Affaire Nabil Baraketi (Tunisie): rapport d’observation 3e audience

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RAPPORT D’OBSERVATION Audience N° 3 - AFFAIRE Nabil BARAKATI CHAMBRE CRIMINELLE SPÉCIALISÉE, LE KEF 14.11.18

Le 14 novembre 2018 s’est tenue la troisième audience du dossier de la victime Nabil BARAKATI devant la chambre criminelle spécialisée du Kef. Le dossier a été transmis à la chambre par l’Instance Vérité Dignité (IVD) le 18 avril 2018. Un représentant d’Avocats Sans Frontières (ASF) était présent en qualité d’observateur. Il a pu accéder à la salle d’audience facilement.

Lieu : Tribunal de première instance du Kef Date: 14 novembre 2018; Heure: 10h25 - 11h00 Accusés et qualité au moment des faits:  Fatteh Ben Ammar AMMAR (décédé), chef du poste de police de Gaafour  Farhat Ben Aziz ALBOUCHI, agent de sécurité au poste de police de Gaafour  Arbi Ben Béchir HAMDI, agent de sécurité au poste de police de Gaafour  Abderrahmane OUERGHUI.  Abdessatar SALHI.  Noureddine NAFTI.  Mohamed Salah MEJRI.  Hamadi SELMI.  Ali Ben DOUA.  Zine El Abidine BEN ALI en sa qualité de ministre de l’intérieur  Habib BOURGUIBA (décédé) en sa qualité de chef d’Etat Parties civiles:      

Les ayants droits de la victime N. BARAKATI. L’organisation mondiale contre la torture (OMCT). Ligue tunisienne pour la protection des droits de l’homme (LTDH). Le parti ouvrier tunisien. Le forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES). L’organisation contre la torture en Tunisie (OCTT).

Résumé des faits: A la suite de la distribution de tracts intitulés « le conflit entre les destouriens et les frères musulmans n’intéresse pas le peuple » par le Parti ouvrier communiste tunisien (POCT), le régime en place à l’époque a procédé à une grande campagne d’arrestations ciblant en particulier les militants de ce parti. Le 28 avril 1987, les forces de l’ordre ont arrêté Chadli JOUINI qui, sous la torture, aurait confessé que Nabil BARAKATI lui avait donné l’ordre de distribuer les tracts. La victime, dirigeante au sein du POCT, a été arrêtée le 28 avril 1987 par les forces de l’ordre opérationnelles au poste de police de Gaafour. Il semble que cette arrestation n’avait été motivée par aucune autorisation légale, que le procureur de la République n’en avait pas été informé et que la mise en garde à vue du dirigeant entre le 28 avril et le 8 mai 1987 ne figurait pas dans les registres de garde à vue. Durant toute cette période d’arrestation, la victime aurait subi de multiples actes de torture. N. BARAKATI a été retrouvé mort des suites d’une balle dans la tête le 9 mai gisant complètement nu sur le sol à côté d’une conduite d’eau localisée à 300 mètres du poste de police de Gaafour. Un révolver appartenant à l’agent Nejib OUESLATI a été retrouvé à côté de son cadavre, dans le but probable de simuler la fuite et le suicide de la victime.


Charges : Violations graves des droits de l’homme, crimes contre l’humanité et notamment les crimes suivants :    

Homicide volontaire (art. 204 C.P.). Torture accompagnée de mort (art. 101 bis, 101- 2° C.P.). Disparition forcée (art. 1, 3 et 6 de la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées). Arrestation, détention et séquestre sans autorisation légale d’une personne, accompagnés de menaces, violences et de mort (art. 250, 251 C.P.).

Atmosphère générale : Cette troisième audience s’est déroulée dans des conditions semblables à celles de la deuxième. La présidente a en outre interagi avec l’un des avocats des parties civiles, lequel a souligné l’absence de formalités précises quant à l’autorisation requise pour l’enregistrement sonore et la prise de photos en vertu de l’article 62 du décret-loi n° 2011-115 du 02/11/2011, et qu’une simple autorisation même verbale pouvant être donnée avant le début de l’audience. Déroulé de l’audience La présidente a commencé par appeler les avocats, les parties civiles et les témoins à la barre. Les témoins présents étaient T. Barakati et C. Jouini. Après avoir appelé les accusés dont seulement F. Albouchi était présent, elle a noté les demandes préparatoires des avocats des parties civiles, l’un d’eux ayant fourni les noms de nouveaux témoins qu’il désirait auditionner. Dans un second temps, la présidente a fait remarquer que l’un des membres du jury légalement désigné par le Conseil Supérieur de la Magistrature, n’avait pas pu siéger à l’audience en raison d’un empêchement. Elle a rappelé que, conformément à l’article 8 de la loi relative à la justice transitionnelle et la loi n° 2013-53 du 24/12/2013, il n’était donc pas loisible de statuer sur le fond et d’auditionner les témoins et les inculpés. La Cour a décidé de ce fait de reporter l’affaire telle qu'elle était à une audience ultérieure, fixée pour le 6 février 2019.


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