L’échaudée Quand l’histoire d’un Roi n’a pas été brûlée, je n’ai pas envie de la lire, G. C. Lichtenberg.
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1 Benjamin Monti u
L’œil fermé des paradis : sous le feu éteint des grandes espérances
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ne basse époque, c’est l’expression qu’employait Cornelius Castoriadis pour parler de notre présent et en souligner la médiocrité. C’est le temps du présent éternel, sans passé ni futur, le même toujours recommencé, même sous des formes différentes, son fond restant inchangé. C’est le temps du retrait de la critique, de son impossibilité de persister ou devenir présence durable. C’est la fin d’une certaine idée de la politique et de son autonomie par rapport aux forces du marché et du langage techno-économique qui a fini par coloniser toute la vie quotidienne. C’est la fin des grandes espérances de libération collective, les individus se repliant sur les petits bonheurs de la vie privée, eux-mêmes conformes aux attentes du marché planétaire dispensateur de plaisirs et de désirs sous les traits de la marchandise devenue servitude universelle. Que devenons-nous sous le règne de l’inutile, du faux et du factice ? L’Échaudée n°8
C’est vrai ; c’est à l’Éden que je songeais ! A. Rimbaud, une saison en enfer
Rien n’aiguise la critique comme la défaite dit l’historien 1, à condition toutefois de reconnaître l’ampleur du désastre et de rester lucide face à celui-ci. Si tout est éteint à l’horizon... Nous nous sommes longtemps demandés si le mouvement de grève de 1995 était le début ou la fin d’une époque, le réveil de quelque chose de nouveau ou les derniers feux d’une forme de contestation issue des luttes ouvrières. Il avait en effet surpris par son étendue et le dynamisme des assemblées générales, souvent actives, parfois à la recherche de leur autonomie par rapport aux bureaucraties syndicales. Ces tentatives d’auto-organisation ne venaient pas de nulle part : elles pouvaient s’appuyer sur l’exemple des coordinations apparues dans les années 1980, à la marge des syndicats ou même en dehors d’eux. Ces derniers n’ont d’ailleurs pas manqué de leur être hostiles, sans doute parce qu’elles étaient le symptôme de leur déclin. Mais l’autonomie ouvrière a toujours existé comme rêve collectif enfoui ou refoulé. En ce sens, les coordinations [ ... ] s’inscrivent, bien qu’imparfaites et pas 2
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Being Beauteous Devant une neige un Être de Beauté de haute taille. Des sifflements de mort et des cercles de musique sourde font monter, s’élargir et trembler comme un spectre ce corps adoré ; des blessures écarlates et noires éclatent dans les chairs superbes. Les couleurs propres de la vie se foncent, dansent, et se dégagent autour de la Vision, sur le chantier. Et les frissons s’élèvent et grondent, et la saveur forcenée de ces effets se chargeant avec les sifflements mortels et les rauques musiques que le monde, loin derrière nous, lance sur notre mère de beauté, – elle recule, elle se dresse. Oh ! nos os sont revêtus d’un nouveau corps amoureux. our Ô la face cendrée, l’écusson de crin, les bras de cristal ! Le canon sur lequel je dois m’abattre à travers la mêlée des arbres et de l’air léger ! ■ Arthur Rimbaud o
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Gerd Arntz u
Entretien sur le socialisme sauvage
L’É chaudée . – Qu’est-ce qui t’a amené à écrire ce livre sur les courants spontanés, autonomes et émancipateurs des mouvements sociaux ? Charles Reeve. – Deux évènements qui se développent dans le temps présent, posent des bases pour aborder ce thème. D’une part, la crise du système représentatif dans l’ensemble des sociétés de système politique parlementaire, et, d’autre part, l’émergence de mouvements de type nouveau qui se structurent et se mobilisent à partir de la reconnaissance de cette crise. Ces mouvements cherchent à mettre en évidence des pratiques d’une démocratie de base ou plus directement soumise au contrôle des participants. Il m’a semblé qu’une réflexion sur l’essence du système représentatif de la démocratie L’Échaudée n°8
parlementaire était le point de départ nécessaire pour arriver à aujourd’hui. Je voulais, surtout et avant tout, poser un cadre historique permettant de mieux comprendre les « nouveaux mouvements » d’aujourd’hui. En quelque sorte, les placer dans l’histoire des idées et des pratiques politiques. Rompre avec l’idée répandue selon laquelle ils étaient quelque chose de totalement nouveau alors qu’ils s’inscrivent dans le fil ancien et toujours présent des courants anti-autoritaires du socialisme qui va des Enragés de la Révolution française aux débats au sein de la Première Internationale, aux courants du syndicalisme révolutionnaire, aux révolutions des conseils au début du siècle passé en Russie et en Allemagne, à la Révolution espagnole de ] [ ..à. la 1936, aux mouvements des années 60, Révolution portugaise de 1974 et aux révoltes 48
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Note de lecture n Charles Reeve Le Socialisme sauvage, Essai sur l'auto-organisation et la démocratie directe dans les luttes de 1789 à nos jours L'Échappée, 2018, 320 pages, 20 euros.
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e Socialisme sauvage de Charles Reeve constitue un important travail de réhabilitation des acquis du passé, de ses errements également, comme du travail de la puissance de la négation toujours inégalement active mais inlassablement présente et surgissant là où on croyait l’avoir vue disparaître. Ces analyses devraient stimuler la curiosité des militants plus jeunes, parfois oublieux ou déconnectés du passé et des faits saillants des luttes et de la signification même de la négation en actes.
À la fois rappel historique et analyse théorique des moments révolutionnaires et de leurs leviers (organisation, tendances, soviets, spontanéité, nouveaux mouvements), chaque chapitre propose cinq livres pour illustrer la période traitée et accompagner une réflexion personnelle. La recherche d’un but didactique est ainsi utilement appuyée. Cette rétrospective critique fait ressortir les terrains de lutte, les discussions autour des concepts qui ont fondé ou qui sont nés de la force pratique rigoureuse de la subversion et rappelle utilement quelques principes intangibles alors que la problématique de la démocratie directe s’émiette sur les crêtes de la spontanéité immédiate. Automne 2018
J’ai été très intéressé par les conclusions sur les communs et leurs impasses. Les communs semblent quasi inédits, sinon renouvelés par l’actualité des ZAD et l’engouement militant pour une économie participative et des critères de contestation équivoques ; parce qu’ils semblent écologiquement urgents, liés à la santé et au bien-être de tous, ils paraissent dépourvus de toute emprise idéologique ; entièrement tournés vers la satisfaction immédiate, ils sont au contraire encadrés et morcelés par une politique d’accommodements forcés ou non ; plutôt que de la subversion, les pratiques autour de la notion de communs génèrent des comportements certes sympathiques de solidarité, mais d’une solidarité idéalisée dans un contexte social inchangé qui la nie. Un vaste « marché civique » où citoyenneté et économie marginale constituent des vecteurs puissants d’intégration se met en place. L’économie informelle ou les conférences gesticulées, on le constate à NotreDame des Landes, ne constituent aucunement une critique unitaire et globale mais bien la reconduction du monde hiérarchisé actuel. Beau.. ] coup de confusion et bien des[ .compromis en cours que Charles Reeve analyse avec lucidité. 513 13
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Bonnes feuilles
Zad et résistance offensive Charles Reeve o n Ces « bonnes feuilles » sont une nouvelle version écrite pour la traduction allemande et portugaise de Socialisme sauvage. Essai sur l’auto-organisation et la démocratie directe dans les lutes de 1789 à nos jours. La partie sur les ZAD est sensiblement développée en fonction des récents développements.
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où la communauté de lutte peut se structurer reste toutefois incontournable. Et puisque sur les lieux de production, la violence des relations sociales laisse peu d’espace à l’initiative collective, la révolte investit l’espace social, la rue, des « zones », des territoires. « Nous pouvons uniquement concevoir la révolution comme interstitielle, comme une révolution qui occuperait les interstices du capitalisme, qui occuperait des espaces dans le monde alors que le capitalisme existe encore 1. » L’idée n’est pas nouvelle, elle renvoie aux pratiques libertaires de naguère des groupes affinitaires ou des phalanstères où l’on vivait selon certains principes ou encore, aux pratiques avant-gardistes de lutte de guérilla et de « territoires libérés » d’un passé plus proche. Avant les mouvements des places, on a vu appa[ ... ] raître, surtout en France ainsi qu’en Italie, un autre type e besoin d’un territoire
1 – John Holloway, Peut-on changer le monde sans prendre le pouvoir ?, Syllepse/ Lux, 2007.
16 6 L’Échaudéen°8 n°8 Automne 2018 2018 L’Échaudée Automne
L’avenir est aux audacieux
Sous les pas de l’horizon se creuse le puits d’amour qu’on appelle vesce de moine Ô puits qui rends visibles les étoiles à midi et le soleil dans les cheveux des saisons j’attends le jour simple comme un fruit où légère une certaine Arcadie descendant le long de l’horizon offrira aux enfants de l’éclipse mortelle son corps vierge et nu marqué entre les seins d’un signe égalitaire ■
Benjamin Péret o
Varduhi Sahagian u
Quelques jours dans une Arménie en révolution
À chaque coin un ami. Sur chaque visage, l'égalité Grândola Vila Morena 1
Les deux textes qui suivent sont extraits d’un récit en cours d’écriture sur la révolution arménienne du printemps dernier, et ses suites. Le mouvement a débuté par une marche entre les villes de Gumri et d’Erevan, organisée par un député d’opposition, Nikol Pachinian et un groupe de jeunes activistes. Bientôt, la marche a rassemblé une foule de plus en plus importante et une fois dans la capitale, ce mouvement a pris une ampleur irrésistible. Malgré les diverses pressions policières, politiques et médiatiques, la force et la détermination d’une large majorité d’Arméniens désireux de bouleverser le cours des choses, entraina rapidement la démission du Premier ministre Serge Sarkissian puis d’une partie de l’oligarchie installée au pouvoir depuis des lustres. 1 – Hymne de la Révolution portugaise.
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rnm
Premier extrait
Azadoutioun ! Le matin du 23 avril, la route était ouverte et on réussit à rejoindre Erevan en taxi, muni d’une petite cargaison de sérum physiologique, au cas où. Le pont permettant de sortir d’Achtarak était plein d’écoliers qui défilaient en occupant toute la route, si bien qu’on dût prendre des chemins de traverse pour quitter la ville. Ils étaient pleins d’énergie et reprenaient en chœur le slogan contre Sarkissian : « Quayl ara merjir Sergin » (fais un pas contre Serge). En arrivant à Erevan, alors que l’on était arrêté à un feu rouge, je vis un groupe de jeunes filles dont l’une portait le drapeau arménien sur les épaules et qui criaient « Azadoutioun » (Liberté). Je fus alors saisi par une grande émotion en entendant ce beau mot que je connaissais depuis l’enfance, dans la bouche d’une jeunesse qui prenait enfin la parole. Très vite, moi qui arrivais d’un pays où rien n’est simple, où il faut surveiller ses mots et modérer ses enthousiasmes, je me laissai gagner par la simplicité de ce mouvement, par son innocence même, et par son évidence emportant toute réserve et toute morosité. Le taxi nous laissa dans le centre et l’on croisa bientôt une manif sauvage à laquelle on se joignit. Je me rendis compte que c’était surtout le petit peuple d’Erevan qui défilait ici, tout âge confondu. Contrairement au jour précédent, les flics ne semblaient pas très présents ni spécialement vindicatifs. Nous étions suivis par des voitures qui klaxonnaient comme après la victoire d’une équipe de foot. Certaines étaient littéralement recouvertes par des jeunes gens qui exultaient, hurlaient, soufflaient dans des trompettes en plastique. J’étais de nouveau ému aux larmes en regardant le sourire radieux de Vart 1 et en observant la joie et l’énergie des gens autour de moi. Peut-être que la nouveauté que constituait une manif pour beaucoup de ceux qui défilaient, expliquait cette fraîcheur et cet entrain ? Les slogans étaient simples et on les reprenait ensemble, sans se lasser : « Arménie libre et juste » (Azad, Artar, Hayastan), « le pays est à nous » et lorsque nous passions devant des bureaux ou des grands magasins, c’était « Gorzadoul » (grève) ou « Miatseq » (rejoignez-nous). La manif grossissait au fur et à mesure que l’on marchait sur les grandes avenues d’Erevan, car on croisait d’autres cortèges sur notre route. J’avais, pour la première fois de ma vie, l’impression de participer à un mouvement populaire. Populaire dans le sens où c’étaient surtout des gens de peu qui étaient autour de moi. Populaire aussi parce qu’on voyait bien qu’une majorité de gens dans le pays était d’accord avec ce qui était en train de se passer, et c’était vraiment merveilleux de se sentir enfin en accord avec tous dans l’envie de changer le cours des choses. Et cela de manière très simple. Très simplement, les gens bloquaient la circulation, partaient en manif sauvage d’un bout à l’autre de la capitale. Très simplement, les gens faisaient grève, qu’ils soient étudiants, lycéens, profs, taximan, ouvrière dans une usine de confection, infirmières, médecins (on vit le cortège des professions médicales dans leurs habits de travail qui venait de nous rejoindre). Très simplement aussi, ils prenaient enfin la parole, [ ... ]
1 – Varduhi, la compagne de l'auteur (Note de la rédaction).
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Rien de ce qui est étrange ne leur est étranger « Si ces faits stupéfiants sont réels, je vais devenir fou. S’ils sont imaginaires, je le suis déjà. » Cette citation d’Ambrose Bierce, placée en épigraphe de son recueil de nouvelles Contes carnivores (Seuil, 2008) par Bernard Quiriny, natif de Belgique, reflète assez bien l’état d’esprit qui règne presque sans partage sur la littérature de ce singulier pays. Pour autant, ce n’est pas de Quiriny que nous allons parler ici, mais de trois de ses compatriotes, plus anciens à des degrés divers, et chez lesquels l’étrange est consubstantiel de leur nature profonde. En route pour le monde parallèle d’un imaginaire laissant peu d’espace à l’innocence, la littérature populaire s’offrant comme le véhicule idéal en la circonstance ! Raymond Jean-Marie de Kremer (1887-1964) eut plusieurs existences, sous plusieurs noms, chacun au service d’une activité littéraire différente, du moins en apparence. Personnage totalement insolite, dont la vie est en elle-même un roman d’aventures, trafiquant à l’époque de la prohibition à bord de son vaisseau le « Rum-Row », côtoyant les écumeurs des mers et les derniers pirates, emprisonné pendant deux ans pour escroquerie et abus de confiance, il travaillait, de surcroît, à devenir un auteur à trois faces, successivement et simultanément. D’abord écrivain « anonyme », en produisant les légendaires fascicules voués à Harry Dickson, le « Sherlock Holmes américain » ; puis auteur pour la jeunesse sous le nom de John Flanders ; enfin, sous la signature de Jean Ray, l’un des maîtres « du sel et du soufre, du visqueux et du glacé, [un] génie de l’innommable » – dira de lui Thomas Owen –, cet homme hors du commun, à l’œuvre monumentale par sa démesure quantitative comme par son originalité absolue dans un « genre » où il est pourtant difficile de s’illustrer sans naviguer sur les eaux plates du cliché, Jean Ray donc, pour simplifier, ne fut reconnu en France que bien tardivement, au début des années 60, et grâce à la bibliothèque « Marabout », publiée par les éditions Gérard, d’origine belge évidemment ! Les Aventures d’Harry Dickson auraient dû devenir un film d’Alain Resnais, projet qu’il porta pendant des décennies sans parvenir à ses fins, mais dont il est possible de se faire une idée puisque le scénario, signé Frédéric de Towarnicki, a été publié aux éditions Capricci 1. Lequel Towarnicki, dans un entretien accompagnant le scénario, témoigne de l’intérêt d’André Breton pour Harry Dickson « qu’il connaissait bien » ; ce qui n’est pas pour me surprendre. Jean Ray écrivit deux romans qui furent tous deux portés à l’écran : La Cité de l’indicible peur, en 1964, par Jean-Pierre Mocky, de manière très infidèle mais avec un humour décalé du en partie à Raymond Queneau (qui ne signa pas), et Malpertuis,..en 1972, par [ .] L’Échaudée n°8
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De la tentation « Mais que se passait-il au château – colosse millénaire qui dans la nuit tombante dressait au milieu des eaux son redoutable étagement de pierre, masse énorme de murs solitaires et fiers entre lesquels, parmi les ruines d’une splendeur passée et les vestiges de fastes révolus, passion, peur et folie menaient la danse ? » On devine la jubilation intérieure qui devait envahir Gombrowicz lorsqu’il écrivait des phrases comme celle que vous venez de lire où l’on trouve tous les ingrédients du roman « gothique » indispensables à son avènement : le château, la nuit, l’eau, les ruines, le passé, la passion, la peur, la folie, le mystère… Fasciné obsessionnellement par la littérature populaire – et les secrets de la technique qui présidait à son succès –, Gombrowicz décida de se lancer dans l’aventure d’un « roman pour les cuisinières », écrit à la manière d’un feuilleton, et publié comme tel dans la presse quotidienne. C’est ainsi qu’apparurent Les Envoûtés, simultanément dans Le Courrier rouge, quotidien du soir de Varsovie, et l’Express-Matin de KielceRadom, entre le 6 juin et le 30 août 1939. Mais sous le pseudonyme de Z. Niewieski ! Car il faudra attendre la notice autobiographique de 1969, figurant en tête du Cahier de l’Herne qui lui était consacré, pour que W.G. reconnaisse être l’auteur de ce fabuleux roman, lequel ne sera publié en France qu’en 1977, et encore dans une édition incomplète puisque les trois derniers chapitres ne feront surface qu’en 1986 pour des raisons qu’il serait trop long d’expliciter ici. Notons toutefois, avec intérêt, que la première publication en langue française retrouva légitimement le chemin du feuilleton, grâce au journal Le Monde qui le publia sous cette forme du 9 juillet au 5 septembre 1977. Quand on connaît l’importance de la « forme » chez Gombrowicz, ce genre de détail à son importance ; sans doute faut-il en remercier Rita, son épouse, et la finesse stratégique qu’elle déploie pour faire vivre l’œuvre du génie polonais. On peut donc affirmer que Les Envoûtés 1 appartient bien à la deuxième moitié du xxe siècle, son existence souterraine et quasi clandestine précédente ne faisant que renforcer le caractère éminemment « gothique » de l’entreprise ! « Cette idée de“mauvais roman”fut l’apogée de toute ma carrière littéraire – jamais, ni avant ni après,je n’ai conçu d’idée plus créatrice. » « Mon projet […] consistait à se donner à la masse, à se rabaisser, à devenir inférieur – non seulement à décrire l’immaturité, mais à écrire avec elle », cite Jean-Pierre Salgas dans son essai sur Gombrowicz 2. Pourtant, à l’époque où il rédige son feuilleton – où il accomplit son forfait, a-t-on envie de dire –, W.G est déjà l’auteur de récits (Mémoires des temps de l’immaturité), d’une pièce (Yvonne, Princesse ... ]lui de Bourgogne), et d’un roman dévastateur, Ferdydurke, qui a fait[ de un personnage incontournable de la jeune littérature polonaise. Mais si Automne 2018
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Les
petits métiers
Craigneur de pire
5L’idée de dresser une liste de métiers mal connus ou disparus m’est venue il y a presque vingt ans. Des travaux plus futiles, quelques guerres et autres circonstances indépendantes de ma volonté, m’ont détourné trop longtemps d’une tâche ethnographique que je me suis promis d’achever, quoi qu’il arrive, durant le présent xxie siècle. Lorsque je rédigeai la première notice (« Essuyeur de quolibets »), j’ignorais qu’André Hardellet avait publié dans Le Canard enchaîné, en 1962, un « Essuyeur de tempêtes* ». Hardellet avait imaginé une suite de métiers, dont seul l’Essuyeur eut pu trouver place dans ma propre nomenclature. En effet, ni le « laveur d’eau » ni le « chasseur d’horizons », dont il fit la description, ne peuvent être associés à une expression particulière, telle qu’essuyer des quolibets, une tempête ou un refus. Je n’en saisis pas moins l’occasion de dédier ce choix de « petits métiers » à l’auteur de Lourdes, lentes…, lesquelles furent, en 1973, jugées outrageantes pour les bonnes mœurs.
CG o * Cf. Œuvres, 3 vol., Gallimard, collection L’Arpenteur, 1992.
L’Échaudée n°8
L
' empereur Trajan (98-117) créa une classe particulière d’espions, qu’il utilisa à Rome et dans les territoires de Mésopotamie, d’Arménie et d’Assyrie que ses campagnes victorieuses agrégèrent à l’empire romain. La vox populi les désignera sous le terme de craigneurs. Le craigneur tenait du provocateur, du mouchard et – avant la lettre – du sondeur d’opinion. Il se mêlait à la plèbe des tavernes et aux clients des thermes ; son rôle consistait à feindre de redouter un avenir d’apocalypse pour l’administration de la cité, la conduite de la guerre ou les approvisionnements afin de susciter en retour les confidences de ses interlocuteurs. Dans son De viris illustribus, Suétone rapporte que les espions de Trajan engageaient leurs conversations mercenaires par une formule qui devint vite proverbiale et les fit reconnaître partout, en même temps qu’elle faisait d’eux la risée des Romains comme des Barbares colonisés : « Je crains le pire ! ». On ignore s’il faut y voir l’expression d’une maladroite paresse ou au contraire le souci scientifique, d’une étonnante modernité, d’enregistrer les réactions à un stimulus unique. Par un déplacement de sens, dont l’histoire des langues offre de nombreux exemples, l’expression « craindre le pire », réduite au seul verbe craindre (désormais intransitif), servira à caractériser les époques et les situations troublées, lorsque le citoyen sent qu’il ne peut se fier qu’à luimême et doit se garder de ceux qui s’inquiètent de ses opinions. Évoquant d’une phrase saisissante de brièveté le Paris de la Terreur, Michelet n’écrit-il pas dans l’Histoire de la Révolution française : « Paris craignait. » (Livre VIII, chap. III). L’expression « Ça craint ! », qui appartient à la langue relâchée de la jeunesse (fin xxe siècle) n’a pas d’autre origine. ■ [ ... ] 36 12
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Psychologie expérimentale du gendarme
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évènements privés nous ont permis d’observer de près quelques beaux spécimens de cet organe préhensile de la société, le gendarme. Les conditions de nos rapports avec eux furent excellentes, quoique propres à nous les faire envisager sous un jour trop favorable : car nous n’étions point détenu entre leurs mains, mais l’autorité supérieure les avait confiés aux nôtres, sous quelque prétexte, dans un but d’expériences. Nous glisserons rapidement sur la morphologie externe de ces militaires, de tout point conforme, en plus grand, aux effigies bien connues présentées sur des guignols afin de former l’esprit des enfants. Remarquons qu’une administration avaricieuse leur refuse, quand ils sont de service, le port si majestueux et si classique du tricorne, au détriment de leur prestige traditionnel. Ne citons le dicton d’un goût peu sûr : « On les sent d’abord, on les voit ensuite », que pour en extraire l’enseignement philosophique : en réalité, vu le petit nombre de spécimens disponibles – il arrive qu’il n’y en ait que cinq pour huit communes – on ne les voit jamais ; et par on nous entendons les malfaiteurs, pourtant leurs partenaires naturels. Quant à leur langage, nous n’y avons relevé aucune prolixité extraordinaire d’adverbes. Nous ne prétendons ici qu’à instaurer une brève psychologie du gendarme, ainsi que nous nous sommes déjà attaché partiellement à celle du militaire et du magistrat. Il était à prévoir que l’habitude, contractée au fur de longues générations, d’être à l’affût de tous crimes et délits, ou mieux, d’un nombre restreint et catalogué de crimes et délits, leur ait forgé un état d’esprit spécial, bien défini à cette heure et devenu propre à leur espèce. Le moment est donc bien choisi de sonder ces obscurs cerveaux. Il s’y passe, d’après nos expériences, ceci, qui étonnera peut-être l’honnête homme, que le gendarme interprète autrement que cet honnête homme une action[ ... ] e récents
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Cornelia Eichhorn, Main u
Verbatimement
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a voix d'Aurélie Casque présentatrice télé : La condamnation à perpétuité du cannibale brésilien Jorge Da Silveira a été confirmée hier en appel par le tribunal de Rio. Ce professeur de karaté, membre de la secte Cartel, est accusé d’avoir kidnappé, torturé puis mangé trois touristes françaises dont les numéros de passeport présentaient trois six successifs. C’est par l’intermédiaire d’un réceptionniste d’hôtel, lui aussi membre de la secte Cartel, qu’il aurait eu accès à ses victimes. Rappelons que la préoccupation majeure de Cartel, dont Da Silveira est à ce jour encore membre, est la démographie mondiale et sa réduction. Les autorités brésiliennes qui avaient mis sous scellé le cahier des dessins documentant les tortures de Da Silveira, intitulé par ce dernier Journal d’un schizophrène, sont incapables de présenter ce cahier à la justice française qui réclame cet élément de preuve tandis qu’un autre procès s’ouvre aujourd’hui à Nanterre ; c’est une affaire dans l’affaire qui implique un diplomate français jugé en France puisque les faits présumés auraient eu lieu dans l’enceinte de l’ambassade française au Brésil. Une information judiciaire avait été ouverte en juin dernier pour des faits d’association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime. Le projet de meurtre visait l’acteur américain Brad Keith, lors de la promotion du film de zombies World War W, un film que déjà notre rédaction conseillait à sa sortie en France, comme en témoigne le reportage qui va suivre. Dans la tête d’un gendarme à Nanterre tandis qu’il gratte avec une pièce d’un euro sa cravate tachée par une coulée d’œuf et que la première question vient d’être posée à l’accusé : Pourquoi ils jugent ça à Nanterre ? L’ambassadeur de France au Brésil : Oui j’ai fait acheter le cahier de torture de Da Silveira aux enchères clandestines mais après avoir fait des photocopies je l’ai jeté. Oui j’ai été écarté de la vie politique française et le président Sarkovy m’a fait muter au Brésil. Oui je suis sympathisant de Cartel. Oui j’ai employé un aquarelliste qui venait la nuit pour copier en grand sur les deux murs de mon bureau derrière les étagères de la bibliothèque certains dessins du cahier de torture de Da Silveira. Oui je suis allé le voir au parloir et oui j’ai accueilli dans mon logement de fonction monsieur Da Silveira à sa première sortie de prison. Oui lors de son séjour à l’ambassade nous avons projeté de kidnapper Brad Keith au moment de l’avant-première du film World War W à Rio pour le manger. Oui à tout. S’il vous plaît laissez-moi dormir, je suis jetlagué comme un ananas. Le juge : Pouvez-vous nous rappeler les raisons de votre écart de la vie politique [ ... ] française ?
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Eve mairot, Turbulences u
Chaîne humaine
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our manger merci disait le carton. Les gens voguaient à leurs occupations. Il y avait souvent, pour ne pas dire presque toujours une mouche sur sa jambe droite, à l’endroit d’une vieille plaie qui avait pris toute la place – elle lui faisait maintenant que la croûte luisante s’était suffisamment épaissie comme une genouillère de cuir craquelé. On ne lui donnait rien ; parfois une rose échappée d’un passant tombait par hasard devant lui. Il tendait le bras, la ramassait : chaque épine alors recevait un prénom. Puis un jour, on n’a plus vu ses couvertures, et les passants ont pu reprendre possession du petit quadrilatère de bitume. L’ombre des passants, mais aussi un distributeur de prospectus, qui avait le visage coupé de petites balafres de ceux qui n’ont plus l’habitude de se raser. Ce qu’on voyait d’abord c’était cette pile de feuilles criardes, vernies comme les chaussures d’un courtier londonien. La pile ne diminuait pas bien vite, la faute au distributeur qui semblait rêver les yeux ouverts. Quand il pleuvait les prospectus pourrissaient, si bien que le quadrilatère gris-noir se colorait assez vite d’encre rouge et verte : ça n’a pas duré bien longtemps. Le distributeur viré n’a plus rien distribué. Le seul fait notable, qu’on n’a pas manqué de commenter, fut qu’un jour une fille, qui marchait un peu trop vite, a glissé, devant lui : ses chaussures à talons hauts ont semblé des patins à glace. Il s’est approché, et a remis la patineuse sur ses jambes. Il n’y a plus rien eu après elle que des sorciers dans leurs pardessus – certains casqués, parlant tout haut. Il n’y a jamais eu de fleurs dans cette prairie, seulement des mégots, confetti d’une fête triste. (r
Et puis un matin on l’a vu revenir. La barbe a poussé, un bouc passablement broussailleux qui ne lui va pas si mal. Qui ne reconnaît pas l’ex-distributeur de prospectus ? D’un sac plastique (fourni par quelque supérette des environs) il a sorti de petites feuilles quadrillées – de celles qu’on se serait plutôt attendu à voir sortir du cartable d’un écolier. Il est donc revenu ; mais cette fois c’est pour faire la manche. Et lui aussi on le trouvera un matin, la bouche ouverte. Et après, on a dit : comme si le monde n’en avait pas assez d’enterrer des hommes ; on reprend alors un peu sa respiration, et on finit le verre, qu’on repose sur le comptoir. ra
Et voilà qu’il s’accroupit et qu’il pose, à sa droite, en tas, les petites feuilles quadrillées. La pile a ressemblé à un petit animal, chaton ou chiot, à qui l’homme au bouc aurait ordonné (un peu vainement) de rester tranquille ; mais (chose curieuse – qui n’était pas cependant la chose la plus curieuse de toutes), il n’y .] [ ..avait L’Échaudée n°8
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Balthazar Kaplan, Le tunnel u 19
Barthélémy Scwartz u 20
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LL de Mars u
Caviardage à tous les étages L’association des Amis de Benjamin Péret a été créée en 1963, quatre ans après la disparition du poète surréaliste. Son objet était de « défendre la mémoire du poète surréaliste et assurer le rayonnement des idées qui ont animé son œuvre et sa vie, notamment en favorisant l’édition de textes inédits ». C’est grâce à elle et à des éditeurs courageux comme Eric Losfeld et José Corti que l’ensemble de l’œuvre poétique et politique de Péret a pu être publié en plusieurs volumes. Après l’auto-dissolution du groupe surréaliste en 1969, l’association des Amis de Benjamin Péret est malheureusement aussi devenue un moyen pour ses responsables de régler des comptes internes entre anciens surréalistes. Ses responsables actuels, Gérard Roche et Jérôme Duwa, ont la particularité de n’avoir participé à aucun des conflits propres au groupe surréaliste à l’époque, et d’avoir rejoint tardivement l’Association avec le zèle et le dogmatisme des successeurs qui viennent après les débats. Ces derniers n’ont visiblement pas apprécié le livre de Barthélémy Schwartz – Benjamin Péret, l'astre noir du surréalisme – paru aux éditions Libertalia (cf. l’Échaudée n°6). Ils le font savoir avec des méthodes qui rappellent la censure stalinienne que dénonçait justement Péret à son époque. Nous publions ici la lettre que Barthélémy Schwartz leur a adressée. Lettre à l'attention de Gérard Roche, directeur de publication des Cahiers Benjamin Péret, et de Jérôme Duwa, secrétaire de rédaction desdits Cahiers (respectivement aussi président et secrétaire de l'association des Amis de Benjamin Péret),
Paris, le 10 novembre 2018 Messieurs, Dans le dernier numéro des Cahiers Benjamin Péret (n°6 d'octobre 2017), vous avez consacré un article et une note de lecture au livre Benjamin Péret, l'astre noir du surréalisme que j’ai publié chez Libertalia en 2016 : « Une soif de révolte qu’aucune écriture ne saurait étancher » de Dominique Rabourdin, et « Une juste place : entre fidélité et dissidence » de Jérôme Duwa. L’article de D. Rabourdin a d’abord paru dans En attendant Nadeau n°27 sous le titre « La soif de révolte de Benjamin Péret » (1er-14 mars 2017). La version de cet article que vous avez publiée dans les Cahiers Péret a été coupée par vous à plusieurs reprises, notamment les deux passages où D. Rabourdin donnait son avis sur le livre, les voici : « Le livre passionné et passionnant de Barthélémy Schwartz est le premier à couvrir aussi largement la vie de Benjamin Péret et le champ de toutes ses activités, en lui donnant la parole aussi souvent que possible » (En attendant Nadeau, p. 35) ; « Ces quelques “impasses” n’empêchent pas ce livre d’être fort, important et souvent émouvant. L’auteur le conclut, en beauté, en donnant le mot de la fin à la poésie avec une belle anthologie de près de soixante pages » (idem, p.39). 1 1 – https://www.en-attendant-nadeau.fr/2017/02/28/benjamin-peret-schwartz/
L’Échaudée n°8
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Parmi les parutions… Approche poétique Jacques Abeille, Brune esclave de la lenteur Guy Cabanel / Jean Terrossian, Journal intime Guy Cabanel / Barthélémy Schwartz, L’Ivresse des tombes Guy Cabanel, Hommage à l’Amiral Leblanc Nicole Espagnol / Alain Joubert / Roman Erben, L’Effet miroir António José Forte, Un couteau entre les dents Alain Joubert, Le passé du futur est toujours présent Georges-Henri Morin, Carnets oubliés d’un voyage dans le temps – Albanie 1987 Critique sociale Serge Bricianer, Une étincelle dans la nuit, islam et révolution en Iran Alfredo Fernandes, Claude Guillon, Charles Reeve, et Barthélémy Schwartz, De Godzilla aux classes dangereuses Jimmy Gladiator, D’un voyage en Palestine, itinéraire d’Houilles à Tulkarem. Americo Nunes, Les révolutions du Mexique. Comix & contre culture
Prochainement : Americo Nunes, Ricardo Flores Magón, une utopie libertaire dans les révolutions du Mexique
Jeff Goarnisson, Le Flip de Paris Balthazar Kaplan, Little Nemo, le rêveur absolu
Lit&rature
Prochainement : LL de Mars, Bandes dessinées : manuel de l’utilisateur
Manuel Anceau, Livaine Varduhi et Jean-Luc Sahagian, Gumri, Arménie, si loin du ciel… Revue L'Échaudée
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Josef Lada u
Ils ont construit la maison sur leurs vieux genoux
Il marche sur sa main
Ours
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D’après l’homme et la femme qui ont vu l’ours, Eve (*) et Barthélémy (*) coordonneraient les échaudages de ce périodique. Plusieurs échaudés, identifiés de façon certaine, ont contribué à ce numéro selon la police :
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■ Manuel Anceau ■ Gerd Arntz ■ Julien Bal ■ Cornelia Eichhorn ■ Claude Guillon ■ Alfred Jarry ■ Alain Joubert ■ Balthazar Kaplan ■ Lacassinière ■ Josef Lada ■ Eve Mairot (*)
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tiennent pas leurs engagements financiers dans la lutte contre le réchaufement climatique !
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■ LL de Mars ■ Benjamin Monti ■ Amaredine Mudejar ■ Benjamin Péret ■ Charles Reeve ■ Arthur Rimbaud ■ Jean-Luc Sahagian ■ Varduhi Sahagian ■ Franz Wilhelm Seimert ■ Barthélémy Schwartz (*) ■ Patrick Tillard
Belgique – France – Québec
L’Échaudée c/o Ab irato, 6 rue Boulle, 75 011 Paris.
Diffusion : www.hobo-diffusion.com Distribution : www.makassar-diffusion.com ISBN : 978-2-911917-18-9. ISSN : 2270-0455 dépôt légal à parution Achevé d’imprimer en décembre 2018 Commande(s) en lign chez Trèfle communication, à Paris, http://abiratoedition.wordpress.co (via PayPa N° d’impression : 9408 26
Contact : abirato.editions@wordpress.com Automne 2018
Au sommaire du numéro 8 n Benjamin Monti Collages (p.1, 26, 35, 88)
n Claude Guillon Les petits métiers (p.36)
n Amaredine Mudejar L'œil fermé des paradis (p.2)
n Alfred Jarry Psychologie expérimentale du gendarme (p.38)
n Arthur Rimbaud Being Beauteous (p.7)
n Julien Bal Or (p.40)
n Charles Reeve Entretien sur le socialisme sauvage (p.8)
n Cornelia Eichhorn PHautx (p.43) – Main (p.44) – Pied (p.53) Les mots sont des putes – L'impensable – La courbe 3 (p.67-69)
n Gernd Arntz Dessins (p.8, 10, 15) n Franz Wilhelm Seiwert Gravure (p.10) n Patrice Tillard Note de lecture (p.15) n Charles Reeve ZAD et résistance offensive (bonnes feuilles) (p.15) n Benjamin Péret L'avenir est aux audacieux (p.20) n Jean-Luc Sahagian Quelques jours dans une Arménie en révolution (p.21)
n Julien Bal Verbatimement (p.45) n Eve Mairot Turbulences (p.54) n Manuel Anceau Chaîne humaine (p.55) n Balthazar Kaplan La chose – Le tunnel (p.70) n Barthélémy Schwartz À quelle action faîtes-vous allusion ? (p.72) n LL de Mars Bande dessinée : mode d'emploi III (p.74)
n Varduhi Sahagian Dessin (p.21)
n Barthélémy Schwartz Caviardage à tous les étages (p.82)
n Alain Joubert Rien de ce qui est étrange ne leur est étranger (p.27)
n Lacassinière VituPéretations (p.86)
n Alain Joubert De la tentation (p.31)
n Josef Lada Il marche sur sa main – Ils ont construit la maison sur leurs vieux genoux (p.90)
9 € 90 pages
Critique sociale Contre-culture Utopie