La question de la Légion étrangère.

Page 1


university of

connecticut libraries

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Question de

3

la

Légion étrangère

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GASTON

IVIOCH

U QUESTION DE LA

LÉGION ÉTRANGÈRE DEUXIÈME MILLE

PARIS BIBLIOTHÈQUE-CHARPENTIER EUSÉNE FASQUELLE, ÉDITEUR

H,

RUE

DE

GRENELLE,

1914

11



1

LIBRAIRE

1

A.MURY GENÈVE

I



LA QUESTION DE LA

LÉGION ÉTRANGÈRE


— DU MÊME AUTEUR Artillerie

:

Des Canons

:

à Fils d'acier (Berger-Levrault, 1887).

Expériences américaines sur le Frettage des Bouches à feu (Id. Notes sur le Canon de campagne de Vavenir (Id., 1891) 1889). L'Artillerie de V Avenir et les nouvelles Poudres, trad. d< l'anglais, de J.-A. Longridge et annoté (Id., 1893). Vu(

générale sur V Artillerie actuelle (Id., 1895).

Art

militaire

:

La Poudre

sans

Fumée

et la

Tactique (Id., 1890)

Histoire Sedan. : les derniers Coups de feu (Denlu, i885). — Histoire de Norvège, trad. dej'allemand, de John Lund (Kris tiania, i~ :

Linguistique La question de la Langue internationale et sa solu tîon par l'Espéranto (Giaid et Brière, 1897). (*) De la pro nonciation de V Espéranto (Gauthier-Yillars, 1907). (*) De l Transcription des Noms propres en Espéranto (Office centra espérantiste, 1910). X-Lexique, vocabulaire de V argot d V Ecole Polytechnique Gauthier -Yillars, 19 10). :

— (

Organisation des Etats La Défense nationale et la Défense de Côtes (Berger-Levrault, 1894). La Défense des Côtes et ù Marine (Id., 1895). Artillerie et Budget (Id., 1897). L'Armée d'une Démocratie (Edit. de la Revue Blanche, 1899) :

La Réforme

Rapport sur 19 10}. 1910).

la

La

militaire

:

Vive la Milice

création d'un lycée à

!

(Bellais,

1900).

Monaco (Imp. de Monaco

représentation vraiment proportionnelle (Gornély.

Politique internationale L'Alsace- Lorraine devant VEaropt (Ollendorf, 1894). Autour de la Conférence interparlementaire (Gollin, 1895). Alsace- Lorraine. Réponse à un pamphle allemand (Id., 1895). Une voix d'Alsace {Eine Stimme aui Elsass) (Id., 1896). L'Ere Une royale idée (Davy, 1897). sans violence. Révision du Traité de Francfort (Edit. de la Revue Blanche, 1899). Ce que coûte la paix armée, et comment er Vers la Fédêratior finir (Bureau Français de la Paix, 1900). d'Occident : Désarmons les Alpes! (Giard et Brière, 1905). (*) Sur le Désarmement : Chimères et Réalités (Impr. Espérantiste, 1906). Histoire sommaire de l'Arbitrage permanent, édition revue (Monaco, Institut international de la Paix, 1910). *

— — —

Traductions littéraires

(*)

:

L'anglais tel qu'on

Bernard (Hachette, 1907).

About (Hachette, 1909). (*)

En

Espéranto.

le

parle, de Tristan

— Le Roi des Montagnes, d'Edmond


GASTON MOCH

LA QUESTION DE LA

LÉGION ÉTRANGÈRE DEUXIÈME MILLE

PARIS BIBLIOTHÈQUE- CHARPENTIER EUGÈNE FASQUELLE, ÉDITEUR il,

RUE DE GRENELLE,

11

1914 Tous droits de reproduction, de traduction réservés pour tous pays.

et d'adaptation


UA

703 L

IL

:

A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE

5 exemplaires numérotés sur papier de Hollande.


FAC-SIMILÉ DE LA

Lettre

du Colonel autrichien de Benedict traduite Ă la page

241



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LA QUESTION DE LA

LÉGION ÉTRANGÈRE PREMIÈRE PARTIE LA CAMPAGNE CONTRE LA LÉGION

PANGERMANISTES ET GENS DE BON SENS

La campagne de 4a tre la

presse allemande con-

Légion étrangère est un exemple frap-

pant à l'appui du mot que Thiers appliquait

aux choses de

la

politique

ne rien prendre

:

au tragique, mais tout au sérieux. Assurément, en

elle

effet,

déterminé d'irréparable nimité du pays auquel

;

n'a encore rien

loin de rallier l'una-

elle

s'adresse, 1

.elle

ya


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

2

déjà soulevé des protestations qui sont de bon

augure pour l'avenir

;

et c'est

donc dans

le

plus grand calme que nous pouvons l'observer, en souriant à ses outrances. Mais cette tranquillité ne doit pas

d'en suivre

nous

développement

le

faire négliger

aux

et d'aviser

conséquences qu'elle comporte,

et qui, le

cas

échéant, pourraient devenir fort graves.

serait fort

11

difficile,

grande

utilité,

tement

les initiateurs

et

d'ailleurs

sans

de rechercher quels sont exacde l'agitation contre la

Légion. L'essentiel est de noter qu'elle

parti pangermaniste,

lequel

l'a

émane du

menée avec

assez de suite et d'ardeur pour produire une

impression

réelle sur

un bon nombre

d'esprits

pondérés, qui ne peuvent imaginer que tant

de

«

révélations

»

sensationnelles soient de

pures inventions.

Ce premier

résultat ressort des articles déjà

publiés par divers journaux que n'anime au-


3

PÀNGERMANISTES ET GENS DE BON SENS cune

aucun

hostilité,

France;

et j'ai

parti-pris

contre

eu personnellement mainte

occasion d'en constater la réalité, dans

correspondance

la

ma

mes conversations avec

et

mes amis allemands. Or, c'est

ici

qu'est le danger.

Si l'agitation

demeurait limitée aux milieux

pangermanistes, sans gravité

réelle,

que

nent bien

elle

serait

irritante,

mais

car les Français compren-

nation allemande, dans

la

son ensemble, ne doit pas être rendue responsable de ses énergumènes,

ne

le

sommes de nos

de leurs jingoes,

non plus que nous

nationalistes, les Anglais

et les Italiens

de leurs méga-

lomanes. Sous ce rapport,

les divers

qui prétendent faire de la

grande politique »

«

peuples

n'ont rien à s'envier les uns aux autres. Chacun

possède ses de

«

trublions

les faire taire

»

:

la

— autant

question n'est pas vouloir empêcher

un chacal de hurler pendant simplement de bien et d'autre,

faire

la nuit

mais

comprendre, de part

combien peu ils représentent la saine

opinion publique de leurs pays respecLfs.


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

4

Assurément,

les

pangermanistes sont, de

tous ces exaltés, les plus détestables brutalité injurieuse,

ils

rer qu'à leurs congénères des~«

russes. Mais

chacun

:

par leuf

ne peuvent se compa-

sait qu'ils

bandes noires

»

ne sont qu'une

minorité, dans ce peuple laborieux et paisible

de soixante-six millions d'âmes cès

mêmes

suscitent

;

et leurs ex-

un notable mouvement

de protestation, dont un heureux symptôme vient d'être fourni par

le

courageux volume

du professeur Nippold sur Le Chauvinisme allemand Si

(1).

grand tapage que mènent

la Post, la

Tae-

glische Rundschau, la Kreuz-Zeitung, la Rhei-

nisch-Westphaelische Zeitung et consorts, leurs excitations et leurs injures sont donc, en elles-

mêmes, sans grande conséquence. Mais teurs

il

n'en serait plus de

même,

si

de haine, qui ont su émouvoir déjà un

grand nombre

d'esprits

pondérés

et pacifiques,

parvenaient à convaincre décidément :

(i)

ces fau-

la

masse

Der deutsche Chauvlnismus, Stuttgart, W. Kohlmam-

iner, 19 13,

1

marc.


PANGERMANISTES ET GENS DE BON SENS

5

de la population allemande que la France maintient, envers et contre tous, une institution dont le caractère la ravalerait

d'une tribu de sauvages.

uu

tôt à

conflit aigu,

les forcenés

On

au niveau

en viendrait bien-

non plus seulement entre

des deux nations, mais entre ces

nations elles-mêmes;

et

des sommations inad-

missibles finiraient par nous être adressées,

au tragique une aventure qui

faisant tourner n'est

encore que déplaisante

Dans

le

et ridicule.

numéro de décembre

1913 de la re-

vue Hochland, M. Henrich Pohl exprime à cet

égard une opinion fort répandue en Alle-

magne, en disant que

existence de la

la seule

Légion étrangère peut,à l'occasion, l'étincelle

qui mettrait

le feu

l'appui de cette crainte,

il

Ce qui sif,

cite

lui.

un

est allé à fait

dans

A de le

:

fera pencher la balance,

Le seul

».

article

écrivait,

au moment déci-

ce n'est pas la question de savoir

allemand

fournir

aux poudres

M. Richard Nordhausen, qui

Tag du 15 mai

«

un jeune

si

Alger volontairement ou malgré

de son engagement sera

décisif. 1.

La


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

6

fierté

nationale s'enflammera et ne le supportera pas

Ce

en

silence.

est

un outrage

seulement parce que

n'est pas

un

à l'humanité,

doit disparaître.

Ce

n'est pas

sion.

la

paix a

le

L'Allemagne,

de l'honneur. Tout

même

devoir de travailler à sa suppres-

nation victorieuse, ne peut pas

la

indéfiniment ce qu'elle

tolérer

n'admettrait

maintenant, cette revendication, que

les villes-frontières,

on mette

fin à

pas,

partir

de

les

Allemands

la

Légion, et

ne puissent plus être incorporés dans

Il

A

après une guerre malheureuse.

que, tout d'abord,

Légion

esclavage, qu'elle

seulement parce qu'elle

offense le sentiment allemand

ami de

la

l'enrôlement dans

demeurera impérissable.

est bien certain

que

nait à se généraliser, et

si

d'âme ve-

cet état

si les

Allemands, sous

prétexte que leurs pères ont vaincu les noires

en 1870, prétendaient nous imposer leurs vues

en matière d'organisation militaire

et

exercer

leur souveraineté dans nos villes de l'Est,

on

courrait à une catastrophe qui ébranlerait le

monde C'est

civilisé tout entier.

pourquoi

il

est juste

temps

d'aviser, et

de s'adresser aux deux peuples qu'une poignée


7

PANGERMANISTES ET GENS DE BON SENS de brouillons malfaisants peut

entraîner à

leur perte.

Aux Allemands,

il

montrer ce que

faut

valent les assertions extravagantes par les-* quelles on s'efforce d'abuser leur crédulité; faut les inviter à se

dre

et

demander

il

à quoi peut ten-

aboutir une agitation entretenue par de

semblables moyens, et leur représenter combien

dangereuse

est toujours,

en pareille matière,

l'intervention de l'étranger, lors

même

qu'elle

se produit avec tact et discrétion, c'est-à-dire

dans des conditions inconnues aux teuto-

manes. Les Français, ensuite, auront à examiner certaines modifications de détail, apportées

recrutement ou au fonctionnement de gion,

indépendamment de

toute

la

au

Lé-

sommation

venue du dehors, ne seraient pas de nature à enlever tout prétexte, critique

même

si

minime

bienveillante.

soit-il,

à une


II

DANGER DE L'INTERVENTION DES ÉTRANGERS

Nul ne peut dire les

hommes

si

un jour viendra, où

auront pris l'habitude de considé-

rer les choses assez objectivement

pour tenir

compte de toute critique dans

mesure où

elle

la

de quelque part qu'elle

est justifiée, et

vienne. Mais ce qui est certain, c'est qu'ils

sont encore bien loin d'une semblable impartialité,

ne fût-ce que parce

qu'ils suspectent

On

l'impartialité de leurs censeurs.

accepte

toujours difficilement les critiques, lors qu'elles sont fondées.

Et avant tout,

tivités, qu'elles soient nationales,

nelles

ou

offenses,

autres,

sans

repoussent

même

même

les collec-

profession-

comme

des

vouloir les examiner,


DE L INTERVENTION DES ETRANGERS celles qui leur sont adressées

U

du dehors;

cela

semble être précisément une condition, une des raisons d'être de toute vie collective.

Mais que dire d'une campagne d'attaques de la dernière violence,

émanée, en temps de paix

armée, de l'un des deux camps opposés, contre l'armée de l'autre pays? N'est-il pas évident qu'elle

ne

peut

avoir d'autre

résultat

que

d'exaspérer les esprits, de gâter irrémédiable-

ment

les relations entre les

deux nations?

A

supposer que ses protagonistes soient sincères

dans leur

indignation,

comment ne com-

prennent-ils pas qu'ils agissent à contre-pied

des intentions philanthropiques dont

ils se

réclament, et qu'ils ne s'y prendraient pas au-

trement

s'ils

voulaient rendre toute réforme

impossible, de manière à maintenir la plaie

toujours à vif pour pouvoir

l'irriter

sans cesse

et

déterminer finalement une catastrophe

la

LégiQn

était

qu'on prétend,

? Si

vraiment l'institution barbare le

premier devoir des étrangers

qui n'auraient d'autre but que d'améliorer cet état de choses serait de s'abstenir

de toute ac-


10 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE tion publique

dans leur propre pays,

borner à signaler très discrètement

et

de

se

mal

à

des citoyens français, seuls qualifiés pour

y

faire porter

le

remède.

Gela est tellement évident, qu'on est forcé

de

suspecter

les

intentions

qui mènent tout ce tapage.

des

On

hommes!

voudrait ne!

voir en eux que d'honnêtes gens, abusés par'

quelques aventuriers qui ont inventé rière fructueuse

de pseudo-légionnaire désa-

busé, et désireux

compatriotes

et

seulement d'éclairer leura

de leur épargner un sort mi-

sérable. Mais, en vérité, ladroits, si être,

«

la car-

gaffeurs

»

on ne

le

peut. Si

que des gens puissent

on n'imagine pas que tout un

une presse nombreuse

ma-

et

parti, toute'

sachant admirable-

ment organiser une action commune, poussent l'aveuglement jusqu'à mener une campagne

humanitaire, pendant des mois et des mois,

de

la

manière

même

que tout

homme

de bon

sens reconnaît la plus propre à en assurer l'insuccès. Et cette certitude

ment amené, d'une

où Ton

est force-

arrière-pensée haineuse et


DE L'INTERVENTION DES ÉTRANGERS agressive, est de nature à

fortifier

11

chez les

Français la décision de se refuser à toute discussion. Ainsi, le simple

au

loir créer,

bon sens indique qu'à vou-

sujet de la

Légion étrangère, une

question internationale, on ne peut aboutir J

qu'à une situation inextricable et grosse de

dangers.

Mais

il

existe bien des cas

se laisse pas arrêter

dérations

;

où une nation ne

par de semblables consi-

et si la situation était

que la dépeignent

les

vraiment telle

pangermanistes, ou

si,

ce

qui reviendrait pratiquement au

même,

masse des Allemands

convaincre

qu'elle

est

telle,

on

se

laissait

concevrait

parfaitement

qu'une poussée d'opinion entraînât

nement à

tions que réclament

être

le

gouver-

à la France les représenta-

faire

cerveaux brûlés

la

;

et

un

certain

dans ce

cas,

nombre de on pourrait

rapidement conduit à des conséquences

irréparables. C'est ce

qu'exprime

le

jugement suivant,

porté par la Correspondance helvétique, etrepro-


.

12 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

du 29 sep-

duit dans les "journaux parisiens

tembre 1913

:

La plupart des Français, toujours un peu insouciants, n'accordent pas à la

légers e

campagne

antilé

gionnaire toute l'attention qu'elle mérite.

Plus réfléchis et plus attentifs que les Suisses, les

qui redoutent aussi

ambitions

les

Français

Belges, les Hollandais et les Danois

et les visées

les

monstreux armements,

les

annexionnistes de l'Allemagne

demandent à quoi pourra bien aboutir

impériale, se

cette levée de boucliers pangermanistes.

Bon nombre

d'entre eux estiment que lorsque l'opinion publique

allemande sera formidablement excitée contre gion, le

débordé

gouvernement impérial pourra et

que, pour

adressera à la France cier la

A

satisfaire

être

cette

une sommation

la

Lé-

un peu

opinion,

il

d'avoir à licen-

Légion

moins de descendre au rang de cinquième puisAlors se produira cette

sance, la France refusera.

attaque brusquée, dont

il

a été

si

souvent question

ces derniers temps.

Les Suisses, Belges, Hollandais, Danois

et

tous les

libéraux des autres pays sont convaincus qu'un écra-

sement de

la

France

serait

un immense

et irrépa-


DE L'INTERVENTION DES ÉTRANGERS rable

malheur pour

monde

le

triomphe immédiat de Europe,

entier.

Ce

13

serait le

l'hégémonie allemande en

contemporaines obtenues après

et les libertés

tant d'efforts, de luttes et de sang, seraient prompte-

ment

étouffées sous les lourdes bottes des junkers

prussiens.

Cette manière

répandue chez s'associer à

de

les

neutres que la tendance à

une campagne

fondée, et dont

beaucoup plus

voir est

qu'ils savent

suspectent donc

ils

non

la ten-

dance.

Le

silence gouvernemental, en face d'une

agitation reposant tantôt sur le l'insulte, et tantôt

sur

mensonge

et

les insinuations et les

procès de tendance, ne peut qu'accréditer en

France l'opinion que préparer

là ce que,

on appelle une

«

l'on est

en train de nous

depuis plusieurs siècles,

querelle d'Allemands

».

Elles

sont de nature à faire accepter par beaucoup

de gens la thèse absurde de nos nationalistes, suivant laquelle la question de gère est tenue en réserve par

allemand pour

lui fournir

la

le

Légion étran-

gouvernement

éventuellement un 2


14 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE prétexte

ultimatum. C'est ainsi que

à

France militaire du 4 octobre écrivait Pourquoi ce déchaînement furieux contre la Légion étrangère

demment profonde.

a

On

dossier »

ment de Berlin

sait

Et, en vérité,

connaît

la

et la façon

des-

très alle-

comment

von Bernhardi

ne

quand on écrire

exiger de notre

se laisse

temps nous

voit le gé

dans

la

revue

du Matin, du

1

plutôt s'efforcer

gouvernement que ja

imposer une guerre, car dans ferait défaut

point de vue économique.

une guerre

gouverner

:

Nous devons il

le

se défendre contre

berlinoise Der Greif (citation

novembre)

méthode germa-

dont

en jouer à l'occasion.

suppositions,

telles

néral

cas le

politique

gouvernement

campagne. Dans quel

cette

dossier français ».

mais

le

évi-

de constituer par cette question un élément di

nique du

de

raison

que

certain en effet

Vraisemblablement par ce sentiment

?

mand <(

et systématique

Les raisons en sont

multiples. D'abord, une Il est

allemand favorise sein

?

la

:

pour

la

préparer

c<

m

Nos dirigeants doiven

de préparer longtemps à l'avano

qu'ils considéreraient

comme

inévitabL


DE L'INTERVENTION DES ÉTRANGERS >u nécessaire, et

d'en prendre l'initiative au

15

moment

oulu.

Heureusement, ce Darle ainsi, ni

n'est

pas l'empereur qui

un représentant qualifié de l'opi-

nion allemande

:

ce n'est

que

le

général von

Bernhardi. Ses paroles doivent 3uisqu'elles exposent

néanmoins

être retenues,

ouvertement

les

concep-

ions d'un parti qui prétend bien devenir ca-

pable d'entraîner un jour son pays.

On

sait

en

effet

que

la

préparation d'une

guerre ne consiste pas seulement à accumuler les

armements. Elle exige que Ton

compte des que

«

impondérables

l'on se soit assuré le

vement patriotique de

»,

tienne

c'est-à-dire

concours d'un soulè-

l'opinion, sans lequel

une grande guerre nationale

est actuellement

impossible. Et c'est à quoi peut viser la confection

du

a

dossier de la Légion

»,

destiné à

déterminer éventuellement l'explosion, ror teutonicus, l'article

que

le

/«-

faisait entrevoir, plus haut,

de M. Nordhausen.


16 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

On

voit par là

combien

d'examiner avecattention

guments produits par ment, de bonne

est nécessaire

et sang-froid les ar-

Allemands qui

les

foi, qu'il

tion de nature à les

il

existe là

émouvoir

et

peut-être

un jour une intervention

combien

il

une quesà justifier officielle;

est nécessaire également de

inviter à procéder à

une

esti-

pareille critique

les

ob-

jective de nos arguments, et à se représenter les

désastreuses conséquences que pourrait entraîner

un emballement

irréfléchi.


III

POPULARITE DE LA LEGION EN FRANCE

Avant d'entrer dans sion,

il

le

fond de

la discus-

faut encore indiquer en quelques

mots

an de ses aspects qui semble inconnu de la plupart des Allemands.

en effet, étonné un grand nombre d'entre

J'ai,

eux en leur disant que, l'étranger est

si

toute ingérence de

dangereuse en matière d'organi-

sation militaire,

il

n'est pas possible d'en

ima-

giner une qui constitue une plus lourde erreur,

une

«

gaffe

siste à

»

plus complète, que celle qui con-

vouloir discréditer notre Légion étran-

gère.

Convaincus, par

les récits

eux, que cette troupe est

qui ont cours chez

un ramassis de ban2.


1S LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

commandés par de sombres

dits

ils

un Français, rencon-

croient, en en parlant à trer l'approbation

brutes,

embarrassée de quelqu'un

qui se sent solidaire d'une mauvaise action

:

trouvent un contradicteur indigné, dis-

et ils

posé à prendre pour une offense personnelle toute parole prononcée contre ce corps d'élite;

sont stupéfaits d'apprendre qu'il n'existe

ils

pas de plus sûr

moyen

d'exaspérer

un

d'entre

nous, que de s'attaquer à un corps qui est sim-

plement un

des plus

populaires

de notre

armée. Il

est

donc nécessaire de leur montrer quelle

situation privilégiée la

Légion occupe dans

l'opinion publique française.

Pour

définir cette situation,

peler que le drapeau

du

1

er

il

suffît

de rap-

régiment étranger

est décoré.

C'est

mée le

une coutume toute particulière à

française,

que celle qui consiste à décorer

drapeau d'un corps de troupe qui

marquablement distingué au 1859,

et,

l'ar-

depuis

lors,

s'est re-

feu. Elle date

de

en tant de combats, onze


POPULARITÉ DE LA LÉGION EN FRANCE régiments seulement ont ainsi obtenu de suspendre

hampe de

la

Or,

le 1 er

la

Légion d'honneur à

étranger est un de ces régiments.

dans

nom évoque

l'esprit

tout

un

de tout Français,

trésor de gloire, toute

une tradition de dévouement qu'il est intolérable

Et

si

droit

leur drapeau.

C'est dire que,

son

de

l'étoile

le

19

et

de vaillance,

de voir chercher à ternir.

un Allemand veut bien ajouter à

cette

considération celle, également appréciée par tous les Français, et sur laquelle nous revien-

drons plus la

du service incomparable que

Légion rend à des malheureux auxquels

offre il

loin,

un refuge

et

une occasion de relèvement,

comprendra quelle lourde faute

patriotes

elle

ses

commettent en s'attaquant à

com-

elle.


IV

PAMPHLETAIRES ET CONFERENCIERS

Il

est difficile

protagonistes de

de parler sans passion des

campagne

cette

bien, ne m'occuperai-je

que

le

;

et aussi

moins possible

de leurs productions. Ces dernières présentent

un

tel

ramassis de mensonges éhontés

et d'in-

jures grossières, qu'elles sembleraient devoir

dépasser

le

but, et

ne pouvoir toucher que

des esprits naïfs, plus à plaindre qu'à blâmer. Il

faut pourtant les mentionner en passant,

puisque, par la vertu magique de elles sont arrivées à

bonne

partie

la répétition,

émouvoir réellement une

du public

:

ce serait fermer les

yeux à l'évidence que de contester

qu'elles ont

réussi à ébranler des esprits plus pondérés


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS

21

que ceux des membres de la Ligue pangermaniste,dela Ligue militaire, âe la Ligue navale,

ou de cette Ligue allemande de protection contre Légion

la

band

étrangère

Schutzver-

(Deutscher

gegen die Fremdenlegion),

constituée à

prince

Munich sous

Hermann

von

la

qui

s'est

présidence du

Sayn-Wittgenstein,

ou encore de son émule, YÀssociation pour combattre Vesclavage des Allemands dans

Légion étrangère (Verein zur

la

Bekaempfung

der Sklaverei Deutscher in der Fremdenlegion).

Parles soins de ces dernières associations, et aussi des industriels avisés qui, en tous pays,

savent battre monnaie avec

le

scandale,

seulement l'Allemagne, mais tous

les

non

pays de

langue allemande sont inondés d'articles, bro-

chures

et livres

haineux, ainsi que de placards

illustrés, destinés à et les

les

annoncer ces publications

conférences publiques par lesquelles on

commente. Un

article

de M. André Fri-

bourg,paru dans YOpinion du 11 octobre 1913, en donne d'intéressants spécimens, que

AI.

Oc-


22 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

manquer de

tave Mirbeau ne pourra

collec-

tionner pour la prochaine édition de son Jardin des

supplices.

représentant

un

une barre de

fer

On

voit

des dessins

légionnaire nu, fustigé avec ;

un

autre, également nu, et

violemment frappé par un chef barbare autre, toujours

d'arbre par les mains et les pieds, à

dune troupe de

au-dessus

Je passe sur

dans

la neige

un mètre

fusille, et

sur ce-

de froid

et

qui lui monte à mi-corps

moins, ceux-là sont habillés,

et

:

au

ne témoignent

pas du sadisme qui paraît jouer un rôle

un

fauves dévorants.

un autre qu'on

qu'on laisse mourir de faim

lui

;

nu, suspendu à deux troncs

si

grand

dans l'imagination des auteurs de cette

méprisable littérature.

Il

Les

textes, naturellement, sont à l'avenant.

est

entendu, une fois pour toutes, que la

Légion étrangère

est « la

honte de ce

l'enfer sur terre », que, les

vent y trouver que «

de l'âme

et

tirent, ils

du corps,

le

la

siècle..»

Allemands ne peu-

déshonneur,

mort

»

;

la torture

que,

s'ils

s'en

en reviennent brisés, blanchis avant


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS

23

Tàge, perdus pour la joie et le travail; mais

que

«

plupart sont enfouis dans les sables

la

du désert

»,

et

existe, 200.000

que

«

depuis que

Légion

la

Allemands sont tombés,

times de cette dévorante bête de proie

»

:

vic-

deux

cent mille, c'est-à-dire, depuis que la Légion existe,

une moyenne de 2.400 par an

!

Ces insanités sont soigneusement collectionnées dans

les

Bel-Abbès

et

bibliothèques régimentaires de

de Saïda, où

elles font la joie

des

légionnaires, allemands ou autres. Mais en Alle-

magne, elles sont certifiées

et

commentées, dans

des réunions publiques organisées à grand orchestre, par des gaillards qui se présentent

comme

anciens légionnaires, souvent revêtus

d'un uniforme plus ou moins authentique,

et

qui s'entendent à faire frémir leur auditoire.

Le s'est

nommé livré

Hasselmann, de Cologne, qui

à des exhibitions de ce genre en

août 1913, peut être donné

du genre (i)

(1). Il

a servi, prétend-il, pendant

Voir Y Humanité du

précité de Y Opinion,

comme un modèle

i

er

septembre

191 3 et

l'article


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

24

sept ans à la Légion, et y a obtenu le grade

de sergent-major. Pendant tout ce temps,

seulement on ne ceau de viande, et

de

riz,

fois sur

mais

une

pas donné un seul mor-

lui a

et

il

il

n'a

a

et

se contenter de pain

dormi que quarante-trois

paillasse,

deux mois,

norij

— soit

une

fois tous les

du temps, à

le reste

la belle

étoile.

sort ordinaire des soldats,

Si tel est le

même

d'un sergent-major, on peut imaginer

quelles épreuves subissent les le

hommes

punis:

brave Hasselmann n'hésite pas à raconter

que

l'un d'eux a

doigts coupés

;

eu

le

Cet

et les

recouvrant d'une cloche en

de fer remplie de

voré vivant

nez

les oreilles, le

après quoi, on l'aurait enterré

jusqu'au cou, en iil

el

rats,

qui l'auraient dé-

!

homme

à l'imagination

malheureusement pas un

si fertile

On

n'esl

lui a

déjà

trouvé des imitateurs, ou, pour mieux

dire.'

des concurrents, car d'

«

il

ancien légionnaire

isolé.

semble que »

soit

venir une profession lucrative

la qualité

en passe de ;

cela,

de-

bien en-


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS

25

tendu, à la condition d'être exercée par de tristes

victimes,

péniblement échappées de

notre enfer colonial. Les réunions où on les

exhibe font assez penser à celles des salutistes, l'assistance est toujours édifiée par l'au-

tobiographie de quelque pécheur repenti.

même

L'un d'eux a sion

inattendue

de

fourni au Matin l'occa-

défendre

le

kronprinz

contre les affirmations compromettantes des

pangermanistes Ce journal contenait, en !

6 octobre,

le

le

effet,

télégramme suivant de Berlin

Le Hamburger Fremdenblatt, une

feuille très

:

im-

portante d'Allemagne, prenant texte d'une conférence faite

par

un

légionnaire,

certain Mertinat, lequel se dit ancien écrit

que

les révélations

faites

par cet

individu sont tellement atroces qu'on aurait peine à les

croire

si

l'authenticité de ses récits n'était pas

garantie par certaines personnalités,

prince héritier d'Allemagne.

le

11

en a

notamment par

semble presque certain que

se disant

recommandé

dû mentir une

magne ne

fois

et

le

faux légionnaire,

protégé par le kronprinz,

de plus,

le

prince héritier d'Alle-

s'occupant pas d'affaires aussi délicates. 3


26 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Un

démenti ne saurait tarder d'être

infligé à cette

|j

1

nouvelle, que nous ne reproduisons que parce qu'elle est

donnée par

le

journaux, nous

un

des

répétons, les plus considérés

en

Hamburger Fremdenblatt

le

,

| '

Allemagne.

Autre exemple. Dans d'octobre 1913, je

me

les

premiers jours

Les vitrines des libraires y étaient garnies -de. biographies d'un

nommé Hans

légionnaire ou prétendu illustrés

; :

Kull, ancien

de placards

tel, et

annonçant des conférences

vait faire.

I

trouvais à Nuremberg.

qu'il de-

Le volume, pour 139 pages de

texte

serré avec 44 illustrations et 4 planches hors texte,

ne coûte que 80 pfennigs,

et porte l'indication

rément, ne public ni

en

même

suffit

le

effort

410 mille

soit 1 franc, »

;

cela, assu-

pour 410.000

tirage réel ait

chiffre fantastique

l'exagération,

e

pas à faire croire que

acheté

ait

que

«

;

de propagande ont

francs,'

approché de ce

mais, toute part

on reconnaît

le I

faite

à

quel formidable

fait les

éditeurs de ce

libelle.

Le ramassis

d'inepties qui constitue ce vo-


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS

27

lume échappe à toute analyse. On y trouve des détails vraiment extraordinaires sur la vie intérieure d'un corps de troupe de notre armée.

Par exemple,

le soir

même

de son arrivée,

jeune légionnaire assiste à une scène qui fait

«

connaître la discipline qui règne

le

lui

ici ».

Au moment où

l'adjudant se présente dans la

chambrée pour

faire l'appel, les

hommes

saillent et le rossent d'importance.

avaient pris soin de les

«

les

coupa-

on appliqua un singulier pro-

On nous fit tième homme fut cédé.

guerre »

Comme ils

commencer par renverser

lampes, on ne peut reconnaître

bles, et alors,

l'as-

numéroter,

et

chaque sep-

traduit devant le conseil de

!

Quant aux

illustrations de l'ouvrage

on y

trouve, entre autres, celles qui ont été repro-

duites dans YOpinion.

Il

convient de noter à

Ion voit un

légion-

naire nu, suspendu par les pieds et les

mains

ce propos que le croquis où

au-dessus d'une troupe de fauves, ne représente pas,

comme

on a cru, un supplice pré-

tendument en usage à

la

Légion

:

Hans Kull


28 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE ne manque pas d'aplomb, mais

ne va pour-

il

tant pas jusque-là. Mais ce dessin et

accompagne

qu'il

sur

homme

et

sur

le texte

intéressant la crédulité

On y apprend, en effet, que notre

a été fait prisonnier, à Madagascar,

par des indigènes, qui bêtes.

un jour

de Fauteur

la véracité

de son public.

jettent

l'ont ainsi

Mais heureusement,

grande présence tirer d'affaire.

il

est

d'esprit, qui lui

exposé aux

doué d'une

permit de se

D'abord, attaqué par de vul-

gaires moustiques,

il

leurs piqûres. Mais

quand arrivèrent des cha-

dut se résigner à subir

cals et des hyènes, qui ne

charogne,

mirent en

il

mangent que de

poussa des hurlements qui

fuite.

Ils

la les

sont remplacés par une

panthère, animal qui ne touche pas aux cadavres

;

mort,

aussitôt, notre vaillant et la

les

hyènes

la rescousse, et

il

et les

le roi

chacals viennent

recommence à

qu'ils sont partis, survient

reusement,

faire le

panthère, déçue, s'éloigne piteuse-

ment. Alors

à

ami de

un

du désert

lion;

crier

!

Dès

mais heu-

est rassasié, et se

contente d'aller boire au ruisseau voisin. Enfin,


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS ie

e

sont des vautours. Rien à faire, cette fois

:

malheureux va succomber, quand arrivent

des indigènes, qui s'écrient, stupéfaits

On

vivre encore, chien blanc! »

'emmène, fille

il

Toi

«

:

on

le délie,

d'un chef. La

devient esclave

de ce dernier est enlevée par un lion. Le

vaillant héros, la

29

bon

tireur, la

sauve en abattant

bête d'un coup de fusil. Devenu, à la suite

de cet exploit, tribu,

il

s'enfuir.

un grand personnage dans

s'empare d'un cheval

Au

parvient à

et

cours de sa route,

il

est

attaqué par unej panthère, et la seul

coup

core une

de jolie

sabre,

ait

qui

le

d'un

constitue en-

l'on s'étonne,

à

il

bon

échappé à tant de dangers.

Je demande pardon au lecteur de ger

encore

tue

prouesse sportive. Enfin,

rejoint la Légion, droit, qu'il

ce

la

lui infli-

résumé de ces inventions pitoyables,

dont l'auteur se^montre un digne descendant

du baron de Mùnchhausen, l'émule allemand de notre baron de Crac. Mais

elles

remplissent

vingt-deux pages in-octavo de texte serré, soit la

sixième partie du volume;

et

il

n'était 3.

pas


30 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

montrer à quels

inutile de s'est laissé

artifices

frelatés

prendre la sensibilité de tant de

braves gens.

La couverture du

livre

ornée d'un croquis,

de Hans Kull est bien dessiné de

le seul

un légionnaire

toute la série, qui représente

subissant

le

supplice de la crapaudine, sous la

garde d'un tirailleur algérien

et cette illustra-

;

tion est visiblement inspirée d'une autre, qui se trouve sur les placards

annonçant

les

férences, et dans laquelle j'ai reconnu

con-

un

cli-

ché qui circula en France vers 1900, à l'épo-

que

punitions

furent

révélées

corporelles

compagnies de

abominables

les

en

alors

usage

aux

dont une pous-

discipline, et

sée d'opinion publique sut avoir raison. L'au-

pu

teur aurait tout aussi bien texte

son

au moyen de dessins représentant un

des supplices du

moyen âge

photographie de

la

voit

illustrer

«

:

justement, une

vierge de fer

»

que Ton

au musée germanique de Nuremberg

aurait fait l'ailaire.


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS

/ ce

31

propos, d'ailleurs, on notera que, soit

ignorance, soit mauvaise

la

foi,

plupart des

tableaux par lesquels on s'efforce de déconsidérer la Légion se rapportant,

non

à

elle,

mais

aux compagnies de discipline, ou du moins décret

du

2 janvier 1902, qui les réforma à la suite

du

à ce que celles-ci étaient avant

mouvement Ce

fait

le

rappelé plus haut.

a été reconnu, en Allemagne, par

bien des auteurs qui, tout en se montrant hostiles à la Légion, qu'elle ne fût

Gazette de

moins

combattue que par des argu-

ments valables. Tel la

voudraient au

est le

Coblence,

Gazette de Cologne

du

1

er

cas d'un article de reproduit

dans

la

janvier 1913, et cité

par M. Heinrich Pohl. Et de même, M. F. von

Papen, dans

les Preussische

tome CXLVIII), dont

le

fond

Jahrbùcher (1912,

s'élève contre

est constitué

une

littérature

par des lettres

et dé-

clarations de soi-disant légionnaires qui n'ont

jamais servi à

la Légion.


32 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Ce

n'est d'ailleurs

gion, c'est

pas seulement sur

sur toute

Lé-

la

militaire

l'institution

française que l'on peut constater la complète

ignorance de

la

plupart des auteurs qui colla-

borent à cette campagne. Voici, par exemple,

gande

intitulée

:

«

une brochure de propa-

Ce qu'un Allemand doit

voir de la Légion étrangère française

»

sa-

(Was

der Deutsche von der franzœsischen Fremdenlégion

On

y

wissen muss), par M. von Witzleben. lit,

à propos de l'abus des punitions

C'est avec

dre

:

une préméditation rusée que, pour per-

un homme qu'on

a pris en grippe,

on

profite de

ce qu'il se trouve en état d'ivresse. S'il arrive

malheureux de rentrer sous-officier le suit à la

chambrée

ordre quelconque. Que,

sous

et

réponde par une injure,

vère

;

il

le

but

et c'est le conseil

Quiconque a

est

n'évitera pas

mais qu'il en vienne au

lui

l'influence

l'homme ne pense pas au danger qui

exécutant l'ordre,

au

ivre à la caserne, l'astucieux

le

donne un

du

vin,

menace*

atteint.

Même

une punition

et

en sé-

« relus d'obéissance »,

de guerre. servi

dans l'armée française


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS sait

que

«

l'ivresse

considérée

comme

ne peut, en aucun cas, être circonstance atténuante

cette inscription est portée,

précisément pour éviter

les

et

que,

peines excessives

pouvant résulter de ce principe, le

»

en caractères

gras, sur les livrets des militaires,

sur

Ba-

le

règlement

service intérieur prescrit à tout gradé

qui rencontre un inférieur en état d'ivresse de s'écarter de lui, et de ne le faire

appréhender

que par des égaux en grade. Le

sous-officier

qui se livrerait à la vexation que M. de Witzleben signale face de lui,

comme

courante, trouverait en

non des témoins du

refus d'obéis-

sance de l'homme, mais des témoins de son

propre abus d'autorité,

et

ne pourrait pas

échapper à une punition sévère.

Il

serait fastidieux de reprendre

une à une

toutes les histoires dramatiques qui, depuis

deux ou

trois ans, ont fait le tour

allemande,

et

l'on voit

de la presse

de pauvres jeunes

gens torturés, ou fusillés sans jugement, à


34 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE propos de peccadilles qui méritaient peut-être

deux jours de consigne au quartier. Quand tapage qu'elles soulevaient devenait trop

on a procédé à des enquêtes

le

fort,

sérieuses, des-

quelles résultait, en règle générale, que la vic-

time n'existait pas, ou bien qu'elle se portait à merveille

et

ne demandait rien à personne.

Je rappellerai seulement, dans d'idées, la le

ordre

cet

comique aventure de Paul Trœmel,

légendaire bourgmestre d'Usedom.

Dans

premiers mois de 1913,

les

les

naux allemands entreprirent une

campagnes d'ensemble, sur

jour-

de leurs

le

cas de ce

fonctionnaire honorable, marié et

père de

belles

deux enfants, qu'on aurait entraîné à la Légion en abusant de sa faiblesse d'esprit (singulier

compliment à prussien)

;

vement, de ministrés.

faire à

un bourgmestre royal sommée,

la

France

le

rendre à sa famille

Trœmel

était

et

à ses ad-

dans sa

fut aussitôt visité

garnison par des journalistes, à qui qu'il s'y trouvait fort bien, et

qu'une chose,

plutôt vi-

c'est

qu'on

il

déclara

ne demandait

le laissât

en paix»


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS

du

L' Illustration

avec

le

mai publia son

portrait,

fac-similé d'une note de lui disant

Entré dans qu'il

31

35

me plaît

la

:

Légion étrangère à Saïda, je déclare,

ici

très

bien et pour cela je ne veux

pas retourner à Allemagne. Je veux tout volontière-

inent rester dans la Légion.

Troemel alias Tunze. Saïda, le 16

mai igi3.

M. Nr. i3.6i 7

Vers

la

même

époque,

les

mands durent annoncer que

dom

mots

alle-

illus-

:

Je vous adresse en signe de vie

supporte très bien

journaux

l'adjoint d'Use-

une carte postale

avait reçu de lui

trée portant les

.

le service.

mes

salutations. Je

Je pense souvent à vous.

Mille choses pour vous et votre famille.

De

votre

:

Paul Troemel.

Finalement,

il

fut

réformé pour surdité

lé-

novembre.

Pour rentrer en Allemagne, pensera-t-on,

et

gère, et arriva à Marseille le 25

pour échapper définitivement à

ses

bour-


36 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

— Nullement:

reaux?

Son

se fixer à.

aucune intention de retour au

Paris, sans

pays natal

pour venir

!

histoire est la suivante, d'après les in-

terviews publiées dans les journaux des 26 et 27 novembre.

Né à Francfort en

1881,

il

fit

de bonnes

militaire de Metz,

études

à

nommé

sous lieutenant au 56 e d'infanterie, à

Cassel.

dans

l'école

En 1911,

il

la politique.

démissionna pour

avec

le

se lancer

il

entra en con-

gouvernement impérial à cause de

ses idées libérales

tracta

fut

Nommé bourgmestre d'Use-

dom, puis député au Landtag, flit

et

:

et, le

26 mars 1913,

un engagement de cinq

2 e étranger, à Saïda, sous

le

il

con-

ans, au titre

nom

du

de Tunze.

Libéral... faible d'esprit, tout s'explique!

Quoi

qu'il

en

soit,

sonnage notoire,

Trœmel, devenu un per-

fut interviewé par tous les

correspondants de journaux, à son arrivée à Marseille. L'Illustration blia

un nouveau

fois, et

du 29 novembre pu-

portrait de lui, en civil cette

toujours dans

l'état le

plus florissant.

I


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS Et

le

Temps du 27 donna, de

37

sa part, les dé-

clarations suivantes: «

Mes impressions sur mon séjour dans excellentes.

sont

pu y

n'avoir pas

même

J'avoue rester plus

<(

Ce que

j'ai

admiré dans

Légion

je regrette de

longtemps mais

infirmité dont je suis atteint ne

c'est l'esprit

que

la

la petite

l'a

pas permis.

la

Légion étrangère,

de corps qui y règne

surtout la bien-

et

veillance des chefs pour les soldats ».

Trœmel

Parlant des incidents de Saverne, M.

time qu'il ne faut y voir que

pagne menée par Rhin.

les

le

es-

prélude d'une cam-

journaux nationalistes d'outre-

.

« Ces vexations », a-t-il ajouté, « ont leur répercussion dans la Légion étrangère, mais cette réper*

cussion est tout autre

que

ce

que

l'on

Allemagne. Je puis dire que, pendant :ourt

que fait

la

que

j'ai

campagne menée contre

plus de bien que de mal.

rent jamais .

passé à la Légion, j'ai

si

elle

escompte en le

temps

pu

très

constater

en Allemagne

lui

Les recrues n'arrivè-

nombreuses que depuis que certains

journaux allemands

la

colonie pénitentiaire, »

représentent

comme une


38 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Je ne sais le

s'il

est exact que,

du 4 octobre, on

Gaulois

un des conférenciers de

comme

dan

ait retrouvé,

la

Ligue contre

un ancien marchand de

Légion,

l'écrivai

1

cacaouettes

bien connu au Quartier Latin, qui, après avoi servi pris

aux bataillons d'Afrique

(!),

aurait entre

une tournée de conférences de »,

frais

paj és. Mais ce qui

c'est

qu'on embarrasserait fort

T

Mertinat

les

et

les

mandant de produire Ce doivent rents

mands

de

être,

ces

qui,

tout au

toui

est vraisemblable

Hassel

les

Kull en leur

leur

livret

de

militaire

plus, de proches

nombreux

légionnaires

pour des peccadilles, ont

turés et fusillés

légior

marcs par jour,

à raison de vingt

naire

mann,

«

p;;

all<,

été to

sans jugement...

Leurs inventions, d'ailleurs, ne sont passa] paraître

un peu grosses

diteurs.

Le 25 août, à Cologne,

à certains de leurs a le

mann, après avoir terminé au la

France

!

A bas la République

sieur Hass<

cri !

»,

de

:

«

Ab

fut sifflé,


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS

gionnaires n'étaient pas le les

sée

le

;

en

plus malheureux

Vorwœrts résumait sa

31 août, de le

Westfaelisches Volksblatt

faisait ressortir l'absurdité

mbre,

les

soldats de l'armée allemande prussia-

mférence d'après

i

que

socialiste vint déclarer à la tribune

i

39

le

même journal

exprimant

;

8 sep

et le

revenait à la charge

souhait que les soldats alle-

le

ands fussent aussi bien traités que leurs calarades de la Légion. PareiLle mésaventure surprit

Dnférencier al

du même

du 3 décembre

la

/olff,

le

u capitaine »

ex-légionnaire, devait prendre la parole. Allé-

par cette promesse que répétaient d'énormes

ffiches, les

yait

Légion étrangère

organisé dans la salle « Germania », à Berlin,

ne réunion au cours de laquelle

îés

Jour-

le

:

La ligue fondée pour combattre rait

un

à Berlin

genre, d'après

auditeurs vinrent en foule. Hélas

maldonne

on de

et

il

!

y

lorsque le sieur Wolff prit posses-

la tribune,

que l'imprimeur

il

dut commencer par

s'était

trompé

(sic) »,

avouer et

qu'il

avait servi à la Légion qu'en qualité de caporal

!


40 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Cette réunion devait d'ailleurs tourner à la confi sion des organisateurs. L'un des orateurs ayant

un

fi

tableau effroyable des tortures infligées aux

li

gionnaires en Afrique et à Madagascar, de violent protestations se firent entendre ce

que vous racontez

est

faux

!

« Menteurs,

:

» «

Légion?» crièrent des légionnaires ceux-là,

tiques,

et l'un

toi

étais-tu à

retraités,

I

authen

d'eux escaladant lestradi j

commença un

petit discours

:

« Je veux explique

pourquoi je

me

que dans

régiment prussien où je

On

le

suis

engagé à

la

Légion. C'est parc servais... »

n'en entendit pas davantage. Le

présideni

agitant furieusement sa sonnette, couvrit la voix d

pauvre diable qui, quelque peu bousculé, dégringo! plus vite qu'il ne l'aurait voulu. Ce fut la

débandade. Le public quitta

pour

cette fois,

à l'ordre

Mais

du

renoncer à voter

la

la

le

signal

salle et

on du

résolution porté*

jour.

enfin, tant d'assertions, répétées av•c

un aplomb inlassable, ne peuvent manquer d produire quelque impression. De « il

reste toujours

quelque chose

»,

la

calomnie

et le public


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS

41

tout en convenant qu'on exagère peut-être, se dit qu'il n'y a point

de fumée sans

feu.

ne se trouve pas

Cela d'autant plus, qu'on

seulement en présence de personnages

comme

ces

légionnaires de

que

le

pant

les situations les

sait

feu est attisé par des

combien

les

falots

pacotille,

mais

hommes

occu-

plus élevées,

et

Ton

Allemands sont sensibles à

l'argument d'autorité.

Par

exemple,

pângermaniste Post du

la

14 août 1913 publiait un article

von Puttkammer ce

(1),

du général baron

débutant par ces mots

Combien de temps encore la France

elle

mettra-t-

à l'épreuve, avec sa Légion étrangère,

l'inlassable patience de l'Allemagne Suit, le

tableau

résultat

»

?

inévitable des tourments

imposés aux légionnaires,

et

de leur sinistre

:

Des milliers d'Allemands, qui sont entraînés à (i)

:

Ce

militaire

peu courtois ne doit pas

avec lé baron Charles de

confondu

être

Puttkammer, chambellan

cien

conseiller provincial,

actif

du rapprochement franco-allemand.

pacifiste

convaincu

la

el

an-

et partisan

4.


42 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Légion,

il

foyers, et le reste

n'y en a pas la moitié qui revoient leurs

parmi ceux-là, beaucoup sont

affaiblis

pour

de leur existence. Et nous supportons cela

depuis quatre-vingts ans

Et voici

le

!

gracieux tableau des motifs pour

lesquels nous maintenons cette institution

La France minution de

:

a besoin de la Légion à cause de la disa natalité, et aussi à cause

de

dégé-

la

nérescence physique qui n'a cessé d'augmenter dans ce pays depuis les guerres de Napoléon. Les Français,

en outre, sont intoxiqués par

rale et de religion.

coup

plus

exemple

faix doivent se

qu'un épaule.

l'Allemand, et :

dans

beau-

est

un

simple

les gares, les

porte-

mettre à deux pour porter une malle

Allemand chargerait négligemment sur son D'ailleurs,

caractéristiques

dents,

que

prouver

les excès

du manque de mo-

Le Français de nos jours

faible

suffit à le

par

l'alcool et

sensuels, par tout ce qui résulte

on reconnaît partout des signes

de

dégénérescence,

maladies

des oreilles, etc., et cependant les

songent toujours à

la

des

Français

revanche.

Quant aux moyens d'empêcher

ment des Allemands dans

l'enrôle-

la Légion,

le

gé-


PAMPHLÉTAIRES ET CONFÉRENCIERS néral n'hésite pas à proposer ce

Aggravation de

qui suit

du

141

l'article

pénal, punissant de prison

43

toute

:

Code

personne

ayant enrôlé des allemands pour une armée

com-

étrangère. Désormais, le racoleur et ses plices devraient être punis

Mesures

raine,

spéciales

de réclusion

;

contre l'Alsace-Lor-

se trouvent plus

de

anciens légionnaires allemands

la ;

moitié des

expulsion de

tous les anciens légionnaires résidant dans les

provinces annexées, exception faite de ceux

dont

le

loyalisme allemand aura été éprouvé

Tout espion français

allemand ne devrait mise en

mands

liberté

de

saisi

être gracié

en territoire

que contre

deux légionnaires

la

alle-

;

4° Interdiction

aux Français de venir chas-

ser en Alsace-Lorraine

;

Aggravation des conditions de séjour

pour

les militaires étrangers

raine

;

;

Les

magne

fils

en Alsace-Lor-

des étrangers résidant en Alta-

seraient soumis au service militaire,


44 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE sous peine d'expulsion (l'auteur croit que cette disposition existe dans la 7°

Enfin

Il

faut mettre

lité

française)

;

:

un terme à

la politesse et à

l'amabi-

que beaucoupd'Allemands témoignent aux Fran-

çais.

la

loi

Ceux-ci ne nous rendent pas cette politesse,

considèrent

comme une marque

nous ne devons pas oublier que

la

et

de faiblesse. Or,

France

vit princi-

palement sur son prestige d'autrefois, alors que

la

force de l'Allemagne ne cesse d'augmenter.

On

voit

que

main morte,

manque de

le

brave général n'y va pas de

et

qu'en

qui

ce

politesse et

concerne

d'amabilité,

il

le

sait

prêcher d'exemple. Le Temps du 16 août écri-

beaucoup de modéra-

vait à ce propos, avec

tion

:

«

Sûrement, un

tel

article est loin

de

représenter les sentiments de la majorité de l'opinion allemande.

que la

cette violente

Il

est certain

campagne

pourtant;

d'agitation contre

Légion ne saurait manquer de produire de

l'effet

sur l'opinion allemande, mal informée,

et particulièrement sensible aux histoires

brigands

».

dej


LA TENDANCE INSIDIEUSE

journaux

Divers

allemands font campa-

gne d'une manière plus réservée écrire, plus insidieuse

en verra un exemple dans

1

octobre 1913

La campagne contre

la

On

et impartiale.

les lignes

du Frankfurter General- Anzeiger, Matin du

j'allais

— et que leurs lecteurs

doivent trouver très calme

er

suivantes

citée

par

le

:

Légion étrangère a été

très

maladroite, toute de faux sentimentalisme. Elle ne s'appuyait que sur des données insuffisamment contrôlées.

Aussi

la presse française eut-elle l'occasion

s'élever avec indignation contre les

mands. Comment doit-on mener

de

mensonges

alle-

lutte?

Tout

cette

d'abord en mettant de notre côté l'opinion publique


46 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE non seulement en Allemagne, mais dans pays, et surtout en France.

les

autres

Nous devons prouver aux

Français et leur faire démontrer par leurs amis que,

somme

toute, la présence

d'Allemands dans

leur attire plus d'ennuis politiques que tions militaires. sion,

En

la

Légion

de

satisfac-

évitant toute contrainte

ou pres-

on peut espérer que

gouvernement

le

français

qui, entre parenthèses, est, sur ce point, tout à

fait

indépendant du Parlement, limitera discrètement le

nombre

allemands, pour arri-

des engagements

ver peut-être à les supprimer complètement.

Ainsi,

on commence par reconnaître pru-

demment que «

pangermaniste

l'agitation

»,

pour ne pas dire

faut

donc renoncer à

insuffisamment contrôlée

créée de toutes pièces.

Il

est

s'appuyer sur ses allégations «maladroites

Mais

comme

il

est

désagréable aux Allemands

que de leurs compatriotes Légion,

on

s'efforcera

européenne contre

cette

s

engagent dans

d'ameuter

où,

la

l'opinion

troupe, et l'on fera

faire d'amicales représentations

jusqu'au jour

».

pour avoir

aux Français la

paix,

ils

consentiront à la supprimer, ou au moins à


LA TENDANCE INSIDIEUSE

47

n'y plus accepter de volontaires allemands.

Les prémisses de ce raisonnement impli-

quent une il

forte

dose de naïveté

n'y a guère de raisons

dans tous

les pays,

;

car enfin,

pour que l'opinion,

épouse des griefs notoire-

ment imaginaires. Mais quelle naïveté plus grande encore, que à

l'efficacité

C'est fou Il

celle qui consiste à croire

de cette méthode.

!

faut réellement avoir

une bien maigre no-

tion de la psychologie des peuples, et plus par-

ticulièrement de celle du peuple français, pour

concevoir

et

exposer ouvertement une tactique

aussi puérile, aussi contraire au but poursuivi.

De semblables

suggestions,

lisaient, justifieraient,

que

les violences

si elles se

généra-

peut-être plus encore

des pangermanistes, l'aver-

tissement, cité plus haut, de la Correspondance helvétique.


VI

l'enquête de la gazette nationale

et le yorwaerts

Voici maintenant une série d'opinions par-

comme émanant

ticulièrement intéressantes,

d'hommes

politiques

connus,

bien

parmi

lesquels les chefs de plusieurs fractions

du

Reichstag. Ce sont les réponses à une enquête

que

la

National-Zeitang organe national-libé,

ral, c'est-à-dire

les

chauvin, avait entreprise dans

milieux parlementaires,

fut publié le 3

et

dont

le résultat

septembre.

La déclaration

la

plus catégorique, et la plus

dangereusement agressive, émane naturelle-

ment du général en puté au Reichstag,

retraite

von Liebert, dé-

membre du

parti del'em-


l'enquête de la gazette nationale

des chefs les plus remuants de

pire, et l'un

l'Association pangermaniste Il

n'y a pas d'autre

française

honte

la

et

à

employer qu'une acRépublique

la

l'inconvenance de

et

l'amener à y mettre

La Haye

paix, à

moyen

:

pour représenter à

tion diplomatique,

d'hommes,

49

fin.

ce

et ailleurs, auraient tout lieu

vailler à faire disparaître ce

trafic

Les amis de

la

de tra-

ferment d'antipathie du-

rable.

Le député Bassermann, chef du parti national-libéral, et

chauvin non moins notoire, ne

va pas jusqu'aux remontrances diplomatiques,

mais n'hésite pas à vouloir porter sur

le

terrain parlementaire, guère

gereux que celui de Il n'est

le

la

la

diplomatie

question

moins dan-

:

pas douteux que, dans sa prochaine session,

Reichstag s'occupera

du scandale de

la

étrangère française. Le mieux sera de poser

tionne

la

ques-

protection des sujets allemands contre les

racoleurs et leurs complices, au d'initiative

Légion la

ou de

résolutions,

moyen de propositions que

l'on transmettrait

sans retard à une Commission. Celle-ci aurait à re-

chercher

les

moyens

législatifs

de mettre

fin

5

au raco-


50 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE lage, et à faire des propositions positives»

atten-

constituer en Allemagne de

dant, on continue de associations

En

pour combattre

la

Légion. Leur première

tâche est de réunir et de contrôler les matériaux existants,

de montrer au gouvernement impérial

Parlement

préparer ainsi

Un

d'une action

la nécessité

le terrain

pour

et au

législative, et de

la législation future.

autre national-libéral,

le

docteur Liej

mann, député de Charlottenburg,

dit

:

Je m'oppose par principe à l'idée de créer une lé-

gion étrangère allemande en face de

nous n'avons pas

un semblable

l'affront d'y constituer

lence.

C'est

pourquoi

moyen d'amener primer

française

«

il

foyer de puru-

semble n'exister

chevaleresque

:

armée

»

qu'un

France à sup-

scandale contre la civilisation que constitue

le

la légion

la

la

droit d'infliger à notre

le

:

il

faut

que

réitérées de tout le

le

dégoût

monde

prendre qu'un Etat qui,

et les manifestations

civilisé lui

même

fassent

son pouvoir sur des moyens aussi malpropres,

dehors des bonnes

mœurs du xx

Les députés de gauche

se

com-

aux colonies, appuie est

en

montrent pour

la

e

siècle.

plupart aussi mal informés, aussi pleins de


l'enquête de la gazette nationale

51

mais au moins

cer-

tains d'entre eux font-ils preuve déplus de

mo-

préjugés contre la Légion

;

dération, de plus de sentiment des

conve-

nances internationales.

M. Gothein, à égard,

A

un

effort suffisant

la place

voyons

la vérité, n'a

ici le

du

pas

fait,

à cet

:

devoir de défendre la patrie, nous

métier payé de tueur d'hommes pour

compte d'un peuple étranger. Le maintien par France de

cette institution, qui

aucun pays

civilisé,

population. Dans

de

la

un pays comme

grande Révolution sur cette

la

dans

s'explique par la stagnation de la

prétend encore aujourd'hui

humaine,

n'existe plus

le

le

la

France, qui se

représentant des idées

le droit

de

la

personnalité

manière de recruter une troupe

doublement répréhensible. Les États

civilisés

est

ont

conclu des ententes internationales pour réprimer la traite des

blanches et l'esclavage, mais

ils

ont main-

tenu pour cette sorte d'esclavage une exception pro-

fondément regrettable; que de combler

c'est

une

nécessité urgente,

cette lacune.

Le député radical Heckscher voit dans tence de la Légion

l'exis-

un obstacle permanent à


52 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE toute

rapprochement

nouvelle tentative de

franco-allemand.

Le député radical Mugdan Je considère

comme

des

écrit

:

moyens inopérants

l'éta-

blissement de pénalités contre l'entrée dans la Légion

que Ton a proposée, de

étrangère, ou la mesure,

rendre plus

difficile

aux anciens légionnaires leur

re-

tour en Allemagne. Celui qui veut rentrer dans sa y être admis

patrie doit

!

Cela, bien entendu, sans

préjudice des dispositions concernant ceux qui se sont soustraits

au service

militaire.

peuple français, de débarrasser

Ce

serait le devoir

la

France d'une

du

insti-

tution aussi indigne.

Avec

le

député radical Mùller-Meiningen,

on arrive enfin dans

le

domaine des

idées rai-

sonnables. Ses propositions tendent surtout à retenir les jeunes et sont les i°

Allemands dans leur pays,

suivantes

:

Traitement absolument humain

et

bon des

sol-

dats dans l'armée allemande, punition très sévère des

bourreaux

et insulteurs

de soldats

;

2° Répression très énergique des balourdises

bu-

reaucratiques. Notre bureaucratie a déjà sur la cons-


l'enquête de la gazette nationale 53 cience maints jeunes Allemands, à ce point de vue

;

3^ Essai d'obtenir l'interdiction de rengagement

déjeunes gens mineurs dans

la

Légion;

cela,

par

la

voie internationale à défaut de la voie diplomatique

;

4° Enfin, création d'une « Légion coloniale volontaire »

allemande^ pour tenir compte du goût pour

aventures qui pousse beaucoup de nos jeunes

les

gens à entrer dans

la

Légion

française.

On

devra don-

ner à cette troupe certains privilèges extérieurs,

et,

en présence de certains petits péchés de jeunesse, on Mais l'essen-

évitera les formalités bureaucratiques! tiel est

et restera

toujours d'affermir l'amour de la

patrie et de l'armée

non par un vain patriotisme de

hourras et de

fêtes (î),

mais

la justice,

qui est

dans

l'Etat.

(i)

qui

le

Les Allemands donnent

se dissipe

rapidement,

fondement de tout ordre

le

nom

de Hurrah-palriotis-

mus à cette forme dégénérée du patriotisme que pratiquent les

pangermanistes,

groupements

comme

les associations

similaires, et

celui de notre

qui

Ligue des

des vétérans et autres

consiste

essentiellement,

patriotes, des camelots

du

roy, des jeunesses plébiscitaires, en discours, acclamations, injures, manifestations

turbulentes, chansons de café-con-

cert et représentations de

drames ineptes.


54 XA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Il

de dire mieux

était difficile

être le

;

mais peut-

député démocrate-socialiste Wolfgang

Heine y

est-il

parvenu

Ceux qui prêchent que nos jeunes gens

le

:

dédain de

de guerre à l'étranger. Je crains que

Jeu ne- Allemagne

et

paix sont cause

la

se laissent séduire les

par

le service

menées de

terminent un accroissement des enrôlements à

Beaucoup de légionnaires

gion.

la

de tout ce qui en dépend ne déla

Lé-

sont, paraît-iL, des

déserteurs allemands, qui sont poussés dans les bras des racoleurs étrangers par l'exagération de la disci-

pline et la crainte des punitions trop

sévères. Il s'y

trouve probablement une forte proportion d'éléments

de moindre valeur intellectuelle, d'hommes à volonté faible,

qui sont

les

premiers à entrer en conflit avec

la discipline militaire. Il faut citer enfin,

biles

qui poussent souvent à entrer à

la

comme moLégion, l'in-

suffisante éducation de la personnalité, la misère, le

chômage,

les

traitements et congédiements arbitraires

et les autres souffrances sociales des déshérités

Nous trouvons encore dans Terreur,

si

cette

du

sort.

réponse

répandue en Allemagne, sur

manière dont s'opérerait

le

«

racolage

»

la

pour


l'enquête de la gazette nationale 55 la Légion, ainsi

qu'une conception bien singu-

lière et contradictoire

engagés

;

diocre,

si

volonté,

car enfin,

de

si

la

mé-

hommes dénués

ce sont des

comment

valeur morale des

cette valeur est si

de

concilier ce fait avec le re-

proche, absolument

justifié,

qui est adressé à

Técole allemande, de ne pas travailler à dé-

velopper

le

sentiment de

la personnalité,

chercher au contraire à l'étouffer sous

de

la discipline ?

de

le

poids

Ceux qui s'évadent des

régi-

ments allemands ne sont-ils pas précisément ceux qui sentent

le

plus vivement à quel point

leur personnalité y est sacrifiée

Ces réserves

faites,

courage avec lequel

il

MM.

?

faut reconnaître

le

Mùller-Meiningen

et

Heine invitent leurs compatriotes à

faire

un

retour sur eux-mêmes, et à reconnaître que,

Allemands de

pour détourner

les

faut améliorer,

dans leur propre pays,

la

Légion,

il

la con-

dition des travailleurs et des soldats.

L'organe du parti socialiste,

le

Vonoaerts,


56 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE tient

un

pareil langage, et

montre une

Le 8 septembre,

impartialité.

réelle

reproduisait

il

les déclarations d'un ancien légionnaire, qui

proteste contre les calomnies courantes. Pen-

dant toute son instruction, à peine

s'il

déclare-t-il,

entendit une injure; et

c'est

quand une

parole rude tombait, c'était en plaisantant

Le

comme un tié.

l'homme

service est très dur,

ce qu'il peut

;

doit

mais, dans son service,

soldat, et

Ce qui rend

on peut presque

la vie si

:

donner tout est

il

traité

dire avec ami-

dure n'a rien à voir avec

les

choses militaires.

Mais

la vérité, d'après

partis

les

effets

bourgeois

l'insoumission et

s'attaquer à la cause (1)

Vorwaerts, est que

le

veulent atteindre les la

désertion

:

Qu'il soit permis en Allemagne, pour

peuple, de devenir officier,

que

les

(i)

comme

punitions excessives ou

ments dont

se

les

rendent coupables

Reproche injustement généralisé,

la déclaration

— sans

de M. Mûller-Meiningen.

un entant du

dans

la

Légion

mauvais

:

traite-

les officiers et les

comme

le

montre


LE VORWAERTS

57

vieux soldats ne soient pas plus durs que dans

Légion

;

l'ouvrier

que

les

allemand de vivre dans son pays

n'ira plus chercher à la

ments, et un

la

conditions économiques permettent à

toit

pour

Légion

s'abriter.

le

pain,

:

alors

il

les vête-


VII

AU RE1CHSTAG

Selon toute vraisemblance,

par M. Bassermann, que gion soit portée devant

la le

le désir

exprimé

question de la LéReichstag,

sera

exaucé, et plutôt encore plusieurs fois qu'une seule

:

au besoin,

le

chef des nationaux-libé-

raux se chargera bien lui-même de soulever l'incident. Il

ne faudra pas, à ce moment, s'émouvoir

outre mesure de ce qui pourra se dire à la tri-

bune. LeReichstagestcoutumier de semblables débats qui, à

ma

connaissance,

produits au moins sept

fois. Et,

s

y sont déjà à cet égard,

nous ne pouvons que nous réjouir de

l'état

de

minorité politique où la Constitution de l'Em-


AU REICHSTAG

59

allemande. Si

pire maintient

la

nation

Reichstag avait

le

pouvoir d'obliger par un

vote

gouvernement impérial,

le

il

aurait

arriver déjà qu'une majorité, égarée par

campagne en

le

pu la

cours, ait déterminé quelque ac-

tion fort dangereuse

actuel des choses,

:

au

lieu que,

dans

l'état

un député pose une ques-

tion au gouvernement, celui-ci répond, et c'est tout.

Au

cours de la discussion, des paroles

déplaisantes peuvent être prononcées à notre adresse, mais nous ne les

par

le

compte rendu de

l'essentiel

:

la liberté

la

connaissons que séance, et c'est là

de notre tribune nous

dispose à ne pas prendre au tragique ces

ma-

nifestations oratoires.

Mais

il

est intéressant

occasions que

le

de rappeler

ici

les

Reichstag a eues de s'occu-

per de notre Légion, pour bien montrer que, si l'origine et

les

imputables aux

excès de la

campagne sont

pangermanistes,

tous

les

maintenant, y prennent part, y comdémocrates socialistes.

partis, dès

pris les

Le 25

février 1911, le rapporteur

du budget


60 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

de

la guerre,

M. Mathias Erzberger, député du

centre catholique, ne craignit pas de déclarer

à la tribune que « la France poursuit à la Lé-

gion une œuvre indigne de la civilisation

Le 30 mars, devant

la

question fut encore agitée

Reichstag, et

le

».

le

comte de Kanitz,

chef du parti conservateur (ou agrarien), dit qu'il nir,

ne

fallait

rôler des

Le

pas renoncer à l'espoir d'obte-

par des négociations, que l'on cesse d'en-

11

Allemands dans

novembre de

la

la Légion.

même année,

au cours

d'une discussion relative aux affaires marocaines, le général

von Liebert, député du

parti

de l'empire, dont on a pu apprécier déjà sentiments dans Si l'on avait tenu la

le

chapitre précédent, dit

aurait été

A

:

:

compte de l'opinion publique,

première exigence du peuple allemand, dans

négociations

les

avec la France (au

sujet

les

du Maroc),

suppression de la Légion étrangère.

quoi M. Erzberger fit l'objection suivante

Je souhaite également

— je

l'ai

:

déjà dit, au prin-

temps dernier, que l'Allemagne n'alimente plus

la


61

AU REICHSTAG Légion étrangère,

et

que, parle

moyen

privées, d'explications officielles les casernes,

on prémunisse contre

Mais

il

me

et

écoles

les

dangereux pour

la vie et

et

dans

service

le

pour un

qu'il est déshonorant

cette Légion, parce

Allemand,

d'associations

dans

pour

la santé.

semble douteux au plus haut point que

Ton doive introduire dans un

traité international

un

semblable point concernant l'organisation intérieure de l'armée.

Quant à Tannée

1913, elle n'a pas

vu moins de

quatre interventions à la tribune du Reichstag.

Le 24 janvier, M. Mùller-Meiningen, posa une question tendant à savoir S'il est

pour

la

exact que,

:

l'assure, le racolage

Légion étrangère française a été particulière-

ment intense dans culier,

comme on

radical,

il

s'est

gagements de

ces derniers temps, et

produit sujets

un

si,

allemands mineurs,

assure-ton, en territoire allemand de l'affirmative, ce que

les

;

en parti-

nombre d'en-

plus grand

et,

et

même,

dans

le cas

gouvernements confédérés

ont l'intention de faire pour mettre fin à ces abus.

Le docteur Lewald, directeur à

l'Office

périal de l'Intérieur, répondit que,

im-

dans cha6


62 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

que cas signalé,

le

gouvernement impérial

avait procédé à une enquête, et que rien ne

permettait de conclure que

le

recrutement en

général, et particulièrement celui des mineurs, fût

devenu plus intense.

ajouta-t-il,

on n'a pu

«

«

En aucun

cas

»,

établir l'existence de

racoleurs en territoire allemand, et dans

di-

vers cas on a reconnu que les assertions faites

à ce sujet étaient de pures inventions.

Le 14

avril, lors

»

de la discussion du budget

des Affaires étrangères, M. Bernstein, démo-

demanda que

crate-socialiste,

ment

agît

énergiquement contre

Cette action, tible

est

gouverne-

les racoleurs.

parfaitement compa-

avec une politique de rapprochement

d'amitié. et

dit-il,

le

Ce

n'est

et.

pas une affaire d'armements

de menaces, mais de justes réclamations à

faire valoir

formes

;

le

tout est d'observer certaines

et d'avoir

pour

soi l'opinion publique.

souvent arrivé que des na-

Aussi bien

est-il

tions -sans

aucune puissance militaire sont

arrivées à faire valoir des

times.

prétentions légi-

;


63

AU REICHSTAG Et là-dessus, l'orateur cita

le

cas d'un jeune

Bavarois du Palatinat, âgé de vingt ans seule-

ment, qui travaillait à Lausanne. Là,

bauché par un racoleur

(?)

il

sait

comment,

poré dans fut tué

la

au

Légion

et

on

envoyé au Maroc, où

il

que son père eût tenté

feu, après

toutes sortes

et,

;

par se trouver incor-

finit

il

em-

qui lui proposa

une place dans une usine de Marseille ne

fut

de démarches

pour

faire

le

libérer.

M. Zimmermann, sous-secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, réponditque des démarches

pressantes avaient été faites à Paris par le

gouvernement bavarois, faisant valoir que cet

homme dait

était

d'une mauvaise santé, qui

impropre à servir à

enquête,

le

demande de

la

Légion.

gouvernement français a libération.

d'ailleurs vingt

ans

son incorporation,

et

et

çais repousse toute

Le jeune

le

ren-

Après

rejeté la

homme

avait

demi au moment de

le

gouvernement fran-

demande

relative à

des

engagés de plus de dix-huit ans. Et après avoir promis d'agir énergiquement auprès

du


64 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

gouvernement français chaque

Allemand mineur taire conclut ?sous avons

qu'un

fois

serait enrôlé, le sous-secré-

:

examiné avec soin tous

venus à notre connaissance depuis

les cas

trois

qui sont

ans

et ce

;

ne sont pas seulement des cas dont nous avons saisis

parles familles, mais,

gnalés par la presse.

11

en

mation suivant laquelle

le

plus souvent, des cas

est résulté 17 fois

hommes

ces

que

été si-

l'affir-

auraient été in-

corporés malgré eux, était complètement dépourvue

de fondement.

généralement d'exagéra-

Il s'agissait

tions, de tentatives

faites

par des insoumis en vue

d'échapper à une condamnation pour s'être soustraits

au service

venue devant

ment

la justice,

et cinq

que

Dans

b*

cas,

qui a prononcé

l'affaire

un

est

acquitte-

condamnations. Mais à l'occasion de

ces poursuites, ces cas,

militaire.

les

on n'a pas pu

établir,

condamnés aient

été

dans quatre de

en rapports avec

des agents français. Enfin, dans 9 cas, l'enquête est .encore pendante.

Vous

voyez,

Messieurs, que nous agissons

toute énergie contre éventuels.

Autant

les

qu'il

sera mis fin à cet abus,

avec

menées d'agents français peut dépendre de nous,

il

aue nous regrettons autant


REICHSTAG que vous,

et

nous empêcherons

65 retour de

le

de

laits

ce genre, qu'il nous arrive d'avoir à déplorer.

Le lendemain, 15

avril,

député radical

le

Ahlhorn, qui ne paraît pas avoir une notion très nette

du

ridicule, déclara

Depuis quelque temps,

les

:

racoleurs pour la Lé-

gion étrangère française parcourent le territoire alle-

mand ils

(jusque dans la Hesse) avec une

travaillent avec

un

tel succès,

telle

audace,

sans qu'on entende

jamais parler d'une arrestation, que chaque patriote sent sa bile s'échauffer.

bien

elle est

Ou

bien notre police dort, ou

dépourvue de tout doigté

— ce qui

n'est

pas étonnant avec notre lourdeur bureaucratique,

ou

enfin la surveillance de nos frontières est

si

la-

mentable, qu'il n'y a aucune difficulté à faire passer la frontière,

par

le train,

en plein jour, à un

homme

qu'on a préalablement endormi. Le père apprend-il la

chose et court-il à Nancy, on lui dit sèchement

que son

fils

est

engagé

Et ne croyez pas qui

se

et parti...

qu'il

ne

s'agisse

que d'hommes

sont soustrails au service militaire. ?son,

la

plupart de ces malheureux ont été détournés, enivrés, et

menés

d'où l'on revient rarement. 6.


66 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE I

En réponse aux objurgations M. Zimmermann renouvela ses

de l'orateur, déclarations \

delà

veille.

Enfin, dans la séance

du 28 mai,

le

bouillante

général von Liebert demanda, aux applaudis-

sements des conservateurs, mais sans succès, qu'une tout

loi

déclarât déchu de sa nationalité

Allemand qui s'engage dans la Légion (11

appuya sa proposition par

Il

vantes

les paroles sui-

:

Je crois que nous avons, à l'égard de notre peuple, devoir de traiter de tels

le

se seraient décidés

de

la société, et,

en état

dehors de

lors

avant tout, de déclarer à

que toute

française

même qu'ils d'ivresse, comme des parias hommes,

l'institution

de

la

la

Légion

nation est

en

la civilisation.

Ces quelques exemples permettent dépenser

que

la

question de la Légion sera encore sou-

levée, plus souvent qu'il ne conviendrait, de-

vant (i) la

du

le

La

Reichstag. législation

Il

faut

actuelle

en prendre notre.

permet de prononcer

déchéance d'un Allemand qui

a pris, sans

service à l'étranger, mais n'en fait pas

ainsi

autorisation,

une obligation

j

j

j


67

AU REICHSTAG parti en

nous disant que ces manifestations

oratoires,

même quand

elles

dépassent les

bornes où l'on devrait se maintenir en parlant

dune

nation étrangère, n'ont aucune influence

sur les relations franco-allemandes. Mais on est bien obligé de reconnaître qu'elles

avoir

une

action

indirecte

très

peuvent

fâcheuse,

quand on renia rqueque des hommes considérables de tous les partis y ont pris part

:

tant

dans ces débats qu'à propos de l'enquête de la

Xational-Zeitung,

noms

nous

avons relevé

les

des députés von Kanitz, conservateur-

agrarien,

von Liebert, du

parti de l'empire,

Erzberger, du centre catholique, Bassermann et

Liepmann, nationaux-libéraux, Ahlhorn,

Gothein, Heckscher, Mugclan, Mùller-Meiningen, radicaux,

Bernstein

crates-socialistes. fort importante.

C'est là

et

Heine,

démo-

une constatation


VIII

LA GAZETTE DE FRANCFORT

Le 20 septembre fort a publié

tance est duire car

la

un

telle,

1913, la Gazette de Franc-

article qu'il

de

tête,

dont l'impor-

convient de

intégralement, malgré

sa

le

repro-

longueur

question y est étudiée dans

le

louable esprit de calme et d'impartialité

autant

il

est impossible de

;

plus ;

et,

répondre aux fu-

reurs pangermanistes autrement que par un silence dédaigneux, autant

il

convient d'exa-

miner avec soin l'argumentation d'un contradicteur aussi plein de réserve et de dignité. Divers cas d'enrôlements dans la Légion étrangère,

dont l'opinion publique d'attirer de

nouveau

s'est

préoccupée, viennent

l'attention sur cette institution,


LA GAZETTE DE FRANCFORT et de

69

provoquer Une série de manifestations publiques.

Comme

arrive

il

souvent dépassé

fréquemment en

le but, et l'on

cas,

on

a

exposé au

s'est ainsi

péril d'atteindre le contraire de ce

ce qu'il convenait effectivement

pareil

qu'on voulait

et

de poursuivre.

de

De

toutes parts, aujourd'hui, s'élèvent des avertissements

contre

la

tendance, à

exagérer

de

l'état

Légion

la

étrangère et à répandre des assertions inexactes, qui

ne peuvent que fournir

gratuitement à

française des éléments de polémique. qu'il soit

temps de

s'éclaircir les

la presse

semble donc

Il

au sujet de

idées

la

lutte contre la Légion étrangère et de son but.

La première question qui

se pose est la suivante

:

avons-nous un droit quelconque, nous autres Alle-

mands, de combattre française a déjà qu'elle

la

Légion étrangère

répondu par

veut considérer

comme purement

la

question

de

française, et qu'elle

mettre aucune immixtion dans

?

La presse

la négative, et la

déclaré

Légion

ne peut adintérieures

les affaires

delà France. Mais, indépendamment de divers points Légion compte en permanence environ

accessoires, la

5.ooo Allemands, y compris par ce

fait,

allemande,

la

et

les

Alsaciens-Lorrains

question se rattache à

nous devons revendiquer

la le

;

politique droit de


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE:

70

nous intéresser au

sort de ces

Allemands. Gela

est

d'autant plus le cas, que le contact se trouve établi avec la sphère

ment,

du

droit

et surtout

la

manière dont d'engage-

les contrats

par cette circonstance, qu'il s'agit

d'hommes soumis au leur

allemand par

enrôlements, par

se font les

engagement

l'étranger

à

que

service militaire allemand,

soustrait

les

à

ce

devoir envers leur patrie, et qu'ils se trouvent amenés à

un

conflit

les lois

Que

de devoirs lorsqu'il y a opposition entre

auxquelles les

ils

doivent obéissance.

Français se refusent à toute discussion sur

cette

matière, rien de plus naturel. Déjà

disait

qu'un soldat étranger équivaut

naux a

:

Choiseul

à trois natio-

un, que l'on a enlevé à l'ennemi, un, que l'on

gagné à l'armée française,

et enfin

un Français qui

peut réserver ses forces au travail productif Si les Français veulent nous accorder

le

droit de calculer

aussi de cette manière, la Légion est

qui nous intéresse à

tendons dire par

Allemand qui

un haut

là rien

une

degré. Mais nous n'en-

de plus que

ceci,

s'enrôle dans la Légion

perdre de vue qu'il

fait

institution

par là

que tout

ne doit pas

un double

et

triple

tort à sa patrie.

Jusqu'ici,

et abstraction

faite

des

questions de


LA GAZETTE

l>£

FRANCFORT

71

principe, la discussion a toujours porté principale-

ment sur

question des racoleurs et

la

sur

À

aux légionnaires.

vais traitements infligés

mau-

les

inter-

presse allemande rapporte que

valles périodiques, la

des racoleurs ont été arrêtés, et fournit des détails sur l'action de ces gens. La presse française,

en

et,

général, tous les Français nient formellement l'exis-

tence de ces racoleurs.

on

n'a

pu

Il

faut convenir que, jusqu'ici,

réussir à établir incontestablement cette

existence sur

aucun exemple déterminé,

veut pas reconnaître pour fort.

Mais

il

tel le

qu'une semblable preuve manière incontestable pas contester que

le

;

cas

l'on ne

Markel à Franc-

même

nature

résulte de la

si

des choses

est très difficile à fournir et,

d'autre part,

de

caractère

la

de

on ne peut

Légion, en tant

que troupe de mercenaires,conduit a priori au système

du

racolage et y sera toujours

on ne

Même

comme

si,

cesse de le soutenir, l'affluence vers la

dépasse ses besoins,

la

;

et

pas nous accorder ce point,

que

le

Légion

vraisemblance est en faveur de

i'existence des racoleurs

tain

lié.

recrutement de

même il

la

est

l'on

si

tout à

Légion

ne veut fait

misère ou de l'inexpérience

en profitant de

la

intéressés, qu'il

s'agisse

cer-

est effectué

d'ouvriers sans travail,

des

de


72 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE déserteurs

ou seulement de délinquants en

fuite.

Mais cela constitue un point important pour

jugement à porter sur

la

le

Légion, en tant qu'institu-

tion en opposition avec les idées modernes.

Il

doit y

avoir beaucoup d'exagérations et d'inventions dans ce

que

allemandes racontent fréquemment

les feuilles

au sujet des mauvais traitements que

les

légionnaires

Dans une troupe

subiraient de la part de leurs chefs.

qui se trouve en campagne pendant

plus grande

la

partie de l'année, ce genre d'abus est, en lui-même,

moins facilement concevable qu'ailleurs cadre de la Légion est pris parmi

ments du corps dangers

les

le

en

légionnaire et ses

en outre,

le

meilleurs élé-

les

français, et

et les souffrances subis

vent créer entre tions

d'officiers

;

il

semble que

commun

doi-

chefs des rela-

que Ton n'obtient pas facilement dans d'autres

troupes.

Mais, d'autre part, là

il

faut tenir

d'une société assez mêlée,

der

le

sentiment de

la

compte

très éloignée

qu'il s'agit

de possé-

subordination, et qui doit con-

tenir maints criminels, qui ont voulu se soustraire à

des poursuites

au moyen

d'un

enrôlement

qui

n'exige aucune pièce d'identité. Cette composition et le

but

même

de

Ja

Légion rendent nécessaire une


LA GAZETTE DE FRANCFORT particulièrement

discipline

qui et

est

maintenue par

les

73

une

sévère,

punitions

discipline

rudes

les plus

par l'occupation continue des légionnaires. Mais explication

cette

ne

De

là résulte la

abandonnons degré

les

ment parmi les

deuxième question que nous

à l'appréciation des Français

sorts les

de

espèce

exigences d'une discipline

vie des légionnaires, qui

la

toute

sans aucun doute,

ni des rigueurs qui,

procédés,

dépassent fréquemment sévère.

pas

justifie

compte

moins enviables de

répond-elle aux idées modernes

à

:

quel

certaine-

ce

monde,

?

Les deux points que nous venons de considérer,

méthode du recrutement naires,

et le

ressortiraient peut-être

l'Etat français fournissait

moins vivement,

moins encore. coloniales

faut

minimum Si la

d'existence,

qu'elle en vienne à

une convention sur

la

et

non

pas

ou peut-être

France veut mener

principalement avec des

évidemment

tion et à

si

aux étrangers qui entrent à

son service une compensation suffisante,

seulement un

la

traitement des légion-

guerres

ses

mercenaires,

il

une rémunéra-

durée du contrat qui

correspondent aux conditions modernes du travail. Aussi bien,

a

pas d'argent, pas de

Suisses

))

est

un

vieux proverbe français. C'est pourquoi nous nous 7


74 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE bornerons concerne

à insister sur

ici

un

seul autre point, qui

condamne certainement

et

Lésion, en

la

tant que corps composé principalement d'étrangers.

Nous voulons parler du

caractère

du contrat qui

lie-

le légionnaire.

La discussion

ce contrat porte surtout

relative à

sur le point de savoir

s'il

de droit privé ou de

est

droit public.

A

propos de l'incident de Casablanca, survenu en

1908, la Cour d'Arbitrage de La

Haye

a déclaré

que

ce contrat est de droit public. Auparavant, les tri-

bunaux

bli

un

arrêt

du 10 décembre

qu'un contrat militaire

qu'il n'est pas admissible

le

les

deux

parties, et

que Pun des contractants

gouvernement

tion opposée, celle

ce

lie

1879, a éta-

contrat sans l'assentiment de l'autre.

statue sur ce

Néanmoins,

mée,

La Cour de

français n'étaient pas de cet avis.

Cassation, par

que

et suivant laquelle

la il

contrat, qui présente

français a la concep-

Cour de La Haye est

a confir-

souverain à regard de

par suite un caractère de

droit public. Ce point de vue vient d'être* motivé erv détail

dans

le récent

Légion étrangère

Par contre,

le

volume de Charles Poimiro, La

et le droit international.

gouvernement allemand

s'en tient


LA GAZETTE DE FRANCFORT au point de vue développé par

meyer dans

le

numéro du

professeur Nie-

le

octobre 1908 de la

i5

Deutsche Juristen-Zeitung, à savoir que

hommes soumis au

le droit public,

du

mais

droit privé C'est là,

légion-

service militaire par

ne sont enrôlés dans ce

qu'ils

que par un contrat d'engagement

service

« les

leurs chefs, dans la

naires ne sont pas, à l'égard de

situation des

75

ressortissant

«<.

comme on

l'a dit

plus haut,

un point de

controverse internationale, qui a été tranché provi-

soirement en faveur des Français, mais qui, à notre avis,

cun

demande encore une étude doute,

le

attentive.

Sans au-

du gouvernement

point de vue

ne répond pas au sentiment général du droit

français et

aux

conceptions sociales. Autre chose est de satisfaire à l'obligation générale

du

service militaire

propre pays, ou de servir à l'étranger

Dans

naire.

le

premier

cas,

il

situation de droit public,

s'agit

que

dans son

comme merce-

évidemment d'une

l'Etat seul a pouvoir

de déterminer conformément

à

la

sous les garanties posées par

la

Constitution.

dans

le

second

cas,

il

ne

loi,

c'est-à-dire

s'agit effectivement

Mais

que

d'un contrat de droit privé, dépourvu de ce caractère public

même

les

Français enrôlés dans

la

Légion

/


76 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE perdent, pendant la durée de leur service, leur qualité

que

de citoyens, les règles

et

on ne peut donc

générales d'un semblable contrat, c'est-

à-dire qu'il doit être établi par les

non pas seulement décrété par une sa puissance supérieure.

ment dans

la

circonstances,

reconnu

deux

seule en vertu de

telles,

que, dans d'autres

un semblable contrat ne

valable

absolument

solde

:

parties, et

Les conditions de l'engage-

Légion sont

service excessif libre,

lui appliquer

laissant à peine

jamais

serait

insuffisante,

un peu de temps

engagement pour une période extraordinaire-

ment longue prétexte.

Et

et

qu'on ne peut réduire sous aucun durée

cette

est

souvent prolongée par des

punitions, que les légionnaires peuvent facilement

encourir à tout cela,

la suite les

de tracasseries de sous-officiers. De

engagés

mis au courant.

11

n'ont pas été préalablement

n'est pas

étonnant qu'il

se pro-

duise par la suite tant de tentatives d'évasion.

Toutes

que

ces circonstances

l'on revise le point de

tamment que légitimité,

maintient

l'on

demander no-

et

examine, au point de vue de

l'application la

autorisent à

vue admis jusqu'ici,

du

contrat.

Même

conception actuelle de ce contrat,

publique française devrait

se

si

la

sa

l'on

Ré-

rendre compte que, du


LA GAZETTE DE FRANCFORT

77

point de vue démocratique, ce système de mercenaires est à rejeter

en principe

;

démocratie que s'impose défendre elle-même, au

le

principe qu'elle doit se

moyen de

ses citoyens,

combattent pas seulement pour de pour

la patrie. C'est

une institution qui

une

car c'est précisément à

pourquoi

il

n'est plus

conception moderne de l'Etat.

l'argent,

qui ne

mais

faudrait renoncer à

compatible

avec

la


IX

LA REVUE HOCHLAND

Enfin, les derniers jours de l'année 1913 ont]

vu paraître un

écrit qui,

sans être d'une tenue

aussi correcte que l'article de la Frankfurter

Zeitung, et tout en présentant encore bien des détails sous

un jour complètement

moigne d'un

effort

erroné,

té-

sérieux vers l'objectivité

impartiale.

Je veux parler d'un travail déjà mentionné plus haut, que M. Heinrich Pohl a publié,

sous

le titre

gère,

dans

land,

La

le

lutte contre la

Légion étran-

numéro de décembre de Hoch-

une importante revue catholique à

dance relativement

libérale, qui paraît à

ten-

Mu-

nich. Cette étude est longue et assez touffeu-


LA REVUE HOCHLAND de sorte

qu'il faut

se

borner à

commence par

L'auteur

diera la question sine ira role,

79 la

résumer.

déclarer qu'il étuet odio, et tient

pa-

au moins au début, en faisant justice

d'une partie des calomnies qui courent contre la Légion.

Mais tout en accordant, avec M. von

Papen, que celle-ci vaut mieux que sa réputation,

peint sous de sombres couleurs la sé-

il

vérité de la

discipline, la dureté

l'insalubrité

du

du

service,

climat, et enfin l'immoralité

régnant

dans

un

adonné,

dit-il,

à l'ivrognerie

milieu

particulièrement surtout à la

et

pédérastie.

Mais, cela posé, l'auteur ajoute que

moyen de là les

faire

œuvre

le

seul

utile consiste à laisser

déclamations courantes,

et

à étudier im-

partialement les points de droit soulevés par l'existence de la Légion.

D'abord, la protection des sujets allemands contre

Et

ici,

le

racolage sur

le territoire

de l'Empire.

après avoir rappelé les débats que ce

point a

soulevés au Reichstag,

il

est

obligé de convenir que jamais on n'a

pu

bien éta-


80 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE blir

un cas

de semblable racolage, qui

réel

sévèrement réprimé par

serait d'ailleurs

les

lois existantes.

A

la suite

de cette constatation, M. Pohl en

vient à appuyer très courageusement l'opinion

que nous avons vu émettre déjà par M. Mùller-

M. Wolfgang Heine

Meiningen, ivaerts,

que

c'est

en améliorant

du soldat allemand que plus efficacement il

cite à ce sujet

le

et

la

Vor-

condition

combattra

l'on

recrutement de

M. von Papen

le

la

le

Légion

;

:

Chaque année on apprend que des déserteurs nombreux, effroyablement nombreux,

se réfugient à

la

Légion pour échapper aux suites d'une faute ou aux

mauvais traitements

infligés

par des anciens ou des

supérieurs. Si l'on parvenait à supprimer complète-

ment

ces

mauvais traitements,

le

nombre

des légion-

naires allemands baisserait très considérablement.

Mais viduels

il

:

ne le

s'agit

pas seulement d'abus indi-

Code de justice militaire lui-même

est coupable.

D'anciens légionnaires ont recommandé

un adou-

cissement du Code de justice militaire allemand,

i


LA REVUE HOCHLAND

comme un bon moyen sertions qui sont

gement

fréquemment

à la Légion.

ment pas

On

si

de réduire

le

81

nombre des

suivies

Ce point de vue

dé-

d'un enga-

n'est certaine-

à négliger.

a vu que M. Mûller-Meiningen a pro-

posé de créer une

allemande

»,

« Troupe coloniale

afin d'offrir

volontaire

un débouché aux

jeunes gens que l'esprit d'aventures entraîne vers notre Légion. Cette idée a été fréquem-

ment préconisée en Allemagne, par de Cologne, par

M. von Papen,

docteur Ritter, de

et,

la Gazette

enfin, par le

Mayence, à l'Assemblée

générale de l'Association pangermaniste qui eut lieu en septembre 1913. M. Pohl s'y rallie, ainsi qu'à

cette,

veiller à ce

que

observation, les

trent pas trop difficiles sur

hommes

devra

qu'on

bureaucrates ne se monle

à enrôler. Mais, aussitôt après,

siens les termes injurieux par lesquels

Liepmann a

protesté

contre

des

passé il

fait

M. Paul

l'organisation

d'une Légion étrangère allemande. Ce n'est

donc pas l'incorporation d'éléments douteux qu'il

nous reproche, mais, en principe,

celle


82 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE de volontaires étrangers

et

;

verra,

l'on

a^

manqu

chapitre XXVII, que ce reproche ne

pas de saveur, venant d'un Allemand. Suit,

une longue discussion juridique sur

droit que tout sujet allemand possède,

protégé par qu'il se

le

1

ci'êtr

gouvernement impérial,

loi-s

trouve à l'étranger, lùt-ce en quai il

de soldat à

la

Légion.

À cet

égard,

il

faut

si

gnaler un point important, qui pourra détei

miner des

conflits regrettables,

nement allemand adopte La nouvelle nalité dans

loi

du 22

l'Empire

et

les

juillet 191 3 sur

dans

qui doit entrer en vigueur

le

les er I

la

situation

gouver

la

natio;

Etats confédéré;

janvier 19 14, a in

troduit certaines innovations qui

pour

si le

vues de l'auteur

juridique des

sont importante légionnaires

aile

mands. D'après

l'article

28 de

cette loi,

l'Allemand qu

sans autorisation de son gouvernement, est entré a service d'un Etat ne faisant pas partie de

l'Empin

peut être déclaré déchu de sa nationalité par décisio

de l'autorité supérieure de son Etat d'origine, n'a obtempéré à la

sommation de

se

démettre,

s'

fait


LA REVUE HOGHLAND ;ar

83

cette autorité. Cette disposition s'applique à

agement dans

Légion étrangère française

la

Fen-

La

(i).

échéance de la nationalité n'est pas devenue obligaDÎre.

Tant que

té signifiée

à

la décision

l'intéressé,

qui le

la

prononce n'a pas

légionnaire

allemand

este sujet allemand, et doit, à l'occasion, être

pro-

gé par l'Empire.

Cette question de la nationalité des légionaires allemands, et de la protection

qu'ils

eurent réclamer des autorités allemandes, onduit à toute une discussion juridique dans iquelle uelle

ici, et

pour

la-

nous devons nous borner à renvoyer à

article )i

on ne saurait entrer

de M. Pohl

et

au commentaire de

la

qu'a publié M. Delius. Elle mérite toute

attention de notre trangères, car ion,

(i)

la

litiges les

question

est

l'occa-

plus imprévus.

bien

moins, pour

Hass Delius. Das deutsche Reichsund Slaatsangehœ-

gkeitsgesetz

^i3.

Affaires

on pourra y trouver, à

matière aux

Mais

Ministère des

vom 22.

Juli

1913, Mannheim

et Leipzig,.


84 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE M. Pohl, d'arriver à des

hommes

empêcher

qui

faire sortir

lui

la

Légion

sont engagés, que de les

s'y

d'y entrer

pouvons que

de

sur ce point, nous ne

et

;

donner raison. Mieux vaut,

toujours, prévenir que réprimer;

et,

dans

le

cas qui nous occupe, celte action préventive est conseillée

par

prudence

la

taire, puisqu'elle est

la

plus élémen-

purement nationale,

c'est-

à-dire inattaquable, tandis que, l'homme une fois

au service de

France, on est conduit à

la

une action internationale, des plus

Or

ici,

l'auteur adopte entièrement les idées

émises par

le

D Max r

Neueste Nachrichten sulte

que Ton

se

Roloff dans les Leipziger

du

11 juin, et d'où

trompe

fort

dès qu'un Allemand passe çaise,

ré-

il

en croyant que,

la frontière fran-

une nuée de racoleurs s'attache à

pas pour

lui faire

signer

meilleurs racoleurs, les a,

délicates.

le

un engagement

:

les

gouvernement français

sans bourse délier, dans

consuls allemands

ses

la

personne des

:

Les consuls d'Allemagne n'ont pas d'argent pour rapatrier leurs nationaux nécessiteux et porteurs

de


LA REVUE HOCHLAND bonnes références, ou pour

On

secours.

comme

«

:

par un petit

n'apaise pas la faim avec des

Vous

n'aviez qu'à rester à la

lieu d'aller à l'étranger

tant à

les aider

85

!

s'en sont bien dit

» Ils

eux-mêmes, avant

phrases

maison, au

au-

d'aller trouver le consul...

Si l'intéressé est en France, vingt-quatre heures

après sa visite au consul,

Et

il

faut

remarquer

il

qu'il

est

ne

s'agit ici

de bonne

gens convenables,

engagé à

la

Légion.

que de jeunes

conduite,

munis des

meilleurs certificats. Le vagabond professionnel sait se débrouiller, à l'étranger, sans consuls et sans

gion étrangère

;

le

Lé-

déserteur a rarement des papiers

sur lui, et sait d'avance qu'il n'a rien à attendre du consul... ...

A

Marseille, par exemple, la Société allemande

de secours donne au jeune postulant quelques marcs

pour calmer

sa faim, et le consul le

mais de l'autre côté de

la rue,

police qui arrête le déguenillé

met

se tient

à la porte

;

un agent de

comme vagabond

!

Que

servent les louables efforts des particuliers qui cher-

chent à diminuer l'affluence des Allemands à Légion,

si les

la

consuls, les représentants qualifiés de

l'Empire, à qui s'adresse tout d'abord leur

compatriote tombé

dans

moyens de

en aide

lui venir

besoin,

le ?

Il

ne

jeune

n'ont pas les serait

vraiment


86 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE pas nécessaire d'augmenter bien considérablement le

budget du Ministère des Affaires étrangères, pour secourir des gens dignes d'intérêt, tombés dans la mi-

ou par d'autres motifs. Les consuls

sère par légèreté

n'auront pas de peine à l'ivraie

:

assez de connaissance des

Tant que côté,

séparer le

on doit supposer que

la situation

on ne

Allemands à

hommes pour

Légion;

et

tenté de dire que ce corps

de nécessaire

pour un de

se

bond

:

homme

est parfois il

sans

moyens la

Sauf

presque

est

quelque chose

est plus

honorable,

convenable, d'être légionnaire que

comme

vaga-

sans aveu. Les tribunaux français

ne plaisantenj pas avec

dans

nombre des

le

perdre dans une prison française et

cela.

même, on

car, après tout,

homme

ont

ne sera pas améliorée de ce

saurait espérer réduire la

bon grain de

ces fonctionnaires

les

étrangers qui sont trouvés

d'existence, et qui pourraient s'engager

Légion mais ne veulent pas

cette dernière pointe,

le faire

!

gratuitement in-

jurieuse pour nos tribunaux, cet article est

on ne peut plus judicieux. En

se ralliant à ses

conclusions, M. Pohl cite un article analogue,

paru dans

la

Koblenzer Zeitung, sous

le titre

:


LÀ REVUE HOCHLAND

La

véritable

87

manière de combattre

la

Légion

étrangère. D'après ce dernier article, les con-

suls allemands ne seraient pas aussi

que

M

le dit

Roloff, et donneraient

siteux la

somme

consulat

le

nécessaire

plus voisin

proche en proche jusqu'à

et

démunis

aux néces-

pour gagner

arriver ainsi de

la frontière.

Jadis, les consulats autrichiens agissaient de

Mais depuis

un

de revenir

même.

quelques années, l'Autrichien qui se

présente à son consul ne reçoit plus lui assure

le

abri et

un

temps pour

à

frontière. S'il vient

un centime. On

repas gratuits, et on lui dit le

premier train vers

la

au rendez-vous, un employé du

consulat le conduit à la gare, lui prend son billet, et lui

remet

la

somme

indispensable pour

puis qu'on agit ainsi, le

Légion

A

a

nombre

le trajet.

De-

des Autrichiens à la

diminué de près de moitié.

Paris, les

Allemands besogneux ne vont pas au

consulat, mais reçoivent de petits secours des associations d'assistance,

ment,

ils

toutes les

pedibus

avant

pour rentrer au pays. iNaturelle-

dépensent cet argent sur place. sources taries,

cam

jambis.

la frontière, à

ils

se

Une

mettent en

La conséquence

est

que

fois

route

peu

Verdun, Mézières, Toul, Nancy,


88 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Epinal ou Belfort, des centaines d'hommes s'engagent à

la

Légion, pour pouvoir enfin, après des se-

maines, manger à leur faim. Il

du

que

faudrait

travail

le

aux Allemands nécessiteux. Quand

ou

aurait réuni dix frontière

consulat à Paris pût procurer

vingt,

un de

par

ses

il

les ferait

employés.

en

il

conduire à

la;

Les bureaux

de recrutement de l'Est auraient bientôt moins de besogne, car

ils

engagent au moins autant

mands en route pour

rentrer au pays que

d'Alle-j

d'hommes

venant d'arriver en France.

Il

M.

est

fâcheux qu'après ces constatations;

peu

Polil revienne à l'idée, d'ailleurs

cisée,

d'une

action

prendre contre

gagement à esclavage,

France. D'après

doit

être

réprouvé

Après qu'on a la

préi

entre-

lui,

l'en-

comme

par l'ensemble des nations civilisées

une honte de

à

Légion équivaut à un véritable

la et

la

diplomatique

flétri la

;

Légion étrangère

nation française,

il

n'est

comme

que

naturel qu'on ait dit à plusieurs reprises, à la

bune du Reichstag allemand, que

la

te

troj tri-

France, en

la


LA REVUE HOCHLAND conservant, se place en dehors

du

89

cercle des nations

civilisées.

L'empire allemand recueillera l'approbation des nationaux de tous

les Etats

civilisés,

considère

s'il

comme un

esclavage le service de légionnaires alle-

mands,

s'il

et

tire

de

là les

conséquences voulues,

tout tranquillement et résolument...

De même que

...

ches, et nalité

l'esclavage et la traite des blan-

que toute dégradation analogue de

humaine,

la

Légion étrangère,

la

person-

telle

qu'elle

existe aujourd'hui, devrait être interdite

en droit in-

ternational.

Le droit nation

français,

qui

indigne d'une

la tolère, est

civilisée.

Mais

à ce

propos,

il

est

l'auteur s'élever contre

intéressant de voir

un de

ses confrères,

M. ViktorReven, qui, dans un ouvrage intitulé

La Légion la

étrangère

France viole

le

(1),

:

expose gravement que

droit international en infli-

geant un traitement particulier

à

certains

étrangers, et en imposant, à des étrangers le service militaire. Car, d'unppart, (i)

Die Frtmdenlegion,

2

e

on ne

fait

édition, Stuttgart, 19 13. 8.

au-


90 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE cime acception de nationalité dans tement des légionnaires,

de

et,

le trai-

nul

l'autre,

j

n'est obligé d'entrer à la Légion. Et de plus,

M. Pohl observe que M. Reven s'engage

]

ici j

dans une voie pleine d'embûches.

Même

nos traités

les

plus répandus de droit inter-

national n'observent pas toujours, la

ici, la

retenue et

]

prudence nécessaires. Ainsi, on. a déclaré contraire

au droit international, d'une manière générale, fait

au paiement d'une taxe en remplacement de ce vice.

Pour reconnaître que

cette thèse n'est pas

forme au droit en vigueur, sur l'article

1 1

rédaction de la

10 de

la

loi

de

il

suffit

la loi militaire

loi

du 22

le I

ou

d'astreindre des étrangers au service militaire

ser-

con-

d'un coup d'œii

de l'Empire, sur

la

juillet 19 13 et sur l'article

sur l'impôt militaire extraordinaire du

3 juillet 1913.

Il

est bien évident,

tions,

par lesquelles

en les

astreints à contribuer

effet,

que ces disposi-

étrangers se trouvent

aux

frais

de la défense

de l'Empire, peuvent d'autant plus être contestées en droit, qu'il est tout à fait impossible

de séparer, dans

les

armements d'un pays,

les


LA REVUE HOCHLAND

91

instruments de défense proprement dits de

ceux qui permettront éventuellement quer

le

d'atta-

pays de ceux qu'on a obligés à payer.

Cette constatation est d'ailleurs d'ordre tout

à

fait

général.

Quand un

un pays quelconque, tributions,

serait

il

étranger, fixé dans

reçoit sa feuille de con-

mal venu à déclarer

qu'il

refusera de payer tant qu'il n'aura pas la certitude que son argent ne servira pas à solder

une dépense

militaire, ce

simplement supprimer Aussi M. Pohl

a-t-il

pour quoi

les

il

faudrait

budgets militaires

!

bien raison de dissua-

der ses compatriotes d'invoquer avec trop de

grandiloquence, à propos de la Légion étrangère, les principes tional.

«

Le

généraux du droit interna-

droit des étrangers,

encore

bien obscur

comme nomme

l'observent le

».

les

La

»

dit-iî,

vérité

est

pacifistes,

droit international

«

est

que,

ce qu'on

n'est

encore

qu'un ensemble de coutumes ne présentant

aucun caractère d'unanimité et qu'il serait

ni d'obligation,

grand temps que

les

puissances

s'entendissent pour l'adoption et le dévelop-


92 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE peinent progressif d'un Code de droit international positif.

Enfin, M. Pohl conclut par une vue des

plus louables. Les conflits soulevés par

corporation de sujets allemands dans gion portent sur des questions de

l'in-

la Lé-

fait,

qui

n'affectent ni l'honneur ni les intérêts vitaux

des deux puissances

;

lorsqu'ils n'ont

résolus par la voie diplomatique,

ils

pu

être

sont donc

essentiellement du domaine de la Cour per-

manente d'Arbitrage de La Haye, ou d'une

Commission internationale Bien mieux idée

encore,

il

d'enquête.

un

Peut-être pourrait-on conclure trage

vue

ainsi son

précise

:

permanent entre notre pays de tous les différends

question

de

la

et

traité d'arbila

France, en

pouvant résulter de

Légion étrangère.

On

la

pourrait s'en-

tendre à l'avance pour établir une méthode d'apla-j

nissement applicable à ce groupe de tendre

la naissance

conclure

cas,

au

lieu d'at-

de chaque conflit particulier pour

un compromis

d'arbitrage.


LA REVUE HOCHLAND

On

93

ne peut que se rallier à une proposition

aussi

renverrait chacune de

sage, qui

difficultés

ces

devant des juges impartiaux, sans

passer par une période de tension diplomatique dont la presse à

sensation aime tou-

jours à exagérer la gravité. Mais pourquoi faut-il

que l'auteur ajoute aussitôt ce qui suit?

Pour ne pas

faire naître d'illusions, et

aux deux puissances

la liberté nécessaire

faudrait que le traité d'arbitrage

il

questions

autant que

«

le

de main,

un

Car, en

les

Légion

la

permettront

particuliers et les circonstances ».

laisser

sur toutes

franco-allemandes relatives à

contint la clause

pour

de décision,

les cas

un tour

différend particulier concernant

un

lé-

gionnaire allemand peut se changer en une question politique sérieuse

;

et

dans une question de ce genre,

suivant l'excellente expression er

1

du comte Bulow

du

mars 1900J, nous ne reconnaîtrons jamais d'autre du peuple alle-

ligne de conduite que le salas publica

mand. Finalement, donc, l'Empire allemand devra, précisément pour décider

ou non.

si

les cas

un tribunal

dangereux,

se

réserver de

d'arbitrage entrera en action,


94 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Grand merci

dit rien qui vaille.

main

forcer la

formant,

Un

d'arbitrage qui

traité

aux pangermanistes

laisserait

«

nous

Pareille restriction ne

!

à leur

la

faculté de

gouvernement en trans-

en un tour de main

»,

l'incident le

plus insignifiant en une question nationale

d'un

œuf

traité serait

une

et l'ont sait qu'ils s'entendent à faire

un bœuf

!

un semblable

duperie qu'on ne peut vraiment pas s'attendre à nous voir admettre. rien de mieux,

s'il

est

Un

traité d'arbitrage,

conclu de bonne

sans réserves ni arrière-pensées. dire d'un semblable traité, qui

qu'à tants

mais

la !

ne jouerait

convenance d'un des deux contrac-

Ce ne serait plus un

foi,

Mais que

qu'on

me

traité d'arbitraire

I

traité d'arbitrage,

passe l'expression,

un


RÉCAPITULATION DES ARGUMENTS

En résumé,

ALLEMANDS-

l'argumentation des Allemands

contre la Légion étrangère porte sur les points

suivants

:

D'abord, en droit;

et,

question préjudicielle

pour commencer, une

:

Le contrat d'engagement à |

droit privé, et ne saurait la

critique

et

aux

la

donc

Légion

est

être soustrait à

réclamations des

étrangers, sur les points

il

de

Etats

peut être con-

traire à l'ordre public. I

Or, 1°

il

On

soulève les objections suivantes

:

ne saurait admettre qu'un Etat mo-

derne recoure, pour sa défense, aux services

de sujets étrangers, car

il

les

provoque ainsi à


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

96

l'insoumission

à

et

à la désertion, et les astreint

un devoir qui peut entrer en conflit avec leur

devoir national

confirmée par

;

c'est là, dit-on,

le fait

que tous

une doctrine

les Etats

ont suc-

cessivement renoncé à employer des soldats étrangers

et cette

;

considération s'impose par-

ticulièrement à une démocratie, et plus encore

au pays qui a proclamé et s'en dit

toujours

le

les Droits

de l'homme

champion;

Le contrat d'engagement à

la

Légion

est

léonin, car la durée en est trop longue, la ré-

munération des légionnaires

est insuffisante,

qu'on leur impose est excessif

le service

telle est l'exploitation

reux sont soumis,

;

et

à laquelle ces malheu-

qu'il

leur arrive de voir

prolonger indéfiniment leur service, pour tenir compte des journées de prison que leurs

gradés leur ont arbitrairement infligées 3°

Ce contrat abuse de

la

misère ou de

;

la

con-

fiance des intéressés, qui en ignorent la

gueur

;

4' Il est

En

ri-

fait

applicable à des :

hommes

mineurs.

.-


RÉSUMÉ DES ARGUMENTS ALLEMANDS 1° le

L'Allemagne

a,

97

plus que tout autre pays,

droit de se préoccuper de ce qui se passe à

en raison du grand nombre de ses

la Légion,

sujets qui 2°

y servent;

Le recrutement

est opéré

par des racoleurs

sans scrupules, qui abusent leurs victimes en les grisant et et

il

par des promesses fallacieuses

aboutit à former

de meurt-de-faim, d'aventuriers dits, voués à l'ivrognerie et

3lus infâmes 3°

et

de ban-

aux mœurs

les plus

traite-

abominables, tant au point de

vue des conditions matérielles delà par suite de

les

;

Les légionnaires sont soumis aux

ments

;

un scandaleux mélange

la brutalité

vie,

que

de leurs cadres, qui

leur infligent toutes les tortures morales et

physiques.

Nous

allons examiner successivement tous

ces points.



DEUXIÈME PARTIE LA RÉALITÉ

XI LES RACOLEURS

La légende des racoleurs Allemagne. Elle

pionomanie,

ce

s'y

est

symptôme

fièvre obsidionale qui sévit

a la vie dure en

superposée

à

l'es-

classique de

la

moment

sur

en ce

l'Europe entière. Dans la plupart des pays, touriste sif

ou le commis-voyageur

court le danger d'être arrêté

en Allemagne,

et

s'il

le

plus inoffen-

comme

est Français,

le

il

espion

;

risque en

outre de se voir accusé de racolage pour le

compte de

la

Légion.


100 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Et pourtant, dans ce pays où

notamment avec un

la police

tel soin,

la police, et

des étrangers, est

faite

qu'à première vue elle semble

en êlre l'institution caractéristique, dans ce

pays où

la

comme un

dénonciation, considérée

acte normal, est pratiquée dans des proportions inconnues partout ailleurs,

il

possible, jusqu'ici, de mettre la

main sur un

n'a pas été

de ces racoleurs qui troublent tellement

le re-

pos des pangermanistes. Mais rien n'y

fait

quantité d'Allemands des plus sensés ont

par se laisser convaincre est

que leur

:

fini

territoire

constamment parcouru par des émissaires

de notr^ gouvernement, chargés de lui procurer de ia chair à canon.

même

On a vu

plus haut que

la Gazette de Francfort, obligée

de re-

connaître que l'existence des racoleurs n'a ja-

mais pu d'affaire

dance priori

:

être établie

positivement, se

tire

en nous intentant un procès de tena

Le caractère de

la

Légion conduit a

au système du racolage... La vraisem-

blance est en faveur de l'existence des racoleurs

»•


LES RACOLEURS T

101

Singulière vraisemblance, qui implique une

complète aberration mentale chez

ment

Ne

gouverne-

le

français et son administration militaire!

serait-ce pas, en effet,

que d'envoyer à

une véritable

l'étranger, à

grands

folie,

frais,

des

agents d'une catégorie aussi inférieure, qui ne sauraient

ment, en

le

et

manquer de

se faire

prendre rapide-

de compromettre leur gouvernement

plaçant dans la posture

quand

la

plus fâcheuse

;

les

candidats à l'engagement

affluent, sur notre

propre territoire, au point

et cela,

qu'on en refuse une bonne moitié

Une que

fois

!

de plus, disons donc aux Allemands

les racoleurs n'existent

que dans leur ima-

même

de sens précis que

gination. Ce

dans

mot

l'esprit

Londres

;

n'a

des

Français

qui

aucun d'eux ne manque

ont

visité

d'aller con-

templer, à titre de curiosité locale, les sergents

recruteurs qui déambulent à Trafalgar-square et

dans Whitehall,

comme

et

qui sont

pour eux

des survivants du bon vieux temps

d'avant la Révolution. L'idée de recourir aux services de semblables

individus paraîtrait 9.


102 LA QUESTIOxN DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE tout à

fait

saugrenue à un Français quel-

conque.

Ce qui peut exister, par contre,

il

convient

de l'indiquer discrètement,— ce sont des agents provocateurs. Il

en

est arrivé,

effet,

que des consuls de

France en Allemagne aient reçu des verbales,

ou

même

écrites, d'individus

offres

propo-

sant, soit de s'engager à la Légion, soit de prc

curer des engagements. Des offres analogue

parviennent souvent à nos bureaux de recru-

tement ou à d'autres autorités françaises. Er voici

deux exemples, publiés par

19 octobre 1913

le

Le soussigné, désirant entrer à

la

Légion étranger

française, mais ne possédant pas l'argent

au voyage, prie qu'on tante

un monsieur

nécessair

lui envoie des fonds poste

Apolda R. R. ioo, ou encore de

cher par

Matin di

:

le faire

à la gare d'Apolda,

6 h. Ô2, se dirigeant sur

res-

cher,

au train

Weimar.

Salutions très distinguées.

Rudolph Recht.


103

LES RACOLEURS Zalenz Je prie

dans

la

la

direction

Silésie,

j

Allemagne'.

de bien vouloir

Légion étrangère, dans laquelle

désir de servir, et

d'avoir

bureau d'enrôlement,

afin

m 'admettre j'ai

le

grand

l'amabilité d'en avertir le

qu'on m'envoie

les

condi-

tions d'engagement.

Veuillez agréer l'expression

démon

profond res-

pect.

!

îvent la signature et

La seconde de donné

suite,

V adresse.)

ces lettres,

si

l'on

y avait

ne pouvait donner lieu qu'à une

retentissante polémique de presse. Mais la pre-

mière aurait eu de tout autres conséquences; et

nous ne pouvons que plaindre son auteur,

policier

temps

amateur mais

qu'il a

l'attente

Dans

le

perdu, en gare d'Apolda, dans

du racoleur qui ne

au train de 6

ce genre

maladroit, pour

s'est

pas présenté

h. 52.

quelle

proportion

proviennent-elles

les

avances

d'hommes

de

naïfs,

égarés par les racontars qui ont cours dans leur pays, ou bien

d'agents d'une

société de


104 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE protection contre

la

Légion étrangère ou de

quelque association pangermaniste, cherchant à prendre nos fonctionnaires en défaut et à

un beau scandale,

créer

rait dire.

Mais

il

va de

ne leur

est

jamais

cieuses,

on

les néglige

On

est toutefois

faite

soi :

qu'on ne sau-

qu'aucune réponse

puériles

ou tendan-

également.

en droit de pencher pour

seconde hypothèse, car leur, véritable

c'est ce

la

la

capture d'un raco-

ou supposé, comblerait les vœux

de tant de gens

!

C'est ainsi que, le 1 er octobre 1913, le Lokal-

Anzeiger

et la

la Société

Post annonçaient, de la part de

contre la Légion, la promesse d'une

prime de 375 francs à

la

première personne

qui ferait arrêter un des racoleurs opérant en

Allemagne. Le* Matin du lendemain observait qu'il et les

y a quelque contradiction entre

fréquentes annonces d'arrestations de ce

genre que l'on trouve dans ces

naux. Quant au Temps,

ment

cet appel

:

il

mêmes

jour-

écrivait judicieuse-


LES RACOLEURS

105

Celte prime ne sera jamais payée, puisque de tels

on doit s'attendre

racoleurs n'existent pas. Toutefois,

que

à ce

nombre

de

l'espoir

la

gagner

fasse

des fausses dénonciations,

et,

augmenter

le

par suite, celui

des télégrammes sensationnels contre la Légion étran-

gère dans

qve

ia

presse allemande. C'est précisément ce

désire la Société de

Peu

journaux allemands eurent

après, les

d'ailleurs :ine

propagande de Munich.

bonne occasion de reconnaître

quels pièges grossiers peuvent être tendus à la crédulité

du public par de vulgaires chevaliers

d'industrie.

La Taeglische Rundschau du 22 octobre rapportait,

en

la

effet,

burlesque

aventure qui

suit: Il

y a quelque temps,

rances

nommé

d'un employé d'assu-

le cas

Gustave Puis, âgé de vingt ans, de

Langenstein, dans

le

Harz,

fit

énormément de

bruit

dans toute l'Allemagne.

Ce jeune

homme

affirmait avoir été invité à boire

à la gare de Halle-sur-Saale par

un

racoleur français,

puis s'être subitement réveillé dans une caserne de

Nancy.


106 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Là on

l'avait obligé à signer

pour Belfort,

un

avait réussi, avec

il

lement racolé pour

la

marche

en Allemagne.

et à revenir

parents, qui

plètement

papier.

Il

éga-

train en

il

fut

com-

rétabli.

s'intéressa vi-

durent ouvrir

cette affaire, et les autorités

à

route

rentra chez ses

Toute l'opinion publique allemande

vement

du

légion, à sauter

soignèrent jusqu'à ce qu

le

En

un Hollandais

une enquête. Or,

enquête a démontré que Puis

cette

avait inventé cette histoire de toutes pièces.

Comme, au sous la

foi

cours de l'instruction,

du serment,

vient d'être

condamné

il

à

il

un an de

prétendait avoir été en France. les

déposé

Il

il

prison.

Puis avait vagabondé à Berlin tout

joyeuse vie, puis balayé

avait

accusé de parjure et

fut

le

temps

avait d'abord

rues et couché à

qu'il

mené

l'asile

de

nuit. Il

faut rendre

hommage

à l'impartialité avec

laquelle la feuille pangermaniste a reconnu

comme

ce Puis s'était

triotes.

Mais comment

arrive à faire

l'Allemagne racolé et

»

«

moqué de est-il

ses

compa-

possible qu'on

énormément de bruit dans toute

avec l'histoire d'un jeune

homme

endormi en plein centre du pays,


LES RACOLEURS et se réveillant

dans une caserne de Nancy,

demande une quinzaine

après un trajet qui

d'heures en train rapide

Et pourtant,

107

c'est

un

!

fait

celte

:

bourde pro-

homme puisse être grisé, même enpi-eine Allemagne, et

digieuse, qu'un

en

France ou

se

réveiller

dans une caserne française, légion-

naire sans

le

savoir, est acceptée

role d'Evangile par

une

mands. On a vu, dans aux

un

du

débats

Ahlhorn

la

comme

multitude

chapitre consacré

le

que

Reichstag,

le

trouve toute naturelle;

esprit aussi avisé

pa-

d'Alle-

et

député

même

que M. Bernstein s'ima-

gine que nous entretenons à Lausanne des racoleurs chargés d'expédier à Marseille, sous prétexte d'un

embauchage quelconque, des

jeunes gens qui se trouvent un jour, on ne sait

comment, soldats à

la

Légion

Les associations contre

buent beaucoup

à

la

répandre

!

Légion contrices

légendes,

qui trouvent plus facilement créance du

ment qu

elles

ont

le

mo-

patronage de semblables

groupements opérant sous

le

pavillon de la


108 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE L'une

philanthropie.

par exemple,

d'elles,

celle qui est constituée

«

pour combattre

l'es-

clavage des Allemands dans la Légion

»,

a

Hans Kull quelques documents,

fourni à M.

sans lesquels les souvenirs personnels de l'auteur seraient

vraiment

C'est ainsi qu'à la fin

une

note,

intitulée

de chasse à française.

:

trop

du volume

se

trouve

Une nouvelle méthode

Vhomme pour

On apprend

inconsistants.

la

Légion étrangère grâce à la vigi-

là que,

lance des autorités allemandes, ainsi que des associations spéciales,

semble

coleurs français

c'est

le sol

de

l'Empire

devenu trop chaud pour

être

terrains

«

»,

les ra-

qui ont dû choisir d'autres

d'opérations.

Soit

en passant,

dit

une tactique bien commode que

celle

qui consiste à se plaindre d'être envahi par les racoleurs, et,

après qu'il a été impossible

un

seul, à déclarer qu'ils sont

d'en prendre partis

!

Quoi

qu'il

en

soit,

il

paraît que c'est à

dres que nos agents opèrent. les

Allemands nécessiteux, en

Ils

se

Lon-

y abordent

donnant pour


LES RACOLEURS leurs compatriotes,

109

un secours

leur offrent

pécuniaire, les conduisent en France;

un engagement

les grisent, leur font signer

comme

et,

Evidemment,

cela doit revenir

de légionnaire

soit riche,

ce prix

mands

se

;

ré-

dans une caserne.

veillent

tête

malheureux

toujours, les

là, ils

!

faut-il

:

pour pouvoir

Et

faut-il aussi

aient

que

s'offrir

que

les

cher,

par

République

la

des soldats à

jeunes Alle-

une fâcheuse propension à

laisser enivrer par

se

des inconnus, pour qu'on

puisse édifie^ toute une

campagne sur

réputation d'intempérance

En y réfléchissant

leur

!

de près, on peut attribuer

à cette

invention une origine assez vraisem-

blable.

On sait, en effet, que

les sergents recru-

teurs qui parcourent les rues de tent à leur casquette lores

que les

:

les

le

jue

le

flot

de rubans trico-

quelque touriste allemand, couleurs anglaises sont les

nôtres, a

pour

un

Londres por-

dû s'imaginer

compte de

la

France.

ignorant

mêmes que

qu'ils travaillent Il

n'a pas réfléchi

gouvernement anglais saurait bien 10


110 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE s'opposer à ce que des agents français vinssent,

sur son propre territoire, faire concurrence

aux hommes qui ont mission de des soldats

Mais ce

et

procurer

des marins.

n'est pas tout. Aussitôt après avoir

exposé cette

«

nouvelle méthode

une

question rapporte

montrer

lui

«

histoire

combien facilement

»,

la note

destinée

en à

jeunes

les

étrangers sont exposés, en France, à être enrôlés contre leur volonté s'agit

dans

Max Kûhn

d'un certain

la

Légion

qui, à

». Il

Nancy,

fut enivré par des racoleurs, et, suivant la for*

mule,

«

caserne

se réveilla le ». Il

lendemain matin

à

la

souffrit mille misères, contracta

une maladie de cœur, reçut un coup de feu

dans « le

la poitrine,

et

gouvernement

devint impotent

lui

en l'expulsant par delà

tré

au pays,

taire, qui le le

il

;

alors

français se débarrassa de

se présenta

la frontière

».

Ren-

à l'autorité mili-

reconnut impropre au service;

et

tribunal d'Elberfeld lui infligea 160 marcs

d'amende pour émigration pour insoumission.

illicite, c'est-à-dire


LES RACOLEURS

111

Voilà donc un insoumis qui invoque l'excuse

commode

si

de l'enivrement par incon-

nus, remontant à plusieurs années,

et

on

lui

accorde, ou l'on feint de lui accorder créance

pour monter une machination absurde contre

un pays

arrive

Il

bonne et

voisin

foi

!

heureusement que des gens de

examinent

choses de plus près,

les

constatent l'inanité de ces légendes. C'est

que

ainsi

la

1914 contenait

National-Zeitung du 3 janvier

un

intéressant reportage, dont

voici le résumé, tel que ...

par

Le

donné

l'a

le

Temps

:

dans la Gazette Nationale

récit publié hier

un rédacteur nommé Erhard Breitner montre

qu'il

faux q&e

est

les

jamais été enrôlés de force dans

eu

naliste a

yeux

la

reaux de

la

la

Légion. Ce jour-

curiosité d'observer de ses propres

méthodes d'engagement

les

allemands aient

déserteurs

Légion.

suivies par les

rendu en France,

Il s'est

passer pour déserteur, et a

demandé

Xégion.

que

Il

doit reconnaître

françaises n'ont exercé sur lui lui a laissé toute la liberté

bu-

s'est fait

à entrer dans la

les autorités militaires

aucune pression

et

qu'on

de signer son engagement*


112 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGER! Voici à peu près le récit cTErhard Breitner «

Le

Nancy

I

er

janvier, je passai la frontière

et je

Novéant

;

me

non

loin de

rendis d'abord au village français

j'allai aussitôt

dans un café

que

je voulais aller à

me

rendre auprès du maire.

Légion.

la

mis à un interrogatoire

que

:

A

déclara

et je

On me

de,

conseilla de

la mairie, je fus sou-j

minutieux. Je déclarait

très

je n'avais point de papiers.

On me donna

alors

me

ren-

j

une enveloppe fermée

et

on

me

conseilla de

dre à Pagny. Je m'informai des moyens d'aller à

Nancy

;

je

demandai à l'employé qui j'avais des

si

gion.

leva les épaules et dit en

êtes

en bonne santé,

pourquoi pas? route

!

En

rendit l'en-

chances d'être accepté à

veloppe Il

me

si

riant

vous en avez

le

la

Lé-*

Si

vous

ferme

désir,

:

«

tout cas, bonne chance sur votre

»

Erhard Breitner

se rendit alors

par le premier train à Nancy.

ment, on examina avec soin

Au

à Pagny, et de

\i

bureau de recrute*

la lettre

de recomman-

dation remise par le maire de Novéant, et on

le sou-

mit à un nouvel interrogatoire. Dans l'après-midi l'examen médical eut service.

Un

lieu. Il fut déclaré

officier lui

ment et lui montra la

apporta

place où

il

un

bon pour

1

contrat d'engagé

fallait signer.

Breitne

\


LES RACOLEURS

demanda main loisir.

«

et

la

113

permission de réfléchir jusqu'au lende-

d'emporter

L'officier

Vous pouvez

le

le

contrat,

regarda

faire ce

afin de l'étudier à

avec

défiance

que vous voulez

vous contraignons en aucune manière

;

n'avez pas le droit d'emporter cette pièce. vez vous en

pas

si

aller si

vous voulez

;

je

ne

;

dit

:

mais vous

Vous pou-

sais

nous vous reprendrons demain

et

nous ne

».

toutefois

Breitner,

persistant dans son attitude, quitta alors la caserne et

rentra en Allemagne, d'où

il

a adressé cette lettre à

la Gazette nationale.

Hâtons-nous d'ajouter, d'après publié par

le

M. Breitner ne

Journal, fit

que non seulement

meuse boisson enivrante qui perdit café, qu'il déclare avoir il

résumé

pas connaissance avec la

compatriotes, mais on lui

Mais

le

offrit

fa-

tant de ses

une tasse de

trouvée excellente.

faudra encore bien des expériences

de ce genre

— à supposer qu'elles soient

lement rapportées par

les

fidè-

journaux de tout

bord, pour détruire les effets du travail de ca-

lomnie que, depuis

si

longtemps, on poursuit

méthodiquement contre la France, à propos de 10.


114 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE la Légion.

Pour le moment, des gens parmi

plus sérieux, en

les

Allemagne, croient aveuglé-

ment aux méfaits de

ces racoleurs qui,

commettre

de ce dont on les accuse,

la moitié

pour

devraient former une légion plus nombreuse

que

la

Légion elle-même.

Tout les

cela est d'autant plus pitoyable,

metteurs en scène de

peuvent manquer

que

cette agitation

ne

au cou-

d'être parfaitement

rant de nos lois et règlements, ainsi que de la

manière dont on

les

applique. Mais la masse du

public allemand, qu'ils trompent sciemment,

a besoin d'être éclairée sur ce point, non seule-

ment par des

efforts particuliers, tels

présente étude ou tionale,

A A

la

officielles-

Matin du 10 novembre pu-

télégramme suivant, de Berlin

la suite

que

reportage de la Gazette na-

mais par des constatations

cet égard, le

bliait le

le

:

de la campagne menée par

la

presse

prétendu racolage pour

la

Légion

allemande contre

le

étrangère, le chancelier de l'Empire,

mann-Hollweg,

a

M. de Bcth-

récemment ordonné une minu-

tieuse et impartiale encpiête.


LES RACOLEURS

115

Suivant des informations de bonne source publiées par

un

les

journaux allemands, les recherches ont donné

résultat

purement

négatif, et

a été impossible

il

jusqu'à ce jour de convaincre de racolage une seule des personnes arrêtées sous cette inculpation.

Je ne sais ce que vaut cette nouvelle, dont la •

rédaction est

un peu vague mais ;

il

est

désirable -qu'elle soit confirmée, et que

vernement allemand, qui

communiqués

à la

le

bien

gou-

est assez prodigue

presse,

donne

aux

grande publicité possible

la

résultats

de

plus

de

toute enquête entreprise sur cet irritant sujet

des racoleurs. Le gouvernement français ne

pourra que

de faire ainsi la lu-

lui savoir gré

mière sur des accusations haineuses

et

dépour-

vues de fondement. Ces dernières, en .duire avec

effet,

continuent à se pro-

une persistance vraiment déconcer-

tante. Voici, par exemple,

un télégramme du

novembre, paru dans

Temps daté du 23

21

Les journaux

campagne contre ^nationale

le

pangermanistes la

continuent

Légion étrangère.

:

leur

La Gazette

apprend par un télégramme de Hanovre


116 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE, qu'un lycéen de

cette ville aurait été enlevé à

parents par des racoleurs opérant pour la

le

compte

Légion. Cette affirmation ne s'appuie d'ailleurs

aucune base

pangermaniste ne fait

idée

du

su;

rende pas compte du tort

qu'ell»

se

pressi

en multipliant des histoire

aussi invraisemblables

vérité, ces

d<

la

à sa propagande

En

que

singulier

précise. Il est

se:

que

ridicules.

journaux ont une bien

pièti\

sens critique de leurs lecteurs, à qui

représentent l'Allemagne entière

comme

il

cou

verte d'un vaste réseau de racoleurs, opéran

dans les

les

régions les plus diverses,

et

enlevan

jeunes gens par centaines, sans jamais êtr

pris sur le fait!

Dès

le

lendemain, cette inepte invention

démentie

Le Berliner Tageblatt de menti catégorique au

ce

matin donne un dé

récit fantastique publié

gazettes pangermanistes la légion

étai;

:

au

d'un lycéen Tropf, qui a

une longue

lettre à sa famille,

volontairement engagé à

la

par

1<

sujet de l'engagement écrit

Légion.

premières informations publiées par

il

A

de Marseill déclare

s'êti

en croire

1<

la presse berli


LES RACOLEURS noise,

Tropf avait

été enlevé

117

par un racoleur de la

Légion étrangère. Les journaux poursuivent

pagne systématique contre

la

Croix annonce qu'un jeune

quitté l'Allemagne

Mais ils

pour

la

homme, nommé Tjomas,

aller contracter

un engage-

à la Légion étrangère.

les lecteurs

de

la

eu connaissance de

National Zeitung ont-

l'article

Et que vaut, à leurs yeux, organe radical

cam-

leur

aux environs de Berlin, a

domicilié à Trebendorf,

ment de cinq ans

d'ailleurs

Légion. La Gazette de

la

du Tageblatt

?

parole du grand

?

Et quant au départ, également spontané,

du jeune Tjomas, que peut^on y objecter Gazette de la Croix publie-t-elle la liste

native de tous les émigrants aille

?

Que

?

La

nomi-

l'un d'eux

en Amérique ou en Algérie, où est

la dif-

férence ? Voici, fait

pour en

finir

avec ce point, encore un

qui montre que l'ardeur des anti-légion-

naires ne se laisse pas arrêter par le seul bruit

que

le

chancelier de l'empire aurait

fait

procé-

der à une enquête concluant à la non-exis-


118 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE tence des racoleurs. Le Journal

iï Alsace-Lor-

du 22 novembre contenait

raine

vante

la

note sui-

:

Trente personnes ont constitué hier soir à Berlin

un groupe de combat

contre la Légion étrangère. Le

Munich.

siège central est à

Il

a été décidé de former

de pareilles sociétés dans toutes

magne

la

recommandé

les

France l'extradition de tous

les

La réunion

a

moyens suivants au gouvernement Exiger de

la

légionnaires ayant

engagés 2

d'Alle-

réunion de ce soir ont parlé plusieurs an-

légionnaires.

villes

(1).

Dans ciens

les

moins de 21 ans

:

lorsqu'ils se sont

;

Engager

l'Italie,

l'Espagne, la Suisse et l'Au-

triche à protester à la Conférence de l'institution de la

Légion étrangère

La Haye contre

;

3° Aggraver les lois punissant les recruteurs 4° Rapatrier les

;

Allemands sans ressources. qui

se

trouvent en France,

On (1)

Il

peut supposer que s'agit

Municboise.

évidemment de

le

gouvernement

alle-

sections locales de la Société


119

LES RACOLEURS

mand

ne manquera pas de faire comprendre à

ces trente bourgeois de Berlin qu'il y a certaines

«

exigences

»

que

ne peut pas poser

l'on

à une nation indépendante, tions

communes où Ton

et certaines ac-

peu de chances

a

d'entraîner les autres Etats.

Quant aux deux autres moyens préconisés par

la section, ils

sont tout à

fait

recomman-

dâmes.

Que Ton

rapatrie les

Allemands indigents

existant en France, rien de

mieux

:

nos tra-

vailleurs ne tiennent pas à les voir avilir le

prix de la

main-d'œuvre, non plus que nos

œuvres d'assistance ne à leur charge. Et

vœu répond

il

se soucient de les avoir

est à

à celui de

MM.

remarquer que ce Roloff etPohl, cité

plus haut. Reste l'idée d'aggraver les lois contre les racoleurs.

Ce

n'est

pas en France qu'on y verra

moindre inconvénient, puisque ne pourra pas

faire

frapper

cette

un

le

mesure

seul agent,

français ou étranger, de notre gouvernement.


120 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Mais que

les vaillants ligueurs

y prennent

garde. Sont-ils bien certains que les premières

victimes de ces lois vengeresses ne devraient

pas

être,

à défaut des consuls visés par

M. Rolqff,

précité de

l'article

général von Deimling,

le

le

colonel von Reuter,

le

jeune sous-lieutenant baron von Forstner

et les

membres du

bourg

?

question,

Je ne si

le

lieutenant Schadt,

Conseil de guerre de Stras-

me

permettrais

pas cette

n'avait déjà été posée,

elle

en

Allemagne même, par un grand nombre de journaux,

et si les

faits,

ou plutôt

les

sujets

allemands, n'y avaient répondu à l'avance. Voici,

à cet égard, quelques extraits

du

journal Le Temps.

Numéro du On

26

novembre 1913

télégraphie de Saint-Dié.

Cinq jeunes Alsaciens, viennent de

se présenter

spécial de la gare de

à la

ont été dirigés sur

d'Epinal.

originaires

de Saverne,

au bureau du commissaire

Saint-Dié, et ont formulé une

demande d'engagement Ils

:

le

Légion étrangère.

bureau de recrutement


LES RACOLEURS

Numéro du On

4 décembre

:

télégraphie de Chartres

:

121

Indigné de la conduite des autorités à

la suite

des

incidents de Saverne et des brutalités dont les soldats

sont ce

que son

tres,

un négociant de Colmar

victimes, fils

au 102

servît

après l'avoir

fait

e

a tenu à

d'infanterie, à

Char-

naturaliser Français.

homme vient d'arriver à la écrit Y Homme libre. Il ne connaît

caserne

tout notre langue. Les officiers ont mis leurs

hommes

Le jeune

«

Marceau,

au courant de invités à se

cette situation

particulière et les ont

montrer bienveillants envers leur nou-

veau camarade. Cette exhortation les

pas du

était superflue, car

braves soldats chartrains avaient entre eux spon-

tanément décidé de

faire tout ce

qui dépendrait d'eux

pour rendre agréable au jeune Alsacien son passage dans l'armée française.

»

Numéro du 14 décembre

:

Boulevard de Sébastopol hier, dans jeunes gens abordaient

un gardien de

d'eux lui tenait ce langage

la

soirée, trois

la paix, et l'un

:

Nous sommes Alsaciens-Lorrains. Mon de ses camarades étaient soldats.

Ils

frère et

un

ont déserté. Moi, 11


122 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE qui

que dix-huit ans,

n'ai

eux pour

je suis parti avec

ne pas servir dans l'armée allemande. JNous voulons nous engager dans

Légion étrangère. Venus à Paris

la

dans ce but, avec quelques économies, nous n'avons plus rien maintenant.

Le gardien conduisit

les trois

jeunes gens au com-

missariat des Arts-et-Métiers. Ce sont effectivement trois Alsaciens

Charles

;

de vingt-trois ans,

Zweg

et

et le frère

Jacques Wolf, âgés

de ce dernier, Louis

Wolf.

Au

reste,

trance

Légion

il

même

semble bien certain que

de

la

est allée à

l'ou-

campagne menée contre

la

rencontre du but visé par

ses promoteurs, en ce sens qu'en attirant l'at-

tention sur cette troupe, elle

y a déterminé un

notable surcroît d'engagements.

On

sait,

en

effet,

que tous

les

concentrés à Marseille, d'où on

pour Oran à chaque courrier, fois (i)

par semaine

engagés sont les

c'est-à-dire

Bien entendu, ces départs ont lieu par

Hans Kull

deux

(1).

postaux. Et l'on peut s'étonner en lisant dans sieur

embarque

qu'il a été

embarqué sur

«

les le

courriers

volume du

un grand

vais-


123

LES RACOLEURS

Or, d'après Y Opinion du 13 décembre, le

nombre des départs du de

fort Saint-Jean a été

:

3.016 en 1910

3.276 en 1911 3.432 en 1912

3.540 jusqu'au

On

1

estimait alors que

er

septembre 1913.

le

nombre

total,

à la

de 1913, atteindrait 4.660, représentant une

fin

augmentation de précédente

1.228,

ou 35,6 0/0 sur Tannée

(1).

même

D'après la

née du lundi

13

source, dans la seule jour-

octobre

1913,

vingt deux

jeunes Allemands se sont présentés au bureau

de recrutement de Verdun pour être dirigés sur la Légion. ^eau de guerre français

non

le

pour

faire

que

le

signal

honneur

(i)

Voir

un

les

qui donna par I

Peut-être,

un coup de ca-

après tout,

est-ce

à ce futur historiographe delà Légion,

gouvernement de

Marseille par

»,

du départ

la

République

l'a fait

chercher à

cuirassé...

remarques du chapitre XIII, page i44*


XII

COMMENT SE FONT LES ENGAGEMENTS

L'engagement à

Légion

la

étrangère ne

peut se contracter que devant un

tendant militaire, après que

le

sous-in-

candidat a subi

dans un bureau de recrutement un examen d'aptitude physique.

Les conditions du contrat figurent sur d'engagement,

l'acte

sous-intendant

doit en

donner lecture au candidat avant de

lui faire

et

le

signer cet acte, dont à conserver.

En

il

lui

fait, l'officier

devant lequel l'homme l'éclairé

car

il

également sur

est bien inutile

homme

remet un exemplaire

pour que

de recrutement,

comparaît d'abord, la portée

de cet acte,

d'examiner à fond un

celui-ci se ravise ensuite, en


COMMENT SE FONT LES ENGAGEMENTS 125 présence du sous-intendant. Est-il besoin de

un homme

dire que, si

tement ou à la sous-intendance en

ou de visible inconscience, mis à

la porte

au recru-

se présentait

état d'ébriété

serait aussitôt

il

des bureaux? Tout Allemand

sérieux qui lira ces lignes appréciera la diffé-

rence qui existe entre des

au moins

(le

officiers,

sous-intenâant et

de recrutement) sont des

le

dont deux

commandant

officiers supérieurs,

et les racoleurs de la légende, qui font signer

l'engagement par des

hommes grisés d'eau-de-

vie et de promesses fallacieuses.

L'étranger qui veut s'engager dans la Légion I

doit être âgé de 18 ans

au plus 1

m.

;

il

doit avoir la taille

et

de 40 ans

minimum

de

55 et être vigoureusement constitué et en

état de faire

dans

au moins

campagne, tant en Algérie que

les colonies.

Bien entendu, l'examen phy-

sique qu'il subit à cet

effet est très sévère, et

une bonne moitié des candidats y sont refusés

:

le

bureau de recrutement qui, par négli-

gence, expédierait d'hôpital

»,

en Algérie

se verrait reprocher

du

« gibier

sévèrement 11.


126 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE inutiles qu'il imposerait

les frais

Le candidat doit présente devant 1°

De son

équivalente 2°

D'un

Du

par

le

sous-intendant

le

à l'Etat

être porteur, lorsqu'il

:

se

:

acte de naissance ou d'une pièce ;

certificat

de bonne vie

certificat d'aptitude

et

mœurs

;

physique, délivré

bureau de recrutement.

Mais, dans

le

cas où

il

deux premières pièces

n'est

pas porteur des

ci-dessus,

on passe

outre à l'engagement. Cette

dernière

disposition

ne

s'applique

qu'aux candidats étrangers.

Quant aux Français, quer également

gement; car

ici les

elles

et les qualités

il

est nécessaire d'indi-

conditions de leur enga-

déterminent

la

composition!

particulières de ce corps de

troupe sur lequel nos voisins se font des idée* si

fausses.

Bien entendu, je ne parle pas des cadre servant au

titre français.

sous-officiers, sont des

sujets d'élite,

Ceux-là, officiers

hommes

pour qui

c'est

e

de choix, de

une distinctio


COMMENT recherchée Légion. ticle

est

SE

et

FONT LES ENGAGEMENTS 127

enviée que d'être détachés à la

On a, d'ailleurs, vu

plus haut, par l'ar-

de la Gazette de Francfort, que leur valeur

reconnue, en Allemagne, par les

que n'aveugle pas

En dehors

la

hommes

passion politique.

de ces cadres, Feffectif de

la

Lé-

gion comprend, dans une proportion d'environ 45 0/0, des Français « servant au titre étranger

».

Cette qualification ne signifie

nullement,

comme on le croit en Allemagne, que ces hommes aient perdu momentanément leur qualité de citoyens français,

ce

qui serait

absurde, puisqu'ils ne peuvent acquérir au-

cune autre nationalité

ment que, pendant ment,

ils

ne

la

;

elle signifie

simple-

durée de leur engage-

peuvent pas servir au

titré

français, c'est-à-dire profiter de la situation qu'ils

ont pu acquérir à la Légion pour entrer

avec leur grade dans un corps de troupe métropolitain

ou

colonial.

Or donc,

les

Français qui désirent servir au

titre

étranger doivent contracter

un engage-


128 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

ment, dans

mêmes

les

étrangers, devant Ils

conditions que les

un sous-intendant

sont tenus de produire, outre

d'aptitude physique délivré par le

dant de recrutement

Leur

vices 2° 3°

militaire.

le certificat

comman-

:

livret militaire

ou un

état

de ser-

;

Un extrait de Un certificat

leur casier judiciaire d'identité,

délivré

;

par

le

maire de leur dernier domicile.

En aucun

cas, ils

ne sont dispensés de

la

production de ces pièces. L'extrait du casier judiciaire, notamment, est nécessaire blir

que

le

pour

éta-

candidat n'a subi aucune condam-

nation

entraînant l'exclusion de l'armée ac-

tive, ces

condamnations empêchant égalemen

tout engagement dans la Légion

(i)

Rappelons que sont exclus de l'armée Les

individus

cas prévu à l'article 117

Ceux

:

ont été condamnés à une

qui

peine

infamante ou à une peine infamante dans

afflictive et

(1).

du Gode pénal

qui, « yant été

tionnelle de

le

;

condamnés à une peine correc-

deux ans d'emprisonnement

et

au-dessus, ont


COMMENT SE FONT LES ENGAGEMENTS 129 Mais

il

plus tard

— nous y

faut noter ici

— que

reviendrons

exigence est facile à

cette

tourner, puisqu'il suffit que le candidat se dise étranger, pour qu'on ne lui

impose plus au-

cune justification de son identité.

Ce

serait

une erreur de croire que

cette dis-

position ne peut bénéficier qu'à des malfaiteurs proprement dits

:

voici

un exemple du

contraire.

Au mois

de

juillet 1913, les

journaux ont

rapporté l'aventure de deux sous-officiers de la

garnison de Nice, qui avaient demandé à

aller servir

au Maroc, sans réussir

à obtenir

cette faveur. Ils désertèrent, s'engagèrent à la

Légion sous de faux noms, mais furent recon-

nus

et arrêtés,

lun avant même

d'être

embar-

qué, l'autre à son arrivée au corps, où se trouvait

un

officier

de son ancien régiment.

furent traduits devant été?

en outre,

un

par l'application

conseil de guerre, de

l'article

pénal, frappés de l'interdiction de tout cice des droits civiques, civils

3° Les relégués collectifs.

Ils

ou

4a du

Code

partie de l'exer-

ou de famille

;


130 LA QUESTION DE LA LEGION ÉTRANGÈRE qui ne pouvait pas absoudre leur désertion,

mais qui, vu

les circonstances,

qui l'avaient

déterminée, se borna fort justement à leur

mois de prison avec

fliger trois

Quoi

qu'il

laquelle,

en

soit,

le

répète,

je

in-j

sursis.

cette pratique

nous

sur

reviendrons

plus loin en détail, n'est pas sans inconvé-

motiva un décret du 14 août

nients. Elle

1906,

qui aggrava notablement les conditions de l'engagement.

Depuis un certain temps, en tatait

un

sensible abaissement

ral et

de

la discipline

coup de mauvais

effet,

on cons-

du niveau mo-

des légionnaires. Beau-

sujets s'étaient engagés en>

fournissant de faux renseignements d'identité; et

de plus,

les

rengagés, sachant que leurs

droits à la pension de retraite étaient définiti

vement acquis,

se laissaient

souvent aller à

l'inconduite.

Pour

les gradés,

normale, la

on disposait d'une sanction

rétrogradation,

bien suffisante


COMMENT SE FONT LES ENGAGEMENTS 131 >our les maintenir dans le droit

chemin mais, ;

on

l'égard des simples légionnaires,

était

lésarmé, à moins de recourir à des rigueurs excessives et à de trop fréquents envois aux

compagnies de discipline. Ainsi que ninistre,

dans

le

République qui motive Il

ne peut

le dit le

rapport au président de la le

décret

être question de

:

leur appliquer des

Deines disciplinaires exagérées ou des

moyens de

ré-

pression spéciaux, que réprouverait le caractère hu-

manitaire de notre législation actuelle. Mais

semble possible

du

et équitable

de

les retenir

gain, et de ne les payer, en

sorte, ;

aux

ouvriers

mau-

manquent

obligations de leur contrat.

En que

les

que

l'Etat se

réserverait la faculté de renvover les éléments

d'un patron dont

me

par l'appât

quelque

proportionnellement aux services rendus

vais, à l'instar

il

conséquence,

les contrats

le

d'engagement des légionnaires

non gradés pourront trois

décret de 1906 décida

être résiliés d'office après

ans de service, dont six mois passés dans

une compagnie de discipline; les contrats

et

de

même pour

de rengagement, au bout de dix-


132 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE huit mois de nouveau service,

si

l'homme a

passé en tout huit mois aux compagnies de discipline.

Mais

cette grave

mesure

discipli-

naire ne peut être prononcée que par ral

commandant

Indochine

et

commandant l'avis

le 19

e

le

géné-

corps d'armée (ou, en

à Madagascar, par

le

général

supérieur des troupes), et sur

d'un conseil de discipline convoqué à cet

effet; et

comme

elle

implique que l'homme a

déjà motivé la réunion d'un autre conseil sem-

envoyé dans une compagnie de

blable qui

l'a

discipline,

on peut estimer que des garanties

suffisantes sont fournies par là contre l'arbitraire.

Mais l'expérience montra bientôt que cela ne suffisait

pas encore,

des 10 mars 1908

et

et

deux nouveaux décrets,

24 mars 1912, vinrent ren-

chérir sur la sévérité de celui de 1906. Actuel-

lement,

dans certains cas

déterminés, par

exemple quand on apprend qu'un légionnaire a déjà été renvoyé antérieurement des troupes coloniales ou de la Légion, ou qu'il a encouru

une condamnation aux travaux publics,

il


COMMENT SE FONT LES ENGAGEMENTS 133 peut être traduit sans aucun délai devant un conseil de discipline,

aux fins de résiliation de

son engagement ou rengagement. Ces dispositions sont d'engagement,

et

doivent être lues par la signature

de

inscrites sur

l'acte,

le

l'acte

de celles

font partie

qui

sous-intendant, avant

à l'homme désireux de

s'engager.

On

voit

combien on

est loin

de l'étrange con-

ception des journalistes allemands, suivant laquelle on s'efforcerait de prolonger arbitraire-

ment

durée du service des légionnaires, en

la

leur infligeant des journées de prison, dont la

durée totale viendrait s'ajouter au temps pour lequel Il

ils

est

se sont engagés.

bien exact que, d'une manière géné-

rale, les militaires

après

le

sont maintenus au corps,

départ des

hommes

de leur classe,

pendant un nombre de jours égal au nombre de journées de prison ou de cellule qu'ils ont

pu subir au cours de leur temps de sauf la disposition suivante

:

si

ce

service,

nombre de

journées dépasse soixante, la durée du main12


134 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE tient

au corps

est fixée

par

le

conseil de disci-

pline, statuant en dernier ressort, et être inférieure à trois

mois

ne peutj

ni supérieure à

un

an. .

du

Ainsi, la durée

être

infligé

à

rabiot» qui pourrait]

ce

un légionnaire comme à

autre soldat, en vertu du droit saurait dépasser

un

an.

En

tout

commun, ne

outre, cette prolon-

gation de service ne peut pas résulter automa

tiquement,

comme on

le croit

en Allemagne

d'une série de punitions injustes ou excessive!' infligées

par un sous-officier mal

disposé,!*;,

conseil de discipline fournissant à l'intéressi la possibilité il

est évident

de se défendre. Mais d'autre part

que ce mode de répression

peut avoir d'efficacité que

s'il

est

n-

employé tou

à fait exceptionnellement, à titre d'exemple*

comme

cela a lieu

dans

les

troupes du servie

obligatoire. Si, après avoir recruté par engage

ments un corps de volontaires de qualité doi teuse,

on conservait, par punition, ceux qui

s

sont montrés mauvais, ou encombrerait bier tôt ce

corps d'éléments qui achèveraient de


COMMENT SE FONT LES ENGAGExMENTS 135 gâter complètement, et corrompraient tout

le

reste.

précisément pourquoi on en est venu,

C'est

après quelques expériences fâcheuses, au pro-

cédé directement contraire à celui que

mands

croient en vigueur.

Au

les Alle-

lieu de conser-

ver par force les éléments malsains, au delà

du terme de leur engagement, on a institué une procédure permettant de rompre ce dernier avant son expiration;

et ce

vère, puisqu'il enlève

au légionnaire sa situa-

tion, tout

en

le

châtiment, très sé-

privant du bénéfice de la pen-

sion de retraite, fait partie des dispositions

dont

les

hommes

sont avisés avant de signer

leur engagement.

Que

tout cela est loin de la légende de ces

racoleurs gens,

qui

amènent de pauvres jeunes

par surprise, dans un enfer où des

gradés impitoyables finiment

1

les

maintiendront indé-

;


XIII

NOMBRE ET NATIONALITE DES LEGIONNAIRES

Recherchons maintenant de quels éléments la

Légion se trouve composée, par

turel

Quelle

est,

d'abord,* la

diverses nationalités dans

garrée

La

le

jeu na-

de cette législation. répartition

des

cette troupe

bi-

?

première constatation, un peu para-

doxale, à laquelle on est conduit, est que la

Légion étrangère

pour moitié, compo-

est,

sée de Français. Et la seconde, que

le

nom-

bre de ses soldats allemands a été fortement exagéré, dans les deux

soins de la polémique

:

pays, pour les

on

est

be-

naturellement

porté, d'un côté, à grossir les motifs

que Ton


.

.

NATIONALITÉ DES LÉGIONNAIRES

137

croit avoir de se plaindre, et de l'autre, à faire

valoir l'attraction exercée par la Légion sur

lesjeunes Allemands.

M. Hans Kull, documenté par Y Association contre V esclavage des Allemands dans la Légion étrangère, « d'après les cielles », attribue

suivante

données françaises

à la Légion

Alsa ciens-Lorrains

5.44o

soit

Allemands

i.44o

»

960

»

8 »

45»/o 12

»

84o

»

7

Français

.

600

»

5

i

Italiens.

.

600

»

5

»

Espagnols

.

600

»

5

»

48o

»

4 »

Autrichiens

»

Hollandais

48o

»

4 »

Divers

600

)>

5

soit

100 °/

.

.

Total

.

.

.

Et l'auteur ajoute que

i3.o4o

«

de 1907 à 1908

pas incorporé moins de 4.946 sujets

mands,

offi-

composition

:

Suisses

'a

la

soit 2.635

Alsaciens-Lorrains

et

»

»,

on

alle-

2.311

utres Allemands. Il

est

permis de se tromper, mais non à ce

joint. 12.


138 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Tout d'abord, on remarquera cette expression elîe

«

pendant

ou bien

1.386

»

:

deux années 1907

les

vague de signifie-tet 1908 »,

pendant une année, à cheval sur

«

1907 et 1908 »? l'auteur,

le

de 1907 à 1908

«

On

le sait

d'autant moins, que

dans sa préface, prétend avoir relevé

engagements d'Allemands,

septembre 1908 fient cinq

mois

une année,

à

»

:

si

de mai à

«

ces derniers mots, signi-

pleins, ils correspondent,

un nombre de

pour

3.326 engage-

ments.

Mais peu importe, car l'exagération, commise n'est pas

du simple au double? mais bien du

simple au décuple

en

effet, le

nombre

:

pendant ces deux années, total des enrôlés

de toutes

nationalités n'a été que de 1,704 et 2.595, sur

lesquels on compta,

respectivement, 223

307 Alsaciens-Lorrains

Quant aux

effectifs

suis pas en état de les

à une

même

date

;

et

!

des deux régimentsje ne

donner tels

mais

qu'ils étaient

les voici, à

deux dates

suffisamment voisines pour qu'on puisse, sans erreur sensible, les comparer et les totaliser.


NATIONALITÉ DES LÉGIONNAIRES

139

F .S

s o £T

Te -i,

Français

.

.

.

.

.

Alsaciens-Lorrains.

Belges

.... ....

Suisses

.

Allemands

.r

-

-""-

-

c

^

zr,

Z ^^

O

2.58o

2.169

35o

Total

°/o

4.749

45,2

O

-

87e

354 85" 9

1

704

6,7

855

17.6

384

39

i

77 5

7.4

,

2^7

327

624

5,9

,

223

255

4 78

4,5

i43

128

271

2,5

58

61

IJ 9

1,1

Luxembourgeois

29

4i

°,7

Tunisiens

61

» m

'7

.

Italiens

Espagnols

Russes

.

.

Marocains

.

Autrichiens

.

i84

Hollandais

.

32

Américains

.

3il

29

<

:

\

1

Hongrois.

Turcs.

.

.

,

.

.

28

28

335

6 99

6,5

5.i33

10 521

99.8

.

1

1

61

Divers

5.388

Ceux du r.rticle

1 er

régiment sont empruntés à un

de M. Stéphane Lauzanne, qui venait


140 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE de se renseigner sur place, à Bel-Abbès (Matin

du 2 octobre 1913) pris

;

et

ceux du 2 e régiment sont

dans l'ouvrage de M. Poimiro, lequel

du colonel Passard, commandant

tenait

giment

les

le ré-

(1).

Ces chiffres appellent un commentaire. signifient,

en

effet,

Ils

que 4.749 hommes au moins

sont certainement et réellement des Français ce sont çais

:

1° les

2° les

;

gradés servant au

hommes

:

titre fran-

qui, tout en établissant

leur qualité de Français, se sont engagés au titre

étranger

gés d'abord turalisation

;

et 3°

comme ;

des étrangers qui, engatels,

ont obtenu leur na-

en moyenne, on accorde environ

140 naturalisations par an dans chaque régi-

ment (i)

en

;

et

sur l'ensemble des deux régiments,

Rappelons à ce propos que

réalité,

la

Légion étrangère

une brigade commandée par un général.

compose, en

effet,

est,

Elle se

de deux régiments divisés chacun en

6 bataillons à 4 compagnies, plus deux compagnies de dépôt (une de recrues et une de convalescents)

outre

de

un

trois

bataillon de

marche

:

au

total,

;

il

l'effectif

régiments ordinaires. Actuellement, 5

existe

en

de plus bataillons

«ont au Maroc, 3 en Indochine, le reste en Algérie.


e

NATIONALITÉ DES LÉGIONNAIRES il

14Î

y a en permanence environ 300 naturalisés

originaires d'Alsace-Lorraine (1).

Mais, sur les 5.772 gers,

il

se trouve

connu de Français

hommes qualifiés d'étran-

un nombre qui,

tout à fait in-

ne pouvant ou ne vou-

lant pas fournir de pièces d'identité, se sont

donnés pour étrangers; ceux-là

comme

lement inscrire

se fontgénéra-

Belges,

Luxembour-

geois ou Suisses, c'est-à-dire d'un

pays de

langue française. D'autre

part,

les

engagés

allemands

se

donnent souvent pour Alsaciens ou pour Autrichiens, et

dans l'espoir

de toute façon,

pays

annexés,

comme

d'être

les fils

sont

mieux accueillis

;

d'immigrés, nés en

officiellement

De

Alsaciens-Lorrains.

comptés

sorte que, fina-

lement, la statistique ci-dessus doit être interprétée de la manière suivante

:

Sur 10.521 hommes, la Légion compte au

moins 4.749 Français, (i)

et

au plus 5.772 étran-

Voir à ce sujet l'intéressant

Fribourg, Les

Alsaciens- Lorrains

d&nsVOpinion du i5 novembre

et

i()i3.

article la

de

M. André

Légion étranger

9


142 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE gers. Et,

parmi ces derniers, on trouve au plus

704 Alsaciens-Lorrains

non encore naturalisés,

775 Belges, 624 Suisses,

au moins

et

etc.,

1.855 Allemands.

Mais

enfin,

dans l'impossibilité où Ton est

dé préciser absolument

admettrons

comme

les chiffres,

nous

bons, ou au moins

les

comme

suffisamment approchés. Et nous dirons donc

que

la

hommes,

Légion

comptait,

dont

en

1913,

10.521

Alsaciens-Lorrains

et

1.855 Allemands, soit 2.559 ressortissants

de

704

l'Empire. S'ils

nombreuse

sont malheureux, c'est en

compagnie, puisque nous brutaliserions égale-

ment

3.213 autres étrangers

et,

ce qui est plus

étrange encore, au moins 4.749 Français Et

Ton songe que tout pangermaniste

n'a

Alsace-Lorraine,

il

le

bruit fait par la presse

trouvé

aucun écho en

ne reste plus, pour

tiver tant d'alarmes,

si

que

1.855

formant environ un sixième de

mo-

Allemands, l'effectif to-

tal.

Sans doute,

le

nombre ne fait rien

à l'affaire

;


NATIONALITÉ DES LÉGIONNAIRES et y

eût-il.

143

encore moins de victimes, on com-

prendrait que leurs compatriotes s'en trassent émus. Mais encore

jours, que est

mon-

— à supposer,

les faits allégués soient

en droit de s'étonner de

la

tou-

exacts— on

disproportion

existant entre la cause et ses effets, et de se

demander •ont là Ils

si,

les

pangermanistes

conscience bien nette.

protestent violemment contre la situation

faite à 1.855

tôt de leurs

ces

de leur côté,

de leurs compatriotes,

anciens compatriotes, car enfin

hommes, en venant

à

volontairement abandonné •d'origine.

— ou plu-

la

leur

Légion, ont nationalité

Mais ne compte-t-on pas, à

l'inté-

rieur de l'Empire, sur trois de ses frontières,

plusieurs millions d'habitants qui n'ont nulle-

ment demandé à devenir Allemands, montrent

médiocrement

sort? Et que diraient nos

qui ont plus

d'affinité

tions cédaient nalistes, et

satisfaits

et

qui se

de leur

voisins, si les peuples

qu'eux avec ces popula-

aux excitations de leurs natio-

prétendaient

terrain- international

la

transporter sur te

question du régime


144 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE qu'elles subissent fort ?

en vertu de

D'une part, une poignée de

libérés

du plus

la loi «

Prussiens

suivant l'expression que s'appliquait

»,

à lui-même

Henri

Heine; de

millions de Mussdeutsche,

d' «

des

l'autre,

Allemands par

quelle serait, pour des tiers impar-

force »

:

tiaux,

la question la plus internationale?

Je n'insiste pas sur ce sujet délicat

et qui, je

point de savoir

si les lé-

le répète,

réserve

le

gionnaires sont réellement tant j'ai

voulu indiquer seulement que,

jours

imprudent de

affaires suffit

du

voisin,

même

Pour en tifs,

à plaindre

il

s'il

s'immiscer

finir

dans

existe des cas

pas d'y regarder à deux

;

est tou-

les il

ne

fois.

avec cette question des effec-

une précision

est

encore nécessaire, afin

d'éviter des interprétations erronées et

mal-

veillantes.

On

sait

en

effet

que certains Allemands re-

présentent la Légion leur race

:

comme

le

tombeau de

d'après les écrits cités au chapi-


NATIONALITÉ DES LÉGIONNAIRES tre IV,

145

200.000 d'entre eux y auraient déjà

une moyenne de 2.400 par an.

péri, soit

notablement plus

que

Légion

la

n'a

C'est

reçu

toutes nationalités depuis sa

d'hommes de création.

importe de ne pas confondre

Il

le

nombre

des engagés avec celui des départs de Marseille,

nier,

mentionné à

pour

les trois

dont on avait à 10.724,

Mais

il

page 123.

la

années 1910, 1911

en

der-

et 1912,

complets, s'élevait

les résultats

soit,

Ce

moyenne, 3.574 par an.

comprend, outre

les

engagés partis de

France, des rengagés, des hommes des cadres, et enfin

les

bre

des

hommes

rentrant de congé. Sur

deux premières catégories, un grand nom-

d'hommes sont refusés

à l'examen médical

subi à l'arrivée en Afrique, qui est plus sévère

que celui des bureaux de recrutement. Et par contre,

beaucoup d'engagements sont

tractés en Afrique

pas dans

la

même,

statistique

et

con-

ne figurent donc

au départ de Mar-

seille.

Le nombre véritable des engagements, 13

tel


146 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE qu'il a été fourni officiellement à

a

été

de

M. Poimiro,

:

1.704 en 1907

2.595 en 1908 2.397 en 1909

2.118 en 1910

Total

:

8.844,

La moyenne pour ces quatre années 2.203,

comprenant environ

1.200

est

donc

étrangers,

sur lesquels environ 280 obtiennent, par la suite, leur naturalisation.

D'autre part, on vient de dire que

l'effectif

de

la Légion, en 1913, peut être évalué à 10.521

hommes. on

Si l'on admettait ce

arriverait à

fier

pleinement

naires

nombre

une conclusion le

tel

quel,

qui, sans justi-

pessimisme des anti-légion-

allemands, révélerait un rendement

bien insuffisant du

nombre des hommes

in-

corporés.

La proportion des rengagés, en

à

48 0/0 du total.

effet, s'élève

Sur 10.521 hommes,

elle

donnerait donc, en nombre rond, 5.000 ren-

gagés

et 5.500 soldats

de moins de cinq ans de


NATIONALITÉ DES LÉGIONNAIRES

147

services. Et ces derniers étant répartis en cinq classes,

on arriverait à une moyenne de 1.100

hommes

présents, par année de recrutement

Le déchet

serait

donc de 50

Seulement, d'après je dois à tif

0/0.

renseignements que

les

un ancien officier de

Légion,

la

comprend que

ci-dessus ne

instruits, incorporés

dans

l'effec-

hommes

les

les unités actives*

Il

faudrait y ajouter, pour chaque régiment,

la

compagnie des recrues, dont

très considérable et varie les arrivées

constamment, selon

mensuelles de France,

ments contractés en Afrique préparation

les

cet officier, qui a

commandé une s'est

hommes. En

élevé

fait, le

de ces com-

une

compte

d'établir des

fait,

fois

nombre

des légionnaires varie entre 13.000 Et, tout

engage-

degré de

et le

antérieure des engagés; d'après

pagnies, son effectif

qu'à 1.400

l'effectif est

justotal

et 14.000.

autant qu'il est possible

moyennes en

pareille matière, le

déchet peut être compris, suivant

les

époques,

entre 18 et 36 0,0.

Encore

n'est-il

pas imputable uniquement


148 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE à des décès et à des infirmités contractées au service.

comprend également un nombre

Il

variable de désertions, de condamnations, et

surtout de ces renvois par mesure disciplinaire dont cédent, et

il

au chapitre pré-

a été question

que ne mentionne aucun auteur

alle-

mand. Quant aux pertes proprement par

le

feu et la maladie,

dites,

causées

serait illusoire de

il

chercher à en donner une moyenne, car

elles

varient naturellement dans des proportions considérables.

On

pense bien que ce n'est pas

sans de douloureux sacrifices que

la-

Légion a

mérité de voir inscrire sur ses drapeaux les

noms de

Sébastopol, Kabylie, Magenta, Ca-

merone, Extrême-Orient, Dahomey,

Mada-

gascar, auxquels on pourrait ajouter ceux de la

guerre franco-allemande, du Maroc, et de

tant d'expéditions obscures

et

souvent

fort

meurtrières: en une courte campagne dans

Sud-Oranais,

il

est arrivé à

le

une compagnie de

perdre 60 hommes, dont deux

officiers.

Mais

ce sont là des risques de guerre, tels qu'ils ne


NATIONALITÉ DES LÉGIONNAIRES s'en produit

que dans des circonstances ex-

ceptionnelles,

et

auxquels

ment penser avant de ment.

Ils

homme

149

faut

il

contracter

représentent

ici la

évidem-

un engage-

part que tout

de faire au hasard, au

est bien obligé

moment

de prendre une détermination quel-

conque;

et cette part est

certainement toujours

considérable quand on prend du service dans

une armée coloniale. Mais nous avons pleine-

ment est

le

la*

dans

les

garnison,

ni de deuils

et

postes les plus reculés, la vie

Légion, dont on verra plus loin tout

confort, ne

Et

minimum. En

réduite au

même à

droit de dire que, dans l'espèce, elle

le

comporte pas plus de souffrances que

celle

d'aucune autre troupe.

c'est là l'essentiel.

13.


XIV LES CHERCHEURS D'AVENTURES

ET LES DÉSHÉRITÉS

Passons maintenant à l'examen de

la

valeur

morale des éléments ainsi réunis.

Pour

conférenciers panger-

les écrivains et

manistes, la chose est bien simple.

suivant eux, comprend

un

La Légion,

nombre

certain

d'esprits aventureux, séduits par les

d'une existence romanesque

;

hasards

des victimes

du

racolage, attirées là par leur misère, leur naïveté et leur

imprudence

;

puis des déserteurs,

autant de traîtres méprisables

;

massis de chevaliers d'industrie bandits, contumaces

ou

libérés,

enfin et

un ra-

même

de

qui, joints


LES CHERCHEURS

d' AVENTURES

aux déserteurs, corrompent

151

les autres, et

don-

nent leur empreinte à l'ensemble.

Les chercheurs d'aventures, nous n'en parlerons pas

:

Légion

si la

n'existait pas, ils s'en-

gageraient dans d'autres corps coloniaux, il

suffirait

de rendre plus élastiques les limites

d'âge à l'admission.

La misère, assurément, coopère au ment,

comme

elle

recrute-

amène des malheureux à

exercer des métiers bien plus pénibles, et dans lesquels réel

sont loin de trouver

ils

dont

le

confort très

jouissent les légionnaires

la garantie d'une

et d'avoir

pension de retraite au bout

de 15 ans.

Et certainement, avaient

s'ils

le

la

plupart des

choix entre

la

hommes,

rude profes-

sion des armes aux colonies et de

bonnes

rentes ou une occupation facile et richement rétribuée,

ne choisiraient pas

Mais voilà

:

tout le

Et alors, on ceci

:

ceux des

est

monde

la

première.

n'a pas ce choix.

bien obligé de se demander

hommes

qui ne se sont engagés

que par misère absolue, par incapacité de


152 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE trouver un autre travail quelconque, ceux qui étaient réellement des épaves de l'organisation

économique nus,

si la

assistés?

que

seraient-ils

deve-

les avait recueillis?

— Des

actuelle,

Légion ne

Des mendiants? Des délinquants?

Mettons que, pour ces malheureux,

Légion

la

soit

une sorte d'œuvre d'assistance par

vail,

certainement moins pénible que d'autres,

et

le tra-

qui offre des chances d'avenir très appré-

ciables, allant jusqu'au grade d'officier et à la

décoration, avec

un minimum assuré par

pension de retraite de simple légionnaire l'on sera forcé

de convenir que

titution fort utile. d'ailleurs pas

Ce côté de

échappé

c'est là

la

une

;

la et

ins-

question n'a

à certains auteurs alle-

mands, comme M. Roloffet divers hommes politiques cités phis haut.


XV SUR LES DESERTEURS, EN GENERAL

Quant aux déserteurs, leur cas simple qu'on paraît

si

n'est

pas

mérite une

le croire, et

étude détaillée.

On méprise très justement, en tous pays, ies hommes qui ont abandonné leur drapeau par lâcheté, par l'appât du

gain

ou

d'un

grade supérieur, par mépris de leur devoir civique, bref ceux qu'un sentiment vil et ina-

vouable a poussés à combattre leur patrie leurs anciens

Mais

les

lâches et les sans -patrie ne quittent

évidemment pas une armée pour ler

et

compagnons d'armes.

dans une autre,

et

aller s'enrô-

notamment dans une

troupe qui est constamment en campagne ou


154 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE sur

le

qui-vive

et d'autre part,

;

si cette

der-

nière assure à ses soldats une vie matérielle très convenable, elle

ne leur

d'or suffisant à attirer les

offre

pas un pont

hommes

capables

de trahir par esprit de lucre. Une des raisons

pour lesquelles aucune payée au

ment que

moment de

l'État français

au reproche

somme

d'argent n'est

l'engagement est précisé-

ne veut pas s'exposer

d'attirer les étrangers

titution d'une sorte de

prime à

Tout ce gibier de potence venir à la Légion. Et

si,

par

se garde

par aventure,

présente sous l'influence d'un excès tané de misère,

il

est très

la

cons-

la désertion.

donc de le

cas se

momen-

vraisemblable qu'un

homme

de ce genre ne tardera pas à tomber

sous

coup des punitions graves qui

le

mineront

la

déter-

rupture de son engagement, en

vertu des dispositions citées plus haut.

Mais tous

les déserteurs

ne méritent pas

la

réprobation qui s'attache à ceux que nous

venons de considérer. Bien au contraire, est qui, victimes

il

en

de circonstances extérieures,

ont pris, pour des motifs dignes de tout res-


SUR LES DÉSERTEURS, EN GÉNÉRAL pect,

155

une résolution toujours bien pénible,

puisqu'elle entraîne l'expatriation et la rupture

des liens de famille

et d'amitié,

sans compter

Tels sont Les

les difficultés matérielles.

hommes

à qui la fierté la plus légitime a rendu intolérables certaines molestations, ou qui, au

nom

d'une tradition toujours vivante dans leurs

cœurs, ne peuvent pas adopter

culte d'une

le

patrie qu'on prétend leur imposer.

Nous touchons

ici

à la considération qui est

réellement la cause profonde de

Allemands contre

la

l'hostilité

des

Légion. Cette dernière les

un élément de com-

gêne, parce qu'elle crée

paraison que Ton peut interpréter dans un sens défavorable à l'Allemagne tions, est

chaque Allemand qui

:

sauf excep-

sert à la

Légion

une protestation vivante contre certaines

institutions de son paj^s.

J'aurais voulu m'abstenir de parler de ces

choses, car cette partie de

mon étude m'expose

fort à être taxé d'hostilité systématique, sinon

de chauvinisme

mands:

agressif,

par beaucoup d'Alle-

et certes, ce n'est

pas dans cet esprit


156 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

que

j'écris.

Je prie donc ceux qui seront tentés

de penser ainsi, de faire

le petit effort

de

lire

avec patience un exposé qui

est

nécessaire

bonne compréhension de

cet

important

à la

sujet.


XVI LES VICTIMES DE MAUVAIS TRAITEMENTS

De même que

les

journaux allemands ne se

lassent pas de rapporter des histoires de supplices infligés à

des légionnaires, leurs con-

ïères français donnent

fréquemment des in-

formations du genre de la suivante, découpée

dans

le

Temps

:

Chalon-sur-Saône, 12 août 191

Un

Allemand,

neuf ans,

s'est

nommé

la

Richard Muller, âgé de dix-

présenté ce matin au recrutement de

Chalon-sur-Saône dans

afin d'y contracter

erté, dit-il, à la suite des

subis.

un engagement

Légion étrangère. Richard Muller

gagé à l'école des sous-officiers de

1

11

3.

était

Potsdam.

11

mauvais traitements

en-

a déqu'il

porte au bras droit une blessure qui lui a 4


158 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE été faite d'un coup de baïonnette. Ses poignets sont

meurtris par

les chaînes.

Les médecins militaires vont s'assurer qu'il peut servir dans la Légion.

Sans doute, chaque se présenté ainsi à

en disant

qu'un déserteur

fois

un bureau de recrutement,

qu'il a fui les

mauvais traitements

dont

il

faire,

dans ses déclarations,

victime,

était

il

faudrait la part

pouvoir

de lexa-,

gération et du désir de se rendre intéressant

même quand

il

traces de coups

fréquent

montre sur son corps et

de blessures

on ne peut savoir

des

ce qui

esl

elles

ne

si

proviennent pas de quelque rixe après boire et

il

est naturellement impossible

;

;

de contrôlei

des dires qui sont souvent suspects. Et san$

doute aussi, nos journaux sont enclins à accep ter

aveuglément ces autobiographies peut-êtr<

un peu truquées, à renchérir sur

elle,

à exa

gérer la brutalité régnant dans l'armée aile

mande. Mais

il

n'en est pas moins certain que

le;

poursuites pour mauvais traitements de supé

!


LES VICTIMES DE MAUVAIS TRAITEMENTS rieurs à soldats,

159

ou pour brimades sauvages

d'anciens à conscrits, sont en Allemagne d'une

fréquence inconnue partout ailleurs

si j'ai

bonne mémoire, on en a relevé plus de 250 au cours de l'année dernière soit dit

;

et ces

poursuites qui,

en passant, n'aboutissent jamais qu'à

des peines dérisoires de quelques jours d'arrêt, sont motivées, dans chaque cas particulier,

par une longue suite de brutalités. Or, isolés,

ou peu répétés, que

les

cas

l'autorité

ne juge

un

conseil

pas nécessaire de traduire devant

de guerre, sont évidemment beaucoup plus

nombreux d'où ;

le

l'on est

fondé à conclure que

maltraitement des soldats est bien un

trait

caractéristique de l'armée allemande. C'est une constatation qu'il est permis défaire

sans y mettre d'intention particulièrement désobligeante et hostile.

mœurs allemandes traits

Il

est certain

ont

que

les

conservé quelques

de rudesse dont les pangermains vont

jusqu'à faire honneur à leur nation,

et

contre

lesquels la protestation des esprits libéraux est

de jour en jour plus vive

et

plus puissante.

On


160 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE connaît, par exemple, la

duels d'étudiants, et

dont

coutume barbare des

les balafres

I

répugnantes

les juristes et les fonctionnaires les plus

paisibles tirent vanité, et

qui,

hors d'Aile-

magne, n'ont d'équivalent que sur

j

les visages

j

des Cafres. L'été dernier, on apprit avec éton-

I

nement, par des annonces de journaux, que

I

certains chirurgiens facilitent cet embellisse-

1

ment aux ger,

étudiants, sans douleur et sans dan-

en leur tailladant

la figure

après insensi-

bilisation et avec toute garantie d'asepsie. Or,

au milieu de nouvelle, les

de rire soulevé par cette

l'éclat

vieux Germains protestèrent,non

contre le maintien

dune

tradition aussi fâ-

cheuse, mais contre l'amollissement des mœurs et la

dégénérescence que dénotait

du nombre des duels!

hommes,

investis

Croit- on

la

réduction

que ces mêmes

d'un grade dans l'armée,

soient très enclins à respecter la personnalité

d'un conscrit, ou à la protéger contre les excès d'un est

subordonné

?

Pour eux,

un moyen d'éducation à

tiné à aguerrir, à

tremper les

la

brutalité

la Spartiate, des-

hommes

;

et c'est

J


LES VICTIMES DE MAUVAIS TRAITEMENTS

161

preuve de vaine sensiblerie, que de

faire

la

combattre. D'ailleurs, les punitionscorporelles ont-elles été supprimées

mandes? Et pourquoi bambins

et

les écoles alle-

se montrerait-on plus

d'hommes

sensible à l'égard vis de

dans

de

faits

que

vis-à-

fillettes ?

Cette tendance est bien

connue dans

les

pays

qui envoient des officiers faire des stages à l'étranger; en Suisse

notamment, des plaintes»

ont été formulées maintes fois à l'adresse des instructeurs

ayant accompli de

qui,

sem-

blables périodes en Allemagne, en étaient re-

venus trop prussianisés, non seulement dans leur allure extérieure, mais dans leur manière d'être vis-à-vis

quand vant

il

de

la troupe.

Et

il

y a deux ans,

arriva, en plein Constantinople, de-

la porte

du ministère de

la guerre,

qu'un

lieutenant-colonel de la mission allemande,

trouvant qu'une sentinelle ne l'avait pas salué correctement, lui rectifia la position avec sa

cravache, et fut tué raided'un coup de baïonnette, cette riposte officiers

tragique n'étonna que les

allemands. 14.


162 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Eh

bien,

il

n'est

pas nécessaire d'aller jus-

qu'en Turquie pour trouver des hommes à qui le

sentiment de leur dignité rend ces procédés

insupportables. Même pour leurs compatriotes,

mieux vaut

qu'ils désertent,

ou de tuer leurs chefs;

et

que de

en tout cas, on ne

peut demander aux étrangers de rer

comme

se suicider

les

considé-

des criminels.

Sans doute, on conçoit que leur conduite, ainsi

que

les réflexions qu'elle suggère, soient

désagréables aux Allemands; mais

que ceux-ci

s'en

est-il

juste

prennent à leurs voisins ?


XVII

LES ANNEXÉS

Encore plus brûlante

et

dangereuse à traiter

est la question des déserteurs Alsaciens-Lor-

rains.

On

a

vu plus haut que

ces derniers, soit 704

nombre déclaré de

non encore

naturalisés

300 naturalisés, contre 1.855 Allemands,

et

est

tion

au-dessus de la réalité dans une proporimpossible à

déterminer. Mais, quel-

que réduction qu'on il

le

veuille

lui faire subir,

est très élevé relativement à celui des Alle-

mands, puisque y compris

les

la

population du pays annexé,

immigrés, ne constitue que

les

3 0/0 de celle de l'Empire.

Le nombre des engagements d'Alsaciens-


164 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Lorrains a d'ailleurs sensiblement décru

:

il

se

maintient, depuis quelques années, entre 200 et 300 il

par an, alors

qu'il était plus

que double

y a vingt ans. Entre autres causes de

réduction,

il

cette

faut noter que, de 1871 à 1880,

on

n'accepta pas d'autres engagements que les leurs et ceux des Suisses, et aussi que la loi

du

26 juin 1889, admettant, pour certaines catégories d'individus, l'acquisition de la qualité

de Français par simple déclaration, permet aujourd'hui

à

beaucoup d'Alsaciens Lorrains

d'entrer directement

dans l'armée française

sans passer par la Légion étrangère.

Quoi

qu'il

en

soit, l'existence

de la Légion,

plus connue çn Allemagne que celle de la loi

de 1889 sur la naturalisation, met en évidence

un

fait,

que j'énoncerai

le

plus discrètement'

possible en disant que les Alsaciens-Lorrains

paraissent servir plus volontiers dans l'armée française que dans l'allemande.

Nous sommes conduits par

à quelques

considérations que je dois indiquer, non pour

donner à ce

travail

une allure politique

qu'il


LES ANNEXÉS

165

importe, au contraire, d'éviter, mais simple-

ment pour exposer dont

il

les

causes d'une situation

faut bien constater la réalité.

En dehors

des milieux « pangermanistes

»,

on ne trouve plus guère personne pour contester

que l'annexion de

la plus

été

l'

Alsace-Lorraine ait

grande faute commise en poli-

tique internationale depuis les conquêtes de

Napoléon. Or, cette faute a été aggravée encore,

si

possible, par la suite ininterrompue de mala-

dresses qui a sévi depuis lors sur ce pays. Et

parmi

les fautes

secondaires qui vinrent ainsi

renchérir sur la

principale,

une des

plus

graves consista dans l'imposition prématurée

du

service militaire à la population annexée.

Lorsque, en 1890, Helgoland fut cédée à l'Allemagne, la Grande-Bretagne ne traitait pas, la

comme nous

gorge

:

elle

en 1871, avec

le

couteau sur

concluait librement une tran-

saction équitable, et put faire admettre que les

habitants de

ment de maître,

l'île,

nés avant son change-

seraient dispensés

du

service


166 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE militaire.

Ce dernier n'y fut donc appliqué

qu'en 1910, à

une génération nouvelle, qui

l'accepta d'autant plus naturellement, qu'au-

cun souvenir de guerre, de conquête

à

deuil ne se mêlait

ment de Dès

l'idée

et

de

de son change-

nationalité.

1893, je montrais, à la suite

du remar-

quable écrivain qui signait Jean Heimweh, «

A

comment on

aurait

pu gagner

les

annexés

».

propos de la dispense du service

mili-

pour une période de vingt ans,

je di-

taire

sais (1)

:

C'eût, été,

de

des habiletés.

la part des

En ne

veille, ni leurs fils,

Allemands,

forçant ni

à servir dans

les

les

la

vaincus de

nombre des options pour

proportion la

on eût évité l'émigration des jeunes gens, qui d'appauvrir le pays, de déchirer

la

rangs de leurs

vainqueurs, on eût diminué dans une considérable le

plus grande

les familles,

France

:

n'a cessé

de ravi-

ver toutes les plaies, de causer des mesures de rigueur, telles

(i)

que

la confiscation des biens des partants

V Alsace-Lorraine

;

bref,

devant V Europe, par Patiens, Paris,

OUendarff.

I


LES ANNEXÉS

on

aurait

ménagé

la

une génération de

167

transition, et, en renonçant à

soldats

malgré eux,

sécurité bien

médiocre pour l'Empire, on aurait vraisemblable-

ment

préparé, pour l'époque actuelle,

en grande

Mais ce sont

des idées que l'Allemagne

bismarckienne

On

une génération

partie allemande.

était

incapable de concevoir.

appliqua donc sans ménagement

la loi

de

recrutement. Les anciens soldats français dedes réservistes et des landwehriens

vinrent

allemands

compte

l'on

et

;

incorpora, sans

mesure, des jeunes gens parmi

uns

tenir

des souffrances représentées par cette

s'étaient

coup de

engagés avant

feu

!

faire le

contre l'envahisseur, d'autres le

drapeau trico-

avaient perdu quelque

de leur famille ou l'invasion

pour

l'âge

avaient eu leur père tué sous lore, et tous

lesquels les

souffert matériellement de

Et pour

voir supérieur,

le

membre

cela,

on invoquait un de-

patriotisme

:

comme

si

un

peuple pouvait, par ordre, changer de patrio-

tisme

A

comme on change

de linge.

ces considérations /morales s'ajoutaient


168

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

celles

de

l'intérêt

personnel dans ce qu'il a de

plus légitime. L'Alsacierï-Lorrain incorporé

dans l'armée allemande

sait

bien qu'il n'y peut

arriver à rien toujours dédaigné,sinon insulté, :

toujours suspect, écarté systématiquement des postes entraînant une certaine responsabilité personnelle, tels que l'humble emploi de télé-

graphiste militaire, chair à canon.

il

n'est

bon qu'à

Dans l'armée

quelque catégorie sociale

faire

de la

française, et à

qu'il appartienne,

il

obtiendra l'avancement correspondant à son instruction et à la qualité de ses services;

puis

ce sera la pension de retraite

ou une

situation civile, souvent les deux ensemble. Ces

choses-là sont de notoriété publique,

au delà des frontières qu'elles déterminent

;

il

n'est

même

pas étonnant

des vocations dans la

patrie de Kellermann, de Kléber, de Ney

et

de

Rapp. Ce

n'est

pas qu'on ne sente,

même

en Alsace-'

Lorraine, les inconvénients que présente pour le

pays l'exode continu de tant de ses jeunes

gens, choisis

parmi

les

meilleurs. Le journal


169

LES ANNEXÉS

numéro

Dur' s Elsass, en résumant, dans son

du 4 octobre

de Y Illustration du

1913, l'article

19 juillet,

l'accompagnait de ce commentaire,

auquel

attachait

il

l'insérer

dans

les

assez d'importance

deux langues

pour

:

Personne n'en voudra aux Allemands de chercher à empêcher leurs jeunes gens d'entrer à la Légion

étrangère, et nous autres Alsaciens, nous aussi, nous

ne pouvons que déconseiller à nos compatrioles sacrifier leurs forces à la

Légion

et d'en priver

d'aller

notre

pays qui en a tellement besoin.

Mais nous nous élevons contre menée^. l'agitation contre

la

la

manière dont

est

sommes

Légion. Nous

outrés des mensonges et des insanités colportés contre la

Légion étrangère...

Quoi

qu'il

en

soit,

on voit que, parmi

îommes quiontabandonné

le

drapeau de leur

)ay? d'origine pour venir servir à [il

existe

>A

les

me

annexés

(y

compris

Polonais), auxquels

injustice

criante,

Légion,

la

au moins deux catégories,

traités et les

les

les

les

mal-

Danois

on ne peut, sans

appliquer

dans son 15


170

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

sens infamant la qualification de déserteurs.

Quant à

la

situation

hommes, quant au

juridique

de

ces

droit de la France à ac-

cepter leurs services, nous y reviendrons plus loin.


XVIII

LES DÉLINQUANTS DE DROIT COMMUN

LEUR RELÈVEMENT

Restent tions Ici,

les

hommes

coupables

d'infrac-

au droit commun. règlements

les

Français

et

les

ont institué, entre les

étrangers,

une différence de

traitement qui est sujette à controverse.

Pour

les

Français, en

livret militaire (ou, ce

effet, la

production du

qui revient au

même,

d'un état de services), ainsi que d'un extrait du casier sable.

ayant

judiciaire,

On

est

absolument indispen-

n'admet pas, en

encouru

effet, les

hommes

des condamnations qui en-

raînent l'exclusion de l'armée (voir re XII)

;

mais on accepte ceux dont

chapile

passé


172 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE comporterait, en cas d'appel au service, l'envoi

aux bataillons

d'infanterie légère d'Afrique

{vulgo, zéphirs).

On

ces derniers,

dont

il

existe

admet, en

une chance de relèvement

la Société a le devoir

de tenir compte

hommes du

aussi bien, d'ailleurs, les gent, désignés

que, chez

effet,

;

contin-

pour ces bataillons spéciaux,

peuvent-ils être envoyés dans d'autres corps,

après un séjour d'épreuve d'une année.

Pour

les étrangers,

mence bien par

au contraire, on com-

prescrire qu'ils doivent pro-

duire, outre leur acte de naissance

pièce vie et

équivalente, un mœurs; mais on

l'absence de ces pièces,

certificat

à tout

il

sera passé outre à dit,

on renonce, en

contrôle sur leur passé, et l'on

s'expose à enrôler, parmi des

hommes

tibles de relèvement, des criminels

tablement

il

de bonne

ajoute aussitôt qu'en

l'engagement. Autrement fait,

ou une

n'y a rien de

bon

suscep-

dont véri-

à espérer.

Cette disposition est difficile à justifier

Ton peut

même

soutenir que,

si

une

;

et

distinc-

tion devait être établie entre engagés français


DÉLINQUANTS ET RELÈVEMENT

173

mieux dans

et

étrangers, elle se comprendrait

le

sens d'une exigence plus sévère à l'égard des

léments venus du dehors, qui sont plus suà caution, puisqu'il est moins facile ou

jets

nême impossible de ancesde leur

s'informer des circons-

faute.

D'autre part, bien des Français, qui ne seaient pas acceptés en raison de leurs antécéents, profitent de la facilité plus

aisse

aux étrangers.

Il

grande qu'on

leur suffit de se décla-

er étrangers — c'est-à-dire Belges ou Suisses,

uand

ils

ne connaissent que leur langue made se donner un état

ernelle, et îaire,

Parfois

il

tyant servi ;rade

civil

imagi-

pour qu'on ne leur demande rien de plus. arrive qu'un de

honorablement

ou une

demande à

Français servant au

dors on

lui

même

hommes, mérité un

distinction, fasse connaître sa

éritable identité et

omme

et

ces

inflige,

pour

la

être

titre

inscrit

étranger,

forme, soixante

ours de prison pour fausse déclaration d'idenité

;

on ne

stdit.

les lui fait

pas accomplir,

et tout

,

15.


174 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Sans doute, ce sont

là des subterfuges

qu'on

peut juger peu compatibles avec la nécessaire rigidité des lois et des règlements militaires.

Mais pourtant, voici deux cas où Ton peut trouver ample matière

montrent combien

il

à

réflexion,

est difficile

de porter un

jugement absolu sur des matières aussi cates.

remarquable coïncidence,

même jour,

au moment

ils

même

j'écris.

1913, contenait

dépêche suivante de Montpellier, du 7 Le

conseil de guerre

pellier, vient

sursis

du 16

de réduire à

e

un mois de

prison

gée au contumax Cherfils, originaire de Cherfils, étant sergent-fourrier

faux

;

commit une

puis

il

série

déserta et

Drôme.

réfugia en Suisse.

Il

comme manœuvre.

ancien légionnaire suisse, à qui la

il

j

d'infanterie et

se

de s'engager à

au 96

la e

avec

forcés infli-

de détournements

vécut six mois, gagnant sa vie

lui conseilla

:

corps, siégeant à Mont-

une peine de vingt ans de travaux

à Béziers,

une

se sont produits

Le Journal, du 8 novembre la

déli-

Leurs précédents se comptent par cen-

taines, et je les choisis ici parce que, par

le

qui

et

confiait ses pei

Légion étrangère

Ui

|


DÉLINQUANTS ET RELÈVEMENT un engagement de cinq ans au

contracta

sous

le

nom

2* étranger,

de Marcel Henri, sujet suisse.

A. l'audience, le défenseur,

donne

175

M

e

Ricateau, de Béziers,

lecture des certificats délivrés à Cherfils par

ses chefs à la

l'accusé,

M.

Légion.

On entend

l'ancien capitaine de

Berlandier, actuellement comrnandant

au i43 e d'infanterie,

et

M.

le

docteur Magnan, pré-

sident du conseil général de la

Drôme, qui donnent

de bons renseignements sur Cherfils.

Des documents

un

l'accusé fut

des dépositions

et

parfait

honnête

homme

que

résulte

il

et

un

excel-

lent soldat jusqu'au jour

où une influence féminine

l'amena à commettre

faute

jugé. Le conseil,

la

ému, rendit

pour laquelle le verdict

il

est

d'indulgence

que nous relatons plus haut.

D'autre part, on Devant

comparu lité

dans

le

d'assises des

hier le légionnaire Jean

Temps du 9

On

sait

article

par lequel

comme

le

que

est il

le

Léman

Temps, journal du

donc du 8 novembre,

commence, indique que

précédent, du 7.

(1)

:

Basses-Pyrénées, a

Joseph-Mathieu Duron, — arrêté

(i)

Cet

Cour

la

lit

le

le

en réa-

mois dernier

soir,

et le

est antidaté.

mot

« hier »,

jugement

est,


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

176 à

Pau, où

s'était

il

rendu pour

faire liquider sa

pen-

sion de retraite militaire.

Originaire des Landes,

Duron

avait été

condamné

par contumace, en 1896, peu après sa sortie d'un ré-

giment d'infanterie coloniale où engagement, à

pour faux

cés,

un

avait contracté

il

de vingt ans de travaux for-

la peine

usage de faux, commis au préjudice

et

de M. Ollé-Laprune, banquier à Pau. C'est alors que sous le

nom

de Jean Léman,

il

s'engagea à la Légion

étrangère où, pendant sept années, soldat d'élite, se distinguant qu'il fut décoré sur

le

si

il

se

comporta en

bien par sa bravoure,

champ de

bataille et

nommé

caporal-fourrier quelques mois avant sa libération.

Cependant,

le

mois dernier, l'heure de

ayant sonné pour

lui, le

liquider sa pension.

mais

là,

moyen

Il

se

la

retraite

légionnaire songea à faire rendit à

Pau

à

cette fin

;

inquiet de son passé, ne sachant par quel

sortir des difficultés qui

s'offraient à lui,

il

eut l'idée d'aller prendre conseil du procureur de la

République

et

de lui confier son secret,

que ce magistrat

se vit

dans

la

et c'est ainsi

pénible nécessité de

le

faire arrêter.

Dans une émouvante

plaidoirie,

barreau de Pau, a rappelé tout et a

notamment donné

lecture

le passé

Favarel,

du

du légionnaire

du télégramme

sui-


DÉLINQUANTS ET RELÈVEMENT

.

vant qu'il venait de recevoir sous

les

ordres duquel

Mon

il

aller

lieutenant

avait servi

;

déposer en

les"

journaux, je regrette de ne

Cependant je

ta faveur.

tain de ton acquittement. Bravo pour notre bienfaitrice

!

Moundy,

brave Léman,

Renseigné trop tard par pouvoir

du

171

suis cer^

vieille

Légion

Toutes mes sympathies.

Après une courte délibération, l'ancien légionnaire a été acquitté

aux applaudissements d'un nombreux

auditoire.

hommes que

Voilà deux S'ils

la

Légion a sauvés.

avaient été arrêtés aussitôt leur crime

commis, ou

qu'ils

se fussent constitués pri-

sonniers, leur peine qui, en raison de leurétat

de contumace, a été portée automatiquement

au maximum, aurait

très

moindre

même pu

;

elle aurait

probablement

deux ans de prison pour

un an pour

le

second,

si

le

été

se réduire à

premier, et à

on leur avait trouvé

des circonstances atténuantes. Mais qu'on les ait

envoyés aux travaux forcés ou en prison,

ils

y auraient achevé de

se

corrompre

définiti-


178 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

vement

;

même

en admettant, contre toute

vraisemblance, qu'ils leur était impossible,

s'y soient

une

minée, de trouver un emploi

dans

le

cadre de la vie sociale

rémédiablement perdus.

amendés,

il

fois leur peine ter-

Au

:

et

de rentrer

ils

étaient ir-

lieu de cela, ils

ont pu entrer à la Légion en se faisant passer

pour étrangers,

et s'y sont

manière, que

Conseil de guerre et la Cour

le

conduits de

d'assises ont également considéré

faute était rachetée.

La

telle

que leur

en vigueur

législation

ne leur a donc pas seulement ouvert la voie du salut qui,

;

elle a

au

également bénéficié à

deux criminels endurcis, pos-

lieu de

sède aujourd'hui en eux des lités, et

la société

membres

réhabi-

certainement décidés à poursuivre dé-

sormais une existence honnête

et utile.

Qu'au-

rait-on gagné à les écraser sans recours sous toute la.rigueur

du Code pénal ?

Et voici encore qu'un

moment

le

de

cas d'un jeune capitaine

folie,

une vilaine

jeu, a obligé de quitter l'armée.

comme étranger,

histoire de Il

s'engage

devient un bon sous-officier,


DÉLINQUANTS ET RELÈVEMENT et, retraité,

achève sa vie paisiblement

l'obscurité,

comme

mieux

l'acculer

179 et

dans

colon en Algérie. Valait-il

au suicide?

Mais, d'autre part, convient-il que la fournisse

ainsi

elle-même

le

moyen de

loi

la

tourner? Convient-il que, permettant à l'un ce qu'elle interdit à l'autre, elle

même

encourage

à la fraude, fût-ce dans une

tention?

meure

Ou

elle-

bonne

in-

bien vaul-il mieux qu'elle de-

rigide et implacable, et qu'elle réduise

au désespoir

et

à de nouveaux crimes ceux

qu'une certaine bienveillance permettrait de

sauver? C'est

on peut soutenir égale

bonne

tions,

un problème au pour

le

foi et

dans

et le

les

sujet

duquel

contre avec une

meilleures inten-

mais qui ne fournit vraiment aucun

prétexte de déclarer, entre autres aménités,

que tion

la ;

mise au ban de

France

s'est

loin de

!à, le

la civilisa-

spectateur impartial n'y

peut trouver qu'un motif de sympathie.

Car un

fait

prime

la

considération du passé

regrettable d'une partie des légionnaires. C'est

que des hommes

qui, ayant

commis unefaute,


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

1$0

sont disposés à s'engager pour servir loyale-

ment, en se soumettant à

aux fatigues

et

la

rude discipline,

aux dangers que comporte

service à la Légion étrangère, ces

le

hommes

sont repentants et profondément désireux de se réhabiliter. Ils ont conservé le sentiment de

l'honneur

cièrement

:

et c'est là ce

qui les distingue fon-

délinquants

des

apache n'aurait guère

l'idée

semblable engagement. Et il

est bientôt liquidé

par

ordinaires.

Un

de contracter un

si le

cas se présente,

les

compagnies de

discipline et le conseil de guerre,

ou au moins

parla résiliation de l'engagement, ou encore par

la désertion.

C'est ici la

que nous trouvons

grandeur morale de

la

le rôle

Légion

occasion offerte à des hommes,

:

elle est

velle,

une

qui ont pu

commettre un péché de jeunesse ou faute grave, de

éminent,

même une

commencer une existence nou-

de faire leurs preuves de courage, de dé-

vouement, une occasion de mériter à nouveau l'estime publique et de retrouver la paix de

leur conscience. Restant dans la mêlée sociale,


DÉLINQUANTS ET RELÈVEMENT seraient,

Is

même

la justice,

I

>assé

;

devenus

lible, ils

En

sous

le

serviteurs

les

dans ce

poids de leur

anonymes du de plus pé-

qu'il a

rachètent leur faute, et reconquièrent

marcher

droit de

e

après avoir payé leur dette

écrasés

levoir militaire

181

vérité, la

la tête haute.

Légion joue

ici

un

rôle qui fait

onger à celui de certains ordres religieux.

non seulement à des coupables, mais

Lrrive

mssi à des >ar

hommes

dont

le

cœur a

été

broyé

quelque grande douleur intime, de vouloir

e réfugier

dans un

asile inviolable, où

demandera compte de leur

îe

leur

ls

pourront retrouver

>nt la foi, et ils

contemplation

le

personne

secret, et

entrent en religion, soit que la

et la prière leur offrent

soin d'activité qu'ils satisferont sions

repos moral. Les uns

une con-

;olation suffisante, soit qu'ils sentent

dans

un beles

mis-

ou dans des œuvres d'assistance. D'au-

res trouvent le salut à la i

I

juste titre qu'on a

Légion

;

et c'est

donc

comparé cette dernière aux

>rdres militants de jadis, templiers, chevaliers le

Malte, chevaliers teutoniques. 16


182 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Il

ya

une somme de noblesse, une gran-

deur, qu'il est déplorable de voir méconnaître

en Allemagne, mais qui, depuis plus de quatrevingts ans, a grandement contribué à établir,

dans notre pays, Légion.

la solide popularité

de

la


XIX

.ÉSUMÉ

ANTÉCÉDENTS DES LÉGIONNAIRES

DES

En résumé, classer comme

légionnaires

les il

suit,

peuvent se

au point de vue de

leur conduite passée (bien entendu, abstraction faite des gradés envoyés à la Légion

y servir au

pour

titre français).

Les Français engagés au

ment environ 45

0/0

du

titré

étranger for-

total et se subdivisent

en quatre catégories.

D'abord un certain nombre d'anciens soldats

mxquels on

ement leur casier judiciaire 1s

non

seu-

est vierge,

mais

n'a rien à reprocher

ont obtenu à leur corps

le

:

certificat

de

Donne conduite.

Parmi eux,

les uns,

désireux de suivre la


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

184

carrière militaire, viennent à la Légion, au

étranger, dans

titre

l'espoir d'y trouver

avancement plus rapide qu'en

un

se rengageant à j

leur corps.

D'autres n'ont eu que plus tard l'idée de

reprendre du

service, à la

éprouvés dans

la vie civile,

suite de revers

mais

ils

passé Tâge de 32 ans, à partir duquel

ont dé-f]

la

Légion

seule leur est ouverte.

La troisième

catégorie se

compose d'hommell

qui ont subi, pendant leur temps de service, trop de punitions de salle de police ou de poi-

son pour avoir pu obtenir

bonne conduite, mis à

et

se rengager.

au régiment

les «

péché que contre

le

certificat

d&j

qui n'ont donc pas été ad-1

Ce sont ceux qu'on appellaJ

mauvaises

têtes »

la discipline, et

;

ils

n'oni-

souvent

paflij

des écarts de conduite plutôt que faute d'esll

homme, par exemple, qu|j| sauter le mur » en garnison!

prit militaire. Tel

aimait trop à sera

un

«

excellent soldat

I

aux colonies.

Enfin, nous trouvons des

hommes

qui ont

des antécédents judiciaires n'entraînant pas


ANTÉCÉDENTS DES LÉGIONNAIRES mais

l'exclusion de l'armée, d'être

les

185

empêchant

rengagés dans d'autres corps. Ceux-là,

on ne saurait trop

le répéter,

montrent, par

le

seul fait de leur

engagement à la Légion,

ont conservé

sentiment de l'honneur, qu'ils

le

qu'ils

sont susceptibles de relèvement.

Quant aux

comme

étrangers,

tels, ils

ou hommes

inscrits

comprennent:

D'abord des anciens soldats, des insoumis et

des déserteurs étrangers, sans antécédents

ou bien n'ayant commis que des

judiciaires,

fautes légères

muler leur

;

ils

n'ont

aucun motif de

possèdent donc généra-

identité, et

lement leurs papiers en règle

En second fâcheux,

et

lieu,

des

;

hommes au

passé plus

qui se présentent donc sous un

Ȏtat civil de fantaisie, et sans et

dissi-

parmi ces derniers

aucuns papiers

se trouvent des

physiquement ou moralement

tarés,

;

Français

ou cou-

pables de fautes graves entraînant l'exclusion

de l'armée,

et

qui ne peuvent donc s'engager

qu'en se faisant passer pour étrangers. Cette dernière catégorie représente évidem16.


186 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

ment un élément douteux, qui tenu sévèrement.

veillé et

A

doit être sur-

l'épreuve,

on y

trouve incontestablement beaucoup de spé-

cimens de ce que

les officiers

mauvais légionnaire

»

:

appellent

«

le

malfaiteurs endurcis,

ou bien hommes dégénérés pour cause coolisme ou de syphilis. Ces dernières

d'altares,

souvent héréditaires, peuvent avoir échappé

à l'examen médical en France,

et

ne se révéler

qu'au second examen qu'ils subissent en arri-

vant en Afrique, ou qu'ils

même

sont au service.

nement à sirables

»

la ;

Il

Légion des

et aussi

plus tard, une fois entre donc certai-

hommes

bien a-t-on

non dé-

«

reconnu, à

cause d'eux, la nécessité de pouvoir ler

annu-

éventuellement l'engagement d'un légion-

naire.

Mais qui,

la très forte

douteux à leur

proportion des

hommes

arrivée, servent

de cinq

à quinze ans de manière absolument satisfaisante, et obtiennent

des

distinctions

même

des grades et

honorifiques, prouve

bien

qu'on aurait tort de désespérer d'eux a priori


ANTÉCÉDENTS DES LÉGIONNAIRES et de les repousser

que

dans l'abîme

;

187

c'est

ce

font les pays qui ferment rigoureusement

leurs frontières vent, sur

aux immigrants qui

une simple appréciation de

qualifiés de

non

se trou-

police,

désirables, et cette ligne de

conduite nous paraît bien moins humaine.


XX CE QUE VALENT CES HOMMES

D'après tout ce qu'on vient de voir,

semblage d'hommes qui constitue

la

l'as-

Légion

est d'une variété réellement prodigieuse.

En

ce qui

concerne

l'âge,

d'abord,

on

trouve des soldats depuis 18 ans, âge légal mi

nimum

même

(ou

moins, dans

le

cas d'étran-

gers engagés sans papiers), jusqu'à 55 ans, â£

extrême de

la retraite

pour un légionnaire en

gagé à 40 ans. Puis, toutes les nations, toutes les profes sions, tous les milieux sociaux, tous les anté

cédents imaginables.

Les livres

et articles

abondent en

publiés sur la Légion

détails et en anecdotes pittc


CE QUE VALENT CES HOMMES resques

sur

d'hommes

et

mélange

extraordinaire

cet

189

sur l'àme collective, façonnée par

tant d'épreuves et de traditions

dans laquelle viennent

se

glorieuses,

fondre leurs per-

sonnalités.

Le général Bruneau, notamment, sacré de belles pages

En

colonne (1)

J'ai

eu dans

commandé

Mon

con-

lui a

émues dans son

livre,

:

ma

un honneur suprême

vie

un régiment de

la

Légion,

le 2

e

:

j'ai

étranger.

éternel regret sera de n'avoir pas eu l'occasion

de conduire au feu cette troupe incomparable dont

nom

évoque

militaire

le

à juste titre le,souvenir de

plus

puissant oui

ait

le

l'organisme

jamais existé, la

lésion romaine. Attirés par la prestigieuse

unique Suisses,

au

monde,

renommée de

Alsaciens-Lorrains,

Allemands, Hongrois, Slaves,

gnols, Turcs

paquebot

et

même, sont

ce

corps

Belges,

Italiens,

Espa-

arrivent par centaines à chaque

immédiatement

dirigés

sur

ces

usines à soldats qui sont les dépôts de Sidi-bel-Abbès et

de Saïda.Là en quelques semaines ou en quelques (>} Paris,

Calmann-Iévy.


190 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE mais, suivant l'origine ou

la

dureté du métal

hu-

main, tous ces éléments hétérogènes, jetés dans l'ardent foyer de cire, et

faire des héros

comme

de corps, ont fondu

l'esprit

sont définitivement

Ôoulés dans le

moule

à

!

Princes, ducs, marquis, comtes ou vicomtes, géné-

raux

et officiers

de tous grades

et

de tous pays, sol-

dats de toutes les armes et de toutes les armées magistrats, prêtres, financiers,

de

loi,

diplomates,

;

hommes

fonctionnaires de toutes sortes; braves gens

qui veulent simplement « voir du pays niques, désœuvrés

l'honneur, veulent

tous

;

le

ceux

neurasthé-

»,

qui,

ayant perdu

reconquérir, et tous ceux qui ont

préféré se faire soldats plutôt que de se brûler la cervelle

:

tous ceux que dégoûte notre civilisation veule

et décadente, et tous ceux qui sont obligés

de

la fuir;

tous ceux qui crèvent de faim, et tous ceux qui sont rassasiés

de voluptés

m'entendez bien, stoïque,

loyal,

;

tous, sans exception, tous, vous

sont

dévoué,

de l'homme de guerre,

Ce qu'on

mués en patient,

cet

être

tenace,

brave,

prototype

le légionnaire.

appelle en France

le

grand public ne

soupçonne pas l'incroyable diversité d'origine, d'éducation, de situation sociale de ces

hommes. Par

suite


CE QUE VALENT CES HOMMES

191

de circonstances exceptionnelles on apprend, un jour, le

mort à

de Géryville, est bel

l'hôpital

cousin de l'empereur d'Allemagne. lern «

est

Mu lier,

légionnaire de 2 e classe

par exemple, que

Un

bien

et

le

Hohenzol-

!

Quand ce

venu

sera fini », dit-il

sur son

le voir

de regarder sous

mon

lit

à son capitaine, qui

d'agonie, « je vous prie

traversin, vous y trouverez

portefeuille et des papiers contenant

sonnalité

paix

Et

;

mais,

d'ici là,

un

ma véritable per-

permettez-moi de mourir en

».

cet évêque,

que

je

trouvai en faction devant le

quartier-général de la division d'Oran, aux grandes

manœuvres du 19 e

Ce

prélat,

corps, en 1894!

devenu

« le

meilleur soldat de la Légion

plus beau

un ancien évêque de Corinthe. parlé de lui, le général

guement

von

l'histoire

X..., qui,

et

le

Et, après avoir

Bruneau rapporte lon-

d'un certain comte Otto

après avoir vécu sous

de Justus Perth, de Dhûrmer,

et

», était, paraît-il,

s'était

le

engagé sous

nom celui

conserva jalousement son

incognito de légionnaire malgré la nouvelle


192 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

devenu

qu'il était

l'héritier

12 millions de couronnes

Le lecteur

un

!

saura gré de reproduire

que M. Albert de

article

ancien

me

d'une fortune de

officier à la

Légion, a publié dans

Journal du 28 octobre 1913, sous

Chair à Canon C'est ainsi

que

ici

Pouvourville, le

le titre

de

surnommés eux-mêmes

les

:

se sont

légionnaires des deux régiments étrangers. Et, pour

connaître ce qu'ils font, ce qu'ils disent,

pas de

lire

beaucoup de

jours à Saïda ou à Sidi-Bel-Abbès à la Légion, y avoir obéi

mandé comme

officier.

il

ne

suffît

ou de passer quinze

livres

;

il

comme soldat,

faut avoir été

y avoir

com-

Mais, pour connaître ce qu'ils

pensent, cela n'a encore été donné à personne, et cela paraît

proprement impossible. De l'incroyable

amalgame que présente que

les résultats

Dans

ce creuset,

la

Légion, nul ne peut savoir

du mélange. où sont

Ils

sont magnifiques.

précipités les produits les

plus divers et étranges, la flamme héroïque, qui tou-

jours l'échauffé, pousse à

la surface et rejette

hors les scories honteuses et le

moindre

alliage,

ne

laisse

au de-

subsister, sans

que l'indestructible métal des plus

pures vertus militaires.


CE QUE VALENT CES HOMMES Mais quelle énergie, quel

commander dans

tact,

193

quel doigté pour

où prédomine, avec TA1-

ce milieu

sacien-Lorrain jeune et furtif, l'Allemand insociable et

secret,

et

même

hommes, doués

des

pour y vivre qualités

les

Entre tous ces

!

plus

vaillantes et

aussi des vices les plus puissants, qui viennent à la

Légion pour

se faire, sous

l'armature d'une discipline

extraordinaire, à la fois de rigueur et de générosité,

une

du

honorable,

existence

mort,

il

mieux,

ou,

une franc-maçonnerie de

est

silence qui conduit

aux

une

digne

la discrétion et

actes les plus stupéfiants

en apparence.

Un

exemple

A

:

Vietri (Tonkin), en 1886,

un

ca-

poral de légionnaires tient le service topographique aussi bien

qu'un polytechnicien.

C'est

un Allemand,

qui a porté l'uniforme des hussards de Brunswick et a été officier d'ordonnance

>uverneur de

Metz.

d'Egler et on ne

dans un qui

lot

Il

sait

du général de Leszczynski, est

sous le

rien de son passé.

faux

Un

de recrues, arrive un soi-disant

sait aussi la

nom jour, Bel<?e,

topographie et qu'on lui adjoint pour

manier l'alidade

et l'éclimètre.

Les deux

hommes

se

regardent

et

du

même

La recrue

est

un

lieutenant français, de l'état-major

coup d'œil

se reconnaissent..

17


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

194 de

la division

qui

de

Nancy,

fer, à

deux

les

officiers,

connus, diplomatiquement, sur

se sont

franco-allemande, dans

tière

et

la

fron-

des réceptions,

l'éclat

des dîners et des ambassades, se retrouvent, au fond

de

bourgeron anonyme de

l'Asie, sous le

Ils se

serrent la

main pour

se

marquer

la

Légion.

qu'ils se re-

connaissent.

Mais

ne parlent pas du passé

ils

jamais, pas

même

au

lit

ils

;

n'en parleront

de mort de l'Allemand, qui

trépasse de la fièvre des bois l'an d'après, à Bakhé.

Cette rencontre

tragique, ce

mutisme

tragique encore, toute la Légion est

là.

entêté plus

Et ce malheu-

reux portait un des plus beaux noms de l'aristocratie militaire prussienne. je

ne

On ne

le

connaîtra jamais

:

car

l'écrirai pas, et suis seul à le savoir.

Les Allemands sont en nombre considérable à

Ce

Légion. Pourquoi y sont-ils venus

?

moi

le

à le dire, et d'ailleurs

jamais.

On

leur plaît

:

on ne

ne leur demande rien ils

:

n'est pas à

leur

ils

disent ce qui

;

il

C'est cet oubli total, c'est ce qu'ils

a plus

n'y a que de la chair à ca-

non, numérotée. Et qu'on ne dise pas que

mort vivante,

demande

se taisent, s'ils veulent. Il n'y

d'individus à la Légion

la

c'est cruel.

voile épais, c'est

cette

sont tous venus chercher à

la


CE QUE VALENT CES HOMMES Légion.

Ils l'y

noue pas

;

et la

mort elle-même ne dé-

cordons du masque.

les

un ordonnance,

J'y eus

un

trouvent

195

singulier ordonnance

;

à Sontay, en 1890. C'était il

ne savait rien du tout de

son métier, sauf monter à cheval;

et,

tout en ou-

bliant de cirer les bottes et d'astiquer les cuirs,

un

ragouinait c'était

irlandais

une

avec

poussière sur

il

ba-

imperturbable. Fort poli,

courtoisie exquise qu'il laissait la

mes tuniques

et sur

matin, au lieu d'entrer dans

ma

mes parquets. «

cainha

»,

Un va

il

chez l'adjudant major avec une lettre chargée que

vaguemestre vient de lui remettre. Quand il

me

rencontre,

beau salut

spencer rouge-;

il

officiers. C'était

glaise,

Le

civil.

sans

et,

soir,

me

parler,

pincé dans

dînait à côté de

un

il

il

me

en

le

sort,

fait

un

un magnifique

moi au mess des

cadet d'une grande maison an-

qui avait disparu de l'armée des Indes pour

une dette de jeu impayée. Son 'instant de

repartait

mourir

pour

;

et,

la lutte,

frère aîné venait à

toutes créances éteintes, capitaine,

il

millionnaire, et

jbaronnet.

La

caractéristique de l'esprit de cette troupe,

le

meilleur et le pire, sans s'étonner, se coudoient, est

'extrême rigueur de la discipline et l'extrême frater-


196

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

nité dont sont empreintes les relations entre les chefs et les soldats.

Les anecdotes typiques y

foisonnent.

Je néglige ce coadjuteur de l'évêque de Cracovie, le plus bel ivrogne des deux régiments, qui ne retrou-

que pour

vait son sang-froid pital, les prières des

dire, près

mourants

amiral français, qui, forte

d'un

lit

d'hô-

d'un

illustre

tête, passait sa vie

en pri-

;

et ce

fils

son, et qui, titulaire de la médaille militaire, l'accrochait à la porte de son cachot, en dehors n'était pas punie, elle

de faction à lui porter sa ronde, tpire

il

!)

les

armes quand, au cours de !

Mais je veux dire

les plaidoiries.

au camp de Phuxa, en 1891, par un des

plus terribles étés

turellement,

et,

;

il

buvait ferme

qui pis

est,

Un

I

rentre à midi

I

l'absinthe coloniale. il

au camp, perdu, sans casque. Insolation delirium iremens;

il

accès de

I

casse tout, rosse son caporal, et

I

pousse des hurlements de bête fauve. Notons

ici,

l'armée française,

d'honneur

pour le

1

l'absinthe, na-.'l

:

jour, après les libations coutumières,

(1)

l'hisi

vaut mieux,

Poméranien, qui

pour l'honneur du corps, que toutes Il était

elle

et contraignait la sentinelle

passait devant (i)

d'un humble

(car

le lecteur

salut

est

Au

étranger,

:

bruit, son que,

dans

à l'étoile de la Légion

ainsi qu'à la Médaille militaire.

I

|

I


CE QUE VALENT CES HOMMES

197

lieutenant de section accourt, le punit, veut l'arrêter.

L'énergumène saute sur son portant sur son

revolver, et tire à bout

Bien entendu,

officier.

mais, dégrisé subitement au fracas de il

lâche ce cri

ne m'as jamais frappé

l'arme contre lui-même

détourne

le

la

manque;

détonation,

Brute (Dummkopf!) que je suis

«

:

faire ça, à toi qui

le

il

canon

le

;

et

;

il

tire

coup part,

;

!

a

Et

il

Te

!

tourne

l'officier s'élance,

la balle se

perd dans

la toiture.

Ah «

Ce

!

Tu ne

que

cri,

!

!

oreilles,

entendu

:

quelle louange de

»

Et pourtant, avoir tenté de tuer son supérieur,

c'est le conseil

de guerre,

descend à Hanoï; spéciale, tiré.

toi

prussien à son nouveau chef fran-

l'ancien troupier çais

de mes

j'ai,

m'as pas frappé,

Et

il

a

il

comme

mort

il

a

légionnaire, et les

hommes, que lePoméranien il

payait sa dette.

position chinoise, feu à bout

l'arme blanche,

trine le biscaïen

un

huit jours après,

Dans un assaut d'une et à

L'homme

passe au conseil, et par faveur

celui-ci est tellement

est acquitté. Or,

certaine.

défenseur... l'officier sur qui

juges sont tellement des

portant

la

il

recevait en pleine poi-

qu'un pirate destinait à son

chef.

Et

ce misérable, qui eût, dans n'importe quelle armée, été

fusillé

et

enterré

honteusement,

fut

inhumé, 17.


198 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE trompettes

sonnantes

et

étendards claquant, avec

l'appareil tragique qu'il méritait...

un témoignage allemand, paru dans un organe important du parti radiVoici maintenant

cal, la

revue munichoise Màrz, du 11 octo-

bre 1913, sous la signature

Arnault. Après avoir esquissé l'arrivée à

M.

de le

Heintz-

tableau de

Bel-Abbès d'un convoi de nouveaux

engagés, « venus chercher

un refuge dans un

milieu étranger qui leur refera une patrie l'auteur continue de la sorte Ici,

on ne contrôle pas

veaux venus. épaules,

tant

On

les

elles

L'âge varie entre

1

se

:

les déclarations

inscrit,

»,

des

nou-

en haussant parfois

les

montrent invraisemblables.

8 et 45 ans (i), mais ces nombres

ne sont pas exacts, puisqu'il y a des enfants de 16 ans, qui se font passer pour plus âgés.

Quant aux

professions,

on

inscrit des

employés,

des ouvriers, des cordonniers, des serruriers, des étudiants, des peintres,

qui

s'est

(i)

etc.

Mais souvent,

donné pour mécanicien

Erreur matérielle,

ans [Note du traducteur).

la

est

limite d'âge

tel

un

homme

ingénieur,

étant fixée à

4o


CE QUE VALENT CES HOMMES employé

cet

élève de l'Ecole Polytechnique.

être sans profession

défroqué, ou

tel

:

Beaucoup déclarent

un ancien

car

officier,

autre qui a pratiqué

seraient pas en état,

manuel, de prouver,

à

la

l'occasion,

un

prêtre

médecine, ne

avaient déclaré

s'ils

ancien

serrurier est

été notaire, ce

a

199

un métier

qu'ils

con-

le

naissent.

nom ? On

Le

prend

celui

le

avant qu'un

vous souvenir mieux de votre nom, » dit

arrive

Il

nommé Durand, et que homme réponde.

qu'on appelle

temps

se passe

qu'on veut.

quelque « Il

faut

sous-

le

officier.

Un

corps

composé d'éléments aussi hétérogènes

orme un ensemble

très

remarquable

;

en général, on

entend dire beaucoup de bien du légionnaire vante sa rare propreté.

Il

sait

tout faire. Tout.

3n besoin d'un peintre pour décorer

une

salle?

;

on

A-t-

Il

s'en

iprésente aussitôt un, qui ornera le plafond de belles

3eurs, d'un Lre r i

voici. Il

eut-on

les

combat sanglant. Faut-il un menuisier? fabriquera tout

un comique, un

un

mobilier d'officier,

tragédien,

instrumentistes, pour les fêtes

es a

sous la main.

un compositeur,

du régiment ? On


200 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

A

Bel-Abbès, où

la

population se compose princi-

palement d'Espagnols pauvres, quente

les

familles, fait

s'assied le soir Ils

devant

le

la porte,

cuisine,, et

la pipe.

lient facilement, les camarades. Ils se sont

se

commun

et

portent doréna-

leurs douloureux secrets.

parlent pas des autres. rités

la

en fumant

compris d'un mot, d'un regard, vant en

légionnaire fré-

le

ménage,

Ils

Ils

ne

respectent toutes les obscu-

de leur passé.

La maladie de

la

Légion

est le « cafard ». C'est ui»i

certain état de dépression, résultant

l'ébranlement moral, et de l'abus

du

de

climat,

l'alcool

de

(l'ab-

sinthe)...

Suivent quelques exemples de cafard, ajanfl

déterminé d'absurdes coups de duels ou

même

vagante

équipée des

Adgar, qui

A

fit

cinquante,

collectifs,

comme

tête, indivi-î

cette extra!

tant de bruit en 1908 ils

se

duite d'un lieutenant.

d'Aïn-ell

légionnaires :

mettent en route, sous

En

rase

la

conî

campagne ils attende™


CE QUE VALENT CES HOMMES qui va d'Aïn-Séfra à Oran.

le train

201

l'arrêtent,

Ils

l'envahissent, et obligent le mécanicien à rebrousser

chemin.

Au

bout de 20 kilomètres,

la frontière

font arrêter

du Maroc. Cafard.

C'est lui qui les avait

fois réveillés, ils

comprirent l'absurdité

Lne

réunis.

ils le

marchent en bon ordre sur

à nouveau, descendent et

de leur acte, et rentrèrent.

Quand

légionnaire est

le

continue à boire, et baïonnette, ses

du

atteint

n'a pas d'argent,

s'il

vêtements, tout

cafard,

il

vend

sa

il

qu'il possède, à

ce

quelque juif algérien, sans s'occuper de ce qui s'en suivra.

années,

Le vin il

bon marché. Dans

à

est

même

ne coûte

rien

:

cinq centimes d'entrée à la porte

Le

remède contre

seul

On

départ en campagne.

demain pour

tira

guéri. Les légionnaires

(1)

lit,

cabaret.

:

et

les

Chanson datant où

l'on

:

[ter)...

Pour

164),

l'action, le

déjà le cafard est

les Alsaciens, les Suisses et les il

est

à la décision, qu'on par-

Pour

Belges,

bonnes

chantent joyeusement

Tiens voilà du boudin

(p.

du

le cafard

battre

se

les

on paie seulement

Lorrains;

n'y en a plus (1).

de

l'époque

rappelée

n'acceptait à la Légion

plus haut

que des engagés

Alsaciens-Lorrains et Suisses [Note du traducteur).


202 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Cette chanson est l'appel, la sonnerie de la charge. Ici, c'est

Au

l'héroïsme qui entre en ligne.

bout de cinq

rengage.

de service,

ans.

De nouveau, au bout de

Alors, au bout de quinze ans,

marie.

Il

reste

en Algérie

le

légionnaire se

cinq autres années. a sa pension. Il

il

se

et devient colon. *

Telle est la vie

du

légionnaire.

On peut

faire toutes

ses réserves sur l'effet politique de cette institution.

Mais quand on

lit

tendent de

du

la vie

ce

que certains journaux pré-

légionnaire, celui qui

l'a

obser-

vée sur place pendant longtemps est bien obligé de ~ se présenter

pour dire ce

qu'il a

vu de

ses yeux.

Je ne sais la Légion, d'elle

du

;

mais

si

ou il

l'auteur de cet article a servi à s'il

a simplement vécu à côté

a certainement pénétré l'âme

légionnaire, et

il

en a bravement pris

la dé-

fense contre ses compatriotes.

Cela facilite la tâche de dire quelques mots

des

mœurs

de ces légionnaires, que

les Aile-


CE QUE VALENT CES HOMMES

mands peignent

volontiers sous de

si

203 sombres

couleurs.

Assurément,

la

Légion

n'est

pas un pension-

nat de demoiselles. Mais quel est qui ressemble à

un

tel

le

pensionnat?

régiment

En

pays, la caserne est une école de vice

;

tous et

que Ton peut en dire de plus atténuant,

ce

c'est

que, pour la plupart des jeunes gens, la con-

tamination ne dépasse pas une sorte de fanfaronnerie qui se traduit en propos et en chants grossiers jusqu'à l'ordure.

Mais à

la

Légion, la proportion de ceux qui

ne se contentent pas de chanter

est certaine-

ment élevée. Beaucoup vont plus

loin, et cela

est déplorable.

Seulement,

il

n'est

pas démontré

que

les

vices qu'on y dénonce avec tant de complai-

sance y soient notablement plus

répandus

que dans bien d'autres groupements. En tous pays, on a le tort de croire que l'on peut dissi-

muler celles

ses

du

propres turpitudes

voisin.

En

en exagérant

France, dans ce pays qui,

faute d'hypocrisie, passe pour plus

corrompu


204 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE que

d'autres, quantité de gens sont convaincus

que

les «

chevaliers de la Table-ronde

nombreux dans

particulièrement

giments prussiens.

ment

mais on ne

;

Ils se

»

sont

certains ré-

trompent grossière-

en fera pas démordre,

les

• i

et certains

termes de notre argot montrent

combien leur erreur

est

répandue.

En général,

pour accréditer une légende de ce genre au sujet

que

du

voisin,

l'on grossît

peut-être

suffit

il

d'un seul scandale,

malignement,

demain

et

dont on aura

pendant en son propre

le

pays.

Quoi

mœurs

en

qu'il

soit,

il

est certain

un grand nombre de

colonies de tous pays,

pour des motifs bien connus de développer

que

la

ici. Il

Légion en

le

dit

et qu'il est inutile

serait puéril de prétendre

soit

torise à dire qu'elles

qu'on

que ces

sont fort répandues en Orient et dans

indemne. Mais rien n'au-

y soient aussi généralisées

en Allemagne, où, sur ce point

encore, on la confond, plus ou moins involon-

tairement, avec certains corps naires. C'est

de

discipli-

une calomnie, que de prétendre


CE QUE VALENT CES HOMMES qu'elle

soit,

à cet égard,

corrompue que

tel

205

sensiblement plus

groupe de blancs, que Ton

pourrait citer, vivant en Afrique ou en Asie.

Je n'insiste pas sur ce sujet répugnant, qui

peut procurer

d'amères surprises à chaque

peuple qui voudra examiner avec attention ce qui se passe dans ses propres colonies.

Quant à

l'ivrognerie, hélas, elle est encore

bien davantage

le

vice

caractéristique

des

pays chauds. Qu'il

me suffise de dire,

à cet égard, qu'après

avoir parcouru bien des pays où elle sévit,

je

n'aurais jamais imaginé que Ton pût boire aussi formidablement que je

l'ai

vu

des bateaux allemands naviguant

faire sui-

sous

les

tropiques, ainsi que dans la colonie de l'Est africain allemand. Et j'ai petite ville

séjourné dans une

du Mozambique, où, sur une popu-

lation blanche de 200

hommes,

il

y avait une

bien forte proportion d'ivrognes, dont les deux plus fieffés étaient

un négociant allemand

et

un français, agents consulaires de leurs pays respectifs

!

18


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

206

Qu'on s'enivre donc à

monotone

la Légion,

Mais une

fois

en campagne, l'ivrognerie disparaît cafard, e\ il

la

vie de garnison, cela n'est ni con-

testable, ni étonnant.

naud,

dans

i

suivant

le

en route,

comme

le

mot de M. Heintz-Ar-

ne reste plus place que pour

l'hé-

roïsme.

La

vérité est

porte

si

généralement, telle

que

les accusations

légèrement contre

que

la

la

procès de la vie

le

que Ion

Légion sont, plus coloniale

conçoivent trop de blancs. Nou-

veaux venus à

la colonisation, et

n'ayant en-

core qu'une armée coloniale rudimentaire, les

Allemands ont déjà trouvé l'occasion d'enrichir leur langue d'un

mot nouveau,

(vertige colonial),

le

pour désigner

Tropenkoller l'état d'esprit

que beaucoup d'hommes contractent au service colonial:

ils

maladie mentale

doivent bien savoir que cette n'est

pas un produit spon-

tané du climat, mais que (et

les

excès évitables

que bien des coloniaux savent heureuse-

ment

éviter)

formation.

contribuent puissamment à sa


CE QUE VALENT CES HOMMES Qu'ils créent

raison de

— et — une

donc

le faire

î

ils

207

auraient bien

Légion coloniale,

comme tant d'entre eux le proposent les mœurs y ressembleront beaucoup à celles de :

la

Légion étrangère...

déjà

si

on n'en peut

dire autant de leur petite troupe actuelle.

Heureux,

si

coloniale

ces volontaires rachètent

leurs défauts par des qualités comparables à celles

de nos légionnaires

I


1

XXI

LA DISCIPLINE, A LA LEGION

La à

discipline est

Légion.

la

qu'elle

trages

nécessairement sévère,

Mais

est-il

ne comporte ni

de

besoin

dire

les sévices ni les ou-

au moyen desquels on soulève

gnation d'un public trop crédule

?

A

l'indi-

I

s'attar-

der à ces inepties, on ferait injure, non seule-

ment aux cadres font

honneur de

peut

le dire,

choisis et éprouvés qui se servir à la Légion, mais, on]

aussi aux soldats qui se laisse-

raient traiter de manière aussi inhumaine.

M. Albéric Cahuet

écrivait très justement à*

ce propos, dans l'Illustration

Ce qu'est

le

du 19 juillet 1913

légionnaire au feu,

il

est inutile

de

:

le


LA DISCIPLINE A LA LÉGION

209

r

rappeler en ces lignes, car notre article prendrait proportions d'un fabuleux livre d'or...

admirable en campagne,

soit

Que

les

ce soldat,

plus facilement que- tous

autres déprimé par la vie de garnison où se réveillent

trop souvent les instincts de ces natures ardentes et impulsives, on ne saurait s'en étonner. la nécessité

d'une

d'ailleurs, le

dont on et

stricte

même

Il

discipline, qui

en résulte n'a point,

caractère impitoyable que

est obligé d'user

pour

les bataillons

celle

d'Afrique,

qui doit être opportune et appropriée à des .élé-

ments d'origine ral

Bruneau,

lours

;

«

si

diverse.

c<

une main de

et les colonels

qui ont

Il

faut », écrit le géné-

fer

dans un gant de ve-

laissé le

meilleur sou-

venir à la Légion sont précisément ceux qui ont su

dans une juste mesure ces deux manières

allier

différentes de s'imposer rité.

:

la bienveillance et la

si

sévé-

))

Ce serait

quer

les

folie,

en

effet,

que de vouloir appli-

mêmes méthodes

différents les

à des

uns des autres par

hommes

si

la race, l'édu-

cation, le passé, l'âge, les aspirations.

d'eux constitue en quelque sorte un

Chacun «

sujet

»

psychologique, qui doit être étudié avec soin, et

manié en tenant compte de son individua18.


210 LA QUESTION DE LA UÉGION ÉTRANGÈRE litési tranchée.

un

A

on peut prédire

cet égard,

bel échec à l'armée allemande,

elle s'avisait d'instituer

une Légion

jamais

si

étrangère,-

de vouloir y appliquer intégralement

et

les

méthodes d'éducation, ou plutôt de dressage qui peuvent réussir dans une cour de caserne

de Potsdam.

Un exemple,

à cet égard, M. Stéphane

zanne rapporte, dans

un

l'article cité

Lau

plus haut

entretien qu'il eut à Bel-Ahbès, avec deux

légionnaires allemands, dont l'un avait

deux ans comme grenadier de sienne, puis était

à sa

était

venu à

ter les

la garde prus

la Légion, j

quatorzième année

de

il

er

service

de Wesel, au bout

L'autre avait déserté trois mois,

fait ses

de

parce qu'il ne pouvait plus suppor

mauvais traitements

la part

de ses anciens.

Je lui

demande encore

qu'il

subissait de

:

— Qu'est-ce qui vous plus surpris — Tenez, regardez vous-même, a le

ici ?

c'est ceci...

Et,

du

doigt,

il

nie

montre par

la

porte des légion

naires qui passent sur le trottoir à côté d'adjudants^


211

LA DISCIPLINE A LA LÉGION d'officiers supérieurs faire

le

ment

les

en

salut

militaire.

uns

les autres.

uniforme,

On Il

sans

à

familière-

côtoie

se

avoir

n'y a ni gêne, ni

rai-

deur.

— Daswûrden wir ja

nicht in Deutschland sehen

jeune légionnaire (Cela, nous ne

fait le

le

!

verrions

pas en Allemagne).

En

effet, les

sidérés

légionnaires, en ville, sont conr

comme dans un camp,

et

dispensés

d'un salut qui, dans d'aussi petites localités, serait surtout

rieurs

:

importunant pour leurs supé-

mieux pour

cela vaut encore

pline que de l'habitude,

laisser

ces

la disci-

derniers prendre

que Ton peut constater dans

les

de tous pays, de rendre

le

petites garnisons

salut avec négligence. Mais évidemment, telle

Allemand, prendre née,

une

tolérance est incompréhensible pour

la

et

Ton conçoit

qu'elle

lui

un

fasse

Légion pour une bande indiscipli-

dépourvue de tout esprit

lement, ces

hommes,

si

militaire. Seu-

négligents en appa-

rence, exécutent fidèlement les ordres donnés,

combattent en héros,

et se feront

tuer pour

le


212 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE supérieur qui, à la

ville, se laissait traiter

par

eux en camarade.

Pour comprendre pline

ressort de cette discil

le

particulière qui fait de la Légion

si

corps unique,

il

un

faut, à défaut d'expérience per-

sonnelle, connaître

ciens légionnaires

un

ou

certain

nombre

d'officiers les

d'an-

ayant com-

mandés. Un de ces derniers, qui a fait campa-j gne avec eux à Madagascar, en Indo-Chine

dans

le

Sahara,

me disait

qu'en neuf ans

il

et

n'a

pas infligé d'autres punitions que des sanctions morales, telles que l'abstention

du tutoie-

ment,

temps où

il

et qu'il regrettera

vivait

On

toujours

le

au milieu de ces hommes.

ne saurait mieux dépeindre

les relations

existant entre les légionnaires et leurs officiers,

que ne

l'a fait

un de

ces derniers,

M. Albert

le

Figaro du 10 janvier

n'ait fait à son

chef aucune confidence

de Pouvourville, dans 1914: Bien qu'il d'aucune

sorte,

le

légionnaire sait bien qu'il n'est


LA DISCIPLINE A LA LÉGION au regard de son

pas,

autre

il

:

même terre et

enfant de la des

mêmes

pas

fils

du

sol national,

Mais

Le chef

Il

même

quement

y

;

il

intelligence et

une expérience... et

jugé par

de cette sorte de jugement qui a des

tient.

qu'il

Et

y

il

n'est

qu'un numéro matri-

profonds, et qui compte. Et

Il

race, capable

avec des intérêts et des pa-

l'officier veut,

chaque circonstance, que ce jugement rable.

un

n'est pas

chaque instant, observé

se sent, à

ses soldats, tifs

une

est

il

la

comme un

soldat

mêmes amours

n'est rien

il

;

un

moins.

de

passions et des

rents sur ce sol cule.

officier,

est à la fois plus et

213

modans

lui soit favo-

montre pratiquement

et publi-

y a là une réciprocité de

tient. Il

contrôle et d'estime intellectuelle, qui n'existe dans

aucune autre armée, dans aucun autre pays.

Mais, d'autre part, blessé de la vie,

«

Légion l'armature

debout

et

légionnaire

le

un

est

qui est venu chercher à la militaire

qui

le

tiendra

suppléera à sa vertu défaillante

Cet appui moral dont

il

a besoin,

pas la sécheresse d'un règlement qui peut lui

fournir

Qui

».

ce n'est le

:

lui dira

si

son effacement volontaire,

si

son


214 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGER suicide social lui ont fait

son

du bien ou du mal

Ce

?

qui est son critérium.. .L'officier

officier seul

e

sa conscience, vivante et vibrante, et sans appel. B les

jugements de

celte conscience-là

sont

d'autaï]

plus respectés et redoutés, qu'ils ne sont pas

d'une sanction réglementaire,

lui-même qui

a

d'œil, souvent

furtif,

choisi

que

que

c'est

par un coup d'œil que

angoisse, l'approbation

minué moralement

le

toiera plus,

ou

occasion qu'il

il

s'est

di

ne

le

y aura

désignera pas à d'aller

ne

il

la

le -ié

premier

se faire tuer, et

il

du

1-

con

Et cette condamnation volontairement accepté

est pire

que tous

les

châtiments disciplinaires

connu un légionnaire qui ne vrer

<

est imperceptible aux autres

mettra, peine atroce, à la garde des mulets et voi.

av<!

chef l'accordera ou L

ne parlera plus au soldat, ou

l'officier

cou;

de son chef,

punition de l'homme qui

la

suiv

l'homrrj

le soldat sollicitera,

secrète

Et

c'est

son juge. C'est par un

une

refusera.

et

le

quand

il

dimanche, était

afin que son

et

de qui

ivre, d'être

lieutenant ne

le

le

souci unique

ramené

vite

jV

étail

au cachoi

rencontrât pas

rues de Saïda en cet état. Le respect et des insignôi honorables

:

pouvait pas ne pas s'eni

dans

du chef

ou glorieux que

le

accept

soi

mêm


LA

DISCIPLINE A LA LÉGION

n porte est poussé

ici

trois

à l'extrême, et

Allemands, tous

215

on connaît à trois décorés

el-x\bbès

ces

our

de guerre de la médaille militaire, qui

faits

dgeaient, avec une hautaine insistance, les mares

de respect dues à cette médaille et qui, avaient résolu de

ils

ur médaille sur leur Ainsi,

l'officier

muet

rbitre ées et

Et

lit

c'est

!

est

directeur,

le

de ces consciences fer-

à leur conduite que cet officier re-

s'il

a été lui-même à la hauteur de sa

Pour

che

si difficile.

n'a

qu'un critérium

se renseigner à ce sujet, :

Ses soldats, le regard de ses soldats,

rne et en

seule îl'à

jour

de ces âmes tortueuses...

muait

,.

au quartier

de légionnaires

et incontesté

le

la fête », laissaient

faire

«

campagne, leur manière de

marque de

gratitude de

l'homme

chaque instant rend l'honneur,

^peccablement

la patrie et

en co-

et,

servir.

c'est

Car

à qui le

de

servir,

l'étendard de ce chef.

Peut-être comprendra-t-on le lien invisible, mais oit

et

formidable, qui joint ces

sespoir à e vie,

ces silencieux

en apparence âpre

par et

silencieux

devoir, et

par

comment

rebutante, éveille en


216 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE eux tous tous pline

y a

il

:

enthousiasmes

les

héroïsmes.

les

souples

à Poccasion,

suscite

coordonné de volontés

l'effort

comme

iandées

et

et,

n'y a là ni contrainte ni disci-

11

des

viriles,

lames d'acier bien

trempé, et à qui, évidemment, rien n'est impossible.

Un est

de cet état d'âme

trait caractéristique

que

les légionnaires

d'autres chefs

sidèrent

que

comme

ne veulent connaîtra

les leurs,

avec qui

ils

se con-

par un lien personnel

liés

la Légion leur tient lieu de patrie et d'armée, et le reste

officiers

tion

ne compte pas pour eux.

me

Un

de leurs

racontait que, dans une expédi-

où Ton avait eu

la singulière idée

de ré-

partir des légionnaires dans des bataillons de

zouaves, on n'en put rien

l'on

tirer,

jusqu'au jour

reconstitua leurs unités

firent merveille.

résultat; car

On

aurait

l'esprit

pu

de corps

;

alors,

ils

s'attendre à ce serait-il porté

à son paroxysme, sinon dans un corps qui n'a nulle part de semblable ?

Or, tout

comme

le

légionnaire n'est inter-

changeable avec aucun autre soldat, on ne


LA DISCIPLINE A LA LEGION

217

saurait prendre pour étalon de sa discipline

dans l'armée

ce qui se passe ailleurs, fût-ce française, et fût-ce

dans nos autres troupes

Comment donc un

d'Afrique.

auteur allemand,

déjà incapable de concevoir la discipline à la française, faite surtout

de confiance

bonne volonté réciproques,

?

Là, tout est

ger dans la stupéfaction. Et

ment, des siens, si

de

pourrait-il porter

un jugement équitable sur à la Légion

et*

celle

fait

qui

pour

le

règne plon-

comme, évidem-

officiers et des sous-officiers

on leur donnait à commander

prusla

Lé-

gion, telle qu'elle est, ne sauraient avoir d'autre idée

de botte

que d'y et

«

mettre de l'ordre

»

à coups

de cravache, on s'imagine tout na-

turellement, outre-Rhin,

que

nous menons nos légionnaires.

c'est ainsi

que


XXII

LES RENGAGES ET CEUX QUI DESERTENT

Pour

caractériser

hommes suffire

manière

la

sont traités à la Légion,

de constater que 48

°/

de

dont il

les

devrait

l'effectif

sont

des rengagés.

Et sur ce nombre,

il

s'en trouve

beaucoup

qui ont repris du service, non à l'expiration de leur premier engagement, mais après avoir quitté la Légion, et goûté plus

temps de

la liberté.

Certains d'entre eux ont

de

faire des

comparaisons

concluantes.

On

ou moins long-

En

voici

même

eu l'occasion

qu'ils

ont trouvées

deux exemples.

sait qu'il existe diverses institutions des-

tinées à aider les légionnaires libérés, en atten-


LES RENGAGÉS ET CEUX QUI DÉSEBTENT

dant

A

qu'ils aient

trouvé une situation

notamment,

Paris,

219

civile.

sont hébergés au

ils

poste-caserne du bastion 86, boulevard Keller-

mann. Or, au mois de septembre trouvait

un Allemand,

l'histoire

est typique.

allemande,

il

il

s'y

Baslen, dont

Déserteur de l'armée,

avait accompli cinq ans de ser-

Légion.

vice à la

nommé

1913,

Au

bout de ce temps,

il

rentre au pays, veut régulariser sa situation, est incorporé

trouve

si

dans l'armée impériale

bien, qu'il déserte

retourne à

la

Légion,

qu'à sa retraite

et

;

et

une seconde

il

s'y

fois,

y reste dix ans, jus-

(article

précité de

M. Sté-

phane Lauzanne).

A la même époque, le 7 septembre, un nommé Charles Schneider, né en Lorraine annexée, se présentait au commissariat de police d'Albert

dirigé sur

(Somme), en demandant à

être

un bureau de recrutement pour s'en-

gager à la Légion.

Ce Schneider, âgé de 32 ans, avait servi dix ans au le

1

er

régiment étranger, où

grade de sergent, la

il

avait obtenu

médaille

militaire,


220 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE l'ordre

du Dragon d'Annam,

du Tonkin, du Maroc le

et

et les

médailles

du Haut-Guir. Libéré

27 février 1912 à Taourirt (Maroc), ir fît part

à son capitaine de son intention d'aller en

Lorraine voir sa mère malade, ensuite contracter

et

de revenir

un nouvel engagement. Le

capitaine lui représenta que

non seulement

il

perdrait ainsi son grade de sergent, le règle-

ment

ne

comme

permettant

simple soldat, mais

arrêté en Lorraine fit

:

condamné

le

comme

il

que

1

risquait d'être

déserteur. Rien n'y

Schneider voulait revoir sa mère.

Dénoncé,

Il

l'incorporation

il

à

passa en conseil de guerre

deux ans de

et fut

forteresse, en Silésie.

réussit à s'évader, traversa toute l'Allemagne,

Luxembourg

et la

Belgique, pour arriver, à

bout de ressources, à Albert.

Il

a maintenant,

au bout de dix-huit mois d'épreuves, retrouvé la sécurité,

à ce régiment qu'il n'avait voulu

quitter que pour quelques semaines.

A

qui donc fera-t-on croire que,

frait à la

Légion toutes

si

l'on souf-

les privations, toutes

les brutalités, toutes les

humiliations,

il

s'y

I


LES RENGAGÉS ET CEUX QUI DÉSERTENT 221 trouverait en permanence plus deo. 000 hommes

ayant repris

service

du~

sous

un

drapeau

déshonoré, après cinq premières années de pa-

Comment

souffrances?

reilles

se fait-il que,

depuis 1831, l'histoire de la Légion ne soit pas plutôt

une

suite

sanglantes?

jehaque

ininterrompue de mutineries

Comment n'apprend-on

instant qu'un

ihommes, que plaisent à

les

petit

journaux

représenter

pas

groupe

de ces

allemands

comme un

à

se

troupeau

d'apaches, a profité de son isolement au fond

du Sahara ou de quelque brousse lointaine, pour massacrer tête?

les tortionnaires placés à sa

Sans doute,

il

se produit parfois

des

:rimes, sous l'influence d'un accès de cafard,

émoin l'anecdote du Poméranien, rapportée M. de Pouvourville,

jar

îaut. ;e

si la

qu'on a lue plus

dixième partie seulement de

qu'on raconte en Allemagne était vraie, complots,

et

non

seulement des crimes individuels

et

im-

''est

)as

Mais

et

de sang-lroid que

mlsits, devraient

se

les

produire constamment,

^u lieu de cela, les légionnaires ne

demandent 19.


222 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE qu'à rester jusqu'à leur quinzième année de service. Il

est vrai qu'en regard des rengagés,

citer

bien des cas de désertion.

D'une manière générale, soit en garnison, sir et

on peut

pendant

se produisent

ils

périodes de

les

loi-

d'ennui qui séparent deux campagnes,

soit sur la route d'Indo-

Chine, pendant la tra-

versée du canal de Suez, où

homme, déprimé par

est facile à

il

un

de sauter

la traversée,

à l'eau et de se rendre à l'agence de désertion

bien connue qui est installée à

Mais aussitôt en campagne,

légionnaire se

le

réveille avec toutes ses qualités, et

question d'abandonner faire tuer

pour

le

Port-Saïi.

il

n'est plus

drapeau, mais de

se

lui.

Ces désertions d'ailleurs, s'expliquent par des causes qui font

s'attendre à les voir plus

homme

pourrait mcnic

qu'on

nombreuses.

peut être pris de découragement, en

s'apercevant que l'existence n'est

Un

pas ce

qu'il avait rêvé;

du légionnaire il

peut avoir

chance d'un changement favorable de

sa

la


LES RENGAGÉS ET CEUX QUI DÉSERTENT 223 tuation de fortune, qui lui fera regretter la vie civile,

alors

qu'il lui

son engagement

résilier

ajcès de cafard, avoir

dont

les

est

impossible de

peut, au cours d'un

commis une

faute grave

conséquences l'épouvantent;

haut,

au chapitre qui

il

ou

traite des

peut plus

antécédents

même

qu'il

peut

se croire victime d'uneinjustice

dont

des légionnaires

il

il

un de ces dégénérés mentionnés

être

être

;

n'ose pas

;

j'accorde

demander

que pareille timidité enfin céder

aux

le

soit

redressement, bien

peu probable;

sollicitations de

il

peut

sa famille,

d'une maîtresse, — ou simplement de quelque agent de la Ligue allemande contre

on ne

se souvient

la

Légion

:

que trop du grave incident

qu'un agent consulaire allemand a créé à Casablanca, en 1908, en facilitant la désertion d'une

demi-douzaine de légionnaires. Mais, avec de l'argent et de belles promesses, n'arriverait

pas au voit

même

résultat partout ailleurs

?

on

Et ne

on jamais de soldats allemands déserter,

même

sans avoir subi aucune influence ou

sans avoir reçu aucune aide du dehors?


224 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Le véritable critérium du naires n'est donc pas le

mais

sort des légion-

nombre des déserteurs,

celui, si considérable, des rengagés.

dernier, ainsi

que

le culte

par ses anciens soldats, fraternelles

et

voué à les

la

Ce

Légion

associations

que ceux-ci ont fondées, non seu-

lement en France, mais aussi en plusieurs

comprendre

pays étrangers, suffiraient à

faire

l'inanité des récits lugubres

que Ton colporte

outre-Rhin. Mais néanmoins,

il

est

bon

d'y

ajouter quelques détails, à l'adresse des Alle-

mands soucieux de lignes.

la vérité qui

liront ces


XXIII

LA VIE MATERIELLE

J'ai

eu l'occasion de voir un bataillon de

la

Légion, en août 1912, à Casablanca.

La

ville,

encombrée par un

afflux extraordi-

naire de population civile qui s'entassedans les

maisons disponibles, ne possédait pas de caser-

nements

;

et la réserve

du corps expéditionnaire,

comptant quelque 5.000 hommes,

était

donc

sous la tente, au pied de l'enceinte, dans des conditions assurément peu plein été.

confortables en

Mais je puis assurer que

naires, qu'on les vît

menant en

ville,

les légion-

dans leur camp ou se pro-

ne donnaient aucunement

l'impression de tristes victimes à laquelle se serait

attendu un lecteur des journaux

aile-


i

226 LA QUESTION DE LA LEGION ÉTRANGÈRE

mands

;

présentaient

ils se

comme

de bons

et

superbes soldats, parfaitement satisfaits de leur sort.

Ce

sort,

©n va

le voir, n'est

nullement misé-

rable. Il

serait fastidieux

des soldes

de donner

ici le

tableau

des pensions de retraite affé-

et*

rentes aux divers grades et anciennetés. Sans

doute, les centimes de poche alloués aux

lé-

gionnaires pendant leur premier engagement,

comme

à tous les soldats

à payer les distractions d'un

suffiraient pas

clubman. Mais

de notre armée, ne

les

hommes

sont entretenus et

nourris de manière à n'avoir rien à dépenser

de ce chef;

le

dépense pour

tabac, qui représente une grosse la

plupart des militaires, leur est!

fourni gratuitement, et

comme à tous nos

soldats,

ceux qui ne fument pas font argent de leurs ne faut pas oublier que, dans

bons. Enfin,

il

des localités

comme

Bel- Abbès, Saïda, et les

postes éloignés qu'occupe la Légion, l'argent

de

poche,

hommes, ne

plus

largement

serait guère

distribué

aux

qu'un encouragement


LA VIE MATÉRIELLE

à

l'ivrognerie;

il

nouveaux venus,

est naturel

et

de

le

227

mesurer aux

de se montrer plus large,

après ce temps d'épreuve, pour les rengagés -ces

derniers reçoivent,

naires,

comme

:

simples légion-

selon leur ancienneté, de S

50 à

fr.

11 francs par prêt, soit de 85 centimes àl

fr.

10

par jour.

Quant à

la

pension de

retraite,

bout de 15 ans de service,

obtenue au

elle s'accroît

annuités correspondant aux

des

campagnes,

et

peut arriver à dépasser, pour un simple légionnaire, la pension allouée à

un

sous-officier des

troupes métropolitaines. Elle peut s'arrondir

encore

ment

(comme

la solde, d'ailleurs)

du

traite-

afférent à la médaille militaire (100 fr.)

ou

même

les

Français

à la croix (250 francs). Puis, pour et les

naturalisation, ploi civil.

il

étrangers ayant obtenu la

y a

la perspective

Dernièrement

est

d'un

em-

mort un Alsacien-

Lorrain, ancien ouvrier menuisier, qui avait été retraité

comme

Légion d'honneur,

adjudant, chevalier de la et était

-des contributions directes

devenu receveur

en Algérie

:

il

n'au-


228 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE rait

pas atteint un pareil résultat en restant au

pays

D'autres, enfin, sans

!

lisés,

même

être natura-

obtiennent une concession dans une co-

lonie, et arrivent ainsi à des situations à la fois

avantageuses

Tout

cela,

en

et

indépendantes.

vérité,

ne constitue nullement

l'exploitation, le contrat léonin

nonce

si

que

l'on dé-

sévèrement. La vérité est qu'il

de se bien conduire à

de ne pas

s'y

la

suffît

Légion, ou au moins

conduire très mal, pour y at-

teindre, en quinze ans,

une situation matérielle

toujours très sortable, et souvent tout à

fait

avantageuse.

Et pendant ces quinze ans,

si l'on

subit des

misères, ce sont celles auxquelles doit

s'at-

tendre toute troupe en campagne; mais, tant

que cela d'un

A

est possible, les légionnaires jouissent

maximum

de confort.

cet égard, l'article

tion jlu 19 juillet

a

paru dans

l'Illustra-

pu dissiper bien

illusions. Je

doute

sumé par

journaux allemands. Pour

les

qu'il ait été traduit

ou

des ré-

facili-


LA VIE MATÉRIELLE ter la chose,

229

avait eu pourtant

['Illustration

l'attention ironique de le faire précéder de la

note suivante

«

:

La reproduction des photo-

graphies illustrant cet article est autorisée. Le

correspondant-photographe de Y Illustration à

M. Geiser, mettra gratuitement des

Alger,

épreuves à

disposition des journaux alle-

la

mands soucieux de compléter tation sur la

On

y verra notamment

preté de ces

documen-

»

le

confort et la pro-

casernements

qui comportent

non seulement des pour

leur

Légion étrangère.

salles

les soldats aussi

de lectures

et

bien que pour

de jeux, sous-

les

officiers, mais jusqu'à une salle de spectacle.

On y

lira aussi

des

menus par

lesquels

on ju-

gera de la véracité de ce malheureux Hassel-

mann

qui, en sept ans, n'a

dormi que 43

sur une paillasse et n'a jamais eu à

que du pain sec tout, ce

et

du

brave garçon

riz...

est-il

fois

manger

Peut-être, après

végétarien

!

Cette question de la nourriture a sa grande

importance

et suffît

manière dont

à donner une idée de la

est assurée,

dans son ensemble, 20


230 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

donc

la vie matérielle d'une troupe. Je crois

intéressant de reproduire

ici

ceux qu'a publiés

Y Illustration. 1er

RÉGIMENT ÉTRANGER 25 e COMPAGNIE.

Menu du

11

(BEL-ABBÈS)

au 17

11

juillet 1913

juillet

MATIN

SOIR

Soupe grasse

Bœuf

Potage pâtes

Bœuf

sauce moutarde

Nouilles au* gratin

d'Italie

rôti

Salade panachée

Salade

12

juillet

MATIN

SOIR

Soupe paysanne

Bœuf

sauce piquante

Potage vermicelle

Ragoût de bœuf aux

Haricots blancs à la maître

Choux

carottes

braisés

dhôtel Salade

Dimanche 13

juillet

MATIN

Potage pâtes

SOIR d'Italie

Biftecks

Haricots verts en salade

Tomates

farcies

Salade garnie

Vin

Soupe grasse

Bœuf

sauce moutarde

Riz au gras Salade


LÀVI£ -4ATÉR1ILLE

231

(Menu spécial)

juillet

Réveil

— Brioche

Chocolat

Après

Vin blanc

la

revue

fiâte-mx- secs

DÉJEUNER-

Œufs aux Tomates

anchois farcies

Oies rôties

Pommes

duchesse

Salade russe

Crème

à la vanille

Fromage de Lorraine Vin Café

Liqueurs

Cigares

15 juillet MATIN

Soupe

Bœuf

SOIR

Potage tapioca

a l'oignon

Bœuf

sauce piquante

rôti

Ragoût de pommes

Macaroni sauce tomates Salade

et

de choux

16 juillet MATIN

Soupe aux haricots

Bœuf

en vinaigrette

SOIR

Potage semoule

Ragoût de mouton

Purée de pommes

aux pommes

Salade

Carottes sauce blanche


232 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE 17 juillet MATIN

SOIR

Soupe au

Soupe légumes

Bœuf

Haricots blancs à

la

riz

Bœuf sauce moutarde Pommes au four

sauce Robert

bretonne

Salade

Dans tous

régiments, l'ordinaire varie

les

d'une compagnie à l'autre, suivant l'habileté

avec laquelle

les

fonds sont gérés. Celui qu'on

vient de citer est certes suffisamment varié et substantiel. Mais en voici

un meilleur,

par M. Stéphane Lauzanne;

compagnie qui riche que

la

se trouve

précédente

MENU DU (26

1 er e

il

relevé

s'agit

d'une

momentanément plus

:

ÉTRANGER

compagnie)

Dimanche 21 septembre 1913 DÉJEUNER

DINER

Soupe au fromage

Soupe au pain

Bœuf rôti Pommes au four

Ragoût de bœuf

Salade russe

Semoule au chocolat Raisins

Vins, café

Rizotto


LA VIE MATERIELLE

233

22 septembre DÉJEUNER

Soupe aux pâtes

Potage semoule

Bœuf sauce Robert Pommes en salade

Ragoût de mouton Nouilles aux tomates

Café

23 septembre DEJEUNER

Soupe au pain

Potage vermicelle Boulettes de

bœuf

Mouton

braisé

Pommes purée

Haricots bretonne

Vin

24 septembre DÉJEUNER

DINER

Soupe au

Potage tapioca

Bœuf

Bœuf

rôti

riz

cornichons

Macédoine

Purée de pois Saint-Germain Café

25 septembre

Soupe paysanne

Bœuf Lentilles

sauté

au jus

Pommes

Soupe au pain

Bœuf

sauce piquante

Riz à l'italienne

aïoli

Raisins

Vin 20


234 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE 26 septembre DÉJEUNER

DINER

Potage semoule

Soupe aux pâtes

Hachis Parmentier

Bœuf sauce tomate Pommes en salade

Nouilles au four

Café

Au

Tonkin,

témoin

le

menu

celui-ci, pris

est

plus savoureux encore,

au hasard parmi cent autres;

Journée du 2

avril,

à

An-Ky SOIR

MA.TIN

Soupe aux légumes

Soupe grasse

Œufs sur le plat Bœuf mode Ragoût de pommes

Omelette aux oignons

Bœuf Tripes à

la

rôti

mode de Gaen

Poulet rôti

Choux-raves au jus

Salade

Salade, bananes

i/4 vin, café

i/4 vin, thé

Ce sont

là,

on en conviendra, des ordinaires

capables de faire envie à bien des gens,

regard desquels

il

et

en

serait intéressant de pou-

voir placer ceux d'un régiment allemand quel-

conque.


XXIV TEMOIGNAGES D ETRANGERS

Mais

les

témoignages qui précédent ont paru

dans des journaux français, être

considérés, par les

sujets à caution.

En voici

et

peuvent donc

Allemands,

comme

d'autres, rassemblés

au hasard de mes dernières lectures,

et

qui

ont été adressés à des organes étrangers.

On

a déjà vu (chapitre VI) celui d'un Alle-

mand, publié par le Vorwaerts du 8 septembre. Il

se

résume ainsi

des circonstances, ifaute des chefs,

en soldats

et

Service très dur en raison

mais nullement

qui traitent

même, peut-on

Pareillement,

donné

:

le Petit

par

la

les légionnaires

dire,

avec amitié.

Bleu, de Bruxelles, a

l'intéressante lettre qui suit, écrite par


236 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

un légionnaire belge à son quiété des sinistres

Légion

;

du 8 août

:

la

elle

«

père, qui s'était in-

révélations » publiées sur

a été reproduite par

le

Matin

Guîcer (Maroc), 29 avril 191

Mon J'ai

1.

cher père,

reçu votre lettre et la coupure du journal .

bruxellois

que vous m'avez envoyée

relative à la

Lé-

gion étrangère. J'ai lu cette coupure avec une violente indignation et je tiens à vous déclarer formel-

lement que tout ce qu'elle raconte

est

complètement

faux.

Je vais reprendre point à point cet ignoble article i° Il n'existe

aucun racolage pour

cun y vient librement corporation est

même

et la visite si

la

:

Légion. Cha-

médicale avant

l'in-

rigoureuse que beaucoup de

ceux qui veulent s'engager ne sont pas acceptés par le

médecin 2

d'un

;

Notre sort à esclave.

La

la

Légion n'est nullement

discipline est

le

paternelle et

sort

bien

moins dure, d'après mes camarades, que dans certains régiments de l'Est de la

France

;

1


237 Ce

son

n'est à la

c'est la

;

gradés nous

Légion ni

la

réclusion, ni la pri-

vie libre militaire sans brutalités. Le»

estiment et savent, quand

il

le

faut,

nous passer de petites fautes qui seraient sévèrement punies dans d'autres armées 4°

Comme

vous dire, tous les

la

vous

voyez, par

dimanches

et

les

jours

Ce

je viens de

que

nous avons

;

de fête pour nous

;

Notre vie n'est nullement

caserne.

ce

Légion n'est pas un enfer

amuser librement 5°

le

;

la

vie

uniforme de

n'est qu'à la portion centrale, à

y a un peu de service de caserne

qu'il

hommes y

mais

restent à peine quelques mois, car dès

leur instruction est terminée,

d'autres

;

Saïda,

garnisons,

ils

service

le

les

que

sont versés dans est

bien

moins

chargé.

Quant ménages

à la nourriture, je suis certain se contenteraient

donne ci-dessous

le

dimanche matin, 3o

Comme

petit

chocolat au

vant

:

lait.

menu avril

que bien des

de notre ordinaire. Je vous

qu'on va nous servir

le

:

déjeuner du matin, bous aurons du Ensuite, à dix heures, le repas sui-

potage velours, salade de harengs et cents durs,

chouchoute, beefsteack, navets sautés à la Vichy, jjiu>


238 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE neaux au

vin, vin, café

un potage, un

dessert, et bien

Tout

au

Le

tafia.

un

pîat de viande,

entendu du café

nous aurons

soir,

plat de légumes, et

du vin

un

(i).

en plein Maroc, à plus de 100 kilomètres

cela

de Casablanca.

Dans

l'après-midi,

casion de la fête

par

offerts

il

y aura des jeux divers à

capitaine et les sous-officiers.

le

Vous voyez que nous sommes noncé par

le

La solde gagés

ou

;

1 1

loin de l'enfer

an-

journal allemand.

n'est pas très forte,

mais

l'oc-

du régiment avec 3o francs de prix

les

francs

en

rengagés ont tous

comme

pour

effet,

les dix

argent de poche

en-

les

jours 8 fr.5o

;

Tous ceux qui veulent s'en donner

la

peine peu-

vent avoir de l'avancement. Il

un il

y a dans

ma compagnie un caporal espagnol et mon sergent-major est belge

caporal allemand

;

;

va s'en aller bientôt avec au moins 1.000 francs de

retraite et la médaille militaire, qui lui

core ioo francs par an. (i)

On

dès que

voit,

par

cet

Dans

ma

exemple

et

rapporte en-

compagnie, sur par

le

précédent, que

Légionnaires sont en campagne, on

les

trois

améliore

encore leur excellent ordinaire, au moins tant que cela possible. Sans doute, tions,

mais

:

ils

à la guerre,

est

peuvent être soumis à des priva-

comme

à la guerre

!

:


TÉMOIGNAGES D'ÉTRANGERS caporaux, deux sont allemands et

•élevés

A

japonais.

Ber-Rechid, à deux étapes

le

239 troisième

d'ici, il

adjudant roumain, un sergent-majoF

et

y a tfn

plusieurs

sergents allemands.

Mon

cher père, je m'arrête, car j'en aurais trop à^

pour protester contre

te dire

envoyé.

En somme,

les

l'article

bien nourris, bien habillés, bien traités. Il

contre

couchés

ne faut rien demander de plus

attaques

les

que vous m'avez

légionnaires sont heureux,

la

qu'une jalousie mal

bien

et

et

mépriser

placée

organise

Légion étrangère.

Van Eckaute. ù* compagnie,

2 étranger, à Guicer e

par Casablanca (Maroc).

Dans la Gazettede Lausanne du 29 août on trouve des déclarations semblables, par un ancien légionnaire allemand,

1913, faites

nommé

François Boillet. Vous avez lu dans les

Allemands

les

dernières dépêches

Légion étrangère.

J'ai

honte de mes compatriotes, et

malgré^mon origine badoise, crier bien

comment

avec acharnement la

maltraitaient

je

haut que ce ne sont

me

fais

un

devoir de

que calomnies.


240 LA QUESTION DE LA LEGION ÉTRANGÈRE Pendant douze ans que lore,

j'ai servi le

drapeau

au Soudan, au Maroc, jamais je

plaindre de mauvais traitements.

de tous

les

que

connus

j'ai

Allemands

et soldats

Il

en

eu à

n'ai est

de toutes

trico-

de

les

me

même nations

qui ont combattu à mes côtés. Tous

et

sont unanimes à proclamer la bonté de nos chefs et

clémence

justice, la

même

qui régnent dans

ments étrangers. Et ce que j'avance, je puis

le

la

les régi-

prouver.

Voici de nombreuses lettres écrites en français et

en allemand qui

me

sont parvenues d'anciens cama-

rades de la Légion. Quelques-unes prouvent surabon-

damment qu'on

Du

reste,

malheureux

pour vous montrer

je vais vous citer

Au

n'est pas

la

à la

Légion.

bonté de nos chefs,

une anecdote.

retour d'une reconnaissance,

un de nos cama-

rade^, exténué de fatigue, sortit des rangs et s'affala

sur le talus bordant cela,

la route.

Notre capitaine, voyant

descendit immédiatement de

crocha

le

sac de notre

propres épaules, puis sa bête.

il

camarade,

fixa

sur

ses

aida le malade à se hisser sur

La colonne rentra

rentrés, nous

son cheval, déle

ainsi

acclamâmes notre

au quartier. Aussitôt capitaine...

Promettez-moi de défendre un peu notre chère Légion par

la voix

de votre journal. Dites bien que


TÉMOIGNAGES D'ÉTRANGERS les soldats

qui y sont arrivés

les

241

uns désespérés,

les

autres déshonorés, sont devenus de braves cœurs, et

ont été traités beaucoup mieux qu'on ne Test dans

une caserne allemande.

Voici enfin

un témoignage un journal

a été publié par

qui, à la vérité,

français,

mais dont

aucun organe allemand ne pourra discuter l'authenticité ni la spontanéité.

Le

7 février 1914, le

écrite

lonel autrichien ger,

Matin a publié une

au major du

pour approuver

le

un rengagement à

trouve

«

)>.

1 er

régiment étran-

désir de son

tracter

fait

lettre

quelques semaines auparavant par un co-

la

fils

extraordinairement heureux

En

de con-

Légion, où

il

se

et satis-

voici la traduction, d'après le texte

original, dont j'ai

pu reproduire

la

photogra-

phie en tête de ce volume, grâce à l'obligeance

de la direction du Matin

:

Sankt Peter, près Gratz (Autriche) y le

28 décembre 1913.

Très honoré Monsieur

Mon fils, Bruno

le

major,

de Benedict, vient de

me faire con21


242 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE naître son intention de se rengager

pour dix ans à

te

Légion.

Comme

son état de santé

s'est

beaucoup amélioré dam

ces derniers temps, et qu'il se trouve extraordinairemen,

heureux

et satisfait

ment d'accord avec

En même sance,

très

à la

la

Légion, je

me

démarcke de mon

déclare pleine- I fils.

temps, je vous exprime toute

honoré Monsieur, pour

l

ma

appui,

reconnaisl'intérêt

a

la bienveillance

que vous avez accordés à mon

vous prie de

continuer à l'avenir votre gracieuse pro-

à

tection,

lui

fils,

et je

montre digne.

la condition qu'il s'en

Avec V expression de ma considération

la

plus

distin-

guée, je suis votre très dévoué.

Benedict, colonel de réserve,

On

observera qu aucune autorisation pater-

nelle n'étant nécessaire

rengagement,

que

le

c'est

pour contracter un

de son propre mouvement

colonel a donné à la Légion ce précieux

témoignage d'estime, dont itablement exceptionnel

le

caractère est vé

et décisif.


TROISIÈME PARTIE DISCUSSION

XXV LE CONTRAT D ENGAGEMENT EST-IL DE DROIT PUBLIC OU PRIVÉ

La question de savoir gagement à privé,

qui

la fait

Légion le

est

le

si

?

contrat d'en-

de droit public ou

fond de

de la Gazette de Francfort,

l'argumentation et

à laquelle on

semble attacher une très grande importance en Allemagne, constitue un problème juridique dont

il

serait impertinent à

de vouloir donner la solution.

un profane


244 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE D'après la Gazette, la Cour de Cassation a jugé, contre le

gouvernement

français,

que ce

contrat est de droit privé, mais la thèse gou-

vernementale a

été

sanctionnée par

la

Cour

Permanente d'Arbitrage.

Au premier

abord, on peut estimer que la

situation n'est pas tout à fait aussi nette que

l'indique cet article. Si l'on se reporte, en

à

sentence arbitrale, dont

la

dans

le

le texte est

effet,

donné

Rapport du Conseil administratif de

la

Cour Permanente d'Arbitrage pour Vannée 19G9,

on constatera que juger

Tribunal

s'est

gardé de

point de droit. Ce dernier portait sur

le

conflit

le

le

survenu entre

l'autorité militaire

française et l'autorité consulaire allemande, qui, toutes deux, prétendaient exercer leur ju-

ridiction sur les légionnaires

mande

:

la

d'origine

alle-

première, en raison de leur qualité

de soldats français, servant en territoire oc-

cupé par lité

la

France, et

la

seconde, vu leur qua-

de sujets allemands se trouvant en pays

soumis au régime des capitulations.

Le Mémoire présenté par

le

gouvernement


LE CONTRAT D'ENGAGEMENT

allemand poussait

d'ailleurs sa thèse juri-

dique à ses conséquences

en attaquant

dans son essence. Suivant gagement, ne liant

simple et

«

la

lui, le

contrat d'en-

légionnaires à l'Etat

les

un temps déterminé,

est

l'article 138

comme mœurs

allemand,

«

un

militaire, par

»

;

sujet

du Code

contraire à l'ordre

public et aux bonnes a soustrait

un

devient nul, aux termes du

tel, il

paragraphe premier de

il

Légion jusque

contrat de services de droit privé

comme

civil

plus générales,

les

de

l'institution

français que pour

245

»,

dans

le

cas où

allemand à son devoir

exemple dans

le

cas où

il

est ap-

pliqué à un déserteur.

Nous reviendrons plus des déserteurs. Pour

le

loin à cette question

moment, nous n'avons

à considérer que la question préjudicielle.

Or donc,

le

Tribunal arbitral

commença

par se refuser à la trancher en principe, pour les

motifs suivants

Considérant que été parlé

:

le conflit

de juridictions dont

il

a

ne saurait être décidé par une règle absolue

qui accorderait d'une manière générale

la

préférence, 21.


246 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE soit à

Tune,

currentes

soit à l'autre des

deux

juridictions con-

;

dans chaque cas particulier,

Que,

compte des circonstances de déterminer

il

faut tenir

qui sont de nature à

fait

la préférence...

Mais ce

considérant

immédiatement

est

suivi d'un autre, qui tranche la question, en

dans

fait,

le

importe, en

sens de la thèse française. Peu effet,

que

le

juger que l'espèce qui

que ce l'on

qu'il

Tribunal

lui était

en dit s'applique à tous

pourra imaginer

Considérant que

la

n'ait

voulu

soumise, puisles cas

que

:

juridiction

du corps d'occupa-

tion doit, en cas de conflit, avoir la préférence, lors-

que

les

personnes appartenant à ce corps n'ont pas

quitté le territoire placé sous la domination diate, durable

et effective

de

la force

immé-

armée...

Nous.n'en demandons pas davantage, puisqu'il résulte

trine

de là que, conformément à

présentée par M.

Weiss, dans

les

deux

le

la

doc-

professeur André

Mémoires

français,

l'Allemagne ne saurait avoir aucune qualité


247

LE CONTRAT D'ENGAGEMENT

pour s'immiscer dans Légion

Sous

de

la

est

avant tout soldat;

:

«

les affaires intérieures

n'est

il

patrie est celle qu'il a lois militaires

drapeaux*

les

soldat

que soldat; sa

promis de servir;

de cette patrie

les

et ses juridic-

siennes». Qu'un

tions sont les

le

légionnaire

déserte ou quitte régulièrement le service à la tin

de son engagement,

et qu'il

commette

l'im-

prudence de retourner en Allemagne sans y être

sous

en règle avec le

coup des

la loi militaire,

lois

il

retombera

de son pays natal,

et

n'aurons aucune objection à formuler

exemples en sont nombreux, de Charles Schneider, 219).

Mais tant

c'est-à-dire,

cité

:

les

et tel est le

cas

plus haut (page

est sous les drapeaux,

par définition,

«

en territoire placé

domination immédiate, durable

sous la effective

qu'il

nous

de

soumis à

la

force

armée française

la juridiction

exclusive

», il

et

est

de l'Etat

français. C'est là, en vérité,

avec une

telle

un principe qui s'impose

évidence, qu'on se

quelles arguties de chicane

il

demande par

est possible d'y


248 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE trouver matière à un procès international, et

de voir un lien quelconque entre

l'arrêt

de

Cassation du 10 décembre 1879, établissant

que

ne saurait statuer sur

l'Etat français

le

contrat d'engagement sans le consentement de l'intéressé, et la prétention

à s'immiscer dans

la

de l'Etat allemand

rédaction et l'applica-

tion de ce contrat.

Mais, lors

même

que l'opinion de

de Francfort serait

même

qu'il

y

la Gazette

fondée, c'est-à-dire lors

aurait contradiction entre l'arrêt

sentence arbitrale, cette dernière consa-

et la

crant la thèse

du gouvernement

français,

que

sinon admettre que, dans l'ordre inter-

faire,

national, la question est actuellement tranchée

par

la

haute autorité de

la

Cour Permanente

d'Arbitrage, dont le gouvernement allemand avait

demandé

et

a loyalement accepté

la sen-

tence?

Que

les spécialistes

du

droit des gens con-

tinuent à la discuter dans leurs Congrès et leurs savantes revues, rien de

mieux

:

un jour

finira par venir, où, à la suite de leurs travaux,


LE CONTRAT D'ENGAGEMENT l'accord désirable s'établira sur

dence unique

249

une jurispru-

Mais vraiment,

et définitive.

il

polémique de presse,

n'y a point là matière à

ni à déclamations de réunions publiques. Plaise

aux dieux que et

les

dissentiments entreFrançais

Allemands ne portent jamais que sur des

questions aussi abstruses, aussi faites pour être

gravement examinées par de paisibles

ristes,

dans

le silence

Cette réserve le

ftiite

du cabinet sur

ju-

!

point de savoir

le

gouvernement allemand a

le droit,

si

ou non,

de critiquer officiellement le contrat d'engage-

ment à prit

Légion, nous pouvons examiner

la

l'es-

de ce contrat. Car peu importe qu'il puisse

ou non, cielles

:

être

l'objet

représentations

de

le seul fait qu'il est

qué dans

le

violemment

public constitue

oblige à rechercher

si les

oppose sont fondées, fois illicite et léonin.

s'il

offi-

criti-

un danger

et

objections qu'on lui

est exact qu'il soit à la


XXVI DES SOLDATS DE METIER, EN GENERAL

Sur

le

Légion, détail il

principe

même

de l'existence de

abstraction faite

et

que comporte

le

contrat d'engagement,

de séparer, dans

convient

la

des clauses de

deux notions qui sont bien

la

discussion,

distinctes

des soldats de métier, en général,

:

celle

et celle

des

soldats étrangers.

On la

a vu en effet que certains adversaires de

Légion s'adressent à notre démocratie sur

un ton de reproche amical, pour songer au tort moral qu'elle se

ployant dans son armée des des

gens

d'hommes

qui ».

font

«

«

l'inviter

fait

mercenaires

métier

de

à

en em»,

tueur


SOLDATS DE MÉTIER, EN GÉNÉRAL

Nous ne pouvons

être

251

que pleins de recon-

naissance pour la sollicitude que l'on témoigne

au bon renom de

ainsi

on ne

la

République

;

mais

s'étonnera pas de ce que nous désirions,

autant

que

mêmes,

et

nous occuper

possible,

nous-

en toute indépendance, du maintien

de ce bon renom.

Assurément,

des

conseils

-toujours être les bienvenus.

d'ami

Mais

doivent

ici,

ce ne

sont pas précisément des amis qui ont atta-

ché

le grelot, et

mêmes

ils

l'avoir fait

veillance

;

ceux qui

ne prétendent pas euxavec discrétion

méconnus

brouiller et rer des

et

de n'arriver

envenimer

bien-

dans

pures, risquent donc

les intentions les plus

d'être

et

les suivront, fût-ce

qu'à

la situation, et

à

ems'atti-

réponses désobligeantes. Le moins

qu'on puisse leur

dire, c'est que, tout

en recon-

naissant volontiers que nos institutions et nos

mœurs

sont encore trop peu démocratiques, trop

fortement des

siècles d'absolutisme qui ont

pesé sur notre

et

se ressentent encore

pays, nous pouvons souhaiter aux Allemands


252 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE de parcourir à leur tour

chemin que nous

le

avons derrière nous. Notre démocratie

est

bien imparfaite, soit; mais qu'ils atteignent

seulement pareil résultat, lité

auront qua-

et ils

pour nous donner conseil en matière de

démocratisme. Il

n'en est pas moins utile de faire remar-

quer que

la question

de la légitimité du ser-

vice militaire obligatoire est encore contestée

par bien des gens. Sans doute,

du continent européen

démocraties

les

se sont vues obligées

d'instituer ce service, à l'exemple

du

très

démocratique royaume de Prusse. Mais qui constituent

le

monde anglo-saxon

celles

persis-

tent à n'en pas vouloir entendre parler,

nom

de

la

que, dans

le

liberté individuelle

:

peu

au

convaincues

cas d'une attaque, l'esprit civique

de leur population leur fournira

les

défenseurs

nécessaires, elles se contentent d'une

armée

permanente composée de cesjiommes que, selon l'angle sous lequel on voit les choses,

on

nomme

naires.

des

volontaires

ou des merce-


SOLDATS DE MÉTIER, EN GÉNÉRAL

253

Notons à ce propos que certaines questions de mots ont une grande importance en

Nous venons d'indiquer que

tière.

du

tout la

même

la

ma-

ce n'est pas

chose, que d'appeler les en-

gagés (nationaux ou étrangers, peu importe) des volontaires ou des mercenaires. Mais que dire de

de

la

M. Gothein qui, dans

la

consultation

National Zeitung, citée plus haut, stig-

matise, à propos de la Légion, le « métier de

tueur

d'hommes

».

Cet honorable député

a-t-il

songé que cette qualification désobligeante ne s'applique pas seulement à ceux qui s'engagent

comme cer,

simples soldats avec l'espoir d'avan-

mais aussi à tous

les officiers, à tous les

sous-officiers rengagés? Parole

qui pouvait

lui

attirer

un bien beau procès

pour offense à l'armée allemande

Quoi

qu'il

en

soit,

il

imprudente,

n'est

!

pas nécessaire de

sortir du continent européen pour trouver des adversaires du service militaire obligatoire,

même

en dehors des milieux tolstoïens ou

anarchistes.

Par exemple,

le

Courrier de la Bourse, de 22


254 LA QUESTION DE

U

LÉGION ÉTRANGÈRE

demander

Berlin, s'étant avisé de

«

s'il

n'est

pas temps de faire disparaître, par un accord international, des

troupes mercenaires dont

sentiments du

l'existence heurte les civilisé

»,

monde

M. Henri Follin répondit, dans

numéro de décembre

le

1913 de V Individualiste

européen, par cette réflexion* d'une profonde ironie

:

délicatesse

du monde

civilisé! Il n'est pas heurté-

de voir arrachés à leurs familles

à

et

leurs

des millions de jeunes gens qu'on oblige à

caserne en attendant qu'on cherie.

Mais

il

serait

les

la

la

utilisât

aux.

guerre quelques milliers-

de déclassés qui, eux-mêmes, ne

bons à autre chose

aller- à

oblige à aller à la bou-

choqué que l'on

répugnantes besognes de

travaux

se

reconnaissent pas

!

Cette remarque, à la vérité, est surtout

boutade de philosophe exaspéré par

une

la sottise

des préjugés dominants. Mais d'autres motifs, d'ordre concret, déterminent d'autres auteurs

à se prononcer contre Aï.

le

Poimiro, par exemple,

service obligatoireécrit

:


SOLDATS DE MÉTIER, EN GÉNÉRAL

255

~Nous ne méconnaissons pas la valeur morale d'une

conception qui astreint tout les

drapeaux, quoi qu'il

si

une

qu'elle

pareille théorie n'est

amène

leurs effectifs

les

ïurriîtt iront

monde

à passer sous se

demander

pas dangereuse, puis-

nations à augmenter incessamment

militaires,

vant plus en supporter s'en

le

permis de

soit

jusqu'au jour où, ne pou-

les

charges financières, elles

au sort des armes pour trancher leurs

rivalités.

Nos préférences vont, sans hésitation, aux armées de métier qui n'enrôlent que des gens aptes physi-

quement

et

intellectuellement au métier des armes

ce qui n'est pas toujours le cas, de nos jours le

monde

bles,

est

appelé sous les

;

où tout

drapeaux, forts ou

fai-

courageux ou lâches, patriotes ou antipatriotes,

amis ou ennemis du pays. Ces troupes de métier représentaient suffisamment

comme

solidité, et si leur

ment moindre que

coût n'était pas relative-

celui de nos

elles avaient l'avantage,

faire faucher, sur les

armées obligatoires,

en cas de guerre, de ne pas

champs de

bataille,

toutes

le-

jeunes forces physiques ou intellectuelles d'un pavs.

Le patriotisme n'en suffit

de

se

était

pas

moins ardent,

il

rappeler celui de nos anciennes popula-


256

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

tions.

L'exemple que, de nos jours, nous donne

peuple anglais,

Mais

est sous ce

rapport plus que probant.

cette théorie que,

crois aussi erronée

le

pour

ma

du point de vue

que du point de vue moral,

part, je

militaire

n'est professée,

en France, que par une faible minorité

:

à

l'opposé des Anglo-Saxons, nous considérons

presque unanimement,

mands, que

comme

font les Alle-

la défense nationale est

un devoir

primordial, incombant à tous les citoyens

capables d'y contribuer d'une manière quel-

conque.

Nous

allons

même

plus loin, et nous pen-

sons que l'existence de troupes composées de soldats de

métier,

ou

même

seulement de

troupes contenant une forte proportion de ces soldats, constitue les libertés

ment que

un danger permanent pour

publiques

l'armée, en

:

nous voulons ferme-

temps de guerre,

soit la

nation en armes, entièrement levée pour sa défense, et qu'en

temps de paix,

rien de plus que l'école

préparée.

cette

elle

ne

soit

défense est


SOLDATS DE MÉTIER, EN GÉNÉRAL Mais nant

il

la

ne

s'agit

pas

d'opérations concer-

défense nationale. L'occupation de

territoires coloniaux taire, et

ici

257

l'état

soumis au régime mili-

de guerre est permanent, est

à proprement parler une tâche de gendarmerie

ou de police générale. Or, bien que la police et la gendarmerie

accomplissent une mission que Ton peut assimiler dans une certaine mesure à la défense nationale, puisqu'elles préservent la société

contre les agents intérieurs de sa dissolution, il

n'est

encore venu à

l'esprit

de personne de

proposer qu'on les recrute par voie d'obligation: ce sont partout des métiers

proprement

exercés par les gens à qui

conviennent.

A

ils

dits,

plus forte raison doit-il en être ainsi des

corps consacrés à la police coloniale, puisque leur action s'exerce dans des pays dont

on ne

hommes

quel-

peut imposer

le

climat à des

conques. Le service aux colonies ne doit être exécuté que par des volontaires;

et l'une

nombreuses objections que soulève

des

la poli-

tique coloniale de notre République, avec ses 22.


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

258

conquêtes démesurées, est s'est fréquemment

service obligatoire.

lent citoyen, prêt à

d'office,

On

l'on

des

hommes

peut être un excel-

donner sa vie pour dé-

fendre la patrie attaquée, et aller servir

trouvé (actuellement encore

au Maroc), d'y employer,

du

la nécessité

ne pas vouloir

aux colonies.

Bien entendu, ces considérations ne s'appliquent

qu'aux citoyens

de la

Quant à ceux qui sont nés ou nies, qui

médiats

métropole

fixés

aux colo-

y possèdent donc leurs intérêts imqui y sont acclimatés r c est évidem-

et

ment sur place que s'impose

à eux

le

devoi

civique de défense nationale. Notons d'ailleurs que, depuis qu'on leur applique l'obligation

du

service (c'est-à-dire théoriquement, depuis

1905, et

en

fait,

depuis la présente année., on

a reconnu la nécessité de leur épargner un trop fort

changement de climat pourquoi transfor;

mer en une être

de

un

la

situation privilégiée ce qui devrait

droit également

métropole

reconnu aux entants

?

Finalement, donc, non seulement l'emploi


SOLDATS DE MÉTIER, EN GÉNÉRAL

de

soldats de métier est légitime

259

aux colonies;

mais une armée coloniale sainement organisée ne devrait comprendre, en dehors d'eux, que le

petit

nombre des hommes du contingent

qui s'engagent pour y accomplir leur temps de service légal, et l'ensemble des citoyens nés

ou domiciliés aux colonies; que ces dernières moralement, en à leur sécurité.

cela,

en attendant

soient, matériellement et

état

de pourvoir elles-mêmer


XXVII

DE L'EMPLOI

DES ÉTRANGERS

EN TEMPS

DE GUERRE, NOTAMMENT EN ALLEMAGNE

Tous

les Etats,

i j

sans aucune exception, a(|

mettent qu'en temps

de guerre une armél

peut comprendre des volontaires étrangers] et

l'ennemi considère ces soldats

belligérants réguliers, au

même

comme

titre

de!

que kl

nationaux. Il

ne

s'est

pas livré une guerre où l'on ni

puisse citer de

nombreux exemples

d'étranger!

armes, soit par conviction polil

ayant pris

les

tique, soit

simplement par goût des aventures

tantôt

ils

sont enrôlés et servent isolémen

dans des corps quelconques,

et tantôt,

s'il

sont assez nombreux, on en forme des unité


l'emploi des soldats étrangers

261

constituées. Les Polonais et les Garibaldiens,

notamment, ont toujours peau de au

la

quand

liberté,

afflué sous le drail

était

menacé, ou

secours des peuples opprimés.

quels services 1870-71, ainsi

ils

que

j'aie

même

cette

sait

ont rendus à la France en

Légion hellénique

la

d'autres volontaires étrangers

sans que

On

pu

;

le vérifier,

guerre,

et

il

a été

dit,

que, pendant

Allemands

les

bien

et

ont dû

combattre certains de leurs compatriotes,

ori-

ginaires des pays que la Prusse avait annexés trois

ans auparavant.

Je puis suivante.

citer,

à ce sujet, la curieuse anecdote

Le lendemain de Sedan,

mon

père,

alors chef de bataillon, et qui parlait l'alle-

mand

à la perfection, rencontra

amis, officier d'état-major, qui

le

un de

ses

pria de venir

aider les camarades alors occupés, avec des officiers

allemands, à régler

cution de la capitulation

:

la

les détails d'exé-

négociation traî-

nait en longueur, faute d'une suffisante con-

naissance des langues de part

et d'autre.

Mon

père accepta naturellement cette pénible cor-


262 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE vée

;

quand tout

et,

rieur allemand

courtoisement

vous

le

:

«•

fut réglé,

un

officier supé-

prit à<part, et lui dit très

Monsieur

ferez bien, quand

mon camarade

vous serez en captivité

de ne plus parler allemand: on vous reconnaîtrait,

et cela

pourrait vous nuire

devant Tétonnement manifesté par il

lui

mon

expliqua qu'il l'avait pris pour un

Et;

».

père

Hano

vrien.

Ce cas de l'engagement de ressortissants l'Etat et

ennemi

et

d<

d'une légitimité contestable!

se produit d'ailleurs fort rarement. Mai;

quant aux

hommes

neutres, leur

guerre

originaires

engagement pour

est, je le répète,

la

des

Etatî

durée d'uni

chose normale

et ad|

mise partout.

Cela,

En

même

en Allemagne.

droit, la question

Dans son monumental

ne

fait

aucun doute

traité sur

le

Le

drai

public de l'Empire allemand, M. Paul Labanc

professeur à l'Université de Strasbourg,

cil


l'emploi des soldats étrangers

263

par M. Poimiro, dit d'abord, en ce qui con-

cerne les troupes mercenaires en général Lorsque

les

besoins militaires ne sont pas entière-

ment remplis par l'Etat

se voit

:

forces nécessaires.

service

le

forcé

de

se

obligatoire

général,

procurer par contrat

L'introduction du service

les

mili-

taire obligatoire n'exclut pas ce dernier.

Puis, en ce qui concerne particulièrement les étrangers

:

Les étrangers peuvent sans doute être admis à ser-

dans

vir

mande mais

et

(1),

ils

En

l'armée

ou dans

la

;

ce qui concerne la marine, à la vérité, citée

ne prévoit

l'engagement

rengagement d'étrangers que

siniers et sommeliers.

Pendant

la

sous-officiers

;

Mais

ils

l'état

comme

cui-

elle ajoute:

durée de leur service,

des personnes de

(i)

flotte alle-

n'y sont jamais tenus.

l'Ordonnance et le

de terre

prendre volontairement du service

militaire

;

font partie

ils ils

ont rang de

sont soumis aux lois et règlements

Wehrordnung (Ordonnance sur l'armée),

article 21,

n° 4, et Marineordnung (Ordonnance sur la marine), article 37

,

1.


264 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE militaires

;

ont droit à l'assistance en cas d'inva-

ils

lidité.

Ces dispositions indiquent nettement s'agit ici

qu'il

d'engagements admis d'une manière

nullement exceptionnelle, mais permanente, dès

le

temps de paix

rapprochées de

;

mation de principe posée par M. elles laissent

Pour

comme dans

cette dernière,

en

suffît à cet

ci-dessus, les

Le premier

égard de

les

effet,

aucune contes-

comme

en droit.

après les textes

citer,

exemples suivants. officier

de l'armée allemande

qui fut tué en 1870 était un Anglais,

Winslow

;

il

faisait partie

de

la

qui fut enlevée à Schirlenhof, les

com-

l'armée de terre.

tation n'est possible, en fait Il

Laband,

supposer qu'en temps de guerre

on accepterait des étrangers* parmi battants, tout

l'affir-

nommé

reconnaissance

le

25 juillet, par

chasseurs du sous-lieutenant de Chabot,

et dont le chef, le comte de Zeppelin, revint seul (i)

(1).

Episode rappelé par M.

Temps du a3 janvier 1914.

Reginald

Kann, dans

le


l'emploi des soldats étrangers D'autre part, on trouve dans la Revue

janvier 1914, intitulé

:

Un

le

du 15

compte rendu d'un volume

Grec sous

1870. L'auteur,

265

drapeau prussien en

le

M. E. Rangabé,

était,

au début

de la guerre, élève dans une école militaire prussienne, et

fit

toute la

campagne avec

le

grade de Portepee-Faehnrich (enseigne, aspirant-officier). Peut-être se trouva-t-il

un jour

en face de ses compatriotes de la Légion

nique

Que parti

serait-il arrivé, si l'Angleterre avait pris

pour

la

ralisant, la

France,

Grèce

et

la

si,

guerre se géné-

était entrée

opposé à l'Allemagne, ou l'autre

helli-

?

dans

le

camp

seulement l'un ou

si

de ces pays avait été entraîné dans quel-

que autre guerre. Leurs tanément sous raient-ils

sujets, servant

le

drapeau

pas subi

le conflit

momen-

allemand, n'aude devoirs que

Allemands nous reprochent de créer ? Et

on pas fondé à dire que, par sa propre

les

n'est-

législa-

tion et par ces précédents, l'Allemagne a ruiné

à l'avance

la thèse qu'elle a

Cour d'arbitrage dans

soutenue devant la

l'affaire

de Casablanca 23

?


266 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈBf: Et, d'autre part, si le

mand

gouvernement

ail

veut qu'on prenne au sérieux son opp

sition à l'emploi de volontaires étrangers,

devrait, par

une juste

au moins à ceux de

réciprocité, interdi]

ses sujets sur lesquels

a prise, de combattre sous un drapeau étrange 1 Or, dans la récente guerre des Balkans, dis

que

les officiers

te

de la mission française

Grèce ont conservé leur uniforme national n'ont pris aucune part aux hostilités, ceux la

mission allemande en Turquie portait

l'uniforme ottoman et combattaient en Thra

Notamment,

le

lieutenant bavarois Preysî

commanda un détachement lieutenant-colonel von

vembre

1912,

à la tête

e1

en

était,

]

du détachement

Derkos (Temps du 24 janvier Mais

de cavalerie,

Lossow

1914).

les freiwillige Kriegsteilnehmer,

ou

t

gagés volontaires pour la durée de la guer

ne sont^ pas admis seulement dans Tarn continentale.

On

seule sérieuse

campagne coloniale que

mand s

les vit intervenir lors de les

A

aient encore soutenue, la guerre con


l'emploi des soldats étrangers es [es

Héréros, en 1905-1906. Le

?n

son temps, partons

Iré

Fribourg

lui a

fait fut

267

signalé,

les journaux, et

M. An-

consacré un article très do-

cumenté dans Y Opinion du 29 novembre 1913.

On

i

ignore

le

nombre

lurent enrôlés de la sorte té

élevé,

si

l'on juge

qui

total des étrangers

par

;

mais

doit avoir

il

deux

les

sui-

faits

En août 1904, il arriva une troupe de Boers, commandée par le général Maritz;

ants.

00

sur une liste de tués, insérée dans les Vier-

t

djahrshefte fur Truppenfùhrung

i

und Heeres-

unde (Cahiers trimestriels pour la conduite es

troupes et

l'art

militaire),

que publie

le

rand état-major, on relève au moins neuf olontaires boers, italiens et français. es

derniers eut

même

ogieuse que voici

Huet avait Ile

j

:

il

aux

cuirassiers, à

Luné-

avait pris part à l'expédition de Madagascar, et

décoré.

Dans

au service de l'Allemagne,

lent un excellent soldat ldat) y

de

:

servi huit ans

avait été blessé

ricain,

Un

l'honneur de la notice

d'après le

le

Sud-Ouest

se

montra éga-

(ein aeusserst

bmuchbarer

jugement de

il

ses supérieurs.


26S LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Voilà donc un Français mort au service de l'Allemagne, parmi bien d'autres étrangers, et

de manière à mériter un

de ses chefs. Je fit il

me

hommage

alors le tour de la presse française

aucun journal pour

n'y eut

l'égard de nos voisins

bourgeois

le

professeur

:

français,

dans leur

égoïsme, trouvaient et continuent de trouver

mode

de faire conquérir

mais

se permettre à

Karl von Stengel, écrivant ceci les

;

un jugement ressem-

blant à celui que nous applique

Les paysans et

spécial

souviens que cet épisode

et

com-

défendre leurs colonies

par des mercenaires allemands, qui

les

dispensaient

d'y risquer leur peau (1).

On

eût été en droit, pourtant,

une opinion de ce genre, car

ou force

d'exprimer

la Schutztruppe*

coloniale, ne comptait à cette époque,

dans le Sud-Ouest africain, que 821 hommes. A la

première

alerte,

plus de 5.000 (i) Article

dans

on

lui

hommes

envoya d'Allemagne de renfort, auxqueh

la Zeilschrift jiir

Politik, 1913, vi, cit

par M. Pohl.

I


269

l'emploi des soldats étrangers

s'ajoutèrent plusieurs centaines de volontaires

étrangers; ces derniers y formèrent donc une

proportion incomparablement supérieure

des 5.700 étrangers de nos armées afri-

celle

caine et coloniale

Tout

même

(1).

cela est intéressant à rapprocher de

ce qu'on écrit en

de

à

de

la

Allemagne contre

Légion,

et

principe

le

notamment de

concluant que l'em-

la Gazette de Francfort,

ploi de soldats étrangers

l'article

«

n'est plus

compa-

avec la conception moderne de l'Etat

tible

On

vient de voir, en

non seulement de

effet,

droit,

que

cet

emploi

».

est

mais de pratique cou-

rante en Allemagne.

Les Allemands seraient-il seuls à l'ignorer? (i)

En

1913, et pour tout l'ensemble des colonies alle-

imandeSjla Schutztruppe comptait 6.470

(Européens

et

hommes

(dont 2.448

4.022 indigènes), à qui s'ajoutaient

jhommes de police (dont 782 Européens

et

t.o32

2Ôo indigènes).


XXVIIÏ

DÉSERTEURS, OU ÉMIGRÉS?

A

cela,

on objecte que ces hommes,

soustraits

au pénible

effectivement

indirectement:

leurs

frères,

de combattre

les

combattent

rendent service à la nation

ils

ennemie de leur

devoir

même

patrie,

en remplaçant aux

colonies ses propres nationaux, qu'elle vrait

y

pour

la

est

maintenir, et dont

de-

peut disposer

guerre en Europe. L'allié de l'ennemi

un ennemi, et

former un

un

elle

l'on n'a

homme

pas

le droit

de trans-

en ennemi de sa patrie, en

déserteur à l'ennemi, de l'amener à violer,

directement ou non,

le

serment que dans cer-


DÉSERTEURS, OU ÉMIGRÉS

271

?

tains pays, on lui a fait prêter lors de son in-

corporation.

Remarquons tout d'abord que la considération du serment militaire, soulevée par tous les

auteurs allemands à propos de la Légion,

n'a rien qui doive

nous frapper. Nous pour-

rions nous borner à lui opposer que c'est là

une

allemands

affaire enlre les soldats

gouvernement,

res interalios acta,

concerne aucunement. Mais

sommes en

il

et leur

qui ne nous

y a mieux nous :

que ce serment

droit de dire

est

dépourvu de toute valeur juridique, comme contraire, précisément, à cet ordre public que l'on

invoque

C'est,

en

si

volontiers contre la Légion (1).

effet,

d'une manière tout à

abusive que Ton assimile

ici les

de

Que

aux

jurent fidélité au roi

de Prusse, rien de mieux volontaire, et les Note pour

et

ceux-ci, faisant librement choix

la carrière militaire,

(i)

du

soldats

contingent aux engagés volontaires officiers.

fait

le

oblige

:

donc en droit

lecteur allemand:

aucun serment politique ou

leur serment est

militaire.

il

n'existe en

et

en

France


272 LA QUESTIOxN DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE conscience. Mais

crues ordinaires.

tel n'est

La

loi

pas

cas des re-

le

leur impose le service

militaire et la discipline, sous peine de sanc-

Un beau

tions sévères.

on leur

même

lit

si

jour,

une formule, on

la

les

rassemble,

les

oblige à jurer,

mort pour défendre son

leur père est

pays contre

on

conquête allemande. C'est

une extorsion de consentement, une violence, qu'ils subissent faute et

s'y soustraire,

qui peut bien les exposer aux rigueurs du

Code de

justice militaire allemande,

ne saurait ni

de pouvoir

les lier vis-à-vis

mais qui

de leur conscience,

aux yeux d'un gouvernement étranger. Mais,

cet

même

en débarrassant

élément mystique

cette objection

et

la

question de

inopérant,

de principe, que,

il

subsiste

la désertion

étant punie par les lois de tous les pays, l'en-

gagement de déserteurs étrangers toutes

circonstances, immoral,

l'ordre public. Et

serait,

en

contraire à

non seulement l'engagement

des déserteurs, mais celui des insoumis, qui

deviennent ainsi des déserteurs par anticipation; et

même

celui de tout

homme

en état


DÉSERTEURS, OU ÉMIGRÉS de porter

armes

les

273

?

appartenant

et

à des

pays de service militaire obligatoire, puisque cet

homme

serait rappelé

en cas de mobilisa-

tion.

Ceux qui soutiennent qu'il

cette thèse oublient

y a déserteurs et déserteurs.

Nous avons eu soin de distinguer

hommes

(chapitres

XV

entre ces

à XVIII). Les

uns ont

déserté pour quelque motif inavouable où à la suite d'un crime

odieux

;

s'ils

viennent à la

Légion, ce qui ne saurait être que bien rare, ils

y auront

chassés.

vie dure et en seront bientôt

la

D'autres,

moins grave

et

coupables

d'une

faute

disposés à revenir au bien,

trouvent là une occasion de relèvement moral et matériel

que

qui n'existe pas dans leur pays

celui-ci

leur tendre

:

ne nous reproche donc pas de

une main secourable.

Restent ceux qui ont déserté parce qu'on les molestait,

ou bien parce que, en leur âme

conscience, la

ils

et

ne se sentaient pas assimilés à

nation qui a conquis leur sol natal. Ceux-là, que peut-on leur reprocher? Ce ne


274 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE sont pas des déserteurs

Leur ancienne part, elle

à

ce sont des émigrés.

patrie peut regretter leur dé-

ne peut ni l'empêcher, ni s'opposer

ce qu'un autre Etat les recueille.

Ce serait •

:

sortir

de notre sujet que de discu-

du

ier ici la légitimité de l'émigration, ou

moins de rappeler elle a

donné

les

discussions auxquelles

question est désor-

lieu, car cette

mais tranchée. Elle opposait, jadis, deux idées contradictoires

:

que chaque

le droit

homme

a de disposer de sa personne, en vertu du principe de liberté individuelle, et

le

droit des

États à s'opposer à leur dépopulation. Or, au-

jourd'hui, la Russie reste

considère pas

le

le seul

État qui ne

droit à l'émigration^comme

appartenant naturellement à tout individu.

Les Allemands,

donc >

le droit

comme

les

Français ont

d'émigrer, c'est-à-dire de renon-

cer aux avantages que leur confère leur nationalité,

en

même temps qu'ils

de ses charges. Et

les

d'offrir leurs services —

s'affranchissent

émigrés ont

même

le

droit

militaires

—à

leur patrie d'adoption, qui a le droit de les


DÉSERTEURS, OU ÉMIGRÉS?

que Ton peut

accepter.

Tout

d'établir,

comme le fait

que celui qui

ce

275

faire,

c'est

la législation française,

dans une armée étrangère,

sert

sans y avoir été autorisé par son gouverne-

ment, perd par cela seul sa nationalité d'origine. Cette disposition peut apparaître

comme

une naïveté, puisqu'elle consiste à priver un

homme

de ce à quoi

noncé

mais

;

elle

des

l'avertit

qu'elle

établit

jour où

il

en

il

a volontairement re-

a son

utilité,

puisqu'elle

conséquences

de son acte, et

situation

à venir, pour le

sa

sera rentré dans la vie civile

réalité, la liquidation

;

c'est,

de son ancienne

si-

tuation légale, la reconnaissance de celle qu'il

a montré vouloir assumer.

Autrement

dit,

l'expatriation n'est pas seu-

lement une opération matérielle, un déménagement, par lequel on quitte un quartier ou

une

ville

pour s'en

aller habiter ailleurs

une rupture, un divorce, l'abandon de

;

c'est

l'an-

cienne patrie, l'adoption d'une patrie nouvelle:

on

s'ex-patrie.

peut

le

Et

regretter

;

la patrie

elle

qu'on abandonne

peut s'efforcer de retenir


276 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE ses enfants,

moyen

efficace

ce pour quoi elle n'a d'autre

que de

montrer plus

se

rable que tout autre pays. Mais possible,

dans

tenir par

l'état

il

dési-

lui est

im-

du monde, de

actuel

re-

force celui qui veut la quitter, et

surtout de l'empêcher de trouver accueil dans le

pays

qu'il a

librement élu.

Si l'on contestait ce droit

à disposer de lui-même,

de chaque

maintenir indéfiniment sur

homme

l'on prétendait

si

lui les obligations

militaires résultant de sa nationalité de nais-

sance, malgré sa volonté de s'expatrier, on en viendrait logiquement à poursuivre la suppres-

sion de certaines garanties que tous les pays civilisés

s'accordent à considérer

comme

gitimes et nécessaires. Par exemple,

il

lé-

ne fau-

drait pas de bien grands efforts à des juristes subtils

pour pousser

raisonnement jusqu'à

le

réclamer une énormité qu'ici, n'a

que personne, jus-

osé préconiser

:

l'extradition des

déserteurs et des autres accusés politiques.

Car

enfin, le fait de leur accorder asile n'est-il

pas, autant

que

celui

de

les

enrôler, quali-


DÉSERTEURS, OU ÉMIGRÉS? fiable

de « contraire à Tordre public

bonnes mœurs

On

277

voit

traîné, si

aux

» ?

combien

loin

Ton admettait

Allemands. Et

et

il

on pourrait la thèse

est à peine

être en-

juridique des

besoin de dire que

sous aucun prétexte, la France ne laissera contester son droit à accueillir les

hommes

qui se réclament de son drapeau,

à utiliser

leurs

services aussi

propres

fils.

bien que

et

ceux de ses


XXIX LES SOLDATS ETRANGERS, AUX COLONIES

Dans

ce qui précède,

nous ne nous sommes

engagements conclus par

occupés que des

des étrangers en vue d'une guerre déterminée,, et,

par conséquent, pour la seule durée de

cette guerre.

Mais, aux colonies,

manent. Cela ne

l'état

signifie

de guerre est per-

pas que l'on

s'y batte

constamment; maison y est constamment exposé à un départ inopiné en colonne ou à quelque insurrection locale;

les bataillons

Légion sont en première

dans

les ter-

pacification

est le

la

ritoires

militaires

moins assurée. Et

ligne,

de

la

les

engagés n'y sont pas


SOLDATS ÉTRANGERS, AUX COLONIES attirés accidentellement

grande conflagration,

telle

par

bruit

le

279 d'une

qu'une guerre euro-

péenne, mais y arrivent à tout moment, en un

courant continu.

La notion des engagements à terme, en vue d'un état de guerre qui est permanent, se substitue

donc

là tout

engagements pour

naturellement à celle des la

durée d'une guerre,

la-

quelle durée est indéfinie par définition. Et de

on en

l'idée

vient,

non moins naturellement,

à

de grouper tous ces engagés étrangers en

un corps

spécial, afin de

pouvoir mieux

les

instruire et les utiliser.

En

vérité,

il

est

impossible de concevoir en

quoi l'enrôlement d'un étranger,

durée tout à

fait

née, cesserait de l'être

quand il

est

un temps déterminé, en vue d'un permanent.il semble

la

licite

pour

la

inconnue d'une guerre don-

même

conclu pour

état de guerre

que ce dernier cas,

durée du contrat est spécifiée, est

le

plus

conforme aux principes généraux du droit quelle eût été la situation d'un «

pour

la

durée de la guerre

»

homme

:

engagé

au début de

la


280

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Guerre de Sept ans, de de

celle

celle

de Trente ans, ou

de Cent ans?

Et, d'autre part, la question

examinée plus

haut (chap. XXVII), de l'emploi de volontaires étrangers contre leur pays d'origine, ne se pose pas, en ce qui concerne les Européens engagés

pour servir aux colonies. La Légion, en est

effet,

essentiellement instituée pour ce service

colonial, et

non pour amener des Européens à

combattre leurs

frères. Si

quelques-uns de ses

bataillons avaient à prendre part à une guerre

continentale, nous aurions, au contraire, intérêt évident à maintenir en Afrique les

patriotes,

non

deux bataillons de :

la

en 1870, quand

Légion furent envoyés

on eut soin de commencer par en

extraire tous les éléments allemands, laisser

com-

naturalisés, de nos ennemis.

C'est d'ailleurs ce qui fut fait

en France

un

en Algérie.

pour

les


XXX LES SOLDATS ETRANGERS, AUX PAYS-BAS

ET AUX ÉTATS-UNIS

11

est d'ailleurs

inexact que tous les pays

aient renoncé à incorporer des étrangers dans leurs troupes, dès le

temps de paix.

Les Pays-Bas ne possèdent pas,

une légion étrangère analogue à

dit,

l'a

nôtre les

;

comme on

mais

ils

la

admettent, en grand nombre,

étrangers dans leur armée coloniale, et

cela,

dans des conditions

étudier en vue de

l'objet

très intéressantes à

que nous poursuivons

ici.

Voici d'abord la reproduction textuelle d'un

placard

officiel,

imprimé en français par

les


282

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

soins

du commandant de

réserve coloniale!

la

à Nimègue.

CONDITIONS pour être admis au service militaire

dans une des Colonies des Pays-Bas.

Les étrangers qui veulent s'engager dans militaire d'une des être

admis sous

le service]

Colonies des Pays-Bas, peuvent conditions suivantes

les

1.

Ne

2.

Avoir une bonne constitution

:

pas être mariés. (les

myopes ne sont

pas admissibles).

m.

3.

Avoir au moins

4.

Être âgé de 18 ans au moins

la taille

de

i

et

55,

36 ans au plus

trente-sixième année pas accomplie). (21 ans pas accomplis) qui le service susdit, doit

produire un

sentement délivré par

Ce

désire

tente. Si le

consentement

est

faut produire l'acte de décès

donné parle tuteur,

il

Être

muni d'un

certificat

de contuteurs.

les

par l'autorité compé-

donné par

du

père.

la

mère,

Quand

il

faut produire un certificat

juge de paix, constatant 5.

Un mineur

s'engager dans

parents ou

les

certificat doit être légalisé

la

certificat

(lai

il

est

du

nomination du tuteur. délivré par

l'autorité


,

SOLDATS ÉTRANGERS, AUX PAYS-BAS 283 compétente, constatant qu'on a toujours été de

bonnes

mœurs.

vies et

Produire un acte de naissance ou de baptême.

6.

Ceux qui ont

7.

servi

doivent autant que possible

apporter leurs papiers militaires, tandis que ceux

qui n'ont pas servi, doivent produire

un

certificat

authentique, constatant qu'ils ont satisfait complè-

tement aux obligations militaires dans leur (Pour

les Suisses ce certificat est

patrie.

remplacé par un

acte d'origine). 8.

Un

9.

Le postulant

portrait légalisé par l'autorité compétente.

Commandant

doit se présenter en personne chez le

de

la

ou dans une des autres

garnisons du Pays (Maestricht,

Breda,

Duc, Bergen-op-Zoom). Celui qui le service susdit

prime de 10.

2

reçoit, sans

minimum

aux Indes

Indes occidentales,

est

et

de

six ans, tant

que pour

seulement

Réserve coloniale.

celui

comme

du jour de

tion de l'acte d'engagement par le la

admis pour

aucune retenue, une

orientales

soldat d'Infanterie, à partir

de

est

Bois-le-

25 florins des Pays Bas.

L'engagement

le service

Nymègue

Réserve Coloniale à

(Nijmegen), Pays-Bas,

pour aux

simple

la ratifica-

Commandant


.

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

284

Les anciens militaires pourront cependant s'en-

1 1

gager pour Tarnie dans laquelle condition que pour la cavalerie la est

de

i,65

mètre,

poids

le

ils

ont

taille

servi, à

minimum

ne dépassera pas

70 kilogrammes. 12. Savoir parler et comprendre parfaitement la langue

néerlandaise [flamande), ou allemande.

SONT EXCLUS DE TOUT ENGAGEMENT

1.

Les déserteurs.

2.

Les personnes émigrées à cause d'un délit politique.

3.

Ceux qui ont

quitté le service militaire soit d'une

manière non honorable, 4. Les Français, les

métans,

les

soit à

Wallons,

cause d'infirmités.

les Anglais, les

Maho-

Nationalités hors de l'Europe et les

Suisses qui n'ont pas l'âge de 20 ans accomplis.

PENSION ANNUELLE

Après un service de quinze ans aux Indes, on peut réclamer une pension annuelle, qui s'élève pour

Adjudant et qui

sous-officier à

566

florins des

monte pour chaque* année de

jusqu'à 666 florins.

un

Pays-Bas,

service de plus,


SOLDATS ÉTRANGERS, AUX PAYS-BAS Pour un Sergent-Major. » Sergent ou Fourrier » .

285

.

026-626

.

486-086

»

florins

»

»

Caporal

33o 460

»

»

»

Soldat

270-070

»

AVIS IMPORTANTS Il

n'y aura pas de paiement anticipé des frais

voyage, mais en quelques cas ces frais tués entièrement,

En

ou en

de

seront resti-

partie.

cas de refus à cause

d'inaptitude physique,

le

postulant sera rapatrié gratuitement.

Ceux qui sont

déclarés bons, mais dont les papiers

ne sont pas parfaitement en règle, seront logés, nourris et

au besoin

monnaie de poche,

le

habillés,

ils

recevront de la

tout aux frais de l'Etat, jus-

qu'à ce que leur acte d'engagement sera sera évident qu'ils Il

est

ne peuvent être admis au

recommandable de ne pas

l'intermédiaire de

ratifié

ou

qu'il

service.

se faire enrôler par

Soi-disants enrôleurs, le gouverne-

ment Néerlandais n'étant d'aucune manière en rapport avec de telles personnes.

L'enrôlement d'étrangers n'est pas du ressort des «

Agents

officiels »

l'enrôlement pour

qui en Hollande sont préposés à le service

aux

rsijmègue, novembre 1910.

colonies.


286

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Je suis en mesure de compléter ces données

par des renseignements provenant directement

du

ministère néerlandais des Colonies.

Les conditions d'engagement ci-dessus exposées sont observées très strictement, notam-

ment en ce

qui concerne la nécessité de fournir

des pièces d'identité vie et

mœurs,

ainsi

et

un

certificat

de bonnes

que l'exclusion des déser-

teurs et des autres éléments spécifiés plus

haut.

Ces exigences morales s'expliquent tout naturellement par

le fait

que

les étrangers ainsi

recrutés ne sont pas destinés à former

un

corps spécial, mais à servir côte à côte avec les sujets néerlandais

qui prennent du service

dans l'armée coloniale. Aussi bien,

ments

sujets à caution

dans notre Légion

les

élé-

que nous incorporons

sont-ils exclus de tout autre

de nos corps de troupe.

Quant au

refus de principe opposé à l'enga-

gement d'hommes de il

est

motivé par

le fait

certaines nationalités,

qu'on a trouvé, à

l'ex-

périence, qu'ils avaient trop de peine à appren-


SOLDATS ÉTRANGERS, AUX PAYS-BAS 25? dre

le

hollandais.

Ainsi

qu'on verra

plus

bas, l'armée coloniale ne comprend, sauf de

hommes

rares exceptions, que des

des nations

germaniques. Enfin, on remarquera que,

touchent en s'engageant

de 472

fr.

frais jusqu'à Java,

prime assez élevée

Curaçao ou Surinam, ce

qui n'est pas une petite dépense,

gagement ne

se contracte

six ans. C'est là

hommes

les

doivent se rendre à leurs

ils

50,

la

si

un terme

et

que l'en-

pas pour moins de

fort long, car

l'armée

coloniale néerlandaise, à la différence de la nôtre, n'a pas de troupes de relève

métropole,

et le

service

y

entièrement aux colonies est

de

même

il

dans la

donc accompli

est vrai qu'il ei*

à la Légion, mais la majeure

partie de cette

garnisons

des

;

est

dernière est au salubres

n'existe pas sous

le

dont

repos

dans

l'équivalent

climat débilitant de

l'irisu-

linde.

Quant au nombre des étrangers tés,

voir

il

:

s'élevait, à

la fin

ainsi recru-

de 1912, à 1177, sa-


288 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Allemands Belges (Flamands)

.

828

soit

220

»

18,7

»

58

»

4,9

»

2

»

2,1

»

)>

3,o

»

99,9

%

....

Suisses

Luxembourgeois

71,2 °/

Divers (dont un sous- lieutenant français) Total

L'effectif total 1

er

36

.

.

de

janvier 1913, était i°

Officiers,

Armée

aux Indes.

1.177

.'

.

soit

l'armée le

suivant

coloniale,

ail

:

des Indes Orientales .

.

.

»

en congé

»

détachés en Hollande

.

.

.

1.178

227

Sous-officiers et soldats

...

75 31.762

33.244 â° Troupes des Indes Occidentales (Guyane et Curaçao)

20

Officiers

Sous-officiers et soldats

495 5i5

Le

total est

de 33.757 hommes, auxquel

s'ajoutent des corps francs de colons (Schut terijen) et

de 4.846

des corps de milice indigène, fort

hommes

(dont 1986 Européens

e

2.860 indigènes).

Mais ce qui nous intéresse

ici, c'est l'armé»!


SOLDATS ÉTRANGERS, AUX PAYS-BAS 289 proprement

coloniale

hommes

de troupe

Orientales, on

dite.

de

Sur

l'armée

les

31.762

des

Indes

compte 9.769 Européens. En ad-

mettant, faute de renseignements privés, que

parmi

les officiers, ainsi

que dans tout

des Indes Occidentales,

il

n'existe pas

l'effectif

un

seul

indigène, le total des Européens servant dans

Farmée coloniale néerlandaise 11.764.

Sur ce nombre,

serait

donc de

les 1.177 étrangers re-

présentent exactement 10 0/0, et les 838 Alle-

mands,

En

7,1 0/0.

présence

d'une

d'éléments étrangers,

on peut

semblable proportion et

surtout

allemands,

s'étonner de ce que jamais la

ne

protestation

soit

élevée

en

moindre

Allemagne

contre ce recrutement.

Je ne dis pas cela pour détourner contre les

Pays-Bas

le

ressentiment de nos voisins, mais

seulement pour montrer que tuelle n'a pas

campagne

ac-

pour seul objet de protéger des

compatriotes contre

ment aux

la

les risques

d'un engage-

colonies. Car, au témoignage d'un

officier qui a visité l'Insulinde, la vie est aussi 25


290

LA QUESTION DE LÀ LÉGION ÉTRANGÈRE:

pénible, sinon davantage, dans Farinée

colo-

niale néerlandaise qu'à la Légion, ne fût-ce

qu'en raison du séjour ininterrompu dans la région équatoriale; et l'on sait qu'au nord de

Sumatra,

D'autre

l'état

de guerre est permanent.

part, les

dans leur marifie des nalités, si bien

que

États-Unis

incorporent

hommes de

toutes natio-

voisinage sur rade d'un

le

navire américain est toujours considéré corn me «

non désirable » par

le

cadre d'un autre pays les

:

marins courent à

commandant dans terre,

les

d'une es-

bordées que

ceux des Etats-

Unis, dont la solde est relativement élevée,

déterminent souvent des désertions parmi les équipages des autres

flottes.

D'après les rapports fiscale

1911-1912,

la

officiels

pour l'année

marine des États-Unis

comptait en 1912, sur un total de 47.515 telots et sous-officiers

:

42.859 Américains de naissance, 2.875 naturalisés,

ma-


MARINS ÉTRANGERS, AUX ÉTATS-UNIS 1.781 étrangers

ou

291

natifs des colonies,

soit un total de 3,9 0/0 d'étrangers, ou 9,8 0/0 d'hommes non Américains de naissance. Sur

nombre,

'ce

il

y avait G36 Allemands, 435

Ir-

landais, 294 Suédois, 236 Anglais, 235 Chinois,

21

1

du

Japonais, et 30 à 40 Français. Le

24 novembre 1913, rapportait

trois de ces derniers servaient à

mont

et

Temps

même

que

bord du Ver-

de YOhio, alors à Marseille

et

;

il

ne

vint à l'idée de personne, en France, de s'éton-

ner de ce

de protester contre

fait et

la

d'aller visiter Paris et d'y

tume de marins

permis-

hommes

sion qui tut donnée à certains de ces

montrer leur cos-

étrangers.

Ainsi, la flotte américaine

compte dans

ses

marins allemands, auxquels

équipages 636

peut s'ajouter, proportionnellement au nombre total,

un bon

millier d'Allemands d'origine,

naturalisés Américains

rable au

ciens-Lorrains,

giments de n'ait

:

le total est

compa-

nombre des Allemands, non Alsala

existant dans

Légion.

jamais invoqué

A

quoi

les

deux

tient-il

les principes

du

ré-

qu'on droit


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

292

contre cette situation, alors qu'il ne s'agit pas

d'une troupe coloniale, mais bien d'équipages qui peuvent être amenés à combattre ceux de

marine impériale ?

la

%

Enfin, nous ignorons, en France,

magne

si

l'Alle-

attend effectivement de se trouver en

de guerre pour user de la faculté, qu'elle

état

réservée,

s'est

d'employer

étrangers. Ce que

textes cités plus haut,

blissent

des

nous savons,

volontaires c'est

les

au chapitre XXVII, éta-

que ces engagements ne sont nulle-

ment exclus a

priori dès le

temps de paix, à

permanent, tout au moins dans

titre

que

la

ma-

rine. Il

n'y aurait

donc pas

lieu de s'étonner si la

troupe coloniale contenait des étrangers,

et si,

par exemple, de ces hommes, engagés pen-

dant tés fais

la

au service après pas

les

Héréros, étaient res-

la fin

des hostilités. Je ne

guerre contre

ici

un procès de tendance analogue à

celui qu'on nous intente à propos des prétendus


MARINS ÉTRANGERS, AUX ÉTATS-UNIS 293 racoleurs (1)

;

j'énonce simplement une hypo-

thèse compatible

mande,

avec

et qui, si elle

la

législation

était vérifiée,

ne soulè-

verait nulle part de protestation. (i)

alle-

Voir page ioo.

25.


XXXI LA DUREE DU CONTRAT D ENGAGEMENT

Si

maintenant nous passons aux détails du

contrat d'engagement, nous trouvons qu'on lui

reproche sa durée,

comme

excessive. Sur

ce point, la critique semble fondée.

Les engagements à

la

Légion, en

effet,

ne

sont reçus que pour une durée de cinq ans, tandis

que

comme pour

les

rengagements sont

admis,

toute l'armée coloniale, pour un,

deux, trois ou cinq ans, jusqu'à concurrence

d'un total de quinze années de service. Il est

évident que la durée du premier en-

longue pour que

gagement doit

être assez

l'homme

temps de fournir un service

ait le

effectif appréciable. Si, tait

pour

lui,

par exemple, on adop-

comme pour

le

rengagement,


DURÉE DU CONTRAT D'ENGAGEMENT

minimum

tin

295

d'un an, l'Etat jouerait très

Même

souvent un rôle de dupe.

en admettant

que l'engagé connaisse suffisamment notre langue gine,

il

et qu'il ait servi

inutilisable, puisqu'il et

être incorporé

il

d'ori-

à son arrivée, qu'une recrue

n'est,

règlements

dans son pays

ne connaît rien de nos

de nos manœuvres

;

il

doit

donc

dans une compagnie de dépôt,

recevra l'instruction nécessaire. Et

n'avait à servir, en tout, que

deux ans,

il

ne rendrait pas à TÉtat l'équiva-

lent de l'argent

Algérie, ainsi

dépensé à

le

transporter en

qu'à l'entretenir

stage préliminaire

;

pendant

héberger à la Légion, pour

au moment même où

ils

la

une

se

quitter

seraient en état de

fournir la contrepartie du service reçu

n'aurons plus

ce

à tout instant, dés gens

momentanément embarrassés viendraient faire

s'il

pendant un ou

:

nous

un corps de troupe, mais

sorte d'asile de nuit.

Par contre,

le

terme de cinq ans, pour

le

premier engagement, est réellement trop long.

Non seulement dans

l'armée métropolitaine,


2%

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

mais dans Légion,

ans

les

la

l'engagement se conclut pour trois

et cette

;

troupes coloniales autres que

durée permettrait au légionnaire

de faire au moins deux ans de service colonial,

un séjour considéré comme

ce qui constitue suffisant

pour

fonctionnaires

les

coloniaux. Dans ces conditions,

boursé en travail instruction; et

les frais

si,

vient pas, ou

s'il

employés

aurait rem-

occasionnés par son

pendant

reconnu que l'existence à

il

et

la

ce temps,

Légion ne

il

avait

lui

con-

avait trouvé des motifs suffi-

sants de vouloir rentrer dans la vie civile, on

devrait considérer que sa dette est payée, et le laisser partir.

En

le

retenant pendant deux ans

déplus, on s'encombre d'un soldat médiocre, parce que de mauvaise volonté

;

on pousse à

l'inconduite et à la désertion; on diminue la

considération qui s'attacheau Il

nom delà Légion.

y a donc lieu d'examiner très sérieuse-

ment

l'idée

de réduire à trois ans la durée du

premier engagement.

On

continuerait, d'ailleurs, à conclure

les

rengagements, au gré des intéressés, pour un,


DURÉE DU CONTRAT D'ENGAGEMENT

297

deux, trois ou cinq ans. Mais pourquoi n'ad-

mettre qu'une durée totale de services unifor-

mément

égale à 15 ans?

ans,

un

homme

qui

s'est

engagé

retraité

quand

révolue. Or,

il

On

accepte, pour cinq

âgé de quarante ans,

et celui

dix-huit ans est forcément

à

sa trente-troisième

année

est

peut avoir intérêt à servir plus

longtemps, pour améliorer sa pension de retraite,

tion, est

ou pour attendre un grade, une distinc-

ou un emploi

civil; et, sauf accident,

encore en pleine vigueur morale

sique.

pour

Il

les

et

il

phy-

semble donc qu'on devrait admettre,

hommes

restés valides, la possibilité

de se rengager jusqu'à concurrence de 25 ans

de service, avec limite d'âge

à

43 ans

:

de

cette manière, celui qui s'engage à dix-huit

ans pourrait rester au service aussi longtemps

que

s'il

avait

attendu sa quarantième

née pour conclure

un engagement de

ans. Bien entendu, les

hommes

antrois

retraités

au

bout de 15 ans de service conserveraient leurs droits à la pension actuelle, et les autres re-

cevraient des annuités supplémentaires.


XXXII SUR LE PRÉTENDU CARACTÈRE LÉONIN

DU CONTRAT

En

ce qui

concerne

caractère

le

qu'un organe aussi sérieux que Francfort

croit devoir

d'engagement,

la

la

imputer

léonin

Gazette de

au contrat

deuxième partie de ce

travail

a suffisamment montré l'inanité des faits invo-

qués pour

le justifier.

Mais

n'est

il

pas inutile

d'y revenir brièvement.

Donc, on reproche à

aux engagés un service

la

Légion d'imposer

excessif, tout en

ne

fournissant en échange qu'une rémunération dérisoire, et rielles et

une existence de privations maté-

de misères morales

;

et c'est

par un

véritable abus de confiance que de pauvres


PRÉTENDU CARACTÈRE LÉONIN

299

égarés seraient amenés dans cet enfer, sans

avoir pu soupçonner à quoi

s'exposaient.

ils

Sans vouloir tracer un tableau idyllique dont l'invraisemblance ferait sourire,

il

faut pro-

tester avec indignation contre des assertions

aussi éloignées de la réalité.

Le

service, à la Légion, est ce qu'il est.

A

moins de raisonner comme des enfants nourris

de romans d'aventures, on ne saurait

s'at-

tendre à ce que la vie des légionnaires, consacrée à la conquête, à la défense et à la première

mise en valeur de contrées à peine connues, soit

comparable à

de commerce, ou

dans une bonne

celle

d'un paisible employé

même

d'un soldat stationné

petite garnison de la

métro-

pole.

Quant à elle

la

rémunération de ce service,

ne comprend pas seulement l'argent de

poche qui, pendant

le

premier engagement, est

le

même

il

faut y ajouter l'entretien qui,

que celui du troupier métropolitain

on

l'a

;

vu, est

tout à fait satisfaisant, les chances d'avance-

ment, une pension de retraite gagnée en quinze


300 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE ans seulement,

et la possibilité d'obtenir la

naturalisation dans

un

délai réduit

suite,

un emploi

niale.

Tout cela constitue un

civil

et,

par

la

ou une Concession coloassurément

sort,

médiocre aux yeux d'un millionnaire, maisj bien supérieur à celui que la plupart des

gionnaires avait au

On

service.

est ici

moment

lé-

de leur entrée au

en présence d'un cas bien

net d'application de la loi de l'offre et de la de-j

mande. Telle qu'est

la Légion, elle attire

coup plus de candidats qu'e

beau-

n'en peut in-

ie

corporer; on n'a donc aucun motif pour aug-

menter

les frais qu'elle

ce serait

un pur

— Mais, nous ici

occasionne au budget

;

gaspillage. dit-on, la République spécule

sur la misère de ces pauvres diables

;

elle j

ne leur accorde, pour prix de leurs services, qu'un salaire de famine.

A

notre époque, où

PEtat s'inquiète partout du sort vailleurs par leurs employeurs,

fait

il

aux

tra-

doit, tout le

premier, améliorer les conditions de travail qu'il

impose à

ses propres agents.

Le reproche aurait plus de

valeur,

s'il

éma-

\


PRÉTENDU CARACTÈRE LÉONIN nait d'un pays

301

l'exploitation des travailleurs

serait impossible. Or, sans doute, l'Allemagne

possède une législation ouvrière très avancée, et les lois

d'assurance

et

de protection y sont

particulièrement développées. Mais ces lois ne

peuvent aller jusqu'à garantir à l'ouvrier des conditions de travail qui, dans leur ensemble, soient seulement comparables à celles de la

Légion. J'ai eu l'occasion, par exemple, au

cours de certaines longues traversées, de

me

rendre un compte précis des conditions qu'une

grande compagnie allemande de navigation fait

à son personnel, depuis

qu'au dernier chauffeur

et

le

capitaine jus-

aux gens de service

;

eh bien, sans entrer dans des détails qui seraient déplacés

ici,

je puis dire que,

pour

les

officiers, ces

conditions sont des plus médio-

cres, et que,

pour

le

personnel inférieur,

sont franchement inhumaines. être légionnaire feur,

elles

Mieux vaut

que matelot de pont, chauf-

ou steward à bord d'un de

ces

ba-

teaux. Il

est

néanmoins intéressant de constater 26


302 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE qu'un auteur, en France, a reconnu

qu'il

y avoir quelque chose à réformer dans

peu

l'orga-

nisation de la Légion, et que ses proposition

tendent uniquement à améliorer sur quelque: points la situation matérielle des je

1

hommes

veux parler de M. André Fribourg

dernier article de la série qu'il a publiée

et di

dam

Y Opinion (13 décembre 1913).

En premier lise

lieu,

il

pour qu'on

insiste

réa-

enfin la création, proposée en 1904, adop-

Sénat en 1908,

tée par le

lors à la

et oubliée depuis

Chambre des Députés, d'un régiment

étranger de cavalerie

et

d'un bataillon étran-

ger d'artillerie. Cette

mesure

est

demandée par beaucoup

de légionnaires qui, ayant servi dans ces armes, passeraient avec joie dans les nouvelles subdivisions;

elle

d'un grand

du cheval

déterminerait

l'engagement

nombre d'hommes qui ont

et

répugnent à marcher,

dos, sous le soleil des tropiques

augmenterait notablement de

la

Légion, dont

elle

la

;

le

le

goût

sac au

enfin, elle

valeur militaire

ferait

une véritable


PRÉTENDU CARACTÈRE LÉONIN petite

armée.

On

ne peut que

aux pouvoirs publics

En second

lieu,

la

303

recommander

(1).

les légionnaires

sont très

désireux de voir améliorer leur solde. C'est là

un sentiment

très naturel, et qu'ils

partagent d'ailleurs avec tous les militaires

et

tous les fonctionnaires de tous les pays.

Pour

les raisons

exposées plus haut, cette

mesure ne semble pas indiquée actuellement, en ce qui concerne

simples légionnaires ac-

les

complissant leur premier engagement le serait

encore moins

si,

et elle

;

comme nous

pro-

le

posons, la durée de cet engagement était ra-

menée de cinq à d'y recourir

que

ans.

trois si le

Il

n'y

aurait lieu

nombre des engagés

ve-

nait à fléchir sensiblement. Déjà pendant

(i)

deux escadrons «

la

guerre

étrangers,

à

du Mexique, on 200 hommes

compagnies montées » actuelles ne sont pas de

lerie

;

elles

possèdent

simplement un

formé

a

chacun. Les

mulet

la

cava-

par

deux

tommes, de sorte que leurs hommes, en route, puissent reposer alternativement. Elles constituent

nontée 3as

»,

ou plutôt

prendre

oroprement

les

dite,

«

demi-montée

allures

vives

où tout

le

«

», car elles

comme

monde

une

ne peuvent

l'infanterie

est à cheval.

se

infanterie

montée


304 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Mais des avantages, dans il

le détail

desquels!

est inutile d'entrer ici, pourraient être ac-

cordés aux rengagés, sous forme de hautes |: paies et de primes.

Et surtout,

il

importe de

faire disparaître ai

plus tôt l'anomalie incompréhensible qui

que

la

pour

fai

solde et la haute paie sont moindres

étrangers

les

c'est là

que pour

les

Français

une injustice dont l'absurdité

saute

aux yeux. Mais tout

cela, ce sont

de petites améliora-

tions de détail, d'un caractère administratif e intérieur, et qu'on être complet. Si

on

ne mentionne les réalise,

ici

!

que poui

on verra venir

plus de postulants, et l'on aura donc plus

de

choix entre eux. Mais en attendant, la situation actuelle ne justifie certainement pas

h

tapage qu'on mène, outre- Rhin, à son sujet. Ainsi,

il

suffirait

de répondre aux critique:

allemandes par l'argument classique des éco nomistes, par l'invocation de la et

loi

de

l'offr<

delà demande.

Mais on a vu plus haut à quel point ces

cri


PRÉTENDU CARACTÈRE LÉONIN

exercent table.

peu fondées. Les

sont

tiques

un métier

Mais

ils

à cet égard.

sont avertis de ce qui les attend

Ils le

savaient certainement avant

— personne n'est

fou pour s'imaginer que soit

tionnaire oisif

légionnaires

pénible, cela est incontes-

de songer à s'engager

aux colonies

305

;

le

service militaire

une sinécure de

et,

avant de

assez

les

petit fonc-

engager, on a

eu soin de leur rappeler qu'ils allaient contracter de dures obligations.

Par contre, leur existence matérielle assurée dans des

est

conditions excellentes, su-

périeures en tout cas à celles que la plupart d'entre eux pourraient se procurer dans la vie civile, et

celles

qui ne craignent la comparaison avec

d'aucun régiment de leur pays d'origine.

Enfin, quant à leur traitement moral, ce

qui est certain, c'est que pour ces

dont

la

hommes,

plupart sont des épaves de la vie, vic-

times soit du sort, soit de quelque faute qu'ils

veulent racheter,

il

représente

le

réconfort et

le salut.

Sans doute, quelques voix isolées prétendent 26.


306

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

avoir rapporté de la Légion une impression contraire.

Accordons que, parmi

les

confé-

renciers qui scandalisent tellement les oreilles

allemandes, parmi

les

Hasselmann,

les Merti-

nat,les Kull, et autres personnages douteux

même

acabit,

il

du

se trouve réellement quelques

anciens légionnaires qui aient

été-

maltraités

par des chefs indignes. Ne constate-t-on jamais des abus individuels analogues dans d'autres armées?... Je n'insiste pas; certaines comparaisons seraient trop faciles, la presse libérale et socialiste

et je les laisse

allemande.

à


XXXIII

LES DÉLINQUANTS

ET LES FAUSSES DÉCLARATIONS D'iDENTITÉ

La question de l'engagement d'hommes poursuivis

ou condamnés pour des crimes ou dé-

lits de.

droit

commun

complexe.

est fort

Je crois avoir montré, par des exemples assez probants,

combien il

fermer

de salut que la Légion ouvre à

la porte

serait regrettable

de

ceux de ces dévoyés qui ont conservé assez de

bons sentiments présenter

de

:

et

la société, la

compassion

geant de l'assisté

me

de ressort pour venir

au point de vue de

et

un énergique

semblent, en pareil cas*

l'intérêt

général

une aide

effort

pltfs

s'y

exi-

personnel

recomman-


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

308

dables qu'une froide rigueur confinant

au

pharisaïsme.

Or donc, pour pouvoir engager dignes d'intérêt

et qui,

ces sujets

si

grâce à leur volonté de

réhabilitation, deviennent

les

plus merveil-

leux soldats, on a imaginé l'expédient consistant à n'exiger aucuns papiers de ceux qui,

n'en produisant pas, sont ou se disent étrangers.

sur

de

De

la

manière, on ignore ce qu'ils ont

cette

conscience, et l'on échappe à l'obligation

les refuser,

tice s'ils se

ou

même

de les livrer à la jus-

trouvent sous

le

coup d'une pour-

suite. Il

est tout à fait indispensable

la possibilité

d'engager ces

de se réserver

hommes,

et

de leur

garantir le secret absolu sur leur passé.

La

première sécurité nécessaire à ceux qui de-

mandent

asile à la

aient à cacher

Légion consiste à y être

un nom d'emprunt,

soit qu'ils

une faute quelconque,

soit qu'ils;

incorporés sous

aient simplement des raisons intimes

famille pour désirer leurs camarades, ni

n'être pas

même

ou de

connus. Ni

leurs chefs ne doi-


LES FAUSSES DÉCLARATIONS D'iDENTITÉ

309

vent pouvoir pénétrer leur pénible secret, qui permettrait, soit de les molester, soit de les

tourmenter sans intention malveillante

et

par

simple indiscrétion. La certitude de pouvoir ainsi s'enterrer vivant constitue la force prin-

cipale et la valeur propre de la Légion, et ci-

mente entre

ses soldats

une camaraderie, une

solidarité inébranlable, qui

solide qu'on

la plus

en font

puisse

la

troupe

concevoir, une

troupe qu'aucun ennemi n'a jamais pu mettre

en échec.

Mais

il

y a pourtant quelque chose^de cho-

quant à ce que arme,

la

l'on puisse confier ainsi

une

garde d'un drapeau, une parcelle de

l'autorité publique, à

un anonyme dont

sonne ne connaît

véritable identité, dont

la

personne n'a pu apprécier

avec une indulgence excessive

de relèvement.

Il

est

fût-ce parfois

— la

capacité

plus grave encore de

s'exposer de la sorte à accepter le répète, le

per-

bien que, je

cas ne puisse se présenter que ra-

rement, des êtres réellement abjects, dont on

devra subir

la

présence pendant assez long-


310 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE temps, jusqu'à ce qu'ils désertent ou se soient

mis dans

que

l'on

le

cas d'être chassés. Et, enfin, puis-

juge

utile, et

éventuellement

le

avec raison, d'assurer

secret

mêmes

doit,

dans

çais,

ouvertement, sans

les

on

aux étrangers,

cas, l'accorder

aux Fran-

les astreindre

au sub-

terfuge consistant à se dire étrangers.

Or, tout cela peut se concilier sans peine.

A

cet effet,

l'homme

qui,

au moment de

s'en-

gager, ne fournirait pas le dossier prescrit par le

règlement, serait tenu de montrer ses pièces

d'identité

seul

:

s'il

au sous-intendant ne possédait pas

militaire, et à lui

dites pièces,

les

devrait faire connaître son identité à cet cier supérieur, en lui

donnant

le

procéder à une vérification rapide

il

offi-

moyen de et

discrète

de sa déclaration. L'engagement serait accepté,

en tout lité il

état de cause, sous le

choisis par l'intéressé

serait révocable

;

nom

et

la

qua-

mais, on va voir,

dans certains

cas.

Les renseignements recueillis seraient expédiés, sous pli scellé, par le sous-intendant,

agissant toujours

en personne, au général


LES FAUSSES DÉCLARATIONS D'IDENTITÉ 311

commandant

Légion, qui

la

droit d'en prendre les

aurait seul le

connaissance,

conserver ensuite sous un

pli

lui-même. Le général statuerait

devrait

et

par

scellé

définitive-

ment sur les engagements réservés par

le

sous-

intendant.

Même

les colonels

giments de

la

commandant

les

deux

ré-

Légion continueraient à rester

dans l'ignorance au sujet de

l'identité

de cette

catégorie de légionnaires, afin de ne pas pou-

voir

par

se

laisser

influencer involontairement

connaissance de leurs antécédents,

la

et

de

ne pouvoir tenir compte que leur conduite au corps des ainsi

et

de leurs services, dans l'attribution

grades de caporal

que dans

les

et

de

sous-officier,

propositions pour la

mé-

daille militaire.

On

peut s'étonner que je propose ainsi d'exi-

ger une déclaration destinée à n'être connue

que du sous-intendant ter secrète

et

du général,

consentir à sa divulgation.

à cela.

et

à res-

jusqu'au jour où l'intéressé pourra Il

y a deux motifs


312 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

En premier refuser

un

on aura

lieu,

certain

ainsi le

nombre

moyen de

d'engagements.

Bien entendu, on continuait à être très large ^t à admettre des le

hommes

qui seraient dans

cas d'être exclus des autres corps de l'ar-

mée mais ;

il

existe pourtant des crimes par-

eux-mêmes ou

ticulièrement répugnants en

par

qui les ont entourés, ou

les circonstances

des cas de récidive ou de

folie criminelle,

dont

auteurs devraient pouvoir être refusés,

les

comme que

le

des non-valeurs morales, aussi bien

service

du recrutement

refuse les non-

valeurs physiques.

Mais à cet égard, être laissée

tenir la

la décision

au sous-intendant

:

ne peut pas

elle doit

au général, responsable de

appar-

de

la valeur

Légion, et seul compétent pour apprécier

-caractère et les besoins de cette troupe.

le

Un

sous-intendant, guidé surtout par des considérations juridiques,

aurait

pu refuser

les

.-engagements CherfHs et Duron, mentionnés

aux pages 174 les aurait

et 175

:

le

général

commandant

certainement acceptés,ofïrant à deux


LES FAUSSES DÉCLARATIONS D'iDENTITÉ 313 jeunes dévoyés

le

droit chemin, et

moyen de

rentrer dans le

donnant au pays deux bons

serviteurs.

Les

hommes

refusés par le général seraient,

demandaient, reconduits au lieu où

s'ils le

s'étaient présentés

sanction, pas

cerne

pour s'engager. Mais aucune

même

l'expulsion en ce qui con-

les étrangers, ne

contre eux

ils

:

pourrait être

prise

seraient sous la sauvegarde de

militaire

l'autorité

ils

à laquelle

s'étaient

ils

confiés.

A

cela,

Dans

deux objections.

l'ordre pratique,

tera de là,

pour

l'Etat,

on notera

qu'il résul-

une dépense sans com-

pensation. Tous les criminels en rupture de

ban

donc pouvoir

vont-ils

pendant quelques jours,

un

petit

«

se faire offrir

aux

frais

de

la

?

Ce danger en

se faire héberger

même

voyage en Algérie

princesse »

soi,

et

effet,

n'est guère à redouter.

que toutes

Il

les dispositions

va de

qui pré-

cèdent seraient inscrites sur les actes d'enga-

gement,

et

que

le

sous-intendant aurait 27

le

de-


314 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE voir d'en donner connaissance aux intéressés,

en

même

temps que, dans

les cas

douteux,

il

avertirait ces derniers que leur engagement n'est signé qu'à titre révocable.

ditions,

il

est

Dans

ces con-j

peu probable qu'un bien grand

nombre de criminels endurcis persistent dans leur intention de

s

méfiants par essence est offerte

engager. Ces gens :

la

sont

sauvegarde qui leur

ne leur dira rien qui

vaille, et ils

au-

ront peur de se jeter dans la gueule du loup.

On peut donc compter que îe nombre des hommes sur lesquels le général devra prononcer négativement sera très

pense résultant de

minime. Et

leur voyage

sera

la dé-

com-

pensée par l'économie des journées de prison qu'ils

ne manqueraient pas de faire une

fois

engagés, par l'assainissement de la Légion,

par

la

suppression de tout prétexte aux récri-

minations qui courent contre

elle.

La seconde objection soulevée par mentation proposée

ici est

la régle-

d ordre juridique,

ou mieux, d'ordre public.

Dans quelle mesure

est-il

admissible que


%

LES FAUSSES DÉCLARATIONS D'iDENTITÉ des fonctionnaires, des

officiers, ayant

naissance d'un crime ou d'un

pas

coupable à

le

curent

Ne

moyen d'échapper

le

délit,

deux ans de prison

pour des motifs

non

déci-

faciles à saisir, la

exception en faveur des proches pa-

du

malfaiteur, père ou mère,filsou

époux, frère ou sœur, Il

mois à

?

L'objection est troublante, mais

rents

pro-

pas coupables du délit de

se rendent-ils

loi fait

lui

à la répression?

recel de malfaiteurs, passible de trois

sive. Déjà,

eu con-

ne livrent

même

la justice, et

315

est facile

et alliés

au

même

fille»

degré.

de concevoir une exception ana-

logue pour les sous-intendants militaires et

pour

le

commandant

général

la

Légion, en

matière de recrutement de cette dernière. Les confidences que ces officiers auraient reçues à ce propos les obligeraient

de vue de la

loi

comme

silence,

au point

à celui de l'honneur;

elles seraient inviolables la confession, ou,

au

comme

pour mieux

le

secret de

dire, elles

titueraient leur secret professionnel.

cons-


XXXIV LA QUESTION DES MINEURS

Il

un second

existe

périeux,

motif, tout à fait im-

d'exiger toujours des candidats la

déclaration effective et contrôlable identité

:

c'est la nécessité

ont bien l'âge requis signer Il

un

et la

de leur

de s'assurer

qu'ils

capacité civile de

contrat.

faut convenir, en effet,

certaines protestations des

que sur ce point

Allemands

sont

justifiées.

Assurément, expriment désir

ou

la

ils

vont trop loin

quand

revendication, ou simplement

l'espoir

ils

le

que nous supprimions tout

engagement d'hommes de moins de vingt

et

23 décembre 1913,

le

un ans. Par exemple,

le


LA QUESTION DES MINEURS

317

correspondant berlinois de V Humanité téléphonait à ce journal (numéro du 24) velle suivante

Le Berliner Tageblatt

çais avait

nou-

avait affirmé, hier, avoir ap-

de source autorisée que

pris

la

:

gouvernement fran-

le

décidé de ne plus admettre dans la Légion

étrangère que des engagements de personnes

ayant

accompli leur vingtième année.

Le Journal cette nouvelle geblatt,

des Débats

est

prend

Berlin, le Berliner Ta-

dans son édition de mercredi, maintient son

affirmation antérieure. Il

ayant opposé un démenti à

du journal de

— G. W.

bien certain que l'organe berlinois

ici

son désir pour une

con-

réalité, et

firme ses lecteurs dans une espérance chimé rique. Si,

en

effet,

on examine

la question

pirant d'un esprit positif et

en

s'ins-

non d'un sentimen-

talisme vague et stérile, on reconnaîtra que le

fait

d'enrôler

un mineur

rien de répréhensible,

pour

le service, et

prises

n'a en

soi-même

quand l'homme est bon

que toutes garanties sont

pour que sa signature

soit valable. 27.


318 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE Sur

le

premier point, rien à dire

que, dans l'intérêt

même

physique des candidats

de

l'Etat,

:

on

sait

l'examen

est aussi sévère qu'il

convient.

Mais quant à il

la

validité

de l'engagement,

y a certainement un progrès important à

accomplir.

Pour s'engager dans troupe,

un mineur

doit,

tout autre corps de

en

avoir l'âge de

effet,

18 ans au moins, et être autorisé par son père

ou son gion,

tuteur.

on

même,

Mais pour l'admettre à

s'il

est

ou

se dit étranger, la

qu'il a réellement 18

tant,

il

s'agit ici

ment

Léni

preuve

ans accomplis. Et pour-

d'un contrat de plus longue

durée que l'engagement ordinaire, grave, puisqu'il comporte

colonies,

la

n'exige de lui ni l'autorisation,

le

et

autre-

service

une discipline particulièrement

aux sé-

vère, et de fréquents risques de guerre ajoutés

à ceux qui résultent du climat.

Il

conviendrait

donc de protéger, au moins aussi bien que dans

le

cas général, les familles et les mineurs

eux-mêmes contre un coup de

tète irréfléchi.


LA QUESTION DES MINEURS

moins qu'on puisse

Ainsi, le

faire,

319 sur ce

point, est d'appliquer à la Légion les condi-

commun

tions qui sonT de droit

armée,

et

l'armée

néerlandaise, c'est-à-dire

coloniale

minimum

d'exiger l'âge

sation

dans notre

qui sont également en vigueur dans

du père ou du

de 18 ans

véritablement

s'indique

et l'autori-

tuteur. Cette réforme

comme un

devoir

d'ordre public, sous la réserve qui sera indi-

quée plus bas.

Mais par

nous sommes ramenés aux con-

là,

sidérations qui

précèdent,

sur la nécessité

d'obliger les candidats à faire connaître leur identité véritable.

Sans doute, dans en

présentent

n'est possible, et le

ment majeur. Et ter

de réformer

cas où

vue

si

il

est

et

aucune

l'on pourrait

le

hésitation

candidat est bien visible-

donc

se conten-

règlement en prévision des

impossible de discerner à simple

l'homme

de vingt

la plupart des cas qui se

pratique,

un

a

un peu plus ou un peu moins

ans. Par exemple, à la disposi-

tion établissant

que les candidats peuvent

être


LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

320

dispensés de produire des pièces d'identité, on ajouterait que cette faculté n'est applicable

qu'à ceux qui sont manifestement majeurs.

On

fournirait ainsi toute la satisfaction désirable

à cet égard, sous la responsabilité des médecins militaires, des

ment

et

commandants de

recrute-

des sous-intendants.

Mais ces

officiers

peuvent se tromper. Et,

d'autre part, les considérations morales exposées plus haut, en faveur de la suppression de

toute exception de ce genre, sont impérieuses.

En

s'y

ties à

rendant, sous la réserve des garan-

donner aux

hommes

corporés sous un état

dra du

même

civil

désireux d'être in-

supposé, on résou-

coup, et sans laisser subsister la

possibilité d'une erreur, la question très déli-

cate de l'engagement des mineurs.

Mais

cette question est

fâcheusement com-

pliquée par l'observation suivante.

La campagne contre pour tous ceux qui

s'y

la

Légion

est,

sinon

sont laissé entraîner,


LÀ QUESTION DES MINEURS

du moins pour politique

ses promoteurs,

qu'humanitaire.

que jamais

elle n'a

321

bien plutôt

La preuve en

est

eu d'écho hors d'Allema-

gne, et que jamais, dans ce

pays on ne

s'en

est pris à l'armée coloniale néerlandaise, alors

qu'en face de 6,7 0,0 d'Alsaciens-Lorrains

de 17,6 0/0 d'Allemands,

étrangers,

30,5 0/0 d'autres

mands forment

la

à

eux seuls

et

Légion compte et

que

les

les

Alle-

71,2 0/0 des

étrangers entrés au service des Pays-Bas.

Dans

ces conditions,

il

est facile

d'imaginer

quelle serait en Allemagne, et surtout en Al-

sace-Lorraine, la situation d'un père ou d'un tuteur qui aurait autorisé son à s'engagera la Légion

toute la

il

ou pupille

aurait à ses trousses

meute des pangermanistes,

les autorités,

pire, et

:

fi's

il

qui

le

ainsi

que

mettraient au ban de l'Em-

se verrait persécuté d'une

manière

intolérable. C'est

pourquoi on peut hésiter devant

l'idée

d'une réforme qui entraînerait de semblables représailles

;

et

M. Poimiro, notamment, y

tout à fait opposé.

est


322

LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

Il

semble pourtant qu'on puisse tenir un

juste compte de la situation

que

véritables otages

si

intéressante des

engagés mineurs,

les

originaires de l'Empire allemand, laisseraient

au pays.

En

effet, le

jeune

homme

siens pour s'expatrier

qui se sépare des

rompt par

sans l'autorisation paternelle,

se crée

Il

velle,

en

sa

famille.

une existence indépendante,

bout d'un certain temps de

on peut

le

considérer

qui

les liens

normalement à

rattachaient

le

avec ou

là,

cette

et,

au

vie nou-

comme émancipé

fait.

Autant donc

il

est

choquant qu'un mineur

puisse s'échapper de chez ses parents pour aller s'engager à la Légion, autant

il

légitime qu'après avoir émigré et vécu tain

temps par

ses propres

vienne libre d'embrasser

la

moyens,

semble

un

cer-

il

de-

carrière de son

choix, sans consulter l'autorité familiale dont il

a cessé de recevoir l'impulsion.

Aussi semble-t-il qu'on pourrait admettre ce

moyen terme

:


LA QUESTION DES MINEURS j

Tout mineur qui désire contracter un en-

gagement à

la

Légion étrangère

est

tenu de

produire l'autorisation de son père ou tuteur. «

Est dispensé de cette condition

dont

le

le

mineur

père ou tuteur réside à l'étranger, et

qui réside lui-même en territoire français depuis six mois au moins. »

De

cette façon,

on épargnerait aux familles

le

danger signalé plus haut. Les Alsaciens-Lorrains et les Allemands, qui sont seuls à ris-

quer d'être molestés pour cette raison, en seraient quittes pour aider leur

à subsister pendant quoi,

ils

le

fils

ou pupille

délai prescrit

;

après

ne pourraient plus être rendus res-

ponsables de son engagement


XXXV LE RÔLE POSSIBLE DE L'ARBITRAGE

ET LE RAPPROCHEMENT FRANCO-ALLEMAND

Enfin, on devra donner la plus grande atten-

M. H. Pohl, rapportée

tion à la suggestion de

plus haut, et

d'un

recommandant

traité d'arbitrage

la

permanent,

questions qui peuvent surgir du

conclusion relatif

fait

de

aux

l'exis-

tence de la Légion. L'idée, telle que la présente l'auteur, est peu praticable; mais, à la

condition de

on peut en.

l'éclaircir,

de

la

tirer l'indication

mettre au point, d'une action

effi-

cace.

Depuis longtemps, la

les pacifistes

préconisent

conclusion d'un traité d'arbitrage perma-

nent, sans réserves, entre l'Allemagne et la


LE RÔLE POSSIBLE DE L'ARBITRAGE France,

comme

325

entre les autres pays. Et le

jour viendra, sans aucun doute, où ces puis-

sances se décideront à assurer

la solution ju-

ridique de tous leurs différends éventuels, et établiront ainsi

fondement qui

la

paix du

monde

soit inébranlable

sur

la

:

le

seul

bonne

foi

et la confiance mutuelle.

Mais, dans idée

n'a

l'état

actuel des choses, cette

évidemment aucune chance

réalisée d'emblée

ration attentive.

:

elle exige toute

S'il

est vrai,

en

d'être

une prépa-

effet,

pacifistes français sont en droit de

que

les

regretter

que, depuis 1904, leur gouvernement n'ait en-

core contracté que 13 traités d'arbitrage per-

manent, quand

le

Brésil en a

Etats-Unis 27, l'Espagne 24,

signé 31, les

l'Italie 21, la

si-

tuation est encore bien plus fâcheuse du côté

de l'Allemagne, qui n'en a qu'un seul à son actif.

On

a bien essayé, en 1907, à la deuxième

Conférence de La Haye, d'entraîner ce pays

dans

un

proposant

vaste la

mouvement d'ensemble, en

conclusion d'un

traité 28

gêné-


32G LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE: ral d'arbitrage, qui aurait lié les 44

puissances

représentées à la Conférence. Mais bien que idée ait été examinée sous toutes les

cette

formes possibles, puisqu'elle ne donna pas à

moins de huit

qu'elle ait rallié

projets très

la

distincts,

et

lieu.)

bien

grande majorité des

suffrages (32 voix contre 9, et 3 abstentions),

échoua, précisément en raison de l'oppo-

elle

sition

de l'Allemagne.

On

dut,

pour

cette fois,,

contenter d'un vote de principe, qui fut

se

rendu à l'unanimité en faveur d'un

dû à

vœu

réser-

vant l'avenir

et

énergique

habile de M. Léon Bourgeois.

A

et

la

persévérance à la fois

que propose M. Pohl,

la vérité, ce

traité d'arbitrage

c'est

un

qui ne porterait pas sur tous

les différends éventuels,

mais seulement sur

ceux

et

relatifs à la

serve,

dont

j'ai

abusif, des cas

Légion,

montré plus haut

le

caractère

que l'Allemagne jugerait de-

voir être exclus. Or, il

encore, avec la ré-

même dans ces conditions,

ne semble pas que

la caste

qui dirige ac-

tuellement la politique étrangère de l'Empire soit

disposée à admettre une convention por-


LE RÔLE POSSIBLE DE L'ARBITRAGE

327

tant jsur toute une catégorie déterminée de différends possibles.

Mais, qu'ici,

si

l'Allemagne a toujours refusé, jus-

de se

absolue

et

lier

par l'arbitrage d'une manière

permanente, on n'en

est pas

moins

obligé de reconnaître qu'elle a déjà recouru

assez fréquemment à des arbitrages occasionnels pour résoudre, sans emploi de la violence,

des difficultés dont

la

diplomatie n'avait pu

venir à bout. Et parmi ces conflits, certains

extrême gravité,

étaient d'une

exemple ceux des Carolines <1899), et de Il

importe

Casablanca

même

comme

(1885), des

par

Samoa

(1908).

de souligner que, dans

cette dernière circonstance, c'est l'Allemagne

qui proposa

peu de

cas,

le

recours à l'arbitrage, alors que

mieux que

celui-ci, auraient per-

mis d'invoquer, de part

et d'autre, le prétexte

de l'honneur national offensé. Quelle

était,

en

effet, la

situation ?

Des

militaires français avaient repris de force, entre les

mains d'agents subalternes du consul

allemand, six légionnaires dont ce dernier


328 LA QUESTION DE LA LEGION ÉTRANGÈRE avait facilité, sinon provoqué la désertion, et qu'il prétendait faire

tection, alors

même D'un

que

embarquer sous

sa pro-

d'entre eux n'étaient

trois

pas sujets allemands. côté, donc,

tional allemand,

nous voyons l'honneur na-

pouvant exiger une applica-

tion aveugle de l'article 3 de la Constitution

impériale, qui dit, à son paragraphe 6

:

«

Vis-

à-vis de l'étranger, tous les Allemands ont droit égal à la protection de l'Empire

mandant, en outre, réparation pour de

fait

de-

les voies

exercées à l'égard d'un garde marocain

attaché à et

», et

un

un agent diplomatique allemand

;

de l'autre côté, nous trouvons l'honneur na-

tional français, exigeant

allemand respecte par

le

que

le

gouvernement

contrat librement signé

les légionnaires, et

demandant satisfaction

contre cet agent diplomatique qui cherchait à

désorganiser nos troupes en temps de guerre,

en créant à côté

d'elles,

en territoire soumis à

notre autorité militaire, une agence de désertion opérant ouvertement, à la barbe de cette autorité.


l' ARBITRAGE

329

en puissance, des casus

belli,

LE RÔLE POSSIBLE DE Il

y avait

là,

de quoi mettre semaines, du

1

le

er

feu à l'Europe. Or, en trois

au 22 mai

de cinq arbitres arrangea toute agitation, par

un

1909,

un tribunal

l'affaire et

mit

fin

à

jugement de

véritable

Salomon.

La première conclusion à s'il

arrive

présence, néral

une autre

fois

tirer

qu'on se trouve en gé-

brochures, articles, conférences,

ment allemand aura vra d'abord

la traiter

prit de conciliation ;

puis,

le

gouverne-

prise en mains,

on de-

avec llattention

et l'es-

que mérite toute démarche

si la

solution tarde à interve-

nir par la voie diplomatique, et

que l'opinion

publique risque donc de s'énerver, proposer

le

le

il

recours à l'arbitrage, que

vernement allemand ne pourra

donné

est que,

non plus de polémiques d'ordre

mais d'une espèce définie que

officielle

delà

faudra le

gou-

refuser, étant

précédent existant.

Mais il y a plus. Si ce gouvernement s'est malheureusement montré, jusqu'ici, le plus réfractaire de tous à l'idée des traités d'arbi28.


330 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE trage applicables à tous les différends futurs,

nullement témoigné

n'a

il

l'égard des clauses

la

même

défiance à

compromissoires spéciales,

par lesquelles on s'engage à soumettre à bitrage certaines

l'ar-

catégories déterminées de

différends.

remarque ne s'adresse pas seulement

Cette

aux

traités

de commerce

et

autres conventions

analogues, où l'introduction delà clause com-

promissoire

depuis 1823, devenue peu à

est,

peu de pratique constante admise, en traités

dans

du

:

cette clause a

été

par l'Allemagne dans des

de tout autre nature,

les

11

effet,

et

notamment

deux conventions franco-allemandes

novembre

1911, relatives

au Maroc

et

au Congo. Or, ce sont

des conventions politiques au

premier chef,et pouvant donner ficultés de souveraineté, flits

à

main armée,

lieu à des dif-

de frontière, de con-

bref à toute la série des

cas à propos desquels on a coutume de ré-

questions

server

les

ou

intérêts vitaux.

les

intéressant Et, en

l'honneur

outre, c'est à


LE RÔLE POSSIBLE DE L ARBITRAGE

331

la suite d'une crise des plus graves, au cours iïe

laquelle btien des gens ont

pu

croire à rim-

ai inence de la guerre, que Ton est convenu de

conjurer désormais par l'arbitrage toute autre* crise de

même

origine, sans exception ni ré-

serve.

Qu'est-ce à dire, sinon que, les deux gouver-

nements comme

deux peuples ne voulant

les

pas se lancer dans une guerre d'extermination, la vision subite

reur a

suffi

du danger dans toute son hor-

pour emporter toutes

les

résis-

tances qu'une diplomatie surannée opposait à l'œuvre bienfaisante de l'arbitrage

on pas conclure de logue, suscité par

un

différend relatif à la Lé-

mêmes

cours au

même remède?

craintes détermineront

pourra-t-on objecter

attendre l'heure du danger

économiser une

Et ne doit-

qu'au cas de danger ana-

gion, les

— Mais,

?

crise,

tenant à conclure

le

?

ici,

le re-

pourquoi

Pourquoi ne pas

en cherchant dès maintraité

préconisé

par

M. Pohl?

— Parce qu'en

agissant dans ce sens, on


332 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE tournerait le dos aux précédents que nous offre

de l'arbitrage, qu'on n'aurait

l'histoire

donc que

peu de chances d'aboutir,

fort

et

qu'une négociation aussi délicate ne doit être entreprise que

à peu près certain du

si l'on est

succès. Jusqu'ici, en effet, les conventions d'arbi-

trage sont toujours nées des circonstances sui-

vantes

Ou un

:

bien,

un

conflit s'étant élevé,

acte spécial,

venant de est celui

le

ne concernant que

on conclut lui, et

soumettre à des arbitres. Ce cas

de l'arbitrage occasionnel, qui per-

mit de résoudre l'incident de Casablanca

Ou

con-

bien, concluant

;

une convention quel-

conque, d'ordre général, on y introduit clause compromissoire. Cest tés

le

la

cas des trai-

de commerce, traités d'extradition, traités

instituant

l'Union Postale universelle et les

autres Unions analogues, etc.

Ou

encore, on conclut

mettre fin à un conflit,

moyen de

cette

même

;

un arrangement pour et

on convient, au

clause compromissoire,


LE RÔLE POSSIBLE DE L'ARBITRAGE d'éviter la

333

production d'un conflit analogue,

en s'engageant

à-

déférer à l'arbitrage tontes

difficultés résultant

de

même

la

catégorie de

différends. C'est le cas dés conventions sur le

Maroc

Ou

et le

Congo

enfin,

;

on conclut un

permanent, convention sur tous les

traité d'arbitrage

d'ensemble

portant

différends qui pourront surgir

entre les contractants, en réservant ou certaines questions.

magne

On

vu combien

a

non

l'Alle-

hésite encore à s'engager dans

cette

où tant de nations s'avancent résolu-

voie,

ment.

Mais jamais encore on n'a eu

l'idée d'envi-

sager a priori, en vue de conclure une convention d'arbitrage,

une catégorie déterminée de

questions au sujet desquelles non seulement

aucun tion

conflit,

n'est

mais

pendante entre

intéressés. Plutôt les

même

aucune négocia-

les

gouvernements-

que d'anticiper tellement sur

événements possibles, de chercher aussi

loin le

fondement d'une clause compromis-

soire,

serait infiniment plus

il

simple

et

plus


334 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE sage de négocier franchement un traité d'arbitrage permanent.

Or,

tel est

9

précisément

cerne la Légion.

s'est

Il

le

cas en ce qui con-

produit à son sujet un

incident, celui de Casablanca, qui est réglé, c'est-à-dire sorti de la politique pour entrer

dans

l'histoire.

Et depuis

tion entretenue en

toute l'agita-

lors,

Allemagne est le

fait

de per-

sonnalités privées, et se montre sans tonde-

ment, puisque

le

gouvernement impérial n'y

a point trouvé matière à intervention diplomatique.

Comment donc

entamerait-on, dans ces con-

ditions, des négociations en

vue de conclure un

traité d'arbitrage particulier à cette question, et qui

en prendrait

n'a pas à engager

une conversal'organisation

de son armée coloniale elle pleine liberté

elle a

La France,

un pays étranger sur

évidemment, tion avec

l'initiative ?

;

et,

en accordant chez

à la parole

et

à la presse,

renoncé d'avance à formuler aucune

réclamation contre et publicistes

les

excès des conférenciers

allemands. Quant à l'Allemagne,


LE RÔLE POSSIBLE DE L'ARBITRAGE si elle

voulait entreprendre une négociation

de ce genre,

elle sait

en y mettant toutes a

à

335

bien qu'on les

lui

répondrait,

formes diplomatiques

:

Avez-vous une plainte déterminée, concrète, formuler

? Si oui,

nous allons l'examiner*

Sinon, nous n'avons rien à vous dire sur ce sujet Il

».

n'y a donc, en définitive, qu'une procé-

dure à suivre

:

Attendre qu'il se produise une réclamation

donnant

lieu,

non à

la nécessité évidente

d'une

réparation immédiate, mais à une contestation; proposer de soumettre ce litige à la

d'Arbitrage de la

Haye

;

et,

une

fois la

Cour

sentence

rendue, profiter de la convention qui en réglera l'exécution

pour convenir de soumettre

dorénavant à l'arbitrage tout autre différend occasionné par

Et

ainsi, tout

fut le

la

Légion.

comme

tournant de

la

l'histoire

crise

de Fachoda

qui détermina

rapprochement anglo-français, puis

le

l'entente

cordiale, la crise déterminée depuis quelques

années au sujet de

la

Légion pourra contribuer


336 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE rapprochement franco-alle-

efficacement au

mand.

Le rapprochement franco-allemand

Comme

ces

!...

mots sonnent étrangement, au

début de 1914, au moment où internationales ont

amené

un niveau inconnu

jusqu'ici,

suspicions

les

les

armements à sans que rien

permette de penser que ce niveau ne sera pas dépassé demain

Et pourtant, là. Il

!

faudra bien

il

faudra que

les

finir

par en venir

deux peuples

se décident

à écouter la voix de la raison,

s'ils

ne veulent

périr de mort violente ou de consomption. Il

y a un peu plus de vingt ans, en no-

vembre

1913, j'écrivais,

devant l'Europe

deux peuples faire

amis...

la

«

:

dans Y Alsace-Lorraine

Le devoir

et l'intérêt

des

non seulement de ne pas

est,

guerre,

mais

d'être cordialement

La tâche du moment

présent, c'est la

réconciliation de la France et de l'Allemagne.

Or, que

s'est-il

se

passé depuis lors

?

»


LE RAPPROCHEMENT FRANCO -ALLEMAND 337

La

comme inévipréconisée même dans

guerre, toujours prédite

table

et

prochaine,

chaque pays par quelques fous dangereux, pas plus survenue pendant

n'est

ans que durant

la

ces vingt

période égale qui les avait

précédés. Mais la mésintelligence, la suspicion,

même

parfois

certains

griefs

poursuivi leur œuvre tiéfaste

;

motivés, les

ont

armements,

toujours croissants, continuent d'absorber une quantité

prodigieuse de forces vives

et

de

capitaux, qui font défaut aux œuvres de civilisation,

même

les

plus urgentes

;

les

initia-

tives fécondes sont paralysées par l'incertitude

du lendemain, ou brusquement annulées par des crises aiguës.

Mais celles

le fait

même

que des crises

comme

de Tanger, Algésiras, Casablanca, Aga-

dir, se

sont dénouées pacifiquement, montre

à l'évidence à quel point cette tension perma-

nente est artificielle et contre nature. Les deux peuples, égarés par des excitations inconscientes

ou coupables, peuvent redouter chacun

les intentions

du voisin

;

mais

ils

s'estiment 29


338 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE réciproquement l'un de l'autre

;

et

sentent qu'ils ont besoin

leurs masses profondes ne de-

mandent qu'à collaborer en au progrès de

la civilisation

toute confiance ;

et les

hommes

capables d'une vue élevée, ou portant une part

de responsabilité dans

comprennent que doit plus être

les affaires

publiques,

paix franco-allemande ne

la

rompue, quelle doit

être assise

sur une base inébranlable.

Et voilà que l'Alsace-Lorraine, par de ses corporations

plus autorisées et de

les

son jeune parlement issu

proclame hautement

la voix

du suffrage universel,

qu'elle

en a assez de ser-

vir de théâtre et d'enjeu à des luttes fratrici-

des

:

qu'elle a droit, elle

la

principale inté-

ressée, à élever la voix entre son ancienne patrie et la nouvelle, pour les

rappeler à la raison

et pour leur servir de trait-d'union,

et

non

plus d'objet de discorde; que ces deux pays

ont également

manqué

elle, l'un en la livrant

l'autre

à leur devoir envers

comme une

en violant ses sentiments

par une annexion imposée,

et

rançon, et

et ses

droits

en infligeant à


LE RAPPROCHEMENT FRANCO ALLEMAND 339 ce peuple démocrate

sienne

;

qu'il

un dur régime à

la

prus-

ne leur reste donc plus, à son

égard, que le devoir de penser enfin à

pour

L'événement

n'a

donc

fait

que corroborer

conviction que j'exprimais en 1893

jamais,

il

elle,

non pour eux.

elle, et

faut dire

la

:

tâche du

;

plus que

moment

sent, c'est la réconciliation de la

la

France

préet

de

PAllemagne. Or, parmi les facteurs qui agissent à ren-

contre de ce rapprochement, la anti-légionnaire lors

est

campagne

un des plus dangereux,

même qu'elle est menée dansJes meilleures

intentions

du monde.

Par exemple, M. Heinrich Pohî termine son article

du Hochland par

Quiconque

est

se contente pas

réellement

ces

mots

:

un ami de

la

paix et ne

de prononcer des discours béats en

faveur, quiconque considère

dangers qui menacent

la société

consiste dans l'opposition

sa

que Fun des plus grands des Etats européens

que des mobiles surtout

sentimentaux ont créée entre l'Empire allemand

et

sa voisine de l'Ouest, celui-là doit déclarer la guerre


340 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE à la Légion étrangère.

Quiconque

supprimer, contribue à vaincre

la

travaille à la faire

guerre

et à assurer

la paix.

Il

est difficile,

en

vérité,

de se blouser plus

complètement.

D'une manière générale, on devrait com-

mencer à

savoir, en

sommes un peuple

Allemagne, que nous

plutôt susceptible, duquel j

on ne peut rien obtenir par

la

menace

et les

récriminations blessantes. Et, en particulier, déclarer la guerre à la Légion, c'est déclarer'

moralement

la

guerre à la France, où ce corps

sera défendu peut-être plus le serait la

unanimement que

garde royale prussienne en Alle-

magne.

La

seule conduite que l'on puisse

recomman-

der aux Allemands soucieux d'améliorer

les>

relations entre leur pays et le nôtre, consiste;

donc à reconnaître que

même,

est

la

Légion, en elle-

une institution aussi légitime que

toute autre force

armée

;

à s'en remettre à la

France du soin d'en améliorer l'organisation générale, en évitant une pression extérieure

f


LE RAPPROCHEMENT FRANCO- ALLEMAND que

les

341

Allemands n'accepteraient pas plus

que nous

;

enfin, à

agir d'accord

avec leurs

amis français, chacun sur son gouvernement respectif,

Légion

pour que tout différend

soit résolu

pare ainsi

la

relatif à

par la voie juridique

la

et pré-

voie à une convention d'arbi-

trage.

29.



CONCLUSION

En

résumé,

après

avoir

calomnies répandues dans

j'ai

France

de les

montré que quelques réformes sont

possibles et désirables, dans l'intérêt la

et

demandes d'arme-

préparer à de nouvelles

ments,

seule intention

la

d'exciter les esprits contre la

même

Légion. Ces réformes sont les suivantes 1°

Réduire à

engagement 2°

trois

ans

la

(voir chapitre

Admettre

les

hommes

pour

les

dant

la retraite la

de

:

durée du premier

XXXI)

;

rengagements jusqu'à con-

currence de 25 ans de service

au bout de

de

justice

fait

et

43 ans d'âge

restée valides, tout en accor-

avec pension proportionnelle

quinzième année (chap. XXXI)

;


344 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE 3° Veiller à ce

homme

qu'aucun

ne puisse

s'engager avant sa dix-huitième année révolue, et exiger

que tous

les

mineurs produisent une

autorisation de leur père ou tuteur, sous la réserve indiquée au chapitre 4°

XXXIV

;

Exiger la production de pièces d'identité,

sinon au bureau de recrutement, au moins, à

au sous-intendant en per-

titre confidentiel,

sonne, sous les garanties de secret spécifiées plus haut

;

en sorte que

de s'engager sous un

les

nom

hommes

certitude que leur identité ne sera

du sous-intendant la

et

désireux

supposé aient

la

connue que

du général commandant

Légion, personnellement (chapitre XXXIII); 5°

Dans

certains cas graves, ne faire signer

l'engagement devant titre provisoire, le

dernier ressort;

l'homme

le

sous-intendant qu'à

général ayant à décider en

en cas de

refus,

ramener

à son point de départ, sous la sau-

vegarde de

militaire,

l'autorité

sans

qu'il

puisse être poursuivi ou inquiété d'aucune

façon (chapitre 6° Créer à la

XXXI)

;

Légion un^ subdivision de ca-


345

CONCLUSION

aux ren-

valerie et unç, d'artillerie; accorder

gagés étrangers

la

même

situation pécuniaire

qu'aux français (chapitre XXXI). Cet ensemble

de réformes enlèverait tout

prétexte de critiques contre la Légion, et devrait

donc donner toute

satisfaction à ceux des

Allemands qui n'ont en vue que et l'amélioration

le

bien général

des relations entre leur pays

et le nôtre-

Mais à ces

ici, et

pour terminer,

Allemands

il

faut renouveler

cette prière instante

:

Qu'ils bornent leur intervention à enrayer,

dans

leur,

propre pays,

la

campagne

violente

anti-légionnaire des pangermanistes, à trer à leurs compatriotes justifiée,

dangereuse

et

combien

suspecte;

rendent compte que l'organisation de est

une

affaire

purement

vif les fibres les plus

mon-

elle est in-

qu'ils la

se

Légion

française, touchant à

profondes du sentiment

national français, en sorte que la plus grande réserve doit être observée à son^égard par les étrangers,

mands,

et

particulièrement par les Alle-


346 LA QUESTION DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

A

cette condition seulement,

il

pourra être

question en France d'une action quelconque

en vue de corriger qui peuvent

quelques défectuosités

les

exister

dans

cette

institution.

Mais tant que nous recevrons d'Allemagne des

sommations discourtoises, ou seulement des objurgations ou des indications, elles n'auront d'autre effet que d'empirer les relations

franco allemandes. Si,

au contraire,

et d'autre,

la question est traitée

avec l'impartialité objective que l'on

s'est efforcé d'atteindre

les

difficultés

mêmes

de part

dans

actuelles

la présente étude,

conduiront

d'elles-

à la solution la plus satisfaisante. Le

premier différend concret qui pourra se présenter sera tranché soit à l'amiable, arbitrage,

comme

Casablanca

;

il

est arrivé

pour

par

celui de

après ce second précédent, on en

viendra tout naturellement à signer,

pour

soit

les affaires

marocaines

comme

et congolaises,

une clause convenant de soumettre désormais à la juridiction arbitrale tout autre à la Légion

;

et l'on

litige relatif

s'acheminera ainsi vers la


CONCLUSION réalisation

mand,

du

347

traité d'arbitrage

franco-alle-

c'est-à-dire vers la détente qui doit pré-

céder l'entente finale.

Et

la

Légion, de la sorte, aura rendu

grand service aux deux pays à Paris,

mars 1914.

la fois.

le

plus



APPENDICE Note

1

(Addition au chapitre IV).

UN DRAME ALLEMAND SUR LA LÉGION

Jusqu'au début de 1914,

les

nombreuses

re-

présentations de propagande, données en Alle-

magne

contre la Légion, ne s'élevaient pas au-

dessus du niveau du cinématographe

et

de

la

chanson de café-concert. Il

était réservé

à M. Erwin Rosen de cher-

cher un succès facile dans l'exploitation du

chauvinisme

du sentimentalisme

et

irrai-

sonné, en produisant un drame qui fut accueilli sur

magne,

une des premières scènes d'Alle-

et qui,

répandre dans

de le

là,

pays

ne manquera pas de se entier.

Le correspondant berlinois du Temps, M. L. 30


APPENDICE

350

Comert, écrivait à ce propos (numéro du 26 février)

:

Berlin, 25 février.

Le Cafard, la

le

drame qu'Erwin Rosen

Légion étrangère, a

été joué hier soir

a écrit contre

au Kùnstler-

Theater de Berlin. Ce fut une manifestation où n'a rien à voir,

un

épisode de la

l'art*

campagne poursuivie j

contre notre plus beau corps militaire africain.

premier rang des loges on remarquait

le

Au

chef du parti

progressiste, le député Mûller-Meiningen, qui a tou-

jours eu dans cette question

tude.

Le succès de

cet appel

une intransigeante aux passions

et

atti-

de cette

suggestion de la crédulité publique paraît avoir ré-

pondu fin

du

à l'attente des entrepreneurs

du troisième

acte et celle

spectacle.

accueillies par des bravos frénétiques.

Des femmes

pleuraient d'attendrissement, et six ou sept teur dut paraître devant

la

La

du quatrième furent

rampe

et venir

fois

l'au-

saluer le

public.

L'œuvre n'a aucune valeur

drame vulgaire sans gné de haine.

Au

C'est

un

souci d'exactitude et tout impré-

lever

sont obscures. Dans

littéraire.

du rideau,

la salle et la

un rayon de lumière

légionnaire s'avance vers le public

:

«

scène

verte

un

Nous sommes

\


UN DRAME SUR LA LÉGION les

légionnaires d'Afrique », s'écrie

puis

il

continue en allemand

:

«

Tout ce que vous

vous montrer ce que nous souffrons

mourons

».

en français,

t-il

rigoureusement exact

allez voir ici est

et

;

nous allons

comment nous

Après ce boniment forain, qui a de quoi

surprendre dans ce Kûnstler-Theater dont sont peut-être

les

plaudissait hier le

rampe

351

les

acteurs

meilleurs de Berlin: et où on ap-

drame de Gerhart Hauptmann,

la

s'allume.

Suit,

une analyse du drame, à laquelle on ne

reprochera pas d'en dissimuler sodes, car,

si

nous

la

les noirs épi-

reproduisions

ici, elle

n'occuperait pas moins de cinq pages de texte et

;

vraiment, ces pauvres inventions ne méri-

taient pas tant d'honneur.

La correspondance du Temps les intéressantes constatations

La presse berlinoise de

masquer

la

médiocrité

M. Erwin Rosen, mais

même «

ce

se termine par

qui suivent

matin

littéraire elle

:

n'essaie pas de

de la

pièce

en loue l'intention

de et

l'exactitude véridique.

C'est

Courrier de

d'une impitoyable vérité la

Bourse.

»,

prétend

le


352 ((

APPENDICE Cette pièce », dit la Gazette de

évidemment

écrite

pour détourner de

qui voudraient y entrer.

Croix, « a clé

la

la

Légion ceux

dans ces con-

Il est difficile,

ditions, de la juger avec toute la froideur de l'esprit critique.

drame a

Quand

il

s'agit

d'une

on ne peut

telle cause,

même

aucune collaboration, pas

rejeter

d'un

celle

qui, par sa tendance, s'éloigne de l'art. »

On

ne saurait trop louer

Lokal-Anzeiger, «

On nous

le

but

plaide le Berliner

»,

et l'intention

de l'œuvre.

affirme que l'auteur s'est servi de ses propres

souvenirs pour écrire ce drame. C'est un avertissement

pour tous de

la

curieux que tenteraient

les

Légion.

Rosen

soit

un

Il

est

les

aventures

dommage cependant qu'Erwin

aussi médiocre écrivain

Nous pouvons du moins

féliciter

dramatique le

Berliner Tageblatt, qui a le courage d'écrire

drame sur

la

Ce

«

Légion étrangère n'est qu'un pesant

inopportun mélo de boulevard Certes,

:

il

est

nous-mêmes,

et

à

et

».

inopportun

boulevard nous oblige à

».

du

critique

!

Et

iaire

confesser

si

lernol de

un retour

sur

que nous ne

connaissons que trop, en France, cette déplorable littérature des

romans et des drames que,

par euphémisme, on qualifie de patriotiques,


UN DRAME SUR LA LÉGION

353

nous n'en sommes que plus en droit de dire que

auteurs de semblables productions

les

sont des malfaiteurs publics.

Au ne

reste, l'opinion

se laisse pas

voudraient,

et

publique, en Allemagne,

duper par eux autant

que

vins. Voici à cet égard

ajouter à ceux que

Le Journal du

deux témoignages à

l'on a trouvés plus haut.

mars 1914 publiait

2

pondance suivante de Munich Une

revue munichoise,

dernier numéro, sur

qu'ils le

disent nos organes chau-

le

la

le

la corres-

:

Kain, publie dans Sun

Légion étrangère, un

article

qui diffère remarquablement de ceux que l'on est

habitué à voir dans

Après de

la

s'être élevé

la

presse allemande.

contre

les

presse chauvine contre

tendus

a

enrôleurs

d'après ces

produit

mêmes

»

ia

attaques

a injustifiées »

Légion, contre

les

pré-

qui pulluleraient en Allemagne

feuilles, l'auteur

les chiffres les

de

plus récents sur

des soldats composant

la

étant pas en majorité,

« les

les

l'article

re-

nationalités

Légion. Les Allemands n'y insinuations et provoca30.


354

APPENDICE

tions, dit-il,

de la presse allemande sont absolument

déplacées. « Sans compter ceux qui y vont pour chercher des

émotions, d'autres qui ont eu parfois maille à partir avec

la justice

temps une «

de leur pays y mènent

la

plupart du

vie nouvelle qui les régénère.

Nous ne voyons donc aucune raison pour com-

battre la Légion, et

si

nos chauvins

le font, c'est

sans

doute pour soulever des complications. Autrement, rien ne nous autorise à critiquer cette institution moralisatrice, qui d'ailleurs n'avait pas été fondée

par

la

France dans un but de conquête, mais par

les

représentants de tous les pays au Congrès de Vienne

de i8i5. C'est donc une institution internationale

dont

la

première idée,

ginal, revient

et c'est là le point le plus ori-

au général prussien Blûcher.

)>

Cette dernière assertion, malheureusement, est bien singulière seize ans après le

ans après

la

;

car c'est

le 10

mars

Congrès de Vienne,

mort de Blûcher, que

et

la

1831,

douze

Légion

étrangère fut créée, bien moins en vue de renforcer l'armée française, que d'utiliser les

nom-

breux étrangers alors réfugiés sur notre

terri-


UN DRAME SUR LA LÉGION toire, et

auxquels l'Etat

355

de donner

était obligé

des secours allant jusqu'à 140.000 francs par mois. Mais, à part ce lapsus, I '

est dicté par la raison

l'article

même. Et

une grande satisfaction qu'on peut

du Kain

c'est le

avec

rappro-

suivant de la revue démocra-

I

cher de

I

tique die Aktion, de Berlin, dont j'emprunte la

l'extrait

I traduction

f bre

1913

// est

au journal

le

Matin, du 28 septem-

:

grand temps que

l'on mette fin

à une campagne

I d'excitation qui chaque jour devient plus odieuse et augI

mente

danger de guerre. Ne

le

se lèvera-t-il

sonne pour crier à ces agitateurs

— .

Vous

êtes des

France. Elle n'a qu'un but «

pitié

Non,

!

Votre lutte

ce n'est pas

pour

le

sort des

:

pousser à

V humanitarisme

,

la

guerre

ce n'est

!

pas

la

légionnaires qui vous incitent à

agir, vous qui n'avez pas d'autre idéal que des massacres

en masse

!

Ce qui vous anime,

honteux qu'inhumain. due. I

:

menteurs conscients

contre la Légion étrangère est une lutte masquée contre la

I

«

donc per-

Ceux qui

c'est

La Légion

un chauvinisme aussi

a besoin d'être défen-

déblatèrent contre elle ne sont que des

chevaliers d'industrie, qui présentent

jour dénaturé.

les

choses sous un


APPENDICE

356 ((

à

la

Les mauvais traitements ne sont pas plus fréquents Légion que dans Varmée allemande. Certes,

cipline

y

est sévère;

mais ce n

est

la dis-

pas une institution pire

que bien des entreprises industrielles allemandes (1).

Personne

et

cesi là

d'y entrer. Elle respecte

le

point capital

les traités

— nest

obligé

conclus avec ceux qui

s*y engagent.

Si vous voulez empêcher

«

Légion,

procurez-leur

Allemands

les

donc

d'existence dans leur pays. Si

de le

grand, cest

Légion; Il

la

conditions

nombre des désespérés

qui cherchent un refuge dans cette « patrie »

d'aller à la

meilleures

institution

est

si

qui est coupable, et non la

ce nest surtout pas la nation française. »

convient de rendre

hommage

à

l'homme

courageux qui a osé dire ces vérités à ses compatriotes la

;

son article est

comme

morale du présent ouvrage. (i)

Voir page 3oi.

le

résumé

et


Note 2

SUR LE PRÉTENDU RACOLAGE

On

a lu à la page 111 l'aventure de

reporter de la Gazette nationale qui

ner, ce

dut constater que ni à

m

Novéant. sion sur

à

et

qui

de

Nancy, on n'exerça aucune pres-

lui.

Ce passage le

Légion

la station frontière

feignit de vouloir s'engager à la

dans

M. Breit-

était déjà

imprimé quand parut,

Temps du 23 janvier

1914,

un extrait

des mémoires d'un ancien légionnaire anglais,

M. G. Manington,qui cher

de

mand (1). fi) .To'in

.4

est intéressant à

l'expérience

Voici cet

du

journaliste

amusant

soldier of-the Légion, par

Vlurraj, 1907.

rappro-

G

récit,

alle-

qui montre

Manin^loii

;

Londres,


APPENDICE

358

également que nos

de recrutement ne

officiers

sont pas des ogres

ont

terribles, et qu'ils

si

conscience de leur devoir d'empêcher un jeune

homme

de s'engager par un simple coup de

lendemain

tête qu'il regretterait le ce

Vous

désirez vous engager dans

ments étrangers bureau de

répondis-je.

:

«

La Légion

Eh !

me demanda

le

un

Oh

I

Vous

êtes

c'est.

Quelque

un

commandant du

)).

imbécile,

Il

cette

sourit et

mon ami...

service y est dur, la discipline sévère...

fils

de famille

;

cela se voit. Je sais ce

bêtise sans doute.

tresse inconstante. Il y

en

Un jupon,

a mille

enchantées de vous consoler. Allez

du

même

que

une maî-

autres qui seront faire

rien de tel pour changer les idées. Si êtes toujours

régi-

— Oui. Monsieur,

depuis hier

bien, vous êtes

Le

un de nos

Depuis quand avez-vous pris

détermination? reprit

?

rue Saint-Dominique.

la

:

un bon dîner

avis et résolu à embrasser

carrière des armes, revenez

me

trouver

;

demain vous

».

la


Note

3

COMPLEMENTS DIVERS

La campagne

antilégionnaire.

Pendant

que ce volume achevait de s'imprimer,

il

s'est

produit une notable recrudescence des attaques contre la Légion. Bien entendu, chacun des

exemples qui vont

être cités

toujours en pareil cas,

le

a

fait,

comme

tour de la presse alle-

mande.

Le 3 mars

1914, le Berliner Tageblatt appre-

nait de Francfort qu'un M. Conrad, ingénieur

à

la

Société générale d'électricité, à Giessen,

âgé de quarante ans, avait disparu,

de ses amis avait reçu de

en France, où

il

par des racoleurs.

lui

une

et

qu'un

lettre, écrite

déclarait avoir été

emmené

— Un ingénieur de quarante


APPENDICE

360

ans, cueilli au centre de l'Allemagne

!

Voilà

qui ferait plus d'honneur à l'habileté de nos

racoleurs-fantômes qu'à

l'esprit

de leur vic-

time, et surtout à celui des gens capables d'accueillir

une

pareille bourde.

Gageons que

cet ingénieur, parti en joyeuse

compagnie, reparaîtra, une

fois

son viatique

épuisé, convaincu d'avoir fait à son

une plaisanterie Le 4 mars,

spirituelle

l'officieuse Gazette de V Allemagne

du Nord annonçait que gion

la

Ligue contre

Reichstag un mémoire sur

Le

7

la

commentaire

le

même

dangers qu'elle

organe publiait, sans

ni rectification, la note suivante,

reçue de la Ligue

D'après une communication I

les

Légion.

mars,

qu'il avait

la Lé-

remettre au gouvernement et au

allait

impute à

camarade

!

:

qui nous

est faite à

instant, les autorités ont été informées de vingt cas

où, dans l'Allemagne

neurs

se sont

du Sud,

engagés à

la

des jeunes gens mi-

Légion ou ont été racolés

pour ce corps.

A

ce propos, le Journal

du 8

faisait

remar-


COMPLÉMENTS DIVERS quer que, officiel

auparavant,

trois jours

de Bavière avait publié

démentant

361

Moniteur

le

un communiqué

l'existence des racoleurs

;

mais ce

document, transmis à la presse par les agences, silence par les

avait été passé sous berlinois, la

si

prompts à

journaux

accueillir les notes de

Ligue de Munich.

Ce communiqué scandale dont

la

se rapportait à

un véritable

Chambre des députés bava-

roise avait été le théâtre, quelques jours plus

qu'a rapporté

tôt, et

cours de

la

le

Matin du 5 mars.

Au

discussion du budget de la guerre,

député Loibl avait prononcé un discours

le

contre

la

Légion,

et

n'avait pas craint de

dire:

On

a

Munich la

assuré que

le

consul général de France à

était d'accord avec les agents

Légion, et on offre

même

de

récemment, un racoleur français nich.

Il est

indispensable que cet

sang allemand dans

les

le

a

recruteurs pour

prouver. Encore été arrêté à

immonde

Mu-

trafic

de

colonies françaises prenne

fin.

Ces étranges paroles ne furent pas relevées 31


APPENDICE

:362

membres du gouvernement qui

ipar les

taient à la séance

dut

;

ministre résident

et notre

aller protester contre elles

auprès du comte

du Conseil

Hertling, président

assis-

ministre des

et

Affaires étrangères de Bavière, lequel

lui pro-

une

son mi-

mit de

faire faire

rectification par

nistre de la guerre.

Le

11

d'après

mars,

les

journaux

annonçaient,

Nachrichten

les Leipziger Neueste

Le ministre prussien des chemins de «l'apposition

dans

les

wagons

et

fer a autorisé

dans

les gares d'af-

un

fiches contre la Légion étrangère. C'est

la propagande

faite

Ces affiches

dans

gares

les

seront

de

Ligue

la

tout d'abord

placées

proches de la frontière et dans les

trains se dirigeant vers la France

Xe

résultat

par la section rhénane de

^militaire.

:

12 mars,

ou

la

Belgique.

on apprenait en France une

nouvelle assez surprenante. L'ancien bourg-

mestre et légionnaire

Trœmel

qui, en no-

vembre, déclarait vouloir se fixer à Paris, parti pour faire en

conférences sur la Légion

mencer par se

faire

était

Allemagne une tournée de ;

il

devait

com-

entendre à Halle, mais la


COMPLÉMENTS DIVERS police

interdit

la

séance

3gJ

annoncée. Pour-

quoi cette interdiction, alors que, sur tout

on permet

territoire,

le

les

conférences et

exhibitions organisées pour vilipender la

gion? Craignait-on que vât en M.

cette dernière

Trœmel un défehseur?

Et,

Lé-

ne trou-

s'il

en est

pas fondé à penser que les infa-

ainsi, n'est-on

mies débitées sous

le

couvert de la trop fa-

meuse Ligue sont patronnées par les autorités ? Enfin,

le

portaient

son tour,

20 mars,

que le

les

journaux français rap-

Ligue militaire reprenait, à

la

projet de créer

une Légion colo-

où Ton ne

se montrerait pas.

niale allemande,

trop exigeant en ce qui concerne le passé des

engagés

(1).

Mais,

fait

à noter, elle propose

en

outre que, suivant une pratique qui nous est

reprochée neurs,

si

vivement, on y admette des mi*

même sans autorisation

de leur père ou

tuteur.

A

ce sujet,

le

correspondant berlinois de

VHumanité téléphonait (i)

Y air pages 53

et 81.

le 19

mars ;


APPENDICE

364 La

presse nationaliste n'abandonne pas

la

lutte

contre la Légion étrangère, malgré toutes les désillusions qu'elle a subies jusqu'à présent. effet,

de rappeler que parmi tous

breux dont il

elle

n'y en a pas

un examen

convient, en

Il

les cas très

nom-

a entretenu l'opinion publique,

eu un seul qui eût

il

été confirmé par

précis.

Aujourd'hui même,

Ligue contre

la «

la

Légion

étrangère » annonce dans les journaux une nouvelle représentation où

un ancien

légionnaire qui se serait

évadé, ferait le récit des souffrances qu'il a endurées. Il est

bon de

logues et sieurs

se souvenir

non moins

villes

que des représentations ana-

théâtrales ont eu lieu dans plu-

de province

et

ont toujours

qu'elles

abouti à compromettre la campagne dirigée contre la

Légion.

L'organe

officiel

de

la «

Ligue militaire

d'une Légion allemande de i5.ooo placée dans

allemande

la colonie

se

du

proposition

demande,

la

création

hommes qui serait

sud-africain. Cette Légion

composerait d'Allemands, et une des

conditions essentielles de la

»

dans son dernier numéro,

d'ailleurs,

son existence

serait, selon

du journal pangermaniste, l'impunité

garantie à tous les délits et à tous les crimes commis.

Pour

les

mineurs, l'organe

officiel

de

la

Ligue de-


COMPLÉMENTS DIVERS mande formellement que ou du tuteur ne

La

soit

le

365

consentement du père

pas exigé.

Vossische Zeiiung,

en rendant compte de

cette

proposition, déclare ne pas vouloir l'examiner de plus près, car elle aboutirait

de criminels et

à

un

créer

le journal ajoute

que

corps de troupe la réalisation

du

projet est d'avance impossible.

Une attaque contre l'armée coloniale néerlandaise.

Ce qui a

été

à la page 289, de

dit,

l'immunité des Pays-Bas vis-à-vis de

la fu-

rieuse indignation des antilégionnaires alle-

mands, a cessé dans

le

d'être

exact.

Temps du 4 mars,

vant de Berlin La campagne contre

le

On

en

lit,

effet,

télégramme sui-

:

la

Légion étrangère

se conti-

nue en Allemagne par des attaques contre les troupes coloniales hollandaises.

une

sorte de

roman

11

vient de paraître à Berlin

fantaisiste intitulé

:

« Fils

un jeune homme

quiet et légionnaire », où

de ban-

soi-disant

d'une excellente famille rhénane rapporte ce qu'il a

vu

à la légion hollandaise.

épisodes la

description

administrée à

yeux des

un

soldat

On

d'une

y trouve entre autres terrible

bastonnade

pour une peccadille, sous

officiers.

31.

les


5

APPENDICE

366

A quand

tour des Etats-Unis ?

le

Maltraitement de soldats

moment où

se produit

campagne contre

la

et

d'écoliers.

— Au

un redoublement de

la

Légion, on ne peut trou-

ver mauvais que nous sortions de

la réserve

observée plus haut à l'égard des traitements subis par les soldats allemands, et qui causent parmi eux tant de désertions et de suicides.

Le Temps du

gramme de

mars contenait un

télé-

Metz, rapportant six de ces sui-

survenus en quelques jours, rien que

cides,

dans

1 er

les

bourg

garnisons de cette ville et de Stras-

:

Les suicides de soldats se multiplient à Strasbourg et

ie

à Metz. e

sous

Il

un

train.

taillon

du

bourg,

s'est

deux

gistre

Metz

y a quelques jours, deux soldats du

régiment d'infanterie, à Strasbourg,

:

Avant-hier,

train des

un

soldat

se jetaient

du

i5 e

ba-

équipages, également à Stras-

brûlé la cervelle. Aujourd'hui on enresuicides

des soldats

de

la

garnison de

un canonnier du 70 e régiment|d' artillerie de


367

COMPLÉMENTS DIVERS campagne

un jeune giment

s'est

pendu dans une de

sous-officier

s'est tiré

Dans une

la 3

un coup de

cbaîoibrée

;

en outre

compagnie du

e

1

45* ré-

fusiî.

lettre adressée à ses parents, ce sous-offi-

cier écrit qu'il a été poussé

au suicide pour échapper

aux tracasseries de son capitaine. Enfin on apprend

du

ditions

soldat

dragons, qui se soustraire

mort dans de

la

singulières con-

Emmelmuth, du serait

pendu

le

aux brimades dont

il

9/

Tegiment de

17 février

pour se de la

était l'objet

part des anciens de l'escadron.

La

d'Emmelmuth

famille

Bochum,

habite

en

Westphalie.

Dans un premier, un deuxième, un troisième et

un quatrième télégrammes l'escadron,

suicide.

quième seulement, en date du

mande aux

parents

faire revenir s'est

s'ils

une enquête, traité à

il

a

le

s'est alors

pu

Dans un cin-

février,

19

on de-

maintiennent leur volonté de

au pays natal

pendu. Le père

par

adressés à la famille

on ne parle pas du

établir

corps de leur

rendu à Metz

que son

coups^de bâton dans|l'écurie

et

fils

a

fils

et

été

qui

après

mal-

probablement

camarades'qui, pour faire croire à

un

suicide, auraient traîné le corps dans les cabinels,

achevé par

ils

ses

l'auraient

pendu

à

une courroie.


APPENDICE

368

d'Emmelmuth ont

Trois soldats de l'escadron

été

arrêtés.

Deux jours plus taient sées

tard, les

journaux rappor-

que des circulaires venaient d'être adres-

simultanément aux diverses subdivisions

nationales de l'armée allemande, contre les

mauvais traitements

cerne l'armée bavaroise ministre

de

supérieurs

soldats, ainsi

bavarois,

un ordre qui

que

le

les

général

rappelle à tous

doivent

mauvais traitements envers

l'avenir

qui ne se seront pas conformés à

que

les conseils

ou

de guerre.

Le ministre de

la

guerre prend, de son côté, l'enga-

gement de poursuivre sans 'indulgence

les

supérieurs

qui auront considéré avec trop de légèreté vais traitements infligés ral

les

ses prescrip-

tions ne soient plus épargnés par leurs supérieurs

par

les

les injures.

Le ministre recommande pour officiers

celle qui con-

de l'armée bavaroise qu'ils

éviter à tout prix

Voici,

:

guerre

la

Kress, vient de publier les

injures.

du 3 mars,

d'après l'Humanité

Le

les

et

aux hommes. Enfin,

de Kress déclare que

la

question

les

mau-

le

géné-

se poserait très


COMPLÉMENTS DIVERS sérieusement de savoir

si

les officiers

369

qui se seraient

rendus coupables de mauvais traitements pourraient encore rester dans l'armée. Les sous-officiers

sont

menacés de punitions analogues.

On

peut se demander

cet ordre sera plus

si

que tous ceux qui Font précédé. En

efficace

tout cas,

il

ne semble pas avoir exercé l'action

immédiate que

l'on

la discipline tant

présumerait en raison de

vantée de Tannée allemande.

Voici, en effet, à trois semaines de distance,

deux exemples de ces répressions dérisoires auxquelles

page 159.

il

Ils

a été

fait

allusion plus haut, à la

sont fournis par

de Berlin au Matin du 23 mars

un télégramme :

Le Conseil de guerre d'Insterburg l'adjudant gardien-chef

Gumbinnen

de

la

prison

a

condamné

miKtaire de

à quatre semaines d'arrêts simples pour

avoir maltraité les prisonniers confiés à sa garde.

Par 17 degrés de

hommes

froid, ce

sans feu, au point

sous-officier laissait les

que l'un d'eux a eu

les

du 45 e

ré-

pieds gelés.

D'autre part,

un adjudant

giment d'infanterie ont

été

et cinq soldat

condamnés,

le

premier à


370

APPENDICE

trois jours,

et

les

cinq autres à trois et huit joi

pour avoir, par leurs mauvais

d'arrêts,

traite men

poussé une recrue au suicide.

Trois jours

homme

pour

d'arrêts

la

mort

d't

!

Voici encore, d'après

le

Temps

du.

20 mai

l'odyssée d'un malheureux, qui ne trouver

certainement pas que la Légion est un enfei Le commissaire de interrogé hier tenstein,

S'étant

de enfui,

un

police de

Vernon, M. Taxil,

déserteur allemand,

Hambourg, où

il

était

Helmuth

Wartenstein vint à Paris

gagner Rouen à pied.

Il

s'est

Wa

en garniso et

voul

égaré en route et

trouvé à demi mort d'inanition dans une meule paille.

A

l'hôpital de

la

(

Vernon, on a constaté que

malheureux portait sur de coups. Remis à

fi

le

corps de nombreuses trac

gendarmerie,

il

a déclaré voulo

s'engager dans la Légion étrangère.

Comme il est indiqué plus haut, à la page 16 on ne peut s'étonner de voir maltraiter les dats dans

un pays où

les

sont encore considérées nécessaires dans les

so

punitions corporelk

comme

écoles.

légitimes

<

Le Temps d


COMPLÉMENTS DfVERS

5 mars

371

contenait, sur ce dernier point, le télé-

gramme

suivant de Strasbourg

Une motion

socialiste

collègues a été déposée

:

émanant de M. Bohle

et ses

sur le bureau de la seconde

chambre du Parlement d'Alsace-Lorraine. Cette motion invite

l'emploi de la férule et les écoles

le

gouvernement à interdire

les

punitions corporelles dans

primaires du pays.

On

se

souvient qu'au

cours du dernier procès du Journal d'Alsace -Lorraine, <pii se

teur,

M. Yung,

ments -du

termina par

infligés

Ban de

la

Quelles

la

condamnation de son rédac-

celui-ci s'était élevé contre les traite-

par

les instituteurs

aux élèves des écoles

Roche.

peuvent

être

les

réflexions d'un

Alsacien qui voit frapper son alors

qu'il a

d'éducation, dans

primé depuis

à

fils

l'école,

connu jadis d'autres principes

un pays où cet abus

longtemps

si

est

sup-

?

Encore un bel exemple de faute rachetée.

Le Temps du

20

histoire qui suit

Un

jeune

mars rapporte

la

touchante

:

homme

d'origine

bretonne,

François


372

APPENDICE au 26

Maynard, incorporé y fut de

en 1910,

régiment d'infanterie

part de ses camarades ayant eu

la

condamnation

connaissance d'une

qu'un beau jour

cruelles,

plus

pourtant,

tard,

et était

il

déserta.

il

se

avait subie

qu'il

avant son arrivée au corps, l'objet de

telles allusions

Quelques mois

constituait

prisonnier

mis en prévention de conseil de guerre.

Des volontaires étant à ce moment demandés pour faire

partie

de l'expédition du

qu'on

supplia

racheter sa faute.

ajoutant qu'un

pour

Le

soir

même, Maynard s'évadait de

ger, et sous le

Peu

la

11

après,

nom

il

comporta fit

fort

revenait à Toul, se pré-

vingt-neuf

comme

sujet étran-

il

Il

fut dirigé sur

prit part à plusieurs

Géry ville combats

bravement.

notamment

taine Labardette

prison et pas-

de Dufour, s'engageait pour cinq

Légion étrangère.

de là au Maroc, où

et se

pour

opposa un refus,

qui a déserté est trop lâche

au bureau de recrutement

sentait

et

lui

se battre.

sait la frontière.

ans à

Sdn capitaine

homme

Maynard

voulant partir

désignât,

le

Maroc,

du détachement du

partie

capi-

qui fut tué avec un lieutenant et

hommes

par

les

vint finalement du Maroc,

Marocains. Maynard re-

titulaire

de

la

médaille de


COMPLÉMENTS DIVERS la

campagne avec deux

agrafes. Il révéla alors sa vé-

ritable identité et sa situation taire.

Ramené

à Nancy,

conseil de guerre ses états

du

de service à

373

il

a

au point de vue mili-

comparu

hier devant le

20* corps qui, après l'exposé de la

Légion,

l'a

acquitté à l'unani-

mité.

C'est

dans

le

même numéro

de journal que

se trouve l'aventure de l'Allemand

Wartens-

tein,

rapportée plus haut. Qui oserait sou-

tenir,

devant ces deux hommes, que

est

la

Légion

une institution à supprimer?

FIN

22



TABLE DES NOMS ET DES PÉRIODIQUES CITÉS

Ahlhorn, député au Reichstag, 65, 67, 107. Aktion, 355.

Baslen, légionnaire, a 19.

Bassermann, député au Reichstag, 47, 58, 67. Bayerische Staats-Zeiiung, 36 1,

De De

Benedict, colonel autrichien, 242, Benedict, Bruno, légionnaire, 241.

Berlandier,

commandant,

175.

i

Berliner Tageblatt, 116, 117, 317* 352, 809. Von Bernhardi, général, i4, l&*

Bernstein, député au Reichstag, 62, 67, 107. chancelier impérial,

Von Bethmarm-Hollweg,

Bismarck, 167. Blùcher, maréchal, 354. Bœrsen-Kurier, 2,53, 35 1, Bohle, député alsacien, 371. Boillet, François, légionnaire, 23g.

Bourgeois, Léon, sénateur, 326. Breitner,

ma

n3,

35;,

Bruneau, général, 189, 209. Bûlow, comte, chancelier impérial, g3. Gahuet, Albéric, 208.

De

Chabot, lieutenant, 264»

ilJ$


316

TABLE DES NOMS

Cherfils, légionnaire, 174, 175, 3i2.

Choiseul, 70.

Comert, P., 35o. Conrad, prétendu enrôlé, 35g. Correspondance helvétique, 11, 47. Delius, Hans, 83.

Von Deimling,

général, 120,

Deutsche Juristen-Zeitung, 75.

Dhurmer, légionnaire, 191. Duron, Joseph-Mathieu, légionnaire,

Durs Eisass, 169. Van Eckhaute, légionnaire,

175, 176, 3i2,

239.

Egler, légionnaire, 193.

Emmelmuth, soldat allemand, 367. Erzberger, Mathias, député au Reichstag, 60, 67. Favarel, avocat, 176. Figaro, 212. Follin, Henri, 254.

Von

Forstner, lieutenant, 120.

France

militaire, 14.

Frankfurter General- Anzeiger 45 Frankfurter Zeitung, 68 à 7 7, 100 ,

248, 298. Fribourg, André, 21,

lift,

,

127, 243,

241,

267, 3o2.

Gaulois, 38.

Gazette de Lausanne, 239. Geiser, 229.

Gothein, député au Reichstag, 5i, 67. Greif \l\. Hamburger Fremdenblatt, 25, 26. %

Hasselmann, légionnaire (?), a3, 24» 38, 229, 3o6. Hauptmann, Gerhart, 35 1.


ET DES PÉRIODIQUES CITÉS

377

Heckscher, député au Reichstag, 5i, 67. Heimweh, Jean, 166.

Heine, Henri, i44Heine, Wolfgang, député au Reichstag, 54, 55, 67, 80.

Heinz-Arnault, 198. Henri, Marcel, voir Cherfils. Hertling, ministre bavarois, 36a. Hochland, 5, 78 à 9^ 338, Hohenzollern, légionnaire, 191.

Homme

libre,

121.

Huet, volontaire français, tué au service allemand, 36 7 Humanité ,.a3, 317, 363, 368. .

Illustration, 35, 36, 169, 228, 229.

Individualiste Européen, 254.

n3, 174, 192, 353, 36o. Journal d Alsace- Lorraine y 118, 371. Journal des Débats, 317. Journal, 39,

Von

Kanitz, comte, député au Reichstag, 6o, 67.

Kain 353, 355. t

Kann, Reginald, 264. Kellermann, maréchal, 168. Kléber, général, 168. Koblenzer Zeitung, 3i, 86.

Kœlnische Zeitung

,

31

Von Kress, général, Kr eux- Zeitung, 117,

,

81.

368. 352.

Kronprinz, 25. Rûhn, Max, prétendu racolé, 110. Kull, Hans, légionnaire (?), 26 à 3o, 38, 108, 12a, 137, 3o6. 32.


.

^

TABLE DES NOMS

378

Laband, Paul, professeur.

2.62,

264.

Labardette, capitaine, 372.

Lauzanne, Stéphane,

i3(),

210, 219, a3a.

Leipziger NeuesU NachrichJUn^

Léman, Jean,

Von

voir

Leszczynski, général, 193.

Lewald, directeur à

Von

&i % 36 2,

Duron. l'Office

impérial de l'Intérieur

Liebert, général, député au Reichstag,

48» 6o*,

66, 67.

Liepmann, député au Reichstag, 5o 67, t

8k

Loibl, député bavarois, 36 1.

Lokal-Anzeiger, io4> 352.

Von Lossow,

lieutenant-colonel allemand au service*

ottoman, 266. Maerz, 198.

Magnan, 176. Manington, G., légionnaire, 357. Maritz, général boer au service allemand, 267. Markel, prétende racoleur, 7 1 241, 355, Matin, i4, 35, 45, 192, io4, n4, a36 36 1, 369. Maynard, François, légionnaire, 372. ;

Mertinat, légionnaire

(?),

25, 38, 3o6,

Mirbeau, Octave, 22.

Moundy, lieutenant, 177. Mugdan, député au Reichstag,

52, 67.

Mùller, légionnaire, 191. Mûller, Richard, engagé, 157.

Mùller- Meininger, député au, Reichstag, 5a, 55, 56, 61, 67, 80, 81, 35q. Napoléon, i65


.

ET DES PÉRIODIQUES CITÉS National- Zeitung, 48 à 55, 67, 357.

m

379

à n5, 117, 253,

Ney, maréchal, 168. Niemeyer, professeur, 76. Nippold, professeur, 4Ntrddeutsche Zeitung, 36o.

Nordhausen,

,

-

5, i5.

Ollé-Laprune, 176. Opinion, 21, 23, 27, 123, i4t, 267, 3o2 3i, 79, 80, 81.

Yon Papen,

Passard, colonel, i4i.

Perth, Justus, légionnaire, 191. Petit Bltu, 235.

Pohl, Heinrich, 5, 3i, 79 à 94, 268, 324, 326, 33i, 338.

Poimiro, Charles, 74, i4o, i46, 254, 263, 32

1.

Post, 4, 4i» 104.

De

Pouvourville* ancien

à

officier

la

Légion, 192,

212, 220. Preussisohe Jahrbùcher, 3 1

Preysing, lieutenant allemand au

service

266. Puis, Gustav, soi-disant racolé, io5, 106.

Von Puttkammer, baron Charles, Von Puttkammer, général baron

*

4*« 4i-

Rangabé, Grec au service allemand, 265. Rapp, général, 168. Recht, Rudolf, agent provocateur

(?),

Von

Reuter, colonel, 120. Reven, Viktor, 89, 90.

Revue, 265. Rheinisch-Westphaelische Zeitung, 4«

10 %*

ottoman,


TABLE DES NOMS

380

Ricateau, avocat, 176. Rittei\ 81.

Roloff,

Max, 84, 87, 119, 120.

Rosen, Erwin, 349 à 35i. Von Sayn-Wittgenstein, prince Hermann, ai. Schadt, lieutenant, 120. Schneider, Charles, légionnaire, 219, 220, 2/17.

Yon

Stengel, Karl, 268.

Taeglische Rundschau, 4» io5.

Tag, 5. Taxil, commissaire, 370.

Temps, 37, 44> io5, 111, n5, 120 à 123, 157, 176, 264, 266, 291, 349, 35i, 357, 365, 366, 370, 371. Thiers,

1.

Tjomas, engagé à

Trœmel, Paul,

le

la

Légion, 117.

bourgmestre légionnaire, 34 à 37,

362. Tropf, engagé à la Légion, 116, 117.

Tunze, voir Trœmel. Viertelsjahrshefte fur Truppenfùhrung und Heeres-

kunde, 267. Vorwaerts, 39, 55, 56, 80, 235. Vossiche Zeitung, 365.

Wartenstein, Helmuth, engagé, 370, 373. Weiss, André, professeur, 246. Westfaelisch.es Volksblalt, 3g.

Winslow, Anglais tué au

service allemand, 264*

Von

Witzleben, 32, 33. Wolf, Jacques, engagé à

Légion, iaa. Légion, 122.

la

Wolf, Louis, engagé' à

la

Wolff, légionnaire

39.

(?),


ET DES PÉRIODIQUES CITÉS

381

X*", Otto von, légionnaire, 191.

Yung, 371. Zeitschrift

fur Politik, 268.

Zeppelin, comte, 264.

Zimmermann,

sous-secrétaire

d'Etat

aux Affaire»

étrangères, 63, 66.

Zweg, Charles, engagé à

la

Légion, 122»



TABLE DES MATIÈRES

PREMIÈRE PARTIE LA CAMPAGNE CONTRE LA LÉGIOÎ^

Pangermanistes et gens de bon sens Danger de l'intervention des étrangers Popularité de

la

Pamphlétaires

et

Légion en France

.

.

.

8

....

17

conférenciers

La tendance insidieuse

.

waerts

.

20

45

.

L'enquête de la Gazette nationale

1

.

.

et le

Vor48

.

AuReichstag

58

La Gazette de Francfort La revue Hochland Récapitulation des arguments allemands

68 72 •

95


384

TABLE DES MATIÈRES

DEUXIÈME PARTIE LA RÉALITÉ Les racoleurs

99

Comment se font les engagements .... Nombre et nationalité des légionnaires .

Les chercheurs d'aventures

et les

.

124

136

déshé150

rités

Sur les déserteurs, en général Les victimes de mauvais traitements Les annexés Les délinquants de droit commun leur relèvement .

.

.

.

.

.

.

.

153 158

163

;

Résumé'des antécédents des légionnaires Ce que valent ces hommes La discipline, à la Légion Les rengagés et ceux qui désertent .

La Témoignages d'étrangers vie matérielle

.

161

.

183

-.

189 208

.

.....•

218

225

234

TROISIÈME PARTIE DISCUSSION

Le contrat d'engagement blic ou privé ?

est-il

de droit pu• •

.7

-•

245


TABLE DES MATIÈRES Des

De

385

....

soldats de métier, en général

250

l'emploi des soldats étrangers aux ar-

mées, en général.

260

'

.

Déserteurs, ou émigrés

270

?

Les soldats étrangers, aux colonies Les soldats étrangers, aux Pays-Bas

.

et

.

278

.

aux 281

Etats-Unis

La durée du contrat d'engagement Sur

le

....

294

prétendu caractère léonin du con-

....

trat

Les délinquants

298

et les fausses déclarations

307

d'identité

La question des mineurs Le rôle possible de l'arbitrage, chement franco-allemand

316 et le

rappro324

CONCLUSION

243

APPENDICE Note

1.

Note

2.

Noie

3.

— Un drame allemand sur la Légion. — Sur le prétendu racolage. ...

— Compléments divers

349 357

(La campa-

gne antilégionnaire. Une attaque contre l'armée coloniale néerlandaise. Maltraitement de soldats et d'écoliers.

Encore un

bel exemple de relèvement.)

Table des noms

et

des périodiques cités

.

.

33

359 383



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