CHRONIQUES DE LA BD
L’AFFAIRE
TINTIN AU CONGO
ACTUABD.COM
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"Il y a une chose que les Blancs qui ont arrêté la circulation de Tintin au Congo n’ont pas comprise. Cette chose, la voici : si certaines images caricaturales du peuple congolais données par Tintin au Congo font sourire les Blancs, elles font rire franchement les Congolais, parce que les Congolais y trouvent matière à se moquer de l’homme blanc qui les voyait comme cela !" Extrait du journal congolais Zaïre, 29/12/1969, p.3, cité par Benoit Peeters dans sa bibliographie Hergé, fils de Tintin. (Flammarion, 2002). Textes de Nicolas Anspach, Charles-Louis Detournay, Didier Pasamonik et Patrick Pinchart © ActuaBD.com, 2016. Crédits photo : Didier Pasamonik & Nicolas Anspach Photo de couverture : D.R. Les articles repris ici ont été préalablement publiés sur le site www.actuabd.com et sont rassemblés dans cette compilation thématique avec l'accord de leurs auteurs, qui restent entièrement responsables de leur contenu, dont ils conservent la propriété intellectuelle. Droits de traduction et de reproduction réservés pour tous pays. Il est strictement interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur ou des auteurs, de reproduire partiellement ou totalement le présent ouvrage, par quelque procédé que ce soit (et notamment par photocopie ou numérisation), de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public. Une copie ou reproduction constitue une contrefaçon passible des peines prévues par la loi du 11 mars 1957 sur la protection des droits d’auteur. Les commentaires qui accompagnent les articles ont été rendus publics sur le site à la demande de leurs auteurs et sont reproduits ici en accord avec les conditions générales du site. Leurs auteurs ont majoritairement choisi de les publier sous pseudonyme ou anonymement ; les identités des autres ont été, dans le présent ouvrage, remplacées par leurs initiales. Nous publions les URL des articles au cas où certains lecteurs souhaiteraient réactiver certaines discussions. Les interventions qui ne respectaient pas les règles de la nétiquette, ou trop laconiques, de même que celles présentant trop de fautes d’orthographe n’ont pas été reproduites ici. Nous assumons notre subjectivité dans le choix des interventions conservées ici. L’intégralité est toujours consultable en ligne. ISBN : 978-2-930750-01-9
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TABLE DES MATIÈRES PRÉFACE : TINTIN AU CONGO, LE MAL AIMÉ ...................................... 6 1 TINTIN AU CONGO CLASSÉ "BD POUR ADULTES" EN GRANDEBRETAGNE .............................................................................................. 8 2 L’AFFAIRE TINTIN AU CONGO PREND UN TOUR JUDICIAIRE ........ 12 3 L’AFFAIRE TINTIN AU CONGO : UN SOUPÇON DE MANIPULATION ? ................................................................................. 31 4 "TINTIN DOIT-IL DEMANDER PARDON ?" ....................................... 35 5 TINTIN AU CONGO : LA CRISPATION DES BELGES ........................ 41 6 BIENVENU MBUTU MONDONDO : "CETTE BANDE DESSINÉE EST RACISTE". .............................................................................................. 48 7 MARCHE ET SIT-IN À BRUXELLES ET À KINSHASA CONTRE TINTINAU-CONGO-LE-COLON ...................................................................... 65 8 AFFAIRE TINTIN AU CONGO : SIT-IN SOUS LA PLUIE ..................... 74 9 L’ÉDITEUR AMÉRICAIN LITTLE BROWN RENONCE À PUBLIER TINTIN AU CONGO .............................................................................. 83 10 L’AFFAIRE TINTIN AU CONGO EN PASSE DE REBONDIR DEVANT LES TRIBUNAUX FRANÇAIS. ................................................................. 90 11 TINTIN AU CONGO COLONISE AUSSI LE DÉBAT EN SUISSE ! ..... 94 3
12 L’AFFAIRE TINTIN AU CONGO PASSE EN JUGEMENT À BRUXELLES ............................................................................................ 99 13 AFFAIRE TINTIN AU CONGO : FRÉDÉRIC MITTERRAND APPELLE À "NE PAS BANALISER LA CENSURE ” ................................................. 107 14 LES ACTIONS JUDICIAIRES CONTRE MOULINSART COMMENCENT À FAIRE DES VAGUES AUX USA ............................. 115 15 AFFAIRE TINTIN AU CONGO : BIENVENU MBUTU MONDONDO ÉCRIT AU ROI DES BELGES ................................................................ 126 16 L’AFFAIRE TINTIN AU CONGO TOURNE À LA FARCE JUDICIAIRE ............................................................................................................. 131 17 AFFAIRE TINTIN AU CONGO : LES PLAIGNANTS EXIGENT LES PIÈCES ................................................................................................. 136 18 ACTUABD.COM ET TINTIN AU CONGO SUR FRANCE INFO ...... 140 19 TINTIN AU CONGO : L’AMBASSADEUR DU CONGO À BRUXELLES DEMANDE À SON TOUR L’INSERTION D’UN AVERTISSEMENT ...... 156 20 AFFAIRE TINTIN AU CONGO : "LE SOIR" INSTRUIT LE DOSSIER 163 21 AFFAIRE TINTIN AU CONGO : BIENVENU MBUTU MONDONDO ET LE CRAN DÉBOUTÉS DE LEURS PREMIÈRES DEMANDES ................ 171 22 TINTIN VA ÊTRE JUGÉ POUR "RACISME” .................................... 174 23 LA JUSTICE BELGE A TRANCHÉ : TINTIN AU CONGO N’EST PAS RACISTE............................................................................................... 188
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24 TINTIN AU CONGO : QUE VEUT RÉELLEMENT LE CRAN ? ......... 193 25 TINTIN "TROP RACISTE" POUR LA BIBLIOTHÈQUE POUR LA JEUNESSE DE STOCKHOLM ?............................................................ 196 26 BRUXELLES : APPEL CONTRE TINTIN AU CONGO ...................... 200 27 TINTIN AU CONGO — "PAS RACISTE", DIT LA COUR D’APPEL DE BRUXELLES .......................................................................................... 203 EPILOGUE : TINTIN, TOUJOURS EN HAUT DE LA COTE .................. 212 POSTFACE : TOUT ÇA POUR ÇA ? ..................................................... 215 A PROPOS D’ACTUABD ...................................................................... 217 LES AMIS D’HERGÉ ............................................................................. 218
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PRÉFACE :
TINTIN AU CONGO , LE MAL AIMÉ Second album d’Hergé après Tintin au Pays des Soviets, Tintin au Congo est une suite de péripéties sans véritable lien, fondée sur les nombreux clichés que véhiculaient les livres scolaires et la presse sur le Congo alors belge. À ce titre, c’est un document sur l’image qu’avaient les Belges des années 1930 de l’Afrique colonisée et de ses habitants. Raciste et caricaturale. Après Tintin au Pays des Soviets, c’est le second livre maudit d’Hergé. Les déboires débutèrent au début des années soixante. En pleine période de décolonisation, la vision du "Noir" (inculte, sauvage et pas très futé) et du "Blanc" (supérieur, intelligent et civilisé), le parler "petit nègre", faisaient tache et l’on fit pression sur Casterman pour qu’il le retire de la vente. Il fut longtemps épuisé. Une décision revue quelques années plus tard, Tintin au Congo rejoignant les autres albums dans l’édition traditionnelle à dos carré. Régulièrement, le sujet refit surface, certains demandant un message d’avertissement, d’autres une censure pure et simple, d’autres encore une mise à l’index avec interdiction à la vente, à la lecture en bibliothèque... on échappa jusqu’à présent à 6
l’autodafé. Hergé, conscient que cet album des débuts contenait des passages trop influencés par l’imagerie coloniale de l’époque, s’était autocensuré et, au fil des rééditions, avait transformé les passages les plus litigieux. Casterman a toujours maintenu le cap et résisté au "politiquement correct" ambiant, réimprimant régulièrement cette œuvre de jeunesse d’Hergé, l’une des seules à avoir été complètement redessinées pour l’édition en couleurs. Et nous offrant même, en 2004, une superbe réédition en fac-similé à dos jaune de la première édition retravaillée, démontrant ainsi que l'intérêt pour cet album ne se tarit pas. Trois ans plus tard, ce qui devint finalement "L’Affaire Tintin au Congo" éclatait, par une plainte déposée par un citoyen congolais contre la société Moulinsart et l'éditeur Casterman. Cette affaire fut suivie et commentée sur le site Actuabd.com. Nous vous proposons de la revivre au travers des divers articles qui se sont succédé ainsi que des extraits des débats parfois très animés, mais souvent d’un haut niveau qu’ils ont provoqués dans le forum qui leur fut chaque fois consacré. Ils sont à prendre avec les précautions d’usage lorsqu’on consulte un forum. Cette compilation de ces articles est réalisée à l’occasion du 20e anniversaire du site www.actuabd.com. Patrick Pinchart Éditeur À propos des commentaires des internautes Il n’est pas simple de retranscrire dans un livre la vivacité des échanges sur Internet. Nous avons choisi de reprendre la structure indentée qui aide à comprendre qui répond à qui : une réponse à un message est systématiquement décalée vers la droite. Nous avons corrigé partiellement, dans la mesure du possible, l’orthographe et la ponctuation, mais nous n’avons pas voulu réécrire les propos. Une grande indulgence est donc demandée dans la lecture de ceux-ci. Les messages en langage SMS ont, par contre, été supprimés.
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TINTIN AU CONGO CLASSÉ "BD POUR ADULTES" EN GRANDE-BRETAGNE 1 12 juillet 2007 La Commission pour l’égalité raciale anglaise a été contactée en mai dernier par un client de Borders, une importante chaîne de librairies. Le client a visiblement été choqué par le caractère "raciste" de Tintin au Congo qu’il a trouvé dans l’une des librairies. La Commission s’est penchée sur le sujet. Une dépêche de l’AFP nous apprend que, selon les membres de l’institution, la vente de ce livre "dépassait l’entendement", compte tenu des éléments "potentiellement très choquants" qu’il contient. Un membre de la commission confie à l’AFP : "Ce livre contient des images et des dialogues porteurs de préjugés racistes abominables, où les "indigènes sauvages" ressemblent à des singes et parlent comme des imbéciles". L’éditeur suivit la recommandation de cette institution en demandant aux libraires
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http://www.actuabd.com/+Tintin-au-congo-classe-bd-pour-adulte-en-
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de ranger ces livres dans les rayons BD pour adultes ! Rappelons que la première mouture de cet album d’Hergé a été dessinée en 1930-31, à une époque où la Belgique était encore une puissance coloniale contrôlant le Congo. Après la guerre, Hergé, lui-même modifia certains aspects jugés trop racistes lors des refontes des premières aventures de Tintin. L’avis émis par cette commission pour l’égalité raciale anglaise prouve qu’il serait peut-être opportun pour ce type d’ouvrage d’ajouter une note expliquant le contexte dans lequel il a été créé. Nicolas Anspach et Didier Pasamonik (L’Agence BD) Extraits des commentaires du forum de cet article MD, 12 juillet 2007 Bien vu, et bonjour à nos amis Congolaises et Congolais ! Quand on parle du Congo et de décolonisation, il est facile de fustiger le passé de la colonisation française.... Il apparaît pourtant que la colonisation du Congo belge (ancienne propriété privée du roi Léopold II) fut l’une des plus sanglantes avec plus de 500 000 morts. Il semble que même la mollusque SDN se soit offusquée à l’époque de pratiques cautionnant exécutions sommaires de masse et mutilations (et j’en oublie le travail forcé et le droit de cuissage). Il est probable que le jeune et influençable Hergé ait relayé les lectures de l’époque. Il ne fut sans doute que la victime de son environnement et de l’abbé Wallez. L’important est qu’en vieillissant, il ait également pris plus de maturité, pour finir par offrir au final une œuvre pleine d’humanisme et de tolérance. M, 9 décembre 2009 Léopold II envoya les sergents Lippens et Debruyne dans le but de l’informer de l’esclavagisme pratiqué par les Maures au Congo ! Les Belges n’ont jamais coupé de mains de Congolais, les Belges ne sont pas des barbares ! Le roi Léopold II n’a pas volé l’or du Congo pour construire le palais de justice de Bruxelles ! Veuillez vous référer à tout ce que les Belges ont laissé au Congo : machines, argent, etc. Des centaines de coloniaux ont laissé leur santé, voire 9
leur vie au Congo ! Mon père a passé 33 ans de sa vie au Congo ! En 1960, il a fui pour ne pas être massacré par les hommes léopards. Et, moi mulâtresse Mema, il m’a emmené en Belgique. Ma mère et toute sa tribu ont été massacrées par des Congolais ! Les Belges, s’ils n’étaient pas tous parfaits, n’ont jamais massacré de Congolais. Mais moi, jeune, j’ai été malmenée et violée par des Congolais ! Je suis une Hema de l’Ituri, je n’ai jamais eu de bonnes nouvelles ni revu ma mère ! Ici, en Belgique je me suis aperçue que les Belges sont une peuplade de gens accueillants, honnêtes, non profiteurs. Je ne puis tolérer que l’on salisse la race de mon père ! Je ne puis tolérer que l’on tache la réputation de feu le roi Léopold II. Je crois que les Blancs-becs qui se paient le luxe de dire des ignominies sur le dos des Belges, devraient suivre une formation axée sur la colonisation belge. Cela leur ferait grand bien ! Bien entendu, la Belgique, pays démocratique, ne va pas tolérer que ce que j’écris dans la présente réponse soit lu par tout un chacun ! JL, 13 juillet 2007 Mettre un avertissement ? Excellente idée... qu’a eue l’éditeur en publiant en 2005 cette première traduction anglaise de la version en couleur ! Placée en ouverture de l’album, la mise au point, qui retrace la genèse de la parution de cette aventure, s’achève ainsi : "In his portrayal of the Belgian Congo, the young Hergé reflects the colonial attitudes of the time. He himself admitted that he depicted the African people according to the bourgeois, paternalistic stereotypes of the period—an interpretation that some of today’s readers may find offensive. The same could be said of his treatment of big-game hunting." De plus une bande rouge entourant l’album le qualifie de "Collector’s Édition". Apparemment cette précaution n’a pas suffi à désarmer les ligues de vertu... WK, 28 décembre 2009 Des livres, plus vendus que Tintin, devraient comporter une bande de mise en garde, car ils comportent des lignes contraires aux droits universels de l’Homme et de la Femme, et à la Constitution française. 10
Ces livres sont certains livres religieux, parmi les 87 religions, dont un la Bible. Mais dire cela est politiquement incorrect, mais laĂŻque.
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2 L’AFFAIRE TINTIN AU CONGO PREND UN TOUR JUDICIAIRE 2 7 août 2007 Jusqu’où faut-il aller dans la repentance ? "Il faut la dépasser", affirmait le président français Nicolas Sarkozy dans son discours prononcé en juillet 2007 à l’Université de Dakar. Ce n’est pas l’opinion des éditeurs anglais et sud-africain de Tintin, ni celle d’un étudiant congolais qui vient de porter plainte à Bruxelles contre Tintin au Congo pour "racisme". L’affaire enflait depuis le printemps dernier. D’abord en Angleterre, ainsi que nous vous l’avions rapporté, où un signalement avait été formulé auprès de la Commission britannique pour l’égalité raciale, laquelle avait jugé que l’album Tintin au Congo, créé par Hergé en 1931 et diffusé quasiment sans interruption depuis, "dépassait l’entendement", en raison de "préjugés racistes" abominables, où les "indigènes sauvages ressemblent à des singes et parlent comme des imbéciles". En conséquence de quoi, la chaîne de librairie Borders avait classé l’ouvrage dans la section "pour adultes".
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http://www.actuabd.com/L-Affaire-Tintin-au-Congo-prend-un-tour-judiciaire
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C’est ensuite, le 28 juillet dernier, l’éditeur sud-africain Human & Rousseau qui renonçait à une édition de l’album en afrikaans, car son éditeur s’est soudain rendu compte que la publication de cet ouvrage publié dans une langue qui était celle de l’oppresseur blanc pouvait être mal interprétée par certaines catégories de la population (l’étude obligatoire de l’afrikaans à l’exclusion de tout autre idiome à l’université avait été à l’origine des émeutes sanglantes de Soweto le 16 juin 1976). Dans le même mouvement, le grand éditeur Penguin signalait que la diffusion de l’édition anglaise en Afrique du Sud ferait l’objet d’un avertissement informant le lecteur du "caractère raciste" de certaines scènes de l’album. Plainte pour "racisme" à Bruxelles C’est aussi, si l’on en croit l’agence Belga qui l’annonce aujourd’hui, une plainte, formulée le 23 juillet dernier, à l’encontre de Moulinsart, la société qui gère les droits d’Hergé, par un citoyen congolais résident à Bruxelles, M. Mbutu Mondondo Bienvenu, auprès du tribunal de première instance de Bruxelles. Le plaignant juge l’album "raciste et xénophobe". "Ce sont les thèses racistes qui ont servi de support à l’idéologie politique pour pratiquer des discriminations sociales, des ségrégations ethniques et commettre des violences, dont des actes de génocides". "Mission sacrée de civilisation entre 1885 1960", commente-t-il pour appuyer son action en justice. Il se réfère à la décision de la Commission britannique pour l’égalité des races et ajoute qu'Hergé lui-même reconnaissait que cet album était le produit de ses préjugés. En conséquence de quoi, notre citoyen congolais réclame 1 € de dommages et intérêts. Condamner l’air du temps Si effectivement, Hergé, qui déclarait en 1974 à Henri Roanne "ne pas aimer les coloniaux", reconnaissait qu’il ne pouvait à l’époque s’empêcher de "considérer les Noirs comme de grands enfants", l’auteur n’était, selon son biographe Benoît Peeters, 13
"pas plus raciste que les autres"3. Car là est la question. Que va-ton demander aux juges ? De condamner l’air du temps ? M. Sarkozy, le 26 juillet dernier, tenait ces propos aux jeunes étudiants venus l’écouter à l’université de Dakar : "Jeunes d’Afrique, je ne suis pas venu vous parler de repentance. Je suis venu vous dire que je ressens la traite et l’esclavage comme des crimes envers l’humanité. Je suis venu vous dire que votre déchirure et votre souffrance sont les nôtres et sont donc les miennes. Je suis venu vous proposer de regarder ensemble, Africains et Français, au-delà de cette déchirure et au-delà de cette souffrance. Je suis venu vous proposer, jeunes d’Afrique, non d’oublier cette déchirure et cette souffrance qui ne peuvent pas être oubliées, mais de les dépasser." Cette allocution avait été vivement critiquée par la presse sénégalaise. Une évolution des mentalités accompagnée par la bande dessinée De son côté, l’historien Sylvain Venayre, commissaire de l’exposition qui a eu lieu à Charleroi en février 2005, Le Remords de l’homme blanc, déclarait dans nos colonnes, en plein débat sur le "caractère positif de la colonisation" : "Les stéréotypes racistes qui accompagnèrent la colonisation à partir de la seconde moitié du XIXe siècle furent très largement portés par l’image : les dessinateurs, les caricaturistes du tournant des XIXe et XXe siècles, portent ainsi une grande part de responsabilité dans la diffusion de ce discours raciste." Mais il ajoutait que depuis, des œuvres militantes, comme Les Passagers du vent de François Bourgeon (Casterman) ou encore Deogratias de JeanPhilippe Stassen (Dupuis), ont fait ce travail d’analyse et de mémoire qui rétablit l’image des artistes de bande dessinée. Il reste que, même si cette plainte est compréhensible, elle est
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In Benoît Peeters, Hergé, fils de Tintin, Flammarion, Paris, 2002, p.79.
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dénuée de bon sens. Si elle devait aboutir, des pans entiers de notre culture, de Voltaire à Kipling, de Rubens à Ingres, devraient être enfermés dans l’enfer des musées et des bibliothèques. En revanche, il serait bienvenu que des œuvres véhiculant des stéréotypes racistes, c’est le cas pour les albums d’Hergé, mais aussi pour certains titres de Jijé ou d’Hubinon, pour ne citer que quelques classiques de l’école belge, soient accompagnées d’éléments qui permettent d’identifier clairement le contexte de leur réalisation, au besoin par l’adjonction d’un feuillet pédagogique. Les nouveaux lecteurs n’auraient alors pas seulement le privilège d’accéder à un classique, ils apprendraient aussi l’histoire. Didier Pasamonik (L’Agence BD) Extraits des commentaires du forum de cet article Poisson radieux le 8 août 2007 "Si elle devait aboutir, des pans entiers de notre culture, de Voltaire à Kipling, de Rubens à Ingres, devraient être enfermés dans l’enfer des musées et des bibliothèques." L’hyperbole de nature purement rhétorique de votre phrase ne doit quand même pas faire oublier que le vrai problème réside peut-être dans l’attitude des éditeurs d’Hergé, qui maintiennent depuis des années dans une collection grand public, et sans contextualisation historique (que vous avez raison d’appeler de vos vœux) une bande dessinée qui, malgré ses "révisions" successives reste, on peut tout de même le comprendre, assez choquante pour certains. Je ne parlerai même pas de l’incorporation récente de Tintin chez les Soviets dans la collection principale, quand Hergé lui-même n’en avait accepté la republication qu’en fac-similé, après bien des hésitations, et pour mettre fin au trafic des collectionneurs. Vous citez Jijé et Hubinon, mais l’audience de leurs vieux albums n’est quand même pas la même. Autre chose : j’ai toujours été frappé quant à moi de l’inanité de l’argument visant à cantonner le racisme (il est vrai assez bonhomme) d’Hergé au seul Tintin au Congo, quand Coke en Stock, par exemple, sous des dehors de dénonciation de l’esclavage moderne, véhicule 15
encore une image dévalorisante et infantilisante des Africains (Hergé a raison de dire qu’il les voit comme de grands enfants) : "Nous y en a êt'e bons c'oyants, nous vouloi' aller à la Mecque". Didier Pasamonik le 8 août 2007 "Vous citez Jijé et Hubinon, mais l’audience de leurs vieux albums n’est quand même pas la même." Je suis d’accord sur le fait que l’audience n’est pas la même, mais ce ne sont pas des "vieux albums", ils ont été réédités récemment dans des compilations comme "Tout Jijé" ou "Tout Buck Danny". Arnaud le 8 août 2007 "Quand Coke en Stock, par exemple, sous des dehors de dénonciation de l’esclavage moderne, véhicule encore une image dévalorisante et infantilisante des Africains (Hergé a raison de dire qu’il les voit comme de grands enfants) : "Nous y en a êt'e bons c'oyants, nous vouloi' aller à la Mecque"." Tsss... tsss... relisez donc Coke en Stock !... Les Africains ne s’y expriment justement pas comme ça !... La citation exacte est : "Nous on est pas des ectoplasmes à roulettes, M’sieur. On est des bons musulmans. On veut aller à La Mecque." Où voyez-vous une image dévalorisante et infantilisante làdedans ?... Vérifiez vos sources !!! Poisson Radieux le 8 août 2007 OK, cette citation ne prétendait pas être exacte, et je n’ai pas pris le temps d’aller chercher l’ouvrage sur un rayonnage, l’ayant uniquement cité de mémoire. Mea culpa. Mais si vous ne voyez pas une image dévalorisante des Noirs dans la mise en scène de ces sombres crétins qui se font répéter vingt fois la même chose sans rien comprendre, je ne sais pas ce qu’il vous faut. Je tenais simplement à souligner qu'Hergé a, malgré l’image qu’on s’en fait, conservé jusqu’à la fin des stéréotypes raciaux qui, pour ne pas être haineux, n’en sont pas moins réels. Arnaud le 8 août 2007 Désolé, mais non... Les Noirs ne sont pas plus maltraités dans Coke en Stock que ne le sont les Sud-Américains dans les 16
Picaros, voire... les Belges, par l’intermédiaire de Séraphin Lampion, de la fanfare de Moulinsart, bref de tous les personnages qui ne font pas preuve immédiatement de la plus totale compréhension. Chacun sait de plus que Coke en Stock fait référence à des faits réels, et que donc l’idée de Noirs se faisant abuser par des trafiquants d’esclaves n’a malheureusement rien à voir avec des à priori raciaux chez Hergé !... Christophe K. le 8 août 2007 À propos de Coke en Stock : là aussi il y a différentes versions et dans les plus anciennes les Noirs libérés de la cale du Ramona s’expriment de manière plus "caricaturale" que dans les versions récentes, missié devenant monsieur, etc. Répondu par Poisson Radieux le 8 août 2007 Euh, non. Dans le cas des Arabes, des Belges, ou encore des Chinois, il y a collection d’individualités marquées, différentes. Dire qu'Hergé s’amuse à faire de l’humour de ces individualités-là, et aussi parfois des stéréotypes nationaux, je pense que tout le monde est d’accord. Dans le cas des Noirs de Coke en Stock toutefois, il y a un groupe indéterminé, qui agit comme masse (regroupé derrière son chef, ce qui ajoute à l’effet comique), et de plus, je maintiens, parfaitement crétin. Mettre les deux sur le même plan n’a pas grand sens à mon avis. Ces Noirs-là sont les mêmes que ceux de Tintin au Congo, et n’ont pas changé d’un iota. La remarque du lecteur précédent me semble d’ailleurs conforter mon opinion làdessus. Qu’on s’entende bien, je ne suis pas de ceux qui mettent Hergé sur le même plan que Gobineau, et je sais parfaitement faire la part de l’héritage politico-culturel et du contexte de l’époque. Cette histoire de procès n’est pas bien sérieuse et je pense, comme je l’ai dit plus haut, qu’il est de la responsabilité de l’éditeur de contextualiser cette œuvre pour la rendre accessible au public. Mais citez-moi une seule page d’Hergé (vous avez la part belle, il y a très longtemps, vingt ans au moins, que je n’ai pas relu certains albums, notamment Jo Zette et Jocko) qui contredise cette représentation des Noirs 17
et je vous donnerai raison, si je suis convaincu. Pour Coke en Stock... Sergio S. le 9 août 2007 Acceptons une fois pour toutes qu'Hergé fut raciste. C’était un assez jeune artiste qui s’amusait en dessinant. Je trouve absurde de penser que l’on doive contextualiser et tempérer notre jugement parce qu’à l’époque il reflétait la majorité ou un grand courant d’opinion. Ça reviendrait alors à accepter et comprendre bien des génocides ou autres horreurs qui étaient aussi le reflet de la majorité des opinions (et aussi que la Terre était plate). Je tiens à dire que je suis un admirateur de l’œuvre d’Hergé. Autant le fond de sa pensée était réactionnaire autant sa forme était novatrice ; son dynamisme, sa liberté (revoyons les autres bandes dessinées ou autres illustrés de l’époque), à part Saint-Ogan en Europe, ils avaient tous 20 ans de retard sur lui. Ils bousculaient les codes, ravageaient le médium, se moquaient des conventions et profitaient (en les inventant) des possibilités de ce qu’on n’appelait pas encore le 9e art. Ce n’est pas George Rémi qui m’intéresse. Lui il pense ce qu’il veut. C’est Hergé que je lis. Pour revenir à cet album-là, il est curieux que l’affaire qui nous préoccupe et sur laquelle on attire l’attention soit cette vision rétrograde et douteuse de la relation Noir/Blanc. Étant petit ce qui m’avait choqué dans Tintin au Congo c’était la violence extrême dont fait preuve Tintin envers les animaux. Il les explose, les dézingue, les extermine. Il est condescendant avec les hommes qu’il rencontre, il est sanguinaire avec les animaux. Ça ne choque personne ? En ces temps de préservation de la nature en danger... Pour terminer mon intervention, je voudrais aussi exprimer une opinion sur toutes les bandes dessinées d’aventures (et tant qu’on y est incluons aussi les romans, les films...) Quand l’ Occident friand d’histoires envoie par l’intermédiaire de ses créateurs (écrivains, dessinateurs, cinéastes) ses héros dans les jungles et les déserts, il met en scène un monde rêvé, plein de promesses parfumées 18
d’exotisme. J’ai toujours considéré que l’aventure, et le genre en luimême étaient un peu "racistes". Pourquoi ?! Parce que chaque fois qu’intervient l’autre, l’étranger, c’est qu’il y a un souci. L’étranger est synonyme de problème, d’énigme, bref de complication. Que tout ça soit fait sous couvert d’humour est évident, il n’empêche que ces millions d’histoires sont racontées à des millions d’enfants ou d’adultes qui, je pense, inconsciemment, acceptent l’idée dans leur for intérieur qu’il vaut mieux rester chez soi et que tous ces pays lointains font peur autant parce qu’ils sont peuplés d’animaux sauvages et venimeux que d’êtres pas tout à fait comme nous. La misère et la magouille y règnent en maîtres, ils sont tous obligés de survivre et sont dangereux justement parce qu’ils sont en danger. On passera sa vie en faisant des voyages pour désapprendre toutes ces bêtises. PPV le 9 août 2007 M. S. : Ahem ! Comparer une vue paternaliste des Africains telle que l’avait Hergé et des millions d’autres de son temps aux génocides de masse en prenant appui sur votre opinion qu’ils étaient acceptés parce que le reflet d’une époque me laisse pantois... Voilà un raccourci bien péremptoire ! Arnaud le 9 août 2007 "Mais citez-moi une seule page d’Hergé qui contredise cette représentation des Noirs et je vous donnerai raison." Sur un cas légèrement différent, mais néanmoins proche, Hergé dénonce clairement les lynchages de Noirs dans Tintin en Amérique... Rappelez-vous... Un bandit mexicain a braqué une banque, tue le directeur, et Tintin est accusé, car le bandit a échangé ses chaussures avec lui pendant qu’il dormait. Or au début de cette histoire, une case montre l’employé de la 19
banque dialoguant avec la police : Employé de Banque : "ce matin, lorsque je suis arrivé à la banque, comme d’habitude, j’ai trouvé le patron dans cet État, et le coffre-fort ouvert… J’ai donné l’alarme. On a immédiatement pendu sept nègres, mais le coupable s’est enfui…" J’admets que ça n’est pas tout à fait l’exemple que vous demandiez, mais tout de même... la prise de position est claire. On pourra noter aussi quelques personnages noirs dans Le Crabe aux Pinces d’Or, ou l’Or noir, personnages secondaires certes, mais qui ne se signalent pas par une caractéristique particulière... Goldenfred (une minorité visible) le 8 août 2007 Cette plainte n’est certainement pas "dénuée de sens". On ne peut nier le besoin très légitime de certaines personnes qui tiennent à mettre, officiellement et judiciairement, l’accent sur les propos nauséabonds qui parsèment cette bande dessinée. Cette plainte relève plus d’une logique de non-indifférence symbolique que d’un acte "dénué de bon sens", la preuve étant que le plaignant semble réclamer 1 euro de dommages et intérêts. Cela n’a rien à voir non plus avec des pans entiers de notre culture d’il y a 100 ans ou plus et qui n’ont plus aucun écho direct sur les préoccupations d’aujourd’hui. Cela a à voir avec la culture populaire et certains objets ultradiffusés de cette culture populaire. On ne peut plus aujourd’hui diffuser et vendre à des millions d’exemplaires un disque, un film, ou une bande dessinée au contenu ouvertement raciste et/ou colonialiste, même d’un temps révolu. Attention, c’est une constatation et non un argument : le passé, qu’on le veuille ou non, est aujourd’hui soumis à une introspection qui ne fait que prendre de l’ampleur. C’est ainsi et il faudra faire avec, même si cela aboutit à des nonsens juridiques et génère des plaintes maladroites. Il y a derrière ce type de controverse un véritable problème de fond qui mêle culture, histoire, diffusion de masse et profit. Bref, un bon gros nœud difficile à démêler... mais un nœud réel. 20
Anonyme le 8 août 2007 "Diffusion de masse" dites-vous... À l’heure d’Internet, c’est amusant. Ceci dit le personnage de Tintin est effectivement très connu Mais l’album Tintin au Congo ? Ça se vend à qui et à combien d’exemplaires aujourd’hui ? Vous croyez vraiment que les gosses d’aujourd’hui lisent ça ? Et s’ils le lisent qu’ils ne lisent QUE ça ? Qu’ils n’ont pas d’autres sources, d’autres influences bien plus MASSIVES ? On peut aussi se demander ce qui conduit des libraires à coller Tintin au Congo au rayon enfants et qu’on soit obligés d’en passer par le juge pour gérer des linéaires... Xav K. le 8 août 2007 J’aurais plutôt préféré que le type qui a porté plainte contre Hergé souligne le parcours individuel de l’homme, qui, à moins de 20 ans, reflétait bien évidemment les idées reçues de son entourage (et le Petit Vingtième n’est pas le prototype des idées humanistes de l’époque...), pour aboutir à ce qu’est devenu Georges Rémi ensuite. Comme quoi l’être humain peut s’améliorer... Ceci dit, j’imagine que cette action a valeur de symbole et ne vise en aucune manière l’individu Hergé. Justice auxiliary le 10 janvier 2008 Je crains certains jugements hâtifs, qui accentuent la confusion sur l’affaire : (a) il ne s’agit pas d’un procès post mortem d’Hergé : le titulaire de l’action le sait. Il est faux de dire qu'Hergé soit mort. Sinon, son œuvre mourrait avec lui. Si elle continue "à être diffusée", comme pense le plaignant, c’est que l’auteur est encore vivant. Ce, à travers Moulinsart, son héritier. (b) À ce titre, Hergé peut-il répondre de ses propos "racistes", qui remontent d’une certaine époque et qu’il faut situer dans leur contexte, mais dont la rediffusion résiste au changement d’époques 21
et de mentalités ? C’est là le nœud ! Je trouve banal que l’affaire soit dite ridicule. Très banal qu’elle fasse l’objet d’un amalgame avec d’autres BD ou écrits du genre : toute affaire en Justice est toujours un cas particulier. Sauf clause de conscience, toute cause est défendable, en ce sens que celui qui assigne a le droit d’exposer et d’argumenter sa plainte, et l’accusé a le droit de présenter sa défense. Trouvez-vous donc que ni l’étudiant ni Moulinsart n’ont ces droits ? Je me réserve d’étaler ici ma vision des choses, sur une affaire si complexe, et souhaite bonne route aux borborygmes. Gill le 8 août 2007 Les passagers du vent est une de mes séries préférées. Pourtant, je me demande dans quelle mesure on ne pourrait pas lui reprocher un certain "révisionnisme", le regard de l’héroïne reflétant un État d’esprit humaniste typique de la fin du XXe siècle qui devait être extrêmement rare à l’époque et donc non représentatif. De même, la mise au placard de certaines œuvres ne serait-elle pas également un acte révisionniste ? Comment les générations à venir pourraient se faire une idée des mœurs d’une époque si les seuls récits disponibles sont tous revus et censurés selon les mœurs de NOTRE génération ? Deogratias ou Tintin au Congo apportent non seulement un témoignage des faits historiques, mais aussi et surtout des comportements qui prédominaient à l’époque. Tout comme le racisme ordinaire de l’affaire Dreyfus ou celui des studios d’Hollywood vis-à-vis des Amérindiens, par exemple (devrait-on supprimer la moitié des films de John Wayne ?). En ce sens, cet ouvrage est donc précieux, même si une datation claire et argumentée pourrait être ajoutée à destination d’enfants non encore avertis. PS : j’allais faire la même remarque concernant la citation du discours de Sarkozy. Comment une telle réponse pourrait-elle être hors sujet puisque l’extrait (non-représentatif puisque ne montrant pas les véritables raisons de la colère des journalistes africains) est lui-même DANS le sujet ? ;-)
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Laurent le 8 août 2007 Pourquoi mêler les Passagers du vent à cette histoire ? Au nom d’un prétendu révisionnisme qui n’existe que dans votre imagination ? Au XVIIIe siècle, les voix des abolitionnistes se faisaient déjà entendre. En 1776, l’Encyclopédie condamne l’esclavage et la traite. À partir de 1789, Brissot, Condorcet ou l’abbé Grégoire militent au sein des assemblées successives pour obtenir son abolition qui sera votée en 1794 par la Convention. Certes, cette position est probablement minoritaire (on dirait aujourd’hui très parisienne) et le Consulat rétablira l’esclavage. Mais il est totalement stupide de parler de révisionnisme parce que Bourgeon campe quelques personnages humanistes au siècle des Lumières. Et pour sortir un peu hors de France, la traite sera abolie entre 1807 et 1815 par les puissances occidentales (Europe + USA), décision qui n’a pu être obtenue qu’à condition qu’un courant d’opinion y soit favorable. Anonyme le 8 août 2007 Interrompre la parution de Tintin au Congo ? Cela me semble irraisonnable, au vu des arguments (bien vus) selon lesquels il s’agit d’une vision de l’époque. Par contre il serait en effet très bien qu’une juridiction impose aux prochaines rééditions, dès à présent, de faire figurer au début de l’album un AVERTISSEMENT, pour que les lecteurs disposent dorénavant de toutes les clés nécessaires leur permettant de déchiffrer au mieux cette œuvre. Certes, d’aucuns opposeront que des tonnes de livres sont xénophobes et/ou racistes et toujours vendus, mais n’oublions pas que Tintin au Congo est lu avant tout.... par des enfants ! Un public cible peu informé (et pour cause) de ce qui s’est passé il y a un siècle dans les colonies ! François B le 8 août 2007 De même qu’il y a dans les ouvrages du Roi Léo en français un avertissement sur l’image caricaturale des Africains véhiculée par Tezuka à l’époque, cela ne me choquerait pas qu’il y a un avertissement dans les albums de Tintin au Congo... Les œuvres de Tezuka n’étant pas moins sacralisées et importantes que celles d’Hergé. L’essentiel est que les œuvres ne soient pas dénaturées 23
surtout. Mmarvin le 8 août 2007 L’annonce de cette plainte idiote est hélas révélatrice des temps actuels. Sous couvert de lutte pour l’Histoire et pour la morale, certains en profitent pour exorciser leur mal-être personnel ou pour se faire une publicité à bon compte. Ne réclamer qu’un euro en guise de dommages montre cependant qu’il n’a pas volonté d’enrichissement, ce qui est déjà ça. Mais en quoi l’album de BD peut-il être responsable du ressenti raciste vécu par cet étudiant ? Ne devrait-il pas porter plainte contre les partis xénophobes de son pays qui sont encore plus virulents qu’ici ? Pour ce qui est de l’album, il est vrai qu’il présente une vision raciale claire et nette, mais tous les auteurs ou presque de l’époque considéraient l’existence de races inférieures comme allant de soi. Nier cette évidence, c’est nier l’histoire de l’art, de la littérature et surtout, c’est nier l’évolution des idées et les fantastiques progrès accomplis dans ce domaine. Notre étudiant doit être bien médiocre pour avoir oublié qu’on ne doit jamais juger un homme ou une œuvre d’une autre époque avec les critères moraux de la nôtre. Pour finir, un avertissement sur le contexte est absolument acceptable, et ce ne serait pas une première. La réédition du Roi Léo de Tezuka porte une telle mention en page de garde, quoiqu’à la lecture du manga, les Africains ne me semblent pas franchement plus mal lotis que les chasseurs blancs qui eux en prennent pour leur grade... PVV le 8 août 2007 Tout ceci est parfaitement grotesque !!! La colonisation et le mode de pensée qui va avec ont disparu, mais ils ont bien existé ! Va-t-on parce que le monde a évolué (positivement, bien sûr !) renier toutes les expressions artistiques de cette époque, même si elle est révolue ? Ce serait une ineptie, et il est incroyable qu’on fasse un foin médiatique au sujet de cette lamentable affaire ! Wizburf le 8 août 2007 Cette affaire est effectivement récurrente. Je suis assez d’accord pour dire que juger une BD de 1930 avec les critères actuels n’est pas 24
adapté pour faire un procès de racisme. C’est le même principe que les débats sur l’utilisation du mot "nègre" dans les ouvrages d’avantguerre. Si je pense qu’un avertissement pourrait effectivement être utile en en-tête de ce livre de Tintin, je pense qu’il ne faut pas prendre les lecteurs pour des idiots non plus. Quand on lit Tintin en Amérique par exemple (quelle que soit la version), ou Tintin chez les Soviets, les jeunes lecteurs actuels se rendent immédiatement compte que ce livre est une grossière caricature (dans le cas de Tintin en Amérique, gangsters de Chicago, cow-boys, Indiens...). Je passe évidemment sur Le Lotus bleu et la domination japonaise en Chine... c’était déjà vrai il y a 20 ans alors a fortiori maintenant. Par contre, je voulais revenir sur le passage dans la salle de classe. Je trouve que la seconde édition est plus méprisante que la première. Les élèves ont l’air d’avoir dans les 8 -10 ans et Tintin enseigne 2 +2 à une bande d’ignorants... c’est plus "incisif", car sorti d’un contexte historique qui était lui évident, et surtout moins méprisant, de l’enseignement sur la Belgique. Flocon le 8 août 2007 Tintin, vous savez c’est déjà de l’Histoire ancienne pour nombre de jeunes lecteurs. Dans 70 ans que dira-t-on de Titeuf ou du Petit Spirou. Il est dommage que seuls des "scandales" de ce genre soient encore en mesure de nous rappeler que cette vieille icône presque aussi décrépie et oubliée que Bécassine ait un jour existé. DEBAES le 8 août 2007 Il est dommage que l’on puisse juger des situations antérieures avec les critères actuels. Il faut également dire au plaignant que les lois avec effet rétroactif n’existent pas ; et que le racisme était totalement absent dans les actes et amitiés d'Hergé. Il est désolant de devoir constater qu’actuellement on peut être traité de raciste par des personnes incapables de recul et d’humour dans leur jugement ! Ces personnes sont-elles complexées et voientelles des intentions racistes dans tout ce qui ne leur plaît pas ????? G.De Baes
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Anonyme le 9 août 2007 Il y a des albums qui sont racistes du titre à la dernière case. "Les blagues belges" par exemple. Mais cela semble être du racisme toléré. C’est assez surprenant ces différences de jugements Anonyme le 9 août 2007 Bonne remarque ! Et si on faisait un procès posthume à Coluche pour avoir lourdement mis 50 couches sur les Belges ? Il les a suffisamment traités de cons, et personne à part les Belges bien sûr n’y ont rien trouvé à redire parce que cet humour lourdingue et franchouillard était le reflet de son temps ! Mieux encore : aujourd’hui quand on parle de Coluche, on se souvient — à juste titre !!! — de ses actions pour les démunis et non de ses moqueries sur un peuple ! Et ne souriez pas, ce n’est pas si différent !!! Icecool le 11 août 2007 Toute cette affaire est intéressante sur bien des points : – Elle permet de faire comprendre en 2007 toute la valeur de la bande dessinée, qui a la puissance d’une œuvre sociale, politique et bien sûr artistique. Tintin est un mythe, ancré dans un contexte donné, et est attaquable en tant que tel (au même titre que le visage "noir" rieur de Banania...). – Pour revenir sur Tintin au Congo, il faut dire quand même qu’il disparut assez longtemps des linéaires "enfantins" dans les années 1950 (devenant aussi introuvable que Les Soviets...) et qu’il ne réapparut pour la première fois que... dans une revue zaïroise ! Y voir aujourd’hui autre chose qu’un document finalement historique sur l’imaginaire africain pour le continent européen de l’époque empli d’images d’Épinal (du missionnaire à la mine de diamants et des crocodiles aux chasses au lion) est finalement ne rien saisir de l’Histoire. Noirs, Jaunes, Rouges ou blancs sont chez Hergé aussi caricaturaux les uns que les autres, tous capables d’héroïsme, de traîtrise, de lâcheté ou d’amitié sincères... L’album, comme on le sait a été revisité afin d’en "gommer" l’idéologie, mais cela n’a rien de plus raciste que les modifications politiques apportées en 1969 à Tintin au pays de l’or noir ou à la modification du nom juif dans L’étoile mystérieuse... Il y a un peu plus à 26
dire par contre sur Coke en Stock que dit précédemment puisqu’à l’origine, les Noirs enfermés y parlaient bien façon "petit nègre". Dans la version modifiée de 1970, leur phrasé est atténué (le plus drôle étant que Haddock continue de leur répondre à la sauce "petit nègre"...). N’oublions pas quand même qu'Hergé avait clairement décidé pour cet album de dénoncer l’esclavage moderne, ainsi que le trafic d’armes. – Dernier point de détail sur Tintin au Congo, Tintin y décime effectivement un contingent animalier (de manière cependant volontairement caricaturale), à tel point que la scène surréaliste de l’explosion du rhinocéros fut modifiée dans les pays scandinaves au profit d’un simple coup de feu involontaire (qui fait fuir l’animal...). Plus tard, notre héros se révèlera plus enclin à la protection animale comme à celle de la planète. Au-delà du ridicule de cette affaire, qui ressurgit des placards régulièrement, il faudrait effectivement se demander combien d’enfants lisent aujourd’hui cet album et combien le prennent au 1er degré : dans ce cas, la Gaule d’Astérix est toujours occupée, mais sauvée par la potion, Baba dans Barbe Rouge impressionne beaucoup, mais a l’air sympa quand même, Buck Danny nous sauve des Japs — pardon, des Jaunes (comme dans Blake et Mortimer...) et Lucky Luke fume toujours trop (sans parler d’un sale gosse qui suce un canon de revolver...), tue tout le monde et a des relations ambigües avec le peuple indien... Tout cela n’est-il que des "Petits Miquets" ou la "représentation sociale et caricaturale de l’impérialisme (occidental) sur le monde consumériste et industrieux des mass médias modernes" ?! Alex le 12 août 2007 Contrairement à ce que conclut "icecool" je ne pense pas que cette affaire soit ridicule. J’avais "presque", moi-même, une opinion. Mais le problème est si complexe que je ne puis que partager avec vous mes soliloques. D’abord, pour les plus jeunes, la controverse sur l’idéologie de Tintin n’est pas nouvelle. Déjà dans les années 1970 nous nous insurgions contre le racisme, le colonialisme et l’impérialisme suintant-le lisions-nous — de ces bds (Donald/Picsou inclus... même et surtout par Carl Barks !) Tintin, j’ai apprécié vraiment et librement vers 20 ans, mais les souvenirs d’enfance de mes lectures non entachées de réflexions 27
politiques sont inégalables quant à la construction de mon imaginaire. Alors, Tintin au Congo... Je ne vais pas regarder dans l’album — et là est le point : il y a un Noir avec une boîte de conserve sur la tête, Milou a les pattes qui sortent d’un boa, Tintin tue 20 antilopes, et les Noirs pleurent à la fin en disant "Tintin y’en a grand Boula Matari". Tout ça était très, très incompréhensible, effrayant et merveilleux à lire comme gamin. Il n’y a pas longtemps, mon fils de 12 ans a lu Tintin chez les Soviets : il riait aux larmes face à la simplicité naïve de cet album. J’aime à croire que l’intelligence et le savoir naissent grâce à nos lectures. Comme mentionné plus haut, je ne sais que penser... Un avertissement me semblait la bonne solution à un moment. Les fans de bd américaines furent très actifs aux débuts de l’Internet, scannant péniblement toutes les bds des 30's- 40's (les Mystery Men, ancêtres de nos superhéros), et accompagnant à CHAQUE fois leurs reproductions d’une mise en garde que ces BDs représentaient le mode de pensée d’une époque ("singes jaunes", etc.) Si vous voulez revenir quelques paragraphes plus haut, vous verrez que la critique contre Tintin n’est pas nouvelle, or rien n’a était entrepris ni par les Studios Hergé ni par Casterman ni Moulinsart — jamais ! Quelques corrections cosmétiques, mais à mon avis plus dans un but d’actualisation (et de profit) que d’une véritable volonté de confrontation politique. Je suis moi-même très perplexe quant à la progression philosophique d’Hergé — et de son œuvre. J’y lis surtout l’échappatoire d’un homme fuyant les responsabilités... C’est mon analyse. Maintenant, pour revenir au cœur du sujet, est-ce que la plainte de M. Mbutu Mondondo Bienvenu est... bienvenue ? Je ne le crois pas. Les victimes du colonialisme sont multiples. Personnellement, fils d’un ancien combattant des colonies, je puis mais ne désire pas raconter les séquelles d’une telle politique. Dans une guerre il n’y a jamais de gagnant, pas dans la famille de M. Bienvenu, pas dans la mienne. Philippe le 18 août 2007 Le passage de l’Étoile mystérieuse, dans sa première édition, 28
dénoncée dans Les Grands Mythes de l’Histoire de Belgique, pages 281 à 289 est des plus intéressant pour affiner son approche du personnage d’Hergé. Didier Pasamonik le 18 août 2007 Absolument. Mais ce qui est plus fondamental dans ce texte de Joël Kotek, c’est sa démonstration : comment Tintin est devenu le mythe de remplacement de la Belgique unitaire. J’aime beaucoup, même si elles sont parfois imprécises, ses réfutations magistrales des thèses de Frédéric Soumois, "l’exemple type du spécialiste complaisant" (p. 282) ou encore de celles de Jan Baetens qui prétend que ce sont moins les œuvres d’Hergé que les lectures qui en sont faites qui sont idéologiques (p.283). On croit rêver. Mentionnons enfin les références de l’ouvrage : Anne Morelli (dir. ouvrage collectif), Les Grands Mythes de l’histoire de la Belgique, de Flandre et de Wallonie, Éditions Vie ouvrière, 1995 Anonyme le 18 août 2007 Au train où vont les choses, il finira bien par y avoir une perquisition chez un individu avec un gros titre dans le journal le lendemain dénonçant un criminel éhonté, sans aucun doute justifiant le retour de la peine de mort, détenant chez lui des preuves manifestes de sa haine envers le peuple Noir, puisqu’on avait trouvé dans la bibliothèque de son fils (circonstance aggravante...), l’album Tintin au Congo... Les Beatles avaient vu leurs disques détruits uniquement parce que Lennon avait déclaré que le groupe était plus populaire que le Christ. On était en droit de penser que la société avait évolué depuis. Il est donc de plus en plus évident qu’Audiard avait raison : le jour où la connerie sera mise en orbite, certains n’auront pas fini de tourner. Marie M le 18 août 2007 Hergé répondait lui-même aux questions sur le racisme lors d’une émission Radioscopie du 9 janvier 1979. Jacques Chancel était à Bruxelles. Voici l’extrait retranscrit : Jacques Chancel : "Alors, j’ai regardé l’album qui donne une nouvelle vie à vos premières aventures, je pense à Tintin chez les Soviets, Tintin au Congo et Tintin aux États-Unis, je crois, alors je suis frappé par une tendance politique que vous aviez qui, peut être, n’est 29
plus celle que vous avez aujourd’hui. Vous étiez particulièrement raciste à l’époque ! Tintin chez les Soviets, c’était de l’anticommunisme primaire, Tintin au Congo, alors là c’était le petit Noir… vous vous preniez pour un vrai Blanc…" Hergé : "Oui oui, bien sûr, mais je pense que je ne me singularisais pas. Je crois que tout le monde à l’époque était d’abord anticommuniste, ou plus exactement, dans le cas du 20e siècle, antibolchevique, l’homme au couteau entre les dents…" Jacques Chancel : "C’était en 1929." Hergé : "C’était en 1929 ne l’oublions pas et quant au Congo bien il allait de soi, ça paraissait aller de soi que de depuis toute éternité les Noirs étaient faits pour servir les bons Blancs qui étaient là-bas. Enfin nous leur envoyions d’ailleurs de bons missionnaires, des hôpitaux, des chemins de fer, que sais-je encore, tous les bienfaits entre guillemets de la civilisation. Donc j’étais colonialiste comme tout le monde était colonialiste. Il y avait une loterie coloniale en Belgique, il y avait votre exposition coloniale à Paris. Tout ça allait de soi, semblait-il ! " Jacques Chancel : "En toute honnêteté ? " Hergé : "En toute honnêteté ! " Jacques Chancel : "Alors ce qui est important c’est de savoir ce que vous êtes aujourd’hui. Si vous avez changé. " Hergé : "Ah mais évidemment. " Jacques Chancel : "Si vous vous êtes transformé ? Ce sont les événements qui vous ont fait changer ou votre nature était différente ? " Hergé : "Peut-être ma nature. Bien sûr les événements m’ont fait changer et puis j’ai évolué comme tout le monde évolue. " Le document est trouvable sur CD coédité par France Inter et l’INA. Titre : Hergé objectif radio. Celia le 22 avril 2008 Très, très intéressant d’avoir pensé à poster l’explication d’Hergé par lui-même, ce qui historicise le débat. Merci !!!!
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3 L’AFFAIRE TINTIN AU CONGO : UN SOUPÇON DE MANIPULATION ? 4 16 août 2007 Un de nos lecteurs, M. Marc Poitevin, bibliothécaire de son État, constate, documents à l’appui, l’"effet retard" avec lequel Tintin au Congo se retrouve mis au banc des accusés en Angleterre (puis en Belgique). Qu’est-ce qui justifie dès lors que cette campagne sorte maintenant ?
"La polémique engagée sur la version anglaise de Tintin au Congo et des interdictions faites "aux enfants" successivement
en Grande-Bretagne, USA, Afrique du Sud et sûrement bien d’autres pays encore en regard à des situations racistes évidentes sont un réveil bien tardif pour ne pas dire inconséquent d’une situation pourtant connue de longue date…" nous écrit notre correspondant. Il souligne le fait que l’information concernant la publication éventuelle d’une "première" parution en Grande-Bretagne
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http://www.actuabd.com/L-affaire-Tintin-au-Congo-un-soupcon-de-
manipulation
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l’année dernière de Tintin in the Congo est fausse, de même que l’affirmation d’une publication sans avertissement au lecteur anglophone. Non seulement, dit-il, Tintin in the Congo est apparu dans sa version anglaise en 1991 soit, il y a plus de 16 ans, mais en plus, il s’agissait du fac-similé de la première version en noir et blanc et non remaniée de la version ultérieure en couleurs, soit la plus "raciste" pour utiliser la terminologie accusatrice. "Aucune réaction n’a été constatée à cette époque au point d’en déclencher une interdiction" constate-t-il. "De la même manière, ajoute-t-il, une "mise en garde" (non pas sous la forme d’un bandeau rouge, mais d’un texte) avait été appliquée afin de montrer, avec force raison, qu’il s’agissait du contexte de l’époque en 1931 lors de sa création." Nous vous produisons les fac-similés du copyright de l’ouvrage et de son avertissement ("Foreword") qui contextualise l’œuvre d’Hergé dans son époque et précise qu'Hergé lui-même reconnaît que la représentation des Africains y est le reflet de "stéréotypes bourgeois et paternalistes de l’époque". "Il s’ensuit que l’on peut s’interroger sur la "frilosité" excessive accordée à une œuvre qui n’a éveillé, jusqu’à ce jour, aucun ressentiment", conclut M. Poitevin, "puisque l’intelligence du citoyen de base, qu’il soit de langue anglaise ou française, avait très bien compris que les conditions du passé ne pouvaient pas être celles d’aujourd’hui et relevaient beaucoup plus de comportements "imagés" (au sens propre du mot) que d’une véritable provocation littéraire." Nous en prenons acte. Manipulation ? Reste la question de savoir ce qui fait que cette affaire sorte maintenant. Récemment disparu, Raul Hilberg, le célèbre auteur du monumental ouvrage La destruction des Juifs d’Europe (1961) avait déjà constaté la perception à géométrie variable de ses contemporains qui avaient ignoré la Shoah jusqu’en 1978 pour en 32
faire un sujet de grande consommation ensuite. Quelle peut-être alors la raison de cette réprobation tardive ? On se le demande. On peut émettre l’hypothèse que c’est l’annonce de l’adaptation de cette bande dessinée au cinéma par Spielberg qui a pu susciter cette offensive. Or, Tintin au Congo ne figure pas parmi les titres retenus par le grand cinéaste américain (il n’avait pas davantage été retenu pour son adaptation en dessins animés à la télévision). Rappelons que lorsque celui-ci avait acquis les droits de Tintin pour la première fois, il y a plus de 20 ans, d’aucuns n’avaient pas manqué de s’interroger sur l’admiration de l’auteur de La liste de Schindler pour un auteur également qualifié par certains d’"antisémite". Il faut croire que Spielberg a su, contrairement à d’autres, prendre la mesure de l’œuvre et de son époque. Didier Pasamonik (L’Agence BD)
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A PROPOS D’ACTUABD Actua BD a été créé en 1996 par Patrick Pinchart, sous son nom de plume Patrick Albray. Depuis plus de vingt ans, de nombreux collaborateurs l’ont rejoint et, par la qualité de leurs contributions, ont contribué à en faire, sous la direction de Didier Pasamonik (éditeur adjoint, directeur de la rédaction), de CharlesLouis Detournay (rédacteur en chef) et d’Aurélien Pigeat (rédacteur en chef adjoint), ce que le "Larousse de la BD" surnomme "L’AFP de la bande dessinée". Un comité de rédaction, actuellement constitué de François Boudet (Paris), Guillaume Boutet (Paris), Patrice Gentilhomme (Tours), Christian Missia Dio (Bruxelles), David Taugis (Paris), également rédacteurs, les assistent. De nombreux rédacteurs l’enrichissent quotidiennement : Pascal Aggabi (Bordeaux), Tahani Biernat (Amiens), Damien Boone (Lille), Jean-Sébatien Chabannes (Marseille), Gilles d’Eggis (Paris), Marc Dacier (Chantilly), Mathieu Drouot (Paris), Alexandre et Stanislas Jedrecy (Paris), Vincent Gauthier (Paris), Louis Girard (Paris), Romuald Lefebvre (Paris), Thierry Lemaire (Paris), Tristan Martine (Paris), Laurent Melikian (Paris), Siham Najmi (Belgique, Bruxelles), Marianne Pierre (Honfleur), Yohan Radomski (Chine), Florian Rubis (Paris), Marianne St-Jacques (Canada), Marc Vandermeer (Belgique, Liège), Marco Zanini (Paris). On peut aussi trouver sur ActuaBD.com des articles signés : Thomas Berthelon (Toulouse), Laurent Boileau (Reims), Antoine Boudet (Lille), Beatriz C. (Montauban), Stéphane Cassou (Paris), Fabrice Castanet (Bordeaux), Gallien Chanalet-Quercy (Paris), Arnaud Claes (Paris), Nicolas Depraeter (Lille), Ralph Doumit (Beyrouth), Stéphanie Franqueville (Lille), Tristan Garcia (Paris), Denis Giguère Le Bédénaute (Québec), Baptiste Gilleron (Lille), Geoffrey Goffin (Belgique, Liège), Charles Ham (Paris), Arnaud Houel (Lille), Mathias Kind (Canada), Richard Langlois (Canada) †, Axelle Mucientes (Paris), Dominique Molinaro (Paris), Matthieu 217
Morvan (Belgique), Xavier M-D. (Toulouse), Tanguy Pâques (Belgique, Bruxelles), Raymond Poirier (Canada), Manuel Roy (Berlin), Silvia Santirosi (Paris) †, Kenzo Suzuki (Toulouse), Tetsuya Ueda (Toulouse), Olivier Wurlod (Suisse) Ils ont constitué, au fil de leurs articles, une précieuse chronique de la bande dessinée, dont cette collection va rassembler les grands thèmes. Nous tenons à les remercier pour leur précieuse collaboration au succès de ce site. www.actuabd.com
LES AMIS D’HERGÉ Les articles repris ici sont issus de l’espace "Les Amis d’Hergé" du site ActuaBD, du nom d’une association de passionnés de Tintin créée en 1979 par Patrick Pinchart, avec l’accord d’Hergé. Retrouvez-y les informations relatives à Tintin et à son créateur : http : //www.actuabd.com/-Les-Amis-d-HergéPour l’association de collectionneurs "Les Amis d'Hergé", créée en 1983, rendez-vous sur le site : http : //www.lesamisdeherge.be/
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