Quelques pas... sur le littoral de Méditerranée

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Quelques pas ... une collection

pour découvrir et comprendre, in situ, tous les milieux naturels de Méditerranée...

J.-F. Cubells

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Quelques pas...

sur le littoral de Méditerranée

ALBIANA

Sur près de 200 000 kilomètres s’étend le littoral méditerranéen. Des centaines d’espèces animales ou végétales colonisent cet espace fragile entre terre, mer et ciel. Chaque années des milliers d’estivants y accèdent, souvent sans se douter de sa richesse. L’auteur, professeur agrégé de biologie, propose d’accompagner chacun sur le rivage en l’aidant à distinguer et à mieux connaître les espèces les plus communément rencontrées. Une iconographie très riche, un format pratique, des textes clairs et accessibles, font de ce guide le complément indispensable des grandes sorties à la plage, des randonnées littorales, des quelques pas en famille, au grand air…

Quelques pas... sur le littoral de Méditerranée

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Les algues

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es algues sont des végétaux simples ne possédant ni racines, ni tiges, ni feuilles, ni fleurs. Leur corps, appelé thalle, est le plus souvent fixé par un crampon à un support solide. Constituées d’un amas de cellules homogènes, elles présentent cependant une grande diversité morphologique. Les thalles peuvent ainsi être filamenteux, globuleux, foliacés ou tubuleux. Leur consistance caoutchouteuse est due à la présence dans les membranes cellulaires de composés pectiques (sucres végétaux). Certaines espèces plus coriaces car riches en calcaire sont qualifiées d’encroûtantes. Les algues possèdent dans leurs cellules des substances colorées appelées pigments leur permettant d’absorber l’énergie lumineuse nécessaire à la production de leur propre matière vivante. La nature de ces pigments permet ainsi de classer les algues en trois principales familles : les algues vertes, brunes et rouges. Il est à noter cependant que la couleur apparente d’une algue n’est pas toujours un bon critère de classification. Les algues vertes possèdent principalement un pigment vert appelé chlorophylle*. Quelques espèces communes sont : l’ulve (Ulva sp.) ou laitue de mer ; l’udotée (Udotea petiolata) en forme de lame en éventail fixée par un court « pétiole » ; l’entéromorphe (Enteromorpha compressa) dont les touffes de filaments verts recouvrent les rochers ; l’acétabulaire

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en corse

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L’alghe

Particulièrement consommées en Asie, car riches en vitamines B et C, en minéraux et en sucres digestes, les algues sont aussi utilisées par les industries pharmaceutiques, cosmétiques et alimentaires pour stabiliser et gélifier leurs produits (codes E400 à E407). De récents travaux scientifiques ont montré les vertus thérapeutiques des algues qui pourraient devenir ainsi de futures usines à médicaments. Cependant, certaines algues comme les dinophycées produisent des substances toxiques qui, accumulées dans certains coquillages, les rendent impropres à la consommation.


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Espèce protégée

Lithophyllum lichenoides bénéficie d’une protection internationale. Trottoir de Lithophyllum lichenoides

(Acetabularia acetabulum), constituée par une seule cellule en forme d’ombrelle blanchâtre. Les algues brunes ont un pigment brun, la fucoxanthine, qui masque la chlorophylle*. Une des espèces les plus fréquentes est la padine « queue de paon » (Padina pavonica) en forme de Halimeda

Acétabulaire– Ulve

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Dictyote

C Padine

cornet blanchâtre à rayures concentriques, commune près du rivage, mais aussi la gracieuse dictyote (Dictyota dichotoma). Autre exemple important, celui des cystoseires ( Cystoseira sp.) constituant en Méditerranée de véritables ceintures algales à proximité de la surface. Chez les algues rouges le pigment dominant est la phycoérythrine. La coralline ( Corallina elongata), de couleur rose et très ramifiée, et la rissoelle verruqueuse (Rissoella verruculosa), toute

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Coralline

frisée, s’observent près de la surface tout comme l’encroûtant Lithophyllum lichenoides. Ce dernier constitue d’importantes constructions, appelées encorbellements, comparables à un trottoir fixé aux rochers. Rissoelle verruqueuse

Cystoseires

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Le perce-pierre

ou criste marine

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ur les rochers littoraux, les peuplements végétaux ne peuvent se développer que sur les replats et dans les fissures où s’accumule un peu de terre. P arfaitement adaptés à l’action du vent et des embruns salés, ils constituent une ceinture halophile*. Une des plantes les plus fréquemment rencontrées est le perce-pierre appelé aussi criste marine. Il appartient, tout comme la carotte et le fenouil, à la famille des ombellifères. Ligneux* à sa base, il peut atteindre 30 à 50 cm et possède des feuilles losangées, verdâtres et divisées en lobes charnus. Sa floraison se déroule de juillet à octobre. Les fleurs, vert jaunâtre réunies en ombelles (renflements constitués par les pédoncules floraux), possèdent 5 pétales. En bord de mer les plantes sont confrontées au manque d’eau douce mais aussi à la dessiccation* due au sel qui se dépose à leur surface et attire l’eau des cellules végétales. Les longues racines du perce-pierre, qui pénètrent profondément dans les fissures des rochers, assurent son alimentation en eau. Ses feuilles charnues, qualifiées aussi de succulentes et dont la pression osmotique* élevée des cellules favorise la rétention d’eau, constituent une réserve de liquide.

en corse

Crithmum maritimum

A baschiccia

Espèce protégée Le perce-pierre bénéficie de mesures de protection régionales.

Perce-pierre colonisant les rochers

Les vertus du perce-pierre sont connues depuis l’Antiquité, les marins en emportaient au cours de leurs longs périples. Riche en vitamine C et en sels minéraux, le perce-pierre est aussi diurétique* et vermifuge*. Il est également recherché en cosmétologie pour ses propriétés calmantes, régénérantes et anticellulites (huiles essentielles). Ses feuilles, après macération dans du vinaigre blanc, constituent un excellent condiment.

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Helichrysum italicum

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A murza

L’immortelle d’Italie

ou hélichryse

Espèce protégée

L’immortelle d’Italie bénéficie de mesures de protection régionales.

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n arrière des rochers littoraux , sur les sols pauvres et ensoleillés l’immortelle d’Italie attire le regard. Cette plante qui ne mesure guère plus de 50 cm de hauteur présente un aspect touffu. Elle possède de nombreuses feuilles linéaires au toucher soyeux, de couleur argentée. Lorsqu’elles sont froissées, elles libèrent une forte odeur de curry. Au printemps et tout au long de l’été, de jeunes tiges dressées et laineuses portent de nombreuses petites fleurs jaune vif regroupées en grappes. Ces bouquets de fleurs, éclatants à la lumière, sont à l’origine du nom de la plante : héli de hélios, le soleil, et chrysun, doré.

L’immortelle d’Italie est une plante aromatique dont on extrait une huile essentielle utilisée pour soigner les hématomes, les foulures et les entorses. Elle possède aussi d’importantes vertus anti-inflammatoires, antiinfectieuses et cicatrisantes. Lors de l’épidémie de grippe espagnole au début du XXe siècle, elle était ainsi brûlée dans les maisons afin de purifier l’air. Étage supralittoral

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Ammophila arenaria 20

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L’oyat

ou roseau des sables et autres plantes des dunes

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es plages et les dunes constituent des milieux mouvants soumis aux embruns salés, au vent et à l’action du soleil. Malgré ces conditions a priori défavorables au développement de la vie, de nombreuses espèces parviennent à prospérer. Parmi celles-ci, l’oyat ou roseau des sables est facilement reconnaissable. Appartenant à la famille des graminées, comme le blé et le riz, l’oyat est une plante vivace poussant en touffes dont la taille peut atteindre 1 mètre de hauteur. Ses feuilles longues, fines et pointues s’enroulent autour des tiges dressées. Adaptée à la sécheresse, leur face inférieure est recouverte d’une couche protectrice épaisse, appelée cuticule. La face supérieure, au cœur de l’enroulement, est tapissée de nombreux poils. Ces différents dispositifs permettent ainsi à la plante de limiter ses pertes d’eau et font de l’oyat une plante très bien adaptée à la sécheresse. L’oyat possède aussi de longues racines et des tiges rampantes capables de s’étendre sur d’importantes distances. Elles peuvent ainsi aller chercher l’eau en profondeur. L’oyat est depuis Épis d’oyat

Étage supralittoral

Espèces protégées L’oyat et la matthiole bénéficient d’une protection nationale, le panicaut et le lys de mer d’une protection régionale.

La dune est un patrimoine naturel exceptionnel mais aussi un milieu fragile. Soumises à de nombreuses agressions telles que l’érosion, l’urbanisation, les incendies, le camping sauvage ou le passage des véhicules 4X4, de nombreuses espèces végétales devenues de plus en plus rares bénéficient de mesures de protection.

Le rôle stabilisateur de l’oyat est ici parfaitement visible


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en corse

Chthamale étoilée (Chthamalus stellatus)

Les balanes

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I denti di cani

Balane conique (Balanus perforatus)

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Les scientifiques se sont intéressés au mode de fixation des balanes. Ils ont récemment découvert qu’une « colle » assurait leur solide fixation sur les surfaces irrégulières et humides. Cette découverte offre d’intéressantes perspectives: ces propriétés pourraient tout à fait convenir à des usages médicaux en remplaçant les points de suture

es balanes appartiennent au groupe des crustacés cirripèdes. Ils vivent en effet fixés le plus souvent sur les rochers, abrités dans une sorte de petit cratère constitué de plusieurs plaques calcaires. De taille réduite – quelques millimètres –, les balanes vivent en colonies. La balane étoilée, ou dent de cochon, porte six plaques calcaires striées de couleur gris blanchâtre. Au centre, une ouverture en forme de cerf-volant permet à l’animal de se nourrir. La balane commune présente une couleur plus foncée, une forme plus pointue et vit plus profondément. Les balanes sont observées sur les rochers battus par les vagues mais aussi sur les coques des navires et les coquillages fixés. Les plaques calcaires qui entourent l’animal constituent une protection solide contre la force de l’eau mais aussi la dessiccation* et l’asphyxie car elles permettent d’emprisonner de petites quantités d’eau au cours des périodes d’émersion. Les balanes sont des organismes microphages* filtreurs. Elles déploient à travers l’ouverture étroite de leur armure leurs pattes transformées en râteaux plumeux (cirres). Les cirres filtrent l’eau et ramènent vers la bouche les débris organiques piégés et le plancton*. La sexualité des balanes est adaptée à leur mode de vie sessile* : elles sont en effet hermaphrodites*.

pour les petites plaies. De l’étage médiolittoral à l’étage infralittoral

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Les bernardl’ermite

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Dardanus sp. ; Pagurus sp ; Clibanarius sp.

U granculu

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etits crustacés, appelés aussi pagures, les bernard-l’ermite présentent deux pinces assez importantes et une petite carapace limitée aux seules parties antérieures de leur corps. Ainsi leur abdomen, dissymétrique et mou, ne possède aucune protection. Cette particularité oblige les pagures à rechercher le plus souvent des coquilles abandonnées de gastéropodes pour y loger leur abdomen. Le grand bernard-l’ermite (Dardanus arrosor) peut atteindre 12 cm et sa coloration est rouge vif. Les pagures des rochers sont beaucoup plus petits (quelques centimètres) et plutôt bruns, avec des taches bleues plus claires sur les pinces et les pattes.

Bernard-l’ermite hors de sa coquille protectrice. Noter son abdomen sans carapace.

Bernard-l’ermite dans une coquille de troque De l’étage médiolittoral à l’étage infralittoral


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Littorina ou Melaraphe neritoides

La littorine Regroupées ou réfugiées dans le creux des rochers, les littorines luttent contre la déshydratation

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e minuscule gastéropode – moins de 10 mm de haut – possède une coquille de couleur gris délavé parfois bleu noir. La spire haute et pointue présente un opercule ovale. Les littorines sont observées dans la zone du ressac exposée aux embruns salés, et se déplaçent verticalement en fonction de l’agitation de la mer. Regroupées en colonies de plusieurs dizaines d’individus, elles se réfugient dans les crevasses des rochers à l’abri du soleil. Les littorines se nourrissent principalement du lichen Verrucaria qu’elles broutent à l’aide d’une sorte de râpe à denticules dures, la radula. La reproduction* des littorines se déroule à la fin de l’hiver, elles produisent des capsules d’œufs pélagiques* qui libèrent de petites larves planctoniques*.

et aussi... Plus en amont du littoral il est possible de rencontrer de nombreux escargots en estive sur les tiges de différents végétaux. Fuyant la chaleur dégagée par le sol, ils se regroupent en hauteur et se réfugient au fond de leur coquille obstruée par un bouchon de mucus*. Ce comportement leur permet de limiter leur perte d’eau et ainsi de résister aux sévères conditions estivales.

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Les murex

ou rochers

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Murex massue ou rocher épineux (Bolinus brandaris)

I runzegnuli (u runzegnulu prunosu è u runzegnuli di caletta)

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e couleur marron foncé, souvent recouvert de petites algues et d’éponges encroûtantes, le murex rouge possède une coquille conique pouvant atteindre 5 à 6 cm de long. Le dernier tour représente les trois quarts de l’animal, son ouverture orange porte une étroite échancrure. L’opercule corné est noir. Plus rare, le murex massue peut atteindre une dizaine de centimètres de long. Sa coquille très caractéristique est courte, spiralée et pointue. De couleur jaunâtre, elle porte de nombreuses épines et se prolonge par un long canal en forme de gouttière. Le murex rouge arpente les rochers près de la surface. Le murex massue préfère les fonds sablo-

Murex tronqué (Phyllonotus trunculus)

Murex rouge ou rocher à pourpre (Thais haemastoma) et sa ponte

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Détail d’une ponte échouée sur la plage

vaseux à plus grande profondeur. Ces deux espèces sont aussi présentes dans les étangs salés littoraux. Les murex se nourrissent d’organismes fixés tels que les balanes ou les moules. Redoutables carnassiers, ils sécrètent un acide qui perce, en quelques heures, la coquille de leur proie. Cette première étape réalisée, ils y introduisent leur trompe et aspirent leur repas. Les murex pondent de nombreux œufs disposés en grappes sur les rochers.

Utilisés pour fabriquer la teinture

Rocher à pourpre

pourpre, « foinix » en grec, les murex étaient dans l’Antiquité récoltés abondamment. Ce terme serait d’ailleurs à l’origine du nom des Phéniciens, grands producteurs méditerranéens de teinture. Les murex étaient broyés dans l’eau de mer. Le liquide obtenu macérait pendant trois jours puis était bouilli et filtré. Sous l’action du soleil, il prenait progressivement une couleur pourpre. Les tissus étaient teints après cinq heures de bain. Étage infralittoral

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Les patelles et ormeaux

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es petits gastéropodes primitifs sont constitués d’un pied musculeux portant une petite tête munie de deux antennes réduites. L’ensemble est recouvert par une coquille. Chez les patelles, que l’on appelle aussi arapèdes, elle est conique en forme de chapeau chinois. Chez les ormeaux, elle est plate et légèrement spiralée, le dernier tour de spire, très développé, est percé de trous ronds assurant respiration et rejet des déchets. Les patelles communes peuvent atteindre quelques centimètres de diamètre ; par contre, la coquille de leur cousine la patelle géante est plus grosse (10 centimètres maximum) et ornementée de nombreuses côtes rayonnantes. L’ormeau, de couleur brun verdâtre avec des taches rouges, est souvent recouvert d’algues calcaires et de bryozoaires, la coquille peut atteindre 7 cm. Les patelles vivent fixées sur les rochers battus. Le

en corse

Patelle géante (Patella ferruginea)

E patelle è patelle di polpu

Espèce protégée La patelle géante est de nos jours en voie de disparition. Très recherchée pour ses qualités culinaires mais aussi comme objet décoratif, elle était devenue très rare, au point de presque disparaître. Elle ne subsiste plus actuellement que dans certains sites de la Méditerranée occidentale comme les îles d’Hyères, la Corse, la Sardaigne ou les îles toscanes, algériennes et marocaines.

Patelle géante parfaitement camouflée

Patelles moussues (Patella ulyssiponensis)

De l’étage médiolittoral à l’étage infralittoral


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