MillĂŠnaire 3 / le centre de prospective du Grand Lyon
« L’enjeu est de concilier l’authenticité du geste, l’esprit du quartier et un soupçon de provocation pour faire bouger la ville »
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ÉQUIPE DE RÉDACTION Alice Berthe Pauline Butiaux Cécile Combelle Pierre-Luc Filion Sophie Julien Pauline Gayaud Jérôme Glad Kevin Grégoire Maude Ladouceur Simon Pouliot
REMERCIEMENTS Laurie Loison L’ensemble du comité organisateur du CAPS-ACÉAU à Montréal L’ensemble des membres-fondateurs et membres de l’ADUQ
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MontrĂŠal, mars 2013
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« Le design urbain est un champ de pratique professionnelle qui occupe la charnière entre l’architecture et l’aménagement du territoire. Il s’intéresse à la face publique et urbaine de l’architecture, ainsi qu’à l’espace physique et tridimensionnel de la planification du territoire. Le design urbain concerne la création et le contrôle des formes physiques de la ville et l’aménagement qualitatif de l’environnement. Les objectifs de cette pratique visent principalement la (re)qualification des espaces publics collectifs, la création de collectivités viables et le développement de processus participatifs d’aménagement du territoire. » Geneviève Vachon, professeure, École d’architecture, Université Laval, citée dans : Lemieux Denis, « Imaginer, réaliser la ville du 21e siècle : cahiers des bonnes pratiques en design » élaboré par Design Montréal, 2008.
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SOMMAIRE
L’ADUQ
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CONTEXTE DE RÉDACTION
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MOT D’INTRODUCTION
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PARTIE UN // TOUR D’HORIZON
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TACTICAL URBANISM LE 18BIS BRUXELLES L’AGRICULTURE URBAINE LE PARK(ING) DAY DETROIT FUTURE CITY
PARTIE DEUX // A MONTRÉAL : QUELLES INITIATIVES URBAINES POUR QUELLES IDENTITÉS ?
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REVENDICATION DE FRICHES URBAINES PIÉTONNISATION TEMPORAIRE DE RUES VERS UNE TRAME VERTE ET BLANCHE CULTIVER ET SE NOURRIR EN VILLE
PARTIE TROIS // DÉTOUR(S) CRITIQUE(S)
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DES MOUVEMENTS, ET DES ÉVÉNEMENTS LE MICRO-ÉVÉNEMENT LE MACRO-ÉVÉNEMENT INTERDITS ? DESIGNERS URBAINS
POUR EN SAVOIR PLUS
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COORDINATION DE PUBLICATION
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PARTENAIRES
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L’Association du design urbain du Québec est un organisme sans but lucratif basé à Montréal et dans la ville de Québec, qui se consacre à promouvoir le design urbain au Québec. Née en 2012 de l’initiative de jeunes professionnels œuvrant dans les domaines de l’aménagement, l’ADUQ se veut être un levier incontournable pour faire reconnaître le design urbain auprès des collectivités et est vouée à devenir une véritable plateforme d’échange. En ce sens, l’association vise à réunir tous professionnels de l’aménagement dont la pratique est axée sur le domaine public et la dimension collective de la ville : designers urbains, architectes, architectes-paysagistes, urbanistes, designers de l’environnement, designers industriels, artistes, ingénieurs, etc. Depuis sa création, l’ADUQ s’investit donc dans la promotion, la création, et la réflexion sur la pratique et le champ de connaissance qu’est le design urbain. Inclusive plus que jamais, elle rassemble un an après sa création près de 200 membres issus des domaines cités plus haut. Via son site web et sa page Facebook, elle rédige et publie des articles de fond, diffuse l’actualité de façon critique, met en réseau ses membres, informe des événements dans le domaine de l’aménagement. Par ailleurs, elle s’implique en participant activement à des consultations publiques et à des charrettes et en s’exprimant dans les médias. Elle est à l’origine d’événements et de concours tels que le concours du Park(ing) Day en partenariat avec le Conseil Régional de l’Environnement, ou encore l’actuel concours Nordicité en partenariat avec le Bureau de design de la Ville de Montréal, et l’association Vivre en ville. Une antenne dans la ville de Québec vient d’être créée. Enfin, une bourse a été lancée afin d’encourager l’émulation autour du design urbain dans le milieu universitaire.
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L’ADUQ
L’ADUQ est une organisation dédiée à mettre en valeur le design urbain au Québec et à inciter ceux qui le pratiquent à échanger et à tisser des liens. L’organisme souhaite ainsi contribuer à la diffusion des compétences spécifiques pour une intervention urbaine responsable dans un environnement de plus en plus complexe et changeant. De manière plus générale, les objectifs poursuivis par l’ADUQ sont les suivants : • Promouvoir et encourager l’excellence des pratiques et des connaissances en design urbain au Québec, notamment par la rédaction de mémoires et d’articles ; • Maintenir un réseau de membres large afin de regrouper tous les acteurs impliqués dans un processus de design urbain et explorer le rapprochement avec des domaines connexes ; • Établir des liens et des partenariats avec les organismes nationaux et internationaux actifs en design urbain, de même qu’avec les milieux universitaires ; • Être active sur la scène locale dans l’organisation d’évènements, de concours, d’ateliers et le montage de projets en lien avec le design urbain ; • Intervenir sur la scène nationale, notamment en déployant une équipe à Québec ; • Sensibiliser les acteurs urbains aux bonnes pratiques en design urbain ; • Travailler à l’essor des connaissances autour du design urbain et synthétiser les enjeux en lien avec le contexte québécois.
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L’ADUQ depuis sa création, c’est : 13 membres fondateurs 194 membres 7
mémoires déposés et présentés devant l’Office de Consultation Publique de Montréal et à Québec
10 articles 3 concours : l’identité visuelle de l’ADUQ, le Park(ing) Day et Nordicité 1 antenne de l’ADUQ à Québec 4
collaborations majeures : le CRE, Bixi, le Bureau du Design de la Ville de Montréal, Vivre en Ville
3 collaborateurs de diffusion, du réseau de membres et d’événement : v2com, la revue Nouveau Projet, Autodesk
600 personnes réunies lors des soirées de lancement à Montréal et Québec 365 publications sur la page Facebook de l’ADUQ 1357 « fans » de la page Facebook de l’ADUQ 5 entrevues radio et presse 1 émission de télévision 1 bourse universitaire ADUQ 8 infolettres 16 partenaires officiels (commandites) 1 atelier-conférence dans le cadre du cycle de conférences annuel du CAPS
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Le cycle de conférences CAPS-ACÉAU 2013, intitulé «Idencités / Idencities», a eu lieu entre le 1er et 3 Février 2013 à Montréal. Avec la collaboration conjointe de l’Université de Montréal, l’Université McGill, l’Université du Québec à Montréal, ainsi que l’Université Concordia, cet événement a réuni 344 participants venus du Québec et du reste du Canada. La tenue du cycle au Québec fut une incroyable opportunité de mettre en avant les spécificités culturelles locales. Les quatre universités organisatrices partagent en effet toutes la volonté de mettre en avant Montréal, la ville qui les réunit. Intitulée « Idencités / Idencities », l’édition 2013 du cycle de conférences de CAPS-ACÉAU a eu pour thème les identités urbaines. À travers une variété de conférences, d’ateliers et de visites, la conférence 2013 a été « l’occasion d’explorer les influences croisées entre le caractère d’un lieu et les pratiques d’aménagement qui s’y façonnent, pour comprendre comment ces deux éléments se renforcent et s’enrichissent l’un de l’autre. Quels enseignements les aménagistes peuvent-ils tirer des spécificités culturelles d’un lieu ? Et comment planifier en gardant toujours en tête l’identité d’une ville et de ses habitants, pour bâtir une profession respectueuse du contexte dans laquelle elle s’exerce ? »
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CONTEXTE DE RÉDACTION
L’ADUQ est une association qui promeut dialogue entre design urbain, échelle locale et identités urbaines, comme manière d’innover et de créer le changement en design urbain. L’ADUQ a été invitée à animer un atelier le samedi 2 février 2013. En collaboration avec les organisateurs du CAPS-ACÉAU 2013, l’ADUQ a choisi de mener un atelier autour de la question : Comment créer le changement en design urbain ? En ce sens, l’ADUQ est née de la volonté de porter un état d’esprit inventif, pertinent, et décomplexé sur le design urbain au Québec. Depuis sa création, l’association souligne la présence de plus en plus forte d’initiatives culturelles locales qui façonnent de nouvelles identités urbaines à Montréal, au Québec et à l’international. Cet atelier fut l’occasion d’échanger sur la valeur et le dynamisme de ces nouvelles pratiques, tout en gardant ces questions en toile de fond : Comment favoriser la prolifération de ces pratiques communautaires ? Quelles places peuvent occuper les professionnels de l’aménagement dans ces nouveaux courants ? Interroger de nouvelles formes, mises en œuvre, voire théories de design urbain relève d’une mission importante de l’ADUQ. L’ADUQ croit fortement en une façon renouvelée de penser le rôle et la pratique du designer urbain au sein de l’espace public urbain à l’échelle locale. Ainsi, ce dossier présente une exploration des nouvelles pratiques urbaines tant au Québec, qu’à l’étranger, afin d’engager le dialogue entre design urbain, échelle locale et identités urbaines.
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MOT D’INTRODUCTION
DISCOURS D’INTRODUCTION DE L’ATELIER
« Tout d’abord, nous souhaitons vous dire que nous sommes très honorés que l’ADUQ : l’association du design urbain du Québec, ait été invitée à animer un atelier lors de ce cycle de conférences du CAPS-ACÉAU. Et ce d’autant plus lorsque cette année, le cycle de conférences du CAPS-ACÉAU a choisi de se consacrer à la problématique de l’identité urbaine, je dirais même DES identités urbaines, sujet cher à l’ADUQ ! Nous sommes également très fiers que l’organisation du CAPS-ACÉAU ait choisi d’inviter une jeune association comme la nôtre, composée de jeunes professionnels de l’aménagement passionnés par le design urbain. La tenue du cycle au Québec est une incroyable opportunité pour l’ADUQ de partager avec vous les spécificités culturelles locales dans le domaine de l’aménagement, et nous pensons très humblement, du moins c’est ce qui nous guide au sein de l’ADUQ, que nous pouvons participer à la diffusion et à la création du changement en terme de pratique en design urbain. Je vous présente les membres qui sont face à vous et qui vont animer cet atelier. Il s’agit de 5 des 13 membres fondateurs de l’Association du design urbain du Québec : Maude Ladouceur, designer urbain, urbaniste stagiaire ; Pauline Gayaud, architecte-paysagiste ; Pierre-Luc Fillion, architecte stagiaire; Kevin Grégoire, designer urbain, et artiste visuel ; et moi-même, Pauline Butiaux, designer urbain et ingénieur en génie urbain. L’objet de cet atelier, quel est-il ? C’est d’une part, et parce que nous avons été invités à ce titre, de vous présenter notre association comme exemple d’initiative qui tend à participer de l’identité urbaine du Québec; C’est plus encore, de vous présenter de quelle façon notre association souligne la présence de plus en plus forte d’initiatives urbaines locales, façonnant de nouvelles formes d’identités urbaines : le tactical urbanism, les ruelles vertes ici à Montréal, l’agriculture urbaine, le Park(ing) Day, etc. Cet atelier relève donc d’une formidable occasion d’échanger ensemble sur la valeur et le dynamisme de ces nouvelles pratiques.» Montréal, le 2 février 2013
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PARTIE UN // Tour d’horizon
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RÊappropriation temporaire d’une rue, Portland, my.parkingday.org
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TACTICAL URBANISM Lorsque le design urbain innovant, participatif et cheap a un nom On ne parle que de ça ! Le tactical urbanism ou pop-up urbanism, c’est cette mouvance émergente émanant de la volonté d’intégrer plus de spontanéité dans la planification urbaine. Malgré une apparente économie des moyens, ces interventions que l’on qualifie de « lighter, quicker, cheaper » ou encore DIY (Do it Yourself) semblent avoir un impact réel et ciblé sur l’espace urbain et les communautés. Il s’agit en effet de revendiquer une vision nouvelle d’un espace urbain décomplexé, multifonctionnel, communautaire, stimulant. Après s’être attaqué à la reconversion des zones industrielles, on s’attaque maintenant à la redéfinition et à la réappropriation de la rue qui est devenue désuète au fur et à mesure qu’elle s’est transformée en un espace monofonctionnel de transit automobile. Ce que révèle cette mouvance du tactical urbanism, c’est l’émergence d’un nouveau type d’espace public typiquement nord-américain, adapté à nos rues souvent très larges ainsi qu’au manque de réelles places publiques. Et même en allant plus loin : les infrastructures urbaines défaillantes, la banalisation des espaces, la prolifération de friches, la privatisation de l’espace public, etc. sont autant de faits urbains qui poussent à une quête renouvelée de la solidarité, d’attentes croissantes en matière de qualité de vie et ainsi poussent à l’émergence d’une densification, d’une ré-intensification et d’une diversification des usages de la rue. Ces actions revendicatrices d’un espace urbain nouveau ont-elles réellement un impact sur la manière dont les villes du XXIème siècle se façonnent ? Si elles s’éloignent des pratiques conventionnelles en aménagement urbain et d’un certain formalisme de la mise en projet, leur atout majeur réside dans le fait qu’elles prônent l’expérimentation, l’empirisme comme une nouvelle façon de dynamiser et repenser le renouvellement des espaces urbains en testant des aménagements urbains de façon souvent simple et peu coûteuse. L’événement annuel du Park(ing) Day, les jardins communautaires, les marchés éphémères, les parklets, les pop-up cafés, les réappropriations éphémères de la rue pour un cours de yoga ou une performance artistique, les installations de micro-architecture, la création de nouveaux espaces publics matérialisés avec de la peinture au sol, quelques bancs et tables et bacs de végétation... autant de faits urbains relevant du tactical urbanism et initiés par des groupes communautaires, des associations, des résidents d’une même rue, des collectifs d’artistes et parfois, des municipalités éclairées.
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Times Square, New York City, nyc.gov
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L’action spontanée est devenue une composante à part entière des outils de planification accessible à tous au-delà des plus traditionnelles (mais non moins louables) charrettes citoyennes ou autres consultations publiques. Or force est de constater que rares sont les municipalités et autres institutions publiques, les agences d’urbanisme et de design urbain, qui s’approprient cette manière alternative, et stratégique disons-le, de créer de nouvelles formes de réappropriations d’espaces publics. Pourquoi le tactical urbanism ne renouvellerait-il pas les outils de planification des professionnels de l’aménagement ? Sans défendre pour autant de façon utopiste ou trop simpliste la possibilité que la rue soit un lieu entièrement piétonnisé ou rempli de pop-up cafés, il s’agit, pour nous professionnels, d’encourager l’idée d’un espace public multifonctionnel et animé, révélateur de nouveaux usages et identités urbaines. Car si l’on peut parler d’identités urbaines, c’est bien parce que ces interventions urbaines témoignent de la créativité des citadins et de leur attachement à leur environnement. Elles devraient donc, tout premièrement, constituer, pour les designers urbains et les collectivités publiques, une ressource nouvelle de connaissance des identités urbaines revendiquées. Et ensuite ? Quel serait le rôle des collectivités publiques face à ces interventions, faut-il par exemple envisager le « faire-avec » dans un esprit de codesign ? Faut-il les faire disparaître dans un souci de cohérence spatiale ? Certaines villes donnent l’exemple en se réappropriant ces nouvelles pratiques. À New York, le Département des transports co-conçoit depuis 2009 des projets de tactical urbanism. De la peinture au sol, des tables, des chaises, des parasols, des plantes en pot, et c’est tout ! Aucuns travaux lourds et onéreux de voiries ou d’infrastructures ! C’est ainsi que le visage d’espaces auparavant largement dédiés à la voiture, tels que Times Square, Herald Square, ou Delancey Street à l’entrée du Williamsburg Bridge, ont radicalement changé, et sont aujourd’hui un succès en terme de réappropriation par les citoyens. À San Francisco, Vancouver ou encore Los Angeles, suite au Park(ing) day, des réappropriations temporaires de places de stationnements ont été ça et là pérennisées sous forme de parklets. À Dallas, le groupe activiste Better Blocks a depuis sa création en 2010 transformé temporairement 32 rues ou places en « better blocks » à Dallas et dans le reste des ÉtatsUnis. Aujourd’hui le mouvement du tactical urbanism se voit consacrer des ouvrages écrits (les volumes 1 et 2 Tactical Urbanism par exemple), il est soutenu par des moyens de financement participatif (ou crowdfunding)
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« Passage piétons à emporter », pop-up-urbain.com « We are all designers », wearealldesigners.com
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tels que kickstarter, et est relayé par des sites web, tels que pop city ou spontaneaous interventions, qui référencent les interventions et donnent à voir le phénomène de mondialisation de ces micro-cultures. Enfin le tactical urbanism fait même l’objet d’expositions comme ces 154 interventions exposées lors de la Biennale d’architecture de Venise de 2012, et prochainement exposées à Chicago. Au Québec, le 3e numéro de la revue Nouveau projet consacrera un dossier à ces pratiques urbaines émergentes. On peut poser néanmoins la question de la portée à long terme de ces interventions, de leur capacité à dresser les grands enjeux urbains des métropoles, la question des limites, donc, du tactical urbanism.
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CrĂŠdit photographique :18bis.com
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LE 18BIS BRUXELLES Quand les étudiants sont rois dans le domaine de l’initiative locale LES ABATTOIRS DE CUREGHEM, UN TERRITOIRE INDUSTRIEL EN QUÊTE D’UNE IDENTITÉ PERDUE
Aux abords du canal de Cureghem, les abattoirs d’Anderlecht sont un témoin du développement industriel de Bruxelles au XXème siècle. Autrefois la mère nourricière et la source d’identité du quartier, cette industrie s’est progressivement distancée de l’économie locale qu’elle a impulsée dans le quartier. Si le lieu reste dédié à l’industrie animale où se croisent ponctuellement nombre d’acteurs, les bouchers, les tanneurs et les saleurs ont quitté les environs, laissant le quartier de Cureghem se paupériser et devenir l’un des quartiers les plus défavorisés de la capitale. Aujourd’hui, l’activité des abattoirs et le marché public qui s’y tient chaque fin de semaine (100 000 personnes chaque semaine) sont menacés par la réorientation de l’entreprise gestionnaire du site des abattoirs. Comment réconcilier un lieu avec son passé ? Comment ré-impliquer une entreprise, et ses différents acteurs dans la dynamique du quartier ? Quatre étudiants en architecture ont formé le collectif le 18bis ; ils ont étudié, mis en projet et sont intervenus sur ce site alors concerné par un projet urbain. Ils ont questionné les préceptes d’un projet mobilisant des professionnels de l’aménagement dont le travail restait essentiellement centré sur la rentabilité économique. Le collectif reste depuis 2009 engagé dans une démarche d’implication citoyenne pour penser la mutation active de ce territoire en régénération en considérant la micro-intervention comme un moteur de médiation et un outil pour la reconstruction d’un imaginaire commun. LE PROJET THÉORIQUE : MISE EN PLACE D’UN PROCESSUS D’IMPLICATION CITOYENNE
Suite à un premier travail de diagnostic territorial, le 18bis a développé un masterplan organisé en plusieurs phases où la micro-intervention devient un élément déclencheur de la mutation du territoire. Phase 1 : Les micro-interventions prolifèrent et interpellent afin de médiatiser la mutation du territoire. Phase 2 : Les micros-interventions sont connectées entre elles par un
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CrĂŠdit photographique :18bis.com
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parcours où se révèlent le paysage et les potentiels du territoire. Elles sont un support à la découverte du site, et supportent de nouvelles pratiques sur le site. Phase 3 : Les micro-interventions évoluent vers de nouvelles structures, suite à la mise en collaboration des acteurs du territoire et pérennisent de nouvelles activités : touristiques, culturelles, associatives, loisirs, etc. La micro-intervention n’est plus une finalité. Au cœur du territoire industriel, elle devient un objet de médiation au service des usagers, des entreprises et des habitants. Elle favorise l’innovation en produisant des éléments déclencheurs pour l’activation de filières d’activités nécessaires à la revitalisation du quartier et à la mise en place d’un processus d’implication citoyenne. MISE À L’ÉPREUVE DE LA RÉALITÉ DU TERRITOIRE PAR LA CONSTRUCTION D’UN OUTIL DE DIALOGUE : LA YOURTE
Sortir de la théorie pour mieux y retourner. - Confronter au problème qu’il est impossible de théoriser un processus d’implication citoyenne, il ne nous restait plus qu’à supposer une participation citoyenne sans citoyens et de générer des masterplans théoriques et des images de synthèse séduisantes confortablement installé depuis l’intérieur des murs de l’atelier de l’école d’architecture. Le 18bis a quitté le cadre universitaire pour confronter ses idées avec la ville telle qu’elle se pratique, telle qu’elle se vit. Suite à un long travail de médiation, auprès des acteurs présents sur et autour du site, le 18bis a concrétisé l’une des micro-interventions projetées dans le masterplan : la Yourte. La Yourte a ainsi pris place durant cinq semaines sur le site des abattoirs, plus précisément à l’interface entre le domaine des abattoirs et celui de la ville. La Yourte a simultanément été : 1- Un objet de curiosité pour médiatiser une problématique et ouvrir un débat sur le devenir des abattoirs d’Anderlecht. 2- Un lieu de travail et de découverte des réalités du territoire. 3- Une interface de médiation entre les différents acteurs du site: dirigeants et travailleurs de l’entreprise, entrepreneurs locaux, professionnels de l’aménagement, membres de la fonction publique, citoyens et associations locales.
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CrĂŠdit photographique :18bis.com
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4- Une nouvelle entrée du site des abattoirs et un point de départ pour des visites exploratoires thématiques sur le site. Cette formidable expérience de « permanence architecturale » (P. Bouchain) a catalysé les échanges et peu à peu, les regards sur le site des abattoirs d’Anderlecht ont évolué. UNE PLATEFORME ÉPHÉMÈRE MAIS ÉVOLUTIVE : DE LA MICRO-INTERVENTION AU CONCOURS DE DESIGN URBAIN EUROPÉEN
Parce que tout projet étudiant a une fin, qu’allait donc devenir cet espace « des possibles » fraichement révélé ? Force est de constater qu’une initiative urbaine pertinente, génère enthousiasme et donne l’impulsion pour s’investir à son tour. D’abord, suite au développement de la Yourte, et par la mise en relation de différentes associations locales avec les gestionnaires du site, l’intervention a muté en un jardin d’agriculture urbaine : le Jardin de Abattoirs. La dynamique s’est transmise et de nouveaux acteurs ont pris le relais du projet initié par le collectif d’étudiants. Finalement, cette cohabitation avec le milieu de l’entreprise a par la suite donné naissance à un festival européen de plus grande envergure, la biennale Park DESIGN 2012. Le concours reprend une partie des intentions théoriques développées dans le masterplan et génère une série de micro-interventions, les connecte entre elles afin de révéler les potentiels du territoire en mutation et d’initier des démarches participatives. QUAND LES ÉTUDIANTS SONT ROIS DANS LE DOMAINE DE L’INITIATIVE LOCALE
Outre le fait que ces micro-interventions soient un outil pédagogique et d’exploration formidable, la question fondamentale soulevée par ce projet est le potentiel que détiennent les étudiants d’intervenir dans le développement urbain. Il est intéressant de mentionner l’énorme avantage que permet le statut d’étudiant afin de produire des initiatives locales. En effet, ils bénéficient d’une neutralité politique, d’une liberté financière mais surtout d’une reconnaissance des différents acteurs qui offrent un soutien inconditionnel à ces étudiants qui s’intéressent à leur environnement. Cet exemple adresse un message clair aux enseignants: mettez vos élèves dehors !
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Toit cultivé, Long Island City, Queens, NYC. Crédit photographique : Alex Maclean
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L’AGRICULTURE URBAINE Lorsque la ville se reconstruit par la nature fertile et productive Les bénéfices de l’agriculture urbaine découlent non seulement du potentiel à alimenter la ville et à réduire la distance entre nos aliments et notre assiette, mais aussi de sa capacité à sensibiliser les consommateurs à des pratiques alimentaires plus saines, en plus de contribuer à l’esprit de communauté et au verdissement de nos quartiers. Qu’adviendraitil de nos villes si on envisageait la production et l’approvisionnement alimentaire comme une priorité en design urbain ? Trois échelles d’intervention sont à privilégier : (I) l’échelle humaine, encourageant les initiatives citoyennes ; (II) l’échelle du projet urbain, intégrant l’agriculture urbaine à la planification ; et (III) l’échelle de la ville, misant sur l’aspect identitaire de l’agriculture urbaine. L’AGRICULTURE URBAINE À L’ÉCHELLE HUMAINE : INITIATIVES CITOYENNES
L’agriculture urbaine pourrait permettre de s’orienter vers un nouvel idéal commun : après l’idéal de la pelouse verte américaine, l’idéal du jardin productif et écologique. Le temps est venu de passer du jardin d’apparat au jardin potager en s’appropriant les espaces qui sont mis à notre disposition en tant que montréalais : balcons, terrasses, cours arrières, etc. L’agriculture urbaine comprend un caractère participatif important qui permet à tous de façonner à sa manière le paysage urbain tout en posant des gestes positifs pour l’environnement. Cette pratique contribue également à l’échelle humaine de la ville et à son appropriation par les citoyens. En appuyant ces pratiques, nous pouvons contribuer à la vie de quartier, encourager l’animation urbaine et l’esprit communautaire. Cet empowerment écologique et environnemental lié à l’agriculture urbaine doit toutefois être appuyé par des ressources d’aide locales (écoquartiers, organismes communautaires, etc). L’ADUQ encourage les municipalités à se doter d’un programme de soutien en agriculture urbaine pour la construction d’un savoir spécifique à chaque environnement urbain afin d’accroître et d’encadrer les initiatives citoyennes, tant au niveau individuel que commercial. L’AGRICULTURE URBAINE À L’ÉCHELLE DU PROJET URBAIN : PLANIFICATION
Qu’advient-il de la planification de cette pratique par les professionnels de l’aménagement ? Les architectes, architectes-paysagistes, designers
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Farmadelphia, Philadelpia. Front Studio Architects (Concours du Van Alen Institute), frontstudio.com
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urbains, urbanistes ont le potentiel de repenser nos villes comme des paysages productifs, mais surtout ils ont le devoir d’actualiser les politiques et orientations d’aménagement de la ville pour s’adapter à cette nouvelle réalité. L’ADUQ estime que la remise en culture des terres peut se faire à différentes échelles et surtout par l’intégration de l’agriculture urbaine sur le territoire urbanisé. Chaque ville au cours de son évolution voit apparaître et parfois durer dans le temps des espaces disponibles ou encore des lots qui deviennent vacants et non utilisés. Pourquoi ne pas offrir et profiter de ces espaces en attendant une future utilisation? Ces lieux éphémères deviendraient des espaces productifs du paysage de la ville et contribueraient à la réduction de l’empreinte écologique. L’ADUQ croit, qu’à cet échelle, les outils de planification (tel que le Plan métropolitain d’aménagement et de développement et le Plan d’urbanisme au Québec) nécessitent d’être actualisés pour y intégrer de nouvelles orientations d’aménagement. L’AGRICULTURE URBAINE À L’ÉCHELLE DE LA VILLE : ASPECT IDENTITAIRE
L’ADUQ considère que l’agriculture urbaine devrait également occuper un rôle prépondérant au niveau de l’identité des quartiers. Plutôt que de chercher à bâtir des icônes architecturaux ou à attirer les starchitects de ce monde, pourquoi ne pas miser sur l’agriculture urbaine afin de renforcer l’animation des villes, l’effervescence des quartiers, d’encourager les initiatives individuelles. L’ « acupuncture urbaine » pourrait être la méthode à privilégier pour introduire l’agriculture urbaine dans la ville. L’acupuncture urbaine est une approche urbanistique imaginée par Jaime Lerner, ex-maire de Curitiba (Brésil), préconisant des interventions pointues, ciblées, qui stimulent des points névralgiques. Le recensement des lots vacants, immeubles abandonnés, stationnements ou aires asphaltées qui ponctuent les villes et qui nuisent bien souvent à l’image des métropoles constituerait une première étape de prise de conscience nécessaire et de constitution d’une réserve d’espaces « d’opportunité » pour implanter l’agriculture urbaine. Philadelphie (U.S.A.) par exemple, est connue pour avoir fait ce formidable exercice de recensement de ses lots vacants. Alors, pourrait-on dire, vive l’ « agripuncture » urbaine !
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Cine parking, Montréal. Installation de l’ADUQ pour le Park(ing) Day 2012. Crédit photographique : ADUQ
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LE PARK(ING) DAY L’observation du phénomène de mondialisation des micro-cultures Depuis plusieurs années, chaque 21 septembre, une multitude d’interventions urbaines spontanées ponctuent le paysage urbain. Le Park(ing) Day, journée internationale au cours de laquelle tout le monde peut devenir designer urbain dans sa ville, permet à tous de participer à un grand projet commun, revendiquant une vision nouvelle de l’espace urbain ; une vision de l’espace public comme lieu multifonctionnel, inventif, récréatif et avant tout, sans voiture ! Si la typologie des rues se veut bien trop monofonctionnelle (dédiée au transit), comment la repenser, en redessiner les formes et contours ? Comment venir habiter la rue différemment ? Le Park(ing) Day, c’est imaginer le temps d’une journée les stationnements comme des lots vacants, et de réels projets potentiels. À l’image du « what would you like to see built here », que voudriez-vous voir à la place de tel ou tel stationnement ? Un foodtruck, un parc, une bibliothèque roulante, une œuvre d’art, un cinéma de coin de rue, une pop-up boutique dans un container, un potager, un marché à fruit, une brasserie mobile, une aire de jeu, un trottoir plus large … ? Cette journée aurait pu passer pour un simple délire d’artistes ou de designers, une journée pour le plaisir. Mais elle prend un sens particulier avec l’émergence depuis 2010 du tactical urbanism qui interroge le monde de la planification urbaine en défendant les interventions spontanées « lighter, quicker, cheaper », qui font sens et ont un impact réel et ciblé sur l’espace urbain et les communautés. Si l’expérimentation participe aujourd’hui de plus en plus au dynamisme et au renouvellement des villes, le Park(ing) Day en est sans doute l’exemple phare. En effet, pour se convaincre de l’apport durable de l’expérimentation, il suffit de regarder l’histoire du Park(ing) Day. Le mouvement a débuté en 2005 avec Rebar, un groupe d’artistes de San Francisco (U.S.A.), qui installèrent du gazon, un arbre, un banc et une clôture, à la place d’un stationnement, en réponse au constat suivant : « more than 70% of San Francisco’s downtown outdoor space is dedicated to the private vehicle, while only a fraction of that space is allocated to the public realm. » Dans la lignée de ce mouvement s’amplifiant chaque année, la ville de San Francisco inaugura en 2010 le premier parklet, mini-parc remplaçant de manière permanente des places de stationnement sur rue. Cette nouvelle typologie d’espace public s’apparente au départ beaucoup aux terrasses de restaurants sur rues, mais elle s’émancipe de plus en plus dans de nouvelles formes plus créatives ; la différence
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Installation pour le Park(ing) Day, Lille, Agence Pattou Tandem, parkingday.fr PÊrennisation d’une installation : Parallel Park, Vancouver, vancouver.ca
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majeure étant que ces espaces sont publics. Il est donc désormais possible de s’y installer sans rien consommer, de venir avec sa glacière et ses amis, et de pique-niquer par exemple en pleine rue, en restant là autant de temps que l’on souhaite ! Aujourd’hui, le parklet prolifère partout en Amérique du Nord, à Chicago, Vancouver, Portland… Au delà de l’exemple des parklets, c’est tout l’espace présentement dévoué au stationnement qui est amené à être reconfiguré. C’est l’émergence d’un nouveau type d’espaces publics, typiquement nordaméricain et adapté à nos rues souvent très larges et le manque de réelles places publiques. C’est l’émergence d’une densification et d’une diversification des usages de la rue. C’est ainsi que de plus en plus on parle de « globalization of microcultures » ou mondialisation des micro-cultures, pour parler de ces phénomènes de tactical urbanism ou popup urbanism qui se propagent dans l’ensemble des villes du monde sous la forme d’événements ponctuels et simultanés comme le Park(ing) Day, ou sous la forme de prolifération de pratiques urbaines et locales nouvelles déclinées dans les villes (l’agriculture urbaine, le guerilla gardening, les installations légères etc.). Ces revendications ne restent de fait plus dans l’anonymat et ont un impact réel sur la manière dont les villes du XXIe siècle se façonnent. Loin des théories, l’expérimentation participe aujourd’hui pleinement au dynamisme et au renouvellement des villes. L’action spontanée est devenue une composante à part entière des outils de planification, et est accessible à tous, municipalités comme citoyens.
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Detroit strategic framework plan, detroitworksproject.com Parckard Motors Plant,The ruins of Detroit, marchandmeffre.com
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DETROIT FUTURE CITY Quand les initiatives locales inspirent et guident les politiques et visions urbanistiques globales La réputation, l’histoire, la condition urbaine de Détroit en font une ville résolument à part et passionnante à étudier pour tout designer urbain. Si certains affirment que c’est la ville par excellence confrontée au phénomène de shrinking cities, d’autres vous diront que ce n’est pas non plus ce no man’s land souvent évoqué. Réalités complexes. En effet, en partie délaissée par ses pères fondateurs, les géants de l’automobile, Détroit change de paradigme et se cherche de nouveaux souffles de développement. À ce point que l’on qualifie Détroit depuis plusieurs années de laboratoire urbain. Laboratoire urbain car il s’agit d’à la fois repenser la ville, son identité, son organisation spatiale, sociale, et son économie locale. Être capable d’assurer le vivre ensemble aussi bien que de subvenir aux besoins essentiels tels que celui de se nourrir (on sait à quel point le centre de Détroit notamment est considéré comme un véritable désert alimentaire), voici tout le défi que s’est lancé Détroit. Laboratoire urbain, parce qu’aujourd’hui, c’est Détroit qui nous « fait la leçon », nous instruit. Force est de constater que depuis plusieurs années, Détroit devient le cas exemplaire d’une ville dans laquelle ont émergé quantités d’initiatives urbaines locales afin de repenser les vides urbains. Et ce, qu’elles soient communautaires ou associatives comme tous ces lots vacants qui ont accueilli de l’agriculture urbaine, mais aussi artistiques comme le projet Heidelberg dans les années 80, ou encore urbanistiques comme ces nombreux groupes de réflexion sur l’urbain, venus parfois des plus grandes universités américaines pour penser de façon renouvelée le Détroit de demain. Aujourd’hui ces initiatives locales qui s’épanouissent depuis plusieurs années dans cette ville, portent leur fruit. En décembre 2012 est paru le guide ‘Detroit Future City’. Ce document de 184 pages, disponible en ligne, a été conçu après deux ans de travail d’une équipe constituée d’élus, de fonctionnaires, de groupes communautaires résidents, d’organismes à but lucratif et non-lucratif. Il a alors pour but de présenter un plan d’action à long terme définissant les grandes orientations en matière d’aménagement urbain et de développement socio-économique de Détroit. Il est particulièrement intéressant de constater que l’emphase a clairement été mise sur la communauté. Les rédacteurs de ce guide, selon un schéma bottom-up, ont décidé manifestement de s’inspirer et se nourrir, de l’ensemble des initiatives locales portées par la population.
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Detroit strategic framework plan, detroitworksproject.com
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Plus précisément, l’objectif a été de dessiner les contours d’inscription des futurs projets urbains dans un plan d’action cohérent et novateur pour les 50 prochaines années, incluant les intérêts de l’ensemble des parties prenantes, et mettant en valeur l’identité urbaine forte de cette ville. Huit thématiques sont largement explorées par ce document : les procédures et politiques urbaines publiques / l’économie urbaine et régionale / l’agriculture urbaine et la sécurité alimentaire / les quartiers, le développement communautaire et le logement / le paysage urbain, l’écologie urbaine et les friches / l’usage et la forme urbaine / la dépollution et la santé / le système urbain, les infrastructures les transports et le développement durable. Il s’agit donc d’un véritable projet urbain, dressant toutes les complexités, interrelations et enjeux globaux auxquels une ville doit faire face, et ce, de façon particulièrement prégnante dans le cas de Détroit. Il est alors passionnant de saisir à quel point l’ensemble des initiatives locales et autres ateliers de recherches ou d’expérimentation en design urbain, ont influencé les lignes directrices dessinées par ce guide. Pour exemple, avec sa multitude de lots vacants, la prolifération d’initiatives d’agriculture urbaine, la pensée renouvelée de chercheurs sur les vides urbains, associées à la volonté de changement de paradigme, le guide s’est basé sur le principe fondateur de penser le paysage comme une infrastructure verte, capable de structurer une forme urbaine alternative pour Détroit. Faut-il alors retenir que face à de tels enjeux auxquels doit faire face cette ville, on ne peut mettre en projet avec des outils urbanistiques traditionnels, trop rigides, et encore moins avec un plan-masse de design urbain préconçu ? L’intelligence de ce plan stratégique est de concevoir un processus dans le temps, le temps naturellement long de la formation des villes et de la reformation des villes sur elles-mêmes après une crise. D’une crise naît le renouvellement, l’espoir et l’alternatif. L’identité de la ville se réaffirme plus que jamais de façon viscérale et c’est ainsi l’opportunité de venir l’intégrer dans un guide d’aménagement urbain fondateur et fédérateur.
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PARTIE DEUX // À Montréal : quelles initiatives urbaines pour quelles identités ?
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Ce mouvement du tactical urbanism émergent a-t-il traversé le Québec ? Et même plus, le Québec est-il proactif et innovant à l’échelle mondiale dans ce courant ? Quels types d’interventions urbaines spontanées observe-t-on au Québec ? Quelles identités urbaines nouvelles émergent dans nos villes ? Comment les designers urbains, les urbanistes, les architectes, les architectes-paysagistes, les artistes et les municipalités encouragent-ils et s’impliquent-ils dans ces pratiques urbaines ? De nombreuses questions auxquelles ce dossier tente de répondre en présentant un portrait large mais non exhaustif des initiatives urbaines porteuses de sens qui ont lieu depuis quelques années à Montréal. Si cette tendance au Québec s’exprime déjà depuis un certain temps en arrière-plan avec les ruelles vertes, des exemples comme Le Champ des Possibles, le Marché Solidaire Frontenac ou les initiatives du collectif RuePublique témoignent d’un désir commun de renouveau à travers un engagement citoyen, artistique et communautaire. À Montréal, nous avons eu droit dans les années 60 au « Montréal voit grand » avec les infrastructures routières, le Stade Olympique, le Casino et Habitat 67. Peut-être est-il venu le temps du « Montréal voit petit » ? Pas dans le sens d’un développement urbain réducteur, timide et sans ambition, mais plutôt dans le sens de l’apologie d’une ville où le cadre de vie prime avant tout, où les identités urbaines s’épanouissent toujours un peu plus. La démonstration qu’il est possible de s’approprier l’espace public dans nos rues reste encore à démontrer. La piétonnisation estivale de la rue Sainte-Catherine ou encore l’initiative Gilford en Vacances expriment bien l’évolution de ces courants. Mais le fait qu’une rue, sans être entièrement piétonnisée ou remplie de terrasses, puisse redevenir un espace public multifonctionnel et animé n’est pas encore ancré dans les mentalités. C’est en effet dans cette perspective que le CRE Montréal (Conseil Régional de l’Environnement) s’est donné pour mission de publier un recueil d’images et de textes faisant suite aux réalisations du Park(ing) Day 2012. Il s’agit de démontrer aux instances politiques la vraie valeur des espaces de stationnement et le véritable potentiel de notre espace urbain. Par ailleurs, Montréal saura-t-elle profiter de son titre « Montréal ville UNESCO de design » comme levier d’innovation en terme de réflexion et de mise en projet de l’espace public ? Comment les concours en design urbain peuvent-ils donner l’impulsion et créer un débat dans les domaines de l’agriculture urbaine, des toits verts, ou pour des projets de tactical urbanism ?
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Le Champ des Possibles, MontrĂŠal, pousses.blogspot.ca Le Champ des Possibles, MontrĂŠal, ruepublique.org
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REVENDICATION DE FRICHES URBAINES Le Champ des Possibles Le Champ des Possibles est un formidable exemple d’appropriation et de gestion d’une friche urbaine par un comité de citoyens. Ce terrain, d’environ un hectare au nord du Plateau Mont-royal, est bordé par la voie ferrée du Canadien Pacifique. Il s’agit d’une ancienne gare de triage qui desservait les industries textiles logées dans les grands bâtiments le long des avenues de Gaspé et Casgrain. L’activité, en pleine expansion durant les années 1970, décrut petit à petit et on assista à partir de 1990 à la désindustrialisation du quartier au profit de l’arrivée des professionnels de la communication ainsi que de nombreux artistes qui s’installèrent dans ces bâtiments industriels. La gare de triage fut démantelée, laissant ce vaste espace à la nature reconquérante. Le vent mais aussi les trains et les animaux, dont l’homme, ont apporté des graines favorisant en pleine ville le développement d’une biodiversité remarquable. Au cours des années 2000, cet espace sauvage est pratiqué par de nombreux citoyens et plus particulièrement investi par un groupe d’artistes qui y pratique notamment le guerrilla gardening, mouvement d’activisme politique qui utilise le jardinage comme moyen d’action environnementaliste. En 2007, face à la pression foncière, ce groupe d’artistes créé une œuvre de land art inspirée du symbole Roerich. Ce symbole était utilisé durant la Deuxième Guerre mondiale pour protéger les monuments historiques et culturels des bombardements. Cette œuvre a alors été créée pour provoquer un dialogue sur la conservation de cet espace et son importance pour la communauté. La mairie a abandonné l’idée d’un projet de gare routière et a racheté le site en 2009 dans le but de le mettre en valeur pour les résidents et les passants. Un Comité citoyen a été créé en 2009 pour travailler avec les administrations de l’arrondissement du Plateau et la Ville de Montréal afin de planifier ensemble l’avenir de cet espace vert. «Nous visons sa conservation et son partage en espace public vert et Réserve de Biodiversité Urbaine». Le site a d’ailleurs été inscrit par l’Arrondissement à la carte des parcs et espaces verts du plan d’urbanisme de la Ville. Durant l’hiver 2012-2013, l’OBNL RuePublique a proposé une installation hivernale : la Forêt des Possibles. Constituée de sapins de Noël, cette forêt offrait une seconde vie aux sapins et était le lieu de diverses activités lors des fins de semaine.
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Pigeon Hole Renewal, MontrĂŠal, facebook.com/pages/Pigeon-Hole-Renewal
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Pigeon Hole Renewal Intervention paysagère réalisée par un commerçant forcené, des étudiants en architecture de paysage et d’autres passionnés, visant la transformation d’un espace gris et morne en paysage vivant à saveur artistique, that’s the Pigeon Hole Renewal ! Situé en plein cœur du VieuxMontréal, le long de la rue Notre-Dame, l’espace est devenu depuis 2009 un pôle créatif accueillant d’installations temporaires, d’événements et de projections. Son design de friche était évolutif et disposé à recevoir une multitude d’usages spontanés.
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La rue Ottawa devant la Fonderie Darling, Montréal, fonderiedarling.org Gilford en vacances, été 2012, Montréal, facebook.com/gilford.envacances
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PIÉTONNISATION TEMPORAIRE DE RUES La rue Ottawa devant la Fonderie Darling Outre les expositions proposées au sein de la Fonderie, l’association Quartier éphémère investit depuis 2007 la rue Ottawa longeant le centre d’art. La rue est partiellement ou entièrement fermée en période estivale pour l’installation d’œuvres et la tenue d’activités culturelles. En 2012 ce sont les artistes Philippe Allard et Justin Duchesneau qui ont installé leur œuvre Courte-Pointe à l’entrée de la galerie. «Courte-Pointe s’étend sur le bâtiment de la Fonderie Darling comme si un géant de passage y avait laissé sa couverture pour la faire sécher au soleil.» Ces interventions nous poussent à réfléchir sur le rôle de l’art et la présence des artistes en milieu urbain et plus particulièrement dans le quartier post industriel du Faubourg des Récollets. Plus largement cette initiative s’inscrit dans la volonté de faire de la rue Ottawa un corridor culturel, un sujet d’actualité dans le cadre du Plan Particulier d’Urbanisme de Griffintown actuellement en élaboration à la Ville de Montréal.
Gilford en vacances Le projet Gilford en vacances a été initié par un des restaurateurs de la rue du même nom, puis organisé par l’OBNL RuePublique en collaboration avec l’arrondissement du Plateau à Montréal. Il relève d’un projet pilote de piétonnisation temporaire afin que les citoyens se réapproprient une rue de leur quartier. De juillet à septembre diverses activités ont été proposées : conférences sur l’histoire de la rue, mardis cinéma, 5 à 7 musicaux les jeudis, journée des bons voisins, journée de troc. Un succès ? Un brin mitigé. En effet, selon les participants, l’initiative, qui en était à sa première année, gagnerait à s’améliorer. Un programme d’activités plus organisé permettrait un meilleur achalandage et une réelle réussite de cet évènement. Pourquoi ne pas relier ces différentes initiatives de piétonnisation afin d’offrir un véritable réseau à l’échelle de la ville ?
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Les boules roses, Claude Cormier + associĂŠs rue Sainte-Catherine, MontrĂŠal, claudecormier.com
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Sainte-Catherine Est La piétonnisation de la rue Sainte-Catherine, où se concentrent de très nombreux commerces et autres activités, est un bel exemple sur plusieurs années d’un projet mené cette fois par la Ville de Montréal, qui, suite à un succès grandissant, a su prendre de l’ampleur. C’est en 2006, à l’occasion de la manifestation sportive des Outgames, que pour la première fois, une portion de la rue Sainte-Catherine a été ouverte aux piétons. Cette piétonnisation, initialement d’une durée de deux semaines, a progressivement été prolongée : en 2012, elle a duré un peu plus de 4 mois. Au fil des années, différentes mesures ont pris place : - Embellissement, avec l’installation d’œuvres d’art sur les terrains vacants attenants à la rue, mais aussi au sol et même suspendue au dessus de la rue avec les Boules roses de l’architecte-paysagiste Claude Cormier qui sont devenues la signature de cet évènement. Des bacs de plantations ont aussi été installés. - Animation de la rue, avec l’autorisation donnée aux terrasses de s’étendre sur la chaussée. - Évènements variés, foires commerciales, Montréal complètement cirque, le télématon, le Festival International Montréal en Arts... L’ampleur toujours plus importante de ce projet est portée par la grande satisfaction des commerçants, des passants et des visiteurs. Souhaitons que cet évènement se poursuive et s’étende à plusieurs rues de la ville.
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Petites fermes entre amis, Atelier Barda pour l’exposition Réinventons la ruelle ! à la Maison de l’architecture du Québec, atelierbarda.com Crédit photographique : Alain Laforest
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VERS UNE TRAME VERTE ET BLANCHE Les ruelles vertes Les ruelles de Montréal, au cœur des îlots d’habitation, sont des lieux privilégiés pour la réappropriation de l’espace public par les citoyens. En se regroupant, les habitants peuvent demander de l’aide auprès de leur éco-quartier afin d’organiser le verdissement de la ruelle. L’asphalte est retirée pour créer des plate-bandes et arbres, arbustes et vivaces sont plantés et parfois du mobilier est ajouté. Ce verdissement est encouragé car l’augmentation du couvert végétal a un impact important sur la qualité de vie des citadins : amélioration de la qualité de l’air et réduction du phénomène des îlots de chaleur urbains, notamment. Un label « ruelle verte » a été créé afin de répertorier ces ruelles aménagées créant ainsi un véritable réseau intermédiaire de mobilité à l’échelle de la ville. À quand de micro-fermes avec petits poulaillers urbains autorisées en ville avant d’allier verdissement, agriculture urbaine et élevage urbain ?
Les ruelles blanches L’engouement des citoyens à investir leurs ruelles est aussi visible en hiver ; et, face à ce dynamisme spontané, le conseil municipal a voté à l’unanimité, en février 2013, une motion visant à créer des règles encadrant l’aménagement des ruelles blanches. Ces orientations devraient être mises en place à l’automne prochain. Dans un article du Devoir daté du 28 février 2013, selon la conseillère de Villeray, Elsie Lefebvre « les procédures permettant aux citoyens d’aménager leur ruelle s’inspireront du concept des ruelles vertes. » Ces mesures veulent continuer à encourager les citoyens à s’approprier leur espace public, freinant ainsi l’exode des familles hors de Montréal. Les ruelles, lieux symboliques de la vie quotidienne retrouvent leur convivialité, et ce, même en hiver.
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Jardin sur rue et marchĂŠ solidaire Frontenac, peteandvegas.com
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CULTIVER ET SE NOURRIR EN VILLE Le marché solidaire Frontenac Le marché Solidaire Frontenac est né en 2008 d’une initiative citoyenne visant à améliorer l’offre de fruits et légumes dans le district SainteMarie à Montréal. Face au constat de désert alimentaire, ou du moins face à la problématique d’accès à de la nourriture saine et équilibrée dans le quartier, le marché solidaire Frontenac se veut être « un lieu de socialisation, un espace de rencontre et d’échange ainsi qu’une vitrine de diffusion culturelle». Épicerie ambulante, agriculture urbaine, cours de cuisine, et autres programmes éducatifs… si l’on n’est pas face un projet de renouvellement de la typologie de la rue ou de la forme de l’espace public, il ne s’agit pas moins de nouveaux usages à encourager dans l’espace public actuel et dans les futurs projets.
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Cantine de rue Grumman, MontrĂŠal, facebook.com/grumman78
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Les cantines de rue La nourriture de rue agit de façon positive en amenant des pauses dans la ville et en favorisant une appropriation du territoire par les habitants. « Partout dans le monde le phénomène s’amplifie, conséquence des processus d’urbanisation à l’oeuvre sur toute la planète, témoignant tout à la fois de l’ampleur de la précarité économique, de l’attachement à des coutumes et à des valeurs menacées, de l’aspiration à un renouveau de l’espace public, voire de l’affranchissement des individus vis à vis des normes collectives » (Catalogue d’exposition Ma cantine en ville, voyage au coeur de la cuisine de rue, octobre 2012, Cité de l’architecture et du patrimoine de Paris) Plus de 60 ans après l’interdiction de la vente de nourriture de rue à Montréal, la ville a lancé à l’automne dernier une nouvelle consultation publique sur ce thème. Ces dernières années en effet, les exceptions au règlement municipal ont permis à quelques restaurateurs de proposer ponctuellement leur cuisine de rue. Face aux réticences de la ville et de certains commerçants, ils ont ainsi réussi à relancer et élargir le débat, en suscitant l’engouement de citoyens convaincus du bénéfice sur leur cadre de vie. La cuisine de rue est revendiquée comme un « principe actif » à l’instauration de nouvelles sociabilités. Elle apparaît comme un temps de construction d’un « nous » éphémère qui s’approprie l’espace de la ville. Le ludique et la sensorialité y joue aussi un rôle prépondérant. L’intérêt de l’expérience urbaine proposée n’est pas seulement dans le résultat, mais surtout dans le processus qui le génère et dans le nouvel environnement et les nouveaux comportements qu’il engendre. Par un développement des pratiques de sociabilité, les cantines de rue contribuent ainsi à transformer le paysage. L’installation des dispositifs sur des lots vacants, des espaces délaissés urbanistiquement, ou en périphérie de stationnement contribue à revitaliser certains quartiers en y apportant un équilibre des fonctions urbaines. Les espaces non utilisés ou sous-exploités semblent d’ailleurs une piste à envisager pour le choix de sites. Mais le défi pour la ville de Montréal est d’arriver à proposer à la fois des espaces viables économiquement, tout en évitant de saturer le marché dans certaines zones. Aussi, si la vente d’aliments doit être encadrée, elle doit aussi laisser la place à la créativité et à une certaine forme de spontanéité, autant dans les assiettes que dans les formes de dispositifs proposées, surtout dans un domaine où l’adaptation au milieu est vitale.
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Rue Alder, Portland CrĂŠdit photographique : Atelier Barda
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La cuisine de rue est le témoignage d’une période de mutation. Elle a un réel impact social, interroge de nouvelles tactiques économiques et urbaines et offre une réflexion sur les nouveaux défis environnementaux. Elle peut dans ce sens faire parti d’un ensemble plus général de réponses alternatives à la revitalisation urbaine.
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Rucher, Quartier Latin, Montréal Crédit photographique : Mathieu Boyd
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L ‘apiculture urbaine L’abeille, emblème de la biodiversité, investit peu à peu la ville. Entre l’engouement à redonner à la nature une place de choix au sein de l’espace urbain combiner à l’acclimatation évidente de ce petit pollinisateur, l’apiculture urbaine laisse entrevoir un avenir riche en nouveaux projets afin de se réapproprier l’espace urbain. En effet, la volonté de certains citadins à développer un circuit d’alimentation à l’échelle locale incite le développement de plus en plus d’initiatives en matière d’agriculture urbaine. Or, en matière d’agriculture, la pollinisation est une étape cruciale en vue d’un rendement accru de la production. Et c’est là que notre insecte rayé entre en jeu puisque il assure dans certains cas jusqu’à 80% de la pollinisation. Ainsi, plus les espaces verts, les cours arrière et les jardins communautaires vont se développer, plus la présence de pollinisateurs sera nécessaire. Quant au souci d’acclimatation de l’abeille en milieu urbain, détrompez vous, l’abeille semble avoir trouvé un refuge dans notre environnement bétonné. En effet, les îlots urbains, tels des incubateurs, offrent à l’abeille un milieu de vie plus chaud de quelques degrés qui favorisent et allongent la floraison. La diversité forale présente en milieu urbain assure une floraison continue et essentielle aux abeilles, contrairement à certain milieu agricole caractérisé par la monoculture et la présence plus importante de pesticides. L’abeille est un allié incontestable pour le développement de l’agriculture urbaine. Dans ce sens, l’agglomération montréalaise regorge d’initiatives favorisant l’émergence d’une conscience collective quant à l’importance des populations de pollinisateurs. Chacun peut être acteur de ce mouvement relativement récent et ce, à différents niveaux. Par exemple, en encourageant la diversité florale, notamment en plantant des plantes mellifères sur notre jardinière, en prenant part à un projet de quartier, ou en s’informant par l’entremise de l’organisme «Miel Montréal» des différents événements et projets apicoles. Prenons comme exemple le «Santropol roulant» et son laboratoire apicole intégrant régulièrement des apiculteurs en herbes, le «CRAPAUD» (collectif de recherche en aménagement paysager et agriculture urbaine durable) et ses ruches sur le toit du pavillon de design de l’UQAM, le projet «P.A.U.S.E», dont le berceau se trouve à l’Université de Montréal ou la ruche collective des «Amis du Champ des Possibles». Une cartographie des ruchers montréalais est disponible sur agriculturemontreal.com/carte. Elle nous permet notamment de nous apercevoir que Montréal n’accueille actuellement pas moins de 161 ruches réparties sur 20 sites. Voici la première démarche à suivre : faire la distinction entre la guêpe et l’abeille. Si la première, carnivore, revendique votre sandwich le samedi midi au parc Lafontaine, la seconde, végétarienne, vous confond simplement avec une fleur… plutôt poétique, non?
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PARTIE TROIS // Détour(s) critique(s)
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Salon urbanismo tactico, Santiago de Chile, salonurbanismotactico.tumblr.com
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DES MOUVEMENTS, ET DES ÉVÉNEMENTS Intervention dans l’espace public : appropriation ou effet de mode ? Il existe des aménagements ou des programmations de l’espace public en ville qui ne rentrent dans aucune catégorie de l’urbanisme traditionnel. Il serait alors plus juste de parler d’événement ou d’installations, deux termes auxquels on adjoint souvent les qualificatifs de temporaire, éphémère, spontané, local, ou encore le préfixe micro. L’emploi de ces qualificatifs se justifie, à l’échelle d’une grande ville, dans l’opposition qu’ils créent face aux multiples structures, réseaux et services, termes alors accompagnés des qualificatifs contraires : permanent, général, programmé, concerté ou précédé du préfixe macro. Bien qu’appartenant à un lexique respectueux et justifié, les qualificatifs des événements et installations ne sont pas sans connotations réductrices. Les mots font souvent l’objet d’un glissement de sens malheureux à l’origine du lieu commun selon lequel la source et la portée de ces événements urbains seraient limitées. Une limitation que l’on attribue aux moyens restreints de leurs mises en oeuvre. Un jugement que l’on retrouve parfois sous la forme : « Combien ça coûte ? Combien de temps ça va durer ? ». Où se situe le seuil de considération ? Les coûts en millions de dollars de travaux, ne sont-ils que les seuls gages de projets urbains porteurs et constructifs pour la ville ? La portée et la popularité d’un faisceau de tendances (le Park(ing) Day, l’agriculture urbaine, la micro-architecture communautaire, l’urbanisme tactique…), se répondant les unes aux autres, vont en croissant. Un mouvement de fond toucherait donc à l’appropriation de l’espace en ville. Le renouvellement dans lequel s’inscrivent les individus et les groupes qui pratiquent ces interventions, semble faire de ces courants et de leurs impacts quelque chose de durable et de significatif dans l’urbanisme et le design urbain de ce début de 21e siècle. Comment révéler l’impact d’un aménagement ou d’une programmation conçue pour une courte durée, de 1 heure à 1 saison ? Peut-il être considéré par l’urbanisme comme générateur de valeur ? Ces initiatives se destinent-elles à une courte durée de vie ? Impriment-elles du sens aux espaces qu’elles investissent ? Ce sens persiste-t-il après leur passage dans l’imaginaire collectif ?
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Planking, Atlanta, planking.me Planking P&PL, MontrĂŠal. CrĂŠdit photographique : P.Gayaud
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LE MICRO ÉVÉNEMENT
Le micro événement, générateur d’une vibration urbaine. Un rappel du sens des espaces urbains PLANKING, FAIRE LA PLANCHE EN VILLE, UN CATALYSEUR D’ESPACE
Le planking est l’exemple d’une intervention des plus insignifiantes en apparence, une simple posture à laquelle chacun peut s’initier et qui peut être reproduite n’importe où. Remontant à 1997, le planking est une invention populaire que l’on doit aux anglais Gary Clarkson et Christian Langdon. À l’origine, c’est un jeu de photos-souvenirs décalées. La popularité de la pratique semble exploser trois ans plus tard, et malgré l’immense variété d’application, le planking demeure simple et inchangé depuis son invention. À la vue d’une image de planking, on ressent instantanément l’engagement du corps dans l’espace. Au-delà de la légèreté affichée, l’intervention fait écho à la timidité que les individus et les professionnels éprouvent parfois dans les projets d’aménagement. D’apparence incongrue, les photographies ne laissent pas indifférents. Car le planking c’est aussi une prise de risque, un risque physique, mais surtout le risque du ridicule. Aussi léger soit-il, ce risque est contrebalancé par ce que l’exercice apporte. Lorsque le planking est pratiqué en espace urbain, il confère au lieu une vibration nouvelle, sortant l’espace de son ordinaire. Le planking, c’est aussi un message : l’intervention dans l’espace public est quelque chose de libre et démocratique. Aussi spontané soit-il, le planking est un théâtre où mobilier conventionnel, nouveau mobilier, art public ou haut-lieu touristique, deviennent les acteurs d’une photo-souvenir, où le corps joue le rôle inversé du décor. C’est l’expérience d’un lieu par une mise en scène des plus efficaces : la posture de la planche. Mouvement par contamination, le planking est aussi l’occasion d’observer le phénomène de propagation des nouvelles pratiques urbaines. Ce phénomène est alors souvent associé au concept de viralité, qui repose sur l’analogie à la contagion d’une maladie, sous-entendant que les individus sont victimes d’une nuisance et la propagent à leur tour. Plutôt que de répéter un constat réducteur, il convient de s’interroger sur les réelles qualités de ces mouvements, ce qui en eux suscite l’envie de partage et de ralliement.
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Bodies in urban space, ciewdorner.at
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BODIES IN URBAN SPACES. DE L’ÉVÉNEMENT À L’URBAIN, UN RAPPEL DU SENS PREMIER DE L’ESPACE PUBLIC EN VILLE
Imaginons que l’on prête au phénomène de planking l’intention d’un artiste, d’un chorégraphe, qui se servirait des corps pour permettre aux espaces de communiquer une palette d’émotions urbaines, stimulant un renouvellement du regard des usagers ! « Bodies in urban spaces invites the residents to walk their own city, thus establishing a stronger relashonship to their neibourhood districts and town. » (Willi Dorner) Événement plus construit que le planking, Bodies in urban spaces, s’inspire du parkour (l’art du déplacement en ville) et est l’œuvre de la compagnie de danse viennoise Willi Dorner (Autriche). Débutée en 2007, l’œuvre met en scène des lieux par l’entremise des corps plutôt que l’inverse. L’œuvre est composée d’un parcours chorégraphié dans lequel des danseurs vont se placer seuls ou en groupe dans des positions insolites dans les interstices des espaces urbains. Du nouveau ou de l’ancien, du bon et du mauvais, Bodies in urban spaces permet de transcender la banalité et de redécouvrir les qualités des lieux investis. Quelques minutes d’immobilité mettant en scène le banal par l’inattendu se transforment ensuite par la photographie en une image forte. Cette œuvre cumule aujourd’hui une série impressionnante d’interventions dans de nombreuses villes à travers le monde. Les multiples parcours ont révélés aux villes leurs interstices, les faiblesses et les qualités du vide dans l’espace urbain, ou l’étonnante richesse des situations dans des espaces d’apparence anodins.
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Blackrock City vu du ciel, burningman.com
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LE MACRO ÉVÉNEMENT
L’installation et l’événement comme seuls générateurs de ville ?
BURNING MAN, LA VILLE DE BLACKROCK CITY
Imaginons que ces exemples d’éphémère en ville puissent créer de la Ville, que l’éphémère soit capable d’aller jusqu’à créer une trame complète, une ville, au milieu du dessert. L’exemple existe, à l’occasion du festival Burning Man, une trame héliocentrique complexe de 128 ilots apparait depuis 1990 dans le dessert de Blackrock au Nevada. Cette ville temporaire de 50 000 participants n’est constituée que d’espaces publics. Durant la période du festival, d’immenses sculptures, de grandes installations, des activités et des performances gratuites côtoient les fonctions classiques d’une ville. Malgré l’absence totale d’infrastructure, la ville se dote d’un pont aérien, d’un système de distribution d’eau, d’un service d’ordre et de services de propreté, d’éclairage, d’un règlement encadrant les usages : des zones silencieuses, des zones bruyantes, des limitations de vitesse. À l’exception du prix du billet qui couvre une bonne part de la logistique, l’ensemble de ces infrastructures et le respect des règles est le fait des participants eux-mêmes, le tout dans le respect du site naturel. L’organisation du festival intègre une phase de décontamination afin d’effacer toutes traces. Et des études d’impacts sont réalisés, un exploit quand on pense à l’acte final du festival de «l’Homme qui brûle» , à savoir la combustion d’une gigantesque structure se trouvant au centre du plan. Imaginons le potentiel de la ville spontanée de Blackrock City appliqué à des villes traditionnelles souffrant de dépopulation. L’exemple fait en effet écho à deux exemples présentés dans ce dossier et pourrait enrichir le discours : le phénomène de désertification urbaine de Détroit, ou encore le recours au symbole de Roerich reproduit dans le Champ des possibles à Montréal. Dans le cas de la trame de Blackrock City, c’est la vue en plan d’un symbole d’une horloge solaire radiocentrique qui constitue la trame. Cet exemple extrême ouvre une réflexion sur les impacts importants que peuvent avoir des évènements temporaires à l’échelle du territoire et de la création urbaine sur elle-même. Il nous permet aussi de nous questionner sur l’encadrement de ces pratiques. Évidemment, la marchandisation et la labellisation des initiatives spontanées restent des terrains d’études à fouiller, mais on constatera que les structures encadrant ces évènements ont plutôt tendance à s’auto-générer efficacement dans des interprétations permissives des règlements.
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American Gothic, Grant Wood, 1930, Art Institute of Chicago
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INTERDITS ? L’histoire d’un potager interdit L’INTERDIT EN VILLE LES FREINS RÉGLEMENTAIRES À L’ÉNERGIE CIVIQUE D’INNOVATION
En ville, que l’on soit en centre-ville ou en banlieue, les initiatives les plus anodines se voient souvent opposer des mesures d’interdiction par réactions. On constate de fait souvent un phénomène d’hyperréglementation agissant comme une bride à l’innovation, un frein à l’initiative, plutôt qu’une attitude proactive dans l’interprétation éclairée des règlements afin d’encourager les initiatives urbaines. Les règlements municipaux, par exemple, peuvent s’avérer être de puissants freins aux initiatives les plus anodines et les plus positives. Face à l’interprétation de ces règlements par réaction, les citoyens n’obtiennent parfois que des dérogations. L’énergie citoyenne se voit donc gaspillée plutôt qu’encouragée ou encadrée de manière proactive. Au fil des ans, les règlements sanctionnant l’innovation comme des nuisances s’accumulent et la motivation de chacun se redirige vers une palette d’activités consensuelles. C’est ce phénomène qui vaut, de façon particulièrement prégnante à la banlieue, sa réputation de propreté et de tranquillité, de normativité et de bien comme il faut. Une réputation dont les villes de banlieue font souvent l’autopromotion et dont la réalité sous-jacente est l’interdit. LE POTAGER DE DRUMMONDVILLE DÉROGATION ET VOLONTÉ MUNICIPALE DE DÉCOURAGEMENT
Dans l’actualité de 2012, un cas d’école illustre bien la faiblesse du cadre réglementaire dit classique dans l’encadrement et l’encouragement des initiatives d’innovation urbaine. Située à 105 kilomètres au sud de Montréal, et comptant quelques 71 000 habitants, Drummondville est une des belles villes du Québec. En plein «printemps érable» dernier, la ville de Drummondville fut le théâtre de ce phénomène d’hyperréglementation. Un couple de résidents, José Landry et Michel Beauchamps, entreprend d’installer à l’avant de leur pavillon un potager ; la réalisation inspire le respect : allées en graviers, bordures au cordeau, tonnelle, et bacs surélevés. On est loin des codes du potager ouvrier ou du jardin maraîcher de production. À bien y regarder, le jardin d’agrément reprend plutôt l’esthétique des jardins à la Française. Disons qu’à leur modeste
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Jardin potager avant et après, Drummondville. co22.org
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échelle, ces travaux de paysagement suivent certains codes des jardins de grands châteaux. La grande variété des espèces cultivées et leurs choix audacieux offrent une expérience visuelle riche et stimulante : la vision d’un beau jardin où abondent des végétaux d’agréments offrant d’ailleurs aux passants, aux voisins et aux enfants du quartier le spectacle de la belle évolution d’un tel jardin. Et pourtant, le couple, qui avait choisi de mettre son temps à profit dans un projet alliant saines habitudes de vies et esthétique paysagère s’est vu opposer un règlement municipal qui interdisait de cultiver à l’avant de leur lot résidentiel. Mentionnons que José Landry et Michel Beauchamps ont opté pour l’avant de la maison non pas par esprit de contradiction, mais parce que le plan de lotissement de leur aire résidentielle les a dotés d’un jardin arrière étroit et plongé dans l’ombre ; des conditions peu propices à la croissance efficace d’un beau jardin d’agrément. CODES ESTHÉTIQUES D’AMÉNAGEMENT ANALYSE ET SE DÉPARTIR DES VALEURS DÉSUÈTES
Le phénomène de blocage dans ce dossier est complexe et fait appel à la nature des villes pavillonnaires. Héritée d’un règlement désuet ne visant pas les potagers à caractère ornemental, l’interdiction tire sa source dans le courant de l’aménagement dit moderne du milieu du 20e siècle. Ce règlement invoqué visait à interdire la mise en culture des espaces gazonnés, un réflexe encore bien présent au milieu du 20e siècle pour les résidents les moins favorisés désirant épargner quelques épiceries par l’apport d’un potager. Dans les faits, on peut difficilement parler de nuisances olfactives, sociales, ou auditives dans le cas des potagers de villes. Pourtant, à la charnière des années 60, les codes des villes pavillonnaires ont établi une liste de nuisances esthétiques pour offrir aux résidents un cadre de vie s’affranchissant des modes de vie modestes. Interdiction des longues cordes à linge, respect des couleurs des crépis, des portes et volets, raccordement sanitaire et électrique invisible, nature des clôtures, etc. Et parmi ces nuisances esthétiques, on retrouve la vue de la terre retournée, et le travail de celle-ci. Les activités d’un potager sont certes peu dérangeantes, mais elles ne cadraient pas avec l’image de modernité que les villes et particulièrement les villes de banlieues voulaient projeter. La culture du tout à l’auto, l’accès
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au confort de la vie moderne pour tous, l’industrialisation des services et des produits, les espaces déconnectés reliés par des infrastructures routières modernes faisant des villes nouvelles un paradis de pavillons résidentiels… Un paradis de moins en moins stimulant qui n’intègre pas les nouveaux paradigmes contemporains. Un paradis qui est devenu le lieu d’interdictions plus farfelues encore que les initiatives qu’il refuse d’accueillir d’encadrer et d’encourager. Plutôt que d’en appeler au respect d’un code jardinier, la décision des services et du conseil de ville fait l’aveu d’une profonde méconnaissance : comme si l’application stricte du règlement prévalait sur l’interprétation des raisons de sa mise en place. Ainsi, les instances qui redoutaient une perte de contrôle par contagion d’une mode à l’ensemble de la ville se sont opposées à un modèle de développement durable et de saines habitudes de vie. Des initiatives dont les services municipaux et sociaux font pourtant la promotion. Il serait injuste de stigmatiser les villes, les centres-villes, ou les banlieues; de parler d’un dogmatisme postmoderne systématique, mais l’hyperréglementation suivant des codes désuets est un des problèmes à traiter si l’on veut pouvoir encourager et encadrer de manière proactive des interventions spontanées et innovantes en Ville. Si l’Association du design urbain du Québec soutient et encourage les initiatives urbaines locales pertinentes et qui donnent de la valeur à l’espace public, il n’est pas moins de son devoir d’engager une réflexion critique sur ces nouvelles formes de design et d’appropriations de l’espace public.
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visualartillery.net
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DESIGNERS URBAINS Comment adapter notre façon de produire la ville ? Les exemples présentés permettent d’« explorer les influences croisées entre le caractère du lieu et les pratiques d’aménagement qui s’y façonne », et de tenter de « comprendre comment ces deux éléments se renforcent et s’enrichissent l’un l’autre » (CAPS-ACÉAU). Reprenons notre question de départ : Comment les initiatives urbaines locales façonnent-elles de nouvelles identités urbaines et inversement ? D’ailleurs qu’entendons-nous par identité ? Larousse nous dit : Identité, Nom féminin (bas latin identitas, -atis, du latin classique idem, le même) : Caractère permanent et fondamental de quelqu’un, d’un groupe, qui fait son individualité, sa singularité. La notion d’identité collective relèverait en effet de plusieurs strates : le lien au territoire, les codes relationnels, la mémoire collective et le projet collectif. L’identité relève aussi d’une notion philosophique qui soulève la question métaphysique des rapports entre le Même et l’Autre, ainsi que celle du devenir. L’identité d’un être ou d’une personne ne semble en effet pouvoir se définir qu’à travers la relation : relation à soi ou à d’autres êtres semblables ou identiques à soi. Il est intéressant de constater alors que la notion d’identité rencontre la notion même d’espace public. L’espace public, ce lieu inaliénable, collectif, de passage ou de rassemblement, à l’usage de tous, et qui constitue un champ de libertés individuelles et collectives. Pourrait-on formuler que les différentes formes d’appropriation de l’espace public relèvent inévitablement d’un engagement émotionnel et physique avec son environnement, créant ainsi le sentiment d’appartenance et permettant, par conséquent, aux identités urbaines de se révéler et de s’épanouir ? Allons plus loin. Il s’agit de notamment constater que l’échelle du quartier, de la place, de la ruelle, de la parcelle vacante, l’échelle locale donc, est, semble t-il, la seule échelle au sein de laquelle s’expriment et s’épanouissent ces initiatives urbaines. Faut-il en conclure qu’à l’heure de la mondialisation, des forces politiques, économiques, sociologiques et écologiques globales nous laissent parfois, nous citoyens, sans armes, et qu’alors seule l’échelle locale permet l’expression et la révélation des identités et idéologies urbaines auxquelles nous nous associons ? Échelle urbaine locale et identités urbaines propres à cette échelle constitueraient ainsi des moteurs de développement de micro-cultures. Ce qui est alors remarquable, c’est de justement constater le phénomène de globalisation des micro-cultures locales. Force est de constater que la relation entre échelle locale et échelle globale est beaucoup plus subtile, et qu’il faut s,extraire d’une dualité simpliste. Les nouveaux courants de pensée portent de fait à croire que le local peut informer et agir sur le global.
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Water Street, New York City. nyc.gov
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Néanmoins quelle est la portée de ces initiatives urbaines, qu’elles soient éphémères ou pérennisées, mais qui demeurent bien souvent très ponctuelles ? Quelle est la valeur à long terme ? Peuvent-elles initier des mutations durables de l’environnement urbain ? D’initiatives locales relevant plus du divertissement culturel aux initiatives plus activistes s’attaquant à des sujets de fond, qu’apportent réellement les initiatives urbaines locales à la réflexion sur les grands enjeux urbains métropolitains, supportant des problématiques souvent bien plus complexes et imbriquées ? Finalement, on pourrait résumer en : ces micro-interventions : design urbain ou divertissement urbain? On en vient donc enfin à la question du rôle des aménagistes. « Faudrait-il faire disparaître, par souci de cohérence spatiale par exemple, l’action isolée d’un bricoleur urbain ? Ou bien la conserver pour égayer la ville ? » (Millénaire 3 / le centre de prospéctive du Grand Lyon). Quelles sont les limites à ses modifications d’usages et de fonctions ? Est-ce qu’une intervention spontanée qui semble utile pour certains, ne va pas gêner d’autres usagers ? Est-ce que ces interventions issues souvent de milieux créatifs, ne génèrent pas un sentiment d’exclusion des autres populations ? N’y a-t-il pas un lourd risque de gentrification : on connaît le processus si éprouvé : un quartier populaire est investi par des artistes et des créatifs puis s’embourgeoise. Spontanéité versus institutionnalisation : quel est donc le rôle des municipalités, des designers urbains, des urbanistes, des architectes, des architectes paysagistes, etc. ? Pour reprendre l’objet de cette conférence annuelle 2013 du CAPS-ACÉAU : « Quels enseignements les aménagistes peuvent-ils tirer des spécificités culturelles d’un lieu ? Et comment planifier en gardant toujours en tête l’identité d’une ville et de ses habitants, pour bâtir une profession respectueuse du contexte dans laquelle elle s’exerce ? » Face à ces initiatives urbaines concrétisées et ces identités urbaines révélées, il s’agit de repenser du moins d’adapter notre manière notre manière de produire la ville. Est-ce envisager de « faire avec » dans une logique de codesign ? ou d’« aider à faire » dans une logique d’accompagnement et de facilitation ? Les exemples de villes comme New York City, Détroit, ou Portland nous montrent à quel point, la démarche classique et descendante top-down (« les collectivités publiques produisent la ville dans le respect général, les experts font, les citoyens sont les administrés »), peut parfois être remplacée par une démarche bottom-up « où la ville s’inspire des idées venant de ses citoyens » (Millénaire 3 / le centre de prospéctive du Grand Lyon) en allant encore plus loin que les consultations publiques.
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En bref : ni effet de mode, ni rÊvolution de la pratique en design urbain, il s’agirait pour le designer urbain de considÊrer ces initiatives urbaines locales comme un terreau fertile de nouvelles connaissances contemporaines sur l’Homme urbain et les conditions urbaines.
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CONTEXTE DE REDACTION CAPS-ACÉAU - Association Canadienne des Étudiants en Aménagement et Urbanisme (www.caps-aceau.org) Bureau de Design - Ville de Montréal (www.ville.montreal.qc.ca) Park(ing) Day - Événement annuel (www.parkingday.fr) CRE – Conseil Régional Environnement (www.cremtl.qc.ca) Vivre en ville – Organisme d’intérêt public (www.vivreenville.org) OCPM – Office de Consultation Publique de Montréal (www.ocpm.qc.ca) Bixi - Vélos en système de partage (www.montreal.bixi.com) v2com – Fil de presse (www.v2com.biz) Nouveau Projet – Magazine (www.nouveauprojet.com)
PARTIE UNE // Tour d’horizon TACTICAL URBANISM Tactical urbanism – Blog et publications (www.tacticalurbanismsalon.com) Pop-up city – Blog (www.popupcity.net) Better Blocks – Groupe activiste (www.teambetterblock.com) Spontaneous interventions – Pavillion USA à la 13è Biennale d’Architecture de Venise (www. spontaneousinterventions.org) Nouveau Projet – Magazine (www.nouveauprojet.com) LE 18 BIS Le 18bis - Collectif d’architectes (www.le18bis.com) Jardin des abattoirs (www.jardindesabattoirs.blogspot.ca) Biennale Park Design 2012 - Festival de design urbain à Bruxelles (www.parckdesign2012.be) L’AGRICULTURE URBAINE AAA – Atelier d’Architecture Autogéré (www.urbantactics.org) Park(ing)day - Événement annuel (www.parkingday.fr) Grumman 78 – Foodtruck (www.grumman78.blogspot.ca) Rebar - Groupe d’artiste américain (www.rebargroup.org) Spacing - Magazine et Blog (www.spacing.ca) Ferme Lufa – Serre sur les toits (www.lufa.com) CRAPAUD - Collectif de recherche en aménagement paysager et agriculture urbaine durable (http://www.crapaud.uqam.ca)
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POUR EN SAVOIR PLUS Références DETROIT Shrinking Cities – Publication - Volumes 1 et 2 - 2006 Detroit future city – Detroit works project (www.detroitworksproject.com) Stalking Detroit – Publication - Actar - 2002 Détroit je t’aime – Blog (www.detroitjetaime.com) Detroit Disurbansim – Blog (Détroit-Disurbanism-project.blogspot.ca) Heildeberg project – Projet communautaire (www.heidelberg.org)
PARTIE DEUX // A montréal et au Québec MONTREAL Champ des Possibles - Comité de citoyens (www.amisduchamp.com) RuePublique - Organisation communautaire (www.ruepublique.org) Fonderie Darling - Quartier Ephémère (www.fonderiedarling.org) Gilford en vacances – Evènement - (www.facebook.com/gilford.envacances) Claude Cormier + Ass. - Architecture de paysage et Design Urbain (www.claudecormier.com) Ruelles vertes de Montréal (www.eco-quartiers.org/cartes) Marché Solidaire Frontenac - Carrefour alimentaire (www.marchefrontenac.com) Pigeon Hole Renewal - Développement de friches (www.parcsephemeres.com) L’APICULTURE URBAINE Miel Montréal - Regroupement d’apiculteurs (www.mielmontreal.com) Santropol roulant - Organisme alimentaire (www.santropolroulant.org) CRAPAUD - Collectif de recherche en aménagement paysager et agriculture urbaine durable (http://www.crapaud.uqam.ca) P.A.U.S.E. - Projet d’agriculture urbaine à l’Université de Montréal (www.aqpere.qc.ca) Amis du Champ des possibles - Comité de citoyens (www.amisduchamp.com) Agriculture urbain MTL - Portail de l’agriculture à Montréal (www.agriculturemontreal.com) CANTINE DE RUE Ma cantine en ville - Voyage au coeur de la cuisine de rue - octobre 2012 - Cité de l’architecture et du Patrimoine de Paris et VIA (www.via.fr/evenements-expo-cantineville) Atelier Barda - Agence d’architecture (www.atelierbarda.com)
PARTIE TROIS // Détour(s) critique(s) Willy Dorner - Chorégraphe - Bodies in urban spaces (www.ciewdorner.at) Burning man - Festival (www.burningman.com) Controverse autour d’un potager à Drummondville - Publié le 18 juillet 2012 - LaPresse
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Pauline Butiaux est designer urbain, diplômée de l’Université de Montréal, et ingénieur en génie urbain, diplômée de l’École des ingénieurs de la Ville de Paris. Elle est membre fondatrice de l’ADUQ, et du collectif artistique Les aiguilles tournent à l’envers. Pauline Butiaux se réalise dans la passion qu’elle voue à la ville et à la pensée contemporaine de celle-ci. Entre Paris, New York et Montréal, ses premières années d’expériences professionnelles se tissent autour des domaines de l’architecture de paysage, de l’urbanisme et du design urbain, tant comme stagiaire-conceptrice dans des agences privées que comme gestionnaire de projet urbain à la Ville de Paris.
Pierre-Luc Filion est un des membres fondateur du collectif le18bis (2009) et membre du conseil d’administration de l’ADUQ (2012). Diplômé d’une maîtrise de l’École d’architecture de Paris La Villette en France et d’un baccalauréat à l’École d’architecture de l’Université de Montréal, il a également étudié à l’École d’architecture de La Cambre à Bruxelles. En parallèle de son engagement professionnel à Bruxelles et à Montréal, il s’implique dans de multiples workshops en architecture et en design urbain. Dans ce sens, il a été tuteur-concepteur au sein du workshop international de l’EASA011 à Cadiz en Espagne.
Pauline Gayaud est architecte-paysagiste, diplômée de l’École Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Bordeaux et membre du conseil d’administration de l’ADUQ (2012). Deux années en faculté de géographie, une curiosité et une pratique de l’art en général ainsi qu’un échange universitaire à Montréal ont enrichi son intérêt pour le design urbain, développé à l’école de paysage. Ces divers champs se mêlent aujourd’hui dans sa pratique professionnelle.
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COORDINATION DE LA PUBLICATION
Kevin Grégoire est designer urbain, artiste, photographe, curieux des phénomènes d’art populaire et cofondateur de l’ADUQ. Il titulaire d’une maîtrise de design urbain de l’Université de Montréal, d’une licence de design et environnement et d’un diplôme d’études secondaire en Art de l’université de Paris 1 Panthéon la Sorbonne ainsi que d’une préparation aux Beaux-Arts.
Maude Ladouceur est titulaire d’une maîtrise individualisée en design urbain de l’Université de Montréal ainsi que d’un baccalauréat en urbanisme de l’Université du Québec à Montréal. Elle possède une formation qui nourrit une de ses plus grandes passions, l’aménagement urbain. Elle travaille présentement davantage dans le domaine de l’urbanisme, mais continue d’enrichir ses connaissances dans le domaine du design urbain en participant à différents colloques ou conférences. Depuis janvier 2012, elle est membre fondatrice et responsable du comité orientation et financement de l’ADUQ.
Simon Pouliot est membre-fondateur de l’Association du design urbain du Québec. Titulaire d’un baccalauréat en urbanisme de l’Université du Québec à Montréal et d’une maîtrise individualisée en design urbain de l’Université de Montréal, Simon a cumulé, au cours des dernières années, des expériences diversifiées, tant au sein d’organismes communautaires et publics que dans l’entreprise privée. Il y a alors agi comme chargé de projet en urbanisme ou conseiller et concepteur en design urbain. Il s’implique par ailleurs au sein de nombreuses activités liées à la pratique du design urbain; charrettes, comités citoyens, politique municipale, etc.
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PARTENAIRES
- Partenaire GRANITE -
- Partenaire ACIER -
- Partenaire BÉTON -
- Partenaire BOIS -
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