Boulogne au féminin, histoire de la femme

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Catalogue édité à l’occasion de l’exposition Boulogne au féminin. Histoire de la femme du XVIIIe siècle à 1975 présentée aux Archives municipales de Boulogne-sur-Mer du 25 septembre au 25 novembre 2016 sous la direction de Karine Berthaud, directrice des Archives municipales.


Photo de famille dans la bonne société boulonnaise, lors du mariage d’Isidore Delpierre et d’Angéline Gournay (1883). Cliché Auguste Patte. AmB, fonds Gournay, 40Fi2/2.

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issus de la même classe d’âge, mais il arrive, particulièrement dans les milieux aisés, de noter un écart d’âge significatif. C’est notamment le cas de Thérèse Loison, jeune fille mineure âgée de 15 ans et dont le père est officier municipal, qui épouse le 1er juillet 1792 à Saint-Joseph Jean Mauguet de la Sablonnière, juge de paix du canton de Desvres, son aîné de 32 ans1. À compter de la seconde moitié du XIXe siècle, le milieu maritime boulonnais développe ses propres spécificités. Du fait de la fréquente absence des pères de famille partis en mer, ce sont généralement les mères qui organisent les unions, celle de l’éventuel époux choisissant pour son fils une jeune fille qui lui conviendrait, et dont elle va trouver la mère afin d’en obtenir « l’entrée de la maison ». Si cette dernière lui est accordée, les fiancés peuvent alors se fréquenter lorsque le jeune homme est à terre. Cette période prénuptiale dure généralement plusieurs années puisqu’on attend souvent le retour du futur époux du service militaire ; elle est plus brève dans les familles d’armateurs, où les jeunes filles sont moins libres de côtoyer leur fiancé. De nouvelles paroisses sont érigées – Saint-Pierre en 1852 - et la population de la Beurière dispose depuis de son église ; on s’y marie généralement l’hiver, de novembre à février lorsque l’activité de pêche est faible. Dans les classes populaires, rares sont les femmes qui ne se marient pas ; on estime à seulement 10 % les femmes de plus de 50 ans mourant célibataires à la fin du XVIIIe siècle. Il est d’autant plus facile de convoler que l’on est pauvre et urbain, alors qu’il faut à la campagne être capable de trouver des terres pour s’établir. À l’inverse, dans l’aristocratie et la bourgeoisie, l’augmentation considérable du montant des dots ne permet généralement que de marier la première, voire la deuxième fille, pour établir des alliances, tandis que les benjamines restent à la maison. Dans un même esprit économique, afin d’éviter une trop grande dispersion du patrimoine, on tend même en ville à s’unir à des membres de sa propre famille, ce qui nécessite d’obtenir une dispense de consanguinité de la part de l’évêque de Boulogne si l’on épouse un cousin au 3e degré, ou du pape pour épouser son oncle ou son cousin germain. Et s’il advenait qu’une parenté inférieure au 6e degré soit découverte après le mariage, celui-ci était entaché de nullité, et les époux devaient demander, outre une dispense, la réhabilitation de leur mariage, pour éviter notamment que les enfants déjà conçus soient considérés comme illégitimes. Ces problèmes de consanguinité, ou d’affinité – lorsqu’on épouse le 1 Archives municipales de Boulogne-sur-Mer. GG22, registre de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse Saint-Joseph (1er juillet 1792). 12

veuf d’une cousine - touchent tous les niveaux de la société, et on note à Boulogne des réhabilitations de mariage, parfois plus de 10 ans après l’union initiale, aussi bien dans les familles aristocrates, comme celle de Denis de Liégeard, seigneur de Tateville et Louise de Guiselin dont le mariage, célébré en 1722 à Longvilliers, est réhabilité en 17392 à Saint-Joseph que chez les marins, comme Louis Battel et Jeanne Linier, mariés en 17283 puis en 17414. Et même si la législation évolue après la Révolution, n’interdisant plus en droit civil les mariages qu’entre ascendant et descendant, frère et sœur ou oncle et nièce, cette question de la consanguinité est d’autant plus prégnante dans la population maritime, qui est soumise à un double clivage, géographique et socio-économique. Géographique, car ces populations sont isolées, et leurs communes rivales : une fille de la Beurière épousera un garçon de la Beurière, un Portelois une Porteloise... Socio-économique car les filles de marins connaissent déjà les gestes qu’elles devront accomplir pour assister leur mari.

Dans un XVIIIe siècle où les chances de voir ses enfants arriver à l’âge adulte sont comptées, la perte d’un parent, et notamment d’une mère qui risque sa vie à chaque nouvel accouchement, est un facteur supplémentaire de risque. Le devoir d’un veuf est donc de trouver rapidement une mère de substitution pour ses enfants ; celui d’une veuve, particulièrement dans les milieux populaires, est d’assurer leur survie et elle ne le peut seule. Avec des femmes qui meurent prématurément en couches, et des hommes en mer, le remariage est fréquent. Si les veufs épousent parfois des veuves – c’est le cas de Jean Létendard qui pour son troisième mariage s’unit en 1785 à Marie Jeanne Feramus, elle-même veuve une fois5, il arrive souvent qu’ils portent leur dévolu sur une femme plus jeune qu’eux, provoquant l’ire de la communauté de jeunes gens que l’on prive d’une promise potentielle. Ceux-ci organisent alors des charivaris, chahutant d’autant plus le « jeune marié » que l’écart d’âge est important, ou que l’union sort des convenances habituelles. C’est notamment le cas à l’occasion du troisième mariage de Baptiste Mabille, célébré le 10 avril 1752 avec Marie Catherine Liévin, qui outre leurs 24 ans d’écart, sont en plus cousins germains. « Ces derniers jours depuis les 7h du soir et jusque bien avant dans la nuit, il s’est attroupé malicieusement dans les Tintelleries […] différentes bandes de jeunes qui affectoient de faire du bruit en frappant sur des 2 AmB. GG15, registre de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse Saint-Joseph (17 avril 1739). 3 AmB. GG34, registre de baptêmes, mariages et sépulture de la paroisse Saint-Nicolas (7 janvier 1728). 4 AmB. GG36, idem (17 septembre 1741). 5 AmB. GG21, id. (10 janvier 1785).


poêles, bassins, chaudrons et tambour, en sonnant du cornet à bouquin6 ». Après quatre jours de ce tintamarre, les autorités municipales en rappelèrent l’interdiction. Ces chahuts se font généralement dans une ambiance bon enfant ; ainsi, lorsqu’on moque en 1749 Marie Françoise Willois, veuve Trollet, qui épouse en troisièmes noces un Suisse âgé de 30

ans, un témoin raconte avoir vu « une multitude de personnes passer dans la rue des Capucins […] faire grand carillon et crier à haute voix ”Charivary ! Charivary !” » tandis qu’un autre regrette que ses enfants étaient couchés « parce que le dit charivary étoit divertissant et se passait sans aucune insulte7 ».

6 AmB. Cote provisoire Liasse1040, causes civiles et criminelles (14 avril 1752).

7 AmB. Cote provisoire Liasse1518, affaires criminelles (20 octobre 1749).

Si le mariage n’était jusqu’alors dissoluble que par la mort de l’un des deux époux, la Révolution va tout changer, instituant dans la Constitution du 3 septembre 1791 le mariage civil et laïc, et par décret du 20 septembre 1792 le divorce. Dorénavant, considérant que l’indissolubilité du mariage constitue une entrave aux libertés individuelles, une simple allégation d’incompatibilité d’humeur ou de caractère peut suffire pour rompre ce qui était jusqu’à la Révolution un sacrement éternel et indestructible, et est dorénavant un contrat aux yeux de la loi civile. On se marie donc à Boulogne devant les officiers municipaux à compter de janvier 1793 ; ce sont également eux qui prononcent le tout premier divorce, le 26 janvier 1793, à la demande de Marie Jeanne Wasselin, journalière âgée de 65 ans, qui après 11 ans de mariage reproche à son époux Jean Foulon de l’avoir abandonnée depuis plus de deux ans, ce

que l’intéressé confirme8. Pour l’anecdote, le premier couple rencontré par les officiers municipaux en charge des mariages était venu pour divorcer. La loi jugée trop souple est amendée par le Code civil de 1804 ; la femme, placée sous la puissance de son mari, est incapable de disposer des biens de la communauté, et le divorce est encadré. Considéré comme « un poison révolutionnaire », il est aboli en 1816 sous la Restauration. Même si le mariage civil est conservé, il redevient indissoluble. Durant cette période 1793-1816, on compte à Boulogne-sur-Mer 60 divorces, chiffre important mais à relativiser face aux 3 888 mariages célébrés, soit 1,5 % des actes enregistrés. Il est à noter que plus de 8 divorces sur 10 ont été prononcés à Boulogne avant la réforme du Code civil en 1804.

8 AmB. E170, registre de mariages (26 janvier 1793). 13


Ce n’est qu’à compter du XXe siècle que l’épouse voit évoluer certains de ses droits, cette plus grande autonomie accroissant le nombre de mariages d’amour. André et Jeanne (1924). Cliché Charles Guillot. AmB, fonds Tintillier, 31Fi31/48. 14


Le divorce, uniquement pour faute, est rétabli sous la IIIe République par la loi du 27 juillet 1884, et à Boulogne, Marie Specque obtient dès le 19 août, cette fois des juges du tribunal de première instance, le jugement de divorce dissolvant le mariage contracté avec Alphonse Petit 14 ans plus tôt. L’année 1885 est exutoire, puisqu’avec 15 divorces enregistrés, on passe de 1,5 à près de 4 % de séparations. Puis, le taux de divorce se stabilise jusqu’à la première guerre mondiale autour de 5 à 6 %, s’effondre naturellement dans cette période, avant d’atteindre les 8,5 % en 1920. Les périodes de guerre mettent le mariage à rude épreuve, du fait de la séparation et de l’émancipation relative qu’ont connue les femmes durant les conflits ; le taux de divorce, qui s’était maintenu à 8,5 % en 1939, atteint 15,7 % en 1945. Si l’on en croit Les cloches de Boulogne, journal mensuel des paroisses de Boulogne, qui évoque en 1950 le divorce d’un ménage sur quatre, la cause d’une « pareille épidémie qui menace sournoisement la famille boulonnaise autrefois si stable et si respectueuse des vieilles traditions chrétiennes9 » serait à chercher du côté du manque de logements après guerre. Cette pénurie obligeant les jeunes couples à cohabiter avec leurs parents provoquerait une pléiade de jeunes épouses assistées et de maris déresponsabilisés. Quoi qu’il en soit, une fois la ville reconstruite et tandis que la femme s’autonomise de plus en plus en travaillant, le taux de divorce continue à progresser, jusqu’à 33 % des mariages célébrés en 1975, alors qu’est modernisée la loi qui reconnaît désormais le divorce par consentement mutuel, pour rupture de la vie commune ou violation des droits et obligations du mariage.

Il faut attendre le XXe siècle pour voir les droits de la femme mariée tendre à progresser : elle obtient en 1907 le droit de disposer librement de son salaire, et on reconnaît en 1938 sa capacité civile – elle peut désormais agir en justice sans l’autorisation de son mari. Enfin, en 1965, la réforme du régime matrimonial consacre l’indépendance des époux dans la gestion de leurs biens ; ce n’est qu’alors qu’une femme mariée peut, par exemple, ouvrir un compte en banque ou choisir une profession sans l’autorisation de son époux.

Mais il serait illusoire de penser, à quelque époque que ce soit, que les rencontres, que la conception d’une famille ne se faisaient que sous le joug du mariage et des autorités religieuses puis civiles. L’âge du mariage, de plus en plus tardif au XVIIIe siècle, obligent des jeunes gens mûrs sexuellement depuis 9 Les cloches de Boulogne n°28 (octobre 1950).

une dizaine d’années à patienter avant de pouvoir impunément connaître leurs premières expériences. Les registres paroissiaux et les multiples naissances d’enfants illégitimes qu’ils recensent prouvent pourtant que la vie sexuelle commençait parfois avant le mariage. On relève ainsi dans la paroisse Saint-Nicolas de 1716 à 1724 le baptême de 10 enfants abandonnés et 22 enfants naturels ou illégitimes – nés sans filiation juridique car non reconnus pour les premiers, hors mariage pour les seconds -, représentant 1,7 % des naissances totales. Les pratiques sexuelles préconjugales augmentent dans le courant du XVIIIe siècle, vraisemblablement grâce à une plus grande indépendance économique des jeunes gens ; on note ainsi pour la paroisse Saint-Joseph 87 naissances illégitimes et 25 abandons d’enfants, soit plus de 5 % des bébés nés entre 1742 et 1792. Certaines des mères parvenant à accoucher seule et discrètement abandonnent leurs enfants, le plus souvent dans un lieu où il est susceptible d’être trouvé. Pour les autres, la sage-femme, et parfois le chirurgien appelé en renfort, veillent à extorquer à la parturiente « dans les douleurs de l’enfantement » le nom du géniteur de l’enfant à naître. La plupart des femmes cédant et avouant, l’enfant est généralement baptisé du nom de celui désigné par leur mère, y compris lorsque celui-ci occupe une position sociale supérieure. Ainsi, lorsque Marie Barbe Beaumont « qui est descendue grosse de la haute ville et est accouchée [en basse ville] » avoue que le père de Marie Jacqueline, née en 1724, est celui dont elle est la domestique, François Magnon, c’est sous ce nom que l’on baptise l’enfant10. Exception qui confirme la règle, lorsque Marie Françoise Martel déclare en 1728 lors du baptême et du décès de son fils Louis Antoine que celui-ci provient « des œuvres du sieur Jacques Antoine Serin, procureur en la sénéchaussée », ce dernier proteste – comme d’autres avec moins de succès - et l’enfant est enregistré sous le nom de sa mère11. Mais les naissances hors mariage ne sont pas simplement le fait de mères séduites et abandonnées. On relève également dans les registres paroissiaux de multiples baptêmes d’enfants conçus par des parents vivant en concubinage, ou tout du moins que les deux parents reconnaissent, même si c’est parfois sous la contrainte. Il s’agit le plus souvent de familles issues d’un milieu populaire et généralement venant de villages alentours, telle celle de Marie Anne Legrand, originaire de Baincthun, « qui est venue ac10 AmB. GG33, registre de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse Saint-Nicolas (9 août 1724). 11 AmB. GG14, registre de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse Saint-Joseph (12 février 1728). 15


coucher icy ayant été chassée de sa paroisse par Monsieur son curé12 » ou plus rarement de parents provenant d’un milieu plus aisé. Ainsi, Pierre François de Tressan naît le 22 juillet 1746 « hors le mariage de messire Louis Elisabeth de La Vergne chevalier comte de Tressan, maréchal de camp et des armées du roi, lieutenant de la première compagnie de ses gardes du corps, et de Michelle Roussel13 ». Dans l’acte de mariage, célébré un an plus tard, on apprend qu’ils étaient déjà parents d’un enfant né à Paris en 1744, soit un concubinage d’au moins trois années14. 12 AmB. GG14, registre de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse Saint-Joseph (11 mai 1720). 13 AmB. GG16, id. (23 juillet 1746). 14 AmB. Id. (10 juillet 1747).

Avérées sans être fréquentes, la vie maritale ou les conceptions hors mariage sont vivement réprouvées par l’Église catholique, qui depuis le concile de Trente en 1563 lutte systématiquement contre toutes formes de relations sexuelles prénuptiales. Les prêtres officiant à Boulogne sont naturellement dans cette droite ligne, l’un barrant la mention légitime sur l’acte de baptême d’une petite fille née quatre mois après le mariage de ses parents15, un autre se permettant d’indiquer en marge d’un acte de mariage à propos de la mariée « il ne sera pas le premier16 » … 15 AmB. GG33, registre de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse Saint-Nicolas (4 février 1720). 16 AmB. GG38, registre de baptêmes et mariages de la paroisse Saint-Nicolas (20 novembre 1753).

Acte de mariage de Louis de La Vergne et Michelle Roussel, déjà parents de deux enfants (1747). AmB, GG16. 16


Les mœurs évoluant après la Révolution, les sagesfemmes cessent de profiter de la détresse des parturientes pour leur soutirer le nom du géniteur du bébé à naître, entraînant une forte hausse du nombre d’enfants nés de père inconnu, et une chute des naissances naturelles ou illégitimes. On compte ainsi à Boulogne de 1802 à 1807 15 enfants nés de père et mère inconnus, 141 de père inconnu et 25 naturels ou illégitimes, soit 6,8 % du nombre total de naissances. Ce chiffre, toujours croissant, dépasse les 10 % sur la décennie 1873-1882, et les 12 % entre 1903 et 1912, date à laquelle la législation améliore le sort des enfants nés hors mariage en permettant à la mère de demander des subsides au géniteur de son enfant. Dans la communauté maritime, où les fiançailles sont longues et les jeunes gens autorisés à se fréquenter – officiellement dans les limites de ce que la morale ca-

tholique permet -, les conceptions prénuptiales sont le plus souvent officialisées par le mariage, même si celui-ci n’est célébré qu’après le service militaire de l’imprudent fiancé. Le temps passé sous les drapeaux s’allongeant après la défaite de 1870, pour atteindre quatre ans en 1914, les matelots attendent souvent d’avoir 25 à 30 ans pour convoler, et il est alors fréquent d’avoir déjà un ou deux enfants. Pourtant, même si ces naissances « prématurées » choquent la morale, les prêtres sont résignés car ces familles s’officialiseront presque toujours par un mariage, l’union libre étant rarissime dans le milieu maritime. De même, la rupture de l’engagement et l’abandon d’une fiancée enceinte serait sévèrement jugé par la communauté, et ne se produisent que rarement : un tel acte déshonorerait celui qui ne respecte pas sa parole, plutôt que la victime abandonnée.

d

evenir mère

Qu’elles soient mariées ou non, ces femmes se retrouvent toutes à égalité face à la maternité qui se profile. Aux antipodes de la grossesse et de la naissance très médicalisées telles qu’on les connaît aujourd’hui, attendre un enfant sous l’Ancien Régime demeure très aléatoire ; on s’en remet au fatalisme, à la prière et aux recettes éprouvées transmises de femmes en femmes pour conjurer les accidents. La grossesse fait alors partie de la vie, mais reste un évènement mystérieux où la vie de l’enfant et de celle qui le porte sont exposées, et qui rappelle dans une société marquée par le christianisme le franchissement de l’interdit et le péché originel. Elle est donc montrée le moins possible, et la vie ordinaire ne s’arrête pas, ni le travail à la maison ni à la plage, aux champs, à l’usine… Cela entraîne de nombreuses fausses couches, provoquant un espacement des naissances et une baisse de la fécondité. Du fait des mariages tardifs dans les groupes sociaux peu favorisés, les familles comptent en moyenne 4 à 5 enfants, nés en général à 2 ans d’intervalle, et dont seulement 2 ou 3 atteindront l’âge adulte. Les familles aristocratiques et bourgeoises sont souvent plus grandes, puisque l’on s’y marie plus tôt, et que les mères ne sont pas protégées par la contraception

naturelle qu’est l’allaitement. À Boulogne-sur-Mer, si certaines familles atteignent parfois une vingtaine d’enfants, on dénombre en moyenne 3 enfants par famille entre 1700 et 1792, avec un taux de natalité plus élevé en basse ville qu’en haute ville17.

L’accouchement est, longtemps, une affaire strictement féminine. Depuis toujours, on accouche à la maison, généralement dans la salle commune qui est la seule à disposer d’une cheminée, avec un entourage exclusivement féminin. Viennent assister la future mère la matrone, qui a appris son métier sur le tas et à laquelle le curé ne demande que de savoir réciter les formules du baptême, au cas où elle devrait ondoyer un nouveau-né en péril, ainsi que les parentes, amies, voisines, venues soutenir et aider la parturiente dès les premières douleurs. Selon les régions, et c’est le cas à Boulogne-sur-Mer, la profession d’accoucheuse est réglementée, et Jeanne Gontier est la première sage-femme jurée connue dès 1550. Mais cette solidarité féminine chaleureuse 17 Avec 21 886 enfants nés dans 7 055 familles, on compte dans la paroisse Saint-Nicolas une moyenne de 3,10 naissances, tandis que la paroisse Saint-Joseph n’en enregistre alors dans la même période que 4 121 dans 1 467 familles, soit 2,8 enfants par foyer. 17


Même enceintes, les sautrières poursuivent leur travail, aussi dur soit-il (c. 1900). Cliché anonyme. AmB, fonds Duprat, 48Fi41.

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Certificat attestant de la formation de sage-femme suivie à l’Hôtel-Dieu de Paris par Catherine Brillard (1728). AmB, cote provisoire liasse 1376.

ne peut occulter les risques encourus : on estime à 1 à 2 % le nombre de mères mourant en couches au XVIIIe siècle, soit avec une moyenne de 5 accouchements 10 % des femmes en âge de procréer. Cette forte mortalité est due à l’impuissance de la médecine de l’époque face à des accouchements impossibles – mauvaises présentations, étroitesse du bassin – ou compliqués par des complications post-partum, mais aussi par les mauvaises conditions d’hygiène favorisant des épidémies de fièvres puerpérales. Pire encore sont les conditions dans les hôpitaux, où accouchent les pauvresses et filles-mères, qui n’ont nulle part où aller, et où meurent environ 10 % des accouchées, soit plus de 5 fois plus qu’à domicile. À Boulogne, les conditions d’accouchement sont un peu moins mauvaises pour les femmes vivant dans la misère puisque, outre l’hôpital Saint-Louis qui les accueille et s’empresse d’admettre d’office les enfants illégitimes parmi les orphelins, la ville paie des gages à une sage-femme jurée, pour que celle-ci soit « retenue dedans la ville pour subvenir aux pauvres femmes indigentes18 ».

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Le XVIIIe siècle voit d’importantes évolutions dans le domaine de l’obstétrique : les sages-femmes sont peu à peu formées, et des hommes apparaissent

dans ce milieu jusque-là exclusivement féminin. Si jusqu’alors la pratique primait, les sages-femmes vont désormais apprendre leur métier durant deux mois à l’Hôtel-Dieu de Paris – la première recensée à Boulogne est Catherine Brillard en 172819. Mais si leurs qualifications augmentent, elles vont toutefois devoir laisser une place à un nouveau venu : le médecin chirurgien, qui trouve d’abord une clientèle dans les milieux aristocratiques et bourgeois. Celui-ci, d’abord appelé pour délivrer les femmes dont l’enfant était mort durant l’accouchement et alors considéré davantage comme un boucher, est le seul habilité pour utiliser de nouveaux instruments relativement efficaces, les leviers et forceps, mis au point à la fin du XVIIe siècle. Cette ébauche de médicalisation, et l’arrivée de l’accoucheur dans un monde traditionnellement féminin transforme les pratiques de la naissance : il commence par évacuer les femmes présentes, pour faire régner le silence et aérer la pièce, impose à la parturiente la position sur le dos, seule considérée comme convenable, alors que l’on avait auparavant la liberté de la posture… À partir de 1759, pour tenter d’endiguer la mortalité infantile et maternelle, sont organisés dans toute la France à l’initiative d’Angélique du Coudray, maîtresse sagefemme de l’Hôtel-Dieu de Paris, des cours itinérants

18 AmB. CC5, registre de comptes (1569-1570).

19 AmB. Cote provisoire Liasse1376, police des arts et métiers (1728).


La mortalité en couches est l’une des dures réalités du XVIIIe siècle. Acte de décès de Marie Jeanne Pin morte après avoir accouché d’une petite fille n’ayant elle-même pas survécu (1738). AmB, GG35.

incluant des travaux pratiques sur un mannequin d’osier recouvert de tissu reproduisant l’anatomie féminine. Pierre Daunou, premier chirurgien accoucheur mentionné dans les Archives municipales, et par ailleurs père de l’homme politique, historien et archiviste du même nom, est missionné en juin 1774 à Amiens, pour y « prendre connaissance du mécanisme de la machine qui sert à la dame du Coudray pour ses cours et démonstrations publiques d’accouchement20 » et y acheter la fameuse machine afin de former à son tour les sages-femmes du district de Boulogne. La formation de celles-ci se renforce à compter de 1803 ; elles suivent alors un an de formation théorique et pratique auprès des accouchées des hôpitaux. Mais malgré la meilleure formation de l’ensemble des soignants, accoucher à l’hôpital demeure bien plus dangereux qu’à domicile, et ne se fait que le moins possible. L’hôpital Saint-Louis ne dispose en 1812 que d’une salle, celle de la Pitié, affectée aux femmes malades, mais il est « desservi par des dames religieuses à qui la décence ne permet pas de donner des secours pour des maladies de ce genre21 » ; aussi, il y est impossible d’y accueillir les parturientes, et notamment celles détenues en prison. Il faut attendre 1842, ce qui n’est pas si tardif pour une ville de province, pour qu’on y ouvre une salle de maternité de quatre lits, qui reste toutefois - hormis cas exceptionnel validé par l’administration – interdite aux fillesmères, « car on vouloit aider de pauvres mères de famille et nullement encourager le libertinage22 ». À la demande du conseil municipal, cette mesure s’adoucit au milieu du XIXe siècle, mais priorité reste donnée aux femmes mariées, et une fille-mère telle Catherine Vaillant ne peut en 1849 être admise à l’hôpital pour 20 AmB. Cote provisoire Liasse1010, cours d’accouchement (1774). 21 AmB. Cote provisoire Récol.3Q1839/5, administration de l’hospice (1812). 22 AmB. Cote provisoire Récol.3Q1812/5, administration de l’hospice (1849).

y accoucher, puisqu’on préfère réserver le dernier lit disponible à une éventuelle naissance légitime23. Parallèlement, les mesures d’asepsie, d’antisepsie et de stérilisation prônées par Pasteur à partir de 1878 provoquent une baisse radicale de la mortalité maternelle ; peu à peu l’hôpital fait moins peur, et est considéré comme un lieu où la médecine sauve et guérit, aux antipodes de ce qu’il était auparavant. C’est donc au XXe siècle que la naissance en milieu médicalisé se répand réellement. On accouche encore à la maison avec l’aide d’une sage-femme, telle Adèle Knobloch, qui de 1892 à 1949 a délivré selon elle plus de 20 000 mamans24, mais la norme s’inverse lors de la seconde guerre mondiale. En effet, si l’on comptait encore en 1939 57 % de naissances à domicile, on compte en 1945 47 % à domicile contre 53% dans un milieu médicalisé – hôpital Saint-Louis, cliniques privées ou cabinet de la sage-femme -, cette tendance ne faisant que se renforcer avec le temps pour parvenir aujourd’hui à des naissances quasi totalement médicalisées.

Si la connaissance du cycle de la reproduction est bien moindre qu’aujourd’hui – ainsi, Marguerite Wateau déclara sans complexe lors du baptême de sa fille en 1720 « que cet enfant provient de son mary, quoiqu’il soit absent depuis quatre ans ou environ25 » -, le contrôle des naissances n’en reste pas moins un enjeu, qui aboutira au XXe siècle à la libre disposition de son corps par la femme. Outre l’âge tardif au mariage, les femmes sont longtemps protégées par la contraception naturelle qu’est l’allaitement. Celles de l’aristocratie et de la bourgeoisie n’ont pas ce privilège, puisqu’elles mettent davantage leurs enfants en nourrice du fait de leurs obligations sociales, 23 AmB. Id. 24 La Voix du Nord (14 mai 1949). 25 AmB. GG14, registre de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse Saint-Joseph (17 novembre 1720).

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Famille de 13 enfants, ce qui n’est pas exceptionnel au début du XXe siècle (1903). Cliché anonyme. AmB, fonds Gournay, 40Fi4/379.

mais aussi sans doute à cause du tabou des relations sexuelles durant l’allaitement. Si à travers le monde, on a toujours su faire preuve d’une grande imagination dans les moyens de contraception, ceux-ci n’ont longtemps que des résultats aléatoires, et il faut attendre le vote de la loi Neuwirth autorisant la pilule en 1967, puis patienter encore quatre ans pour voir passer ses décrets d’application, pour disposer enfin d’une contraception efficace. Mais avant cette date, l’échec de techniques contraceptives plus ou moins artisanales conduit parfois à la pratique de l’avortement, voire à celle de l’infanticide, dont les quelques cas recensés dans l’histoire de Boulogne-sur-Mer heurtent profondément la population. L’affaire la plus sévèrement jugée demeure celle d’Antoinette Ledoux, accusée avec sa

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mère d’avoir en 1673 tué et enterré son nouveau-né ; après avoir dû faire amende honorable devant l’église Saint-Nicolas et demandé pardon à Dieu, au roi et à la Justice, elle est pendue et étranglée, son corps brûlé et ses cendres jetées au vent26. L’avortement, lui, est traité selon les régimes politiques, et selon l’état démographique du pays, comme un délit ou comme un crime – en 1942, il devient un « crime contre la sûreté de l’État » et est passible de la peine de mort. Il est pratiqué dans la clandestinité pour le plus grand risque de celles qui y sont contraintes, jusqu’au vote de la loi Veil qui le légalise en 1975. La discussion et le vote de ces deux lois, Neuwirth et Veil, si elles ont profondément marqué l’opinion publique française, n’agitent pas particulièrement la presse locale. 26 AmB. Cote provisoire Liasse1428, affaires criminelles (1673).


Souvent rejetée, la fille-mère peut toutefois bénéficier, sous réserve, de l’aide du bureau de bienfaisance (1881). AmB, cote provisoire Q2345.

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Dans les familles bourgeoises, bien que les enfants soient le plus souvent confiés à une nourrice, ne se dément pas l’amour maternel (c. 1910). Cliché anonyme. AmB, fonds Boutillier, 75Fi288.

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Quand, appelé à d’autres responsabilités en 2012, j’ai tenu à ce que Mireille HingrezCéréda puisse me remplacer au poste de Maire de la Ville de Boulogne-sur-Mer, j’ai souhaité, au-delà du grand respect que j’ai pour sa personne et ses compétences, réparer une injustice, qui n’est pas spécifique à notre ville, en faisant élire pour la première fois une femme au fauteuil majoral. Cet acte symbolique était aussi le signe d’une reconnaissance plus large envers les femmes qui s’engagent au quotidien dans la vie publique. Cette riche exposition, Boulogne au féminin, tout en rendant un vibrant hommage aux Boulonnaises, illustres ou inconnues, montre aussi combien, de la reconnaissance des droits fondamentaux jusqu’à l’égalité professionnelle ou la parité dans la représentation politique, le parcours menant à l’égalité entre hommes et femmes fut et reste parfois encore lent et difficile. Mais comment ne pas évoquer le personnage emblématique qu’est notre Zabelle locale, figure allégorique des Boulonnaises ; elle rappelle combien le rôle des matelotes fut essentiel au développement de notre ville. Et, au-delà de Zabelle, les Boulonnaises qui dans cette exposition - c’est ce qui fait sa richesse - prennent les atours d’épouse, de mère, d’ouvrière, de prostituée, de religieuse, d’infirmière, de résistante ou encore de citoyenne, illustrent le caractère protéiforme de la condition féminine. Je tiens donc à remercier et féliciter Karine Ber thaud, directrice des Archives municipales – l’une des nombreuses cheffes de service de notre municipalité - et toute son équipe, pour avoir mis en lumière cette moitié de l’humanité, mais aussi de notre cité, jusqu’alors trop souvent dans l’ombre. Frédéric Cuvillier Ancien Ministre Député-Maire de Boulogne-sur-Mer 3



« Une femme est une fille, une soeur, une epouse et une mere, un simple appendice de la race humaine… » La littérature regorge de citations aujourd’hui légitimement considérées comme misogynes, même si certains osent les justifier encore. Cette définition de la femme livrée par un essayiste anglais du XVIIIe siècle, Richard Steele, reflète pourtant parfaitement son époque. Bien que composant la moitié de l’humanité, la femme n’a en effet longtemps été considérée, pour reprendre Bossuet, que comme « le produit d’un os surnuméraire », la ravalant systématiquement à un rang inférieur ; elle l’est toujours dans certaines sociétés. On lit dans le registre aux sépultures de la paroisse Saint-Nicolas de Boulogne-sur-Mer (16631668) l’épigramme suivante :

« L’homme juste, selon le sage, Peche sept fois et davantage. Mais la femme juste… combien ? Ma foy, le sage n’en sait rien. » Car, s’appuyant toujours sur la faute biblique initiale d’Ève, tout justifie culturellement, à Boulogne comme dans tout l’Occident chrétien, cette infériorisation de celle qui, alors, ne sert finalement qu’à perpétuer la race. Soumise à son père puis à son mari depuis des millénaires, la femme française doit attendre le XXe siècle pour s’émanciper : l’épouse peut disposer de son salaire à partir de 1907, n’est plus incapable juridiquement en 1938, et peut travailler sans autorisation maritale à compter de 1965 ; toutes obtiennent le droit de vote et d’éligibilité en 1944, et le droit de disposer de leur corps par les lois Neuwirth autorisant en 1967 la contraception, et Veil permettant en 1975 l’avortement. Depuis Claudia Prima, affranchie du Ier siècle, première Boulonnaise connue grâce à son épitaphe découverte près du sentier de la porte Gayole, à Mireille Hingrez-Céréda, première femme élue maire en 2012, nos concitoyennes ont connu le lent, le laborieux cours de l’Histoire jusqu’à l’accélération de ces 50 dernières années. Même si, de par la spécificité maritime de Boulogne, les matelotes dont les maris étaient souvent absents ont peut-être gagné, un peu plus tôt qu’ailleurs, une certaine autonomie domestique. Il serait évidemment impossible de prétendre à l’exhaustivité ; plutôt que de ne citer que certaines femmes illustres, ce sont toutes les Boulonnaises qui sont nos héroïnes. Épouses, mères, amoureuses, pêcheuses, ouvrières, prostituées, religieuses, infirmières, femmes en guerre, femmes libérées et citoyennes… : toutes ont, malgré la place mineure qu’on a autrefois bien voulu leur octroyer, façonné notre ville, laissant dans ses archives des témoignages parfois infimes, parfois majeurs qui retracent une Histoire commune, une histoire de Boulogne au féminin.

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 L’homme est un cerveau, la femme une matrice.  Jules Michelet, historien (1849)

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La femme, maĂŽtresse de la maison

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a femme, maîtresse de la maison

Source fondamentale de l’histoire de la famille, et de celle qui en constitue le pilier – la femme –, les registres paroissiaux puis d’état civil conservés à Boulogne-sur-Mer depuis 1569 sont une mine d’informations, mais une mine d’informations restreinte à des renseignements administratifs, préservant l’intimité des habitants. Malgré ces limites se dévoile à travers eux l’évolution de la société, des fiançailles et du mariage devant le prêtre, au divorce révolutionnaire, au mariage pour tous... Les secrets de famille s’y révèlent : naissances légitimes ou non, parfois assorties de promesses de mariages rarement respectées, reconnaissances, adoptions… Les 538 registres conservés par les Archives municipales de Boulogne-sur-Mer, de 1569 à 1945, nous racontent la naissance, le mariage, le décès, bref la vie des Boulonnais, et particulièrement lorsqu’elles deviennent mères, celle des Boulonnaises.

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iançailles, mariages, remariages, et plus si affinités

S’il est une pratique qui n’a guère évolué au fil du temps, c’est celle de la rencontre des filles et des garçons. On retrouve, les siècles passant, peu ou prou les mêmes usages, basés sur l’homogamie socioprofessionnelle – on épouse quelqu’un provenant du même milieu que soi : les filles de pêcheurs épousent des fils de pêcheurs… – et l’endogamie : les trois-quarts des mariages se font entre jeunes gens issus du même lieu, les autres dans un rayon d’une vingtaine de kilomètres. On se rencontre dans le milieu professionnel, puisque les filles travaillent pour épargner l’argent de leur future dot, mais aussi lors des fêtes, veillées, messes, pèlerinages… sous l’œil des aînées qui surveillent le manège des jeunes gens et ne tolèrent guère de privautés. Et, même si l’amour et l’attirance sont pris en compte, le statut est malgré tout déterminant dans le choix du partenaire, afin de répondre à des impératifs économiques de survie. Que les parents arrangent les noces ou que les jeunes gens se choisissent, on n’opte jamais pour un homme au statut inférieur, une telle union déshonorerait la mariée et bien-sûr sa famille, alors qu’un homme peut épouser une femme riche d’un rang subalterne. 8

La cour amoureuse, parfois seul, parfois accompagné de jeunes gens armés pour écarter de potentiels soupirants, est longue, et dure souvent plusieurs années. En effet, contrairement à une idée répandue, hormis dans l’aristocratie, on se marie plutôt tard sous l’Ancien Régime. Les filles convolent généralement vers 25-26 ans, les garçons autour de 27-28 ans, ceci permettant en repoussant l’âge des premiers rapports sexuels de « contrôler » le nombre des naissances. Cet âge tardif au mariage crée un marché matrimonial tendu, d’autant plus qu’il constitue aussi une nécessité sociale et économique, assurant pour les classes populaires une survie plus simple que pour des célibataires. La main de la jeune fille enfin accordée par son père, les fiançailles sont annoncées et le mariage est généralement célébré très rapidement – à Boulogne-surMer le plus souvent dans les deux jours qui suivent – afin d’éviter au couple d’entamer une vie commune prématurée. Les mariages sont célébrés dans l’église Saint-Nicolas pour les paroissiens de la basse ville, dans l’église Saint-Joseph pour ceux de la haute ville, et exceptionnellement dans l’église de l’hôpital Saint-Louis. Le plus souvent, les jeunes époux sont


Cortège nuptial quittant l’église Saint-Pierre lors d’un mariage dans la population maritime (c. 1900). Cliché anonyme. Archives municipales de Boulogne-sur-Mer, fonds Duprat, 48Fi37.

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