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Une passion pour l’innovation Des bouchons qui n’ont plus besoin de tire-bouchons, des bouchons composés de liège et de biopolymères qui permettent de créer des formes complètement originales, des solutions remplaçant la tourbe traditionnelle dans les pelouses naturelles qui réduisent de 40 % les blessures des joueurs de football. Des technologies qui permettent d’obtenir un niveau de TCA (tricloroanisole)non-détectabledansdesanalysesindividuellesdebouchons, des revêtements de sol flottants durables, 100 % étanches et sans PVC, des applications innovantes pour les secteurs de l’aérospatiale, de la construction, des transports, de l’énergie ou du design. Une réduction de la durée du premier cycle d’extraction du liège, le séquençage du génome du chêne-liège, un système d’irrigation goutte à goutte. L’économie circulaire, des produits écologiques, l’efficacité énergétique. Bienvenue dans l’univers d’Amorim.
3 Éditorial João Pedro Azevedo 4 Amorim Cork Italia remporte le prix de la Responsabilité sociale des entreprises 5 Le liège à la Biennale d’architecture de Venise en 2021 6 Le liège n’est pas fait pour être caché. Il est fait pour être vu. Eduardo Souto de Moura 9 Corticeira Amorim : une passion pour l’innovation 18 Pas de passion sans esprit de sacrifice La famille Cardoso 20 Taboadella : dans les vignes du Dão comme dans la vraie vie 22 Maison de retraite António Ferreira de Amorim 10e anniversaire de Bagos D’Ouro 23 150 ans : troisième acte NEWS
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Deuxièmement, nous devons être capables de le faire de façon systématique et constante, année après année, afin que nos clients, nos collaborateurs et nos actionnaires puissent se reposer sur des prévisions positives garanties.
Chez Corticeira Amorim, l’innovation est définie de façon générique et transversale comme la capacité à développer de façon systématique de nouveaux matériaux, produits, applications et processus dans des secteurs compétitifs et stratégiques, c’està-dire des secteurs où les caractéristiques du liège sont très recherchées par les clients, génèrent une création de valeur pour l’entreprise et pour les autres parties prenantes. Mais commençons plutôt par la fin. L’un des traits les plus saillants et distinctifs du groupe Amorim est son orientation axée sur les résultats. Chaque année, l’entreprise investit plus de 8 millions d’euros dans l’innovation. Si cela n’aboutissait pas à des résultats tangibles et significatifs, cela serait tout simplement un gaspillage de ressources : il n’y a en effet pas d’innovation sans résultats.
Troisièmement, nous sommes les leaders du marché et devons donc assumer cette position et le risque associé au fait de lancer des nouveautés. Ces trois dernières années, Corticeira Amorim a envoyé 14 demandes d’enregistrement de brevets, créé un centre d’innovation, la « i.cork factory », et mis en place deux joint-ventures, ce dans le but d’élaborer des plans de développement d’applications qui n’existaient même pas il y a 4 ans. L’entreprise a également observé une place de plus en plus importante des ventes de nouveaux produits et d’applications dans son chiffre d’affaires global. Quatrièmement, le liège devant toujours être l’élément distinctif et spécial, il faudra en exploiter tous ses aspects sensoriels, écologiques et fonctionnels. Si la raison poussant à utiliser le liège dans une application n’est pas claire, nous n’atteindrons jamais des niveaux de création de valeur suffisamment intéressants et répondant à la valorisation attendue par les actionnaires. Chez Amorim Cork Composites, les nouveaux produits permettent de réaliser une marge moyenne supérieure de 10 % à la marge moyenne de l’assortiment mondial. Il est fondamental que les nouveaux produits viennent enrichir notre gamme, et non le contraire.
ANNÉE 37 NUMÉRO 2 JUILLET 2020
Rédaction Éditorialiste Inês Silva Dias
Siège Rua de Meladas 380 4536-902 Mozelos VFR Portugal
Opinion João Pedro Azevedo
Propriété Corticeira Amorim Coordination Rafael Alves da Rocha
Édition Corticeira Amorim Conception graphique Studio Eduardo Aires Studio Dobra (pagination)
Cinquièmement, l’innovation en soi est valorisée de façon pure et simple par le marché, au fur et à mesure des ventes et des marges, et cela doit être le point de départ et d’arrivée. La décision prise par Corticeira Amorim il y a quelques années déjà, de rendre les départements d’innovation indépendants des différentes unités d'affaires, a clairement permis de renforcer la capacité à comprendre les problèmes et les opportunités de chaque segment et application. Aurait-il été possible d’avoir des produits comme le Neutrocork, le Wise, le Corkeen, ou d’assister à toute cette révolution des processus que nous voyons se mettre en place aujourd’hui dans le cadre d’Amorim Florestal si nous n’avions pas eu une vision centrée sur les problèmes concrets et spécifiques de chaque unité d'affaires ? J’en doute ! Et si nous nous tournons maintenant vers l’avenir, nous pouvons dire qu’il n’y aura pas de croissance sans une forte capacité d’innovation. L’efficacité opérationnelle est une condition indispensable au succès de chaque unité d'affaires, mais pas suffisante, et d’après ce que je connais et observe au quotidien, je n’ai jamais vu autant d’opportunités ouvertes pour le liège qu’aujourd’hui. Il ne tient désormais qu’à nous de les concrétiser. João Pedro Azevedo CEO Amorim Cork Composites
Traduction en anglais Sombra Chinesa Traduction en allemand, espagnol, français Expressão Impression et finition Lidergraf – Artes Gráficas, SA Distribution Iberomail Correio Internacional, Lda
Conditionnement Porenvel Distribuição, Comércio e Serviços, SA Périodicité Trimestrielle Tirage 22 000 exemplaires Dépôt légal 386411/15
Corticeira Amorim, S. G. P. S., SA s’engage à respecter et à protéger votre vie privée. Vous pourrez cesser de recevoir notre Amorim News à tout moment. Pour ce faire, envoyez-nous un e-mail à l’adresse press@amorim.com. Pour de plus amples informations sur notre politique en matière de confidentialité ainsi que sur l’exercice de vos droits en ce qui concerne vos données à caractère personnel, consultez notre politique de confidentialité disponible surwww.amorim.com ANNÉE 37 / NUMÉRO 2
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Amorim Cork Italia remporte le prix de la Responsabilité sociale des entreprises Amorim Cork Italia (ACIT) a récemment reçu le prix BBS (Biblioteca Bilancio Sociale), une des distinctions italiennes les plus prestigieuses en matière de responsabilité sociale des entreprises. NEWS
Le projet en compétition était le programme de recyclage des bouchons de liège de l’entreprise ACIT : ETICO. Il est arrivé à la deuxième place en termes de votes absolus. En place depuis 2011, ETICO est un projet de collaboration avec plusieurs associations et institutions, lesquelles représentent au total près de 1 000 bénévoles et gèrent plus de 5 000 points de collecte de bouchons dans toute l’Italie. Au cours des cinq dernières années, environ 100 tonnes de bouchons ont été ainsi récupérées. Après 9 ans d’existence, c’est la première fois que l’ACIT décide de proposer sa candidature à ce programme pionnier qu’est le prix BBS. Carlos Santos, directeur général d’Amorim Cork Italia, explique « qu’aucun autre programme de ce genre n’existait à l’époque, nous avons dû légaliser des opérations comme le stockage, le transport, la granulation. Notre processus est aujourd’hui crédible et arrivé à maturité. Nous avons donc pensé que c’était le moment idéal pour participer à ce prix. »
En 2019, 115 tonnes de bouchons ont été collectées, lesquels ont été récupérés par deux architectes italiens qui ont donné naissance à la collection SUBER. Les bouchons recyclés ont été transformés en petits granulés de liège, puis combinés à d’autres matériaux afin de former de nouveaux objets, comme des systèmes d’éclairage, des tables, des sièges, des portes-parapluies et des portemanteaux au design original. L’objectif désormais est que la collection SUBER devienne accessible « au grand public, aux boutiques, au réseau Amorim international », ajoute Carlos Santos en mentionnant les caves. « Nous aimerions que les bouchons usagés retournent dans les caves comme objets de design et de décoration ». La directeur général d’ACIT souligne que l’objectif principal implique d’accorder « une importance et une place encore plus grande au liège et au geste d’ouvrir une bouteille de vin ».
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Le liège à la Biennale d’architecture de Venise en 2021
L’architecte libanais Hashim Sarkis, curateur de la prochaine Biennale d’architecture de Venise, a lancé cette question : How will we live together ? (Comment allons-nous vivre ensemble ?)
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Une réponse simple est apportée par le projet : In Conflict, du collectif d’architectes portugais depA. Ce projet a été choisi pour représenter le Portugal lors de la 17e Biennale d’architecture de Venise qui, en raison de la pandémie, a été reportée à 2021. La proposition élue a été soutenue par Corticeira Amorim (CA), qui a fourni 100 mètres linéaires d’aggloméré de liège fin produit par Amorim Cork Composites. Le matériau permettra de créer les 14 panneaux d’exposition qui composent l’installation. In Conflict rejoint ainsi les précédents projets soutenus par CA qui, au fil des ans, ont permis au liège de devenir un acteur majeur de l’une des scènes artistiques les plus importantes au monde. On pense notamment à l’œuvre Trafaria na Praia de Joana Vasconcelos, présentée lors de la Biennale d’art de 2013 et, plus récemment, aux installations de Leonor Antunes et Nacho Carbonell présentées respectivement aux Biennales d’art de 2017 et 2019. La proposition du studio portugais répond directement à la question How will we
live together ? en présentant des processus caractérisés par le conflit, qui questionnent la problématique de l’habitat dans ses aspects physiques et sociaux. À travers l’exposition et des débats, le collectif depA souhaite « réfléchir au rôle de l’architecture comme discipline artistique, publique, politique et éthique ». En réalité, l’exposition évoque principalement un Portugal récemment démocratisé, appauvri et en plein processus de décolonisation. Un pays marqué par la destruction matérielle, les mouvements sociaux et la participation sociale. À partir de ce scénario de base, d’autres projets sont appelés à participer au débat autour de cette question, « construisant un panorama élargi et transversal des 45 années de démocratie dans le pays à travers son reflet dans l’architecture portugaise ». La 17e Biennale d’architecture a dû tenir compte du contexte sanitaire dans lequel nous nous trouvons et l’édition prévue cette année a donc été reportée à 2021. En conséquence, la Biennale d’art est elle aussi reportée à 2022. 5
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Le liège n’est pas fait pour être caché. Il est fait pour être vu. Quand on observe l’architecture d’Eduardo Souto de Moura, il semble évident qu’il est fasciné par les matériaux, leur beauté et leur authenticité. Que ce soit à l’échelle domestique ou urbaine, son architecture allie toujours intelligence et sensibilité, tient compte du cadre dans lequel elle s’inscrit, et donne un sens historique à ce que nous vivons. Au cours de cet entretien lumineux, l’architecte portugais lauréat du prix Prtizker, révèle... Quel est votre premier souvenir avec le liège ? La première fois que j’ai vu du liège, c’était un bouchon. C’est le premier contact que nous avons avec le liège. Les bouchons. Quand on est petit et qu’on ouvre la bouteille de lessive, la carafe d’huile d’olive... Quand vous étiez enfant, aviez-vous déjà pensé que le liège pouvait faire plus que des bouchons ? Non. Rien. Même aujourd’hui j’ai encore des doutes. [Le liège] c’est avant tout des bouchons. Et il n’y a rien d’équivalent. Rien. C’est impossible. Pour l’isolation, on peut en débattre. Le premier contact que j’ai eu fut avec un bouchon et celui-ci est parfaitement efficace. Il n’y a aucune discussion possible à ce sujet. Celui qui dit le contraire devrait se taire car cela est prouvé depuis des siècles. Dans votre vie professionnelle, comment utilisez-vous le liège ? J’ai un souvenir qui me revient lors d’un passage à l’hôpital de Saint João. J’étais malade, j’avais mal aux dents, et je me suis rendu à l’hôpital. Je me souviens avoir observé les escaliers de l’hôpital en liège. Et je me suis dit : comment est-il possible que ANNÉE 37 / NUMÉRO 2
le liège, qui est mou quand j’appuie sur un bouchon avec la main, supporte ici le poids de milliers et de milliers de personnes ? Je suis allé en Suède il y a quelques années. J’avais été contacté par un atelier norvégien pour participer à la construction de l’aéroport de Lisbonne. Ils avaient déjà construit l’aéroport de Göteborg avec du liège d’Amorim. Et s’il y a bien un endroit où les flux de personnes sont très importants, c’est un aéroport. Des millions de personnes y passent chaque jour, et marchent sur du liège portugais.
poignée. Pourquoi je me suis souvenu de la maison Fallingwater : parce que je l’ai touché et la sensation avait été très agréable. C’était en quelle année ? Vous souvenezvous à combien d’années remonte ce souvenir ? C’était en 2011 lorsque j’ai gagné le prix Prtizker. Je suis allé visiter la maison le matin et j’ai gagné le prix le soir...
Est-ce à cette époque qu’on s’est rendu compte que l’utilisation d’un matériau véritablement portugais, une matière première portugaise, pouvait être très Parmi les propriétés du liège, laquelle est démocratisée ? la plus importante selon vous ? C’est possible. Je ne suis pas sûr de moi. On a déjà évoqué ses propriétés isolantes. Il Parce qu’aujourd’hui, on abuse un peu du y a un autre élément que j’ai découvert aux liège. Je ne pense pas qu’avoir des portables États-Unis quand j’ai visité la maison peutêtre la plus célèbre au monde, la Fallingwater recouverts de liège soit très joli. Je pense que House, la maison sur la cascade de l’architecte le liège a des propriétés objectives et que l’utilisation de ses qualités doit se faire dans Frank Lloyd Wright. Nous étions en train de visiter la maison quand j’ouvris une porte et je un champ limité. Quand on l’utilise pour tout et n’importe quoi, cela finit par donner vis que la salle de bain avait du liège collé aux n’importe quoi et cela ne me plaît pas. murs. J’ai approché ma main pour toucher, Même s’il faut défendre le liège portugais. Je et je me suis dit : cela doit être merveilleux vois du liège dans tellement de choses. Des de prendre une douche ici, le carrelage est robes en liège, des portefeuilles en liège, des beaucoup plus froid. Son toucher est super agréable. Puis, quand Amorim m’a demandé téléphones portables en liège, des sacs en liège... c’est un peu excessif, je trouve. de concevoir un objet en liège, j’ai conçu une 7
« Pour moi, l’architecture est une question globale. Il n’y a pas d’architecture écologique, il n’y a pas d’architecture intelligente, d’architecture durable : seule existe la bonne architecture. Il y a toujours des problèmes que nous négligeons : par exemple, l’énergie, les ressources, les coûts, les aspects sociaux. Nous devons faire attention à tout. » Quel souvenir avez-vous du pavillon de Hanovre ? Au pavillon de Hanovre, tout a commencé à l’extérieur. C’était juste une suggestion au début. Il y avait eu des travaux qui m’avaient beaucoup impressionné, avec des bandes de pierre ressemblant à du schiste, et du coup, on s’est demandé : pourquoi on ne ferait pas des bandes de liège ? C’est un bâtiment réalisé en partenariat avec mon confrère Siza. On l’a fait. Ça s’est bien passé. Le soutien d’Amorim a été extraordinaire sur la partie technique. On a inventé un bloc, un aggloméré qui pouvait quasiment passer pour du béton, un bloc de liège incroyable. Et à propos de l’exposition au Centre Culturel de Belém (CCB), où ont été utilisés des blocs de liège ? Au CCB, mon but était de créer sept cellules pour projeter sept vidéos. J’avais donc besoin de sept espaces délimités avec des blocs, des briques. Il est évident que je me suis dit que le liège était le mieux adapté,
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car il permettait d’isoler, d’absorber le son, et les personnes qui regardaient les films pouvaient même s’y asseoir. Il est facile à transporter et facile à monter. J’ai donc réalisé toute l’installation en liège. Amorim a eu la gentillesse de m’offrir le liège pour l’exposition (qu’ils ont ensuite récupéré, parce que rien ne se perd). C’était sympa. Je voudrais rendre hommage à Amorim parce que, en tant que mécène, cette entreprise se comporte toujours parfaitement bien. Je n’ai jamais rien demandé. Chaque fois que j’utilise du liège, Amorim a considéré ceci comme du mécénat. C’est assez rare au Portugal. Le mécénat n’existe quasiment pas au Portugal. Les deux caractéristiques que je retiens d’Amorim sont la disponibilité et le professionnalisme. C’est une entreprise très professionnelle, ce qui n’est pas si commun au Portugal. Et comment s’est passée votre participation au projet Metamorphosis d’Amorim ? J’ai créé une poignée et une rambarde. C’était juste au moment où je revenais des ÉtatsUnis, et j’avais été impressionné. J’avais déjà vu du liège sur des maquettes, j’en avais touché, mais je n’en avais jamais directement utilisé dans des éléments d’architecture que nous touchons et utilisons sans nous en rendre compte (dans la salle de bain). Ça m’a beaucoup impressionné et j’ai donc utilisé directement le matériau que j’avais vu pour des choses à toucher, une rambarde et une poignée donc. Je ne sais pas si ces objets sont commercialisés. J’aimerais beaucoup qu’ils le soient. En plus, je pense qu’ils sont très jolis. Toujours à propos de cette poignée, un architecte accorde toujours beaucoup d’attention à ce type de détails. Pour vous, ce sont des éléments fondamentaux dans une construction considérée comme un ensemble. Cela n’est pas uniquement lié au liège, mais aussi à une certaine façon d’être, de concevoir et de projeter... Le détail, c’est la cerise sur le gâteau. Une bonne idée, certes, mais l’enfer est pavé de bonnes intentions. Concrétiser et mettre en œuvre une idée est compliqué. Très compliqué. La mettre en œuvre ensuite avec cohérence dans les petites et les grandes réalisations est très difficile. Pourtant, c’est bien le détail, la petite touche, qui fait toute la différence. Que vous évoque la durabilité inhérente au liège ? Il est évident que le liège est durable, mais de nos jours, tout est une affaire de business. C’est le prix qui décide de tout.
C’est horrible, mais c’est la réalité. Il ne sert à rien d’être romantique et de tomber amoureux de certaines choses... le client dit souvent non, je veux ça, le moins cher. Point final. J’aimerais savoir, quand je parle de durabilité, je ne parle pas des qualités chimiques et physiques du matériau, mais plutôt de l’aspect économique de son application. Ma question est la suivante : dans l’hypothèse où vous auriez un budget illimité, avec carte blanche, envisageriezvous le liège, en tant que matériau noble, organique, durable, recyclable... Je vais être sincère et honnête avec vous. Je me trompe peut-être, mais le liège n’est pas fait pour être caché. Il est fait pour être vu. Je suis peiné quand je traverse la région de l’Alentejo et que je ne vois pas les chêneslièges et leur écorce entourés de béton. C’est vraiment une image qui me dégoûte. Je trouve le liège très joli, dans sa couleur, sa texture, son aspect naturel, ce n’est donc pas un hasard si le pavillon d’Hanovre fut une réussite. Premièrement, il est joli, et deuxièmement, cela lui confère une identité. Nous devons maintenant toutefois analyser son efficacité. Une chose est d’être amoureux d’un matériau... Vous ne trouvez pas dommage de prendre un matériau qui a besoin de 45 ans pour être mature, de le coller sur un mur et de le recouvrir ensuite de ciment ? Il faut que son utilisation soit parfaitement rationalisée.
Eduardo Souto de Moura est né à Porto, en 1952. Il a étudié l’architecture à l’École des Beaux-Arts de Porto, puis a commencé sa carrière en collaborant avec Álvaro Siza alors qu’il était encore étudiant. En 1981, fraichement diplômé, il remporte le concours pour la construction du Centre Culturel du Secrétariat d’État à la culture à Porto, et se lance alors comme indépendant. Parmi ses projets les plus connus figurent la tour Burgo, à Porto, le stade municipal de Braga, et la Maison des histoires de Paula Rego, à Cascais. Outre son travail d’architecte, Eduardo Souto de Moura est également professeur à l’Université de Porto et professeur invité à Genève, Paris-Belleville, Harvard, Dublin, ETH Zurich et Lausanne. En 2011, Eduardo Souto de Moura devient le deuxième architecte portugais à remporter le prix Pritzker, et en 2018, il reçoit le Lion d’or à la Biennale de Venise.
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Corticeira Amorim : Une passion pour l’innovation Si c’est la curiosité qui fait bouger le monde, l’innovation est la force qui permet d’avancer et d’aller plus loin. Chez Corticeira Amorim, la Recherche & Développement + Innovation sont des aspects fondamentaux de la stratégie du groupe, décisives pour renforcer le leadership, et transversales à toutes les unités d'affaires du groupe. L’innovation transforme les rêves en réalité, rend l’impossible possible, permet de découvrir de nouvelles applications avec un matériau millénaire, et donne encore un sens nouveau au liège. Mais une question persiste : de quoi est faite cette impulsion innovatrice ? ANNÉE 37 / NUMÉRO 2
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Cela fait 150 ans que l’ambition de Corticeira Amorim est de faire du liège un matériau mieux considéré. Cela n’est possible que grâce à un engagement fort, constant et indéfectible en faveur de l’innovation. S’il est évident que le liège, de par sa nature, est un matériau exceptionnel réunissant de très nombreuses propriétés et caractéristiques uniques, qu’aucun matériau artificiel n’a encore été capable d’imiter, il est toutefois important de se souvenir que seules la connaissance scientifique et la recherche technologique, combinées à une approche stratégique et créative, permettent de pousser le liège encore plus loin, de développer de nouvelles applications avec un matériau 100 % durable, et d’explorer des chemins jamais imaginés, sublimant ce que la nature nous a donné. En partant des caractéristiques naturelles du liège et de son énorme potentiel, le défi posé à Corticeira Amorim a toujours été de développer de nouvelles applications, capables de faire la différence et de créer de la valeur. Avec l’innovation, c’est donc un champ de possibilités illimitées qui s’ouvre au liège, qui prend la forme d’une gamme de produits et solutions sans équivalent dans le secteur, et ce quelle que soit l’unité d'affaires du groupe. Ce qui au départ était le premier laboratoire spécialisé dans le contrôle de la qualité, de la production et des processus (Labcork, créé en 1983), a pris une telle ampleur que la R&D+I implique désormais des investissements annuels d’une valeur moyenne de 8 millions d’euros, sans compter les investissements dans des projets autonomes de technologie de dernière génération et de processus de production exclusifs. Comme le résume bien António Amorim, PDG de Corticeira Amorim, « grâce à un investissement sans précédent dans la R&D+I, à l’intégration de technologie de dernière génération exploitant la capacité productive, et à une approche entrepreneuriale, rigoureuse, créative et qualitative, ce qui a commencé au XIXe siècle comme un petit commerce de bouchons de liège, acquiert désormais une toute nouvelle dimension. Nous avons ouvert la voie à l’innovation de produit, en passant des applications traditionnelles à des applications plus sophistiquées, capables de répondre aux défis techniques et environnementaux de secteurs parmi les plus exigeants du monde. » Pendant des années, l’impulsion innovatrice de Corticeira Amorim se consacrait principalement au liège. Mais au cours des
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prochaines années, l’enjeu est de continuer à exploiter le potentiel de ce matériau incomparable, tout en approfondissant les connaissances sur l’arbre à son origine, le chêne-liège. En effet, si l’on veut le meilleur liège possible, il faut de très bons chêneslièges, en quantité et de qualité suffisantes pour répondre aux énormes défis auxquels devra faire face le secteur du vin, parmi bien d’autres. Ce voyage de découverte débute par des connaissances empiriques, recueillies sur le terrain, en sélectionnant la meilleure matière première. Mais il passe également par la suberaie d’où le liège est extrait, par les usines, en apprenant auprès des personnes qui en savent le plus, et va jusqu’au développement de nouveaux matériaux et solutions à base de liège, étendant sans cesse son éventail d’applications.
aussi la construction durable, l’industrie aéronautique et aérospatiale, les transports, le design, la mode, l’architecture et les arts, l’aménagement de paysages, le sport et bien d’autres applications dans des projets de niveau mondial.
AMORIM CORK :
Réinventer le bouchon
À la fin des années 1990, face à la menace des bouchons alternatifs, le secteur du liège fit face au plus grand défi de son histoire. La question était simple : innover ou disparaître. L’innovation l’a emporté et, de nos jours, la connaissance alliée à la technologie de pointe permettent Pionnier de l’économie circulaire désormais de produire les meilleurs bouchons du monde, préférés par les Cette extension et cette diversification producteurs de vin et les consommateurs. des possibilités du liège ont été rendues Que ce soit l’éradication du TCA, ou les possibles par l’ouverture, en 1963, d’une interactions entre le vin et le bouchon, unité spécialement créée pour exploiter les chez Amorim Cork l’innovation prolonge déchets issus de la production de bouchons. Cette date marque un tournant dans l’histoire plus que jamais la tradition. de Corticeira Amorim, transformant Miguel Cabral, responsable de Recherche l’entreprise en un groupe dont la mission est et Développement chez Amorim Cork, d’augmenter la valeur du liège, en exploitant le potentiel de ce matériau si noble et unique a rejoint l’entreprise fin 1999 et a été immédiatement plongé dans l’ambiance. et en étendant sa gamme d’applications. « Je me souviens très bien de ce moment Il illustre également clairement, et ceci est fondamental, majeur, quand je suis arrivé très important, le caractère pionnier du dans l’entreprise. Les attaques contre le groupe, lequel dès les années 1960, donnait bouchon de liège étaient assez importantes, naissance au premier modèle d’économie circulaire aujourd’hui mis en œuvre de façon il fallait des réponses. » La réponse ne se fit pas attendre puisqu’au transversale dans toutes ses unités d'affaires. La connaissance empirique marque le début début du XXIe siècle, deux nouvelles usines du voyage, avec un approfondissement furent créées, l’une à Coruche (2000), et de la compréhension du liège et ainsi, la l’autre à Ponte de Sor (2001), dans lesquelles découverte de tout son potentiel. La création fut mise en place une nouvelle façon de d’unités industrielles qui ont réussi à faire travailler. L’innovation y jouait un rôle de cette ambition une valeur ajoutée, en majeur, des mesures de prévention au concrétisant ce potentiel, représente la contrôle de qualité. La priorité était de lutter deuxième étape. Il fallait en effet aller encore contre l’ennemi public du liège : le TCA plus loin. C’est pour cela que le liège, dont (tricloroanisole). Cela se fit en 3 étapes, grâce l’histoire est liée à la découverte de la cellule, à des mesures de prévention, de traitement a été analysé à la loupe afin de révéler tout et de contrôle. ce qu’il avait à offrir. Cela s’est passé dans les Les mesures de prévention, se souvient laboratoires, les universités et les centres de Miguel Cabral, étaient relativement faciles à recherche, en croisant différentes disciplines mettre en place dans des unités industrielles pour répondre à chaque défi de façon neuves comme celles qui venaient de sortir créative, inventive et visionnaire, toujours de terre dans l’Alentejo. En ce qui concerne dans le profond respect de la nature. les mesures de contrôle, il y eut une heureuse Le résultat de ce parcours passionnant et coïncidence, ou un « timing parfait ». Comme porteur de changement est qu’aujourd’hui, le rappelle Miguel Cabral, en mai 2000, un poussé par l’innovation, le liège se révèle laboratoire américain présenta au Portugal les partout dans le monde comme une résultats d’une étude sur le contrôle qualité matière première de choix. Dans des des bouchons de liège, un simple outil qui secteurs comme le vin, bien sûr, mais permettait d’analyser la présence de TCA de 10
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©Dora Miller
façon objective. En 2001, sur la base de ces recherches, une première chromatographie fut réalisée dans les usines d’Amorim Cork. « Il était essentiel de pouvoir séparer le bon grain de l’ivraie et de distinguer les lots contaminés », se souvient-il. Mais il manquait encore des mesures de traitement. C’est là qu’intervint le système ROSA®, une méthode d’extraction du TCA développée et brevetée par Amorim Cork., qui joua un rôle essentiel dans la lutte contre le TCA : « Ce fut un premier pas en avant », souligne Miguel Cabral, « nous avons alors réussi à avoir des lots beaucoup plus propres et une réduction de l’ordre de 80 % ». Avançons un peu dans le temps, jusqu’en 2007, date à laquelle le même système, jusqu’alors uniquement utilisé avec les bouchons techniques, est alors appliqué aux bouchons naturels, donnant naissance à ROSA Evolution®, et diminuant ainsi encore davantage la contamination. Si des systèmes comme ROSA® ont permis d’accroître considérablement la crédibilité sur le marché, il était possible d’aller encore plus loin. En 2008 est lancé un projet complètement disruptif qui marque un « avant » et un « après » dans l’histoire d’Amorim Cork, et dans le secteur des bouchons dans son ensemble. Un investissement sans précédent en R&D+I a conduit à la mise en place, en 2016, d’un système révolutionnaire d’analyse individuelle de bouchons, le système NDTech, qui a permis de lancer le premier bouchon naturel ayant un niveau de TCA non détectable. En 2019, Amorim Cork a
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produit 57 millions de bouchons NDTech, et le système a depuis été étendu aux bouchons de champagne, avec le lancement de NDTech sparkling. 57 millions est un chiffre impressionnant, mais que fait-on des autres bouchons naturels ? En tant que leader du secteur, Amorim assume sa responsabilité d’ouvrir la voie, et cela n’est possible que grâce à un engagement indéfectible en faveur de l’innovation. Il ne suffit pas d’éliminer le TCA de certains bouchons, il faut l’éradiquer, et c’est l’engagement pris pour 2021. « Tous les bouchons techniques sont déjà couverts, il suffit donc maintenant d’étendre cette performance à tous les bouchons naturels », déclare Miguel Cabral.
Des bouchons qui n’ont plus besoin de tire-bouchons
L’éradication du TCA sera sans nul doute une grande avancée, mais l’innovation ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Comme le souligne Miguel Cabral, « l’innovation implique de résoudre des aspects négatifs, mais aussi de développer des aspects positifs. » Un bon exemple est le système Helix, qui a permis de présenter pour la première fois au monde un bouchon qui n’avait plus besoin de tirebouchon, réinventant ainsi totalement le binôme liège-verre. En ce moment même, le département Innovation d’Amorim Cork travaille surtout sur des projets autour des interactions entre le vin et le bouchon, afin de comprendre comment le bouchon joue un rôle dans l’évolution du vin au fil du temps.
Il y a 20 ans, quand Miguel Cabral a rejoint l’entreprise, il avait du mal à expliquer ce qu’il voulait faire. « Miguel va faire des recherches dans le couvercle d’une bouteille ? » entendait-on régulièrement. 20 ans plus tard, le bilan est positif. « Nous n’aurions jamais pu imaginer tout ce qu’il y avait derrière un bouchon et l’importance que le bouchon avait dans son interaction avec le vin, à savoir, qu’il l’aide à vieillir de façon équilibrée dans la bouteille au fil du temps. »
AMORIM CORK FLOORING :
Le design thinking comme principe d’orientation Amorim Cork Flooring (ACF) vient de lancer Cork Signature, une gamme de solutions pour revêtements de sol totalement personnalisables, qui promet de révolutionner le secteur. L’innovation n’est toutefois pas une nouveauté dans une entreprise qui a adopté le design thinking comme principe d’orientation. « L’innovation est l’âme du groupe, et se retrouve dans toutes les unités d'affaires », explique Jean-Sebastien Moinier, responsable de l’innovation chez Amorim Cork Flooring, en soulignant qu’avec le virage pris lors du passage au nouveau millénaire, l’innovation joue désormais 12
un rôle véritablement déterminant dans l’entreprise. « C’est à cette époque que nous avons commencé à développer une nouvelle génération de produits qui répondait directement aux besoins émergents du marché et aux attentes des consommateurs ». « Un processus d’innovation commence toujours par comprendre ce dont les personnes ont besoin et quelles sont les tendances du marché », continue JeanSebastien Moinier. « Ce que nous avons découvert, c’est que le confort à la maison est une question centrale, de plus en plus importante. En résumé, nous pourrions dire qu’il s’agit de trouver des solutions durables pour les gens, mais aussi pour la planète. Et c’est sur cela que notre stratégie se concentre : être une entreprise de revêtements leader en termes de durabilité, car nos produits sont fabriqués avec cette matière première qu’est le liège, dont les références de durabilité sont uniques en leur genre », souligne JeanSebastien Moinier. Si la durabilité est un critère clair pour les consommateurs, la santé aussi, et notamment la qualité de l’air ambiant à la maison. Et c’est là que le liège fait toute la différence. L’impact climatique lié au choix de nos matériaux est très important, et la façon dont nous parvenons à les exploiter dans le cadre d’une économie circulaire est déterminante pour les entreprises. « Le liège dispose ici d’un héritage unique : il est naturel, renouvelable, recyclable, et ne rejette aucune substance chimique dans notre environnement », explique le responsable de l’innovation d’Amorim Cork Flooring. « Au vu de cette tendance du marché, nous nous devons de la traduire en solutions pour les revêtements de sol et les murs, et c’est exactement ce que nous faisons. Petit à petit, nous avançons sur ce chemin du berceau au berceau (concept d’éco-conception), qui débute par le choix de matériaux considérés comme sains ».
Une innovation invisible
Le secret est de chercher l’innovation en adoptant un autre point de vue : « Nous sommes habitués à ce que l’innovation soit visible, comme le dernier avion, ou le dernier smartphone. Mais l’innovation, c’est quelque chose de très pragmatique. Elle peut être invisible. Elle peut être dans le produit. Quelque chose qui se trouve à l’intérieur du produit sera très intéressant et valorisé par le consommateur ». Le deuxième pilier de l’innovation pour Amorim Cork Flooring, c’est de se concentrer réellement sur le produit, qui doit offrir des avantages clairs, être facile à utiliser, et, comme le dit Jean-Sébastien Moinier, être quasiment une ANNÉE 37 / NUMÉRO 2
« solution sans problèmes ». C’est-à-dire qu’il faut qu’il soit durable, facile à manipuler, et résistant aux aléas de la vie domestique ou au poids du contexte commercial. Dans le cadre de ce processus de développement de produit, qui réunit ingénieurs, designers et chefs de projet, les inputs des consommateurs qui interagissent avec les produits sont essentiels : « Nous devons définir vers quoi nous voulons tendre et, petit à petit, nous parviendrons au succès. Il ne suffit pas de chercher le standard. Il est important d’être proche des usagers, de passer du temps avec eux pour que des échanges aient lieu et que nous puissions interpréter et traduire leurs besoins. La relation avec les usagers fait partie du processus d’innovation ». La prochaine étape dans cette culture de l’innovation est justement d’adopter cette méthodologie du design thinking, laquelle, en observant les personnes et leurs comportements, permettra de trouver la solution dont ils ont réellement besoin. Dans ce sens, l’avenir est à la personnalisation certes, mais le présent l’est déjà, et c’est pourquoi Amorim Cork Flooring a développé la gamme de revêtements de sol Cork Signature, qui permet de réaliser 17 000 combinaisons différentes à partir de couleurs, de formes, de finitions, jusqu’aux façons de l’installer. Le résultat est une solution totalement personnalisée et une création d’espaces originaux, sur mesure selon les personnes. Avec le développement de cette version de la gamme pour les murs, la gamme Dekwall Signature est également une nouvelle solution écologique destinée à la catégorie LVT (Luxury Vinyl Tile), sur le segment du luxe.
AMORIM CORK COMPOSITES :
Le ciel n’est pas la limite L’innovation fait partie de l’ADN d’Amorim Cork Composites (ACC), dont les racines remontent à 1963, année de la création d’une usine de fabrication de granulés et d’agglomérés de liège à partir des déchets de l’industrie des bouchons. Une nouvelle voie s’était ouverte et a permis de découvrir tout un ensemble de nouvelles utilisations au liège. Dotée d’une culture d’innovation solide, cette usine pionnière a prouvé que pour le liège, le ciel n’était pas la limite. Visible ou dissimulé, à l’extérieur ou à
l’intérieur, le liège est présent là où on ne l’attend pas, dans les produits les plus incroyables, et si une société connait bien cette réalité, c’est Amorim Cork Composites. La culture de l’innovation est dans nos gènes et le meilleur défi est toujours le suivant. Aujourd’hui, ACC opère dans 25 segments d’affaires différents : elle fournit des matériaux à quelques-unes des industries les plus exigeantes et les plus avancées au monde, dans des secteurs aussi différents que ceux de l’aérospatiale, du bâtiment ou des revêtements sportifs, pour n’en citer que quelques-uns. « Nous sommes une société qui recherche sans cesse de nouvelles utilisations du liège, avec toujours une valeur ajoutée », nous explique Eduardo Soares, directeur de l’innovation d’ACC. « Nous avons développé de nombreux projets incrémentaux, qui répondent directement aux besoins du marché, ainsi que d’autres, plus disruptifs et plus avant-gardistes ». Dans tous les cas, le développement du produit et la connaissance de ses applications sont des éléments-clés. « En réalité, notre concurrence ne vient généralement pas d’autres produits et d’autres producteurs de liège, mais de types de matériaux totalement différents » résume Eduardo Soares. « Nous essayons d’inclure le liège dans des domaines extrêmement variés, de trouver de nouvelles applications, et pour cela, l’innovation est fondamentale. » Avant tout, parce que c’est un processus qui implique une profonde connaissance et une maîtrise technique extrêmement pointue, capable d’apporter des réponses à de nombreux secteurs, chacun ayant ses caractéristiques, ses particularités et ses défis. « C’est très attractif pour ceux qui travaillent ici, car les journées ne se ressemblent pas et parce que nous relevons des défis qui viennent de différents secteurs et filières technologiques » récapitule le directeur de l’innovation d’ACC.
Un générateur d’idées
Du fait de sa position d’avant-garde et de son portefeuille de matériaux innovants dans le domaine des matériaux, ACC est, à juste titre, perçue comme un leader. C’est une sorte de générateur d’idées qui lance sur le marché de nouveaux concepts disruptifs, avec un risque majeur associé (30 % des projets, selon le responsable), ou qui répond directement aux demandes des clients, en se concentrant sur des lacunes concrètes qui doivent être comblées (70 % des projets). En 2020, l’un des grands enjeux d’Amorim Cork Composites est l’utilisation du liège dans les terrains de jeux. Le besoin avait été 13
identifié : créer des terrains de jeux sûrs, durables et accessibles, et la réponse a été le Corkeen by Amorim, un projet qui ne pourrait exister sans l’innovation. « Corkeen by Amorim est le grand thème de l’année : nous avons développé et breveté une première version qui est sur le marché et nous avons conçu un modèle d’affaires que nous sommes en train de mettre en place dans plusieurs pays ». Parallèlement, deux domaines sont en plein développement, celui des underlays (sous-couches) et celui des underscreeds, (sous-chapes) dans une thématique d’économie circulaire. Comme l’explique Eduardo Soares, « l’underscreed U38 offre une performance supérieure, nettement au sommet de la pyramide, en utilisant des matériaux recyclés et du liège, et il est donc naturel que la réceptivité du marché soit si encourageante ». Le thème des formats des matériaux est un autre grand vecteur de l’innovation chez ACC. Pour répondre à ce défi qui permet le développement de nouveaux produits susceptibles de remplacer, en grande partie, les plastiques traditionnels, ACC a développé le programme de matériaux Extrucork. Ce sont des composites de liège et de biopolymères qui rendent le liège injectable, extrudable, moulable et thermoformable, et permettent de créer des formes qu’on n’avait jamais réussi à créer auparavant, ce qui ouvre la porte à d’autres applications. L’élan innovateur d’ACC est si fort que, dans un monde idéal, la société pourrait développer de nouveaux produits tous les jours. Pour stimuler plus encore cette capacité à innover, à développer des matériaux différenciés et à les tester, ACC a inauguré, en octobre 2018, i.cork factory, une usine-pilote pour l’innovation, qui fonctionne comme un laboratoire et un espace d’expérimentation par excellence, tant pour de nouveaux composites que pour des technologies pionnières. « i. cork est née dans le but d’accélérer notre capacité à développer des matériaux et à tester de nouvelles technologies pour ces nouveaux matériaux, ou pour moderniser les nouveaux processus actuels.
i.cork factory : une usine, un laboratoire et un centre d’essais
Nous créons des prototypes des matériaux de demain et nous pouvons fabriquer des préséries avec les nouveaux processus que nous voulons appliquer à nos opérations, dans un environnement qui est un mélange d’usine, de labo et de centre de tests, et ce dans un esprit résolument pratique », indique Eduardo Soares.
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Dans sa genèse, ACC a été créée pour valoriser les déchets de liège, en transformant 70 % des dérivés de la fabrication des bouchons en granulés, puis ceux-ci en agglomérés, avec lesquels nous voulons donner de nouveaux usages au liège. Et ce modèle, qui est inscrit dans l’ADN de la société, est plus fort que jamais. « L’économie circulaire est l’axe central d’ACC », souligne Eduardo Soares. « Nous utilisons notre connaissance de l’économie circulaire dans l’industrie du liège pour aller chercher des matériaux qui ne sont pas exploités par d’autres industries et leur donner une nouvelle vie. » Par exemple, nous avons un projet structurant, en partenariat avec Nike, dans lequel ACC incorpore des matériaux recyclés pour créer de nouveaux composites aux innombrables applications, un modèle clair de symbiose industrielle. Le problème de la durabilité est bien sûr central, et dans un moment où une grande partie des solutions lancées par le secteur des plastiques est devenue obsolète, le liège est une excellente alternative. « Pour plusieurs secteurs de l’industrie, le liège représente la nature et inclure cette nature dans nos applications les plus courantes sera de plus en plus la voie à suivre », conclut Eduardo Soares.
AMORIM CORK INSULATION :
Construire les villes de demain Chez Amorim Cork Insulation (ACI), l’innovation est un concept dynamique qui accompagne les défis lancés par ceux qui sont au premier rang : les architectes, les ingénieurs et les paysagistes. Des produits emblématiques dans le domaine de la construction durable, comme le MDFachada, aux nouvelles solutions pour les pelouses naturelles, en passant par les façades végétales des villes de demain, le liège révèle son côté le plus innovant. Depuis la création de la première usine d’Amorim Cork Insulation à Silves, en 1967, jusqu’à nos jours, beaucoup de choses ont changé dans la façon dont nous vivons, construisons et nous logeons. L’architecture de référence n’est plus concevable sans une perspective de durabilité et de recherche de matériaux et de solutions de construction durable, non seulement pour les concepteurs, mais aussi pour le consommateur final. En effet, l’innovation est une réponse aux défis lancés par le marché depuis la
fondation d’Amorim Cork Insulation, comme l’explique Carlos Manuel, le PDG de la société : « Notre concept d’innovation est un concept dynamique, ce qui veut dire que nous sommes toujours attentifs aux besoins du marché. » Dans cette optique, les demandes spécifiques des architectes sont souvent le moteur de l’innovation d’Amorim Cork Insulation. C’est dans ce contexte qu’est apparu, en 2000, un produit complètement innovant, développé par la société, et qui deviendra un emblème d’Amorim Cork Insulation : la solution MDFachada. Il s’agit d’une application innovatrice où le liège reste visible à l’extérieur des bâtiments, et qui répondait aux besoins du projet conçu par les architectes Siza Vieira et Eduardo Souto de Mouro pour le Pavillon du Portugal, lors de l’exposition universelle de 2000 à Hanovre, en Allemagne. En 2012, les indicateurs de l’innovation ont été de nouveau peaufinés. Le marché exige de nouvelles solutions, notamment en ce qui concerne l’utilisation du liège dans le design d’intérieurs, et Amorim Cork Insulation y répond avec des produits qui permettent un usage du liège plus décoratif et plus personnalisé. De tels produits, souligne Carlos Manuel, sont destinés au marché global : le Portugal, d’autres pays européens, en particulier l’Italie qui, historiquement, est à l’avant-garde du design, et des pays d’Asie. Les architectes et les concepteurs exploitent tout le potentiel du matériau et investissent dans des modèles personnalisables et faits sur mesure.
Corksorb, une réponse à la catastrophe écologique
Encore une innovation d’Amorim Cork Insulation qui va bien au-delà de l’architecture et du design d’intérieurs. L’entreprise recherche constamment de nouvelles solutions qui élargissent les possibilités du liège et contribuent, en même temps, à protéger la planète. Dans ce sens, le produit Corksorb, développé pour absorber les déversements d’hydrocarbures dans les océans provenant des supertankers, apporte une réponse à cette catastrophe écologique. Carlos Manuel le souligne : « Heureusement, la situation à l’origine de cette application n’existe plus, puisque la loi oblige ces bateaux à être munis d’une double coque. Cependant, la solution Corksorb continue à remplir sa fonction d’absorbant à une échelle différente : elle est utilisée dans des industries où il y a des fuites d’huile et autres hydrocarbures ». Du fait de ses caractéristiques, le liège n’absorbe que le pétrole brut, et non l’eau ; il a aussi l’avantage 14
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de pouvoir être comprimé pour récupérer le pétrole brut, et peut donc être réutilisé. « Il existe un concept - dans ce cas, l’utilisation de granulés de liège expansé pour absorber les matériaux indésirables - puis il y a des variantes adaptées aux besoins du marché », signale le PDG d’Amorim Cork Insulation. L’application des pratiques de l’économie circulaire au sein d’Amorim Cork Insulation a aussi donné d’importants résultats en termes d’innovation. Par exemple, l’utilisation du sous-produit issu de la fabrication et du recyclage dans de nouvelles solutions pour les pelouses naturelles. Cette solution innovante remplace la tourbe traditionnelle, réduit considérablement la consommation d’eau, et permet une diminution de 40 % des blessures chez les joueurs. Durabilité et sécurité sont les deux concepts-clés d’une solution qui a été adoptée pendant le championnat européen de 2016, et elle est utilisée en Espagne, dans les camps d’entraînement du Real Madrid. Ce type d’application peut aussi être utilisé sur les toits végétalisés des bâtiments, et c’est une solution durable qui améliore la qualité de l’air et apporte un plus grand confort thermique. « C’est une façon innovatrice de valoriser un produit recyclé et qui s’intègre parfaitement dans le concept d’économie circulaire », conclut Carlos Manuel.
AMORIM FLORESTAL :
Au commencement était le chêne-liège Toute innovation projette le présent dans le futur, et chez Amorim Florestal, demain se sème aujourd’hui. Lancé en 2013, le projet d’intervention forestière (PIF) est le pilier de l’innovation forestière de cette unité ; il est fondé sur la R et D afin que nous soyons sûrs d’avoir plus de liège, et de meilleure qualité. Doublement centré sur les domaines de la recherche scientifique et de la production forestière, cet ambitieux projet commence à donner ses premiers fruits, et intègre l’innovation et une vision de manière exemplaire. Tout commence par la matière première. Le liège est la base de toute cette industrie, pour cette raison, si l’on pense à l’avenir, il faut retourner aux origines : le chêneliège. Leader de cette industrie, la société Corticeira Amorim est celle qui en sait le plus au monde sur le liège. Notre défi pour les jours prochains est qu’elle soit celle qui contribue le plus au savoir sur le liège et à son développement. Toutes les étapes ANNÉE 37 / NUMÉRO 2
sont faites dans ce sens. Comme l’explique Francisco Carvalho, administrateur d’Amorim Florestal : « Nous sommes les leaders dans ce domaine. Je ne crois pas qu’une autre société possède à la fois notre taille, notre capacité financière et notre vision pour le faire ». Lancé en 2013, le projet d’intervention forestière a été conçu pour répondre aux défis posés par les facteurs biotiques et abiotiques dans les suberaies, et pour améliorer l’avenir du secteur du liège. Dans les grandes lignes, le but du PIF est, grâce à la recherche scientifique, de travailler sur le chêne-liège et sa biotechnologie de manière à ce que, à l’avenir, la production de liège puisse accompagner, que ce soit en termes de qualité et de quantité, la croissance prévisible du marché. L’objectif est de planter 50 000 hectares de chênes-lièges dans les dix prochaines années, une augmentation de 7 % de la surface de plantation, qui permettra une croissance de 35 % de la production de liège. Ce bond ne peut se faire sans l’innovation. Avant de concevoir le projet, les responsables de Corticeira Amorim ont analysé en profondeur le contexte afin de comprendre quels étaient les domaines dans lesquels il fallait le plus agir, et ce qui pouvait être fait à court, à moyen et à long terme. « Nous étions dans un contexte où le marché exigeait plus de liège et de meilleure qualité, et ce que nous tirions de la suberaie était l’inverse, en dégradation permanente, sur le plan qualitatif et quantitatif. Nous sommes allés sur le terrain pendant plusieurs mois pour connaitre et étudier différentes réalités, comprendre leurs dynamiques et identifier les surfaces où nous pourrions intervenir.»
Prendre soin du présent et construire l’avenir
Dès le début, il a été clair que la stratégie devait porter sur deux volets principaux : prendre soin du présent et construire l’avenir, en se basant sur la recherche scientifique et le transfert de connaissances. Nous avons rapidement établi des protocoles avec certains organismes universitaires et scientifiques, au Portugal (l’université d’Évora, l’université catholique portugaise et l’institut supérieur d’agronomie, entre autres) et à l’étranger (CSIC, Generalitat de Catalunya) dans le but d’approfondir notre savoir sur le chêne-liège, dans plusieurs domaines complémentaires. Parallèlement, le travail sur le terrain a commencé avec les producteurs forestiers afin de mettre en place et de tester de nouvelles méthodologies et de nouvelles approches, ainsi que d’injecter une nouvelle dynamique dans le secteur.
Le projet s’est déroulé en trois phases : la première, centrée sur la recherche et la biotechnologie pour produire du savoir sur la suberaie, le chêne-liège et ses ravageurs. La seconde phase a été de tester ce savoir et ce savoir-faire sur le terrain, dans les plantations de Corticeira Amorim et de ses partenaires. La troisième phase consiste à approfondir ce savoir et à le partager avec d’autres producteurs forestiers pour qu’ils plantent des suberaies plus vigoureuses et plus rentables, en utilisant les nouvelles technologies. Le raccourcissement du premier cycle d’extraction du liège était l’objectif le plus pressant. Grâce à des méthodologies innovatrices comme l’irrigation au goutte-à-goutte pendant une période initiale limitée et la mycorhization (association symbiotique du chêne-liège et d’un champignon qui le rend plus résistant et plus robuste), il a déjà été possible d’avancer la date de la première extraction. La densité des peuplements de chênes-lièges est l’un des autres points du calendrier à l’étude, ainsi que la séquençage du génome, l’amélioration du chêne-liège et la lutte contre les ravageurs et les maladies, comme le bupreste ; la recherche est réalisée sur le terrain, que ce soit sur de nouveaux peuplements, en surveillant des peuplements installés au début du PIF, ou sur des chênes-lièges adultes. Comme l’explique Nuno Ribeiro, professeur au département de phytotechnie de l’université d’Évora, nous travaillons actuellement sur des modèles mathématiques qui associent plusieurs facteurs et qui pourront devenir des outils précieux pour les producteurs forestiers.
Le côté magique d’une vision à long terme
Ce sont des étapes indispensables pour réaliser de grandes conquêtes. La stratégie est progressive et il y a toujours un laps de temps inévitable entre l’action et les résultats. Le fait que le chêne-liège soit un arbre à croissance lente pose des défis très particuliers. Il faut savoir attendre pour voir et mesurer les résultats. Le fait que Corticeira Amorim possède cette vision à long terme, avec des protocoles sur plusieurs années, est, selon Nuno Ribeiro, « le côté magique », car il permet aux scientifiques de travailler sur un horizon très confortable. Malgré le temps nécessaire, les progrès réalisés en seulement sept ans sont notables. Comme le projet Regagork, mis en œuvre en 2003, qui a permis une première extraction du liège vierge à 12 ans, ou la séquençage du génome du chêne-liège, réalisée par le consortium Genosuber. 17
« Pas de passion sans esprit de sacrifice » Pour raconter l’histoire de la famille Cardoso, nous devons remonter à ses origines. Il faut remonter la vallée du Douro jusqu’à Mesão Frio dans le district de Vila Real. C’est là qu’en 1970, lors d’une visite d’affaires dans la petite ville, José et Joaquim Amorim ont rencontré Manuel Pinto Cardoso et Ermelinda Lopes Manuel et Ermelinda « travaillaient dans les champs, pour des fermes qui vendaient du liège à Amorim ». José et Joaquim recherchaient du personnel de maison pour la ferme familiale de Meladas. C’est de cette façon que « l’accord » qui allait changer la vie des Cardoso pour toujours a été conclu. La même année, Manuel et Ermelinda ont quitté Mesão Frio avec « leurs plus jeunes enfants, pas encore en âge de travailler » : Fernando, Joaquim, António, Celestino et Francisco. Quatre autres enfants sont restés : Idalina, Alice, José Luís et José Manuel, mais ils les ont rejoints peu de temps après et dans cet ordre-là. On ne sait pas si cet accord était verbal ou écrit, mais il consistait à ce que la famille Cardoso s’installe à Meladas à la condition qu’ils puissent « faire venir leurs enfants mariés et célibataires » pour aller travailler dans les champs, « mais qu’ils aient du travail dans les entreprises de la famille Amorim ». C’est ainsi que ça a commencé. Au début des années 70, à l’exception de Celestino et Francisco, tous les fils de Manuel Cardoso et Ermelinda Lopes ainsi que leurs deux gendres Zé, le mari d’Alice, et Manuel, le mari d’Idalina, travaillaient dans les usines. L’un après l’autre, ils se sont presque tous retrouvés chez Corticeira Amorim, que l’on connait maintenant sous le nom de Amorim Cork Composites. Seulement Fernando et António sont restés dans l’unité des revêtements, qui porte aujourd’hui le nom de Amorim Cork Flooring. José Almeida, un des gendres de Manuel
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et Ermelinda, a travaillé chez Corticeira Amorim pendant 37 ans. « C’était le maître de la scie » et « également le cordonnier du personnel ». António Martins Pereira, l’autre gendre, a travaillé autant de temps à l’étape de trituration du liège. José Luís, un des fils les plus âgés, était au poste de « la presse BL2 et à l’époque, ils l’appelaient “la presse des blocs” ». Il est resté presque quatre décennies dans l’entreprise jusqu’à son départ en retraite. Son frère José Manuel, lui aussi ouvrier chez Corticeira Amorim, aujourd’hui âgé de 74 ans, a touché un peu à tout. « J’ai travaillé de l’entrée du site jusqu’au fin fond de l’usine. J’ai encore des amis qui s’y trouvent », raconte-t-il. Ce sont des amitiés d’un temps où “la mentalité et l’état d’esprit étaient complètement différents". « C’était une autre vie. On travaillait énormément. » Pourtant, « à la ferme, il y avait encore plus de travail », ajoute aussitôt José Manuel. « Nous avions 23 bœufs », dit-il avec fierté. Les Cardoso « travaillaient à l’usine et après leur journée de travail, ils se rendaient à la ferme ». Ermelinda et Manuel Cardoso, surnommé affectueusement « Monsieur Manuel de la ferme », n’avaient pas de salaire, mais ils profitaient de toutes les ressources de la ferme. « Ils pouvaient avoir autant de bétail qu’ils le voulaient » et ils gagnaient de l’argent par la vente d’animaux et de fruits. Ils y sont restés pendant « une dizaine d’années », mais en vieillissant, « ils ne pouvaient plus travailler dans les champs » et ils sont partis vivre chez leur fille Idalina, dans le quartier d’Amorim. À la ferme, il n’y a eu « que de bons
souvenirs », dit José Manuel en souriant. « Nous avons connu les enfants de Margarida, de Luzia, d’Américo… Ils sont tous allés là-bas et nous nous sommes occupés d’eux. » Laurinda, la femme de José Manuel, se rappelle que « c’étaient de bons moments, en particulier pour les enfants ».
Les souvenirs de la troisième génération
La famille Cardoso n’a jamais manqué d’enfants. Le clan des neuf enfants a donné naissance à de nombreux petits-enfants. Plus d’une dizaine de cousins Cardoso ont été élevés à la ferme de Meladas. Même si peu à peu, les Cardoso ont acheté « leurs maisons dans le quartier d’Amorim, les souvenirs les plus marquants sont ceux de la ferme de Meladas », affirme Luís Cardoso, fils de José Manuel. « On allait dormir à la maison, mais on passait la majorité de notre temps à la ferme », se rappelle-t-il. Dans le cas de Luís, cette affirmation était on ne peut plus vraie parce que 48 ans auparavant, c’est à cet endroit qu’il est né. « Il n’y avait plus le temps d’aller à l’hôpital d’Oleiros. » Teresa et Ana Paula, les filles d’Idalina Cardoso, sont très nostalgiques de leur enfance à la ferme. « On faisait tout, c’était la belle époque », se souvient Ana Paula. Teresa qui à 49 ans aujourd’hui, a de très bons souvenirs de cette époque. « On tirait les bœufs auxquels les charrettes étaient attachées et mon grand-père disait : “Tenez-les, ne bouge pas !” Et moi, je tenais la baguette dans ma main et ils restaient tranquilles.» De son côté, João Pedro, fils de 18
De gauche à droite : Teresa Cardoso, João Pedro Cardoso, Maria do Céu Cardoso, Isabel Cardoso, Ana Paula Cardoso et Luís Cardoso.
José Luís Cardoso, se souvient de sa grandmère « qui vendait des fruits » et « d’aller jouer au football sur un petit terrain pas loin ». Toutefois, Isabel, la fille d’Alice Cardoso, et Ivo, le fils de Fernando, n’en ont pas beaucoup de souvenirs. Ce sont deux des plus jeunes cousins. Si Isabel n’a pas beaucoup de souvenirs, Maria do Céu, sa sœur aînée, en a énormément. « J’en ai beaucoup de souvenirs ! Pendant les vacances scolaires, mon grand-père nous donnait une boîte de conserve et un bâton pour effrayer les oiseaux dans le champ de maïs.
Tininha, les excursions et les bals populaires
Bien que personne de la famille Amorim n’ait vécu dans la ferme, l’endroit « était un point de rassemblement ». Il y avait toujours beaucoup de monde. « Ils offraient la ferme aux colons », les « missionnaires ». « Tous les ans, des excursions étaient organisées pour les anciens. C’était à chaque fois des fêtes spectaculaires. Tininha mettait la ferme à disposition pour ces occasions. C’étaient des bals populaires… on s’en souvient encore. On participait à tout. » Tininha, de son prénom Albertina, était une des sœurs cadettes de la famille Amorim et une personne très appréciée par les Cardoso. « Avec Tininha, nous avons toujours eu une relation très proche lorsqu’elle était encore de ce monde », raconte Maria do Céu. « Nous avions une affection réciproque. », raconte Ana Paula. Parmi la dizaine de cousins Cardoso ayant grandi à la ferme, neuf ont fini par travailler chez Amorim ANNÉE 37 / NUMÉRO 2
Cork Composites (ACC). Aujourd’hui, sept y travaillent : Luís, Teresa, Ana Paula, Maria do Céu, Isabel, João Pedro et Ivo. Ils sont répartis sur l’ensemble des unités de l’usine. Maria do Céu est réceptionniste, mais au sein de l’entreprise, elle touche un peu à tout. Elle est entrée chez Amorim lorsqu’elle avait 17 ans et cela fait maintenant 32 ans qu’elle y travaille. « Autrefois, il n’y avait pas de femmes dans l’usine, les rares qui y travaillaient étaient des femmes d’un certain âge, elles faisaient cuire des sacs de granulés. Lorsqu’ils ont ouvert l’atelier des joints, c’est à partir ce moment-là qu’ils ont embauché des femmes. Nous étions considérées comme les petites nouvelles », se rappelle-t-elle avec nostalgie. C’est également dans l’atelier des joints que sa cousine Ana Paula a fait ses débuts. Aujourd’hui, elle s’occupe de « la fabrication de tableaux mémo ». Elle est arrivée chez ACC à l’âge de 19 ans « pour bénéficier de ses droits », elle a aujourd’hui 48 ans. « Tous les moments que je passe ici sont particuliers pour moi, j’aime ce que je fais et j’apprends tous les jours quelque chose de nouveau. » C’est dans cette même unité que nous avons rencontré Isabel et Teresa. Isabel est cheffe d’équipe de l’unité. Elle a 44 ans et cela fait 26 ans qu’elle travaille au sein du groupe. En ce qui concerne le travail avec des membres de sa famille, sa philosophie est la suivante : « Dans l’entreprise, il n’y a pas de cousins, d’oncles ou de tantes, il y a juste des collègues de travail ». Cela fait 32 ans que sa cousine Teresa travaille dans ce secteur de l’entreprise. « S’il y a un quelconque
problème, c’est à moi qu’ils viennent s’adresser. J’adore mon métier, c’est mon terrain de jeu. » Du côté masculin, nous avons rencontré Luís Cardoso, âgé de 46 ans. Cela fait 25 ans qu’il travaille chez ACC. Au cours de ce quart de siècle, il se souvient de quelques moments difficiles, comme en 2009. « C’est à ce moment-là que je suis devenu chef de production et qu’on a connu la fameuse crise financière mondiale. À cette période-là, j’embauchais à 6 h du matin et je débauchais tard le soir. » C’est pour cela qu’il croit que « la passion ne vient pas sans esprit de sacrifice ». João Pedro, 48 ans, a commencé à travailler chez ACC à l’âge de 14 ans. Il a quitté l’entreprise puis y est retourné en 1994. « J’étais dans les cylindres, puis je suis passé aux presses ; j’ai pratiquement travaillé dans toute l’usine et maintenant, je suis chauffeur. » Ivo est celui qui a le moins d’ancienneté dans l’usine. « J’ai 30 ans, je suis pratiquement d’une autre génération. » Il a démarré dans l’unité des revêtements, mais en 2005 il a rejoint le reste de la famille. Il travaille de nuit « dans l’atelier de laminage des blocs ». Ils s’accordent tous à dire qu’au cours des dernières décennies de travail, « beaucoup de choses ont changé » chez ACC. « La taille de l’usine », mentionne João Pedro et « la sécurité, qui a été de plus en plus renforcée », ajoute-t-il. Maria do Céu regrette le « sentiment d’unité » et la « complicité entre collègues ». « Cela restera à vie, ce sont beaucoup d’années passées dans la même entreprise », conclut Isabel.
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Taboadella : dans les vignes du Dão comme dans la vraie vie Racines romaines, tradition et futur. Des vins qui sont le reflet d’un lieu et qui puisent leur caractère dans des vignes ancestrales et une singularité propre. C’est dans la cave de Taboadella, au cœur de la région du Dão, qu’un nouveau projet vitivinicole d’excellence vient de voir le jour, le premier de la famille Amorim dans la région. 40 hectares de vignes, des sols granitiques pleins de caractère. Des vignes ancestrales, un héritage unique, l’essence d’une époque et d’un lieu. Une passion pour le vin, des connaissances, une audace et une volonté de créer un projet de référence dans une région vitivinicole très particulière — c’est la première région délimitée de vins tranquilles au Portugal et le berceau du cépage Touriga Nacional — productrice de vins au profil classique qui se conservent dans le temps. Voilà les ingrédients réunis par Luísa Amorim pour diriger Taboadella, le tout dernier projet vinicole du groupe et la première implantation de la famille Amorim dans la région du Dão. « Le Dão est pour nous l’une des régions les plus emblématiques et prometteuses du pays, berceau de grands vins au profil classique avec une immense longévité, un terroir unique qui ne montre pas seulement tout le potentiel du Touriga Nacional et de l’Encruzado, mais également d’autres cépages portugais traditionnels », souligne Luísa Amorim. Pour Taboadella, l’objectif consiste à « nous impliquer dans un nouveau projet d’excellence et de devenir une référence dans la région du Dão ». Avec le même objectif de produire des vins exceptionnels capables de révéler la culture et l’essence d’un lieu, le projet de Taboadella bénéficie de l’expérience acquise par le groupe avec la cave Quinta Nova de Nossa Senhora do Carmo dans la
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vallée du Douro : « Ce sont deux régions complètement différentes et nous avons décidé de nous implanter dans la région du Dão avec un tout nouveau projet. La grande différence, c’est que nous bénéficions déjà de 20 ans d’expérience. C’est ce savoir-faire et cette expertise que nous pouvons mettre à profit ici », explique Luísa Amorim. Taboadella est un projet vinicole d’exception qui comprend également une dimension œnotouristique. Dans la maison du vin, construite dans l’ancienne grange, il est possible de prendre rendez-vous pour visiter la cave, effectuer une dégustation et acheter des vins au prix du producteur ainsi que quelques produits gastronomiques de la région. En 2021, Villae 1255, un manoir typique du Dão avec juste huit chambres et dont l’intérieur a été décoré par Ana Vale, sera prêt.
Des vins d’altitude qui respirent la fraicheur, la légèreté et la transparence
Taboadella bénéficie d’un domaine continu de 40 hectares de vignes, marqué par un plateau triangulaire qui atteint entre 400 et 530 m d’altitude. Tout comme d’autres terroirs de grandes régions vitivinicoles dans le monde, Taboadella profite d’une interaction entre le sous-sol granitique et la topographie de l’endroit. Pendant les mois d’été, les températures élevées dans le domaine de Taboadella, un peu plus élevées que dans le reste du Dão,
combinées au drainage (une « sécheresse » de l’eau des pluies grâce à l’inclinaison des coteaux) et à la fraicheur du sol permettent une maturation lente et homogène des grappes à l’origine de grands vins. Les vignes traditionnelles ne sont pas arrosées, perpétuant ainsi la qualité ancestrale et la singularité des 25 parcelles avec une production intégrée, caractérisées par une densité moyenne de 3 500 pieds de vigne par hectare. Ce terroir exceptionnel permet de produire des vins d’altitude qui respirent la fraicheur, la légèreté et la transparence et qui expriment toute l’élégance du Dão. C’est de ces sols granitiques, légers et perméables, mais débordants d’énergie que naissent des vins de caractère. Les Villae sont des vins d’assemblage sans bois, à la fois intenses et délicatement parfumés. Produits à partir de cépages classiques (à chair blanche, l’Encruzado, et à chair rouge, le Mencia, l’Alfrocheiro et le Touriga Nacional), ces cuvées de réserve monocépages révèlent véritablement leur origine grâce à des vins uniques et personnalisés. Les cuvées Grande Villae sont l’expression ultime de l’âme romaine de Taboadella, un hommage à son savoirfaire ancestral.
Âme romaine
Les grands vins naissent dans des lieux uniques et Taboadella ne fait pas exception à la règle. Ici, le vignoble et les vins ont 20
des racines ancestrales et une dimension culturelle très forte. « J’ai ressenti quelque chose de particulier lorsque je suis arrivée ici et que j’ai vu cette roche monolithique dont on m’a expliqué plus tard qu’il s’agissait d’un pressoir romain, apparemment de nature rocheuse et qui, selon les spécialistes, est l’une des plus anciennes traces de l’activité vinicole dans le Dão », explique Luísa Amorim. « Chez ANNÉE 37 / NUMÉRO 2
Taboadella, nous ressentons l’âme de ce lieu, de ceux qui y sont passés et y ont laissé un héritage, comme si c’était un chemin déjà parcouru. Dans ce domaine, cet environnement incomparable se ressent chaque jour et en vérité, c’est ce qui nous inspire réellement. » Taboadella a pour héritage une villa romaine avec un cadre unique auprès de la Ribeira das Fontainhas, une propriété de la classe supérieure rurale composée d’une maison, d’une cave, d’une grange et d’autres petits bâtiments. Plus tard, à l’époque médiévale, les traces historiques de Taboadella remontent à 1255 avec les maisons de la propriété confortablement situées dans une forêt de pins, de chênes et de châtaigniers et entourées d’un jardin centenaire qui s’étend jusqu’aux parcelles de vigne. C’est à partir de cet héritage qu’un projet pour le futur mettant à l’honneur le meilleur de l’œnologie contemporaine a vu le jour. La cave, conçue par le célèbre architecte Carlos Castanheira, présente une conception simple et fonctionnelle avec deux bâtiments interconnectés — d’un côté, la salle où les fûts sont entreposés et de l’autre, la salle où se déroule la vinification par gravité — et qui s’étendent sur une superficie de 2 500 m2 et parfaitement encadrés dans le plateau forestier. Les matériaux choisis — le bois et le liège — sont un hommage à la nature, d’où proviennent le vin et les bouchons, et s’intègrent parfaitement dans l’ensemble et dans la continuité. Par ailleurs, l’aspect doré de la structure en bois et le revêtement en liège ont un caractère écologique et durable.
Œnologie de précision
C’est dans cette cave, par gravité, qu’une œnologie de précision est élaborée, digne des meilleures pratiques vinicoles mondiales. La vedette de la cave est l’égrappoir/pressoir Pellenc qui, au moyen d’une vibration mécanique, permet de retirer la quantité de pépins souhaitée avec pour objectif de vinifier les vins et de leur donner plus de douceur en neutralisant les tanins trop agressifs. Cet appareil, doté d’un pressoir centrifuge, contrôle l’intensité de l’égrappage en fonction de la taille des grains afin d’écarter ceux qui sont trop secs et verts et qui ne sont pas assez bons pour une maturation de qualité. Autre nouveauté de la cave : les 11 cuves en béton qui permettent de développer des notes florales et des textures plus fines et plus profondes. « C’est une cave qui s’inscrit dans le XXIe siècle, une cave de pointe qui nous permet d’utiliser la technologie dans le bon sens, avec une sélection rigoureuse et une vinification par gravité », explique Luísa Amorim. Les visiteurs de Taboadella peuvent découvrir une partie de ce processus en marchant sur une passerelle située en hauteur dans la salle des fûts dont la capacité permet d’accueillir jusqu’à 500 fûts de chêne français. À l’image d’une sculpture en suspension, le Barrel Top Walk est une œuvre architecturale innovante qui permet de découvrir l’environnement dans lequel le vin vieillit en interagissant avec l’espace de manière naturelle et authentique et en respectant la structure et la grandeur des vins, qui leur conférent leur propre caractère avec l’effet du temps. Une vision unique et contemplative d’un projet singulier. 21
Maison de retraite António Ferreira Amorim À Santa Maria de Lamas en début d’année, l’inauguration de l’établissement d’hébergement pour personnes âgées António Ferreira Amorim a été célébrée. L’association Bem-Estar est l’organisation caritative responsable du projet. Le bâtiment récemment inauguré a reçu ce nom en guise de remerciement envers Corticeira Amorim, pour son aide au travers de la fondation Albertina Ferreira de Amorim, et António Ferreira Amorim pour son aide à titre personnel. L’établissement d’hébergement pour personnes âgées António Ferreira Amorim dispose de 41 chambres pour ses résidents et, en outre, il peut également accueillir 35 personnes âgées dans le cadre d’un centre de jour. Au-delà de l’aide apportée par Corticeira Amorim et António Ferreira Amorim, le projet de l’association BemEstar qui a reçu plus de 2,6 millions d’euros d’investissements a également pu bénéficier du soutien de la mairie de Santa Maria da Feira.
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Bagos d’Ouro fête son 10e anniversaire L’association Bagos d’Ouro a eu dix ans et continue sa mission qui est de favoriser l’éducation des enfants et des jeunes en difficulté dans le Douro. Dix années d’engagement, de travail et d’intervention sur le terrain, dans une stratégie de proximité, a semé des rêves et des opportunités, là où ils faisaient défaut. L’éducation est « l’arme la plus puissante pour changer le monde » et c’est le principe de base de cette association sans but lucratif qui réalise un travail extraordinaire dans une des plus belles et des plus célèbres régions du Portugal, mais qui est aussi l’une des plus pauvres : le Douro. Créée en 2010 à l’initiative de Luisa Amorim et du père Amadeu Castro, cette association de solidarité sociale, exclusivement privée, a apporté son aide à plus de 100 familles dans six cantons du Douro, et a suivi les enfants les plus vulnérables d’une des régions les plus pauvres de l’UE, tout au long de leur parcours scolaire, jusqu’à ce qu’ils entrent dans la vie active. Comme l’explique Luisa Amorim, le rôle de Bagos d’Ouro est de « donner une chance à l’intérieur de la famille », et d’inverser le cycle de la pauvreté et de l’exclusion sociale. L’équipe fixe de l’association travaille chaque jour sur le terrain, selon une stratégie de proximité qui offre à chaque enfant, à partir de six ans jusqu’à sa majorité, un suivi personnalisé. L’équipe fonctionne
comme « un parrain ou une marraine à distance », et travaille avec des enfants, des jeunes, des familles et des enseignants pour créer les conditions et l’harmonie nécessaires à leur développement. Les solutions sont étudiées ensemble et passent par des choses apparemment aussi simple, que de fournir un cartable, des lunettes ou du soutien scolaire, puis de trouver un premier stage. Dans le contexte de la COVID, Bagos d’Ouro s’est mobilisée pour trouver des ordinateurs pour que tous les enfants puissent avoir accès à l’enseignement non présentiel, dans des conditions égalitaires. C’est ce parti-pris de valorisation de chaque enfant, où tous sont responsabilisés et invités à intervenir dans la définition des objectifs annuels et du travail nécessaire pour les atteindre (les engagements Bagos d’Ouro), qui permet de développer le potentiel unique de chacun et d’atteindre des résultats très positifs, tels que 89 % de non-redoublements, 84 % d’engagements Bagos d’Ouro respectés et 64 % de réussite scolaire, parfois très bonne ou exceptionnelle (les chiffres sont de 2019). Les chiffres ne sont qu’une manière de quantifier l’impact d’un projet qui transforme et est capable de changer des vies. Le rêve « d’un Douro plus équilibré, plus égalitaire et, surtout, plus inclusif » a motivé la création de l’association, est maintenant plus près de la réalité. 22
150 ans : troisième acte
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