table des matières
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EDITORIAL
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ARTICLE DE FOND: BAYELSA NIGERIA
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l’architecture au Costa Rica
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LITTLE SUN
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retourner à LAGOS 2042
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pictres Déménagement
Par Tuuli Saarela, Editeur de ArchiAfrika Magazine
Coin du Président
Par Joe Osae -Addo , président de la Fondation ArchiAfrika
- Interview par Cyril Akika, Conseiller spécial du Gouverneur pour l’ Investissement. - An Interview with Costa Rican Architect Marianella Jimenez Calderon
- ArchiAfrika s’ associe avec Little Sun pour promouvoir l’ energie
- Une diaspora nigériane retourne à la maison en 2042 pour retrouver sa ville a changé Par Godson Egbo
- Une série de Voyage sur les espaces urbains à Kampala et à Johannesburg
Crédit photo: Nii Obodai Provencal 2
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AiD événements
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ARCHITECTURE ET SON AVENIR
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REPENSER LA BANQUE DE CONCEPTION
- Un événement de l’aide sur la collaboration intergénérationnel avec des musiciens ghanéens Edem et Pat Thomas - Réseau éducation qu’ArchiAfrika série de conférences 101 avec Ben van Berkel
-Une conception de l’architecture projet étudiant studio Par Peter Odoh
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DURABLE LOGEMENT À FAIBLE COÛT
Changer les mentalités dans l’approche de gouvernement Low Cost ensembles de logements par Mary Anne gendarme-
Art & Architecture au travail
-Mobilisation pour le développement urbain inclusif Par Kathleen Louw, Palais des Beaux-Arts de Bruxelles (BOZAR)
football pour centre de l’espoir - An Interview with Wahab Musah of NGO Play Soccer Ghana
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EDITORIAL La publication de ce numéro d’ArchiAfrika est tardive. L’idée originelle était de le sortir avant la conférence “Perspectives Africaines”. Cependant la conférence a été annulée au dernier moment et ce numéro fut donc mis en attente.
L’accent est mis, dans ce numéro, sur notre pays hôte, le Nigéria ; avec un point central sur l’état du Bayelsa, où nous avons eu la rare chance d’interviewer le Gouverneur du Bayelsa State, l’Honorable Henry Dickson et son équipe de conseillers, sur les opportunités et les défis à relever pour le développement de leur état pétrolier. Nous avons trouvé, également au Nigéria, une perspective futuristique pour la ville de Lagos, à travers le récit-fiction de Godson Egbo, sur son retour dans sa ville natale, en 2042. Lisez cette histoire et imaginer à quoi pourrait ressembler la ville dans le futur. Nous avons également regardé plus loin dans ce numéro, à travers les voyages de notre président Joe Osae-Addo au Kathmandu au Nepal où il rencontra quelques incidents diplomatiques. Il serait donc apparemment l’un des premiers ghanéens à avoir visité le Népal ! Nous avons également interviewé Marianella Calderon du Costa Rica, qui est la seule femme membre de l’association des Architectes et Ingénieurs de son pays. Comment, pouvons-nous, en tant qu’africains comparer nos expériences et quelles leçons pouvons-nous en tirer? Les activités de notre organisation ArchiAfrika sont également mises à l’honneur à travers quelques unes de nos histoires, dont un reportage sur notre série Adventurer in Diaspora à Accra et sur la série de conférences récemment données par Ben van Berkel pour 600 étudiants de EiABC (Ethopie), Central University (Ghana) et KNUST 4
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(Ghana) dans le cadre de notre réseau ArchiAfrika Educational Network. Nous sommes également fiers de vous présenter les lampes solaires Little Sun conçues et dessinées par Oliafor Eliasson en tant que récent partenaire d’ArchiAfrika ! Dans ce numéro, nous vous présentons également des projets qui nous intéressent, de la nouvelle approche de Mary Ann Constable à propos des HLM du gouvernement de Cape Town à la passion de Wahab Musah pour le football au centre Football for Hope FIFA de Cape Coast. Nous vous présentons également le projet d’étudiant de Peter Odoh du Nigéria, qui releva le défi de repenser la design des banques. Pour finir, nous vous présentons l’initiative récente de BOZAR à Kampala en Ouganda, à travers le regard de Kathleen Louwt, dont le projet est de mobiliser les groupes à travers le continent et audelà pour définir un modèle de développement urbain inclusif en Afrique. J’espère que vous apprécierez ce numéro. Encouragez nous en nous envoyant vos suggestions d’articles et vos idées pour le prochain numéro !
Bien à vous, Tuuli Saarela Rédacteur en chef de ArchiAfrika Magazine
PARTNERS DOEN Culture L’objectif de ce site est de promouvoir et de rapprocher nos partenaires et de rassembler des récits de changements significatifs engendrés par leurs activités culturelles. La DOEN pense qu’une société créative, dotée d’une conscience environnementale et sociale est possible. Le monde est plein d’entrepreneurs engagés prêts à développer des initiatives culturelles et sociales durables, d’individus n’ayant pas peur de prendre des risques tout en mettant leur idées novatrices en pratique, d’individus qui inspirent ceux qui les entourent! La DOEN offre à ces personnes un soutien financier et les rapproche les uns des autres.
Fondée sur le principle que la culture est un besoin fondamental, la mission de la Fondation Prince Claus est de rechercher activement des collaborations culturelles sur une base d’ egalité et de confiance avec des partenaires d’excellence dans des régions ou les moyens et les possibilites d’expression culurelles, de recherche et de production dans le domaine de la création sont limités, et le patrimoine culturel menacé. La Fondation Prince Claus la siége se trouve a Amsteram est financée par le ministére des Affaires étrangéres et la Loterie nationale du code postal des Pays-Bas.
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Coin du Président L’année 2014 a été, jusqu’à ici, l’année des voyages et de l’aventure. Bayesla State, Nigéria à plusieurs reprises. Segou et Bamako, Amsterdam, Bruxelles, Durban et maintenant Katmandu. Mais ne soyons pas trop idyllique, l’Afrique reste encore un endroit où les drames de l’existence font foison. Mais nous l’aimons toujours autant ! Toutes ces visites ont eu lieu à l’occasion de réunions et de conférences sur le développement culturel et l’architecture. ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Le dénominateur commun de tous ces lieux reste leur évidente beauté et leur caractère unique mais je dois avouer (sans vouloir heurter quiconque) que mes endroits préférés sont Ségou et Katmandu. Mes amis hollandais, belges, nigérians et sud-africains, s’il vous plait, continuez de m’inviter. Je vous aime tous toujours autant. Segou m’a frappé visuellement et émotionnellement. La rivière puissante et sensuelle du Niger traversant la ville, avec des autochtones de l’allure la plus élégante. Des femmes drapées dans leur merveilleux pagne de coton, avec maintien et détermination, une caractéristique unique de l’Afrique de l’Ouest francophone très visible au festival. Mes hôtes Mahmadou et son équipe étaient les meilleurs. Merci Beaucoup! 8
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NEt puis Katmandou, où j’assistais début mai à la réunion des partenaires du PCF.
Me rendre au Népal a déjà été tout une histoire, étant donné que je suis le seul ghanéen ayant demandé un visa depuis dix ans. Oui ! Ce fut presque un incident international, tandis que mes hôtes Khanak et son équipe travaillèrent sans relâche pour rendre possible ce voyage.
Légende de la photo: Joe Addo with Prince Claus Fund partners in Kathmandu
Quelque que soit ce qui s’est passé lors du mouvement des pays non-alignés lancé par les grands leaders de notre temps tel que Nehru, Nkrumah, etc, ce genre de problèmes n’aurait jamais du arriver ! Katmandu, à ma grande surprise, est une ville animée, de plus de 2 millions d’habitants, et extrêmement contemporaine. Je ne sais pas ce que j’imaginais ; j’avais sans doute une vision plus idéalisée et romantique, que j’ai certainement créé en confondant le Népal avec le Tibet. Une telle ignorance est totalement inacceptable mais j’ai découvert peu après que la plupart de mes amis les plus cultivés s’étaient fait la même vision que moi. « Ce n’est pas seulement moi qui me suis fait trop influencé par les bandes dessinées comme Tintin au Tibet », pensais-
je. Cet endroit me rappelle Accra, en fait. Oui, Accra !! C’est surtout la sensation, l’énergie et l’âme de Katmandu. Tout se passe au niveau de ses habitants, assez spéciaux en faites. J’en ai rencontré un specimen : Kashish Das Shrestla, un jeune photographe/entrepreneur, qui gère le nouveau Musée de la ville. J’ai l’honneur de partager quelques bribes de notre conversation avec vous tous. Je dois en profiter pour remercier la fondation Prince Claus qui a financé la plateforme Creative Force de ArchiAfrika pour organiser cette réunion extraordinaire de partenaires afin de partager nos idées et nos visions. Je remercie également les organisateurs qui étaient au Népal avec nous, Christa, Emma, Bertam, Sarita et Laxmu, un merci spécial à vous ! ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Parlez moi de votre parcours. Êtes-vous de la diaspora, avez-vous quitté le Népal pour y revenir ou êtes-vous resté au Népal tout ce temps ? J’ai quitté le Népal et j’y suis revenu. Je fais des allers-retours à New York depuis Janvier 2003. Aujourd’hui, je suis résident de l’état de New-York et je suis citoyen du Népal. Et j’adore le fait de vivre entre deux mondes, parce que c’est probablement ce qui me permet de faire ça. Autrement, je pense que si on vit uniquement dans sa bulle quelque soit le pays dans lequel on est, alors on est seulement dans cette bulle. Mais là, je change en permanence ma vision du monde et mes réalités. Même si je vivais et travaillais à New York, je revenais au Népal au moins une fois, si ce n’est deux à trois fois par an. Ce que faisais, c’est que je photographiais la Fashion Week de New York à New York et puis j’utilisais cet argent pour faire mes recherches sur l’environnement au Népal pendant quelques mois, puis j’étais à nouveau à cours d’argent, alors c’était le moment idéal pour faire mes bagages et revenir à New York pour photographier la saison d’automne.
Mais vous voyez, la technologie nous permet de faire ça en tant que membres de la diaspora et d’avoir ces connections entre nous. Je pense que c’est comme ça que se dessine le futur et nous devons l’exploiter correctement. Au Ghana/en Afrique, il y a des gens qui ont de très bonnes idées, mais je crois qu’il s’agit de bien contextualiser nos influences en étant à l’étranger, ce qui manque un peu en ce moment. Et ce que vous avez fait, en faites ! Parce que quand je parle de ce qui manque, il s’agit surtout de projets tangibles. C’est ce qui nous manque. Comment faites vous pour intégrer toutes ces expériences fantastiques dans quelque chose que les gens peuvent expérimenter réellement et physiquement ? On ne peut pas continuer à dire qu’il n’y a rien à Katmandu, et repartir l’été à New York et s’amuser. Non. Qui ne fait rien, n’a rien. Nous sommes toujours très doués pour pointer du doigt les problèmes, les fautes, les erreurs, ce qu’il nous manque et pour dire que ça ou ça aurait dû être fait, mais par contre nous sommes assez nuls pour dire ce que nous avons réellement fait.
On fait des blagues à ce sujet sur le continent. En Afrique, c’est typiquement africain. 10
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Mais je pense que c’est peut-être culturel. Cet aspect culturel transcende les frontières. Il y a un truc avec l’Asie du Sud et du Sud-Est, l’Afrique, l’Amérique du sud et les Caraïbes, qui pourrait être dû au climat ou à quelque chose d’autre qui nous incite à avoir une position à peu près similaire face à notre environnement, à l’humanité, à la politique et à l’économie. J’ai ressenti ça quand je suis arrivée au Nepal, à Katmandu, il y a quelques jours. Je me suis senti comme à la maison, il y avait une sorte de similitude avec ce que je vivais qui pouvait être superficielle, mais intuitivement, je me sentais comme à la maison.
Cette énergie, on sait ce que c’est. On ne peut pas l’expliquer, mais on sait exactement quoi en attendre et comment les choses vont se passer ici, parce que nos mondes se ressemblent d’une certaine manière. On en parlait la nuit dernière de chaos organisé, par exemple, on sait parfaitement manœuvrer dans une circulation et des trottoirs de ce genre. Avez vous déjà travaillé en Afrique ? Pas encore, non malheureusement. C’est un continent qui m’a toujours fasciné depuis que je suis enfant parce que j’ai eu la chance de grandir avec un tas de numéros du National Geographic et de Herald Tribunes International, donc j’ai toujours eu ça en tête, mais je n’ai jamais eu l’occasion d’y voyager ou d’y travailler. Donc j’espère que ça viendra tôt ou tard. Vous savez une des pistes que nous n’explorons pas assez en tant que créatifs, c’est ce que j’appelle l’artisanat et les arts traditionnels. Je crois que pour des économies émergentes comme celle de l’Afrique ou de l’Asie, l’artisanat
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CrĂŠdit photo: Joe Addo ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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est quelque chose que nous devrions commercialiser, comme l’art. Donc une des choses sur lesquelles j’aimerais beaucoup travailler avec vous, c’est réfléchir à un moyen d’emmener en Afrique des tisserands de bamboo par exemple, ou des fabricants d’objets en jonc, des menuisiers, des fabricants de briques, des ouvriers et fabricants de métal. Au Ghana nous perdons toutes ces compétences. Quand je regarde autour de moi, tout est construit en briques, mais nous ne fabriquons pas de briques alors que nous avons cette argile. Nous n’en fabriquons pas parce que nous n’avons pas les artisans compétents qui peuvent lancer une usine de fabrication de briques ou tout simplement commencer à fabriquer des briques par eux-mêmes. Donc j’aimerais bien que vous et notre organisation, nous puissions explorer le monde des arts traditionnels et précieux, pour repérer ces origines pures et les bases de l’artisanat. Je pense que c’est ça qui nous manque.
mettent parce qu’il y a un réel besoin pour ça. Le côté effrayant de tout ça est que le dernier tremblement de terre a eu lieu il y a environ 10 ans donc nous attendons le prochain qui peut arriver à tout moment. Vous avez vu une partie de la ville et la façon dont s’est organisé, le plan d’urbanisation et d’architecture est insensé. Nous avons construit tout cet immobilier depuis dix ans et durant ces dix années, nous avons oublié qu’un tremblement de terre nous pendait au nez. Comment pouvons nous oublier que Katmandu est une des villes les plus vulnérables au tremblement de terre ? Je crois que c’est même la plus vulnérable. Bref, nous verrons comment ça se passera.
Oui c’est intéressant, nous organisons un événement du 1er au 3 juin, où nous avons invité un groupe de tisserands traditionnels de la communauté des Taponi dans le Sud. Nous exposerons ici dans la galerie le procédé qu’ils utilisent pour fabriquer ces immenses matelas avec de l’herbe à éléphant. Donc ils utiliseront de l’herbe à éléphants pour fabriquer ces grands matelas et nous les vendrons au détail. C’est vraiment intéressant que vous ayez repéré ce type d’artisanat.
Tout à fait. Il y a aussi ce petit débat à Katmandu sur le fait de savoir si c’est une bonne ou une mauvaise chose d’avoir commercialisé ce genre d’artisanat. Comme pour l’art Thangka, qui est l’art tibétain le plus ancien, il n’y a plus autant de dévouement pour le pratiquer, il s’agit uniquement de business, ainsi que pour la gravure sur bois et sur pierre, c’est uniquement du business aussi. Personnellement, je pense que c’est bien, parce que je suis pragmatique, c’est une façon de maintenir vivant l’artisanat
‘Nous avons ce concept que nous appelons patrimoine vivant, parce que chaque siècle, nous subissons un gros tremblement de terre et il y a donc une raison pour laquelle nous nous transmettons ça, génération après génération.’
Absolument, parce que les gens ont tendance à romantiser l’artisanat. Il doit y avoir cette transition entre artisanat et l’entreprise commerciale, et son application doit être commercialisée pour produire en masse. Donc je ne vois pas du tout ce qu’il y a de conflictuel. On est toujours forcé de choisir, c’est tout ou rien. En ce qui concerne la culture, je le vois clairement partout autour de moi, et la culture contemporaine telle que nous la connaissons n’est pas statique, elle est organique et en évolution. Il ne s’agit pas seulement de traditions mais aussi d’autres influences. Comment cela façonne votre vision du monde
Ces cent dernières années, nous avons eu à reconstruire encore et encore, donc dans la même famille d’artisans qui a construit le temple il y a 500 ans, les traditions de construction se trans12
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Cependant, cette instabilité n’a-t-elle pas généré cette sorte de régularité enracinée et extraordinaire dans l’artisanat? N’est-ce pas la dichotomie de tout ça? La nécessité et la fonction, n’est ce pas?
LĂŠgende de la photo: The City Museum in Kathmandu. Credit: Joe Addo ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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et comment êtes vous impliqué dans la communauté créative ici et à New york ? J’ai eu la chance de grandir au milieu de la photographie. C’était en moi, avant même que je m’en rende compte. Mes parents collectionnaient les œuvres d’art pendant mon enfance, donc je voyais aussi beaucoup d’art. Je savais que si j’irais en Amérique, j’irai à New York et à San Francisco. Ça, c’est entièrement dû à la pop-culture américaine. Longtemps avant que je parte en Amérique du Nord, j’étais extrêmement attiré par cette culture, uniquement parce que j’ai grandis à l’époque de la Télé par satellite et de l’internet florissant. Ma famille a eu la télé par satellite en 1993 et internet en 1994. Et je suis parti à New York en 2003, donc c’était pratiquement comme si j’avais déjà vécu là-bas. C’est vrai, c’est la même chose pour moi. On a grandi avec la musique et les films, les magazines et les publications. Exactement, et mon père avait l’enregistrement sur cassette de Woodstock 1969. Il l’avait acheté à Bangkok et je regardai ça inlassablement. Cela a façonné pour beaucoup ma vision du monde. Cette littérature des années 50 et 60, cette idée de parcourir le monde est toujours actuelle. L’art contemporain qui m’a réellement influencé est la culture pop et le pop art de la fin des années 50 et 60.
C’est l’avantage de naviguer entre plusieurs mondes et plusieurs cultures. La question qui me vient automatiquement à l’esprit, c’est que nous avons un art extraordinaire dans ce pays alors pourquoi n’avons nous pas de lieux pour ça ? Pourquoi pas au Népal ? Pourquoi devons nous aller dans un pays industrialisé et accepter le fait qu’ils soient les seuls à pouvoir faire ça. 14
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LĂŠgende de la photo: Joe Addo with Kashish Das Shrethra of Kathmandu City Museum ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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C’est la même question quand je construis une galerie où les gens peuvent venir. Ca devrait être simplement une galerie et non une galerie à Kathmandu. J’aimerais entendre comment Katmandou a changé. Sont les artistes influencent et susciter le changement dans la société et dans l’identité du peuple népalais? Pas encore, mais je pense que cette génération y arrivera et je vais vous dire pourquoi. Entre 1996 et 2006, le pays était en guerre civile. Donc pendant ce temps, une génération entière a grandi plus vite que prévu. Il y a eu tellement de gens tués et enlevés. Chaque matin, ils se réveillaient et voyaient dans les journaux encore plus de gens tués dans une nouvelle embuscade, et ça s’est passé pendant 8 à 10 ans.
‘Donc il y a une génération entière qui a grandit avec cette violence à proximité, mais en restant complètement détachée. La mort et la guerre était dans les journaux du Kathmandu, dans les maisons du Kathmandu, chaque jour.’
Crédit photo: Joe Addo
Presque chaque jour, 15 à 20 personnes étaient tuées. Ces enfants qui avaient environ 8 ans en 1996, ont passé les 8 à 10 années suivantes à vivre ça. Les écoles étaient fermées par des groupes armés : soudainement, un groupe armé se présentait dans les écoles, attaquait les professeurs, brûlait les bus. Notre génération a traversé ça et je pense qu’elle commence doucement à s’exprimer là-dessus de différentes manières. L’une d’elle est de quitter le pays pour aller trouver un meilleur monde ailleurs. D’autres s’expriment à travers la musique, la peinture, et l’écriture sur des morceaux de papier. Il se passe donc beaucoup de choses ici. Je pense qu’on commence à le voir petit à petit, vous savez. ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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‘Il y a des artistes qui travaillent sur le changement climatique et ses conséquences au Népal, il y a des artistes qui font des créations à propos de la politique du Népal, de l’ethnique politique du Népal. Il y a beaucoup de performances qui voient le jour, donc nous y arriverons, je pense qu’à priori nous y arriverons. Je ne vais pas dire « à priori », j’enlève ce mot, nous y sommes déjà et la création a déjà commencé et ça va continuer de plus en plus fort. Ce n’est qu’une question de temps, et ce n’est rien d’autre que la honte qui empêchera les décideurs d’écouter ces cris.’
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CrĂŠdit photo: Joe Addo ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Interview par
Cyril Akika Conseiller spécial du Gouverneur pour l’Investissement. Gouverneur d’Etat du Bayelsa
Interview de Henry Seriake Dickson
La production massive de pétrole a généré à la fois du développement mais aussi des problèmes à résoudre pour l’état du Bayelsa. Pouvez-vous nous dire comment vous avez pu équilibré votre programme de développement entre ces deux énergies qui s’opposent ? ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Du point de vue du gouvernement, la production massive de pétrole dans Bayelsa State a généré plus de problèmes que de développement. Cela s’explique par la façon dont le Nigéria est structuré actuellement ; toute la production du secteur de l’exploitation pétrolière est enregistrée au gouvernement fédéral et pas forcément au gouvernement de l’état ou dans la collectivité où le pétrole a été produit. Quand les compagnies de pétrole viennent à Bayelsa, elles installent un magasin, des puits de forage ; quand le pétrole est extrait des puits, tous les revenus sont censés revenir au gouvernement fédéral et au gouvernement local. En dépit de la centralisation, des fonds sont alloués pour l’état où le pétrole est produit. Pour des états producteurs de pétrole comme Bayelsa, on partage 13 % du montant des revenus générés par les puits de Bayelsa en fonds de dérivation.
‘Si on évalue le pourcentage du revenu des activités pétrolières qui revient à Bayelsa, on peut dire que c’est presque négligeable comparé à l’impact de la production en elle-même sur l’environnement et la communauté située aux alentours des installations de production.C’est pour ces raisons que nous pensons que les problèmes sont plus importants que le développement. Le développement donc la collectivité est censée profiter, n’a pas vraiment d’impact sur les gens.’ 22
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Vous ne verrez pas de nouvelle ville ou de nouvelles usines construites grâce aux activités pétrolières, tout ce que vous verrez, c’est des puits de pétrole. Et pendant ce temps, les services d’assistances qui sont censées accompagner les puits de pétrole n’ont même pas leur siège dans ces collectivités, mais à Port Harcourt, Lagos ou Abuja. Vous comprenez pourquoi les problèmes à résoudre nous paraissent plus important que le développement. Lorsqu’il y a une explosion dans n’importe quel puits, cela affecte immédiatement une collectivité. Les autorités officielles censées gérer ce genre de situation sont en faites des agences nationales et internationales, sur lesquelles l’état n’a aucun contrôle et donc aucun droit de légiférer quand ces événements dramatiques arrivent. Le nettoyage de l’épandage du pétrole, par exemple, n’est pas le rôle du gouvernement d’état, mais celui du gouvernement fédéral. Donc le gouvernement d’état devra demander la permission au gouvernement fédéral pour faire quelque chose pour l’assainissement de l’environnement. Il y a des cours d’eau sur le territoire de l’état qui ne sont pas contrôlés par l’état, mais qui sont gérés par les Autorités fédérales qui sont supposés contrôler et gérer les cours d’eau intérieurs dans le pays. Ce type de structure dans le pays créée parfois des limites ou des problèmes de connexion. Mais la production continue, les gens vivent sur place où il y a un gouvernement d’état, et au final, la plupart des activités pétrolières sont légiférées par le gouvernement fédéral. On ne voit aucune action immédiate lorsqu’un événement dramatique survient et demande une intervention rapide. Alors, nous essayons de gérer ça à la manière d’un gouvernement en nous impliquant activement dans le processus de production. Nous voulons que l’état, les gens et la collectivité soient directement impliqués dans les activités pétrolières. De grandes entreprises multi-
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Photo credit: www.cometonigeria.com CrĂŠdit photo: ndlink.org ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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nationales ont des projets de cession d’actifs auxquels l’Etat du Bayelsa prendra part. Par exemple, l’état du Bayelsa a monté une entreprise de pétrole et a signé des accords avec des partenaires pour proposer une offre de rachat des parts qui seront cédées par les multinationales.
de pétrole brut a été creusé au Nigéria, dans l’état du Bayelsa en 1956. L’Etat du Bayelsa n’a commencé à exister qu’en 1996 durant la période militaire. A l’époque de sa création, il n’y avait pas de programme de développement et la production de pétrole avait déjà commencé. Durant cette période, chaque plan lancé, généralement par l’administration militaire était des plans à court terme qui ne duraient pas plus d’un an. Le financement venait uniquement du gouvernement fédéral était utilisé pour le développement de l’état sur un an. C’est comme ça que c’était structuré avant l’arrivée de la démocratie en 1999. Par la suite, les gouvernement successifs élus démocratiquement essayèrent de lancer un programme pour l’état.
De cette façon, nous pensons que l’état peut devenir gestionnaire d’une part des actifs et ainsi contrôler les revenus qui viennent de la production de ces installations. Mais ce qui compte le plus, c’est que nous L’impact de la production de pétrole brut sur aurons la capacité de canaliser le développement comme je vous l’expliquai le développement des commu- plus tôt, n’est pas direct, mais plutôt indirect car il est contrôlé par le gouvernement fédéral. nautés affectées par la produc- Que vous soyez un état productif de pétrole ou tion de pétrole. Nous sommes non, le revenu national qui vient du pétrole est partagé entre tous. Pour l’instant l’allocation déjà en compétition pour une fédérale a été la base du financement de l’état, credit: www.cometonigeria.com offre sur un desPhoto actifs de la puisque c’est cet argent qui est utilisé pour financer les activités publiques. L’état se comdernière cession de Shell. pose en grande partie d’une administration C ‘est excitant ! Dites nous plus sur le contexte historique du programme de développement de l’état du Bayelsa. Comment cela a-t-il évolué avant et après la production de pétrole ? Quel impact sur l’état du Bayelsa et quelle est sa stratégie de développement durable dans les 20 prochaines années ? Avant 1996, l’état du Bayelsa faisait partie de l’état des Old Rivers dans l’ancienne région de l’Est Nigéria avant que cela s’appelle Oil Protectorate. Ils ont obte nu cette appellation, pas forcément à cause du pétrole, mais à cause de l’huile de palme. L’état du Bayelsa possède aujourd’hui une compagnie appellée Bayelsa Palm Limited, qui est une entreprise d’huile de palme avec une plantation. Le premier puits Photo credit: Associated Press
publique et de pratiquement aucune industrie. Donc vous avez une administration publique et un gouvernement, de petites et moyennes entreprises, mais pas d’industries.
Avec le gouvernement actuel, nous nous sommes rendus compte que la structure économique de l’état Bayelsa ne pouvait pas être durable. En effet, les impacts de la production ou du prix du pétrole auront des effets directs sur notre économie, ainsi que sur nos recettes. Quand cela arrive, même les activités de chaque jour sont perturbées. Le gouvernement a donc décidé de diversifier notre économie. Dans notre plan de développement, nous cherchons à améliorer les autres secteurs économiques, en essayant de créer des industries, de développer l’agriculture, d’améliorer les infrastructures ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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d’état et de fournir l’électricité sur le territoire, en encourageant le tourisme et en développant le secteur de l’éducation et de la santé. Ceci pour faire de l’état du Bayelsa, un endroit que les gens viendront visiter et où ils pourront vivre, travailler et s’amuser.
Le premier plan de développement de l’état a été conçu par le premier gouvernement civil. Mais ce plan était basé sur des projections censées être financées par des subventions fédérales. La différence avec notre gouvernement actuel, c’est le plan de développement que nous avons conçu qui va plus loin que les subventions fédérales espérées. Nous cherchons à augmenter les revenus intérieurs de l’état à partir de sources variées et pas seulement en nous basant sur les subventions fédérales. Les revenus seront générés par des impôts et par une part sur les bénéfices des entreprises situées dans l’Etat et ayant généralement leurs activités dans l’Etat. Voici les priorités de notre plan de développement. Diriez-vous que vous suivez une philosophie particulière dans votre plan ou pouvez vous identifier dans quelle philosophie l’inscrire ? Photo Bayelsa State Governor’s Office 26 credit: ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
CrĂŠdit photo: bayelsanewmediateam.wordpress.com ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Crédit photo: Bayelsa State Governor’s Office 28
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Cette question serait peut-être mieux traitée par un urbaniste que par un politicien. En regardant ce qui se passe à Bayelsa aujourd’hui, en tant que profane de l’urbanisme et professionnel de la finance, je n’y vois pas tellement de philosophie particulière, mais un urbaniste vous répondrait certainement quelque chose de différent.
Pour aller plus loin, je sais que nous avons un programme spécial pour la régénération urbaine et la restauration de certains aspects de la vieille ville de Yenaoga. Nous développons également une nouvelle ville de Yenagoa, qui sera mise en avant parce que nous sommes sur une île touristique, il faut reconnaître que notre culture traditionnelle fait partie des attractions touristiques. Donc si vous parlez d’une philosophie de conception, alors notre plan pour la nouvelle ville de Yenagoa pourrait répondre à votre question. Nous souhaitons créer une ville moderne tout en nous assurant que son développement est conforme à certaines normes. En réfléchissant à la conception de la ville de Yenagoa, nous
avons remarqué qu’il fallait créer un nouvel environnement qui puisse être un espace de détente où il fait bon vivre et où les gens se sentiraient bien et heureux d’y vivre. Pour lancer ce processus, le gouvernement de l’état a mis en place un comité composé d’urbanistes, de géomètres terriens et immobiliers, d’architectes, de professionnels, de comptables et d’avocats. Le comité avait pour mission de concevoir une nouvelle ville qui attirerait les gens et les entreprises. Ils ont visité d’autres villes au Nigéria, pour se faire une idée de ce que pouvait être des villes florissantes. Ils ont également mené des études et des interviews pour réunir informations et données qui pourraient être utiles à la conception de la nouvelle ville. A ce jour, le comité à esquissé un plan de base et bien que le rapport complet ne soit pas terminé, ils ont soumis un rapport intermédiaire qui donne une idée de ce que pourrait être cette ville. Comment seront implantés les différents éléments de votre ville ? Est-ce une initiative de l’état et quel est le rôle du secteur privé ? Bon, un des règles de base du gouvernement, concernant l’évolution de l’économie, c’est de laisser le secteur privé y jouer un rôle clé. Nous pensons que le secteur privé peut être un soutien durable pour le gouvernement. Lorsque les revenus du gouvernement fluctuent, le secteur privé, lui, continue à croître à son rythme et durablement. C’est our cette raison que le gouvernement se concentre sur les partenariats avec le secteur privé pour lancer des projets et des entreprises sur le territoire de l’état qui tiendront dans la durée. Dans la nouvelle ville de Yenagoa, nous avons des espaces conçus pour être résidentiels, d’autres à destinée commerciale et nous avons égaleArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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ment des espaces verts. Les espaces résidentiels et commerciaux seront construits par le secteur privé. Les installations seront mises en place par l’Etat. La gouvernement a déjà alloué des terrains pour ce nouveau projet, dont une propriété qui était la demeure de l’ancien gouverneur. La propriété couvre toute une île à Yenagoa et l’ancien palais du gouverneur a été transformé en un hôtel 5 étoiles avec un terrain de golf, un terrain de polo et un terrain de tennis. Ces espaces sont pensés comme des espaces de relaxation et de divertissement pour les touristes et les habitants de la ville En ce qui concerne les espaces vert et le développement durable, pensez vous que le design a un rôle dans la promotion du développement durable et du développement des industries locales ? Pensez vous que le design peut vous aider à résoudre certaines questions environnementales, économiques ou sociales ? Pour concevoir cette nouvelle ville, nous avons voulu nettoyé une bande de terre qui bordait la zone. Cette bande de terre est bordée par un ruisseau naturel le long duquel il y a des habitations informelles, si on peut dire ça comme ça. Bon nombre d’entre elles sont des baraques, et la plupart des habitants sont des ruraux. La ville de Yenoagoa était une commune rurale avant que Bayelsa devienne un état et que Yenoagoa devienne sa capitale. Vous pouvez déjà imaginer ce que peut subir une ville rurale quand elle devient capitale d’état, plus particulièrement pour ce qui concerne ses activités informelles. Donc une des interventions directes de l’état a été de repenser et rénover cette bande de terre pour la convertir en un front de rivière à différents usages récréatifs et commerciaux avec une voie piétonne, des espaces verts, des magasins, et des aires de repos. Nous espérons créer un environnement magnifique ou vous pouvez vous promener, faire votre jogging ou rouler à bicyclette le long de la rivière. Le design a donc définitivement un rôle à jouer dans le développement de cette nouvelle ville et pour préserver les espaces traditionnels. 30
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‘Nous voulons promouvoir notre culture. Quand un visiteur vient à Bayelsa, il est présenté avec notre culture et invité à participer. Nous avons l’intention de veiller que le développement de l’Etat représente l’esprit de notre peuple.’ Une grande partie du travail que nous faisons à ArchiAfrika se concentre sur l’éducation des nouveaux architectes, des jeunes gens et des jeunes professionnels du design. Nous voulons réfléchir sur les problèmes du développement et apporter une méthodologie critique du design pour commencer à résoudre certains de ces problèmes. Quel est le rôle du système éducatif dans l’amélioration de la vie des citoyens du Bayelsa et comment le plan de développement résout-il le problème des citoyens les plus démunis ? Je vais vous dire ce que notre gouvernement a réalisé dans le secteur de l’éducation. Tout d’abord, Bayelsa a été reconnu comme l’un des état les moins développés en matière d’éducation. Ceci était dû à la nature rurale de l’état et au manque d’infrastructures scolaires. En ce moment même, nous avons lancé un plan pour construire et équiper des écoles primaires et secondaire dans le Bayelsa. Le gouvernement a également annoncé que l’éducation serait gratuite dans l’état, jusqu’au niveau secondaire. Du primaire au secondaire, au Bayelsa, un enfant n’aura pas à payer ses frais de scolarité et l’état lui fournira également uniforme, chaussures, livres et cahiers. Tout ce que les parents auront faire, c’est de faire en sorte que l’enfant se rende à l’école. Nous encourageons également les élèves du système scolaire public à s’inscrire à l’école d’embarquement lors des trois dernières années de leur scolarité,
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l’état souhaite donner une nouvelle orientation à la jeunesse en les aidant à préparer leur vie après l’école secondaire. Nous espérons qu’ils verront ainsi la vie différemment, d’une façon plus positive et que de là, ils iront vers les établissements d’études supérieures. Pour soutenir cet effort, nous mettons à disposition actuellement des bourses pour les diplômés et post-diplômés pour qu’ils continuent leur éducation en dehors du Nigeria. A l’heure actuelle, nous avons 150 étudiants en doctorat dans des universités occidentales, britanniques pour la plupart et européennes. Nous avons environ 200 étudiants en master et 350 autres peut-être même 400 étudiants qui bénéficient de bourses d’état. Nous avons aussi des étudiants que nous avons repéré dès l’école primaire, et que nous avons envoyé dans ce que nous appelons les écoles secondaires « Ivy League » au Nigeria. Nous avons pris certains des élèves les plus brillants dans les écoles primaires de tout l’état, et nous les avons envoyé dans les meilleures écoles du Nigeria.
‘L’idée est de leur donner le sens du nationalisme et pour cela les faire interagir avec des enfants d’autres régions du pays. Cette expérience permettra aux jeunes d’agir dans une perspective plus nationale, ainsi lorsqu’ils reviendront au Bayelsa, ils reviendront avec vision plus large et une meilleure compréhension du monde qui les entoure.’ Nous améliorons l’éducation et les opportunités pour notre peuple, afin qu’ils aient un impact plus large sur la société. Nous pensons que de cette façon, nous pourrons agir sur les capacités de la nouvelle génération à nous emmener plus loin. Quant aux jeunes qui ont déjà atteint l’âge limite pour bénéficier de ces nouvelles mesures sur l’éducation, ils pourront apprendre des métiers qui peuvent être 32
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utiles dans l’industrie du pétrole dans des centres d’acquisitions de compétences que nous avons mis en place. Actuellement, malgré la présence de l’industrie pétrolière dans notre état, il y a beaucoup de chômage, donc nous essayons de donner aux gens des compétences qui leur permettront d’avoir un job au sein de cette industrie. De même, du fait qu’il y ait beaucoup de constructions en cours au Bayesla, nous avons pu transféré des compétences aux ouvriers du secteur de la construction pour que les habitants puissent continuer à profiter du boom qui a lieu en ce moment au Bayelsa. Lorsque les gens ont des boulots, leurs revenus augmentent, et ils peuvent commencer à prendre en charge leurs besoins quotidiens. Cela amène beaucoup de stabilité dans le système. A long terme, ces solutions permettront de limiter le désœuvrement de la jeunesse dans l’état, parce qu’auparavant, il y avait beaucoup de bagarres – je suis sûre que vous avez entendu parler de la situation violente dans le Delta du Niger et une partie de cette violence était aussi présente au Bayelsa. Mais aujourd’hui au Bayesla, les jeunes ont une raison de vouloir progresser, devenir meilleur et actifs au sein de la société. Bon, on dirait que vous faites beaucoup d’efforts sur l’éducation et je suis sûre que dans 20 ans, vous aurez une société différente. Alors quelle est votre vision dans 20 ans pour votre état ? Ce gouvernement veut créer des institutions, structures et systèmes qui dureront plus longtemps que le gouvernement en lui-même. Nous nous concentrons actuellement sur la création de lois qui aideront les institutions à perdurer même après le mandat de l’actuel gouverneur. Le gouvernement actuel a signé des projets de lois tel que la loi sur la transparence et la loi sur l’épargne. La loi sur la transparence exige du gouverneur qu’il produise chaque moi ses
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CrĂŠdit photo: Associated Press ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Photo credit: Bayelsa State Governor’s Office
rapports et ses comptes. Il se présente devant le public et présente les revenus qui ont été générés pour l’état et comment l’argent a été dépensé. Si il ne le fait pas pendant trois mois consécutifs, c’est suffisant pour le destituer. Ces responsabilités publiques ont été transformées en lois par le gouvernement, afin que ce prochain gouvernement, qu’il le veuille ou non, se conforme aux lois existantes. En attendant que le prochain gouvernement prenne le relais, nous voulons lancer une culture de la transparence, pour limiter l’autoritarisme qui se répand dans l’administration au Nigeria. Nous espérons que cette transparence et cette responsabilité seront également appliquées au niveau local où les cadres sont également supposés rendre compte en utilisant les mêmes outils. Une fois que cette méthode est appliquée et qu’elle devient une façon de vivre, alors la fonction publique sera responsable devant la classe politique. Et le tissus structurel de l’état changera. Comme je l’ai signalé auparavant, nous avons aussi des projets de lois sur l’épargne. Cette loi sur l’épargne apporte une sécurité mensuelle à l’état, chaque mois une partie des revenus est placé sur un compte épargne. Il s’agit aussi d’une loi, le prochain gouvernement sera donc contraint de continuer cette procédure. Grâce à la mise en œuvre de cette loi, nous avons commencé à créer un matelas d’économies qui nous pourra nous aider à pallier à n’importe quelle types d’imprévus.
C’est vraiment utile, parce qu’en 2012,
on a du faire face à une grosse inondation dans l’état et grâce à ces économies, nous avons pu aller immédiatement au parlement, pour obtenir l’autorisation des députés de prendre un peu d’argent dans ce compte d’épargne pour pouvoir parer immédiatement aux effets de l’inondation. ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Pendant cette crise, nous avons réalisé que si nous n’avions pas ce matelas d’économies et ce compte épargne, la panique aurait gagné tout l’état, et particulièrement ceux qui étaient directement touchés par l’inondation. Donc nous avons déjà pu constater les avantages de ces économies mensuelles. La priorité du gouvernement actuel se porte sur la construction des institutions et nous voulons le faire également avec les entreprises. Nous sommes sur le point de lancer une loi de privatisation, l’idée majeure est d’encourager le secteur privé à s’associer avec le gouvernement pour mettre en place des projets commerciaux qui deviennent des entreprises. Ils seront gérés par le secteur privé mais quand ils deviendront rentables, le gouvernement aura la possibilité de réinvestir les bénéfices de ces entreprises au profit du grand public. De cette façon, l’état augmente son revenu de base, et peut également aider les entreprises à se développer dans l’état. Les gouvernement successifs n’auront pas le contrôle de ces entreprises, ils ne pourront rien d’autre que leur permettre de se développer et de prospérer. La loi sur la privatisation renforce les accords avec les partenaires du secteur privé qui investissent au Bayelsa, cela permet également d’assurer le succès et la capacité de ces entreprises sur la durée. Donc ma vision dans 20 ans sera renforcée par toutes ces initiatives tant que nous nous assurons que nos lois permettent d’assurer la réussite et la continuité de la croissance. Quelle est la particularité culturelle de l’état Bayesla et est-ce quelque chose que vous avez choisi de préserver dans votre plan de développement, en sachant que vous êtes dans la course vers la modernité et le développement ? Quel est le message de l’état de Bayelsa que vous voudriez faire dire au reste du monde ?
état homogène de la tribu Ijaw au Nigéria.
La Jérusalem du peuple Ijaw. Nous pensons qu’il est important de préserver la culture Ijaw. A travers le président du Nigéria, la tenue Ijaw est devenu le costume national. Aujourd’hui, vous pouvez voir d’autres tribus dans le pays qui portent le même costume. Notre peuple est connu pour l’aquaculture et la pêche. L’homme typique Bayelsa est un pécheur et vit la plupart du temps aux alentours de la rivière et des cours d’eau, et fait partie de la communauté des pêcheurs. J’ai entendu dire qu’un Ijaw avait même fait tout le chemin jusqu’à Accra ! Cependant, comme les lieux où nous vivons ont tendance à devenir marécageux, cela devient de plus en plus difficile de développer l’immobilier. Pour travailler la terre, on doit d’abord apprivoiser le marécage et l’assécher ce qui représente une part énorme du coût de construction. Ce que nous bricolons maintenant à titre d’expérimentation, c’est la construction des maisons sur piliers métalliques, au-dessus du marécage avec un étang sous la maison. Nous avons travaillé sur quelques designs préliminaires et nous essayons d’incorporer ces idées dans nos schémas de logements de masse, parce que c’est le reflet de la culture de notre peuple. Cette interview a été réalisée à Accra par Tuuli Saarela.
On peut dire que l’état du Bayelsa est le seul ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Entretien avec
Architect Marianela Jiménez Calderón
L’architecte costaricaine Marianela Jiménez Calderón, Présidente de l’Association des architectes du Costa Rica, s’entretient avec ArchiAfrica à propos d’architecture durable, de design et de son rôle dans le nouveau visage de l’architecture costaricaine. 38
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COSTA R
CrĂŠdit photo: www.costaricantimes.com 40
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RICA
Au Costa Rica, les architectes ont mis l’accent sur le développement durable, le patrimoine et la formation. Pouvez-nous dire quelles sont vos approches concrètes ou nous donner des exemples de méthodes de travail inter-disciplinaires que vous utilisez au Costa Rica et qui peuvent être appliquées en Afrique ? Notre approche du développement durable a été accentuée ces dernières années, car nous avons réalisé que les professionnels de l’architecture devaient prendre en compte les problèmes qui affectaient directement les gens. C’est pour ça que nous soutenons fortement la norme RESET « Requirement for Sustainable Buildings in the Tropics », qui est un guide du design responsable avec 7 chapitres d’évaluation concernant tous les aspects nécessaires au projet de construction, des conditions économiques du site à l’usage des technologies de construction ou de fabrication avec des matériaux locaux. Votre question me permet de vous expliquer le processus qui nous a permis d’aboutir à la norme RESET, tout en partageant avec vous des exemples de collaboration interdisciplinaires et les stratégies de partenariat qui nous ont permis d’atteindre nos objectifs. Tout d’abord, la gestion complète du projet a été opérée par IAT (Institute of Tropical Architecture), le CACR (Association of Architects of Costa Rica) et l’INTECO (Institute of Technical Standards of Costa Rica), ce qui a permis de rendre cette norme réelle et de mettre sa diffusion en accès libre. Le concept fondateur de RESET est né il y a quelques années au IAT. C’était en 2009 quand l’architecte Bruno Stagno convoqua un groupe de professionnels, sous le nom de « Junior Group » pour des réunions hebdomadaires, dans l’idée de rassembler des informations, d’étudier les normes internationales liées au thème du durable, de collecter des paramètres, et d’adapter ces informations utiles et essentielles aux régions tropicales. Ce long travail ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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d’accumulation progressive pendant deux ans fut rassemblé et condensé pour créer la première version de ce qui sera RESET. Une fois que le document fut complet, l’étape suivante a été l’adaptation en Norme Nationale, pour plus de visibilité et pour faire une réelle différence au niveau local, régional et mondial. En 2011, le Junior Group coinjointement avec INTECO, commencèrent à former un sous- comité technique pour la norme avec des représentants de différentes organisations nationales et d’institutions gouvernementales, afin de mettre en conformité RESET avec les normes ISO et les réglementations ECA (Costa Rican Accreditation Entity) Et finalement, après un bon nombre d’heures de travail et plusieurs mois de consultations publiques nationales, la Norme a été présentée dans cet auditorium en Décembre de l’année suivante, sous la référence Inte 06-12-01:2012 RESET. En parallèle, depuis lors, le CACR soutenait déjà fortement le projet, pour notamment pallier les problèmes du développement durable dans le milieu. Sous le couvert du Conseil de l’Union internationale des architectes, - UIA, situé à San José, Costa Rica - la déclaration 2009 COSTA RICA, qui a été signée par le président du CFIA (Association fédérale des ingénieurs et architectes) et le président du CACR, certifie depuis 2009 les meilleures conditions pour la construction d’un immeuble sur votre site, prenant en considération tous les aspects que la construction, quelque soit son type, doit avoir pour être durable. Dans le cadre de ce projet, le CACR a présenté en 2012 sa biennale sous le thème « Architecture verte et construction durable », des projets nationaux et internationaux furent exposés sur le sujet avec des intervenants internationaux, et une foire aux matériaux, produits de construction et technologies alternatives responsables fut organisée. L’objectif de cette biennale était de récompenser les projets dont les objectifs principaux étaient la protection de l’environnement. 42
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ment « Alternatives for our World Towards Pas forcément les plus spectaculaires, les plus Sustainability » coûteux ou les plus sophistiqués, mais An surtout Interview with (Alternatives pour un monde durable) les projets utilisant des techniques de construction alternatives, des matériaux et de la Une fois la norme RESET prête, le CACR a main d’œuvre locale, privilégiant une faible présenté ses démarches devant les organisaaffectation des sols et mettant en place des tions internationales : FCA – Central Amerstratégies passives pour réguler la lumière et ican Federation of Architects, the FPAA – la température afin d’utiliser le moins d’énerPan-American Federation of Architects, lors gie possible. de l’événement du AIA – American Institute of Architects and de l’UIA – International En 2013, le CACR a présenté à nouveau le Union of Architects. projet au Congrès, sous le thème « Développement durable, patrimoine, education ».
Nous sommes convaincus que l’intégration des concepts de développement durable et de protection du patrimoine sont nécessaire pour que la société soit consciente de ces problèmes et que la formation commence dès l’enfance. Notre commission CACR « Constructed Space
and childhood Costa Rican » fait un très bon travail à ce sujet. Une session du Comittee of Children of the UIA, lors de l’événement, et pour la première fois en Amérique Latine, ce qui a permis de toucher des représentants de nombreux pays.
De plus, en ce qui concerne le sujet du « patrimoine », on privilégie la restauration d’anciens immeubles construits de manière durable plutôt que de les démolir pour construire de nouveaux projets. C’est un bon moyen de préserver le contenu et l’identité culturelle de ce patrimoine. Chaque année, notre comité CIDECA (des étudiants d’architecture) organise l’événe44
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La norme RESET a été très bien accueillie et tous ont témoigné un grand intérêt et ont fait preuve d’un large soutien pour qu’elle soit applicable dans toutes les zones tropicales du monde. Par exemple, l’UIA a publié l’information sur son site web et sponsorise sa traduction en anglais et en français, ce qui complète idéalement l’initiative. Le FCA a également montré la volonté d’en faire une norme régionale et a commencé à l’utiliser au sein du Central American Committee of Architecture and Sustainable Construction. Compte tenu du grand intérêt démontré pour la certification des projets de construction, un deuxième groupe d’expert à lancé l’étape suivante du processus sur le plan national. Chaque chapitre de RESET a été revu un par un, avec cette fois l’idée de préciser les éléments qu’un candidat devra fournir pour que le projet soit évalué et certifié. Etant donné la complexité et les différentes étapes par lesquelles doit passer un projet architectural, il a été décidé que chaque étape de la conception, de la construction et des opérations seraient certifiée indépendamment les unes des autres (cette option a été présentée au public en mars de cette année)
Photo Marianela Jimenez Calderon CrĂŠditcredit: photo: barriobird.blogspot.com ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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pour les projets qui sont en cours d’évaluation et qui espèrent leur certification dans le courant de l’année. Il y a eu d’autres obstacles à surmonter : former les futurs examinateurs des construction au niveau local et international, obtenir des institutions d’état et des organisations financières, des garanties financières pour les projets certifiés, etc. Et nous ne doutons pas que le travail en équipe et les alliances stratégiques nécessaire pour ce long parcours prendront bientôt forme. D’après votre expérience, quel serait le rôle de l’architecte dans les pays tropicaux comme le Costa Rica ou l’Afrique en voie de développement. D’après vous, comment améliorer la collaboration entre ces régions dans le cadre du dialogue Sud-sud ? Le rôle principal de l’architecte est de développer une architecture juste. Personnellement, je n’aime pas trop parler de bonne et de mauvaise architecture, parce que si c’est mauvais, cela ne devrait pas s’appeler architecture. Donc la question se pose plutôt ainsi:
Comment définir l’architecture ?
Beaucoup d’architectes célèbres se sont essayés à cette définition avec une inspiration très poétique et je n’oserai pas faire de même. D’autant plus que parfois ces définitions ne sont pas toujours compréhensibles par les gens. En mettant la poésie de côté, on pourrait dire qu’il s’agit de la création d’espaces de solutions pour les usagers. Cela pourrait être aussi simple, parfois nous oublions que nos créations doivent répondre aux besoins des gens et non à notre égo ou à des intérêts triviaux.
Donc pour proposer des solutions efficaces, le travail d’architecture doit interagir avec son environnement. Dans les pays tropicaux et partout ailleurs. Aujourd’hui, dans notre contexte tropical, cela signifie traiter des conditions spécifiques d’ensoleillement, de ventilation, d’humidité, etc. Cela doit être pris en compte pour assurer le confort des personnes qui habitent ou utilisent l’espace. C’est aussi une responsabilité de proposer des solutions architecturales qui prennent en compte la diversité humaine. C’est pour ça que cette année 2014, notre biennale a pour thème « Architecture pour tous », avec un focus particulier sur tous les projets, publics ou privés, internes ou externes, qui prennent en compte la diversité humaine. Pas seulement celle des différences physiques ou des caractéristiques cognitives de chaque être humain, mais aussi la diversité culturelle dans laquelle nous vivons dans un contexte mondialisé.Ainsi en tant que CACR, nous avons lancé des associations autonomes sur ces différents sujets pour répondre à ces problèmes spécifiques. Lors de notre dernière biennale, nous avons pu développer une stratégie commune grâce aux congrès et au soutien des nouvelles associations et nous avons créé une équipe de conseillers thématiques, pour travailler sur les sujets abordés. Il faut bien comprendre que les professionnels de l’architecture ont besoin des connaissances inhérentes aux autres disciplines pour faire face aux problèmes que génère l’espèce humaine. Ces équipes sont donc formées de professionnels de différentes disciplines tels que l’architecture, l’ingénierie dans différents secteurs, l’éducation, le secteur public et des leaders de communauté, des consultants privés, etc... Je pense que ce procédé peut être appliqué dans d’autres régions du monde, y compris les pays africains. Il faut que les gens comprennent que cette profession n’est pas au-dessus des autres, mais tout aussi importante et complémentaire. ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Cela permet un dialogue franc et productif entre les gens, les organisations, les régions et même entre les nations. En Afrique, les architectes qui travaillent selon les principe de développement durable doivent faire face à un problème : les clients et le public ne se rendent pas compte ou ne comprennent pas les avantages et donc le procédé pour arriver à ce type de conception. Que pensez-vous de cette tendance et comment les architectes peuvent-ils répondre à cette incompréhension ? Je pense que la seule façon de prouver l’intérêt de ce procédé, c’est de montrer les résultats avec des données techniques. Par exemple,
On peut prouver qu’une grande fenêtre avec l’ensoleillement génère un certain nombre de degrés de température à l’intérieur de la pièce, alors que la même fenêtre ayant la couche de protection ou le vitrage adéquat pour se protéger du soleil, permet de faire chuter considérablement la température à l’intérieur. On peut prouver que c’est plus rentable de dépenser pour construire un ombragement approprié plutôt que de dépenser pour installer l’air conditionné, une dépense énergetique qui implique en plus un coût supplémentaire pour l’usager. Cela signifie qu’on peut s’inspirer des techniques anciennes, utiliser des stratégies passives pour contrôler l’ensoleillement et la lumière, la ventilation et le confort général des espaces, mais également être suffisamment créatif pour s’adapter au langage 48
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contemporain, celui de la réalité d’aujourd’hui et de l’époque dans laquelle nous vivons. Cela signifie que nous devons adapter ces concepts et non les appliquer littéralement tel quels. J’aimerais partager avec vous quelques idées de RESET. Le concept principal de RESET : Plus de design que de technologie. • Les concepts de développement durable et de bioclimatique doivent être la base, complétée par la technologie. Cela ne l’exclut pas totalement mais cela la limite.
PCrédit photo: costaricanimages.com
• RESET se veut être une norme « populaire » qui peut toucher la majorité. C’est la seule façon pour créer un réel changement. • Les Architectes doivent être responsables de leurs conceptions. Exemples de stratégies de conceptions • Nous pouvons concevoir des ouvertures dans la direction d’où vient le vent pour ventiler la pièce plus rapidement. • Les vitres doivent être teintées pour éviter la chaleur. • Préférer les matériaux et la main d’oeuvre locale. Et pour cela vous devez être créatif et
imaginatif. • Soyez critique ! Essayez les matériaux et les produits proposés sur le marché. Le secteur de l’architecture en Afrique semble être dominé par les hommes. Quelle est votre expérience en tant que femme architecte au Costa Rica ? Quels sont les avantages et les inconvénients de votre genre dans votre domaine ? Et plus particulièrement, votre genre influence-t-il votre plaidoyer ? Bien que l’Amerique Latine soit encore assez macho, cela s’estompe dans l’architecture au fil des années, Dieu merci ! En outre, au Costa ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Rica, nous avons pas mal de systèmes légaux qui protègent les droits et les libertés des individus, au sein de notre système démocratique. Mais le plus important, c’est le changement dans la conscience des gens, qui mieux que les lois, sera réellement efficace. Dans le cas de mon pays, durant les années 90, on pouvait voir un bon nombre de femmes qui étudiaient l’architecture, mais peu de professeurs femmes l’enseignaient. Actuellement, sur environ 3300 professionnels de l’architecture qui sont inscrits dans notre école, 35 % sont des femmes. Notez que le CACR fait partie du CFIA (Federate Association of Engineers and Architects), qui forme 5 écoles, dont l’une d’elle est la notre et dont les 4 autres sont destinées aux professions d’ingénierie. Le pourcentage de femmes dans ces autres écoles est beaucoup plus faible que dans la notre. Et c’est d’autant plus visible dans la composition du Bureau général de la direction du CFIA, où sur 10 membres titulaires, je suis la seule femme. Cependant, par rapport aux années précédentes, la présence des femmes est nettement prise en compte, même pour le poste de président. Nous avons également un comité contre la discrimination sexuelle, qui organise des activités et des ateliers pour nous aider à renforcer le pouvoir et l’éducation des femmes dans la société. Il y a également des événements où les lycéens des deux sexes sont invités à s’orienter vers les métiers d’architecture et d’ingénierie. Par exemple il y a eu des conférences avec Sandar Cauffman, une costaricaine qui gère le projet MAVEN de la NASA. Dans mon expérience personnelle comme dans ma vie professionnelle je me suis bien débrouillée. Je ne parlerai pas des avantages et des inconvénients d’être une femme. Bien sûr, j’ai du faire face à des réactions désagréables dûes à ces stéréotypes (avec les clients, les ouvriers, les officiels des institutions, etc) mais ça arrive dans 50
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beaucoup de professions et dans beaucoup de circonstances. Il ne s’agit pas seulement de discriminations sexuelle, mais également des discriminations liées à la diversité culturelle, sexuelle, ethnique, ou encore des discriminations liées à un handicap, à l’âge (très jeune ou très vieux) etc.
Alors, pour le cas des femmes, je pense que le plus important est de refuser de se comporter en victime et d’assumer son rôle avec courage. Les stéréotypes et les discriminations ne tiennent pas longtemps face à la conviction, le professionnalisme et l’engagement avec lesquels nous faisons notre travail. Il n’y aucune excuses pour ne pas s’impliquer et faire notre maximum. Du point de vue pratique, comment ArchiAfrika et votre association peuvent coopérer pour partager des idées et des solutions innovantes pour la conception et la construction, avec un accent particulier sur l’éducation du public ? Nous vous offrons avec plaisir notre magazine de CACR que nous appellons « Habitar », qui est imprimé mais également en version numérique. La version numérique est lue par des gens de beaucoup de pays différents. De cette façon, nous pouvons diffuser des informations sur ce que fait ArchiAfrika à beaucoup de gens, plus particulièrement en Amérique Latine et au Costa Rica. De même, sur la base d’une coopération mutuelle, nous pourrions partager nos éléments sur chacun de nos médias : site web, facebook, twitter, youtube, etc. J’ai beaucoup apprécié cette interview, cela nous a permis de voir ce que nous pouvons faire pour les gens en Afrique et même plus, et c’est très important. www.cacrarquitectos.com Via Facebook:https://www.facebook.com/pages/Arquitectos-de-CostaRica/193116537387117?fref=ts ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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ArchiAfrika s’associe avec
Little Sun pour promouvoir l’éner-
Your work with the Association of Architects in Costa Rica has placed emphasis on sustainability, heritage and education. Can you talk about some real world approaches or examples of interdisciplinary models at work, in Costa Rica which could be applicable in Africa?
Our approach to the concepts of sustainability has been strengthened in recent years because we have concluded that professionals in architecture must approach the issues that affect all
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people. That is why we are givin petus to the standard RESET " for Sustainable Buildings in which is a design guide with s taking into account the economic the site where the project will tak development of construction tec manufacturing of local materials allows me to take this opportun about the process of the norm can share examples of interdisc that have enabled us to achieve
ArchiAfrika et Little Sun se sont associés pour distribuer une lampe solaire conçue par l’artiste Olafur Eliasson et l’ingénieur Frederick Ottesen. Little Sun cherche à promouvoir l’éclairage propre, efficace et accessible pour les 1,6 milliards de personnes vivant sans accès à l’électricité.
mis de se démarquer des autres lampes solaires sur le marché et de mettre l’accent sur l’importance d’un « bon » design pour répondre aux problèmes de développement. ”
Tandis que le Ghana peut se vanter d’avoir ArchiAfrika élargit ainsi le discours sur la obtenu un taux relativement élevé d’électrificonstruction en Afrique en y englobant le rôle cation avec 74 % des foyers équipés en élécdu design socio-culturel adapté au déveloptricité, de nombreuses régions du pays peinent pement. Notre objectif est de promouvoir des ng a strong im-délestages encefréquents for our work. sous les ou « dumso » stratégies de design pensées sur le continent, "Requirements dûs aux problèmes de secteur pour se fournir pour aborder the enTropics," At first, entire process was performed main- les défis du futur et engager la électricité. Pendant lesanmatchs de la Coupe prochaine sevenduchapters ly by thebeaucoup IAT (Institute Tropical Architec-génération de professionnels dans monde, par exemple, de fansofont un dialogue critique. c conditions ture), the CACR été déçusofpar l’interruption de leur(Association magnifique of Architects of ke place, to Les the élèvesCosta Rica)aussi and INTECO (Institute of Technimatch. souffrent de ne pas être Depuis son lancement en 2012, Little Sun chnologies and de faire calleurs Standards Costa en mesure devoirsofdu soir. Rica), for the developa distribué plus de 165 000 lampes dans le s. The question ment of a standard for general dissemination monde. La combinaison unique d’un design nity ArchiAfrika to explain et Little free of charge. Theréunis RESET generator concept Sun se sont pour magnifique et d’une ingénierie exceptionnelle RESET, and I les lampes was born several years distribuer solaires Little Sunago dansin the IAT. It was fait de conLittle Sun, la lampe la plus populaire ciplinary work 2009 when architect Bruno Stagno tout le Ghana etinl’Afrique de the l’Ouest. Little vendue à travers le globe. Les gens découvrent a greater audi- pas une organisation de charité, la Sun n’est à quel point la lampe est utile même dans les distribution des lampes solaires est un business zones avec électricité. Cette lampe amusante dont l’objectif est de former un réseau de disest un outil pratique pour former les gens tributeurs pour fournir les gens dans les zones partout dans le monde aux avantages de l’énerrurales. ArchiAfrika d’un autre côté est une gie solaire et des sources d’énergie durable. ONG soucieuse de promouvoir des solutions de « bon » design concernant les problèmes To learn more de développement en Afrique. Ensemble, ils www.archiafrika.org ont prévu de mettre en place un plan marketwww.littlesun.com ing pour Little Sun en Afrique de l’Ouest et de mettre en place un réseau de distribution pour encourager l’usage des lampes solaires comme source d’énergie alternative. L’architecte Joe Osae-Addo pense que :
‘‘l’énergie solaire est la réponse à la demande des communautés rurales et urbaines au Ghana, le soleil étant une énergie propre, stable et renouvelable. Le design de Little Sun lui a perArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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LITTLE SUN SUR LA ROUTE
Par: Ali Ouedraogo Notre nouvelle série « Little Sun on the road » présente des histoires originales collectées par les membres de l’équipe de Little sun lorsqu’ils voyagent de par le monde avec Little Sun et qu’ils travaillent avec les partenaires-distributeurs internationaux et les agents de vente de Little Sun – pour diffuser la lampe solaire Little sun. Le première histoire vient de Ali Ouedraogo, notre coordinateur Africa Business and Development. Depuis janvier, celui-ci a pris la route du Zimbabwe pour travailler avec notre partenaires Alight Zimbabwe Trust. J’ai rencontré Darlington Guru pour la première fois, l’année dernière. Lorqu’il était enfant, Darlington été sponsorisé par le PLAN ONG du Zimbabwe. Il a grandi dans un environnement plein d’adversité où parfois l’incertitude et l’espoir marchaient ensemble côte à côte. Mais avec le soutien du plan du Zimbawe, il étudie maintenant la sociologie à l’université du Zimbabwe et il ressent un besoin urgent de rendre la pareille à sa communauté.
“Je me suis redécouvert moi et ce que je suis capable de faire.” -Darlington Guru
En mars dernier, Darlington a connu le projet Little Sun par Aligth Zimbabwe Trust. Une organisation dont les membres étaient des enfants précédemment sponsorisés par le Plan. En continuant ses études, Darlington commença à vendre des lampes Little Sun dans sa ville natale de Mount Pleasant, une petite banlieue de Harare ayant un faible taux d’électrification. Il organisa des petites campagnes d’éducation pour les résidents sur les avantages économiques et sanitaires de l’usage de l’énergie solaire, et il recruta un membre de sa communauté pour l’aider à vendre des lampes.Aujourd’hui, Darlington gagne assez d’argent pour couvrir une partie de ses dépenses 56
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quotidiennes et le plus important pour lui, il rend service à sa communauté. « En vendant des lampes Little Sun, cela m’a aidé à payer mes frais de transport de chez moi à l’université du Zimbabwe et ça m’a permis d’acquérir des compétences en marketing. Je me suis redécouvert et j’ai découvert que je pouvais réussir. » Les revenus que Darlington gagne avec Little Sun lui permet d’être financièrement autonome tout en aidant les membres de sa communauté à acquérir une source d’énergie stable. Il gagne aujourd’hui un dollar pour chaque lampe vendue et les bénéfices de Little Sun se répandent dans sa communauté. Darlington étudie maintenant pour développer ses compétences d’entrepreneur et a récemment commencé un stage au bureau de Alight Zimbabwe Trust. Il apprend les techniques de ventes des autres vendeurs de Little Sun et il partage également ses expériences avec eux. L’ histoire de Darlington souligne l’impact social et économique de Little Sun dans les collectivités sans éléctricité. J’espère voir beaucoup plus de jeunes comme Darlington, dont l’engagement pour sa communauté et son désir d’explorer toutes les opportunités qui lui sont offertes, a servi d’inspiration pour d’autres. Legend :
“Les Lampes Little Sun per-
mettent aux enfants de ma communauté d’avoir de la lumière pour qu’ils puissent étudier pendant la nuit et qu’ils réussissent. Mais beaucoup d’autres enfants dans d’autres endroits de mon pays attendent d’avoir la même opportunité et je veux être là pour eux.” ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Retour A Ă
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Ceci est un extrait du journal d’un architecte à la retraite Godson Egbo, à propos de son retour à Lagos en 2042, après une absence de 39 ans. Dans son journal, celui-ci raconte les changements qu’il a remarqué depuis la dernière fois qu’il a visité la ville en 2003..
Godson Egbo
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Il s’est passé plusieurs années depuis que j’ai quitté le Nigéria. J’avais l’habitude d’y retourner régulièrement quand j’étais plus jeune. Mais j’ai eu une mauvaise expérience quand j’ai voulu faire une transaction immobilière qui m’aurait rendu riche. J’avais convaincu plusieurs investisseurs britanniques sur les avantages de la propriété immobilière au Nigéria et j’avais misé ma crédibilité sur la viabilité d’un programme, connu sous le nom de Lekki Palace Towers. Nous avions levé 2 millions de livres, nécessaires pour acheter le terrain et nous avons été vite dupé par le type avec qui j’avais été à l’école ! J’ai été disgracié et j’ai perdu magistralement la face. J’ai donc tourné le dos à cet endroit et j’ai décidé de concentrer mes efforts au Royaume Uni. Mais au cours de toutes ces années, il y avait quelque chose qui me chagrinait ; une ombre, une interrogation, et si... ? Un vague désir de retour ; par curiosité... Maintenant, j’ai finalement décidé de saisir l’occasion d’aller voir ce que j’ai manqué ces dernières années. Je suis aussi un vieil homme maintenant. Je dois revenir au moins une fois au bercail avant de... Bon, tant que j’ai encore la possibilité. L’immense superliner airbus C400 penchait imperceptiblement vers tribord lorsque le capitaine annonça l’amorce de la descente vers Lagos. Tandis que les détails du sol devenait de plus en plus perceptibles, je regardais à travers le hublot pour essayer de faire un peu de géographie. En-dessous de moi, je voyais une grande agglomération tentaculaire qui s’étendait aussi loin que je pouvais l’apercevoir. La propagation de la ville était limitée d’un côté par l’horizon et de l’autre , par une mer large et étincelante. Je m’attendais à voir les toits familiers de métal rouillé mais j’ai été agréablement surpris par les solides constructions qui ont accueilli mon regard. Je voyais des groupes de blocs mégalithiques et des avenues dont les tours se bousculaient. Les buildings semblaient danser et chatoyer dans la lumière du crépuscule, tandis que leurs peaux tendues de verre reflétaient les rayons du soleil. Alors que le superliner atterrissait, je n’arrivais pas à reconnaître l’aéroport à quelques centaines de pieds au-dessus du sol. C’est seulement quand j’ai aperçu la vieille tour de contrôle hexagonale que j’ai su qu’il s’agissait de l’aéroport international Murtala Muhammed. ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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C’est seulement quand j’ai aperçu la vieille tour de contrôle hexagonale que j’ai su qu’il s’agissait de l’aéroport international Murtala Muhammed. L’avion nous déversa dans le Terminal 3. Les portes s’ouvrirent et l’odeur de l’Afrique s’engouffra rapidement dans la cabine. Cette odeur !! Un de mes tiroirs de souvenirs rarement parcouru, s’ouvrit avec cette odeur. Cela sentait la terre musquée, le diesel et le vin de palme; les noix de cola et les embouteillages, la sueur honnête et la bile coléreuse. Je fus immédiatement transporté aux temps de ma jeunesse ; le temps de la puissance et de la confiance, de l’amour et du goût pour les aventures héroïques. Je me dirigeais vers le contrôle des passeports. Une fille en uniforme turquoise et tresses spoutnik me regarda froidement tandis que je me hissais vers sa vitre. Sans un mot, elle prit mon passeport européen, le vérifia minutieusement, trouva une page vierge et finalement la tamponna. “Vous êtes parti longtemps” me ditelle en me rendant mon passeport. Puis elle sourit, révélant une dentition de perles et dit : “Baba, bienvenue à la maison”. Je la remerciais et m’en allait précipitamment afin qu’elle ne remarque pas la petite larme qui commençait à se former au coin de mon œil. Après avoir récupéré mon unique bagage, je suivais la signalétique vers Ikeja Interchange. En quittant le Terminal 1, je me retrouvai sur une vaste place. A l’autre bout de la place, une énorme arche de pierre rouge signalait l’emplacement du “Mono”, le transport public magnétique de Lagos. C’était le célèbre système monorail magnétique, qui avait déjà été construit dans plusieurs villes de Chine et d’Inde. Il avait été construit à la fin des années 2020 quand le système de transport routier de Lagos avait atteint la limite du supportable. La communauté des hommes d’affaires de la ville a mis une telle pression sur le gouvernement que celui-ci avait été forcé de signer un accord avec la Compagnie Chao San Construction de Shanghai et le chemin de fer national chinois pour construire
un nouveau système de transport. Dès ces débuts, le Mono a rencontré un large succès avec les Lagosians, à tel point qu’avoir un moyen de transport privé n’était même plus nécessaire. Le Mono était présent dans tous les secteurs de la société. Si un “grand monsieur” dans une grosse voiture voulait perdre son temps coincé dans les embouteillages, c’était son problème ! “Hovering Okada, sah !” Mon regard restant confus, il cria : “Licence 48672, “Lagos State Governement Public Vehicle Registration” “C’est bon” dis-je, “ je vais seulement au terminus du Mono” “Ah, pas de problème, sah, je peux vous y déposer aisément et incroyablement rapidement pour seulement 25 Naira !” J’étais sur le point d’embarquer dans son véhicule quand je me rappelais quelque chose : “Vingt-cinq naira !” m’exclamai-je dans une moue de dégoût, “Vous devez penser que je suis une sorte de JJC. Faites-le pour dix.” Il sourit et cria “Oga, tu es trop dur pour moi. Ok, entre !” Je grimpais à bord et je sentais que le véhicule s’affaissait légèrement sous mon poids non négligeable. Le véhicule trépigna un peu sur place et nous nous mirent en route dans une fine fumée bleue. Nous nous lançames dans la foule de la place, par un côté puis l’autre, pour éviter d’entrer en collision avec les piétons et les autres Hovokadas. Si vous avez un jour l’occasion de conduire une Hovokada, je vous le recommande. C’est tellement souple ; il n’y a pas de contact avec le sol et vous avez votre propre petit habitacle semi-ouvert. Nous sommes maintenant dans la Guilde. C’est leur territoire. Il s’avère que la Guilde – La Guilde Oshodi des commerçants du marché et des praticiens alliés – est un corps quasiindépendant qui régit les affaires de cette petite enclave à Lagos. Mon chauffeur me raconta l’histoire. “Quand mon père est arrivé dans le pays en 2008, il y avait beaucoup de problèmes à Lagos. Pas de lumières, pas d’eau, et tout allait si lentement ! Lentement ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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L’avion nous déversa dans le Terminal 3. Les portes s’ouvrirent et l’odeur de l’Afrique s’engouffra rapidement dans la cabine. Cette odeur !! Un de mes tiroirs de souvenirs rarement parcouru, s’ouvrit avec cette odeur. Cela sentait la terre musquée, le diesel et le vin de palme; les noix de cola et les embouteillages, la sueur honnête et la bile coléreuse. Je fus immédiatement transporté aux temps de ma jeunesse ; le temps de la puissance et de la confiance, de l’amour et du goût pour les aventures héroïques. Je me dirigeais vers le contrôle des passeports. Une fille en uniforme turquoise et tresses spoutnik me regarda froidement tandis que je me hissais vers sa vitre. Sans un mot, elle prit mon passeport européen, le vérifia minutieusement, trouva une page vierge et finalement la tamponna. “Vous êtes parti longtemps” me dit-elle en me rendant mon passeport. Puis elle sourit, révélant une dentition de perles et dit : “Baba, bienvenue à la maison”. Je la remerciais et m’en allait précipitamment afin qu’elle ne remarque pas la petite larme qui commençait à se former au coin de mon œil. Après avoir récupéré mon unique bagage, je suivais la signalétique vers Ikeja Interchange. En quittant le Terminal 1, je me retrouvai sur une vaste place. A l’autre bout de la place, une énorme arche de pierre rouge signalait l’emplacement du “Mono”, le transport public magnétique de Lagos. C’était le célèbre système monorail magnétique, qui avait déjà été construit dans plusieurs villes de Chine et d’Inde. Il avait été construit à la fin des années 2020 quand le système de transport routier de Lagos avait atteint la limite du supportable. La communauté des hommes d’affaires de la ville a mis une telle pression sur le gouvernement que celui-ci avait été forcé de signer un accord avec la Compagnie Chao San Construction de Shanghai et le chemin de fer national chinois pour construire un nouveau système de transport. Dès ces débuts, le Mono a rencontré un large succès avec les Lagosians, à tel point qu’avoir un moyen de transport privé n’était même plus nécessaire. Le Mono était présent dans tous les secteurs de la société. Si un “grand monsieur” dans une grosse voiture voulait perdre son temps coincé dans les 70
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Ikoyi,d’art Lagos Oeuvre originaleby Godson Egbo 72
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embouteillages, c’était son problème ! “Hovering Okada, sah !” Mon regard restant confus, il cria : “Licence 48672, “Lagos State Governement Public Vehicle Registration” “C’est bon” dis-je, “ je vais seulement au terminus du Mono” “Ah, pas de problème, sah, je peux vous y déposer aisément et incroyablement rapidement pour seulement 25 Naira !” J’étais sur le point d’embarquer dans son véhicule quand je me rappelais quelque chose : “Vingt-cinq naira !” m’exclamai-je dans une moue de dégoût, “Vous devez penser que je suis une sorte de JJC. Faites-le pour dix.” Il sourit et cria “Oga, tu es trop dur pour moi. Ok, entre !” Je grimpais à bord et je sentais que le véhicule s’affaissait légèrement sous mon poids non négligeable. Le véhicule trépigna un peu sur place et nous nous mirent en route dans une fine fumée bleue. Nous nous lançames dans la foule de la place, par un côté puis l’autre, pour éviter d’entrer en collision avec les piétons et les autres Hovokadas. Si vous avez un jour l’occasion de conduire une Hovokada, je vous le recommande. C’est tellement souple ; il n’y a pas de contact avec le sol et vous avez votre propre petit habitacle semi-ouvert. Nous sommes maintenant dans la Guilde. C’est leur territoire. Il s’avère que la Guilde – La Guilde Oshodi des commerçants du marché et des praticiens alliés – est un corps quasi-indépendant qui régit les affaires de cette petite enclave à Lagos. Mon chauffeur me raconta l’histoire. “Quand mon père est arrivé dans le pays en 2008, il y avait beaucoup de problèmes à Lagos. Pas de lumières, pas d’eau, et tout allait si lentement ! Lentement comme vous n’aviez jamais vu auparavant!” Apparemment, les commerçant du marché d’Oshodi en ont eu marre et ont commencé à prendre en charge les services que le gouvernement était censé fournir. Ils ont coulé des forages, ont construit des incinérateurs, et ont installé quatre grandes tours de télécommunications. Les gens sur place renoncèrent au système habituel et se fournirent en électricité, eau et télécommunications auprès de la Guilde. La Guilde s’enrichit et commença à investir dans le nettoyage de l’environnement. Les gens commencèrent à voir la différence et ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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le quartier devint de plus en plus populaire. La Guilde mit en place une patrouille non-armée, dont la présence rassurait les riverains et décourageait les voleurs. Les quartiers autour du marché, réclamèrent l’accès à cette éléctricité moins chère et plus régulière ; et à cette nouvelle sécurité, la Guilde augmenta donc son influence. En fait, la Guilde devint si populaire, qu’en plus des 19 sièges qu’elle avait au gouvernement local, elle en gagna douze de plus aux élections de 2021. A son apogée, la Guilde contrôlait l’électricité, l’eau et la plupart des télécommunications d’environ 20% de la ville. Son influence s’étendait d’Ijeka au Nord, à Oworonsoki à l’est, et Mushin et Fadeyi dans le sud. Nous atteignions la station Mono, devant le Marché Oshodi. “Je descends ici”, dis-je à Toure. Je lui donnais une centaine de naira et son visage s’agrandit d’un large sourire. De ma position surélevée sur l’esplanade, je pouvais voir l’activité frénétique du marché en-dessous de moi. La voix d’un commerçant thaïlandais en-dessous de moi parvint jusqu’à mes oreilles. Il réprimandait fortement un homme Yoruba habillé en agbada bleu marine qui lui réclamait un rabais totalement absurde. Le Yoruba accusa à son tour le marchand de pratiquer des prix criminels. Mais tout ça n’était qu’un jeu : quelques instants après, ils disparaissaient dans la cabine de l’opérateur pour effectuer la transaction. En regardant au-delà du marché, je pouvais voir clairement les frontières de la Guilde. D’immenses bâtiments monolithiques de dix à quatorze étages dans la rue, je vis un immeuble imposant, d’environ 16 étages qui faisait la longueur de tout un pâté de maison. De grandes lettres sur le toit indiquaient l’Hotel Lotus. “Je vois”. Le type d’en face renchérit : “C’est notre Chinatown”, dit-il. En regardant en haut et en bas de la rue, je me demandais pourquoi je ne l’avais pas remarqué plus tôt. Les magasins avaient des noms tel que Chang’s Mercantile Emporium, Restaurant du Double Bonheur et Immobilier Grande muraille et il y avait une succursale de HSBC. Mais les visages dans la rue étaient encore plus frappants. 74
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The ‘Mono’
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Sketches de Godson Egbo 76
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Mon compagnon de voyage m’expliqua que les chinois étaient présents à Lagos depuis les années 60-70, mais que cette présence s’était renforcée récemment après la signature du Pacte de développement mutuel sino-nigérian en 2012. Cet accord permettait de commercialiser des matériaux bruts nigérians avec de l’assistance technique chinoise. “Et d’ailleurs” hasarda-t-il, “ce système de train a été construit pour le Pacte”. Il y avait de nombreux visages chinois – indiens et européens d’ailleurs aussi – dans la rue. A cet instant, une moto surgit à côté de moi. J’eu juste le temps d’apercevoir Guangzhou SD1200 sur le réservoir d’huile. Un jeune chinois au look de star de cinéma chevauchait l’engin, avec une beautée africaine aux larges cuisses sur le siège arrière. Le “sokoto” qu’il portait, claquait dans le vent et elle tentait vainement de dégager les cheveux balayant ses yeux.. Le train quitta la station et arriva rapidement à Yaba South. Prochain arrêt, Ebute Merra ; Ijora, Ebute Ero, Tinubu, où je devais descendre. Après avoir salué mon compagnon de route, je descendis du train dans la chaleur de la fin d’après-midi. Le soleil amorçait son coucher et je me dirigeais vers le bureau de mon ami sur Broad Street. La rue était longée par de hauts buildings ; c’était comme si je marchai dans un ravin profond, sombre et caverneux. Le système de circulation préservait l’île de la densité du trafic, de sorte que les piétons et les Hovakadas en majorité se pressaient dans les rues. Fatigué par ce voyage, la myriade d’images que j’avais vu récemment, tournoyait dans ma tête. Lagos s’était, effectivement, débarrassée de cette image de la quintessence du dysfonctionnement ; mais son âme n’avait-elle pas été sacrifiée dans cette affaire ? Dans ma jeunesse, j’avais été assez impressionné par l’énergie primale de la ville. Depuis les réformes initiées au début du siècle pour la qualité de vie à Lagos par Olusegun Obasanjo, une grande partie de la pauvreté qui donnait à Lagos l’allure d’une ville diminuée, avait disparu. Et maintenant, la ville semblait suinter le bonheur. Mais le punch n’était plus là.
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images en mouvement
- Kampala et Johannesburg
lÊgende de la photo: Godfrey M., in Nakasero Market – Kampala, Uganda
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Thomas Aquilina
lÊgende de la photo: Graffiti illustration in Yeoville – Johannesburg, South Africa
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Il est rare d’utiliser une bicyclette comme mode de transport principal pour circuler dans ces deux villes. La rhétorique habituelle de ce moyen de transport n’a pas encore pris son envol. Peutêtre est ce dû à l’accès restreint au espaces de vente et d’entretien des bicyclettes, ou bien encore aux véhicules plus encombrants et plus rapides qui refusent de partager la route et qui compromettent ainsi la sécurité des cyclistes. Dans ces villes, les transports publics(minibus) sont plus accessibles et représent le moyen le plus sûr pour se déplacer pour la majorité des voyageurs journaliers. Par contre, à Kampala, le trafic est dense et les boda-bodas (taxi-motos légers) sont très répandus.
Nakasero Market, Kampala, Uganda Dans un marché aux fruits, un rémouleur s’épuise à la tâche. Avec une bicyclette qui a été adaptée pour alimenter une meule, il aiguise des couteaux. Ses mains se sont endurcies au contact du disque abrasif. Le mécanisme judicieux est constitué d’une corde de nylon, nichée entre la jante de la roue et le pneu, qui tourne grâce au pédalage. Un chapeau à larges bords le protège des brûlures du soleil ougandais, à l’image des grands parasols un peu plus loin. Il ne semble pas dérangé le moins du monde par le traffic incessant de bétail et de marchandises qui se déroule autour de lui. De plus loin, les chalands le regardent faire son travail. Le regard plein de curiosité de quelques observateurs a été capturé par l’image. Yeoville, Johannesburg Sur un mur de plâtre, un graffiti attire le regard. Le dessin humoristique d’une vache sur le dos d’un homme roulant à bicyclette. Les lettres faites au pochoir apparaissent en grandeur nature. Mais la vache est largement disproportionnée par rapport au cycliste et pèse lourdement sur lui. Son pelage semble constituer des motifs dessinant la carte du monde. Comme si le monde surgissait sur l’épaule du cycliste. La vache est utilisée comme métaphore en lieu et place du singe sur le dos de l’homme, en référence aux coutumes traditionnelles zulu. Elle est représentée avec le mufle noir, une caractéristique de la race bovine élevée par les Nguni d’Afrique Australe. 80
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Ces deux photographies côte à côte ne font pas uniquement référence à un moyen de locomotion sur deux roues, elles évoquent également les quelques éclairs d’imagination et d’inventivité des gens de la rue. Le rémouleur et l’artiste graffeur sont des acteurs inhérents à l’espace informel de ces endroits, même si chacun de ces acteurs répond à des besoins très différents. Le rémouleur, Godfrey N. raconte que “tout ce qui se passe dans le marché tourne autour des couteaux. Les marchands en ont besoin pour couper la plupart des produits qui leur passe entre les mains, des tomates à la viande”. Godfrey, se dressant sur ses pédales, aiguise habituellement, environ deux cent couteaux par jour. Lwazi M.,
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légende de la photo: Nakasero Market – Kampala, Uganda
un habitant de Johannesburg, qui m’a montré le graffiti, me disait que l’illustration racontait l’histoire de tous ces petits métiers informels. Il ajoutait que “la vie dans ces conditions, reste alléatoire”. Ces activités informelles représentent une force de production qui ne devrait pas être sous-estimée. Par ce mode opératoire fluctuant et instable, les gens deviennent agiles. Et Lwazi m’a assuré qu”ils avaient tous un objectif bien précis.” Ces images expriment un élan, une énergie, bien que les bicyclettes restent stationnaires. Les sujets sont fixes dans l’espace, leurs jambes continuent de tourner et sont pourtant enracinées dans cet endroit.
Les bicyclettes deviennent en quelques sortes un moyen ludique stimulant pour les habitants, leur permettant de changer leur environnement. Cela n’implique pas obligatoirement une mobilité à l’extérieur ou encore des déplacements hors de la ville mais une simple transformation de leurs conditions de vie actuelles. Ces photographies révèlent les différentes améliorations ou modifications de ce qui existait auparavant. Follow on Twitter @thomasaquilina ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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D’une génération à l’autre Accross Generations (D’une génération à l’autre) a été un des événements Adventurers in Diaspora [AID] qui a eu lieu Mardi 7 novembre 2013 à la Damba Terrace au Golden Tulip Hotel d’Accra. Intervenants Denning Edem Agbeviadey [Ayigbe Edem] – Musicien ghanéen hiplife Patrick Thomas [Pat Thomas] – Musicien ghanéen highlife Modérateurs Ben Brako – Musicien, Présentateur de radio Ama K. Abebrese – Présentatrice TV, Actrice Avec la série « Across Generations » AiD cherche à faire connaître les efforts de collaboration inter-générationnels dans différents domaines artistiques. Across Generations explore les potentiels de collaboration dans la musique, la poésie, la réalisation de films, la peinture et la sculpture. Pour débuter la série, l’attention a été portée sur la collaboration musicale. Pat Thomas et Ayigbe Edem, qui ont collaboré sur un re-mix d’un classique de Pat Thomas « Sika ye mohya », étaient mis à l’honneur. Pat Thomas Patrick Thomas est né en 1951 à Kumasi, d’un père, professeur de musique et d’une mère, chanteuse vedette d’un groupe vocal. La vague disco et reggae qui envahit l’Afrique dans le milieu des années 70 provoqua différentes réactions dans la communauté musicale au Ghana. Tandis que certains musiciens boudaient la musique importée, d’autres comme Pat Thomas s’adaptèrent avec succès à la tendance pour créer leur propre style. Son groupe, The Sweet Beans, a été très populaire à la fin des années 70 et tourna dans tout le pays. Ils accompagnèrent également le président Général I.K. Acheampong pendant ses voyages officiels pour divertir les invités. Désigné par le Arts Centre comme « the Golden Voice of Africa » (La voix d’or de l’Afrique), Pat Thomas a gagné bon nombre de prix, y 84
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compris, le prix ECRAG pour l’album de l’année. Album à succès comprenant « Mdeo Wiase », « Megyedzi So, Gye Nyame Dzi », « Sika Nantee », « Anoma », « Medo Waise », « Yesu Se Bra », « Marijata » and « Stay there ». Sa chanson la plus célèbre était « Sika Ye Mogya », un classique des années 90 encore populaire aujourd’hui. Ayigbe Edem Denning Edem Agbeviadey est un jeune artiste ghanéen, de studio et de scène. Il se produit sous le nom de Ayigbe Edem ou plus brièvement Edem. Il est devenu célèbre avec la sortie de son premier album « The Volta Regime » en 2008 comprenant des titres à succès tel que «U dey craze », «Bra fremi fremi », «Nyornuviade », «Give it up », «Emmre Sesa». Voici quelques points de discussions débattus lors du premier épisode de « Across Generations
1. La pertinence du mentorship dans l’industrie musicale, tout comme les artistes plus âgés apprennent des artistes plus jeunes. Les intervenants ont partagé ce qu’ils ont appris de l’autre au cours de leur collaboration. Pat Thomas a, par exemple, a suscité l’intérêt d’Edem pour la pratique de la guitare. « C’est bien de se mêler aux plus jeunes. On apprend tellement de choses de chacun » disait Pat Thomas, en décrivant sa rencontre avec Edem pour lui apprendre à faire sonner sa guitare. « Nous avons appris l’un de l’autre et c’est une bonne chose »
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2. La nécessité de plus d’efforts pour améliorer la collaboration intergénérationnelle dans la musique. Les intervenants évoquèrent les succès commerciaux des collaborations musicales telles que Obour et A.B. Crentsils « Adjoa » et « Juliana ». Grâce à cette collaboration, chaque artiste a fait face à une génération de fans différente, et jusque là inexploitée. Ils ont évoqué à quel point des collaborations similaires pourraient booster les ventes pour les musiciens plus âgés. Ben Brako a évoqué l’improvisation dans le texte comme un exemple justifiant la nécessité de plus de collaborations. Selon lui, la culture derrière la musique est très importante. Il pense que les jeunes artistes peuvent apprendre des artistes plus âgés, à mieux se présenter dans leur musique et dans leur mise en scène.
3. L’importance de la performance live et de la pratique de un ou plusieurs instruments de musique. Ben Brako a parlé de la richesse des expériences vécues durant les spectacles musicaux live et conseille aux jeunes artistes de jouer plus souvent sur scène. Il a également reconnu que les enregistrements numériques étaient extrêmement pratiques et permettaient aux jeunes artistes d’enregistrer régulièrement plusieurs chansons. Il pense que les artistes plus âgés pourraient peut-se servir de cette technique pour enregistrer plus de morceaux, plus souvent.
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Ama Abebrese souleva la question des revenus financiers de la musique au Ghana. Elle fit remarquer que, contrairement à ce qui se passe en Occident, les royalties ne sont pas payées et il n’y a pas de grands labels de production qui signent et gèrent les artistes. Elle a demandé aux intervenants comment ils vivaient de leur musique. Edem suggéra comme moyen de revenu de rendre les vidéos youtube payantes même si cela restait succinct. Il remarqua qu’il était nécessaire pour les artistes ghanéens d’explorer d’autres moyens de créer des revenus avec leur musique, car les méthodes étrangères n’étaient pas applicables au Ghana.
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Le métier d’architecte s’est développé et s’associe maintenant à une série plus large de références culturelles. L’architecte peut maintenant se référer au cinéma, à la mode, à la littérature, à la philosophie, à la musique, à l’art, etc. et enrichir considérablement l’aspect culturel de la profession. Cependant avec un point de vue si large, la fonctionnalité de l’architecture – le côté rationnel et scientifique de la profession – est parfois oubliée. L’architecte, aujourd’hui, doit
optimiser de plus en plus ses constructions afin de les rendre à la fois accessibles et responsables. D’autant qu’ il y ait beaucoup à découvrir sur le côté pratique du métier, je crois que, dans le futur, le métier sera de plus en plus orienté vers la connaissance et l’expertise – pas simplement en transformant le savoir en nouvelles techniques de design, mais également en intégrant ce savoir dans ce que j’appelle “l’appréciation par l’expérience”
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Joel Attah, Central University College : « Vous avez parlé des modifications sur la design d’une construction qui sont faites sur place et retranscrites juste après sur le plan. Comment peut-on avoir accès à des méthodes de travail similaires en Afrique, étant donné notre faible niveau en nouvelles technologies et pour le travail en réseau ? C’est une question intéressante. Je ne sais pas quel est le niveau de connaissances nécessaire pour maîtriser les techniques de production et de design en Afrique. Ce que nous savons, c’est que pour chaque pays, chaque endroit dans lequel vous travaillez, vous pouvez adapter votre méthode de travail à cet espace en particulier. Ainsi il n’est pas absolument nécessaire d’utiliser à chaque fois les techniques les plus avancées. C’est tout à fait possible de travailler avec des technologies locales ainsi qu’avec des méthodes de travail qui s’adaptent à tous les endroits. Bekalu, Institut éthiopien de l’architecture , la Construction: “Les super structures avec lesquelles vous travaillez pourraient être considérées comme luxueuses dans certains contextes. Comment les justifiez vous et comment expliquez vous les complications et les possibilités qu’elles engendrent ?” La structure a toujours été importante en Architecture. Si vous regardez l’histoire du développement de villes comme Amsterdam ou Manhattan, par exemple, la structure de la ville a modelé entièrement l’aspect consumériste, productif et financier de la ville. Nous ne devons pas oublier que de principes similaire de géométrie et de structure ont joué un rôle important dans la construction des buildings. Donc si on parle de consommation, de production et de la façon dont les gens vivent dans un building, c’est très souvent relié à ces principes organisationnels. Je ne suis pas intéressé par la structure en elle-même. Je suis plus intéressé par ce que la structure peut faire pour l’organisation du bâtiment. Et je suis peut-être plus intéressé par les principes d’infrastructure, d’enracinement et par la façon dont les gens
se croisent dans l’escalier, dans le hall, dans les couloirs ou partout ailleurs où on peut trouver un nœud infra-structurel associé à l’architecture. Pour moi, c’est une des premières raisons qui me conduit à penser la structure du building. Si vous prenez le building Mercedez Benz avec la double hélice ; la double hélice est une idée d’infrastructure, ce n’est pas une idée de structure. Cela pourrait être une structure mathématique et géométrique ultra complexe, mais cela commence sur la base d’une infrastructure. Edem Tamakloe, Kwame Nkrumah University of Science and Technology : “ En ce qui concerne le développent durable social de l’espace, y-a-t-il des possibilités dans le futur, que la façon dont les gens perçoivent l’espace public change ? ” L’idée du développement durable est, je pense, un concept fascinant en architecture. J’ai remarqué que souvent, lorsque les gens utilisent un ascenseur, ils parlent peu aux autres. Et je pense que ce n’est pas vraiment dans le principe du développement durable. Ce n’est pas durable tout simplement parce que, ce n’est pas sain de prendre tout le temps l’ascenseur. C’est beaucoup plus agréable de se déplacer dans les escaliers parce qu’on croise d’autres personnes et c’est, espérons-le, par ce biais, une meilleure façon d’échanger nos connaissances. Et je pense qu’on trouve des espaces publics dans beaucoup d’espaces architecturaux. Il ne s’agit pas seulement du jardin public de la ville. Non, il s’agit aussi de la façon dont vous croisez l’autre dans une salle d’attente, ou dans un couloir avant d’arriver dans une salle de classe par exemple. Il y a beaucoup de concepts de développement durable dans le domaine social qui peuvent motiver les gens à travailler différemment, à échanger des connaissances, partager plus d’idées, et à mieux interagir que ce qui se passe actuellement dans les espaces que nous avons conçu. Donc je pense vraiment que réfléchir à une forme inspirée par les sciences sociales est très important avant de penser au design de l’espace public. ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Lagos est le centre économique du Nigéria, et génère une part importante du PIB national. La plupart des échanges commerciaux et financiers ont lieu dans le quartier d’affaires situé sur l’île. C’est également dans ce quartier que beaucoup de banques commerciales internationales, d’institutions financières et de grandes entreprises ont installé leur siège. Lagos compte un des niveau de vie les plus élevé comparé aux autres villes nigériannes et africaines.
Int
Lagos étant reconnue comme la capitale commerciale du pays, celle-ci attire naturellement une large population de nigérians et d’étrangers venant y régler différents types d’affaires. Cette activité importante génère inévitablement une pression forte sur le mouvement des transactions mais également sur la circulation des usagers dans l’enceinte des bâtiments bancaires. La Banque centrale du Nigéria (CBN) a institué récemment une nouvelle politique sur les transactions d’espèces, en mettant en place des frais de fonctionnement pour les retraits ou dépôts d’espèces supérieurs à N500 000 par personne ou N3 000 000 par entreprise. Cette nouvelle politique sur les transactions d’espèces (retrait et dépôt) au sein des banques, permet de diminuer (MAIS NON PAS ELIMINER) la quantité d’argent physique (pièces et billets) qui circule dans l’économie et d’encourager les transactions électroniques (paiements des marchandises, services, transferts, etc.) Cette nouvelle politique a été instituée à Lagos pour plusieurs raisons essentielles : • Pour les consommateurs : Transactions plus pratiques, plus de services en option, diminution de la criminalité liée à la circulation d’espèces, accès plus avantageux aux services bancaires et accès 94
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Oeuvre par Peter Odoh
térieure des Banques Revoir l’architecture
pour promovoir la monnaie virtuelle a lagos
Un Architecture Student Design Studio Par: Peter E. Odoh Projet supervisé par le: Dr. Okey Nduka . Maître de conférences Université du Nigeria , Enugu
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plus large au crédit. • Pour les entreprises : Accès plus rapide au capital, réduction des pertes de revenus et réduction des coûts de gestion. • Pour le gouvernement : Augmentation des rentrées d’impôts, meilleure inclusion financière, développement économique. Pour mieux promouvoir cette politique, les architectes sont sollicités pour repenser l’architecture des halls au sein des bâtiments bancaires de la ville. A l’échelle mondiale, les réseaux bancaires les plus remarquables en terme de transactions monétaires virtuelles sont les services bancaires mobiles, par internet, par téléphone, par carte électronique, par terminaux PoS (TPV) et par guichet automatiques. Le défi pour les architectes de Lagos et d’Afrique est donc de prendre en compte ces types de réseaux dans l’espace des halls de banques, comme des aspects essentiels de l’environnement bancaire mais il s’agit également de rendre l’espace plus accueillant pour le visiteur. La plupart des banques de Lagos ont été conçues selon un modèle basé sur le système des transactions en espèces comme le montre ci-dessous ce plan traditionnel d’un hall de banque. Dans la suite de l’article, nous appelerons ce type d’architecture : système “comptoir.” Les points suivants détaillent les principaux inconvénients du système “comptoir” 1. Faible prise en charge personnelle de la transaction due à la barrière du comptoir. 2. Les clients ne peuvent accéder facilement aux informations durant la transaction 3.Les fonctions électroniques fournies par le comptoir ne sont pas utilisables aisément par les clients.
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Oeuvre par Peter Odoh
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durable à faible LOGEMENT DES CO
Changer les mentalités du gouvernement sur les projets de HLM Par AnneMarie Constable
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OÛTS
TLa municipalité de la ville de Cape Town a lancé un nouveau projet de HLM innovant et subventionné dans la ville d’Ocean View, situé à peu de distance en voiture de Cape Town dans le Western Cape en Afrique du Sud. Le projet montre à quel point le gouvernement peut jouer un rôle dans la marche à suivre en matière d’habitat et de création d’emplois pour développer l’offre de moyens de subsistance durables dans les communautés appauvries. Les maisons en pierre du pays sont construites à partir de matériaux naturels trouvés sur le site et les architectes ont conçu un plan en forme de boîte, qui rompt avec les plans classiques des projets précédents du gouvernement. En ayant fourni des emplois à une majorité de la population au chômage de Ocean View, le projet redonne le sens de la dignité à la communauté qui a longtemps été réduite au silence. Ocean View, appelé à l’origine Slangkop, a été établi en township en 1968 pour parer aux déplacements forcés ordonnés par le régime de l’Apartheid dans le cadre de la loi Groupe Areas Act. Les gens de « couleur » étaient donc déplacés au même endroit et le taux de chômage atteignait environ les 85 %. La consommation excessive d’alcool et de drogue a généré crimes et violence domestique. Le manque de formation et d’éducation a rendu les opportunités de travail de plus en plus faibles.
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système sanitaire correct et sans services de base En 1951, suite à une étude menée par le National Building Research Institute dans le Township de Soweto à Johannesburg, des HLM furent conçus selon les standards minimum de qualité de vie qui étaient considérés comme suffisant pour des « non-européens » par le régime de l’Apartheid. Ces maisons typiques en forme de blocs (surnommées les 51/6) comprenaient deux chambres à coucher, un salon et une cuisine surmontée d’un toit en pente à double pignon, des installations sanitaires basiques dans une pièce séparée à l’arrière de la parcelle. Les murs en ciment de 150 mm d’épaisseur 100
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étaient recouvert de fibre-ciment ondulée. Il n’y avait pas de plafond (ou d’isolation) ni de murs internes. 19 ans après la fin de l’Apartheid, les HLM, fournis par le Programme de Reconstruction et de Développement (RDP) du nouveau gouvernement, sont encore conçus de cette façon. Le temps a prouvé que ces maisons-blocs typiques en RDP sont bien endessous de la norme minimale pour une qualité de vie confortable et saine. La minceur extrême des murs est une protection trop faible contre la pluie, le vent et le feu. Le gouvernement a situé le site à l’extrémité
d’Ocean View dans les années 80, mais le terrain n’a jamais été adapté pour des projets de construction à faible coût, étant donné le coût élevé que représente l’excavation du matériau rocheux. En Octobre 2006, un entrepreneur a été désigné pour enlever la roche et la broyer, et ce matériau a été vendu pendant 4 ans. A la même époque, le budget a été renforcé pour rendre le projet de construction financièrement viable. La Conception et la mise sur plan des maisons a seulement commencé en 2012 et la construction a commencé en 2013. Pauline Houniet, la coordinatrice en chef du projet au département de l’habitat de la ville de Cape Town, qui a lancé le projet depuis
ses débuts, explique : « La ville veut que les HLM soient perçus différemment. Quand on pense aux HLM, on pense immédiatement à la typologie des maisons-blocs en RDP. Nos voudrions changer les mentalités ». Le concept original d’après lequel les maisons sont conçues est l’utilisation de la pierre présente sur le site. L’utilisation du matériau nécessite beaucoup de travail, ainsi beaucoup d’emplois ont été créés pour les résidents. Les travailleurs sans formation sont formés sur le site par un expert en pierre et maçonnerie. Ce qui est important lorsqu’on propose des moyens de subsistance durables, c’est le ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Le projet d’habitation d’Ocean View « Mountain Wiew » vise à briser le moule classique avec un type de maison RDP « non conventionnel » qui respectera les 40 mètres carrés minimum exigés.
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transfert des connaissances à la communauté afin qu’elle soit en mesure d’appliquer dans le future ce qu’elle a appris. La Ville a approuvé un financement supplémentaire du Programme spécial de création d’emplois qui bénéficiera au Programme élargi des travaux publics du maire (EPWP). L’entrepreneur choisi pour le projet, la Mellon Housing Initiative, a facilité le programme EPWP, en s’engageant avec la communauté locale pour tenter de répondre à leurs besoins spécifiques. L’autre concept important est la conception d’un plan « out of the box ». Sur les 543 maisons, il y aura 5 différents types, explique l’architecte Andre Spies, de l’agence Twothink Architects ( nommé conjointement avec Etienne Bruwer). Les maisons de type A sont actuellement en travaux pour la phase 1 du Projet. La maison a un plan en T et chacune d’elle partage un mur mitoyen avec la maison d’à côté, ce qui permet d’économiser de l’espace (les murs ont 390 mm d’épaisseur). La forme en « T » permet d’articuler les différents espaces intérieurs ainsi que de créer des espaces ouverts à l’extérieur pour de futures extensions. Ainsi faisant, les maisons paraissent en faites plus grandes que l’espace de 40 m² prévu, explique Spies. La flexibilité du plan permet à chaque habitant d’ajouter quelque chose d’unique à l’identité de sa maison. La maison est protégée par un toit de tuiles en béton ayant des propriétés plus isolantes que le toit en tôle classique. Un faux plafond en-dessous dissimules des fermes pour une isolation supplémentaire au-dessus. En ce qui concerne la structure, la pierre est posée contre un coffrage en acier. Les blocs de béton sont utilisés pour les ouvertures de portes et de fenêtres pour créer des bords lisses sur les murs de pierre afin de faciliter la pose des portes et des fenêtres. Bien qu’il n’y ait pas de gouttières sur les toits, un tablier 104
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court tout autour des fondations de la maison pour évacuer l’eau. La pierre a des avantages bien plus importants pour l’environnement que la construction en béton. La pierre permet de créer dans des espaces à vivre confortables et sains. Ce projet unique est une étape positive vers le changement initié sur la façon dont sont conçus et installés les HLM. Il est prévu que ce projet soit un modèle pour des projets similaires à Western Cape et sur le plan national (et peut-être aussi sur le plan international). La collaboration et l’adhésion des différents groupes d’intérêts a été essentielle.
‘Ce processus a impliqué beaucoup d’apprentissage et il est important qu’à l’avenir, cet apprentissage soit utilisé pour créer de meilleurs modèles plus efficaces pour les projets de logement subventionnés par le gouvernement.’ Mary Ann Constable Two Think Architecture
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CrĂŠdits photo: Mary Ann Constable
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Architecture et Art au travail Pour la Mobilisation inclusive du DĂŠveloppement Urbain
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Art at Work, the itinerant experimental urban project launched by BOZAR and the European Commission, rallied local cultural partners and UNHabitat in its path, and became a lobbying and rallying instrument. The synergy of the partners’
La route de Kampala En septembre 2012, Le Centre des Beaux Arts de Bruxelles (BOZAR) a organisé une conférence régionale à Kampala, Uganda intitulée : “Comment l’art et l’architecture peuvent rendre le développement de la ville inclusif et durable ?” Cet événement faisait partie d’un projet plus large pour une plateforme urbaine mobile “Art at work”, une expérimentation conçue pour initier une réflexion sur la place, le rôle et l’accès à la culture dans la société civile. Le projet dans sa version simple se matérialise sous la forme d’un pavillon d’exposition en bois à ciel ouvert dessiné par l’architecte David Adjaye. Les pavillons sont placés dans des endroits publics et abrite des expositions temporaires de photographies contemporaines conçues par Simon Njami avec l’aide de curateurs locaux, ainsi que des workshops pour les artistes. Lancé lors de la 3e édition du sommet EU-Afrique à Tripoli, ce projet a été développé dans 6 capitales africaines de 2011 à 2012 (Addis Ababa, Le Caire, Harare, Kampala, Bujumbura et Nairobi) avec le soutien de la Commission européenne. Tout au long de ce projet, l’accueil du public, de la presse et des institutions a confirmé trois aspects essentiels : l’engagement d’une nouvelle génération d’artistes africains, de professionnels de l’art et d’architectes dans leurs villes ; l’importance de l’accès à la culture dans le contexte urbain ; et le besoin d’espaces urbains destinés à la créativité. ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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of Uganda, Kampala City Authority Council, Bayimba Cultural Foundation, and Makarere University, and the valuable collaboration of the Aga Khan Development Network representative office in Uganda, and ArchiAfrika and UN Habitat. The Declaration of Kampala was adopted at this forum, as an example of commitment that can rally regional, national and local stakeholders in the field of art and architecture around the common goal of inclusive and sustainable urban development in African cities. photo: KathleenCity LouwAuthority Council, ofCrĂŠdits Uganda, Kampala 108
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En outre, et mieux encore, ce projet a permis, grâce aux personnes qu’il a mobilisé et plus particulièrement à la conférence de Kampala, la gestation d’un petit lobby multidisciplinaire et multiinstitutionnel suffisamment puissant pour défendre un développement urbain axé sur les individus et sur la La conférence L’idée d’ajouter un aspect régional à l’édition de Kampala pour le projet “Art at Work” est venue de l’élan local déjà présent dans le réseau régional. Ainsi durant cette même période de l’Automne 2012, la Biennale mobile estafricaine (EASTAFAB), le festival Bayimba, la nouvelle biennale d’art contemporatin de Kampala (KLAART12), et la célébration du Jubilée national de l’indépendance ont été lancés. La conférence régionale intitulée “Comment l’art et l’architecture peuvent permettre le développement inclusif et durable de la ville ?” a été donc été pensée comme une initiative conséquente pour stimuler l’echange intra-africain sur les problèmes de développement urbain. Cette initiative a été soutenue par un workshop animé par les artistes du projet Art at work. Avec l’aide de l’appui essentiel de David Adjaye, la conférence a réussi à réunir plus de 70 professionnels de la région Est Africaine – maires, urbanistes, architectes et professionels de la culture – tous mobilisés pour (re)définir leurs villes. ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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L’impact Depuis Kampala, une réaction en chaine a eu lieu par l’intermédiaire d’interventions dans différents forums de haut niveau, et ce grâce à l’engagement de plusieurs individus et institutions spécialisés. En Octobre 2012, lors de la 3e réunion des ministres de la culture de l’ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) à Bruxelles, le Ministre Ougandais du Genre, du Travail et du Développement social, est monté sur la tribune pour évoquer la conférence de Kampala et proposer à l’assemblée d’adopter une résolution en ce sens. Cette proposition fut unanimement acceptée. Ainsi la Résolution N°21, sous le chapitre, “capacité de construction” précise que : ‘[Les Ministres de la culture des pays de l’ACP] proposeront des régles de lois afin de valoriser le rôle des arts et de l’architecture au service du développement durable et inclusif des villes de l’ACP’ En Avril 2013, BOZAR, la Commission européenne et ArchiAfrika ont été invités à organiser un événement annexe au 24e Conseil de Gouvernance de UN Habitat. L’événement, intitulé “Art et Architecture at work” proposait deux présentations, l’une par l’architecte sudafricain Heinrich Mbya à propos de son travail pour une architecture engagée socialement en Afrique du Sud et l’autre par Joy Mboya, directeur du GoDown Arts Center à Nairobi, à propos du prochain nouveau grand festival urbain Nai Ni Who.Les intervenants ont pu ainsi faire des recommandations à UN Habitat telles que : - appuyer l’observation, l’apprentissage et la documentation concernant la culture urbaine inclusive et émergente et les initiatives mises en place pour ré-imaginer la ville, pour valoriser la diversité culturelle, la confiance et l’harmonie culturelle entre les citoyens ; - créer un lien entre la société civile et les politiques urbaines nationales en exposant ces types de modèles; - appuyer les récits d’expériences locales concernant le développement durable. Cette 110
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collaboration s’est poursuivie en Novembre 2013 avec le comité “The Value of culture and creativity in urban development” lors des Jours européens pour le développement. L’événement annuel de la Commission européenne s’est orienté cette année-là vers des objectifs de développement inspirés par la vision d’“Une vie décente pour tous”. A cette occasion, BOZAR, la Commission européenne et UN Habitat ont réuni 5 membres issus de gouvernements locaux, du secteur culturel, du secteur de l’urbanisme, du secteur commercial, et du secteur de l’architecture et venant de différentes parties du monde (Joy Mboya du GoDown Arts Center de Nairobi ; M.A Masunda, ancien maire de Harare, l’urbaniste indien Shipra Narang Suri, et Carlos Jamarillo, l’ancien directeur du planning de Medellin, qui fut nommée la ville la plus innovante de l’année par le Wall Street Journal en 2012). Ce débat s’est révélé être, dans le forum, la seule discussion prévue au sujet de l’architecture. L’objectif étant de débattre sur le besoin d’intégrer pleinement l’art, l’architecture, les espaces publics, la culture et la créativité dans le programme de développement de 2015.
Que prévoir pour demain? L’UNESCO a statué qu’aucune société ne peut s’épanouir sans culture et aucun développement ne peut être envisagé sans qu’il puisse être considéré comme durable. En écho aux questions prioritaires du développement urbain – ‘l’élément le plus déterminant du 21e siècle selon la Banque Mondiale – il nous faut affirmer que le rôle de la culture est un élément essentiel pour la cohésion sociale et pour l’application de la démocratie dans ces villes nouvelles à la croissnce ultra-rapide des pays en voie de développement. En effet, dans le contexte mondialisé actuel et grâce aux nouvelles technologies de l’information, l’attractivité et la qualité de vie des villes génère un tissus social qui influe sur la croissance économique. La créativité venant de différents
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acteurs, que l’on retrouve dans chacune de ces villes,, est un moteur de développement. Des initiatives locales émergentes et des expérimentations visionnaires sont nécessaires pour concrétiser ce débat. Art at Work, ce projet urbain expérimental et itinérant lancé par BOZAR et la Commission Européenne, a permis de rassembler partenaires culturels locaux et UN Habitat sur une même voie. Il est, par la même occasion, devenu un outil de lobbying et de ralliement. Cette synergie des partenaires au sein des différentes missions (culture, développement, habitat) s’est concrétisée sur le terrain du développement urbain et a permis de renforcer le message diffusé lors des forum spécialisés. Bon nombre d’initiatives et de discussions importantes concernant le développement urbain basé sur la culture, ont été lancés sur le continent africain par des groupes de professionnels multidisciplinaires. Ainsi Doual’art’Salon Urbain de Douala’, La Biennale de Picha à Lumumbaschi, la série des conférences Perspectives Africaines de ArchiAfrika pour le “Dialogue de Lagos” se sont tenus en Automne 2013. Ces initiatives auraient besoin d’être documentées et diffusées. Les projets urbains actuels, tels que le festival Nai Ni Who de Nairobi, ont besoin d’être rapportés et analysés en termes de coûts, de bénéfices et d’impacts. Le futur forum officiel de 2014 du 4e sommet Union Européenne-Afrique à Bruxelles et le Forum urbain mondial de Medellin, sont des plateformes militantes idéales pour diffuser le message d’un développement inclusif et durable basé sur la culture.
Photo credit: ArchiAfrika 112
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The Road to Kampala In September 2012, the Centre for Fine Arts in Brussels (BOZAR) organized the regional conference How art and architecture can make city development inclusive and sustainable in Kampala, Uganda. This event was part of larger traveling urban platform project Art at Work, an experiment designed to generate a reflection on the place, role of and access to culture in civil society. The project’s simple format called for an open-air wooden exhibit pavilion designed by architect David Adjaye, placed in public spaces and sheltering temporary African contemporary photography exhibits conceived by Simon Njami and local curators, as well as parallel workshops for artists. Launched at the 3rd EU-Africa summit n Tripoli, it was produced in six African capitals from 2011 to 2012 (Addis Ababa, Cairo, Harare, Kampala, Bujumbura, and Nairobi), with the support of the European Commission. Throughout the duration of this project, public, press and institutional reception of this initiative confirmed three essential CrÊdits photos: Kathleen Louw ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Oguaa football pour centre de l’espoir
Crédits photo: ArchiAfrika 114
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Mfantsipim School est une école secondaire de garçons située dans la ville de Cape Coast, à 100 miles de Accra, la capitale du Ghana. Mfantsipim a d’abord été fondé en 1878 ; puis en 1905, elle est devenu la première école secondaire du pays. Ghana’s Football for Hope Centre a été construit sur le site donné par l’école lors de la campagne « 20 centres FIFA » en 2010.
Du développement durable
La durabilité était l’une des principales directives du projet, de la conception initiale au design détaillé. Nous avons suivi les principes du design passif et nous avons utilisé une palette de matériaux de constructions mixtes fait à base de composants locaux récupérés et renouvelables. Le système de design passif nous permet d’éviter le coût élevé d’un système de refroidissement et minimise les frais courants d’électricité et d’eau. Cela permet également de réduire les effets des coupures de courant et d’eau qui sont fréquentes dans le quartier. La fluctuation continue des prix des matériels importés tels que le béton, l’acier ainsi que le coût élevé et la faible qualité du bois traité étaient assez préoccupants. Cette situation nous a amené à envisager l’utilisation d’échafaudages récupérés et de conteneurs offerts pour la structure. Les matériaux locaux et les technologies du bambou ou des blocs de terre crue a permis de situer la construction au sein de son contexte naturel et culturel, mais cela garantit également que la construction et la maintenance du bâtiment pourra être assurée par la main d’œuvre locale. C’est un réel plaisir d’être ici dans votre centre un an après sou ouverture, et de voir qu’il est devenu un lieu plein de vie. Ce n’est pas seulement un édifice, mais bien un lieu de vie. Qu’est ce qui rend cet endroit si unique? Le centre FIFA Oguaa football for hope centre a été construit par la FIFA, mais il appartient à la communauté, et c’est très ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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important que cette communauté ait la pleine possession de toute l’installation. Ce matin, en arrivant, vous avez vu des gens qui jouaient, souriaient, et s’amusaient et c’est l’idéal ! Vous savez, la plupart du temps, les organisations construisent de très belles choses au début, mais cela devient vite un éléphant blanc. Vous n’obtiendrez rien des gens en les contrôlant. Pour notre centre, nous avons eu de la chance et je suis très heureux parce que chaque jour, je viens ici et je vois des enfants jouer et s’amuser. C’est cela qui me rend heureux. C’est tellement génial de voir des enfants, qui autrement traîneraient dans la rue, venir ici et s’amuser.
J’appelle ce lieu la clinique sociale parce que chaque jour, il n’y a pas seulement des enfants, mais des parents qui viennent ici pour parler avec nous à propos des changements qu’ils ont observés sur leurs enfants, après qu’ils soient venus jouer ici. Cela me rend heureux. Au moins, cela veut dire que le centre est là pour vraiment donner de l’espoir aux nonprivilégiés. Et c’est exactement ce que nous faisons. Pouvez-vous nous raconter un peu l’histoire du projet et ce qu’il est devenu aujourd’hui? Le centre FIFA Oguaa Football for Hope fait partie des projets lancés lors de la première Coupe du monde qui a eu lieu sur le sol africain. La FIFA a construit une vingtaine de ces centres dans toute l’Afrique, comme une résultante de la coupe du monde en Afrique du Sud. La FIFA a décidé de construire une installation au Ghana. Nous avons eu la chance d’être l’un des pays sélectionnés. L’idée était d’utiliser le
football pour promouvoir la santé, l’éducation aussi bien que le bien-être général des jeunes. Une des choses importantes à propos de cette installation, est que la FIFA, comme je vous l’ai dit, voulait que la communauté sur place en soit entièrement propriétaire et gestionnaire. Qu’il s’agisse de la conception du lieu, aussi bien que de la gestion du projet. Par conséquent, nous avons utilisé des matériaux bruts locaux pour construire le lieu et nous avons eu la chance de recevoir l’aide de l’architecte ghanéen Joe Addo pour concevoir le lieu. La communauté, propriétaire du lieu, c’est très important pour la FIFA et c’est pour ça que nous avons été en mesure de créer ce lieu de cette façon. D’abord en utilisant des matériaux bruts locaux et ensuite en demandant à un architecte ghanéen de concevoir le lieu. Quels sont les programmes spécifiques que vous mettez en place au sein de cet environnement incroyable qu’est le votre? J’utilise le mot “environnement” un peu librement, mais c’est pourtant bien que c’est. Vous avez créé un lieu... et aussi des activités très complètes qui profitent à tous les usagers de cet espace. Ici, nous gérons des programmes pour les enfants de différents groupes d’âges. D’abord, nous avons un programme pour les enfants âgés de 4 à 15 ans que nous appelons “Play for fun. Learn for life” (Jouer pour s’amuser. Apprendre pour vivre) Il a été conçu et structuré sur un programme scolaire de 48 semaines et chaque semaine, un sujet différent est enseigné aux enfants.
Ce programme est mis en œuvre dans un cadre unique et inhabituel en utilisant le football comme un outil pédagogique. Nous avons quitté les salles de classe traditionnelles. Nous ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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utilisons le football pour enseigner aux enfants des compétences liées à la santé, la vie mais aussi la sociabilité. C’est ce qui nous rend unique, parce que, par exemple, nous utilisons le terrain de foot comme salle de classe et les entraîneurs comme professeurs. Ce programme a déjà eu lieu l’an passé. Avec cette installation, nous avons aussi essayé d’intégrer les jeunes adultes de 15 à 25 ans. Dans ce programme, nous choisissons de jeunes adultes déscolarisés, en décrochage scolaire et qui ne font plus rien du tout... ceux qui traînent simplement dans la rue. Nous les emmenons au centre, nous invitons des intervenants extérieurs après avoir identifier les besoins personnels de chacun afin de comprendre réellement quels sont leurs problèmes et comment nous pouvons intervenir. A la fin de la journée, nous sommes en mesure d’en scolariser quelquesuns et de trouver des emplois pour d’autres. Nous pouvons aussi en former certains pour travailler dans le centre. Quelle a été la réaction générale et pensez vous que l’architecture a eu un impact direct sur la façon dont le projet s’est déroulé ? Pensezvous que l’architecture compte?
‘L’aspect positif est que nous utilisons cet espace pour promouvoir le tourisme sportif et c’est là où la question de l’architecture a son importance. Je pense vraiment que l’architecture compte. Nous avons beaucoup de visiteurs qui viennent faire 118
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un tour pour visiter le bâtiment. L’environnement est assez sain pour les enfants. Quand on regarde les environs, c’est très vert. Regardez les arbres, les bambous, la structure entière, c’est très aéré.’ Donc oui, je crois qu’un des points positifs de ce projet dans sa globalité, c’est son architecture. C’est très important. Pour terminer, j’aimerais que vous nous parliez de vos projets futurs. Vous avez mentionné l’ouverture d’une autre installation dans le nord. J’aimerais vous dire que nous sommes très contents de vous soutenir, avec l’aide de Francis Kéré pour la conception, qui d’ailleurs est très enthousiaste à cette idée. Dites moi selon vous, pourquoi il est important d’essayer de dupliquer ce projet, tout en le contextualisant dans l’environnement dans lequel il est construit.
‘En premier lieu, je voudrais vous remercier particulièrement Constructs LLC pour le travail formidable qu’ils ont fait pour nous. Et plus spécialement Monsieur Joe Addo. Nous essayons de développer et de construire beaucoup plus de centres. Nous essayons de faire tellement d’autres choses qui implique l’architecture. J’espère que nous pourrons être partenaires avec des institutions similaires à ArchiAfrika pour développer plus de projets.’ ArchiAfrica Magazine Septembre 2014
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Collaborateurs Joseph Osae-Addo Cyril Akika Marianella Jimenez Calderon Little Sun Godson Egbo Thomas Acquilina Ben van Berkel Peter Odoh Mary Ann Constable Kathleen Louw Wahab Musah Editeur Tuuli Saarela Keziah Illidge Direction artistique & conception Joseph Osae-Addo Kodzo Nyanyuie Doamekpor Translation Cecile Johanet 122
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