Philippe Samyn - Entre ombre et lumière

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philippe sa m y n

ENTR E OMBR E ET LUMIÈR E

ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE C oll ec tion L’AC A DÉ M I E E N P O C H E



EN T R E OM BR E ET LU M I ÈR E , T R A N S PA R E N C E E T R E F L E T


Du même auteur La ville verticale, Bruxelles, Académie royale de Belgique (« L’Académie en poche », 38), 2014 (réédition 2017). The Vertical City, Bruxelles, Académie royale de Belgique (« L’Académie en poche », 38-EN), 2014 (réédition 2017). Between light and shade, transparency and reflection, Bruxelles, Académie royale de Belgique (« L’Académie en poche », 94-EN), 2017.


philippe samyn

ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

Académie royale de Belgique C oll ec tion L’Ac a dé m i e en p o c h e-


Publié en collaboration avec

Publié avec le soutien de

Académie royale de Belgique rue Ducale, 1 1 000 Bruxelles, Belgique www.academie-editions.be www.academieroyale.be

Fig. 38. MFP/Fig. 40. Matteo Piazza (MP)/Fig. 41. Guido Coolen/Fig. 42 et 43. ChB-JE/Fig. 44. F. Loze & Archipress Paris/Fig. 45. George De Kinder (GDK)/Fig. 46. ChB-JE/Fig. 48. MFP/ Fig. 49. AFM/Fig. 51. JMB + BEAI/ Fig. 52 et 53. MFP + BEAI/Fig. 57 et 58. +SVP/Fig. 59. J-L Laloux/Fig. 61. AFM/ Fig. 62. +SVP/Fig. 63. MFP/Fig. 64. Daylight Liège/Fig. 65. ChB-JE/Fig. 67. J. Bauters (JB)/Fig. 68 et 69. MFP/ Fig. 70. AFM/Fig. 71. MP/Fig. 72. MFP/ Fig. 73. JB/Fig. 77 ChR/Fig. 78 et 79 MFP/Fig. 82 GDK + M. Jaspers

Collection L’Académie en poche Sous la responsabilité académique de Véronique Dehant Volume 94 © 2017, Académie royale de Belgique Crédits © Philippe Samyn, pour le texte Illustrations © Samyn et associés et les photographes (+ architectes associés) pour : Fig 1. +BEAI/Fig.10 et 11. Christian Richters (ChR)/Fig.12. +Studio Valle Progettazioni (SVP)/Fig.13. MarieFrançoise Plissart (MFP)/Fig. 17 et 18. Christine Bastin et Jaques Evrard (ChB-JE)/Fig. 19. Studio Claerhout/ Fig. 20. +SVP/Fig. 21 et 22. ChB-JE/ Fig. 23.MFP/Fig. 25. Centre Scientifique et technique de la construction Be/ Fig. 31. Andrès Fernandez Marcos (AFM)/Fig. 36. Jean-Michel BYL (JMB)/

Suivi : Loredana Buscemi, Académie royale de Belgique Couverture : Maquette de la sculpture de verre pour le siège de AGC à Louvain-la-Neuve ; p : 2010, r : 2011-2014 (01/577) Impression : IPM Printing SA, Ganshoren ISBN 978-2-8031-0569-4 Dépôt légal : 2017/0092/1


Introduction

L’image 1 de couverture montre une partie d’une sculpture en verre, qu’il faut imaginer dans l’espace vide qui l’entoure 2. Elle résume le sujet de ce petit ouvrage. Des transparences, ombres et reflets complexes émanent d’une forme pourtant simplissime quant à sa géométrie, mais cette sculpture immatérielle n’est réelle que grâce à 1

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Photographies et maquettes photographiées sont elles-mêmes, soit reflets d’une réalité avérée ou espérée, soit ombres du souvenir de son inadvenance, comme pour les projets qui illustrent ici le propos. Le parallélépipède de verre blanc (avec sa transparence, ses ombres et ses reflets) au plan carré de 62 × 1,35 m = 83,7 m de côté et de 4 × 1,8 m = 7,2 m de haut (4 × 1,35 × 4/3), du siège de AGC Europe à Louvain-la-Neuve acquiert sa légèreté avec celui de son campanile : le parallélépipède complémentaire de la sculpture en verre extra-clair (avec transparence, ombre et reflets d’une autre nature) de 10 × 1,35 m = 13,5 m de long, 1,35 m de profondeur et 10 × 1,8 m = 18 m (10 × 1,35 × 4/3) de haut. Ses fondations sont prêtes et en attente de sa construction, que j’espère en 2017 [01/577 — Fig. 1]. Le rapport 4/3 (et la dimension de 1,35 m) annonce déjà le triangle de Pythagore (et l’échelle humaine). 7


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

un usage réfléchi d’une technologie constructive concrète. Des volumes de verre trempé extra-clair 3 (rectangles de 1,35 m × 1,80 m en 12 mm d’épaisseur), forment le motif de l’objet. Ils sont enchâssés dans une cage en barres d’acier inoxydable de haute résistance 4 de 12 mm × 12 mm de section par l’intermédiaire de cales en Néoprène 5 à leurs quatre coins et de joints en mastic de silicone 6. L’emploi de ce dernier est critiquable (puisqu’encore non recyclable à ce jour) mais n’a pas encore de substitut pour assurer la stabilité structurelle, celle-ci étant vérifiée au moyen de progiciels de calcul sophistiqués. Ombre et lumière invitent transparence et reflet. Elles sont au cœur de mon travail et je les sollicite sans cesse, aussi bien dans leurs aspects pratiques que théoriques. Repères historiques et chiffres à l’appui, je me livre ici à l’exercice périlleux de relier mes projets à des concepts d’ordre théorique et scientifique, reflets abstraits d’un travail des plus concret, inspirés par le grand dessein du commanditaire et le génie du lieu.

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Ces matériaux sont décrits, ci-après, dans le corps du texte. Ibid. Ibid. Ibid. 8


Introduction

Les sens et le paradoxe La jouissance des cinq sens est essentielle pour, comme l’écrit Merleau-Ponty « … qu’avec mon corps se réveillent les corps associés 7 ». C’est par les cinq sens que l’architecture, activité du corps et de l’esprit de l’homme, acquiert sa réalité dans le monde. Mais la culture oculocentrique de Platon (~428 à 348 av. J.‑C.) nous place dans une caverne où l’ombre et le reflet, même lorsqu’ils convoquent in extremis l’écho sonore, comme le décrit de manière si inspirante Victor Stoichita 8, font abstraction du toucher, de l’odorat et du goût. Suis-je donc prisonnier de cette caverne ? La réponse est à la fois positive et négative. D’une part, il faut l’admettre sans remords, cet ouvrage ne peut viser à couvrir l’ensemble du champ architectural. Il s’attache à un aspect seulement de l’art de construire, lequel se développe essentiellement pour ne satisfaire que la vue et l’ouïe. Pas besoin d’invoquer, comme pour s’excuser, un effet de dématérialisation provoqué par les nouvelles technologies de la « réalité virtuelle » : les réflexions qui suivent, ellesmêmes, couchées sur papier, ne se lisent qu’avec 7 8

Maurice Merleau-Ponty, L’œil et l’esprit, préface de Claude Lefort, Paris, Gallimard, Folio essais, 1964, p. 13. Victor I. Stoichita, Brève histoire de l’ombre, Genève, Librairie Droz, 2000. 9


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

les yeux. Vous ne les toucherez pas ni ne sentirez le parfum des matériaux, ni leur relation intime avec le goût des repas qui ravissent votre palais, et je ne pourrai qu’évoquer furtivement le rôle sensoriel des matériaux, aussi déterminant soit-il pour la jouissance de l’architecture. D’autre part, bien que limitée ici au plan de la perception visuelle et auditive, la réflexion architecturale doit néanmoins s’exercer de manière globale. En effet, l’architecture se construit à coups de créations, de découvertes et d’inventions, et elle s’invite tout à la fois dans l’art, la science et l’ingénierie : —— comme l’art, elle puise « à cette nappe de sens brut,… en toute innocence 9 » ; —— comme la science, elle « manipule les choses, s’en donne des modèles internes et, opérant sur ces indices ou variables les transformations permises par leur définition, ne se confronte que de loin en loin avec le monde actuel 10 » ; —— comme l’ingénierie (ou la technologie) elle manipule la matière en quête d’invention ; —— comme en philosophie, toutes les questions d’architecture doivent être posées sous l’angle de la perception et se nourrir de l’observation des paradoxes. 9

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Maurice Merleau-Ponty, op. cit., p. 9. Ibid., p. VII. 10


Introduction

Parmi ces derniers, le plus fondamental semble être celui qu’énonce Merleau-Ponty à propos de la peinture et qui peut s’appliquer tel quel à la construction : « son interrogation interminable, qui se relance d’œuvre en œuvre, ne saurait déboucher sur une solution et, pourtant, délivre une connaissance, à la singulière propriété de n’obtenir cette connaissance, celle du visible, que par un acte qui le fait advenir sur une toile 11 ». C’est là le paradoxe de l’architecture, à la fois question et réponse, irréductible à l’une comme à l’autre.

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Ibid., p. VII. 11



Ch a pitr e 1

Un socle de connaissances

Le mythe de l’origine de l’art chez Pline l’Ancien (23 à 79 ap. J.-C.), avec le trait dessinant l’ombre d’une silhouette humaine, et le mythe de l’origine de la connaissance chez Platon, avec la projection des ombres de la réalité sur le fond de sa caverneprison 1, sont encore et toujours des expressions de notre manque originel d’imagination. On y échappe, à nouveau, par les chemins de la création artistique, de la découverte scientifique et de l’invention technique. La construction est à la croisée de ces trois chemins et c’est là que je me tiens, interrogeant la lumière qui pénètre par transparence dans la construction et les ombres et reflets qui l’accompagnent. Mes innombrables interrogations sont celles d’un bâtisseur préoccupé par le sens de ses actes, taraudé qu’il est par l’inquiétude de ne voir que 1

C’est encore Stoichita qui fait cette mise en parallèle fascinante. 13


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

l’ombre de la réalité. Ma caverne est heureusement peuplée de nombreux livres, tant théoriques que pratiques, qui me donnent de quoi ébaucher un socle de connaissances sur lequel je peux m’appuyer dans ma pratique journalière et qui, en retour, se met à jour par la confrontation avec celle-ci. La construction À l’échelle de quelques millénaires, le bâtiment présente des caractéristiques constantes découlant de la physiologie et de l’âme humaines, ainsi que de la nature qui nous entoure. Ces invariants, dont font partie l’ombre et le reflet, font l’objet de la théorie de l’architecture et de la construction dont la plus ancienne connue à ce jour, et qui garde toute sa pertinence, est celle de Vitruve 2. Françoise Choay 3 ne retient que la théorie de Vitruve en raison de sa cohérence, complétée par celle que développent Christopher Alexander et son équipe dès 1970 4 pour l’architecture uniquement. 2 3 4

Marcus Vitrivius Pollio (dit Vitruve ~ 90 à 20 av. J.-C.), De architectura. Françoise Choay, La Règle et le Modèle : sur la théorie de l’architecture et de l’urbanisme, Paris, Éditions du Seuil, 1980. Christopher Alexander, Sara Ishikawa & Murray Silverstein, A Pattern Language, Oxford, Oxford University Press, 14


Un socle de connaissances

Fermement appuyées sur ce socle théorique éprouvé, mes réflexions trouvent toujours leur source dans la « fabrication » d’un projet d’architecte et d’ingénieur. Ce projet a pour matière première, je le répète, tant le grand dessein du maître d’ouvrage que l’analyse du génie du lieu et donne, à chaque fois, un résultat différent. Mes réflexions se construisent donc par bribes et morceaux, sur plusieurs sujets simultanément, celles découlant d’une « fabrication » donnée interagissant toujours avec celles provenant des autres. Elles s’additionnent et se complètent ainsi graduellement au fil des années et des projets et je tente, de temps à autre, d’en faire une synthèse 5.

5

1977. Voir aussi The Nature of Order. An essay on the Art of Building and the Nature of the Universe (Book 1 : The Phenomenum of Life. Book 2 : The Process of Creating Life. Book 3 : A Vision of a Living World. Book 4 : The Luminous Ground), Center for Environmental Structure, Berkeley, California, 2002. Bulletin de la Classe des Arts, Académie royale de Belgique, 6e série, t. VII, 1996, 1-6, p. 131-137 : « La petite ville possible de trente mille habitants » ; t. XI, 2000, 7-12, p. 251-263 : « La terre étroite » ; t. VXII, 2006, 1-6, p. 45-53 : « La ruine utile et la construction efficiente » ; « Étude de la morphologie des structures à l’aide des indicateurs de volume et de déplacement », Mémoires de la Classe des Sciences, Bruxelles, 2004, 482 p*. La ville verticale, Bruxelles, L’Académie en poche, 2014, 122 p.* ; ainsi que : Philippe Samyn et Pierre Loze, Devenir moderne ? Entretien sur l’art de construire, Bruxelles, Éditions Mardaga, 1999 ; ou encore Principes de construction à l’usage de mes étudiants et collaborateurs, avril 1997* (* e-book sur www.samynandpartners.com). 15


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

Suite à la transformation profonde qu’a connu le processus de fabrication du bâtiment à partir du XIX e siècle, la construction actuelle n’est plus entièrement régie par les invariants de la théorie de Vitruve. Les découvertes et inventions qui apparaissent régulièrement définissent ainsi peu à peu un ensemble de « variables constructives » que la communauté technique s’attache à définir, à documenter et à ordonnancer : performances, matériaux selon leur forme et leur nature, éléments de la construction, ou encore programmes fonctionnels 6. Par ailleurs, en cohérence avec l’évolution de la société, ces mutations technologiques génèrent un corpus toujours croissant de textes légaux et normatifs ; ceux-ci interagissent en sens divers avec les « variables constructives » issues du secteur de la construction lui-même, soit pour les contenir, soit pour les orienter ou les stimuler. Compte tenu de leur valeur légale, ils sont prioritaires mais, le plus souvent, rédigés dans la précipitation et sans recul sur les évènements, 6

Le système de classification SfB, originaire de Suède (Samarbetskommittén för Byggnadsfragor), est recommandé par le Conseil international du Bâtiment pour la Recherche, l’Étude et la Documentation dès 1959. Il est appliqué en Angleterre sous le nom Ci/SfB dès 1968 et le Centre d’Information et de Documentation du Bâtiment publie la version Française Si/SfB en 1973. Très efficient, il permet le classement et le traitement informatique des données et ce tant pour les dessins que les pièces écrites et chiffrées. 16


Un socle de connaissances

ils évoluent au gré de ces derniers bien plus rapidement que l’objet qu’ils codifient. Ils ne peuvent pas non plus suivre le rythme des progrès scientifiques et techniques et freinent ainsi leur usage, au point que le temps écoulé entre une invention (ou découverte) et sa mise en œuvre pratique est généralement de plusieurs décennies dans l’industrie de la construction, alors qu’il dépasse rarement l’année dans les autres secteurs industriels. Pour s’y retrouver dans cet environnement mouvant, le concept de durabilité peut servir de guide. En effet, la construction est statique, elle ne vole pas, ne navigue pas, ne roule pas. Sa forme découle toujours des exigences auxquelles elle doit répondre. Ainsi, par exemple, les formes aérodynamiques et fluides (surtout sans trait d’ombre !) que l’on rencontre partout aujourd’hui, si elles sont nécessaires aux avions, aux bateaux et aux voitures, sont parfaitement inappropriées pour un bâtiment. La recherche d’économie de matière et de légèreté s’impose donc à la construction, non pas pour lui permettre de mieux se mouvoir 7 mais par respect de l’environnement. 7

Il nous faut pousser l’exploration intellectuelle de la construction statique, tout comme Bertrand Piccard et André Borschberg le font pour la construction mobile avec l’avion Solar Impulse ! 17


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

C’est là précisément l’objet de mes travaux sur la morphologie des structures. Comme je l’étudie dans La ruine utile et la construction efficiente, la pérennité P de la construction est inversement proportionnelle à son efficience E : leur produit E × P est une constante C en un lieu et un moment donnés. Le dessin de la construction et de ses composants pour en limiter les déchets et le travail inutile sur chantier est aussi important 8 que le progrès des sciences et des technologies pour augmenter la valeur de C : c’est le « développement durable » [Fig. 2]. Le monde économique Aucune réflexion sur la construction, et qui se veut pertinente, ne peut être formulée sans se référer au système économique qui prévaut dans notre société démocratique et qui recherche la paix. J’évoque ci-dessus la lenteur avec laquelle l’industrie de la construction intègre les inventions et découvertes, mais que penser alors de ce système qui met, depuis les travaux de Jay Wright Forrester 9, plus de soixante ans pour accepter son 8

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D’autant plus que les matériaux et éléments constructifs sont industrialisés. Si la maçonnerie ne produit pratiquement pas de déchets, ce n’est déjà plus le cas de la charpente en bois ! Seulement quelques années après avoir inventé la mémoire magnétique de l’ordinateur, Jay Wright Forrester développe, 18


Un socle de connaissances

interdépendance avec l’écosystème de la planète. Je retiens parmi de nombreux ouvrages récents, les livres : La troisième révolution industrielle de Jeremy Rifkin 10 et Effondrement de Jared Diamond 11. Je cite le second car l’analyse de son auteur anthropologue apporte, s’il le faut, encore plus de poids aux propos du premier, lesquels servent de toile de fond aux réflexions qui suivent. L’économiste Rifkin analyse l’implosion de la société mondiale, que nous ressentons tous à des degrés divers, construite sur le modèle issu de la seconde révolution industrielle. Il perçoit cependant l’émergence vigoureuse de la troisième et en définit les cinq piliers (énergie renouvelable, bâtiments à faible consommation et/ou producteurs d’énergie électrique, stockage de l’énergie, distribution en toile intelligente de l’énergie électrique à l’instar de la toile de distribution de la communication, voiture électrique ou à piles à combustible). dès 1956, la théorie de la « Dynamique des Systèmes » et son application à l’industrie (Industrial Dynamics, 1961, et Urban Dynamics, 1969, Cambridge, MIT Press ; Principles of Systems, 1968, et World Dynamics, 1971, Cambridge, Wright-Allen Press). World Dynamics est un des sujets de mes études au MIT en 1971-1972 et est tout aussi déterminant que les théories raffinées de calcul des structures dans la construction de ma feuille de route intellectuelle. 10 Jeremy Rifkin, The Third Industrial Revolution, New York, Palgrave Macmillan, 2011. 11 Jared Diamond, Collapse : How Societies Choose to Fail or Succeed, New York, Viking Press, 2005. 19


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Il en fait découler une société empathique vivant dans le respect de la biosphère, ce qui m’intéresse et m’enchante. Je ne me réfère cependant ici qu’à ses réflexions sur l’aspect énergétique en relation avec la construction : 1. La deuxième loi fondamentale de la thermodynamique relative à l’entropie dit que toute énergie se dégrade, du disponible à l’indisponible. Elle va du chaud au froid, du concentré au dispersé, de l’ordre au désordre. J’ajoute que toute construction en consomme, même la plus économe en énergie nécessaire à son édification, puisqu’elle a pour objet de satisfaire les besoins de l’homme, donc de l’amener du froid au chaud, du dispersé au concentré et du désordre à l’ordre. 2. Les énergies renouvelables deviennent partout accessibles à tous, qu’il s’agisse du solaire, de l’éolien, de l’hydroélectrique, du géothermique, de la biomasse 12. Leur déploiement supprime la nécessité d’une organisation pyramidale du pouvoir, telle qu’elle était induite par l’ancienne concentration des productions d’énergie, et demande l’organisation de la société en réseau. Nos constructions nouvelles (comme nos véhi12

Il ne faut pas exclure la maîtrise, lointaine peut-être, de la fusion nucléaire. 20


Un socle de connaissances

cules) deviennent toutes de petites unités de production et de stockage 13. 3. La mise en réseau de la communication et de l’énergie entraîne la disparition de nombreuses industries de très grande taille avec leurs intermédiaires commerciaux, et resserrent le lien direct entre le citoyen et les créateurs, inventeurs et découvreurs. Ces derniers mettent leurs acquis à disposition sans pour autant les vendre : il en découle la renaissance de l’art et de l’artisanat dans leurs plus belles expressions avec un impact majeur en architecture et en ingénierie civile. Voici donc résumées les réflexions de Rifkin qui concernent directement l’acte de construire. L’énergie et la société Nos vies sont rythmées et conditionnées non seulement par nos rapports avec les autres, mais aussi par les cycles journaliers et saisonniers de la nature. Chaque jour, de manière différente selon la saison, la latitude, et la nature du lieu, les variations de température, d’humidité, de couleur et d’intensité de la lumière, son caractère direct ou diffus, les sons, les odeurs, les états des surfaces 13

Ceci est d’autant plus souhaitable, ou inévitable, que le coût de la distribution pyramidale (n’importe laquelle) croît beaucoup plus vite que la population desservie (voir La ville verticale, note 17). 21


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que nous touchons, influencent notre vécu. L’objet de l’abri (la construction) est de limiter voire de supprimer les inconvénients de la nature sur notre vie sans pour autant nous priver de ses bénéfices. C’est ce qui fait le charme des bâtiments anciens ou rudimentaires, en osmose avec la nature, vers lesquels nous sommes irrésistiblement attirés pour nous reposer et nous ressourcer, sans parler de la cabane de notre enfance. En ville, l’animal de compagnie permet à beaucoup de compenser l’absence de ce contact primordial. Rien, a priori, ne devrait priver l’humain de la jouissance de ses sens et pourtant peu de constructions de ce dernier siècle (y compris les miennes), même celles du mouvement dit « moderne » porté aux nues par les architectes eux-mêmes, échappent à cet écueil. Pire, la réduction progressive de leurs « performances » sensorielles et affectives s’accompagne d’une augmentation de leur empreinte énergétique, tant pour leur construction que pour leur fonctionnement et leur maintenance. En outre, elles ne sont plus démontables ce qui augmente encore leur charge environnementale pour les générations futures. L’avertissement du rapport du MIT au Club de Rome de 1972 14 et le premier choc pétrolier 14

Sous la direction de Dennis L. Meadows (et l’influence des travaux de J.W. Forrester), le rapport The limits to growth souligne déjà les cinq principaux problèmes de l’humanité : 22


Un socle de connaissances

en 1973 ne connaissent de retentissement dans le monde de la construction, que par l’édification lente et progressive de normes et règlementations aussi nombreuses qu’inefficientes, aussi longtemps qu’elles ne remettent pas en question la posture philosophique de notre société : tout dans la forme, peu sur le fond. En architecture, les vagues stylistiques et formelles se succèdent, mais ne sont que des emplâtres sur une jambe de bois : elles sont toutes naïvement cyniques, qu’il s’agisse du postmodernisme, du mouvement « High Tech » ou des nombreux avatars du déconstructivisme. L’engouement actuel en Europe pour les bâtiments dits « passifs » n’est l’expression que de la dernière vague stylistique, tant il est corseté par la législation et les documents normatifs, nonobstant le fait que mieux isoler une construction (tant ses parties vitrées que ses parties opaques) et la rendre la plus étanche possible à l’air a tout son sens à condition qu’elle puisse respirer. Envisager donc dès à présent, au sein de l’Union européenne, de ne construire que des nouveaux bâtiments producteurs d’énergie au-delà de leurs propres besoins (que l’on veille également à limiter), comme le préconise Rifkin, prend tout accélération de l’industrialisation, croissance forte de la population mondiale, persistance de la malnutrition mondiale, épuisement des ressources naturelles non renouvelables, dégradation de l’environnement. 23


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

son sens pour autant que les puissantes entreprises énergétiques soient immédiatement priées de transporter en réseaux intelligents coordonnés cette nouvelle production diffuse, sous le contrôle attentif des autorités européennes. Pour autant aussi, et c’est au cœur de mon propos, que ce nouveau type de construction permette à nouveau le libre usage de nos sens et l’emploi de composantes les plus démontables et recyclables possibles. Pour autant finalement qu’une solidarité constructive soit inventée. À l’instar de la « sécurité sociale » où les nantis partagent leurs ressources avec les démunis, la « sécurité énergétique » partage l’énergie économisée ou produite par les nouveaux bâtiments avec celle que consomment les bâtiments anciens, maintenus en l’état en tant que patrimoine culturel ou social. Ces nouvelles constructions peuvent aussi bénéficier de l’apport fécond de la production artisanale de haute technologie, et des artistes, acteurs existentiels de la société civile.

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Lumière, transparence et reflet 1

Je vous invite maintenant à une promenade où les matériaux (transparents, diffusants ou réfléchissants / raides ou souples / étanches ou perméables) et les éléments de la construction (structure, enveloppe simple ou multiple, écran,…) dialoguent dans leur environnement avec l’ombre et la lumière, la transparence et le reflet. Elle est illustrée par quelques-uns de mes projets et réalisations 2. 1

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Les grandeurs physiques relatives à la lumière sont : a. la puissance lumineuse d’une source (exprimée en Lumen : Lm) ; b. l’intensité lumineuse (en Candela : Cd) ; c. l’éclairement (en Lux : Lx) ; d. la luminance (en Cd/m²) ; e. la température de couleur Tc (en °K) ; f. l’efficacité lumineuse (en Lm/W). La référence (01/xxx) reprise pour chacun d’eux permet au lecteur de se documenter plus en détail sur www.samynandpartners.be. Les illustrations (où p donne la date du projet et r celle de la réalisation) concernent la Belgique, sauf mention. Elles sont créditées en fin d’ouvrage. 25


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

La lumière du jour La lumière dont il est ici question, dans cette fine bulle d’atmosphère d’à peine 120 km d’épaisseur autour de la terre, n’a rien à voir avec celle au-delà dans l’Univers et que nous découvrons depuis quelques décennies seulement grâce au télescope spatial Hubble. L’expression « lumière du jour » recouvre un très grand nombre de réalités différentes. L’intensité et la température de couleur de cette lumière varient en fonction de la latitude, du jour de l’année, de l’heure du jour. Elle éclaire de manière directe ou diffuse en fonction de l’orientation, de la couverture nuageuse ou du taux d’humidité de l’air. Sa résultante perceptible dépend d’abord de l’environnement naturel puis de celui créé par l’homme. À latitude égale et au même instant relatif, la lumière cristalline de Marrakech au Maroc est fort différente de celle qui éclaire les brumes de Kagoshima au sud du Japon. Une ambiance urbaine se différencie aussi d’une ambiance rurale. La température de couleur de la lumière « naturelle » varie de 2500° Kelvin au lever et au coucher du soleil à plus de 5800° K à midi et se voit modifiée lorsqu’elle est réfléchie par une surface colorée. Les surfaces colorées de 26


Lumière, transparence et reflet

l’environnement extérieur soumis au rayonnement solaire direct dictent ainsi la couleur de la lumière diffuse. La lumière fixe les limites des couleurs perceptibles, variables d’un individu à l’autre. L’architecture peut en jouer mais sans que le repère naturel ne se perde sous peine de perturber notre état. J’ai dressé le graphique de l’éclairement sous ciel serein à Uccle en Belgique, pour chaque heure et jour de l’année sur une surface verticale 3 ainsi que sur une surface horizontale 4. Les deux « papillons de Lux » qui en résultent [Fig. 3 et 4] sont édifiants et incitent au rêve et à la méditation. Ils guident mes réflexions dès le premier croquis conceptuel. L’orientation et la latitude À une latitude donnée, taille et proportions des ouvertures dépendent de leur orientation et de celle des murs, façades et toitures mais aussi des obstacles de l’environnement au rayonnement solaire. À ce sujet, il est essentiel de se rappe3 4

Orienté nord, nord-est, est, sud-est, sud, sud-ouest, ouest, nord-ouest. C’est à Robert Dogniaux que l’on doit, dès 1954, la mesure méthodique de ces valeurs. Institut royal météorologique de Belgique, Publications série B, nº 12, Ensoleillement et orientation en Belgique. V. Étude de l’éclairement lumineux naturel, par R. Dogniaux, 1954. Je tente, en vain à ce jour, de me procurer ces mesures pour d’autres latitudes. 27


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

ler que la situation est très différente entre les tropiques, des tropiques aux cercles polaires et au-delà des cercles polaires. Alors que partout sur la planète le Soleil se lève à l’est et se couche à l’ouest, la zone entre les tropiques voit le Soleil à midi se balancer du nord au sud, selon la saison. Des tropiques aux cercles polaires, l’hémisphère nord ne voit à midi le soleil qu’au sud et l’hémisphère sud ne le voit qu’au nord. Ceci constitue un fait déterminant pour l’architecture. En effet, l’est et l’ouest, stables toute l’année, forment le repère d’orientation entre les tropiques, alors que l’axe nord-sud est le référentiel usuel au-delà. La baie C’est par la baie, le trou dans le mur ou la toiture, que la lumière pénètre directement, par réflexion ou de manière diffuse, dans la construction, et différemment selon son orientation, la saison et l’heure du jour, avec ses attributs, (fenêtre ou verrière, vitrage, garde-corps, balcon, stores, volets, rideaux). Elle qualifie l’architecture 5. Tous ces composants ont connu d’importantes évolutions ces dernières décennies, mais aucun d’entre eux n’a un impact aussi impor5

Lire : La lumière naturelle à bon escient, Ravel Office fédéral (Suisse) des questions conjoncturelles, 73 p., 1995, téléchargeable sur la toile. 28


Lumière, transparence et reflet

tant sur la matérialité de l’enveloppe (façade ou verrière) que le vitrage et la protection solaire. Bien d’autres facteurs, en relation avec la baie, influencent l’architecture tels que, par exemple, la question de la pénétration de la lumière dans une pièce 6, toujours plus efficiente en partie haute. La partie basse de la fenêtre pourrait ainsi être pleine et mieux isolée, mais ceci priverait cependant l’occupant de la jouissance de la vue vers le bas, la nature, la vie sociale et les jeux d’ombres. C’est pour cela que je privilégie, malgré leur moindre efficacité lumineuse, les baies du sol au plafond, la fenêtre étant équipée d’un garde-corps transparent. Vient aussi, parmi bien d’autres, la question de la ventilation naturelle qui pose aussi celle du confort, tant acoustique qu’olfactif, et de la poussière. Tous ces facteurs et questions interagissent dans le dessin de la baie. Quant aux aspects économiques, nonobstant ce qui est techniquement possible, c’est la raison qui commande la taille et les proportions de la 6

C’est aussi la flexibilité d’usage de cette pièce qui est d’autant plus grande lorsqu’elle est haute sous plafond et peu profonde. Un bâtiment de faible profondeur (12 à 13 m) et de hauteur sous plafond de 3 m convient à la plupart des usages (logement, école, hôpital, commerce, administration, atelier,…) et peut ainsi répondre à l’évolution des besoins. À l’inverse, la plupart des immeubles profonds, parfois construits il y a moins de 30 ans, ne peuvent être adaptés pour satisfaire aux besoins changeants et sont voués à la démolition. 29


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baie. Un châssis ouvrant ne devrait ainsi pas excéder une surface de un ou deux mètres carrés, ou présenter une hauteur excessive par rapport à sa largeur, pour être d’usage pratique. Le vitrage Le vitrage se doit d’être le plus cristallin possible pour permettre la même perception des couleurs qu’en son absence ou alors « annoncer la couleur » et devenir une intervention artistique destinée à être vue et non pas à transmettre la lumière pour voir autre chose. C’est aussi par lui que les échanges énergétiques avec l’extérieur sont les plus importants ce qui incite à lui conférer les meilleures performances dans ce domaine. C’est aussi lui qui, à l’heure actuelle, est un des meilleurs supports de cellules photovoltaïques et permet de concevoir la façade 7 comme un générateur énergétique. Une des tâches pour les années à venir consiste donc à concilier le respect des sens (bon rendu des couleurs, ventilation naturelle,…), la limitation des déperditions énergétiques, la protection solaire et la production d’énergie. En particulier, l’isolation de l’enveloppe contribuant lourdement aux performances énergétiques, la tentation est grande de réduire 7

Surtout par ses parties opaques. 30


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la surface vitrée ou d’augmenter son pouvoir isolant, quitte à réduire la transmission lumineuse totale. Mais cette réduction va de pair avec une augmentation du temps d’utilisation de l’éclairage artificiel 8. Contrairement à l’intuition, le calcul soigneux du compromis énergétique optimal entre dimension du vitrage, pouvoir isolant et transmission lumineuse mène souvent à des vitrages de grande taille. Si de grands vitrages sont coulés dès 1665 à la Manufacture royale de glaces, fondée par Colbert pour Louis XIV, leur coût élevé en réserve l’usage aux constructions exceptionnelles 9. Le verre à vitre ordinaire, produit du milieu du XIX e siècle et jusqu’en 1920 à partir de cylindres soufflés et découpés, n’est par contre disponible qu’en feuilles de taille limitée. Gropius s’accommode encore, en 1925, de cette limite traditionnelle pour les grandes baies en verre cloisonnées du Bauhaus à Dessau en attendant la diffusion commerciale, à l’échelle planétaire, de grandes vitres en verre étiré. Cette diffusion permet alors la généralisation de l’emploi de très grandes fenêtres et vitrages qui, tout autant que 8

9

Elle doit aussi être suffisamment répartie ce qui implique une grande hauteur de fenêtre et de plafond ainsi qu’une profondeur limitée de bâtiment. Francis Poty et Jean-Louis Delaet précisent des grandeurs de 2,5 m × 1,7 m en 1806 à 8,14 m × 4,2 m en 1889, dans leur ouvrage Charleroi, pays verrier édité par la Centrale Générale à Charleroi, en 1986. 31


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le béton armé et les fins châssis en acier, qualifient le mouvement moderne. Le verre étiré, cristallin, est produit industriellement depuis 1903 10. L’étirage laisse sur le verre des lignes en relief, discrètes mais caractéristiques. Cette matérialité de la transparence et les légers reflets qui en découlent sont à la fois défauts et qualités. Il peut être poli pour fournir de la glace et être mis en œuvre en double vitrage (dès 1912 aux Etats-Unis), mais il est graduellement supplanté par le verre dit « float 11 » à partir de 1952. La production de ce dernier demande moins d’énergie et permet de très grandes dimensions. Certains verriers tels que AGC Interpane en Allemagne sont maintenant capables de livrer des feuilles de verre de 3 m de large et 18 m de longueur en 20 mm d’épaisseur ! Mais le verre float de première génération présente une coloration vert émeraude d’autant plus prononcée qu’il est épais, réduisant la transmission lumineuse  12 et appauvrissant imperceptiblement 10

Le verre étiré est inventé à Charleroi par l’ingénieur belge Émile Fourcault, avec le franco-belge Émile Gobbe qui dépose son premier brevet en 1901. 11 Le verre float (ou « flotté ») est inventé par l’ingénieur anglais Sir Alastair Pilkington qui dépose son premier brevet en 1952. 12 Un vitrage est aussi caractérisé par son indice de transmission lumineuse (TL). Un verre float extra clair de 6 mm à 12 mm d’épaisseur présente ainsi un TL de 91 % contre un TL de 87 à 88 % pour un verre float ordinaire. 32


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mais réellement la perception des couleurs 13. Ce verre ne peut, en outre, être produit qu’avec une planéité parfaite sans la « matière » qu’offrait le verre étiré capable d’en matérialiser la présence sous la lumière, forçant son marquage lorsqu’il y a risque de s’y cogner. Les perfectionnements apportés au verre float, visant à juguler la surconsommation énergétique et l’inconfort découlant de la mode des façades-rideaux largement vitrées, renforcent cet appauvrissement. La recherche de la réduction de la quantité totale d’énergie, que laisse passer un vitrage par rapport à l’énergie solaire incidente 14, conduit au verre teinté absorbant et au verre réfléchissant à couches déposées « sous vide » ou « pyrolysées 15 », de toutes les couleurs selon les souhaits de l’architecte. 13

La perception des couleurs est qualifiée par l’indice de rendu des couleurs (IRC), chiffre compris entre 1 et 100 qui traduit le degré de concordance entre l’aspect coloré d’un objet éclairé par une source donnée (ou naturellement à travers un vitrage) et l’aspect de ce même objet éclairé par une source de référence de même température de couleur (ou naturellement). 14 Le facteur solaire (F.S. ou « g », qui s’exprime en %), caractérise le rapport entre l’énergie passante à travers le vitrage et l’énergie solaire incidente. g = 84 % (et TL = 88 %) pour un simple vitrage ordinaire de 6 mm, g = 74 % (et TL = 79 %) pour un double vitrage ordinaire de 2 × 6 mm, et peut descendre jusqu’à g = 16 % (TL ≤ 20 % !) pour le verre à couches. 15 Les verres à couches minces se développent à partir des années 1960. Celles sous vide sont déposées par pulvérisation cathodique assistée par champ magnétique. Il s’agit d’une nanotechnologie qui ne porte pas encore son nom (comme on s’y réfère 33


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L’industrie du verre est maintenant aussi incitée à développer des produits à hautes performances énergétiques mais moins réfléchissants, appauvrissant le moins possible la perception des couleurs. Pour ma part, c’est depuis 1990 que je demande à l’industrie verrière d’offrir du verre cristallin dans ses gammes de produits standards. Ma prise de conscience relative aux désagréments du manque de cristallinité du vitrage remonte à l’étude de siège de la CNP/NPM (Compagnie Nationale à Portefeuille / Nationale Portefeuillemaatschappij), en 1994 (01/320, Fig. 5). Albert Frère souhaite une façade en pierre de France alors que je suis depuis longtemps opposé à l’emploi de revêtements de façades en pierres minces agrafées 16. Il me faut donc trouver une réponse conciliant le souhait de mon client et mon souci d’orthodoxie constructive. C’est ainsi que j’ai l’idée d’employer du verre cristallin, émaillé ton « pierre de France » sur sa face intérieure et maté à l’acide sur sa surface extérieure. Le résultat dépasse toutes mes attentes depuis les années 1990), puisque ces couches ont une épaisseur de 10 à 800 nm (nm = nanomètre = 10-9 m = 10-6 mm = 10-3 µm). 16 La dalle de pierre résiste dans le temps, même fissurée, lorsqu’elle est posée à plein bain de mortier sur un mur. Elle « vit » en sursis lorsqu’elle est agrafée en quelques points et couvre un isolant de façade. Chocs thermiques à coup sûr, impacts mécaniques parfois, finissent par la fissurer avant qu’elle ne tombe. 34


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car non seulement il évoque, sans hésitation possible, la pierre de France mais présente aussi une profondeur visuelle tout à fait nouvelle. Finalement, l’aspect désagréable que prend la pierre lorsqu’elle est mouillée, résultant de sa porosité, disparaît grâce à l’étanchéité du verre. Albert Frère est conquis. Il ne me reste plus qu’à trouver le verre en quantité voulue ! À l’époque, en effet, ce verre cristallin n’est produit qu’en fin de vie de la chamotte réfractaire tapissant la paroi intérieure des fours ; il est rare et donc très convoité. Je peux heureusement sécuriser l’approvisionnement nécessaire en récupérant le stock prévu pour la maintenance de la grande bibliothèque de France, à Paris. Il est juste insuffisant et quelques volumes d’une autre provenance doivent être utilisés, ce qu’un observateur attentif remarque. Le même verre est utilisé pour le vitrage de vision afin de tenter, sans y parvenir vraiment, d’atténuer les effets désagréables des couches énergétiques 17. Demande oblige, tous les grands verriers se mettent à produire du verre float presque « cristallin 18 », ce dont bénéficie aussi l’industrie du 17

En outre, équipé de doubles châssis vitrés performants, l’immeuble se veut, à l’époque, exemplaire en matière énergétique. Il est cependant possible, vingt-deux années plus tard, d’en améliorer les performances pour tenter d’approcher une consommation nulle. 18 « Clearvision » chez AGC (le plus cristallin), « Ultra Clear » chez Guardian, « Cristal » chez Saint Gobain. 35


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panneau photovoltaïque. Nous disposons donc maintenant à nouveau de verre cristallin respectant la couleur de la lumière naturelle, pour autant que les doubles vitrages ne soient pas équipés de couches minces. Ce verre plus transparent devrait pourtant réfléchir l’ultraviolet (invisible par l’humain) pour être perceptible par les oiseaux 19. Deux développements technologiques À l’avenir, deux autres évènements importants concernant le verre promettent d’avoir, me semble-t-il, une influence déterminante en architecture. Le premier concerne le double vitrage sous vide, inventé en 1989 à l’Université de Sydney par Richard E. Collins et Steven Robinson, et produit industriellement au Japon par NSG (Nippon Sheet Glass) à partir de janvier 1997 20 19

Katarine Logans dans son article « For the birds » (Architectural Record, 10/2015, p. 148-154) rappelle que des « centaines de millions d’oiseaux » meurent chaque année en heurtant un vitrage, rien qu’aux États-Unis d’Amérique ! Pourtant les vitrages avec couches « UV » sont indisponibles en Europe. Une note interne d’AGC (David.Kelich@eu.agc.com) sans référence, ni date, ne fait état que d’une « centaine de millions d’oiseaux, en Europe » (reçu par courriel 2015.12.17 / 18:04 de Bhadresh Parbhoo@eu.agc.com). 20 ECBS News, Issue 27, june 1998, p. 7-10 : « Vacuum Glazing Research Program at the University of Sydney, Australia ». NSG 36


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sous la marque « Spacia ». Ce produit est révolutionnaire, mais il a fallu tout le temps écoulé depuis lors pour que son « évidence » émerge et qu’il puisse tout prochainement (avec d’autres caractéristiques et de meilleures performances) être disponible en Europe. Ce premier double vitrage est composé de deux verres float de 3 mm d’épaisseur distants de 0,3 mm, entre lesquels le vide est créé. De petites colonnes cylindriques de 0,5 mm de diamètre, en acier inoxydable, placées tous les 20 mm dans les deux sens empêchent les feuilles de se rapprocher sous l’effet du vide. L’intercalaire périphérique traditionnel du double vitrage, composé en général de mastics synthétiques et d’un profilé rigide (aluminium, acier,…) formant un bord noir opaque de 20 à 25 mm, réduit les performances énergétiques du vitrage d’autant plus que ce dernier est petit (c’est ce qui est appelé communément l’effet de bord). Il n’est de surcroît pas recyclable 21. Il est ici remplacé par un frittage céramique de moins de 6 mm de largeur limitant l’effet de bord au strict minimum. me fait parvenir des échantillons enregistrés au bureau en date du 1998-11-04, déjà ! 21 Alors que les expressions « économie circulaire » et « cradle to cradle » (du berceau au berceau) sont dans toutes les bouches, personne ne s’inquiète des « montagnes » de lattes d’aluminium-mastic-éclats de verre qui s’empilent dans les déchetteries des ports. 37


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En forçant le trait, l’ensemble présente plusieurs vertus. Dans les versions actuellement attendues, son niveau d’isolation thermique est bien supérieur à ce qu’il est possible d’atteindre avec le meilleur des triples vitrages énergétiques connus à ce jour. Les nouveaux verres sous vide produits en Europe devraient ainsi présenter un coefficient de transmission thermique U=0,3 W/ m2 °K 22, qu’il soit en position verticale ou horizontale 23. Il est très aisément recyclable, n’étant fait principalement que de silice et de petites colonnes en acier inoxydable. Il a pratiquement l’épaisseur du simple vitrage et présente un bord si fin qu’il peut remplacer les petits volumes vitrés équipant les châssis à petits bois de tous les bâtiments du patrimoine dit classique. Bien qu’il soit cristallin, la présence discrète des petits plots en acier inoxydable redonne à ces verres la « présence » du verre étiré. La taille des vitrages actuellement réalisés selon ce procédé est cependant limitée à 1,5 m sur 3 m, mais des formats 22

Le coefficient de transmission thermique U (en W/m² °K) du simple vitrage de 6 mm est de 5,7 ; celui du double vitrage de base varie entre 2,7 et 3,3 ; celui des meilleurs vitrages isolants actuels est de 1,0 à 1,2 et descend à 0,7 pour les triples vitrages. Le verre Spacia de 1997 présente un U = 1,4 W/m² °K. 23 Ceci est une qualité supplémentaire car les doubles ou triples vitrages actuels voient leur transmission thermique augmenter de manière très significative lorsqu’ils s’écartent de la verticale. Par exemple, le U d’un double vitrage très isolant passe de 1,1 en position verticale à 1,7 en position horizontale, soit une perte de résistance thermique de plus de 50 %. 38


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plus grands sont attendus avec des verres de plus de 6 mm d’épaisseur. Le second évènement concerne la chute vertigineuse du coût de la cellule photovoltaïque de silicium (passée de 10,4 cm à 15,6 cm (de 4 à 6 pouces) de côté) : de 3,3 USD/Wc en 2006 à 0,60 USD/Wc en 2012 et à 0,38 USD/Wc en avril 2016 24. Les données relatives à la récolte énergétique solaire, en tout point de la planète et quelle que soit l’orientation, sont entre-temps aussi devenues accessibles par simple téléchargement, par exemple sur le site du Joint Research Centre (européen) d’Ispra en Italie 25. Elles permettent de produire des abaques polaires tels que les deux que j’ai dressés pour le projet Issol dans le zoning « Les Plénesses » à Verviers, Belgique [01/592, latitude 51°N, Fig. 6 et 7] et pour celui du centre d’accueil du village culturel de Lujiazhi à Zhoushan en Chine [01/574, GM 26, latitude 30°N, Fig. 8 et 9]. La course du 24

Laurent Quittre, ISSOL, courriels à Samyn and Partners 2012.05.23/16 :03 et 2016.03.10/16 :27 (il s’agit de dollar USA par Watt crête (Wc), sur base de l’indice Bloomberg) et de prix moyens, qu’il s’agisse de cellules mono-ou poly-cristallines. 25 E-mail : jrc-info@ec.europa.eu 26 C’est à cette occasion que débute fin 2009, ma collaboration avec Georges Meurant, ses compositions en rectangles de couleur apparaissent depuis dans bon nombre de projets (signalés par la mention « G.M. » derrière le nº de dossier). Ce premier projet de Zhoushan est malheureusement défiguré, n’ayant pu diriger les plans d’exécution, ni le chantier. 39


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soleil y est également figurée. Ils montrent en particulier que l’énergie annuelle, en kWh/m², recueillie sur une face verticale plein nord est encore de 35 % de l’optimum plein sud pour la Belgique et de 20 % pour Zhoushan. Jusqu’à présent nous nous efforçons d’utiliser ces cellules avec parcimonie en les orientant, généralement, comme la règle de l’art traditionnelle le préconise, perpendiculairement à la position azimutale du Soleil le 21 juin. Aujourd’hui la réduction vertigineuse du coût de la cellule et la disponibilité des statistiques d’ensoleillement bousculent totalement ce paradigme. Des surfaces capteuses à orientation non idéale deviennent économiquement rentables. Le bâtiment producteur d’énergie par son enveloppe à un coût accessible est donc à portée de main, pour autant que sa structure portante n’en grève pas anormalement le coût — c’est loin d’être une question de détail —, et que le réseau de distribution électrique devienne effectivement intelligent et accessible à tous. Il reste à concevoir une architecture intégrant ces cellules d’une manière « aimable ». Le photovoltaïque n’est pas une panacée et il importe d’évaluer, en fonction du site, la source d’énergie renouvelable la plus appropriée. En 1998, l’emploi des cellules photovoltaïques en façade pour le château de Hendrik Seghers que j’évoque plus loin, ou pour la caserne des 40


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pompiers de Houten [01/373, Fig. 10 et 11], revêt un caractère expérimental, voire presque symbolique. Il en va tout autrement en 2006. C’est à ce moment que le Conseil de l’Union européenne est convaincu de la pertinence de couvrir son nouveau siège, le bâtiment Europa d’une ombrelle photovoltaïque [01/494, GM, Fig. 12] et que l’enveloppe de l’Euro Space Centre à Libin-Transinne (façades et toiture) [01/518, Fig. 13] est conçue comme une véritable centrale électrique avec une puissance installée de 439 kWc (et une production annuelle de l’ordre de 370 MWh soit 91 % des besoins en électricité du centre). Les panneaux sont encore dans ces deux cas orientés de manière optimale. Je propose maintenant une enveloppe continue de panneaux photovoltaïques pour toutes les parties pleines des façades extérieures du nouveau bâtiment de la Faculté des Sciences appliquées de l’Université libre de Bruxelles, boulevard du Triomphe à Ixelles. Cette parure extérieure, toujours d’un noir bleuté, contraste avec les parois blanches des patios intérieurs, indiquées pour la réflexion de la lumière naturelle [01/570, Fig. 14 et 15]. Ces panneaux offrent une puissance de 180 Wc/m²  27 alors qu’elle n’est que de 100 Wc/m², il y a 10 ans à peine. 27

La puissance de la cellule seule est actuellement de 210 Wc/ m², et de 280 Wc/m² pour les applications spatiales. Comme il 41


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Une technologie émergeante à base de composants organiques (« OPV » organic photovoltaic) laisse, d’autre part, présager des panneaux transparents. Le verre feuilleté et trempé La feuille de verre, fragile, accroît sa résistance aux chocs lorsqu’elle est réalisée en deux ou plusieurs couches liées entre elles par un ou plusieurs films transparents de 0,38 mm en pvb (ou en eva) 28. Ce vitrage présente aussi l’intérêt de bloquer le rayonnement ultraviolet. La combinaison de feuilles de verre trempé 29 et de verre float ordinaire confère à ce feuilest difficile d’imaginer une ville aux bâtiments tous noirs, des panneaux photovoltaïques (presque) blancs voient maintenant le jour avec une puissance de 90 Wc/m². 28 Le verre feuilleté est inventé en 1903 par le chimiste français Edouard Bénédïctus (1879-1930) qu’il brevette sous le nom de Triplex. C’est cependant l’invention en 1927 du pvb (butyral de polyvinyle) par les chimistes canadiens Howard W. Matheson et Frederick W. Skirrow qui marque le début de l’emploi du verre feuilleté pour les pare-brise de voitures dès 1936 en Angleterre. Il faut attendre les années 1960 pour leur application dans le bâtiment, 1980 pour la première « norme » belge (une STS – spécifications techniques unifiées), et 1989 pour la norme belge NBN 23-002. Eva : éthylène-acétate de vinyle, mis au point en 1950 et commercialisé par ICI (Imperial Chemical Industries). 29 La feuille de verre trempé, brevetée vers 1930 par Rudolph Seiden (1900-1965), est approximativement deux à cinq fois plus résistante que la feuille de verre ordinaire car elle est 42


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leté une meilleure sécurité car le bris en petits fragments du premier est contrecarré par le bris en éclats du second. Ils peuvent ainsi être utilisés pour des garde-corps 30 ou des éléments de plancher vitré. L’emploi de ces verres est imposé pour tout vitrage en surplomb, tels que ceux des verrières, depuis 2014 et maintenant aussi pour les grands vitrages verticaux dans les espaces public ou dans les zones à risque de tornades ou de typhons. Leur faible performance mécanique au regard de leur coût incite cependant à ne les utiliser précontrainte par échauffement lent suivi d’un refroidissement brutal de ses faces extérieures comprimées par la contraction et la mise en traction du cœur de la feuille se refroidissant. Le verre « armé » inventé par Frank Shuman (1862-1918) en 1892 et composé d’un fin grillage de fils d’acier moulé dans le verre, est la première tentative pour assurer une certaine sécurité au verre. Le coefficient de dilatation thermique de l’acier étant cependant deux fois celui du verre étiré et trois fois celui du verre borosilicaté, il est condamné à ruine sous variations thermiques répétées. Il est d’autant plus surprenant qu’il ait encore été utilisé dans les vantaux des portes coupe-feu au RoyaumeUni jusqu’il y a peu. Outre leur faible résistance mécanique et comme la plupart des polymères, pvb et eva sont sujets à fluage, ce qui ne permet pas d’exploiter au maximum les propriétés du verre. C’est pour cela que je propose à AGC, dès 2010, de mettre au point un nouveau type de verre armé (à la faveur des grands progrès récents relatifs aux colles) utilisant un filet de très petites mailles en fils de para-aramide dont la résistance est celle des meilleurs aciers mais dont le coefficient thermique est celui du verre ordinaire, voire borosilicaté, ce qui éliminerait les défauts du verre armé d’acier. 30 Je préfère en ce qui me concerne utiliser la tôle perforée comme décrit plus loin. 43


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qu’avec parcimonie, pour l’une ou l’autre « note aiguë » dans la composition. C’est ainsi que je l’utilise pour la petite verrière faîtière portant et offrant à la vue la girouette en acier inoxydable brillant d’Olivier Strebelle sur un petit immeuble en bois à Waterloo 31. Comme les miroirs que j’évoque plus loin, celle-ci renvoie au gré du vent les rayons solaires dans la salle de réunion du deuxième étage puis, par l’intermédiaire d’une dalle ronde en verre feuilleté au centre de sa table, vers le hall d’entrée [01/200, Fig. 16, 17 et 18]. Le miroir réfléchissant la lumière naturelle Cela fait longtemps que je suis fasciné par le miroir. Je l’emploie notamment pour réfléchir la lumière naturelle, comme dans les profonds ébrasements des fenêtres étroites de la ferme de Stassart à Uccle que je restaure dès 1991 pour accueillir mon équipe d’architectes et d’ingénieurs [01/265, Fig. 19]. Il permet non seulement un plus grand apport de lumière naturelle mais aussi un très agréable regard oblique vers l’extérieur. 31

Je découvre chez lui, vers 1985, les maquettes de sculptures monumentales qu’il ne peut réaliser pour le Sart-Tilman et profite de cette petite girouette pour tester le dispositif à plus petite échelle avant de lui demander les trois grandes qui couronnent la butte que je dessine au centre de recherches CRCSL à Louvain-la-Neuve ; p : 1986, r : 1987-1988 - (01/160). 44


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J’utilise depuis lors fréquemment ce dispositif à l’occasion de la restauration ou de la rénovation de bâtiments anciens, comme dans les ébrasements des baies du « bloc A » du Résidence Palace intégré au bâtiment Europa [Fig. 20]. Je suis ensuite amené à étudier l’usage de surfaces réfléchissantes ou de miroirs placés « en visière » entre la partie vision et l’imposte vitrée d’une fenêtre, dans l’objectif d’éclairer le plafond et simultanément d’assurer l’ombrage (ce que l’on appelle communément « étagères à lumière » ou « light shelves »). C’est ainsi qu’à l’occasion de la mise au point en 1992 d’un immeuble de bureaux, à l’angle des avenues Michel-Ange et de Cortenberg à Bruxelles [01/260, Fig. 21 et 22], je me rends compte qu’un caillebotis d’aluminium extérieur peut déjà assurer cette fonction avec une relative efficience, avec l’avantage de ne jamais devoir être nettoyé. Le résultat est si convaincant que, visitant l’immeuble en 2000, Jan Piet et Dirk de Nul adoptent séance tenante le même dispositif pour leur premier nouveau siège à Aalst [01/401, Fig. 23]. Je dessine aussi, en 1997, des réflecteurs anidoliques 32 pour le projet de la Caisse Congés du 32

Le réflecteur anidolique est une étagère à lumière qui utilise des réflecteurs spéculaires courbes conçus pour réfléchir une plus grande part de la lumière diffuse du ciel que ne le ferait un miroir plan. Il est étudié dès 1993 par Raphaël Compagnon à l’EPFL (École Polytechnique Fédérale à Lausanne). 45


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Bâtiment à Bruxelles [01/351, Fig. 24 et 25]. Placés à l’extérieur, leur forme cylindrique en fait les réflecteurs les plus performants 33. Ils affirment en outre la modénature de la façade en relation avec celles des bâtiments voisins. L’efficience du système, évaluée avec scepticisme à l’époque me semble bien valoir d’être à nouveau considérée, malgré la charge de nettoyage qu’elle implique. Jouant distraitement avec un miroir je me rends compte au début de l’année 1999 de la possibilité de réfléchir, modestement mais efficacement, la lumière diffuse. Ceci m’inspire la proposition de nouvelles façades pour un immeuble au rond-point Schumann à Bruxelles, où de grandes plaques de verre revêtues d’une couche pyrolysée semi-réfléchissante renvoient de la lumière du nord dans les bureaux, sans perturber la vue [01/381, Fig. 26]. Finalement, même un verre ordinaire réfléchit toujours quelque chose 34. 33

Cette étude est menée au CSTC (Centre scientifique et technique de la Construction), par Ir Peter Wouters. 34 Sauf le verre traité « antireflets ». La baisse de la réflexion de vieilles plaques de verre est observée pour la première fois par John W. Rayleigh, en 1887. Le premier traitement antireflet, mais il est peu fiable, est découvert par Harold D. Taylor dès 1896, et breveté en 1904, toujours en Angleterre. Il faut attendre 1935 pour que Aleksander Smakula chez Carl Zeiss brevette le premier traitement fiable, et 1990 pour atteindre une transmission de 99,5 %. Le traitement antireflet le plus performant actuel est produit par Schott sous le nom commercial « Amiran ». Il présente un taux de réflexion visuelle de 1 % pour le vitrage 46


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Les capteurs de lumière naturelle D’autres progrès technologiques récents ouvrent la voie vers de nouveaux modes de transport de lumière naturelle, avec ou sans concentration. C’est ainsi que l’on dispose actuellement de capteurs faits de coques en segments de paraboloïdes de révolution, dont l’axe pointe toujours vers le Soleil, concentrant l’énergie solaire en un seul point (le foyer des paraboles). À cet endroit la partie visible de l’énergie est envoyée dans un faisceau de fibres optiques et le rayonnement calorifique infrarouge est transformé en énergie électrique. Le faisceau de fibres peut alors se diviser, à la manière du système vasculaire humain, pour alimenter des sources lumineuses ponctuelles. Bien que ces machines soient encore à des prix inabordables pour des applications courantes 35, l’International Polaris Foundation me permet de les proposer en 2004 pour son projet de « Centre environnemental » sur les terrains de la Toronto University [01/477, Fig. 27, 28 et 29]. simple et de 2 % pour le vitrage double, contre respectivement 8 et 15 % pour les vitrages « non traités ». Ce taux passe à 20 % pour le triple vitrage ! 35 Le sujet commence seulement maintenant, et encore très timidement, à susciter l’intérêt de l’industrie. De nombreuses jeunes sociétés y travaillent comme Echy, créé en France en 2010 par Quentin Martin-Laval (X-Pont 2012) et Florent Longa (X 2012) alors encore étudiants à l’École Polytechnique, qui proposent déjà de petites installations rentables. 47


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

Avec une structure entièrement en bois massif, 24 colonnes tubulaires  36 portent les planchers et comprennent un noyau en fibres optiques alimenté, le jour, de lumière de haut en bas par ces capteurs placés sur le toit et, la nuit, de bas en haut par de puissants projecteurs aux vapeurs de mercure et halogénures métalliques (eux-mêmes alimentés par les batteries chargées le jour par les capteurs). Ces grandes artères distribuent ensuite la lumière dans les réseaux de veines puis de veinules horizontales pour alimenter les luminaires. Tout comme pour ces capteurs, il est aussi possible de placer des miroirs ordinaires sur des héliostats de manière telle qu’ils suivent la trajectoire du Soleil et en réfléchissent les rayons en un faisceau de lumière de direction constante. Celui-ci peut ensuite être réfléchi par un ou plusieurs miroirs, également fixes, pour éclairer n’importe quel endroit dans une construction. Ce sont ces héliostats 37 que je propose en 2010 36

Je prévois de réaliser ces colonnes à l’aide de feuilles de bois de déroulé (placages), réenroulées à la manière dont on fabrique un cigare de Havane. Ce procédé est inventé le 24 novembre 1995 par Karel Kunnen dans le cadre des travaux pratiques du cours sur les structures bois que je donne aux futurs ingénieurs civils à la Vrije Universiteit Brussel. Il permet de réaliser des colonnes en bois homogène, pleines ou annulaires, cylindriques ou conoïdales. Je n’en ai encore réalisé aucune à ce jour, mais je continue à considérer cette idée comme très prometteuse. 37 Je les propose pour la première fois en 1996 pour le projet de pavillon d’accueil, sous la face nord de l’hôpital érasme 48


Lumière, transparence et reflet

pour le projet de la Maison de l’Histoire européenne dans l’ancien institut Eastman au parc Léopold à Bruxelles [01/573, GM, Fig. 30]. Une batterie de miroirs, dont il faut noter que leur surface réfléchissante est toujours orientée vers le bas, donc à l’abri des pluies verticales, réfléchit les rayons solaires verticalement dans un puits de lumière, où ils sont déviés horizontalement, pour pénétrer dans les salles d’exposition. Là, ils sont finalement réfléchis en flux convergents, parallèles ou divergents pour éclairer à façon les objets exposés. Les parois des salles obscures sont percées par des tubes cylindriques aux parois noires suffisamment longs (1 m pour 20 cm de diamètre) pour éviter la transmission de lumière diffuse provenant du puits de lumière lui-même [Fig. 31]. Sans plus de succès, je propose en 2010, un héliostat avec miroir elliptique pour éclairer le cercueil dans chaque salle de cérémonie du crématorium à Aalst [01/583, Fig. 32, 33 et 34] et en 2014, 232 de ceux-ci pour éclairer le cœur du musée Guggenheim à Helsinki [01/619, Fig. 35 et 36]. Ce n’est finalement qu’en 2016, que je réussis enfin à en réaliser un à la caserne des pompiers de Charleroi, pour acheminer la lumière de la à Anderlecht de manière à le « baigner de soleil » (01/336) et, ensuite, en 2000 pour éclairer la scène de l’Aula Magna à Louvain-la-Neuve (01/291). 49


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toiture dans le parking public en sous-sol [01/569, Fig. 37]. Le miroir d’eau Plans et cours d’eau sont les plus fascinants miroirs naturels et les plus extraordinaires étagères à lumière (leur masse thermique tempère aussi l’atmosphère). Ils portent les rêves 38 et font venir la lumière de la terre pour illuminer leurs rives et les constructions qui les bordent, comme dans la cour de la ferme de Stassart 39 abritant mon équipe [01/265, Fig. 38] ou les patios de la caserne des pompiers à Charleroi [01/569, Fig. 39]. De même, les centres de recherches M & G Ricerche à Venafro, Italie [01/222, Fig. 40] et OCAS 40 à Zelzate [01/223, Fig. 41], se reflètent dans les bassins qui les entourent (pour le premier, ils jouent aussi un rôle essentiel de climatisation sous la tente).

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Enfant mon regard se perdait dans le grand méandre de la Lys reflétant les nuages, au nord du jardin familial à Afsnee-lezGand. 39 Le plan d’eau réfléchit aussi les nuages et le chêne qui a l’âge de mon équipe et de ma fille aînée Virginie. 40 Onderzoek Centrum voor de Aanwending van Staal, sur le site de Sidmar. 50


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La double peau Les fonctions multiples auxquelles l’enveloppe de la construction doit satisfaire conduit à lui conférer une « épaisseur » dans laquelle les éléments constructifs conjuguent leurs efficiences respectives. Le mur épais de maçonnerie se pare à cet effet de nombreux attributs : alcôves, balcons, volets, loggias, rideaux ou voiles dans ses baies ; bandeaux, seuils en saillie, bas-reliefs, auvents et débordements de toiture sur ses parties pleines. Ils protègent la façade et contribuent à sa modénature, lui confèrent son échelle humaine et sa profondeur visuelle alimentée par les jeux d’ombres et les reflets. J’adopte la même approche pour les grandes surfaces en verre transparent (ultra-clair, comme il se doit). Ces façades « ouvertes » invitent le regard à l’intérieur, et d’abord dans la profondeur protectrice de l’enveloppe de la construction, espace vide peuplé d’éléments constructifs, à l’instar des attributs des baies et des parties pleines du mur de maçonnerie. Cet espace vide peut être extérieur (dans un environnement clément) ou enclos par une deuxième enveloppe transparente protégeant la première (la « double peau ») lorsque, pour quelque raison que ce soit, la première enveloppe ne peut satisfaire seule à l’ensemble des perfor51


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mances souhaitées, qu’il s’agisse de sécurité ou de se protéger du froid, du chaud, de la pluie, du vent, de la poussière ou du bruit, ou encore lorsque l’espace tampon entre les deux surfaces vitrées est utilisé pour l’agrément ou pour une raison fonctionnelle. Au-delà de ma quête de lumière naturelle et de transparence, la recherche de meilleures performances énergétiques me conduit dès 1987 aux grandes façades vitrées 41 dont la profondeur est selon le cas matérialisée par des attributs extérieurs ou par une double peau. L’une et l’autre réponse jouent avec l’ombre et la lumière, la transparence et le reflet. Après trois propositions infructueuses 42, c’est en 1989 qu’il m’est permis d’étudier le premier immeuble à double peau et de le réaliser en 1992-1993, au coin des rues Belliard et de Trèves à Bruxelles 43 [01/225, Fig. 42]. Une enveloppe 41

L’idée d’un parement en briques raides suspendu devant un isolant mou de plus en plus épais, et soumis à choc thermique heurte mon esprit de constructeur. Ce n’est seulement que depuis quelques années que l’industrie de la terre cuite propose, enfin, des parements plans en petites tuiles plates, « souples » me permettant à nouveau d’imaginer leur emploi. 42 Extension de la Banque Bruxelles Lambert avenue Marnix à Bruxelles (p : 1987. 01/183). Extension du Centre de Recherches de Solvay à Neder-over-Hembeek (p : 1987. 01/190). Euroclear Operation Center, Bruxelles (p : 1988. 01/204). Les doubles peaux tampons thermiques y sont aussi utilisées comme corridors et cages d’escaliers en façade (voir site web). 43 Immeuble Brussimmo pour compte d’Arbed-Sidmar. 52


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extérieure en verre clair protège du bruit et de la poussière la façade en bois sur charpente en acier. L’espace de 0,90 m qui les sépare, avec ses caillebotis d’entretien, sert non seulement de tampon thermique mais aussi de grande conduite aéraulique reprenant l’air pulsé dans les bureaux. L’agrément de cet immeuble transparent, dans un Bruxelles administratif en murs rideaux réfléchissants et panneaux de béton ou de pierre, étonne… et convainc ! Tout d’abord, la même année, l’Université libre de Bruxelles sous la présidence de Hervé Hasquin, qui me permet de réaliser l’auditoire de première candidature de médecine à l’Hôpital Erasme avec son enveloppe en simple vitrage englobant le foyer et les escaliers autour de son volume enclos [01/270, Fig. 43], puis les Éditions Dupuis pour leur siège à Marcinelle [01/286, Fig. 44] où, bénéficiant d’une façade au nord 44, l’espace de la double peau qui s’étend à trois atriums tempérés révèle toute la profondeur de la construction et ses cloisons vitrées sur châssis en bois. Vient ensuite l’Université catholique de Louvain où Marcel Crochet, recteur, et Raymond Lemaire, père spirituel de Louvain-la-Neuve, me permettent de dessiner le reste de la partie ouest de la ville pour y implanter la Grande Aula 44

Il n’y a des stores (extérieurs) que sur les pignons est et ouest, la façade sud étant aveugle, accolée à un entrepôt. 53


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[01/291, Fig. 45 et 46]. Pour la première fois je peux y étudier en détail, dès l’esquisse d’avantprojet, la physique du bâtiment en symbiose avec la construction 45. La double peau s’étendant au foyer s’impose vite. La grande salle et sa scène sont en particulier conçues pour l’éclairage naturel 46. Depuis, je continue, au gré des questions qui se posent, à utiliser la double peau 47. La plus récente, très délicate, concerne celle de la rénovation énergétique des innombrables immeubles de logements construits en Europe dans les années 1950-1970, sous forme de barres de 12 à 15 niveaux 45

Assisté de Filip Descamps et Paul Mees de Daidalos ainsi que Peter Wouters du CSTC pour les études acoustiques, énergétiques et d’éclairage. 46 Profitant de mon absence d’une semaine au Chili pour donner cours, la suppression des lanterneaux est ordonnée à l’entrepreneur par le futur opérateur. Le plafond montre encore toujours ses tristes yeux fermés, mais je suis confiant qu’ils s’ouvriront un jour, tant pour la qualité de la lumière dans la salle et sur scène, que pour des questions évidentes d’économies d’énergie. 47 Tour Dexia, place Rogier à Bruxelles (p : 2002, r : 2003-2006. 01/ 301). Centre de Recherches GlaxoSmithKline à Rixensart (p : 1996, r : 1997-1999. 01/317). Siège de la CNP-NPM à Gerpinnes (p : 1995, 1996-1997. 01/320). Siège INP (Administration Générale de la Sécurité Sociale Chilienne) à Santiago du Chili (p : 1997. 01/362). Tour Centrale à Bruxelles (p : 1998. 01/364). Premier Siège Social De Nul à Aalst (p : 2002, r : 20032005. 01/401). Crèche à Watermael-Boitsfort (p : 2003. 01/459). Europa à Bruxelles (p : 2005-2007 ; r : 2008-2016. 01/494) (voir site web www.samynandpartners.com). Palais de Justice à Namur (p : 2007. 01/511). Siège de BNP-Paribas-Fortis à Bruxelles (p : 2013. 01/604) (voir www.samynandpartners.com). 54


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aux longs plans rectangulaires de 11 m à 12 m de profondeur et façades orientées est et ouest. Les travaux d’isolation thermique et d’étanchéisation à l’air (si pas à l’eau !) qu’elle implique doivent en effet se faire sans (trop) perturber les occupants. C’est ainsi que je propose pour un immeuble des « Villas de Ganshoren » de maintenir intégralement la façade existante et d’atteindre l’objectif par l’ajout de larges balcons (augmentant ainsi substantiellement l’agrément des logements) et d’une deuxième peau en double vitrage clair et châssis ouvrants, mais je ne convaincs pas [01/633, Fig. 47]. La double peau peut parfois se limiter à un simple pare-pluie comme dans le cas de la rénovation (en recherche de lumière naturelle) d’un immeuble de bureaux à l’angle de l’avenue Marnix et de la rue du Trône à Bruxelles [01/489, Fig. 48]. La façade avec ses allèges et faux trumeaux en pierre fait place à une enveloppe de bois sur isolant avec portes-fenêtres et stores extérieurs en bois sur balcons, protégés par des vantelles de verre clair. Les vantelles L’arbre à feuillage caduc est le dispositif le plus naturel et le plus efficient pour offrir, l’été, une ombre protectrice tout en laissant, l’hiver, le 55


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rayonnement solaire pénétrer profondément par la fenêtre. Lorsqu’il ne peut y être fait appel, stores, persiennes, volets protègent depuis la nuit des temps des excès du soleil. Pour être efficaces, il faut que ces dispositifs soient placés à l’extérieur et ils constituent dans ce cas un élément constructif déterminant dans la modénature des façades. Généralement bannis depuis près d’un demisiècle dans nos contrées en raison de leur coût (non seulement fourniture et placement mais aussi maintenance et entretien), ils retrouvent une crédibilité économique à la faveur des préoccupations énergétiques actuelles. C’est ainsi que je les propose pour la première fois à grande échelle lorsque j’étudie en 1998 la rénovation du siège de ENI à Rome 48 [01/375, Fig. 49 et 50], avec ses deux façades orientées à l’est et à l’ouest. Dessiné en 1959 par les architectes Bacigalupo, Finzi, Nova et Ratti, cet immeuble livré en 1962 est un véritable four solaire et ses gigantesques groupes frigorifiques ne suffisent pas à garantir le plus élémentaire confort d’été aux occupants, (sauf à fermer les stores vénitiens intérieurs !) et à recourir à l’éclairage artificiel. J’invente donc pour l’occasion un système de très grands volets en verre, pivotant sur leur axe 48

Le « palazzo Mattei » du nom du président d’Ente Nazionale Idrocarburi disparu dans des circonstances non encore élucidées à ce jour. Le projet est abandonné lorsqu’ENI décide de se défaire de son actif immobilier. 56


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horizontal (Rome antique oblige : 3,6 m de haut, 7,2 m de large), sérigraphiés sur les deux faces de bandes horizontales alternées et espacées de leur largeur, qui suivent la trajectoire du soleil. Ce dispositif permet de se protéger en permanence du rayonnement énergétique du soleil sans se priver ni de lumière, ni de vue. Le projet n’aboutit pas (ce bâtiment reste, encore aujourd’hui, un réfrigérateur à la porte ouverte depuis plus de 50 ans !) et le concept reste confidentiel jusqu’il y a peu. En 2010, je suis amené à concevoir le nouveau siège d’AGC Europe 49 [01/577, Fig. 51 à 53] à Louvain-la-Neuve pour lequel je propose ce système. L’accueil est enthousiaste et la demande de brevet pour l’invention est introduite 50, ce qui me permet de développer le concept sous forme de vantelles, qui protègent entièrement les quatre façades (rigoureusement orientées selon les axes cardinaux) du bâtiment de plan carré, sur une trame de 1,35 m. Horizontales au nord et au sud (douze vantelles de 30 cm de large par étage de 3,6 m de haut), verticales à l’est et à l’ouest (quatre 49

Asahi Glass Company entre dans le capital de Glaverbel en 1981, tout en lui laissant une grande autonomie de gestion. Voir : Philippe Samyn et Jan De Coninck, AGC Glass Building, Tielt, Lannoo, 2014 (consultable, en e-book, sur www.samynandpartners.be). 50 La demande de brevet belge est introduite le 2012.01.09 et la demande de brevet international, le 2013.01.09. 57


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vantelles de 33,75 cm par module de 1,35 m), elles sont portées par une structure très fine en acier inoxydable microbillé, une coursive d’entretien et de sécurité les met à distance de la façade. Des biellettes actionnées par de petits actuateurs électriques en assurent le mouvement. Ces servomoteurs, alimentés par les données climatologiques recueillies en toiture (température, humidité, pression atmosphérique, vitesse du vent, luminosité, couverture nuageuse) en contrôlent l’orientation, ce indépendamment pour chaque façade. Au nord et au sud, les quatre vantelles supérieures de chaque niveau sont aussi pilotées séparément des huit inférieures pour fonctionner comme étagère à lumière. Fermées par temps chaud, ouvertes par temps froid sous le Soleil, ouvertes sous les nuages ou par grand vent, les vantelles sont en perpétuel mouvement lent et créent un jeu d’ombres et de lumière dynamique. Tous les vitrages du bâtiment sont évidemment en « Clearvision ». Ceux de l’enveloppe, derrière les vantelles, sont pourvus de la couche « sous vide » présentant le meilleur compromis entre isolation thermique (U= 1,0W/m² °K), transmission lumineuse (TL = 75 %) et indice de rendu des couleurs (IRC = 97 %).

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C’est ainsi que le bâtiment est « near zero energy » (NZE) 51 alors qu’il est équipé de vitrages pratiquement transparents car l’économie énergétique réalisée sur l’éclairage électrique est bien supérieure à celle qui aurait pu être obtenue par des vitrages thermiquement plus performants mais moins transparents. Des stores de toile blanche sur la face intérieure de l’enveloppe complètent la gestion de la luminance 52 et du contraste lumineux. La nuit, les vantelles fermées (ainsi que les stores si on le souhaite) offrent une surface blanche réfléchissant l’éclairage artificiel intérieur pour le plus grand confort des occupants et au bénéfice du bilan énergétique, tout en permettant des vues obliques vers l’extérieur. Le résultat est si convaincant que, visitant l’immeuble en 2015, Jan Piet et Dirk De Nul, encore eux, adoptent séance tenante les vantelles pour leur deuxième nouveau siège à Aalst [01/571, Fig. 54]. Les vantelles peuvent aussi, mais au détriment de la transmission lumineuse, être opaques si la nécessité d’occultation s’ajoute au besoin de protection solaire. C’est le dispositif, prévu pour 51

La qualification NZE (pratiquement zéro énergie) correspond à un bâtiment dont la consommation énergétique est pratiquement nulle, sans tenir compte de l’énergie nécessaire aux équipements liés à l’activité humaine. 52 1000 à 4000 Cd/m² pour une fenêtre, 70 à 80 Cd/m² pour un papier blanc sous 300 Lux. 59


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la rénovation, transformation et extension de la Maison de la Culture de la Province de Namur 53 [01/628, Fig. 55 et 56]. Les nouvelles façades, en verre extra clair avec un U = 1,1 W/m² °K et châssis de chêne, sont protégées du Soleil et de la pluie par des seuils débordants et des vantelles en profil Z d’acier laqué blanc, créant autant de traits d’ombre qui rythment la façade. Le moucharabieh Une enveloppe doit parfois, à la manière d’un moucharabieh, filtrer la lumière et la vue lorsque cette dernière se veut discrète ou suggestive. C’est le cas tant de la façade extérieure en patchwork de vieux châssis de chêne recyclés que de la façade en verre de la « lanterne » au siège du Conseil de l’Union européenne 54 [01/494, Fig. 57 et 58]. Le patchwork de vieux châssis de chêne joue le rôle d’abat-jour de la « lanterne ». Il « disparaît »

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Cette œuvre de Victor Bourgeois (1897-1962) livrée en 1964, présente des parties de façade en murs rideaux de bronze et de verre réfléchissant. Élégants et prisés à l’époque, ils sont en mauvais état et de faible performance énergétique. 54 Jean Attali et Philippe Samyn, EUROPA. Conseil européen et Conseil de l’Union européenne, Bruxelles-Tielt, CIVA et Lannoo, 2013 (consultable, en e-book, sur www.samynandpartners.be). 60


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littéralement au crépuscule lorsque cette dernière est allumée 55. Le volume de la « lanterne » contient, du premier au huitième étage, quatre grandes salles de conférences, chacune entourée de deux niveaux de cabines d’interprètes desservies par huit niveaux de couloirs périphériques. Au rez-de-chaussée, au neuvième et au dixième étages, cafétéria et restaurants demandent une vue vers l’extérieur. Finalement un escalier de secours tout en courbes, desservant l’ensemble des niveaux, se déploie sur toute la hauteur de la « lanterne ». L’enveloppe demande une certaine transparence en parties basse et haute pour la vue, et une certaine opacité au droit des circulations pour la discrétion. Cette combinaison est obtenue par l’emploi de plaques de verre sérigraphiées de transparence variable entre 33 à 75 % 56. Le motif reproduit sur les panneaux doit rendre perceptible leur division élémentaire et 55

« Les vertus du patchwork et la façade du Conseil de l’Union Européenne », in Bulletin de la Classe des Beaux-Arts, Académie royale de Belgique, 6e série, t. XVII, 2006, 7/12, p. 323-353. Voir aussi Jean Attali et Philippe Samyn, op. cit., p. 67-92. C’est en 2003 que je propose pour la première fois l’emploi de vieux châssis de chêne recyclés pour la double façade d’une crèche à Watermael-Boitsfort (01/459). 56 Chaque quart des 42 segments de troncs de cônes elliptiques empilés formant l’enveloppe est constitué de 14 plaques de verre trapézoïdales cintrées avec arêtes horizontales courbes, soit au total 588 plaques de dimensions et de transparences différentes (voir aussi Jean Attali et Philippe Samyn, op. cit., p. 109-158). 61


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donc la succession des ordres de grandeur 57, mais également, à la manière de l’illusionniste, amplifier le galbe du volume. Celui que je retiens est composé de lignes inclinées à ¾ sur l’horizontale, placées en alternance dans une direction et dans l’autre. Dans la première, les bandes ont une largeur constante de 5 cm pour une variation de l’intervalle les séparant allant de 5 à 15 cm, tandis que dans l’autre direction, les bandes ont une largeur de 7,5 cm, avec un intervalle de séparation compris entre 2,5 et 12,5 cm. L’écartement entre les bandes est minimum au centre de la surface de la « lanterne » et grandit au fur et à mesure que les bandes se rapprochent de sa base ou de son sommet, avec pour résultat une diminution de la transparence à mesure de l’élargissement de la « lanterne » et, inversement, une augmentation de la transparence à mesure de son rétrécissement en haut et en bas. Le jeu de moucharabieh s’amplifie dans l’escalier de secours avec la succession de tôles d’acier très perforées, à la fois suspentes et garde-corps, véritables mantilles toutes en courbes, se lovant verticalement de niveau à niveau derrière l’enveloppe bombée. 57

Dom Hans van der Laan, Le nombre plastique, quinze leçons sur l’ordonnance architechtonique, traduction par Dom Xavier Botte, Leiden, E. J. Brill, 1960. Il s’agit de la seule théorie avérée relative aux règles régissant la proportion des volumes en relation avec l’acuité visuelle et la morphologie des humains (voir aussi les travaux de Gérard Cordonnier, 1924). 62


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Les « miroirs aux couleurs » La « lumière naturelle » ayant pénétré dans la construction avec un minimum de perte de qualité, la voilà à l’intérieur, rebondissant de manière directe ou diffuse sur toutes les surfaces qu’elle touche. Ces surfaces agissent elles-mêmes comme des miroirs diffus réémettant une faible portion de la lumière naturelle qui les atteint, et leurs couleurs « teintent » les objets contenus dans le volume qu’elles enclosent. Tout se passe comme si notre perception de la nature et du vivant nous rendait sympathiques et apaisantes les réflexions des matériaux « naturels » tels que le bois ou la pierre. Il en va de même des motifs renvoyant à la faune et la flore, même reproduits en peinture sur du papier ou des étoffes. Il en va tout autrement des surfaces de murs peintes en grands aplats de couleur uniforme, manifestation d’un acte humain abstrait. Si elles ne sont pas des expressions artistiques voulues, attendues et offertes au regard, elles deviennent intruses et perturbantes et ce, d’autant plus insidieusement que la couleur s’y veut discrète. C’est ainsi que les tons « blanc cassé » (le nom est bien porté) ou les gris « distraits » perturbent profondément la perception d’un espace. Cela fait longtemps que j’exprime le souhait de pouvoir disposer de peinture vraiment blanche, comme celle du peintre (qu’il s’agisse de gouache, d’acrylique ou 63


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d’huile) ou comme le papier couché au talc ou plus simplement comme un enduit de chaux, alors qu’aucune peinture produite industriellement ne peut y répondre. C’est toujours le cas en 1997, et il est très désagréable que l’industrie de ce dernier siècle soit toujours aussi déficiente à ce sujet. Je me tourne donc vers les gris « purs », sensés n’être qu’un mélange pur de blanc et de noir et c’est à François Cornélis, à l’époque administrateur-délégué de Petrofina, que je dois la mise au point de peintures acryliques « gris pur » par sa filiale Sigma Coatings en 1998. Ce n’est pas aussi aisé qu’il y paraît, car le noir n’est produit que par un mélange de couleurs qu’il est difficile de calibrer 58 (et l’on sait combien Rothko en tire profit !). Lorsqu’enfin ces peintures sont prêtes, je les propose à Hendrik Seghers dont je rénove en 1998 le château Groenhove à Malderen [01/532, Fig. 59] et il s’écrie : « maar dit zijn kleurspiegels ! », et comme il a raison ! Je choisis donc ces « miroirs aux couleurs » selon le mur et la pièce concernée ; en gris très foncé dans la cage d’escalier pour y mettre en évidence un magnifique Rubens, un gris presque noir dans la seule pièce style Louis XVI subsis58

Nul doute que l’invention du plus noir des noirs, couleur absorbant 99,965 % de lumière, peinture composée d’une forêt de nanotubes de carbone perpendiculaires à sa surface, que cela soit par l’artiste belge Frederic de Wilde (2010) ou par Vantablack (2015), (pour Vertical Aligned Nano Tube Arrays-Black) est à utiliser en construction. 64


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tante pour faire chatoyer les boiseries et leurs moulures gris clair, des gris presque blancs dans les chambres, etc. Il est tout aussi convaincu lorsque je lui propose de peindre les façades en gris avec 60 % de noir 59. Elles changent de couleur selon l’heure du jour, le jour de l’année et la météo ! J’emploie depuis ces peintures grises dans tous mes projets. Lorsque plus tard, avec des moyens bien plus réduits, Hendrik me demande de rénover les communs du château, je les tapisse de papier aluminium froissé 60 : miroir ou miroir aux couleurs ? [Fig. 60]. Et voilà la lumière qui rebondit à nouveau. Volets, rideaux, reflets et Lux La transparence s’accompagne du reflet. L’atmosphère elle-même ne peut être plus transparente que par temps froid et sec et sans contre-jour (pensez aux mirages : quel reflet !). Quant au verre, même cristallin, il n’est vraiment transparent que 59

Une grande résille de vantelles avec cellules photovoltaïques suivant la trajectoire du Soleil protège les terrasses ajoutées devant les façades sud. Une série de longs tubes en verre borosilicatés contenant des capteurs solaires thermiques forment la pergola de la toiture terrasse. 60 Il forme en même temps pare-vapeur couvrant la paroi isolante du côté chaud, ce qui est techniquement orthodoxe, certes, et conforme à la religion technologique du jour. Il n’empêche qu’une paroi respirante est toujours préférable pour un local habité régulièrement, ce qui n’est pas le cas ici. 65


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lorsque l’on regarde une scène éclairée à partir d’un espace qui l’est moins : de l’intérieur vers l’extérieur par une fenêtre orientée au nord, ou l’inverse la nuit. Volets et rideaux se ferment dans la construction traditionnelle lorsque l’obscurité succède au jour, ou s’ouvrent au spectacle de la pleine lune et du ciel étoilé, de l’orage ou encore de la chute de neige. Cette occultation contribue à l’intimité de la pièce et est aussi utile pour y augmenter sa luminosité par la réflexion de la lumière artificielle. Elle nous met à l’abri de l’effet désagréable de « miroir noir 61 » que produit le vitrage sous l’éclairage intérieur. L’éclairement y est encore au minimum de 250 à 500 Lux chez les riches (combien de temps encore ?) alors qu’il dépasse rarement 50 à 100 Lux chez les pauvres 62. La verrière globale L’oculus zénithal totalement ouvert au sommet de la demi-sphère de 43 m de diamètre du dôme du Panthéon à Rome (125 ap. J.-C.) ou les hauts vitraux de la cathédrale gothique (48,5 m pour les 61

À l’inverse du miroir « blanc », semi-réfléchissant, sans tain vers une pièce obscure. 62 Riches ou pauvres jouissent pendant la journée d’un éclairement de 90 000 Lux maximum ! 66


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nefs de Beauvais, 1225-1272/1500-1548) permettent à la lumière naturelle d’irradier de somptueux espaces par d’infinis jeux d’ombre et de lumière. L’oculus et la grande verrière verticale font toujours partie du vocabulaire architectural, mais les premières grandes charpentes en acier qui apparaissent dès la seconde moitié du XIX e siècle permettent la réalisation de verrières de toiture : englobant tout un édifice, elles ouvrent un nouveau chapitre de l’art de construire. De vastes toitures transparentes couvrent les premières gares ferroviaires à l’air libre ou de grands halls d’exposition. Des verrières globales enveloppent de vastes volumes enclos comme celui du Crystal Palace de 1851 à Londres (39 m de hauteur) ou les premières grandes serres du Jardin des Plantes à Paris (1836), de Kew Gardens (1849) ou du palais royal de Laeken (1873). La pénétration de la lumière naturelle dans ces espaces à l’air libre ou enclos est de 60 à 70 % (celle du verre, lorsqu’il est propre, réduite par l’emprise de son support), la température y fluctue librement, tout comme au Panthéon et dans les cathédrales. Il est très difficile d’y maintenir une température stable et d’éviter les courants d’air, l’enveloppe étant vitrée et sans inertie thermique. Par temps froid, la chaleur qui y est produite provoque des mouvements d’air ascendant qui 67


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s’accélèrent lorsque l’air se refroidit en redescendant le long des parois extérieures. Par temps chaud et sous le Soleil, malgré les parasols, des baies de ventilation au sommet et à la base du volume enclos sont nécessaires pour évacuer la chaleur produite par l’effet de serre, même avec des verres réfléchissant à faible facteur solaire. Les grandes surfaces de verre peuvent aussi être source d’inconfort acoustique, qu’il s’agisse du bruit qu’elles réverbèrent ou de celui que provoque la pluie battante. Ces questions thermiques et acoustiques influencent donc de manière déterminante la composition architecturale et l’organisation des grandes verrières globales en verre simple (U=5,7 W/m² °K) pour qu’elles gardent toute leur légitimité fonctionnelle et environnementale. Lorsqu’il est impératif de réaliser un espace climatisé en tout point, ce qu’il faut en principe éviter, l’emploi de double vitrage (U=1,1 W/m² °K), et bientôt de verre sous vide (U=0,3 W/m² °K), permet dans une certaine mesure de réduire l’inconfort thermique en hiver, au prix d’une importante dépense énergétique, mais nécessite toujours des dispositifs pour « couper » les vents coulis froids le long des parois vitrées verticales.

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Lumière, transparence et reflet

C’est ainsi que pour les atriums du nouveau siège social de KBC Verzekeringen 63 à Leuven [01/433, Fig. 61], des bacs en verre au pied des verrières verticales sont imaginés pour réchauffer l’air des vents coulis avant qu’il ne déborde dans l’espace, et qu’au bâtiment Europa [01/494, Fig. 62], un tube à ailettes chauffant est disposé tout au long à 5 m de haut sur la face intérieure de la double façade 64. Ces exceptions sont rares et la verrière globale se conçoit toujours plus logiquement en simple vitrage ou simple peau. N’importe quelle forme de surface (à courbure gaussienne nulle, positive ou négative) 65 est géométriquement réalisable en triangles 63

Marc Dubois, Tussen binnenstad en spoor. Leuven 2003, Gent, Ludion. 2005. 64 Une façade intérieure en châssis d’acier et une façade extérieure en châssis de chêne « patchwork ». 65 La géométrie d’une surface courbe est définie par R , son plus 1 grand rayon de courbure et R 2, son plus petit, mesurés sur la perpendiculaire au plan tangent en chacun de ses points, ou par 1/ R 1 et 1/ R 2 appelées les courbures principales. La courbure gaussienne qui est le produit de ces dernières (K = 1/ R 1 × 1/ R 2) caractérise la forme générale d’une surface. Ainsi pour les quadriques (les équivalents en trois dimensions des coniques en deux dimensions : ellipses, paraboles ou hyperboles) K = 0 lorsque R 1 est infini comme pour un cylindre elliptique hyperbolique ou parabolique ou un cône à base elliptique ; K > 0 lorsque R 1 et R 2 sont du même côté de la surface, comme pour un ellipsoïde, un paraboloïde elliptique ou un hyperboloïde à deux nappes ; K < 0 lorsque R 1 et R 2 sont de chaque côté de la surface, comme pour l’hyperboloïde à une nappe (le diabolo) ou le paraboloïde hyperboliques (la selle), illustrations et équa69


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ou trapèzes (les verres plats comme dans les exemples qui suivent, ou tronconiques, comme pour la « lanterne » de Europa, étant l’approximation usuelle). L’usage auquel est destinée la verrière, sa taille et les performances physiques 66 que l’on attend d’elle ainsi que la recherche de la structure la plus légère possible (dans les limites de la flexibilité imposées par la fragilité du verre) limitent cependant cette liberté. La structure ne doit être, en outre, ni trop élancée verticalement ni trop surbaissée pour limiter les effets du vent d’une part (force horizontale de l’ordre de 1 kN/m²), et du poids propre d’autre part (0,2 à 0,3 kN/m² pour le vitrage, puis 0,3 à 0,7 kN/m² pour la structure soit une force verticale de 0,5 à 1 kN/m²). Raideur oblige 67, la structure est encore souvent en acier ordinaire S235 68 comme dans tions sur www.wikipédia « quadrique ». On appelle aussi Courbure moyenne : 1/R m = (1/ R 1 + 1/ R 2) /2. 66 Qui concerne aussi le comportement au feu. 67 Le module d’élasticité E (qui caractérise la raideur d’un matériau et est exprimé en Pascal (Pa), ou N/m²) vaut E = 210 GN/m² pour l’acier, quelle que soit sa résistance mécanique laquelle est exprimée par sa limite élastique qui varie de 235 MN/m² pour l’acier doux à 2000 MN/m² pour l’acier de très haute résistance. 68 La « résistance » σ d’un acier s’exprime par un S majuscule suivi de la valeur de sa limite élastique (contrainte à partir de laquelle il arrête de se déformer d’une manière élastique) en MPa. Il est actuellement possible d’obtenir des tôles de 1 à 12 mm d’épaisseur en S2000, et qui sont parfaitement soudables. 70


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les exemples qui suivent. L’emploi d’acier de très haute résistance, longtemps réservé aux câbles et maintenant disponible en tôles minces (industrie automobile aidant !), s’impose cependant pour en réduire la quantité de matière. Il implique de remplacer le verre raide par des membranes souples et donne lieu à de nouvelles morphologies structurelles auxquelles je travaille en ce moment. La verrière en simples vitrages trapézoïdaux à couche réfléchissante du Comptoir forestier à Marche-en-Famenne 69[01/279, Fig. 63 à 65] est formée d’un segment de tore (K > 0) sur charpente bois. Elle couvre un espace d’activité industrielle et deux constructions en maçonnerie dont l’une abrite des chambres frigorifiques et l’autre des bureaux et des laboratoires chauffés en hiver. Celle du musée du Neanderthal Museum à Erkrath-Mettmann en Allemagne [01/290, Fig. 66] est une portion de cylindre elliptique (K = 0) couvrant le site archéologique. Des brumisateurs y vaporisent de l’eau (calcaire pour un temps) sur sa face extérieure en verres clairs trapézoïdaux tant pour rafraîchir l’espace enclos que pour la couvrir, après quelques temps, d’une croûte calcaire translucide. 69

Bulletin of the International Association for Shell and Spatial Structures, vol. 36 (1998), nº 2, August 118, p. 73-82. Consultable au « 01/279 » sur www.samynandpartners.be. 71


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La verrière couvrant le restaurant d’entreprise de Petrofina, rue Guimard à Bruxelles [01/313, Fig. 67] est un cylindre à directrices en forme de chaînette 70 (K = 0), ses doubles vitrages rectangulaires étant portés par de petits profilés IPE80 cintrés en acier suspendus aux bâtiments qui la bordent et lui assurent l’ombrage. Finalement, la verrière de la tour d’exposition du Musée du Verre à Lommel [01/469, Fig. 68 et 69] présente la forme d’un cône à base circulaire (K > 0). Les vitrages doubles à couche réfléchissante et les mailles de la fine structure de tubes d’acier qui les portent sont triangulaires. Si la charpente en bois du Comptoir et la croûte calcaire à Erkrath réduisent la transmission lumineuse, elles apportent une certaine protection solaire le jour et réfléchissent la lumière artificielle la nuit tout en étant lumineuse de l’extérieur. La tour de Lommel, exposant des œuvres d’art en verre tout au long de ses escaliers hélicoïdaux, doit, à l’inverse, offrir transparence et scintillement pendant la nuit. Le polycarbonate 71 présente la même transmission lumineuse que le verre, mais est 35 fois 70

La chaînette est la forme que prend un câble franchissant une portée horizontale lorsqu’il est suspendu par ses extrémités et soumis à une force uniformément répartie verticalement sur sa longueur. 71 Le PC, découvert en 1953 par Schnell, Bottenbruck et Krimm chez Bayer AG, est mis sur le marché en 1958. Il faut à nouveau attendre des décennies pour voir se développer les plaques à 72


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plus souple, 6 fois plus dilatable, et deux fois plus léger mais surtout plus résistant aux chocs. Mis en œuvre sous forme de plaques à parois multiples, il offre une isolation thermique de 0,875W/m²K avec un IRC supérieur à 97 %, ce qui en fait aussi un matériau approprié pour la verrière, malgré sa moindre résistance aux rayons ultra-violets. Je l’utilise ainsi pour les parois des salles de sport des casernes de pompiers à Enschede (p : 2003, r : 2005-2007 ; 01/450) et à Charleroi (p : 2014, r : 2015-2016 ; 01/569), mais c’est surtout pour offrir une belle lumière dans le petit atelier de l’artiste-peintre Erik Salvesen à EkenäsTammisaari en Finlande qu’il s’avère d’une grande utilité [01/561, Fig. 70]. Les portiques en multiplex de bois y portent, à l’extérieur, un bardage ajouré de planches de bois et une verrière en verre simple et, à l’intérieur, des panneaux en parois multiples en polycarbonate.

parois multiples avec un haut pouvoir isolant. Il présente une densité de 1,2, une limite élastique de 60 MPa, un module d’élasticité de 2 GPa, un coefficient de dilatation thermique de 70.10-6 °K (contre respectivement, et pour le verre ordinaire, 2,5 – 40 MPa – 70 GPa et 1,2. 10-6 °K). 73


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La membrane plastique Depuis la nuit des temps, la lumière naturelle est aussi transmise de manière diffuse par les tentes en toile blanche ou filtrée par les résilles et filets en vanneries ou cordage. Les découvertes et inventions de ce dernier siècle nous permettent maintenant la réalisation d’enveloppes souples en toiles et films transparents et étanches, ou encore en tôles, résilles ou filets à perméabilité variable, ainsi que d’enveloppes raides en panneaux translucides à haut pouvoir isolant. Elles ouvrent de nouveaux champs de l’art de construire, jouant à nouveau avec l’ombre et la lumière, la transparence et le reflet. L’emploi de tissus de polyester enduits de PVC 72, utilisé jusqu’alors en bâches (et en particulier pour couvrir les volumes de chargement des camions) est expérimenté à partir des années 1960 pour des tentes à l’air libre puis également pour englober de vastes espaces clos, ouvrant un autre chapitre de l’art de construire. Ces surfaces souples, qui ne peuvent avoir qu’une courbure gaussienne négative 73, sont légères (1 à 1,5 kg/ 72

Hoechst, en Allemagne, les produit principalement à l’époque, mais est progressivement supplanté par la société Serge Ferrari à Lyon qui produit les bâches les plus performantes à partir de 1973 ; ces tissus sont classés M2 en matière de réaction au feu. 73 Sous pression atmosphérique, les enveloppes souples soumises à pression interne peuvent, elles, prendre toutes courbures (encore un chapitre différent de l’art de construire). 74


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m² contre 20 kg/m² pour un verre de 8 mm), se fabriquent aussi facilement que les voiles de bateau et sont aisées à mettre en œuvre. Elles ont actuellement une résistance admissible de 100 à 150 KN/m. Blanches, leur transmission lumineuse (TL) est cependant inférieure à 10 %. Le tissu en fibre de verre enduit de PTFE 74 apparaît ensuite au début des années 1970 75. Il présente les mêmes caractéristiques mécaniques que le tissu polyester-PVC actuel, est un peu plus transparent, incombustible, moins salissant, théoriquement plus durable mais, plus raide et fragile, il est délicat à mettre en œuvre. C’est Frei Otto (1925-2015) 76 qui parmi les premiers, dès 1960, réalise l’intérêt de ces « verrières souples » en architecture et en déve74

PTFE : Polytétrafluoréthylène, que Roy. J. Plunkett (1910-1994) découvre par hasard en 1938, chez Dupont. 75 Ils sont le fruit de l’effort commun menés par Dupont, OwensCorning, Birdair et Saint-Gobain. 76 Frei Otto (ed.), Tensile Structures, Vol. 1: Pneumatic Structures; Vol. 2: Cables, Nets and Membranes, Cambridge (MA), The MIT Press, 1967/1969 (édition originale en allemand, 1962/1966). Architecte (1925-2015), il étudie aussi ces grandes formes tendues sous forme de filets en câble d’acier et les utilise pour le pavillon allemand à l’exposition universelle de Montréal en 1967, puis pour la couverture du stade et de la piscine des Jeux Olympiques de Münich en 1972. Ces structures coûteuses et complexes, paradoxalement très alourdies par leurs accastillages, ne sont ensuite que très rarement utilisées sauf pour quelques grandes volières. Elles me donnent cependant, en 2009, l’idée des filets en cordages para-aramides cousus. 75


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loppe méthodiquement la grammaire et le vocabulaire. Il étudie en particulier différentes surfaces minimales possibles à l’aide de film de savon sur un contour fermé 77. La matière de ces surfaces (toujours à courbure gaussienne négative, sauf pour le plan) avec une épaisseur constante y est en tout point soumise à contrainte constante dans toutes les directions. On ne peut trouver formes plus efficientes pour porter leur propre poids, mais toutes ne le sont pas pour reprendre les autres charges auxquelles sont soumises les membranes. En outre, les tentes sont toujours confectionnées à partir de lés de tissus assemblés et formés d’un fil de trame et de chaîne ne présentant pas la même résistance (σ) et raideur (E) dans les deux sens 78. Cette surface minimale n’est donc, à proprement parler, pas réalisable en textile.

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C’est le physicien belge Joseph Plateau (1801-1883) qui fit les premières recherches sur les surfaces minimales à l’aide de films de savon s’appuyant sur un fil métallique. Il découvre les surfaces de révolution minimales sous pression interne (à courbure moyenne constante, non nulle comme démontré par Charles Eugène Delaunay, 1816-1872) : le plan, la sphère, le cylindre, la caténoïde, l’onduloïde et le nodoïde. Voir aussi les travaux de D’Arcy Wentworth Thompson, dont On growth and form, Cambridge University Press, 1917. 78 Sauf pour le tissu « précontraint » polyester-PVC inventé par la société Serge Ferrari, à Lyon, en 1973. 76


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Il faut être très ouvert en 1989 et audacieux comme l’est Guido Ghisolfi 79 pour accepter que j’enveloppe entièrement son centre de recherches « M&G Ricerche » à Venafro [01/222, Fig. 40 et 71] dans une structure textile fermée (polyesterPVC). Le grand volume enclos est rafraîchi par l’air frais pris au ras de l’eau du bassin qui l’entoure. Ce projet convainc et me permet ensuite de projeter et parfois de réaliser d’autres structures textiles 80 dont la station de métro BruxellesErasme avec ses toiles en tissu de verre / PTFE et ses façades transparentes en tissu d’acier inoxydable [01/283, Fig. 72]. Aidés par nos puissants outils de calcul numériques, il est intéressant d’étudier dès à présent de nouvelles formes de « surfaces minimales » pour des membranes dont la résistance (et/ou l’épaisseur) varie comme on le souhaite 79

(1957-2015) Vice-président du Groupe Mossi Ghisolfi fondé en 1953 à Tortona, Italie par son père Vittorio. Groupe SINCO, Tortona, Italie. D’autant plus qu’il n’y a pas d’autre exemple au monde à l’époque autre que le Club des Ambassadeurs de Frei Otto, à Ryad. 80 Château d’eau, monument national à Nouakchott, Mauritanie (p : 1989. 01/242) ; Station autoroutière de Wanlin (p : 1994, r : 1995. 01/314) ; Couverture de la cour du château de Alden Biesen (p : 2001. 01/425) ; Station autoroutière de Spy (p : 2005, r : 2007-2008. 01/497) ; Pavillon belge à Shanghai (p : 2009. 01/555) ; Mardasson à Bastogne (p : 2009. 01/557) ; Verrière de la Banque Nationale à Bruxelles (p : 2012. 01/586). Voir www.samynandpartners.com. 77


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sur sa surface (par exemple, en tôles métalliques perforées) ou, pour les textiles, dont la résistance/ raideur en chaîne et trame est différentiée, ou encore pour les filets cousus en cordages paraaramides ou HPPE 81. Ces surfaces présentent aussi la vertu de ne pas devoir être précontraintes pour acquérir et maintenir leur forme. Pour le vaste atrium de l’extension du centre de recherches de Solvay à Neder-over-Heembeek [01/190, Fig. 73], j’imagine donc en 1987 une membrane de cette nature, ultra légère, en film transparent d’ETFE 82 sur un filet en paraaramide. Ensuite, il me faut attendre 2008 et le concours, gagné, de la gare de Train Haute 81

Le para-aramide qui nous concerne ici (PPD-I) est découvert en 1965 par Stéphanie Kwolet et Hubert Blades chez Dupont. Il est mis sur le marché en 1971 sous le nom de Kevlar. S’ensuit en 1978 le Twaron de Akzo (maintenant chez Teijin). Il présente une résistance à la rupture de 3 000 MPa (supérieur aux meilleurs aciers mais avec une densité de 1,45, étant 5,5 fois plus léger) et un module d’élasticité de 100 GPa. Il est maintenant surpassé par le polyethylène de masse molaire très élevé (HMPE ou HPPE) dont la fibre est inventée par Albert Pennings en 1963 et commercialisée dès 1990 par DSM aux Pays-Bas sous le nom de Dyneema. Sa fibre est plus légère, avec une densité de 0,97, présente une limite élastique σ entre 1 400 et 3 000 MPa et E = 100 GPa. Finalement, le cordage en fibre de carbone commence à faire son apparition en attendant les nanotubes de carbone de résistance à la rupture de 50 GPa et 6 fois plus léger que l’acier ! 82 Éthylène tétrafluoroéthylène, produit par Solvay, entre autres. Je mets cette membrane au point avec PTL (Plastiques et Textiles Lyonnais), elle présente une transmission lumineuse supérieure à 90 %. 78


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Vitesse « Vesuvio Est » sur la ligne Roma-Reggio di Calabria, avec un hall sous une charpente en cylindre parabolique ultra légère et souple en acier de très haute résistance couverte d’un film d’ETFE avec une transmission lumineuse record de 88 % ! [01/552, Fig. 74]. L’ensemble est si léger que les efforts du vent priment sur les grands efforts sismiques de la région. La ventilation y est naturelle pour garantir l’habitabilité confortable et des « bacs vitrés à frigories » complètent localement le dispositif. Suit, en 2009, le projet du centre culturel à N’Gozi au Burundi [01/567, Fig. 75] qui me tient particulièrement à cœur car il se fait dans le cadre d’un projet de coopération avec la Belgique. La misère matérielle du pays contraste singulièrement avec la culture vivante et raffinée de sa population qui s’exprime, entre autres, dans ses somptueux textiles et vanneries et son savoir-faire constructif d’abris en feuillages et brindilles 83. C’est pour cela que je propose de n’offrir que du cordage para-aramide ou HPPE, livré en bobines, ensuite noué par les villageois en vastes filets suspendus aux eucalyptus présents sur le site, auxquels sont suspendues à 83

Il est temps d’arrêter le saccage des forêts d’eucalyptus dans lesquelles pullulent des fours de campagne produisant de mauvaises briques utilisées pour construire de mauvais bâtiments dans une architecture occidentale sans relation aucune ni avec la nature et le climat, ni avec la culture du pays. 79


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leur tour de vastes huttes (ventilées et éclairées naturellement) en feuillages et brindilles 84. Le concept du grand filet en HPPE couvert d’un film ETFE est repris, en 2010, pour la grande salle de spectacles dans la carrière à Zhoushan [01/574-2, Fig. 76]. Peu coûteuses, extrêmement légères et transparentes, pratiquement insalissables, disparaissant sous le feu, ces structures minimales en filets para-aramide ou HPPE, couvertes ou non d’une membrane d’ETFE, bien que des plus prometteuses et réalisables (depuis 1990 !), ne sont encore que des projets de papier. Vesuvio Est et Zhoushan seront donc des « premières ». Ceci rappelle la lenteur avec laquelle l’industrie de la construction évolue. Permettre également la recherche et le développement en dehors des laboratoires, en expérimentant des constructions réelles pour leur propre usage, serait de nature à la dynamiser mais surtout à donner confiance aux investisseurs immobiliers et autres commanditaires.

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Forme de la surface et maillage des filets sont dessinés de manière à reprendre les efforts avec le moins de matériau (coûteux) possible. Étant suspendues, les huttes ne sont plus sujettes à l’instabilité qui les caractérise lorsqu’elles portent sur le sol. Elles peuvent donc être beaucoup plus grandes que toutes celles réalisées à ce jour (les huttes bantoues dans le Transvaal en Afrique du Sud). 80


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La membrane en tôle perforée Les tôles en métal déployé, en tissu d’acier inoxydable ou les tôles perforées permettent la réalisation d’écrans visuels et de protection solaire certes, mais sont surtout très efficientes comme coupe-vent. C’est ainsi que le métal déployé protège la station-service 85 de Houten aux Pays-Bas [01/363, Fig. 77], et que les tissus en acier inoxydable habillent les volets sur la terrasse au premier étage de Groenhof [Fig. 59] et protègent les quais à érasme [Fig. 72]. C’est chez « De Nul », en 2001 que je découvre l’intérêt de la tôle perforée plane pour la façade du parking au rez-de-chaussée et le plafond sous verrière de l’auvent d’entrée [Fig. 23] et que je l’utilise dans la foulée pour les terrasses en cubes tant de la rénovation de logements sociaux, rue des Minimes, au pied du Palais de Justice de Bruxelles [01/421, Fig. 78] que de la College Toren, au bord de la Lys à Kortrijk (01/510; p : 2006-2015, r : 2016-2018). Elle commence à devenir « structure » lorsque je profile la tôle pour envelopper la caserne de Charleroi et la laisse se prolonger en toiture pour former un haut garde-corps [Fig. 37]. 85

Ainsi que celles à Orival (p : 1998, r : 2000-2001, 01/365) et à Hellebecq (p : 2000, r : 2001-2002, 01/385), et les « nez » des voûtes de couverture des quais de la gare à Leuven (p : 19992001, r : 2002-2008, 01/389). 81


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C’est graduellement que je prends conscience de son potentiel structurel et en particulier à l’occasion des escaliers de secours de la « lanterne » d’Europa, qui sont suspendus à une tôle de 1,5 mm d’épaisseur perforé à 50 % et en acier ordinaire S235 86 [01/494, Fig. 79], ou encore lorsqu’elle prolonge les cuves du chai de Château Cheval Blanc à Saint-Émilion [01/542, Fig. 80] tant pour porter la toiture, et ses puits de lumière, que pour protéger de la chute. Elle devient élément structurel à part entière, lorsqu’elle remplace les diagonales dans les poutres en treillis pour reprendre l’effort tranchant, tout en offrant protection climatique, et contrer la chute 87. Je dessine deux passerelles piétonnes sur ce principe en 2010 88, mais ne peux l’expérimenter qu’en 2016 pour la tour d’exercice de la caserne des pompiers de Charleroi [Fig. 81]. À la faveur de l’avènement d’acier de très haute résistance, il serait intéressant d’envisager de réaliser de vastes tentes en tôle d’acier perforée à l’instar de celles réalisées, en tôle pleine 86

Elle ne nécessite, en outre, aucune protection au feu car elle est sollicitée à moins du vingtième de sa limite élastique. 87 Une tôle en métal déployé « aplanie », plus « vertueuse » puisque sans les déchets des trous de la tôle perforée, peut également être utilisée mais avec une moindre efficacité structurelle. 88 La passerelle au-dessus des voies de chemin de fer à la gare de Leuven, dans sa troisième version (p : 2010, r : en attente, 01/4153) et deux grandes passerelles à Gand, au-dessus du canal et de l’autoroute (p : 2010, 01/575). 82


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par Vladimir Choukhov 89 à Nizhny Novgorod en 1895 et 1896 mais, à ma connaissance, plus jamais depuis. Alors que la membrane polyester-PVC ou fibre de verre-ETFE (avec une transmission lumineuse de seulement 10 %) ne peut raisonnablement pas franchir une portée supérieure à 20 m, une membrane en tôle d’acier de 1 mm d’épaisseur perforée à 60 % revêtue d’un film transparent d’ETFE (donc avec une TL ≥ 55 %) pourrait aisément franchir une portée supérieure à 50 m pour un acier S690 jusqu’à 70 m pour un acier S2000 ! De la bougie à la DEL Lorsque le jour baisse, lorsque la nuit s’installe, des sources lumineuses artificielles permettent à l’homme de continuer son activité. Il est en effet exclu de compter sur la pleine lune, dont le flux lumineux n’est que de 0,25 Lm, ce qui ne donne qu’un éclairement de 0,25 Lx au sol. À l’extérieur, les grands feux de bois, autour desquels on s’installe, prennent le relais avec leurs jeux d’ombres et de lumière féérique mais, à l’intérieur, nos ancêtres doivent se satisfaire de la lumière de l’âtre et de bougies, dont le flux lumineux atteint environ 10 Lm (soit un éclai89

Vladimir Grigorievitch Choukhov (1853-1939). 83


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rement de l’ordre d’une dizaine de Lx pour une bougie posée sur une table) : l’empire de l’ombre. Heureusement, l’éclairement nécessaire à une ambiance lumineuse confortable diminue aussi avec la température de couleur 90. Artistes et artisans sont convoqués pour distribuer la lumière issue de ces sources de faible puissance mais vibrantes 91. Ils créent des lustres à facettes en cristal et jouent avec des miroirs sous des plafonds de grande hauteur. Les lampes à huile du XVIIIe siècle, les lampes au gaz et au pétrole, et les autres sources inflammables mises sur le marché au XIX e siècle offrent de meilleures efficacités et des flux lumineux plus importants. En ville, les constructions sont progressivement connectées au réseau de distribution de gaz 92 pour l’éclairage et le chauffage. Ce réseau s’ajoute à ceux des égouts 93 et de l’eau 94 et il est suivi par les réseaux électriques et télé90

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C’est ainsi que, selon Kruithoff, 15 Lux suffisent pour l’éclairage à la bougie (Tc=2 000°K), et 50 Lux pour l’incandescent (Tc=2 400°K), alors qu’il faut 300 Lux pour une Tc de 3 000°K (halogène) et plus de 500 Lux pour une Tc de 5 000° K. La sensibilité de l’œil à la lumière, maximale en plein jour pour la longueur d’ondes correspondant au jaune (555 nm) dérive la nuit vers celle du bleu (470 nm) et est nulle pour les longueurs d’ondes inférieures à 380 nm (l’ultraviolet) ou supérieures à 770 nm (l’infrarouge). L’efficacité lumineuse d’une bougie n’est que de 0,3 Lm/W. À Londres dès 1812, à Bruxelles dès 1818. Le voûtement de la Senne à Bruxelles ne s’achève qu’en 1871. La distribution d’eau à chaque bâtiment est relativement récente en Belgique où elle ne s’organise qu’à partir de 1860. 84


Lumière, transparence et reflet

phoniques à la fin du même siècle, puis par celui des fibres optiques à la fin du XX e siècle. L’éclairage public naît, améliorant non seulement la sécurité de la rue mais aussi celle des bâtiments, dont les dispositifs de protection contre l’intrusion s’allègent. Les grands centres urbains de distribution de biens et de services s’organisent et les moyens de transport se développent. La vie nocturne prend une nouvelle dimension, la lecture et l’acquisition du savoir livresque en particulier. La mauvaise habitude est aussi très vite prise de convoquer l’éclairage électrique pendant la journée. Les constructions urbaines, dorénavant « branchées » en sont progressivement mais profondément modifiées, alors que les bâtiments isolés hors de la ville gardent longtemps encore leur physionomie autarcique et protégée. Le logement urbain, par exemple, peut se passer de cave à charbon, de déchèterie et de compost, de garde-manger, de buanderie et de lingerie, de cave et de grenier, les services rendus autrefois par ces espaces auxiliaires l’étant maintenant par les réseaux 95. L’éclairage électrique ne produit ni flamme, ni émanation gazeuse et 95

Le système atteint ses limites, il se met de plus en plus en déséquilibre avec la nature. En particulier, le coût des réseaux par unité de surface construite augmente de manière exponentielle avec la taille des villes, forçant soit l’isolement social, soit la faillite des finances urbaines (voir La ville verticale, op. cit.). 85


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réduit fortement les risques sanitaires et d’incendie. Les constructions peuvent devenir étanches, rendant possible une prise en charge mécanique du nécessaire renouvellement de l’air. La hauteur sous plafond peut aussi se réduire et les plateaux devenir plus profonds. La production industrielle de l’ampoule à filament incandescent, à la fin du XIX e siècle, puis celle des tubes fluorescents vers 1930, révolutionnent aussi notre mode de vie et la construction. L’ampoule à incandescence 96, avec une efficacité lumineuse de 10 à 20 Lm/W et une durée de vie normalisée à 1 000 heures 97, offre un flux lumineux de 740 Lm pour 60 W et un indice de rendu des couleurs (IRC) proche de 100 %, ainsi qu’une température de couleurs comprise entre 2 400 et 2 700°K. Elle devient la source d’éclairage universelle. Le tube fluorescent est encore beaucoup plus performant, avec une efficacité lumineuse de 80 à 100 Lm/W (par exemple, un flux lumineux de 3 000 Lm pour 36 W), une durée de vie pouvant aller jusqu’à 12 000 heures et une température de couleurs comprise, au choix, entre 2 700 et 6 500°K. Ces performances s’obtiennent au prix 96

Elle n’est pratiquement plus fabriquée, sa vente étant définitivement interdite dans l’Union européenne au 31 décembre 2012. 97 Cette obsolescence programmée par le cartel Phoebius dès 1924, est un compromis technique entre flux lumineux, efficacité lumineuse, rendu des couleurs et durée de vie. 86


Lumière, transparence et reflet

d’un IRC standard de 80 % seulement, ce qui en limite longtemps l’usage aux bâtiments industriels ou de bureau. Il existe cependant des tubes présentant un IRC proche de 95 %, (mais avec une perte d’efficacité lumineuse de 5 à 10 %). Sa qualité de lumière, bien qu’un peu plus « froide » (4 500°K au lieu de 2 700°K), n’a rien à envier à celle de l’ampoule incandescente. Le tube fluorescent est donc bien encore la source lumineuse la plus vertueuse, jusqu’à la fin du XX e siècle, pour un éclairage diffus. La production d’électricité, très locale au début du XX e siècle, se concentre progressivement, sa distribution étant assurée par des réseaux autonomes de câbles en très haute tension pour limiter les pertes 98. Les défaillances de ces productions locales autonomes et les crises pétrolières successives conduisent, dès les années septante, à l’interconnexion et à la densification des réseaux. Après d’interminables négociations, un compromis voit le jour, en vertu duquel la fée électricité dispense son énergie à une tension standard de 220 Volts en étoile, ou 380 Volts 98

On se rappelle que la puissance vaut P = V.I (Différence de potentiel fois l’intensité du courant électrique) et que les pertes en chaleur valent ΩI² (résistance Ω du conducteur fois le carré de l’intensité I du courant électrique). À puissance transportée constante l’augmentation de V par 10 réduit donc les pertes par 100. 87


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en triangle 99. Tous les appareils électriques, y compris les luminaires, sont maintenant conçus pour ces valeurs de tension. La nature des sources lumineuses qualifie aussi la construction sur la planète. Les nations encore économiquement dominantes (Europe, États-Unis notamment) et les pays sous régime dictatorial disposant d’importantes ressources énergétiques, comme naguère l’URSS, s’offrent souvent encore le luxe de la lampe halogène et sa lumière flatteuse pour les habitations, ainsi que pour les constructions dévolues au commerce, à la culture ou aux loisirs. Cela ne durera plus longtemps. Le tube fluorescent y est communément accepté pour les lieux de travail. Quel contraste avec les zones géographiques laissées pour compte, telles que l’Afrique, l’Amérique du Sud ou des grandes parties de l’Asie ! Là, la précarité énergétique, quelle qu’en soit la cause, force à l’emploi quasi exclusif de tubes fluorescents, tellement plus efficaces. Cette atmosphère nocturne, que nous percevons comme « crue », qualifie en réalité une utilisation particulièrement vertueuse des ressources énergétiques et des technologies disponibles.

99

La norme CEI 60038, 6e édition, 1983, « IEC standard voltages » porte ces valeurs à 230 V et 400 V. 88


Lumière, transparence et reflet

La lampe à diodes électroluminescentes (DEL) 100 apparaît timidement dans les années 1990 pour devenir la source lumineuse potentiellement la plus performante à ce jour, avec une efficacité lumineuse de 50 Lm/W en 2008 à 200 Lm/W maintenant, une durée de vie dépassant actuellement 80 000 heures (tendant vers les 100 000 heures) et un IRC atteignant déjà 95 % pour certaines lampes, en amélioration constante. Cette nouvelle source lumineuse, alimentée en basse tension (12 ou 24 Volts) est une des expressions de la troisième révolution industrielle vigoureusement alimentée par le réseau Internet. Elle est en phase avec la production locale d’électricité qui se libère des pertes de courant dues à la production centralisée. Nos constructions pourraient donc être, dans un avenir proche, alimentées aussi par un réseau très court (voir note 97) de production locale en 12 ou 24 Volts, en complément de l’alimentation en 230/400 Volts. C’est là un deuxième pas de géant dans la quête de l’efficacité et de la sécurité d’usage depuis l’émergence de l’ampoule à incandescence. Il m’est difficile d’imaginer l’impact de cette évolution sur l’architecture. La DEL devient aussi le pixel des écrans lumineux animés, dont la taille possible ne cesse de 100

LED (Light Emitting Diode) en anglais. 89


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grandir 101, comme pour la tour Dexia 102 [01/301, Fig. 82] ou, comme envisagé, sur le tambour de proue de la Maison de la Culture de la Province de Namur [01/628, Fig. 55].

101

James P. Michell présente aux États-Unis, en 1977, le premier écran plat monochromique de télévision avec quelques centaines de LED. En 2004, l’écran de toiture de la « Freemont Street Experience » à Las Vegas-Nevada se compose de 12,5 millions de DEL (sur 460 m de long, à 27 m de haut et sur une largeur équivalente). 102 Tour Dexia, que j’ai pu concevoir pour Jean Michel Lauryssen, directeur de Progex-Compagnie Immobilière de Belgique, et avec Barbara Hediger pour l’éclairage. 90


Ch a pitr e 3

L’ombre

L’ombre n’existe que parce qu’existe la lumière. Les considérations qui suivent se réfèrent à la matière opaque plutôt qu’à la matière transparente et à ses reflets, dont il a été question jusqu’ici. La contradiction n’est qu’apparente car ce n’est pas en tant qu’objets autonomes que ces deux sortes de matières intéressent l’architecte, mais bien en tant qu’elles constituent des éléments de construction, de nature industrielle ou artisanale, fabriqués et assemblés pour constituer un bâtiment réel. Or, la plus grande part de la matière que l’architecte travaille est opaque : la structure est opaque, la pierre et la brique sont opaques, tout comme le sont le bois, l’acier et les tuiles 1. Il y a plusieurs millénaires que l’architecture est apparue sur la 1

Il existe bien sûr des bâtiments à structure en verre, mais il s’agit de projets expérimentaux ou de démonstration, plus proches de la sculpture, éventuellement habitée, que de l’architecture. La sculpture de verre devant le siège d’AGC à Louvainla-Neuve [Fig. 1] en est un exemple. 91


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terre en tant que discipline autonome, et l’essentiel de ses codes s’appliquent de manière plus ou moins explicite à la matière opaque. Le rôle de la lumière dans la mise en forme architecturale est, d’abord, de définir les volumes, puis de « sculpter » les murs par les ombres projetées, et enfin de traverser localement ces derniers, au travers de percements nécessairement limités en nombre et en étendue. Ce n’est que tout récemment, que le développement des technologies du verre permet à la transparence et au reflet de prendre une part nettement plus importante dans ce que la construction exprime par son aspect. Néanmoins, tous ces éléments, qu’ils soient opaques ou transparents, obéissent nécessairement aux règles qui régissent une construction saine et que l’on désigne souvent par le terme délicieusement ambigu de « règles de l’art ». Une de ces règles me tient particulièrement à cœur : la règle du « trait d’ombre ». Elle émane du simple bon sens constructif, mais elle tire son nom de ce que la lumière en révèle, et c’est cela qui lui donne sa place ici. Loin de n’être qu’un détail secondaire de mise en forme, le trait d’ombre touche aux fondements de la manière de construire, étant intimement lié à deux concepts fondateurs de la forme architecturale : le « dessin » et le « joint », dont il sera question plus loin. 92


L’ombre

Le trait d’ombre La règle du « trait d’ombre » pourrait s’énoncer ainsi : « sauf conditions particulières, précisément définies et limitées, tous les éléments de construction soumis à l’action des intempéries doivent se marquer en élévation par un trait d’ombre horizontal qui souligne le désaffleurement qu’impose la logique constructive ». Cette règle s’applique à tous les éléments de construction, qu’ils soient opaques et transparents, mais sa manifestation n’est pas la même pour ces deux catégories d’objets. Sur les matériaux opaques, le trait d’ombre est une simple bande sombre dont la largeur est proportionnelle à l’importance du désaffleurement. Sur les matériaux transparents, il participe au jeu complexe des reflets en remplaçant localement l’image réfléchie par une bande de transparence, plus sombre. Le trait d’ombre a une très vieille histoire. De tout temps, en tous lieux, les constructions vernaculaires 2 des régions pluvieuses présentent généralement une toiture débordant des murs pour les protéger de la pluie, en y projetant le trait d’ombre « originel ». Cette disposition est « traduite » dans la pierre par l’architecture érudite de l’Antiquité, 2

L’Encyclopedia of Vernacular Architecture of the World (Paul Oliver ed., Cambridge University Press, 1997 ; en trois volumes) documente le sujet avec rigueur et profondeur. 93


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sous la forme de corniches, d’architraves ou de larmiers. À une échelle plus réduite, les technologies antiques des matériaux n’autorisant, en gros, que l’assemblage par empilement d’éléments pierreux de taille réduite ou de pièces de bois, le bon sens constructif impose à chaque élément d’être décalé vers l’avant par rapport à celui qu’il surmonte : c’est le principe du « casse-goutte », qui empêche l’eau de s’infiltrer dans le joint, où elle détériorerait à coup sûr la construction. Le débordement de toiture reste tout à fait pertinent dans l’architecture contemporaine, sans pour autant copier les formes du passé. Au contraire, la réflexion peut être développée plus avant : comme le débordement devient inopérant pour des façades plus hautes que deux niveaux, il s’indique de réaliser une protection complémentaire au moyen de bandeaux, continus ou non, régulièrement répartis sur leur hauteur (coursives d’entretien, terrasses, etc.). L’avènement de matériaux étanches tels que les tôles métalliques (cuivre, zinc, bronze, aciers alliés, aluminium,…), les plaques en matériaux de synthèse (PVC, polyester, butyle, EPDM,…) et les grands volumes de verre 3 ne remettent 3

Les premières verrières sur charpente métallique donnent lieu à l’invention au XIXe siècle du mastic « pur lin », mélange de craie et d’huile de lin, dont l’usage s’étend vite à tout châssis vitré, tant pour en assurer l’étanchéité que pour en améliorer la rigidité. Le verre reste fixé mécaniquement par calage de 94


L’ombre

pas en question la nécessité du casse-goutte, qui prend la forme de seuils débordants, de bardage à clins, de joints debout ou de rejets d’eau profilés. À partir des années 1950 apparaissent cependant des mastics souples et étanches (tels que le PVC, l’acrylique, le polyuréthane, le polyester, le polysulfure ou le silicone, produit le plus utilisé aujourd’hui). Ce mastic silicone adhère aux éléments qu’il relie, et autorise la réalisation de n’importe quelle forme monolithique lisse, « libérant » ainsi l’architecture de la « contrainte » du rejet d’eau. Mais cette « libération » n’est qu’apparente car elle contient en elle-même la contrainte d’un entretien et d’une maintenance alourdis. En effet, la surface d’une façade constituée de plaques uniformes et coplanaires est sujette à salissures et dégradations de manière d’autant plus visible qu’elle est grande, lisse et réfléchissante. Comme tout se voit plus, poussière, coulées de pluie, voire coulées de silicone, il faut nettoyer plus… 4 En outre, produite par une industrie « lourde » rarement à même de garantir un réapprovisionnement à long ou à moyen terme, une telle construction est fragile voire éphémère. Certes, des 4

petits clous pour les châssis en bois et parclose pour les châssis métalliques (acier, aluminium, bronze, cuivre). La peinture sur un support continu ne présente pas cette faiblesse pour autant, lorsqu’elle est extérieure, qu’elle soit adéquatement protégée de la pluie ce qui implique toujours le trait d’ombre. 95


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industries artisanales récemment apparues, grâce à leurs outils « intelligents » 5 adaptés à la production de pièces uniques ou de petites séries, peuvent assurer à un coût raisonnable la reconstitution de composants de la surface. Mais la mise en œuvre de tels processus de maintenance de haute technologie ne peut s’envisager qu’à trois conditions : il faut que la surface soit morcelée en éléments de petite taille, que l’architecture tolère, voire favorise, les différences de teintes et/ou de texture, et que le joint entre éléments permette un remplacement aisé. D’un point de vue statistique, peu de bâtiments classés dans l’architecture « monolithique » remplissent aujourd’hui ces trois conditions. Le dessin Si les sciences et techniques sont vouées au progrès, il n’en est rien de l’art qui, au travers de nos sens, sollicite toujours la même âme et le même esprit. La construction occupe dans cette trilogie « reperire, invenire, creare 6 », un rôle paradoxal. Si elle ne progresse pas au niveau de son trait et de son dessin (il n’y a en effet aucune différence conceptuelle entre le tracé de l’architecture antique et de la contemporaine), elle est 5

6

La production d’objets par « impression » ou « découpe » en trois dimensions à partir de fichiers numériques produits par un « concepteur » est devenue commune. Découvrir, inventer, créer : ma devise. 96


L’ombre

de la main de l’homme et sa matérialité témoigne de son époque. Le dessin 7 doit simultanément répondre aux règles intangibles de proportions 8 et de lisibilité pour émouvoir et porter en lui l’intelligence de la construction 9. Il s’exprime dans le champ des sept ordres de grandeurs perceptibles, du millimètre au kilomètre avec le mètre en son centre et m’inspirent l’analogie avec les sept octaves d’un clavier de 7

8

9

Même celui concernant les programmes architecturaux « nouveaux », tels que ceux liés au transport, au travail ou encore à la santé, doit répondre aux mêmes règles. Redécouvertes par Hans Dom van der Laan, (voir note nº 82). Elles renvoient au triangle de Pythagore 3/4/5 et au rapport φ tel qu’il découle de l’équation φ = φ³ +1 et répondent aux règles de proportion qui régissent l’espace (tridimensionnel) tout comme le nombre d’or φ, tel qu’il découle de l’équation φ = φ² + 1, régit le plan (bidimensionnel). C’est ainsi qu’au gré du dessin, et en particulier du dimensionnement des parties de la construction, j’ai appris les vertus des dimensions de base de 135 cm en plan et de 180 cm (4/3 × 1,35) en élévation, avec leurs multiples et sous multiples (en cm) 135 / 112,5 / 90 / 67,5 / 45 / 22,5 / 11,5 / 5,675 / 2,8375,… et 135 / 157,5 / 180 / 202,5 / 225 / 247,5 / 270 / 292,5 / 315 / 337,5 / 360… Le trait à la main qui précise le détail constructif au fur et à mesure de l’élaboration du dessin jusqu’au plan d’atelier est maintenant puissamment complété par l’élaboration de la « maquette numérique » intelligente (BIM : Building Information Modeling) avec ses composants tridimensionnels, auxquels il peut être attribué diverses caractéristiques en permettant l’exploitation par tous les progiciels utiles tels que ceux de calcul de structure, de physique du bâtiment, ou de coûts. Il s’agit d’une réelle révolution dans la manière de penser la construction. 97


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piano avec le La de 440 Hz en son centre (à une note près). Il précise, par des traits, les contours aussi bien des éléments de construction que de l’ensemble qu’ils forment, contours dont on a besoin pour définir les mesures précises de la construction en vue d’être à même de la réaliser 10. Le joint Si le petit objet peut être monolithique, le grand objet, meuble ou construction, doit être constitué de parties en matériaux identiques ou différents. Ces parties sont liées entre elles d’innombrables façons selon les matériaux et l’usage. Nœuds, coutures, colle, chevilles, clous, vis, soudures lient généralement de manière intime, et l’un à l’autre, les peaux, tissus, feuilles mines, plaques et profils de toute nature formant les parties du grand objet et du meuble. Leur dimension, à l’échelle du décimètre et au plus du mètre, peuvent être précises et soumises à des tolérances fines. Il en est ainsi aussi pour les composants de la construction : du bloc de pierre, madrier de bois ou profilé acier à la fenêtre, la porte ou le lavabo. 10

Le peintre n’a pas le même objectif et, dans la plupart des cas, il s’applique donc à créer et superposer librement des taches de lumière, d’ombre et de couleur, le contour n’étant que la jonction entre deux surfaces. 98


L’ombre

Leurs tolérances dimensionnelles s’additionnent cependant, imposant un joint entre eux, lorsqu’ils sont assemblés pour former la construction. Cette dernière, de plus grande taille (à l’échelle du décamètre voire de l’hectomètre) est donc moins précise. Le joint est généralement d’une largeur constante (de l’ordre du cm) et relie toujours deux volumes parallélépipédiques ou cylindriques quelles que soient leurs positions relatives ou la forme et les matériaux des composants. Ce joint est central dans l’art de construire. Il doit être réfléchi et conçu avec la plus grande attention dès le début du dessin tant il peut être déterminant dans le choix-même des détails constructifs et des matériaux envisagés. Il doit aussi être conçu pour permettre tant le remplacement d’un composant sans abîmer ceux qui l’entourent, que la démontabilité de l’ouvrage. Lorsqu’il concerne deux composants fixés l’un à l’autre, le joint est l’élément de solidarisation ou se conjugue avec lui. Le mortier solidarise ainsi, dans les trois dimensions, blocs et briques, de pierre, terre ou terre cuite, tout en formant le joint. Il assure aussi l’étanchéité à l’air et, ou à l’eau. Les composants doivent présenter une épaisseur minimum pour ce faire : de l’ordre du décimètre. Un réseau d’ombres est toujours assorti aux ressauts dans le plan ou hors de celui-ci tant du joint que des composants. 99


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Chevilles, tenons et mortaises, clous, vis, boulons ou rivets solidarisent les pièces raides en bois, matériau synthétique ou en métal, superposées l’une sur l’autre par l’intermédiaire d’un plan formant joint perméable. Une des pièces projette toujours un trait d’ombre, dû à son épaisseur, sur l’autre. Des pièces trop fines, les tôles en métal en particulier, se déforment et conduisent à des assemblages mécaniques indémontables (tels que des rivets) et aussi disgracieux qu’éphémères 11, aux ombres capillaires et irrégulières : c’est ici qu’il convient de les brasser ou de les souder ensemble. Le joint est d’une toute autre nature lorsqu’il concerne deux composants fixés sur un troisième généralement mince ou très mince : le « revêtement ». Tout l’art consiste à rendre le joint imperceptible, sans ombre, comme dans le cas de lés de papier peint collés côte à côte sur un enduit mural ou de dalles de marbre posées jointivement sur un bain de mortier (au sol et au mur). Le joint doit avoir quelques millimètres à un centimètre dans le cas de carreaux en céramique pour en négocier les dimensions moins précises tant en plan qu’en épaisseur, l’ombre s’y fait diffuse.

11

Il en va tout autrement de l’assemblage des tôles de voitures, bateaux ou avions construits en atelier avec grande précision. 100


Épilogue

Ombre et transparence sont tantôt diffuses, morcelées ou franches ou encore sources d’illusions d’optique 1. Diffuses, elles tempèrent les désagréments de la lumière trop vive et du reflet (et adoucissent les couleurs), comme l’absorbant acoustique le fait pour le bruit trop vif et pour l’écho. Morcelées, par le mouvement lent des nuages, la pluie ou la neige, le frémissement de l’eau ou du feuillage d’un arbre, elles rendent compte du temps qui passe. Elles sont encore différentes sous le rayonnement d’une source lumineuse ponctuelle, 1

Nous y sommes en permanence sujets. De nouvelles illusions sont régulièrement découvertes comme, en 2011, le « Flashed Face Distortion Effect » par Sean Murphy, étudiant en psychologie à l’Université de Queensland en Australie (voir aussi « Illusions Optiques » sur Wikipedia). Il y a donc toujours autant à découvrir à l’échelle métrique qu’à celle de l’atome ou du cosmos. 101


ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE, TRANSPARENCE ET REFLET

vibrantes sous la flamme et immobiles sous la source électrique. Le reflet est à la transparence ce que l’ombre est à la lumière 2. Philippe Samyn. Le 1er septembre 2016.

2

C’est pour l’esthétique ce que la musique est au silence. 102


Table des matières

Introduction

Les sens et le paradoxe

Chapitre 1 — Un socle de connaissances La construction Le monde économique L’énergie et la société

Chapitre 2 — Lumière, transparence et reflet La lumière du jour L’orientation et la latitude La baie Le vitrage Deux développements technologiques Le verre feuilleté et trempé Le miroir réfléchissant la lumière naturelle Les capteurs de lumière naturelle Le miroir d’eau La double peau Les vantelles

7 9 13 14 18 21

25 26 27 28 30 36 42 44 47 50 51 55


Le moucharabieh Les « miroirs aux couleurs » Volets, rideaux, reflets et Lux La verrière globale La membrane plastique La membrane en tôle perforée De la bougie à la DEL

Chapitre 3 — L’ombre Le trait d’ombre Le dessin Le joint

Épilogue

60 63 65 66 74 81 83 91 93 96 98 101



Collection « L’Académie en poche » 1.

Véronique Dehant, Habiter sur Mars ? (2012)

2.

Xavier Luffin, Religion et littérature arabe contemporaine (2012)

3.

François De Smet, Vers une laïcité dynamique. Réflexion sur la nature de la pensée religieuse (2012)

4.

Richard Miller, Liberté et libéralisme ? Introduction philosophique à l’humanisme libéral (2012)

5.

Ivan P. Kamenarovic, Agir selon le non-agir. L’action dans la représentation idéale du Sage chinois (2012)

6.

Jean Mawhin, Les histoires belges d’Henri Poincaré (2012)

7.

Jacques Siroul, La musique du son, ce précieux présent (2012)

8.

Baudouin Decharneux, La religion existe-t-elle ? (2012)

9.

Jean-Marie Rens, ‘Messagesquisse’ de Pierre Boulez (2012)

10. Jean de Codt, Faut-il s’inspirer de la justice américaine ? (2013) 11.

Bruno Colmant, Voyage au bout d’une nuit monétaire (2012)

12. Philippe Manigart et Delphine Resteigne, Sortir du rang. La gestion de la diversité à l’Armée belge (2013)

13.

Hervé Hasquin, Les pays d’islam et la Franc-maçonnerie (2013)

14. Monique Weis, Marie Stuart, l’immortalité d’un mythe (2013) 15.

Xavier Luffin, Printemps arabe et littérature. De la réalité à la fiction, de la fiction à la réalité (2013)

16. Myriam Remmelink, Éthique et biobanque. Mettre en banque le vivant (2013)

17.

Marie-Aude Baronian, Cinéma et mémoire. Sur Atom Egoyan (2013)

18. Frédéric Boulvain et Jacqueline Vander Auwera, Voyage au centre de la Terre (2013)

19. Daniel Salvatore Schiffer, Métaphysique du dandysme (2013) 20. Philippe de Woot, Repenser l’entreprise. Compétitivité, technologie et société (2013)

21. Jacques Scheuer, L’Inde, entre hindouisme et bouddhisme. Quinze siècle d’échanges (2013)

22. John F. May, Agir sur les évolutions démographiques (2013) 23. Yaël Nazé, À la recherche d᾽autres mondes. Les exoplanètes (2013)


24. Jean Winand, Les hiéroglyphes égyptiens. Aux origines d᾽une écriture (2013)

25. Frans C. Lemaire, Dimitri Chostakovitch. Les rébellions d᾽un compositeur soviétique (2013)

26. Baudouin Decharneux, Lire la Bible et le Coran (2013) 27. Bruno Colmant, Capitalisme européen : l’ombre de Jean Calvin (2013) 28. Françoise Meunier, Quel avenir pour la recherche clinique en cancérologie ? (2014) En anglais : Françoise Meunier, What is the future of cancer research? (2014)

29. Jean Winand, Décoder les hiéroglyphes. De l’Antiquité tardive à l’Expédition d’Égypte (2014)

30. Jacques Joset, Louis-Ferdinand Céline : mort et vif... ! (2014) 31.

Jean-Baptiste Baronian, La littérature fantastique belge. Une affaire d’insurgés (2014)

32. Valérie André, La rousseur infamante. Histoire littéraire d’un préjugé (2014)

33. Jean-Pierre Contzen, Les menaces venant de l’espace (2014) 34. François Mairesse, Le culte des Musées (2014) 35. Guy Haarscher, La Cour suprême des États-Unis. Les droits de l’Homme en question (2014)

36. Catherine de Montlibert, L’émancipation des serfs de Russie. L’année 1861 dans la Russie impériale (2014)

37.

Jean-Pol Poncelet, Une énergie dérangeante. Nucléaire : une controverse durable ? (2014)

38. Philippe Samyn, La ville verticale (2014) En anglais : Philippe Samyn, The Vertical City (2014)

39. François De Smet, Une nation nommée Narcisse (2014) 40. Jean-Pol Schroeder, Le jazz comme modèle de société. Livre-disque, avec la participation du Steve Houben trio (2014)

41. Jean-Pierre Hansen, Une quête de Graal (2014) 42. Hervé Hasquin, Déconstruire la Belgique ? Pour lui assurer un avenir ? (2014)

43. Philippe de Woot, L’innovation, moteur de l’économie (2014)


44. Bruno Colmant, Crises économiques et dette publique (2014) 45. Samuele Furfari, L’énergie, de la guerre vers la paix et la stabilité (2014)

46. Samuel Wajc, Que faire de la mer Morte ? (2014) 47. Gilbert Hottois, Le transhumanisme est-il un humanisme ? (2014) 48. Benoit Frydman, Petit manuel pratique de droit global (2014) 49. Xavier Dieux, Le marché bien tempéré (2014) 50. Alain Eraly, Quand les mots construisent la réalité (2014) 51.

Marc Wilmet, Petite histoire de l’orthographe française (2015)

52. Amand A. Lucas, Les savants d’Hitler et la bombe atomique (2015) 53. Jean-Marie André, Fleuve jaune, papillons amoureux et musique classique de la Chine du XXe siècle (2015)

54. Françoise Lauwaert, Puissance et pouvoir de l’écriture chinoise (2015) 55.

Jean-Pol Poncelet, À toute ardeur ! Science et technique sur le chemin de l’énergie (2015)

56. Jacques Pélerin, Wallonie, réindustrialisation et innovation.« Sortir par le haut ? » (2015)

57. Jacques Joset, Louis-Ferdinand Céline : la manie de la perfection... ! (2015)

58. Daniel Salvatore Schiffer, Le clair-obscur de la conscience (2015) 59. Jean-Marie Frère, La résistance des bactéries aux antibiotiques (2015) 60. François de Callataÿ, Cléopâtre, usages et mésusages de son image (2015)

61. Anne Staquet, Descartes avance-t-il masqué ? (2015) 62. Guillaume Wunsch, Michel Mouchart et Federica Russo, Les limites de la connaissance en sciences sociales. L’explication mise en cause (2015)

63. Vincent De Coorebyter, Deux figures de l’individualisme (2015) 64. Daniel Droixhe, Fer ou ciguë ? Récits sur le cancer du sein au 18e siècle (2015)

65. Véronique Dehant, Habiter sur une lune du système solaire ? (2015) 66. Pierre Somville, Pour une esthétique du coeur (2015) 67. Jean-Pierre Schaeken, Pic pétrolier, pic gazier sans cesse reportés (2015)


68. Jean Creplet et János Frühling, Penser les soins de santé (2015) 69. Frédéric Boulvain et Francis Tourneur, Pierres et marbres en Wallonie (2016)

70. Marc Wilmet, Il y a grammaire et grammaire (2016) 71.

Pierre Petit, Patrice Lumumba. La fabrication d’un héros national et panafricain (2016)

72. Viviane Pierrard, Les colères du Soleil (2016) 73. Philippe de Schoutheete, La création de L’Euro (2016) 74. Pierre Somville, Brasillach écrivain, mal-aimé des Lettres françaises (2016)

75. Roland Souchez, Glaces polaires et évolution de l’atmosphère (2016) 76. Hervé Hasquin, Le soi-disant « Gladio belge » (2016) 77. Francis Delpérée, J’écris ton nom, Constitution (2016) 78. Christophe Van Staen, La Chine au prisme des Lumières françaises (2016) 79. Jean-Paul Haton, La parole numérique. Analyse, reconnaissance et synthèse du signal vocal (2016)

80. Stéphane Louryan, Les preuves embryologiques de l’évolution (2016) 81.

Michel Hambersin, Institutions culturelles et Nouvelles technologies. L’exprérience du spéctacle vivant (2016)

82. Baudouin Decharneux, Socrate l’Athénien ou de l’invention du religieux (2016)

83. Hervé Hasquin, Inscrire la laïcité dans la Constitution belge ? (2016) 84. Théophile Godefraind, Hominisation et transhumanisme (2016) 85. Firouzeh Navahandi, Être femme en Iran. Quelle émancipation ? (2016) 86. Philippe de Woot, Maîtriser le progrès économique et technique. La force des choses et la responsabilité des hommes(2016)

87. Luc Chefneux, Pourquoi l’innovation ? Quels défis pour l’Europe ? (2016)

88. Hugues Bersini, Big Brother is driving you (2016) 89. Xavier Dieux, L’Empire des choses. Liberté - Complexité - Responsabilité. (2017)

90. Anne Richter, Les écrivains fantastiques féminins et la métamorphose (2017)


91.

Monique Mund-Dopchie, L’Atlantide de Platon. Histoire vraie ou préfiguration de l’Utopie de Thomas More ? (2017)

92. Lucien François, Le probleme de l’existence de Dieu. Et autres sources de conflits de valeurs (2017)

93. Francis Delpérée, L’état Belgique (2017)


Collection « Mémoires » Les Minorités, un défi pour les États. Actes de colloque (2012) L’idéologie du progrès dans la tourmente du postmodernisme. Actes de colloque (2012) Denis Diagre, Le Jardin botanique de Bruxelles (1826–1912). Reflet de la Belgique, enfant de l’Afrique (2012) Musique et sciences de l’esprit. Actes de colloque (2012) Catherine Jacques, Les féministes belges et les luttes pour l’égalité politique et économique (1914-1968) (2013) Athéisme voilé/dévoilé aux temps modernes. Actes de colloque (2013) Stéphanie Claisse, Du Soldat Inconnu aux monuments commémoratifs belges de la Guerre 14-18 (2013) Georges Bernier, Darwin, un pionnier de la physiologie végétale. L’apport de son fils Francis (2013) Jacques Reisse, Alfred Russel Wallace, plus darwiniste que Darwin mais politiquement moins correct (2013) La démocratie, enrayée ? Actes de colloque (2013) Catherine Thomas, Le visage humain de l’administration. Les grands commis du gouvernement central des Pays-Bas espagnols (1598-1700) (2014) Francis Robaszynski, Francis Amédro, Christian Devalque et Bertrand Matrion, Le Turonien des massifs d’Uchaux et de la Cèze (2014) Pierre Verhas, L’histoire de l’Observatoire royal de Belgique (2014) L’Homme, un animal comme un autre ? Actes de colloque édités par Jacques Reisse et Marc Richelle (2014) La bataille de Charleroi, 100 ans après. Actes de colloque (2014)


Pierre Assenmaker, De la victoire au pouvoir. Développement et manifestations de l’idéologie impératoriale à l’époque de Marius et de Sylla (2014) De Mons vers le Nouveau Monde. Lettres de Jean-Charles Houzeau en Jamaïque (1868-1876), Hossam Elkhadem et Marie-Thérèse Isaac (ed.) (2015) Le Quatrième partage de la Pologne. Actes de colloque (2015) Frédéric Boulvain et Jean-Louis Pingot, Genèse du sous-sol de la Wallonie (2015, 2e éd. revue et augmentée) La liberté d’expression. Menacée ou menaçante ? Actes de colloque (2015) Robert Wangermée et Valérie Dufour (dir.), Modernité musicale au XXe siécle et musicologie critique. Hommage à Célestin Deliège. Actes de colloque (2015) Jean-Louis Migeot, Des chiffres et des notes. Mathématique et solfège, physique et musique : une introduction (2015) Hugues Bersini, Quand l’informatique réinvente la sociologie (2015) Jean-Louis Kupper, Notger de Liège (972-1008) (2016) émile Biémont, Le règne du temps : des cadrans solaires aux horloges atomiques (2016) L’évaluation de la recherche en question(s). Actes de colloque (2016) Jean-Charles Speeckaert, Dominique de Lesseps. Un diplomate français à Bruxelles au temps du renversement des alliances (17521765) (2016) Marc Groenen , L’art des grottes ornées du Paléolithique supérieur (2016) Stéphanie Claisse, Monuments aux morts... et aux survivants belges de la Guerre 14-18 (2016) Charleroi 1666-2016. 350 ans d’histoire des hommes, des techniques et des idées. Actes de colloque (2016)


Fig. 1 — La sculpture de verre devant le siège de AGC à Louvain-la-Neuve ; p : 2010, r : 2011-2014 (01/577).

Fig. 2 — L’efficience et la pérennité d’une construction en fonction des progrès de la connaissance.


Fig. 3 — Éclairage naturel journalier en Lux à Uccle (Bruxelles) pour des surfaces verticales nord, est, sud, ouest et le plan horizontal (avec un maximum de 90 000 Lux à midi sur l’horizontale au solstice d’été).

Fig. 4 — Éclairage naturel journalier en Lux à Uccle (Bruxelles) pour des surfaces verticales nord-est, sudest, sud-ouest, nord-ouest (avec un maximum de 90 000 Lux au zénith, le 21 juin à 12h00).

Fig. 5 — Siège social de la CNP/NPM, Gerpinnes ; p : 1994, r : 1995-1996, (01/320). Photographie janvier 2016.


Fig. 6 — Hall de production de panneaux photovoltaïques, Dison ; p : 2011 (01/592).

Fig. 7 — Insolation annuelle moyenne en Belgique (100 % = 1 100 kWh/m² an).

Fig. 8 — Lujiazhi Cultural Creativity Garden Zhoushan. Cultural coffee shop et sa verrière photovoltaïque, Zhoushan, Chine ; p : 2019, r : 2015-2016 (01/594).

Fig. 9 — Insolation annuelle moyenne à Zhoushan, Chine (100 % = 2 100 kWh/m² an).


Fig. 10 — Verrière photovoltaïque, caserne des pompiers, Houten, Pays-Bas ; p : 1998, r : 1999-2000 (01/373).

Fig. 11 — Les 2 200 dessins d’enfants dans la caserne.


Fig. 12 — EUROPA, siège du Conseil de l’Union européenne, Bruxelles ; p : 2005–2008, r : 2008–2016 (01/494).

Fig. 13 — EuroSpace Centre, Libin-Transinne ; p : 2006, r : 2007-2008 (01/518).

Fig. 14 — Façade photovoltaïque du bâtiment des sciences appliquées de l’Université libre de Bruxelles ; p : 2009, r : 2017 – 2018 (01/570).

Fig. 15 — Coupe perspective transversale.


Fig. 16 — La girouette d’Olivier Strebelle sur l’immeuble de bureaux pour Eric Boulanger, Waterloo ; p : 1998, r : 1989-1990 (01/200).

Fig. 17 — La salle de réunion et sa verrière de toiture sous la girouette.


Fig. 18 — L’oculus au plafond du hall d’accueil, sous la salle de réunion.


Fig. 19 — Les miroirs dans les ébrasements de fenêtres des bureaux de Samyn et Associés, Uccle ; p : 1992, r : 1993 (01/265).

Fig. 20 — Les miroirs dans les ébrasements de fenêtres et sur les étagères à lumière, EUROPA ; p : 2004, r : 2008 à 2016 (01/494).


Fig. 21 — Les étagères à lumière pour l’immeuble « Cristal », Bruxelles ; p : 1992, r : 1996-1998 (01/260).

Fig. 22 — Détail des caillebotis.

Fig. 23 — Les étagères à lumière au siège des entreprises Jan De Nul, Aalst ; p : 2000, r : 2001-2002 (01/401).


Fig. 24 — Les réflecteurs anidoliques pour le siège de la Caisse Congés du Bâtiment, Bruxelles ; p : 1997 (01/351).

Fig. 25 — Illustration de l’efficacité des réflecteurs de lumière naturelle.

Fig. 26 — Les grands pans semiréfléchissants forment des réflecteurs de lumière verticaux pour cet immeuble de bureaux, Bruxelles ; p : 1999 (01/381).


Fig. 27 — Capteurs de lumière en toiture pour la Fondation Polaire Internationale, Toronto, Canada ; p : 2004 (01/477).

Fig. 28 — Coupe transversale.


Fig. 29 — Conduits de lumière dans les colonnes en bois.


Fig. 30 — Coupe perspective illustrant les jeux de miroirs de la Maison de l’Histoire européenne, Bruxelles ; p : 2010 (01/573).

Fig. 31 — Les canons de lumière naturelle éclairant les salles obscures.


Fig. 32 — Une résille structurelle en bois porte la toiture et diffuse la lumière naturelle dans le crematorium, Aalst ; p : 2010 (01/583).


Fig. 33 — Un héliostat avec miroir elliptique éclaire le cœur du crématorium.

Fig. 34 — Les miroirs en toiture annoncent de loin le crématorium.


Fig. 35 — 232 héliostats au Guggenheim à Helsinki, Finlande ; p : 2014 (01/619).

Fig. 36 — Maquette.


Fig. 37 — L’héliostat rectangulaire dans la cour centrale de la caserne des pompiers à Charleroi ; p : 2014, r : 2015-2016 (01/569).


Fig. 38 — La cour de la ferme de Stassart, Uccle (01/265).

Fig. 39 — Les patios de la caserne des pompiers de Charleroi (01/569).


Fig. 40 — M&G Ricerche, Venafro, Italie ; p : 1989, r : 1990-1991 (01/222).

Fig. 42 — Brussimmo, Bruxelles ; p : 1991, r : 1992-1993 (01/225).

Fig. 41 — OCAS, Zelzate ; p : 1981, r : 1990-1991 (01/223).

Fig. 43 — Auditoire de première candidature médecine, Hôpital Erasme, Bruxelles ; p : 1992, r : 1993 (01/270).


Fig. 44 — Éditions Dupuis, Marcinelle ; p : 1993, r : 1994-1995 (01/286).

Fig. 45 — La Grande Aula, Louvain-laNeuve ; p : 1999, r : 2000-2001 (01/291).

Fig. 46 — Le parterre aveugle sous les KW électriques.


Fig. 47 — Balcons et double peau. Villas de Ganshoren, Bruxelles ; p : 2016 (01/633).

Fig. 48 — Les vantelles de verre clair, avenue Marnix, Bruxelles ; p : 2006, r : 2007-2009 (01/489).


Fig. 49 — Les vantelles sérigraphiées assurent la diffusion de la lumière dans les bureaux du siège de ENI (Ente Nationale Idrocarburi), Rome, Italie ; p : 1998 (01/375).

Fig. 50 — Les gigantesques vantelles protègent les façades est et ouest du soleil.


Fig. 51 — Le siège social de AGC Glass Europe, Louvain-la-Neuve ; p : 2010, r : 2011-2014 (01/577).

Fig. 52 — Les vantelles nord et sud, est et ouest.


Fig. 53 — Vue intérieure.

Fig. 54 — Les vantelles du deuxième nouveau siège des entreprises Jan De Nul, Aalst ; p : 2015-2016, r : 2017-2018 (01/571).


Fig. 55 — Maison de la Culture de la Province de Namur ; p : 2015, r : 2017-2018 (01/628).

Fig. 56 — Les vantelles en acier laqué blanc.


Fig. 57 — Le patchwork de vieux châssis de chêne, EUROPA (01/494).

Fig. 58 — La « lanterne » en verre sérigraphié.


Fig. 59 — Le gris pur à 60 % de noir et la résille photovoltaïque du château « Groenhof », Malderen ; p : 1998, r : 1999-2000 (01/352).

Fig. 60 — Imposte en miroir et papier d’aluminium froissé tapissant les murs de l’annexe du château « Groenhof ».


Fig. 61 — Les « bacs » en verre au pied des verrières, KBC Verzekeringen, Leuven ; p : 2002 (01/433).

Fig. 62 — Les tubes à ailettes au pied de la verrière EUROPA (01/494).


Fig. 63 — Le Comptoir forestier à Marche-en-Famenne ; p : 1992, r : 1993-1994 (01/279).

Fig. 64 — Vue de nuit.

Fig. 65 — Vue intérieure.


Fig. 66 — La verrière en cylindre elliptique du Neanderthal Museum à Erkhrath-Mettmann, Allemagne ; p : 1993 (01/290).


Fig. 67 — La verrière en chaînette du restaurant pour Petrofina, rue Guimard, Bruxelles ; p : 1994, r : 1995-1996 (01/313).

Fig. 68 — La verrière conique du Musée du Verre à Lommel, extérieur ; p : 2004, r : 2005-2006 (01/469).


Fig. 69 — Les escaliers.

Fig. 70 — L’atelier de Erik Salvesen à Ekenäs-Tammisaari, Finlande ; p : 2009, r : en attente. (01/561).


Fig. 71 — L’espace intérieur de M&G Ricerche (voir aussi Fig. 40), (01/222).

Fig. 72 — La station de métro Bruxelles-Erasme ; p : 1995, r : 2001-2003 (01/283).

Fig. 73 — Le film d’ETFE sur filin para-aramide au centre de recherches Solvay à Neder-over-Heembeek ; p : 1987 (01/190).


Fig. 74 — La gare Vesuvio Est près de Naples, Italie ; p : 2008, r : en cours d’étude (01/552).

Fig. 75 — Les Burundais invités à « tisser » leur centre culturel à N’Goziv; p : 2009, r : inconnu (01/567).


Fig. 76 — La grande tente ETFE para-aramide à Zhoushan ; p : 2010, r : en cours d’étude (01/574).

Fig. 77 — Les écrans en métal déployé à Houten, Pays-Bas ; p : 1998, r : 1999 (01/363).


Fig. 78 — Les terrasses « cubes » de 3 m de côté, rue des Minimes à Bruxelles ; p : 2001-2007, r : 2008-2011 (01/421).

Fig. 79 — Les tôles perforées portant les escaliers de secours dans la « lanterne » EUROPA (01/494).


Fig. 80 — Les colonnes en tôle perforée sur les cuves du chai de Château Cheval Blanc à Saint-Émilion, France ; p : 2008 (01/542).

Fig. 81 — La tour d’exercice de la caserne des pompiers à Charleroi (01/569).


Fig. 82 — Tour Dexia, place Rogier, Bruxelles ; p : 2002, r : 2003-2006 (01/301).




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