REFERENCE
3 3333
08575 5433
LES CONTES
DE PERRAULT
IMPRIMERIE PAUL DUPONT
'"Te^
Garni er frèr
P.Pv^^
1 LES CONTES
DE
PERRAUL GRAVURES EN CHROMOLITHOGRAPHIE PAR
T.
VIGNETTES DE
G.
LIX
STAAL, YAN D'ARGENT, TOFANI, ETC.
,::l^l,flkl\,
PARIS GARNIER
FRÈRES, 6,
LIRRAIRES-ÉDITEURS
RUE DES SAINTS-PÈRES,
6
rat! Vbl^ VUHK PUBLIC LIPRARY
•>'-qw«aâ i» «oiiiù»?*' V
Garmer frères. Editeurs Pans,
irnp
Le petit
»'
»
Dufrénoy. 49 Rue du Mor.lpapnasse Paris
Chaperon rouge.
LES
CONTES DE PERRAULT
LE PETIT CHAPERON ROUGE
L était
une
su voir
:
sa
fois
Cette bonne seyait
si
Un jour
une
mère en
petite
de
fille
village, la plus jolie
mère-grand plus
était folle, et sa
femme
lui fit faire
un
petit chaperon^ rouge, qui lui
bien, que partout on l'appelait
mère, ayant
sa
fait
qu'on eût
folle encore.
le petit
des galettes,
Cliaperon rouge.
hii
dit
LOiiunent se porte ta mère-grand, car on m'a dit qu'elle était malade
:
«
Va
voir
porte-lui
:
une
galette et ce petit pot de beurre. » Le petit Cliaperon rouge partit aussitôt pour aller
chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre village. elle
rencontra compère
le loup,
qui eut bien envie de
de quelques bûcherons qui étaient dans
pauvre enfant, qui ne savait pas lui dit
:
«
— Ohî
qu'il était
ma mère-grand, ma mère lui envoie.
Je vais voir
de beurre que
—
oui, lui dit le petit
tout là-bas, là-bas, à
Ancienne
la
coiffure, qui fut
la foret. Il
En
passant dans un bois,
manger; mais
la
lui
n'osa, à cause
il
demanda où
elle allait.
La
dangereux de s'arrêter à écouter un loup,
et lui porter
une galette avec un
Demeure-t-elle bien loin?
Chaperon rouge
c'est
;
première maison du
en usage jusqu'au temps du
par delà
village.
le
petit pot
dit le loup.
moulin que vous voyez
— Eh bien,
roi Cliarles IX.
lui
dit le loup, je
veux
LES CONTES
2
voir aussi
l'aller
:
je
DE PERRAULT
vais par ce chemin-ci, et toi par ce chemin-là; et nous
m'y en
verrons à qui plus tôt y sera.
Le loup
se mit à courir de toute sa force par le
petite
chemin qui
était le plus court
s'en alla par le
lille
chemin
;
et la
le
plus
long, s'amusant à cueillir des noisettes, à
courir après les papillons et à faire des bou-
quets des petites fleurs qu'elle rencontrait.
Le loup ne fut pas longtemps à la
maison de
Qui est
toc, toc. «
petit
mère-grand;
la
Chaperon rouge,
faisant sa voix, qui et
un petit
envoie.
»
dans son
i)ot
jeta sur la
'
cherra. » Le loup tira
bonne femme
de trois jours
qu'il avait
la
che\
et la dévora en
danslelitdelamère-grand, en attendant
le
heurte
dit le loup
en contre-
vous apporte une galette
de beurre, que ma mère vous
lui cria
:
«
illette, et la
moins il
:
C'est votre fdle le
était
à cause qu'elle se trouvait
lit,
mangé. Ensuite
—
La bonne mère-grand, qui
peu malade, bobinette
la
là?
à arriver
il
de rien
ferma
la
Tire
porte s'ouvrit. ;
car
un
la chevillettc,
il
porte et
petit Chape-
y
Il
se
avait plus
s'alla
^
coucher ^^
ron rouge, qui, quelque temps après, vint heurter à^la porte
toc, toc. «
:
qui entendit
Qui est là?
Le
»
grosse voix du
la
petit
louj),
Chaperon rouge,
eut peur d'abord;
mais, croyant que sa mère-grand était enrhumée, répondit
:
« C'est
votre
fille, le
Chaperon rouge, qui vous
petit
apporte une galette et un petit pot de beurre que ma mère
vous envoie. voix
:
«
Tire
»
Le loup
lui cria,
la chevillette, la
en adoucissant un peu sa
bobinette cherra. » Le petit Ello s'amusait à
Chaperon rouge
Le loup, «
Mets
la
la
tira la chevillette, et la
voyant entrer,
lui dit
porte s'ouvrit.
en se cachant dans
galette et le petit pot de beurre sur la
1.
Petit verrou de bois qui
2.
Grand
coffre
où
ferme
les portes
l'on serre le pain
dans
dans
les
les villages
campagnes.
huche
~,
le
lit
sous
la
couverture
:
et viens te coucher avec
Cjarnier frères, EdileursPa
'rénov,
Les Fées
49 Rie Ju Montparnasse
Pa?is
LE
PETIT
Le prlit (lliaperon rouge se
iioi.
»
)ieu
élounée de voir coMuneul
ui dit
:
«
Ma mère-grand,
(jue
CHAPERON
(l(''shal)iilc
sa
ROUGE
3
et va se iiiellre
mère-grand
élail
(aile
vous avez de grands hias
î
dans
le lit,
où
elle fui
en son déshabillé. Elle
—
C'est pour
mieux t'em-
— Ma mère-grand, que vous avez de grandes jand)es —C'est pour nieux courir, mon enfant. — Ma mère-grand, que vous avez de grandes — C'est pour nueux écouter, mon enfant. — Ma mèie-grand, que vous avez de grands yeux! — C'est pour mieux mon enfanl. — mère-grand, que vous avez de grandes dents — C'est pour manger. en disant ces mots, ce méchant )rasser
ma
fille
î
î
oreilles!
le voir,
î
loup se jeta sur
le petit
te
Chaperon rouge
iMa
» Et,
et le
mangea.
LES
6
si
demanda
belle, lui
« Ilélas
î
monsieur,
ce qu'elle faisait
c'est
DE PERRAULT
CONTES
toute seule, et ce qu'elle avait à pleurer.
là
ma mère qui m'a
chassée du
bouche cinq ou
d'où cela
lui
venait. Elle lui raconta toute son aventure.
reux,
considérant qu'un
et,
en mariage
Pour
sa
h
six perles et autant
tel
don
valait
une autre, l'emmena au
sœur,
elle se
fit
Le
fils
du
fils
la
sa
du
roi
son pèie, où
propre mère
la
il
du
roi
j)0uvait
MORALITÉ L'honnêteté coûte des soins
Mais
tôt
ou tard
Et souvent dans
.le
elle a sa
les
Ont encor plus de force
moins.
le
les pistoles
Peuvent beaucoup sur
Cependant
;
récompense,
temps qu'on y pense
Les diamants et
les esprits
;
douces paroles et
donner
l'épousa.
chassa de chez elle
mourir au coin d'un bois.
Et veut un peu de complaisance
qui vit
en devint amou-
malheureuse, après avoir bien couru sans trou\ er personne qui voulût alla
roi.
pria de lui dire
mieux que tout ce qu'on
palais
que
tant haïr,
Le
lo^i^is. »
de diamants,
sortir de sa
sont d'un plus grand prix.
la
:
et la
recevoir,
La Barbe Bleue
LA BARBE-BLEUE
L était
à la
une
lois
un liomine qui avait de
campagne, de
la vaisselle
belles
maisons à
la ville et
d'or et d'argent, des meubles en bro-
derie et des carrosses tout dorés. Mais, par malheur cet avait la barbe bleue ni
femme
:
ni fdle qui
cela le rendait
si
laid et
ne s'enfuît devant
si
honnne
terrible, qu'il n'était
lui.
Une de ses voisines, dame de qualité, avait deux fdles ])arfaitement belles. demanda une en mariage, en lui laissant le choix de celle
Il
lui
en
qu'elle voulait lui donner. Elles n'en voulaient point
toutes deux, et se le renvoyèrent l'une à l'autre, ne
pouvant se résoudre à prendre un barbe bleue. Ce qui avait déjà
les
homme
qui eût
dégoûtait encore, c'est
la
qu'il
épousé plusieurs femmes, et qu'on ne savait
pas ce que ces
femmes
étaient devenues.
La Barbe-Bleue, pour
faire connaissance, les
mena,
avec leur mère et trois ou (piatre de leurs meilleures amies, et quelques jeunes gens du voisinage, à une de ses oiilaieiit
punit toutes Jeux
maisons de campagne, où on demeura huit jours entiers.
Ce
n'était
que promenades, que parties de chasse
(pie collations
:
on ne dormait point
et
et
de pèche,
on passait toute
la
([ue
danses et festins,
nuit à se taire des malices
.
CONTES DE PERRAULT
LES
8
les
uns aux autres
:
enfiu tout alla
maître du logis n'avait plus
Dès qu'on fut de retour
la
si
barbe
à la ville, le
bien, que si
la
commença
cadette
un
bleue, et que c'était
fort
à trouver
sa
femme qu'il était obligé de faire un voyage
en province de six semaines au moins pour une affaire de conséquence
de se bien divertir pendant son absence qu'elle ;
campagne
à la
dit-il, les clefs
si
elle voulait;
fit
que partout
mon
elle fit
mes
mes
la
grande galerie de l'appartement bas
:
s'il
colère
vous arrive de l'ouvrir,
» Elle
.
il
ouvrez tout,
monte dans son carrosse
jeune mariée, tant
maison, n'ayant osé
le
elles avaient
lui
d'or et
mon
où est
la clef
allez
du cabinet du
partout; mais,
défends de
telle sorte^
les
le
mari y
;
pour son voyage.
envoyât quérir pour aller
d'impatience de voir toutes
y venir pendant que
ma
venait d'être ordonné
et part
Les voisines et les bonnes amies n'attendirent pas qu'on cliez la
Voilà, lui
la vaisselle
n'y a rien que vous ne deviez attendre de
promit d'observer exactement tout ce qui
et lui, après l'avoir embrassée^
qu'elle les
pierreries; et voilà lepasse-
pour ce petit cabinet, je vous défends d'y entrer, et je vous que,
;
«
coffres-forts
partout de tous les appartements. Pour cette petite clef- ci, c'est
bout de
qu'il la priait
bonne chère.
des deux grands garde-meubles; voilà celles de
argent; celles de mes cassettes où sont
;
venir ses bonnes amies
d'argent, qui ne sert pas tous les jours; voilà celles de
or et
le
mariage se conclut
Au bout d'unmois, la Barbe-Bleue dit à
menât
que
honnête homme.
les richesses
de
sa
cause de sa barbe bleue, qui
était, à
leur faisait peur.
Les voilà aussitôt à parcourir
les
chambres,
les cabinets, les
garde-robes, toutes
plus belles et plus riches les unes que les autres. Elles montèrent ensuite aux garde-
meubles, où des
lits,
elles
ne pouvaient assez admirer
le
nombre
et la beauté des tapisseries,
des sophas, des cabinets, des guéridons, des tables et des miroirs où l'on se
voyait depuis les pieds jusqu'à
la tête, et
dont les bordures, les unes de glace,
les
au très
d'argent et de vermeil doré, étaient les plus belles et les plus magnifiques qu'on eut
jamais vues;
elles
ne cessaient d'exagérer et d'envier
le
bonheur de leur amie, qui
cependant ne se divertissait point à voir toutes ces richesses, à cause de l'impatience qu'elle avait d'aller ouvrir le cabinet de l'appartement du bas. Elle fut
si
pressée de sa curiosité, que, sans considérer qu'il était malhonnête de
quitter sa compagnie, elle descendit par pitation, qu'elle pensa se
du cabinet,
rompre
elle s'y arrêta
le
un
escalier dérobé, et avec tant
cou deux ou trois
quelque temps, songeant à
fois. la
Etant arrivée
de préci-
à la
porte
défense que son mari
lui
BARBE-BLEUE
LA avait faite, cl considéranl
sanlc
mais
;
la
Icnlalion
|)()urrail
([iril
(«lail si
D'abord
moments,
ne vit rien,
elle
elle
commença
dans lequel se miraient des murs
:
an-ivcr inalhciir d'avoir vlv désobris-
lui
ne
ïovlv, i\nv\[Q
petite clef etouvi'it en Irendiltuit
que
cY'laient toutes les fennnes (pie
qu'elle venait de retirer de la serrure, lui
femmes morles,
se remetti'e
un
elle pi-il
donc
la
])cu
mourir de peur,
ramassa
mais
:
caillé,
attacliées le long
Barbe-Bleue avait épousées, et
la
tomba de
i)eu repris ses sens, elle
cbambre pour
à la
:
fenêtres étaient fermées. Après (iuciqiies
corps de plusieurs
les
siinnonler
plancber était (ont couvert de sang
le
avait égorgées l'une après l'autre. Elle pensa
Après avoir un
la jxiL
porte du cabinet.
la
i)arce (jue les
à voir
9
la
et la clef
qu'il
du cabinet,
main. referma
la clef,
porte
la
cl
moula
elle
n'en pouvait venir à bout, tant elle était émue.
Ayant remarqué que
du cabinet
clef
la
tacbée de sang, elle l'essuya deux ou trois
mais
le
sang ne s'en
laver, et il
même
allait
point
la frotter a\
ec
:
à fait
de
:
il
moyen de
n'y avait pas
quand on
car
ôtait le
la
fois
eut beau
du sable
y demeura toujours du sang;
fée\ et
elle
était
la
et
;
la
du grès,
clef était
nettoyer tout
sang d'un côté,
il
revenait
l'autre...
La Barbe-lîleue revint de son voyage dès
le soir
même,
et dit qu'il avait reçu des lettres en cliemin
(pii lui
avaient appris que
l'alfaire
pour laquelle
il
1
ir
Je peur
était parti venait d'être
terminée
à son avantage.
Sa femme Ht tout ce qu'elle put pour
lui
témoigner
<{u'elle était ravie
de son
prompt retour. Le lendemain,
il
lui
demanda
les clefs, et elle les lui
trenddanle, qu'il devina sans peine tout ce qui
D'où vient,
«
— — 1.
les
Il
lui dit-il,
faut, dit-elle,
Ne manquez
la clef
l'ai
du cabinet
un ouvrage de
et d'autres objets
n'est point
laissée là-baut sur
pas, dit la Barbe-Bleue, de
C'est-à-dire que la clef était
anneaux constellés
que
que je
donna, mais d'une main
si
s'était passé.
me
la
ma
avec
donner
féerie. Elle était cncliaiitéo
magiques, du genre des talismans.
les
autres
?
table.
tanliU.
»
sans doute, couune
la
lampe meiveilleusej
Après plusieurs remises,
il
fallut a])porter la clef.
La Barbe-Bleue, Tayant considérée, Pourquoi y
«
a-t-il
Bleue
y avez
vues.
:
Je n'en sais rien, répondit
n'en savez rien? reprit le
la
Barbe-
la
Eb bien
cabinet.
entrerez, et irez prendre votre place auprès des
aux pieds de son mari en pleurant et en
marques d'un
toutes les
— Vous
mort.
—
!
dames que vous
»
Elle se jeta
un rocber,
attendri
clef?
Vous avez voulu entrer dans
je le sais bien^ moi.
;
la
femme
dit à sa
du sang sur cette
pauvre femme, plus pâle que
Madame, vous y
PERRAULT
DE
CONTES
LES
10
demandant pardon, avec
lui
vrai repentir, de n'avoir pas été obéissante. Elle aurait
belle et affligée
un cœur plus dur qu'un rocber.
comme
« Il
elle était
faut mourir.
mais
;
la
Madame,
lui
Barbe-Bleue avait lout à
et
dit-il,
l'beure.
— Puisqu'il faut mourir, répondit-elle en donnez-moi un peu de temps
—
davantage.
monte, je
ne viennent point les vois, fais-leur
ils
:
m'ont promis
signe de se bâter.
Anne
lui
verdoie
répondait
:
«
plaît, » lui
la
la
Barbe-Bleue, mais pas un
:
«
qu'ils
me
:
«
Ma sœur Anne
tour,
la
pour voir
si
(car
mes
elle
frères
viendraient voir aujourd'bui, et,
si
tu
»
baut de
le
et lui dit
baut de
la
tour
ma sœur Anne, ne
Je ne vois rien que
;
et la
pauvre
affligée lui criait
vois-tu rien venir
le soleil
? »
Et
la
de
sœur
qui })oudroie^ et Iberiie qui
vite,
ou je monterai là-bautî
— Encore un moment,
s'il
vous
vois-tu
rien
répondit sa femme. elle
criait
tout bas
:
«
Anne,
ma sœur Anne, ne
»
sœnir
qui verdoie.
1.
la
Barbe-Bleue, tenant un grand coutelas à sa main, criait de toute
Descends
Et aussitôt venir?
yeux baignés de larmes,
»
-.
Cependant sa force
Anne,
«
:
sœur
te prie, sur le
La sœur Anne monta sur
temps en temps
les
»
Lorsqu'elle fut seule, elle appela sa s'appelait ainsi),
2.
regardant
Je vous donne un demi-(juart d'beure, reprit
moment
Et
le
pour prier Dieu.
Anne
lui réj)ondit
»
Poudroyer, darder, Verdoyer, jeter un
éljlouir les yeux.
éclat vert.
:
«
Je ne vois rien que
le soleil
qui poudroie et l'berbe
LA BARBE-BLEUE Descends donc
«
vais, » ré|)(tn(lil
rien venir
— — — — —
l'.l
Hni'i)e-|{l(Mie.
lit
puis elle criai!
je nionlei'iii
<>ii
:
l;i-li;inl
— Je
î
m'en
Anne, ma sœur Anne, ne vois-(u
«
?
Je vois, répondil
la
sœur Anne, une
iJirossc
poussièie
\ienl de ce cùté-ci...
((ui
Sont-ce mes frères? Hélas
Ne
î
non.
veux-tu
ma
p;is
sœur-, je vois
descendre
elle criait
:
«
Anne,
Je vois deux cavaliers
Li'oupeau de moutons..,
lui
criait la
?
Encore nn petit moment?
Et puis
—
vile, crin
(emine.
la
Barbe-Bleue.
répondit sa femme.
»
ma sœur Anne,
ne vois-tu rien venir
viennent de ce côté
cpii
mais
;
?
ils
sont l)ien
loin
encore.
— —
Dieu
soit loué
Je lenr
fais
î
s'écria-t-elle
La Barbe-Bleue se mit
femme
descendit et
ne sert de rien, dit par
en
les
allait
il
ment pour
si
fort,
Barbe-Bleue;
la
lui
abattre
le pria
de
se recueillir. «
mande-toi bien ce
frères,
il
la
que toute
la
maison en trembla. La pauvre
pieds tout éplorée et tout écbevelée.
mourir
faut le
î
»
Puis,
la
«
Cela
prenant d'une main
coutelas
La pauvre
tête.
se tournant vers lui et le regardant avec des
yeux mourants,
Dans
à crier
alla se jeter à ses
cheveux, et de l'autre levant
l'air,
femme,
un moment après, ce sont mes
signe tant rpie je puis de se hâter.
cà
lui
donner un petit mo-
Non, non,
dit-il,
recom-
Dieu... » Et levant son bras...
momeni, on heurta
si
fort à la porte, (pie
la Barbe-Bleue s'arrêta tout court.
On
ouvrit, el
aussit(U on vit entrer deux cavaliers qui, mettant l'épée à
la
main, coururent droit
à la
Barbe-Bleue. Il
Il
reconnut
l'un
([uv c'étaient les frères
dragon et l'autre mousquetaire, de sorte
ver; mais
les
put gagner
le
deux
frères le
perron.
Ils lui
la prit d'i
par
les
cheveux.
de sa femme,
poursuivirent de
si
qu'il
s'enfuit aussitôt
près, (pi'ils
l'ail
pour se sau-
râpèrent avant
passèrent leurs épées au travers du corps et
le
(pi'il
laissèrent
mort.
La pauvre femme se lever
était pi-es([ue aussi
pour embrasser ses
frères.
morte que son mari,
et n'iw ait pas hi force
de
.
LES
12
Irouva que
se
Il
la
CONTES
DE
PERRAULT
Barbe-Bleue n'avait point crhéritier, et qu'ainsi sa
femme
demeura maîtresse de tous ses biens Elle
en employa une partie à marier sa jeune sœur Anne avec un jeune gen-
tilhomme dont
elle était
aimée
dejiuis
longtemps
charges de capitaines à ses deux frères, et
un
fort
avec
la
honnête homme, qui Barbe^Bleue,
lui fit
oublier
le le
;
une autre partie
reste à
se marier
à acheter des
elle-même à
mauvais temps qu'elle avait passé
Garnier frères
lidiĂŽeurs
Paris
lip'.
La Belle au
bois
Dufrenoy.
dormant.
4"j
??:e
h
Monlpapnat'se Par;
LA BELLE AU BOIS DORMANT
y
L
avait
une
fois
pas d'enfants,
si
eaux du monde
:
un
une reine qui étaient
roi el
faciles (|u'on
vœux, pèlerinages
n"v faisait. Enlin pourtaut fdle.
On
fil
ne saurait dice.
la
d'elles faisant
coutume des eût, par ce
nables
fées
un don, comme
moyen, toutes
la
faciles
de n'avoir
tout fut mis en œuvre, et rien
un beau baptême: on donna
en ce temps-là,
si
allèrent à toutes les
reine devint grosse et accoucha d'une
princesse toutes les fées qu'on put trouver dans
chacune
',
lis
le
pa)
s (il
})our
marraines
à la petite
s'en trouva sept), afin (pie
c'était la
princesse
les perfections
imagi-
.
Après
les
cérémonies du baptême, toute
compagnie revint au
un grand chacune
festin
d'elles
palais
pour
du
roi,
les fées.
où
il
On mit
y
la
avait
devant
un couvert magnifique, avec un palais
étui d'or massif où
il
y
avait
fourchette et un couteau de
chacun prenait sa place à priée, parce qu'il
qu'on
la
y
une
fin or,
table,
on
cuiller,
une
garni de diamants et de rubis. Mais, vit entrei-
une
vieille fée,
comme
qu'on n'avait point
avait plus de cinquante ans qu'elle n'était sortie d'une tour, et
croyait morte ou enchantée. Le roi
lui
lit
donner un couvert
1. On allait on pèlerinage, pour avoir des enfants, à Notre-Dame de Liesse, à Saint-Rent en Bretagne, à Notre-Dame de Roqueniadour en Querci, à Saint-Urbic en Auvergne, etc.
;
Anjou,
mais
il
n'y
H
CONTES DE PERRAULT
LES
moyen de
eut pas
n'en avait
donner un
lui
d'elle, l'entendit, et,
la [»rincesse, alla,
parler
La
les sept fées.
grommela quelques menaces entre auprès
comme aux
étui d'or massif
que sept pour
fait faire
vieille
autres, parce
crut qu'on
Une des jeunes
ses dents.
que
l'on
méprisait et
la
fées, qui se
trouva
jugeant qu'elle pourrait donner quelques fâcheux don à
dès qu'on fut sorti de table, se cacher derrière
la
de
tapisserie, afin
dernière, et de pouvoir réparer, autant qu'il serait possible, le mal que
la
la
vieille aurait fait.
Cependant,
fées
les
donna pour don
lui
qu'elle aurait
de
commencèrent
comme un ange
l'esprit
admirable à tout ce qu'elle ferait; la
la
;
la
quatrième,
comme
cinquième, qu'elle chanterait
(pi'elle
un rossignol
tctc, avec plus
Ce
Dans
ce
paroles
:
main duii fuseau,
don
fit
frémir toute
moment
la
jeune fée
terrible
Rassurez-vous,
«
princesse se percera
la
Le
roi,
»
pour tâcher d'éviter
le
par lequel chez
soi,
Au
il
l)out
arriva
que
où une bonne
ma bonne femme? (pii
ne
la
la
est vrai
il
durera cent ans, au bout desquels
(pii
la vieille, fit
que fait
:
le fils
publier un édit
au fuseau, ni d'avoir du fuseau
filer
et
le roi
la
reine ('tant allés à une de leurs maisons
jeune princesse, courant un jour dans alla justpi'au
le roi
—
Ah
î
— Je que
faites-vous? donnez-moi que je voie
file,
ma
Cette bonne
l)elle
cela est joli si
le
château, et
haut d'un donjon, dans un petit gale-
avait faites de filer au fuseau.
dit la princesse.
connaissait pas.
;
ancienne a
mais, au lieu d'en mourir, elle tombera
vieille était à filer sa quenouille.
ouï parler des défenses que
mon
vie.
la
de quinze ou seize ans, il
et dit tout haut ces
n'en mouri'a point
malheur annoncé par
montant de chambi-e en cliambre, tas
;
la
n'y eut personne qui ne pleurât.
il
la ta])isserie,
fille
défendait à toutes personnes de
sous peine de
de plaisance,
votre
main d'un fuseau
réveiller.
la
de derrière
fée
la vieille
en mourrait.
pour défaire entièrement ce que
seulement dans un profond sommeil d'un roi viendra
sixième, qu'elle jouerait de
de dépit que de vieillesse, que
et (pi'elle
compagnie, et
roi et reine,
je n'ai pas assez de puissance la
la
sortit
danserait parfaitement bien;
la
;
dernière perfection. Le rang de
étant venu, elle dit, en branlant la
celle d'après,
;
troisième, qu'elle aurait une grâce
la
princesse se percerait
La plus jeune
à la princesse.
personne du monde
toutes sortes d'instruments dans la
don
à faire leur
qu'elle serait la plus belle
î
femme «
Que
n'avait point
faites-vous
là,
enfant, lui réjjondit la vieille,
reprit la princesse
:
comment
j'en ferais autant. Elle n'eut pas plus tôt
LA fuseau,
])ris le
comme
(jiie.
HEIJ.1-:
elle
AT
('lail
\ive.
li'(»|t
Tarrèl des fées fordouuail ainsi, elle seii perça
La bonne
vieille,
la
un peu
main
rioin-dic. cl
d aillcin-s
(|iic
eL tuniha ('Nanouie.
bien euiharrassëe, crie au secours: on vieni de tous cùLés; on
jcUe de l'eau au visage de
piincesse, on
la
tempes avec de leau de
lui frolte les
DOHM.Wr
IJÔIS
la
la
délace, on
frappe dans
lui
reine de lloni;iie
'
;
les
mains, on
mais rien ne
la
faisait
revenir.
Alors leroi,(iui éUiil monté au bruit, se sou vint de
la
pr(''diclion(leslé'(;s. el. jiiiicanl
bien
(\u"\\ fallait
(pie cela arrivât pniscjue les fées Invaienl dit.
dans
le j)lus bel
appartement du
en broderie d'or et d'argent.
lil
palais, sur
On
mellre
lit
la
princesse
un
ciU dit un
ange, tant elle était belle; car son évanouisse-
ment
n'avait point ôté les couleurs vives de
son teint lèvres les
:
ses joues t^'taient incarnates, et ses
comme du
corail; elle avait
yeux fermés, mais on doucement, ce qui
tout
n'était pas
Le
roi
seulement
l'entendait respirer faisait
voir
qu'elle
morte.
ordonna qu'on
la
laissât
dormir en
repos, jusqu'à ce que son lieure de se réveiller
venue. La bonne fée
fùl
vie en la
dans à la
le
condamnant
royaume de
princesse
;
mais
(]ui lui
avait sauvé la
dormir cent ans
à
euo
3Iataquin, à douze mille lieues de elle
tumi-a cva»ouie.
était là,
lors(pie l'accident arri\a
en fut avertie en un instant par un
})etit
nain qui avait
des bottes de sept lieues (c'étaient des bottes avec lesquelles on faisait sept lieues
d'une seule enjambée)
dans un cbariot tout de à la descente
La
.
feu, traiiié
du cbariot.
grandement [)révoyanle, elle serait
fée partit aussitôt,
Elle elle
on
la vit,
par des dragons. Le
approuva
tout ce qu'il avait lait
pensa que. (piand
la
dune
au boni
;
mais
comme
princesse viendrait
bien embarrassée toute seule dans ce grand cbàteau
:
la
main
elle était
à se réveiller,
voici ce qu'elle
Elle toucba de sa baguette tout ce qui était dans le cbàteau (liors
gouvernantes, fdies d'bonneur, femmes de cbambre,
beure, arriver
présenter
roi lui alla
le roi
lil.
et la reine),
genlilsbommes,
officiers,
maîtres d'bôtel, cuisiniers, marmitons, galoi)ins, gardes, suisses, pages, valets de 1.
Cette eau doit sou
nom
à sainte Elisabeth, leiuo de Hongrie.
pied
;
elle
loucha aussi tous
freniers, les gros
matins de
les la
DE PERRAULT
CONTES
LES
16
chevaux qui étaient dans
hasse-cour et
princesse, qui était auprès d'elle sur son
mirent tous, pour ne se réveiller qu'en tout [)rèts à
la
servir
feu, toutes pleines
se
fit
en un
Alors
quand
lit.
Dès qu'elle
même
moment
:
les fées n'étaient
du château et
de bien afin
que
loin. la
ne
On
a
eut touchés,
si
ils
s'endor-
afin d'être
feu aussi.
le
Tout
cela
après avoir baisé leur chère enfant, sans qu'elle s'éveillât,
château.
firent publier des défenses à qui il
que ce
fût d\Mi approcher.
poussa^ dans un quart d'heure, tout
grande quantité de grands arbres et de
d'épines entielacées les unes dans les autres, que bête ni (pi'on
les
temps que leur maîtresse,
pas longues à leur besogne.
Ces défenses n'étaient pas nécessaires; car autour du parc, une
avec les pale-
en aurait besoin. Les broches mêmes, qui étaient au
elle
rs le
en sorte
les écuries,
petite Pouffle, petite chienne de la
de perdrix et de faisans, s'endormirent, et
le roi et la reine,
soi'liient
la
oyait plus (pie
le
ne douta point que
petits,
de ronces et
homme n'y auraient pu j)asser
;
haut des tours du château, encore n'était-ce que la fée
n'eût encore
fait là
un tour de son métier,
princesse, pendant qu'elle dormirait, n'eût rien à craindre des curieux.
Au bout de
cent ans,
(pie la princesse
que des tours
le fils
du
endormie, étant
qu'il voyait
roi (pii régnait alors, et qui était allé à la
chasse de ce côté-là,
dune autre
demanda
au-dessus d'un grand bois fort épais. Chacun
selon qu'il en avait ouï parler
:
les
uns disaient que
c'était
famille
ce (pie c'était lui
répondit
un vieux château où
il
BEIJ.E
I-A
rcvenaildcscsprils: sabbat. La plus
pût
Mon
prince,
les sorciers
cprini Oi-rc
('-lail
y
a plus de ciu(pianle ans
cent ans, et qu'elle
sei'ail
Le jeune prince, mettrait
les
de
17
conln-c
la
deniein-ail
\
.
niisnCiil leur
\
el (pie
j;i
il
rni|)or(ai!
pouvoir manger à sou aise, et sans
savait (\u'vn croiiv. lors(|u*iiu vieux |);i\san pril
il
dans ce château une princesse,
lamour
DOli NIANT
suivre, ayaut seul le pouvoir de se faire un passage au travers du bois.
le
Le prince ne «
que (ons
opinion
eoiniiiiiiie
HUIS
Al
enfanls (piil pouvait alliaper, pour
(oiis les
(pi'ou
aiilrcs,
It's
si
ce qui en élait.
A
il
la
mon
p;M(.le el lui dil
le lils d'iui roi. à (pii elle était
aventure
de
l'eu
y devait
doi inir
réservée.
»
ciul. sans balancei-. (piil
il
:
:
père quil y avait
plus belle qu'on eût su voir: (pTelle
réveillée par
belle
et par la gloire,
ouï dire à
j"ai
à ce (Hscours, se sentit tout
une
à
lin
la
que
et pousse'' pai-
;
résolu! de vcur sur-le-cbamp
peine s'avança-t-il vers
que
le bois,
tous ces grands arbres, ces ronces et ces épines s'écartèrent d'eux-mêmes pour vers le château, qu'il
avenue où
il
entra
et,
;
que personne de
vit
le laisser
passer.
voyait au bout
ses
un peu,
ce qui le surprit
gens ne
marcha
Il
d'une grande il
pu suivre,
l'avait
parce que les arbres s'étaient rapprochés dès qu'il avait été passé.
Il
ne
laissa
pas de continuer son chemin
prince jeune et amoureux est toujours vaillant. tout ce qu'il vit d'abord était capable de
le
Il
:
glacer de crainte. C'était un silence afïreux
limage de la mort s'y présentait partout; ce n'étaient et
d'animaux qui paraissaient morts.
Il
passe une grande cour pavée de marbre,
des gardes, qui étaient rangés en haie, Il
la
il
lit,
dont
eût jamais vu
et
leurs lasses, où
monte
l'escalier:
il
y
a\ ait
endornùs eu buvant. il
entre dans
la
salle
carabine sur l'épaule, et ronflant de leur
:
les
11
entra dans une chambre toute dorée, et
rideaux étaient ouverts de tous côtés,
une princesse qui
paraissait avoir quinze
resplendissant a\ait quelque chose de lunu'neux et
;
qu'ils s"(''taient
traverse plusieurs chambres, pleines de gentilshommes et de dames, dormant
tous, les uns debout, les autres assis.
sur un
:
des corps étendus d'hommes
qu'endormis
encore quelques gouttes de vin, montraient assez
mieux.
(jue
reconnutpourtani bien, aux nez bourgeonnes et
à la face vermeille des suisses, qu'ils n'étaient
Il
un
entra dansunegrandeavanl-cour, où
en admirant, et
il
se mit à
genoux auprès
et
le
ou seize ans, et dont
de divin.
d'elle.
plus beau spectacle
Il
il
vit
(ju'il
l'éclat
s'approcha en trend^lant
LES CONTES DE PERRAll/r
18
comme
Alors,
fin
la
de Tenchantement était venue,
princesse s'éveilla; et,
la
regardant avec des yeux plus tendres qu'une première vue ne semblait «
Est-ce vous,
mon prince? lui
vous vous êtes
ces paroles, et plus encore de la
charmé de
comment
savait
dit-elle,
témoigner
lui
])ien fail
manière dont
plus que lui-même. Ses discours furent mal rangés;
peu d'éloquence, beaucoup d'amour. pas s'en étonner
:
elle avait
eu
le
Il
était plus
temps de songer
ne s'étaient pas
ils
le
permettre »
étaient diles. ne
en plurent davantage:
ils
ne doit
l'on
à ce qu'elle nurait à lui dire; car la
:
Le prince,
l'assura qu'il l'aimait
bonne
fée,
pendant un
avait procui-é le plaisir des songes agréables. Enfin,
lui
qu'ils se parlaient, et
heures
il
embarrassé qu'elle, et
y a apparence fl'bistoire n'en dit })Ourtant rien) que sommeil,
attendre.
elles
sa joie et sa reconnaissance;
le
si
il
long
y avait quatre
il
dit la moitié des choses qu'ils avaient
à se dire.
Cependant tout charge
;
le palais s'était réveillé
comme
et,
<rhonneur, pressée la
ils
n'étaient pas tous
comme les
magnifiquement, mais
ma
il
princesse ils
:
chacun songeait à
la
princesse à se lever
collet
monté
'
;
elle
faire sa
mouraient de faim. La dame
:
la
princesse que
tout habillée,
elle était
se garda bien de lui dire qu'elle était habillée
mère-grand, et qu'elle avait un
Ils
la
autres, s'impatienta, et dit tout haut à
viande était servie. Le prince aida
fort
avec
amoureux,
comme
n'en élait pas moins belle.
passèrent dans un salon de miroirs, et y soupèrent, servis par les officiers de
la
princesse. Les violons ei les hautbois jouèrent de vieilles pièces, mais excellentes, quoiciu'il
y eût près de cent ans qu'on ne
de temps,
grand aumônier
le
d'honneur leur
tira le rideau. Ils
besoin, et le prince
être en peine de
Le prince dans
la
les
la (juitla
dès
lui dit
roi
la
dormirent peu^
et après souper, sans
;
chapelle du château, et la
perdre
la
dame
princesse n'en avait pas grand
matin pour retourner
qu'en chassant,
il
s'était
(pii
lui
son père, qui était un bon
pas bien persuadée, avait toujours
jouât plus
à la ville
où son père devait
lui.
hutte d'un charbonnier,
fromage. Le
et,
voyant
qu'il allait
perdu dans avait fait
homme,
Mode du temps de Henri IV
:
cette
(pi'il
mode
la forêt, et qu'il
manger du
le
presque tous
une raison en main pour s'excuser quand
nuits dehors, elle ne douta plus
1.
le
les
maria dans
crut; mais sa les il
jours à
avait
un
siècle
au
moment où
la
mère n'en
;
car
l'auteur écrivait.
fut
chasse, et qu'il
avait couché
n'eût quelque amourette
avait couché
pain noir et du
il
deux ou
trois
vécut avec
la
LA princesse
[)lus
une
fut
lille.
jamais se
tout bas à
passer de
jietits
jeter sur eux
lui lit
le
la
mort, ce
roi fut
où
cérémonie
elle
^
à son
l'ois
mais
n'osa
il
monde
On
de se
se retenir
à
disait
(pi'en \(t\anl
cl
deux ans.
el (piil se \il
le
ma-
U
([uérir \
|f^|V5A^. k
la ville
entra au milieu de toute
cour.
Quelque temps après, la
élail
parce
l'aimât, car elle élail
des ogres,
arriva au boni de
(pii
une entrée magiiifKpie dans
capitale,
vie.
la
(pioiipi'il
les inclinations
avait
femme, dans son cbàteau. On
reine sa
le
plusieurs
dit
dans
enfants, elle avait toutes les peines du
lia^e, et alla en «grande la
(|ui
./o?^r,
|ii'eniiei'.
ne l'avait é|)Ousée qu'à cause de ses ^lands biens.
le roi
la coin- (pi'elle
déclara [)ul)li([uement son
il
crai^nîiit
le
qu'on nonuna
se contenter
la
il
lils
sœur. La reine
sa
fallait :
un
aussi le prince ne ^oulait jamais rien dire.
:
Mais (juand maître,
que
l)eau
de son secret
lier à elle
de race ogresse, et
même
|>Ius
e\pli(pier. (piil
[)(»ur le faire
deux enl'aidsdonl
eul
el
DOUMANT
ISOIS
lM?//'ore, et le second
encore
j)araissait
<pi"il lils,
de deux ans entiers,
nommée
AT
lil'IJ.E
guerre
oisin.
à
laissa
Il
le
roi alla faire
l'empereur Gantalabutte, son la
régence du royaume o
à On
.
la
reine sa mère, et lui reconuiianda fort
sa
femme
et ses enfants
:
devait être à
il
la
guerre tout
.
,
lui
ht une eiilive niaguilniuc.
dès
l'été el.
(pi'il fut
parti, la
mère envoya sa bru et ses enfants à une maison de campagne dans pour pouvoir plus aisément assouvir son horrible envie. Elle y alla (jucKpies jours mon diner la après, et dit un soir àsonmaitre d'Iiotel « Je veux manger demain à les bois,
reine
:
petite Aurore.
— Abî
Madame,
(cl elle le dit
d'un ton d'ogresse
veux manger
à la sauce
Ce pauvre homme.
Kobert
boid)on.
Il
tin
:
le
ruismier non
—
Je
le
veux, dit
la
reine
chair fraîche), et je
la
la
»
el
fallait la
pas se jouer à une ogresse, prit son petite
Aurore
:
en criant se jeter à son cou.
cou leau
i«
.
en\ie de manger de
à la cinuubre de
en sautant
se mit à pleurer
Sauce inventée par
(pii a
'.
maître d'hôtel..
le
VON ani bienciu'il ne
grand couteau, et moida (piai latre ans, et vint
dit
lui
Rul>ei-t, (lu
tomba des mains,
temps du Luuis XlV.
et
elle avait el lui il
alla
pour
lors
demander du dans
la
basse-
LES CONTES DE PERRAULT
20
cour pour couper
la
^orgc
à
un
ai;neau, et lui
])etit
temps
la
donnée
petite Auroi'e el lavait
à sa
bonne sauce, que
lit
une
si
bon. .11 avait emporté en
tresse l'assura qu'elle n'avait jamais rien mangé de
femme,
si
dans
poiu' la caclier
sa maî-
même
logement
le
qu'elle avait au fond de la basse-cour.
Huit jours ajjrès, à
mon
souper
le
la
méchante reine
petit Jour.
»
Il
dit à son maitre d'hôtel
ne répli([ua pas, résolu de
:
manger
Je veux
«
tromper comme
la
l'autre
fois.
alla
Il
à sa
chercher
le petit
Jour, et
femme, qui
le
cacha avec
chevreau fort tendre,
petit
trouva avec un petit fleuret à
le
des armes avec un gros singe
faisait
la
il
:
petite Aurore, et
(pie l'ogresse
:
«
Je veux
manger la
reine à
un
la
du
à la place
petit Jour
un peu dure, quoique
dit
au
Ce
fut
cette
pouvoir encore tromper. La jeune
la
la
gorge à
deux de
fois.
la
la Il
reine, et
jeune reine;
il
en
lui
enfants,
qu'on «
tendant
le
mes pauvres
les avait
moi où
qu'il avait recju
enfants que
lui
vous ne
j'ai
la
faire à
chambre
sui'prendre. et lui dit avec
donné
répondit
le
;
j'irai
lui dit-
revoir
mes
pauvre maître d'hôtel tout attendri, \ous ne
laisserez pas d'aller revoir vos enfants;
à son souper, avec le
enragés avaient mangé
la
tant aimés. » Elle les croyait morts depuis
»
Il la
mena
brasser ses enfants et pleui'er avec eux,
contente de sa cruauté, et
de couper
reine mère. « Faites, faites,
la
ména-
lui rien dire.
jeune biche en votre place.
Un
de
je les ai cachés, et je tromperai encore la reine,
mangea
sa vie,
main, dans
la
cou, exécutez l'ordre ([u'on vous a
enlevés sans
et
poignard à
ne voulut pourtant point
Non, non, madame,
mourrez point,
pour sauver
la
chambre, dans l'intention de n'en pas
sa
s'excitait à la fureur, et entra, le
beaucoup de respect Tordre elle,
prit la résolution,
Il
monta dans
peau
sa
:
moyen de trouver dans
belle et blanche; et le
gerie une bète aussi dure (pie cela?
un
méchante reine
soii',
reine avait vingt ans passés, sans compter les cent ans qu'elle avait dormi était
il
porta
le
Il
mêFiie sauce que ses enfants. »
pauvre maître d'hôtel désespéra de
alors (jue le
donna
main, dont
la
trois ans.
Irouva admirablement bon.
Gela était fort bien allé jusque-là; mais,
maitre d'hôtel
que
n'avait pourtant
môme
elle se
la l'eine
en
mais ce sera chez
lui faisant
aussitôt à sa chambre, où, il
alla
appétit
accommoder une
que
si
c'eût été
la
manger une
la laissant
biche, ({ue
reine
;
la
elle était
em-
reine
bien
préparait à dire au roi, à son retour, que des loups
et ses
deux enfants.
soir qu'elle rôdait à son ordinaire
dans
les
cours et basses-cours du château,
I.
|)(Mir\ lialciu'i-' .l(tm'(|iii
A
lilvMJ-:
(|ii('l(|U(' \i;iii(lc
pleurait. j)ai'ee({iie
la
Al
riaiclic. elle
reine sa
|)()|;\|\N|-
l{()IS
cnlcndil
mère voulail
.
dans une
salle basse, le petit
le l'aire loiieller.
à cause (|u'il avait
élé luéeliant: et elle enlendil aussi
la
pelile
frère.L ogresse reconnu!
la
reine el de ses enlanU: et. furieuse d'avoir élé
la
commanda
Ironipée, elle
\oi\(le
dès
le
Aurore
(pii
deuiandail pard(m pour sou
lendemain au
matin, avec une voix épouvanlal)le,
(|ui
l'aisîiit
lremI)lerloutle monde. (pi'onap|torlàl au milieu
delà cour une grande cuve, (pielle
lit
remplir
de crapauds, de vipères, de couleuvres et de scjpenls, pour y faire jeter
mailrc dhôtel, sa
donné ordre de
a^;lit
la
femme les
reine et ses enfants, et sa servante
amener
les
mains
:
le
elle
liées
dei'rière le dos.
Us étaient roi,
là,
et les
bourreaux se préparaient
qu'on n'attendait pas
poste, et
demanda
si
tôt,
entra dans
la
à les jeter C(»ur.
dans
à clieval
la
;
cuve, lorscpie il
le
venu en
était
tout étonné ce que voulait dire cet liorrible spectacle. Pei'sctnne
n'osait l'en instruire, (piand l'oi'resse, enragée de voir ce (pi'elle voyait, se jeta elle-
même
tète
la
bétes quelle
y
sa
la
mère; mais
première dans
la
cuve, et fut dévorée en un instant par les
avait fait uiettre. Le roi ne laissa pas d'en être fàcbé il
:
\
ilaines
elle était
s'en consola bientôt avec sa belle fenune et ses enfants.
LE MAITRE CHAT LE CHAT BOTTE
.\
meunier ne
laissa
pour lous biens, à
trois enfants qui! avait,
que son moulin, sonàne et son chat. Les partages furent bientôt faits; ni le notaire ni le
auraient eu bientôt le
moulin,
Ce dernier ne pouvait pourront gagner Iors(pie j'aurai il
mangé
tout
second Tàne, et
un
se consoler d'avoir
honnêtement en
leur vie
mangé mon
faudra que je
le
procureur n'y furent
chat, et
meure de faim.
que je
le
un
sac, et
me
:
«
Ne vous
faire faire
chat
ne
fit
pas
affligez pas,
si
mon
ou
bottes,
dans
fit
pas semblant,
pour
aller
dans
Allusion à la fable deiuiL'i'e du liuisièrae
11
sa peau,
il
la
dit
lui
avait vu
lui
me
d'un air
donner
les broussailles, et »
Quoique
faire tant
comme quand
il
le
vous
maitre du
de tours de
se pendait par
farine pour faire le rnort^ qu'il ne désespéra
pas d'en être secouru dans sa misère.
1.
})our moi,
;
un manchon de
mal j)artagé que vous croyez.
grand fonds là-dessus,
qu'il se cachait
frères, disait-il,
maître; vous n'avez qu'à
souplesse pour })rendre des rats et des souris, les pieds,
mes
:
»
une paire de
verrez ({ue vous n'êtes pas
lot
mettant ensemble
serai fait
Le chat, qui entendit ce discours, mais n'en posé et sérieux
pauvre patrimoine. L'ainé eut
plus jeune n'eut que le chat.
pauvre
si
se
me
le
])oint appelés. Ils
la
Fontaine
:
le
Cliat et
le
deux
Rat.
Le
Chat
bottĂŠ
LE chnl
le
L(>i's([ii('
alla
ce
ciil
son sac à son cou,
il
(|iril
en prit
dans une garenne où
il
y
lacerons^ dans son sac, et
quelque jeune
dans son
son's;tc, et le
maître
eliat, tirant
Tout glorieux de chez
le roi,
le lit
monter
à
(c'était le
nom
Voilà,
«
:
de garenne que M.
à
inclhml
lapins.
Il
mil du son et des
coninie sil eùl élé niorl,
il
allendil
rpie
l'ourrei'
avail mis.
y
:
im jeune
('(ourdi de lapin enira
s'en
cl le
dans
(uasans miséricorde
alla
On
parler.
une grande révérence
fit
il
et lui dit
roi
cl.
encore des luses de ce nionde, vint se
il
lui
:
ra|)partement de Sa Majesté,
où, étant entré,
au
à
bi'.ivciiiiMil
l)(»ll;i
aussitôt les cordons, le prit
proie,
sa
demanda
et
se
^rand noinhre de
avait
couché, (piileut conlenlemenl
fut-il
il
23
cordons avec ses deux pâlies de d(>vanl. cL s'en
s'élendanl
(pi'il
1U)TT1>
dcinniKN'.
av;iil
les
insliiiil
pour mani;er ce
sac,
A peine
peu
lapin,
CFfAT
le
un
Sire,
lapin
marquis de Carabas
qu'il lui prit
en gré de donner
son maître, m'a chargé de vous présenter
de sa part.
—
plaisir.
remercie, et
me
(pi'il
fois,
tenant
il
alla
toujours
se cacher dans
son
lescoi-dons et les tua tous les deux.
du
avait fait
un
ouvert, et
sac
lorsque deux perdrix y furent entrées,
lui lit
l'ait
»
Tue autre l)lé,
Dis à ton maître, répondit
(pic je le
le roi.
il
Il
faire
alla
ensuite les |)résen(er au roi. connne
lapin de garenne. Le roi reçut encore
donner
})(tur
une paire do bo
tira
ave(; plaisir les
deux perdrix,
et
il
il
boire.
Le chat continua ainsi, pendant deux ou trois mois, de porter de temps en temps, au
du gibier delà chasse de son maître. Un jour
roi.
à la
i)!omenade. sur
monde, faite:
il
bord de
dit à son maître
:
la
« Si
rivière, avec sa
me
laisser faire.
(pril sut (pie le roi devait aller fille,
vous v(nilez suivre
vous n'avez qu'à vous baigner dans
trerai, et ensuite
1.
le
la rivière,
»
Plante laiteuse qu'on donne aux lapins dans
!pb
campagnes.
la
mon à
plus belle princesse du
conseil, votre fortune est
rendroil (pie je vous
mon-
LES CONTES DE PERRAULT
24
Le marquis de Carabas
Dans
serait bon.
le
à crier de toute
qui se noie
!
A
»
sa force
ce
Au
«
:
fois
vint à passer, et le chat se mit
qu'il se baignait, le roi
du
secours! au secours! Voilà M.
mit
cri, le roi
avait apporté tant de
de M.
ce que son chat lui conseillait, sans savoir à quoi cela
fit
temps
gibier,
il
marquis de Carabas
le
portière et, reconnaissant
la tète à la
ordonna
gardes qu'on
à ses
chat qui
le
allât vite
lui
au secours
marquis de Carabas.
le
Pendant qu'on
pauvre manjuis de
retirait le
carrosse, dit au roi que,
dans
temps
les
la rivière,
(pie son
était
il
des voleurs qui avaient emporté ses habits, quoiqu'il eût crié au voleur sa force
le
:
du
le chat, s'approcliant
maître se baignait,
!
venu
de toute
drôle les avait cachés sous une grosse pierre. Le roi ordonna aussitôt
^
aux
officiers
rir
un de
M.
de sa garde-robe d'aller qué-
le
;
et
bonne mine
(car
il
trouva fort à son
Carabas ne
lui
les
pour
roi lui fit
beaux ha-
donner relevaient
lui
de sa personne),
fait
ou
comme
qu'on venait de
bits
habits,
marquis de Carabas. Le
mille caresses
sa
beaux
ses plus
était la
beau
fille
et le
g[-é,
du
et bien roi
le
marquis de
eut pas plus tôt jeté deux
trois regards fort
respectueux et un
peu tendres, qu'elle en devint amoureuse Vous serez tous
l.aehe-,
fuumie
eli.ur
^'"^
^^
a Kite
foHe.
Le promenade. Le chat,
rosse, et qu'il fût
de
à réussir, prit les
devanls
il
leur dit
:
«
la
Le «
roi
et.
le
leur avait
M.
car-
le
pré que vous
marquis de Carabas, vous serez tous hachés
menu comme
si
vous ne dites au roi que
»
ne manqua pas de demander aux faucheurs
C'est à
montât dans son
de voir que son dessein commençait
ayant renconti'é des paysans qui fauchaient un pré.
Bonnes gens qui fauchez,
fauchez appartient à 3L chair à ])àté.
:
roi voulut qu'il
ravi
le
fait
marquis de Carabas,
peur. « Vous avez
— Vous voyez.
là
Sire, répondit le
» dirent-ils
un
à
qui étaitce pré qu'ils lauchaient
tous ensemble; car
bel héritage, dit
marquis;
rapporter abondannnent toutes les années.
»
c'est
le roi
la
menace du
:
chat
au marquis de Carabas.
un pré qui ne manque point de
LE CHAT BOTTK
Lo maître
à
cluit.
([iii
allait (oiijonrs
Bonnes gens qui moissonnez,
«
M.
Le
le
roi,
25
devant, rencontra des moissonneurs, et leur
si
vous ne dites que tous ces
marquis de Caral)as, vous serez tous hachés menu comme chair
moment
qui passa un
encore avec
et le roi s'en réjouit
voulut savoir à
marquis de
qu'il voyait. « C'est à 31. le
disait toujours la
a[)rès,
même chose à
le
(pii
:
à pâté.
»
a|»partenaient tous les hiés
(^arahas, » répondirent les
marquis. Le chat,
dil
appartiennent
l)Iés
tous ceux qu'il rencontrait, et
moissonneurs;
devant
(pii allait
carrosse,
le
étonné des
le roi était
grands hiens du marquis de Carahas.
Le maître chat arriva enfin dans un heau château, dont
le
maître était un ogre,
le
plus riche qu'on ait jamais vu, car toutes les terres par où le roi avait passé étaient
de
la
dépendance de ce château. Le chat eut soin de s'informer qui
ce qu'il savait faire, et
demanda
près de son château sans avoir l'honneur de L'ogre
le
que vous aviez
d'animaux
—
;
si
révérence.
lui faire la
reçut aussi civilement que le peut un ogre, et
assuré, dit le chat,
élait cet ogre, et
à lui parler, disant qu'il n'avait pas voulu passer
le lit
On m'a
reposer. «
don de vous changer en toutes sortes
le
que vous pouviez, par exemple, vous transformer en
en éléphant.
lion,
Cela est vrai, répondit l'ogre brusquement, et, pour vous le montrer, vous
m'allez voir devenir lion. »
gagna aussitôt
Le chat
les gouttières,
ne valaient rien pour marcher sur
Quelque temps après,
le
fut
si
effrayé de voir
non sans peine
un
lion
et sans péril, à cause
devant
lui, qu'il
de ses bottes, qui
les tuiles.
chat ayant vu que l'ogre avait quitté sa première forme,
descendit, et avoua qu'il avait eu bien peur. «
On m'a
assuré encore, dit le chat,
mais je ne saurais le croire, que vous aviez aussi le pouvoir de prendre la forme des plus petits animaux
avoue que voir. »
;
par exemple, de vous changer en un rat, en une souris
je tiens cela tout à fait impossible.
Et en
même
temps
il
— Impossible? reprit
se changea en une souris
(pii
l'ogre;
Cependant
le roi,
qui vit, en passant,
dedans. Le chat, qui entendit
au-devant et dit au
roi
:
«
le
beau château de
l'ogre,
mangea.
la
voulut entrer
Votre 3Iajesté
soit la le
bienvenue dans ce château de M.
marquis, s'écria
le roi, ce
ne se peut rien de plus beau que cette cour plaît. ces bâtiments qui l'environnent; voyons les dedans, s'il vous Il
allez
bruit du carrosse qui passait sur le pont-levis, courut
marquis de Carabas. — Comment, monsieur encore à vous?
je vous
se mit à courir sur le
plancher. Le chat ne l'eut pas plus tôt aperçue, qu'il se jeta dessus et le
:
vous
et
»
le
château est
que tous
LES CONTES DE PERRAULT
26
Le marquis donna le
premier,
collation,
même
mais
gendre.
»
:
«
II
(pii
;
jeune princesse
fait
les
et dès le
;
où
salle,
suivant
et, ils
le roi
M
.
le
marquis de Carahas, de
grands hiens
le
devaient venir voir ce
y
était.
jour
seigneur et ne courut plus après
il
les
épousa souris
la
princesse.
que pour
roi,
qui en
après avoir hu cinq ou
marquis, que vous ne soyez
faisant de grandes révérences, accepta l'honneur
même
Le
même que sa fdle,
qu'il possédait-, lui dit, le
qui montait
trouvèrent une magnitupie
préparer pour ses amis, qui
ne tiendra quh vous, monsieur
Le marquis,
faisait le roi
à la
n'avaient osé entrer, sachant que le roi
qualités de
voyant
était folle, et
coups
main
que Togre avait
jour-Kà,
charme des honnes
six
la
entrèrent dans une grande
ils
mon
que
lui
Le chat devint grand
se divertir.
Cendrillo n
CENDRILLON LA PETITE PANTOUFLE DE VERRE
L était
une
fois
une femme, Elle avait
un gentilhomme
la ])lus
deux
liautaine et
filles
la
(|ui
épousa en secondes noces
plus fière qu'on eût jamais vue.
de son humeur, et qui
ressemhlaient en
lui
toutes choses. Le mari avait de son côté une jeune
d'une douceur et d'une honte sans exemple
de sa mère,
(pii
était
la
ses
filles
son
:
elle
:
ne put
souffrir les
faites,
que
la
encore plus haïssahles. Elle
et celles
son, dans
helle-mère
la
éclater sa
mauvaise rendaient
chargea des plus viles occupations de
de mesdemoiselles ses
filles
un grenier, sur une méchante
dans des chamhres parquetées, où
;
montées \ qui elle
des
lits
des plus à
(pii l'aurait
1.
dans
la
mai-
mode, fille
;
et des
ouffrail
grondée, parce (pie
gouvernait entièrement.
Lorsqu'elle avait s'asseoir
la
La pauvre
tout avec patience, et n'osait se plaindre à son père, le
mai-
pendant que ses sœurs étaient
la tète.
femme
la
chamhre de
couchait tout an haut de
paillasse,
elles avaient
frottait la
miroirs où elles se voyaient depuis les pieds jusqu'à
sa
mais
lille,
tenait cela
eid'ant. qui
fit
honnes qualités de cette jeune
c'était elle (pii nettoyait la vaisselle et les
madame
elle
meilleure personne du monde.
Les noces ne furent pas plus tôt
humeur
:
les
fait
son ouvrage, elle
cendres, ce
Les niaiclies des escaliers.
allait se
mettre au coin de
(|ui faisait (pi'ou l'appelait
la
cheminée,
communément dans
et
le logis
LES CONTES DE PERRAULT
28
Ciicendron. La cadette, qui n'était pas
si
malhonnête que son aînée,
Cendrillon. Cependant Ccndrillon, avec ses méchants fois plus belle
arriva
Il
qualité.
dans
le
que
que
du
roi
donna un
bal, et qu'il
Nos deux demoiselles en furent
sait le linge
.
l'appelait
laissait d'être
cent
en pria toutes
les habits et les coiffures
Nouvelle peine pour Cendrillon, car
c'était elle qui repas-
On ne
de ses sœurs, et qui godronnait^ leurs manchettes. la
personnes de
les
aussi priées, car elles faisaient grande figure
pays. Les voilà bien aises et bien occupées à choisir
qui leur siéraient le mieux
ne
quoique vêtues magnifiquement.
ses sœurs,
le fils
liahits,
manière dont on
parlait
que de
s'habillerait. « Moi, dit l'aî-
mon habit de velours rouge et Moi, dit la cadette, ma garniture d'Angleterre. je n'aurai que ma jupe ordinaire mais, en récompense, je mettrai mon manteau à fleurs d'or et ma barrière de diamants, qui n'est pas des plus indifférentes. » On envoya quérir la bonne née, je mettrai
—
;
~
coiffeuse,
pour dresser
rangs, et on
fit
bonne faiseuse \
Elle allait s'asseoir da
pour goût bon. Cendrillon
les conseilla le
lui
cornettes
les
à
deux
acheter des mouches de appelèrent
Elles
demander son
mieux du monde,
avis
et s'offrit
car elle avait
:
la
Cendrillon
même à les
le
coiffer,
ce qu'elles voulurent bien.
En
les coiffant, elles lui disaient: « Cendrillon, serais-lu
— — Tu
llélas
!
mesdemoiselles, vous vous moquez de moi
as raison,
on
Une autre que elle les coiffa
elles étaient
rirait
si
on voyait un Cucendron
(Cendrillon les aurait coiffées
;
bien aise d'aller au bal
ce n'est pas
aller
au bal.
de travers
;
là
ce
(pi'il
me
»
mais
elle était
bonne
:
parfaitement bien. Elles furent près de deux jours sans manger, tant
transportées de joie.
pour leur rendre
la taille
plus
On rompit plus de douze lacets,
menue,
à force
de
les serrer,
et elles étaient toujours devant leur miroir.
Enfin l'heureux jour arriva, on partit, et Cendrillon les suivit des yeux,
longtemps qu'elle put. Lorsqu'elle ne
1.
Empesait.
2.
Bandeau. Ce sont les modes du temps où l'auteur
3.
?
faul.
les vit plus, elle se
écrivait.
le
plus
mit à pleurer. Sa marraine.
.
CE.XDUILLON loule en pleurs,
(|ui In vil
drais bien. lui dit
:
«
.
.
demanda
bien aller au bal, n'est-ce pas?
— Eh bien, seras-tu bonne
mena dans
chambre, et
sa
ce (ju'elle avait.
Je voudrais bien.
«
Va dans
«
:
le
à sa
marraine, ne pouvant deviner
bal
Sa marraine
la
citrouille fut aussitôt
la
Ensuite
comment
creusa, et, n'ayant laissé
elle alla
sortait elle lui donnait
l'ée,
en
jardin, et apporte-moi
put trouver, et
une porta
au
la faire aller
de
i'écorce, la frappa
la
sa baguette, et
changée en un beau carrosse tout doré.
regarder dans
vie. Elle dit à (Cendrillon
je vou-
t'y ferai aller. » Elle
cette citrouille pourrait
que
.
était
oui, dit Cendrillon
î
mariaine: je
tille? dit sa
dit
lui
— Hélas
citrouille. » Cendrillon alla aussitôt cueillir la plus belle qu'elle
.
.
(prdle ne put achever. Sa marraine, qui
» Elle pleurait si fort
Tu voudnus
soupirant. la
lui
29
la
de lever
un coup de
un beau cheval, ce qui tU un
où
souricière,
trappe de
la
la
trouva six souris toutes en
elle
chaque souris
souricière, et à
sa baguette, et la souris était aussitôt
bel attelage
de
six
chevaux d'un beau
cpii
changée en
gris de souris
[)ommelé
Comme drillon,
elle était
en peine de
cpioi elle ferait
n'y a pas quelque rat dans
s'il
marraine va voir.
raison, dit sa
:
Cendrillon
»
gros rats. La fée en prit un d'entre louché,
il
fut
la ratière,
les trois^ à
changé en un gros cocher,
(pii
lui
un cocher
:
«
Je vais voir, dit Cen-
nous en ferons un cocher. apporta
la ratière,
où
il
y
cause de sa maîtresse barbe,
— Tu
as
avait trois et,
l'ayant
avait les plus belles moustaches qu'on ait
jamais vues. Ensuite
elle lui dit
:
«
Va dans
soir ; apporte-les-moi. » Elle
en et
six la(|uais, qui c|ui
La aise?
ne
fit
ne
s'y tenaient attachés
comme s'ils
— Oui, mais est-ce que la
y trouveras
:
Eh
«
la
marraine les changea
j'irai
n'eussent
fait
autre chose de toute leur vie.
bien, voilà de quoi aller au bal, n'es-tu pas bien
comme cela, avec mes vilains babils?
toucher avec sa baguette, et en
môme temps
carrosse; mais sa marraine
passer minuit, l'avertissant que,
si
lui
elle
»
Sa marraine
ses habits furent changés en
des habits d'or et d'argent, tout chamarrés de pierreries paire de pantoufles de verre, les plus jolies du
monta en
six lézards, derrière l'arro-
eut pas plus tôt apportés, que
montèrent aussitôt derrière le carrosse, avec leurs habits chamarrés,
fée dit alors à Cendrillon
que
le jardin, tu
les
;
elle lui
monde. Quand
donna ensuite une
elle fut ainsi parée, elle
recommanda, sur toutes choses, de ne pas
demeurait au bal un moment davantage, son
carrosse redeviendrait citrouille, ses chevaux des souris, ses la([uais des lézards, et
que
ses vieux habits reprendraient leur première forme.
LES CONTES DE PERRAULT
30
ne manquerait pas de sortir du bal avant minuit.
Elle promit à sa marraine qu'elle
ne se sentant pas de
Elle part,
Le
joie.
fds
du
roi,
qu'on
alla avertir qu'il venait
d'arriver
une i^rande princesse qu'on ne connaissait point, courut
donna
main à
la
compagnie.
Il
se
la fit
descente du carrosse, et alors
un grand
silence
;
la
mena dans
la
recevoir.
où
salle
la
on cessa de danser,
Il
lui
était la
et les violons
ne
jouèrent plus, tant on était attentif à contempler les grandes beautés de cette inconnue.
On
n'entendait qu'un bruit confus:
vieux avait
qu'il était,
longtemps
ne
laissait
qu'il n'avait
pas de
«
vu une
Ah!
Le
qu'elle est belle! »
si
belle et
même,
roi
regarder, et de dire tout bas à
la
aimable personne. Toutes
si
tout
reine qu'il
la
les
y dames
étaient attentives à considérer sa coifiureet ses habits,
pour en avoir, dès
le
lendemain, de
semblables, pourvu qu'il se trouvât des étoffes assez belles et des ouvriers assez habiles.
Le
fils
du
roi la
mit
à la
place
rable, et ensuite la prit poui' la Elle dansa avec tant
encore davantage. collation, Le
au
fils
lo, courut
la
taut
ivov.i.
il
elle leur fit
;
plus hono-
de grâce, qu'on l'admira
On
apporta une fort belle
dont le jeune prince ne mangea point.
était
occupé à
s'asseoir auprès
honnêtetés
la
mener danser.
la
considérer. Elle
de ses sœurs, et leur
part des oranges et des citrons que
le
prince
lui
fit
alla
mille
avait donnés,
ce qui les étonna fort, car elles ne la connaissaient point.
Cendrillon entendit sonner onze heures trois quarts; elle
révérence à elle alla
la
compagnie,
et s'en alla le plus vite qu'elle put.
trouver sa marraine,
bien aller encore elle était
le
et,
après
lendemain au
l'a^
bal,
fit
aussitôt
Dès
une grande
qu'elle fut arrivée,
oir remerciée, elle lui dit (ju'elle souliailerail
parce que
le
occupée à raconter à sa marraine tout ce qui
heurtèrent à la porte, Cendrillon leur alla ouvrir.
«
fils
du
s'était
roi l'en avait priée.
Comme
passé au bal, les deux sœurs
Que vous êtes longtemps à revenir! »
leur dit-elle en bâillant, en se frottant les yeux et en s'étendant comme si elle n'eût
que de se
réveiller
:
elle n'avait
s'étaient quittées. « Si lu étais
pas ennuyée elle
nous
;
il
fail
cependant pas eu envie de dormir depuis qu'elles
venue au
bal, lui dit
est venu la plus belle princesse, la
a fait mille civilités; elle
une de
ses sœurs, tu
ne
t'y serais
plus belle qu'on puisse jamais voir;
nous a donné des oranges et des citrons.
»
CE.XDRILLOX Cendrillon ne se sentait pas de joie
mais
elles lui ié()ondirent
en peine,
etcpi'il
î
elle leur
:
monde pour
donc bien belle?
« Elle était,
ne poiu-rais-je donc pas
31
demanda
fusse folle.
(pie je
taudi'ail
»
mon
lui
])rèter
Le lendemain, parée que
la
habit à
(Cendrillon
fut bien aise, car elle aurait été
voulu
celh' princesse,
du
le lils
l'oi
en
élail fort
Cendiil-
(pii elle était.
Dieu
vous êtes heu-
(jue
î
voir? Hélas! mademoiselle Javotte. |)rètez-moi
la
Javotte, je suis de cet avis! Prêter Il
nom de
savoir
.\!on
votre habit jaune, que vous mettez tous les jours.
en
le
connaissail pas, que
la
donnerait toute chose au
lon sourit, et leui' dit
reuses
qu'on ne
;
— Vraiment,
un
mademoiselle
dit
(^uceudron conuiie cela!
vilain
bien à ce refus, et elle
s'attendait
grandement embarrassée
si
sa
sœur eût bien
son habit.
deux sœurs furent au
les
bal, et Cendrillon aussi,
mais encore plus
jn'emière fois. Le fds du roi fut toujours auprès d'elle, et ne cessa de
lui
conter des douceurs. La jeune demoiselle ne s'ennuyait point, et oublia ce que sa
marraine
recommandé, de sorte
lui avait
qu'elle entendit sonner le
minuit, lorsqu'elle ne croyait pas qu'il fut encore onze heures fuit aussi
légèrement qu'aurait
traper. Elle laissa
fait
tomber une de
une biche. Le prince
elle
cence, qu'une de ses petites pantoutles,
tomber.
On demanda aux
une princesse mal vêtue,
Quand
:
ils
gardes de
la
lui
pareille
et
de
celle
s'ils
belle
si la
roi l'avait
dame y
qu'assurément
ses petites pantoufles
ramassée, et il
était fort
l'at-
carrosse, sans
qu'elle
avait laissé
n'avaient point vu sortir
deux sœurs revinrent dubal^ Cendrillon leur demanda
tomber une de du
ne put
fille
fort
paysanne que d'une demoiselle.
avait été
;
qu'elle s'était enfuie lorsque minuit avait sonné, et
le fils
il
dirent qu'ils n'avaient vu sortir personne qu'une jeune
encore bien diverties, et
laissé
mais
prince ramassa bien
étant resté de toute sa magnifi-
porte du palais
et qui avait plus l'air d'une
les
la
le
bien essoufllée, sans
méchants habits; rien ne
laquais, et avec ses
que
premier coup de
elle se leva et s'en-
la suivit,
ses j)antoufles de verre,
soigneusement. Cendrillon arriva chez
:
amoureux de
si
de verre,
qu'il n'avait fait la
que
la
si
elles s'étaient
elles lui dirent
promptement plus jolie du
la
regarder tout
que
oui,
mais
qu'elle avait
monde
le reste
;
du
que bal,
personne à qui ap|)artenait
belle
la
petite pantoufle. Elles disaient vrai
;
qu'il épouserait celle
l'essayer
peu de jours après, dont
le
le fils
du
roi
pied serait bien juste à
aux princesses, ensuite aux duchesseset
fit
la
publier, à son de trompe,
pantoufle.
à toute la
On commença
à
cour, mais inutile-
LES CONTES DE PERRAULT
32
On
ment.
porta chez les deux sœurs qui firent tout leur possible pour faire entrer
la
leur pied dans
pantoufle, mais elles ne pin-ent en venir à bout. Cendrillon, qui les
la
regardait^ et qui reconnut sa pantoufle, dit en riant
pas bonne!
Ses sœurs se mirent à rire et à se
»
faisait l'essai
de
fort belle, dit filles.
Il fit
qu'elle
la
que
:
«
Que je voie
moquer
d'elle.
si
elle
ne
pantoufle, ayant regardé attentivement Cendrillon, et cela était très juste, et qu'il avait
me serait
Le gentilhomme qui la
trouvant
ordre de l'essayer à toutes
asseoir Cendrillon, et, approchant la pantoufle de son petit pied, et qu'elle lui était juste
y entrait sans peine,
comme de
il
les
vit
L'étonnement
cire.
des deux sœurs fut grand, mais plus grand encore quand Cendrillon tira de sa poche l'autre petite pantoufle qu'elle mit à son autre pied. Là-dessus, ari-iva la marraine, (pii,
ayant donné un coup de sa baguette sur
encore plus magnifiques que tous Alors les deux sœurs
au
la
reconnurent pour
bal. Elles se jetèrent h ses pieds,
traitements qu'elles
lui
avaient
les habits
de Cendrillon,
pour
lui
fait souffrir.
la
belle
On
la
mena chez
le
bonne que
jeune prince, parée
belle,
fit
il
les priait
comme elle était.
la
cour.
mauvais
dit,
en
les
de l'aimer bien
11 la
trouva encore
l'épousa. Cendrillon, qui était aussi
loger ses deux sœurs au palais, et les maria, dès
deux grands seigneurs de
les
Cendrillon les releva, et leur
plus belle que jamais; et, peu de jours après,
à
devenir
fit
personne qu'elles avaient vue
demander pardon de tous
embrassant, qu'elle leur pardonnait de bon cœur, et qu'elle toujours.
les
les autres.
le
jour
même,
RIQUET
une
L était
M6"L
/^T^
^%\J CP^è::^
s'il
.
en vertu du don
m
nus au
ne
cela consola
monde un
si
un peu
vilain
la
la
Il
Une
est vrai
,,
.
elle
personne
pauvre reine, qui
marmot.
:
que
qu'il
mal
fée,
qui
.
aimable
même
ajouta lui
si
laid et
laisserait pas d'être
venait de
([u'ellc
autant d'esprit qu'il en aurait à
Tout
.
.
aurait beaucoup d'esprit
qu'il
poui'i'ait.
lils si
avait forme humaine.
se ti'ouva à sa naissance, assura qu'il
parce
M'slaJ
une reine qui accoucha d'un
fois
qu'on douta lonii:temps
fait,
HOUPPE
LA
yV
aimerait
qu'il
donner
faire,
mieux.
le
était bien affligée d'avoir
cet enfant
ne commença pas
plus tôt à parler, qu'il disait mille jolies choses, et qu'il avait dans ses actions sais
quoi de
si
spirituel qu'on
en
était
charmé. J'oubliais de dire
avec une petite houppe de cheveux sur à
la
houppe, car Riquet
Au bout de
était le
sept ou huit ans,
la
La première qui vint au monde qu'on appréhenda que qui avait assisté à
modérer
la
joie
la
de
la
la tète,
nom de reine du
rpii lit
royaume
était plus belle
que
le
nomma
voisin accoucha de le
jour;
trop grande joie qu'elle en avait ne
reine, elle lui déclara
qu'on
la
houppe
que celte
la
seconde fdle dont
elle
moments
ne
lliquet
après,
deu\
reine en fut
lui fît
mal. La
lilles.
si
aise,
même fée
était présente, et,
pour
i)elile pi'incesse n'aurait
d'esprit, et qu'elle serait aussi stupide qu'elle était belle. Cela mortifia
reine; mais elle eut, quelques
je
au monde
sa ftimille.
naissance du petit lliquet à
la
ce
qu'il vint
un bien plus grand chagrin,
accoucha se trouva extrêmement
laide. «
Ne vous
pas
beaucoup car
affligez
la
la
pas
LES CONTES DE PERRAULT
34
tant,
Madame,
d'esprit qu'on
lui dit la fée,
votre
fille
sera récompensée d'ailleurs, et elle aura tant
ne s'apercevra presque pas
qu'il lui
manque de
veuille! répondit la reine; mais n'y aurait-il pas
d'esprit à l'ainée, qui est
de
l'esprit, lui dit la fée;
a rien
si
belle?
— Je
moyen de
ne puis rien pour
mais je puis tout du côté de
que je ne veuille pour votre
pouvoir rendre beau ou belle
la
la
lui
beauté.
— Dieu
taire avoir
elle.
plaira.
le
un peu
Madame, du
beauté; et com^ie
côté
il
n'y
donner pour don de
satisfaction, je vais lui
personne qui
la
»
A mesure que ces deux princesses devinrent grandes, leurs perfections crurent aussi
avec
elles, et
cadette.
11
on ne parlait partout que de
enlaidissait à
vue
si
la
lui
demandait, ou
maladroite, qu'elle n'eût
née sans en casser une,
Quoique
la
beauté de l'aînée et de
d'œil, et l'ainée devenait plus stupide
répondait rien à ce qu'on cela
la
que leurs défauts augmentaient beaucoup avec
est vrai
beauté
ni boire
soit
elle
l'esprit
de jour en jour
de
la
La cadette
l'âge. :
ou
elle
ne
répondait une sottise. Elle était avec
pu ranger quatre porcelaines sur
le
bord d'une chemi-
un verre d'eau sans en répandre la moitié sur ses
habits.
d'un grand avantage dans une jeune personne, cependant
cadette l'emportait toujours sur son aînée dans toutes les compagnies. D'abord on
allait
du côté de
la
plus belle pour
la
voir et l'admirer; mais bientôt après on allait
A
lUQl'Kr à celle qui avait le plus d'esprit, était
pour
IIOIPPE
I.A
lui
35
eutendre dire mille choses agréables; et on
étonné qu'en moins d'un (piart d'heure l'ainée n'avait plus personne auprès
d'elle, et
que tout
monde
le
remarqua bien
stupide, le
;
s'était
rangé autour de
la
cadette. L'ainée, qu()i([ue fort
donné sans regret toute
et elle eût
sa beauté
pour avoir
la
moitié de l'esprit de sa sœur. La reine, toute sage qu'elle était, ne put s'empêcher
de
lui
reprocher plusieurs
fois sa bêtise; ce cpii pensîi faire
mourir de douleui; cette
pauvre princesse.
Un jour
qu'elle s'était retirée dans
homme
venir à elle un petit le
jeune prince lliquet à
amoureux le
monde,
le plaisir
un bois
poui' y [)l;undre son
a^ ait quitté le
de
la
malheur,
elle vit
désagréable, mais vêtu très magnifiquement. C'était
houppe, qui, étant devenu
la
d'elle sur ses portraits qui couraient
par tout
royaume de son père pour
voir et de lui parler. Ravi de
ainsi toute seule, la
ioi't
d l'aborda avec tout
le
la
avoir
renconlrer
respect et toute
politesse imaginables. Ayant remarqué, après
avoir
lui
fait les conqjliments ordinaires, ({u'elle était fort mélan-
colique,
lui
il
dit
Je ne comprends pas, Madame,
«
:
conunent une personne aussi belle que vous
l'êtes j)eut
être aussi triste que vous paraissez; car, <pioique je puisse
me
vanter d'avoir vu une infinité de belles personnes, je
puis dire que je n'en plaît à dire,
ai
Monsieur,
reprit Riquct à
hi
jamais vu dont répondit
» lui
de
—
Il
croit
demeura
là. «
La beauté,
grand avantage, qu'elle doit tenir lieu de
— J'aimerais mieux,
dit la princesse, être aussi laide (jue vous, et avoir
que d'avoir de
la
Ijeauté
n'y a rien, Madame,
en manquer. de
fort bête, et c'est
il
—Je là
est
ne
ferez-vous? dit
princesse.
la
de
sais
comme
j'en
—
;u',
et être hôte autant
marque davantage qu'on
la
le
J'ai le
a
de
que je
l'esprit,
nature de ce bien-là, que plus on en
pas cehb dit
le
que de a,
plus
princesse; mais je sais que je suis
la
chagrin qui
puis aisément mettre
afflige, je
l'esprit,
(pii
que vient
Madame, qui vous donner de
princesse; et elle
vôtre
la
possède, je ne vois rien qui puisse vous allliger
croire n'en pas avoir; et
on
si
beauté approche de
la
l'esprit,
g^iis,
la
houpi»e, est un
tout le reste; et, (piand on
beaucoup.
la
me
fin à
tue.
—
Si ce n'est
votre douleur.
pouvoir, Madame, dit Ri([uet à
autant qu'on en saurait avoir, à
la
que
cela.
— Et conunent la
houppe, de
personne que je dois aimer
le
.
LES CONTES DE PERRAULT
36
plus
comme vous êtes, Madame,
et
;
cette personne,
il
ne tiendra qu'à vous que vous
ayez autant d'esprit qu'on peut en avoir, pourvu que vous vouliez bien m'épouser.
La princesse demeura tout interdite et ne i-épondit rien. à la
houppe, que cette proposition vous
je vous
de
fait
en
même temps
»
La princesse avait
cette année ne viendrait jamais; de sorte qu'elle accepta faite. Elle
n'eut pas plus tôt promis à Riquet à
la
houppe
la
facilité
incroyable à dire tout ce qui
fine, aisée et naturelle. Elle
soutenue avec
houppe crut
Quand ment
lui
elle fut
sulut et
si
avoir
tuelles.
Toute
la
un
trouva
d'une manière et la
donné plus d'esprit
lui
elle se
que Riquet à
d'une
elle babilla
qu'il
telle force,
ne s'en était réservé pour lui-même.
cour ne savait que penser d'un change-
la
extraordiuaire; car autant on
auparavant, autant
:
de
lui était
qu'elle l'épouserait dans
lui plaisait, et à le dire
retournée au palais, toute si
d'es-
la fin
commença, dès ce moment, une conversation galante
houppe, où
iiicpict à la
peu
proposition qui
an à pareil jour, qu'elle se sentit tout autre qu'elle n'était auparavant
une
si
grande envie d'en avoir, qu'elle s'imagina que
si
»
Je vois, reprit Riquet
peine, et je ne m'en étonne pas; mais
la
donne un an tout entier pour vous y résoudre.
prit, et
«
lui
avait ouï dire d'impertinences
entendait-on dire de choses bien sensées et infiniment spiri-
cour en eut une joie qui ne se peut imaginer;
il
n'y eut que sa cadette
qui n'en fut pas bien aise, parce que, n'ayant plus sur son aînée l'avantage de l'esprit, elle
ne paraissait plus auprès
Le
roi se conduisait
d'elle
qu'une guenon
par ses avis;
il
allait
fort désagréable
même
quelquefois tenir conseil dans son
appartement. Le bruit de ce changement s'étant répandu, tous
royaumes voisins
firent leurs efforts
dèrent en mariage; mais
elle
pour
si
spirituel et
lui.
Son père,
si
bien
faire aimer, et
fait,
un d'eux. Cependant
qu'elle
en vint un
il
qu'il lui
Elle alla par hasard se
Gomme
deman-
la
si
puissant,
si
bonne volonté
plus on a d'esprit et plus on a de elle
demanda, après avoir
donnât du temps pour y penser.
promener dans
le
même
bois où elle avait trouvé Riquet
houppe, pour rêver plus commodément à ce qu'elle avait à
qu'elle se promenait, rêvant
pieds,
la
s'en étant aperçu, lui dit qu'il la faisait maitresse sur le choix d'un
peine à prendre une ferme résolution sur cette alfaire,
à la
jeunes princes des
ne put s'empêcher d'avoir de
époux, et qu'elle n'avait qu'à se déclarer.
remercié son père,
les
presque tous
n'en trouvait point qui eût assez d'esprit^ et elle les
écoutait tous sans s'engager à pas riche,
pour s'en
profondément,
comme de plusieurs personnes qui
elle
entendit
un
faire.
Dans
le
temps
bruit sourd sous ses
vontet viennentetqui agissent. Ayant prêté
lUQUET A LA HOUPPE que Tuu
roreillc plus altentivcmenl, elle ouït
mite
»
l'autre
;
:
«
Donne-moi cette chaudière
La terre s'ouvrit dans
même
le
cuisine pleine de cuisiniers, de
un
j)()ur faire
temps, et
en
11
:
disait
:
l'autre
:
elle vit
marmitons
festin magnifique.
»
37
Apporte-moi eette mar-
« «
Mets du bois dans ce
feu. »
comme une graude
sous ses pieds
et de toutes sortes d'officiers nécessaires
sortit
une bande de vingt ou trente rôtisseurs,
qui allèrent se camper dans une allée du bois, autour d'une table fort longue, et qui tous, la lardoire à la
main
et la
queue de renard sur
l'oi-eille
',
se mirent à travailler en
cadence, au son d'une chanson harmonieuse.
La princesse, étonnée de ce spectacle, leur demanda ]»our (pii
Madame, pour
lui
répondit
prince lliquet à
le
plus apparent de
le
houppe, dont
la
la
les
ils
travaillaient. « C'est,
bande,
noces hc
feront demain. » La piincesse, encore plus surprise (ju'elle
y
(pi'il
ne
l'avait été, et se
avait
d'épouser
le
un an qu'à
ressouvenant tout à coup
pareil jour elle avait
prince Riquet à
ber de son haut. Ce qui
la
faisait ({u'elle
venait pas, c'est que, ({uand elle elle était bête, et le
prince
lui avait
qu'en prenant
donné,
promis
houppe, pensa tom-
fit
ne s'en sou-
cette promesse,
nouvel esprit que
le
elle avait oublié toutes ses
sottises.
Elle n'eut pas fait trente pas, en continuant sa pro-
menade, que Riquet
à la
brave, magnifique, et
marier. «
j^^^^
ici
pour exécuter
— Je vous avouerai ma
se présenta à elle,
la
le crois,
1.
dit la
sans esprit, je
Les cuisiniers élégants se la
^^^
^^
^
^
ma
parole, et je
ne doute point que
la
princesse,
que je
n'ai la
pas encore
prendre
telle
souhaitez. lui dit
jndre
à tenir
franchement, répondit
— Vous m' étonnez, Madame, — Je princesse, homme
^^
la vôtre.
résolution là-dessus, et que je ne crois pas pouvoir jamais
que vous
un
^^^^
^
prince qui va se
Vous me voyez. Madame, exact
vous ne veniez
pris
houppe
comme un
queue.
On
voit encore,
me
et
Riquet à
la
houppe.
assurément,
si
j'avais affaire à
trouverais bien embarrassée.
dans leur négligé de travail, de dans certaines provinces, des chasseurs
coiffaient,
la
Une
un
peau de quelque animal, dont
coiffés ainsi.
brutal, à
princesse n'a que sa
.
LES CONTES DE PERRAULT
38
me dirait-il, et comme celui à qui
parole,
mais
il
faut je
parle est
l'homme du monde qui
je
l'avez
promis;
plus d'esprit, je
me résoudre à vous épouser comment voulez-vous qu'ayant l'esm'avez donné, qui me rend encore plus difficile en gens que je n'étais,
pouvais néanmoins
que vous
a le
entendra raison. Vous savez que, quand je n'étais qu'une bête, je ne
suis sûre qu'il
prit
me
que vous m'épousiez, puisque vous
:
prenne aujourd'lnii une résolution que je
n'ai
pu prendre dans ce temps-là?
vous pensiez tout de bon à m'épouser, vous avez eu grand tort de m'oter
ma
Si
bêtise
me faire voir plus clair que je ne voyais un homme sans esprit, répondit Riquet à la houppe, devait être bien reçu, comme vous \enez de le dire, à vous reprocher voti'e manque de parole, pourquoi voulez-vous. Madame, que je n'en use pas de même dans une chose où y va de tout le bonheur de ma vie? Est-il raisonnable que les personnes qui ont de l'esprit soient d'une et de
—
Si
il
pire condition
avez tant, et
A la
que ceux qui n'en ont pas? Le pouvez-vous prétendre, vous qui en avez tant souhaité d'en avoir? Mais venons au
([ui
fait, s'il
vous
plait.
ma laideur^ y a-t-il quelque chose en moi cpii vous déplaise. Êtes- vous mal contente de ma naissance, de mon esprit, de mon humeur et de mes manières? — Nullement, répondit la princesse; j'aime en vous tout ce que vous venez de me réserve de
dire.
—
Si cela est ainsi, reprit Iliquet à la
vous pouvez
me
rendre
le
faire? lui dit la princesse.
— Cela
m'aimez assez pour souhaiter que pas, sachez
que
la
rendre spirituelle
même la
houppe, je vais être heureux, puisque
hommes.
plus aimable des
cela soit; et afin.
fée (pii, au jour
persoiuie qui
— Comment
cela se peut-il
se fera, répondit Riquet à la houppe,
me
de
ma
plairait,
si
vous
Madame, que vous n'en doutiez
naissance,
me
vous a aussi
lit
le
fait le
don de pouvoir don de pouvoir
rendre beau celui que vous aimerez, et à qui vous voudrez bien taire cette faveur.
—
Si la
deveniez
chose en est
le
prince du
ainsi, dit la princesse, je
monde
le
souhaite de tout
mon cœur que vous
plus aimable, et je vous en fais le don autant qu'il
est en moi. »
La princesse n'eut pas plus à ses
tôt
yeux l'homme du monde
le
prononcé ces paroles, que Riquet à plus l)eau, le
mieux
eût jamais vu. Quelques-uns assurent que ce ne furent point qui opérèrent, mais que l'amour seul cesse,
ayant
fait
fit
cette
métamorphose.
la
houppe parut
plus aimable qu'elle
fait et le
les Ils
charmes de disent que
la
la fée
prin-
cette réflexion sur la persévérance de son amant, sur sa discrétion et
sur toutes les bonnes qualités de son
ame et de son
esprit,
ne vit
[)lus la
dilformité de
RIOUET A LA HOUPPE hiidcur de sou visage; ([ue sa bosse ne
SOU corps ni
la
(runliomme
(pii l'ait le
elïVoyablement^
elle
ne
39 lui
seml)la plus (pic le
^ros dos, et qu'au lieu (pic jus(pralors elle lui
trouva plus (ju'un certain air penche
l'avait
(pii la
bon
air
vu boiter
charmait.
Ils
disent encore ([ue ses yeux, (|ui étaient louches, ne lui eu parurent ([ue plus brillants; (|ue leur dcu-èglement passa
dans son esprit pour
d'amour; et qu'enfin son gros nez rouge eut pour
la
niarcpie d'un violent excès
elle
quehjuc chose de martial et
d'hcM'OÏque.
Quoi
(pi"
en obtint
il
le
en
soitj la princesse lui
consentement du
coup d'estime pour Riquet
roi
à la
promit sur-le-champ de répouser, pourvu
son père. Le roi ayant su que sa
houppe,
qu'il connaissait d'ailleurs
très spirituel et très sage, le reçut avec plaisir les
noces furent faites ainsi que Riquet à
qu'il
la
l'avait
ndji,
dans l'air
Tout est beau dans Tout ce qu'on aime
cet écrit
que
ce
que
la
vérité
même.
l'on aime,
a de l'esprit.
le
lendemain,
prévu, et selon les ordres
MORALITE Ce que l'un
avait beau-
pour un prince
pour son gendre. Dès
houppe
en avait donnés longtemps auparavant.
Est moins un conte en
fille
cpi'il
LE PETIT POUCET
L était
une
fois
un
une bûcheronne qui avaient sept
l)ùclieron et
que dix ans, et
enAints, tous garçons; Taînc n'avait
n'en avait
que
d'enfants en
si
faisait
le
n'était
bonté de son esprit.
la
guère plus grand que
Ce pauvre enfant tort.
Cependant
peu,
il
Il
il
le
Il
pouce, ce qui
était le souffre-douleur
était
le-
plus fin et
le
sa
fît
de
eu tant
allait vite
la fois.
Ce qui
les chagrinait encore, c'est
mot prenant pour
bêtise ce qui était
;
quand
qu'on l'appela la
femme
il
vint au
le petil
maison, et on
lui
monde,
i!
Poucet.
donnait toujours
plus avisé de tous ses frères, et,
s'il
parlait
écoutait beaucoup.
une année
vint
le
que
plus jeune ait
incommodaient beaucoup, parce
était fort petit, et,
bûcheron
douleur les voir
:
«
Tu
si
grande, que ces pauvres gens
que
ces enfants étaient couchés, et
très fâcheuse, et la famine fut
résolurent de se défaire de leurs enfants.
que
vie.
plus jeune était fort délicat et ne disait
une marque de
c'est
pas moins de deux à
étaient fort pauvres, et leurs sept enfants les
qu'aucun d'eux ne pouvait encore gagner sa
que
le
s'étonnera que le bûcheron
peu de temps; mais
en besogne, et n'en Ils
On
sept.
était
vois bien
Un
soir
auprès du feu avec sa femme,
il
lui dit,
cœur serré de ;
mourir de faim devant mes yeux, et je suis résolu de
demain au
le
que nous ne pouvons plus nourrir nos enfants je ne saurais
bois, ce qui sera bien aisé
;
car, tandis qu'ils
n'avons qu'à nous enfuir sans qu'ils nous voient.
—
les
mener perdre
s'amuseront h fagoter, nous
Ah!
s'écria la
bûcheronne.
Garnier frères
Edite
PETIT POUCET
Li:
bien (oi-meino inoner pcixlrc tes onfnnls?
poiirrais-tii
représenter leur grande pauvreté,
lui
ne
elle
Son
»
mai'i avait l)oaii
y consentir;
i)()uvait
elle
était
pauvre, mais elle était leur mère.
Cependant, ayant considéré faim, elle
Le
Poucet ouït tout ce
petit
qu'ils parlaient d'affaires,
de son
jjère, i)Our les
reste de
({uelle
douleur ce
la nuit,
dirent, car. a>ant entendu
rpi'ils
levé
s'était
il
doucement
écouler sans étie vu.
songeant
bord d'un ruisseau, où
il
alla se
Il
à ce qu'il avait à faire.
mourir de
Il
d.e
dans son
lit
et s'était glissé sous l'escabelle
recoucher et ne dormit point du se leva de
bon malin,
et alla an
remplit ses poches de petits
cailloux blancs, et ensuite revint à la maison. et le petit
serait de les voir
lui
consentit, et alla se coucher en pleunuil.
y
On
partit,
Poucet ne découvrit rien de tout ce
qu'il
savait à ses frères. allèrent dans
Ils
une
forêt fort épaisse, où, à dix
pas de distance, on ne se voyait pas l'un l'autre.
Le bûcheron se mit à couper du ramasser
à
Le père et
les la
mère,
les
bois, et ses enfants
pour
broutilles
faire
des
voyant occupés à
fagots.
travailler,
s'éloignèrent d'eux insensiblement, et puis s'enfuirent ° I
,^
I
tout à coup par
un
Lorsque ces enfants sévirent force. car,
Le
seuls,
ils
il
avait laissé tomber le long
avait dans ses poches.
Il
leur dit donc
:
«Ne
du chemin
suivirent, et
il
les
mena
étaient ^enus dans la foret.
contre
Dans
Ils
il
ils
y
:
..„,
|„.;v..
la
maison,
frères;
mon pèreet ma
suivez-moi seulement.
jusqu'à leur maison par
le
même chemin
n'osèrent d'abord entrer, mais
ils
»
qu'ils
se mirent tous
porte, pour écouter ce que disaient leur père et leur mère.
la
le
moment que
le
bûcheron
et
la
bûcheronne arrivèrent chez eux,
n'espéraient plus rien. Cela leur redonna
mouraient de faim. Le bûcheron envoya sur l'heure il
reviendrait à
mes
logis
seigneur du village leur envoya dix écus, qu'il leur devait
dont
.].
les petits cailloux blancs qu'il
craignez point,
mère nous ont laissés ici, mais je vous ramènerai bien au Ils le
.,]..']].
se mirent à crier et à pleurer de toute leur
petit Poucet les laissait crier, sachant bien par où
en marchant,
!
petit sentier détourné.
avait longtemps qu'ils n'avaient
mangé,
elle
sa
la
il
y
le
avait longtemps, et
vie. car les
pauvres gens
femme à la boucherie. Comme
achela trois fois plus de viande qu'il
LES CONTES DE PERRAULT
42
n'en
pour
fallait
bûcheronne dit:
souper de deux personnes. Lorsqu'ils furent rassasiés,
le
Hélas! où sont maintenant nos pauvres enfants?
«
bonne chère de ce qui nous reste
Mais aussi, Guillaume, c'est
là.
perdre; j'avais bien dit que nous nous en repentirions. Que
mon
cette forêt? Hélas!
Le bûcheron s'impatienta
à la fin
que
mais
bûcheron ne
le
c'est qu'elle lui
gens qui aiment fort
rompait
W
la tête,
ont toujours bien
celles qui
La bûcheronne
était tout
mes pauvres enfants?
»
la
menaça de
aise
et qu'il était de
son
fils
Ils
taisait.
Thumeur de beaucoup
d'autres
que
dit.
«
:
une
Hélas! où sont maintenant
fois si
te voilà crotté! viens
que tous
mes
enfants,
haut, que les enfants, qui élaient à :
«
Nous
voilà,
porte, et leur dit en les embrassant
la
aîné, qu'elle aimait plus
que je
las,
«
:
vous avez
Que je
l)ien
la !
»
suis
faim
Ce Pierrot
te débarbouille. »
les autres,
nous voilà
;
et
était
parce qu'il était un peu rousseau,
un peu rousse.
et qu'elle était
se mirent à table, et
mère, à qui
ne se
femme;
de vous revoir, mes chers enfants! Vous êtes bien
comme
elle
si
sa
porte, l'ayant entendue, se mirent à crier tous ensemble
toi, Pierrot,
es
disent bien, mais qui trouvent très importunes
en pleurs
Elle le dit
Elle courut vite leur ouvrir
battre
la
fût peut-être encore plus fâché
femmes qui
les
Tu
»
î
car elle redit plus de vingt fois qu'il s'en
;
repentirait, et qu'elle l'avait bien dit. n'est pas
maintenant dans
Dieu, les loups les ont peut-être déjà mangés!
bien inhumain d'avoir perdu ainsi tes enfants
Ce
qui les as voulu
toi
font-ils
la
feraient
Ils
ils
mangèrent d'un appétit qui
racontaient
la
peur
faisait plaisir
eue dans
qu'ils avaient
la
au })ère et à
forêt,
la
en parlant
presque tous ensemble. Ces bonnes gens étaient ravis de revoir leurs enfants avec eux, et cette joie dura tant que les dix écus durèrent. Mais, lorsque l'argent fut
dépensé,
encore;
première Ils
retombèrent dans leur premier chagrin,
ils
et,
pour ne pas manquer
le
coup, de
les
et résolurent
mener bien
de
les
perdre
plus loin que
la
fois.
ne purent parler de cela
Poucet, qui
fit
se fût levé de
grand matin pour
à bout, car
trouva
il
faire, lorsque, la
leur dt^'euner,
secrètement
si
qu'ils
son compte de sortir d'affaire connne
il
la
aller
porte de
la
(ju'il
il
avait déjà
à
à double tour.
il
le petit
mais, quoiqu'il
fiiit;
ramasser des petits cailloux,
maison fermée
bûcheronne leur ayant donné songea
ne fussent entendus par
ne put en venir 11
ne savait que
chacun un morceau de pain pour
pourrait se servir de son pain au lieu de cailloux, en
LE
POUCET
PETIT
jelanl par iiiiolles lo long des cheniins où
le
ils
43
passaient:
serra donc dans
le
il
sa poche.
Le père ol)sciir;
Le
mère
et la
et,
dès
les nienèi-ent
(pi'ils
y
fiiivnl,
ils
dans rendroil de
petit Poucet ne s'en chagrina pas heaucoup. parce
son diemin, par
mais
bien sui'pris
fut
il
moyen de
le
la l'orèt le [)lus éj)ais
gagnèrent un faux fuyant, et (pi'il
croyait retrouver aisément
son pain, qu'il avait semé parlout où
lorscju'il
et le plus
les laissèrent là.
il
avait passé;
ne put en retrouver une seule miette
les
:
oiseaux étaient venus, qui avaient tout mang(''.
Les voilà donc bien raient.
alïïigés
La nuit vint, et
il
;
car plus
s'éleva
tables. Ils croyaient ii'enlendre
ils
s'enloncaienl dans
un grand vent qui leur
foret, plus
la
faisait
s'éga-
ils
des peurs épouvan-
de tous
côtés que des liurlements de loups qui ve-
naient à eux pour les manger.
Ils
presque se parler, ni tourner survint une grosse pluie
jusqu'aux os
;
ils
qui les perça
glissaient à
tombaient dans
boue,
la
n'osaient
la tête. Il
chaque pas, d'où
se
ils
relevaient tout crottés, ne sachant que faire
Le
de leurs mains. petit
Poucet grimpa au haut d'un
arbre, pour voir petite lueur
s'il
comme
ne découvrirait rien
:
tournant
la
tète de tous côtés,
d'une chandelle, mais qui était bien loin par delà
cendit de l'arbre, et, lorsqu'il fut à terre,
il
ne vit plus rien
Cependant, ayant marché quelque temps avec ses frères, du côté lumière, Ils
il
la
revit en sortant
arrivèrent enfin à
car souvent
ils la
maison où
demanda
Ils
heurtèrent à
Cette femme, les voyant tous
mange
une des-
cela le désola. qu'il avait
vu
la
bois. était cette chandelle,
la
non sans bien des frayeurs
:
une bonne femme vint leur ouvrir.
porte, et
si
la foret,
jolis^ se
et qui
enfants?
—
Ilélasî
demandaient
mit à pleurer et leur dit
où êtes- vous venus! Savez-vous bien
les petits
Il
ce qu'ils voulaient. Le petit Poucet lui dit qu'ils étaient de pauvres
enfants qui s'étaient perdus dans
enfants,
vit
perdaient de vue, ce qui leur arrivait ton tes les fois qu'ils descendaient
dans quelque fond. Llle leur
la
du
:
il
la foret.
madame,
lui
([ue c'est
ici
la
à coucher par charité. :
«
Hélas
î
mes pauvres
maison d'un ogre qui
répondit lepetit Poucet, qui trend)lait
LES CONTES DE PERRAULT
44
de toute
sa force aussi bien
loups de
la
forêt
nous retirer cbez vous;
La femme de
y
sous
la
le lit et alla
on avait mais
il
tiré
ne
du
porte
ouvrir
la
11
Ahî
sais à
il
tient
Il
me
les tira
genoux en
donc
alla
monsieur qui »
me
le
— Je sens
si
comme
le
femme
cacher
les fit
souper était prêt et
était
si
encore tout sanglant,
ce soit ce veau, (]ue je viens
chair fraîche, te dis-je encore une fois,
travers
;
il
y
a
ici
quelque chose que je n'en-
se leva de table et alla droit au
il
feu,
droite et à gauche, disant qu'il
femme, que
la
bon
souper de logre.
tu veux :
me
lit.
tromper, maudite femme! Je ne
bien t'en prend d'être une vieille bête.
vient à propos, pour traiter trois ogres de
mes amis
qui
venir voir ces jours-ci. »
de dessous
lui
que ce seraient Il
flairait à
Il
femme de
le lit l'un
demandant pardon
ogres, qui, bien loin d'avoir de là
;
après l'autre. Ces pauvres enfants se mirent à
mais
la pitié, les
ils
avaient affaire au plus cruel de tous les
dévorait déjà des yeux, et disait à sa
de friands morceaux, lorsqu'elle leur aurait
prendre un grand couteau
l'aiguisait
les
entendirent heurter trois ou quatre
mit à table. Le mouton
que je ne te mange aussi
Voilà du gibier qui
doivent
se
disant ces mots,
dit-il, voiià
quoi
il
faut, lui dit sa
reprit l'ogre en regardant sa
«
soit
se chauffer auprès d'un
broche pour
demanda d'abord
porte. L'ogre
vin, et aussitôt
En
la
à se réchauffer, ils
diiabiller^ que vous sentiez.
»
que
vous ne voulez pas
vous voulez bien Ten prier.
c'était l'ogre qui revenait. Aussitôt sa
;
sentait la chair fraîche. «
tends pas.
entier à
en sembla que meilleur.
lui
si
mena
les laissa entrer, et les
Comme ils commençaient grands coups à
esl bien sur si
qui crut qu'elle pourrait les cacher à son mari jusqu'au
un mouton tout
avait
Il
nous aimons mieux que ce
aura pitié de nous,
qu'il
l'ogre,
lendemain matin, il
que ferons-nous?
ses frères,
et, cela étant,
nous mange; peut-être
car
que
ne manqueront pas de nous manger cette nuit,
;
et,
fait
en approchant de ces pauvres enfants,
sur une longue pierre, qu'il tenait à sa main gauche.
empoigné un, lorsque
sa
femme
lui dit
:
«
Que voulez-vous
N'aurez-vous pas assez de temps demain? plus mortifiés.
— Tais-toi,
bien à souper, afin
reprit sa
il
en avait déjà
Lheure ils
qu'il est?
en seront
femme
voilà
:
un
as raison, dit l'ogre, donne-leur
et la
cju'ils
faire à
Il
reprit l'ogre,
— Mais vous avez encore tant de viande, moitié d'un cochon. — Tu
veau, deux moutons
femme
une bonne sauce.
ne maigrissent pas, et va
1. Terme de cuisine, qui signilie préparer les viandes pour pour préparer au jeu de mots qu'on verra plus tard.
les
les
accommoder en
mener coucher. ragoût.
Ce terme
est
»
employé
ici
LE PETIT
La bonne femme manger, tant de
(juoi si
ce qui
lui
ils
fut ravie
de
POUCET
joie, et leur
porta
étaient saisis de peur. Pour Togre.
bien régaler ses amis.
donna un peu dans
L'ogre avait sept
filles,
Il
45
l)ien à il
souper; mais
ils
ne purent
se remit à boire, ravi d'avoir
but une douzaine de coups de plus qu'à l'ordinaire;
la tète, et ro])ligea
de
s'aller
courber.
qui n'étaient encore que des enfants. Ces petites ogresses
loii!,'uc pit
avaient toutes le teint fort beau, parce qu'elles mangeaient de leur père; mais
elles avaient
de
petits
yeux
la
chair fraîche,
comme
gris et tout ronds, le nez crochu, et
une
l'une de fort grande bouche, avec de longues dents fort aiguës et fort éloignées beaucoup, promettaient elles mais méchantes; fort encore pas l'autre. Elles n'étaient
car elles mordaient déjà les petits enfiuits pour en sucer le sang.
LES CONTES DE PERRAULT
46
On
les avait fait
grand
lit,
coucher de bonne heure, et
chambre un autre lit de mit coucher
même grandeur
la
y avait dans la ce fut dans ce, lit que la femme de
:
la tête.
Il
Le petit Poucet, qui avait remarqué que
même,
pas égorgés dès
le soir
de ses frères et
le sien,
sienne, afin
il
de l'ogre avaient des couronnes
les fdles
tout doucement les mettre sur
alla
que l'ogre
couronnes d'or,
les prît
voulait égorger. La chose réussit
sur
le
veille.
se jeta donc
Il
pour
qu'il
la
comme
l'avait
il
tête de ses frères et
pour
les
garçons
qu'il
pensé; car l'ogre, s'étant éveillé
et prenant son
lit,
chambre de
ses
garçons qui dormaient tous, excepté
un
main de
bel ouvrage
de ses
filles,
;
comme :
«
les petits
balancer, la gorge à ses sept
filles.
il
fois. »
où étaient
dit-il, j'allais
soir. »
bonnets des garçons
En
la
Allons
avait tàté celle de
Vraiment,
je vois bien que je bus trop hier au
où ayant senti
lit
«
:
Poucet, qui eut bien peur
le petit
l'ogre qui lui tâtait la tête,
nos gaillards; travaillons hardiment. »
dit-il,
deux
du
et s'approcha
filles,
tous ses frères. L'ogre, qui sentit les couronnes d'or faire là
grand couteau
se portent nos petits drôles; n'en faisons pas à
à tâtons à la
lorsqu'il sentit la
lit
les avoir
tête des sept fdles de
la
mit sur
ses filles, et ses filles
brusquement hors du
comment
monta donc
les petits
au
remords de ne
minuit, eut regret d'avoir différé au lendemain ce qu'il pouvait exécuter
voir, dit-il, Il
l'ogre
se leva vers le milieu de la nuit, et, prenant les bonnets
l'ogre, après leur avoir ôté leurs la
même
garçons; après quoi elle alla se coucher auprès de son mari.
les sept
d'or sur la tête, et qui craignait qu'il ne prît à l'ogre quelque
sur
dans nn
elles étaient tontes sept
ayant chacune une couronne d'or sur
:
Il
disant ces mots,
alla
Ah
«
il
î
ensuite
les voilà,
coupa, sans
Fort content de cette expédition,
il
alla se
recoucher auprès de sa femme. Aussitôt que dit
le petit
Poucet entendit ronfler l'ogre,
de s'habiller promptement et de
le suivre. Ils
jardin, et sautèrent par-dessus les murailles.
toujours en tremblant, et sans savoir où
L'ogre s'étant éveillé dit à sa
femme
:
«
ils
Ils
il
réveilla ses frères, et leur
descendirent doucement dans
coururent presque toute
la
le
nuit,
allaient.
Va-t'en là-haut habiller ces petits drôles
d'hier soir. » L'ogresse fut fort étonnée de la bonté de son mari, ne se doutant point
de
la
manière
qu'il
les aller vêtir. Elle
ses sept Elle
filles
entendait qu'elle les habillât, et croyant qu'il
monta en haut, où
elle fut
lui
ordonnait de
bien épouvantée, lorsqu'elle aperçut
égorgées et nageant dans leur sang...
commença par
s'évanouir (car c'est le premier expédient que trouvent presque
lAi
femmes en
toutes les
trop longtemps à
POUCET
PEin;
47
femme ne
fût
chargée, monta en haul pour
lui
pareilles rencontres). L'ogre, craignant
besogne dont
l'aire la
l'avait
il
que
sa
aider. Il
ne fut pas moins étonne que sa fenune,
lors(pi'il
«
Ahî
payeront,
qu'ai-je
à l'heure Il
les
malheureux,
le
nez de sa femme; et l'aNanl
Donne-moi .
et tout
lait
re-
mes
vite
hottes de sept lieues, lui
alin (|ue j'aille les at-
dit-il,
»
campagne;
et,
après avoir couru de tous côtés, enlin
chemin où marchaient
les
pauvres enfants, qui
Il
se mit en
du
-n'étaient plus (ju'à cent pas
de leur père.
logis
il
entra dans
-s^
^
montagne en mon-
virent l'ogre qui allait de
Ils
vit cet atîreux si)ectacle.
:
traper
le
le
»
jeta aussitôt une potée d'eau dans
venir «
î
me
là? s'écria-l-il. Ils
l'ail
tagne, et qui traversait des rivières aussi aisément
du moindre ruisseau.
qu'il aurait fait
Le
lieu
le
s'y
un rocher creux proche
petit Poucet, qui vit
où
ils
étaient,
y
lit
cacher ses frères, et
fourra aussi, regardant toujours ce que l'ogre
deviendrait.
L'ogi'e.
se
([ui
long chemin qu'il avait
fait
trouvait fort
inutilement
bottes de sept lieues fatiguent fort leur il
las
du
(car
les
upan
homme), voulut
se reposer; et, par hasard,
s'asseoir sur la roche oii les petits garçons s'étaient cachés.
alla
Comme
il
n'en pouvait plus de fatigue,
temps, et vint à ronfler
moins de peur
(pie
il
s'endormit, après s'être reposé quelque
effroyablement, que
si
([uand
il
tenait
les
pauvres enfants n'eurent pas
son grand couteau
[)our
leur
couper
la
gorge.
Le
ment
à la
et dit à ses frères
maison pendant que Togre dormait bien
point en peine de
Le
moins de peur,
petit Poucet en eut
lui.
Ils
fort, et
qu'ils
crurent son conseil, et gagnèrent vite
petit Poucet, s'étant
approché de
l'ogre, lui lira
la
doucement
mit aussitôt. Les bottes étaient fort grandes et fort larges fées, elles avaient le
de s'enfuir prompte-
;
mais,
don de s'agrandir et de s'apetisser selon
la
ne se missent maison. ses bottes et les
comme elles
jambe de
étaient
celui qui les
LES CONTES DE PERRAULT
48
chaussait
de sorte qu'elles se trouvèrent aussi justes à ses jambes que
;
été faites pour
alla droit à la
Il
maison de
ses fdles égorgées. « a été pris par
il
dire de ils
me
elles
eussent
moment
le
femme
donner tout ce
le
tuer
La bonne femme,
où
que voilà, pour
poignard sur
la
de vous
est, et
il
en rien retenir, parce qu'autrement
chose presse beaucoup,
la
ne croyiez pas que je suis un affronteur,
l'état
il
ne leur donne tout
s'il
qu'ils lui tenaient le
qu'il a vaillant, sans
Comme
qui pleurait, auprès de
Poucet, est en grand danger, car
m'a aperçu, et m'a prié de vous venir avertir de
prisse ses bottes de sept lieues
ogre ne
trouva sa
il
lui dit le petit
une troupe de voleurs, qui ont juré de
tueront sans miséricorde.
le
où
l'ogre,
Votre mari,
son or et tout son argent. Dans gorge,
si
lui.
a voulu
il
faire diligence, et aussi afin
que je
que vous
»
donna aussitôt tout ce qu'elle avait; car cet
fort effrayée, lui
pas d'être fort bon mari, quoiqu'il mangeât les petits enfants. Le
laissait
petit Poucet, étant chargé de toutes les richesses de l'ogre, s'en revint au logis de
son père, où Il
y
fut reçu avec bien
il
a bien des
de
la joie.
gens qui ne demeurent pas d'accord sur cette dernière circonstance,
et qui prétendent cpie le petit Poucet n'a jamais fait ce vol à l'ogi'e; qu'à la vérité n'avait pas fait conscience de lui
que pour courir après et
même
lorsque
prendre ses boites de sept
les petits enfants.
Ces gens-là assurent
pour avoir bu et mangé dans
le petit
Poucet eut chaussé
les
bottes de l'ogre,
succès d'une bataille qu'on avait donnée.
que,
Le
s'il le
roi lui
souhaitait,
il
lui
promit une grosse
il
était à
il
alla, disent-ils,
Il
somme le soir
d'argent
même;
gagnait tout ce qu'il voulait
:
s'il
et,
en venait
se trouvait quelques elles le
payaient
si
femmes
fait
trouver
à bout.
de
là,
où et
il
du
le roi, et lui dit la fin
Le
du jour.
petit
Poucet
lui là
donnaient tout ce
qu'il
son plus grand gain.
qui le chargeaient de lettres pour leurs maris;
mal, et cela
mettre en ligne de compte ce
Après avoir
lieues
car le roi le payait parfaitement pour
voulait pour avoir des nouvelles de leurs amants, et ce fut Il
îissurent que,
cette première course l'ayant fait
porter ses ordres à l'armée, et une infinité de dames
mais
Ils
s'en alla à la cour,
deux cents
il
ne se servait
il
de bonne part,
le savoir
apporteiait des nouvelles de l'armée avant
rapporta des nouvelles dès connaître,
dont
maison du bûcheron.
la
armée qui
savait qu'on était fort en peine d'une
lieues,
qu'il
allait à si
peu de chose,
qu'il
ne daignait pas
gagnait de ce côté-là.
pendant quelque temps
le
métier de courrier, et y avoir amassé
i.i-:
beaucoup de bien, (pron eut de
il
revinl
le revoir. Il
porc ET
l'KTiT
son père, où
('liez
l'aise. Il aclieta
création pour son père et ses frères; et par là
bien sa cour en
même
n'est pas possi!)lo dimagiiier
il
mil loule sa famille à
19
il
les établit tous, et
temps.
MOHAI.ITK
On ne
s'afflige
Quand
ils
point d'avuir ijeaiicoiip crnifanls,
sont tous beaux,
Et d'un extérieur qui
Mais
On
si
le
l'un d'eux est faible,
méprise, on
faits et liien
Iticn
l)rille;
le raille,
on ne on
Quebiuefois cependant c'est ce petit
Qui fera
le
bonheur de toute
dit
le pille
mot, :
marmot
la famille
la
joie
des offices de nouvelle
grands
lit
parfaitement
L'ADROITE PRINCESSE LES AVENTURES DE FINETTE
i
temps des premières croisades, un
de TEurope se résolut
bon ordre aux ministre
si
plus ce prince, c'était
le
je sais seulement que,
loui; il
royaume
sais quel
inlidèles,
voyage,
il
dans
mil un
conlia la réju;ence à
la si
un
habile qu'il fut en repos de ce côté-là. Ce qui inquiétait soin de sa famille. lui avait
Il
avait
comme, en
ces
perdu
la
reine son épouse
point laissé de fds, mais
Ma chronique ne m'a
detroisjeunes princesses à marier. ;
si
de son royaume, et
alTaires
depuis assez peu de temps: elle ne
nom
de je ne
guerre aux
Avant que d'entreprendre un
Palestine.
le
roi
d'aller faire la
il
se voyait père
point appris leur véritable
temps heureux,
la
simplicité des peuples
donnait sans façon des surnoms aux personnes éminentes. suivant leurs bonnes qualités ou leurs défauts, on avait
ce qui signifie indolente en style
Finette
:
noms
.lamais
on
n'a rien
sa coiffure
la
l'aînée
de ces [w'mca^ses^ N(mc/talanfe,
seconde, Babillardc
:
et la troisième.
qui avaient tous un juste rapport aux caractères de ces trois sœurs.
vu de
si
indolent qu'était Nonchalante. Tous les jours elle n'était
pas éveillée à une heure après midi lit,
surnommé
moderne;
:
on
la traînait à l'église telle qu'elle sortait
de son
en désordre, sa robe détachée, point de ceinture, et souvent une mule
d'une façon et une de l'autre.
On corrigeait cette différence durant la journée
ne pouvait résoudre cette princesse à être jamais autrement qu'en mules;
une fatigue insupportaiile
à
;
mais on
elle trouvait
mettre des souliers. Quand Nonchalante avait dîné, elle
i;
ADliOl
l'UlNCESSI-:
11'
se mellail à sa loilello. où elle élail jusqu "au soir leinps.
à
jiis(|ii"à
miiiuil, à jouer c( à
([uon avait été à rhabiller
la th'sliahiller
grand
se coucher qu'au
Bahillarde
Celte princesse était fort vive,
vie.
n'employait (pie peu de temps pour sa j)ersonne; mais si
ne
étrange que, depuis qu'elle lui
de son
longLenips
était pres(jue aussi
ne pouvait jamais parvenir à aller
elle
:
clic cinpIoxaiL le resle
jour.
une autre sorte de
menait
:
souper; ensuite on
elle avait
était éveillée jusqu'à ce <prelle
IVit
et
une envie de parler endormie,
la
houche
fermait pas. Elle savait l'histoire des mauvais ménages, des liaisons tendres.
des galanteries, non seulement de toute
mais des
plus
registre de
bourgeois.
petits
femmes
toutes les
cour
la
Elle
([ui
tenait
exerçaient
certaines rapines dans leur domesticjue, pour se
donner une parure plus éclatante,
mée précisément de la
comtesse une
marquis un
tel.
et était infor-
ce que gagnait
telle,
la
Pour être instruite de toutes cc^
petites choses, elle écoutait sa
couturière avec
de
j)lus
nourrice et
de ces belles histoires depuis
pourvu
({u'elle parlât, elle
s;i
(prdle n'aurait
plaisir
écouté un ambassadeur, et ensuite dissait
suivante de
et le maitre d'hôtel du
elle étourle roi
son père jusqu'à ses valets de pied; car.
ne se souciait pas à qui.
La démangeaison de parler produisit encore un autre mauvais princesse. Malgré son rang,
blondins de
la
cour de
lui
ses
airs
trop
fiuuiliers
donnèrent
effet
chez cette
la liardiesse
aux
débiter des douceurs. Elle écouta leurs fleurettes sans
façonpouravoir
le plaisir
de leur répondre; car à quehfue prix (|ue ce
que du matin au
soir, elle
écoutât ou caquetât. Babillarde, non plus que Nonchalante,
ne s'occupait jamais sait aussi
ni à penser, ni à faire
peu d'aucun soin domestique,
aucune
ni des
réflexion, ni à lire
;
fût,
elle
il
fallait
s'embarras-
amusements que produisent
l'aiguille
et le fuseau. Enfin ces deux sœurs, dans une éternelle oisiveté, ue faisaient jamais
agir ni leur esprit ni leurs mains.
La sœur cadette de ces deux princesses sait elle
incessamment de
l'esprit et
s'appliquait à en faire
de
sa
était d'un caractère bien différent. Elle agis-
personne
un bon usage.
;
elle avait
une vivacité surprenante,
et
Elle savait parfaitement bien danser,
DE PERRAULT
LES CONTES
r,^2
chanter, jouer des inslriimeiils petits travaux
de
main
la
l'ordre et la règle dans la officiers
(|ui
ils
une adresse atlmirable
réussissait avec
maison du
car dès ce temps-là,
;
;
amusent d'ordinaire
empochait, par ses soins,
roi, et
de voler
se mêlaient
à tous les
personnes de son sexe, mettait
les
les pilleries
des
les princes.
Ses talents ne se bornaient pas là; elle avait beaucoup de jugement, et une pré-
sence d'esprit
si
de toutes sortes
merveilleuse qu'elle trouvait sur-le-champ des
un piège dangereux qu'un ambassadeur de mauvaise dans un traité que
ambassadeur dans
et
de son maître,
changea
le roi
lui avait inspirés sa
fille,
il
avait
foi
de signer.
ce prince était tout près
termes que
les
moyens pour
jeune princesse avait découvert, par
d'affaires. Cette
du
l'article
trompa
tendu au
Pour punir
la
roi
son père
perfidie de cet
mettant
traité; et, en le
à son tour le
sortir
sa pénétration,
trompeur même.
La jeune princesse découvrit encore un tour de fourberie qu'un ministre voulait jouer au cet
roi
homme-là
marques de lui
donna
le
un
si
faisait
qu'elle,
autres
de
\]
et,
par
donna
le conseil qu'elle
nom
de Finette. Le
retomber
l'infidélité
filles qu'il
;
mais
il
s'il
de
il
le
(pie ses autres filles
peuple ;
et
il
n'avait point eu d'autre enfant
se défiait autant de la conduite de ses
se reposait sur celle de Finette. Ainsi,
comme
en donna tant que
beaucoup plus
roi l'aimait
grand fond sur son bon sens que,
sa famille,
fit
il
sa pénétration et de sa finesse d'esprit; elle
serait parti sans inquiétude
il
à son père,
sur lui-même. La princesse donna, dans plusieurs autres occasions, des
pour être sur des démarches
se croyait sur de celle de ses sujets,
il
prit les
mesures que
je vais dire.
Vous
qui êtes
si
savante dans toutes sortes d'antiquités, je ne doute pas, comtesse
charmante, que vous n'ayez cent
Le
roi
fois
(entendu parler du merveilleux pouvoir des fées.
dont je vous parle, étant ami intime d'une de ces habiles femmes,
cette amie; lui dit ce
il
lui
représenta l'inquiétude où
prince, (pie les
chose contre leur devoir
était
il
touchant ses
filles.
deux aînées dont je m'inquiète aient jamais ;
mais
elles
ont
si
peu
d'esprit, elles sont
si
«
alla
Ce
fait la
trouver
n'est pas,
moindre
imprudentes, et
vivent dans unesi grande désoccupation, queje crains que. pendant mon absence, elles n'aillent s'embar(pier
dans quel(]ue
Finette, je suis sûr de sa vertu
tout égal
pour mes
:
c'est filles,
de se casser
;
folle
intrigue pour trouver de quoi s'amuser. Pour
cependant je
qui soient faites avec
sit()t
que
celle à qui elle
un
tel
comme les autres, pour faire me Mve trois (pienouilles de verre
la traiterai
pourquoi, sage fée. je vous prie de art
que chaque quenouille ne manquepoint
appartiendra fera quelque chose contre sa gloire.»
l/ADliOllE
Comme
celle fée était des plus
PKI.NCKSSK
donna
lia!)iles. elle
chantées et travaillées avec tons
ordonnail de
dans un
de l'un et de l'autre sexe;
enchantées, dont portes de
Vous
la
il
allez,
prit
il
un
la
les
Le
il
le
temps de sonahsence,
fait
leur ôta tous leurs
Il
présent des quenouilles princesses et ferma les
les
partit.
coi'hillon qu'elles
provisions pour
la
y
en danger de
là
on avait eu soin d'attacher une poulie
:
une corde
avait mis
en-
avail.
princesses dans une tour
peut-être croire, iMadame, que ces princesses étaient
tour, et on
(pi'il
roi dit à ses tilles (|u'il leur
emhrassa
il
les clefs, puis
dessein
le
(jue ce fût.
après leur avoir
et,
lui-même
mourir de faim. Point du tout fenêtres de
pour
pendant tout
celte tour
leur expliqua les qualités,
tour, dont
mena
aucune personne
et qu'il leur dc'l'endaitd'v recevoir oiriciers
il
lieu hien désert.
demeure dans
leur
l'aire
à ce prince trois (luenouille^
les soins nécessaires
Maisilnefnl pas content de cette précanlion; fort haute, (pii était hàtie
53
à
une des
à laquelle les princesses attachaient
descendaient chaque jour. Dans ce corbillon, on mettait leurs
journée, et, (juand elles l'avaient remonté, elles reliraient avec
soin la corde dans la chambre.
Nonchalante et Babillarde menaient dans cette solitude une vie elles
(jui les
s^ennuyaient à un point qu'on ne saurait exprimer; mais
patience; car on leur avait
fait la
quenouille
moindre démarche un peu équivoque ne
Pour Finette,
elle
la fit
si
lui
fournissaient des
désespérait
fallait
:
prendre
terrible qu'elles craignaient
que
la
casser.
ne s'ennuyait point du tout; son fuseau, son
truments de musique
il
amusements;
on mettait dans
et,
aiguille et ses ins-
outre cela, par l'ordre
du ministre qui gouvernait
l'Etat,
lettres qui les informaient
de tout ce qui se passait au dedans et au dehors du
royaume. Le
permis
roi l'avait
ainsi
et le ministre,
;
ne manquait pas d'être exact sur cet
empressement, et prendre
la
s'en divertissait.
moindre part
force de s'amuser de
si
;
le corbillon
pour
faire sa
cour aux princesses,
article. Finette lisait toutes ces
Pour
ses
deux sœurs,
elles
elles disaient (ju'elles étaient trop
peu de chose
des princesses des
:
il
nouvelles avec
ne daignaient
j)as
y
chagrines pour avoir
la
leur fallait au moins des cartes pour se
désennuyer pendant l'absence de leur père. Elles passaient
donc
et je crois qu'elles ne
ainsi tristement leur vie,
en murmurant contre leur destin
manquèrent pas de dire qui/ vaut mieux
d'être né fils de roi. Elles étaient souvent
moins ce qui se passait dans
la
être né
:
heureux que
aux fenêtres de leur tour pour voir du
campagne. Un jour, comme Finette
était
occupée
CONTES DE PERRAULT
LI<:S
54
dans sa chambre à quelque joli ouvrage, ses sœurs, qui étaient à pied de leur tour une pauvre
femme velue de
fort pathétiquement; elle les priait les
la
fenêtre, virent au
haillons déchirés, qui leur cria sa misère
mains jointes
de- la laisser
teau, leur représentant qu'elle était une malheureuse étrangère
de choses, et qu'elle leur rendrait service avec
la
entrer dans leur châ-
(|ui
savait mille sortes
plus exacte lidélité. D'abord les
princesses se souvinrent de l'oi'dre qu'avait donné le roi leur pèje de ne laisser entrer
personne dans
la
tour
;
mais Nonchalante était billarde
que
si
si
lasse
de se servir elle-même, et Ba-
ennuyée de n'avoir que ses sœurs
l'envie qu'eut l'une d'être coiffée
en
à qui parler,
détail, et l'em-
pressement qu'eut l'autre d'avoir une personne de plus pour jaser, la
les
engagea à se résoudre de
laisser entrer
pauvre étrangère. «
du
Pensez-vous, dit Babillarde à sa sœur, que
roi s'étende sur
Je crois que nous
la
— Vous ferez ce
des gens
comme
défense
la
cette malheureuse?
pouvons recevoir sans conséquence. qu'il
vous
plaira,
ma sœur
répon-
»,
dit Nonchalante.
Babillarde, qui n'attendait
cendit aussitôt le corbillon
dedans, et
les
princesses
la
que ce consentement, des:
pauvre femme se mil
la
montèrent avec
le
secours
delà poulie.
Quand les
cette
dégoûta;
changerait
le
femme
fut devant leurs yeux, l'horrible malpropreté de ses habits
voulurent
elles
lui
en donner d'autres, mais
lendemain, et que pour l'heure
Comme elle achevait de
parler, Finette revint
faite,
dissimula
Cependant
la
le
fait
en
les servir.
pour
ses sœurs; elles lui dirent
montei'; et Finette, qui vit que c'était une chose
chagrin qu'elle eut de cette imprudence.
nouvelle officière des princesses
prétexte de leur service, mais, en
madame,
songer à
de sa chambre. Cette princesse fut
étrangement surprise de voir cette inconnue avec quelles raisons elles l'avaient
elle leur dit qu'elle
qu'il était elle allait
je ne sais
si
effet,
fit
cent tours dans
pour observer
la
disposition
le
château, sous
du dedans
vous ne vous en doutez déjà, mais cette gueuse prétendue
aussi dangereuse dans le château que le fut le
déguisé en abbesse fugitive.
comte Ory dans
le
couvent où
il
;
car^ était
entra,
i.'Ai)i;()HE
Pour ne pas vous
Ce jeune prince, qui le roi
55
tenir davanlaii^e en suspens, je vous dirai (pie celte créature
couverte de haillonsétait
entièrement
PitiNCKssi!:
son
un des plus
j)ère et
le
artili(Meux esprits
n'avait pas besoin
il
car ce roi était d'un caractère
de Moult-BcnùiK Pour
aine d'un roi puissant, voisin
le (ils
était
si
doux
et
jeune prince,
si
de beaucoup de qu'on
facile
comme
surnommé
détours^ les peuples l'avaient
du père des princesses.
de son temps,
lui
avait
n'ai-issait (jue
il
Riche-en-CaïUHe^,
et,
,i,^ouvcrnait
finesse
pour
donné
le
cela
;
surnom
par artifice et par
pour abréger, on
disait Htclie-Cuuli'le. il
avait
un frère cadet qui
était aussi
de défauts: cependant, malgré frères
une union
parfaite
de l'âme qu'avait
(pialités
personne étaient le
si
si
le
rempli de
bell(>s (pialités
que son aine
différence d'iiumeur, on voyait entre ces
la
que tout
le
monde en
prince cadet,
la
était surpris.
Outre
beauté de son visage et
remarquables qu'elles l'avaient
fait
nommer
la
les
l'était
deux
bonnes
grâce de sa
Bel-à- Voir. C'était
prince lliclie-Cautèle qui avait inspiré à l'ambassadeur du roi son père ce trait de
mauvaise
que
foi
l'adresse de Finette avait fait
tomber sur eux. Ricbe-Cautèle, qui
n'aimait déjà guère le roi, père des princesses, avait achevé par
aversion: aussi, quand ses
filles,
il
se
fit
il
un pernicieux
neux. Uiche-Cautèle obtint
la
plaisir
la
tour des princesses,
En examinant l'aire
monde
le
prit des
roi
la
le
prudence d'un père
prendre en
si
soupçon-
mesures
cpii le firent
parvenir à entrer
vous avez vu.
château, ce prince remarqua qu'il était facile aux |)rincesses de se il
en conclut
qu'il devait rester si
punir de son entreprise téméraire.
Il
le
de
son père d'aller faire un voyage,
jour, parce cpielles pourraient bien,
et le faire
habits et
il
comme
entendre des passants, et
[)endant tout
les
le
de tromper
permission du
sous des prétextes qu'il inventa, et
dans
là
sut les précautions que ce prince avait prises à l'égard de
les haillons
appeler du
conserva donc toute
personnage de gueuse de profession;
sœurs eurent soupe, Hiche-Cautèle jeta
dans son déguisement
elles s'en avisaient,
qui
la
journée
et, le soir. lors(pie les trois le
couvraient et laissa voir
des habits de cavalier tout couverts d'or et de pierreries. Les j)auvres princesses furent
si
épouvantées de cette vue
(pic toutes se
nette et Babillarde, qui étaient agiles, chalante, qui avait à i)eine
1.
Beaurou|i
liéii
2.
Riche ou
foiii'
eurent
mirent à fuir avec précipitation. Fi-
bient(')t
l'usage démarcher,
fut en
gagné leur chambre
:
mais Non-
un instant atteinte parle|)rince.
LES CONTES DE PERRAUJ.T
56
Aussitôt
il
se jeta à ses pieds, lui déclara qui
il
était, et lui dit
que
réputation de
la
beauté et ses portraits l'avaient engagé à quitter une cour délicieuse pour
sa
offrir ses
vœux
Nonchalante fut d'abord
et sa foi.
répondre au prince, qui était toujours à genoux douceurs et
lui faisant
mille protestations,
pour époux dès ce moment-là même, de disputer,
elle dit
mais comme, en
;
sa mollesse naturelle
nonchalamment
la
conclusion de ce mariage
;
venir
disant mille
lui
ne
pas
lui laissant
la
force
à Riche-Cautèle qu'elle le croyait sincère,
qu'elle acceptait sa foi. Elle n'observa pas de plus grandes formalités
dans
lui
éperdue qu'elle ne pouvait
conjurait avec ardeur de le recevoir
la
il
si
mais aussi
que
en perdit sa quenouille
elle
et
celles-là :
elle se
brisa en mille morceaux.
Cependant Babillarde et Finette étaient dans des incpiiétudes étranges
avaientgagnéséparémentleur chambre,
comme chacune
bres étaient assez éloignées Tune de l'autre; et
ignorait entièrement le destin de ses deux sœurs,
fermer
Le lendemain,
l'œil.
tement bas
devant
dans
elles,
lui dit qu'il
sortit, et
chercher 11
était
pernicieux prince
au bout du jardin
;
les
la
de ces princesses
passèrent
et là cette princesse
nuit sans
la
témoigna
à lliche-
quoiqu'elle n'osât se présenter
crainte qu'elles ne blâmassent fort son mariage.
se chargeait de le leur faire approuver
;
et,
Le prince
après quelques discours,
enferma Nonchalante sans qu'elle s'en aperçût
;
ensuite
il
se
mit à
princesses avec soin.
quelque temps sans pouvoir découvrir dans quelles chambres
fut
elles
mena Nonchalante dans un appar-
l'inquiétude où elle était de ses sœurs,
Cautèle
il
(pii
le
elles
:
Ces cham-
et elles s'y étaient renfermées.
elles étaient
enfermées. Enfin, l'enviequ'avait Babillarde de toujours parler étant cause que cette princesse parlait toute seule en se plaignant,
chambre
et la vit par le ti'ou
porte, et
lui dit,
et sa foi
(pi'il
comme
il
de
la
le
prince s'approcha de
la
porte de sa
serrure. liiche-Cautèle lui parla au travers de
avait dit à sa sœur,
avait fait l'entreprise d'entrer dans
que la
c'était
tour.
Il
pour
lui offrir
la
son canu'
louait avec exagération sa
beauté et son esprit; et Babillarde, qui était très persuadée qu'elle possédait un mérite extrême, fut assez
un
flux
folle i)our croire
ce que
le
prince
de paroles qui n'étaient pas trop désobligeantes.
eût une étrange fureur de parler pour s'en acquitter
moments, car de
la
elle était
journée; par
la
Il
lui disait
:
elle lui
fallait (pie
comme
répondit
cette princesse
elle faisait
dans ces
dans un abattement terrible, outre qu'elle n'avait rien mangé
raison qu'il n'y avait rien dans sa chan)bre propre à mangei*.
PlUNCESSK
I.'ADUOITE
Comme
elle était
d'une paresse extrême, et
loujonrs parler, elle n'avait pas «pie rhose, elle avait
la
57
ne songeait jamais à rien,
(|ii'elle
(ju'à
moindre ^n'évoyanee quand ellcavail besoin deipiel:
recours à Finette; et cette aimable i)rincesse, qui était aussi
la-
borieuse et prévoyante (pie ses sœurs l'étaient peu, avait toujours dans sa cbambre
une
elle-même. Babillarde donc, qui n'avait pas
sée par la
de massepains, de pâtes et de confitures
inlinité
laites
faim et par
la
les
tendres protestations que
porte, l'ouvrit enfin à ce séducteur
ment
comédien auprès
le
Ensuite teau, où
ils
d'elle
:
il
et,
;
quand
sèclies et liciuides qu'elle avait
même avantage,
le
lui faisait le
elle
eut ouvert,
se sentant pres-
prince au travers de il
fit
encore parfaite-
avait bien étudie son rôle.
sortirent tous deux de cette chambre, et s'en allèrent à
l'office
du cbà-
trouvèrent toutes sortes de rafraî-
ils
chissements
car le corbillon en fournissait tou-
;
jours les princesses d'avance. Babillarde continuait d'abord à être en peine de ce qu'étaient
devenues ses sœurs
;
mais
étaient sans doute toutes la
chambre de
de rien
elle s'alla
mettre dans
sur je ne sais quel fondement, qu'elles
l'esprit,
Finette, où elles ne manquaient
Riche-Cautèle
.
,
deux enfermées dans
fit
tous ses efforts pour
la I'IUl'
confirmer dans cette pensée, et
iraient trouver ces princesses vers le soir <pi'il fallait les
Enfin (fu'ils
teau,
aller
chercher (piand
prince et
le
la
ils
donna
recommença
la
main
elle
:
à la princesse,
que de
au
l'avoir reçu
parti
Il
lui dit,
moment même, pour époux,
étant sans contredit
ment un
([ui le
pour
le
fut pas
de cet avis;
comme
mena dans
il
elle
pour
ce lieu
;
et,
après
;
et,
elle, et les
quand
il
y
fut,
il
avantages qu'elle
si
elle allait
trouver ses sœurs avant
ne manqueraient pas de s'y opposer, puis([ue,
plus puissant pi'ince voisin,
l'ainée
répondit
avait dit à Nonchalante, qu'elle devait
i)arce que,
elles
iiiorreriiix.
ap[)artement du châ-
à aller voir le bel
qu'il avait
à exagérer la tendresse
foi
ne
princesse mangèrent ensemble de fort bon accord
trouverait en l'épousant.
accepter sa
de verre en
auraient mangé.
eurent achevé, Hiche-Cautèle demanda il
vit sa iiiiciioiiille
dit cpi'ils
lui
que pour
elle
;
il
paraissait plus vraisemblable-
qu'ainsi cette princesse ne consentirait
jamais à une union qu'il souhaitait avec toute l'ardeur imaginable. Babillarde, après bien des discours qui ne signifiaient rien, fut aussi extravagante (pie l'avait été sa
.
DE PERRAULT
LES CONTES
58
sœur;
elle
accepta
prince pour époux, et ne se souvint des effets de sa quenouille
le
de verre qu'après que cette quenouille se fût cassée en cent pièces.
Vers
le soir, liabillarde
retourna dans sa chambre avec
prince, et
le
chose que vit cette princesse, ce fut sa quenouille de verre en morceaux bla à ce spectacle; le prince lui ])arler la
demanda
le
sujet de son trouble.
première
la
Elle se trou-
.
Comme
tère des quenouilles cesses serait par
là
;
et ce prince eut
une
de scélérat de ce que
joie
entièrement convaincu de
Cependant lîabillardc n'était pas en humeur d'aller chercher sessœurs avec raison qu'elles ne pussent approuver sa conduite mais ;
trouver, et dit qu'il ne manquerait de celte assurance,
la
princesse, qui n'avait pas dormi de
N'est-il pas vrai, belle comtesse,
et
ils
filles
elle craignait
:
prince offrit de les aller
la nuit,
comme
il
que ce Riche-Cautèle
imprudentes personnes
s'assoupit; et, pendant
avait fait de Nonchalante.
était
un grand
scélérat, et ces
Je suis fort en colère contre
?
tous ces gens-là, et je ne doute pas que vous n'y soyez beaucoup aussi inquiétez point,
mys-
moyens pour les persuader de l'approuver. Après
qu'elle dormait, Uiche-Cautèle l'enferma à clef,
deux princesses de lâches
le
le
père des prin-
le
mauvaise conduite de ses
la
rage de
la
rendait incaiiable de rien taire, elle dit sottement à Riche-Cautèle
seront tous traités
comme
méritent.
ils le
11
mais ne vous
;
n'y aura que
la
sage
et courageuse Finette qui triomjtbera.
Quand
ce prince perfide eut enfermé Babillarde,
château, les unes après les autres
qu'une seule, Finette
.
qu'il voyait
Comme
il
les
n'était pas
une dupe comme
voyant
il
était
une harangue
il
alla
dans toutes
chambres du
les
trouva toutes ouvertes,
les
assurément
circulaire,
ses aînées, l'écouta assez
qu'il était éclairci qu'elle était dans sa
il
celle
où
il
conclut
s'était retirée
s'en alla débiter à
la
porte
longtemps sans
chambre,
lui
elle lui dit
répondre.
que,
s'il
était
tendresse aussi forte et aussi sincère pour elle qu'il voulait le lui per-
vrai qu'il eût
une
suader, elle
le priait
de descendre dans
et qu'après elle lui parlerait tant
donnait sur
comme
choses qu'il avait dites à ses sœurs. Mais cette princesse, qui
de Finette
Enfin,
et
fermée par dedans,
avait conqjosé
mêmes
;
(pi'il
le
jardin et d'en fermer
voudrait par
la
la
porte sur lui;
fenêtre de sa chambre, qui
le jardin.
Uiche-Cautèle ne voulut point accepter ce parti ; et,
comme la princesse s'opiniàtrait
toujours à ne point vouloir ouvrir, ce méchant prince, outré d'impatience, alla quérir
une bûche laissé
et enfonça la porte.
Il
trouva Finette armée d'un gros marteau, qu'on avait
par hasard dans une garde-robe
(pii était
proche de sa chambre. L'émotion ani-
PRINCESSE
i;.\l)nOITE
de cette [)rineesse
le teint
à Iliclie-Cautèle
en reculant
dit fièrement,
avec ce marteau.
l'amour qu'on
a
— Quoi
ré[)utation
Il
en
finit
la
et
;
mais
elle lui
vous approchez de moi. je vous fendrai
cruelle haine?
si
de son Ion
Il
hardiesse
pour é[)oux au plus les princesses ses
il
H
dit
tète
que
lui avait ins|)irée
devait
lui dit qu'elle
avait eue d'enfoncer sa porte.
<pi'il
l'avait fait à ses
vite.
la
pocrite,
ajouta cpiil ne s'était dé-
avec respect son cœur et sa main, et
comme
li\
se mit à lui prôner de nou-
» Il
de son esprit merveilleux.
la
colère, elle |)arnt
à ses pieds
cliaud)re à l'autre, l'ardeur violenle
voulant persuader,
par où s'étaient retirées les
si
yeux fassent pleins de voulut se jeter
il
belle [)rincessc, s'écria Jliclie-Cautèle
lui offrir
intérêt de le recevoir
de
!
Prince,
violence de sa passion
la
lui
«
:
de sa beauté
guisé cpie pour venir
pardonner à
et, (iiioiquc ses
pour vous s'al tire une
veau, mais d'un bout do la
;
d'nne beauté à enclianler.
59
sœurs,
de son
qu'il était
encore à Finette
qu'il
ne savait
sœurs, parce qu'il ne s'étaitpas mis en peine
chercher, n'ayant songé qu'à elle. L'adroite princesse, feignant de se radoucir,
chercher ses sœurs, et qu'après on prendrait des mesures tous en-
lui dit qu'il fallait
send)le; mais Riche-Cautèle lui répondit
(ju^il
ne jmuvait se résoudre à aller trouver
les princesses, qu'elle n'eût consenti à l'épouser,
parce que ses sœurs ne manqueraient
pas de s'y opposer à cause de leur droit d'aînesse. Finette, qui se défiait avec raison de ce prince perfide, sentit redoubler ses soupçons
par cette réponse elle trembla de ce qui pouvait être arrivé à ses sœurs, et se résolut de :
venger du
les
(ju'elles
môme coup qui lui
ferait éviter
un malheur
sans peine à l'épouser, mais qu'elle était persuadée que soir étaient toujours
se
pareil à celui qu'elle jugeait
avaient eu. Cette jeune princesse dit donc à lliche-Cautèle qu'elle consentait
donner une
foi
malheureux, qu'ainsi
les
elle le priait
réciproijue au lendemain matin
:
mariages qui se faisaient
de remettre
pour i>enser au
bon
fort
lit,
ciel; ([u'ensuite elle le
chez
elle
de
n'a-
un peu de temps seule
mènerait dans une chambre où
et qu'après elle reviendrait s'enfermer
le
cérémonie de
elle ajouta (|u'elle l'assurait
vertir les princesses de rien, et lui dit qu'elle le priait de la laisser
un
la
il
trouverait
jusqu'au lendemain.
Riche-Cautèle, qui n'était pas un fort courageux personnage, et qui voyait toujours Finette
armée du gros marteau dont elle badinait comme on fait d'un
Cautèle, dis-je,
consentit à ce que souhaitait
quelque temps méditer. sur
le
ne
Il
la
éventail
princesse, et se retira pour
fut pas plus tôt éloigné,
que Finette courut
;
Uiche-
la laisser
faire
un
lit
trou d'un égoul qui était dans une chambre du château. Cette chambre était
aussi propre qu'une autre
;
mais on jetait dans
le
trou de cet égout, qui était fort spa-
LES CONTES DE PERRAULT
60
cieux, toutes les ordures faibles
;
puis elle
fit
du château. Finette mit sur ce trou deux bâtons
bien proprement un
sa
chambre. Un moment après, Riche-Cautèle y revint, et
où
elle venait
de
faire le
lit,
fait
tout d'un coup
rompre
La chute du prince
éloigné de
la
fit
avec précipitation, et sa pesanteur
le lit
bâtons,
les petits
pouvoir se retenir, en se faisant vingt bosses c()tés.
princesse le conduisit
la
et se retira.
Le prince, sans se déshabiller, se jeta sur ayant
croisés très
par-dessus, et s'en retourna aussitôt dans
lit
un grand bruit dans
chambre de Finette;
il
tomba au fond de
à la tête, et le
elle sut aussitôt
tuyau
que
l'égout, sans
en se fracassant de tous :
d'ailleurs
il
n'était pas
son artifice avait eu tout le
succès qu'elle s'était promis, et elle en ressentit une joie secrète qui
ment agréable. On ne peut pas
lui fut
extrême-
décrire le plaisir
qu'elle eut de l'entendre barboter dans l'égout.
méritait bien cette punition, et
la
Il
princesse avait
raison d'en être satisfaite. Mais sa joie ne l'occupait pas
si
fort qu'elle
Son premier soin facile
ne pensât plus
à ses
fut de les chercher.
Il
sœurs. lui fut
de trouver Babillarde. Riche-Cautèle, après
avoir enfermé cette princesse à double tour, avait laissé la clef à sa II
se
y ta'Mii
li
cette qu'elle
fit
chambre. Finette entra dans
Jit ixrc pucipitatioii.
réveilla sa sceur
chambre avec empressement
en sursaut. Elle
fut bien confuse
en
la
bruit
et le
voyant. Finette
lui
raconta de ([uelle manière elle s'était défaite du prince fourbe qui était venu pour les outrager. Babillarde fut frappée de cette nouvelle
malgré son caquet, Riche-Cautèle
lui
elle élait si
avait dit.
Il
peu
comme
d'un coup de foudre; car,
éclairée, qu'elle avait cru ridiculement tout ce que"
y a encore des dupes comme
celle-là
au monde.
Cette princesse, dissimulant l'excès de sa douleur, sortit de sa chambre pour aller
avec Finette chercher Nonchalante. Elles parcoururent tou tes les cliambres du château sans trouver leur sœur; enfin Finette s'avisa qu'elle pouvait bien être dans ra])par-
tcment du jardin
:
elles l'y
blesse, car elle n'avait pris
nèrent tous
les
trouvèrent en
effet,
demi-morte de désespoir
aucune nourriture de
la
et
journée. Les princesses
de
lui
fai-
don-
secours nécessaires; ensuite elles firent ensemble deséclaiicissements
qui mirent Nonchalante et Babillarde dans s'en allèrent reposer.
une douleur mortelle puis toutes ;
trois
i;adroite princesse Uiclio-CaulMe passa
(;ej)eiidaiil
venu,
il
ne fut i^uère mieux.
pas voir toute
l'horrc^ui-,
se tourmenter,
du château. rivière,
dont
il
lians[iorter à lui était
il
lui lit
roi
se faire
prendre une
la vie, et la
entendre à des ^ens
(pii lit
si
([ui [)ècliaient
loisir; et la
forte haine contre Finette,
moments
hien tristes;
la
honteuse faiblesse de ses sœurs
})rincesses, qui était causée par les suites
dans cette
(pi'il
Il
lit
songea uioins à
gloire lui élait mille lois [)lus
mettait dans un désespoir
la
la
mauvaise santé de ces deux
(jui
était déjà
lui
lui.
la
un habile fourbe,
son esprit depuis son aventure pour devenir fourbissime. L'égout
contusions ne
se
disgrâce qui
de leur mariage indigne, mit encore
constance de Finette à l'épreuve. Riche-Cautèle,
plus fin que
ne pouvait
il
compassion à ces bonnes ^ens.
peine à se rendre maîtresse. Cependant
elle avait
ra[)pela tout
aise, et, (|iian(l le jour fui
son père, pour se faire guérir à
Cette princesse passait des
dont
mal à son
se venger d'elle.
(pi' à
chère que
(bi-(
jour n'y donnait jamais. Néanmoins, à force de
le
dans un état
cour du
arrivée
se guérir
parce (pie
moyen de
fut tiiv
la
nuil
la
prince se trouvait tians des cavernes (Jont
Irouva lissuede l'égoutqui donnait dans une rivière assez éloignée
trouva
Il
(À-
61
ni les
donnaient pas tant de chagrin que ledépit d'avoir trouvé quelqu'un se douta des suites des
Il
[)rincesses malades,
il
fit
deux mariages
•
et
pour tenter
les
deux
porter, sous les fenêtres de leur château, de grandes caisses
remiilies d'arbies tout chargés de
beaux
fruits.
Nonchalante et Babillarde, qui étaient
souvent aux fenêtres, ne manquèrent pas de voir ces fruits: aussitôt envie violente d'en manger, et
elles
il
leur prit une
persécutèrent Finette de descendre dans
le
corbillon pour en aller cueillir. La complaisance de cette princesse fut assez grande ])Our vouloir bien contenter ses sœurs* elle descendit, et leur apporta de ces fruits, qu'elles
mangèrent avec
Le lendemain,
il
la
beaux
dernière avidité.
parut des fruits d'une autre espèce. Nouvelle envie des princesses,
nouvelle complaisance de Finette* mais les officiers de Riche-Cautèle, cachés, et qui
avaient
manqué leur coup
sirent de Finette et
la
première
fois,
ne
le
mancjuèrent pas
celle-ci
:
ils
se sai-
l'emmenèrent, aux yeux de ses sœurs, qui s'arrachaient
les
che^ eux de désespoir.
Les
satellites
de Riche Cautèle
maison de campagne où il
était le
firent
si
bien, qu'ils
étaittransportédefureur contre cette princesse,
elle
menèrent Finette dans une
})rince pour achever de se remettre en santé. il
lui dit
Comme
centchoses brutales, îupioi
répondit toujours avec une fermeté et une grandeur d'àme dignes d'une héroïne
LES CONTES DE PERRAULT
69
comme
Enfin, après l'avoir gardée quelques jours prisonnière,
elle était.
conduire au sommet d'une montagne extrêmement haute,
un moment après manière qui
elle.
Dans ce
lieu,
vengerait des tours
le
à Finette
montra barharement
lui
il
la
comme elle
punir
jeter dans ce tonneau, puis le rouler du haut de
la
la
lit
mourir d'une
Ensuite ce perfide i)rince
un tonneau tout hérissé par dedans de que, pour
il
y arriva lui-même
fallait faire
qu'elle lui avait laits.
rasoirs et de clous à crochet, et lui dit allait la
annonça qu'on
lui
il
et
le
canifs,
de
méritait, on
montagne en has.
Quoique Finette ne fut pas Romaine, elle ne fut pas plus effrayée du supplice qu'on préparait que Régulus ne l'avait été autrefois à la vue d'un destin pareil. Cette
jeune i)rincesse conserva toute sa fermeté et
même
toute sa présence d'esprit. Riche-
Cautèle, au lieu d'admirer son caractère hé'^'"^=
'
roùiue, en prit une nouvelle rage contre elle et songea à hàler sa
se
mort. Dans cette vue,
il
baissa vers l'entrée du tonneau qui devait
être l'instrument de sa vengeance, pour exa-
miner
s'il
était bien
fourni de ses
armes
meurtrières. Finette, qui vit son persécuteur attentif à regarder, ne perdit point de
temps; le fit Elle le
fit
elle le jeta
dans
rouler du haut de
le
la
tonneau, et elle
montagne en
bas,
rouler du haut de la montajjnc.
sans donner au prince le temps de se reconnaître.
Après ce coup,
une extrême douleur
elle prit la fuite la
;
et les officiers
du prince, qui avaient vu avec
manière cruelle dont leur maître voulait traiter cette aimable
princesse, n'eurent garde de courir après elle pour l'arrêter. D'ailleurs
ils
étaient
si
effrayés de ce qui venait d'arriver à Riche-Cautèle, qu'ils ne purent songer à autre
chose qu'à tâcher d'arrêter furent inutiles
:
il
le
tonneau, qui roulait avec violence- mais leurs soins
roula jusqu'au bas de
la
montagne, et
ils
en tirèrent leur prince
couvert de mille plaies. L'accident de Riche-Cautèle mit au désespoir
Voir. Pour
les
peuples de leurs États,
était très haï, et
ments
si
même l'on
nobles et
si
ils
le roi
Moult-Bénin et
le
prince Bel-à
n'en furent |)oint touchés. Riche-Cautèle en
s'étonnait de ce
que
le
jeune prince, qui avait des senti-
généreux, put tant aimer cet indigne aîné. Mais
tel était le
bon
naturel de Bel-à- Voir, qu'il s'attachait fortement à tous ceux de son sang et Riche-Cau;
I.
ADIiOllK
lèle avait toujours
eu l'adresse de
n'aurai! jamais i)u
sepaidonnerde
lémoi^ner tant
lui
uy
guérir promptement
en
prit, rien
nimer de
en
})lus
i)lus, et
temps sans être
le
le
livrée à
mit tout en usage pour tâcher de
il
empressés que tout
les soins
château où
de nouveaux chagrins. Lcsdcux princesses mirent au monde fort
embarrassée. Ce^iendant
:
soudre à s'exposer encore une
fois, quoi(iu'elle
en
vît
réussir le dessein (|u'elle avait, toutes les mesures ([ue
homme, enferma
déguisa en
un
ctieval,
la ville
Quand
les enfants
du
roi
bien la
le
courage de cette
honte de ses sœurs
la
le péril. Elle prit,
prudence
[)eut ins[)irer
de ses sœurs dans des boîtes, et
Finette fut dans cette
oii était
ville, elle
la
manière magnifi([ue doni
de l'Europe; car, dès ce temps-là,
ciel
de
lit
ellepi'it
Richc-Cautèle.
apprit que
il
turiers sans emploi, sans talent, qui se donnaient pour des
avaient reçu des dons du
:
faire
elle se
et quelques autres; et dans cet équipage elle arriva à
Moult-Bénin,
les cliarlatans
:
y
elle
prince Bel-à-Voir récompensait les remèdes qu'on donnait à son frère avait
courions
la lit ré-
pour
bouche de ces enfants, pour leur laisser la respiration
emporta ces boîtes
capitale
monde s'enve-
sœurs, et n'y fut pas long-
elle avait laissé ses
princesse ne s'abattit point l'envie (pi'elle eut de cacher
petits trous, vis-à-vis la
le
send)liiieiil
danger (pi'elleavaitcouru, avait encore
l'effroyable
dont Finette se trouva
fils,
généreux prince
souffrir longtem[)s.
fViire
dégagécde
heureusement
chacune un
d'auiilié, (|ue ce
ne soulageait Riclie-Caulèle; au contraire, ses plaies
Finette, après s'être l'egagné
frère, et
cependant, malgré
:
63
pas répondre avec vivacité. lîel-ù-Voir eutdonc
une douleur violente des blessures de son les
l'hlXCKSSE
y
le
al liié à la
avait quantité d'aven-
bonunes admirables, qui
pour guérir toutes sortes de maux. Ces gens, dont
la
seule science était de fourbcr hardiment, trouvaient toujours beaucoiq) de ci'oyance
parmi les
les
noms
lieu
peuples
.
Ils
savaient leur en imposer pai* leur extérieur extraordinaire et
de leur naissance; et
mérite chez
le
la
prérogative de venir de loin leur lient souNcnl lieu de
vulgaire.
L'ingénieuse princesse, bien informée de tout cela, se donna un ce royaume-là lier
[)ar
bizarres qu'ils prenaient. Ces sortes de médecins ne restent jamais dans le
:
ce
nom
était Sanat io
;
puis elle
iit
nom
éli'anger
annoncer de tous côtés
pour
(jne le cheva-
Sanalio était arrivé avec des secrets merveilleux pour guérir toutes sortes de
blessures les plus dangereuses et les plus envenimées. Aussitôt liel-à-Voir envoya
quérir
le
prétendu chevalier. Finette vint,
monde, débita cinq ou
six
mots de
l'art
dun
lit
le
médecin empiricpie
air cavalier
:
le
mieux du
lien n'y manquait. Cette
DE PERRAULT
LES CONTES
64
princesse fut surprise de
la
l)onne
mine
et des manières agréables de Bel-à-Voir, et,
après avoir raisonné quelque temps avec ce prince au sujet des blessures de RicbeCautèle, elle dit qu'elle allait quérir une bouteille d'une eau incomparable, et que
cependant
elle laissait
deux boites
qu'elle avait apportées, et qui contenaient des
onguents excellents, propres au prince blessé. Là-dessus,
coup de
le
prétendu médecin sortit
voir tant tarder. Enfin,
le
on entendit des prit tout le
il
ne revenait point; on
de petits enfants dans
cris
monde, car
on découvrit que ces
;
comme
l'on s'impatientait
envoyer
le
beau-
presser de revenir,
cbambre de Riche-Cautèle. Cela
la
ne paraissait point d'enfants. Quelqu'un
il
cris
allait
sur-
])réta l'oreille, et
venaient des boîtes de l'empirique.
neveux de Finette. Cette
C'étaient en effet les
princesse leur avait
fait
prendre beaucoup de
nourriture avant que de venir au palais
comme
il
y
avait déjà longtemps,
taient de nouvelle, et
ils
ils
;
mais,
en soubai-
expliquaient leurs besoins
en cbantant sur un ton dolent.
On
ouvrit les
boîtes, et l'on fut fort surpris d'y voir bien effec-
tivement deux marmots qu'on trouva
fort jolis.
Ricbe-Cautèle se douta aussitôt que c'était encore On
un nouveau tour de Finette
fut foi-t surpris d'y
:
il
en conçut une
fureur (pi'on ne peut pas dire, et ses
augmentèrent
à
un tel
point, qu'on vit bien qu'il fallait qu'il en
maux en
mourût.
Bel-à-Voir en fut pénétré de douleur, et Ricbe-Cautèle, perfide jusqu'à son dernier
r
moment, songea
à abuser
de
la
tendresse de son frère. « Vous m'avez toujours aimé,
prince, lui dit-il, et vous pleurez
amitié par rapport
à la vie.
mettez-moi de m'accorder
ma perte.
Je meurs
la
;
Je n'ai plus besoin des preuves de votre
mais
si
je vous
ai
été véritablement cber, pro-
prière que je vais vous faire.
Bel-à-Voir, qui, dans l'état où
il
»
voyait son frère, se sentait incapable de
lui rien
refuser, lui promit, avec les plus terribles serments, de lui accorder tout ce qu'il lu'
demanderait. Aussitôt que Ricbe-Cautèle eut entendu ces serments,
en l'embrassant: j'ai à
vous
«
Jemeurs
faire, c'est
il
dit à son frère,
consolé, prince, puisque je serai vengé; car
la
prière que
de demander Finette en mariage aussitôt que je serai mort. Vous
obtiendrez, sans doute, cette maligne princesse, et dès (pi'elle sera en votre pouvoir,
princesse
I;AI)I{()ITE
vous
[)longei'ezun poiguard (huis
lui
limprudcnce de
\e
se repentit de
il
ne voulut rien témoigner de son repentir
lliehe-Cautèle,
dont
il
ra\
l'ut
mort
([ug sa
i
mérite était chéri de (ont
le
Finette, qui était encore une
bientôt
son livre,
nétait plus tempsde se dédire, (pii
quérir
le
et [>eu
la
monde.
reporta
la
montra au
quenouille où
la
les (juenouilles
voir les trois quenouilles à
roi
la fois. Il
;
mais
la fée
qui lui avait donné
de
vie auprès d'elle^ et
Pour commencer
la
les
les
punir
punition des
puis, ayant fait
;
filles ainées([u'il les
comme
elles
la pi-iant
le
elle avait
illustres qui s'étaient
rendues célèbres par leurs vertus de
de
l'art
la féerie,
la
et
le
elles
voyaient
les
sienne; et à
Theure
garder toute leur
nombre
galerie de son
infini
de femmes
mouvement et
voyait de tous côtés des tro[)hées et ce ne fut pas
une légère
triomphe de ces héroïnes avec
fée leur dit avec gravité (pie,
occupées que celles dont
mère de
On
si
les
avait réduites.
tout vice et
pour leur
faire
la
pour
réparer
bonne manière. En
elles s'étaient aussi bien
tableaux, elles ne seraient pas tondiées
;
la
source de tous leurs malheurs. les le
empêcher de retond)er jamais dans des malheurs pareils,
temps qu'elles avaient perdu,
elle allait les
occuper d'une
effet, elle obligea les princesses de s'employer aux travaux
grossiers et les plus vils
la
Pour
indignes égarements où elles s'étaient perdues; mais ([ue l'oisiveté était
fée ajouta que,
;
par leur vie laborieuse. Par
méprisable où leur malheureuse imprudence
comble de chagrin,
les
et
femmes vertueuses,
mortification i)our les deux sœurs de comparer situation
les
toutes ces figures avaient du
étaient en action de})uis le matin jus(|u'au soir. et des devises à la gloire de ces
de
la
envoya
mena dans une
peindre Ihisloire d'un
château enchanté, où
effet merveilleux
même manège
méritaient.
i)rincesses, la fée les
l'ait
et
alla
soupçonneux, voulut
le roi, ([ui était
quenouilles, en
toui',
une profonde révé-
n'y eut que Finette qui put montrer
roi entra dans une telle fureur contre ses deux
La
trois piiii-
de verre. Nonchalante
elle l'avait prise. Babillarde fit le
et Finette à son tour apporta sa quenouille
dans
ses sonirs, apprit
de lem[)s après on annonça aux
de demander à voir
fut
quenouille de Finette,
rence, elle
même à
de regretter
loin
du ro\ aume à Bel-à-Voir,
l'assuràl la succession
retour du roi leur père. Ce prince vint avec empressement dans leur
son premier soin
un
expira peu de temps après.
heureusement relouriu'e avec
l'ois
mort de Riche-Cautèle,
la
cesses le
le
à
il
Moult-Bénin en eut une sensible douleur. Pour son peuple,
roi
mois:
soin. liel-à-Voir IVéuiil (riiorrcur à ces
ses serments: mais
il
Le
65
les
plus
et, sans égard pour leur teint, elle les en\ oyait cueillir des
-
LES CONTES DE PERRAULT
66
pois dans ses Jardins et en arracher les mauvaises herbes. Nonchalante
au désespoir qu'elle eut de mener une vie
mourut de chagrin de s'échapper
la
nuit du château de les
Le bon naturel de Finette et,
lui
roi.
se cassa
la fée,
lit
ressentir
si
son père, qui ra\ la
que ce jeune
La
([iielle
ait
le ])rince
elle craignait
;
dans
])rince
;
arbre, et
la
:
dans
haine
la
c(cur d'un frère dont
le
fait
car. dès
l'on considérât
avec raison que
il
était
la sacri-
j)rincesse alla consulter la sage fée. qui
avait méprisé Nonchalante et Bahillarde.
seulement
vous n'avez pris juscfu'ici des mesures
si
Princesse, vous
«
:
justes pour votre con
duite qu'en vous mettant toujours dans l'esprit (pie ht prudence est la sûreté. Continuez
mourut
Bel-à-Voir l'avait
ne ^oulllt l'épouser que pour
ïée ne ^oulut rien révéler à Finette; elle lui dit
êtes sage et prudente
un
accordée sans l'en avertir
moindre chose que
avait ]K>ur elle n'eût passé
fiera son frère. Pleine de cette inquiétude, l'estimait autant
tète contre
une douleur bien vive du destin de ses
mariages. Finette treml)la à cette nouvelle
chéri; et elle appréhenda
la
apprit que
elle
ce temps-là, l'inclination des parties était
que Riche-Cautèle
elle
:
mains des paysans.
au milieu de ses chagrins,
demander en mariage au
les
ne jmt résister
à ses inclinations
de fatigue. Bahillarde. qui trouva moyen, cjuelque temps après,
et
de cette blessure entre
sœurs,
peu conforme
si
mère de
devons sou^ enir vivement de l'importance de cette maxime,
parviendrez à être heureuse sans d'autres éclaircissements de
la fée,
le
secours de
mon
art. » Finet te,
s'en retourna au palais dans
et
la
vous
n'ayant pu tirer
une extrême agitation.
Quelques jours après, cette princesse fut épousée par un ambassadeur, au
nom du
prince Bel-à-Voir; et on l'emmena trouver son époux dans un équipage magnificjue.
On
lui fit
des entrées de même dans les deux premières villes frontières du roi Moult
Bénin; et dans d'elle
la
troisième elle trouva
par l'ordre de son père. Tout
jeune prince aux approches lui
en
faisait la
Quand
le
mariage
si
il
(ju'il
était surpris
avait
la vit.
il
fut fraj)pé
de voir
la
tristesse de ce
témoigné souhaiter
lui,
au-devant de
de ses charmes,
il
lui
en
lit
la
:
le roi
même
princesse.
com|>liment, mais
confuse, que les deux cours, qui savaient combien ce prince était
spirituel et galant, crurent qu'il en était
reux
prince Bel-à-Voir qui était venu au-devant
monde
guerre, et l'avait envoyé, malgré
Bel-â-Yoir
d'ime manière
d'uii
le
vivement touché, qu'à force d'être amou-
si
perdait sa présence d'esprit. Toute
la ville
n'entendait de tous côtés que des concerts
souper magnili({ue, on songea
à
mener
les
et
retentissait des cris
de
joie, et l'on
des feux d'artitice. Enfin, après un
deux époux dans leur appartement.
I.ADIiOlTE Finclt(\ qui se souvonait toujours de
Plil.NCESSE
maxime
la
67
avait
la
à cette et les
elef
du cabinet de l'appartemenl
femme de
renouNelée dans
((ue la fée lui ii\ai(
rosprit, avait son dessein en tète. Cette ])rin('esse avait
^a^né une de
ncs l'eunnes
(|u"on lui destinait, et elle aAail donne''
jwrter dans ce cabinet de
la j)aille.
une
vessie,
du san^ de moulon.
boyaux de quelques-uns des animaux qu'on avait manj^ésausoupei'.
passa dans ce cabinet sous quehjue prétexte, et composa une
boyaux et la vessie pleine de sani'.Ensuite
laquelle elle mit les
J^a
de
rii»ure
princesse
paille
dans
elle ajiisl;! celle ligure
en désbabillë de femme et en bonnet de nuit. Lfu-sque Finelte eut achevé celle marionnette,
elle alla
rejoindre
compagnie,
la
et |)eu
(|ui
ordre
de lemps
a|)rès
belle
on condiusit
la
princesse et son époux dans leur appartement.
Quand on eut donné donner,
lui fallail
flambeaux et
femme de Le
})rince.
dans
la
(|u'il
les la
cacha dans un
le lit, et se
son épée, et
femme de
au
la [)assa
tra-
Au même
prétendue Finette.
la
de tous côtés,
sentit le sang ruisseler
il
et trouva la
temps
chambre.
fois tout haut, prit
«
la toilette le
après avoir sou])iré deux ou trois
vers du corps de
moment
à
dame d'honneur emporla
se relira. Aussilùl Finette jeta
paille
des coins de
la
paille sans
mouvemenl.
h
pm
s.,,,
tant de cruelles agitations, quoi! après avoir lant balancé
ments aux dépens d'un crime, jai ôlé ])Our
aimer
eu
{)as
la
î
force de m'affranchir d'un
d'avoir Iroj) de vertu?
même épée... » A ces mots^ Finette
tomber son épée,
«
fit
vie à
passa
et i.
a..
umv,.,-s j,, corps.
une
la
à
moment
serment qu'un
Ah ciel
î
son lour par
enlendit (pie
suis pas
(|ue je
la
je garderais
vue
l'ai
:
mes
ser-
j'élais
né
ce|)endanl je n'ai
frère possédé de furinii' a\ ail exigé
peut-on songei- à vouloir |)unii'une fenmie
ma
j ai
satisfait ton injusle
mort. Oui,
le [>rince, cpii.
cherchait pour se
telle sottise;
Prince, je ne
î
le
si
une charmanle princesse que
Eh bien! Hiche-Caulèle,
mais je vais venger Finelle
pas qu'il
la
Ses charmes m'ont ravi dès
de moi par une indigne surprise
la
épée
Qu'ai-je fait? s'écria lîel-à-Voir. Quoi! après
bi'lle
vengeance:
princesse,
il
laul (jue
dans son Iransporl. avail
passer au Iravers du
c<»r|)s
:
elle
laissé
ne \()ulut
ainsi elle lui cria:
morte. Votre bon cœur
ma
fait
devintM-
volre re-
LES CONTES DE PERRAULT
68
pcnlir;
et,
par
une tromperie
Là-dessus Finette raconte à Bel-à-Yoir
femme de admira infinie
la
de
paille.
lui
avoir épargné
heureux serments qu'on Cependant,
» la
ai
joie d'apprendre
un crime auquel
que
la
princesse vivait,
si
elle
il
prudence et
il
une obligation
ne pouvait penser sans horreur
avait eu la faiblesse de ne pas voir
la
;
nullité des
et
il
mal-
avait exigés de lui par artifice.
Finette n'eût pas toujours été bien persuadée que pnidence est mère
eût été tuée, et sa mort eût été cause de celle de Bel-à-Voir; et puis
après on aurait raisonné à loisir sur la
épargné un
crime.
je
prudence qu'elle avait en toutes sortes d'occasions, et lui eut
ne comprenait pas comment
de sûreté,
la
Le prince, transporté de
vous
prévoyance rprelle avait eue touchant
innocente,
la
présence d'esprit!
bien funestes, pour les réserver à
la
bizarrerie des sentiments de ce prince. Vive
elles
un
préservèrent ces deux époux de malheurs
destin le plus
doux du monde.
Ils
eurent
toujours l'un pour l'autre une tendresse extrême, et passèrent une longue suite de l)eaux jours dans
une gloire
et
dans une
félicité
qu'on aurait peine à décrire.
.
PEAU-D'ANE
I.
était
une
fois
un
de tousses voisins j)ius
roi
heureux de tous
conllrmé par
le
si
grand,
de ses
et
les
leur chaste
hymen
était
choix qu'il avait
née une
fdle,
qu'on jmuvait dire
si
res|)ec(é
([u'il
était le
monarques. Son bonheur était encore d'une ])rincesse aussi belle (|ue
fait
vertueuse; et ces heureux époux
De
aimé de ses peuples,
si
alliés,
ivaientdans une union parfaite.
\
douée de tant de grâces
et
de charmes,
qu'ils ne regrettaient point de n'avoir pas une plus ample lignée
La magnificence,
le
goût
et
l'abondance régnaient dans son palais
;
les
ministres
étaient sages et habiles; les courtisans vertueux et attachés; les
domestiques
fidèles et
laborieux
;
les écuries
vastes
et
remplies des plus beaux chevaux du monde, couverts de riches caparaçons
:
mais ce qui étonnait
les
étrangers
venaient admirer ces belles écuries, c'est qu'au lieu
un maître âne
apparent,
(pii
le })lus
de longues et grandes
étalait
l'n à lin étalait ses
oreilles.
Ce
roi lui avait
n'était pas par fantaisie,
donné une place
au
lieu d'être
la
nature
l'avait
malpropre, était couverte, tous
beaux écus et de louis d'or de toute espèce, qu'on Or,
comme
longues oreilles.
le
particulière et distinguée. Les vertus de ce rare animal
méritaient cette distinction, puisque litière,
mais avec raison, que
les vicissitudes
de
la
formé les
si
extraordinaire, que sa
matins, avec profusion, de
allait recueillir à
son réveil.
vie s'étendent aussi bien sur les rois
que sur
les
LES CONTES DE PERRAULT
70
sujets, et
que toujours
les
biens sont mêlés de quelques maux,
le ciel
permit que
reine fût tout à coup attaquée d'une âpre maladie, pour laquelle, malgré l'habileté des médecins,
Le
roi sensible et
s'affligeait
temples de son royaume,
mots,
le roi fit
c'est que,
:
s'il
celle
dit
(jui
vœux
d'une épouse
si
«
:
de
chère mais
les
;
dieux
Trouvez bon, avant que je meure, que j'exige
lui
les ai
de vous suivre.
les
»
A
ces
baigna de pleurs
hyménée
parler d'un second
ma chère reine, parlez-moi plutôt comme je ne vous
le
ardents à tous les
vous prenait envie de vous remarier...
avec une fermeté qui augmentait successeurs, et,
que l'hymen est
La reine, sentant sa dernière heure approcher,
des cris pitoyables, prit les mains de sa femme,
et, l'assurant (|u'il était superflu dit-il enfin,
proverbe fameux
pour
offrit sa vie
époux qui fondait en larmes
une chose de vous
le
sans modération, faisait des
et les fées étaient invoqués en vain. dit à son
la
science et
on ne put trouver aucun secours. La désolation fut générale.
amoureux, malgré
tombeau de l'amour,
la
:
«
;
Non, non,
— L'État, reprit
la
reine
regrets de ce prince, l'État doit exiger des
donné qu'une
fille,
vous presser d'avoir des
fils
vous ressemblent mais je vous demande instamment, par tout l'amour que vous
({ui
;
avez eu pour moi, de ne céder à l'empressement de vos peuples que lorsque vous aurez
trouvé une princesse plus belle et mieux alors je
mourrai contente.
On présume que
la reine,
serment, ne croyant
que
c'était s'assurer
mari ne
fit
que moi; j'en veux votre serment,
et
qui ne manquait pas d'amour-propre, avait exigé ce
qu'il fût
que
faite
»
le roi
au monde personne qui pût
l'égaler,
ne se remarierait jamais. Enfin
elle
tant de vacarme; pleurer, sangloter jour et nuit,
pensant bien
mourut. Jamais
menus
droits
du
veuvage furent son unique occupation. Les grandes douleurs ne durent pas. D'ailleurs et vinrent en corps prier le roi
dure
et lui
fit
les
répandre de nouvelles larmes.
Il
que feue
sa
femme, pensant que
une princesse plus
reine fût vertueuse et point stérile
1.
Nom
;
qu'on donne aux
({u'à la
filles
;
parut
lui
belle et
la
la
mieux
cela était impossible. Mais le conseil traita
babiole une telle promesse, et dit qu'il importait peu de
et sa tran(iuillité
l'État s'assemblèrent,
allégua le serment qu'il avait fait à
reine, défiant tous ses conseillers de pouvoir trouver faite
grands de
de se remarier. Cette première proposition
de
beauté, pourvu qu^une
que TÉtat demandait des princes pour son repos
vérité l'infante
*
avait toutes les qualités requises
des rois en Espagne et en Portugal.
pour
.
PEAl -D'ANK faire
une grande ou
([ii'alors,
reine, mais
enfants ne seraient plus réputés du
de son nom. raieiil
les
même
lui.
sang,
ou
un
('"Iran^cr
(|ue.
el (jue,
|)(nir
s'il réi;iiail
(''i»oiix
avec
(pii
enlraîne-
frappé de ces considérations. ])romil
roi,
cl
;
elle, ses
n'y ayani point de prince
peuples voisins pourrai(^nt leur susciter des guerres
ruine du royaume. Le
la
elioisir
lui
(jifil f'allail
remmènerait chez
cet étranger
(pi'il
songerait à les contenter.
Effectivement
il
chercha, parmi
les
princesses à marier,
grâces de
les
la
feue reine: ainsi
s'avisa de trouver ([ue l'infante, sa
il
ne se déterminait point. Malheureusement,
tille,
était
non seulement
mais qu'elle surpassait encore de beaucoup reine sa
mère en
nesse,
l'agréable fraîcheur de son ])eau
enflamma le
([ui serai! celle (pii |)(»ui rail
convenir. Cha<[ue jouronluiaj)portail des pori rails charmanls: mais aucun n'avait
lui
cacher
le roi
esprit et
d'un feu
à l'infante, et
il
il
belle et bien faite à l'avir.
la
en agréments. Sa jeu-
si
violent
«pi'il
lui dit cpi'il avait
de l'épouser, puiscpi'elle seule pouvait
le
teint
ne put résolu
dégager
de son serment La jeune princesse, remplie de vertu et de pudeur, pensa s'évanouir à cette horrible proposition. Elle se jeta le
aux pieds du
conjura, avec toute
lîi
contraindre à commettre un
Le
roi qui s'était
pour mettre
la
roi,
son père, et
force qu'elle put trouver dans son esprit, de ne tel
mis en tête ce bizarre projet, avait consulté un
conscience de
la
la
pas
crime. \'\cux
druide*
princesse en repos. Ce druide, moins religieux (pi'am-
bitieux. sacrifia, à l'honneur d'être confident d'un grand roi, l'intérêt de l'innocence
du
et de la vertu, et s'insinua avec tant d'adresse dans l'esprit
lement pie et
le
crime cpi'il
que d'épouser
sa
allait fille.
commettre,
Ce prince,
qu'il lui
flatté
par
persuada les
de se préparer
une œuvre
discours de ce scélérat, l'embrassa,
revint d'avec lui plus entêté que jamais dans son projel
l'infante
roi. lui adoucit tel-
même cpie c^était :
il
lit
donc ordonnera
à lui obéir.
La jeune princesse, outrée d'une vive douleur, n'imagina rien autre chose
1.
Prêtre des anciens Gaulois.
(pie
LES CONTES DE PERRAULT
72
marraine. Pour cet
d'aller trouver la fée des Lilas, sa
dans un
joli cabriolet attelé
même nuit
effet, elle partit la
d'un gros mouton qui savait tous les chemins. Elle y
arriva heureusement. La fée, qui aimait l'infante, lui dit qu'elle savait tout ce qu'elle
venait
mais qu'elle n'eût aucun souci, rien ne pouvant
dire,
lui
exécutait fidèlement ce qu'elle allait
que d'épouser votre père
ce serait une grande faute
elle,
vous pouvez
l'éviter
faut qu'il vous
et son pouvoir,
pour remplir une
dites-lui que,
:
donne une robe de
couleur du temps
la
ne pourra y parvenir.
il
ma
prescrire; « car,
lui
;
mais, sans
;
nuire
lui
chère enfant,
fantaisie
le
si elle
lui
dit-
contredire,
que vous avez,
il
amour
jamais, avec tout son
»
La princesse remercia bien sa marraine; et dès
lendemain matin
le
au
elle dit
roi
son père ce que la fée lui avait conseillé, et protesta qu'on ne tirerait d'elle aucun aveu qu'elle n'eût nait,
une robe couleur du temps. Le
assembla
dition {|ue,
fameux ouvriers,
les plus
s'ils
ne pouvaient réussir,
d'en venir à cette extrémité
L'empyrée
:
dès
n'est pas d'un plus
le
il
roi, ravi
et leur
les ferait tous
second jour,
beau bleu,
de l'espérance qu'elle
commanda
ils
lorsqu'il
don-
lui
cette robe, sous la con-
pendre.
II
n'eut pas
chagrin
le
apportèrent
la
est ceint de
nuages d'or, que
robe
désirée.
si
cette belle robe lorsqu'elle fut étalée. L'infante en fut toute contristée et ne savait
comment
se tirer d'embarras.
à la marraine, qui,
iïcn
Le
roi pressait la conclusion.
demander une de
la
couleur de
la
lune.
envoya chercher les plus habiles ouvriers, couleur de
la
s'affligea
immodérément
fort,
une
ou je crois que,
pareille robe,
diamants et
il
les
si
vous
le
lui
femmes
la
et lui
dit:
demandez une robe couleur du
roi votre père, car
la
refuser,
son père,
roi
La
et sa nourrice.
«
fée des
Ou
je
soleil,
me
nous
jamais on ne pourra parvenir;!
ou nous gagnerons au moins du temps.
demanda
lui
n'y eut pas vingt-quatre heures.
»
robe; et l'amoureux roi donna, sans regret, tous
rubis de sa couronne })0ur aider à ce superbe ouvrage, avec ordre
de ne rien épargner pour rendre cette robe égale au tous ceux qui
ne pouvait rien
vint au secours de l'affligée princesse,
L'infante en convint, les
roi, qui
encore
d'essayer
lui dit
commanda si expressément une robe
lors([u'eIle fut avec ses
viendrons à bout de dégoûter faire
fallut recourir
charmée de cette superbe robe que des soins du
Lilas, qui savait tout,
trompe
Le
et leur
lune, qu'entre donner et apporter
L'infante, plus
Il
étonnée de ce que son secret n'avait pas réussi,
soleil.
Aussi, dès qu'elle parut,
virent déployée lurent obligés de fermer les yeux tant
éblouis. C'est de ce
temps que datent
les lunettes vertes et les
ils
furent
verres noirs.
Que
PEAU-D'ANE
73
devint rinlanlc à celte vue? Jnmais on n';nait lien
coidondue,
travaillé. VAU' étail
dans sa ehainhre, où
vo\ant
pis; car, en «
Oh
pour
î
la fée
ma
coup,
le
amour de votre père
à
une
vous conseille de
lille,
honteuse ([u'on ne peut dire,
de
dit-elle à Tinlante,
lui l'aire; c'est la
peau de cet âne
cpiil
pensait en
Le pauvre àue plus aucun
si
la
même
le roi fùl
moyen
lejc
(pi'elle
détes-
tem[)s (pie son père ne pourrait jamais se résoudre à
élonné de celte
fut sacrifié, et
((
ne man(juez pas
allez, et
:
demande
passionnémeni, et
»
sou désir pour
sacrilier son âne, vint le Irouxcr, et lui e\j)Osa
animal. Quoi(pie
aime
de liouver encore un moyen d'éluder un mariage
l/infante^, ravie
hien
nous allons metlre lindigne
sera un peu ('tourdi de
(pi'il
dire (pie vous désirez celte [)eau.
lail, et «pii
(^e lui
terrible épreuve. Je le crois bien entélé de ce mariage,
qui fournit à t(»utes ses (léj)enses avec tant de profusion lui
arlistenienL
si
devint roui>e de colère.
soleil, elle
prochain: mais je pense
(pTil croit si
de
heaii el
si
sous [)réte\te d'avoii' mal aux veux, elle se leliia
l'attendait, plus
robe du
la
et,
de
vti
l;i
fantaisie,
peau galamment apportée
d'éluder son malheur,
la
peau de ce bel
ne balança pas à
il
la satisfaire.
ne voyant
à l'infante, (pii.
désespérer, lors(pie sa marraine
s'allait
accourut. «
Que
faites-vous,
ma
lille? dil-elle,
meurtrissant ses belles joues;
voici le
voyant
la
moment
j)rincesse déchirant sis
le
cheveux
el
plus heureux de votre vie. Enve-
loppez-vous de cette peau, sortez de ce palais, et allez tant (fue terre pourra vous
porter
:
lorscpi'on sacrifie tout à la vertu, les dieux savent
en récoinpenseï-. Allez,
j'aurai soin (jne votre toilette vous suive partout; en cpielquc lieu arrêtiez, votre cassette,
que vous vous
où seront vos habits et vos bijoux, suivra vos pas sous terre;
et voici uia baguette (jue je vous
donne
:
en frapi)anl
la
lerre. (piand
besoin de cette cassette, elle paraîtra à vos yeux, mais hàlez-vous de tardez pas.
sortit
de cette vilaine peau, après
la
pria
de
ne pas rabaiidonner.
s'être barbouillée de suie
de cheminée, et
de ce riche palais sans être reconnue de personne.
L'absence de l'infante causa une grande rumeur. Le fait
ne
»
L'infante embrassa mille fois sa marraine, s'alfubla
vous aurez
[)artir, el
préparer une
darmes
et plus
fête magnifi(iue, était inconsolable.
de mille mousquetaires pour
qui la protégeait, la rendait invisible
aller à la
roi,
Il fit
au désespoir, ptirtir
quête de sa
aux plus habiles recherches.
([ui
avait
plus de cent genfille;
mais
la fé'c,
DE PERRAULT
LES CONTES
74
Ainsi
il
fallut bien s'en consoler.
Pendant ce temps Tinfante cheminait. loin, et
Elle alla bien loin, bien loin, encore plus
cherchait partout une place; mais quoique par charité on
manger, on
trouvait
la
dans une belle
ville,
si
lui
donnât à
crasseuse que personne n'en voulait. Cependant elle entra
à la porte
de laquelle était une métairie, dont
fermière
la
avait besoin d'un souillon pour laver les torchons, nettoyer les dindons et l'auge
des cochons. Cette femme, voyant cette voyageuse d'entrer chez
elle,
ce
que
la
cuisine,
malpropre,
où
On
s"v
la
lasse
mit dans un coin reculé
elle fut, les
premiers jours, en butte
aux plaisanteries grossières de peau d'àne
proposa
lui
elle était
la
d'avoir tant marché.
de
si
de grand cœur, tant
l'infante accepta
la valetaille,
tant sa
rendait sale et dégoûtante. Enfin on
accoutuma;
d'ailleurs elle était
remplir ses devoirs, que
la
si
fermière
soigneuse de
la
prit sous sa
protection. Elle conduisait les moutons, les faisait
parcpierau temps où
dons paître avec une (pi'elle
n'eut jamais
il
le fallait; elle
menait
telle intelligence, qu'il
fait
autre chose
:
les
din-
semblait
aussi tout fruc-
tifiait sous ses belles mains.
Un
jour qu'assise près d'une claire fontaine, où
elle déplorait
souvent sa
triste condition, elle s'a\ isa
de s'y mirer; l'efiroyable peau d'àne, qui
habillement. ré[)ouvanta. Hon-
sa coiffure et son
teuse de cet ajustement, elle se décrassa
blanches que de
l'ivoire, et
La joie de se trouver mais
il
ment
lui fallut
le
si
le
faisait
visage et les mains, qui devinrent plus
son beau teint reprit sa fraîcheur naturelle. belle lui
donna envie de
s'y baigner, ce qu'elle exécuta; la
métairie. Heureuse-
ainsi elle eut le loisir
de tirer sa cassette,
remettre son indigne peau, pour retourner à
lendemain était un jour de fête;
d'arranger sa toilette, de poudrer ses beaux cheveux, et de mettre sa belle robe couleur
du temps Sa chambre .
était
si
petite,
que
la
queue de
cette belle robe ne pouvait
pas s'étendre. La belle princesse se mira et s'admira elle-même avec raison, qu'elle résolut, les
pour se désennuyer, de mettre tour
à tour ses belles
si
bien
robes les fêtes et
dimanches, ce qu'elle exécuta ponctuellement. Elle mêlait des fleurs et des dia-
.
PEAU-D'ANE inants dans ses beaux cheveux, avec n'avoir pour témoins de sa beauté
un art admirable;
que
ses
autant avec son horrible peau d'àne, dont on
Un jour de
fête
que Peau-d'Ane
75
mis
avait
montons
la
donné
avait
lui
et souvent elle soupirait de
et ses dindons, le
rpii
Taimaient
nom dans cette
robe couleur de
qui celte ferme appartenait, vint y descendre pour se reposer en revenant de
Ce prince
était jeune,
beau et admirablement bien
reine sa mère, adoré des peuples.
accepta
qu'il
;
puis
il
se mit
rant ainsi de lieu en lieu,
il
porte fermée. La curiosité
cevant prit
princesse
la
enfoncer
la
sortit avec peine
qui était c'était
belle et
si
l'œil à la sei'rure
;
richement vêtue, qu'à son
une
souillon, qu'on
allée
sombre
air
noble et modeste
il
la
l'au-
satisfait
pour s'informer
et obscure, mais ce fut
nommait Peau-d'Ane,
On
lui
répondait que
à cause de la peau dont elle s'ha-
crasseuse, que personne ne la regardait ni ne lui
qu'on ne l'avait prise que par
Le prince, peu
une
vit
poite, sans le respect que lui inspira cette ravissante personne.
de cette
billait, et qu'elle était si sale et si
pitié,
pour garder
de cet éclaircissement,
vit bien
les
moutons
que
et les dindons.
ces gens grossiers n'en
revint au palais
du
son père, plus amoureux qu'on ne peut dire, ayant continuellement devant
les
savaient pas davantage, et qu'il était inutile de les questionner.
yeux
la
belle
image de cette divinité
repentit de n'avoir pas heurté à
la
qu'il avait
vue par
le
Il
trou de
la
porte, et se promit bien de n'y pas
serrure.
dans
la
même
nuit,
une
lièvre
si
terrible,
La reine sa mère, qui n'avait que
remèdes médecins Enfin,
que bientôt
lui d'enfant, se
il
Il
se
manquer une
antre fois. Mais l'agitation de son sang, causée par l'ardeur de son amour,
la
il
mais ([ue devint-il en aper-
personne qui demeurait dans cette petite chambre.
la
parlait, et
roi
Kn cou-
[)arcourir les basses-cours et tous leurs recoins.
mettre
la
prince une collation champêtre,
entra dans une sombre allée, au bout de laquelle lui lit
roi, à
chasse.
l'amour de son père et de
t'ait,
offrit à ce jeune
la
pour une divinité? L'impétuosité du sentiment ((u'il éprouva dans ce moment
rait porté à Il
si
à
On
terme.
du
soleil, le fds
lui
donna,
fut réduit à toute extrémité.
désespérait de ce que tous les
étaient inutiles. Llle promettait en vain les plus grandes récompenses aux ;
ils
ils
y employaient tout
leur art, mais rien ne guérissait le |)rince
devinèrent qu'un mortel chagrin causait tout ce ravage;
reine, qui, toute pleine de tendresse
de son mal, et que, (piand
il
s'agirait
pour son de
lui
fils,
céder
la
couronne,
cendrait de son troue sans regret, pour l'y faire monter; (pie princesse,
quand
même on
serait en
guerre avec
ils
en avertirent
vint le conjurer de dire
le roi
le roi s'il
la
cause
son père des-
désirait quel(|ue
son père, et qu'on eût de justes
DE PERRAULT
LES CONTES
76
sujets
pour s'en plaindre, on
qu'elle le conjurait
pour obtenir ce
sacrifierait tout
de ne pas se
La reine n'acheva pas ce touchant discours sans mouiller torrent de larmes.
«
Madame,
suis pas assez dénaturé
de longues années et
pour désirer
qu'il veuille
à
me
le
visage du prince d'un
le
prince avec une voix très faible, je ne
couronne de
la
mon
père; plaise au
bien que je sois longtemps
ciel qu'il
plus fidèle et
le
mon
— Ah
m'en coûte.
cher
ton père, en
î
sauve
me
fils,
la
mienne
dit-il,
je vais
vous obéir
:
me
je
sont
La reine, étonnée de ce
officiers qui
c'est la plus vilaine bête après le loup;
une peau
votre métairie et qui garde vos dindons. chasse, a peut-être
mangé de
On courut
à la métairie, et l'on le
fit
bien
ma
chers. Oui, fasse
qui
madame,
un
« C'est,
reprit
fille,
une crasseuse, qui loge dans
noire,
— N'importe, ;
ma
un gâteau,
par hasard avait vu cette
sa pâtisserie
ma-
î
pensée,
me l'apporte. » nom bizarre, demanda
dit la reine;
c'est
en un mot, je veux que I*eau-d'Ane (puisque Peau-d'Ane
son mieux un gâteau pour
roi
on
et que, dès qu'il sera fait,
Peau-d'Ane?
si
me
mère, je désire que Peau-d'Ane
de ses
du
un crime de mettre
ferais
me
en danger deux êtres qui
un sateau pc
— Eh
puisqu'il faut vous déclarer
dame,
était cette
vie;
la
et celle
déclarant ce que tu désires, et sois
bien assuré qu'il te sera accordé.
la
plus
comme je le suis à vos mon fils, reprit la
mais,
retour de
vive
marier; et vous pensez bien que, soumis
reine; rien ne nous coûtera pour te sauver
Lllo fit^de son niicu\
le
m'olTrez, je n'ai point
î
volontés, je vous obéiiai toujours, quoi qu'il
f
leur.
la
Quant aux princesses que vous
respectueux de ses sujets encore pensé
enfin
lui dit
mais
qu'il désirait:
mourir, puisque de sa vie dépendait
laisser
venir Peau-d'Ane, pour
une il
y
lui
mon
fantaisie
fils,
au
de malade
a) lui fasse
ordonner de
;
promp-
faire
de
prince.
Quelques auteurs ont assuré que Peau-d'Ane, au moment que ce prince avait mis l'œil à la
serrure, les siens l'avaient aperçu
fenêtre, elle avait vu ce prince restée, et
Quoi
si
jeune,
que souvent ce souvenir
qu'il
en
soit,
lui
si
;
et })uis, que,
beau et
si
bien
regardant par sa petite
fait,
que
l'idée lui
en
était
avait coûté quelques soupirs.
Peau-d'Ane l'ayant vu, ou en ayant beaucoup entendu parler
PEAU- D'ANE avec
chambre, jela
77
moyen dèlre connue,
ravie de ixtiivoir Iiounci- un
('loge,
s'eulerma dans sa
sa vilaine peau, se décrassa le visage et les mains, se coiiïa de ses
blonds cheveux, mit un beau corset d'argent brillant, un jupon pareil, et se mit à faire le gâteau tant désiré
de
elle pril
:
la |)lus
|nire farine, des (cufs et
du beurre
bien fiais.
En
de dessein ou autreinenl, une bague cpiClle
travaillant, soit
tomba dans
a\ail au doigt
pâte, s'y mêla; et, dès (jue le gâteau fut cuit, s'affublant de son
la
horrilde peau, elle donna
gàleau
le
à rofliciei'. à (pii elle
du prince; mais cet homme, ne daignant pas
lui
demanda des nouvelles
répondre, courut chez
le
prince
lui
porter ce gâteau.
Le prince
le prit
que
vivacité,
les
avidement des mains de cet homme, et
médecins,
étaient présents, ne
([ui
fureur n'était pas un bon signe
bague
(pi'il
:
effectivement,
le
trouva dans un des morceaux du gâteau
mangea avec une
le
prince pensa s'étrangler, avec ;
mais
il
la tira
baisa mille fois cette bague,
quand
il
la
mit sous son
il
accordât de
la
faire
fait
venir; n'osant
([u'il
tout
moment,
se donna, pour imaginer
serrure, de crainte qu'on se
ce gâteau qu'il avait
non plus dire ce
moquât de
naire; toutes ces idées le tourmentant à les
éme-
pourrait voir celle à qui cette bague pouvait aller; et n'osant croire, sil
demandait Peau-d'Ane, qui avait
la
line
jugea ne pouvoir
clie\ et, et l'en lirait à
croyait n'être vu de personne. Le tourment
comment
de
le cercle était si étroit, qu'il
du monde.
servir qu'au plus joli petit doigt Il
la
adroitement de sa
bouche, et son ardeur à dévorer ce gâteau se ralentit, en examinant cette
raude montée sur un jonc d'or, dont
telle
manquèrent pas de dire que cette
médecins, ne sachant plus ([ue
faire,
lui,
demandé. avait vu
(pi'il
et qu'on le prît
la fois, la lièvre le
déclarèrent à
la
(pi"<»n
j)ar
le
lui
Irou
pour un vision-
reprit fortement; et
reine que le prince était
malade d'amour. La reine accourut chez son fdsî s'écria le
monarque
te la donnerons, fùt-elle
conlirma
le
serment du
auteurs de ses jours
une
alliance qui
:
«
la
roi.
avec
lils,
aflligé,
le roi,
nomme-nous
qui se désolait
celle
que
:
«
Mon
lils.
mon
cher
veux nous jurons que nous
tu
;
plus vile des esclaves. » La reine, en IVndjrassant,
Le
Mon père
vous déplaise:
raude de dessous son chevet,
pi'ince, attendri
et
et.
ma mère,
par
les
larmes et
lui
des
leur dit-il, je n'ai point dessein de faire
pour j)reuve de cette vérité,
c'est
les caresses
que j'épouserai
la
dit-il
personne
à
en tirant l'émequi cette bague
CONTES DE PERRAULT
LES
78/
ira, telle qu'elle soit; et
il
n'y a pas apparence que celle qui aura ce
une rustaude ou une paysanne. Le
reine prirent
roi et la
que
ainsi
bague, l'examinèrent curieusement, et jugèrent,
la
prince, que cette bague ne pouvait aller
le
doigt soit
joli
»
quà quelque
de bonne
fille
maison. Alors
tambours,
les
ayant embrassé son
le roi,
les fifres et les
([ue l'on n'avait qu'à venir
fils,
en
le
conjurant de guérir, sortit,
trompettes par toute
la ville,
fit
sonner
et crier par ses hérauts
au palais essayer une bague, et que celle à qui
elle irait
juste épouserait l'héritier du trône.
Les princesses d'abord arrivèrent, puis les duchesses, mais Il
elles
eurent beau toutes s'amenuiser
les doigts,
marquises et les baronnes
les
aucune ne put mettre
la
;
bague.
en fallut venir aux grisettes, qui, toutes jolies qu'elles étaient, avaient toutes
les
doigts trop gros. Le piince, qui se portait mieux, faisait lui-même l'essai. Enfin, on
en vint aux
filles
de chambre;
elles
ne réussirent pas mieux.
sonne qui n'eût essayé celte bague sans succès, lorsque cuisinières, les
marmitonnes,
les
gardeuses de moutons
:
Il
n'y avait plus per-
prince
le
demanda
les
on amena tout cela; mais
leurs gros doigts rouges et courts ne purent seulement aller par delà l'ongle. «
A-t-on fait venir cette Peau-d'iVne, qui m'a fait
un gâteau ces jours derniers?
»
dit le prince.
Chacun «
se prit à rire, et lui dit
Qu'on
l'aille
excepté quelqu'un.
On
amour
(|uelque
dame
chercliait
sa
n'eût la
le
;
il
ne sera pas dit que
j'aie
tintamarre
la
dindonnière.
et le cri des hérauts d'armes, s'était bien
tambour
doigt aussi
:
elle
aimait
le
prince; et,
comme
le véri-
la
menu
({ue le sien. Elle eut
que
donc une grande joie
chercher, et qu'on heurta à sa porte. Depuis qu'elle avait su qu'on à mettre sa bague, je ne sais quel espoir l'avait portée à se
soigneusement, et
fa!l)alas,
heurtait à
faisait ce
un doigt propre
coiifer plus
roi
est craintif et n'a pointde vanité, elle était dans la crainte continuelle
quand on vint
ment
le
courut, en riant et en se moquant, chercher
doutée que sa bague
de
elle était sale et crasseuse.
»
L'infante, qui avait entendu le
table
que non, tant
chercher tout à l'heure, dit
à
mettre son beau corset d'argent, avec
le
jupon plein
de dentelles d'argent, semé d'émeraudes. Sitôt qu'elle entendit qu'on porte, et qu'on l'appelait pour aller chez le prince, elle remit prompte-
peau d'àne, ouvrit sa porte;
et ces gens,
en se moquant
d'elle, lui
dirent (|ue
.
PKAIJ-DANE le roi
la
demandait pour
menèrent chez
ils la
n'osa croire
que ce
le
l'ùl
lui (airo
prince,
('pouscr son
(pii
de
rire, fille,
vue
elle «pi'il avail
Triste et confondu de s'être
si
79
puis, avec de longs ("clats
lui-même, étonné de raccoutrement de celle si
fils
:
pompeuse
et
si
helle.
lourdenieni lrom|)é:
,llimPliUV''ll,jn,It%-x, ^,„^
^^
Elle parut d'une beauté
«
Est-ce vous,
basse-cour de
—
la
lui dil-il. <pii
si
ravissante que
le
prince se mit ù ses genou:
looez au fond de cette allée oljscure, dans
la
troisième
métairie"?
Oui, seig;neur, répondil-elle.
Montrez-moi votre main soupir.
».
dil-il
en tremblant et poussant nu
.
ailles- iz.
ty^
CIRCULATION HtNS ROOM
|>rofond
Dame!
qui fut bien surpris! Ce furent le roi et
bellans et les grands de
une
petite
au plus la
CONTES DE PERRAULT
LES
80
main
délicate,
peau tomba, et
qu'il était, se
mit
elle
à ses
monde
;
et par
un
parut d'une beauté
genoux, et
les serra
ne s'en aperçut presque pas, parce que leur force, et lui
reine, ainsi
blanche et couleur de rose, où
doigt du
joli petit
la
que tous
demander
si
petit
ravissante,
si
bague
que
fait
;
mais on
bien épouser leur fils. La princesse, confuse
plafond s'ouvrit, et que
le
tout faible
rougir
reine vinrent l'embrasser de toute
lui
en remercier, lorsque
Tintante se donna,
la fit
cependant
descendant dans un char
diam-
s'ajusta sans peine
le prince,
avec une ardeur qui
le roi et la
elle voulait
la
mouvement que
de tant de caresses et de l'amour que les
les
cour, loi-sque de dessous cette peau noire et crasseuse sortit
la
marquait ce beau jeune prince, la
fée des
allait
Lilas,
de branches et de fleurs de son nom, conta, avec une
grâce infinie, l'histoire de l'infante.
Le
roi et la reine,
charmés de voir que Peau-d'Ane
redoublèrent leurs caresses
amour
princesse, et son
;
mais
le
une grande princesse, vertu de
la
princesse fut telle, qu'à peine donna-t-il
le
la
s'accrut par cette connaissance.
L'impatience du prince pour épouser
temps de
était
prince fut encore plus sensible à
la
convenables pour cet auguste hyménée. Le
faire les préparatifs
roi et la
reine, qui étaient affolés de leur belle-fille, lui faisaient mille caresses, et la tenaient
incessanunent dans leurs bras sans
le
consentement du
;
elle avait déclaré qu'elle
son père
roi
ne pouvait épouser
aussi fut-il le premier à qui on
:
le
prince
envoya une
invitation, sans lui dire quelle était l'épousée; la fée des Lilas, qui présidait à tout
comme de raison, Il
l'avait exigé, à
cause des conséquences.
vint des rois de tous les pays
cabriolet; de
plus
éloignés,
:
uns en chaise à porteur, d'autres en
les
montés sur des éléphants, sur des
tigres, sur des
aigles; mais le plus magnifique et le plus puissant fut le père de l'infante, qui
heureusement avait oublié son amour déréglé, belle,
dont
et avait
épousé une reine veuve, fort
n'avait point eu d'enfant. L'infante courut au-devant de lui;
il
la
reconnut aussitôt, et l'embrassa avec une grande tendresse, avant qu'elle eut
le
il
temps de se jeter Le
à ses
firent avec toute la
ficences,
Le
genoux.
roi et la reine lui
roi,
présentèrent leur
pompe
ne virent et ne regardèrent père du prince,
fils,
qu'il
combla d'amitiés. Les noces se
imaginable. Les jeunes époux, peu sensibles à ces magni-
fit
(ju'eux.
couronner son
fils
ce
même jour,
et, lui
baisant
la
main.
PE AU-DANI-: le plîica
sur son Lmnc, maillé
la
rcsislanccdc ce
SI
bien né:
lils si
Les fêtes de cet illustre mariage durèrent près de trois mois
deux époux durerait encore, lant
ils
s'aimaient,
s'ils
MOUALITI'.
Mais, tant que dans
Des mères
et
le
est, diflicile
à croire;
monde on aura
des enfants,
des mères-grand's.
On en gardera
la
mémoire.
iRCULAT10^ IM'8
HOO»*
lui
lalliil
obéir.
mais l'amour des
n'étaient pas morts cent ans
après.
Le conte de Peau-d'Aiie
il
;
TABLE DES MATIÈRES
Le
petit
Chaperon
rouge
1
Les Fées
4
Barbe-Bleue
La Belle au
7 bois
dormant
13
Le MAITRE Chat ou le Chat botié
22
Cendrillon ou la petite Pantoufle de verre
27
Riquet a la Houppe
33
Le
40
petit Poucet
L'adroite Princesse ou les Aventures de Finette
50
Peau-d'Anb
69
imprimerie PAUL DUPONT. (Cl.) 78. 12.97
CENTRAL
t.,,..
CHILDRENS
^.