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RÉGIONS LA CONSTRUCTION BOIS EN NOUVELLE AQUITAINE
L’ACTUALITÉ DES ACTEURS EN RÉGIONS
LLa Nouvelle Aquitaine est la plus grande étendue de forêts en France métropolitaine, avec un territoire de près de trois millions d’hectares. De feuillus, majoritairement comme dans toutes les régions du pays, et de résineux particulièrement adaptés à la transformation et à la construction, comme le Pin maritime et le Douglas. Le premier a été mis à rude épreuve, l’été dernier, en faisant les frais des incendies de forêt, mais il s’agit d’une essence réputée pour la qualité de son écorce particulièrement résistante au feu. Les deux méga-feux qui ont ravagé plus de 30 000 hectares de forêts sur 600 000, en Gironde, à la Teste-de-Buch et sur le secteur de Landiras et de Sainte-Hélène, n’ont pas réduit tous les arbres en cendres. Bien que leurs racines aient été brûlées, beaucoup, les plus gros, ont eu droit à une nouvelle vie, coupés, puis passés en scierie pour être transformés en bois construction, de charpente, de bardage, parquet, lambris, ou en bois de palettes. En revanche, l’écorce qui peut être exploitée en paillage pour le secteur de la jardinerie n’est plus valorisable. « En protégeant le pin, l’écorce a brûlé mais le bois a été en grande partie préservé » , précise Géraldine Gay-Mallet, prescriptrice bois pour Fibois Landes de Gascogne. « Cette altération a pu entraîner une moins-value de l’arbre à la vente. Et maintenant, huit mois après, il commence à bleuter. Ce n’est pas embarrassant pour du bois de palette, mais c’est suffisamment inesthétique pour que cela freine son utilisation en bois de construction. Même s’il n’a perdu aucune de ses qualités mécaniques, cette teinte le rend inapte à la vente en tant que matériau de construction » . Un peu plus au nord-est de la région, dans les forêts de Corrèze, Creuse et Haute-Vienne, les peuplements de Douglas arrivent à maturité de récolte. « Cette essence d’origine nord-américaine (qui n’est ni un pin, ni un sapin) a été introduite en France en 1842, puis principalement plantée dans les régions de moyenne montagne du centre du pays à partir des années 1960 » , rapporte Sabrina Pedrono de l’association France Douglas, créée en 1993. Ces plantations ont permis de constituer un massif de plus de 400 000 hectares, qui fait de la France le premier producteur européen de Douglas. Même si cette surface reste modeste ( 3 % de la surface forestière française ), elle a permis d’ores et déjà de produire 18 % des sciages français en 2020. Dans 15-20 ans, elle pourrait représenter 30-35 % de la production des sciages nationaux. Au début des années 1990, les peuplements forestiers étaient encore relativement jeunes, et la production de Douglas restait confidentielle. L’association a initié, dès sa création, de nombreuses études de caractérisation du Douglas, afin de le valoriser comme matériau de construction, en misant sur ses deux qualités principales : la durabilité naturelle du duramen de l’arbre, et son niveau de résistance mécanique. « Pour améliorer la lisibilité du Douglas sur le marché de la construction, les entreprises adhérentes de France Douglas ont pris très tôt la décision de travailler ensemble à l’élaboration d’une offreproduits ciblée, standardisée et qualifiée aux plans technique et environnemental ( élaboration de FDES pour chaque produit ), et harmonisée avec les cadres normatif et réglementaire. Cette offre couvre les produits de structure ( bois massif ou produits d’ingénierie type BLC ou CLT ), de revêtement extérieur ou d’aménagement extérieur et s’enrichit sans cesse. La filière est prête à répondre aujourd’hui, techniquement, à la demande des marchés » . Désormais, la tâche de l’association est de convaincre les prescripteurs, constructeurs, charpentiers, promoteurs, architectes, que ce résineux made in France est l’une des réponses bois à leurs projets. En Nouvelle Aquitaine, nombreux déjà sont les constructeurs bois, comme Jimmy Elion, fondateur d’Innov Bois Aquitaine basé à Saint Jean d’Illac ( 33 ), à utiliser du Douglas « en bardage à couvre-joint, notamment pour revêtir les maisons arcachonnaises sur le Bassin, en carports et autres abris extérieurs aussi, où le bois est exposé à l’eau et à la chaleur, aux UV. Car le Douglas offre l’avantage de ne pas avoir à être traité ( duramen ) » . De fait, Innov Bois Aquitaine offre un profil encore peu fréquent dans l’univers des constructeurs. Jeune entreprise créée il y a seulement cinq ans, elle emploie actuellement 22 salariés dans ses ateliers et son service commercial. « Nous sommes constructeur bois, et aussi, charpentiers couvreurs zingueurs. Nous réalisons des tiny-houses et nous souhaitons développer de nouveaux marchés à travers l’hexagone, dans la construction en madriers notamment, en partenariat avec l’industriel scandinave Kontio » . Développer une franchise nationale, c’est dans ce but que Jimmy Elion a créé le pôle Innov Bois France. « Nous attendons les premiers franchisés pour la fin de l’année, voire début 2024. Ils bénéficieront de l’image de marque que nous avons commencé à mettre en place sur le net, ce qui facilitera leur visibilité et leur permettra de développer leur marché. En parallèle, ils auront l’obligation de réaliser quelques maisons par an pour le constructeur nordique qui manque de poseurs sur le territoire national. D’ailleurs dans cette perspective de développement, nous recrutons des chefs d’équipe, charpentiers, couvreurs et constructeurs bois » . Plus prudente par rapport à l’activité des prochains mois, Yasmine Serre, gérante d’Alaya Maison Bois, installée au Teich, voit nombre de dossiers retoqués par les organismes financiers. Pourtant, la demande est bien là, mais les conditions d’emprunts sont de plus en plus strictes : un vrai frein à la construction pour de nombreux candidats à l’accession qui plutôt que de repousser leur projet, préfèrent l’annuler. « Notre double casquette de constructeur en madriers, et depuis quelques temps également en ossature bois permet de répondre aux projets d’extension, dont les budgets sont moindres. Mais les réalisations neuves en madriers se font plus rares, et plus petites : il s’agit souvent de maisons d’une quarantaine de m² que l’on installe à quelques mètres de l’habitation principale, en logement d’amis, ou comme bureau. Mais, plus on construit petit, plus c’est complexe et plus c’est cher… » . En attendant que les banques revoient leur politique de prêts, Yasmine Serre, retravaille des projets de propriétaires déçus pour répondre aux attentes. Malgré cela, son carnet de commande continue de se remplir quelque soit le système constructif. D’ailleurs, elle se prépare à réaliser une belle construction en madriers au nord de Bordeaux.
Texte : Mireille Mazurier