,
les
spécial. Ils relèvent tice, les
Célestes sont
soumis à un régime
directement pour
la police, la
jus-
impôts, des autorités françaises et n'ont rien à
La législation qui un double but. Permettre
faire avec l'administration indigène.
leur est imposée se propose
LES CHINOIS de surveiller leurs agissements tion par
un impôt
]',.,
limiter leur
el
immigra-
spécial.
Ces mesures de protection paraissent du reste in-
aux colons français auxquels
suffisantes
qu'au point
de
Chinois
les
bien au point de vue industriel
font partout, aussi
commercial, une
vue
concurrence
meurtrière. juste de protéger nos colons et de les encou-
S'il est
rager,
voie
il
prudent cependant de n'agir dans
est
qu'avec circonspection. Le petit
nationaux installés au Tonkin le dire,
et
trop souvent,
il
faut
leurs exigences rendraient impossible tout pro-
grès et ruineraient le protectorat ce qu'ils réclament
en
cette
nombre de nos
somme
une
:
monopole,
ce
que poursuivent sous
si
on leur accordait
monopole. Car
sorte de
cette absence
mettant
différents prétextes et en v
quelques formes, presque tous
les industriels et
merçants européens dans leurs revendications incessantes
campagnes contre la
nois. Je dis
campagne
Européens
«
toujours
était
»
liberté laissée
com-
et leurs
aux Chi-
avec intention, car
menée par
c'est
de concurrence
si
celte
des Français et dans
m'y où vont
l'intérêt des Français, je serais prêt h
associer dans
une large mesure. Mais, au
les choses, je
ne vois pas
la nécessité
ruine du commerce^
supprimant
et
train
pour
le
de
mettre dans l'embarras en
se
protectorat d'achever la
concurrence asiatique au bénéfice de
la
maisons anglaises ou allemandes. La juste mesure à établir dans
délicates
cet ordre d'idées
parmi
les
me
paraît
une des plus
questions qui intéressent la coloni-
sation.
Ne «
serait-il
pas sage de s'en tenir à notre formule
Colonisons pour
n'est plus stérile
les
colonies. »
et plus
:
Aucune conception
fausse que celle qui propose
EN TERIUÏOIRE MIIJTAIUE
i5o
C(iinMio Inil uni([U(M'l iinnK'diat àlacolonlsalion. l'cnricliissciiiont
de quelques cenlaines d'Européens. Cher-
chons donc à créer des établissements prospères
et
vi\anls, à posséder des colonies qui produisent et qui
avec
iraliquent, fut-ce
des Chinois.
l'aide
Français \ perdront au début, mais
dans
Quelques
France y gairnera
la suite.
La chose car
la
les
est délicate, répétons-le, et difficile à dire,
réclamations contre
la
concurrence chinoise
sont violentes et très générales dans la colonie euro-
péenne,
celle
qui
fait
l'opinion en France et n'hésite
pas à déclarer qu'on veut la mort et
que
du commerce
français
pour quelque
l'argent chinois pourrait bien \ èlre
chose Il
reste bien
être libre.
On
entendu que
concurrence ne peut pas
la
doit s'armer et se défendre.
deviendrait une colonie
chinoise
— Le Tonkin faut
Il
garder largement la place de nos colons, par des commandes,
— C'est un devoir cuter.
Mais ce
faciliter et
strict et
il
encourager leurs
essais.
absurde de
le dis-
serait
n'est pas là le
donc v
les favoriser
but
ilnal.
La prospérité
générale de la colonie, son développement propre doit passer avant tout.
On
peut afilrmer du reste que
la
concurrence chinoise n'est qu'une difficulté secondaire
pour nos colons. Elle n'empêche pas péen de prospérer à Singapour entraves administratives
ments commerciaux
et
commerce euroHong-Kong. Les
le
à
nos extraordinaires règle-
et
(droit au pavillon, douanes, taxes
de ports, protection exagérée des industries métropolitaines, déffiut d'outillage
munication
aux progrès là (ju'il
)
sont
et à la
faudrait
commercial, de voies de com-
un
obstacle
autrement sérieux
réussite de nos nationaux. C'est par
commencer
les
réformes.
Le but est,
(le la
if)!
législation spéciale
imposée aux Chinois
nous l'avons
de limiter
et
LES CHINOIS
les intérêts
la
du
dit,
de rendre
la surveillance possible
concurrence dans une mesure
telle
protectorat et le développement
que
du pays
n'aient point à en souffrir.
Au
de chercher à détruire
lieu
Chinois
et leurs associations, ce
résultat
que de
les
rendre clandestines,
quent plus dangereuses, on a voulu
comme moven
utiliser
les
groupement des
le
qui n'aurait eu d'autre
donnant une existence
et
par consé-
les régulariser et
de surveillance
en
leur
oflicielle.
Dans chaque centre important, les Chinois forment société, une congrégation, sous l'autorité d'un de
une
leurs notables, véritable fonctionnaire rétribué par le
protectorat et appelé « chef de congrégation^ ». fonctionnaires,
munis de pouvoirs de
Ces
police et de sur-
veillance suffisants, deviennent responsables de leurs
compatriotes inscrits sur
Presque tous la
les
les contrôles
de
la résidence.
Chinois du Tonkin proviennent de
province de Canton ou de celle de Foc-Yen
les villes
importantes,
ils
et
dans
groupent suivant leur pro-
se
venance sous l'autorité de deux chefs de congrégation
un pour
les
Cantonnais
et
un autre pour
;
gens de
les
Foc- Yen.
Malgré l'inconvénient réel de créer ainsi des centres
nombreux
et
puissants exclusivement
chinois,
cette
utilisation de la solidarité chinoise, cette sanction officielle
donnée
à leurs sociétés produit
de bons résultats.
I Dans les agglomérations moins importantes comme Dong-Dang, le titulaire de cette fonction est appelé « Chef de Marché » (Banli-Truong). Il n'est pas rétribué, mais il est autorisé à faire un léger prélèvement en nature sur le marché, .
deux ou
,
trois fols par an.
EN TERRITOIRE MILITAIRE
i52
C'est le seul
movon, du
eux une action
reste, d'avoir sur
sérieuse.
Tout Chinois débarquant au Tonkin autorisé à v séjourner,
se
française et sur la présentation
de
la localité
où
il
être
par l'autorité
du chef de congrégation
veut s'établir, une carte d'identité,
portant son signalement, sa photographie
de
pour
doit,
faire délivrer
^ Pour compenser Fiinpôt personnel
et l'indication
sa profession
qu'il
ne paye pas,
l'immigrant chinois doit, en échange de sa carte, verser
une somme proportionnée
à
sa
profession
et
à
sa
richesse (c'est l'impôt de capitation, indépendant de la
patente et dont
la
quotité varie suivant la catégorie où
est inscrit le titulaire).
veut se déplacer, et
il
Une
fois inscrit
et
classé,
s'il
doit déposer sa carte à la résidence
en retirer un permis de circulation valable pour un
temps déterminé
et spécifiant les villes
où
il
est autorisé
à séjourner.
Ce régime correspond assez bien aux besoins des du Delta, pour lesquels il a été fait. Mais c'est le lieu de remarquer, une fois de plus, qu'une mesure bonne h Hanoï peut être, dans certains centres commerçants
I. En outre do la photographie, souvent absente dans les hautes régions, la carte porte le « Diem-Chi ». indication antliropométrique en usage depuis des siècles dans les pavs d'Exlrcnie-Orient. Pour 1 obtenir, le titulaire place la carte entre l'indev et le médium de la main gauche de telle sorte que 1 index se trouve allongé tout entier sur la carte, le loiig d une ligne tracée dans ce but. On marque alors d'un trait de plume ou dun coup de pinceau sur cette ligne, la place des plis intérieurs des phalanges, la racine de longle et l'extrémité
du doigt. Il sulïil pour constater lidentité. de faire placer son index au porteur de la carte, dans la même position et de vérifier si
les indications
sont exactes.
LES CHINOIS mauvaise
cas,
manque
le
Dong-Dang
à
crélasticitc
i53
de rcgretlor encore
ot
de nos institulions
adminis-
tratives,
^ous devions emplover sur nos chantiers de routes de constructions un grand nombre d'ouvriers et de coolies chinois embauchés au moment du besoin dans et
les villages voisins
quand été
de
la frontière et
où
temps
très court. C'est ce
possible.
ment de
ils
travaillaient et valables seulement
Mais
j'ai
la
une grande
fait
le
pour un
plus souvent
de procéder n'eut pas l'agré-
cette façon
imposer
fallut
cartes à
que
l'administration centrale,
qualifiée d'irrégulière.
Sur
émue d'une
situation
ses ordres réitérés et formels,
capitation totale et distribuer des
On pen-
partie de nos travailleurs.
probablement, en leur faisant paver deux piastres
un morceau de sifs.
eût
mais des permis de séjour, limités au lieu
même
sait
Il
raisonnable de ne leur point délivrer de eartes
d'identité
il
renvoyés chez eux
ou l'argent venaient à manquer.
le travail
En
fait, la
carton, les transformer en gens inoffen-
mesure
fiscal, il s'agissait
La concurrence
était
n'était pas à craindre,
manquaient enfin c'était un ;
de force
aune
mauvaise.
Au
point de vue
d'une recette supplémentaire minime. car les ouvriers
véritable danger de
c[uantité de Chinois
inconnus
fession le droit de vivre et de circuler
et
donner
sans pro-
au Tonkin.
On
enlevait ainsi toute valeur réelle à la carte d'identité, car
il
devenait impossible d'imposer au chef de congré-
gation la responsabilité
de cinq à
six cents
Chinois
recrutés directement par nous et qu'il déclarait ne pas
connaître.
Dans notre secteur de Dong-Dang, la proximité de la donne à la colonie chinoise une physionomie tout à fait spéciale et on y rencontre certains types
frontière
9.
EN TEIUUTOIRE MILITAIUE
i5',
inconnus dans
Dolla.
le
On
peut
y distinguer trois
groupes principaux de Cliinois: 1°
Les Chinois agriculteurs installés isolément depuis
longtemps dans
les villages
Thôs, propriétaires par voie
d'achat et habituellement
mêmes impôts que soumis
à la capitation
des indii^ènes dont détails
les
ils
banquiers.
payent
Ils
et
distinguent malaisément
se
ont pris
les
usages et jusqu'aux
du costume.
Cette catégorie peu
nombreuse, soumise au droit
commun
et
aisés, n'a
besoin d'aucune surveillance spéciale^
généralement composée de gens notables
commerçants
2^ Les Chinois
groupés dans
marchés de
les
installés à
demeure
Ils
la
et
ne font plus partie
d'aucune cong-ré^ation en Chine, enterrent leurs morts
et
la frontière, c[uelqucfois
depuis plusieurs générations.
ment
les
autres habitants, ne sont plus
ré2:ulièrc-
au Tonkin, mais continuent
à
paver
capitation et sont restés, malgré tovit. Chinois de
mœurs et d'aspect. Ce sont gens tranquilles,
ayant intérêt
à voir le pays prospérer, parce cju'alors le
marche mieux. Mais d'attachement ou de renseigner vert,
ou
il
3°
Jamais
lidélité.
les pirates, s'il le faut
même
à partager
l'occasion s'en présente.
La population
commerce
ne peut être question avec eux
le
Tout
pour
ils
n'hésiteront à
se
mettre à cou-
bénéfice d'une prise,
si
profit leur est bon.
flottante de
marchands
et
de coolies
I. Un exemple rappellera aux camarades cjui me liraient que sont ces Chinois agriculteurs. Tous ceux qui ont suivi la roule de Langson ou Donjr-Dang à Pho-Binli-g-ià connaissent le plus notable d entre eux le Ba-lio de Duc-hin et surtout sa femme « la mère Duc-hin >>. Ils ont gardé certainement bon
ce
:
souvenir de Ihospitabilitc reçue chez cette vieille dame et de sa curieuse collection d autographes, recueillis en réclamant de cliacpie passager un certificat de satisfaction toujours accordé.
LES CHINOIS
i55
venus pour chercher du travail ou exercer leur commerce. C'est de beaucoup et la seule
Plus adroit
dans
la
et
et
provinces basses.
les
plus intelligent que le Thô, le Chinois
région de
commerce
plus nombreuse
la catégorie la
qu'on trouve dans
Dong-Dang
de tous
tissage (briques,
possède
le
monopole du
travaux demandant
les
un appren-
maçonnerie, forge, charpente...).
Le marchand venu pour faire fortune (quelquefois du Foc-\en, mais plus souvent de Canton), souple, adroit,
(juelquefois
scrupules,
intelligent
très
demande une
forte
toujours sans
et
surveillance.
Il
exerce
tous les métiers, v compris souvent celui d'usurier. réussit généralement,
merce lités
vin sens très
c'est
qu'il apporte
développé
et
dans
le
S'il
com-
de remarquables qua-
professionnelles.
Aussi droits et faciles en affaires que leurs mandarins se
montrent tortueux en
çants se contentent,
politicjue, les
quand
insignifiant. Serviables,
il
le
Chinois commer-
d'un bénéfice
faut,
d'une complaisance inépuisable,
toujours prêts à transiger, à s'arranger, à entreprendre
une
affaire,
parole
leur
Pratiques, en outre, très l'aciles,
avec
commerciale
persévérants,
ils
rages
très
ont et
le
sûre. crédit
s'associent
Soumis à la justice française v ont recours le moins possible et préfacilité.
fèrent régler sans frais leurs différends t
est
ils
en usent beaucoup entre eux
une extrême
au Tonkin,
et
au moven d'arbi-
*
Dong-Dang venaient assez souvent me I. Les Chinois de soumettre leurs contestations et je me rappelle entre autres avoir réglé il
la faillite
faut l'avouer,
dun
par
le
cabaretier-restaurateur ruiné surtout, trop large crédit ouvert aux soldats
européens de passage. Sur leur demande, je réunis les i4 ou i5 créanciers et chacun donna son compte certifié par l'intéressé. La maison et le fonds de commerce furent vendus pu-
EN TEIUUTOIKE MILITAIRE
i5(;
Les coolies et
nombre dans ces petits
la
les
ouvriers clùiiois employés en grand
haute
réj^^ion
pour leur commerce. Ce sont sans de l'intérieur de
au moins égale
la
régulièrement pavés,
pour leur
se font pirates,
ils
le
le
monde
plus souNent des pav-
Chine, bien bâtis, d'une
à celle des
doux de nature
vailleurs,
lent pas
ne ressemblent en rien à
Cantonnais jaunes qu'on voit courir
Européens,
et très enfants.
taille
assez tra-
forts,
Bien
traités et
sont faciles à conduire, ne vo-
plaisir
en somme,
comme cpi'à
les
Annamites
et
ne
défaut d'un métier plus
moins dangereux. dû réunir pour nos travaux de Dong Dang un grand nombre de ces ouvriers chinois et, pendant plusieurs mois, le village donna l'hospitalité à six ou huit "aillards dont un tiers au moins avaient servi cents c lucratif et J'avais
l'année d'avant dans les bandes pirates des environs.
On nous avait prédit même au début sans fut heureuse et
cents chinois
des désastres
et je n'étais
pas moi-
quelque inquiétude. L'expérience
nous eûmes certainement avec nos
moins de
difficultés
que
s'il
avait
employer un pareil nombre d'Annamites ou
six
fallu
même
de
chemineaux piémontais sur un chantier de France. J'avais été obligé de faire couper la tête à
deux d'entre
bliquement quelques jours après pour établir lactif, puis au cours dune seconde réunion, après discussion au sujet d une créance que contestaient les autres créanciers, sous prétexte qu'elle était présentée par un Chinois associé aux afiaires du failli, on transigea séance tenante. La répartition faite par moi (environ 35 pour loo) fut acceptée, chacun toucha sa part, donna quitus et il n'en fut plus question. La failli rentrait le lendemain comme employé chez un de ses créanciers, en attendant qu il put reprendre une aflaire à son compte. Ces arrangements amiables sont tout à fait dans les habitudes des Chinois qui savent fort bien cependant, à roccasion. s adresser aux tribunaux et se servir des moyens judiciaires.
ORGANISATION POLITIQUE
13;
eux rormclleniciil reconnus pardcs liabilants du village (|u'lLs
avaient enlevés quelques mois avant sur la route.
Ceux dont
la
travailler
un peu
conscience était
tèrent sans bruit le
Tonkin
:
les
en ouvriers inofîensifs
trop chargée quit-
autres continuèrent à
et tranquilles.
La poussée des Annamites vers les hautes régions rendra moins nécessaire l'élément chinois dans la vie économique du pavs et lui fera peu à peu une véritable concurrence. Dans la suite l'Annamite supplantera le Chinois pour tous
les
travaux où l'adresse entre en jeu
(maçonnerie, menuiserie, charpente, travail du
mais pas plus que
le
Français
il
ne prendra
fer
)
sa place
commerciale.
Cette revue nécessairement incomplète des éléments
sociaux qui peuplent la région de Langson suflira ce-
pendant le
lios
1
à faire saisir la
et
les
?Sunos. Leur lano-ue, leurs
besoins sont les et
physionomie du milieu.
gros de cette population disparate est
mêmes.
En
fait,
formé par
mœurs,
les
leurs
C'est eux qu'il faut gouverner
apprivoiser.
Mais
il
est utile,
rechercher
avant d'en étudier
comment
s'était
formé
les
le lien
moyens, de
politique qui
unissait toutes ces races et de voir à l'œuvre l'adminis-
tration annamite.
La race
thô, la plus ancienne et
n'est pas capable
la [)kis
nombreuse,
de s'imposer aux peuples voisins (Chi-
nois et Annamites) qui lui sont intellectuellement supérieurs. Elle est
d'ailleurs
trop peu
nombreuse
et
trop
mêlée à des éléments hétérogènes pour former une nationalité.
Les Thôs ont en
effet
de tous temps été soumis
aux Annamites ou aux Chinois qui
les
ont successive-
EN TERRITOIIIE MILITAIIŒ
i58
mont
cxploiU's.
Langson
neté de l'Annam. était
vague
semble qu'en principe
Il
depuis des
ait,
et
Dans
la
la frontière
Nous avons vu, au début de et
ont vécu
régime d'une féodalité puissante.
le
cette étude, les rois
en luttes continuelles avec leurs vassaux, de Cao Bang
pavs de
le
la souverai-
pratique cette souveraineté
populations de
les
longtemps sous
reconnu
siècles,
les
Le
seigneurs
de Langson. Ceux-ci payaient tribut
tantôt à l'Annam, tantôt à la Chine. Quelquefois aux
deux
s'ils
étaient faibles
ou
à
personne quand
ils
étaient
forts.
C'est à cette paraît-il,
une
époque féodale que
véritable prospérité
le
pays aurait connu,
c|u'il
n'a pas retrouvée
depuis. Cette prospérité, en tous cas, a lative
dû èh^
très re-
ou de bien courte durée. Le manque complet de
monuments
anciens, la pauvreté des traditions et le dé-
faut de sens artistique chez les habitants suffisent à le
prouver.
Quoi
qu'il
en
soit,
ou expéditions nord
et
il
reste trace
militaires,
les races,
la
les territoires
frontière.
quelques
rencontré
le
disponibles
Nous avons, en étudiant
résidu de quelques-unes d'entre
(Les Thô-ti jwur l'Annam,
elles
les
venant successivement du
du sud pour occuper
ou contestés sur
dans
nombreuses invasions, migrations
traditions locales de
les
Nungs pour
la
Chine). L'installation des cjul
ont
fail
mandarins
et
des soldats annamites
depuis, souche de Thô-ti (installation que
reslimation des habitants
fait
remonter
à
une centaine
d'années) correspond vraisemblablement à tion de l'Empire par
la
restaura-
Gia-Long aux environs de 1800.
Les hautes provinces ne seront plus désormais contestées et les
quekjues garnisons chinoises que nous retrouve-
ORGANISATION POLITIQUE rons
à
Cao-Baiiij^,
That-Ké
et
Lani^son,
v viendront
demande de Tu-Duc, im-
avec l'assentiment et sur la
puissant à faire la police chez
lui.
C'est de la réoccupation de 1800
du pavs
nisation politique
i5ij
que daterait
l'orga-
que nous
l'avons
telle
trouvée.
On
du reste, contenté de jeter la population moule annamite Provinces, Phu, Huyen, etc., avec leur hiérarchie de mandarins petits et grands. Ce n'est pas le lieu de décrire une fois de plus cette admidans
s'était,
le
:
nistration et nous larités
nous bornerons
provenant du milieu
sions politiques inférieures
ou Chau),
le
:
canton (ïong),
à relever les particu-
dans
les
subdivi-
l'arrondissement
(Huyen
social
la
commune
(Xa).
En pavs Thô, le « huven » est appelé « chau » et le mandarin qui l'administre « Tri-Chau ». Les attributions
du Tri-Chau sont théoriquement
a tout entre les mains: police,
recrutement, etc..
En
réalité
très étendues.
Il
administration, impôts,
son influence est très
variable et son rôle se réduit parfois à servir d'intermédiaire entre l'autorité supérieure et les habitants.
Les chefs de canton (caï-tong) sont
ses
agents et pos-
sèdent peu d'attributions propres. Plus encore que pour
Tri-Chau, leur influence dépend de leur notabilité
le
personnelle.
La commune (Xa) est la base de la vie politique, elle autonomie et s'administre elle-même.
jouit d'une large
Le pouvoir
est exercé
par
la
réunion des notables qui
font représenter en face de l'autorité par le
ou
Xa-Truong.
fonctionnaire larges,
Les
attributions
(en réalité
se
Ly-Truong
nominales de
ce
celles des notables) sont très
surtout en ce qui concerne la répartition des
EN TERIUÏOIUE MILITAIUE
lOo
charges
(linpols, cor\L'es, rccrulcmonl...) ri radininis-
'
communaux.
des biens
tralioii
Ces biens sont du reste assez mal administrés. Con-
slamment
endettées,
communes
les
mettent à
se
la
merci des |)rèlcurs d'argent, Chinois ou autres, au\(juels
en fm de compte aliéner
faut
il
qu'on
s'exonérer des lourds intérêts
pour
la terre
ne
peut
[)lus
payer.
Chez
les
Annamites,
un pauvre
le
Lv-Truong
est le
plus souvent
diable sans autorité dont les fonctions sont
analogues à celles du gérant d'un journal politique. Bien
que ne prison
pa\s
faisant rien, et reçoit les
tliô, cette
jeunes
la
responsable de tout, va en
est
il
coups
si
remplissent successivement
importante. Dans
les
petits
En
la
si la
commune
patriarcales, le
sociale
comme
du
pays,
le
les
Lv-
plus important.
11
fonction indéfiniment.
dehors des cadres administratifs réguliers,
signaler
est
surtout chez
villages,
Nungs où les mœurs sont plus Truong est souvent le personnage conserve alors
En
l'occasion s'en présente.
fonction est plus honorable. Les notables
très caractéristique
une
taires, tout à fait «
de
la
il
faut
physionomie
véritable hiérarchie de titres mili-
honoraires
comme récompense aux
»
jeunes
aujourd'hui, conférés notables
de
bonne
famille ou aux anciens fonctionnaires qui ont rendu des services.
Ces
titres
particulière la
étant
au
«
à vie »
titulaire.
donnent une notabilité
Quelques-uns
même entraînent
nomination aux derniers échelons du mandarinat
et
1 L'Etat ne connaît pas le contribuable en tant qu'individu. no connaît et n'impose que la commune responsable qui répartit comme elle l'entend les charges et y fait face comme .
Il
elle j)eut.
ORGANISATION POLITIQUE par
cons(''(|iicnl
corvées.
Ils
véritable
récompense dont nous usions à
de distinguer
et
rexcmptioii crimpùi personnel
les
les
nous servaient à surveiller
partisans
A
et à
de
une
l'occasion.
les services
rendus
gens sûrs. Tous ces petits chefs, ha-
bituellement plus influents que place,
et
sont assez recherchés pour constituer
un bon moven de reconnaître
C'est
i6i
fonctionnaires en
les
les corvées, à
prendre en compte
les
encadrer
armes distribuées
fm de 1898,
la
compris
celle
toutes les fonctions supérieures, y de Tri-chau, étaient remplies par des Anna-
mites, à lexclusion presque absolue des gens
Ces mandarins de toutes
tailles,
lettrés
du
pavs.
faméliques du
Delta ne se contentaient pas de vivre sur
le pays.
voulant pas s'éterniser dans des postes considérés
Ne
comme
Les plus fréquents de ces titres sont Xa-Doan (autrefois des partisans dune commune). Tong-Doan (chef des partisans d un canton). Et les titres supérieurs de Ba-ho et Tienhù qui entraînent le dernier échelon du mandarinat (g*^ degré, 2^" classe). Maltieureusement, même en Annam, on achète quelquefois les décorations et les honneurs. Aussi, beaucoup de ces titres, avant qu on cùl donné aux commandants de secteur le droit de contrôler les propositions et d en faire euxmêmes, avaient-ils été payés fort cher. Rappelons en passant que le mandarinat annamite comporte neuf degrés et chaque degré deux classes, cela fait dix-huit échelons. Chez les fonctionnaires, la fonction est indépendante du degré de mandarinat. Certaines d'entre elles cependant exigent que le titulaire soit mandarin et mènent normalement jusqu'à un certain degré de léchelle. Un Tri-Chau, par exemple, doit être mandarin (g» degré, 2*^ classe) et arrive généralement après quelques années à la i''*' classe du 8"^ degré (quelquefois même au 7*= degré). Le mandarinat ainsi conféré sans examen, aux fonctionnaires Thùs, bien que moins estimé I.
:
clicf
1
les
mêmes
prérogatives.
en territoire militaire
iGj
un
exil,
biens et
Du
Knir
Il
on
reste
en cour par cantons. fiant
Il
fallait
rapidement
acquérir
facilitait
les
choses aux mandarins bien
la répartition bizarre des
était
communes
un canton ou deux
pris à leur voisin
qu'on voulait
sans le moindre souci de
faits
dans
les cir-
un désordre qui
rendait
l'intérêt des populations, avaient produit,
conscriptions administratives,
toute surveillance impossible les
et des
d'usage de les récompenser en leur con-
punir. Ces changements
Malgré
quelques
profitaient en conscience de l'occasion.
ils
^
difficultés rjue créait
chaque jour une
administration aussi défectueuse et grâce à une interprétation
un peu exagérée
dant de respecter
des instructions
l'initiative
gènes, les officiers occupant
recomman-
des fonctionnaires indile
pavs avaient l'ordre de
s'abstenir de toute ingérance dans les affaires
Le commandant du
cercle,
seul,
du
pays.
avait des attributions
politiques. Ses subordonnés devaient se confiner dans
comniandement de leur poste et laisser les mandarins L'action du commandant du cercle, beaucoup trop éloignée des populations, devenait illusoire, nous vivions en pays ennemi. L'autorité des commandants de poste se limitait le plus souvent au le
agir à leur guise.
droit de lever des coolies dans le village le plus voisin.
Les habitants nous craignaient sans nous respecter,
ils
détestaient leurs fonctionnaires annamites et vivaient
Le Chau de Dong-Dang. par exemple, possédait quelques I cantons pauvres et lointains (comme le Han-Luu au nord et Da-^iham au sud-ouest) séparés du reste de larrondissement par d'autres cantons plus importants (Uven-Cot et Quang-By) dont on avait fait cadeau à des Tri-Chau mieux vus. Il s y trouvait même deux ou trois communes, enclavées, qui dépendaient, on ne sait pourquoi, de cantons très éloignés. .
RAPPORTS AVEC LES HABlïAMS chez eux pirates
comme
pour avoir
ils
la
nous renseigner dans
Après
la
payant mandarins
pouvaient, paix
et
iG3
et
s'abstenant avec soin de
la crainte
des représailles.
chasse aux pirates et tout
l'occupation militaire de la frontière,
il
en organisant
fallait
donc, pour
donner au nouvel ordre de choses un peu de consistance, rapprocher des habitants
se
et
gagner leur confiance en
travaillant à leur bien-être.
On
nous l'avons vu, rendu possible une
leur avait,
donné movens de se défendre, en leur fournissant des armes. C'était un premier pas, uneniesure préparatoire
participation active à la poursuite des pirates et les
au travail politique proprement
du
dit, à la
réorganisation
pavs.
Pour entreprendre partie de notre tâche, i"
Donner
et
mener
à
bien cette seconde
deux choses étaient nécessaires
satisfaction
:
aux justes réclamations des
Thùs contre l'administration annamite en leur assurant un gouvernement plus équitable; 2° Mettre les officiers en contact avec les populations et
leur permettre
de prendre,
par une intervention
directe dans les affaires locales, l'influence et l'autorité
leur manquaient jusque-là. Le premier souci du colonel Gallieni dans
(|ui
cet
d'idées fut en effet de retirer l'administration
aux Annamites
de remplacer
et
par des indigènes Cette réforme
nommés
si
mandarins en place
à l'élection.
rationnelle et cpii devait être
conde n'alla pas sans obstacles. la
les
ordre
du pavs
Il
si
fallut avoir raison
fé-
de
mauvaise volonté assez naturelle du gouvernement
annamite
et,
ajoutons-le. des préventions de l'autorité
EN TERRI TOI HE MILITAIRE
1(3',
M.
IVaiiraise.
ne
Lancssan
(le
comme nous
au débul,
s'y prèlail
noté déjà, qu'avec une certaine
l'avons
répugnance.
On
\ pai^int cependant,
mais,
principe admis,
le
n'en restait pas moins délicate, car
l'ap|)lication
il
fut
dès l'abord assez difficile de trouver chez les Thùs des
On
fonctionnaires suffisants.
bien
connaissant
administrative
apportèrent
le
et
le
pays
contenta de braves gens
se
qui,
défaut d'expérience
à
de science des
lois
annamites, nous
concours de leur extrême bonne volonté.
Leur tâche, du
reste, et
des
celle
commandants de
secteur fut rendue facile par la détente immédiate produisit cette innovation
et
par
la
que
confiance des popu-
lations.
au gouvernement du pays par est un moyen très sur habitants à la chose publique. Quel que
La coopération d'intéresser les soit
leur
premier
directe
fonctionnaires
des
l'élection
manque de essai
marque de
culture,
de liberté
et se
mœurs annamites
nion si
le
les
ils
sentent
le
prix de ce
montrent sensibles
à cette
confiance.
Les premières élections, des
^
et
il
est vrai,
avant de
se
se ressentaient
permettre une opi-
notables ne manquaient jamais de s'informer
commandant du
secteur n'avait pas
un candidat
ofiiciel.
Il ne s agit pas, bien cntcntlu, de sullrage universel, mais choix et dune présentation faite par lensemble des notables. Le Ly-Truong est désigné par les notables de la commune, le Caï-Tliong par ceux du canton, le Tri-Chau par les chefs de canton et les notables supérieurs delà circonscription. Ces désignations doivent être approuvées par 1 autorité française et les titres de nomination sont expédiés, suivant le cas, par le gouverneur annamite de la province ou par le vice roi
I.
d
ini
du Tonkin.
RAPPORTS AVEC LES
ÏIARIT \NTS
i(.:.
du cadre indigène de gouverne-
Cette reconstitution
ment, immédiatement complétée par
la rel'onte et
mise en ordre des circonscriptions administratives,
pidement menée. Mais à
eux-mêmes nos
les avions, ils
dès
le
il
eût été imprudent d'abandonner
fonctionnaires improvisés. Si nous ne
début, pris en
main
inutiles entre l'autorité des
conduits de près,
et
se seraient trouvés bientôt réduits
au rôle de rouages
mandarins supérieurs
emplovés inférieurs de leurs propres bureaux Il fallait
manente
la
fut ra-
et les
'
donc créer un organe de surveillance per-
et
s'affranchir
d'administration
dans
qui
locale
permit de
pratique de l'intermédiaire des
la
darins provinciaux
et
de diriger nos
man-
fonctionnaires
Thôs dans leur nouvelle mission. Les commandants des secteurs militaires étaient
on en
fit
des administrateurs en leur donnant
là
;
une mis-
sion politic|uc et des droits bien définis dans leur cir-
conscription territoriale qu'on avait eu soin de faire
plus souvent coïncider avec
Ces droits sont
fort
une
le
division administrative.
étendus
et le
commandant du du gouverne-
secteur jouit chez lui, au point de vue
ment des indigènes, d'une
très lar^e initiative.
Tous
fonctionnaires indigènes sont à ses ordres, y compris
les le
Tri-Cliau, son principal agent et son conseil naturel
pour
les affaires
indigènes.
11
suit
de plus près
bitants et entre davantages dans la vie
peut
le faire
C'est en
un commandant de
somme
cercle
du
les
ha-
pays, cpie ne
ou un résident.
de l'administration directe c[ue nous
faisons là avec des rouages indigènes. L'agent Français
I.
Ces derniers, Annamites
nistratif, n'auraient
de fadministration.
lettrés
rompus au
pas tarde à prendre
la
service
admi-
direction effective
EN TEaaiTOIRE MILITAIRE
('.<•. I
(le
commandant du
sectoiir)
ment, réparlit
les
vérifie les rôles
d'impùls
tement les la
mililaire,
demandes ou
charges
y a lieu, les secours,
et les touche, assure le
ordonne les
donne des ordres dlreclc-
et, s'il
les corvées, reçoit et
recru-
examine
réclamations des hahitants, dirige
police et note les fonctionnaires.
La tache
est
lourde dans
un pays neuf
nos
et
man-
darins étaient souvent hien peu instruits des choses administratives. Aussi, l'expédition des affaires ne conser-
forme
vait pas toujours cette régularité de
bureaux
et
On
aux chancelleries.
si
chère aux
s'en tira cependant
sans trop de difficultés et l'inexpérience de leurs auxiliaires
eut
môme cet
avantage de permettre aux
administrateurs de prendre chez eux dès
torité qui leur était nécessaire, sans se perdre
entraves que
sait,
mieux que tout
officiers
début, l'au-
le
dans
les
autre, enchevêtrer la
bureaucratie annamite.
Les populations, après avoir
remplacement des
hommes
et
se
ajuste
rapprocher
titre,
il
d'elles.
leur fallut
passagers retours offensifs traite, après lesquels,
si
Très méfiantes
du temps pour
convaincre qu'il ne s'agissait plus cette
se
avec joie le
de leur race, virent bientôt sans déplaisir l'au-
torité française
d'abord
accueilli
fonctionnaires annamites par des
fois
se
d'un de ces
rapidement suivis de re-
mandarins annamites
pavaient de leurs déboires sur
les
et pirates
malheureux qui
avaient eu l'imprudence de nous rendre service.
Quand contre
ils
eurent trouvé chez
une protection
secteur
la piraterie,
les
efficace
et
le
commandant du
durable cette
fois
habitants s'habituèrent vite à
un appui désintéressé dans leurs réclaun arbitre é(|uitable dans leurs différends. Ce mouvement vers l'autorité française qui s'était
chercher en lui
mations
et
RAPPORTS AVEC LES HABITANTS abordable
faito
à tous, clc\nit
mérite d'être noté
bientôt très important.
comme une
quable du besoin de justice
si
^^^-
Il
remar-
maiiifestatioii
vivant chez toutes
les
po-
pulations simples.
Une tendance
h ce point légitime et utile
au progrès
de notrectablisscment devait être encouragée. L'accueil
aux premières tentatives de rapprochement rassura
l'ait
les
timides et l'on vit bientôt les paysans
exhumer
leurs
vieux procès et leurs réclamations en suspens pour se
donner se faire
Ce celle
la satisfaction rare et
si
nouvelle pour eux, de
rendre justice gratuitement.
fut
même
bientôt
une charge
très absorbante cpie
de donner audience à tous ces braves gens porteurs
de grimoires barbouillés de cachets rouges et de caractères chinois, qu'ils apportaient
soigneusement roulés
dans quelque morceau de bambou. vieilles cjuerelles
de réclamations déjà vingt sition,
Il
s'agissait
au sujet d'un morceau de fois
rizière
de
ou
renouvelées dont l'expo-
interrompue h chaque phrase par
les
formules de
politesse et de respect, exigeait d'interminables palabres.
On
cependant
arrivait
le
plus souvent à s'entendre
et, à
part la loi annamite qui en éprouvait parfois rj^uelque
dommage, trages
où
tout le
le
sens
monde
se trouAait
commun
bien de ces arbi-
remplaçait autant que pos-
sible les considérations juridiques.
La çais,
de parler à un mandarin,
fùt-il fran-
sans bourse délier et d'obtenir quelque chose de sans
lui,
im
possibilité
sujet
un cadeau proportionné
à l'affaire, est
toujours
d'étonnement pour nos administrés.
une question délicate en Extrême-Orient que du cadeau, du « lai ». Elle est si diversement
C'est celle
appréciée que, dans la pratique, on peut s'en trouver
embarrassé.
FN TERRITOIRE MILITAIRE
i08
On
cnlcnd dire souvent de
bonne
1res
kin qu'il est impossible de refuser
par
un
ii^digène,
donateur
que
aller
et
le
D'autres afllrment que
usages
même
le fait
^
au ïon-
une grave injure au
c'est faire
l'encontre des
à
foi
cadeau présenté
du
pays.
d'accepter de ses
administrés la plus légère offrandeest une malversation.
A
propos d'une circulaire du gouverneur de l'Indo-
Cbine défendant aux fonctionnaires d'accepter deaux des indigènes, on a pu journaux
les
et indignés,
France
de
proclamant
temps de probité
et
lire cette
des
articles
qu'il était
les
ca-
année dans tous éloquents
honteux, en notre
d'intégrité professionnelle,
qu'il
put encore être question de cadeaux, de pots-de-\in, fût-ce Il
dans
la
plus lointaine de nos colonies
....
V a autant d'exairération dans la « rési^rnation
premiers que dans
foudres
les
un peu
»
des
ridicules des
seconds.
L'usage veut en l'inférieur
ne
Annam
qu'en aucune circonstance
se présente les
périeur, quel qu'il soit.
mains vides chez un su-
C'est
le
moyen courant de
contribuer à l'cntrclicn du mandarin
et
de reconnaître
d'avance la bienveillance qu'on lui demande. Mais c'est
en outre dans d'autres
cas,
uue
signe matériel de soumission
et
sorte de tribut et
un
d'obéissance à l'ordre
établi.
Aussi faut-il distinguer
les
quelques victuailles clas-
I. Il est entendu que j'écris ici pour les honnêtes gens. Tout fonctionnaire qui voit dans le « laï « un supplément de solde ou de bien-être à prélever sur le pays, ou apporte dans une détermination une préoccupation de lucre, si petite soitelle, n est déjà plus un honnête homme. Le cas n'est malheureusement pas théorique. Il y a des voleurs et des gens indélicats au Tonkin comme en France,
peut-être pas plus.
RAPPORTS AVEC LES IIATBITANTS siques
(œufs,
poissons,
fruits,
i(k)
que
riz....)
pré-
d'hom-
sentent les mandarins et les notables à titre
collectif, des cadeaux que se croient forcés d'offrir malheureux paysans qui viennent demander justice
mage les
ou présenter une réclamation. Refuser
des notables est en
le lé^er tribut
effet consi-
comme un signe de mécontentement grave, mépriser leur hommage et les traiter en ennemi.
déré par eux c'est Il
donc convenable de
est
même
de
des
l'exiger
l'accepter
ou
villages
peu sûrs dont l'abstention pourrait cas est exceptionnel
d'amener, sans
et
quelquefois
mandarins
être préméditée.
miter leurs présents de
notables indigènes à li-
telle sorte
ne puissent
qu'ils
deviennent
être considérés
une rétribution ou un tribut onéreux. Il n'en va pas de même pour les habitants se
Le
la seule difficulté pratique est
les froisser, les
« représentatifs » et
et
des
comme
isolés
qui
du cadeau en doit disparaître. Le paysan Thô s'habitue ne rien apporter quand il est assuré que sa
présentent en solliciteurs. L'habitude
pareil
cas
fort bien à
requête n'en souffrira pas. Mais la chose lui semble
du temps
tellement incrovable qu'il faut précautions pour
En
fait,
l'v
et
quelques
amener.
on n'abuse du
«
que quand on
lai »
bien.
Un homme
peut
toujours suivre son inspiration.
de bonne
foi
et
Il
dans la
les villages
première
inqoortants
mon
du
fois,
secteur de
veut
m'est arrivé
souvent, au début, d'accepter quelques œufs ou
nard d'un paysan pour ne pas
le
de conscience droite
le contrister
Dong-Dang,
un
et
ca-
même
visités,
pour
de recevoir des présents relativement
comme un
porc entier ou
un
petit
bœuf que
escorte partageait avec les habitants en signe de ré-
jouissance.
— Je
n'ai
Gka^vdmaison.
jamais eu de remords à ce sujet. io
EN TERRITOIRE MILITAIRE
lyn
On tenir,
somme,
peut en
ol
c'csl
dans celle quesllon du
ce qu'il imporle de re-
comme
« lai »
en bien
d'autres circonslances, s'affrancliir très largement sans
aucun inconvénient des mcltrc un peu de S'il est
traditions locales.
11
suffit d'y
tact.
sage de tenir compte dans la forme des habi-
tudes du pays et de ses mœurs,
ne faudrait pas
il
croire cependant cjue c'est en copiant les
administrant à leur place
et
drons une autorité durable
comme
Notre supériorité
et solide.
de race chrétienne réside surtout dans la justice,
serait
il
absurde de
mandarins, en
eux que nous pren-
le
sentiment de
perdre sous prétexte
la
de nous conformer aux
mœurs
nous
ouverte à tous, facile à obtenir,
la justice gratuite,
locales.
Apportons avec
soyons abordables, ra23prochons-nous des populations.
Notre prestige n'a rien à v perdre; au respect
et
on peut gouverner
régions sans marcher toujours
coupe à
peur n'ajoute rien
la les
le
races des hautes
rotin et le coupe-
main. Le respect d'abord, puis l'attachement
la
des habitants, nous seront acquis d'une façon d'autant
plus rapide et durable que nous aurons
profondément
annamites.
et celui des
prenne
à
la différence
son compte
Que
la
marqué plus
entre notre gouvernement l'administration française
protection des habitants, le
soin de leur sécurité, la défense de leurs droits, la dis-
tribution des secours et laisse à la justice indigène, soi-
gneusement sion. C'est
légitime.
surveillée, le soin matériel de la répres-
un
artifice, si l'on veut,
Bienveillance
mais
faut punir parfois rigoureusement mais
mis de montrer que
il
ne veut pas dire il
est utile et
faiblesse,
nous
est
il
per-
ce n'est point là notre fonction et
que nous ne sommes pas venus pour d'en laisser la charge à
cela,
la justice habituelle
en affectant
du
])avs.
SITUATION EN FIN
Ce
171
serait le lieu d'enre^islrer îes résultais
c
de parcourir
le
pavs réorganise en
gnage de ceux qui ont pu avant
i8(j5
fin
visiter la frontière
après cet efTort de deux ans, est
et
obtenus
et
1890. Le témoichinoise
unanime
à
déclarer ces résultats véritablement inesjjérés.
L'occupation déiinitive de
région
la
assurée, avaient bientôt fait rentrer au
bitants émigrés. Leurs
d'abord sous
la
et
sécurité
la
ïonkin
villages s'étaient
les
ha-
reconstruits
protection immédiate des postes et en
des points choisis pour en rendre la défense facile (ma-
melons, rochers, grottes).
La réorganisation politique, lit
et
On
le reste.
vit sortir
timidement d'abord,
les
d'années de souffrances. prirent le
chemin de
pacification
la
morale
de leurs tanières, peu à peu
la
habitants terrorisés par tant
Les cabanes en paillotes replaine, les villages perdirent
leur aspect de repaire pour se disperser plus riants et
plus abordables sur
le
bord des
bientôt remise en culture,
impôts, très modérés
il
les
est vrai,
Des symptômes de confiance
rizières.
La
terre fut
marchés fréquentés,
les
régulièrement payés.
caractéristicjues,
comme
la
construction de maisons en briques et la reprise des cultures à long terme (la badiane par exemple), ne
tardèrent
pas à devenir
fréquents.
Le pavs présenta
une plivsionomie sinon prospère encore du moins tranquille et vivante. bientôt
et riche,
Cet .''^PP approvisionnement des indiirènes, cette entente entre l'autorité française et les habitants était certaine-
ment
la
note la plus caractéristique
J'en citerai
et la
plus frappante
hommes connaissant le Tonkin. seulement comme exemple ces quelques
de notre œuvre pour
les
lignes tirées d'une série d'articles parus dans le courrier
d'Haïphong, dans
le
courant de janvier 1896. M.
J.
de
EN TERRIÏOIIIK MILITAIRE
172
Cuers, dirccleur de ce journal, v raconte
de
sa visite à
Langson, Dong Dang
ques jours avant
le
impressions
les
rsacham, quel-
départ du colonel Gallicni
Ce qui frappe,
«
et
*,
Langson
(entre
dit-il
et
Dong
«
Dang),
«
Muongs
«
abords des villages, portent leurs denrées au marché
« les
c'est
confiant
l'air
Chinois vont
et
femmes
et
et
des
populations. Thôs,
viennent sur
aux
la roule,
:
enfants mettent le nez à la porte
les
«
des Caï-nha pour voir passer la troupe. Beaucoup de
«
curiosité
te
rence d'incjuiétude ni d'hostilité.
mais
aucune appâ-
polie, pas gênante, sans
personne ne
A
l'approche des
s'enfuit. Je note cette
impres-
«
cavaliers,
«
sion car elle est déjà très vive au début
«
le sent
«
nistration a rassuré tous ces pauvres gens qui ont
:
l'absence de tracasserie de la part de l'admi-
« tant souffert des Chinois «
ils
;
ont pris l'habitude de
voir dans les Français, dans les officiers, des protec-
« tcurs. C'est l'indice très net « catif «
du voyage. On
—
d'un
état d'esprit signifi-
que je retrouverai partout au cours de celte
excursion et
il
ne
davantage
les
nous pénétrons au cœur de
ces
fera cjue s'affirmer
« jours suivants. Plus
muongs
mans,
c<
populations, de ces
«
sauvés des exactions des bandes chinoises par l'orga-
« nisation défensive
villages thôs,
du
colonel Gallieni,
territoire, telle
associés
que
à la police
l'a
du
et
comprise pays, à la
(c
le
«
répression de la piraterie, plus aussi nous seul irons
«
grandir ce sentiment de confiance, plus
«
^
«
dont
iendront à l'approche du ils
reconnaissent
« traduise la
I.
890.
le
les
indigènes
commandant du
territoire
fanion, sans qu'aucun d'eux
moindre appréhension
Courrier d'IIa'iphong,
i/j,
i6, i8, 21, 28 et 28 janvier
SITUATION EN FIN « ce
Dans
CCS villages, écrit-il
tion avait
17.3
encore, dont
en Chine pour éviter
fui
«
habitants sont revenus
«
sentis protégés.
c(
que fermes
«
Beaucoup de «
i8.)5
On
le
la
popula-
pillage, les
très vite dès qu'ils
sont
se
ne voit cjue cultures nouvelles,
à peine rebâties depuis quelques mois. buffles paissent en liberté.
Mais ces gens qu'une politique sage a ramenés au
«
Tonkin
«
importe aujourd'hui au protectorat de ne pas
((
aliéner.
(c
de choses
«
jamais.
«
l'honnêteté administrative. L'autorité
«
de Lan" son,
«
extérieure.
«
neurs, mais
«
de
«
pressurent la population, point d'An-Satt qui rende
«
la justice
«
«
et
cj[ui
se sont
complètement
ralliés à
nous,
il
se les
Qu'il y prenne garde, un retour à l'ancien ordre serait funeste, et les détournerait de nous à
Ce qui
lui,
les a
le
Le
séduits dans le régime
nouveau
c'est
du Tong-Doc
vieux A i-van-Li, est toute de forme territoire
lui
rend beaucoup d'iion-
lui a enlevé toute autorité.
Au-dessous
point de mandarins annamites pillards qui
aux plus offrants.
((
« «
Ce
sera
l'éternel
honneur du colonel
Gallieni,
contre ses détracteurs, l'éternel honneur de ses coUa-
(c
borateurs dévoués d'avoir su inspirer confiance, en
«
peu de temps, à ces indigènes
si
qui l'étaient encore rendus davantage par
«
et
((
teur
du
si
méfiants par nature la len-
protectorat à les protéger. »
Cette appréciation de l'œuvre accomplie dans la haute
région est intéressante à enregistrer
;
elle
résume bien
l'opinion à peu près générale des colons européens
Tonkin.
10,
du
EN TERRITOIIU-: MILITAIRE
j-\
Ce sont
du
là
serait facile
resto des constalalions
De
de multiplier.
ment qu'en prenant une
de
faits qu'il
tout ceci, retenons seule-
ligne de conduite et des pro-
cédés de gouvernement adaptés au pays et aux circonstances,
sans
errements précédents,
des
souci
nous
avons obtenu des résultats qu'on ne saurait méconnaître.
Malheureusement,
La grande cju'il
de il
c'est
autorité
du
encore du provisoire
avait su concjuérir et surtout le besoin
ses services
pour achever
est vrai, force
de
loi à
'.
colonel Gallieni, la confiance
la pacification,
qu'on avait donnaient,
notre réglementation de for-
tune. Mais voici la pacification passée au second plan et il
s'agit
d'administrer.
qu'en France, dit-on, il
le
Dans
cet
ordre d'idées,
provisoire
seul
du définitif, pour du personnel.
faut de l'officiel,
l'instabilité 11 est
soit
bien
durable,
faire équilibre à
donc nécessaire de régulariser, d'asseoir l'admi-
nistration
des
j:)résentent
:
hautes régions.
Deux
orientations se
I. Nous avons va, par exemple, le commandant du secteur donner des ordres au Tri-Cliau et remployer directement à
tous
les
détails
de ladministration.
En
théorie et d après
le
régime du protectorat, c est seulement par lintermédiaire du Tong-Doc de Langson que ce fonctionnaire aurait dû recevoir les instructions de l'autorité française. Cela crée une situation difficile, car les ordres du commandant du secteur n'étaient pas toujours d accord avec les instructions du Tong-Doc et nos fonctionnaires indigènes s'en trouvaient parfois fort embarrassés. Jusqu'ici les petits mandarins Thùs. pleins de bonne volonté, n'hésitaient pas à suivre le commandant du secteur et le Tong-Doc lui-même, malgré quelques signes de mauvaise humeur, en présence de la situation un peu subalterne qui lui était faite, ne s'est pas hasardé à un conflit réel. Il y a là cependant un véritable danger qu il est indispensable de faire disparaître.
RÉGIME CIVIL ET RÉGIME MILITAIRE
— Dcsinlércsscr indigènes pour
les
les
officiers
peu
à
peu des
175
afTaires
renfermer dans leur domaine militaire
régime
s'acheminer ainsi vers
le
— Ou au contraire
y faire entrer plus avant, leur
et
en donner
les
la direction
civil.
d'une façon plus complète
sanctionner officiellement
l'existence
et
d'une véritable
administration militaire française. serait délicat d'aborder
Il
paraison C'est
et l'étude
la commodes de gouvernement.
dans son ensemble
des deux
une matière de discussion toujours complexe
souvent irritante. Bornons-nous à rentre dans notre cadre
Dans
le territoire
régions
les
régime
qu'il
tel
civil
est
et
Il
faut
s'accordent à démontrer
Il
de toute colonisa-
c'est à l'action
militaire
première partie du programme.
remplie dans
les
reste à se
au con-
l'obtenir d'abord, puis la faire durer.
Personne ne conteste que revient la
a-t-il lieu
?
et l'expérience
donc
le
un régime exceptionnel sous
cjue la sécurité est la base nécessaire
tion.
2;énéralement dans
compris au Tonkin? Cette
modification doit-elle être hâtée ou y
Le bon sens
et
cpii
prudent d'appliquer
est-il
traire d'y laisser subsister
l'autorité militaire
question
:
de Lan<^-Son
frontières,
la seule
provinces qui bordent
demander
si
le
régime
le
que
Elle est
Quang-Si.
civil
est outillé
pour y assurer d'une façon permanente la sécurité des populations et des Européens et pour permettre à ces provinces de remplir efficacement leur rôle de
tampon
entre la Chine et les terres basses. L'expérience a été faite et n'a
pas été heureuse.
Langson
et
Cao-Bang
ont joui autrefois de l'administration civile qui s'y est
montrée impuissante. Cette impuissance tive et le
régime militaire
est-il
est-elle défini-
en état de mieux réussir
')
EN TERRITOIRE MILITAIRE
lyO
Mémo qu'on
ainsi ri'dnilo, la qiicslion est difficile cl mérite
s'y arrête.
Voici
mon
opinion
le
:
régime
encore impossible pour de longues années dans vinces de la fronlicre.
Il
hâte est dangereuse et sans militaire a ses inconvénients
il
de
car cette
L'administration
profit. ;
pro-
reste,
commun,
chercher à hâter ce retour au droit
pendant, qu'elle peut
du
n'y a pas lieu,
civil est
les
semble démontré, ce-
faire progresser le
pays
duire au développement économique qu'il comporte, à condition de recevoir
et
et le
con-
commercial
une constitution
sur des bases raisonnables. Essayons de
officielle assise
prouver.
le
Le régime civil, avons-nous dit, est encore impospour de longues années dans les provinces de la frontière. C'est comme toujours dans une erreur de sible
fond cjue nous chercherons et le
le secret
de cette incapacité
point faible de notre gouvernement indigène, sans
avoir recours aux arguments faciles et habituellement exagérés, qu'on tire trop souvent des abus de détail et de la valeur
En
du personnel emplové.
théorie, le pavs protégé,
l'Annam,
reste charge
son administration intérieure et conserve administratives
du gouvernement
un
fonctionnaires français contrôlent
le
des services Indigènes, administrent
Asiatiques
marche des tion
étrangers
services
et
assurent
Nous avons
ad-
nombre de
fonctionnement
Européens
et
directement
la
les
généraux du gouvernement (ges-
des finances, travaux publics,
affaires extérieures,
petit
de
attributions
(police, justice,
ministration proprement dite...);
les
les
emploi de
sécurité
la force
générale,
armée).
observé, en étudiant le corps social anna-
jnite au Tonkin, combien l'organisation d'une semblable
REGIME CIVIL ET RÉGIME MILITAIRE chose
lutelle était
difricilc.
deux contractants, fonction normale
:
Pour
avantageux aux
être
protectorat doit
le
,77
se limiter à
direction d'ensemble et
sa
contrôle.
Il
présente alors sur l'annexion une véritable supériorité
économie de fonctionnaires, acceptation plus les
habitants, transition amiable,
momentanée
l'anarchie
cjui
un changement brusque de
Que
sans à-coup et sans
accompagne nécessairement nationalité. Mais cela n'est
possible qu'à trois conditions 1°
:
par
facile
:
pays protégé possède d'avance des rouages
le
administratifs complets et en état de fonctionner régu-
lièrement
;
Que
•2°
la tranquillité
suffisantes force
comme moyen
3°
Que
de gouvernement
la
;
protégé accepte le protectorat sans trop de
le
répugnance la
générale et la sécurité v soient
pour ne pas exiger d'une façon habituelle
et
ne conserve pas
l'idée fixe
de profiter de
première occasion pour jeter son protecteur à
la
porte.
La première de ces conditions à l'exclusion des
a fallu de tous
était
remplie au Toiikin
deux autres. Cela explique pourquoi
temps
sortir
du
protectorat
il
normal par
des expédients.
L'emploi de
la force
dans un pavs mal pacifié
sur était, au début surtout, de tous les jours.
pouvait songer à en confier la police,
maniement,
même
pour
user contre nous. Leur mauvaise volonté
en outre, un peu partout,
français
peu
aux autorités annamites qui n'auraient pas
manqué d'en forçait
le
et
On ne
à
transformer
le
les
fonctionnaires
dont
contrôle
ils
étaient
chargés en une intervention directe et journalière dans les affaires
locales. C'est
bientôt soumis à deux
ainsi
que
le
gouvernements
pavs se trouva
parallèles, à
deux
EN TERRITOIRE MILITAIRE
1-S
hiérarchies juxtaposées dont les rapports et la subordi-
nation mutuelle sont
le
mal
plus souvent
pour rendre possible
faudrait,
11
le
définis.
fonctionnement
d'un pareil système, que l'entente fût toujours
réi^ulier
complète entre
supérieures françaises et
les autorités
annamites. Mais cette
entente (nous avons essayé de
dire pourquoi) ne peut avoir lieu qu'exceptionnellement et,
pour ainsi
dire, à la surface. Aussi
est-il obligé,
dans
vendi avec
les
est très
posés,
sa province,
affaires
ments. Cela
quand
rare et
est
les
peuvent le
chaque résident
se créer
mandarins de son
habile et les
de
un inodus ViQuand il
ressort.
mandarins sont bien aller
dis-
sans trop de froisse-
résident
obligé d'agir en sens inverse des
se
trouve souvent
instructions
que
les
mandarins provinciaux reçoivent de leurs supérieurs naturels.
De
là
suivent des frottements, des résistances,
des difficultés qu'il ne peut surmonter qu'en brusquant les choses et se
en imposant directement sa volonté, sans
préoccuper de
la direction occulte
vernement annamite. Mais que
s'il
A
est
le
gou-
armé et soutenu. Ce n'est pas toujours le cas. mandarins qui prétendent n'obéir qu'à
côté des
leur vice-roi, voici lière,
donnée par
cette altitude n'est possible
les
services français
douanes, trésor...) dont chacun
se
(armée réguréclame de
ses
directeurs propres et n'accepte d'observations d'aucun autre. L'ensemble constitue aussi spécialisé, aussi
un régime
aussi compliqué,
peu maniable qu'en France.
pays sûr, calme, depuis longtemps dressé
Ln
et assoupli
pourrait à la rigueur s'en contenter. Le ïonkin n'en est pas là.
La preuve en
est
dans
les
tâtonnements
et les
expédients, peu heureux quelquefois, destinés à éluder les
termes d'une conslilulion de protectorat reconnue
insuflisanle.
RÉGIME CIVIL ET RÉGIME MILITAIRE
On
au plus presse en niellant dans
a paré
des résidenls, par la création des milices,
gouvernement,
outil de
179
la
main
la
premier
le
Cela leur permet de
force.
passer outre aux résistances locales, de résoudre les con-
de détail
llits
de faire
et
les
manque
provinces
chez eux
la police
tendent. Mais quoi qu'on
ait tenté,
comme
notre régime
ils
l'en-
civil
dans
d'assiette, d'autorité et d'unité
dans la direction; par conséquent
il
manque de puissance.
M. de Lanessan, dès son arrivée, frappé de l'arbitraire que cette situation entretenait dans notre administration et des
abus qui en découlaient, avait essavé de résoudre
remède
la cjuestion
autrement.
cette plaie
dans un retour aussi complet que possible
espérait trouver le
Il
à
aux principes du protectorat normal. Sa première préoccupation fut de rendre aux Annamites leurs attributions administratives
point
du
tout sa
d'action. Bien
main une
la
que ne partageant
confiance dans la bonne
foi
des
man-
eu l'occasion déjà de constater qu'il y avait une ligne de conduite raisonnable et une tentative
darins, là
de leur remettre dans
et
movens
partie de leurs
j'ai
loyale de retour à
une
situation
nette. Les premiers
résultats semblaient encourageants.
Tout vaut mieux
que l'anarchie. Il
dut cependant s'arrêter en route
praticjuement françaises,
ment
la nécessité
dans
les
de
laisser
provinces,
et
reconnaître
encore à l'autorité
une action de gouverne-
plus directe et plus étendue que ne le comporte
notre traité de protectorat. La dualité d'attributions,
la
coexistence de deux hiérarchies administratives dont les
rapports sont
aggravé par
mal
définis, reste
la spécialisation et
donc entière. Le mal
des différents services publics qui entravent
pas l'action personnelle
est
l'indépendance relative
et l'initiative
du
à
chaque
résident.
EN TERRITOIRE MILITAIRE
i8o
La
loiilalivc
de M. de Lancssan
et
du gouvernement
action à la direction i^énérale
taire à
Sera-t-il
toute sa vitalité, afin de limiter notre
contrôle? Peut-être; mais
annamite
?
l'administration annamite toute
possible de rendre à
son autonomie
dans
est-elle desliiiée
préparer nne solution délinitive
l'avenir à
il
au
et
faut attendre (pie la race
produit une classe dirigeante moins réfrac-
ait
notre civilisation. C'est
demande des
générations.
Que
un
faire
travail
social
qui
en attendant?
Xotre organisation des hautes régions peut à ce sujet
donner quelques indications. possibilité de
gouverner
On
à l'aide
v verra peut-être la
de cadres indigènes di-
rectement commandés par des fonctionnaires français.
Pourquoi
le
est obligé
de prendre
résident ne recevrait-il pas les droits qu'il et
ne deviendrait-il pas
le
chef
immédiat du gouvernement indigène. Les échelons supérieurs de la hiérarchie annamite se trouveraient
peu à peu réduits à un et
rôle de figuration honorifique
de chancellerie. Personne, je
La chose en tout elle sortirait
Dans de tous
la
ne s'en plaindrait.
crois,
cas vaut la peine d'être étudiée
c'est grâce à une surveillance une occupation militaire très
haute région,
les instants,
à
solide et surtout à cette unité d'action
réclamée en toutes circonstances par
que nous avons imposé au pays plète, et
de
taires
mais
de notre cadre.
mais encore précaire, qui se reconstituer
le
si
énergiquement
colonel Gallieni,
cette tranquillité lui a
com-
permis de renaître
en dix-huit mois.
jNos postes mili-
retomberaient dans l'impuissance,
les
populations
armées bientôt désorientées, deviendraient inutiles peut-être dangereuses, si
du jour où
et
cette vmité d'action
laborieusement obtenue viendrait à
se relâcher. 11
RÉGIME CIVIL ET RÉGIME MILITAIRE
1,^1
n'est pas
nécessaire d'insister sur l'impossiljililé d'ob-
tenir en
territoire civil
une
aussi complète coordination
pareille discipline et
de tous
les
une
pouvoirs. Les
considérations qui précèdent et l'expérience
souvent
si
renouvelée en sont une preuve suffisante. Cette expérience en effet n'est plus à faire. Toutes
provinces non encore pacifiées sont confiées d'abord
les
à l'autorité militaire et
soumises à son régime d'excep-
avant leur passage au droit
tion
commun. Le pro-
cessus est régulier et tout irait bien sans la hâte ha-
en pareil cas. Dès qu'une contrée a repris un peu de calme extérieur, les bandes pirates dispersées, bituelle
les tribus rebelles rentrées
dans
pavs à la
le
civil. C'est
trop tôt.
après la répression violente, laisser au
faudrait,
Il
on veut sans
le devoir,
autre délai la confier au régime
temps de
se discipliner,
de
se
calmer, de se plier
domination française sous une autorité plus
plus libre que celle de notre gouvernement résultats
acquis n'ont encore aucune stabilité
tout se désorganise, les pirates rentrent,
échappent aux autorités françaises
et
forte et
civil. ;
Les
bientôt villages
les
après avoir essayé
de vivre d'expédients pour ne pas avouer une erreur,
on le
est obligé
en
fin
de compte de reprendre l'œuvre par
pied et de rendre aux militaires une contrée plus
dévastée, plus déserte et plus difficile à pacifier
de
la
première tentative. Après une nouvelle
plète pacification,
nouveau retour au
montagne ont
ainsi
changé
trois
le
ou quatre
lors
incom-
commun...
droit
Certaines provinces intermédiaires entre
que
et
Delta
fois
et la
de gou-
vernement. Ces oscillations suffisent à expliquer trouve encore
si
dévastées et
si
comment on
peu sûres des provinces
qui devraient être depuis longtemps repeuplées et IranGrand.maison.
11
EN TERRITOIRE MILITAIRE
iRa (juilli's. ].o
N iMi-'J'Iic
quable exemple. toire
11
'
remar-
peiil-èlre le plus
011 est
serait intéressant d'en écrire
comme document
En
de colonisation.
une grosse colonne de 1,800 possession de cette contrée
2,000
à
si
l'iiis-
octobre 1895
fusils
reprenait
souvent pacifiée sur
le
papier et y servait de prélude à une nouvelle période militaire
devenue nécessaire après deux ou
malbeurcux de gouvernement Je ne voudrais pas
conclure que
le
rale supérieur
me
donner
régime militaire
au régime
trois essais
civil. ici le
ridicule d'en
est
d'une façon géné-
civil, cela
prouve seulement
que chacun d'eux doit venir en son temps pour rendre possible notre adminislration
le
fonctionnement
civile
aux
pays tranquille, discipliné déjà,
colonies,
de
faut
un
des
ré-
il
déshabitué
bellions intérieures et à l'abri des agents
que
et
délicat
de trouble
extérieurs.
Cette obstination à « civiliser » ou
mieux
à « fonc-
tionnariser » nos conquêtes avant maturité tient sou-
vent à des préventions, très répandues dans certains milieux, contre
due surtout au régime
le
régime militaire. AuTonkin,
elle est
à l'habitude prise de considérer ce passage
civil
comme la constatation officielle d'une On comprend combien les gou-
pacification définitive.
verneurs généraux sont désireux de faire possible cette constatation et d'en tirer
le
plus tôt
une preuve
irré-
cusable des progrès accomplis.
On
pourrait y joindre, dans certains cas,
un molif
Cet insuccès en ce qui concerne le liaut Yen-thé, dcdépeuplé et inculte est d'autant plus déplorable qu'il n'est peut-être pas au Tonkin de ré^rion plus fertile, plus propre aux cultures riches et mieux placée pour la création d'exploiI.
vaslé,
tations agricoles importantes.
REGIME CIVIL ET REGIME MILITAIRE qui a sa valeur
lo
:
souci de placer
iins des rontlioiiiiaires
De
el d'iililiser
qui altendeiit
tout ceci, concluons seulement
lement
le
retour au droit
frontière serait
commun
un
i83
quel(|ues-
poste.
que tenter actueldes provinces de la
une imprudence grave. ?sous v sommes
donc condamnés pour longtemps peut-être au régime militaire.
faut s'en contenter et en tirer ce qu'il peut
Il
donner.
Après avoir su
pacifier,
saurons-nous administrer
et
pavs ne souilrira-t-il pas de cette prolongation de
le
'
bail
Ses adversaires affirment que est
dur aux habitants
personnel
est
les officiers
et
le «
inexpérimenté
et
La guerre
fiques
ne sont pas leur
change à chaque instant;
fait.
Les colons en outre se
obstacle au développement
un peu de
vrai et
et les
hasardent qu'avec dé-
fiance en territoire militaire. Cette
là
»
Le
seule leur rapporte et les succès paci-
commerçants européens ne
un
la légalité.
n'ont aucun goût pour des fonctions sans
profit.
titue
régime du sabre
peu soucieux de
répugnance cons-
du
pays.
—Hya
beaucoup d'exagération.
Le régime du sabre
sait,
quand
il
le faut, s'attirer la
sympathie des populations. Nos rapports avec
les
indi-
gènes dans la région de Langson en sont la preuve.
La
cordialité de ces rapports et la confiance des habi-
tants constituait la note caractéristique, le point spécial
qui frappait si
le visiteur
de nos
fiefs
militaires. Je
ne
sais
l'entente aurait été aussi rapide et complète en pavs
annamite. Mais nous avions
affaire à des
gens simples,
ayant plus besoin de justice que de légalité, qui s'ac-
commodaient fort bien de nos procédés sommaires. Si du reste, nous pouvons accepter le reproche de n'avoir
EN TERRITOIRE MILITAIRE
i8/,
pas nionlré en toutes circonstances la loi
annamite représentée par
jours au proiit de
la justice et
tant que nous lui avons
le
un
respect absolu de
mandarin,
dans
l'intérêt
c'est
ton-
de l'habi-
manqué. Nos administrés ne
s'en plaignaient pas.
La répugnance des colons
et
des commerçants fran-
en territoire militaire
çais à se fixer
est explicable.
définition, les territoires militaires sont ceux qui
craignent d'v trouver l'arbitraire et le
pas paciliés
;
manque de
sécurité.
11*^
ils
territoire
Par
ne sont
Ceux qui ont habité ou
en 1894- 1890 n'ont plus, je
visité le
crois,
ces
préventions..
Les critiques visant
le
manque de
stabilité et d'expé-
rience administrative des officiers sont plus sérieuses et
moment où
la
chasse aux pirates, passée au second plan, doit céder
le
doivent être prises en considération, au
pasàl'étudedes cjuestions politiques
et
économiques qui
du pavs. Pour ne pas enraver les progrès chaque jour plus sensibles d'une région qui ne demande qu'à prospérer, il faut entrer hardiment dans la voie des réformes ad-
intéressent l'avenir
ministratives, régulariser les rapports des fonctionnaires
indigènes avec l'autorité française, reviser l'impôt, revoir l'application des lois annamites relatives à la pro priété,
encourager certaines cultures, réorganiser Tins
truction dans les villages, pousser les travaux publics régler l'entretien et poursuivre l'amélioration des voies
de communication... Tout peut
le
faire avec
rience, ne lui
vouement
et
cela,
l'autorité
militaire
son personnel qui, à défaut d'expé
marchandera pas
le
concours de son dé-
de son désintéressement. Les incontestables
progrès réalisés en (juelques mois sont garants du snc ces final.
Mais
il
faut reconnaître
que
les
changements
RÉGIME CIVIL ET IIÊGIME MILITAIRE trop fréquents et
le
manque de
i85
pratique des officiers
chargés de fonctions administratives constituent, dans cette nouvelle phase,
Le colonel Gallieni
une
difficulté grave.
avait amélioré déjà la situation
que
s'appliquant à ne distraire leurs fonctions, les
commandants de
en
moins possible de
le
secteur.
Il le fallait
néanmoins trop souvent.
La cause principale de est
ces
aux colonies pour
faire
déplacements obligatoires
Les militaires n'allant point
assez caractéristique.
fortune n'y peuvent chercher
!que des avantages de carrière. Or, d'après nos règlements,
n'est
il
établi
de propositions spéciales pour
l'avancement ou autres récompenses, qu'à
la suite
des
grosses colonnes, des opérations militaires proprement dites. 11
en résulte que pour récompenser un
dant de poste ou de secteur dont tranquille,
on
doit d'abord l'envoyer ailleurs.
point à comparer cependant la tivité et d'action
lui revient,
Mais
n'y a
un
offi-
avec celle qui
isolé,
en sous-ordre, dans une colonne nombreuse. sont
faits
pour
coups de
tirer des
sont employés à autre chose, cela ne peut en-
en ligne de compte dans leurs
C'est
Il
d'énergie, d'ac-
personnelle que doit dépenser
les militaires
fusil, s'ils
trer
somme
dans son petit gouvernement
cier
comman-
circonscription est
la
un
tort.
chefs militaires alternative.
Quel que
soit
ne peuvent, en
Décourager
états
leur
effet,
les officiers
de services.
bon
vouloir, les
sortir
de cette
administrateurs en
leur imposant contre leur gré des fonctions sans profit.
Ou
leur rendre difficile tout travail sérieux, toute entre-
prise de longue haleine en les appelant
comme
les
autres aux opérations
actives
à
concourir
en dehors de
chez eux. Cette seconde solution entrave tout progrès politique
EX ïEURirOIRE MILITAIIIE
i80
(liiial)l('.
La
plus iiiamaisc encore parce
piciiiirrc osl
qu'elle esl injuste. Il
V
a
là
un
danger pour toute tentatixc
très réel
d'adininistration militaire. Peut-être sera-l-11 néccssairi' ])r)ur V
remédier de spécialiser
les
commandants de
sec-
teur ou au moins de les soustraire aux déplacements
trop fréquents nécessités par le
commandement
direct
de leur troupe, sans qu'ils aient à craindre de compro-
mettre leurs intérêts de carrière en s'attacliant à leurs i'onctions administratives.
Sans
insister davantage, reconnaissons-le, l'adminis-
tration militaire a ses inconvénients. Elle peut réussir
cependant
à
ofliclelle assise
condition de recevoir une constitution sur des bases raisonnables.
constitution
Cette
mais
oniclelle est indispensable
Sous l'impulsion du colonel Galllcni,
difliclle à obtenir.
une œuvre remarquable a été produite en deuv ans. Le pavs a été pacilié, repeuplé, réorganisé, transformé. C'est en faisant table rase de nos méthodes précédentes et de notre habituelle routine que nous avons réussi. Ce fait dépasse en portée les limites du territoire où nous venons de l'étudier. Il montre ce quepeu\ent faire des ofliclers et des fonctionnaires français un peu délivrés des entraves accoutumées et quel essor ce retour à l'acliou individuelle et à la responsabilité personnelle
peut donner à une entreprise de colonisation.
Cette
constatation malheureusement a été souvent faite et
Que dans une situation difUclle, se un homme suffisamment trempé pour ré-
infructueusement. présente
clamer |)(^iir
et
obtenir ses coudées franches et assez doué
user nrileineiil do sa liberté d'action,
il
toujours. Mais, en outre de sa tâche normale,
dra dépenser une
somme
il
réussira lui
fau-
d'énergie qu'on ne soupçonne
MESURES A PRENDRE
187
pas pour conserver les libertés acquises el empêcher la
péniblement
roue
si
C'est
une
seule de
tirée
de rornièrc, d'y retomber.
que
lutte de tous les instants,
permettra
lui
donne
l'autorité personnelle c^uc
soutenir
le
succès.
Du jour où
cet
homme
dans
la
même
est
remplacé par
même
classe, inscrit
disparaît,
un autre du même grade ou de colonne sur
les
la
il
papiers administratifs.
Quelles que soient sa capacité et son énergie, le nou-
veau venu ne pourra pas dès l'abord prendre assurance et la
même
autorité morale.
la
môme
Si les travaux
de son prédécesseur n'ont point encore reçu
la
consé-
cration d'un texte officiel, ne sont pas devenus des lois, sera le plus souvent écrasé par l'effort des services et
il
des bureaux ligués pour reconquérir leurs prérogatives et
retrouver
chie.
le
jeu tranquille de leur habituelle hiérar-
Car nos administrations joignent
qualités
une
à leurs autres
une extrême
susceptibilité rare et
jalousie
de leur autonomie.
Le <f
dilTicile
coup de
en France n'est donc pas de donner un
collier »,
les résultats
de faire vite
et bien,
durables, de profiter
du
mais de rendre
travail déjà fait.
C'est ce qui explique dans toutes nos entreprises velles la lenteur des progrès et la médiocrité
ment
final.
Beaucoup de
travail fourni et de résultats
partiels obtenus, rien de solide et
formes laborieusement conquises,
sement expérimentées restent d'efforts personnels.
lement dans
le
nou-
du rende-
le
de
les
définitif.
Les ré-
méthodes soigneu-
plus souvent à l'état
Elles entrent rarement et diffici-
domaine des règlements écrits, des lois Ceux que le jeu naturel du régime
administratives.
existant a portés
aux échelons supérieurs de leur man-
darinat spécial, trouvent ce régime excellent.
Ils
sont
EN TERRITOmE MILITAIRE
i88
devenus par
état, hostiles à tout esprit d'initiative et
par
habitude, opposés à toute innovation. C'est l'essai
cile
donc
le
passage
au règlement
du
provisoire au déiinilif, de
qu'il est indispensable et
difll-
si
de hâter. M. de Lanessan avait accepté de tenter
loyalement l'expérience; juscpi'au bout.
il
aurait,
je
M. Rousseau, devant
poussé
crois,
ac-
les résultas
quis, s'était décidé à poursuivre dans cette voie et avait
entrepris de faire
des règlements avec les
appliquées au
territoire^.
leur donner la
11*^
sanction des
Il
était
textes
méthodes
en train
ofliciels
et
de
de les
étendre, dans la mesure des ressources disponibles, à toutes les provinces de la frontière. C'est
consolant
et
un
résultat
malheureusement exceptionnel d'avoir pu
en deux ans imposer
le
principe
cl
prouver
la possibilité
Espérons que l'œuvre sera
de cette transformation. poursuivie.
Il
resterait à préciser les bases sur lesquelles
il
con-
vient d'asseoir cette constitution réclamée pour les territoires militaires.
I.
Malgré
la réserve
possible de ne pas citer
que je ici
le
me suis imposée, il m'est imnom du commandant Lvautey
(aujourd'hui lieutenant-colonel commandant un territoire miMadagascar). Collaborateur et ami du colonel Gallieni, il s'était fait le propagateur ardent et autorisé de ses idées dans les fonctions successives de chef d état-major du général commandant les troupes et de chef du cabinet militaire de M. Rousseau. G est à son infatigable action, à la légitime inlluence qu il avait acquise et que savait apprécier M. Rousseau, (pjcst due la réglementation, l'acceptation oiriciclle des méthodes coloniales étudiées dans ce livre. Le Tonkin lui doit beaucoup. litaire à
MESURES A PRENDRE Mais ce
nous répéter car
serait
i8r,
s'agit
il
seulement de
rendre définitif ce qui existe déjà. de
suffira
Il
résumer en terminant. Ce sera
le
la
conclusion de ce chapitre.
Notre but
double
est
Former des
lo
occupées
et
«
:
marches militaires
des bandes pirates entre la Chine et
du Delta
»
solidement
opposant un obstacle sérieux au mouvement les
provinces riches
;
même
2" Constituer en
temps
à notre occupation
un
d'appui solide où nous puissions compter sur
point
concours des habitants,
l'entier
môme
en cas de soulè-
vement ou de troubles dans les provinces annamites. Le régime militaire peut seul assurer à notre occupation et aux habitants armés un encadrement et une cohésion suffisamment solides pour créer ce barrage. C'est chose faite,
suffit
il
Le second point
est
ce travail politique,
traire
plus délicat.
Pour mener
deux choses sont nécessaires
complètement
les
—
de n'y rien changer.
habitants
à
à bien :
sous-
l'influence
des
une situation privilégiée. La suppression des mandarins annamites chez les Muongs a été le premier pas. Ils doivent être remplacés par un gouvernement très rapproché des habitants, ne comAnnamites
et leur créer
portant que le
pays,
les
intermédiaires indispensables, pris dans
nommés
par leurs pairs
torité française, à tous les degrés
et
subordonnés à l'au-
de
la hiérarchie.
Les Annamites voient naturellement d'un mauvais œil ces provinces leur échapper définitivement et
ne
renonceront pas, sans une lutte opiniâtre, aux bénéfices qu'ils
I
.
en tiraient ^ Notre intérêt
Voici un
est
de couper court à
exemple qui montrera combien
les
Annamites 11.
EN TEUIUTOIKE MILITAIRE
Kjo
CCS retours oiïciisirs cii leur cnlcvanl sur les aulrcs races,
tout
moyen
S'il
du
d'action.
est difficile sans sortir
ouvertement des termes
de rompre oniclellemeut
protectorat,
souveraineté de la cour nistrative et d'en
d'Annam
remanier
les liens
de
sur la lilérarcliie admi-
les bases, il l'aut,
en appli-
cpiant reLiullèrement ce (pie nous avons expérimenlé
dans
le
11*^
territoire,
lui soustraire pratl([U(Mnent
derniers échelons et admettre l'action
les
innnédlatc de
l'autorité française locale sur les habitants et les fonc-
tionnaires inférieurs. Les secteurs créés par le colonel Gallieni
répondent parfaitement à ce besoin de sur-
veillance rapprochée.
principal de notre
Ils
sont appelés à former le cadre
gouvernement
militaire.
on veut, de l'administration directe
;
mais
ce cas ses véritables inconvénients car elle
sont tenaces et
comment
ils
Ce
elle
sera,
si
perd dans
n'augmente
cherchent à reprendre possession
du pa\s qu'on leur a enlevé. Quelques mois après le remplament des mandarins annamites, trois ou quatre anciens Tri-Cliau en disponibilité, étaient venus trouver
Dong Dang.
le
plus ancien et
le
le
Tri-Chau « Thô
»
de
plus influent des mandarins
Ils lavaient si bien endoctriné que lui-même, quelques jours après, m'exposait la situation ditficile des nouveaux fonctionnaires qui ne connaissaient pas l'administration et lutilitc qu'il y aurait povir eux à pouvoir compter sur un secrétaire
indigènes.
et instruit, ajoutant que les anciens mandarins annamites ne demanderaient pas mieux que de rentrer-, en La cette qualité de secrétaires, chez leurs successeurs Thôs nécessité de vivre entrait bien pour quelque chose dans cette requête modeste, mais elle était, à n en pas douter, encouragée et probablement conseillée par l'autorité annamite supérieure. Si elle avait été admise, ces secrétaires auraient rapidement confisqué lautorité réelle dans leur ancienne circonscription et la situation serait redevenue ce qu'elle était quelques mois avant, avec cette aggravation que les véritahlcs fonctionnaires, cachés derrière de petits rois fainéants, auraient agi avec d autant moins de retenue qu'ils n'auraient plus été responsables de leurs actes.
intelligent
!
MESURES pas
nombre
le
PRENDRE
A
191
des agents français et ne répugne pas aux
aux Français qu'aux
liabitants qui prélcrcnt avoir affaire
Annamites. Après avoir ainsi réglé tion,
la
forme de notre administra-
sera nécessaire d'en simplifier le fond et de la
il
modifier profondément. Son application sera confiée, en elTet, à
des indigènes n'ayant point
ciales et à des officiers français
questions administratives.
mettre dans
De
manier.
la
peu
fait
d'études spé-
familiarisés avec les
donc prudent de leur
Il est
main un instrument
solide et facile à
profondes modifications sont nécessaires
parce que les lois annamites actuellement en vigueur sont
mal appropriées aux besoins du pavs. C'est une complètement nous y reviendrons
législation à revoir
dans
le
;
chapitre suivant.
Le régime que nous voulons créer
Nous devons
faire
situation meilleure
que
leur éviter tout sujet de
voulons
les
doit être privilégié.
aux habitants des hautes régions une celle
de nos autres protégés
et
mécontentement habituel si nous
attacher à notre cause par le seul sentiment
véritablement puissant
et
tenace chez l'homme, quelles
que soient sa race et sa couleur celui de son intérêt. Un impôt très modéré et soigneusement réparti mais ;
rieioureusement exi^é, des corvées réduites au et
mininum
toujours appliquées sur place à des travaux d'utilité
publique,
le
sivement à nière,
la
service militaire régional
emplové exclu-
garde du pays. Très large tolérance doua-
facilités
encouragement
de transactions,
cultures riches par la diminution taxes, instruction
dans
la
il
des
suppression des
les villa2:es, crédit auricole
Autant de questions dont et activer la solution
ou
:
faut poursuivre l'étude
pour arriver
à doter les provinces
frontières d'une vie propre, en les faisant profiter directe-
EN TEimiTOIRE MILITAIRE
1.,-î
mcnl de
toiilcs les
leur en outre rêts,
charges qu'on leur Impose. Donnons-
un gouvernement soucieux de
accessible
à
tous,
leurs inté-
toujours prêt à écouter
les
doléances, à faire droit aux justes réclamations, à aider les villages, à les déc^réver
en cas de besoin. Xe denian-
dons en échange aux populations que de s'attacher à l'ordre
champs
nouveau, de vivre en paix, de défendre leurs et
leurs villages, de repeupler et de faire pro-
gresser le pays par leur travail.
Le
protectorat n'a rien à v perdre. Les revenus qu'il
pourrait tirer actuellement des provinces hautes, en les écrasant, sont insignifiants.
—
Le bénétice qui
sera la
conséquence nécessaire de cette conduite, au point de
vue de
la sécurité
de
la colonie et
rale, est considérable.
de
la pacification
géné-
CHAPITRE Importance de
Mon
l'inslallalion matérielle.
Yll
—
intention n'est pas d'entrer
Construclions
ici
et routes.
dans une descrip-
tion détaillée des constructions et des travaux entrepris
dans
la
ai fait
région de
une place
Dong-Dang en 1894-1895. à part, c'est qu'à
mon
Si je leur
sens, l'installa-
tion matérielle prend, en matière de colonisation,
une
importance qui n'est généralement pas chez nous appréciée à sa valeur. C'est
de suivre
les
Anglais
un point
et
sur lequel
de mettre à
profit,
il
serait sage
en
les
Les voies de communication, avant de devenir de tout progrès matériel, sont de pacification dans
sonne ne
imi-
admirable entente des choses pratiques.
tant, leur
le
le
un pays de parcours
conteste théoriquement.
moins comprendre dans
les
la
base
premier instrument difficile.
Per-
Ce qu'on semble
colonies françaises, c'est la
nécessité de loger les Européens, troupes et fonctionnaires, confortablement et
honorablement. Malgré
grosses dépenses qui en résultent tout d'abord, faisait
de bonne
suite de la
foi le
de compte, que
Mais
il
les
l'on
calcul des économies réalisées par
diminution de déchet due à des installations
salubres pour les troupes européennes, fin
si
est
on
trouverait, en
budget doit y gagner. une autre face de la question qui nous le
intéressait spécialement près de la frontière de
Chine
et
EN TEIUllTOIllE ^MILITAIRE
içi',
sur
veux
Jacjiu'llc je
iiislsler.
Les constructions solides,
—
s'agit
11
de
l'eflet
moral.
les installations définitives
constituent la seule prise de possession qui ne laisse
aucun doute sur fait
accompli sur
les
intentions
letpiel
du
colonisateur. C'est le
n'est plus possible
11
]\ous l'avons signalé plus haut
Chine voisines du Tonkln,
le
dans
;
les
de revenir.
provinces de
bruit courait périodirpie-
ment du prochain départ des Français. On en parlait ouvertement sur les marchés et les mandarins de la frontière demandaient sans embarras aux officiers rennous comptions rester longtemps encore au
contrés,
si
Tonkln.
Ils
croyaient ou feignaient de croire que, venus
seulement pour mettre
quand
irions ailleurs
Les populations de
le
pays en coupe réglée, nous
il
n'y aurait plus rien à prendre.
la
haute région ne savaient trop
défaut d'autres motifs, cette incerti-
qu'en penser
et à
tude aurait
suffi à
entraver toutes nos tentatives de
rapprochement. L'essor
donné aux travaux de toutes
truction, sur la frontière
même,
taires considérables et définitifs
chinois. Les habitants
ne
se
mit
lin
cons-
aux racontars
trompèrent pas sur
de cette prise de possession
tée
sortes, la
d'établissements mili-
et
la
por-
une des premières
places dans l'œuvre de la pacification morale, de l'appri-
voisement des populations lui revient sans aucun doute. se plaçait le
com-
en s'enoja^eant dans cette
voie.
C'est à ce large point de
mandant du
territoire
Le o-ouverneur et,
vue que
ijénéral s'v prêta
en créant des ressources
avec l'année 189A, s'ouvrit une période de travail et
d'activité
colonnes 11
était
plus et
féconde
pour
l'avenir
du
pavs que
combats.
temps,
Xous avons
dit l'état
haute région en
fin 1898.
chi reste, d'aviser.
de nos postes militaires dans
la
CONSTRUCTIONS ET ROUTES Inséciirilé,
if)5
mauvaises conditions liygicniques, incendies
fréquents, difficulté de circulation et de ravilailiemcnt,
moral déplorable,
effet
pareille matière la
—
pas.
— rien n'y manquait. Mais en
bonne A olonté
et l'activité
faut de l'argent. Aussi,
Il
mainte
pu jusque-là
déjà, ces graves inconvénients n'avaient
émouvoir l'administration
Pendant
su[)érieure.
cette période de
deux ans,
face directement à des dépenses
atteindre
un
c^ue
ce
le
protectorat
lit
de construction pouvant
million de francs pour
Dang. ?vous verrons
ne suffisent
fois signalés
que produisit
le
secteur de
cette
Dong-
mise de fonds
beaucoup d'bommes auïonkin trouvaient exagérée.
Aurait-on pu faire mieux à moins de être.
Les traités avec
les
frais.
— Peut-
entrepreneurs étaient onéreux,
une consécjuence du manque de confiance dans le du protectorat. L'argent coûtait plus cher encore j'ai cité une anecdote inslruclive à ce sujet. Le procédé employé pour obtenir cet argent, en inscrivant de c'est
crédit
;
grosses dépenses de constructions militaires
au budget
amertume ^. La question « casernements de Dong-Dang et rSa-Cham » fut agitée par moments, sur les rives du fleuve Rouge, comme un petit Panama. Il v avait certainement là des du chemin de
fer,
a été critiqué avec
irrégularités réelles et des conditions financières difficile-
ment justifiables. I. Pour laisser à la question sa physionomie réelle, il faut noter que ces constructions militaires étaient des postes destinés à la garde du chemin de i'er qui en avait grand besoin. Seuls les casernements de Dong-Danp: et Na-Cham ne se trouvaient pas sur le parcours du tronçon Pliu-Lang- Thuong-Langson, mais sur le tracé du prolongement dont les travaux jusqu à I)on!4-Dang. commencés en 1896, doivent être finis ou laien avancés.
EN ïEUlilTOIRE MILITAIRE
i.,r>
son prendre
V qui
? Il
esl injuste
la responsabilité
de semblables
qui luttent avec
les
Ils
de faire porter toute
trafics
sur les
hommes
multiples difficultés de l'exécution.
n'ont pas toujours
le
choix des
moyens
et se voient
souvent contraints d'opter entre des compromis douteux et
bras croisés.
politique des
la
Or,
il
ne faut pas
—
quand un pays neuf n'avance pas il recule. Ceci n'est pas un plaidoyer, c'est une observation d'ordre i^énéral et un regret, car il y a là une tare, une l'oublier,
cause d'impuissance à laquelle échappent difficilement
nos entreprises commerciales ou industrielles d'outre-
mer.
admis qu'une
Il est
ment
alTaire coloniale doit nécessaire-
rapi^orter des intérêts
énormes
tentent de prêter de l'argent capital fictif à
à ceux qui se
ou d'en
rémunérer devient
alors
con-
faire prêter.
Le
absolument dis-
proportionné avec l'importance réelle de l'entreprise qui ne peut plus donner de bénéfices. Les prêteurs en profilent pour
augmenter leurs prétentions
si
l'on veut
un nouvel appel à leurs capitaux. (^•Ite impossibilité, avec nos mœurs actuelles, démener à bien une grande entreprise à un prix raisonnable est
dans
suite faire
la
chose tenter
connue que personne ne se hasarderait à en une (un chemin de fer par exemple) sans la
si
garantie de
la
France ou de
la colonie,
cpiand elle est
solvable.
En
dehors des crédits extraordinaires accordés par
protectorat, le
commandant du
le
territoire disposait des
crédits réguliers affectés à l'entretien des casernements et
aux constructions
champ de l'artillerie
lutte.
Le
militaires.
Ce
fut encore
là
un
service des constructions, conlié à
de marine, devait assurer directement
la
CONSTRUCTIONS ET ROUTES construction
occupés par
rentretien de tous
et
nom de
abonnement, pour
«
Masse de Baraquement
se loger, était
régiments indigènes
Le colonel
casernements
les
Européens. L'attribution aux corps de
les
troupes, sous le
les
uj-j
et
d'un
y donnait de bons résultats.
conformément
Gallieni,
»,
admise seulement dans son immuable
à
non main sur ce
principe d'unité de direction, réclama et obtint sans peine, dans son territoire, la liante
comme
service
sur tous les autres et
masse de baraquement pour
Le
personnel
insuffisant
création d'une
la
troupes européennes.
les
des constructions
était
absolument
pour assurer son service en dehors des gar-
nisons importantes
et,
comme toutes
les
administrations
techniques, éprouvait une répugnance extrême à délé-
guer
ses
pouvoirs à des profanes.
mandants de
On n'ouvrait, aux com-
poste, les crédits nécessaires
pour
les petites
réparations courantes qu'avec une prudence qui touchait à la
parcimonie
moyennant
et
justilications
dans d'innombrables factures, sfénéralement
énumérées fictives.
La méthode changea. Les fonds, directement répartis par le commandant du territoire ou provenant des masses de baraquement, besoins aux
furent
commandants de
confiés
secteur.
On
suivant leur
les
demanda
de justifier l'emploi des soinmes reçues, non plus en
accumulant des factures signées par quelque vague cabaretier
Chacun
chinois,
s'ingénia à
mais en
montrant leurs
postes.
devenir architecte, à utiliser ses
ressources en personnel, corvées, matières premières.
—
-
On
devient
compte. Tous
en tous
cas,
économe quand on
les postes se
travaille
reconstruisirent bien
à
son
ou mal
;
dans des conditions incontestablement
supérieures à ce
qui existait. La paillotte
et
le
bois
proscrits étaient remplacés par le moellon, la brique, la
EN TERRITOIRE MILITAIRE
ujS lùlo.
la
liiil(\
l'abri et
Tout
monde
le
trouva peu à peu à
se
en sûreté.
L'inexpérience des
constructeurs
fait
un
sourire
pavait,
prolessionnel
que l'ensemble
vrai
(|u'on obtint, en
se
du bâtiment par
leur architecture tout à fait rudimentaire.
moins
est
il
murs
des
vit
menacer ruine. Bien des postes
lézarder et des ponts
auraient
se
On
quelquefois par des insuccès.
vrai,
était
un temps
Il
n'est pas
praticjue et durable et
très court, avec des crédits
relativement faibles, des résultats considérables.
Chaque commandant de du commandant du
bation
secteur envovait à l'approterritoire les projets labo-
rieusement établis des constructions qu'il devait entreprendre.
Il
y avait
inattendues, tecturales
là
dedans un peu de tout
:
fantaisies
dispositions bizarres, conceptions archi-
allant depuis
le
proiU
un peu
fruste des
cabanes d'Esquimaux jusqu'au gothique flamboyant.
Sachant qu'on ne et
aimant mieux
fait
bien que ce qu'on
laisser à
chacun
le
fait
volontiers
stimulant de pro-
duire une œuvre personnelle que de corrif^er quelques erreurs de détail, le colonel Gallieni, en dehors de certains principes très simples sur lesquels table, acceptait tout
sions qu'il
Je
me
;
sans se faire
du
il
était intrai-
reste plus d'illu-
ne convenait.
Langson un commandants de
rappelle avoir feuilleté chez lui à
dossier de ces projets envoyés par les
secteur et l'avoir entendu
château ogival destiné à
la
dire à l'aspect d'un
banlieue de Cao-Bang
service des constructions va bien rire de nos
petit
Le monuments, :
«
mais au moins nous aurons abouti à quelque chose. il
»
y a là une leçon de premier ordre à enregistrer.
Ltiliser les
hommes, développer
|)ro(luire à
chacun son rendement maximum,
leur initiative et faire est
le
CONSTRUCTIONS ET ROUTES
'00
problème fondamental du commandement, quel soit. Tout le monde est d'accord sur le jirincipe, plication est plus délicate. Cela tient à ce (ju'il
au
faut
une
les lignes générales,
Rien
détail.
une
chef, avec
très
l'ait,
qu'il
l'ap-
je crois,
grande fermeté dans
grande tolérance dans
très
n'est plus difficile,
le
plus rare et cependant
plus nécessaire que de se dépouiller de ses préférences
de
et
goûts pour tout ce qui ne touche pas au fond
ses
même
des questions.
Ce désintéressement
volontaire, ce
commande pour la personnalité de exécuter est un des ressorts les plus actifs
respect de celui qui celui qui doit
mais
Pour donner une partout
et
les
succès.
idée de l'activité déplovée
des résultats obtenus
rapidement
principaux
il
un peu
nous faut énumércr
travaux exécutés dans
Dong-Dang, du commencement de 1894
secteur de fin
du
plus difficiles à manier
les
le
à la
de 1895.
Lne pour
entreprise civile avait été chargée de construire
compte du protectorat
le
Dong-Dang Bo-Sa
et les
blockaus de
:
les
Leo-Kao. Confiées à l'entreprise Clément
et
poussées avec une activité
extrême, ces
A
—
et
importantes
mars 1894,
constructions, mises en chantiers en livrées
casernements de
\am-Quan, Pac-Luong,
étaient
en mai 1895.
Dong-Dancjy l'ensemble du poste comprenait
Un
:
casernement défensif pour 60 indigènes avec
logement
d'officier.
En
moellons
et
briques, couvert en
tôle.
— Un magasin des subsistances un four pain. — L n casernement pour une compagnie d'Européens et
soit
:
étage
un
à
corps de bâtiment pour la troupe, élevé d'un
sur
rez-de-chaussée,
en
pierres
apparentes et
EN TEIUIITOIHE MH^lTAlllE
30O
avec vérandas en galerie, d'une longueur de
l)ilfHics
80 mètres.
— Un pavillon pour quatre
de
ofliciers,
même
cons-
Iruclion.
— Deux citernes — Poste de
faisant
police,
ensemble 5oo mètres cubes. poudrière,
cuisines,
latrines,
écuries.
Le luxe un peu exagéré du gros œuvre de ces consI
mêlions
l(Mn-
et
leur caractère de solidité massive avaient
raison d'être à la porte de Chine. Les Chinois sui-
vaient de très près
le
progrès de nos travaux et c'est
volume des maçonneries et les dimensions des bâtiments qui leur ont fait une impression prosurtout
le
fonde.
Bien planté sur son mamelon,
le
poste de
Dong-Dang
produit justement celte impression de « déhnltif il
est
question au début de ce chapitre
et
»
dont
quand en cul-
tivant leurs champs, les habitants de la région l'aper-
çoivent de loin, les
ils
ne peuvent manquer de sentir croître
deux sentiments que nous voulions leur inspirer
confiance et
:
la
le respect.
Le hlockàiis de Nam-Quan, établi sm^ la frontière même, à 100 mètres des ouvrages chinois de la porte de Nam-Quan, est une construction carrée, solide et honorable, flanquée en diagonale par
portant l'usage supérieure. oflicier
Il
deux
coffres et
d'un canon-revolver sur
peut loger cjuarante indigènes
com-
la
terrasse
et
un sous-
européen.
Les petits blockaus de garde de Pac-Luong, Bo-sa et Lco-Kao sont de fortes tours carrées en maçonnerie, comprenant un étage sur rez-de-chaussée et une terrasse défensive sous toiture en tôle (Léo-Kao n'a qu'un étage). Ils peuvent loger sans peine quinze indigènes.
CONSTRUCTIONS ET ROUTES
201
Les aulres travaux du seclcur, v compris
aux blockaus
d'accès
et postes
chemins
du commandant
entrepris sous la direction immédiate
du
les
déjà mentionnés, ont été
secteur.
Nommons
—
les
plus importants:
Le poste de Xa-han pour un
officiers
européens
et soixante
officier,
indigènes
;
deux sous-
commencé en
mars 1890, achevé en août (moellons et bric|ues, coucomprend un blockaus à étage pour la
vert en tôle)
;
un bâtiment flanquant renfermant le logement de l'officier, un poste de police, une demi-enceinte en troupe,
maçonnerie avec emplacement pour deux pièces de 80 et les communs du poste en sous-sols. Xa-han n'a pas coûté plus de 4. 000 piastres (i 1,000 francs). Tous les faux frais se sont trouvés supprimés
de montagne
;
les plans, les
études, la surveillance des travaux ayant
été fournis par les officiers la
du
secteur
et
main-d'œuvre (terrassements, abattage
des
bois
de charpente,
par
etc.),
les
une et
partie de
préparation
du
tirailleurs
poste.
—
—
Le hlockaus de Son-Ta
provisoire, en pisé
couvert en tôle, construit en décembre 1894» janvier
et
février 1890.
— Le poste de
Bao-Lam, dont la reconstruction a commencée en juin 1890, devait comprendre, après achèvement un rez-de-chaussée en briques couvert en été
:
tuiles,
de i3 mètres sur
6,
pour trente indigènes.
blockaus en briques contenant officier
européen
et
un
le
Ln
logement du sous-
étage servant de plate-forme de
garde sous toiture en
tuiles.
Les deux bâtiments
se
flanquent l'un l'autre. Le travail se poursuivait en juin 1895, à l'économie,
d'œuvre des
et
tirailleurs
en grande partie par
du
poste.
En
y mettant
la
main-
le
temps
EN TEKUIÏOIRE MILITAIRE
io-?
ncccssairc,
on pouvait arriver
conditions
convenables
à le construire dans des
pour un millier de
])iaslres
(2,Goo à 3,000 francs). Les travaux
si
urgents d'ouverture de routes nou-
velles et de réfection des anciennes étaient
lèlement aux constructions, dans
menés
paral-
limite des fonds
la
disponibles.
Toutes
les études,
piquetages ainsi que
tracés,
direction des travaux revenaient aux officiers de
Dang. La surveillance
et
la
la
Dong-
conduite des chantiers
étaient assurées par des sous-officiers, des caporaux et
des soldats choisis dans la compagnie de légion.
travaux d'art, ponceaux en maçonnerie, culées,
Les
mon-
tage de ponts en fer ont été exécutés par des soldats de la
même
compagnie. Les terrassements, par des ouvriers
chinois.
Depuis
le
mois de mai 1894 nous avons
ainsi cons-
truit:
—
La.
Dong-Dang
roule de
à
la
(remplaçant un mauvais sentier). carrossable, largeur
10 pour
minima
porle de Chine
3''™,8oo de route
3 mètres, pentes
maxima
100, caniveaux et ponceaux en maçonnerie,
En
sans empierrement régulier.
quelques parties rocheuses
terrain accidenté avec
(le prix
de revient
était
de
7G cents (3 francs environ), le mètre courant \ compris ponceaux et roquetage, les explosifs étant fournis gratuitement).
—
La
réduisait à
roule de
une
fossés, î^vec des
même le
Dong-Dang
piste
à
Langson qui
dépourvue de caniveaux
et
se
de
pentes que n'abordaient pas sans risques
les petites charrettes à buffles et
plus souvent effondrés, a
dû
des ponts en bois
être refaite entièrement et
CONSTRUCTIONS ET ROUTES le tracé
dans
ao.H
changé en plusieurs points. La partie comprise
le secteur (7
kilomètres) fut ainsi peu à peu remise
en état du mois de décembre 1894 à juin iSgô. Sur ce parcours, la route présente actuellement une largeur de 4 mètres, des pentes inférieures à 10 pour 100, un
empierrement veaux
solides.
peu près régulier, des
à
fossés, des cani-
Les passerelles de madriers ont été rem-
placées par sept ponts en fer sur culées en maçonnerie,
dont un de 18 mètres en deux portées.
— La roule Cao-Bang) d'argent. faites
de Doncf-Dang à
n'avait
pu encore
Les rectifications
cependant
et
assez larges
pour
le
(route de
les
faute
plus urgentes étaient
permettaient la circulation en tous
temps. Trois ponts en
deux passerelles en
Na-cham
être refectionnéc
fer sur culées
en maçonnnerie
et
acier de 18 et 20 mètres de portée,
passage des petites voitures, étaient
en place.
En
dehors des routes carrossables, tous
étaient réunis
les
blockaus
au poste central par des chemins cava-
liers construits à
peu près complètement par
les
corvées
indigènes et la main-d'œuvre militaire. Ces chemins d'accès, ouverts
représentent à
un
en terrain rocheux assez gros effort.
et
très
Celui de
accidenté,
Dong-Dang
et Son-tu avec embranchePac-Luong peut donner un développement
Léo-Kao, Bo-Sa, ><a-lian
ment
vers
d'une Cjuinzaine de kilomètres. Les
sommes affectées aux travaux de route dans le Dong-Dang de mai 1894 à juillet 1895 s'éle-
secteur de
vaient a 8,228 piastres (22 à 28,000 francs).
Eu
présence des travaux considérables entrepris pour
notre installation,
un témoisnaiie
il
était
bon de donner aux habitants
direct de bienveillance, en dotant le pavs
KN TEIIRITOIRE MILITA IRE
2o',
de quclfjiics constructions spécialement destinées à leurs
que le gouverneur Dong-Dang, approuva le projet d'y construire un marché couvert et une résidence indigène pour remplacer la maison tombant en ruines où était logé le tri-cliau. Il accorda môme un premier
besoins. C'est dans cet ordre d'idées
général, de passage à
crédit de
5oo
piastres
pour chacune de
ces construc-
tions.
Les travaux conduits, en faisant appel pour
les
trans-
ports aux corvées indigènes, furent mis en train en
mars iSqS
Un
et
achevés dans
le
courant de
premier corps de marché
36 mètres sur 8
en pierres
juillet.
(le seul construit),
formé de piliers en briques sur
est
taillées,
de
socles
supportant une charpente en bois
couverte en tuiles. Les deux extrémités sont fermées
par des façades, brique
et pierre, à trois arcades.
La résidence indigène comprend un bâtiment de 18 mètres sur 8, en pierres apparentes avec bordures en
briques et ornementation dans
le stvle chinois,
entouré
de dépendances.
La
solidité et
avalent
fait
l'aspect
soigné de nos constructions
bonne impression sur
l'exemple semblait
devoir lui
travaux utiles renaissait avec
population et
la
profiter.
la sécurité
Le goût des
retrouvée. Plu-
sieurs maisons solides et convenables s'élevaient à
Dong-
Dang ou dans
même
les villages
environnants.
Il
arriva
du village de Ha-Lung, à quelques kilomètres de Dong-Dang, vinrent me trouver pour me prier de construire à leurs frais, sur un petit arroyo de 12 à i5 mètres de largeur, un pont que l'eau ne que
les
notables
puisse pas emporter. Je leur pierres taillées
et
ment, une borne
fis
deux arches
solides
de
en mémoire de cet heureux événel'ut
dressée au bord
du
ruisseau,
men-
CONSTRUCTIONS ET ROUTES
:,o5
tionnant, en caractères chinois, pour leur allirer
bénédictions des passants,
le
nom
des donateurs
les
et celui
de l'architecte. Enfin, dans
le
courant de juillet 1890, rachèvemenl
des indispensables travaux d'installation
nous permit de montrer aux indigènes de
la
mémoire de
Un
nôtres.
les
de sécurité respectueux
que nous savons honorer
leurs morts,
petit
et si
monument en
pierres taillées de
quatre mètres de hauteur couvre maintenant de sa croix blanche la sépulture de nos soldats.
De dimensions
modestes,
il
porte cependant lui aussi
caractère définitif de nos
le
constructions nouvelles.
C'est notre sceau de vieille nation catholique
pour continuer à remplir France
s'est
la
venue
là
mission séculaire que
la
imposée autrefois
encore dans l'œuvre de
et
qu'elle revendique
la civilisation
chrétienne.
^ oici pour donner, en terminant, la note pittoresque
rendre l'impression produite par nos travaux sur
et
visiteurs qui
montaient jusqu'à
extrait des articles
Courrier
dans
le
M.
de Cuers'.
J.
la frontière,
déjà cités, parus en janvier 189G, d' Haïphonrj,
sous la signature de
Lang-son,
M.
(c
le
le
5
janvier.
colonel Gallienl, cjui vient de passer le
mandement du deuxième M.
les
un nouvel
territoire à
com-
son successeur
colonel de la Folve de Joux, tient à visiter avant
La
il est ici fait mention eut lieu huit ou dix départ définitif de Dong-Dang. J'avais passé mon commandement à M. le capitaine Famin, de 1 infanterie de marine, le 3 4 décembre.
I.
visite
jours après
dont
mon
Grandmaisox.
12
EN TERIUTOlllE MIEITAIUE
ani]
(le nai lir les
ciilre
iK'cs
hh^ckliaus, les roules iiouNclIcincnl Icriui-
Dong-daiig
et
Na-cliain,
bien voulu
a
cl
proposer à M. Tlionié cl à moi de l'accompagner dans celte excursion cpii
On
«
a
promel
d'èlre fort intéressante.
beaucoup parlé du système de surveillance
élabll sur la frontière
:
fumisterie disent les uns; orga-
Moi-même, sur
nisailou admirable assurent les autres.
des renseignements,
sur ce sujet, aussi
j'ai
beaucoup
mon
depuis trois ans
écrit
désir est-il
grand de juger de
visu de ce qui a été fait et de ce qui reste à faire, des résultats obtenus et de ceux à espérer.
Ma ('té
dit
colons,
curiosité est encore piquée par tout ce qui à Lang-son depuis
où
trois jours,
unanimement, professent pour
le
m'a
officiers et
colonel Gal-
lieni l'admiration la plus vive. 3 lieuros.
Rendez- vous
«
est pris
sur la rive droite
du Song-ki-
Kong, au débouché du pont de Kilua. Déjà l'escorte, une quarantaine de linli-co à clieval commandés par deux
sous-ofTiciers de cavalerie, attend
au haut de
la
berge.
«
En
«
Les trompettes sonnent.
c(
En
fanion
route pour Donn-dani»
!
jî
pointe, à loo mètres, trois cavaliers et le porte-
du commandant du
territoire.
groupe formé du colonel Gallieni, lui le peloton
moi
;
les
et
Puis un
un peu
de M. ïbomé, du capitaine Auriac
chevaux essaient de mordre
font vite connaissance
et, la
d'un pas allongé pour suivre va d'un train d'enfer.
et
petit
derrière et
de
de ruer, mais
ils
bride sur le cou, marchent le
poney bai du colonel qui
CONSTRUCTIONS ET ROUTES Enfin
«
quand
gros de l'escorte par quatre, puis par deux
le
chemin devient plus étroit. De Lang-son à Dong-dang la route
ce
207
le
est carrossable.
Désireux avant tout de sortir de l'éternel provisoire,
remplacé partout
Gallieni a
colonel
chaque année, par des passe-
Lois qu'il fallait refaire
en
relles
fer,
commandées
main-d'œuvre militaire
à
la
maison Le Rov
montées sur place
les a
;
pendant que les corvées empierraient Aucune route du Délia n'est meilleure.
Peut-être
«
peu
forte,
le
premier jour,
la
hi
et a
bâti les culées
chaussée.
le
ponceaux en
les
la
dépense a-t-ellcété un
mais du moins on ne sera plus obligé de
la
recommencer. « le
En
causant à bâtons rompus de l'avenir de ce
colonel revient sur sa préoccupation constante
— tions
«
J'ai
voulu marquer à
du pavs
nous, que
la
n'était pas
années seulement. Si sacriiices,
c'était
conquis par «
ses
Chine
et
venue
ici
pour quelques lourds
elle consentait à d'aussi
pour garder à jamais
armes.
Tout a concouru
aux popula-
demandais d'avoir conllancc en
à qui je
France
la
jiavs,
:
le
territoire
»
h ce but.
Les constructions impor-
Dongmaçon-
tantes de Lang-son, les casernements luxueux de
dang
de ?sa-cham,
et
le
réseau de blockhaus en
nerie jalonnant la frontière en face des forts cliinois, et
même
la ligne
du chemin de
pensée
ôtcr à notre occupation ce caractère de provi-
:
fer,
ont été inspirés par
la
si longtemps, et que les mandarins du Quang-si ont si bien su exploiter. Déjà, les mamelons dénudés de Lang-son se cou-
soire qu'elle a gardé
militaires c(
vrent d'une végétation plus riante. Voici les premières plantations de badiane. C'est déjà, et ce sera surtout
dans quelques années
-
—
si le
gouvernement
se
décide à
EN TERRITOIRE MILITAIRE
2o8
encourager
De
«
la
— une
culture
pour
richesse
jolis villages, çà et là^ à
la
contrée.
mi-côte de vallées dont
courbes de niveau inférieures sont tracées par des
les
de
talus
formant
rizières,
comme
les
gradins d'un
amphithéâtre immense. Dong-dang,
Au
«
bas de la pente,
3 heures.
une cinquantaine de maisons
neuves, bordant trois ou quatre rues qui se croisent. C'est le village de
Dong-dang. Partout des constructions
en briques ont remplacé de décoration chinoise
les paillottes.
Une jolie
très pure, a été bâtie
pagode,
pour loger
quan-chau.
le
La route contourne un dernier mamelon sur la comme une toile de fond, le casernement ap-
«
;
hauteur,
paraît soudain,
On nous
«
avait
tant
dit
ce
déflore à l'avance les impressions ^lais
«
devant
compare par
les
«
vous verrez
»
qui
!
bâtiments d'un style sévère, que je
pensée aux misérables paillottes du
la
quartier d'infanterie et des subsistances à Haïphong,
j'éprouve une véritable satisfaction à constater qu'ici au
moins fois
il
tion le
De elle
le
Protectorat est sorti de l'ornière.
Ce casernement
«
faut tenir
a coûté cher? c'est possible.
compte qu'au moment de
chemin de
fer
Toute-
sa construc-
ne venait pas jusqu'à Lang-son.
quel priv de transport efïroyable l'entreprise n'a-tpas été grevée dans ce pays perdu,
et la «
Mais
l'elTet
cher. Songez
deux
où
tout, la pierre
chaux exceptées, devait être apporté de
fort loin.
moral produit ne saurait être paye trop
donc que
pas, regarde chez
Chine, dont
la frontière est à
nous par tous
ses forts étages.
la
CO^STRL(:ïlONS ET ROUTES
Casernement de Dong-dang
«
du même modèle. La
cliam sont
et
casernement de \a-
description
Une
m'évitera de m'étendre sur le second.
rence
:
Dong-dang on
à
apparente tout
a
Xa-cliam tout
à
;
employé est
209
en
du premier seule ditlé-
pierre
la
laissée
Mais par-
bricpies.
M. Clément, l'entrepreneur, en a donné au Propour son argent. C'est un très beau travail, très
tectorat
lini, très
ciers,
>ée
soigné.
Deux grands bâtiments
«
:
à étage
:
pavillon des ofil-
logement des soldats européens.
cbambres spacieuses, bien
En
a
Quel quartier militaire en France
contre-bas, de vastes citernes
pris, plus confortable
àl'étaoe
et les
est
tirailleurs
est
:
des
communs.
mieux com-
?
Sur une extrémité du mamelon, un blockhaus
formant réduit
«
;
rez-de-cliaus-
aérées.
«
ce
Au
mander, bureaux, magasins
salles à
fait
isolé
pour recevoir une section de
ou de garde indigène.
Plus loin, à
l'écart, le
cimetière militaire avec partie
réservée pour les indigènes flanc de coteau v conduit
non
catholiques.
L ne route
à
en dix minutes. Déjà bien des
tombes pieusement entretenues, abritent
dernier
le
sommeil des victimes du devoir. «
Au centre, une
monumentale. Sur
croix de pierre
vm soubassement de forme carrée, M. le capitaine de Grandmaison a fait graver l'inscription « aux soldais morls pour la France ! » « Sur la pente, près du chemin qui monte vers les casernes, la gérance du service administratif, la bou:
lano^erie, etc. « ^lais le
a disparu,
tour du propriétaire
est
achevé. Déjà
pendant que nous regagnons pour
d'avant-dîner
le gîte si
aimablement
le
jour
la toilette
offert.
12.
EN TERIUTOIKE MILITAIRE
2IO
l)onu;-t]anii: csl
«
(|n('l(|U('s
noyé dans
nuit (|uV'loilenl seules
la
lumières des maisons eliinoises où l'on
Neille
tard.
janvier.
Dans
«
sur
la
«
la vallée
couverte de
brume
la
pointe s'enuairc
à
chaque instant
route de Na-cham.
La
frontière chinoise est proche
;
par des déchirures de mamelons, on découvre quelque fort chinois. Aussi les villag^es sont- ils sur leurs gardes.
Pour nous montrer surveillance, le veille
fonctionnement du système de
le
commandant du
au quan-chau de
territoire a prescrit la
prendre
faire
les dispositions
d'alarme sur 25 kilomètres environ, entre Dong-dang et
Phai-bung. Tous
dépressions
même ou de
nois d'entrer
perjiendiculaires à la
les sentiers
frontière, tous les passages,
tous les cols, toutes les
pouvant permettre à des pillards chisortir, sont
gardés par des groupes
de 4 à 5 hommes, ïhos, Muongs ou \uns, armés de fusils iS-l\, la ceinture
crénelé le
du
garnie de cartouches.
village, le reste des habitants
Au
réduit
en armes avec
li-thuong. «
C'est
un
véritable coniin militaire
tière ainsi organisée.
volontiers
comme
Partout
la
à cette obligation,
que
popvdation
cette fron-
s'est
soumise
peu gênante du
reste,
murmurer, de construire et d'entretenir les chemins qui relient les blockhaus. Pour iAlc c'était une question de vie ou de mort, de sécurité elle a accepté,
sans
assurée ou de pillages continuels
;
elle l'a comjirls et n'a
pas liésité à se mettre carrément de notre côté.
CONSTRUCTIONS ET IlOLTES
2n
Lco-kao, H heures.
«
Sur un
environs
pic escarpé,
et la ligne
dominanl toutes
des fortins chinois,
les vallées
des
blockhaus de
le
Leo-kao
—
\ous descendons de cheval pour faire l'ascension mot n'a rien d'evagéré du sentier cpii permet d'v
« le
—
accéder.
11
coups de dynamite dans
a fallu le tracer à
rocher presque vertical, et au sonunet,
même, «
un mètre
écrètéc sur
Le blockhaus
est
Gare
à peine.
perché sur
la
pointe
])late-formc n'a pas 20 mètres de largeur.
peine, l'ancien poste chinois sur
A
le
suit l'arête
il
le vertige
du
!
pic, et la
i5o mètres à
un mamelon dominé.
Gènes par ce voisin toujours aux aguets,
les
Chinois se
sont reportés plus en arrière. «
De Lco-kao, où flotte gaiement
nous voyons des réguliers tructions
;
Deux
le
le
:
tricolore,
poste abandonné.
sortes de blockhaus
:
ceux de Leo-kao
Bo-sa qui se répèlent fréquemment tière
drapeau
aux nouvelles cons-
d'autres font tomber les cjuelques paillottes
encore debout dans
(c
travailler
long de
le
la
et
de
fron-
simples bâtiments carrés à étage, et crénelés, où
(pielques lin lis,
une douzaine tout au
plus,
peuvent
tenir de longues heures contre 100 Chinois. D'autres, c connue ceux de ^sa-han et de Phaï-bung, véritables petits
casernements pouvant recevoir un peloton, avec
logement «
d'olïicier, et
enceinte flanquée.
Le blockhaus de Bo-sa,
visité
en toute hâte,
en plaine, au point de convergence de surveille étroitement.
Comme
de Po-mou, tout voisin,
il
celui de
ferme
la
est bâti
trois vallées qu'il
Leo-kao
et celui
porte à l'infiltration
partant de la frontière chinoise qui est à deux pas, et
EN TEIUUTOIUE MILITAIUE
212
venant menacer
la
grande roule directe de Dong-dang à
Na-cham. Na-lian, 9 heures.
«
M.
le
lieutenant Fialix,
commandant le poste de du colonel, entre Leo-kao au commandant du terri-
Nalian, est venu à la rencontre et
Bo-sa; et après avoir
toire les
de
fait
honneurs de ce dernier blockaus qui dépend
au galop pour devancer à Na-
lui, cet officier part
lian notre petite troupe. «
Xa-lian
est
bien
le
plus « joli » poste qu'on puisse
rêver, et aussi le plus parfait ce
comme
installation.
Est-ce poste, est-ce blockhaus qu'il faut appeler ce
casernement
si
coquet,
espace assez restreint
manque aux on ne
si
si
confortable!^ Oui, car sur
rien n'a été oublié,
du détachement
aises
voit partout
qu'embrasures
se flanquent, et pas
un
destiné à l'occuper,
et
créneaux,
produit «
le
Grandmaisonqui
«
de
taille,
î
encore
M.
Gomme
le
la
ici
capitaine
de
l'entrepreneur
ont peut dire que
c'est
le
chef-
la
promenade matinale a aiguisé les apdéjeuner du lieutenant Fialix reçoit
l'excellent
blissement de ce blockaus. »
:
l'ensemble
cet officier.
un formidable assaut. « Le colonel raconte, en déjeunant, gnet
et
effet.
c'est
est l'architecte, et aussi
avec ses légionnaires
pétits,
la pierre
plus heureux
Naturellement
d'œuvre de
construction,
la
plus minutieux ont été apportés
brique est mariée à
murs
les
coin n'est perdu pour la défense.
Quelle merveille d'ingéniosité. Pour les soins les
un
rien ne
si
du nom du
établi sur son
On
l'histoire
doit l'appeler «
de
lieutenant qui, le premier,
emjîlacemenl un posle provisoire,
été tué en le défendant.
l'éta-
Langroavait et
a
CONSTRUCTIONS ET ROUTES Toute
«
celle région élalt
une colonne
les
2i3
un nid de pirates. Quand commandanl du ter-
eul bousculés, le
décida d'occuper solidement le pavs pour les
riloire
empêcher d'v revenir. Ceux-ci voulant débarrasser de la surveillance
à tout prix se
mettait fin à leurs
cpii
exactions, firent longtemps la guerre aux postes en for-
mation. Toutes
les
nuits c'était une nouvelle attaque
;
sous les pas des reconnaisances, chaque jour, quelque
On
nouvelle embuscade était préparée.
temps de palissader
core eu le
bandits
les
quelques défenses
de
de l'entourer
de
profitant
M.
saut à l'improviste.
accessoires,
l'obscurité
le
n'avait pas en-
poste de Na-han,
le
donnèrent
que l'as-
lieutenant Langrognet fut
tué à la tête de la petite garnison. «
A
Bo-sa, pour arrêter
les
travaux, les Chinois as-
sassinèrent le caï, leur compatriote, qui fournissait les
maçons «
et les charpentiers,
En
dépit de cette résistance acharnée, les blockliaus
sont debout maintenant, défiant toute attaque, et les pirates découragés ont «
Mais
il
faut
quart d'heure de
avant «
et
il
la partie.
à cheval, alors
sieste aurait tant
longue encore
est
abandonné
remonter
Sur
boisées
la droite, le
le
petit
la
route
importe d'arriver à Xa-cham
blockhaus de Son-tu, au sommet
;
la vallée
semant des torrents sur plu à
les
lui,
des collines
profonde s'enchevêtre de plus en plus
On
ses pentes.
teur, avant de les laisser
tomber de
dirait
sa
tordre et les convulser.
orcbidécs accrochent leurs grappes est
;
la nuit.
d'un pic dénudé. Partout autour de
s'est
que
de charme
;
que
main
Aux
le
créa-
puissante, arbres, des
sur le sol, la mousse
piquée de milliers de violettes, hélas sans parfum.
»
CHAPITRE
VllI
L'occupation complète des hautes régions était-elle nécessaire?
—
— Agriculture. — Possibilité de colonisation européenne. — Régime de propriété. — Impôt. — Industrie. — Commerce. — Avenir de région. Caractère du pays.
la
la
la
Nous avons
depuis quelques années, clans
fall,
hautes régions
un
du ïonkin,
effort
les
considérable.
L'importance des résultats obtenus ne peut plus être contestée.
En
pacifier, à
gouverner
suivant la voie ouverte, nous arriverons à et à faire progresser ces
immenses
territoires.
Mais
il
est
permis de
était nécessaire.
ne
sont-ils
pas
se
demander
Les dépenses
disproportionnés
probables de l'entreprise.
si
un
et les sacrilices
avec
les
La question
a
tel
eflort
consentis bénéfices été
posée
souvent.
Liconteslablement chose
était possible,
il
riches d'un pays. C'est
ïonkin que les
serait plus
avantageux,
si
la
de limiter sa conquête aux parties
un
projet longtemps caressé
celui de coloniser et
provinces basses en limitant
au
d'occuper seulement la prise
de possession
des régions montagneuses à une surveillance très somluaire.
ne
Malbeureu.sement,
peut être
réellement
c'est
une utopie. L necontrée
tranquille
cpi'à
condition
d'a\oir des frontières nettes. Les marges vaii:ucs sont en
MISE EN VAEEL'R DES HALTES RÉCJIONS
une source pcrniaucnlo
tous pavs
dance générale
souvent
et
crinsécuiilt'.
qui
irréilécliic
?,:,
La ten-
pousse
les
avant-gardes européennes vers l'intérieur, dans tous liinterlands
y compris
africains,
sud algérien,
le
les
est
une manifestation caractéristique de l'appréhension des voisinages inconnus. Xous ne pouvions en Indo-Chine échapper à cette stahle
que
côtés
à
le
nous n'y trouverons
loi et
d'éc|uilihre
jour où nous nous serons heurtés de tous
des
Chine,
véritables:
frontières
Siam. C'est du
restes, sous la pression des
nous l'avons vu
et
un peu
Birmanie,
événements,
à contre-cœur,
qu'on
s'est
décidé en 1S94 à marcher franchement. Il
donc sage d'accepter sans
est
nations
cette
charge
nécessaire
et
inutiles récrimi-
de chercher
les
movens de rendre moins onéreuse l'occupation de ces nouveaux domaines. ^"ous avons réclamé pour eux un régime militaire et exceptionnel.
politique
même
Il
nous
montrer que,
reste à
au point de vue économique, ce régime d'excep-
tion s'impose.
Recherchons donc de bonne pitre ce
foi
dans ce dernier cha-
qu'on peut attendre de l'avenir agricole, com-
mercial et industriel de notre région de Langson. ressortira j'espère de cette élude
ne point
faire d'illusions
se
incapal)le, à
mon
sens,
que
s'il
est
sur l'avenir d'une région
d'enrichir nos colons,
compter au moins qu'elle arrivera dans suffire sans grever l'ensemble
11
prudent de
de
la
on peut
suite à se
la colonie.
néolin-erons le travail de reconstitution écono-
Xous mlque qui
s'est
acconq^li parallèlement à la réorgani-
sation polilique et
équilibre
prendrons
normal vers
la
fin
le
pays revenu à son
de 1890, pour y analyser
EN TRIUUTOIliE MILITAIRE
iC.
Irrs hrirvcMiionl les principales cpicslions (pii iiilércsscnl
son tlévc'loppenicnl
iiialcricl.
CARACTKRE DU PAYS
lui
Uycn
;
C{ui
(^eci
la
ici (le
Il s'ai;il
pour
c'est là
Dong-Dang ou, du Cliau de Van-
circonscriplion de
donner son
nom
oiliciel,
qu'ont été recueillis
renseignements
les
suivent et je tiens à leur laisser ce caractère local. posé,
j'ajouterai
que
l'aspect
la constitution
et
Haut-Tonkin. La plupart de nos observations peuvent donc s'applicjuer dans un rayon fort étendu. Le Cliau de Van-Uyen comprend sept cantons répartis sur les deux rives du Song-Ry-Kong, dans la région de hauts mamelons et de rochers, où cette rivière, de ce territoire sont très répandus dans
le
après avoir arrosé Langson, dessine le grand coude de
Yan-Quan pour remonter Cliam, où
elle
Le Song-Ry-Kong hauts affluents de
de Langson
et
au nord. Cette
la différence
est,
comme on
la rivière
de
grande partie sur face
ensuite vers le nord, à JNa-
devient navigable à la petite batellerie.
le
le
sait,
un
des
de Canton. Les provinces
Gao-Bang
se
trouvent
versant chinois
donc
en
du Haut-Tonkin,
disjDOsition explicjue, avec l'altitude,
de climat
et
de cultures entre cette fron-
tière et les provinces basses.
Malc;ré son d'èlre l'artère
volume assez fort, le Soni^-Rv-Rons:, loin du pays, n'en forme qu'un accidenl,
d'inqiorlance secondaire. Les rives
carpées
el
peu prallcables,
un
obstacle à la
voie de pénétration.
d'un cours irré-
encombré de rochers circulation bien plus qu'une
gulier, torrentiel par endroits et
en font
généralement es-
les diflicullés
CARACTÈRE DU PAYS
En dehors du Song-Ky-Rong, par quelques-uns
dont
débit niais
217
Chaii
le
arrose
est
de ses aftlucnts, arrovos de faible
les
vallées
constituent les
même
culture et d'habitation en
temps que
zones de lignes
les
naturelles de circulation.
Ces vallées d'arroyos, souvent assez larges
et
de mamelons bas, sont généralement habitées
bordées bien
et
cultivées.
Entre
elles,
s'étendent de vastes massifs de
élevés et quelquefois de rochers broussailleux
La population y
peu près nulle
est à
et les
mamelons ou
boisés.
communi-
cations s'y réduisent à quelques mauvais sentiers.
Ces mamelons incultes couvrent de vastes surfaces.
Leurs pentes raides tapissées de brousse ont été déboisées peu à peu par les incendies qu'allument en hiver les
habitants dans le but de se procurer au printemps
des pâturages pour les buffles. Les gorges seulement et
quelques pentes garanties par leur humidité sont encore boisées.
Ln rameau lette
de
la
formation calcaire du Kaï-Kinh
Chau SO-XE.
traverse le
du squemouvements du sol et eaux du ciel, qui supporte le C'est l'affleurement
rocheux, bouleversé par
sculpté par le travail des
Tonkin.
On
les
en retrouve par endroits
les
les
gorges étroites et le chaos
si
la
baie d'Along jusqu'à
centaines
Chine. Dans
les parties
des
où
le travail
trarié par la végétation, n'a pas été
pour atténuer mater
les reliefs, rectifier les
les dépressions,
de lieues
en
de l'érosion, con-
suffisamment
actif
déversoirs et col-
pays présente l'aspect tout à
d'un terrain inachevé au point de vue topo-
fait spécial
graphique
le
pointes aiguës,
caractéristique depuis
:
suites de cuvettes et de cirques sans
lement apparent, régime hydrographique Grandmaiso.x.
très
écou-
Incom13
EN TERRITOIRE MILITAIRE
2i8
plct et souvent incompréhensible,
perles soudaines de
cours d'eau...
Ces fonds de cirques
isolés
ou communiquant par
des gorges étroites, se sont en partie cependant remplis d'alluvions et portent des cultures peu étendues mais
souvent excellentes entourées de
falaises à pic
au pied
sommet broussailleux. Le rameau qui se prolonge à travers le Chau de Dong-Dang du sud-ouest au nord-est, traverse le SongKy-Rong dont il produit les rapides et le coude brusboisé et au
que en aval de A an-Quan, puis
s'abaisse et devient
visible à
hauteur de Dong-Dang pour
nord où
il
On
forme
communes de tité
le
trouve dans
trop faible
insuffisante
bois
massif abrupt que suit la
la frontière.
bonnes essences
région d'assez
pour
et, à
peu
se relever vers le
la construction,
mais en quan-
de rares exceptions près, de qualité
pour permettre une exploitation commer-
ciale.
AGRICULTURE L'agriculture est actuellement et sera probablement
toujours
le seul
moven
d'existence, la seule richesse
du
pays de Langson.
Les indigènes se montrent, nous l'avons
dit,
assez
bons agriculteurs à l'exclusion de touteautreprofession.
La principale culture et de beaucoup la plus développée du riz. Cultivé avec soin dans les terres arro-
est celle
sables et dans les fonds de cirques,
bonne
certaines rizières, actuelle surpasse rait
le riz
donne une
récolte et tout à fait exceptionnellement, dans
deux
récoltes par an.
un peu
la
La production
consommation. Elle pour-
augmenter dans des proportions
assez fortes par
AGRICULTURE une
219
augmenterait beaucoup
irrigation qui
surface
la
des terres arrosables et surtout par l'usage des engrais.
La fumure peu
actuellement tout à
est
insuffisante et
fait
régulière.
Le Thôs,
de
petit excédent
peu près
est à
riz,
que produisent
les villages
seul produit d'exportation, la
le
seule matière d'échange cjui permette aux habitants de se
procurer
Chinois.
les
Cet excédent, limité par paresse au a suffi jusqu'ici tière étant et
opium
les objets fabricpés, fruits, bestiaux,
que leur fournissent
;
la
strict nécessaire,
contrée chinoise qui borde la fron-
pauvre en
sans communications faciles
riz,
plus peuplée que sa fertilité ne le comporte. Mais
nous verrons en parlant du commerce conditions
Cjui lui
carrossables
et
denrée
est
celte
du chemin de
surtout
en train de perdre la
augmentée, ne
pour paver
suffira plus
chinoises et alimenter le les
production du
commerce
les
riz,
local. et
ne peu-
le
maïs, ont
créer d'autres ressources en cultivant
un peu de
de l'indigo, des haricots rudimentaire. Mais
ils
et
en
môme
importations
?Sungs qui n'ont pas de rizières
vent guère cultiver en grand que
comment
fer,
sa valeur d'échange.
Dans un avenir rapproché,
Déjà
et des nouvelles
sont faites par l'ouverture des routes
se livrant à
dû
se
coton,
une industrie
sont inférieurs en tout aux Chi-
nois et leurs produits n'ont qu'un débouché local insignifiant.
Pour déjà,
il
éviter
une
crise
faudra donc
Tonkin développent cole.
dont
cjue
et
le
le
mal dont
encore la cause
et
de
fait
sentir
modifient leur production agri-
C'est à l'autorité française
de prévoir
malaise se
nos populations du Haut-
lui
le
qu'incombe
jNlia-què ne
en indiquer
le
la
charge
soupçonne pas remède.
EX TERRITOIRE MILITAIRE
220
de se créer des ressources nouvelles en obtc-
s'ault
Il
liant
produits
des
comme
le
riz,
qui peuvent
Parmi
les
n'entrant
en
pas
concurrence,
avec ceux des contrées plus
favorisées
céder à meilleur compte.
les petites
cultures
du pavs on en trouve peu
qui remplissent ces conditions.
Le coton nain pousse bien mais son rendement est fait insuffisant pour qu'il puisse être question de
tout à
le cultiver
dans un but industriel.
L'indigo réussit mieux
Actuellement
encore.
les
plantations sont limitées aux faibles quantités nécessaires trie
pour teindre
primitive tend,
cotons indigènes. Cette indus-
les
du
devant
reste, à disparaître
importations croissantes d'étoiles fabriquées Serait-il possible d'étendre la culture
de l'exportation?
La canne
à
—
ne
je
de l'indigo en vue
le crois pas.
seulement à
cultivée
sucre,
plante potagère dont
les
et teintes.
de
l'état
indigènes sont très friands,
les
donne de beaux produits. Le
sucre, sur la frontière
vient de Chine et coûte cher.
Mais
connaissent pas la fabrication
et les
les
habitants n'en
débouchés prévu
ne sont pas suffisants pour rendre productive une ex
En outre, mêmes terres
canne
ploitation de quelque importance.
la
sucre réclame à peu près les
que. le
et ce sont
poniblcs.
précisément
Le
thé,
le
seules qui ne soient pas dis
les
pavot
et le
mater. Le tabac existe déjà
Dang
et
Kv-Lua deux
à
riz
et
tabac peuvent
s'accli-
on trouve entre Don
petites plantations
de thé, assez
fructueuses paraît-il, appartenant à des Chinois.
Toutes ces cultures, porter de plus loin,
comme
le café
essais longs et coûteux.
Il
celles
qu'on voudrait im-
par exemple, exigeraient des
serait intéressant
malgré tout
d'en essayer quelques-unes. Le tabac par exemple
et
AGRICULTURE pcut-ctre
le
pavot à
opium qui
221
se prêtent bien à la pe-
culture et sont de manutention
tite
^lais les
cantons voisins de
facile.
Dong-Dang
ont la fortune
de posséder déjà une plante de bon rapport, connue
et
appréciée des habitants, capable de donner des résultats excellents et dont les plantations existantes fournissent I
!
'
un
stock suffisant pour permettre de s'assurer la supé-
riorité
de production sur
les
régions
cpii
tenteraient de
l'acclimater. C'est la badiane.
Après étude du terrain pays,
il
et
mœurs
des
agricoles
semble pouvé qu'aucune culture ne
du
lui convient
mieux. Tout en cherchant donc à développer quelques plantes annuelles à sucre, la
comme
ou à encourager
badiane que doit
se
le tabac, le
la
pavot ou la canne
plantation
du
thé, c'est sur
concentrer l'attention.
La culture de la badiane peu répandue encore au Tonkin en dehors de quelques cantons (le Chau de
Dong-Dang
un de ceux qui en produisent le plus), mal connue pour qu'il soit utile d'en parler ici avec un peu plus de détails et de rechercher les movens propres à la faire progresser. est assez
est
intéressante et assez
Culture et exploitation de la badiane.
L'huile ou essence de badiane (anis étoile) est duit de la distillation
du
le
pro-
d'un arbre parvenu
fruit frais
à l'état adulte.
Cet arbre à feuillage persistant vert gris, pousse très
grandes proportions.
lentement
Commençant
façon insignillante vers i5 ans, vers
et
peu toufiu, d'un
et n'atteint
il
jamais de
à produire d'une
entre en rapport
18 ou 19 ans. Sa durée n'est pas indétinic
environs de 60 à 70 ans,
il
et,
aux
meurt branche par branche.
22
EN TEKIllTOIRE MILITAIUE
2
On
\v ciilllvo
mêlé
sur
les
pontes des
à d'autres arbres.
mamelons
souvent
boises,
Les plants obtenus par semis
sont mis en terre dans des
ou sous
taillis
bois.
Au bout de
ou quatre ans, il faut ébrancher les arbres voisins pour donner de l'air au jeune plant. L'iiabitude de se
trois
servir des bois
pour procurer à l'arbuste, pendant
premières années, un abri nécessaire contre
un
retarde sa croissance et cause
3o pour loo). siblement
On
les
le soleil,
déchet (environ
fort
pourrait avec plus de soin réduire sen-
les pertes et activer la
La plantation de la badiane Los semis exigent beaucoup de
poussée. est assez dispendieuse.
soins et la valeur
mar-
chande de chaque pied mis en terre peut atteindre trente à cinquante cents (un franc à
La production pas
toujours
un franc cinquante).
rappelle celle de l'olivier et ne correspond
exactement avec
la
période
annuelle.
L'arbre chargé de fruits par une bonne récolte porte il est abîmé par la cueillette et ne donne l'année suivante que quelques fleurs tardives qui tombent souvent sans produire de fruit. Lne récolle
déjà des bourgeons
fructueuse
;
comme celle de 1894 est donc
suivie d'une récolte
habituellement
mauvaise ou presque nulle
comme
en 1895.
Le
au mois d'août
fruit recueilli
dans des appareils très primitifs. béton recouverte d'un l'argile,
dôme en
est distillé sur place
Lne
chaudière en
terre cuite luté avec de
forme l'alambic. Les tuyaux de condensation
et les ajutages sont
souvent en
bambou
assez ingénieu-
sement agencés.
Chaque paysan apporte
sa récolte
au
four banal.
L'essence recueillie dans des bidons en fer-blanc est
vendue au
sortir
ration
répartit
se
de
la
chaudière et
au prorata des
le
produit de l'opé-
apports.
Elle
est
AGRICULTURE par
achetée
223
des Chinois qui parcourent
accompagnés de
coolis porteurs de
les
villages
touques en fer-blanc.
remplissent leurs récipients, pavent comptant
Ils
vont en Chine. Trop souvent, du de
tie
la récolte
leur est
gent. C'est sur sa récolte de badiane,
ïhô emprunte
le
prête car alors prix
cju'il
le
et s'en
une bonne pardue d'avance pour prêts d'arreste,
quand il en a, que Le Chinois s'v
plus volontiers.
prélève les intérêts en nature, pave le
il
veut et réalise de gros bénéfices.
Ainsi exportée, la badiane entre en circulation
com-
merciale par Canton. Elle est recherchée en Europe par
droguerie
la
et la
parfumerie
et s'achète sur le
marché
de Londres. Le picul d'essence (60 kilogrammes)
se
vendait sur place en 1894 de 3oo à 820 piastres (85o à 900 francs).
Il
est
monté en 1896
à
35o piastres (environ
i.ooo francs) ce qui est exceptionnel.
Pour transformer
les
bénéfices incertains des trop
rares propriétaires de badiane en
régulier pour
l'ensemble
du
un produit
pays, trois
sérieux et
choses
sont
nécessaires.
Encourager
la
plantation
Augmenter
le
rendement en perfectionnant
;
la
dis-
tillation: le commerce vers nos ports du Tonkin. Dans un but fiscal on avait primitivement concédé le monopole de la badiane à un Européen. Ce détestable expédient fut dans la suite remplacé par une simple taxe, trop forte il est vrai, et dont l'application mal réglée laisse une large place à l'arbitraire. Actuellement un droit annuel de 25 cents est payé pour chaque arbre en âge de rapporter. Le taux
Dériver
est
exagéré.
Un
pied vigoureux peut dans les bonnes
EN TERRITOIRE MILITAIRE
22^
un
années donner cl
demie ou deu\
bénéfice
piastres.
une
allcli^nant
Mais
piastre
c'est l'exception
;
beau-
coup d'autres, trop jeunes ou trop vieux, ne rapportent presque rien
dans
et
couvre diriicilement Il
s'ensuit (pie
ment
des
les
années mauvaises
récolte
la
la taxe.
nous devons accepter presque
déclarations trop
officielle-
de moitié.
failjles
Cette
situation fausse est aussi préjudiciable aux intérêts
cultivateur qu'à ceux
du protectorat.
du
iNous y reviendrons
en parlant de l'impôt. Les plantations longtemps interrompues par
que de
sécurité
activité.
1890 une certaine
mouvement
qu'il
faudrait suivre et
C'est ce
le
man-
en
encourager par tous
Le procédé
le
avaient repris
les
moyens.
plus efficace serait d'accorder une prime
directe à la culture sous forme,
exonération de taxe,
par exemple,
d'une
au nombre de
proportionnelle
pieds mis en terre dans l'année. Mais
il
faudrait là,
pour é\iter des abus, une surveillance que nous ne
sommes
pas outillés pour assurer.
Le plus pratique !•>
la
De
ramener
à dix
considérable et
On pourrait en rapport
cents au plus. L'elTct moral
le trésor
serait
en définitive v perdrait peu.
au bout de quelques années l'impôt
cliiffre
Donner
est déiinitive.
table et continuel
du lendemain. Or
serait
augmenter ensuite mesure une lormc très ofiicielle
actuel pour
à cette
déclarer qu'elle
la
:
exiger alors l'inscription complète des pieds
et
remonté au 30
serait à notre avis
réduire la taxe dans de fortes proportions et de
Pour
;
le
et
^lia-(pié, le véri-
sujet d'inquiétude est l'incertitude la sécurité et la
confiance sont pour
culture de la badiane plus indispensables que pour
AGRICULTURE
un
toute autre chose. C'est
pour que l'habitant le
se
32 5
placenienl à
terme
loiiii;
décide à en faire les
frais,
il
et
faut
convaincre que de nouveaux changements ne vien-
(h'ont plus enlever à lui travail et
ou
de ses dépenses
à ses enfants le fruit de son
;
3" Distribuer, à titre de secours, des graines et des
plants aux ple,
communes
habitent
pauvres. Les Xungs, par exem-
souvent des terres très propres à cette
culture et l'entreprendraient volontiers
ou de
plants
s'ils
avaient des
l'argent.
Les achats de graines pourraient être
faits
aux com-
munes
riches possédant déjà des plantations
tantes,
en avant soin de
commander
les
impor-
à l'avance et
d'en exi^-er la livraison. Le fruit doit en effet sécher sur D l'arbre
pour donner une bonne graine
difficultés à fournir des graines faire
et
les
produc-
ne consentiraient peut-être pas sans quelques
teurs
aux voisins pour leur
concurrence.
Le procédé
emplové pour
très primitif
ne donne qu'un rendement
faible.
la distillation
Les marcs de badiane
jetés après l'opération renferment encore assez d'essence
pour qu'une tentative
d'utilisation ait été faite autrefois.
Les déchets achetés à bas prix dans
les villages
devaient
être redistillés. Les difficultés matérielles et la méfiance
des habitants ont
Au
fait
avorter
l'alTaire.
lieu de chercher à profiter des
de distillation des indii^ènes,
apprendre de meilleurs.
On
il
mauvais procédés
vaudrait mieux leur en pourrait,
dans ce but,
prêter à quelques villages producteurs des alambics de
bonne
qualité,
analogues
France pour bouillir dans
à ceux qu'on la
campagne
emploie en
certaines fleurs
(comme la lavande). En voyant augmenter le rendement dans une sensible proportion, les autres villages 13.
EN TEIIRITOIIIE MILITAIRE
226
ne larderaient pas à demander à leur tour des appareils convenables dont
ils
pourraient ensuite rembourser la
valeur par annuités.
Une
entreprise industrielle de préparation de badiane
ne ferait pas
ses frais
pour le moment. La distillation coûte
trop peu au producteur pour qu'on puisse trouver dans celle opération la 11
rémunération d'un capital industriel.
faut noter cependant
villages,
pour devenir un
que
l'essence prise dans les
article
commercial, doit être
travaillée et quelquefois rectillée. Peut-être serait-il possible,
quand
production
la
se sera développée, d'obtenir
un produit supérieur, une marque faisant prime, sans augmenter sensiblement le revient défmitif. C'est une question à étudier. sur place et par une seule chaulïe
La badiane
aclielée par les Chinois,
bouillie,
actuellement en circulation commerciale par
de Canton. duit
On
pourrait dériver sur
tel qu'il est livré
exige quelques
Haïphong
ce pro-
au commerce de Chine. Mais cela
précautions.
place, d'enlèvement
entre
la rivière
Le procédé d'achat sur et de payement comp-
immédiat
tant répond trop bien au caractère apathique de l'indi-
gène pour qu'il
soit facile
de l'en faire changer.
faudrait donc se plier aux usages
en relations avec
les petits
un personnel qui opère de la vérité,
la
du pays
et se
11
mettre
acheteurs chinois ou créer
môme façon. On n'aurait,
résolu de la sorte que la moitié
à
du problème
une autre difficulté plus sérieuse se présente. La récolte est presque toujours hypothéquée aux prêteurs d'argent et mangée d'avance. Ce serait s'y et
prendre trop tard que d'attendre tillation
I.
pour l'acheter
le
moment
de
la dis-
^
L'agent européen d une maison J lluïpliong, venu pour
AGRICULTURE
En
loiil élat
de cause,
c'est
227
une opérai ion
de inodltier une liahitude ancienne dans 11
que
nécessaire de n'y employer qu'un personnel
serait
actif, choisi et très
^ ers
dinicile
les campa_i;nes.
le
au courant de
milieu d'août 1890,
Dong-Dang pour
l'alTaire.
un Chinois
se présentait à
compte d'une maison de Hanoï
le
demandant à acheler de la hadiane. Adressé par moi à un notable producteur, il lui offrit sans hésiter 200 piastres du picul d'essence qui en valait à ce moment 55o. Ce n'est point avec des intermédiaires de ce genre que nous attirerons
La
la
badiane dans
le Delta.
véritable culture à encouraofer dans la région de
Dong-Dang
est
donc
la
badiane qui peut arriver dans
suite à transformer sa situation
la
économique.
Les habitants se remettent d'eux-mêmes à planter dès que la sécurité l'avenir.
movens
Il
et
du pavs
faut les pousser
leur permet de songer à
dans cette voie par tous
les
particulièrement en réduisant la taxe dans
de fortes proportions.
Xous avons recherché surtout
jusqu'ici les
moyens
propres à ramener la prospérité chez l'agriculteur indi-
un achat de
m'avait été adressé en iSgô par confirmai dans 1 idée qu il ne ferait rien au moment de la récolle et que le seul système possible était celui de l'aire au cours de Tannée, des avances et des prêts d arircnt remboursables en nature. Il suivit le conseil et avait à la fin de lannée, mis dans le pays lôooou 2000 piastres par lintermédiaire d un chinois de Ky-Lua. Je n'ai pas pu suivre le résultat de cet essai, intéressant cependant et utile à encourager, même dans lintérêt du producteur, à condition que 1 intérêt total prélevé sur l'argent prêté ne dépasse pas au début 20 pour 100 par an pour baisser ensuite aux environs de 12 à i5 pour 100 quand laflaire sera devenue courante et que les risques auront diminue. essaver le
colonel Gallieni.
l^adiane,
Je
le
EN TEIUUÏOIKE MILITAIIIE
228
gône sans
insister sur les lenlalives possibles
de coloni-
sation européenne. Je ne crois pas qu'il soit raisonnable
d'y songer sérieusement.
Le
sol est suffisant
mettre aux races
les
désormais
babilants et pertranquilles,
de prospérer d'une façon normale
s'accroître et le
pour nourrir
locales,
;
de
mais
pays n'oITre au colon européen aucune chance de
succès.
Le
personnel y est impossible
travail
et la
grande
ne pourrait trouver de bénéfices qu'en
exploitation
dépouillant l'habitant. Le thé cependant et peut-être
doivent être étudiés. La réussite est possible
l'élevai^e
mais douteuse du moins pour l'élevage. Les moutons
bœufs dupavs ne reproduisent que médiocrement. Les pâturages sont en outre maun'existent pas et les petits
vais et les
débouchés paraissent insuffisants.
Pourquoi du alors et à
que des
reste, tenter cet effort
en pavs pauvre,
terres fertiles, propres à tout, disponibles
proximité du réservoir inépuisable de main-d'œuvre
(comme
qu'est le Delta
haut Yen-thé par exemple),
le
attendent encore des colons?
La constitution de grandes propriétés avec des colons essais de M. Thomé, auprès
annamites peut réussir. Les de
Lam
tilé,
dans
le
Dong-trien, région analogue au Ven-
sont concluants.
entreprenants qui et le
meilleur
repeupler
Outre
moyen de
hommes
aux
la tenteraient,
ce
que
cette
actifs
les
et
serait le plus sûr
pacifier définitivement et
marges du Delta,
les
bénéfices
les
pourrait donner
exploitation
régions
de
movennes
dévastées par la piraterie. J'ai parlé
d'hommes
drait ajouter est nécessaire
:
actifs et entre|)renants,
pourvus de capitaux
sulfisants.
il
fau-
Tout cela
pour réussir au Tonkin qui ne deviendra
REGIME DE LA PROPRIÉTÉ
229
jamais un cliainp de colonisation populaire. valide petit
mais pauvre,
s'il
L'homme
n'est d'avance fonctionnaire
ou grand, débarquant
pour chercher qu'en France entretenir par
à Hanoï avec ses deux bras mourra de faim plus sûrement moins qu'il ne parvienne à se faire
sa vie, y à
;
protectorat et à obtenir quelque vague
le
fonction dans une administration.
L'argent lui-même ne
pas et beaucoup de ceux
suffit
qui en étaient pourvus en arrivant, l'ont profit. 11 faut qu'il soit
aux mains de colons
mangé «
sans
de choix
»,
de gens qui auraient réussi partout ailleurs.
Ce sont des choses les
utiles
franchement
à dire
un malentendu
répéter pour éviter
Français de France. Les colonies
et à
trop fréquent chez
comme
Tonkin
le
ne sont pas des pays de cocagne où reverdissent
les
Ce sont des champs d'action ouverts aux hommes entreprenants, actifs, pratiques, trempés pour fruits
secs.
la lutte,
— rien de plus.
Dans notre haute
région, ne pensons pour le
moment
qu'à développer l'agriculture indigène. Espérer davantage serait se préparer des mécomptes.
toujours trop rare et
Lidépendamment
main-d'œuvre y sera trop dispendieuse pour permettre
de toute autre considération,
la
aux Européens de prélever sur
le travail
indigène
un
bénéfice suflisant.
REGIME DE LA PROPRIETE
Le régime
légal de la propriété exerce
considérable sur
Ln
la
pays ne peut progresser
la limite
où
les
lois
une influence
prospérité agricole. et se
qui v régissent
développer que dans le
pouvoir de pos-
séder sont coiiforines aux goûts de ses habitants et
EN TEIUUTOIKE MILITAIRE
23o
La
à leurs besoins.
ap[)ro|)il('(:.s
pour
cliose esl Irop é\ideiile
qu'il soit utile d'y insister.
L'indigène de
la
haute région aime
sa terre, s'attache
à son coin de rizière et désire le posséder.
pour
l'amour du
être propriétaire. C'est
même
tel
(pie
nous
contrées pauvres
que
entêté
Dans basses,
le
sol
11
est fait
pour
lui-
trouvons chez notre paysan des
de France, d'autant plus tenace et
ce sol est plus ingrat.
les plaines riches et
populeuses des provinces
au milieu des immenses
rizières,
toujours sem-
blables et jiour ainsi dire impersonnelles, qui nourris-
sent son village, l'Annamite n'a pas cet instinct de la
propriété individuelle.
donne
11
sa part
de travail
— Son attachement, son
riz.
du
d'un ordre tout dilTérent. C'est
lieu natal
village fait
dans
est
sa collectivité, le petit corps social
partie qu'il
régime de
la
aime
et
qu'il
communauté
qui en souffrent. Ces
il
lois
le il
lui convient.
les ^
dont
ne veut pas quitter. Le
Or, au Tonkin, l'Annamite étant sont faites pour lui et
et
amour
réclame sa part de
le
plus fort, les lois
impose aux races soumises
mal
ajustées
aux mœurs des
Thôs sont devenues une source d'incessantes Autrefois, les villages possédaient
difUcullés.
un domaine com-
munal important et vivaient comme les Annamites, sous un régime tiès rapproché de celui de la communauté. La propriété héréditaire rare.
et
absolue y était chose
Les habitants cultivaient des concessions dont
le
La loi n admet pas en Annam ou au moins n'admet exceplioiuiellcmenl la vente définitive des rizières. La vente liai)ituelle est toujours « à réméré ». Le vendeur conserve la l'acullé du rachat moyennant restitution du prix paye. Celle mesure esl évidemment dictée par le souci de proléger le domaine communal el convient l^en aux terres du Delta cl aux I.
(|u
mœurs
de ses hubilanls.
RÉGIME DE LA PROPRIÉTÉ retour à
coiiiiiniiu»
la
('(ail
incapacllo de
(désliérencc, famille,
etc.
d'aliéner
que sous conditions.
.
et
.)
.
aSi
dans
])r('\u
de
cullure
part de
n'avaient
qu'ils
domaine communal
immenses
terrains
est
la
droit
le
opéré depuis, une importante é\olution
Il s'est
cas
coiialii.s
la
et le
souvent réduit maintenant aux
non
cultivés.
La propriété
indivi-
duelle et perpétuelle devient le cas général pour les terrains réellement productifs.
Ce nouveau régime conviendrait mieux aux mœurs de nos indigènes,
s'il
était
une
sur
assis
législation
appropriée. ^lais ce sont les circonstances locales qui
imposé
l'ont
Le
fisc
et
il
manque de
stabilité.
annamite ne connaît pas
clame toujours en bloc
commune,
le total
les particuliers et ré-
de son impôt à chaque
colleclivement responsable du versement. Or,
depuis une quarantaine d'années, dans les
troubles périodiques,
le
Haut-Tonkin,
la piraterie et l'entretien
l'occupation chinoise épuisaient le pays.
décimée ne parvenait plus que difficilement les terres cultivables.
Les déshérences
et
de
La population les
à exploiter
incapacités
de culture pour certaines familles réduites devenaient fréquentes, alors que les charges allaient en s'aggravant.
Les notables dans l'embaras aliénaient alors, pour les
besoins
vovance,
du moment
les
ou indigènes
une et
et
avec une très grande impré-
biens disponibles à des particuliers (Chinois riches); sous la condition de subvenir dans
projDortion déterminée aux charges de la
commune
souvent de consentir un prêt d'argent. Le capital de
ces prêts n'étant
jamais rendDoursé
se
transformait ha-
bituellement à l'échéance en une nouvelle cession de terre.
La
partie productive
du domaine communal
se
trouva
EN TEHIUTOIIŒ MILITAIRE
232
de
peu
sorte
la
(|iii
à
rité, l'objet
Tous
peu transformée en propriétés privées
leur tour, par suite
{le\iiireiit à
du manque de
sécu-
de fréquentes transactions.
ces contrats,
réel caractère
bien que présentant souvent
de pérennité
tliéoriquement soumis à
et le spécifiant parfois,
qui
la loi
droit de rentrer en possession
laisse
un
sont
au vendeur
le
movennant restitution du
prix pavé. Cette cause générale de caducité dans les contrats est inconciliable
privée. Aussi
dans
la
avec le régime de la propriété plus souvent
restait-il le
pratique
et les
lettre
morte
nouveaux propriétaires purent
se
croire à l'abri de toutes réclamations, jusqu'au jour
où
une certaine prospérité reparut dans le pays avec sécurité. Les anciens propriétaires ou leurs liéritiers
et
parfois les
communes
movennant un
vinrent alors réclamer le racliat,
prix infime
et
quelquefois 20 ou 3o ans
après la vente, de terrains que la culture et de velles plantations avaient transformés. tait
la
Le
nou-
cas se présen-
chaque jour en 1895. Légalement, ces réclamations moins discutables. En
sont souvent recevables ou au
équité, elles sont généralement injustes et les
nouveaux
propriétaires ne les acceptent jamais sans procès.
Parmi
les
inconvénients résultant de ces intermi-
nables disputes,
le
plus grave est l'incertitude qui règne
sur le droit au rachat. La propriété privée y perd une partie de sa sécurité, sans rendre aux communes les
avantages de
Par
la
communauté.
ailleurs, la reconnaissance
comme
toutes les transactions précédentes, sans lable, aurait ses
délinitive de
examen préa-
dangers en favorisant trop ouvertement
l'accaparement du sol par
les
Chinois
et
en sanctionnant
(piehpiefois des ventes faites contre toute justice et à des
prix dérisoires.
RÉGIME DE LA PROPRIÉTÉ
233
Cela doinando une étude sérieuse. Cliaquc cas parti-
examiné dans son espèce
culier doit être
équité. Mais
ment
nouveaux contrats
les
en
régularisés
ainsi
contre
retour oITensif des mécontents devant la justice
tout
annamite. La
Il s'agit
remanier.
loi est à
L ne autre question doit
et résolu
faudrait pouvoir ensuite garantir sûre-
il
se pose et
mérite qu'on
de l'achat des terres par
évidemment
être
prêteurs d'argent.
les
s'v arrête.
Chinois. Le
Thô
protégé contre la rapacité des
11 est
hon pourtant de ne rien exa-
gérer.
Le Chinois devenu propriétaire isolément
et
vient alors
un colon
au point de vue difhcile de le
sa terre.
intellioent, actif, et 'D"
social.
Au
souvent
s'installe
d'une façon définitive sur
Il
bout d'une génération
distinguer des
autres
de-
peu dissolvant
notables.
il
est
Point
dans ce cas d'avoir recours à des mesures
n'est besoin
d'exception.
Mais dans
cantons de
les
la frontière
il
arrive fré-
quemment que la terre est achetée ou plus souvent saisie comme gage d'une dette non pavée, par des Chinois de Chine qui ne résident pas si
leur
vent
champ
comme
et
est très voisin
métavers
les
font cultiver directement
de
ou conser-
la frontière
anciens propriétaires, en par-
tageant la récolte. C'est alors raître
un
véritable abus qu'on peut faire dispa-
pour l'avenir en déclarant officiellement
illégales
de pareilles ventes, lorsc^ue l'acquéreur ne réside pas au
Tonkin. Pour senties,
il
les
ventes régulières précédemment con-
sera possible d'y remédier
peu
à
peu en im-
posant aux Chinois propriétaires l'option entre
dence au ïonkin ou
Mais
ij
serait sage
la
de
revente
du
sol
la rési-
aux communes.
ne pas brusquer
les
choses et
EN TERRITOIRE MILITAIRE
23i
d'exiger (ju'clles
aux
passent régulièrement en laissant
se
anciens proj^riélaires
rembourser
temps nécessaire pour
le
d'achat
prix
le
et
en
y aidant au be-
les
soin.
au cours de l'année 1895, en répartissant des
J'avais,
fonds prêtés par villages de
aux
protectorat, à titre d'avances,
le
frontière,
la
de ces
spécifié c[u'une partie
fonds serait consacrée au rachat des rizières cédées pré-
cédemment
à des Chinois.
Il
serait, à
mon
sens, très
de généraliser ce procédé, en exigeant qu'une pro-
utile
portion déterminée de la récolte des terres ainsi rache-
pour l'amortissement de
tées fût réservée
paysan
se trouverait forcé
forme donnée au crédit agricole inconvénient faites
plus
le
grave.
aux communes
la dette.
de racheter sa terre lui
ferait
Trop souvent
Le
et cette
perdre son les
avances
aux habitants sont
et distribuées
employées intégralement à manger ou à reconstruire maisons, sans souci de l'échéance.
les
jM'unter aux
Chinois pour paver
em-
faut alors
Il
le
protectorat et la
misère va croissant.
Quoi
qu'il
en
soit,
sans précautions les
il
serait
villages
imprudent d'exonérer
et
les
d'engagements librement consentis.
menter encore leur imprévoyance serait
faut
11
])riélé
peler la
une mauvaise leçon
le
le
et,
et leur paresse.
le
Ce
respect de la pro-
mais ne serait-ce pas
meilleur
leur? C'est
leur devons
;
thôs
d'aug-
donner.
apprendre aux indigènes
des autres
que
à leur
particuliers
On risquerait
moven pour
le lieu
de rap-
cela est de respecter
premier exemple d'intégrité que nous
de toutes
les injustices,
l'expropriation
violente et sans compensation de la terre est celle qu'on
pardoime pas
le
moins. Ce principe n'est malheureusement
un axiome chez
les
Européens quand
ils se
mettent
REGIME DE L\ PROPRIÉTÉ à coloniser.
Sans parler de
comprennent
les
;
Nouvelle-Calédonie
que nous savons
la
façon dont
Arabes en Algérie, et tant d'autres
les
2.35
les
Anglais
le
Canaques en
ont pu se convaincre
aussi à l'occasion civiliser nos conquêtes
« à l'anglaise ».
Ce procédé, non point excusable mais applicable en face de sauvages, n'est pas admissible
ropéen doit
au Tonkin. L'Eu-
contenter des terres disponibles ou se
s'y
décider à payer.
même
Alors
chemin de demniser
fer
les
de travaux publics, d'un
qu'il s'agit
par exemple,
il
me
paraît nécessaire d'in-
habitants lésés par la perte d'une terre de
valeur (rizières arrosables, plantation de badiane,
Les
frais
etc. *).
généraux d'une grande entreprise n'en seraient
pas sensiblement alourdis car ces terres sont relative-
ment dans
rares dans nos parages. la
désert
entre
haute région,
les
ou en pavs conquis.
un mamelon
Trop souvent en arrivant
Européens Ils
inculte et
se croient
dans
le
ne font aucune différence
un
coin de rizière, sans se
douter qu'un remblai de route ou une baraque de surveillant peut couvrir l'héritage de toute
terre j'ai
une
famille.
pour eux ne représente aucune valeur
vu vendre
certaines
parcelles
de bonnes
alors
La
que
rizières à
des prix pouvant atteindre i,8oo à 2,000 francs l'hec-
—
somme énorme pour un pavs pauvre. Nous demandons à l'indigène le respect des
tare,
I.
Notons que dans certains cas
il
lois et
suffira d'exiger
que
de
le
particulier soit indemnisé d'une façon équitable sur le domaine communal quand il est suffisant. Au point de vue politique, il
une grande dilTérence entre imposer à une commune la charge collective de la cession d'un terrain pour cause d utilité publique ou absorber, sans précaution et sans indemnité, la
existe
terre des particuliers.
EN TEIUUTOIIIE MILITAIRE
230
lajuslico. Doiiiions-lui rc\ciiipl(\
Le prétexte
d'ulililé
générale et de service public ne justifie pas les injustices
du
légales, l'écrasement
iaible.
La
imperson-
brutalité
nelle des organes collectifs de nos sociétés, l'impuissance
même quand il
de l'individu à lutter
cœur des
jettent au
révolte qui se manifestent terribles explosions.
est
dans son droit,
foules ces ferments de haine et de
de loin en
Quand on sème
loin par de
si
on ré-
l'injustice,
colle l'insurrection.
IMPOT
Sans entrer
ici
dans
de l'impôt indigène, je
le détail
voudrais faire ressortir
les
inconvénients
j2;raves
pour
la
haute région d'être soumise au régime des provinces basses.
Il est
peu raisonnable de prétendre imposer sans
distinction à des contrées aussi différentes, les
impôts,
més
les
mêmes
formalités, les
Les
tarifs et la classification
ont été
faits
mômes impri-
des terres adoptés dans
pour l'Annam
du ïonkin. Douze ou quatorze sont soigneusement distinguées laisser
échapper au
Pratiquement
fisc
aucune parcelle du
ces distinctions et
une grande
Delta
sol.
ces tarifs sont tout
à fait inapplicables dans les hautes régions.
s'ensuit
et le
catégories de terres y et tarifées de façon à
interprète à sa façon et les applique II
«
».
les rôles officiels
ne
mêmes
comme
Chacun il
les
l'eutend.
inégalité dans les charges et
une
inquiétude continuelle chez l'habitant.
Dans
le
situation,
iSyô,
but de remédier au danger très réel de cette le
colonel
m'avait
donné
Gallieni,
l'ordre
au commencement de d'étudier la
question
IMPOT de
et
soumettre un projet de ri'nleinentalloa pro-
lui
ment où
il
cette pièce,
oici
bases d'une
les
parue (en février
crois) sous
je
montre à quels expédients il avoir recours pour respecter le sens commun
forme de fallait
possible d'arrêter
serait
d'impôt plus conformes aux besoins du pavs.
assiette
A
manière de procéder jusqu'au mo-
fixant la
visoire,
287
circulaire. Elle
sans porter atteinte aux
formes administratives scru-
puleusement exigées par l'administration centrale
«
Devant
les
:
divergences d'interprétation qui se sont
« produites jusqu'ici
dans l'application, aux rôles d'im-
« pôt, des tarifs officiels,
il
m'a paru nécessaire de régu-
« lariser cette application. « Il
importe de remarquer d'abord que
« catégories
de terrains,
fixées
les
douze
pour l'impôt annamite
«
des basses régions, ne sont pas applicables dans leur
«
ensemble aux impôts de culture dans
«
ofion.
o
«
classe
«
d'herbe
«
sablonneux ne pouvant être employés à
«
novés.
«
la
haute ré-
Pour n'en citer que quelques exemples: la neuvième comprend « les terrains communaux couverts :
et
... de marécages.
de roseaux.
culture ne
«
région où
«
dixième partie de
la
» Il est
la culture.
évident que dans une
couvre peut-être pas
superficie totale,
la
la
on ne peut
«
demander aux communes un
«
d'hectares de « brousse » qui leur sont nominale-
ce
ment «
Il
droit sur les centaines
atTectés.
est fort
difficile,
cadre donné
d'autre part, de faire entrer
«
dans
le
«
le riz
de montagne, l'indigo
les
cultures flottantes, et,
comme
dans beaucoup de
cas,
EN ÏERUITOIUE MILITAIRE
338
maïs. Ces cultures
sont
chaque année en
faites
«
le
«
quantité variable, un peu au hasard dans des défri-
«
chenients souvent abandonnés après une ou
«
récoltes.
«
niunes où ces cultures sont plus stables, d'évaluer
«
assez
«
tés,
«
même
Alors
à
la
exemple dans
«
Cette sixième classe,
la
en
d'alluvion
des terrains pauvres de
«
cliements de bois.
«
rôles ofilciels
«
lité,
«
cultivés et
«
c'est la
«
Toutes ces
ce qui est
maïs
il
ligure).
est planté
mamelons ou dans
dlfilcultés
imposent
le
dans
des défri-
proviennent de ce que
les terrains
normal dans
les
maïs par
spéciiie des terrains
elïct,
plus souvent
«
«
le
sixième classe (la seule où
«
et le
en prenant
inexact,
et
de faire rentrer
lettre,
«
qui leur sont alVec-
terrains
les
injuste
serait
« .choses
dans certaines com-
qu'il est possible
exactement il
deux
les
les
suivant leur qua-
pays complètement
peuplés, alors que dans la haute région
culture seule que peut atteindre l'impôt.
Dans
jusqu'au
ces conditions et
moment où
l'éta-
«
blissement d'un État régulier de
«
permettra d'asseoir l'impôt d'une façon définitive, on
«
suivra pour
«
après.
ce
gène doit poursuivre
«
corvées
«
En
«
«
1°
la
dehors de
la taxe sur la
2° Les rizières
le
remboursement des
;
Les cultures flottantes (maïs, indigo, haricots,
de montagne)
1°
et
;
3'^
/j°
badiane, l'impôt indi-
:
La taxe personnelle
«
«
propriété rurale
confection des rôles les règles ci-
«
riz
la
;
Les propriétés bâties
Taxe personnelle
et les jardins.
el corvées.
IMPOT «
«
Lfi taxe
personnelle
et les
eorvées peuvent
doi-
el
vent être payées par tous ceux qui n'en sont pas
exemptés. L'exemption accpiise aux
« régulièrement
« fonctionnaires et
mandarins
sont
«
titres.
«
]\ungs rentreront dans
«
n'aura
«
communes
Les
« qu'elles
plus
sera limitée à ceux cpii
nommés
régulièrement
ce
«
239
possèdent
et
encore soumises à le
droit
d'inconvénients
leurs
la capitalion
commun
ce
:
même
puisqu'alors
ne possèdent pas de rizières, l'impôt
dra dans leurs cultures flottantes, jardins
les
des
qui
altein-
et villages.
«
3° Rizières.
«
Les rizières sont actuellement loin de figurer en
totalité sur les rôles. Cette fraude générale est
due
ne donnant que tout à
l'assimilation de rizières
à
fait
exceptionnellement deux récoltes, aux meilleures rizières
du
Delta. L'imposition de la totalité des rizières
d'après ces tarifs serait une charge exagérée pour les communes. Jusqu'au jour où il sera possible de vérifier
exactement dans quelle mesure les inscriptions des
rizières sont altérées et
naissance de cause,
il
où on pourra
les inscriptions actuelles fois les chiffres
les taxer
en con-
v a lieu de maintenir les tarifs et
dans leur ensemble. Toute-
de l'impôt de 189^ étant notablement
inférieurs à l'impôt qu'il est équitable de
demander
aux populations désormais tranquilles, on exigera l'inscription de nouvelles rizières de façon à obtenir
une majoration de
i5 à 3o pour 100 suivant les cas,
sauf exceptions justifiées
par
les
circonstances lo-
cales. «
3° Cultures diverses.
«
Les cultures flottantes
tagne, l'indigo et le
telles
maïs sont
que faites
le
riz
de
mon-
en proportions
EN TERRITOIRE MILITAIRE
2/lo
suivant les années. Les terrains qui leur
« variables V
sont
«
position.
alTcctés
—
changent souvent en étendue
C/est la quantité
moyenne de
faut imposer sans tenir
([u'il
«
ments
«
de l'année précédente pour évaluer
«
qui sera comprise dans
«
entre les récoltes.
On
en
compte des emplace-
«
«
et
ces cultures
cultivés.
tablera dans chaque
commune
la
9*^
sur
la
les résultats
surface cultivée
classe sans distinction
hahiiation et jardins.
«
4^*
Terrains
«
Le
calcul de la surface imposable sera fait en éva-
cl'
«
luant la superficie couverte par chacun des villages
«
de
«
les villages
«
à trois
commune. On pourra, pour
la
ou quatre types pour lesquels
« été fait. Cette façon «
nients,
Dans
«
simplifier,
vu
le travail
la faiblesse
de
la taxe.
la catégorie « jardins » seront
cultures de faible surface,
«
immédiat des
«
dans
«
comprises
dans
faites
Tous
villages.
douzième
aura
de procéder n'a pas d'inconvé-
«
la
taxer
d'après leur importance en les rattachant
ces
le
les
voisinage
terrains rentrent
classe.
«
Mesures spéciales à 1890. Comme il importe que dès cette année, l'impôt soit établi d'après les instructions qui précèdent, les commandants de secteur feront faire le travail par les Tri-Chau après leur avoir donné les indications
«
nécessaires. Ils le vérifieront ensuite et les rôles
«
seront adressés au
«
«
«
«
i5 «
Tong-Doc par
les
Tri-Chau
ne (le
mars au plus tard) qu'après cette vérification. Pour la même date, les commandants de secteur
commandant de
«
feront parvenir à leur
«
observations relatives à l'application des règles ci-
« dessus,
en
même
temps que
les
cercle leurs
modifications qu'ils
IMPOT
2',i
«
auraient autoris;jes en raison des circonslanccs lo-
«
cales. »
Ce modus vivendi, sulTit à ])LTe,' la 1
celte instruction de circonstance
prouver que, pour devenir régulièrement proshaute réo-ion a besoin d'un réoime o D
rent de celui
du
L'établissement d'une
un
exige
travail
à laquelle
dence
il
normale de l'impôt
assiette
de longue haleine. C'est une question
ne faut toucher qu'avec une extrême pru-
et l'étude
L'impôt
officiel dilTé-
Delta.
est
pratique en
est difficile.
certainement
la
base de toute souverai-
neté. C'est le sione matériel de la soumission et sa o rentrée régulière est un svmptôme certain de prospérité.
Mais
il
faut
que
aux besoins du pays table. Cela
l'assiette et
que
en
soit stable,
la répartition
importe plus au pavsan
et le
en
conforme soit
équi-
touche de plus
près que toutes les considérations de nationalité et de patriotisme.
Le détestable système annamite prêtant arbitraires,
forçant
le
manque de
sincérité
à tous les
dans
les
déclarations et rendant impossible toute sécurité pour l'avenir, fut de tout
tude
et
temps
la principale
cause d'inquié-
de défiance chez nos administrés. Chaque chan-
gement de mandarin ou d'administrateur pouvant se traduire par une aggravation de charges, le contribuable vivait dans un continuel souci du lendemain. Dans la pratique, les fonctionnaires français ne vivaient pas assez près des populations pour surveiller
utilement l'établissement des rôles des
communes
était
de négocier avec lui l'impôt Gra>;dmaison.
et la seule
de transiger avec
le
ressource
mandarin
« à forfait »,
local,
moyennant un 14
EN TERRITOIRE MILITAIRE
242
sacrifice jx'cunlairc proporlioiiiir à leurs ressources
à la rapacité
du
ou
inaiiclarin.
Les fonctionnaires Tliùs
et
les
notables ne nous
vus d'abord sans quelque appréhension
avaient pas
toucher ce point délicat.
Ils
redoutaient l'application
des tarifs ofliciels et se tenaient sur la défensive.
Dans
l'impossibilité de contrôler matériellement les
déclarations,
il
des rôles
nos
et
fort difficile d'apprécier la valeur
était
investigations
se
heurtaient à une
insurmontable défiance. C'est après des mois de quentation journalière
que
je
ments
fré-
de tentatives infructueuses
et
pus obtenir des habitants quelques renseigneprécis sur la question.
donner, du
reste,
Ils
ne pouvaient pas
me
une marque plus authentique de leur
confiance.
La promulgation d'un le
pavs,
serait
rôle spécial d'impôt, fait
l'indispensable
réorganisation politique.
Il
v aurait là
sidérable. Sachant désormais sur quoi
appliquer régulièrement des
pour
complément de notre
tarifs
un progrès con-
compter
et
voyant
raisonnables,
les
populations perdraient peu à peu cette défiance, cette
empêche presque toujours de
crainte perpétuelle qui les
renseigner de bonne les
récoltes,
le
foi
nombre
l'administrateur français sur d'habitants,
la
superficie des
terres cultivées, etc.
Sans essayer de tracer
résumons seulement
viendrait de l'appuyer 1°
La région
le
les
cadre d'un scmjjlable travail,
principes sur lesquels
il
con-
:
frontière
doit jouir
d'un régime de
faveur, d'une situation privilégiée en matière d'impôts
pour des raisons politiques sur lesquelles nous ne
re-
viendrons pas. Le mieux serait d'y réduire en principe les charités
au tribut nécessaire de soumission. Le trésor
IMPOT n'y perdrait pas de grosses
2'i3
sommes
et la sllualion
rale Y trouverait de grands avantages
2" face
géné-
;
Dans une contrée où une infime partie de la surdu sol est seule mise en culture, l'impôt ne peut
frapper la terre suivant sa capacité de culture,
peut atteindre que
la
rizières arrosables
et
culture elle-même.
de
la
En
il
ne
dehors des
badiane, les habitants font
surtout des cultures flottantes dans des défrichements
ou moins longtemps suivant leur
utilisés plus
cpialilé,
puis rendus à la brousse et remplacés par d'autres.
La
seule solution équitable est de taxer les rizières suivant
leur superficie et leur qualité, les cultures flottantes en
prenant pour base
très
la récolte
de l'année précédente
Le svstème d'imposition
3°
simple
et très clair
toujours
restera
la
;
et d'évaluation doit être
dans une région où
la sécurité
préoccupation principale
et
où
il
faudra rendre définitive une administration militaire
un peu rudimentaire et fortement disciplinée: 4" La taxe sur les cultures riches (spécialement
la
badiane) doit être supprimée ou très réduite.
La production de prospérité, régions
;
il
agricole, répétons-le, est le seul espoir
le
faut
seul
moven
d'existence des
en
alléger
les
sera-t-il possible de trouver
peu
à
peu dans
les
de consommation une compensation à ces nécessaires. Mais dans cette voie,
dence
dans
est indispensable.
et la
très
impôts
sacrifices
grande pru-
Toute hâte, toute exagération
les tarifs ferait renaître
tentement
une
hautes
Peut-être
charges.
immédiatement
le
mécon-
contrebande, sources de la piraterie.
EN TERRITOIRE MILITAIRE
2U
INDUSTFilE.
Dans un pavs neuf, pour
Icnlcr avec quelques cliances
de succès une entreprise industrielle,
faut trouver
il
:
Les matières premières;
La main-d'œuvre Des débouchés possibles ;
et
des communications suffi-
santes. Il
me
paraît dlfriclle de songer actuellement à intro-
duire l'industrie dans
région de Langson.
la
Les matières premières sont rares. Pas de charbon, pas de soie, peu de bois
canne
à
sucre à l'état
;
le
coton, l'indigo, le thé,
rudimentairc. Seuls
la
les bassins
miniers vers Cao-Bang pourraient être explorés avec fruit.
faudrait-il y découvrir des gisements très
Encore
riches de
métaux précieux pour qu'une exploitation
sérieuse y put être organisée.
La main-d'œuvre manque complètement point capital. Les habitants réfractaires
au
et
c'est le
sont exceptionnellement
travail industriel. Ils ont recours
pour
leurs besoins de tous les jours aux Chinois et mainte-
nant
parfois,
aux Annamites. Mais
la
main-d'œuvre
devient dans ces conditions, dispendieuse et les ouvriers expatriés vivent
mal dans un pavs qui
n'est
pas le
leur.
Les voies de communication l'état
artiiicielles sont
d'ébauche en dehors du chemin de
son, et dans
une grande
gneuse (dans le secteur de
commvmlcations
fer
partie de la région
Dong-Dang
encore à
de Lang-
monta-
entre autres) les
fluviales n'existent pas.
Ouant aux débouchés commerciaux,
il
serait
tou-
COMMERCE
INDUSTRIE, jours
de
dilTicile
Kong
et
concurrence aux Cliinois à Ilonir-
faire
aux Annamites dans
Delta.
le
Les conditions sont loin d'être provinces basses, richesses
Trouver
isolons
du Tonkin sont
en
riz et
le
production du
la
débouché commercial sont mise en valeur générale de
les
mêmes dans
passant que
les
les
deux
main-d'œuvre.
la
de cette main-d'œuvre,
l'utilisation industrielle
augmenter
a^S
riz
les
un
assurer
lui
et
deux problèmes de
la
la colonie.
COMMEHCE.
Dans la région de Dong-Dang, le mouvement du commerce local s'est toujours porté de préférence vers le
Nord. Les relations
des ports français, et
le
de langue avec
voisine
Chine
du Tonkin le seul
difficiles
peu sûres avec
et
le
élevé des articles d'importation venant
Delta, le prix
voisinage, la
communauté de
race
les
aborio^ènes de la zone chinoise
et
surtout la facilité d'écouler en
produit d'échange courant,
le riz, tout
y
commerciaux avec le bas Tonkin se limitaient jusqu'à ces derniers temps au ravitaillement des Européens et à quelques importations contribuait.
Les rapports
insignifiantes des spécialités les
Par
ailleurs,
fait
les
la
noix d'arec,
les races
de
la
mon-
impropres au commerce. Aussi
Chinois s'étaient-ils créés
Toutes
:
le sel.
nous l'avons vu,
tagne sont tout à les
annamites
marmites en cuivre battu,
là
un
véritable monopole.
transactions se faisaient par leur intermé-
diaire.
Pour entrer en tonkinois,
ils
relations directes
n'avaient
pu
se
avec leurs clients
contenter d'apporter leurs 14.
EN TEIUUTOIllE MILITAIRE
3',r,
d'une
niarcliandiscs
façon
inlcrniillcntc
avalent
et
depuis longtemps fondé des marchés permanents en
Autour de chacun d'eux s'était formée une ai^'domératlon de marcliands et d'intermédiaires.
terre annamite.
Ces {i
devenus peu
villages, vérilahles colonies chinoises,
peu
plus importants et les plus riches de la région
les
Dong-Dang,
(Kv-Lua, près de Langson,
frontière
Cao-Phong, près de Ïha-Kc, etc.), avaient conquis leur
autonomie face des
une indépendance presque complète en
et
mandarins annamites qui
lement pour \
s'en occupaient seu-
recueillir le trlhut destiné à entretenir
leur bienveillance.
Le chef de par et
les
coni?réii:ation
ou
le
chef de marché
Chinois remplaçait officiellement
administrait
le
village
dont
le
assurait
il
nommé
Lv-Tliruong
lui-même
la
police et l'entretien.
Ces marchés échappant en
chacun d'eux terie
où
s'était
se traitaient
à toute surveillance,
fait
transformé en un centre de pirales
affaires des
vendait parfois ouvertement des armes
—
On y des munitions.
bandes. et
La situation s'est heureusement modifiée. A Don":Dong, par exemple, la présence du commandant du secteur et du Tri-Chau indigène qui v résident, l'installation des services publics et d'une garnison relative-
ment importante,
l'affluence des
Annamites venus du
Delta pour chercher leur vie ont transformé
nomic essentiellement cliinoise de la La majorité cependant et la partie population gers.
est
encore formée par
Le chef de marché
est
les
la plivsio-
localité. la
plus riche de la
marchands étran-
dent-ils encore
une surveilhmce
police strictement assurée.
un deman-
nécessairement resté
fonclionnalre local inlluent. Aussi ces marchés très
active et
une
COMMERCE Il
bon de
est
le
2
remarquer, loulefois, ce
',7
serait faire
mauvaise politique que d'entraver leur dévelop-
acte de
pement par des mesures de police excessives ou vcxatoires. Tout le commerce local, toute la vie économique du pavs se trouvent en effet concentrés dans ces marchés autrefois nombreux et florissants. Le village de DongDang,
au dire des habitants
l'on s'en rapporte
si
et
aux
qu'on y rencontre, voilà trente ans, deux ou trois fois plus
traces de constructions anciennes
devait être,
étendu qu'il ne
l'est
aujourd'hui.
L'importance de ces centres chinois suivait naturel-
lement
le
mouvement du commerce local. A l'exception (comme Dong-Lom près
de quelques-uns d'entre eux
de ?Sa-Cham) qui avaient les pirates, vers la
Au
la spécialité
fm de 1898,
ils
d'approvisionner
tombaient à rien.
cours de 1894, dès cjue les populations dispersées
eurent regagné leurs villages
et
que
la sécurité
vée permit
marchés périodiques (généralement tous reprirent
un
retrou-
sur les routes de circuler sans danger, les
un peu de
vie et celui de
les
cinq jours)
Dong-Dang
redevint
centre d'affaires relativement important. Sa situation
est excellente
mètres de
la
;
sur la grande route de Chine à A kilo-
frontière et à proximité des cantons les
plus riches et les plus peuplés de la région.
Pendant l'année 1890,
cette reprise des affaires s'ac-
centuait dans d'importantes proportions. Aujourd'hui, les
produits
du Delta
:
riz,
poisson sec,
sel,
noix d'arec,
etc.. s'v rencontrent en abondance avec les étoffes, les lilés
de coton,
le pétrole
(qui continuent à nous venir
de Hong-Kong par Canton
et
Long-Tchéou),
le
thé et
la pacotille chinoise.
Mais
il
est facile
de voir que nous entrons
une période d'évolution commerciale dont
il
là
dans
est
inté-
EN TERRITOIRE MILITAIRE
2',8
rossant de connaître les causes et de prévoir les consc([uences.
mouvement
i^c
considérable amorcé par
le
ravitaillement des troupes et les grands travaux d'utilité
publique,
a
l'acilité
par
la
création des routes carrossables
du chemin de
surtout par l'ouverture
et
de Langson
faudrait se G:arder de mesurer les procrrès écono-
Il
miqucs de
la
haute région à l'accroissement des marchés
comme
ceux de
en
de simples échanges entre
effet
Dong-Dang
et
Ky-Lua.
tout à
les
Il
ne
s'agit
plus
habitants et leurs
mouvement de transit affaires est du sur-
fournisseurs chinois, mais d'un
nouveau. Le progrès des
fait
tout aux exportations
du Delta
vers la Chine.
Le
culti-
n'y prend qu'une faible part et avant
vateur indigène
cette activité nouvelle ait produit l'augmentation
que
de travail il
fer
profondément modifié déjà l'équilibre du commerce.
et
de production qui en sera
le résultat final,
soudrira d'une crise économique que son
manque
de prévoyance rendra plus sensible.
d'initiative et
Jusqu'ici le petit excédent de produits agricoles (sur-
tout le riz
et,
pour quelques communes,
suffisait à satisfaire les besoins très limités
par des échanges directs avec
Mais à
un
voici
prix
les
la
badiane)
de l'indii^ène
Cliinoisde la frontière.
chemin de fer couvre le marché de riz qui n'est plus rémunérateur pour le producque
le
teur de la liante région
et
enlève ainsi toute valeur
d'échange à son excédent de production'. Cette dépréciation n'est rachetée par
marchands
substituer au\ (Chinois ne
I
.
Le
riz
dans
duit à meilleur ré;,aons.
aucun bénélice immédiat. Les
et les ouvriers
le
cl
se
consomment pas davantage,
le bas Aiuiam est toujours provendu moins cher que dans les hautes
Delta et
compte
annamites qui essayent de
COMMERCE au contraire, les
et ils
2Vj
ne payent pas plus cher
la
badiane,
porcs ou les fruits.
Pour
tirer profit
un
réserve
d'une voie commerciale rapide
comme un chemin
fort débit,
de
fer,
et à
faut avoir en
il
stock de matières exportables (mines, char-
bon, bois
ou posséder une puissance de surpro-
)
duction que peut seule donner une population très
La région de Dong-Dang n'a rien de tout
dense.
cela et
conséquence immédiate de l'ouverture du chemin de
la
fer
V sera une crise analogue à celle que nos agricul-
teurs de France ont
dont
et
ils
Le mécanisme de
connue
voilà
douze ou quinze ans
souffrent encore. est
toujours
le
commerciale met
l'activité
même. L'augmentation
les
populations agricoles
en contact avec des produits nouveaux qui changent leurs habitudes.
La
n'est plus assurée
dans
du beaucoup
duits directs
plus à
sol.
près,
satisfaction des la
par
les
pro-
Le blé, par exemple, ne présente pour le pavsan français, la môme
importance qu'autrefois dans
la
somme
totale des né-
La transformation des mœurs crée peu peu des besoins nouveaux très réels et qu'il est im-
cessités
à
besoins de la vie
même proportion
de
la vie.
possible de négliger.
Pour que
l'équilibre persiste
duits vendus
traire qui arrive.
de production font perdre
une
que
les
pro-
et c'est le
con-
faudrait
La concurrence des
centres nouveaux
commerciales rapides leur
et les voies
partie de leur valeur et le malaise est
doublé puisque les besoins cettes
il
donnent une plus-value
se sont accrus et
que
les
re-
diminuent.
C'est ce qui va se passer
région.
11
est nécessaire
en augmentant
la
pour
le riz
dans
la
haute
de travailler dès maintenant,
jiroduction agricole
et
surtout en fa-
EN TERIUTOIRE MILITAIRE
35o
vorisanl
dcveloppomonl des cultures
le
nuer ce malaise Mais
il
(ju'il
semble
d'niK» consé(|neiice (ont à fait locale
s'at-it là
sccondairc.de rouverture
et
un point de vue
riclics, à atté-
diriiclle d'éviter.
du clicmin de
fer.
C'est à
plus général qu'il serait intéressant
d'étudier l'avenir commercial et les chances de succès de celle nouvelle voie rapide entre le Délia la fronlière Il
du Tonkin
et
de Chine.
en
était facile
189'), sur le
marché de Dong-Dang
(à i5 kilomètres de la gare terminus et à 4 kilomètres
de
la fronlière),
mouvement.
d'observer les prcuiiers symptômes
J'essaverai
donc d'en
tirer
du
quelques indi-
cations sur la portée de l'enlreprise.
Quand coup
il
raison de débouchés
Extrême-Orient, est
de politique coloniale on parle beau-
s'agit
et avec
l'idée fixe
du
commerciaux. En
colonisateur européen
de parvenir à drainer une partie de l'immense
vement commercial de pour exemple
la
mou-
Chine. Voyons, en prenant
tentative française la plus avancée
la
marche vers le Quang-Si par Langson et Dong-Dang), comment peut se former un semblable courant et quelles difficultés on y rencontre. (celle
de
la
Il s'agirait,
haut
et
dans
d'un peu
l'idée des
loin,
hommes
qui regardent de
de pénétrer au cœur de
la
pro-
du Quang-Si et de déplacer, en lui faisant suivre une ligne beaucoup plus courte, l'énorme vince chinoise
trafic
de
la rivière
de Canton, au i^rand bénéfice de nos
du Tonkin. Sur une carte, cela paraît assez simple dans la pratique malheureusement les choses ne s'arports
;
rangent pas avec
On ment
la
même
facilité.
peut sans peine se rendre compte du bouleversequ'il faudrait
entreprendre dans notre régime de
COMMERCE
25i
droits de douane, de tarifs de ports et
pour obtenir
lage de transports
Sur nos marchés du Haut-Tonkin, factures d'usage courant
:
dans notre outil-
la clientèle chinoise.
manu-
les objets
fdés, pétroles,
étoiles,
etc.,
arrivent à meilleur compte, en dépit de la douane, ve-
nant de Hong-Kong en passant par avons
la
la
région que nous
prétention d'approvisionner, que
de Haïphong. Et
cela, avec soixante
s'ils
venaient
jours de transport
à dos d'homme, alors que les marchanHaïphong peuvent arriver en trois ou quatre jours. Il faudrait vraiment une révolution heureuse mais peu probable dans nos mœurs commerciales pour aller faire concurrence aux marchandises de Hong-Kong sur la movenne rivière de Canton où elles parviennent presque en franchise dans des conditions de bon marché
dont plusieurs
dises de
de transjx)rt inouïes.
Mais alors peut-être pourrions-nous limiter notre ambition à voisine
la clientèle
prise présente les
outre,
déjà sérieuse de la région chinoise
du Tonkin, v compris Long-Tchéou? L'entreune
mêmes
difficulté grave
aléas
;
on rencontrerait, en
d'un ordre
spécial.
Les habi-
tants chinois de la frontière vivent en grande partie trafic
peu le
du
avec nos marchés. Le pays est pauvre, produit
et le transit des
marchandises de Long-Tchéou vers
Haut-Tonkin constitue
cette population
la
principale ressource de
de colporteurs
et
de marchands.
En
même
que nous puissions y concurrencer les articles de Hong-kong, l'arrivée directe de nos marchandises sur les marchés de Chine v produirait une crise admettant
très sérieuse.
La
prospérité apparente produite par les
transactions actuelles avec le
diatement est
et le
Tonkin tomberait immé-
sud du Quang-Si apparaîtrait
tel qu'il
réellement, analogue à nos réi^ions montaj^neuses
EN TERRITOIRE MILITAIRE
252
du Tonkln cliemin de
Dans
et
incapable d'absorber
le cas,
la clientèle
régions,
faudrait,
pour
frontière
aux
fermer
la
Ce
prohibitifs.
mer
débit de notre
improbable j'espère, où nous voudrions
nous contenter de il
le
fer.
lui
tonkinoise des hautes
imposer nos importations,
articles chinois par des tarifs
une déplorable mesure de suppri-» existant déjà avec la Chine on ris-
serait
ainsi le trafic
;
un but de concurrence douteuse
et pour une clientèle insignifiante, de se fermer pour longtemps le marché chinois et de faire souffrir beaucoup des
querait dans
régions qu'il importe de ménager. «
commerce
»,
il
est
Même
en parlant
bon de ne pas perdre de vue que
tout malaise dans la haute région, toute exploitation de l'indigène se traduira par de graves embarras politiques.
La moindre fausse manœuvre de douanes sur nos frontières du Xord ferait immédiatement renaître la contrebande
et
par conséquent
la piraterie.
Faut-il donc déclarer que notre chemin de fer est
une mauvaise
affaire et
que son
transit actuel provenant
surtout de circonstances spéciales (travaux, ravitaille-
ment des troupes), il n'a pas d'avenir commercial? Ce serait exagéré mais, à mon sens, il est condamné ;
pour longtemps
à des visées plus modestes.
son premier fret commercial
ïonkin a,
:
du
sel,
du poisson
—
Quel a été
Les produits du bas
sec et surtout
du
riz qu'il
début, jetés sur nos marchés. Son avenir est
dès
le
Le
riz
;
là.
coûte régulièrement 20 à 3o pour 100 plus
cher dans l'intérieur
Tonkin
')
le
du Quang-si que dans
pouvoir absorbant
sont très réels. C'est en outre
le
Delta
du
est illimité et les besoins
un mouvement
existant
déjà qu'il s'agit seulement d'augmenter et de régulariser.
Le premier
et le
plus remarquable résultat local
COMMERCE do l'ouverture du clicniin de
quelques semaines
de décupler en
fer a été
marché du
le
253
riz à
Dong-Dang.
Du
vendu par voitures entières au lieu de se débiter à la mesure ou au picul (balles de ()0 kilogrammes) Les acheteurs chinois utilisaient pour l'enlever le bout de route carrossable que nous avons
jour au lendemain,
s'y est
il
.
mené
jusqu'à la porte de Chine, où
ils
le
chargeaient
en convois à dos d'homme. Cette activité immédiate, ce soin de profiter jusqu'au
bout des voies de communication nouvelles
est
un
indice
sérieux et qu'il ne faut pas négliger. Si nous arrivons à
fournir régulièrement le riz sur les gros marchés de
Chine, à cjuelques centimes de moins actuellement,
la
cju'il
n'y coûte
fortune de notre chemin de fer paraît
assurée.
La chose ter ce
mais
est possible
mouvement
nous faut devenir
à
augmentera
de quelques
importe de ne pas limi-
fournisseurs de riz attitrés
les
Quang-si. Le Tonkin n'y il
il
une exportation intermittente. suffit
pas actuellement mais
sa production et
en attendant, au prix
de douanes, attirons en cas de
sacrifices
besoin nos riz de Cochinchine ou voisins (Siam, Java,
créer
dans
le
Il
du
Delta
même
ceux de nos
Birmanie
)
un marché
pour
considérable où les
Chinois du Quang-si prennent l'habitude de s'approvi-
— Le
sionner régulièrement.
fret
de retour ne
man-
quera pas, car la Chine surabonde de produits exportables et la clientèle est illimitée.
Voilà
comment je comprends la
création d'un premier
courant commercial avec la Chine. \ous avons tout dans la
main pour
le créer.
En
y mettant ensuite un peu de tarifs cjui semblent éta-
bonne volonté, en modifiant ces blis
pour
faire déserter
Gkandmaison.
nos côtes, nous amènerons 15
les
EN TERRITOIRE MILITAIRE
204
Chinois riz.
à
nous doinandcr dans
Le plus pressé
déplorable ré[)utation.
au long cours
de
serait
la sullc
du
antre cliosc que
perdre à nos ports leur
l'aire
Un capitaine américain voyageant dans je ne
et traitant
sais
plus quelle revue
une question commerciale, prétendait, en exagérant peut-être un peu cju'ayant visite mais pas beaucoup
—
successivement
Haïphong,
il
—
les ports
avait
de Yokohama,
dû paver i6o
premier, i6 francs dans le troisième. Il ajoutait
:
second
le
On
«
Hong-Kong
i,6oo francs dans
et
ne m'y reprendra pas.
Jusqu'au jour, lointain peut-être, où
mieux
accueilli,
aura repris
et
francs de droits dans le
le
le
»
commerce,
chemin trop oublié de
nos ports coloniaux, toute tentative de fourniture en Chine, toute concurrence aux importations de
Kong dans le
le
\un-Xan)
Quang-si est
impossible.
]Notrc
Langson peut vivre malgré tout nos
riz et
de
(et bientôt
la
chemin de
un
pis aller
;
fer
de
à la condition d'attirer
nos produits indigènes par des
nables. C'est
Hong-
Birmanie dans
mais
il
tarifs
raison-
faut bien s'en con-
mieux faire pour le moment. Nous avons demandé déjà pour les régions de la frontière une administration simple et bien disciplinée entre les mains d'une autorité forte qui sache, en pré^ tenter ne pouvant
parant leur bien-être, s'assurer
le
concours des habi-
tants.
Sans industrie possible, habitée par une population tranquille mais peu dense et paresseuse, ne possédant
aucun produit d'exportation,
la
région de
Dong-Dang
n'a pas d'avenir commercial. Les races indigènes
vent cependant
s'y
développer
et atteindre
prospérité suffisant à leur ambition.
peu-
un degré de
Nous avons vu
à
quelles conditions.
La
situation nouvelle faite au
commerce
local par
GOMMENT EXPLOITER LE TONKIN? l'ouverture
du chemin de
255
poussée grandis-
fer et la
sante des Annamites vers la frontière occasionnera
une
moyen
d'y
crise
économique peut-être grave. Le
remédier
d'encourager dans une large mesure
serait
production
seul
la
développement des cultures
agricole et le
riches. Il
S'il
faut citer à part la hadiane qui a fait ses preuves.
d'en généraliser
était possihle
culture
la
pays
le
pourrait se transformer dans l'avenir.
La colonisation ou l'exploitation
directe par les
Euro-
péens dans nos contrées ne peut vivre qu'en dépouillant les
hahitants.
Même
h ce
prix
la
réussite en
serait
douteuse. C'est
donc
à la prospérité et
que doivent tendre nos sance tranquille travail,
bien-être
Assurons-lui
que peut
la
jouis-
procurer son
lui
amenons-le peu à peu à augmenter ce bien-être
en dirigeant
mieux
connaissances et ciales.
du
aux progrès de l'indigène
eiTorls.
Il
en
ses
efforts,
en développant
facilitant ses relations
deviendra un auxiliaire sur
et
ses
commer-
dévoué sur
lequel nous pourrons compter en toutes circonstances et
nous aurons rempli notre tâche dans
J'ai, à dessein,
au
territoire
instant
cet
la
haute région.
limité cette courte étude
de Lan^son. horizon,
économique
Je voudrais, élargissant
montrer comment
un
les principes
qui nous ont guidés dans cette excursion locale peuvent s'appliquer à l'ensemble
du Tonkin. Ce m'est une occaune fois de plus et
sion, volontiers saisie, de les définir
EN TERRITOIRE MILITAIRE
25n
de leur demander, en terminant, quelques conséquences pratiques.
Notre grande erreur coloniale
est
ploiter nos conquêtes avant maturité.
nons
à chcrclier
de prétendre ex-
Nous nous
obsti-
un immédiat débouché pour nos pro-
duits métropolitains dans des contrées qui ne peuvent
absorber parce qu'elles ne produisent pas. Il
de
faut pourtant semer avant de récolter et grefîer avant
cueillir des
tueusement de ciels
fruits.
tirer
Au
donc d'essayer infruc-
lieu
du Tonkin par des moyens
de problématiques bénéfices, ne serait
d'en faire d'abord
prospère
la
artifi-
pas sage
un pays économiquement vivant
et
?
Mais nos capitaux sont méfiants aussi,
-il
sommes-nous impuissants
et
nos colons rares
à opérer
;
nous-mêmes
transformation matérielle indispensable pour rendre
Tonkin capable de produire mesure suffisante. C'est donc aux habitants le
—
et
d'absorber dans une
dirigés et instruits qu'il
faut confier le soin de ce nécessaire progrès.
Ce raisonnement nous ramène à
la
double consé-
quence déduite, au début de ce volume, de considérations 1°
un peu
vail social
2°
de
différentes
:
Notre premier travail au Tonkin doit être un tra;
Dans l'aménagement économique
la colonie,
il
et
commercial
ne faut considérer d'abord que
propre, la traiter en pays libre et agir dans
le
sa vie
seul in-
développement et de sa prospérité. L'examen du premier point m'a fourni la matière presque totale de ce livre. Le second pourrait, à mon térêt de son
COMMENT EXPLOITEU LE TOMvlN
357
?
sens, servir de guide dans l'étude de toutes les questions
du pays. ïonkin gagnerait
qui touchent à la mise en valeur S'il est facile
émancipation,
de voir ce que il
le
à cette
malaisé de comprendre ce que
est plus
pourrait v perdre la France.
Prétendre, à l'aide de
tarifs
douaniers, faire absorber
dès maintenant nos produits français par les indigènes, serait
une dangereuse
illusion.
Les Annamites produisent à peine de quoi suffire à leurs besoins très limités. Est-il plus raisonnable de
une complète
marchander
liberté de fabriquer,
nuire aux industriels de France
diflicile
la crainte
de
L'écoulement des pro-
?
duits manufacturés par les pays à
de jour en jour plus
à notre colonie
dans
monnaie
chez
d'or devient
peuples à étalon
les
blanc.
?sous
ne vendons rien en Extrême-Orient,
surplus,
si
nos industriels
tonkinoise sur les
marchés asiatiques,
fabriquer au Tonkin
comme
— Au
craignent la concurrence
Au
Indes, pour vendre en Chine.
cju'ils
aillent
Anglais fabriquent aux
les
où
cas
certains pro-
duits viendraient déprécier nos marchandises de France
sur les marchés européens, fermons-leur ces marchés.
Rien de plus juste
et le
peut acheter à ce prix
Tonkin ne
s'en plaindra pas
Toutes nos idées sont faussées, du obsession
de lucre immédiat.
On
marque curieuse dans l'importance (théoriquement,
il
s'il
la liberté industrielle.
est vrai)
reste, par cette
en peut voir une excessive accordée
aux questions de
Les colonies réduites à un port,
transit.
comme Hong-Kong ou
Singapour, n'avant pas d'autres movens d'existence, vivent de transit. Mais, il
pas
quand
il
s'agit
du Tonkin,
n'est-
surprenant parfois d'entendre surtout parler
EN TERRITOIRE MILITAIRE
258
d'exploiter lo
quinze
Yun-\an
vaut cependant
que pour
Un
pavs peuplé de douze à
peine qu'on s'en occupe.
la
s'il
était
possible de
semble
production locale
et
un pont
jeter
Yun-Xan-Fou. Le
Ilaïpliong et
une
Il
certains, la colonisation serait achevée et le
but atteint
paraît
?
millions d'habitants, riche et facile à exploiter
de lui trouver des débouchés
autrement intéressante
affaire
entre
soin d'augmenter la
Admettons donc, pour un moment,
le
Tonkin
libre
indépendant. C'est un pays bien doué, capable,
et
me
et pressée.
s'il
bonne figure en Extrême-Orient. Quels moyens va-t-il employer pour y est
judicieusement conduit, de
parvenir
?
Vraisemblablement,
quer
il
voudra produire
et
fabri-
:
Ce
1°
ment
qu'il
consomme lui-même
à ses voisins
Ce que
2°
acheter 3°
faire
achète actuelle-
et
;
ses voisins
absorbent
et
sont disposés à lui
;
En troisième
ligne seulement, ce qu'il peut espérer
vendre en Europe.
Car
si
ce trafic
est aléatoire.
promet de gros
L'Europe
bénéfices,
se défend, la partie
la réussite
économique
y est âprement disputée et le jeu serré. Il est donc normal de baser la prospérité d'un pavs neuf sur des opérations moins fructueuses mais plus sûres.
Dans
cette voie, l'agriculture tient la
première place,
puis viennent l'exploitation des richesses dustrie. Or, et les
nous l'avons reconnu,
les
du
sol et l'in-
colons sont rares
Français clair-semés pour longtemps e-ncore en
Indo-Chine.
Ce sont donc
:
l'agriculture indigène (le riz en pre-
COMMENT EXPLOITER LE mière ligne),
les exploitations
premières sources de
que
qui doivent devenir
sa prospérité.
pour prévoir une trop
Est-il besoin de spécifier,
critique,
25.j
?
indigènes (pèche côtière,
salines, etc...), l'industrie indigène les
TOMvi:<
mon intention n'est point du
facile
tout d'amoin-
drir l'importance des entreprises françaises, des cultures
que rien
riches, des grandes exploitations? Je voudrais
ne fût épargné pour leur ouvrir nos possessions neuves y faire une très large place.
et leur ici
d'établir
que
cette place
s'agit
sur la production, sur
ses lignes
programme. Observons
ment que pour coordonner ses travaux, pour à
première
indigène.
le travail
n'est pas le lieu d'aborder, fût-ce dans
générales, l'étude de ce
peu
seulement
la
de mise en valeur doit être fondée
et cjue toute tentative
Ce
Il
ne doit pas être
peu raisonnablement et rendre moins improductifs
ses efforts, le colonisateur doit
s'imposer deux tâches
d'ordre différent et d'importance prescjue égale 1°
Un
travail social et administratif (qui,
prime toute autre préoccupation) 2°
L'aménagement du Tonkin,
les
gneuses
et
de l'outillage
commerce.
plaines vivantes et fertiles
sont difticilcment comparables les détails
de
la
:
au début,
;
sol et la création
nécessaire à l'exploitation et au
Au
seule-
les orienter
du Delta
aux contrées monta-
colonisation
doivent
être
soigneusement appropriés à chaque milieu. Mais principes qui
la
dominent ne changent pas
nous avons demandé pour
les
réclamer pour l'ensemble de
Pour en
faire la
preuve,
il
hautes régions,
suffit
il
faut le
de rappeler
social et administratif:
Tranquillité assurée.
ce C|ue
la colonie.
urgents de ces desiderata.
— Au point de vue
les
et
les
plus
EN TERIUTOIUE MILITAIRE
36o
Asslctlc de l'iinpôt
ment
direct très stable et judicieuse-
équilibrée.
Prudence extrême dans l'établissement des taxes de culture et des impôts indirects.
Enseignement agricole et industriel. Encouragements directs à la culture. Secours,
essais,
expositions, publicité.
Régime de absolu de
la
propriété assis et bien assuré. Respect
la
propriété indigène.
Grande simplification
et
libéralisme dans le régime
administratif des concessions, des exploitations et des entreprises industrielles.
Frontières et ports largement ouverts au commerce.
Régime douanier
réduit, en grande partie, à la protec-
tion des produits
que
Tonkin peut fabriquer
le
lui-
même.
—
S'il s'agit
de l'aménagement du
sol et
de l'outil-
lage à créer, c'est dans l'intérêt de la production locale et surtout
du développement de
vent être menées
les
l'agriculture
premières entreprises
que doi-
:
Irrigations, protection contre les inondations, naviga-
tion intérieure, routes, cliemins de fer.
Les communications rapides sont primordiales, per-
sonne ne
énorme
le
conteste. Mais
et c'est là
leur prix
de revient
est
surtout qu'il faudrait procéder avec
métliode.
Les cliemins de
fer
du Tonkin doivent répondre
à
de
multiples conditions qu'il semble naturel de grouper ainsi par ordre 1°
Répartir
d'urgence les
:
ressources
disettes, égaliser les cours et
du pavs pour permettre
aux
éviter
les
liabitants,
sûrs d'être approvisionnés en tem|)s utile, de spécialiser
leurs exploitations suivant les régions
;
COMMENT EXPLOITER LE TONKIN Drainer
2"
les marelles,
produlls exportables, approvisionner
los
donner des déboucliés en Chine
Assurer
3*^
le
261
?
;
produits chinois par
des
transit
du Tonkin. Quant à l'outillage maritime,
les
ports
notons seulement qu'il
fort
est inutile et
important lui aussi,
onéreux de
le créer
prématurément au delà des besoins. Quand le pays remplira ses docks et couvrira fussent-ils
en bois
comme
de marchandises
à Singapour,
il
ses quais,
ne sera plus
nécessaire de subventionner à grands frais des lignes de
navigation qui ne font rien.
Répétons-le donc une
encore
fois
au développement propre du pays, la
production indigène, à
cessaire
pour favoriser
;
de l'outillage né-
la création
cette
en somme,
c'est,
à l'augmentation de
production
et
l'exporter
qu'il faut consacrer nos efforts.
La France terres
;
elle
n'a pas besoin de conquérir de nouvelles
ne peut pas
les
peupler. Ce sont des marchés,
un un marché. lourde, un luxe que peut
des centres d'activité extérieure qu'il lui faut. Mais
pavs qui ne produit pas n'est pas
—
-
C'est
justifier la rale,
une charge
très
préoccupation légitime de l'expansion
mo-
mais que ne nous permettrait pas notre situation
de fortune,
s'il
temps de
n'était possible avec le
le trans-
former en un placement avantageux.
Une
évolution
se dessine,
très
heureuse, dans
sens. Constatons cet indice rassurant
d'étudier le passé
sans trop
;
il
d'amertume
regarder plus coniiants l'avenir.
ce
nous permettra et
nous
fera
CONCLUSION.
Voici la dernière page de ce livre. Je crains d'avoir
mal rempli
tâche que je m'étais tracée.
la
On
risque
toujours, en supprimant les accessoires, en négligeant le détail
vu
et
la
note pittoresque, de faire perdre à
la
pensée sa valeur exacte, sa teinte précise. L'impression
complexe
et
profonde que j'aurais voulu rendre assez
vivante pour la
faire partager,
se
dégage confuse et
sans relief de ces notes trop hâtives.
En
colligeant les points noirs
pour y chercher des les ombres du ta-
enseignements, en ne copiant que
ne
bleau,
les indécis,
me
suis-je pas
de dégoûter
désir eût été de leur
Tonkin S'il
mis dans
le cas
de décourager
les indifférents alors
que
mon
donner conhance dans l'avenir du
?
en
est ainsi, je regrette
de ne point avoir su en-
châsser les idées que je prétendais défendre, dans
cadre plus riche et plus plaisant.
trouvé
le loisir
poiu" y reposer
Comment
un
n'ai-je pas
de peindre ces belles plaines du Delta
mon
lecteur fatigué et le réconforter
au
spectacle de l'activité et de la vie qui débordent des
innombrables
villages cachés
dans leurs bosquets dç
CONCLUSION
bambous au
feuillage grcle et
263
comme
semés
verts sur l'océan des rizières inondées
Comment
n'ai-je pas
môme
tenté de lui faire sentir
charme de nos régions montagneuses en
le
des îlots
?
menant
le
parles étroits vallons où, sous renclievètrement des rotins
épineux, courent
les
arroyos naissants. Nous aurions
pu
gravir ensemble les rochers déchiquetés, explorer les
cirques sans issue, les cavernes cachées dans l'ombre des bois profonds et admirer
un admirable
par
comment
artifice
le
Créateur
l'horreur de ce chaos sous la richesse
verdure dont Il
l'a
le
brume
la
sage et
matin dans
ces gorges étranges, à l'heure
laiteuse dissimule encore le détail
résume
le
du pay-
dessin de sa puissante architecture.
Les premiers raA ons du le
du manteau de
revêtu.
y avait des sensations d'art exquises à recueillir en
s'enfonçant
où
il
plu
s'est
de son génie à transformer
soleil
viennent bientôt
faire vivre
décor, ciseler les reliefs, animer les tentures de feuil-
lage et d'incomparables végétations qui drapent les flancs
roux
si
curieusement ouvrés des
un émerveillement de
falaises à
pic.
Et
c'est
du jour, au
suivre avec les heures
milieu de l'inattendu des formes, l'inépuisable variété des teintes et la gradation délicate des tons gris bleuâtre des départs las
traînant sur le chemin
du retour depuis ;
de cobalt que plaquent sur lourd
soleil
de midi,
;
depuis le
jusqu'aux grandes ombres
les
la rizière trop
li-
les taches
verte,
au
branchages immobiles, jus-
qu'aux rayons carminés effleurant
la
pointe extrême
des hauts rochers broussailleux qui découpent au cré-
puscule leurs silhouettes violet sombre sur
d'un
ciel
le
fond lavé
couleur de turquoise morte
Je n'ai pas dit l'irrésistible attrait de cette vie
de
E> TEIIKIÏOIRE MILITAIRE
2G',
coMunandanl de
secteur, la jouissance profonde de pro-
duire soi-même, de récolter ce qu'on a semé, de tra-
sentiment, lourd quelquefois
vailler sur des réalités: le
mais toujours de tous
fortifiant
les instants
ment qu'on
pour l'àme, d'une responsabilité qui vous prend, l'attache-
l'intérêt
;
une population
sent croître en soi pour
simple, respectueuse, faite pour la paix, qui se rap-
proche peu à peu J'aurais
dû
de
«
ciale
affection
la
que
pas oublier
et s'apprivoise.
signaler au mois cette camaraderie spé-
brousse fait
estime réciproque, cette
», cette
une
naître
pareille vie partagée et
les collaborateurs, les
ne
amis de Dong-Dang,
ne fùt-cc que pour reconnaître, sans espoir de m'en de
acquitter, la dette
reconnaissance
que
con-
j'ai
tractée.
Le lieutenant Colombat, le
plus utile
brèche;
de mes
le
plus fidèle, le plus
compagnons. Toujours
administration,
routes,
actif,
sur la
co-
reconnaissances,
lonnes, combats, jardinage, tout lui convient pourvu qu'il se dépense.
Le lieutenant Seidenbindcr, toutes les besognes
agent-voyer
et
utiles.
mon
autre bras. Prêt à
Comptable, entrepreneur,
bien d'autres choses encore,
court pas après
Le lieutenant
quand
Fialix,
son activité calme
et
un sa
fidèle
du
secteur, exerçant
— C'est
Le lieutenant Bondonneau gardé seulement
Et
et
peu
méthode.
sa
nécessaire pour apprécier sa valeur et laissé
ne
fermeté tranquille dans son
gouvernement de Na-IIan. Beaucoup de besogne de bruit.
il
les pirates.
le
temps
sentir le vide
par son départ. tant d'autres,
grettés
chefs respectés
ou camarades re-
Et cette belle troupe de
la
Lé-
CONCLUSION
265
gion qu'on ne peut oublier quand on a eu l'honneur de
commander ailleurs que sur les glacis de Bel-Abbès. Bon à tout, prêt à tout, s'accommodant de tout,
la
légionnaire
le
dans
brousse n'a
la
qu'on
où
Maçon, charpentier, ouvrier en
il
va.
le
en
traite
chantier, commissaire de police
son pareil
pas
homme
pourvu
et
qu'il fer,
le faut,
s'il
il
sache
chef de se re-
trouve au premier signal, malgré ces avatars passagers, l'admirable soldat qu'on connaît, portant toujours en
mordant, ce mouvement en avant, ce besoin de
lui ce
marcher sur
on
fait
l'obstacle, cette tension vers
l'ennemi dont
avec raison la caractéristique, la vertu première
d'une troupe de combat. Il
faut vraiment
que
le
métier militaire libreinent
accepté et trempé par l'action nourrisse le
germe de
vertus très hautes. Quel stimulant, quel idéal peuvent
amener
le
jamais?
Serait-ce
l'appas
quelques médailles
ou
l'espoir
pavé
une bravoure habituelle qui va un dévouement qui ne calcule
légionnaire à
jusqu'à l'héroïsme, à
de sa
maigre
Mais à quoi bon ces digressions tardives?
Il
n'est plus
constaté que
le
service?
élaguant les détails, alléger
J'ai
les
de mourir de faim quand on l'aura jeté sur
comme impropre au
amoindrie.
solde,
parcimonieusement distribuées
si
ma
thèse,
J'ai
cru en
peut-être l'ai-je
temps de mieux
nous colonisons
faire.
très
mal. Nos
œuvres d'expansion portent toutes coinme une marque de décrépitude,
comme un symptôme de fatigue et d'imEn pratiquant la colonisation, en
puissance à produire.
vivant au contact des races indigènes,
j'ai
acquis la
conviction que ce sont les forces morales malheureuse-
ment
trop méprisées, qui seules pourraient rendre
un
EN TERRITOIRE MILITAIRE
2GG
peu de
vitalité à
traditions,
nos entreprises. C'est
aux métJiodes nationales que
le
j'ai
retour aux
demandé.
Les Aniïlais sont des orijanisateurs de premier ordre et
nous aurions besoin trop souvent de nous mettre à
leiu' école.
me
Je
seulement contre l'anglo-
suis élevé
manie, contre l'humiliante habitude que nous avons prise de
marcher toujours
Anglais quand
il
s'agit
remorque de quelqu'un
à la
de colonies, Allemands
s'il
:
est
question de choses militaires. Or l'expérience est
là
pour démontrer que nous sommes de mauvais copistes.
Nous n'empruntons
à nos
modèles du moment que
au
appropriés peut-être
des formes, des simulacres,
génie propre de ceux qui les ont inventés mais
le
plus
souvent détestables entre nos mains parce qu'ils accentuent nos défauts
et
nos faiblesses, qu'ils compriment nos
instincts de race et laissent sans emploi les réserves de
productivité très réelles quoi' Si
qu'on en
que nous possédons encore
—
dise.
nous voulons mieux
faire,
il
faut redevenir
Fran-
çais.
En
^I. Demolins sur la Edouard Drumont dit
discutant les opinions de
supériorité des Anglo-Saxons,
excellemment dans un
article récent:
ont à l'heure actuelle une
« Si les
Anglais
telle supériorité sur
nous, ce
n'est pas parce qu'ils sont Anglais, c'est parce
que nous
avons cesssé d'être Français.
La France
On
les
— C'est mon
avis.
deux qualités de fond, deux
avait autrefois
vertus qui suffisaient à tout
»
:
la
générosité et
Français de bonne race, mais
la
masse,
le
sens.
les
le
corps social
semble avoir perdu ces deux marques d'élect ion dans
bon
le
retrouve encore souvent chez l'individu, chez
.
S'il
entre
desseins de la Providence de rendre à la France,
CONCLUSION
2()7
sur les autres nations, la supériorité matérielle et morale qu'elle a
si
longtemps gardée, nous connaîtrons que
cette renaissance est proche
en voyant chacun des actes
de son expansion reprendre ce double caractère rosité
dans
la
conception,
cution.
FIN
—
bon sens dans
:
génél'exé-
TABLE DES MATIERES
Pages.
Avant-Propos
v
Chapitre premier.
—
impossible dans l'examen des cir-
11 est
constances qui nous ont amenés au Tonkin de découvrir une ligne de conduite arrêtée d'avance. La France a conquis l'Indo-Ghine, en dehors de tout calcul, pour obéir instinctivement à son rôle traditionnel. Preuve his-
— —
torique
Chapitre
5
—
Les
locales n'expliquent pas, au Tonkin, nos longs insuccès. Ils tiennent à une erreur de principe. Nous voulons exploiter à l'anglaise au Heu de civiliser. — Résultats nous n'avons su inspirer confiance ni aux indigènes, ni aux colons, ni aux capitaux. Vices administratifs. Exemples II.
difficultés
—
:
—
Chapitre
—
—
111.
Causes. hostilité
—
Insuccès de
Instabilité
de
—
dans
—
La
— Irréconciliable — Moyens pratiques pro-
religion, la langue,
l'instruc-
Conclusion; Civilisons nos conquêtes
52
— Organisation des hautes régions dans ports avec générale. — Politique des
Chapitre IV.
ses
la pacification
Situation dans
Chapitre V.
—
la
région de Lang-Son en
Lutte contre
occupation militaire.
la
—
piraterie.
—
fin
mement
rap-
races,
i8g3.
.
.
—
—
Ar88
des villages
—
politique.
Rapports avec
78
Organisation et
Relations avec les Chinois.
Utilisation des habitants au point de vue militaire.
Chapitre VI.
27
—
indigène.
la direction.
la classe instruite.
pres à y remédier. tion.
notre politique
les
— Régime militaire
habitants. et
régime
— Organisation civil.
à prendre pour rendre les résultats définitifs
— Mesures
13G
TABLE DES MATIÈRES
.>.~o
Chapitre VII.
—
Importance de
l'installalion
matérielle.
— 193
Constructions et roules
Chapitre VIII.
—
L'occupation complète des hautes régions
— Caractère
était-elle nécessaire?
ture.
—
gime de merce.
Possibilité
la propriété.
—
Impôt.
— Comment exploiter
TYPOGRAPHIE DE
— Agricul— Ré-
le
—
Industrie.
Tonkin?
—
Com214 202
CoNCLUSiON
PARIS.
du pays.
de colonisation européenne.
E.
PLON, NOl RRIT ET C"\ RUE GARANClÈRE, S.
\
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CARTE DU TONKIN Échelle UO
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Limite d'État Capitale
Ville importante
• Localité moins
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Bao-Ha
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r^ACHAM
SECTEUR
DONG-DANG PARTIE de
VOISINE la
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—
—
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franç^aisej
—
—
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