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Ici, on sait rire ! humour Oualas
from AM Hors série
by afmag
Pionniers comme jeunes talents, les stars du stand-up à l’ivoirienne sont à l’affiche des clubs locaux et des festivals internationaux. Entretiens. propos recueillis par Jihane Zorkot
Les Abidjanais sont de bons vivants, ils ont toujours le sourire aux lèvres. Et pour le rire, ce sont sans doute les premiers. Si certains pionniers, tels qu’Adama Dahico ou Gohou Michel, se sont battus pour représenter l’humour à l’ivoirienne, de jeunes talents n’hésitent pas à entrer dans la danse. Il y a quelques années, le statut d’humoriste n’était pas pleinement assumé. Les artistes se présentaient comme des comédiens. Depuis, les mentalités ont évolué grâce à des émissions cultes, comme Bonjour, lancée en 2006 par la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI), première chaîne à l’époque, qui propulse l’humour au premier rang des arts les plus prisés en Côte d’Ivoire. Bon nombre de comiques se font connaître dans cette émission, tel le Magnific ou Joël. Abidjan devient alors la « capitale du rire », tant et si bien que Canal+ Afrique lance l’émission – qui va vite devenir célèbre –Le Parlement du rire. Aujourd’hui, on observe dans la ville un véritable boom des comedy clubs : le Gondwana Club, fondé par Mamane, le Dycoco Comedy Club, créé à Cocody en 2020 par le groupe Grégoire Furrer Productions (fondateur du prestigieux Montreux Comedy Festival, en Suisse), et tout récemment le Music’All Cultural Center (MAC), créé par Oualas et le metteur en scène Abass Zein. Tous affichent la même ambition : donner à de jeunes talents l’opportunité de jouer devant un public et leur permettre de trouver un tremplin pour se faire connaître. ■
Le fédérateur
TAHAR LAZRAK, dit Oualas, est ivoiro-marocain. L’aventure du théâtre démarre pour lui en 2007, avec Chawarma Story une pièce écrite par Abass Zein. Aujourd’hui, cet autodidacte qui a débuté dans sa chambre avec une petite webcam est le personnage principal de ses shows. Après avoir joué pour les plus grands festivals, tels Montreux, le Marrakech du rire ou le Juste pour rire canadien, il a été l’initiateur d’Afrique du rire, qui en est déjà à sa quatrième édition et réunit plus de 30 artistes internationaux chaque année. Également à la tête du MAC, un centre culturel en plein cœur d’Abidjan, il a pour ambition de révéler de jeunes talents et de donner à l’humour africain (et ivoirien) une envergure internationale.
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Ensuite : Vous êtes francophone, anglophone mais aussi arabophone. Un atout pour pouvoir jouer partout, j’imagine ! Oualas : Je suis ivoiro-marocain. Ce n’est pas que je me considère « comme » un Ivoirien, je « suis » ivoirien. Mon père est arrivé dans le pays en 1956, avant l’indépendance, il me le répète souvent. Le drapeau et l’hymne national sont nés devant lui. En 1960, on pouvait choisir entre la nationalité ivoirienne et la française. Mon père a pris la première, car c’est la Côte d’Ivoire qui lui a ouvert les bras. Je suis ivoirien, c’est le cœur qui parle. En 2017, Jamel Debbouze m’a proposé de m’installer en France et de bosser avec lui au Comedy Club. J’ai trouvé cette proposition incroyable, mais j’ai décidé de la décliner. Ma terre, c’est l’Afrique. C’est ce continent que j’ai envie de développer. Il ne faut pas que l’aide vienne toujours des autres. Pourquoi attendre ? Nous aussi, on sait faire des choses. Quand je donne des conférences dans des universités à l’étranger, je dis aux ils et mettre a de l’A frique. faut l’aider à avance double je ne suis pas just marocain, suis à la bu Je suis lang dans mon pays, mais j’ai la cha aussi anglophon nophone. Autodidacte, je puis et mes ressources et j’a partager tout sur scène. Pe mon publ ic ou s sketch, je assimilé et compris par tous. Comment avez-vous réussi à vous créer une place dans le cœur des Ivoiriens ? gen jour Adama D r J’ des têtes fait connaître. Ensuite, j’ai fait Bonjour e J expé guerre. montrais couleur pa l’expérience mo pas l’ en vous voyant sur scène ? re jeunes de revenir quand ils auront fini leurs études et de mettre leurs savoirs au service de l’Afrique. Il faut l’aider à avancer. Avec ma double culture, je ne suis pas juste ivoirien ou marocain, je suis également africain, à la fois malien, sénégalais, burkinabé… Je suis francophone par la langue parlée dans mon pays, mais j’ai la chance d’être aussi arabophone, anglophone et hispanophone. Autodidacte, je puise dans ma culture et mes ressources et j’ai envie de partager tout cela sur scène. Peu importe l’origine de mon public ou sa langue. Quand je fais un sketch, je veux qu’il soit
Contrairement à ce que les gens pensent, mon premier spectacle n’était pas pour Bon, mais, en 2009, avec Adama Dahico, au Festival international du rire d’Abidjan. J’étais l’une des têtes d’affiche, et c’est comme ça que je me suis en 2014, et là, j’ai convaincu le public abidjanais. J’ai abordé un sujet très sensible, qui était mon expérience de la guerre. Ça a plu parce que je montrais que nous, les Ivoiriens de couleur blanche, n’avons pas gardé de rancune. Des deux côtés, l’expérience a été horrible, mais nous avons également vécu des moments de fraternité magnifiques, et il ne faut pas l’oublier. À quoi un spectateur doit-il s’attendre
Le plus beau compliment que j’ai reçu, c’est : « Quand on regarde ton spectacle, on voyage. » J’essaie de transporter le public dans tous les pays
« Quand on regarde ton spectacle, on tou d’Afrique, à travers les anecdotes que j’ai pu vivre au Congo, au Burkina, au Mali, au Togo, ou encore au Bénin. Surtout lorsque je joue en Europe. Les spectateurs adorent ça. Parce que je leur offre un tour d’horizon. Ils ne savent pas quelle est la différence entre un Ivoirien et un Camerounais, par exemple. Mais grâce à mon sketch, ils apprennent les nuances, et j’envoie un message fort : l’Afrique se bat pour avancer. Mon prochain spectacle, c’est Oualas déconfiné, qui raconte après le Covid-19, et surtout après être devenu papa. Ma vie de père m’a poussé à me concentrer sur mes objectifs réels. Vous avez créé différentes scènes du rire. Quel rôle voulez-vous jouer dans l’expansion de l’humour ivoirien ?
Dès que j’ai eu l’idée du MAC, j’ai contacté Abass Zein pour que l’on monte le projet ensemble. Je ne voulais pas juste créer une scène de stand-up, mais un espace créatif où le théâtre, la chanson, l’humour puissent se rencontrer. On met en avant de jeunes talents et, une fois par mois, un artiste international. On essaie de l’implanter un peu partout sur le continent, notamment au Congo. Afrique du rire, lui, est né de la frustration d’être invité à des festivals et de comprendre que notre continent n’est jamais mis à l’honneur. Je me suis dit que personne d’autre que nous ne le ferait. Lorsque j’ai appelé des humoristes pour leur présenter mon projet, je leur ai dit : « J’ai des rêves, mais très peu de fonds, donc soit vous me faites confiance et on y va, soit on laisse tomber. » Et 80 % des gens m’ont suivi. C’était vraiment la folie : un festival énorme, avec une tournée dans 11 pays, un staff de 60 personnes… Aujourd’hui, nous en sommes déjà à la quatrième édition, mais on a été stoppé par le Covid-19. Je suis sinon en train de monter une troupe d’humoristes, « Babi comédie », avec de jeunes talents pas encore connus mais excellents. Je suis aussi intéressé par le monde anglophone. J’ai joué récemment à Accra, et je trouve que c’est un bon marché culturel. Je mets de plus en plus d’anglais dans mes one-man-shows, un anglais compris par tous, qui permet à l’Afrique anglophone de profiter de nos talents. Je relie les deux langues en faisant des tournées au Nigeria, au Liberia, au Ghana, mais aussi au Rwanda. ■