Revue de Madagascar (Paris) Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
Comité de Madagascar. Revue de Madagascar (Paris). 1904/06/10.
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MADAGASCAR A L'EXPOSITION DE HANOI
RAPPORT GÉNÉRAL
l'Exposition de Hanoï SUR
DEUXIÈME PARTIE (1)
Dans le Tonkin et autour du Tonkin CHAPITRE PREMIER LANG-SON Dès que les opérations du jury furent terminées, cest-àdire en décembre 1902, les délégués se dispersèrent, tenant profiter de la saison froide pour faire quelques voyages dans le Tonkin. Mes instructions m'assignaient Lang-Son et Laokay ainsi que la frontière chinoise sur ces deux points. Le passage suivant de la lettre adressée par le Gouverneur général de Madagascar à celui de l'Indo-Chine définit le butde la .mission que j'avais à remplir: « Vous savez déjà, Monsieur le Gouverneur général, dans quelles conditions notre JelIne possession se présente à l'Exposition de Hanoï. Ainsi que l'indique la préface d'une notice qui sera distribuée au Pavillon de Madagascar, ce n'est point pour se mesurer à ses devancières, la Colonie se rend à l'invitation gracieuse qui que lui a été adressée c'est pour y trouver des exemples profitables, tout en témoignant de l'œuvre que la France a accomplie en six années dans la Grande Ile de l'Océan Indien. C'est aussi pour contribuer à affirmer avec son aînée, dans la ma-
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(t)
Reproduction et traduction interdites. La première partie de ce rapport a fait l'objet d'un fascicule spécial du oUrnal Officiel J, de Madagascar (n° lu 10 décembre 1903).
nifestation éclatante de la vitalité et de la prospérité de cette dernière, la puissance d'expansion coloniale de notre pays. « M. Jully, par l'organisation d'un bureau de renseignements et quelques causeries, saura, j'en ai la conviction, montrer au public de l'Exposition de Hanoï les résultats obtenus à cet égard. Je serais heureux que ses efforts aboutissent à nouer des relations plus intimes entre notre grande colonie d'Extrême Orient et Madagascar. appel à « Je sais que dans ce but je n'ai pas besoin de faire votre sollicitude pour faciliter à M. Jully les voyages d'études qu'il doit entreprendre à l'issue de l'Exposition, dans les diverses contrées de l'Indo-Chine au cours de sa mission en Extrême Orient. Mais je vous exprime par avance toute ma gratitude pour ce que vous voudrez bien faire pour lui dans ce sens. » Gouverneur général del'Indo-ChineréponAcettelettre,M. dit en me donnant, pour tous les fonctionnaires placés sous ses ordres, une lettre de mission qui me permit d'obtenir les moyens de transport en usage dans chaque région et m'assura près de tous un accueil empressé et cordial, l'hospitalité étant du reste pratiquée dans toute l'Indo-Chine avec la plus large et la plus absolue courtoisie, chez les fonctionnaires civils ou militaires, comme chez les colons. Le samedi 10 janvier 1903, je devais retrouver à la gare de Hanoï mon ami M. Noufflard, secrétaire général des colonies, arrivé depuis quelques jours au Tonkin après un voyage a Madagascar et dans les Indes. Les trains quittent Hanoï de bonne heure et la domesticité indigène est peu matinale; aussi, les voyageurs éloignés de la gare sont-ils obligés de prendre leurs précautions pour trouver au moment voulu leur poussed'ailIl de Tamatave la devant est porte. à même en pousse leurs, où, pour ne pas manquer le train du matin, il faut faire porter ses bagages la veille. Nous sommes en plein hiver: une pluie fine et pénétrante délaie le sol détrempé, et les coolies tirant et poussant sur la petite voiture ont peine a l'extraire des bourbiers qui s'échelonnent sur les avenues a travers les terrains vagues de l'ancienne citadelle. Sept heures du matin il fait à peine jour. Les nuages, bas
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comme des traînées de fumée d'usine, balaient la campagne. Sous la lumière blafarde, les couleurs vertes et rouges des cap quan et des khan si chers aux Annamites, détonnent. Ils se pressent sur les quais et dans leur salle d'attente, dociles, déjà rompus aux nouvelles habitudes, heureux de pouvoir regagner rapidement leur village, après marché fait, ventes et emplettes terminées. Ils encombrent déjà les wagons spéciaux, largement ouverts, trop sans doute par ces froids.
La gare de Hanoi et le hall des marchandises en construction (1903)
Toussant, crachant, piaillant et jacassant, leur masse compacte garnit chaque voiture, pleine comme un panier d'œufs: au-dessus et sur cette masse humaine, oscillent les grands chapeaux des congaïes tenus verticalement, ces chapeaux parasols qui ne peuvent franchir la portière des wagons sur a tête de leurs propriétaires. Logés dans un compartiment de première très confortable, nous battons la semelle les vitres sont hermétiquement closes et nous gelons! Que doit-il en être des pauvres nhaquès en plein vent. On m'assure que des Européens ont dû parfois.
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voyager dans des wagons découverts, le train n'en comportant pas d'autres. Sept heures vingt minutes: un Annamite vêtu de soie noire passe en agitant la cloche, et le train s'ébranle. Lentement nous longeons par un viaduc en courbe la rue de Tien-Tsin qui borde la citadelle du côté Est. Etabli sur un terrain marécageux, comme la majeure partie de la ville, ce viaduc subit chaque année des tassements: il permet à la ligne de rester à la hauteur du pont Doumer élevé de 13m50 au-dessus de l'étiage les crues du Fleuve Rouge sont en effet subites et terribles. Ce pont d'une longueur totale de 1.682 mètres a été assez reproduit et décrit pour que nous n'en parlions pas. C'est une œuvre hardie qui ne présente qu'un défaut le trottoir bordant la voie en encorbellement n'a que 1m30 de largeur, et ne permet pas l'accès des voitures. Au sortir du pont, un remblai provisoire conduit à Gialam: on travaillait en 1903 à l'achèvement du remblai définitif, élevé de plus de 10 mètres au-dessus de la plaine. Ces remblais traversant des marécages composés de terres d'alluvion vaseuses, constituent une des grosses difficultés d'entretien des chemins de fer du Delta, avec les orages et les pluies d'hiver. Pendant toute la durée du crachin les trains ne passaient qu'avec de grandes précautions sur ces masses mobiles où les tassements par glissements étaient fréquents malgré les plantations des talus, et le remblai de Gialam est célèbre entre tous à Hanoï. Près de cette petite gare se détache la voie de Haïphong; la nôtre, obliquant résolument vers le Nord-Est, se dirige vers le canal des Rapides. On connaitl'histoire du chemin de fer de Lang-Son. C'est en somme la théorie des petits paquets appliquée à l'organisation économique des colonies comme elle l'a été jadis à la pacification. Cette théorie pour les conquêtes militairessembleavoir fait son temps il ne paraît pas qu'on y ait renoncé totalement encore dans la mise en valeur pratique nous aurons occasion de le constater encore à propos du chemin de fer du Yunnan.
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La ligne du Quang-Si, décidée par M. de Lanessan, fut établie entre Phù-lang-Thuong et Lang-Son sur une longueur de 100 kilomètres. Les prévisionsprimitives étaient de 4 millions de francs : onen aurait dépensé 20. Sur l'emprunt de 1896 une nouvelle somme de 20 millions fut affectée à ce chemin de fer pour le relier d'une part à Hanoï et de l'autre à Dong-Dang et la frontière de Chine la transformation de la voie de 60 centimètres en voie de 1 mètre fut en même temps
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Le pont Doumer
décidée. La, longueur totale du chemin de fer de Hanoïau Quang-Si est donc actuellement de 169 kilomètres et la dépose totale de 40 millions, ce qui donne prix de revient un approximatif de 235.000 francs par kilomètre. La situation du pays au moment où fut construite la première partie de la ligne, principalement dans toute la région Bac-Lé,a'ugmenta consi dérab lement le prix de revi ent. Il en effet protéger les travailleurs contre les attaques des Plates qui, jusqu'en 1894, restèrent les maîtres dé cette contrée rilde et sauvage. C'est au général Gallieni, alors colonel,
e lut
que revient l'honneur de cette pacification. La méthode qu'il mit depuis si heureusement en pratique à Madagascar a été nettement définie dans le livre de M. de Lanessan : La colonisation française en Indo-Chine. Tandis que le train roule vers les légères collines qui limitent les vallées du canal des Rapides et du Song-Cau, je parcours les pages de ce livre. d'intelligence par le lieute« Commencée avec beaucoup nant-colonel Clamorgan dans le 1er territoire, cette organisation est surtout l'œuvre du colonel Gallieni, qui prit, à la fin de 1892, le commandementdu 1er territoire et à qui fut donné en outre plus tard le commandement du 2me. C'est à lui, à son infatigable activité, à l'esprit d'administration et d'organisation dont il est doué, à sa grande autorité sur les troupes et leurs officiers, à sa bienveillance remarquable pour les indigènes, que doit être attribuée la pacification aujourd'hui complète du 1er et du 2me territoire militaire, c'est-à-dire toute l'étendue de la région montagneuse qui borde le QuangTonget le Ouang-Si. Il faut ajouter que s'il a pu réussir dans cette œuvre, ce n'est pas seulement à cause des moyens financiers mis à sa disposition, mais aussi grâce à la confiance qu'a bien voulu lui témoigner avec moi le général Duche-
min ».
Les lignes qui suivent, déterminant l'étendue des pouvoirs à donner aux commandements militaires et la nécessité d'un commandementgénéral unique, sont dictées par le sens pratique d'une expérience vérifiée. « Le colonel Gallieni n'a fait qu'un petit nombre d'opérations militaires. En dehors de quelques colonnes rapides dans les massifs du Baoday, du Mauson, de Lung-Qué, son expédition de Caï-Kinh à la fin de 1893, mérite une mention spéciale, tant à cause de l'habileté avec laquelle elle fut organisée et conduite, qu'en raison des résultats qu'elle a donnés Les procédés qui ont été mis en œuvre pour la pacification du 1er et du 2me territoire, sont aussi simples que sûrs. Ils consistent dans la fermeture des frontières par des postes et des blockhauss situés de manière à dominer les routes principales et à protéger les plus gros centres de population, la construction de routes reliant tous les postes, l'armement des populations sédentaires
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dont il faut avoir soin de respecter les mœurs, les coutumes, l'organisation sociale et administrative. » La méthode employée à Madagascar, au cours de l'année 1897, fut, on le voit, absolument identique à celle du Tonkin. Certes, il est facile, quand la tranquillité est rétablie dans une région, alors que les rebelles armés sont redevenus des paysans laboureurs, de critiquer les tracés des routes ou la construction des postes exécutés sous le feu de l'ennemi. Avec la même facilité que l'homme met à oublier la douleur une fois la souffrance passée, les peuples oublient les difficultés de la lutte aussitôt la paix rétablie. Au Tonkin plus qu'ailleurs, peut-être même parce que la guerre y fut plus dure, on a oublié les mauvais jours. Les blockhauss qui couronnent les sommets à partir de Kep, forteresses péniblement construites à prix d'argent et de sang, sont ébréchés aujourd'hui comme des ruines de burgs démantelés. On a laissé les indigènes enlever les portes et les fenêtres, les toitures crevées livrent passage à des traînées de lumière qui éclairent l'intérieur; la brousse folle a envahi les abords et recouvert les sentiers. Pourvu qu'un brusque réveil possible et même probable à côté de ces provinces chinoises en pleine ébullition, ne vienne pas brutalement nous imposer la mise en état de ces postes qu'il eût été si facile de conserver
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intacts Le chemin de fer serait-il un anesthésiant qui fait perdre la notion du danger? D'autant plus peut-être quand on sait que l'ennemi possible n'en a pas à sa disposition Dans la brume et le crachin, ont successivementdisparu la pagode de Lim et la citadelle de Bac-Ninh; les deux ponts du Song-Cau et du Song-Thuong nous ont permis de juger des difficultés rencontrées sur ces fleuves du Delta dans lesquels la navigation des grands sampans d'une part, et la fréquence des grandes crues de l'autre, obligent à surélever le tablier et a munir les ponts d'une travée tournante Phu-lang-Thuong, avec son hippodrome cher aux Hanoïens, est resté bien loin derrière nous. La Société des courses, pour l'instant, comme celle de Nam-Dinh, semble en délicatesse avec la grande sœur de Hanoï, peut-être à cause de l'appui
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moral et financier donné à celle-cipar la Société d'encouragement. Les réunions de Phu-lang-Thuong n'en restent pas moins brillantes c'est le prétexte d'une partie de campagne pour les sportsmen de la capitale et leurs familles. Nous aurons occasion de revenir, à propos de l'élevage au Tonkin, sur cette question des courses; nous laissons donc dans le brouillard La petite ville, propre et coquette, de Phu-lang Thuong, puis le village de Kep, pour pénétrer dans la vallée du Song-Thuong. La monotonie du Delta disparaît avec les premières hauteurs et aussi la fertilité une brousse épaisse garnit encore les côtés de la voie mais, de la plateforme du train, je reconnais beaucoup de ces arbrisseaux à l'écorce jaune, à la feuille blanchâtre qui constituent les fourrés de Madagascar sur les côtes après le déboisement; l'analogie ne s'arrêtera pas là, et des feuillages connus vont défiler à chaque instant dans les creux des vallées. Les sommets se dégarnissent, les formes s'accentuent. Celles-ci sont bien différentes des profils des collines malgaches où les arrondis dominent; les montagnes tonkinoises sont composées de lignes droites se heurtant à angles aigus, et laissent, par suite, l'œil qui en parcourt la silhouette, des repos qui en rompent la monotonie. Les villages se font rares; la population concentrée autour des rizières faciles du Delta fuit les hauteurs de culture pénible les vallées seules lui assurent le vivre, elle s'y groupe mais de plus en plus clairsemée. Toute cette région, d'ailleurs, était restée jusqu'à notre occupation le champ d'approvisionnement des pillards chinois qui, débordant des rives de Si-Kiang, poussaient leurs incursions dévastatrices sur les frontières annamites. Aussi, les noms des diverses localités claironnent les combats passés, attaques ou guet-apens, assauts ou surprises qui, souvent hélas! furent chèrement payés. Bac-lé, depuis près de vingt ans, est oublié; le fait que nous passons près delà dans le premier territoire militaire nous rappelle brutalement qu'il faut cependant se souvenir. Les blockhauss deviennent plus nombreux et les hauteurs elles-mêmes revêtent des aspects
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à
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de châteaux-forts
à gauche, les
à-pic du Kin-Dong-naï
est
barrent l'horizon; à droite, la chaîne du Deo-Quao couverte d'un collier verdoyant, et en parcourant confortablement, à la vitesse modérée mais suffisante pour les pentes, de 20 kilomètres à l'heure, cette région heurtée, rude et sauvage, on songe, avec un retour de respect admiratif, aux difficultés que dut avoir cette colonne Giovaninelli! Elle se lança héroïquement vers l'inconnu, sans guide, sans carte, et parcourut en dix jours la route de Chu à Lang-Son, enlevant successivement les retranchements de Thaï-hoa, ceux de Ha-hoa, de Dong-Song et de Bac-Viay,occupa Lang-Son, et deux jours après, à marches forcées, gagnait en sept jours Hanoï, et en huit jours, avec le sanglant combat de Hoa-Moi, la place de Tuyen-Quang investie, démantelée,dont la garnison réduite au tiers de son effectif était délivrée après plus de trois mois
!
de siège
Plus éclatante entre toutes fut cette épopée, mais nombreuses furent dans toute cette conquête duTonkin les grandes açtions. Aussi comprenons-nous le soin jaloux avec lequel les vieux tonkinois cherchent à rappeler aux nouveaux arrivés, à ceux que le confortable et le bien-être, la vie facile et sûre attendent aujourd'hui au sortir du paquebot et du train, les difficultés et les labeurs d'antan, le sang versé et les vies perdues. On le respect du passé en Indo-Chine, et les journaux fréquemment y donnent des leçons d'histoire locale pas un ancien nom, attaché à cette histoire, ne disparaît sans qu'un cordial adieu ne lui soit publiquement donné. Tâchons à Madagascar d'imiter nos aînés, et loin de craindre un retour vers notre passé de dix ans, rappelons, nous aussi, à nos camarades récents, les tombes dont la conquête et la pacification ont semé la terre Malgache. Si les actions eurent rarement l'occasion d'être grandes en ce pays, souvenons-nous que l'énergie et l'endurance de nos troupes tinrent obscurément contre la maladie, jusqu'à la mort.Puissent les journaux de Madagascar, eux aussi, faire revivre ce souvenir à ceux qui l'ont gardé, le remémorer à ceux qui l'ont oublié et le faire connaître à tous ceux qui l'ignorent. Notre histoire coloniale moderne devrait figurer en première ligne parmi les
a
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livres d'enseignement secondaire dans les établissements
coloniaux!.
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Péniblement, le train gravit la ligne de partage des eaux les courbes de rayon trop court, combinées avec des pentes rapides, font patiner la machine sur les rails humides. Celle-ci souffle et anhèle: lentement, très lentement, nous gagnons le col de Cut à l'altitude de 300 mètres. La vallée du FleuveRouge et de ses affluents est abandonnée nous pénétrons dans le versant du Si-Kiang par la vallée du Song-Ki-Kong et près de là nous apercevons la plaine de Lang-Son. Cette vaste cuvette de laquelle émergent des pâtés calcaires tels que ceux de Ky-lua, présente, de loin, après les défilés rocheux récemment traversés, un aspect trompeur de fertilité que les chaînes dénudées qui l'encadrent démentent rapidement. La ligne traverse la ville dans sa longueur celle-ci est recoupée par des avenues droites, perpendiculaires et parallèles à la voie. Quelques maisons confortables, solidement bâties, révèlent le désir chez les premiers occupants de faire de ce centre un important chef-lieu. Mais tout en restant capitale du premier territoire militaire, Lang-Son n'a pas pris le développement économique sur lequel on semblait compter. La population indigène du cercle s'élève à 50.000 habitants environ; quant aux Européens, ils se réduisent à trois entrepreneurs et quatre commerçants. Tant que la ligne du chemin de fer fut en construction, Lang-Son comme centre de ravitaillement, présenta encore une certaine importance. La voie étant ménée jusqu'à Dong-Dang aujourd' hui, les touristes seuls fréquentent le pays deux hôtels leur permettent d'y séjourner. Le tour de la ville est rapidement fait une visite à la citadelle, une autre aux forts de Ky-lua contre lesquels le 28 mars 1885 vinrent se briser les colonnes chinoises entre les deux redoutes, le point où fut blessé le général de Négrier, cause de la retraite subite et inexpliquée qui eut, sur la politique coloniale et même générale de la France, une si déplorable répercussion. En écoutant la description détaillée de cette journée glorieusement commencée, que me fait aimablement le lieutenant qui me guide, j'oppose l'afTo-
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lement de Paris recevant l'inquiétant câblogramme au calme de Londres pendant les débuts de la guerre du Transvaal: les mauvaises nouvelles, en fin 1899 et 1900, se succédaient et se vérifiaient, les compagnies fondaient et les officiers tombaient. Impassible, l'Angleterre poursuivait l'œuvre les crédits s'ajoutaient aux crédits, les hommes succédaient aux hommes avec tant de suite et de régularité que, passant en février 1900 dans le port de Capetown, je pus y constater 80 vapeurs affrétés venant dedébarquer leur cargaison d'hommes, de chevaux et de matériel, ou en attendant le débarquement. La série des revers avait été pourtant profondément sentie Par le peuple entier, car dans la ville du Cap même, au caféconcert, une jeune actrice vêtue des couleurs nationales anglaises que recouvrait une large écharpe de deuil, chantait les héros tombés, pleurait les défaites subies, devant la foule frémissante d'une salle comble, qui à la fin de l'hymne se levait tout entière pour entonner le Rule of Britannia. Voilà l'esprit de suite avec lequel il est possible de faire des colonies et surtout de les rendre prospères! Que serait-il arrivé pour la conquête de Madagascar, si nous avions subi dès le début un échec, ou si la colonne volante, faible poignée d'hommes malades, eût été écrasée sous les murs de Tananarive? Quel eût été l'emballement de Paris et qu'auraient fait les Chambres devant la tempête dé l'opinion publique?. Nous revenons parle pont du Song-Ky-Kong et nous rentrons en ville par le boulevard Gallieni en passant devant la résidence qu'il a fait construire la pacification définitive fut ici son œuvre et le soin avec lequel les communications sont assurées de Lang-Son et ses environs, est la confirmation pratique et très nette de ses procédés d'occupation. Son souvenir est resté précis dans la population indigène et parmi les 4.000 Chinois qui animent le commerce de la ville, attirés là par l'important marché de Ky-lua où se concentrent, une fois par semaine, les produits de la région badiane, maïs, canne à sucre, sorgho, tabac et un peu de coton. C'est chez l'un d'eux que je puis trouver le panorama de la ville car le Chinois est excellent photographe sa patience et sa précision s'accommodent fort bien des minutieuses prépa-
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rations, bains, virages, etc., qui, malgré tous les progrès, restent encore la terreur des amateurs de photographie en chiphotographe chauds. dans Le les surtout voyage, pays nois devient alors un auxiliaire providentiel que je conseille vivement à mes confrères inutile d'ajouter que- ses prix sont excessivement réduits. Van-Tong-Sine promet de m'envoyer
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Intérieur de la grotte de Van-Méo, à Kylna
à Hanoï les
photographies demandées: au jour fixé, je les ai
reçues. La tournée en ville étant terminée, mon guide m'emmène auxrochers de Ky-lua. Cette masse calcaire qui s'étend par pâtés coniques ou demi-sphériques sur la gauche de Lang-Son forme un cirque échancré sur l'Est et presque fermé vers l'Ouest par un étroit défilé qui escalade un col la route de BanThi traverse le cirque. Utilisant cette défense naturelle, les Chinois en 1885 l'avaient complétée par des murailles et des retranchements dont il reste encore des traces. La principale colline est percée d'une série de grottes reliées par des couloirs dont ils avaient fait des magasins de vivres et de muni-
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tions. Mais l'intérêt de ces grottes réside surtout dans l'adaptation qui en a été faite depuis un temps, immémorial sans doute, au culte religieux. E paves d'une formation contemporaine, vraisemblablement de celle de la baie d'Along, dont ces massifs rocheux rappellent très exactement les formes, érodées sans doute par la mer à une époque lointaine, des
Sortie de la grotte de Van-Méo
grottes de Ky-lua ont servi d'abri probablement aux populations primitives qui suivirent le progrès des terres sur l'Océan. L'entrée de la grande grotte de Van-Méo est élevée audessus du sol du cirque d'une quinzaine de mètres; on y accède par un escalier taillé dans la roche; des arbres s'élèvent devant laporte, laisséslàsans doute parles indigènes superstitieux pour remplir l'office de l'écran obligatoire. De suite, on se trouve dans une vaste salle assez élevée où la lumière extérieure filtre de façon suffisante pour permettre de distinguer tout d'abord les deux gardiens du temple, menaçants et peinturlurés, assis sur un animal fantastique, vêtus de costumes étranges, qui défendent l'accès du sanctuaire. Un premier autel à droite garni de figurines coiffées d un
bonnet ou morion arrondi, puis un alignement de bonzes coiffés d'une sorte de chapeau de rabbin, prouvent que Chinois et Annamites sont venus successivement faire leurs dévotions et aligner leurs divinités parmi les stalactites de la grotte. Habitué à l'obscurité, l'œil perçoit bientôt à des plans différents, les autels incrustés aux moindres anfractuosités des parois, dont la succession suit le relèvemenl du sol en face de l'entrée et borde un escalier abrupt taillé dans la roche. En le suivant on se heurte, à la rencontre du sol et de la voûte, contre une fente étroite dans laquelle un bouddha étrange debout, la tunique tombant en plis rigides et les mains allongées dans un geste hiératique, sort en demi-relief de la masse calcaire. Très semblable à certains bouddhas remarqués aux environs d'Angkor, cette divinité ne porte pas le caractère chinois marque-t-elle la trace de l'infiltration bouddhique ? Est-elle l'épave d'une colonisation partielle antérieure En tous cas, sa facture n'est ni annamite, ni chinoise et révèle une croyance bien différente, une idée de la félicité ascétique que les idoles confucianisées ignorent. Revenus dans la grande salle d'entrée, nous en gagnons l'autre extrémité et, par une anfractuosité basse, nous pénétrons dans une série de grottes à travers lesquelles, d'escalade en escalade, nous parvenons à la sortie sur le flanc opposé de la colline. Une nef spacieuse en ogive gigantesque avec des fuseaux de stalactites forme cette sortie et, du sommet, pendent les racines des lianes et des arbustes qui, dans ce vide de 15 mètres, cherchent à regagner le sol nourricier. Dans la brousse légère au dehors, des fleurs de montagne parmi lesquelles une violette brousse maigre d'ailleurs et tourmentée. Le soir même nous prenons le train de Dong-Dang. Dixsept kilomètres sont rapidement franchis des moyens de transport doivent me permettre de gagner la porte chinoise et de reprendre le train de 6 heures pour revenir diner LangSon. En arrivant à Dong-Dang, des ordres mal transmis nous font attendre une heure les pousse-pousse, et malgré la diliqu'à coolies, de la fameuse n'atteignons porte nos nous gence
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à
la nuit tombante, par une route pittoresque mais hérissée de montées et de descentes dont quelques-unes font prendre à nos véhicules une allure désordonnée. Sur la gauche, la falaise rocheuse que les Chinois ont fortifiée en 1885 s'étend abrupte et déchiquetée à droite les montagnes s'étagent et sur l'une d'elles la forteresse de Nam-Ouan est solidement campée au milieu une coulée étroite, barrée par une construction qui semble ridiculement petite entre ces deux massifs aux flancs desquels une muraille s'accroche escaladant les pentes, zigzagant dans les creux, minuscule obstacle artificiel accolé à de formidables remparts naturels. C'est la porte de Chine. La
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construction est récente, l'ancienne ayant été minée par nos troupes le 24 février 1885. Celle-ci est sans intérêt et la gueule de dragon qui surmonte l'entrée lui donne seule un peu de caractère. Assise sur une sorte de col qui coupe la dépression perpendiculairement, la porte précèdeunepetite esplanade sur laquelle un corps de garde et des magasins sont à l'étroit au delà, la vallée continue, profonde et s'enfonçant vers le Nord. C'est la route de Long-Tchéou. Sur quelques crêtes la campagne est on aperçoit encore de vagues forteresses déserte seules quelques cases sordides abritent les soldats du poste dans la gorge au bas du magasin. Les femmes et les enfants, habitués aux nombreuxtouristes, tendent la main, bousculés et repoussés par les porcs en quête de nourriture. Misère et saleté sont les deux notes de cette excursion, après laquelle reste au visiteur une déception complète. Combien différente cette impression, des paysages imaginés, aux notes claires et gaies, aux pagodes fleuries et contournées, aux villes grouillantes, sales mais pittoresques. Au lieu de cela, une campagne pelée et vide, des constructions aux enduits effrités, des cases de bambous branlantes et sur le tout, un ciel d'hiver maussade qui distille un crachin glacial, dont les fines gouttes délaient le sol gluant. Telle est la Chine, entrevue par le guichet de la porte de Nam-Ouan. Aussi, c'est avec empressement que nous regagnons LangSon, où un bon feu nous attend dans la salle commune de l'hôtel, près duquel nous pourrons, après dîner, recueillir quelques renseignements locaux.
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L'agitation, qui continue à se propager dans le Quang-Si et dans le Quang-Tong défraie la conversation dans laquelle revient fréquemment le nom d'un mandarin chinois connu sous le titre de maréchal Sou. Il m'estdéjà familier ce nom que j'ai bien souvent entendu prononcer dans l'entourage du général Gallieni. Quand ce d3rnier commandait à Lang-Son, Sou (il n'était peut-être que colonel cette époque), régnait sur l'autre versant de la frontière. De son vrai nom Sou-KomPao, primitivement allié avec les chefs pirates, il trouva plus prudent ou peut-être plus conforme à ses intérêts bien compris, demarcher d'accord avec nous. Des anecdotes déterminent d'ailleurs le caractère des arguments dont se servit notre commandant militaire pour le convaincre, parmi lesquels figurait en première ligne le traitement réciproque résumé dans la formule « Ne faites pas aux autres ce que vous ne voudriez pas qu'on vous fît. » A la suite d'une incursion en pleine Chine, faite par des inconnus que Sou prétendait avoir vu rentrer au Tonkin, le maréchal se déclara convaincu. Un calme, relatif évidemment, mais inconnu jusquelà, régna de Lang-Son à Caobang, et lorsqu'en 1896, le colonel Gallieni quitta le Tonkin, il alla faire ses adieux au commandant chinois qui versa de vraies larmes, m'ont raconté des témoins, et affirma à son ami et maître qu'ilperdait en lui son père. Sou retrouva une mèredans la République Française, qui lui continua son traitement de faveur et l'augmenta même, paraît-il, dans de notables proportions. Tout alla bien, jusqu'au jour où la croix de commandeur de la Légion d'honneur lui fut remise. Il faut avouer que cette habitude d'apposer sur la poitrine de nos agents dits secrets, une marque distinctive, n'est peut-être pas une heureuse combinaison. En tout cas, c'est dire ouvertement aux compatriotes de l'hommedistingué «Voici l'un de vous autres qui marche avec nous. » Or, pour des gens simples qui ne comprennent pas la valeur de la civilisation que nous importons par la force de nos armes et la persuasion de nos lois, il peut y avoir malentendu, et les compatriotes de l'homme distingué sont fort capables de dire « Voici un traître. C'est sans doute le raisonnement que fit la gracieuse souveraine de Chine, raisonnement corroboré
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par le calme, relatif toujours, que gardèrent ces provinces limitrophes de nos frontières pendant l'insurrection des Boxers. Calme momentané du reste et tout apparent, car en janvier 1903, alors que j'étais à Lang-Son, les Sociétés secrètes continuaient leur propagande. La rancune impériale, brusquement amie de la paix, saisit le premier prétexte et mit en demeure le maréchal Sou de réprimer l'agitation qui se fomentait. Vainementcelui-ci fit-il comprendre à Pékin que ses forces étaientinsuffisantes, ses soldats mal armés, affamés et sans argent; il dut se mettre en route contre les rebelles de Quang-Si. L'opinion courante à Lang-Son, en janvier 1903, était qu'il serait abandonné par les siens et massacré. Mais la Cour de Pékin voulait une disgrâce éclatante la mort dégradante en public et non l'assassinat. Le maréchal Sou, commandeur de la Légion d'honneur, fut donc arrêté en juillet 1903 et conduit à Pékin sous l'inculpation d'avoir laissé s'accentuer le mouvement insurrectionnel au Quang-Si et au Yun-nan, et même de l'avoir favorisé. Aussitôt arrivé, il fut jeté en prison, jugé et condamné à la peine capitale. Presque au même moment (octobre 1903) la famine décimait les provinces occupées par les rebelles, et le nouveau gouverneur Yuan-Shi-Kaï déclarait impuissant. M:ais cette situation ne pouvait sauver le malheureux Sou, dont l'impératrice voulait la tête, et il allait être exécuté quand, heureusement pour notrerenom et notre dignité, le ministre de France à Pékin s'interposa et obtint la grâce de notre allié. Cette nouvelle fut accueillie avec joie par tous les Journaux de l'Indo-Chine, même par ceux qui s'étaient montrés les adversaires de l'ex-maréchal et avaient le plus critiqué lasincérité de son concours rétribué. Cette question, lors de mon passage, passionnait. Lang-Son divisé aussi en deux camps, les partisans et les adversaires de Sou-Kom-Pao. J'espère que suite des événements aura réuni ces deux Partis dans la même idée, et tous là-bas,j'en suis sûr, sont actuellement convaincus que si l'on se sert des gens, il est Juste et digne de les abandonner à la vengeance des ne pas leurs il serait peut-être sage même de ne pas les y exposer. Quant, aux discussions auxquelles j'assistai sur le dévelop-
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pement des Sociétés secrètes en Chine, elles me furent si bien expliquées quelques semaines plus tard par une enquête personnelle faite à Canton, que je crois inutile de les reproduire. L'opinion la plus généralement admise à Lang-Son était que les bandes du Quang-Si agissaient sous l'inspiration des mandarins désireux de renverser la dynastie mandchoue et de rétablir celle des Ming. Le mouvement, de l'avis de tous, avait dévié étant exploité par les pillards et gens sans aveu qui profitaient de la terreur des paysans pour les enrôler de force et les rançonner. Tant que ces faits se passaient de l'autre côté de la frontière, leur seul résultat était d'entretenir à proximité de chez nous des foyers d'agitation. Mais malheureusement, il arriva souvent au cours de l'année 1902 que des émissaires des rebelles pénétrèrent sur le territoire tonkinois. S'infiltrant dans des villages écartés, ils tinrent aux habitants le raisonnement suivant « Avant six mois les Français seront jetés dehors et nous reviendrons en force si vous ne vous affiliez pas immédiatement vous serez considérés par nous comme rebelles, exécutés, vos cases seront détruites et vos biens confisqués. » Le timide nhaqué cède naturellement et préfère payer la redevance demandée. Ces listes d'impôts sont du reste fort bien tenues, j'ai pu m'en convaincre, et doivent persuader l'indigène qu'avec ce double paiement il reste en parfaite sécurité. Contre cette guerre occulte, il est difficile d'agir ceux qui se font prendre sont le plus souvent reconduits de l'autre côté de la frontière et remis au mandarin le plus voisin qui en extorque sans doute le maximum avant de les condamner. Mais cela durera tant que les provinces chinoises resteront dans cet état déliquescent où les a laissé depuis un sièclel'incurieimpériale, état aggravé parle ferment dissolvant des sociétés secrètes. Contre ce voisinage dangereux nous n'avons qu'un moyen d'action, c'est d'entretenir avec toutes les populations tonkinoises limitrophes de la Chine, un contact aussi étroit que possible et une police aussi nom' breuse que se pourra c'est aussi d'être impitoyable après jugement des coupables. Ces faits récents et les souvenirs douloureux des luttes
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sanglantes de la pacification ont eu le résultat fâcheux de provoquer chez nos compatriotes habitant le Tonkin une haine absolue du Chinois en général. Or il est incontestable que le Haut-Tonkin manque de bras; la population des cercles frontières Moncay, Lang-Son, Caobang, Bao-Lac, Ha-Giang, Laokay, peut être estimée en effet à 150.000 habitants environ comprenant Annamites, Thos et Mans, alors que cet ensemble couvre une superficie d'au moins trente mille kilomètres carrés
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Un poste
militaire dans le cercle de Lang-Son
qui donne 5 habitants par kilomètre carré. La province de Quang-Toung en revanche, qui, au recensement de 1892, comprenait 19.000.000 d'habitants, en contient actuellement 25.000.000 pour une superficie approximative de 1.100.000 kilomètres carrés, soit près de 23 habitants par kilomètre carré, avec des agglomérations comme celle de Canton comprenant 2.000.000d'habitants. La loi inéluctable depeuplement pousse donc vers le Tonkin les Chinois du Quang-T oung, mais loin d'y être accueillis ils en sont repoussés par l'opinion publique ,et tolérés à peine par l'administration qui est obligée de la Ce
suivre. C'est un malheur à notre avis et la vraie cause delà stagnation dans leur développement de tous nos territoires tonkinois du Nord. Voici du reste comment s'exprimait sur le même sujet M. de Lanessan, dans son livre déjà cité (page 102) : « Or, du moment où nos frontières seraient fermées aux Chinois, je considère qu'il serait impossible d'obtenir avant plusieurs s iècles, le peuplement des immenses territoires montagneux qui entourent le Delta. La population est trop dense, il est vrai, dans celui-ci, mais si nombreuse qu'elle soit, elle est insuffisante pour occuper le Tonkin tout entier. Il faut, de toute nécessité lui adjoindre des auxiliaires. Ceux-ci sont précisément les Chinois dont on réclame la destruction. N'estil pas préférable de les amener à changer de profession et à se fixer au sol?. ». Certes cela serait préférable d'autant que l'Annamite sur plusieurs de ces points représente l'infime proportion hors des centres, et que la population est composée des Thos et Mans, peuplades encore demi-sauvages. A côté de cette opinion d'un Français autorisé qui a dirigé l'Indo-Chine et connaît l'indigène, il est intéressant de juxtaposer l'avis donné par le correspondant du Times à Pékin asiatique, constitue la «. Le Chinois, qui etdans toute colonie carcasse essentielle pour ainsi dire l'épine dorsale de la constitution politique du pays, est exclus du Tonkin, ou pour être plus exact, est sujet de la part de l'administration française à tant de formalités tracassièresjustifiées ou non, qu'il lui est impossible de vaquer en paix à ses occupations. Les Chinois se plaignent que leur position au Tonkin devient chaque année plus difficile et que leurs charges s'accroissent sans cesse. Maispourquoi viennent-ils au - Tonkin, objectent les Français, alors que ni nous, ni les Annamites ne désirons leur présence L'idée qui semble prévaloir dans ce pays c'est l'exclusion totale de l'élémentchinois, ce qui signifie l'exclusion de la Colonie de toute chance de prospérité et de vitalité. » Les conquêtes sont toujours suivies d'erreursdece genre, inévitables. Ce qui s'est passé et se passe au Tonkin pour le Chinois a eu son équivalent à Madagascar pour le Hova. Ce dernier, aussi commerçant que le premier, avait établi de
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petits comptoirs sur tous les points de File. Il fut sur plusieurs, l'éducateur des indigènes locaux, éducateur brutal, il est vrai, rançonnant et pillant parce que supérieur, au même titre que le Chinois pouvait l'être sur les populations du Haut-Tonkin. Mais il est indiscutable que c'est à leurs comptoirs commerciaux que les Hovas durent le privilège d'être les maîtres de la plus grande partie de Madagascar, plus qu'à leurs expéditions militaires presque toujours désastreuses. Tout gouverneur, du reste, était un trafiquant et ce trafic formait le plus clair de ses revenus. Quand nous nous substituâmes au Gouvernement de Tananarive il était difficile de laisser en place ces gouverneurs hovas qui tiraient leur pouvoir de l'ancienneautorité; ajoutons d'ailleurs que l'opinion publique était unanime pour que « ces pelés, ces galeux, d'où venait tout le mal fussent vivement rappelés en Imérina. Comme pour le Chinois au Tonkin, une vieille haine, fomentée par les injustices plus ou moins grandes, dont nos colons de la première heure avaient souffert, entretenait chez eux un désir de vengeance que les événements autorisaient, sinon poussaient, à satisfaire. Donc les gouverneurs hovas rentrèrent dans leur capitale. Avec eux le commerce remonta leur personne d'abord, leurs clients et leurs esclaves ensuite emportèrent l'élément vital indispensable à ces populations côtières paresseuses et aveulies. Pas plus que le Tho ou le Man, le Betsimisaraka en effet n'est capable de tenir boutique. Il en est résulté que dans tous les points de la côte où la population ne justifiait pas l'installation d'un comptoir par un commerçant européen, on n'a plus rien vendu ni acheté. Je ne parle pas de la ruine des cultures accessoires que le fonctionnaire ou commerçant hova entretenait près des postes, et dont le produit, remontant constamment à Tananarive, faisait l'objet d'un nouveau trafic on peut compter que de ce chef la production du tabac par exemple, a diminué de plus de moitié à Madagascar. Justement ému par cet état de choses, le Gouverneur général a essayé à plusieurs reprises de ramener vers les côtes, et sur la demande même motivée, de plusieurs de nos compatriotes, le courant d'émigration hova, arrêté par notre conquête. Nous espérons que le chemin de fer contribuera de son
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côté à rétablir ce courant : c'est en tout cas un fait évident à l'heure actuelle que le Hova fut un colonisateur dont nous ne pouvons nous passer. En voyant la répulsion instinctive, et motivée par la maladie, que l'Annamite montre pour quitter ses rizières du Delta et habiter la montagne, j'ai tout lieu de croire que le Chinois comme le Hova doit être dans leHaut-Tonkin le seul élément commercial et agricole sur lequel il soit possible de compter. Et d'autre part, bien sincèrement, je ne vois pas la concurrence que peut faire à nos commerçants le trafiquant chinois établi dans des trous où pas un des nôtres n'aurait l'idée d'aller ouvrir boutique. Je ne parle pas bien entendu des grands centres où le système des patentes élevées et des mesures prohibitives me semble justifié. Mais si nous exceptons Moncay, dont le cercle compte au moins 13.000 Chinois, nous n'avons pour tout le pays indiqué ci-dessus qu'un ensemble de 5.000 ou 6.000 Chinois. Il doit être possible de faire mieux en attachant ce colonisateur au sol, comme le demandait M. de Lanessan. Le retour en chemin de fer sur Hanoï suffit d'ailleurs à démontrer combien toute la région reste inexploitée. Un des produits particuliers au cercle de Lang-Son est la badiane.Des plantations assez nombreuses aux environs immédiats de Lang-Son prouvent que la culture de ce produit destiné aux marchés de France a pris une grande extension. Il est d'origine chinoise et le principal port d'exportation était autrefois Haïphong est actuellement en concurrence avec Pak-hoï lui avantageusement. Mais dans ce résultat, est-ce que les 4.000 Chinois qui peuplent le cercle de Lang-Son n'entrent pas pour beaucoup? Haïphong a exporté, en 1900,46.000 kilogrammes d'huile de badiane Pak-koï à la même époque en exportait la même quantité, soit un total de 92 tonnes. La demande, si je ne me trompe, est élevée le terrain de LangSon semble convenir parfaitement à cette plante et il est certainement possible de doubler la production actuelle qui semble, avec le tabac et le coton, devoir être une des ressources principalesde cette province. Tandis que le train nous ramène vers le Delta, je feuillette
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un rapport sur les recettes du chemin de fer de Hanoï à la frontière du Quang-Si dans le premier semestre 1902. Ce qui est particulièrementintéressantdans ces relevés, c'est de constater le chiffre de 422.557 billets de quatrième classe délivrés à des voyageurs indigènes et asiatiques. Ce fait démontre nettement que l'indigène adopte nos moyens de transport et se rend rapidement compte des avantages qu'ils représentent. D'un tableau annexé ressort également que le mouvement le plus important de ces voyageurs indigènes s'est produit aux gares de Hanoï, Bac-Ninh, Phu-tu-Son, Phu-lang-Thuong au delà de ce dernier point, il décroît dans une proportion considérable pour atteindre à Dong-Dang un total de 12.448 voyageurs indigènes pendant six mois, soit 34 voyageurs par jour et par train le rendement dans la région haute semble donc médiocre. Il est intéressant de remarquer aussi le chiffre élevé des marchandises (2.450 tonnes) emportées par l'indigène en grande vitesse. Il se résout difficilement à ne pas accompagner ses colis, préférant payer douze cenls par tonne kilométrique au lieu de huit. Pour la petite vitesse, nous relevons parmi les tonnages les plus importants les bois de chauffage 3.236 tonnes; les bois de construction 1.486 tonnes; le sel: 1.187 tonnes; les objets manufacturés : 771 tonnes les riz et paddys : 657 tonnes les fourrages 158 tonnes les boissons 142 tonnes l'alcool 117 tonnes; les huiles et pétroles 108 tonnes. Les produits d'exportation en dehors des riz occupent dans le total une place infime légumes : badiane 22 tonnes 45 tonnes; peaux brutes 6 tonnes, etc. En secs, maïs tout un total de 14.351 tonnes y compris les marchandises
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destinées aux services civilsetmilitaires,ainsi que les matériaux de construction rails, traverses, etc., destinés aux Travaux Publics le tout établi pour six mois, soit 28.702 tonnes par an, sur lesquelles le transport pour le compte de la colonie figure pour 9.000 tonnes environ. Comme pour les voyageurs, les gares qui fournissent à l'expédition le plus fort contingent sont celles de la région basse, Dong-Dang ne figurant qu'avec 260 tonnes poursix mois.
La recette totale de janvier à juin 1900 a été de 365.000 fr. environ, soit 730.000 par an : le rapport ne donne malheureusement pas le compte des frais d'exploitation. De ces chiffres réunis et publiés par le bulletin économique de l'Indo-Chine (octobre 1902), il ressort nettement qu'autant la ligne est fréquentée dans la région basse, autant elle l'est peu à partir de Phu-lang-Thuong. Etant donné que le chemin de fer ne pénètre pas en Chine et n'a pas pour but la liaison de ce côté avec aucun centre commercial ou aucun débouché, les 120 kilomètres qui séparent Phu-lang-Thuong de Nam-Quan constituent donc un chemin de fer exclusivement stratégique et sans intérêt économique, pour l'instant du moins. La situation ne peut être modifiée que si la ligne est poussée jusqu'au Si-Kiang ou si la mise en valeur de la province de Lang-Son est déterminée par un afflux de population nouvelle. La seconde solution est encore douteuse par suite de la sinophobie et demandera en tout cas beaucoup de temps pour être pleinement réalisée. Quant à la première,où en estLe gouvernement chinois a bien concédé à une elle compagnie Française le prolongement de la ligne HanoïQuang-Si jusqu'à Long-Tchéou d'abord et jusqu'à Nanning sur le Si-Kiang ensuite mais depuis huit ans l'affaire reste pendante par suite dedifficultésdiplomatiques. En 1898, une mission, à la tête de laquelle était M. l'ingénieur Wiart, qui vint à Madagascar en 1896 et dont nous avons gardé un excellent souvenir, fut chargée d'étudier le tracé d'une ligne partant de Nam-Quan, passant par LongTchéou, Nang-Ning, Lieou-Tchéou, Kouei-lin, Nang-Tchéou, Tchang-cha et Hankéou, point terminus du chemin de fer « Hankéou-Pékin » donné à une compagnie franco-belge. La longueur de cette ligne serait de 1.500 kilomètres environ. Cette étude faite depuis cinq ans n'a été suivie d'aucun résultat. Il est regrettable que dans des questions primordiales de ce genre où c'est, non pas l'intérêt de telle ou telle colonie, mais l'influence, et par suite la situation internationale de la France qui est en jeu, la métropole n'intervienne pas directe-
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ment et constamment pour en hâter le règlement. Sur la carte du Service Géographique de l'Indo-Chine, le tracé de ce chemin de feu est porté en entier mais c'est la seule preuve que nous ayons jusqu'à ce jour de la possibilité de son existence. Au moment où la question chinoise devient un problème européen transportant la question d'Orient en Extrême Orient il paraît urgent de savoir si nous voudrons, nous aussi, nous avancer jusqu'à Si-Kiang ou rester confinés dans nos frontières actuelles. Ceci intéresse la France le prolongement de la ligne au delà de Nam-Quan, intéresse l'Indo-Chine; il semble que ces deux intérêts soient connexes en l'occasion ,et qu'une coopération de la métropole pourrait changer en ligne économique et de rapport, cette voie qui pour l'instant aboutit à un cul-de-sac. N'ayant pas eu entre les mains le rapport de M. Wiart, il nous est difficile de juger des difficultés que présente au point de vue exécution le tracé de la ligne. De Nam-Quan à Long-Tchéou, il emprunte partiellement la vallée du Sang-KiKong qui passe à Lang-Son. De Long-Tchéou à Nanning-Fou il suit la vallée du Tso-Kiang, affluent du Si-Kiang. Entre Nanning et Lieou-Tchéou les difficultés doivent être nombreuses, la région étant montagneuse et formant une ligne de partage des eaux accentuée. Les vallées des fleuves ellesmêmes du reste, ainsi que nous pourrons le constater en remontant le Fleuve Rouge,multiplient le nombre des ouvrages d'art sur des cours d'eau dont l'embouchure est souvent encaissée avec un sol vaseux. Mais quelles que soient les difficultés, il est certain qu'une étude serrée les atténuera et rendra l'exécution praticable. L'énorme population du QuangToung d'autre part, avec près de 60 habitants par millecarré et l'afflux vers Canton des denrées provenant du Quang-Si garantissent à ce chemin de fer un rendement économique important, même s'il n'était poussé que jusqu'à Lieou-Tchéou, c'est-à-dire sur une longueur de 400 kilomètres environ au delà de Nam-Quan. Puisse l'avenir assurer prochainement la réalisation de ce rêve, cher aux Tonkinois à juste titre, car il peut faire de Hanoï le vrai débouché de la Chine méridionale, rôle prépon-
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dérant auquel sa situation exceptionnelle, au centre d'une région riche en hommes et en terre, la destine, aussi bien qu'Haïphong semble indiqué pour devenir après quelques travaux urgents, un port de commerce du premier ordre. A. JULLY. (A suivre.)
APERCU O
SUR LE COMMERCE EXTÉRIEUR DE MADAGASCAR PENDANT L'ANNÉE 1903
c
Le commerce général de la Colonie de Madagascar et dépendances avec l'extérieur s'est élevé pendant l'année 1903 àla somme totale de 49.578.299 francs contre 55.433.476francs en 1902; il est donc en diminution de5.855.177 francs. A première vue, ces chiffres paraissent indiquer un arrêt ou même un recul dans le développement économique de la Grande Ile. Un examen détaillé et approfondi va, au contraire, faire ressortir les progrès réalisés dans la mise en valeur de la Colonie. Le graphique ci-après indique le mouvement commercial des huit dernières années et les résultats obtenus depuis
l'occupation (1896 à 1903).
IMPORTATIONS ET EXPORTATIONS RÉUNIES
IMPORTATIONS La diminution constatée dans le commerce général en 1903 provient uniquement des importations qui de 42.289.036 francs en 1902 sont descendues l'année dernière à 33.107.171 francs, accusant ainsi une différence en moins de 9.181.865
francs. On verra plus loin que, par contre, le chiffre des exportations s'est accru de 3.326.688 francs. 1
MOUVEMENT DES IMPORTATIONS DE
1896 A 1903.
C'est en 1901 que la capacité d'achat de la Grande Ile a atteint son maximum. Les années 1900-1901 et 1902 ont donné des résultats exceptionnels dont les causes principales sont l'achèvement de la route carrossable de Tananarive à Mahatsara, le commencement des travaux du chemin de fer et l'introduction de main-d'œuvre étrangère, les ravages causés par les sauterelles aux plantations de riz, enfin, la création du point d'appui de la flotte à Diego-Suarez et l'augmentation d'effectifs qui en a été la conséquence. Il faut donc prévoir que pendant les années qui suivront le chiffre des importations restera à peu près stationnaire. Le tableau ci-après donne pour les importations, classées par groupe de marchandises, les résultats comparés des deux dernières années.
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:
IMPORTATIONS EFFECTUÉES EN
1902
ET
1903
POUR LES PRINCIPAUX
ITissus IMPORTES | PRODUITS CLASSÉS PAR GROUPE DE MARCHANDISES.
r-=
PRODUITS IMPORTES 1903 1902 PRODUITS PRINCIPAUX
|tion.,.,
»»
, , Boissons5.604.109
11.873.085 5.041.865
»
11.837.940 2.312.583
» 4.666.767»» Ouvrages en métaux4.661.595 2.649.562» Marbres, pierres,terres2.535.031»1.935.253 Denrées coloniales de consomma1.412.982» 1.650.592» Métaux 1.112.504 975.909 Bois 1.507.063 185.907» Produitsdi\'ers".,..,. 8.303.192» 7.130.268» Farineux alimentaires..
TOTAUX,
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»
«
»
42.289.036
»
»
»
33.107.171
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ressort de cet exposé que la diminution porte sur tous les produits. Passons en revue les principaux d'entre eux. Il
Boissons. — Le commerce des boissons a passé de •).601.109 francs à 4.666.767 francs accusant ainsi une moins value de 938.342 francs qui porte principalement sur les eauxde-vie diverses. Au point de vue de l'hygiène et de la conservation de la race indigène on serait tentéaupremier abord de se féliciter de cette situation si, au fléchissement des importations d'absinthesuisse et d'eaux-de-vie anisées, avait correspondu une diminution de la consommation locale. Malheureusement, il n'en a pas été ainsi et les rapports des administrateurs signalent de toutes parts une recrudescence extraordinaire de la fraude sur les alcools fabriqués clandestinement par les indigènes et une augmentation considérable de la fabrication et de la vente de la boisson fermentée appelée «betsa-betsa » dont les Malgaches des régions côtières aiment à s'énivrer. Il se peut que le taux trop élevé des droits
de consommation frappant les alcoolsfabriqués ou importés dans la Grande Ile n'ait pas été étranger à ce fâcheux
résultat. Le gouvernement local prendra certainement des mesures pour modifier cet état de choses, dans un sens à la fois plus favorable à la santé publique et aux finances de la Colonie. IMPORTATIONS DE BOISSONS DE
1896
A
1903
Ouvrages en métaux. — On constate également une forte diminution de 2.022.033 francs sur les ouvrages en métaux introduits à Madagascar pendant l'exercice écoulé. Dans ce dernier chiffre les monnaies d'or et d'argent entrent pour 1.102.842 francs. Ce fait trouve son explication dans le ralentissement du commerce des bœufs avec l'Afrique du Sud dont il sera question plus loin. Le paiement des bœufs achetés dans la Colonie s'effectue, en effet, le plus souvent en livres sterling et, les exportations de ces animaux ayant fléchi l'année dernière de 1.919.465 francs, il est naturel que les importations de monnaie d'or aient baissé dans une proportion équivalente.
IMPORTATIONS D'OUVRAGES EN MÉTAUX DE
1896
A
1903
Farineux Alimentaires. — La diminution des importations de farineux alimentairesestde2.729.282 francs dont 2.438.157 francs pour le riz. Il n'y a pas lieu de s'alarmer de ce recul considérable qui correspond à un accroissement proportionnel de la production locale.
IMPORTATIONS DE RIZ DE
1896
A
1903
Ainsi qu'on le voit, les importations de riz qui, en 1902, avaient été de 15.614.354 kilos, représentant une valeur de 3.204.706 francs, déjà en baisse de près de moitié sur 1901, n'ont atteint pendant le dernier exercice que 3.001.956 kilos valant 766.549 francs. On ne peut que se réjouir de ce résultat qui n'est dû qu'à l'extension locale de la culture du riz et qui démontre que la Grande Ile tend à devenir, pour cette denrée, de moins en moins tributaire des pays étrangers. Cette céréale reste, en effet, la base de l'alimentation des indigènes et les besoins de ces derniers n'ont pas diminué depuis 1901. Seulement, l'ouverture de la route de l'Est, en déterminant une baisse considérable des prix de transport, a permis aux riz de l'Imerina de venir concurrencer avec avantage jusqu'à la côte les riz de Saïgon. Il est permis d'espérer que les Malgaches, renonçant peu à peu à leurs habitudes d'indolence et désireux d'accroître leur bien-être, entreront enfin dans une voie nouvelle et cultiveront d'année en année de plus grandes superficies de marais dont beaucoup sont encore vierges de tout défrichement. Nous verrons alors la production locale devenir suffisante pour alimenter la Colonie tout entière, le surplus trouvant en outre un écoulement facile dansles pays voisins, lorsque la mise en exploitation de la voie ferrée rendra les transports du plateau central à la côte encore plus faciles et surtout moins coûteux. '.: Tissus. — La valeur des tissus importés dans la Colonie s'est élevée, en 1903, à 11.837.940francs,aulieu 11.873.085 francs en 1902, soit une légère différence en moins de 35.145 francs. Ce sont les tissus de coton qui sont' l'objet à Madagascar du commerce le plus important, puisque leur valeur représente le tiers des importations totales. Jusqu'en 1901 les transactions sur ces tissus ont suivi une progression constante. Depuis deux ans, il s'est' pro-
de
duit un léger fléchissement qui fait supposer que le mouvement ascensionnel a atteint pour quelque temps son apogée. IMPORTATIONS DE TISSUS DE COTON.
Bois. — Les importations de bois qui s'étaient élevées, en 1902, à 1.507.063 francs sont descendues l'année dernière à 185.907 francs, d'où une moins-value de 1.321.156 francs, tandis que les exportations se sont accrues au contraire de 357.653 francs. Ces chiffres sont le résultat de la mise en exploitation régulière des riches forêts de l'Ile, qui a pris depuis quelque temps une grande extension. Il ressort du graphique ci-après que les importations de bois tendant à disparaître il n'est pas téméraire de penser qu'elles cesseront bientôt complètement tandis que les expéditions de nos produits forestiers au dehors augmenteront chaque année.
IMPORTATIONS DE BOIS DE
1896
A
1903
EXPORTATIONS
Pendant l'année 1903 les exportations de la Grande Ile au dehors ont augmenté de3.326.688 francs passant, de13.144.140 à 16.471,128 francs. Ces chiffres sont des plus encourageants, car c'est surtout par l'importance des produits exportés que l'on peut juger de la richesse d'un pays et des progrès réalisés par ce dernier au point de vue économique. A part un léger recul en 1901, la marche ascensionnelle des exportationsdepuis1896 a été continue.
EXPORTATIONS
r i1
DES PRINCIPAUX PRODUITS EN
PRINCIPAUX
1902
PRODUITS EXPORTÉS
(Valeur)
»»
°r-; ••••• 4.122.612 Bovidés.,,, ,
, , , , ,, ,, ,
Caoutchouc
Raphia.
•
PeauX'grandes..
Cire.., Bois
,
Farineuxalimentail'es.. yanille Autres
produits TOTAUX
4.401.250 545.630 1.039.150 692.841
1902
ET
1903
1903 (Valeur) 5.856.778 2.481.785
»
» 2.581.439» » 1.818.368» » 1.149.985o 789,519» 556.018» 297.722»* 655.380 » 391.654» 317.286» 302.108» 206.613» 561.954» 847.476»
13.144.440
»
»
16.471.128
La valeur des exportations a donc quadruplé depuis l'occupation, c'est-à-dire en huit ans, preuve indéniable de l'essor industriel et commercial que notre prise de possession a imprimé à la Grande Ile. On a vu, par le tableau ci-dessus, qui donne la valeur des principaux produits exportés pendant les deux dernières années, que l'augmentation du chiffre des exportations s'applique à tous les articles, sauf les bovidés, la cire, les farineux alimentaires et la vanille.
Or. — Les exportations d'or qui atteignaient déjà 4.122.612 francs en 1902 se sont élevées l'année dernière à 5.856.778 francs, en augmentation de 1.734.166 francs. Cette recrudescence est due à la découverte de nouveaux placers et au nombre toujours croissant des prospecteurs qui se livrent à la recherche du précieux métal. Il convient de noter que depuis 1896 le commerce de l'oi a suivi une progression à peu près constante malgré l'emploi presque exclusif de la batée dont le rendement est très faible. EXPORTATIONS D'OR DE
1896
A
1903
:
Peaux de bœufs. bœufs a de des Le commerce peaux — pris en 1903 une grande extension elle s'affirmera certainement lorsque le chemin de fer permettra d'exporter en plus grande quantité les dépouilles d'animaux provenant du pla-
teau central. La baisse des prix de transport de Tananarive à Tamatave a beaucoup contribué à la reprise des affaires qui vient de se manifester; elle est due également à l'augmentation de la population européenne de l'Ile qui nécessite l'abatage d'un plus grand nombre de têtes de bétail. EXPORTATIONS DE PEAUX DE BOEUFS DE 1896 A
1903
'-J
Bovidés. — Le commerce des bœufs n'a pas répondu aux espérances conçues par l'administration de la Colonie après le développement considérablequ'avaient atteint les exportations en 1902. Celles-ci ont subi, eneffet, en 1903, une moins-value de 1.919.465 francs par suite du ralentissement des transactions commerciales avec la côte orientale d'Afrique, que la nécessité de reconstituer les troupeaux du Transvaal et de l'Orange, décimés à la suite des hostilités anglo-boër, avaient rendues d'abord très actives. De plus, nos produits malgaches
ont eu à lutter contre la concurrence très sérieuse des viandes de boucherie provenant de la République Argentine, des Etats-Unis et même de l'Australie. Il résulte d'une enquête très sérieuse à laquelle s'est livré le Gouvernement de la Colonie à ce sujet, que les exportateurs de Madagascar ne s'étaient pas suffisamment attachés à expédier des animaux de choix, répondant en tous points aux exigences des marchés du Natal et du Mozambique. Cette façon de procédersemble avoir jeté le discrédit sur les bœufs de Madagascar et constitue, à n'en pas douter, une des principales causes du recul constaté dans les exportations. Aussi, l'administration locale n'a-t-elle pas manqué d'appeler l'attention des éleveurs et des négociants sur les avantages pouvant résulter pour eux de l'emploi de méthodes rationnelles pour l'engraissement du bétail et de l'envoi en Afrique du Sud de sujets réunissant autant que possible les qualités exigées par les acheteurs. Si ces conseils sont scrupuleusement suivis, il est à présumer que les relations commerciales avec Durban, Lourenço-Marquès et Beira reprendront aussi activement que par le passé. La création d'un service de navigation régulier entre la Colonie etla côte orientale d'Afrique, actuellement à l'étude, contribuerait, sans doute, dans une large mesure, à atteindre ce but. EXPORTATIONS DE BOEUFS DE 1896 A
1903
Farineux alimentaires. —Les farineuxalimentairesexportés
hors de la Coloniesont presque exclusivement représentés par les poisduCap, cultivés sur la côte Ouest; lesexportations de légumes secsont passé, en 1903, de 374.770 à 281.778 francs. -
DE LÉGUMES
EXPORTATIONS
Denrées Coloniales
SECS DE
1896 A 1903
-
A l'exception des clous de girofle, dont commerce accuse, en 1903, une plusvalue de 40.000francs, la plupart des denrées coloniales de consommation telles que la vanille, le cacao, le café, ont subi
de consommation.
le
une baisse assez importante.
EXPORTATIONS DE CLOUS DE GIROFLE DE
1896
A
1903
L'avilissement du prix de la vanille sur les marchés d'Europe et les droits relativement élevés qui frappent ces produits coloniaux à leur entrée en France, auxquels il faut ajouter les aléas inhérents à ces cultures riches, peuvent être considérés comme les causes principales du ralentissement constaté dans l'exportation de ces denrées. Il serait à souhaiter que la métropole, par mesure de réciprocité, accordât, enfin, la détaxe complète à nos produits coloniaux, mesure depuis longtemps réclamée, et malheureusement sans succès, par tous ceux qui se préoccupent de l'avenir de nos possessions d'outre-mer. EXPORTATIONS DE VANILLE DE
1896 A 1903
Caoutchouc. — Parmi les produits du sol dont le trafic a particulièrement progressé en 1903, il faut citer en première ligne le caoutchouc dont les exportations présentent une plusvalue de 2.035.809. Cette heureuse reprise, qu'il faut surtout attribuer à la pacification complète des tribus du Sud, démontre que les ressources de l'Ile en plantes caoutchoutifères sont loin d'être épuisées ainsi que le faisait craindre la courbe descendante de 1899 à 1902 figurée sur le graphique ci-après. Ce résultat fait bien augurer de l'avenir réservé au caoutchouc de Madagascar, généralement en faveur sur les marchés d'Europe. Cependant on a signalé, à diverses reprises au Gouvernement delà Colonie, des fraudes commises par les indigènes qui, en récoltant le latex, y mélangent de la terre et des cailloux pour en augmenter le poids. Des mesures très
sévères, analogues à celles qu'a dû adopter le gouvernement de la Guinée française, seront prises pour empêcher le retour de ces procédés barbares et éviter ainsi la dépréciation qui ne manquerait pas de frapper le caoutchouc de Madagascar, si ces abus se renouvelaient. EXPORTATIONS DE CAOUTCHOUC DE
1896
A
1903
Raphia. — Les exportations de raphia qui, en 1902, avaient subi une forte diminution attribuée à la baisse des cours les marchés de la métropole, ont repris l'année dernière sur un peu plus d'activité. La valeur de ces produits envoyés au dehors s'est élevée à la somme de 1.818.368 francs en augmentation de 779.218 francs. Les viticulteurs du midi et du sudouest de la France se servent de cette fibre comme lien si ce procédé se répandait dans les autres pays de vignobles, la Colonie pourrait exporter des quantités relativement considérables de raphia, le palmier dont il est extrait étant très répandu dans la plupart des régions côtières. Ce textile qui sert dans le pays à la fabrication des rabanes, pourrait également être utilisé par l'industrie métropolitaine pour la confection de tissus. Une maison de Lyon avait entrepris des essais dans ce sens qui, malheureusement, n'ont pas donné
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jusqu'à ce jour de résultats satisfaisants, en raison du prix de revient trop élevédes fils de raphia. EXPORTATIONS DE RAPHIA DE
-:
A
1896
1903
Cire. Les exportations de cire ont diminué de 233.501 francs elles se sont élevées à 556.018 francs au lieu de 789.519 francs réalisés en 1902. Il faut attribuer en partie la moins-value constatée l'année dernière à plusieurs cyclones qui, la fin de 1902 et au début de 1903, ont ravagé la côte Est et détruit une grande quantité de ruches. Les guépiers sont aussi des ennemis redoutables des abeilles; ce sont ces insectes nuisibles qui ont rendu infructueux les essais d'apiculture entrepris par le service forestier de la Colonie à Analamazaotra. La cire de Madagascar étant très appréciée sur les marchés d'Europe, il est à souhaiter que les indigènes qui, jusqu'à présent, se sont surtout contentés de récolter le miel et la cire sauvages, ne tardent pas à se livrer à l'élevage
à
rationnel des abeilles qui pourrait devenir, par la suite, une source importante de revenus. -
EXPORTATIONS DE CIRE DE 1896
A
1903
-
Bois d'Ebéniterie. On a vu plus haut que les importations de bois avaient diminué pendant l'année écoulée dans une très forte proportion. L'installation. de plusieurs scieries mécaniques etla mise en exploitation de nombreuses concessions forestières ont déterminé une plus-value assez importante dans les expéditions au dehors qui ont passé de 263.058 francs en 1902 à 564.754 francs, augmentant ainsi de 357.653
francs
Il est certain que, comme pour le riz, Madagascar ne tardera pas à se suffire en bois et que le commerce de
ces produits avec l'extérieur acquerra par la suite un grand développement, la côteorientale d'Afrique assurant aux commerçants un débouché rémunérateur.
EXPORTATIONS DE BOIS D'ÉBÉNISTERIE-DE 1896 A
1903
En résumé, la situation économique de Madagascar au début de 1904, en dépit d'une gène passagère dans les transactions commerciales qui s'est manifestée par un certain nombre de faillites et de liquidations judiciaires, se présente sous un jour favorable. Il convient surtout de retenir de cette courte étude que si les importations ont présenté au cours du dernier exercice une moins-value considérable il faut en attribuer la cause essentielle aux progrès réalisés par la mise en valeur du sol, qui permet à la Colonie de trouver sur son propre territoire, une partie des produits qu'elle recevait jadis de l'extérieur. Malgré un court arrêt en 1901, les exportations ont suivi au contraire une progression continue qui s'est affirmée par une augmentation de plus de 4 millions en 1902, de plus de 3 millions en 1903. Ces chiffres témoignent de l'activité déployée par les entreprises agricoles, industrielles et commerciales, ainsi que de la marche progressive de l'exploitation des produits naturels par les indigènes.
On peut, dans ces conditions, envisager comme prochain, le jour où la valeur des produits exportés, égalera celle des importations. Tous les efforts de ceux qui s'intéressent à l'avenir de Madagascar doivent tendre vers ce but. Lorsqu'il aura été atteint, la prospérité de la Grande Ile sera définitivement assurée et tout porte à croire que l'achèvement du chemin de fer contribuera pour une large part à cet heureux
résultat.
C. L.
SOUVENIRS .D'UN
(1)
D'AVANT-GARDE SOLDAT (1895)
CHAPITRE XVIII COMBAT D'AMBOHIPIARA.— LE POINT D'OU L'ON VOIT TANANARIVE. FUSION DES ÉCHELONS DE LA COLONNE VOLANTE.
--
DERNIÈRE RÉSISTANCE DES HOVAS EN AVANT DE LA CAPITALE. BOMBARDEMENT DU PALAIS DE LA REINE. UN DRAPEAU BLANC QUI SE MONTRE A TEMPS. PRISE ET OCCUPATION DE TANANARIVE.
Un combat d'avant-garde a eu lieu le 26 septembre, au sud d'Ampanotokanaoùquelques chasseurs d'Afrique signalaient une troupe assez nombreuse. Il y avait là, pour les Hovas, une succession de défenses
naturelles formées par les collines rocheuses avoisinant Sabotsy (2), par l'Ikopa et son affluent de droite, le Manarano, ainsi que par les escarpements du massif du Fandrozana. L'ennemi laissa s'avancer le groupe Metzinger sans ouvrir le feu sur les premières lignes, contrairement à ce qu'il faisait jusqu'alors, et, lorsque nous fûmes à 400 mètres, il démasqua Voir la Revue du 10 janvier et suivantes. (2) Ne pas confondre avec le village de Sabotsy situé tout près de Tananale mot veut dire « samedi », c'est-à-dire là où le marché a lieu le rive -
(1)
;
samedi.
une pièce de canon établie sur les crêtes; en même temps, une vive fusillade blessa six hommes de la Légion. Celle-ci se trouvait à découvert pour ne pas être exposée davantage à un feu meurtrier, elle mit sac à terre et s'élança à l'assaut des positions des Hovas qui s'enfuirent, balayés par nos feux de salve et nos obus. Les ennemis furent rejetés au delà de l'Ikopa du Manarano, tandis que ceux qui s'étaient aventurés sur les pentes du Fandrozana reçurent une pluie de mitraille envoyée par la 16ebatterie. La chasse continuait à la descente,de la montagne jusque vers Tsimahandry, quand un fort parti de Hovas, posté le village natal de sur les hauteurs d'Ambohipiara Ranavalona — arrêta la poursuite un obus renversa un homme et un caporal de la compagnie Pradal (bataillon Lentonnet). Ce fut autour des Tirailleurs de monter à l'assaut de ce nid royal, mais les soldats de la Reine n'y étaient plus. fait Le 27 septembre, soleil froid loup; le de est resté a un caché et une bise glacée s'est mise à souffler si violemment que nous avons eu grand'peine nous réchauffer avant onze heures du matin. Après avoir grimpé le long des pentes du massif du Fandrozana, nous avons atteint un col d'où l'on aperçoit Tananarive, à quelque vingt-cinq kilomètres à vol d'oiseau on ne peut s'imaginer le plaisir et le réconfort que cette vue nous a procurés, aux hommes plus encore qu'aux officiers. Un autre spectacle nous cause une surprise agréable l'avant-garde et le gros sont campés à une demi-lieue dans la plaine, à Tsimahandry nous avons l'ordre de rejoindre, de sorte qu'il n'y aura plus de troisième échelon nous marcheronsde concert jusqu'à Tananarive. La capitale hova est bâtie sur une montagne isolée, à 1.458 mètres d'altitude, et allongée du nord au sud son sommet tronqué forme un étroit plateau sur lequel se profilent notamment les palais de la Reine et du premier Ministre. Les pentes, fort abruptes, sont garnies de maisons. Presque tout autour s'étendent des rizières - immenses celles-ci se prolongent au nord-ouest, dans un rayon trois
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il
à
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ou quatre lieues, et elles ne sont franchissables que sur des
digues très étroites. Nous venions précisément du nord-ouest, mais cette configuration du sol aurait obligé la colonne à marcher en files dans les rizières défoncées ou inondées, à passer la Mamba près de son confluent avec l'Ikopa, là où la rivière est large et profonde, et à s'exposer en détail au feu de l'ennemi. En outre, on eût manqué de positions dominantes pour aborder ville et mettre en batterie. Au nord-est à l'est, au contraire,on pouvait éviter les grandes rizières et s'avancer jusqu'à une dernière ligne de positions d'attaque, par une série de hauteurs à peu près de même altitude que la colline de Tananarive. C'est pourquoi le Général en chef résolut d'opérer un mouvement tournant par le flanc, dans la direction d'Imerimandroso d'où nos troupes se rabattaient sur la capitale. L'ennemi fut trompé par cette stratégie. Déjà la Heine, nous voyant aussi près, se disposait à s'enfuir avant l'assaut de la ville auquel les Hovas s'attendaient pour le lendemain, 27 septembre nous eûmes l'air d'être indécis, peu ardents à terminer une lutte dont l'issue devenait réellement problématique, et Ranavalona se reprit à espérer. Enfin, il n'est pas jusqu'à la proximité de la route de Tamatave qui n'ait donné le change sur nos intentions en appuyant vers l'est, qui sait si nous ne nous ménagions pas une prudente et tardive retraite? En effet, on ne saurait envisager sans inquiétude la simple hypothèse d'un brusque retour en arrière. Il ne faudrait pas trop compter sur la validité — toute relative — des soldats européens de notre vaillante petite armée nos munitions s'épuiseraient vite dans des alertes et des combats successifs de plus, nous éprouverions les pires difficultés pour vivre sur un pays hostile dont les ressources seraient mises aisément hors d'atteinte comme jadis la barque de César, nos mulets portent la fortune de la colonne volante. Quelques-uns, cependant, ont bronché d'autres ont succombé à la peine; aussi, y a-t-il eu, dans chaque échelon, des
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pertes de chargement inévitables, et nous n'avons plus exactement la totalité des huit jours de vivres qu'il devrait nous rester. Le convoi de la réserve, dirigé par le capitaine Iraçabal, a supérieurement marché, mieux que les échelons de l'avantgarde et du gros, paraît-il ce n'est pourtant pas que nous fussions favorisés, car on avait réservé de bons mulets pour faire monter les hommes du 200e ceux-ci ont enfin pris rang au milieu du groupe Metzinger. La nuit du 27 fut tranquille. Les Hovas avaient cependant la partie belle une bruine glacée semait la fièvre, les pieds collaient à la terre, et, à la faveur d'une obscurité profonde, l'ennemi pouvait nous faire beaucoup de mal; il ne songea même pas à nous empêcher de dormir ce qui n'eût pas manqué de nous harasser davantage. Le 28 septembre, à la pointe du jour, nous nous dirigeâmes sur Imerimandroso : la Légion escortait le grand convoi et un bataillon de Tirailleurs algériens lui servait de soutien sur les flancs. Déjà le gros de la colonne volante était rendu au campement, à trois kilomètres à l'ouest d'Ambohimanga (1), quand le convoi fut attaqué au tiers du chemin, vers midi. Des bandes de plus en plusnombreuses nous suivaient depuis le départ et s'étaient rassemblées sur les hauteurs d'Alakamisy tout-à-coup, des décharges de fusil parties des crêtes et même du village atteignirent les deux compagnies de la Légion qui nous formaient arrière-garde. Les légionnaires, gens solides au feu ripostèrent à 200 mètres: pendant une heure, il fallut répéter salves sur salves avant que les Hovas se soient décidés à reculer l'affaire nous laissait six hommes hors de combat. On dut cesser le tir, car les munitions Lebel allaient manquer. L'ennemi, un instant démonté, chercha à gagner le milieu du convoi nos bœufs affolés prenaient déjà du large lorsque le
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1 Ambohimanga, la ville sainte, sert de lieu de sépulture aux premiers rois de l'Imerne. Elle s'élève sur une haute colline, presque isolée au milieu d'une plaine de rizières: c'eût été perdre un temps précieux que de pousser
Jusqu'à cette position escarpée, assurément défendue et pour nous inutile. D'ailleurs, nousparaissions donner ainsi aux Hovas un gage de nos senti'> ments de respect envers le culte des ancêtres.
capitaine Gendron, avec ses conducteurs sénégalais, se jeta vigoureusement sur l'arrière, à l'arme blanche. A peu près au même moment, le colonel Oudri, à la tète des Tirailleurs algériens, dégagea notre échelon où chacun avait pris un fusil Gras nous eûmes un frisson d'émotion et de plaisir quand on fit circuler les cartouches. Les troupes houves, commandées par Rainianjalahy, ont assez bien tenu et un effort plus hardiaurait gravement comla nuit était venue quand nous arripromis notre marche vâmes Imerimandroso. Nous avions besoin d'un repos complet : ces bons Hovas nous laissèrent dormir tranquillement. Le 29, on reprit le mouvement, du nord au sud-est, en s'arrêtant un grand nombre de fois pour donner le temps à l'infanterie et à l'artillerie d'occuper les hauteurs. Après avoir dépassé Lazaina, nous avons eu, dans l'aprèsmidi, deux engagements avec les troupes de couverture de Tananarive le premier, lorsque l'avant-garde entrait dans le village de Sabotsy où l'ennemi nous a canonnés un officier et trois tirailleurs algériens furent blessés. Le second combat se livra aux abords du village d'Ilafy : le Dataillon malgache et l'infanterie de marine refoulèrent les Hovas dans les rizières de l'ouest, en avant de Tananarive. Avant que cette dernière action ne soit terminée, nous campons à Ilafy, distant de la capitale d'environ quinze kilomètres. Je rencontre, sur la place du marché, un Hova nommé Ralambo « le baron Lambo (sanglier) » comme l'appelaient avant la campagne le camarade Conty et les officiers de l'escorte c'est un jeune homme parlant très correctement le français. Il me raconte que le parti de la guerre veut se défendre jusqu'à la dernière extrémité et mourir aux pieds de la Reine, tandis que les partisans de la paix— comme lui — nousregardent passer en curieux. quitte, lui dis-je, à sortir un fusil de dessous le lamba et à se changer en adversaires dès que nous aurons le dos tourné. Dans la soirée, les bruits les plus extraordinaires circulent: la Reine et le premier Ministre auraient fui, laissant les belligérants se débrouiller. Que de canards dans le camp!
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Le lundi 30 doit être le grand jour
faut prendre Tana-
narive, sans quoi. Devant nous et à gauche, c'est-à-dire face à l'est, les Hovas occupent deux lignes de collines parallèles à la ville. Ce sont: d'une part l'Ankatso d'autre part, les hauteurs d'Andrainarivo (1.415 m.) et les ruines de l'Observatoire du P. Colin, à Ambohidempona (1.402 m.). Un peu à droite se trouvent, entre Ambatofotsy et Andraisoro, deux mamelons (1.300 m. environ) : ils sont garnis de batteries, et, comme ils abritent les faubourgs, l'ennemi pourrait bien y opposer une sérieuse résistance. Derrière nous, Rainianjalahy a reparu depuis 6 heures du matin; ayant pris position au nordd'Ilafy avec 2.000 hommes et 2pièces de canon, il fait tirer sur le convoi — sans doute pour dégourdir les retardataires jeme rappelle avoir entendu siffler les obus à la place même où nous achevions de déjeuner, par mesure de précaution; savait-on, en effet, si on mangerait dans la journée Le Général en chef avait envoyé à Ilafy le bataillon des Haoussas et une compagnie d'infanterie de marine pour tenir en respect Rainianjalahy. Impatients d'en veniraux mains, les Haoussas chargèrent l'ennemi à l'arme blanche au village de Sabotsy : les Hovas défendirent désespérément leur artillerie qu'ils durent abandonner, non sans nous avoir mis un officier et 24 hommes hors de combat. Les dernières opérations vont s'effectuer en deux actions combinées. A gauche, le général Metzinger a pour mission de se • déployer par le sud-est il doit s'emparer de l'Ankatso, de l'Observatoire et d'Andrainarivo. La première de ces positions fut canonnée et, à 9 heures du matin, elle était enlevée. A l'aile droite, le général Voyron doit protéger le convoi, le mener près d'Ambatofotsy et attaquer les deux mamelons de 1.300 mètres, en avant d'Andraisoro. A mesure que nous avançons, un grand mouvement d'exode les Hovas qui ne se dessine à l'ouest, dans les rizières combattent pas s'enfuient par le faubourg d'Isotry et les digues de l'Ikopa.
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Vers 10 heures, notre convoi, composé d'à peu près 1.300 mulets, se massa dans un profond pli de terrain au-dessus duquel les sections de l'artillerie de marine trouvèrent une position de tir excellente, juste en face et à bonne portée des deux mamelons que le général Voyron avait pour objectifs. N'ayant rien de mieux à faire avant l'arrivée du Général en chef et de l'état-major, j'étais monté sur un monticule je cherchais à la jumelle l'emplacement des canons houves. Cette curiosité intempestive me valut d'être pris comme cible; des balles sifflèrent juste à mes oreilles et je saluaipolimentdeux obus partis des mamelons. Au moment précisoùnous mettions en batterie, un troisième projectile ricocha entre le capitaine Boucher et moi, à moins de dix pas de nos pièces qui ripostèrent aussitôt. Pendant une demi-heure, les Hotchkiss ennemis nous criblèrent de leurs obus ils tombaient à droite, à gauche, fusant au-dessus du creux où nous étions, et c'était un spectacle assez plaisant de voir la queue interminable du convoi se presser pour s'enfoncer dans son abri. Par bonheur, les coups furent alternativement longs ou trop courts,sauf trois ou quatre, et les obus n'éclatèrent pas. Enfin, les décharges s'espaçant, le feu cessa grâce à la supériorité de notre tir. Vers 11 heures, on entendit l'artillerie de l'aile gauche canonner l'Observatoire. C'est alors que le général Voyron, disposant au plus près detroupes inoccupées, détacha de sa pointe gauche le bataillon malgache du commandant Ganeval qui s'élança à l'assaut de cette position. Le groupe Metzinger s'était trouvé retardé dans sa marche par les escarpements successifs du terrain et par une quantité de petits partis de tirailleurs ennemis embusqués dans les villages. A midi, ses pièces mettaientenbatteries contre les hauteurs d'Andrainarivo où les Cadets de la Reine servaient vigoureusement, sinon adroitement leurs canons il fallut tirer plus de 75 obus en 30 minutes pour en venir à bout et permettre au 3e bataillons de Tirailleurs algériens (commandant Debrou) de commencer l'attaque.
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Cette phase du combat faillit mal tourner. Deux compagnies venaient d'enlever levillage d'Andraisoro et se portaient à l'assaut de celui d'Andrainarivo, quand elles furent tout-à-coup surprises par un feu très violent qui laissa sur place 6 tués, 2 officiers et 17 hommes blessés. Le reste du bataillon arrêta cette contre-attaque par des salves répétées, mais une section de l'artillerie du convoi dut envoyer une rafale de mitraille pour dégager le terrain. Malheureusement, les Hovas avaient achevé deux blessés, décapité et mutilé trois cadavres. Il était environ 1 h. 30 de l'après-midi; toutes les défenses extérieures de la capitale étaient entre nos mains; il ne restait plus qu'à prendre la ville de Tananarive. Presque au même instant, un incident épique s'est produit à l'Observatoire. Le bataillon malgache, dont faisaient partie Jacques de Fitz-James, Staup, de Maugras, Baudelaire, Dominé, etc., avait pris à l'ennemi deux bons canons, dont l'appareil de réglage était enlevé, il est vrai, mais qu'importe mes camarades ajustèrent de leur mieux deux doubles-décimètres à dessin en guise de hausses et, pointant sur la ville, ils donnèrent le premier signal du bombardement. Nos 12 pièces de 80 de montagne s'étant réparties sur les mamelons des cotes 1.300 et sur l'Observatoire, le bombardement commença à 3 heures. Encore trois heures et il fera nuit il faut, coûte que coilte, en finir. Ordre était donné de former six colonnes d'assaut toutes devaient converger vers les palais de la Heine et du premier Ministre. On laissait d'avance carte blanche à la Légion, aux turcos, aux sénégalais, ainsi qu'aux bataillons noirs haoussa et malgache pour aller vivement; chacun sait ce que cela veut dire dans les circonstances critiques. Des sapeurs du génie, munis de pétards, devaient faire sauter les barricades et les maisons encombrantes. Le Général en chef se posta sur un tertre élevé, attendant les événements en compagnie du général de Torcy, chef d'état-major, et de M. Ranchot, Résident général adjoint à Tananarive.
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En ouvrant le feu les premiers, les Hovas avaient démasqué les deux plus fortes et les mieux servies leurs batteries étaientsur un terre-plein du palais de la Heine, d'où elles répondaient au tir de l'Observatoire. Deux autres batteries, qui ne tirèrent que quelques obus dans la direction des mamelons, paraissaient perdues parmi un fouillis de maisons et de verdure. Le palais de Ranavalona était notre principal objectif. Notre tir s'effectua lentement, pour ménager nos munitions, d'abord en tir de réglage, avec des projectiles à mitraille l'un d'eux, crevant toiture d'un petit bâtiment au coin duquel se trouvait un canon Armstrong, éclata au milieu des officiers et des soldats houves; il fit une trentaine de victimes, — blessés ou tués. Un autre arriva sur le mur du palais de la Reine, écornant la façade et projetant une pluie meurtrière dans un groupe compact de défenseurs. Un troisième obus tomba sur une terrasse, derrière le palais la mitraille blessa quelques Hovas qui se croyaient abrités; d'autres Malgaches furent pris de frayeur, sautèrent en bas, d'une hauteur de plusieurs mètres, et se rompirent les os. Puis, nos pièces tirèrent en tout une douzaine d'obus allongés; nous avons cru, — d'aussi loin — que la mélinite avait produit non seulement des effets terrifiants, mais qu'elle avait aussi causé des pertes et des dégâts considérables (1).
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Pendant plusieurs mois après la campagne, on vécut, à Tananarive,sur cette légende que les obus à la mélinite avaient semé l'épouvante et la mort parmi les Hovas. Il résulte d'une information sérieuse que ceux de nos projectiles qui ont produit le plus d'effetfurent précisément nos obus à mitraille dutirderéglage. Les Malgaches s'étaient empilés sur les terre-pleins avoisinant le palais de la Reine; une telle panique suivit les premières décharges qu'ils s'enfuirent et s'abritèrent dans tous les locaux à proximité. Aussi, les obus à la mélinite trouvèrent-ils les cours désertes. Ceux qui atteignirent le palais ne causèrent aucun dégât le bâtiment étant formé d'une muraille et d'une cloison distantes de 3 mètres environ; ils se rupturaienten traversant le mur, et les éclats, nombreux mais très menus, étaient recueillis par la cloison qui faisait écran. Un seul de ces projectiles tomba sur un petit rez-de-chaussée couvert en voliges et où s'étaient entassés les Hovas; il éclata dans l'angle de la toiture, criblant de blessures les infortunés qui s'étaient réfugiés là; une dizaine furent tués sur le coup. Mais aucun deces obus allongés ne put allumer d'incendie. Il n'en aurait pas été de même si on avait continué le tir à mitraille le palais (en bois!) contenait une quantité invraisemblable de caisses de poudre, et l'on peut juger de ce qui se serait passé si le feu avait pris dans cette grande baraque. (1)
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On vint, paraît-il, dire à la Reine, retirée dans une chambre isolée, quels ravages causaient nos canons; se prenant à pleurer, Ranavalona ordonna d'arborer le drapeau blanc. Il était 3 heures et demie. Ce fut l'artillerie qui eut le dernier mot, car au moment où la colonne d'assaut formée par le bataillon Ganeval allait escalader les raidillons montant au palais, un indigène agitant au bout d'une perche un immense lamba blanc s'avança à toutes jambes, suivi d'un parlementaire en filanzane. Les Ilovas, peu rassurés sur le résultat de leur mission, et
disposés peut-être à gagner du temps, n'avaient pas muni leur émissaire — un notable bourgeois — de pouvoirs assez officiels pour traiter d'autre chose que de la cessation du feu. Ce n'était pas assez la ville devait se rendre à merci. Le général Duchesne laissa trois quarts d'heure aux Hovas pour revenir avec pleins pouvoirs, leur déclarant énergiquement qu'il voulait, de gré ou de force, occuper Tananarive avant la chute du jour. Auprès d'un mur en ruines, au-delà duquel notre conquête se projetait sur l'horizon, toute nimbée et resplendissante des rayons du soleil à son déclin, le drapeau du régiment d'Algérie fut déployé. Là, devant les troupes, devant le Général en chef, le général de Torcy et le Résident général de France, M. Ranchot, un des fils du premier Ministre vint, à l'heure dite, au nom de la Reine et du gouvernement hova, faire solennellement la reddition de la ville. Nos troupes avaient l'assurance d'un bon accueil immédiat. La nuit même, les deux palais et la place d'Andohalo étaient occupés militairement au général Metzinger avait été réservé l'honneur de pénétrer le premier dans la capitale de l'Imerne. Le général Duchesne et le général Voyron campèrent au pied des faubourgs, prêts à y lancer les troupes noires à la moindre alarme. Le lendemain mardi, 1er octobre, à 9 heures, le général Duchesne entrait à la Résidence de Tananarive. Le matin de cette journée, je montai, dès le réveil, au
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palais du premier Ministre je fus frappé de l'aspect que présentait le bivouac d'Andohalo : on eût dit l'élite des soldats d'Annibal, impassibles au milieu de leurs bêtes et à peine étonnés d'une si audacieuse réussite. Respectueux jusqu'à la fin des biens de l'ennemi, les Tirailleurs étaient campés en tas sur la place, entourés de maisons qui paraissaient magnifiques, et, pour la seule fois depuis de longs mois, sans le moindre souci, ils se reposaient de leurs formidables fatigues.
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La campagne est terminée il était temps Dix-sept jours après le départ de l'avant-garde, nos provisions de cartouches et d'obus avaient été dépensées largement et nos vivres étaient limités. Quel soupir de soulagement il est permis de pousser, et quelle grosse partiegagnée que ce risque-tout de la colonne
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volante
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Maintenant vont être oubliés les ennuis, les fatigues, les accès de fièvre, et l'on va songer au retour la France est plus belle, plus riche encore d'affections et de souvenirs, quand on est loin et que l'on a souffert. — plus désirable Mais, avant de partir, beaucoup d'entre nous resteront quelque temps dans la Grande Ile, jouissant des loisirs que la paix ramène. Chacun deviendra un peu « Malgache» pour pénétrer dans l'intimité de cette race houve, si curieuse-à prendre sur le vif, avant que la conquête n'y ait laissé son empreinte. Nos impressions d'après la campagne ressembleront à ces plantes exotiques que l'on cueille encore sauvages. Survient un habile jardinier qui façonne les arbustes à sa fantaisie des fleurs nouvelles s'épanouissent, leur corolle multiplie ses pétales elles sont sans doute plus jolies,mais elles ont perdu, avec la simplicité, cette beauté champêtre et ce parfum subtil qui avaient tant de charmes.
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CHAPITRE XIX ASPECT DE TANANARIVE EN OCTOBRE 1895. LE MONDE MALGACHE. — QUELQUES KABARY HISTORIQUES L'AME HOUVE.— LES RESSOURCES LOCALES. — LE ZOMA. NOTES SUR L'ESCLAVAGE. — LES JARDINS DE TSARASOATRA RAINILAIARIVONY. UN HOMME D'ÉTAT LES FÊTES DU FANDROANA. — UNE SOIRÉE DANSANTE.
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COMMENCEMENT DES INSURRECTIONS.
La première fois que nous avons aperçu Tananarive, nous débouchions du col du Fandrozana, à 1.300 mètres d'altitude. Après sept mois de campagne au cours desquels les fatigues ne nous avaient pasété épargnées, nous allions enfin toucher au but une grande ville se dressait au loin devant nous au-dessus des maisons étagées, on distinguait nettement les deux palais de la Reine et du premier Ministre, se découpant sur le cielbleu. Nos sensations qui, depuis Majunga, n'avaient pu s'émousser à contempler des merveilles, s'avivaient tout-à-coup devant l'imprévu et le pittoresque du coup d'œil. La joie folle d'arriver fouettait encore notre imagination et l'on Tananarive se criait de bouche en bouche » « Tananarive comme autrefois les Croisés acclamant Jérusalem. Il n'en fallait pas davantage pour que la capitale hova elle se présente, il se parât de la magie des illusions est vrai, sous un aspect des plus séduisants, à mesure que l'on s'en approche. Du milieu d'une grande plaine aux rizières verdoyantes émerge une haute colline isolée dont les pentes sont couvertes de maisons en pisé et en briques à un étage, bâties à l'européenne sur une des faces ou tout autour de chaque habitation, des piliers soutiennent une varangue. Tout en haut se profilent lessilhouettes des édifices, d'une -. facture étrange, bizarre, ainsi que de belles villas, demeures
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des grands personnages houves ou des européens, la plupart Anglais. A l'opposé de ce quartier aristocratique et à l'ouest de la ville s'élève la Résidence Générale, construction élégante et assez majestueuse, dans le goût de la Renaissance française. Des jardins descendent en terrasses jusqu'auprès d'un petit lac propre et coquet, vers le centre duquel s'allonge une jetée aboutissant à un minuscule bâtiment on se croirait à Fontainebleau, devant le cabinet de l'Empereur. Autour de Tananarive, les maisons de campagne forment autant de séjours agréables elles se perdent dans les manguiers, dans les lilas de Perse, tout parfumés; elles s'ombragent d'arbustes odoriférants ou de plantes grimpantes d'un aspect caressant. Dans les jardins et les vergers, les fleurs, les légumes de France poussent à l'envi, à côté des pêchers, des grenadiers, des néfliers du Japon, des caféiers, des cannes à sucre et des patates. Une basse-cour entière s'agite dans quelques fermes d'où l'on s'attendrait à voir s'échapper les moutons et les vaches, mais le seul cochon à peau noire vous glisse entre les
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jambes. Il n'y a pas de médaille sans revers il ne faudrait pas grimper en ville. Aussitôt que l'on monte, les illusions dégringolent : les rues se réduisent à des raidillons rocailleux, ardus, pénibles, à des boyaux étroits et tortueux, à des marches d'un escalier cyclopéen. La principale avenue a été pavée sur une longueur de cent mètres, aux approches de la façade ébauchée d'une sorte de temple de la Justice et du palais de la Reine mais comme si cette rue regrettait un tel luxe de confortable, elle se déchausse en débouchant sur la place d'Andohalo, avant la cathédrale, puis elle traverse Tananarive jusqu'au faubourg d'Analakely dans une descente basaltique, ravinée et inégale. On ne circule aisément qu'en filanzane, sorte de siège suspendu au milieu de deux longs brancards portés sur les épaules de quatre solides bourjanes. De près, beaucoup de maisons perdent leur prestige elles grimacent un faux air de civilisation qui détonne.
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Le long de la ville, la voie est remplie de vendeurs d'occasion ou de marchands assis près de leurs petites boutiques; mais le centre des affairesse trouve, un jour la semaine, sur la place du zoma,c'est-à-dire du vendredi, terme dont on a fait,
par extension, « marché public ». Aux environs, quelques bourgs portent le nom du jour où Talata (mardi), Sabotsy (samedi), Alase tient le marché robia (mercredi), etc. C'est sur ces agora, lorsque l'espace s'y prête, ou dans une grande plaine que le peuple s'assemble pour entendre les kabary, messages de la Reine ou harangues des notables politiques. Pendant la campagne, les plus importants de ces kabary furent dirigés contre nous. Ainsi, après Maevatanana, la Reine se rendit sur la place d'Andohalo, proche du palais, pour exhorter son peuple à s'enrôler et à résister aux Vazaha. Plus tard, lorsque nous fûmes à Andriba, Ranavalona passa deux officiers nobles, anciens élèves une revue magnifique de Saint-Cyr et de Saint-Maixent, avaient disposé les troupes en bataille en dessous de Tananarive, dans la plaine de Mahamasina,où des discours belliqueux furent acclamés. Enfin, lorsque les Ilovas apprirent que nous avions franchi les monts Grands Ambohimena, les Cadets de la garde royale vinrent au kabary d'Andohalo renouveler à leur souveraine les serments de la défendre et, s'il le fallait, de mourir à ses pieds. La population se montre au premier abord sympathique. La race se rapproche, chez certains Hovas, du type malais dont on a fait descendre les premiers conquérants de l'Ile. Les hommes sont de taille moyenne, assez svelte, si l'individu est jeune par contre, l'embonpoint vient vite, surtout chez les potentats du Gouvernement, presque tous du genre poussah, c'est-à-dire bouffis et empâtés. Après huit mois de campagne, les femmes paraissent séduisantes, mais cela ne signifie pas qu'elles soient belles, au sens des agréments du visage. Le mariage ou l'union libre
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sanctionnée par les enfants sont en honneur il n'est pas rare de voir une nichée de marmots composer la famille et souvent des mères vont à leurs occupations en portant à cheval sur le dos un nourrisson retenu par le lamba. Les Malgaches ont un costume national, le lamba, de couleur blanche, et ils sont coiffés d'un chapeau de paille (ou plutôt de joncs tressés) Ú larges bords. Ils s'effacent dans les rues en saluant jusqu'à terre pour vous laisser passer combien de temps cela durera-t-il En général, on nous trouve trop affables, trop doux il nous faudrait un peu de cette morgue dominatrice qui maintient le prestige extérieur de l'anglosaxon aux colonies. Le dimanche, le monde afflue dans les églises ou dans les temples les femmes, avec cette recherche de la chevelure longuement nattée dans le dos qui est la coiffure préférée de la noblesse (les Andriana) et de la haute bourgeoisie, ou bien les cheveux roulés en chignon de petites tresses compliquées. Toutes font assaut de toilettes, suivant leur condition, depuis le simple lamba de coton jusqu'aux étoffes de soie d'un blanc crémeux ou de couleur. Le religion n'est pas toujours, chez lesMalgaches,affaire de conviction ils sont personnels avant tout et vont la où ils pensent être bien traités au catholicisme avec les Français, au culte dit réformé avec les Anglais ou ceux qu'ils jugent inféodés à l'Angleterre — parce que protestants. L'histoire du rattachement des Hovas au protestantisme est assez curieuse. En 1869, du temps de la reine Rasoherina, les Hovas, sauf quelques exceptions près, n'avaient aucune croyance. Les pasteurs anglais et norvégiens, jaloux des missionnaires catholiques, faisaient des efforts désespérés pour vaincre l'indifférence de la classe dirigeante, la noblesse, et pour la convertir à leurs idées mais, soit apathie de la race, soit défaut d'esprit évangélique, soit désaccord entre la doctrine anglaise et la norvégienne, aucun succès notable ne venait couronner leurs entreprises rivales. Enfin, les représentants de la London MissionarySociety,
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furent les plus habiles ils triomphèrent d'une façon éclatante. Ils avaient compris qu'il importait peu de faire de rares adhérents si la Reine elle-même ne donnait l'exemple, et ils s'attelèrent à la gagner (1). Il ne fut nullement question de doctrines ils représentèrent seulement à Rasoherina qu'en adoptant la religion protestante, elle en serait le chef à Madagascar comme la reine Victoria en était le chef à Londres. Rasoherina, qui n'entrevoyait pas les mêmes facilités dans le catholicisme, fut orgueilleusement flattée de joindre un pouvoir nouveau celui qu'elle possédaitdéjà, et elle embrassa une sorte de protestantisme façonné à son usage. Grâce à d'abondantes largesses savamment dosées, les recrues dans la caste noble devinrent nombreuses et le peuple suivit, par obéissance servile. Est-ce à dire que les croyances des Hovas se soient modi-
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à
fiées?
Assurément non. Les Anglais, en provoquant l'adhésion de la Reine, n'eurent pour but que de combattre l'influence éventuelle de la France, mais leurs néophytes, manquant de convictions, furent tout aussi rebelles que par le passé à l'idéal religieux. Depuis, les Malgaches ont vu trop de sociétés protestantes se disputant leur conquête et prônant chacune leur variante pour y attacher une importance autre que celle d'une manifestation politique ou privée, à laquelle la foi reste totalement étrangère (2). Pourtant, l'autorité du catholicisme pénètre les Hovas d'un le caractère de cette divine institution respect involontaire
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Martineau. « Madagascar ». Quand un personnage important, Rasanjy, devint après le chute du dernier Premier Ministre, l'adjoint au Directeur des affaires indigènes, il fonda fl Tananarive, dans une petite maison en roseaux — tranonjozoro — une secte protestante nouvelle pour s'affranchirde la tutelle (même dissimulée) de ses anciens maîtres, les Anglais ce qui témoigne d'une rouerie consommée et d'une parfaite connaissance de l'état d'esprit de ses concitoyens. Du reste, l'idée séparatiste d'une communauté indigène politico-religieuse s'inspirait des vues ambitieuses de Rainilaiarivony. Le 25 août 1903, les journaux publiaient l'information suivante «Le Gouverneur général a inauguré à Tananarive une nouvelle écolecréée par lasecte dissidente (1) (2)
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malgache.
»
qui a traversé les siècles, triomphante, en imposera toujours à ses plus ardents détracteurs (1). La cathédrale, solidement assise à Andohalo sur une base de granit, est très belle. L'intérieur est décoré dans le goût des pays ensoleillés le bleu et le rouge dominent les ornementations de la peinture murale la profusion des ors rehausse les couleurs et fait resplendir la nef. Le dimanche 6 octobre, une grande messe d'actions de tous les officiers grâces a été magnifiquement célébrée étaient là, impressionnés par la majesté d'un Te Deum solennel qui faisait vibrer les cœurs à l'unisson des orgues, sous le choc des sentiments de reconnaissance, de patriotisme et de gloire. La semaine suivante passa très vite nous l'avions employée à nous accoutumer à la vie coloniale sédentaire, à laquelle nous n'étions pas préparés, et à nous reposer des fatigues de la colonne depuis huit mois, je coucherai — le 8 octobre dans un vrai lit, sur un matelas de rafia et, moyennant deux piastres par mois (10 francs), j'habiterai à Isoraka une maisonnette composée de quatre chambres, jugez du luxe Une varangue donne du côté du levant, sur une enfoncée de terrain cultivée en canne sucre et en patates. Un filet d'eau potable sourd au creux d'un rocher; chaque matin, je vois les esclaves descendre chercher de l'eau à la fontaine, en s'arrêtant pour babiller elles remontent lentement, la cruche en terre posée sur la'tête et retenue par un bras nu dont le galbe fait penser à quelque vivante statue de bronze. D'autres femmes circulent rapidement dans la rue, portant
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C'est ainsi que Macaulay, vers 1840, à propos d'un factum allemand, laissait échapper, dans une page restée célèbre, l'aveu d'une perpétuelle impuissance « Nor do we see any signwhich indicates that the term of her long dominion is approaching. She saw the commencement of all the governments and of all the ecclesiastical establishments that now exist in the world ; and we feel no assurance that she is not destined to see the end ofthem all. She was great and respected before the Saxon had set foot on Britain, before the Frank had passed the Rhine, when Grecian éloquence still flourished in Antioch, when idols were still worshipped in the temple ofMecca. And she may still exist in undiminished vigour when some traveller from New Zealand shall, in the midst of a wast solitude, take his stand on a broken arch of London Bridge to sketch the ruins ofSt-Paul's » (Critical and historical essays) (1)
des paniers remplis de riz pour approvisionner leurs maîtres. Les vivres vont affluer. Aussitôt la nouvelle de la prise de Tananarive, les Hovas qui tenaient Tamatave et les lignes fortifiées de Farafaty se sont rendus au commandant Bienaimé dont l'escadre bloquait la ville du côté de larade : la voie principale et la plus courte de celles qui relient le plateau central à la mer se trouvant dégagée, des équipes de porteurs s'échelonnèrent le long de la route. Bientôt nous connûmes les douceurs du bien-être en reprenant goût au pain de boulanger et au vin. dontnous étions privés depuis si longtemps ces importantes et précieuses denrées faisaient défaut sur < le marché de la capitale.
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ANDRIAMENA.
(A suivre)
MADAGASCAR SON HISTOIRE GÉOLOGIQUE, SON AVENIR AGRICOLE ET
Conférence faite le Mardi
1er
Mars 1904 à l'École coloniale
(RÉSUMÉ) Le but de cette conférence a été de synthétiser, en une vue d'ensemble,
les principales données d'ordre géologique que l'on possède sur Madagascar, en utilisant tant lesdocuments déjà publiés que des observations personnelles recueillies sur place au cours de deux missions successives dont j'ai été chargé par les ministères de l'Instruction publique et des Colonies.
I. — HISTOIRE
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MINIER
GÉOLOGIQUE
Madagascar, la plus grande île du monde après Bornéo, est séparée de l'Afrique par le canal de Mozambique, prolongé au Nord, vers la mer d'Arabie, par une dépression de plus de 4.000 mètres de profondeur. Son bord Est est une grande faille rectiligne que les sondages montrent se prolongeant au Nord de Sainte-Marie-de-Madagascar jusque vers les Seychelles. Le « seuil des Mascareignes » porte les iles granitiques et gneissiques des Seychelles, une série de hautsfonds (Banc Nazareth, etc.), les iles Maurice, La Réunion, Rodriguez. La trainée des Maldives, Laquedives, Chagos est remarquable par son allure rectiligne, parallèle à la faille de la côte Est de Madagascar. Bien plus à l'Est, les îles Andaman, N icobar, Sumatra, Java sont placées le long d'un géosynclinal qui limite en cette région l'Océan Indien. A l'époque primaire, Madagascar avec l'Australie, l'Inde, l'Afrique, l'Amérique du Sud, constituait un vaste continent
que l'on a appelé le continent de Gondwana et qui est si remarquable par sa flore spéciale, à Glossopteris, et par ses glaciers. A l'époque secondaire, le continent de Gondwana s'est scindé Madagascar fait partie du continent australo-indoen deux malgache, qui s'effondre lui-même peu à peu. A la fin de l'époquesecondaire, une grande transgression, une grande invasion de la mer se fait sentir à Madagascar; les témoins nous en ont été conservés sur la côte Est (M. Baron, M. Boule). A l'époque tertiaire, les mouvements du canal de Mozambique permettent, à deux reprises différentes, l'invasion de la faune éocène (Lémuriens, Fosa, etc.), puis d'animaux un peu nageurs (Potamochère, Hippopotame), apparus à l'époque miocène. Beaucoup de ces animaux, aujourd'hui disparus du reste du globe, se retrouvent encore vivants à Madagascar; ce sont eux qui donnent à la faune de l'île son caractère archaïque et si spécial. De grands effondrements, à la fin de l'époque tertiaire, déterminent l'extinction progressive de grands oiseaux, répartis dans tout l'Océan Indien (Æpyornis de Madagascar Dronte de l'île Maurice, de Bodriguez, etc.); leurs derniers représentants se sont éteints, il y a quelques siècles seulement; car ils ont été contemporains d'un homme connaissant les instruments en fer et peut-être même les armes à feu (M. G. Grandidier).
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II. —
AVENIR AGRICOLE
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Dans l'étude des ressources agricoles, il faut tenir compte de trois facteurs essentiels la nature géologique du sous-sol, la nature chimique du sol, les conditions climatériques propres à chaque région. Aucun de ces facteurs n'a, à lui seul, une action prépondérante, c'est leur ensemble, leur action combinée qui fait la valeur agricole d'un sol. C'est pourquoi M. le général Gallieni, avec l'extraordinaire compréhension qu'il a eue des besoins de la colonie naissante, avait organisé un service de Météorologie agricole, en même temps qu'il demandait à M. Müntz, membre de l'Institut, de diriger l'analyse des échantillons qu'il avait fait prélever en
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différents pointsde la colonie l'étude géologique était assurée par l'envoi de nombreux documents, à la fois, à l'Ecole des Mines, au Muséum, et à la Sorbonne une synthèse d'ensemble en était donnée dès 1900 par M. Boule. Madagascar possède une grande variété de terrains géologrès et giques; granites et gneiss dans la région centrale calcaires sur la côte ouest; alluvions et terrains volcaniques. analyses de MM. Müntz et Au point de vue chimique, les — Rousseaux ne donnent pas des résultats très optimistes mais les échantillons n'ont pas toujours été prélevés parmi les meilleurs (M. Besson) ils ont été récoltés sans se guider sur la nature du sous-sol, presque aucun échantillon n'avait de été prélevé dans l'ouest, dans la région sédimentaire nouvelles analyses ont comblé cette lacune et donné des résultats beaucoup plus encourageants. — Il faut d'ailleurs faire la part du climat; « on ne peut appliquer le mêmecoefficient de fertilité à des terres de même composition, prises dans des situations de climat différentes (M. Müntz) »; cette remarque s'applique aux terres du Midi de la France, de Ceylan, de l'Inde, de Java, du Cambodge (M. Müntz, M. Prudhomme). A Madagascar, la variété climatologique est très grande, due surtout à l'inégale répartition des pluies. Ce sont maintenant les études de détail qui vont commencer; seule l'organisation d'un service géologique comme ceux de l'Inde, des colonies anglaises de l'Afrique du Sud, de l'Algérie, de l'Indo-Chine peut faire aboutir ces études et" rendre à la fois à l'Agriculture et aux Mines les services que les sciences appliquées sont en droit de demander aux sciences pures une bonne carte géologique est le meilleur cadre d'une carte agronomique et peut même souvent la remplacer. La côte Est semble destinée spécialement aux cultures coloniales, dites riches sonclimat, humide et chaud, rachète la pauvretéde son sol mais, dans un avenir peu éloigné, il faudra songer à remédier à l'épuisement de ce sol par l'introduction d'engrais, surtout d'engrais phosphatés et potassiques, tout au moins pour les cultures les plus riches, comme on le fait à Ceylan et à Java.
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La Grande Forêt et ses annexes présentera de grandes ressources quand le perfectionnement des moyens de transport et l'aménagement rationnel en assurera l'exploitation rémunératrice. Déjà les résultats de 1903 sont très encourageants. Le Centre, à qui son altitude donne un caractère à part, est Un pays producteur de légumes de région tempérée et de riz. La côte Ouest est un pays d'élevage; elle le restera. Outre le bœuf, dont il existe d'immenses troupeaux, on pourrait y élever le cheval et l'âne, beaucoup mieux que sur les hauts plateaux étant donnée la nature géologique du solon ne s'y heurterait pas aux graves difficultés provenant du manque de chaux et d'acide phosphorique. Des travaux d'irrigation, — faciles, permettront de remédier à la sécheresse de l'hiver austral et de faire de cette région, grâce au sol relativement riche, un pays de culture intensive du riz. — La côte Ouestsera ainsi destinée à approvisionner surtout le marché de l'Afrique du Sud, si elle peut se l'assurer et si elle n'arrive Pas trop tard pour le disputer à la République Argentine et au Texas. III. — AVENIR MINIER
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Au point de vue minier, les trop grands espoirs qu'on avait tout d'abord fondés Madagascar n'ont pas été réalisés mais sur les recherches ont été insuffisantes et surtout conduites sans
méthode. L'Or est abondant à Madagascar. Il se trouve surtout assez dans des alluvions, peu épaisses, peu constantes et recouvertes souvent de roches stériles; dans ces alluvions, l'or est exploité surtout par le procédé de la batée ou par les procédés des sluices, depuis l'évolution de l'état d'esprit des popuque lations permis l'emploi d'indigènes travaillant la journée; à a les procédés plus perfectionnés semblent devoir être peu rémunérateurs. Les filons ont été étudiés jusqu'à présent; peu ils semblentcependantdevoirattirer plus en plus l'attention. D'ailleurs, d'après les travaux de M. Lacroix, l'or se trouve surtout disséminé dans les granites et les gneiss dont il serait un élément constitutif et ancien. Il en résulte que les terres de décomposition de ces roches sont souvent aurifères; elles ont
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été prises quelquefois pour des alluvions anciennes. Mais il en résulte aussi que la présence d'or, même abondant dans les alluvions, n'implique pas nécessairement la présence d'un filon en amont. Cependant on peut espérer que des phénomènes de ségrégation, de concentration de l'or, ont pu se produire, en certains points, surtout dans les régions de grandes failles; les gisements des environs de Mananjary sont très encourageants à cet égard; leur exploitation a augmenté de30010 les exportations semestrielles d'or en 1903. les gisements n'ont Le Fer existe en assez grande quantité pas été étudiés d'ailleurs ils seraient difficilement exploitables, par suite du défaut de moyens de communication et du manils peuvent être appelés à se développer que de combustible dans un avenir prochain, à la suite de prospections détaillées et méthodiques, et par l'application des procédés électriques de métallurgie du fer, déjà en usage dans une usine des Alpes françaises, près de Modane. Le Cuivre a été signalé en plusieurs points. Quelques gisements ont même été exploités par le gouvernement malgache ils sont abandonnés actuellement, et, sans avoir à cet égard de données précises, on les dit épuisés, ce qui semble peu vraisemblable. — Des gisements de cuivre natif, ayant fourni des blocs de plusieurs kilogrammes, ont été découverts dans les produits de décomposition des basaltes. Quoique d'âge très différent, ils rappelleraient les gisements du Lac Supérieur et des îles Feroë. Les gisements de Zinc, Plomb, Argent, Nickel, etc., ne semblent pas avoir jusqu'ici d'importance pratique. Des gisements de Graphite, puissants de 4 mètres et exploitables, existent en plusieurs points, en particulier aux environs de Tananarive. L'Asbeste ou Amiante a été signalée; les gisements ne sont pas exploitables jusqu'ici; mais il y a lieu d'attirer l'attention sur ce produit, de plus en plus demandé pour la fabrication d'objets isolants et incombustibles. Les recherches de Pierres précieuses ont pris ungrand développement en 1903. Madagascar semble un des pays où la Tourmaline se présente en plus beaux cristaux, capables de ri-
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valiseravec ceux du Brésil, de Ceylan,de l'Oural, Il en serait de même pour l'Améthyste. De très beaux échantillons de Cristal de Roche ont été exportés aux XVIIIe siècle, provenant de Vohemar de toute la côte Est les gisements alluvionnaires semblent épuisés mais il y aurait lieu de rechercher les gisements en place, dans lespoches des basaltes ou les filons des roches anciennes. Il peut y avoir là une importante source de richesses pour l'Ile. Des Argiles et Marnes, fournissant d'excellentes briques, carreaux et tuiles, des Calcaires donnant de la chaux, acceptée par les services publics, des Calcaires à ciments, non encore exploités, existent dans tous les terrains sédimentaires de l'île, en particulier à Diego Suarez où se trouve une importante industrie (MM. Imhaus et Pivert). La question du Charbon est une des plus importantes du Nord-Ouest de Madagascar; elle semble malheureusement devoir se résoudre négativement. Il n'y a guère d'analogie entre les formations géologiques du Nord-Ouest de Madagascar et celles de l'Inde, de l'Australie, du Capquiontfourni des charbons fructueusement exploités. Les lignites, signalés à plusieurs reprises dans la région de Nosy Be, sont des accidents locaux, peu épais, peu constants, absolument inexploitables. Les résultats négatifs des sondages et les études que Jai faites sur le début de la série sédimentaire, montrent qu'il 11y a aucune raison de croire queces lignites s'enrichissent en profondeur. La dernière mission de MM. le capitaine Mouneyres et le Rév. Baron montré a que les espoirs fondés sur le Pétrole étaient également chimériques. En l'absence de houille ou de pétrole, c'est à l'Énergie électrique, produite la captation des chutes d'eau qu'il par faudra s'adresser. Il en a de très belles, surtout dans le y Nord de l'Ile où elles gardent, même pendant la saison sèche, un débit relativement considérable. (Massif d'Ambre, Tsaratanana). L'énergie électrique se transporte couramment à plus de 150 kilomètres; l'installation,rémunératrice en Europe, l'est à fortiori dans neuf où l'on n'a pas à compter avec un pays amortissement d'un matériel ancien, où la faible densité de la
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population permet l'établissement facile de lignes à haut voltage, où le prix du charbon est plus que triplé par les frais de transport. — Certains colons utilisent déjà ces forces hydrauliques, par exemple pour le décorticage du riz (Cie Suberbie sur l'Ikopa). C'est à cette Houille blanche qu'il faudra s'adresser, puisque l'autre, la houille noire, semble devoir manquer. CONCLUSION
Madagascar, il faut bien l'avouer, ne présente, ni des richesses minérales exceptionnelles, ni un sol d'une fertilité extraordinaire. Mais ce n'est pas, non plus, un pays où il n'y a rien à faire bien au contraire. Au point de vue minier, son or lui donne un rang honorable parmi les pays producteurs d'or ses pierres précieuses pourront lui donner la matière d'un important courant d'exportation son fer et son cuivre, grâce aux progrès de la métallurgie, pourront, tout au moins, suffire à sa consommation locale il en sera de même de sa chaux et de ses ciments. Mais il faudrait que les recherches fussent menées d'une façon méthodique, comme en Indo-Chine ; car la région centrale, à peine étudiée, peut nous réserver d'heureuses surprises. Les forces hydrauliques, aménagées et captées, fourniront la plus grande partie de l'énergie électrique nécessaire aux différentes industries locales. Le jour où l'Ile de Madagascar n'introduira plus comme aujourd'hui, du riz de Cochinchine, où, au contraire, elle commencera à vendre au-dehors son propre riz, ses exportations seront bien près d'égaler ses importations; elle commencera à se suffire à elle-même; le développement de ses industries minières, et de ses cultures riches, de son élevage, seront alors pour elle un bénéfice net. On peut espérer que ce jour n'est peut-être pas très éloigné.
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PAUL LEMOINE Chargé de mission scientifique
àMadagascar.
Documents et Informations MADAGASCAR CHRONIQUE DU MOIS D'AVRIL.
La fête des Enfants.
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M.
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Le cycloae
de la Réunion.
Lepreux en tournée. — Nécrologie. Tananarive, le
16
avril
1904
Quel contraste bizarre, tout de même, que celui que crée la différence des latitudes. Tandis que l'on accueille joyeusement en France, la renaissance du printemps, l'épanouissement des fleurs et de la verdure, nous assistons ici, sans regret, à la chute des feuilles, au déclin de la saison estivale qui est pour nous une période d'inaction forcée et de multiples ennuis. Car les fortes chaleurs ne vont pas, dans les les pays tropicaux, sans les averses, sans les orages violents qui mettent de sérieux obstacles à toutes les relations, qu'elles soient mondaines ou bien commerciales, sans les ouragans qui dévastent quelquefois toute une contrée et nous font nous apitoyer sur des malheurs bien grands. Cela explique assez qu'après avoir vécu, de longs mois durant, moroses et énervés dans la suffocante atmosphère d'une chambre, éprouvé Une foule d'émotions souvent angoissantes, barbouillé, en somme, le tableau des plus sombres couleurs, on soit bien aise d'y jeter quelques enluminures qui, par antithèse, le rendent plus attrayant. Une série de fêtes devaient nous faire oublier tous les mauvais souvenirs de cette importune saison des, pluies, mais voilà qu'au moment même où se dessinait a nos yeux cette perspective, une mauvaise nouvelle est
venue, soudain, jeter sa note lugubre et interrompre ainsi le cours de nos joyeuses pensées. Dans les derniers jours du mois de mars, un câblogramme de l'agence Havas apportait, en effet, à Tananarive la nouvelle du cyclone qui, dans la nuit du 21 au 22 du même mois, avait ravagé la Réunion. Aucun détail, d'abord, sur cette catastrophe; sinon que les dégâts matériels , alloué uncréétaient énormes et que le Parlement avait dit d'un million pour secourir les sinistrés. Le Gouverneur de la Réunion faisait, d'ailleurs, de la situation le tableau le plus navrant qui se puisse imaginer. « Saint-Denis, écritdate du 1er avril, au Gouverneur général, offre un « il, à la lamentable les arbres sont déracinés ou brisés ; la « aspect plupartdes maisons ont leur toiture enlevée ou fortement « endommagée. La population pauvre a surtout souffert « « les cases qu'elle habite généralement se sont effondrées et abri « un gran d nombre de personnes sont aujourd'hui sans « etsans ressources. Les plantations sont dévastées, les « récoltes presque anéanties ». Et, partout, dans les journaux de la Réunion,c'est la même note désolée. Je ne reviendrai pas sur l'impression douloureuse qu'a produite, dans toute la colonie de Madagascar, la nouvelle des malheurs de nos compatriotes de l'île voisine, mis à si rude épreuve; le Gouverneur général en envoyant à M. Samary l'expression de ses sentiments attristés s'est fait l'interprète de cette affliction générale. Mais, en pareille occurrence, un tribut de regrets aurait été bien peu de chose pour soutenir les énergies prêtes à défaillir. On s'est donc empressé d'organiser les secours pour soulager les misères nombreuses. La Colonie a prélevé sur son budget une somme de 20.000 francs qu'elle a, aussitôt, envoyée par l'aviso transport laNièvre au Gouverneur de la Réunion avec d'énormes provisions en riz et en bœufs. La ville de Tamatave a fait, de son côté, un don gracieux de 2.000 francs, Ces sommes s'accroîtront encore du produit d'une souscription actuellement ouverte à laquelle, s'associeront de grand cœur, tous les habitants de la Grand e Ile malgache. Enfin, une fête de bienfaisance sera organisée,
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sous peu, dont les bénéficescontribueront dans une certaine mesure, à venir en aide aux malheureux sinistrés. Comme toutes les précédentes, la fête des Enfantsqui, pour la sixième fois, a été célébrée dans toute l'Imerina, le 7 avril écoulé, a obtenu un succès éclatant. Ma plume se refuse à vous faire la description détaillée de tout ce que j'ai vu, ce jour-là, d'original et de curieux. Je mecontenterai de
La fête des Enfants. — Grouped'enfants indigènes en tirailleurs
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vous esquisser en quelques mots, ce spectacle pour moi inédit. Dès l'heure la plus matinale une foule grouillante d'indigènes se trouve massée sur la place Colbert où d'innombrables bannières aux couleurs les plus variées mettent leur note gaie sur la monotonie de cette énorme tache blanche. Cette masse compacte se presse, s'écrase, se dispute les premiers rangs pour pouvoir jouir du coup d'œil. Bientôtles premiersgroupes d'enfants débouchent sur la place, accueillis par les cris de joie de tous les assistants. Pendant deux heures c'est un défilé interminable qui déroule son ruban multicolore à travers les rues et les boulevards aboutissant à
la place Richelieu. Précédés de là musique du Gouvernement général, les légions d'enfants marchent d'un pas allègre que scande le rythme de leurs chants variés. Tous les groupes ont une bannière et un petit orchestre qui les entraîne et les aide à supporter plus facilement les fatigues d'une course relativement longue pour deé enfants de leur âge. Les garçons sont habillés en guerriers ou affublés d'accoutrements plus ou moins disparates; les filles portent indistinctement le lamba national ou la robe européenne qui rompt, avec à propos, la monotonie de l'ensemble sans trop nuire à la couleur locale. Celles-ci chantent des couplets variés et mélancoliques, sur un ton guttural qui s'harmonise parfaitement avec les sonscuivrés des instrumentistes ceux-là exécutent tantôt des danses locales qui n'ont rien de bien gracieux mais qui nécessitent, tout de même, de l'agilité, de la souplesse et surtout de l'habileté, tantôt des jeux guerriers avec des sagaies, des lances et des boucliers qui ne manquent pas d'un certain
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pittoresque. Bientôt tout ce monde se trouve réuni sur l'immense place de Mahamasina; on dirait une mer moutonneuse qui ondule en courroux, laissant échapper de son sein des hurlements de tempête qui sont, cette fois-ci, des tressaillements d'allégresse. Rasanjy prend la parole et fait l'éloge de l'assistance médicale indigène entraînant ses auditeurs travers les diverses étapes de l'énorme chemin parcouru, grâce aux sages mesures de l'administration qui s'intéresse avec une sollicitude toute particulière au développement de la race malgache. « La France, dit-il en terminant, peut être assurée du dévouement et de l'entière fidélité de ses nouveaux sujets qui, par tous les moyens, lui témoigneront leur reconnaissance pour l'œuvre civilisatrice qu'elle a accompli à Madagascar. » gloriLes mères des plus nombreuses familles, dontc'est fication, se présentent ensuite au nombre de 686 pour recevoir des récompenses proportionnées à l'importance numérique de leurs enfants. Ici, se place un détail qui ne manque pas d'importance puisqu'il fait ressortir le développement progressif de la popu-
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lation de la Grande Ile et les heureux résultats obtenus grâce aux diverses mesures administratives. Les dernières statistiques font ressortir, pour l'année 1903, une augmentation de 26,80/00 sur l'accroissement des précédentes années. C'est là d'un très bon augure pour la prospérité économique de notre jeune colonie. Enfin, c'est le tour des récompenses distribuées aux cent élèves les plus méritants des écoles de garçons et de filles signalés au chef du service de l'enseignement par les directeurs des divers établissements des régions environnantes. Cette initiative, dont l'honneur revient à l'A lliance Française, a produit, en quelques années à peine, les plus heureux résultats pour la diffusion de notre langue, but vers lequel cette société n'a cessé defaire tendre ses efforts, depuis sa création. Dans l'après-midi, une matinée travestie a réuni tous les enfants de la colonie européenne dans les salons du Gouvernement général. A voir tous ces bambins déguisés de la plus heureuse façon, on pouvait se rendre aisément compte des prodiges d'ingéniosité imaginés par l'orgueil des mères pour donner à cette fête de la jeunesse tout l'éclat qui lui convenait. Bébés roses, folies, bouquetières, diables, clowns et pierrots ont évolué, pendant de longues heures, avec un entrain endiablé, dans des danses et des farandoles auxquelles seule a mis fin l'heure tardive de la soirée. Un buffet très bien servi de toutes sortes de friandises et de rafraîchissements avait pleinement satisfait la gourmandise de cette multitude de petits seigneurs qui ont emporté, sans nul doute, de cette charmante réunion, le meilleur des souvenirs.
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Gouverneur des colonies Lepreux faisant fonctions de Secrétaire général est parti, le 7 avril, pour une mission dans l'intérieurdelacolonie. Ilse rendra, d'abord,surles chantiers du chemin de fer pour, de là, continuer sur Tamatave et retourner ensuite par Andevorante, Mananjary, Ambositra, Fianarantsoa et Antsirabe. L'absence de M. Lepreux ne durera guère plus d'un mois, si je suis bien renseigné, et son retour à Tananarive s'effectuera dans les premiers jours de mai. M. le
Le 12 du courant, la Société philharmonique de Tananarive a donné son premier concert dans la grande salle du théâtre aménagéepour la circonstance. Le programme de cette soirée élaboré avec le soin le plus minutieux était des plus attrayants. Aussi une foule élégante se pressait-elle, dès huit heures et demie, pour entendre les talentueux artistes de cette association d'élite, dans le local de la réunion. Lafête a parfaitement réussi à la grande satisfaction des organisateurs et des nombreux assistants.
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Un télégramme apporté ici, il y a peu de jours, la nouvelle du décès de sœur Marie dela Perche, fille de la Charité de Saint-Vincent de Paul, qui avait fondé, il y a quelques années, la léproserie de Farafangana et la dirigeait, depuis, avec un grand zèle. Chacun aregretté cette mort prématurée qui a fait disparaître une personne à laquelle son caractère affable, son abnégation et son esprit de sacrifice avaient concilié les sympathies de tous et plus particulièrement des enfants lépreux à qui elle avait toujours prodigué les soins les plus
intelligents.
J.
ROLPH.
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L'élevage dans le Sud.— Céréales et sériciculture. Mort de MM. Vincent, Dupré et Raybaud. — Le Gouverneur général en tournée. — La fête des fleurs. Tananarive, 29 avril 1904
Un récent rapport du vétérinaire Ganeval a, de nouveau, attiré l'attention de tous sur un chapitre intéressant au premier chef celui de l'élevage en pays Antandroy. Ce document
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où sont consignées d'utiles remarques, toutes, basées sur l'expérience, envisage la possibilité d'un plus grand développement du cheptel dans cette région où sévissent rarement les épidémies et où les pâturages sont des plus abondants. D'après ce praticien, l'élevage du cheval, du mouton et dela chèvre, qui n'a encore été tenté que sur une petite échelle, serait susceptible de donner les résultats les plus satisfaisants. Ce serait là une nouvelle source de revenus importants pour
notre colonie et nul doute que cette constatation ne serve à orienter quelques-uns des colons de l'endroit vers cette branche de l'élevage qui ne pourrait manquer d'être rémunératrice dès que les débouchés auront été très sérieusement étudiés et que le Sud de Madagascar sera relié aux ports d'exportation. Entre toutes les régions de l'Imerina, celle d'AntsirabeBetafo est appelée au meilleur avenir économique.Depuis quelques années, on y fait, au point de vue agricole, des essais qui, étant donnés les résultats obtenus, méritent d'être tentés en grand. Gràce à la composition du sol et aux conditions climatériques, les céréales viennent très bien dans cette province et sont de toute première qualité. Une note de M. le pharmacien principal Balland, directeur du laboratoire du comité de l'intendance à Paris, qui a analysé divers échantillons de blé et d'orge provenant de cette région, en fait foi. Contrairement aux affirmations de MM. Müntz et Rousseaux qui ont prétendu que l'acide phosphorique faisait complètement défaut dans la plupart des terres de Madagascar, ce principe chimique se trouverait, en forte proportion, dans les céréales en question, si l'on s'en rapporte aux analyses de M. Balland. L'industrie séricicole s'est également développée, de façon étonnante, dans cette région privilégiée. Grâce aux énormes plantations de mûriers qui y ont été faites, l'élevage du ver à soie pourra être entrepris, avant qu'il soit longtemps, sur une plus vaste échelle encore. Une magnanerie modèle a été installée dans le district de Betafo et les résultats obtenus sont des plus encourageants pour l'avenir. L'exposition séricicole qui s'ouvrira à Nanisana, au mois de mai prochain, fera d'ailleurs ressortir, comme il convient, les progrès qui ont été accomplis dans cette branche de l'activité industrielle.
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La mort a fait une ample moisson, cette quinzaine, dans les rangs de la population européenne.
Coup sur coup, trois pertes sensibles ont, à quelques jours d'intervalle, douloureusement ému la société tananarivienne où ces victimes du sort comptaient de nombreuses sympathies. C'était, d'abord, l'adjudant en retraite Vincent, qui s'était installé comme colon dans la province d'Ankazobe et que la mort est venue surprendre au moment où, après de pénibles labeurs, il allait pouvoir récolter le fruit de ses efforts persévérants. Ensuite, le capitaine Dupré, dont les éminents services rendus à la cause de la colonisation n'étaient plus à compter, qui voyait sa brillante carrière brisée à un âge où la vie était encore, pour lui, pleine de promesses. Enfin, le sympathique M. Raybaud, si avantageusement connu pour sa cordiale affabilité et ses brillantes qualités d'administrateur distingué, qui a été brusquement enlevé par une maladie terrible. Arrivé dans la Grande Ile dès son plus jeune âge, M. Raybaud avait, dans les diverses situations qu'il a occupées comme interprète d'abord, comme administrateur colonial, ensuite, toujours été l'homme d'initiative et d'intelligence qui, en toutes circonstances, savait faire apprécier son concours dévoué. Après avoir assisté aux étapes successives de la conquête au cours de laquelle il déploya de rares qualités d'endurance, il travailla activement à l'heureuse évolution de notre nouvelle colonie. Il a malheureusement succombé à la tâche avant d'avoir pu jouir de la belle situation que lui avaient value son travail et ses intelligents efforts. L'émotion causée par toutes ces pertes ne s'effacera, de longtemps, de toutes les mémoires et le souvenir de ces hommes d'élite, qui, chacun dans sa sphère, avaient largement concouru à l'œuvre poursuivie à Madagascar, restera toujours vivace.
#* Le général Gallieni, accompagné de son chef de cabinet civil, a quitté Tananarive, le 25 du courant, pour se rendre dans la province de l'Itasy où il est allé effectuer une tournée d'inspection. Son absence a été de très courte durée car le retour du chef de la colonie dans notre capitale s'est effectué dans la soirée du vendredi 29 avril.
La fête des fleurs, dont l'initiative digne de tous les éloges revient au Sport-Club, a été le véritable clou des diverses réjouissances.Vous décrire l'animation qui, le 24 avril, a régné, toute l'après-midi durant, dans la ville basse où se donnait cette fête, m'est chose impossible. Dès trois heures de l'après-midi, une foule grouillante dindigènes se pressaient entassés sur la place Colbert et
La Fête des Fleurs (Li-Raque-Oise)
tout le long de l'avenue de France où la bataille n'allait pas tarder à s'engager, dès l'arrivée du Gouverneur général, sitôt après le défilé d'usage. Dans ce champ clos d'une muraille vivante, la lutte a été vive et acharnée, intrépides les combattants. Jusqu'à une heure fort tardive de la soirée, les gracieux projectiles bouquets de fleurs et confettis, ont fait fureur, jonchant le sol. Jetez, si vous le voulez bien, un coup d'œil sur la piste qui s'offre à nos regards. Voyez ici, ces coquets pousse-pousse
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fleuris, là, ces voitures enguirlandées de si artistique façon, plus loin, ces chars magnifiques qui ont dû sùrement coûter beaucoup de veilles et de travail à ceux qui les ont imaginés et construits avec beaucoup d'art. C'est
ueOise véritable
locomotive remorquant deux wagons où prennent place un essaim de charmantes jeunes filles; c'est le Djemnah qui donne La Fête des Fleurs. — Restaurant Malgache l'illusion d'un vapeur en panne se balançant sur son ancre c'est le char de Jacques 1er, empereur du Sahara, avec Sa Majesté, entourée de ses gardes, assise sur un trône à l'ombre d'un dais luxueux. Je n'en finirais plus avec l'énumération des chars, si jen'avais conscience d'être par trop prolixe sur un thème qui adéjàfait,àcette même place, l'objet de plus d'une relation. Je dirai donc, pour termiLa Fêle des Fleurs. Le Djemnah
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ner, que cette
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charmante fête sera marquée à la pierre blanche dans les annales mondaines de 1904.
Uneréunion que j'enregistre avec d'autant plus de plaisir dans la chronique de cette quinzaine, qu'elle a été dictée par une pensée généreuse, est celle de l'Association philharmonique indigène. C'est le 23 du mois courant que cette nouvelle société a donné son premier concert dans la vaste salle du théâtre municipal. Le programme de la soirée soigneusement élaboré devait confirmer, une fois de plus, les nombreux spectateurs européens dans l'idée que les Malgaches sont susceptibles d'être de bons musiciens. Très habilement dirigé, l'orchestre a, en effet, remporté un véritable succès. La foule des indigènes manifestait, à tout instant, sa satisfaction de la façon la plus bruyante tandis que les Européens témoignaient leur satisfaction par des applaudissements. Alternant avec les symphonies de l'orchestre, d'agréables intermèdes scènes tantôt lyriques, tantôt empreintes du comique le plus désopilant, ont, tour à tour, ému et égayé les nombreux spectateurs et valu à leurs divers interprètes de vifs applaudissements pour le naturel de leur jeu et la mimique expressive de leurs gestes.
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Enfin, notons que les membres du cercle de l'Union, nouvellement reconstitué, organisaient un bal pour le 16 du courant. On a, en effet, bien dansé, on s'est agréablement amusé dans les vastes salons du coquet immeuble d'Andohalo magnifiquement décorés pour la circonstance. Le général, Mme et Mlle Gallieni assistaient à cette belle soirée qui s'est terminée par un cotillon abondamment fourni de jolis accessoires que conduisaient avec un inlassable brio et un tact parfait, Mlle Gallieni et M. Charles Martin, directeur du Comptoir National d'Escompte.
J.
ROLPH.
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Le budget local de 1904. Le budget définitif de la Colonie pour 1904 se chiffre par une balance de prévision de recettes et de dépenses s'élevant à 23 millions 805.000 francs, somme inférieure de 721.000 francs (1.181.000 francs de diminutions contre
460.000 francs d'augmentations) aux prévisions de 1903, résultant du fléchissement constaté dans les derniers mois de l'année précédente sur le produit des divers droits de douane. L'extension croissante prise à Madagascar par l'industrie aurifère a permis d'élever de 190.000 francs le' total du chapitre 1 (Produits du Domaine). De même, sur le chapitre II (Contributions sur rôles et assimilés), malgré une diminution de 50.000 francs sur les patentes, il a pu être inscrit 100 000 francs d'augmentation sur les licences, autant sur la taxe de séjour des Asiatiques et Africains, 10.000 francs sur l'impôt des champs de canne et 15.000 francs sur celui des moulins à betsabetsa. Mais la crise qui atteint le commerce général de la Colonie et spécialement le trafic des exporta tions de bœufs, a sa répercussion sur le chapitre III en diminution de 100.000 francs sur les taxes d'importation, de '225.000 francs pour les droits de sortie des bœufs, de 37.000 francs pour les droits de visité des animaux et de 668.500 francs sur la taxe de consommation. Enfin, le chapitre IV se balance par une diminution de 25.000 francs. La plupart des chapitres du budget des dépenses subissent par contre coup de notables réductions. Le chapitre relatif au Personnel est abaissé de 16.000 francs pour diminution d'employés civils et de 22.250 francs pour suppression d'indemnités à des fonctionnaires militaires. Une économie de 40.000 francs est faite sur le budget du Service des Douanes. Lechapitre des Postes et Télégraphes est réduit de 65.000 francs; celui de la Garde régionale de 135.000 francs celui des Imprimeries officiellesde 16.000 francs celui du Service topographique de 25.000 francs; celui des Domaines de 4.000 francs, pour suppressions d'emplois dans le personnel de ces différents services. Au chapitre 18, Agriculture, on a inscrit 128.000 francs d'écono40.000 francs sur les allocations mies diverses, parmi lesquelles aux colons militaires à qui il ne sera alloué cette année que 20.000 francs 30.000 francs sur le Concours agricole de Tananarive, supprimé, et 20.000 francs sur la participation de la Colonie à. l'Exposition coloniale de Marseille. Les différents services de l'Enseignement supportent une réduction de 70.000 francs dont 40.000 représentant la moitié de la subvention autrefois accordée aux écoleslibres. La suppression de la flotille amène une annulation de crédit de 179.260 francs sur le chapitre 21. Enfin, la subvention.aux budgets municipaux est réduite de 30.000 francs, et le chapitre des Dépenses imprévues est diminué de 50.000 francs.
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Seuls, comportent des augmentations de crédits le chapitre 2 (matériel du Gouvernement) et le chapitre 24 (frais de transport). Dans le premier, on a inscrit, en supplément, 12.000 francs pour l'usine électrique qui dessert l'hôtel du Gouverneur général, 5.000 francs pour l'entretien des chevaux et 3.000 francs pour les musées commerciaux; dans le second, le crédit affecté au service des automobiles est majoré de 160.000 francs dont 90.000 francs pour l'achat de 3 nouvelles voitures. Le total des crédits nouveaux s'élève à 1.317.096 francs, tandis que 2.038.096 fr. précédemment inscrits ont été annulés, d'où il résulte une différence de 721.000 francs, équivalente à la diminution des recettes prévues. Une exposition séricicole a dû s'ouvrir le 25 mai à Tananarive en même temps qu'a eu lieu l'inauguration de l'école d'agriculture deNanisana. En raison du développement pris, depuis quelque temps, par l'industrie des pailles de chapellerie et des chapeaux, le Gouverneur général a pensé qu'il y avait intérêt à adjoindre à l'exposition séricicole proprement dite, section dans laquelle on recevrait tous une les échantillons concernant cette nouvelle industrie qui pourrait donner lieu à un mouvement d'affaires très actif. La gomme copal de Madagascar. D'une note adressée par le — ministre de la Guerre au général Gallieni il ressort que les établissements d'artillerie de la Métropole utilisent actuellement par an environ 1.000 kilos de copal dur de Madagascar; cette résine est vendue au prix élevé de 4 fr. 20 le kilogramme. assez Ce prix est le principal obstacle à un emploi plus étendu du copal et Il y aurait tout intérêt à pousser à la recherche de ce produit, en raison des propriétés remarquables des vernis qu'il permet de Préparer. Le ministre de la Guerre ajoute que des mesures sont prises pour f examiner utilisation parlesservices du génie et les services administratifs qui pourrait être faite de la gomme copal et l'imporance que pourrait atteindre sa consommation. Affectations et mutations. T oquenne — MM. les lieutenants-colonels et Gallois et le commandant Tralboux quittent le comfalys,Le des cercles de Maintirano, Maevatanana et des MahaGouverneur général leur a adressé des lettres de féliciIrcons pourlesheureuxrésultats qu'ils ont o b tenus dans leurs circonscriptions respectives.
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eiïlent
M. Capurro, chef de bureau de 1re classe du corps des comptables, prend la direction du 4e bureau du Secrétariat général en remplacement de M. Poirier.
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Sont remplacés dans les postes qu'ils occupaient A Port Bergé, M. Barreau par M. Louédin; à Mahambo, M. Prétrel parM.Giresse; à Vohitrarivo, M. Laporte par M. Vivié; à Tamatave, M. Didelot par M. Aujas; à Vohemar, M. Lassalle par M. de Laborderie; à Anosibe, M. Leca par M. Gauthier et à Fenerive, M. Dubois par M. Pechmartv. Le drame d'Androhibe. — On n'a pas oublié le drame sanglant qui coûta la vie à M. Lemaire, tué d'un coup de fusil au cours d'une dispute avec un de ses voisins de campagne M. Rey. La justice poursuivait Rey comme auteur principal du crime et les époux Cannet, patrons de Rey, comme complices. La Cour d'assises de Tananarive, dans son audience du 19 avril, a acquitté les époux Cannet, leur complicité n'ayant pas été démontrée, et condamné Rey à 5 ans de réclusion et 25.000 fr. de dommages-intérêts qu'il devra payer conjointement avec les époux Cannet.
Modifications territoriales. — Les progrès de la pacification dans l'Ouest et la facilité des communications désormais régulières dans ces régions ont permis d'effectuer sans inconvénients la suppression du Cercle de la Mahavavy et d'en répartir le territoire entre les circonscriptions limitrophes de Majunga, Maevatanana et 1 Maintirano. D'autre part, le District de Marolambo a été supprimé et joint à la Province de Vatomandry-Mahanoro pour former une nouvelle circonscription administrative englobant des populations indigènes de même race et qui prendra le nom de Province des Betsimisaraka du sud. M. l'administrateur Cardenau est chargé de la direction de cette province qui aura son chef-lieu à Vatomandry. Enfin, la région de Diego-Suarez est remise aux mains de l'autorité civile par la suppression du territoire militaire créé en 1900 en vue des travaux de défense. M. l'administrateur Guédès qui était adjoint au commandant du Territoire et maire de la ville, est nommé chef de la nouvelle Province deDiego-Suarez. Le secteur des Antankara est rattaché à la province de Nosi-Be.
FRANCE Le régime protectionniste à Madagascar. — Cette question si importante, qui fit jadis couler beaucoup d'encre, vient, tout récemmentencore, de susciter de nouvelles polémiques. A un éloge par M. Méline du régime protectionniste et de ses résultats à Madagascar, le Temps du 2 mai répondit par la thèse contraire attribuant à ce système économique la « torpeur » commerciale de l'Ile; à son tour, M. Moret répliqua au Temps dans la Dépêche Coloniale et, dans ce même journal, M. Etienne, avec sa grande autorité et sa haute compétence, a fait aux uns et aux autres, (n° du 16 mai) une réponse que les lecteurs de la Revue liront certainement avec plaisir. « Il est entendu, écrit le Président du Groupe colonial, qu'une des raisons d'être des colonies est d'ouvrir des débouchés à l'industrie et au commerce de la mère-patrie. Mais toutes les méthodes sontelles bonnes pour arriver à ce résultat? Et faut-il considérer comme Une inutile, sinon nuisible, superfluité l'occupation de territoires où, pour une raison ou pour une autre, l'industrie nationale n'a pas encore trouvé l'écoulement de ses produits? Telle est la question quemettent à l'ordre du jour un récent article de M. Méline et la réponse qu'y a faite le Temps. (( M.Méline se montre très satisfait du développement qu'ont pris à Madagascar les importations françaises. De 1.800.000 francs, (chiffre qu'elles atteignaient en 1893) elles se sont élevées, en 1902, à 31 millions. Dans la même période, les importations étrangères sont montées péniblement de 3 à 6 millions. Aux veux de *' M. Méline, Madagascar est donc bien. Il colonie qui marche une en rend grâce au régime douanier dont elle a été dotée au lendemain même de la conquête, dès 1896. Ne parlez pas, en revanche, à l'honorable sénateur des Vosges, des colonies où règne la liberté commerciale. Ne lui parlez pas, par exemple du Dahomey, ou la convention conclue avec l'Angleterre détail piquant, par le — ministère que présidait M. Méline interdit tout droit différentiel. — Au Dahomey, de 4.486.000 francs en 1893, nos importations sont « tombées à 3.711.000 francs en 1902, tandis que les importations étrangères passaient de 5.951.000 francs à 13.398.000 francs. Cette constatation, évidemment fâcheuse, inspire à M. Méline la mélancolique conclusion (( que nous occupons le Dahomey pour les autres bienplus que pour nous».
C'est ici qu'intervient le Temps. Il admet que le Dahomey ne donne pas satisfaction aux industriels de France; mais il est une satisfaction tout au moins qu'il donne aux contribuables métropolitains et que Madagascar, malheureusement, leur refuse. Le Dahomey ne coûte rien au budget; c'est une colonie qui fait face à toutes ses dépenses, avec des excédents de recettes. On n'en saurait dire autant de Madagascar, qui coûte à l'Etat 30 millions par an. Demander 30 millions à l'ensemble des contribuables de France pour que quelques industriels privilégiés vendent à Madagascar 31 millions de leurs marchandises, l'opération est médiocre. Et le Temps nous explique que si les recettes locales n'ont pas suivi dans la colonie une progression plus rapide, si les exportations restent stationnaires au chiffrede 13 millions, contre 42 millions d'importations, représentant pour une grande partie l'approvisionnement du corps d'occupation et du service des travaux publics, la faute en est au régime que nous avons établi à Madagascar. Pour être maîtres de protéger l'industrie nationale par des droits dont certains atteignent 150 0/0 de la valeur, on a substitué l'administration directe au protectorat. Et voilà pourquoi votre fille est muette « Je ne suis ni de l'avis de M. Méline quand il déprécie le Dahomey, ni de l'opinion de ses contradicteurs quand ils préjugent mal de l'avenir de Madagascar. Dans la sévérité de leurs critiques, les uns et les autres ne tiennent pas un compte suffisant d'un facteur essentiel en matière économique, du temps, sans lequel aucune évolution ne se produit, pas plus hors d'Europe qu'en Europe, dans les habitudes du commerce et les conditions d'existence d'un peuple. « Il a pu dépendre de l'établissement d'un tarif de douane élevé que la porte fût fermée à Madagascar aux importations étrangères et qu'une part plus large qu'auparavant fût réservée à l'industrie française. « C'est un résultat dont se réjouit M. Méline, et je m'en applaudis avec lui. Mais il ne dépendait pas de la forme d'administration donnée au pays conquis d'en transformer, en moins de dix ans, la puissance de production. Les exportations de Madagascar sont passées en neuf ans, de 10 millions, chiffre de 1894, à 16 millions et demi, total constaté pour 1908. Le Temps trouve que c'est longue insécurité de l'île, que le peu. Sans doute. Mais oublie-t-il général Gallieni a dû pacifier pied à pied le peu de densité de la population indigène, qui ne fournit aux travaux des champs qu'une main-d'œuvre insuffisante et les tâtonnements inévitables dans un pays où tout est nouveau pour le colon, plus riche souvent d'illusions «
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de capitaux, où aucune expérience léguée par le passé ne guide l'initiative privée et la bonne volonté officielle? « Est-ce bien sérieusement, d'ailleurs, que l'on regrette à Madagascar l'abandon du régime du protectorat? Est-ce la France qui a renoncé à ce mode d'administration, ou n'est-ce pas plutôt le gouvernement hova, — reine, premier ministre, honneurs de tous les numéros — qui l'a rendu impossible en provoquant partout la désobéissance et la rébellion La politique de protectorat, si elle consiste non en une formule dont on attend de magiques effets, mais en l'utilisation pratique des rouages indigènes, il n'est pas d'homme au monde qui s'en soit montré plus partisan que le général Gallieni. Cet organisateur émérite en a fourni mille preuves dans les huit années qu'il a consacrées à constituer à Madagascar les éléments de sa prospérité future. Prospère, la colonie le deviendra certainement si l'on n'abandonne pas la prudente méthode qu'a inaugurée son gouverneur général pour se lancer, comme le conseille le Temps, dans de nouvelles expériences. « N'oublions pas les déboires qu'a causés le Tonkin aux impatients qui demandaient au pays de produire avant même d'avoir été pacifié Et que les satisfactions qu'a données depuis l'Indo-Chine a ceux qui n'avaient pas désespéré alors de son avenir calment l'inquiétude de ceux qui estiment trop lent aujourd'hui le développement de Madagascar. » 411e
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M.
l'administrateur en chef Martin qui dirigea successivement
Madagascar les provinces de Maj unga et de Mananjary avant d'être nommé commandant supérieur de l'Est et qui, en dernier lieu, remplissait les fonctions de secrétaire général de la Côte d'Ivoire, vient d'être chargé par le ministre des Colonies du gouvernement de Mayotte et des Comores. Nous adressons à notre dévoué collègue l'expression de nos plus cordiales félicitations Pour la flatteuse mission dont il est investi. M. le gouverneur Martin a quitté Marseille le 17 mai à bord du Natal. a
Le Congrès maritime international. Le 22 mai s'est ouvert — a Lisbonne le Congrès maritime international organisé par l'Association internationale de la Marine, fondée et présidée par M. J. Charles-Roux, ancien député président du Comité de Madagascar et de l'Union coloniale française. Le roi de Portugal présidait la séance d'ouverture au cours de laquelle M. CharlesRoux a prononcé un remarquable discours faisant un bel éloge
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des hardis navigateurs portugais qui visitèrent les premiers les régions baignées par l'Océan Indien, notamment Madagascar, que découvrit Diogo Dias. Le Congrès a terminé ses séances le 29. M. Lemaire, gouverneur des Colonies, qui fut pendant plusieurs années résident de France à Fort-Dauphin, vient d'être nommé gouverneur des Etablissements français de l'Inde.
Tableau d'avancement. — Nous apprenons avec plaisir que
notre collègue M. le lieutenant-colonel breveté Verrier, ancien chef du service géographique à Madagascar, est inscrit d'office au tableau d'avancement pour le grade de colonel.
L'emprunt de
millions. — Sur le rapport favorable de M. Chaumet, au nom de la Commission des Affaires extérieures et des Colonies, la Chambre des députés a adopté sans discussion, dans sa séance du 31 mai, le projet de loi déposé le 30 mars par les ministres des Colonies et des Finances, autorisant Madagascar à emprunter quinze nouveaux millions, pour l'achèvement du chemin de fer de Tananarive à la côte Orientale. Nos lecteurs trouveront, dans la Revue de juillet, le texte intégral du rapport de M. Chaumet, qui contient, sur les travaux du chemin de fer, des aperçus nouveaux très instructifs; nous nous bornons à publier aujourd'hui l'exposé des motifs du projet de loi. 15
Messieurs, Une loi du 14 avril 1900 a autorisé la colonie de Madagascar a réaliser par voie d'emprunt une somme de soixante millions affectée à la construction d'un chemin de fer de Tananarive à la côte Est et à l'exécution des divers travaux publics. L'article 2 de cet acte législatif prévoyant que le gouvernement local pourrait réaliser immédiatement une somme de trente-neuf millions, ces fonds furent empruntés, en vertu de décrets en date des 12 février 1901, 8 septembre1901 et 6 octobre 1902, à la Caisse nationale des retraites pour la vieillesse. D'autre part, une loi du 5 juillet 1903 a autorisé la colonie à réaliser les vingt et un millions constituant le reliquat de l'emprunt de soixante millions et àaffecter cette somme à l'achèvement du chemin de fer. Les détails d'application de cette dernière loi furent fixés par un décret du 29 juillet1903 qui stipule que sur les vingt et un millions
a réaliser, huit seraient affectés à l'achèvement de la section de la voie ferrée Brickaville-Mangoro et treize millions à la deuxième
section Mangoro-Tananarive. Conformément à ces dispositions, huit millions furent mis de suite à la disposition du Gouverneur général de Madagascar et les treize millions restant furent réservés au Trésor public pour être affectés à la deuxième section du chemin de fer quand un décret auraitautorisé l'ouverture de celle-ci. Or, le Gouverneur général de Madagascar a fait connaître au département des Colonies que les huit millions mis à sa disposition Pour être affectés à la construction de la section Brickaville-Mangoro ne lui suffisent pas pour en assurer l'achèvement et évalue à environ dix millions de francs la somme supplémentaire nécessaire à cet effet. Il estime également que les prévisions de dépenses de la section Mangoro-Tananarive doivent être portées de treize millions de francs à environ quatorze millions. Dans ces conditions, les ressources dont la réalisation a été autorisée par le Parlement sont insuffisantes pour permettre de Pousser le chemin de fer jusqu'à Tananarive on ne peut d'ailleurs songer à faire supporter un supplément de dépenses aussi important Par le budget local, ainsi que nous l'avions fait pressentir lors du vote de la loi du 5 juillet 1903, d'après les prévisions qui se trouvent Maintenant dépassées. D'un autre côté, il est indispensable à tous les points de vue que des mesures soient, dès maintenant, prises pour assurer l'achèvement complet du chemin de fer dont les difficultés principales semblent en partie surmontées. L'arrêt ou le ralentissement des travaux entraînerait des dépenses importantes de réfection et de réorganisation, lors de la réouverture des chantiers, et pourrait être interprété d'une façon fâcheuse pour l'influence française. Il importe donc que cette œuvre soit poursuivie sans relâche jusqu'à sa réalisation définitive. Nous avons pensé, dès lors, que la seule solution permettant d'atteindre ce but consiste dans l'augmentation du montant de l'emprunt autorisé par la loi du 14 avril 1900. Mais nous avons été amenés, en raison des difficultés considérables que rencontre la construction du chemin de fer, à évaluer très largement le supplément de ressources à mettre à la disposition de la colonie et c'est ainsi que nous avons cru devoir fixer à quinze millions l'augmentation que nous vous proposons d'approuver. Toutefois, il est bien spécifié par le projet de loi, d'une part, que
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la réalisation de cet emprunt complémentaire ne sera effectuée que progressivement, au fur et à mesure des besoins dûment justifiés par des projets d'exécution approuvés par le ministre des Colonies. Le gouvernement ayant reconnu que la division de la ligne en deux grandes sections seulement ne lui permettait pas de suivre d'assez près l'exécution des travaux et l'emploi des ressources, aura soin d'imposer par décrets la répartition des chantiers en un nombre plus considérable de sections, soit au moins trois pour chacune des parties comprises entre Brickaville et le Mangoro et entre le Mangoro et Tananarive. De cette façon, nous aurons toute garantie pour l'utilisation judicieuse des ressources mises à la disposition de la colonie. D'autre part, l'article 4 du projet de loi porte une disposition qui limite strictement le montant de l'emprunt à la somme nécessaire pour l'achèvement du chemin de fer. Enfin, les décrets qui autoriseront les émissions successives spécifieront que le service de l'emprunt autorisé sera gagé, par privilège et jusqu'à due concurrence, non seulement par le produit des taxes de consommation déjà affectées à la garantie de l'emprunt de 60 millions, mais aussi par le produit de l'impôt foncier sur les rizières ou de tout autre impôt qui lui serait substitué. Nous avons, en conséquence, l'honneur de soumettre à vos délibérations le projet de loi dont la teneur suit
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PROJET DE LOI
Le président de la République française, Décrète Le projet de loi dont la teneur suit sera présenté à la Chambre des députés par le ministre des Colonies et par le ministre des Finances, qui sont chargés d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion. Article premier. — Le Gouverneur général de. Madagascar et dépendances est autorisé à réaliser par voie d'emprunt, en sus de la somme de soixante millions de francs qui a fait l'objet de la loi du 14 avril 1900, une somme supplémentaire qui ne pourra pas dépasser quinze millions et qui sera affectée exclusivement à l'achèvement de la construction du chemin de fer de Tananarive à la Côte orientale. Art. 2 — La réalisation de chacune des différentes parties de l'emprunt ainsi que l'ouverture des travaux seront soumises aux conditions fixées par la loi du 14 avril 1900.
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Art. 3. Les ressources d'emprunt à consacrer à la construction de chacune des sections du chemin de fer seront fixées soit par des décrets spéciaux, soit par des décrets autorisant, par application de l'article 3 de la loi du 14 avril 1900, l'ouverture des travaux. Art. 4. — Lorsque le chemin de fer sera achevé et alors même que le maximum des dépenses supplémentaires fixé par la présente loi ne serait pas atteint, aucune nouvelle réalisation d'emprunt ne Pourra plus avoir lieu et l'autorisation qui fait l'objet de l'article Premier de la présente loi sera, pour le reliquat, annulée de plein droit.
Art. 5. L'emprunt supplémentaire faisant l'objet de la présente — loi sera soumis aux conditions et jouira des avantages stipulés par la loi du 14 avril 1900. Fait à Paris, le 30 mars 1904.
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EMILE LOUBET.
Par le président de la République Le ministre des colonies, GASTON DOUMERGUE.
Le ministre desfinances, ROUVIER.
Légiond'honneur. L'Officieldu 2 juin publie les promotions — et nominations ci-après que nous enregistrons avec plaisir Sont promus officiers de la Légion d'honneur MM. le colonel Caudrelier, , qui seconda si efficacement le général Joffre à DiegoSuarez; le lieutenant-colonel Lohro, ancien commandant du cercle de Maintirano; le commandant Laverdure qui se distingua en 1899 ans le Sambirano et commandapendant plusieurs années le cercle la Grande-Terre. Sont nommés chevaliers MM. le capitaine Arqué, du bataillon ranger , (opérations du Vohingezo en 1899); le médecin-major eaussenat, ancien directeur de l'infirmerie de Betafo qui accompagna la colonne dirigée contre les rebelles du Menabe,en1898 les capitaines Ducarre, commissaire-adjoint de Madagascar à l'expsIllon de Hanoï; Raudot (campagnes dans le Sud); Quinet, commandant du secteur du Sud-Tsiribihina; Philippe, qui faisait partie de escorte de M. le Myre de Vilers et prit part ensuite, à la camPagle de 1895; Carles Vallod, Petitdemange, Jacquin et Michel, leslieutenants Doucet, Corbel et Delamarre, qui ont tous contribué a n pacification du Sud et de l'Ouest de Madagascar.
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CHRONIQUE ET
COMMERCIALE, INDUSTRIELLE.
AGRICOLE
Note sur la culture du fraisier à gros fruits, à la Station d'Essais del'Ivoloina(près Tamatave). Au mois de juin 1902, la station de l'Ivoloina reçut du Jardin d'Essais de Nanisana, une caisse de 50 plants de fraisiers à gros fruits. Mis en terre dès leur arrivée, ces plants avaient tellement souffert du voyage, que quatre seulement purent être sauvés. On favorisa autant qu'on put leur multiplication; ilsont pu donner dans ces conditions une quantité telle de stolons (jeunes plants) peu de temps après leur mise en terre, qu'en mai dernier, la station d'Essais de l'Ivoloina, possédait une quantité suffisante de jeunes fraisiers pour permettre de tenter un véritable essai de culture. M. Hoareau, jardinier du service de l'agriculture, qui conduit sous la direction de M. Duchêne, agent de culture, le potager de la station d'Essais de l'Ivoloina, communique sur la culture du fraisier les renseignements consignés dans la note ci-dessous dans laquelle sont exposées les observations pratiques qui ont été faites pendant les six derniers mois, sur le développement de cette plante fruitière, dont les produits sont si appréciés des Européens, et qui sont d'autant plus précieux pour la région de Tamatave, qu'ils arrivent à maturité à une époque où les fruits tropicaux sont encore loin de mûrir. En appliquant à la lettre les indications fournies par M. Hoareau, tout le monde pourra facilement et sans de trop grands frais, obtenir des fraises, dont la saveur n'égalera pas tout à fait celle des fraises de France, mais qui néanmoins constitueront un dessert très agréable.
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Première plantation. — Les plants arrivés de Tananarive
furent mis en terre dans l'une des planches du potager, située en bordure de la rivière. « Le Sol de cette partie de la station formé d'alluvions récentes, déposées par les eaux du fleuve qui les recouvrent lors des grandes crues, est de consistance moyenne, plutôt légère, mais de richesse supérieure à la moyenne des terres d'alluvion des vallées de la côte Est. Malgré l'ombrage etles arrosages qui leur furent prodigués, les plants de fraisier venus d'Imerina périrent en grande partie, quatre seulement furent sauvés. (clis se trouvèrent si bien sur l'emplacement qui leur avait été réservé, qu'au commencement d'août, c'est-à-dire trois mois à peine après la plantation, ils avaient déjà formé de belles et vigoureuses touffes chargées de fleurs, qui fructifièrent mois d'octobre suivant. au « Naturellement on s'était bien gardé d'enlever les coulants, au contraire, on en avait favorisé l'émission autant que possible, par l'apport d'une forte couche de terreau, destinée à fournir de la nourriture à profusion tant aux pieds mères, qu'aux jeunes plants auxquels ils donnaient (< En novembre, on put retirer une quantité suffisante de petits fraisiers pour planter une planche entière. En mai 1903, cette parcelle avait fourni un assez grand nombre de nouvelles plantes, pour Permettre de mettre en culture huit planches de un mètre de largeur et de huit mètres de longueur. C'estcetessai qui apermis de recueillir les observations qui ont servi à la rédaction de la présente note et de reconnaître qu'il est parfaitement possible de récolter des fraises Pendant une partie de l'année à Tamatave. «
naissance.
Essai de culture proprementdite. — La parcelle de terre qui Porta le premier essai véritable de culture du fraisier à la station d'Essai de l'Ivoloina, fut, comme celle dans laquelle les premiers: Sujetsavaient été plantés, choisie au potager, c'est-à-dire dans un sol léger et riche qui fut fertilisé par l'apport d'une bonne encore fumure. ((
« Labouré à 0m20 de profondeur environ, le terrain fut ensuite lvisé en 8 planches d'un mètre de largeur, séparées entre elles par des sentiers de 0m40 à0m50 de largeur, maintenus à 0m10 contreen bas des planches. Ce dispositif semble être à recommander sur la côte Est pour lutter contre la trop grande humidité du sol. (( Les sentiers creusés (ie 0m10sont de véritables petites rigoles
faisant l'office de drains dans lesquelles s'écoulent le trop plein de l'eau qui se trouve à la partie supérieure des planches. « On planta dans chaque planche deux rangées de fraisiers, espacées de 0 m. 40, la distance conservée entre les touffes, sur les lignes, fut la même. rapidement, se développèrent avec vigueur « Les plants reprirent et donnèrent tout d'abord naissance à une très grande quantité de stolons, que l'on prit soin d'enlever dès qu'ils eurent formé assez de racines pour subvenir à leurs propres besoins, et que l'on mit en place dans des planches semblables aux premières. « Vers la fin de Juin le nombre de planches que l'on avait décidé de planter, étant atteint, on commença à supprimer les coulants dès leur apparition, dans le but de provoquer la floraison et la fructification. « Ces deux phases de la végétation ne tardèrent pas à se produire et l'on remarqua à ce moment que les plantations les plus récentes, fleurissaient et fructifiaient les premières. On peut déduire de cette remarque, qu'à Tamatave, il convientde planter les fraisiers destinés à la fructification, dans lafin de juin et au commencementde juillet, tandis que les sujets avec lesquels on compte pour fournir de nouveaux plants, devront être mis en terre en avril ou mai. Toutefois, on ne peut être très catégorique à ce sujet, car l'essai qui fait l'objet de cette note, n'a pas été répété et du dire de tous ceux qui connaissent le climat de Tamatave, le temps de la saison froide qui vient de s'écouler, a été exceptionnellementpluvieux « Il se peut qu'une saison plus sèche entraîne avec elle des conséquences susceptibles de modifier cette appréciation, résultat des observations recueillies sur un seul et premier essai de culture. « Pendant toute la durée de la végétation, les soins d'entretien ont consisté en sarclages souvent répétés pour maintenir le sol indemne de mauvaises herbes, et en luttes assidues et quelquefois délicates, contre les animaux ennemis qui ont eu vite fait d'apprécier les fraisiers et les fraises. « Les escargots sont de redoutables mangeurs de fraises, il faut avoir bien soin de les faire rechercher et écraser. Pour s'en préserver presque complètement, il suffit de ne pas laisser de brousse autour de la parcelle où l'on fait cette culture. « Au début, la plantation eut beaucoup à souffrir des attaques d'une grosse larve grise de 15 à 18 millimètres de longueur, qui vivait dans de petites galeries creusées dans lesplanches. La nuit
ces insectes coupaientune grande quantité de plants au collet, et eaucoup d'inflorescences, qu'ils tentaient ensuite d'entraîner dans leurs galeries. Il Les dégats furent d'abord si importants que l'on crut à un moment la plantation perdue à cause de ces insectes, c'est alors quel'on eut l'idée de faire recouvrir toutes les planches d'une ouche de sable de 2 à 3 centimètres d'épaisseur. Le résultat fut immédiat, les larves purent encore sortir de leurs repaires, mais eurs galeries furent immédiatementrebouchées après leur passage, grains de sable qui tombèrent à l'intérieur. Chaquematin on des fit ramasser sur le sable et écraser. Furent-elles ainsi toutes suites, 'ou bien une partie d'entre elles émigrèrent-elles pour eller chercher ailleurs plus en rapport avec leurs mœurs ? gîte un le est ce qu'il est difficile de dire, en tout cas elles disparurent, et fraisiers recommencèrent à végéter vigoureusement et à
les '-
sNotifier.
La fructification été surtout importante en août-septembre et a ctobre, elle commencé à décliner dans les premiers jours de a «
Membre.
sol«Lorsque les premiers fruits apparaissent, il faut recouvrir le des planches d'une mince couche de paille hachée pour éviter que les fraises ne soient souillées de terre. Les essais sont continués actuellement, mais en raison de la température encore élevée dela saison, ils nécessitent des soins Péciaux. Si les cultures entreprises réussissentpendant l'hivernage, les observations faites donneront lieu à la préparation Unenouvelle qui seront note. »
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«
:
Signé
HOAREAU. »
Laculture du fraisier telle que l'expose M. Hoareau dans la note Cedente peut résumer ainsi. se sol doit être choisi léger et aussi riche que possible, on devra y, l' f^élioreravec du fumier très décomposé et diviser la culture en lénches d'un mètre ou un mètre vingt de longueur, maintenues l£gèrement surélevéesau-dessus des sentiers qui servirontde.drains. es fraisiers destinés à produire de nouveaux plants doivent être -Pl planté6 en mars-avril et mai, tandis que l'on attendra pour mettre enP ace qui doivent fructifier, les mois de juin et ceux sar sol devra être maintenu propre pendant la végétation par des clages souvent répétés. Il faut lutter constamment contre les
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juillet.
escargots et sabler la surface des planches si les larves grises apparaissent. La fructification des plants cultivés suivant les indications fournies par M. Hoareau, se produit surtout pendant les mois relativement secs d'août, de septembre et d'octobre. Il est indispensable de pailler pour éviter que les fruits ne soient souillés de terre. — FAUCHÈRE.
du Comité de Madagascar
Le secrétairegénéral
:
DIRECTEUR-GERANT
C. DELHORBE