Alfred Barbou. Les Héros de la France et les PavillonsNoirs au Tonkin
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Barbou, Alfred (1846-1907). Alfred Barbou. Les Héros de la France et les Pavillons-Noirs au Tonkin. 1884. 1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numériques d'oeuvres tombées dans le domaine public provenant des collections de la BnF. Leur réutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 : - La réutilisation non commerciale de ces contenus est libre et gratuite dans le respect de la législation en vigueur et notamment du maintien de la mention de source. - La réutilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par réutilisation commerciale la revente de contenus sous forme de produits élaborés ou de fourniture de service. CLIQUER ICI POUR ACCÉDER AUX TARIFS ET À LA LICENCE 2/ Les contenus de Gallica sont la propriété de la BnF au sens de l'article L.2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques. 3/ Quelques contenus sont soumis à un régime de réutilisation particulier. Il s'agit : - des reproductions de documents protégés par un droit d'auteur appartenant à un tiers. Ces documents ne peuvent être réutilisés, sauf dans le cadre de la copie privée, sans l'autorisation préalable du titulaire des droits. - des reproductions de documents conservés dans les bibliothèques ou autres institutions partenaires. Ceux-ci sont signalés par la mention Source gallica.BnF.fr / Bibliothèque municipale de ... (ou autre partenaire). L'utilisateur est invité à s'informer auprès de ces bibliothèques de leurs conditions de réutilisation. 4/ Gallica constitue une base de données, dont la BnF est le producteur, protégée au sens des articles L341-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. 5/ Les présentes conditions d'utilisation des contenus de Gallica sont régies par la loi française. En cas de réutilisation prévue dans un autre pays, il appartient à chaque utilisateur de vérifier la conformité de son projet avec le droit de ce pays. 6/ L'utilisateur s'engage à respecter les présentes conditions d'utilisation ainsi que la législation en vigueur, notamment en matière de propriété intellectuelle. En cas de non respect de ces dispositions, il est notamment passible d'une amende prévue par la loi du 17 juillet 1978. 7/ Pour obtenir un document de Gallica en haute définition, contacter utilisationcommerciale@bnf.fr.
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PAVILLONS-NOIRS AU
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PARIS LIBRAIRIEUNIVERSELLE D'ALFRED DUQUESNE
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RUE DE LA SORBONNE,
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été déposé AU MINISTÈRE DE L'INTERIEUR Section de la librairie) Conformément à la loi. Ce volume
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Tous droits de reproduction et de traduction rcscrcr.-:.
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PRÉFACE
Le récit que nous voulons faire, selon les relations de nos voyageurs et d'après les documents historiques, est un récit à la fois exact et merveilleux. Il tient du prodige et ressemble à une épopée des aventures héroïques, des exploits presque fabuleux, tels sont, en deux mots, les événements qui viennent de se passer au Tonkin. Jamais les héros de roman enfantés par la puissante imagination d'un Alexandre Dumas n'ont accompli des faits plus surmais les personnages d'invenprenants tion ne font des choses extraordinaires et invraisemblables que pour l'amusement de la foule et pour la satisfaction de leurs passions, tandis que ceux dont nous entreprenons d'écrire l'histoire ont versé leur sang généreux, le sang de tel
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France, ont dépensé toutes leurs forces pour l'accomplissement d'un devoir sacré, afin de bien travailler à la grandeur et à la prospérité de notre patrie. Raconter leurs combats et leurs entreprises, c'est donc acquitter une dette de reconnaissance, et, si nous ne sommes print trop au-dessous de notre tâche, ajouter une page à notre histoire nationale et donner un grand enseignement avec le simpleexposé de vérités dramatiques. A quoi ont sacrifié leur vie, et Francis Garnier, et Henri Rivière, dont la mémoire doit être impérissable? la France, pour conA cette idée server sa suprématie, pour continuer son œuvre de civilisation, a besoin déposséder des colonies. Lorsque l'on considère l'avenir réservé sérieurend monde, l'on lorsque se au sement compte dela situation des différents peuples de l'Europe, on ne peut que constater avec inquiétude et avec tristesse le formidable accroissement, la
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redoutable prépondérance de la race anglo-saxonne et la faible part réservée à notre nation. La guerre terrible, notre défaite de 1870, a contribué à diminuer encore notre influence et en Afrique et en Asie; une faute impardonnable et dont il jst permis de calculer les conséquences a rendu les Anglais maîtres de l'Egypte et de la seconde clef de la Méditerranée. Les Etats-Unis d'Amérique comptent déjà près de cent millions d'habitants et l'Australie est appelée à de grandes destinées. Voulons-nous donc nous condamner à vivre sur notre sol, hélas! imoindri, à nous y épuiser en efforts ;tériles tandis que les autres peuples l'Europe, nos voisins et nos rivaux, itendant tous les jours leurs territoires. iccroissent à la fois leurs richesses et eur puissance? La Non. France qui jadis par le Caiadaet la Louisiane dominait en quelque ,orte l'Amérique du Nord, qui avait conluis les Indes occidentales perdues sous
le règne honteux de Louis XV, et qui, sans la criminelle ambition de Napoléon Ier, eût cependant conservé sur le globe sa prépondérance, la patrie des plus hardis explorateurs et des colonisateurs les plus habiles et les plus loyaux, la France commence à reconnaître que ses destinées sont liées à celles de ses lointaines possessions. Instruits par nos malheurs, il importe que nous travaillions à notre complet relèvement et que notre nation soit forte et représentée au dehors comme en Europe. Nos qualités, la justice et la bonté qui sont naturelles à notre race, nous rendent plus aisément sympathiques même aux peuples sauvages contre lesquels nous combattons au nom de la
civilisation. Partout où nous avons eu des établissements nous avons laissé un souvenir profond, indélébile, un souvenir qui se traduit par une affection non encore éteinte. Si le récit de nos expéditions actuelles,
grands drames historiques, peut passionner le lecteur, il montrera en outre quelle action bienfaisante et utile pour tous exercent au delà des mers nos soldats, nos courageux fils, qui pensent que le sacrifice de leur vie n'est rien lorsqu'il s'agit de travailler à la grandeur et à la prospérité de la mère patrie! Certes, ce n'est qu'au prix d'incessants efforts et d'importants sacrifices que nous pouvons affermir nos conquêtes et les rendre fructueuses; mais, qui reculerait devant le but à atteindre, but poursuivi par les peuples qui nous jalousent et rêvent sinon notre anéantissement du moins notre complet affaiblissement? Lorsq ue, en 1875, le hardi voyageur anglais Margary périt dans l'extrême Orient, lorsque, à Londres, on apprit que sa tête avait été promenée par ses barbares vainqueurs, comme un trophée, l'opinion cria aussitôt vengeance et justice et si, cela eût été nécessaire, le Parlement britannique n'eût pas hésité à déclarer la guerre la plus dangereuse.
Nous ne voulons point la guerre et nous ne la ferons que si nous y sommes contraints, mais nous ne permettrons pas, nous non plus, que nos morts, Francis Garnier et Henri Rivière, aient succombé inutilement. Nous ne voulons pas que l'expédition à laquelle ils ont été mêlés, l'expédition, a-t-on justement dit, la plus belle depuis celles de Fernand Cortez et de Pizarre, finisse par une reculade à la fois honteuse et préjudiciable à tous nos intérêts. Deux cents des nôtres avaient conquis en un mois cinq provinces peuplées de plusieurs millions d'habitants et les plus riches d'Annam. Nous n'abandonnerons pas ces provinces, parce que sous notre protectorat leurs habitants sont plus heureux et plus libres, et parce qu'elles offrent à notre commerce de merveilleux débouchés. La Chambre des députés l'a bien compris en votant à une majorité considérable,le31octobreet le i8décembre 1883, la continuation de notre ferme politique
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coloniale. Ses votes ont été l'expression de la volonté du pays qui, se rendant compte des tentatives incessantes des l'avequ'on prépare entend voisins, pays nir, qu'on assure, à nous et à nos enfants, une prospérité commerciale actuellement compromise sur le continent. L'exemple de l'Angleterre, qui ne recule jamais devant ce que certains hommes politiques appellent des aventures, ne suffit-il pas à nous éclairer? Son commerce prospère tandis que le nôtre traverse des crises redoutables sans cesse elle a augmenté ses débouchés, tandis que les nôtres ont diminué. Nos acheteurs de jadis produisent à leur tour et nos importations augmentent parfois à mesure que décroissent nos exportations; si cela continuait, notre ruine et notre décadence seraient proches, et les Américains, les Espagnols, les Italiens, les Allemands ont déjà trop profité de notre inertie. Et cependant les hommes ne nous manquent pas à nous non plus, et ils -
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font preuve, au moins autant que les étrangers, de courage, d'initiative et d'esprit de colonisation. Le gouvernement de la République a le devoir de stimuler ces qualités; il l'a compris, et nous espérons que tous comprendront avec lui que des colonies dépend la richesse nationale. « N'est-il pas étonnant, écrivait récemment un officier de marine des plus distingués, n'est-il pas étonnant de voir la France, dont le système financier est si admirable et si puissant, rester en arrière dans toutes les entreprises qui pourraient développer notre influence lointaine et procurer à notre commerce l'usage plus facile d'instruments de crédits nationaux? Nous nous laissons primer partout par les peuples audacieux. Pourquoi aurions-nous une répulsion pour ce genre d'affaires, cause de si grandes richesses en Angleterre, aux États-Unis et, à nos portes, en Belgique et en Hollande? Qu'on remarque l'ardeur des Allemands à développer sur
toutes les mers leur commerce au moyen d'une flotte marchande dont l'outillage perfectionnéassure le succès! » Il ne nous manque qu'une impulsion que nous réclamons, à une époque où la civilisation européenne s'étend sur le monde. Affirmons donc énergiquement l'utilité, le besoin, la nécessité de la colonisation, pour laquelle nous avons autant d'aptitudes que quiconque. Ne reculons pas devant les sacrifices nécessaires et sachons profiter du dévouement de nos nationaux. A cette question est intimement liée. notre régénération et de nos colonies dépend notre existence même. L'Algérie, dont la possession a été tant attaquée, sera avant peu la plus riche province de France; il en sera de même du Tonkin, par lequel nous aurons accès en Chine, grâce auquel nous serons en rapports commerciaux avec ce peuple qui compte tant de millions d'hommes pouvant devenir nos tributaires, c'est-
à-dire que nous pourrons alimenter de nos produits. Ainsi nous donnerons un aliment à notre activité et nous trouverons à maintes questions sociales une solution pratique. Dans ce livre consacré au Tonkin, devenu heureusement l'objet de la préoccupation publique, nous nous contenterons d'énumérer les combats glorieux, les luttes superbes de nos marins contre les bandits que l'on nomme les PavillonsNoirs, etnous résumerons brièvement rhistoire presque fantastique d'une contrée riche entre toutes et qui nous devra les bienfaits de la civilisation moderne. De ce récit émouvant par les seuls faits qu'il contient, l'enseignement se dégagera seul, et, pour tout dire, en songeant à la gloire et aux avantages que nous pouvons recueillir dans cette entreprise, Francis Garnier crierons avec parnous tant pour le Tonkin « En avant! pour cette vieille France »
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A. B.
CHAPITRE PREMIER MOEURS ET COUTUMES
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Sommaire: Voyage de Tissanier au Tonkin en 1658. Mœurs et coutumes à cette époque. — Origines fabuleuses. — Bua Soldats et mandaet Chua. — Un monarque esclave. rins. — Costumes 'et usages. — Superstitions. — Les bonzes. — Funérailles royales. — Les médecins. — Exécutions. — Souvenirs de Hué. de Michel Chaigneau. — Mœurs actuelles de l'Annam et du Tonkin. — Sièges annamites. — Le bétel. — Habitations et ameublements. — Caractère du peuple. — L'armée et la marine. — Habitudes royales. — Un mandarin qui ôte sa chemise. — Les cureurs d'oreilles. — La température au Tonkin.
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Vempire d'Annam, que l'on peut considérer comme une tranche de l'Inde située au delà du Gange, a pour limites, d'un côté, la chaîne de montagnes qui le sépare du Laos siamois, de l'autre, la mer de la Chine. L'Annam est coupé transversalement en deux parties au Sud la Cochinchine, au Nord le Tonkin; la France possède la partie la plus méridionale de la Cochin-
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chine, et de plus elle a étendu son protectorat sur le Cambodge. Les Anglais, établis aux deux rives du golfe de Bengale, sur le territoire birman et le territoire siamois, surveillent de là nos efforts avec une jalousie qui s'est accrue depuis les récents événements du Tonkin, car la route de l'Inde nous est désormais ouverte de ce côté par Je fleuve Rouge. Le Tonkin proprement dit est borné au Nord par la Chine, à l'Est par la mer, au Sud par la province du Ciampa, à l'Ouest par l'Annam. L'ancienne capitale du Tonkin, Hanar, dont nous aurons souvent occasion de parler, se nomme quelquefois Kécho, ce qui signifie le « grand marché», ou Thanlong-than ce qui veut dire « cité du Dragon-Rouge ». Édifiée au septième siècle, lorsque la contrée dépendait encore de la Chine, cette ville, un moment abandonnée, redevint capitale il y a neuf cents ans, puis fut abandonnée par les monarques annamites qui. s'établirent dans la haute Cochinchine, à Haé. Dans un pays comme le Tonkin, où la
culture du riz est en grande faveur, les larges voies de terre n'existent pour ainsi dire pas; elles sont remplacées par les rivières, quele grand écrivain Pascal nommait « des chemins qui marchent Des aréquiers, grands arbres à panache, embellissentles paysages, et des orangers, presque toujours en fleurs, grands comme brise des chênes verts d'Italie, parfument qui chaque nuit souffle de terre. Pour s'intéresser à un pays, il le faut d'abord bien connaître géographiquement. Cependant nous nous contentons, au début de cet ouvrage, de cette courte notice que nous développerons dans les chapitres suivants à mesure que les descriptions deviendront nécessaires. Notre intention est de prouver par des faits l'intérêt capital de la France à la possession du Tonkin. Les mœurs de cette région si longtemps inexplorée sont curieuses à tous les points de vue en faisant d'abord connaître les coutumes d'autrefois, nous éclairerons un point négligé par les historiens modernes et nous donnerons, croyons-nous, un plus grand attrait à notre étude. Donc, avant de raconter les événements
».
la
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extraordinaires qui se sont accomplis au Tonkin depuis 1870, jetons un regard sur
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le passé. Pendant
les années 1658,1659,1660,
il
y a par conséquent deux cent vingt-quatre ans, —un jésuite, Joseph Tissanier, alla en mission dans ce pays, qu'il nommait le Royaume de Tunquin. La relation de son voyage est extrêmement intéressante et mérite d'être résumée. Selon ce voyageur, on n'a jamais vu làbas ni glace ni neige et les arbres ne perdent jamais leur verdure il y en a dont les branches ne portent jamais ni feuilles ni fruits, mais sont seulement couvertes de fleurs. Le royaume n'avait alors ni villes entourées de murailles, ni forteresses, et les voleurs, nombreux, entraient aisément dans les maisons non closes; quandonlesprenait on leur tranchait la tête, mais les mesures les plus rigoureuses ne pouvaient mettre déprédations. leurs à terme un Les naturels aimaient les vers et le théâtre, les chants, les jeux et les danses. Leurs troupes se servaient de tambours, ou plutôt de tams-tams, et avaient des ensei-
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connaissaient ils couleurs; diverses de gnes les armes d'Europe et en fabriquaient non indolents montraient mais habileté, se sans et paresseux. Un Hollandais leur ayant appris à faire des grenades pour la guerre ajouta, afin de les stimuler, qu'il fallait y mettre une livre de sueur ce bon conseil ne parvint pas à les dégourdir. On ne connaît point leur origine d'une manière certaine. Leur histoire primitive se compose d'une série de fables dont voici les principales : La femme d'un des grands de ce pays enfanta cent œufs, prodige qni la surprit beaucoup mais elle fut vite consolée lorsqu'elle vit éclore soudain cinquante enfants mâles et cinquante filles dix-huit de ses fils régnèrent les uns après les autres sans interruption. Un peu plus tard, lorsque les Chinois conquirent le Tonkin, on raconte encore cette légende Un enfant de trois ans, monté sur un chevaLde fer, qui parut miraculeusement, se mit à la tête des soldats et parvint à re-
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pousser les envahisseurs, qu'il défit entièrement dans une seule bataille. Tout ce que l'on sait de très certain, c'est que du xi° au XVUC siècle le Tonkin fut gouverné par sept familles différentes, dont les principaux chefs furent des bandits. Ils ne cessèrent de lutter contre la Chine et parvinrent à conquérir leur indépendance en se soumettant seulement à un léger tribut qu'ils cessèrent de payer au bout d'un certain temps. A l'époque où Tissanier y arriva, il y avaitdeuxrois enfonction,l'unnomméBua, et l'autre, Chua le second exerçait seul le pouvoir, disposant desbiens du royaume, tandis que le premier, véritable fantôme, restait enfermédans son palais sans en pouvoir sortir, si ce n'est un jour par an, jour de fête où on le promenait ainsi qu'une statue, en grande pompe, à travers les rues de la ville. Il s'ennuyait tellement qu'il fit nommer sonfils à sa place, afin de quitter sa prison et de s'aller diverlir au dehors avec ses amis. L'autre monarque, Chua, donnait tous
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les jours audience, et, assis sur un trône doré, entouré de mandarins et de soldats de sa garde, écoutait les plaintes de ses sujets, qui, plaçant leurs requêtes sur leur tête, se prosternaient et attendaient à genoux la réponse du prince. La garde se composait de cinquante mille soldats; une armée de soixante mille hommes gardait la frontière de la Cochinchine cinq cents éléphants de guerre s'ajoutaient à ces forces et la marine se composait de cinq cents belles galères peintes, dorées, que Les matelots conduisaient en ramant debout, le visage tourné vers' le but à
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atteindre. Les dignitaires du pays étaient divisés en deux classes : les mandarins d'armes, sorte de généraux, et les mandarins de lettres, juges et conseillers du roi. Ces derniers obtenaient leurs grades à la suite d'examens nombreux et difficiles. L'habillement des hommes et des femmes consistait en une longue robe descendant jusqu'aux talons, s'ouvrant sur le devant et fermée par une large agrafe sur le côté droit. Les habitants se teignaient et se noircis-
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saient les dents, portaient les cheveux très longs et attachés derrière la tête, marchaient avec un éventail à la main et les pieds nus. Seul, le roi portait des chaussures. Tous s'asseyaient par terre sur des nattes et, pour manger, se servaient de deux petits bâtons qu'ils maniaient avec une grande dextérité. Chacun mâchait du matin au soir un fruit semblable à la noix et mélangé avec des feuilles et de la chaux, mélange porté dans une petite bourse et qu'on s'offre mutuellement quand on se rencontre. C'est le bétel. Les hommes, selon leur fortune, avaient plusieurs femmes, qu'ils pouvaient répudier; le Bua en avait quarante et le Chua. étaient les honorées centaine; les plus une plus belles et celles qui savaient le mieux chanter. Différentes sectes religieuses, qu'il serait trop long d'énumérer, partageaient" les croyances des habitants, qui avaient coutume d'adorer dans leurs maisons trois celle de la cuisine, celle des arts statues et celle du propriétaire; on leur offrait des parfums et des papiers dorés. Ils adoraient
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également ]e Soleil, la Lune et le Monde, le Nord, le Midi, l'Orient, l'Occident et le Centre. Cinq jours de fête correspondent à ces divisions, et ces jours-là les prêtres ou bonzes s'habillent différemment en noir pour le Nord, en rouge pour le Midi, en vert pour l'Orient, en blanc pour l'Occident, en jaune pour le Centre. Les instruments et les tables de sacrifices changeaient également de couleur dans ces circonstances. En outre, ils adressaient leurs hommages aux éléphants, aux chevaux, aux singes, aux vaches, aux chiens, aux oiseaux, aux serpents, aux rats et même aux arbres, aux grosses pièces de bois et aux éventails. Les devins étaient très considérés; on les consultait avant d'entreprendre quoi que ce fût, ainsi que les magiciennes faisant profession de dire l'état des âmes dans l'autre monde. On se réunissait dans des festins sous prétexte d'inviter et d'apaiser les divinités malfaisantes, ou bien un tirait des coups de mousquet afin d'effrayer ces dieux et de les chasser de la maison. On cherchait des présages dans la ren-
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contre des poules et dans le nombre des éternuements. Des temples munis de cloches s'élevaient dans tous les villages. Les bonzes vivaient des présents des fidèles et, en dehors de leurs cérémonies, s'employaient à réparer les ponts et à préparer sur les routes des abris destinés au repos des voyageurs pendant les grandes chaleurs. Parfois, en temps de guerre, le monarque faisait saisir ses bonzes et les envoyait à l'armée. Lacoutume, quiasubsisté, était d'honorer beaucoup les morts. Le deuil se portait avLC des robes de toile blanche et l'on apportait à diverses époques de l'année, sur 1RSsépultures, des tables chargées de
nets.
Le missionnaire du xvne siècle, à qui nous empruntons ces détails, a assisté à desfunérailles royales vraiment merveilleuses. On éleva prèsde la capitale, dans la campagne, une immense pyramide, et tout autour, vingt-cinq maisons de bois d'une hauteur prodigieuse, peintes du haut en bas -et tapissées de pièces de soie. Au milieu, un palais élevé sur des colonnes couvertes
d'or et garni de cent belles statues représentant des mandarins et des femmes avec des tambours et des trompettes. Auprès, plus de cinq cents maisons de bois remplies de poules, de vaches, de tigres et de mon-
ceaux de riz. Non loin, sur le fleuve, cent galères magnifiques et, sur la rive, trois cents éléphants et trois cents chevaux peints de diverses couleurs. Le roi, successeur du défunt, vint dans cette ville improvisée, suividetoute sacour, de mille eunuques, et de plus de deux mille mandarins il donna aux bonzes une somme considérable en or sousprétexte de racheter toutes ces maisons pour l'âme de son père, représentée par une grande statue couverte d'une robe d'or. On plaça la statue chef palais, le auquel le dans trône, sur un des bonzes mit le feu, ainsi qu'à toutes les maisons et à toutes les galères. Tous les édifices, avec les richesses et les animaux qu'ils contenaient, furent réduits en cendre. Exact est le récit de cette cérémonie grandiose et féerique. Les médecins du Tonkin étaientalors réputés pour leur science, qu'ils apprenaient,
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paraît-il, dans un trèspetit nombre délivrés uifs.Ilsne questionnaient pointles malades pouls, mais et se contentaient deJcurtâter on affirme qu'ils guérissaient des maladies passant en Europe pour incurables, telles que l'épilepsie et la phtisie. Ils n'employaient en général que des racines et des herbes et, pour les cautérisations, une sorte de petite châtaigne connue sous le nom de pierre (L, serpent. Le premier missionnaire français qui alla au Tonkip, en 1627, se nommait Alexandre de Rhodes, et, avec l'aide de sixreligieux, il avait déjà converti des milliers deTonkinois lorsque, en 1658, arriva lejésuiteTissanier. Il se passa alors ce qui s'est passé dans tous les pays du monde les missionnaires, parieur zèle exagéré, par leurs prétentions, parle fanatisme qu'ils provoquèrent, furent cause d'embarras et de massacres sans nombre. Sans eux, combien de sang eût été épargné et de combien, peut-être eut, été avancée l'heure de la civilisation en Asie. Les services par eux rendus ne compensent point les désordres et les crimes occasionnés par leurs voyages et par leurs prédications.
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Au temps du séjour au Tonkin du Père Tissanier (nous venons de citer les traits les plus curieux de sa relation) on faisait dans ce pays de sauvages exécutions. On excitait un éléphant contre le comdamné, à qui on avait bandé les yeux l'éléphant saisissait l'homme avec sa trompe, le jetait en l'airet le recevait sur ses défenses de façun à lùi percer le ventre après quoi il le désembrochait et le foulait aux pieds. Mais notons le fait le pius important pour cette époque: le Tonkin, nous le répétons, il y a deux cents ans, était affranchi de la suzeraineté de la Chine et refusait même de lui payer tout tribut. Ou trouve dans une autre relation, 4e 1666, et due au jésuite italien larinÿ,
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quelques détails également curieux sur les mœurs primitives du Tonkin, mais les relater nous entraînerait trop loin. Dans ce chapitre nous voulons seulement donner une idée et des richesses et des merveilles de ce pays maintenant soumis au protectorat de la France. On sait comment le jugeaient les voyageurs il y a deux cents ans voyons comment on le décrit aujourd'hui. On aura
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de la sorte, résumées, l'histoire .du passé et l'histoire du présent. Pour cela nous consultons le livre intéressant de M. Michel Chaigneau, ancien officier de marine cet ouvrage s'intitule Souvenirs de Hué. Hué est, comme on sait, la capitale de l'empire d'Annam, lequel comprend, avonsnous dit, la Cochinchine, le Tonkin et une partie du Cambodge. Les mœurs de Hué et celles du Tonkin sont donc semblables, et on va voir que, en réalité, elles ont peu varié. M. Chaigneau passa sa jeunesse à Hué, où son père avait obtenu le titre de grand mandarin les détails par lui donnés sont d'une exactitude absolue. M. Chaigneau, le père, était arrivé en Cochinchine en 1791. Les services qu'il rendit alors au souverain d'Annam, GiaLong, lui méritèrent les plus hautes faveurs, et c'est ainsi qu'il put se rendre compte des mœurs et des habitudes intimes des
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habitants.
Les Annamites et les Tonkinois ne font presque pas usage de chaises. Ils ont des tables ou des estrades sur lesquelles ils
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s'installent tantôt à la façon des tailleurs, tantôt à demi-courbés sur des coussins. Les grands mandarins prennent place sur des tables plus hautes que celles réservées à leurs visiteurs. Chez ces personnages, devant les tables et les estrades servant de sièges, sont placées, en général, d'autres tables plus petites où, sur des plateaux en bois et en ivoire sculpté à jours et.garnis aux coins de plaques en or et en argent, on pose, quand il vient des visiteurs, deux boîtes en or ou en argent ciselé, contenant l'une du bétel et de l'arec, l'autre des cigarettes ou du tabac haché avec un réchaud de cuivre servant à allumer les cigarettes, à brûler les parfums, et une théière garnie en or, des tasses à thé en porcelaine de
Chine. Le bétel n'a point cessé d'être en usage. C'est une plante grimpante à feuilles larges d'un vert foncé ces feuilles se coupent par morceaux que l'on enduit de chaux et que l'on plie en petits paquets carrés. On mâché d'arec, sorte paquets morceau avec un ces
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d'amande, fruit d'un arbre ressemblant au palmier. Ce mélange, par suite de la mastication, devient une chique rouge que l'on
rouler continuellement dans la bouche t qui fait cracher de la salive rouge comme [u sang. Ce mélange pique légèrement la temgue et devient, paraît-il, très agréable [la longue; les Annamites prétendent qu'il onsa£Jæ leurs dents, ce qui semble vrai, iar ils les gardent presque toutes pendant kit
eur vieillesse. Les .domestiques éventent leurs maîtres journée avec de grands évenpendant tails en plumes de pélican; pendant la sieste rt pendant les repas ils chassent les moucha et les moustiques avec des queues de cheval montées sur des bâtons peints en rouge. D'autres éventails servent à activer le feu des réchauds. Les pièces ne sont meublées qu'avec es estrades, les tables, quelques nattes, des éventails et des réchauds les maisons sont très w;e.s eLsans étages, ce qui fait qu'ils es considèrent comme plus agréables que es nôtres, où, disent-ils, nous sommes pêleAle, les uns sur les autres, et pas du tout nous, critique qui, pour nos grandes IDes, ne manqus point de justesse. Les fenêtres des maisons annamites ont énéralentent des persiennes vertes; à l'in-
la
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térieur les pièces ne sont pas peintes, mais les poutres du plafoni, les colonnes, le plancher sont d'un bois dont la couleur est fort belle nous ne parlons là que des habitations riches. Les Annamites sont en générald'un caracils sont bons et hospitaliers, tère doux mais ils. ont à la fois un caractère timide et orgueilleux, indécis et léger, et se laissent aisément entraîner au mal. Ils sont esclaves de l'étiquette et les fonctionnaires sont extrêmement jaloux de leur autorité. Ce peuple, plongédans la servitude, gouverné despotiquement et exploité par ses chefs, les mandarins, est devenu hypocrite, fourbe, menteur au delà de toute expression. « L'Annamite n'est doux que devant ceux qu'il craint, et son humilité n'est qu'hypocrisie, car dès qu'il peut le faire sans danger, il devient moqueur, » a dit un de nos compatriotes, M. Dutreuil de Rhins, qui a vécu parmi les Annamites. Ayant accepté le commandement d'un des bâtiments de guerre dont la France venait de faire cadeau au roi d'Annam à la suite des derniers traités, M. Dutreuil de Rhins a, , dans dévoilé le intéressant, très livre un
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désordre qui règne dans l'administration1 du pays. Les mandarins oppriment, exploitent et volent leurs administrés ceuxci, à leur tour, prennent ce qu'ils peuvent à leurs inférieurs. A bord des bâtiments de la flotte annamite, — si l'on peut donner le nom de flotte à un ramassis de vieilles carcasses fossiles aux planches disjointes, aux ferrures rongées par la rouille, aux mâtures tenant on ne sait pas comment, aux voiles qui pendent en lambeaux, — sur ces semblants de navires où l'équipage, d'ailleurs, n'entend rien à la manœuvre, les hommes vendent le matériel en détail, ou s'absentent et vont se promener et s'amutravailler s'agit il de quand à terre, ou ser d'appareiller. La saleté est leur élément favori « C'est à peine s'ils se passaient un le dit figure, d'eau la voyasur nous peu dans le inconnu il est quant savon, geur au pays. » Leurs matelots ne changent jamais de linge et couchent tout habillés sur des les mandarins eux-mêmes se connattes tentent de mettre, dans les grandes cir-
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1. Le
royaume d'Annam et les Annamites.
constances, une tunique plus propre parflessus leur costume habituel. Ces mandarins, qui commandent au peuple, sont les êtres les plus débauchés, Les plus ignorants, les plus paresseux du monde, et malgré cela les plus suffisants irrogants et inhumains envers leurs inférieurs, ils sont serviles et rampants visII-vis des mandarins d'un grade plus élevé [ue le leur. Aussi faut-il voir avec quel mépris le voyageur français que nous citions tout à l'heure en parle dans son livre. Sur chacun des bâtiments de la flotte, commandé par un capitaine français, le 'oi avait fait monter un mandarin, soi-disant pour surveiller l'équipage de nationaité annamite, mais en réalité pour esoionner l'officier français ces mandarins avaient peur de s'éloigner du rivage, craignaient la tempête, redoutaient le mal de ner et par conséquent se tenaient presque
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oujours à fond decale. Les soldats de terre valent ceux de mer m exerce pourtant les recrues, on leur ipprend la charge en douze temps et l'écolede peloton; par intervalles, on passe les revues, « revues de marionnettes, »
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dit M. de Rhins il y a pourtant des exercices militaires, et qui sont même assez, curieux, où des éléphants sont lancés contre des palissades derrière lesquelles on embusque des mannequins armés. Mais tout celan'empêche pas que les forces de terre ne soient, comme la marine, en pleine décadence, et des unes et des autres il ne sera pas difficile d'avoir raison. Il faudrait pourtant peu de chose pour rendre ce pays prospère la nature y est le sol, d'une grande fertilité admirable l'homme du peuple peut y vivre avec virigt ou trente centimes par jour un mandarin riche dépensant franc. grand Le est un en y mandarin, premier ministre, touche dixhuit cents francs par an; et depuis peu de temps. Mais ainsi que le faisait remarquer M. G. Depping, dans une remarquable étude publiée par la revue le Livre universel, cette prospérité ne peut se réaliser que sous un gouvernement meilleur et plus honnête. Le roi passe sa vie au milieu de de de femmes, eunuques, ses manses ses darins, et ne sort guère que pour aller faire des sacrifices ou pour chasser. Avide
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et IluinodAuuain.
Rui
comme ses courtisans, il entasse de l'argent dans son trésor particulier, qu'il fait garder, dit-on, — c'est sans doute une légende, — par des caïmans que lui fournissent les eaux de la Cochinchine. Revenons aux curieux traits de mœurs relatés par M. Chaigneau dans le livre que nous avons déjà cité 1. Ce Français avait, comme sait, rendu d'immenses services au roi Gia-Long, qui était un homme de bien et ne ressemblait en rien à ses tristes successeurs. C'était en effet un prince d'un esprit noble et élevé. Il avait compris sur-le-champ que les Français qui le servaient ne voudraient pas s'astreindre àl'étiquette royale, consistant à se prosterner cinq fois aux pieds du souverain quand on se présente devant lui aussi les dispensa-t-il de cette humiliante formalité il se contentait de leur part, de cinq inclinaisons de tête. C'est lui qui dit encore au fonctionnaire de sa chancellerie, lequel tardait à expédier à M. Chaigneau le brevet de grand mandarin et s'excusait de ce retard en
on
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1.
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Souvenirs de Hué (1867).
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disant qu'il ne savait comment désigner la iacnille du nouveau titulaire n'est Il « dès lors, il pas du pays, il est étranger st de ma famille. » Réponse aussi généreuse que délicate elle signifiait que, pour celui qui parlait, la seule vraie noblesse ctait de le bien servir. Gia-Long s'élevait au-dessus des préjugés le son peuple mais il existait des usages nationaux auxquels lui aussi devait se conformer. La polygamie règne dans l'Annam un jour le roi, causant au sortir du conseil ivec M. Chaigneau, se plaignit du tracas qui l'attendait dans son sérail. Il aurait mieux aimé, disait-il, continuer à discuter es affaires du conseil. « Tenez, je vais me trouver tout à l'heure au milieu d'une nuée Je diablesses qui me crieront aux oreilles l me rendre sourd. » (Et ici le roi con.refaisait d'une façon comique la voix et .es gestes d'une femme en fureur). — Mais, lui répondit son interlocuteur, il < serait très facile à Votre Majesté de dimiluer ses ennuis; ce serait de réduire le aombre de ses femmes. — Chut! chut! repartit le prince; parlez bas!. » Et il enraîna plus loin son favori, lui faisant com-
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prendre que si ses collègues, les autres mandarins, l'entendaient, ils ne lui pardonneraient pas cette parole imprudente, les femmes du sérail étant presque toutes filles de mandarins, ce que les grands du pays regardent comme un grand honneur. Quelque temps auparavant, un mandarin avait offert sa fille à Gia-Long, et malgré son grand âge ce prince n'avait pu refuser le présent. En ce moment, il semblait dire que s'il délaissait sa nouvelle acquisition, la femme s'en plaindrait à son père et ferait répandredes bruits qui couvriraient le roi de ridicule aux yeux de son peuple. Un étranger qui était en aussi bons termes avec Sa Majesté annamite devait, naturellement exciter la jalousie des drandarins indigènes. La scène la plus comique du monde se passa un. jour entre M. Chaigneau et l'un de ses collègues. Le premier était allé rendre visite au second. Aussitôt toute la maison est sans dessus dessous les domestiques endossent leurs habits de cérémonie; on prépare le thé, le bétel;les factionnaires sont-à leur poste. Les deux mandarins montent sur une table (c'est la metpays) manière de s'asseoir en ce et se
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procession
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causer sur une estrade. Dans le courant de la conversation, le mandarin annamite, voulant se mettre à l'aise, se dépouille de son habit, et sa chemise, à demi déboutonnée, allait rejoindre l'habit, quand M. Chaigneau, vivementblessé de cette inconvenance et pour ne pas être en reste avec ce malotru, jette bas habit, chemise, et se dispose même à détacher la boucle de son pantalon, quand son collègue l'arrête en lui disant tout bas que ses femmes étaient derrière la jalousie. (Les curieuses étaient accourues, en effet, pour assister à l'entretien.) « Hé! que m'importe? lui ré-. pondit son collègue, ce n'est pas pour vos femmes que je suis venu. Mais parlons de vous, monsieur le mandarin. Vous avez besoin, à ce que je vois, d'une leçon de politesse, et je vous la donne. Sachez bien qu'un Français ne souffre d'impolitesses de personne, et lorsque je fais à un mandarin l'honneur de le visiter, je veux qu'il garde mien. j'ai le habit quand son » Les mandarins se traitent aussi quelquefois entre eux. A propos de ces grands repas, M. Chaigneau nous a donné le menu d'un festin de cérémonie chez les AnnaLent à
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nous y relevons les plats suivants des brochettes de morceaux de chien, de la gelée de mousse maritime colorée et moulée, des champignons d'éléphant (sic) à la sauce de crevettes (on obtient, parait-il, ces champignons dans des couches faites avec de la fiente d'éléphant et des feuilles ou de la paille), des tranches de caramboles crues, des crêpesliées en paquets avec des pois verts écrasés au milieu, etc., etc. Le successeur de Gia-Long, Ming-Mang, avait parfois des entretiens avec M. Chaigneau fils; il lui demandait l'explication de certaines gravures, représentant surtout des types militaires et des uniformes français. Comme il était difficile de traduire exactement en annamite certains termes de notre langue, ces explications étaient laborieuses « Singulier langage, disait le roi, en parlant du français; c'est c'est un peu un sifflement continuel comme le chinois. » Mais c'étaient les noms propres qui causaient le plus d'embarras. Le mandarin qui écrivait sous la dictée de M. Chaigneau ne savait comment reproduire certains noms illustres dans notre histoire militaire; Kléber devenait mites
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Ké-lé-bé : le maréchal Soult était changé en Xou-lé, Napoléon enNa-pho-lé-ong. On" trouve dans les Souvenirs de Hué mille autres traits curieux. Parmi les professions les plus extraordinaires qui s'exercent chez ce peuple paresseux avec délices, il faut citer celle de cureur d'oreilles. Dans certaines rues de la capitale on. remarque des espèces de kiosques construits avec quatre colonnes de bambou qui supportent un léger toit de paille de riz ou de feuilles sèches, au-devant; sur deux bâtons de bambou une tablette et des vases de porcelaine de Chine,contenant de longs cure-dents de bois et depetits instruments de ferou de bambou, pinces; crochets, baguettes portant de petits pompons de coton. Derrière cette table un homme qui. des d'inviter les passants à yeux, ne cesse
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s'arrêter.
Lorsqu'un de ceux-ci cède'à la tentation, l'artiste, avec une grande dextérité, avec incroyable,dit M. Chaigneau, légèreté une introduit ses instruments dans les oreilles du client et les nettoie en un clin d'oeil moyennant un modique salaire qui, par-
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fois, est l'objet d'amusantes contestations. Aux abords des palais et des casernes se tiennent d'ordinaire de véritables bandes de- vagabonds qui sont les domestiques des princes et des mandarins à eux se mêlent des comédiens, également domestiques, et qui sont entretenus par les plus hauts
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personnages. Tous ces valets de grande maison insultent les passants, hommes ou femmes, et les volent avec une audace que protège la force armée qui est au service des mêmes maîtres. Le grand mandarin français dont nous résumons les impressions dut un jour, en se rendant chez Gia-Long, faire arrêter un comédien domestique qui l'insultait et lui faire administrer dans la rue vingt-cinq coups de rotin, châtiment en usage constant. Cette correction reçue, le comédien, au lieu de faire, en se relevant, les trois salutations exigées par la coutume et par l'étiquette, remit insolemment son chapeau il injures; tête et recommença ses sa sur fallut lui administrer cinquante nouveaux coups de bâton, ce qui le rendit respectueux, car il se prosterna ensuite.
Sous les derniers princes de l'Annam, dont Tu-Duc est le plus connu de nous, Tu-Duc, qui reviendra souvent dans notre récit, ie peuple s'est plus avili encore si c'est possible. Il suffit, croyons-nous, des quelques traits que nous avons choisis pour bien faire «Maître cette race que nous sommes appela sinon à régénérer, du moins à
ajmàlorer. Elle habite, nous le répétons, un pays fertile, d'une richesse incalculable. La colonisation de l'Annam et de la province du Tonkin nous sera du reste facilitée
par le climat-
Affranchi des monotonies tropicales, dit le docteur Maget (médecin de première classe de la marine}, dans une étude sur les coniiiions sanitaires de ce pays, le climat du Tonkin, comporte un hiver plus long que l'hiver astronomique, un été et deux saisons intermédiaires assez médiocrement indiquées. » L'hiver dure cinq mois, de novembre à mars; avant l'été, auquel on prête une durée égale, il y une courte saison printanière; de même, entre l'été et l'hiver, le «
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mois d'octobre passe pour un mois d'au-
tomne. L'hiver est marqué par de grands écarts de température,jusqu'à 12 degrés en douze heures; les séries froides peuvent atteindre douze a quinze jours de durée c'est la saison variable par excellence; un jour on allume du feu et on se vêtit de drap; au. lendemain le vent du sud force à reprendre la flanelle d'été. « Hiver pour les natifs, dit le docteur Maget, mais, relativement aux ardeurs de celle qui la suit, la saison n'est en réalité, pour l'Européen, qu'un véritable printemps. » La moyenne des cinq mois d'hiver est de 19 degrés environ. Si l'on se débilite en été, on se remet vite en hiver octobre et avril sont encore supportables, quand ailleurs, sous les tropiques, le climat combat sourdement contre vous pendant toute la durée de l'année. En novembre, la température est des plus agréables, le thermomètre descend à 16 degrés! l'on a quelques journées de vent temps couvert et de brume, mais de nord-est, qui prédomine, amène presque toujours un beau temps sec.
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Les Européens peuvent s'accommoder à merveille de cette température. On trouve actuellement au Tonkin beaucoup de bœufs sauvages, d'éléphants et de tigres les habitants n'ont d'autre moyen de se protéger contre ces animaux que de se barricader chez eux depuis le coucher du soleil jusqu'à son lever. L'empereur d'Annam préfère voir dévorer un à un ses suj ets par les bêtes féroces et laisser dévaster les récoltes que d'autoriser les Annamites à posséder des armes qu'ils pourraient tourner contre lui, une fois les fauves détruits. Les cerfs se trouvent en grande abondance et sont si curieux qu'ils accourent pour voir de près les voyageurs, comme des
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animaux apprivoisés. Nous n'énumérons pas ici les produits du sol, qui, bien exploité, fournira d'immenses richesses. Il n'est pas indispensable de les connaître en détail, pour bien prouver ce qu'on est en droit d'attendre de cette colonie nouvelle. Et maintenant que nous avons satisfait, en décrivant les mœurs des Tonkinois, une curiosité légitime, nous allons brièvement résumer leur histoire.
CHAPITRE DEUXIÈME DES ÉVÉNEMENTS QUI AMENÈRENT L'INTERVENTION
FRAXÇAISE AU IOI'\KI:\-
Sommaire : Politique suivie par tous les hommes d'état frangais. — Utilité générale de notre intervention au Tonkin. historique. Les Précis premiers l'Annam. souverains de — — — De la prétendue suzeraineté de la Chine. — Premières expéditions françaises en Cochinchine et au Tonkin(1Gt>4).— Pierre Poivre. Pigneaux de Béhaine. — Notre politique en Orient pendant la Révolution et sous le premier Empire.— Tentatives faites à l'époque de la Restauration. — Déclin de noire marine dans l'extrême Orient sous le gouvernement de Louis-Philippe. — Le roi Tu-Duc. — Notre nouvelle intervention en 1858. — Tourane. — Prise de Saigon (1859). — Conquête de la Cochinchine. — Traité de -1862. l'exploration du — De 1863 à 1870. — Utilité de Tonkin.
La nécessité étant reconnue d'assurer des débouchés nouveaux à notre commerce et aux produits de nos nouvelles colonies, ce qu'il importe d'affirmer d'abord, c'est que les événements qui ont amené notre récente intervention au Tonkin sont la conséquence d'une politique remontant à plus de cent ans et à laquelle ont participé tous les gou-
veroements, en France, depuis le règne de Louis XV. Accuser le gouvernement de la Répulique de nous avoir lancé dans des avenares,c'est donc une calomnie pure, car.
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dans toute l'histoire de notre politique drangère, on ne trouve pas d'exemple d'une action plus suivie. Des faits que nous allons résumer il résulte que nous avons acquis sur l'Annam, auprix d'effortslongs et pénibles, desdroits incontestables, droits qu'il importe de faire valoir énergiquement pour le développement de notre commerce et de notre industrie, pour la défense de nos intérêts et le maintien de notre prestige dans l'extrême Orient pour la conservation de notre colonie, la basse Cochinchine les nations occidentales étant, sur ce terrain, solidaires les unes des autres, l'occupation du tleuve Rouge par la France sera favorable, non seulement à nous, mais encore aux autres nations d'Europe, ce qui écarte toute possibilitédeconflit. Une guerre avec Chine serait seule possible, mais outre qu'elle n'offrirait pas pour nous de dangers sérieux. il faudrait, pour qu'elle éclatât, que la
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Chine continuât à écouter des conseillers hostiles à la France et bien peu avisés, car elle n'a pas le droit d'agir dans l'Annam n'exerce lequel elle plus aucune suzesur raineté ; lorsque les Anglais se sont établis en Birmanie la situation était la même et elle n'est point intervenue. Nos lenteurs seules lui ont permis d'entrer dans le débat, sans raisons sérieuses. Cela dit, esquissons en quelques lignes l'histoire de ce pays, d'après les principaux ouvrages des historiens qui ont été résumés dans le journal le Temps. La légende annamite fait remonter l'origine de ses rois à un parent de l'empereur de la Chine. Placés l'un à côté de rautre, le Céleste-Empire et son voisin moins puissant, l'Annam, ont été en relations constantes depuis un temps immémorial. Ces relations ont été de natures diverses. Nous voyons les deux pays tantôt s'envoyant des ambassades réciproques, tantôt en guerre parfois l'Annam, victorieux de la Chine, repousse l'envahisseur dans son pays, tantôt lui-même, vaincu, est réduit en province chinoise. Finalement, l'Annam accepte une sorte d'investiture de son formidable voisin,
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Typesannamites
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qui donne à ce dernier une supériorité honorifique sur son faible adversaire. Les limites de l'Annam n'ont pas toujours été aussi nettement définies qu'elles le sont aujourd'hui. Il est convenu, en effet, actuellement, que l'empire d'Annam se compose de trois parties le Tonkin au nord, la Cochinchine ou Annam proprement dit au centre, et, au sud, la basse Cochinchine ou Cochinchine française. En réalité, l'Annam était jadis le pays Tonkin, aujourd'hui appelons le que nous qui s'est étendu à certaines époques de l'histoire jusqu'à Canton. L'Annam s'est trouvé cinq fois réduit en province chinoise de 111 avant JésusChrist à 39 après Jésus-Christ de 42 à 186 pour la troisième fois, de 226 à 540, pendant une période de trois cent quatorze années; une quatrième fois, pendant trois cent trente-six ans, de 603 à 939 ; la Chine s'empare une dernière fois de l'Annam en 1407, et cette occupation dure une vingtaine d'années. Ces différentes conquêtes de l'Annam par la Chine n'ont pas été sans laisser dans le
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pays une trace profonde. Dès l'année 186 de notre ère, la littérature chinoise était introduite dans l'Annam 'et les préceptes de Confucius y étaient enseignés, mais c'est surtout à l'époque de leur dernière domination que les Chinois, sur lesquels régnait alors la dynastie des Ming, imposèrent aux vaincus un grand nombre de leursjcouturnes : le tatouage, en usage dans l'Annam, fut défendu les femmes furent obligées de porter des vêtements courts à manches larges et les hommes de porter les cheveux longs. On n'ignore pas que l'usage de se raser le haut de la tête et de réunir les cheveux en une longue tresse qui tombe dans le dos ne date, chez les Chinois, que de la conquête tartare au milieu du dix-septième siècle. Les Chinois établirent une nouvelle administration et construisirent des écoles dans esquelles on enseigna les caractères chinois. A différentes reprises, des aventuriers ou des.descendants d'anciennes familles régnantes secouèrent le joug des Chinois et .régnèrent sur l'Annam, tantôt sous nom de princes, tantôt sous le nom de rois ou
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d'empereurs. Depuis le dixième siècle de notre ère, on ne compte pas moins de six dynasties qui ont gouverné ce pays 1° les Dinh (968) 2e les Lé antérieurs (980) 3° les postérieurs (1010) ; 40 les Trân (1225) ; Ly 5° les Lé postérieurs (1428), et 6° les Nguyen (1802). Cette dernière dynastie est celle qui a été fondée par Gia-Long après qu'il eut réuni le Tonkin à l'Annam. Elle a donné depuis lui quatre souverains MinhMang, Thieû-Tu, Tu-duc et son successeur actuel, Hiep-Hoa. Les différentes dynasties chinoises ont accordé aux princes annamites, depuis plusieurs siècles, une investiture qui n'a d'ailleurs jamais eu un effet pratique sérieux, car elle n'impliquait pas de concessions mutuelles, d'alliance offensive ou défensive, mais simplement la remise d'un sceaimu chef de la dynastie, sceau dont le souverain de l'Annam ne faisait usage que dans sa correspondance avec le Fils du Ciel, l'envoi d'ambassades et le payement d'un tribut dé médiocre importance. Cette investiture et ce tribut laissent subsister entièrement la souveraineté dç l'Annam, ainsi que nous avons déjà eu
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ailleurs l'occasion de le démontrer. En effet « dans une alliance entre deux pays de force inégale, quand l'allié inférieur se réserve la souveraineté ou le droit de gouverner lui-même, il doit être regardé comme indépendant. Le payement d'un tribut, qui enlève de la dignité au pays qui le paye, n'enlève rien à la souveraineté de ce pays. » Dans le cas présent, l'Annam rentre bien dans la catégorie des États souverains car depuis 1407, c'est-à-dire depuis l'occupation des Ming, la Chine n'est jamais intervenue dans les affaires intérieures du la succession au trône, l'admiroyaume nistration, la promulgation des lois, sesont faites sans que la Chine ait été consultée. Quand la Chine fut en guerre avec des puissances européennes, en 1842 et en 1860, nous ne l'avons pas vue requérir l'aide des troupes de son soi-disant vassal. Si, comme le disait une note publiée il y a quelque temps dans les journaux, à deux reprises différentes, dans les dernières années, les Chinois ont fait passer à leurs troupes la frontière annamite, c'était dans leur intérêt propre et non pas à la suite d'un appel de poursuivaient Tu-Duc les 1864, ils en
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lébris des rebelles Taïpings, devenus Paillons-Jaunes et Pavillons-Noirs pour les craser en 1879, ils pourchassaient LiYong'sai, qui avait levé l'étendard de révolte lans le Kouang-Si. Il n'y avait pas là l'acte ['unsuzerain appelé par un vassal à son ecours, mais bien le fait d'une puissance [ui, sachant qu'on n'aura pas la force de a repousser, pénètre chez son voisin pour e faire justice elle-même. La Chine n'est jamais intervenue entre es différents pays de l'Indo-Chine ni dans eurs relations entre eux, ni dans leurs dations avec l'Angleterre jusqu'à ces cmps derniers elle n'avait même point
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ongé à protester contre notre action diplonatique ou militaire en Annam. Enfin, les Annamites se sont eux-mêmes thargés de dissiper nos derniers doutes sur anature de leurs relations avec la Chine. lans le cours d'une conversation entre 'amiral Dupré et les ambassadeurs annanites en 1874, àSaïgon, l'amiral remarqua lIe, suivant les annalesd& leur pays, Annam avait été pendant longtemps sous a protection de la Chine, le mot protection mpliquant, suivant l'interprétation anna-
e
mite duterme,ledroitabsolumentdespotiqu d'un père sur son fils. Les ambassadeurs annamites protestèrent énergiquement contre cette interprétation et déclarèrent que la cour de Hué n'avaitjamais reconnu la suzeraineté de la Chine. L'amiralleur rappela les tributs envoyés à Pékin les ambassadeurs répondirent que l'Annam, étant beaucoup plus petit que la Chine, sa voisine, avait été envahi fréquemment parles armées chinoises et obligé de se soumettre contre sa volonté; qu'à des intervallesirréguliers et éloignés les Annamites avaient envoyé des présents à Pékin pour s'éviter des ennuis, mais qu'ils n'avaient jamais commis d'acte qui pût être interprété comme une reconnaissance de leur soumission. Ces faits étant exposés, reprenons à son origine l'histoire de l'interventionde le France au Tonkin. On a vu, dans notre précédent chapitre1 l'arrivée dans ce pays, en 1658, de quelques missionnaires français. Peu d'années après, la Compagnie des Indes orientales, créée en 1664, donna au commerce français, dans l'extrême Orient, un débouché qu'il n'avaitpaseu jusqu'alors
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ยก,hare construit ,UI' la
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Coeliini'line.
Les Portugais, les Hollandais et les Anglai nous avaient d'ailleurs devancés. Dès 1684
la Compagnie des Indes orientales envoyai au Tonkin un agent nommé Le Chapellier qui trouva les habitantsbien disposés pou les Européens et établit un comptoir dan le pays. Deux années plus tard, un autri agent de la Compagnie, nommé Verret, si rendit à son tour en Cochinchine pouj choisir un emplacement favorable à le création d'un comptoir. Il se décida pourPoulo-Condor. Malheureusement, la série des guerres qui affligèrent la fin du règne de Louis XIV arrêta tous les projets d'établissement qu'avaient pu avoir les Français. Plus tard, les rapports de différents autres agents furent également favorables à un établissement, soit à Poulo-Condor, soit en un autre point de la Cochinchine, mais on peut considérer le voyage dePierre Poivre à la Cochinchine en 1749 et 1750 comme le vrai point de départ de nos relations avec la Cochinchine. L'occupation par nous de labasse Cochinchine est, comme l'a dit justement M. Vial, capitaine de frégate, qui y a passé
«
plus confaits les des années longues un ; dérables de notre histoire maritime1 ». Nous possédons là un territoire dont la iperficie est de plus de trois cents lieues trrées de terre, peuplé de deux millions hommes et doué d'une fertilité extraornaire. Sa capitale Saïgon est un des meilurs ports du monde. Depuis que nous l'ayons conquis, son ousement commercial s'est accru rapideent en 1870 déjà il y entrait 551 navires loag cours, jaugeant246,747 tonneaux, 4,765 barques de mer indigènes, jausant 78,004 tonneaux. (Les recettes de son budget dépassent acellement dix millions de francs. Pierre Poivre, dans le premier voyage mt nous venons de parler, avait pour but puvrir le commerce laGochinchine, d'y nblir un comptoir et de se procurer par voie de Manille, ou des places voisines, s plants de noix muscade et de girofle li devaient être tous portés aux îles de ance et de Bourbon.
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l. Les Premières minées de
française,
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la Cochinchine, colovol, in-So, par P. VIAL. -- -
Vers la même époque un missionnaire d la Société des missions étrangères Charles Thomas de Saint-Phalle, fournissait à Du pleixles renseignements les plus prëcieu sur Tonkin. Ces événements, qu'il n'entre point dan notre plan d'étudier longuement, ont ét très bien condensés dans une étude déj citée par nous et publiée par un écrivai des plus compétents, dans le journal l
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Temps. •
Voici la partie essentielle "de cette étude
Au-moment où Poivre entreprit'
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voyage, deux occasions d'assurer d'un manière sérieuse l'influence française dan l'Indo-Chine nous avaient déjàété foui l'unesous Louis XIV,par ministr nies du roi de Siam, Constance Phaulkon, don de 1688 et chute révolution la la à mort a l'àutij notre crédit ruine la de amena nous avait été indiquée par Dupleix, qui de 4750 à 17-52; cherchait par une allianc poë nous assurer la lé roi de Pégou avec session des bouches de TIraouaddy. Un troisième occasion allait nous être fourni éclata en 1785 ei révolution qui par une Cochinchine.
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Le neveu du dernier souverain de 1 Cochinchine, Nguyen-Anh, chassé de se Mats par des rebelles et réfugié à Saigon s'était décidé, sur le conseil d'un mission naire français, Pigneaux de Béhaine, évÊ que in partibus d'Adran, à implorer le se cours de la France pour rentrer dans se États. Il envoya le prélat, muni de plein pouvoirs et accompagné de l'héritier pré somptif du trône, le prince Canh, à Pondi chéry, dont le gouverneur, n'ayant pas i disposition de troupes pour faire un< sa
expédition, engagea l'évêque d'Adran" i passer en France. Pigneaux de Béhaine fui bien reçu à Versailles. On lui promit un secours de 1,650 hommes, de l'artillerie, des armes, quatre frégates et deux ou trois bâtiments de transport nécessaires à l'expédition. Par un traité signé à Versailles, le 28 novembre 1787, le roi delaCochinchine cédait à la France la propriété absolue et la souveraineté de l'île, formant le port principal de la Cochinchine, appelé «Hoï-nan»etparles Européens «Touron», ainsi que Poulo-Condor, en échange des sepromettait d'envoyer. Louis XVI cours que Lévêrrue d'Adran repassa à Pondichéry,
lont le gouverneur, l'Irlandais comte de Sonway, devait commander l'expédition projetée- L'Anglais John Barrow raconte [u'à l'arrivée du prélat dans la colonie, ]on\vay avait pour maîtresse Mme de aides de camp. ncune, femmed'unde .évêque d'Adran fit des visites aux femmes des différents fonctionnaires de Poncÿhéry, à l'exception de Mme devienne, qui, fort irritée d'être traitée de la sorte, fit petarder D'autre l'envoidestroupes en Cochinchine. part, ce qui est plus vraisemblable, le gouverneur était peu favorable à ['expédition parce qu'il ne la jugeait pas avantageuse à laFrance. Quoi qu'il en soit, le traité de Versailles ne reçut pas son exécution, les projets de l'évêque avortèrent et, au lieu d'un secours important
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qu'on lui avait promis, le prélat n'obtint que l'escorte de la frégate la Méduse pour deux navires de commerce armés et équipés à ses frais. Néanmoins, l'évêque d'Adran était accompagné d'un certain nombre d'officiers français, dont le concours ne contribua pas peu à permettre à NguyenAnh de remonter sur le trône de ses pères. Parmi ces officiers se trouvaient quelque
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ingénieurs distingués qui construisirent les citadelles de Saïgon et de Hanoï et fortifièrent la rivière de Hué. En 1802, NguyenAnh fit la conquête du Tonkin et, ayant ainsi réuni sous son sceptre toute la partie orientale de l'Indo-Chine, il prit le nom de Gia-Long, sous lequel il est plus connu dans l'histoire. Ce prince témoigna toujours la plus grande bienveillance aux exprima à différentes reFrançais, mais prises la satisfaction que lui causait la nonexécution du traité de Versailles. Il redoutait fort les Anglais, et il craignait que, s'il eût accordé à laFrance les possessions jadis promises, il n'attirât sur lui la colère de la- nation puissante, maîtressedes Indes, qui méditait déjà la conquête de la Birmanie. Gia-Long fut reconnu souverain maître de l'Annam en 1804 par l'empereur de Chine, etc'estalors que Hué, capitale dela Cochinchine, devint capitale de l'Annam, et Hanoï, la ville capitale du Tonkin, ne fut plusqu'une ville de province. Les Tonkinois, déçus dans leurs espérances, vexés dans leurs coutumes, surchargés d'impôts, supportèrent difficilement le
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joug de Gia-Long, mais leurs révoltes furent aisément étouffées1. La chute de la royauté, les événements de la Révolution, les guerres de l'Empire n( permirent pas à la France de s'occuper dE l'Annam. Ce n'est pas que parmi les innombrables projets que forma Napoléon il ne s'en trouve un relatif à ce royaume; un mémoire en fait preuve, mais le despote conquérant avait d'autres soucis plus pressants. Le gouvernement de la Restauration reprit la tradition de Louis XVI et chercha à renouveler avec les pays de l'extrême Drient les relations brisées brusquement à la fin du siècle dernier. De la brillante pléiade d'officiers français qui, appelés par l'évêque dAd.ran, avaient aidé Gia-Long à remonter sur le trône de ses pères, deux seulement, au commencement du règne de Louis XVIII, avaient survécu et étaient restés à la cour du souverain qui leur devait son trône Philippe Vanier et Jean-Baptiste Chaigneau. Le duc de Richelieu, ministre des affaires
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1.
Abrégé d'histoire annamite. — Courrier de
Saïgon.
étrangères, écrivit à ce dernier, le 17 septembre 1817, pour réclamer le concours de d'armateurs Bordeaux de zèle faveur en son qui avaient fait ou se proposaient de faire des expéditions pour le Tonkin et la Cochinchine. gouvernement, disait le duc, Le encou« rageait ces essais surtout dans l'espérance qu'ils pourraient nous conduire à fonder dans ces pays un commerce permanent. » Deux expéditions faites en 1817 par les maisonsBalguerie, Sarget etCie et Philippon et Cie de Bordeaux, ne furent pas très heureuses; mais une troisième, composée des deux trois-mâts le Larose et le Henri, réussit complètement. La vue dQ ces bâtiments inspira ou raviva dans l'âme de Chaigneau le désir de revoir son pays natal. Non sans peine, il obtint un congé du vieux Gia-Long, et il s'embarqua pour la France au mois de novembre 1819. Chaigneau, nomme en octobie 1820 agent et consul de France en Cochinchine, retourna à Hué avec la mission de négocier un traité decommerce avec le souverain de l'Annam. Malheureusement Gia-Long était mort le 25 janvier 1820 et son fils Minh-Mang se montra hostile à toute
espèce d'arrangement avec la France. Ghaigneau quitta définitivement la Cochin chine en 1824. Un de ses neveux, à deux reprises différentes, essaya de représenter la France comme vice-consul à la cour de Hué ; il fut obligé d'abandonner la partie. Ilse fit alors un long silence sur l'épopée de nos prédécesseurs. Pendant plusieurs années, « si nous avions pu prêter l'oreille, à travers le bruit de nos révolutions, aux échos de l'extrême Orient, nous n'eussions plus entendu d'autres voix françaises que le cri des missionnaires égorgés1». La révolution de juillet 1830 avait changé le cours de notre politique coloniale; le roi Louis-Philippe était peuporté aux expéditions lointaines, il trouvait que c'était marine l'Algérie s'occuper de de notre assez déclina, notre commerce dans les mers orientales devint si nul qu'on cessa d'y d'État. vaisseaux des envoyer Toutefois en 1839, lorsque les Anglaré firent en Chine une irruption armée ayant objet le négoce de l'opium, un officier pour français d'une grande valeur, le capitaine
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1. Les
Français au Tonkin, Hippolyte Gautier.
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de vaisseau Cécille, qui se trouvait dans ces parages, essaya d'attirer de nouveau sur l'extrême Orient l'attention du gou-
vernement.
C'est à ses avis pressants qu'on a attribué un mot de Guizot, bien souvent cité, mais dont on a trop tardé à tenir compte « Il ne convient pas à la France d'être absente dans une si grande partie du monde où déjà les autres nations de l'Europe ont pris pied. » Après que le traité de Nankin (1842) eut ouvert le Céleste-Empire au commerce anglais, le ministère français fit cependant un effort pour obtenir, au moins pacifiquement, notre part des avantages militairement obtenus par la Grande-Bretagne. Il envoya, a écrit M. Hippolyte Gautier1, il envoya un plénipotentiaire, M. de La.: grenée, escorté par cinq navires, et selon espérances nos un traité fut signé en notre •" faveur le 24 octobre 1844. Sur les côtes de l'Annam quelques tentatives furent faites en même temps pour sauver les missionnaires en péril; nos vais-
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1
1.LesFrançaisauTonkin.
quelquesdélivrer parvinrent à en seaux uns. Cécille, Rigault de Genouilly, le commandant Lapierre, avec la Gloire et la Victo rieuse, agirent énergiquement pour assurer protection à nos nationaux. Mais leurs réclamations furent dédaignées : un guet-apens fut dressé contre les officiers négociateurs. Le brave commandant Lapierre, ne consultant que l'honneur, du pavillon, prit sur lui de répondre à coups de canon. Il tua quelques centaines d'Annamites dans leurs forts, coula cinq de leurs corvettes et fit de la sorte respecter la France, qui cependant continua d'être là-bas. « absente En 1847 Tu-Duc monta sur le trône d'Annam et les persécutions contre les chrétiens redoublèrent. Pendant dix ans on se contenta, chez nous, de déplorer cet état de choses il fallait une occasion, un prétexte pour nous faire prendre pied définitivement dans un pays où nos efforts pendant plus de' cent ans étaient restés sans succès. Les événements fournirent au gouvernement de Napoléon III cette occasion désirable, qu'on aurait pu, qu'on
»
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aurait dû trouver plus tôt, et qui permit de continuer l'œuvre commencée sous Louis XVI. En 1856, le commandant du Catinat, puis notre consul à Shanghaï, M. de Montigny, envoyé extraordinaire, ne purent obtenir d'être reçus à Hué. Le 20 juillet 1857, l'évêque Jose-Maria Diaz était exécuté les persécutions redoublaient; le prétexte était sérieux. D'autre part, les armements pour l'expédition de la Chine nous fournissaient l'occasion et nous facilitaient une action prompte en Cochinchine. De concert avec l'Espagne une expédition fut décidée; nous renvoyons ceux de nos lecteurs que les épisodes de cette lutte pourraient intéresser à l'important ouvrage de M. Romanet du Caillaud, publié en 1880 1. Dans notre livre, où nous ne pouvons donner à ces préliminaires une place trop importante, nous nous contenterons d'analyser un chapitre du livre que nous avons Tonkin, de M. Hippolyte cité, les Français Gautier.
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au
1.
L'Intervention française au Tonkin.
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En 1858 on s'occupa donc de l' extrème Orient. Notre influence y était nulle on se souvenait à peine en France du nom de Dupleix qui jadis avait conquis l'empire des Indes, devenu la possession de l'Angleterre il s'agissait de reprendre pied en Asie. L'occasion, avons-nous dit, était favorable nous avions de graves griefs contre les Annamites, et à la même époque nous nous engagions, de concert avec l'Angleterre, dans la seconde guerre de la Chine. Des écrivains parvinrent à émouvoir chez nous l'opinion publique en démontrant que tous les peuples d'Europe, non sans raison, convoitaient des établissements dans l'Asie
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orientale. On décida qu'on irait en Indo-Chine, et après avoir hésité entre Saigon et Tourane, port silué près de Hué, l'amiral Rigault de Genouilly se rendit à Tourane avec quelques navires français suivis d'un petit vapeur espagnol. Tourane avait été choisi, selon toute probabilité, parce que c'était le seul point de la côte « qui fût bien connu des navigateurs ».
s'empara sans difficulté de la ville et de la presqu'île, mais le lieu était mal situé, il n'y avait là aucun avenir commercial, et on dut l'abandonner après y avoir dépensé beaucoup d'argent et inutilement établi des magasins, des parcs et des batteries. On eut le bon esprit de ne point persister et d'aller à Saïgon, ville commerçante et peuplée, placée sur la route de la Chine et du Japon et offrant de réels avantages pour une colonie. Au commencement de 1859 l'escadre de l'amiral Rigault de Genouilly arriva donc en Cochinchine et, après quelques engagements, notre artillerie eut raison de la résistance des Annamites. Les mandarins essayèrent de perpétuer la lutte en incendiant unepartie de la ville; pendant deux années, le gros de nos troupes étant en Chine et le commandant Jauréguiberry n'ayant pu marcher en avant, sept cents de nos soldats, serrés par plus de vingt mille assaillants, gardèrent seuls notre conquête sous le commandement du capitaine d'Arriès. Mais en 1861, avec des forces impoOn
santés, l'amiral Charner vint ravitailler la petite garnison, franco-espagnole, qui était exténuée de fatigue et avait accompli des prodiges de valeur. Aussitôt eut lieu une attaque générale des retranchements des Annamites, retranchements savamment construits, garnis de pieux, de pointes, entourés de trous profonds, défendus par une artillerie redoutable.. A la suite de combats sanglants, glorieux, les places furent emportées d'assaut et l'armée annamite, vaincue, accablée, se dispersa. Si les soldats se battirent contre nous avec un grand courage, en revanche, il importe de le constater, les habitants- nous firent un bon accueil et nous considérèrent comme des libérateurs. Au-moment où nos troupes allaient marcher sur Hué, capitale de l'Annam, Tu-Duc, effrayé, signa un traité de paix; il se trouvait alors menacé par les Tonkinois soulevés contre lui, et, pour ne point perdre tout son royaume, il nous abandonna, en 1862, la Cochinchine, e'est-à-dire trois provinces, Mitho, SaïgonBienhoa, sur lesquelles s'éta-
blit la souveraineté française. Il fut stipulé une indemnité de guerre de 20 millions, la tolérance pour les chrétiens dans tout l'Annam, le libre commerce dans trois ports en outre, aucune portion du territoire annamite ne pouvait être concédée à une puissance étrangère sans notre consentement. La situation eût été bien meilleure si l'on se fut aussitôt emparé du Tonkin, maist la politique hésitante de Napoléon III ne permettait pas deviriles résolutions; aussi. le traité avantageux que nous venons de reproduire ne reçut-il pas son exécution. De tous côtés éclatèrent des insurrections secrètement encouragées parTu-Duc;les mandarins fomentèrent ces révoltes et il fallut de nouveau tirer le canon. L'amiral de la Grandière, nommé gouverneur, montra de l'énergie et du savoirfaire. Il fit, en 1863, accepter notre protectorat au roi de Cambodge, province limitrophe de la Cochinchine, et parvint, aidé par les indigènes eux-mêmes, à chasser les rebelles. A cette époque, en 1864, Francis Garnier, âgé de vingt-quatre ans, fut nommé admi-
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nistrateur de l'arrondissement de Cholen, ville voisine de Saïgon et la plus importante de la colonie. Nous raconterons en détail les actions extraordinaires de cet homme qui, dès le début, fit preuve de ses remarquables qualités d'administrateur, perça des rues, creusa des canaux, construisit des ponts et des quais, ouvrit des écoles, abolit labastonnade, établitl'égalité de la justice, supprima les douanes intérieures et nous concilia les Annamites,
reconnaissants de ces réformes. Gràce à lui, le ministre de la marine (c'était alors M. de Chasseloup-Laubat) put faire prévaloir en France l'idée de nous maintenir dans la colonie. En 1867, on vint à bout des dernières rébellions et nous fûmes définitivement maîtres de la Cochinchine française. Les Français se mirent alors à parcourir leur nouveau domaine, afin d'en tirer commercialement un parti fructueux. En 1866, 1867, 1868, une commission composée de MM. de la Grée, président, Joubert, Francis Garnier et Delaporte, remonta le fleuve du Mékong et parcourut 10,000 kilomètres en pays inconnus.
très importante au point de vue scientifique, ne donna pas, au point de vue commercial, les résultats qu'on en attendait1. Elle denrontra au contraire que de nombreux rapidt-" et des cataractes entravent la navigation du Mékong dont on avait rêvé de faire la grande artère commerciale vers la Chine et le Laos. On.chercha ensuite vainement une autre route par la Birmanie les explorateurs, les capitaines Fau et Moreau, moururent en route, de la fièvre. Il semblait évident qu'il fallait renoncer de ce côté au ransit, aux avantages que nous donnent t le canal de Suez et la position de not ï colonie de Cochinchine, admirablement ituée entre l'Inde anglaise, Sumatra, Bornéo, à proximité des 600 millions de consommateurs de l'immense empire chinois, avec qui notre commerce n'est que de100 millions et devrait être décuplé. Alors un examen attentif fit songer au Tonkin, dans lequel se trouve une artère fluvialevle fleuve Rouge, magnifique voie Mais cette expédition,
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sur le
1. Notice
Tonkin, par Ch. Genin.
commerciale qui pénètre au cœur de la Chine. Nuus entrons maintenant dans le vif de notre sujet, l'exploration du fleuve Rouge et la conquête du Tonkin. On connaît à présent les événements du début de notre intervention on peut juger, si nous avons été suffisamment explicite, de l'utilité qu'il y a pour la France à s'ouvrir la voie commerciale peut-être la plus importante du monde. Il nous semble avoir prouvé en principe ceci lorsque nos efforts pour assurer des débouchés aux produits de nos nouvelles colonies, lorsque l'exploration du fleuve Rouge, que nous allons raconter, amena notre intervention au Tonkin, des circonstances imprévues ne dictèrent pas notre conduite. Elle était, nous le répétons, la conséquence logique d'une politique remontant à plus de cent ans. Il n'y a point là d'aventure, mais un intérêt national de premier ordre. Il ne s'agit pas d'un projet appartenant à un ministre ou à une coterie. La troisième République cherche et trouvera le moyen de compléter une œuvre
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commencée sous Louis XVI, ajournée par Napoléon Ier, reprisc par Louis XVIII, continuée sous le règne de Napoléon III, et à laquelle, en ce temps-ci, les Français patriotes se sont intéressés sans distinction de
parti. Puisse l'opinion publique s'émouvoir pour cette entreprise d'où dépend en partie notre prospérité industrielle !
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CHAPITRE TROISIÈME L'EXPLORATION DE M. DUPUIS
Sommaire : Expédition de M. Sencz (1872). — Reconnaissance du Tonkin. — Histoire de Jean Dupuis. — Son séjour en Chine. — Ses entreprises et ses désastres. — De la Chine à la mer, par le Tonkin. — Un périlleux voyage sur le fleuve Rouge. — Importance de cette pérégrination. — M. Dupuis à Paris. — Son retour au Tonkin (1872). — Rencontre de M. Dupuis et de M. Senez. — Celui-ci intervient pour défendre les intérêts de M. Dupuis. — Mauvaise foi et perfidie annamites. — Nouvelle expédition sur le fleuve Rouge. — Dangers courus par le hardi voyageur. — Le journal de Jean Dupuis: — Intervention de l'amiral Dupré, gouverneur de la Cochinchine (1873). — Maladie de M. Senez. Nécessité de l'occupation militaire du Tonkin.
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Pendant que se..passaient en Cochinchine les faits que nous venons de rappeler, le Tonkin était très éprouvé. Après avoir subi une effroyable guerre civile, il se vit envahi en 1865 par des rebelles chinois, parmi lesquels se trouvaient les PavillonsNoirs dont nous aurons à relater les crimes sans nombre. Ce3 brigands commirent des dépréda-
tions et des massacres, pillèrent et brûlèrent tout sur leur passage; ils défirent les troupes envoyées de Hué pour les chasser. On fit appel à des soldats chinois qui se contentèrent de recueillir un riche butin et ne retournèrent qu'à regret chez eux départ 1869. Après le de ces soi-disant en nouréguliers, la guerre civile éclata de veau. Le gouvernement français de la Cochinchine s'émut d'un pareil état de choses, a rapporté l'historien Romanet du CailIaud, en 1868, dans le projet de traité que l'amiral de la Gravière s'était efforcé de conclure avec le gouvernement de Tu-Duc, une des clauses. portait que la France se chargeait d'aider l'Annam à détruire la ; piraterie qui infestait ses côtes. Bien que ce projet n'eût pu aboutir, Français envoyèrent des navires dans le golfe du Tonkin, non seulement pour donner la chasse aux pirates, mais encore pour reconnaître ce pays. La guerre de 1870-1871 et l'insurrection de la Commune arrêtèrent ces projets, qui furent repris aussitôt après le rétablissement de la paix en. France.
et
-
le
un de nos marins les plus énergiques et commandant de l'aviso le Boarayne, fut chargé de l'exploration des bûtes du Tonkin et commença son expédition en 1872. Attaqué par les pirates de la côte, il les châtia sévèrement et débloqua les ports de l'Annam. Il ne se laissa rebuter ni parles mauvais procédés ni par la duplicité des mandarins, qui s'efforcèrent de l'entraver de toutes façons dans son voyage, de l'empêcher de parvenir jusqu'à Hanoi", où il arriva au mois de novembre après avoir couru mille dangers. r M. Senez futlepremier Européen nonmissionnaire qui pénétra dans cette ancienne capitale du Tonkin on lui fit le plus mauvais accueil, mais il déclara qu'il ne souffrirait pas la moindre inconvenance, contraignit le gouverneur à lui rendre visite, et pénétra dans la citadelle avec une faible escorte, après avoir désarmé les. troupes qui la gardaient.. On lui objecta qu'il n'avait pas le droit de pénétrer dans le pays avec des barques. Il répondit que les Chinois ayant libre accès partout, et l.a France jouissant, par M. Senez,
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traité, des privilèges des nations les plus favorisées, il était absolument dans son droit et finit par obtenir satisfaction. Après avoir fait du fleuve par lequel il était venu une exacte reconnaissance, M. Senez revint par Bac-Ninh, où il reçut un accueil aimablemais il dut tenir tête à une troupe de soldats chinois qui menaçaient de le lapider. Les autorités annamites, pour éviter tout conflit, le logèrent danslacitadelle, où apprit quelques jours plus tard que troisvapeurs arrivaient à sa recherche. Ces vapeurs étaient commandés par un autre Français nommé M. Dupuis est un de ces hommes d'initiative dont le nombre est malheureusement trop peu considérable chez nous. Passionné pour les voyages, ilpétait parti pour la Chine à l'âge de vingt-cinq ans, afin d'ytenterune vaste entreprise commerciale. Il y resta de longues années, étudia à fond la langue chinoise, se lia avec les mandarins et les principaux personnages du pays, qu'il parcourut presque en entier, gagnant et méritant partout la confiance, obtenant même le droit d'avoir sur le sol
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Dupuis.
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chinois un entrepôt de matériel de guerre. Il ne tarda pas à. réaliser une grande fortune dont il fut dépouillé par les pirates; il la refit et un incendie réduisit en cendres pour plus de 500,000 francs de marchandises amenées à grands frais. M. Dupuis faillit même périr dans ce désastre; mais, loin de se décourager, il se remit à l'œuvre et chercha les moyens de
réparer ses malheurs.
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Nous avons dit que, grâce à ses relations, il avait pu parcourir toute la Chine or, a écrit M. Romanet du Caillaud dans son remarquable ouvrage que nous analysons1, parmi toutes les provinces de cet empire, il en était une qui avait particulièrement attiré sonattention, c'était l'Yun-Nân, située au-dessus de la Birmanie, à proximité du Tonkin, province inexploitée faute de débouchés, et dont les mandarins et les commerçants chinois vantaient sans cesse à M. Dupuis les richesses métallurgiques. Fournir à ces richesses une voie d'écoulement, cela devint le but, l'unique préoccupation du hardi négociant qui, dès 1864, 1. Histoire de
l'Intervention française au Tonkin.
pressentit que la voie du Tonkin était la voie naturelle de la Chine à la mer. Il résolut d'aller reconnaître lui-même la navigabilité du fleuve Rouge, se rendit favorables les mandarins de Yun-Nàn et se mit en route aussitôt qu'il eut appris que l'expédition française sur le Mékong, dont nous avons parlé, avait constaté que ce fleuve n'est point navigable. Le Yun-Nân était alors en guerre civile. M. Dupuis y resta malgré les plus grands dangers, mais futforcé d'ajourner son exploration jusqu'en 1870. Esprit aventureux, caractère persévérant, il avait, en même temps que l'audace, la prudence indispensable pour réussir; ainsi le jugeait Francis Garnier. Il entreprit son périlleux voyage à travers un pays parcouru par des. bandes armées, et se jura de parvenir jusqu'aux bords du fleuve du Tonkin. En vain le vice-roi d'Yun-Nân, craignant qu'il ne fût massacré, essaya de le retenir; il déclara que rien ne pouvait l'arrêter et allait partir à cheval avec un seul domestique, lorsque le souverain, effrayé de son audace, se décida à lui donner une nom-
breuse escorte et de chaleureuses lettres de recommandation. Pour éviter les bandits qui désolaient la contrée il dut faire un immense détour, gravir des montagnes, traverser des contrées peuplées d'animaux féroces. Épuisé de fatigue, abandonné à diverses reprises par les hommes de son escorte, risquant sa vie chaque jour, les yeux toujours fixés vers le but à atteindre, il parvint enfin à une petite ville nommée Mang-Hâo et située sur les bords du fleuve Rouge, le grand fleuve du Tonkin, navigable jusqu'à
!
la mer
Les marchands cantonnais de cette cité très commerçante ne virent point sans jalousie l'arrivée d'un négociant européen et cherchèrent à lui nuire de toutes les épouvantèrent ses serviteurs, manières mais avec le petit nombre qui lui resta fidèle,
; ils
Dupuis continua sa route et descendit le celui-ci point jusqu'au où fleuve du cours n'offrait plus aucune difficulté à la navigation. Ses lettres de recommandation le protégèrent seules et le firent respecter des Pavillons-Noirs eux-mêmes. Il revint sur ses pas après avoir soigneuM.
Duruii, le premier explorateur du tleuve ftouge.
sement exploré tout le pays, et à son retour fut reçu avec enthousiasme par les mandarins du Yun-Nàn, qui après avoir entendu le récit de ses fatigues et de ses dangers, le surnommèrent Dô-Ta-Jen, Dupuis le Grand Homme, et lui témoignèrent depuis lors une confiance illimitée. On fit aussitôt les plus beaux projets sur l'échange des richesses de la contrée contre des marchandises européennes par la voie du Tonkin, mais comme il importait avant tout de pacifier le pays, M. Dupuis, accrédité comme mandataire duchef militaire de l'Yun-Nân, fut chargé d'aller en Europe faire l'achat d'armes et de munitions et partit immédiatement pour la France. Il arriva à Paris au commencement de 1812 et alla sans retard exposer au ministre de la marine, qui était alors le regretté vice-amiral Pothuau, et sa mission et les résultats de son exploration. L'amiral Pothuau, qui, grâce à sa haute intelligence, à sa pratique des affaires, a rendu tant de services, accueillit très favorablement l'explorateur courageux quiseul, à ses frais, avait acquis la certitude que le fleuve Rouge pouvait devenir une artère
)mmerciale puissante et résolu un prolème vainement cherché par nos offlers. M. Dupuis ne pouvait prévoir à cette poque aucune difficulté avec les Annantes-;mais, afin d'être mieux reçu par la our d'Annam, il demanda la faveur de se endre à Hué sur un navire de l'État. Le ministre accéda à celte demande tout n laissant certains frais à la charge du oyageur, invita le gouverneur de la Cohinchine à lui prêter son concours, mais n déclarant toutefois que la France ne pouait intervenir que de cette manière offiiense dans une entreprise qui demeurait .ux risques et périls de M. Dupuis. Celui-ci, après avoir acheté en France les canons et des chassepots, partit pour iaïgon où il reçut les plus chaleureux en ouragements de toute la colonie. Il alla insuite à Shang-Haï, où il acheta deux lavires anglais, et, après avoir achevé d'orçanlser son expédition à Hong-Kong, lossession anglaise située sur les côtes de a Chine, il appareilla pour le Tonkin. L'expédition se composait de deux caaonnières à vapeur, le Hong-Kiang et le
Lao-Kai, une chaloupe à vapeur, le Sa Tay, et une grande jonque chinoise. Le personnel comprenait vingt-cinq. E ropéens,parmi lesquels on remarquait second de M. Dupuis, M. Millot, négocia à Shang-Haï; un ingénieur, M. Ducos; i conducteur, M. d'Ercourt, et environ ce vingt-cinq Asiatiques, tous armés chassepots et de revolvers. La tenue ( l'équipage était celle de nos marins, avi la calotte américaine autour de laquelle nom- du navire était inscrit en lettres d'o Dupuis consacra tout cequi lui resta de fortune à l'équipement de cette peti1 <
flotte1.
Trente pièces de campagne avec lei matériel roulant, six à sept mille fusils tir rapide,.douze à quinze tonneaux c munitions dé toute sorte, tel était le matt riel de guerre queM. Dupuis avait emmj gas.iné_sur saflottille. Nous. avons vu comment, il se mit à1 recherche de. M. Senez, qu'il parvint rejoindre sur le Bourayne, au mois d novembre 1872. 1.
Thureau,
leTonkin.
Tonkill.
ail
citadelle
d'une
intĂŠrieur
Aspect
entra aussitôt en poapparier avec le commissaireroyal annamite, le plu; haut fonctionnaire de Tu-Duc. 11 exposi de la manière la plus précise ce que fld mandait M. Dupuis, non moins en vertu di mandat dont il était investi qurau non c'étai de la civilisation et du commerce 1 autorisation de traverser le territoire di l'Annam, le Tonkin, en se servant de se routes et de ses voies iluvîales, pour intro duire dansla province deYun-Nân, c'est-à dire en Chine, et pour en rapporter, toutr marchandises et tous produits. i -e Dupuis s'engageait échange, M. En payer les droits de navigatibn et de M. Senez
:
dOllaue. M. Senez ne manqua point de faire bril-
1
•
ler aux yeux du mandarin annamite les avantages inappréciables que son gouvernement retirerait d'une semblable entre-j prise, l'immense prospérité qui en résulte-1 rait pour le pays f la libre circulation des Euiopéens dans le Tonkin arrêtant les insurrections, la piraierie éloignée par la seule présence de leurs navires sur les côtes, le trésor royal cessant de s'épaiser infructueuse, lutte trouvant ad dans une
mtraire dans la perception des droits de ansit« une nouvelle et abondante source
revenus1». Le mandarin demanda dix-huit jour* pur faire connaître la réponse du Tu-Duc. L Senez s'éloigna après avoir de la sortr rêté àM. Dupuis tout l'appui qu'il pouait lui prêter, après avoir bien fait com,rendre au commissaire royal de l'Annam ue son gouvernement ne pouvait persister ien longtemps à s'isoler du monde civisé. « Le progrès de la civilisation est tel, isait l'officier de notre marine, que si ous ne permettez pas à M. Dupuis de cirluler et de commencer librement, un autre se présentera qui vous le demandera, et ros forts, et vos canons, et vos barrages, loute votre résistance sera vaine. » Et cela était vrai la face du monde a thangé depuis que, grâce à la vapeur, on eut traverser les mers en quelques jours. nYaaew-Yorkblen plus commodément ;t bienplus rapidement aujourd'hui qu'on 6
;
L Romanet du GaiHauil, l'Intervention française
flllTOl/kin.
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j sort.!
n'allait, il y a soixante ans, de Marseille i Dunkerque. Toute la terre appartient à tous lei hommes et comme la terre peut nourrii bien plus d'hommes qu'elle n'en porl actuellement, c'est à l'initiative, à l'effori individuel, que chacun devra désormais son
;
On voit les oiseaux et même certaines
plantes émigrer, selon leurs besoins L'homme, si fier de sa supériorité intelleè, lectuelle et maintenant en possession dd moyens de locomotion plus rapides et plus sûrs que ceux des oiseaux eux-mêmes, condamner l'homme continuera-t-il de se à végéter et à mourirsurplace, tandis que à quelque distance du sol où[il est né, lai prospérité l'attend Quant à ceux qui ouvrent lavoie, ils on £ toujours subir des épreuves siterribles qu'il faut avoir une énergie, une volonté semblables à celles de M. Dupuis pour en sortir victorieux. Aussitôt après le départ de M. Sénez qui mili-l représentait, cependant, la puissance taire de la France, les difficultés commencèrent pour le négociant.
à
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Tonkin.
au Douane
la de mandarins
Les
Le caractère annamite reprit le dessus. Méfiants, rusés, incapables de concevoir d'autre politique que celle de s'enfermer chez eux et de fermer tout accès aux hom-
mes civilisés, comprenant quesi les peuples par eux pressurés avaient les moindres notions de droit et d'équité, ils perdraient leui prestige, lesmandarins commencèrent par faire levide autour de M. Dupuis et défendirent aux indigènes, malgré les conventions stipulées, de lui vendre des denrées. Au bout de quelques jours, on lui apprit qu'il n'aurait point de solution avant trois mois et qu'il ferait bien d'aller attendre la réponse de la cour de Hué dans un autre pays que le A cette tin de non-recevoir M. Dupus, n'agissant plus que pour son compte personnel,répondit que rieirne l'empêcherait de poursuivre son voyage et, malgré Iqd barrages, maigre -le mauvais vouloir mandarins qni levèrent des troupes p( s'opposer à son entreprise, il continua. explorations et découvrit un canal qtÚI permit de se rendre à Hanoi, l'anaig -capitale du Tonkin, avec tous ses bateaux Il y arriva à la fin de décembre 1872.
Tonkin.
-
C'était la première fois que parvenaient à des bateaux à vapeur, et les autorités innamites témoignèrent, en les voyant, une les mandarins firent fergrandeterreur mer les portes de la citadelle et appelèrent leurs soldats aux armes. ÀJI contraire, les indigènes, courbés sous nombre en vinrent consijoug écrasant, un dérable acclamer celui qu'ils considéraient comme un libérateur, manifestation qui augmenta la malveillance des mandarins. Par bonheur, à cette époque, M. Dupuis, comme on le sait, défendait en même temps que les intérêts de la France les intérêts de? marchands chinois de la province de Yun-Nàn, etilfut protégé par le général qui se trouvait à la tête de quelques troupes chinoises, dans nord du Tonkin. Dupuis laissa ses navires mouillés à Hanoï sous le commandement de M. Millot, transborda son matériel sur des jonques, et en janvier 1873 uartit. pour le Yun-Nan avec dix Français et trente Asiatiques. Bans tout son parcours sur le territoire annamite, des bandes de soldats excités par les mandarins l'accompagnèrent de démonstrations hostiles, mais n'osèrent pas
;
le
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l'attaquer. Chemin faisant, il rencontra les Pavillons jaunes qui lui firent un accueil amicalet les Pavillonsnoirsqui, pressentant la fin prochaine de leurs brigandages, ne le laissèrent passer que par crainte. Il nous faudrait reproduire ici le journal de voyage écrit au jour le jour par Jean Dupuis lui-même pour donner à nos lecteurs une idée de cette pérégrination vraiment merveilleuse, mais ces détails passionnants agrandiraient démesurément notre cadre. Il nous suffira de dire qu'après des dangers inimaginables M. Dupuis, au mois de mars 1873, entra dans la capitale d'YunNÙn, dont les habitants lui firent une véritable ovation. Ayant affronté mille fois la mort, ayant bravé toutes les fatigues, maniant l'aviron avec ses hommes ou tirant ses bateaux à la corde, M. Dupuis avait parcouru tout le fleuve Rouge, et démontré qu'il était navigable. L'arrivée l'habile hardi explorade et « teur, la démonstration si frappante de la facilité des communications avec la mer, soulevèrent un véritable enthousiasme parmi la population chinoise, et les
d'Annam.
pays
au fĂŞte
Une
mandarins renouvelèrent à M. Dupuis les offres les plus avantageuses qu'il refusa, comme il avait refusé déjà les offres des grandes maisons de commerce anglaises et allemandes de Hong-Kong, espérant toujours que la France, dans un prochain avenir, pourrait bénéficier la première du résultat de ses explorations. » (1) L'utilité incontestable des explorations dé Dupuis, ses intéressantes découvertes furent confirmées et par M. de Kergaradec, consul de France à Hanoï, et par M. Edmond Fuchs, ingénieur en chef des mines, à Paris. Le Tonkin, nous reviendrons sur ce sujet, renferme des richesses considérables; mais ce que nous tenons à mettre en lumière avant tout, c'est l'importance de la découverte, par un Français, du seul fleuve qui puisse nous établir en communication directe avec la Chine, et le patriotisme de Dupuis qui n'a cessé de vouloir que sa patrie seule profitât des avantages de sa découverte, qui sera avant peu féconde en résultats pour notre pays. (1).
lu par M. l'amiral Mousciences:
Extrait d'un Rapport
chez à l'Académie des
*
us avons dit quel intérêt les négociants
Nu
;
fhlUI,is de la province de Yun-Xân avaient L le ce débouché aussi les autorités militaires
cette contrée offrirent leur concours l Dupuis, et lui proposèrent des troupes tour venir à bout de la malveillance des Annamites. Dupuis refusa, déclarant de nouveau îyu'il voulait laisser le champ libre à la lolitique de la France, et accepta seulement une garde de cinquante-cinq hommes [jour protéger ses convois. Muni de cette escorte et voulant sans retard utiliser la voie fluviale par lui trouvée,
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courageux explorateur organisa un Convoi de marchandises pour Hanoï et redeccendit le cours du fleuve Rouge au mois d'avril 1873. Partout où il s'arrêta, les chefs indigènes accoururent àluipourluiproposerdestraiés cnncernant l'exploitation de leurs mines et le transport de leurs produits dont ils ne pouvaient tirer aucun parti faute de débouchés. Pendant sonabsence, le grand mandarin île Tu-Duc, roi d'Annam, était venu - Hanoï avec mission de délivrer cette ville des le
rebelles chinois, mais surtout de l'expédition française. M. Millot, durant l'absence de son chef et de son ami, était parvenu à éviter les pièges des Annamite, pièges redoutables, car maintes fois ses hommes faillirent être assassinés, et il ne parvenait à se procurer des vivres qu'avec la plus grande difficulté. Il lui fallut une indomptable énergie pour faire respecter notre Le retour de Dupuis augmenta la rage des mandarins annamites les vexations redoublèrent, le fleuve fut barré en amont et en aval pour lui couper toute retraite, et on le menaça d'incendier ses navires il eut été inévitablement massacré, si, grâce à l'appui dequelques chefs indigènes, il n'avait réussi à composer une troupe de cinq cents hommes, qui, armés de fusils à tir rapide, intimidèrent l'ennemi. L'explorateur aussitôt que sa sécurité lui parut assurée, envoya M. Millot à Saïgon afin d'informer de sa situation le gouverneur de la Cochinchine française, M. le contre amiral Dupré. Malgré les difficultés de saposition, malgréles propositions àlu son aites parles étrangers, M. Dupuis, dans'
pavillon..
:
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MILLOT,
second de la première expédition au Tonkin.
désintéressement patriutique, entendait que son entreprise restât absolument française. Il proposait, en cas d'hésitation, de planter à l'aide de ses hommes, le drapeau français sur la citadelle crHalloï, et de, proclamer, sous le protectorat de la France, la restauration d'un prince aimé des Tonkinois, certain d'être aidé parles indigènes, Lout prêts à se soulever contre l'odieuse tyrannie des Annamites. II réclamait en outre, pour les retards considérables que le gouvernement annamite avait apportés à son légitime trafic, une indemnité qui lui était certainement due. L'amiral Dupré ne se rendait pas alors un compte exact de la situation. Il avait reçu de nombreuses dépêches du gouvernement annamite, lequel se plaignait des crimes de notre explorateur, le calomniait avec une incroyable perfidie et réclamait son expulsion.
La vérité était qu'en présence des guetsapens chaque jour tendus à lui et à ses hommes, alors que les Annamites tentaient d'empoisonner leur eau, d'incendier leurs bateaux, de les réduire par la famine et avaient mis leurs têtes à prix, Dupuis avait
dû se défendre, et n'avait point laissé impunies ces criminelles tentatives. Giaéreux et bienveillant pour le peuple qui l'aimait, cet homme que rien ne pouvait mtimider, avait fait prisonnier le chef de la police qui le voulait faire assassiner, avait marché sur la forteresse avec deux canons, mis la garnison en déroute, enlevé un indolent préfet au milieu d'une garde de millehommes et détruit la préfecture, enfin livré une bataille véritable, où il mit avec sa petite troupe quatre mille Annamites en déroute. Tous ces faits étaient nécessités par une légitime défense, ce que comprit l'amiral •upré aussitôt que M. Millot lui eut donné les explications nécessaires.
Notre gouverneur de la Cochinchine reconnaissant la légitimité des réclamations de Dupuis, lui fit dire de refuser tout concours des Chinois, affirmant qu'il se chargeait de faire payer lui-même les indemaâés dues à son expédition [qui, par Ja suite du mauvais vouloir des Annamites, avait échoué en partie. Il lui fit prêter par la succursale saïgonnaiise une somme dé trente mille piastres,
garantie par la colonie de la Cochinchine française, laquelle, pour se couvrir prit inscription « sur le montant de l'indemnité due à M. Dupuis par le gouvernement d'Annam », et évaluée approximativement à deux cent cinquante mille piastres. En outre, l'amiral Dupré déclara qu'il enverrait un officier français pour arranger les affaires du Tonkin et ouvrir ce pays au commerce. Il songea aussitôt à M. Senez, qui auparavant lui avait adressé un mémoire traitant l'occupation du Tonkin. Selon M. Senez, notre position enGochinehine serait précaire aussi longtemps que nous ne nour assurerions pas un traité sérieux avec l'Annam, traité vainement réclamé depuis longtemps, et que nous ne pourrions obtenir qu'en occupant Tonkin le brillant officier de marine avait même dressé le plan de l'opération et donné d'importants détails sur notre future politique. La chose principale était d'exterminer d'abord les bandits chinois qui ravageaient les provinces dans sécurité de point de notre vue au l'extrême Orient, au point de vue de notre dignité, de notre honneur et de nos inté-
le
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Porto de la douane annamite.
rêls, cette occupation s'imposait. L'état di la France en 1873 ne permettait certes pas une grande expédition, mais les Tonkinois nous aimaient et réclamaient notr protectorat; c'est avec leur appui mêmg qu'on pouvait combattre, contre les mai; darins et les soldats mail Ce projet séduisit l'amiral Dupré; M. Senez, épuisé par Th climat de la Cochât plaida chine, dut revenir en France, où il la cause près du ministre de la marine. Pendant ce temps, le gouvernemeji annamite ne négligeait rien pour parveni la jaloux à faire expulser M. Dupuis Angleterre sachant bien quelle riche colo. nous pouvions fonder, faisait des représell tations par son ambassadeur à M. de Bra glie, alors ministre des affaires étrangères et les négociants anglais de Hong-Konj cherchaient les moyens de s'établir point dulittoral du Tonkin. L'anarchie augmentait dans ce pays, 1-4 événements se précipitaient l'amiral Du demanda par le télégraphe le retour d reprendre. eJ^J M. Senez, dont l'état s'était aggravé qui il était impossible de nier. -
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annamites.
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Alors, toujours par voie télégraphique, prévint Cochinchine de la guuverneur ministre que le Tonkin était ouvert par succès de l'entreprise Dupuis que cela msait une émotion profonde dans le immerce anglais, allemand et américain, où la nécessité pour nous d'occuper nmédiatement le Tonkin avant la double ivasion dont ce pays était menacé par les uropéens et par les Chinois, et d'assurer la France cette route unique vers la ,hine centrale. Les soulèvements y étaient si nombreux, ue l'on pouvait craindre que Tu-Duc ne it renversé, et alors nous perdions l'avange du traité qui ouvrait le Tonkin à notre tmmerce, les cinq cents mille chrétiens e la contrée étaient exposés aux plus rands périls, et nous courions même isque d'être chassés de la Cochinchine. En vue de pareilles éventualités, l'amiral lupré jugeait nécessaire d'occuper sans etard la citadelle et un point de la côte vec des forces suffisantes pour tenir en espect et les rebelles et les pirates. Il se déclarait prêt à assumer toute esponsabilité, ne demandait ni approba-
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tion ni renforts, mais seulement la libert d'agir, et rĂŠclamait, pour remplacer M. Se nez, M. Francis Garnier.
CHAPITRE QUATRIÈME FRANCIS GARNIEn
Sommaire. — Caractère de ce héros. — Ses premiers projets. cette.vieille France! » — Rencontre En avant pour « — de Dupuis. — Manœuvres anglaises. — Arrivée à Hanoï. — Questions de dignité. — Une proclamation. La mauvaise foi annamite. — Provocation des mandarins. — Une immense citadelle prise d'assaut par 180 français. — Faitd'armes inouï. — Pacification de la province. — Tentatives
-
d'administration.
Qui était Francis Garnier?
Un lieutenant de vaisseau français qui, en 1866, avait commandé en second la mission d'exploration du Mékong et de l'Indo-Chine. Pour le faire connaître de suite, il nous-suffira de citer ce jugement
:
porté sur lui par
Levasseur, membre de l'Institut « On trouve bien rarement l'intrépidité, la science, le patriotisme e l'amour des grandes découvertes réunis à tel degré dans un même homme un , dans un homme aussi jeune. » Garnier se rendit avec empressement à l'appel de l'amiral Dupré; mieux que personne au courant de la situation du Tonkin, il déplorait alors l'inertie de notre gouvernement, redoutait l'intervention anglaise - et disait à ses amis, dans son désespoir, que, s'il était né en Angleterre, il serait - puissant et honoré, à cause de ses projetç' et de ses tentatives, tandis qu'en France, son pays bien-aimé, on ne tenait aucun compte de ses efforts. Lorsque l'amiral Dupré l'eut mis au courant de la situation, lui eut appris qu'il voulait intervenir à main armée, il fit observer que mieux valait d'abord se mettre d'accord avec le gouvernement annamite, afin d'éviter toute intervention chinoise, se poser en défenseurs de TuDuc, et imposer ainsi, en échange de notre protectorat, l'ouverturedu Tonkin au coinmerce. M.
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programme fut accepté par le gouGarnier Cochinchine, M. la de et rneur rut mission d'aller sur les lieux faire réciplaintes relative enquête aux e oques de Dupuis et des Annamites. Les mandarins, nous l'avons dit, vou.ent à tout prix chasser « les Barbares accident qui violaient le sol de l'Annam». s'étaient adressés pour cela d'abord à Chine, qui refusa, à cette époque, toute tervention, puis aux Anglais de Honging, et même à des marchands alleands venus dans leurs parages pour y sndre un bateau. N'ayant trouvé aucun appui, c'est l'ami.1 Dupré qu'ils étaient venus supplier de nvoyer M. Dupuis, dépeint par eux imme un malfaiteur. L'amiral répondit qu'il ferait droit à urs réclamations si elles étaient justes et est dans cette situation que Garnier partit mur le Tonkin au mois d'octobre 1873. Il écrivit alors à sa famille « Une petite cpédition est prête. Je pars à la tête rune division composée de deux canonières, d'undétachement- de fusiliers tarins et d'un détachement d'infanterie Ce
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:
de marine. Voilà une petite expéditior d'ap je aime. J'aurai les la faculté comme peler à moi, s'il est nécessaire, la compa gnie de débarquement d'une corvette qu me remorque jusqu'aux embouchures du fleuve. Comme instruction, carte blanche L'amiral s'en rapporte à moi. En avan donc pour cette vieille France » Son entreprise, ainsi qu'il le constatai dans une autre lettre, était d'autant plus délicate que le ministère réactionnaire duc de Broglie ne voulait point entendra parler de cette politique coloniale Garnier craignait de se voir désavoué en compagnie de l'amiral Dupré. Partisan avant tout des moyens pacifiques. se proposait, si les Annamites le secondaient, de régler le différend Dupuis et d'ouvrir au commerce le Tonkin et son fleuve en y organisant les douanes sousle protectorat de la France; mais en cas de résistance et de trop grande obstination desmandarins, il était décidé à essayer de fonder une colonie nouvelle pour la France. Les événements devaient lui dicter sa
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conduite. Il fit ses adieux à sa jeune femme et à
Tonkin.
au \illapc
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Fortification
par laissa à Sanghaî et sa fille qu'il aj donc à la tête de sa petite troupe; son mement principal se composait de quati canons. Le début fut mauvais; la canonnièi coula dans un coup de mer Garnier di aller à Tourane, y rester quelques jours puis, continuant son voyage, se servir d bateaux chinois dont l'un coula à son toui entraîné par le courant les autres faillirer périr malgré les efforts des mariniers< des populations riveraines qui aidaient a halage. On se trouvait dans cette position grav lorsque soudain le sifflet d'un navire vapeur se fitentendre; c'était M. Dupui qui venait à la rencontre de son compi triote et qui aussitôt accosta la jonque i salua le chef de la mission française. Un long entretien eut lieu. Ces dem hommes de cœur et de courage ne si cachèrent point les difficultés de leur entreprises. Ils savaient l'un et l'autre que les Anglai agissaient Pékin pour pousser la Chine i la conquête du Tonkin, contrecarrer no! projets et ruiner, s'il se pouvait, notri
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à
lonie de Cochinchine; à Paris, «une seule inande d'explications de l'Angleterre faiit perdre la tête à M. de Broglie1 ». bupuis exposa ses griefs l'hostilité qu'on avait manifestée l'avait ruiné; des marandises achetées par lui un prix consirable étaient en quelque sorte enfermées
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seraient perdues pour lui. M. Garnier lui issaespérer qu'avant peu les difficultés raieuLaplanies, lui fit promettre qu'il se nfoulerait à ses prescriptions et il lui a ndu-cette justice: a M. Dupuis, plein de m sens et de patriotisme, a déféré à utes mes indications. » Ceci est utile à constater. Le négociant remorqua Garnier avec ln vapeur, et l'expédition arriva de la trte, le 5 novembre 1873, en vue d'Hanoï. Quand,quelques joursplus tard, le comlandant parvint dans la capitale du Tonn, il trouva pavoisés et tirant le canon our le saluer les trois navires européens 2 Dupuis sur le rivage, où étaientaccouis des milliers de spectateurs indigènes, ux cents soldats chinois, armés de chas-
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Correspondance de Francis Garnier.
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sepots, en grande tenue, bannières dé ployées, formaient la haie et présentaien les armes c'étaient les gardes de M. Du puis. Quant aux mandarins annamites e au gouverneur de Hanoï, ils n'avaient poin daigné se déranger. Garnier arrivait cependant avec le! intentions les plus conciliantes il fit deman der où on allait le loger le gouverneur insolemment, lui envoya un subalterne qu conduisit le représentant de la France à une mauvaise auberge. Aussitôt Garnier marcha droit à la citadelle avec quinze hommes d'escorte, yentra seul, et pénétra, avant qu'on eût pu lui fermer les portes, jusqu'au grand maréchal, vice-roi du Tonkin, vieillard plein d'énergie et de patriotisme, mais ennemi acharne de'la France. Notre officier lui parla haut et ferme, lui dit qu'il venait sur l'ordre du gouverneur de Saïgon s'entendre avec lui pour poser les bases d'un traité qui devait se conclure entre la France et la cour de Hué, afin d'ouvrir:à la navigation commerciale le fleuve du Tonkin. Le vice-roi balbutia, répondit qu'il n'a-
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4
FHANCIS GARMFR, 1'-'
21
explorateur du Tonkin, tué
décembre 18/3.
vait aucun pouvoir pour traiter et qu' devait consulter son souverain. J'attendrai donc, répondit son visiteui — mais vous voudrez bien venir demain fi rendre ma visite, et je vous prie de m'ind quer un logement pour mes hommes pour moi. A cela le vieux gouverneur répond qu'il en avait fait désigner un. A ces mots, se sentant offensé, Garnit entra dans une violente colère, reproch énergiquement au gouverneur son manqu de convenance, déclara qu'il ne voula pas être traité comme un misérable étrar ger et qu'il lui fallait une habitation dign de son rang. En présence d'une attitud aussi fière et aussi déterminée, le gouye: neur fit ses excuses, offrit des rafraîchi sements, et tout le personnel français ft immédiatement installé dans des pavilloi d'architecture chinoise attenant à la cit< delle, qui servaient aux étudiants ann< mites à l'époque de leurs examens, et doi la réunion se nommait le Camp des lettré. Dès le lendemain de l'installation FraI cis Garnier adressa à ses hommes l'alloei tion suivante
:
ET
MARINS
SOLDATS;
în vous envoyant au Tonkin sauvegarder rintérêls de la civilisation et de la France,
hiral gouverneur vous a fait une faveur et
nié une preuve de confiance. Vous méritez ie, vous justifierez l'autre. Vous vous rappelez que vous êtes au milieu de populations ffensives et malheureuses que votre séjour milieu d'elles ne doit pas être une charge utée à toutes celles qui pèsent déjà sur elles il finihinaugurer, au contraire, une ère de Llagemenl et -de paix. Vous vous abstiendrez de tmll acte de brutalité vous- vous ncerez de faire aimer et respecter le draLU qui vous abrite en ne .négligeant aucune rasion de vous rendre utiles, en vous monnt en toute circonstance justes et bienveil-
;
c
;
;
rts.
veus êtes peu nombreux; mais vos armes, dentredoutables. re diMÎpline, 1a--c..1.use que vous servez, vous Vous conserverez soigneu-
aenl ce prestige par une fidélité absolue aux lements militaires, par une subordination aplète à vos supérieurs de tout grade et de ite arme, par cet esprit d'union et de camaterie qui allège les devoirs les plus pénibles, est la source d'une féconde émulation. Piurai beaucoup à vous demander et je
pte sur vous.
En même temps il faisait afficher
roclamation aux habitants, dans laqu il leur disait que les Français venaient Tonkin pour le débarrasser des pirate des bandits, pour se conduire fraterne ment envers les Annamites, leurprocure facilité de faire le commerce et, parla,1 apporter la richesse et la Il n'avait en vue que la vertu, disait et il le prouva. Dupuis, connaissant mieux la fourberie la lâcheté des mandarins, eût préféré qui parlât plus fermement, plus militairemej mais telles n'étaient ni les intentions ni mission de Garnier, qui aussitôt cherch négociations. bien à mener ses Avant de rien entendre, les mandari répondirent qu'il fallait expulser M. Dupu et le vice-roi, affirmantson mauvais vd loir, chercha toutes les occasions de ves et d'humilier notre représentant, refusa dédaigneusement d'assister aux coni rences, pendant lesquelles destroupes ann mites en armés, prêtes faire feu, ente raient la petite escorte de Garnier, qui moquait de ces menaces et les méprisait. En outre le gouverneur, furieux de ce ql
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Vue
notre envoyé eût pénétré jusqu'à lui, grada, condamna à cent coups de rotin fit jeter en prison le capitaine annamite était de garde ce jour-là. Garnier exigea mise en liberté immédiate et l'obtint m le malheureux ne put venir le remerc que trois jours plus tard, tant on l'av mis en piteux état. En outre, à la proclamation française, sage et si conciliante, le gouverneur répc dit en en faisant afficher une autre dise n'avait été envoyé q que « l'officier pour chasser Dupuis qu'après il devr se retirer, n'ayant aucun droit de s'i miscer dans les affaires du pays. En out il défendait aux négociants annamites chinois d'avoir aucun rapport avec le co mandant français, de façon à l'isoler e faire le vide autour de lui. Là ne se bornaient pas les hostilités essayait d'empoisonner l'eau dont se serv le corps expéditionnaire la nuit, du h« de la citadelle, on lançait sur notre cai des fusées incendiaires. M. Dupuis n'ét poison le moins menacé que par par pas feu, qu'on tenta de mettre maintes fois ses magasins de poudre.
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La situation n'était plus tenable; aussi Garnier écrit à son frère, le 10 novembre Je lutte contre des difficultés de tous genres. Je suis inquietdene pas apprendre l'arrivée du Decres et de l'Espingole, ayant à faire tête à des complications qui exigeraient des forces plus considérables que celles que je possède. Il n'y a qu'un coup d'éclat qui puisse. contrebalancer l'effet des menées annamites, redonner confiance en moi, rétablir l'autorité et le prestige dont je suis arrivé entouré. Ce coup d'éclat, j'y suis décidé. Le lo novembre j'attaquerai avec mes cent quatre-vingts hommes la citadelle, j'arrêterai le maréchal et je l'enverrai à Saigon sur un bateau de Dupuis. » Cependant il essaya encore des négociation?, sur les supplications de l'évêque Puginier, chef des missionnaires, qui craignait d'exposer les chrétiens à la vengeance des mandarins pendant quelques jours il s'efforça de nouveau de décider les autorités annamites à ouvrir le Tonkinau commerce européen. En présence de leur refus, il adressa aux habitants une nouvelle proclamation,
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dans laquelle il déclarait le fleuve du To kin ouvert, de la mer au Yun-Nàn, au coi merce français, espagnol et chinois, c'ei à-dire aux nations ayant un traité av l'Annam les négociants des autres natioj devaient être sous la protection du pavill( français. En même temps Francis Garnier1 plaida près d'un ambassadeur venu de Hué, représentait cause de son entreprise; ce personnage l'obstination et l'aveugl ment des mandarins du Tonkin, dont peuple en servilité demandait à secouer joug il démontrait l'utilité des transactioi commerciales par lui entreprises. A ces dernières tentatives pacifiques le mandarins répondirent en faisant arrachï la proclamation. Cette insolence appelai le châtiment; un conflit devenait inév table les mandarins, n'ayant en face d'eu qu'une troupe de quelques hommes, ne me nageaient plus leurs menaces et se prépq raient ouvertement à la lutte. Par bonheur, le 12 novembre, arrivèren les deux canonnières si impatiemmen
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Sa Correspondance.
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attendues par Francis Garnier. Celuin'hésita plus. Le 19 novembre il envoi i de la d'Hanoï citadelle au gouverneur ultimatum : désarmement de la citadelle acceptation des conditions de la Franci permission à M. Dupuis de retournerlibr ment en Chine. Garnier écrit ensuite à son frère « J'ai fait assez d'efforts pour éviter Te fusion du sang. On n'a pas répondu à m( j'ai attendu jusqu'à six heur ultimatum du soir et je donne mes ordres; il est d heures. Demain, au point du jour, j'attaqi sept mille hommes derrière des murs av< cent quatre-vingts hommes. Si cette letti te parvenait sans signature, c'est-à-dh sans nouvelle addition de ma part, c'e: grièvement blessi j'aurais été tué ou que Dans ce cas je te recommande ma femm et ma fille. » L'héroïque- officier, qui avait fait sf Garnie] Paris, siège de le pendant preuves avait dressé son plan d'attaque avec un précision et une prévoyance vraiment a( mirables. La citadelle d'Hanoï, qu'il s'agissait d'en porter d'assaut, s'élève à peu de distanc
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du fleuve construite d'après un plan européen sous le règne de Yia-Long, dont nous
Ivons parlé, ayant la forme d'un carré de bastions, avec 1,000 mètres 'étendue, de chaque côté elle est dominée iarune haute tour, et ses cinq portes sont léfendues par des redans, par des ponts it des fossés. Sur les bastions, des canons de bronze. jfi 30 novembre 1873, date mémorable, ftpt mille hommes se trouvaient dans cette En face, nous le répétons, cent
l'ni
lie. atre-vingts es lieutenants r
Français1.
Garnier étaient Hautefeuille, M. Trentinian, de
Baiu, M. II. Esmez. A quatre heures et demie du matin on veilla les hommes, qui mangèrent la loupe. Le chef harangua sa troupe, et à la winte du jour M. Bain, à la tête de sa petitecolonne, se précipita vers la porte du
Sud. Quelques soldats enlevèrent les chevaux détails de ce combat se trouvent dans lèS ouvrages de M. Romauet du Caillaud et de 1. H. Gautier. 1. Les
de frise qui défendaient l'entrée du redan un marin escalada la porte et l'ouvrit ses camarades. Un canon fut braqué et o
tira aussitôt sur la citadelle, puis
o
s'élança sur le pont. L'ennemi répondit en tirant à mitraille mais ne blessa personne. Notre canonpra tiqua une ouverture les Annamites époi vantés s'enfuirent, laissant l'entrée lîbr
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de ce côté.
Pendant ce temps, la seconde colonne, l'aide du canon elle aussi, cherchait àdéfor cer une autre porte massive et garnie e haut de barreaux solides. Un de ces bai qi les balles, Garnier, et sauta sous reaux s'accrochant trouvait là, d rebord au se cette porte, bondit à l'intérieur, le revo souci d'une grêle poing, d sans ver au projectiles. Deux hommes le suivirent. E l'intérieur il commanda de faire ur, brèche avec des obus à balles, et s colonne entra à sa suite. Le drapeau français fut arboré. L'attaque avait été admirablement so L'Espi, canonnières, deux les tenue par gole et le Scorpion, placées à 1,200 mètrf de distance, quoique la première n'eût qu
du
M.Balnydirige le tir ĂŽleses canons dn haut de
lamâture
vingt-trois hommes à bord et la second quatorze seulement. L'enseigne de vaisseau Balny, qui le commandait toutes deux, dirigea le tir ayel une précision admirable, du haut de 1j mâture du Scorpion, posté sur la vergui du mât appelé le petit perroquet. Les mé caniciens eux-mêmes se mirent au servic des pièces; chaque homme se rendit compte de l'importance du combat et fii son devoir avec une ardeur extraordinaire, sachant que le salut des camarades dq terre dépendait en partie de la précision du tir des navires. Cette poignée d'hommes, aussi vaillants les uns que les autres, assura le succès de lajournée, auquel contribua de son côté M. Dupuis avec les soldats chinois irréguliers dont il disposait. Quant à Garnier, c'est un de ses soldats, Imbert, qui dans une sorte de journal lui a rendu cet hommage Garnier, plus brave que tous, payant sans cesse de sa personne, s'exposa à tous les dangers de l'action. avant! enfants, En avant, mes en » « criait-il sans cesse, et il marchait le premier.
Les soldais annamites, intimidés par l'intrépidité d'une- attaque à laquelle ils ne pouvaient croire, tiraient mal et n'atteignaient pas les nôtres. En vain ils firent pleuvoir du haut des remparts des poutres énormes, une grêle de pierres, des poignées de clous triangulaires à pointes aiguës, des fusées incendiaires; en vain le vieux gouverneur, donnant, lui aussi, la preuve de son courage, mais d'un courage inutile, s'efforça de ramener ses troupes terrifiées au bout d'une heure la citadelle était en notre pouvoir, le gouverneur grièvement blessé et avec lui trois cents hommes. L'ennemi, qui comp-
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tait quatre-vingts morts, laissait entre nos mains deux mille prisonniers parmi lesquels presque tous les grands mandarins.
Le reste fuyait. La fin de cette glorieuse journée, qui eût produit de si grands résultats si la diplomatie française avait montré autant de fermeté que nos combattants avaient déployé de courage, l'après-midi se passa à débusquer les débris de l'armée annamite cachés dans les vastes champs entourant
la citadelle.
l'intérieur, les deux mille soldats restéi à leur poste mais paralysés par la peur après avoir jeté leurs armes, se prosterné rent devant Garnier. On délivra quatre cents prisonniers qui depuis plusieurs années gémissaient dans la forteresse, la chaîne et le carcan au cou. Dès le lendemain des députations de la ville, précédées du drapeau tricolore, vinrent s'incliner devant le vainqueur. Une quantité d'armes prodigieuse étaii tombée en notre pouvoir, avec des éléphants et des chevaux en grand nombre, des cai nons, des milliers de kilos de poudre, des vivres pour cent mille hommes. Le héros de l'expédition continuant alors! sa lettre à son frère lui dit « AU rightl Le citadelle a été enlevée avec ensemble, sans que nous ayons un homme blessé c'est une: opération modèle (sans me vanter).Mais le soir, j'ai éprouvé qu'il était plus facilel de prendre la citadelle que de la garder. Il m'a fallu,avec cinquante hommes qui me restaient, passer la nuit, dans un ouvrage qui a 6 kilomètres de développement et où se trouvaient encore deux mille hommes armés ayant des chefs et se croyant conA
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Rnuirc.
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damnés à mort par les vainqueurs. L'incendie, les surprises, tout était à craindre. Nous n'avons guère dormi. Aucun de mes postes ne comptait plus de six hommes; heureusement ils faisaient du bruit comm*
vingt.
«.
Auj ourd'hui le désarmement s'est fail sans résistance. Je prends en main l'administration de la province. Elle a deux millions d'âmes. Les populations viennent, à moi. Je demande à l'amiral Dupré mon ami Luropour m'aider. Je suis exténué de fatigue; voilà trois nuits que je passe.j'envoie mes hauts prisonniers sur le
.Dec]'ès.»
Et c'est du palais central de la citadelle d'Hanoï que Garnier. écrivait cela. Bientôt il recevait la soumission des autorités locales, les faisait adhérer à ses règlements de commerce, dictait des ordres aux mandarins et organisait des milices indigènes. Il voulait non pas la conquête, mais l'administration du pays, l'investiture française, pour le Tonkin, sans répudiation de l'autorité de Tu-Duc, roi de l'Annam. Et il avait une foi sincère dans la réussite de son entreprise merveilleuse, malgré la
faiblesse de son escorte, et il ne demandait à ses chefs, en France, que d'être un peu soutenu, s'écriant que si des renforts lui parvenaient à temps et s'il ne mourait, il était certain d'ouvrir à sa patrie l'accès du plus riche et du plus florissant pays. Il écrivait cela familièrement, en ce temps-là, à son ami Luro dont il réclamait la présence. Il disait à ce bon compagnon d'armes, avec la gaieté française qui ne l'abandonna jamais, même dans le péril « Quoiquej'aie expédié les hauts fonctionnaires du pays à Saïgon pour qu'ils ne se croient pasobligés de soulever les populations contre moi, j'aima province sur les bras. Ne me réponds pas comme Sganarelle : « Mets-la « par terre, » mais viens me trouver; je te demande avec instance à l'amiral, je ne peux pas tout faire. Le Tonkin est certainement préférable à la Cochinchine comme richesse, climat et densité de population. » Les matelots partageaient cette opinion. Une fois installés dans la citadelle ils se crurent en pleine féerie et l'un d'eux décrivait de la sorte son ravissement « On roule sur les meubles précieux et les fauteuils
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de soie; on se balance dans des palanquin tout dorés; on s'évente avec des éventail en soie et en plumes de quatre-vingts centi mètres de long; on s'accroche au côté dei sabres incrustés de nacre et d'ivoire. » Garnier félicita ses braves comme il con.
venait, pour leur courage, pour leur modération, pour les soins qu'ils avaient donnés aux blessés ennemis. Ils avaient réellement honoré le pavillon, et tous ont conservé comme un titre de gloire, comme une marque d'honneur, la copie dp la proclamation à eux adressée par leur chef. Nous verrons, dans la suite, des faits d'armes plus surprenants, mais ce que fit Garnier pour l'administration du pays est plus extraordinaire encore. En quelques mois cet homme de trente-quatre ans accomplit des prodiges. Il rassura les Tonkinois, leur expliquant qu'il avait dû châtier la perfidie des mandarins annamites, mais que, encore une fois, il voulait seulement ouvrir une voie au commercepour la prospérité de leur pays. Tous pourraient donc continuer à s'oc-
cuper de leurs travauxsans rien craindre, ni pour leurs biens ni pour leurs coutumes; l'envoyé de France recommanderait en outre au roi et aux mandarins de traiter le peuple comme un père traite ses enfants. Garnier, n'ayant qu'un très petit nombre d'hommes, recruta parmi les Tonkinois qui nous étaient favorables des troupes auxiliaires qui remplacèrent les Annamites en fuite, et il assura de la sorte ses communications avec la mer. Il fit appel à des volontaires pour former une milice, et les jeunes gens accoururent, heureux de venir en aide à celui qui les débarrassait de la tyrannie odieuse des Annamites, lesquels, selon l'expression de Garnier, n'avaient aucun amour du peuple qu'ils ruinaient et saignaient jusqu'à la moelle des os. Il établit en quelques jours une administration nouvelle, choisit ses fonctionnaires, organisa sa milice, accueillit les chefs militaires quilui amenèrent une petite armée. D'autre part il réprima sévèrement le 'brigandage, ordonnant de courir sus aux voleurs, qui furent livrés à l'autorité fran-
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çaise, et exécutés après qu'on les eût eoil vaincus de crimes. Il acheta à M. Dupui il trois de faire ses vapeurs guerre pour chasse aux pirates, diminua l'impôt sur Ii riz, encouragea les commerçants chinoi renattri Aussitôt transactions. vit on aux rou la confiance les boutiques d'Hanoï se vrirent. Une ère de prospérité semblaij commencer, mais il restait à livrer biei des combats au delà d'Hanoï.
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CHAPITRE CINQUIÈME LESPAYILLONS-NOIIÏS Somiii'iire: Etablissement de ces bandits dans le Tonkin. — Les abris qu'ils trouvent sur les côtes. — Leurs tanières Des repaires et leurs refuges dans les îlots du golfe. protúgés par des murailles de 80 mètres. Comment les Pavillons-Noirs vinrent de la Chine. — Explication de leur nom. — Les Pavillons-Jaunes. — Leur organisation. — Chasse aux bateaux. de commerce. Relations des pirates avec les habitants du Tonkin. Transactions commerciales. — Les écumeurs de mer. — L'habitation de plaisance d'un forban. — Exploits des Pavillons-Noirs. — Les voleurs de cheveux. — La chasse aux femmes et aux enfants. — La récolte des esclaves. — Comment on se procure des servantes. — Différe.ntes ruses de guerre. — Un thargement de bétail humain. — Supplices en usage. — Complicité des mandarins annamites et des marchands chinois.
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Avant de continuer le récit des exploits le Francis Garnier, il est indispensable 311e nous donnions quelques détails sur une catégorie d'ennemis contre lesquels il va avoir à lutter et qui sont connus sous le nom de Pavillons-Noirs. Ce sont des bandes célèbres par leur
audace et par leurscruautés, composée! de brigands de la pire espèce, qui depuii de longues années commettent toutes sortef d'atrocités sur les Annamites et les sauvages des montagnes. Aidés à certaines époques par les Pavillons-Jaunes, moins cruels qu'eux, ils ont empêché tout commerce dans le Tonkin. Ces forbans venus de Chine doiven.t être considérés comme des pirates, de véritables ils ont écumeurs des côtes de l'Annam partout répandu la terreur. Voyons comment ces Pavillons-Noirs et les autres pirates se sont établis avi Tonkin et du Tonkin dans le reste de l'Annam. De temps immémorial, le golfe du Tonkin a été renommé pour un des principaux foyers de la piraterie dans les mers de l'extrême Orient. Tout y prête sa situation en face du passage des jonques qui la proxide l'Inde se rendent en Chine mité d'un pays fertile, dont les habitants timides et désarmés sont incapables de faire respecter leurs ports la topographie des terres, les courants et les bancs qui interdisent de naviguer sans pilote. Les pirates n'ont que le choix, pour abriter
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leursjonques, entrelesbouchesdes rivières, les échancrures de la grande île d'Haïnam DU bien l'inextricable fouillis d'îles et de Rochers désigné généralement sous le nom
t.
'archipel de Fie-Tzo-Long
Toutefois, lorsque les croisières françaises eurent fait quelques exemples, les embouchures du fleuve Rouge ne leur parent plus assez sûres et ils leur préférèles côtes de l'Annam, au sud du golfe. ls trouvaient là d'excellents mouillages connus de nos commandants, et d'où ils Pouvaient remonter le cours des rivières, ans s'exposer à rencontrer nos canonières, pour dévaster des villages incaables de leur résister. Les côtes sont articulièrement redoutées des jonques de ommerce, et les habitants du littoral ont IlLémigrer à l'intérieur pour échapper au ligamdage et au rapt. ; L'ile- d'Haïnam est habitée par des peusauvages indépendantes des Chinois, dont elles ne tolèrent l'établissement sur le bord de la mer que dans la mesure des nécessités de leur commerce avec eux.
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des
1.
Excursions et reconnaissances.
Les bancs qui semblent obstruer li partie occidentale, celle qui regarde 1 golfe du Tonkin, n'ont pas été sondés a les pirates vont chercher, à terre de ce] bancs, des refuges où ils sont sûrs de ni
1 pas être poursuivis. Enfin, des Chinois condamnés à l'exil sont venus dans ces parages former des agglomérations et contracter mariage avec des femmes du pays; tous les bandits oni j bienvenus. les été Le long des côtes du Tonkin existent da milliers d'ilots verdoyants qui se succèdent sur une ligne non interrompue de près di admil milles de longueur et se prêtent 80 rablement à l'exercice de la piraterie groupe de Hao-Tao ou de Gow-To estmême L'ad connu sous le nom d'Ile aux Pirates. pect de ces îlots est tellement sauvage n'y aperçoit aucune plage sur les borda J aucun plateau sur les cimes. Tel îlot ne présente à l'extérieur ai toutes ses faces que des murailles à pic ( 60 à 80 mètres de hauteur, avec une seu crevasse qui, parfois même, fait défai L'intérieur est une espèce de chemina ronde et régulière, ou un entonnoir for.
qu'
par l'abaissement rapide des murailles vers le centre; le fond est une cuvette se remplissant et se vidant à la marée, tantôt à lir libre par la crevasse, tantôt à travers ine grotte à la voûte plus ou moins surlaissée, et tantôt encore par quelque canal iOuterrain. Il est de ces criques où les sampangs (embarcations du pays), les petites et [es grandes jonques, pénètrent à certains moments, grâce à la marée. Dans les frottes, où l'on est parfailement abrité et caché dance à la vue, où l'on trouve en abondes coquillages, du poisson et même lu bois, les écumeurs de mer peuvent camper U'aise. Mais, en revanche, il est il'autres refuges où il n'y a absolument rien, où il serait impossible de trouver un emalacement pour bâtir une maison. Pourchassés, comme ils l'ont été à certaines Roques, les pirates ont été forcés de se etirer là, et il était impossible de les uivre; mais ils ont dû ne pas se trouver à 'aise dans ces refuges, pour peu que leur léjour s'y soit prolongé, à cause du défaut l'espace, du manque d'eau, douce et de 'ivres. Ils en ont gardé le souvenir comme ant celui d'une époque pendant laquelle
ils ont enduré leurs plus dures privation Aussitôt le danger passé, ils se sont hât d'en sortir pour regagner les côtes même les îles plus extérieures. Le Tonkin, on le sait, n'a pas toujou fait partie de l'Annam. Il a joui autrefq de son indépendance, et cen'est qu'aY peine qu'il supporte le joug que ses vaii foi Aussi, bien lui imposé. des ont queurs a-t-il essayé de briser ce joug en se soul vant. Une de ces révoltes, nous l'avons di Franj eut lieu en 1858, à l'époque où la l'Annan et l'Espagne faisaient la guerre à pour venger lès injures que le roi de ni pays, Tu-Duc, avait infligées à leursépoi tionaux. Tu-Duc, n'étant pas de force résister à ses ennemis, ne craignit pas c recourir à un moyen digne de la plus vantable barbarie. Il fit appel à des merc naires du détroit et livra le pays révol à des hordes de bandits. Il s'adressa à des volontaires chinois, ai ciens insurgés des provinces qui, pendant d( années, avaient été en insurrectionconti le gouvernement de Pékin. Ce dernierava qui s'é taieii fini par triompher désrévoltés, dispersés dans toutes les directions. Ce I
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l'urto-ilraiidin<.!<;ÂťPa\illons-Nuirs.
bandes d'irréguliers tombèrent, pareilles des nuées de vautours, sur le Tonkin qui leur abandonnait Tu-Duc; à eux se joi gnirent les pirates du golfe du Tonkin. Du Nord, il vint des bandes de taë-ping: du Yunnan; du côté de la mer, ce furen des pirates de Kao-Tao et d'ailieurs des ra massis de gens sans aveu qui, accourus des ports du sud de la Chine, vinrent encore grossir leurs rangs. Tous ces aventuriers marchaient sous des bannières de diffé rentes couleurs, pavillons noirs, pavillonjaunes, etc. de là les noms divers qui leur furent donnés. Bien entendu, ces mercenaires, on ne les payait point ils se payaient eux-mêmes sur les pays qu'ils mettaient au pillage; puis, ces flibustiers s'emparèrent de villes à leur convenance, s'y établirent et s'y fortifièrent. Quand le roi d'Annam, Tu-Duc, reconnaissant l'étendue de sa faute, voulut se débarrasser de ces hôtes incommodes, il était trop tard. Les à s'étaient établis Pavillons-Noirs, les uns, Laokaï, petite ville sur le fleuve Rouge les autres, les Pavillons-Jaunes, s'étaient installés sur les bords de la rivière Claire, un des affluents de ce grand cours d'eau.
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la première est :eUe qui a fait le plus parler de ses agissenents depuis le commencement des hostiDe ces deux catégories,
ités. Les Pavillons-Jaunes, fatigués sans doute le leur vie d'aventures, cherchèrent à dvre en bonne intelligence avec les indigènes, qu'ils protégèrent même au besoin contre les attaques des voleurs et des banlits. On les vit se livrer au travail, et ce l'est que de loin en loin qu'ils commirent les déprédations. Ce changement dans leurs habitudes a permis de traiter avec eux, et c'est ce qui explique comment, dans le cours de la campagne où nos troupes sont engagées, la France a pu s'en faire des alliés, qui nous ont rendu d'incontestables services. Pour les Pavillons-Noirs, ils ont été intraitables, et il faudra que la France se résolve à les déloger de force des positions dans lesquelles ils se sont cantonnés, malgré les plaintes de l'Annam, trop faible pour exercer contre eux la moindre représaille. Il semble que d'après les informations qui arrivent du Tonkin, l'armée des Pavil-
Ions-Noirs comprend à la fois des trou f de terre et des troupes de mer, à suppos que la dénomination de « troupes », app quée à de tels flibustiers, ne soit pas tr; ambitieuse. En d'autres termes, les Pav Ions-Noirs se composent et de maraudeu opérant à terre, et de pirates, écumeurS la fois dejner et de rivière. Le terrain si lequel ils opèrent, ce sont les rives et 1 alentours du fleuve. Rouge; les eaux qu'i écument sont celles de ce fleuve, y compr le golfe où le fleuve Rouge vient se jete c'est-à-dire le golfe du Tonkin. Dans ces parages, la piraterie n'est pj organisée d'une manière fixe, comme c pourrait le croire, peut-être même n'y t-elle jamais été organisée de cette façoi c'est-à-dire avec des chefs reconnus et obéii des équipages réguliers, des arsenaux des magasins. Il semble que les compagnie se forment pour chaque expédition, parfoi en vue d'un coup déterminé, et qu'elles a dissolvent après le partagé du butin. Sa doute, il y a des hommes qui s'adonneri avec prédilection à ces sortes d'aventurer et certains capitaines s'y sont fait un renom mais on n'est pas, en général, pirate d i
Chdannamik.
profession. Le malheur est plutôt qued de Chinois, presque tous ceux, dit-on, d fréquentent les côtes du Tonkin, prenne] délaissent et reprennent ce métier, comi ils feraient d'un autre plus honnête, av une parfaite tranquillité de conscience sans encourir de réprobation. C'est surtout aux jonques de commer que s'attaquent les pirates, qui s'en pre nentaussi, mais plus rarement, auxjonqu de pêcheurs et aux jonques de bûcheron En général, l'usage qui a prévalu et q constitue comme une espèce deloi de guerre, loi respectée d'ordinaire, c'est gî les passagers d'une jonque capturée i subissent aucun mauvais traitement s'i n'ont pas fait de résistance on, pousi même parfois la délicatesse jusqu'à II débarquer à proximité d'un endroit où lJ seroi faire rapatrier leur de moyens se plus faciles. Mais si l'équipage a combatt on ne lui fait aucun quartier les homm sont exposés à tous les sévices et à tout les cruautés; les femmes et les enfants soi emmenés en esclavage. Quant aux jonques de pêche, elles s'a rangent pour ne pas conserver longtemfl
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bord les produits que leurs filets ont tirés du sein de la mer; dès qu'elles ont Lir cale à moitié pleine de poisson, elles mpressent de le porter au marché le us voisin. A ces jonques, ainsi qu'à celles li sont montées par des bûcherons, pirates se contentent de demander, sIon leurs besoins, des cordages ou des les victimes, heureuses d'en être vres littes à si bon compte, se soumettent tellement à ces réquisitions et ne portent
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mais plaimte. entre pite. s'est établi les pirates il reste, Li les habitants une sorte de convention Les objets capturés sont expédiés, mme si c'était une marchandise honnête courante, sur les places ordinaires de aimerce, à de gros négociants chinois
en font leur affaire et qui recherchent jidcment cette clientèle de pirates. Ce sont de véritables receleurs, et il y a itiauellement échange de services entre négociants et les pirates. In jour, une embarcation appartenant me maison d'Haï-Phong avait été assaillie large et conduite aux. îles de Kao-Tao 3 fut renvoyée presque aussitôt avec des
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lettres d'excuse et avec une belle iridemn pour lesfamilles des deux matelots tués se défendant. Les marchands s'emploie de leur côté à sauver les pirates qui vie nent à être pris par nos croiseurs. A chaq capture faite par les Français, la congrég tion chinoise ausé de tous ses moyens d'i fluence en faveur des gens livrés par noua la justice annamite.Si.nous inférons deJ dTIaï-Phoi chinois que les marchands sont tous, sans exception, des receleu d'habitude, nous ne nous écarteronsproK blement pas beaucoup de la vérité; nol connaissons suffisamment, par ailleml quelle est leur moralité. Est-ce à dire qu commanditent la piraterie ou qu'il se tro parmi eux de véritables, chefs de pirate OIin'a rien vu qui justifie pleinement cet imputation. navid On est tenté de s'étonner que la tion reste active, comme elle l'est, sous En somm pirates. continuelle des généraleme menace les jonques ne se défendant 1 ainsi de il danger pour peu pas, y a personnes. Quant aux risques matériels, i rentrent dans la catégorie de ceux qu'(
Lneeveoiti_.nJepirate;auToukin.
mer.«
comprend sous la dénomination généra de fortune de Dans le golfe même, le commerce Tonkin avec la Chine, celui de Pakhoï, Long-Moon et d'Um-Po avec IIong-Koi donnent lieu à un mouvement importai Lorsqu'une bande se croit suffisamme aguerrie, quand, d'échange en échang elle est parvenue à posséder une boni jonque de mer, elle se risque au loin. Les journaux anglais enregistrent prE que chaque semaine des actes de pirater qui ont eu pour théâtre les mers de ChiB il s'en commet un bien plus grand nomb dont ils n'ont pas connaissance. Les navir à vapeur eux-mêmes ne sont pas à rabri l'on est porté à se demander si l'on a raisc d'attribuer à des sinistres maritimes touti les disparitions de vapeurs quiont été co statées dans ces dernières Ilserait toutefois bien difficile d'établ la part proportionnelle des pirates d Tonkin dans l'ensemble de la piraterie qi désole les mers de Chine. Ajoutons que les principaux des pirate quand ils ne dirigent pas de leur personr tranquillement, vivent expédition, a une <
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années.
liilieu de leur famille et de leurs serviteurs, lin des villes et des autorités avec lesquelles faudrait compter. Ils ne s'enferment pas [ans des cavernes; leurs hommes, pas [avantage. Ceux qui veulent se livrer au ku. et à la. débauche trouvent à le faire [ans toutes les villes du Tonkin et sur tous es marchés; personne ne leur demande luiils sont ni d'où provient l'argent qu'ils lépensent. IL y a à l'intérieur des terres de véritables illages où les pirates habitent lorsqu'ils E sont pas en expédition. Un voyageur visité un de cas villages : les guides le irent Iles débarquer sur l'île de Sha-Pak-Wan Kao-Tao) et ils prirent avec lui umsen'L
courant entre deux haies d'arbustes pineux, avec des portes de distance en, istance, qui se trouvaient ouvertes, car 'était le jour. On déboucha dans des plantions soignées où se voyaient disséminées elques petites maisons. Plus loin, un tit sentier semblable au.premier conduis à la terrasse où s'élevait l'habitation chef : une jolie maison, bien tenue, avec e large, la véranda dominant un ravin Ler
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ivéparaissaiitfair-epartiedelapropuiété.
Nous avons dit que les pirates attaquaie] même des jonques de bûcherons. Le bi < effet dans est très rare en tout le jdelta Tonkin, cultivé en rizières, et on le f venir à grands frais des montagnes, par annayas qui se déversent dans les prin paux bras du fleuve. Malgré le danger courir, la tentation est grande d'exploit les îlots de l'archipel .recouverts de en bas d'arbustes ou même d'arbres q suffit d'abattre pour lesfaire rouler jusqu'
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rivage.
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Deux exemples montreront à quell avanies sont exposés les pauvres gensqui risquent à cette exploitation. Un jour la Surprisé traversant l'archi des Fie-Tze-Lang, rencontra un sampsii d'où partaient des appels. Deux hem le montaient. Ils racontèrent que, depil unequinzaine de jours, ils suivaient à tance une petite jonque de pirates, ala masquée par un îlot qu'ils indiquèr Ces pirates leur avaient pris leurs fentm parce qu'ils en manquaient -eux-mê absolument, avaient-ils dit, et ils avai fait la promesse de les rendre après leu: expédition. La Surprise trouva la jonque
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dont l'équipage, composé d'une dizaine d'hommes, sauta à terre et ne put êtr( rejoint. Tout auprès, un sampang étail amarré avec les deux femmes elles juré rent d'ailleurs qu'on les avait employées exclusivement à la cuisine. Une autre fois, se présenta au consulat dHaï-Phong le patron d'une jonque de bûcherons, un jeune Chinois que des pirates avaient assailli au mouillage de Dô-S'on, à l'entrée même du Cu'a-Cam ; ils l'avaient dévalisé de ses provisions, de ses effets et d'une partie de ses cordages. Il connaissait leur chef et s'offrait à montrer la maison qu'il habitait à la Càc-Bar et tint parole. Une canonnière ramena le lendemain l'homme qu'il avait dénoncé; et qui niait, malgré des charges, accablantes. « Nieras-6u„ s'écria tout à coup le patron en saisissant sa chevelure nouée en queue, nieras-tu que les cheveux que voici ne soient ceux de ma femme que toi-même a coupés? » Aux pêcheurs et aux bûcherons, il est vrai, les pirates ne demandent guère que d'assurer leur subsistance les jonques de
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larchandisessont les proies qu'ils convoiiiit. Lorsque Tu-Duc, l'empereur d'Annam, lnlut se débarrasser des forbans qu'il* vait appelés à son secours, ceux-ci étaient 'autant moins disposés à déguerpir qu'ils vaient imaginé une autre branche de tmmerce, ou pour mieux dire une autre ranche de piraterie fort avantageuse l'Annam de spéciale côtes aux our eux, t du Tonkin et ayant des conséquences virement désastreuses, à savoir le trafic t la vente d'enfants annamites. Avant 165, la femme annamite était à peu près iconnue sur les marchés de Chine. Les remières amenées se vendirent à vil prix n ne voulait pas, dans les familles aisées, e sèrvantes aux dents noires, comme on ualifiait les malheureuses, à cause de usage qu'elles font du bétel. C'était à époque de la grande insurrection du onkin; les pirates, encombrés de prisoniers, tenaient absolument à s'en défaire. ls imaginèrent de coiffer les hommes à la kinoise et de les livrer aux agences d'émiration qui recrutaient des travailleurs eur les îles de guano du Chili. Ils cédèren
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les femmes et les enfants pour si peu chose qu'ils finirent par les placer. Le malheur c'est que de cette façon, • créèrent un précédent. Dans la préfectu de Liêu-Châu limitrophe du Tonkin, n'est pas aujourd'hui de maisons où l'i ne rencontre une ou plusieurs femmes cette provenance, et l'on dit qu'elles vendent très bien, pourvu qu'elles aie été dégrossies. Souvent, elles font l'offi de simples servantes mais quelquef< aussi, elles tiennent la place d'épouses second. La femme légitime, quiredout
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rait l'introduction d'une égale dans ménage, accepte plus volontiers uneétra gère d'une race qu'on regarde comr inférieure et d'une condition plutôt abai
sée. Elle est à peu près certaine, en ce ce que cette concubine ne lui fera point1 tort, et que les enfants qui en naîtront disputeront pas l'héritage à ceux du pi mier lit. Pour bien nous expliquer, disons que polygamie est dans les mœurs du pays. Ajoutons que la Tonkinoise. est doue laborieuse, peu exigeante. Elle a su faire apprécier et se vend bien maintenan
ussi les pirates se sont répandus dans les illages les plus excentriques et ont annoncé u'ils achetaient les enfants et les jeunes !mmes. Alors, un nouveau genre de crime evint promptement le plus grand fléau de l contrée: le trafic et la vente de femmes t d'enfants annamites. Tous les moyens Bvinrent bons aux pirates pour prendre Issession de leur proie et ils ont embritidé des voleuses d'enfants. Des mégères à leur solde parcourent pays; elles accostent les jeunes femmes ouvres, en quête de travail, et sous hétexte de leur procurer une place, elles d'autres fois, is mènent à l'acheteur sont les femmes elles-mêmes qui, enlaînées par leur passion pour un jeune fétis, né de père chinois et de mère annatite, croient aller à un rendez-vous d'atour. Dans les deux cas, le résultat est le f
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ême. Pendant qu'on les conduit à la jonque 1 mer, sur laquelle on va les embarquer les emmener en esclavage, on a soin de ur faire prendre, mêlée à leurs aliments, aelque poudre qui les endort; le plus ornairement, ce sont des chiques de bétel
imprudent que les malheureux acceptent ment, sans songer à mal. Aux enfants 01 fait avaler la même poudre dans du ri sucré. Sur les jonques, un compartiment du posé tout exprès, compartiment clos aVI soin, est installé pour les recevoir; lesrU times restent là jusqu'au jour du dépari La déposition d'une jeune servante du vil lagede Traly, enlevée d'une façon barbari puis délivrée avec ses compagnes, par ui bâtiment français, le DUCQuëdic, a four. de curieux renseignements sur la vie: bord de ces jonques de pirates. Cette jeun fille servait chez des Chinois. Mais eU ignorait que ses maîtres pratiquassent 1| piraterie. Elle avait bien remarqué que l maîtresse de la maison portait souvent d~ plats de riz, de ce fameux rix prépaij qu'ell dont nous parlions tout à l'heure amarri les portait, dis-je, à une jonque pou au rivage. Elle s'arrangea un jour descend! porter le plat elle-même. Elle dans la cale. Mais, à peine entrée, le coii vercIe du panneau par lequel on l'avaj fait descendre se referma sur elle; la mal heureuse était prisonnière avec d'autrf
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filles qu'on avait sans doute recrutées d'une manière à peu près semblable. Une fois que la jonque est en mer, les patrons trouvent inutile de continuer les précautions, et ils suppriment pour leurs captives l'usage de poudre stupéfiante qui les
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avait plongées dans l'assoupissement. Les femmes au teint hâlé, appartenant en général à la classe la plus misérable, lui ont été mal nourries, qui sont sauvages malpropres, ne se vendraient pas avantageusement si elles n'avaient pas été dressées au préalable. Cette opération1 se pratique sur la frontière, du côté de MonLay, à Hakoï, et en général dans les villages duTonkinentièrementhabitésparles Chinois. L'autorité annamite n'oserait s'imEiscer aisons.dans ce qui se passe à l'intérieur des On n'a pas de renseignements sur les méthodes employées pour refaire à la phinoise l'éducation de ces malheureuses. ,,"près un stage plus ou moins prolongé, probablement selon leurs aptitudes, on les Iait entrer dans un lot qui s'expédie en Phine. On -divine quel peut être le genre
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1.
Excursions et reconnaissantes.
d'éducation qu'on leur donne, en vuqi métier auquel on les destine. 3 Les filles encore jeunes, quand surt leur beauté promet et qu'on peut esm de les vendre un jour un bon prix, élevées avec un grand soin. Ce sont Igfl suj ets de choix que naguère encor^ expédiait, jus q u'au delà de Canton, CÀ côté; de l'autre jusqu'à Cholon etSin^ poure pour les maisons de prostitua Quelquefois les marchands chinois, CHMÎ Tonkin, entretiennent un ménage à di annamite, en gardent auprès d'eux qu ques-unes, pour leur usage particulier
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Un jour, en 1880, à Haï-Pho-ng, pql découvrit une vingtaine de ces fillette^ chées dans des paniers, dits paniers""Õ¡j chons, sur le pont d'un vapeur anglai-
allait appareiller pour Hong-Kong.. cochons du Tonkin sont fort estimé; comme chacun sait, et l'on en fait ui grande exportation. Lorsque la travers^ doit être longue on enferme ces animaul les pattes attachées sous le ventre, dag les susdits paniers, dont la forme est biIÏ connue, -et que les douaniers ne se tloi y d'ouvrir. général la peine nent pas en
J;iune.
Heine
le sur \upcur
à Canonnière
Chinois quiconnaissait cette circonstancj avait essaye d'en tirer partie pour sor infâme lO(¡mme.rce Il a fallu un hasard pour mettre sur h trace de la vaste exportation de femmes e d'enfants volés qui se fait du Tonkin et dl l'Annam pour les ports de la Chine. Uni canonnière française, la Jlassue, avait cap turé, près de H&koï, une jonque don l'équipage fut aussitôt transbordé. Tout i coup, tandis qu'on était en marche, ur officier marinier qui s'était avisé de visite] Ja cale, crie à l'aide. En soulevant ur
panneau, ilavait cru apercevoir toute unE nouvelle bande. Cette bande se réduisait i un seul inGtWidu, couché le pistolet ai poing, sur en véritable entassement humain. D'une chambre, où il ne semblai: pas qu'on pût tenir dix personnes, on tin successivement, après le pirate, quaranti femmes ou enfants, demi asphixïës: des qu'on eût tardé, tous ceux pour peu couchesinférieures-auraient cessé de vivre. On ne Jesavait jetés là qu'au moment OL la Massue allait aborderlajonque, mais lef souffrances de ces pauvres créatures dataient de plus loin : la traversée s'étail
à
prolongée plus qu'on ne pensait, les vivres manquaient depuis plusieurs jours, des enfants avaient déjà succombé, les femmes à peine couvertes, quelques-unes dans un état de nudité complet, étaient d'une maigreur horrible à voir. Ce qui se passe au également Cambodge. Fonkin passe au se Les pénéfrançais explorateurs ont pu trer jusqu'au centre du commerce d'eslaYes. Ils ont vu des-barques chargées de e triste-bétail humain descendre la rivière uLconduit au Cambodge. M. de Carné,, qui a été un de ces explorateurs, a décrit ces scènes attristantes. Les malheureux captifs, a-t-il dit, pa-lissaient plus accablés encore par doules étaient fers dont ils chareur que par gés. Dans les- sentiers de leurs forêts, plus léger bruit, uya-mt au comme des llaims sauvages, tapis comme des bêtes auves au fond de leur hutte de bambous tremblant à notre vue, ils semblaient, it la.s l'échelle des êtres; plus rapprochés brute que de l'homme. Ici, au conimmobiles dans leur étroite prison iante, laissant errer au hasard leurs Egards mornes, ils portaient, empreint
la
la re,
sur leurs traits, ce caractère de nobles; qu'un malheur irrémédiable profondénylJ senti imprime partout à la figure humai Il y a encore, hélas! au Cambodge,p( ainsi dire à l'ombre de notre pavillon marché public d'esclaves; mais le Sa bodge, actuellement, n'est que sousjfl protectorat; nous devons user de gjn ménagements et nous ne pouvons oftiB que du roi lui-même la suppression l'odieux usage consacré par les siècloûi Les esclaves faits par les Pavillonssont des sauvages. On les prend au ! poursuit retraites -coq les. leurs dans on des bêtes, on les chasse à travers les puis on les enchaîne et on les condui les marchés du Laos, de Siam ou
j
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bodge. Un esclave sauvage vaut 800
tandis qu'un Cambodgien n'en TH 500, et un Annamite 200. Les jeunes filles qui sont atteignent un prix très élevé, luxe. dérable que celui des éléphants de Ajoutons que les bandits qui font chasse à l'homme redoublent de cruau lorsqu'on leur oppose de la résistance.
"aussi très
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K[iou>antablc massacre au Tonkin.
Ils font subir à ceux qui essayent de les combattre les plus cruels supplices lorsqu'ils parviennent à s'en emparer. Ils vont de village en village, partout où il leur plaît d'exercer leurs déprédations. Si les populations s'arment à leur approche, ils brûlent, pillent, massacrent, commettent des crimes sans nombre. « Ordinairementt, à l'approche de ces vautours, de ces tigres,, tout le monde s'enfuit; on cherche du moins à sauver de leur cruelle rapacité les femmes et les enfants. Mais souvent les pirates ont dressé des embuscades; le village est cerné et il arrive que ces pauvres gens, en fuyant les griffes du tigre, tombent sur les cornes du taureau. On connaît la destinée des mal-
heureuses victimes. Quelquefois, si les parents des capturés sont riches et s'empressent d'expédier on émissaire au lieu où les pirates gardent leur proie, à force de prières et à coût d'argent, ils parviennent à les racheter; mais s'ils tardent, si la jonque a mis à la «
Extrait d'une lottre de Mer Cololner, vicaire apostolique du Tonkin (1813). 1.
voile, les pauvres pères, les pauvres maris ont perdu pour tou j ours leur fille 'bienaimée, leur chère épouse; ils n'ont plus
qu'à pleurer. ». 1 Les mandarins de Tu-Duc, au Tonkin, n'ont rien tente pour faire cesser un semblable état de choses. De temps à autre, sous prétexte de lever des troupes pour faire la guerre aux pirates, ils frappaient le peuple de souscriptions forcées, fixaient eux-mêmes le prix de cette souscription, que leurs émissaires allaient recueillir de force chez les habitants, qui vendaient tout ce qu'ils possédaient après quoi, les mandarins se partageaient le montant de la souscription et se gardaient- bien d'armer un seul homme. Les Chinois, à vrai dire, ont, eux aussi, leur grosse part de responsabilité dans ces crimes. Ce sont eux qui font le trafic infâme des esclaves; ils ont des courtiers qui viennent sur les côtes du Tonkin recevoir livraison de la marchandise humaine, qui se vend en Chine au marché public. Ces courtiers aident les Pavillons-Noirs dans leur œuvre abominable ils inventent, comme des chasseurs adroits, des pièges
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nouveaux, ingénieux. Ils se servent du pavillon de leur pays pour mieux tromper leurs victimes. C'est ici qu'apparaît réellement la mission civilisatrice de Francis Garnier. Détruire ou disperser les Pavillons-Noirs, c'était une partie de sa tâche; il ne manqua point de la bien remplir. Mais les pirates, menacés de perdre leurs moyens d'existence, se groupèrent et se il fallut donc leur livrer de fortifièrent sanglants combats.
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CHAPITRE SIXIÈME LA
MORT DO£;.:\ HÉROS ET L'ABANDON" DU TONKLN
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Marche en avant. — Une expédition de vingt"pt hommes. — Comment ayec cette troupu MM. Bainy d'A\ricourt, Trentinian et Harmand prirent d'assaut les six forteresses du Tonkin. — L'aspirant Hautefeuille. — Francis Garnier continue ses exploits. — Les Tonkinois l'accueillent comme un libérateur. — Lutte contre les PaÜllons-Koirs. La défense d'Hanoi. — Un guet-apens Mort héroique de Francis Garnier. et une trahison. — Mort de Balnv. — La mission Philastre et l'abandon du Tonkin.
Soiïtmi're
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Sachant qu'il avait autour de lui les Pavillons-Noirs, que l'occupation d'Hanoï ne suffirait pas pour assurer la liberté de nos transactions commerciales; prévoyant que les Annamites, mis en fuite, reprendraient l'offensive aussitôt qu'ils se rendraient compte du petit nombre des combattants français, Francis Garnier comprit qu'il ne pouvait laisser de citadelles aux mains de l'ennemi, entre lui et la mer, et il résolut de s'assurer les villes fortes du delta du Tonkin.
Le 23 novembre, il envoya donc er reconnaissance vers les bouches du fleuvi une de ses canonnières, l'Espingole, soui les ordres de M. Balny d'Avricourt, avei quinze fantassins commandés par le lieui tenant de Trentinian. Le docteur Harmand) médecin de la marine, leur avait été adjoint] Dans l'espace de sept jours, ces vaillant*
reçurent la soumission du gouverneurd4 Hung-Yen, capitale de la province de ci nom et s'emparèrent la forteresse d
soldats.
Plra-ly, -défendue par mille Devant cette citadelle, nos troisofncieri se présentèrent avec les vingt-sept hommes ils donnèrent di dont ils disposaient minutes pour qu'on leur ouvrît les portes; d'homm Le délai écoulé, cette poignée monta à l'assaut, gravit les parapets de la fortification entourée de marais, à travers lesquels tonte la garnison épouvantée s'en plus fuit. Les Annamites se Douchaient dan d'eau pour éviter nos balles ; on alla en chercher plusieurs quelques heures tard: ils étaient couverts de sangsues, Après avoir reçu la soumission desautorités, installé un nouvel administrateur et laissé trois sentinelles à la garde de
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la forteresse, on continua la marche en
avant.
Le 1er décembre YJïspingole vint mouiller devant -Haï-Dzuong, ville occupant une position stratégique d'une importance
considérable, puisqu'elle commande la principale route d'Hanoï au golfe. Elle était défendue par plusieurs forts et une citadelle bastionnée, garnie de nombreux canons et entourée d'un fossé large et profond. Ces fortifications étaient l'œuvre d'ingénieurs français qui les avaient éJe vées jadis pour protéger l'intérieur Tonkin contre les pirates. Une bordée de coups de canon lâchée parle fort accueillit La petite troupe; mais nn cinq minutes M. de Trentinian s'empara dela position et s'élança vers la forteresse. Il escalada les murs du redan qui protégaient la porte, sous le feu d'une pièce chargée à mitraille qui fit quatre Fois feu sans atteindre un seul homme. Les assaillants arrivent en face d'une ftorteénorme qui résiste aux coups réitérés de la hache leur-position devient critique Ils allaient battre en retraite, lorsque le elocteur Harmand, par une heureuse ins-
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piration, tira un coup de fusil sur les bq ! apercevai lesquels à reaux travers on lances des défenseurs. Un de ces barreaux vola en éclats; J autres furent aussitôt brisés avec et la petite troupe sauta par cette tandis que les Annamites se sauvaienfad jetant leurs armes. Pendant ce temps, un aspirant demain M. Hautefeuille, monté sur un canot, jg courait les nombreux bras du fleuve détruisait les barrages élevés par les ~a mis, et le 5 décembre arrivait Ninh-Binh, capitale de la province aciS défendue forteresse nom, par une de quarante-six canons, et gardée dix-sept cents hommes. M Au moment d'aborder, le canot la chaudière éclata tandis que des mâ ciens accouraient sur le rivage pourÉ pousser nos soldats. M. Hautefeuille, de vingt ans, laissa son embarcation afl à la dérive, sauta dans un canot, à terre et débarqua avec cinq Françai deux volontaires de Saïgon, drapeau * tête et baïonnette au canon. Près de la porte de la citadelle se tenai
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un mandarin. L'aspirant courut sur lui, le saisit au collet et l'entraîna dans m bâtiment voisin. Là, il lui déclara qu'i venait pour assurer la liberté de la naviga. tion que, pour cela, il lui fallait la cita délie avant un quart d'iieure. Comme lemandarinhësi ai Hauteftandil euiïL lui plaça son revolver sur le front, l'drII,J hommes, que notre armée de sept en joue sur le seuil, tenait les Atimmite1 à distance. Tremblant, le commandant de la place, car c'était lui, signa la capitulation; le drapeau français fut hissé sur la citadelle ; ci mandarins, fit prisonniers les autres on alorslintrépide officier, avec trois nommes, alla faire le tour des remparts, passant devant les milliers de défenseurs rangés à genoux, les armes à terre. De tels exploits sont invraisemblables, disions-nous dans notre préface; pasun de ces détails cependant qui riesoitscrupuleusement exact et on peut imaginer aisément quels furent les immenses périls affrontés par nos De son côté, après avoir confié à M. Bain la garde de la citadelle d'Hanoï, Francis
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marins.
rnier descendait le cours du fleuve sur la nonnière le Scorpion et s'emparait, lui 5si, malgré la plus vive résistance, des rts qui entravaient le passage.. Quand il arriva.. à son tour devant Ninhnk il éprouva une grande joie et une ande surprise envoyant notre drapeau .tLer sur le haut des murs, en s'entendant Luer pur les canunc de la place. près avok félicité Hautefeuille il le
tssa pour poursuivre son expédition dont l trouve l'exacte narration dans le jour:1 de Dupuis. Sansperdre une heure, Garnier,deininlifeth, se-dirige sur Nam-Dinh Il enlève les lis forts qui en défendent l'entrée, puis. rive devant cette ville, acclamé par les pulations qui se pressent le long des es. Cependant la citadelle ouvre le feu Scorpion, un boulet atteint le mât misaine et enlève le paratonnerre. FraiiGarnier envoie l'aspirant Bouxin, avec iaaze hommes et une pièce de quatre, Jiulre une attaque sur la porte du Sud, dant que l'ingénieur hydrographe Bouildoit colonne, pénétrer autre avec une l'
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dans la ville marchande, pour en cha toute bande ennemie. Francis Garnier débarque ave marins vers la porte de l'Est et joint bientôt par M. Bouillet. On du redan puis, après quelques d: Francis Garnier avise des chevaij à l'aide desquels il escalade le la vue des Français, les Annamites précipitamment la place. De notre plusieurs blessés, dont un officier. Nam-Dinh étant pris, Garnier y j M. Harmand comme gouverneur lui avoir donnéseulement quelques 4 de vive voix il devait cherc. ser la province et à former unei Pour surveiller une province deux millions dhommes, M. Ha posait de vingt-cinq soldats. De tous côtés aussitôt, les WU envoyèrent leur soumission. Lu de la plus grande partie du Toi dure que quelques jours. Garnier et ses lieutenant alors des milices tonkinoises à battre l'ennemi, lequel lj Bac-Ninb.
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Lorsque ces milices hésitaient on lîsi envoyait du renfort,, deu-x ou trois solitaJ français, et elles, ramenaientaussi em rage. Les indigènes manifestaient haute. leur joie, car en réalité on lesdébarrassai de leurs oppresseurs et ils savaient fu* l'ombre du pavillon français ils pourraiej jouir de la justice, de la liberté et de 1 prospérité commerciaJÊS-Mais,peuraclievi la pacification du. Tonkin, il fallait sou mettre la région supérieure jusqu'au del de Son-Tay, où se trouvaient les postes d,
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Pavillons-ojrs.
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La ville de Son-Tay, capitale de la vince située au nord-ouest d'Hamoï, étai prÎM annamite-, le occupée par ungénéral Hou:" qui y avait réuni des foret
importaœutes. DLipma aivait vivement engagé Garnier i
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s'emparer de cette ville, qui conm-antla le cours du fleuve, et à se rendre maître générai, re- sedL tmame. capable de ralM les forces anwmlieB" et d'opposer unerésit taace sérieuse.. Mais le commandait çais était resté sourd a ce conseil et avai préféré porter tous ses efforts d'abord dan
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Delta, où le réclamaient les missionlires, menacés dans leur sécurité. Pendant qu'il opérait dans ces provinces, détachement laissé à Hanoï pour la fotectiun de la contrée avait tous les 1ITS des escarmouches avec les soldats de Tay. Ludace de ceux-ci s'accrut avec ur impunité leur nombre grossissait tous d'un s'emparer parvinrent à Ils jours. s ttit fort mal défendu par trop peu kommes et dont la possession leur perit d'attaquer la garnison d'Hanoï. Les bandes des Pavillons-Noirs, après oir incendié et semé la terreur dans la titrée environnante, se décidèrent à un nd combat. La garnison, composée une poignée d'hommes, dut, avec l'aide Dupuis, accomplir des prodiges de leur pour repousser l'attaque; le chef incipal fut heureusement tué au début de
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l'aire. n purtait des habits de soie magnifiques. Itait un ancien pirate à qui les Annales avaient promis une somme consibtkle pour nous combattre. Après sa rtses troupes furent assez aisément disjsées par nos obus, mais les rares soldats
d'Hanoï n'en restaient pas moins expos ! aux plus grands périls. Le 18 décembre Garnierayant achj son voyage militaire revint dans cette vil Il prit aussitôt, de concert avec Dupq les mesures nécessaires pour marcher s Son Tay, où se trouvaitl'armée annam Pavillons-Noirs, les grossie par On allait partir lorsque, le. 20, ij ambassade arriva de Hué, proposant paix au nom de Tu-Duc; acceptant les c< ditionsfrançaises et l'ouverture du Ton! au commerce et à lanavigation. Garni heureux de cette solution, aussitôtann cer un armistice - dans une proclamati Le lendemain, le dimanche, 21-J discuj il cembre 1873, dans l'après-midi, la citadelle avec les ambassadeurs les prélimina dutraité, lorsque, soudain, attaquée. C'était une nouvelle trahison. Annamites. On courut aux armes. —Bon courageJ mes braves, ce ne i rien ! s'écria Garnier, en postant lui-mj lequel marins le rempart vers sur ses çaient les - Pavillons-Noirs, 'bannière parvi l'aide du canon on ployées. Avec
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repousser les assiégeants qui se réfugièrei derrière une chaussée en forme de rêrt blai, à 1,200 mètres de la forteresse. Notre commandant,inquiet de les voir près et craignant une surprise pendant eut nuit, résolut de les déloger. Il envoya son lieutenant Balny d'un et sortit en même temps de la citadell avec un canon, dix-huitfrançais êt quelque volontaires indigènes, les clairons sonnarl la charge. La colonne prit le pas de course à tm lesquels dans des champs le canoi vers s'enfonça. Garnier, le revolver au poing, criant ni enfants, l avant En avant mes en « » près de 2 kilomètres en murait, et ait" gnit le remblai derrière lequel s'afrriiâil l'ennemi. Au moment ou l'escalada, hommes seulement se trouvafent près' 41 lui. UM" décharge les ttuciHit;: le Degame tomba frappé fru-fte HMiie Ifl trifiie, le caporal Guérin fut effïeu'ré' tempe,..le troisième soidistrecula.Fiais-,eftfl Ou ne-le saura-jamais miaiifl pas&a-t-il? se 1orsqu#- autres combattants affwèrfcflii! ils trouvèrentfeur commandant percé1éi 1
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PavillonsLes décapité. lance de et juups oirs s'étaient enfuis, emportant sa tête omme unJLrophée. missiondepuis écrit CVst ainsi, un a « iaire catholique, c'est ainsi que succomba, 'ictime de son impétueux courage, le chef le cette expédition si habilement conduite. 1 n'avait certainement été guidé par au-
qu'il personnel. Ce d'intérêt mutif a :UIl accompli, ce qu'il a souffert, c'est par pur jatriotisme et pour l'honneur de la France. inii souvenir vivra, non seulement dans le :œul' de ses amis et de ses compagnons armes, mais aussi dans celui de ces popu(lion" loble honnêtes qui ont su apprécier le dévouement dont il était animé à Sur égard. » Pendant que Garnier tombait sous les touprf des Pavillons-Noirs, Balny, à la tête l'une escouade, se portait sur le flanc des Chinois pour les prendre à revers. Ceux-ci, Parvenus à 3 kilomètres environ de la citaelle, s'étaient retrancliés derrière une levée e terrain. L'officier, ne voyant plus perenne, divise ses hommes pour faire une attue dans lestouffes de bambou. On lui fit alors que son fourrier a disparu; il
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bondit sur les retranchements des bandil espérant le secourir, et à son tour est t à bout portant. Ainsi périrent et le lieutenant et le ch< ces héros, l'un, le colonisateur, doué de plus vaste et la plus noble intelligence, tous les courages et de toutes les vertus. Que leur mémoire soit honorée Cette fatale journée avait coûté la vie deux officiers et à trois hommes. La peU garnison de la citadelle faillit céder au d| couragement. Un instant l'officier à q revenait le commandement eut l'intenti de se retirer sur les navires, mais Dupu décii l'en dissuada avec énergie et il fut en conseil que la citadelle serait défendi] jusqu'à la dernière extrémité, jusqu'à vie du dernier homme. Le lendemain, Dupuis se rendit aupn du cadavre de Garnier qu'on avait ra porté. Il a ainsi raconté cette lugubi visite ttii milieu des Il deux marins. est au « d'horrible comme ces cadavres sans têt Ils sont là, étendus sur la paille, tels quï] ont été apportés hier soir. M. Garnier a 1 ramen celui bras droit écarté, de gauche
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le long du corps
le pied droit est chaus chaussel
d'une bottine, l'autre n'a qu'une blanche. Ses vêtements sont en lambeau le corps est couvert de blessures faites pl les sabres et les .lances. La poitrine i ouverte, le cœur arraché. et la peau bas=ventre enlevée L.. Les deux mains soi crispées. Je lui serre pour ladernière et bien fortement sa pauvre main dro glacée, en lui jurant qu'il sera vengé.» Oui, certes, il l'a été, mais trop tard. Toutefois, malgré ce terrible malbed ia conquête du Tonkin ne fut point abai donnée. Le 25 décembre, une canonnière amerj à Hanoï une compagnie d'infanterie marine avec des vivres et des munition Cet important renfort rendit courage] tous. D'autre part, les détachements envoy L' dans le Delta continuaient leur œuvre. disperj pirant Hautefeuille avait batlu et les insurgés, pacifié toute sa province. < jeune homme,presque un enfant, s'acquij marchai de mission glorieusement tait sa s'étaj il commandant; de les traces son sur fait aimer .de la population tout enière 4
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et
avait en lui une aveugle confiance. De leur côté, M. de Trentinian, à HaïDng, organisait militairement les Tonlois, et le docteur Harmand se faisait acmer par les habitants de la contrée à confiée; dans l'importante province INam-Dinh l'ornre régnait. Partout on portait aux représentants de la France [ témoignages de reconnaissance et de vouement. \insi, en moins de deux mois, quelquesdes nôtres avaient conquis, pacifié ce fcple de douze millions d'habitants. In ne sait ce qu'on doit le plus admirer lis ces hommes qui, bien réellement, ont des héros ils ont fait preuve non seuilent de bravoure et d'énergie, de science de volonté, mais encore d'un admirable die d'organisation. Et cependant il se trouva des Français i osèrent écrire que Francis Garnier avait lé et s'était enrichi au Tonkin. Après sa trt, iélas on trouva dans sa chambre un ses effets et quelques piastres. les haines politiques font oublier ime l'honneur de la patrie, et le funeste if.tre de Broglie, qui, au monfent de la
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mort de Garnier, s'occupait d'asservir France républicaine, de livrer des comba Brogl à l'intérieur, le gentilhomme de ne voulait point entendre parler des gl rieux faits d'armes du Tonkin. Rien n'était perdu, cependant, renfort nous répétons. Après l'arrivée de nos ambassadeu à la fin de décembre 1873, les annamites reprirent les négociations inte M. Bain, puis M. Esmez après lu rompues ayant pris la direction des affaires civile un traité fut convenu qui ouvrait le fleui Rouge à la navigation, donnait au co merce toute liberté et proclamait le prote torat de la France sur le Tonkin. Le but était atteint, le traité allait êti signé, Tu-Duc, souverain de l'Annan s'inclinait, les populations nous étaie attachées, il suffisait de se maintenir sur non terrain conquis avec une garnison peu comn apprit ce fut Soudain breuse. on — q ministère le foudre de un coup — que Broglie désavouait l'œuvre de Garnier coi tinuée par ses lieutenants'.
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IOngtemj 1. Ce même ministère refusa pendant d'accorder une pension à la veuve de Garnierl
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rou lie.Dclui-qui'inciit
Un officier français nommé Philastj yint au Tonliin 4 son tour avec l'intent
d'empêcher qu'on continuât l'œuvre coflj mencée. Il avait reçu cette missionPhililst. du mj nistère nouveau. En arrivant, Y. coula une jonque chinoise, venue sur 1 foi des traités pour faire du commerça fit pendre d'inoffensrfà matelots chinois odieuse exécution qui nous valut la hçûnj de nos
allié.
Puis, aussitôt qu'il eut reçu ses pouvoir» M. Philastre, malgr-é toutes,les représentai tions qui lui furent faites, duima rofdrj d'âvacuer les provinces occupées par noi troupes et de quitLer lescitadellas. Eu quelques jours fut perdu le. prufit d la plusadmirable expédition qui jamaij ait ét&faite, et on vit s'accomplir, grâce au hommes d'État 4'"alors.Lquine rêvaient qui le rablis.s.eme.ç¡.t de. la monarchie, une re; culadeinexplicable, inutile, honteuse. les Etaussitôtlesmandarins annamites etlevé] Pavillons-Noir^, reprenant courage, se J rentenmasse recommencèrent lutte. Nous ne saurions dépeindre l'humiliation de nos héroïques combattants cqntraint d'abandonner une à une les citadelles si
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aillamment emportées, et de s'enfuir en [uelque sorte, eux vainqueurs, au milieu les risées de nos ennemis.
Les pirates et les soldats de Tu-Duc j-e-
irirent donc l'offensive. Pendant plusieurs ours, a écrit M. Romanet du Gaillaudj le lot destructeur se répandit au loin, portant :n tout lieu la terreur et la mort. enfants eux-mêmes - « Les femmes, les l'étaient point épargnés. Traqués comme les bêtes fauves, les chrétiens cherchaient sn vain un refuge dans la fuite le carnage ;t l'incendie les poursuivaient de village en
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village.
révoltés ne devaient s'arrêter qu'après avoir détruit les plus belles installations faites par les catholiques, massacré un grand nombre d'entre eux et dispersé Les autres, sans abri, pans ressources dans les montagnes: C'est chrétienprincipalement les sur « tés évangélisées par les missionnaires français qu'ils s'étaient jetés avec le plus d'acharnement. A vrai dire, les missions espagnoles de la province n'ayaient pas non plus été ép.al'gQée; vingt de leurs églises avaient été brûlées, et les villagesy.atter « Les
nant, détruits et mis à sac. Les mission naires eux-mêmes avaient vu leurs propre résidencesmenacées. Quant à nos partisans, à ceux qui avaien accepté des fonctions des mains de Garnie] d ou même qui étaient seulement suspects re sympathie pour notre cause, ils furent cherchés, égorgés, et eurent leurs biens pillés, leurs maisons incendiées. Et M. Philastre laissa se consommer sous n'ayant pas monstruosités, ses yeux ces même un mot de pitié pour ces malheuJ prendre Qu'avaient-ils victimes à reuses « le parti de Garnier contre leurs mandarins? » se contenta-t-il de répondre aux plaintes et aux prières qui lui furent adres-
»
:
sées.
On a calculé que, dans ces fatales jour-
nées, vingt mille indigènes furent massacrés, soixante-dix mille chassés de leurs foyers ou dépouillés de leurs biens, trois cents villages brûlés. Tu-Duc, pour récompenser le chef des Pavillons-Noirs, le nomma mandarin. Un détachement de nos troupes se battait victorieusement contre les bandits; M. Philastre lui donna l'ordre de cesser les hostilités.
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Alors les cruautés redoublèrent. Des préfets et-des Bous-préfets indigènes, par nous choisis, forent saisis et enterrés vivants dans toute la province, des massacres horribles. N-otre drapeau, pendant une nuit, fut déchiré sur la citadelle d'Hanoï M. Philastre ne parut pass'occuper de cette injure mais là ne devaient point se borner ses actes. Le 6 février, M. Philastre et l'ambassadeur annamite firent un traité réglant les condition-s de' l'évacuation de la citadelle d'Hanoï, dernierpoint occupé par lesFrançais. Il fut stipulé que, jusqu'à la conclusion d'un traité définitif, nos troupes se retireraient à Baï-Phong, et y conduiraient égalementJesnavires de M. Dupuis; qu'en cas chasseraient de r-efus de sa part, elles du ToiiUn; que ce dernier ne pourrait remonter au Yun-Nân qu'avec la permission des autorités;-qu'un résident français pourrait s'installer à Hanoï, avec quarante hommes, etc. Voilà J& convention qui remplaça le traité si honorable que M. Eemez devait conclura
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avec les ambassadeurs annamites, lorsqu'il en fut empêché par un ordre émanant de
Pliilastre. Deux jours après, pendant que M. Dupuis était allé à Saigon plaider devant le gouverneur sa, cause, celle de nos partisans lâchement abandonnés, et celle de la civilisation, son expédition, personnel, navires, marchandises, tout était évacué sur HaïM.
Phong1 Enfin le 11 février 1874, le pavillon français fut amené du sommet de la tour d'Hanoï; à la même place, nos-soldats étonnés virent flotter l'oriflamme annamite. Ainsi,
pendant vingt-quatre heures ce drapeau, que IPF soldats français avaient vaincu, sembla, dit M. Romanet du Caillaud, les couvrir de sa protection. Nos armes avaient cunquis la citadelle qu'une diplomatie étrange nous obligeait à abandonner. Au moment de la quitter, l'ambassadeur de Tu-Duc s'avança en tête du cortège, entouré de quatre parasols, insignes de sa haute dignité; à côté de lui marchait le nouveau représentant de la France, M. Phi1.
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Le Tonlnn. —
lastre. Derrière, venaient nos soldats qui défilèrent, le cœur plein de rage, devant une haie d'Annamites riant et se moquant. Ainsi était continuée l'œuvre de Garnier par Philastre qui, pour prix de ses services au Tonkin, reçut la croix d'officier de la Légion d'honneur tandis que, comme nous l'avons dit précédemment, le ministère de Broglie marchandait un morceau de pain à laveuve de Garnier. A quels sentiments obéissait M. Philastre qui eut le triste, courage d'insulter la mémoire de son héroïque prédécesseur, qui, au lieu de protéger son compatriote Dupnis, le laissa dépouiller, ruiner, et le traita en quelque sorte comme un voleur? On ne sait au juste ce qui lui dictait sa conduite; il avait fait de longues recherches sur la langue et sur le droit annamites et, séduit sans doute par les mœurs des mandarins, il les avaient adoptées. Ses camarades disaient de lui qu'il était plus Annamite que les Annamites eux-mêmes. Peut-être fut-il guidé par des motifs d'un. autre genre quoi qu'il en soit, il détruisit en quelques jours une œuvre merveilleuse,
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abandonna un pays pacifié et conquis par l'humble Français, lui héros, fit, nos se serviteur d'un monarque sauvage, et il doit se considérer comme responsable du sang qui a coulé et qui coulera encore pour l'achèvement de l'entreprise. Quant à l'amiral Dupré qui d'abord s'était montré si enthousiaste, si ferme, il craignit de défendre la cause duTonkin et de se compromettre aux yeux du ministère de Broglie, et il eut le triste courage d'approuver la conduite de Philastre. Le 15 mars 1874, le gouverneur de la Cochinchine signa un traité de paix avec le représentant du roi Tu-Duc, traité en apparence assez avantageux, mais qui, le Tonkin abandonné par nous, ne devait évidemment jamais être exécuté. M.Philastre, considérant que sa besogne était achevée à Hanoï, était parti pour Saïgon avec le représentant de Tu-Duc. Il fut remplacé par un homme de valeur et d'une grande probité, M. Rheinart, qui, si cela eût été possible, fût parvenu à réparer les désastres d-cj'évacuation; mais nous verrons avec quelles difficultés il se trouva aux prises.
En dépit des fautes de M. Philastre, fautes qui selon nous seront appelées cricepen-I minelles par l'histoire, un fait était dant acquis, fait de la plus haute importance un traité régulier était signé entre la France, le traité du 15 mars 1874, qui constitue nos droits au Tonkin. Cet acte officiel étant celui sur lequeltout repose actuellement, nous devons en reproduire ici les articles essentiels.
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Art 2. — S. Exc. le Président de la République française, reconnaissant la souveraineté du roi d,. l'Annam et son indépendance vis-à-vis de toute puissance étrangère quelle qu'elle soit, lui prometaide et assistance et s'engage à lui donner, sur sa demande et gratuitement, l'appuinécessaire États l'ordre et la trandans mainLenir puur ses quillité, pour le défendre contretoute attaque et pour détruire la piraterie qui désole une partie des côtes du royaume. Art. 3. — En reconnaissance de cette protection, S. M. leroi de l'Annam s'engage à conformer sa politique extérieure à celle de la France et à ne rien changer à ses- relations diplomatiques actuelles. Art. 11. Le gouvernement annamite s'engage à ouvrir au commerce les ports de Thin-Naï dans la province de Binh-Dinh, de Ninh-Haï dans la province de Haï-Dzuong, la ville de Hanoï et h.
-
passage par le fleuve du Ni-Hâ, depuis la mer jusqu'au Yun-Nân. Le port de Ninh-Hai, celui de Hanoï et le transit parle fleuve seront ouverts aussitôt après l'échangé des ratifications, et même plus tôt, si faire se peut; celui de Thin-Naï, un an après. D'autres portsou rivières pourront êtreultérieurement ouverts au commerce si le nombre et l'importance des relations établies montrent l'utilité IIp cette mesure. Art. 13. La France nommera dans chacun des ports ouverts au commerce un consul ou agent assistéd'une force Buffisalate, dont le chiffre ne devra pas dépasser le nombre de cent hommes, pour assurer sa sécurité et faire respecter son auturité, pour faire la police des étrangers, jusqu'à ce que toute crainte à ce sujet soit dissipée par l'établissement des bons rapports que neipaut aauqucr de faire naître la loyale exécution du traité.
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Une copie de-ce traité fut envoyée à la Chine, qui n'éleva alors aucune protestation, jet c'est pour faire respecter les clauses de ce contrat librement signé par Tu-Duc que nous avons dûintervenir de nouveau mili-
lairement.
CHAPITRE SEPTIEME HENRIRIVIÈRE
Sommaire; Conséquences de la conduite de M. Philastre. — M. Rheinart, son successeur, abandonne Hanoï et retourne Saïgon. — La ruine de Dupuis. — Cinq années d'attente. Hésitations du gouvernement français. — Le comman— dant Rivière à Hanoï, avril 1882. — Reprise dela citadelle d'Hanoï. — Les embarras du vainqueur. — La France semble l'abandonner à son tour ainsi que F. Garnier. — Ses lettres intimes. Tu-Duc appelle débarrasser pour se —
à
de nous une armée chinoise. — La situation devient critique. — Nos nouvelles opérationsmilitaires à "NamDinh. — Sortie et combat de Hanoï. — Mort de Rivière. (26 mai 1883). — Portrait de ce héros.
Nous avons dit que très difficile était la situation de M. Rheinart, qui remplaça à Hanoï M. Philastre, venu en France chercher sa récompense. L'évacuation de là citadelle avait enlevé tout prestige aux soldats de France les Pavillons-Noirs, encouragés parles mandarins, continuèrent les massacres, les incen-
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dies et les pillages. En outre, Tu-Duc, ne tenant aucun compte du traité, cherchait à nous chasser et faisait réunir dans ce but une importante armée annamite au Tonkin, où les autorités indigènes, prenant leur revanche, violaient ouvertement les con-
ventions. Désespérant de pouvoir lutter avec quarante hommes qui lui restaient, M. Rheinart prit le parti d'abandonner complète^ ment Hanoï, alla à Haï-Phong, remit là le service politique au commandant des troupes, M. le chef de bataillon Dujardin, et se rendit ensuite à Saïgon afin de nette- r ment exposer au gouverneur de la Cochinchine la gravité de la situation. Vers cette époque, le successeur de l'amiral Dupré au gouvernement de la Cochinchine, l'amiral Krantz, signa un nouveau traité purement commercial avec les représentants de l'Annam, traité qui, pas plus que rautre, ne devait être exécuté. Les insurrections se multiplièrent; partout se déploya l'étendard de la révolte et, les unes après les autres, les principales citadelles furentoccupées par les insurgés, qui se livrèrent aux plus épouvantables
excès contre les populations pacifiques du Tonkin. D'aube part, dans les provinces orientales, les indigènes amis de la France se révoltèrent à leur tour contre l'autorité de Tu-Duc, et nos quelques troupes restées au Tonkin durent, pour exécuter les clauses de notre protectorat, marcher contre ces combattants, ce qui nous fit accuser par eux de trahison. Tels furent les résultats de la politique de M. Philastre ! Au lendemain de l'évacuation nous fûmes maudits et méprisés par tout le monde aulieu de manifester comme auparavant du respect à nos nationaux, on les injuriait et on les menaçait. devenait pendant ce temps M.Dupuis? Que On le devise. En vertu de la convention Philastre, l'expédition de ce vaillant explorateur -ava.it dû abandonner les maisons qu'elle occupait Hanoï; ses effets, ses bagages, ses papiers laissés là sans scellés yfurent mis aupillage. Ses navires et ses équipages, dont l'entretien coûtait une somme considéra-ble, furent dixprisonniers pendant quelque sorte en neufjnois. On lui enleva ses canons et on
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lui dit ironiquement ensuite de retourner dans 1Yun-Xân par le fleuve que gardaient les i'avillons-Xoirs victorieux. L'amiral Dupré ne l'avait pas écouté, l'amiral Krantz ne l'écouta pas davantage, et lorsque l'amiral Duperré, partisan de M.Philastre, eut remplacé l'amiral Krantz en CocllinchiIl, on se garda bien plus encore de répondre à de pressantes sollicitations, à de justes revendications. Le ministre de la marine (nous sommes toujours à l'époque de la présidence de Broglie;, le ministre de la marine, M. de Moiitaignac, envoyait cette dépêche inouïe possible le Faire tout en Cochinchine « pour endormir et faire traîner l'affaire Dupllik.! » Il y avait cependant quelque chose d'admirable dans lecourage, dans la persévérance de ce négociant français à qui nous devons en réalité, comme on sait, la découverte de la navigation du fleuve Rouge. ApiîèstaHtde misèressouffertesetdontaucune ne lui était imputable, M. Dupuis s'en, vint chercher en France, auprès des-représentants de son pays, la protection et la justice dues à sesdroits et à son paL-riotisme.-
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Voulant enfin faire cesser d'iniques persécutions, il adressa à la Chambre des députés une pétition dans laquelle il exposa que son entreprise, avantageuse à tous les points de vue pour la France, avait été cause de la perte de sa fortune et de sa santé. Grâce à M. Philastre et à l'abandon du gouvernement on avait-séquestré ses navires, et, pour entretenir ses équipages, il avait, dû contracter des dettes énormes au lieu de.recueillir les bénéfices que lui assuraient ses marchés passés en Chine. A la fin on avait saisi ses navires, et ses fidèles serviteurs avaient été en partie massacrés. En échange de l'ouverture d'une riche contrée à son pays, il avait pour récompense la misère, la calomnie et la 1
persécuti-OQs
C'est en1876 que Dupuis arriva à Paris déposa qu'il et sa pétition. Eh bien, malgré la justice de sa cause, il lui fallut attendre trois années pour qu'on s'occupât de ses droits, trois années de martyre, durant lesquelles il subit tous les déboires, toutes les
humiliations. L'administrationfrançaise, toujours fidèle à ses traditions monarchiques, ne daignait
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pas encore s'occuper des revendications commerciales. Alors qu'en Angleterre chaque citoyen, depuis le plus riche jusqu'au plus pauvre riiarchand, est, quand il deinahde justice, protégé par les ambassadeurg et les consuls, par la nation tout entière, eh France il était d'usage de ne point tenir èompte de ces affaires mercantiles. Ce sera l'honneur de la République et dLi ministère àctuel d'avoir compris autrement les detoirs administratifs. Mais en 176 on n'en était pas encore là. Là Charfibrë des députés [renouvelée, il est vrai, dans fiiitervalle) n'examina la pétition de tliipuis qu'en fSi9, et ce ne fut qtln février 1881 qu'une discussion pÜltlitttle eut lied sur ce sujet i ta Chambre renvoya la pétition au ministre cotnpéteflt, mais là discussion eut -du iiioifts pour fésultat de rtiettfe à mt lés agfssefrtents des directeurs de nos colonies Cette époque. Ênfin, en 1S&2, l'amiral Jaiifëgtiiberry, ministre de la marine, affirma]son ^titerltion de déposer un projet ayant loi de pt/tit but d'affirmer et d'drganisef notre protectorat dans le tonkin. Mais d'indemnité à Dupuis il n'en était
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point question, quoique, l'Académie des sciences, sur le rapport de l'amiral Mouchez, lui eût accordé le prix destiné français où au savant ayant < au voyageur rendu le plus de services à la France et à la science». Bientôt, nous l'espérons, M. Dupuis recevra la complète réparation qui lui est due. La seule excuse de notre gouvernement fut que, pendant les années qui suivirent la guerre, on n'avait pas trop de toutes nos forces pour faire face à des éventualités redoutables; mais la réorganisation de notre armée est maintemant complète et notre drapeau doit être respecté dans le monde entier. Revenons maintenant un peu en arrière. Nous avons dit que les traités signés en1874 ne furent point exécutés; on sait pour quelles raisons. Tu-Duc, souverain de l'Annam et monarque imbécile, était al'entière mercide ses femmes et de ses mandarins. Il avait le droit de faire tomber les têtes de ses sujets, droit dont il abusait; mais ses ministres, vivant de leurs exactions, de leurs rapines, comprenant bien que notre intervention ferait
pouvoir, leur horrible cesser ses mandarins à parasol le tenaient enfermé et lui racontaient les faits à leur manière. Pendant sept années, en dépit du contrat de 1874, le gouvernement de Tu-Duc entrava toute transaction commerciale, prit à sa solde les Pavillons-Noirs qui nous barraient le fleuve Rouge, favorisa le honteux trafic des esclaves, et réduisit les Tonkinois à la plus profonde misère. Un de nos nationaux fut même assassiné sans qu'on en tirât vengeance. Cependant comme Tu-Duc se sentait menacé par des révoltes dirigées contre lui, il fit en 1878 appel à la Chine pour se protéger, en même temps qu'il réclamait l'intervention de nos soldats, considéréspar lui comme des gendarmes à sa solde. Mais rienne parvint alors à secouer la torpeur de nos gouvernants, pas même la menace d'une intervention allemande à Haï-Phong. C'est à ces fautes impardonnablesque l'on doit les prétentions actuelles de la Chine. Si simplement nous nous étions maintede Garnier, la Tonkin après mort nus au il n'y aurait eu aucune intervention) de ce
Tu-Duc, cmp"!'l'ur <1Aiiruim.
peuple dont le gouvernement, disions-no à la fin du chapitre précédent, av; reconnu le traité de 1874 sans observ
lions 1. Toutefois, grâce à ce traité si mal o servé, la présence et le maintien de Il consuls à Hanoï et à Haï-Phong avaie permis de continuer les explorations. En 1876 et en 1877, M. de Kergarade ufficier français, fit deux voyages sur fleuve Rouge. Il acquit à son tour la certitude que navigation jusqu'à la frontière était po sible en toute saison pour des vapeurs fond plat et à roues. Sur les rives du fleuv tantôt des pays peuplés et bien cultivé
deverdoyantes campagnes; tantôt des fi
rets de bambous et des régions sauvai où abondent les tigres et les éléphants. mit, pour aller en Chine, la première fo vingt-cinq jours et la seconde dix-huit. trouva les marchands chinois tous parfd tement disposés à étendre leur coam.. coasidéraiei Rouge qui fleuve le et sur La preuve de ce fait se trouve dans le Livi jaune publié en décembre 1&83. 1.
es Pavillons-Noirs comme le seul
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leur désir. C'était 1& confirmation de ce qu'avait dit f. Dupuis. Vers le même temps, M. Dutreuil dr hins parcourait tout Annam. le docteur rîarmandgravissaitlesmontngnes du Laos, te docteur)lagen explorait le TonkiTI. Ces explorations faites par des Français, les mvrages par eux publiés entretenaient esprit public de la question. Mais nos forces militaires n'étaient point augmentées, et Tu-Duc de plus en plus iudacieusement violait le traité il ne leasait de faire appel aux troupes chinoises eus prétexte qu'il avait besoin qu'on 'aidât maintenir l'ordre, ce que nous euls ayion mission de faire. Il fallait en-finir avec ce monarque trop feu Iftl respectueux de ses engagements. En la. Chambre vota des crédits destinés iaugmenter nos forces navales au Tonkin in de poursuivre la piraterie et d'assurer t sécurité deS::transactions et des commucations. En conséquence de ce vote, le commannt Henri Rivière résolut de nous établir
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au Tonkin plus solidement et partit mois de mars 1882. Rivière était alorsâgé de cinquante-ci dé comptait se-rvil et trente-sept ans ans dans la marine. Il commandait la divisi maritime de Cochinchineidepuis cinq m; et n'avait plus besoin que o.'une missi brillante pour gagner une étoile d'amir Le commandant de Saïgon 26 mars, avec deux navires de la stàtic le Drac etle Parseval. Les troupes qui étaient confiées se composaient de dé compagnies (soit deux cents hommes) d' fanterie de marine, une -section d'artille; de montagne et un détachement de tira leurs cochinchinois, de création récent ts cinq hommes, environ cents tout, en marins que Rien n'était encore bien précis dans
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soldats. instructions.•«
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Le Drac et le Parseval jetèrent l'ani devant Haï-Phong le 2 avril. Le soir, milieu des illuminations et des feux joie des Tonkinois qui fêtaient ce retd tardif de notre protection, nos soldi furent embarqués sur des bateaux marine marchande àffrétés à l'avance.
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entrèrent le lendemain dans la rade Hanoï et prirent leurs cantonnements H le terrain vague de la concession français où se trouvaient, comme garde consulaii deux compagnies d'infanterie de marii sous les ordres du chef de bataillon Bertl de Villers. Sur lui pesait la lourde char: de soutenir au Tonkin l'honneur franco et d'y faire bonne contenance avec pt d'appui. Les relations étaient devenues fort acr monieuses avec les mandarins, qui avaiej repris dans leur citadelle les allures ( 1873, s'y confinant, s'y fortifiant et a entourant de sept à huit mille soldats, La venue de quelquescentainesd'hommj n'intimida qu'un moment l'arrogance anni mite ce déploiement de forces était tic peu pour annoncer une virile décision ( la France ce n'était qu'une demi-mesur plus que modeste et comme toutes li demi-mesures, au lieu de résoudre, elle E pouvait qu'aggraver les difficultés1. L'arrivée de ce renfort exaspéra I< mandarins annamites, qui, suivant leui (
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1.
Hippolyte Gautier, les Français au Tonkin
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anciennes habitudes, firent des démonstrations hostiles. Le nouveau chef d'expédition reconnut indispensable de compenser l'infériorité numérique par une action d'éclat, et de riposter à d'insolentes attitudes par la prise de la citadelle d'Hanoï. Le25 avril, àhuitheures un quart du matin, le bombardement commença à onze heures nos petites colonnes montèrent à l'assaut, tandis que l'armée ennemie s'enfuyait par les portes. Nousn'avions que quatre blessés. Le gouverneur de la forteresse se coupa la gorge. Le commandant s'installa dans la citadelle -puis, craignant pour la sécurité de M. Rheinart, notre résident à Hué, il envoya un navire le chercher. A la vue de notre pavillon, les mandarins de Hué, qui connaissaient la prise de la citadelle, firent pavoiser la ville de drapeaux tricolores ils accablèrent les envoyés de protestations d'amitié, les félicitèrent d'avoir mis à la raison les méchants mandarins d'Hanoï, promettant d'exécuter les traités et de se montrer en tout agréables à la France. Cette reprise d'Hanoï était-elle utile Futelle habile? On a affirmé que non, en don-
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nant pour raison que c'était à Hué, capi tale de Tu-Duc, qu'il fallait aller frapper Oui, sans doute mais le commandant Ri vière, entouré d'Annamites menaçants e ne déguisant point leurs préparatifs dl guerre, le commandant Rivière ne pouvai agir La situation était en quelque sorte même qu'au temps de Garnier; mais Ri vière profita de l'expérience et montr, qu'il était, lui aussi, un administrateu] pratique. Il laissa aux mandarins la direction de affaires civiles, se contentant de prendri en mains les douanes, de façonJi éviterle vols et les déprédations. Après s'être installé dans la citadelle, 01 -plutôt après l'avoir démantelée pour éY ter les contestations, Rivière demanda dei instructions qu'on lui fit attendre, carl'ami ral Jauréguiberry ne put obtenir denou, veaux crédits. Il se trouva donc condamm à l'inaction pendant plus de huit mois sachant que les Annamites négociaien
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autrementi.
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4.
Consulter à ce sujet l'ouvrage de M. Paul
chanel : la Question du Tonkin.
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Ambassadeursannamites.
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contre lui, en secret, et avec les Chinois avec les Anglais, et se plaignant dans s( lettres intimes de l'attente d'un dénouemen Il écrit, dépeignant le fleuve Rouge qu' est réduit à regarder couler « Il est certain que ses eaux ont UE teinte rose. C'est un joli fleuve, avec d( rives de sable ou boisées- un fleuve d France. Je demeure au Consulat, éléganl maison blanche avec véranda tout autoui Les navires légers de la division navale soi mouillés sous mes fenêtres. De toute journée on ne sort pas à cause de la ch leur. Mais vers cinq heures du soir je mont à cheval avec le consul ou avec ie commar dant de l'infanterie de marine,etnousfai sons une promenade en ville ou àla citadelle Ces villes asiatiques sont de grouillante agglomérations d'êtres humains et éi amoncellements de cabanes de bois et 4 paille. La race est inoffensive et très crain tive. Quant aux femmes, me semble qu ce ne sont que des singes, et même pas d, jolis singes. » Tout le caractère français entre dans ce quèlques lignes du brillant officier que noui avons eu l'honneur de bien connaître, e
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qui était en même tempsqu'un soldat hors ligne, un homme de lettres d'une grande valeur. Et tandis qu'il recevait des instructions qui le condamnaient à l'inertie, les Chinois peu à peu s'infiltraient, s'étendaient, venaient faire cause commune avec les Annamites et même avec les PavillonsNoirs en vain Rivière demandait à les combattre. Cependant, à partir du mois de novembre 1882, le péril se fit redoutable le commandant se trouvait enserré et risquait, quand il voudrait se dégager, de n'être plus en force. A cette époque on apprit en Annam notre abstention en Egypte, faute impardonnable et la plus grande de ces temps; cet aveu de faiblesse redoubla l'audace de nos ennemis d'Asie Tu-Duc demanda au vice-roi de Canton vingt mille hommes afin de combattre contre nous jusqu'à ce qu'il nous eût chassés « comme le vent chasse la poussière ». Et de Canton on répondit: «Nous prendrons des mesures dès l'arrivée des vents du Nord. » Alors les préparatifs de guerre devinrent de plus en plus menaçants autour de
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nous; l'Angleterre renouvela ses tentatives pour intervenir. L'amiral Jauréguiberry parvint à déci. der le conseil des ministres à prendre un* résolution mais M. Bourée, alors ministn de la France à Pékin, entra en négociations avec la Chine et annonça qu'elle con sentait à retirer ses troupes du Tonkin. — On eut le tort de croire à la probité des diplomates chinois, qui jouèrent M.Bouréi par-dessous jambe. Mais l'amiral Jauréguiberry compri nettement la situation et jugea que li meilleur moyen d'aboutir, c'était de prou ver sa force l'honorable ministre de II marine, continuant la-politique de l'amira Pothuau, envoya en décembre f882 1 navire la Corrèze, avec deux cent einquant hommes, au secours du commandai} Rivière qui, ne pouvant se laisser bloque dans Hanoï, se porta, après -avoir reçu c, renfort, devant Nam-Dinh, enleva la cita delle d'assaut et chassa les trois mill Annamites qui la défendaient. Cette action d'éclat n'empêcha poin l'armée ennemie de serrer de près Hanoï où le commandant retourna le 2 avril 1883
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Le commandant
HENRI
RlntRF., tué à Hanoï par les Annamites.
Il n'avait que quatre cents hommes pour I; défense de la place; une sortie lui paru nécessaire il la fit.le 19 mai, et y périt. Les détails de celte funeste journée on été exactement connus, il y a peu de temps Houzel lettre le du cowite par une que neveu du commandant Rivière, a commi niquée aux journaux français. Cette lettré écrite par un officier faisant partie du corp expéditionnaire du Tonkin, peut être cor sidérée comme le récit officiel de la moi de l'héroïque soldat. La vfici : « Les journaux nous apportent les pr< miers renseignements sur les effets de l'ar nonce en France<es malheureux évént ments du 19 mai. Comme presque temîjolm pour les événements lointains, ceax-ci or été "ln grande partie défigurés, et je vol même ici se former après coup des légende contraires à la vérité. On a télégraphi que nous étions tombés dans une embus cade. C'est inexact. On savait parfaitemeri cher l'ennemi l'y était là allait et que on cher. Le nombre, on n'y faisaitpas grand attention. N'avait-on pas vu le 16 mai dl trois jours avant, sur la rive gauche fleuve, les troupes de Bac-Ninh, fortes d
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plusieurs milliers d'hommes, avec des canons, chassées;pendant sept kilomètres par quatre compagnies jusqu'au canal des Rapides? On leur avait tué beaucoup de monde, consommé 14,000 cartouches et il n:y avait pas un seul blessé. répétait mai, Je commandant 19 Le me « le malin, en partant « Ah! ils auront arrivions décampé avant que nous « faire allons buisson encore creux. » nous « Il fut vite détrompé quant à la présence de l'ennemi, mais il crut qu'il suffirait d'un vigoureux élan pour le;¡[briser, et il paya bravement de sa personne pour produire cet élan. Malheureusement, notre position était par tropjdéfavorable. «Après l'enlèvement du premier village, nous nous étions avancés sur une chaussée étroite, seul ehemm où nous pussions passer. L'ennemi, arrivant en foule de tous côtés, ne se comporta point comme tous ceux. à qui nous avions eu affaire auparavant. Ceux-ci étaient braves, bien armés et bien abrités. La retraite s'imposait, elle fut peut-être un peu tardive. Le commandant ne voulait pas croire qu'il fût obligé de reculer et semblait penser que ce pre-
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mier pas en arrière serait la fin de sa fortune. « Au bout de peu de temps, l'artillerie, dont le personnel avait beaucoup souffert, dont plusieurs chevaux étaient blessés et qui était le point de mire d'un feu d'enfer, fut gravement compromise.. Il n'y avait presque plus personne autour des pièces. Le commandant et les officiers présents se mirent à aiderde leur personne, à pousser aux roues et à diriger les chevaux. C'est là que l'enseigne Clerc fut blessé, puis l'aspirant Moulun' tué raide d'une balle à la tête. Le commandant et le commissaire Ducorps le prirent sous les bras et le déposèrent dans le fossé. Un instant après, lij commissairè, déjà blessé au pied, recevait qui lui fracassait la balle main. autre une C'est, je crois, le dernier des 'survivants qui aiL parlé au commandant "Rivière; des autres qui étaient à ses côtés, personne n'est revenu. «Presque au même instant, le commandant tombait en arrière en portant la main traversé gauche. Il dû être côté a auau dessous de l'épaule par une balle tirée a capitaine cinquantaine de Le mètres. une
Le commandant BUITIIE
tua
DE YILLEHS,
dosenvirons (flhnoĂŻ.
au combat
Jacquin l'aida à se relever, mais il retomba presque de suite, peut-être sous une autre balle. « Je n'ai pu avoir de renseignements précis sur ce qui s'est passé après. « Des gens avaient raconté que le commandant et Jacquin s'étaient mutuellement fait sauter la cervelle. C'est absolument faux. Le commandant n'avait même pas de revolver sur lui et n'avait pris que sa canne. On avait raconté la même chose de l'aspirant Moulun. « Il n'estmalheureusement pas difficile de deviner que les Chinois les plus rapprochés, n'ayant plus d'adversaires valides devant eux, se sont rapidement précipités sur les; blessés et leur ont coupé la tête de suite. Je les ai vus le faire un peu plus loin à d'autres. Le commandant m'était caché par une maison. nous seulement, missionnaires les Par « avons pu avoir quelques renseignements postérieurs, sans possibilité de contrôle. «D'après les dires de leurs émissaires, le Chinois qui a coupé la tête du commandant a reçu une gratification de 80 barres d'argent. La tête, après avoir été portée à
Son-Tay, a été salée et envoyée à Tu-Duc, à Hué, avec les vêtements. Les corps auraient été enterrés tous ensemble près du lieu du combat. Les autres têtes ont été pendant longtemps portées au bout de bambous, comme on l'avait fait de celles de Garnier et de Balny. n'a faire On rendre. Le gourien se pu « verneur annamite resté à Hanoï avait été prié par le consul de chercher à s'interposer pour cela. Il s'est enfui le soir même et on n'en a plus entendu parler depuis". Aucun Français n'a encore pénétré jusqu'au lieu du combat depuis la fatale journée. «
Certifié conforme par le soussigné, neveu
- du commandant Rivière,
«
« Cte
J.
DU BOUZET. »
Ainsi périt un de nos plus glorieux soldats, un homme qui valait autant par ses vertus que par son courage. La tête d'Henri Rivière a été retrouvée le i8 septembre. Son corps ne l'a été que vingt jours après. Il a été reconnu aux initiales marquées sur le linge. La tête seule du commandant Rivière
sera ramenée, pour le moment, en France Le 13 octobre, à cinq heures du soir, oi a pu rendre les derniers honneurs religieu: et militaires aux restes du brave comman dant, qui reposent dans le cimetière d'Hanoï au milieu des braves enfants de la Franc que la guerre ou la maladie ont mois sonnés. La cérémonie du 13 octobre a été for mposante. Tous les honneurs militaire dus à la haute situation du commandan lui ont été rendus. Toutes les troupes d< la concession étaient sous les armes, tow les officiers de terre et de mer avaient tem à venir, ainsi que le commissaire général tous nos matelots se pressaient autour di cercueil de leur ancien chef et de celui de ses vaillants compagnons du 19 mai, porte derrière. Sur la tombe, le commandant de la flotille, M. Morel-Bcaulieu, a prononcé d'une voix émue un discours touchant qui a trouvé un écho dans tous les cœurs. Voici un extrait de ce discours
:
Pardonnez-moi de prolonger pendant quelques instants encore la douloureuse cérémonie
M.
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chef détat-major du commandant Rivière, troupes et ramena l'artillerie après le collillit(J'ilanoi.
DE MAROLLES,
-
à laquelle nous assistons, pour dire, au Lord de ces tombes qui vont se refermer sur eux, un dernieradieu à nos infortunés compagnons d'armes, tombés au champ d'honneur le
mai 1883. Adieu, vaillants officiers Adieu! intrépides soldats et marins! Adieu à vous tous, braves enfants de notre chère Franoe, qui êtes morts "loin d'elle pour soutenir l'honneur de son drapeau en combattant contre la barbarie pour la cause de la civilisation. Adieu, chers compagnons d'armes, et que vos noms gravés ici perpétuent dans les siècles le souvenir de votre courage et de votre dévoue19
1
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ment
Et vous, regretté commandant Bavière, dont le nom est en ce moment au fond de tens nos rendre un dernier cœurs, permettez-moi hommage à votre bravoure, à votre bienveillance, à votre générosité, a la droiture et à la fermeté de votre caractère., et recevez par ma voix le témoignage de l'universelle sympathie que vous avez laissée parmi nous. Reposez en paix au milieu de nous, braves ofilciers, courageux soldats et marins qu'und mort glorieuse a prématurément- enlevés à l'affection de vos parents et de vos amis. Le sang que vous ayez généreusement versé sur le sol du Tonkin, le noble sacrifice que
de
0-
vous avez fait de vos existences ne seront .pas inutiles. La France a tressailli en apprenant votre trépas, et de nouvelles troupes nous ar-
rivent chaque jour. Elles suivent l'héroïque exemple que vous leur avez donné, et vous aurez largement contribue à doter notre Patrie du protectorat de l'un des plus fertiles royaumes de l'Orient. Adieu, Rivière! Adieu, Berthe de Villers! Adieu, iacquki, d'Héra] de Brisis, Moulun Adieu à vous tous, glorieux compagnons d'armes tombés sur les champs de bataille au Tonkin. Adieu, ou plutôt au
!
!
revoir
Henri Rivière était aimé, vénéré de tous les officiers ses compagnons d'armes. C'est en Nouvelle-Calédonie, en 1878, qu'il avait gagné ses épaulettes de capitaine de vaisseau«n réprimant la révolte des Canaques. Jamais, a écrit dans 1e-Figaro un de ses biographes, jamais on n'aura tout dit sur Henri Rivière, tant la vie de ce héros fut pleiiifi d'actions généreuses, de mots aimablesetspirituels, de grandes aventures, de bons livres et 'de obles élans. Tout Ië fond de son caractèrepourrait se résumer
dans de petites phrases empreintes d'une vague mélancolie que l'on retrouve toujours dans sa correspondance, même lorsqu'il voulait se montrer allègre et confiant en son étoile. Pendant onze ans, Henri Rivière a occupé à Paris un petit appartement au quatrième étage du n° 10 de la rue Godot-de-Mauroi. Les mercredis et les samedis, il recevait un ou deux amis à déjeuner; le jeudi matin était consacré à sa famille à Paris, ainsi que le samedi soir et le dimanche, à Mantes. Simplicité, cordialité, affabilité, telles étaient les véritables qualités du commandant. Rivière se levait à huit heures, et se mettait aussitôt à sa table de travail, une petite table sans aucune prétention, appuyée contre une fenêtre donnant sur la rue. Une panoplie, composée d'armes rapportées de ses expéditions, surplombait cette table-bureau. L'ameublement du cabinet-salon était sobre quelques fauteuils, unebiliothèque, lesquels secrétaire, commode et un sur une s'amoncelaient des gazettes, des revues,
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des manuscrits, de nombreux albums, des photographies et des livres. Il travaillait, quotidiennement, le matin, jusqu'à onze heures et demie, écrivant les pages qu'il avait conçues' la veille. Son étonnante mémoire lui rendait, sans effort, chaque lendemain, les idées et les phrases ciselées en chemin, soit sur la route de Paris à Mantes, soit sur le boulevard. On a connu Rivière romancier, auteur dramatique, poète, brillant causeur et vaillant capitaine. Ajoutons qu'il était d'une
charité inépuisable. Vers une heure, rue Godot, la sonnette commençait à carillonner, annonçant des visites de quémandeurs les uns venaient lui demander son appui pour entrer dans une revue, dans un journal, dans un ministère les autres venaient l'ennuyer avec la lecture d'œuvres obscures, nouvelles ou romans voués au silence ou à l'oubli. Il écoutait tout avec bienveillance, sans se plaindre. Il donnait presque tout ce qu'il possédait. Si encore il avait été très riche, mais il se privait pour donner.
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«J'ai fait gracier, disait-il, quelques forçats qui s'étaient bien conduits pendant l'insurrection canaque et ils viennent me demander des secours pour vivre, je leur en donne. » En outre, Rivière avait pris charge de familles recommandées en campagne par des amis mourants et leur servait une pension régulière, exhortant les enfants au travail, citant l'exemple de leurs pères et payant pour leur instruction. Au point de vue littéraire, Henri Rivière peut être considéré comme un écrivain d'une rare pureté de style. La phrase est simple, claire, précise. Le mot est le mot exact, et prend son emploi propre, à la place voulue. On sent dans ses
livres l'œuvre sans effort, le travail sans recherche ambitieuse, sans adjectifs trop hardis le substantifs ni trop pompeux, verbe arrive partout avec son autorité naturelle, expressive, puissante, opportune. La logique en tout cela suit le corps du style d'xm pas égal. Des bords du fleuve Rouge, le commandant, sans perdre de vue le drapeau national, avait TIll œil sur la coupole de
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l'Académie française, où l'avenir lui réservait une place, sans doute. Mieux que les palmes vertes de l'habit d'académicien, les palmes recueillies là-bas le rendront immortel
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CHAPITRE HUITIÈME LES ÉVÉNEMENTS MILITAIRES DE MAI A SEPTEMBRE
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Sommaire. — Le général Bouët. — La division navale i l'amiral Courbet. — M. Harmand, commissaire général a Tonkin. — Hai-Phong. — Nam-Dinh. — Le colonel Badem — Mort de Tu-Duc. — Les journées d'août. — Prise d fort de Phu-Hoai et de la pagode des Quatre-Colonnes. Marche sur Son-Tay. — Attaque et prise des forts de Hu( Prise Traité août. Un récit d du de la ville. 25 — — combat. — La situation nouvelle.
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Il y eut un moment de trouble dans nel établissements du Tonkin, quand on y ap prit la sortie malheureuse, tentée à Hanoï commandai^ le 19 mai,, et la mort du Rivière. A Hanoï, la concession française, bieï que gardée par quatre cents hommes envi ron, craignit un redoublement d'hostilitéi de la part des Pavillons-Noirs, et les rési dents européens se retirèrent à Haï-Phong où les blessés furent transportés. M. Charles Thomson, gouverneur de I<
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Cochinchine, se hâta d'expédier, le plu vite possible, des renforts sur Hanoï, e sans rencontrer aucune résistance, san tirer un coup de fusil, les nouveaux arri vants dégagèrent la ville. C'est le 26 mai que l'on apprit à Pari la catastrophe du 19 mai. En communi quant cette nouvelle à la Chambre des de putés, le ministre de la marine annonç qu'il avait immédiatement prescrit au gou verneur de la Cochinchine de diriger su le Tonkin les troupes disponibles de 1, colonie, et qu'il avait fait partir de Franc les renforts pour lesquels un crédit venai d'être demandé au Parlement. II ajoutai que le général Bouët, commandant miti taire de la Cochinchine, avait reçu Pordri de ne rendre au Tonkin, pour y prendre 1 commandement supérieur du corps exp4 ditionMire. te général Bouët venaitd'êtri nommé, depuis moins d'un an, général brigade. C'était, parmi les officiers de o grade dans l'infanterie de marine, l'ui des plus jeunes il est né en 1833.C'est ui il i neveu de l'amiral Bouët-Willaumez commencé sa carrière en 1852, et soi avancement a été des plus rapides. -
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Avant tout, il s'agissait de pourvoir aux nécessites du moment et de venger l'honaviserait ensuite de armes; on nos neur aux moyens de réparer les conséquences politiques d'un événement qui devait encourager l'audace de l'ennemi et les résistances de l'Annam. Sans être compromise, la situation quele général Bouët trouvait au Tonkin ne permettait par, de prendre .immédiatement l'offensive. Nos troupes n'occupaient que trois places du Delta mais leurs communications étaient assurées.Haï-Phong, où s'étaient concentrées les garnisons voisines, était en état de résister avec l'appui des canonnières. Les Annamites étaient maîtres de Nam-Dinh; mais le colonel Badens tenait la -citadelle, et il avait les moyens de repousser toute attaque. A Hanoï, un conseilîle défense s'était constitué après les événements du 19 mai, et avait pris des disposions pour assurer l'occupation de la pagodejroyaLe. 1 fut créé une nouvelle division navale, dite du Tonkin, où entrèrent le Bay-qrd, cuirassé neuf, portant pavillon - amiral, YAtaîante, autre cuirassé, le Château-Ré-
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naud, le Kersaint, YHamelin, le Parsev, leDrac, etc., et dont le commandement confié au contre-amiral Courbet. L'ami] Courbet n'avait pas encore l'expérience pays annamite, mais il avait une gran habitude des escadres d'évolution. Né 1827, à Abbeville, c'est un des rares n rins ayant passé par l'Ecole polytechniqi Il avait été directeur de l'école de Boyai ville, où l'on enseigne l'art des torpilli puis pendant deux ans, de 1880 à 188 gouverneur de la Nouvelle-Calédonie. Un commissariat général de la Rép blique française au Tonkin fut en oui institué par décret du L8 juin 1883, et c fonctions échurent à un ancien comp gnon d'armes de Francis Garnier, au de teur Jules Harmand, consul à Bangkok. Une direction triple, assez logique, éti ainsi donnée à nos affaires du Tonkin partie belliqueuse divisée entre le génér et l'amiral; la partie politique confiée à li haut fonctionnaire civil. Dès son arrivée, qui eut lieu le 6 juin, général Bouët compléta les mesures néce saires pour la sécurité des positions, LI places occupées furent mises en étatcoi]
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Le vice-amiral COCHon.
plet de défense. Les premières troupi venues de Cochinchine, servirent à renf( cer les garnisons. Avec l'effectifdisponib on allait bientôt se trouver en situation tenir la campagne, en attendant les re envoyait forts qu'on de France et qui c vaient mettre le général à la tête de quai à cinq mille hommes. Dans les rivières du Delta, l'amii Courbet était représenté, pour le comma dement des canonnières, par M. More
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Beaulieu.
soin du général fut de fai préparer de multiples casernements. So activ travailla pluie torrentielle, on une ment à dresser des -abris de plus en pl indispensables; les digaes des enviroi firent réparées et une Irtificati.. COM française à concession relia la uw citadelle. M d'avoir i3' a Il eut -bielitôt -à «'applaudir -eutiientôt -propos garni Haï-Phong d'une ikotirfl enceinte, -car, à peine sortie de terre, cet enceinte était attaquée dass la nuit cl Le
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juillet. L'ennemi arriva trop tard. Les assai lants fort nombreux, conduits par le Tarr 5
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tran-Thuet, généralannamite qui jouissait d'une réputation d'invincible et qui jadis avait; sous les ordres- de Nguyen-TriPhuong, défenduTourane et Ki-Hoa, les assaillants, sortis soudain de leurs campements pour se jeter contre plusieurs points à la fois, s'étaient un moment emparés d'une pagode d'où ils dirigeaient sur la ville des coups de feu et des fusées incendiaires. Repoussés de partout par nos soldats et nos colons, ils perdirent un grand nombre des leurs at durent se replier sur l'autre rive de Cua-Cam. A Nam - Dinh, le lieutenant-colonel Badens s'était fortifié et tenait ferme, quoique menacé par une armée d'investissement. Tous les soirs,'des batteries annamites bombardaient la ville régulièrement, mais innocemment, les batteries étant placées à 1,000 mètres, c'est-à-dire trop loin. C'est dans cette période que se place la brillante sortie conduite par le colonel, à la date du 19 juillet, contre les Annamites qui entouraient la ville. Sept cents hommes tués 1 et plusieurs
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Voici un document que nous -donnons à titre de curiosité c'est la proclamation d'un des 1.
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canons pris à l'ennemi, les abords de la place déblayés tel était le résultat de cette journée, qui relevait le prestigedudrapeau français. Le lendemain, découragées, les troupes de Hué renoncèrent à occuper ces lignes qui leur étaient devenues si funestes, se chefs des partisans levés par le roi d'Annam, Tu-Duc, et qui, placé sous les ordres du prince Hoang, faisait partie des troupes annamites battues à Namh-Dinh par le colonel Badens. — Nous, Nguyên-Thûat, tàn-tuong (chef d'étatmajor) de l'armée, avons l'honneur de faire l'affiche suivante; c'est conformément à la décision royale que nous recrutons des volontaires aller à la guerre. pour Il est écrit dans le livre de Kiuh-Dich : « Dans une attaque faite au nid de l'ennemi, le premier morceau est la main de l'ouro (chef), et la récompense est toujours due aux personnes cou-
rageuses.» Ainsi tous les gens courageux de notre armée doivent se battre fortement et de tout leur cœur avec l'ennemi afin d'être récompensés. Voici la liste des récompenses réglementaires : 10 Attaque et prise de Haï-Phong, 10,000 ligatures. - 20 Prise d'un grandhateau à vapeur, 10,000 ligatures.
replièrent sur leur ancien campement de Nu-Ban, plus éloigné. Du coté de Hanoï, reconnaissances élargissaient de le série une cercle d'investissement et permettaient de mesurer les forces des Pavillons-Noirs, dans la direction de Son-Tay. Près de Haï-Phong, le commardant Morel-Beaulieu avait aussi l'occasion l'infliger une sévère leçon aux bandes d'Annamites et de Chinois qu'il rejetait au d là du Cua-Cam et Prise d'un bateau à vapeur d'une dimension médiecre3 5,000 ligatures. 4° Prise d'un petit bateau à vapeur, 3,000 ligatures. 50 Prise d'une petite chaloupe. 2,000 ligatures. 6° Attaque et destruction d'un bateau à vapeur de chaque dimension, moitié du la récompense de la prise. (La ligature se compose de pièces de monnaie enfilées). 1° Une tête coupée pendant la bataille, 50 tauls de récompense; lorsque ce sont des têtes d'officiers, 10 taéls de plus. (Le taël est une monnaie chinoise d'une valeur de 7 ir. 15.) 80 Une tête coupée en dehors de la bataille, moitié de la récompense. 90 Une tête de mata coupée pendant la bataille, 30 taëls. 10° Une têle de mata coupée en dehors de la bataille, moitié de la somme. 3°
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qui ne devaient plus inquiéter la place. En définitive, grâce au courage des troupes et aux habiles dispositions de leurs chefs, la situation était intacte au moment où les renforts envoyés de Nouméa et de Toulon allaient fournir les moyens d'agir vigou-
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reusement. Vers la même époque, le commissaire général civil, M. Harmand, arrivait au Tonkin, muni d'instructions spéciales que le gouvernement lui avait fait tenir à son passage à Saïgon. Pour le succès même de l'expédition, il importait qu'aucun conflit d'attributions-ne pût naître; que le commandement militaire, tout en s'inspirant de la pensée du gouvernement, conservât l'entière direction responsabilité sa sous des mouvements de troupes et des opérations de guerre. Dans ces instructions, les rôles se trouvaient donc déterminés avec précision, le commandement militaire ayant la direction exclusive des opérations et la faculté de faire prévaloir ses vues en, civil. le commissaire désaccord de avec cas C'est dans ces conditions que celui-ci se rencontrait, vers la fin de juillet, avec le général Bouët, à qui les instructions susJ
mentionnées avaient été communiquées, et avec l'amiral Courbet, commandant nos forces navales dans le golfe du Tonkin. Les premiers jours furent employésau débarquement des renforts arrivés de FrajKe et de la Nouvelle-Calédonie, à leur répartition dans l'intérieur, à l'étude exacte de l'état de choses, à des mesures d'ordre et d'administration. Le 30 juillet, le commissaire général réunissait à Haï-Phong, en conseil de guerre, l'amiral Courbet et le général Bouët, afin de délibérer sur la situation et d'arrêter un plan de conduite. On y déciila d'abord que l'effort principal devait se porter à Hanoi, le point le plas important du Delta, afin de désorganiser les bandes de Pavilions-Noirs, Chinois et annamites, qui s'étaient retranchés dans de fortes positions vers Phu-Hoaï, entre Day et le fleuve Rouge. SuramDt~, les opérations devaient être bornées à celles qui seraient nécessaires pour élargir progressivement le cercle d'occupation. On mit ensuite en discussion un autre point, qu'un événement tout récent rappelait à l'aitention.
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En effet la nouvelle de la mort subite dt roi d'Annam et des difficultés auxquelles avait donné lieu le choix de son successeui venait de parvenir à Haï-Phong. L'empereur Tu-Duc était mort le 17juil let, à l'âge de cinquante-quatre ans, après un gouvernement despotique. Aucuneanné ne s'était passée sans insurrection ce qu'i: y eut de plus fatal pour lui et pour son royaume, ce furent ses persécutions contr( les étrangers, d'où deux guerres étaient la guerre de 1858 et celle de résultées 1868, qui nous .donnèrent la Cochinchine, devenue une de nos plus florissantes colonies. La succession de l'empereur étail exposée à des compétitions d'où pouvait l'in. sortir, ou un monarque hostile fluence française, ou un monarque prêt à subir. Tu-Duc n'avait pas laissé d'enfanls et les mandarins du parti militaire se concertaient pour faire passer son héritage à l'un de ses neveux choisi en haine des Français. Il fallait agir. Dans ces conditions, les hommes les plus compétents émettaient l'avis que l'affaire du Tonkin ne se réglerait pas sans un intervention à Hué c'était là qu'il fallait
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chercher la principale source des difficulté c'était de là que partaient les ordres donni pour la résistance aux mandarins du To kin,les subsides et les encouragements ai Pavillons-Noirs. Ne convenait-il pas de pr fiter du trouble résultant de la mort du r et de la transmission des pouvoirs pour porter rapidement sur la rivière de Hii enlever les forts qui commandent la pass et de là dicter des conditions? Les aval tages de cette opération furent reconnus l'unanimité. Quant aux moyens d'actio un examen approfondi fit constater qu'i pouvaient être réunis en quelques jours; suffisait que les forces de l'escadre fusse; augmentées de quelques pièces d'artiller fournies par le corps expéditionnaire, du matériel d'un petit corps de débarqu ment emprunté à la Cochinchine. Le plan exposé offrait toutes chances succès, et l'exécution n'en "pouvait êt: le gouvernement y donna s retardée assentiment. Rendez-vous fut pris à Tourane, c devaient se rencontrer, le 15 août, l'escadi du Tonkin et les bâtiments envoyés ( Saïgon.
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Ces mesures n'étaient pas plus tût prises qu'il fallut, le 15 août, livrer combat,
près de Hanoï, dans la direction de Son-Tay. Depuis longtemps le commandant était prévenu que l'ennemi se fortifiait dans une position allant depuis Cau-Canh jusqu'au fleuve Rouge, et ayant la direction S.-N. le long du Nhué-Giang, et la direction E.-O. vers le fleuve, où il établissait des batteries pour s'opposer aux entreprises sur ses lianes. L'ennemi comptait donc fermer la route de terre vers Son-Tay et la route par le fleuve. Le corps expéditionnaire recevait, le 30 juillet, ses derniers détachements de troupes. De son côté, l'ennemi se renforçait. Il était urgent d'agir, car les populations s'inquiétaient. Le i4 aoûtr après l'appel du soir, les ordres de mouvements forent lancés pour le lendemain. Chaque officier recevait un exemplaire de la carte. Les dispositions consistaient, d'une manière générale, à dégager la route de la digue au moyen d'une colonne et de toute la flottille; a.entourer, avec deux colonnes, la position demi-circulaire de l'ennemi en arrière de
Nhué-Giang, et à exécuter alors une attaqu d'ensemble enveloppante. En un mot, et d'une manière générale, 1 conception d'ensemble était d'enveloppe les positions ennemies de trois colonne fortes d'environ cinq cents hommes cha cune. L'une, celle de droite (colonel Bichot, devait passer entre le lac et le fleuve e longer celui-ci, soutenue par la flottille tandis que les deux autres s'échelonneraien au delà de Phu-Hoaï. Les mouvement devaient commencer dans la nuit; mais li pluie, qui malheureusement tomba à parti de deux heures sans cesser, occasionna ui retard pour le mouvement des colonnes e des canonnières celles-ci purent néanmoin ouvrir le feu à six heures dix, et à sep heures quinze l'avant-garde de la premièn colonne (colonel Bichot) rencontra uni première,barricade et l'enleva. La colonm s'engageait dansTrem,quand à neuf heure: un feu violent "partait d'une quatrièmt barricade placée en avant de la pagod< des Quatre-Colonnes. 'On ne put réussij à la tourner.. Le commandant là colonne, jugeani que le concours de la deuxième lui serail
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nécessaire, fit reposer ses troupes, évacue les blessés surlaflottille et résolut d s'emparer d'une pagode située en arrièr du flanc droit de la barricade dans la plaine et qui servait de point d'appui à la lignl des Pavillons-Noirs. A quatre heures, la flottille et la colonn ouvrirent un feu très vif; l'ennemi ne tin pas. Vers cinq heures trente, la colonni occupait la pagode de la plaine et s'y ins tallait pour la nuit. Le lendemain, soi commandant se portait sur la pagode de Quatre-Colonnes, mais la trouvait évacuée La deuxième colonne (commandant Go ronat) marchant par Yen-Taï, y avaitlaissi une compagnie et une section d'artilleri, pour observer Noïr et s'était dirigée à si1 heures et demie sur le fort de Phu-Hoaï qu'elle devait enlever de concert avec II troisième. L'artillerie dut être renvoyée Yen-Taï, ne pouvant plus passer à cause d4 ?
l'eau.
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Le fort de Phu-Hoaï avait été abandonné par l'ennemi. La colonne de gauch< (colonel Révillon) se porta sur Yen, où ell<
arriva à huit heures et demie, et livr combat à l'ennemi, qui fut obligé de bat,
tre en retraité derrière la digue, tout en restant menaçant. Le commandant prit alors position à Noï, dans une pagode qui fut fortifiée et crénelée et dont toutes les heures dix furent gardées. A avenues tomba une pluie torrentielle qui ne cessa de toute la journée. La nuit se passa sur ce point, sans incident. La colonne de gauche, dans laquelle des Pavillons-Jaunes se trouvaient comme auxiliaires, après avoir remplacé à PhuHoaï la colonne du centre, reconnut le village de Yong et alla se poster avec de l'arlillerie sur la route de Son-Tav, croisée perpendiculairement par la ligne ennemie formée, sur une longueur de 2 kilomètres, de redoutes, de parapets etde bouquets d& bambous. La plaine était nue devant toute cette ligne, dont l'enlèvement élait regardé comme décisif par le colonel Révilfon, qui ru prévenir la colonne du centre pour lui demander une action combinée. Malheureusement cette action était impossible et le général dut ordonner la retraite, qui s'effectua en très bon ordre quoique les bandes ennemies, sorties de leurs retranchements,, aient harcelé nos
troupes de flanc et qu'une de nos compagnies ait beaucoup souffert. On se replia lentement, emportant morts et blessés, jusqu'au pont Balny, où l'on eut répit et où l'on reçut l'ordre de rentrer à Hanoï. Le lendemain, la première colonne reprit son mouvement vers la pagode des quatre colonnes. Elle était évacuée depuis la veille. Avant de pousser plus loin, le commandant de la colonne, le colonel Bichot qui attendait des nouvelles des deux antres colonnes, était informé que la troisième était rentrée la veille au soir à Hanoï. Il n'avait pas de nouvelles de la deuxième, mais entendait le canon et la fusillade de son côté, vers neuf heures. A trois heures, il recevait du commandant de la deuxième colonne un avis daté de YenTaï, annonçant que la deuxième colonne était à ce point, depuis deux heures trente, par ordre du général, pour rentrer à Hanoï. D'autre part, l'ennemi était en retraite de tous les côtés. Le commandant de la première colonne remit au lendemain la suite des opérations, d'autant mieux que le fleuve grossissait à vue d'œil. Tout à coup, à neuf heures du soir, l'inondation arrivait et met-
tait plus d'un mètre d'eau dans la pagode. A une heure et demie, craignant que celleci ne fût emportée, le commandant dela colonne faisait embarquer les troupes sur les canonnières et ne gardait qu'une compagnie. Cette délicate opération se faisait avec le plus grand ordre et le plus grand dévouement de la part de la flottille. Peu après, la digue crevait au-dessous de la pagode, ce qui faisait disparaître tout danger. Les troupes fraîches venues de Hanoï arrivaient, et la pagode était mise en défense. Il faut dire que les mouvements de la flottille ont été des plus difficiles dans les opérations du i5 au17 août, et nous devons donner quelques détails précis sur ce sujet, sans trop revenir cependant sur ce que déjà dit. avons nous : La crue imprévue des eaux avait telle- ment grossi le fleuve que le courant de L surface atteignait, dès le lû, une vitesse t de 9 kilomètres. Des tourbillons s'étaient formés, les navires avaient la plus grande t peine à gouverner, et parfois ils étaient de mettre leur gouvernail toutd'un w bord pour se tenir en route. C'est surtout
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à partir du 16 août que les manœuvres ontété vraiment difficiles: le courantavait une telle force que seules les embarcations à vapeur ont pu maintenir les communications avec la colonne de droite, celle du colunel Bichot : on a été forcé de renoncer à se servir de l'aviron. On avait appareillé le 15 avant le jour, mais les grandes canonnières la Fanfare et le Pluvier n'avaient pu lever l'ancre avant quatre heures trente minutes du matin, tandis que la Tromhe, le MousqueY Eclair s'étaient mis en marche à onet trois heures vingt minutes. Le temps était mauvais de la pluie, du vent et certains signes avant-coureurs d'une perturbation dans les éléments. Vers six heures quinze minutes, les canonnières d'avant-garde la Trombe et l'EclaÙ' ouvrent le feu sur une batterie ennemie masquée dans les bambous, près de la pagode desQuiatre-Colounes. Dès que nos bâtiments se trouvent dans le champ de tir des Pavillons-Noirs, ceux-ci dirigent sur eux un feu des plus vifsqui ce manque pas de précision. Toute la flottille appuie le mouvement
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de l'avant-garde, mais le courant est tel que les canonnières ont grand'peine à se maintenir aux postes qui leur sont assignés. Les projectiles pleuvent autour d'elles; la Trombe et YÉclair sont atteints par des projectiles, deux matelots de YEclairsontlégèrementblessés. Peu après, la Trombe est touchée au-dessous de sa flottaison; on répare l'avarie tantbien que mal, mais dans cette journée ce navire a été par deux fois à deux doigts desaperte. A la première salve de l'ennemi il s'en est fallu de peu qu'un projectile ne frappât sa
chaudière. Vraiment notre flottille n'avait pas les qualités nécessaires pour agir dans ces eaux rapides sous le feu d'un ennemi entreprenant. Il fallut l'énergie de leurs commandants et leur grande habileté pour tirer parti de tous ces bateaux. En communication constante avec le colonel Bichot, le capitaine de frégate Morel-Beaulieu reçut avis de celui-ci qu'après les deux tentatives infructueuses du matin, il allait donner un peu de repos à ses hommes et remettre à trois heures l'attaque de la barricade des Quatre-Colonnes. En conséquence, les bâtiments cessèrent
un feu inutile et vinrent mouiller hors de 'portée de l'artillerie des Pavillons-
Noirs.
deux heures cinquante minutes, ils appareillaient de nouveau, criblaient de projectiles creux la position ennemie et réussissaient à l'ébranlerparle tir de leurs canons-revolvers Hotchkiss. A quatre heures, on cessait le feu. La colonne de droite n'avait pas réussi dans son attaque.- Des canonnières ramassaient les morts et les blessés, et les ramenaient A
à
Hanoï
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Pendant nuit du 16 au-17 août, la crue du fleuve Rouge, qui était déjà très mar-
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quée la veille, s'était encore accèntuée. La violence du courant était devenue extrême une digue, rongée par l'eau, avait cédé à une centaine de mètres en dessous de la pagode, et il s'était formé en cet endroit un véritable et. terrible torrent par lequel le fleuve se déversait dans la plaine, renversant tout sur son passage. Le remous et l'aspiration qui se produisaient à cette coupure de la digue étaient un grand danger les pour bâtiments les et surtout empour barcations. Les communications entre la
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flottille et la colonne du colonel Bicho devenaient presque impossibles. La manœuvre des navires dans ces re mous exigeait les plus grandes précautions leurs embardées étaient effrayantes. Le vitesse du courant dépassait six nœuds soit près de 11 kilomètres. Les hommes de l'infanterie de mariŒ ont été admirables, autant par leur sang froid devant ce danger terrifiant de l'eai quiles a envahis jusqu'à la ceinture lorsqut les digues ont été rompues, que par leui vaillance en montant par trois fois à l'as, saut de la barricade. On ne sait commen] exprimer l'admiration des soldats pour 1( colonel Bichot. Véritable type de l'homme de guerre, c'est à lui et au capitaine di génie Dupommier que la colonne a dû soi salut. Le colonel a conduit les attaques er personne, et où iln'a pas réussi le succèi était impossible. Le but que se proposait le général er chef n'a pas été atteint, cela n.e doit pa. le être dissimulé mais il est heureux que résistance des Pavillons-Noirs nous ait em. pêchés de continuer sur Sond-Tay.L'inondation a été effroyable. Toute colonne
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surprise'dans la plaine eût été perdue. Les Pavillons-Noirs ont fait de grandes pertes par millier d'hommes atteints moins, un au le feu, tués ou abandonnés à l'inondation. Cependant la guerre .devenait difficile; il fallaitdes renforts, car chaque jour on s'étendait dans le pays, et, pour tenir tous les points occupés, il fallait immobiliser du monde et des canonnières. En attendant les renforts jugés nécessaires,le général Bouët ne négligea rien pour amener la prompte pacification de tout le Delta du Tonkin, et surtout pour que les troupes destinées à faire campagne dans ce pays trouvassent dans leur tenue et leur équipement, jusqu'alors malappropriés au climat, de même que dans le transport de leurs munitions, de leurs viyres et de leurs bagages, toutes les commodités imaginables. La plus heureuse des innovations dont le corps expéditionnaire sera redevable cet officier général est, sans contredit, la suppression de la vareuse de molleton, dont les chaleurs tropicales contre lesquelles il y a à lutter sont loin de justifier l'Usage en toute saison par nos sous-officiers et nos soldats des différentes armes. La va-
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reuse a donc été remplacée par une espèCE de chemisette en cotonnade légère, connue dans le Tonkin sous le nom de ke-as. Elle est d'une couleurbrun foncé, tirant même beaucoup sur le noir. Les pantalons et lecoiffes du casque indien, blancsjusqu'alors, ont été confectionnés avec la même étoffe, Cette modification dans la tenue du corp? expéditionnaire est des plus heureuses, car, dans cette guerre de haies et d'embuscades que nous faisons, guerre où, des deux côtés, l'on ne procède que par surprise, des masses sombres opérant par tel temps que ce soit peuvent se dissimuler bien plus facilement, lorsqu'elles parcourent des plaines interminables, que celles dont le bariolage trahit tous les mouvements aux yeux de l'ennemi. L'habillement qui a: été réformé si à propos faisait du soldat français une véritable cible et pouvait le lors-i fairetuer àune distance considérable, qu'il se profilait sur une digue. Pour prévenir la plaie annainile, qui, fort longue à guérir, existe dans tout le Tonkin comme en Cochinchine et à Canton le commandant en chef songea à faire dontroupe, ner des bas à tous les hommes de
qui, de plus, doivent avoir toujours sous la main une flanelle et un tricot pour se couvrir aux abaissements de température, lesquels, en hiver surtout, sont considérables dans un même jour. Cette guerre, toute d'embuscades et de surprises, comme nous l'avons dit, rappelle sous bien des rapports les vieilles luttes de la Vendée et surtout celles du Bocage. La promptitude dans les mouvements à exécuter -et la célérité dans les marches y sont les principales conditions de succès. Le commandant en chef l'a si bien compris qu'il n'a pas hésité à constituer un train de bagages, ne laissant porter aux soldats en marche que les cartouches et la ration de vivres pour la journée. Une troupe de coolies, marchant à un kilomètre environ en arrière, est chargée de porter les sacs, ainsi que les vivres de réserve. Cette modification profonde de notre tactique donne au corps expéditionnaire un cachet fort original et fait tout de suite penser aux lignes de bagages dont les armées grecques et romaines se faisaient toujours suivre. Dans leurs guerres de l'Afghanistan, les
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Anglais ont employé le même système ils n'ont eu qu'à s'en féliciter. Enfin, dans le bas pays, l'eau des rivières, lourde, chargée de détritus organiques, salée pendant une bonne partie de l'année, étant difficilement potable, des recommandations expresses ont été faites pour qu'en marche le soldat ne boive, autant que possible, que de l'eau ayant bouilli, puis ayant été aérée à l'aide d'un bambou effiloché. Ces mesures étaient excellentes. Maintenant, reprenons notre récit. Pendant que nos colonnes marchaient sur Son-Tay, le lieutenant-colonel Brionval, aidé de M. Marquis, l'énergique résident français de Haï-Phong, organisait une colonne avec les faibles éléments militaires laissés à sa disposition, et enlevait les places de Haï-Dzuong et de Phu-Binh, défendues toutes les deux, dit-on, par des contingents chinois. Dans tous les cas, la résistance n'a pas été sérieuse. Deux cents canons de bronze et des monceaux de ligatures ont été les principaux trophées de cette courte, mais brillante expédition. A partir du i8 août, des opérations mili,
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taires, à la suite desquelles nos soldats
s'emparèrent de la capitale de l'Annam, furent poursuivies avec activité. L'attaque et la prise des forts de Hué eurent lieu le 20 août. L'escadre, composée -des navires le Bayard, l'Atalante, VAnnamile, le Château-Renaud, le Drac, le Lynx et la Vipère, quitta, dans la matinée du 19, la baie de Tourane, et, dans l'après-midi du même jour, arriva devant l'entrée de la rivière de Hué. Cette entrée est protégée au Nord et au Sud par des lagunes et des - dunes de sable couvertes de forts et de batteries, dont il était indispensable de s'emparer avant de passer outre. Le commandant en chef avait résolu de commencer l'attaque par les forts du Nord. En conséquence, les navires prirent position dans l'ordre suivant le Drac, tout au Nord, en face d'un fort puis le Lynx, devant un village où devait s'opérer le débarquement la Vipère et le Château-Renaud, en face de deux batteries annamites. Venaient ensuite l'Annamite, l'Atalante etle Bayard, qui avaient pour objectif un grand fort cii-culaire, bâti à la pointe de la langue de terre située en face des dunes de sable du
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Sud et couvrant l'embouchure même de li rivière de Hué. Peu à peu commença bombardement les Annamitesrépondirentvigoureusement , mais sans succès leurs boulets ronds ni portaient pas jusqu'aux navires. Lebom.
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bardement se prolongea jusqu'à la nuit éclairé par la lueur des incendies allumés dans les villages voisins. Le débarquemenl devait avoir lieu le lendemain matin, mais l'état de la mer ne permit pas de l'effectuer et il n'eut lieu que le jour suivant. Le corps de débarquement comprenait les compagnies duBayard, de.l'Atalante du Château-Renaud, avec de l'artillerie; les 27e et 31°. compagnies de l'infanterie de marine; une compagnie de tirailleursannamites deux batteries d'artillerie de marine; cent coolies au total, mille cinquante hommes et quinze canons. Les Annamites attendaient nos troupes dans des tranchées. Ils les accueillirent par une pluie de bombes et une fusillade bien nourrie. Nos soldats escaladèrent les dunes, tombèrent sur les Annamites qu'ils mirent en fuite, et, après en avoir tué un grand nombre, coururent snr le fort du
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Nord et s'en emparèrent : ils se rabattirent ensuite sur le fort du Sud, enlevèrent les batteries de la plage, le fort circulaire et emparèreiit de la pagode des Bains du Roi. L'Annam était à nous. Immédiatement, notre commissaire général civil se rendait à Hué avec les pleins pouvoirs dont il était muni et s'installait à la légation de France. De là, il adressait au gouvernement annamite un ultimatum dans lequel, après avoir rappelé les nombreux griefs que nous avions à faire valoir, il indiquait les conditions d'une paix accep-
table.
Le 25 août, après une longue discussion, le traité dont il avait posé les bases était
:et
accepté et dûment signé. la convention En voici le sommaire reconnaissait pleinement expressément le - protectorat de la France sur l'Annam. — Le droit pour nous d'occuper, à titre permanent, les fortifications de Thuan-An et de l'entrée de la rivière de Hué, ainsi que la ligne de Nungy-Kiva, qui commande les communications de l'Annam avec la Cochinchine. — La province de Bin-Thuan,
contiguë à la Cochinchine, était cédée à la France en l'acquit des anciennes dettes contractées par l'Annam et dont le recouvrement était depuis longtemps vainement poursuivi. — Les ports de Xuonday et de Tourane seront ouverts. — Une ligne de télégraphie aérienne sera établie entre Saigon et Hanoï. —Des résidents pourront être établis par la France aux chefs-lieux de toutes les provinces du Tonkin. Les résidents seront assistés de forces françaises dans la proportion jugée nécessaire par le gouvernement français, qui pourra également établir le long du fleuve Rouge les fortifications et les postes qui lui paraitront nécessaires. La France acceptait les charges qui font partie du devoir du protectorat garantir l'inlégrité des États protégés, les défendre contre les agressions du dehors et les rébellions du dedans, etc. Spécialement la France se chargeait à elle seule de chasser du Tonkin les bandes desPavillons-Noirs et d'assurer la securité du commerce du fleuve Rouge. Il est facile de constater les avantages que ce nouvel arrangement présentait en
:
ce qui touche nos rapports avec laiuiam, Par ce fait notre situation au Tonkin sf trouvait considérablement améliorée. Lt traité conclu, Je commissaire général installa un résident près de la cour"de Hue et se hâta de revenir au Tonkin, où des
opérations de guerre pouvaient avoir lieu. Quant à l'escadre, elle reprit une surveillance active sur les côtes pour fermer la mer à nos adversaires se porter au besoin sur les points menacés. Le gouvernement français venait d'ailleurs, par une circulaire maritime, de rappeler l'interdiction qui frappe depuis longtemps en Annam l'importation des armes et la nécessité où il se trouvait 'de tenir rigoureusement lamain à cette interdiction. Toutes les mesures étaient donc bien prises. Jusqu'à la fin dumois d'août il ne se plaine La marquant. et rien de très passa le fort de Phu-Haï avaient été abandonnés .supposait qu'on Pavillons-Noirs,' les par s'être réfugiés sur Son-Tay. La pagode des Quatre-Colonnes était toujours occupée par des troupes qui
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avaient eu trois alertesinsignifiantes; 1 reconnaissances autour de la pagode n' vaient révélé aucun ennemi. Toutefois garnison avait été doublée, et dans les de niers jours du mois des troupes étaie portées vers Son-Tay sous les ordres ( général Bouët. On formait un corps de quatre mil volontaires annamites et il y avait ui
police de deux cents indigènes qui foin tionnait depuis près de trois semaines. E général les Annamites reprenaient coï fiance et beaucoup étaient revenus dans ville d'Hanoï. La canonnière la Fanfat avait eu la soumission des chefs des vi lages situés an-dessus des Quatre-Colonne et les rapports des espions signalaient u mouvement de retraite des Pavillons-Noirs de nombreuses défections semblaient s produire dans leurs rangs, décimés par 1 étai fait plus sérieux Un maladie. encore la rupture entre les Annamites et les Pavil Ions-Noirs. Ceux-ci se montraient djspos à continuer la guerre, tandis que ceux-li de souciaient contrevenir ordre peu aux se uni souverain et de persister dans de leur lutte qui avait été terriblemejit meurtrière
]
ie nouvel empereur d'Annam semblait
evoir tenir la main à l'exécution loyale du
raité de Hué. Il avait envoyé deux de ses îinistres sur le théâtre de la guerre avec rdre de dissoudre les troupes annamites lui combattaient contre nous et de faire iiriger sur la capitale les généraux qui refuseraient de déposer les armes. Les résultats de cette mesure semblaient evoir être des plus heureux. La pluie et le soleil étaient touj ours mpitoyables, mais c'était plaisir de voir ms braves soldats supporter l'un et l'autre tvec la gaieté qui caractérise le Français. Ici nous tenons à parler d'une corresondance qui a vivement frappé un grand mbre de nos compatriotes. Le 28 septembre, le 13 et le 17 octobre 883, un journal parisien publiait une série ie lettres émanant d'un officier de marine à. qui sa situation ne permettait pas de *
igner.
C'était, disait le Figaro, la relation détaillée et prise sur le vif des opérations liilitaires accomplies pendant le mois d'août et à la suite desquelles nos soldats S'emparèrent de la capitale de l'Annam,
Et le journal ajoutait: ce récit «n'c pas seulement un document historiqu c'est aussi un fort joli morceau de littcr
ture».
En effet, de son bord, où il était res pendant l'action engagée contre les troup annamites qui garnissaient les forts de Hu le brillant écrivain, lieutenant, officil à bord de l'Atalante, avait suivi avec ui llinettè d'approche les différentes phasi du combat. Son imagination aidant, dépeignit dans ses correspondances, SOL des couleurs absolument romanesques, conduite de nos compagnies de débai quement lors de la prise des forts c. Hué. Il décrivit avec une grâce charmante dt scènes de détail, des anecdotes de batailh des saillies spirituelles succédant à de élans farouches. En véritable artiste qi, n'avait rien de mieux à faire, en corres pondant émérite qui pense toujours à soi journal, il fabriqua de chic toute un bataille, vue de loin, décrite de près. CeL fut lestement troussé, avec un grain d; poésie. Les lumières furent éclatantes; ombres, très noires. ]
le
:
Voici quelques extraits de ces lettres Hué. les de Dans La prise campe« — ments des marins del'Atalante. —Nuit du 20 août. plein d'incerD'abord le débarquement « titudes, au petit jour, au milieu des brisants de la plage; les matelots, dans l'eau jusqu'à la ceinture, secoués par les lames, trébuchant, mouillant leurs munitions et leurs armes. Mauvais début. Et puis, tout
le monde était arrivé au complet sur le sable, malgré les balles et la pluie de bombettes que des gens invisibles, cachés derrière les dunes, lançaient d'en haut. Vite, on avait commencé à monter et à courir en gardant un silence de mort. Et puis, tout à coup, dans une ligne de tranchée merveilleusement établie, qui semblait entourer toute la presqu'île, on avait trouvé des gens qui guettaient, tapis comme des rats sournois dans leurs trous de sable des hommes jaunes, d'une grande laideur, étiques, dépenaillés, misérables, à peine armés de lances, de vieux fusils rouillés, et coiffés d'abat-jour blancs. Ils n'avaient pas l'air d'ennemis bien sérieux; on les avait
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presque tous tués là, sur place, au miliel de leur effarement, à coups de baïonnette « Quelques-unss'étaient enfuis vers 1 Nord, laissant tomber leurs provisions leurs petits paniers de riz, leurs chiques d bétel. Ceux qui avaient la poitrine crevé criaient d'une manière profonde et hoi rible, envomissantleursangdans le sable Un, qui avait dans la bouche la baïonneth d'un matelot, mordait cette pointe, la ser rait de toutes ses forces, — avec ses dent! saignantes qui crissaient contre le fer, ., pour l'empêcher d'entrer, de lui crever 1* gorge. Mais le matelot était fort, et sei dents s'étaient cassées; la pointe, sorti par la nuque, l'avait cloué dans le sable On tuait presque gaiement, déjà grisé pa: les cris, par la course, par la couleur di sang. Et tout cela qui s'était passé très vite très vite, en quelques secondes, défilai maintenant en souvenir, avec une len teur et une netteté de détails qui étaient
atroces.
supérieur de le commandant Ensuite, « l'ordre avait donné débarquement de corps à cette compagnie de l'Atalante de montei tout au bout de la dune et de s'emparer du
iart de droite, sur lequel flottait le pavillon jaune d'innam. -
;
toujours était à la On monté course, un « peu en désordre les matelots lancés y allaient comme des enfants. Puis brusquement ils s'étaient arrêtés, reculant de deux pas. Une nouvelle tranchée, remplie de têtes humaines!. Toutes ces figures venaient de surgir à la fois, sous une rangée de chapeaux chinois de forme abat-jour; leurs petits yeux à coins retroussés regardaient avec une expression fausse et férocc, dilatés par une vie intense, par un paroxysme de rage et de terreur. « C'étaient ceux-ci qu'on avait aperçus, del'escadre, et qu'on suivaitanxieusement, de là-bas, au bout des longues vues. ressemblaient plus du tout aux pauvreshères dela tranchée basse c'étaient des hommes très beaux, vigoureux, trapus des têtes carrées, militaires, vraies tètes 4e HunSj avec des cheveux longs et des
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;
;
petites karbiches pointues à la mongole. Correctement équipés, portant leurproviballes dans des petits paniess de jonc passés au bras, comme des ménagères qui vont au marché, ils restaient là, bar-
ili
rant le passage, attendant, ne disant rien
et ne bougeant pas. — C'étaient les soldats réguliers d'Annam, — et ils devaient être braves, pour avoir tenu depuis la veille au soir sous le feu terrible des obus. vrai; il mais Mal armés, est on ne pou« vaitguère juger de cela à première vue des lances ornées de touffes de poils rouges, de grands coutelas affreux emmanchés sur des hampes, et des fusils à pierre, labaïoni
;
nette au bout. d'hésitation de instant Un et peur cheî « ces grands enfants étourdis, — les mate lots la surprise, sans doute, la surprise de ces têtes jaunes, de ces physionomie* jamais vues, et rencontrées là face à face émergeant de leur fossé de C'est prend, quand cela ces peursgrave « là. Les hommes d'Annam s'étaient redres sés davantage, comme prêts à sortir dl leurs trous. L'instant devenait suprême. Ili étaient à peine trente, eux, les premierl montés, en présence de tout ce mondi jaune; les autres restaient encore à mi côte, beaucoup trop loin pour les sou tenir. « Et précisément, malgré leurs airs dl
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grands garçons et leurs tournures carrées, ces matelots de la section de tête étaient des très jeunes, presque tous des enfants d'une vingtaine d'années, pêcheurs bretons, qui avaient quitté leur village ail printemps dernier et n'avaient jamais vu pareille fête. — On leur avait parlé des chausse-trapes, des trous garnis de pointes j Chinois dissimulent les que sous les pas on leur avait même donné des cordes à nœud, en leur expliquant le jeu de ces pièges et la manière d'en sortir. Et ces choses leur revenaient à l'esprit, avec la tête du commandant Rivière plantée au bout d'une pique, et la mort des prisonniers suppliciés. Oui, ils avaient bien vraiment un peu peur. de lieutenant vaisseau qui Le comman« dait cette compagnie de l'Atalante s'était mis à leur crier En avantf à leur dire très vite une foule de choses pour les entraîner, Il avait avec lui un brave second maître de manœuvre, appelé Jean-Louis Balcon, qui avait déjà guerroyé en Chine, et qui, lui, cherchait à entraîner l'aile gauche par une rapide et bizarre harangue de matelot. — Et les têtes qui regardaient
:
-
derrière la tranchée écarquillaient leurs petits yeux obliques, hésitant encore, se demandant si le moment était bien venu de se ruer sur ces Français. « Tout cela, qui est très long à dire, n'avait pas duré deux minutes. Mais, de l'escadre, on avait vu aussi ce mouvement d'hésitation, et on l'avait suivi avec une poinante inquiétude. « Enfin, tout d'un coup, les matelots avaient été enlevés par je ne sais quelle parole meilleure, quel sentiment de rage ou de devoir. — Ils s'étaient jetés en avant, tête baissée, avec des cris contre les gens
dnam.
« Ceux-ci s'étaient attendus àune attaque à l'arme blanche, ayant vu briller les baïonnettes des Français. Mais non, les maga-sins des fusils étaient chargés, et ce fut un feu répétition, un de ces feux rapides, foudroyants, des « Kropatschek », qui s'abattit sur eux comme une grêle. Ils tomfcliftnl en faisant voler du sable, et maintenant ils avaient trouvé, eux aussi, des voix aiguës pour crier; ils s'affalaient, ne savaient plus se servir de leurs lances; cette mpiditéde nos armes leur jetait une im-
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ils
n'avaientrien imamense stupeur. Non, giné de pareil des fusils encore plus effrayants et d'unjeu plus mystérieux que les canons d'hier!. Alors ils avaient été pris de cette terreur sans nom des choses incompréhensibles, fatales, contre lesquelles on sent qu'il n'y a rien à faire, et la panique des déroutes avait commencé à les gagner tous comme une traînée de poudre. « Ils fuyaient en criant, se renversant les uns les autres dans leur tranchée étroite. Et les matelots, la petite poignée d'hommes, tout à fait enfiévrés à présent par la fumée, couraient le soleil, le après, par par sang, baïonnette dans les reins, — et montaient
toujours.
1
était arrivé quelques secondes, En on « tout en haut des dunes, devant le fort. Des soldats à tête de Hun, qui le gardaient, cachés derrière les talus, en étaient sortis par un mouvement brusque, comme des diables qui sautent d'une boîte, et avaient fait feu à bout portant. Par une de ces chances extraordinaires comme nous en avions ce matin-là, ils n'avaient blessé personne et tout de suite ils s'étaient sauvés
en désordre, gagnés eux aussi par la contagion de la peur. lieutenant de vaisseau comman le Alors «
dant, aidé toujours du second maître Jean Louis Balcon, avait arraché le pavillon jaune d'Annam, le pavillon noir du mandarin, et hissé à leur place celui de France. Ce fort était le point culminant de la presqu'île; on l'avait immédiatement aperçu de partout, cc petit pavillon français; de la plage et de l'escadre, les matelots, qui étaient àce momenttrès expansifs, l'avaient salué par des cris de joie. C'était le premier flottant sur cette terre deTu-Duc; ce n'était signe d'esrien et c'était beaucoup un — poir, visible là pour toute la petite troupe française, et, pour les autres, le présage de la déroute. « Du haut de ce fort où les hommes de l'Atalante venaient en courant se grouper, on voyait de loin tout le corps de débarquement, la compagnie du Bayard, l'artillerie, l'infanterie de marine, les matas indigènes se masser sur les dunes pour commencer leur grand mouvement d'ensemble vers les forts du Sud. On suivait cela du coin de l'œil, mais on avait surtout
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à s'occuper des fuyards de la tranchée, qui redescendaient tous sur l'autre versant de sable, du côté de l'intérieur de la grande lagune. « On en avait tué beaucoup, presque au vol. Mais la masse s'était réfugiée à gauche, dans un village qui était là, au pied du fort. Un village très riant sous le soleil, avec des maisonnettes blanches bariolées à la chinoise; avec de beaux arbres exotiques et des jardins fleuris avec des pagodes anciennes, aux murs ornés de faïences de'mille couleurs, aux toits tout hérissés de monstres. «Oh!les malheureux fuyards!. L'instanl d'après ce village flambait. Un obus d( l'escadre était tombé au milieu, justement dans des cases de paille. Murailles d( planches peintes, fines charpentes de bambous, cloisons de rotin à jours, tout cèle s'était allumé presque à la fois; lesflamme passaient d'une maison à l'autre si vit( qu'on n'avait pas le temps de les voil courir. « Autour de ces feux, il doit se passer di curieuses choses. Mais ils sont très lointains et du bord on ne peut rien voir. Il devi-enl
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nécessaire de changer le point de vue; nous le transporterons donc à terre, là-bas, au campement des marins de YAtalante. matinale, qui milieu la lumière de Au « était fraîche et bleue, ces flammes étaient d'un_j*ouge extraordinaire; elles n'éclairaient pas, elles étaient sombres comme du sang. On les regardait se tordre, se mêler, se dépêcher de tout consumer les fumées, d'un noir intense, répandaient une puanteur acre et musquée. Sur les toits des pagodes, au milieu des diableries, parmi toutes lesgriffes ouvertes, toutes les queues foucchues, tous les dards, cela semblait d'abord assez naturel de voir courir les langues rouges du feu. Mais tous les petits monstres de plâtre s'étaient mis àcrépiter, à éclatet, lançant de droite et de gauche leurs écailles en porcelaine bleue, leurs yeux en boules de cristal, — et ils s'étaient effondrés, avec les solives, dans les trous béants des sanctuaires. « Les matelots devenaient difficiles àr retenir; ils voulaient descendre dans ce village, fouiller sous les arbres, en finir avec les gens de Tu-Duc. Un danger inutile, car évidemment les pauvres fuyards
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allaient être obligés d'en sortir, et alors la route d'en bas, qui passait au pied même du fort, deviendrait leur seule iseme. « On avait réglé les hausses
pour la distance, chargé les magasins des fusils; on avait tranquillement tout préparé pour les tuer au passage. Et, en les attendant, on regardait là-bas le mouvement combiné des autres troupes françaises qui s'accélérait vers le Sud, les ennemis qui fuyaient, les pavillons d'Annam qui s'amenaient. La grande batterie du Magasin-au-riz était prise, les villages de derrière brûlaient avec des flammes rouges et des fumées noires.Et on se réjouissait devoirtous allait incendies, voir de tout comme ces vite et bien, comme tout ce pays flambait. On n'avait plus conscience de rien, et tous les sentiments s'absorbaient dans cette étonnante joie de détruire. le feu effet, ils avaient passé En sous « des marins de YAtalante, ces fuyards attendus. On les avait vus paraître,se masser, à moitié, roussis, à la sortie de leur village; hésitant encore, se retroussant très haut pour mieux courir, se couvrant la
tête, en prévision des balles, avec des bouts -de planches, des nattes, des boucliers d'osier. — précautions enfantines, comme on en prendrait contre une ondée. Et puis ils avaient essayé de passer, en courant à toutesjambes. « Alors la grande tuerie avait commencé. On avait fait des feux de salve, — deux — et c'était plaisir de voir ces gerbes de balles, si facilement dirigeables, s'abattre sur eux deux fois par minute, au commandement, d'une manière méthodique et sûre. C'était une espèce d'arrosage qui les couchait tous, par groupes, dans un éclabouSsement de sable et de gravier. d'absolument voyait fous, qui se On en « relevaient, pris d'un vertige de courir, comme des bêtes blessées ils faisaient en zigzags, et tout de travers, cette course de la mort, se retroussant jusqu'aux reins d'une manière comique, leurs chignons dénoués, leurs grands cheveux leur donnant des airs de femme. « D'autres se jetaient à la nage dans la lagune, se couvrant la tête, toujours avec des abris d'osier et de paille, cherchant à gagner lesjonques. On les tuait dans l'eau.
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avait de très bons plongeurs, qui y « restaient longtemps au fond; —on réussissait tout de même à les attrapper, quand ils mettaient la tête dehors pour prendre une gorgée d'air, comme des phoques. « Et puis on s'amusait à compter les morts. cinquante à gauche, quatre-vingts à droite dans le village, on les voyait par petits tas quelques-uns, tout roussis, n'avaient pas fini de remuer un iras, une jambe se raidissait tout droit, dans une crispation; ou bien on entendait un grand cri horrible. « Avec ceux qui avaient dû tomber dans les forts du Sud, cela pouvait bien faire huit cents ou mille. Les matelots discutaient là-dessus, établissaient même des 11
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paris sur la quantité. grande la annamite Un fort terre de « venait d'envoyer au milieu d'eux trois boulets parfaitement pointés, qui, par une rare chance, avaient traversé les groupes sans toucher personne. Ils n'y avaient même pas pris garde, tant ils étaient occupés à guetter les passants et les nageurs. « Il n'en restait plus guère pourtant.
peine neuf heures du matin, et déjà tout semblait fini; la compagnie du Bayard et l'infanterie venaient d'enlever là-bas le fort circulaire du Sud, armé de plus de cent canons; son grand pavillon jaune, le dernier, était par terre, et de ce côté encore les fuyards affolés se jetaient en masse dans l'eau, en se cachant la tête, ponrsuiyis par les feux de salve. En moins de trois heures, le mouvement français s'était opéré avec une précision et un bonheur surprenants la déroute du roi d'Annam était achevée. « Le bruit de l'artillerie, les coups secs des gros canons avaient cessé partout; les bâtiments de l'escadre ne tiraient plus, ils se tenaient tranquilles sur l'eau très bleue. « Et puis une foule blanche s'étaitrépandue en courant dans les mâtures tous les matelots restés à bord étaient montés dans les haubans, face à terre, et criaient ensemble « Hurrah! » en agitant leurs chapeaux. C'était la fin. » A
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CHAPITRE NEUVIÈME LEr GRANDES OPÉRATIONS DE LA FIN DE 1883.
Sommaire. — Evénements des 10", 2 et 3 septembre. — Combat près de Haïdzuong. — M. Harmand à Hanoï. — COllcentration des troupes à Hanoï. — Marche de l'armée sur Phu-Hoï. — Combat du 10 septembre. — Marche sur PhuTchong et vers Son-Tay.— Retraite des Pavillons-Noirs.— Reconnaissance du colonel Bichot. — Nouvelles de Hué. — Points occupés par les troupes françaises. Mesures prises. — Départ du général Bouët. Événements d'octobre. — — — Situation à cette époque.
Comme nous l'avons vu, le résultat qu'on s'était proposé dans les combats du mois d'août n'avait pas été complètement atteint, et, de plus, on avait constaté la présence d'adversaires nombreux, bien armés et appuyés sur de solides travaux de défense. Appréciant les difficultés de la situation et la force de l'ennemi, le général réclamait l'envoi de renforts. Le gouvernement prit immédiatement des dispositions pour satis-
faire à cette demande. Dans le courant de septembre, les renforts et les approvisionnements jugés nécessaires partirent en conséquence de France et d'Algérie. Cependant le commandant du corps expéditionnaire jugeait qu'il pouvait, sans attendre l'arrivée des renforts annoncés, reprendre l'offensive, et ce fut entre les villages de Palan et de Phong que le corps expéditionnaire livra les combats des premiers jours de septembre. En effet, à la suite des affaires des 15 et 46 août, l'ennemi s'était retiré vers le Day, dans les villages de Phong, Sau et Ra, et sur la rive droite du Day. Le commandant du corps expéditionnaire avait fait mettre en défense la pagode des Qualre-Colonnes et y avait laissé deux compagnies avec une section du génie, une section d'artillerie et une ambulance. Des reconnaissances s'étaient avancées dans la plaine aussi loin que le permettait la hauteur des eaux et jusqu'à Kê (sur le fleuve, à mi-distance entre les QuatreColonnes et Palan), où l'on avait détruit les ouvrages qui y avaient été élevés pour battre les canonnières les canons qui les
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armaient avaient été envoyés à Hanoï. H s'agissait dans l'opération projetée d'attaquer les Pavillons-Noirs dans leur nouvelle position, et avant tout de s'assurer que le fleuve Rouge était libre et que les transports pouvaient y circuler sans danger. Dès le 25 août, le général Bouët avait ordonné à la canonnièrelaFanfaredepousser une reconnaissance le long du fleuve, au-dessus de la pagode des QuatreColonnes. Ce navire constata, du 26 au 29 août, que le fleuve était libre jusqu'à Palan ou Ba'Giang. Cet important village est bâti à environ 25 kilomètres à l'ouest d'Hanoï, sur les bords du fleuve Rouge et des deux côtés de la digue-route de Hanoï à Son-Tay. Il se trouve à 8 kilomètres environ au-dessous de l'embou chure du Day. De Ba'Giang part, à travers les rizières, une route qui, après avoir traversé les villages de Phong et de Thong, tourne brusquement à l'Ouest, franchit le Day et monte directement à Son-Tay par Ban-Ha, Cau-Yony et Back-Loa. Le 29 août, le chef d'état-major, le commandant Coronnat, remontait le Song-Koï
et poussait une reconnaissance avec le transport de rivière le Rurimaru,sur lequel on avait embarqué une compagnie d'infanterie de marine; en même temps, une colonne, commandée par le commandant Berger et composée de trois compagnies, dont une de tirailleurs, suivait la digue, escortée sur la droite par les canonnières la Hache et la Fanfare, qui se maintenaient à sa hauteur. Le commandant Berger atteignit Glay sans trouver de résistance et rentra aux Quatre-Colonnes, tandis que les canonnières continuaient jusqu'à Palan sans rencontrer l'ennemi. En conséquence, les ordres de marche furent lancés. Le 30, un bataillon — trois compagnies d'infanterie et une compagnie de tirailleurs — était concentré aux QuatreCblonnes le 31 août, un second bataillon partait de Hanoï sur la flottille et le Rurimaru, remontait le fleuve Rouge et continuait par eau jusqu'à Palan, escortant le premier bataillon qui suivait la digue de défense du Song-Koï. A trois heures du soir, le même jour, tous deux étaient installés à Palan et, tandis que la Fanfare et le Pluvier restaient mouillés devant le vil-
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lage pour surveiller l'ennemi du côté de Bac-Ninh, les autres canonnières se dirigeaient surl'entrée du Day. En avant de Palan, on apercevait l'ennemi qui faisait un mouvement vers l'Est, Une digue, celle que l'on devait suivre pour aborder la ligne de retranchements; se dirigeait dans la direction de Phong Courant en ligne droite sur une longueur de 2 ou 3 kilomètres, elle s'inflé. chissait légèrement vers la gauche, passail à Phong, où, se soudant à une anciennf digue, elle revenait vers la route de Palan demi-cercle. décrivant de Dam sorte une en l'espace compris entre les digues, le terrain de rizières était noyé, et de mêm entre les digues et les rives du fleuve. L< centre de l'ennemi était à Phong, Se gauche postée aux villages de Tanh-Teun< et d'A'Mo, sa droite débordait la lisière d<j Phong et donnait la main à des force! annamites que l'on voyait dans le lointain Ensuivant la digue, nous avions d'abord à enlever, par.des terrains difficiles, le vil lagedeTanh-Teune, qui était à cheval sui la partie de la digue perpendiculaire à le puis al direction que suivait la colonne
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delà de Tanh-Teune, avant d'arriver t Phong, la position d'A'Mo, défendue pai un fortin. Le 1erseptembre, à sept heures du matin, les troupes se mettaient en marche sui deux colonnes la colonne de gauche 2e compagnie de tirailleurs annamites — et Pavillons-Jaunes — suivait un sentier dans la rizière la colonne de droite — le gros des troupes — suivait la digue. La distance de Palan à Phong n'est que de 5 kilomètres. A huit heures trente minutes, l'avant-garde prenait le contact de l'ennemi et engageait feu. Sa gauche était établie au village de Tanh-Teune, défendu sur la digue qui protège son front contre l'envahissement des eaux par des abatis de bambous. La position ennemie dessinait un vaste arc de cercle, avec de bons points d'appui du seul côté accessible près de la digue, de telle sorte qu'il fallait d'abord déloger les Pavillons-Noirs au centre et à droite pour pouvoir cheminer le long de la digue. La 2e compagnie de tirailleurs se porta à cet effet à la hauteur d'A'Mo, les Pavillons-Jaunes à sa gauche, ces indigènes
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soutenus par la 25e compagnie du -4° régiment. L'artillerie dirigeait pendant ce temps envoyait le feu nourri et centre sur un quelques projectiles sur la droite. En se déployant, les troupes gagnaient du terrain à droite, et rendaient moins dangereux le cheminement sur la digue. La position de l'ennemi étant bien reconnue, il devenait nécessaire de faire effort sur la droite, afin de permettre à nos troupes engagées dans la plaine d'avancer sans être prises en écharpe par le feu de Tanh-Teune. Le commandant Berger recevait, en conséquence, l'ordre de gagner rapidement la pagode placée au centre de r la digue et de faire pivoter sur sa droite la 26e compagnie du 2e régiment, de manière dégager la digue dans la partie perpenà r diculaire à la direction que suivait le gros des troupes. La digue fait, comme on l'a î dit, un coude brusque à angle droit entre la partie que l'on avait suivie et celle qui passe à Tanh-Teune. En donnant cet ordre, on envoyait au | commandant Berger la 27e compagnie du 2e régiment, comme soutien. [
Sa colonne s'engagea bravement. Dès qu'elle avait gagné un peu de terrain, la section d'artillerie d'avant-garde avançait, suivie de près par les quatre pièces du gros, escortées de leurs soutiens. Les troupes gagnaient du terrain de tous les côtés, et les Pavillons-Noirs évacuaient le centre de la digue pour se porter à la lisière de Phong. Les Annamites, à leur tour, étaient refoulés à l'extrême gauche par les Pavillons-Jaunes, soutenus par la 20e du 4e régiment. La retraite de l'ennemi se dessinait nettement dans la plaine il était impossible, malheureusement, de tirer un parti décisif de ce mouvement de recul; la hauteur de l'eau dans la rizière était telle que les hommes en avaient jusqu'aux aisselles et étaient forcés de tenir le fusil haut pour que la culasse put continuer à fonc-
;
tionner. La droite était du reste arrêtée par la lisière de Tanh-Teune, d'où l'ennemi tirait à couvert. La chaleur devenait accablante. Le commandant Berger était arrivé à 150 mètres de la lisière; voyant l'ennemi ébranlé, il demanda des renforts pour don-
village de le l'assaut et emporter ner Tanh-Tune. Le général lui envoie immédiatement la 26e compagnie, fait avancer l'artillerie jusqu'au coude de la digue, et au moment où cette compagnie arrive au même point, clairon sonnant, toute la droite se précipite à la baïonnette sur les retranchements. En cinq minutes, la 28e du Ae régiment perd 15 hommes, la 26° et la 27e du 2e régiment ont chacune un officier tué, MM. Aubertin et Haulon. Les hommes de la 26e du 2° régiment, ainsi que les tirailleurs annamites de la 3e compagnie, nageaient pour gagner la lisière. La résistance de l'ennemi était brisée par cette furieuse attaque, ses cadavres jonchaient le sol. Il abandonnait sept étendards, des fusils, etc., et fuyait dans la direction de Phong. De leur côté, les Pavillons-Jaunes l'abordaient et un de leurs chefs capturait un grand pavillon. La droite poursuivait son succès, mais au débouché de Tanh-Teune elle était arrêtée par un feu violent parti du village d'A'Mo et d'un fortin placé à quelque distance de la digue. Le général, ne croyant pas devoir s'engager plus à fond avant
d'avoir fait reposer les hommes, donnai) l'ordre de se maintenir et de se mettre c l'abri dans le village que l'on venait d'en lever. A sa droite et au centre,l'ennemi battaii en retraite et se dispersait sous le feu len et continu de notre artillerie. Une reconj naissance lancée par le commandant Ber.ger montrait que la lisière d'A'Mo se com, posait d'un fort parapet crénelé appuyé à une pagode établie sur la vieille digue elle même, et d'un petit fortin qui formait 1« limite de la ligne de défense à l'extrême droite. On resta pendant la nuit, qui se pas sans incident, sur les positions conquises Le commandant Berger, ayant reçu de1 ieiidei ordres pour reprendre l'attaque le main à la première heure, prit toutes lai
-.
dispositions en conséquence et fit conj struire des épaulements pour l'artillerie au point du jour il ouvrait le feu sur l'enl celui-ci s'était retiré sur Phong, ei nemi en avançant par la digue, à mi-distance entre Tanh-Teune et A'Mo, on échangea quelques coups de fusil avec les PavillonsNoirs, qui avaient passé la nuit à relever
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j
leurs morts et leurs blessés, et accentuaient leur mouvement de retraite à mesure que nous avancions. Les canonnières entrées dans le Day avaient canonné la veille les colonnes qui accouraient de Son-Tay au secours de Phong; elles appuyaient maintenant le mouvement de la colonne, criblaient de projectiles le village de Phong et forçaient les Pavillons-Noirs à se débander de tous les côtés. Le soir on poussait par la gauche une grande reconnaissance jusqu'à l'entrée de Phong, et on constatait que l'ennemi avaitévacaé toutes ses positions mais le manque de cavalerie et la hauteur deeaux ne permettaient pas de le poursuivre. D'autre part, il n'entrait pas dans le pisn du général d'étendre la ligne qu'il d'immobiliser sur le Day une occupait partie de ses effectifs; le succès étant bien établi, il donna l'ordre de revenir à Palan, d'y laisser une garnison qui serait le point d'appui des opérations futures, et de faire reatrer le restant de la colonne aux Quatre-Colonnes et à Hanoï. Le lendemain, Sseptembre, dès le matin,
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-
et
la colonne reprenait la route qu'elle avai suivie victorieusement dans les deux joui nées précédentes. Le temps était mauvais depuis la veille marchl abondante rendait la une pluie pénible, et les attelages de l'artilleri avaient grand'peine à cheminer sur 1 digue. On arriva néanmoins à Palan neuf heures du matin sans être inquiétés Le jour même, la flottille et les transport rentraient à Hanoï; une compagnie e demie, une section d'artillerie, une sectio' du génie et deux canonnières restaient Palan, où l'on s'établissait fortement. En résumé, une colonne composée d cinq compagnies françaises de quarante quatre artilleurs, le reste indigène, avai enlevé une position très forte, tué et bless plus de mille Chinois et cinq ou six cent Annamites. Son moral avait doublé d valeur, sa confiance était entière le fleuv Rouge devenait libre jusqu'à l'entrée di Day. Mais le dixième de l'effectif européeei avait été mis hors de combat, l'ennend avait été abordé à la baïonnette et s'étai fait tuer sur ses positions.
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Il avait le nombre, un armement ni derne, des munitions en abondance he reusement, les bons canons lui manquaie encore, mais il était à prévoir qu'il finir* par en avoir. Quant à son habileté à chois des positions défensives, elle était incontf table. Celles du 1er septembre, certain ment improvisées en quarante-huit heure -peuvent être considérées comme un m dèle. Tandis que lacolonne opérait par terr la flottille lui prêtait un appui puissan Le 1er septembre, à cinq heures trente c matin, la Hache, Mousqueton et l'Ecla descendaient le Day, dont l'entrée éta gardée par le Pluvier et le Léopard. Li chaloupes à vapeur le Pélican et le Ha Phong éclairaient route. Vers huit hel res, la flottille arrivait au coude du Da; qui précède Phong. En débouchant, le Pélican et le Ha Phong, qui tenaient la tête de. la ligne, soi salués par une grêle de projectiles que l'o croit lancés par une -batterie ennemi masquée par un bouquet de bambous. Le canonnières ouvrent le feu dans cette d rection et-reconnaissent que les coups di
le
la
rigés sur elles partent de cinq jonques cachées dans l'arroyo qui relie Phong au Day. Quelques obus font taire le feu de trois des cinq pièces de l'ennemi, mais elles réduire les deux autres parviennent à ne que vers quatre heures du soir. La nuit se passe sans incident, malgré la proximité de l'ennemi. Le 2, la Hache et XEclair descendent le Day jusqu'au point de passage de la route de Son-Tay, arrêtent l'ennemi qui, au nombre de quinze cents à deux mille, arrivait de cette ville pour portersecours Phong,etle forcent à incliner vers la droite pour prendre le 1passage de Ra, en aval de Phong. Les canonnières l'escortent et lancent des obus dans la direction qu'il suit. Le 3 an matin, la Hache descend de nouveau vers San-Lai, un village en aval de Phong, et engage le feu avec une troupe de Chinois. Abrités derrière la digue, ceux-ci ripostent aux obus et à la fusillade de la Hache leur tir est vite rectifié et il est assez juste pour que la canonnière soit criblée de balles. Heureusement, personne n'est touché. C'est le dernier épisode de le lutte. Ordre est donné de remonter Day;
à
;
le
la flottille se concentre à Palan et, laissan deux canonnières en ce point, reprend c même jour son mouillage à Hanoï. Cette affaire produisit une impressioi excellente. Chacun loua la vaillance dl nos jeunes troupes, et les journaux anglai de Hong-Kong furent, cette fois, unanime à constater notre succès. Le 7 septembre, nos troupes livrèren un nouveau combat aux Pavillons-Noirl qui furent défaits.La bataillé eut lieu prè
-
de Haïdzuang. Depuis le 4 septembre, M. Harmand étai à Hanoï. Son action rayonnait sur toutli Delta et il était l'âme de la conquête. Con naissant à fond hommes et les chose du Tonkin, il croyaitqu'unë nouvelle vie toire ferait disparaître toute trace de Pavil Ions-Noirs. Aussi, profitant de la baisse de -eaux, il concerta avec le général Bouëtè les officiers supérieurs unemarche enavant Toutes les troupes disponibles du' Delti furent concentrées à Hanoï, d'où la petiti armée, forte de trois mille hommes, s'a
les
vança sur Phu-Hoï. Une reconnaissance effectuée par terr et par eau avait indiqué les forces de l'en
friincuis.
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nemi, bien retranché dans des lignes allani d'une branche à l'autre du fleuve et fer mant la presqu'île dont la possession IIOUÏ assure la prise de Son-Tay. Il fallait l'et déloger et s'emparer d'abord de Phu-Hoï la clef de ces retranchements. Deux colonnes se mirent en mouvemen le 9, après-midi, celle de droite appuyé par cinq canonnières, qui prirent part ai combat. Les Pavillons-Noirs, enhardis moin parleurs succès que par notre inaction pro longée, se battirent avec courage. Le len demain matin, leurs lignes furent enlevée d'assaut et un bataillon d'infanterie loge) dans Phu-Hoï. Nous avons eu dans ce premier comba 65 hommes tués ou blessés; les ennemii ont perdu plus de 700 hommes. La petite armée se dirigea ensuite sui Phu-Tchong et s'avança jusqu'à 19 kilo mètres de Son-Tay. Le 15 septembre, les Pavillons-Noirs si réplièrent sur cette ville, abandonnant lei retranchements qu'ils avaient élevés et oc cupaient entre cette place et Hanoï. Le 17 le colonel Bichot, à la tête de deux batail. ons, alla reconnaître les positions aban-
se
données et détruire les ouvrages encore existants. Gette retraite des Pavillpns-Noirs était attribuée à ce que leur solde n'était plus payée par le gouvernement annamite. La discorde semblait complète entre celui-ci et ses anciens acolytes. Les nouvelles reçues de Hué étaient excellentes et portaient que le roi et les ministres se conformaient docilement aux conseils de notre représentant, M. de Champeaux. Il avait obtenu l'envoi au Tonkin des deux premiers ministres du roi d'Anchargés de licencier les troupes annanam, , mites qui n'avaient pas encore fait leur soumission. Le Chàteau-Renaud stationnait l'entrée de la rivière de Hué. Une canonnière faisait le service entre cetteville etHaï-Phong etles communications avec M. Harmand étaient fréquentes. Les mandarins s'étaient décidés f à entrer en relations avec le commissaire général civil etle général annamite TramtTrouët était enJLté en pourparlers avec lui. Edaient eux. mandarins de Niia-Buchétaient arribvés à Haïphong et les Annamites n'attenque la chute de Son-Tay, qui devait
à
j-
!
éloigner les Pavillons-Noirs, pour déposer les armes. Les points joccupés par nos troupes, entre Hanoï etSon-Tay, étaient la pagode fortifiée, Pliuhoï, Palan et Giabaï cette dernière place presque à portée de canon de Son-Tay était défendue par 9,000Pavillons-Noirs. M. Harmand avait formé un corps de 3,000 Annamites et demandé à M. Thomj son, gouverneur de la Cochinchine, toutes les troupes dont il pouvait disposer conséquence, 500 hommes étaient partil en Saigon le pour le Tonkin. M. Navellf sur était retourné occuper son poste à Quin hone, afin de se mettre en relations avef les mandarins de Nim-Binh, etles troupe! indigènes qui cernaient Nam-Dinh, venaien d'être en partie licenciées par les mandaJ rins annamites. Les forts de Thuanan avaient été remï en état et étaient occupés parles 27° et 31 compagnies d'infanterie de marine, un compagnie de tirailleurs annamites et deu batteries d'artillerie. La pacification du bas Delta avançai grand l'annonce de rapidement et que
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renforts étaient partis pour le Tonkin avai produit une vive satisfaction. On devait désormais suspendre les opé rations pour laisser produire les effets di traité de Hué, et pour attendre l'arrivée de renforts annoncés. C'est alors que le général Bouët, qu avait, précédemment, demandé à être re levé, s'embarquait pour revenir en France chargé des instructions et d'une missioi spéciale du commissaire général civil. Or lui donnait pour successeur immédiat If colonel Bichot, mais en réservant à l'amiral Courbet le commandement en chef dt toutes les forces de terre et de mer. Les dernières semainesde septembre on1 été employées aux. préparatifs nécessités par le débarquement des renforts attendus et par la réorganisation des provinces. Pendant le mois d'octobre, aucun fait important n'a eu lieu au Tonkin. La santé du corps d'armée a été excellente et dans quelquesreconnaissances poussées usqu'au Day et au canal des Rapides, le colonel Bichot n'a rencontré aucun ennemi. Aux alentours d'Hanoï, les routes étaient toujours impraticables; on élevait les bara-
j
quements et on établissait les campements destinés à recevoir les hommes de renfort dont on attendait l'arrivée du 4 au 10 novembrepour prendre possession de Son-Tay; de Bac-Ninh de Hong-Hoa, qu'il était reconnu absolument nécessaire de soumettre. Il y avait là des réguliers chinois qui tenaient dans les dernières des places fortes de la résistance. Et cependant, nous n'étions pas en guerre avec la Chine! C'était assurément une de. ces étrangetés comme on n'en peut voir que dans l'extrême Orient. La cour de Hué restait étrangère à tout ce qui se passait au Tonkin et les mandarins annamites obéissaient uniquement à M. Harmand. L'administration françaises'étendaitalors sur tout le Delta.A côté de chaque mandarin, chef de province, était placé un résident qui contrôlait tous ses actes. Des annamites de Saïgon étaient chargés de la police et les impôts rentraient sans difficulté. Les douanes fonctionnaient d'une façon satisfaisante. Le littoral, comme l'intérieur, laissait cependant à désirer. Il était aussi difficile
et
de se débarrasser des pirates chinois que des Pavillons-Noirs, et on attendait que les
canonnières descendissent du haut fleuve pour leur faire une chasse sans trêve ni merci. Pratiquement, les Français n'avaient pas dépassé Hanoï et ne devaient chercher à le faire qu'après l'arrivée des renforts. Les seuls faits de guerre à signaler pendant le mois d'octobre sont la prise de la citadelle de Ninh-Bin parle colonel Badens, qui s'en empara le 21 avec 20 hommes appartenant aux canonnières Pluvier et Léopard, et la prise de la citadelle de Phunoï, située à cinq kilomètres. Le colonel s'avança jusqu'à trois milles dans les terres sans rencontrer de résistance. C'est le 26 octobre que l'amiral Courbet prit le commandement en chef des troupes françaises au Tonkin, à Hanoï, où il attendit l'arrivée des renforts pour continuer les opérations militaires. Comme le ministre de la marine, l'amiraL Peyron, l'a déclaré le 20 novembre à la commission nommée parla Chambre des députés relativement aux crédits deman-
dés pour le Tonkin, le contre-amiral Courbet avaitreçu tous les pouvoirs nécessaires pour mener à bien la lourde tâche dont il était chargé. D'accord avec les colonels Bichot et Badens, l'amiral a immédiatement conçu un plan de campagne qui ne pouvait être mis à exécution qu'après l'arrivée des renforts. Dans les opérations qui devaient avoir lieu dès que le contre-amiral Courbet aurait reçu ces renforts, le rôle de la flottille semblait devoir se trouver fatalement cffacé, la baisse des eaux dans le fleuve Rouge étant assez accentuée pour que la navigation en amont d'Hanoï devînt impossible à des bâtiments cubant plus d'un mètre d'eau, ce qui est le cas de nos canonnilEs. Elles ne pouvaient donc être utilisées pour réduire Song-Taï et Bac-Ninh. On résolut alors de mettre à la disposition du corps expéditionnaire les canots à vapeur armés en guerre et les jonques de transport qui. toutefois, ne devaient pas avoir l'appui si efficace de l'artillerie de la flottille. Aussi a-t-on décidé d'envoyer au Tonkin de nouvelleschaloupes canonnières de faible tirant d'eau, qui pourront rendre de grands
services dans Je fleuve Rouge, comme elles pourraient participer à une attaque surdes places maritimes, car elles peuvent tenir parfaitement la mer. Au commencement de novembre, notre situation au Tonkin était la suivante Nous occupions toutes les places fortes dij bas Delta: Hanoï, Haï-Dzuon^. Quany-Yea Nam-Dinh efNinh-Binh. Le 7 novembre, d'importantes informa tions arrivèrent à Haï-Phong. L'amiral Courbet avait décidéd'ajourné sa marche sur Bac-Xinh, où la garnison chi noise préparait, disait-on, une résktanci désespérée. Il se proposait d'attendre qui la récolte du riz fut faite et que les routai encore inondées, fussent devenues prati cables pour permettre le transport de grosse artillerie, dont l'amiral voulait servir pour le siège. Les forces françaises devaient se metfjj semaine première marche la en vers décembre, époque à laquelle le gouverni ment chinois aurait probablement décid la question de savoir s'il devait envoyt des secours à la garnison de Bac-Niahm bien l'abandonner à son sort. i
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Quant aux Pavillons-Noirs, le bruit courait qu'ils désertaient en masse et avaient akaadonné toutes leurs positions entre Hanoï et Song-Taï, mais cependant on affirmait que les marques de toutes les ajnes prises sur eux ne laissaient pas le moindre doute sur leur origine. Elles étaient, croyait-on, fournies par la Chine, qui nous faisait ainsi la guerre sans la
déclarer.
-Vers cette époque, le gouvernement autorisa M. Harmand. commissaire civil au Tonkin, à venir, sur la demande qu'il en avait faite, prendre un congé en France. Cette mesure était la conséquence de la réunion, eutre les mains de l'amiral Courbet, de tous les pouvoirs civils et militais. Il résultait de ce nouvel état de choses, en effet, que la mission de M. Har-
mand était naturellement suspendue. D'après les dépêches de Hong-Kong, les principales positions des Pavillons-Noirs, des ÀMamites et des Chinois au Tonkin étaient 1a>suivantes : Son-Tay, défendu 5,003 Pavillons-Noirs et 2,000 Chinois; llang-Hoâ. par 3.000Pavillons-Noirs; BacMinh, par 2,000 Pavillons-Noirs, 4,000 An-
ar L-
;
namites et 4,000 Chinois — on comptait, en outre, un millier de Chinois, autant de Pavillons-Noirs et 7 ou 8,000 Annamites dans les provinces que traverse le fleuve Rouge dans son cours supérieur; enfin, — dans les provinces du nord, il y avait une armée de 14,000 Chinois établis de CaoBang à Lang-Son, mais ceux-ci ne paraissaient pas devoir prendre part aux hostilités avant une déclaration de guerre for-
melle..
l'arrivée des renforts attendus et embarqués àbord du Bien-Hoaeïdu'To?ikin, l'effectif de notre corps expéditionnaire devait atteindre 10,300 hommes, y compris les tirailleurs annamites de Saigon, sans compterles recrues tonkinoises enrôlées par M. Harmand. Mais la cavalerie manquait complètement et l'artillerie était A
insuffisante. Pour la cavalerie, le système suivant devait être appliqué: on enverrait unecom-j pagnie du train des équipages militaires. Cette compagnie serait chargée du service des transports les mulets dont elle disposerait et un certain nombre de chevaux qu'on achèterait dans le pays seraient en
:
Tonkin.
;ui marine
ĂŽle infanterie
I,
outre destinés à monter des compagnies d'infanterie de marine. Quelques officiers de cavalerie seraient envoyés au Tonkin pour présider à cette organisation, dont le besoin se faisait vivement sentir. L'objectif de l'amiral Courbet était d'occuper tous les points stratégiques du Delta, de s'y installer et d'y rester. Il devait commencer par Bac-Ninh et non par Son-Tay, comme on le croyait. En effet, Bac-Ninh paraissait plus facile à investir que Son-Tay, dont les abords sont marécageux et peu praticables pour l'artillerie. L'amiral Courbet disposait de pièces de montagne assez solides pour détruire les ouvrages en terre derrière lesquels s'abritaient les troupes ennemies. Les troupes dont disposait le commandant en chef pour marcher sur Bac-Ninh s'élevaient à plus de 6,000 hommes. L'état sanitaire des troupes était aussi satisfaisant que possible; Fétat moralétait bon. Leur effectif, au Tonkin, s'élevait alors .à 15,000 hommes. En effet, au mois de mai,
800 hommes étaient en garnison à Haïphong, à Nam-Dinh et à Hanoï. A la suite de la mort du commandant Rivière, il a été expédié 500 hommes de la NouvelleCalédonie et 800 de Toulon. Quand le généraLBouët partit de Saïgon, il prit avec lui800 hommes d'infanterie de marine. M. Thompson en envoya par la suite 900, et 600 hommes partirent en même temps de France, ce qui fait un total de 4,400 soldats d'infanterie de marine 750 artilleurs de marine furent envoyés de Toulon et de
;
Saïg«n.
il faut ajouter un bataillon de 600 marinsvenus de Toulon, 1,850 homÀ ces chiffres
mes de la légion étrangère et des tirailleurs algériens, 1,500 tirailleurs annamites de Saigun, plus i,200 hommes des compagaies de débarquement apparlenant aux 32 navires de guerre formant l'escadre de l'amiral Courbet, qui a fait débarqueravec lui, lorsqu'ii prit le commandement général, MbO hommes des équipages de la flotte soit un total de 10,900 hommes ou de9,400 aans compter les Annamites de Saïgon. En ajoutant à ce total les 4,100 hommes de troupes tonkinoises formées par M. Har- -
mand, instruites et commandées par nos officiers, on arrive à un effectif total de 15,000 hommes. Le bataillon de la légion étrangère et celui des tirailleurs algériens sont débarqués à Haï-Phong au milieu du mois de novembre. Ces renforts étaient importants l'amiral Courbet ne voulant entreprendre aucune opération militaire sans l'artillerie et la cavalerie nécessaires. Vingt-deux canons appartenant à des navires de la flotte furent mis à terre, ainsi qu'un certain nombre de canons revolvers; 6,000 hommes, 50 pièces de canon, 200 cavaliers constituaient l'armée mobile dont l'amiral disposerait devant Son-Tay. Le projet d'attaquer immédiatement Bac-Ninh fut abandonné. Cette place ne devait être investie qu'après lareddition de Son-Tay et deHong-
,
Hoa. Son-Tay est sur la rive droite du fleuve Rouge; la citadelle est à environ 800 mètres du fleuve, et l'espace qui l'en sépare est occupé par un certain nombre de villages qui forment une agglomération de 15 à 18,000 mille habitants. En partant du fleuve, on suit une route
qui traverse la ville; on atteint ainsi une première enceinte en terre, puis un chemin de ronde qui contourne la forteresse, et on arrive enfin à la porte nord de la citadelle. Le mur en terre est séparé de l'enceinte régulière par une chaussée de 3 à 400 mètres de large, sur laquelle des villages ont été établis. Entre le chemin de ronde et la citadelle on voit huit casernes, où les troupes annamites tenaient garnison. La citadelle a la forme d'un quadrilatère chacune de ses faces a 500 mètres de longueur. Elle est construite en briques et en maçonnerie, avec bastions au milieu de chacune des faces. C'est une forteresse qui a été édifiée à la fin du siècle dernier"par des ingénieurs français. Quatre portes y donnent accès, à chacun des points cardinaux; mais les portes principales sont celles qui donnent au sud sur le fleuve Rouge et au nord vers l'intérieur du pays. Dans l'enceinte de la citadelle, il y a au centre une pagode, à gauche la maison du gouverneur général, à droite celle du mandarin chargé de la ustice à chaque angle un poste militaire, et, pêle-mêle entre ces
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j
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constructions, les établissements de l'administration annamite, la prison, les magasins à riz, etc., de telle sorte que la forteresse paraît très encombrée. Les villages les plus nombreux et les plus peuplés se trouvent entre la citadelle et le fleuve; sur les autres faces de la forteresse la population est assez clairsemée. Telle est la citadelle qui fut un des objectifs du corps expéditionaire. Bien qu'on gnorât ,l,' quelles pièces d'artillerie elle était armée, comme il n'était pns supposable qu'elle fût défendue par des pièces rayées de gros calibre, elle ne devait pas résister à un bombardement régulier. Encombrée comme elle l'était de constructions, quelques obus pouvaient, croyait-on, faire flamberfous les établissements qui se trouvent à l'intérieur de l'enceinte, et une attaque méthodique rendrait les parapets intenables. Pendant le mois de novembre, il se produisit deux faits militaires à signaler
:
Ls 13, l'ennemi attaqua Haï-Dzuong et
il fut repoussé. Le 17, 1,200 Pavillons-Noirs, renforcée
par des pirates, attaquèrent également
la canonnière la Carabine, mouillée près de Haï-Dzuong. L'équipage français eut 12 hommes blessés, parmi lesquels le résident français de Haï-Phong. Les balles ennemies trouèrent le bâtiment, malgré les plaques mobiles suspendues sur ses flancs pour la protection de l'équipage. En même temps une attaque directe était dirigée sur la citadelle de Haï-Dzuong, défendue" par 60 soldats. Notre grande canonnière le Lynx, attirée par le bruit de la canonnade, arriva à temps pour empêcher la destruction complète de la Carabine et la prise de la citadelle. L'artilleriedu Lynx dispersa rapidement l'ennemi. Celui-ci, serré en masses, a Ipbi des pertes énormes.
la suite de cette affaire de Haï-Dzuong l'état de siège fut déclaré, et les mandarins annamites, le plus grand nombre des villes du Delta, depuis le Tong Doc (gouverneur), le Quan Bo (administrateur), le Quan An (justicier), jusqu'au Quan Phu (mandarin militaire), y compris les Quan (chefs de milice chargés de la police et de A
*
la rentrée des impôts), les Doï (ofticiers), ont été arrêtés et emprisonnés sous l'inculpation de connivence avec les Chinois, avec les pirates et avec les bandes de rebelles qui désolent Delta du fleuve Rouge. L'état de siège déclaré au Tonkin était réclamé depuis longtemps par tous les résidents français et étrangers, qui affirmaient qu'il n'y aurait de sécurité dans le pays que quand tous les pouvoirs auraient été concentrés dans les mains de l'autorité militaire. Ajoutons que c'est à la suite de la proclamation de l'état de siège que M. Harmand a demandé à rentrer en France, sa mission n'ayant plus d'objet du moment que les pouvoirs qui lui avaient été donnés étaient dévolus au commandant en chef du corps expéditionnaire. Dans les derniers jours du mois de novembre, le ministre delà marine a reçu du gouverneur de la Cochinchine la dépêche
le
:
suivante etapprovisionnements renforts les Tous « ont été débarqués à Haï-Phong et dirigés immédiatement sur Hanoï. Le paquebot le Volga (frété par la marine) est arrivé le
9 novembre avec du matériel. Le paquebot le Saïgon (service de Saïgon au Tonkinl est parti, le 13, de Saïgon pourHaï-Phong. ShamTock, venant du « Le transport le Tonkin, est arrivé à Saïgon le 14 novembre et repartira pour Toulon le 25. l'Aspic partie le canonnière 22 La est « de Saïgon pour le Tonkin. « Le transport la Corrèze est parti le 2U novembre de Singapour directement pour le Tonkin. « Le croiseur l'Hamelin est arrivé le 16 Saïgon, venant de la côte. « Le transport de matériel la Vienne relâché le 18 à Saïgon, en route pourHaï-
à
a
Phong. « L'état sanitaire en Cochinchine et au Tonkin est excellent. Aucun fait particulier à signaler. » La dépêche contenait en outre l'avis de l'achèvement des préparatifs pour la marche en avant.
CHAPITRE DIXIÈME. NÉGOCIATIONS ET BATAILLES.
Sommaire : La politique chinoise. Subterfuges du mar— quis Tseng. — Attitude de nos ministres des affaires étraugères. — Réponses de M Barthélemy-Saint-Hilaire, de Gambetta et de M. Challclllci-Lacour. — Politique de M. Jules Ferry. — Les crédits pour la guerre du Tonkin sont votés par les Chambres en décembre 1883. — EvéneLa canpngnr* de l'amiral Courbet. — ments militaires. Prise de Son Tay (17décembre). — Utilité du protectorat du Tonkin pour la France. — Richesses etproduits du pays.
-
Pendant que se passaient ces événements et tandis que l'amiral Courbet achevait ses préparatifs de combat, le marquis Tseng, ambassadeur de Chine à Paria, entreprenait de négocier avec la France. L'exposé de ces négociations a été fait clairement et d'une manière complète, à la tribune de la Chambre des députés, au mois d'octobre 1883, par M. Challemel-Lacour, qui était encore à cette époque ministre des affaires étrangères.
Le marquis Tseng avait déjà maintes fois demandé des explications aux prédécesseurs de M. Challemel-Lacour. En 1880,
répondait au gouvernement chinois que nos rapports avec le Tonkin étaient réglés par le traité de 1874. que nos lecteurs connaissent, et qui, en assurant l'indépendance de l'Annam vis-à-uis de toute puissance étrangère, plaçait sous le protectorat de la-France les intérêts européens dans ce pays. Le marquis Tseng s'était contenté de protester de mouveau en faveur du droit de suzeraineté de la Chine sur l'Annam, et plus tard, en i882, il adressa à Gambetta une note conçue dans le même esprit. Gambatia, continuant sur ce point la politique de M. de Freycinet et de M. Barthélemy-Saint-Hilaire, écrivit au marquis Tseng une lettre dont voici le passage important M. Barthélemy-Saint-Hilaire
:
Le gouvernement impérial chinois, écrivezvous, ne peut pas reconnaître le traité de 1874 conclu, entre la France et l'Annam. Or, ce traité, quirègle précisément nos rapports avec
l'Annam, a été officiellement communiqué au 'gouvernement chinois le 2o mai 1875 par le
comte de Rochechouart, chargé d'affaires de France à Pékin, et dans la réponse en date du lojuin suivant, que le prince Kong a envoyée à M. de Rochechouart, il n'a été élevé ancune objection contre la conclusion du traité ni contre ailcune de ses clauses; l'Annam est mentionné simplement comme ayant été autrefois un pays tributaire de la Chine, ce qui ne présente à vrai dire qu'un intérêt historique. Vous comprendrez sans, peine que, dans ces conditions, il nous soit malaisé d'admettre que le gouvernement chinois vienne contester aujourd'hui un traité existant et déjà entré dans la période d'application depuis près de huit années. Nous ne saurions nous arrêter, en tout cas, à une réclamation aussi tardive, et le gouvernement de la République hésité d'autant moins à revendiquer l'entière liberté de ses actes en ce qui'concerne l'exécution de ses conventions avec l'Annam qu'il ne nourrit, ainsi que M. de Freycinet et M. Barthélemy-SaintHilaire vous en ont successivement donné l'asdessein qui puisse porter omsurance, aucun brage à la Chine ou qui soit préjudiciable à ses intérêts. Agréez, etc. -
LÉON GAMBETTA.
Après s"être montré au début très conciliant,. après n'avoir émis aucune préten-
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tion inacceptable, peu à peu le marquis de Tseng s'enhardit, et il finit par nous proposer, dans le courant de 1883, l'abandon de nos traités et l'évacuation du Tonkin en voulant réserver à la Chine la faculté d'occuper elle-même, si bon lui semblait, tout le nord de l'Annam. Excitée par les articles d'une partie de la presse anglaise, jalouse de notre tentative, encouragée sans doute aussi par les journaux intransigeants français qui ne veulent point de colonies, ladiplomatiexhinoise s'imaginait que les députés condamneraient la politique ministérielle et contraindraient notre gouvernement à abandonner la partie. Mais M. Challemel-Lacour obtint gain de cause en exposant les faits sans réticence. Il résuma de la sorte la question Dès le premier jour, nous avons fait nettement connaître que, s'il ne nous était pas possible de traiter avec la Chine des affaires de l'Annam, nous étions cependant disposés à entrer ennégociations pour tout ce qui touche aux rapports de voisinage des deux pays, à étudier même un arrangement de frontière quilui procurât
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toutes garanties. Nos dispositions n'ont pas changé. Il ne paraît pas qu'il en soit de même à la cour de Pékin, s'il faut en juger d'après les propositions successivement émises par ses représentants. Nous n'en restons pas moins disposés à poursuivre avec elle les pourparlers dans l'esprit le plus amical, espérant que les événements accomplis l'amèneront à un sentiment plus juste de la situation, surtout lorsqu'elle aura constaté que la politique modérée, mais résolue, du gouvernement de la République n'a cessé d'avoir l'approbation des Chambres et, par conséquent, du pays. Mais le marquis Tseng ne se tint pas peur battu, et continua ce qu'on a justement appelé sa comédie diplomatique il nous menaça de la guerre. Certes, si la Chine avait en politique des principes semblables à ceux qu'on respecte en Europe, la situation aurait pu apparaître grave, mais pour les Asiatiques les mots et les principes de droit n'ont pas la même valeur que pour nous. Ces peuplas ne semblent même pas se douter de ce que nous nommons fièrement l'honneur, la
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dignité nationale. Si nous nous montrons conciliants, ils croient que nous reculons, parce qu'ils sont toujours prêts à céder lorsqu'on leur résiste; ils demandent beaucoup pour obtenir peu, rien du toutmême, s'ils ne se sentent pas les plus fons. Avec cela ils sont doués d'une incroyable vanité ils considère!^ leur civilisation ils nous comme supérieure à la nôtre nomment des barbares et croyent que leurs ruses enfantines sont de nature, à' nous tromper et leurs rodomontades assez terribles pour nous faire frémir. Si la Chine a cru facile d'employer avec nous le système véritablement puéril, elle a trop oublié les limites dans lesquelles il est permis d'en user en Europe. L'excès de ses prétentions a fait l'unanimité dans l'opinion divisée jusque-là surcette affaire du Tonkin. Une partie de la presse est, de parti pris, hostile à toute extension coloniale, mais n'y a pas un Français en France capable de supporter patiemment l'idée qu'on pourrait renoncer aux résultats de douze années de sacrifices et évacuer le Tonkin sur une simple invitation dn- gouvernement chinois. Ou achever malgré son
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mauvais vouloir la pacification du pays, 01 le lui abandonner complètement, c'est lui même qui nous pose ainsi le dilemme i ne pouvait y avoir deux avis sur la réponse Aussitôt que nos hommes d'État, embar rassés un moment d'avoir en face d'eux de adversaires si perfides et si fuyants, aussitôt que nos ministres ont éclairé publiquement les petits moyens chinois, la situation s'est trouvée immédiatement simplifiée. Il a apparu à tout le monde qu'il fallait porter au Tonkin des coups rapides, terminer au plus vite la campagne militaire, ne point s'inquiéter de la Chine qui veut nous faire la guerre, «sansnous faire»,etn'entreprendre de nouvelles négociations qu'après avoir remporté de nouvelles vicloires.. M. Jules Ferry, devenu à son toiui ministre des affaires étrangères, a été à bhauteur de sa tâche, et dans la première demande de crédits qu'il a adressée à la Chambre en décembre 1883, il a donné sur la guerre du Tonkin les explications les! plus franches les plus complètes. Ilfit publier le Livrejaune qui contient tous les documents relatifs à nos affaires du Tonkin, et le pays fut enfin complète-
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ment éclairé. C'est dans ce livre, uniquement composé de pièces diplomatiques, que nous avons puisé pour raconter exactement les-faits les plus importants. 1\1. Jules Ferry, après la publication du Livrejaune, aborda à la Chambre la discussion des crédits nécessaires, et profita -de cetie occarion pour répondre aux adversaires de la politique coloniale. Il a examiné successivement, avec une entière franchise, les reproches adressés à s^^gouvernement, et le grand art qu'il a eu en y répondant a été de faire sentir à la ChMfthre, dans les difficultés dont l'affaire -du Tonkin s'est peu à peu grossie, la part duc à la nature du pays dans lequel on opère, à la fuyante duplicité et aux prétentions d'une- exagération toute asiatique des adversaires avec lesquels nous négocions, aux conditions mêmes dans lesquelles s'exeKe le pouvoir en France, c'est-à-dire, un mut, à cette force des choses qu'il n'est au pouvoir d'aucun homme de prévenir, ni de supprimer. Ce qui nous parait tout à fait remarquable dans ce discours, c'est l'esprit politique qui ranime, cet esprit qui aborde les questions sans for-
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mule toute faite, et cherche à tirer de leur résoudre. même les les de moyens essence L'impression a été très grande, et, comme on l'a vu par les résultats dela séance, oîlcj a été décisive. S'emparant d'un mot de M. Camille Pelletan, qui avait dit que si, du moins, il s'agissait de politique de conservation coloniale, l'extrême gauche pourrait appuyer le cabinet, M. Jules Ferry s'est défendu d'en avoir jamais fait d'autre. Si les troupes françaisessont allées à Tunis,£'est pour assurer la sécurité de 1'Algérie.Douc, elles sont en ce moment au Tonkin, c'est pour sécurité Cochinchine. la de la assurer Quand on crée un établissement au milieu de populations de civilisation inférieure, on ne peut le considérer comme définitif que] quand il est en possession des positions stratégiques qui le commandent, et des moyens de résister aux grandes influences concurrents qui - se trouvent dans son voisinage. Il s'ensuit que les programmes primitifs sontjpresqne toujours dépassés, et il n'est point de colonie prospère qui ait échappé à cette nécessité vitale de se fortifier.
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Le président du conseil a
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sition. Le ministère a-t-il eu le LOrt de ne p prendre suffisammeut au sérieux l'inte vention de la Chine? Pourquoi ce reproch Est-ce parce qu'il a annoncé que la Chi ne romprait point les relations diplon tiques? Voilà un an qu'on négocie, et el ne sont pas encore rompues. Est-ce pai qu'il se serait montré intransigeant ai elle M. Jules Ferry a protesté qu'iln'av jamais considéré l'empire chinois com une quantité négligeable. Le cabinet traité comme il aurait traité une puissai européenne raisonnable et obéissant à intérêts et non à ses passions. Il y aN avec lui plusieurs terrains de conciliatie on les a tous essayés et on lui a prop toutes les concessions compatibles a notre honneur. C'est seulement depuis le 17 novem chinois le gouvernement nous a i que venus officiellement qu'il avait mis 8 nison dans Bac-Ninh et Son-Tay. mis Jules Ferry point M. a ce encore Chambre franchement en présence
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nécessités de cette situation nouvelle. La Chine. a changé d'attitude; devons-nous changer de conduite? Faut-il laisser entre ses mains Son-Tay, sur le chemin duquel Rivière a été tué Ce serait une singulière façon de le venger. A la dernière dépêche du marquis Tseng, en date du 5 décembre, nous demandant de donner l'ordre à nos troupes de s'arrêter, le président du conseil a annoncé qu'il se proposait de répondre que l'on peut consentir à une proposition de ce genre, quand on se trouve en présence d'une base sérieuse de négociations la Chine n'en offre point il n'y a donc pas lieu d'arrêter la marche de notre armée. Et il a demandé à l'opposition, qui l'interrompait Si vous connaissez une autre solution compatible avec l'honneur national, avec le soin de notre situation dans le monde, dites-le. Après ce discours, la Chambre se sentit en présence d'une de ces situations où il faut conclure, où toutes les considérations secondaires disparaissent devant l'obligation patriotique. A une majorité considérable, le Parlement affirma sa confiance dans l'énergie du gouvernement pour dé-
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fendre au Tonkin le droit et l'honneur d( laFrance. Ce vote a eu un grand retentissement;-il a appris aux soldats engagés au Tonkin que le pays est disposé à les soutenir, et la vigueur des opérations s'en ressentira, car quelle est la situation d'un militaire qui ne saurait compter sur là fermeté de ceux dont sa mission dépend Il à donné surtout une grande force à notre diplomatie en dissipant les illusions dont pouvaient se bercer nos adversaires. Voilà la Chine prévenue. Si ses diplomates ont fait fonds sur nos défaillances, il leur faut retirer désormais cet élément de Leurs calculs. Le gouvernement a nettement délimité le but de notre entreprise, circonscrite au Delta du Tonkin et à ses points stratégiques. Et il a avec lui la France, décidée à ne pas reculer incessamment devant leurs prétentions. Si, lorsqu'on traite avec eux, il ne faut pas renoncer absolument aux prévisions les mieux justifiées de la sagesse humaine, nous sommes persuadés que nous effets voir les des réà tarderons pas ne flexions que cette ferme attitude leur inspirera.
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Le ministère a déposé le la décembre 1883 une nouvelle demande de crédit de 20 millions pour les dépenses du Tonkin pendant l'année 1884. Ainsi l'exigent nos
lois parlementaires, qui ne veulent point qu'une dépense soit engagée sans l'autorisation des Chambres. Le gouvernement a compris que, une fois une action engagée au loin, le seul bon système était d'envoyer le nombre de troupes nécessaire; si l'on hésite, sillon expédie, à intervalles éloignés, de petits corps, ceux-ci se font détruire les uns après les autres, sans profit et sans gloire. Plus vite le Tonkin sera pacifié, plus vite noustraiterons définitivement avec la Chine. Or, les mandarins de Hué, croyant peut-être, comme le marquis Tseng, que la France est un peuple barbare et ne sachant ce qu'il veut, les mandarins avant la prise de Son-Tay, avaient redoublé d'efforts pour nous chasser. Ils sont allés jusqu'à faire assassiner le successeur de Tu-Duc, le roi Hiep-Hoa, qui affirmait sot, intention de faire respecter le traité conclu empoisonné, Ce été monarque a nous. avec
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selon les uns, étouffé sous des oreillers par ses femmes, selon les autres mais, quel qu'ait été spn supplice, on l'a sup primé pour le remplacer par un jeune prince de quinze ans, parent d'un ministre des finances deFAnnam, qui est notre plus implacable ennemi. Il importait d'agir avec vigueur, et c'est .ce que ne manqua pas de faire le commandant de notre expédition. Au commencement de décembre, l'amiral Courbet continuait son action militaire. Il mit le Tonkin en état de siège; depuis longtemps cette mesure était réclamée par tous les résidents français et étrangers, qui déclaraient ne point se trouver en sécurité dans ce pays tant que les pouvoirs ne seraient pas concentrés dans les mains de l'autorité, militaire. L'amiral fit en outre arrêter quelques grands mandarins convancus de connivence avec lesbandeschinoises, et il entra en campagne. Quel était son objectif? On l'ignora pendant assez longtemps; il avait enmené avec lui toutes les chaloupes à vapeur de son escadre pour appuyer ses opérations,
en manœuvrant dans les canaux nombreux qui se trouvent entre Hanoï, Bac-Ninh et Son-Tay. Ces chaloupes sont armées d'un canon revolver; des bandes en tôle d'acier abritent contre les balles les matelots armés de fusils à répétition. Dans les premiers jours de décembre, on apprit en France que, tandis que ses lieutenants reconnaissaient laroute de Bac-Ninh,l'amiral Courbet avait reconnu en personne s'en était approla citadelle de Son-Tay ché à deux kilomètres. Il acquit de la sorte la preuve que l'ennemi avait évacué ses lignes de défense pour se concentrer dans la citadelle et dans le camp retranché qui l'entourait. Il résolut alor- d'enlever
et
la citadelle. C'est l'aviso le D/'ac, parti de Haï-Phong matinée,qui, le 18 décembre 1883, dans trois jours plus tard, a apporté à HongKong la nouvelle de la prise de Son-Tay. Les nouvelles officielles de l'amiral Courbet ont été aussitôt télégraphiées Paris, leset voici, d'après-les-lettres arrivées depuis le récit de cet important fait d'armes : Dans la journée du 14, notre petit corps expéditionnaire s'était installé snr les bords
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du fleuve Rouge et y avait établi ses campements, après s'être emparé des villages fortifiés qui défendaient les abords de la forteresse. Le 16, les derniers renforts arrivèrent, et l'armée assiégeante setrouva forte d'environ 5,000 hommes. Aussitôt l'attaque commença. Dès le lever du soleil, les canonnières bombardèrent la place, faisant de larges brèches dans l'enceinte de terre qui entourait la ville. Pendant ce temps, nos troupes se massaient derrière les talus de la route qui longe les fortifications de la ville du côté de l'ouest. On ne pouvait rien tenter du côté nord à cause des ouvrages avancés qui défendaient par là l'accès du chemin conduisant au fleuve. Nos soldats se trouvaient en face d'une citadelle réellement redoutable, dont les remparts étaientencore en très bon état et avaient résisté à nos projectiles; aux coins du fort, aux points cardinaux, "quatre portes, défendues par des postes nombreux et reliées entre elles au moyen d'un chemin conduisant à des redoutes, à des maisons fortifiées servant de demeure aux chefs ennemis.
Le mur se composait, avons-nous dit,
d'une épaisse banquette de terre, sur laquelle étaient plantés des bambous taillés en pointes, et qui, grâce à une large route postes, les reliant derrière et tous située constituait un vaste retranchement dans lequel les défenseurs, parfaitement abrités, avaient accumulé de puissants moyens de résistance. De nombreux, canons garnissaient ce rempart. Presque tous les assiégés étaient armés de fusils à tir rapide ils avaient eu le temps de se préparer à la IUMP.ot. croyaient leur position inexpugnaule. Nos soldats de l'infanterie de marine et de la légion étrangère, nos fusiliers marins prirent place le matin en face de la porte d'Ouest, tandis que les tirailleurs algériens, formant la gauche, avaient reçu l'ordre d'enlever la défense de la face nord. Ils devaient se porter plus avant dans la direclion des villages fortifiés et en déloger l'ennemi. La forteresse se trouva de la sorte investie de trois côtés la garnison avait, il est vrai, libre accès pour la fuite par la porte Sud, mais l'amiral Courbet ne dispo-
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sait pas d'un nombre d'hommes assez considérable pour faire un investissement complet. A onze heures du matin nos troupes, après quelques engagements assez vifs, s 'installèrent sur les positions qui leur avaient été assignées pour y attendre le signal de l'assaut, et nos canons ouvrirent sur la place un feu des plus violents. Peu à peu nos obus mettaient le feu.aux maisons couvertes de paille qui s'élevaient près de l'enceinte et qui bordaient la route de défense; favorisés par ces incendies, nos tirailleurs algériens s'avancèrent rapidement jusqu'au pied des murailles. Nos canons se turent pendant une heure, afin de donner un peu de repos à nos combattants ; puis ils reprirent plus fortement, et à cinq heures de l'après-midi fut donné le signal de l'assaut. Du côté de l'ouest, le mur d'enceinte s'était affaissé sous nos boulets il ne formait plus qu'un amas de terre sur lequel s'élança, la baïonnette au canon, avec la merveilleuse bravoure française, la colonne d'assaut for.c d'environ 2,000 hommes. Nos marins, nos soldats de la
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légion étrangère renversèrent tout devant rien ne résista à leur élan. Près des eux murailles, les derniers arrivants aprçurent les cadavres de huit turcos décapités c'étaient les premiers montés à l'assaut. Alors les assaillants devinrent furieux on ne fit plus de quartier, et les ennemis payèrent cher cette horrible cruauté. Son-Tay était pris, bien que lesportes de la forteresse, solidement barricadées, empêchassent les troupes d'entrer dans la place. Les casernes bâties en dehors des glacis étaient vides de leurs défenseurs, qui s'étaient réfugiés à l'intérieur de la forteresse. On tua de nombreux ennemis sur place. Les Pavillons-Noirs se battaient avec acharnement, et la plupart d'entre sesont fait tuer les Annamites enx. s'étaient enfuis aussitôt que l'assaut avait les soldats chinois se sont été donné montrés courageux, mais aucun ne résistait aux zharges à la baïonnette. La nuit arrivait. Bombarder l'enceinte intérieure et tenter un second assaut, après troisjours de combat et six jours de marche, était trop pour des troupes exténuées de
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fatigue. Du reste, l'amiral ne doutait pas que la citadelle se rendrait le lendemain. Toutes les dispositions furent prises en vue de la continuation de la lutte mais, lelendemain, la ville était vide de ses défenseurs: Pavillons-Noirs, Annamites, Chinois, les autorités comme les simples soldats, tous avaient fui pendant lanuit, se glissant silencieusement par la porte du sud et gagnant sans trahir leur présence la route de HungHoa, suivis parles troupes qui gardaient les retranchements élevés sur la routed'Hanoï. On n'estime pas à plus de 4 à 5 mille hommes la garnison qui défendait SonTay pendant la dernière journée de combat. La moitié de l'armée ennemie s'était débandée après le combat de PhuTha, livré le 14. Le 17, au matin, Son-Tay était occupé sans combat, après deux jours de lulte très vive dans laquelle nous avons perdu 85 hommes tués dont 4 officiers, et qui nous a coûté 240 blessés dont 15 officiers. En dehors de ces blessés, beaucoup d'hommes souffrent de la marche, s'étant blessés avec des bambous dont le sol était parsemé partout.
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L'action avait été chaude, commeonvoit, et l'amiral Courbet a rendu lui-même justice au courage de nos ennemis. En d'autres temps, Paris, en apprenant un si brillant fait d'armes, eût illuminé ses maisons mais nous sommes dans une période où l'on songe que le relèvement de la France n'est point encore com-
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plet.
Après la prise de Son-Tay, l'amiral Courbet s'est dirigé surBac-Ninh. Tous les villages de cette région sont très peuplés. Le pays est riche en riz, coton et indigo, et la moindre parcelle de terrain est en culture. La ville de Bac-Ninh n'a cependant pas l'importance des autres villes du bas Delta; ce n'est en réalité qu'une agglomération de maisons échelonnées le long de la grande route, la route de Hanoï en Chine. L'importance des villes tonkinoises celui de Bac-Ninh se juge à leur marché est loin d'avoir les proportions de ceux de Hanoï, Hai-Dzuong, Nam-Dinh, etc. La citadelle est hexagonale trop petite pour contenir la garnison, qui est dispersée dans une série de maisons qui entourent
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du Tonkin qui permet de suiwv 1-Itis aisément lo récit des événements.
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la citadelle, elle ne contient que les logements des mandarins. La distance de Hanoï à Bac-Ninh est de 35 à 36 kilomètres: route large et praticable en temps ordinaire. Après la mort du commandant Rivière, les mandarins de BacNinh ont commencé des travaux de fortification sur la route à partir du canal des Rapides ils ont placé des canons aux intersections des digues et de la route sur laquelle ils ont fait de nombreuses saignées de trois à quatre mètres de largeur. Les Chinois du général Wang-Qui-La ont établi des fortins en terre et en bambous sur les deux mamelons qui commandent la
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citadelle de Bac-Ninh. La petite sous-préfecture de Phu-Tu-Son, qui est à mi-distance de Hanoï à Bac-Ninh, est un amas de paillottes à cheval sur la route. La demeure du Quan-Phu entourée d'un petit réduit en terre. Au delà du Phu-Tu-Son, les digues de protection contre les inondations disparaissent. Ici nous devons terminer le récit des faits militaires, et il nous suffira. d'ajouter quelques réflexions pour compléter autant que possible notreétude.
est
l'on jette un regard sur le passé, on voit combien la situation de la France a changé depuis quelques années. En 1874, encore sous l'influence des événements de l'année terrible, l'assaut donné par nos troupes à la citadelle d'Hanoï ne pouvait forcer le gouvernement français à l'occupation de la capitale du Tonkin. Notre pays, et la majorité de la nation pensait ainsi, ne paraissait pas être en mesure de défendre par les armes les limites de ses colonies. Aujourd'hui la situation a changé. Autant, avec une France atfaiblie et un trésor vide, il fallait rester dans une sage réserve; autant, avec une France riche et forte, on doit se hâter de prendre dans l'extrême Orient la positi.. que nous devons y occuper, venger en même temps la foi jurée et ne pas permettre que notre pavillon soit insulté par un monarque asiatique. Qu'on soit bien persuadé que conseiller l'annexion du Tonkin n'est nullement vouloir lancer notre pays dans une aventure sentimentale où le désintéressement touche à la duperie. Il faut agir, écrivait récemment un homme politique dans la Revue Si
desDeux
Mondes, il faut agir, parce que
notre prestige, notre politique et nos intérêts sont actuellement en Asie. La sécurité de notre possession en Cochinchine, les besoins du commerce auquel l'ouverture du Tonkin offrira d'admirables débouchés exigent que l'intervention de la France soit décisive et amène des résultats qui, espérons-le, seront définitifs. L'annexion du Tonkin intéresse aussi bien notre marine marchande que notre marine militaire. Sans possessions lointaines, en effet, la marine marchande se meurt et la marine militaire reste inutile, usant sur place et sans profit ses meilleurs officiers et les millions qu'elle coûte. Il ne faut pas oublier l'animation extraordinaire, l'activité prospère que les colonies donnent aux arsenaux militaires et commerciaux de l'Angleterre et la richesse immense qui en découle pour les industries de ce pays. Sachons-le : aujourd'hui la Prusse cherche envoyer elle puisse éloignée où terre une Pourquoi? Parce naissante. flotte que sa depuis 1871 elle a décuplé sa marine. 'Elle a acquis une -forée-nôuvelle-et elle veut l'exercer. Serait-ce à nous, Français, de
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nous amoindrir, là où l'Allemagne chercli à s'agrandir. Dans cinquante ans, a-t-on dit, et peut être avec raison, à la façon dont agissen les Anglais et les Russes, il n'y aura plu dans l'Indo-Chine un seul État indépendan et alors, si, quand nous le pouvons, nou n'augmentions pas notre puissance colo niale, nous serions exposés à voir li France ne plus compter au nombre de puissances d'Europe. Hâtons-nous donc il y a au Tonkin un peuple qui ne demand qu'à se jeter dans les bras de celui qui 1 délivrerades Annamites, ses oppresseurs de puis le commencement du siècle. C'estànou à les affranchir. La magnifique situatiol que nous avons en Cochinchine, la richess toujours grandissante de cette colonie, nou défendent de nous laisser supplanter dan qu'à il tient voisin où nous d ne un pays nous installer. Ajoutons que le Tonkin contient. noii l'avons dit, d'immenses richesses. On trouve beaucoup de mines d'or, des mine d'argent, des mines de cuivre en quantit considérable, d'importants gisements d zin d'étain, mines des de plomb, des mines
du fer, de l'acier, du sel, de la soude, du *lpèt«e, de l'alun, de l'arsenic, du soufre, du charbon deterre, du pétrole, du kaolin, du marbre, du jade, du cristal de roche, des pierres précieuses, de l'ambre, des eaux
minérales. Ces-précieux produits se peuvent acquérir sur place à des prix très avantageux ainsi en 1873 M. Dupuis pouvait prendre du minerai de cuivre en échange d'un poids égal de sel or. le sel coûtait à Hanoï de 5 à 6 centimes le kilogramme. Le riz, qui est la principale culture du Tonkin, est cultivé dans la plaine et donne deux moissons par an. On en distingue deux espèces, dont l'une sert à l'alimentation; de l'autre espèce, les Annamites extraient un alcool qui est leur unique boisson capiteuse. La canne à sucre, nous apprend en outre M. Romanet duCaillauddans une brochure urlesProduitsduTookin, la canne à sucre est cultivée partout au Tonkin, où l'on récolte également du mais, des patates, des bananes, des oranges, des limons, des ananas, des goyaves, du thé vert d'excellente qualité, du tabac qui, sur certaines
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montagnes, vaut, disait Francis Garnier, les tabacs de Manille et de la Havane; de l'opium, des plantes médicinales, de la cannelle, du coton, de l'indigo, des huiles, des bois odoriférants, etc., etc. Parmi les animaux domestiques plus nombreux sont les chevaux, les buffles qui servent à la culture des rizières, les bœufs de labour, espèce petite mais bien faite, au poil court et luisant, à la chair excellente; des porcs, qui sont la base de la nourriture animale des indigènes. Point de moutons, mais beaucoup de chèvres. Les volailles, les poules, les canards, les oies sont très communs et se vendent très bon marché. Les canards s'élèvent par troupeaux et ont ours bergers et leurs chiens. Le ver à soie réussit trèsbien auTonkin, où l'on trouve en outre, au milieu des broussailles, une araignée rougeâtre de grosseur moyenne qui produit une soie très résistante, très abondante, avec laquelle on fait de belles étoffes et qui vaut environ cinq francs le kilogramme. Beaucoup d'oiseaux très beaux, au plumage éclatant; des paons et des faisans bleus; des hirondelles, dont les fameux
les
nids sont l'objet d'un important commerce. Sur le rivage de la mer des tortues à écailles et des coquilles nacrées qui servent lesquelles les Annaincrustations pour aux mites sont les plus habiles artistes du monde. dans la plaine, Le gibier est abondant des lièvres et des perdrix; dans les montagnes, des cerfs, des daims, des chevreuils etdes sangliers, mais les montagnes, nous l'avons dit déjà, sont aussi habitées par de nombreuses bêtes fauves, des tigres, des panthères, des rhinocéros, des ours et des
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éléphants.
Mais ces animaux n'intimident plus les Européens, et il serait aisé, dans cet admirable pays possédant de nombreux fleuves navigables, des routes, il serait aisé d'établir des chemins de fer et d'ouvrir partout des voies commerciales. Nous avons suffi-
samment démontré plus haut l'immense importance de la découverte de la navigabilité du fleuve Rouge il importe que nous utilisions cette découverte. Nous avons le ferme espoir que le dévouement de nos soldats ne sera point perdu; grâce à eux la
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France ouvrira à son commerce desdébouchés nouveaux; après les batailles livrées, la prospérité de la patrie grandira. Les troubles de Hué ne sont point redoutables, et l'amiral Courbet a envoyé les forces nécessaires pour rappeler les mandarins au respect de notre traité. En outre, M. le général Millot, nommé commandant en chef du nouveau corps expéditionnaire, se trouve à la tête d'un corps d'armée suffisamment nombreux pour faire réfléchir la Chine avec qui nous traiterons, étant maîtres du Tonkin, lorsque nous le jugerons convenable. Quant à nos vaillants qui là-bas combattent pour nous etversentleur sang sans marchander, la médaille militaire du Tonkin les récompensera de leurs peines et ils auront mérité la reconnaissance de la
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nation
TABLE DES GRAVURES Pages
Une fête religieuse chez les Aunamites Typesd'acteurs de musiciens
annamites. Iatérifiiic d'un riche Une représentation sur un théâtre annamite., Rli
21 25 29 33 36
La procession annuelle du
France. Saigon
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Tonkin.
88 93 97
et
et Reine
Annamite.
d'Anuifu
Un enterrement
Dragon
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Types annamites civils et Pic de câbles télégraphiques reliant la Cochinchine à
la Premier phare construit sur la côte de Cochinchine.. L«Babords de Sai;'Jll (vue de la rivière) Le pLlrt de U. bal au palais du Gouvernement, à Saigon linvillage sutle Portrait de Dupuis, premier explorateur du fleuve Rouge. Intérieur d'une citadelleau Les mandarins de la douane au Toa-in Uae fèteau pays Portrait de Millot, second de la première expédition, au
Rouge.
fleu'e
Tonkin. r
d'Annam.
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Portrait de Francis Garnier, explorateur au Tonkin La Grande Pagode annamite Prise d'un fort annamite par les marins IL Balny dirige le tir deses canons-revjlvers Combat surlesbords du fleuve Rouge Pute-drapeau des pavillons-noirs
français.
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de pirates au La chasse aux pirates par un aviso francais Canonnières à vapeurjir le fleuve Jaune
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109 113 121 125 129 133 137 141' 153 157 1G1
165 173
Nam-Dinh183 Pages
pouvantable massacre au Tonkin Prise de Intérieur d'un poste annamite
Entrécd'unposteannamite,
177
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180
193 Prise d'assaut des retranchements des Pavillons-Noirs. 197 Débarquement des troupes à 201 Bombardemcnt d'un fort par les marins français 205 Escadrille du corps expéditionnaire 217 Tu-Duc, empereur d'Annam 221 Une 225 Ambassadeurs annamites 229 Portrait du commandant Henri Rivière, 233 Portrait -du commandant Berthe de Villers 237 Portrait de M. de Marolles, chef 241 Portrait du général 249 , Portrait du vice-amiral 253 Vue de Haï-Phang 261 Prise des forts de 265 Les canonnières la Vipère et le 273
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Arrivée du ministre plénipotentiaire français à Hué 281 Vue de Ba-Hoa, 285 Signature du traité de paix à Hué 293 La pagode des supplices à Hanoî 309 Course de 317 ; 321 Attaque générale d'un fort par les marons français Attaque d'un camp retranché par les tirailleurs 325 333 L'infanterie de marine au Tonkin 34J Transports -militaires au Tonkin Mission chinoise et ses interprètes 349 Le marquis Tseng, ambassadeur de Chine et sa famille. 353 357 La grande porte de Pékin, capitale de la Chine La grande rue cirrulaire de Carte (de Marseille au Tonkin) par l'isthme de Suez.. 368 369, Carte (Cohinchine et Tonkin) 373 Vue de
chevaux
Saigon.,
Pékin36^
NOTA.
—
laMande Illustré l'obligeance du Nous devons à reproduction de la plupart de nos gravures.
TABLE DES CHAPITRES
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III.
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IV.
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V.
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