La peripherie du Parc W - Atlas Antropologique

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LA PERIPHERIE DU PARC W ATLAS ANTHROPOLOGIQUE Sous la direction de: Walter Barbero Introduction: Tito Sciattella Textes de: Amadou Boureima, Chiara Oriti Niosi, Alberto Preato, Marilena Crosato ImprimĂŠs Juin 2011


PREFACE La disparition prématurée, le 3 septembre 2010, de mon ami et collègue Walter Barbero, auteur, et plus encore, promoteur de la présente publication, m’impose le devoir de rédiger cette préface, en tentant de donner vie à un processus de transposition de sa pensée. C’est là un concept très présent dans cette culture africaine que Walter aimait tant. La périphérie du parc du W, Atlas anthropologique, naît au sein du programme Développement Local et Conservation de la Nature dans le Cadre de Processus de Soutien au Nepad : les investissements dans les zones périphériques du bloc écologique WAP (RTB/W), cofinancé par la Direction Générale de la Coopération et du Développement du Ministère

des Affaires Etrangères de la République Italienne. Le programme est mis en place par trois ONG italiennes, ACRA, AFRICA 70 et Cooperazione e Sviluppo, qui coordonnent respectivement les interventions au Burkina Faso, au Niger et au Bénin. Il convient en outre de signaler que ce programme, qui intervient exclusivement dans les zones périphériques du parc du W, naît des expériences acquises et des indications d’ECOPAS, programme de coopération environnementale entre l’Union Européenne et les trois pays sur lesquels s’étend le parc du W. Ce dernier fut institué à l’époque coloniale, dans le cadre de l’AOF (Afrique Occidentale Française) . Développé entre 2001 et 2008, date à laquelle il s’est achevé, ECOPAS a concentré les efforts et les ressources sur la Core Area du système RBT/W, en limitant vice-versa ses interventions dans les espaces périphériques, où précisément s’insère, dans un processus méthodologique planifié et avec l’usage d’un bon instrument de gestion - le PAG (Plan d’Aménagement et de Gestion de la Réserve de Biosphère Transfrontalière W) -, le programme de la Coopération italienne. La phase de structuration de cet Atlas anthropologique a donné lieu à une comparaison attentive des structures possibles


de cet ouvrage : d’un côté, nous voulions donner vie à une publication centrée sur les ressources naturelles du parc, sa riche faune avant tout, ce qui revenait au book classique, avec de nombreuses photographies, sur le modèle de ceux qui sont consacrés aux célèbres parcs de l’Afrique orientale ; de l’autre, nous défendions le choix d’une publication qui mette l’accent sur les populations qui vivent dans les périphéries du parc. C’est l’angle que nous avons choisi finalement car il correspondait mieux à la finalité du projet mais surtout parce que dans une langue simple – que les spécialistes ne nous en tiennent pas rigueur – il tente de fournir aux nombreux visiteurs du parc quelques éléments de réflexions sur la nature des problématiques que connait la majeure partie des écosystèmes protégés, ce qui est la cas des parcs. Nul doute que la pression anthropique a constitué depuis toujours le premier facteur de risque pour les équilibres délicats qui caractérisent l’état de santé de l’écosystème que nous examinons. Depuis les années cinquante la zone centrale du complexe du W n’est plus habitée. Les populations se sont retirées soit par contrainte, soit par souci de bien être, vers les périphéries dont le peuplement s’est effectué de façon différenciée, sur une longue période. L’interaction du bon millier d’implanta-

tions (villes, hameaux, campements) recensés dans les trois pays concernés, mais plus encore, leur réparation géographique, déterminent les zones socialement problématiques dont l’équilibre, lié aux perspectives de développement, conditionne l’avenir du complexe RTB/W. Il nous a donc, dans cette logique, semblé opportun de fournir des éléments de connaissances des formes, mais plus encore des raisons qui sont à l’origine des processus d’agrégation de la population qui réside dans les périphéries du complexe. La première partie de l’Atlas anthropologique réunit cinq interventions de chercheurs nigériens et européens qui nous donnent une vision d’ensemble de l’histoire, du peuplement, des problématiques et des caractéristiques majeures du complexe. La seconde partie se compose de 14 fiches où sont analysées les implantations (5 au Bénin, 3 au Burkina Faso, 6 au Niger) représentatives des dynamiques anthropiques caractérisant les périphéries de la TRB/W. Pour chaque village, les éléments démographiques, géographiques et morphologiques sont analysés, ainsi que les caractéristiques morphologiques et les points critiques de l’implantation, dans leur relation au parc notamment.

Je conclus en affirmant que l’Atlas Anthropologique peut contribuer à la diffusion et à la connaissance du patrimoine de savoirs extraordinaires détenu par les populations de la périphérie et mobilisable pour une valorisation efficace et une gestion participative de l’inestimable patrimoine environnemental du complexe du W.

Tito Sciattella

Le Programme ECOPAS (Ecosystèmes Protégés en Afrique Sahélienne) se concrétise au terme d’un long parcours qui a vu, à partir de 1984, le renforcement de la volonté de collaboration des trois états limitrophes, aboutissant au projet de statut de parc transfrontalier pour le « W », avec consécutivement un accord de réduction progressive de la souveraineté sur les zones de pertinence « nationale » (i-e « composantes ») respectives au profit d’une instance de gestion supranationale («Coordination régionale»).

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INDEX p1 _ Études La région du parc du W

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Populations et peuplement

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Création du parc et dynamique de la transhumance dans la zone

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Exploitation des ressources du bassin du parc du W

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Stratégies d’implantation à la périphérie du parc du W

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Glossaire

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p2 _ Villages

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Benin B01 | Kanderou B02 | Kargui B03 | Kompa B04 | Mokollè B05 | Sinkperou

pg 73 pg 83 pg 93 pg 103 pg 113

Burkina Faso BF01 | Kondjo BF02 | Lara BF03 | Mangou

pg 125 pg 135 pg 145

Niger N01 | Kelly Tassi Foulangay Do N02 | Kiwirkoye N03 | Allambarè N04 | Bani Zombou N05 | Bossia N06 | Mourekouara

pg 157 pg 167 pg 177 pg 185 pg 195 pg 205



LA PERIPHERIE DU PARC W ATLAS ANTHROPOLOGIQUE

Études



1 LA REGION DU PARC DU W Chiara Oriti Niosi

|Une Réserve de Biosphère| Continent de déserts, de savanes, de chaines montagneuses et de forêts, l’Afrique possède une variété d’écosystèmes unique au monde. La zone soudano-sahélienne, qui constitue une grande partie de l’Afrique de l’ouest, abrite l’un des bassins de biodiversité les plus vastes et les plus singuliers de la planète. Il s’étend de la Guinée au Niger, en passant par la Côte d’Ivoire, le Mali, le Burkina Faso et le Bénin. Cette succession ininterrompue de paysages variés, allant de la forêt guinéenne à la savane soudano-sahélienne, crée des écosystèmes spécifiques du fait de leurs interactions avec les sociétés qui y habitent. Le lien indissociable qui unit l’homme à son environnement est d’autant plus solide en Afrique de l’Ouest que plus de 80% de la population vit en milieu rural. Dans cette zone de l’Afrique le rapport permanent entre l’homme et la nature est devenu une nécessité pour la vie quotidienne et une exigence pour la survie des populations et le maintien de la diversité biologique. Ce lien se maintient grâce

à des activités telles que l’agriculture, l’élevage et la chasse qui, pour satisfaire les besoins essentiels de l’homme, se fondent sur la valorisation des ressources naturelles renouvelables. La permanence de cette relation, aussi nécessaire à l’homme qu’à son habitat, requiert un équilibre permanent des différents écosystèmes, dont la protection et la préservation peuvent garantir un accès régulier et non nuisible aux ressources. Dans cette optique, dans les deux dernières décennies, l’idée de préserver les écosystèmes a évolué vers une association stricte avec le concept de développement durable, dans lequel les pratiques locales peuvent constituer un véritable outil de conservation des écosystèmes. La compréhension et la valorisation des interactions qui existent entre la dynamique de la biodiversité, les activités humaines et le développement local sont à la base du concept de Réserve de Biosphère, la nouvelle stratégie d’aménagement de l’espace et de protection de l’environnement. En tant que modèle de gestion durable de la biodiversité, une réserve de biosphère vise à répondre à trois fonctions complémentaires : la conservation des écosystèmes, le développement local et l’éducation environnementale. Cette pluralité de fonctions demande l’enga-

gement de tous les acteurs associés aux processus de préservation et de valorisation des ressources naturelles disponibles, de la communauté internationale aux communautés locales, en passant par les Etats. L’Afrique de l’Ouest, dans son unicité biologique, offre un emblème de cette dernière frontière de protection environnementale, tout en accueillant la première réserve de biosphère transfrontalière de la planète : la réserve transfrontalière de biosphère du W (RTB/W). Le parc régional transfrontalier du W, situé à la jonction de trois Etats, le Bénin, le Burkina Faso et le Niger constitue le cœur et l’origine de cette Réserve de Biosphère. La RTB/W, cependant, ne s’arrête pas aux 10.300 km² qui constituent actuellement les trois sections transfrontalières du parc du W, ni aux zones adjacentes, aux statuts diversifiés, telles que la réserve totale de faune de Tamou et la réserve partielle de Dosso, au Niger. Elle concerne aussi d’autres zones protégées voisines, situées sur le territoire des trois Etats : le parc de la Pendjari, au Bénin, le parc de l’Arli, au Burkina Faso, et leurs zones cynégétiques et forêts classées. C’est un ensemble considérable de biodiversité, d’ailleurs aussi connu comme le complexe écologique régional WAP (W, Arli, Pendjari).

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|L’histoire du Parc du W et ses périphéries| Comme la plupart des zones protégées de l’Afrique de l’Ouest, le noyau central de l’actuel parc du W commença à susciter l’intérêt et devenir objet protection à partir des années 1920 du siècle dernier, en pleine époque coloniale. La très faible occupation humaine de ces zones, s’expliquant alors par la présence de la mouche tsé-tsé (responsable de la trypanosomiase animale et interdisant donc tout élevage) et des pathologies humaines telles que l’onchocercose, avaient incité les premiers cartographes occidentaux de la période coloniale à qualifier la zone du W de « vastes espaces inhabités ». Cependant, la biodiversité étant particulièrement importante dans ces zones, les autorités coloniales décidèrent de les classer en 1927 en « parc refuge », créant ainsi un premier embryon du futur parc du W. Ensuite, l’abondance de la grande faune sauvage présente dans la région poussa les autorités à adopter, à partir de 1937, des méthodes de classement plus formelles, qui se concrétisèrent en statuts variés, depuis la « réserve totale de faune » jusqu’à la « forêt classée ».

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LES RESERVES DE BIOSPHERE Une réserve de biosphère est une aire portante sur des écosystèmes terrestres, côtiers, marins, qui vise à promouvoir des approches, moyens et systèmes pour réconcilier la conservation de la diversité biologique avec son utilisation et valorisation durable. La désignation réserve de biosphère a été crée par l’UNESCO a partir de 1971, au début du Programme ‘L’Homme et la Biosphère’. Mais seulement dès 1996 les principes de fonctionnement des réserves de biosphères ont été définis. L’application de tels principes dépend cependant de la juridiction nationale, du moment que les sites reconnus en tant que réserves de biosphère restent placés sous la juridiction souveraine des états où ils sont situés. Selon les principes de 1996 chaque réserve de biosphère doit contenir trois éléments : - une ou plusieurs aire(s) centrale(s) bénéficiant d’une protection à long terme et permettant de conserver la diversité biologique, de surveiller les écosystèmes les moins perturbés et de mener des

recherches et autres activités peu perturbantes (zone centrale) ; - une zone tampon, bien identifiée, qui normalement entoure ou jouxte les aires centrales, valorisée avec des activités de coopération compatibles à pratiques écologiquement viables, y compris l’éducation environnementale, l’écotourisme et la recherche ; - une aire de transition flexible (aire de coopération ou zone périphérique), qui peut comprendre un certain nombre d’activités agricoles, d’établissements humains ou autres exploitations, et dans laquelle les communautés locales, agences de gestion, groupes culturels et autres partenaires travaillent uniment pour gérer et développer durablement les ressources de la région. Donc, dans l’aire de transition les populations locales s’adonnent à leurs activités productives habituelles. En effet, la conception des réserves de biosphère, à la différence des parcs et aires protégées classiques, permet d’allier conservation et développement durable en concertation avec les populations.

Malgré la variété des statuts, la méthodologie adoptée pour la protection et la conservation de la diversité biologique répondait toujours à une approche très rigide, où l’idée de protection environnementale était liée à une défense rigoureuse des éléments du milieu naturel contre toute dynamique extérieure, voire anthropique, considérée comme des menaces.

Mais, contrairement aux avis des cartographes coloniaux, les zones protégées, bien que peu peuplées, hébergeaient de petites communautés Gourmantchés, Peules, Zarmas, Haoussas, Baribas, Sombas. Quoiqu’en nombre limité et dispersées dans l’espace, ces populations implantées dans les zones protégées utilisaient les ressources naturelles disponibles pour mener leurs activités de subsis-


tance. Néanmoins, leur présence ne pouvait pas être tolérée par une conception de conservation de l’environnement qui considérait toute activité humaine comme destructrice de la nature et incompatible avec la protection des écosystèmes. Ainsi, à partir des années 1940, les rares villages encore présents dans les zones protégées commençaient à être déplacés et repoussés vers les zones périphériques du parc du W. Au même moment, l’accès aux zones qui, quelques années plus tard, allaient constituer le futur parc du W fut interdit, comme toute activité humaine, depuis la chasse jusqu’au pâturage du bétail. Sous l’égide d’une telle réglementation, le 4 Août 1954, quelques années avant l’acquisition de l’indépendance par les trois Etats concernés, ce complexe de zones protégées fut déclaré parc national du W du fleuve Niger. Après les proclamations d’indépendance, en 1960, le Bénin, le Burkina Faso et le Niger renforcèrent les corpus juridiques de leurs statuts et entamèrent les premiers essais de collaboration pour la gestion transfrontalière du parc du W. Malgré l’insuffisance des ressources humaines, matérielles et financières, les trois pays cherchèrent à assurer la protection du parc, tout en suivant la conception, rigide, héritée des autorités coloniales. En

effet, jusqu’au début des années 1970, la faible densité d’occupation humaine de la zone et la relative sécurité alimentaire des hommes et du bétail autorisaient ce schéma classique de conservation des parcs. Le déplacement des villages, implantés auparavant dans le parc, vers les périphéries, c’est-à-dire les zones les plus proches des limites du parc, avait en effet augmenté les pressions anthropiques sur ce dernier, mais cela n’entraina pas de déséquilibre écologique notable, vu le nombre limité de populations déplacées. A partir des années 1970 et pour toute la décennie suivante la situation commença à se détériorer. A cette date et jusque dans les années 1980, le Niger connut des épisodes de sécheresse marquée qui provoquèrent des flux migratoires nordsud pour rechercher des endroits suffisamment riches pour assurer la survie du bétail et poursuivre les activités agricoles. L’élevage extensif transhumant, très répandu au Niger, avait été l’activité la plus touchée par la sécheresse ; avec leurs ressources abondantes, les périphéries du parc du W, si ce n’est, illégalement, le parc lui-même, devinrent des sites de nomadisation par excellence. Par conséquent, l’augmentation de la population dans la périphérie des aires protégées accrut la pression anthropique sur les ressources naturelles du parc et

ses périphéries. Au-delà du risque grave de dégradation des ressources naturelles, l’accroissement progressif du peuplement dans les périphéries mit en évidence l’inadéquation du schéma classique de protection environnementale, trop rigide ; la méthode de sanctuarisation adoptée jusqu’alors pour la conservation de la biodiversité du parc du W ne pouvait plus continuer à ignorer la valeur du facteur humain dans la préservation de l’environnement. Premièrement, parce que l’application d’une telle méthode aurait requis des moyens de contrôle excessifs et inexistants ; en deuxième lieu, parce que l’augmentation de la densité d’occupation humaine dans la zone imposait une réorganisation des espaces et des ressources à protéger et à utiliser. Donc, même sous l’influence de la conscience environnementale qui pendant les années 1970 commençait à se développer au sein de la communauté internationale, une nouvelle structuration du parc et de ses périphéries fut adoptée, avec le classement de réserves et zones tampon au Niger, Bénin et Burkina Faso. Des réserves totales, des réserves partielles et des zones de chasse furent créées tout autour du parc du W, dans le but de compenser le déséquilibre de plus en plus évident entre le niveau d’exploitation, souvent illégale, des ressources na-

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turelles et le patrimoine environnemental à protéger. La zone de protection intégrale constituait le noyau central du parc, où toute activité humaine, telle que l’agriculture, l’élevage, la chasse, l’abattage des arbres, était interdite, pour assurer la conservation intégrale de la biodiversité. En revanche, la protection partielle, appliquée aux milieux environnants de la zone de protection intégrale, visait à garantir l’existence de lieux où les populations riveraines pouvaient pratiquer leurs activités de subsistance, en respectant les règlements adoptés pour assurer la préservation et la disponibilité du patrimoine naturel. Ces zones ne prévoyaient pas le droit à l’implantation de campements. Enfin, les zones de chasse, souvent dérivées des réserves de faune instituées à l’époque coloniale, répondaient à la demande d’un tourisme encore plutôt restreint et spécifique. Ce système de protection et de structuration du parc selon des zones à différents statuts exigeait le renforcement de la surveillance et la mise en œuvre de pratiques de gestion visant à faciliter les actions de préservation et, à partir des années 1990, à valoriser le parc en tant que circuit destiné au tourisme de vision, en plus du tourisme cynégétique. Finalement, durant la dernière décen-

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nie du XXe siècle, le parcours évolutif du parc du W se concrétise dans une stratégie de préservation de la biodiversité qui intègre la participation des communautés locales pour la conservation des ressources naturelles. La région du W devient une réserve de biosphère, et ce, en raison des conventions et à la suite des classements internationaux qui avaient fixé l’évolution du parc : la « convention concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel » de l’UNESCO, en 1972, le « programme l’homme et la biosphère », lancé au début des années 1970, et la « convention de Ramsar sur les zones humides », en 1971. A partir des prolongements des principes édictés par ces conventions internationales, les trois pays du parc du W, le Niger, le Bénin et le Burkina Faso ont officiellement prévu, à partir de 2001, la dévolution de la gestion du parc à une entité transfrontalière unique, créant l’un des premiers exemples africains de coopération intergouvernementale pour la préservation de la biodiversité : le parc régional transfrontalier du W, qui, en 2002, est devenu partie de la première réserve transfrontalière de biosphère de l’Afrique. |Le milieu naturel de la région du Parc du W|

La zone du W avec ses périphéries est une large étendue de savanes soudaniennes qui s’étend du nord au sud et couvre près de deux millions d’hectares, en créant une grande variété de zones écoclimatiques et d’habitats, marquée par des affinités sahéliennes au nord et soudano-guinéennes au sud. La disponibilité en eau, fortement variable de la saison sèche à la saison des pluies, a une répercussion énorme sur l’abondance, la distribution et la typologie de végétation et d’animaux. Schématiquement, le bassin du W est caractérisé par l’existence d’une saison sèche marquée, allant du mois de novembre au mois d’avril, et d’une seule saison des pluies, en gros de juin à octobre - les précipitations atteignant leur maximum au milieu de la saison et variant, normalement, entre 600 et 1000 mm d’eau par an. Dans la partie nord de la région du W, en territoire nigérien, la durée et l’intensité des pluies deviennent de plus en plus faibles, pour laisser place à une saison sèche de plus en plus longue et torride. Au-delà de la réserve de Tamou, le climat soudanien caractérisant la plus grande partie du parc du W est remplacé par celui du Sahel, domaine des herbes clairsemées et des arbustes épineux. Au contraire, vers le sud du bassin, particulièrement au Bé-


LE ZONAGE OPERATIONEL DE LA REGION DU W L’actuel structure, dimensions et méthodes de gestion opérationnelle de la région du W, voir le Parc et ses périphéries, résultent d’un processus d’aménagement conduit par le Niger, le Bénin et le Burkina Faso dans le but d’améliorer sans cesse la préservation de la biodiversité. La zone de protection intégrale, géographiquement partagée entre les trois Pays, constitue l’espace effectif du Parc Régional du W. Elle est délimitée au Nord, au Niger, par le fleuve Niger, et au Sud, au Bénin, par la chaine de l’Atakora. La partie nigérienne s’étende pour 221.142 ha, celle burkinabé pour 235.543 ha et celle béninoise, la plus ample, pour 577.235 ha. Selon le statut appliqué par les trois Etats, toute activité humaine à l’intérieure de telle zone est strictement interdite. Du coté nigérien, au Nord de la zone de protection intégrale, s’étende pour un ampleur de 76.345 ha la Réserve Totale de Faune de Tamou. Crée en 1962, l’aire héberge les villages déjà existant au moment de sa constitution, mais l’implantation de nouveaux villages est interdite. L’agriculture et l’élevage dans la zone sont permis, mais sous le contrôle de l’administration du Niger, qui assigne les superficies à cultiver et organise des ateliers de formation sur

les techniques de défrichement contrôlé. La chasse est interdite dans toute la réserve. En 1976, la Réserve Totale de Tamou fut intéressée par une modification de ses limites au but de créer une zone déclassée de 70.000 ha au profite de l’agriculture. En plus, cinq kilomètres le long de la rivière La Tapoa, en territoire qui fait déjà partie de cette Réserve, à été délimité une zone de protection intégrale en tant qu’aire à particularité écologique. Cette aire, même si structurellement fait partie de la Réserve, sur le plan opérationnelle est considérée comme partie intégrante du Parc du W. A coté de la Réserve de Tamou et au Nord-Est du Parc du W, toujours dans le territoire nigérien, se trouve la Réserve Partielle de Dosso, de 538.456 ha. Le décret qui en a déterminé la création établie qu’ici toute activité humaine, y compris la chasse, est permise, mais d’une façon autorisée et réglementée. Du coté burkinabé, la zone de chasse de la TapoaDjerma, avec ses 28.736 ha d’ampleur, entoure les lisières occidentales du Parc. Au Bénin, les aires protégées sont représentées par zones de chasse, notamment la Zone cynégétique de Djona, de 118.947 ha, et la Zone cynégétique de la Mékrou, de 110.530 ha. Après la qualification de la région du W en Réserve de Biosphère en 2002, toutes ces aires protégées à différents statuts ont acquis de nouvelles fonctions,

tout en maintenant la même typologie de classement. La zone de protection intégrale représente le noyau centrale de la Réserve de Biosphère. L’interdiction de toute activité humaine persiste, mais la recherche, l’éducation environnementale et le tourisme de vision sont permises et de plus développées. Les Réserves, totales et partielles, répandues au Niger et au Burkina Faso, ont été identifiées comme zones tampon, où la promotion d’activités pour le développement durable et la responsabilisation des populations sont poursuivies. Enfin, aux alentours pour un moyenne de 25 km carrés des aires tampon, ont été indiquées des zones de transition: zones ordinaires, sans statuts protectif, où modèles de développement durable sont mis en œuvre pour limiter les pressions anthropiques sur les zones tampon. Même si en adhérence aux principes de fonctionnement des Réserves de Biosphère, le Niger, le Bénin et le Burkina Faso gèrent les aires protégées de la Région du W selon leur propres législations nationales. Au Burkina Faso et au Niger, la gestion du Parc est assurée par les administrations, respectivement régional (gestion décentralisée, administration forestière) et national (gestion centralisée, Direction de Parcs et Réserves). Au Bénin, la gestion du Parc est confiée au CENAGREF (Centre National de Gestion de Réserves de Faune), un office d’Etat doté d’autonomie administrative et financière.

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nin, la saison humide s’allonge de plus en plus, jusqu’à transformer le climat soudanien en climat guinéen, mais cela se produit au-delà des limites méridionales de la région du W. L’ensemble du bassin est modelé par un réseau hydrographique assez dense. Le Niger, fleuve permanent et troisième fleuve de l’Afrique en longueur, traverse la zone du W de l’ouest à l’est. Il marque les limites septentrionales du parc régional du W, en lui donnant aussi le nom, dérivé des méandres serrés que le fleuve trace en formant la lettre W. Les rivières Tapoa, Mékrou et Alibori sont les principaux affluents du Niger. Au Burkina Faso, les rivières Kourtiagou et Pemdjo se jettent dans la Pendjari, qui traverse le parc du même nom, partie du complexe WAP. Les fleuves et les cours d’eau ne représentent pas les seules sources d’eau de la région, vu la présence dans le parc et ses périphéries d’un grand nombre de mares naturelles plus ou moins permanentes, lieux où les animaux viennent s’abreuver et sources d’eau pour les populations riveraines. |Le cycle saisonnier| Les changements saisonniers de la région du W sont liés à la présence ou absence des pluies. Au niveau du parc du W, l’in-

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fluence des pluies se répercute sur la vie de la flore et de la faune, mais dans les périphéries du parc, les pluies scandent et déterminent les activités humaines. La période la plus riche en végétation dans le bassin du W est la saison de pluies, ou « l’hivernage », de juin à septembre. En tant que phénomène extraordinaire arrivant après la longue saison sèche, la pluie, favorisée par le vent du sud-ouest, la mousson, est marquée par de violents coups de vents et devient torrentielle. En juin, en début de saison, les orages sont encore très localisés, mais durant cette période transitoire d’environ un mois, la ligne des orages progresse vers le nord et les pluies sont de plus en plus fréquentes dans toute la région du W. Dans le parc, la savane montre sa vraie productivité : les arbres, les herbages et les fleurs redeviennent verdoyants, les insectes et les amphibiens repeuplent l’air et la terre. La faune sauvage se disperse sur l’ensemble du parc, vu la richesse en sources d’eau et en nourriture. Du Bénin au Niger, les périphéries deviennent de plus en plus vertes, en offrant un terrain prêt pour les cultures et des zones de pâturage qui s’étendent sur toute la région. Pour les agriculteurs, c’est le moment des semis. Pour les éleveurs de la grande transhumance en provenance du Bénin, c’est le moment de

rejoindre les pâturages des plateaux au nord, au Niger, où ils demeureront durant toute la saison sèche. Après les grandes averses sur la région du W, les rivières principales du parc et leurs affluents sont à leur niveau maximum. En septembre, la végétation, les animaux et les hommes profitent tous de l’eau précédemment tombée. En cette période, dans le sud du parc la végétation est encore très verte et haute, et dans la partie plus sèche du parc, au nord, les herbes annuelles, même si elles sont beaucoup plus courtes, forment des tâches de verdure sur le sol. Les animaux restent toujours très dispersés dans le parc, vu la richesse en eau et nourriture dont ils peuvent profiter. Dans les périphéries du parc, dans les champs cultivés, les fruits sont mûrs après les pluies et pour les agriculteurs, c’est le moment de moissonner les céréales. A partir d’octobre, le sol s’assèche progressivement et la couverture herbacée commence à jaunir. La saison sèche s’approche, mais le pâturage reste encore plutôt abondant et les éleveurs demeurent avec leurs troupeaux aux alentours du parc, en profitant du fait que les champs sont libres. En décembre, la saison sèche commence brutalement. L’harmattan, le vent frais et sec en provenance du Sahara, commence


à souffler régulièrement, en réduisant de façon drastique l’humidité de l’air. La saison des pluies est désormais loin, les rivières et les mares dans le bassin du W s’assèchent de plus en plus, la végétation s’éclaircit et les animaux se concentrent auprès des rares points d’eau encore existants. Aux périphéries du parc, les champs sont vides et les récoltes déposées dans les greniers. Les éleveurs commencent à concentrer le bétail autour des sources d’eau encore disponibles, en prévision de leur départ vers le sud verdoyant, en laissant derrière eux l’aridité de la saison chaude qui s’approche. Cette dernière arrive en mars, début d’une saison vraiment torride surtout au nord, où les très rares pluies isolées, nommées « pluies des mangues » en raison de leur capacité à faire murir ces fruits, ne peuvent pas réduire la grande chaleur et la poussière envahissante. Dans la région du W, l’évaporation atteint 1 cm par jour : presque tous les points d’eau sont secs en cette période, à l’exception de quelques rares flaques d’eau dans les lits des principales rivières et des points d’eau alimentés par des sources permanentes et artificielles. Les animaux du parc dépendant de l’eau se concentrent sur ces sites.

Dans les périphéries du parc, les agriculteurs n’ont plus qu’à attendre les premières pluies pour préparer les champs au semis. Les éleveurs transhumants encore au nord sont définitivement résolus à se déplacer vers les pâturages du sud. Pour les villageois qui restent, c’est alors le début d’une période critique. Les champs sont nus, les granges désormais presque vides. La « soudure », période de transition allant des premières pluies à la nouvelle récolte, contraint à vivre dans la gêne, vu le manque de nourriture et la hausse des prix des vivres.

|Les paysages de la région du W| Depuis le parc jusqu’à ses périphéries, la région du W se présente comme une vaste pénéplaine, sans reliefs bien marqués, à l’exception de la chaine de l’Atakora qui s’étend au Bénin en délimitant la lisière méridionale du parc du W. Du point de vue géologique, d’amples extensions d’épais sols latéritiques caractérisent toute la région. Très riches en fer et parfois devenus si durs qu’ils forment des cuirasses imperméables, de tels sols empêchent la croissance de la végétation.

A la nouvelle arrivée des pluies, le parc renaît, la flore et la faune prospèrent, mais, dans les périphéries, les hommes doivent faire face encore à la période de « soudure » avant de profiter de nouvelles récoltes. Les pluies gouvernent donc le cycle saisonnier et la vie entière de la région du W. Leur influence est d’autant plus importante qu’elles sont irrégulières dans l’espace et le temps. Alors que le schéma général est prévisible, la durée et l’intensité des saisons ne le sont pas. Les variations interannuelles sont très importantes et l’impact des années très humides ou très sèches peut être catastrophique pour la population, leurs cultures et leur bétail.

Pareilles caractéristiques devraient produire un paysage plutôt homogène, dur, plat et aride dans toute la zone. Au contraire, la région du W présente des paysages hétérogènes, qui ont permis le développement de plusieurs espèces d’animaux et végétaux et ont assuré, depuis des millénaires, la présence de l’homme. En effet, le réseau hydrographique dense de la zone et le cycle saisonnier d’une alternance très tranchée assurent le renouvellement de la biodiversité dans l’espace et le temps. De même, la richesse en ressources naturelles et le réseau fluvial ont fait du W depuis des millénaires une zone de mouvements et contacts entre les peuples.

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|La géologie| La vaste pénéplaine qui s’étend dans la région du W est parsemée d’affleure ments cristallins qui comptent parmi les roches les plus anciennes de la planète. Extrêmement dures, les roches les plus jeunes datent d’environ 550 millions d’années, tandis que les plus anciennes peuvent atteindre les deux milliards six cents millions d’années. Elles ont été soumises à une érosion lente mais constante, qui se traduit actuellement par une succession de faibles reliefs, séparés par des vallées où se sont déposés des sédiments. Des vestiges cristallins, abritant une flore et une faune spécifiques et variées, et des collines tabulaires, souvent recouvertes de cuirasses latéritiques épaisses et compactes, sont disséminés çà et là dans la zone du W. Au sud-ouest du parc, les formations géologiques récentes se traduisent par deux massifs importants, quoique peu élevés, des paysages du W : les falaises de grès précambriens du Gobnangou et les collines métamorphiques de l’Atakora. Dans leur partie septentrionale, les dernières manifestations de l’Atakora donnent naissance aux chutes de Koudou, là où la rivière Mékrou franchit la barrière naturelle de l’Atakora d’ouest en est. Aux limites septentrionales du bassin du W, précisément au niveau de la Ré-

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serve Totale de Faune de Tamou, les formations sédimentaires d’âge tertiaire, quoique riches en nappes aquifères, annoncent les paysages arides et les sables dunaires du Sahel ouest-africain. Les ressources minérales du bassin du W sont limitées, mais il y a cependant des dépôts de phosphate, exploités de façon semi-artisanale au Burkina Faso, auprès de Kodjari. Au Burkina Faso toujours, aux environs de Diapaga, deux sites miniers artisanaux, actuellement en activité, sont liés à la présence d’or. Le nickel, le cuivre et le manganèse ne sont pas absents de la région, mais leur exploitation n’est pas rentable et n’est donc pas développée. En revanche, le fer des roches-mères et surtout la latérite sont omniprésents sur toute la zone du W. Une telle richesse a permis l’éclosion d’une industrie métallurgique préhistorique très active et très précoce, car c’est là qu’on trouve certaines des toutes premières traces de métallurgie connues sur la planète. Les vestiges de cette activité marquent encore aujourd’hui les paysages du bassin du W. |La flore et la faune| La végétation du bassin du W se développe selon la répartition spatio-temporelle des pluies et des sources d’eau et selon les caractères topographiques de

la région. En termes généraux, la savane constitue la végétation typique de la région du W, mais les paysages du W sont si variés qu’ils donnent naissance à plusieurs typologies de savanes. Dans la partie nord du bassin, des confins de la réserve de Tamou jusqu’à l’axe Mékrou-Niger, la flore est caractéristique du domaine sahélien avec la présence sporadique d’épineux plus ou moins rabougris et de végétation ligneuse contractée, alternant avec des sols nus. Au sud de l’axe Mékrou-Niger, la végétation abandonne la teinte sahélienne pour montrer l’opulence des savanes arborées, plus riches en flore humide. Bien que les limites entre ces différents paysages ne soient pas très nettes, les habitats créés par la variété du cortège floristique du bassin du W sont nombreux et offrent un abri à plusieurs espèces d’animaux. Le nord du W est caractérisé par une nette abondance d’espèces ligneuses épineuses, telles que les nombreuses espèces d’Acacia. Les espèces arborées sont toutefois aussi présentes : Adansonia digitata (le baobab), Parkia biglobosa (le néré), Vitellaria para¬doxa (le karité), Faidherbia albida (l’arbre de l’éleveur) sont très répandues dans tout le bassin du W et fréquemment utilisées par l’homme qui, en dehors des zones protégées, en favorise la croissance.


Mais c’est la brousse tigrée et la brousse tachetée qui constituent les paysages les plus emblématiques de ce côté du W. Elles tirent leur nom de l’aspect qu’elles présentent sur les photogra phies aériennes. Il s’agit de fourrés denses à Acacia, Pterocarpus lucens, Combretum, alternant avec des espaces de sol nu, qui apparaissent localement à la faveur d’affleurements totalement plats. Dans ces espaces, la végétation semble s’agréger selon un ordre géométrique précis et régulier, qui vise peut-être à exploiter les ressources hydriques limitées d’un milieu aride en les concentrant sur une portion privilégiée de l’espace. C’est l’une des réponses les plus appropriées et les plus élaborées que la végétation soudano-sahélienne ait donné à l’avancée de la sécheresse : plutôt qu’une raréfaction de la couverture arbustive, c’est l’option « discontinuité et alternance » qui a prévalut ici. Les colonies de Ctenium elegans, Loudetia sim¬plex ou Combretum nigricans constituent d’autres exemples d’adaptation à la disponibilité en eau limitée de certains endroits de la région du W. Il s’agit d’espèces adaptées à l’aridité des sommets des pentes, qui se développent en espaces très ouverts à l’intérieur du parc du W, où il n’est pas rare de rencontrer la gazelle à front rouge.

En revanche, dans les milieux à hydromorphologie marquée, comme les fonds de vallée, le bas des pente, ou, le plus souvent, les bords de mares, la végétation est composée de plusieurs espèces ligneuses, souvent de grande taille, comme l’Acacia nilotica ou la Mitragyna inermis. Cette végétation spécifique attire de nombreuses espèces d’herbivores, comme le damalisque, le cobe de buffon ou le cobe défassa. Dans les zones encore plus proches de l’eau, notamment aux bords du fleuve Niger, des espèces essentielles pour l’alimentation des herbivores se développent, telles l’Echinochloa stagnina (le bourgou) et l’Oriza longistaminata (le riz sauvage) : cette végétation aquatique est la préférée des hippopotames et des lamantins. Mammifères de l’espèce de siréniens, ces derniers sont confrontés à un risque très élevé d’extinction à moyen terme. Herbivore, inoffensif et non agressif, non seulement recherché pour sa chair mais également pour sa graisse, dont l’huile est utilisée en médecine traditionnelle, le lamantin est très facile à capturer et il a été décimé par la chasse, les filets modernes et les hélices des pirogues à moteur. La destruction de son habitat par les aménagements hydriques et la pollution continue de menacer la survie de cet animal, dont l’observation est si

exceptionnelle qu’il a toujours été considéré comme un animal mythique, à l’origine des sirènes. Les éléphants, les lions et les léopards sont quelques-uns des animaux les plus célèbres qui habitent le parc du W. Aux bords des cours d’eau, surtout dans la zone méridionale du parc du W, les forêts galeries constituent des écosystèmes particuliers exceptionnellement riches en biodiversité, avec de simples, et étroits, cordons rizicoles qui suivent exactement les contours de la rivière ou véritables forêts, denses, larges de plusieurs centaines de mètres. Quelle qu’en soit la typologie, les forêts galeries créent des niches écologiques bien particulières, à la fois pour la microfaune spécifique qu’y vit, comme la mouche tsé-tsé et pour la grande faune, qui y trouve fraîcheur et protection. Les espèces végétales présentes dans ces galeries sont très nombreuses et doublent à elles seules la florule de la zone. En suivant le Niger vers le sud, au-delà de l’axe Mékrou-Niger, la teinte sahélienne de la végétation commence par laisser place aux paysages soudaniens, marqués par des espèces ligneuses et arborées, parcourus, dans le parc du W, par de grands troupeaux d’éléphants, de buffles et d’antilopes, comme les hippotragues et les bubales. Sur les reliefs de l’Atakora poussent des arbres de petite taille,

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bien adaptés à la faible disponibilité en éléments nutritifs, comme l’Euphorbia sudanica ou le Ficus. Les bas de pente au delà de la chaîne montagneuse sont occupés par des savanes densément boisées, qui abritent des gigantesques Daniellia oliveri. Plus bas, dans les vallées, l’Acacia gourmaensis, qui n’existe que dans cette région, apparaît à coté d’un autre végétal emblématique de la zone, le Borassus ae¬thiopum (le rônier), immense palmier aux fruits et aux gemmes comestibles. Ce secteur méridional de la zone du W est lui aussi caractérisé par la présence de nombreux arbres utiles qui, comme le karité, sont ici plus exploités par l’homme que dans la partie septentrionale du bassin. En effet, surtout au Bénin et au Burkina Faso, la production de beurre de karité dans les périphéries de la région du W est assez répandue. L’utilisation des plantes traditionnelles n’est pas la seule activité humaine développée dans les périphéries du bassin du W. L’homme est présent depuis des millénaires dans la région du W et des vestiges de villages, souvent marqués par des bosquets de gros baobabs, indiquent que dans les aires protégées les zones de ruissellement des eaux ont abrité un jour des installations humaines. Les sites archéologiques dispersés dans le parc

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du W montrent que ces anciens villages ressemblaient beaucoup aux zones agropastorales qui contournent aujourd’hui les périphéries du parc : en effet, dans les trois pays du W, l’agriculture et le pâturage sont les principales activités humaines. Mais, si au Niger l’agriculture continue d’être basée sur les cultures traditionnelles, comme le mil, le sorgo et le blé, au Bénin et au Burkina Faso celles-ci ont souvent été supplantées par la culture du coton. L’expansion rapide du coton comme culture de rente a un impact environnemental très élevé, car elle se traduit souvent par une surexploitation des sols et une pollution des cours d’eau par les engrais et les pesticides. La ville de Ba¬nikoara, au Bénin, première productrice de coton du pays, est située exactement aux lisières méridionales du parc du W et symbolise la menace qu’une telle culture fait peser sur les zones protégées.


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2 POPULATIONS ET PEUPLEMENT

Amadou Boureima, Ali Mahamane, Moussa Barage, Amadou Oumarou, Mounkaila Harouna, Mahamadou Sani Moussa, Soumana Douma, Iro Dan Guimbo et Moustapha Mamadou Kone.

|Peuplement| L’histoire du peuplement de la région s’est déroulée en trois phases : - une première période dite d’implantation préhistorique (du paléolithique au néolithique); - une seconde période dite d’implantation ancienne; - une troisième période marquée par une dynamique d’implantation récente (date du XXe siècle à nos jours). |Implantation préhistorique| Les premiers peuplements humains connus correspondent à des sites préhistoriques acheuléens (Paléolithique moyen) situés près de la rivière Tapoa. Des sites néolithiques, assez récents (2 à 3.000 ans), ont été découverts dans la

région de la rive gauche de la Mékrou. On y note la présence de squelettes, de poteries, d’outils, de meules. Le gisement est particulièrement riche (Boubé G. 2002). La présence des hommes du paléolithique sont attestées par des pointes de flèche en pierre dénotant des interactions très anciennes entre la faune et l’homme dans la région. Cette situation perdura jusqu’à la découverte de la culture des céréales (sorgho, mil et riz) vers 2000 ans avant J.-C. L’homme y aurait vécu de chasse en utilisant déjà les feux de brousse et en pratiquant la cueillette de fruits et de graines sauvages. Le travail et l’utilisation de matériel entre 100-300 ans avant J.-C. auraient accru le rendement de la chasse et celui des cultures céréalières favorisant ainsi l’accroissement des populations. Par ailleurs, les nombreux tas de scories se trouvant dans le parc du W indiquent que la région était depuis longtemps une zone d’extraction du minerai de fer même si on ne connaît ni l’époque ni la durée de ces activités. A l’exception de sa partie nord qui aurait connu l’influence de l’Etat Mossi, la région du W, par son éloignement des principaux champs d’action des civilisations du Moyen -Age

africain, tels que les royaumes du Ghana, Mali et Gao, a suscité peu d’intérêt pour les recherches archéologiques. Cependant, des efforts ont été fournis par le Programme Ecopas pour combler ses insuffisances par le financement des recherches récentes. |Implantation ancienne| Le processus d’occupation humaine du parc s’est effectué par des cycles de peuplement et de dépeuplement dus à de nombreux facteurs, tels que l’apparition de certaines maladies comme le paludisme ou encore l’onchocercose parmi la population. La plupart des villages de la zone burkinabé sont anciens, ce qui lui confère une stabilité certaine par rapport au reste de la périphérie. Toutefois, dans sa partie extrême sud- est, elle enregistre une immigration croissante de populations, notamment les agriculteurs Mossis qui s’installent maintenant dans les hameaux. A cette immigration Mossi, il faut ajouter l’accroissement du nombre de campements permanents et temporaires des pasteurs Peuls dans toute la périphérie, en particulier dans le secteur est à la frontière avec le Niger.

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La périphérie de la composante béninoise se caractérise par : des implantations dans la zone sud avec une majorité d’installations récentes qui indiquent que la zone tend vers une stabilisation progressive; la zone sud-est, plutôt variée, où des villages anciens jouxtent des villages récents Cette périphérie du parc du W au Bénin est constituée de plusieurs zones qui ont été colonisées par diverses ethnies à des époques différentes. La zone du fleuve au Bénin est essentiellement constituée en majorité du groupe ethnique Dendi. Son peuplement s’inscrit dans le cadre des vicissitudes de l’évolution historique des grands empires de l’Afrique de l’Ouest, notamment l’Empire de Gao. L’éclatement de ce dernier à la fin du XVIe siècle, a provoqué des mouvements des groupes Sonrai-Zarmas vers le long de la vallée du fleuve Niger. C’est au milieu du XVIIIe siècle, qu’une fraction du groupe Sonrai-Zarmas, les Dendis, envahit toute la vallée du Niger (Bénin) en aval de la Mékrou. Bloqués à l’est par les royaumes Haoussas, les Dendis fondèrent de nombreux villages autour du royaume de Kompa et imposèrent leur pouvoir à toutes les chefferies

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existantes. Ils ont conservé leur langue d’origine Sonrai-Zarmas et tous les habitants dominés l’ont adoptée. Un peu plus tard, tout au sud, des princes Bariba, venus du royaume de Nikki, ont conquis la chefferie des Mokolé et installé les principautés de Guenéganda et de Sakatem respectivement à Guéné et à Kandi. Il convient de signaler, à coté de ces principaux groupes ethniques, le peuplement singulier de la vallée du fleuve Niger par des agriculteurs Gourmantchés, installés essentiellement dans les villages de Loumbou-Loumbou, Mamassi Gourma, etc. Dans la composante nigérienne, des villages comme Karey Kopto, village de pécheurs sur la rive du fleuve Niger, sont des sites où le culte de Faran Maka Bote, personnage mythico-historique, est actif. Ce personnage aurait vécu sur ce site avant le XIVe siècle et serait l’ancêtre de tous les pêcheurs (Sorko ou Sorkawa) du Fleuve Niger, entre Tombouctou, au Mali, et Yawri, au Nigeria. Il serait le fondateur de la culture Songhaï et aurait été à l’origine de la cité de Gao. Cet élément, à la fois historique et légendaire, montre bien toute l’imbrication, dans

cette région d’Afrique, entre nature et culture. Il confirme le fait que les ressources naturelles (cueillette, chasse, pêche) de cet environnement ont été utilisées de tout temps par les populations de la région qui ont laissé leur empreinte dans les formations végétales et les paysages (pâturage, incendies, cultures). Cette partie a été, au cours des XVIIIe et XIXe siècles, l’objet de nombreux mouvements de population, source de conflits et de conquêtes. Elle était peuplée de Gourmantchés (zone de Tamou, rive droite) et de Zarma (zone du Dallol Bosso, rive gauche) lorsque des Peuls (pasteurs Peuls nomades) l’ont envahie. La résistance des Gourmantchés et des Zarmas fut vive contre l’emprise Peule. La résistance des populations autochtones aurait abouti à la construction de villages fortifiés, dont on trouve des traces nombreuses dans le périmètre du PNWN. D’autres villages comparables s’étendent sur une zone qui va jusqu’à la rivière Sirba (région du Liptako : Torodi, Tonikware). Dès cette époque, les nouveaux maîtres de la région considérèrent les populations autochtones comme des populations asservies. D’autres agriculteurs


s’installèrent dans les villages, en tant que captifs introduits dans la région. Des formes d’assimilation sont apparues dans la région de Tamou (dans le hameau Gourmantché de Boutou), avec la formation de la lignée Foulmangani, issue de l’association de Peuls et de Gourmantchés. Les fortifications sont constituées de doubles murs de terre. Ces villages datent des XVII-XVIIIe siècles. Leur rattachement à une ethnie déterminée n’a pas été effectué clairement. L’une des hypothèses est qu’ils auraient été construits pour résister aux attaques des Peuls. On remarque que ces sites sont très abondamment plantés en baobabs (Adansonia digitata), arbre très utilisé dans l’alimentation et la pharmacopée locale. On peut penser à une interaction ancienne entre l’homme et la nature qui dépasse le simple cadre de la cueillette, en favorisant le développement d’une essence « utile ». Cela constituerait un exemple de proto-agriculture dans le domaine africain. Au cours du siècle dernier, toutes les populations de la région sont progressivement passées d’une économie reposant sur l’utilisation usufruitière des ressources naturelles sauvages (chasse,

pêche, cueillette) à une économie reposant sur l’agriculture, l’élevage et le commerce. L’ organisation sociale locale est complexe. Elle repose sur la distinction de différentes catégories socioprofessionnelles : il y a ainsi des lignages nobles et non-nobles, des populations libres ou « captives ». Une structuration en castes existe également au niveau professionnel, perpétuée par une tradition de liens endogamiques. On peut ainsi distinguer des castes de statut inférieur comme les bouchers, les tanneurs, les barbier-circonciseurs, et les musiciens. D’autres professions n’ont pas systématiquement un statut inférieur. Il s’agit des Chasseurs (gaw en songhaï) et Pêcheurs (sorko) qui se rattachent tous à un ancêtre commun, Faran Maka Bote. |Dynamique d’implantation récente| L’aire nigérienne est caractérisée par des dynamiques accélérées d’installation, avec une majorité de villages nouveaux, notamment dans la zone déclassée d’Ainoma (Senokonkédjé, Koffounu II). Ce phénomène territorial en cours dans la périphérie de la composante du Niger, est en voie de stabilisation et/ou stabilisé.

Le fond démographique Peul, dans sa composition, est fortement influencé par les mouvements migratoires qui alimentent sa croissance. Selon une récente étude Ecopas, 44% des éleveurs interrogés disent être venus s’installer dans la réserve à la suite de la grande sécheresse 1972-73. La disponibilité en ressources pastorales explique aujourd’hui l’attrait d’autres éleveurs provenant de la zone de Say ou des parties nord du pays pour cette région. Depuis les années cinquante la zone centrale du complexe n’est plus habitée. Les populations se sont retirées soit par déguerpissement soit par souci de bien être (rapprochement des voies de communication) sur les périphéries dont le peuplement s’est effectué de façon différentielle, sur une longue période. Le processus historique qui a vu l’occupation d’une bonne partie de la périphérie du complexe W, notamment la vallée du Niger, s’est poursuivie dans la plupart des villages riverains par des nouvelles implantations de pasteurs Peuls. Cette réalité est due aux mouvements migratoires, conséquences des grandes sécheresses des années 1970 et 1980 qu’ont connues les pays

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sahéliens. Ces années de crises ont jeté plusieurs communautés sur les chemins de l’exode en quête de zones d’accueil plus propices. Pour ces déplacés, la zone du fleuve, tout comme l’ensemble de la périphérie béninoise, constitue une des destinations préférées. Pourtant, dans un passé assez récent (moins de 40 ans) cette zone était hostile pour l’homme en raison de la proximité du fleuve, avec son corollaire de maladies liées à l’eau comme le paludisme, l’onchocercose et la bilharziose ; la présence d’animaux sauvages ; enfin, l’enclavement de la zone aggravé par la présence d’une végétation assez dense. Toutes ces raisons expliquent, à posteriori, la faible occupation humaine de cette partie de la réserve du W. Les nouvelles installations résultent, d’une part, de l’assainissement de la région du parc du W grâce à une opération menée par le gouvernement et la FAO à partir de 1973 pour l’éradication de la mouche tsé-tsé ; d’autre part, de la poussée migratoire des agriculteurs et des éleveurs des zones septentrionales, sinistrées par les grandes sécheresses des années 1970. L’opération d’assainissement a eu pour conséquence de mettre à disposition de

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nouvelles terres de culture, de pâturage et des zones de pêches permanentes. Les éleveurs minimisant les risques de maladies parasitaires et du changement brusque de régime alimentaire pour les bêtes rejoignent les pâturages de la bordure du fleuve. L’aggravation de la sécheresse a provoqué au cours des années 1980 la migration et l’installation des familles Zarmas venant pour la plupart de l’ouest du Niger. Ainsi, depuis de 1984, période de grande sécheresse au Sahel, de nouvelles communautés, venant de l’Est se sont installées dans la plupart des villages de la région. La population riveraine du parc s’est alors considérablement accrue au cours de la dernière décennie. A partir de 1985, la partie de la rive gauche du fleuve, au nord du parc, peu occupée jusque là, le sera complètement. En effet, un front pionnier va coloniser la partie située entre Falmey et Boumba. On constate une double extension dans l’espace et dans le temps de l’occupation des méandres du W, d’une part dans un sens nord-sud et d’autre part dans le sens sud-nord depuis le village de Boumba descendant vers Kirtachi.

|Population| Les populations vivant à la périphérie du W sont estimées à environ 405.000 personnes réparties dans 1.019 implantations humaines (villages, hameaux et campements) (ECOPAS 2003). La distribution spatiale de la population se caractérise par une zone à forte concentration représentée au Bénin par Banikoara (sud-ouest), et la vallée du fleuve Niger de Pekinga à Malanville (est) au Bénin et au Niger l’axe KotakiBelandé du Dallol Bosso au Niger (nord). L’étendue des villages est liée à leur rôle administratif (Kandi et Malanville au Bénin, Falmey, Belandé et Tiguey au Niger, Diapaga et Botou au Burkina), mais aussi aux raisons historiques qui ont contribué à une concentration de la population. Les zones périphériques de la partie béninoise du parc connaissent une densité humaine très variable. Elle est élevée dans la zone du fleuve : plus de 20 hbts/km² à Karimama et, si l’on exclut la surface occupée par le parc dans cette zone, on atteint une densité équivalente à celle de la ville de Malanville (Bénin) soit 24 hab./km2. Entre 1979 et 1992, le taux d’accroissement moyen annuel de la


population rurale dans la zone atteignait les 2,5%. En plus de l’accroissement 24 naturel de la population, la dynamique démographique actuelle est entretenue par de fortes immigrations de groupes ethniques divers, principalement Peuls, Zarmas et Haoussas. |Principaux groupes ethnolinguistiques | La région du W, riche en ressources naturelles, connaît depuis fort longtemps des mouvements de population et de contacts entre ethnies. Les groupes ethniques les plus importants dans cet espace sont : les Baribas, Mokollés, Dendis, au Bénin ; Gourmantchés au Burkina Faso ; Zarmas, Haoussas, Foulmanganis, Touaregs au Niger et Peuls dans les trois pays. On peut identifier de grandes zones avec aussi bien des groupes ethniques majoritaires que des populations présentant une certaine hétérogénéité ethnique. Ce mélange ethnique est plus accentué pour les villages de la vallée du fleuve (nord-est). Il est, en revanche mineur pour la partie éloignée (sud-ouest). A l’instar de la multitude de groupes ethniques, il existe aussi une grande diversité de langues parlées à la

périphérie de la réserve de biosphère du W. Ainsi, on note essentiellement dans les trois composantes le Bariba, Mokollé, Dendi, Peul dans la partie béninoise, le Gourmantché dans la partie Burkinabé ; le Zarma, Haoussa, Foulmangani, Tamachek dans la partie nigérienne et enfin le Fulfulde qui est parlé dans les trois pays. |Répartition spatiale des groupes ethniques| Périphérie de la composante nigérienne du W La périphérie nigérienne du W, les ethnies se répartissent entre les départements de Say (rive droite du fleuve), de Boboye et de Kollo (rive gauche du fleuve). Les communautés entretiennent naturellement des relations strictes de dépendance avec les zones protégées du complexe W. Elles sont pour la plupart tributaires de l’exploitation des ressources agricoles, pastorales, forestières, cynégétiques et hydrauliques du Complexe. Ainsi, sur la rive droite du fleuve (département de Say), entre le XVIIIe et XIXe siècle, l’espace du parc correspondait à un no man’s land entre

le Gourma et le Borgou. Il fait partie de ces espaces intermédiaires où les pouvoirs et les peuplements se diluaient et ont souvent offert aux Peuls des axes migratoires privilégiés. Les éleveurs Peuls empruntaient donc ce couloir migratoire de l’Ouest-Niger mais qui se trouvait plus au nord, du fait de l’insalubrité pastorale des savanes au sud de Torodi. De ce fait, à cette période tout le Gourma était infesté de glossines. Il en était de même de la partie méridionale des plateaux, entre le fleuve et le Dallol Bosso. Au cours de la période coloniale, le peuplement se densifie. Les poussées de transhumance méridionales demeuraient donc faibles et se justifiaient d’une part, du fait de la présence de maladies animales endémiques et de l’autre la non surcharge pastorale des zones septentrionales. Cependant, au cours de la période coloniale, le peuplement se densifie. Les Gourmantchés, assiégés à Botou et dans les falaises du Gobnangou, étendent leur habitat le long des vallées. Ces deux processus contribuent à un assainissement des savanes pour l’élevage. Des pasteurs Peuls viennent s’installer à côté des anciens centres guerriers de Torodi, Gueladjo et d’autres

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petites chefferies. L’histoire du peuplement retient que les Gourmantchés à la différence des autres populations ne sont pas arrivés mais revenus sur un espace qu’ils avaient occupé auparavant. Ils furent progressivement repoussés vers le sud par les Peuls qui fondèrent le royaume du Liptako vers 1709 avec pour capitale Dori. Du Liptako, ils joignirent d’autres clans tels que les Bary et les Sow. Ces différents clans vécurent en entités indépendantes les unes des autres jusqu’au moment où ils réussirent sur la base de la religion musulmane à créer l’Etat théocratique de Diagourou. Ainsi, de Diagourou, ils descendirent vers le sud aux dépends des Gourmantchés. Les Bittinkobés occupèrent Lamordé, Ganki et Diouforé, les Torobés occupèrent Torodi, les Baribés et les Silloubés occupèrent Tamou et enfin les religieux pacifiques Modibadiés (Cissé) fermèrent les vagues de migration en s’installant à Say. Ces clans fondèrent les cantons (chefferies) qui serviront d’appui à l’administration coloniale française (Amadou 2008). Les Peuls, Gourmantchés et Foulmanganis vont ainsi occuper des

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territoires importants dans les Cantons de Tamou, Say, Gueladjo et Torodi riverains du parc du W. Sur la rive gauche du fleuve, dans les départements de Boboye et de Kolo, l’histoire du peuplement du plateau du Boboye (Fakara) est également liée aux conquêtes hégémonistes peules de l’ouest du Niger. Ces mouvements du début du XIXe siècle ont été fortement déclenchés et entretenus par le Jihad (guerre sainte) de Ousmane Dan Fodio. A la différence de la rive droite du fleuve on note la forte présence du groupe ethnique Zarma. Les Haoussas, venus de l’est du Niger, auraient occupé les premiers, la vallée du Dallol Bosso entre le VIe et VIIe siècles, vers les XIIIe et XIVe siècles, a lieu l’expansion de l’empire Sonraï (Beauvilain, 1977). Ils occupent alors la vallée. Trois ethnies se partagent le Boboye jusqu’au XVIIe siècle. Il s’agit des Goubeys, issus du métissage Haoussa-Sonraï au nord ; les Tulmeys (sous groupe Haoussa) et les Kallés (sous groupe Sonraï) au sud (SPPE, 1994). A la fin du XVIIe siècle, les Zarma, chassés du Mali et conduits par Malibéro, envahissent la région au sud-ouest du

Niger (c’est-à-dire l’actuel Zarmaganda) et le Boboye. Les chefferies Zarma de Yéni et Kiota sont fondées au XVIIIe siècle. C’est à cette période qu’avait lieu la pénétration peule dans la vallée. Des groupes peuls venant de la région de Say, attirés par les riches pâturages, remontent pacifiquement le Dallol. Sous la pression des Touaregs, ils s’installent, avec des Peuls de Lamordé, dans la vallée du Boboye. Boubacar Loudoudji, grand marabout, compagnon de route d’Alpha Mohamed Diobo (Say) apporte un grand changement politico-religieux dans la région par la conversion des Zarmas à la religion musulmane et la création de la chefferie de Birni N’Gaouré. Suite à l’appel à la guerre sainte d’Ousmane Dan Fodio (Sokoto), les Peuls, commandés par Boubacar Loudoudji, se soulèvent en 1804 et dominent les Zarmas. Périphérie de la composante béninoise et burkinabé La périphérie de la composante béninoise se caractérise par un mélange de groupes ethniques qui s’ajoutent aux autochtones. Dans le Nord du pays, qui reste une zone de contact avec la


République du Niger, on constate une forte concentration de Haoussas le long du fleuve et des Peuls installés dans les campements à la limite du parc du W. En descendant vers le Sud du pays, on rencontre trois zones caractérisées par une certaine homogénéité ethnique avec toutefois une présence constante des Peuls. Bien qu’essentiellement dominée par les groupes Dendis (une fraction du groupe Zarma), Mokolés et Batonnus, l’homogénéité ethnique de la périphérie béninoise diminue avec la présence massive des éleveurs Peuls qui se sédentarisent et des immigrés travailleurs Gourmantchés et Zarmas venant du Burkina et du Niger. La périphérie burkinabé du parc présente une certaine homogénéité ethnique avec une prédominance des Gourmantchés et de pasteurs Peuls et quelques groupes Zarmas. |Vestiges historiques culturelles| La région du W a joué depuis des temps immémoriaux un rôle attractif pour les nombreuses populations préhistoriques et historiques qui s’y sont succédé. Les sites archéologiques, les vestiges des sépultures «royales», les enceintes

fortifiées en pierre et les lieux sacrés sont le signe de la diversité culturelle qui caractérise ce milieu de façon ininterrompue depuis 200 000 ans. La partie nord de la réserve est marquée par la présence de nombreux artéfacts témoignant d’une occupation humaine ancienne. Après les bifaces de pierre taillée du Paléolithique apparaissent les outils plus travaillés et complexes du Néolithique : pointes et haches de pierre polie, céramiques, et ce jusqu’à la période protohistorique et l’histoire récente, sont disséminés un peu partout sur le W. Environ une centaine de sites archéologiques ont été identifiés dans la seule partie nigérienne du W par les spécialistes de l’Institut de Recherche en Sciences Humaines de l’Université Abdou Moumouni. Lors d’un inventaire, une équipe d’archéologue a découvert en 2002 la statuette de terre cuite protohistorique, baptisée «Vénus du W », emblème de la présence séculaire et de la légitimité de l’Homme avec sa culture. |Relation du parc avec les différents acteurs : des rapports diversifiés| On peut voir à ce niveau deux types de rapports, en effet le parc est à la fois

un espace pourvoyeur de ressources naturelles de toute sortes (bois d’œuvre, ressources fourragères, chaumes, espèces mellifères) et en même temps un espace de conflit. Espace pourvoyeurs de ressources La réserve de biosphère du W joue un rôle très important dans la survie des populations riveraines. En effet, les produits de cueillette, prélevés par les femmes à la périphérie du parc et souvent à l’intérieur même de la réserve, permettent à un certain nombre de ménages de traverser la période de soudure sans grande difficulté. Une partie des prélèvements est autoconsommée tandis que l’autre est destinée à la vente. Cette dernière donne suffisamment de revenus aux femmes pour qu’elles puissent satisfaire une partie de leurs obligations sociales (mariage, baptême, déplacement, etc.). D’autre part, l’abondance au niveau du parc du W et de sa périphérie des ressources naturelles et l’équilibre de l’écosystème suscitent la convoitise des populations autochtones et immigrées. Malgré les interdictions liées à son statut de zone protégée, le parc National du W du Niger n’a pas été totalement

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exempt d’utilisation par la population locale (nigérienne ou des deux Etats voisins). La réserve constitue aussi pour les pêcheurs, un réservoir de ressources halieutiques. En période de crue, les mares se trouvant dans les plaines d’inondation sont remplies. Ces mares dont la plupart sont semi permanentes avec leur végétation constituent aussi des frayères pour plusieurs espèces de poisson. Pendant le retrait des eaux, le volume des mares se réduit et les poissons sont piégés. La plupart de ces mares sont semi permanentes, et à partir du mois de mars, elles tarissent et les poissons meurent. Certains pêcheurs arrivent à faire des prélèvements mais de façon frauduleuse (Amadou, 2006). Les prélèvements de bois de service et de paille sont aussi très importants. Presque toutes les toitures des cases des villages sont renouvelées chaque année à cause des termites et de l’humidité. Pour la fauche de la paille, les villageois adressent en général une demande au service des eaux et forêts. L’exploitation du Echinocloa stagnina (bourgou) est importante dans l’alimentation des bœufs d’embouche. La récolte du miel se fait aussi

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frauduleusement à l’intérieur de la réserve et souvent de façon artisanale, ce qui provoque des incendies. Tous les villages situés à la périphérie immédiate utilisent, à des degrés divers, la réserve pour satisfaire leurs besoins. Ainsi l’exploitation des ressources du parc se fait-elle en général d’une façon frauduleuse, celle-ci assure cependant la survie de cette population riveraine. |Espace de conflit| Les rapports anciens mentionnent l’existence d’un braconnage (Fiaisson, 1937) qui est passé du statut d’activité vivrière à celui d’activité lucrative avec des réseaux organisés de braconniers opérant aussi bien à partir du Niger qu’à partir du Bénin. Depuis les années de sécheresse de 1970 et 1980, le pâturage illégal se développe de plus en plus et devient extrêmement préoccupant pour l’équilibre de l’écosystème. Ces activités illégales se sont d’autant plus développées qu’elles ont bénéficié d’un certain laxisme dans l’application de la réglementation, entre l’indépendance et le milieu des années 1980. Grâce à des mesures énergiques de contrôle, de sensibilisation et de

développement, entreprises depuis 1990, on assiste à une reconstitution de la diversité biologique animale avec notamment le retour des espèces comme le lycaon, le guépard, l’expansion de nombreux herbivores, etc. ainsi qu’à une reprise des formations forestières. Depuis 1993, les statistiques fournies par le PNWN attestent d’une forte diminution du braconnage et du pâturage illégal. En raison de l’importance socioéconomique et écologique des ressources de la réserve, la pression anthropique qui s’exerce sur le parc est importante. Elle menace gravement son intégrité du fait des activités destructrices qui y sont menées telles que le braconnage, la chasse, le pâturage, la transhumance, les feux de brousse, la pêche. Les impacts de ces activités pourraient conduire à la diminution de la diversité biologique. Bien que l’absence de données fiables limite considérablement l’analyse, le braconnage est souvent considéré comme étant une des principales causes de la raréfaction voire de la disparition complète de certaines espèces dans le parc. Le danger de cette pratique réside surtout dans l’utilisation de toute une gamme de poisons et d’armes dont les


effets sont dévastateurs. C’est ainsi que dans la pratique de la chasse traditionnelle, les armes utilisées sont certes très peu destructrices, mais elles comportent le risque de favoriser la propagation de maladies par suite d’infection d’animaux blessés ou tués et abandonnés. De plus, du fait qu’elle utilise une mise à feu préalable de la brousse pour débusquer le gibier, elle est souvent à l’origine de feux non contrôlés portant sur de très grandes surfaces. L’utilisation d’armes à feux nuit à la diversité biologique car elle tue en général sans discernement mâles et femelles. Les pressions s’exercent dans toutes les parties du parc, mais plus intensément le long de la Tapoa au nord-ouest, où sont implantés plusieurs hameaux, le long de la Mékrou, au Sud dans la zone de Patélogou, dans la partie est où l’on observe l’installation de plusieurs éleveurs venant de Kollo et de Niamey. Une dizaine d’îles faisant partie intégrante du parc sont complètement occupées. La présence massive d’herbivores peut entraîner une consommation importante de biomasse dont ne peut plus bénéficier la faune sauvage. Une autre conséquence du pâturage dans

la réserve consiste en la disparition régulière des herbacées consommées par le bétail, avec en revanche un état de conservation relativement satisfaisant de la végétation ligneuse en dehors des aires cultivées. De plus, la présence du bétail et des pasteurs, en perturbant les habitats fauniques, peut provoquer la migration des animaux sauvages vers des zones moins productives ou moins sécuritaires. Il faut aussi noter que le bétail, généralement peu suivi sur le plan sanitaire, peut être un vecteur important d’épizootie pouvant décimer la faune sauvage. Ce fut le cas pour plus de 75 % de buffles du parc morts entre 1981 et 1982 de peste bovine, soit environ 600 à 800 têtes. Une autre conséquence de la présence du bétail est la coupe des arbres fourragers par les pasteurs pour l’alimentation de leur troupeau lorsque les herbages sont insuffisants. L’importance du bétail domestique à l’intérieur du parc peut aussi interdire l’accès aux animaux sauvages aux points d’eau en saison sèche. Les feux sauvages constituent une pratique très dangereuse car ils surviennent à des périodes inopportunes et sur des milieux biologiques très fragiles, sans

aucun respect de mise à feu. Ils peuvent avoir lieu en toute période, mais sont cependant plus fréquents en saison sèche chaude et en début de saison des pluies. Au parc du W, les feux sauvages les plus fréquents proviennent des activités de braconnage et de pâturage : les braconniers allument les feux afin de rabattre le gibier vers des zones propices ou pour dégager le combustible herbeux qui gêne la visibilité ; l’éleveur met le feu pour éloigner les fauves ou pour faciliter l’activation des repousses appréciées par son bétail. Si l’exploitation des troncs et des branches peut avoir pour conséquence la dégradation des paysages et la diminution de la diversité biologique, l’exploitation à des fins alimentaires et médicinales conduit souvent à la mort des plantes à la suite à de prélèvements excessifs et continus. L’un des premiers effets de la mise en culture est la transformation des paysages avec pour conséquence la diminution de la diversité biologique (perte de la diversité écosystémique et spécifique), la fragmentation et l’isolement des habitats fauniques, la perturbation des dynamiques hydrologiques et l’amenuisement des ressources forestières et pastorales.

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3 CREATION DU PARC ET DYNAMIQUE DE LA TRANSHUMANCE DANS LA ZONE

Amadou Boureima, Ali Mahamane, Moussa Barage, Amadou Oumarou, Mounkaila Harouna, Mahamadou Sani Moussa, Soumana Douma, Iro Dan Guimbo et Moustapha Mamadou Kone.

|Création du Parc| Dès 1900-1905, la sécurité et l’interdiction des pratiques esclavagistes par le pouvoir colonial en Afrique Occidentale Française entraînent l’expansion de l’habitat et l’accroissement des implantations humaines dans cette contrée du W surtout après la sécheresse de 1914. Des tentatives pionnières se manifestèrent vers la Mékrou (sans l’atteindre), essentiellement à partir de Botou. Des campements saisonniers pour la chasse ou la culture sous pluies furent créés, mais ils furent parfois très éphémères en raison des contraintes naturelles (maladies) (Dominique D, 2005). Mais l’abondance de la grande faune sauvage dans ce vaste domaine de savane sahélienne a continué de susciter l’afflux

des populations. Il constitue déjà à l’époque un patrimoine exceptionnel, dernier refuge en Afrique de l’Ouest des énormes troupeaux d’antilopes, d’éléphants, de buffles. Cette abondance de la grande faune sauvage dans le W n’avait pas échappé aux administrateurs de l’époque et un classement intervint en 1925, point de départ d’une longue histoire, jalonnée de découpages aux statuts variés tels que celui de « réserve totale de faune », ou encore de « forêt classée ». Ce qui n’était qu’un espace réservé aux chasseurs par décision de l’administration coloniale, constitue désormais un élément majeur du Patrimoine Africain, vecteur d’intégration (Amadou B, 2008). On peut sans doute regretter que la création de cet ensemble de zones protégées ait entraîné le déplacement des populations et des rares villages encore présents jusqu’en 1954. Cette période, marque ainsi le classement définitif des trois zones protégées de la RTB W en « parcs nationaux de la RTB W du Niger », couvrant une superficie de 10.300 km² et constituant l’actuel « parc régional transfrontalier de la RTB W ». La création du parc National du W du Niger est le résultat de la lutte d’éminents

scientifiques européens pour réglementer la chasse et créer des zones de refuge pour la faune sauvage dans les colonies. Ainsi entre 1952 et 1953, le complexe du W est délimité et classé. En 1954, un décret pris par le Gouverneur de l’Afrique Occidentale Française (AOF) crée le parc national du W du Niger. Cette création s’est traduite dans les faits par le déplacement des villages et populations installées dans ce domaine et l’interdiction d’accès pour la chasse. Elle répondait ainsi à un double objectif régional et national de conservation de la diversité biologique et animale. Les principes de conservation était pleinement appliqués sur une superficie d’environ 10000 kilomètres carrés répartis entre le Niger (220.000 ha) le Burkina Faso (250.000 ha) et le Bénin (550.000 ha), (Boluvi M G, 2005). Puis plus tard, et dans l’optique de contenir la pression anthropique (agriculture, pâturage, chasse/braconnage, coupe de bois, etc.) sur le parc du W, la réserve totale de faune de Tamou fut créée par décret n° 62-188/MER du 18 août 1962. Elle couvre une superficie d’environ 147 000 ha et est adjacente au parc Natio¬nal du « W» du Niger auquel

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elle sert de zone tampon. C’est une zone qui recèle des potentialités agro-sylvopastorales. Et enfin la Réserve Partielle de Dosso (306 000 ha), avec au nord, le plateau de Kouré (75 000 ha) constituant un des derniers sanctuaires de girafes de l’Afrique de l’Ouest, a été instituée par le décret 62-189 du 08-08-62 : limitée au sud et à l’ouest par le fleuve Niger, au Nord par la piste de Kirtachi à Hilikoye Kouara jusqu’à son croisement avec la route de Dosso à Gaya, situé 20 km au sud de Dosso et à l’est par la route de Dosso à Gaya (Amadou B, 2006). Le parc comme la réserve totale de faune de Tamou constituent des zones définies par l’Etat pour la préservation des ressources forestières. Ces dernières sont considérées comme des ressources naturelles faisant partie du patrimoine de la Nation. L’Etat est responsable de la mise en valeur durable et équilibrée de ces ressources. |Transformations récentes des zones périphériques du parc| Contexte climatique actuel et effets des sécheresses au sahel Depuis les années 1970, les premiers

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signes des perturbations de l’équilibre des milieux naturels liés au changement climatique sont observés dans la réserve de biosphère du W et sa périphérie. En effet, les paramètres décisifs de la biodiversité sont affectés par les changements climatiques : périodes de reproduction ou de migration, durée des saisons de croissance, répartition des espèces et densités de peuplement végétal, fréquence des infestations parasitaires et des maladies. Le contexte climatique actuel qui se traduit par une pénurie d’eau, et la dégradation de la qualité de ces ressources en eau met à mal ce milieu. En effet, la réduction des précipitations et l’augmentation de l’évaporation liée à l’élévation des températures provoquent la concentration des animaux sauvages autours de rares plans d’eau, qu’ils doivent souvent partager avec les bêtes domestiques - ce qui perturbe la quiétude de la faune du W. A partir des années 1970, on a assisté à d’importantes vagues de migrations agricoles en direction du département de Say. Migrations spontanées d’un côté, organisées de l’autre, les familles victimes des sécheresses et aussi de l’épuisement des terroirs surabondamment cultivés du nord de la région de Tillabéri

(Zarma¬ganda et Kurfey) sont déplacées dans la région de Say. En 1960, on estimait la densité de Say à environ 3 hab. /km2, un quart de siècle plus tard (1988) elle est de 12 hab. /km² pour une moyenne nationale de 5,7 (Amadou B. 1994). En 1976, la partie est de la réserve totale de faune de Tamou (76.000 ha) a été déclassée pour, officiellement, permettre une installation des populations du nord (Zarmaganda). Depuis lors, la population du Canton de Tamou a été multipliée par 3 entre 1974 et 1988. Elle est ainsi passée de 7.085 habitants à 36.679. Cette période a été marquée par un courant migratoire assez fort qui s’est traduit par une mise en culture des terres et une exploitation de type minier des ressources. Les conséquences du déclassement de la réserve de faune, ont été désastreuses pour les Peuls et les Foulmanganis. Les cellules pastorales ont été fragmentées faisant place à des enclaves agricoles et les parcours habituels des bergers perturbés. Les populations immigrées, agricoles dans leur écrasante majorité, ont reproduit le même système d’exploitation des terres qu’au nord et les Peuls considérèrent ce système comme dévas-


tateur. Du reste, la cohabitation entre les deux communautés est conflictuelle, surtout en période de culture (Amadou B. 1994). |Changement de Statut de la périphérie : d’une zone pastorale à une zone agropastorale| L’un des faits majeurs qui ont marqué le début du processus de création de zone protégée du W est le caractère de protection stricto sensu, comme l’atteste du reste le décret de 1962 qui « ignore » délibérément l’existence des habitants de la région et leurs us et coutumes ; plus encore le décret 1954 l’instituant comme zone protégée formelle, un langage qui ne s’adresse qu’aux personnes susceptibles d’en comprendre les objectifs, à savoir la population expatriée de Niamey souhaitant observer la grande faune en automobile. Ce type de situation est généralement dénoncé comme un effet absurde de l’étatisation, voire comme une politique de conservation mal engagée. Ce caractère protectionniste stricto sensu a évidemment des conséquences sur le mode de vie de la population locale. La zone du plateau et particulièrement la Commune rurale de Tamou est reconnue comme le lieu des déplacements

anciens des éleveurs du nord exclusivement, qui allaient à la recherche du pâturage au sud. C’est une zone à vocation pastorale et donc une zone de convergence des troupeaux venant de la région de Tillabery et de Dosso mais aussi de forte mise en valeur agricole depuis trois décennies. En 1976, la partie nord-est et est de la RTT change de statut : elle n’est désormais plus classée. Au contraire, elle est cédée aux émigrés du nord, en terre agricole, alors même qu’il s’agissait d’une zone de pâturage par excellence. De fortes perturbations s’ensuivent. Au fil du temps, la réduction et la dégradation des zones de pâturages dans l’ensemble de la zone périphérique du parc du W devient la préoccupation majeure des éleveurs. Cette crise concerne, à des degrés différents, les trois composantes de la réserve du W. Dans le cas du Niger, cette situation contraint souvent les éleveurs à descendre plus au sud à la recherche de pâturages et signifie même souvent une migration définitive pour certains. La croissance sans précédent du cheptel reconstitué après les deux grandes sé-

cheresses de 1973 et 1984 au Niger fait de la transhumance du bétail une activité importante. Les effectifs sont importants : on a dénombré au cours d’un survol aérien (effectué par l’UICN en 1994) : 30 000 à 50 000 têtes de bétail dans le parc du W ; en, 2003, 1171 troupeaux de bovins (soit 101 309 animaux) ont été dénombrés dans le complexe WAPOK et sa périphérie proche. Ces chiffres rendent compte des résultats positifs des campagnes de vaccination menée par les Etats et surtout de l’attrait exercé par la zone, sur le plan pastoral, comparativement aux autres zones du Niger ou du Burkina Faso. Les quelques zones de pâturage à la périphérie qui accueillent ces troupeaux à Tamou sont de plus en plus surchargées et présentent des signes de dégradation évidents. De plus, ces espaces pastoraux se réduisent progressivement au profit des terres agricoles. On peut synthétiser les effets majeurs (des effets observables aujourd’hui) de ce que nous venons de présenter comme suit : - changement de statut de la zone d’une

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vocation pastorale à celle d’agricole-pastorale ; - difficulté de mouvements pour les éleveurs en raison du contrôle strict exercé sur les ressources. Ils se trouvent donc peu à peu contraints à la sédentarisation ; - l’incursion dans le parc du W devient une solution incontournable pour beaucoup d’éleveurs. |Cohabitation difficile entre les agriculteurs et les éleveurs transhumants| Les flux migratoires de la population provenant du nord du Niger, une population qui bénéficie de conditions favorables pour l’accès aux ressources hydriques, commencent à fragiliser les équilibres entre les différents groupes ethniques (en raison de la divergence d’intérêt). En effet les besoins de nouvelles terres agricoles se manifestent par l’avancée d’un front pionnier dans les zones de pâturage. A cela vient s’ajoute une pluviométrie aléatoire qui est le propre du milieu sahélien. Les stratégies d’adaptation des agriculteurs sont restées immuables : extension des aires de culture avec un

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usage privatif ou tout au moins contrôlé de certaines ressources naturelles (coupe de fourrage ou des résidus de cultures, enclos de maraîchage autour des points d’eau…). Cette avancée du front agricole est généralement source de conflit dans les zones agropastorales. Remarquons que la fréquence des conflits entre agriculteurs et éleveurs augmente dans la zone du plateau de la réserve totale de Tamou (RTT), malgré l’absence de colonisation par les premiers des zones limitrophes des espaces de pâturage. Cette fréquence relativement élevée serait liée à l’existence chez les éleveurs autochtones d’un sentiment de spoliation de terres de pâturages par les allogènes. En effet, les éleveurs pensent que l’installation de ces agriculteurs a fortement altéré leur gestion de l’espace et des pâturages. Alors pour asseoir leur droit de propriété sur les allogènes, les premiers occupants développent des stratégies qui aboutissent à la création de villages de la zone habités par plusieurs ethnies, généralement dans des hameaux éparpillés sur l’ensemble des terroirs, mais toujours rattachés au village mère. Il s’agit d’une sorte de dynamique d’occupation de l’espace sciemment organisée par les

premiers occupants et qui permet l’installation et le maintien de liens de dépendance politique et sociale. Dans la zone du fleuve, les agriculteurs, dans leur logique d’occupation incontrôlée de terre agricole, ont investi des terres de terroirs voisins, suscitant ainsi des réactions de désapprobation et des conflits ouverts inter-terroirs. Ceux-ci opposent les terroirs de Bossia à Brigambou et Sakalagonga. Le litige avec le village de Sakalagonga persiste encore du fait que ses habitants ont occupé des terres agricoles de Boscia : ils veulent en effet les annexer à leur terroir. Quant au litige avec Brigambou, il a fait l’objet d’un règlement coutumier devant le chef de canton de Boboye, qui confirma le droit de Boscia sur la portion litigieuse du fait que ses fondateurs seraient les premiers occupants des lieux. Dans cette zone du fleuve, les conflits entre les agriculteurs et les éleveurs sont très fréquents du fait que le plateau surplombant les terres agricoles de la vallée du fleuve est très utilisé par les éleveurs locaux et étrangers. Une forte concentration d’animaux est observée sur le plateau pendant la période des transhu-


mances et en saison des pluies, avec pour conséquence la multiplication des risques de dégâts sur les champs de cultures. Cependant, des cadres de concertation et de règlement des conflits existent et se redynamisent aujourd’hui dans tous les secteurs de la réserve du W et sa périphérie. Les chefs de villages, les maîtres des eaux, les imams, les rouga, les garso, les gardiens des lieux de culte (Boscia et Karey Kopto) sont les détenteurs du pouvoir de décision en matière de la vie sociale et économique. Leur pouvoir dont la légitimité est unanimement reconnue reste incontournable pour la mise en place d’un cadre représentatif de concertation et de règlement durable des conflits liés à la gestion et l’utilisation des ressources naturelles renouvelables. |Impacts de la transhumance sur le parc | La pratique de la transhumance vers le parc du W, les périphéries protégées et les zones écologiquement fragiles demeure une menace pour son équilibre écologique. Elle est également à l’origine de la remise en cause des dispositions de certains accords communautaires, de

l’accroissement des conflits entre transhumants et conservateurs d’une part et entre transhumants et exploitants agricoles de l’autre. L’état du bétail dans l’espace pastoral de Kotchari au Burkina en début de saison pluvieuse est révélateur de la dégradation du pâturage dans cette zone, alors que celle-ci voit passer des milliers de bovins en transhumance entre le Niger et le Bénin. Ainsi, les conséquences de cette pratique sont observables sur plusieurs plans : - écologique : la transhumance provoque une dégradation des écosystèmes sur les axes de transhumance et dans les zones d’accueil : elle est liée à la surexploitation des ligneux fourragers tels que Pterocar¬pus erinaceus, Afzelia africana et Khaya senegalensis pour nourrir leurs animaux, une exploitation qui obéit à la nécessité de suppléer au déficit quantitatif et qualitatif des pâturages herbacés en fin de saison sèche sur les axes et dans les zones d’accueil. La dégradation des écosystèmes est également liée à l’allumage des feux pastoraux qui favorisent le développement de jeunes repousses de graminées vivaces très recherchées par le bétail, la mauvaise gestion et de

la surcharge des aires de pâturage dans les zones de transit et d’accueil, du pâturage dans les zones protégées (ceci en effet perturbe la tranquillité des animaux sauvages), à une concurrence pour l’utilisation des ressources alimentaires, à la dégradation de l’habitat et de la faune (envasement des mares et des cours d’eau, tassement du sol), enfin et accessoirement au braconnage pratiqué par les transhumants. - zoo-sanitaire : la transhumance provoque un risque épidémiologique, le troupeau transhumant peut répandre rapidement des maladies contagieuses dans ses déplacements, ce qui est susceptible de mettre en péril le cheptel de régions entières. C’est pour cette raison que toutes les réglementations nationales, les accords bilatéraux et communautaires font obligation à l’éleveur transhumant de se munir d’un certificat de vaccination du troupeau ou du certificat international de transhumance (CIT). Le non respect de la réglementation zoo-sanitaire par les transhumants constitue le risque épidémiologique majeur de la transhumance. Le contact entre le bétail et les animaux sauvages, principalement aux points

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d’eau en saison sèche, mais aussi dans les zones de pâturage, peut être à l’origine de la transmission de maladies. Certains transhumants signalent des cas de maladies contractées par leur bétail dans les zones d’accueil. Il s’agit de la trypanosomiase et d’autres parasitoses auxquelles les zébus sont très sensibles ; - zootechnique : les impacts de la transhumance sur le plan zootechnique se traduisent par une réduction drastique de l’espace pastoral due à l’extension des terres cultivées et de l’emprise croissante des agriculteurs. Ces derniers ont souvent recours à des pratiques comme le brûlage des résidus culturaux restés sur les champs dans le but d’éloigner les éleveurs, l’obstruction des pistes à bétail et l’occupation des zones d’accueil par les champs ou des zones de chasse ; - socio-économique : les problèmes socio-économiques engendrés par la transhumance se résument aux dégâts causés par le bétail sur les cultures et les récoltes, cela reste la principale cause de conflits entre agriculteurs et éleveurs, les vols de bétail, les conflits quelquefois mortels entre les transhumants et les populations

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des zones de transhumance ; - politique et réglementaire : la mise en œuvre des textes réglementant la transhumance rencontre d’énormes difficultés sur le terrain. En conséquence, on observe la méconnaissance et/ou le non-respect par les éleveurs transhumants des réglementations nationales et communautaires ; l’insuffisance d’information et de sensibilisation des éleveurs transhumants sur la conduite à tenir lors de la transhumance ; l’occupation par les autochtones des pistes à bétail et de certaines zones officielles d’accueil ; l’abattage, non réglementaire ou «vaccinations » des animaux domestiques qui paissent illégalement dans le parc national du W côté Bénin ; la suspension de la transhumance transfrontalière par le gouvernement de la République du Bénin sur toute l’étendue du territoire national, compte-tenu des problèmes créés. La pratique de la transhumance et le pâturage illégal dans le parc du W constituent une évidente menace de disparition pour la faune sauvage et son habitat. A l’opposé, les éleveurs sont victimes de taxes «sauvages» au cours de la transhu-

mance de la part des forces de l’ordre, de prédation des animaux domestiques par les fauves tant à l’intérieur que dans la périphérie, et enfin d’abattages punitifs par les gardes forestiers des animaux qui paissent illégalement dans le parc.


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4 EXPLOITATION DES RESSOURCES DU BASSIN DU PARC W

Amadou Boureima, Ali Mahamane, Moussa Barage, Amadou Oumarou, Mounkaila Harouna, Mahamadou Sani Moussa, Soumana Douma, Iro Dan Guimbo et Moustapha Mamadou Kone.

|Ressources naturelles du bassin du parc| Le bassin du parc du W dans sa partie nigérienne renferme l’une des plus riches diversités biologiques de l’Afrique de l’ouest. Elle est liée à la variété des paysages et des écosystèmes. En raison des caractéristiques édaphiques et orographiques, différentes formations végétales se succèdent en constituant une mosaïque de paysages le long de toposéquences (Ambouta, 2002). Les zones humides de la réserve de biosphère, constituées de fleuves (50 km), rivières, plaines d’inondations, mares, sources et dallols, ont une très grande importance pour le maintien de la diversité génétique. La zone centrale est une savane boisée, c’est à dire une végétation constituée d’arbustes et d’arbres clairsemés. La

savane arbustive et les galeries forestières représentent 93% de la formation végétale du parc du W. Dans la zone périphérique, les principales unités d’occupation des terres sont: les champs cultivés, les jachères, les brousses tigrées et les prairies aquatiques dans la vallée du fleuve Niger. |Principales formations végétales| Les espèces végétales ont une répartition spatiale liée aux caractéristiques pédologiques et la disponibilité en eau. On y distingue (Mahamane et al. 2006 a) : Les formations à Combrétacées qui sont caractéristiques des plateaux cuirassés du Continental Terminal. Elles comportent essentiellement des Combretum micranthum, Combretum nigricans, Acacia ataxacantha et Guiera senegalensis. Les formations buissonnantes se développent essentiellement sur les sols perméables et peu fertiles des zones sableuses des plateaux. Elles couvrent de grandes superficies, surtout dans la zone centrale et une partie de la zone de transition (réserve de Dosso). Les espèces dominantes sont : le Combretum micran-thum, le Combretum nigricans, la Dicrostachys glomerata, la Guiera se-

negalensis, la Piliostigma reticulatum, le Crossopteryx febrifuga, etc …. On peut y rencontrer quelques arbres atteignant 10 m de hauteur dont le Burkea africana, l’Anogeissus leocarpus le Terminalia avicennoïdes. La strate herbacée comprend surtout Loudetia togoensis, Ctenium newtoni, et Hyparrhenia involucrata. Les parcs à épineux : ces formations se rencontrent principalement sur les sols ferrugineux tropicaux sableux des vallées sèches au pied des plateaux. Les principales espèces qui les constituent sont les Balanites aegyptiaca et l’Acacia senegal. Les formations de galeries forestières sont constituées de galeries à feuillage caduc, de galeries semi-sempervirentes et enfin de galeries sempervirentes. Les parcs agro forestiers sont des formations très ouvertes parce qu’elles sont nécessairement influencées par les défrichages et les sarclages. Les parcs constituent une particularité botanique de la réserve de biosphère de la région du W avec la présence d’importants peuplements presque purs d’Adansonia digitata et de Faidherbia albida, de Vitellaria paradoxa et Borassus aethiopum. Les parcs à Adansonia digitata sont généralement situés sur les parties élevées des plateaux

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dans des zones de savane boisée (dans l’aire centrale) et sur les rives et îles du fleuve Niger. Les baobabs se trouvent généralement dans les villages anciens de la périphérie et dans les espaces du noyau central qui ont fait l’objet de déguerpissement. En raison de l’utilisation importante de ces arbres dans l’économie et dans l’alimentation humaine (fruits, feuilles, écorces), on peut penser que ces concentrations, souvent monospécifiques, sont le résultat d’une action anthropique ancienne ayant favorisé la germination et le développement de cette essence. Les parcs à Acacia albida qui généralement constituent de véritables parcs monos¬pécifiques, s’étendent dans toute la zone de transition sur les sols agricoles. Espè¬ce agroforestière par excellence, l’Acacia albida contribue à la fertilisation des sols et à l’alimentation. Les parcs à Borassus aethiopum se situent principalement dans les zones inondables de Boumba et de Karey Kopto. Les parcs à Vitellaria paradoxa se retrouvent à Boumba (vallée du Dallol Bosso). |Ressource en eau| La réserve de biosphère du W dans sa

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partie nigérienne dispose de plusieurs cours et plans d’eau exploités par les populations riveraines. Le fleuve constitue la limite septentrionale du parc. Dans sa partie nigérienne le parc est délimité par deux affluents importants du Niger : la Tapoa et la Mékrou. Il comprend donc deux bassins versants principaux : celui de la Tapoa au nord-ouest et celui de la Mékrou au Sud-est. Ces deux bassins sont séparés par une dorsale qui traverse le parc National du W dans sa partie nigérienne dans sa plus grande diagonale (Ambouta, 2002). Hormis le fleuve Niger, le réseau hydrographique dans son ensemble n’a qu’une activité saisonnière. L’écoulement de la Tapoa et de la Mékrou ne se fait que de la saison des pluies au mois de décembre (6 mois/an). En dehors des rivières, le parc National du W dans sa partie nigérienne renferme également 32 mares permanentes et semi-permanentes, naturelles ou artificielles. Les pluies ruissellent vers le fleuve assez rapidement en raison d’une dalle de granit continue sous-jacente qui limite l’infiltration. Cette précarité des ressources hydriques dans le parc constitue une limite importante à l’exploitation du milieu par les

grands herbivores. C’est pourquoi 10 mares artificielles ont été creusées. Six d’entre elles gardent de l’eau jusqu’en avril. Sur la rive droite, on dénombre aussi comme cours d’eau le Diamangou et le Goroubi avec une multitude de cours d’eau secondaires, tous temporaires. Sur la rive gauche, les mares se répartissent le long du lit mineur du Dallol entre Belandé et Boumba au Sud. Les principales mares sont celles de Falmey, Koudje-Kaina, Saboula et les systèmes du fleuve (Mare de Koissi….) (Mahamane et al. 2006 a). |Principales espèces animales| Les connaissances sur la faune du complexe du W sont encore limitées ; cependant de nombreuses recherches en cours les améliorent. Ainsi 52 espèces de mammifères (hors petits rongeurs et chiroptères) sont enregistrées : l’éléphant, le buffle, le cob de buffon, le cob de¬fassa, le cobredunca, le damalisque, le bubale, l’hippopotame, l’hippotragus, le lion, le guépard, les phacochères et une diversité de singes (cynocéphale, patas, singe vert...) entre autres. Les espèces menacées sont le guépard, le lycaon,


l’éléphant et le lamantin. On y dénombre quelques 360 espèces d’oiseaux d’origine africaine ou paléo-arctique, parmi lesquelles l’Aigle pêcheur, l’Aigle bateleur, l’Oie de Gambie, le Héron cendré, la Grande outarde d’Afrique, la Cigogne serpentaire, le Grand calao d’Abyssinie, la Grue couronnée, le Vautour huppé, les martins pêcheurs, etc. 150 espèces de reptiles et d’amphibiens cohabitent : crocodile, python de Sebha, Vipère hurlante, Naja, Varan du Nil, Tortue de rocher, tortues aquatiques, etc. Et 100 espèces de poissons ; certains d’entre eux n’existent plus aujourd’hui que dans les zones protégées : les Synodontis, Tilapia, Hydracon, Lates, Labeo, Bagrus, Slestes, Hetrotis, etc. La majorité des espèces de grands mammifères de la savane de l’Afrique soudanienne se trouvent dans le parc même si leur densité est assez faible en raison d’une longue histoire de pression anthropique (braconnage, pâturage et transhumance illégaux). Le parc du W dans sa partie nigérienne est probablement le mieux surveillé et le plus riche en faune d’Afrique de l’ouest. Notons par ailleurs que les plateaux de Kouré abritent la dernière population des girafes de l’Afrique de l’Ouest.

|Activités socio-économiques dans la périphérie du parc W| La question de la gestion rationnelle de la biodiversité est de nos jours une préoccupation, notamment en ce qui concerne la gestion durable des écosystèmes. Malgré des avancées significatives, aujourd’hui encore, de nombreuses contraintes pèsent sur le maintien des fonctions des écosystèmes et par conséquent leur capacité à pourvoir les populations en produits et services vitaux. Or l’importance de la biodiversité est capitale en raison de la nourriture, l’habitat, la médecine et les revenus qu’elle engendre. |Exploitation agricole| L’agriculture constitue incontestablement l’activité économique la plus dominante sur l’ensemble des aires protégées adjacentes au parc national du W dans sa partie nigérienne. Exercée par la quasi-totalité des populations, elle repose sur l’exploitation extensive de l’espace. L’outillage utilisé est rudimentaire et la traction animale est rarement utilisée. La majeure partie de la production agricole assurée par des petites exploitations familiales est autoconsommée. Les cultu-

res pratiquées varient suivant les unités morphologiques. Le mil est associé soit au niébé et au sorgho soit à l’arachide ou au voandzou sur les sols sableux et le sorgho est associé au niébé sur les sols argileux. Ces systèmes se caractérisent aussi par un accroissement des superficies mises en valeur annuellement alors que la taille moyenne des exploitations diminue du fait de l’accroissement démographique. Le besoin en terres agricoles s’accompagne de défrichements nouveaux. En effet, les paysans défrichent la brousse tigrée pour en faire des champs mais ces sols sont impropres à l’agriculture. Au sein de cette réserve, sur la base d’une analyse spatio-temporelle, on a observé que les surfaces cultivées ont augmenté de 4 070 ha en 1955 à 12 590 ha en 1996 et que la superficie cultivée par personne est passée respectivement de 2,85 ha à 2,3 ha. L’extension des champs de culture part généralement des villages existants. Actuellement, la vallée de Alambaré, à partir du village de Baniguiti jusqu’à la limite de la réserve est mise sous culture. Elle se manifeste aussi autour de Forgossago et Foulanwey Gorou, de même qu’au sud-

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ouest de Tamou, le long de la réserve. Dans la zone des girafes, la progression du front agricole dans la brousse tigrée est évaluée à 22 ha par an et peut même s’accentuer à cause du fort taux d’accroisse ment démographique. La jachère constitue dans ces systèmes de cultures pluviales le principal mode de gestion de la fertilité des terres. Cependant, les surfaces en jachères diminuent d’année en année du fait de la croissance démographique. Alors que les superficies cultivées augmentent chaque année, le rendement et la production sont chaque fois insuffisants. L’autosuffisance alimentaire demeure ainsi toujours problématique sur l’ensemble de la zone et en particulier dans le sanctuaire de la zone des girafes. Les cultures irriguées sont pratiquées au bord du fleuve et des mares. Les principales cultures pratiquées sont la courge, le chou, le piment, la patate douce et le maïs. La production agricole souffre d’aléas naturels tels que les inondations, les sécheresses et la baisse de la fertilité des sols. |Exploitation pastorale| Dans la réserve du W, l’élevage est de

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deux types : l’élevage transhumant et l’élevage sédentaire pratiqué par les populations locales. Pour l’élevage sédentaire, l’exploitation des pâturages est rythmée par les saisons. Les espèces animales sont les bovins, les ovins, les caprins et les asins. Sur la rive droite, durant la saison des pluies, du fait de l’abondance de la végétation et des plans d’eau, les aires de pâturage sont constituées par les plateaux au nord d’Alambaré et ceux situés entre Alambaré et la Tapoa pour les éleveurs qui résident dans la zone périphérique. Les troupeaux des éleveurs de la zone déclassée (entre la réserve et le fleuve) exploitent les brousses et jachères des hauts bassins versants des petites rivières qui coulent vers le Niger. Après les récoltes, les troupeaux utilisent les champs où ils consomment les résidus de culture durant environ un mois ou un peu plus. En saison sèche et froide les troupeaux consomment les herbacées sous forme de paille des jachères sableuses et surtout des plateaux. Leur alimentation est souvent complétée par le pâturage aérien après émondage des arbres par les bergers. Lorsqu’en saison sèche et chaude les troupeaux ont consommé

les légumineuses et les graminées, les éleveurs amorcent leur descente vers le parc à la recherche des zones qui ont été brûlées où les jeunes repousses de graminées pérennes constituent des aliments à haute valeur nutritive (Amadou B, 2007). A l’annonce des premières pluies dans le nord du Bénin, les troupeaux traversent rapidement la partie sud plus surveillée de la réserve (zone tampon) et s’installent dans l’extrême sud du parc nigérien et dans le nord du parc béninois : il s’agit de secteurs enclavés où le gardiennage est peu actif. Avec les premières pluies et le retour de la végétation, les troupeaux remontent progressivement vers le nord et regagnent la réserve. Les déplacements des troupeaux des transhumants sont plus complexes. La durée de leur séjour dépend essentiellement des possibilités de pacage dans les champs des agriculteurs et des disponibilités locales en eau. Quel que soit le type d’élevage pratiqué, les contraintes auxquelles les éleveurs doivent faire face semblent alors plus porter sur l’insuffisance, quantitative et qualitative, des pâturages désormais plus petits à cause des champs et des conflits


dans l’utilisation des espaces (faune et agriculteurs) ainsi que de celle des points d’eau pour l’abreuvement. |Pêche| Selon les statistiques des administrations locales en charge de la pêche, le nombre total de pêcheurs dans la périphérie du parc du W du Niger (BoumbaKorogoun¬gou et zone de Say) est estimé à 920 dont 850 professionnels et 70 occasionnels (Ichaou et autres, 2007). Les ressources halieutiques sont composées de 98 espèces de poissons appartenant à 22 familles dont 15 espèces de petites tailles. Le stock exploité appartient à 10 familles dont les plus importantes sont numériquement: les Cichlidae, les Bagridae, les Mokochidae, les Mormyridae et les Centropomidae (Capitaine). Les autres animaux aquatiques comprennent les mammifères (hippopotames, lamantins), les reptiles (tortues, varans du Nil et probablement des serpents) et les amphibiens (grenouilles). Ces animaux ne font pas l’objet d’exploitation à proprement parler mais les captures d’amphibiens, de tortues et du varan du Nil ont été signalées par les pêcheurs. Les zones de pêche sont variables selon

les périodes de l’année et selon les engins utilisés. Pendant les hautes eaux, la pêche est pratiquée dans les bras et les endroits abrités des courants comme les rives, les herbiers, les rives des îlots formés par les bras du fleuve. Pendant l’étiage, la pêche est pratiquée dans le lit mineur et les mares. L’essentiel du poisson produit est commercialisé à l’état frais vers les grands centres urbains notamment Niamey, Dosso, Agadez et Arlit. L’exportation vers le Nigeria et le Bénin concerne le poisson fumé. La commercialisation du poisson est assurée soit directement par le pêcheur ou sa femme ou bien par des mareyeurs (des femmes, en majorité). |Exploitation des produits ligneux et non ligneux| Dans le passé, l’exploitation des ressources ligneuses ne faisait pas partie des habitudes des populations de la périphérie du parc du W. Les prélèvements étaient effectués pour servir aux besoins des familles, qu’il s’agisse de bois pour le feu de la cuisine ou du bois servant aux constructions. Aujourd’hui, du fait de la conjonction d’un certain nombre de facteurs (la monétarisation du bois

et la forte demande des villes, le bois est devenu un produit marchand. Ainsi, pour la ville de Niamey, la réserve de biosphère renfermant encore les seules formations forestières viables est soumise à l’exploitation en particulier dans les zones protégées adjacentes au parc du W. L’exploitation des ressources ligneuses à des fins énergétiques reste la forme la plus dominante. Les principaux produits forestiers non ligneux exploités sont : la gomme arabique de Combretum nigricans, les feuilles de Cassia tora et Adansonia digitata, l’hypocotyle du rônier ou ‘‘miritchi’’, les fruits de Diospyros mespiliformis, de Vitex doniana, de Parkia biglobosa, de Tamarindus indica et les amandes du karité pour la production du beurre. Cette dernière est l’une des activités génératrices de revenus pratiquée par les femmes de Boumba. Ce village a une tradition de production du beurre très ancienne si bien qu’aujourd’hui à Boumba et les villages environnants, quelques mille femmes produisent, à des degrés divers, du beurre de Karité (Mahamane 2006 b). Cependant l’extraction se fait selon des méthodes traditionnelles malgré l’introduction de matériel technique moderne

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à savoir le moulin. L’activité s’étale sur toute l’année selon la disponibilité des amandes. La cueillette de cette matière première se fait uniquement pendant l’hivernage, période de mûrissement des fruits. La production du beurre de Karité est assujettie à de moyens matériel, physique et humain. Les facteurs de production comprennent le matériel de production, le travail et la saison. Les matériels de transformation utilisés dans l’ensemble du processus de production sont les ustensiles de cuisine : poêle, pilon, mortier, marmite, cuvette, louche, etc., et qu’on affecte pour les besoins de l’activité. Le mode de production exige une énergie humaine qui dépasse largement les capacités d’une seule femme. En effet, la production du beurre de Karité reste une activité collective, même si, du reste, la principale productrice doit faire appel à l’aide des autres femmes. Un réseau de femmes productrices s’est construit autour de l’activité, généralement au sein des familles. Le temps consacré à la production du beurre se situe entre 7 et 8 jours, ce qui

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accroît les charges de travail quotidien des femmes ; or elles sont par ailleurs très occupées par des tâches domestiques. Bien que toutes les femmes ramassent les fruits, pendant la saison des pluies, la période de production varie selon les productrices, chacune essayant de gérer son emploi de temps de manière à trouver un moment pour s’occuper de ce qui est considéré comme activité secondaire. Dans l’ensemble, le cours de la pluviométrie influence largement la production du karité. Lors d’une bonne pluviométrie, les arbres produisent beaucoup de fruits et offrent ainsi une matière première assez importante. La gamme des sous-produits du beurre de karité sont les coques issues du concassage des noix généralement utilisés comme combustible. Par ailleurs les résidus du processus de travail servent dans la réparation et la protection des pirogues en l’occurrence pour boucher les fissures. La part du beurre autoconsommé varie selon les productrices. Elle ne situe en moyenne de 5 à 25 % de la production totale. La majeure partie de la production est commercialisée directement sur le marché local de Boumba par la productrice, ce qui

lui donne une rentrée d’argent souvent considérable. Les revenus annuels issus de cette activité varient entre 30 000 à 35 000 F pour les petites productrices et de 50 000 à 60 000 F pour les grandes productrices. Ces revenus contribuent largement à équilibrer le budget des femmes. Bien plus, elles investissent dans l’achat des animaux, ce qui leur donne une certaine indépendance économique. L’un des principaux atouts de la filière est sans aucun doute la généralisation des techniques d’extraction du beurre, qui, il faut le souligner, reste une activité traditionnelle de la zone. En outre, malgré les menaces, l’arbre de karité est encore assez abondant, faisant de la zone de Boumba un centre d’excellence dans la production du beurre de karité. Cependant cette activité se heurte aujourd’hui à des contraintes de plusieurs ordres. Il s’agit principalement : - du manque de matériel performant (concasseur, baratteuse, moulin, etc.) qui permettrait aux femmes de passer moins de temps à la production et de se consacrer à d’autres activités ; - du poids des contraintes anthropiques qui risquerait à moyen terme de réduire


significativement le potentiel ligneux en karité de la zone (le débroussage et l’abattage des arbres constituent sans nul doute une menace sur la capacité de régénération du karité) ; - des contraintes physiologiques : la production des fruits n’est pas régulière compte tenu du cycle biologique de l’espèce d’une part et du vieillissement des parcs arborés de l’autre. Cela limite la production du beurre, déjà à de nombreux endroits, le parc à karité devient vieillissant, faute de jeunes plants. Si cette dynamique continue, il est fort à craindre que dans les décennies à venir la production du beurre dans la région ne soit compromise ; - les contraintes commerciales : grâce à l’appui de certains programmes, par exemple PROKARITE (projet de valorisation de la filière karité), les femmes arrivent à écouler leur production en direction de Niamey. Potentiellement cela constitue une avancée; néanmoins des difficultés majeures persistent, notamment l’absence de débouchés sûrs, faute d’un point de vente principalement à Niamey. Cela aurait permis de mieux faire connaître le produit et de le valoriser surtout que Niamey continue à importer

du beurre du Burkina Faso. - des contraintes naturelles dues aux effets combinés des oiseaux, du vent qui empêchent la maturation des fruits (Yamba B, 2006). On exploite également, dans la périphérie du parc, le fourrage herbacé. L’exploitation de ce dernier est un phénomène récent dans ces formes actuelles. Traditionnellement, elle consistait au fauchage et au stockage de paille devant servir de fourrage durant la période de soudure. C’est aujourd’hui une exploitation de type commercial exercée autant par les populations locales que par des migrants professionnels. |Pratique apicole| L’apiculture est l’une des activités génératrices de revenus pratiquées par les habitants de Moli Haoussa. Ce village a une tradition apicole très ancienne. C’est une activité qui se déroule pendant la saison sèche, période creuse du calendrier agricole du paysan; d’où son caractère complémentaire et non concurrentiel avec l’activité agricole. Les moyens conditionnant sa pratique sont: le matériel de production, la flore mellifère et les techniques de production. Le matériel apicole

utilisé pour la production est composé de ruches et de matériel de récolte, de filtrage et de conditionnement (Yamba B, 2006). Il existe deux types de ruches : les ruches traditionnelles en paille et en tronc évidé de construction locale et les ruches Kenyanes en planches récemment introduites. Le matériel de récolte se différencie selon que l’opération a lieu sur des ruches traditionnelles ou sur des ruches Kenyanes. Pour les ruches traditionnelles, il se limite à un seau, un couteau et une torche en paille tandis que pour les ruches Kenyanes, les apiculteurs utilisent une combinaison (vêtement de récolte), une paire de gants, un enfumoir, une brosse à abeille, des bottes, un seau et un couteau. La flore joue un double rôle dans l’apiculture, à la fois comme source de nourriture des abeilles et de support aux ruches, principalement traditionnelles. Le village de Moli Haoussa est l’un des gros producteurs de miel de la zone. Sa proximité de la réserve de biosphère du W explique l’abondance des espèces mellifères, très bien connues de tous les apiculteurs. Cependant, ils affichent une

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préférence marquée pour certaines espèces qui, de leur point de vue, possèdent une valeur apicole particulière. Il s’agit essentiellement du Bombax costatum (kapokier), du Combretum glutinosum, du Combretum nigricans, du Combre tum collinum, du Ficus sycomorus, du Lannea microcarpa et du Lannea acida pour le goût très apprécié du miel obtenu, sans compter que la production est abondante. Le travail de l’apiculteur comprend une série d’activités : la fabrication de ruches traditionnelles qui prend 1 à 2 jours ; l’installation de la ruche sur les arbressupports; les visites périodiques pour minimiser les risques de vandalisme mais aussi pour apporter de l’eau aux abeilles, en particulier en saison sèche ; la récolte et l’extraction du miel des rayons récoltés et enfin le filtrage du miel par décantation. Toutefois l’organisation de ces activités diffère d’un apiculteur à l’autre en fonction du nombre de ruches exploitées. Dans les gammes de produits de la ruche, seuls le miel et la cire sont connus et utilisés par les apiculteurs alors que le pollen, la gelée royale et les propolis ne font l’objet d’aucune utilisation. Ces

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sous-produits sont méconnus des apiculteurs malgré leurs propriétés thérapeutiques. La majeure partie de la production est commercialisée par l’apiculteur ; lui permettant ainsi une rentrée d’argent souvent considérable en l’occurrence pendant la saison sèche. Avant la mise en vente, le miel filtré est généralement embouteillé ou mis dans des pots en plastique avant d’être stocké dans l’unique magasin de dépôt du village ; faisant aussi office de boutique. Le miel se vend à raison de 2 250 F le litre, 1 250 F le demi litre et 750 F le quart du litre. La présence d’une boutique coopérative dans le village permet à beaucoup d’apiculteurs de vendre leurs produits sur place. En effet, les apiculteurs de Moli Haoussa sont organisés en groupement connu sous le nom de « Groupement Sériba ». A l’origine elle comprenait 10 apiculteurs, mais aujourd’hui le groupement compte une trentaine d’adhérents. Les acheteurs sont généralement les touristes et les visiteurs du parc, et l’essentiel de la production est écoulée sur place au village. Les revenus annuels issus de cette activité oscillent entre 30 000 F et 80 000 F pour les petits producteurs et entre 150 000 et 300

000 F pour les grands producteurs. Ces chiffres restent sans aucun doute sous estimés. Cependant, compte tenu des difficultés à obtenir les revenus réels, ces chiffres doivent être maniés avec précaution et considérés comme des ordres de grandeur. Quoi qu’il en soit les revenus issus de la vente de miel permettent d’assurer l’équilibre alimentaire des ménages surtout que la grande productivité coïncide avec la période de soudure pendant laquelle les disponibilités céréalières sont généralement faibles voire nulles. Le miel permet par ailleurs de parer aux dépenses urgentes; bien plus, il offre aux apiculteurs l’opportunité d’épargner dans l’achat des animaux. Le miel produit à Moli Haoussa jouit d’une réputation de très bonne qualité. Plusieurs types de miel sont vendus : miel peu clair, miel écrémé, miel ambré, miel jaune vif, etc. C’est enfin une activité en pleine croissance, intéressant de plus en plus les jeunes. |Tourisme| La région du parc du W, enclavée et peu équipée, n’intéresse principalement qu’un public motivé et averti, soit quelques milliers de visiteurs les années fastes


et seulement une centaine en périodes creuses. Le tourisme ne peut donc pas encore être considéré comme une source de revenus d’appoint, à la fois pour les populations de la région, pour les opérateurs privés, mais également pour le parc et les pouvoirs publics. Pourtant, le parc présente un intérêt touristique en raison de la diversité des écosystèmes, des grands mammifères africains, d’une avifaune riche, des cours d’eau dont le fleuve Niger, des chutes et cascades telles que celles de Koudou (Bénin-Burkina) et de Tanougou au Burkina Faso, des sites historiques et même préhistoriques, des mares sacrées ou îlots forestiers utilisés comme autels pour des offrandes ou invocations rituelles par les populations riveraines. S’y développe toutefois au Burkina Faso et Bénin, un tourisme cynégétique, qui malgré le petit nombre de visiteurs concernés (quelques centaines par an), génère des revenus significatifs et réguliers. Les plateaux de Kouré abritent les dernières populations des girafes de l’Afrique de l’Ouest. L’existence d’un hôtel de luxe à Tapoa, la construction des gîtes touristiques à Ka-

rey-kopto, Boumba et Moli haouassa et l’installation des infrastructures d’accueil à Kouré et à Kanaré et l’organisation locale de guides participe au développement et au maintien du tourisme. |Chasse| De manière générale, dans la réserve de biosphère du W, la chasse est fortement ancrée dans la culture de certains groupes ethniques : le gibier est un don de Dieu et donc exploitable comme un produit de cueillette. Pour ces populations autochtones, elle répond à des traditions et des rites, mais le plus souvent le chasseur recherche la satisfaction des besoins nutritionnels et parfois le profit personnel (Ichaou, 2007 b). Quand il s’agit d’étrangers chasseurs, de multiples passions cynégétiques se sont développées à tel point que cette classe aisée et/ou munie des pleins pouvoirs (décideurs politiques, hauts cadres de l’administration, riches commerçants, expatriés et officiers militaires…) défend ses pratiques à travers de véritables lobbying. Quatre espèces sont les plus recherchées par les braconniers. Il s’agit respectivement du buffle, de l’hippotragus ou

antilope cheval, la gazelle rufifrons et de l’éléphant. Ce sont principalement les grands mammifères produisant une grande quantité de viande et de beaux trophées (cornes, ivoire, peau) qui étaient recherchés. Les principales zones menacées sont : Mékrou, Korogoungou, ouest du parc, Zone entre Alambaré et Wergorou, Weygorou, Zone de Korogoungou, Zone ouest Tapoa, et vers le sud de Wergorou. |Commerce et Artisanat| Le commerce repose essentiellement sur l’échange de produits agricoles, sylvicoles et pastoraux et de produits manufacturés. Ces produits se retrouvent dans les différents marchés hebdomadaires. Le commerce de ces produits est plus développé dans les terroirs situés au bord du fleuve. Le commerce du bois est très développé du côté de la commune rurale de Tamou. Toutes les transactions sont possibles grâce aux réseaux de pistes et de routes reliant les villages aux centres urbains (Say, Niamey). Le secteur de l’artisanat est peu développé dans la zone mais contribue

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à l’amélioration du niveau de vie des populations. Les principaux produits d’artisanat sont les nattes, les céramiques, les chaises et tables en bois. La confection des nattes est une activité exclusivement féminine et consiste à fabriquer des nattes à base de feuilles de palmier doum. Ces produits sont en partie autoconsommés par la famille et en partie vendus sur place dans le village. Le nombre de nattes produites par saison varie entre 10 et 30 nattes par individu selon les périodes. La période la plus propice est la saison sèche et l’activité est freinée en période hivernale à cause des travaux champêtres. Le prix d’une natte varie entre 400 à 2500 Fcfa. Le revenu tiré de cette activité permet de supporter les dépenses de la famille et quelque fois de réaliser des économies pouvant aller jusqu’à l’achat de bovin. Cette activité est en pleine expansion dans les villages de la périphérie du W malgré le fait que le prix des colorants ne cesse de grimper. Le travail du bois par les forgerons constitue une activité artisanale dans la confection des instruments et outils utilisés en agriculture. En plus du fer, ces artisans utilisent aussi du bois dans la fabrication

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des outils. Cette activité occupe l’artisan toute la journée. Le bois utilisé dans cette activité est prélevé aux alentours du village et quelque fois dans le parc. Les principales espèces concernées sont Balanites aegyptiaca et Combretum nigricans. Elles sont utilisées dans la fabrication de daba, couteau et bien d’autres articles (Koré et autres. 2007).


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5 STRATEGIES D’IMPLANTATION A LA PERIPHERIE DU PARC DU W Alberto Preato, Marilena Crosato

| Implantations humaines en Afrique tropicale | En considérant l’histoire de notre espèce depuis ses origines, on ne peut négliger les longs millénaires de nomadisme de petits groupes de chasseurs, et d’éleveurs ensuite. C’est là un héritage de grande portée que la pensée occidentale a oublié pendant des siècles, se convaincant plutôt de l’existence d’un état de nature « sédentaire », dans lequel notre espèce se rassemble et vit naturellement dans les villes, qui serait l’unique -et inévitableforme d’organisation sociale. Le voyage et le déplacement, du mythe au sens commun, sont considérés comme un état exceptionnel et temporaire, comme la rupture d’un équilibre qui implique des difficultés, un trouble, où le retour à la maison, en tant qu’objectif, est toujours prévu. Cette conviction, qui relève plus du postulat que de la démonstration, associe le nomadisme à un état archaïque

d’organisation sociale chronologiquement dépassée par les « bâtisseurs de ville », porteurs de civilisation et d’innovations, en oubliant combien l’histoire de l’homme sédentaire est courte, proportionnellement, en oubliant aussi que les différenciations en catégories se révèlent souvent simplificatrices et réductrices devant la complexité de la nature humaine. Même dans la période historique des villes et des villages, une tension vers le mouvement, vers la nouveauté, l’inconnu, la recherche de nouveaux espaces, l’interaction avec des communautés porteuses de culture différentes demeure. Dans le contexte africain, cet aspect a une valeur très importante à cause de la conception de la durée des structures d’habitations qui y est différente. En premier lieu, nous trouvons des groupes comme les Peuls, qui pratiquent encore la transhumance et ont une organisation sociale nomade ou semi-nomade. En second lieu, la maison elle-même est construite pour durer quelques années et non pas une vie entière, permettant ainsi au village de participer de cette dimension temporaire et flexible et de se déplacer, quand cela est nécessaire, en fonction des ressources naturelles qui subviennent à ses besoins. C’est là que le lien étroit entre la société africaine et la

nature entre en jeu, dans une conception holistique qui voit l’homme faire partie intégrante d’un tout dont elle est souveraine. Cet aspect fondateur de la société en structure les mythes, les rites traditionnels, mais aussi les formes concrètes de l’existence, depuis les pratiques agricoles jusqu’aux matériaux utilisés pour la construction. Il est intéressant alors de se demander où se situe ce qui doit être durable, les limites et les frontières qui, depuis toujours, sont nécessaires à l’homme. Celles-ci sont souvent, dans le cas du village, associées et intégrées aux éléments naturels environnants : un fleuve ou un arbre, sacralisés, pour qu’ils puissent rester là, en cas de déplacement du village, tels des protecteurs éternels. Viennent ensuite les liens de parenté, dont l’importance est extrême, qui structurent la société et peuvent être déplacés en tout lieu. Nous ne pouvons pas toutefois négliger l’existence, dans l’Afrique contemporaine, d’une tension toujours plus forte vers la « modernité » conçue comme l’adhésion aux modèles occidentaux du bien être et de la consommation, et d’interférences entre un Etat jeune et « importé », avec ses lois, ses règles, sa bureaucratie, et le modus vivendi traditionnel. Nous assistons donc à la sédentarisation des

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groupes Peuls, à la transformation de quelques villages en villes modernes, et à l’introduction de nouveaux matériaux et nouvelles techniques de construction d’une plus grande viabilité. Sur ce point, l’exemple du parc du W est pertinent, l’institution du parc et l’introduction de restrictions concernant son accès ou l’utilisation de certaines zones interfère avec les pratiques de subsistance traditionnelles des villages alentours telles que la chasse et l’utilisation de ses ressources naturelles. |Particularité des implantations humaines à la périphérie du parc du W| La périphérie du parc du W non seulement s’étend de part et d’autre de trois Etats, le Niger, le Bénin et le Burkina Faso, mais est peuplée d’ethnies différentes, les Hausas, les Djermas, les Gourmantchés, les Songhais, auxquels s’ajoutent les nomades Peuls. Il est donc évident qu’il n’y a pas là une seule manière de construire et que l’on ne peut parler de façon univoque d’habitat traditionnel, entre autre en vertu du fait que cette tradition est en évolution constante et toujours mise en cause par l’introduction d’éléments modernes. Même si la myriade de villages et de petits centres qui constellent cette zone

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est vieille d’un siècle ou de quelques dizaines d’années, l’architecture que l’on peut lire en se promenant sur ses routes est bien plus ancienne et résulte d’un processus millénaire d’adaptation aux conditions naturelles ainsi qu’aux interférences socio-économiques auxquelles les hommes ont dû faire face au cours de la longue histoire de cette région. Tout comme dans un processus d’adaptation naturelle, l’architecture traditionnelle s’est, elle-aussi, progressivement adaptée aux lents changements physiques et culturels ; mais les mutations rapides des dernières décennies risquent de miner le fragile équilibre entre l’homme et la nature, un équilibre sur lequel se fondent les implantations rurales de cette zone. C’est précisément pour cette raison, et dans le but d’en conserver le patrimoine culturel, que cela vaut la peine de souligner quelques caractères transversaux et distinctifs de l’habitat dans les zones limitrophes du parc du W. Les caractéristiques des implantations humaines dépendent de deux types de paramètres. Ce sont avant tout les facteurs objectifs : le climat, les matériaux disponibles, les connaissances techniques, le style de vie. Nous trouvons en outre des facteurs de type subjectifs : le goût esthétique, le corpus de croyances

magico-religieuses, le prestige social. Le besoin de construire un abri vient en premier lieu de la confrontation avec les paramètres climatiques : température, précipitations, vents, ensoleillement ; et c’est par rapport à ces éléments que nous pouvons trouver les motivations du choix d’implantation (orientation, matériaux et techniques employées). Il faut également tenir compte du fait que la séparation des rôles entre concepteur, constructeur et usagers est rare dans le contexte de l’Afrique rurale : presque tous les édifices sont auto-construits. Ce sont très souvent les femmes de la famille qui s’en chargent, tout comme elles s’occupent de la décoration. Dans des occasions particulières, la réalisation d’édifices publics, destinés au culte par exemple, ou bien dans le cas de familles qui n’ont pas la possibilité de pourvoir toutes seules à la construction de la maison, des tiers, étrangers à la cellule familiale, peuvent s’occuper des travaux. Il s’agit alors d’une sorte d’échange d’aide mutuelle : pareille prestation de travail n’est pas rétribuée, et le rite de la pendaison de crémaillère sert à remercier la communauté et ceux qui ont participé aux ouvrages. L’abondance ou la rareté des ressources en eau joue un rôle primordial dans le choix du lieu d’implantation. Dans un


contexte où la totalité de l’eau potable est extraite par des puits, la morphologie et la viabilité, dans leur globalité, des implantations sont liées à l’utilisation de cette précieuse ressource. En outre, la présence de cours d’eau temporaires et permanents influence largement l’agriculture et l’élevage, qui demeurent les principales activités économiques de subsistance. Enfin, dans son bassin d’influence, le rôle du Niger, qui reste une voie de communication pour les marchandises et les personnes, est tout aussi important. Ce n’est pas un hasard si, dans toute l’Afrique tropicale, les ports internes sont souvent des centres économiques remarquables, quand ils ne sont pas le siège des plus grandes agglomérations - Niamey, Bamako, N’Djamena et Khartoum en sont des exemples. |il concetto di villaggio| Le concept de village, en Afrique subsaharienne, est avant tout défini par le lien familial et ensuite par les coordonnées spatiales ou morphologiques. C’est l’appartenance à un clan précis, ou à un groupe ethnique, et la reconnaissance d’un chef commun qui détermine au plus haut point les structures sociales, et donc les particularités du mode d’implantation d’un village. La morphologie

et la structure physique de ce dernier sont au contraire mouvantes, tout comme sa localisation géographique. Le village, entendu de ce fait comme un corpus unitaire de structures physiques, population, activité économique, hiérarchie sociale, peut se déplacer à la suite d’événements naturels qui mettent sa survie en danger, ou, plus simplement partir à la recherche de terres plus fertiles, de pâturages plus verts, pour ensuite se re-fonder dans un nouveau lieu. Mais, même dans l’Afrique rurale il est désormais difficile de trouver des terrains vagues : les conditions pour occuper ou exploiter la terre ont beaucoup changé à la suite de l’introduction du système étatique sur le modèle occidental et d’un corpus législatif complexe, très éloigné des habitudes traditionnelles sur lesquelles s’étaient modelées les diverses organisations tribales. La population en outre connaît une croissance continue grâce à l’introduction de structures sanitaires modernes, et la pression anthropique est accentuée par l’émergence de nouveaux pôles urbains ou de travaux saisonniers. Ainsi, des populations différentes, sans doute déjà en contact grâce à des échanges commerciaux, partagent-elles aujourd’hui le même territoire, et l’on trouve de plus en plus souvent des éléments provenant de traditions et de cultures différentes

dans la même cellule villageoise. Chaque groupe élabore ses propres stratégies d’adaptation à ces nouveaux espaces et ces nouvelles conditions. Généralement, la tendance est à la cohabitation dans des situations de proximité toujours plus grande, et chacun garde sa propre identité socioculturelle. «Les villages et les maisons sont construits «sur» les gens et les groupes sociaux, comme quelque chose que l’on porte. Le concept opposé, à savoir que les gens puissent s’adapter et vivre dans des maisons, des villages, des espaces préconstruits et non adaptés à la réalité sociale, n’existe pas.» (A. Arecchi) Dans ce mélange ethnique, les traits du mode d’habitation propre aux différentes populations qui composent l’agrégatvillage apparaissent distinctement. Des formes de « symbiose » entre différentes populations existent également : c’est par exemple le cas des Peuls, éleveurs nomades d’Afrique occidentale, qui partagent l’usage des ressources naturelles du territoire avec les populations sédentaires de la zone du parc du W, mais non pas l’espace physique, puisqu’ils s’établissent généralement dans des campements extérieurs au noyau central. Des échanges mutuels s’ensuivent : les uns, éleveurs, peuvent fournir la viande et les laitages, les autres, agriculteurs, peuvent les acquérir ou les échanger contre des légumes et des céréales.

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|la route| La route demeure l’un des éléments clés à analyser pour comprendre le fonctionnement des implantations rurales en Afrique. Très souvent, en effet, les villages naissent et se développent le long d’une artère de communication. Il peut s’agir d’une ancienne piste qui a progressivement été élargie et goudronnée, dans certains cas, pour faciliter le passage des camions et des voitures sur de longues distances ou, tout simplement, d’une langue de terre battue qui relie deux centres peu distants l’un de l’autre ; mais, quelles que soient ses caractéristiques et ses dimensions, cette voie de communication est le cœur de la vie sociale et des échanges commerciaux. Différents type de rapports entre le village et la route peuvent exister : dans certains cas, la route traverse le village de part en part ; ailleurs, le village est le point d’arrivée d’une piste, et constitue le but de ceux qui la parcourent ; on trouve encore des villages touchés seulement de manière tangentielle par une route, construite plus tard, et qui influence alors leur développement morphologique ; vient enfin le cas où la naissance d’un village est uniquement liée à la présence d’un croisement entre deux artères de communication. La route est

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un centre de la vie : un de ses segments plus large peut se transformer en marché informel, les bords de la chaussée sont occupés par des artisans occupés à travailler le fer, ou à transformer en meubles et ustensiles les branches et les troncs des forêts voisines, et des bidons tâchés d’huile indiquent à l’œil attentif des camionneurs de passage la possibilité de se réapprovisionner en diesel. Les immanquables frigidaires de Coca Cola, ou un billard en mauvais état annoncent un bar, et les paysans peuplent les espaces encore libres en vendant des légumes, du miel ou des paniers d’osier sur des tables improvisées. La route joue également un rôle dans l’organisation du village et constitue une sorte de fil conducteur, d’épine dorsale sur laquelle donnent tous les édifices et les espaces publics les plus importants : la maison du chef du village, ou le marché alimentaire, ou la mosquée ; et le réseau d’égouts ou la ligne électrique, quand ils existent, suivent son parcours. La rue principale se présente assurément comme un élément de modernité. Sa conception provient d’un fonctionnalisme de type occidental, mais elle n’est pas uniquement un lieu de passage -elle l’est en fait seulement pour une part minimale-, et fourmille d’activités, de couleurs, de monde.

Le lacis de voies qui se développe à l’intérieur des quartiers est de toute autre nature et revêt une toute autre dimension. Privés en apparence de hiérarchie et en évolution constante, résultats de juxtapositions d’éléments au fil du temps, les chemins sont plus facilement définissables par la négative. Leur caractère interstitiel n’est en rien résiduel : ces sentiers et parcours contiennent en soi l’histoire du développement du village. Ils témoignent de la manière dont il s’est développé au cours des années, et des événements qui l’ont marqué (une inondation, la chute d’un arbre, une concession abandonnée). A chaque fois que le besoin d’un nouveau parcours survient, ou de déviation d’un parcours précédent pour faire de la place aux structures publiques, des discussions très longues, et ouvertes, ont lieu. Il s’agit de processus très délicats qui demandent l’engagement des leaders communautaires, et de la communauté elle-même, car ils se révèlent irréalisables ou de faible efficacité sans un réel accord sur les objectifs et les méthodes. Au sein de l’économie d’un village, la route est le lieu d’échanges commerciaux, qui rayonne, parfois sur des centaines de mètres depuis le point névralgique constitué par le marché formel, ou qui


se présente à son tour comme un marché diffus, un espace public déformé par rapport à la notion de place européenne, et dont les pôles d’attraction sont la tête des taxis collectifs, ou une zone ombragée à l’abri d’un grand arbre, ou le marché du village. |Rites et traditions| Les lieux réservés aux rites ou liés au mythe fondateur du village ont une importance fondamentale. Le territoire du village est défini par le « contrat » que le fondateur stipule avec des génies du lieu ; grâce aux rites et aux liens avec les lieux sacrés, ses descendants gardent et transmettent ce rapport avec la terre. L’autorité des chefs de terre tire son origine de l’appartenance au lignage du fondateur qui a stipulé ce contrat. Toute la vie sociale de ces populations est réglée par un système de pratiques et de traditions encore très fortes, dont on peut reconnaître les traces au sein du village. Le climat chaud et la régularité des pluies permettent d’organiser la plupart des activités rituelles en plein air ; c’est pourquoi il est rare de rencontrer des édifices prévus à cet effet : bien souvent, le lieu sacré est un arbre ou un groupe d’arbres ; dans d’autres cas, il peut s’agir d’un petit terrain ayant l’air abandonné ou d’une zone enclose ou d’une clairière

à l’intérieur de la forêt. Aux abords du village de Kanderou, au Bénin, nous trouvons par exemple Gbéboro, l’arbre sacré du village. Les membres du groupe Sego (le même que le fondateur) s’adressent à lui pour demander à être protégés en cas d’épidémie, pour invoquer la pluie, ou pour favoriser la fertilité d’une femme. Au pied de l’arbre, un cercle de pierre indique le lieu de sacrifice rituel. C’est là qu’un coq, un œuf ou encore une chèvre sont sacrifiés avant d’être mangés. Le fait que les différentes ethnies ont généralement un lieu spécial pour le dialogue témoigne de l’importance attribuée à la « parole », comme moyen de communication, mais aussi comme dialectique et réflexion : il s’agit à nouveau d’un arbre, appelé « l’arbre de la parole », qui demeure un élément clé dans la vie du village. Il constitue en effet le centre de la vie sociale et familiale du village : c’est à l’ombre de cet arbre que les hommes du village se réunissent pour discuter. La rencontre suit un protocole précis, qui prévoit l’aller et retour de la parole : le plus ancien commence la conversation en annonçant un fait, un problème dont il a l’intention de discuter. Après avoir présenté son opinion, il passe la parole et, suivant une hiérarchie dictée par l’avancée en âge, chacun des participants expose son avis.

Une fois que le plus jeune a pris la parole, il l’a restitue au plus âgé, qui peut conclure la discussion ou la relancer pour approfondir la question traitée. En général, il s’agit de résoudre des problèmes ou de gérer des situations, comme un conflit entre des voisins ou à l’intérieur d’une famille, ou, des cas de vols ou autres délits. Là, le Conseil a aussi un pouvoir de sanction et, s’il considère que c’est nécessaire, il peut indiquer le fait à la police et aux autorités judiciaires. Avec l’arrivée et l’affirmation progressive des religions monothéistes, les édifices consacrés au culte ont fait leur apparition, et l’on trouve aujourd’hui dans presque tous les villages, une ou plusieurs mosquées, souvent construites dans des matériaux modernes et résistants au temps. Ces nouveaux espaces destinés au culte n’ont toutefois pas remplacé les lieux de la tradition : au contraire, ils leurs empruntent des éléments architecturaux, comme les hangars, situés à l’extérieur de l’entrée de la mosquée. Ce sont des lieux ombragés, des lieux de sociabilité, qui marquent le passage progressif de l’extérieur vers l’intérieur de l’édifice sacré. Ils sont présents dans toute l’Afrique occidentale, tant à l’échelle publique que familiale.

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|la concession| « L’habitation dans l’Afrique sub-saharienne répond à une architecture totale avec lequel on dit tout : les conditions du milieu, des définitions de rapports économiques et sociaux, les conceptions fondamentales. » (A. Arecchi). Dans les implantations rurales, la concession, indépendamment de ses dimensions, reste l’unité d’habitation de base à disposition d’une famille. Il s’agit d’une portion de terrain, close, où différents édifices et espaces qui composent la maison sont aménagés. La morphologie de la concession rappelle ses origines, à savoir celle « d’un lieu apprivoisé », arraché avec effort à la nature pour répondre aux nécessités humaines et enclos pour protéger ses habitants. Dans les implantations rurales des zones située à la périphérie du parc du W, la concession est entourée d’une clôture de feuilles de palmes, ou de tiges de mil et de rondins, interrompue par une grande ouverture appelée Buburignabu, toujours orientée vers le sud-ouest. Généralement on trouve à l’intérieur de cet enclos : -un édifice de plan circulaire, construit en boue avec un toit de paille, appelé Lidiedamdielt Udiedano : c’est la maison du chef de famille ;

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-un ou plusieurs édifices, de dimensions légèrement inférieures, appelés Lipiodjeli, qui correspondent aux salles pour les femmes ; -une grange, de forme cylindrique, construite en tiges de mil tressées et soutenue par une base de rondins ; -un grand arbre ou un ou plusieurs hangars, construits avec des branches et des feuilles de palmier ; -un espace pour cuisiner ; -un ou plusieurs petits enclos, souvent pourvus de toits, pour les animaux domestiques ; -un lieu ombragé destiné à la conservation des bidons d’eau ; -un petit paravent construit avec des matériaux végétaux pour la douche. Ces éléments se retrouvent, avec de légères différences, parmi les populations Hausa et Folmongani, avec, dans certain cas, la présence, en outre, d’un espace destiné au culte. La disposition des cellules d’habitation par rapport à la clôture varie selon les populations et le lieu d’implantation : la configuration la plus commune, qui se retrouve aussi chez les Peuls sédentaires, est celle des « paillotes » bien à l’intérieur de l’enclos. Les Goumantchés au contraire adoptent une solution qui leur est propre : les édifices sont positionnés de façon circulaire tout

le long de la clôture, et leurs ouvertures sont tournées vers l’espace central. « Les efforts d’une génération ne servent pas de base et de fondement pour la génération suivante, mais d’exemple : celle-ci doit se conformer au même processus technologiques, matériaux de base et milieu culturel, comme à des données immuables » Dans la maison africaine, la dichotomie entre durable et provisoire est beaucoup plus forte. La maison est un organisme changeant, il s’adapte constamment aux conditions de la famille, et à ses variations démographiques - nous l’avons vu - tout comme aux changements de saison. Bien des familles résident en effet dans une petite maison à proximité des champs durant la saison agricole pour ensuite revenir à la maison du village, une fois que la moisson a été emmagasinée dans les granges. Mais ce sont les matériaux avec lesquels l’habitation est construite qui déterminent un modus operandi, fondé sur un remaniement continuel, sur l’adjonction de nouvelles parties, sur le remplacement d’anciens éléments par des nouveaux. Le centre de la sociabilité domestique n’est pas la maison – entendue comme élément physique – pas plus que celle-ci ne représente la continuité de la famille. Il convient de rappeler, en raison préci-


sément des « interférences » de la modernité, combien l’équilibre sur lequel l’habitat de cette région, et d’une manière plus générale, de ce que nous appelons l’Afrique rurale, se fonde et survit est délicat. C’est aussi le cas des structures sociales de ces populations et d’un système traditionnel de gestion de la terre qui, aujourd’hui, se superpose à un système de type moderne, et se trouve supplanté par ce dernier. Des pratiques coutumières, qui ont en elles un concept de viabilité -concept qu’une partie de l’Occident tente de redécouvrir et de s’appropriersont destinées à être progressivement délaissées, si on ne fait pas l’effort de les comprendre, les conserver, et les valoriser, au profit d’un modèle de développement urbain, pour le moins douteux, si ce n’est manifestement dépassé.

La maison des Peuls Nomades ou semi-sédentaires

Elle est en paille avec une armature de bois très légère par fois démontable et transportable. Elle peut avoir une forme semi-sphérique, ovoïdale, en coupole, ou allongée, en tunnel. La maison est souvent construite par les femmes et disposée selon une orientation nord –sud. La porte d’entrée est basse et petite, pour garder la fraîcheur et l’obscurité. Les nomades utilisent des maisons de 3-4 mètres sur deux, alors que les semi sédentaires ont des maisons plus grandes. Les hommes et les femmes dorment dans la même maison, sur des lits superposés. L’habitation est réduite à une division symbolique de l’espace. Il s’agit en réalité d’une nonhabitation, si on s’en tient au sens habituel du terme. La répartition rigide de l’espace intérieur des maisons Peules compense, au niveau symbolique, l’absence de protection matérielle des intempéries. Le campement Peul est un agglomérat entouré d’une clôture de branches qui regroupe quelques dizaines de maisons où vivent des familles qui appartiennent au même lignage. Pour des raisons de sécurité, l’enclos du bétail est généralement au centre de l’habitat.

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GLOSSAIRE Aire ou la superficie : est la mesure d’une surface. Par métonymie, on désigne souvent cette mesure par le terme « surface » luimême (par exemple, on parle de la « surface d’un carré » alors qu’il faudrait parler de son aire). Le terme aire (du bas latin aera espace plan) est utilisé en mathématiques. Aire du W correspond ici à la partie sanctuaire de la réserve. Aire Protégé: une aire protégée est une superficie mise en défens contre les formes d’exploitation humaine pour les objectifs de protection d’écosystèmes naturels déclarés menacés ou pour des objectifs scientifiques ou esthétiques. Selon les objectifs assignés, nous avons ;- Une réserve de biosphère,une réserve intégrale,un Parc National ,une réserve de faune. Apiculture : activité socio-économique qui consiste à l’entretien des abeilles pour l’exploitation des produits qu’elles élaborent ou mettent en réserve Biodiversité (diversité biologique) : variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie; cela comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes. La biodiversité est considérée comme une des ressources vitales

du développement durable. Biosphère : ensemble d’espaces vivants de la Terre où les conditions environnementales permettent le développement de la vie. Braconnage : chasse ou pêche illégale. Les raisons de l’illégalité peuvent être diverses : la chasse ou la pêche a lieu en dehors des périodes qui lui sont réservées ; les animaux se trouvent sur un domaine privé ; les moyens utilisés ne sont pas autorisés ; l’espèce chassée ou pêchée est protégée ; CENAGREF : Centre National de Gestion des Réserves de Faune (Bénin). Office d’Etat béninoise à caractère social, scientifique et culturel, doté d’une personnalité morale et d’une autonomie administrative et financière. Le CENAGREF gère la gestion du Parc du W, du Parc de la Pendjari et de toutes le Réserves partielles, totales et zones de chasse du Bénin. Conservation de la nature :[] consiste en la protection des populations d’espèces animales et végétales, ainsi que la conservation de l’intégrité écologique de leurs habitats naturels ou de substitution (comme les haies, carrières, terrils, mares ou autres habitats façonnés par l’homme). Son objectif est de maintenir les écosystèmes dans un bon état de conservation, et de prévenir ou de corriger les dégradations qu’ils pourraient subir. Débit : Volume d’eau écoulé par un cours d’eau en un temps donné. Déguerpissement : est l’opération par

laquelle il est fait obligation pour des motifs d’utilité publique à des occupants d’une terre appartenant à la puissance publique de l’évacuer même s’ils ont cultivé ou construit[]. Il sert donc à mettre fin à une situation d’occupation illégale d’un terrain. Par extension, le terme déguerpissement s’applique aussi à des destructions de bâtiments construits sur des terrains non constructibles. ECOPAS : ce programme s’était fixé comme objectif d’inverser les processus de dégradation des écosystèmes et de préserver la biodiversité dans le complexe régional au bénéfice des populations et plus particulièrement, des populations riveraines de l’aire protégée et de sa zone d’influence. ECOPAS a réussi à réunir trois pays autour de la protection des ressources protégées du Parc transfrontalier du W. Il s’agit du Bénin, du Niger et du Burkina Faso Ecosystème : système naturel formé par une association d’êtres vivants et son environnement géologique, pédologique et atmosphérique qui, en raison de leur interdépendances, permettent le maintien et le développement de la vie. Ethnie : groupe humain possédant un héritage socioculturel commun, comme une langue, une religion, des coutumes et des traditions communs. Foret classée : aire naturelle à statut protégé, composée par une étendue boisée,

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relativement dense, constituée d’un ou plusieurs peuplements d’arbres et d’espèces associées. Formation végétale : communauté d’espèces végétales, caractérisée par une certaine physionomie, et qui détermine un paysage caractéristique. Front pionnier : est un mécanisme d’extension des superficies cultivées poursuivant un triple objectif d’augmentation de la production agricole, de meilleure répartition des densités et de contrôle des marges du territoire. Le front pionnier le plus connu ici se situe dans la zone de Aïnoma sur la rive droite du Fleuve Niger à la périphérie de la réserve de biosphère du W. Zone le long de laquelle le peuplement progresse par occupation et mise en valeur de terres nouvelles. Habitat : ensemble d’éléments du paysage qui offre les ressources suffisantes pour permettre à une population d’une espèces de vivre et se reproduire normalement en ce milieu. Hameau: (Gure) organise l’unité spatiale de chaque ferme. Un hameau regroupe un ensemble de fermes toutes identiques sauf par la taille. Il regroupe en général quinze fermes alignées les unes après les autres, soit agencés en groupes informels. Longtemps les hameaux ont été placés sous la protection de guerriers pour éviter les razzias sur le bétail. Harmattan : vent chaud, sec et poussiéreux

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qui, en provenance du Sahara, souffle vers le Sud en Afrique de l’Ouest, entre la fin de novembre et le milieu du mois de Mars. La date de son début d’apparition annuelle (entre la fin de Novembre et le début de Janvier), sa durée et son intensité peuvent beaucoup influencer les récoltes agricoles des pays sahéliens. Hivernage : saison des pluies. Expression utilisée dans la région sub-sahélienne pour indiquer la période pluvieuse de juin à septembre. Les Réserves de Biosphère : En vertu des dispositions du cadre statutaire du réseau Mondial de réserve, les réserves de biosphère sont des aires portant sur des écosystèmes terrestres et côtiers /marins qui visent à promouvoir des solutions pour réconcilier la conservation de la biodiversité avec son utilisation durable. Les réserves sont des aires affectées à la protection de la faune et de son environnement dans lesquelles peut être interdit toute présence humaine, sauf autorisation délivrée par les autorités compétentes de la protection de la faune sauvage. Les activités agropastorales sont réglementées. Elles sont reconnues sur le plan international, proposées par les gouvernements nationaux et restent sous la seule souveraineté de l’Etat sur le territoire duquel elles sont situées. Pour la réserve de biosphère du W du Niger,

nous avons le Parc national du W, la réserve totale de faune de Tamou ,la réserve partielle de faune de Dosso,le plateau de Kouré avec le découpage ci-après : La zone centrale, c’est-à-dire le territoire et où espace sanctuaire du parc W. Une zone tampon, bande de 15 Km de large entourant le parc. Cette zone constitue une ceinture de sécurité pour le parc et circonscrit une aire protégée aux règles d’usage non définies. Mais en pratique les mêmes règles d’usages que dans le parc y sont appliquées par les gardes forestiers. Une zone de transition constituée par la réserve totale de faune de Tamou et la réserve partielle de faune de Dosso ainsi que la zone girafe centrée sur le plateau de Kouré. Les réserves de biosphère doivent remplir trois fonctions complémentaires : - Fonction de conservation : Les réserves de biosphère doivent contribuer à la conservation des paysages, des écosystèmes, des espèces et des gènes. Cette fonction sera assurée grâce à une zone centrale strictement protégée, correspondant au Parc National du W du Niger et à une zone tampon, partie méridionale de la réserve totale de faune de Tamou, assurant la transition et la diffusion de la faune vers la périphérie. La fonction de conservation permettra de sauvegarder une biodiversité importante pour la région. - Fonction de développement :


Les réserves de biosphère doivent favoriser un développement économique et humain respectueux des particularités socioculturelles et environnementales. Le programme de mise en valeur prévoit un développement des communautés locales selon plusieurs axes, en fonction des potentialités des différentes parties de la réserve de biosphère du W. - Fonction logistique : Les réserves de biosphère doivent encourager la recherche, la surveillance, l’éducation et l’échange d’information, d’expérience et de personnel. Cette fonction comprend : les fonctions d’observatoire (suivis écologique et économique à long terme) ainsi que les fonctions d’éducation environnementale. MAB: Man and Biosphere Programme – Programme sur l’Homme et la Biosphère. Lancé au début des années 70, le MAB est un programme multidisciplinaire de recherche dans le but d’améliorer les relations entre les gens et leur environnement au niveau mondial. Il vise à réduire la perte de biodiversité par des approches écologiques, sociales et économiques et il utilise le réseau mondial de réserves de biosphère comme un outil d’échange de connaissances, éducation et de prise de décision participative. Mare : étendue d’eau, pérenne ou temporaire, naturelle ou artificielle, de faible extension et bas profondeur, abritant un écosystème propre. A alimentation non continue, provenant du ruissellement ou de la

remontée du plafond de la nappe phréatique, la mare dépende généralement des eaux de pluies et est un écosystème fortement saisonnier. L’eau y est stagnante, ou à circulation très lente. Véritables synonymes de biodiversité, les mares sont actuellement menacées par la pollution, l’ensablement et l’abandon. Nomadisme : mode de peuplement généralement basé sur l’élevage pastoral, où la recherche des pâturages et le déplacement des animaux fondent la mobilité des hommes. Onchocercose : aussi dite cécité des rivières, l’onchocercose est une maladie parasitaire transmise par la piqure d’une mouche. L’onchocercose entraine de sérieuses lésions cutanées et, dans sa phase finale, une cécité irréversible. Parcs agroforestiers : terrains couverts d’arbres ou d’essences forestières entretenues par les propriétaires terriens et sur lesquels sont pratiquées de manière intégrée des activités d’élevage ou d’agriculture. Parc National :Selon L’UICN :«Un Parc National est une zone relativement étendue (100.000 ha) ou un ou plusieurs écosystèmes n’ont pas été altérés par l’exploitation ou l’occupation humaine, où les espèces animales et végétales, les sites géomorphologiques et les habitats présentent un intérêt particulier du point de vue de la science, de l’enseignement, de la distraction ou existe

un paysage de grande beauté. » ;« Pour laquelle la plus grande autorité du pays a adopté des mesures visant à prévenir ou éliminer le plus rapidement possible l’exploitation et l’occupation humaine et à imposer le respect des caractéristiques écologiques, géomorphologiques où esthétiques qui ont déterminé sa création».« Dans laquelle est autorisée sous certaines conditions l’admission des visiteurs à des fins récréatives » Parc refuge : aire naturelle à statut protégé. Le parc refuge a été la première méthode de classement utilisée par les autorités coloniales en 1927 pour la protection du noyau central de l’actuel Parc du W. Pénéplaine : stade évolué de l’érosion due aux réseaux hydrographiques et résultant dans un large espace avec de faibles dénivellations. Peuplement : ensemble des population des espèces appartenant souvent au même groupe taxonomique. En ce contexte il est employé comme synonyme de population et pour indiquer sa répartition sur un espace donné. Pluies des mangues : rares pluies isolées intervenant généralement intervenant pendant le mois d’avril dans la région subsahélienne, bien avant l’arrivée de la saison des pluies. Produits Forestier Non Ligneux : produits d’origine biologique, autres que le bois, dérivés des forêts, d’autres terres boisées et d’arbres hors forêts.

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RAMSAR (Convention sur les zones humides d’importance internationale) : traité intergouvernemental adopté en 1971 pour la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides, visant à enrayer leur dégradation et leur perte et reconnaissant leur fondamentale fonction écologique, social, culturelle, scientifique et économique. Le Parc du W a été inséré dans la listes des zones humides d’importance internationale de Ramsar. Réserve de biosphère : aire portant sur des écosystèmes terrestres/ côtiers/ marins, qui vise à promouvoir approches et moyens en concertation avec les populations locales et tous les acteurs concernés pour réconcilier la conservation de la diversité biologique avec son utilisation durable. Réserve partielle : méthode de classement d’une aire naturelle protégée, qui permit toute activité humaine, chasse comprise, à l’intérieur de l’aire, mais d’une façon autorisée et réglementée pour assurer à la fois la conservation des ressources naturelles et le développement local durable. Réserve totale : méthode de classement d’une aire naturelle protégée, qui permit l’exercice de certaines activités humaines sous le control, l’autorisation et la formation de l’administration chargée de la gestion de l’aire. Normalement, dans une réserve totale l’agriculture et l’élevage sont permit, mais la chasse est interdite. L’implantation de

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nouveaux villages est interdite Ressource naturelle : bien, substance ou objet présent dans la nature, et exploité pour les besoins d’une société humaine. Il s’agit donc d’une matière première, minérale (ex : l’eau, sol) ou d’origine vivante (ex : le poisson, les animaux). .RTB/W: Réserve Transnationale de Biosphère du W. Première réserve transfrontalière de l’Afrique de l’Ouest, née en 2002 comme nouvel classement du Complexe Ecologique WAP. Savane : ensemble d’écosystèmes caractéristique des zones semi-aride de la planète. La formation végétale de la savane est normalement composée de plantes herbacée vivaces avec d’arbres et d’arbustes plus ou moins parsemés. La densité des espèces ligneuses peut varier. Les paysages de la savane se trouvent principalement en Afrique dans le domaine soudanien, mais aussi en Asie, en Amérique du Sud et en Australie. Soudure : en Afrique sahélienne, la période entre deux récoltes ou la nourriture et l’eau viennent à manquer. Transhumance : migration périodique du bétail vers une zone de pâturage à une autre, en fonction de la saison, des conditions climatiques et de l’abondance d’eau et de nourriture. Trypanosomiase : maladie parasitaire due à la présence dans le plasma sanguin de

protozoaires flagellés du genre Trypanosoma et transmise par des insectes piqueurs, en particulier les glossines (mouches tsé-tsé). La maladie du sommeil est une trypanosomiase spécifique de l’espèce humaine dont l’agent pathogène est diffèrent de celui des trypanosomiases animales. UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature. Crée en 1948, l’UICN est le premier et le plus vaste réseau mondiale de protection de l’environnement, avec plus de 1000 ONG et gouvernements regroupés en association. L’UICN vise à encourager et aider les sociétés à conserver la biodiversité et à assure une durable et équitable gestion des ressources naturelles, en appuyant la recherche scientifique, la gestion de projets et le développement de politiques, lois et bonnes pratiques. UNEP : Programme de Nations Unies pour l’Environnement. UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture. Agence spécialisée des Nations Unies née le 16 novembre 1945 dans le but de contribuer au développement durable mondiale à travers l’éducation, la science, la culture et la communication. WAP (Complexe écologique) : vaste aire protégée situé dans l’Afrique de l’Ouest composé par le Parcs Nationaux du W (Niger, Bénin, Burkina Faso), le Parc National de la Pendjari (Bénin) et la Réserve National


d’Arly (Burkina Faso). Zone à protection intégrale : aire à statut protégé où toute activité humaine est interdite pour assurer une intégrale conservation de la biodiversité. Zone cynégétique : méthode de classement d’une aire naturelle protégée dédiée à la chasse contrôlée et autorisée. Zone de chasse : Voir zone cynégétique. Zone de transition : zones ordinaires, sans statuts protectif, où modèles de développement durable sont mis en œuvre pour limiter les pressions anthropiques sur les zones tampon. Zone tampon : méthode de zonage des réserves partielles et totales, où la promotion d’activités pour le développement durable et la responsabilisation des communautés locales sont poursuivies comme instruments de conservation des ressources naturelles.

RTB W : Réserve Transfrontalière de Biosphère du W RTFT : Réserve Totale de Faune de Tamou RTT : Réserve Totale de Tamou UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature

SIGLES ET ABREVIATIONS AOF : Afrique Occidental Française CIT : Certificat international de transhumance ECOPAS : Ecosystème Protégé en Afrique Soudano-Sahélienne FAO : fonds Mondial pour l’alimentation PF/DDE : Poste Forestier/Direction Départementale de l’Environnement PNWN : Parc Nationale du W du Niger

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LA PERIPHERIE DU PARC W ATLAS ANTHROPOLOGIQUE

Villages

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N06

N03

N02

N04 N05 N01

B03

BENIN B01 B02 B03 B04 B05

| Kanderou | Kargui | Kompa | Mokollè | Sinkperou

BF03 B02

BURKINA FASO

BF02

BF01 | Kondjo BF02 | Lara BF03 | Mangou

BF01

B01

NIGER N01 N02 N03 N04 N05 N06

| Kalletassi | Kiwirkoye | Allambarè | Banizoumbou | Bossia | Mourekouara

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l’Etat du Bénin, est situé sur une colline à l’est du fleuve Kotchera (étymologie : action de nager, ce terme indique le lieu où les enfants allaient nager, dans un bassin créé par le fleuve et il s’etend sur environ trois km au nord, jusqu’à la confluence des fleuves Karago et Karagoussou, près du petit lac de Yabadou.

B01

B01 | KANDEROU lat 11.6499 long 2.54053

|pays| Bénin |typologie| village mère |nombre d’habitants| 850 |nombre de concessions| 80 |date de fondation| vers 1900 |distance de la limite du parc| < 3 km |ville la plus proche| Gaya |phénomènes migratoires| immigration |ethnie principale| Batonou |éléments traditionnels| arbre sacré |éléments modernes| maison carrée |territoire| Le village de Kanderou, inclus dans la zone tmapon du parc du W, dans

Kotchera constitue le village mère, il est entouré des collines de Kanderougorou au sud, des collines Samossogourou à l’ouest et le parc du W à l’est et au nord. Cette disposition a conduit à une expansion progressive du village au de là de ces obstacles territoriaux, avec la fondation de nombreux hameaux agricoles et de villages fils au-delà de les collines et en direction du parc, avec pour conséquence l’augmentation de la pression anthropique et des situations de conflit. Yabadou s’étend au contraire à proximité du lac dont il prend le nom ; il a été fondé plus récemment par des populations non autochtones qui ont reçu du chef de terre de Kotchera le permis de s’implanter dans cette zone. |population| La population est de 850 habitants environ. Cette estimation est obtenue en considérant une moyenne de dix personnes par concession, chiffre qui correspond à la population de chacune des concessions des deux villages de Kanderou.

Si l’on prend aussi en compte les habitants des hameaux de Kanderou, la population totale de la zone est environ de 1600 personnes, avec un nombre presque égal de femmes et d’hommes. La différenciation en classe d’âges ne répond pas à des exigences précises liées au travail agricole et à d’autres aspects socioculturels ; en revanche une différenciation sur base sexuelle existe : les hommes sont Harouassi (adolescents) jusqu’à 18 ans, et les femmes arrivent au Satara (l’âge du mariage et de la procréation) plus tôt, c’est-à-dire, à 16 ans. On observe quelque chose d’analogue dans l’âge avancé : une femme est considérée comme âgée (Kurotoko) à 40 ans, alors que l’homme ne l’est que dix ans plus tard (Buogouro). La majeure partie de la population est très jeune (moins de dix-huit ans). Le groupe ethnique majoritaire est celui des Batonu. Il se divise en Sègo (forgeron), Yoni (guerriers), Siga, Modou (tisserands), Yari (agriculteurs), Griot (sorciers) et Taro. |activité économiques| L’agriculture joue un rôle déterminant dans l’économie du village et le processus de décision lié à l’organisation des activités agricoles respecte les différentes hiérarchies sociales structurant le village et les familles. On trouve des parcelles

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collectives cultivées sous l’autorité d’un chef de concession (gnini yinro boukouro) et des champs individuels. Les hommes travaillent le Gbabaga Baatombou (champ collectif des hommes) qui est proche de la concession, et les femmes ont leur Kouta (champs collectif des femmes) plus éloignés, mais accessibles aux maris. De nombreux champs individuels se trouvent aussi dans le village. L’introduction des cultures commerciales, le coton surtout, est en train de modifier lentement ce système traditionnel, en privilégiant les cultures individuelles au détriment des cultures collectives. L’afflux d’argent venant de la commercialisation du coton, subventionnée par l’Etat, se reflète donc non seulement dans l’organisation du travail agricole mais aussi au niveau social et, comme nous le verrons, dans la morphologie et l’organisation des concessions et du village lui-même. |morphologie du village | Les deux parties du village de Kanderou se développent à proximité des cours d’eau temporaires, car l’agriculture est l’activité principale et les concessions sont souvent entourée par la zone destinée à l’agriculture. Le développement plus récent des villages a essentiellement touché la zone méridionale, dans le voisinage des structures administratives : la kyewdjirou (l’école) et la wenwu yanrou (marché du coton).

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Des traces du lien des populations Baatambou avec la tradition animiste subsistent à Kanderou : un arbre sacré, avant les premières concessions de Kandèrou Yabadou, l’arbre Gbèboro et la pierre Kperadoussi, à Kotchera. Celle-ci représente les divinités masculines et féminines et a pour but de protéger le village et de garantir la fertilité et une bonne santé. Les villages, comme à l’habitude, sont formés de concessions distinctes qui, ici, ne sont pas toujours encloses dans des enceintes et barrières physiques bien définies. Dans de nombreux cas, les formes et les espaces sont définis par la répartition des édifices et non par les enceintes. Les délimitations sont utilisées uniquement pour la protection de récoltes particulières et l’entretien et la garde du bétail. Les concessions sont entourées de champs et les deux villages sont pourvus d’arbres sacrés situés près des concessions les plus importantes, auxquels la population s’adresse en cas de besoin pour trouver une solution possible à des problèmes d’origine diverses. Deux signes caractéristiques de la modernité sont apparus récemment : un plan rectangulaire a souvent remplacé la base circulaire des constructions, des toits métalliques remplacent les toits de pailles, et les huisseries sont soutenues par des

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châssis en bois. Ces nouveaux éléments impliquent des changements évidents dans la vision d’ensemble du village, mais aussi l’apparition de nouvelles modalités – et de nouveaux moyens - de construction. Le fait que les concessions soient proches d’une route accessible au transport des matériaux constitue un autre facteur favorable. L’architecture des deux villages reflète clairement la richesse économique, l’interaction culturelle entre les différentes ethnies et la modernisation qui s’est produite récemment. La présence d’éléments modernes est le signe d’une évolution de l’architecture mais montre aussi que la population est disposée à s’ouvrir et à innover constamment. Il est certain que l’activité commerciale intense et les échanges culturels continus ont joué de manière décisive sur ce processus d’évolution. |éléments typiques| La présence d’édifice colorés constitue un aspect particulier : l’usage de la coueur est très extrêmement rare dans cette zone, car elles sont difficiles à trouver et coûteuses. Ici on trouve des maisons entièrement recouvertes d’enduis avec des coloris différents. La présence de décoration est encore moins habituelle : il s’agit de petites frises gravées sur les parois des édifices. Il s’agit presque toujours d’une ligne continue qui parcourt toute la structure

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horizontalement ; elle est interrompue par des dessins géométriques. Le dessin, près de l’ouverture, s’adapte et englobe les huisseries. La date est indiquée sur quelques-unes des structures présentant ce type de décoration : on suppose qu’elle correspond à la date de réalisation. Il s’agit toujours d’édifices de construction récente. |points critiques| Les éléments qui provoquent des situations de conflits à Kandérou relèvent de quelques questions problématiques. Il s’agit en premier lieu du doublement des autorités avec deux niveaux : traditionnel et administratifs, situées respectivement à Kandérou Kotchera et Kandérou Yabadou. Cette localisation spatiale distincte provoque une séparation entre les habitants des deux Kandérou, qui tendent à suivre le chef de leur fraction. En second lieu, l’introduction du coton, qui a altéré les modalités de production traditionnelles et pousse la population à pratiquer la monoculture, provoque des problèmes de santé en raison des substances chimiques utilisées et a épuisé la disponibilité en terre pouvant encore être occupé. Il s’ensuit une pression démographique sur les limites du parc. |relations avec le parc| La relation avec le parc se caractérise par une poussée

anthropique vers l’intérieur, en raison de la réduction de la surface et du nombre de terres libres (à cause des plantation de coton) et de l’interférence avec la pratique de la chasse provoquée par la réserve.


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B02

B02 | KARGUI lat 11.6499 long 2.54053

|pays| Bénin |typologie| village |nombre d’habitants | 2250 |nombre de concessions | 176 |date de fondation| vers 1800 |distance de la limite du parc | 25 km |ville la plus proche| Gaya |phénomènes migratoires| immigration |ethnie principale | Dendi |éléments traditionnels| arbre sacré |éléments modernes| maison carrée |territoire| Kargui est situé sur la commune

de Malanville, dans le Département de l’Alibori. Il se trouve le long de la piste qui relie Guéné à Karmama dans l’enclave comprise entre le fleuve Niger à l’est et le parc du W à l’ouest. Selon la tradition, la zone d’appartenance du village s’étend au sud jusqu’au bassin du Guiguirigata et au nord jusqu’à un baobab qui est lui-même considéré comme le symbole du village, même si au niveau administratif cette zone relève de deux communes différentes, Malanville et Karimama. |population| Le village fut fondé par les Gourmantchés, qui sont désormais complètement assimilés aux Dendis. Les fondateurs furent Bassada Dambou et son frère Bassada Galoubou au XIXe siècle. Ils s’établirent dans un premier temps dans un lieu appelé Koubou Koubou, mais cette première implantation fut abandonnée à la suite d’une mauvaise récolte qui provoqua de très nombreuses victimes. Ils se déplacèrent alors d’abord vers Kochira et ensuite vers Nagui Fiti pour arriver enfin au lieu jugé adapté, à savoir Kargui. Les fondateurs, originaires du Burkina Faso, arrivèrent jusqu’au Bénin, alors qu’ils étaient à la recherche de leur père, chasseur d’éléphant, mort, selon la tradition, car il en avait tué un, malgré l’avis contraire des esprits locaux.

Aujourd’hui le noyau central du village compte 2 253 habitants, répartis en 176 concessions. Dans les zones environnantes, 300 personnes habitent dans les hameaux. La zone est touchée depuis quelques années par des phénomènes d’immigration de type aussi bien saisonnier que définitif. Il s’agit essentiellement d’étrangers, des Nigériens des ethnies Haoussa et Djerma, qui viennent à Kargui à la recherche de terre ou de travail. Ce phénomène a conduit à une certaine hétérogénéité ethnique dans le noyau central du village, mais aussi a un processus de territorialisation, avec la création d’un quartier Haoussa, avec une place, reconnaissable à l’arbre de la parole et la mosquée. Celleci est utilisée presque exclusivement par les habitants de la zone. |activités économiques| L’agriculture est la principale activité de la zone. Le terrain est fertile, la disponibilité en eau et les grandes étendues cultivées permettent d’avoir des récoltes abondantes et diversifiées. On y cultive en effet du maïs, des arachides, du manioc, de l’ocre, des légumes, en plus de cultures commerciales telles que le coton. Grâce à l’usage de pompes pour l’irrigation, les agriculteurs de la zone parviennent aussi à cultiver la terre pendant la saison sèche, en utilisant l’eau de l’Alibori. Les champs sont identifiés en fonction de la culture :

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- fari : champ collectif éloigné de la concession. Si l’on y cultive du blé, il prend le nom de kotokolofari ; avec des haricots, il s’appellera toungourifari. - lambo : potager situé le long du fleuve Alibori. On y cultive des pommes de terre, des tomates et des plantes aromatiques. - kossia windi banda : champ voisin de la concession. On y cultive du maïs et du gombo. - gourou banda fari : champ situé au-delà du fleuve. - weiborafari : réservé aux femmes, situé à l’intérieur de leurs maris respectifs, puisque ce sont eux qui en concèdent l’utilisation d’une partie à leur femme. Il est nommé demsitarey si on y cultive des arachides, ou hamofari pour la culture de sorgho. - sinkafatarey : champ de riz. Les habitants de Kargui n’utilisent pas les rives du fleuve Niger à des fins agricoles : c’est une zone fortement inondable, et son exploitation n’est pas nécessaire, en raison de la proximité du fleuve Alibori et de la connaissance des techniques d’irrigation rudimentaires. |morphologie du village| Les cours d’eau et les caractéristiques du terrain influencent de manière décisive la morphologie et la possibilité d’expansion du village. A l’est, le fleuve Niger, au sud l’Alibori constituent autant de limites. Comme cela se produit

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souvent dans les implantations d’Afrique équatoriale, la route qui traverse le village est un élément décisif : c’est l’axe autour duquel s’organise sa croissance, un axe qui facilite l’accès à Kargui, son marché, ainsi qu’à d’autres implantations. Les activités principales s’organisent sur le bord de la route, qui joue aussi un rôle décisif dans le quotidien de la population. La richesse du village se reflète de manière évidente sur son tissu urbain et dans son architecture, où des éléments modernes se fondent dans les structures traditionnelles. Les concessions, en effet, sont constituées d’un ensemble de structures traditionnelles et modernes qui donnent lieu à des agrégats aux caractéristiques particulières : des structures rectangulaires en brique, avec des loggias de bois et des toits métalliques jouxtent de petites cabanes circulaires de terre, de briques et de paille - le tout étant délimité par les enceintes traditionnelles. Les édifices qui symbolisent le pouvoir traditionnel et religieux, à savoir, la concession du chef du village et la mosquée principale, se trouvent au centre du village, le long de l’axe perpendiculaire à la route. L’importance de la productivité agricole a exigé l’édification d’entrepôts de grande dimension, protégés et sûrs. On peut en effet trouver dans le village les différentes structures de ce type, comme par exemple,

l’édifice moderne de grandes dimensions qui est situé à l’entrée du village. |éléments typiques| La concession du chef du village présente un élément particulier : elle se compose de trois édifices rectangulaires, disposés perpendiculairement les uns par rapport aux autres, de façon à former une sorte de patio ouvert sur la route. La maison dans laquelle vit le chef du village est constituée de différentes pièces, avec un accès par un portique externe, qui n’est pas une simple structure de bois juxtaposée au bloc maison, comme il advient habituellement, mais un véritable prolongement de la structure du toit – la continuité ainsi garantie étant destinée à créer un espace d’ombre et comme une cloison entre la maison proprement dite et la court ouverte. |points critiques| La position du village, délimité par les fleuves Niger et Alibori, et le parc du W devient problématique surtout durant la saison des pluies. Le Niger en effet déborde et inonde une bonne part des terrains situés à l’est du village. La crue arrive près de la route Kouara Tedji, détruisant les concessions et obligeant les habitants de la zone à reconstruire leurs maisons à l’ouest du village, ce qui augmente de manière considérable la densité et la pression anthropique de la population résidente.

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D’autres dynamiques de conflit sont liées à la superposition durant certaines périodes de l’année entre les activités agricoles concentrées dans la zone de Kuta et Kangari Gambou et la transhumance des Peuls, qui utilisent les mêmes ressources naturelles. |relation avec le parc| Les habitants du village n’ont pas une perception correcte des limites administratives du village, spécialement en ce qui concerne la position de la limite du parc du W. En effet, une vaste zone, qui appartenait traditionnellement au village, se trouve aujourd’hui incluse dans le parc, obligeant à la redéfinition de ses limites. C’est aussi ce qui a provoqué des conflits avec les autorités du parc. Les habitants disent s’attendre à des clarifications et à davantage d’informations de la part des techniciens du service des Eaux et Forêts.

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B03

B03 | KOMPA lat 12.2015 long 3.02419

|pays| Bénin |typologie| village mère |nombre d’habitants| 2524 |nombre de concessions| 160 |date de fondation| vers 1900 |distance de la limite du Parc| 10 km |ville la plus proche| Gaya |phénomènes migratoires | immigration |ethnie principale| Dendi |éléments traditionnels| arbre sacré |éléments modernes| maison carré |territoire| Le village de Kompa est situé

en position stratégique entre le parc du W qui le délimite à l’ouest et le fleuve Niger, qui marque également la frontière politique avec l’Etat du Niger à l’est. La proximité du fleuve et de la lisière du parc constituent la limite physique de son expansion, même si celle-ci est favorisée par les caractéristiques morphologiques du terrain environnant. La présence de différents cours d’eau et d’une zone de colline font que les terres sont fertiles et adaptées à l’agriculture, à l’élevage et à la pêche. Il s’ensuit une forte pression démographique ainsi qu’une forte pression de l’immigration, et en conséquence une exploitation progressive de tout le territoire, jusqu’aux terres se trouvant à l’intérieur de la zone protégée du parc : la question de l’occupation des sols devient alors problématique. |population| Kompa, en langue dendi signifie « le premier » ; ce nom évoque l’importance politique du village en la reliant à l’histoire de sa fondation. Marmari, originaire du Mali, en fit le noyau central du royaume Dendi. Seuls trois des huit fils de Marmari ont eu accès au pouvoir : c’est ce qui explique la distribution spatiale du village. Celui-ci, en effet, se développe à partir d’un noyau central. Viennent ensuite les quartiers des lignages Marmari, Bomberi et Gasari, qui héritèrent du pouvoir. Il est aujourd’hui difficile de retrouver

à Kompa l’organisation territoriale caractéristique de la société Dendi, car les différentes vagues migratoires l’ont affaibli. Le village se structure sur trois niveaux différents : Dijda, le niveau inférieur, qui concerne la maison ; Windi, la concession, l’espace occupé par la famille élargie ; Korédji, le quartier des familles de lignage royal. A chaque niveau correspond une figure de référence, liée en général aux rôles traditionnels de la famille (père, grand-père). Le chef de village, choisi parmi les quatre lignages royaux, joue un rôle fondamental dans la résolution des conflits entre les habitants, dans la distribution des terres, et demeure la figure de référence pour toute la communauté. En revanche, l’autorité administrative, est reconnue légalement, mais uniquement au niveau formel, dans les relations entre le village et les institutions et pour la récolte des impôts étatiques. Aujourd’hui, Kompa compte 2524 habitants, auxquels s’ajoutent les 865 habitants des hameaux. Le village connaît une croissance constante, une expansion qui devient de plus en plus problématique en raison de l’insuffisance de terres disponibles. Du fait du surpeuplement et de la saturation progressive des terres cultivables, le village s’est étendu vers le nord, le sud et l’ouest, créant ainsi un réseau de dix villages

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(Kompakouarakomboï), tous situés en fonction du Niger, dont Kompa est le village mère. La richesse du village et de ses terres attire constamment des étrangers, qui viennent à la recherche de travail ou de possibilité de faire du commerce. Sept ethnies différentes sont en effet présentes, même si l’ethnie Dendie reste majoritaire. Deux facteurs expliquent cette expansion : la nature alluvionnaire de la vallée, qui favorise le développement agricole, et la position stratégique du village, au centre de flux commerciaux qui attirent les étrangers en provenance du Nigeria, du Niger, du Burkina Faso et du Mali. |activité économiques| L’activité économique la plus diffusée demeure l’agriculture, suivie du commerce, de l’élevage, de la pêche et de l’artisanat. Les femmes s’occupent des activités domestiques et agricoles, du petit commerce, de la récolte des fruits et des plantes médicinales. La production agricole est plutôt variée, allant des cultures traditionnelles et de saison, à de nouvelles cultures, variant selon les périodes de l’année, ce qui permet une production continue. La variété des produits est destinée à l’autoconsommation mais elle est aussi source de grande richesse, en liquidités, grâce à l’accumulation liée à la

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production continue ainsi qu’à la demande de produits non traditionnels de la part des nombreux villages environnants qui ne les cultivent pas. Pour la commercialisation de tous les bien produits, on a créé une zone réservée au le marché : vaste, elle est aménagée avec les structures traditionnelles en bois. |morphologie du village| Caractéristique du village, la concentration des habitations en son centre s’explique par deux facteurs, morphologique (les pentes douces en direction du Niger peuvent être exploitées pour l’agriculture) et hydrographiques (la présence des fleuves et la saison des pluies). Le village se caractérise donc par un centre habité très dense, autour de la place centrale, par des rues étroites et par un labyrinthe de maisons rectangulaires très proches les unes des autres. La construction des structures administratives au sud du centre d’origine et un nombre considérable de mosquées correspondent au développement le plus récent du village La présence de différentes ethnies et cultures se reflète évidemment dans l’aspect du village, dans son tissu urbain et dans son architecture. Nous pouvons en effet trouver les concessions Dendies typiques jouxtées par celles des Haoussa, mais aussi des ensembles

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qui présentent les caractéristiques de l’une et de l’autre. Les premières se caractérisent par des édifices rectangulaires en brique, organisés en optimisant les espaces, alors que les secondes sont marquées par la présence de structures circulaires de terre et de paille disposées en cercle. Les typologies d’habitat se mêlent dans des combinaisons variées : circulaires avec un toit de paille, rectangulaires avec un toit métallique, ou en paille avec une, deux ou trois pentes ou encore rectangulaires avec un toit plat en terre ou en paille. |éléments typiques| La concession du chef de village typique Dendi est de dimensions modestes, et les espaces entre les structures sont réduits. La maison du chef de village est située tout près de l’entrée. En face d’elle, un édifice est réservé aux plus proches des membres de sa famille. Une structure de bois et de paille unit les deux structures et crée une zone d’ombre sous laquelle se tiennent souvent les rencontres avec le chef du village. Les enceintes ont aussi des caractéristiques différentes, elles peuvent être en terre, brique, de canne ou en un mélange de matériaux. La grande variété des structures témoigne de l’interpénétration entre les différentes coutumes mais aussi de la grande innovation

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du système traditionnel. L’immigration, les échanges commerciaux constants et les contacts avec d’autres villages et d’autres réalités comptent parmi les facteurs décisifs de cette perméabilité. |points critiques| Le territoire connaît un développement exceptionnel et, en conséquence, une forte croissance démographique. Or dans ce contexte de pression démographique, l’occupation des sols, la compétition pour l’utilisation des terres, l’immigration Peule, l’immigration liée à une la centralité du village dans les flux internationaux du commerce constituent autant d’éléments provoquant des tensions. Facteurs de croissances et origine des conflits sont liées. |relation avec le parc du W| La relation avec le parc se caractérise par la proximité et la forte poussée expansive du village, qui provoque alors un conflit avec la présence d’une zone protégée. Autre facteur de tension : l’interdiction de la chasse dans la zone protégée, quand elle y était habituellement pratiquée, par quelques couches de la société, qui se trouvent désormais contraintes de changer d’activité.


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B04 | MOKOLLE’ lat 12.2015 long 3.02419

|pays| Bénin |typologie| village mère |nombre d’habitants | 2524 |nombre de concessions| 160 |date de fondation| vers 1900 |distance de la limite du parc | 10 km |ville la plus proche | Gaya |phénomènes migratoires | immigration |ethnie principale| Mokulle |éléments traditionnels| arbre sacré |éléments modernes| maison carrée |territoire| Le village de Mokollé se

situe dans le département d’Alibori, sur la commune de Malanville, et s’étend sur un territoire occupé par la forêt de Goungoun, qui, en raison de sa position et de l’abondance de ses ressources en eau, est aussi fréquenté par les pasteurs Peuls. Il est en outre entouré par différents cours d’eau saisonniers, qui, historiquement, ont permis à ses habitants de se défendre contre les vagues d’invasion. A l’intérieur, différents hameaux temporaires présentent la particularité d’être constitués de concessions circulaires encloses et donc séparées les unes des autres par les champs cultivés par chacune des familles. Les limites du village, selon la perception de ses habitants, correspondent au nord-ouest, avec le lac Lagadje, où de nombreux animaux sauvages de la zone viennent boire – ce dont bénéficient les chasseurs -, à l’est avec la colline Boto, au sud, avec le lac Fangalla, au sud-est avec la forêt Goungoun, et au nord avec le cours d’eau Goukpa, un affluent du Sota. |population|La pression anthropique dans le village dépend fortement des variations climatiques saisonnières et la répartition de la population change de manière notable au cours de l’année. Durant la saison sèche (de janvier à juin), environ 400 personnes sont concentrées dans le noyau central du village car le travail dans les hameaux est terminé. Il

faut y ajouter les habitants des campements Peuls (environ 960 personnes). Le village compte donc environ 1300 personnes, qui, se déplacent, pour la plupart, durant la saison des pluies vers les zones limitrophes, proches des terres cultivées. En ce qui concerne la répartition ethnique de la population, on peut constater que les familles Peules, concentrées dans les champs, sont bien plus nombreuses (environ trois fois plus) que les familles Mokelle si on considère la totalité du territoire du village – celles-ci étant les plus nombreuses dans le centre du village. On y constate différents types de mouvements migratoires : immigration à caractère permanent de familles qui viennent dans cette zone à la recherche d’un lieu favorable pour s’installer durablement. Il s’agit principalement de Djermas et d’Haoussas provenant du Niger, qui suivent les processus d’installation traditionnels en demandant la terre au chef des terres du village (Magazi Yoro) et en instaurant des processus d’implantations durable. Le second type est l’immigration à caractère temporaire, de personnes qui se déplacent de manière saisonnière, à la recherche de travaux dans les plantations de coton, pour ensuite revenir dans leurs familles, dans le sud du Bénin, qui travaillent comme vendeurs de

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boissons alcoolisées ou dans la restauration. |activités économiques | L’agriculture est la principale activité économique, elle est pratiquée en utilisant des techniques de rotation et d’association. Dans le village de Mokollé, les paysans préfèrent cultiver leurs champs avec des cultures commerciales, et donc gagner de l’argent pour leur famille, alors que les champs collectifs son cultivés uniquement pour la production de cultures vivrières. Dans le cas du coton, ce sont 200 à 300 tonnes qui sont produites, sur une surface d’environ 273 hectares. L’exploitation de la forêt de Gougoun est une autre forme d’utilisation des ressources naturelles. Il s’agit d’une zone protégée où la cueillette, l’élevage et l’agriculture sont permis mais contrôlés. La forêt constitue une ressource très importante pour l’approvisionnement en fruits et autres plantes comestibles, et comme lieu de cueillette des herbes médicinales. La conversion de vastes zones du territoire en zones agricoles a beaucoup réduit les possibilités de chasse. C’est pourquoi cette activité se déroule à l’intérieur de la zone protégée du parc, surtout durant la nuit. La forêt est aussi un lieu privilégié pour l’élevage, et constitue une alternative aux zones désormais inaccessibles du parc, car

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la présence d’herbes, d’arbres et de quelques mares, même pendant la saison sèche y est garantie. |morphologie du village| La répartition des concessions et de la population à Mokollé présente des caractéristiques originales : grâce à la disponibilité de fonds, liées à la culture et la commercialisation du coton, on assiste à une transformation progressive des typologies de construction dans la zone, avec un passage graduel à des structures de type moderne. En outre, une hiérarchisation territoriale ressort de la différenciation typologique des habitations, et de leur mode de construction : les structures modernes se concentrent dans le noyau central du village de Mokollé, les résidences saisonnières sont situées dans une première ceinture périphérique, et les différents villages Peuls se trouvent dans la deuxième ceinture. Le noyau du village est caractérisé par des édifices rectangulaires modernes construits en brique et, dans la majeure partie des cas, avec des toits et des huisseries métalliques. Vers la périphérie, les concessions sont davantage dispersées car elles sont entourées de champs et marquées par les structures circulaires traditionnelles. Deux facteurs sont à l’origine de cette

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différence si frappante entre les deux zones : l’un est culturel, le second, démographique. Alors que la majeure partie de la population stable et autochtone réside dans le centre, les résidents saisonniers, venant souvent du Niger et du Burkina Faso s’installent dans la périphérie. En outre, durant la saison des semailles et de la récolte, le centre se vide et la périphérie se remplit de travailleurs qui se consacrent à l’activité agricole, et lorsque la récolte est terminée, la population résidente revient dans le noyau central du village pour le traitement et la commercialisation des produits, tandis que les immigrés saisonniers rentrent dans leur village de provenance. La répartition spatiale de la population suit le rythme des saisons. |éléments typiques| La concession du chef du village diffère des concessions des villages traditionnels : elle comporte un nombre considérable d’édifices rectangulaires organisés comme un petit quartier, et dépourvus de délimitation bien définie. Elle se situe dans le voisinage de la place principale et est facilement accessible par la route. La disposition des structures crée de petites places où se déroulent les activités quotidiennes. A l’intérieur du complexe, la résidence du chef du village n’occupe pas

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une position dominante, et se distingue des autres uniquement par la présence d’une zone d’ombre créée dans la partie antérieure de l’édifice. |points critiques| Les ressources naturelles de la zone sont utilisées tant par les habitants du village que par les Peuls qui, durant la transhumance, abandonnent les cours d’eau situés à l’intérieur du parc du W pour aller dans la forêt Goungoun. C’est à cause de cette concurrence que les premiers conflits entre les habitants Mokolles et les Peuls se sont produits : ils sont essentiellement liés à la gestion des ressources en eau et aux dommages subis par les cultures à cause du bétail. Le prestige insuffisant, et en déclin, en raison de phénomènes migratoires désormais sans bornes, du chef de terre Mokolle accroît ces tensions. |relation avec le parc du W| Le village se trouve à une distance certaine de la zone du parc, sa population ne créé pas d’interférences avec la zone protégée, puisqu’elle utilise d’autres zones pour ses activités de production.


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B05

B05 | SOMPEREKOU lat 11.31095 long 2.49046

|pays| Bénin |typologie| village |nombre d’habitants| 1200 |nombre de concessions| 52 |date de fondation| vers 1950 |distance de la limite du parc | 40 km |ville la plus proche| Kandi |phénomènes migratoires| immigration |ethnie principale | Batonou |éléments traditionnels| arbre sacré |éléments modernes| maison carrée |territoire| Le village Sinkpérou est situé

sur un haut plateau, qui descend jusqu’au fleuve Alibori, et se trouve au sud du village d’origine Sompèrekou, à environ cinq cents mètres de la route nationale qui relie Kandi à Banikoara. Ses limites sont, à l’est, l’hameau Gamagou, à l’ouest, la colline de Gasounongourou, au sud le fleuve Alibori, et au nord la colline Wagangourou. En outre, les hameaux de Bounnin, Kpego, Trabo, Warangourou, Biné, Abidjan, Yagbo, Pettiré, Koka Gbebagou et les campements Peuls de Baakani, Nabarka, Goubannou, Gannou, Yakho Bah Garou, Pete Ibbi, Monnon et Bello Garou dépendent de Sinkpèrou. |population| Le noyau central du village compte 1267 habitants, pour un total de 84 concessions. Sur le reste de son territoire, 1615 personnes résident dans les hameaux et 455 personnes dans les campements Peul. Concernant la répartition ethnique de la population à Sinkpèrou, les Batounou constituent le groupe principal, et la présence d’éléments Gando est forte. Les deux groupes cohabitent dans le village, tout en présentant aujourd’hui de fortes différences d’organisation sociale et territoriale. On constate deux typologies de phénomènes migratoires dans le village : il s’agit d’abord de la venue de deux familles Djermas depuis le Niger pour faire du commerce dans la zone. Elles gèrent deux commerces de produits

alimentaires dans le village. Ce sont ensuite les hommes Gourmantchés, qui viennent du Burkina Faso pour travailler dans les champs de coton et de maïs des familles du village. Ils résident donc dans les concessions de leurs employeurs durant la saison agricole. Il est intéressant d’observer que ce groupe ethnique joue aussi un rôle dans les pratiques symboliques de type personnel à l’intérieur du village. Les Gourmantchés sont considérés comme clairvoyants, c’est donc à eux que l’on s’adresse pour prévoir les lieux et le moment le plus adapté pour pratiquer les sacrifices |activités économiques|L’agriculture est l’activité principale des habitants du village. Les deux ethnies, les Batonou et les Gambo, se consacre de cultures semblables : coton, sorgo, maïs et arachides – à ceci près que seuls les Batonou cultivent du riz, le long des cours d’eau du village. Les autres activités sont la cueillette des fruits et des herbes (pratiquée principalement par les femmes) et l’élevage, pratiqué surtout dans les campements Peuls. |morphologie du village| Situé à quelques mètres de la route nationale qui relie Kandi à Banikoara, le village occupe une position qui favorise le commerce et l’échange avec les centres voisins. La facilité d’accès a permis un processus rapide de modernisation. Le

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village se développe le long d’une route qui le traverse et qui constitue un élément important pour les activités et le quotidien de la population. Les concessions situées dans le voisinage de la zone centrale se caractérisent par la présence d’édifices rectangulaires en terre et en brique avec des toits et des huisseries de bois et de métal. Les espaces et la division entre les différentes concessions ne sont pas toujours délimités par des enceintes ; c’est dans certain cas la position des structures qui définit les limites et les propriétés. La répartition des concessions et de la population témoigne de ses origines et illustres ses comportements démographiques. Les demeures fixes de la population autochtone sont situées dans une zone dense, comportant un nombre important d’édifices. Au contraire, en allant vers le sud, on trouve les concessions, de construction plus récente, caractéristiques du groupe Gando. Plus loin de la route, tant à l’ouest qu’à l’est, le tissu urbain est moins dense et l’on trouve les concessions temporaires, c’est-àdire les concessions destinées à la résidence provisoire imposée par la culture des champs. Les demeures saisonnières ne sont pas uniquement réservées à la population autochtone qui se déplace vers la périphérie. Les travailleurs étrangers venus du Niger et

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du Burkina Faso pour la récolte du coton y habitent également. |éléments typiques| La concession du chef religieux se trouve dans la partie sud du village. C’est dans un espace spécifique et considéré comme sacré, en raison de la présence des reliques d’un guerrier, situé dans sa maison qu’il pratique ses rites religieux. Il est fondamental de souligner la présence d’une ligne électrique et d’un éclairage public. |rapport avec le parc| La pression anthropique exercée sur le parc du W est plutôt basse, malgré le nombre considérable d’habitants. Le village jouit en effet d’une position privilégiée grâce au voisinage d’une autre zone protégée, la forêt supérieure de l’Alibori.


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BF01 | KONDJO lat 11.6207 long 2.0093

|pays| Burkina Faso |typologie| village |nombre d’habitants| 412 |nombre de concessions| 29 |date de fondation| vers 1950 |distance de la limite du parc| < 2 km |ville la plus proche| Diapaga |phénomènes migratoires| émigration |ethnie principale| Gourmantché |éléments traditionnels| arbre sacré |éléments modernes| maison carrée |territoire| Le village de Kondjo se trouve

au Burkina Faso, dans le département de Logobou, à proximité d’un petit fleuve saisonnier, le Pampabigabagou, et jouxte d’un côté la réserve partielle de Kourtiagou et de l’autre le parc du W, et s’étend sur les bords de la route nationale qui relie le Bénin au Burkina Faso. Le développement du territoire du village est donc limité par la présence de ces deux zones protégées et du défaut de buffer zone du côté du parc du W. Trois hameaux permaments (Niamonga, Natongou, Seri) et deux hameaux temporaires (Palboa et Bosswanga) se trouvent à l’intérieur du territoire. Ils sont habités uniquement durant la saison agricole et sont constitués de refuges provisoires et de hangars. |population| Environ 400 personnes vivent dans le noyau central du village, et 600, environ, dans les hameaux, ce qui représente donc mille habitants sur la totalité du territoire du village. Il n’y a pas de campements Peul. L’homogénéité ethnique du village est forte, la majeure partie des habitants étant de l’ethnie fondatrice du village, les Gourmantchés. Le village connaît différents types de phénomènes migratoires : d’une part, des travailleurs du village qui se déplacent dans le nord du Bénin pour la récolte du coton, ou de commerçants qui vont jusqu’au Togo et au Nigéria pour acquérir des biens, de l’autre

des familles ont immigré, depuis le Nigéria, et se sont installées dans le village, donnant lieu à des processus d’enracinement, tels que la création de petites activités commerciales (boucherie, boulangerie) et la construction et la construction de la première mosquée du village. |activités économiques| L’agriculture est l’activité productive prédominante. Il s’agit en particulier de cultures commerciales, comme le coton, gérées par la SOFITEX, mais aussi de culture de céréales et de légumes. On observe que les techniques modernes et les produits chimiques sont utilisés uniquement pour la culture du coton, les méthodes traditionnelles étant employées pour toutes les autres. L’élevage est interdit, en raison du voisinage du village avec le parc du W, mais les habitants laissent paître leurs moutons dans une plaine, appelée en effet Liankwalikanou (le lieu de pâturage des animaux) ou à l’intérieur de leurs concessions. |morphologie du village| Kondjo est un village de fondation récente, né du travail des Gourmantchés dans la province de Kardiaga, au Bénin. Frappé par une épidémie de maladie du sommeil, le village a été abandonné et ses habitants se sont déplacés d’abord dans la zone de Komboangou, puis à Nougourim, pour s’établir finalement dans

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l’un des hameaux de l’intérieur du territoire. Ce sont ensuite des colons blancs qui ont imposé le nouveau nom Kondjo, dont l’origine provient du fleuve situé à proximité du village, le Pendjo. On observe que dans ce village, contrairement à ce qu’il se passe dans le reste du pays, les concessions ne sont pas disséminées dans le territoire et entourées de zones cultivées, mais que les unes et les autres sont concentrées (alors qu’habituellement les champs sont éloignés des concessions). Ceci provient assurément de l’isolement dans lequel se trouve le village et explique pourquoi l’on trouve des villages temporaires à proximité des lieux où les activités agricoles sont pratiquées. Le noyau du village est composé de deux quartiers Niamtoali (le quartier de devant, à l’ouest) et Niampoli (quartier par derrière, à l’est). Dans chacun des deux quartiers, la plupart des constructions sont de type traditionnel, constituées de maisons circulaires, en boue, avec un toit de palmes, disposées en cercle autour d’un espace ouvert – ce qui est habituel chez les Gourmantchés. |éléments typiques| Les concessions les plus anciennes sont construites selon les canons traditionnels Gourmanchés, avec des

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édifices dont la base est circulaire, en terre et le toit en paille, disposés en cercle avec de vastes espaces communs et des zones pour le déroulement des activités quotidiennes. Les concessions les plus récentes se caractérisent par la présence d’édifices rectangulaires en briques. L’alternance de petites structures présentant des caractéristiques semblables aux structures circulaires, avec toutefois un plan carré, avec les structures typiques de l’espace traditionnel constitue une typologie particulière. |rapport avec le parc du W| Kondjo présente les particularités d’un village situé à l’intérieur de la zone protégée : les habitants considèrent que leurs interventions, tant sur le parc du W que sur la réserve de chasse, sont légitimes. Ces lieux sont, en effet, conçus comme part intégrante du village. En outre, on trouve ici des animaux et des plantes, qui ont déjà disparu ailleurs, en raison de la déforestation progressive, provoquée par le besoin de zones toujours plus vastes pour la production du coton. |points critiques| La proximité du parc reste l’une des particularités et des problématiques majeure du village. Elle limite en effet fortement la poussée d’expansion du village. Or la population tend à augmenter et à employer des surfaces toujours plus grandes pour la culture du coton. Une partie

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de la population est donc obligée de quitter le village pour trouver du travail ailleurs - au Bénin ou au Nigéria habituellement. L’absence de lieu réservé au marché explique également les éventuels déplacements saisonniers d’une partie de la population. Celle-ci se dirige alors vers les grands centres pour la commercialisation des produits.

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BF02 | LARA lat 11.8043 long 1.9924

|pays| Burkina Faso |typologie| village |nombre d’habitants| 800 |nombre de concessions| 143 |date de fondation| vers 1900 |distance de la limite du parc| < 1 km |ville la plus proche| Kotchari |phénomènes migratoires| émigration |ethnie principale| Gourmantché |éléments traditionnels| arbre sacré |éléments modernes| maison carrée |territoire| Le village de Lara se trouve à la

limite occidentale du parc du W, à proximité du cours d’eau Yanbayoula Ufanu et du fleuve Kubbagu. Il est situé dans la province de Tapoa, qui correspond à une part de l’ancien règne des Gourma. Il s’agit donc de lieux qui ont toujours été habités par les Gourmantchés. Le territoire du village est délimité à l’est par la piste qui longe le parc du W, à l’ouest par le village de Bandouo, au nord par le hameau Foanghili et au sud par la piste qui longe le parc du W et par Kubbagu. |population| Toute la population de Lara est Gourmantché, et on estime un total d’environ 850 personnes, réparties dans les trois quartiers comme suit : Lara centre (300 habitants), Lara Bussouali (292 habitants), Lara Fantama (260 habitants). La répartition du pouvoir Lara constitue une originalité. Sans chef traditionnel, le village dépend du chef de village Kotchari et appartient à la famille Combari. Un délégué légal y est toutefois présent : représentant Administratif du Village (RAV), il est choisi par les habitants et nommé par le préfet. Il appartient à la famille des Codjati, parente de celle des Combari. Toutes deux entretiennent des relations d’aide mutuelle. Concernant la sphère religieuse, les habitants du village pratiquent leurs rites dans la forêt Tambepua, le lieu sacré de Lara. Il s’agit

d’une forêt de baobabs et karités, et c’est dans une clairière que sont effectués les sacrifices rituels. Ce sont surtout les membres de la famille Codjati qui les pratiquent, pour résoudre les problèmes (pour invoquer la pluie par exemple, quand la saison humide est longue à venir). |activités économiques| L’agriculture est la principale activité des habitants du village de Lara. Différents types de champs existent, nommés de manière différentes en fonction de leurs utilisateurs, de leur position et du type de culture. Les champs proches de la concession sont appelés afellola, les champs individuels masculins, ussalo kwano, les champs du chef de la concession, litchadjani, et se trouvent à l’intérieur du village. Mais certains champs sont aussi éloignés de la concession : les odiedankwo, c’est-à-dire les champs collectif de chaque concession, l’ukuampo, les champs collectif du village et enfin les kwagu, champ en jachère. L’élevage est en revanche uniquement pratiqué sous forme familiale. Il était autrefois pratiqué à large échelle mais, avec la création du parc, le pâturage a été interdit dans les zones protégées. |morphologie du village| Le village prend le nom d’une espèce de tubercule présent dans la région (Dioscorea villosa). Quand il

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fut fondé, en l’absence de terrains cultivés, il était facile de trouver des plantes sauvages comme la lara. La tradition orale attribue la fondation de ce nouveau village, œuvre de Codjati Tambaro, arrivé de Kotchari, au besoin de terres à cultiver. On peut, dans le village de Lara, distinguer trois quartiers : Lara centre, Lara Bossuali et Lara Fantama. Du point de vue administratif, Lara constitue un village, même s’il s’agit en réalité d’un hameau distant du village de Kotchari. C’est pourquoi un délégué se trouve à Lara : il s’agit d’un représentant administratif du village, mais il n’y a pas de chef traditionnel. Celui-ci réside à Kotchari. |éléments typiques| On peut identifier trois modèles principaux de type d’habitat. Chacun d’entre eux peut présenter quelques variantes. On trouve, en effet, les maisons traditionnelles, en terre et en paille, mais aussi de petites structures dont les caractéristiques sont semblables aux maisons circulaires, avec toutefois un plan carré, et un toit de paille et des édifices de plus grande dimension, à plan rectangulaire et toit plat ou inclinés avec une ou deux couches de terre, de bois et de métal. On constate parfois dans les maisons de construction récente la présence d’éléments modernes avec des huisseries métalliques. Les espaces situés entre les concessions comptent aussi des structures destinées à emmagasiner les produits agricoles. Il s’agit

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de constructions traditionnelles, regroupées à côté des habitations et au milieu des zones cultivées. |relation avec le parc du W| Les habitants avaient l’habitude de pratiquer bien des activités sur le territoire qui fait désormais partie du parc W : la chasse, la cueillette de fruits sauvages et d’herbes. La création du parc a donc créé une situation conflictuelle : les habitants revendiquent le droit d’exercer ces activités dans les lieux traditionnels, et de la manière traditionnelle, et continuent, dans la plupart des cas, à le faire en cachette et illégalement. Compte tenu du lien très fort que les habitants du village entretiennent avec la terre, un départ volontaire est inconcevable. La cohabitation reste donc complexe. |points critiques| La relation entre le parc du W et la population est difficile, et la récente introduction de la culture du coton constitue une problématique supplémentaire. Elle a provoqué une augmentation vertigineuse de la demande de terre agricole ainsi que le risque d’une exploitation excessive du sol.

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BF03 | MANGOU lat 12.0725 long 1.874

|pays| Burkina Faso |typologie| village d’origine |nombre d’habitants| 370 |nombre de concessions| 47 |date de fondation| vers 1900 |distance de la limite du parc| <10km |ville la plus proche| Kotchari |phénomènes migratoires| émigration saisonnière |ethnie principale| Gourmantché |éléments traditionnels| arbre sacré |éléments modernes| maison carrée

|territoire| Le village appartient au département de Diapaga. Il est entouré de collines et traversé du nord au sud par la plaine de Mangou. Le premier site du village se trouvait à l’intérieur du parc, à Boulfouanou, mais à la suite d’une épidémie qui a frappé le bétail de la zone avant qu’elle ne devienne zone protégée, la population a été obligée par les autorités coloniales à changer de site. C’est ce qui explique la localisation actuelle de Mangou. Deux hameaux agricoles, Bagmangou et Touobouli, ainsi qu’un campement Peul – ce qui est inhabituel dans la partie burkinabé du parc - se trouvent également sur le territoire du village. |population| Une population de 720 habitants réside sur la totalité du territoire du village. C’est moins que dans certains « villages satellites » de Mangou (Tanfolkouna, Kimgoandi, Koumalgou, par exemple). Concernant la répartition ethnique, tant les Gourmantchés que les Peuls sont présents, mais à la différence de ce qui se produit à la périphérie du parc au Bénin ou au Niger, ceux-ci ne se sont pas installés dans des campements autour du village, mais à l’intérieur du noyau central de Mangou. Dans cette zone, la plupart des Peuls se consacrent à l’élevage ; c’est pourquoi ils abandonnent leur maison une bonne partie

de l’année, pendant la transhumance. |activités économiques| L’agriculture est la principale activité économique. Viennent ensuite la cueillette et de l’élevage. Dans le secteur agricole, la commercialisation, récente, du coton est importante, et constitue une grande innovation dans le système économique traditionnel. La richesse en liquidités augmente le pouvoir d’achat et permet le commerce de nouveaux produits. L’agriculture est pratiquée tant au niveau privé que collectif, pour répondre aux besoins familiaux dans le premier cas, pour la commercialisation des produits dans le second. L’absence de lieu réservé au marché dans le village oblige les habitants de Mangou à se rendre à Katchari pour commercialiser leurs produits. |morphologie du village| Mangou est le village mère de bien d’autres villages de la périphérie du parc du W, nés de la demande croissante de terrains cultivables. On assiste donc à un dépeuplement progressif du centre d’origine (qui ne compte désormais que 370 habitants) en faveur des villages satellites (plus de 2000 personnes résident à Koumalgou) ainsi qu’à une perte d’influence du pouvoir exercé par Mangou. Le village compte plusieurs lieux sacrés. Le cas de la plaine de Kurla, situé à l’intérieur

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du parc du W, mérite d’être évoqué. Les Gourmantchés accordent une telle importance aux rites traditionnels que lorsqu’ils n’ont pu continuer à les pratiquer dans la zone du parc nouvellement créé, les prêtres ont choisi un nouveau lieu rituel, où ils ont installé un nouveau fétiche, l’ancien étant resté dans sa position d’origine, de façon à garantir le lien avec les génies du lieu. |éléments typiques| La concession du chef du village est l’une des plus grandes. Elle compte onze structures circulaires, une rectangulaire et différentes zones d’ombre créées par des constructions de bois et de paille. Trois des édifices ont des W.C., sept sont résidentiels, et le dernier est un édifice public. Ce dernier n’est pas un véritable édifice mais une cabane avec une double ouverture, vers l’extérieur et l’intérieur de la concession : il s’agit de la salle du chef du village. Cet espace, destiné à l’accueil et aux rencontres et réunion, comporte un banc semi-circulaire en terre réservé au chef du village. La cabane jouxtant l’entrée de la concession est un lieu de très grande importance : elle symbolise le pouvoir et joue un rôle notable dans les dynamiques sociales du village. |relation avec le parc du W | La dimension

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symbolico-religieuse de quelques-unes des activités traditionnelles qui se déroulent à l’intérieur du parc est l’une des raisons qui explique les difficultés de la population locale à accepter les limitations imposées par l’institution de la zone protégée. |points critiques| La hausse de la demande de terres, les obstacles géographiques à la croissance du village et la proximité du parc ont conduit un nombre de plus en plus important de jeunes à abandonner Mangou pour se rendre dans des villages plus grands des environ.

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N01| KELLY TASSI FOULANGAY DO lat 12.0725 long 1.874

|pays| Niger |typologie| campement Peul |nombre d’habitants| 179 |nombre de concessions| 26 |date de fondation| vers 1960 |distance de la limite du parc| < 5 km |ville la plus proche| Dosso, Gaya |phénomènes migratoires| saisonniers |ethnie principale| Peul |éléments traditionnels|maison de paille |éléments modernes||territoire| Kelly Tassi Foulangay Do est

un campement Peul situé à l’intérieur du territoire du village de Bomba, à peu de distance du hameau de Kally Tassi II, qui est habité par les Djerma, à proximité de la frontière nigérienne avec le Bénin, frontière constituée par le fleuve Niger. Le territoire de ce campement est délimité à l’est par le bassin de Baroubangou et celui de Tollobangou. La limite est marquée en revanche par la présence d’un Garbeyna (arbre de gomme arabique) à l’ouest, d’une grosse termitière et d’arbres de tollo situés le long d’un cours d’eau appelé, pour cette raison, Tollobangou au nord, et de collines au sud. |population| Dans les campements vivent 179 personnes. Elles sont installées dans 26 concessions. La plupart des habitants du campement di Kalley Tassi Foulangay Do sont Peuls, originaires de Boybangou (d’où vient aussi le fondateur du village). Presque 10% de la population masculine émigre au Bénin durant la saison sèche, pour se consacrer au commerce. Il s’agit surtout d’hommes âgés qui ne peuvent plus pratiquer la transhumance mais qui s’organisent en groupe pour gagner de petites sommes d’argent, grâce à la vente du bétail. |activités économiques| Pour l’ethnie Peule, l’élevage n’est pas uniquement une

activité économique. C’est le point central autour duquel s’articule toute la vie sociale du village. En raison des changements climatiques et de l’augmentation de la pression anthropique qui réduit considérablement la zone de pâturage, les habitants de Kalley Tassi Foulangay Do commencent à se tourner vers l’agriculture pour leur subsistance, mais l’activité principale demeure assurément l’élevage, qui constitue la richesse des groupes Peuls mais surtout leur modus vivendi. Chaque année, au début de la saison des pluies, entre mars et avril, un groupe de vingt jeunes, avec 40 000 têtes de bétail, part pour les parcours de la transhumance, pour ne revenir qu’au terme de la saison humide, lorsque le bétail est ramené au campement et l’élevage pratiqué à l’intérieur du territoire du village. |morphologie du village| Il s’agit d’un campement Peul, appartenant au village de Boumba, dont la fondation remonte à 1960 et reste l’œuvre d’Aladji Soumana Bandi. Cet homme est originaire de Boybangou, un village habité essentiellement par les Peuls. C’est la présence de riches pâturages et le voisinage bénéfique du fleuve Niger qui expliquent le choix de cette localisation pour l’implantation. Le campement est formé de concessions

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(bade) plutôt distantes les unes des autres et disséminées sur le territoire, donc la structure essentielle consiste en deux ou trois édifices de paille et de forme ovale. Ils sont entourés de champs de céréales, sans enclos. Il s’agit d’un système d’implantation et de construction traditionnel beaucoup moins sophistiqué que ceux des villages d’agriculteurs. Là, au contraire, on utilise des matériaux plus durables et l’organisation spatiale de l’habitat est plus articulée. |éléments typiques| Une des caractéristiques des maisons du campement concerne la position de la porte d’entrée : elle est toujours orientée à l’ouest. Les édifices sont disposés en ligne, et non en cercle, comme dans villages d’agricultures du Bénin et du Burkina Faso. |relation avec le parc du W| La proximité du campement avec le parc du W est la principale cause de l’exploitation des ressources internes de la zone protégée par les habitants du village. Les motivations socio-culturelles, liées à la transhumance, jouent mais c’est aussi que, selon les pasteurs Peuls, les agriculteurs de Boumba et Bangou Bèri ont occupé les zones habituelles de pâturage pour leur culture. | points critiques | Le besoin de fournir au bétail des zones où la végétation et l’eau

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sont abondantes a conduit les pasteurs Peul à aller toujours plus à l’intérieur de la zone protégée. Ils sont alors confrontés à un autre problème : leurs activités traditionnelles sont illégales à l’intérieur du parc et sont punies par les agents des Eaux et Forêts du parc du W. Les pasteurs sont arrêtés et le bétail confisqué.

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N02

N02|KIWIRKOYE lat 12.0725 long 1.874

|pays| Niger |typologie| campement Peul |nombre d’habitants| 212 |nombre de concessions| 31 |date de fondation| vers 1980 |distance de la limite du parc| < 25 km |ville la plus proche| Dosso |phénomènes migratoires| saisonniers |ethnie principale| Peul |éléments traditionnels| maison de paille |éléments modernes| / |territoire|Il s’agit d’un campement Peul,

situé au nord est du parc du W et à l’extérieur de la zone tampon. Le campement de Kiwirkoye se trouve dans le canton de Boboye, dans la région Dallol Bosso, à l’intérieur du territoire appartenant au village de Belande. Il se dresse sur une plaine qui s’étend à l’ouest de la vallée du Dallol et qui est entourée de l’un des affluents du fleuve qui coule dans la vallée. A la différence des autres villages, il est un peu plus loin de la zone protégée du parc, mais l’influence de cette dernière reste tout aussi forte et décisive pour le développement économique et social de la population. Son extension est fortement conditionnée par la morphologie du terrain : en effet, le village est délimité par des zones d’eau, des fleuves temporaires et en conséquence de vastes zones où la végétation est florissante. |population| La population résidente est de 212 personnes, réparties dans 31 concessions. Les Peuls représentent l’ethnie dominante : ils viennent pour la plupart de la région de Gourma, sur la rive droite du fleuve Niger. Les mouvements migratoires qui caractérisent le camp Kiwirkoye relèvent essentiellement de l’émigration saisonnière d’une partie importante de la population masculine (20%) qui se dirige vers le sud, au Bénin, pour commercialiser le bétail au marché de Parakou, mais aussi sur la côte. Certains vont jusqu’à Lagos au Nigéria ou

à Bolga au Togo pour gagner assez d’argent pour acheter le nouveau bétail sur la route du retour, à Kiwirkoye. |activités économiques| L’élevage était à l’origine la principale activité, mais son apport alimentaire étant insuffisant pour la population - dont les besoins augmentent -, l’introduction de l’agriculture est devenue nécessaire. Là aussi, comme dans la majeure partie du territoire limitrophe du parc, le sol s’est grandement appauvri au cours des années, jusqu’à devenir peu productif. C’est ce qui explique la recherche constante de sources alternatives de subsistance. |morphologie du village| L’origine du campement remonte au siècle dernier, époque où son fondateur, qui venait de l’autre rive du fleuve, demanda et obtint du chef du village de Bellande le permis de s’installer sur son territoire. Le choix se porte sur ce terrain en raison de la présence d’herbe pour les animaux, de végétation, de cours d’eau et de terre à cultiver. La densité de la population et du tissu urbain est très inférieure à celle des autres villages. Les concessions, en effet, sont disposées en ordre dispersé sur le territoire et entourées de grands champs. Elles ne sont pas délimitées physiquement, et sont constituées d’environ trois ou quatre cabanes ovales, d’une ou deux

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cabanes rondes pour les W.C., et de granges (situées à faible distance). Les maisons sont de type traditionnel Peul : construites en bois et en canne, elles sont de forme ovale. Les structures se succèdent en ligne et les ouvertures, toutes orientées vers l’ouest, sont situées de façon à être à l’abri du vent. Non loin des cabanes, on peut trouver une zone d’ombre, liée à la présence d’un ou plusieurs arbres. Ceux-ci sont indispensables au déroulement des différentes activités quotidiennes. |éléments typiques| A l’intérieur de la maison, la répartition est d’espaces est bien définie et organisée. On entre dans un petit espace libre, avec une source d’eau. Le lit, surélevé par rapport au terrain, est situé immédiatement à droite. On peut trouver dans la dernière partie de la maison, tous les ustensiles de cuisine, en ordre, disposés les un sur les autres ou posés sur les étagères prévues à cet effet. A gauche de l’entrée, un étage surélevé par rapport au sol, sert de lit en cas de nécessité ou de plan d’appui. Les casseroles et les objets d’usage quotidien sont rangés dans les espaces situés sous les lits. Malgré ses dimensions réduites, l’espace est si bien organisé qu’il permet le déroulement de toutes les tâches quotidiennes.

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|relations avec le parc du W| La zone protégée, même si le campement de Kiwirkoye n’est pas dans son voisinage immédiat, joue un rôle fondamental dans les pratiques et les parcours de transhumance des habitants Peul. |points critiques| L’interdiction de l’utilisation des ressources naturelles de zones traditionnellement fréquentées par les éleveurs Peuls durant la transhumance, en ce qu’elles se trouvent dans la zone protégée, provoquent une forte préoccupation et un conflit avec les autorités locales. On assiste en outre à un lent changement des habitudes des habitants de la zone : ils cherchent des formes alternatives de subsistance dans l’agriculture et le commerce.


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N03

N03|ALLAMBARE’ lat 12.6634 long 2.22946

|pays| Niger |typologie| village mère |nombre d’habitants| 1176 |nombre de concessions | 63 |date de fondation| vers 1980 |distance de la limite du parc | < 20 km |ville la plus proche| Dosso |phénomènes migratoires| émigration et immigration |ethnie principale| Foulmangani |éléments traditionnels| maison de paille |éléments modernes| poste de santé/ école/mosquée/banque de céréales/marché

|territoire| Le village d’Alambaré est situé dans le département de Tillabéri, dans le canton de Tamou, à l’intérieur de la réserve totale de Talou. Le territoire du village est limitrophe au nord du village de Tamou, au sud, du hameau de Moli Haoussa Pambwa, la limite correspondant au cours d’eau du même nom ; à l’est la limite coïncide avec le cours d’eau Bouba, qui sépare le territoire d’Alambaré de celui de Tankoundè. A l’ouest, il n’est plus possible de retrouver la limite originale : c’est aujourd’hui la frontière du Burkina Faso qui marque la limite du village. Le territoire de ce village est très grand : il couvre une de 14 km de rayon environ, qui comprend en son sein les hameaux de Forgosogou, Sundingo 1, Baniguiti 2, Diagokouerga et Zabarma 2, plus le village distant de Boilè. Deux autres villages fondés par les habitants d’Alambaré sont aujourd’hui proches : Louballe et Wolloungourou.

village sont l’agriculture, le commerce, et l’élevage. La totalité de la population pratique l’agriculture, en ayant souvent une seconde activité, commerciale. La présence d’un grand marché la facilite. De nombreuses activités de type traditionnel et moderne se multiplient à l’intérieur du village. Une bonne part d’entre elles est liée au voisinage du parc du W et à son récent développement touristique (cuisiniers, artistes, animateurs, etc.). C’est à Alambaré que se tient tous les samedis l’un des marchés les plus importants de la région. On y vend des produits agricoles, de l’artisanat local et du bétail. Grâce à sa bonne position, le marché du bétail acquiert chaque année plus d’importance et il s’affirme comme point de rencontre privilégié entre les acheteurs et les vendeurs provenant du Burkina Faso avec ceux qui viennent de Niamey.

|population| La population résidente est de 1176 personnes, réparties sur 63 concessions. Dans le village, la majeure partie de la population, y compris son chef, appartient à l’ethnie Folmongani, mais de nombreuses autres ethnies sont aussi représentées : les Djermas, Sonrais, Peuls, Haoussas et Gourmantchés.

|morphologie du village| Alambaré signifie, en langue gourmantché, « avoir vu la richesse » et désigne la fertilité du terrain sur lequel le village est fondé. En effet, selon l’opinion des anciens du village, la zone d’Alambaré était très fertile. Actuellement, au contraire, en raison de la pression anthropique et de l’exploitation agricole, les terrains ne sont plus aussi productifs que dans le passé. Le village véritable a été fondé par Yeliga, un

|activités économiques| Les principales activités pratiquées par les habitants du

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Folmongani, qui s’est installé dans la région pour se consacrer à l’agriculture, et devint le premier chef de terre du village. Aujourd’hui le chef du village habite dans la zone centrale, Tindangou. C’est en effet là que l’on trouve les principales infrastructures : un poste de santé, la banque des céréales, le marché, la mosquée et une école. Autour de ce noyau central, nous trouvons, à l’ouest, le quartier de Zabarma, à l’est celui de Oudanapou, au sud, celui de Sentier, et enfin au Nord, Fondey, Gorobanda et le quartier Bénin.

Nous trouvons à l’intérieur de la concession différent petits édifices, comme la maison du chef de famille (djegou), la maison des femmes (djefou), ainsi que différents hangars et le lieu sacré de la famille (bordiegou).

Le marché est l’un des zones les plus importantes du village : un vaste espace équipé lui est réservé. Traversé par la route, il se développe sur chacun de ses côtés avec une multitude de structures en bois prévues pour le commerce. Le marché est important pour l’économie du village, mais également pour celles des centres environnants. Le village exporte essentiellement des produits de la terre et importe de la ville de Niamey des objets et des éléments plus particuliers et plus modernes.

|relation avec le parc du W| Alambaré se trouve à l’intérieur de la réserve spéciale de Tamou, une zone protégée. En vertu de ce statut, toute activité humaine y est interdite. En conséquence, les ressources de la zone ne peuvent être exploitées librement par ses habitants. On assiste donc à un conflit entre d’un côté les habitants du village qui revendiquent le droit d’utiliser la terre pour pratiquer leurs activités traditionnelles, l’agriculture et l’élevage ; de l’autre, les représentants de l’Etat qui doivent défendre en même temps le respect des obligations en vigueur dans l’aire protégée et la croissance du village à l’intérieur de la zone.

|éléments typiques| Les concessions sont dispersées, presque toujours séparées d’un « addeira », le champ voisin de la concession. Elles sont de type traditionnel, composées pour la plupart de maisons circulaires avec un toit de paille et disposées en cercle.

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Un arbre se trouve toujours au centre du grand espace enclos se et d’autres éléments sont répartis de manière moins rigide cette fois : la douche, le lieu où l’on cuisine. L’entrée de la concession, appelée lworoubugnaba (grande porte) est toujours positionnée au sud-ouest.

|points critiques| La position particulière d’Alambaré présente un grand potentiel en terme de développement des activités

commerciales et/ou liées au tourisme, mais aussi l’un des obstacles majeur eu développement du village en raison de l’insuffisance de terres cultivables.


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N04

N04|BANIZOMBOU lat 12.6634 long 2.22946

|pays| Niger |typologie| hameau |nombre d’habitants| 651 |nombre de concessions| 62 |date de fondation| 1991 |distance de la limite du parc | < 5 km |ville la plus proche| Dosso |phénomènes migratoires| émigration |ethnie principale| Djerma |éléments traditionnels| maison de paille |éléments modernes| / |territoire| Le village de Banizoumbou

est situé au Niger, dans le département de Tillaberi, sur la rive droite du fleuve Niger, et entouré de collines. Les limites du territoire sont, à l’ouest, la montagne Ala Hara Izè Tondo, au nord les collines Hannanizè Ize Tondo, et au sud les collines Djoukwey Tondo. Banizoumbou est un village détaché de Mala, fondé il y a 250 ans par Kabu Hinka, un chasseur Djerma. Le mythe de la fondation du village raconte que Kano Hinka dû s’éloigner du village pour partir à la recherche de sa sœur, prisonnière d’un guerrier, et qu’il le trouva occupé par d’autres personnes à son retour. Il partit donc en quête de terre et fonda Banizombou, su un terrain très fertile. Le nom, en langue Djerma, signifie « que la paix vienne d’en haut » : c’est l’expression qu’utilisa le fondateur la première fois qu’il vit le territoire, pour lui souhaiter un sort soit clément. |population| 650 personnes environ habitent le village. Elles se répartissent sur une soixantaine de concessions. Presque tous les habitants appartiennent à l’ethnie Djerma, qui est celle du fondateur du village. Les mouvements migratoires sont saisonniers : il s’agit en particulier des commerçants qui, durant la saison sèche, partent vers les pays limitrophes pour exercer leur activité. Un léger flux d’ouvriers agricoles qui viennent

pour proposer leurs services une fois la récolte terminée dans leur village existe également. |activités économiques| Malgré la proximité du fleuve Niger, la pêche n’est pas pratiquée par les habitants du village, et le fleuve est exploité uniquement comme ressource en eau, à des fins agricoles. C’est donc l’agriculture qui joue un rôle fondamental dans l’économie domestique. Les champs sont organisés de la manière suivante : Kouara banda fari : champs proche du village, cultivé uniquement par les hommes et destiné à la culture du mil et des haricots. C’est les champs le plus important, parce que c’est lui qui alimente toute la famille. Sagui fari : champs éloigné du village, cultivé par les femmes pour produire du sorgho. Fari zenon : ancien champs, en jachère pour trois-cinq ans. Sagui suna : espace naturel situé au sud de Hammam Izè. Kali : verger et jardin potager, le long de Banizoumbou Gorou, où l’on culture les mangues, le manioc, la salade, la goyave, les choux.

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Kambey fo fari : champs individuel. Motarey : rizière sur la rive du fleuve, cultivé uniquement par les femmes. |morphologie du village| Le village se trouve au centre d’un croisement de routes, provenant des villages environnants et il se développe surtout dans sa partie centrale, où la densité démographique et le tissu urbain sont plus denses. Les routes qui s’articulent à l’intérieur du village se développent dans un dense réseau de concessions et créent donc une véritable organisation spatiale. Lorsque l’on s’éloigne du centre, les constructions deviennent plus rares en raison de la présence de vastes aires cultivées et des difficultés dues à la morphologie du terrain. En observant les édifices des différentes concessions, il est possible de remarquer la présence d’éléments modernes et innovants comme l’usage fréquent des portes et fenêtres de métal avec un cadre en bois. L’existence de gouttières de métal, innovantes, non seulement en raison du type de matériel, mais aussi comme élément de construction peu employé dans les autres villages constituent une particularité. Les concessions ont un aspect et des caractéristiques traditionnelles, avec des édifices de terre et de paille disposés en cercle et délimités par des enclos de bois, de

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paille ou de terre, et parfois composés des trois matériaux. Ils sont disposés les uns par rapport aux autres et séparés uniquement par le passage des routes qui se dirigent depuis le centre du village vers les centres voisins. |éléments typiques| La concession du chef du village se compose de trois édifices rectangulaires avec une zone d’ombre dans la partie précédent l’entrée, une zone pour abriter les animaux, et un espace prédisposé pour le déroulement des activités quotidiennes. Le tout est entouré d’une enceinte qui en fixe les limites. Contrairement aux autres concessions, la disposition des édifices n’est pas circulaire. Ils sont disposés de façon linéaire, et leurs ouvertures sont orientées dans la même direction, à l’abri des vents. A l’extérieur de la concession, on trouve immédiatement la place principale, avec en son centre un grand baobab et un autre arbre qui créent une vaste zone d’ombre. La présence du grand baobab pourrait indiquer le point d’origine du village.

|points critiques| Les problématiques principales du village sont liées à la concurrence élevée pour l’accès à la terre, en raison de la présence d’un grand nombre d’éleveurs et d’agriculteurs dans la même zone.

|lien avec le parc du W| Le principal lien avec le parc du W tient aux parcours de la transhumance qu’arpentent, comme dans le cas des Peuls de Kiwirkoye, un grand nombre d’hommes et de têtes de bétail, depuis la périphérie nigérienne jusqu’à celle du Bénin du parc.

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N05

N05|BOSSIA

lat 12.54507 long 2.73527

|pays| Niger |typologie| village |nombre d’habitants| 450 |nombre de concessions| 33 |date de fondation| 1900 |distance de la limite du parc| < 1 km |ville la plus proche| Dosso |phénomènes migratoires| émigration et immigration |ethnie principale| Djerma |éléments traditionnels| maison de paille |éléments modernes| / |territoire| Le village de Bossia appartient

au Département de Dosso, dans la souspréfecture de Birni Gaurè. Il est situé le long du fleuve Niger, entre son bassin et les collines Tondikouara (collines blanches). Le territoire du village s’étend au-delà du fleuve et comprend l’île Goungou et les collines Tulwa, qui marquent la limite du village Sakala Gonga. Au sud, la limite avec le territoire Birigambou est définie par un cours d’eau temporaire, le Tola Ghindi, et au nord, avec le village Sakala Gonga, par un fleuve temporaire. De nombreux hameaux agricoles se trouvent à l’intérieur du territoire, Komabarma et Bori par exemple. Les campements Peuls sont également nombreux : Tonfi Foyo Guinde, Rouga Falda, Sudinga, Kokorbebangou. |population| La majeure partie des habitants du village de Bossia appartient à l’ethnie Djerma (273 personnes). Viennent ensuite les Haoussas (151 personnes), les Gourmantchés (27 personnes), les Bellas (6 personnes). On assiste chaque année à des phénomènes migratoires d’une double nature : d’une part, les jeunes du village émigrent durant la saison sèche (novembre-février) pour rejoindre les côtes du Togo, où ils peuvent pratiquer la pêche, ou bien le Bénin, pour se consacrer à des commerces de différente nature ; de l’autre il s’agit des populations qui ont immigré dans les années 1960-70,

en provenance du Nigéria ou des régions de Boboi et Dogondoutchi au Niger, pour pratiquer la pêche et l’agriculture. |activités économiques| A l’origine, la principale activité exercée par la population était la pêche, qui avait non seulement une valeur commerciale mais aussi, dans une plus grande mesure, culturelle. Ce n’est plus une activité habituelle aujourd’hui en raison de nombreux facteurs : en premier lieu la diminution de la quantité de poissons. Cette activité a été intégrée à l’activité agricole qui, au fur et à mesure des années, a acquis un rôle déterminant pour l’économie du village. Sur les rives du fleuve, nous trouvons les rizières ; à l’extérieur du village, les champs collectifs ; et en son sein, de petits potagers et jardin cultivés dans un cadre familial. L’exploitation des terres voisines du fleuve pour la culture du riz a eu deux conséquences négatives pour l’économie : les terres sont destinées à une seule culture, ce qui empêche la production d’une plus vaste gamme de produits, et la répétition de la même plantation année après année a fini par appauvrir les terrains. Leur productivité diminue alors. La présence de la végétation et de l’eau favorisent également l’élevage. Celui-ci reste toutefois saisonnier, et suit les processus traditionnels de la transhumance.

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Une fois que les exigences du marché interne du village sont satisfaites, la commercialisation des produits a essentiellement lieu dans les centres commerciaux des environs. |morphologie du village| Bossia est un village créé par des populations provenant de la zone de Tillaberi au Niger. Le fondateur du village, Sayo Ali, est un Songhay, originaire de Namarou, qui vint il y a 150 ans, pour s’y installer, dans le lieu où aujourd’hui se dresse Bossia. Au tout début, les habitants, des pêcheurs, s’installèrent sur les rives du fleuve à 1 voire 2 kilomètres de la position actuelle du village. La présence du grand cours d’eau a une influence importante sur la structure du village et sur les habitudes de la population. Les habitations donnent directement sur les rives, à quelques mètres de l’eau, où l’activité humaine est continue. L’eau joue en effet un rôle actif dans la vie quotidienne de la population. Le fleuve est utilisé à des fins agricoles et sert aussi de grande voie de communication. Les routes qui permettent d’atteindre les centres voisins, en effet, ne sont praticables que pendant la saison sèche et le reste de l’année, le fleuve constitue l’unique voie d’accès au village. La faible disponibilité en terre, la présence de grands champs, l’existence du fleuve et les limites morphologiques imposées par le

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terrain sont à l’origine de la concentration des concessions en une zone unique, qui constitue le noyau du village. Dans la zone centrale, les concessions se situent à peu de distance les unes des autres, et ne sont séparées que par la présence d’un réseau de routes qui permettent d’atteindre les rives du fleuve. |éléments typiques| Le village de Bossia est un exemple encore très traditionnel du point de vue des systèmes d’habitat, avec des maisons de terre et de paille, répartie de la façon typique des Djermas. La présence de nouvelles constructions, liées à la population agricole, n’altère pas cette perception parce que les nouvelles structures, même si elles sont de forme rectangulaire et de dimensions plus généreuses, sont construites en utilisant les techniques traditionnelles locales. Au sein du village, nous pouvons trouver deux places caractérisées par la présence de grands arbres qui créent des zones d’ombre. C’est là que la population masculine se réunit pour penser et débattre sur l’avenir du village. Au sein de la concession, des espaces communs sont destinés aux activités quotidiennes des habitants. Les activités publiques se déroulent dans les places qui se forment entre les différentes concessions. |relation avec le parc du W| Comme c’est le cas pour la plupart des villages, la création

de la réserve a eu une influence sur la vie de la population en raison des limitations imposées et de la difficulté à trouver certaines ressources. |points critiques| Le problème principal est lié à la pression anthropique excessive sur le territoire. Les terrains agricoles sont surexploités et en raison de l’insuffisance de nouvelles terres cultivables, les agriculteurs ne peuvent laisser reposer les champs déjà exploités.


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N06

N06|MOUREKOUARA lat 12.65427 long 2.48516

|pays| Niger |typologie| village |nombre d’habitants| 322 |nombre de concessions| 36 |date de fondation| 1971 |distance de la limite du parc| < 10 km |ville la plus proche| Dosso |phénomènes migratoires| émigration et immigration |ethnie principale |Haoussa |éléments traditionnels| maison de paille |éléments modernes| / |territoire| Le village se trouve dans le

département de Tillabéri, dans la zone de Tamou, entre la colline Dutchi et le fleuve Niger, que l’on nomme Kouara (kou=vallée; ouara=eau) en langue Haoussa. Le territoire du village est délimité à l’ouest par le fleuve saisonnier Kassipoli, au sud-est par la colline Doutchi, au sud par le village Beragum, au nord enfin, par le fleuve Niger. Les hameaux permanents de Gosso, Kasspioli et Tchangakouara ainsi quelques campements Peuls de Gosso Peul, Gida al Hadji et Kassipoli Peul se trouvent à l’intérieur de ce territoire. |population| La population résidant dans le village est de 322 personnes. S’y ajoutent 254 personnes qui vivent dans les hameaux et les 340 Peuls des trois campements. Presque tous les habitants du village appartiennent à l’ethnie Haoussa. Dans les hameaux, les Djerma de Gosso et les Gourmantché de Kassipoli constituent deux communautés installées sur le même territoire sans que les ethnies se sans qu’une mixité ethnique s’ensuive. |activités économiques| Au moment de la fondation du village, le commerce était la principale activité. Ce n’est que dans un second temps que les habitants du village ont commencé à se consacrer à l’agriculture, à la pêche, à l’élevage, à l’artisanat, et la cueillette de produits naturels. La production agricole

est abondante et les cultures diversifiées : dans les zones voisines du fleuve, on trouve de grands potagers et vergers avec des tomates, des carottes, de la salade, des mangues et des bananes. On trouve aussi les champs collectifs traditionnels situés autour du village, les jardins privés qui s’étendent à proximité des concessions et les jardins potagers situés sur les rives du fleuve. Le développement récent du village modifie dans certains cas les pratiques et les habitudes : c’est ce qu’il s’est produit avec la pêche qui est aujourd’hui pratiquée avec des instruments modernes. |morphologie du village| Il s’agit d’un village fondé récemment, en 1971, par un Haussa du sous-groupe Maouri provenant du village de Matankari, sur la rive opposée du fleuve. A cette époque, la zone était inhabitée et le permis d’installation fut donné par le chef de terre Peul de Tamou. Le nom Mourekouara a une forte connotation symbolique, car il renvoie à l’origine Maouri de ses habitants, qui se sont installés dans une zone habitée en majorité par des Djermas. Les contraintes du terrain explique la concentration des concessions dans une zone unique, qui constitue le noyau du village et se trouve non loin de la rive du fleuve Niger. La densité des concessions est plus forte dans la partie centrale du village et moindre lorsqu’on s’en éloigne. Quelques

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zones consacrées aux activités communes, telles que l’école, la mosquée, le puits et le moulin sont présentes dans le village. Le système d’habitat est typique, avec les maisons de terre et de paille disposées en cercle à l’intérieur de la concession. Le plan de la plupart des habitations est circulaire. On trouve toutefois des concessions, circulaires, avec des édifices à plan rectangulaire et des concessions mêlant les deux types de construction (circulaire et rectangulaire). |éléments typiques| La concession du chef de village, de grandes dimensions, se caractérise par la présence de structures aussi bien circulaires que rectangulaires, réparties dans un espace rectangulaire. Dans la partie centrale, un vaste espace destiné aux activités communes, dominé par la présence d’un grand arbre créant une zone d’ombre. C’est là que se déroulent toutes activités collectives et quotidiennes. |relation avec le parc du W| Le village n’a pas de liens directs avec le parc. |points critiques| Le problème principal est le manque de nouvelles terres agricoles, en raison de la pression anthropique. C’est ce qui a provoqué dans le passé des frictions et des conflits entre les agriculteurs et les pasteurs, qui traversent la zone lors de la transhumance.

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REMERCIEMENTS Cet Atlas n’aurait pas vu le jour sans les nombreuses personne qui, par leur connaissance du terrain, des traditions nationales et de la bibliographie, ont contribué grandement à sa rédaction La première partie de cet ouvrage, notamment les chapitres 2, 3 et 4, a été élaborée par l’équipe du Programme de Recherche CMARB_W (Connaître pour Mieux Agir dans la Réserve de Biosphère du W) de l’Université Abdou Moumouni de Niamey du Niger composée de : enseignants chercheurs : Amadou BOUREIMA (géographe), Ali MAHAMANE (botaniste), Moussa (agronome), Amadou BARAGE OUMAROU (sociologue), Mounkaila HAROUNA (géographe) ; doctorants : Mahamadou Sani MOUSSA (géographe), Soumana DOUMA (écologue), Iro DAN GUIMBO (agronome) Moustapha MAMADOU KONE (géographe). Les experts et spécialistes de l’équipe CMARB_W ont aussi aidé à la collecte de données et informations sur les composantes Béninoise et Burkinabés exclusivement sur la base de la documentation bibliographique.

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