La résidence d'artiste en milieux scolaire et éducatif

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La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif - pratiques et recherches –

Enfance, Art et Langages ACTES DU COLLOQUE | 24 et 25 septembre 2013 | FRANCE – BELGIQUE - QUEBEC


Remerciements Enfance, Art et Langages remercie ses invités pour la qualité de leur interventions, ainsi que les partenaires et équipe sur place qui ont permis la tenue de ce colloque.

Ce colloque s’inscrit dans le cadre de la Convention de recherche 2012-14 qui lie : Enfance, Art et Langages - Caisse des écoles de Lyon La DSDEN du Rhône Université Claude Bernard - Lyon 1 - ESPE Université Lumières - Lyon 2 - Équipe d'accueil Éducation Cultures et Politiques L'Institut Français de l'Éducation

Organisateurs Christine Bolze et Marion Gronier pour EAL ainsi que : Alain Kerlan, Jean Paul Filiod, Christian Lallier, Luc Trouche, Nicolas Favelier et Claudine Potok Partenaires Ville de Lyon, Caisse des écoles de Lyon - Enfance, Art et Langages, Institut Français de l'Éducation, Université Lyon 1 - ESPE, Université Lyon 2 Laboratoire Éducation Culture et Politique et Centre Max Weber (UMR 5283) et le Ministère de la Culture et de la Communication. En partenariat avec la DSDEN du Rhône, l'Opéra de Lyon et l'École Normale Supérieure de Lyon Réalisation des actes Jean-Paul Filiod, Alain Kerlan, Christian Lallier, Christine Bolze, Caroline Bruguière, Nadège Galakhoff Montage vidéo Mélodie Tabita, Christian Lallier


Sommaire

SOMMAIRE

2

INTRODUCTION

3

LE PHENOMENE RESIDENCES D’ARTISTE

4

Alain Kerlan

L’entrée des artistes

4

LES RESIDENCES EN RECHERCHE

12

M. Evreux

L’Opéra à l’École 12

F. Carraud

Classe artistique : Quelle influence sur le travail enseignant ?

15

C. Choquet

De la boîte noire au troisième espace

34

M-C Le Floch

Le projet MUS-E® À Lille

41

J. P. Filiod

Résider en résidence - Un détour par l’espace

49

S. Necker

Evaluer l’EAC en partenariat ! Etude de cas

56

M. Lemonchois La participation d’élèves à la création d’un conte avec professionnels N. Montoya

62

Réflexions comparatives sur les résidences d’artiste : vers la fin d’une rhétorique de l’exception ?

82

ARTS ET ARTISTES A L’EPREUVE DE LA RESIDENCE

95

M. Buscatto

Le travail artistique en mutations - Dynamiques et tensions

95

Table ronde

L’art et l’artiste au risque de la résidence C. Lallier avec A. Damani, C. Hurtig-Delattre, C. Llobet et M. Mercier

104

Dialogue

Alain Kerlan, dialogue et interview avec Christian Ruby

106

Table ronde

Des formes esthétiques entre « œuvre » et « production » J. P. Filiod avec J. Lefebvre, D. Cerclet et E. Eudes

107

CLOTURE

110

Marie-Christine Bordeaux, Grand témoin du colloque

110

ANNEXES

122

Les annexes contiennent une bibliographie ainsi que des fiches expériences décrivant la majorité des dispositifs artistiques cités dans ces interventions, n’hésitez pas à vous y référer.


A c tes d u Col lo que : la rés iden ce d ’ar tis te en mi lie ux s c ola ire et é duca ti f

Introduction Les 24 et 25 septembre 2013 s'est tenu à Lyon un colloque intitulé : La résidence d'artiste en

milieux scolaire et éducatif – pratiques et recherchesCes journées de réflexions organisaient la rencontre et surtout l'échange entre artistes, pédagogues et chercheurs. Venus de différents pays de la francophonie, les intervenants se sont ainsi concertés sur la place centrale qu'occupent les résidences d'artistes et sur leurs impacts dans les

milieux éducatifs. Deux journées riches en hypothèses et débats que nous vous

présentons dans ces Actes numériques.

Afin de faciliter votre lecture, voici un rappel des contenus approchés : Ouverture par Alain Kerlan : L'entrée des artistes. La première journée a été dédiée aux résidences qui ont été abordées sous deux angles : la présentation fine et illustrée de dispositifs avec sept exemples français, belges et québécois (en annexe), puis les observations et analyses des chercheurs qui les ont étudiées. Chacune de ces interventions a été transcrite dans ce document dans la partie Les résidences en recherche.

La deuxième journée a privilégié l'approche artistique des résidences. Aussi, après une conférence de Marie Buscatto sur les mutations de ce travail artistique et un dialogue entre les philosophes Alain Kerlan et Christian Ruby, trois tables rondes se sont succédées pour mieux appréhender les notions de risque, d'œuvre et de production… Les travaux de cette journée ont été filmés et montés pour ces actes et sont introduits dans la partie Arts et Artistes à l’épreuve de la résidence ; vous trouverez dans ce document des liens vers

les vidéos en question.

Observatrice attentive des journées de travail, Marie-Christine Bordeaux a tenu le rôle de grand témoin du colloque et en a fait la synthèse dans sa conférence de clôture.

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Ac te s du Collo que : L e ph éno mèn e résidence s d’ a rt ist e

Le phénomène résidences d’artiste L’entrée des artistes ALAIN KERLAN ,

philosophe, professeur des universités en Sciences de l’éducation

à l’Université Lumière – Lyon 2

La préoccupation du commencement, de

l’incipit, est sans doute commune au travail artistique et à l’exercice philosophique, et plus largement à l’exercice de la pensée et de l’expression, quel qu’en soit le matériau. Un titre à cet égard n’est pas une étiquette apposée après-coup. J’ai choisi d’intituler cette conférence introductive d’un colloque consacré aux résidences artistiques en milieu éducatif : « L’entrée des artistes », et non pas, par exemple : « Des résidences

Par où commencer ? Le choix de placer ce colloque sous cette expression : « l’entrée des artistes », n’obéit pas

au

seul

plaisir

d’une

métaphore

circassienne. Encore que… L’art à l’école, c’est tout de même un sacré cirque dans la classe ! Dans la forme scolaire ! J’entends encore l’exclamation d’une professeure des écoles exerçant dans une école maternelle accueillant un artiste en résidence dans le cadre

du

programme

Enfance,

Art

et

artistiques à l’école, pourquoi comment ? ».

Langages (EAL) : « Quand je vois comment

Je voudrais brièvement m’en expliquer, dans

l’artiste travaille, je me demande si son cerveau est

la mesure où ce choix n’engage pas

vraiment fait comme le mien ! ». Déclaration

seulement la forme, mais bien aussi le fond

pleine d’humour, et qui évoquera à nombre

de mon propos.

d’entre nous quelques souvenirs, mais dont l’humour

fait

état

d’une

expérience

marquante, et significative.

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Ac te s du Collo que : L e ph éno mèn e résidence s d’ a rt ist e

L’expérience de la résidence, l’expérience

buterions inévitablement sur cet écueil si

partagée de la résidence, voilà ce qui me

nous prétendions définir d’emblée ce qu’est

semble constituer le point d’entrée le plus

«

approprié

dans

les

scolaire », et si nous nous enfermions dans

réflexions

que

notre

la recherche d’une définition préalable et

colloque. En effet, et nous le verrons très

canonique. Il y a de fait sous le même terme

vite, la toute première caractéristique des

des pratiques fort diverses, et c’est cette

résidences qui nous réunissent est leur

diversité et cette effervescence qui doivent

diversité, multipliée de surcroît par la

être préservées.

les

questions

voudrait

et

aborder

une

résidence

artistique

en

milieu

diversité des expériences qu’elles suscitent, diversité qui décourage par avance et rend vaine toute tentative de définition préalable.

Ce que dit la charte nationale Il existe vous le savez une « charte nationale » concernant les résidences d’artistes, qui fait

Se saisir d’une diversité, et non la réduire

l’objet d’une circulaire parue en mars 2010. Son intitulé exact est le suivant : « Charte

Mon intention toutefois n’est nullement

nationale

d’éviter la notion de « résidence », elle va

pédagogique des résidences d’artistes ». Elle

être au contraire incessamment interrogée,

distingue :

illustrée, mise en perspective ici même

-

:

la

dimension

éducative

et

La résidence de création ou d'expé-

pendant deux jours. Il s’agit d’éviter l’écueil

rimentation, qui développe une activité

du formalisme ou du nominalisme. Auguste

propre de conception d'une œuvre et

Comte lui-même, père comme on le sait du

des actions de rencontre avec le public

positivisme,

pratique

de façon à présenter les éléments du

consistant à commencer une réflexion ou un

processus de création tout au long de

exposé par une définition générale de leur

l'élaboration de l'œuvre. Sa durée est

objet. Il qualifiait non sans humour cette

variable, de plusieurs semaines à

pratique de « dogmatisme puéril ». Nous

plusieurs mois, et elle n'aboutit pas

dénonçait

cette

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Ac te s du Collo que : L e ph éno mèn e résidence s d’ a rt ist e

-

nécessairement à un spectacle, une

l’éducation, lequel stricto sensu ignore le

exposition ou une publication.

terme comme la notion de « résidence ».

La résidence de diffusion territoriale, qui s'inscrit en priorité dans une stratégie

de

développement

local,

selon deux axes : diffusion large et diversifiée de la production des artistes et actions de sensibilisation. -

La

résidence

association,

Au-delà de la définition : le mot et la chose Distinguons donc le mot et la chose. Cette affaire des « résidences artistiques en milieu scolaire » me semble comporter deux enjeux,

qui

correspond à une présence artistique dans un établissement culturel, sur une durée de deux à trois ans. Elle a une triple mission de création, de diffusion et de sensibilisation.

lesquels bien entendu s’entrecroisent. Il y a bien un enjeu du côté des mots, de la dénotation comme de la connotation des mots, le choix même du terme « résidence » est au cœur de cet enjeu, mais il y a tout autant un enjeu du côté des choses sous les

Une école, un collège ou un lycée peut

mots, et les choses, entendons par là les

accueillir des artistes en résidence. Cette

pratiques et les dispositifs dans leur diversité

modalité particulière est appelée « résidence

sous la même étiquette.

en établissement scolaire ».

Ce

que

cette

notion

de

«

résidences

Nous avons bien lu : pour la charte et dans sa

artistiques en milieu scolaire » nous invite à

façon de peser les mots, la résidence en milieu

interroger,

scolaire est une modalité de la résidence

croisement où les chemins de l’art et les

association, avec sa triple mission. Nous

chemins de l’éducation en viennent à se

l’aurons bien constaté : jusque dans son titre,

rencontrer

cette charte pèse méticuleusement ses termes

carrefour que je me propose d’examiner.

entre d’un côté le langage de la « résidence »,

c’est

et

donc

ce

carrefour,

s’interpénétrer.

C’est

ce

ce

***

qui est celui de l’art et de la culture, pas celui de l’école, et le langage de l’école et de 6|Pa g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e ph éno mèn e résidence s d’ a rt ist e

Cette question, ce désarroi, je ne l’ai Posons

donc

à

nouveau

la

question

:

Pourquoi aujourd’hui des artistes à l’école ? Pourquoi « l’artiste en tant qu’artiste » comme

pas

entendu

comme

une

demande

« pédagogique » ou « didactique ». Ce professeur ne se serait nullement satisfait d’un discours sur le partenariat, qui avait

partenaire éducatif, sinon recours éducatif ?

d’ailleurs été largement exposé. Non. Sous l’inquiétude bien compréhensible, se tenait

L’artiste et/ou l’enseignant Je

voudrais

ouvrir

en

même « stupéfiant », « scandaleux », au sens

rapportant un cri du cœur. Pas le mien. Il

étymologique : ce dont il avait été question,

s’agit du cri du cœur d’une enseignante en

et ce dont il est aussi question dans ce

arts

à

colloque lyonnais, ce n’est pas de la place et

Beaubourg, en janvier 2007, lors d’une des

du rôle de l’art en éducation, à l’école, mais

dernières sessions d’un important colloque

bel et bien de l’entrée de l’artiste en tant

international consacré à l’évaluation des

qu’artiste dans le champ éducatif, dans le

activités

domaine des missions de l’école.

plastiques.

cette

un constat assez simple mais décisif et

La

scène

artistiques

et

réflexion

se

situe

culturelles.

Silencieuse peut-être jusque-là, et à l’écoute des

communications

issues

du

monde

entier, une participante avait pris la parole pour

ne

poser

qu’une

seule

mais

douloureuse question : « Mais nous autres,

professeurs d’arts plastiques, que devenons-nous dans tout cela ? ». Il n’avait été question, au cours ces journées, en effet, que des artistes

Je crois que c’est en effet une bonne question : « Pourquoi des artistes à l’école ? Et pourquoi aujourd’hui » ? « Pourquoi des artistes dans l’école par les temps qui courent ? » Je ne prétends pas y répondre, mais à l’orée de ce colloque, je me propose d’ouvrir au moins quelques pistes.

et des dispositifs d’éducation artistique faisant appel aux artistes.

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Ac te s du Collo que : L e ph éno mèn e résidence s d’ a rt ist e

Une première piste :

Une seconde piste :

sous le signe partagé de l’esthétique

l’artiste « à la place » de l’enseignant ?

Je ne développerai pas la première piste, elle

Je me contenterai sans trop de commentaires

veut simplement rappeler que ce qui nous

de vous soumettre quelques réponses :

occupe

Une première réponse à minima : celle

s’inscrit

dans

un

mouvement

général, dans une dynamique d’ensemble

d’Erutti, plasticienne, qui a été en résidence

affectant l’éducation et l’école, non sans

à EAL : Seul un artiste peut introduire l’élève,

relation avec la société et la culture dans son

l’enfant, dans une véritable expérience

ensemble : la montée en puissance d’un certain nombre de valeurs ou de dimensions que l’on peut qualifier de façon générale

esthétique, l’enrôler dans une authentique démarche artistique, parce que lui seul l’habite

pleinement.

Réponse

discutable

d’esthétique : redécouverte du sensible, du

sans doute, qui fait trop l’impasse sur le

corps, de l’imagination, de l’émotion, de la

partenariat, mais qui a le mérite de nous

singularité… Autant d’éléments en effets plus proches du vocabulaire de l’art et de l’esthétique que de celui de la rationalité scientifique. Il m’est arrivé de théoriser ce

mettre

en

face

d’interrogations

dérangeantes mais incontournables : L’appel aux artistes vise-t-il à « mieux faire » ce que l’enseignant seul ne peut accomplir, ou à

mouvement en avançant l’hypothèse d’un

faire « autre chose, autrement » ? Ne

basculement du modèle éducatif, longtemps

désigne-t-il pas en creux l’existence d’une

et encore assez largement d’inspiration rationnelle-scientifique, vers un « modèle esthétique en éducation ». Cette considération générale ne répond pas

limite inhérente à l’enseignement dès lors qu’il s’agit du pouvoir éducatif de l’art ? La réponse de Gérard Garouste : Interrogé sur l’apport de l’artiste à ces élèves en

toutefois à la question angoissée de mon

difficultés accueillis par des artistes en

professeur d’arts plastiques. Pourquoi des

résidence à La Source, lieu éducatif créé par

artistes « en chair et en os » ? Cette question

le peintre, Gérard Garouste m’avait fait la

ouvre la seconde piste.

réponse suivante : « Ce que l’artiste apporte

d’abord

?

Une

nécessaire

et

salutaire 8|Pa g e

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Ac te s du Collo que : L e ph éno mèn e résidence s d’ a rt ist e

déstabilisation. Ce n’est pas l’absence de normes,

contre la logique scolaire, le règne de

mais la capacité à produire, travailler, déplacer la

l’expliquer/comprendre.

normativité

qui

».

importe…

qu’explicitait

une

Un

propos

autre

réponse,

métaphorique, comparant les rôles et les

Une troisième piste :

places

de

le Cheval de Troie dans la forme scolaire

l’échiquier.

Une troisième piste pourrait s’appeler méta-

L’artiste a tous les privilèges de la diagonale

phoriquement « la piste du Cheval de

du Fou, voire ceux de la Reine (le Fou est

Troie » : l’artiste dans l’école contre l’école,

néanmoins

pour desserrer - voire défaire - l’étau de la

comparatives

l’enseignant

aux

de

l’artiste

pièces

choisi

de

pour

sa

et

portée

métaphorique, on l’aura compris), tandis que

forme scolaire.

l’enseignant se trouve consigné au pré-carré

À suivre cette piste, on est aussitôt appeler

du Roi, au champ-clos royal. Esthétiquement,

à être attentif à ce que « l’entrée de l’artiste »

si je puis dire, le maître-roi est nu…

inéluctablement

Je pourrai enfin emprunter à Marc Le Bot, ou

Ses effets sur la forme scolaire. Il s’agit

du moins envisager à partir de ses propos

d’effets spatiaux, temporels, relationnels,

sur l’art, une troisième réponse, pas très

déjà bien documentés, et qu’on retrouvera

éloignée de celle de Garouste, à première

assurément dans les communications et

vue : « J’appelle art, déclare Le Bot, ces effets

discussions de ce colloque.

de perturbation que l’artiste produit dans un

Dans cette perspective, à un premier niveau,

langage par ailleurs très normalisé, et par lesquels il rompt la communication. Il n’y a rien à

Les

objets

de

protestation

qui

habituels

de

l’art

constituent

s’oppose perception

aux

une

modes et

de

compréhension. Et donc du même coup, ajouterai-je, une sorte de machine de guerre

dans

l’école.

nous pourrions analyser l’entrée des artistes dans

comprendre. Il s’agit d’affronter ».

bouscule

l’école

comme

un

processus

de

« déscolarisation », de « dé-disciplinarisation » des arts. Ce n’est pas là quelque chose d’anodin, bien au contraire. Cela touche nécessairement à la nature même de l’école, ou plus exactement de la forme scolaire. Cela peut être lu comme l’indice d’un 9|Pa g e

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Ac te s du Collo que : L e ph éno mèn e résidence s d’ a rt ist e

changement

profond,

certes

encore

Les pistes précédentes oublient une donnée

souterrain, voire marginal, qui fait signe vers

essentielle. Elles n’interrogent pas du côté

une autre école…

des artistes eux-mêmes. Pourquoi en effet

À un second niveau, dès lors, nous touchons à des processus et à des enjeux qui débordent «

de

l’éducation

beaucoup artistique

l’enjeu »,

de

puisqu’ils

concernent le devenir de l’école elle-même, du modèle éducatif, et procèdent d’une vision critique et d’une visée de rupture avec l’état des choses. L’artiste pour changer

l’école, pour changer une école qui doit

les artistes d’aujourd’hui acceptent-ils voire même revendiquent-ils - d’entrer dans l’école ? Pourquoi « y vont-ils » ? Comment comprendre ce double mouvement, de l’art(iste) contemporain vers l’école et le champ éducatif, d’artistes « en « demande d’école », d’un côté, et de l’école en demande d’art(tistes) contemporains, de l’autre ?

changer, mais ne peut changer par elle-

Voici la thèse que je défendrai : Si l’art et les

même. C’est la lecture maximale que je

artistes d’aujourd’hui sont impliqués et

proposerai de la politique éducative des arts

sollicités dans le champ éducatif, si même ils

menée un temps par Jack Lang. L’image du

s’y engagent, c’est parce qu’il y a dans l’art

cheval de Troie, donc. Et une réponse à mon

d’aujourd’hui et la démarche artistique

professeur d’arts plastiques.

d’aujourd’hui, qu’elle se déploie sur le plan visuel, sur le plan émotionnel, ou sur ceux

L’art d’aujourd’hui, l’école d’aujourd’hui : des préoccupations en partage Reste toutefois au moins une question, ouvrant une quatrième piste : mais pourquoi les artistes en tant qu’artistes « y vont-ils » ? Pourquoi l’art contemporain est-il aussi un

de l’énergie ou de la pensée, quelque chose qui touche aux questions et aux problèmes éducatifs chose

qui

aujourd’hui touche

«

majeurs, à

la

quelque

source

de

l’éducation » pour notre monde. L’art et l’éducation ont en commun des questions et des problèmes majeurs.

art engagé dans l’école ? 10 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e ph éno mèn e résidence s d’ a rt ist e

Ces questions, ces problèmes, me semblent graviter autour de trois points : 1) l’individu,

le sujet « comment éduquer, former le sujet

Je m’en tiendrai là, puisqu’il s’agit d’ouvrir

aujourd’hui ? Comment se « fabrique » le

et de baliser notre espace de recherche. Ce

sujet contemporain ? 2) la créativité, la

ne sont en l’état que des pistes. Je ne doute

création, et derechef l’origine : que recouvre

pas

la demande de création et de créativité qui

échanges les croiseront plus d’une fois.

que

vos

communications

et

nos

concerne aujourd’hui chacun ? 3) la norme,

la loi : comment fabriquer de la norme et de la normativité tout en invitant chaque sujet à « être lui-même » ? Qu’est-ce que l’art a à nous apprendre là-dessus ? ***

11 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Les résidences en recherche L’Opéra à l’École MARIE EVREUX , Opéra de Lyon, chargée de médiation culturelle

Un projet artistique

Un projet d’étude

L’Opéra à l’école est un projet artistique et

Une

culturel initié à la rentrée 2011 par l’Opéra de

de l’Education (l’IFÉ) accompagne les acteurs

Lyon pour une durée de trois ans dans une

du projet en réalisant une étude, L’Opéra aux

école élémentaire et un collège de Vénissieux.

Minguettes, qui comporte deux volets :

Le projet se construit autour de deux axes :

rencontres et ateliers avec des artistes et des techniciens, spectacles et épétitions. Le

projet

est

piloté

par

le

pôle

de développement culturel de l’Opéra, en partenariat avec l’Éducation Nationale et la ville de Vénissieux. Il reçoit le soutien financier et matériel de plusieurs mécènes : la Fondation d’entreprise Total, la Fondation d’entreprise France Télévisions et l’entreprise

de

terrain

à

Français

travers

la

Christian Lallier ;

nature de l’opéra, la musique, le théâtre,

Des activités de découverte de l’Opéra :

étude

l’Institut

des interactions sociales, portée par

par sept artistes, mêlant, en écho à la

Une

de

méthodologie de l’observation filmée

Des ateliers de pratique artistique menés

la danse et les arts plastiques ;

équipe

Une enquête compréhensive portée par le Centre Alain Savary construite à partir d’une

démarche

d’observation

et

d’analyse sur ce qui se vit et ce qui se joue au cours de cette expérience du point de vue des professionnels engagés dans l’action et des élèves. Cette enquête s’appuie sur l’observation et l’utilisation d’outils de la recherche en sciences sociales : enquêtes par questionnaires, entretiens et groupes de travail.

Clairefontaine. 12 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Le pôle de développement culturel avait déjà

action culturelle et artistique d’ampleur

travaillé avec des équipes de recherche lors

à l’école sur :

de la réalisation des projets participatifs

-

les participants et les cadres d’actions ;

Kaléidoscope 1 et 2.

-

l’organisation

La

question

de

la

commande

des

enseignements

et

les méthodes d’apprentissage ;

d’une

évaluation et de son financement se pose

-

les dynamiques de partenariat ;

désormais en amont des projets et la

-

les processus de création artistique, les pratiques des artistes.

formulation des attentes s’affine. Les attentes de l’Opéra pour ces études sont les suivantes : 

Apport méthodologique afin d’aider les parties prenantes (artistes, opérateurs culturels, partenaires) à prendre du recul

L’étude tend à évaluer la traduction de ces postulats dans le réel, avec une finalité opérationnelle : quels éléments favorisent la réussite du projet ? Comment faire évoluer le dispositif ?

tout au long de la mise en œuvre du projet ; 

Confirmer

des

intuitions,

réajuster

certaines propositions en cours de projet ; 

Capitaliser sur les éléments de réflexion

Au terme de deux années de projet, des points de satisfaction se dégagent : 

mis en avant par les chercheurs pour

La relation partenariale construite entre l’équipe de recherche, l’Opéra et les

construire de nouveaux projets.

enseignants soutenue par un retour régulier

croise

questionnements

les

problématiques

des

différents

et

acteurs

de

l’étude

dialogue entre tous les acteurs.

ou d’amender les postulats de départ du Il

l’avancée

contribue à instaurer la confiance et le

Ce projet d’étude a pour objectif de valider

projet.

sur

Le

partage

questions

des des

observations chercheurs

et sur

les les

(institutions culturelles, éducatives, tutelles)

pratiques sont des apports essentiels

dans le but de préciser les impacts d’une

pour prendre du recul et remettre en perspective les actions et ce qui les fonde. 13 | P a g e

Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Toutefois des questionnements subsistent : 

La présence de chercheurs contribue à nourrir des attentes qui ne sont pas réalistes (justification « scientifique » d’une plus-value d’une action artistique à l’école par exemple), dans un contexte où l’on encourage une vision utilitaire

Les temporalités de la recherche et des établissements culturels ne sont pas les mêmes

:

travailler

sur

des

études

d’impact dans un calendrier d’action contraint (les trois ans du projet) s’avère complexe

et

induit

une

étude

des

impacts à moyen terme uniquement.

des pratiques culturelles.

Pour en savoir plus : -

Sur le projet l’Opéra à l’école : www.opera-lyon.com

-

Rapports de recherche : rapports intermédiaires de l’IFE et rapports d’études relatifs aux projets Kaléidoscope. Contacter Stéphanie Petiteau et Marie Evreux : d.culturel@opera-lyon.com

14 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Classe artistique expérimentale au collège : Quelle influence sur le travail ordinaire des enseignants ? FRANÇOISE CARRAUD ,

maître de conférence en Sciences de l’Education ISPEF,

Université Lumière – Lyon 2

Des artistes à l’école : source d’innovation et d’amélioration ?

Depuis des décennies, les gouvernements

Les résidences d’artistes en milieu scolaire,

successifs ont produit et mis en œuvre des

comme les différents partenariats avec des

réformes de multiples natures avec pour

artistes, sont souvent présentés comme des

objectif explicite une meilleure efficacité du

innovations pédagogiques, innovations qui

système et, plus ou moins implicitement, une

sont elles-mêmes envisagées comme des

visée

« améliorations » du système scolaire qui

enseignantes.

pourraient, voire devraient, produire des

professionnelles étaient déficientes, comme si

effets positifs sur les résultats scolaires des

elles étaient à l’origine des mauvais résultats

élèves, notamment ceux qui sont les plus en

des élèves. Or les chercheurs qui ont étudié ces

difficultés. Cette question de l’amélioration du

réformes et leurs effets, ne peuvent toujours

système et de la progression des résultats des

mettre en évidence des relations de causalité

élèves au regard des évaluations nationales et

entre ces transformations organisationnelles,

internationales est épineuse. Elle est souvent

didactiques ou pédagogiques et les résultats

mise sur le devant de la scène politique et

des élèves, et ne peuvent guère statuer sur leur

médiatique

efficacité (ou inefficacité).

qui

parle

aussi

d’efficacité,

d’efficience voire de productivité de l’école. Elle

est

renforcée

par

les

problèmes

d’insertion sociale et professionnelle des élèves devenus adultes.

de

transformation Comme

si

des

pratiques

ces

pratiques

Cela ne signifie certes pas qu’il n’existe aucune

relation

transformations

entre ou

ces

évolutions,

innovations

et

les

résultats scolaires des élèves, cela ne signifie 15 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

pas non plus, comme certains le prétendent,

« Les démarches d’innovation et d’expérimentation

que les enseignants résisteraient à tout

relèvent de la conduite du changement dans un

changement

et

empêcheraient

toute

système complexe ».

progression du système. Mais la multiplicité des variables qui influent sur les réussites ou

Ainsi les projets de ces résidences d’artistes

échecs scolaires, leurs différents liens et

sont toujours motivés par un effet escompté

interconnexions,

sur les résultats scolaires des élèves soit

le

rôle

des

contextes

éminemment variables et influents eux-

directement,

aussi, rendent difficile la mise en évidence de

modification des pratiques pédagogiques des

facteurs favorisant, de manière avérée et

enseignants. C’est pourquoi la plupart des

univoque, la réussite scolaire de tous les

projets

enfants, quels que soient leurs milieux

notamment la mesure des résultats des

sociaux et familiaux.

élèves. Mais certains prévoient également de

Pour autant, à l’heure actuelle, l’innovation ou

mesurer les effets de ces résidences sur les

l’expérimentation pédagogique, les pratiques

pratiques enseignantes, car comme le disent

innovantes sont, non seulement mises à

les acteurs : « On sait que tout cela coûte très

l’honneur (avec certes beaucoup d’ambiguïtés),

cher ». Mais le malentendu est parfois grand

mais aussi prescrites par l’institution elle-

car tous les enseignants n’anticipent pas de

même : voir notamment l’article 34 de loi

la

d’orientation de 2005, mais également le rôle

professionnels : la plupart estimant que la

du DRDIE (Département de la Recherche et du

présence d’artistes, les pratiques artistiques

Développement,

de

réalisées par les élèves sous la conduite

l’Expérimentation) institué au sein de la

d’artistes, ou encore les sorties, visites ou

DGESCO,

(Conseillers

spectacles artistiques peuvent combler un

Recherche-Développement,

écart culturel, apporter aux enfants des

Innovation et Expérimentation). Dans le Vade-

formes de prérequis culturels leur permettant

mecum Innover pour une école des réussites

de mieux suivre et acquérir les apprentissages

(rédigé par le DRDIE), il est noté que :

proprement scolaires, sans qu’il soit pour

et

Académiques

de

des

l’Innovation

CARDIE

et

soit

prévoient

même

indirectement

des

manière

par

évaluations,

ces

la

et

changements

16 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


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autant nécessaire de modifier les dispositifs

départementale visant le développement de la

de ces apprentissages scolaires.

danse et de la musique et soutenue par le

C’est dans ce contexte général que peuvent être étudiées les résidences d’artistes en milieu scolaire et notamment le travail de la classe artistique expérimentale du collège de

Conseil Général. Il a été proposé au rectorat de l’académie, qui a recommandé ce collège, et il est soutenu par plusieurs organismes et fondations. Il a « pour objectif d’intégrer les

pratiques artistiques dans un projet pédagogique

La pinède1.

transdisciplinaire pour favoriser la réussite scolaire et éducative de l'élève. […] prévenir les difficultés à l’école et développer l’ambition scolaire »2.

Un collège, une expérimentation et une recherche

Il vise aussi à « transformer les pratiques

Ce collège intégré au programme ECLAIR scolarise

un

peu

plus

de

500

élèves,

population largement issue de l’immigration

professionnelles » : « […] La fréquentation régulière

des

artistes

et

la

confrontation

permanente des démarches pédagogiques et artistiques obligent à une grande ouverture d’esprit

et marquée par un fort taux de chômage. Les

et à beaucoup d’inventivité pour tirer le meilleur

résultats scolaires sont inférieurs d’environ

parti d’une relation forcément complexe. Les effets

20 % à la moyenne départementale. Les

sont prioritairement attendus du côté des

enseignants

(une

soixantaine)

sont

peu

nombreux à rester au-delà de quelques

enseignants mais concernent aussi nécessairement les artistes »3.

années. Mais il existe un noyau stable, composé d’enseignants expérimentés, dont

L’observation,

l’équipe engagée dans ce projet.

scientifiques

Le projet de la classe artistique expérimentale

comme l’accompagnement et le suivi du

est

projet, prévus dès l’origine par les initiateurs,

à

l’initiative

d’une

association

l’étude de

cette

et

l’évaluation

expérimentation,

1

Le nom du collège a été transformé afin de respecter l’anonymat et la confidentialité des enquêtés, comme le veut la déontologie des sciences sociales (même si cet anonymat est parfois difficile à tenir, notamment dans le cas de recherches réalisées dans le cadre de projets expérimentaux, et subventionnées par des commanditaires qui souhaitent rendre publiques leurs actions). 2

Présentation du projet sur le site internet de l’association.

3

Idem

17 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

sont

assurés

par

une

équipe

de

cinq

chercheurs du laboratoire Éducation, cultures

et

politiques,

recherche

issus

de

distinctes

:

disciplines Alain

Kerlan

l’art à l’école, coordonne l’ensemble ; Céline Choquet (dans le cadre de sa thèse de doctorat) étudie les résultats du dispositif sur les parcours des élèves tout au long des quatre années de collège ; Marie-Christine (psychologie

de

l’éducation)

s’intéresse à l’évolution de l’estime de soi des élèves inscrits dans cette classe ; Samia Langar (dans son mémoire de master 2) a rendu

compte

de

l’influence

de

cette

expérimentation sur les familles et leurs relations à l’école ; et moi-même qui travaille sur

les

questions

de

professionnalité

enseignante à partir des théories de l’activité. C’est

ainsi

que

depuis

le

début

de

l’expérimentation (en 2009), je cherche à comprendre les effets de ce dispositif de classe

artistique

sur

le

travail

majeures ? Pour quelles conséquences ?

de

(philosophie de l’éducation), spécialiste de

Pipérini

quelle manière ? Quelles sont les influences

des

enseignants : ce dispositif modifie-t-il le

La démarche est de type ethnographique : il ne s’agit pas d’une évaluation au sens habituel du terme mais d’une description détaillée de l’activité ordinaire et du sens que les acteurs donnent à cette activité. Comme le dit l’historien Bernard Lepetit ma première question est « comment ça marche ? » et non «

pourquoi

cela

ne

marche-t-il

pas

mieux ? »4. Dans ce sens l’évaluation n’est pas réalisée de l’extérieur, elle n’est pas produite par les chercheurs indépendamment des acteurs : elle est dévolue aux acteurs eux-mêmes. Ce sont eux qui évaluent, c’està-dire qui déterminent la valeur de leur activité : quel sens, quelle valeur donnent-ils à

leur

activité

professionnelle

dans

ce

contexte spécifique de travail qu’est la classe artistique expérimentale, au sein d’un collège situé dans un quartier sensible c’est-à-dire en difficulté économique et sociale ?

travail ordinaire des enseignants ? Si oui de

4

Les Formes de l'expérience. Une autre histoire sociale, Paris, Albin Michel, 1995, 337 p. (page 11)

18 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

L’organisation de la classe artistique…

formation pour les enseignants avec les artistes, des temps de réunions hebdomadaires, et de

La mise en œuvre du projet a nécessité une organisation rigoureuse élaborée par les enseignants

eux-mêmes

en

nombreuses visites et spectacles pour lesquels les enseignants accompagnent les élèves.

2009-2010.

Les pratiques artistiques, les artistes et leurs

Pour que les élèves suivent chaque semaine

compagnies ont été choisis par le collectif

deux ateliers artistiques de trois heures

des enseignants et des commanditaires du

chacun (soit deux demi-journées dans la

projet : en classe de 6ème, il s’agissait de

semaine), sans avoir un emploi du temps plus

danse contemporaine ; en 5ème, de théâtre et

chargé que celui des autres classes de

d’écriture ; en 4ème, musique et écriture (avec

sixième, le nombre d’heures de cours de

le même écrivain que l’année précédente) ; et

chaque discipline a été réduit sur l’ensemble

en 3ème (2013-2014) une compagnie de

de l’année scolaire (au prorata de leur part

théâtre a mêlé différents arts : écriture,

respective dans l’emploi du temps). Les

théâtre, musique, vidéo… L’enquête n’ayant

enseignants, tout en ayant moins d’heures de

pas porté sur le processus de choix de ces

cours avec les élèves de cette classe, doivent

compagnies et de ces artistes, il est difficile

cependant effectuer l’ensemble de leurs

de dire précisément comment et sur quels

heures de service, c’est pourquoi ils sont

critères ils ont été élus.

alternativement présents pendant les temps d’ateliers conduits par les artistes (en fonction du nombre d’heures « abandonnées » au profit de ces ateliers)5. À cela s’ajoutent des temps de résidences ou de mini-résidences avec les artistes (et auxquels assistent les enseignants

concernés),

des

journées

D’une certaine manière, les projets artistiques ou culturels font partie de l’histoire de ce collège : dans les entretiens, les enseignants évoquent leur goût pour le travail à plusieurs qui les encourage à demeurer dans l’établissement. C’est ainsi qu’ils ont immédiatement adhéré au

de

Cette « présence » a fait l’objet de nombreuses discussions et reste un point névralgique du projet : quel est le rôle de l’enseignant pendant ces ateliers ? Quelle posture ? Quelle influence sur le travail des artistes (en sachant que tous les enseignants sont amenés à être présents à des différents moments de l’année, quel que soit leur degré d’engagement dans le projet) ? Quelle influence sur le travail en classe des enseignants ? Sur les relations entre enseignants et artistes ? C’est sur ces points que nous poursuivons notre étude (cf. deuxième partie de ce texte). 5

19 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

projet proposé par un de leurs collègues (ancien

En 2012-2013 : quatre entretiens avec

dans l’établissement) et ont œuvré à constituer

des enseignants nouvellement engagés

une équipe complète pour une même classe.

dans le projet.

Ceci ne doit pas faire oublier que tous les enseignants

de

la

classe

artistique

Et juin 2014 : neuf entretiens, avec la

(une

quasi-totalité de l’équipe enseignante.

douzaine) ne sont pas engagés au même

Ces entretiens, qui durent entre une

niveau : tous ne participent pas à toutes les

heure et une heure trente, portent

réunions ou aux temps de formation, mais ils

toujours sur l’activité concrète des

ont tous, d’une manière ou d’une autre, accepté

enseignants.

le principe et l’organisation de cette classe. Le questionnement général et les principales

… et de la recherche correspondante

questions de recherche concernent le travail ordinaire dans le contexte de cette classe

L’enquête concernant les enseignants et leurs pratiques professionnelles, est principalement basée sur des entretiens individuels, avec quelques moments d’observation, notamment pendant les réunions collectives. 

artistique expérimentale : le fait de travailler au sein d’une équipe d’enseignants enrôlés dans le même projet, de se réunir très régulièrement avec des collègues et avec différents

acteurs

intervenants

dans

ce

En 2010-2011 : dix entretiens ont été

projet, de déléguer une partie de son temps

conduits,

enseignants

de travail à des artistes, sur des temps

différents, à deux moments dans l’année

scolaires, tout en participant à ces temps de

scolaire (décembre et juin).

pratique artistique, contribue-t-il, ou non, à

En 2011-2012, deux longs entretiens

modifier ou à transformer les pratiques

(début juillet) avec deux enseignants

ordinaires de ces enseignants, au sein de

différents : l’un nouvellement entré dans

leurs propres classes ? Le fait de participer

le projet et l’autre déjà interviewé l’année

aux ateliers artistiques, de voir les élèves

précédente et moteur du projet (tous

engagés

deux s’apprêtant à quitter le collège).

impulsées et coordonnées par des artistes,

avec

cinq

dans

des

pratiques

artistiques

20 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

de les accompagner lors de spectacles, ou à

compte l’histoire de l’individu (son histoire

l’occasion

prestations

personnelle, sociale, technique et culturelle)

publiques, a-t-il une influence sur le travail

et s’intéresse aux systèmes de références,

ordinaire de ces enseignants ?

valeurs et normes que cet individu met en

de

leurs

propres

Pour traiter ces questions, pour saisir et analyser d’éventuelles transformations du travail ou des pratiques professionnelles

œuvre

au

cours

de

son

activité

professionnelle. C’est dans ce sens que nous utilisons ce terme ici.

ordinaires des enseignants, il importe de

Pour saisir cette professionnalité comme

clarifier le sens donné aux expressions « travail

système de normes et de valeurs en acte,

ordinaire » ou « pratique professionnelle

nous nous intéressons aux discours des

ordinaire ». Notre intérêt, ancien, pour le

enseignants sur leur activité concrète. Il ne

travail ordinaire et quotidien des enseignants

s’agit pas de faire apparaître et de récolter

est

de

des représentations, ou des discours de

« professionnalité » définit à partir des travaux

rationalisation sur le travail, mais de faire

du sociologue Aballéa (1992) pour qui la

raconter le travail par le détail, par le menu,

professionnalité est un système de normes et

pour, à partir du récit de l’activité même,

de valeurs en acte. Ce terme, venu de l’italien

saisir les normes du travail qui sont en jeu et

professionalità,

années

ce que à la suite de Schwartz (1997) nous

soixante-dix par les syndicats italiens des

appelons les processus de re-normalisation

usines FIAT, désigne un patrimoine commun

du travail, en situation et en contexte.

ancré

dans

utilisé

le

dans

concept

les

que les ouvriers veulent défendre et faire reconnaître, une somme de connaissances, de

capacités

et

expériences.

Ainsi

la

professionnalité suppose un métier, une expertise (des savoirs et des cod’mpétences) et un système de références normatives ou de valeurs (déontologie, éthique), un univers moral. En effet, la professionnalité prend en

La recherche étant en cours, les résultats sont encore partiels et provisoires : ils concernent tout d’abord le travail enseignant au sein de la classe puis, dans un second temps, ils traitent du travail des enseignants au sein des ateliers de pratiques artistiques conduits par les artistes. 21 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Premiers résultats :

ou de « scolariser » le travail artistique est

à propos du travail

souvent évoqué collectivement et repris individuellement. Les enseignants craignent

enseignant dans la classe

de

« Éviter d’instrumentaliser les pratiques artistiques »

les

dimensions : notamment préparer les cours, mettre

en

œuvre

tout

en

assurant

l’organisation et le contrôle du groupe classe, ou encore évaluer les acquisitions des élèves. À ces principaux aspects, assez bien connus et répertoriés par les chercheurs, s’ajoutent des activités invisibles ou cachées, mal connues : des tâches matérielles, organisationnelles ou

Ainsi, les entretiens conduits la première année ont fait apparaître que la classe artistique expérimentale ne modifiait pas, ou peu, le travail ordinaire et habituel des enseignants en ce qui concerne le travail de

adaptations,

des

cours.

habituelles

Au-delà pour

apports

de

la

classe

eux,

des les

enseignants semblent d’abord s’accorder sur le fait que travailler avec cette classe particulière ne nécessite pas de modifications spécifiques. Le risque d’« instrumentaliser »

préoccupations

scolaires

liées

aux

programmes et progressions. Comme si les bénéfices attendus pour les élèves risquaient d’être perdus ou gâchés par cette forme scolaire qui, si elle est implicitement acceptée comme cadre (ou « genre ») de leur propre travail, est tout aussi implicitement refusée, du

moins

en

partie,

quand

il

s’agit

d’autres types d’apprentissages, notamment de nature artistique. La

encore relationnelles ou émotionnelles.

conception

les

artistique en les faisant coïncider avec

Le travail enseignant comporte différentes

les

stériliser

plupart

des

enseignants

affirment

cependant « faire des ponts » ou des liaisons entre le

contenu

des ateliers et leurs

enseignements, selon le degré de proximité entre la discipline enseignée et la pratique artistique (EPS et danse, usage de la langue anglaise en lien avec des artistes anglais, etc.), et notamment en cours de français, qui est bien revendiqué comme une matière artistique parce qu’elle « travaille sur la sensibilité ». Mais il faut « faire attention à ne pas

surinvestir

l’atelier

d’objectifs

pédagogiques ». Encore une fois, il s’agit 22 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

d’éviter de « pédagogiser » ou « didactiser »

habituellement

les activités artistiques, de les conformer à

bousculent bien le travail des enseignants,

une forme scolaire qui serait stérilisante. Dans

fortement normalisé par la forme scolaire et

le même temps, le travail des artistes, qui ne

ses exigences en termes de programmes,

se conforme pas à ce modèle, déstabilise

programmations et progressions. Mais les

quelque peu le travail des enseignants. Pour

tensions

nombre d’entre eux, il semble que l’absence

l’organisation et la mise en œuvre les

de programmation, le fonctionnement « un

activités artistiques et les activités scolaires,

peu trop improvisé », ont été gênants. Même

bien ressenties par les enseignants, ne

si les enseignants se sont « adaptés », cela les

semblent pas affecter leur propre activité

a parfois empêchés de « faire des liens avec la

professionnelle et leur adhésion à la forme

classe » et les apprentissages, en vocabulaire

scolaire comme genre professionnel.

ou

consacré

aux

contradictions

cours,

entre

par exemple. Les entretiens conduits les années suivantes n’ont pas démenti cette volonté de ne pas trop remettre en question la conception et le

Des transformations relationnelles dans la conduite de la classe

déroulement des activités scolaires, des

Quelle que soit la discipline concernée, les

cours et des apprentissages disciplinaires. Il

enseignants décrivent une « manière de faire

ne faut cependant pas sous-estimer les effets

cours

de la classe artistique sur le temps scolaire et

« classique ». Il s’agit d’abord de reprendre le

l’organisation même des cours (qui sont

travail fait à la maison et demandé lors du

passés de cinquante minutes à une heure

cours précédent (leçons ou exercices), puis

trente)6. Ainsi il apparaît que le projet de la

de mener une réflexion, individuelle et

classe artistique et la participation des élèves

collective, à partir de textes, de documents

à

artistiques

ou d’exercices, pour stabiliser (le plus

plusieurs heures par semaine, sur le temps

souvent par écrit) des connaissances qui

des

ateliers

de

pratiques

traditionnelle,

magistrale

»,

Voir Carraud, F. (2012). « Expérimentation dans un collège ECLAIR. Le travail enseignant entre logique scolaire et logique artistique ». In Sociologies Pratiques, n° 25, Le collège en question : des professionnels au cœur des tensions. 6

23 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

devront ensuite être apprises ou appliquées

D’une manière générale, les enseignants

dans un exercice pour le cours suivant. À

constatent que les élèves sont beaucoup

chaque fois, le travail demandé est noté au

moins enclins à la moquerie que dans leurs

tableau et copié par les élèves dans leur

classes habituelles : ils se respectent mieux

agenda. Le fait de travailler en équipe a

et osent davantage intervenir en cours à

permis

et

l’oral, ils lèvent le doigt et participent

d’adopter cette « procédure » pour toute

volontiers, ce qui crée une dynamique de

l’année. Dans ce cadre relativement stable,

classe plus agréable pour les enseignants.

les manières de conduire le groupe et les

Dans le même registre, et en lien avec la

individus

dimension

aux

enseignants

quant

à

elles

d’expliciter

sont

toujours

précédente,

les

enseignants

instables, sujettes aux aléas des interactions

constatent que ces élèves sont plus assurés :

et des humeurs individuelles et collectives.

ils ont davantage confiance en eux et osent

Et ce sont ces activités professionnelles, liées

s’exprimer, ils sont également plus à l’aise

aux relations des enseignants avec les élèves

dans leur corps et vont plus volontiers au

ou des élèves entre eux, qui ont été le plus

tableau. Enfin, s’agissant des apprentissages,

transformées

les enseignants ont remarqué que ces élèves

par

la

classe

artistique

expérimentale.

sont plus curieux, ouverts et intéressés par

Trois ensembles de transformations peuvent être identifiés : les changements d’ordre politique

(le

«

vivre

ensemble

»),

les

changements d’ordre psychologique ou affectif (l’« estime de soi »), les changements d’ordre cognitif ou comportemental (la « curiosité » et le « goût de l’effort »).

les nouveaux apprentissages. Parfois certains estiment même que ces élèves sont plus exigeants et qu’il faut leur proposer des activités plus riches (par exemple, en anglais, des chansons d’un autre niveau). Tous les enseignants interrogés trouvent les élèves plus épanouis, plus ouverts, plus autonomes et plus engagés dans le travail scolaire. Mais, au-delà

de ces convergences, la

question de l’autorité et de la discipline scolaire reste un point d’achoppement. 24 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Respecter et faire respecter l’ordre scolaire

qui, souvent, restent en partie dans l’ombre du « sale boulot »8. Cette visibilité a aussi

En effet, tout au long des années de déroulement du projet, quels que soient les enseignants et les artistes, les exigences d’ordre et de discipline (silence, immobilité, etc.) et les injonctions relatives à ces exigences ont fait l’objet de divergences entre ces deux groupes professionnels. Et si les écarts entre le travail des artistes et celui des enseignants n’ont, finalement, que peu interrogé le travail enseignant relatif aux contenus

d’enseignement

et

à

leur

organisation, ils ont été bien plus difficilement vécus, par rapport aux modes de régulation de la relation pédagogique et aux contrôles corporels et comportementaux. En effet, c’est au niveau de la discipline comme norme de régulation, que les écarts ont pu être perçus et vécus comme de réelles divergences, désaccords assez vivement dénoncés, même à mots couverts, tant par les enseignants que

implicitement

contribué

à

re-normaliser

collectivement des normes souvent intégrées comme individuelles. Plusieurs enseignants ont longuement relaté comment, le fait de voir le travail des artistes, ou d’autres collègues,

le

fait

de

constater

leurs

différentes manières de contrôler le groupe et de faire respecter l’ordre scolaire, a influencé leur propre conception de la discipline

et

de

la

régulation

des

comportements des élèves. D’autres ont davantage insisté sur les écarts de perception et d’intervention. Cette question de la gestion de la discipline, de la mise au travail des élèves et de leur engagement dans l’activité est particulièrement visible lors des d’ateliers eux-mêmes. Ainsi ces temps de pratiques artistiques ont-ils fait l’objet d’investigations plus poussées lors des entretiens réalisés la seconde et la troisième année.

par les artistes7. Dans le même temps, le projet de la classe artistique a donné une plus grande visibilité à ces normes disciplinaires

Quelques entretiens menés avec les artistes, par des collègues, ont montré que ces artistes étaient eux-mêmes en désaccord, voire en conflit, avec les attitudes et les pratiques des enseignants. 7

La notion de « sale boulot », formalisée par le sociologue Hughes, a été reprise par Payet à propos de l’école (1997) et nuancée par Barrère (2003). 8

25 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Des

résultats

en

cours

de

La présence des enseignants était donc

formalisation : le travail des

obligatoire (puisque effectuée dans le cadre

enseignants au sein des ateliers de pratiques artistiques

se déroulaient pendant une à deux demipar

semaine),

les

enseignants

étaient toujours présents (en fonction de leurs heures de service). En règle générale, si ces ateliers étaient conduits par un (ou plusieurs)

artistes,

un

enseignant

était

également présent pendant la première partie (qui durait une heure trente) et un autre durant la seconde partie (qui durait aussi une heure trente). Chaque enseignant ne restant présent lors des ateliers que durant quelques mois. Ceci sans oublier la présence régulière des chercheurs et autres observateurs,

ainsi

que

celle

n’était que très peu organisée, prévue, planifiée, aucune tâche n’étant « prescrite ».

Lors des ateliers de pratiques artistiques (qui

journées

de leur service d’enseignement), mais elle

des

commanditaires du projet. Au final, plusieurs adultes, ayant des statuts et des rôles très distincts, étaient présents en même temps, dans un même lieu, avec le même groupe d’élèves.

Et, lors des entretiens, la plupart des enseignants

disent

leur

malaise

:

leur

sensation de ne rien avoir à faire, de ne pas travailler et même « d’être payés à ne rien faire ». Pourtant, lorsqu’ils décrivent, en détail, leur activité, celle-ci apparaît riche et variée, même si elle n’est pas « prescrite ». Ainsi, peu à peu, en fonction des contextes et des artistes intervenant, à partir du travail qu’ils

ont

l’habitude

de

réaliser,

les

enseignants « inventent » de nouvelles formes de travail qu’ils adaptent en situation. Comme le résume l’un d’entre eux : « Petit à

petit, je me suis rendu compte que mon travail c’était d’être là, ce n’était plus un souci… ». Au fil des entretiens, cette formule, « Être là », renvoie nécessairement à différentes façons d’être là, à différents rôles et différentes postures qui peuvent être entremêlés. Ainsi les enseignants veulent à la fois « garder [leur]

rôle de prof » et « délaisser [leur] position », ce qui est « un peu difficile » disent-ils. Ainsi ils peuvent « jouer » plusieurs rôles en même 26 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

temps (« conjuguer les rôles ») ou passer de l’un

point est sujet à controverses, nous l’avons

à l’autre en explorant toutes les nuances d’un

vu. Tous les enseignants s’interrogent :

continuum qui va du rôle de prof à celui

quand doivent-ils intervenir pour ramener le

d’élève

calme ? Le font-ils trop ou trop peu ? Même

en

passant

par

celui

d’artiste,

d’entraineur ou de coach.

s’ils en discutent avec les artistes (et avec leurs collègues) les seuils de perception du désordre sont très variables : selon les

Rôle de prof

enseignants, selon les artistes, selon les

Tous les enseignants signalent qu’ils doivent « être prof » pour tout ce qui concerne l’organisation du travail des élèves : « tout ce qui est institutionnel ne concerne pas les artistes » dit l’un d’eux. Ainsi ce sont eux qui vont chercher les élèves dans la cour, font l’appel

(avec

parfois

des

difficultés

techniques quand l’ordinateur de la salle prévue pour les ateliers ne fonctionne pas), font installer les élèves (en demandant de poser les cartables, les vêtements, ou de les récupérer à la fin), s’attachent à obtenir le calme,

etc.

Plusieurs

expliquent

qu’ils

organisent, et parfois prennent eux-mêmes en charge, un rituel pour débuter la séance, pour

faire

du

lien

avec

les

séances

précédentes.

jours, les « moments de flottement, de bazar » sont jugés graves ou pas. En effet, cette perception du désordre, imminent ou avéré, varie non seulement d’un individu à l’autre mais aussi d’un jour à l’autre, selon les contextes et les situations, en fonction de ce qui a pu se passer les heures ou les jours précédents, dans la classe, dans le collège, dans le quartier. De même, les modalités d’intervention pour assurer ou retrouver le calme peuvent varier : depuis le petit claquement de lèvres presqu’imperceptible, les haussements de sourcils ou le regard appuyé en direction d’un élève, jusqu’au déplacement physique vers un de ces élèves pour le morigéner, le mettre à l’écart, l’exclure ou le punir, ou seulement le

En tant que professeurs, ils se sentent

maîtriser par une présence proche, en

chargés de la discipline et estiment devoir

passant par les remontrances collectives, les

faire respecter et régner l’ordre scolaire. Ce

propos moralisateurs ou les menaces… 27 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Les

gestes

professionnels

destinés

à

ordinaires, nous avons vu que c’était assez

contrôler les individus et le groupe, parfois

rare. Malgré tout cela existe, de manière

infimes ou minuscules, sont extrêmement

discrète, et si les effets à long terme sur leur

nombreux. Si tous les enseignants n’usent

travail ordinaire sont difficilement mesurables,

pas des mêmes gestes dans des situations

ils ne sont pas négligeables. « Être prof » c’est

qui peuvent sembler proches, tous se sentent

encore réexpliquer, reformuler les consignes :

investis de cette mission de contrôle et de

rester auprès de petits groupes ou d’élèves

surveillance.

particuliers, et redire ce que l’artiste a

Du côté des artistes, il semble que les interventions des enseignants soient souvent embarrassantes, envahissantes

voire (mais

importunes aucune

ou

enquête

rigoureuse n’a été faite sur ce point, et les discours et perceptions doivent également différer selon les personnes et les contextes). Alors que pour les enseignants, il apparaît clairement qu’ils doivent agir, que c’est leur rôle : « Je sentais qu’il fallait que j’intervienne, que

je prenne la parole et là c’était mon rôle de prof ». Pour certains, il est même de leur devoir de « donner ou transmettre son autorité » à l’artiste : « lui donner son autorité, il me semblait que ça

passait par moi », par exemple en lui faisant sentir qu’ils sont tous deux « sur la même

longueur d’ondes ». « Être prof » cela peut être aussi reprendre des éléments du travail fait en atelier lors des cours

demandé à tous, redire, répéter, encore et encore… Tout en stimulant les élèves, en les motivant, en les engageant dans les activités proposées

et

veillant

à

maintenir

cet

engagement, motivation ou intéressement. Ce travail de reformulation et de stimulation pourrait conduire à jauger et corriger les élèves, mais si les enseignants sont présents pour aider et accompagner, ils ne s’autorisent pas à juger ou évaluer. Par une forme d’accord tacite,

les

pratiques

d’évaluation

des

apprentissages artistiques, paroles ou gestes, sont réservés aux artistes. Les enseignants peuvent

évaluer,

comportements

corriger

inadéquats

ou mais

punir

les

pas

les

activités artistiques. Dans ce sens ce travail d’accompagnement individualisé des élèves ou des petits groupes, renvoie davantage à un rôle d’entraîneur, voire de coach, qu’à un rôle d’enseignant au sens strict. 28 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

« Être coach »

« Jouer à l’élève »

Un coach est aussi un entraîneur, un mentor

La plupart des enseignants (sauf ceux qui se

ou un conseiller, un accompagnateur9. Dans

sont refusés à « jouer le jeu » mais c’est resté

ce sens les enseignants expliquent être

exceptionnel et momentané) se sont, à divers

souvent dans cette position de celui qui donne

moments, volontairement enrôlés comme

des conseils, qui aide individuellement, qui

élèves, notamment lors des échauffements :

encourage : « qui entoure l’élève dans ce qui lui est

comme les élèves ils peuvent enlever leurs

demandé ». Ce travail d’accompagnement

chaussures, s’asseoir par terre, faire des

personnalisé, de coaching, est rarement

exercices corporels ou d’écriture, danser,

effectué par les enseignants dans leur classe,

jouer d’un instrument… Et ne craignent pas de

quand ils doivent faire cours, contrôler le

perdre leur autorité ou prestige de prof en

groupe et l’engager dans le travail scolaire.

faisant

Alors que, durant les ateliers, un enseignant

préparaient

explique de manière détaillé qu’il « n’est pas

représentation théâtrale, certains enseignants

entraineur mais capitaine », c’est-à-dire membre

ont également choisi de « remplacer »

du groupe, chef d’équipe : « celui qui dit qu’il

des élèves : « […] et donc là je m’asseyais sur une

faut y aller, qu’il faut pousser la montagne » et que

chaise, je savais pas trop quoi faire, qui dire […]

les élèves suivent par mimétisme. Cette

j’étais un peu mal à l’aise […] je trouvais que j’étais

attitude de coach, à mi-chemin entre le prof qui enseigne, qui réexplique et reformule, et l’artiste qui dirige le groupe et le travail,

cela.

Parfois, un

quand

spectacle

les ou

élèves une

assez inutile […] et puis je me suis mis à remplacer les élèves absents ». Et cet enseignant de poursuivre : « Et alors du coup j’ai ressenti ce que

ressentaient les enfants, j’étais comédien à ce

glisse aussi, imperceptiblement vers le rôle

moment-là, ça a donné de l’énergie au groupe, un

d’élève. Et tous les enseignants rencontrés

groupe qui n’était pas facile ».

ont, à un moment ou un autre, endossé ce rôle d’élève.

Beaucoup

d’enseignants

se

sont

complètement mobilisés, engagés, immergés dans l’activité proposée par l’artiste et se

9

Voir Rey (2012). Dictionnaire historique de la langue française.

29 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

sont sentis « à égalité » avec les élèves. Ils ont

peuvent demander aux élèves (ce qui parfois

alors éprouvé des émotions fortes, partagé

les interroge vivement12). De plus, même en

des « moments uniques », « inoubliables » avec

participant de manière active et engagée aux

certains d’entre eux. Ce qui peut être analysé

activités proposées par les artistes, les

comme un « partage du sensible10 », une

enseignants restent toujours vigilants pour

expérience

et

contrôler le groupe et les écarts disciplinaires

émotionnelle commune, est souvent évoqué

éventuels : « [participer comme un élève] ne

à propos de la préparation des productions

m’interdisait pas de faire une remarque à un élève si

publiques des élèves (et de ce qui leur

nécessaire […] je gardais ce statut d’enseignant, là ».

apparaît

danger

Et pour garder ce statut d’enseignant et faire

publique) ou encore au sujet des spectacles

des remarques aux élèves, il leur fallait

auxquels ils ont assisté ensemble11.

endosser, souvent en même temps, un autre

Mais « être élève » reste un jeu, un jeu qui

rôle : celui d’observateur.

même

esthétique,

comme

une

profondément

sensorielle

mise

en

émouvant,

a

ses

limites : non seulement les enseignants savent percevoir où les artistes veulent les conduire, quand ils ne connaissent pas par avance le déroulement ou les objectifs de l’activité (que les élèves ignorent), mais surtout ils peuvent choisir de « ne pas se livrer,

ne pas s’engager ou s’exposer à titre personnel ». Ils « n’exposent pas leur intimité », ils « ne

mettent pas en jeu leur personnalité » alors qu’ils ont le sentiment que c’est ce que les artistes 10

Un double rôle pour toujours rester observateur En effet, tous les enseignants expliquent que, tout en faisant les échauffements ou les exercices demandés par les artistes (danse, écriture

ou

autre),

ils

font

un

effort

d’observation des élèves pour à la fois réagir, intervenir

si

principalement

besoin, pour

mais

mieux

aussi

et

comprendre

Rancière, J. (2000).

Ce point sera travaillé ultérieurement à la suite des derniers entretiens conduits (juin 2014) : le partage d’émotions fortes (entre enseignants et élèves), à l’occasion de la classe artistique, influence-t-il le travail ordinaire et la professionnalité des enseignants ? 11

Ce point, important, sera également discuté ultérieurement : le choix d’activités ou de pratiques artistiques liées à l’art contemporain a-t-il une influence sur le travail des enseignants, dans la classe et dans les ateliers ? Les pratiques artistiques personnelles des enseignants ont-elles aussi une influence ? 12

30 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

l’activité de leurs élèves et également en

personnes. Elles engagent les enseignants

rendre compte : « moi j’avais un double rôle,

dans une re-normalisation de leur travail, au

même en théâtre je ne prenais pas de notes mais je

moment des ateliers, et sans doute aussi, de

me souvenais et je notais juste après tout ce qu’il

manière discrète, au moment des cours,

s’était passé » ; « et en écriture je notais pendant, et je faisais l’atelier ». Ils prennent donc souvent des notes, font des comptes rendus pour leurs

même s’ils continuent de conduire les apprentissages de la même manière et de suivre les mêmes programmes.

collègues. Pour observer ils ne restent pas toujours immobiles, assis dans un coin de la pièce, ils se déplacent et, quand ils sont auprès des élèves ils peuvent également les aider

Avant de conclure, provisoirement, il est intéressant de développer quelque peu un autre rôle : celui d’assistant de l’artiste.

(mais aussi rester silencieux à côté d’eux). Et l’on voit bien de quelle manière les

Assistant de l’artiste

différents rôles assumés par les enseignants

Assurer l’organisation matérielle, maintenir

lors des ateliers peuvent se chevaucher ou

la discipline, garantir l’ordre scolaire, faire le

s’imbriquer, s’entrecroiser parfois même se

lien avec l’institution, etc., autant d’activités

contredire

toujours

qui, tout en relevant du métier d’enseignant,

enseignants, ils sont aussi « coachs »,

sont aussi des tâches qui complètent, aident

« élèves », « observateurs », « animateurs »

ou assistent les artistes qui en sont dégagés.

disent-ils parfois ou encore « assistants » :

Mais, au-delà de cette répartition des tâches,

autant

qui

qui place les enseignants au service des

débordent le travail ordinaire. Ces activités

artistes et qui peut s’analyser en termes de

ne sont pas codifiées, ni par les programmes,

division

ni par la formation, ni même par le métier (au

enseignants cherchent à assister les artistes

sens d’un collectif professionnel). Elles ne

dans la conjugaison de leur travail artistique

sont pas formalisées et restent toujours à

et pédagogique. La mise en œuvre de cette

« inventer » au fur et à mesure, à ajuster en

intention et de cette assistance, qui n’est pas

situation en fonction des contextes et des

sans ambivalence et ambiguïté, demande

car,

d’activités

s’ils

qui

sont

dépassent,

sociale

du

travail,

certains

31 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

beaucoup de temps et de disponibilité et va

et le statut d’enseignant, et l’autonomie

au-delà des exigences ordinaires du temps

recherchée

dans

de travail enseignant. En effet, cela nécessite

enseignant

ne

beaucoup

et

d’artiste, certains, parfois, cherchent à être

informelles, de longs temps de discussion

des « collègues », « à égalité » avec eux. Cette

(avant ou après les ateliers), des entretiens

question de l’égalité, ou plutôt de l’inégalité

téléphoniques qui semblent essentiels à

des statuts sociaux (et économiques) des uns

certains enseignants qui envisagent même

et des autres, est essentielle même si elle

des préparations communes avec certains

toujours passée sous silence à propos des

artistes. Ainsi, même si c’est de manière

résidences d’artistes en milieu scolaire. Elle

marginale et est particulièrement lié aux

devrait être (et sera) davantage travaillée

individualités (enseignants comme artistes),

pour mieux mettre à jour, analyser et

certains enseignants se placent volontiers

comprendre les tensions et contradictions

aux côtés des artistes pour travailler « avec »

entre les professionnels dans leur travail

eux. Ils cherchent alors à bien comprendre

quotidien dans les établissements.

de

rencontres,

formelles

le

travail13.

revendique

Si la

aucun posture

les intentions, démarches et propositions des artistes, tout en désirant, plus ou moins explicitement,

les

«

rapzprocher

»

des

enseignants, en leur suggérant d’adopter une

Conclusion

démarche

Pour conclure provisoirement, il faut insister

plus

pédagogique

avec

des

objectifs (« une direction ou un cap », « être dans

sur

une idée de programme »), et des propositions

enseignants

« moins complexes, plus lisibles ». Ainsi cette

proposées

position d’assistant, assurée et assumée par

partager des émotions, par exemple quand

les enseignants, qui tend à les mettre dans

un artiste interpelle un élève qui se tient à

une position de dépendance par rapport aux

l’écart et parvient à le faire s’exprimer, ou

artistes, est parfois en tension avec la posture

quand les élèves parviennent à improviser et

13

le

fait

que aux

aux

la

participation

activités

élèves

leur

des

artistiques permet

de

Voir Dubet, F. (2006). Injustices. L’expérience des inégalités au travail.

32 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

« sont vraiment dans une démarche artistique ».

Sans négliger le fait que ces émotions

Plusieurs enseignants sont encore vivement

artistiques adviennent dans le cadre de l’art

émus quand ils en parlent. Cette émotion et ce

contemporain

partage des émotions peuvent être analysés

enseignants à cette forme d’art, comme leurs

d’un point de vue sociologique : le travail

propres expériences et pratiques artistiques,

émotionnel,

les

réalisées dans leur vie personnelle, ont une

émotions, même s’il est caché ou invisible, fait

influence sur leur travail au sein de cette

bien partie du travail enseignant et doit être

classe artistique expérimentale.

le

travail

sur

ou

avec

et

que

le

rapport

des

analysé comme tel. C’est une des dimensions de la professionnalité enseignante qui fera l’objet de nos prochaines réflexions.

33 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

De la boîte noire au troisième espace CELINE CHOQUET , doctorante en Sciences de l’Education, Université Lumière – Lyon 2

La présentation suivante repose sur un

performances

observatoire de résidences d’artistes dans

normes ». Ces remarques subjectives voire

une classe artistique de collège, située à

excessives pour certaines ne nous interrogent

Montpellier. Nous présenterons quels sont

pas moins sur ce qui se joue objectivement au

les effets de l’art sur les jeunes, les aptitudes

sein de l’expérience esthétique partagée avec

et

l’artiste et, en son centre, une relation enfant-

facultés

stimulées

par

l’éducation

artistique et particulièrement la relation

inattendues

voire

«

hors

adulte en pleine mutation.

entre les élèves et les artistes. Le terrain de notre recherche se situe dans Durant la dernière décennie, les pratiques

une classe artistique expérimentale, un

artistiques et culturelles dans le champ

projet

socio-éducatif prennent de l’importance au

permettant aux élèves de rencontrer des

niveau international et particulièrement en

formes d’art diverses et des artistes aux

France, dans des écoles principalement

approches différentes au sein du collège. Les

situées dans des quartiers fragilisés au

enfants ont atelier toutes les semaines et

niveau socio-économique. Cependant, il

sont en immersion trois jours par trimestre

existe peu de recherches qui permettent une

dans des centres culturels (CCN, théâtres…).

véritable évaluation des effets de l’éducation

En 6ème, la résidence s’est tournée vers la

artistique de manière à mieux comprendre

danse (6h/semaine) pour commencer avec la

les processus qui s’y créent.

compagnie Les Gens du quai, dirigée par

De nombreux constats étonnent et parfois émerveillent les acteurs de tels projets : le travail avec l’artiste conduit l’enfant à des

longitudinal

de

quatre

ans,

Anne Lopez ; en 5ème, les enfants ont abordé le théâtre avec la compagnie de L’Astrolabe de Nicolas Pichot (3h/semaine) et l’écriture 34 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

avec Jean-Daniel Dupuy (1h30/quinzaine) ;

capacités d’individus en pleine construction

en 4ème, l’expérience de l’écriture a été

personnelle,

prolongée et le théâtre a fait place à la

impalpables et intimes relevant du sensible

musique avec Maguelone Vidal (3h/semaine)

et du cognitif ? Fulgurances, hasards ou réels

et enfin en 3ème, l’année tourne autour d’une

acquis, c’est ce que la recherche tente de

approche d’« art total » avec la compagnie de

cerner grâce à des méthodes qualitatives

Mathias Beyler (3h/semaine), abordant le

empiriques complémentaires (observations

théâtre, la danse, la musique, la radio,

filmées et entretiens avec les artistes et avec

l’écriture, la poésie...

les enfants, en individuel et en groupe). Le

capacités

somme

toute

chercheur n’est pas là pour conforter une Nous avons régulièrement des remarques venant des acteurs du projet (enseignants, éducateurs, artistes…) sur diverses capacités fines dont font preuve les jeunes : « j’admire

de quoi ils sont capables », « un lâcher-prise et une confiance totale », « une immersion totale », « ils sortent de cette identité d’élève pour devenir danseur »... Il s’agit de remarques subjectives et non de constats objectifs face aux réels effets de l’art et aux capacités des jeunes. En effet,

selon

quelle

théorie

l’enfant

ou

l’adolescent ne serait-il pas capable de certaines performances au point de nous en étonner ? Et a contrario, des observations sporadiques

extérieures

suffisent-elles

réellement pour tirer des conclusions sur les

demande béhavioriste afin de satisfaire les objectifs d’une commande institutionnelle, ne présentant un système que par ses interactions sans chercher à en comprendre le fonctionnement interne, la Boîte noire, en l’occurrence la pédagogie déployée par les artistes. Ce qui doit être au centre de notre modèle d’analyse est ce qui se joue entre l’artiste et les enfants, à l’intérieur de l’espace spécifique qu’instaurent la présence et le travail de/avec l’artiste, alliant les mondes de l’art et de l’école, pour former un Troisième

espace, concept proposé par Richard Deasy1, caractérisant l’éducation artistique comme un lieu socialisant aux normes spécifiques, nous le verrons plus loin dans cette présentation. Nous cherchons donc à mieux comprendre la

1

Third space, When learning matters, R. J. Deasy, L. M. Stevenson, Arts Education Partnership, 2005.

35 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

relation subjectivante qui se crée en atelier,

Durant

cette

recherche,

nous

évaluons

tout en conservant l’exigence de maintenir

qualitativement les effets de l'art, mais

trois principaux domaines où sont repérables

surtout, nous cherchons à en comprendre le

les effets de l’art.

fonctionnement. Puisqu’il y a donc une insuffisance en termes d’évaluation des effets de l’art, il est nécessaire de construire un modèle théorique et cette expérimentation de classe artistique est propice pour mettre à l’épreuve notre hypothèse concernant la compréhension de la relation enfant-artiste et définir l’espace qui s’y crée. Ainsi, nous nous attacherons à comprendre comment et

Sur le plan de la recherche, il y a déjà de nombreux travaux publiés à ce propos : un aperçu

précis

existe

dans

les

pourquoi cette relation pédagogique basée sur l’expérience esthétique est fructueuse et quels en sont les enjeux.

communications du Symposium Européen et

Dans le cadre de cette communication, nous

International de Beaubourg de 20072. Les

avons

effets de l'art sont déjà assez bien repérés

théoriques qui ont retenu notre attention

par les travaux existants et nous avons pu

pour rendre compte des effets de l’art selon

les rassembler essentiellement dans trois

nos trois axes d’observation.

sélectionné

quelques

modèles

domaines : la cognition, le développement

En ce qui concerne le versant cognitif, les

personnel et la socialisation. Mais il s’agit

travaux d’Howard Gardner et Ellen Winner3

d’effets recensés largement inexpliqués,

avec le Project Zero permettent de dégager

faute de modèle théorique.

de l’éducation artistique essentiellement des capacités

«

perceptives, productives et

Publiées dans l’ouvrage Evaluer les effets de l'éducation artistique, Symposium international et européen de recherche, Paris, 2008, La Documentation Française/Centre Georges Pompidou. 2

3

Evaluer les effets de l'éducation artistique, op. cit., p. 69 & p. 145.

36 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

réflexives ». Selon eux, parmi ces capacités

mais surtout pour qu’il se réalise de façon optimale

cognitives, huit catégories de schèmes de

en tant qu’être humain », le processus de

pensée sont stimulés en atelier d'art, à

création est ainsi appréhendé dans ce qu’il a

savoir

la maîtrise d'une technique ;

de plus éducatif et individualisant pour la

l'investissement et la persévérance ; l'imagination ;

personne, développant une autonomie et

l'expression ; l'observation ; la réflexion ; l'extension

affirmant sa subjectivité par l’expérience

et la recherche ; la compréhension du monde

créative.

:

«

artistique ». Nous pouvons donc noter que ces capacités travaillées en atelier forment une approche intellectuelle complète : fonctions réceptives, expressives et raisonnement. La notion de mémoire n’est pas mise en avant dans ces travaux mais bien présente. Toutes ces fonctions cognitives sont à la fois spécifiques à l’expérience esthétique et généralisables à toute expérience de vie et d’apprentissage.

la

notion

de

socialisation,

pour

laquelle nous nous réfèrerons à plusieurs recherches

distinctes,

permet

d’ouvrir

l’expérience sensible individuelle vers un partage collectif. Pour cela, les travaux de Pippa Lord5 et la métaphore de l’expérience artistique comme un Triangle d’apprentissage

mutuel nous éclairent sur la nécessaire cohésion entre les artistes, les enseignants et les élèves.

S’agissant du développement personnel, les travaux de Pierre

Enfin,

Gosselin4

et ce qu’il

nomme l’Autorité intérieure met en avant « une tendance profonde incitant à être auteur de

ses pensées, de ses actions et de ses œuvres (…) qui

Richard Deasy6 présente quant à lui cette rencontre comme menant à l’ouverture d’un

Troisième espace, une sorte de sortie sans sortir de la classe, un lieu qui n’est ni

favorise ainsi le développement d’une forme

purement un atelier ni une classe, un espace

d’autorité qui porte à transcender ce qui a été

esthétique de création, formateur et source

proposé ». Selon lui, « Si l’on entraîne l’élève à

d’échanges démocratiques au sein de l’école.

créer, ce n’est pas simplement pour qu’il s’exprime,

4

Evaluer les effets de l'éducation artistique, op. cit., p. 255.

The arts-education interface : a mutual learning triangle ?, J. Harland, P. Lord, A. Stott, K. Kinder, E. Lamont, M. Ashworth, NFER, 2005. 5

6

Third space, op. cit.

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

En somme, plusieurs travaux sont éclairants,

de l'artiste dans la classe avec les enfants, dès lors

d’autant plus si on les met en relation. Ils

que l'artiste pense et agit en tant qu'artiste, relève

convergent vers un « espace d’apprentissages

d'une autre logique que la logique didactique commandée par les attentes et les formes scolaires

mutuels » entre les artistes, les élèves et les

établies, une logique obéissant plutôt à ce que

enseignants, ne se réduisant pas seulement

nous pourrions appeler un esprit d'atelier ».

à un triangle mais ouvrant justement une nouvelle aire éducative dépassant la forme scolaire, et relevant de normes spécifiques.

Voilà donc l'hypothèse sur laquelle nous nous sommes basés, à savoir que « l'artiste,

en tant qu'artiste avec les enfants, ouvrirait un

Il se crée ainsi un espace où les adultes et les

espace d'actions et de compétences nouvelles, une

adolescents échangent d’égal à égal, tous

zone proximale de développement singulière ». La

apprennent et forment une communauté de

Zone proximale de développement, selon la

réussite partagée, l’art et le sensible donnant

théorie de L. S. Vygotski8, explique que pour

du sens à la vie et aux projets de chacun. Le

qu’un enfant puisse vraiment progresser, il a

modèle d’analyse va donc nous permettre

besoin d’être accompagné par une personne

d’évaluer et de comprendre cet espace et ses

qui puisse anticiper ses apprentissages et

effets spécifiques.

ainsi le guider correctement à son propre

Pour tenter de le comprendre et notamment

niveau de compréhension. Ici, c’est cet

ce qui caractérise la relation enfant-artiste,

échafaudage

nous avons travaillé avec Alain Kerlan7

propose à l’enfant qui porte à croire que sa

autour d’une hypothèse qu’il a proposée

présence provoquerait quelque chose de

depuis plusieurs années, notamment au

particulier dans cette capacité à être à la fois

Symposium de Beaubourg, qui emprunte aux

devant et à côté du jeune, dans l’expérience

théories de L. S. Vygotski et qui propose de

esthétique, le guidant vers l’autonomie, la

considérer la présence et le travail de l'artiste

conscience de soi et l’affirmation de sa

dans la classe avec les enfants sous un

subjectivité dans le groupe classe.

pédagogique

que

l’artiste

éclairage vygotskien : « La présence et le travail

7

Evaluer les effets de l'éducation artistique, op. cit., p. 241.

8

Pensée et langage, L. S. Vygotski. Editions sociales/Messidor, Paris, 1985 (1933).

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Nous pouvons illustrer comme suit l’espace pédagogique des ateliers, avec, en son centre, l’expérience esthétique et la subjectivation.

Nous travaillons à une reformulation de

d’approfondir la compréhension de cet

notre hypothèse qui ne se réduit pas au seul

espace

concept

de

zone

proximale

de

et

peut

être

emprunté

à

la

psychanalyse de D. W. Winnicott9 et son

développement et qui conserve le parallèle

concept

entre l’idée de proximité et de distance. Un

transitionnel ou encore dénommé espace de

autre

création.

cadre

9

théorique

nous

permet

d’espace

potentiel,

espace

D.W. Winnicott, Jeu et réalité, Folio Essais, 2005.

39 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


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Pour conclure cette brève présentation, dès

personne, de l’adulte en devenir. La relation

lors que nous nous intéressons au contenu

entre l’adolescent et l’artiste engage la

de la Boîte noire que constitue l’éducation

subjectivité de chacun, des critères moraux

artistique,

de

et rationnels sont présents aux côtés de

nombreuses capacités travaillées en ateliers

critères sensoriels et esthétiques, les valeurs

par les élèves : des capacités cognitives,

objectives de réussite sont complétées par

sociales et personnelles, des savoir-faire,

les

des savoir-être, au monde et à soi, une

personnelle, encourageant la confiance et

conscience au niveau sensible et rationnel,

l’autonomie chez ces adultes de demain.

nous

pouvons

relever

valeurs

subjectives

de

formation

en somme une éducation globale de la

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Le projet MUS-E® à Lille MARIE-CHRISTINE LE FLOCH , maître de conférences en Sociologie, Université Lille

Cette

contribution

l’évaluation artistique

sur qui

aborde

un

projet

associe

deux

l’effet

de

d’éducation artistes

à

un enseignant dans chacune des dix classes d’une école élémentaire de la métropole lilloise. Ce projet MUS-E® a lui-même des effets sur les pratiques éducatives et le développement des enfants. La question de l’évaluation comprend par conséquent plusieurs niveaux d’analyse. Le premier concerne les fondements de l’évaluation, le second ses résultats en termes de progrès pour les enfants et le troisième rend compte de modifications des cadres spatiotemporels et des postures professionnelles du travail éducatif. Nous

présentons

Les normativités en éducation Toute évaluation repose sur des critères. Ils s’appuient sur des normativités que l’on peut rapporter à des univers de justice et de grandeurs (Boltanski, Thévenot, 1991) car l’école se trouve au carrefour de plusieurs univers

normatifs.

Dans

un

projet

d’éducation artistique, les artistes et les enseignants s’appuient sur des critères différents mais aussi sur des compromis et des convergences. Si l’école se trouve dans plusieurs mondes (Derouet, 2000) et on peut préciser qu’avec les

projets

d’éducation

artistique,

les

normativités de la Cité civique rencontrent ceux de la Cité inspirée. Mais l’école se

ainsi

successivement

les normativités à l’œuvre en éducation, l’effet de l’expérience esthétique vécue par les enfants et en dernier lieu la forme scolaire en travail.

trouve aussi confrontée aux injonctions de la « réussite scolaire », de productivité (taux de réussite), de « plus-value » éducative et de réputation pour leur école et leur quartier. Les enseignants et les enfants sont, à travers des directives mais aussi plus largement les normes et les représentations des acteurs 41 | P a g e

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dans la Cité industrielle, la Cité marchande et

corporelle, la présence d’esprit et de corps, le

la Cité du renom, pour reprendre ces mêmes

tout dans le plaisir physique et la joie d’un

catégories. Le bien commun et la citoyenneté

accomplissement.

visée se présentent donc davantage comme un problème que sous la forme d’une évidence. Différentes normativités travaillent ainsi les critères d’évaluation et la Cité par projet sert de référence commune. L’évaluation se présente au fond comme celle d’une dynamique en cours, tenant compte des étapes de son développement.

L’observation régulière en atelier montre des différences mais aussi des convergences dans l’expression de ces critères. Elles portent sur la place du plaisir, le rôle des émotions, les normes d’expression et de participation. Pour les artistes, le plaisir apparait comme une fin en soi et se confond d’une certaine manière avec celui de la réalisation d’une

Tels qu’ils sont formulés par les enseignants

œuvre. Pour les enseignants, il s’agit plutôt

et les artistes, les critères d’évaluation ont

d’un « carburant » qui soutient des efforts,

leurs spécificités. Au-delà des apprentissages

prix à payer de la satisfaction. L’émotion,

du socle de compétence et du respect de

force d’inspiration pour les artistes, reste

règles collectives, les professeurs des écoles

associée, pour les enseignants à l’émotivité et

attendent

deviennent

à la timidité. Pour les artistes, le plaisir du jeu

capables de se concentrer dans l’observation

et de l’activité se confond avec la motivation.

ou la comparaison d’objets ou de documents.

L’exaltation des sens engendre la création

Ils doivent montrer de l’énergie mais, en

comme par la magie. L’émotion est intégrée à

même temps, être capable de la maîtriser et

l’action créatrice, performance en elle-même.

faire preuve d’attention, de patience et de

Pour les enseignants, le plaisir motive l’effort

persévérance pour aller au bout d’un projet.

consenti pour un objectif de réussite et de

que

les

enfants

Pour les artistes, la liberté est première. Les enfants doivent oser s’exprimer selon les diverses pratiques artistiques proposées, travailler leur aplomb qui passe par l’aisance

valorisation du travail réalisé. Ce dernier passe par l’expression des désirs et la recherche de cette réussite mais aussi par la maîtrise de l’émotivité.

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Pour

les

artistes,

l’expression

et

la

C’est

en

fonction

de

cette

normativité

participation reposent sur l’estime de soi et un

négociée et ajustée que sont saisis les progrès

mieux-être de l’enfant. On peut parler d’une

pour les enfants.

individuation réussie fondée sur la confiance en soi et la capacité à se donner ses propres normes, selon une injonction à l’authenticité (Taylor, 1991) dans le travail de création. Pour les enseignants, il faut se montrer expressif, créatif et se situer en s’intégrant dans un collectif, selon une norme de participation. Les normes

d’expression

sont

celles

de

formulations correctes, de résultats clairs et acceptables, pendant que la démarche et le regard

artistiques

accordent

toute

leur

importance au brouillon et à l’élaboration. On

peut

ainsi

saisir

une

convergence

autour d’un compromis qui devient normatif : il « faut » sortir de la gêne (effacement, moqueries,

masques)

et

de

l’angoisse

scolaire, se donner ses propres règles pour une autonomie et la formation d’un jugement éduqué.

Les

d’expression,

normes de

d’authenticité,

participation

voire

d’implication apparaissent clairement comme normativités contemporaines de l’éducation.

Des progrès pour les enfants Au cours de la recherche nous avons pu saisir l’expérience esthétique des enfants à travers des moments de révélation, révélation de soi, à soi à travers le regard d’autrui, selon une perspective d’inspiration hégélienne qui peut être illustrée par la relation amoureuse. Cette expérience

débouche

sur

de

nouvelles

dispositions à travers l’ouverture de l’espace personnel et social de l’enfant. Les savoirs existentiels, comme les définit Merleau-Ponty

renvoient

à

une

certaine

manifestation de la vérité de soi, une capacité sensible de l’enfant à se révéler, à oser se montrer sous un jour inédit. Ce type de savoirs soutient l’enfant dans l’affirmation de son identité personnelle. Ces savoirs traduisent une certaine qualité à être, une perception et une attention particulière, la découverte d’une harmonie dans un processus créatif, la capacité de faire, de choisir, de s’exposer. Mathéo par exemple qui était absent de toute implication scolaire a pu oser exprimer un 43 | P a g e

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avis, choisir un thème, des partenaires et se

dialogique de l’identité constitue l’une des

laisser porter par la musique. Clément a pu

trois vecteurs de la construction identitaire

sortir d’un trouble sévère.

avec la dimension pragmatique (savoir en

L’expérience du succès personnel a une dimension narcissique mais elle réside aussi dans le fait de se sentir relié à quelque chose qui dépasse l’expérience ordinaire, quelque chose que l’on contemple et qui change le

action) et la dimension narrative (se dire se raconter) (Ricœur, 1990). Ces trois dimensions sont présentes dans les expériences vécues par les enfants dans le projet MUS-E® tel qu’il se déroule dans cette école.

regard que l’on porte sur soi. Au lieu de se

La reconnaissance de leurs qualités donne de

sentir menacé par des regards qui jugent, on

l’audace aux enfants. Ceux-ci prennent des

peut montrer de nouvelles dispositions,

risques et montrent un nouveau rapport aux

connaître un succès et se sentir porté par

étapes de réalisation d’un objectif. Cette

l’admiration des autres. L’apparition de ces

boucle vertueuse rend à nouveau possible

dispositions

l’horizon,

une pédagogie des erreurs qui deviennent

change le point de vue. Un voile se lève sur

des étapes. Inévitables et nécessaires dans

un monde que l’on découvre : celui de

tout apprentissage, elles sont surmontées à

formes nouvelles, de signes non perçus

la

jusque-là, de couleurs inhabituelles, un

académiques ou non académiques. Leur

monde de relations jusque-là inaccessibles

prise en compte est inégale dans le cadre des

ou incompréhensibles. Lila initialement en

évaluations standardisées mais on peut les

échec est devenue leader de sa classe pour

saisir par un suivi des parcours montrant,

les

par exemple, l’excellence en dessin de

nouvelles

apprentissages

ouvre

depuis

qu’elle

est

reconnue pour ses qualités. À la suite des philosophes, la sociologie de la construction de l’identité sociale a insisté sur le « caractère interlocutoire » du moi et cela tout au long de la vie. Cette dimension

faveur

de

ces

progrès

scolaires

Clément. En outre, les enfants ont pu décrire par eux-mêmes certains de leurs progrès :

Evaluation de compétences par les enfants eux-mêmes « Nous avons appris à manipuler différentes matières –plastique, tissus, carton, papier terre-, à utiliser un pistolet à colle sans se 44 | P a g e

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brûler, à coudre sans se piquer, à découper avec un cutter, à peindre en dosant la quantité de peinture, à nettoyer et à ranger les pinceaux ».

nécessairement à l’orchestration demandée

« Nous avons appris à travailler seul, à aider les camarades et à aller jusqu’au bout- d’une idée- ».

Dans le contexte d’une école, les cadres

aux éducateurs dans le contexte scolaire.

habituels du travail quotidien bougent au cours du déroulement des ateliers.

Le travail de création est aussi collectif, il invite à sentir l’interdépendance ainsi que la place trouvée et occupée dans un groupe. Au cours d’un projet de classe, un bagage de sens commun se constitue et devient une véritable culture de la classe. Cette culture commune permet de transcender bien des conflits ou

Les cadres scolaires en travail Le travail conjoint d’éducation des enseignants et des artistes transforme l’espace solaire, ses rythmes ainsi que les rôles inscrits dans les relations pédagogiques.

moqueries, à travers des références à ce qu’on

L’espace des ateliers invite au mouvement aux

a vécu ensemble (connivences, private jokes).

gestes plus spontanés et aux actes de parole.

La circulation des savoirs facilite ainsi la

Le projet Muse dans l’école où s’est déroulée

régulation des relations.

la

Pour conclure ici, l’expérience esthétique et la

réappropriation des locaux scolaires. Les

possibilité de la partager fait sauter des

ateliers peuvent se dérouler dans les salles

verrous. Les progrès sont constatés dans les

de classe, dehors (il y a trois cours), dans les

livrets de compétences. Des enfants peuvent

salles vides d’une ancienne école contiguë, à

retrouver

construction,

l’extérieur (land art par exemple) ou dans

personnelle pour chacun d’entre eux, selon une

des espaces intermédiaires (atelier photo

logique propre à l’équation singulière de leur

dans un hall). Les cadres temporels des

trajectoire. Pour autant, même si le respect de

séquences et du rythme scandé par les

ces singularités fait partie des normativités

récréations et les sonneries sont maintenus

contemporaines, l’expression et l’affirmation

mais ne sont pas systématiquement pris en

personnelle des enfants ne se prêtent pas

compte dans le déroulement des ateliers.

le cours de leur

recherche,

est

l’occasion

d’une

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Ces configurations nouvelles sont propices

l’état de concentration des enfants qui,

au mouvement plus libre des enfants et

cependant, s’ajuste à l’implication dans le

invitent

travail

à

des

formes

nouvelles

de

création.

Ce

ré-ancrage

de

d’expression : occuper l’espace physique et

l’apprentissage dans le cours de l’action ou

sonore d’une grande salle, apprendre la

de la fabrication desserre des contraintes

discrétion dans un couloir quand les autres

habituelles

classes ont besoin de calme pour travailler.

occasionnelle d’ennui ou de précipitation

Au cours de ces ateliers, les enseignants et

du

rythme

scolaire,

source

infructueuse.

les artistes interviennent en coprésence ou

Avec MUSE, « on peut respirer à fond », une

de manière séparée selon le projet et l’état

enseignante CP

d’avancement de ce dernier. Par exemple dans

l’écriture

d’un

conte

dramatique

destiné à être mis en scène, la comédienne prend des demi- classes dans la phase d’invention et d’écriture dictée, puis la classe entière travaille en répétition, en présence de l’enseignante et de la comédienne.

d’une nouvelle respiration. temporalités

sont

de la patience et de l’adaptation des interventions en fonction des progrès de chacun et de la progression d’ensemble. En bousculant les cadres de la forme scolaire, le projet d’éducation artistique modifie les prises de rôle et les styles de relation

Le temps de l’inspiration est aussi celui

Les

Le temps de l’inspiration est également celui

pédagogique. Les

modifiées

ateliers

d’éducation

artistique

par

fonctionnent comme une invitation à sortir

l’intervention partagée des enseignants et

des rôles prescrits ou à changer de style.

des artistes. Finir un dessin, obtenir un

En

résultat individuel (maquette) ou collectif

occasionnelle,

(scénette à savoir par cœur, bien interprétée)

imprévues, des professeurs d’école et des

devient plus important que l’heure de la

artistes opèrent un nouveau réglage dans

montre ou le temps de récréation. Cela ne

leurs interventions. Certains d’entre eux

supprime pas le besoin de pause rappelé par

demeurent

coprésence à

directe, l’épreuve

attachés

à

continue de

leur

ou

relations

identité 46 | P a g e

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professionnelle initiale. D’autres, à l’inverse,

Avec le projet MUS-E on voit bouger la forme

laissent

gré

scolaire. Le plus souvent, les adultes gardent

de la situation. Travailler ensemble produit

la main mais il arrive que des enfants

divers

fil

s’emparent davantage de la conduite d’un

du temps, l’activité et l’idée que chacun

atelier. Enfants et adultes sont en effet sur un

se fait de son métier.

pied d’égalité dans une expérience esthétique

évoluer

leur

ajustements

et

pratique

modifie,

au

au

Parmi les rôles prescrits, ce qu’on appelle la régulation normative est révélatrice des rouages de la forme scolaire. Selon les

qui bouleverse les représentations les plus répandues sur le développement des enfants, selon une métaphore de stades ordonnés.

contextes, une force de rappel est exercée

L’école en France n’en finit pas de se

par les enfants ; elle implique sa prise en

réconcilier avec le corps et les sens longtemps

charge. Assurer la discipline permet de libérer

séparés des œuvres de l’esprit. L’expérience

l’autre intervenant qui peut alors se consacrer

esthétique

à l’initiation artistique ou technique. Incarner

perception que l’on a du monde et des autres.

ce rôle peut être vécu comme une manière de

Le suivi du parcours des enfants montre des

tenir sa place, de rester maître de la classe.

moments de révélation qui se traduisent par

Mais il peut aussi être endossé à contre cœur,

une ouverture de leur espace personnel et

comme une corvée qui prive l’adulte du plaisir

social. Les postures de moquerie peuvent

d’une participation plus spontanée. À certains

ainsi évoluer vers le respect de qualités

moments de fort engagement des enfants,

différentes

cette force de rappel disparait et la régulation

dispositions

peut être abandonnée pendant l’activité. De

L’éducation artistique milite sans réserve

même, la transmission des consignes et

pour le respect des singularités et du

l’évaluation des résultats, tâches ponctuées

développement

de critiques ou d’encouragements, peuvent

également le problème de leur mise en

faire l’objet d’une redistribution émotive et

musique en déplaçant la question d’un

affective du travail d’éducation.

renouveau dans l’éducation morale.

sensible

et

l’accès enrichit

peut

à la

personnel

modifier

de

la

nouvelles

subjectivité.

mais

pose

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Bibliographie Baeza C., Le Floch M-C., Loeffel L., Nosalik P., Perugorria C., 2013, Effets de l’éducation artistique à

l’école. Exemple du projet MUS-E, Rapport pour l’association Courant d’Art, Université de Lille III, PROEOR-CeRIES, Dec, 2013. Boltanski L., Thévenot L., 1991, De la justification. Les économies de la grandeur. Gallimard, Paris. Derouet J-L. (Dir.), 2000, L’école dans plusieurs mondes, D Boeck Université, Bruxelles. Taylor C., 1991, Le malaise de la modernité, Cerf Humanités, Paris. Taylor C., 1998, Les sources du moi. La formation de l’identité moderne, Seuil, Paris. Ricœur P., 1990, Soi-même comme un autre, Seuil, Paris.

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Résider en résidence - Un détour par l’espace JEAN PAUL FILIOD , maître de conférence en Sociologie, Université Lyon 1 – ESPE

Résidence, résider : de l’Espace aux espaces de familiarité Parlerait-on de résidences d’artistes sans parler de l’espace ? Comme le temps, comme les objets, l’espace fait partie des évidences

L’invite est ici faite de s’attarder sur l’espace, à travers quelques résultats obtenus au fil de dix ans de recherche sur le terrain d’Enfance,

Art et Langages, programme lyonnais de résidences d’artistes en école maternelle1.

du quotidien. Dans l’espace toujours nous

Dire résidence fait résonner le verbe résider, et

sommes, sans cesse traversés par lui autant

d’autres avec lui : habiter, demeurer, rester. Un

que nous le traversons. C’est sans doute

artiste qui réside est supposé rester (au moins

pour cela que nous l’interrogeons peu,

un peu), s’être approprié a minima des

préférant, lorsqu’il s’agit d’artistes en milieu

espaces, devenus lieux, espaces de familiarité,

scolaire ou/et éducatif, les questions sur "la

partagés avec d’autres acteurs : enfants-

place de chacun dans le partenariat”, sur le fait

élèves2, enseignants, Atsem3, autres adultes,

de savoir si l’artiste est ou non “pédagogue”,

professionnels ou non. Cette appropriation

s’il n’est pas “instrumentalisé” par l’École, si

est-elle

les enfants “s’épanouissent” ou non, si les

l’artiste ait au moins le sentiment d’être en

inégalités entre eux sont réduites, etc. Ces

résidence, expression censée aussi signifier

sujets, évidemment légitimes et cruciaux,

qu’il n’est pas intervenant (et encore moins, si

dématérialisent toutefois les réalités de la

l’on veut bien s’étonner du drôle de destin de

rencontre entre artistes et milieux éducatifs.

certains mots, demeuré) ?

1

suffisamment

durable

pour

que

Pour plus de détails, on peut télécharger les rapports de recherche et le bilan d’activités sur www.eal-lyon.fr

Je remobilise ici l’expression utilisée depuis 2005 dans les rapports de recherche (cf. note 1) et utilisée plus récemment dans Necker, S. et Filiod, J. P. (2014). Le sensible au pluriel. Jeux de cadres en contexte d’éducation artistique, STAPS, 103, 87-99. Cette expression a pour finalité de prendre en compte en toute circonstance le double statut, générationnel et scolaire, des êtres concernés. 2

3

Agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles.

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Un lieu, des clefs, des lieux : une appropriation paradoxale ?

écoles à mettre l’artiste « au centre ». Peu d’architectures le permettent, et dans le cas

La présence effective de l’artiste dans l’école ne semble jamais être autant interrogée que

contraire, les acteurs compensent : 

des flèches au sol ou sur les murs

lors des premiers jours, où les équipes

invitent à un parcours menant au lieu

engagées dans ces partenariats se demandent

de l’artiste et parfois jalonné de

bien quel endroit lui sera dédié.

décors, liés ou non au travail de l’artiste ou/et des enfants-élèves ;

Les écoles n’ont pas été construites pour accueillir des artistes, ni, d’ailleurs, d’autres catégories

de

professionnels.

les artistes, au fil du temps, se

Leur

déplacent, pour signaler ou rappeler

architecture est conçue pour différentes

leur présence, prenant alors l’habitude

fonctions, attribuées à diverses pièces :

d’être là aux heures d’entrée et de

salles de classe, salle des maîtres, tisanerie,

sortie, à la cantine, etc.

cour de récréation, salle de motricité…et aucune personne de l’extérieur n’y est prioritairement attendue. Comme si l’école était conçue une fois pour toutes, étant ainsi pleinement un établissement (au secondaire comme au primaire).

contexte local, qui détermine le choix du lieu à

l’artiste.

minima, le font-ils au point de s’être approprié une sorte de « chez-soi » ? Ce qui peut sousentendre d’avoir les clefs de la maison. À ma connaissance, cette question ne fait pas partie des choses réglées une fois pour

À cette réalité spatiale générale s’ajoute le

dédié

Alors, puisque les artistes « résident » a

La

spécificité

de

l’architecture du bâtiment, la variation du nombre de classes, la loi qui n’autorise plus les enseignants à bénéficier d’un logement de fonction, autant de paramètres qui orientent ce choix. Parfois, on incite les

toutes au début de la résidence. Dans la pratique – ce que j’énonce-là ne résulte pas d’une étude systématique, qui reste donc à faire, l’artiste a parfois les clefs, souvent non. Ne pas les avoir, c’est se soumettre aux horaires de l’école, que l’artiste soit avec les élèves ou non. L’artiste fait ainsi comme beaucoup d’autres travailleurs : il rationalise 50 | P a g e

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ses espaces-temps, cherchant même à les

du photographe, le « studio » du musicien,

optimiser. Mais pour certains, la qualité de la

qui porte avec lui des sons, paramètre

résidence tient à la possibilité de venir sur

supplémentaire

des temps particuliers, tôt le matin, tard le

localisation. Quant au chorégraphe, rien de

soir, le week-end, les vacances scolaires.

tout cela. Ou tout. Il investit souvent

Car, si l’artiste conserve un fonctionnement

plusieurs espaces de l’école, voire l’école

qui consiste à se laisser porter par une idée,

tout entière, l’espace pouvant même être

une envie, un essai, intimement liés au

central dans son projet. Le visiteur peut ainsi

travail de création et à la mise en jeu d’un

se faire surprendre par des corps en

« univers artistique » (selon l’expression des

mouvement dans un espace scolaire jusque-

appels à projets), une résidence digne de ce

là très balisé et défini.

nom impliquerait que l’artiste ait les clefs.

Pourtant, il y a bien la « salle de motricité » ou

Mais en même temps, on peut résider sans

« salle d’évolution », mais souvent, les

posséder le pouvoir total sur les seuils du bâtiment, alors… Alors,

le

choix

de

la

chorégraphes refusent de s’y installer, pour que les pratiques scolaires et artistiques ne

un

soient pas confondues. Cette volonté de

inventaire, même partiel, renvoie de la

distinguer les pratiques conduit justement,

variété : une « BCD 4 », un « espace couchettes »,

parfois, à restreindre l’activité artistique

une « salle goûter »,« une sorte de salle de jeux »,

autant que possible à ce lieu, et ce, pour

une ancienne salle de classe, deux salles de

plusieurs raisons :

classe

revenons

dans

les

deux

aux

lieux,

premières

dont

années

de

donner une identité au travail artistique ;

résidence, puis une seule la troisième, du fait

reconduire autant que possible un

d’une création de classe…La recherche d’un lieu adéquat tient aussi compte de la ou des disciplines de référence de l’artiste : il y a

climat, spécifique à ce lieu ; 

protéger les autres lieux de l’école, notamment les classes, qui doivent

l’« atelier » du plasticien mais aussi le « labo »

4

Bibliothèque Centre Documentaire.

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être elles aussi préservées, identifiées

que les chorégraphes. Outre leur « atelier »,

comme le lieu du travail dit « scolaire ».

les plasticiens investissent la cour, les

On relèvera le paradoxe de cette distinction : l’étanchéité

des

lieux

peut

signifier

une protection des permanences culturelles de l’École, autant qu’une reconnaissance à part entière de l’activité artistique au sein de l’école (l’établissement) ou de l’École (l’institution).

couloirs, la BCD, le hall d’accueil ; voire les toilettes,

qu’on

encombre

ou

qu’on

transforme en jardin, pour faire prendre conscience ce qu’est un volume ou faire comprendre

qu’on

peut

aménager

diversement des espaces construits. En conséquence, ce sont aussi les liens entre les différents espaces qui sont modifiés, les

Le lieu et l’espace, la station et le mouvement « Dans la plupart des langues indo-européennes,

l'idée d'habiter est rendue par deux verbes, dont l'un exprime une relation de possession », habiter, « et l'autre l'idée d'une halte dans un mouvement », rester ou demeurer5. L’appropriation doit donc être pensée comme station en propre (le lieu) et comme station dans une relation intime au mouvement (l’espace).

seuils se révélant alors mouvants : les portes des classes s’ouvrent, sans que cela affecte les activités, tolérant mieux la circulation des élèves. Cette mobilité a une raison d’être bien différente de celle qu’on imagine souvent (la fuite), les élèves ayant intériorisé la logique des limites et la spécificité du travail

proposé.

Toutefois,

tous

les

enseignants ne réagissent pas de la même manière à ces modifications spatiales : une enseignante arrivée dans une des écoles qui

Ainsi, si résider en résidence s’entend

avaient

comme l’appropriation d’un lieu dédié à

fermait systématiquement la porte ; et obtint

l’artiste, cela passe aussi par celle de

sa mutation dès l’année suivante.

intégré

cette

nouvelle

pratique

plusieurs lieux et par le déplacement et le mouvement. Cette réalité ne concerne pas

5

Sivignon Michel. Du verbe habiter et de son amère actualité. Revue de géographie de Lyon. Vol. 68 n°4, 1993, p. 216.

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Des changements professionnels sous l’angle de l’espace L’approche spatiale permet ainsi d’aborder

voyage. Ils le prennent, ils racontent, c’est un vrai échange ». Les deux autres espaces sont « la BCD, tout ce qui tourne autour de l’album, y compris les objets pour raconter l’histoire, et un espace avec

la question du changement des pratiques

du matériel à disposition, des matériaux, pour faire

professionnelles. Chez les enseignants6, les

du collage, se faire plaisir ». « La manipulation »

exemples ne manquent pas, notamment via la

devient

dynamique générée par la polarité lieu de

d’apprentissage : « la semaine prochaine, on va

l’artiste – classe. L’exemple qui suit est

travailler le jus de raisin : ils apportent des jus de

exceptionnel, mais mérite d’être exposé, car le

raisin achetés en grande surface, mais ils vont avoir

« bouleversement » vécu par cette enseignante

3 kilos de raisin, avec chacun leur grappe et ils vont

de petite section, survient après une bonne vingtaine

d’années

d’habitudes

pro-

fessionnelles engrangées. Ces changements concernant sa classe et sont survenus la troisième et dernière année de résidence d’une

un

préalable

à

tout

processus

partir de la grappe et faire du jus de raisin, avec leurs mains ». Prégnance du corps, de l’expérience sensorielle, les danses et les chants ont pris une nouvelle place, en combinant contrainte :

« on fait un grand cercle » et liberté : « s’ils veulent chanter et danser, ils le font ».

artiste identifiée comme marionnettiste, mais qui

est

aussi

plasticienne,

conteuse,

chanteuse, musicienne.

Il

n’en

va

pas

différemment

avec

les

« albums ». « Aussitôt qu’un album est découvert, il est joué, et quand les enfants ont bien acquis les

Commençons par l’espace. Exit la répartition

référents lexicaux et spatiaux, qu’ils ont vécu

en « coins classiques : BCD, coin cuisine, garage,

l’histoire avec leurs tripes, leurs émotions, je passe

etc. », il y a désormais « trois espaces ». « Un

au support, à l’album papier, en petits groupes. Et

grand espace est prévu pour les marionnettes » et

seulement après, je le mets dans la bibliothèque.

pour une marionnette spécifique, qui passe « tous les week-ends chez un enfant différent » : c’est « très porteur parce qu’elle a son carnet de

Plus tard, je les vois, ils reprennent l’album et ils racontent l’histoire ». L’album est là, « c’est classique », mais « on fait autrement : je fais revivre l’histoire en mobilisant la pâte à modeler,

Pour les Atsem, voir D. Boukacem, J.P. Filiod, Entre-tenir sa place : les Atsem au travail, Rapport de recherche IUFM – Université Lyon 1, Ville de Lyon, 2011. Pour les artistes, voir J.P. Filiod, Des artistes dans l’école : brouillages et bricolages professionnels, Ethnologie Française, vol. XXXVIII, no 1, 2008, p. 89-99 Sur les mutations du travail artistique en général, voir la contribution de M. Buscatto dans ces mêmes Actes. 6

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

des objets, qui prennent place pas loin du support

avec des photos, on se dit ce qui va se passer le

dans le coin BCD ». La connexion est ainsi faite

matin (…). Si, plus tard, un enfant s’angoisse, je

avec la variété de matériaux, regroupés dans

reviens sur cette bande de la matinée, et je lui dis

« un grand carton, avec plein de trucs dedans, et c’est eux qui choisissent le medium qu’ils ont envie de coller ». L’enseignante se tient à distance :

« J’observe, de l’extérieur, les choix qu’ils font, et ça

“où on en est ? qu'est-ce qu’il te reste ?”, il voit où il en est, on repart ». Un regroupement au niveau du tableau est toutefois maintenu : directrice de l’école, l’enseignante partage

me donne des indications sur ce qu’ils sont. On les

son poste avec une autre, à qui elle ne veut

met trop dans “papier-crayons-peinture” tout de

pas « imposer (…) un bouleversement total ».

suite. Et la créativité, elle y est plus. Ils sont normés,

Mais, ce support au déroulé du matin, « ma

ça c’est clair ».

collègue l’utilise », « elle est ravie ».

Il n’y a pas pour autant absence de normes.

Enfin, un autre rituel a pris place, celui de

Les sciences sociales nous ont au moins

« dire Bonjour à chaque enfant, avec un vrai temps

appris cela : pas de vie sociale sans normes.

pour le faire

Mais

surprenante, mais la manière de le faire

ce

terme,

dans

la

bouche

de

». La pratique peut être

l’enseignante, signifie l’imposition d’une

contredit

contrainte aux enfants et l’absence de remise

bonjour”. La pratique a été importée par

en question des habitudes. Ainsi les « rituels »,

l’artiste, qui, pour chaque jour passé à

qui font partie de la panoplie professionnelle

l’école, visitait chacune des dix classes en

de

Censés

début de journée pour s’annoncer par un

« structurer » et « rassurer l’enfant », ils ont

« Bonjour » dit sur un ton et un temps dont la

lieu le matin après le temps d’accueil, au

singularité a été remarquée par beaucoup.

moment du « regroupement » des élèves

Selon l’enseignante, « elle a une manière de le

devant l’enseignant et le tableau. Pour notre

dire qui marque, elle dit “Bienvenue”, elle a fait

enseignante, « tels qu’ils se font habituellement,

comprendre qu’il fallait accueillir un enfant de 3 ans

ça n’a pas de sens pour les enfants. (…) Ils doivent

comme un être à part entière. Depuis, je le fais, et

pas écouter la maîtresse qui dit “c’est lundi,

les enfants sont contents qu’on se dise Bonjour ».

l’enseignant

de

maternelle.

l’adage

“C’est

simple

comme

gnagnagna”… ». Elle revendique toutefois un

« rituel » central, « le déroulement de la matinée : 54 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

La dynamique spatiale : motifs discrets et attention des acteurs Le choix de cet exemple est-il antinomique avec

la

problématique

de

l’artiste

en

résidence ? Non. Que cela concerne les changements dans la classe ne doit pas faire oublier que ce sont la présence et les manières de faire de l’artiste qui provoquent ces changements : le rituel du Bonjour, mais aussi le grand carton aux matériaux en tout genre, laisser faire les enfants et les observer à distance, la marionnette qui voyage… sont des pratiques mises en œuvre par l’artiste dès la première année. (On ajoutera, sans savoir si cela joue un rôle, que, dans cette école, l’artiste avait les clefs.) Une autre objection pourrait concerner la nature des changements. Ceux qui rêvent d’un

Enfin, on pourrait se dire que l’enseignante, directrice de l’école et plus proche de la retraite que de l’entrée dans le métier, se permet de fait plus de choses. Il n’en est rien : « Pendant les deux premières années, je

n’osais pas me lancer. Et l’artiste, c’est elle qui m’a permis de dire “Ose !”.J’avais peur, je n’osais pas me lancer, j’avais peur de ne pas être dans la lignée institutionnelle ». L’élan fut ainsi donné, mais rien n’aurait pu être fait aussi aisément sans le « soutien à 100 % de l’inspectrice » de circonscription. Ainsi, si le détour par l’espace nous permet de prêter attention aux choses concrètes (presque au sens de l’anglais, où concrète signifie concret, mais aussi béton), il ne peut faire l’économie des acteurs et de l’attention qu’ils

portent

eux-mêmes

à

ces

changements, si discrets soient-ils.

bouleversement de la culture scolaire ne sont sans doute pas servis… même si la suppression des rituels avec ces « petite section » (dire la date, compter les absents, poser l’étiquette personnelle, dire le temps qu’il fait…) relève de la rupture. Mais on retiendra surtout que les changements apportés s’inscrivent dans un rapport discret au quotidien, un des motifs innovants de ces résidences.

55 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Evaluer l’Éducation artistique et culturelle en partenariat Des extraits vidéo pour s’entendre, ou pas ! Etude de cas SOPHIE NECKER ,

maître de conférences, ESPE Lille Nord de France, Laboratoire

RECIFES, sociologue associée au CDWEJ

MILTON PAULO NASCIMENTO DE OLIVEIRA ,

danseur, chorégraphe,

improvisateur et artiste associé en matière de danse au CDWEJ

Entre

2011

programme

texte expose des résultats issus de ce

Comenius Regio réunit deux

travail1 autour d’une étude de cas. La

structures œuvrant à la présence des arts et

méthode de collecte de données retenue

des artistes dans les écoles ; l’une belge : le

repose

Centre

pour

l’évaluation. Ainsi, elle valorise la pluralité

l’Enfance et la Jeunesse (CDWEJ), l’autre

des regards subjectifs sur une même réalité.

européen

et

2013,

Dramatique

un

de

Wallonie

française : Enfance, Art et Langages (EAL). Il vise à questionner l’évaluation de l’éducation artistique

et

culturelle

à

l’école

pré-

élémentaire (dite « maternelle »).

sur

le

sens

étymologique

de

L’expérience de l’atelier en présence d’un(e) artiste,

sa

teneur,

ses

enjeux

est

appréhendée par le croisement de points de vue à partir d’une question : que disent des

Conduite par Jean-Paul Filiod et Sophie

acteurs différents (artistes, enseignant(e)s,

Necker, la recherche-développement de ce

personnels

programme

travaillant sur un même lieu, avec les mêmes

sociologie,

européen anthropologie,

fait

dialoguer

sciences

éducatifs

associés),

mais

de

enfants-élèves2, de situations émergeant du

l’éducation et sciences et techniques des

travail avec un(e) artiste ? L’intérêt est de

activités physiques et sportives. Le présent

mettre en valeur ce que les acteurs des

Cf. Necker, S. et Filiod, J. P. (2014). Le sensible au pluriel. Jeux de cadres en contexte d’éducation artistique, STAPS, 103, 87-99 ; Filiod, J. P. et Necker, S. (2013). Évaluer l’éducation artistique : l’expérience au croisement des points de vue. In Collectif, cARTable d’Europe. Approche du concept d’évaluation en éducation artistique à partir de résidences d’artistes à l’école. Lyon et Strépy-Bracquegnies : Caisse des écoles de la ville de Lyon et CDWEJ, 45-49. 1

Nous remobilisons l’expression que nous avons choisi d’utiliser dans les publications citées (cf. note 1), afin de prendre en compte en toute circonstance le double statut, générationnel et scolaire, des êtres concernés. 2

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

ateliers et les chercheurs considèrent comme

Dans cette contribution, à partir d’un extrait

significatif et pertinent, mais aussi d’étendre

vidéo retenu par Milton Paulo Nascimento de

les interactions entre les terrains pour

Oliveira en vue d’un entretien avec Sophie

développer la réflexion sur l’évaluation.

Necker, nous discutons les consensus et dissensus observés dans le croisement des

Pour les quatre écoles (deux françaises, deux belges) accueillant un(e) artiste et participant à la recherche, la confrontation de points de

points de vue, ce qu’ils peuvent nous apprendre de l’expérience en éducation artistique et de son évaluation.

vue s’opère par une succession d’étapes : -

Le filmage d’une séance de travail avec

tapis, Alice monte sur le tapis3

artiste et enfants-élèves. -

Le visionnage de ce film par le chercheur

et

par

chaque

acteur

travaillant avec cette classe. Chacun, seul, relève des passages qu’il trouve significatifs. -

La rencontre de chaque acteur en entretien individuel, sur la base des données filmées. Les échanges portent sur ce que chacun a relevé de marquant.

-

L’extrait vidéo : Sauter maintenant sur le

Un entretien collectif avec ces mêmes acteurs. Le chercheur propose une sélection de passages significatifs et de ce que chacun a pu en dire.

Présentation Au cours de l’atelier qu’il conduit auprès d’enfants-élèves âgés de 2,5 à 4 ans, Milton Paulo Nascimento de Oliveira propose au groupe de « traverser » trois tapis alignés en « dansant très vite ». Pendant qu’un ou deux enfants-élèves évoluent sous le regard de l’artiste,

les

autres

certains

étant

déjà

sont

spectateurs

passés,

;

d’autres

attendant leur tour. Le jour du filmage, la classe n’est pas au complet. Les adultes peuvent alors accorder du temps à chacun, individuellement. Cela permet aux enfants-

3

L’extrait est ainsi intitulé par l’artiste.

57 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

élèves

d'explorer

les

consignes

de

en

particulier

son

hypothèse

sur

le

mouvement tout en gardant leur singularité

balancement d’Alice.

et sans pour autant se faire emmener, voire

« J’ai observé [Alice] (…) qui était dans le fond,

parfois effacer, par la force du groupe.

en attendant assise sur le tapis. Je sentais Paulo

qu’elle était en train déjà de s’organiser pour

Nascimento de Oliveira retient de ce temps

faire son passage, elle était déjà en train de

En

entretien

individuel,

Milton

de travail, un extrait de trois minutes, centrant son attention sur Alice, alors âgée de 2 ans et 7 mois. Cet extrait est situé dans les dernières minutes de la séance. Il débute

capter, de préparer son corps dans son mouvement, ce balancement qu’elle faisait vers l’avant, vers l’arrière, où elle engageait les jambes, elle était déjà dans un dessin de saut parce que comme c’est un passage sauté, il

lorsqu’Alice attend son tour, assise sur les

faut sauter et quand on saute, on plie les

tapis réservés aux spectateurs. Elle est

jambes, on penche le torse vers l’avant, il y a ce

attentive,

des

rapport du corporel qui homologue le haut et le

enfants-élèves. L’extrait prend fin à l’issue

bas qui commence à se connecter et donc, elle

de la traversée des tapis par Alice, seule.

commence à créer ce va-et-vient aussi. (…) elle

elle

observe

le

passage

est en train de se préparer » Entretien individuel, avril 2013

Pourquoi avoir retenu cet extrait ? En entretien, Milton Paulo Nascimento de Oliveira repère chez Alice attendant son tour, les prémisses de l’action de traversée à venir. Par

décomposition

du

mouvement

et

interprétation des indices pris sur la posture et

l’attitude

de

l’enfant-élève,

l’artiste

montre qu’Alice est déjà dans l’activité, alors même qu’elle n’est pas encore engagée dans la traversée : elle prépare son mouvement. Milton Paulo Nascimento de Oliveira appuie

S’appuyant

sur

l’extrait,

Milton

Paulo

Nascimento de Oliveira pointe les étapes par lesquelles Alice est passée au cours de l’atelier (ce jour-là) : elle est d’abord avec lui puis, avec une autre enfant-élève puis, seule dans la traversée. L’extrait présente cette dernière évolution. L’artiste affirme alors que dans son attitude, Alice a changé (cette fois-ci à l’échelle temporelle de l’année) : elle a gagné en autonomie. Faisant référence

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

au Body-Mind Centering4, il conduit son

en place, où elle revisite ce chemin et là, le fait

analyse et repère des traces d’« intelligence

de devoir tomber, aller par terre, le fait de se

dans le parcours du mouvement » :

lever, la façon dont elle s’est mise debout, elle

« Là on la voit [Alice], elle monte toute seule, je

était très à l’aise, vraiment très intelligente dans son parcours de mouvement »

lui tends la main, elle ne prend pas ma main.

Entretien individuel, avril 2013

Elle va toute seule, elle tombe tout de suite, donc elle était déjà dans un élan et elle n’avait

En

pas besoin comme avant, que je la prenne par

Nascimento de Oliveira signifie. Il marque

la main, que je la place sur le tapis. (…) Elle

l’évolution – positivement connotée – de

repousse encore une fois le sol et à un moment

l’attitude et du mouvement d’Alice, au fil des

donné, elle se redresse au niveau de la tête, en

ateliers du projet et de cet atelier. Non

repoussant le sol et elle passe vers la position quatre pattes, elle fait le transfert vers les bras, elle plie les jambes et elle se lève. C’est incroyable, ce moment où, tout de suite, on oublie Alice, qui était un peu immobile, avec un

retenant

cet

extrait,

Milton

Paulo

seulement elle a gagné en « autonomie », mais elle développe également un mouvement « habité », « complexe », anticipé, où elle a « trouvé ses appuis » et « ses articulations ».

corps statique (…). C’est incroyable ces microchangements, transformations qu’elle a pu développer dans son parcours. Voilà, c’était un peu ce que j’ai observé et (…) en lisant le livre de Body-Mind Centering5, qui parle de ce

Pluralité des regards subjectifs sur l’expérience d’Alice, pour une pratique du regard pluriel

schéma de développement qui est le schéma

En

homologue, qui est l’avancée vers l’avant, le

Nascimento

recul vers l’arrière dans ce plan sagittal, le

plusieurs extraits vidéo pour ce qu’ils

rapport avec les bras et les jambes où l’enfant

révèlent

est en train de découvrir le quatre-pattes, il y a aussi ce rapport avec la nuque. C’est très présent chez Alice, ces schémas qui se mettent

entretien

de

individuel, de

Oliveira

l’expérience

Milton

Paulo

choisit

ainsi

d’Alice

dans

l’atelier. Dans cette même étape de collecte, l’enseignante explique ne pas souhaiter

Il s’agit d’une méthode d’éducation somatique par le mouvement créée par Bonnie Bainbridge Cohen. Pour des détails, voir : www.bodymindcentering.com 4

5

Nouvelles de Danse, 50 : Sentir, ressentir et agir. L’anatomie expérimentale du Body-Mind Centering®, Contredanse, 2002

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

rendre significative l’activité d’Alice car au

Enseignante : « Alice, c’est toujours… (…) "Tu

moment du filmage, cette enfant-élève est

viens ? Tu vas être dans l’atelier plasticine [pâte

dans la classe depuis peu de temps. En

à modeler]." (…) parfois, j’installe les autres et

entretien collectif, le chercheur revient sur

je ne sais plus dans quel atelier elle était, parce

l’extrait « Sauter maintenant sur le tapis, Alice monte sur le tapis » choisi par Milton Paulo Nascimento de Oliveira. L’artiste et l’enseignante disent tous deux la lenteur d’Alice et s’accordent sur les conséquences délétères

qu’elle

pourrait

avoir

sur

le

parcours et le vécu scolaires de l’enfantélève

(en

classe

et

dans

le

groupe).

que ça fait bien 10 minutes que je lui ai dit de s’asseoir là. Tu sens, chez elle… [qu’elle n’est] pas à l’aise, [qu’elle] verrouille un peu tout ce qu[’elle] peu[t] verrouiller. (…) Artiste : « moi je vois quelqu’un qui est

effectivement dans une lenteur, dans un corps qui ne répondait pas. (…) comme si elle avait envie, mais que le corps ne répondait pas. Et là [dans l’extrait retenu], je sens que le corps

Toutefois, les indices prélevés par l’artiste et

répond parce que (…), c’est le sourire

l’enseignante pour analyser et discuter

maintenant qui est présent, qui est vivant et

l’extrait vidéo, les cadres qu’ils mobilisent

que le corps répond. Il y a un courant qui

pour interpréter et attribuer une valeur à

passe » Entretien collectif, juin 2013

l’expérience d’Alice diffèrent. L’enseignante renvoie la lenteur de l’enfant-élève au

Cette étude de cas (le cas n’étant pas Alice,

mauvais choix de ses parents de l’amener à

mais l’extrait présentant l’activité d’Alice)

l’école en poussette. Pour l’enseignante, ce

rend

mode de déplacement explique « sa lenteur et

son corps qu’elle découvre de façon différente par rapport aux autres qui descendent et qui marchent, qui ne viennent pas en poussette ». La poussette serait un frein à l’autonomie et à liberté motrice d’Alice.

compte

interprétations

de

la

possibles

pluralité d’une

des même

réalité. La façon de voir et d’interpréter retenue dépend – entre autres choses – d’un système de valeurs, de connaissances, de repères normatifs que le regardeur s’est construit. Donner la possibilité (des moyens,

60 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

des outils6, du temps, des espaces…) aux équipes

en

partenariat

de

verbaliser,

d’expliciter, de partager, discuter, débattre ces cadres apparaît comme une condition nécessaire

à

l’appréciation

fine

des

comportements d’enfants-élèves et de leur complexité,

à

la

compréhension

des

connaissances en jeu dans l’expérience vécue en ateliers… Soit une condition nécessaire à un partenariat bienveillant et constructif.

Milton Paulo Nascimento de Oliveira souligne l’intérêt de l’outil vidéo. En tant qu'artiste, situé toujours au milieu des enfants-élèves, la vidéo lui permet une vision plus large de l'atelier, de prendre de la distance pour pouvoir observer ce qui se passe à l'intérieur comme à l’extérieur de l'espace de danse. 6

61 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

La participation d’élèves du primaire à la création d’un conte musical avec des artistes professionnels MYRIAM LEMONCHOIS ,

professeure département de didactique, Université

de Montréal – Québec

EMELINE OUVRARD , auxiliaire de recherche, Université de Montréal – Québec

Introduction et problématique Il est largement reconnu que l’éducation artistique

favorise

le

développement

personnel et social des enfants, mais peu d’études ont effectivement démontré l’existence réelle de ces effets (Valentin, 2006). Il manque des recherches pour comprendre pourquoi est favorisé ce développement

en

fonction

des

expériences des élèves dans les projets artistiques (Burnard et Swann, 2010). Il est difficile de déterminer, dans la littérature de recherche, si les effets sont causés par la pratique artistique ou par les

innovations

pédagogiques

qui

l’accompagnent (Fraisse, 2008). À titre d’exemple : le travail collectif est souvent adopté lors des projets artistiques, et il semble

permettre

d’améliorer

les

compétences sociales. Mais l’effet est-il dû aux expériences artistiques ou au

dispositif pédagogique mis en place ? Seule

la

spécificité

de

l’expérience

artistique permet d’affirmer la plus-value apportée

par

l’éducation

artistique

(Lauret, 2008), il est donc important de comprendre la participation d’élèves à des activités artistiques, en se centrant sur les spécificités de ce type d’activités, sans négliger les formes d’intervention pédagogique qui en découlent. Les deux dernières décennies ont vu la multiplication des interventions d’artistes dans les écoles et certains affirment qu’il ne peut y avoir de projets artistiques sans participation (Lacroix et Mouraux, 2003). Quant à Ramsey White et Rentschler (2005),

ils

affirment

participation

développe

que

cette

l’intégration

sociale. Par ailleurs, il n’existe pas toujours de participation authentique des élèves dans les projets (Hart, 1992). Dans 62 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

certains

projets,

simplement

les

élèves

présents,

sont

ailleurs

ils

par

exemple,

le

programme

d’enseignement

au

primaire

de

de la

prennent part aux prises de décisions

Nouvelle-Écosse (CSAP, 2006, p. 130).

(Guetzkow, 2002). Si de nombreuses

Finalement, la question de savoir quelles

recherches ont porté sur la participation

formes de participation l’école peut

des élèves dans le cadre de projets, le

intégrer

désaccord entre les points de vue des

comme des acteurs sociaux reste entière.

auteurs est peut-être la conséquence d’un manque de définition de la participation (Merli,

2002).

C’est

pourquoi

il

est

nécessaire de définir précisément ce qu’on entend par participation des élèves afin de mieux en comprendre les effets.

pour

reconnaître les élèves

D’une manière générale, la clef de la réussite de la participation des enfants est le partenariat enfants-adultes (Cook et

collab., 2004). La même constatation est faite par les chercheurs qui ont étudié les pratiques pédagogiques des artistes dans

De la Convention Internationale des

les écoles : les pratiques des artistes les

Droits de l’Enfant – CIDE - (ONU, 1989)

plus

découle une définition de la participation

recherchent une coparticipation et une

des enfants reliée à la reconnaissance de

coconstruction entre les élèves et les

leur parole. Depuis, l’UNICEF demande

artistes (Craft, 2005). Actuellement, les

aux milieux scolaires de développer la

recherches sur les interventions d’artistes

participation

(Lansdown,

dans les écoles — les plus récentes et les

2005). Mais la participation reste encore

plus approfondies — se sont déroulées en

peu développée à l’école (Brougère et

Grande-Bretagne, où, depuis 2002, un

Vandenbroeck, 2007) ou alors seulement

important programme de partenariats

dans le cadre d’une éducation à la

artistiques et culturels, intitulé Creative

citoyenneté (Pagoni, 2009). De plus, elle

Partnership, a été institué avec les écoles

est parfois définie comme une contrainte,

(Burnard et Swann, 2010). Ces recherches

évaluée en termes d’énergie dans la

ont fait ressortir plusieurs points saillants

réalisation de la tâche, comme l’indique,

concernant la relation entre élèves et

des

enfants

signifiantes

sont

celles

qui

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

artistes : c’est une relation qui diffère de

artistique ait lieu, l’artiste doit diriger son

celle de l’enseignant avec les élèves

acte volontairement en formulant une

(Galton, 2008 ; Pringle, 2008) parce que

intention artistique, afin de maximiser les

l’artiste se place à côté des élèves

potentialités de l’œuvre et la rendre plus

(alongside) (Chappell et Craft, 2009). Les

intelligible,

interventions des artistes dans les écoles

(Ilhareguy, 2008, p. 72). Pour autant, le

signifiante

et

intéressante

aborder

travail ne se limite pas à une résolution de

autrement les élèves (Chappuis et collab.,

problème qui consisterait à surmonter des

2008, p. 135). Le contexte des projets de

contraintes de départ. Si l’artiste vise

création

donc

intentionnellement à réaliser ce qu’il

forme

pressent, il n’est pas toujours en mesure

particulière de participation dans les

de pleinement déterminer les contours de

écoles.

son

seraient

pertinent

une

autorisation

avec pour

des

à

artistes

étudier

est

une

œuvre

dès

le

début

de

son

élaboration. L’intention artistique est un

complexe

intentionnel

composé

d’interactions entre intentions initiales et

Contexte théorique Spécificité de la création artistique Reprenant Genette lorsqu’il affirme qu’il

n’y a d’œuvre qu’à la rencontre active d’une intention et d’une attention (Genette, 1992, p. 8), nous avons défini la spécificité de la création artistique autour de ces deux notions : intention et attention. Le premier élément propre à l’art, selon

intentions d’ajustement (Ilhareguy, 2008). Le processus de création consiste en une mise à l’épreuve d’intentions artistiques, l’artiste expérimentant et vérifiant la pertinence de ses intentions artistiques dans l’expérience de leur matérialisation ou de leur conceptualisation (Ilhareguy, 2008). Au cours du processus de création, l’artiste est donc amené à faire des choix parmi ses intentions.

Genette (1997), est la considération de la fonction intentionnelle. Pour que l’activité

64 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

Genette

(1997)

appelle

«

attention

esthétique », l’attention de l’œuvre et de ses éléments

de

contenu

matériels

et

conceptuels afin de les apprécier. Mais cette attention intense et rigoureuse concerne aussi l’activité du créateur : l’œuvre est le résultat d’une composition où chaque intention est soumise à l’appréciation. L’artiste ne peut vérifier et évaluer la pertinence de ses intentions artistiques qu’à partir de sa propre sensibilité (Lemonchois, 2003). Toute création artistique repose sur

l’appel à la nécessité intérieure (Kandinsky, 1989), dans lequel l’artiste puise ses mobiles (Guisgand, 2002) et qui joue un rôle de verdict sensible pour mettre à l’épreuve

des

intentions

artistiques

Participation Depuis la publication de la CIDE (ONU, 1989), la participation de l’enfant a fait l’objet d’un nombre croissant de projets concrets et de recherches (Lansdown, 2001). Dans ces travaux, la définition de la participation découle directement de l’article 12 de la CIDE qui octroie aux enfants le droit d’avoir un rôle actif dans leur propre existence et de participer aux décisions

les

concernant

(Lansdown,

2001). Et les chercheurs constatent que le degré le plus élevé de la participation des enfants consiste dans leur implication à des prises de décision avec des adultes, parce que ce sont celles qui ont un impact durable sur l’ensemble de la collectivité

(Ilhareguy, 2008).

(Cook et collab., 2004). En adoptant cette

Si le créateur évalue ses intentions artistiques

définition de la participation, il s’agit de

à partir de sa sensibilité, il doit, par ailleurs,

chercher à comprendre comment les

toujours avoir en tête le regard d’autrui.

artistes impliquent les élèves dans des

L’artiste pour être reconnu doit montrer qu’il

prises de décision.

est non seulement singulier (un être unique dont l’œuvre est originale) mais aussi

universel (capable de toucher chacun et tous en même temps) (Heinich, 2005). L’art n’est pas seulement une pratique solitaire, c’est aussi une pratique sociale.

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Craft (2005) et Galton (2008), qui ont étudié la participation d’enfants à des projets avec des artistes, constatent que cette participation est authentique, si les enfants ont un rôle dans le processus de création. Étant donné que la participation 65 | P a g e


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

étudiée dans notre recherche se déroule

montréalaise pour tous. Ce programme

dans le contexte particulier de projets de

accorde un soutien financier pour la

création avec des artistes dans des

réalisation de résidences de création

écoles, nous avons porté notre attention

dans des écoles publiques francophones

sur

qui

et anglophones de l’ile de Montréal. Les

accompagne la mise à l’épreuve des

projets Libres comme l’art ont pour

intentions artistiques, pour déterminer

objectif de faire participer des élèves à un

les ajustements nécessaires à la réussite

projet

de l’œuvre. Dans ce contexte et afin

professionnelle sur plusieurs mois et ils

d’étudier la participation d’élèves du

sont

primaire à un projet de création avec des

artistique et la pertinence des activités

artistes, trois objectifs ont été définis : 1)

proposées dans les écoles. Les jeunes

Analyser comment les artistes sollicitent

entrent

la participation des élèves en milieu

démarche

scolaire

comment

alors que les artistes alimentent leur

l’appel à la nécessité intérieure module la

travail créatif au contact des élèves.

participation des élèves ; 3) Définir le

Toutes les disciplines artistiques sont

statut de l’élève lors de sa participation

admissibles

au processus de création avec les artistes.

douzaine de projets de ce type étant

le

processus

;

2)

de

décision

Comprendre

de

création

sélectionnés

ainsi

en

sur

leur

contact

artistique

au

artistique

qualité

avec

une

professionnelle,

programme.

Une

financés chaque année, nous en avons sélectionné un au hasard pour réaliser cette étude. Ce projet a permis la

Méthodologie Sujets La recherche a porté sur un des projets du programme Libres comme l’art, créé par le Conseil des Arts de Montréal, Le Conseil des Élus de Montréal et l’École

participation d’élèves de 2e et 3e cycle du primaire à un projet de création de conte musical avec des artistes : une classe de 3e cycle a réécrit un conte traditionnel japonais, une autre de 2e cycle a appris à jouer du shinobue, écrit et sélectionné 66 | P a g e

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des séquences musicales, et deux autres

La méthode de recherche a été élaborée à

du 2e cycle ont sélectionné des thèmes

partir d’une recension de la littérature de

musicaux joués. Deux artistes, l’une

recherche impliquant des enfants. La

Japonaise et l’autre Québécoise, sont

sociologie de l’enfance considérant les

intervenues conjointement. Toutes les

enfants comme des participants à part

deux étant co-auteures du conte, mais

entière

l’une d’elles étant à l’initiation du projet,

d’interpréter

c’est cette dernière que nous avons

(James et Prout, 1990), au même titre que

rencontrée en entretien.

les adultes (Christensen et Prout, 2002),

(Sirota,

l’approche

la méthode de recherche a consisté en individuels

avec

une

artiste et un enseignant et des entretiens collectifs avec les élèves, avec auparavant des observations lors des interventions des

artistes

pour

propre

expérience

d’infantiliser

les

reconnaitre leur point de vue (Alderson,

De type descriptif (Van der Maren, 1987),

entretiens

évite

capables

enfants : il s’agit d’entendre et de

Instrumentation

des

leur

2005),

en

concevoir

les

questions. Parce que la recherche a bénéficié d’une subvention de recherche octroyée par le Bureau de la recherche, du développement et de la valorisation de l’Université de Montréal, son comité d’évaluation scientifique en a approuvé la

2000). Le guide d’entretien auprès des élèves a donc tenté de respecter les éléments essentiels lors de la conduite de recherche auprès d’enfants, déterminés par Clark et Moss (2001). Tout d’abord, les élèves ont pu témoigner de leurs expériences des élèves, comme des experts, c’est-à-dire comme les autres participants

adultes.

Ensuite,

une

certaine souplesse était présente dans la conduite des entretiens : de mode semidirectif, l’ordre et la formulation des questions ont été adaptés aux enfants.

valeur scientifique.

67 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


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Déroulement

entretiens ont été effectués : un en fin de

Les entretiens ont pu être réalisés auprès de trois groupes d’élèves, chaque groupe étant composé de trois élèves différents issus

des

différentes

classes

ayant

participé au projet. Ces entretiens ont duré environ quarante minutes chacun. Faire parler les élèves sur ces concepts complexes, tels que ceux que nous avons définis dans notre contexte théorique, s’est

avéré

difficile.

Les

projet, auprès de l’enseignant spécialisé en musique, qui a accompagné le projet dans les classes y participant, et deux entretiens avec l’artiste, initiatrice et responsable du projet, un entretien en début de projet, avant les observations dans les classes et un entretien à la fin du projet. Les entretiens avec les adultes participant ont duré en moyenne une heure.

premières

L’analyse des notes d’observation nous a

questions de l’entretien qui consistaient à

permis de construire un guide d’entretien

leur demander ce qu’ils avaient aimé le

et de déterminer les questions que nous

plus et ce qu’ils avaient aimé le moins

voulions

dans le projet, ainsi que ce qu’ils avaient

questions d’ordre générales sur le projet,

imaginé du projet avant de le commencer,

le

nous ont permis d’avoir un recueil de

questions réunies sous trois thèmes

mots et d’expressions que nous avons

principaux : le processus de prise de

réutilisé pour reformuler nos questions le

décision, l’appel à la nécessité intérieure,

plus simplement possible. Par ailleurs,

la relation aux élèves.

guide

poser.

Après

d’entretien

quelques

contenait

des

nous avons adapté le déroulement du guide d’entretien à l’ordre d’apparition des thématiques que les élèves abordaient au cours de l’entretien, nous contentant ainsi de reformuler leurs propos pour les

Le point de vue des enfants a été croisé celui

des

adultes.

Afin de pouvoir réaliser les observations et les entretiens dans les écoles, l’obtention d’un

inviter à être plus précis.

avec

Considérations éthiques

Trois

autres

certificat

d’éthique

auprès

de

l’Université de Montréal s’est avérée nécessaire, ainsi que des formulaires de 68 | P a g e

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consentement

de

participation

à

la

recherche, un destiné à l’enseignant, un à l’artiste et un autre aux parents des élèves. L’obtention du consentement des élèves leur a été demandée de manière orale. Les données ont été anonymisées, les

participants

ne

devant

pas

être

identifiés lors du traitement des données et de la diffusion des résultats.

Résultats La participation des élèves sollicitée par les artistes Le projet de création avec les artistes s’est toujours déroulé dans la salle de classe réservée aux cours de musique. Malgré cela, les enfants nous disent que

Méthode d’analyse des résultats

ce n’est pas comme à l’école. Les élèves ont

Les entretiens avec les élèves, l’artiste et

eu des difficultés à expliquer pourquoi,

l’enseignant

mais en reformulant leurs propos nous

analysés

de

ont

été

transcrits

manière

puis

thématique

en

avons eu quelques réponses.

fonction des objectifs de recherche. Ils

Tout d’abord, les élèves disent que le

ont été analysés une deuxième fois en

projet a un côté mystérieux, car ils n’ont

écoutant le fichier audio, afin de mieux

pas su avant la présentation du projet

cerner le discours des enfants. Lors de

final, ce que serait le résultat de leur

l’écoute, l’analyse a été effectuée de

travail. Le projet de création a été réparti

manière linéaire, au fur et à mesure de

entre plusieurs classes : une classe a

l’écoute : les chercheurs interrompant

réécrit l’histoire, une autre a appris à

leur

jouer

écoute

pour

transcrire

leurs

du

shinoboe

pour

créer

des

interprétations faisant appel au cadre

séquences musicales et deux autres

théorique ou aux données recueillies lors

classes ont choisi toutes les autres

des observations. Les résultats sont

séquences

présentés en fonction des objectifs de la

ailleurs, la mise à l’épreuve d’intentions

recherche

artistiques implique une modification de

et

des

thèmes

issus

de

l’analyse des entretiens.

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musicales

du

conte.

Par

la création au fur et à mesure de son 69 | P a g e


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

avancement : c’est nous qui a fait l’histoire…

ce ne sont pas les élèves qui jouent, mais

mais on sait pas quoi ça fait tout ensemble,

des artistes professionnels. L’artiste qui

nous disent les élèves. Les élèves ont bien

dit intervenir depuis 15-20 ans dans les

compris que le projet se construisait au

écoles reconnaît que des projets comme

fur et à mesure et pensent que cela

cela, c’est assez unique. Cet aspect est assez

diffère des autres projets dans l’école.

déroutant pour les participants : au début

Pour les élèves, c’est un projet mystérieux aussi parce qu’il diffère des autres projets d‘intervention d’artistes à l’école. Des élèves nous disent avoir pensé au

du projet, l’enseignant et les élèves nous ont

dit

avoir

été

étonnés

par

le

déroulement du projet qui impliquait seulement de faire des choix musicaux.

début du projet qu’ils allaient continuer à

Lorsque nous demandons aux élèves ce

jouer de la flute à bec et faire un spectacle de

qui est différent entre l’enseignant et

fin d’année, comme tout le temps. Certains

l’artiste, un élève cite un exemple de

élèves ont même imaginé que les artistes

séquences de pratique du shinobue, l’une

feraient tout le travail de création et

avec

qu’eux joueraient seulement quelques

interventions

morceaux. Les interventions d’artistes se

enseignant de musique :

déroulent souvent sur une courte période

l’artiste

japonaise et

l’autre

durant

ses

avec

leur

Moi je trouve que c’est meilleur avec Y (l’artiste

et ont pour objectif de présenter une

japonaise), plus facile, parce qu’avec P. (leur

œuvre, de réaliser un atelier avec les

enseignant de musique), avec lui on pratique,

élèves ou d’aider l’enseignant à réaliser

avec Y., on pratique et en même temps on

une création des élèves montrée à l’école. Les projets Libres comme l’art sont originaux parce qu’ils visent une création professionnelle, c’est-à-dire destinée à un large public, et qu’ils séparent les aspects

techniques

des

aspects

de

création, ainsi dans les projets musicaux

choisit des choses, et puis après on donne son opinion si on aime cela. Lorsque le projet a été présenté en début d’année aux élèves, ils n’avaient pas imaginé avoir un rôle aussi important. Ils ne sont pas habitués à être consultés pour participer à des prises de décisions : c’est 70 | P a g e

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souvent leur enseignant qui choisit ce

décidé d’y aller avec des votes et que j’ai noté

qu’ils doivent faire et selon eux, c’est

pour avoir une espèce d’idée de ce qui plaisait le

correct, parce qu’après tout c’est lui le prof,

plus à la majorité. Le processus de création

nous disent-il. L’une des particularités du

artistique

projet retenue par les élèves est leur

programmation horaire comme les cours,

participation à des prises de décision.

les contraintes de temps ont donc eu des

Le fait que le projet se déroule dans la classe a impliqué une adaptation du projet aux contraintes scolaires. L’enseignant et les élèves ne nous nullement parlé des contraintes scolaires, peut-être parce qu’ils les vivent au quotidien et qu’elles sont des habitus inhérents à l’école, auxquels on finit par ne plus penser. Mais elles ont été pesantes pour l’artiste, même

ne

répond

pas

à

une

implications sur le type de relation avec les élèves : j’aurai trouvé cela intéressant

d’avoir un peu plus de temps, travailler peut-être un peu plus en équipe, pour avoir un rapport plus égal, nous dit l’artiste. En début de séance, l’artiste commence par présenter le travail du jour :

On a trouvé pas mal d’ambiances, mais il nous reste quelques moments du spectacle où là on ne sait pas quoi, alors c’est pourquoi on est en

si le projet n’était pas le premier qu’elle ait

classe ce matin, on a besoin de ton avis ; c’est

fait dans des écoles. La contrainte la plus

parce qu’on a plusieurs choix, et on n’arrive pas

dérangeante pour l’artiste a été celle du

à se décider.

temps si on avait eu plus de temps, j’aurai peut-

Lors de chaque séance d’une heure, les

être essayé d’explorer les segments musicaux et

artistes présentent aux élèves diverses

de creuser un peu plus les choix. L’artiste

versions musicales et elles les consultent

aurait préféré travailler avec les élèves sur

pour la mise à l’épreuve de ces intentions

des périodes plus longues que celles qui

artistiques. Elles ont donc délégué une

lui étaient allouées sur l’heure du cours

partie de leur travail en demandant aux

avec l’enseignant spécialisé en musique. À

élèves d’en déterminer les ajustements

cause de la contrainte de temps, l’artiste a

nécessaires. Quand nous demandons aux

dû adopter une procédure particulière

élèves ce que cela leur fait, ils répondent :

pour le recueil des choix des élèves : j’ai

moi, j’aime ça parce que si c’est eux tous seuls 71 | P a g e

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qui les prennent, c’est comme si nous on

S’ils le mettent là, on serait content, parce que

participait pas parce qu’on donne pas notre

notre choix est mis dans le spectacle, mais si

opinion. Pour les élèves, la notion de

jamais ils sont pas là, on se dirait au moins

participation est bien reliée à l’idée de

qu’on s’est laissé exprimer, même s’ils les ont pas mis, au moins on a pu dire notre

prendre des décisions personnelles.

personnalité, les choix qu’on a choisis.

Dans l’ensemble, de nombreux choix des élèves

ont

été

incorporés

dans

la

réalisation : on a respecté leurs choix

musicaux, les instruments, tout cela on ne les a pas remis en question, nous dit l’artiste. Selon l’enseignant, les élèves

Les élèves ajoutent qu’ils se sont sentis

comme des créateurs, créatrices parce qu’ils ont pu exprimer leur personnalité dans le processus de création, même si tous leurs choix n’ont pas été intégrés dans le produit final.

ont reconnu leurs choix dans le produit final et il nous rapporte des propos

avait choisi cela, ben oui, c’est ma phrase. Mais

L’appel à la nécessité intérieure et la participation des élèves

toutes les décisions prises par les élèves

Le processus de création exige de porter

n’ont pas été incorporées dans le projet.

une

Par ailleurs, jamais les décisions qui ont

matériaux qui peuvent être insérés dans

été prises par les enfants n’ont jamais été

l’œuvre,

considérées comme des choix définitifs,

séquences

le processus de création impliquant de

intentions artistiques est parfois difficile

mettre

pour les élèves. Dans ce projet de

entendus après le spectacle : ah oui, on

à

l’épreuve

des

intentions

attention

dans

esthétique

le

cas

musicales.

sur

observé, Formuler

les

les des

artistiques. Mais les élèves semblent ne

création,

pas avoir été gênés par le fait que les

initiales

décisions qu’ils avaient prises n’étaient

artistes, mais elles ont été mises à

pas définitives ou qu’elles n’aient pas été

l’épreuve par les élèves qui ont dû faire

incorporées dans le produit final :

appel à leur nécessité intérieure afin de

les ont

intentions été

artistiques

formulées

par

les

rendre un verdict sensible et prendre des 72 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

décisions

pour

les

ajustements

enseignant semble faire référence à ce

des

choix

des

que Bachelard appelle la surveillance

artistes

intellectuelle de soi (Fabre, 2003), un

arrivaient en classe avec trois ou quatre

outil nécessaire à la pensée scientifique

versions d’une même séquence pour les

qui nous empêche de croire à la première

faire

leur

idée venue. Si l’enseignant spécialiste en

demandaient de choisir parmi celles-ci

musique renvoie parfois les élèves à leur

celles qu’ils pensaient correspondre le

intériorité,

mieux. Après mise en contexte, l’artiste

l’enseignante généraliste leur demande

demandait aux élèves de réfléchir en

rarement : c’est pas vraiment une habitude,

fermant les yeux parce qu’elle pense qu’il

nous disent les élèves. Et lorsque cela

lui semblait important de renvoyer les

arrive, c’est uniquement en dehors des

élèves à leur intériorité : je vais le faire moi-

apprentissages scolaires, par exemple

même, pour avoir le senti, parce que c’est très

pour demander aux élèves s’ils veulent

kinesthésique, c’est les sons, faut les sentir,

aller dehors quand il fait chaud. Les

nous dit-elle.

élèves

Lorsqu’on demande à l’enseignant ce

l’enseignante ne veut pas qu’on copie les

qu’il pense de cette manière de faire, il

personnes, parce que quand on va juste dehors

nécessaires. séquences

Lors

musicales,

écouter

aux

les

élèves.

Ils

nous répond que lui aussi le demande dans ses cours aux élèves : on veut bien

les

pensent

élèves

qu’à

pensent

ce

que

moment-là,

et qu’on a rien à faire (…) là ce sera plate. D’après cet exemple, l’intériorité renvoie

leur faire prendre conscience de cela, le faire

au maître intérieur, tel que défini par

réfléchir, le faire questionner sur tout cela. Ce

Durkheim (1938) : l’élève doit y faire

qu’on

appel

remarque

d’emblée

lorsqu’on

pour

y

trouver

une

vérité

compare les propos de l’artiste et ceux de

universelle, le juste et le bien. Si le maître

l’enseignant concernant l’appel

la

intérieur chez Durkheim renvoie à un

nécessité intérieure, c’est que l’artiste a

habitus moral (Fabre, 2003), l’appel à la

parlé de sentir quand l’enseignant parle

nécessité intérieure de l’artiste n’est pas

de réfléchir et de questionner. Cet

du même ordre. Elle ne renvoie ni à un

à

73 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

bon comportement social (Durkheim,

et les attentes d’un public. L’élève doit se

1938)

poser

ni

à

un

bon

comportement

comme

artiste,

c’est-à-dire

intellectuel (Fabre, 2003). Lorsque les

comme être unique parlant au nom et en

artistes partagent avec les élèves leurs

direction de tous (Maulpoix, 1998, p. 63).

intentions artistiques, ils leur demandent

Lorsque les artistes et les élèves se

de faire appel à leur sensibilité.

retrouvent

Les artistes demandent aux élèves de faire appel à leur sensibilité et en même temps, ils rappellent aux élèves que la

partenaires

créateur, adopte

dans

l’apprentissage une

l’acte

artistique

perspective

culturelle

indispensable à la pratique artistique.

mise à l’épreuve sensible implique le regard de l’autre. Les consignes des artistes

contiennent

à

la

fois

une

dimension personnalisante et de l’autre une

dimension

généralisante.

La

dimension personnalisante apparaît dans les consignes des artistes : ce que tu

préfères ; ce que tu penses ; ça va être toi qui va décider. Et les artistes rappellent ainsi aux élèves la dimension généralisante en leur demandant par exemple : imagine-toi que

tu arrives au spectacle et là tu entends…

Le statut de l’élève lors de sa participation au processus de création En déléguant une partie de leur travail de création aux élèves, les artistes leur ont reconnu une expertise : celle de pouvoir évaluer

la

pertinence

d’intentions

artistiques. Les artistes ont accordé aux élèves

une

expertise

:

celle

d’une

personne agissante, c’est-à-dire capable

Trouves-tu que cela nous met dans l’ambiance

de faire des choix éclairés dans des

de la forêt japonaise, de la forêt de bambous et

situations dont il maîtrise et comprend

que cela ouvre un conte japonais ? Les artistes

les enjeux (Lacroix et Mourault, 2003). Et

accompagnent les élèves dans le travail

étant donné que les artistes n’ont pas

d’explicitation de l’intention artistique en

vérifié

leur montrant qu’elle est un compromis

possédaient réellement cette expertise,

entre un projet d’expression personnelle

nous pouvons dire qu’elles ont d’emblée

auparavant

si

les

élèves

74 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


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reconnu les élèves compétents pour

n’est pas capable d’avoir totalement

participer

décisions

confiance dans leurs compétences : c’est

artistiques. L’artiste que nous avons

sûr que ce n’est pas ce que je pense au début là,

rencontrée justifie ainsi cette posture : ce

volontairement. Et il ajoute : peut-être que je

que j’ai essayé de leur dire que c’est eux les

ne

spécialistes, à partir du moment où je leur

personnellement. Je ne pense jamais qu’ils

donne le contexte et leur fais écouter

pourront faire certaines choses. Il cite en

différentes musiques, je ne vois pas pourquoi ils

exemple : souvent j’aurai envie de leur faire

ne seraient pas capables de choisir, puisqu’ils

écouter de la musique, telle que de l’opéra… « oh

ont une sensibilité. Les élèves ont vraiment

non, ils n’aimeront pas cela. Ça va rire et puis ils

eu l’impression qu’on les reconnaissait

n’aimeront pas cela ». Je m’enlève le droit de

comme compétents et se sont sentis

faire cela et je vois que cela pourrait très bien se

aux

prises

de

valorisés : Ce que j’ai préféré c’est choisir les

leur

fais

pas

assez

confiance,

passer. L’enseignant ne pense donc pas

musiques, parce que c’est des choix à nous, et

d’emblée que les élèves sont compétents.

pas des choix à d’autres. Au début du projet,

Les principes didactiques, quelles que

les élèves n’ont pas imaginé qu’on leur

soient les disciplines, reposent toujours

confierait des tâches propres à l’artiste.

sur l’idée que les élèves ne sont pas

Être reconnu comme expert est un rôle

compétents et que le rôle de l’enseignant

apprécié des élèves, mais qui n’est pas

est de les amener à le devenir.

habituel à l’école.

Lorsque

L’enseignant reconnaît qu’il y a un

participation des élèves, elle affirmait son

décalage entre l’attitude de l’artiste

ignorance en affirmant qu’elle ne savait

envers les élèves et la sienne : elles avaient

pas quelles musiques il fallait choisir en

au départ confiance en leurs idées, en leurs

rappelant plusieurs fois au cours d’une

capacités, en leur effort, en leur motivation.

même période et à toutes les périodes :

Même s’il valorise ses élèves en leur

moi je ne sais pas, c’est vous qui savez. Le

disant ah ça vous êtes bons pour cela ;

travail au sein du projet devait se faire

c’est comme cela que je voudrais qu’on

dans un esprit égalitaire : toutes les

travaille tout le temps, il reconnaît qu’il

opinions pouvaient être entendues, étant

l’artiste

a

sollicité

la

75 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


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donné qu’elle étaient issues de personnes

elle se déroule dans un contexte scolaire

considérées comme compétentes dans

en respectant ses contraintes. Les élèves

leur créativité et leur sensibilité artistique.

n’ont

En adoptant cette attitude, l’artiste a eu

artistiques mais ils ont participé à leur

l’impression que les élèves ressentaient

mise à l’épreuve et ont pu prendre des

un certain inconfort et qu’ensuite ils se

décisions

questionnaient :

nécessaires à la production artistique.

Je pense qu’ils ne sont pas habitués, qu’ils sont

Les élèves ont pris des décisions d’ordre

toujours dans un rapport maitre-élève, le

artistique et par de là se sont sentis

maitre sait tout, l’élève ne sait rien. Et là de les mettre dans un processus de coéducation, de

pas

développé

quand

des

aux

intentions

ajustements

reconnus comme compétents et dans une

cocréation, ils ne sont pas habitués à cela. Et

relation égalitaire avec l’artiste.

c’est la difficulté, la surprise.

Les élèves pensent que les artistes n’ont

Cela peut être en effet déroutant pour les

pas exercé une autorité sur eux, tout

élèves qu’un adulte qui prend la place de

comme,

son enseignant n’en sait pas plus que lui.

enseignant, mais que le prof, quand il est

parfois,

peut

le

faire

leur

prof, il est sévère. Ils rappellent ainsi que dans le rôle d’explicateur de l’enseignant induit

Discussion des résultats

inégalitaire.

Les résultats exposés ci-dessus nous ont permis

de

principale

répondre de

la

à

la

question

recherche

pour

comprendre la participation d’élèves du primaire à un projet de création avec des artistes.

Nous

avons

vu

que

une

cette

participation diffère sur de nombreux points de la participation demandée aux élèves habituellement en classe, même si

relation Les

pédagogique

propos

des

élèves

rappellent ceux de Rancière (1987), lorsqu’il affirme que l’artiste a besoin de

l’égalité comme l’explicateur a besoin de l’inégalité (p. 54). La reconnaissance des élèves, dans un rapport égalitaire entre adultes

et

enfants,

n’est

pas

sans

rappeler le projet d’émancipation décrit par Rancière (1987, 2009). Chez Rancière (2009), si l’instruction est basée sur un 76 | P a g e

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rapport savant

inégalitaire et

un

entre élève

un

maître

ignorant,

l’émancipation se base sur la prémisse d’une égalité des intelligences du maître et de l’élève qui leur permet d’échanger

leurs aventures intellectuelles (Rancière, 2009, 23). Il nous paraît intéressant d’interpréter les résultats à la lumière des travaux de cet auteur, car la définition de la

participation

empruntée participation

à

la et

interchangeables,

que CIDE

nous

avons

implique que

émancipation comme

soient

dans

les

publications du centre de recherche de l’UNICEF (Lansdown, 2005).

que l’élève a cherché en jugeant de l’attention

que

l’élève

à

porter

en

vérifiant par lui-même ce qu’il a trouvé. Pour

Rancière

(1987),

la

leçon

émancipatrice de l’artiste est d’effectuer une double démarche : ressentir et faire partager ce qu’il ressent. Cela ne signifie pas copier l’œuvre d’un artiste mais adopter une attention et une attitude de recherche propre à l’art pour dire et faire partager son rapport à soi, aux autres et au monde dans des matériaux a priori arbitraires et dont il faut forcer la résistance pour pouvoir se dire (Rancière, 1987). Cet auteur rappelle ainsi que la

Prendre pour point de départ l’égalité,

vertu première de notre intelligence est la

c’est donc partir non pas de ce que l’élève

vertu poétique (Rancière, 1987, p. 120).

ignore, mais de ce qu’il sait et de vérifier

Selon Rancière (2009), l’art de nos jours

s’il a usé de son intelligence (Rancière,

relève d’un régime esthétique qui lui

1987). Dans notre recherche, nous avons

octroie une valeur émancipatrice dans la

constaté que les artistes ont demandé

mesure où la propriété d’être de l’art

aux élèves de justifier leurs choix. Ils leur

n’est

ont demandé de rendre compte de leur

perfection technique, mais reflète une

volonté de donner du sens, en montrant

volonté de partager une appréhension du

que leur nécessité intérieure a bien été

sensible.

sollicitée. Ils ont donc joué ici un rôle

Rancière (1987), nous pouvons dire que

identique à celui du maître ignorant

le rôle pédagogique de l’artiste est de

décrit par Rancière (1987) en vérifiant

donner

dépendante

de

Reprenant

à

voir

faire

critères

les

de

propos

l’art

de

de

pour

77 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 | enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

apprendre

à

en

faire

soi-même

;

l’émancipation

de

Rancière,

comme

apprendre de celui qui vient en homme

capacité des individus à se démarquer

émancipé pour aider le novice sur le

des

chemin

(Rancière, 2009). Le projet d’émanciper

de

l’intelligence

poétique

à

identités

qu’on

leur

assigne

partager la parole muette de l’émotion en

par

maniant l’arbitraire de la langue — dans

progressives

le cas étudié le langage musical. Il

l’éducation, où expression de soi et

semblerait que développer une posture

enseignement artistique sont intimement

d’auteur à l’école consiste à mettre en

mêlés (Lemonchois, 2011). Mais dans la

œuvre

classe, le rapport de pouvoir entre élève

un

régime

esthétique

de

l’art

est

enseignant

dans

les

écoles

(1890-1920)

de

l’enseignement des arts, c’est-à-dire un

et

est

un

pouvoir

mode d’enseignement dans une égalité

d’assujettissement et l’expression de

des sujets, enfants et adultes.

l’élève ne suffit pour être émancipatrice. C’est parfois même au contraire une

Parce que la création artistique relève à la

source additionnelle d’assujettissement :

fois d’un régime de singularité et d’un

l’élève qui se dévoile par l’expression

régime de communauté (Heinich, 2005),

artistique se met en danger, en particulier

elle

lieu

celui d’être jugé par l’enseignant, comme

privilégié dans lequel le sujet peut se dire

lorsque celui-ci l’évalue en fonction des

tout en participant à la culture. Les

étapes du développement graphique.

artistes par leur expérience d’auteur

Pour que l’éducation ait une valeur

peuvent

émancipatrice,

constitue

aider

d’évidence

les

élèves

un

dans

la

il

ne

suffit

pas

de

construction de leur propre posture

demander aux élèves de s’exprimer par

d’auteur. La notion d’auteur permet de

l’art, mais de leur demander de faire

penser l’aptitude du sujet à produire du

l’effort

social, par sa position de sujet et par sa

sensible. L’appel à la nécessité intérieure

force

conjugue

renvoie

critique aussi

(Bertucci, à

la

2007).

Elle

définition

de

de

partager

des

leur

dimensions

expérience

à

la

fois

personnelle et sociale ; il exige un 78 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

compromis entre expression personnelle

participants (les élèves, l’enseignant et

et attentes du public. Par la mise à

l’artiste) dans le cadre d’un projet de

l’épreuve d’intentions artistiques avec

résidence de création dans une école

des artistes, les élèves peuvent approcher

primaire montréalaise. Les résultats ont

une posture d’auteur.

permis de comprendre la participation d’élèves du primaire à un projet de création avec des artistes. Nous avons vu que cette participation diffère sur de nombreux

Conclusion Parce

que

les

points de la participation demandée aux projets

d’intervention

d’artistes dans les écoles se multiplient, que cela soit au Québec ou dans d’autres pays, et qu’il existe des évidences non démontrées sur la participation des élèves, la recherche a eu pour objectif principal de comprendre quelle était leur participation dans

ce

contexte,

en

adoptant

une

définition précise de la participation. Par ailleurs parce qu’il est important de

élèves habituellement en classe, même si elle se déroule dans un contexte scolaire en respectant ses contraintes : les élèves ont pu prendre des décisions en faisant appel à leur nécessité intérieure, tout en prenant en

compte

les

attentes

d’un

public

potentiel. Cette participation repose sur la reconnaissance

en

amont

de

la

compétence des élèves, dans une relation égalitaire entre adultes et enfants.

prendre en considération dans ce type de

La recherche n’a étudié qu’un seul projet

projets, la spécificité des expériences

de résidence d’artistes dans une école. Il

artistiques, la recherche s’est appuyée sur

s’agissait d’une étude pilote pour mettre à

deux

l’épreuve

de

leurs

aspects

essentiels

:

l’approche

théorique

et

l’intention artistique et l’appel à la nécessité

méthodologique d’une recherche de plus

intérieure qui caractérise l’attention de

grande ampleur sur différents projets

l’artiste. De type descriptif, la méthode de

d’intervention d’artistes dans des écoles de

recherche a permis de recueillir dans des

l’Ile de Montréal. Elle nous a permis

entretiens semi-directifs les propos des

d’évaluer la pertinence de notre cadre 79 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

théorique

et

recherche,

d’affiner

en

d’entretiens

nos

particulier

auprès

des

outils les

de

guides

élèves.

De cette étude pilote, une autre question émerge.

Actuellement,

plusieurs

Mais

recherches sur l’engagement scolaire des

comme il s’agit d’une étude sur un corpus

élèves reprennent le concept de sentiment

restreint ses résultats ne peuvent être

d'efficacité

généralisables et doivent faire l’objet de

théorisé par le psychologue Albert Bandura

vérification dans d’autres recherches.

(1997). Ce concept désigne la croyance que

Cette étude nous a permis d’observer une forme de participation dans un contexte scolaire qui implique une reconnaissance de la compétence des élèves comme prémisse,

alors

qu’habituellement

la

compétence de l’élève y est reconnue comme émergent

finalité. :

Plusieurs

Que

devient

questions la

valeur

émancipatrice de ces projets à plus ou moins long terme ? Pourrait-elle être développée dans d’autres apprentissages scolaires ? Pour mieux comprendre les apports d’une telle participation dans les apprentissages

disciplinaires,

nous

aimerions effectuer une recherche pour comparer les pédagogies des enseignants et

des

artistes,

dans

le

contexte

d’apprentissages disciplinaires par projets, qui

sont

des

formes

pédagogiques

relativement proches des interventions d’artistes dans les classes.

(self-efficacy),

personnelle

possède un individu de ses compétences pour atteindre un but et serait source de réussite scolaire et même de résilience. Les recherches montrent que les élèves se désintéressent

des

activités

dans

lesquelles ils se sentent peu efficaces (Bandura, 1997). Le degré de perfection attendu est extrêmement élevé ou flou dans le domaine des arts lorsque les critères

de

perfection

technique

ou

d’appréciation subjective sont des critères d’évaluation. Par conséquent, l’évaluation des

réalisations

conséquence

de

des

élèves

miner

le

a

pour

sentiment

d’efficacité personnelle des élèves en arts, parce qu’elle consiste à adopter une évaluation

normative

basée

sur

la

comparaison (Ames, 1992), en arts avec un idéal inaccessible (le génie artistique), ou à adopter une attitude culpabilisante pour l’élève

(Ames,

1992),

qui

ne

peut

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re che rc he

comprendre la subjectivité de l’appréciation

la compétence de l’élève est reconnue

par l’enseignant de sa réalisation. Il n’existe

comme finalité. Adopter un enseignement

aucune

sentiment

des arts basé sur la reconnaissance de

d’efficacité comme source d’engagement

l’expertise sensible des élèves pour prendre

dans les apprentissages artistiques et nous

des décisions d’ordre artistique est-il

nous interrogeons sur la diminution de

envisageable ? Ce type de participation est-

l’intérêt des élèves pour les arts au fur et à

il

mesure de leur scolarité. Cette étude nous

didactiques des disciplines, et en particulier

a

de

en enseignement des arts ? Et si, oui,

participation dans un contexte scolaire qui

permet-il une amélioration du sentiment

reconnait la compétence des élèves comme

d’efficacité personnel des élèves ?

recherche

permis

sur

d’observer

le

une

forme

transférable

dans

la

plupart

des

prémisse, alors qu’habituellement à l’école

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Réflexions comparatives sur les effets spécifiques des résidences d’artiste dans les dispositifs d’éducation artistique et culturelle : vers la fin d’une rhétorique de l’exception ? NATHALIE MONTOYA ,

maître de conférences en sociologie, Laboratoire du

changement social et politique, Université Paris-Diderot Réflexions à partir d’une double enquête menée sur deux dispositifs d’éducation artistique et culturelle porté par le conseil général de Seine Saint Denis (Culture et Art au Collège, Résidence In Situ)

Depuis un peu plus d’une dizaine d’années,

raison de leur caractère encore trop peu

les recherches menées en sciences sociales

nombreux,

sur l’éducation artistique et culturelle se sont

l’examen singulier des dispositifs (types de

développées de façon importante. Si nous

moyens

disposons

coordination, forme des projets etc.) sur des

aujourd’hui

de

travaux

importants sur l’histoire de l’éducation artistique et culturelle, sur les processus socio-politiques qui ont présidé à son développement

par

expérimentations

et

dispositifs et si nous pouvons désormais nous

appuyer

sur

un

certain

nombre

d’enquêtes menées sur les projets euxmêmes, très peu de recherches se sont intéressées

aux

effets

différentiels

des

projets entre eux. Les enquêtes empiriques

ont

eu

consacrés

tendance

au

projet,

à

replier

type

de

réflexions générales sur « l’art à l’école ». L’étude

que

nous

avons

menée,

avec

Géraldine Bozec et Anne Barrère, sur le dispositif de résidence artistique In Situ, un an après avoir mené une étude sur le dispositif Culture et Art au Collège1, visait à explorer les effets spécifiques propres à la forme « résidence artistique » (par comparaison avec une forme plus ordinaire de projet d’une quarantaine d’heures). Quels sont les

sur l’éducation artistique et culturelle, en 1

Bozec Géraldine, Barrère A., Montoya N. Les parcours « La Culture et l’Art au Collège » : enquête sur un dispositif d’éducation artistique et culturelle, Laboratoire CERLIS, Université Paris-Descartes, février 2013. Le rapport et la synthèse peuvent être téléchargés ici : www.seine-saint-denis.fr/La-Culture-et-l-Art-au-College.html 82 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

apports spécifiques d’une résidence d’artiste

L’enquête sur In Situ a été menée au

dans un collège, lorsqu’on les compare avec

printemps

les processus engagés, par ailleurs, dans les

limitée en temps et en moyen que celle

projets d’éducation artistique et culturelle ?

réalisée sur la CAC (Culture et l’Art au

20133.

L’enquête

était

plus

Collège). Une dizaine d’entretiens ont été

Le dispositif de résidence In Situ du Conseil Général de la Seine-Saint-Denis Les artistes en résidence accueillis dans In Situ, 10 à 11 chaque année, signent un cahier des charges précis2. Ils s’engagent à poursuivre un travail de création personnel et à être présents au collège entre trente et quarante jours par an. Ils doivent s’associer à un lieu culturel en Seine-Saint-Denis et organiser des sorties avec les collégiens. Ils bénéficient d’un espace dédié au sein de l’établissement. Comme le dit la charte du dispositif, « artistiquement, il s’agit de développer des projets inédits, et de développer le travail en direction du public collégien en permettant le suivi, le contact et l’échange avec un artiste dans le cadre d’une démarche spécifique. La résidence d'artiste au sein du collège permet de rendre présente la création au plus près de la communauté scolaire. Elle offre un espace d'ouverture, de réflexion et d'expression auquel les collégiens peuvent être associés individuellement ou collectivement, charge aux partenaires du projet d’imaginer des moments de rencontre, de découverte et d’échange ». La résidence comporte des moments de passage obligés de l’acte inaugural à la restitution finale en passant par un certain nombre de points d’étapes.

menés avec des artistes et des enseignants, 12 séances de travail ont été observées et 6 groupes d’élèves de 3 à 4 élèves sur deux résidences ont été interrogés lors d’entretien collectif ; 6 sur 10 des résidences In Situ menées

en

2012-2013

ont

ainsi

été

examinées, par entretien ou observation. Par ailleurs les réunions de préparation de deux résidences de l’année 2013-2014 ont été observées

et

quelques

résidences

des

années passées ont été évoquées dans les entretiens menés les années précédentes avec les acteurs de Culture et Art au Collège. Comme pour l’étude sur les parcours CAC, nos questionnements portaient sur l’examen des processus sociaux mobilisés par ces projets et sur la saisie et l’analyse de leurs effets sur l’école et sur le rapport aux arts et à la culture des élèves concernés4.

2

La présentation du dispositif In Situ est téléchargeable ici : www.seine-saint-denis.fr/IMG/pdf/charteinsitu-2.pdf

3

Pour une présentation détaillée de l’enquête CAC, peu exploitée ici, cf. le rapport cité plus haut.

4

Le rapport d’étude n’est pas encore achevé et devrait être bientôt disponible sur le site du conseil général de Seine-Saint-Denis (prévue pour décembre 2014). 83 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

L’étude comparative sur les deux dispositifs

-

Afférentes à ces deux facteurs un

permettait ainsi d’observer les processus

ensemble de variables à la durée et la

engagés

et

nature de la présence de l’artiste dans la

culturelle lorsqu’un ensemble restreint de

classe changeait également : l’artiste

variables changeaient :

disposait d’une salle qui lui était affectée

-

-

par

l’éducation

artistique

La variable temps est sans doute celle

dans le collège (pour créer et travailler

qui marque le plus significativement la

avec les élèves), et de fait était installé

différence entre les deux dispositifs.

dans le collège au côté de l’équipe

La seconde variable, d’importance pour

pédagogique.

comprendre l’engagement des artistes dans ces projets, tient à l’esprit de la commande passée aux artistes dans chacun des dispositifs par les acteurs du Conseil Général. Dans le cadre d’In Situ, les artistes sont soumis à une injonction partiellement contradictoire : s’ils sont libres de mener leur création comme ils l’entendent

dans

l’espace

de

la

résidence, le conseil général attend d’eux qu’ils mènent avec une classe un

Les premières exploitations de l’enquête montrent

que

les

résidences

d’artistes

exacerbent les effets et les enjeux des projets d’éducation artistique et culturelle : si les tensions provoquées par les projets peuvent être plus fortes, la forme scolaire est retravaillée de façon plus significative par ces expériences et la familiarisation des élèves avec les objets culturels et les pratiques artistiques plus notables.

travail sur l’année qui donnera lieu à une présentation

finale.

L’injonction

à

produire avec les élèves est à la fois moins forte (il s’agit d’une résidence, et non pas d’un projet à mener avec les élèves) et plus exigeante.

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Les résidences exacerbent

contradictions tout en offrant des espaces de

les tensions et les contradictions

collaboration plus larges et plus ouverts.

propres au projet d’éducation artistique et culturelle

Dans une résidence, à cause de la durée et de la liberté offerte à l’artiste, la dimension erratique du processus créatif avec les élèves

Des formes de collaboration artistes-enseignants plus ouvertes et plus périlleuses Les enquêtes ont souvent soulignées les difficultés soulevées par l’entrée des artistes à l’école : les habitudes de travail des acteurs éducatifs d’une part, et des artistes et des acteurs culturels d’autre part, sont toujours pensées comme difficilement compatibles. Les artistes ignoreraient les codes et les

est accentuée, tandis que l’attente placée dans le projet et ses effets est plus forte.

Lors de la réunion préparatoire d’une résidence, un professeur de français demandait à l’artiste : « Ce qu’il va falloir se poser comme question, c’est là où vous voulez les emmener ». « On va voir ensemble » répondait l’artiste, évoquant à nouveau ses thèmes. L’enseignante insistait en rappelant que les thèmes allaient intéresser les élèves mais que le « problème c’était de savoir comment faire devant les élèves ». L’artiste s’en tenait à des réponses évasives sur un travail qu’il convenait de construire au fur et à mesure.

normes scolaires tandis que les acteurs éducatifs auraient du mal à comprendre les artistique

Cette ouverture des méthodes de travail avec

(caractère indéterminé du travail en cours,

les élèves, permise par le temps de la

rythmes irréguliers, logique de projet etc.).

résidence, exacerbe les tensions et amène

S’il existe de nombreux exemples de projets

les artistes et les enseignants à inventer de

qui démentent ces représentations stéréo

nouvelles formes de collaboration, entre les

typiques des mondes scolaires et culturels,

contraintes des institutions scolaires et les

les enquêtes tendent à montrer que les

différentes formes d’attentes placées dans

projets d’éducation artistique et culturelle

ces projets.

tendent à actualiser et à mettre en scène ces

« On navigue à vue » disait une enseignante au

oppositions. Les résidences d’artistes dans

moment de la restitution finale du projet de

les établissements scolaires accentuent ces

résidence sur lequel elle était engagée. « C’est

formes

spécifiques

du

travail

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

souvent du hors-piste », « on monte sur un bateau

cours d’écriture de l’artiste engagé dans le

et on ne sait pas toujours où l’on va arriver ».

projet : tout d’un coup dépossédés d’une

« L’aventure » au long cours engagée par la

œuvre dans laquelle ils ne se reconnaissaient

résidence accentue le sentiment d’incertitude

pas, ils ont interrompu brutalement, en

des acteurs éducatifs engagés dans les

excluant l’artiste du collège, toute forme de

projets d’éducation artistique. Elle élargit les

collaboration possible. Il est remarquable que

possibilités

les

d’après nos enquêtes, le temps long passé

enseignants qui se saisissent différemment

dans les collèges par les artistes, accentuent

de cette ouverture. Entre le retrait total

les tensions souvent présentes dans les

(absence systématique des enseignants en

projets d’éducation artistique et culturelle

classe, difficulté à communiquer) observé

davantage qu’elles ne stabilisent les formes

dans deux résidences), et un engagement

de collaborations, toujours bricolées, dans ce

exacerbé (présence systématique en classe,

type de projet.

de

collaboration

pour

velléité de co-création du projet avec l’artiste etc.) qui peut donner lieu à des malentendus et des tensions, les enseignants cherchent souvent pendant quelques mois la « juste

Exacerbation des tensions autour de « l’oeuvre finale »

place », les modes de collaboration les plus

D’après nos enquêtes sur in Situ, ces

efficaces

tensions

et

les

plus

confortables.

Ces

sont particulièrement fortes

à

moments d’ajustements et de recherches

l’approche de la fin de l’année et du moment

peuvent

de restitution finale, sur laquelle des attentes

donner

lieu

à

des

tensions même

divergentes sont souvent placées. Pour les

conduire à l’abandon de la résidence, dans

opérateurs du Conseil Général les moments

des

l’occurrence,

de

mené

nos

résidences constituent la vitrine officielle du

surinvestissement

des

dispositif : des élus, des responsables

enseignants dans l’une des résidences, les

administratifs des services culturelles ou de

avait amenés à jeter l’opprobre sur l’œuvre en

l’inspection académique y sont conviées très

extrêmement

cas

l’année

fortes

qui

exceptionnels. où

observations,

nous le

peuvent

En

avons

restitution

finale

de

chacune

des

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

officiellement

événement

etc. Nous avons assisté à des négociations

culturel soutenu par le Conseil Général. Lors

parfois délicates sur les formes de ces

de ces présentations, entre invités, on

restitutions (degré d’achèvement du travail

échange

et

présenté, ouverture au public, jauge et nature

esthétiques des travaux présentés par les

de la présentation etc.), significatives de

artistes et les élèves. L’un des opérateurs du

l’accentuation des tensions propres aux

dispositif nous confiait avoir été très déçu

résidences d’artiste.

sur

comme

les

à

un

qualités

formelles

lors d’une résidence précédente, par un travail final qui n’était pas à la hauteur du travail habituellement réalisé par ces deux

Une forme scolaire retravaillée

artistes ; interrogés un peu plus tard, ces

en profondeur par l’installation

derniers disaient avoir respecté le travail des

durable des artistes

élèves et s’en être tenu à ce qu’il était possible de faire avec une classe de primoarrivant, peu engagée dans le projet d’après eux. Pour les artistes, ces attentes

sont

parfois difficiles à comprendre car elles contrastent avec la liberté qui leur ait donné en début de résidence de créer à leur rythme et selon l’avancée du travail avec les élèves. Pour certains, l’exigence de restitution met en péril et dénature le travail d’atelier, d’avancées à petits pas, réalisé avec les élèves. Du côté des équipes pédagogiques, la tendance est à inclure ces moments de restitution dans les événements festifs de fin d’année : fêtes de collège ouverte aux familles, journées de présentation des projets

L’installation durable d’une manière de travailler alternative à la forme scolaire Notre enquête sur les parcours CAC avait montré que l’un des effets les plus notables des projets d’éducation artistique à l’école tenait

à

la

retravaillaient installation

façon la

d’un

«

dont forme

les

projets

scolaire

curriculum

»

:

alternatif,

ouverture de l’espace-temps scolaire, formes pédagogiques nouvelles, transformation de l’ambiance

etc.

Les

résidences

In

Situ

accentuent les traits de cette transformation, pour l’installer plus significativement dans l’espace scolaire. 87 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Interrogés sur les projets qu’ils mènent avec

Il est intéressant que les élèves associent ici

les artistes, les élèves évoquent longuement

le temps passé par l’artiste dans le collège

et en détail les types d’activités qu’ils ont

(elle « venait » tous les jours ») avec le sens

réalisées dans les résidences. L’installation

donné au projet : leur faire ce plaisir et se

sur l’année du travail avec l’artiste lui

faire

confère un statut d’activité légitime au sein

directement lié à sa manière de présenter

de l’espace scolaire, mais spécifiques dans

son travail de création, le projet a un sens

ses

pour ces jeunes filles parce qu’il s’inscrit

modalités

de

travail

et

dans

les

exigences qui lui sont associées.

« Enquêtrice : Mais vous savez pourquoi elle est là A. [artiste en résidence] ?

plaisir.

Si

l’idée

de

plaisir

est

dans le temps, et dans un temps dont elle présume que l’artiste fait un usage libre (« elle n’est pas obligée d’être là »).

Elève 1 : Non. Enquêtrice : Ça vous étonne ?

Un peu plus tard, à propos des formes de

Elève 1 : Depuis le temps qu’elle est là, ça nous étonne plus. Au début on pensait que c’était pour une journée, on se disait elle veut quoi, pourquoi elle est là.

travail

Elève 2 : On croyait que ça allait nous rajouter des heures. Elève 3 : On croyait que c’était pour une journée. Enquêtrice : Vous ne vouliez pas le faire ? Elève 2 : Non, c’est qu’on ne savait pas au début. Elève 1 : Moi je croyais que c’était pour une seule journée. En fin de compte, je vois elle venait tous les jours. Au début de l’année, on se disait, elle veut quoi, elle sert à quoi, elle va nous faire quoi, mais finalement, on se rend compte. Enquêtrice : Et elle est là pour quoi à votre avis ? Elève 1 : Ben pour nous faire plaisir. Elève 2 : Et pour se faire plaisir à elle. Enquêtrice : Comment ? Elève 2 : Ben, avec…En faisant partager ce qu’elle aime. (...) C’est pas pareil, elle est pas obligée d’être là ».

engagé

par

l’artiste,

les

élèves

opposaient là encore le travail avec les enseignants à celui mené par l’artiste :

Elève 1 : Les profs ne servent à rien. Ils font que crier, nous exclure, crier, ils nous apprennent rien. A… elle nous a jamais collé, elle nous a exclu qu’une fois. Elève 2 : Non, on peut sortir notre téléphone elle dit rien. Enquêtrice : Et ça vous trouvez ça bien ? Elève 1 : Bah oui. Enquêtrice : Ah, les règles sont pas claires avec A…. ? Elève 1 : Voilà c’est ça qui est bien – tant que tu travailles, tant que tu ne fais pas n’importe quoi, c’est ça qui est bien. Tant que tu travailles et que tu rigoles c’est bon. (...) Elève 2 : Pour nous c’est pas une prof, c’est quelqu’un qui est venu comme ça ».

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Non sans contradiction mais avec beaucoup

relation dans la durée avec l’artiste et la

de fermeté, ces élèves désignent un équilibre

pratique artistique, permet plus fortement et

fragile entre indiscipline et concentration,

plus durablement que dans les parcours

équilibre permis par l’ignorance des règles

CAC,

scolaires de l’artiste et supporté par son

cependant (il n’y a « que dans le projet avec A

engagement

qu’elle travaille »), à l’institution scolaire des

personnel

qui

semble

être

propice au travail et à l’intérêt de ces élèves

de

raccrocher,

de

façon

limitée

élèves à la limite du décrochage.

pour leur travail. « Tant que tu travailles et que tu

rigoles c’est bon » : c’est clairement l’idée d’un travail appliqué, mais accompli dans le plaisir, qui engage ces élèves dans le projet et le distingue de l’ordinaire des cours (« qui ne

servent à rien »).

Vers des « artistes-enseignants» ? L’enquête comparative montre que ces contradictions sont également accentuées lorsqu’il s’agit de comprendre le rôle et la place de l’artiste dans les établissements

de

dans lesquels ils sont en résidence. Les

raccrochages scolaires ponctuels, de l’aveu

artistes sont face aux élèves sans être

même de cette élève :

considéré, et sans se penser eux-mêmes

Cet

équilibre

autorise

des

formes

« Elève 1 : C’est gentil de sa part de vouloir faire le projet. Elle était à fond dans le projet. Je voyais qu’elle voulait vraiment finir. Nous aussi on voulait vraiment finir, on était à fond…quand il fallait accrocher les élastiques, c’était que moi et A…. (...) Elève 1 : J’ai vu qu’on pouvait travailler tranquillement en s’amusant et tout, là, du coup j’ai travaillé. Mais qu’avec elle. Y’a que le projet avec A…. où je travaille. Les autres cours, je fais n’importe quoi sauf avec A ».

comme enseignants. Ils travaillent à la réalisation d’un projet artistique, mais au sein d’un collège, avec une classe qui les contraint à faire preuve de pédagogie, d’autorité et d’une connaissance relative du fonctionnement de l’institution. Lorsqu’on les compare aux artistes qui interviennent dans les projets Culture et Art au Collège, il

Absente du collège pendant plus d’un mois,

semble que les artistes en résidence soient à

souvent exclue pour indiscipline, cette élève

la fois plus proches des enseignants, et plus

avait décroché, d’après ses propres mots des

libres de se réaliser comme artiste au sein

autres cours. Là encore, l’installation d’une

des établissements scolaires. 89 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Dans une résidence, les artistes s’installent

de changer de projet en cours d’année, d’en

pour une année, avec les moyens qui sont

débuter plusieurs à la fois en fonction du

ceux des enseignants : en plus d’avoir un

déroulement de la résidence. La présence

rendez-vous régulier avec une classe, une

dans le collège infléchit leur travail en même

demi-journée par semaine, tout au long de

temps qu’elle offre un espace pour s’y

l’année,

salle

déployer pleinement : la résidence pousse

uniquement consacré à leur travail, ils

les artistes à habiter le collège par leur

fréquentent la salle des profs, ils ont leurs

pratique de création.

ils

disposent

d’une

habitudes à la cantines, connaissent les CPE, les surveillants, les autres enseignants du collège et sont plus au fait des règles de

Pour les élèves, les artistes en résidence sont également perçus « comme des profs, qui ne

seraient pas tout à fait des profs ». « C’est comme un

l’établissement scolaire. L’un des artistes en

prof, mais qui viendrait de l’extérieur et qui n’est pas

résidence participait même au conseil de

obligé d’être là » disait un élève. Les élèves sont

classe et donnait son avis sur l’engagement

sensibles aux rapports qu’instaurent les

des élèves dans le projet. Bref, dans les

artistes, différents de ceux qu’ils entretiennent

résidences, les artistes s’installent dans les

avec leurs enseignants : les artistes sont en

établissements au côté des enseignants, en

général plus bienveillants, moins au fait des

endossant une partie de leurs pratiques et

codes disciplinaires, plus attentifs.

habitudes au collège. La résidence est également l’occasion de déployer et d’explorer sur la longueur les possibilités de création au sein du collège. Ils ont

accès

à

davantage

d’espace

pour

exposer leurs œuvres et commenter leur façon de travailler : dans leurs salles, mais

« Elève 1 : Les autres profs quand on fait n’importe quoi ils nous ignorent, vous voyez. Alors on s’arrête. Alors que A. (artiste en résidence) elle nous calcule toujours un truc, elle va nous dire arrêter, elle va nous parler pendant 10 minutes, et nous ça va nous donner encore plus envie de rire. Enquêtrice : Donc il vaut mieux qu’elle ne le fasse pas ? Elève 2 : Ben oui. Mais elle ne le sait pas. Faut ne pas lui dire. »

également comme on l’a vu parfois dans les couloirs, le CDI, la cour etc. La durée leur laisse le temps de chercher avec les élèves, 90 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Comparé au parcours Culture et Art au

Certains

Collège, les artistes en résidence s’intègrent

l’acquisition d’une forme de sensibilité

davantage à la vie de l’établissement, au côté

durant les résidences, de façon peut être

des autres enseignants. En résidence, les

plus évidente, plus détaillée que lors des

artistes sont à la fois plus profs et plus

entretiens menés avec les artistes des

artistes. Bien qu’elle soit sujette à polémique

parcours Culture et Art au Collège.

en

France,

l’expression

«

Artistes-

enseignants » (« teaching artist »), employée sans complexe aux Etats-Unis pour désigner le travail mené par les artistes dans les établissements scolaires, qualifierait très

des

artistes

témoignaient

de

« Enquêtrice : Sur leur perception de la musique classique, vous avez eu des témoignages ? M… : Ils ne sont pas très bavards. (...) Enfin ce n’est pas tellement dans les mots que je vois les choses, mais dans les actes, leur façon de se tenir au concert, ou les questions qu’ils posaient quand il y avait des intervenants, la pertinence...

bien la position paradoxale des artistes

Enquêtrice : vous sentiez qu’il y avait une écoute ?

en résidence.

M… : je sens qu’il y avait une sensibilité ». Entretien avec M…musicien, accueilli en résidence 2012-2013

Une familiarisation plus grande avec la pratique artistique

artistes engagés dans les projets avait une

méconnaissaient

pour parfois

l’artiste avec lequel

les

élèves,

qui

la

pratique

de

ils travaillaient. La

connaissance des œuvres des artistes est bien plus sensible dans les résidences In Situ.

d’élèves

attestent

avec la pratique des artistes en résidence.

Dans les parcours CAC, la pratique des

variable

témoignages

également d’un processus de familiarisation

Une plus grande familiarité avec le métier d’artiste

visibilité

Les

« Enquêtrice : C’est quoi son métier à A…? Elève 1 : Plasticienne Elève 2 : Elle fait ce qu’elle aime. Elle fait des tournées. Elle accroche des œuvres. (...) Elève 1 : Pour nous c’est artiste c’est quelqu’un qui sait ce qu’il veut, c’est quelqu’un qui sait ce qu’il va faire…pas comme nous. (...) Mais artiste tu montres ce que tu fais, tu fais découvrir aux gens ce que tu fais. Enquêtrice : Pourquoi vous dites qu’elle aime bien son métier A… ? Elève 1 : Ben je ne sais pas, elle est souriante. En plus c’est quelque chose qu’elle a fait. Elève 2 : Elle aime bien les couleurs. Elle aime bien les lignes ». 91 | P a g e

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Etre

artiste

pour

ces

élèves,

ou

plus

rapports

au

monde,

des

valeurs,

des

exactement plasticienne, c’est « choisir et

représentations de sa place dans la société

aimer ce qu’on fait » et « le montrer ». Leurs

davantage que de transmettre un goût pour

formulations

les

maladresses familiarité

dénotent,

en

d’expression,

avec

la

façon

dépit

des

objets

culturels

ou

artistiques.

La

une

certaine

rencontre avec l’art, les œuvres, et la

qu’à

l’artiste

pratique artistique est alors dotée dans cette

d’habiter sa pratique.

perspective d’une fonction émancipatrice

Enquêtrice : Qu’est-ce qu’elle vous a appris A… ?

(« ouvrir le champ des possibles ») qui prime

Elève 1 : Son métier c’est trop bien.

sur les dimensions esthétiques des objets

Enquêtrice : C’est quoi son métier ?

mobilisés. Il semble que cette ambition

Elève 1 : Artiste. C’est trop bien. Enquêtrice : C’est ça qu’elle vous a appris ? Elève 1 : Oui, c’est trop bien. Et puis elle nous a appris à accrocher des élastiques, à mettre des couleurs ».

éthique soit moins prévalente dans les résidences artistiques ou plutôt qu’elle soit reconfigurée, retissée autour de la pratique ;

La transmission est double pour ces élèves :

l’installation de la pratique dans la durée, qui

la découverte d’une pratique plasticienne

la banalise et permet de la découvrir en

(mettre des couleurs) est associée à la

profondeur, relègue à l’arrière-plan les

compréhension d’un rapport au travail vécu

espoirs de transformation radicale associés

comme un plaisir (« trop bien »).

au caractère exceptionnel de la rencontre avec les œuvres d’art. Moins extraordinaire,

Un rééquilibrage des ambitions éthiques et esthétiques

l’expérience de la résidence amène ses

L’enjeu des projets d’éducation artistique et

spécificités d’une pratique avant d’en faire

culturelle, réside souvent principalement

ressortir les valeurs éducatives. Dans les

pour les acteurs culturels qui les portent

résidences, il est autant question d’amener

dans leur dimension éthique et dans leur

les élèves à réaliser une œuvre, et à partager

ambition de transformation de la personne ;

la démarche de création de l’artiste que

il s’agit souvent de façon plus ou moins

de

explicite dans ces projets de transmettre des

d’éveiller les valeurs de citoyenneté.

différents acteurs à se recentrer sur les

transformer

les

représentations

ou

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Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

D’ailleurs,

les

artistes

accueillis

en

résidences se révèlent prudents, et pour certains extrêmement sceptiques, lorsqu’il s’agit d’évoquer les effets de leurs actions dans le collège.

« L’idée c’est qu’ils aient des moyens d’être aussi ouverts que la vie est ouverte. En théorie tout leur est accessible, mais dans la pratique, il faudrait pouvoir les aider plus à être autre chose que ce à qu’ils s’imaginent être prédestinés. À l’évidence, il y a beaucoup d’autres urgences que celle de s’instruire sur l’art... Même pour être artiste et vivre de ça, il ne faut pas juste savoir dessiner, il faut aussi savoir faire un book, savoir se comporter en «société», il y a un côté de réseau, il faut savoir saisir une opportunité, être fiable, lire un contrat, pouvoir négocier... (...) Pour retirer le bon, le vrai efficace de la résidence, l’art c’est le prétexte, mais tout le concret qui se passe, c’est cette dimension autre, ouverture, qui apporte la confrontation de deux univers différents. C’est pour ça que les échanges en-dehors du collège sont si importants. Et pas forcément pour voir de l’art ». Entretien avec A…, plasticienne, accueillie en résidence 2012-2013

l’idée d’assumer certains besoins de compétences, certains manques de compétences, et ça y a toujours pourquoi pas les compétences de quelqu’un d’autre. Dire que oui, c’est possible, quel que soit le truc. Et d’ailleurs, ils n’y croyaient pas trop quand ils faisaient les boîtes. Pour eux, c’était abstrait jusqu’à ce qu’ils se retrouvent les mains dans la peinture. L’aventure, c’est tout le chemin... Enquêtrice : Tu penses à tous leur avoir transmis cette idée ? A… : Oui, je pense. Enfin peut-être pas l’idée précisément, mais bon. Enquêtrice : A quoi tu vois ça ? A… : Leur enthousiasme, le fait que quand on s’est mis à réaliser les choses, ils savaient quoi faire ».

Dans

les

résidences,

les

éducatrices générales des

ambitions

artistes sont

portées par une pratique régulière avec les élèves ; ces ambitions se nouent autour d’une prise en compte plus précises des difficultés des élèves et de la possibilité pour la pratique artistique de revêtir une fonction

plasticienne

éducative générale. Par rapport aux projets

comparait la résidence à un « pansement

de taille plus modeste comme les CAC,

inadapté à une plaie trop grande ». Et

plutôt qu’à une rencontre exceptionnelle,

pourtant c’est bien par la pratique qu’elle

parfois encore décrite comme un choc, c’est

avait eu le sentiment de transmettre à ces

à la découverte d’une pratique et de ses

élèves la possibilité d’entreprendre.

difficultés, dans la durée, que les artistes en

Un

peu

plus

tard,

cette

« A… : Ce qui me plairait de leur avoir transmis, c’est la possibilité de l’entreprenariat, au sens d’entreprendre un projet en autonomie, avec

résidence prêtent des vertus éducatives.

93 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : L e s ré side nc e s en re cherc he

Conclusion : la fin de la rhétorique de l’exception ?

général, reconnu comme tel par les élèves, que

Les projets d’éducation artistique et culturelle

des élastiques, faire un film de science-fiction

sont souvent examinés à l’aune de leur

ou un clip vidéo, réaliser un concert), d’une

caractère exceptionnel. La rencontre entre les

œuvre (en cours de création) ou de la

univers culturels et scolaires est généralement

singularité d’une relation avec un artiste en

pensée comme rare et précieuse, vectrice de

particulier.

changements d’autant plus radicaux qu’elle

lorsqu’on les compare à des projets de taille

est

plus

extraordinaire.

Les

études

de la spécificité d’une pratique (travailler avec

sur

les

Si

modeste,

les

résidences

tendent

à

d’artistes,

exacerber

les

résidences artistiques permettent de sortir de

tensions propres aux projets d’éducation

cette pensée magique qui prête à l’éducation

artistique, et à en accentuer les effets sur

artistique et culturelle de façon générale (et

l’école et sur la culture, elles permettent

donc plus ou moins indifféremment à tous les

également de saisir les effets différenciés de

projets

vertus

chacune des pratiques engagées, de chacun

miraculeuses de pallier les manques de

des modes d’engagement ou de collaboration

l’institution

réalisations

mobilisées dans des contextes spécifiques.

inachevées du projet de démocratisation de la

C’est sans doute dans ce travail comparatif,

culture. La résidence d’artiste, en installant

sensible aux situations particulières, attentif à

durablement la présence des artistes dans les

la diversité des moyens et des méthodes

collèges d’une part, et le travail mené avec les

engagés dans les dispositifs, que réside pour

élèves dans l’emploi du temps scolaire d’autre

les chercheurs en sciences sociales une piste

part,

espace

féconde d’interrogations et de réflexions, qui

d’expérimentation pour les acteurs culturels et

soient à même de désenchanter les propos

éducatifs

la

militants tenus sur l’éducation artistique et

mobilisation des pratiques artistiques dans

culturelle sans tomber dans une dénonciation

l’espace scolaire. Les premières enquêtes

unilatéralement critique, aveugle aux effets

menées sur les résidences le montrent : il y est

avérés mais toujours singuliers, de ces projets.

qui

s’en

réclament)

scolaire

offre

des

un

et

les

les

véritable

ressorts

propres

à

moins question de l’ethos de l’artiste en 94 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

Arts et artistes à l’épreuve de la résidence Le travail artistique en mutations - Dynamiques et tensions MARIE BUSCATTO , professeure d’université en Sociologie, Université Paris 1 – Sorbonne Note de lecture : ce texte est intimement lié à des extraits vidéo du colloque. Pour une meilleure compréhension, visionnez les vidéos au fur et à mesure de votre lecture.

Depuis le début des années 1960, les arts ont

Comment rendre compte de ce paradoxe ?

pris une place croissante dans les sociétés

Que nous dit-elle sur le travail artistique et,

occidentales, sous l’influence croisée d’une

plus largement, sur la vie d’artiste à l’aube

impulsion politique visant la démocratisation

du XXIe siècle ?

culturelle, de l’avènement des industries culturelles de masse et de l’intérêt croissant de la population pour les biens et les pratiques artistiques. Parallèlement à cette montée

des

pratiques

culturelles

et

artistiques, amatrices et professionnelles, de la petite enfance au grand âge, a crû de manière forte le nombre de femmes et d’hommes qui aspirent à devenir artistes, voire à vivre de leur pratique artistique de manière professionnelle. Et cette croissance n’a pas été empêchée par les faibles chances de succès et la multiplication des difficultés

Il s’agit ici de dépeindre et de comprendre les dimensions objectives et subjectives du travail artistique justifiant un fort engagement de soi dans une activité pourtant si risquée, si incertaine, si difficile à vivre et si peu rémunératrice pour une grande majorité des artistes. Ce texte se fonde sur des travaux de recherche portant aussi bien sur les arts reconnus de longue date, comme la littérature, la musique classique, les arts plastiques, le théâtre ou la danse classique, que sur les arts plus récemment définis comme tels, à l’image

d’emploi et de travail.

95 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

du cirque, de la bande dessinée, de la musique

disparaissent dès les deux premières années

rap ou de la danse contemporaine1.

d’exercice (Coulangeon, 2004).

Des artistes toujours plus nombreux et soumis à de grandes difficultés d’emploi et de travail

Ou encore, l’essentiel des écrivain-e-s qui

Sous

sociales,

crû

les

sociale, traduction, etc. (Lahire, 2006).

professionnels

et

Les artistes identifiés varient ainsi grandement

amateurs, dans les arts dits majeurs – théâtre,

selon les critères choisis : rémunérations liées à

danse, musique classique, arts plastiques ou

l’activité artistique, auto-déclaration, exposition

littérature –, mais également dans les arts dits

d’œuvres ou pratique artistique effective, temps

mineurs, en voie de légitimation – cirque

consacré à l’activité, appartenance à une

contemporain, musiques « populaires » ou

association

bande dessinée. Ces artistes sont nombreux et

« sentiment » d’être un-e artiste.

l’effet

culturelles

de

et

populations

ces

mutations

économiques

d’artistes,

ont

ont publié au moins une fois chez un éditeur exerce

souvent difficiles à dénombrer du fait du grand flou que caractérise le mot artiste. Prenons au hasard deux exemples français des problèmes que pose le dénombrement des artistes.

un

autre

enseignement,

ou

à

métier

pour

journalisme,

un

syndicat

vivre

animation

d’artistes,

Or, ce que révèle plus largement cette difficulté à compter les artistes est de fait la grande difficulté de leurs conditions de travail et

d’emploi

:

forte

précarité,

faibles

Si on trouve plus de 25 000 musicien-ne-s

rémunérations au regard des qualifications

interprètes

qu’à

engagées, cumul d’activités, risques sérieux

l’échéance de 10 ans, une fois le premier

d’échecs, souffrances physiques ou tensions

engagement

subjectives nombreuses…

déclaré-e-s,

il

professionnel

s’avère

déclaré,

la

probabilité de toujours exercer la musique de manière professionnelle est de 45 % alors même que 20 % de ces musicien-ne-s

Et plus largement encore, apparaît ainsi la faible part de ceux et de celles qui vivent, au moins de manière principale, de leur art. L’essentiel des musiciens de rap, des poètes

1

Les points traités ici ont été développés et approfondis dans deux textes publiés par nos soins (Buscatto, 2014, 2012).

96 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

ou des écrivain-e-s ne vit pas de son art et la plupart des danseur/se-s, circassien-ne-s, musicien-ne-s

de

jazz,

cinéastes

ou

comédien-ne-s en vit de manière secondaire, ou du moins en exerçant son art de manière différente de celle qui les « définit », de leur point de vue, comme artiste (professorat, animation,

doublage,

musiques

«

com-

merciales », accompagnement, traduction…). Comprendre le travail artistique dans nos sociétés contemporaines suppose donc de rendre

compte

d’un

tel

investissement

subjectif des artistes dans leur art.

Extrait vidéo Vocation : 01min50 Pour conclure, les artistes et les différents membres des mondes de l’art définissent prioritairement leur activité comme une nécessité qui s’impose à eux et à elles, expliquant en retour aussi bien l’acceptation des difficultés inhérentes à sa réalisation – difficultés

Justifier l’entrée dans le travail artistique : l’appel à la « vocation » Le travail artistique a longtemps relevé de manière principale du registre du métier et de l’habilité. Au-delà des variations entre arts

matérielles

et

psychologiques

rencontrées dans l’exercice de l’activité d’artiste – que la continuation de l’activité dans le temps pour une partie d’entre eux et elles, malgré les difficultés répétées auxquels ils et elles sont parfois confronté-e-s.

au fil du temps s’est cependant construit

Et ce constat se répète, que l’enquête porte

un passage progressif, lent et controversé,

sur le cirque contemporain (Cordier, 2009)

du « régime du métier » au « régime

les écrivain-e-s (Heinich, 2008 ; Lahire,

professionnel » et, enfin, au « régime de

2006 ; Naudier, 2007 ; Sapiro, 2007), les

vocation » (Moulin, 1992 ; Heinich, 1996)

musicien-ne-s classiques (François, 2009),

aujourd’hui observé dans les différents arts.

de jazz (Buscatto, 2004) ou de rap et électro (Jouvenet,

2006),

les

danseurs

et

les

danseuses de l’Opéra de Paris (Laillier, 2011), 97 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

de hip-hop (Faure, 2004) ou contemporain-

Ainsi, les musiciens de rap ou électroniques ou

e-s (Sorignet, 2004), les plasticien-ne-s

les musicien-ne-s de jazz décrivent aussi bien

(Oughabi, 2014) ou encore les acteurs et les

leur attachement émotionnel à la création de

actrices

français-e-s

leur musique que le prix qu’ils et elles sont

(Bensa, 2006 ; Menger, 1997 ; Paradeise,

prêt-e-s à payer pour aller jusqu’au bout de

1998) ou grec-que-s (Karakioulafis, 2014)…

leur démarche créative. Les « petits boulots »,

professionnel-le-s

le long apprentissage social et musical fait d’imitation des autres et d’acceptation de

Une « passion » dévorante pour l’activité artistique

« galères » et de « plans » incontournables, les échecs et les difficultés musicales, financières

La vocation s’accompagne aussi le plus

ou humaines sont, pour ces individus, autant

souvent de discours affichant une passion

de prix à payer pour réaliser leur passion de

pour

manière « authentique ».

l’activité

artistique.

L’attachement

démesuré à l’activité, l’incapacité à échapper aux idées créatives, le besoin intense de s’exprimer par la création ou encore l’intensité des émotions sont autant de traits qui caractérisent chez ces artistes un rapport passionné au travail artistique. Cette passion ne se réalise pas au hasard. Elle concerne de

Extrait vidéo Trajectoires : 01min53

manière principale l’activité censée permettre à l’individu d’exprimer son « être », ses

d’« authenticité », et ce, même si elle est de

Une passion justifiant de continuer « quand même »

fait secondaire dans l’activité quotidienne

La passion pour la création artistique devient

pour la plupart des artistes qui, de fait, ne

ainsi un élément clé de l’engagement de ces

réussissent guère à vivre de leur passion.

artistes qui font le « choix » de continuer sur

pensées « profondes » et de faire ainsi preuve

cette piste alors même que capacité à en vivre 98 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

et reconnaissance artistique ne sont que

la création musicale avec leurs « potes » sur

rarement au rendez-vous. La passion pour

disque ou en concert.

l’activité artistique choisie – écrire ses poèmes, jouer sa musique, créer ses installations ou monter son spectacle - soutient alors l’effort parfois démesuré que suppose le maintien dans une activité qui donne souvent lieu à une reconnaissance sociale et personnelle limitée et surtout bien inférieure aux justifications vocationnelles

données

pour

expliquer

l’entrée dans l’activité artistique. Cette passion se maintient parfois sous le

Enfin, même s’ils ou elles effectuent l’essentiel de leur activité professionnelle sur un mode soit alimentaire, soit professionnel, dans l’art ou à l’extérieur du domaine artistique (Bureau, Perrenoud, Shapiro, 2009), dont l’école est un exemple

évident

(Filiod,

2008), l’activité

artistique investie de manière personnelle est redéfinie comme celle qui exprime leur personnalité,

leurs

qualités

créatives

et

personnelles, leurs aspirations intimes.

signe de la vocation, le temps devant donner l’occasion ou la possibilité à l’artiste d’être enfin reconnu-e comme un-e artiste à part entière par ses pairs, voire même par la critique ou les producteurs. Mais la passion peut se dissocier de la vocation pour devenir le ressort principal du temps et de l’énergie consacrés à monter des projets souvent onéreux et peu rémunérateurs à l’image de ces écrivain-e-s qui consacrent leur temps libre, une fois leur activité professionnelle accomplie, à écrire des romans ou des

Une organisation collective de trajectoires passionnées Les manières dont les unes et les autres (re)construisent leur rapport à l’activité artistique, entre vocation et passion, ne se

font

pas

grandement

au des

hasard

et

dépendent

conditions

collectives

de production, de reconnaissance et de rémunération à l’œuvre dans les mondes de l’art fréquentés par ces artistes.

poèmes chers à leur cœur ou des musicien-

D’une part, certain-e-s artistes se voient

ne-s de rap ou électro ou de jazz qui

défini-e-s

enchaînent les « petits boulots » alimentaires

formation dans l’élite comme une « main-

afin de libérer du temps et de l’énergie pour

d’œuvre » compétente et bien formée sur le

par

leur

seul

parcours

de

99 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

marché du travail qui peut l’accueillir. C’est

Le possible accès à l’intermittence du

le cas probant des musicien-e-s d’orchestre

spectacle disponible pour ces musicien-ne-

(Lehmann, 2002), des danseurs et des

s renforce encore leurs chances de vivre de

danseuses de l’Opéra de Paris (Laillier, 2011)

la musique même si elle n’est pas celle qu’ils

ou des violonistes-virtuoses (Wagner, 2004).

et elles aspirent à créer et à jouer de manière

En

principale.

effet,

ayant

passé

les

nombreuses

Une

même

situation

est

épreuves de formation et de sélection mises

rencontrée pour les danseurs et danseuses

sur le chemin d’une carrière d’élite, mêmes

(Rannou, Roharik, 2006) ou les comédien-

les artistes qui ne peuvent réaliser leur

ne-s et acteurs/trices professionnel-le-s

vocation à plein se voient doté-e-s d’une

dans les travaux déjà cités. En revanche,

valeur

permet

rares sont les écrivain-e-s ou les poètes

des reconversions au sein même de l’art

(Dubois, 2011) qui peuvent imaginer vivre de

qu’ils et elles affectionnent.

leur art. Les enquêtes révèlent ainsi de

professionnelle

qui

leur

D’autre part, dans la plupart des autres mondes

de

l’art,

les

possibilités

de

(re)construction de la passion se révèlent bien plus nombreuses, mais aussi plus difficiles

d’accès

et

donc

largement

nombreux/ses

enseignant-e-s

(très

majoritaires chez les poètes selon Dubois) ou

des

journalistes,

mais

aussi

des

assistant-e-s sociales, des mères au foyer ou des allocataires sociaux.

dépendantes des opportunités présentes sur

Ne pas vivre de son art étant la règle,

les marchés du travail. Par exemple, les

l’investissement

musicien-ne-s de jazz peuvent envisager de

vocationnel va plutôt dépendre des signes de

vivre de la musique sur un marché du travail,

reconnaissance reçus par les pairs, les

certes très concurrentiel et saturé, mais

critiques ou les éditeurs dans des cercles

ouvert du fait des nombreuses possibilités

parfois très fermés – la poésie expérimentale

offertes à un-e musicien-ne de jazz bien

ou la composition contemporaine – et des

formé-e – événements commerciaux, soirées

manières dont chacun et chacune justifie à

privées,

lui-même ainsi qu’à autrui son propre

spectacles,

enseignement

ou

accompagnement musical (Buscatto, 2004).

subjectif

sur

un

mode

rapport à l’activité artistique. 100 | P a g e

Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

Seule une vocation, définie comme une « nécessité intérieure », justifierait chez ces artistes de s’engager dans de tels efforts.

Extrait vidéo Savoirs : 02min18

S’accompagnant d’une entière passion pour

Un travail très exigeant qui suppose un lourd engagement personnel

« son » art, cette vocation peut certes

Or, c’est bien par la seule vertu de la passion

s’épuiser au fil du temps, notamment lorsque

et/ou de la vocation qui guident les individus

l’aspiration artistique peine à se réaliser. Mais

concerné-e-s

le maintien dans la production artistique

que

ces

efforts

sont

effectivement acceptés. Si la passion guide

«

quand

bien l’implication dans le travail artistique, elle

engagement de soi, souvent passionné, qui

ne doit pas masquer les apprentissages, les

explique largement que certains individus

contraintes, les efforts et les difficultés que

continuent à se définir comme artistes alors

traverse la plupart des artistes étudié-e-s.

même

que

même

»

l’activité

suppose

bien

professionnelle

un

ne

permet guère de s’accomplir comme artistes et que la reconnaissance artistique est faible. Ces engagements passionnés sont enfin le

Conclusion

fruit de mécanismes collectifs qui tiennent efforts,

aussi bien à la définition historique du travail

individuels et collectifs, disciplinés et parfois

artistique contemporain sous le registre de la

douloureux,

:

vocation qu’aux modalités d’emploi et de

les conditions de travail et d’emploi sont

reconnaissance à l’œuvre dans les mondes de

souvent difficiles et les chances de voir

l’art ou aux contextes familiaux, scolaires,

leurs aspirations artistiques reconnu-e-s

sexués ou sociaux dans lesquels évoluent les

sont faibles.

individus artistes.

Les

artistes

font

pour

de

multiples

exercer

leur

art

101 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

Références bibliographiques Bense Ferreira Alves Celia Précarité en échange. Enquête sur l’implication au travail, Paris, Éditions Aux lieux d'être, 2006. Bureau Marie-Christine, Perrenoud Marc, Shapiro Roberta (dir.) L'artiste pluriel : démultiplier l'activité pour

vivre de son art, Lille, P.U. du Septentrion, 2009. Buscatto M. « Aux fondements du travail artistique. Vocation, passion ou travail ordinaire ? ». In Leroux Nathalie, Loriol Marc (dir.) Le travail passionné, Paris, Eres, 2014, à paraître. Buscatto Marie « Travail artistique ». In Bevort Antoine, Jobert Annette, Lallement Michel et Arnaud Mias (dir.) Dictionnaire du travail, Paris, PUF, 2012, p. 798-803. Buscatto, Marie « De la vocation artistique au travail musical : tensions, compromis et ambivalences chez les musiciens de jazz », Sociologie de l’art, OPuS 5, 2004, p. 35–56. Cordier Marine Le cirque sur la piste de l’art. La création entre politiques et marchés, Thèse de sociologie, Université Paris Ouest Nanterre La Défense, décembre 2009. Coulangeon Philippe Les Musiciens interprètes en France. Portrait d'une profession, Paris, La Documentation française, 2004. Dubois Sébastien Le métier des poètes, document de travail, www.poesiecontemporaine.fr/jce/documentset-travaux, Consulté le 10 mai 2012. Faure Sylvia « Institutionnalisation de la danse hip-hop et récits biographiques des artistes chorégraphes »,

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102 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e Jouvenet Morgan Rap, techno, électro... Le musicien entre travail artistique et critique sociale, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2006. Karakioulafis Christina « Être acteur professionnel en Grèce : un travail de passion ou un emploi comme les autres ? ». In Leroux Nathalie, Loriol Marc (dir.) Le travail passionné, Paris, Eres, 2014, à paraître. Lahire Bernard La Condition littéraire. La double vie des écrivains, Paris, La Découverte, 2006. Laillier Joël « La dynamique de la vocation : les évolutions de la rationalisation de l’engagement au travail des danseurs de ballet », Sociologie du travail 53, 2011, p. 493–514. Lehmann Bernard L’orchestre dans tous ses éclats. Ethnographie des formations symphoniques, Paris, La Découverte, 2002. Menger Pierre-Michel La profession de comédien. Formation activités et carrières dans la démultiplication

de soi, ministère de la culture, Paris, 1997. Moulin Raymonde L'artiste, l'institution et le marché, Paris, Flammarion, 1992 Naudier Delphine « Les modes d’accès des femmes écrivains au champ littéraire contemporain ». In Mauger Gérard (dir.) Droits d’entrée. Modalités et conditions d’accès aux univers artistiques, Paris, Editions de la Maison des sciences de l’homme, 2007, p. 191-213. Oughabi Moufida « Ne vivre que de son activité de plasticien : une condition exclusive pour affirmer sa passion au travail ? ». In Leroux Nathalie, Loriol Marc (dir.) Le travail passionné, Paris, Eres, 2014, à paraître. Paradeise Catherine Les comédiens. Profession et marché du travail, Paris, PUF, 1998. Rannou Janine, Roharik Ionela Les danseurs. Un métier d'engagement, Paris, La Documentation française, 2006. Sapiro Gisèle « Je n’ai jamais appris à écrire. Les conditions de formation de la vocation d’écrivain », Actes

de la recherche en sciences sociales, 168 (3), 2007, p. 12-33. Sorignet Pierre-Emmanuel « Etre danseuse contemporaine : une carrière ‘corps et âme’ », Travail, Genre et

Sociétés, 12, 2004, p. 33-53. Wagner Izabela « La formation des violonistes virtuoses : les réseaux de soutien », Sociétés

contemporaines, 56, 2004, p. 133-163.

103 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

Table ronde L’art et l’artiste au risque de la résidence

Animateur

CHRISTIAN LALLIER , anthropologue-cinéaste, IFE – ENS Lyon

Invités

ABDELKADER DAMANI , directeur de Veduta, Biennale d’Art Contemporain de Lyon CATHERINE HURTIG-DELATTRE,

enseignante,

résidences

d’artistes

Enfance,

Art et Langages

CAMILLE LLOBET , artiste plasticienne, résidences d’artistes Enfance, Art et Langages MARC MERCIER , directeur du Festival Instants Vidéos et artiste vidéo - Marseille

Que vient donc faire un artiste dans une

intervenant extérieur. Mais, que se passe-t-il

école ? Témoigner de son art, faire découvrir

quand l’artiste s’installe dans l’école, au

son activité, initier à sa pratique artistique ?

quotidien… qu’il s’engage aux côtés des

Parfois, bien davantage… Les ateliers de

enseignants dans une pratique pédagogique

l’artiste engagent les enfants dans des jeux

au long cours, pendant un an voire plusieurs

d’expression qui les obligent à travailler

années… ?

leurs cadres de socialisation : la mise en représentation de soi supposant de se sentir en confiance avec autrui…

Une résidence d’artiste désigne un lieu de création pour les artistes, au sein d’une institution publique ou privée, pour une

L’artiste vient transmettre sans le devoir

durée déterminée. Quant est-il de l’artiste en

d’enseigner. En cela, il se distingue de

résidence dans un milieu éducatif et dans un

l’enseignant et n’appartient pas à l’institution

établissement scolaire en particulier ?

scolaire. Il apparaît alors souvent comme un 104 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

Cette fois, la résidence ne vise pas tant à

En posant d’emblée la question de la mise en

favoriser le processus de création de l’artiste

risque de l’art et de l’artiste en résidence, il

lui-même qu’à lui demander de produire une

s’agit de s’interroger sur l’enjeu d’une telle

expérience esthétique, de réaliser un projet

pratique éducative. En effet, s’il n’y a pas de

artistique, pour les élèves.

risque pour l’artiste alors c’est qu’il n’y a pas

Dès lors, comment l'artiste parvient-il à concilier ou à maintenir sa propre créativité

d’enjeu à l’intégrer dans une école. En quoi le milieu scolaire met-il l’artiste à l’épreuve ?

dès lors qu'il s'engage à développer la

On se demandera donc ce que le milieu

créativité d'autrui ? Que produit l’artiste en

scolaire fait à l'art et à l'artiste, en mettant à

résidence dans un milieu éducatif : s’agit d’une

l'épreuve les conditions de sa créativité.

œuvre ou d’une simple expérience ? Mais, si il ne s’agit pas d’une œuvre alors est-il encore un artiste ? Et si il n’est plus un artiste à part entière, en tant qu’il ne produit pas d’œuvre, alors qu’elle est son statut ? Un intervenant extérieur… mais précisément, la notion de « résidence » semble vouloir rompre avec celle d’un intervenant qui désigne le caractère

Cette attention portée sur la prise de risque de l’artiste vise donc à interroger l’interaction qui se construit entre l’artiste et l’enseignant et à travers laquelle se joue une relation sans doute

plus

complexe

entre

l’institution

artistique et l’institution éducative.

ponctuel de la relation.

La Table Ronde en vidéo Lien YouTube [01:14:19]

105 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

Alain Kerlan, dialogue et interview avec Christian Ruby

ALAIN KERLAN , philosophe professeur des universités en Sciences de l'Education à l'Université

Lumière

Lyon

2,

Laboratoire

Education

Cultures

et

Politiques.

Invite

CHRISTIAN RUBY ,

philosophe, directeur de la revue Raison Présente, auteur de

nombreux ouvrages consacrés à l’art contemporain.

Les résidences d’artistes ne sont qu’une modalité institutionnelle de l’éducation artistique et culturelle en milieux scolaire et éducatif. Néanmoins, la rencontre entre ces deux univers, l’art et l’éducation, soulève de nombreuses interrogations. Quels sont les points de tension et de convergence entre l’institution éducative et l’institution artistique ? Quel sens donner à l’entrée de l’artiste en milieu scolaire sur le plan esthétique? Quels sont les effets de cette rencontre sur les parties-prenantes ? Sans prétendre y répondre, les deux interlocuteurs tentent au cours d’un dialogue d’apporter des pistes de réflexion à ces interrogations.

Dialogue de philosophes Lien YouTube – 38min01

106 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

Table ronde Des formes esthétiques entre « œuvre » et « production »

Animateur

JEAN-PAUL FILIOD , maître des conférences en Sociologie, Université Lyon 1 - ESPE

Invités

JULIE LEFEBVRE , artiste danseuse chorégraphe Compagnie La Fabrique fastidieuse, résidences d’artistes en écoles maternelles Enfance, Art et Langages – Lyon

DENIS CERCLET ,

maître de conférences en anthropologie à l’Université Lyon 2,

membre du Centre de Recherches et d’Etudes Anthropologiques (CREA)

EMELINE EUDES ,

docteure en esthétique environnementale et coordinatrice du

programme Artistes intervenants en milieu scolaire à l’Ecole nationale supérieure des Beaux-arts de Paris (de 2011 à 2013)

Au

cours

de

interrogerons

cette le

table

statut

ronde, des

nous

formes

esthétiques produites dans le cadre des résidences d’artistes, notamment la manière dont on nomme ces « formes ».

Ce terme, productions, suggère une valeur matérielle issue d’un faire, mais il sousentend aussi que ces formes, produites par des gens qui ne sont pas artistes, ne

Pour l’intitulé, nous avons mobilisé deux

méritent pas d’être qualifiées d’œuvres,

termes courants :

terme distinctif d’un monde de l’Art qui

l’un, œuvre, est plutôt associé à l’artiste ;

l’autre, production, est plutôt associé

continue d’avoir besoin de distinction.

aux élèves, enfants ou adolescents, mais peut-être aussi adultes, voire grands adultes. 107 | P a g e Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

En fait, derrière ce mot œuvre, qui semble

à Queneau ou Perec, mais dont le Frésident-

faire problème à pas mal de gens, il y a

Pondateur (dixit l’oulipo.net de 2014) est

sans

doute

l’ombre

du

chef-d’œuvre,

François

Le

Lionnais,

mathématicien

et

version supérieure de l’œuvre, symbole de

ingénieur chimiste, fondateur du Collège de

l’excellence, du sublime, de l’exceptionnel,

Pataphysique

bref, tout le contraire de l’ordinaire et de la

mondiale et résistant notoire pendant celle-

banalité supposés de la production.

ci. L’OULIPO, qui compta parmi ses membres

après

la

seconde

guerre

Marcel Duchamp, aura donc nombre de Cependant, en nous calant sur la racine du mot œuvre, des résonances affleurent avec d’autres mots : ouvrage, ouvrier, sans oublier l’ouvroir, qui désigne, dans une communauté religieuse, le lieu des travaux en commun. Ces mots peuvent alors donner un sentiment de rapprochement avec la

production. Et avec la mention de l’ouvroir, cette famille de mots nous fera bien sûr penser, puisque la création et la créativité sont concernées par ce colloque, à des mouvements culturels inscrits dans ce qu’on pourrait presque appeler une tradition, celle des OU-x-PO, « ouvroirs de quelque chose

descendants, à commencer par l’OULIPOPO pour la littérature policière, et avant l’arrivée de tant d’autres : OUPEINPO, OUTRAPO, OUBAPO, OUPHOPO, OUCIPO, OURAPO, OUMAPO, OUMUPO,

pour la peinture, la tragicomédie, la bande dessinée, la photographie, la cinématographie, la radiophonie, les marionnettes, la musique. Les arts sont donc bien présents, mais nous sommes plutôt à un carrefour, celui des arts, des sciences et de la littérature, comme le prouveront

ensuite

l’OUARCHPO,

l’OUJARPO

l’histoire,

l’OUHISPO, et

l’informatique,

l’OUINPO,

l’OUCUIPO

(pour

l’architecture,

le

jardinage, la cuisine).

potentielle », lieux d’élaboration de possibles à partir de contraintes formelles.

Que

d’ouvroirs

!

Que

d’œuvres

!

Que de productions ! À l’origine, il y a l’OULIPO, OUvroir de Littérature POtentielle, communément associé

108 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que : A rt s e t a rt ist e s à l’ ép reu ve d e la résid enc e

Et dans l’art, il y a d’autres mots : créations,

Ou sommes-nous dans un contexte d’art en

pièces, installations, performances, voire

contexte : art social, art public, résidence

formes tout simplement. Au-delà de ces

d’artiste en milieu scolaire et éducatif… ?

termes, la question du statut se pose en

Mais puisque l’art est en contexte, on

regard

pourrait penser que cela reste de l’art, sauf

des

contextes

ces

formes

prennent naissance et place. Sommes-nous

peut-être aux yeux du Monde de l’Art…

dans un contexte artistique ? Un monde de

l’art, pour se rappeler d’Howard S. Becker ?

La Table Ronde en vidéo Lien YouTube [01 :14 :19]

109 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que Gran d t émoin

Clôture Grand témoin MARIE-CHRISTINE BORDEAUX,

maître

des

conférences,

GRESEC,

Université

Stendhal – Grenoble 3

Je commencerai cette synthèse par quelques

difficile à appréhender du point de vue

remarques transversales sur les enjeux de

des outils qui structurent traditionnellement

l’éducation artistique, tels qu’ils se trouvent

l’éducation (classes, horaires, programmes),

réactualisés

ou

les

permet de combiner de l’exceptionnel et de

résidences

d’artistes

des

l’ordinaire et de s’inscrire dans des stratégies

établissements scolaires. Ensuite, je me

de long terme. Je conclurai sur le rôle

réfèrerai

croissant des collectivités, phénomène qui

à

l’«

reconfigurés au

archéologie

dans sein

»

de

ces

résidences : comme toute innovation -

concerne

contrairement à une vision répandue de

d’éducation artistique et culturelle, mais qui,

l’innovation comme pur surgissement de

dans le cas particulier des résidences, appelle

l’inédit -, les résidences d’artistes en milieu

quelques remarques du point de vue de

scolaire ont une histoire, qui montre que ce

l’ancrage des projets dans le temps et du

dispositif

point de vue de l’impératif de généralisation.

s’ancre

dans

une

conception

l’ensemble

de

la

politique

récurrente du rôle de l’art dans la société

des institutions et de la demande sociale.

Les enjeux de l’éducation artistique et culturelle dans les résidences en établissements scolaires

J’aborderai

dont

Le premier enjeu est celui du partenariat, qui

les résidences ont évolué, quels usages y sont

est dans les « gènes » de l’institutionnalisation

associés, et comment ce dispositif longtemps

de l’éducation artistique. Dès le congrès

considéré comme hors normes, coûteux,

d’Amiens Pour une école nouvelle en 1968,

aussi bien que dans l’histoire de l’école et de ses réformes, et qu’il s’adapte aux évolutions

ensuite

la

manière

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

l’éducation artistique est étroitement mêlée à

inscription avérée dans le monde de l’art et

des

de la culture, capacité à intervenir dans un

enjeux

de

transversalité,

société

:

créativité,

modernité,

formation

de

projet pédagogique, formation attestée par

citoyens éclairés et impliqués. Les écoles sont

des diplômes ou par l’expérience, co-

encouragées à coopérer avec des acteurs

élaboration d’un projet commun avec un ou

extérieurs et à faire une large place aux

des

pratiques

et

l’éducation artistique ont eu constamment le

médiatiques. La culture dont il est question à

souci de dissocier le partenariat culturel aussi

cette époque déborde largement le champ de

bien

l’art, car elle inclut jusqu’aux industries

l’Éducation (le lien avec les entreprises et plus

culturelles. Les exemples cités dans les actes

largement avec le marché de l’emploi) que de

du congrès se réfèrent aussi bien au théâtre,

son

aux arts plastiques qu’aux médias (journaux,

(l’intervention à la petite semaine, le travail

radio, télévision). Le partenariat est présenté

alimentaire). Ils ont développé un modèle

comme

ouverture

spécifique du partenariat, que Françoise

réciproque entre la société et la sphère

Buffet avait proposé de nommer « partenariat

éducative.

se

culturel d’éducation » (Buffet, 1998 : 17-23)

précisera plus tard avec la mise en place de

pour bien le distinguer des autres formes de

dispositifs conjoints culture / éducation. Elle

partenariat dans le secteur éducatif : ce

servira à définir les formes de l’agir tout

modèle opère un va-et-vient constant entre

autant que le sens de l’action. À partir de

le dedans (l’école) et le dehors (les lieux

1983, le partenariat est défini par les

culturels, le champ de l’art), tendant à une

ministères de la Culture et de l’Éducation,

certaine forme de convergence entre les

selon des normes qui restent aujourd'hui à

objectifs de l’éducation et ceux de la culture,

peu

et transcendé par la notion d’intérêt général.

artistiques,

la

près

culturelles

condition

La

notion

d’une

de

inchangées

partenariat

concernant

les

intervenants : reconnaissance par les DRAC de

la

qualité

patrimonial

du

chez

travail le

artistique

partenaire

ou

culturel,

enseignants.

de

son

versant

Les

origine

mercantile

promoteurs

historique

ou

de

dans

utilitariste

Le partenariat a été longtemps étudié dans sa dimension interindividuelle, entre un artiste et

un

enseignant.

Lorsque

l’éducation 111 | P a g e

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

artistique s’est trouvée, dès la fin des années

atelier

1980, confrontée au problème général de la

également un élément précurseur, ainsi que

démocratisation

fallu

la forme du contrat, par lequel l’artiste

cependant repenser l’assise du partenariat

recevait une bourse et non un salaire. Les

dans d’autres cadres que ceux des ateliers et

résidences portaient enfin une question

des options : ce fut l’époque des jumelages,

toujours posée, mais rarement résolue dans

sites

les ateliers de pratique artistique : le lien avec

culturelle,

expérimentaux,

aménagement

des

il

a

plans

rythmes,

locaux, parcours

culturels (qui resurgissent aujourd'hui dans la

un

(que

j’évoquerai

processus

de

plus

création

bas)

en

était

cours

d’accomplissement.

loi de refondation de l’école). La dimension interindividuelle

du

partenariat,

très

prégnante dans les projets menés à l’échelle d’une classe, est alors complétée par un partenariat

d’organisation1,

centré

sur

l’impératif de généralisation, la mise en cohérence

au

niveau

territorial,

et

sur

l’établissement scolaire tout entier, voire le bassin d’éducation comme territoires de référence.

Face

à

résidences

d’artistes

cette

évolution,

apparaissent

les

d’une

certaine façon comme une préfiguration, dès les années 1980, d’enjeux qui ont émergé au début des années 1990. Le refus des interventions régulières en classe de type

Le deuxième enjeu est relatif aux effets de l’éducation artistique. Face à des affirmations souvent entendues, prêtant à l’intervention de l’artiste un pouvoir réel et direct sur l’amélioration de performances scolaires ou de comportements sociaux chez les enfants, on peut - toutes proportions gardées, bien entendu, et avec une pointe d’humour établir un parallèle avec la delphinothérapie et la controverse dont elle fait l’objet2. Les recherches scientifiques (qui s’opposent en cela

à

certaines

recherches

financées)

établissent que le dauphin ne soigne pas, qu’il « agit » indirectement, comme un

Françoise Buffet (1998 : 19-20) propose une typologie du partenariat en trois points : d’impulsion (institutionnel) ; de projet (définissant les responsabilités de chacun et les cadres matériels) ; de réalisation (logiques d’action, stratégies). Nous avons utilisé dans plusieurs études cette grille en l’adaptant aux avancées des politiques d’éducation artistique, également en trois points : partenariat de réalisation (entre acteurs de terrains) ; d’organisation (au niveau des structures locales) ; d’impulsion (au niveau politique) (Bordeaux, Deschamps, 2013 : 42-45). 1

On trouve une intéressante synthèse de cette controverse dans Jacinthe Baribeau, Geneviève David et Serge Larrivée, « Critique du modèle neurophysiologique de la delphinothérapie - Sonophorèse et écholocation », Revue de psychoéducation, vol. 35, n° 2, 2006 : 399-417. 2

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

élément transformateur du contexte et de

le rôle reconnu à chacun, l’occupation de

l’entourage de l’enfant en raison de la

l’espace, le temps consacré à la connaissance

croyance

pouvoir

mutuelle et à la conception d’un projet

thérapeutique et en raison de la mobilisation

commun, la question de la transversalité des

physique, affective, sensorielle déployée pour

savoirs et des pratiques, etc.

diffuse

dans

son

aboutir à une rencontre entre un enfant malade et un animal considéré à la fois comme auxiliaire thérapeutique et comme l’incarnation

de

forces

échappant

à

la

connaissance rationnelle. C’est pourquoi il me semble qu’il faut prendre au sérieux les artistes lorsqu’ils évoquent la spécificité de leur rôle et la distance qu’ils souhaitent préserver

vis-à-vis

d’objectifs

scolaires,

comportementaux, cognitifs pourtant bien observables dans les retombées des projets menés en classe, tout en affirmant leur engagement social auprès des enfants et des jeunes. Ainsi que le rappelle régulièrement Alain Kerlan, l’enjeu de l’éducation artistique, c’est de changer l’école, c'est-à-dire l’acte même d’enseigner, et non de compléter l’école ou de trouver remède à certaines de ses limites. Dans le cas des résidences d’artistes, on voit bien comment la résidence n’est

pas

unidirectionnelle,

centrée

sur

l’enfant, mais au contraire en prise avec l’ensemble de la communauté éducative, par

Le troisième enjeu est celui de la médiation. Je laisse de côté une question pourtant importante, celle d’une situation somme toute assez classique, où l’artiste, seul en scène (il s’agit de « scène » au sens sociologique), représenterait à lui seul le monde de l’art et de la culture auprès des enfants, dans un face-à-face sans médiation, ni médiateur autre que l’enseignant ou l’ATSEM. En somme, sans médiateur culturel, ou plus précisément : sans médiateur du monde culturel. Je me centrerai plutôt sur les institutions médiatrices. Un rôle me semble, en effet, insuffisamment étudié de ce point de vue : c’est celui joué par Enfance, Art et Langages, qui agit comme un « traducteur » permanent entre différents mondes : monde de la culture, monde de l’éducation, mondes vécus par les enfants et les familles, sphère politique. Un « traducteur » ne se définit pas uniquement par des opérations menées par et sur le langage, bien qu’il s’agisse d’une 113 | P a g e

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

fonction majeure de la médiation, dont les

médiateur

traces écrites sont nombreuses dans le cas

résidences invitent à dépasser les tensions

des résidences (conventions, contrats, récits

récurrentes entre éducation et médiation,

d’expérience, évaluations, etc.) qui font aussi

dont

appel à de très nombreuses interactions

Loyrette (2013 : 8-9). Selon ce rapport, ces

verbales. Il se définit aussi par la production

tensions

de normes, dimension toujours importante

l’Éducation nationale privilégie des objectifs

dès lors qu’il s’agit de la sphère éducative.

«

Les normes sont ambivalentes : elles cadrent

programmes scolaires) tandis que la culture

l’action et peuvent limiter l’imagination des

privilégie des objectifs « plus larges » et

acteurs en présence. Elles peuvent aussi être

« humanistes ». Elles se cristallisent, du point

considérées comme des repères cristallisant

de vue des institutions culturelles, dans

les leçons de l’expérience, à condition d’être

l’opposition entre deux directions : relations

évolutives et de rester des outils au service

avec

d’une démarche. Dans le cas des résidences,

artistique ») et « politique de publics ». En

cette fonction de médiation (certains diraient

effet, la médiation, en tant que pratique

d’accompagnement ou d’ingénierie de projet)

professionnelle, repose sur l’idée que l’école

est particulièrement importante, et cela dès

n’est pas le seul vecteur d’éducation à la

les années 1980, comme ce fut notamment le

culture, et que l’âge scolaire n’est qu’un des

cas avec l’association Savoir au Présent,

âges possibles pour des apprentissages

association très active dans l’organisation de

culturels non formels.

résidences dans toute la France, et qui ne se bornait pas à l’organisation concrète du faceà-face entre enseignants et artiste. Le rôle joué par des structures d’accompagnement telles que Savoir au présent ou Enfance, Art et Langages permet d’élargir la question de la médiation au-delà de la seule figure du

culturel.

témoignait

sont

monde

particulier,

récemment

fondées

fonctionnels

le

En

»

sur

le

rapport

l’idée

(l’adéquation

scolaire

les

que

aux

éducation

Faute de pouvoir citer d’autres enjeux, je m’en tiendrai à un dernier enjeu, que je formulerai par une question : dans quelle mesure

les

résidences

d’artistes

accomplissent-elles un objectif d’éducation artistique et culturelle ? Je m’appuie, pour poser cette question, sur l’idée maintenant 114 | P a g e

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

communément admise et relativement bien

souvent en prise les acteurs de ces projets

ancrée institutionnellement que l’éducation

(enfants, communauté éducative, artistes) est

artistique et culturelle ne se définit pas

dans les murs de l’école. Certes, des sorties

seulement par la co-présence d’enseignants,

culturelles

d’élèves et d’artistes engagés dans un projet

apprentissages culturels sont certainement

commun.

plus

présents. Mais ce n’est pas leur existence qui

fondamentalement, par la combinaison de

est visée par la question posée, c’est plutôt

trois expériences de l’art : esthétique, par le

leur place dans les objectifs des projets, dans

contact avec les œuvres et les lieux ;

leur réalisation et dans leur évaluation.

Elle

se

définit,

sont

prévues,

et

des

artistique, par l’élaboration personnelle d’un langage et d’une forme ; symbolique et culturelle, par l’appropriation de ressources culturelles, la réflexivité, la formation de l’esprit critique la confrontation des points de vue. Les résidences sont conçues sur le principe de l’immersion (présence longue, cohabitation, apprivoisement progressif) et non sur celui de la rupture (présence plus ou moins

ponctuelle,

activités

parfois

inconcevables dans un système éducatif traditionnel, temps fort et visible d’un projet mené

par

ailleurs

toute

l’année

par

l’enseignant). Pour le dire autrement : sur le principe

de

la

proximité

et

de

la

familiarisation et non sur celui de l’étrangeté ou de l’altérité entre acteurs éducatifs et acteurs culturels. La scène qui met le plus

Les résidences d’artistes en milieu scolaire ; permanences et évolutions Je voudrais maintenant faire un retour vers le premières formes de résidences dans les établissements scolaires, en m’appuyant à la fois sur mon expérience personnelle de mise en place de résidences au cours des années 1980, en lien avec l’association Savoir au Présent, et sur les actes d’un colloque organisé

en

1990

par

cette

même

association, avec l’appui des ministères concernés3. À cette époque, les résidences en milieu scolaire sont une extension des résidences en entreprises, dans les usines et dans divers lieux de vie et de travail. Les mêmes règles y sont prescrites, en particulier

Actes du colloque École / Milieu scolaire / Milieu artistique. Quels échanges, quels réseaux, quelles pratiques, ministères de la Culture, de l’Éducation nationale, de l’Agriculture, Savoir au Présent, Palais du Luxembourg, 16-18 mai 1990. 3

115 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que Gran d t émoin

le fait de ne pas demander à l’artiste d’animer

quel point, à cette époque, le discours est

d’ateliers de pratique ou de faire don d’une

limité4, faisant ainsi une large place au

œuvre réalisée dans le cadre de la résidence.

discours

Il

dominantes

était

également

recommandé

de

d’artiste dans

et

donc

aux

le

champ

de

valeurs l’art

:

commencer la résidence sans programme

autonomie par rapport à la demande sociale

préalable d’activités, le but étant que chaque

ou

lieu d’accueil invente progressivement les

rupture,

formes de la rencontre. Les résidences sont

académiques ou disciplinaires. Ce discours

conçues selon un référentiel assez strict, sous

est assez largement relayé par Savoir au

la responsabilité du chef d’établissement,

présent qui défend un point de vue centré sur

destiné

l’altérité

à

laisser

singuliers et non

émerger

des

projets

normés selon les règles

politique,

dévalorisation

fondamentale

des

des

savoirs

acteurs

en

présence et la spécificité du rôle de l’artiste :

personnellement À l’époque où se tenait le colloque de 1990, que

avant-garde,

« L’école ne peut attendre de l’artiste qu’il assure

pédagogiques.

alors

singularité,

les

résidences

une

activité

éducative

ou

culturelle. L’institution scolaire atteint des buts culturels parce que l’artiste dans sa pratique relève

d’artistes

de l’artistique. […] La médiation culturelle doit

concernaient tous les types d’établissements

s’appuyer sur les fondements de la création

scolaires, le point de vue de l’Éducation

artistique ». Cette idée, qui consiste à

nationale était formulé essentiellement par

présenter l’action de l’artiste comme d’autant

l’Inspection générale des arts plastiques,

plus efficace (ou en tout cas efficiente) qu’il

focalisée sur la différenciation entre les

s’affranchit de tout référence à une pratique

professionnalités respectives de l’enseignant

ou à un savoir-faire pédagogique, reste

d’arts plastiques et de l’artiste. Aucun apport

aujourd'hui très prégnante dans les discours

n’est repérable pour les problématiques liées

d’artistes, mais elle l’est de moins en moins

au primaire et à la maternelle, c'est-à-dire à

dans

l’enseignant

de

préoccupées par la qualité de la transmission

l’institution culturelle, on est frappé de voir à

et par les compétences nécessaires pour

polyvalent.

Du

côté

les

discours

des

institutions,

« La meilleure résidence d’artiste semble être son atelier », affirme ainsi un représentant de la Délégation aux arts plastiques du ministère de la Culture. 4

116 | P a g e Enfance, Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Ac te s du Collo que Gran d t émoin

assurer cette qualité. De plus, elle est à

domaine, Jean-Paul Fourmentraux5. Y faire ou

relativiser par l’observation concrète des

non figurer une expérience menée dans un

résidences que j’ai organisées, ou plus

établissement scolaire peut, selon les cas,

récemment par l’examen des vidéos réalisées

renforcer ou affaiblir ces stratégies. La même

dans les classes lyonnaises coordonnées par

question s’est posée à propos des ateliers

Enfance, Art et Langages, où l’on voit

artistiques dans le champ social, comme l’a

fréquemment

posture

analysé Pierre-Alain Four (2003 : 207-227),

d’explication, de facilitation, de soutien,

mais les actions menées en milieu carcéral,

d’accompagnement.

geste

hospitalier ou dans les quartiers en difficulté

professionnel expliqué et partagé par les

ont connu une progression en légitimité

artistes se jouent les enjeux d’une co-

supérieure par rapport à celles menées en

éducation, d’une pédagogie active et d’une

milieu scolaire.

les

artistes

Autour

en

du

méthode non formelle, bien qu’elle se déroule dans un contexte formel, celui de l’école.

La question de la mention des résidences dans les CV est réapparue au cours de ce

Il est intéressant de noter que déjà à cette

colloque, et semble toujours poser quelques

époque, les organisateurs et institutions

problèmes, malgré une réelle progression de

partenaires se plaignaient des stratégies de

cette

légitimité des artistes, qui ne mettaient pas

changements

en

l’éducation artistique et culturelle comme

visibilité

leur

participation

à

des

question,

à

la

majeurs

faveur :

de

trois

l’affirmation

de

résidences en milieu scolaire. Les curriculum

composante

vitae (CV) d’artistes diffusés auprès des

culturelles ; la raréfaction des soutiens

institutions culturelles ne mentionnaient pas,

publics en matière de culture et le besoin de

dans la plupart des cas, ce type d’expérience.

diversifier

Or, les CV sont un outil important des

artistes ; le pilotage par les collectivités

stratégies de légitimation dans le champ

territoriales (qui par ailleurs financent la

artistique, comme l’a montré, dans un autre

culture) de dispositifs qui échappent ainsi à

les

stratégique

sources

des

de

politiques

revenus

des

Fourmentraux (2011 : 79-82) montre comment, dans le cas des coproductions entre artistes et scientifiques, l’examen des curriculum arte (des artistes) et des curricumum vitae (des ingénieurs informaticiens) permet d’analyser les modes d’attribution de valeur artistique ou scientifique, et les stratégies de valorisation artistique d’activités hybrides relevant de la recherche-création. 5

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

une connotation trop scolaire. La longue

entre

durée des résidences et l’importance des

domination des unes envers les autres. Or,

crédits qui y sont affectés contribuent aussi à

nous savons que les difficultés de l’éducation

cette légitimation. La notion de résidence

artistique et culturelle tiennent certes à des

elle-même relève d’un vocabulaire de l’action

problèmes concrets de mise en œuvre, mais

publique centré sur la création et le créateur,

plus profondément à des conflits de valeurs

au contraire des ateliers de pratique artistique

et de représentations entre la culture de

et des autres dispositifs de type « classe à

l’école et la culture du champ artistique

PAC » : la résidence d’artiste reste un

contemporain. Elles tiennent aussi à une

dispositif

tension

identifié

majoritairement

par

rapport à des espaces non scolaires.

représentations conflictuelles de la relation artistes

et

pourrait supposer

enseignants,

que

dépassées par

l’on

trente

années de construction institutionnelle du partenariat entre culture et éducation, sont toujours

présentes.

Ce

cultures

historique,

l’institutionnalisation

J’ai entendu au cours des échanges que les

entre

les

constat

peut

s’expliquer de deux façons. D’une part, la culture doit être appréhendée « au pluriel », selon les termes de Michel de Certeau qui postulait que son analyse ne peut être que polémologique6, afin de mettre en évidence une de ses dimensions majeures : les conflits

et

les

rapports

présente de

bien

de

avant

l’éducation

artistique, dès la création des enseignements artistiques

à

l’école,

entre

deux

représentations opposées des visées de cet enseignement7 et, plus largement, de l’acte même d’enseigner. D’autre part, malgré la très grande hétérogénéité des « carrières » d’artistes (au sens sociologique du terme), malgré le fait que dans certains domaines (arts plastiques, danse, musique) les artistes ont dans leur grande majorité suivi une formation supérieure spécialisée, la critique de l’école reste très prégnante dans leurs discours. Cette critique est une transposition

À propos de l’activité culturelle de la production des non-consommateurs, considérée à tort comme passive et marginalisée par la dimension productiviste de l’économie culturelle, Certeau relève que « la relation des procédures avec les champs de force où elles interviennent doit […] induire une analyse polémologique de la culture. […] la culture articule des conflits et tour à tour légitime, déplace ou contrôle la raison du plus fort » (1990 : XLIV). 6

On peut se référer notamment à l’histoire de l’enseignement du dessin puis des arts plastiques, et plus particulièrement aux « scènes primitives » décrites par Bruno Duborgel à propos des visions opposées – utilitaristes ou esthétiques – développées par Eugène Guillaume et Felix Ravaisson (1990 : 72-74). Une synthèse historique réalisée en 1996 par Marie-Jeanne Brondeau-Four et Martine Colboc-Terville (« Du dessin aux arts plastiques. Repères historiques et évolutions jusqu’en 1996 ») peut également être utilement consultée sur le site de l’académie de Mayotte. 7

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

de la critique de l’académisme, en art comme

identité

ailleurs, et également une façon d’héroïser le

compétence artistique ; soit en tant que

regard rétrospectif que posent les artistes sur

simples « travailleurs culturels » (Menger,

leur parcours en soulignant son caractère

2003), présents à un moment de leur vie

singulier

vocation,

professionnelle auprès de certains groupes

d’opposition, de résistance. Curieusement,

sociaux sans pour autant considérer y avoir

alors qu’une critique sociale aujourd'hui

des missions ou une vocation particulières.

par

le

régime

de

professionnelle

centrée

sur

la

largement répandue reproche à l’école le caractère

structurel

de

sa

dimension

inégalitaire, les artistes perdurent dans une critique plutôt psychologisante de l’école, génératrice d’ennui, incapable de déceler les talents, les individualités et de développer le plaisir d’apprendre. Ce faisant, ils présentent leur rôle de deux manières : soit sous le régime d’une vision « romantique » de la transmission8, qui convient assez bien au temps souvent bref de leur intervention auprès des enfants et à la préservation d’une

De l’exceptionnel à l’ordinaire : la question des changements d’échelle Un des reproches principaux qui pouvait être fait aux résidences d’artistes par l’Éducation nationale au cours des années 1980 était le caractère exceptionnel et coûteux de ces opérations. Face aux valeurs « inspirées » qui prédominaient dans les discours culturels faisant

la

promotion

des

résidences,

l’Éducation opposait les valeurs « civiques »9 et critiquait le caractère sporadique de ces

À cet égard, les artistes se présentent souvent comme des figures de l’enseignant idéal selon leurs propres normes, c’est-à-dire libertaire et anti-système. Dans ses travaux sur l’école ou sur l’illettrisme, Bernard Lahire a largement critiqué cette vision d’une pédagogie romantique et vertueuse. « L'enseignant romantique - dont l'un des modèles est partiellement livré dans le film de Peter Weir Le Cercle des poètes disparus - ne fait en définitive que jouer le rôle bien connu des lecteurs de Max Weber, rôle du ‘prophète’ face au ‘prêtre’ comme ‘fonctionnaire du culte’. Ce modèle d'enseignant privilégie l'expérience événementielle vécue par rapport à l'exercice quotidien, la spontanéité ou le happening pédagogique par rapport à la progression continue dans un corps de savoirs et, au fond, la démarche intérieure et volontaire par rapport à l'action extérieure et imposée. Il privilégie ainsi, sans s'en rendre compte, ceux qui ont déjà constitué au cours de leur socialisation antérieure les démarches et les motivations internes par rapport à ceux qui ne les ont pas encore constitué[es] et qui ont besoin pour cela d'une action pédagogique spécifique. » (Lahire, 1997 : 6). Par ailleurs, dans un cadre relevant plutôt de la formation des adultes, Lahire critique les postures adoptées par les associations luttant contre l’illettrisme, considérant comme populistes certaines de leurs affirmations, par exemple : « Le même fond populiste amène ATD à développer la conception d’une pédagogie radicalement romantique (antitechniciste, anti-institutionnelle, antiautoritaire, égalitaire) où l’apprentissage se déroulerait dans la joie permanente » (Lahire, 1999 : 53) 9 En référence à des catégories développées par Boltanski et Thévenot, les « valeurs inspirées » privilégient l’excellence (plus que la simple qualité professionnelle) la spécificité de la démarche artistique, l’autonomie du monde de l’art, la singularité de la démarche, l’innovation, l’avant-garde ; les « valeurs civiques » s’attachent davantage à l’égalité d’accès, au droit à la culture, à la culture facteur d’identité ou bien commun, à l’héritage, au sens commun (Bordeaux, Deschamps, 2013 : 25-27). 8

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

projets, l’impossibilité de les généraliser

que l’intervention de la collectivité territoriale

aussi

cadrage

peut changer la donne, à condition de

pédagogique préalable. Ce ne fut sans doute

maintenir son effort sur la durée. À Lyon,

pas le cas dans toutes les régions, mais dans

toutes les écoles maternelles de l’éducation

les territoires où j’ai eu l’occasion de monter

prioritaire ont été, sont ou seront concernées

des projets, rien ne se serait fait sans le

par une résidence d’artiste. L’appel à projets

volontariat des chefs d’établissements et des

permet de cadrer l’impératif de qualité du

directeurs d’écoles en lien avec les élus de

côté des artistes ainsi que la cohérence avec

leur ville, le rectorat et les inspections

le projet d’école. La durée, qui est fixe, mais

académiques

peut dans certains cas être négociée, est

bien

que

l’absence

restant

en

de

dehors

de

l’impulsion et du suivi de ces actions.

pensée

pour

garantir

des

effets

seulement sur les enfants, mais Aujourd'hui, les résidences sont reconnues par l’Éducation nationale et font même l’objet d’une

circulaire

spécifique10.

Des

interministérielle collectivités

les

revendiquent comme un outil important de leur politique croisée de soutien à la création et d’éducation artistique. Elles les organisent concrètement de manière à les rendre accessibles. L’expérience d’Enfance, Art et Langages à Lyon, ainsi que celle d’autres territoires comme la Seine Saint Denis (pour les collèges) ou le Nord Pas de Calais, montre

non

aussi et

surtout sur la communauté éducative, ce qui est la condition de l’ancrage des nouvelles pratiques développées à l’occasion de la résidence. À la fin de la résidence, les écoles ont la possibilité de continuer à mener des projets culturels, contrairement à bien des projets

où,

une

fois

le

spectacle

ou

l’exposition terminés, on passe à autre chose. Au cours de la résidence, les artistes sont en général amenés à animer des ateliers, dans le cadre d’un projet de recherche artistique coélaboré avec les équipes pédagogiques.

La circulaire (Éducation nationale, Enseignement supérieur et recherche ; Agriculture ; Culture et Communication) n° 2008-059 du 29 avril 2008 « Développement de l'éducation artistique et culturelle » précisait déjà que « les résidences d’artistes seront développées pour permettre aux élèves de suivre au plus près la création dans différents champs, des phases de recherche jusqu’à la réalisation. Elle a été complétée récemment par la Circulaire (Éducation nationale ; Agriculture ; Culture et Communication) n° 2010-032 du 5 mars 2010 « Charte nationale : la dimension éducative et pédagogique des résidences d'artiste », qui définit les résidences en milieu scolaire comme une des catégories possibles des résidences d’artistes. 10

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Ac te s du Collo que Gran d t émoin

politique concertée et durable. Il y a là matière On voit donc, d’une certaine manière, ces résidences répondre point par point aux critiques dont elles pouvaient faire l’objet, et devenir un des instruments d’une politique territoriale de l’éducation artistique visant la généralisation. Ce format de projet, qui était exceptionnel

par

son

ampleur

et

à réflexion pour ceux qui seraient tentés de voir

dans le

instrument

parcours culturel l’unique

de

la

généralisation.

Les

résidences permettent de poser la question, à mon avis nécessaire, de la diversité des dispositifs et des échelles de projets.

son

ambition, peut aujourd’hui faire l’objet d’une

Bibliographie Bordeaux Marie-Christine, Deschamps François, 2013, Éducation artistique, l’éternel retour ? Une

ambition nationale à l’épreuve des territoires, Toulouse : Ed. de l’Attribut (coll. La Culture en questions) Buffet Françoise (dir.), 1998, Entre école et musée, le partenariat culturel d’éducation, Lyon : PUL (coll. Travaux et documents) De Certeau Michel, 1990 (première éd. 1980), L’Invention du Quotidien, I. Arts de faire, Paris : Folio (coll. Essais) Duborgel Bruno, 1990, « Scènes de l’enseignement artistique », in Daniel Lagoutte., Les arts plastiques

contenus, enjeux et finalités, Paris : A. Colin, (Coll. Formation des enseignants), p. 71-90 Four Pierre-Alain, 2003, « La démocratisation culturelle à l’épreuve des ateliers de pratiques artistique », in Olivier Donnat (dir.), Regards croisés sur les pratiques culturelles, Paris : La Documentation française (coll. Questions de culture), p. 207-227. Lahire Bernard, « Démocratisation, formes scolaires et techniques intellectuelles », Actes du colloque « Défendre et Transformer l’École pour tous ». Marseille. 3-4-5 octobre 1997, mis en ligne sur www.r-lecole.fr Lahire Bernard, 1999, L’Invention de l’ « illettrisme », Paris : La Découverte Menger Pierre-Michel, 2003, Portrait de l’artiste en travailleur. Métamorphoses du capitalisme, Paris : Seuil (La République des Idées)

Actes du colloque École / Milieu scolaire / Milieu artistique. Quels échanges, quels réseaux, quelles pratiques, ministères de la Culture, de l’Éducation nationale, de l’Agriculture, Savoir au Présent, Palais du Luxembourg, 16-18 mai 1990

L’éducation artistique et culturelle dans les musées et monuments nationaux, rapport de mission confiée à Henri Loyrette et conduite par Catherine Guillou, ministère de la Culture, juillet 2013

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Annexes  Bibliographie  Fiches expériences : exemples de dispositifs o Art à l’école o Enfance, Art et Langages o Témoignage Bérengère Valour o IN SITU o L’Opéra à l’école o Libres comme l’art o Les Escholiers de la Mosson o MUS-E® à Lille

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Actes du Colloque Bibliographie

Bibliographie sélective Les résidences, Les artistes ANDRE, Sophie.

L'inscription de la résidence d'artistes en milieu rural et sa pertinence dans le développement culturel local. Mémoire de DESS Développement Culturel et Direction de projet sous la direction de Jacques Bonniel, Faculté d’Anthropologie et de Sociologie. Lyon : Université Lyon 2, 2004, 117 pages. socio.univ-lyon2.fr/IMG/pdf/doc-557.pdf

BECKER, Howard S.

Les mondes de l’art. Paris, Flammarion, 1988 (1982), 379 pages. BONNIEL, Jacques. Résidences d’artistes : définition et contextes artistiques, institutionnelles et historiques in Les

résidences d'artistes en questions. Lyon : Agence Musique et Danse Rhône-Alpes, collection Clef de 8, 2005, pp.14-18. BORDEAUX, Marie-Christine, DESCHAMPS François.

L’Éducation artistique, l’éternel retour ? Une ambition nationale à l’épreuve des territoires. Toulouse : Ed. de l’Attribut (coll. La culture en questions), 2013, 172 pages. BOURDIEU, Pierre. L’invention de la vie d’artiste, Actes de la recherche en sciences sociales. 2, 1975, pp. 67-94. BUSCATTO, Marie (sous la dir.). L’art et la manière : ethnographie du travail artistique. Ethnologie française numéro consacré à l’art au travail. N°2008/1. Paris : CNRS – PUF, 2008, p 5-13. www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ETHN_081_0005

CHABANNE, Jean-Charles ; PARAYRE, Marc ; VILLAGORDO, Eric.

La rencontre avec l’œuvre. Eprouver, pratiquer, enseigner les arts et la culture. Actes des journées d’études scientifiques JEPEAC, Perpignan, octobre 2009. Paris : L’Harmattan, 2012, 392 pages. DEKENS, Gregory ; GINEVRO, Daniela.

Art, Petite Enfance, Etc., Morlanwelz, Lansman Editeur, 2012, 68 pages. FILIOD, Jean Paul. L’innovation en mode pluriel et relatif. L’exemple de l’éducation artistique et culturelle et d’un dispositif présenté comme “innovant”, Socio-logos. Revue de l'Association Française de

Sociologie, no 7, 2012. socio-logos.revues.org/2661

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Actes du Colloque Bibliographie

FOURNEL, Yves. Des artistes à la maternelle. Entretien avec l’adjoint au maire de Lyon délégué à l’éducation.

L’observatoire. N°42. Grenoble : Observatoire des politiques culturelles, juillet 2013, 3 pages. GODBOUT, Line.

Guide de l’artiste en milieu scolaire Pour faciliter l’intégration des arts et de la culture en éducation. Canada Moncton : Association acadienne des artistes professionnel.le.s du Nouveau-Brunswick, 2011, 60 pages. www.aaapnb.ca/centrederessources/files/centrederessources/AAAPNB-guide-artiste-milieu-scolaire-2012.pdf

HEINICH, Nathalie.

Etre artiste. Cinquante questions. Paris : Klincksieck, 1996. JORI LAZZARINI, Héloïse. Sous la direction de Alain Vulbeau.

L’éducation artistique et culturelle, entre attentes sociales et réponse à la crise de l’école. Etude comparée France – Québec des représentations des acteurs de l’EAC dans les terrains défavorisés. Université Paris Ouest Nanterre-La défense, 2012, 142 pages. KERLAN, Alain.

Conférence : Ce que l’artiste « fait » à l’école… De la maternelle au lycée et à l’université. L’engagement éducatif de l’art, Séminaire Fédération Nationale des Elus Socialistes et Républicains Condorcet, Avignon, 20 juillet 2012, 20 pages. www.meirieu.com/ECHANGES/kerlan_artiste.pdf LAMY, Yvon ; LIOT, Françoise.

Les résidences d’artistes. Le renouvellement de l’intervention publique dans le domaine des arts plastiques : enjeux et effets, in CALLEDE Jean-Paul, Métamorphoses de la culture, pratiques et politiques en périphérie, MSHA, Bordeaux, 2002, p.213-234. MENGER, Pierre-Michel.

Portrait de l’artiste en travailleur. Paris, Seuil 2003, 96 pages. MONOD-JUHEL, Charline.

Autour de la résidence d’artiste : évolution et extensions du principe de résidence d’artistes. Mémoire de master 2 professionnel Développement culturel et direction de projet. Lyon : Université Lumière Lyon 2, 2009, 141 pages.

cARTable d’Europe. Approche du concept d’évaluation en éducation artistique à partir de résidences d’artistes à l’école. Belgique : CDWEJ et EAL, mai 2013, 64 pages. www.calameo.com/read/002562879c00dc508de0e

Vade-mecum pour monter une résidence d’artiste à l’école. Paris : DSDEN, Inspection de circonscription de la Goutte d’Or, octobre 2012, 4 pages. 18b-gouttedor.scola.ac-paris.fr/IMG/pdf/Vade-mecum_residence_d_artiste_oct_2012.pdf

Développer une résidence d’artistes. In La Scène. N° 49. Nantes : Millénaires, été 2008, 20 pages.

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Actes du Colloque Bibliographie

La résidence d’artistes plasticiens en milieu scolaire. Compte-rendu des rencontres des 15 et 16 novembre 2007 à Auxerre – Salle de l’Assemblée départementale, Conseil général de l’Yonne. Auxerre : Centre d’art de l’Yonne, 2008, 49 pages. www.mediationculturelle.net/wp-content/uploads/résidence-artiste-à-lécole.pdf

Textes officiels France

Circulaire N°2013-073 du 3 mai 2013 « Le parcours d’éducation artistique et culturelle ». Paris : ministère de la Culture et de la Communication, 4 pages, 2013. www.education.gouv.fr/pid25535/bulletin_officiel.html?cid_bo=71673

Éducation artistique et culturelle. Charte nationale : la dimension éducative et pédagogique des résidences d'artistes. Circulaire n° 2010-032 du 5-3-2010. Bulletin officiel n°10 du 11 mars 2010. Paris : ministère de l’Education nationale, 2010. www.education.gouv.fr/cid50781/mene1003709c.html

Circulaire N° 2006/001 du 13 janvier 2006 relative au soutien à des artistes et à des équipes artistiques dans le cadre de résidences. Paris : ministère de la Culture et de la Communication, 7 pages, 2006. mediatheque.cite-musique.fr/mediacomposite/cim/_Pdf/70_Institutions_Circresidences.pdf

Belgique – Wallonie

Le Décret du 24 mars 2006 relatif à la mise en œuvre, la promotion et le renforcement des Collaborations entre la Culture et l'Enseignement. 12 pages. www.gallilex.cfwb.be/document/pdf/30655_001.pdf

La circulaire 2200 du 20/02/2008 concernant le décret du 24 mars 2006 relatif à la mise en œuvre, la promotion et le renforcement des collaborations entre la Culture et l’Enseignement. 8 pages. www.enseignement.be/hosting/circulaires/upload/docs/2394_20080220104436.pdf

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Actes du Colloque Bibliographie

Données d’observation et de recherche par expériences ENFANCE, ART ET LANGAGES - LYON FILIOD, Jean Paul ; NECKER, Sophie. Evaluer l’éducation artistique : l’expérience au croisement des points de vue. cARTable d’Europe, approche du concept d’évaluation en éducation artistique à partir de résidences d’artistes à l’école. Belgique et France : CDWEJ et EAL, 2013, pp. 45-49. FILIOD, Jean Paul, BOUKACEM, Dalila ; COSNIER, Brigitte ; PINOT, Françoise ; SEGUI, Fernando. Trois études sur le dispositif Enfance, Art et Langages, Lyon : Université de Lyon : université Lyon 1-IUFM, 2011, 153 pages. www.eal.lyon.fr Présentation : « Rapport de recherche développant les 3 thématiques suivantes : Trace d'enfance, d'arts et de langages : paroles d'élèves ; Entre-tenir sa place : les Atsem au travail ; Arts dans l'école, arts hors-l'école : les motifs d'une rencontre. » Filiod, Jean Paul ; avec COSNIER, Brigitte ; DUVILLARD, Jacques ; LADRET, Geneviève ; PINOT, Françoise et VIDON, Michel. Quand l’éducation artistique ne va pas de soi. Enfance art et langages, programme lyonnais d'éducation artistique et culturelle en école pré-élémentaire, 2e phase. Lyon : Université Lyon 1 - IUFM, INRP, Caisse des Ecoles de Lyon EAL, 2007, 100 p. FILIOD, Jean Paul (sous la dir.) Recherche-développement sur le programme Enfance Art et Langages. Bilan de trois ans de recherche (2005-2008). Lyon : 2008, 46 pages. www.eal.lyon.fr - Rapport de 2007 : Quand l’éducation artistique ne va pas de soi. - Rapport de 2006 : La place, le statut et les usages des arts à l’école maternelle. KERLAN, Alain (sous la dir.) Des artistes à l’école maternelle. Lyon : SCEREN-CNDP, Enfance, Art et Langages, 2005, 190 pages.

C E N T R E D R A M A T I Q U E D E L A W A L L O N I E P O U R L ’E N F A N C E E T L A J E U N E S S E – L O U V A I N L A -N E U V E (B E L G I Q U E ) NECKER, Sophie ; Filiod, Jean Paul Evaluer l’éducation artistique : l’expérience au croisement des points de vue. cARTable d’Europe. Approche du concept d’évaluation en éducation artistique à partir de résidences d’artistes à l’école. Belgique : CDWEJ et EAL, mai 2013, pages 45-49. www.calameo.com/read/002562879c00dc508de0e

L’Instant Marionnette, un projet du CDWEJ, film réalisé par J-B. Gabriel, 2006.

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Actes du Colloque Bibliographie

I N S I T U E T C U L T U R E E T A R T A U C O L L E G E – C O N S E I L G E N E R A L S E I N E -S A I N T -D E N I S BARRERE, Anne ; MONTOYA, Nathalie ; PEQUIGNOT, Bruno (ss la coordination et responsabilité scientifique). Les parcours « La culture et l’art a collège » : enquête sur un dispositif d’éducation artistique et culturelle. Paris : Université Paris-Descartes, Laboratoire CERLIS, février 2013, 14 pages. fr.calameo.com/read/00063492458629ea01db7

LES ESCHOLIERS DE LA MOSSON - MONTPELLIER CARRAUD, Françoise. Expérimentation dans un collège ECLAIR. Le travail enseignant entre logique scolaire et logique artistique. In Sociologies pratiques 2012/2 n°25. KERLAN Alain (sous la dir.) Les moissons de la Mosson. La scène et l’écriture. Rapport établi à l’intention d’Hérault Musique Danse. Lyon : Lyon : Université Lyon 2, Equipe d’Accueil Education Culture et Politique, octobre 2012, 48 pages. KERLAN, Alain (sous la dir.) Les moissons de la Mosson. Que la danse commence ! Rapport établi à l’intention d’Hérault Musique Danse. Lyon : Université Lyon 2, Equipe d’Accueil Education Culture et Politique, septembre 2011, 37 pages. recherche.univ-lyon2.fr/ecp/ressources/axe-3/LES%20MOISSONS%20DE%20LA%20MOSSON.pdf/view

LANGAR Samia (sous la direction d’Alain KERLAN) Les relations Parents-Collège : Quelles médiations pour la classe artistique ? Rapport établi à l’intention d’Hérault Musique Danse. Lyon : Université Lyon2, Septembre 2011, 55 pages. recherche.univ-lyon2.fr/ecp/ressources/axe-3/RAPPORT%20MEDIATION%20LANGAR%20DEF..pdf/view

L’O P E R A A L ’ E C O L E - L Y O N MAIRE SANDROZ, Marie-Odile ; STEFANI, Patrick. L’Opéra aux Minguettes. Ce que l’art fait à l’école, ce que l’école fait à l’art… Premier rapport intermédiaire de l’étude compréhensive. Lyon : Contribution du Centre Alain Savary, Agence qualité éducation, IFÉ/ENS Lyon, septembre 2012, 86 pages.

A R T I S T E S I N T E R V E N A N T E N M I L I E U S C O L A I R E , ENSBA – P A R I S LEMAIRE, Vincent ; DEAM, Nina. L’effet chenille. Pais : Beaux arts de Paris les éditions, 2012, 64 pages. Projet conduit dans les écoles de Saint-Ouen avec L’ENSBA de Paris et les Fondations Rothschild en 2011-2012.

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Actes du Colloque Bibliographie

Sites internet : expériences de résidences d’artistes FRANCE Seine-Saint-Denis Conseil

Général

de

la

Seine-Saint-Denis,

In Situ, 31 pages.

fr.calameo.com/read/00063492480be20e94fc7

In Situ et CAC - www.seine-saint-denis.fr/-Education-artistique-et-culturelle-.html Montpellier Classe artistique expérimentale Les Escholiers de la Mosson. Hérault Musique Danse. www.heraultmusiquedanse.fr/classe-artistique.html

Petites Galeries - www.ac-montpellier.fr/sections/ia34/actualites-ia34/mini-residence-artiste Rennes Les

résidences

d’artistes

de

Rennes.

rennes.iconito.fr/index.php/blog?blog=les_r_sidences_d_artiste

Les résidences d'artiste à l'école : dispositif Ville de Rennes/DRAC. Métropole Rennes, 1page. metropole.rennes.fr/politiques-publiques/culture-education-vie-sociale/la-culture/mise-en-partage-de-laculture/?no_c

Rhône-Alpes La Caravane des dix mots - fr-rhonealpes.caravanedesdixmots.com Lyon Les Résidences d’artistes en maternelle – Enfance, Art et Langages - www.eal.lyon.fr L’Opéra à l’école - Opéra de Lyon www.opera-lyon.com/opera-citoyen/developpement-culturel/lopera-a-lecole/

Nord Contrat Local d’Education Artistique (CLEA) - www.clea-intercommunal.fr Côte d’Or Résidences longues - www.cotedor.fr/cms/lang/fr/pid/4884 Créteil UNE ARTISTE en RESIDENCE au Lycée Saint-Exupéry de Créteil acl.ac-creteil.fr/domaines/residence/residence-st-exupery.doc

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Actes du Colloque Bibliographie

INTERNATIONAL Belgique - La Louvière Centre Dramatique de Wallonie pour l’Enfance et la Jeunesse (CDWEJ) www.cdwej.be/index.php?pid=1&mid=1000

Canada - Montréal C2S Arts et Evénements - www.c2sarts.org Suisse - Genève Academia d’Archi : Orchestre en classe. www.accademia-archi.ch/index.php?option=com_content&view=article&id=50&Itemid=137

Sites internet : artistes intervenants au cours du colloque Yves Henri - www.yveshenri.com Julie Lefebvre - lafabriquefastidieuse.com/index.php?/project/julie/ Milton Paulo Nascimento de Oliveira - www.dancersproject.com/browse/DancersBio.php?ID=4546 Arnaud Theval - www.arnaudtheval.com/2-50-autofiction.php Camille Llobet www.eal.lyon.fr/enfance/sections/fr/residences/les_artistes/artistes_en_residenc/?aIndex=1

Bérengère Valour www.eal.lyon.fr/enfance/sections/fr/residences/les_artistes/artistes_des_ancienn/?aIndex=2

Marc Mercier - www.instantsvideo.com/blog/fr/archives/category/accueil ou instantsvideo.over-blog.com

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Fiche expérience

Colloque 2013 – La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif

L’art à l’école Dispositif porté par le Centre dramatique de Wallonie pour l’Enfance et la Jeunesse (CDWEJ) à la Louvière (Belgique). Les résidences d’artistes prennent place dans des établissements scolaires de tous niveaux, des crèches aux établissements d’études supérieures pour une durée d’une année scolaire. www.cdwej.be

© A. Valentin

© CDWEJ

Centre dramatique de Wallonie pour l’Enfance et la Jeunesse Rue des Canadiens 83 7110 Strépy-Bracquegnies Belgique Tél. : +32 64 66 57 07 Courriel : info@cdwej.be

Directrice du CDWEJ Sarah Colasse


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Présentation du projet Le CDWEJ (Centre dramatique de Wallonie pour l’Enfance et la Jeunesse) existe depuis 1982. Lié au secteur du théâtre jeune public, il travaille au rapprochement entre monde artistique et monde éducatif en proposant des spectacles pour le jeune public ainsi qu’un vaste projet sur l’ensemble de la Wallonie : l’opération « Art à l’Ecole ». Ce dispositif permet la mise sur pied d’une soixantaine de résidences d’artistes par

saison.

Ces

résidences

se

déroulent

dans

des

crèches,

des

écoles

du fondamental (maternelles et primaires), des écoles du secondaire et des Hautes Ecoles pédagogiques. Nous les appelons davantage « ateliers » que « résidences ». Un atelier équivaut à une dizaine de demi-journées de prestation pour l’artiste en classe.

LA RECHERCHE L’opération « Art à l’Ecole », dans ses contours actuels, existe depuis 2004. Le CDWEJ a pris un tournant en 2000 avec la mise sur pied d’un projet ministériel : d’un travail avec des animateurs, il est passé à un travail avec des artistes en création exclusivement. Dans l’idée d’emmener les élèves dans un véritable processus artistique, les plonger dans un bain de recherche, un chemin, loin de toute certitude, de toute recette… Dans l’idée également de valoriser la singularité de chacun, de l’affirmer en tant que ferment de création au sein du collectif.

Par ailleurs depuis 2011, dans le cadre du projet européen cARTable d’Europe conduit avec Enfance, Art et Langages (cf. fiche expérience EAL), le CDWEJ s’est assuré la collaboration de la sociologue Sophie Necker pour une recherchedéveloppement sur la question du sensible. Plus d’informations sur : cartabledeurope.over-blog.com

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Partis pris des ateliers Art pour tous. L’enjeu principal du dispositif consiste à mettre les jeunes en contact avec les arts dès le plus jeune âge, de revendiquer une place importante pour les arts dans la société, de défendre la politique de l’art pour tous. Partenariat. L’atelier se déroule presqu’exclusivement en temps scolaire, avec la classe dans son entièreté. Il repose sur la complémentarité des compétences artistiques/pédagogiques de l’artiste et l’enseignant partenaires. La mise en œuvre de cette philosophie du partenariat trouve ses influences… en France, précisément via la parole de Jean-Claude Lallias, responsable à l’époque de l’Anrat, que le CDWEJ avait invité en conférence lors des prémisses de l’opération. Pour articuler ce partenariat artistes/enseignants, des formations réunissent artistes, enseignants et médiateurs culturels à l’entame du travail avec les jeunes. Ici, autre source d’influence française, c’est Marcelle Bonjour et le dispositif Danse au Cœur qui nous ont inspirés pour la mise sur pied de ces modules de formation. Triangulation. Il est un autre partenariat d’importance chez nous : celui qui nous lie à nos Partenaires culturels - Points de chute. Ils sont une vingtaine de centres culturels locaux et régionaux à avoir rejoint le CDWEJ. Ce travail avec les médiateurs culturels est capital. Pour rapprocher ces deux mondes que sont l’art et l’école, il s’avère toujours juste et sain d’avoir une structure qui offre un cadre (en l’occurrence, ici, le CDWEJ) et qui accompagne sans faire ingérence dans les projets (CDWEJ et le centre culturel en lien avec l’école). La collaboration avec nos Partenaires culturels - Points de chute nous permet d’opérer un véritable travail de proximité, de mise en lien avec les œuvres, les propositions culturelles… Elle nous permet également de rester attentifs aux spécificités, aux besoins, aux attentes de chaque région. Co-construction. Artistes, enseignants, médiateurs culturels… tous contribuent à construire et voir grandir cette opération. Eclectisme. Les ateliers se déroulent dans des régions parfois très différentes et dans des écoles très diverses elles aussi. Âges, milieux sociaux, types d’enseignement, types de publics… Cette diversité est une revendication et un atout. Elle permet d’œuvrer au décloisonnement, à la rencontre et dévoile chaque année ses richesses tant en formations que lors des réunions et des Rencontres « Art à l’Ecole ». 3|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Balisage. Une saison « Art à l’Ecole » est très structurée, balisée et demande un véritable engagement pour tout qui y participe : réunions, formations, Rencontres « Art à l’Ecole » où se retrouvent les élèves qui présentent et découvrent les différents chemins artistiques parcourus…

MARGE DE PROGRESSION Chaque médaille a son revers, chaque situation, son paradoxe. Concernant le CDWEJ stricto sensu : 

Sur sa faim ? La Belgique est petite mais in fine, le territoire d’action du CDWEJ, lui, est plutôt grand. Pour pouvoir compter sur la diversité préconisée, il est important de maintenir un certain nombre d’ateliers. Cependant, pour donner l’accès à ce type de projets à un maximum d’enseignants, d’écoles, de jeunes… nous veillons à ce que les ateliers tournent et que ce ne soit pas chaque fois les mêmes établissements qui en bénéficient. Mais quid de ces écoles qui souhaitent tant poursuivre et approfondir une démarche artistique ? Quid des brasiers qu’on allume et qu’on ne laisse pas « prendre » sur le long terme ? Il peut être très frustrant pour tous de ne pas pouvoir développer plus en avant un partenariat qui mériterait de l’être, une exploration artistique avec de nouveaux élèves…

Cadre >< souffle ? Une des grandes forces de l’opération est sa structure et son balisage (cf. plus haut). Il est cependant important de rester vigilant à y préserver du souffle, de la liberté, de nouveaux possibles, du temps pour se poser et évaluer ce qui s’y passe, pour évaluer la structure en elle-même. Le danger serait de nous voir nous retrouver à « fonctionner ». L’art à l’école ne peut simplement « fonctionner », l’art à l’école doit « vibrer ».

Nos pistes pour tenter d’éviter les écueils énoncés : 

Artistique. Un travail accru avec des artistes associés invités à repenser le projet avec nous. Nous venons par exemple de mettre sur pied « L’Assemblée des Rêveurs », espace de réunions avec la direction (trois rencontres sur l’année) où, avec six artistes, l’opération est remise en perspectives. 4|Page

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Gestion. Octroyer davantage d’autonomie aux binômes artiste/enseignant, aux Partenaires culturels - Points de chute… Favoriser encore davantage les prises d’initiatives…

Collaborations. Les projets internationaux tels que celui qui nous lie présentement à Enfance, Art et Langages sont des espaces de confrontation, de rencontre et de construction qui peuvent permettre de prendre de nouveaux souffles, d’entrevoir la chose quotidienne sous un autre angle et de creuser des thématiques d’importance.

Concernant le contexte institutionnel belge francophone : 

La culture : une possibilité ou un droit ? Un décret a vu le jour en 2006, cosigné par la Ministre de l’Enseignement et la Ministre de la Culture. Ce décret encourage les ponts entre arts et écoles en finançant des projets sélectionnés par une commission. Il reconnait d’ailleurs le CDWEJ comme Partenaire privilégié. Ce système a le mérite d’exister mais pose la question suivante : veut-on proposer l’art à l’école sur base du bon-vouloir des personnes en présence (enseignants, directions, inspection…) ou bien adopte-t-on une politique claire et cohérente pour rendre accessible la pratique artistique à TOUS les élèves ? Cette question en entraîne aussitôt une autre : qu’entend-t-on par art à l’école ? Pour notre part, nous défendons bien entendu le principe de travailler AVEC des artistes. Or, cela engendre des coûts. Or, cela bouscule les pratiques. Ce qui n’est certes pas toujours évident à gérer mais ô combien essentiel pour proposer de véritables démarches artistiques et pour garder une société en mouvement…

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Pilotage Le CDWEJ est subsidié principalement par la culture. Un contrat-programme le lie au – ou à la – Ministre en charge des arts de la scène. Ce contrat est renouvelable tous les quatre ans.

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Fiche expérience

Colloque 2013 – La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif

Enfance, Art et Langages Programme de résidences d’artiste en école maternelle à Lyon. La résidence se prolonge trois années au sein d’une même école, située prioritairement en territoire fragilisé. Ce dispositif soumis au regard de chercheurs et accolé à un centre ressources. www.eal.lyon.fr

er

Ecole maternelle les Tables Claudiennes (Lyon 1 ), résidence de Camille Llobet, plasticienne, 2012-13

Ecole maternelle Gilbert Dru (Lyon 7

ème

),

résidence de François Cini, plasticien, 2008-2009

ème

Ecole maternelle Combe Blanche (Lyon 9

), résidence de Myriam Soltani Azad, plasticienne musicienne, 2012-2013

ENFANCEARTETLANGAGES Les Subsistances 8 bis quai Saint Vincent 69001 Lyon Tél. : +04 78 38 62 10 Courriel : enfance-art-langages@mairie-lyon.fr

Directrice Christine Bolze

Assistante projet Anaïs Lavot


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience EAL

Présentation du programme de résidence ENFANCEARTETLANGAGES coordonne un programme de résidences d’artiste en école maternelle pariant sur l’intérêt de l’art et de la création comme langage sensible et fondateur pour le petit enfant. Ce projet original est né à Lyon en 2002 d’un partenariat entre la Ville et des ministères de l’Education Nationale et de la Culture. Le principe est simple : un artiste, quelle que soit sa discipline, s’installe au cœur de l’école maternelle, pour une implantation délibérément longue durant trois années. S’engage alors dans cette durée, un travail d'équipe entre les enseignants, le personnel de l'école, les parents, les équipements culturels de la ville. Enfance, Art et Langages a initié en douze ans, une quarantaine de résidences d’artiste. Chaque année environ 1.200 enfants sont concernés, principalement dans les quartiers priorisés de la ville.

Au-delà de la démocratisation scolaire et culturelle, la démarche de l’artiste observée puis partagée régénère des pratiques scolaires dans de nouveaux modèles éducatifs. Ce processus est soumis au regard de chercheurs en sciences-humaines depuis dix ans. Chaque année, ils produisent des analyses et un propos sur l’expérience artistique à l’école (disponible sur le site internet : www.eal.lyon.fr). Basé aux Subsistances, un centre de ressources en parallèle des résidences, propose documentation, éditions, DVD, colloques, formations sur l’art et l’enfance.

Résidence d’artiste, de l’usage du terme par Enfance, Art et Langages

La dénomination Résidence d’artiste a été choisie dès 2002 à Lyon pour caractériser l’installation d’un artiste dans une école maternelle de la ville. Les Italiens d’Emilie Romagne, dont l’expérience lyonnaise s’est inspirée avaient retenu le mot atelieriste pour nommer l’artiste à l’école. Pourquoi Résidence d’artiste ? Parce que ce terme emprunte plus au monde de l’art qu’à celui de l’enseignement. Le dispositif lyonnais prétend bouleverser l’organisation ordinaire de l’école. Il faut des mots forts, voire étrangers pour bousculer l’ordinaire et s’autoriser une expérience autre. Le dispositif Enfance, Art et Langages entend offrir aux hôtes de l’école les espaces temps et lieu de la résidence. De ceux qui résident, qui habitent l’école. 2|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience EAL

LA RECHERCHE Les résidences en maternelle au sein d'Enfance, Art et Langages (ou EAL), font l'objet depuis 2004, d'études, d'observations et d'analyses par des chercheurs-universitaires, enseignants du premier degré et formateurs en ESPE. Les recherches nourrissent les acteurs des résidences (enseignants, ATSEM1 et artistes) et vice-versa. Les résultats sont communiqués par la publication de rapports, par ailleurs partagés lors de séminaires. L’ensemble des documents produits est accessible sur le site internet d’EAL. Des outils vidéo en ligne, Propositions ouvertes pour l’action professionnelle, décryptent des situations spécifiques.

Les questionnements sur l'art et l'enfance sont au cœur de la démarche d'Enfance, Art et Langages. Le pôle recherche est régi par des conventions triennales avec l'Université Lyon1ESPE, l’EA Education, culture et politique – Lyon2 et l’IFE.

1

Agent Territorial Spécialisé en Ecole Maternelle 3|Page

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience EAL

Partis pris du programme Rencontrer la démarche d’un artiste Plasticien, danseur, ou musicien, l’artiste en résidence partage son univers avec les enfants, les enseignants, les ATSEM, les parents d’une école. Cet artiste n’est pas un pédagogue, pas un éducateur, pas un animateur. Il n’est pas chargé d’enseigner. N’enseigne pas de techniques artistiques, il ne réalise pas d’œuvre non plus dans l’école. Il n’a pas de classe, il a un atelier et occupe aussi les couloirs et les recoins. Il intervient dans l’école avec de petits groupes d’élèves provenant d’une seule classe ou de plusieurs. C’est à la fois très simple et assez inhabituel. Il doit trouver ses marques. L’équipe de l’école aussi. Cela peut prendre un peu de temps et beaucoup de tâtonnements… Que fait-il ? Il introduit dans l’école sa démarche artistique : sa manière de travailler, de voir et d’interroger le monde. Ce qu’il cherche, comment il cherche, la palette de ses matériaux, ses référents théoriques, artistiques, son imaginaire, ses langages et ses propres réalisations qu’il donne à voir. Les productions expérimentées ou réalisées avec les enfants sont le résultat de ce processus. Ce processus fonde la résidence d’artiste en maternelle.

Expérimenter Un certain nombre d’artistes invitent les enfants à entrer dans leur univers artistique, en expérimentant des dispositifs, en proposant des expériences à vivre : expérience d’élaboration d’une intention et d’un projet, expérience de perception en toute audace et en toute sécurité, expérience de soi, expérience esthétique, expérience de l’usage d’outils ou de matériaux peu habituels à l’école, expérience à partir de petits dispositifs inventés et propices à mobiliser les imaginaires. Par exemple : un gant rétroviseur, il s’agit d’un gant d’enfant en laine sur lequel l’artiste greffe un petit miroir, le gant devient un outil d’exploration. Ou encore des courbes de niveau tracées à la craie tout un après-midi, sur le goudron de la cour autour d’une flaque d’eau qui s’évapore sous le soleil, cartographie éphémère. L’enfant est au cœur de la résidence en étant au cœur de l’expérience: il réfléchit, projette, propose, explore, tente, observe, perçoit. Il est présent, concentré, « il va jusqu’au bout » disent les enseignants.

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Interroger les pratiques professionnelles On dit fréquemment que la résidence d’artiste provoque dans l’école un choc des

mondes. Une directrice évoquait « un bouleversement joyeux ! ». L’artiste bouscule et détourne les usages de l’école, les hiérarchies, les flux, les circulations, les espaces, les temps, les matériaux, les mots… Ce bouleversement ne va pas sans heurts que le dialogue cependant, résout. Le dialogue pour mieux se connaître et se comprendre mais aussi pour renouveler les pratiques professionnelles, développer le sens de l’observation et de l’analyse. Intégrer les contextes sans leur être soumis, mettre à distance, interroger les routines, chercher le sens de l’action, aller plus loin et finalement non seulement, comprendre les détournements propres à l’artiste ou à la résidence, mais les souhaiter et les provoquer.

QUESTIONNEMENT EN COURS… 1) Un projet d’équipe L’artiste réside non pas dans une classe, mais dans l’école. Il travaille avec les enfants mais aussi les adultes : les enseignants et les ATSEM, les parents aussi. Faire équipe malgré les nominations tardives et les mouvements de personnels fréquents, malgré les différences de métiers, de cultures professionnelles, malgré les hiérarchies autoritaires… Les temps de concertation sont indispensables. Si des problèmes traversent les équipes, la résidence les révèle, ne les résout pas toujours…

2) Trois ans de résidence et après ? Les premières résidences d’artiste d’Enfance, Art et Langages datent de 2003, 12 ans d’expérience... Une capitalisation, une certaine expertise, des savoir-faire sont là, indéniablement acquis par les acteurs artistes-enseignants-ATSEM. Mais essentiellement acquis individuellement. Transforme la pratique au sein de la classe mais la dynamique au sein de l’école s’émousse assez vite… On peut s’interroger plus globalement sur le partage de ces bénéfices dans chacun des métiers. Le parcours culturel (artistique ?) de l’enfant développé par la circulaire de mai 2013 pourrait apporter des réponses et permettre des aboutissements avec 5|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience EAL

la réforme des rythmes éducatifs. Rendre les métiers plus réflexifs est possible à condition d’avoir ou de prendre le temps de la réflexion.

3) Résidences d’artiste : une méthodologie de l’action culturelle de territoire ? Les résidences décryptées au filtre des recherches livrent une foule de bénéfices pour ceux qui en font l’expérience. Mais qu’en font les commanditaires ? qu’en disent ceux qui les financent ? Comment passer de l’expérimentation, non pas à la généralisation mais à l’essaimage des principes positifs découverts là ? Construire d’autres projets, d’autres formes en conservant la substantifique moelle des résidences ? Alain Kerlan nous dit qu’il manque encore à l’éducation artistique et culturelle un modèle théorique pour en permettre la diffusion cohérente… Nous comptons sur les chercheurs pour avancer en ce sens. Et nous essayons de convaincre par l’énumération d’arguments, afin de dépasser la mise en place d’actions artistiques pour affirmer des politiques d’éducation artistique et culturelle.

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience EAL

Pilotage Enfance, Art et Langages a été créé à Lyon en 2002 à l’initiative de la Ville de Lyon et des ministères de la Culture et de l’Education Nationale. Le dispositif bénéficie aujourd’hui d’un financement majoritaire de la Ville de Lyon (directions de l’Education et de la Culture), et d’un soutien de la DSDEN du Rhône, de la DRAC Rhône-Alpes, et de l’ACSé. EAL est intégré à l’établissement public Caisse des Ecoles de Lyon.

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Témoignage

Colloque 2013 – La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif

Enfance, Art et Langages Bérengère

Valour ,

artiste

chorégraphique livre le témoignage de son expérience d’artiste immergée durant trois ans au sein des maternelles Mermoz A et Mermoz B (Lyon 8ème).

Propos d’artiste Ma démarche d’artiste « Tous les hommes sont libres et égaux dans le déploiement de leur sensibilité », Jacques Rancière. Cette phrase symbolise pour moi l’enjeu majeur de mon travail. C’est dans « tout ce qui met en lien », que je me nourris et m’inspire pour proposer une approche du quotidien par un corps conscient. Le principe des créations in situ, de l’improvisation ou de la composition instantanée, sont les bases du mouvement que je crée.

Vivre la résidence Pour commencer, ce qui caractérise Enfance, Art et Langages et qui étaye l’emploi du terme résidence à mon sens, c’est l’échelle du projet : -

échelle de temps : 3 parfois 4 ans ;

-

échelle d’espace : toute l’école, toutes les classes sont concernées.

Puis il y a l’idée d’interprète et d’auteur qui diffère dans l’approche d’une résidence. Pour moi, dans la résidence en milieu scolaire, l’artiste doit se positionner comme auteur. La question des disciplines et surtout de la formation dans ces disciplines est à prendre en compte dans le démarrage d’un projet de résidence. Par exemple, la formation d’un danseur est avant tout une formation d’interprète alors que le cursus de l’école des Beaux-arts est beaucoup plus basé sur la démarche personnelle de chacun. 1|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche témoignage Bérengère Valour

En ce qui concerne ma résidence, le terme de résidence peut sembler plus ou moins approprié si l’on prend en compte les besoins particuliers d’une recherche chorégraphique (grand espace, sol adapté) ; mais pourtant, ce terme est nécessaire et opportun car il symbolise une présence particulière, une présence dans tous les temps et tous les espaces de l’école. Se faire une place dans l’école, c’est avant tout comprendre comment l’équipe fonctionne, quels sont les moments forts, les rituels presque « chorégraphiques » et, petit à petit, s’immiscer discrètement dans ses moments (les petits-déjeuners partagés, les moments de repas, les temps de récréation dans la cour) pour que la confiance s’installe. Il m’a semblé que nous avons toujours beaucoup avancé dans ces temps informels, assises ensemble sur des petites chaises face à la cour et aux enfants.

Et c’est une question de présence dans tous les sens du terme : -

La présence physique (enfants, artiste, enseignants, ATSEM) nous sommes bien tous ensemble dans l’école.

-

La présence à soi-même (enjeux pour les enfants dans la pratique artistique mais aussi pour les adultes de l’école qui ne peuvent entrer dans le processus que s’ils se distancient de la situation proposée et vécue au présent).

-

La présence à l’instant, qui pour moi est l’étape suivante, celle qui demande d’être à la fois physiquement là, présent à soi-même, et présent avec les autres pour faire et vivre ensemble.

Et la résidence implique que la présence soit perçue malgré l’absence physique par exemple. Par plusieurs stratagèmes, nous avons essayé de faire en sorte que ma présence à l’école soit continue malgré mes périodes de travail à l’étranger. Pendant ces trois ans de résidence j’avais envie de partager ce que je vivais en dehors de l’école avec les enfants, les enseignants, les ATSEM. J’envoyais des mails, des cartes postales, des flyers de spectacles, j’invitais d’autres artistes à venir proposer un extrait de spectacle. Des musiciens à faire des moments de sortie des classes en musique, tous les artistes invités étaient des personnes proches de mon univers et participaient de fait à la compréhension plus globale de qui je suis et de ce que je fais.

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche témoignage Bérengère Valour

Il y a, je crois, le faire et aussi le laisser faire. Lancer des propositions, et voir ce qu’elles produisent. C’est aussi comme ça que je travaille. On voit ce qui marche et ce qui ne marche pas une fois qu’on a essayé. Et à partir de ça on peut discuter, préciser, affiner.

La question de la langue, des langues Une fois la confiance établie, il faut encore parler la même langue ou plutôt trouver un langage commun pour le projet. Et dans mon cas, c’est le langage du corps, le langage sans mots que j’ai essayé de transmettre de trois façons différentes, trois expériences communes et partagées sur trois plans : -

Une expérimentation par le corps lors des réunions – dansée (une heure de danse /une heure de paroles).

-

Invitation à une générale d’un spectacle à l’Opéra pour un spectacle dont je faisais partie.

-

Aller voir un spectacle ensemble, tous en tant que spectateurs, pour que chacun exprime et assume ses impressions, sa sensibilité.

Offrir les conditions matérielles de la création Il y a aussi le fait important que l’utilisation du mot résidence dans le milieu artistique renvoie à une mise à disposition d’espace et de temps mais aussi de moyens matériels qui offrent des conditions de travail pour inventer et créer. Or, une résidence Enfance, Art et Langages donne également les moyens de créer, et quand ce n’est pas en termes d’utilisation de l’école comme d’un lieu de répétition, c’est, en tous cas, en permettant de co-produire financièrement des projets de création.

La question de l’après –résidence Trois points d’interrogation après deux années de recul : Mon projet de départ consistait à lier deux écoles engagées ensemble dans la résidence. J’avais pris le parti de faire les mêmes propositions dans les deux écoles, mais je n’ai pas eu assez de recul sur leurs impacts différents surtout la première année Je me suis rendu compte assez tard qu’en fait, j’avais fait deux résidences ! Et je dirais que l’une a bien marché et l’autre moins bien. 3|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche témoignage Bérengère Valour

C’est un état de fait, mais si l’école a des problèmes ou des tensions internes, alors la résidence, avec la venue d’une personne extérieure, dévoile ces difficultés. Parfois pour les surmonter ; parfois pour les exacerber. Dans les deux écoles, nous avons inventé deux formes différentes pour ne pas passer de tout à rien après la troisième année passée ensemble : « projet parachute », « semaine des arts »… Ces projets « atterrissage » m’ont permis de voir que les apports, les changements dus à la résidence, sont plutôt visibles chez les personnes individuellement et beaucoup moins dans le fonctionnement global de l’école ou de l’équipe. Pour conclure je dirai que si le terme « résidence » se définit par un lieu de recherche dans lequel on vit un temps donné en cherchant des idées, des réponses alors l’école pourrait être considéré comme une résidence longue (…15 ans minimum !) où les équipes changent mais où la création individuelle et collective est toujours singulière et n’est jamais achevée.

Complément vidéo

Cette vidéo est un extrait d’atelier conduit par des artistes dans le cadre d'un stage Enfance, Art et Langages - Inspection d'académie du Rhône en 2010. Les participants devaient composer un court solo à partir d'une écoute musicale puis danser à plusieurs leur propre partition à l'écoute des autres. L'idée de cette expérience conduit à vivre corporellement et personnellement une situation de création artistique, tel qu'on la propose aux enfants dans le cadre des résidences. Les participantes sont des ATSEM, des enseignantes et une artiste plasticienne de différentes écoles EAL.

Extrait vidéo : 04min 26 4|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Fiche expérience

Colloque 2013 – La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif

IN SITU Programme de résidences de création d’une année scolaire entière dans les collèges publics de la Seine-Saint-Denis. En lien avec une structure culturelle, tous les champs de la création artistique contemporaine. L’artiste est accueilli pour mener un travail artistique personnel, poursuite d’un travail de création en cours, ou mise en œuvre d’un travail spécifique pour la résidence. www.seine-saint-denis.fr

© Eric Garault/Picture Tank 2011

© Eric Garault/Picture Tank 2011 Photographies réalisées durant l’année 2010/11 par Eric Garault dans le cadre de sa résidence IN SITU itinérante.

Hôtel du Département Direction de la Culture, du Patrimoine, des Sports et des Loisirs Mission « La Culture et l’Art au Collège » Esplanade Jean Moulin 93006 Bobigny Responsable de la Mission Dominique Bourzeix Tél. : 01 43 93 85 45 Courriel : dbourzeix@cg93.fr

Chargée de Mission Yasmine Di Noia Tél. 01 43 93 76 77 Courriel : ydinoia@cg93.fr

Chargée de Mission Cathie Losson Tél. : 01 43 93 85 45 Courriel : closson@cg93.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience IN SITU

Présentation des résidences d’artistes au collège Le dispositif IN SITU a été créé en 2007. Il consiste à mettre en place, chaque année, onze résidences de création dans les collèges publics de la Seine-Saint-Denis. Concrètement, après un travail de repérage croisé, les artistes sollicités par le Département sont invités en résidence dans un des collèges du département durant une année, sur l’équivalent d’une journée par semaine d’activités scolaire. Tous les champs de la création artistique contemporaine sont concernés. Les artistes sont accueillis pour mener un travail artistique personnel. Il peut s’agir de la poursuite d’un travail de création en cours ou la réalisation d’un projet spécifique, imaginé pour l’occasion. Une structure culturelle est systématiquement associée à la résidence et a la charge de concevoir, avec le résident, un parcours culturel et de le mettre en œuvre. Un local est dévolu à l’artiste au sein du collège pour lui permettre de travailler sur place et matérialiser sa présence dans les lieux.

A noter, sur l’ensemble des éditions, 72 artistes et collectifs y ont participé, 62 collèges en ont bénéficié sur 32 villes, et plus de 20 formes de création contemporaine ont été proposées sachant que, chaque année, aussi bien les artistes que les collèges sont nouveaux.

In Situ : le guide pratique / www.seine-saint-denis.fr/In-Situ-le-guide-pratique.html Ce guide pratique, recense les passages obligés, les conseils, les rappels méthodologiques pour faire des résidences la plus belle réussite possible.

LA RECHERCHE Ce dispositif s’est inspiré d’un ensemble de préconisations formulées par le laboratoire de sociologie ESCOL/ESSI (Paris 8) dans le cadre d’une recherche-action menée en 2005/2006, dont l’objet était de mettre en évidence les conditions propres à favoriser des processus d’acculturation scolaire.

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience IN SITU

En 2014, un rapport commandé par la Mission Culture et Art au Collège à Nathalie Montaya sociologue, maître de conférences à l'Université Paris Diderot s’apprête à paraitre. En 2013, un rapport d’enquête a été produit par le laboratoire d’études du CERLIS (Centre de recherche sur les liens sociaux, Université Paris-Descartes) présentant les principaux résultats d’une recherche collective qui visait à évaluer le dispositif « La Culture et l’Art au Collège » (CAC), financé et piloté par le Conseil général de la Seine-Saint-Denis. Cette étude vise à nourrir la réflexion sur les enjeux de l’éducation artistique et culturelle par une analyse proprement sociologique des représentations et des expériences des acteurs qui y sont engagés sur le terrain. Plus d’informations sur : www.seine-saint-denis.fr/La-Culture-et-l-Art-au-College.html

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience IN SITU

Partis pris du programme Ces résidences de création ont pour but d’expérimenter une rencontre entre des projets artistiques et éducatifs en milieu scolaire, dans une synthèse qui se veut exemplaire. Artistiquement, il s’agit de développer le travail en direction du public collégien en permettant le suivi, le contact et l’échange avec un artiste dans le cadre d’une démarche spécifique. La résidence permet de disposer, tant pour l'artiste que pour les collégiens, d'un temps d'exception vécu au quotidien, en et hors temps/rythmes scolaires habituels, laissant une place possible aux relations directes avec l'artiste dans le cadre de son travail. Elle vise à faciliter l'échange, l'interaction et la rencontre entre la communauté scolaire et l'artiste. Si toute expérience de résidence implique le développement d’une dimension d’accueil et la construction réciproque d’un lien, cela doit se faire dans l’acceptation et le respect du risque expérimental qui constitue l’enjeu de toute création artistique. Il s’agit aussi de créer les conditions du réinvestissement pédagogique de la situation au bénéfice des élèves, de leur développement et de leur apprentissage. La résidence, qui est intégrée dans le volet culturel du projet d’établissement, doit être le point d’appui d’un projet transdisciplinaire mené par une partie de l’équipe enseignante. C’est néanmoins toute l’équipe qui doit être mobilisée sur les enjeux de la résidence : si une ou deux classes seulement sont concernées par un travail plus approfondi en lien avec l’artiste, pour autant la résidence doit induire des effets sur l’ensemble de l’établissement. Et, au-delà du collège, sur le territoire de proximité.

ACQUIS ET MARGE DE PROGRESSION Le défi permanent d’IN SITU est de faire la preuve qu’un projet de mise en partage d’une œuvre et de son processus de création peut s’envisager dans un lien étroit avec les enseignements sans pour autant devenir un «super » support pédagogique. On peut se réjouir que nombre de professeurs, encouragés par leurs chefs d’établissements, arrivent à dépasser les logiques de programme et à construire des séquences pédagogiques à la fois pertinentes et respectueuses du projet artistique. Mais, malgré le recul de sept années et la preuve qu’une telle démarche est possible,

c’est toujours cet aspect qui inquiète les enseignants lorsqu’ils

abordent une résidence. 4|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience IN SITU

Une autre source de satisfaction est de n’avoir jamais dû céder sur la qualité intrinsèque des projets artistiques, l’institution scolaire se révélant plus apte qu’on ne l’imagine à accueillir des propositions originales voire radicales, artistiquement parlant. Enfin, il est satisfaisant de constater que d’année en année, nous avons pu conserver au dispositif une souplesse dans son organisation et dans son contenu et que, là encore, l’institution scolaire a plutôt « joué le jeu » et adapté son fonctionnement pour faciliter les choses même si, çà et là, des rigidités peuvent subsister. Sans oublier que tout cela a pu exister et se déployer grâce à un portage politique déterminé et convaincu qui, aujourd’hui encore, place l’éducation artistique et culturelle au nombre des priorités départementales.

Néanmoins, il s’agit, encore et toujours, d’œuvrer à la connaissance mutuelle de ce que sont les enjeux et les contraintes de chaque acteur de ces résidences. Les chartes, les vadémécums, les séances d’immersion dans les univers artistiques sollicités ou les approches progressives de la vie de classe n’y suffisent pas et il faut continuer à faire preuve d’imagination pour réduire les zones d’incompréhension qui peuvent vite altérer les dynamiques à l’œuvre. Autre aspect interrogé sans véritable réponse : la difficulté à positionner l’élève comme un acteur à part entière de ces résidences, et non comme un simple bénéficiaire. Et un (petit) regret: le constat que ces résidences, pour marquant qu’ait pu être leur déroulement, tombent vite dans l’oubli et ne font pas trace dans les établissements qui les ont accueillies (sauf exception à découvrir ici en zoomant en mode satellite sur le collège Delaune de Bobigny).

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience IN SITU

Pilotage Le Département est l’opérateur et l’unique financeur du dispositif (250.000 € par an sous forme de bourse de création), en partenariat avec l’Education nationale (DSDEN et Rectorat), la DRAC d’Ile de France et son réseau d’acteurs culturels. Deux chargées de mission en assurent le suivi.

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Fiche expérience

Colloque 2013 – La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif

L’Opéra à l’école Op éra de Lyo n Résidences de sept artistes danseurs, comédiens, plasticiens, musiciens durant trois années scolaires (2011-2014) au sein d’une école élémentaire et d’un collège voisins à Vénissieux (69). Expérience soumise au regard de chercheurs. developpement-culturel.opera-lyon.com

© B. Stofleth - Répétition au Studio du Ballet, juin 2013

© B. Stofleth – Représentation à l’Amphi de l’Opéra, juin 2013

Opéra de Lyon Place de la comédie 69203 Lyon cedex01 Tél : 04 69 85 54 54 Courriel : d.culturel@opera-lyon.com Pôle de développement culturel de l’Opéra Responsable Stéphanie Petiteau

Chargée de médiation culturelle Marie Evreux

Chargé de production Ghislain Lenoble


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Opéra à l’école

Présentation des résidences d’artistes au collège L’Opéra national de Lyon a implanté un projet artistique de trois ans dans le quartier des Minguettes à Vénissieux. Les enfants scolarisés à l’école Anatole France puis au collège Elsa Triolet bénéficient d’une expérience artistique de longue durée qui devrait les accompagner et les soutenir dans leur passage, parfois difficile pour certains, de l’école primaire au collège. La durée devrait aussi permettre de mesurer les impacts réels d’un tel projet sur l’ensemble de la communauté scolaire. L’Opéra à l’école est un projet artistique et culturel initié à la rentrée 2011 par l’Opéra de Lyon pour une durée de trois ans dans une école élémentaire et un collège de Vénissieux. Cet investissement culturel se concrétise, tout d’abord, par la présence de trois puis jusqu’à sept artistes en résidence. Ensuite, d’autres artistes, permanents de l’Opéra, interviennent ponctuellement. Les enfants et les jeunes inscrits dans ce projet suivent un parcours de découverte de l’Opéra de Lyon et de ses métiers. Ils participent aussi, en 2014, à la création d’un spectacle qui se produit à l’Opéra de Lyon et lors d’événements organisés à Vénissieux même.

LA RECHERCHE Une recherche « l’Opéra aux Minguettes » a été commanditée dès l’origine du projet par l’Opéra de Lyon à l’Institut Français de l’Education (IFÉ). Elle comporte deux volets : -

une approche par l’anthropologie filmée confiée à Christian Lallier.

-

une enquête « compréhensive » menée par le Centre Alain-Savary. Le Centre Alain-Savary est une composante de l’Agence Qualité Education (AQÉ) de l’IFÉ - ENS de Lyon, en tant que centre national de ressources sur les pratiques éducatives dans les établissements et territoires confrontés à d'importantes difficultés sociales et scolaires. Le Centre conduit des études dans le but d’apporter un appui aux acteurs de l'éducation visant ainsi à développer la réussite scolaire et à réduire les inégalités.

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Opéra à l’école

L’étude porte sur les points suivants : -

La connaissance des publics d’action et bénéficiaires du projet en identifiant les profils sociologiques, les habitudes et pratiques culturelles.

-

L’impact de l’action sur les participants (élèves et leurs familles, enseignants, artistes) et les cadres d’actions (projets d’écoles, réseau ECLAIR).

-

L’analyse des dynamiques de partenariats.

La parution de ses résultats de recherches est attendue pour la fin novembre 2014 avec une synthèse numérique librement accessible en ligne. Concernant le rapport complet, il pourra être consulté sur demande via le Pôle Développement Culturel de l’Opéra. L’équipe de recherche rend des rapports intermédiaires. La première année d’observation (2011-2012) a fait l’objet d’un premier rapport intermédiaire. Un deuxième rapport intermédiaire mené par le centre d’études Alain Savary est paru en 2013. Ces documents sont accessibles à la demande auprès du Pôle Développement Culturel de l’Opéra.

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Opéra à l’école

Partis pris Le projet l’Opéra à l’école s’inscrit dans la lignée d’une action territoriale concertée de long terme. Les différents partenaires approuvent les objectifs et participent à la définition des contenus en amont du projet. Ils sont consultés régulièrement, notamment via la réunion du comité de pilotage du projet. Le projet fait l’objet d’une

convention

entre

l’Opéra

de

Lyon

et

les

Services

départementaux

de l’Education Nationale du Rhône. Elle se décline dans les établissements scolaires comme suit : -

À l’école par un avenant à l’axe culturel du projet d’école.

-

Au collège par le contrat d’objectifs et un cahier des charges annuel. Les actions de l’Opéra de Lyon de développement culturel font également l’objet d’un suivi au sein du comité de pilotage institutionnel qui réunit tous les financeurs publics de l’établissement (Ville, Etat, Région, Département) ainsi que l’Education Nationale.

-

Enfin, les actions de l’Opéra de Lyon sur la ville de Vénissieux font l’objet d’une convention entre la Ville et l’Opéra, signée pour trois ans et assortie d’un plan d’actions annuelles.

Au-delà d’une

du

contenu

communication

institutionnel régulière

du

entre

le

partenariat, pôle

de

le

projet

fait

développement

l’objet culturel,

les établissements scolaires, la circonscription de Vénissieux Sud, et les autres partenaires (école de musique, services de la Ville de Vénissieux, etc).

SATISFACTIONS… Au terme de deux années de projet (septembre 2013), des points de satisfaction se dégagent : -

Les élèves acquièrent des compétences fondamentales pour apprendre (expression orale, mémoire, concentration, confiance et estime de soi, posture réflexive…) et grandir (maîtrise des émotions, engagement individuel pour

un

objectif

commun…).

Ils

manifestent

également

leur

plaisir

de partager des moments conviviaux et de se sentir devenir « experts » dans les disciplines artistiques. 4|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Opéra à l’école

-

Le projet permet aux adultes-intervenants (enseignants, artistes, opérateurs culturels) de développer de nouvelles compétences professionnelles (cointervention) et de réinterroger certaines pratiques (évaluation).

-

La relation partenariale construite entre l’équipe de recherche, l’Opéra et les enseignants, soutenue par un retour régulier sur l’avancée de l’étude, contribue à instaurer la confiance et le dialogue entre tous les acteurs.

… ET MARGE DE PROGRESSION Les questionnements actuels : -

La relation aux familles, envisagée initialement comme un axe majeur par l’équipe de l’Opéra, reste ponctuelle et parcellaire. Les informations -orales et écrites- et les invitations régulières à découvrir différentes étapes du projet (dans les établissements scolaires et à l’Opéra) n’ont pas suffi. De nouvelles modalités d’action avec les familles sont envisagées pour la suite (participation à des ateliers de pratique artistique qui leur soient dédiés en dehors de l’univers scolaire notamment).

-

La présence de chercheurs contribue à nourrir des attentes qui ne sont pas réalistes (justification « scientifique » d’une plus-value d’une action artistique à l’école par exemple), dans un contexte où l’on encourage une vision utilitaire des pratiques culturelles.

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Opéra à l’école

Pilotage Le projet est piloté par le Pôle de développement culturel de l’Opéra de Lyon, en partenariat avec l’Education nationale et la Ville de Vénissieux. Il reçoit le soutien de l’ACSé, Clairefontaine et les Fondations Total et France Télévisions.

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Fiche expérience

Colloque 2013 – La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif

Libres comme l’art Programme de résidences de création avec le milieu scolaire pour les artistes professionnels avec l’appui d’un lieu de diffusion professionnel. La résidence se déroule sur l’année scolaire dans des écoles primaires ou des écoles secondaires de l’ile de Montréal au Québec, à raison d’une dizaine de rencontres entre le ou les artiste(s) et les élèves d’une ou plusieurs classes. Son originalité consiste à amener les élèves à participer au processus de création des artistes. Il fait actuellement l’objet d’une recherche pour évaluer ses impacts sur les artistes, les élèves et les enseignants. www.artsmontreal.org/fr/programmes/libres-comme-lart

Résidence des artistes Ximena Holuigue et Geneviève Godin, en 2011-2012 dans une école primaire. Cette résidence a été appuyée par le Centre Turbine (centreturbine.org), qui développe des espaces d’expérimentation jumelant pratiques actuelles en art et en pédagogie.

Conseil des arts de Montréal Édifice Gaston-Miron 1210, rue Sherbrooke Est Montréal (Québec) H2L 1L9 514-280-2599 Canada Conseillère en cinéma et littérature Réjane Bougé rbouge.p@ville.montreal.qc.ca


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Libres comme l’art

Présentation de ce dispositif La participation au processus de création des artistes Le Conseil des arts de Montréal (CAM), la Conférence régionale des élus de Montréal (CRÉ) et le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) ont annoncé le lancement officiel de Libres comme l’art le 21 octobre 2008. Mais ce programme existait déjà à titre expérimental depuis quelques années dans des écoles primaires de Montréal en milieu défavorisé. En effet, ce programme de résidence avait été élaboré par le Programme de soutien à l’école montréalaise (PSEM) pour être inséré dans sa mesure « accès aux ressources culturels » parmi les sept qu’il développe afin de favoriser la réussite des élèves issus de milieux défavorisés et de milieux défavorisés pluriethniques. Dernièrement, le PSEM a changé de nom, pour s’appeler désormais Une école montréalaise pour tous et a été rattaché directement au MELS, tout en gardant ses principales lignes directrices.

Bien que la définition «classique» d’une résidence de création suppose que l’artiste ou l’organisme artistique dispose d’un espace adéquat pour la réalisation du travail de création d’une œuvre, il est à noter que, selon la discipline exercée par l’artiste ou les artistes, et la disponibilité des locaux à l’école où se déroule la résidence, l’espace alloué à la création peut varier d’une résidence à l’autre. La plupart des disciplines artistiques sont admissibles soit : les arts visuels, les arts médiatiques, le cinéma et la vidéo, la danse, la littérature, les métiers d'art, la musique, les nouvelles pratiques artistiques, les arts du cirque et le théâtre.

Parce que les projets Libres comme l’art doivent aboutir à une œuvre qui répond aux exigences de professionnalisme artistique1 du Conseil des arts de Montréal, le projet de résidence doit être porté par un lieu de diffusion professionnel, soit un lieu principalement voué à la diffusion d’œuvres artistiques ou littéraires et dirigé par un professionnel qui fait la sélection des artistes ou des écrivains qu’il présente.

1

Définition de « professionnalisme artistique » tel que l’entend le CAM : « On entend par artiste

professionnel, tout artiste qui, ayant acquis sa formation de base, possède une compétence reconnue par ses pairs, crée, interprète ou publie des œuvres pour diffusion dans un contexte professionnel, se voue principalement à la pratique de son art et reçoit une rémunération pour les œuvres qu'il réalise. » 2|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Libres comme l’art

Les activités mises en place dans le cadre de ce programme doivent s’adresser : 

aux élèves fréquentant les écoles primaires publiques ciblées par Une

école montréalaise pour tous ; 

aux élèves fréquentant les écoles secondaires publiques de l’île de Montréal (à l’exception des écoles ou des classes à vocation artistique).

L’originalité

du

programme

de

résidence

Libres

comme

l’art

consiste

en

l’importance accordée à la participation des élèves au processus de création ou des artiste(s) lors de la sélection des dossiers. Ces résidences d’artistes sont donc des projets significatifs en rupture avec d’autres projets artistiques dans des écoles, puisqu’elles se déroulent sur une longue durée et constituent des situations où les adultes et les enfants doivent prendre des décisions ensemble pour créer une réalisation artistique professionnelle.

Participer au processus de création Les artistes sont sélectionnés sur dossier à partir de la présentation de leur projet de création et des activités prévues avec les élèves. Les résidences de création Libres comme l’art impliquent les élèves dans un projet de plusieurs semaines avec des artistes professionnels en fonction de trois aspects : l’appréciation artistique, la rencontre avec divers aspects de la création et la participation à la création (proposer des idées, gérer une partie du projet…). Lorsque les élèves participent au processus de création en partenariat avec un artiste, ils peuvent comprendre que l’expression artistique n’implique pas seulement un désir d’expression, mais aussi un travail

de recherche des moyens à mettre en œuvre pour

dépasser

les contraintes. Ce travail consiste en une mise à l’épreuve des procédés de création. Le processus de création implique d’entrer dans un processus décisionnel. Les élèves sont donc amenés à soumettre des idées aux artistes et à exercer des choix artistiques avec eux.

Faire des choix artistiques Le travail ne se limite pas à une résolution de problème qui consisterait à surmonter des contraintes de départ. Si l’artiste vise intentionnellement à réaliser ce qu’il pressent, il n’est pas toujours en mesure de pleinement déterminer les contours de son 3|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Libres comme l’art

œuvre dès le début de son élaboration. Au cours du processus de création, les élèves sont donc amenés à faire des choix artistiques en collaboration avec les artistes. Le processus de création consiste en une mise à l’épreuve d’intentions artistiques, l’artiste expérimentant et vérifiant la pertinence de ses intentions artistiques dans l’expérience de leur matérialisation ou de leur conceptualisation. Les artistes formulent parfois les intentions mais invitent toujours les élèves à les mettre à l’épreuve. Ainsi ils demandent aux élèves de faire appel à leur sensibilité et en même temps, ils leur rappellent que la mise à l’épreuve sensible implique le regard de l’autre, donc une certaine forme d’objectivité. Par conséquent, dans ces résidences, la participation des élèves au processus de création diffère sur de nombreux points de la participation demandée aux élèves habituellement en classe, même si elle se déroule dans un contexte scolaire en respectant ses contraintes : les élèves peuvent prendre des décisions en faisant appel à leur nécessité intérieure, tout en prenant en compte les attentes d’un public potentiel.

LA RECHERCHE En 2012, le Conseil des Arts de Montréal et la Conférence régionale des élus de Montréal ont mandaté Myriam Lemonchois, professeure à l’Université de Montréal, pour réaliser une recherche sur les impacts des projets Libres comme l’art sur les élèves, les enseignants et les artistes (2013-2014). Ce projet de recherche a été élaboré suite à une recension de la littérature de recherche sur les projets de résidence d’artistes dans des écoles dans quatre pays : États-Unis, Grande-Bretagne, Australie et Canada afin de déterminer d’un côté les difficultés rencontrées par les chercheurs, de l’autre les apports pédagogiques et les apports artistiques constatés. Une dizaine de résidences en cours ou terminés ont été sélectionnées, certaines se déroulant au primaire, d’autres au secondaire, et l’ensemble essayant de couvrir l’ensemble des disciplines artistiques admissibles au programme Libres comme l’art. La méthodologie de recherche adopte une approche qualitative avec plusieurs instruments de collecte de données : des entretiens semi-directifs avec des artistes, des enseignants et des groupes d’élèves ayant participé au projet Libres comme l’art. Quelques résidences ont pu faire l’objet d’observations approfondies durant leur durée. Les résultats de la recherche doivent être présentés à l’automne 2014. 4|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Libres comme l’art

Paroles d’élèves, d’artistes ou d’enseignants Lors de la création d’un conte musical avec des élèves du premier cycle du primaire, jamais les décisions qui ont été prises par les enfants n’ont été considérées comme des choix définitifs par les artistes. Mais les élèves semblent ne pas avoir été gênés par le fait que les décisions qu’ils avaient prises n’étaient pas définitives ou qu’elles n’aient pas été incorporées dans le produit final :

S’ils le mettent là, on serait content, parce que notre choix est mis dans le spectacle, mais si jamais ils ne sont pas là, on se dirait au moins qu’on s’est laissé exprimer, même s’ils les ont pas mis, au moins on a pu dire notre personnalité, les choix qu’on a choisis. Les élèves ajoutent qu’ils se sont sentis comme des créateurs, créatrices parce qu’ils ont pu exprimer leur personnalité dans le processus de création, même si tous leurs choix n’ont pas été intégrés dans le produit final. Une élève ajoute :

Ce que j’ai préféré c’est choisir les musiques, parce que c’est des choix à nous, et pas des choix à d’autres. L’enseignant reconnaît qu’il y a un décalage entre l’attitude de l’artiste envers les élèves et la sienne : les artistes avaient au départ confiance en leurs idées,

en leurs capacités, en leur effort, en leur motivation. Lorsque les artistes ont sollicité la participation des élèves, ils affirmaient ignorance en affirmant ne pas savoir quelle musique. Le travail au sein du projet devait se faire dans un esprit égalitaire : toutes les opinions, y compris celles des élèves, pouvaient être entendues, étant donné qu’elles étaient toutes issues de personnes considérées comme compétentes dans leur créativité et leur sensibilité artistique. Les élèves pensent que les artistes n’ont pas exercé une autorité sur eux, tout comme, parfois, peut le faire leur enseignant, mais que le prof, quand il est prof,

il est sévère. Ils rappellent ainsi que dans le rôle d’explicateur de l’enseignant induit une relation pédagogique inégalitaire. Les propos des élèves rappellent ceux de Rancière (1987), lorsqu’il affirme que l’artiste a besoin de l’égalité comme

l’explicateur a besoin de l’inégalité (p. 54). La reconnaissance des élèves, dans un rapport égalitaire entre adultes et enfants, n’est pas sans rappeler le projet d’émancipation décrit par Rancière (1987, 2009).

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Libres comme l’art

Pour les artistes intervenir auprès de jeunes enfants ou d’adolescents est un défi. Une artiste rapporte son expérience en début de projet :

ça a été un défi pour moi et peut-être un peu plus complexe pour eux (les élèves). Parce que je ne suis pas arrivée en disant on va faire ça ça ça et ça va donner ça. Parce que je ne le savais pas. Je voulais vraiment cette fois-là y aller en création complète tout en ayant une matière première qui était définie : les adolescents. Un élève du secondaire dit qu’avant le projet avec les artistes, il allait à l’école par obligation sans y prendre plaisir : c’était « fais ce que t’as à faire puis tu rentres

chez toi après ». Et ce même élève constate que durant la résidence : On a créé des liens avec les artistes, mais aussi dans le projet, il y a aussi les enseignants qui sont impliqués puis ça aussi ça a fait des liens aussi. Une autre élève du secondaire : Moi je trouve que ce projet m’a appris qu’on peut

aller vers d’autres affaires, ben pas d’autres affaires, mais d’autres projets pour s’intéresser… Parce que moi, habituellement, j’étais toujours « je fais mes affaires, je fais mes affaires ». Je voulais rien savoir d’autres affaires. Mais quand tu t’aventures dans quelque chose que tu connais pas, t’apprends quelque chose de nouveau, tu vois que c’est intéressant.

Identité Montréal Nord, murale réalisée en mars 2010 par Patrick Dionne et Miki Gingras (Diasol) en collaboration avec des élèves du secondaire. Ce photomontage a été réalisé avec des caméras obscura, un Brownie 1957 pellicule couleur 2 1/4. La lentille a été retirée pour mettre un sténopé, tous les gens ont été photographiés dans des poses d'environ 8 à 12 secondes. La résidence a duré environ 7 mois et le montage environ 4 ou 5 mois. 6|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience Libres comme l’art

Pilotage Ce dispositif de résidence d’artistes a été élaboré par programme par le Conseil des Arts de Montréal (www.artsmontreal.org), la Conférence régionale des élus de Montréal (credemontreal.qc.ca ) et le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du

Sport

(MELS)

par

son

programme

Une

École

montréalaise

pour

tous

(www.ecolemontrealaise.info).

7|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Fiche expérience

Colloque 2013 – La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif

La classe artistique Collège les Escholiers de la Mosson De septembre 2011 à juillet 2014, une classe de collégiens bénéficie (de la 6ème à la 3ème) d’un vaste parcours de pratiques artistiques intégrées aux enseignements et conduites par des artistes, dans le but de favoriser la réussite scolaire des élèves. www.heraultmusiquedanse.fr

© HMD

© HMD

Depuis de nombreuses années Hérault Musique Danse œuvre pour favoriser la rencontre entre les artistes et les élèves et la pratique d’une discipline artistique. Les bilans témoignent de l’impact positif des pratiques artistiques sur le développement personnel des élèves. Mais de tels projets restent trop souvent à l’initiative d’un ou deux enseignants, et n’étant pas inscrits dans la durée et encore moins intégrés au projet pédagogique de la classe, les bénéfices potentiels sont sous exploités. Hérault Musique Danse, le Conseil général de l’Hérault et le collège les Escholiers de la Mosson (ECLAIR) ont perçu la nécessité d’aller plus loin et ont conçu une alternative pédagogique en s’appuyant sur les pratiques artistiques. Choix a été fait de travailler avec des artistes ayant une réelle activité de création et d'explorer différentes formes d'art. La participation des artistes sort de l'habituelle logique d'intervention sous forme d'atelier et doit nourrir leur propre recherche. Les mêmes élèves de « La classe artistique » bénéficient du dispositif durant quatre années.

Hérault Musique Danse Tél. : 04 67 45 71 10 Courriel : contact@heraultmusiquedanse.fr Chargée de mission Françoise Heulin

Directrice Sabine Maillard


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Présentation de la classe artistique Les pratiques artistiques sont inscrites dans le projet pédagogique de la classe et dans l’emploi du temps des élèves, chaque enseignant cédant une part de son volume horaire annuel aux pratiques artistiques. Les élèves bénéficient chaque année et pendant 4 ans d’environ 150 heures de pratique artistique réparties sous forme d’ateliers hebdomadaires de 3 heures et de trois mini-résidences de 3 ou 4 jours. Il est important de signaler que les élèves n’ont pas été sélectionnés : la composition de cette classe ne s’est pas faite sur le volontariat mais sur des critères classiques de constitution d’une classe. Les “pratiques artistiques”, sont ici considérées comme un terme générique désignant à la fois les ateliers de pratique, la rencontre avec les œuvres, le spectacle vivant, le regard du spectateur. Un partenariat a donc été élaboré avec trois structures culturelles de la ville de Montpellier (le théâtre Jean Vilar, le Centre Chorégraphique National et le domaine d’O).

o

En 2010/2011 (6ème), présence de la Cie de danse Les Gens du Quai dirigée par Anne Lopez.

o

En 2011/2012 (5ème), présence de la Cie de théâtre de l'Astrolabe, et l’écrivain,

Jean-Daniel Dupuy. o

En 2012/2013 (4ème), Présence de la musicienne saxophoniste Maguelone

Vidal et de l’écrivain Jean-Daniel Dupuy. o

En 2013/2014 (3ème), présence de la compagnie de théâtre U Structure Nouvelle

LA RECHERCHE Cette expérimentation, est accompagnée et évaluée par Alain Kerlan, philosophe de l’éducation et membre de l’EA Education Cultures et Politiques (Lyon2/ENS/IFE). Une équipe de recherche « Art et éducation » constituée par Françoise Carraud, Céline Choquet, Samia Langar, et Marie-Christine Pipérini a d’ores et déjà produit deux rapports de recherche en 2011 et un 2012.

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

L’évaluation et la recherche scientifique concernent l’impact des pratiques artistiques sur les apprentissages, le développement personnel des élèves et le lien social mais aussi la transformation des pratiques des enseignants.

La synthèse du rapport scientifique réalisée par Alain Kerlan sur ces quatre ans de classe artistique à Montpellier est accessible dès la fin octobre 2014 via le site Hérault Musique Danse.

Pour plus d’informations sur les différents documents disponibles : 

www.heraultmusiquedanse.fr/observations-et-evaluations.html

recherche.univ-lyon2.fr/ecp/ressources/axe-3

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Partis pris OBJECTIFS ET ATOUTS Quatre principes fondamentaux avaient été retenus : 

Mettre la pratique artistique au centre de la pédagogie, tout en garantissant l’intégralité des enseignements obligatoires. Par pratique artistique on entend aussi bien l’expérimentation physique en atelier (du côté de la création) que la découverte culturelle et l’histoire des arts (du côté de la réception).

Ne pas opérer de sélection dans le recrutement des élèves de la classe. La classe artistique de 6e est constituée de la même manière que les autres classes, sans désir de spécialisation artistique.

S’appuyer sur le travail d’équipe entre les enseignants des différentes disciplines et les artistes représentant la diversité des champs artistiques.

Respecter le travail de l’artiste en reconnaissant la contribution éducative de l’art sans l’instrumentaliser à des fins pédagogiques.

Les effets positifs constatés en classe de 6e s’affirment au fil des ans, aussi bien au niveau collectif qu’individuel car les pratiques artistiques créent une alchimie positive dans la classe. Les enseignants et l’équipe de recherche ont déjà noté des progrès en matière de relation aux autres, d’estime de soi, de confiance en soi et d’ouverture au monde par la fréquentation régulière des œuvres et des artistes qui stimule une curiosité intellectuelle qui fait souvent défaut aux élèves. L’acquisition est aussi remarquable en termes d’autonomie, avec la prise en charge par les élèves de leur vie d’élève dans la classe et en dehors de la classe, et en termes d’écoute des consignes qui favorise une plus grande rapidité dans la mise au travail. Concernant les résultats scolaires ce n’est pas spectaculaire, mais contrairement aux autres classes, les élèves perturbateurs n’arrivent pas à tirer la classe vers le bas et les bons élèves s’autorisent à être bons ; cette classe obtient des résultats satisfaisants au sein de cet établissement mais ces derniers restent faibles au regard des moyennes nationales (il faut toutefois rappeler que le collège est classé en zone d’éducation prioritaire). 4|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

La méthode de travail, proposée et coordonnée par Hérault Musique Danse est construite

sous

forme

de

réunions

de

régulation

et

de

modules

de

Formation/Action/Recherche. Elle adopte ainsi un processus d’observation, d’analyse et de régulation interne qui permet d’identifier, de noter et de signifier les effets sur les élèves et sur l’équipe pédagogique ce qui permet aussi d’éclairer le dispositif, de le reconsidérer et de re-questionner les objectifs, de façon à pouvoir décider avec justesse de la suite des événements. Cette méthode de travail est inédite en collège et semble répondre au désir des enseignants de travailler “autrement” et “ensemble” et a de ce fait un effet dynamisant sur l’ensemble de l’équipe enseignante et éducative. La

classe

artistique

est

aussi

repérée

comme

classe

pilote

au

sein

de

l’établissement. L’élaboration du projet pédagogique a amené l’équipe enseignante et éducative à s’interroger sur la structuration du temps de l’élève : un nouvel emploi du temps, mis en place dès la rentrée 2010 pour les élèves de la classe artistique, propose des séances d’1h30 (au lieu des 55 minutes ordinaires) pour permettre une installation plus efficiente des élèves dans l’activité scolaire. Ce nouvel emploi du temps qui s’est révélé très positif à la fois pour les élèves et pour les enseignants a été adopté par tout le collège à la rentrée 2011.

MARGE DE PROGRESSION Lors de la présentation de son rapport scientifique de l’année de 4e, Alain Kerlan souligne deux éléments dominants : 

Tout d’abord, il constate la difficulté pour l’enseignant de s’inscrire réellement dans l’atelier ; Il s’interroge particulièrement sur la place, et les rôles que l’artiste réserve ou assigne aux enseignants et relève aussi la difficulté pour ces derniers d’être, lors d’un atelier, à la fois participant, garant de l’ordre scolaire, pédagogue et observateur.

D’autre part Alain Kerlan relève une anxiété très présente chez l’élève malgré l’impact positif de la pratique artistique concernant la découverte de soi, une aisance relationnelle entre eux et avec les adultes et la capacité à se projeter dans l’avenir. Ce caractère anxiogène serait donc peut être à interroger du côté du collège et de la scolarité « ordinaire », mais il précise aussi que la classe de 4e est, pour tout élève, une classe charnière, où les problématiques de l’adolescence sont exacerbées, même en dehors de la question des pratiques artistiques. 5|Page

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Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Pilotage Le projet est coordonné par l’association Hérault Musique Danse. HMD est conventionné par le Conseil général de l'Hérault et la Direction Régionale des Affaires Culturelles du Languedoc-Roussillon. Le projet reçoit le soutien de la Fondation de France, la Caisse des dépôts direction régionale du Languedoc-Roussillon, la Fondation BNP Paribas, la Maïf, La Fondation d'entreprise La Mondiale, l'ACSE ainsi que la Ville et l'Agglomération de Montpellier dans le cadre du CUCS. La Fondation de France a récompensé la classe artistique par un “Laurier national” en 2012.

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Fiche expérience

Colloque 2013 – La résidence d’artiste en milieux scolaire et éducatif

MUS-E ® à l’école Samain Trulain - Lille L'école d'application Samain Trulin à Lille expérimente la mise en place d'ateliers MUS-E® pour l'ensemble de ses dix classes et sur une période de cinq ans. Le principe du programme MUS-E® repose sur l'intervention hebdomadaire d'un ou deux artiste(s) autour d'un projet de pratiques artistiques, spécifique à chaque classe. www.mus-e.fr

© Marc Helleboid

© Danièle Bertotto

Tél. : (+33) (0) 3 88 56 99 75 Courriel : info@mus-e.fr

Directrice artistique Isabelle Marx


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Présentation du dispositif MUS-E® en général Le programme MUS-E® introduit les arts à l'école primaire en proposant une pratique artistique régulière à un public d'enfants de 6 à 11 ans d'écoles dites « sensibles ». Le projet a la vocation de participer à la prévention de la violence, du racisme et de l'exclusion sociale, à travers l'ouverture aux différentes cultures et l'éveil du potentiel créatif de chacun. Les ateliers sont animés par des artistes professionnels, en temps scolaire et en présence des enseignants. Ils durent une année scolaire, à raison d'une intervention d'1h30 par semaine, soit 45 heures par an. Le projet est conçu en amont avec la direction de l’école et l’enseignant, présent lors des séances; et peut regrouper plusieurs disciplines. Dans l’idéal, les ateliers s’inscrivent sur plusieurs années scolaires consécutives avec les mêmes enfants, comme c'est le cas à l'école d'application Samain Trulin à Lille. MUS-E® défend : o

la notion de démarche artistique où l'enfant expérimente, se trompe, s'investit dans un parcours personnel et collectif ;

o

la pratique artistique : ancré dans l’expérience, les ateliers stimulent le plaisir de la découverte, la curiosité, l’intérêt et l’accès à d’autres savoirs, savoir-être et savoir-faire ;

o

l'art comme outil de communication pour accéder à des cultures différentes pour promouvoir l’ouverture, le lien social, l’apprentissage et le respect des différences.

En œuvre dans 11 pays, le programme MUS-E® s’adresse aujourd’hui à environ 55.000 enfants de 550 écoles primaires, grâce à l’appui de l’Union Européenne, de nombreux gouvernements nationaux et régionaux et de partenaires privés. Près de 1.000 artistes sont impliqués dans ce programme. Le projet MUS-E® « Music at School » fut initié en 1993 par Yehudi Menuhin. Il s'inspire pour ce faire, du concept d'éducation musicale du compositeur, ethnomusicologue et pédagogue hongrois Zoltán Kodály, qui pensait que la musique devait faire partie du quotidien et qu'elle devait être accessible à tous. Yehudi Menuhin élargit le concept de Kodály en l'adaptant à la réalité actuelle de la multiculturalité. L'association Courant d'Art coordonne le programme MUS-E® depuis 2006 en France. 2|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


Colloque 2013 – La résidence en milieux scolaire et éducatif Fiche expérience CDWEJ

Présentation de l’expérience MUS-E® à Lille Entre 2009 et 2011, l’école Samain Trulin bénéficie de 2, puis 3 projets MUS-E® pour l'établissement. En 2011, l’équipe enseignante demande l'étendue du programme à l'ensemble de ses dix classes en faisant le pari que l’ouverture culturelle combinée avec le dire permettra d'améliorer le lire et l’écrire. Ainsi depuis trois ans, ce projet concerne dix classes soit les 203 enfants de l’école, du CP au CM2, les dix enseignants et onzeq artistes s’y rattachant. La directrice de l’école et Courant d'Art assurent la coordination d’ensemble, suivi également par l’inspecteur et le conseiller pédagogique de la circonscription. Chaque classe est engagée dans un projet bi-disciplinaire et spécifique, en lien avec son projet de classe et celui de l'école. Cela permet d’articuler des apprentissages à visée scolaire et esthétique. Les enseignants choisissent parmi les disciplines suivantes : danse, théâtre-conte, arts plastiques/visuels ou cirque. Cette année, onze artistes interviennent tout au long de l'année dans l'école, à raison d'un ou deux artistes par classe (les artistes peuvent intervenir sur deux projets différents). Il ne s’agit pas d’une résidence d’artiste, au sens strict du terme mais les artistes sont installés durablement dans l'école, dans et hors les salles de classes selon l’évolution d’une œuvre en marche.

Les ateliers, centrés autour de la pratique, se caractérisent par une forte et continuelle sollicitation des enfants : le projet artistique évolue au cours de l'année dans une démarche participative des enfants selon un échange constant entre eux, l'artiste et l'instituteur. Le projet se transforme avec les enfants, grâce à leurs apports, leurs idées, ce qui en fait d'une part toute la richesse et ce qui leur permet d'autre part d'y adhérer totalement en se l'appropriant. Ils sont acteurs de leur création, utilisant les outils amenés par l'artiste, accompagnés par leur instituteur, le tout créant une dynamique de confiance, de responsabilisation et de créativité. Les ateliers sont complétés par, au moins, une visite culturelle (exposition, concert, représentation théâtrale, ..). Des temps de performances et d’expositions devant les parents sont prévus afin de présenter des résultats ou les étapes du projet traversées par les enfants, durant et à l'issu de l'année scolaire. 3|Page Enfance Art et Langages | Les Subsistances à Lyon 04 78 38 62 10 |enfance-art-langages@mairie-lyon.fr


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LA RECHERCHE Une évaluation a été commandée auprès d’universitaires sur la période 2011-2013, soit les deux premières années de la mise en place de ce projet de cinq ans, à partir d’une recherche de terrain (Rapport sur des « effets de l’éducation artistique à l’école », Baeza C., Le Floch M-C., Loeffel L., dec 2013). Ce rapport est disponible sur le site de Mus-e, dans la rubrique Galerie/Documents à télécharger et également ici.

En prenant appui sur le cadre général de réflexion du réseau MUS-E® et sur la philosophie de l’évaluation propre au programme MUS-E® France, la recherche avait pour objectif d’évaluer les effets des pratiques d’éducation artistique sur les apprentissages, la qualité du vivre ensemble dans la classe et plus largement dans l’école (comportement, attitude des élèves) ainsi que le développement personnel de chaque enfant. L’objectif était plus précisément d’articuler ces dimensions de la vie des élèves à partir d’une hypothèse : les pratiques d’éducation artistique réunissent les conditions d’un « apprendre autrement » générateur d’un mieux-être des élèves. Le propre des dispositifs et des situations d’éducation artistique est en effet de faire bouger les frontières du « scolaire » ainsi que les catégories de l’éducation et de l’enseignement : les instruments de ces déplacements en sont les artistes eux-mêmes, ce qu’ils apportent et ce qu’ils disent de leur engagement dans ces actions éducatives au sein des écoles ; les enseignants et leurs motivations à s’engager dans ce type de projet, les croyances qui les inspirent ; l’art en tant que tel comme objet non scolaire ; les dispositifs en eux-mêmes et les situations qui tendent à bousculer les normes traditionnelles de la forme scolaire, en particulier l’espace et le temps, les modalités du travail scolaire, la place accordée à la créativité, à la sensibilité et au corps des enfants. Au fond l’hypothèse était que dans le bouleversement de « l’ordinaire scolaire » se trouveraient les conditions d’un rapport de l’enfant à lui-même favorisant une meilleure estime de soi, une meilleure appréciation de ses compétences, une capacité d’action plus importante sur lui-même et sur son environnement, une plus grande autonomie.

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Partis pris du dispositif Des ateliers de pratique artistique L’art est abordé à travers une pratique régulière. Ainsi les artistes MUS-E® orientent leur méthodologie vers l'expérience directe : il s'agit non pas d'apprendre de l'art, mais par l'art. L'art est au service du participant en activant ses ressources, tant comme individu que comme être social. La priorité doit être donnée à un investissement dans les domaines du rythme, l’espace, la perception sensorielle, le jeu et l’imaginaire. Apprendre, c’est faire des expériences concrètes. Entrer dans un processus de création L’artiste doit rendre accessible le processus de création, se servir de sa méthode et de son expérience, et permettre aux enfants de développer leur potentiel de créativité. Il met sa vision au service des enfants pour leur donner d’autres perspectives pour s’exprimer, entrer dans un processus de création personnelle et collective. Un rôle-clé dans l’éducation de la multiculturalité Les ateliers constituent un excellent moyen d'aborder des cultures différentes et ainsi promouvoir l’ouverture, le lien social et l’apprentissage et le respect des différences. Une collaboration étroite enseignant-artiste L’artiste crée toutes les conditions pour que les enseignants puissent collaborer étroitement au déroulement du projet, dans le respect du projet global de l'école. L’enseignant est toujours présent lors des interventions. Il participe aux séances selon une dynamique propre à chaque binôme artiste-enseignant. Pas d'obligation de productions ! Mettant les enfants au centre des ateliers, pleinement sollicités sans être contraints, le programme MUS-E n'exige pas la mise en place d'un « rendu final »! Ainsi enseignant et artiste conviennent avec les enfants de la possibilité/envie/pertinence d'une restitution et de sa forme (étape de travail, blog, exposition, représentation...).

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MARGE DE PROGRESSION 1. Sur le long terme : 1 an voire plus MUS-E® a la spécificité d'inscrire son action dans la régularité et la durée : 30 séances par an réparties au fil de l’année, sur une période d'un an minimum avec les mêmes élèves ; afin que chaque enfant puisse bénéficier de 45 heures de pratique artistique par an. Il s'agit de passer de la simple sensibilisation à une pratique régulière source d'apprentissages multiples y compris d'apprentissages fondamentaux. À ce jour, ce point semble aller à l'encontre de la structuration des programmes scolaires.

2. Une forme scolaire en mouvement Si les ateliers reposent sur la dynamique du binôme enseignant-artiste, celle-ci n'est pas aussi évidente à mettre en place et à vivre. Des concertations régulières entre les artistes et les enseignants sont nécessaires pour clarifier les attentes, le fonctionnement du partenariat, chercher des solutions aux problèmes soulevés par certains enfants ou par le groupe, négocier les limites de territoire de l'artiste et de l’enseignant. En cas de besoin, Courant d'Art accompagnent les artistes et enseignants dans ce processus délicat.

3. La diversification et pérennisation des partenariats Les ateliers (intervention, matériel, transport, sortie) sont entièrement financés par Courant d'Art. La recherche de financements constitue la principale mission et difficulté de Courant d'Art. À ce jour, à la vue des spécificités de chaque territoire et de nos moyens pour la coordination, il nous est difficile d'étendre le programme à davantage de villes (malgré les demandes). D'où une réflexion sur une nouvelle structuration à l'image d'autre pays européens, telle que l'Italie ou l'Espagne.

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Pilotage Depuis 2006, et en qualité de coordinateur national, l'association Courant d'Art a la mission de construire et développer un réseau sur le territoire français, en partenariat avec d'autres associations implantées dans différentes villes qui œuvrent aussi en faveur de l'éducation artistique. Les premiers ateliers MUS-E® furent initiés à Strasbourg dans le cadre de la politique de la Ville (à ce jour 85 % de financements publics). Grâce aux dons privés, le réseau MUS-E® France s'est étendu en 2008, 2009 et 2010 aux villes de Paris, Lyon et Nancy. La Fondation de l'Orangerie soutient également le programme MUS-E depuis 2009 et finance désormais 12 classes MUS-E ® à Lille. Depuis son implantation en France, le programme MUS-E® a touché 4.350 enfants dans cinq grandes villes françaises grâce à l’implication de 83 artistes.

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