BOULOGNE 14-18

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BOULOGNE 14-18

Catalogue édité à l’occasion de l’exposition Boulogne 14-18, présentée aux Archives municipales de Boulogne-sur-Mer du 15 septembre au 14 décembre 2018, sous la direction de Karine Berthaud, directrice des Archives municipales.

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TÉMOIGNAGES BOULONNAIS

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PRÉFACE

BOULOGNE 14-18

Boulogne-sur-Mer en temps de guerre À trois reprises durant le cycle commémoratif du centenaire de la Première Guerre mondiale, la ville de Boulogne-surMer, à travers ses Archives municipales, a souhaité montrer à ses habitants des fragments de son histoire durant la Grande Guerre. Cet effort patrimonial et mémoriel est pleinement justifié compte-tenu de la riche histoire boulonnaise en temps de guerre. Mais l’exposition proposée cette année en clôture du Centenaire 14-18 nous permet cette fois-ci d’aller bien audelà de la figure classique du port en guerre, point d’arrivée des contingents britanniques et des troupes de l’Empire, où encore point de passage de l’avant-garde de la jeune armée des ÉtatsUnis emmenée par le général Pershing en route vers son destin. Grâce à d’exceptionnels témoignages conservés aux Archives municipales, l’exposition Boulogne 14-18 propose un regard kaléidoscopique sur le singulier quotidien de la cité boulonnaise à compter de l’été 14. En l’espace de quelques jours, l’insouciante cité balnéaire change de décor et enfile avec gravité l’uniforme qu’elle ne quittera plus jusqu’en 1918. On est saisi - et c’est la grande richesse des témoignages livrés ici - par la multiplicité des fonctions remplies par la ville et l’enchevêtrement des situations qu’elle donne à voir. Port de débarquement britannique dès le mois d’août 1914, mais également sauveté pour des milliers de réfugiés chassés de Belgique et des régions de l’Est et du Nord de la France où la poussée allemande a été la plus forte. Si l’entente quotidienne des populations locales avec l’allié britannique reste globalement cordiale sous l’enceinte de la ville, les tensions sociales créées par l’afflux massif de réfugiés totalement démunis est un vrai sujet d’ordre public pour la cité. Ville de cantonnement et base-arrière sanitaire, Boulogne-surMer est également située aux portes d’un champ de bataille encore trop souvent méconnu : la mer. La guerre contre les mines et les torpillages fréquents de bâtiments réarmés de la marine

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marchande rythment aussi le quotidien des Boulonnais. À côté de la vie à l’arrière qui s’organise, tant bien que mal, la ville offre ainsi un autre registre de position défensive aux avant-postes de la guerre. Durant plus de quatre années, Boulogne-sur-Mer est littéralement au confluent d’expériences de guerre plurielles et extrêmement diversifiées : cantonnement et débarquement de troupes alliées, accueil de réfugiés, adaptation sociale des populations aux contraintes de la guerre, point de passage des états-majors et citadelle portuaire au contact des opérations. Alors que la ville s’organise pour tenir en temps de guerre, les 8 000 combattants mobilisés de Boulogne-sur-Mer vont connaître le tragique destin de leurs compatriotes : la Marne, dès 1914, avec d’importantes pertes, les sanglantes offensives de Champagne et d’Artois en 1915, puis Verdun et la Somme, mères de toutes les batailles, sans oublier les 25 Boulonnais tombés loin des leurs dans les combats du Front d’Orient et les morts du Chemin des Dames, 18 pour le seul premier jour de l’offensive lancée le 16 avril 1917. Plus de 1 600 Boulonnais, soit plus de 20% des hommes mobilisés, sont tués ou portés disparus entre 1914 et 1918. Ce lourd tribut permet de comprendre l’empreinte sociale et morale laissée par le premier conflit mondial sur les familles boulonnaises et sur la ville dans son ensemble. Occupant une position stratégique durant le conflit, la Ville de Boulogne-surMer a été résolument aux avant-postes de la commémoration depuis 2014, grâce à la forte mobilisation de sa population et des acteurs sociaux de la mémoire, mais grâce aussi à l’engagement de ses élus, qu’il convient de saluer pour le travail d’histoire et de mémoire au long cours qu’ils ont mené avec beaucoup de conviction durant plus de quatre années. Joseph ZIMET

Directeur général de la Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale

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Après avoir commémoré et rendu hommage à nos Alliés – au

notés sur le vif ou a posteriori, rendent tangibles et palpables

travers des expositions Boulogne, port allié 1914-1918 en 2014

des situations exceptionnelles, en première ligne au plus près

et 1917, le moment Pershing en 2017 – célébrons en cette année

des combats mais aussi à l’arrière du front.

2018, date ô combien symbolique, le centenaire de la fin de cette terrible guerre.

Comment aussi ne pas être sensible au sort des réfugiés Belges et Nordistes, venus des régions envahies, trouver refuge et

Je voudrais tout d’abord rendre un hommage appuyé aux 1 600

réconfort dans notre ville ? Accueillis, malgré les restrictions

poilus boulonnais morts pour la patrie, mais aussi à ceux qui

et les difficultés, par les Boulonnais, ils nous rappellent à une

sont revenus blessés, meurtris, ou traumatisés, à ceux qui, ne

actualité brûlante et doivent nous interpeler sur le désespoir des

supportant plus l’enfer des tranchées, ont fui et ont été pour cela

populations dont le pays est en guerre.

fusillés, à ceux qui ont enduré les répercussions de ce conflit ; aux Français, aux Alliés si présents à Boulogne-sur-Mer et dont

L’exposition Boulogne 14-18 et cet ouvrage, point final des

le rôle fut crucial, mais aussi aux Allemands, tous victimes d’un

commémorations, ont enfin pour vocation de laisser, à l’heure

conflit qui les dépassait.

où tous les témoins ont disparu, un témoignage, une trace rappelant les horreurs d’une guerre qui trouve son terreau dans

Et quel meilleur moyen pour cela que d’aller au plus près des

l’exacerbation nationaliste et doit nous astreindre, encore de nos

acteurs qui ont vécu cette période si singulière ? Soldats, mais

jours, à une réelle vigilance.

aussi hommes trop âgés pour combattre, femmes, enfants, tous

C’est pourquoi, je souhaite que cette année 2018 soit avant tout

ont éprouvé peines, douleurs ou angoisses. Je remercie les

une année qui célèbre la Paix, et qu’elle nous permette, tous,

Archives municipales de dévoiler de précieux témoignages qui,

d’apprendre de l’Histoire et de tout ce qu’elle porte.

FRÉDÉRIC CUVILLIER

Ancien ministre Maire de Boulogne-sur-Mer Président de la Communauté d’agglomération du Boulonnais

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Avant-propos

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Après Boulogne, port allié 1914-1918 présentée en 2014 à la

certains sujets manquaient encore de documentation, nous

gare maritime, évoquant la grande base arrière qu’a été la ville,

avons en dernier recours exploité la correspondance municipale

puis 1917, le moment Pershing qui commémorait en 2017 au

– en particulier celle du maire, Félix Adam, et de son premier

musée l’arrivée des premiers soldats américains à Boulogne,

adjoint Auguste Chochoy – la presse et les dos de notre collection

les Archives municipales souhaitent célébrer, pour conclure

de cartes postales anciennes.

ce cycle consacré à la Grande Guerre, les Boulonnais. Ceux qui sont restés et qui ont subi, ceux qui sont partis et se sont battus.

Ce procédé permet une lecture fluide, vivante, souvent sensible,

Ceux qui tous ont souffert, d’une manière ou d’une autre.

où les témoignages se répondent les uns aux autres, où deux personnes qui ne se connaissent pas corroborent les dires de

En écho à Boulogne 40-44, exposition présentée par les Archives

l’autre. Il a aussi ses limites, la principale étant temporelle.

municipales en 2005, nous avons souhaité mettre à l’honneur

Certaines correspondances s’interrompent prématurément, le

des témoins qui ont vécu les évènements de Boulogne 14-18.

plus souvent du fait de la disparition de leur auteur, mais aussi

Les 12 principaux, qu’ils soient journaliste, réfugié, soldat

plus prosaïquement parce que l’ensemble des lettres ne nous

mobilisé, vous seront présentés au fil des pages. D’autres, dont

est pas parvenu.

l’intervention est plus ténue, sont également cités : Joseph Lardeur, auteur d’une série de « Causeries touristiques »,

De la même façon, la plupart des témoignages présentés

Gabrielle Liffran - sœur de Maurice et Paul Lélu – et son mari

s’achèvent lorsque leur auteur quitte la ville. Aussi, certaines

Joseph, Paul Thellier et René Lesage, tous deux prisonniers

périodes, en particulier la fin du conflit, sont peu documentées.

de guerre à Hammelburg en Bavière, Louis Leroux, jeune

Au contraire, les premières années de guerre le sont bien

homme grièvement blessé. Ces trois derniers écrivent à Aimé

davantage. Autre limite, géographique celle-ci, il nous a été

Pruvost, directeur de l’école Dezoteux ; leur correspondance

difficile, voire impossible, de mentionner leur position, les

est conservée par La contemporaine – ancienne Bibliothèque de

soldats au front ayant l’interdiction de l’indiquer dans leurs

documentation internationale contemporaine -, de même que

courriers. Enfin, la précision historique de certains extraits

les enquêtes auxquelles ont répondu les écoles de la rue de la

reste parfois sujet à caution. Quoi qu’il en soit, ils demeurent

Scierie, Navarin, Bucaille, l’école nationale d’institutrices d’Arras

pour la plupart fiables, et vous invitent dans le quotidien des

et le collège Mariette, ainsi que les cahiers de roulement de

témoins de Boulogne 14-18.

l’école Pierre-Bertrand. Si, malgré ces nombreux témoignages,

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BOULOGNE 14-18 Dans la quiétude du mois de juillet 1914, ponctué à Boulognesur-Mer par les animations qui sont l’apanage d’une station balnéaire prisée – meeting automobile, bains, spectacles, concours hippique… -, les tensions diplomatiques entre la Serbie et l’empire austro-hongrois semblent bien abstraites. Pourtant, lorsque le 25 juillet est signifiée la rupture des relations diplomatiques entre Belgrade et Vienne, l’inquiétude atteint Boulogne, d’autant plus vivement qu’elle contraste avec l’insouciance voire la frivolité qui régnaient jusqu’alors. Les mauvaises nouvelles sur le plan international s’enchaînant rapidement, les touristes quittent massivement Boulogne dès le 27 juillet, et le concours hippique est écourté. La prise de conscience des Boulonnais est brutale : les banques sont prises d’assaut par une population angoissée qui souhaite retirer ses fonds, les commerces d’alimentation dévalisés par des ménagères soucieuses de prévenir un éventuel siège de la ville. De leur côté, les hommes mobilisables partent en quête de bonnes chaussures et assiègent les cordonneries. La réquisition le 31 juillet de quatre chalutiers pour les équiper en dragueurs de mines ne contribue pas à rassurer la population quant à l’avancée potentielle de l’ennemi, pas davantage que les touristes encore présents qui affluent massivement à la gare. Le 1er août en fin d’après-midi, dans une ambiance générale extrêmement tendue, parvient au maire Félix Adam l’ordre de mobilisation générale. Annonçant la mobilisation à partir de minuit, le dimanche 2 août, celui-ci est placardé dans les rues de la ville à 17 heures ; à 18 heures, ce sont les cloches du beffroi qui sonnent à toute volée. L’effervescence en ville confine alors à l’affolement ; les transports commerciaux et de voyageurs

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Comme Maurice Lélu, beaucoup de Français espèrent encore, le 1er août, que l’un des belligérants recule, évitant ainsi une guerre que l’on pressent comme meurtrière (1er août 1914). Collection Christian de Valence.

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BOULOGNE 14-18 sont suspendus, le théâtre du casino annule sa représentation

trouveront la mort dans un délai plus ou moins court ; certains,

prévue pour la soirée et ferme ses portes. Dans une population

enfin, traverseront ces quatre années de guerre indemnes, tout

pétrie de patriotisme, dans lequel on l’a élevée depuis la défaite

au moins physiquement.

de 1870 et la perte de l’Alsace-Lorraine, prédominent plusieurs

Ils reviendront, pour certains. Ils reprendront le cours de leur vie

sentiments, pour certains totalement antinomiques : les uns

là où ils l’avaient laissé, ils reconstruiront et ils se souviendront.

demeurent incrédules, tels Maurice Lélu ou Clément Lozinguez, qui, le 1er août encore, ne peuvent croire à la guerre ; la plupart

Maurice Lélu, caserné à Cherbourg, lettre à sa mère,

sont confiants dans une victoire totale et rapide – parmi ceux-là

[sd] « Les nouvelles actuelles ne sont pas rassurantes, mais je

se comptent quelques insouciants, ravis de mener une nouvelle

persiste à ne pas croire à la guerre. Je pense que l’Allemagne

vie ; les autres ont peur. Si les témoignages convergent pour

n’osera pas tenir tête à l’orage, ni s’engager dans une lutte à

évoquer une population féminine éplorée, plus rares sont les

un contre deux. Elle attendra une meilleure occasion. En tout

hommes aptes à admettre leur peine de la séparation et leur

cas, si elle marche, nous avons toutes chances de la battre et de

crainte de l’avenir, tel Clément Lozinguez qui, s’il ne redoute pas

relever à France, et de réparer le mal qui lui a été fait en 1870.

de mourir, regrette le bonheur qu’il pourrait manquer, ou André

[…] Il ne faut pas se fier ni aux nouvelles affiches en ville qui

Sueur qui relate son départ de la maison avec la plus grande

sont truquées et censurées par le sous-préfet et préfet ni aux

sincérité.

nouvelles des journaux qui sont censurées. »

Quoi qu’il en soit, dans l’enthousiasme ou la gorge nouée, tous gagnent à partir du 2 août la gare centrale, sous contrôle

André Delattre, caserné à Amiens, 1er août 1914 « Le 28 juillet,

militaire et fermée au public. Encouragés par les vivats, les

le quartier est consigné et, le 1er août, c’est la mobilisation. Dans

fleurs et la musique, les soldats boulonnais, partant souvent

les chambres, ce ne sont que des cris et des chants. Certains

la musette débordant de victuailles, embarquent dans le plus

ne croient pas encore à la guerre ; d’autres, avec l’insouciance

grand ordre, sous les yeux éplorés de celles qui n’ont pu se

de leurs 20 ans, ne voient dans le départ en campagne qu’une

résoudre à les quitter à la porte de la maison.

occasion de mener une vie nouvelle et de rompre la monotonie

Ils laissent des femmes, des parents, qui dans l’angoisse vont

de la caserne. »

vivre, ou parfois juste survivre, dans des conditions de vie compliquées par les restrictions, les bombardements…, qui

Maurice Vanheeckhoet, 1er

vont devoir pallier l’absence…

heures du soir, on sonne la Générale et on annonce la mobilisation

Ils partent pour un avenir incertain : d’aucuns seront faits

commençant le lendemain dimanche. »

août 1914 « Tension politique. À 6

prisonniers dans moins d’un mois ; d’autres seront blessés ou

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BOULOGNE 14-18 Georges Docquois, 1er

août 1914 « Dès ce moment, l’on n’a plus

André Delattre, [2

août 1914] « Vers midi, un planton vient me

rencontré que jeunes femmes et jeunes filles en larmes… Des

dire qu’on me demande à la grille. Je m’y rends immédiatement

ménagères prévoyantes ont assiégé les marchands de vivres.

et je trouve mon père qui est venu de Boulogne. [… Il] m’apporte

Débordés, les épiciers ont, tôt, fermé boutique. […] L’attitude

une ceinture de flanelle que ma mère a eu la sage précaution

des hommes y est impressionnante de résolution froide. Des fils

de confectionner. Elle y a cousu à l’intérieur 200 F en louis d’or…

de certains de mes amis vont prendre leur poste sans que leur

Mon père me remet encore 50 F en pièces de 5 F et me dit adieu à

bonne humeur en paraisse du tout modifiée. »

travers la grille. J’ai le cœur serré car je ne sais quand je reverrai les miens. »

Maurice Lélu, lettre à son frère Paul, 1

er

août 1914 « Nous

attendons d’un moment à l’autre l’ordre de mobilisation.

Maurice Vanheeckhoet, 2

Néanmoins, je ne crois pas que nous ayons la guerre : la Triplice

mobilisation. Je fais faire une tunique de sous-officier avec

reculera. Comme toi, j’ai pris mes précautions testamentaires. »

galons et ajuster une culotte. Affluence aux portes du quartier.

août 1914 « Commencement de la

Enthousiasme. Trompettes. [… Le colonel] se promène de

Clément Lozinguez, caserné à Noeux-les-Mines, 1

août 1914

long en large dans la cour et fait sonner les trompettes. Son

« Nous venons de recevoir à Nœux l’ordre de mobilisation

enthousiasme et cette musique ont l’air d’être de commande.

générale. Je te dirai sans forfanterie que cela ne m’a pas ému

Cela sent en plein la vie de garnison. »

er

fortement. En effet, ma petite chérie, cette mobilisation ne signifie pas la guerre : c’est simplement une mesure de précaution que

André Sueur, [2

l’on prend en prévision de l’aggravation de la situation. […] Ce

as assisté aux adieux à ma famille. Que de larmes ont-ils

que je crains le plus, c’est qu’on m’envoie sur les lignes de feu,

versées. Que de sanglots. […] Tu as pu apprécier leur douleur

risquer d’attraper une « balle dans la peau ». Non que la mort

à tous, pourtant il fallait se séparer. Je reçus de bon cœur leur

m’effraie dans ces conditions, ma chérie, car je ne suis pas

dernier baiser, et crânement je partais après leur avoir fait mes

poltron, mais j’aurais tant voulu passer à côté de toi quelques

dernières recommandations. Je vois encore devant mes yeux la

années, où nous aurions été si heureux, et je suis bien triste, je

tristesse, la douleur immense de mon père, de ma chère mère,

te l’assure, à l’idée que ce bonheur pourrait m’être ravi presque

de mes frères et sœurs. […] La nuit plusieurs fois je t’ai surprise

au moment de pouvoir en jouir. Voilà, ma chérie, la seule chose

à pleurer car je ne dormais pas. Au réveil j’étais décidé et je

qui m’attriste à l’idée que cette guerre pourrait bientôt éclater. »

savais quelle contenance prendre ! Je maintins autant que je

août 1914] « Le dimanche 2 août, Berthe, tu

pus mais les sanglots étouffaient dans ma gorge ne pouvant me

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BOULOGNE 14-18 retenir. Il fallait se quitter. […] C’est dans notre chambre que je ne pus retenir mes larmes en voyant notre petit Lionel dormant paisiblement dans son berceau. »

Georges Docquois, 3

août 1914 « Hier un travailleur modeste,

près de monter dans le train qui devait le conduire à son corps, disait à ses enfants : « Eh ! ben, vlà, moi, j’vas faire c’que j’craignais tant qu’vous, vous auriez à faire. Ça fait qu’vous, comme ça plus tard, vous s’rez tranquilles. J’suis content. » »

André Sueur, [3

août 1914] « Le lundi matin 3 août, j’arrivais à la

gare de Boulogne. Quel spectacle grandiose ! Musique, fleurs, bouquets, des cris : « Vive la France ! », « Vive l’armée ! »… Je montais dans le train le cœur bien gros mais résolu. »

Pierre Moleux, lettre à sa belle-mère, 4 août 1914 « Je pense bien que nous serons vainqueur, mais ce sera de peu et ce sera dur ; que ce serait beau si on reprenait l’Alsace et la Lorraine ! Ne vous tourmentez pas pour moi, ma chère mère ; d’abord, on revient de la guerre ; et puis, s’il m’arrive un malheur, je suis bien prêt, et de plus, ce ne serait rien en comparaison de la victoire que nous escomptons tous. »

Maurice Lélu, lettre à sa soeur Gabrielle, [7 août 1914] « Je pars tout à l’heure pour la bataille décisive et je veux te dire auparavant toute mon affection. Je crois que nous allons avoir à fournir un choc terrible pour enfoncer l’armée allemande, mais je crois aussi que nous l’enfoncerons et que la campagne sera finie avant deux mois ». Le samedi 1er août, dans l’après-midi, les autorités locales placardent en ville l’affiche ordonnant la mobilisation générale effective à minuit (1er août 1914). Archives municipales de Boulogne-sur-Mer, 1H363.

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