CULTIVER LE TERRITOIRE DU BUREAU
AMINE BÉNATTABOU Mémoire de fin d’étude, sous la direction de TANIA URVOIS & JEAN-BAPTISTE MOGNETTI Remerciements à ma famille et à SOLENE GEFFROY pour leur soutien sans faille ainsi qu’à toutes celles et ceux qui ont aidé au développement de ma réflexion et à la relecture. EESAB 2015
FEUILLE DE ROUTE
LE TIERS-LIEU Le Tiers-lieu : la sphère complémentaire un territoire détourné Le Tiers-lieu au travail un territoire intégré Le Tiers-lieu collaboratif un territoire affirmé
FRONTIÈRES INVISIBLES La qualité des acteurs La figure du nouvel arrivant La temporalité pour estamper les différences Etablissement des lieux dans les espaces collaboratifs
CULTIVER LE TERRITOIRE Un paysage de proximité Revaloriser un contact humain
CULTIVER LE TERRITOIRE DU BUREAU « Il y a longtemps que le mot « bureau » ne fait plus penser à la bure, cette grosse étoffe de laine brune dont on faisait des tapis de table mais qui servait parfois à confectionner des robes de moine […]. Par métonymie successive, on est passé dudit tapis de table à la table à écrire elle-même, puis de ladite table à la pièce dans laquelle elle était installée, puis à l’ensemble des meubles constituant cette pièce, et enfin aux activités qui s’exercent, au pouvoirs qui s’y rattachent, voir même au service qui s’y rendent […]1. »
Le bureau a changé d’échelle tout au long de son évolution. À la vision de l’écrivain Georges Perec (1936 – 1982), nous pouvons ajouter la transformation du bureau en interface virtuelle survenue quelques années après son décès. A l’aube du 21e siècle, l’apparition de l’ère numérique synonyme de 3 e ère de mondialisation a restructuré les relations spatio-temporelles. Alors que de nouvelles manières de communiquer et de travailler ont émergé, la frontière Domicile/Travail que l’on pensait immuable, a été remise en question. Depuis les prémices de la dématérialisation jusqu’à aujourd’hui, ce bouleversement sociétal semble toujours d’actualité au vu des cas de mal-être en entreprises. N’a-t-on pas perdu quelques outils en chemin ? L’institut de sondage Giacom prévoit que la moitié de la population Française sera indépendante d’ici 10 ans 2. Face à cette mobilité croissante dans la sphère du travail , l’Étude de trois profils 3: Créatif, Co-worker et Prestataires de services, c’est d’abord arrêter sur le paysage de l’intime. Il semblait juste d’observer la vie quotidienne à la manière de Perec, en prenant le temps d’interroger ces formes d’indépendance. Ces individus avaient-ils les repères suffisants sur leur(s) lieu(s) d’activité(s) ? La mobilité peut être vécue
1. Perec G., L’infra-ordinaire, Seuil, 1989 2. Huffingtonpost, «Pour les Freelances, des bureaux nomades», 2015, disponible sur http://www.huffingtonpost.fr/2016/02/24/ freelance-bureaux-nomades_n_9307294.html?ir=France&ncid=fcbklnkfrhpmg0 0 0 0 0 0 01 3. Voir annexe Intimité au bureau
comme un éloignement, une sorte d’errance qui empêche de réellement se définir socialement. Si la question de l’Intimité au bureau3 se retrouve désormais repoussée dans les marges, c’est en partie pour questionner l’individu d’une autre manière. Après m’être concentré sur le fonctionnement d’un Fablab 4 et d’un espace de Co-working 5 pour le bien de projets d’aménagement, il m’est apparu que mon point de vue ne prenait pas en compte l’entièreté du questionnement. Du paysage de l’intime, ma réflexion c’est ensuite orientée vers un territoire plus commun. En effet, à la fin du 20 e siècle, les Tiers-lieux6 , ces espaces complémentaires aux deux premières sphères du Domicile et du Travail, ont en fait réaffirmé leur place sur le territoire et se sont propagés sous différentes formes : Tiers-lieux détournés7, Tiers-lieux intégrés au Travail 8 et Tiers-lieux collaboratifs 9. Ils ont ainsi offert des lieux d’accueil adaptés à la nouvelle classe sociale mobile. Au sein des Tiers-lieux collaboratif, comme les Fablabs, Hackerspaces ou espaces de Co-working, ce besoin de repères ne se résume pas à la simple intimité. Dans ces territoires, ce mal n’est ressenti qu’à un faible degré pour la simple raison que les membres se connaissent et interagissent avec camaraderie. Lorsque l’on travaille, on ne peut faire abstraction du contexte. C’est plus profond que la simple intimité d’une personne. Avec l’absence de hiérarchie institutionnelle, si hiérarchie il y a elle est motivé par le degré de compétence ou d’expérience des individus, il est d’autant plus question de l’équilibre du rapport humain au sein d’un groupe. Comment amener ces individus à cultiver leur territoire de travail au sein de ces écosystèmes où interagissent tant de singularités ?
4. Voir Glossaire, Fablab 5. Voir Glossaire, Co-working 6. Voir Glossaire, Tiers-lieu 7. Ibid., Tiers-lieu détourné 8. Ibid., Tiers-lieu intégré au Travail 9. Ibid., Tiers-lieu collaboratif
L’une des pierres angulaires de la mutation qu’a connue le bureau, le projet du TBWA/Chiat/Day nous servira de fil rouge tout au long du mémoire. Cette oeuvre collaborative de Jay Chiat publicitaire et de Gaetano Pesce artiste designer, introduit en 1993 la notion de « Bureau virtuel » et préfigure certaines formes de managements actuelles. C’est une mine d’informations qui nous permettra de comprendre l’évolution des Tiers-lieux mais aussi d’y suivre la circulation des informations . En s’émancipant du statut protocolaire du bureau, ce projet reconsidère la valeur spatio-temporelle. Il donne de considérables perspectives à la définition d’outils permettant de cultiver le territoire du bureau virtuel.
10. Chiat J., TBWA /Chiat/Day, 1993
Les mĂŠtonymies du mot bureau.
DOMICILE
TRAVAIL
TIERS-LIEUX
TEMPS
Les trois sphères d’activités de l’Homme.
LE TIERS-LIEU COMPLÉMENTAIRE un territoire détourné Les Tiers-lieux sont des espaces physiquement forts qui viennent compléter la fonction de la Maison et du Travail. En 1989, le sociologue Ray Oldenburg les définit pour la première fois dans son livre The great good place11 . De son titre original Cafés, Coffee Shops, Bookstores, Bars, Hair Salons and Other Hangouts at the Heart of a Community12 l’ouvrage met en lumière les « third places » qui jonchent la vie des citoyens, désignant ainsi les lieux alternatifs de sociabilité. Les Tiers-lieux se définissent plus par une activité que par une inscription spatiale. Permanents ou éphémères, c’est l’individu libre qui en décide, car les Tiers-lieux ne sont pas figés. Dans son sens le plus large, tout lieu peut prendre cette dénomination. Plus ils sont neutres, meilleures sera leur capacité d’adaptation aux individus. Il n’est donc pas simple de les caractériser. « Afin que la ville et ses quartiers offrent l’association riche et variée qui est leur promesse et leur potentiel, il doit y avoir un terrain neutre sur lequel les gens peuvent se rassembler. Il doit y avoir des endroits où les individus peuvent aller et venir comme bon leur semble, dans lesquels personne n’est requis de jouer l’hôte, et dans lequel tous se sentent comme à la maison et à l’aise13 . »
Historiquement, les Tiers-lieux ont toujours existé. Leurs activités font écho à certains changements sociaux. Avant les années 50, les Tiers-lieux constituaient de multiples épicentres de proximité. Salons de coiffure, bistrots, épiceries constituaient une partie essentielle de la vie des citoyens. Cela leur permettait de se rencontrer. Cette interaction était le lien de la communauté. L’un des exemples les plus connus en France demeure les cafés de Saint-Germain-des-Prés. Les Deux magots ou le Café de Flore sont célèbres pour avoir été des lieux de rencontres d’artistes. Seulement, le développement de l’automobile après la Seconde guerre mondiale, « automobile suburbs » aux États-Unis a mis à distance le Domicile du lieu
11. Oldenburg R., The Great Good Place: Cafes, Coffee Shops, Bookstores, Bars, Hair Salons, and Other Hangouts at the Heart of a Community, Marlowe & Co, 1989 (3e edition: 1999) 12. Oldenburg R., The Great Good Place: Cafes, Coffee Shops, Bookstores, Bars, Hair Salons, and Other Hangouts at the Heart of a Community, Marlowe & Co, 1989 (1ere edition: 1989) 13. Ibid., p. 22.
de Travail. Les commerces de proximité ont peu à peu disparu de nos vies emportant avec eux la communauté locale. Ce phénomène de désenchantement d’une partie du territoire a favorisé un engouement massif pour l’évolution technologique de la fin du 20 e siècle. Des nouveautés qui ont redonné de la couleur aux Tiers-lieux. Une dimension supplémentaire est ainsi apparue : la possibilité de travailler à l’extérieur. Dans les années 90, les Tiers-lieux prirent une perspective nouvelle, avec le mouvement lancé par les Starbucks coffee Shops. Véritables figures de proue, ces cafés se distinguent par un détournement volontaire de leurs usages premiers. Si les employés de cette chaine prennent le temps d’écrire nos noms sur les gobelets de café, c’est en partie pour créer une relation de proximité qui stimulera le temps passé à proximité de leurs produits. En surfant sur l’approche d’Oldenburg, les Starbucks coffee Shops offrent une structure adaptée au besoin du multitasking14. Désignant d’abord la faculté de système d’exploitation à traiter simultanément plusieurs informations, le multitasking s’est ensuite appliqué à l’Homme. À la fin du 20 e siècle, le phénomène s’est ainsi emparé de la Génération X15 appelée aussi Génération des migrants numériques, qui a pris l’habitude de faire plusieurs choses à la fois. « On cherche à augmenter les plaisirs en les additionnant, (…). Une stratégie de dédoublement de l’action plus subtile, et plus perverse, consiste à chercher à compenser un déplaisir par une dose de plaisir (…). Néanmoins, si le Multitasking prend tant d’ampleur dans notre société, c’est moins en raison d’un hédonisme croissant que grâce aux nouveaux médias – portables, smartphones, tablettes, etc. –, qui permettent de téléphoner en surfant sur le Web ou de lire plusieurs documents en parallèle ou d’échanger des messages pendant une réunion. Ainsi, nous avons l’impression d’en faire plus en moins de temps16 . »
14. Voir Glossaire, Multitasking 15. Voir Glossaire, Generation X 16. Lacroix, A . 2012, « Menace sur les pauses café », Philosophie Magazine 57 - L’homme débordé
I. Shutterstock (2013). Mod Madmen: The world of Mad Men through a 21st-century Lens – comparaison entre les outils de 1963 et ceux de 2013 [Photo.]. Extraite de http://www.shutterstock.com/blog /2013/04/modmen-the-world-of-mad-men-through-a-21st-century-lens/
DiffÊrents lieux d’implatation de Tiers-lieux dans la vie des citoyens.
Les Tiers-lieux détournés17 ne découlent pas uniquement d’une vision marketing. Le seul fait de ressentir un bien-être par un point de vue agréable ou une assise confortable peut transformer un territoire spécifique en un espace d’interaction. C’est ainsi que certaines tables de bistro se transforment en bureau le temps d’un café. À la mise en place du World Wide Web en 1990 popularisant l’utilisation du réseau Internet, la transformation du bureau prend un tournant décisif : il se dématérialise. Issu du réseau Arpanet, initialement conçu par l’armée américaine en 1975 pour faciliter la relation Homme / machine, Internet est aussi l’un des symboles de l’implication des passionnés de bidouilles dans la démocratisation des moyens de communication. La même année par exemple, Steve Wozniak, célèbre cofondateur d’Apple, conçoit le premier ordinateur de Bureau. Employé chez Hewlett Packard, il passe tout son temps libre entre l’atelier de son garage et les premiers Hackerspaces de Californie pour concevoir l’Apple I. Si ce passage entre des recherches secrètes de l’armée à l’utilisation planétaire d’internet sur son propre ordinateur à été si rapide, c’est en partie due à l’énergie de la communauté hacker. En effet, il n’a fallu dès lors que quelques années pour que l’outil ordinateur se démocratise et envahisse la société. Dès 1996, Sony utilisait déjà le slogan « Your office is where you are ». Une manière pour la marque japonaise d’affirmer le potentiel de ses nouveaux outils numériques. Cette gestion de données virtuelles à distance, a permis d’esquisser, ce qui allait devenir le télétravail18 . À l’aube du 21e siècle, le travailleur prend une réelle indépendance et affirme sa liberté. Un nouveau statut apparait. La frontière entre Domicile et Travail se fragilise, mais le télétravail ne se résume pas au simple fait de travailler chez soi. L’indépendant
17. Voir Glossaire, Tiers lieu détourné 18. Voir Glossaire, Télétravail 19. Le Blog du Freelance, « La carte de France des cafés où il fait bon travailler quand on est freelance », 2010, disponible sur : http://blog.freelance. com/la-carte-de-france-des-cafes-ou-il-fait-bon-travailler-quand-on-estfreelance/827
devient alors nomade et se désolidarise de la structure du travail pour s’emparer du territoire. Les besoins changent. On peut désormais considérer que certaines constituantes se sont ajoutées au Tiers-lieu. Le nomade veut trouver une structure où il se sent bien. Si d’un côté, les fast-foods et leur combo sandwich/fauteuil/connexion se servent du confort comme d’une valeur ajoutée, de l’autre, les indépendants s’organisent à leur manière en partageant les bonnes adresses à l’image de la « Carte de France des cafés où il fait bon travailler quand on est freelance19». Il n’est donc pas rare aujourd’hui de voir des lieux transitoires ou des moyens de locomotion qui servent d’espace de travail. Le Tiers- lieu n’est-il pas une réponse possible à nos rythmes de vie ? En cherchant à rentabiliser notre temps, on est forcé de trouver des alternatives à l’éloignement du Domicile au Travail. En ce sens, on peut aussi se demander si le Tiers-lieu ne se place pas plutôt entre les deux premières sphères de la Maison et du Travail ? Notre contexte social, semble être un terreau formidable pour le développement de ces environnements. N’assiste-t-on pas à une forme de réactivation de l’espace public ? Grâce aux Hotspots qui facilitent l’accès à internet, il est devenu simple de descendre au parc en bas de chez soi pour travailler sur son ordinateur. Le Tiers-lieu nous permet de reprendre un dialogue direct avec le territoire local.
II. Agence DDB (20 08). Mc Donald’s Wi-fi Gratuit [Photo.]. Extraite de http://lareclame.fr/mcdonalds+wifi III. AFP/Getty image (2012). Starbucks [Photo.]. Extraite de http://www. forbes.com/pictures/gh45ihhh/10 -starbucks/
Le seul fait de ressentir du bien-être peut transformer un territoire spécifique en un Tiers-lieu d’interaction. Le combo sandwich/fauteuil/ connexion par exemple est utilisé par les fast-foods comme une valeur ajoutée ciblant directement les travailleurs indépendants
LE TIERS-LIEU INTERNE AU TRAVAIL un territoire intégré
L’indépendant met en lumière la marge parfois infime, qui sépare Domicile, Travail et Tiers-lieu. En s’intéressant à la forme particulière de Tiers-lieu de travail20 , on s’aperçoit que maintenir la frontière est essentiel pour développer une cohésion de groupe. Au sein même des enceintes de Travail, plusieurs micro-espaces comme la cafétéria, les espaces de restauration ou même les fumoirs créent des points de rassemblement. Les salariés se rejoignent autour d’un centre d’intérêt commun. Un lieu limité dans l’espace, très fréquenté. La série comique Caméra Café 21 créée par Bruno Solo, Yvan Le Bolloc’h et Alain Kappauf, nous donnait justement à voir les relations d’employés de l’entreprise fictive Geugène Electro Stim, du point de vue de la machine à café placée dans l’espace détente. Les Tiers-lieux sont visibles dès l’école. En effet la cafétéria, la bibliothèque ou la cour de récréation sont avant tout des espaces de respiration nécessaires au rythme d’une journée. L’image de la cour de récréation dans les yeux d’un enfant constitue un formidable terrain d’amusement. Les différents jeux qu’il peut y pratiquer sont autant de perspectives pour lui de se défouler. Les Tiers-lieux sont donc particulièrement actifs au moment des pauses et permettent d’alterner les environnements. Plusieurs études comme « la règle des 52/1722 » du Draugiem Group relayée par le site The Muse, prouve que les périodes de travail devraient être agrémentées de temps de repos.
même âge ou d’une même section, un Tiers-lieu sert aussi l’intérêt commun du groupe en matérialisant un terrain propice à la rencontre. Il redéfinit l’écosystème de l’école en un réseau d’interdépendances. En se confrontant, les individus apprennent autant à découvrir l’autre qu’à se définir eux-mêmes. Encore une fois le territoire ne fait que délimiter un cadre. Il n’a pas fonction de liant mais de prétexte à une connexion. Depuis peu, mon école a mis en place un baby-foot à proximité de la cafétéria. C’est un objet simple qui dynamise considérablement l’espace et gomme le temps d’une partie les différences entre élèves, professeurs et agents d’entretien. Les Tiers-lieux et le travailleur mobile entretiennent un dialogue essentiel. Les entreprises de services, attestent de l’attente placée en eux 24 : elles perçoivent ces espaces de pause comme l’une des seules possibilités pour leurs employés de se parler tous ensemble. Le cas du prestataire de services est particulier de par son intense mobilité. Celle-ci a la fâcheuse tendance de le détacher de son entreprise mère : « De mon point de vue le sentiment d’appartenance existe peu. Je n’y vais que très rarement pour des réunions. Quand tu travailles directement dans la boîte mère, oui, il y a du corporatisme, mais comme je suis souvent détaché dans d’autres entreprises je ne le ressens pas 25. »
« La concentration est comme un muscle : pour pouvoir fonctionner, elle ne doit pas être surmenée 23 . »
Dans un milieu qui a tendance à créer des biotopes hermétiques par l’enfermement des individus d’un
20. Voir Glossaire, Tiers-lieu interne au Travail 21. Solo B., Le Bolloc’h Y., Kappauf A ., Caméra Café, 20 01, 570 épisodes, 3 à 5 min. 22. Gifford J., The Rule of 52 and 17: It’s Random, But it Ups Your Productivity, 2014, disponible sur: https://www.themuse.com/advice/the-rule-of-52and-17-its-random-but-it-ups-your-productivity 23. Ibid.
24. Entretien de l’auteur avec la Pensec A ., Chargée de recrutement Altran Brest, 10 avril 2014 25. Entretien de l’auteur avec Ledan T., prestataire de service - Génésis, 2 mai 2014
IV. © ROBIN J.P./M6 (2010). Caméra Café 2010 – 11 [Photo.]. Extraite de http://www.allocine.fr/series/ficheserie-4209/photos/ V. © ROBIN J.P./M6 (2010). Caméra Café 2010 – 8 [Photo.]. Extraite de http://www.allocine.fr/series/ficheserie-4209/photos/
Les Tiers-lieux interne au travail sont des lieux limités dans l’espace et très fréquentés. La matérialisation de ce terrain propice à la rencontre redéfinit un écosystème homogène.
Pour parer au manque d’attachement de leurs employés, les entreprises misent sur des micros évènements au sein des Tiers-lieux pour recréer du tissu social. Le terme « équipe » que l’on retrouve de manière récurrente dans le vocabulaire des entreprises est tout sauf innocent. Ces techniques de management tentent de revaloriser le sentiment d’appartenance.
l’insouciance en recréant un environnement ludique. Le bâtiment a la particularité de s’étaler pour rendre visible la « hiérarchie horizontale ». Si le Googleplex s’identifie à la liberté guidée de l’école, elle prend tout de même à contre-pied sa hiérarchie pyramidale 28 , cette fameuse hiérarchie qui régit l’espace du bureau depuis l’Organisation Scientifique du Travail Taylorienne 29.
Cette politique n’est pas anodine. Sur les fondements, elle rappelle celle de Google. Comme le définit le Guardian dans un article de 2012, Google est l’instigateur d’une tendance : le retour du fun dans l’espace de travail26 .
Pour permettre aux salariés de s’autogérer, on favorise le concept de Tiers-lieu. À l’inverse des autres entreprises, les lieux de détente prennent une place considérable. Ce type de système, permet de favoriser créativité et épanouissement personnel. Pourtant, Google n’est pas dans l’empathie. Elle s’est simplement aperçue que fidéliser un employé lui coûte moins cher, que de chercher son remplaçant. L’esprit du numérique, naturellement présent chez Google, a remodelé le monde.
Le Googleplex 27 réalisé par STUDIOS Architecture, est établi depuis 2004 sur les montagnes de la Silicon Valley. La caractéristique de Google est d’être intimement liée à Internet. Pour générer une nouvelle dynamique, Larry Page et Sergeï Brin, les créateurs de la société, ont toujours déniché leurs employés créatifs directement à la sortie de l’école. Ils créent ainsi une continuité avec l’environnement universitaire dans le Googleplex. En effet, le système mis en place dans les universités offre une part d’indépendance aux étudiants. N’avoir aucun bureau attitré est source de liberté de déplacement. Liberté guidée, si l’on nuance le propos, qui s’oppose à la structure habituelle des entreprises. Lorsque nous parcourons nos cursus éducatifs, il n’est pas rare de ressentir l’envie de sortir du milieu scolaire et de nous épanouir enfin dans notre vie d’adulte. Mais, il semblerait que bien souvent ce sentiment s’estompe après être rentré dans la vie active. Les individus éprouvent une certaine nostalgie vis-à-vis de leur période étudiante. Larry Page et Sergeï Brin ont bien compris que notre scolarité reste inconsciemment présente. Ils tentent de préserver
26. Smedley T., « Workplace design: how office space is becoming fun again », 2012, disponible sur : http://www.theguardian.com/money/2012/ feb/17/workplace-design-office-space-fun 27. STUDIO Architecture, Googleplex, 20 04, Mountain View 28. Voir Glossaire, Hiérarchie pyramidale 29. Voir Glossaire, Organisation Scientifique du Travail (O.S.T.)
« La théorie de la fin de la géographie, développée par O’Brien en 1990 et 1992, s’emploie à montrer que l’explosion des techniques de communication a rapproché les lieux et les hommes. Si la Terre est ronde, sa forme semble revêtir de moins en moins d’importance pour certains secteurs de l’activité économique 30 . »
Le débat sur la fin de la géographie émerge de « la restructuration des relations spatiales comme conséquence des transformations technologiques, matérielles et politiques 31 » débuté en 1991 par la fin de la Guerre froide et la diffusion du numérique. Le cyberespace a nettement redéfini les limites du monde en aplatissant les frontières politiques et juridiques des états ainsi que la géographie physique des territoires. Paradoxalement, s’il n’est pas définissable géographiquement, il a globalisé les relations humaines, en donnant la possibilité
30. Sanguin, A .L. « Fin de la géographie ou revanche de la géographie ? Les sociétés humaines entre un monde lisse, un monde pointu ou un monde plat », 2014, Confins – N°22 31. Ibid., La révolution numérique et l’explosion des lieux 32. Ibid., La révolution numérique et l’explosion des lieux
d’échanger plus facilement et rapidement avec les quatre coins de la planète. Le Tiers-lieu une réponse à ce que met en question André Louis Sanguin dans son article Fin de la géographie ou revanche de la géographie ? Les sociétés humaines entre un monde lisse, un monde pointu ou un monde plat où il se demande « le territoire a-t-il donc perdu de sa signification et de son pouvoir dans la vie de tous les jours ? 32 ». Car la force d’un Tiers-lieu tel que Google c’est de matérialiser ce concept. En dessinant les contours d’un territoire, on donne une enveloppe au cyberespace et du direct aux relations humaines. Le Googleplex est tellement calqué sur l’organisation de la ville que les employés ont tendance à y vivre 33 . Les territoires du Domicile, du Travail et du Tiers-lieu se fondent les uns dans les autres. Le siège social de Google se place donc à un degré plus élevé que le simple Tiers-lieu intégré. « L’humeur persistante du Tiers-Lieu est ludique... Il peut spontanément accueillir un rassemblement sans activité spécifique où tout le monde s’attardent plus longtemps que prévu, parce qu’ils s’amusent et qu’on ne souhaite pas partir. L’envie de revenir, de recréer, et de ressaisir l’instant est là 34. »
Les Tiers-lieux intégrés brisent la monotonie du quotidien. Lorsqu’ils sont influents, ils proposent même de retrouver un instant d’espièglerie. Ainsi, les Tiers-lieux forment une passerelle entre numérique et territoire. Ils rematérialisent donc un territoire dans un monde privé de frontière.
33. Bui D., « Silicon Valley vs Misère Valley, les laissés-pour-compte de Google & Co », 2014, disponible sur : http://tempsreel.nouvelobs.com/ monde/20141121.OBS5765/silicon-valley-vs-misere-valley-les-laissespour-compte-de-google-co.html 34. Oldenburg R., p. 37 W W
VI. Mundinteractivos (2013). El ‘paraíso’ de Google [Photo.]. Extraite de http://www. elmundo.es/albumes/20 08/03/07/google_zurich/index_1.html VII. Mundinteractivos (2013). El ‘paraíso’ de Google [Photo.]. Extraite de http:// www.elmundo.es/albumes/20 08/03/07/google_zurich/index_7.html
TRAVAIL
La priorité est donnée aux espaces de détente, reléguant le Travail au second plan. Google par exemple, tente de préserver l’insouciance en recréant un environnement ludique.
LA SPÉCIFICITÉ DU TIERS-LIEU COLLABORATIF un territoire affirmé La typologie des Tiers-lieu a évolué depuis l’apparition du terme en 1989. Son implantation s’est manifestée sous trois formes. On s’aperçoit que la propagation de Tiers-lieu coïncide avec la division et la spécialisation des domaines. La troisième branche qui vient enrichir le Tierslieu détourné de son usage premier et le Tiers-lieu intégré au travail, est le Tiers-lieu de collaboration 35 . Le projet TBWA/ Chiat/Day né en 1993 n’est pas le premier Tiers-lieu de ce type à voir le jour pour autant cela demeure une ébauche manifeste des espaces, développés aujourd’hui. par sa manière d’aborder le travail virtuel. Contrairement à la neutralité mentionnée dans la thèse de Ray Oldenburg, le Tiers-lieu collaboratif affirme son inscription géographique. Il utilise les ressources locales, territoire et individus, pour s’alimenter et s’épanouir. C’est un véritable écosystème qui se met en place autour d’un biotope et d’une biocénose. Débutons par évoquer le cas des locaux publicitaires TBWA Chiat/Day36 , où le projet se sépare en deux temps. Premièrement le Chiat/Day Building37 de Los Angeles, apparu principalement sous les traits de l’architecte Frank Gehry en 1993, reflète la volonté du commanditaire, Jay Chiat, de redonner des couleurs à son agence. Le bâtiment impose donc sur la rue une paire de jumelles monumentales, hommage à des esquisses de Claes Oldenburg. Puis dans un second temps, le projet de l’agence Chiat/Day38 à New York, réalisé un an plus tard en collaboration avec Gaetano Pesce, nous intéresse tout particulièrement car plus abouti et reflétant davantage la mobilité créative. C’est un tout architectural. Les idéaux des deux hommes convergent vers l’humanisme
et une foi en la communauté active.
Le Chiat/Day est une interprétation de la modernité et une manière de s’émanciper du statut protocolaire du bureau. Gaetano Pesce perçoit cette période comme un mouvement permanent. En inscrivant sa vision sur un moment donné, il est conscient d’établir les fondations pour le futur. It’s a Mad Mad Mad Ad world39 titre de l’article publié dans le New York Times cette même année 94, ne compare pas le Chiat/Day au film de Stanley Kramer It’s a Mad, Mad, Mad, Mad, world40 pour rien. L’agence met en place une véritable théatralisation. Elle dote ainsi chacun des employés de la technologie dernier-cri de l’époque. Téléphones et ordinateurs portables, forment ainsi la panoplie du parfait nomade. Pesce et Chiat rêvent de faire disparaître les limites du bâtiment. Ce qui est intéressant, c’est qu’ils ne choisissent pas de créer une continuité avec l’extérieur en supprimant les parois. Ils favorisent une manière d’appréhender l’espace. Dans un premier temps, ils mettent en place un lieu déconnecté de la vie réelle, comme le sera à une tout autre échelle le Googleplex. Un des premiers protocoles a été de supprimer le bureau d’une de ses employées. Grâce à cela, le directeur s’aperçoit que l’individu privilégie ensuite les supports mobiles : des objets qui lui permettent de s’adapter aux endroits disponibles. Mise en marge du reste de l’agence, l’employée vit plus mal le regard des autres que sa condition de « sans bureau ». Dans un second temps, Jay Chiat efface la plupart des repères des individus. Le Chiat/Day est conçu et réservé pour la communauté d’employés. Les concepteurs distinguent « espace privé » et « espace personnel ». De leur point de vue, l’espace à soi est une entrave à la communication. Les casiers individuels sont donc
35. Voir Glossaire, Tiers-lieu collaboratif
39. Muschamp, H. « It’s A Mad Mad Mad Ad World », 1994, disponible sur :
36. Chiat J., TBWA /Chiat/Day, 1993 37. Gehry F., Chiat/Day building, 1993, Los Angeles
http://www.nytimes.com/1994/10/16/magazine/it-s-a-mad-mad-madad-world.html
38. Pesce G., Chiat J, Chiat/Day, 1994, New-York
40. Kramer S., It’s a Mad, Mad, Mad, Mad World, 1963, 265 min.
symboliquement placés à l’entrée de l’agence. « Vous aurez de l’espace privé déclarait Chiat, seulement ce ne sera pas un espace personnel 41. »
L’espace déstructuré déstabilise : aucun mur n’est droit. Donnant l’image d’une forêt colorée, le dédale d’allées dans lequel on se perd, favorise les rencontres impromptues. Le roulement journalier est affirmé par deux règles : le système de prêt et l’abandon des bureaux attitrés. Les outils appartiennent à tout le monde. Aucune frontière n’a donc le temps de s’ériger. Le mot routine n’existe pas dans le Chiat/Day. Ce territoire anticipe le Tiers-lieu collaboratif car il n’est pas figé. Les formes multiples de circulation amènent de la dynamique à la journée de l’employé. L’espace fonctionne comme un yo-yo. Tantôt attirant les individus à interagir à l’intérieur pour mieux collaborer (« condensation sociale») , tantôt les poussant à chercher de l’inspiration à l’extérieur des locaux. L’agence Chiat/Day est une ébauche idyllique sur le papier, mais loin d’être efficace dans les faits. Sûrement trop en avance sur son temps, la volonté de mettre de la distance entre l’espace commun de l’entreprise et l’espace personnel le Chiat/Day rappelle l’organisation des « Sea of Cubicles 42 ». Pourtant les objectifs sont différents : en effet dans les années 80, les cellules mises en place pour rentabiliser l’open space individualisaient complètement le travail pour le rendre plus compétitif alors que le Chiat/ Day tente de favoriser le travail collaboratif à l’individualisme.
41. Muschamp, H., p. 1 42. Voir annexe Intimité au bureau
VIII. Mundinteractivos (2013). El ‘paraíso’ de Google [Photo.]. Extraite de http://www.elmundo.es/albumes/20 08/03/07/google_zurich/index_1. html IX . Mundinteractivos (2013). El ‘paraíso’ de Google [Photo.]. Extraite de http://www.elmundo.es/albumes/20 08/03/07/google_zurich/index_7. html
Les concepteurs du Chiat/day distinguent « espace privé » et « espace personnel ». De leur point de vue, l’espace à soi est une entrave à la communication. Les casiers individuels sont donc symboliquement placés à l’entrée. L’espace déstructuré du Chiat/Day déstabilise. Aucun mur n’est droit donnant l’image d’une forêt de meubles. On se perd ainsi dans un dédale d’allées qui non qu’un but : favoriser les rencontres impromptues.
Les terreaux de développement du Tiers-lieu collaboratif
Au début du millénaire, les Tiers-lieux se sont spécialisé, nous sommes ainsi passés comme le souligne Neil Gershenfeld fondateur du Fablab au M.I.T., de l’ère du « personal computer » à celle de la « personal fabrication ». Aujourd’hui, ces Tiers-lieux dit collaboratifs ou encore Laboratoires de fabrication numérique et collaboratifs 43 se multiplient un peu partout sur la planète, quittent à frôler la saturation dans les grandes villes américaines et européennes. Chacune des organisations se rejoint autour de valeurs similaires de démocratisation de l’innovation ainsi que de croyance en l’émancipation par le faire, communément appelé Do-ocratie. Ces valeurs makers, sont tout simplement liées aux facteurs qui ont permis l’émergence des Tiers-lieux collaboratifs. En effet, l’apparition d’internet, considéré comme le début de la 3e ère de mondialisation 44 , a favorisé la transmission culturelle entre continents en détruisant les frontières. Comme nous l’avons vu, les pionniers de la bidouille informatique ont participé à cette vague de partage sans précédent ont fait éclore de ces nouvelles pratiques de travail. Ces mêmes pratiquent qui aujourd’hui remettent en question le conformisme du bureau en s’immisçant entre maison et travail, donnant corps à leur rôle de briseur de monotonie.
D’un autre le Fablab, qui se nourrit du bassin capitaliste de la Silicon valley à l’est des États-Unis mélangé aux nombreuses start-up. Bien distinct, chacun matérialise le virtuel sur notre territoire tant et si bien que leurs réseaux se croisent bien souvent. Le site makery.info 47, qui se présente comme «médias de tous les labs» diffuse l’activité de tous les Tiers-lieux collaboratifs mellant ainsi Fablab, Hackerspace ou encore Biohacklab et Medialab. Preuve en est faites que les réseaux sont ouverts et ne s’arrêtent nullement à la dénomination.
Les Tiers-lieux collaboratif prennent en fait racine dans deux terreaux antagoniste du développement de la culture numérique. D’un côté le Hackerspace, né dans une Europe de l’est communiste et qui se développe ensuite dans l’est américain en un mouvement contestataire et en contre-culture libertaire.
43. Voir Glossaire, Mondialisation - 3 e ère 44. Voir Glossaire, Laboratoires de fabrication numérique et collaboratifs 45. Voir Glossaire, Fablab 46. Voir Glossaire, Co-working
47. Carte des labs de la Makery disponible ur : http://www.makery.info/ map-labs/
X . Auteur (8 Novembre 2014). Des membres discutent autour de la fraiseu se numĂŠrique au Fablab Artilect de Toulouse. [Photo.]. XI. Auteur (8 Novembre 2014). Partie Biohackerspace du Fablbab Artilect de Toulouse. [Photo.].
APPRENTISSAGE RENCONTRE
LIBERTE DE «TOUT» FABRIQUER
ECHANGE DE RESSOURCES
INNOVATION SOCIALE / NUMERIQUE /ECONOMIQUE REPONSE LOCAL
Valeurs éthiques des Fablab issuent de la charte du M.I.T. : Liberté de «tout» fabriquer / Rencontrer Échanger / Échanger de ressources / Apprentissage / Lieu de réponse locale /Diffusion valorisation de l’innovation
L’antenne du Fablab
Début des années 90, la collaboration entre The Grassroots Invention Group 48 et The Center for Bits and Atoms du Massachusetts Institute of Technology49 lance le programme Medialab50 en questionnant la manière de croiser contenu de l’information et sa représentation physique. Dans la continuité en 1998, un professeur du MIT lance un cours intitulé How to make (almost) everything pour sensibiliser ses étudiants à la fabrication numérique : c’est-à-dire permettre de piloter des machines-outils pour reproduire des modèles réels conçus virtuellement par un ordinateur. L’engouement autour de cet exercice dessine chez Neil Gershenfeld l’envie de changer d’échelle. Il propose ainsi la possibilité de presque tout concevoir sans se restreindre à la communauté étudiante du MIT mais en visant tout citoyen par l’intermédiaire de Fablabs. Un brin humaniste, Neil Gershenfeld, perçoit l’accès à une technologie de conception et son appropriation comme un moteur de la créativité personnelle. L’avantage du numérique est de permettre de répliquer et de faire évoluer indéfiniment les objets imaginés, mais également de pouvoir re-fabriquer les pièces de machines-outils elles-mêmes. Le but du programme Fablab était de permettre à quiconque le désirant de pouvoir re-fabriquer son espace FabLab en reproduisant les machines qui en constituent un. Pour compléter le programme, le MIT a mis en place des Fab-academy, pour former des individus aux disciplines et une charte des Fablabs. Dès lors, ces trois données ont permis aux Fablabs de se ramifier mondialement. Cependant, si tous les laboratoires que l’on trouve aujourd’hui ont le même historique, il faut bien dissocier Fablab institutionnel privé 51 et Fablab associatif52 . Seul le Fablab associatif est certifié par le label, mis en place par la Charte Fablab53 du MIT, qui cadre l’organisation globale et le
48. « The Grassroots Invention Group», disponible sur : http://gig.media. mit.edu/ 49. « The Center for Bits and Atoms », disponible sur : http://cba.mit.edu/ 50. Voir Glossaire, Medialab 51. Voir Glossaire, Fablab institutionnel privé 52. Voir Glossaire, Fablab associatif 53.. M.I.T., « The Fab Charter », 2012, disponible sur, http://fab.cba.mit. edu/about/charter/
type de machines à utiliser. Ainsi on retrouve dans la plupart des Fablabs une base d’atelier similaire : CNC à 3 axes, machines de prototypage rapide comme des imprimantes 3d, Arduino … La charte souligne aussi le principe d’ouverture gratuite ou conditionner par le temps consacré à aidé les autres membres. Au niveau national, ce réseau s’est développé en 2009 par l’ouverture d’Artilect 54 à Toulouse. Comme l’atteste l’inauguration des Fabriques du Ponant à Brest en septembre 2014, il continue son essor et compte désormais une cinquantaine de lieux dans l’hexagone 55. La force des Tiers-lieux collaboratifs réside dans la multiplication des contacts. Les Fablabs accroissent donc le réseautage plus local à l’image du regroupement français Interfab56 . Désormais on trouve énormément de Laboratoires de fabrication numérique et collaboratifs dans le monde. La dynamique lancée par les Fablabs a fait éclore une multitude de sous-branches. Il faut savoir que chaque Fablab est singulier. Ce sont les membres qui choisissent sont orientation. Leur spécialisation s’explique en grande partie par leur inscription géographique, à l’image de la grande concentration de Fablabs autour du M.I.T. (Fablab Central, Fablabs For American Inc., McKinley South End Academy Fab Lab, South End Technology Center, The Technology Innovation and Entrepeneurship Projet) ou des neuf Fablabs à Paris (Le Petit Fablab, Maker sur Seine, La Paillasse, Fabelier, WoMa, La nouvelle Fabrique, BlackBoxe, PMClab, Cité Numérique2).
54. « Artilect », disponible sur : http://www.artilect.fr/ 55. Raymond J.L., « 50 fablabs en France (et 350 dans le monde) : Etat des lieux et pratiques », 2014, disponible sur : http://www.netpublic. fr/2014/06/50 -fablabs-en-france-et-350 -dans-le-monde-etat-des-lieuxet-pratiques/ 56. « Interfab », disponible sur : http://www.interfabs.fr/
L’éthique Hacker
En 1995, l’association C Base de Berlin ouvre ses portes en revendiquant la dénomination Hackerspace 57 Similaire sous bien des aspects aux Fablabs, ce Tiers-lieu collaboratif possède la volonté toute particulière de devenir un territoire de rencontre. L’espace gratuit et libre d’accès était destiné à transmettre des connaissances sur le numérique et à former les membres aux logiciels et réseaux de données. Le foyer de ce mouvement est difficilement situable car un véritable va-et-vient entre la culture sociocommuniste de l’Europe de l’est et les Etats-Unis s’est mis en place. Si d’un côté de l’Atlantique la culture du partage s’est imposée politiquement, elle n’est pas en reste du coté ouest américain où depuis longtemps une dynamique associative est cultivée pour lutter contre un individualisme exacerbé par la constitution. Si le mot « hacker » est difficile à cerner tant il a pris des sens différents selon les contextes dans lequel il a évolué. Le terme est d’abord tiré de l’utilisation de la hache comme outils de fabrication. Selon le sociologue Michel Lallement qui s’est intéressé récemment au mouvement faire 58 , la naissance de la pratique du hacking, tel qu’on la connaît aujourd’hui, remonte à la fin des années cinquante. À l’heure ou l’informatique était accessible à une élite composée de chercheurs et militaires, le TMRC, Tech Model Railroal Club, ouvre au sein du MIT. L’association dans laquelle se côtoient passionnés de maquette et férus de systèmes de contrôle ferroviaires commence à utiliser un nouveaux langage pour communiquer. Ainsi au fil de leurs rencontres, le mot «hacker» devient une manière de travailler. Une intervention rapide ou la forme importe peu, mais qui doit respecter le cadre de l’action sans l’altérer.
57. Voir Glossaire, Hackerspace 58. Lallement.,M. L’ äge du faire - Hacking, travail, anarchie, Seuil, 2015
Le TMRC s’orientera progressivement du bricolage vers l’informatique lorsque le centre de recherches du MIT leur proposera d’expérimenter le fonctionnement du TX-0, l’un des premiers ordinateurs de la famille des Transistorized Experimental. Dans les années 90, la démocratisation des outils technologique telle que les micro-ordinateurs donna lieu aux premiers rassemblement de connaisseurs à l’image du CCC, Chaos Computer Club, mais ce n’est qu’en 95 que le Hackerspace devint réelment libre et ouvert. Selon le site spécialisé et reconnu par la communauté hackerspace.org 59 plus de 2000 Hackerspaces seraient répertorié dans le monde. Si les États-Unis et l’Europe demeurent les territoires les plus actifs, on peut compter des dizaines d’associations sur chaque continent. Contrairement aux Fablabs, il n’existe pas de charte qui cadre ces Tiers-lieux. Ce sont en majeure partie des organisations à but non lucratif gérer par une équipe de direction qui s’approprient les quatre principes majeur : un espace ouvert physiquement situé, pour rencontrer des personnes voulant travailler sur leur projet en partageant leur savoirfaire et connaissances. Ces lieux physiques ont surtout vocation à diffuser les «valeurs éthique Hacker» : libre coopération, refus de la hiérarchie, liberté d’échange de l’information, anti-discrimination et do-ocratie.
59. «Hackerspace» disponible sur hackerspace.org
XII. Atlantic 2.0 (12 mai 2014). Une discussion dans le hall d’entrée de la Cantine numérique de Nantes [Photo.]. http://cantine.atlantic2.org /les-espaces/ XIII. Atlantic 2.0 (12 mai 2014). Session de travail dans les espaces de Co-working à la Cantine numérique de Nantes [Photo.]. http://cantine.atlantic2.org / les-espaces/
Valeurs du Co-working dĂŠfinit par Brian de Koven :
La convergence : le Co-working
À la fin des années 90, le développement du numérique, a fait émerger une nouvelle classe sociale composée d’indépendants. Pour répondre à l’isolement des webmasters et autres graphistes forcés économiquement de travailler à domicile, plusieurs initiatives ont vu le jour pour venir compléter les Tiers-lieux détournés. L’avènement du Fablab et du Hackerspace que nous venons de voir on permit de favoriser des pratiques plus libres proche du nomadisme.
héberge le premier Co- working Space officiel. Brad Neuberg, programmeur, met ainsi en place un espace de travail ouvert 2 jours par semaine qu’il agrémente d’activités commune lors des pauses : repas, vélo, méditation et même des séances de massages. Le Coworking Space donnera ensuite lieu aux initiatives de collocations de bureau ou encore au Jelly. Apparu en 2006, ce dernier est un réseau de rencontre qui invite occasionnellement les travailleurs indépendants, à se rejoindre chez l’un des membres.
En 1999, le chercheur et Game-designer Brian DeKoven définit le Co-working60 comme un espace facilitant travail et réunions assistés par ordinateur61 . C’est aussi cette année qu’ouvre le 42West24, en plein centre de New York. Contrairement au C Base ce dernier loue ses bureaux flexibles à tous les indépendants, seul ou en groupe. Le 42West24 est un espace de travail 9to5 précurseur du Co-working. De là naît une distinction notable entre espace de Co-working privé que représente le 42West24 et d’autres espaces de Coworking à but non lucratif62 qui favorisent la notion de communauté et l’ouverture d’esprit par la création d’événements entre membres.
Dans le monde entier on compte approximativement 1500 espaces de Co-working pour une centaine en France. Si le réseau virtuel mondial apparaît dès 2006 via la plateforme Co-working-Wiki 63 , il a fallu attendre 2008, pour qu’un espace de ce type ouvre ses portes en France.
Si le principe de Co-working a trouvé son nom avant les années 2000, il a fallu quelques années pour que les structures se l’approprient. Entre-temps, de véritables Tiers-lieux collaboratifs à but non lucratif se sont ouvert à l’instar du Shraubenfabrik, appelé aussi Centre communautaire pour les entrepreneurs, inauguré en 2002 à Vienne.
Espace de Co-working associatif, Fablab et Hackerspaces adhèrent aux mêmes valeurs de sérendipité. Il n’est donc pas rare que ces Tierslieux collaboratifs soient en connexion directe. Leurs réseaux sont ouverts à tout type d’individus. Une étude publiée par le site bureau partagé démontre sa diversité en dressant un tableau des trois domaines les plus représentés au sein de ces espaces de Coworking : le numérique, le design et le conseil.
En 2005, le phénomène a pris de la consistance. D’un côté Londres accueille Hub, le 1er réseau mondial de Tiers-lieux collaboratifs, qui reste encore aujourd’hui le plus grand réseau avec 28 Hubs actifs sur la planète. De l’autre côté, San-Francisco
60. Voir Glossaire, Co-working 61. De Koven B., « The Co-working Connexion », 2013, disponible sur : http://www.deepfun.com/fun/2013/08/the-Co-working-connexion/
62. Deskmag, « The History Of Cowoking », 2015, disponible sur: http:// www.tiki-toki.com/timeline/entry/156192/ The-History-Of-Co-workingPresented-By-Deskmag#vars!date=1995- 05-13 _20:23:01! 63 Deskmag, « Co-working Wiki », 20 06, disponible sur : http://wiki. Co-working.org /w/page/16583831/FrontPage
Tiers-lieux : une mixité complémentaire
LABORATOIRES DE FABRICATION NUMÉRIQUE ET COLLABORATIFS
Fab lab Living lab
Teck- shop
Hacke rsp ace Co- wor king
Les différents types de Laboratoires de fabrication collaboratifs forment un réseau de compétence riche.
SYNTHÈSE Les Fabriques du Ponant et le Multiple
« Le langage de la communication rend simple et accessible des objets complexes. Il présente le Tiers-lieu comme un service, comme un objet dont la forme est aboutie et simple. C’est par l’usage d’un Tiers-lieu que se développe la compréhension des Tiers-lieux 64. »
Fablab, Hackerspace et dans la continuité l’espace de Co-working, nous l’avons vu, plus haut entretiennent des valeurs similaires. Ces Tiers-lieux sont des terreaux de l’imagination et de la création. Ce sont des outils de recherches qui permettent la mise en place de stratégies collaboratives. Mon questionnement prend pour cible ces espaces, car à l’expérience, je pense qu’ils regorgent de potentiel à venir. Ce sont deux territoires vivants dont l’évolution du fond modifie la forme. Les acteurs qui les composent évoluent et apportent sans cesse de nouveaux projets. Le développement de ces Tiers-lieux collaboratifs tend à s’appliquer de plus en plus aux scénarios du réel. Aucun des Tierslieux collaboratifs n’est déconnecté, pourtant ils peinent à atteindre un public large. Leur manifeste et valeurs nous apportent un élément de réponse très important. Les individus doivent comprendre les territoires par l’action. Une donnée qui n’est pas sans rappeler la philosophie du Do It Yourself, fais-le par toi-même en Français. Les Fabriques du Ponant à Brest comme Le Multiple à Toulouse, exemples que j’ai pu visiter, font dialoguer Fablab et espace de Co-working sur un même territoire. Ils imbriquent deux pièces complémentaires pour favoriser la vie des membres. . Les Fabriques du ponant 65 situées dans ma ville sont un consortium de plusieurs associations. La première d’entre elles, la Maison du Libre, est une
64. Duriaux Y., Buret A ., Manifeste des Tiers-lieux, Licence Creative commons, 2013 65. Les Fabriques du Ponant, « Présentation », 2014, disponible sur : http:// www.lesfabriquesduponant.net/index.php?static1/les-fabriques-du-ponant-fablab-brest
association qui promeut le libre accès à la culture. Elle porte deux initiatives, le Fablab appelé TyFab ainsi qu’un club d’informatique pour les jeunes, les Petits hackers. La seconde, l’association Les Petits Débrouillards Grand Ouest, vise la démocratisation des sciences expérimentales sous forme de projets numérique comme l’Atelier des Bidouilles Informatique Libre. Enfin, l’école d’ingénieurs Telecom Bretagne vient compléter le consortium avec son Fablab intégré au campus, le Telefab, qu’elle met en lien direct avec les Fabriques du Ponant . Le Multiple 66 réunit de son côté La Serre, un espace de Co-working et Artilect, un Fablab qui est le premier Laboratoire de fabrication de ce type à avoir été ouvert en France, courant 2009 et le premier à avoir été labellisé par le MIT en 2010. Dans la vie du citoyen, un Tiers-lieu revêt une place importante car il lui permet de s’imposer politiquement. Ray Oldenberg le qualifie de « Greater Good 67x », autrement dit de biens communs, par sa capacité à favoriser les débats publics. Ce sont en quelque sorte les Forums du 21e siècle. Si la révolution numérique a remis ce terme au gout du jour par le biais des forums internet, ce sont les Tiers-lieux, qui répliquent matériellement ce qu’étaient les places publiques d’échange de la Rome Antique. Fablab et Co-working se placent à différents niveaux d’un projet. Un Fablab permet d’expérimenter, d’éprouver un projet jusqu’au prototypage. Il donnera ainsi vie à une innovation. Un espace de Co- working proposera lui de jouer le rôle d’incubateur d’entreprises, c’est-à-dire de soutenir la gestation de projets innovants ou de suffisamment développer une technologie pour qu’elle puisse permettre la naissance d’une entreprise. Ces Tiers-lieux collaboratifs sont
66. Artilect, « Le Multiple un lieu pour… », 2014, disponible sur : http:// www.la-serre.org /le-multiple-un-lieu-pour/ 67. Oldenburg R., p. 66
complémentaires. Le fait d’avoir un espace de Coworking en communication directe avec un Fablab simplifie les échanges mais donne surtout de l’efficacité au lieu, chaque partie du territoire ayant un but simple et explicite. Le Multiple est un exemple du genre. C’est un lieu qui marie le Fablab Artilect à un espace de Co-working, la Serre. Cette organisation particulière permet de séparer deux fonctions tout en gardant une proximité suffisante pour se compléter. L’espace est conçu sur la base d’un grand Open-space et de filtres amovibles. L’accueil vient scinder l’espace dédié au Fablab de l’espace de Co-working. Les deux espaces sont décomposés en plusieurs zones spécifiques : - Côté Co-working en fonction des scénarii de travail : seul, en groupe, en réunion et en conférence. Puis un espace commun de restauration et détente au fond. - Côté Fablab en fonction des spécialités des machines : Biohacklab (paillasse, aquaponie, …), Prototypage rapide (CNC, imprimantes 3d,…), communication (fond vert, reproduction…), outillage à main (électroportatif et atelier...) L’open space permet de garder une connexion visuelle. Les membres peuvent donc facilement dialoguer d’un bout à l’autre de l’espace. Mon interlocutrice au Multiple, une jeune Américaine qui s’occupait de la permanence du lieu ce jour-là, m’a confié qu’il y a une nette divergence entre les mentalités françaises et américaines. Elle a insisté sur l’une des valeurs qui à ses yeux était primordiale : l’équilibre du rapport humain/territoire fonctionne sur le principe d’échange. Les membres et le lieu se nourrissent mutuellement : l’un par la dynamique et l’autre par les ressources. Selon elle, cette manière de travailler peine à prendre. Du côté français
la notion de propriété de l’idée est très marqué. Les Américains sont plus sensibles au partage de leur projet, donnant ainsi naissance à un système d’open-source puissant. Un projet doit vivre. Plus les acteurs sont nombreux, plus les faiblesses d’un projet seront questionnées et possiblement résolus. Il faut considérer ces espaces comme un terrain de jeu dans lequel l’idée de chacun est valorisée. La rencontre des points de vue est essentielle, d’autant plus s’ils sont nourris d’une culture propre. La production émerge du rapport humain. Il n’y a pas forcément d’objet fini au terme de la production. Tout l’enjeu de ce lieu, c’est de produire des solutions innovantes, de faire avancer la réflexion. La lenteur n’est pas vue comme une faiblesse. Une attitude réflexive est valorisée à travers la maturation le questionnement et la débrouille. Les connexions avec le réseau sont sensiblement intéressantes. Un projet commencé au Fabriques du Ponant peut trouver un prolongement au Fablab Central de Boston pour aboutir au ZB 45 Makerspace d’Amsterdam. Certains Fablabs plus que d’autres mettent l’accent sur les valeurs de l’open-source. Le territoire de Brest qui est en pleine floraison a toujours des idéaux assez poussés sur le sujet, contrairement à Artilect qui subit un effet de boomerang. La personne que j’ai rencontrée sur le site Toulousain a évoquée de trop grandes difficultés à ériger une passerelle entre leur attache américaine et la culture française. Tel qu’évoqué précédemment, l’inscription géographique influe sur les orientations du laboratoire mais aussi sur le rapport entre ses membres. Au Multiple, les individus semblent moins proches qu’aux Fabriques du Ponant, ce qui se reflète dans les propos de Nicolas Lassabe, co-directeur
68. La rédaction de Makery, « Esprit des labs, où es-tu ? Les réponses de quatre fondateurs », 2014, disponible sur : http://www.makery. info/2014/07/28/esprit-des-labs-ou-es-tu-les-reponses-de-quatre-fondateurs/
du Multiple qui regrette que « certains membres ne disent pas toujours qu’ils ont bossé au Fablab une fois le projet sorti du lab 68 . » Ceci peut s’expliquer par le degré d’implantation des lieux et par les niveaux de populations des laboratoires. Le cercle Brestois, encore émergeant, est essentiellement constitué de 190 membres la plupart présents aux balbutiement du projet participent activement et solidairement à son développement, alors que les 900 membres du laboratoire de Toulouse sont composés du cercle de fondateurs ainsi que d’un cercle accru de membres consommateurs, constitué pour la majorité d’étudiants qui gravitent autour du laboratoire pour la durée de leurs études. Les Tiers-lieux collaboratif demeurent des territoires d’habitués, mais sont aussi pensés pour que les individus puissent naviguer d’un Tiers-lieu à un autre. « Vous observez les cafés et il y en a un grande variété. Vous avez Starbucks, qui est le modèle de franchise type, et il y a tout un réseau souterrain et éclectique de cafés intéressants. J’apprécie les économies qui peuvent intégrer ces deux genres. Parfois j’aime aller à Starbucks, parfois j’aime aller dans une gargote délirante perdue au fond d’une ruelle. Je pense que les deux sont tous les deux géniaux. Tant que ni l’un l’autre n’essaye de prétendre que l’autre ne mérite pas d’exister69. »
Comme le dit Brad Neuberg, fondateur du premier espace de Co-working, il est agréable de pouvoir naviguer d’un environnement à un autre car on y retrouve l’essentiel pour travailler. Le contexte de création d’un Tiers-lieu de collaboration est essentiel. Il permet de valider la viabilité de son écosystème. Ces territoires se distinguent par un contexte physique et humain. Les connexions auront une portée différente selon les membres, le lieu et le moment. La diversité émerge localement. Un
69. Dullroy J., « Co-working began at Regus … but not the way they think», 2012, disponible sur : http://www.deskmag.com/en/Co-working-did-begin-at-regus-but-not-the-way-they-think-362
Fablab créé un tissu en se connectant aux écoles, aux entreprises, et autres territoires culturellement riches. Ces ressources transformées en projet sont ensuite injectées dans le réseau international. Cette ouverture permet de placer la barre créative haute. Car les professionnels et amateurs de tous secteurs confondus sont un potentiel énorme. Les changements sociaux de la 3 e ère de mondialisation sont influencés en grande partie par la Révolution Numérique. Les transferts de l’information qu’a instauré le cyberespace ont restructuré les relations spatiales en effaçant nos frontières. Ce ne sont pas seulement les limites de nos pays et de nos continents qui ont été gommées, ces perturbations ont directement touché les Hommes. En se désolidarisant d’un territoire, de nouvelles manières de se déplacer, de travailler, de vivre sont apparus et ont déstructuré les sphères des individus : Domicile, Travail et Tiers-lieu ont dû être redéfini. Les Tiers-lieu de sociabilité ont repris des couleurs par l’intermédiaire de Tiers-lieu de collaboration, en offrant des lieux de rencontres adaptés à la mobilité, affirmant ainsi leur importance sur le territoire local. La connexion du Co-working, ce mode de travail collaboratif et du Fablab, ce Laboratoire de fabrication numérique, représente et transmet les valeurs du citoyen de demain. Un individu actif sur son territoire, créatif et épanoui. Seulement, ce Tierslieu collaboratif ne se confronte-t-il pas à certaines frontières qui déstabilisent la communication à l’intérieur de leur écosystème ?