POURQUOI LA CROISSANCE URBAINE DE BOGOTA A T-ELLE CONDUIT À UN PHÉNOMÈNE D’URBANISATION ILLÉGALE À LA PÉRIPHÉRIE DE LA VILLE ? Étude d’un cas: l’occupation illégale du sol à San Cristoabl Norte. Alexandre Pineill
Sous la direction de Xavier de Coster Mémoire présenté en vue de l’obtention du diplôme de master en architecture. Année académique 2013 - 2013.
UNIVERSITÉ CATHOLIQUE DE LOUVAIN Année académique 2012-2013 LOCI Saint-Luc Bruxelles
« Une étude de cas est une analyse systématique d’une situation dans le but de résoudre un problème et de trouver des solutions » G.Morin, 2005, La méthode des cas : guide orienté vers le développement des compétences, Gaetan Morin éditeur, Montréal, p.98.
« La ville de Bogota, fondée en 1538 par Jimenez de Quesada, avait su conserver son charme. Construite selon le modèle espagnol, la ville se développa avec harmonie autour de son centre situé stratégiquement à la place Bolivar. Deux fleuves entouraient la ville d’éléments naturels, […]. Durant ces dernières années, le changement survenu dans toutes les villes du monde a détruit l’armonie de Bogota. La ville s’est développée en longueur, sans ordre ni raison, faisant l’objet d’une extension anormale. »
Le Corbusier.
1. INTRODUCTION 1.1. Pourquoi ce sujet........................................................................................................................................... 9 1.2. Poser la problématique................................................................................................................................ 10 1.3. Objectifs......................................................................................................................................................... 10 1.4. Méthode......................................................................................................................................................... 10 2.
BOGOTA AUJOURD’HUI 2.1. Le contexte géographique............................................................................................................................ 13 2.2. Population...................................................................................................................................................... 18 2.3. Stratification socio-économique................................................................................................................. 22 2.3. Mobilité.......................................................................................................................................................... 25 2.4. Pollution......................................................................................................................................................... 31
3. L’URBANISATION ILLÉGALE À BOGOTA 3.1. Un contexte politique annonceur de crise démographique..................................................................... 35 3.2. L’explosion démographique de Bogota comme origine au problème de logement............................... 35 3.2.1. La croissance démographique................................................................................................... 35 3.2.2. L’urbanisation illégale est-elle informelle, marginale ou clandestine?................................. 40 3.2.3. Historique de l’émergence des quartiers informels................................................................. 42 3.3. La consolidation des quartiers illégaux, conséquence d’un déficit en logements............................... 46 3.3.1. Constat du déficit en logements à Bogota................................................................................ 46 3.3.2. Une solution alternative: l’autoconstruction............................................................................ 49 3.3.3. Une solution innovante proposée par les pouvoirs publics face à l’urbanisation illégale.. 52
4. ETUDE DE CAS : SAN CRISTOBAL NORTE, QUARTIER INFORMEL SITUÉ EN PÉRIPHÉRIE DE BOGOTA 4.1. Présentation................................................................................................................................................. 57 4.2. Usaquén, la localité..................................................................................................................................... 60 4.2.1. Le contexte géographique.......................................................................................................... 60 4.2.2. Le contexte historique................................................................................................................ 61 4.2.3. Population et stratification socio-économique........................................................................ 62 4.2.4. Mobilité......................................................................................................................................... 66 4.2.5. Pollution........................................................................................................................................ 68 4.2.6. Usages et équipements............................................................................................................... 70 4.3. San Cristobal Norte, l’UPZ.......................................................................................................................... 73 4.3.1. Le contexte géographique et topographique............................................................................ 74 4.3.2. Population.................................................................................................................................... 78 4.3.3. Mobilité........................................................................................................................................ 79 4.3.4. Pollution....................................................................................................................................... 82 4.3.5. Reportage photographique........................................................................................................ 83 4.4. Diagnostic et solution proposée................................................................................................................ 86 4.4.1. La proposition urbanistique....................................................................................................... 87 4.4.2. La proposition architecturale..................................................................................................... 91 5. CONCLUSION 6. BIBLIOGRAPHIE
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
1.
INTRODUCTION:
En 1700, seulement 8% de la population mondiale habitait dans les villes. En 1910, 19% de la population mondiale était devenue urbaine et en 1950 on passe à 33%. En 2006, plus de 50% de la population mondiale habite désormais dans les villes1. Cet exode rural, observable à l’échelle planétaire, entraine d’importantes migrations de population que les villes doivent être en mesure de gérer. Comme l’explique William Ospina, « […] la croissance démesurée des villes est un mal planétaire qui constitue un défi immense pour toutes les sociétés. Mais il est difficile de rencontrer un cas aussi dramatique que celui de Bogota ; nous pouvons en trouver la preuve dans le désordre de ses rues, dans le chaos urbain, dans la crise des transports, dans l’hostilité générale qui y règne, dans les indices très élevés de pauvreté, dans l’alarmant niveau d’indigence, dans la corruption de l’administration, dans l’insécurité, dans l’absence de profil culturel, dans le manque d’identification de la population à la ville qu’elle habite »2 Cette citation d’Ospina, bien qu’elle date quelque peu, reflète pour moi la situation de Bogota aujourd’hui. Ayant habité dans des villes comme Paris ou Bruxelles, c’est en tout cas ce que j’ai pu ressentir au début de mon séjour.
1.1.
Pourquoi ce sujet ?
La Colombie est un pays qui m’a depuis toujours attiré, principalement pour des raisons familiales. Ma grand-mère maternelle étant colombienne, j’ai eu l’occasion d’y être allé plusieurs fois pour voyager et voir ma famille. Plus tard, au cours de mon cursus universitaire, j’ai eu l’opportunité d’y faire un stage sur chantier d’un mois. Cette immersion dans ce pays, totalement différent de la Belgique (et de l’Europe en général), m’a impressionné et m’a conduit à considérer l’architecture comme une discipline aux multiples facettes: il n’existe pas « une » manière, mais « des » manières d’aborder l’architecture et de la pratiquer. Au-delà de ce que j’ai pu apprendre à l’école, j’ai pris conscience d’une réalité et de l’aspect pratique et concret de l’architecture. En atelier, nous sommes limités à la phase de projet. Dans la réalité, les choses sont tout autres et d’autres facteurs que nous n’avions jamais eu à traiter entrent en considération: la logistique ou les problèmes rencontrés en dernière minute sur chantier en sont deux exemples caractéristiques; le fait de devoir tenir compte des désirs et des exigences d’un client en est un autre. Depuis, mon intérêt pour le continent sud-américain et particulièrement la Colombie n’a fait qu’augmenter. C’est au cours de mon année de master 1 que j’ai pleinement pris conscience de cet engouement en partant pour un échange d’un an à l’Universidad Pontificia Javeriana de Bogota. Un projet d’équipement urbain abordé en atelier m’a permis de mieux comprendre cette ville jusqu’alors inconnue. Tout d’abord observée, je l’ai ensuite analysée, j’ai essayé d’en comprendre le fonctionnement et j’ai tenté de proposer une solution locale à un problème spécifique. La capitale de la Colombie est une mégapole de presque 9 millions d’habitants que les experts (voir la citation ci-dessus) qualifient sans retenue de chaotique quant à son fonctionnement, sa planification et son gouvernement. Medellin, en revanche, seconde ville colombienne, a réussi à surmonter la plupart de ses difficultés et donne aujourd’hui l’exemple avec ses équipements urbains et son transport public.3
1: www.statistiques-mondiales.com. Consulté en Août 2013. 2: OSPINA W, Septembre 1999, Dónde está la franja amarilla, Editorial Norma SA, Bogota, p.12. 3: ECHEVERRI A, Décembre 2011, Informalidad y urbanismo social en Medellin, Catedra UNESCO de Sostenibilidad de la UPC, n°12, p.11-24.
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Cette constatation m’a interpellé. En plus de ses problèmes internes (sociaux, mobilité, insécurité, pollution), Bogota connaît une forte urbanisation non seulement légale mais aussi illégale. De plus, en raison de sa situation géographique et topographique, la croissance urbaine de la ville est devenue un phénomène complexe très difficilement maîtrisable. Afin de préciser l’angle d’étude de ce vaste sujet, nous allons ici nous interroger sur la croissance urbaine en périphérie de Bogota, plus particulièrement dans le secteur de San Cristobal Norte.
1.2.
La problématique
Pourquoi la croissance urbaine de Bogota a t-elle conduit à un phénomène d’urbanisation illégale à la périphérie de la ville ? L’expansion urbaine touche la plupart des villes du monde, bien que celle-ci ne soit pas toujours maitrisée. C’est notamment le cas de Bogota mais étudier la croissance urbaine de toute la capitale colombienne serait un sujet d’étude beaucoup trop vaste pour un mémoire. Pour expliquer les raisons de cette perte de contrôle, il faudrait aborder des domaines tels que la sociologie, l’histoire, la géographie ou bien encore l’architecture et l’urbanisme. Aborder de manière approfondie autant de domaines dépasserait largement le cadre de ce mémoire qui veut se limiter aux seuls domaines de l’architecture et de l’urbanisme. Je vais donc me pencher sur le phénomène de l’expansion urbaine à périphérie de la ville. Pour aborder cette étude sous un angle plus concret, je m’attacherai plus particulièrement à un secteur spécifique de la ville caractéristique du processus d’urbanisation illégale qui touche toute la périphérie de Bogota, à savoir le secteur de San Cristobal Norte, au nord de la ville. L’analyse de San Cristobal Norte nous permettra de changer d’échelle, c’est-à-dire de passer de l’échelle de la ville à celle d’un quartier, puis d’une parcelle pour aborder la problématique à une échelle plus humaine et ainsi rentrer jusque dans les détails de l’architecture. Néanmoins, nous expliquerons rapidement en quoi l’aspect social est lui aussi directement lié à la croissance urbaine de Bogota, et par extension, à la situation actuelle de la Colombie et d’autres villes d’Amérique Latine.
2.1.1. Objectif L’objectif de cette étude de cas est en premier lieu de dégager la problématique d’un cas concret et ainsi de compléter une expérience menée à l’atelier d’architecture à l’Universidad Pontificia Javeriana, sous la direction du professeur Emilio San Miguel, par une analyse théorique. Cette application à un cas réel nous permettra de comprendre un peu mieux le mécanisme général de genèse de quartiers illégaux à Bogota, ainsi que tous les engrenages participant à ce processus. Ce mémoire est aussi pour moi l’occasion d’en apprendre davantage sur une ville que j’ai d’abord rejetée avant de l’adorée. Je profite également de l’opportunité de ce travail pour prendre du recul sur le projet d’architecture que j’ai réalisé à la Javeriana, chose que je ne prend pas toujours le temps de faire.
2.1.2. Méthode
Cette proposition urbanistique et architecturale servira d’exemple de solution pour que cette population exclue réintègre la ville et participe activement à la vie de celle-ci.
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Dans un souci de contextualisation et d’introduction au problème posé, nous ferons tout d’abord un état des lieux de la ville de Bogota aujourd’hui. Dans un deuxième temps, nous tenterons de comprendre le phénomène d’urbanisation illégale qui touche la ville dans sa globalité avant de nous concentrer sur la localité d’Usaquén4 où se situe San Cristobal Norte . Nous adopterons plus tard une échelle intermédiaire, celle des UPZ5, pour présenter les facteurs et les contraintes d’origines naturelles et humaines qui ont donné au quartier de San Cristobal Norte la configuration qu’il a aujourd’hui. Puis une analyse sera faite pour classer les problèmes qui en résultent à partir de laquelle il sera facile de dégager des conclusions et ainsi de définir un diagnostic. Enfin, la proposition architecturale sera envisagée comme une solution possible au problème donné à l’échelle du quartier.
4: Bogota est composée de 19 localités. Usaquén est l’une d’entre elles. 5: UPZ pour Unidades de Planeamiento Zonal ou unité de planification de zone. Elle est l’échelle intermédiaire entre la localité et le quartier et sert à la planification urbaine de Bogotà. « Secretaria de Planeacion », www.sdp.gov.co.
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2.
BOGOTA AUJOURD’HUI
2.1.
Contexte géographique
Il paraît important de présenter la ville de Bogota dans son contexte géographique et topographique. En effet, c’est la configuration naturelle du territoire qui a influencé, avant tout autre facteur, l’étalement urbain. Bogota est située dans la région centrale de la Colombie, Cundinamarca (fig.3). Elle est perchée à 2630 m au-dessus du niveau de la mer, sur la grande savane de l’ altiplano Cundiboyacense, plateau de la cordillère orientale des Andes. La ville se place au troisième rang mondial des métropoles les plus hautes du monde, derrière Quito (Equateur) située à 2850 m et La Paz (Bolivie) située à 3600 m au-dessus du niveau de la mer. La ville a été bâtie sur un territoire autrefois inondé par un lac; d’où la présence d’importantes zones humides. Elle est également située sur le haut bassin de la rivière Bogota (la Cuenca Alta del rio Bogota) dont la superficie est de 4.219 km2. Le district capital (fig.4) a une aire totale de 1776 km2 dont 477,85 km2 sont urbanisés (tâche grise fig.4). La zone rurale, quant à elle, couvre une superficie de 1298,15 km2. Enfin, Bogota s’étend sur 16 km d’est en ouest et sur 33 km du nord au sud6. Plusieurs marqueurs naturels permettent de délimiter la capitale. La ville est bordée à l’est par une chaîne montagneuse boisée appelée los Cerros orientales dont les collines les plus connues abritent les sanctuaires de Guadalupe et Monserrate, deux points de référence pour la ville. À l’ouest, la rivière Bogota délimite la périphérie de la ville. On note également que plusieurs autres rivières importantes traversent la ville: le Tunjelo au sud, le San Francisco, le Fucha et le Salitre qui se jettent tous dans la rivière Bogota7 (fig.6). Enfin, la ville est bordée par les municipalités de Soacha au sud et de Chia au nord (fig.5).
En arrière plan, on peut voir los Cerros orientales qui accueille au sommet le sanctuaire du Monserrate. Fig.1 : Photographie de Bogota. Source : world-traveling.info.
6: PARDO GARCIA-PENA G, 2004, Atlas historico de Bogota, Editorial Planeta, Bogotá. 7: MOLINA GIRALDO H, 1996, Ciudad y region en Colombia, la occupacion a largo plazo, Universidad Externado de Colombia, Bogota.
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Fig.2 : Carte de la Colombie Source : Institut géographique Augustin Codazzi, 2005.
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Panama
Vénézuela
Équateur Brésil REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
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Région Cundinamarca
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Bogota D.C
Pérou
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Fig.3 : Carte de la région Cundinamarca et de Bogota DC. Source : http://maps.stamen. com.
Bogota D.C Région Cundinamarca REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
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Fig.4 : Photographie satellite de la région Cundinamarca et de Bogota DC. Source : google.map.com.
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Chia REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
Sopo REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
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1/40000 REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
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Bogota D.C Fig.5 : Carte des municipalités de la région Cundinamarca. Source : http://commons. wikimedia.org/wiki/File:Rio_ Bogota_map.png.
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Zones vertes
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Rivères et cours d’eau Périmètre Bogota D.C
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Fig.6 : Carte du relief de Bogota, de la rivière Bogota et de ses principaux affluents. Source : google.map.com.
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2.2. Population La population de la ville augmente de façon exponentielle depuis les années 1960. En effet, l’exode rural se fait majoritairement en direction de Bogota, la capitale. Cette population ayant fui la campagne en raison du conflit armé colombien, qui aujourd’hui migre sans formation professionnelle, sans réserve financière, est souvent contrainte de s’installer dans des quartiers urbanisés illégalement situés pour la plupart à la périphérie de la ville.
Ainsi, sur les 7 364 782 habitants que comptait la ville en 2010, 6 235 000 appartiennent aux classes socio-économiques inférieures, soit près de 85% de la population totale.8 Par pauvre ou très pauvre, on entend les populations de classe socio-économique 0, 1, 2 et 3 qu’on définira dans le sous chapitre suivant. Or avoir 85% d’habitants pauvres ou très pauvres à Bogota, capitale de la Colombie et principal centre économique du pays, ne met surement pas à son avantage la situation du pays sur la scène internationale. Devant ce constat peu flatteur, plusieurs polémiques ont surgi quant au nombre exact d’habitants que compte Bogota. Un journaliste du quotidien El Tiempo prend position et, par un rapide retour en arrière, nous démontre qu’il est impossible que Bogota compte le nombre d’habitants prétendu par la mairie. « […] Jamais, dans les 175 ans que Bogota compte comme capitale de la Colombie, depuis 1821, il n’a été possible de savoir avec exactitude, avec certitude le nombre de ses habitants. […] En 1975, durant le mandat de la confrérie Palacio Rudas, le Secrétariat du Gouvernement a fait un recensement démographique de Bogota et a calculé un total de 5,4 millions d’habitants, quand on n’en calculait pas plus de deux millions et demi. […] Celui de 1993, qui a été divulgué à la presse, donne à la capitale 6 millions d’habitants ; mais dans un bulletin d’information qui est annoncé quelques jours plus tard, le DANE corrige ce chiffre et affirme que la population de Bogota ne dépasse pas les 5,4 millions d’habitants. C’est le même organisme qui a fait le recensement, il y a 21 ans, pour le Secrétariat du gouvernement. […] Serait-il possible que le recensement de 1993 ait été dépassé de plus d’un million d’habitants ? Parce qu’on peut calculer la population de Bogota selon un facteur élémentaire. Si la ville est composée de 1200 quartiers au plus, les 5,4 millions d’habitants donneraient une moyenne de 4 500 habitants par quartier, ce qui 8 : http://www.radiosantafe.com/2010/07/07/en-bogota-el-847-de-la-poblacion-es-de-los-estratos1-2-y-3/. Consulté en Aout 2012.
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Fig. 7: Graphique représentant la croissance démographique de Bogota de 1910 à 1960. Source: Graphique réalisé par moi-même d’après Zambrano Fabio, Castelblanco Cardina, 1988, «Comunidades y territorios, reconstruccion historica de Usaquén», Bogota.
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est trop bas, quand on sait qu’il y a des quartiers où vivent plus de 50.000 habitants, et aucun avec moins de 10 000 habitants; mais supposons que la moyenne soit très basse, de seulement 6000 habitants par quartier, on obtient 7,2 millions d’habitants. […]» Je me permets d’insister sur ce point car falsifier des informations porte préjudice aux politiques mises en place par ce même gouvernement pour résoudre, entre autres, le problème de logement qui touche Bogota. De plus, ceci influe également sur les stratégies urbaines et architecturales qui deviennent alors inadaptées et obsolètes. Ce mémoire tente d’apporter une réponse architecturale au problème de l’occupation illégale du sol à Bogota, conséquence directe d’un important déficit de logements dans la ville. Or si on ne connaît pas exactement le nombre de pauvres à Bogota, on ne peut pas évaluer le nombre de logements sociaux à construire. Les habitants doivent de toute façon trouver un toit pour s’abriter. Livrés à eux-mêmes, ils construisent donc illégalement une habitation de fortune là où ils le peuvent. Ceci a pour effet d’augmenter le nombre de quartiers construits illégalement en alimentant l’étalement urbain que la municipalité de Bogota tente par tous les moyens de contrôler. Une telle différence dans un recensement officiel décrédibilise sensiblement le département national des statistiques. Ainsi, les données quantitatives obtenues dans les études des organismes gouvernementaux ne seront présentées dans ce mémoire qu’à titre informatif et ne seront en aucun cas considérées comme une base fiable. Il est d’ailleurs étonnant de voir qu’il est encore en 2013 très difficile d’avoir accès au nombre de résidents bogotains. On pourrait penser qu’une brève recherche google nous apporterait la réponse, mais en réalité l’information est bien moins accessible que cela. Le site du département national des statistiques colombien (DANE) ne semble toujours rien divulguer, bien qu’il offre un large éventail de données relatives à la population bogotaine (pourcentage par sexe, par statut civil, etc.). Un autre site institutionnel, celui du ministère du logement, proposait de consulter une page relative à notre requête, mais celle-ci affiche une erreur. Quant au site wikipedia9, la version espagnole propose 7 363 78210 résidents en 2010 d’après une projection de population faite par le DANE lors du recensement 2005. La version anglaise évoque le chiffre de 7 674 36611 habitants pour l’année 2013, d’après une étude du DANE. Mais, je n’ai retrouvé aucune trace de ce chiffre sur le site du DANE. Enfin, la version française annonce une population de 6 778 691 habitants12 en 2005 d’après le recensement du DANE. Le site web du dictionnaire Larousse fait une estimation à 8 743 500 habitants pour l’année 2011, presque identique à celle de la CIA qui l’évalue à 8 744 000 habitants. Le site des Nations-Unies estime que Bogota compte 7 800 000 habitants13, mais ne donne aucune date précise du recensement. Finalement, après une dernière tentative sur un site institutionnel colombien, celui du ministère de l’urbanisme (SDP), une page14 affiche le nombre d’habitants de chaque localité de la capitale en 2009. Ironie du sort, nous n’avons pas accès au total, c’est à nous de le calculer:
9: Bien que Wikipedia ne soit pas un support adapté à la rédaction d’un mémoire, dans ce cas-ci l’objectif était d’une part de chercher le plus de données possible sur l’internet dans le but de les comparer et d’autre part, de montrer comment une information peut-être malmenée suivant la version languistique d’un site web. 10: http://es.wikipedia.org/wiki/Bogot%C3%A1. Consulté en juillet 2013 11: http://com.wikipedia.org/wiki/Bogot%C3%A1. Consulté en juillet 2013 12: http://fr.wikipedia.org/wiki/Bogota. Consulté en juillet 2013 13: http://www.eclac.org/dmaah/noticias/paginas/3/33313/cantillo1.pdf. Consulté en juillet 2013. 14: http://www.sdp.gov.co/portal/page/portal/PortalSDP/Informaci%F3nTomaDecisiones/Estadisticas/RelojDePoblacion. Consulté en juillet 2013.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Numéro de la localité
Nom de la localité
Nombre d’habitants
1
Usaquén
485.162
2
Chapinero
136.429
3
Santafe
109.947
4
San Cristobal
408.387
5
Usme
416.826
6
Tunjuelito
201.187
7
Bosa
614.107
8
Kennedy
1.043.146
9
Fontibon
362.898
10
Engativa
859.586
11
Suba
1.122.556
12
Barrios Unidos
236.595
13
Teusaquillo
149.225
14
Los Martines
98.465
15
Antonio Narino
108.620
16
Puente Aranda
256.106
17
La Candelaria
24.158
18
Rafael Uribe U
376.707
19
Ciudad Bolivar
664.402 TOTAL 7.680.853
Résumons: Classement
Année
Population
Source
D’après le
1
2005
6.778.691
Wikipedia Fr
DANE
2
2009
7.680.853
SDP
3
2010
7.363.782
Wikipedia Esp
4
2011
8.743.500
Larousse
5
2011
8.744.000
CIA
6
2013
7.674.366
Wikipedia Angl
7
?
7.800.000
Nations-Unies
DANE
DANE
D’après ce tableau récapitulatif, on peut envisager que Bogota compte en 2013 près de 9.000.000 d’habitants même si aucun document ne semble officialiser ce constat. Le district capital, c’est-à-dire la zone urbaine et rurale de Bogotá, a une densité de 4.146 hab/km2 en 2010 alors qu’en ne comptant que le périmètre urbanisé on atteint une densité15 de 20.570 hab/km2. A titre comparatif, la ville de Bruxelles a une densité de 5.062 hab/km2 16 tandis que celle de Paris est de 21.196 hab/km2.17
15: D’après le DANE. Etant donné les problèmes d’estimation de population énoncés auparavant, cette donnée est donnée à titre informatif pour la comparer à celle d’autres villes dans le monde. 16 : D’après le chiffre du Registre national au 1er janvier 2011. www.Bruxelles.be 17 : D’après l’Institut national de statistique et des études économiques (INSEE) en 2009.
20
Fig.8 : Tableau synthétique de la population des différentes localités de Bogota en 2009. Source : SDP.
Fig.9 : Tableau synthétique des estimations de population de Bogota. Source : Voir tableau.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Densité de population par ville
Fig.10: Tableau synthétique des densités de population en fonction des villes. Source : Urban Age - London School, actualisé par la SDP, Bogota, 2010. IBGE, 2010.
Ville
Densité en hab/km2
Mumbai
34.270
Shanghaï
24.670
Paris
21.196
Bogota D.C
20.570
New Delhi
19.640
Sao Paulo
18.920
New York
15.360
Mexico D.F
12.540
Bruxelles
5.062
La répartition18 de population dans les localités en 2009 est la suivante:
> 600.000 400.001 - 600.000 250.001 - 400.000 25.001 - 250.000 5.000 - 25.000 Usaquén
1
Chapinero
2
Santa Fe
3
San Cristobal
4
Usme
5
Tunjuelito
6
Bosa
7
Ciudad Kennedy
8
Fontibon
9
Engativa 10 Suba 11 Barrios Unidos 12 Teusaquillo 13 Los Martines 14 Antonio Narino 15 Puente Aranda 16 Candelaria 17
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Fig.11 : Carte de répartition de la population à Bogota selon les localités en 2009. Source : Réalisé par moimême sur une base existante du SDP.
1/7500 REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
Ciudad Bolivar 19
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REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
Rafael Uribe 18
18: http://www.sdp.gov.co/portal/page/portal/PortalSDP/Informaci%F3nTomaDecisiones/Estadisticas/RelojDePoblacion. Consulté en juillet 2013.
21
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
2.3.
Stratification socio-économique
La stratification socio-économique est un schéma d’organisation sociale et économique de la société. On ne peut l’aborder sans évoquer les notions de richesse et de pauvreté. Dans ce mémoire qui traite de l’urbanisation illégale, on aura davantage tendance à se tourner vers les classes les plus pauvres de la société bogotaine. La pauvreté est un phénomène difficilement qualifiable et donc quantifiable à l’échelle mondiale, tant les écarts de richesse sont grands entre les pays. Bien que chaque pays ait sa propre définition de la pauvreté, «aujourd’hui, tout le monde s’accorde sur le fait que la pauvreté est un phénomène complexe, pluridimensionnel, ne pouvant être réduit à sa simple expression monétaire (c’est-à-dire à un niveau insuffisant de ressources économiques pour vivre de façon décente)»19. Toutefois, «parmi les différentes définitions de la pauvreté, deux se détachent. La pauvreté peut être dite absolue ou bien relative. Est pauvre celui ou celle qui ne dispose pas de suffisamment de ressources monétaires pour se reproduire dans le premier cas. La pauvreté est alors qualifié d’absolue et concerne les pays en développement. Est pauvre celui dont le revenu monétaire est en deça de 50% du revenu médian. La pauvreté est alors dite relative et concerne quasi exclusivement les pays développés»20. D’ailleurs, c’est en se basant sur le revenu monétaire que «la banque mondiale définit la ligne de pauvreté différemment. Elle considère que sont indigents (pauvreté extrême) les individus qui reçoivent moins d’un dollar US par jour calculé à partir du taux de change particulier, différent de celui des pays, dit de parité de pouvoir d’achat (PPA). Ceux qui reçoivent moins de deux dollars PPA par jour sont pauvres»21. L’indice de pauvreté se calcule donc d’une multitude de façons différentes, suivant les critères qu’on utilise pour le calculer, rendant extrêment difficile et imprécis les classements mondiaux. Néanmoins beaucoup d’autres outils complémentaires existent qui permettent de préciser le phénomène. Tel est notamment le cas de l’indice de Gini22. En Amérique Latine, le niveau des inégalités est très élevé comparé aux autres pays. À la fin des années 1990, le coefficient de Gini est, selon l’OCDE, de 0,639 au Brésil, 0,59 en Argentine, 0,58 en Colombie, 0,55 au Chili et 0,52 au Mexique alors qu’il se situe à 0,36 aux Etats-Unis et 0,27 en France. Le niveau des inégalités a tendance à baisser dans les années 2000, sauf en Argentine.23 Le niveau des inégalités est, comme l’indice de pauvreté, un facteur déterminant dans notre questionnement, surtout dans un pays comme la Colombie où le gouffre entre riches et pauvres est un facteur de ségrégation spatiale d’un point de vue urbanistique, mais aussi un facteur à l’origine de morphologies urbaines très hétérogènes caractéristique des villes sud-américaines. Le niveau des inégalités influe directement sur les taux de mortalité et de criminalités des villes et des pays. Comme l’explique Pierre Salama, «niveau et variation des inégalités et taux de croissance du PIB constituent les facteurs clés expliquant l’évolution de la pauvreté. Ils constituent ce qu’on appelle le «triangle de la pauvreté», selon l’expression heureuse de François Bourguignon24. Plus le niveau des inégalités est élevé, plus il est probable que la profondeur de la pauvreté sera importante. A l’inverse, plus la croissance est 19: http://etudesrurales.revues.org/68. Consulté en Juillet 2013 20: SALAMA P, Automne-Hiver 2007, Pauvreté: le bout du tunnel?, Problèmes d’Amérique latine, n°66-67, Paris, p.1 21: SALAMA P, Automne-Hiver 2007, Pauvreté: le bout du tunnel?, Problèmes d’Amérique latine, n°66-67, Paris, p.2 22: Le coefficient de Gini est un autre indicateur de mesure globale des inégalités mettant en rapport les pourcentages de la population et de revenu distribué. 23: SALAMA P, Automne-Hiver 2007, Pauvreté: le bout du tunnel?, Problèmes d’Amérique latine, n°66-67, Paris, p.4 24: BOURGUIGNON F, 2004, The Poverty Growth Inequality Triangle, Working papers, Colloque pour la recherche en relations économiques internationale, 4 Février 2004, Banque mondiale, Washington.
22
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
élevée, plus le revenu des pauvres augmentera et moins de temps ils mettront pour combler l’écart qui les sépare de la ligne de pauvreté si et seulement si la distribution des revenus qui accompagne la croissance n’est pas altérée. La variation des inégalités a en effet un impact sur le niveau de la pauvreté.»25 Faute de pouvoir trouver un classement mondial des villes suivant l’indice de pauvreté, basons-nous sur le PIB des villes dans le monde. Suivant l’INSEE (l’Institut National de la Statistique et des Études Économique) et PWC (PriceWaterhouseCoopers), en 2008, on obtient:
Fig.12 : Tableau synthétique de quelques pays suivant leur PIB. Source : INSEE, PWC, 2008.
Fig.13 : Tableau synthétique du pourcentage de population indigente. Source : Banque mondiale, 2005.
Fig.14 : Tableau synthétique du pourcentage de population vivant sous le seuil de pauvreté. Source : CIA World Factbook, 2012.
Rang / 100
Ville
Pays
PIB (en 2008 en milliards de dollars)
1
Tokyo
Japon
1 479
6
Paris
France
564
8
Mexico
Mexique
390
10
Sao Paolo
Brésil
388
16
Hong Kong
Chine
320
29
Bombay
Inde
209
64
Bogota
Colombie
100
75
Bruxelles
Belgique
83
En se basant sur l’indice PPA (individus recevant moins d’un dollars par jour) de 2005 (individus qui reçoivent moins d’un dollar US par jour) de la banque mondiale, on obtient le classement suivant, par pays cette fois-ci: Pays
Pourcentage de population indigente
Madagascar
67,8%
Inde
41,6%
Chine
16,3%
Colombie
12,7%
Brésil
8,5%
Mexique
5,1%
France, Belgique et Japon
N/D
Enfin, à titre informatif, si l’on fait un classement sur 157 pays du plus pauvre au plus riche en se basant sur les estimations nationales du pourcentage de la population vivant sous le seuil de pauvreté, on obtient pour l’année 201226: Rang
Pays
Pourcentage de population pauvre
21/157
Mexique
51,3%
25/157
Madagascar
50%
48/157
Colombie
37,2%
72/157
Inde
29.8%
118/157
Japon
16%
121/157
Belgique
15,2%
130/157
Chine
13,4%
151/157
France
6,2%
25: SALAMA P, Automne-Hiver 2007, Pauvreté: le bout du tunnel?, Problèmes d’Amérique latine, n°66-67, Paris, p.3 26: http://www.indexmundi.com/g/r.aspx?t=0&v=69&l=fr. Consulté en juillet 2013.
23
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
La comparaison des précédents tableaux avec celui-ci montre qu’il faut être prudent avec les chiffres concernant les critères de pauvreté. Si les premiers tableaux, utilisent des indices pertinents (PPA et PIB), on remarque qu’il est impossible de se baser sur la définition de la pauvreté de chaque pays pour établir un classement à l’échelle mondiale. L’avoir fait nous permet de voir que le Japon (16%) et l’Inde (29,8%) détiennent presque le même nombre de pauvres ce qui paraît absurde au vue de la situation de ces deux pays. Toutefois, en ramenant ce pourcentage aux populations respectives de ces pays (en 201327, l’Inde compte 1,25 milliards d’habitants et le Japon compte 127,144 millions d’habitants), l’Inde reste largement en tête. En Colombie, les inégalités sont palpables grâce à un système de classes socio-économiques très hiérarchisés. En effet, on dénombre pas moins de six estratos socios-economicos calculés selon le salaire minimum mensuel: l’estrato 6 correspond à la classe haute, le 5 à la classe moyenne-haute, le 4 à la classe moyenne, le 3 à la classe moyenne-basse, le 2 à la classe basse, le 1 à la classe basse-basse et le 0 est une classe récente déstinée aux habitants des quartiers à urbanisation illégale. Certaines zones urbaines ne sont pas répertoriées, elles portent la mention N/D. Elle se réfère soit à des zones urbanisées illégalement, elles n’ont donc aucune valeur au regard de la loi et ne sont pas répertoriées, soit à des édifices qui accueillent d’autres fonctions qu’un usage résidentiel. La définiton du pauvre en Colombie a énormément évolué si on la compare à celle du début du siècle dernier. Celle-ci est établie à partir du salaire mininum qui est recalculé chaque année, en fonction de l’évolution économique du pays. Un pauvre est donc une personne qui gagne environ le salaire minimum mensuel colombien. Historique du salaire minimum en Colombie depuis 1990 Année
Salaire minimum (en $US)
Aide aux transports (en $US)
1990
22,8
2,11
1995
66,0
6,0
2000
144,5
14,6
2005
212
24,7
2010
286,1
34,2
2013
327,5
39,2
En 20 ans, de 1990 à 2010, le salaire minimum a été multiplié par 12,5. Les aides aux transports permettent aux habitants pauvres qui vivent souvent en périphérie urbaine d’utiliser le transport en commun massif (assez coûteux pour eux, de l’ordre de $1 U.S le ticket) pour se rendre sur leur lieu de travail.
9,3% de la population à Bogota appartient à la catégorie basse-basse, c’est-à-dire que ce sont des citadins vivant dans une pauvreté extrême. Par opposition, seulement 1,7% de la population appartient à la classe la plus riche. Enfin, la majorité soit près de 73%, se classe dans les catégories basse et moyenne-basse.28 La population de Bogota est donc composée en grande majorité de pauvres. Il s’agit de populations n’ayant pas forcément accès à l’eau potable ou à l’énergie (pour les plus démunis), souvent analphabètes et ne profitant pas, ou très peu, d’aides sociales.
Stratification socio-économique Sans
1
2
3
4
5
6
Total
Nbre d’îlots
6469
6793
15198
11853
2298
1037
886
44534
% îlots
14.53%
15.25%
5.16%
2.33%
1.99%
100%
34.13% 26.62%
27: D’après le dictionnaire Larousse. Consulté en Aout 2013. 28 : D’après la Direccion Nacional de Planeacion. www.dnp.gov.co. Consulté en Décembre 2012.
24
Fig.15 : Tableau synthétique regroupant l’évolution du salaire minimum colombien depuis 1990. Source : http://www.businesscol.com
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Estrato 6 Estrato 5 Estrato 4 Estrato 3 Estrato 2 Estrato 1 Sans estrato
Fig.16 : Plan représentant la répartition des classes socio-économique à Bogota. Source : DAPD, 2009.
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Les populations très pauvres (estrato 0, 1, 2) s’installent à la périphérie ouest et sud de la ville tandis que les classes plus aisées occupent le nord de Bogota.
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Limite de localité
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2.4. Mobilité La question de la mobilité est un des thèmes omniprésents dans la politique de développement de la ville de Bogota. Elle a été depuis les années 1950 au cœur des préoccupations et des discussions politiques quant à l’avenir de la ville. Evoquer la question de la mobilité à Bogota nécessite tout d’abord de dresser un historique du réseau viaire de la ville, composante indissociable de la thématique abordée. C’est à partir des années 1990 que la question de la mobilité devient critique à Bogota. Pourvue d’un réseau viaire insuffisant, dégradé, et souffrant de l’augmentation de la circulation automobile, Bogota devient très rapidement une ville chaotique où la vitesse moyenne n’atteint pas plus de 5 km/h aux heures de pointe. Par ailleurs, le système de transport public est à ce moment là inexistant; on ne peut compter que sur des sociétés de bus privées. La concurrence est forte et les bus circulent en nombre beaucoup trop important. Le réseau viaire est alors rapidement saturé et inadapté à un tel flux automobile. Ce n’est qu’en 1999 qu’un transport public, le Transmilenio, est créé par l’administration du maire Enrique Peñalosa (1998-2002). La nécessité était telle
25
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
que ce système de transport massif connaît un succès immédiat. Quelques 900 000 voyageurs empruntent quotidiennement ses grands bus rouges29. Le réseau actuel s’est développé en troix phases. La première proposait 41 km de lignes au début du projet (en 2000) pour atteindre 380 km de lignes lors de la troisième phase.
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Le transmilenio dispose de 9 lignes, qui desservent 114 arrêts. Le système fonctionne avec des bus articulé d’une capacité de 160 à 270 passagers, invention largement reprise à Paris avec les bus en accordéons. Pour des facilités de mobilité, ces bus empruntent des voies propres qui leurs sont réservées.30
29 : http://www.institut.veolia.org. Consulté en Août 2013. 30 : www.transmilenio.gov.co. Consulté en Août 2012.
26
Fig.17 : Carte représentant l’extension du réseau de Transmilenio au fil du temps. Source : www.transmilenio. gov.co
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Fig.18 : Photographie d’un transmilenio. Source : www.transmilenio. gov.co
Sur un plan urbanistique, la mise en place du Transmilenio à Bogota est un tremplin pour la ville : Bogota change de visage, son infrastructure routière s’améliore grâce aux sites propres de bus, et l’espace public est repensé pour accueillir le nouveaux flux de circulation des bus, mais aussi celui des piétons. Petit à petit on privilégie le piéton à la voiture. Grâce à son nouveau transport public à faible coût (beaucoup moins cher que la mise en place d’un métro) qui optimise au maximum le transport des passagers à travers la ville, Bogota remporte en 2006 le prix d’or de la Biennale de Venise en tant que « Meilleure ville »31. La mobilité à Bogota a aussi évolué dans le sens où elle s’est tournée vers d’autres moyens de transport. Toujours dans l’optique de réduire le flux automobiles et pour compléter le Transmilenio, la ville a misé sur la réintroduction de la bicyclette en milieu urbain avec la mise en place d’un vaste système de pistes cyclables. En 2000, la ville de Bogota publie un plan directeur pour les déplacements à bicyclette. Trois cent vingt kilomètres de pistes cyclables sont aménagés en 9 ans. Le projet ne se limite pas qu’aux couloirs de vélo mais intègre le mobilier urbain adéquat (parking à bicyclettes) et réaménage l’espace public alentour.32 Ces récentes mesures, bien qu’elles aient eu un impact significatif sur la mobilité à Bogota, n’arrivent toutefois pas à endiguer totalement le problème de congestion automobile qui touche la capitale. C’est pourquoi l’administration d’Enrique Peñalosa lance en 1998 le pico y placa. Ce système étendu par la suite à toutes les grandes villes colombiennes comme Medellin, Cali, Barranquilla et d’autres, vise à limiter le trafic automobile en journée, afin de décongestionner la ville devenue impraticable. Concrètement, le pico y placa utilise les jours pairs et impairs du calendrier. Si l’on prend l’exemple de la ville de Bogota pour le mois de juin 2012, les voitures particulières ayant leur plaque minéralogique finissant par 0,2,4,6 ou 8 ont interdiction de rouler les jours pairs. Pour les jours impairs, l’interdiction concerne les véhicules dont la plaque se termine par 1,3,5,7,933. A l’origine, les restrictions s’appliquaient du31 : MARTIN G, ESCOVAR A, GOSSENS M, Août 2007, «El Renacer de una ciudad», Coordinateurs éditoriaux du catalogue officiel de l’exposition de Colombie dans le cadre de la Biennale de Venise de 2006, Bogota. 32 : INTERFACE OF CYCLING EXPERTISE, 2000, «The economic benefits of cycling in Santa Fe de Bogota», GK Den Haag, p.8. 33: http://www.picoyplaca.info/bogota. Consulté en juillet 2013.
27
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
rant les heures de pointes, entre 7h et 9h et 17h30 et 19h30. Forts du résultat obtenu, les maires qui succèdent, durcissent à chaque fois un peu plus le pico y placa. En plus des voitures particulières, Luis Eduardo Garzón, étend l’interdiction de rouler aux taxis et aux busetas34. Mais constatant encore une nette amélioration du trafic, le maire qui lui succède, Samuel Moreno, (2008-2011) prolonge l’interdiction à une journée entière soit de 6h à 20h, provoquant l’ire des automobilistes35. A noter que si le système est aussi efficace, c’est qu’il est extrêmement répressif puisque l’amende pour les fraudeur s’élève à 260.000 pesos colombien, soit $144 US, quel que soit le niveau de revenus du contrevenant! Mais les réflexions sur la mobilité et plus largement sur le développement de la ville de Bogota prennent leurs origines dès la deuxième moitié du XXe siècle. C’est en 1945 que la Société Colombienne des Architectes36 crée le premier plan du système viaire de Bogota. Il est dessiné à partir du plan Soto-Bateman et pensé selon une logique d’ingénieur, c’est-à-dire en termes de gestion de flux. Un des objectifs du plan d’urbanisme est de connecter la ville dans le sens nord-sud et est-ouest au moyen de la création de deux grandes artères : l’avenue Las Americas et l’avenue des Comuneros. C’est également ce plan qui définit le maillage orthogonal dessinant d’immenses îlots rectangulaires. Bien que la trame urbaine de Bogota évolue encore aujourd’hui selon un quadrillage à la manière des villes nord américaines, le plan en damier colombien tire son origine de la loi des Indes (plan des villes coloniales fondées par les Espagnols)37. Les axes parallèles aux Cerros orientales se nomment les carreras tandis que les perpendiculaires s’appellent les calles.
Il est relativement facile de se repérer dans la ville. Chaque rue (calle) et avenue (carrera) sont respectivement numérotées par rapport au centre historique et aux Cerros orientales. Plus on s’éloigne du centre vers le nord, plus le numéro de la calle augmente. Pour les calle allant du centre vers le sud, il est mis un «S» comme sud, pour ne pas se tromper. La carrera 1 est celle qui se trouve la plus près des Cerros orientales. Plus on s’éloigne vers l’ouest, plus le numéro de la carrera augmente.
Un an plus tard, en 1946, la revue Proa propose à la municipalité de Bogota un plan viaire qui tente de réorganiser le centre historique de la 34: Les busetas sont de petits bus d’une trentaine de places assises qui arpentent les rues de Bogotá s’arrêtant au gré des passagers pour les débarquer ou les embarquer. Il n’y a pas d’arrêts ou de stations pour monter ou descendre. 35: http://www.picoyplaca.org/. Consulté en juillet 2013. 36 : En espagnol : Sociedad Colombiana de Arquitectos 37: GRÜNEWALD F, LEVON E, 2004, Villes en guerre et guerres en ville, pratiques humanitaires en questions, édition Karthala, Paris, p.290.
28
Fig.19 : Schéma expliquant le fonctionnement des calles et des carreras à Bogota. Source: Schéma personnel.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
ville selon une trame orthogonale par la création de quelques axes directeurs : l’avenue Cundinamarca (Carrera 30) et l’avenue San Francisco.
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Fig.20 : Système viaire de Bogota, les grands axes. Source : Plan réalisé par moimême à l’aide du cadastre.
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Consciente de la pression démographique exercée sur la ville, la municipalité invite dès 1949 Le Corbusier à réfléchir sur l’expansion urbaine que connaît la capitale. Nous sommes à l’aube des années cinquante et Bogota compte déjà quelques 700 000 habitants et sa croissance urbaine ne tardera pas à devenir incontrôlable si la municipalité n’intervient pas sur le plan urbanistique.
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Fig.21 : Plan de Bogota, 1948. Source : Fondation Le Corbusier.
Face à ce défi, Le Corbusier propose en 1950, un plan pilote pour la ville de Bogota. Ce plan pilote (encore appelé plan régulateur) permettrait, tout en proposant une solution pour le développement futur de la ville, de doter
29
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
la capitale d’une vision urbanistique moderne. Le plan pilote de Le Corbusier regroupe deux idées nouvelles qui serviront de fil conducteur pour l’urbanisation de la ville. La première idée repose sur le principe des secteurs urbains, c’est-à-dire que le plan prévoit un zonage des secteurs qui compose la ville. En effet, il donnera un usage à chaque îlot ou ensemble d’îlots définissant ainsi les espaces verts et autres usages nécessaires.
La deuxième idée consiste à gérer les flux de circulation par une hiérarchisation du réseau viaire. Le réseau se divise alors en cinq catégories encore appelées 5V: V1 : Représentées en bleu, ces voies sont à caractère régionale. Elles relient les régions à la ville de Bogota. V2 : Représentées en rouge, ces voies de statut métropolitaine irriguent en suffisance la ville et assure la fluidité du trafic. V3 : Représentées en orange, ces voies délimitent les différents secteurs qui composent la ville. V4: Representées en jaune, ces voies à caractère beaucoup plus locales, desservent les quartiers des secteurs de la villes. V5: C’est la plus petite unité de voirie. Ces voies desservent chaque habitation38.
Fig.22 : Plan de zoning du centre civique de Bogota, 1950, Le Corbusier Source : Fondation Le Corbusier.
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Le plan pilote donne à Bogota quelques nouveaux axes et prolonge les précédents dans le respect de la trame existante. Ces gros axes ceinturent la 38 : LE CORBUSIER EN BOGOTA, 2010, «LC BOG : Le Corbusier en Bogota, 1947-1951», Universidad de los Andes, Universidad Javeriana, Bogota p.143.
30
Fig.23 : Plan Pilote de Bogota, 1950, Le Corbusier. Source : Fondation Le Corbusier.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
ville et lui confèrent un périmètre urbain quadrillé en plusieurs types de voiries hiérarchisées en fonction des flux de circulation.
Nouveaux tracés Tracés existants REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
Fig.24 : Système viaire de Bogota, les grands axes, 1950. Source : Plan réalisé par moimême à l’aide du cadastre.
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Centre Historique
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2.5. Pollution Dans les années 1980, Bogota est la quatrième ville d’Amérique latine touchée par la pollution atmosphérique juste derrière Sao Paulo, Rio de Janeiro et Belo Horizonte (Brésil)39. Dès 1983 et jusqu’en 1986, de grandes mesures sont prises pour réduire la pollution émise par les sites industriels de la ville: installation de filtres et d’équipements de contrôle de l’air, un changement dans les procédés de production, des études sur la pollution de l’air40. Cependant, ces mesures ne concernent que la pollution provoquée par le secteur industriel et ne prennent pas en considération la pollution provoquée par les automobiles. Dans les années 1980, l’explosion démographique que subit la capitale colombienne contraint les habitants à habiter de plus en plus 39 : UNEP, 1987, «Première information préliminaire sur la situation écologique en Amérique Latine et dans les Caraïbes», Mexico. 40 : ROMIEU I, WEITZENFELD H, FINKLEMAN J, 1991, Urban Air Pollution in Latin America and the Caribbean, Journal of the air & Waste Management Association, Taylor & Francis Group, Mexio, D.F, p.1169 .
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
loin du centre ville, jusqu’alors considéré comme le pôle économique de la ville. Suivant le modèle d’expansion urbain nord-américain, la voiture particulière s’impose rapidement comme principal moyen de transport. S’ajoute à cela la quantité de bus privés évoquée au point précédent qui détériorent rapidement la qualité de l’infrastructure routière. En 2008, « Bogota est classée dans les quarante villes les plus polluées du monde. […] Bogota, par exemple, consomme 24% de l’énergie totale consommée par la Colombie. A cause de cela, c’est la ville la plus polluée du pays et elle se classe au troisième rang des villes les plus polluées d’Amérique Latine. Les localités de Fontibon, Puente Aranda et Kennedy sont les secteurs les plus contaminés de Bogota. […] 60% de la pollution de l’air sont générés par les automobiles, les bus et les motos. Les 40% restants sont produits par le secteur industriel» d’après le ministère de l’écologie de Bogota. Quatre facteurs permettent d’expliquer les hauts indices de pollution provoqués par les automobiles et les bus : la mauvaise qualité de l’essence, le mauvais état des moteurs, le manque de conformité des casses, et la congestion. Quelques mesures sont prises comme l’explique Juan Antonio Nieto, ministre écologique de Bogota, « en février de cette année, le maire a conclu un accord avec Ecopetrol41 pour réduire les particules toxiques contenues dans l’essence vendue à la ville et grâce à cela espère réduire la pollution ». Nieto reconnait donc que l’indice de pollution de l’air de Bogota est au-dessus de la moyenne fixée par la loi écologique. Concernant la mauvaise état des moteurs, il existe à Bogota, selon des chiffres du district rassemblés dans une étude de Codensa42, environ 600.000 véhicules particuliers âgés de 14 ans en moyenne et 18.000 bus âgés de 12 ans en moyenne. Une des alternatives proposées pour améliorer la mobilité et réduire la pollution serait alors de repenser la ville. Contrairement aux modèles qui séparent les zones résidentielles des zones de travail, les intégrer permettrait de réduire les distances de déplacement des habitants. De cette façon, il serait plus probable que les gens marchent jusqu’à leur lieu de travail ou utilisent la bicyclette. «Ceci est en train de se produire aux États-Unis où, avant, le modèle était celui des villes étendues où il n’y avait pas d’autre option que d’utiliser sa voiture pour aller de sa maison à son lieu de travail » explique Edgar Blanco, directeur pour l’Amérique Latine du Centre pour le Transport et la Logistique du Massachusetts Institute of Technology aux USA et qui a participé au forum «Bogota 2038»43. Cet extrait paru dans un article datant de septembre 2008 a été écrit juste après le forum Bogota 2038. Il évoque les problématiques soulevées par la municipalité en matière de pollution atmosphérique. Principalement causée par le trafic routier, l’automobile est devenue la nouvelle bête noire des maires de la capitale, le pico y placa l’atteste bien. Enfin, il ne faut pas oublier que Bogota est située à 2 600m d’altitude. Or «la pollution de l’air est affectée par les changements d’altitude. En effet, les villes situées à plus de 1500m au-dessus du niveau de la mer ont une pression atmosphérique environ 15% moins élevée que celles situés au niveau de la mer. Par conséquent, les engins motorisés conçus pour fonctionner à de basses altitudes sont moins efficaces à haute altitude et émettent de plus grandes quantités d’hydrocarbures et de monoxyde de carbone. Le résultat visible est un brouillard photochimique appelé smog en anglais qui a tendance à se renforcer par l’augmentation du rayonnement solaire des hautes altitudes»44 précise l’agence de protection environnementale américaine (EPA). 41 : Ecopetrol est une compagnie pétrolière colombienne qui fait partie des quatres plus importantes compagnies pétrolières d’Amérique Latine. www.ecopetrol.com.co. Consulté en Décembre 2012. 42 : Codensa est l’entreprise de distribution d’électricité à Bogota. 43 : MORALES L, Septembre 2008, « Contaminacion a Bogota, no va bien y podria ser peor », journal La Semana, hebdomanaire. 44: http://cfpub.epa.gov/ncea/cfm/recordisplay.cfm?deid=47804#Download. Consulté en juillet 2013.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Fig.25 : Photo illustrant le brouillard de pollution à Bogota. Source: http://mikesbogotablog.blogspot.be/2011/02/bogotas-car-free-day.html
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
3.
L’URBANISATION ILLÉGALE À BOGOTA 3.1. Un contexte politique annonciateur de crise démographique
C’est au milieu des années 1960, dans un contexte de fin de guerre civile appelé la Violencia que naît le conflit armé colombien, principalement provoqué par la situation politique du pays. À l’origine, deux groupes de guérilla marxistes émergent : les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) et l’ELN (Armée de libération nationale) et plongent très vite la Colombie dans un climat de terreur. Au fil des années, l’envenimement du conflit intérieur crée en Colombie un contexte propice à toutes sortes de violations des Droits de l’Homme; dont les déplacements forcés de population, témoignage significatif de ce phénomène. Dans un premier cas, la situation économique précaire de certaines régions oblige également des populations à la migration45. Dans un second cas, les populations rurales sont victimes de violences de la part des groupes armés, de recrutements forcés dans les rangs des groupes armés illégaux ou de l’appropriation forcée de terrains. Ainsi, avec trois millions de personnes déplacées depuis 1950, la Colombie était en 2008 le pays du monde le plus touché par ce phénomène, selon le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés46. Les populations victimes d’un déplacement forcé migrent en général vers la capitale en quête de perspectives futures plus sûres. Mais les conditions de précarité des migrants qui ont souvent tout abandonné ne facilitent pas leur insertion urbaine et sociale. Ces importants flux migratoires ont donc une répercussion importante sur la croissance urbaine et démographique de Bogota et explique le boom démographique qu’a subi la capitale andine. D’après une étude réalisée par le ministère du logement en 2003, plus de 30% de la population bogotaine représente des émigrés.47 Précisons que l’on distingue les populations qui migrent de leur plein gré et les « déplacés » qui sont les personnes qui ont dû fuir leur lieu de résidence. Depuis la seconde moitié du XXe siècle, la forte croissance de Bogota entraîne un important besoin en logements. Plus de la moitié des habitants de la ville vivent dans la pauvreté tandis qu’une minorité accède à un niveau de vie élevé, entraînant ainsi des inégalités qui ont tendance à s’accentuer dangereusement au fil du temps. Ces inégalités sont notamment à l’origine de problèmes comme la violence ou l’insécurité en ville, caractéristique tristement célèbre de plusieurs villes sud-américaines.
3.2. L’explosion démographique de Bogota comme origine du problème de logement
3.2.1. La croissance démographique
Même si les migrations forcées des années 1960 ont entrainé un bouleversement, les grandes transformations démographiques de Bogota ont commencé dans les années 1950, durant lesquelles le processus d’urbanisation qui a accompagné l’industrialisation s’est intensifiée.48 À partir de 1950, l’industrialisation des grandes villes comme Cali, Medellin ou Bogota a provoqué un important exode rural. Les campagnes sont désertées par les habitants, attirés par la nouvelle offre de travail liée à l’industria45 : CODHES, 1997, Desplazados por violencia y conflicto social en Bogotá, Arquidiocesis de Bogota, Arquidiocesis de Bogota, Bogota, p.42. 46 : http://www.unhcr.fr/cgi-bin/texis/vtx/home. Consulté en Aout 2012. 47 : Ministère du logement, « Secretaria hacienda », www.institutodeestudiosurbanos.info. Consulté en Aout 2012. 48 : VIVIESCAS F 1989, Urbanizacion y ciudad en colombia, Fondo Editorial, Bogota, p.123.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
lisation et le modèle de la vie citadine moderne. Le phénomène est comparable à celui de la révolution industrielle en Europe, mais avec un retard considérable de l’ordre d’un siècle. En 1964, la population de Bogota avoisinait 1.697.311 habitants49 avec une croissance annuelle de 7% durant les sept années antérieures. Aujourd’hui, la capitale compte quelque 9 millions d’habitants mais son taux de croissance a diminué pour atteindre 2,2% par an.
Ce graphique illustre bien l’explosion démographique des années 1950 et 1960.50 De plus, entre le début (1912) et la moitié du XX siècle (1964) la superficie de Bogota a été multipliée par 3.51 Années
Nombre d’habitants
Croissance
1912
121.257
2.7
1918
143.994
2.9
1928
235.421
5.0
1938
330.312
3.4
1951
715.250
6.1
1964
1.697.311
6.8
Les huit cartes suivantes témoignent graphiquement de l’ampleur de la croissance urbaine et de l’étalement urbain qu’a connu Bogota à partir des années 1950 jusqu’à aujourd’hui52:
49: Comme précédemment, un chiffre officiel à considérer encore avec précaution car il provient du DANE. 50 : DANE, Recensement de la population par le Département Administratif National des Statistiques. 51 : ZAMBRANO F, CASTELBLANCO C, 2000, Comunidades y territorios, reconstruccion historica de Usaquen, Alcaldia local de Usaquén, Bogota p.76. 52 : www.institutodeestudiosurbanos.info. Consulté en décembre 2012.
36
Fig.26 : Evolution et projection démographique, Bogota D.C. Source : Graphique réalisé par moi-même d’après des informations du DANE.
Fig.27 : Tableau synthétique de la population de Bogota en relation avec la croissance urbaine de la ville entre 1912 et 1964. Source : Tableau réalisé par moi=même d’après: ZAMBRANO Fabio, CASTELBLANCO Cardina, (2000), « Comunidades y territorios, reconstruccion historica de Usaquen », Bogota.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Fig.1: 1538-1912 Aire: 892,3 ha Densité: 149 hab/ha Aire urbanisé par an: 2,4 ha
Fig.2: 1912-1939 Aire: 1529,8 ha Densité: 156 hab/ha Aire urbanisé par an: 76,5 ha
Fig.3: 1940-1950 Aire: 1554,1 ha Densité: 222 hab/ha Aire urbanisé par an: 155,4 ha
Fig.4: 1950-1960 Aire: 1889,1 ha Densité: 157 hab/ha Aire urbanisé par an: 188,9 ha
Fig.5: 1960-1970 Aire: 3142,9 ha Densité: 250 hab/ha Aire urbanisé par an: 314,3 ha
Fig.6: 1970-1980 Aire: 5812,37 ha Densité: 206 hab/ha Aire urbanisé par an: 581,2 ha
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Fig.7: 1980-1990 Aire: 2648,5 ha Densité: 306 hab/ha Aire urbanisé par an: 264,9 ha AUTODES KA
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Fig.8: 1990-2000 Aire: 3528,3 ha Densité: 276 hab/ha Aire urbanisé par an: 352,8 ha
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Fig.28: Historique de la croissance urbaine de Bogota de 1538 à 2000. Source : Institut des études urbanistique.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
L’ explosion démographique entraîne une transformation de la structure urbaine. Trois facteurs permettent d’expliquer l’hétérogénéité morphologique de la ville : - les ménages qui ont les ressources suffisantes peuvent choisir où s’installer; - les ménages qui évoluent dans l’échelle socio-économique réussissent à obtenir un statut leur permettant d’occuper les espaces que les premiers ont occupés auparavant; - les ménages qui occupent les lieux délaissés par la deuxième catégorie de citadins mais qui n’ont pas les ressources suffisantes subissent une dégradation de qualité de vie. Le centre de Bogota se densifie, mais le phénomène le plus marquant est l’ occupation des périphéries de la ville par les habitants de la troisième catégorie mentionnée ci-dessus. Limitée à l’est par les cerros orientales, Bogota s’étend de manière radiale et finit par absorber les municipalités voisines pour ne former qu’un seul tissu urbain. Usaquén, Suba, Fontibon, Bosa et Usme, autrefois de petits villages coloniaux, font désormais partie intégrante de la ville53.
1
Usaquén
2
Chapinero
3
Santa Fe
4
San Cristobal
5
Usme
6
Tunjuelito
7
Bosa
8
Ciudad Kennedy
9
Fontibon
10
Engativa
11
Suba
12
Barrios Unidos
13
Teusaquillo
14
Los Martines
15
Antonio Narino
16
Puente Aranda
17
Candelaria
18
Rafael Uribe
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Ciudad Bolivar
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53 : MOLINA, HUMBERTO, 1992, Estructura y Tendencias de crecimiento, Mision Bogota Siglo XXI, Punto Aparte, Bogota, p.55.
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Fig.29 : Carte de répartition de la population à Bogota selon les localités en 2009. Source : Réalisé par moimême sur une base existante du SDP.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
C’est dans les années 1960 que la morphologie de Bogota évolue le plus. Les anciens villages nouvellement intégrés à la ville se transforment en quartiers ouvriers où l’autoconstruction remplace l’architecture coloniale d’autrefois. Les populations issues de l’exode rural sont dans la majorité des cas très démunies financièrement et sont dans l’impossibilité de payer un logement en ville. Elles n’ont alors pas d’autre choix que de s’éloigner à la périphérie, là où les terrains sont encore vierges de toute construction. Les nouveaux arrivants commencent par s’approprier un lot de terre pour ensuite s’atteler eux-mêmes à la construction de leur habitation. Souvent, celle-ci évolue au gré des disponibilités financières et des besoins des occupants. Ces maisons rassemblent toutes les fonctions dans un seul et même espace qui évolue au fil du temps avec l’agrandissement de la famille. Les enfants devenus adultes ne quittent pas le domicile familial, mais construisent un étage au-dessus de l’existant en vue de fonder à leur tour une famille. De ce schéma social, naît alors un paysage urbain caractéristique, fait d’un enchevêtrement de maisons jamais finies, tantôt peintes de couleurs vives, tantôt laissées à l’état brut.
Fig.30 : Photographie d’un quartier informel à Bogota, mars 2012. Source : Photographie personelle.
L’urbanisation de la capitale s’est développée en fonction des besoins des habitants. Par conséquent, elle a été soumise aux pressions que génère la société (augmentation de la demande en logements) qui engendre une expansion urbaine mal maîtrisée qui a pour résultat un déséquilibre dans la structure urbaine de la ville. Morphologiquement, les quartiers autoconstruits de la périphérie sud de la ville provoquent une véritable fracture dans le maillage de la ville, autant dans l’infrastructure (inexistante ou quasi inexistante) que dans la typologie du bâti. L’urbanisation à Bogota se traduit par une augmentation de la densité de population mais surtout par l’augmentation d’une urbanisation marginale en périphérie urbaine, qui s’est accentuée ces dix dernières années. Ces quartiers marginaux occupent une proportion importante du territoire urbain de Bogota (plus de 25%) et abritent une grande partie de la population urbaine (environ 2.500.000 personnes)54. La ramification de la cordillère des Andes définit un terrain particulièrement difficile par son dénivelé et oriente alors la croissance urbaine selon l’axe 54 : JUAN DE DIOS M, Février 2001, algunas consideraciones en la formacion y consolidacion de la ciudad espontanea en bogota, Revue Territorios Uniandes, n°6, Bogota, p.83.
39
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
nord-sud et dans une moindre mesure sur la périphérie ouest. La périphérie de Bogota est composée de Ciudad Sur (au sud), Ciudad Norte (au nord) et Borde Occidental (à l’ouest).55 Dans la périphérie sud surtout, mais également à l’ouest de la ville, on relève un accroissement de quartiers d’origine clandestine et un développement inachevé du système routier et de l’infrastructure des services d’égouts et d’acheminement d’eau. Aujourd’hui, le phénomène a pris tellement d’importance qu’il a fracturé radicalement le nord et le sud de la ville. De plus, la périphérie urbaine a été utilisée pour consolider de nouvelles zones d’expansion urbaine, comme réponse au problème d’accroissement de la population, mais l’explosion démographique a complètement dépassé les institutions en charge de la planification urbaine. À l’est, cependant, la périphérie ne connaît pas d’expansion urbaine puisque sa situation géographique l’interdit. Il existe toutefois quelques exceptions dont le secteur de San Cristobal Norte. Animé par la volonté de nouveaux arrivants ayant fui leurs terres d’origine, ce secteur en pleine montagne commence à s’urbaniser clandestinement : les arbres sont coupés laissant la place à l’autoconstruction.
3.2.2. L’urbanisation illégale est-elle informelle, clandestine ou marginale?
Le terme urbanisation illégale, inconnu de notre vocabulaire d’architecte occidental, fait référence en Colombie à toute construction humaine réalisée sur un terrain sans avoir au préalable, ni acheté de parcelle, ni obtenu un permis de lotir ou de construire. La construction se fait par auto-construction et peut aussi bien être édifiée sur une zone déjà urbanisée comme le centre de Bogota (on construira à l’emplacement d’une dent creuse par exemple), que sur un terrain encore vierge comme l’est, dans les années 1970 la périphérie de Bogota et plus spécialement tout le secteur sud-ouest. En plus du simple fait de ne pas respecter la loi, l’urbanisation illégale met en jeu la vie de ses occupants. La non-vérification des sols, l’inexistence de fondations, de personnes qualifiées pour la construction des édifices, et l’absence de réseaux d’égouttages et d’adduction d’eau potable sont autant de facteurs qui peuvent se révéler fatals en cas de glissement de terrain, d’effondrement ou d’empoisonnement. D’autant plus que le phénomène s’installe majoritairement sur les terres délaissées par la ville en raison de leur difficulté d’accès (isolé de l’infrastructure de Bogota), et de leur dangerosité (sur des terrains inondables ou sujets à des effondrements).
55 : GOBERNACION DE CUNDINAMARCA, 2008, « modelo de ocupacion territorial regional, para los municipios de las Provincias de Sabana Centro, Sabana Occidente y Soacha, con su sistema de informacion geografico y coadyuvar en su adoption », Octobre 2008, Bogota.
40
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Haut risque Moyen risque Faible risque Sans surprise, Ciudad Bolivar et Usme présentent des risques d’effondrement de terrain. C’est aussi dans ce secteur que l’urbanisation illégale s’est la plus développée car les terrains à priori non constructibles ont été délaissés par la ville. La carte montre également los Cerros orientales bordant la ville du nord au sud.
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Fig.31: Carte des menaces par éboulements dans le district de Bogota. Source : DPAE, DACD, 2007.
Les habitants de ces quartiers sont principalement des émigrés issus de l’exode rural provoqué par le climat politique du pays. Ce sont donc des paysans démunis financièrement et la terre est, pour eux, synonyme de richesse. Ils procèdent donc naturellement à ce que l’on pourrait appeler une ruralisation de la ville en s’appropriant illégalement des lots de terres parce qu’avoir un terrain implique pour eux la possibilité d’y faire ce qu’ils en souhaitent. Le propriétaire peut alors y construire, par étape, la maison dont il a besoin, en fonction de ses envies et surtout de ses disponibilités financières. Avant 1950, les quartiers naissant aux abords du périmètre urbain de Bogota étaient de nature ouvrière et aucun autre qualificatif n’était employé à leur égard. C’est à la fin des années 1950, que le phénomène grandissant, commence à être repris par la presse qui parlera de quartiers «fantômes», «marginaux». En 1961, la ville préfère parler de quartiers abandonnés et propose des procédures de légalisation. En 1967, de nouveaux termes, plus scientifiques, plus alambiqués, remplacent les précédents. On parle alors d’«urbanisation à développement progressif», de «Plan d’amélioration des zones de développement incomplet» et des «superficies occupées par de l’habitat social» ou «populaire de manière informelles». L’existence de procédures de légalisation voudrait, qu’à mon sens, on les nomme quartiers illégaux mais en 1972, la mairie choisit de parler de «zones urbaines développées de manière incomplète» ou «zones développées de manière informelle». Ce n’est qu’à partir des années 1980, que la ville s’exprime de manière plus explicite en évoquant la régularisation de «quartiers clandestins», de quartiers «informels».
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Le terme informel peut prêter à confusion pour caractériser la nature illégale d’un secteur urbain.56 Ainsi, « Trois principaux types d’irrégularités caractérisent les quartiers informels. Les infractions aux règles de la construction existent de façon diffuse dans les villes, mais sont généralisées dans ces quartiers. L’irrégularité vis-àvis des règles d’urbanisme leur est spécifique. L’occupation de terrains appartenant à autrui concerne bon nombre de ces quartiers. Combinant ces irrégularités, les quartiers informels font généralement l’objet d’une distinction entre quartiers illégaux (les habitants occupent des terrains d’autrui) et lotissements irréguliers (les occupants ont la propriété du terrain, mais n’avaient pas le droit d’y bâtir). Les quartiers informels se développent quand l’urbanisme planifie et réglemente l’espace à bâtir et la construction de façon insuffisante ou inadéquate, quand le marché formel ne propose pas de logement bon marché, quand l’État n’offre pas d’alternative pour l’accès au logement des pauvres. »57 L’étude du vocabulaire employé dans ce cas est intéressante dans la mesure où elle illustre parfaitement la politique de l’autruche menée par Bogota quant à l’apparition du phénomène, cherchant à minimiser et à dédramatiser la situation. Chaque mot susceptible de heurter l’opinion publique est ainsi aseptisé pour en minimiser son impact. Au lieu d’utiliser un mot pour qualifier le phénomène, la mairie de Bogota en utilise trois ou quatre qui compliquent la compréhension du phénomène et n’apporte rien de plus. Dans ce mémoire, je me contenterais d’utiliser le terme illégale de manière générique pour caractériser ces quartiers. Selon moi, s’il existe des procédures de légalisation, c’est que ces quartiers sont illégaux à l’origine. Qu’ils se soient développés de manière incomplet est une conséquence de cette situation d’illégalité et je pense que pour identifier clairement la défaillance, il est important d’employer les mots justes. Par illégal, j’entends aussi bien les quartiers illégaux que les lotissements irréguliers dont la différence a été expliquée précedemment. Si dans ce mémoire, je ne fais pas de distinctions entre ces deux nuances, c’est qu’elles se caractérisent toutes les deux par une occupation illégale du sol, problématique à laquelle je tente d’apporter une réponse. J’utilise également le terme clandestin qui traduit une situation d’irrégularité et marginal qui renvoit à une sorte d’exclusion de la société. Le terme illégale fait plus allusion à un statut juridique alors que ces deux mots apportent une dimension sociale au phénomène.
3.2.3. Historique de l’émergence des quartiers informels
Un décret municipal de 1932 permet d’identifier pour la première fois des quartiers ouvriers construits de manière sauvage. Ces quartiers n’étant pas reliés légalement au réseau de la ville, le décret a pour but de leur faire appliquer la taxe sur l’électricité. Sans que personne ne se doute de rien, c’est à partir de ce moment-là que naissent les premiers quartiers construits illégalement, responsables quelques décennies plus tard du gigantesque étalement urbain qu’a subi Bogota. En effet, les premières préoccupations du gouvernement concernant ces quartiers ouvriers (qualifiés d’abandonnés par la mairie) ne naissent qu’en 1961, soit une trentaine d’années plus tard. Pour la première fois, on parle de les légaliser, c’est-à-dire de les intégrer dans le plan de planification globale de la ville par la création d’un cadastre jusqu’alors inexistant. Mais ces premières réformes n’auront que très peu d’impact au vu de l’explosion démographique, déjà en cours. Il aurait fallu anticiper le phénomène et ces mesures auraient dû 56: En espagnol, le terme informal est utilisé lorsqu’on veut désigner un quartier construit illégalement en Colombie. Au Brésil par exemple, ces quartiers sont nommés favelas, le terme étant même rentré dans la langue française. De plus, d’après le dictionnaire Larousse, informel signifie « d’une réunion sans règles fixes ni ordre du jour précis, mais qui s’ordonne d’une manière spontanée. » 57 : CLERC V, Décembre 2010, Les territoires de l’informel, Revue Espaces et Sociétés, n°143, p.63-79.
42
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
être applicables lors des prémices de l’explosion démographique soit dix ans auparavant, si bien qu’à la fin des années 1990, presque 20% de l’aire urbaine de Bogota était construite illégalement.58 Superficies urbaines développées légalement et illégalement (Ha) Années
1960-1970
Aire urbaine 13 985
Composition population bogotaine
1970-1980
1980-1990
1990-2000
2000-2007
24 046
29 308
32 000
35 232
Aire urbaine 1 048 1 544 2 524 6 506 7 160 illégale 7,50% 6,42% 8,61% 20,33% 20,32% Aire urbaine 12 936 22 501 26 784 25 493 28 071 légale 92,50% 93,58% 91,39% 79,67% 79,68%
Source: Institut des études urbanistiques.
Fig.32 : Tableaux synthétique des superficies urbaines dé8,61% 7,50% 6,42% 20,33% 20,32% veloppées légalement et illé- Aire urbaine Aire urbaine Aire urbaine Aire urbaine Aire urbaine illégale illégale illégale galement. illégale illégale Source : Direction de légalisation et d’amélioration des quartiers. 1980-1990 1960-1970 1970-1980 1990-2000 2000-2007
92,50% Aire urbaine légale
Fig.32 bis : Graphique personnel.
Usaquén
1
Chapinero
2
Santa Fe
3
San Cristobal
4
Usme
5
Tunjuelito
6
Bosa
7
Ciudad Kennedy
8
Fontibon
9
93,58% Aire urbaine légale
91,39% Aire urbaine légale
79,67% Aire urbaine légale
79,68% Aire urbaine légale
Dans les années 1970, le phénomène tend à se consolider dans les secteurs où il est apparu et à s’amplifier de manière générale à la périphérie de la capitale. Ainsi, ce sont d’abord les secteurs appartenant au centre historique et ses alentours qui sont touchés: Santa Fe, Puente Aranda, Tunjuelito et Chapinero (carte de gauche). Puis à la périphérie (carte de droite), les municipalités d’Usme, Kennedy, Bosa, Suba et Ciudad Bolivar verront les prémices de cette urbanisation illégale. 59
Engativa 10 Suba 11 Barrios Unidos 12 Teusaquillo 13 Los Martines 14 Antonio Narino 15 Puente Aranda 16
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Rafael Uribe 18 Ciudad Bolivar 19
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Candelaria 17
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Fig.33 : Plan des municipalités de Bogota. Source : Plan réalisé par moimême d’après des informations du DANE.
1/10000 En 1971 et 1972, la ville de Bogota prend conscience que l’urbanisation illégale n’est pas un phénomène isolé, mais tend au contraire à se généra-
58: MARTINEZ, S, 2007, «synthèse de la problématique des superficies développées illégalement», n°0172, Direction de légalisation des quartiers, Alcaldia de Bogota, Bogota, p.12. 59: MARTINEZ, S, 2007, «synthèse de la problématique des superficies développées illégalement», n°0172, Direction de légalisation des quartiers, Alcaldia de Bogota, Bogota, p.16.
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liser et à s’amplifier dangereusement, transformant la capitale en capharnaüm urbain. Etant désormais obligée de tenir compte de ces nouvelles zones marginales, la ville dresse alors un diagnostic de la situation existante et n’hésite pas à faire appel à des sociétés étrangères comme les Britanniques Freeman, Fox, Wilbur, Smith y Associates60 pour repenser toute l’infrastructure de la capitale andine. Face à la perte de contrôle de l’étalement urbain, Bogota tente tant bien que mal de maîtriser sa croissance par une redéfinition à deux reprises de son périmètre urbain et par la mise en place d’une multitude de plans d’urbanisme et de décrets (voir fig.34). Même si chaque plan d’urbanisme possède quelques spécificités, tous ont pour objectifs premiers de désengorger le centre de la ville et de contrôler la croissance urbaine de Bogota. On retrouve la même profusion61 dans les décrets62 votés par la ville. Tous servent à identifier les quartiers construits illégalement majoritairement à la périphérie de la ville. Les termes de quartiers abandonnées, marginaux, clandestins ou informels apparaissent tour à tour et chaque décret porte un nom de programme différent du précédent. Cependant, ces nombreuses interventions arrivent bien trop tardivement. Elles ne font que révéler davantage la maladresse et l’incapacité de la ville à gérer son expansion. Néanmoins, il existe plusieurs raisons à cette perte de contrôle, certaines imputables à la mairie de Bogota, d’autres plus fataliste de la condition précaire du pays à cette époque là. Dans les années 1960, 1970 et 1980, aucun moyen de détection et de recensement des quartiers construits illégalement n’existait par faute de moyens technologiques et de personnels qualifiés. Aussi, durant ces trois décennies, peu de mesures ont été prises pour contrôler et sanctionner ces pratiques abusives bien que la ville ait eu conscience du phénomène. Malheureusement, s’ajoute à cela le manque de programmes politiques se penchant sur la problématique du logement social et des classes sociales inférieures. Et les nombreux plans de planification urbain élaborés ainsi que les décrets votés visaient tous à atteindre les même objectifs, ce qui eut pour effet de semer la confusion. Par exemple, en 1975, au lieu de se conformer au plan urbanistique «théorique» du service d’urbanisme, la ville opte pour une solution pratique et décide d’orienter sa croissance urbaine en fonction du réseau d’adduction d’eau potable et d’égouttage installé par la société de distribution d’eau potable et des égouts de Bogota63. Mais la difficulté qu’a la capitale à résoudre son problème de croissance urbaine s’illustre également dans la mise en place en 1979 d’un nouveau plan de développement urbain, le septième en cinquante ans. Ce n’est qu’à partir des années 1980, grâce à la mise en place du projet Ciudad Bolivar, que la mairie réagit de manière globale (décret 890, 1984). Le projet propose une légalisation massive des quartiers clandestins visant à améliorer notoirement les conditions de vie de ses habitants délaissés. Durant toute la décennie, plusieurs programmes se mettent en place pour créer une structure juridique et administrative visant à définir les secteurs urbanisés illégalement et à sanctionner les acquisitions clandestines de terrain. En plus de punir les infractions, des solutions légales voient le jour pour faire diminuer le nombre de quartiers étant dans l’irrégularité. On instaure des procédures pour légaliser juridiquement ces quartiers et les relier aux différents réseaux de la ville: réseaux viaires, d’eaux, d’égouts, d’électricité, de transports en commun. 60: MARTINEZ, S, 2007, «synthèse de la problématique des superficies développées illégalement», n°0172, Direction de légalisation des quartiers, Alcaldia de Bogota, Bogota, p.23. 61: 1961, décret 1 - 1961, décret 68 - 1961, décret 30 - 1963, décret 22 - 1967, décret 65 - 1972, décret 20 - 1972, décret 21 - 1975, décret 25 - 1979, décret 7. 62: MARTINEZ, S, 2007, «synthèse de la problématique des superficies développées illégalement», n°0172, Direction de légalisation des quartiers, Alcaldia de Bogota, Bogota, p.29. 63: MARTINEZ, S, 2007, «synthèse de la problématique des superficies développées illégalement», n°0172, Direction de légalisation des quartiers, Alcaldia de Bogota, Bogota, p.36.
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Plan Distrital
Estatuto para el Ordenamiento Fisico del Distrito Especial
Plan Officiel de zonage
Plan Général de Développement Ac. 7 - 1970 Intégral
POT (Plan d’organisation territoriale) - UPZ (Unité de planification zonale)
1964
1967-1990
1968
1970-1980
2000-2004
Déc. 3640 - 1954
Déc. 619 - 2000 Déc. 490 - 2004
Déc. 1119 - 1968
Acuerdo 6 - 1990
N’a jamais vu le jour
Ac. 38 - 1961
Plan Pilote Distrital
Plan Distrital
Déc. 34 - 1952
1957-1958
Plan Régulateur Wiener & Sert
1953
Déc. 185 - 1951
Ac. 88 - 1948
Ac. 21 - 1944
Manuel d’urbanisme
Ac. 74 - 1925
Décrets
1961
Plan PROA
Plan Pilote Le Corbusier
Plan SCA
1945
1946
Plan Soto-Bateman
1944
1950
Bogota Futuro
Ensanches (élargissements) Carl Brunner
1919-1925
1933-1950
Nom
Fig.34 : Tableau regroupant les différents plan d’urbanisme mis en place au XX siècle. Source : German Montenegro, Université Pontificia Javeriana, Institut de l’habitat et d’urbanisme, Coloque 2009, Rénovation, réhabilitation et explansion urbaine.
Date
Cinquième plan d’urbanisme
Quatrième plan d’urbanisme
Troisième plan d’urbanisme
Deuxième plan d’urbanisme
Premier plan d’urbanisme
Rénovation urbaine
Développement urbain
Huitième plan d’urbanisme
Septième plan d’urbanisme
Unités urbaines à usage résidentiel de haute, moyenne et basse Sixième plan d’urbanisme densité (hauteur établie en fonction de la largeur des voies)
Rénovation urbaine
Adopte un système d’indice régulateur proportionnel au nombre d’étages construits
Plan viaire
Annexion des municipalités autour de Bogota
Zonage fonctionnel
Bureau du plan régulateur
Premier zonage: industriel, civique et commercial, espace verte, résidentiel par catégorie (R.strict, central et quartier ouvrier)
Trois élargissements: Nord, Ouest et Sud
Définition des largeurs des voiries
Objectif
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Il faudra néanmoins attendre les années 1990 pour que l’enjeu de la légalisation des quartiers clandestins ne soit pas exclusivement du ressort du service d’urbanisme de Bogota. Plusieurs organismes se partagent alors la tâche : entre autres les sociétés de services publics, le bureau de prévention des catastrophes, le département d’actions sociales ou la sous-direction de contrôle de l’habitat64. Cette nouvelle collaboration témoigne bien du fait que le bureau d’urbanisme, à lui seul, est incapable de freiner le phénomène qui a même été multiplié par 3 en l’espace de dix ans. La superficie urbaine illégale est passée de 8,61% dans les années 1980 à 20,33% durant les années 1990 (voir fig.32 bis). Finalement, au vu de ces derniers chiffres, le projet Ciudad Bolivar n’a fait que contourner le problème au lieu d’y remédier à la racine. Dans les années 2000, la coordination des différents intervenants avec les maires de Bogota permet la dé-marginalisation de nombreux quartiers soit par une politique de légalisation massive, soit en procédant à une légalisation quartier par quartier. Mais c’est véritablement le Plan d’Organisation Territoriale (POT), élaboré entre 1997 et 2000, qui donne une nouvelle impulsion à la politique de légalisation. Les quartiers d’origine illégale sont alors au cœur du projet et le but du POT est de ré-homogénéiser le tissu urbain, de rendre plus compacte une ville, jusqu’alors désarticulée par les secteurs marginaux de la périphérie. Ainsi, près de 654 ha sont légalisés dans les secteurs d’Usme, de Kennedy et de Ciudad Bolivar. Malgré un fort engagement dans la lutte et la mise en place de mesures concrètes, ces chiffres reflètent la difficulté du processus puisque, entre 2000 et 2007, 7160 hectares, soit 20% de la superficie de Bogota est toujours en situation illégale (voir fig.32 bis).
3.3. La consolidation des quartiers illégaux, conséquence d’un déficit en logements La crise démographique qu’a subie Bogota durant toute la seconde moitié du XXe siècle a engendré une crise urbanistique. À cette époque, l’offre en logements, alors insuffisante, a provoqué l’émergence de quartiers informels. Au début du XXIe siècle, les nouvelles mesures prise par la mairie tardent à porter leurs fruits et les quartiers illégaux de la périphérie ont tendance à se consolider, au lieu de disparaître. Entre 1990 et 2007, il n’y a eu aucune évolution puisque encore 20% de la superficie de Bogota est de nature illégale d’après le tableau p.43.
3.3.1. Constat du déficit en logements à Bogota
Comme le rappelle l’économiste Mercedes Castillo, «au niveau urbain, le logement est un élément qui structure la ville et qui est une pièce maîtresse s’insérant entre les quatre fonctions de la ville qui s’expriment dans le tissu urbain selon les architectes modernistes comme Le Corbusier : résider, se déplacer, travailler et recréer. En ce sens, le logement s’intègre avec d’autres éléments constitutifs de la ville: équipements, espace public, services métropolitains.»65 Dans le cadre de ce mémoire, cependant, quand on évoque le thème du logement, on se réfère, entre autres, aux habitations auto-construites situées en zone urbanisée illégalement en périphérie urbaine. Contrairement à ce qui est dit dans la citation, ce tissu urbain désarticule la ville suivant une dynamique de fragmentation spatiale: Bogota est fragmentée selon un schéma nord-sud, rendu visible par la morphologie de la ville: les plus démunis habitent le sud dont les bâtisses de briques s’étalent à perte de vue tandis que le nord abrite les quartiers de classes sociales supérieures. 64: MARTINEZ, S, 2007, «synthèse de la problématique des superficies développées illégalement», n°0172, Direction de légalisation des quartiers, Alcaldia de Bogota, Bogota, p.41. 65: CASTILLO M, Décembre 2004, Bitacora Urbano Territorial, annuel, Vol.8, n°1, Bogota, p.16.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
La photographie a été prise d’une tour située dans le centre de Bogota. Les Cerros orientales situés à gauche permettent de nous orienter et nous indique que nous regardons le secteur sud de la ville. La coupure est nette, la frontière est visible à l’œil nu: là où les bâtiments élevés s’arrêtent, commencent les municipalités de Ciudad Bolivar et Usme, qui accueillent la population la plus pauvre de la ville. Fig.35 : Photographie de la morphologie de la ville de Bogota, mars 2012. Source : Photographie prise par moi-même.
N’oublions pas que les autres périphéries participent aussi, bien que dans une moindre mesure, à cette ségrégation spatiale. La morphologie urbaine permet rapidement de se rendre compte de se déséquilibre mais pour approfondir l’étude, on peut également se baser sur le pourcentage de personnes vivant dans la pauvreté66.
Plus de 12% De 5% à 11% Moins de 5%
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1/10000 REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
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Fig.36 : Pourcentage des personnes pauvres selon les critères des nécessités élémentaires sanitaires. Source : DANE-DAPD, Enquête sur la qualité de vie, 2003.
66: La notion de pauvreté est ici définit comme étant les nécessités élémentaires sanitaires pour vivre dignement. A savoir l’accès à l’eau potable, au réseau d’égouts, à l’électricité.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
L’insuffiance en logements a donc des répercussions sur la morphologie de la ville en encourageant la consolidation de quartiers illégaux, principal responsable de l’hétérogénéité de la ville. Le déficit en logements devient alors le cheval de bataille dans la quête d’une ville compacte. En Colombie, on distingue un déficit de logements dit quantitatif et un autre appelé qualitatif. Le déficit quantitatif fait référence aux ménages qui nécessitent leur propre logement (propriétaires), les familles en somme. En effet, d’après Miguel Téllez, gérant de la société Economistas urbanos asociados67, le ménage moyen est composé de 3,72 personnes. Or dans chaque habitation vit en moyenne 1,7 ménages, soit environ 6 ou 7 personnes68 ce qui signifie qu’une famille moyenne de 4 personnes est obligée de cohabiter avec 2 ou 3 autres personnes. La nécessité de cohabiter est donc le premier facteur qui participe à l’augmentation du déficit quantitatif. Le deuxième élément à prendre en compte est quant à lui d’ordre matériel : il s’agit des habitations qui, par leur précarité, doivent être entièrement remplacées. Le déficit qualitatif, quant à lui, fait référence aux logements dont on a relevé des déficiences partielles. On en dénombre trois types: le premier type concerne la structure du logement (murs instables par exemple), le deuxième renvoie au surpeuplement (lorsqu’on compte plus de 5 personnes par chambre) et le troisième porte sur le raccordement aux réseaux de la ville (électricité, eau potable, égouts, ramassage des ordures ménagères, électricité)69. Autrement dit, le déficit quantitatif désigne les ménages qui nécessitent une nouvelle habitation pour se loger tant leur logement est vétuste, tandis que le déficit qualitatif identifie les ménages qui habitent dans des habitations susceptibles d’être habitables sous réserve de quelques améliorations. Le tableau de la page ci-contre montre que 19.1% des ménages de l’aire métropolitaine de Bogota vivent dans une situation de déficit en logement, que celui-ci soit quantitatif ou qualitatif. En rappelant qu’un ménage regroupe en moyenne 4 personnes, on estime à 1.471.816 le nombre de personnes ne vivant pas dans de bonnes conditions. Cette donnée est confirmé par Ramirez qui, en 2003, dit: «En accord avec le POT, les tendances d’expansion de l’aire urbaine de Bogota dans les dernières décennies démontrent que 20% du sol occupé, soit environ 6.600 hectares, s’est développé selon une urbanisation illégale, où vivent de manière extrêmement précaire près de 1.400.000 personnes […]. Cette situation est la plus visible dans les localités de Bosa, Kennedy, Engativa, Rafael Uribe, Ciudad Bolivar, San Cristobal y Usaquén.»70 Par ailleurs, il est intéressant de relever que le facteur de surpeuplement est déterminant dans les deux types de déficit, même si le niveau de tolérance n’est pas le même. En effet, par le surpeuplement, le déficit qualitatif dresse un parallèle avec la surface minimum du logement social standard qui détermine le nombre d’espaces et donc de chambres. On ne se réfère pas ici à la qualité des espaces de vie, ni à l’accessibilité ni même à la proximité des équipements urbains par rapport au logement, mais uniquement à la surface habitable du logement social standard. Ainsi, en 12 ans (de 1972 à 1984), la superficie de la parcelle accueillant le logement social a été réduite de 60% par rapport à sa taille initiale. Aujourd’hui en Colombie, la parcelle a une superficie de 36m2 (3m x 12m)71. Cette décision complètement arbitraire prise par des bureaucrates pose d’ailleurs un gros problème aux architectes et urbanistes qui critiquent le manque de flexibilité. En effet, les preneurs de décision, politiques et économistes, prônent la normalisation et la standardisation de l’habitat social pour des raisons de rapidité de mise en œuvre et de coûts mais, pour les ar67: Economistas urbanos asociados est une société non gouvernementale spécialisée dans les investigations de marchés et dans les enquêtes d’opinion publique. 68: DEL ROSARIO B, 2005, Territorios y Sociedades, Diferentes dimensiones de analisis, Actos del III simposio de planificacion y desarollo del territorio. Una mirada a America Latina y Europe, Université de Barcelona, Barcelona, p38. 69: MINISTÈRE DISTRITAL DE L’HABITAT, Décembre 2011, Analyse de l’enquête multipropositionelle, Convenio de asosacion, n°82, Phase 2, p.5. 70: CASTILLO, M, Déc 2004, Bitacora Urbano Territorial, Vol.8, n°1, annuel, Bogota, p.20. 71: CASTILLO, M, Déc 2004, Bitacora Urbano Territorial, Vol.8, n°1, annuel, Bogota, p.18.
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chitectes et urbanistes, ils en viennent à oublier le fait que le logement est une pièce maîtresse dans le mécanisme urbain qui sert à modeler la ville. Aire métropolitaine de Bogota TOTAL ménages Type déficit
Nombre
%
1.927.390
100
1.559.436
80,9
367.954
19,1
282.495
14,7
Structure
8.423
0,4
Cohabitation
254.981
13,2
de Défaillance
Sans déficit Avec déficit Quantitatif
Surpeuplement (entre 3 et 5 19.091 pers)
1,0
85.460
4,4
3.709
0,2
Qualitatif Structure
Fig.37 : Tableau regroupant le nombre total de ménages avec ou sans déficit. Source: DANE, Recensement 2005. www.cenac.org.co
Surpeuplement (plus de 5 29.060 pers)
1,5
Sanitaire
39.142
2,0
Cuisine
7.628
0,4
Structure & Surpeuplement
473
0,0
Structure & sanitaire
1.760
0,1
Structure & cuisine
319
0,0
Surpeuplement & sanitaire
1.416
0,1
Surpeuplement & cuisine
654
0,0
Sanitaire et cuisine
582
0,0
Structure, surpeuplement et 161 sanitaire
0,0
Structure, surpeuplement et 138 cuisine
0,0
Structure, sanitaire et cuisine
179
0,0
Surpeuplement, sanitaire et 145 cuisine
0,0
Structure, surpeuplement, sa- 93 nitaire et cuisine
0,0
La situation montre un emballement: plus la demande en logements sociaux augmente, plus le déficit augmente, et plus on tend à diminuer la surface minimum du logement social.
3.3.2. Une solution alternative: l’autoconstruction
Face à ce déficit en logements, les habitants les plus démunis se tournent vers des alternatives comme « l’insertion dans le marché locatif privé ou l’autoconstruction. Dans la situation de pénurie de ressources qui est la leur, cela se traduit par la location de logements de taille réduite, partagés avec d’autres ménages, le plus souvent sous-équipés, ou la construction d’un logement en matériaux précaires sur un terrain sous-équipé en infrastructure.» comme l’explique Françoise Dureau, géographe et démographe72. 72: DUREAU F, Janvier 1995, Repenser la ville à travers une analyse des pratiques résidentielles des citadins les plus pauvres?, Colloque préparatoire au Sommet Mondial pour le Développement Social ORSTOM - UNRISD, Royaumont, p.1.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Avant d’évoquer l’autoconstruction, précisons que la production de logements en Colombie fait intervenir deux acteurs : d’une part, la production capitaliste, d’autre part, la production sur commande. La production capitaliste est celle que nous connaissons en Belgique: un promoteur acquiert un terrain et y construit des logements pour les vendre. Dans la production sur commande, « le promoteur n’a pas à investir de capital : le futur usager du logement acquiert le terrain, apporte le capital requis pour la construction et charge le promoteur de réaliser uniquement la construction du logement»73, selon l’institut de recherche pour le développement. La production sur commande s’opère de deux manières différentes: soit par la production étatique, soit par l’auto-construction. Toujours selon l’institut de recherche pour le développement, « la production étatique a comme but de permettre l’accès au logement aux secteurs défavorisés, en construisant le logement, soit directement, soit sur commande. Quant à l’autoconstruction, qui est le mode de production illégal de logement le plus répandu à Bogota, elle fonctionne au travers de ce qu’on appelle en Colombie la urbanización pirata74: les agents opérant sur ce marché acquièrent des terrains dans des zones non constructibles, hors des limites de la ville, et les lotissent pour les revendre, sans titre légal de propriété, sans dotation de services ni infrastructure, à des familles à faibles revenus75.»
CONSTRUCTION LOGEMENTS PROD. CAPITALISTE
PROD. SUR COMMANDE
PROMOTEUR
AUTO-CONSTRUCTION PROD.ÉTATIQUE
En 1947, Le Corbusier est invité à Bogota pour réfléchir au problème de la croissance urbaine de la capitale colombienne et proposer un nouveau plan d’urbanisme pour la ville. Cependant, conscient de la forte différence culturelle, « quand Le Corbusier est venu au pays, différents professionnels l’ont informé que les gens d’ici étaient très pauvres et que les nécessités en termes de logements des secteurs populaires étaient très grandes et variées et qu’on ne pouvait pas mettre ces personnes dans des appartements.»76
Fig.38: Schéma explicatif de la production de logements en Colombie. Source: réalisé par moimême.
Barre de logements à redents Unités d’habitations
73: http://www.mpl.ird.fr/suds-en-ligne/fr/metropol/bogota/bogota07.htm. Consulté en Janvier 2013. 74: ou Urbanisation illégale 75: http://www.mpl.ird.fr/suds-en-ligne/fr/metropol/bogota/bogota07.htm. Consulté en Janvier2013. 76: FORERO S, FABIO E, 19 juin 2002, interview avec German Samper Gnecco.
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Fig.39 : Plan du centre civique de Bogota, Le corbusier. Source, Fondation Le Corbusier.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
En plus de proposer dans son plan Pilote de nouveaux concepts urbanistiques (plan de zoning et hiérarchisation du réseau viaire), son attention portera surtout à remodeler le centre civique77 de Bogota plutôt que les périphéries de la ville, qui sont les enjeux réelles de l’expansion future de la ville. Fier de son modèle de l’habiter78, Le Corbusier propose ses unités d’habitations pour remédier au déficit de logement en oubliant que les habitants qui ont besoin d’un logement n’ont en réalité même pas les moyen de louer un appartement. Rapidement, le désir de transformer Bogota en ville moderne, avec ses unités d’habitations, principale manifestation du changement de la manière de vivre et d’habiter, est rapidement rattrapé par la réalité colombienne et ses importants flux migratoires des habitants de la campagne vers la ville. Dans les années 1950 et 1960, les nouvelles unités d’habitation construites pour les classes moyennes par l’État sont, d’une part, insuffisantes et, d’autre part, ne permettent pas aux plus démunis de se loger. C’est cette carence en logements qui entraînera alors une nouvelle forme d’urbanisation et d’occupation du sol en marge des politiques urbanistiques de l’état. Elle se définit par son caractère spontanée et anarchique, ne suivant aucune planification urbaine officielle comme le Plan Pilote de Bogota de 1950 proposé par Le Corbusier. C’est German Samper Gnecco, un architecte colombien avec qui il avait travaillé plusieurs années, qui sera un des premiers à apporter une solution efficace au problème de logements bogotain. En effet, conscient des enjeux de Bogota quant à son expansion urbaine et au logement prioritaire des classes populaires, il fait de l’habitat populaire autoconstruit et dirigé par un organisme étatal une de ses priorités. En 1958, il entreprend avec sa femme un projet expérimental de logements populaires autoconstruit et auto-géré79 à Bogota. Le projet La Fragua situé dans le quartier éponyme propose 100 unités de logement sur un terrain de 3600 m2. Samper lance ici les bases d’un système d’auto-construction, le premier du pays. L’objectif du projet est de construire un ensemble d’habitations accessibles aux personnes à très bas revenus. Ceci est rendu possible par deux choses: «la première, l’exécution par le principe d’autoconstruction, déjà connu dans d’autres pays […]. Quant à la seconde, c’est en dessinant des petites maisons sur de petits terrains pour diminuer les coûts de construction et minimiser l’impact du prix du terrain.»80
Fig.40 : Photos et schéma du quartier Fragua. Source : http://www.german-samper.com
77: Le centre civique correspond au centre historique de la capitale. 78: A ce moment là, la cité radieuse de Marseille est en construction (1945-1952). 79: En espagnol: vivienda popular por autoconstruccion dirigida. 80: http://www.germansamper.com. Site consulté en janvier 2013.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Le projet La Fragua est devenu un exemple parmi les projets par autoconstruction dirigés par des organismes appartenant à l’État (la production étatique sur commande) car, même quarante ans après, le quartier a évolué, s’est consolidé, s’est transformé morphologiquement. Sur le plan social, « ce type d’habitation s’est montré être, selon un grand pourcentage d’habitations étudiées, un formidable instrument de consolidation et de promotion de la famille. Dans la majeure partie des habitations, la nouvelle génération est sortie du quartier, et les fils des auto-constructeurs originaux, maintenant coiffeurs, plombiers, charpentiers exercent de façon professionnelle, quelques-uns d’entres eux exerçant avec beaucoup de succès».81 Les autres projets similaires, majoritairement construits dans les années 1970, se sont révélés des échecs ou de moins belles réussites, car la communauté d’habitants n’avaient pas les ressources financières nécessaires pour consolider le quartier.82 Même si plusieurs projets de logements soucieux des classes les plus défavorisées voient le jour comme celui de La Fragua, la déferlante migratoire est telle que la ville est submergée par les vagues d’émigrants fuyant les campagnes en raison du contexte politique violent. En effet, c’est à partir des années 1970 que la Colombie s’enlise dans un conflit entre les guérillas, les paramilitaires et le gouvernement. Le narcotrafic et le crime organisée maintiennent alors le pays dans un état de crise permanente. D’ailleurs, entre 1970 et 1990, le contexte politique à des répercussions tel sur les déplacements forcées de population que la proportion du sol occupé illégalement a triplé pour passer de 6% à 20% (voir fig.32). Finalement, l’urbanisation illégale définit deux directions importantes dans l’urbanisme de Bogota: le formel et l’informel. Et comme l’explique Lopez Borbon Walter, «l’informalité, propose une autre expression de la formalité, ni meilleure, ni pire, plus ou moins en accord avec les conditions données, mais c’est une autre forme qui dans beaucoup de cas cherche à être acceptée et reconnue»83.
3.3.3. Une solution innovante proposée par les pouvoirs publics face à l’urbanisation illégale La ville aura pourtant mis du temps à comprendre que les composantes formelle et informelle de la ville de Bogota sont indissociables. Le premier plan d’urbanisme à intégrer de façon innovante ces deux dimensions est le Plan d’organisation territoriale élaboré à partir de 1994 et paru en 2000. Il donne naissance à Metrovivienda, une entreprise à capital public chargée de la question du logement social à bogota. Face à la limite du marché, aux maigres interventions de la ville en matière de logement social et à une demande toujours plus forte, «en 1999, l’administration d’Enrique Peñalosa84 tente de trouver une réponse à ces questions en créant Metrovivienda, une entreprise industrielle et commerciale à capital public chargée de la promotion du logement social. Les pouvoirs publics mettent en place un système original dans lequel une entreprise privée à fonds 81: http://www.germansamper.com. Site consulté en janvier 2013. 82: SALDARRIAGA A, FONSECA L, 1989, Un siglo de Arquitectura colombiana. Nueva historia de Colombia, Planeta, Bogota, Tome IV, p.199. 83: LOPEZ BORBON W, 2003, Origen se la informalidad urbana en Bogota, anos cincuenta, Universidad Piloto de Colombia, Bogota, p.34. 84: Ce maire, a qui les bogotains doivent énormément, a notamment été l’instigateur du fameux système de transport massif Transmilenio. Il a également donné un nouvel élan en matière d’urbanisme et a contribué à revitaliser la ville par la mise en place d’un réseau de pistes cyclables couvrant une large proportion de la ville, par la requalification et la création de nombreux espaces publics, de promenades, de parcs et, élément qui peut sembler anecdotique, a donné une nouvelle jeunesse aux trottoirs de la ville qui étaient dans un état déplorable. Adulé par certains pour ces interventions, il fût cependant très critiqué par d’autres, l’accusant d’avoir dilapidé les fonds publics durement économisés durant les quelques années de son mandat (1998-2000).
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
publics fournit des terrains aménagés, choisit des projets de logements proposés par des promoteurs (sous certaines conditions de prix de vente) et accompagne les ménages dans l’achat des logements sociaux réalisés.»85 Si le projet Metrovivienda a pu voir le jour, c’est que l’administration Peñalosa s’est rendu compte que les quartiers urbanisés illégalement étaient «aujourd’hui compliqués et coûteux à remodeler. Les coûts de réaménagement de ces quartiers sont en effet bien plus élevés que ceux engendrés par la création ex-nihilo de quartiers urbains de même taille. Les pouvoirs publics se sont rendus compte qu’il était plus pertinent et moins coûteux de prévenir, c’est-à-dire de proposer une offre de logements accessibles dans un quartier aménagé et équipé, plutôt que de guérir en procédant à un «colmatage» et à un réaménagement d’aires urbaines anarchiques et sous-équipées.»86 L’originalité de Metrovivienda réside dans le fait que c’est une entreprise industrielle et commerciale rattachée à la municipalité de Bogota. En effet, n’étant pas une administration publique ou un bailleur social, elle remet en cause le schéma classique de gouvernance en matière de gestion urbaine. Il est très difficile de construire à faible coût, d’autant plus lorsqu’il s’agit de logements sociaux déstinés aux ménages à bas revenus (logements d’intérêt social87) ou aux ménages à très bas revenus (logements d’intérêts prioritaires88). Comme l’explique Flora Dancuort, « […] plusieurs éléments expliquent le coût élevé de la promotion et de la construction de logements sociaux, notamment la question des déséconomies d’échelle (le coût unitaire d’un lot de taille restreinte est plus élevé que celui d’une opération de plusieurs lots d’une surface globale plus grande), la durée élevée des procédures de concertation et d’obtention des permis de construire, les impôts et les questions juridiques, la spéculation et la capture de plus-values.»89 En 2000, les VIS (logements sociaux) avaient un coût maximum de 19.300 $US. Or en 2000, le salaire mensuel minimum n’était que de 137 $US90 (En 2013, le salaire minimum a plus que doublé pour atteindre 312 $US91.) L’achat d’un logement social restait donc très difficile d’accès pour les ménages qui ne gagnaient que le salaire minimum. Mais la création de Metrovivienda a donné naissance à une nouvelle catégorie de logement social encore plus abordable pour les familles les plus démunies: les VIP (logements sociaux prioritaires) qui ont un prix de base de 10.000 $US, soit presque deux fois moins cher que les VIS. Le mécanisme ingénieux mis en place par Metrovivienda permettant de passer d’un VIS à un VIP est qu’«au lieu de construire directement des logements sociaux et de les proposer aux ménages, Metrovivienda fournit seulement des terrains urbanisés et les revend, sous certaines conditions, à des promoteurs chargés de construire des logements à caractère social. Ce système permet de réduire les coûts de construction des logements sociaux par la réalisation d’économies d’échelle, la capture des plus-values et leur transfert aux familles, la réduction des frais de fonctionnement.... C’est un système économique et efficace pour les pouvoirs publics qui n’ont pas besoin de procéder
85: DANCOURT F, 2008, Gouvernance urbaine à Bogota, Metrovivienda, une entreprise à capital public chargée de la question du logement social à Bogota, Convention Urbanistique du monde, Fondation Leopold Mayer, p.1. 86: DANCOURT F, 2008, Gouvernance urbaine à Bogota, Metrovivienda, une entreprise à capital public chargée de la question du logement social à Bogota, Convention Urbanistique du monde, Fondation Leopold Mayer, p.2. 87: Les logements d’intérêt social sont appelés en Colombie les Viviendas de Interés Social ou plus fréquemment VIS. 88: Les logements d’intérêt social prioritaire sont appelés en Colombie les Viviendas de Interés Social Prioritarios ou plus fréquémment les VIP. 89: DANCOURT F, 2008, Gouvernance urbaine à Bogota, Metrovivienda, une entreprise à capital public chargée de la question du logement social à Bogota, Convention Urbanistique du monde, Fondation Leopold Mayer, p.2. 90: Sur base de $1 US = COP 1.800 (Pesos Colombien). 91: http://www.businesscol.com/empresarial/tributarios/salario_minimo.htm. Consulté en juillet 2013.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
à des transferts de ressources publiques92.» Par terrains urbanisés, on se réfère à des terrains dont l’infrastructure est achevée, dotés de parcs et d’aires de jeu. Metrovivienda se charge donc de connecter les parcelles aux différents réseaux de la ville: eau potable, égout, électricité, ramassage des ordures ménagères, voiries. Elle en assume les risques et les coûts. En revanche, ce sont les constructeurs privés qui assument les risques et les coûts de la construction des logements. Ce sont également eux qui vendent les habitations. De plus, dans ce processus, Metrovivienda considère la ville dans sa globalité, à l’échelle macro et micro. Elle urbanise elle-même les terrains achetés de façon à assurer une bonne articulation entre la nouvelle infrastructure et l’existant, à l’échelle de la ville. Elle évite d’une part que des constructeurs privés fassent des économies ou pire, volent de l’argent, en «omettant» de réaliser certains travaux. C’est loin d’être anecdotique : c’est malheureusement trop souvent le cas en Colombie. Et d’autre part, elle tend à harmoniser les différents quartiers qui composent la capitale. Un autre élément, plus esthétique que fonctionnel, a attiré mon attention. A Bogota, chaque urbaniste cherche à mettre sa touche personnelle à l’îlot ou au quartier qu’il urbanise. En effet, chaque intervenant cherche à ce que l’on remarque son travail et, pour ce faire, il mettra un point d’honneur à créer une limite visible entre son travail et celui du voisin. Ainsi, d’une maison à l’autre ou d’un côté de la route à l’autre, le trottoir ne sera pas de la même hauteur, le parement utilisé différent (si le voisin utilise des dalles de couleur noire, l’urbaniste aura tendance à pencher pour du blanc), etc. En se rendant compte de cela, on comprend pourquoi cette ville donne le sentiment d’avoir été construite de manière si chaotique, anarchique par rapport à d’autres comme Medellin. La taille de la ville en est certes partiellement responsable, mais on note surtout une absence de politique d’uniformisation, ou plutôt, si ce n’est une non-application de celle-ci, c’est un manque de rigueur dans les détails. Même si les grandes lignes du plan d’urbanisme en vigueur sont respectées, il est, à mon sens, important de s’attarder sur ce genre de détails qui sont visibles à l’échelle humaine. C’est ce que voit tous les jours le citadin bogotain qui se fait une image de sa ville comme un puzzle de mille pièces incomplet, toutes de couleurs différentes, au lieu de la voir comme un ensemble homogène. L’anecdote montre que l’urbanisme contribue donc largement à la sensation de bien-être qu’on peut éprouver dans une ville. Metrovivienda se préoccupe également de l’échelle micro, mais de manière plus indirecte. Bien qu’elle ne construise pas elle-même de logements, elle choisit quel promoteur-constructeur va construire sur ces parcelles et donc quel type d’architecture va caractériser le futur quartier. Metrovivienda est une machine complexe qui influence aussi bien l’urbanisme que l’architecture de la ville. Au-delà des notions qui font l’objet de mon mémoire, elle considère l’aspect économique, social, culturel, écologique, politique de la ville et de ses habitants, et c’est sans doute cette dimension multi-polaire qui permet de faire face au déficit de logements à Bogota et en Colombie en général. Selon deux études réalisées par le département national de statistiques et le secrétariat distrital de planification, le déficit en logement dans la capitale a baissé de 16% entre 2007 et 2011. En effet, la première étude établit à 307.334 le nombre de ménages étant en déficit de logements alors que la même étude réalisée en 2011 fait état de 258.046 ménages ne vivant pas dignement dans un logement. Alors qu’en 2007, 15,5% des ménages à Bogota étaient en déficit de logement, il n’y en a plus que 11,8%93 en 2011.
92: DANCOURT F, 2008, Gouvernance urbaine à Bogota, Metrovivienda, une entreprise à capital public chargée de la question du logement social à Bogota, Convention Urbanistique du monde, Fondation Leopold Mayer, p.3. 93: http://portel.bogota.gov.co/portel/libreria/php/x_frame_detalle.php?id=47358. Consulté en Juillet 2013.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
En guise de conclusion, rappelons toutefois l’évolution de l’occupation légale et illégale du sol de 1960 à 2007: Proportion des secteurs avec développement informel par rapprt aux secteurs avec développement formel à partir des années 60.
Hectares 40000 Superficie urbaine informelle Superficie urbaine formelle
35000 30000
Dans les années 1960, sur 13.985 hectares de zone urbaine, 7,50% appartiennent au secteur informel.
25000
Dans les années 1970, sur 24.046 hectares de zone urbaine, 6.42% appartiennent au secteur informel.
15000
Dans les années 1980, sur 29.308 hectares de zone urbaine, 8.61% appartiennent au secteur informel.
5000
20000
10000
0
Dans les années 1990, sur 32.000 hectares de zone urbaine, 20,33% appartiennent au secteur informel. De 2000 à 2007, sur 35.232 hectares de zone urbaine, 20.32% appartiennent au secteur informel. Fig.41 : Proportion des secteurs avec développement informel par rapport aux secteurs avec développement formel à partir des années 60. Source : Graphique en barres empilées réalisé par moi-même d’après la source: voir note en bas de page.
Années 1960-1970
1970-1980
1980-1990
1990-2000
2000-2007
Le graphique94 montre une nette augmentation des secteurs développés clandestinement. Le phénomène semble totalement paradoxal puisqu’il tend à s’inurbaine tensifier au fur superficie et à mesure queinformelle les solutions trouvées par la mairie de Bogota portent leur fruit. On constate que malgré la politique de démarginalisation et formelle de réinsertion supericie urbaine urbaine mise en place par l’Etat, à travers le POT et Metrovivienda, le pourcentage de quartiers marginaux dans les années 2000 est resté identique à celui de la décennie antérieure. Néanmoins, l’enquête de qualité de vie menée par le DANE et par le secrétariat de planification entre 2007 et 2011, démontre que, même si le processus a mis du temps à se mettre en route, la solution mise en place est la meilleure puisqu’en à peine quatre ans elle a réussi à inverser la tendance, chose qui n’était encore jamais arrivée auparavant.
94: MARTINEZ T, SERGIO M, 2007, sintesis de la problematica de las areas desarolladas informalmente, Alcaldia de Bogota, Bogota, p.11.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
56
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
4.
UN QUARTIER INFORMEL SITUÉ EN PÉRIPHÉRIE DE BOGOTA : SAN CRISTOBAL NORTE À USAQUÉN
L’objectif dans cette étude est, à la vue du constat actuel, de proposer une solution architecturale et urbanistique qui permettrait peut-être la réinsertion sociale et urbaine des populations abandonnées du quartier périphérique de San Cristobal Norte.
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Fig.42 : Image satellite de l’agglomération de Bogota DC. Source : google.map.com
4.1. Présentation Contextualiser la problématique à une échelle macro a permis de comprendre les facteurs sociaux, culturels, politiques, démographiques, urbanistiques formant les rouages de la complexe machine urbaine qu’est Bogota. Après avoir abordé l’urbanisation illégale de façon globale, concentrons-nous maintenant sur un secteur spécifique de la ville, la localité d’Usaquén. Alors que l’échelle macro permet de comprendre un phénomène dans sa globalité en remontant à la genèse du problème, l’échelle micro va permettre, à partir de l’étude d’une infime partie de la ville, d’émettre une solution à la problématique posée. De plus, si la première partie de l’exposé a été assez théorique, la seconde se démarquera par son aspect pratique puisqu’elle se conclut par un projet d’architecture personnel développé lors de mon échange universitaire. Je tiens à préciser, au risque de me répéter, que cette étude de cas ne prétend en aucun cas apporter la solution au problème posé, mais propose plutôt une réponse possible à la problématique suite à un diagnostic établi au préalable lors de l’atelier d’architecture de l’université.
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Parallèlement au changement d’échelle effectué dans le plan de mon exposé, on adoptera une échelle de plus en plus petite à travers celles mises en place par le POT. Nous présenterons en premier lieu la localité d’Usaquén avant de nous rapprocher davantage pour atteindre le quartier de San Cristobal Norte. Il me paraît important de travailler à l’échelle du quartier, car c’est la plus petite entité urbaine. Qui plus est, c’est une aire urbaine extrêmement riche socialement, car c’est le premier lieu de vie, de cohabitation, de rassemblement des citadins. Le phénomène est d’autant plus fort à Bogota (et dans les autres villes colombienne), où les populations émigrantes suite aux déplacements forcés se rassemblent par région, créant des communautés sociales très soudées et des quartiers aux identités aussi fortes que différentes. Revers de la médaille, cette ségrégation sociale et spatiale spontanée est à l’origine de nombreux conflits qui augmentent les taux de criminalité et d’insécurité dans la capitale. Le plan d’organisation territorial définit quatre échelles qui hiérarchisent la ville: l’échelle métropolitaine (la ville), l’échelle urbaine (les localités), zonale (les UPZ95) et voisinale (le quartier). Les UPZ victimes d’une occupation illégale du sol ont la particularité de s’appeler UPZ de mejoramiento integral96. Elles bénéficient, toujours dans le cadre du POT, d’un programme spécial ayant pour objectif la reconversion urbaine de ses zones. Le tableau suivant regroupe les localités dont les UPZ de mejoramiento integral:
95: Pour rappel, UPZ signifie Unidades de Planeamiento Zonal ou unité de planification de zone. Elle est l’échelle intermédiaire entre la localité et le quartier et sert à la planification urbaine de Bogotà. C’est avec le POT qu’elle est apparue. « Secretaria de Planeacion », www.sdp.gov.co. 96: J’ai préféré conserver l’expression espagnol, la dernière étant difficilement traduisible, l’expression «UPZ à améliorer intégralement» étant probalement la plus proche mais dans ce cas inélégante.
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Fig.43 : Image satellite de la localité d’Usaquén. Source : google.map.com
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Numéro de localité Localité
UPZ
1
Verbenal
Usaquén
San Cristobal Norte 2
Chapinero
San Isidro Patios
3
Santafe
Lourdes
4
San Cristobal
San Blas La Gloria Los Libertadores
5
Usme
La Flora Danubio Gran Yomasa Comuneros Alfonso Lopez
7
Bosa
Bosa Occidental Bosa Central
Conformément au chapitre précédent, on remarque que les localités qui présentent le plus de UPZ de mejoramiento se situent à la périphérie sud. Il s’agit de Usme et de Ciudad Bolivar. Malgré qu’Usaquén ne fasse pas partie de la périphérie sud, elle est aussi victime d’occupation illégale. Les UPZ concernées sont Verbenal et San Cristobal Norte, qui fait l’objet de toute mon attention.
8
Kennedy
Gran Britalia
11
Suba
18
Rafael Uribe
Patio Bonito Rincon Tibabuyes Marco Fidel Suarez Marruecos Diana Turbay 19
Ciudad Bolivar
Fig.44 : Tableau regroupant les localités dont les UPZ bénéficie du programme de mejoramiento integral. Source : Tableau réalisé par moi-même sur base de la SDP.
San Francisco Lucero El Tresoro Ismael Perdomo Jerusalén
Localités détenant des UPZ de mejoramiento Autres localités
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Fig.45 : Carte des localités de Bogota dont les UPZ bénéficient du programme de mejoramiento integral. Source : Carte réalisée par moi-même d’après les données du tableau ci-dessus.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
4.2.
Usaquén, la localité
4.2.1. Le contexte géographique
Usaquén est la première localité à la périphérie nord-est de Bogotá D.C. Elle est «limitée à l’ouest par l’autopista norte (autoroute du nord), qui la sépare de la localité de Suba; au sud par la calle 100, qui définit sa frontière avec la localité de Chapinero; au nord par les municipalités de Chia et Sopo, et à l’est par La Calera. Elle s’étend sur 6.532 hectares dont 3.807 appartiennent à l’aire urbaine et 2.724 sont définies comme superficies rurales protégées. Usaquén est la cinquième plus grande localité du district capital97.» En effet, avec une superficie de 65 km2, elle se situe juste derrière Sumapaz (780 km2), Usme (215 km2), Ciudad Bolivar (123 km2) et Suba (100 km2).
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97: ALOMIA R, MIGUEL A, 2009, Documento de trabajo que posibilita la construccion del plan local en deporte, recreacion, activid fisica, parques de la localidad, Universidad pedagogia nacional, alcaldia de Bogota D.C , n°1 p.15.
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Fig.46 : Carte de la localité d’Usaquén et de ses alentours. Source : Carte réalisée par moi-même.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
La localité est composée de 9 UPZ dont celle de San Cristobal Norte.
Paseo Los Libertadores Verbenal La Uribe San Cristobal Toberin Los Cedros Country club Usaquén Santa Barbara
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Fig.47 : Les 9 UPZ de Usaquén. Source : Plan réalisée par moi-même à l’aide du cadastre.
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Zone rurale protégée
4.2.2. Le contexte historique
Au XXIe siècle, avant l’arrivée des Espagnols, Usaquén était un territoire habité par les indigènes Muisca et Tibabita. C’était une importante zone humide comme en témoigne son riche système hydrique, encore présent aujourd’hui : cours d’eau, canaux, failles hydriques, marécages. C’est à partir de 1539 que la structure urbaine du village d’Usaquén, alors situé dans le secteur de Santa Barbara, se met en place. Le village s’étend jusqu’en 1777 où la population est expulsée vers Soacha par les autorités espagnoles. Cependant, le secteur est appelé à se repeupler au fil du temps par la construction de grandes fermes, les haciendas98, génératrices d’opportunités de travail. De la fin du XIXe siècle au début du XXe siècle, Usaquén située à quelques kilomètres de Bogota, devient une destination prisée des citadins pour y passer les fins de semaine. Ce n’est qu’en 1954 qu’Usaquén, au même titre que cinq autres municipalités99, est annexée à la ville de Bogota qui connaît une expansion urbaine importante. La croissance urbaine se poursuit jusqu’en 1987 où le centre historique d’Usaquén qui a gardé son architecture coloniale, est classé aux monuments nationaux. Dans les années 1950 et 1960, l’explosion démographique qui touche Bogota affecte également Usaquén devenu une localité située à la périphérie de la ville. La croissance démographique d’Usaquén s’explique d’une part, par la migration des populations, et d’autre part, par une population bogotaine venue d’autres secteurs de la ville. De cette situation résulte deux phénomènes : une part non négligeable de la population d’Usaquén vit dans des logements informels situés dans les Cerros orientales alors que l’autre partie de la popu98: Les haciendas sont de grande propriétés agricoles. 99: Suba, Engativa, Fontibon, Bosa et Usme.
61
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
lation accède à des logements confortables. Ceci permet d’expliquer qu’aujourd’hui Usaquén abrite à la fois la population la plus riche et la plus pauvre de Bogota. Ces logements informels sont situés dans des quartiers dits « invasifs », car ils envahissent la montagne, endroit où il n’est pas, à priori, permis de construire. Ces habitations se situent entre autres autour de la zone d’extraction de deux carrières, devenue la principale source de travail pour ces populations venues de la campagne sans aucune formation professionnelle. En plus de travailler dans les carrières, cette tranche de population y vit, cohabitant avec les risques très élevés d’éboulements et de glissements de terrain.100
Secteur de SCN La Carrera septima Les carrières Fig.48 : Photographie satellite de l’invasion des cerros orientales à Usaquén. Source : Google Map.
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4.2.3. Population et stratification socio-économique
D’après une étude datant de 2002101, Usaquén compte 474 773 habitants soit 6,4% de la population bogotaine. Ainsi elle se place au septième rang des localités les plus peuplées de la ville. En termes de densité de population, elle a la cinquième localité plus faible densité avec un rapport de 14 700 hab/km2.102 100 : ZAMBRANO F, CASTELBLANCO C, 2000, Comunidades y territorios, reconstruccion historica de Usaquen, Alcaldía Local de Usaquen, Bogota. 101: DAPD, 2002, Subdireccion de Desarollo Social, Alcaldia de Bogota, Bogota D.C 102 : DAPD, 2002, Subdireccion de Desarollo Social, Gerencia de Desarollo Humano y Progreso Social, Alcaldia Mayor de Bogota, Bogota.
62
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
350
Densité de population, Bogota, 2002.
Hab/Ha
298
302 301
307
300
243
250
222 201
204
200 166 142
150
147
149
149 150
169
154
117 103 90
100
C
Te u
0
Fig.49 : Graphique de la densité de population à Bogota en 2002. Source : DAPD, Sous-direction du développement social.
sa qu ha illo pi n Fo ero nt ib on U sm e U Ba sa rri qu os én La Un id C an os Lo dela s M ria ar tin es Pu en Sub te a Ar an Sa da nt a F T An unj e to ue l ni ito C oN iu da arin d o Bo liv En ar ga tiv a Bo Ke sa nn ed R af y ae l U Sa rib n e C ris to ba l
50
On dénombre quelque 129.025 ménages qui se partagent 107.896 logements, soit 3,41 personnes par ménage et 1,20 ménage par logement. Ce constat illustre qu’il existe donc un déficit en logements touchant la population pauvre de la localité. Le tableau suivant illustre justement la répartition de la population d’Usaquén par UPZ et suivant leur catégorie socio-économique. On remarque que l’UPZ de San Cristobal Norte, située en périphérie, abrite les classes pauvres de la localité tandis que les populations très aisées sont dans les UPZ d’Usaquén, Santa Barbara et Country Club. Autrement dit, 30,1% de la population d’Usaquén appartient à la classe 3, 24,4% à la classe 4, 15,7% à la classe 6, 12,4% à la classe 5, 11,3% à la classe 2, 4,6% à la classe 1 et enfin 1,5% appartient à la classe 0.103
103 : D’après une étude datant de 2009 du département administratif national de statistiques (DANE-SDP), « Proyecciones de poblacion segun localidad ». www.dane.gov.co. Consulté en Aout 2012.
63
64
Paseo de los libertadores Verbenal La Uribe San Cristobal Norte Toberin Los Cedros Usaquén Country Club Santa Barbara Zone rurale d’Usaquén Total
UPZ
6.994
0 226 262 275 1.037 549 940 3.648 23 34 769 21.344
357 52.494
Catégorie socio-économique 1 2 3.154 5.051 35.090 113 898 15.202 7.483 1.148 209 4.364
303 139.970
52.629 11.409 48.958 24.426 6 2.239
3
241 113.167
25.895 78.283 4.388
4.360
4
19.002 13.191 13.432 8.646 155 57.704
3.278
5
3.924 13.804 11.223 42.794 1.072 72.983
6 166
Total 3.546 96.310 17.055 72.680 52.018 102.364 41.634 24.678 51.474 2.897 464.656
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Fig.50 : Tableau synthétique de la répartition de la population d’Usaquén par UPZ et par classe socio-économique en 2009. Source : DANE, SDP, 2009
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Estrato 6 Estrato 5 Estrato 4 Estrato 3 Estrato 2 Estrato 1 REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
Fig.51 : Plan représentant la répartition des classes socio-économique à Usaquén. Source : DAPD, 2009.
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Sans estrato
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Le déficit en logements conduit à un surpeuplement qui a pour effet d’augmenter la densité de population. Comme le montre le tableau suivant, la densité est donc plus importante dans les UPZ pauvres: celle de San Cristobal Norte et Verbenal sont les deux concernées. UPZ
Densité de population (2010) Estratos prédominants
Verbenal
27.926 hab/km2
0, 1, 2 et 3
San Cristobal Norte
26.640 hab/km2
0, 1, 2 et 3
Toberin
17.985 hab/km
3 et 4
Los Cedros
2
15.291 hab/km
4 et 5
Santa Barbara
11.167 hab/km2
5 et 6
Country Club
2
8.632 hab/km
5 et 6
Usaquen
8.540 hab/km2
5 et 6
La Uribe
5.036 hab/km
2,3 et 4
Paseo de los Libertadores
579 hab/km
2 et 6
Zone rurale d’Usaquén
105 hab/km2
0
2
2
2
Enfin, en se référant toujours au chapitre précédent, on peut affirmer que les secteurs où s’entassent les populations les plus pauvres sont aussi les secteurs où se développe une occupation illégale du sol. D’après le DAPD (le département administratif de planification distrital), «en 2002, 1.259 quartiers on été légalisés dans tout le district capital. La localité d’Usaquén, elle, présentait un total de 79 quartiers marginaux aujourd’hui légalisés. […] On estime que cette régularisation bénéficia à 42.499 habitants de la localité.»104 C’est-à-dire que 9% de la population d’Usaquén est très pauvre et est contrainte de vivre de façon précaire sur des terrains construits illégalement.
4.2.4. Mobilité Le réseau viaire d’Usaquén est composé d’un maillage de voies hiérarchisées en quatre catégories. Tout d’abord les artères principales, de première importance, permettent un transit à l’échelle métropolitaine et régionale. Ensuite, un tissu d’artères secondaires vient articuler les artères principales et les voies intermédiaires. Celles-ci connectent les secteurs entre eux ; on est ici à l’échelle de l’UPZ. Enfin, un maillage de voies à caractère local dessert chaque parcelle, on passe alors à l’échelle du quartier. Bien que son système viaire paraisse sans faille, il existe à Usaquén des problèmes de mobilité. On pourrait penser que puisqu’elle abrite les populations les plus riches de la capitale, son aménagement urbain aurait reçu un traitement de faveur. Mais selon Andrès Felipe Vergara, citadin visiblement mécontent, «il n’y a qu’une ligne [de Transmilenio] qui passe dans la localité. Il s’agit du tronçon de l’Autopista Norte qui passe par l’ouest et qui est donc très éloigné du reste de la localité. De plus, le Transmilenio sur cette ligne reçoit des passagers de la localité de Suba alors qu’elle dispose de deux lignes de plus.105» Quant au transport public traditionnel: «il est précaire, lent, désordonné, désagréable et dangereux. Tout ceci fait qu’il n’est pas attractif et c’est pour cela qu’Usaquén est une des localités qui utilise le moins le transport public traditionnel106.» Enfin, Usaquén a un déficit de pistes cyclables, il n’y a que deux pistes cyclables qui traversent la localités, celle de la Carrera 19 et celle de la Calle 170. 104: ALOMIA R, MIGUEL A, 2009, Documento de trabajo que posibilita la construccion del plan local en deporte, recreacion, activid fisica, parques de la localidad, Universidad pedagogia nacional, alcaldia de Bogota D.C, n°1, p.8. 105: http://elantagonista.com/usaquen-y-sus-problemas-de-movilidad/. Consulté en Juillet 2013. 106: http://elantagonista.com/usaquen-y-sus-problemas-de-movilidad/. Consulté en Juillet 2013.
66
Fig.52 : Tableau synthétique de la densité de population en fonction des UPZ d’Usaquén en 2010. Source : SCRD, 2010.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Voies locales Voies intermédiaires Artères secondaires Artères principales
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Fig.53 : Système viaire d’Usaquén. Source : Plan réalisé par moimême à l’aide du cadastre.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
4.2.5. Pollution La pollution entraîne trois types de nuisances pour l’être humain : olfactive, acoustique et visuelle, affectant ainsi trois des cinq sens. Usaquén est touchée par plusieurs types de pollution et trois éléments majeurs ont été identifiés: le dépôt de déchets, la détérioration du système hydrique, des canaux et des failles hydriques, et la qualité de l’air (bruit et émission atmosphérique). Tout d’abord une pollution liée au trafic automobile qui se ressent davantage sur les grandes artères de circulation. Par exemple sur l’Autopista Norte, véritable autoroute dans la ville qui traverse toute la capitale du nord au sud, compte pas moins de six voies automobiles et deux couloirs en site propre de Transmilenio. Avec une largeur totale d’environ 50 m, l’axe dégage une pollution qui entraîne des nuisances aussi bien sonores qu’olfactives.
Comme le précise une étude du ministère de la santé, «la dégradation de l’environnement se fait par la pollution de l’air qui entraine également un inconfort acoustique causé par l’important flux automobile. Il existe aussi une pollution visuelle causée par l’augmentation de l’activité commerciale formelle et informelle107.» Cette dernière108 affectant l’ensemble du réseau viaire de la localité. Mais le phénomène le plus inquiétant reste la dégradation des Cerros orientales, zone théoriquement protégée. Les UPZ concernées sont Verbenal, los Cedros, Santa Barbara et San Cristobal Norte qui font partie des secteurs prioritaires en termes de santé publique, tant la pollution y est importante. Toujours d’après le rapport du ministère de la santé paru en 2012, «dans cette zone montagneuse il s’est développé une activité d’extraction (carrières) intense, qui a contribué à augmenter dangereusement les risques d’éboulements 107: D’après une étude du ministère de la santé paru en 2012 établit avec la participation des hôpitaux d’Usaquén. p.53. 108: On se réfère ici à la prolifération de publicité sur le bord des routes.
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Fig.54 : Photgraphie de l’autopista norte traversant Usaquén. Source : http://3.bp.blogspot. com/
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
et de glissements de terrains. Elle est sillonnée par un grand nombre de failles rocheuses polluées par des eaux usées et des ordures ménagères. […] L’air est pollué par des particules de poussières qui proviennent des carrières et de la déforestation, affectant d’une part la réserve naturelle et d’autre part les quartiers de Villa Nidia, Cerro Norte, Codito, Soratama, Santa Cecilia, Serrezuela et Buena Vista109.»
Pollution atmosphérique
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Fig.55 : Les axes de circulation polluée à usaquén. Source : Plan réalisée par moi-même à l’aide du cadastre.
109: : D’après une étude du ministère de la santé paru en 2012 et avec la participation des hôpitaux d’Usaquén, p.62.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
4.2.6. Usages et équipements Le POT classe les UPZ suivant leurs caractéristiques dominantes, en huit groupes110 : 1- résidentiel à urbanisation incomplète : secteur périphérique non consolidé111, de classes socio-économiques 1 et 2, à dominante résidentielle et avec des déficiences dans son infrastructure, son accessibilité, ses équipements et son espace public; 2- résidentiel consolidé : secteur consolidé de classe socio-économique moyenne à usage principalement résidentiel, et qui présente actuellement un changement d’usage et une croissance urbaine non planifiée; 3- résidentiel qualifié : secteur consolidé de classe socio-économique moyenne avec usage résidentiel qui comprend une bonne infrastructure, des équipements collectifs et des conditions d’habitation et écologiques adéquates; 4- développement : secteur peu développé, avec de grands terrains en friche. 5- Avec centralité urbaine : secteur consolidé comprenant des centres urbains où l’usage économique prédomine; 6- commercial : secteur du centre métropolitain ou l’activité tertiaire prédomine; 7- à dominante industrielle : secteur où l’industrie est l’activité principale, même s’il y a des commerces et des équipements publics; 8- où les équipements urbains prédominent : secteurs destinés à la construction d’équipements urbains et métropolitains qui, par son ampleur dans le tissu urbain, doivent être dirigés selon des conditions spéciales.
Développement Résidentiel à urbanisation incomplète Commercial Résidentiel qualifié
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L’UPZ San Cristobal Norte est un secteur d’Usaquén défini comme urbanisé de façon incomplète (n°1) et abritant les classes socio-économiques les plus basses. Il s’agit de caractéristiques dominantes, ce qui signifie que les 26 quartiers qui composent San Cristobal Norte ne participent pas tous au même niveau au processus. Ce sont essentiellement les quartiers de Santa Cecilia, Cerros Norte et Arauquita situés à la périphérie de la ville dans les Cerros orientales qui ont entraîné l’UPZ dans la première catégorie. Il s’agit de quartiers urbanisés illégalement de classe sociale 0, 1 ou 2. 110: MINISTÈRE DE L’URBANISME, Mai 2010, La construccion de un territorio mas competitivo, Révision du POT, Alcaldia de Boogta, Bogota DC. 111 : On entend par « non consolidé », les terrains non urbanisés en milieux urbains ou dans notre cas particulièrement, les terrains urbanisés de façon illégale.
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Ou les équipements urbains prédomine Avec centralité urbaine
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Fig.56 : Caractéristique prédominante des UPZ dans la localité d’Usaquén. Source : Plan réalisée par moi-même à l’aide du DAPD, 2009.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Revenons à l’échelle métropolitaine pour comparer112 l’offre en équipements urbains de chaque localité en fonction de sa population:
Fig.57 : Répartition des équipements urbains par localités à Bogota en 2002. Source : DAPD, Bogota DC.
Localité
Nombre ments
Chapinero
3.160
122.991
25.69
Teusaquillo
1.364
126.125
10.81
La candelaria
265
27.450
9.65
Usaquén
2.485
439.341
5.66
Santa Fe
549
107.044
5.13
Barrios Unidos
639
176.552
3.62
Los Martines
328
95.541
3.43
Antonio Narino
289
98.355
2.94
Puente Aranda
534
282.491
1.89
Suba
1.360
753.593
1.80
Fontibon
468
300.352
1.56
Rafael Uribe
535
385.114
1.39
Engativa
1.045
769.259
1.36
Tunjuelito
273
204.367
1.34
Kennedy
1.028
951.330
1.08
San Cristobal
488
457.726
1.07
Usme
256
259.189
0.99
Bosa
366
450.468
0.81
Ciudad Bolivar
462
628.672
0.73
Total
15.629
6.635.960
2.35
Nbre d’équipements pour 1000 habitants
Usaquén est la quatrième localité avec le meilleur ratio d’équipements pour mille habitants. Pour 439.341 habitants, elle offre un parc de 2.485 équipements urbains. En effet, Usaquén et les autres localités abritant les classes aisées de la société offrent une plus grande quantité en équipements que les localités pauvres du sud comme Usme, Bosa et Ciudad Bolivar. UPZ
Fig.58 : Répartitiion des équipements urbains par UPZ à Usaquén en 2002. Source : DAPD, Bogota DC.
d’équipe- Population
Population
Nbre d’équipements
Paseao de los Libertadores 5.543
10
Verbenal
56.719
77
La Uribe
40.845
39
San Cristobal Norte
62.635
93
Toberin
35.964
82
Los Cedros
93.905
200
Usaquén
45.279
720
Country Club
29.959
380
Santa Bàrbara
60.850
884
Total
439.341
2.485
Conformément à la répartition spatio-socio-économique, les UPZ (Santa Bàrbara, Usquén et Country Club) présentant le plus d’équipements sont celles abritant les classes d’estrato 5 et 6. Ainsi, San Cristobal Norte offre presque dix fois moins d’équipements que Santa Bàrbara alors qu’elle est plus peuplée. Le tableau peut s’expliquer, entre autre, d’un point de vue géographique: plus on approche de la périphérie de la ville, moins il y a d’équipements. 112: D’après une étude de la DAPD, sous direction du développement social, 2002, Bogota DC.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
1
2
3
5
4
6 Sécurité citoyenne Santé Sport & récréation Education Justice
7
Culture Culte Bien-être social Aministration
1
Paseo de los libertadores
2 Verbenal 3 La Uribe 4 San Cristobal 5 Toberin 6 Los Cedros 9
7 Country Club 8
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9 Santa Barbara Fig.59 : Répartition des équipements urbains dans la localité d’Usaquén. Source: Plan réalisé par moimême à l’aide du cadastre.
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8 Usaquén
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Le plan ci-contre illustre le tableau précédent en localisant la répartition des équipements à Usaquén et en effet, la plus forte concentration d’équipements se situe au sud de la localité, dans les UPZ les plus riche.
4.3.
San Cristobal Norte, l’UPZ
Il existe, dans la montagne du secteur est de San Cristobal Norte, des habitations auto-construites à l’aide de matériaux de récupération comme du bois, de la ferraille ou du carton. Il existe aussi des habitations construites de manière informelle en brique qui sont organisées en minuscules îlots. Cette morphologie péri-urbaine est le principal témoin d’une urbanisation illégale. Après avoir analysé de manière assez théorique la localité d’Usaquén dans le cadre de l’atelier d’architecture de l’université Javeriana, l’idée était, pour l’UPZ San Cristobal mais surtout pour les quartiers de Santa Cecilia, Arauquita, Cerros Norte d’investiguer nous-mêmes113. Par investiguer nous-mêmes, j’entends nous déplacer jusqu’à notre secteur, l’arpenter afin de s’imprégner du lieu, de l’ambiance; dialoguer avec ses habitants afin de nous sensibiliser aux problématiques des résidents de ces quartiers marginaux. La proposition était d’autant plus intéressante pour moi qui ne connaissais absolument rien de cet univers.
Fig.60 : Photgraphie de l’unique accès aux quartiers de Santa Cecilia, Arauquita et Cerros Norte. Source : Photographie personnelle.
Conscient du danger auquel nous nous exposons, nous décidons d’entrer dans le quartier sur le coup de 10h du matin un samedi, pour avoir le temps de monter jusqu’aux dernières habitations et de faire le tour sans avoir à craindre la tombée de la nuit. Malheureusement avant d’arriver en haut du quartier Cerros Norte, nous sommes arrêtés par une petite bande de jeunes plutôt aimables au premier abord. Ils nous ont d’abord expliqué que plus haut c’était dangereux et qu’il valait mieux (ou plutôt que nous devions) être accompagnés d’un résident sous peine de nous faire voler dans le meilleur des cas (et je n’ose imaginer dans le pire des cas). Naturellement rien n’est gratuit de nos jours et encore moins pour ces gens-là qui avaient déjà repéré nos appareils photos, pourtant bien cachés. Après nous être rapidement concertés, nous décidons de ne pas faire confiance à ces guides touristiques à l’allure bien particulière, mais à peine avaient-ils entendu notre cordial refus que le ton 113: Les deux filles de mon groupe et moi-même.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
de leurs voix s’est durci, nous enjoignant à redescendre le plus vite possible. L’idée était de faire une boucle, monter par Cerros Norte et redescendre par Arauquita, mais la situation exigea que l’on redesence sur nos pas. Si ce genre de situation peut avoir lieu un samedi matin à 10h, je pense être en mesure d’imaginer quel genre d’incident peut se produire pendant la nuit: guerre de gangs, règlements de compte, trafic de drogues, d’armes, viols, kidnappings, meurtres, etc. L’étude se résumera donc à une autre analyse théorique, bien que j’ai pu aborder de façon assez réaliste le thème de l’insécurité.
4.3.1. Contexte géographique & topographique
Nous changeons donc d’échelle pour nous concentrer sur l’UPZ de San Cristobal Norte. On s’intéressera principalement au secteur est, situé dans les Cerros orientales. Le secteur est de l’UPZ est divisé en trois quartiers : Arauquita, Santa Cecilia et Cerros Norte. Le secteur est enclavé dans la zone forestière de la réserve naturelle protégée des Cerros orientales. De plus, elle compte un système hydrique très riche avec trois cours d’eau qui y coulent: Arauquita, San Cristobal et El Cedro. La topographie a donc été largement dessinée par l’écoulement de ces eaux comme l’atteste la faille San Cristobal qui fragmente les quartiers de Santa Cecilia et Cerros Norte. Deux carrières (en jaune fig.48) auparavant exploitées sont situées de part et d’autre de l’accès au secteur : la première au nord, la seconde au sud. Elles resserrent la liaison entre Arauquita et Santa Cecilia/Cerros Norte et forment un entonnoir qui a pour effet d’isoler un peu plus le secteur du reste de la localité.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
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Fig.61 : Photographie satellite du secteur est de San Cristobal Norte. Source : google.map.com.
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Fig.62 : Photographie satellite du secteur est de San Cristobal Norte. Source : google.map.come.
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Cerros Norte Santa Cecilia Arauquita
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Fig.63 : Les 3 quartiers de San Cristobal Norte. Source : Plan réalisée par moi-même à l’aide du cadastre.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
La topographie du site en rend l’accessibilité particulièrement difficile du fait du dénivelé très important entre la partie basse et haute du secteur. Outre le problème d’accessibilité, le dénivelé entraîne également une complexification de la construction car il implique de rigoureuses études sur la nature des sols pour prévenir tout risque d’éboulement ou de glissement de terrain.
Fig.64 : Maquette d’étude représentant l’UPZ de San Cristobal Norte. Source : Maquette réalisée par moi-même.
Enfin, au regard de la topographie du site et du passage des trois failles hydriques, on note que les risques de glissements de terrains sont relativement élevés: au niveau de la faille centrale, San Cristobal mais également dans la partie basse du secteur, lieu où le dénivelé s’affaiblit. Il y a là aussi un
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
important risque d’inondation en cas de fortes précipitations. La déforestation et l’extraction de pierres des deux carrières augmentent significativement les risques d’éboulement et de glissement de terrain.
Risque important REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
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Risque moyen Risque faible
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4.3.2. Population Le secteur oriental de San Cristobal Norte est considéré comme périphérique non consolidé, de classe socio-économique 1 et 2 à prédominance résidentielle avec une infrastructure incomplète, une accessibilité difficile, une carence en équipements urbain et un espace public très pauvre voir inexistant.114 Il abrite en 2012 22.687 habitants115. En 1930, le quartier se limitait à quelques bâtisses, mais au cours de la seconde moitié du XXe siècle, le phénomène s’est amplifié de façon exponentielle pour aboutir aujourd’hui à l’existence de trois quartiers qui fonctionnent comme une microsociété, en marge de la ville qui l’a rejetée. La population de Cerros Norte, une des plus importante de l’est d’Usaquén, a réussi à obtenir une certaine reconnaissance locale, en dépit des conditions géographiques, topographiques et sociales qui la caractérisent et qui l’isolent. Vers 1944, un des propriétaires des quelques fermes de l’époque commençe à parcelliser et à vendre ses terrains. Chaque lot est alors acheté à crédit par environ huit familles qui le sous-divisent en parcelles pour y habiter. La population du secteur est, à ce moment-là, composée d’émigrants venus 114 : D’après le plan d’organisation territorial (POT) de Bogota. Le POT est un instrument présenté sous la forme d’un cahier des charges, qui établit les directions à suivre quant au développement urbanistique, écologique, politique, administratif des zones urbaines et rurales du territoire appartenant au district. 115: D’après une étude du ministère de la santé paru en 2012 établit avec la participation des hôpitaux d’Usaquén, p.62.
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Fig.65 : Plan représentant les risques de glissement de terrain à San Cristobal Norte. Source : Plan réalisé par moimême à l’aide du cadastre.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
d’autres quartiers de la ville en quête d’un moyen facile et bon marché de se loger, car il leur était quasi impossible d’accéder à un logement à cause du coût de location des appartements et de celui des services publics. En plus d’être à la recherche d’un logement, ils étaient aussi à la recherche d’opportunités de travail. San Cristobal Norte est donc le lieu idéal puisqu’il combine les deux facteurs : ses parcelles qu’on peut acheter pour une somme dérisoire et la proximité des deux carrières, source de travail. Aujourd’hui, ce sont les habitants eux-mêmes qui sont les acteurs dynamiques de l’organisation de leur territoire. Ce qui explique pourquoi ces quartiers isolés du reste de la ville arrivent malgré tout à fonctionner en autarcie, en microsociété avec leur propre économie souterraine, leur propre service public116.
En 2012, 83% du secteur oriental de San Cristobal Norte suit un processus de régularisation visant à légaliser ces quartiers clandestins. Fig.66 : Photographie du secteur est de San Cristobal Norte. Source : Photographie personnelle.
16
4.3.3. Mobilité Santa Cecilia et Cerros Norte sont respectivement traversés par une voie centrale (en violet fig.69). L’accès se fait par l’avenida septima (en rouge fig.69) qui est une artère importante reliant le nord au sud de la ville. Les deux voies, propres à chaque quartier, ne se relient à aucun moment. À cause du dénivelé très important du site, ces quartiers ne sont pas desservis par le transport public de la ville. Un système de transport privé alternatif officieux a été mis en place par les habitants eux-mêmes : des véhicules 4x4 prennent les citadins au niveau de l’arrêt de bus situé sur la Carrera septima et montent jusqu’à la partie haute du site s’arrêtant aux intersections pour laisser les passagers descendre 117 du véhicule. Les sociétés de transports n’utilisent que des 4x4 car une voiture standard serait incapable de monter jusqu’en haut, sans compter le fait que la majorité des routes ne sont pas goudronnées. Comme le précise une étude datant de 2012, «en général le site, par sa localisation, présente un déficit dans son infrastructure, dans son accessibilité, sa mobilité, ses équipements, ses espaces publics, qui le rend encore plus inaccessible aux personnes à mobilités réduites. L’accès aux transports en commun est impossible à cause du manque de voieries, de l’étroitesse des quelques routes existantes et du dénivelé. Les éléments précédents ajoutés aux problèmes d’insécurité sont les causes de l’abscence de transport en commun. Pour accéder au secteur, il faut alors faire appel à des sociétés informelles118.» 116 : HOPITAL DE USAQUÉN, 2006, Reconstruccion de la memoria colectiva en salud. Grupo « Los Conquistadores » Barrio Cerros Norte, Salud Publica Ambito Comunitario, localité d’Usaquén, Bogota. 117: Les 4x4 ont la particularité de faire la montée avec des passagers mais la descente à vide. 118: D’après une étude du ministère de la santé paru en 2012 et avec la participation des hôpitaux d’Usaquén. p.62.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Fig.67: Photographie d’un 4x4 montant les rues abruptes de Cerros Norte. Source : Photographie personnelle.
Fig.68 : Photographie montrant le dénivelé du quartier de Cerros Norte. Source : Photographie personnelle.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
Septima
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Voies centrales
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Fig.69 : Plan représentant les flux automobiles à San Cristobal Norte. Source : Plan réalisé par moimême à l’aide du cadastre.
On peut hiérarchiser le flux piétonnier du secteur en trois catégories : la première est un flux élevé détecté sur les voies principales de la partie basse du secteur (en rouge fig.70). Le relief beaucoup plus doux et la présence de commerces de proximité alimentent abondamment ces voies en piétons. Les deux voies centrales respectives aux deux quartiers constituent un flux de catégorie moyenne reliant d’ouest en est les extrémités du secteur par un serpentin d’asphalte (en orange fig.70). Quant à la troisième catégorie, elle définit un faible flux caractérisé par des piétons empruntant les transversales aux deux dorsales centrales (en jaune fig.70). Les piétons empruntant ces voies sont essentiellement les résidents des habitations avoisinantes. Ces voies de circulation n’ont pas le même statut que celui de la dorsale centrale, elles sont de moindre importance et le fait qu’elles soient tantôt goudronnées tantôt laissées en terre en témoigne bien.
Flux élevé Flux moyen Flux faible Septima Fig.70 : Plan représentant les flux piétons à San Cristobal Norte. Source : Plan réalisé par moimême à l’aide du cadastre.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
4.3.4. Pollution
Service
Couverture Usaquén
Eau potable
99,9%
Égouttage
99,9%
Electricité
100%
Gaz naturel
71,0%
Ramassage des ordures
99,8%
Comme l’indique le tableau, la couverture en eau potable, égout, gaz naturel et ramassage des déchets n’est pas complète à Usaquén. Les quelques dizaines de quartiers touchés sont ceux des classes 0,1 et 2 c’est-àdire essentiellement ceux appartenant à l’UPZ Verbenal et San Cristobal Norte et tout particulièrement les quartiers que j’étudie: Santa Cecilia, Cerros Norte et Arauquita. Bien qu’une procédure de reconnaissance soit en cours actuellement, s’ils ne sont pas connectés au reste du réseau, c’est qu’ils occupent illégalement un sol qui appartient à une réserve naturelle protégée. Cette défiance crée un cercle vicieux et met en danger la santé des habitants: le ramassage des déchets n’étant pas assuré, les habitants jettent leurs ordures là où ils peuvent c’est-à-dire dans la nature, dans les failles de la montagne, contaminant l’eau qui y coule. L’absence de système de récupération des eaux usées à la même conséquence, elles sont redirigées vers les failles hydriques. Mais ces mêmes habitants n’ont malheureusement pas accès à l’eau potable, elles creusent donc des puits ou bien viennent récupérer l’eau qui coule de la montagne, contaminée par leurs propres déchets. Cela peut paraître ahurissant, à nous européens, mais n’oublions pas que cette population vit dans une extrême pauvreté. Elle n’a donc que très peu eu accès à l’éducation même si la situation des plus jeunes générations est plus prometteuse. On ne peut donc pas la blâmer de n’avoir aucune conscience écologique et sanitaire.
Comme le précise le ministère de la santé, «5% des familles ne bénéficient pas de ces services [ceux du tableau], particulièrement dans les quartiers de Arauquita et Cerros Norte ou respectivement 34% et 14% des familles
82
Fig.71 : Tableau synthétique de la couverture en service public. Source : Enquête sur la qualité de vie, DEI, CCB, Bogota, 2007.
Fig.72 : Photographie montrant l’amoncellement des ordures dans le quartier de Cerros Norte. Source : Photographie personnelle.
L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
souffrent de ce problème, la population de ces quartiers est ainsi dans l’obligation de boire l’eau de puits ou de citernes, lesquels sont en mauvais état et pollués. Le service de ramassage des ordures couvre 98% des familles, mais les 2% des familles restantes appartiennent aux quartiers de Santa Cecilia et Arauquita, lesquels deviennent préoccupants au niveau de l’amoncellement des déchets même si des conteneurs ont été déposés à cet effet119.»
Fig.73 : Photographie montrant l’amoncellement des ordures dans le quartier de Cerros Norte. Source : Photographie personnelle.
Photo 1 : On aperçoit au loin les quartiers du secteur est de San Cristobal Norte situés dans la montagne.
4.3.5. Reportage photographique
Malgrè l’incident, nous avons quand même eu l’opportunité (la chance?) de faire un reportage photographique du début de notre périple. Ce reportage se compose de seize photographies qui suffisent à dresser un état des lieux et à s’imprégner de l’atmosphère de Cerros Norte.
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Fig.74 : Photographie personnelle. Photo 2 : En bas des trois quartiers, il y a une multitudes de commerces informels en tout genre. L’entrée aux quartiers est peuplée la journée de marchands ambulants.
Fig.75 : Photographie personnelle.
119: D’après une étude du ministère de la santé paru en 2012 établit avec la participation des hôpitaux d’Usaquén. p.63.
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Photo 3 : Les habitations situées le plus en contrebas sont relativement bien construites avec un parement en brique en façade. Fig.76 : Photographie personnelle. Photo 4 : Une fois que l’on commence à monter, l’anarchie s’installe petit à petit. Fig.77 : Photographie personnelle.
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Photo 5 : Plus on monte et plus on sent la précarité s’installer. Les habitations sont de moins en moins bien finies au niveau des façades. Fig.78 : Photographie personnelle. Photo 6 : On voit un escalier abrupt permettant de couper les boucles que fait la route goudronnée. Fig.79 : Photographie personnelle.
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Photo 7 : Ces habitations sont beaucoup plus représentatives des quartiers informels: elles sont un air de «pas finies. La maison en premier plan a un début de premier étage. Fig.80 : Photographie personnelle. Photo 8 : La route goudronnée principale débouche sur un chemin secondaire de terre. Fig.81 : Photographie personnelle.
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Photo 9 : Le premier aménagement urbain: il s’agit d’une placette et d’une petite aire de jeux pour enfants qui surplombe la ville. Fig.82 : Photographie personnelle. Photo 10 : Le deuxième aménagement urbain: un terrain de sport. Fig.83 : Photographie personnelle.
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Photo 11 : Nous arrivons environ à mi-hauteur et constatons que la typologie des habitations à encore changé, devenu de plus en plus vétuste, on est déjà loin de l’entrée et l’ambiance a complétement changé. Il fait plus froid et silencieux. Nous sommes à présent coupé de la ville. Fig.84 : Photographie personnelle. Photo 12 : Des chiens errants fouillant dans des ordures ménagères.
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Fig.85 : Photographie personnelle.
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Photo 13 : Cette maison illustre bien le schéma social évolutif de l’habitat informel: Lorsque les enfants de la famille vivant au rez de chaussée se marient, ils construisent leur propre étage juste au dessus de celui des parents pour pouvoir fonder une famille et acceuillir les futurs enfants.
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13
Fig.86 : Photographie personnelle. Photo 14 : Toujours plus haut, la photographie laisse percevoir un chemin de campagne. La route groudronnée à laisséeplace aux chemins de terre qui ont eux-mêmes laissés place à des chemins à peine tracés. Fig.87 : Photographie personnelle. Photo 15 : Cette photo semble être hors contexte et ne laisse plus du tout percevoir que l’on est juste au-dessus de Bogota. On voit ici des maisons de fortune qui ne dépassent pas deux étages donc relativement récentes. La nature reprend petit à petit ses droits.
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Fig.88 : Photographie personnelle. Photo 16 : Un exemple type des dernières maisons que l’on peut trouver en haut des trois quartiers même si nous n’avons pas pu grimper jusqu’en haut. Par rapport aux toutes premières habitations, ici la misère est bien réelle.
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Fig.89 : Photographie personnelle.
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Fig.90 : Localisation du reportage photographique. Source : Plan réalisé par moimême à l’aide du cadastre.
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4.4.
Diagnostic et solution proposée
Après avoir observé et analysé San Cristobal Norte, nous sommes en mesure d’identifier la cause du problème. La démarche de ce mémoire, bien qu’elle ait été beaucoup plus approfondie, a été la même que celle de l’atelier d’architecture. En effet, la première phase a été de nous envoyer sur le terrain et la deuxième phase a été d’analyser la localité puis le site pour comprendre pourquoi San Cristobal Norte implose socialement de l’intérieur et pourquoi elle n’arrive pas à se reconnecter au reste de la ville. La troisième phase est de proposer un plan d’urbanisme en accord avec les nécessités de la population tandis que la quatrième et dernière phase est une proposition architecturale. L’idée est d’utiliser l’architecture afin d’apporter une solution aux problèmes sociaux, économiques, culturels, éducatifs et sécuritaires de cette population trop longtemps abandonnée.
Fig.91 : Analyse d’Usaquén réalisée au cours de l’atelier d’architecture de la Javeriana lors de mon échange universitaire. Source : Réalisé par mon groupe et moi.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
CATALINA FLOREZ ANA MARIA AMARILLO ALEXANDRE PINEILL
MORFOLOGIA
EQUIPAMIENTOS
DESAROLLO HISTORICO
INFRASTRUCTURA
TRAZA
MORFOLOGIA Y QUEBRADA
SOCIAL
RELIEVE
TOPOGRAFIA
ILEGALIDAD
INSEGURIDAD
MOVILIDAD
USOS TOPOGRAPFIA
CONECTIVIDAD
MORFOLOGIA
ILUMINACION
INVASION
DENSIDAD
VIAS MORFOLOGIA
ACCESIBILIDAD
TRANSPORTE INFORMAL
TRANSPORTE INFORMAL
CONECTIVIDAD
CONTAMINACION
RIESGO DERRUMBE
DESAROLLO HISTORICO
INVASION CERROS
LA SOLUCIÓN ESTA EN CONECTAR LOS BORDES DE AMBAS PIEZAS
CONCLUSION: A TRAVEZ DE UNA RED DE EQUIPAMIENTOS GENERAR UN SISTEMA PARA INTEGRAR LA MORFOLOGIA DEL SECTOR
VIAS MAL ESTADO
......................
CONCLUSION:
CANTERAS
DESCONEXION
FALTA ALCANTARILLADO
RELIEVE
EJE CENTRAL CON BORDES
REMONCION DE MASA
DESAROLLO HISTORICO
CONCLUSION:
LA SOLUCIÓN ESTA EN GENERAR UN CIRCUITO ENTRE LAS DOS PIEZAS
CONCLUSION: GENERAR UN SISTEMA DE ACTIVIDADES SOBRE LOS BORDES
ESCORRENTIAS
DENSIDAD
CONCLUSION : LA SOLUCION ESTA EN PROPORCIONAR INFRAESTRUCTURA EN LOS BORDES DE AMBAS PIEZAS
CONCLUSION: REUBICAR A LA POBLACION QUE SE ENCUENTRA EN MAYOR RIESGO
EL SECTOR ESTÁ PARCIALMENTE FRAGMENTADO
Fig.92 : Analyse du secteur est de San Cristobal Norte réalisée au cours de l’atelier d’architecture de la Javeriana lors de mon échange universitaire. Source : Réalisé par mon groupe et moi.
4.4.1. La proposition urbanistique
Nous120 sommes donc arrivés à la conclusion que le secteur oriental de San Cristobal Norte est partiellement fragmenté. Fragmentation observée à tous les niveaux: urbain, économique, social et culturel. De plus, une discontinuité dans l’infrastructure, dans la morphologie urbaine et dans la structure naturelle du site participe à le désarticuler davantage. La solution urbanistique proposée se fera à travers les objectifs suivants : - tirer parti de la morphologie du site pour résoudre les problèmes de mobilité, d’insécurité, de pollution; - s’appuyer de la structure naturelle influençant la configuration du site pour prévenir d’éventuelles catastrophes naturelles (éboulements, inondations, etc.); - créer et consolider le tissu urbain existant; 120: La partie analyse urbanistique s’est faite en groupe tandis que le projet architectural est individuel.
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L’occupation illégale du sol à San Cristobal Norte à la périphérie de Bogota
- bénéficier du contexte économique informel existant pour le réintégrer dans cette proposition architecturale en vue d’améliorer les conditions de travail des habitants et, peut-être même, participer à la réintégration de ces commerces dans le marché légal. La solution relative à la morphologie du site serait de connecter entre elles les franges des deux quartiers. En effet, il est question de recoudre le tissu urbain existant de la même manière que l’on recoudrait une plaie ouverte. Le but serait, d’une part, de ressouder les deux pièces qui composent le secteur de San Cristobal Norte et, d’autre part, de rattacher ce secteur nouvellement unifié, au reste de la ville. Au niveau de la mobilité, il s’agirait de générer un circuit fermé desservant les deux pièces : Santa Cecilia et Cerros Norte. Une issue au problème de pollution serait de consolider le réseau viaire existant et de créer l’infrastructure manquante à la périphérie du secteur, zone la plus contaminée. L’analyse de la couverture actuelle en équipements montre qu’il faudrait, à travers un réseau d’équipements urbains, générer un système pour intégrer la morphologie du secteur. Dans cette même optique, générer un système d’activités tant diurnes que nocturnes permettrait de faire baisser considérablement le taux d’insécurité. Enfin, relocaliser la population vivant dans les zones à risques importants éviterait de les exposer inutilement aux catastrophes naturelles dues aux inondations ou aux glissements de terrain. San Cristobal Norte est structuré par deux axes ouest-est renforçant la coupure entre Santa Cecilia et Cerros Norte déjà présente à cause de la faille hydrique. La proposition serait donc de créer des axes nord-sud reliant les deux pièces, surmontant ainsi le handicap naturel qu’est la faille.
Axes structurants Faille hydrique
De plus, chacune des parties se divise en trois parties ce qui génère six fragments. Les axes nord-sud relie actuellement les trois fragments de chaque pièce. Nous proposons de relier un fragment d’une pièce avec un fragment de l’autre par deux flux qui s’entrecroiseraient.
Les 2 pièces de SCN Fig.93 : Schéma explicatif des axes. Source : Schéma personnel.
Flux Fragment 6 Fragment 5 Fragment 4 Fragment 3 Fragment 2 Fragment 1
Concrètement, il s’agirait de retisser le réseau viaire de façon à ce qu’il reconnecte entre elles l’ensemble des zones fragmentées et permette de lire le secteur comme une seule et même entité. Nous hiérarchiserons, par la même occasion, l’ensemble du réseau viaire existant en donnant la priorité tantôt à la voiture, tantôt au piéton. En termes de dynamisme social et économique, l’analyse qui précède nous a permis de constater que, d’une part, les trois entités qui constituent une pièce ne sont pas connectées entre elles et fonctionnent indépendamment les unes des autres et, d’autre part, que quelques pôles d’activités existent dans ces quartiers mais qu’ils ne jouent aucun rôle unificateur.
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Fig.94 : Schémas explicatifs de la fragmentation des quartiers. Source : Schéma personnel.
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Pôles d’activités Fragment 6 Fragment 5 Fragment 4 Fragment 3 Fragment 2 Fragment 1
Enfin, il n’existe aucun pôle attractif dans la partie basse de l’UPZ, ce qui pourrait être interprété comme une cause possible de l’isolement de ce secteur par rapport au reste de la localité. C’est pour cette raison que notre proposition urbaine inclut une série de nœuds d’activités qui viendraient appuyer la bonne cohésion de chaque fragment avec le fragment voisin tandis que trois pôles d’activités d’ordre beaucoup plus important assureraient un rôle de centralité, relieraient les deux pièces coupées par la faille hydrique et reconnecterait l’UPZ au reste de la localité, et, à plus grande échelle, au reste de la ville.
Fig.95 : Schéma explicatif des différents pôles d’activités. Source : Schéma personnel.
Flux Pôles d’activités Fragment 6 Fragment 5 Fragment 4 Fragment 3 Fragment 2 Fragment 1 Axes majeurs REALISE PAR UN PRODUIT AUTODESK A BUT EDUCATIF
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Fig.96 : Schéma explicatif, les axes. Source : Schéma personnel.
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En accord avec le besoin en équipements urbains et les attentes de la population, les pôles d’activités secondaires seraient : - une salle de musique : La musique est omniprésente en Colombie, on l’écoute à tous les coins de rues et elle est encore plus importante pour les populations pauvres. Cet équipement ouvert le jour et occasionnellement la nuit pour des représentations musicales assurerait un contrôle social et lutterait contre l’insécurité et la violence. - une salle communale : Elle existe déjà, mais nous proposons de la relocaliser d’une manière plus stratégique. Cet équipement aurait pour fonction de gérer les affaires commu-
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nautaires. L’implanter entre deux fragments d’une même pièce inviterait les populations à se fréquenter. Rappelons que les populations vivant dans ces quartiers sont pour certaines des populations déplacées en raison du conflit interne armé qui sévit en Colombie. Elles se regroupent alors en communautés d’une même région d’origine, fonctionnent en microsociété et sont source de violence et règlements de compte. - une crèche : Elle permettrait aux mères, souvent très jeunes, de se réinsérer dans le monde du travail. - un centre de documentation écologique : Il viserait à sensibiliser l’ensemble des habitants de San Cristobal Norte aux notions écologiques de base quant à la pollution des failles hydriques traversant le secteur, à la réserve naturelle protégée entourant le périmètre construit et à l’abandon des ordures ménagères en pleine nature. - un club des abuelos121: Ce club existe déjà, mais nous choisissons de le réimplanter plus stratégiquement, en accord avec notre proposition urbaine. Pour la plupart d’entre eux, ces équipements n’existent pas, ou s’ils existent, ils ont été créés là où il y avait de la place et non pas là où ils devraient idéalement se trouver. Aucune réflexion n’a été faite sur leur implantation alors que s’il étaient mieux situés, leur champ d’attractivité aurait atteint une population plus large. Enfin, le choix des équipements présentés ne s’est pas fait aléatoirement, mais bien en fonction des nécessités de la population. Leur emplacement, issu d’une réflexion, doit correspondre aux nœuds du schéma final précédent. Concernant les pôles attractifs de plus grande importance, qui jouent un rôle de centralisation et interviennent à l’échelle de l’UPZ, nous avons opté pour des équipements ayant pour but de former professionnellement les populations pré-adultes et adultes et, par la même occasion, de réduire le taux de délinquance. Il est donc proposé d’implanter un collège technique spécialisé en construction, des ateliers pour l’éducation et la formation artistique et une place de marché offrant des ateliers d’apprentissage aux métiers de poissonnier, boucher, fleuriste, etc. Notre proposition urbaine adopterait également un comportement soucieux de l’écologie quant à la sauvegarde de l’écosystème des Cerros Orientales. San Cristobal Norte est une UPZ dont seulement certains quartiers sont légalisés. Ces quartiers aujourd’hui légalisés ne l’étaient pas auparavant et leurs implantations ont donc été une transgression à la loi et ont porté préjudice à la nature. Il est donc question de travailler sur la trame urbaine actuelle tout en se conformant au périmètre urbain existant. Dans une optique de réhabilitation du sol et des fonctions, notre proposition urbaine prévoit également de transformer les deux anciennes carrières en parc naturel ouvert au public mais fermé la nuit. La structure urbaine actuelle de San Cristobal Norte s’est formée de manière spontanée, par une occupation illégale du sol et par un processus d’auto construction non contrôlé par la municipalité de Bogota. Elle est finalement le reflet d’un urbanisme largement handicapé par la morphologie naturelle du site. Notre proposition entend tirer parti de ces handicaps naturels pour les transformer en forces.
121: Abuelos en espagnol ou grands pères en français.
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Fig.97 : Proposition urbaine du secteur est de San Cristobal Norte pour les quartiers Santa Cecilia, Cerros Norte et Arauquita. Source : Plan réalisé par mon groupe et moi.
4.4.2. La proposition architecturale
Alors que la proposition urbanistique est collective, la proposition architecturale, elle, est individuelle. J’ai donc choisi de m’intéresser au point névralgique du masterplan situé dans la partie basse de San Cristobal Norte car je pense que c’est en requalifiant l’accessibilité au secteur que l’on parviendra à le reconnecter au reste de la ville. Il m’a semblé important d’étudier ce nœud d’activités et de le transformer en pôle attractif à l’échelle de l’UPZ mais également à l’échelle de la localité et éventuellement même à l’échelle de tout le secteur nord de Bogotá.
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8 Traitement minéral Traitement végétal Pièce d’eau
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Fleurs
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Fruits
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Légumes
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Poisson
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Viande
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Grains et oeufs
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Divers
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Garderie
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Atelier
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Traitement des déchets
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Une place de marché me permettrait de travailler à toutes les échelles possibles et en même temps de faire se rencontrer la population de San Cristobal Norte avec celle du reste de la ville. Le site d’implantation accueille actuellement de nombreuses activités de services et de commerces informels, gérées par des habitants de Santa Cecilia, Cerros Norte et Arauquita. C’est donc dans une optique de reconversion professionnelle et dans le respect des usages existants que j’ai choisi d’y développer une activité commerciale. Le projet s’appelle Los pajaros qui signifie les oiseaux. Le nom m’est venu en regardant les volumes qui, avec un peu d’imagination, font penser à des oiseaux sur le point de s’envoler. Cette image est aussi le message que j’ai voulu faire passer : le secteur oriental de San Cristobal Norte, longtemps resté endormi, abandonné, est maintenant en train de se réveiller et ne va pas tarder à déployer ses ailes, à relever la tête.
Fig.98 : Proposition architecturale personnelle. Source : Plan réalisé par moimême.
Fig.99 : Transposition du concept en architecture. Source : Réalisé par moimême.
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Fig.100 : Image de synthèse des volumes du projet . Source : Image réalisée par moi-même.
L’idée de base du projet est de réconcilier l’homme avec la nature qui l’entoure. La parcelle est alors retravaillée de façon à faire cohabiter les trois symboliques du site: le bâti de l’homme, l’eau des failles hydriques des Cerros orientales et les arbres de la forêt offrant ainsi trois ambiances - minérale, végétale et aquatique - à travers lesquelles l’homme pourra évoluer à sa guise. Les lignes de force du site sont générées par la volumétrie des bâtiments. Le chaos urbain et l’absence totale de logique dans le tissu urbain existant m’a permis de jouer avec mon volume et de le transformer en sculpture abritant les besoins de l’homme. Comme dans tous les marchés, chaque type d’aliments correspond à un secteur de vente. Il en est de même ici, chaque module accueille un type de produit. La parcelle abrite dix modules, sept sont destinés aux fleurs, fruits, légumes, poisson, viande, grains et œufs, divers. Les trois autres comprennent respectivement une garderie qui pourra être utilisée aussi bien par les clients que par les marchands, un atelier visant à la formation professionnelle dans la découpe de viande et un centre de traitement des déchets du marché avec un système de ramassage et de tri adapté aux types de déchet. La relative complexité du traitement au sol et la plasticité du volume qui s’affirme avec force, m’ont entraîné à le répéter de manière identique plutôt que de créer quelque chose de nouveau à chaque fois. Le bâtiment devient alors une référence dans la ville et l’excentricité des volumes cherche à donner un sentiment de fierté à la population résident aux alentours.
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Fig.101 : Image de synthèse du projet . Source : Image réalisée par moi-même.
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Fig.102 : Maquette de site personnelle. Source : Réalisée par moimême.
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Fig.103 : Maquette d’un module de marché. Source : Réalisée par moimême.
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5.
CONCLUSION
Les propositions urbanistique et architecturale ont été faites à Bogota dans le cadre de l’atelier d’architecture il y a plus d’un an. Avec un peu de recul, plusieurs remarques me viennent à l’esprit. Tout d’abord, comme je l’ai dit, le projet était divisé en trois parties: la phase d’analyse, la phase de proposition urbanistique et la phase de proposition architecturale. Durant la phase d’analyse, qui s’est étalée sur la moitié du calendrier du projet, nous avons travaillé à plusieurs échelles. Du macro au micro, nous avons débuté par la localité d’Usaquén avant de nous concentrer sur l’UPZ, le quartier, puis finalement la parcelle. En comparaison avec la méthode de LociSaint-Luc-Bruxelles où la phase d’analyse ne dure que très peu de temps, j’ai d’abord été un peu frustré de devoir attendre deux mois pour rentrer dans le vif du sujet. Mais finalement, cette étape s’est avérée obligatoire car Bruxelles ne connait certainement pas les même problèmes sociaux et urbanistiques que ceux de Bogota. Aussi, avec du recul je me rends compte maintenant que ces deux mois étaient le minimum indispensable pour comprendre les mécanismes de formation des quartiers informels de Bogota. Je peux même dire aujourd’hui que le travail effectué en atelier ne m’a fait prendre conscience que de la partie émergée de l’iceberg. En effet, c’est en faisant ce mémoire que j’ai pleinement pris conscience de la complexité du phénomène. Il aurait fallu commencer par travailler à l’échelle métropolitaine, remonter dans le temps et aborder les thèmes politique, géographique et socio-culturel qui ont forgé ce pays pour appréhender de manière générale la croissance urbaine de Bogota et, être en mesure de faire à plus petite échelle une proposition plus réaliste. Je viens de mettre ici le doigt sur un des éléments qui m’ont poussé à faire ces études : il s’agit de l’aspect multi-dimensionnel de l’architecture. C’est le fait de devoir parfois, et c’est exactement le cas ici, faire appel à l’histoire, la sociologie, la politique pour comprendre un phénomène dans sa globalité et ensuite déterminer quelle proposition architecturale sera la plus pertinente pour panser les plaies d’une ville malade. Cette étape me semble maintenant essentielle, d’autant plus pour moi, qui n’ai pas grandi là-bas et qui ignorais tout du fonctionnement de la société bogotaine et colombienne, de la hiérarchisation des classes socio-économique, de ce qu’est là-bas un pauvre ou encore de l’existence de processus de légalisation des quartiers clandestins. D’ailleurs, l’expérience était aussi très instructive pour les étudiants colombiens, qui viennent tous de classes sociales relativement aisées et qui n’avaient jamais réfléchi à cette problématique. La méthode adoptée par le professeur d’atelier Emilio San Miguel est la même que celle du POT, nous préparant ainsi le mieux possible à relever le défi dans le monde professionnel. Défi d’envergure, puisque c’est un des plus graves problèmes qui rongent encore aujourd’hui non seulement la capitale colombienne mais aussi la plupart des villes de Colombie, de toute l’Amérique du Sud et centrale et même du monde. Je pense notamment aux pays sous-développés ou en voie de développement en Afrique ou en Asie. Notre proposition urbanistique est, à mon avis, non dénuée de sens et de sensibilité. Les solutions proposées sont relativement réalistes pour la plupart et aideraient probablement à développer le secteur sur la bonne voie, secteur qui de toute façon ne fait pas l’objet d’une attention particulière même si près de 80% de celui-ci est en voie de légalisation. La politique d’urbanisme de la mairie est davantage portée sur la périphérie ouest et sud où l’enjeu est de parvenir à freiner voire éliminer l’urbanisation illégale qui pousse la ville à s’étendre davantage. Evidemment, c’est une proposition qui n’est pas réalisable à court terme, ni à moyen terme mais à long terme. Même si la concrétisation des idées sur la mobilité ou l’accessibilité pourrait se faire dans le court terme, c’est surtout au niveau social que l’interrogation demeure. Les liens sociaux entre les communautés vont-ils se resserrer? Le dispositif d’équipements mis
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en place aura-t-il un effet régulateur sur les violences observées, sur le taux de criminalité, de scolarisation, sur la conscience écologique des habitants? L’idée était en tout cas, d’apporter une petite pierre à l’édifice. Si même les acteurs officiels chargés de régler le problème n’y sont pas parvenus, je doute que ma proposition soit la solution au problème. Beaucoup plus de paramètres doivent être pris en considération pour que l’étude soit complète. Même si l’aspect matériel semble pouvoir être réalisable (état des routes, transport en commun, mise en place d’un réseau d’équipements pour le secteur), c’est changer les mentalités et la manière de vivre qui semble être le plus gros défi dans une ville où les inégalités sont la source d’importants conflits sociaux. Enfin, avoir choisi de développer une place de marché est maintenant un peu plus discutable. Même si l’idée de rassembler les gens de tous les horizons sociaux était honorable, je doute que cela puisse vraiment se réaliser. J’ai en effet oublié de prendre en compte une composante sociétale essentielle qui m’aurait arrêté dans mon choix. Je suis parti, malgré moi, du concept de marché européen, c’est-à-dire de marché ou se côtoient toutes les classes sociales alors que ce n’est pas du tout le cas en Colombie. Le marché est avant tout utilisé par les personnes défavorisées, les pauvres. À partir du moment où son salaire le lui permet, quelqu’un de classe sociale plus élevée ira faire ses courses dans un supermarché. Ironie du sort, alors que nous fuyons les supermarchés en quête de produits de qualité que l’on retrouve sur nos places de marchés, les Colombiens préfèrent aller au supermarché, ce qui témoigne d’une certaine aisance financière. Ce mémoire m’a permis d’approfondir et de compléter ce que j’ai pu apprendre lors de mon séjour à Bogota. Même si je ne referai peut-être pas la même proposition architecturale avec le recul que j’ai maintenant, j’ai été heureux d’avoir pu aborder cette problématique à plusieurs reprises. Si l’on veut résumer le problème d’urbanisation illégale de Bogota, je dirais que c’est le contexte politique violent dans lequel a été plongée la Colombie pendant plus de trente ans qui a été le premier facteur déclencheur de l’explosion démographique qu’a connue Bogota à partir des années 1960. L’absence de politique d’urbanisme pour le développement futur de la ville a été le second élément qui, au lieu d’amortir le phénomène, a transformé la ville en chaos urbain. En plus d’être dans l’incapacité d’accueillir un flux d’émigrants toujours plus important, la ville a adopté une politique de l’autruche concernant l’existence puis le développement des premiers quartiers illégaux. Face à un sérieux déficit en logements et au prix de l’immobilier trop élevé, les nouveaux arrivants n’ont pas eu d’autre choix que de se tourner vers l’habitat informel, seule alternative possible à l’époque. En quête de terrains vierges pour y bâtir leur habitation de fortune, ces déplacés politiques se sont alors excentrés en périphéries urbaine, en zone rurale, là où on ne viendrait pas les déloger. Ils ont vu juste puisque, faute de lois répressives et de politique visant à freiner cette urbanisation clandestine, ces quartiers ont eu tendance à se consolider. Bogota a fini par se fragmenter : il y avait (et il y a toujours!) la ville formelle et la ville informelle, mais lorsque la mairie s’est rendu compte de l’ampleur du phénomène, il était déjà bien trop tard et l’urbanisation illégale était déjà ancrée dans les esprits depuis plusieurs générations. Après plusieurs tentatives ratées, ce n’est que dans les années 2000, que Bogota créa Metrovivienda, un organisme capable d’offrir un logement abordable aux plus démunis. Grâce à Metrovivienda, la ville aperçoit enfin la lumière au bout du tunnel et arrive de plus en plus à faire face à son déficit de logements. Parallèlement à cela, le dernier plan d’urbanisme en date, le POT, paru aussi dans les années 2000, autorise des procédures administratives spéciales pour légaliser les quartiers construits illégalement et freine l’urbanisation illégale par une série de lois répressives.
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J’ai choisi dans ce mémoire de ne m’intéresser qu’à un élément problématique de Bogota pour tenter, en tant qu’étudiant, d’y apporter une solution. Mais la capitale colombienne est rongée par bien d’autres problèmes. En premier lieu, la mauvaise gestion de la mobilité paralyse le plus la ville mais il y a aussi la violence, les inégalités sociales qui restent des problèmes à résoudre aujourd’hui. L’écologie et le développement durable sont depuis peu rentrés dans les préoccupations des têtes pensantes bogotaine. A titre comparatif, Medellin la deuxième ville économique du pays, est confrontée aux mêmes problèmes mais celle-ci s’est réveillée bien avant sa capitale et a choisi de concentrer ses efforts sur la mobilité et les équipements urbains. Medellin a résolu son problème de mobilité par la création d’un réseau de transport en commun efficace qui couvre aussi bien les quartiers formels qu’informels. C’est ainsi qu’un métro aérien a vu le jour, mais aussi un service de télécabines qui relient les quartiers informels de la montagne au centre urbain. De plus, la politique d’urbanisme portant également sur la création de nombreux équipements urbains ont fait de Medellin une ville soucieuse de ses citadins, mais aussi une ville culturelle où il fait bon vivre, et où il est agréable de se promener. Pendant ce temps-là à Bogota, le scandale du cartel de contratacion éclate en 2010, impliquant le maire Samuel Moreno Rojas et l’obligeant à démissionner. Il s’agit là d’un des plus gros scandales politique qu’a connus le pays: Rojas, membre de la famille de l’ex-président Gustavo Rojas Pinilla, ainsi que d’autres personnalités politiques sont accusés d’avoir détourné les fonds des travaux du Transmilenio pour près de 521 millions de dollars, entraînant par là même un retard des travaux de plus de deux ans. Les travaux, qui ne devaient paralyser le cœur de Bogota que quelque temps, s’éternisent, provoquant fureur et honte des citadins sur leurs gouvernants. Malgré les sérieuses difficultés que rencontrent Bogota au niveau de son urbanisme, la ville reste soucieuse de son patrimoine architectural. Il existe en effet, une grande diversité de styles architecturaux disséminés dans toute la capitale. L’architecture colonial, par exemple, est encore très présente dans certains quartiers d’Usaquén ou de la Candelaria. Il est aussi possible de traverser des quartiers entiers abritant de majestueuses demeures appartenant au style britannique du début du XXe siècle. Le centre, quant à lui, est plus significatif du modernisme. Du reste, la capitale andine est dotée d’un impressionnant héritage culturel. En effet, la ville propose 45 théâtres, 70 musées en tous genre et tout autant de galeries d’art. En 1892, l’humaniste espagnol Mercelino Menendez Pelayo la qualifiera même d’Athènes d’Amérique du Sud tant la culture littéraire bogotaine y était importante. Il y a quelques années, en 2007, l’UNESCO lui décerne le titre de Capitale mondiale du livre prouvant ainsi que même après un siècle, Bogota continue de briller sur le plan culturel. A la première impression, Bogota est une ville qui fait peur par son gigantisme et qui déçoit par sa laideur mais une fois apprivoisée, on s’aperçoit que sa situation géographique la rend unique et que l’hospitalité des bogotains la rend charmante et accueillante ; si bien qu’on y resterait bien quelques années de plus.
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