TFE - Réhabilitation durable du patrimoine industriel

Page 1

Comment réhabiliter le patrimoine industriel lié à la voie d’eau pour qu’il retrouve sa fonction productive ? Mise en place d’une hypothèse méthodologique sur le Canal de Willebroeck

Alix Errembault LBARC 2237 – Atelier de recherche TFE, Héritage


-2-


TABLE DES MATIÈRES Introduction Chapitre 1 – Filières productives et leurs dispositifs architecturaux dans le territoire du canal à Bruxelles : contexte et développement 1.1 Ressources naturelles au service des filières productives dans le bassin de l’Escaut 1.1.1 Hydrographie 1.1.2 Pédologie 1.1.3 Géologie 1.2 Dispositifs architecturaux au service des filières productives sur le Canal de Bruxelles 1.2.1 Brève histoire de l’industrie le long du Canal 1.2.2 Familistère de Godin : métal (fonte) 1.2.3 Brasserie de la Marine : agriculture (orge) 1.2.4 Quai Demets STIB : charbon 1.2.5 Filature d’Aoust : laine 1.2.6 Quai de l’industrie : matériaux de construction 1.2.7 Les cokeries du Marly : gaz et chimie Conclusion : ressources naturelles locales et infrastructures industrielles au service d’une nouvelle production à Bruxelles ?

Chapitre 2 – Bruxelles, production et canal état des lieux 2.1 Évolution de la logique économique du secteur de la construction 2.1.1 logique de croissance : économie linéaire 2.1.2 logique de soutenabilité : économie circulaire 2.2 Stratégies liées à la renaissance de la productivité le long du canal 2.2.1 Programme Régional en Économie Circulaire 2.2.2 Stratégie Rénovation 2.2.3 A Good City has Industry -3-


2.3 Le territoire du canal dans la politique urbaine régionale 2.3.1 Plan Canal 2.3.2 Plan de qualité paysagère et urbanistique, BKP 2.4 État actuel de la production lié au canal à Bruxelles : exemples significatifs 2.4.1 Bâtiments ne profitant plus de la voie d’eau a. Brasserie de la Marine b. Coop 2.4.2 Industries traditionnelles encore liées au canal c. Meunerie Bruxelloise d. Inter-béton 2.4.3 Site d’activités productives et d’économie circulaire e. Recypark f. Marly Conclusion : vers un déploiement de l’économie circulaire de la construction ?

Chapitre 3 : Le patrimoine industriel lié à la voie d’eau comme levier de l’économie circulaire de la construction

3.1 Gestion des flux à Bruxelles et le long du canal 3.1.1 Les flux sur le territoire de Bruxelles et du canal

a. voie fluviale b. voie viaire c. voie ferrée d. voie cyclable

3.1.2 Les flux dans l’espace productif 3.2 Dispositifs architecturaux 3.2.1 Structure : espaces polyvalents 3.2.2 Patrimoine : espaces spécifiques 3.2.3 Activités complémentaires : forme de circularité 3.2.4 Manutention : espaces des cours 3.3 Diagnostic matériel du bâitment industriel -4-


3.4 Proposition d’un programme productif 3.5 La brasserie de la Marine : test méthodologique 3.5.1. Analyse historique [Catalogue photographique] 3.5.2 Gestion des flux a. sur le territoire b. dans l’espace productif 3.5.3 Dispositifs architecturaux, structurels et fonctionnels du bâtiment industriel a. Structure : espaces polyvalents b. Patrimoine : espaces spécifiques c. Activités complémentaires : forme de circularité d. Manutention : typologie des cours 3.5.4 Diagnostic matériel du bâtiment industriel 3.5.5 Proposition d’un programme productif

Conclusion - Ouverture prospective : hypothèse pour la réhabilitation du patrimoine industriel Remerciements Bibliographie

-5-


-6-


Introduction La terre nous offre une multitude de ressources et le défis actuel est d’en prendre soin pour ne pas les épuiser. A l’échelle mondiale, en 2014, on estimait extraire 60 milliards de tonnes de matière par an et accumuler 12 milliards de tonnes de déchet.1 En effet, depuis que l’homme s’est sédentarisé, la société dans laquelle il évolue n’a cessé de se développer. Les villes se densifient, la nature est envahie et le citoyen perd petit à petit le contrôle de son environnement. Pourtant, à une époque où la démographie croît continuellement et où la consommation est devenue une religion, il est important de se demander si, aujourd’hui plus que jamais, l’homme ne devrait pas être acteur de son milieu ? « Il faut changer la façon dont les gens s’impliquent là où ils vivent ».2 Il est donc urgent de changer nos modes de fonctionnement et de mettre la société de surconsommation sur pause au profit d’un nouveau système : l’économie circulaire. Cette dernière est « un système économique et industriel visant à maintenir les produits, leurs composants et les matériaux en circulation le plus longtemps possible à l’intérieur du système, tout en veillant à garantir la qualité de leur utilisation ».3 Concrètement, nous allons voir comment notre société bruxelloise et plus particulièrement le territoire du canal de Willebroeck et Charleroi pourrait s’adapter à ce système productif et autonome. Ce territoire a été spécifiquement choisi car c’est le long de cette voie d’eau que Bruxelles a connu sa plus grande expansion économique lors de la révolution industrielle aux 19ème et 20ème siècles. Cependant, depuis la désindustrialisation dans les années 70, ces infrastructures industrielles sont devenues désuètes dans le paysage urbain. Elles sont des témoins fascinants de la production urbaine intensive mais ne sont plus exploitées. Il serait donc intéressant de voir comment ce patrimoine industriel qui nous est conféré le long du canal pourrait être revalorisé et se réadapter à un tel système de circularité et de production. La question qui se pose alors est : « comment réhabiliter le patrimoine industriel lié à la voie d’eau à Bruxelles pour qu’il retrouve sa fonction productive ? ».

1 Delmée, H. (2017). « Un vade-mecum pour la conception à partir de matériaux de réemploi ». Travail de fin d’étude, Master d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme (LOCI – UCL). p.7 2 Dion C., Laurent M. (2015), Tuddenham R. dans le film : « Demain », 18’20 3 Belgium.be, « Economie circulaire » -7-


Notre propos s’articulera en 3 grandes parties chronologiques pour tenter de répondre à cette question de réhabilitation circulaire. Le premier chapitre discutera de l’évolution de l’industrie au fil du temps et de sa production intimement liée aux ressources naturelles présentes dans le bassin de l’Escaut. Ces ressources sont hydrographiques, pédologiques ou géologiques. Elles sont composées de nombreux éléments riches et fertiles favorisant différentes filières de production bien précises. Puis nous zoomerons sur le canal de Willebroeck et Charleroi et retracerons brièvement son histoire. Construit à partir du 16ème siècle il a permis de connecter des points stratégiques sur le territoire et de promouvoir la productivité. Par la suite, le canal s’est industrialisé pour gérer la transformation des matières premières extraites dans le bassin. Des dispositifs architecturaux spécifiques ont ainsi été mis en place au service des filières le long de la voie d’eau. Nous les analyserons par le biais de 6 exemples d’industries dont la production dépend directement des matières premières principales (métal, matière agricole, charbon, laine, matériaux de construction et molécules chimiques) du bassin de l’Escaut. Le second chapitre posera la question des besoins de notre société, afin de réhabiliter ce patrimoine dans une optique de ville productive et autonome. Ainsi, ce chapitre analysera de manière plus théorique l’état de la production à Bruxelles et spécifiquement le long du canal. La capitale fait face aujourd’hui à des enjeux démographiques, économiques et environnementaux importants, sollicitant énormément le domaine de la construction. Pour les pallier, elle propose des ambitions et des stratégies bien précises favorisant la renaissance de la production urbaine : le ‘Programme Régional en économie circulaire’, la ‘Stratégie de rénovation’ ainsi qu’une exposition qui s’est déroulée en 2016, ‘A good city has industry’. Dans la même logique productive et circulaire, deux stratégies liées directement au territoire du canal ont été établies : le Plan Canal (2011) et le Plan de qualité paysagère et urbanistique (2016). Finalement, nous réaliserons un état des lieux non-exhaustif des industries encore présentes le long du canal. Trois typologies d’industries se distinguent aujourd’hui : les bâtiments ne profitant plus de la voie d’eau, les industries traditionnelles encore liées au canal et les sites d’activités productives et d’économie circulaire. Chacune sera présentée par deux exemples emblématiques. Ces stratégies et cette analyse personnelle permettrons de comprendre que l’économie circulaire est au centre d’un renouveau sociétal. Le secteur de la construction étant énormément touché par ces transitions proposera un nouveau système afin de mieux gérer ses ressources : le réemploi.

-8-


Le dernier chapitre proposera une hypothèse méthodologique de réhabilitation pour le patrimoine industriel lié à la voie d’eau, basé sur les filières de réemploi. Ce système de rénovation se déroulera en 4 étapes : analyse des flux à Bruxelles (bateau, camion, tram et vélo), étude des dispositifs architecturaux de l’industrie (structure, patrimoine spécifique, activités complémentaires et manutention), diagnostic matériel du bâtiment et proposition d’un programme productif. Finalement, nous testerons cette méthode sur un bâtiment emblématique le long du canal : la brasserie de la Marine.

-9-


- 10 -


CHAPITRE 1 – Filières productives et leurs dispositifs architecturaux dans le territoire du canal à Bruxelles : contexte et développement « La production est l’action d’un sujet qui transforme une matière première pour faire exister un nouvel objet. » 1. Depuis sa naissance, l’homme produit pour subvenir à ses besoins essentiels, se nourrir et s’abriter, mais également pour améliorer son niveau de vie. Pour se faire, il puise les ressources naturelles que la terre lui confère, les transforme puis les consomme. Ces moyens de production ont énormément évolué au cours du temps, à commencer par l’amélioration constante des moyens de transformation de la matière première. Cependant, aujourd’hui une nouvelle problématique nait car les ressources naturelles de la terre ne sont pas infinies et commencent à s’épuiser. Plus précisément, nous allons nous intéresser dans ce chapitre au contexte et au développement de la production dans le bassin de l’Escaut au 19ème siècle. Nous analyserons tout d’abord les matières premières dont l’homme disposait sur ce territoire et la manière dont il la transformait. Puis, nous verrons de manière plus précise, les dispositifs architecturaux qu’il a mis en place, le long du canal de Willebroeck et Charleroi à Bruxelles, pour répondre à cette production massive. L’analyse permettra de mieux comprendre le patrimoine industriel dont nous héritons aujourd’hui le long de la voie d’eau bruxelloise, afin de proposer par la suite une forme de réhabilitation en toute connaissance de cause.

1

CNRTL, Production. - 11 -


Mer du Nord

2 1

3

l’Escaut

Saint-Quentin Bassin Houiller Industries sidérurgiques Industries chimiques

Figure 1 - Bassin de l’Escaut : industries liées à l’eau - 12 -


1.1 Ressources naturelles au service des filières productives dans le bassin de l’Escaut La terre est composée d’une multitude de ressources naturelles et l’homme les exploite pour vivre, le bassin de l’Escaut en est un bel exemple. En effet, il est depuis plusieurs siècles, une ressource importante en eau et en matières premières pour la production, les terres y sont fertiles et présentent de nombreuses qualités tant en surface que souterraines. L’étude de la composition de ces sols d’un point de vue hydrographique, pédologique et géologique, nous permettra donc de comprendre de manière concrète pourquoi ce bassin est à l’origine d’un tel engouement économique et productif. Ainsi, nous allons dans un premier temps analyser et référencer les différentes ressources naturelles présentes dans le bassin, à savoir l’eau, la composition des sols et celle des sous-sols. Puis, nous verrons ce qu’elles favorisent comme filières de production et comme industries enrichissant le territoire.

1.1.1 Hydrographie Tout d’abord, le bassin de l’Escaut est une ressource en eau non négligeable. En effet, il s’étend sur 21 863 km² dans trois Etats : il prend sa source en France (sur le plateau de Saint-Quentin), traverse la Belgique et se jette dans la mer du Nord aux Pays-Bas. Son fleuve principal est l’Escaut, il fait 350 km dont 140 km ont été canalisés et comportent plus de 250 barrages et écluses. Ses grands affluents sont l’Erclin, la Selle, l’Ecaillon (dans le haut Escaut français) et la Haine, la Scarpe, la Lys, la Dendre et le Rupel (sur le bas Escaut belge). La topographie du bassin alluvial est assez lisse, sa source se situe à 95m de haut et son sommet culmine à 212 m, favorisant l’implantation facile et rapide de sites de production. Ce relief essentiellement plat confère au district de l’Escaut des rivières du type basses terres avec des vallées larges et des débits et écoulements réduits.2 En effet, le débit d’eau dans le bassin de l’Escaut n’est pas très élevé, environ 10 millions de m³ d’eau se jettent dans la mer chaque jour.3 Le bassin de l’Escaut présente donc un paysage varié, avec des alternances de bas-plateaux et de plaines parsemées de collines, une couverture boisée, limitée et discontinue.

2 3

Geocaching.com « Source de l’Escaut (vers un fleuve international) » (2015). isc-cie.org « L’Escaut en un clin d’œil » - 13 -


(1) Forges de Clabecq entre le Canal de Charleroi et la Sennette

(2) Site minier Bois-du-Luc - nettoyage du charbon à l’eau

(3) Industrie chimique de Floreffe le long de l’eau - laboratoire

Figure 2 - l’industrie dépendante de l’eau : sidérurgie - charbonnage - chimie

moulin à eau

vanne

écluses

Figure 3 - ourvage hydrauliques - 14 -

ascenceur à bâteaux


Cette ressource d’eau, pleine de qualités, a joué un rôle déterminant dans le développement économique et politique de la Flandres, du Brabant, du Hainaut et du Nord de la France depuis le Moyen Age. Entre voie de transport, source d’eau (potable ou non), force motrice, etc., elle recouvre une multitudes de fonctions indispensables, rendant sa proximité primordiale pour le développement de l’homme. Le bassin de l’Escaut a été énormément exploité au cours des siècles, pour devenir un centre productif très important en Europe. La présence d’eau a permis la construction de sites de production importants tels que l’industrie sidérurgique, du charbon et de la chimie (fig 2). Nées respectivement de la présence de gisement de fer, de gisement houiller, ou encore du sel, ces industries nécessitent des ressources en eau abondantes. Néanmoins, leur mode d’alimentation sont totalement différents : la sidérurgie et la chimie (géographiquement dispersées) prélèvent l’eau dont elles ont besoin dans les cours d’eau tandis que l’industrie du charbon (plus localisée) s’alimente directement dans la nappe phréatique. Ces usines se sont donc installées dans les vallées, là où se trouvait l’eau et/ou à proximité des mines. Outre le transport et sa force motrice, l’eau a différents usages bien précis dans ces 3 domaines de productions. Dans la sidérurgie, l’eau est utilisée pour : le refroidissement des appareils, l’extinction de produits incandescents, l’épuration de gaz et de fumées, la production de vapeur, pour sa force motrice, les eaux domestiques, … Pour ce qui est de la chimie, l’eau sert comme eau de process et comme eau de réfrigération mais est également souvent utilisée sous forme de vapeur. Finalement, dans l’industrie du charbon, l’eau est utilisée pour le lavage du charbon, le dépoussiérage des fumées de chaudière, le refroidissement ainsi que la fabrication de vapeur. Dans les cokeries les usages de l’eau sont similaires à ceux de la sidérurgie, à savoir le refroidissement des circuits et l’extinction du coke. 4 En ce qui concerne plus particulièrement les voies d’eau qui constituent le bassin de l’Escaut, elles ont été dotées de nombreux ouvrages hydrauliques : moulins, vannages, écluses, viviers, ascenseur à bateaux, … (fig. 3) afin d’alimenter toutes les activités liées à l’eau et de relier au mieux les sites industriels du bassin. Les cours d’eau constituaient ainsi des artères économiques structurantes bordées par les métiers d’eau qui se développaient sur ses rives (meuniers, blanchisseurs, brasseurs, tanneurs, etc.) et, avant tout, une voie de navigation. 5 Michel R. (1984). « L’eau et l’industrie en Lorraine. Les exemples des industries sidérurgiques et des industries du charbon ». In: Revue Géographique de l’Est. Tome 24, N°2-3. Eaux continentales et industries. p. 133-148. 5 De Rive BL (1835). « Précis historique et statistique des canaux et rivières navigables de la Belgique et d’une partie de la France », Ed : Leroux, p.21 et suivantes 4

- 15 -


Mer du Nord

1 2

Bruxelles

3

l’Escaut

sol alluviaux sableux limono-caillouteux sablo-limoneux limoneux agriculture verreries craie sable blanc

Figure 4 - Bassin de l’Escaut : industries liées aux sols de surface - 16 -


1.1.2 Pédologie6 Une partie importante de la production sur le territoire du bassin de l’Escaut est l’agriculture et l’exploitation des sols en surface. En effet, le district hydrographique international (DHI) de l’Escaut fait 36 416 km², c’est l’un des plus petit d’Europe mais c’est également l’un des plus peuplés et intensivement cultivés. Aujourd’hui, il draine et irrigue un territoire habité par 11 millions d’Européens, le bâti y représente 13% de la superficie totale du district. De plus, il compte 22 077 km² de surface agricole (61 % de la superficie totale du district), 69 336 exploitations agricoles (± 2 exploitations agricoles par km²). L’élevage y est fort présent dans le nord du district et les labours dans le sud. Cette agriculture fulgurante est due à la richesse et à la fertilité importante des sols dans le bassin. Plus précisément, on y retrouve 5 types de sols majeurs : les sols alluviaux (7%) à proximité des voies d’eau, les sols sableux et sablo-limoneux (6%) en basse Belgique, les sols limono-caillouteux (4%) en haute Belgique et les sols limoneux (56%) et sablo-limoneux (24%) en moyenne Belgique. 7 Chaque sol à des caractéristiques bien spécifiques avec des avantages et des inconvénients. En ce qui concerne les sols alluviaux, ils sont très lacuneux, bien aérés et bien hydratés, donc souvent très fertiles. Ensuite, les sols sableux sont peu fertiles car ils ne retiennent ni l’eau ni les éléments nutritifs. Les sols limono-caillouteux ont quant à eux, plusieurs variantes (acides ou calcaires ; épais à superficiels) ils sont souvent affectés aux cultures, aux pâturages ou au boisement suivant leur épaisseur, leur texture, leur drainage et leur relief.8 Pour ce qui est des sols limoneux et sablo-limoneux qui recouvrent une partie importante du bassin de l’Escaut, ils sont riches et fertiles cependant, ils ne laissent pas bien passer l’eau, sont fragiles et s’appauvrissent au fil des ans. Ils sont donc affectés essentiellement aux grandes cultures. Ainsi, chaque type de sol est une ressource naturelle favorisant une filière de production bien particulière. Dans le bassin de l’Escaut, la majeure partie de la surface du bassin est consacrée aux prairies et aux cultures (72%), puis aux zones urbaines (10%) et diverses (11%) et finalement aux forêts (7%). En effet, les sols limoneux et sablo-limoneux, qui représentent le ¾ de la surface du bassin, sont très fertiles et favorisent la production intensive des cultures. 6

Pédologie : étude scientifique des sols en surface.[Le Petit Robert (2020)] Ministère de la Région wallonne (2005) « District Hydrographique International de l’Escaut, Tome I : État des lieux en Région wallonne » p.7 8 Etat.environnement.wallonie.be (2018) « Principaux types de sols ». 7

- 17 -


Figure 5 - (1) banlieue de Dunkerque, espace habitable, agricole et industries

Figure 6 - (2) industrie du textile à Gand, pelotes de laines

Figure 7 - (3) verrerie de la Louvière - 18 -


Plus précisément, cette agriculture comprend 4 types d’exploitations majeurs : les céréales, les prairies permanentes, les betteraves sucrières et les cultures fourragères. De vastes paysages cultivés et très organisés, parsemés de bâtiments abritant la matière première et sa transformation, se sont ainsi dessinés (fig. 5). Ces bâtiments de productions étaient de toutes sortes : moulins à vent, fermes carrées, silos à grains, sucreries, tanneries, entrepôts, … Par exemple, la région de Leuven comptait de nombreuses brasseries car ses terres fertiles permettaient la culture de l’orge pour la fabrication de la bière. L’avantage de ces sites de production est qu’ils étaient géographiquement plus libres et pouvaient s’implanter à de nombreux endroits tant que la terre y est fertile. On retrouve également une industrie importante en Flandres orientale, celle du textile avec l’industrie cotonnière et linière (3% de la surface est occupée par cette industrie). En effet, dans les alentours de Gand poussent, sur des terres fertiles, du lin. Des petites villes comme Wetteren, Termonde, Saint-Nicolas, Renaix, etc., possédaient des filatures et des tissages de coton où l’on fabriquait des cretonnes, des cotonnettes, des coutils et des satins. (fig. 6) A Gand et dans la région de Courtrai-Izegem, se fabriquaient également les fines toiles de lin, les batistes et les linons. 9 En parallèle, les terres moins fertiles telles que les sols sableux, sont exploités différemment, ils sont souvent boisés ou servent de pâturages mais ont également d’autres vertus intéressantes pour la confection de matériaux de construction.10 Par exemple, Zeebrugge, Anvers ou encore la Louvière, avaient de grandes verreries nécessitant beaucoup de sable comme matière première (fig. 7). En effet, la verrerie était une industrie très importante en Belgique, elle occupait 23 000 ouvriers et fournissait ¼ de la production mondiale. Le long de la Nette se trouve une autre forme de sable, le précieux ‘sable blanc’, permettant le façonnage d’enduits de constructions. Pareillement, dans la région de Mons, le sol était composé de craie servant également à la fabrication d’enduits et de peintures. Ces formes d’industries étaient en général plus conséquentes et plus localisée car elles dépendent directement de leur ressource en matière première. Ainsi, les terres étaient rentabilisées au maximum afin de mettre à profit les riches ressources naturelles du territoire de l’Escaut. De nombreuses filières industrielles en ont découlé, rendant le bassin très productif et en grande partie autonome avec son importante agriculture. 9

Histoire-des-belges.be « Industrie ». isc-cie.org « L’Escaut en un clin d’œil »

10

- 19 -


Mer du Nord

2

1 3

l’Escaut bassin houiller industrie sidérurgique industrie du ciment céramique petit granit carrière d’argile fours à chaux grès

Figure 8 - Bassin de l’Escaut : industries extractives - 20 -


1.1.3 Géologie Dans le bassin de l’Escaut, on retrouve de nombreuses ressources souterraines exploitées par l’homme telles que l’argile, la craie, le sable blanc, le calcaire, … mais les 3 plus importantes étaient le charbon, le métal et la pierre.11 Chacune de ses matières premières permettaient la confections de nombreux matériaux indispensables à la construction de la société. Cette industrie extractive très présente dans le bassin, dépend de facteurs très divers, tels que la richesse et l’exploitabilité des gisements, la situation géographique par rapport aux grands centres urbains et industriels, la nature des besoins, la qualité de la main-d’œuvre, etc.12 Chaque ressource naturelle était donc exploitée, à commencer par le charbon dans la région de Charleroi et la Louvière (et le long de la Meuse). Il donna naissance aux premières machines et locomotives à vapeur, augmentant la production industrielle et dynamisant les échanges. Il alimentait les premiers éclairages publics, révolutionnant la salubrité urbaine et surtout, il produisait l’électricité.13 A côté des mines de charbon se trouvaient les mines de fer, ce métal était utilisé dans de nombreux domaines tels que la construction, les réseaux ferroviaires, la forge, … Plus au nord du bassin de l’Escaut, dans la vallée de la Senne se trouvaient plusieurs carrières de pierres, telles que des carrières de porphyre à Quenast, de petit granite à Ecaussine, de pavé de porphyrite à Lessines ou encore de pierre bleue à Soignies. Ces pierres ont permis de construire nos villes : maisons, routes, digues, … 14 L’industrie de la fabrication de matériaux de construction était également fort présente dans le bassin de l’Escaut, elle représentait 13% de la production en Belgique. Par ailleurs, des carrières d’argile, parsemées tout le long de l’Escaut et ses affluents, permettaient également la fabrication de nombreux matériaux de construction tels que les briques, la céramique et les faïences réfractaires. Toujours dans la construction, près d’Antoing, de Tournai ou de Mons, se trouvait des industries de ciment et de chaux. En effet, ces régions avaient de riches gisements de calcaire assurant l’approvisionnement en matières premières nécessaires à la fabrication du clinker et donc du ciment.15 11

Histoire-des-belges.be « Industrie ». Gulinck M. (1958). « Carrières ». Comité national de géographie commission de l’atlas national. Atlas de Belgique, planche 39. p.3-4 13 Amis.de.la.Terre.fr. « L’Europe et le charbon un air de 19e siècle ». 14 Schreurs J-P. Aardrijkskunde « Groeven van vaste gesteenten in midden- en zuid-belgie ». 15 Febelcem.be. « Présentation du secteur du ciment ». 12

- 21 -


Figure 9 - (1) carrières de Quenast, porphyre

Figure 10 - (2) Extraction d’argile réfractaire dans la carrière d’argile

Figure 11 - (3) Carrière de terre et de ciment de Desvres - 22 -


Ainsi, à partir du 19ème siècle, plusieurs conurbations et de nombreuses villes de diverses grandeurs le long du bassin de l’Escaut, témoignaient déjà d’une forte industrialisation.16 En conclusion, la richesse des ressources du bassin de l’Escaut a permis à la Belgique et au Nord de la France de développer une production considérable et de créer une immense prospérité durant plusieurs siècles. Néanmoins, aujourd’hui, la délocalisation des industries d’extraction et les carences en ressources naturelles laissent le territoire vide, dans un état de pollution non négligeable et économiquement vulnérable. Ainsi, il serait intéressant de tirer profit des ressources naturelles encore présentes, à savoir les voies d’eau ou encore les terres à qualités multiples afin de relancer une économie locale et intensive dans nos pays, tout en respectant les enjeux environnementaux. De plus, plusieurs ressources en matières premières pour la construction sont encore disponibles sur le territoire de l’Escaut (ex : ciment, chaux, ...), favorisant la reconstruction d’infrastructures locales pour cette nouvelle société productive.

16

Sevrin, R. (1986). « Esquisse géographique du bassin transfrontalier de l’Escaut ». Annales de Géographie, t. 95, n°529. p. 315-340. - 23 -


Vilvorde

6. cokerie du Marly 2. brasserie de la Marine

1. familistère de Godin

3. quai Demets

5. quai de l’Industrie

4. filature d’Aoust

Canal de la Senne Senne

Halle

Figure 12 - Carte des établissements indsutriels à Bruxelles 19ème siècle - 24 -


1.2 Dispositifs architecturaux au service des filières productives sur le Canal de Bruxelles Nous venons de voir que l’industrie dépend intimement des ressources naturelles qui l’entourent. Ces dernières confèrent de nombreuses matières premières, favorisant différentes filières de production très variées. Afin de répondre à ces demandes de production, des infrastructures spécifiques ont été mises en place, créant un renouveau architectural total. En effet, le territoire du canal à Bruxelles hérite d’un patrimoine unique, marqué de différents styles architecturaux (baroque italo-flamand, néo-classicisme, Art Nouveau, Art Déco, éclectisme, modernisme, …). Ce patrimoine, constitué d’ouvrages d’art spécifiquement liés à la voie d’eau et aux activités industrielles qu’il occupait, raconte l’histoire des mutations économiques, techniques et sociales à l’œuvre au cours du temps. Nous allons donc étudier ces dispositifs architecturaux mis en place le long du Canal de Willebroeck et Charleroi, afin de répondre aux demandes de production industrielles. Plus particulièrement, elle reprendra des exemples représentant six domaines industriels phares de Bruxelles, dont la production est directement liée aux matières premières du bassin de l’Escaut. Ces domaines sont la métallurgie (1), l’agriculture (2), l’utilisation de charbon (3), l’industrie du textile (4), le stockage et le traitement des matériaux de construction (5) ainsi que l’industrie chimique (6). Chaque description discutera de l’historique de l’industrie, de sa matière première, des moyens de transports mis en place pour l’import et l’export de sa production ainsi que son aspect physique et architectural. La partie du canal qui nous intéressera pour cette analyse sera le ‘Canal de le Senne’ (fig. 12). En effet, outre sa fonction logistique, le canal joue également un rôle important au niveau de la gestion des eaux de la vallée de la Senne. Il fait office de bassin d’inondation de sorte que la vallée de la Senne (et la ville de Bruxelles en particulier) soit protégée des inondations.17 Plus précisément, le canal est alimenté par la Senne au niveau de Tubize et il rejette son trop plein à la sortie de Bruxelles, de nouveau dans la Senne, à Vilvorde.

17

1010 architecture urbanism sprl (mars 2015) « La vallée partagée P.dt périphérique Nord, Zone du canal entre le Pont Van Praet et la gare de Vilvorde ». p.16 - 25 -


Escaut Anvers

Rupel

Zemst Eppegem

Malines Vilvorde Machelen

Bruxelles Drogenbos

Senne

Halle Rebecq

Naast

(1) Ressource naturelle : la voie d’eau Bassin de l’Escaut

Beersel Lot

Tubize

Soignies

(2) Productivité le long de la voie d’eau Bruxelles (11è siècle)

Anvers

Canal de Willebroeck

Malines Vilvorde Bruxelles Halle Canal de Charleroi

Braine-le-château

Soignies

Nivelles

Seneffe

Charleroi (3) Infrastructure de logisitque : le canal Canal de Willebroeck (1550) Canal de Charleroi (1830)

- 26 -

(4) Industrialisation le long du canal Bruxelles (19è siècle)


1.2.1 Brève histoire de l’industrie le long du Canal Avant de se lancer dans l’analyse des dispositifs architecturaux du canal de Willebroeck et Charleroi, il est important de savoir pourquoi et dans quelles circonstances l’industrie est née le long des voies d’eau à Bruxelles. Comme expliqué ci-avant, l’industrie s’implante à des endroits stratégiques, près des ressources naturelles favorables à la production. Dans le cas de l’industrie bruxelloise, cette ressource principale est l’eau. En effet, la Senne, sous-affluent de l’Escaut, était une voie hydrographique (1) non négligeable : son tirant d’eau était suffisamment profond, jusqu’à un certain endroit, pour être navigable. À cet endroit marécageux, au 10ème siècle, un port primitif s’est installé afin de décharger la marchandise à quai. C’est ainsi que la ville de Bruxelles a commencé à se construire en tant que plaque tournante pour le commerce (2). En amont, la Senne comptait déjà 6 moulins hydrauliques qui favorisaient encore la production dans la région. Vers 1561, le commerce maritime prend de plus en plus d’ampleur, le port se développe très rapidement et la Senne n’est plus une voie d’eau adaptée à l’exportation et l’importation de marchandises. Charles Quint décide alors d’y remédier en initiant les travaux du canal de Willebroeck (3), reliant Bruxelles à Anvers en 30km et facilitant le transport direct jusqu’à la mer. Le port servant le canal devient alors l’endroit le plus actif de la ville.18 Trois siècles plus tard, la montée progressive de l’industrie lourde dans la ville, implique une meilleure connexion (3) avec les autres villes industrielles. Le canal est ainsi prolongé en 1830, en direction de Charleroi. Finalement, le nouveau canal ainsi que l’arrivée du chemin de fer restructurent le territoire : les activités s’y réorganisent avec la création de vastes zones d’activités économiques et le développement de quartiers ouvriers. La Belgique connait alors un essor économique très important et atteint son apogée à la fin du 19ème siècle (4). Affaiblie une première fois par les 2 guerres mondiales, le début du déclin industriel se fait sentir. Et finalement, à partir des années 1970, les grands centres productifs qui s’étaient créés le long du canal se sont vus totalement désindustrialisés. En effet, les activités productives se sont progressivement transférées vers les périphéries et/ou vers d’autres continents. D’autre part, il s’agit de fermetures pures et simples des activités industrielles liées d’une part aux carences en ressources naturelles sur le territoire Belge et d’autre part à une recomposition

18

G. de Ghellinck (1998). « Le vieux port de Bruxelles, analyse de la mutation d’un espace urbain ». Travail de fin d’étude, Licencié en Architecture (I.S.A. Saint-Luc) - 27 -


Figure 13 - Vue aérienne de la rencontre du canal de Willebroeck et celui de Charleroi sousles ponts de la place Sainctelette, dans les années 1970. - 28 -


globale du tissu économique.19 Cette désindustrialisation a provoqué l’apparition des friches industrielles ainsi qu’une détérioration du bâti aux abords du canal. Cette dégénérescence matérielle s’est accompagnée d’une dégradation sociale, notamment en termes de revenu et d’emploi. Dès lors, de nombreuses initiatives à petites échelles ont été prises pour sauver ces quartiers mais, le monde étant en évolution totale, sa fonction de productivité intense n’a encore jamais été retrouvée.20 (Nous y reviendrons dans le Chapitre 2) Aujourd’hui, le paysage et les perspectives qu’offrent les alentours du canal constituent à eux seuls un patrimoine d’exception. Outre son industrialisation, l’urbanisation du territoire autour du canal a permis de créer des ensembles uniques et de valeur, tels que des places de marchés et places communales qui sont des témoins de la vie sociale, économique et politique locale.21

19

Agence de Développement Territorial (ADT) (Janvier 2009). « Bruxelles [dans] 20 ans », Cahier de l’ADT n°7, Perspective Brussel 20 Anne-Sophie VanHelder (2018). « Bruxelles ville productive ». Mémoire de fin d’étude du master de spécialisation en urbanisme de la transition, ULB 21 Agence de Développement Territorial (ADT) (Janvier 2009). « Bruxelles [dans] 20 ans », Cahier de l’ADT n°7, Perspective Brussel - 29 -


familistère de Godin

Figure 14 - Le Familistère de Laeken le long du quai du canal de Willebroek.

tôlerie & emballage

canal de Willebroeck chemin de fer

ajustage

école

magasins

Senne

expédition

salle d’exposition

fonderie quai de chargement

services : lavoir, magasin, réfectoir

Figure 15 - Vue des usine de poêles Godin à Laeken - 30 -

familistère


1.2.2 Familistère de Godin : métal (fonte) Près du pont Van Praet, sur la rive droite du Canal se trouve l’usine et le familistère Godin (quai des Usines, 156). C’est en 1858 que cette usine de poêles est fondée par J-B. Godin. Le terrain de 4 hectares qu’il acquiert, est compris entre la Senne au nord et le canal de Willebroek au sud, afin de disposer du charbon et du métal par bateau et de bénéficier de la proximité du marché important en Belgique. Des ateliers y sont aménagés et sont reliés directement au chemin de fer qui parcourt l’usine. C’est donc là que les poêles Godin étaient conçus, dessinés, fondus et assemblés par plus de 200 personnes. 22 Par la suite, Godin souhaite étendre au site bruxellois son système de l’habitation unitaire. Le pavillon est finalement édifié en 1887 sur le modèle des premiers immeubles du familistère de Guise en France. La construction en briques comprend quatre niveaux d’habitation. Elle est organisée autour d’une cour intérieure protégée par une couverture de verre sur une charpente de bois. Des coursives donnant sur la cour desservent les 72 logements traversants du quadrilatère. Plusieurs équipements collectifs sont également construits pour compléter l’ensemble : des écoles, des jardins potagers, un lavoir, des magasins et un réfectoire. C’est une réelle ville autonome qui se créée alors à Laeken.23 En 1968, l’usine cesse de fonctionner et est vendue à différents industriels. Classé en 1988, le bâtiment d’habitation a abrité différentes fonctions depuis sa fermetures : bureaux, hôtel, logements sociaux. Actuellement il est en travaux pour l’établissement de nouveaux logements. En ce qui concerne ses ateliers, ils ont été détruits en 2013 pour accueillir un centre commercial. D’un point de vue architectural, ce site bruxellois est le modèle d’une implantation industrielle en charnière entre la sortie de la production du type artisanal et l’entrée dans les processus de production industrielle. L’usage des matériaux en bois, avec ses charpentes inspirées de la structure de grange, des poteaux en fonte, est particulière de cette expression technique. Les toitures à deux pentes sont à peine antérieures aux toitures sheds si typiques par la suite des grands ensembles industriels. L’agencement des fonctions de l’usine entre acheminement des matériaux (charbon, métaux...), machine à vapeur, rapport à la rivière, au train, au canal, stockage et commercialisation des produits finis, la proximité du Familistère des logements, avec leurs fonctions associées (crèche, jardin, école...) n’est pas due au hasard.24 22

Huberty C. et Valente Soares P., « Les canaux bruxellois ». La fonderie n°25, Bruxelles ville d’art et d’histoire, Ed : Région de Bruxelles Capitale. p.44 23 Familistère.com « Le familistère de Laeken ». 24 Vanderhulst G., (2006). « Site des anciennes usines GODIN à Laeken-Bruxelles ». - 31 -


brasserie de la Marine

Figure 16 - Brasserie du Marly - 1920 silos touraille maison de l’ingénieur cour d’expédition

source d’eau

canal de Willebroeck

écuries / garage cour de service conciergerie

bureaux

bras de transbordement

services bouteillerie brasserie embouteillage malterie

Figure 17 - Brasserie de la Marine - 1950 - 32 -


1.2.3 Brasserie de la Marine : agriculture (orge) La brasserie de la Marine a été construite en 1917 le long du canal (Chaussée de Vilvorde, 146) au centre d’un parc de 3 hectares, l’ancien Parc Meudon. La brasserie était implantée à un point stratégique, elle était non seulement le long du canal afin de recevoir sa matière première (l’orge et aussi un peu de charbon) par voie d’eau mais également à côté d’une source d’eau qui servait à la fabrication de la bière et de la limonade. L’ensemble des bâtiments se composait de 3 ailes construites autour d’une cour centrale ouverte vers la rue dont elle était partiellement séparée par la conciergerie. Pourvue des dernières nouveautés techniques, La Marine se présentait en 1939 comme la brasserie la plus moderne du pays. Elle comportait 4 divisions : la brasserie, la malterie, l’unité de remplissage et la division ‘eaux minérales’ (Meudon). En 1942, la brasserie est rachetée par Wielemans, la Marine assure alors d’une part la fabrication des bières de fermentation haute et d’autre part le maltage25 pour tout le groupe. La brasserie-malterie vie alors ses heures de gloire et offrait du travail à 250 personnes. Puis en 1980, malgré la prise de contrôle de la brasserie par le groupe Artois de Louvain, les affaires périclitent. En effet, des problèmes techniques (l’eau du puits était devenue insuffisante en qualité et en quantité) et économiques vont entraîner la cessation des activités et la fermveture totale de la brasserie en 1981. Le complexe de bâtiments existe toujours actuellement mais a subi de nombreuses dégradations à la suite de vandalismes et de vols. Au fil du temps, l’ensemble a été morcelé et réaffecté individuellement pour accueillir différentes fonctions : magasin de peinture, salles d’évènementiel, banque alimentaire et un grossiste en décoration de jardin. 26 D’un point de vue architectural, la brasserie est un bâtiment typique de l’ère industrielle. Avec des façades en briques rouge, des alcôves divisées par des demi-pilastres encastrées ou encore des fenêtres cintrées. C’est une architecture sobre, élégante et symétrique. D’un point de vue structurel, la Marine est composée de colonnes et de poutres en béton armé de manière pure et répétitive, selon le système ‘Hennebique’ (c’est-à-dire que l’ossature est en béton, clairement affirmée, le bois et le métal sont utilisés pour les huisseries et la brique pour le remplissage)27. Cette structure est directement reconnaissable en façade.28 25 Maltage : action de transformer l’orge en malt par germination [Le petit Robert (2020)] 26 Bière et brasseries Bruxelles (2008). « C’était au temps ou Bruxelles brassait » 27 Mis au point par Monsieur Hennebique, ingénieur français, au 19ème siècle 28 L. Weyers (1986) “Brasserie-malterie de la Marine, 5 jaar na de sluiting”. Travail de fin d’étude, licencié en architecture - 33 -


quai Demets

Figure 18 - Usine centrale des tramways et le portique de manutention du charbon - 1920

chaudière cour

tapis souterrain

portique de manutention tapis roulant

21 silos

canal de Charleroi

Figure 19 - Transport du charbon (1) coupe longitudinale (parallèle au canal) : passage en souterrain entre les silos et le soubassement des machines à vapeur/turbines (2) coupe transversale : système de portique-grue sur le canal - 34 -


1.2.4 Quai Demets STIB : charbon C’est en 1903 que la société des Tramways bruxellois (aujourd’hui l’équivalent de la STIB) fait construire une grande usine à usage de centrale électrique (quai Demets, 33), la centrale d’Ixelles n’étant plus suffisante pour l’alimentation électrique du réseau de trams. La centrale est implantée au bord du canal pour l’approvisionnement en charbon (provenant de bassin houiller du Hainaut) mais également pour son approvisionnement direct en eau (nécessaire au fonctionnement des turbines à vapeur qui produisent l’électricité). Le chemin de fer qui venant de Schaerbeek et acheminait du charbon et du bétail aux abattoirs d’Anderlecht, longe également la centrale.29 Le site comprend plusieurs immeubles dont la plupart ont été conservés : l’ancienne centrale, les silos à charbon, la cour pavée, la maison de direction, un escalier monumental surmonté d’une très belle balustrade de pierres. L’usine a été montée sur un radier de 1m50 d’épaisseur comprenant d’anciens rails s’étendant sur 3m au-delà de l’axe des murs qui ont eux-mêmes un 1m d’épaisseur. Il y avait deux cheminées, dont la trace au sol est encore visible dans la cour. Le cœur de la centrale est l’ensemble des 21 silos qui reçoivent le charbon par un système de tapis roulant. Il est déversé sur ce dernier par un portique-grue qui l’enlève de la péniche, accosté au quai du canal de Charleroi. Le charbon alimente ensuite un autre tapis souterrain qui passe sous la cour et le déverse dans les chaudières faisant tourner des machines à vapeur, couplés à des alternateurs. 30 Ce site industriel est remarquable de rationalité. En effet, il s’agit, pour l’époque, d’une centrale particulièrement moderne et performante. Elle correspond à la consécration de l’énergie électrique que l’on marque par des bâtiments monumentaux, d’une très grande qualité technique et architecturale pour signifier le progrès et l’avenir. L’ambition était d’ailleurs grande : la place était prévue pour une expansion de l’activité, voire un doublement des installations. La solidité et la modernité de la structure se traduisent dans le fonctionnement structurel de l’ensemble du site.31 Aujourd’hui, les bâtiments sont pour la plupart, encore debout. Ils servent d’ateliers et de laboratoires pour la STIB. 29

Reflexcity.net « Quai Fernand Demets n°33-35-37 ». Vanderhulst G. « Les portiques et grues à Molenbeek-Saint-Jean sur le Canal de Charleroi ». Bruxelles fabrique. Bruxelles fabrique, p.21-22 31 Jacobs T., (2019). « Usine centrale des Tramways Bruxellois ». Bruxelles Fabriques 30

- 35 -


filature d’Aoust

Figure 20 - Usine de filature ‘D’Aoust et Frères’

Figure 21 - Le bras oriental de la Senne le long de l’ile d’ Aa et quelques-uns des bâtiments abandonnés des anciennes filatures d’Aoust.

Figure 22 - Le pont-vannes de la Senne à hauteur des anciennes filatures d’Aoust. La toiture à croupes, à l’arrière-plan, appartient à l’ancienne maison directoriale

- 36 -


1.2.5 Filature d’Aoust : laine Les industries textiles sont venues s’implanter à Bruxelles bien avant l’essor industriel de la Belgique. En effet, ils choisissent dès le Moyen-Âge les communes de Forest, de Saint-Gilles et d’Anderlecht où ils trouvent de l’eau en abondance, nécessaire à la fois pour la force motrice mais également pour le lavage et la teinture des tissus. De plus, de vastes étendues herbeuses permettaient le séchage et le blanchiment des toiles. 32 La première industrie de taille à avoir pressenti tous ces avantages est la filature de laines d’Aoust (rue Bollinckx, 15). Fondée en 1829 par les industriels Willems et De Keyser, elle occupait une petite partie de l’île d’Aa sur la Senne, bordant le futur canal de Charleroi. L’industrie lainière connut ainsi, sur et à proximité de cette île, une expansion importante durant tout le 19ème siècle, la fabrique de couverture de laine employait à cette époque 250 personnes. Le débit de la Senne autour de l’île était contrôlé par un système de vannes : le bras droit, par des portes intégrées au pont qui en permet le franchissement ; le bras gauche, passant sous un des bâtiments de l’ancienne filature par un jeu de plusieurs vannes dont on peut encore apercevoir les crémaillères. En 1919, la société de laine installe une nouvelle machine à vapeur électrique en remplacement de l’ancienne qui puisait son eau dans la Senne. En effet, l’eau était devenue beaucoup trop sale pour l’industrie pure et délicate du textile. On était loin de la situation du 19ème siècle lorsque l’eau, limpide et abondante, avait attiré en amont de Bruxelles les industries textiles.33 En 1935, des bureaux de style Art Déco ont été construits à quelques dizaines de mètres en amont de l’ile, par l’architecte De Ridder. Puis, en 1967, l’ensemble fut racheté par le groupe Dafica. Cependant, 20 ans plus tard l’usine est en liquidation et ferme définitivement ses portes en 1984.34

32

Draps W. (2003) « Commerce et négoce ». Bruxelles, Ed : Mardaga. p. 52 Huberty C. et Valente Soares P., « Les canaux bruxellois ». La fonderie n°25, Bruxelles ville d’art et d’histoire, Ed : Région de Bruxelles Capitale. p.4 & 8 34 Reflexcity.net « Usine des Laines d’Aoust ». 33

- 37 -


quai de l’Industrie

Figure 23 - Dépôt de matériaux Cigrasa, portique de manutention halle couverte ateliers et bureaux couverts

canal de Charleroi

3 portiques de manutention cour extérieure (couverte ou non)

Figure 24 - Ancien entrepôt Cigrasa, double portique de manutention - 38 -


1.2.6 Quai de l’industrie : matériaux de construction Le commerce de matériaux de construction (carrelage, céramiques, pierre, verre, briques, sable, …) était très important à Bruxelles. Ils étaient extraits et façonnés dans toute la Belgique et arrivaient par voie d’eau dans la capitale. Le quai de l’industrie, par exemple, était connu pour l’accueil, la transformation (si nécessaire) et le stockage de ces matériaux avant d’être réintroduits sur les chantiers de la ville. Plusieurs firmes s’y sont succédées, profitant chacune à leur tour de l’espace de stockage : la scierie à vapeur Briots, un dépôt de tramways et les Parqueteries bruxelloises reprisent plus tard par la nouvelle firme Cigrasa.35 Plus précisément, l’entreprise Cigrasa de dépôt de matériaux de construction pour les gros chantiers et de carrelages s’est implantée le long du canal à Molenbeek (n° 79 du quai de l’industrie) de 1948 à 1969. Afin de décharger les bateaux de ces matériaux (dont essentiellement le sable et le gravier), l’entreprise a dressé un immense double portique de manutention (fig 23). De plus, il est doté d’un portique situé à l’intérieur de la parcelle. Il est structuré par des pieds noyés dans un socle de béton, muni d’un rail central sous une toiture à deux versants, le tout est riveté et assemblé par boulons.36 L’infrastructure de Cigrasa est finalement reprise vers la fin des années 1980 par Libelco, marchand de voitures d’occasion. Ce dernier marque un intérêt certain pour cet ancien hangar, il l’entretient, le répare et le repeint partiellement, conservant son état original (fig. 2a et 2b). Aujourd’hui, le double portique est inutilisé mais rappelle l’importance du commerce des matériaux de construction, pour lequel le canal jouait un rôle essentiel.37 Finalement, on se rend compte qu’un espace pour la gestion de matériaux de construction (stockage, manutention et petits ateliers) ne demande pas une infrastructure très complexe, peut de choses sont à mettre en oeuvre.

35

Vanderhulst G., Bouteiller A. (2015). « Les portiques et grues du canal de Charleroi ». Bruxelles patrimoine n°015-016 dossier ateliers, usines et bureaux. Ed : Bruxelles développement urbain p.36 36 Ivy, p. 38 37 Huberty C. et Valente Soares P., « Les canaux bruxellois ». La fonderie n°25, Bruxelles ville d’art et d’histoire, Ed : Région de Bruxelles Capitale. p.20 - 39 -


cokerie du Marly

Figure 25 - Cokeries du Marly

cheminées d’extinction

gazomètres

chemin de fer

fours

portique de manutention

Figure 26 - Cokeries du Marly - 1940 - 40 -

canal de Willebroeck


1.2.7 Les cokeries du Marly : gaz et chimie Les cokeries38 du Marly débutent leurs activités en 1932. Le groupe gazier est principalement partenaire, avec la Société Belge de l’Azote, gros producteur de produits pour l’agriculture et la phytopharmacie. Il s’agit donc de produire du gaz de ville, de fournir du coke et d’alimenter une industrie carbochimique par des produits dérivés. En effet, ayant démarré leurs activités en pleine crise des années 30, le groupe ne commence son réel développement qu’avec le fonctionnement des usines des « produits chimiques du Marly » qui exploitent les sous-produits de la cokéfaction. Ce système permet déjà une forme d’économie circulaire car les déchets d’une fonction deviennent les matières premières d’une autre. Cependant, la pollution, notamment les fumées, étaient non négligeables car les fours n’étaient absolument pas filtrés... Ce qui causa un désastre immense pour l’état des sols et la santé des travailleurs. Les cokeries se sont implantées en aval du port, dans la commune de Neder-Over-Heembeek. Les cokeries ont besoin du canal pour l’approvisionnement en charbon (le fonctionnement des Cokeries assure 12% du trafic maritime) et pour l’eau nécessaire à leur exploitation. Le raccordement au chemin de fer et la construction du pont Buda, en 1934, donnent à ces rives des atouts remarquables. Plus précisément, la cokerie était basée sur 4 batteries indépendantes, totalisant 130 fours. Ces derniers font 16 m de long, 4 m de haut et 40 cm de large.39 Après plusieurs années très tumultueuses, la cokerie ferme ses portes en 1993. les emplois de 135 personnes sont perdus, ce qui est une délivrance pour les travailleurs qui travaillaient dans de mauvaises conditions, au milieu des gaz et des fumées. De plus, l’usine laisse derrière elle une friche industrielle de 12 ha complètement polluée et difficilement exploitable. La zone est finalement acquise par le Port de Bruxelles à la fin des années 90’ pour assurer son expansion indispensable. De fait, il n’y a pas d’autre terrain bénéficiant du canal dans la région. Le quai, ayant été réalisé pour recevoir de gros bateaux, fait 6 mètres de tirant d’eau. En 2003, le port a donc assuré la dépollution du site ainsi que sa démolition. Les immeubles industriels et surtout les gazomètres (qui auraient pu être convertibles), ont été totalement rasés. Par ailleurs, lors de ce processus, un incendie catastrophique eu lieu.40 En 2015, le terrain est dédié à BPost pour y installer un centre de tri au niveau national. 38

Cokerie : Usine réalisant la synthèse de coke et de gaz manufacturé à partir de charbon par un procédé de distillation à sec. Le coke est surtout recherché pour produire de la fonte (sidérurgie). 39 Tchorski.morkitu.org « Carcoke, la cokerie du Marly ». 40 Vanderlhust G., (2013) « Histoire de la cokerie du Marly ». Patrimoine industriel Wallonie-Bruxelles - 41 -


Conclusion : ressources naturelles locales et infrastructures industrielles au service d’une nouvelle production à Bruxelles ? La richesse des ressources du bassin de l’Escaut a donc permis à la Belgique et au Nord de la France de développer une production considérable et de créer une immense prospérité durant plusieurs siècles. Néanmoins, aujourd’hui, la délocalisation des industries d’extraction et les carences en ressources naturelles laissent le territoire vide, dans un état de pollution non négligeable et économiquement vulnérable. Ainsi, il serait intéressant de tirer profit des ressources naturelles encore présentes, à savoir les voies d’eau ou encore les terres à qualités multiples afin de relancer une économie locale et intensive dans nos pays, tout en respectant les enjeux environnementaux. En outre, plusieurs ressources en matières premières pour la construction sont encore disponibles sur le territoire de l’Escaut, favorisant la reconstruction d’infrastructures locales pour cette nouvelle société productive. Par ailleurs, la région de Bruxelles possède un patrimoine industriel riche faisant de la ville en elle-même une ressource. En effet, toutes ces infrastructures le long du canal ont été érigées pour la production, leurs qualités architecturales, spatiales et d’accessibilité les rendent donc particulièrement intéressantes pour une relance de l’industrie dans la ville. Pour la suite, nous allons donc essayer de comprendre comment Bruxelles, qui était une ville productive et quasiment autonome, pourrait relancer son économie de manière circulaire, tout en tirant profit des ressources naturelles du pays ainsi que des ressources artificielle de l’ancienne ville industrielle.

- 42 -


- 43 -


- 44 -


CHAPITRE 2 – Bruxelles, production et canal : état des lieux Aujourd’hui, nous héritons d’un patrimoine architectural important le long du canal de Willebroeck et Charleroi, témoignant de la puissance industrielle de Bruxelles au 19ème et 20ème siècle. Ce patrimoine doit se réinventer et s’adapter aux défis contemporains pour retendre vers une ville productive et autonome. Pour cela, il faut comprendre ces enjeux, qui ont bien changé depuis la désindustrialisation. Dans un premier temps, nous allons réaliser une étude théorique à propos de la situation économique et démographique bruxelloise. Plus précisément, nous allons établir un bref état des lieux des défis cruciaux de la région aujourd’hui. Ensuite, nous allons voir quels moyens Bruxelles met en place pour tendre vers une ville productive au moyen de l’économie circulaire et avec comme territoire d’accroche, la zone du canal. Pour ce faire nous discuterons du ‘Programme en économie circulaire’, de la ‘Stratégie de rénovation’ ainsi que de l’exposition ‘A good city has industry’. Puis, nous allons zoomer sur ce territoire clé du canal et analyser les 2 stratégies principales qui le composent soit le ‘Plan canal’ et le ‘Plan à qualité paysagère’. Dans un second temps, une analyse typologique de l’industrie encore présente le long du canal sera réalisée, reprenant six exemples de réhabilitation du patrimoine lié à la voie d’eau.

- 45 -


< 0.00 % 0.00 - 1.19 % 1.19 - 2.15 % 2.15 - 3.27 % > 3.27 % moins de 200 habitants

Figure 27 - Évolution de la population en Région de Bruxelles-Capitale, 2005 à 2010 % annuel moyen Taux dee variation annuel moyen = 2.5% - 46 -


2.1 Évolution de la logique économique du secteur de la construction 2.1.1 Logique de croissance : économie linéaire Comme expliciter dans le premier chapitre, d’un point de vue historique, certaines villes du Moyen-Âge (dont Bruxelles) se sont développées à proximité des cours d’eau. Les premiers habitants y trouvent des terres fertiles et la voie fluviale leur permet de commercer (entrant et sortant). À l’époque pré-industrielle règne donc un équilibre quasi évident entre la force de la nature et celle de l’homme : les cours d’eau sont une source de vie mais ils mettent aussi en péril quiconque s’en approche trop … Ce modèle d’équilibre sein entre l’homme et la nature qui s’est maintenu depuis l’antiquité, a été complètement chamboulé lors de la révolution industrielle. Ce phénomène a démarré lorsque la production de masse a poussé les villes à ne plus être tributaires de leur matières premières locales. Il repose en partie sur un système de valeurs prônant la suprématie de la production illimitée et du progrès matériel, sans réelle conscience de la destruction de l’environnement.41 En effet, aujourd’hui, nous évoluons dans une économie mondiale linéaire qui ‘produit, consomme et jette’. Cette économie très (trop ?) confortable est finalement peu adaptée aux réels besoins de la population. Nos villes, dont Bruxelles, sont confrontées à de nombreux défis urgents auxquels l’économie consommatrice actuelle ne peut pas répondre : défis économiques, sociaux, démographiques, sanitaires, climatiques et environnementaux.42 Plus particulièrement, à Bruxelles, le défi majeur à gérer est celui de la démographie. En effet, la région bruxelloise prévoit une croissance démographique importante pour les années à venir, résultant de l’accroissement naturel de la population et d’un solde migratoire élevé (fig.27).43 Cette croissance va engendrer une demande importante de logements et d’emplois. A cet enjeu démographique vient s’ajouter un enjeu plus global, celui de l’environnement, remettant en cause tout le fonctionnement de notre société… 41

Clette V. & Geczynski S. (2015) « La vallée partagée P.dt périphérique Nord ». 1010 architecture urbanism sprl, p.71 42 Gosuin D., Fremault C., Laanan F. (2016) « Programme Régional en Économie Circulaire ». be circular, be.brussels, p. 2 43 1010 architecture urbanism sprl (2015) « La vallée partagée P.dt périphérique Nord », p.16 - 47 -


2.239 Kt/an de matière première = 25% de tous les imports en région bruxelloise

2.422 Kt/an de déchets = 35% de tous les exports en région bruxelloise

Figure 28 - Économie linéaire - 48 -


Une nouvelle forme d’économie devra donc être mise en place pour répondre à cette mutation sociétale, tout en respectant les enjeux écologiques actuels. Cela va se traduire dans de nombreux secteurs tel que la construction et la rénovation. Ces derniers vont être énormément sollicités dans les années à venir, tant pour gérer l’augmentation du nombre de logement, que pour la réduction de l’impact environnemental du parc immobilier de la capitale (nous y reviendront au point 2.2.2 : Stratégie Rénovation). Cette nouvelle forme d’économie va également se faire ressentir dans le monde du travail. Le secteur tertiaire ayant absorbé une large part des travailleurs qualifiés de la Région (en ce compris les anciens emplois ouvriers), il ne permet plus l’insertion professionnelle durable de ces profils.44 Le territoire du canal est finalement un point de levier pour répondre à ces demandes importantes et pour le lancement d’une nouvelle économie.

2.1.2 Logique de soutenabilité : économie circulaire Pour toutes ces raisons citées au-dessus, il est urgent de passer d’une économie linéaire à ce que l’on appelle un ‘modèle circulaire’ de production et de consommation. En effet, « Plus que jamais, l’essoufflement du modèle économique linéaire est une opportunité de changer le cours des choses. […] Nous souhaitons privilégier un modèle de développement non seulement durable, mais surtout plus humain, pour lequel la croissance économique n’est plus une fin en soi mais un outil au service de la croissance de la qualité de vie. »45 L’économie circulaire soutient deux idées majeures, d’une part il faut fermer le cycle des matériaux et d’autre part augmenter l’efficacité des ressources. Ce système économique favorise l’échange et la production qui, « à tous les stades du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter l’efficacité de l’utilisation des ressources et à diminuer l’impact sur l’environnement tout en développant le bien être des individus ». Dans toute la mesure du possible, elle se développe à l’échelle locale en créant des chaînes de valeur peu délocalisables.46

44

Clette V. & Geczynski S. (2015) « La vallée partagée P.dt périphérique Nord ». 1010 architecture urbanism sprl, p.71 45 Gosuin D., Fremault C., Laanan F. (2016) « Programme Régional en Économie Circulaire ». be circular, be.brussels. p.2 46 Ivy. p. 3 - 49 -


ressources naturelles locales : bassin de l’Escaut, Belgique

le déchet devient une matière première

Figure 29 - Économie linéaire - 50 -


Dans l’économie linéaire traditionnelle, les flux de capitaux se transforment en flux de matériaux, cherchant à réaliser des profits en construisant de nouveaux éléments dans l’espace physique.47 La démolition de bâtiments est un parfait exemple de cette économie énergivore et consommatrice. Pour orienter la transition vers l’économie circulaire, il est essentiel d’examiner la gestion des flux de matériaux et l’organisation de l’espace et du travail dans le secteur de la construction. En effet, 2 239 Kilotonnes/an de matières premières (= 25% de l’import) rentrent dans Bruxelles, contre 2 422 Kt/ an de déchets (= 35% de l’export) … L’intensité des flux de matières doit donc être drastiquement réduite.48 Ainsi, dans une perspective circulaire, chaque site de construction doit être considéré comme une ressource pour que tous les matériaux ayant été démantelés soient recyclés et/ou réutilisés. Par ailleurs, cette transition implique également de repenser radicalement les relations entre les différents acteurs présents dans l’économie matérielle afin de leur permettre de collaborer et d’éliminer l’individualisme. 49

47

Harvey, 1976 Arnsperger et Bourg, 2016 49 Declève B., Grulois G., de Lestrange R., Bortolotti A., Sanchez Trenado C. (2020). « Designing Brussels ecosystems » Metrolab Brussels MasterClass II. Royal Library of Belgium. p. 158 à 169 48

- 51 -


approche transversale

gouvernance

111 mesures

approche territoriale

Figure 30 - Schéma du PREC - 52 -

approche sectorielle


2.2 Stratégies liées à la renaissance de la productivité le long du canal

Face à ces constats quelque peu alertants… quelles sont les mesures prises par la Région de Bruxelles et quels sont les objectifs et ambitions de cette dernière ? Voici deux stratégies (le PREC et la Stratégie rénovation) et une exposition (‘A good city has industry’) qui proposent de nombreuses solutions dont le territoire tremplin est le canal de Willebroeck et Charleroi.

2.2.1 Programme Régional en Économie Circulaire50 L’économie circulaire est un sujet de recherche florissant et un objectif politique à travers le monde, par exemple à Bruxelles avec le PREC (Programme Régional d’Économie Circulaire). Ce dernier a été adopté en 2016 par le Gouvernement de la Région de Bruxelles-capitale et vise 3 objectifs généraux : - Transformer les enjeux environnementaux en opportunités économiques. - Ancrer l’économie à Bruxelles afin de produire localement quand c’est possible, réduire les déplacements, optimiser l’utilisation du territoire et créer de la valeur ajoutée pour les Bruxellois. - Contribuer à créer de l’emploi. Afin d’atteindre ces objectifs, le programme comporte 111 mesures réparties en 3 parties stratégiques et une meilleure gouvernance administrative : - Mesures transversales : elles concernent l’ensemble des acteurs économiques - Mesures sectorielles : elles identifient 5 activités prioritaires sur une vision à l’horizon de 2025 : logistique, déchets, alimentation, commerce et construction. Ces secteurs ont été choisis en fonction de leur potentiel de création d’emplois, de leur impact sur les émissions et de leur capacité à relever les grands défis de la région de Bruxelles.51 - Mesures territoriales : elles visent à construire une économie circulaire sur base de 10 centres d’activités essentiellement le long du canal : des activités productives intégrées, l’aménagement des quartiers, l’allongement du cycle de vie du bâti bruxellois en le rénovant et en réutilisant au maximum les ressources internes à la région par la mise à disposition d’ateliers, de lieux de stockage, de zones de captation de matériaux, etc. 50

Gosuin D., Fremault C., Laanan F. (2016) « Programme Régional en Économie Circulaire ». be circular, be.brussels. p.3,4 51 Vickery Hill A., Luna Quintanilla D., Kampelmann S. (2018) « What Works for Brussels? ». Chair circular metabolism, ULB, p.37 - 53 -


2.2.2 Stratégie Rénovation 52 L’objectif principale de la ‘Stratégie Rénovation’ est que pour 2050, l’ensemble du parc immobilier bruxellois soit performant. La consommation de ce dernier devra être de 100kWh/m² par an en énergie primaire en moyenne pour les bâtiments résidentiels. Voici quelques chiffres datant de 2015, qui donnent la mesure de l’urgence pour agir sur la manière de construire et surtout de rénover à Bruxelles : - 56% : émissions directes de gaz à effet de serre que représente le secteur du bâtiment - 573 276 : logements à Bruxelles - 39 607 : logements sociaux à Bruxelles - 34% et 26% : maisons et appartements appartenant à la classe la plus énergivore (G) - 40% : part de logements construits avant 1945 - 30% : bâtiments non isolés Jusqu’à présent, les ambitions les plus fortes ont concerné la construction neuve, la gestion énergétique au sein des bâtiment et légèrement la rénovation. La réduction de l’impact environnemental du parc immobilier bruxellois entier existant, n’a toutefois pas encore fait l’objet d’une stratégie à part entière. Au regard des objectifs à atteindre, il faut à présent poser le principe selon lequel il ne peut plus exister, à terme, de bâtiments non performants sur le territoire. Les attentes ne peuvent cependant pas toutes reposer sur l’enveloppe ou les installations d’un bâtiment : les comportements au sein de celui-ci sont déterminants, et la sobriété énergétique est de mise. Pour ce faire, 3 angles d’attaque majeurs doivent donc être pleinement investis : - L’augmentation du taux de rénovation - L’amélioration de la qualité des rénovations - L’utilisation rationnelle de l’énergie au sein du bâtiment. Cette initiative de rénovation massive du parc immobilier signifie un flux de déchets immense et une arrivée en force des matières premières à devoir gérer, ce qui est une immense opportunité pour mettre en place le concept de l’économie circulaire. Ainsi, il s’agirait de recycler les matériaux de construction mais surtout de les réemployer ! 52

Gouvernement de la Région de Bruxelles Capitale (2019). « Stratégie de réduction de l’impact environnemental du bâti existant en région de Bruxelles-capitale aux horizons 2030-2050 ». Bruxelles environnement, p. 6,7,126 - 54 -


Selon le CSTC53 , environ 5 % du parc immobilier est dans un tel état qu’il n’est pas possible d’en obtenir une performance acceptable après rénovation. La démolition ne pouvant pas être évitée, il faudra en tirer parti pour qu’elle devienne une source de matériaux et non de déchets. Tout démantèlement sera dès lors subordonné à l’établissement d’un inventaire des éléments réutilisables et à la démonstration préalable de sa nécessité. Toute une logistique est à mettre en place afin de pouvoir réemployer ces matériaux : 1. export des matériaux ‘déchets’ depuis les chantiers de démolition 2. (si nécessaire) transformation de ces matériaux ‘déchets’ en matériaux ‘prêts à l’emploi’, sur place ou dans un espace externe conçu à cet effet 3. mise sur le marché des matériaux ‘prêts à l’emploi’ 4. (si nécessaire) stockage 5. import des matériaux vers d’autres chantiers demandeurs Le réemploi des matériaux de construction demande donc une gestion des flux importante, une collaboration précise entre tous les acteurs de la construction ainsi que la mise à disposition d’espaces externes pour la transformation et le stockage. Cependant, si tous ces aspects sont intelligemment mis en place, le réemploi permettra de réduire drastiquement les déchets de construction dans la ville. Par ailleurs, cette filière de réemploi de matériaux de construction est tout à fait compatible avec le territoire du canal qui offre une voie fluviale non-embouteillée traversant Bruxelles, rassemble de nombreux acteurs de la production et surtout offre un patrimoine industriel immense pouvant accueillir ces espaces intermédiaires.

53

Centre Scientifique et Technique de la Construction - 55 -


Figure 31 - Jan Zaman : basé sur la carte des usages économiques dominants de la région de Bruxelles - 56 -


2.2.3 A good city has industry “A good city has industry” est une exposition mise en place aux Bozar par ‘Atelier Brussels’ qui considère que l’industrie est une composante essentielle du riche tissu urbain et économique d’une ville dynamique. En effet, l’exposition met en lumière la nécessité de créer un environnement dans lequel une économie saine et diversifiée peut se développer. Les résultats de la recherche y sont exposés, ainsi que de nouvelles stratégies qui font de la ville un endroit où il fait bon vivre et travailler.54 Les villes sont les lieux d’incubation et les moteurs de l’économie. Toutefois, depuis la désindustrialisation, la ville s’est transformée en un lieu attrayant où il fait bon vivre et travailler. Les espaces productifs ont été refoulés vers la périphérie, voire vers les pays à bas salaires et la ville devient un lieu de consommation sans production, ce qui est incompatible avec la circularité. Ainsi, ‘A good city has industry’ propose 10 clés d’action pour construire la ville productive de demain : 1. « Construire la ville productive requiert une représentation plus fine de l’économie urbaine » Grâce à l’élaboration d’une carte d’inventaire détaillée, on se rend compte du potentiel du tissu urbain : dans les concentrations de certains secteurs ou échelles d’activités surgit la possibilité de collaboration, de partage de l’espace, de raccourcissement des chaînes ou de fermeture de flux.55 2. « Chérissez la générosité des bâtiments industriels et des infrastructures. » L’état des bâtiments industriel n’est plus intact, cependant leurs typologies spécifiques, leurs espaces de travail et leurs structures dans la ville, constituent un contexte stimulant et abordable pour de nouvelles initiatives de startup.56 Cette clef d’action fait référence au patrimoine industriel lié à la voie d’eau qui nous intéresse depuis le début de ce travail. En effet, il offre d’immenses opportunités spatiales, de transports et de collaborations pour la mise en place de la filière de réemploi à Bruxelles. 3. « Des initiatives modestes et nombreuses façonneront l’économie du futur. » De nombreuses entreprises innovantes sont nées dans une arrière-cour ou un garage. Pour rendre la ville productive et inclusive, de tels petits espaces d’entreprises sont d’une importance capitale.57 54

Bozar.be “A good city has industry” Atelier Brussels (2016). « A good city has industry ». Bozar. p. 11 56 Ivy, p. 13 57 Ivy, p. 15 55

- 57 -


4. « Développez les logements à l’échelle des espaces industriels et non l’inverse » La ville productive est un concept intéressant, cependant pour produire il faut de la main d’œuvre. Pour que cette main d’œuvre soit opérationnelle, elle nécessite des logements en suffisance. Ainsi, en concevant la rénovation urbaine, elle doit être ajustée à l’échelle des espaces de travail afin que la ville aménage à la fois de la place pour les logements et pour l’emploi. 5. « Associer le logement à l’industrie requiert de nouvelles compositions architecturales. » Pour que la main d’œuvre soit opérationnelle, elle nécessite de logements en suffisance et de qualité. La ville productive doit aussi être une ville agréable à vivre. 6. « Rendez l’industrie urbaine visible dans l’espace public. » Cette industrie urbaine doit être entièrement assumée pour qu’elle fonctionne, elle doit être esthétique et placée au centre de nos vies quotidiennes. Cela se traduit principalement sur le territoire du canal qui n’est actuellement pas une fierté pour la région de Bruxelles. 7. « L’espace public relie penseurs et faiseurs dans une ville solidaire. » La ville est un lieu où habitent, s’attardent, se rencontrent et collaborent des gens de toutes sortes. En plus des bureaux, universités ou écoles, il faut implanter plus solidement l’industrie autour des espaces publics urbains pour construire une ville entreprenante et solidaire.58 8. « Le partage de l’infrastructure et des équipements libère plus d’espace pour l’économie urbaine. » Nos villes saturées invitent à se serrer les coudes. Si les entreprises mutualisent les équipements et l’infrastructure que chacune utilise sur sa parcelle, nous gagnerons de l’espace pour l’économie urbaine. (Reprenons l’exemple des portiques et grues qui longeaient le canal au 19ème siècle, ils servaient à plusieurs industries à la fois, favorisant les échanges et concentrant les coûts en équipements). La mixité des fonctions est donc à promouvoir afin de partager, diversifier, faire se rencontrer et rentabiliser les espaces et les acteurs industriels. 9. « Les alliances entre entreprises optimisent l’espace raréfié. » Industriels, entrepreneurs, promoteurs, autorités, habitants, … chaque acteur à sa valeur ajoutée pour faire grandir et évoluer la ville productive. La collaboration et la mutualisation sont à favoriser au maximum. 58

Ivy, p. 29 - 58 -


10. « Une économie urbaine circulaire offre une plus-value plus élevée pour la ville » Comme expliquer auparavant, la ville rapporte beaucoup d’argent mais n’en bénéficie pas forcément. Il faut donc organiser la production et la logistique sur base de chaînes courtes et de cycles fermés, la ville en deviendra plus durable et une plus grande partie de sa valeur y restera. En conclusion, ce décalogue qui identifie les points de levier essentiels pour le lancement d’une ville productive nous aidera à répondre à la question de la réhabilitation du patrimoine industriel lié au canal que pose ce mémoire. En effet, la Région de Bruxelles aspire à redevenir productive et autonome afin de relancer son économie tout en respectant les enjeux environnementaux actuels. Ainsi, la mixité fonctionnelle au sein de la ville doit être encourager. En outre, il faut créer des espaces urbains de qualité où l’activité productive est assumée et valorisée, le tout en tirant profit des infrastructures patrimoniales existantes.

2.3 Le territoire du canal dans la politique urbaine régionale Nous avons vu que le territoire clef pour relancer Bruxelles en tant que région productive, est celui du canal. Ainsi, il est important de comprendre clairement ses enjeux, ses projets et ses stratégies. Les études et analyses réalisées à propos de ce territoire sont très nombreuses. Néanmoins, deux plans majeurs, réalisés par la région de Bruxelles-Capitale, font office de lignes directrices pour le développement du canal en pleine évolution depuis la migration de ses usines. Un premier plan est sorti en 2013, le « Plan Canal » et un deuxième est sorti en 2019, le « Plan de qualité paysagère et urbanistique ». Ce dernier a pour objectif de renforcer la cohésion et la cohérence de l’ensemble des projets déjà réalisés dans le cadre du Plan Canal.

- 59 -


domaine du port

patrimoine industriel

grands axes publics

situations d’exception

terrains oubliés

vallée de la Senne, nature

Figure 32 - Plan Canal, les ressources du Domaine - 60 -


2.3.1 Plan Canal Ce premier plan a été réalisé à l’initiative de la région de Bruxelles-Capitale par le bureau ‘Alexandre Chemetoff & associés’. L’objectif principal de ce schéma directeur est de maîtriser le développement du territoire de la zone-canal pour répondre aux grands enjeux démographiques et urbains auxquels il est confronté.59 Monsieur Chemetoff décrit la base de son travail comme suit : « le plan canal c’est d’abord une carte d’état des lieux qui montre le territoire tel qu’il est, qui en dresse le portrait depuis Biestebroeck jusqu’à Buda, sur 14km de long et un territoire de 313 hectares. ». En effet, tout comme l’identifie la première clef de ‘A good city has industry’, l’importance de la cartographie n’est pas négligeable selon lui. Le premier exercice fut donc de réaliser un inventaire complet et d’y répertorier les différentes initiatives en cours. En effet, de nombreux projets ont vu le jour autour du canal mais leur impact à l’échelle urbaine était minime car ils avaient été réalisés de manière indépendante. Dans un second temps, un grand « domaine régional » est constitué comme un réseau qui tout au long du canal permet de lier les projets et les quartiers entre eux afin de reconstituer un territoire uni.60 De manière plus concrète, ces interventions concernent 6 éléments majeurs du canal : le domaine du port, le patrimoine industriel, les grands axes publics, les situations d’exception (bassin de Biestebroeck, bassin Vergote, Buda), les terrains oubliés et la vallée de la Senne. (fig. 32) Finalement, la philosophie du projet propose un rassemblement au sein de la ville. Il s’agit de faire de Bruxelles une ville accueillante et mieux partagée.61 C’est donc le début d’une mixité urbaine qui va promouvoir les associations nécessaires à l’établissement de la ville productive.

59

Nakhlé L., Raynaud F. (2015) « Canal, vous avez dit canal ? » ADT.brussels, p.8 Plan Canal, Kanal Plan 01, Bruxelles, 10’ 51’’, bureau des paysages, 2014 61 Chemetoff A. & Associés (2014). « Le plan Canal 01 ». Canal.brussels, consulté en ligne 60

- 61 -


Figure 33 - Plan de Qualité Paysagère et Urbanistique - 62 -


2.3.2 Plan de qualité paysagère et urbanistique, BKP Quelques années après le lancement du plan Canal, un nouveau plan directeur est sorti à l’initiative de ‘perspective Brussel’ et dirigé essentiellement par le Bureau Bas Smet. Ce projet de ‘plan de qualité paysagère et urbanistique’ a pour objectif d’apporter plus de cohérence et d’identité dans la diversité des projets le long du canal au moyen de l’aménagement des espaces publics. Il vise aussi à renforcer les relations entre les différents quartiers parfois encore morcelés par l’infrastructure du canal.62 Afin de structurer le programme du BKP, le bureau Bas Smet propose 3 ambitions majeures qui sont basées sur des Continuités, des Sous-Zones et des Singularités. - Ambition 1 : Bénéficier de l’identité spécifique du canal et de sa continuité qui représentent une particularité au sein de la région. Aménager des espaces publics de qualité favorisant les activités économiques et portuaires mais également récréative. - Ambition 2 : Renforcer le caractère d’espace public des infrastructures de circulation et leur donner cohérence et identité. Revaloriser les quais, les rues avoisinantes et la mobilité le long de la voie d’eau (nouveaux matériaux, plantation, mobilier urbain, vélo, …). - Ambition 3 : Améliorer le territoire et son paysage de manière durable. Des sous-zones caractéristiques ont également été établies afin de mieux cibler les potentiels de projets sur chaque espace du canal. En commençant par le sud voici les noms de ces zones : Rive gauche, zone industrielle Sud, Biestebroeck et Batelage, Quartier ABC, Bassins Vergote et Béco, Schaerbeek-sur-Senne, avant-port et Schaerbeek Formation et finalement plaine industrielle Nord. Le cas d’étude que nous allons analyser se trouve dans cette dernière zone la plus au nord du canal. - Ambition 4 : Profiter de la voie d’eau et de ses quais Le BKP va donc plus loin que le Plan Canal et lance de nouveaux points d’actions aspirant de plus en plus à une ville productive telle que défini dans ‘A good city has industry’. En effet, ils parlent non seulement de la création de nouveaux espaces publics au moyen de nouvelles compositions architecturales (faisant référence aux clés 7 et 5 du décalogue déifni par ‘A good city has industry’), mais également de la valorisation du patrimoine lié à la voie d’eau (clé 2) ainsi que le partage et l’alliance des acteurs et des entreprises pour tendre vers de la mixité fonctionnelle (clés 8 et 9). 62

Bureau Bas Smet (2019). « BKP – territoire du Canal » Perspective Brussels - 63 -


persp. depuis le pont de Buda

persp. depuis la terrasse Meudon

persp. depuis le BRYC

persp. depuis le monument au Travail

persp. depuis le parc des Armateurs persp. depuis Sainctellette

quartier Nord

persp. depuis l’écluse de Molenbeek

persp. depuis la tête de Biestebroeck

persp. sur le bassin Batelage

perspectives à valoriser élément bâti élément paysager

Figure 34 - BKP, ambition 1 : Vues et perspectives de la voie d’eau à valoriser - 64 -


Buda

cruise terminal terrasse Meudon

BRYC

parc du monument au travail

parc des Armateurs quai des Péniches parc Béco Scaintelette

parc Ninove esplanade des Abattoirs pont de Cureghem tête de Biestebroeck Batelage

parc Productif

parc végétal parc minéral

Figure 35 - BKP, ambition 2 : Espaces emblématiques préconisés par le BKP - 65 -


avant-Port

bassin Vergote

bassin Biestebroeck

activités portuaires et de transport (ZAPT) entreprises en milieu urbain (ZEMU) industries urbaines (ZIU)

Figure 36 - BKP, ambition 3 : Zones d’activités économiques et portuaires - 66 -


rowing club cruise terminal terrasse Meudon BRYC

bassin Vergote bassin Beco

écluse de Molenbeek

tête de Biestebroeck bassin de Biestebroeck bassin Batelage

écluse d’Anderlecht cercle des Régates

activité économiques activité récréatives

Figure 37 - BKP, ambition 4 : Usages de la voie d’eau - 67 -


Vilvorde Suez Buda f. Marly a. Brasserie de la Marine

c. Meunerie Bruxelloises Duferco Derichebourg Belgium Familistère de Godin

Greenbizz BC materials d. Inter-béton

Infrabel Stib b. Coop e. Recypark

Stevens Recycling

Imal portiques Cigrasa Rotor DC Biestebroeck

Filature d’Aoust Novacity City Campus

lié au canal plus lié au canal économie circualire Halle

Figure 38 - Carte non-exhaustive de la production le long du canal - 68 -


2.4 État actuel de la production liée à l’eau à Bruxelles : exemples significatifs

Nous arrivons à la dernière phase de compréhension du canal. Elle consiste en l’analyse des dispositifs architecturaux mis en place sur le patrimoine industriel lié à la voie d’eau. Tout d’abord, il est important de préciser que 3 grands segments ayant des caractéristiques économiques spécifiques, se distinguent le long du canal : le Nord, le Centre et le Sud. Dans la partie nord, l’activité portuaire est bien implantée, tandis que la partie sud reste en partie occupée par des zones industrielles et des activités tertiaires sous forme de zonings. Le centre se caractérise quant à lui par un tissu historique d’ateliers et d’habitations, auquel s’ajoutent les quartiers de bureaux autour des grandes gares : la tension entre les espaces pour l’implantation des fonctions industrielles, portuaires, tertiaires et résidentielles y est clairement visible. Aujourd’hui, les activités productives subsistent mieux dans les zones industrielles, alors que leur présence s’estompe de plus en plus vite dans les zones dites mixtes.63 Au sein de ces 3 secteurs, la façade du canal propose toutes sortes de bâtiments ayant chacun leur histoire (retracée dans le chap. 1) et leur typologies architecturales et fonctionnelles spécifiques. Plus précisément, notre étude portera sur l’état actuel des anciens bâtiments industriels liés à la voie d’eau. Dans ce registre, 3 catégories sont définies sur base de la fonction actuelle des anciennes industries. La première catégorie analyse les bâtiments dont la fonction est encore liée au canal. La deuxième catégorie discute des bâtiments ne profitant plus de la voie d’eau. Et finalement, la dernière catégorie étudie les bâtiments proposant des fonctions innovantes d’économie circulaire, favorisant le respect de l’environnement Bruxellois et les ambitions de la ville. Afin de mieux comprendre ces différentes formes de productivité le long de l’eau, nous allons analyser 2 exemples d’industries par catégorie.

63 Nakhlé L., Raynaud F. (2015) « Canal, vous avez dit canal ? » ADT.brussels, p.105 - 69 -


le Marine

Figure 39 - Brasserie de la Marine, transbordement des orges - 1950 touraille chaussée de Vilvorde

cour de manutention

silos

ancienne cour de services

rue Meudon

cruise terminal

magasin de peinture évenementiel ancien bras de transbordement

banque alimentaire décoration de jardin

Figure 40 - Situation actuelle de l’ancienne brasserie de la Marine - 70 -


2.4.1 Industries ne profitant plus de la voie d’eau a. Brasserie de la Marine En 1981, après presque un siècle d’activité (voir chap 1), la brasserie de la Marine ferme ses portes et est rachetée par un marchand d’automobiles. Par la suite, ce dernier a totalement ‘emballé’ le bâtiment industriel en recouvrant ses façades en briques rouges avec de la taule ondulée et en y annexant des hangars tout autour et dans la cour intérieure. L’ancienne brasserie s’est alors transformée en un grand entrepôt de stockage. Au fil des années (comme la plupart des industries le long du canal) le bâtiment a été morcelé et occupa différentes fonctions, sans réellement retrouver d’activité productive. En 2016, le port de Bruxelles a construit un ‘cruise terminal’64 entre l’ancienne brasserie et le canal de Willebroeck, rompant toutes connexions autrefois bien établie avec la voie d’eau. Les qualités architecturales de ce bâtiment industriel ont donc été ensevelies et oubliées sous un amas de taules. Aujourd’hui, l’ancienne brasserie de la Marine accueil 4 intervenants : un magasin de peinture, des salles d’évènementiel et des ateliers, une banque alimentaire et un grossiste en décoration de jardin. Ces fonctions, profitent peu des qualités architecturales qu’offre le bâtiment. En effet, tous ces espaces conçus à l’origine pour produire de la bière (salle des machines, touraille, malterie, salle de brassage, salle de soutirage, espaces de manutention, ...) ont été réduits essentiellement au stockage ou bien ne sont plus exploités (touraille et silos, éléments emblématiques de la brasserie, voir chap. 3). Néanmoins, deux fonctions profitent encore des dispositifs architecturaux autrefois mis en place et de l’authenticité du patrimoine industriel. Il s’agit tout d’abord de la banque alimentaire qui se trouve dans les anciennes caves de soutirage de la brasserie, profitant de l’ampleur et de la fraicheur de l’espace. Ensuite, au-dessus, se trouvent les salles d’évènementiel qui profitent des vastes espaces ouverts et structurés des anciens lieux de stockage de la bière. Par ailleurs, les travaux de rénovation qu’ils ont effectués, ont permis de revaloriser l’esthétique du patrimoine, en mettant à nu ses murs de briques et sa structure en béton. En ce qui concerne le magasin de peinture ‘Paint Trade Center’, il se trouve à l’ancien emplacement du magasin de bières de la Marine et profite ainsi de la proximité de la chaussée de Vilvorde. Cependant son entrée ne se fait plus sur la cour intérieure (où régnait toute la vie) mais sur la petite rue de Meudon. De plus, le magasin ne représente qu’une petite partie de toute l’aile gauche que l’entreprise occupe en espace de stockage. 64

Cruise terminal : quai accueillant les bâteaux de croisière venant de la mer du Nord - 71 -


Coop

services meunerie

Figure 41 - Le grain est amené par péniche et est aspiré par un élévateur qui conduit dans les silos où il est stocké - 1950 magasin accès chemin de fer

cour de manutention

façade du canal de Charleroi

Figure 42 - Meunerie Moulart, plan rdc - 1903 - 72 -


b. Coop L’actuel bâtiment COOP a été construit en 1903 par l’industriel Léon Moulart. La meunerie était l’une des plus grandes meuneries de Bruxelles. A son apogée, dans les années 1930-1940, cette minoterie fonctionnait 24 heures sur 24, six jours par semaine et produisait chaque jour environ 80 tonnes de farine. Son implantation (Quai Fernand Demets, 23) entre le canal et le chemin de fer permettait l’approvisionnement direct du grain et du charbon. La meunerie cessa ses activités en 1958. Puis, jusque dans les années 1980, d’autre activités ont été créées par la famille Moulart : fabrication de chapeaux et d’outils, vente de charbon, production d’aliments pour bétail, laboratoires, confiserie et imprimerie.65 À partir de 1988, les bâtiments ont été affectés pour des dépôts de pneus. Finalement, en 2011, l’ancienne Meunerie devint la propriété du Port Sud qui veut transformer ce bâtiment en un espace engendrant de nouvelles dynamiques sociales, économiques et culturelles à Anderlecht. 66 En 2014, le bâtiment COOP ouvre ses portes. Réhabilité par le bureau Bogdan & Van Broeck, sa nouvelle architecture se veut « non intimidante, accessible, toute en transparence ».67 Plus précisément, il accueille aujourd’hui un incubateur pour les petites et moyennes entreprises (générant jusque 120 emplois), un ‘centre d’interprétation’ ainsi qu’un ‘chantier naval’ innovant. Le but est de mettre les habitants du quartier à contribution pour faire tourner ce nouveau ‘forum’ et d’y favoriser la réinsertion professionnelle. Ce nouveau bâtiment propose une lecture du patrimoine passé et futur du quartier à travers une vaste bibliothèque de médias et une programmation multiple d’expositions, ateliers et autres événements. L’idée est de « valoriser l’histoire industrielle du bâtiment tout en innovant ».68 Cela se traduit par une restauration novatrice et adaptable, favorisant l’échange et la rencontre, le tout dans un patrimone remarquable : - Les éléments du programme ne sont pas considérés comme des espaces ou des bâtiments fixes, mais plutôt comme des ‘projets’ évolutifs en interaction constante les uns avec les autres. - Le temps (et donc le changement) plutôt que l’espace est considéré comme le contexte principal de l’architecture. La flexibilité et l’adaptabilité permanente deviennent donc des qualités essentielles. - Le projet interagit également à l’échelle locale de son quartier. 65

Coop.brussels (2016) « Moulart Dynasty » Anderlecht.be « Patrimoine industriel le long du canal » 67 Lalibre.be (2012) « La Meunerie du canal rénovée » 68 Reflexicity.net « COOP » 66

- 73 -


rooftop + vue

centre d’interprétation espaces multifonctionel

services

entreprises (2 bâtiments classés) canal de Charleroi

Figure 43 - Coop, réalisé par Bogdan & Van Broeck - 74 -


Les deux bâtiments classés existants sont dépouillés et utilisés comme de grands conteneurs flexibles. Entre les deux, à l’intérieur d’une coquille d’architecture légère, toutes les fonctions auxiliaires sont insérées : escaliers, ascenseurs, techniques, espaces de service, etc., n’interférant pas avec la structure du patrimoine. Au rez-de-chaussée, les espaces ouverts de réception et d’administration relient directement le projet au quartier. Une toiture panoramique a également été déposée sur le bâtiment à front de rue, offrant un restaurant, un jardin sur le toit et des terrasses. Elle fonctionne comme un phare le long du canal et un point de repère qui relie le site à la ville.69 Cependant, le lien important qui existait autrefois avec le canal n’est plus d’actualité.

69

Bogdanvanbroeck.com « COOP » - 75 -


Meunerie bruxelloise

Figure 44 - Meuneries Bruxelloise - 1950

voie viaire

silos

cour de manutention

chemin de fer

CER

ES

canal de Willebreock

arrivée de la matière dans l’usine tansbordement matière première

Figure 45 - Usines Ceres - 76 -


2.4.2 Industries traditionnelles encore liées au canal c. Meunerie Bruxelloise En face du site de la brasserie de la Marine, sur la rive droite du canal se trouvent la meunerie Bruxelloise, (l’actuelle usine Ceres). En 1889, la roue du tout premier moulin de la meunerie commencèrent à tourner le long du canal de Willebroeck, dans le petit village brabançon de Haren. Cette localisation entre la voie d’eau et le chemin de fer servait non seulement de force motrice pour le moulin, mais également de voie de transport non négligeable. En effet, les minoteries70 de très grande capacité étaient destinées à traiter les blés importés d’Amérique du Nord. La meunerie Bruxelloise était également dotée de plusieurs silos en béton et maçonnerie, en métal ou entièrement en béton. Leur construction s’est échelonnée des années 1907 aux années 1960, constituant un véritable catalogue des techniques de construction de telles installations.71 En ce qui concerne l’usine elle-même, elle illustre une typologie liée aux exigences spécifiques d’une organisation rationnelle de la production de farine. Cette typologie apparut dès le milieu du XVIIIe siècle, lorsque les opérations de nettoyage du grain et de blutage72 de la farine, précédant et suivant la mouture proprement dite, furent regroupées au sein d’un même bâtiment. Entièrement mécanisées, ces différentes étapes imposaient une organisation verticale de l’usine : les grains ou la farine tombaient d’une machine dans la trémie de la suivante. D’autre part, pour obtenir une transmission efficace de la force motrice et permettre l’installation de batteries de cylindres sans cesse plus importantes, il devint nécessaire d’aligner les machines et donc d’étendre les usines en longueur. Cette double exigence conféra aux minoteries une physionomie particulière, qui reste perceptible dans l’organisation des bâtiments de la Meunerie Bruxelloise. Aujourd’hui, la minoterie de Haren est toujours active. La ressource en eau du canal ne lui sert plus d’énergie hydraulique car tous leurs moulins fonctionnent à l’électricité. Cependant, elle est toujours utilisée pour ses autres avantages tels que la navigation intérieure qui est un moyen de transport important pour l’approvisionnement de la matière première principale de la minoterie : le blé (en plus du train, qui pénètre sur le site de l’entreprise et des camions).73 70

Établissement industriel pour la transformation des grains en farine. [Petit Robert (2020)] Huberty C. et Valente Soares P., « Les canaux bruxellois ». La fonderie n°25, Bruxelles ville d’art et d’histoire, Ed : Région de Bruxelles Capitale. p.48-49 72 Séparation du son et de la farine, tamisage. [Petit Robert (2020)] 73 Ceres.be « Historique Ceres, groupe Soufflet» 71

- 77 -


Inter-béton

Figure 46 - projet de réhabilitation d’Inter-béton, BC architecture auvent : bureaux Havenlaan

promenade public

tour Up Site bassin Vergote

livraisons

tour de mélange activité industrielle

auvent : coworkings

Figure 47 - Inter-béton, projet de BC architecture - 78 -


d. Inter-béton L’entreprise Inter-Béton est un site de production de béton, entourée de bâtiments industriels sommaires et de tas de sables, loin du bucolique et des embruns.74 Elle se trouve le long du canal de Bruxelles, au niveau du bassin Vergote, dans un quartier très dynamique de la ville de Bruxelles. Cet emplacement vaut cher pour eux : à deux pas des chantiers du centre, gourmands de béton, et le long du canal par où arrivent les livraisons. L’usine a donc un immense potentiel de reconversion post industrielle, dont les acteurs tant privés que publics ainsi que les citoyens sont bien conscients. En effet, ils négocient des visions novatrices sur le futur. C’est pourquoi le Bouwmeester bruxellois a organisé un concours de design envisageant la réhabilitation de l’infrastructure d’Inter-béton vers une meilleure intégration urbaine. C’est finalement le bureau BC architecture qui l’a remporté. Leur proposition vise à répondre à des questions pragmatiques par des solutions novatrices et favorables tant à l’industrie qu’à la ville. Le site va donc profondément muer, pour un profil plus soigné avec moins de nuisances. Afin de contrôler le bruit et la poussière du processus de mélange du béton, un auvent géant sera suspendu au-dessus de la zone d’activités. Cet auvent sera soutenu à intervalles réguliers par des murs en blocs de béton secs, qui seront fabriqués à partir des déchets de béton provenant des camions malaxeurs. L’auvent a été conçu avec l’épaisseur d’une couche de plancher, afin de permettre une grande portée et accueillir les bureaux d’Inter-Beton sur une extrémité. Ces bureaux auront une vue d’ensemble sur les activités de l’industrie. À l’autre extrémité, l’auvent surplombera l’espace public et un escalier d’entrée descendra en spirale pour rejoindre la promenade publique. Une fonction publique à l’intérieur du auvent sera également ouverte : ateliers, espaces de répétition, coworking, ... Situé au croisement du nouvel axe Tour&Taxis et de la Havenlaan qui sera reconvertie, l’auvent encadre la tour de mélange en béton et la transforme en un point de repère accessible à la ville, rendant Bruxelles fière de son intégration industrielle dans les nouveaux quartiers à forte mixité.75

74 75

Baele M. (2017) « Le ‘plan Canal’ bruxellois à l’honneur à Marseille ». RTBF BC architects (2016) « Inter-Béton ». - 79 -


Recypark

Figure 48 - Projet Recypark, implantation de la structure réemployée

structure Rotor

skatepark bruxelles propreté ballade verte chemin de fer

canal de Charleroi

Coop

Figure 49 - Projet de Recypark, réalisé par 51n4e - 80 -


2.4.3 Sites d’activités productives d’économie circulaire e. Recypark Les parcs de collecte à Bruxelles deviennent de plus en plus populaires et indispensables. Ils permettent de répondre à l’importante demande en économie circulaire à Bruxelles, en récupérant les déchets des uns pour en faire les ressources des autres. Cette nouvelle demande d’intégration de plateformes de recyclage au cœur de la ville devient un réel défi urbain, afin qu’il fasse partie intégrante de la ville.76 En effet, le terrain proposé pour la réalisation de ce projet se trouve dans le centre à Anderlecht, le long du canal de Charleroi, sur une partie des anciens quais Demets (voir chap. 1). Ce choix d’implantation semble très judicieux car il est un témoin de l’ère industrielle et de la ville productive et autonome (ce à quoi la société veut retendre aujourd’hui avec l’économie circulaire …). Concrètement, pour faciliter l’intégration de ce nouveau Recypark dans l’environnement urbain, le projet propose de le juxtaposer à un espace public relié au canal. Ce lieu public comprendra un skatepark et des espaces verts, créant une zone tampon qui atténue les nuisances générées par le programme d’un Recypark. De plus, cette diversité permet au projet d’être ouvert à tous et de devenir un véritable lieu de rendez-vous et de vie. Les skaters et les habitants du quartier pourront s’y rassembler, tout en renouant des liens avec la voie d’eau qui était si importante à l’époque industrielle.77 En ce qui concerne la confection architecturale du lieu, Bruxelles-Propreté souhaitait favoriser les filières de réemploi pour intégrer la dimension de recyclage dans la construction de leurs infrastructures. Ainsi, l’entreprise Rotor a proposé de réutiliser une structure existante pour recouvrir la Halle collective (figX). Finalement, ils ont trouvé une structure d’un ancien centre équestre à Liège, vouée à être démolie. Elle se compose d’une succession de portiques en bois lamellé-collé de 26 mètres de large, couvrant un vaste espace continu. La forme singulière des arches offre à cette dernière une identité particulière, dont le projet dessiné par les architectes tire pleinement parti.78

76

51n4e.com (2016) « Recypark » Borret K., (2018) « Brussels productive city ». Bruxelles, Ed : Bouwmeester Maître Architecte, p.38-39 78 Rotordb.org (2016) « Recypark Anderlecht » 77

- 81 -


Marly

Figure 50 - Projet du Marly, nouvelle vision du déchet, verdure atrium de verdure parc Meudon

bureaux cantine

chaussée de Vilvorde

cour de manutention

parking extérieur sur le toit

canal de Willebroeck

Figure 51 - Projet pour Bruxelles-Propreté au Marly, réalisé par Tetra architecten - 82 -


f. Marly Sur un site industriel de 10 000 m² en bordure de canal, dénommé Marly (entre l’ancienne brasserie de la Marine et les cokeries Marly), l’Agence Bruxelles Propreté souhaite accueillir une partie de son service nettoyage qui centralise près de 400 agents au départ du site. Ils souhaitent améliorer leur intégration urbaine, la qualité de l’aménagement paysager et la qualité architecturale des constructions afin de redorer l’image du « déchet ». Le bureau Tetra architecten a su relever ce défi de combiner activités logistiques et espace vert. Leur proposition spatiale étire le parc Meudon vers le canal à travers la parcelle qui devient une grande zone verte, offrant une nouvelle identité au sein du paysage industriel. Autour de cette masse végétale viennent s’empiler de manière fonctionnelle, compacte et qualitative les différents composants du programme (bâtiment à destination des employés, parking intérieur, parking extérieur) afin de minimiser les nuisances sonores et les gaz de combustion du matériel roulant pour les employés. La zone verte plantée d’arbres à hautes tiges prend une position centrale. Véritable espace de vie, elle agit comme un filtre et augmente le confort de travail pour le personnel tout en conservant la qualité de l’air pour le quartier avoisinant. La proposition redéfinit un alignement à rue perméable vers l’intérieur d’ilot, révélant depuis le domaine public la masse verte et les activités de l’entreprise. De plus, le projet prévoit la possibilité plus tard de pouvoir traverser le site dans une zone verte continue, permettant ainsi de connecter depuis les quais du canal, le parc Meudon et le haut résidentiel de Neder-over-Hembeek. 79 Le bâtiment est conçu comme une ‘structure caissonnée en béton’.80 Cette structure régulière se veut donc flexible et adaptable afin d’accueillir une grande diversité d’affectations futures. Afin de donner plus d’ampleur au jardin de verdure, le bâtiment a 2 étages et les camions sont garés en toiture. En ce qui concerne les locaux pour le personnel, ils se trouvent dans l’aile nord. Le long de la façade sud de cette aile, qui donne sur le bois-jardin, sont organisés les bureaux et la cantine, captant ainsi la chaleur du soleil (surtout en hiver lorsque les arbres sont nus). La cantine est traitée comme un véritable espace de rencontre avec de belles qualités spatiales, espace ouvert, à double hauteur, positionnée de manière centrale par rapport au jardin.81 79

Baele M. (2017) « Le «plan Canal» bruxellois à l’honneur à Marseille ». RTBF Borret K., (2018) « Brussels productive city ». Bruxelles, Ed : Bouwmeester Maître Architecte, p.36-37 81 Bouwmeester Maître arhcitecte (2016) « Marly – Bruxelles propreté, fact sheet » 80

- 83 -


Conclusion : vers un déploiement de l’économie circulaire de la construction le long du canal ? « Il n’y a pas d’industries sans transport fluvial, ferroviaire ou routier, sans logements pour les ouvriers et pas d’industries sans lieux de vie sociale, culturelle et politique ».82 En effet, le canal a rempli ces conditions pendant des siècles jusqu’il y a 50 ans, avant la désindustrialisation. Ce territoire était un centre économique intense, faisant tourner la région de Bruxelles, entre-autre grâce à son emplacement central et stratégique le long d’une voie d’eau. Et si cette ville redevenait productive ? Quelques petites initiatives ont déjà été prises dans les anciennes industries dont nous héritons le long du canal favorisant l’économie circulaire. Entre interventions durables, adaptables et flexibles, amélioration de la voie d’eau et de ses atouts, valorisation du patrimoine industriel, mise en place d’espaces publics, promotion de la mixité des fonctions, réemploi des matériaux, collaborations et partages, gestion des flux, … le territoire du canal a un potentiel immense de reconversion productive. Concrètement, Bruxelles veut favoriser une nouvelle forme d’économie soucieuse des enjeux démographiques et environnementaux actuels : l’économie circulaire. Celle-ci permettrait de tendre vers une ville productive et autonome. Dans cette logique, la région veut rénover son parc immobilier afin de le rendre énergétiquement plus performant et de pouvoir accueillir la population grandissante. Ainsi, le secteur de la construction va être énormément sollicité dans les années à venir et pour qu’il rentre dans une logique de circularité, une logistique de ‘réemploi’ doit être mise en place. Longtemps considéré comme une barrière, le canal se présente désormais comme le trait d’union capable de réconcilier les quartiers centraux et le reste de la région. Ce territoire, qui constitue un échantillon exacerbé des grands défis régionaux, peut devenir l’axe prioritaire d’une recomposition urbaine tournée vers une meilleure intégration des dynamiques économique, immobilière, sociale, environnementale et culturelle. Plus précisément, le Canal est un lieu propice pour le relancement de la production au sein de la ville tout en respectant les nouveaux enjeux environnementaux actuels. Finalement, notre question se précise : comment réhabiliter le patrimoine industriel lié à la voie d’eau pour qu’il participe au lancement de la ville productive et plus particulièrement pour qu’il réponde à une forte demande en réemploi ? 82 Vanderhulst G., (2015) « Canal, vous avez dit canal ? » ADT.brussels, p.43 - 84 -


- 85 -


FORME structure industrielle le long du canal

BESOINS économie - logements

démographie

environnement

RESSOURCES transformation matière première

matière première

bâtiment ressource en matière première

Figure 52 - Forme - besoins - ressources - 86 -


CHAPITRE 3 : Le patrimoine industriel lié à la voie d’eau comme levier de l’économie circulaire de la construction Une forme architecturale donnée (le patrimoine industriel lié à la voie d’eau), des besoins définis (enjeux démographique, économique et environnemental) et des ressources à long terme (naturelles et artificielles) : comment faire coïncider le tout pour faire évoluer la région de Bruxelles vers une ville productive et autonome ? Nous allons tenter de répondre à cette question en proposant une hypothèse méthodologique de réhabilitation pour le patrimoine industriel lié au Canal de Willebroeck et Charleroi. Plus particulièrement, nous avons vu que le réemploi est un outil très intéressant à utiliser pour les chantiers de rénovation à Bruxelles, il favorise l’économie circulaire et permet à la ville d’être autonome et indépendante. Cependant, cette méthode demande une organisation rigoureuse et la mise en place d’une certaine logistique (synthèse du chap.2) : représentation du territoire et ses flux, diagnostic structurel, fonctionnel et matériel du bâtiment et proposition de programmation. Nous allons développer ces éléments en 4 partie distinctes, puis nous l’appliquerons sur une ancienne industrie le long du canal : la brasserie de la Marine.

- 87 -


brasserie de la Marine

Figure 53 - Territoire de la région de Bruxelles : voies de transports - 88 -


3.1 Gestion des flux à Bruxelles et le long du canal 3.1.1 Les flux sur le territoire de Bruxelles et du canal Tout projet commence par une étude fine et détaillée du territoire sur lequel il s’implante. Dans le cadre de la réhabilitation par le réemploi, cette étude a une importance d’autant plus cruciale qu’elle va permettre d’analyser les apports de matières les plus proches et donc les plus rentables d’un point de vue économique et écologique. Ainsi, cette analyse doit permettre d’une part de comprendre les enjeux de la région (comme réalisé en début du chap. 2) et du quartier propre à l’implantation de l’industrie à rénovée., d’autre part, elle doit analyser finement les différents flux de matières possibles jusqu’au bâtiment. À Bruxelles, le long du canal, 4 voies de transport majeures sont identifiées pour la gestion de ces flux : la voie fluviale, la voie viaire, la voie ferrée et la voie cyclable.

a. voie fluviale

En ce qui concerne la voie fluviale, elle est au cœur de notre recherche qui discute du ‘patrimoine industriel lié au canal’. Ce canal de la Senne est entièrement géré par le Port de Bruxelles, il est le partenaire de référence en matière de transport et de logistique dans la capitale. Il est le second port intérieur belge et jouit d’une localisation idéale au centre de l’Europe. C’est un port maritime accessible 24h sur 24, la navigation depuis le port d’Anvers se fait en cinq heures par un canal qui ne compte que deux écluses.83 De plus, le canal est la seule voie de transport qui traverse la ville sans embouteillage et qui peut doubler facilement sa capacité d’utilisation. Plus précisément, le transport par voie d’eau permet l’acheminement de masses lourdes, en grande capacité et en vrac, transportées sur de grandes distances. Les 5 matières principales qui y sont transportées sont : - matériaux de construction : gravier, ciment, sable, … (62%), Inter-béton, par exemple, fait venir ses matières premières en bateau et achemine ses produits finis vers les chantiers de Bruxelles et des alentours par camions. - produits pétroliers (21%) - divers : conteneurs (9%), avec un terminal qui permet le transbordement de conteneurs entre les bateaux et les camions - produits agricoles (3,5%), la meunerie Ceres, par exemple, importe du grain et exporte de la farine par le canal 83

Port de Bruxelles.fr « À propos du port » - 89 -


Bruxelles : voies d’eau

505

730

3850

600

4574

700

505

300

3850

600

Véhicule - capacité : 1 350 T (50 à 60 camions) 730

270

730

505

4574

505

3850

3850

330

300

600

600

4574

4574

Giration

700

1925

300

500

380

700

>400 700 110 300

300

700

300

505

700

730

3850 230

730.0

3185

270.0

330.0

300

300

600

350 465 1925

Stationnement à quai

4574

425.0

4000

500

1400

300

700 380

1925

1925

>400 110

Déchargement

700 1200

300

500

500

1040.0

25

425.0

300

380

230

110

330.0

400

>370

300

3185

>400

350

940

245

300

>400 110

Matériaux en vrac : sable, gravier, terre, ... 300

25

110 300

380

380 >400 110

>370

300

465

300

Figure 54 - Flux générés par la voie fluviale à Bruxelles 400

425.0

1200

- 90 -

730.0 270.0

1800

4000

230

270.0

300

230 3185

3185


- minerais et ferrailles (1,6%), l’usine Duferco, par exemple, recycle les vieux métaux et les transportent par bateau vers des lieux où ils seront fondus. Le transport par voie d’eau constitue un choix intéressant tant écologiquement qu’économiquement. La pollution, la consommation d’énergie et les nuisances sonores sont moindres qu’avec le transport par route ou par rail. Une péniche de gabarit standard (env. 1350 tonnes) transporte plus ou moins autant de marchandises que 50 à 60 camions. Bien entendu, cette solution n’est intéressante que si la marchandise débarquée est destinée à la ville elle-même et n’engendre pas de transport supplémentaire en camion.84 Cependant, il est important de noter que le transport sur le canal n’est pas si simple ! En effet, d’une part le rétrécissement du canal au niveau du pentagone ne permet pas à tous les bateaux de traverser la ville et d’autre part, l’écluse dans le centre ralenti énormément le trafic fluvial. Pour revenir au développement d’une ville productive, le Port de Bruxelles ambitionne pour 2040 de prendre des engagements concrets, se traduisant par 6 tendances clés : 1. Croissance du transport par voie d’eau et en particulier de conteneurs. 2. Transition environnementale et énergétique. 3. Optimisation de la logistique dans le secteur de la construction et du bâtiment, et réutilisation des matériaux. 4. Logistique urbaine durable. 5. Economie circulaire. 6. Intégration urbaine. Le master plan du Port pour 2040 est donc totalement en lien avec les ambitions de la Région bruxelloise qui préconise la relance d’un canal productif basé sur un modèle d’économie circulaire. De plus, le Port veut augmenter son trafic fluvial afin que la voie d’eau bruxelloise soit rentabilisée au maximum.85

84 85

Coordination Senne « Les cours d’eau et l’eau à Bruxelles ». Fiche 9 – enseignant, p. 4,5 Akki Y., Baert A., Moens A., Matthis P. (2020) « Master plan 2040 ». Port de Bruxelles - 91 -


4574

006

Bruxelles : réseau viaire 700 1400

700

700

940

300

380

1925 700 300

1400

300 700

1200

940

245

ring

700

500

700

300

300 700

route le long du canal

4754

>400 110

300

700

230 1200

730.0

192

380

700

230

3185

270.0

700 350

730.0

3185

>400 110

270.0

300

500

300

330.0

350

940

245

1925

350

465

Véhicule - capacité : 45m³ / 20m³ 1200

700

330 300

500 1925

730.0

330

270.0

380

300

300 380 300

1200

940

245

425.0

730.0

25

330

300

5291

>370

505 230

25

110

270.0

>400 110

300

300

>370

25

425.0

300

110

>370

300

300

350 600

330.0 1040.0

465

600

730

270

380

31

505

600

350

425.0

25

700 300

300

300

940

245

1200

330

4000 505

1925

230

4000 1040.0

1200

>400 110

300

500

1200

300

730

270 730

270

4000500330

330.0

>400 110

730

270

940

245

4000

730

270

>400 110

465

425.0

465

1925

1925

1400

Giration

3185

380

300

700

0

230 465

425.0

1400

3185

350

330.0

230

1400

505 4574

500

300 380 >400 110

0583

300

700

700

1925

600

500

>370

005

425.0

300

940 730.0

230

270.0

380

230 1200

300 350

1200

330.0

300

230700 700

3185

110

730.0

465 1200

350 300

380

270.0

270.0

465

110

330.0

700 1040.0

300

700

25 25

0

1200

400

400 4000

4000

300 300

>370 >370

110 110 300

425.0

300 300

300

0

300

750

425.0

1200

25

25

380

300

>370300

>370 300

300

1040.0

>370300 300>370

300

300

1400 700 380 700 110

1040.0

300

>400

>400

300

1200

003

>400

073>

245

245 245

400

0940 03 940

750 300 300

400

400

>400 110>400 300 110

1800

25

110

>370

300

300

500 >400 300 >370 500300 110

940

380

380 500 >400 110

1200

0.524

730.0

270.0

330.0

1200 730.0

083

270.0

730.0

270.0 425.0

330.0 730.0 330.0

1200

011 270.0

1200 330.0

1800 730.0

270.0

425.0

Figure 55 - Flux générés par la voie viaire à Bruxelles 750

0.0401

1200 300 1200

750

750

500

380 380

>400 110 940

940 300

300

25

52

400

003

073>

245

1800

245

1200

110

400

750

003

300

300

380

110

300 1200 1200

>370

110

>370

380

400

110 300

380 25

Matériaux : gros éléments de construction 5/2 petits encombrants 1800 011 400

25

300

400

400

>370

300

25

400 700

110

110 300

1400

700 1800

1200

300

4000

300

700

300 425.0

003

425.0

400

380

1200

300

1400

>400 1400

1200

Déchargement

4000

25

300

1400

425.0

0004

1200

4000

300

300

564

300

465

053

25

1040.0

110 300

425.0

>400

750 25

1200 110

>370

300

032

110700

1800

110

300

700

700 300 >370 300 300 >370 300

400

1200 425.0

3185 25

465

700

5813

3185

465 350

1040.0

1800

300

230

350 300

400

1200

700 300

700

700 700

700

25 25

425.0

700

230

425.0

>400

425.0

330.0

3185

300

>400 350

400 730.0

3185

425.0

330.0

- 92 -

425.0

004 425.0


b. voie viaire Pour ce qui est de la voie viaire, elle peut accueillir différentes formes de véhicules, à savoir les camions, camionnettes ou encore voiture. Cette variété de véhicules permet de transporter facilement un large panel de matériaux : des dalles bien rangées sur palettes, des grandes structures, du mobilier ou encore des petits objets. Le camion et/ou la camionnette restent un moyen de locomotion fréquemment utilisé, qui effectue souvent la liaison entre les moyens de transport ferroviaires et fluviaux, mais aussi depuis les lieux ne bénéficiant pas de ces infrastructures. Par ailleurs, la voie routière le long du canal est directement reliée au ring en périphérie permettant un acheminement rapide (voir carte). D’où l’importance d’espaces logistiques conséquents dédiés à l’accueil de ce type de véhicules.86 La voie viaire est actuellement la voie la plus empruntée dans nos pays car elle est flexible et confortable. Cependant, ce moyen de transport pollue et est fortement dépendant du trafic… Bruxelles étant la 21ème ville la plus embouteillée d’Europe (selon le classement TomTom), il est peu fiable.87

86

Flores M. (2020). « La ville productive, histoire d’une mutation ». Travail de fin d’étude, Master d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme (LOCI – UCL). 87 M.LA. (2020) « Voici la carte des nouvelles et futures pistes cyclables à Bruxelles ». DH Les sports, consulté en ligne - 93 -


505

730

270

3850

330 600

Bruxelles : réseau de tram STIB 505

1925

4574

3850

1925 1925

600

700 300 4574

500

700

1925

1925

700

500

300

380

1925

1400 700 1925

Véhicule 500

230

230

3185

3185

3185

3185 380

350

5

465

230 3185 465

>400 110

230

capacité 350 : 180 m³ (4x camions)

465 350 940

245 500

4000

465

300

465

300

1200

4000 4000 4000 Stationnement à quai 230

425.0

3185

1925

3185 730.0

300 330.0

350

4000

4000

270.0

300

230

3185

350

300

465

465 425.0

4000

Déchargement

1040.0

25

425.0

300

230

>370

300 1040.0

425.0

300

110 >370

25

110 300 >370

300

350

425.0

25

25

300 300

>370

110 300

25

300300300 >370 >370 300

465

110

4000

300

3185

25 300

300

300

300

1200

25

110

>370

1040.0

>370

300

25

425.0

4000

300 300

25

380

300

110 300

>370

>370

110 300

25

110

300

300

>370

300

380

>400

110

1040.0

425.0

300

400

25

400

300

>370

>400 25

110

300

300

>370

300

Matériaux : encombrants et éléments de construction

400

400

400

1200

380 110 1800 1200

1800

750

400 750

400

Figure 56 - Flux générés par la voie de tram à Bruxelles, ‘tram-cargo’ 1800

750

- 94 -

25 300

>370

300


c. voie ferrée La voie ferrée, quant à elle, regroupe non seulement les trains mais aussi les trams et les métros. En effet, toute la rive droite du canal est superbement desservie par le chemin de fer qui traverse la ville du nord au sud, donnant un double-accès aux industries de ce côté-là. En parallèle, la rive gauche n’est reliée qu’à une forme de voie ferrée, le tram de la Stib. Ce dernier, étant largement développé dans tout Bruxelles, il pourrait relier facilement des points clefs de la région à la zone ouest du canal, au moyen de ‘tram-cargo’. Ce concept encore peu développé, a démarré à Zurich et à Dresde. Il permet de tirer parti des infrastructures déjà existantes pour distribuer des marchandises dans le centre-ville et réduire le nombre de camions, offrant des solutions pour la gestion de la logistique urbaine. Plus précisément, à Zurich le tramway est utilisé pour les transports en commun mais également pour collecter les déchets encombrants, produits métalliques et électroniques au sein de la ville. Il est composé de deux services : le Cargo-Tram qui collecte les encombrants et le E-Tram qui collecte les produits électroniques et informatiques. Onze arrêts ont été établis sur l’ensemble du territoire de la ville avec une fréquence de 15 jours, alternativement pour le Cargo-Tram et le E-Tram. Chaque arrêt a une durée d’une journée ou demi-journée. Par ailleurs, le tram est composé d’une voiture récupérée des années 1930 et tracte deux autres voitures de collecte. Le fonctionnement de l’ensemble est assuré par 3 agents, qui aident les particuliers à déverser leurs déchets dans la benne. Ce projet est fort apprécié des habitants qui disposent ainsi à proximité de chez eux d’un point mensuel pour se débarrasser de leurs encombrants tout en créant des moments de rencontres amusants. De plus, outre la création de voies permettant le stationnement du tram-cargo, peu de moyens ont dû être mis en œuvre pour la réalisation de ce concept. Cette installation permet de réduire le nombre de véhicules dans la ville.88 Ainsi, en logistique urbaine il est donc possible d’imaginer des solutions simples, effectuées avec du matériel récupéré (c’est la moindre des choses pour la collecte des déchets recyclés) et apportant aux habitants un service indispensable.

88

Logicites.fr, Libeskind J. (2015) « Le Cargo-Tram de Zürich, ou comment utiliser le tramway pour la collecte des déchets » - 95 -


300

>400 110

Bruxelles : réseau de pistes cyclables

230

25

270.0

330.0

300

110

350

>370

3185

230

230

350

350

465

3185

>370350 300

300

300

3185230

3185

25

465

465

465

3185 425.0

4000

4

4000

4000

3850

465

300

3850

Véhicule

120

300

245

4000

4574

3850

300

300

300

150 1925

90 90 110

120

150

capacité245: 1.3 m³110

4574

120

90

270

150

200

425.0

74

3850

1040.0

25

425.0

425.0

Giration

245

1040.0

300

>370

270

150

>370

110 300

300

Stationnement 4574

465

380 110

110

>370

120

90

25

25

300 300 300 >370 300 300 >370 >370 300

125

280 110 230

245 280

>400 270 >400 270

110 300

>370

200

150 200

25 300

270

300

380

4000

300

200

90

245

25 110270

25 110 110 >370 300 >370 300

300 300

120

25

3185

270 270

110

425.0

25

3850

74

0

380

1925

125

200 230 200

>400

>400

270

125

280 200

270 230 200

110

400

25 300

>370

200

400

400

400 300

125

280

Déchargement

1925

>400

230 200

1925

125

280 >400

230 200

1800 1925

750

Matériaux : petits encombrants, ‘déchets’ 1925

1925

Figure 57 - Flux générés par la voie cyclable à Bruxelles, ‘vélo-cargo’

230

350 350

3185

230

3185

465

- 96 -

110 300

25

3


d. voie cyclable Finalement en ce qui concerne la voie cyclable, elle est de plus en plus présente à Bruxelles et spécialement bien développée le long du canal. Le vélo à 2 roues tel qu’on le connait pourrait paraître anecdotique pour le transport de matériaux… Cependant, avec une roue en plus, un coffre et une belle piste cyclable, les petits encombrants pourraient être collectés dans la région au moyen de ‘vélo-cargo’. En effet, le vélo est un moyen de transport de plus en plus promu en région bruxelloise, surtout depuis avril 2020, avec la crise du coronavirus. Les habitudes de déplacement ont été bousculées et l’espace public bruxellois a été complètement repensé. « A la sortie du confinement, les transports en commun bondés à l’heure de pointe, ce n’était plus acceptable. On devait trouver d’autres solution à l’usage de la voiture et des transports en commun » explique la porte-parole de la ministre de la Mobilité, Elke Van den Brandt (Groen) « Pour les petites distances, les Bruxellois sont généralement contents de rouler à vélo, mais il ne se sentaient pas en sécurité dans le trafic. ». Ainsi, 40 km de pistes cyclables en plus ont été installées dans la capitale en 2020, favorisant le vélo et non la voiture individuelle.89 Par ailleurs, ce moyen de transport alternatif encourage la bonne santé de la population. Une étude de l’Institut allemande de recherche Mercator affirme qu’en Europe, les nouvelles infrastructures cyclables provisoires ont permis d’augmenter la circulation à vélo de 7 % en moyenne. Si ces habitudes perdurent, les chercheurs allemands estiment que ces infrastructures pourraient générer trois milliards de dollars d’économies pour la santé par an sur le continent, ce qui n’est pas négligeable.90

3.1.2 Les flux dans l’espace productif La transformation de matière génère des flux au sein de l’industrie. Ces flux vont grandement conditionner l’architecture du bâtiment. Ainsi, à la suite de l’étude des flux sur le territoire et au préalable du diagnostique du bâtiment, il est important de comprendre comment la matière circulait à travers les équipements de production. De son arrivée par voie fluviale, ferroviaire ou viaire à son export vers le marché de la ville, elle suivait un parcours particulier. 89

M.LA. (2020) « Voici la carte des nouvelles et futures pistes cyclables à Bruxelles ». DH Les sports, consulté en ligne 90 K.F. (2020) « Découvrez la carte interactive des nouvelles pistes cyclables créées à Bruxelles » Rtbf info - 97 -


3.2 Dispositifs architecturaux, structurels et fonctionnels du bâtiment industriel La deuxième étape du processus de réhabilitation consiste en la réalisation d’un diagnostic des dispositifs architecturaux du bâtiment ainsi que son fonctionnement interne et externe. « Chérissez la générosité des bâtiments industriels et des infrastructures »91. Comme nous avons pu le voir dans les chapitres précédents, tous ces bâtiments construits le long du canal au 19ème et 20ème siècle avaient une vocation industrielle spécifique, dépendant d’une ressource naturelle précise. En outre, contrairement à ce qu’il se passait dans la ville portuaire d’Anvers ou dans le bassin houiller belge, l’industrie bruxelloise était très diversifiée.92 Nous héritons donc d’un patrimoine industriel immense dont il faut tirer parti. L’état de ce patrimoine n’est plus intact, cependant leurs typologies spécifiques, leurs espaces de travail et leurs structures dans la ville, constituent un contexte stimulant et abordable pour de nouvelles initiatives de startup.93 Ainsi, il est important de comprendre le fonctionnement architectural du bâtiment industriel afin de les réhabiliter de la manière la plus juste tout en respectant le patrimoine ancien.

3.2.1 Structure : espaces polyvalents Tout d’abord, une synthèse de la structure générale du bâtiment doit être établie, reprenant un métré détaillé ainsi que des schémas des accès, des circulations et des entrées de lumière. Deux types de structures se distinguent principalement dans les constructions industrielles. La première est celle dites de ‘poteaux/poutres’. Elle permettait de réaliser des immenses espaces ouverts, avec des hauteurs sous-plafond importantes, structurés par des colonnes et des poutres régulières (en béton ou acier) afin de pouvoir réaliser sa production en masse ou de stocker sa matière. Pour la réhabilitation, ce genre d’espaces permet d’accueillir une multitude de fonctions de façon totalement réversible et adaptable. Des cloisons légères (de réemploi) peuvent y être installées très simplement afin de redéfinir de nouveaux espaces. De plus, pour autant que ces cloisons soient assemblées de manière simple, elles peuvent être déplacées facilement, rendant l’espace totalement modulable. Ces espaces étant souvent profonds, ils ne facilitent cependant pas l’entrée de lumière. 91 Atelier Brussels (2016). « A good city has industry ». Bozar. p. 11 (2ème clé du décalogue) 92 Viaene P. (2013) « Le paysage de Bruxelles entre ruralité et industrie ». Bruxelles patrimoines (hors-série), p.248 93 Atelier Brussels (2016). « A good city has industry ». Bozar. p. 11 - 98 -


La seconde typologie structurelle des industries est celle des murs porteurs (en briques), elle permet de créer des espaces en longueur et dénués de tout obstacle grâce aux grandes portées des poutres. Cette typologie en longueur favorise l’entrée de lumière et peut également accueillir toutes sortes de fonctions. Son seul inconvénient est que les murs ne sont pas modulables et difficilement perçables.

3.2.2 Patrimoine : espaces spécifiques En parallèle de ses immenses espaces ouverts, les industries présentent souvent des caractéristiques architecturales uniques, spécifiques à leur production, telles que des salles de machines, des silos, un moulin, des grues et portiques, une cheminée, une touraille, des fours, … Ces espaces très spécifiques sont toujours plus difficiles à réhabiliter. Ils demandent de réaliser une analyse encore plus fine de représentation afin de comprendre exactement les espaces (surface au sol, hauteur sous plafond, machines, entrée de lumière, spécificité architecturale, distribution, accès, climat et ambiance, …). Une rénovation plus lourde du patrimoine étant souvent nécessaire pour ce type d’espaces, elle devra être dument justifiée afin de ne pas entraver leurs valeurs patrimoniale. Toutefois, les contraintes architecturales de ce type de lieux favorisent l’imagination. Elles permettent d’innover et d’inventer de nouveaux concepts encore jamais exploités, ne requérant pas d’immenses interventions. Comme la 3ème clef d’action pour favoriser la ville productive le spécifie : « des initiatives modestes et nombreuses façonneront l’économie du futur ». C’est ainsi que plusieurs entreprises innovantes sont nées dans une arrière-cour, un garage ou encore un entrepôt. Pour rendre la ville productive et inclusive, de tels petits espaces dédiés aux entreprises sont d’une importance capitale.94

3.2.3 Activités complémentaires : forme de circularité Le dernier type d’espaces présents dans les industries sont les pièces qui accueillaient des activités complémentaires, indispensables au bon fonctionnement de l’industrie, sans être reliée directement à sa production. Tout d’abord, on retrouve des espaces de service pour l’industrie : confection d’outils (forge), préparation des chevaux (écuries) puis celle des voitures (garage), entreposage du charbon qui faisait tourner les machines de l’usine, atelier de réparation, vestiaire pour les ouvriers, … 94

Ivy, p. 15 - 99 -


Ensuite, des pièces étaient dédiées aux administrations et aux bureaux de l’industrie. Finalement, une conciergerie et un accueil étaient aussi présents. La mondialisation étant moins développée au 19ème, début 20ème siècle, ces espaces étaient indispensables pour maintenir une régularité et une autonomie au sein de l’usine. Ils constituaient souvent une aile entière de l’industrie et se trouvaient à une extrémité du site. Ainsi, pour leur réhabilitation, tout comme les espaces polyvalents et spécifiques, il est important de bien les comprendre (métré, accès, distribution, lumière, …). En ce qui concerne l’implantation d’une fonction, il faut garder à l’esprit que l’architecture de ces lieux était au service de l’ensemble du site industriel et qu’ils étaient également une sorte de forum de rencontres et d’échanges, communs à tous les acteurs présents sur le site. Par ailleurs, ils permettaient de maintenir une forme de circularité au sein de l’industrie et la rendait autonome. Aujourd’hui, ces espaces seraient tout à fait propices à la multifonctionnalité ‘de base’, avec des salles de coworking, un réfectoire (style ‘food court’), des bureaux administratifs, un secrétariat ou encore des ateliers de réparation d’outils et de machines. En effet, comme conseillé dans la 9ème clé de ‘A good city has industry’, pour tendre vers une ville productive, « les alliances entre entreprises optimisent l’espace raréfié ». Industriels, entrepreneurs, promoteurs, autorités, habitants, … chaque acteur à sa valeur ajoutée pour faire grandir et évoluer la ville productive.95 La collaboration et la mutualisation est à favoriser au maximum entre petites entreprises et au sein même des grandes industries.

3.2.4 Manutention : typologie des cours Dans la continuité de l’analyse des flux, il est important de comprendre quels espaces, le plus souvent extérieurs, étaient dédiés à la manutention de la matière (première ou traitée). Une typologie très fréquente dans les anciennes industries pour cette distribution de matériaux est celle des ‘cours’. Placées au centre du site industriel, elles permettaient de diffuser la matière dans tous les bâtiments. Ainsi, dans un premier temps, les flux de matières au sein de l’usine doivent être compris : import de la matière première, transformation de la matière à travers tous les bâtiments et export du matériau fini. Elle permet de bien comprendre la perméabilité du bâtiment et ses grands accès. Dans un second temps, une analyse des équipements de transbordement de la matière est à réaliser, particulièrement en ce qui concerne les industries liées au canal. En effet, de nombreux portiques et grues étaient parsemés le long de la voie d’eau bruxelloise. Par ailleurs, ces 95

Ivy, p. 33 - 100 -


équipements étant de grande ampleur et très couteux, ils servaient à plusieurs usines en même temps. Ce mode de partage des équipements est à privilégier le long de l’eau et/ou dans les cours qui sont tous les deux des espaces de rassemblement pour plusieurs bâtiments/industries. Cela va dans le sens de la 8ème clé de ‘A good city has industry’ qui dit que « le partage de l’infrastructure et des équipements libère plus d’espace pour l’économie urbaine ». Nos villes saturées invitent à se serrer les coudes. Si les entreprises mutualisent les équipements et l’infrastructure que chacune utilise sur sa parcelle, nous gagnerons de l’espace pour l’économie urbaine. La mixité des fonctions est donc à promouvoir afin de partager, diversifier, faire se rencontrer et rentabiliser les espaces et les acteurs industriels.96 Finalement, comme spécifié par la 6ème clé de ‘A good city has industry’, « Rendez l’industrie urbaine visible dans l’espace public ». L’industrie urbaine doit être entièrement assumée pour qu’elle fonctionne, elle doit être esthétique et placée au centre de nos vies quotidiennes.97 Cela se traduit principalement sur le territoire du canal qui n’est pas encore une fierté pour la région de Bruxelles. Embellir le canal, le rendre accueillant et promouvoir sa productivité, passe donc principalement par une rénovation respectueuse de son patrimoine industriel. Pour ce faire, il faut le valoriser, lui rendre son authenticité et y implanter des fonctions productives d’économie circulaire, favorisant l’autonomie et l’indépendance de la ville.

96 97

Ivy, p.31 Ivy, p.23 - 101 -


3.3 Diagnostic matériel du bâtiment industriel Connaître la matière en présence afin de déterminer ce qui sera réutilisable dans le bâtiment est un réel enjeu. Chaque matériaux et éléments doivent être répertoriés afin de savoir d’une part ce qui est intact et peu rester, d’autre part ce qui pourra être recyclé sur place et finalement ce qui devra être recyclé et/ou adapté pour être envoyé sur un autre chantier dans la région. Voici 4 critères d’identification du potentiel de réemploi de la matière. Cela permet de voir clairement à partir d’un gisement de départ quelle part peut être réemployée et quelle part devra être valorisée autrement : - un facteur technique qui regroupe le démontage, les caractéristiques physique set mécaniques, le stockage et la préparation au réemploi. - un facteur temporel : tel matériau pourra intéresser un repreneur de matériaux de réemploi à un moment plus qu’à un autre selon l’offre et la demande. - un facteur économique : le plus souvent, un matériau dont le prix de revente sur le marché de seconde main est très proche du prix de l’équivalent neuf du matériau ne sera pas un candidat intéressant. - un facteur organisationnel : le démontage soigneux des matériaux nécessite généralement plus de temps. Le temps accordé à la phase de démontage dans le planning de chantier jouera donc un rôle crucial dans ce qui pourra être démonté et récupéré.98 L’objectif sera donc de respecter au maximum ce patrimoine industriel dont nous héritons en réutilisant ou recyclant les matériaux au sein du bâtiment. Néanmoins, connaître la matière dont on dispose ne veut pas dire que tout va pouvoir être réemployé. En effet, il est difficilement envisageable de n’utiliser que des matériaux de réemploi à une échelle dépassant celle d’un pavillon. Des matériaux neufs devront donc être intégrés au projet, même si cette intervention neuve sera minime, elle doit rester dans une optique de réemploi et de durabilité. Ainsi, le système pourrait s’inverser : on ne conçoit pas avec des matériaux réemployés mais pour qu’ils puissent l’être par la suite. La question de la provenance et des types de matériaux se pose alors mais celle des assemblages et de la résistance au temps se pose également.

98

Delmée, H. (2017). « Un vade-mecum pour la conception à partir de matériaux de réemploi ». Travail de fin d’étude, Master d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme (LOCI – UCL). p. 64 - 102 -


3.4 Proposition d’un programme productif Sur base de la compréhension architecturale fine d’un bâtiment industriel et de la matière en jeu, un programme peut être établi. Comme démontré durant tout ce travail, les fonctions intéressantes à implanter dans de telles infrastructures industrielles sont celles qui touchent à la productivité en général. Afin de promouvoir cette économie circulaire au sein d’une ville productive, la flexibilité et l’adaptabilité du bâtiment sont primordiales. Ainsi, lors de la rénovation, le but premier est de revaloriser l’authenticité d’un patrimoine pour pouvoir en tirer parti et le mettre à disposition de toutes sortes d’entreprises, start-up ou activités productives. Ce mode de rénovation multifonctionnel favorise donc l’accueil d’une multitude de fonctions dans le temps mais également simultanément, permettant la collaboration des acteurs et le partage des équipements. L’établissement d’un programme et plus particulièrement, ‘la réhabilitation d’une ancienne industrie le long du canal en espace multifonctionnelle’, peut se faire en 3 grandes étapes : gestion des flux, choix de démontages et de réassemblages dans les espaces polyvalents et fonctionnalisation des espaces spécifiques. Tout d’abord, des conclusions sont à tirer de l’analyse des flux de matières. Elle permet de savoir par où et comment la matière arrivera, sera traitée et exportée. Cette analyse aide, entre-autre, à aménager les cours extérieures et couvertes initialement conçues pour la manutention et la gestion des flux de matériaux. Plusieurs fonctions peuvent donc déjà être fixées au sein du bâtiment et la circulation commence à s’y dessiner. Ensuite, parallèlement, le diagnostic matériel du bâtiment et l’étude de sa structure permettent de définir les démontages à réaliser. En effet, dans le cadre d’une réhabilitation multifonctionnelle, les espaces doivent être simples et épurés pour pouvoir accueillir toutes sortes de programmes au fil du temps. Dans cette logique, la ‘carcasse patrimoniale’ du bâtiment industriel doit être retrouvée. Par la suite, de nouveaux équipements peuvent être posés afin de générer des fonctions et des ambiances bien précises. Ces gestes architecturaux doivent rester légers et ne pas altérer la structure. La question des assemblages devient alors primordiale, les nouveaux éléments ajoutés devant être totalement indépendants de la structure. Ainsi, lors de la conception des détails techniques du projet, certains type d’assemblages doivent être mis en place afin de favoriser le réemploi. L’idéal serait évidemment de ne pas avoir d’assemblage (vrac, emboîtement, …), cependant de nombreuses autre solutions existent : - Les assemblages à favoriser sont donc ceux de type sec ou mécanique (ex : vis, clous, clips) ou encore les fixations réversibles (ex : boulons, vis, - 103 -


équerres), ils permettent un réemploi aisé. - Les assemblages de type humide (ex : mortier de chaux) ou les fixations semi-réversibles (ex : agrafe, clou) peuvent être acceptés. - Les assemblages de type très humide (ex : plafonnage) ou irréversibles (ex : colles, solidarisation sans éléments tiers) sont, quant à eux, à proscrire au maximum.99 Finalement, en ce qui concerne la fonctionnalisation des espaces spécifiques à un type de production, trois degrés d’intervention pour la réhabilitation sont envisageables : - La fonction initiale peut reprendre son activité. L’infrastructure doit donc être ‘simplement’ rafraichie et mise à jour. Ainsi, des silos désaffectés pourraient redevenir un espace de stockage pour des grains, de la terre, des graviers, du sable, … servant à l’industrie voisine. - La fonction initiale n’est plus utile à la société ou plus assez performante. Cependant, les qualités architecturales de l’infrastructure spécifique permettent d’y implanter une toute nouvelle fonction, sans devoir changer fondamentalement la bâtiment. Par exemple, un moulin à eau pourrait être relancé, non plus pour moudre le grain mais pour générer de l’électricité et procurer de la lumière au bâtiment industriel. - La fonction initiale n’est plus utile et l’infrastructure ne permet pas d’accueillir une nouvelle activité intéressante. Les équipements et l’infrastructure doivent donc être soigneusement démontés pour être réutilisés ailleurs. En général, une structure simple peut finalement être retrouvée, permettant d’accueillir un nouveau panel d’activités. Néanmoins, il arrive que toute la structure doive être démontée, laissant un espace vaquant, prêt à accueillir toute nouvelle fonction. C’est, par exemple le cas de nombreuses grues et portiques le long du canal ne servant plus, elles ont été démontées, permettant d’agrandir et d’aérer les quais. En conclusion, pour pouvoir définir le plus justement possible le programme à établir au sein de ce patrimoine industriel, il est important de réaliser au mieux l’étude préalable du bâtiment. Chaque intension architecturale initiale doit être comprise afin de la mettre en valeur pour les fonctions actuelles ou futurs. De plus, pour promouvoir le réemploi et conserver au maximum le patrimoine, les nouveaux matériaux ajoutés lors de la réhabilitation doivent être issus d’une économie circulaire, indépendants de la structure principale et réversibles. 99

Delmée, H. (2017). « Un vade-mecum pour la conception à partir de matériaux de réemploi ». Travail de fin d’étude, Master d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme (LOCI – UCL). p. 67-69 - 104 -


- 105 -


1925 touraille cheminée

limonaderie conciergerie

services bureaux

1971

silos

recouvrement petite cour

1987

hangars recouvrement grande cour

recouvrement façades

Figure 58 - Évolution architecturale de la brasserie de la Marine au fil du temps - 106 -


3.5 La brasserie de la Marine : test méthodologique Pour conclure ce mémoire, voici une application de réhabilitation concrète du patrimoine industrielle lié à la voie d’eau, en utilisant la filière de réemploi. Cette dernière est réalisée sur l’ancienne brasserie de la Marine dont nous avons déjà discuté lors des chapitres précédents.

3.5.1. Analyse historique

Cette brasserie, initialement appelée ‘Brasserie du Marly’ a été construite au début du 20ème siècle. Construite en forme de U, elle était constituée de trois ailes laissant apparaître une grande cour extérieure. Au fil du temps Elle a connu plusieurs changements pour rester à la pointe des nouveautés technologiques. La première mise à niveau des performances de la brasserie a été réalisée en 1925 ; la touraille et sa cheminée, la conciergerie ainsi que la bouteillerie (dessinant une deuxième cour plus intime) ont été construits. En 1942, la brasserie a été rachetée par le groupe Wiellemans-Ceuppens, elle change alors de nom et devient la ‘Brasserie de la Marine’. L’industrie assure alors d’une part la fabrication des bières de fermentation haute et d’autre part le maltage pour tout le groupe. Par la même occasion, la Marine investi dans un bras de manutention, reliant les péniches du canal aux greniers et permettant d’être alimenté directement en orge. Le charbon est également livré par bateau. Elle connait alors ses heures de gloire. En 1956, des silos à grains sont construits à l’arrière du complexe. Quinze ans plus tard (1971), la petite cour est recouverte et des hangars sont annexés. Finalement, en 1980, malgré la prise de contrôle de la brasserie par le groupe Artois de Louvain, les affaires périclitent. Quelques années plus tard, en 1987, l’ensemble a été racheté par un marchand d’automobiles qui emballe totalement l’ancienne brasserie et détruit la cheminée, la maison du directeur et le bras de transbordement. La grande cour est refermée, les façades sont recouvertes de taules métalliques et des entrepôts sont ajoutés. Aujourd’hui le bâtiments abrite 4 fonctions différentes : magasin de peinture, salles d’évènementiel, banque alimentaire et grossiste en décoration de jardin. En 2016, le port de Bruxelles a construit le ‘cruise terminal’ sur les quais du canal devant la brasserie, annihilant toute connexion avec la voie d’eau.

- 107 -


Catalogue photographique de la Brasserie de la Marine

Figure 59 - Vue aérienne de la Brasserie

Figure 60 - Vue de la Brasserie depuis le canal

- 108 -


Figure 61 - Aile centrale et bureaux, petite cour recouverte

Figure 62 - Bureaux

- 109 -


Figure 63 - Vue sur la grande cour et la conciergerie en avant plan - 110 -


Figure 64 - Arrière de la salle de brassage et cheminée de la touraille - 111 -


Figure 65 - Recouvrement de la grande cour en 1987 - 112 -


Figure 66 - Recouvrement des façades 1987 - 113 -


Figure 67 - Proposition de gestion des flux autour de la brasserie

Nouveau tram 3

Quartier de Neder-over-Heembeek

Figure 67 - Coupe d’implantation, transports présents sur le territoire de la brasserie - 114 -


3.5.2 Gestion des flux a. sur le territoire

La brasserie de la Marine a une implantation stratégique. En effet, elle est au bord du canal de Willeboreck, à deux pas du ring, longée par une piste cyclable et bientôt reliée au réseau de tram bruxellois. Cependant, la connexion du bâtiment au canal a été totalement rompue par la construction du ‘Cruise terminal’, compromettant l’arrivée de matériaux par la voie fluviale. Ce cruise terminal a été développé par le port de Bruxelles, dans le cadre du Plan Canal (voir chap. 2) en 2016, « il entend surfer sur la vague du développement des croisières touristiques tout en réintégrant la voie d’eau dans le tissu urbain bruxellois ».100 Ainsi, un flux de touristes venant de la mer du Nord est observable devant la brasserie. Ce dernier encourage donc l’utilisation de la voie d’eau pour le transport de personnes mais plus de marchandises. En ce qui concerne la voie viaire, elle est très bien desservie tant par les camions que par les camionnettes. Les camions peuvent aisément débarquer/embarquer leur marchandise à 2 points stratégiques et pour ce qui est des camionnettes, elles peuvent décharger/charger facilement leur marchandise à 3 points (dont un au sein de la cour principale qui donne directement sur la chaussée). Finalement, les vélos étant beaucoup plus léger et de taille moindre, ils peuvent s’arrêter à plusieurs endroits autour ou même dans les bâtiments.

Brasserie de la Marine Cruise terminal : flux de touristes

Parc de Meudon

100 PortdeBruxelles.fr

« À propos du port ». URL : https://port.brussels/fr/portde-bruxelles/propos-du-port [consulté le 18.04.21] - 115 -


5

3 cave de garde

silos

touraille

8

malterie frigorifère brasserie

chaudières salle des machines

7

6

R+2

1

dégermage touraille

7

trémie orgette grenier à orge

cave de garde

3

malterie frigorifère brasserie

chaudières salle des machines

limonaderie

2

4

6

silos

5

9

limonaderie

2

R+1

10 trémie orgette

1

salle de soutirage

écuries / garage bureaux grenier à orge

habitation

réservoir eau canal parc à charbon chaudières

4bis

6 box d’expédition

r1

l na ca

magasin

11 r2

u co

conciergerie

0

stock limonade

u co

13 Rdc

expédition des malts

frigorifère brasserie

12

cave de soutirage écuries / garage

bureaux atelier et forge

déchargement des orges

limonaderie bouteillerie

Figure 68 - Flux de matière au sein de la brasserie - 116 -

brasserie - malterie


b. dans l’espace productif Au préalable du diagnostic précis du bâtiment industriel, il est intéressant de comprendre le fonctionnement de la brasserie lors de son activité au 20ème siècle. L’orge arrive donc par bateau (0) et est directement injecté dans les greniers de la brasserie, qui se situent dans l’aile centrale du bâtiment (1). Ensuite, il est séché une première fois dans les greniers avant de partir à la malterie au centre du bâtiment (2). Il subit un début de germination pour le rendre fermentable. Le malt germé (ou malt vert) est alors envoyé vers la touraille pour le touraillage (3), ce qui consiste à sécher le malt vert. En effet, l’air chaud circule avec l’effet de tirage à travers les grains posés sur de grandes grilles en métal. Les grains de malt sont alors débarrassés de leur radicelles101, c’est le dégermage (4). Le maltage est terminé, le grain est prêt pour le brassage, une partie est directement exportée pour la brasserie Wiellemans (4bis) et le reste est stocké dans les greniers ou les silos pour être brassé sur place. Le malt est donc repris, poli et concassé, formant une ‘farine’ (5). La farine est ensuite amenée vers la salle de brassage où va s’élaborer le moût de la bière, « c’est dans ce local, dont l’aspect agréable du décor général et des appareils ne manquera pas de réjouir le visiteur et qui est, pourrait-on dire, le salon de l’usine, que le malt va livrer le sucre qu’il contient, sous la forme d’un jus sucré, le moût de bière, que l’on additionnera de houblon après l’avoir fait bouillir » (6).102 A la fin de l’ébullition, le moût est transféré dans des cuves de fermentation où il se mélange à la levure. Le moût est ensuite refroidi pour favoriser le développement des levures (7). Puis, il est dirigé vers la cave de fermentation, au cœur du bâtiment (8). Grâce à l’action de la levure, le sucre du moût se transforme en alcool, c’est ainsi que naît la ‘bière’. Cette bière devra encore être affinée et débarrassée de certaines matières défavorables. Pendant plusieurs jours la bière se repose et se clarifie dans les caves de gardes (9). Durant cette maturation, la bière est constamment débarrassée de sa levure résiduelle par le dessus. La bière achevée, elle peut finalement revenir dans l’aile centrale du bâtiment pour être embouteillée (10), puis expédiée par la cour intérieur (11).103

101

Germe sortant du grain Weyers M., « Société Anonyme, Brasserie-Malterie de la Marine ». Bruxelles, p.31 103 Lemercier B. (2016), « Avec la bière, pas de demi-mesure » 102

- 117 -


polisseuse et concasseur de malt

trémie à farine et bascule automatique

chaudière à moût

réfrigérant à moût

bac et local de refroidissement

Figure 69 - Fonctionnement de la brasserie en image - 118 -


cave de garde

cave de fermentation

cave de garde

fabrique d’eau gazeuse et de limonades

laveuse de bouteilles

camions devant le quai de chargement (dans la cour)

Figure 69 - Fonctionnement de la brasserie en image - 119 -


ateliers circulation

circulation

lumière

Poteau / poutre : 17 65 m² - salles de stockage - haut : 6m sous plafond - vastes espaces - modulable (entre les co-

lumière

lones)

Mur porteur : 4 250 m²

- peu lumineux - frais

- salles des machines - bas : 3m sous plafond - grands espaces - adaptable - très lumineux

Figure 70 - Structure principale de la brasserie - 120 -


3.5.3 Dispositifs architecturaux, structurels et fonctionnels du bâtiment industriel Afin de comprendre les dispositifs architecturaux mis en place au service de la confection de la bière, nous avons réalisé un catalogue descriptif. Ce dernier permettra par la suite de tester des programmations productives.

a. Structure : espaces polyvalents En ce qui concerne la structure de l’ancienne brasserie, elle est assez classique. Elle se compose principalement de poteaux/poutres (17 650 m²), elle accueillait principalement les caves de fermentation et de garde, les greniers et la manutention. Ces espaces ont une hauteur sous plafond importante. L’aile gauche (salles de machines et de brassage) et l’aile droite de la petite cour (écuries/garage, forge et ateliers) présentent une autre forme structurelle, les murs porteurs (4 250 m²). En effet, elles avaient besoin d’espaces libres, ouverts et lumineux pour leur fonctions respectives.

- 121 -


circulation

lumière

circulation

Touraille : 1 150 m² ‘Four servant à sécher des denrées (malt, houblon)’

lumière

Silos : 1 320 m² - espace de stockage - point de repère - 12 box de 4m x 4m - isolé de l’ensemble - entrée par l’arrière - lumineux (en bas), peu lumineux (en haut)

- espace chaud et sec - point de repère - typologie complexe - 2 étages en tamis - 1 coupole en béton - peu lumineux

Figure 71 - Touraille et Silos - 122 -


b. Patrimoine : espaces spécifiques Deux bâtiments ont des qualité spatiales très spécifiques, il s’agit des silos à orge et de la touraille. En ce qui concerne les silos (1 320 m²), ils ne sont pas uniques dans la conception de la bière, servant d’espace de stockage, on les retrouve souvent sur les site industriels. Ils restent tout de même difficiles à réhabiliter pour une fonction autre que du stockage de matériaux en vrac. Ils sont constitués de 12 box en béton armé de 4m x 4m, le tout quasiment aveugle. Leur hauteur d’une trentaine de mètres au total fait des silos le bâtiment le plus haut du complexe, formant, avec la touraille, un point de repère important. Initialement détachés du complexe de bâtiment, on y accédait par le côté droit où se trouvait la circulation verticale et l’équipement pour le transport des orges. Aujourd’hui les silos, appartenant aux salles d’évènementiel, ont été percés au niveau R+3 (le terrain étant fort pentu) pour créer l’entrée principale à l’arrière du bâtiment. C’est donc le seul niveau des silos qui a été aménagé, on y retrouve également des bureaux et ateliers à droite de l’entrée. La touraille (1 150 m²) est quant à elle très spécifique à la fabrication de la bière, c’est un four servant à sécher le malt pour arrêter la germination. C’est également dans ce bâtiment que se faisait le dégermage ainsi que le stockage sec et aéré du malt prêt à brasser. Le four se trouve en haut de la touraille, sous une immense coupole construite en briques poreuses, serties dans une voûte-support en béton armé. Il est constitué de deux plateaux de 160m², de 2 retourneurs électriques et un déblayeur qui évacue automatiquement le malt touraillé vers une trémie en béton armé, qui le livre aux appareils de dégermage.104 Les deux premiers niveaux sont, quant à eux divisés en petites pièces, c’est la que le dégermage se fait. Finalement, l’ensemble de la touraille est peu lumineux et proposait à l’époque de la brasserie, des espaces chauds et secs.

104

Weyers M., « Société Anonyme, Brasserie-Malterie de la Marine ». Bruxelles, p.13 - 123 -


Bureaux : 100 m² - espace d’accueil public - typologie de maison

circulation

Figure 72 - Activités de services - 124 -

lumière


c. Activités complémentaires : forme de circularité Une aile entière était dédiée à ces activités complémentaires dans l’ancienne brasserie. On y retrouvait des écuries/garage, des ateliers de réparation, une forge pour la confection et l’entretien des outils et des bureaux d’administration. Par ailleurs, on retrouvait une conciergerie à front de rue, sur un côté de la grande cour, pour gérer les circulations dans la brasserie. A l’exception de la conciergerie qui a disparue en 1981 lors des gros travaux, tous ces bâtiments sont encore intacts. Les anciens bureaux le sont particulièrement, la typologie d’une ‘petite maison’ est encore perceptible au milieu de ces cartons entreposés. Il était le lieu d’accueil de la brasserie et ouvert au public.

- 125 -


circulation

lumière

Cour 1 : 1 430 m² - espace d’exportation - à ciel ouvert - lieu de rassemblement - porosité int. / ext. élevée - mouvement perpétuel

circulation

lumière Cour 2 : 460 m² - espace de réparation - à ciel ouvert - lieu intime, backstage

Figure 73 - Typologie des cours - 126 -


d. Manutention : typologie des cours La brasserie de la Marine était composée de deux cours, autour desquelles toute la vie se déroulait. La plus grande servait de cours d’expédition, son rez-de-chaussée était donc très perméable et la seconde, plus intime, regroupait les fonctions de services, mentionnées au-dessus. Elles ont toutes les deux été recouvertes à la fin du 20ème siècle, ce qui leur a fait perdre tout leur caractère et a empêché toutes connexions avec l’extérieur. Il serait donc intéressant de les découvrir pour qu’elles retrouvent leur fonction initiale de manutention et de rassemblement à ciel ouvert.

- 127 -


1. ré-ouvrir les cours

3. démolition des hangars contemporains 2. découvrir les façades

Figure 74 - Schéma des démontages - 128 -


3.5.4 Diagnostic matériel du bâtiment industriel A la suite de ces analyses, les démontages à réaliser peuvent être établis. Trois démontages principaux seront à exécuter : la réouverture des cours, l’enlèvement des taules en façade et la déconstruction des hangars annexés dans les années 80. Les matériaux dont ont héritera le plus sera la taule, elle recouvre toutes les façades de la brasserie et des hangars. Elles seront donc récupérées pour le projet de réhabilitation de la brasserie. Elles pourront être utilisées sous deux formes : décorative pour recouvrir les noyaux de circulation ou cloison modulables pour définir toutes sortes d’espaces au sein du bâtiment. Ce système favorise la modulabilité et la souplesse des lieux.

mur en béton (noyau de service) a. Déco, revêtement de nouveaux murs

vis tous les 40 cm tôle récupérée

b. Cloison séparatrice et modulable

vis tous les 40 cm

poteaux en bois tous les 1 m

Figure 66 - Schéma des démontages - 129 -


Touraille : point de repère offert au quartier auditoire, salle polyvalentes et de réunions, ...

1. Arrivée des matériaux de construction

Silos : point de repère offert à la ville rooftop, restaurant, expo, ateliers créatifs, ...

2. Stockage

3. Ateliers 4. Coworking 5. Magasin 6. Expédition des matériaux

Salles de brassage : création d’un fab lab au service de la ville

Espaces de réemploi Espaces de production pour la ville et le quartier

Figure 75 - Propostion d’un programme multifonctionnel et de réemploi - 130 -


3.5.5 Proposition d’un programme productif Comme démontré tout au long de ce mémoire, la filière du réemploi est à promouvoir au maximum pour les chantiers et rénovations futurs à Bruxelles. Ce système nécessite une gestion des flux, des collaborations entre les acteurs de la construction mais également la mise à disposition d’espaces externes pour la transformation et le stockage des matériaux (voir chap. 2). L’ancienne brasserie de la Marine étant implantée à un point stratégique dans la ville, elle serait tout à fait propice à accueillir ce genre de filière productive. En effet, elle est sur une zone très passante et bien desservie en termes de gestion des flux. Elle se trouve également à la convergence de plusieurs milieux : entre 2 sites industriels, à deux pas du quartier résidentiel de Neder-over-Heembeek, le long du canal, à côté du parc Meudon, devant le Cruise terminal et son afflux de touristes, … Les rencontres, le partage et la collaboration d’acteurs multiples y sont énormément favorisées. De plus, la grandeur et la structure de l’ancien site de production permet d’accueillir de grands espaces de stockages et de manutention dont la filière de réemploi a besoin. L’espace ne manquant pas, des fonctions telles que le coworking, les fablab, un food court ou encore un magasin de matériaux réemployés pourront y être implantés, favorisant la multifonctionnalité.

- 131 -


Conclusion - Ouverture prospective : hypothèse pour la réhabilitation du patrimoine industriel Le bassin de l’Escaut était à l’origine d’une économie fulgurante au 19ème et 20ème siècles et ce grâce à ses ressources naturelles et son modèle productif intensif. Il n’en reste plus grand chose aujourd’hui… la délocalisation des industries d’extraction et les carences en ressources naturelles laissent le territoire vide, dans un état de pollution non négligeable et économiquement vulnérable. Cependant, de nombreuses ressources qu’elles soient naturelles (voie d’eau, terres fertiles, …) ou artificielles (infrastructures productives, canaux, patrimoine industriel, …) sont encore présentes sur notre territoire, témoignant d’un ancien fonctionnement productif et autonome. Ce système parait vieux et archaïque mais nous avons beaucoup à en apprendre ! En effet, depuis plusieurs décennies le monde est lancé dans un système de consommation toujours plus puissant. Il serait temps de le mettre sur pause afin de profiter pleinement de toutes les ressources et infrastructures déjà présentes, c’est tout l’enjeu de l’économie circulaire. Concrètement, le long du canal de la Senne (affluent de l’Escaut) à Bruxelles, un patrimoine industriel riche nous est confié faisant de la ville en elle-même une ressource. Toutes ces infrastructures ont été érigées pour la production, leurs qualités spatiales et architecturales les rendent ainsi particulièrement intéressantes pour une relance de la ville productive et autonome. Les nombreuses initiatives et stratégies déjà mises en place par la région de Bruxelles permettent de démarrer une lente transition. Plusieurs projets naissent sur le territoire du canal mais un changement radicale et global de notre manière de vivre doit être réalisé pour que l’impact soit réel. Comme annoncé en introduction, « il faut changer la façon dont les gens s’impliquent là où ils vivent »105. Le rôle de l’architecte sera donc d’induire ce changement lors de rénovations. Une belle référence de réhabilitation du patrimoine industriel favorisant cette transition des mentalités est celle de l’ancienne meunerie Moulart. Cette dernière ayant été transformée en un vaste espace multifonctionnel « non intimidante, accessible, tout en transparence »106 , elle privilégie les échanges, la réinsertion professionnelle et place les habitants du quartier au cœur du projet. Le nouveau centre COOP a donc réussi à avoir un impact non négligeable sur son environnement large. 105 106

Dion C., Laurent M. (2015), Tuddenham R. dans le film : « Demain », 18’20 Lalibre.be (2012) « La Meunerie du canal rénovée » - 132 -


Nous pouvons dés lors émettre une hypothèse méthodologique : l’économie circulaire de la construction est une clé essentielle pour la réhabilitation du patrimoine industriel le long du canal de Bruxelles. Elle permet de répondre d’une part à la demande d’emplois grandissante avec la croissance de la population, d’autre part de pallier le manque de production et d’autonomie au sein de la ville, ensuite elle gère les enjeux environnementaux actuels et finalement elle favorise le changement des mentalités dont nous avons grandement besoin aujourd’hui. Il est important de noter que ceci n’est qu’une hypothèse. Le patrimoine industriel le long de l’eau ne peut pas être destiné uniquement aux activités industrielles. Comme mentionné dans le décalogue de l’exposition ‘A good city has industry’, des logements sont par exemple à pourvoir afin de pallier les enjeux démographiques de la région. Ainsi, il est aujourd’hui indispensable de redonner une place centrale à cette production délocalisée et de retrouver une forme d’autonomie, afin de retourner à une conscience collective, d’utiliser les ressources naturelles et artificielles à bon escient et de consommé à une juste nécessité.

- 133 -


- 134 -


Remerciements Pour finir, je souhaite remercier plusieurs personnes qui m’ont été d’une grande aide pour la réalisation de ce mémoire. Tout d’abord, je tiens à remercier de tout cœur ma promotrice, Madame de Lestrange. Merci pour votre aide précieuse et régulière. Vous avez toujours su me guider dans la bonne voie, avec une multitude de ressources. Je retiendrai votre technique du petit poucet qui dépose ses pierres durant tout le texte afin de retracer son chemin. (Par ailleurs, j’espère vous croiser en Bourgogne un de ces jours !) Ensuite je souhaite remercier mes co-promoteurs, Monsieur Gillis, Monsieur Vandenbroucke, Monsieur Vanden Eynde et Monsieur Anselmo. Je voudrais souligner la rigueur, l’enthousiasme et la simplicité avec laquelle cet atelier s’est déroulé. Ça n’a pas toujours été facile mais je me suis toujours sentie encouragée et tirée vers le haut. Je suis donc très satisfaite d’avoir pu réaliser la conclusion de mes études au sein de cet atelier de patrimoine (aussi lié au développement durable pour ma part). Merci également d’avoir tout mis en œuvre pour que nous puissions toujours présenter et avoir des échanges en présentiel malgré la situation sanitaire. Je souhaite également remercier le bureau de Trio Architecture qui m’a souvent accueilli durant ces 6 derniers mois. Pour la plupart, ancien de Saint-Luc, ils savaient ce que j’endurais et m’ont toujours soutenu ! Je tenais aussi à remercier Monsieur Weyers et Monsieur Cooreman qui ont également réalisé leur mémoire de fin d’étude sur l’ancienne brasserie de la Marine. Ils m’ont fourni une multitude de documents précieux pour la réalisation de mon projet et à la compréhension de ce bâtiment complexe. Finalement, je souhaite remercier mes parents et mes frère et sœurs. Merci de m’avoir supportée pendant ces 5 ans d’étude éprouvante. Merci pour les Schleiper de dernière minute, merci pour les transports de maquettes aléatoires, merci pour votre patience les veilles de nuit blanche et de charrette et surtout merci d’avoir investi, il y a 20 ans, dans une maison en face de chez Espace plan cela m’a sauvé plus d’une fois ;).

- 135 -


Bibliograhie - Livres - Gellynck B., Casabella N., Valiunaite R., de Bruyn E. (2015). « La vallée partagée P.dt périphérique Nord, Zone du canal entre le Pont Van Praet et la gare de Vilvorde. » Bruxelles, 1010 architecture urbanism sprl. - Debrun G., de la Boulaye P. (2010). « Architecture Wallonie-Bruxelles » Inventaire #3 - Demey T. (2011). « La Senne, de la source au confluant », Ed : Badeaux - Demey T. (2008). « Un canal dans Bruxelles », Ed. : Badeaux - De Rive BL (1835) « Précis historique et statistique des canaux et rivières navigables de la Belgique et d’une partie de la France », Ed : Leroux - Draps W. (2003) « Commerce et négoce ». Bruxelles, Ed : Mardaga. p. 52 - Mumford L. (1950) « Technique et civilisation » Ed : Seuil - van Overloop E. (2015) « Les origines du bassin de l’Escaut ». F. Hayez, imprimeur de l’Académie royale des sciendes, des lettres et des beaux-arts de Belgique

- Articles - Agence de Développement Territorial (ADT) (2009). « Bruxelles dans 20 ans », Cahier de l’ADT n°7, Perspective Brussel, consulté en ligne URL : https://perspective.brussels/sites/default/files/documents/20ansBXL_FR_WEB_OK.pdf - Architecture Workroom Brussels (2016) « A good city has industry ». Bozar, consulté en ligne URL : https://www.bozar.be/fr/activities/120813-a-good-city-has-industry - Baele M. (2017) « Le ‘plan Canal’ bruxellois à l’honneur à Marseille ». RTBF, consulté en ligne URL : https://www.rtbf.be/info/regions/bruxelles/detail_le-plan-canal-bruxellois-a-l-honneur-a-marseille?id=9722379 - Bureau Bas Smet (2019). « BKP – territoire du Canal », Perspective Brussel, consulté en ligne URL : https://perspective.brussels/fr/projets/territoire-du-canal/ beeldkwaliteitsplan - Christian Vandermotten, (2018), « Les structures économiques de la Belgique et leur spatialité, des Golden Sixties à aujourd’hui », Belgeo 4, consulté en ligne URL : http:// journals.openedition.org/belgeo/20564 - 136 -


- Coordination Senne « Les cours d’eau et l’eau à Bruxelles ». Fiche 9 – enseignant, p. 4,5 - De Rive BL (1835). « Précis historique et statistique des canaux et rivières navigables de la Belgique et d’une partie de la France », Ed : Leroux, p.21 et suivantes - Gouvernement de la Région de Bruxelles Capitale (2019). « Stratégie de réduction de l’impact environnemental du bâti existant en région de Bruxelles-capitale aux horizons 20302050 ». Bruxelles environnement. - Huberty C. et Valente Soares P., « Les canaux bruxellois ». La fonderie n°25, Bruxelles ville d’art et d’histoire, Ed : Région de Bruxelles Capitale. - Jacobs

T., (2019). « Usine centrale des Tramways Bruxellois ». Bruxelles Fabriques

- K.F. (2020) « Découvrez la carte interactive des nouvelles pistes cyclables créées à Bruxelles » Rtbf info, consulté en ligne URL : https://www.rtbf.be/info/regions/detail_lacarte-interactive-des-nouvelles-pistes-cyclables-creees-a-bruxelles?id=10543681 - Laconte P. (2014). « European industrial and engineering heritage as an illustration of current challenges in defining heritage and its uses ». consulté en ligne URL : https:// search-proquest-com.proxy.bib.ucl.ac.be:2443/docview/1643292023?pq-origsite=summon - Lemercier B. (2016), « Avec la bière, pas de demi-mesure », consulté en ligne, URL : http://blog.univ-angers.fr/labiere/2016/04/20/le-processus-de-fabrication-2/ - Lhuilllier V. (2018). « Conserver des entrepôts au cœur de la ville ». Le Soir - Real E. (2015). « Reconversions. L’architecture industrielle réinventée », open édition, p.14, consulté en ligne URL : https://journals.openedition.org/insitu/11745 - M.LA. (2020) « Voici la carte des nouvelles et futures pistes cyclables à Bruxelles ». DH Les sports, consulté en ligne URL : https://www.dhnet.be/regions/bruxelles/ bruxelles-mobilite/voici-la-carte-des-nouvelles-et-futures-pistes-cyclables-abruxelles-5f44ec10d8ad586219b08894 - Michel R. (1984). « L’eau et l’industrie en Lorraine. Les exemples des industries sidérurgiques et des industries du charbon ». In: Revue Géographique de l’Est. Tome 24, N°2-3. Eaux continentales et industries. p. 133-148. - Sevrin, R. (1986). « Esquisse géographique du bassin transfrontalier de l’Escaut ». Annales de Géographie, t. 95, n°529. pp. 315-340. - Stroobants J-P. (2018). « Bruxelles inaugure « son » Centre Pompidou ». Le Monde, consulté en ligne URL : https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/05/06/ bruxelles-inaugure-son-centre-pompidou_5295149_3246.html - 137 -


- Vanderhulst G. ,Bouteiller A. (2015). « Les portiques et grues du canal de Charleroi ». Bruxelles patrimoine n°015-016 dossier ateliers, usines et bureaux. Ed : Bruxelles développement urbain - Vanderlhust G., (2013) « Histoire de la cokerie du Marly ». Patrimoine industriel Wallonie-Bruxelles - Vanderhulst G. « Les portiques et grues à Molenbeek-Saint-Jean sur le Canal de Charleroi ». Bruxelles fabrique - Viaene P. (2013) « Le paysage de Bruxelles entre ruralité et industrie ». Bruxelles patrimoines (hors-série), p.248

- Mémoires - Cooreman T. (2009). « Le site du Marly en congrès ». Travail de fin d’étude, Licencié en Architecture (I.S.A. Saint-Luc) - de Ghellinck G. (1998). « Le vieux port de Bruxelles, analyse de la mutation d’un espace urbain ». Travail de fin d’étude, Licencié en Architecture (I.S.A. Saint-Luc) - Delmée H. (2017). « Un vade-mecum pour la conception à partir de matériaux de réemploi ». Travail de fin d’étude, Master d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme (LOCI – UCL). - Flores M. (2020). « La ville productive, histoire d’une mutation ». Travail de fin d’étude, Master d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme (LOCI – UCL). - Le Fort B. (2009) « Le Bassin Vergote », Travail de fin d’étude, Licencié en Architecture (I.S.A. Saint-Luc) - Vanhelder A-S. (2018). « Bruxelles ville productive ». Mémoire de spécialisation en urbanisme de la transition, ULB - Weyers L. (1986) « Brasserie-malterie de la Marine, 5 jaar na de sluiting ». Mémoire de fin d’étude, licencié en architecture

- Rapports - Akki Y., Baert A., Moens A., Matthis P. (2020) « Master plan 2040 ». Port de Bruxelles - Atelier Brussels (2016). « A good city has industry ». Bozar. - 138 -


- Borret K., (2018) « Brussels productive city ». Bruxelles, Ed : Bouwmeester Maître Architecte - Bouwmeester Maître arhcitecte (2016) « Marly – Bruxelles propreté, fact sheet » - Chemetoff A. & Associés (2014). « Le plan Canal 01 ». Canal.brussels, consulté en ligne [URL : https://jacquesteller.files.wordpress.com/2017/10/rapport_et_ plancanal.pdf] - Febelcem.be. « Présentation du secteur du ciment », consulté en ligne URL : https:// www.febelcem.be/fr/infos-economiques/presentation-du-secteur/ [consulté le 13.04.21] - Declève B., Grulois G., de Lestrange R., Bortolotti A., Sanchez Tanchez Trenado C. (2020). « Designing Brussels ecosystems » Metrolab Brussels MasterClass II. Royal Library of Belgium. - Gosuin D., Fremault C., Laanan F. (2016) « Programme Régional en Économie Circulaire ». be circular, be.brussels. - Gulinck M. (1958). « Carrières ». Comité national de géographie commission de l’atlas national. Atlas de Belgique, planche 39. p.3-4 - Nakhlé L., Raynaud F. (2015) « Canal, vous avez dit canal ? » ADT.brussels - Vanderhulst G., (2006). « Site des anciennes usines GODIN à Laeken-Bruxelles ». [Lettre d’intérêt au familistère] consulté en ligne URL : https://www.ieb.be/ IMG/pdf/notedinteret_poeleriesgodin-2.pdf - Vickery Hill A., Luna Quintanilla D., Kampelmann S. (2018) « What Works for Brussels? ». Chair circular metabolism, ULB.

- Films - Dion C., Laurent M. (2015), Tuddenham R. dans le film : « Demain », 18’20 - « Les entreprises d’insertion dans l’économie circulaire en image » Youtube URL : https://www.youtube.com/watch?v=XbbTR94xwko [Consulté le 10.02.21] - « Plan Canal, Kanal Plan 01 », Bruxelles, 10’ 51’’, bureau des paysages, 2014 URL : http://www.alexandre-chemetoff.com/films/plan-canal-kanal-plan-01bruxelles-1030-bureau-des-paysages-2014/

- 139 -


- Sites web – - 51n4e.com (2016) « Recypark » URL : https://www.51n4e.com/projects/recypark [consulté le 17.05] - Amis.de.la.Terre.fr. « L’Europe et le charbon un air de 19e siècle ». URL : https:// www.amisdelaterre.org/l-europe-et-le-charbon-un-air-de-19e-siecle/ [consulté le 13.04.21] - Anderlecht.be « Patrimoine industriel le long du canal » URL : https://www.anderlecht.be/fr/patrimoine-industriel-le-long-du-canal [consulté le 18.05] - BC architects (2016) « Inter-Béton ». URL : http://architects.bc-as.org/Inter-Beton [consulté le 18.05] - Belgium.be « Economie circulaire », URL : https://www.belgium.be/fr/economie/developpement_durable/economie_durable/economie_circulaire [consulté le 05.05.21] - Bière et brasseries Bruxelles (juillet 2008). « C’était au temps ou Bruxelles brassait ». [Source : WordPress] URL : https://biereetbrasseriesbruxelles.wordpress. com/2008/07/16/nouveau-la-brasserie-marine-a-neder-over-heembeek/ - Bogdanvanbroeck.com « COOP ». URL : https://www.bogdanvanbroeck.com/ projects/coop-anderlecht-be/ [consulté le 18.05] - Bozar.be “A good city has industry”. URL : https://www.bozar.be/fr/activities/120813-a-good-city-has-industry [consulté le 17.04] - Coop.brussels (2016) « Moulart Dynasty ». URL : http://www.coop.brussels/decouverte/stations/moulart/ [consulté le 18.05] - Cargill.com « Algae Natural Food and Cargill launch a unique project to grow eco-designed microalgae in Strasbourg». URL : https://www.cargill.com/2016/ algae-natural-food-and-cargill-launch-a-unique-project [consulté le 18.04.21] - Ceres.be « Historique Ceres, groupe Soufflet» URL : https://www.ceres.be/fr/ qui/349/historique [consulté le 16.05] - Coordination Senne, Les sources Bruxelloises URL : https://www.coordinationsenne.be/fr/documentation/dossiers/sources.php [consulté le 15.02.21] - Etat.environnement.wallonie.be (2018) « Principaux types de sols ». URL : http:// etat.environnement.wallonie.be/contents/indicatorsheets/PHYS%204.html [consutlé le 12.05]

- 140 -


- Familistère.com « Le familistère de Laeken ». URL : https://www.familistere.com/ fr/decouvrir/une-architecture-au-service-du-peuple/le-familistere-de-laeken [consulté le 15.05] - Febelcem.be. « Présentation du secteur du ciment ». URL :

https://www.febelcem. be/fr/infos-economiques/presentation-du-secteur/ [consulté le 13.04.21] - Geocaching.com « Source de l’Escaut (vers un fleuve international) » (2015). URL : https://www.geocaching.com/geocache/GC64MKP_source-de-lescaut-versun-fleuve-international?guid=ba565ddd-7457-4f78-8b29-7c5cefbf0615 [consulté le 13.05] - Histoire-des-belges.be « Industrie ». URL : http://www.histoire-des-belges.be/aufil-du-temps/epoque-contemporaine/essor-economique-de-la-belgique/lindustrie [consulté le 10.05] - Isc-cie.org « L’Escaut en un clin d’œil » URL : https://www.isc-cie.org/fr/a-propos/lescaut-en-un-clin-doeil/#js-accept-cookies [consulté le 13.05.21] - Lalibre.be (2012) « La Meunerie du canal rénovée ». URL : https://www.lalibre.be/regions/bruxelles/la-meunerie-du-canal-renovee-51b8e5fee4b0de6db9c58d88 [consulté le 15.05] - Schreurs J-P. Aardrijkskunde “Groeven van vaste gesteenten in midden- en zuid-belgie”. URL : http://users.skynet.be/jeanpierre.schreurs/aardrijkskunde/ mijnbouw3.html [consulté le 13.04.21] - Logicites.fr, Libeskind J. (2015) « Le Cargo-Tram de Zürich, ou comment utiliser le tramway pour la collecte des déchets ». URL : https://www.logicites. fr/2015/02/23/le-cargo-tram-de-zurich-ou-comment-utiliser-le-tramway-pourla-collecte-des-dechets/ [consulté le 21.05.21] - Marianne De Fossé, « Anciens entrepôts urbains de Bruxelles : architecture et construction », Brussels Studies, Collection générale, n° 117, URL : http://journals.openedition.org/brussels/1590 [consulté le 01.05.21] - PortdeBruxelles.fr « À propos du port ». URL : https://port.brussels/fr/port-debruxelles/propos-du-port [consulté le 18.04.21] - PortdeBruxelles.fr, « Projet Tacte » URL : https://port.brussels/fr/content/projet-tact [consulté le 14.02.21] - PortdeBruxelles.fr, « Village de la construction » URL : https://port.brussels/fr/ content/village-de-la-construction [consulté le 14.02.21] - Reflexicity.net « COOP ». URL : http://www.reflexcity.net/bruxelles/communes/

anderlecht/quai-fernand-demets/coop [consulté le 18.05.21] - 141 -


- Reflexcity.net « Quai Fernand Demets n°33-35-37 ». URL : http://www.reflexcity.

net/bruxelles/communes/anderlecht/quai-fernand-demets/quai-fernand-demets-33-35-37 [consulté le 14.05.21] - Reflexcity.net « Usine des Laines d’Aoust ». URL : http://www.reflexcity.net/ bruxelles/communes/anderlecht/rue-bollinckx/usine-des-laines-d-aoust [consulté le 14.05.21] - Région de Bruxelles-capitale (2018). « Le projet Kanal » URL : https://kanal. brussels/fr/le-projet-kanal/principaux-acteurs-du-projet - Rotordb.org (2016) « Recypark Anderlecht » URL : https://rotordb.org/fr/projects/recypark-anderlecht [consulté le 17.05.21] - Silo.brussels Visite virtuelle du bâtiment des silos URL : https://www.nodalview. com/QC4PRyqQ8vkYaZVDeHmLnhQd [consulté le 05.02.21] - Tchorski.morkitu.org « Carcoke, la cokerie du Marly ». URL : http://tchorski.morkitu.org/5/buda-marly.htm [consulté le 18.05.21]

- 142 -


- Illustrations Figure 1 – Production personnelle Figure 2 – URL: https://cgtnforge.wordpress.com/2016/02/19/reforme-ducode-du-travail-un-retour-au-xixeme-siecle-philippe-martinez-cgt/ Figure 3 – « Les différents ouvrages favorisant la navigation ». URL : http:// batellerie59.free.fr/fichiers/page3/bat3.htm Figure 4 – Produciton personnelle Figure 5 – Centre de la Mémoire Urbaine d’Agglomération (CMUA) Figure 6 – “Saga Legrand” URL : http://tricotsolidaire.canalblog.com/archives/2013/01/31/26288239.html Figure 7 – R. Vilain (2017) « Les verreries carolorégiennes ». URL : http://charleroipaysnoir.blogspot.com/2017/05/les-verreries-caroloregiennes.html Figure 8 – Production personnelle Figure 9 – « Vue aérienne des carrières de Quenast ». Cliché I.G.M Figure 10 – D. Dimitrova « Extraction d’argile réfractaire dans la carrière d’argile ». URL : https://fr.123rf.com/photo_87966555_extraction-d-argiler%C3%A9fractaire-dans-la-carri%C3%A8re-d-argile.html Figure 11 – « Carrière de terre et ciment – Nord -Pas-De-Calais ». URL : https:// www.geneanet.org/cartes-postales/view/5164953#0 Figure 12 - Production personnelle (dessiné sur base de la carte de Bruxelles industrielle en 1910, la carte de Vandermaelen (1846-1854) et celles du Dépôt de la Guerre (1865-1878). Figure 13 - « Les canaux bruxellois ». La fonderie n°25, Bruxelles ville d’art et d’histoire, Ed : Région de Bruxelles Capitale. p.32 Figure 14 - Photographie S. Polak à Bruxelles, 1924. Collection Familistère de Guise.URL : https://www.familistere.com/fr/decouvrir/une-architecture-auservice-du-peuple/le-familistere-de-laeken [consulté le 15.05] Figure 15 - URL : http://leblogdecallisto.blogspot.com/2017/11/espace-godin-docks-bruxsel.html Figure 16 - Chaussée de Vilvorde - Rue de Meudon - Brasserie du Marly (1920) URL : http://bruciel.brussels/ Figure 17 - Production personnelle Figure 18 - Collection Dexia –Académie Royale, Reflexcity, URL : http://www. reflexcity.net/bruxelles/photo/88a89d37477c53382fabf3626ea5e2dc Figure 19 - Extrait de la plaquette de promotion des tramways bruxellois de 1910, « Les portiques et grues à Molenbeek-Saint-Jean sur le Canal de Charleroi - 143 -


». Bruxelles fabrique, p.22 Figure 20 - https://www.lafonderie.be/2020/05/13/sur-la-route-de-la-laine/ Figure 21 - « Les canaux bruxellois ». La fonderie n°25, Bruxelles ville d’art et d’histoire, Ed : Région de Bruxelles Capitale. p.4 Figure 22 - « Les canaux bruxellois ». La fonderie n°25, Bruxelles ville d’art et d’histoire, Ed : Région de Bruxelles Capitale. p.3 Figure 23 - Inventaire architecture industrielle (1980) « Quai de l’industrie », URL : http://bruciel.brussels/# Figure 24 - Production personnelle, sur base de URL : https://www.geo-trotter. com/carte.php Figure 26 - Inventaire architecture industrielle, « Avenue Antoon van Oss - Chaussée de Vilvorde - Canal de Willebroek », URL : http://bruciel.brussels/# Figure 27 - Production personnelle, sur base de « Evolution de la population en Région de Bruxelles-Capitale, 2005 à 2010 », URL : http://journals.openedition. org/brussels/docannexe/image/1331/img-11.jpg Figure 28 - Production personnelle, sur base de « Designing Brussels ecosystems » Metrolab Brussels MasterClass II, p.158 Figure 29 - Production personnelle, sur base de « Designing Brussels ecosystems » Metrolab Brussels MasterClass II, p.158 Figure 30 - Produciton personnelle, sur base de URL : http://www.circulareconomy.brussels/a-propos/le-prec/ Figure 31 - Jan Zaman (2020), basé sur la carte des usages économiques dominants de la région de Bruxelles © Departement omgeving et al 201847 adaptation de ‘cities of making’ Figure 32 - Chemetoff A. & Associés « Le plan Canal 01 », p.22 Figure 33 - Bureau Bas Smet, « Plan de Qualité Paysagère et Urbanistique » URL : https://www.architectura.be/fr/actualite/19543/territoire-du-canal-coup-denvoidu-plan-de-qualite-paysagere-et-urbanistique Figure 34 - Bureau Bas Smet, « Plan de Qualité Paysagère et Urbanistique », p.54 Figure 35 - Bureau Bas Smet, « Plan de Qualité Paysagère et Urbanistique », p.70 Figure 36 - Bureau Bas Smet, « Plan de Qualité Paysagère et Urbanistique », p.72 Figure 37 - Bureau Bas Smet, « Plan de Qualité Paysagère et Urbanistique », p.73 Figure 38 - Production personnelle Figure 39 - Weyers M., « Vue d’ensemble de l’usine », p.5 Figure 40 - Production personnelle Figure 41 - « Le grain est amené par péniche et est aspiré par un élévateur qui conduit dans les silos où il est stocké », URL : http://www.coop.brussels/decou- 144 -


verte/stations/moulart/#prettyPhoto[rel-images]/4/ Figure 42 - (1903) « Meunerie: plan original au sol », URL : http://www.coop. brussels/decouverte/stations/moulart/#prettyPhoto[rel-images]/29/ Figure 43 - Production personnelle, sur base de Bogdan & Van Broeck, URL : https://www.bogdanvanbroeck.com/projects/coop-anderlecht-be/ Figure 44 - Hellemans E., «Meunerie bruxelloise », URL : http://www. laken-ingezoomd.be/searchaction.php?type=foto&search=criteria&service=19&view=1&nr=195&page=22 Figure 45 - Production personnelle Figure 46 - BC Archtiects, « Inter-béton », URL : http://architects.bc-as.org/Inter-Beton Figure 47 - Production personnelle, sur base de BC Archtiects, « Inter-béton », URL : http://architects.bc-as.org/Inter-Beton Figure 48 - 51n4e, « Open public structures », URL : https://www.51n4e.com/ projects/recypark Figure 49 - 51n4e, « Open public structures », URL : https://www.51n4e.com/ projects/recypark Figure 50 - Tetra Architecten, « Marly », URL :https://bma.brussels/app/ uploads/2017/09/FACTSHEET-Marly-1.pdf Figure 51 - Tetra Architecten, « Marly », URL :https://bma.brussels/app/ uploads/2017/09/FACTSHEET-Marly-1.pdf Figure 52 - Production personnelle Figure 53 - Production personnelle Figure 54 - Production personnelle Figure 55 - Production personnelle Figure 56 - Production personnelle Figure 57 - Production personnelle Figure 58 - Production personnelle Figure 59 à 64 - Weyers M., « Brasserie Malterie de la Marine » Figure 65 à 66 - Croix châtelain (1987) Figure 66 - Production personnelle Figure 67 - Production personnelle Figure 68 - Production personnelle Figure 69 - Bière et brasseries Bruxelles (2008). « C’était au temps ou Bruxelles brassait », WordPress, URL : https://biereetbrasseriesbruxelles.wordpress. com/2008/07/16/nouveau-la-brasserie-marine-a-neder-over-heembeek/ Figure 70 à 75 - Production personnelle - 145 -


- 146 -


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.