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JUI | AOU | SEP 2009

numéro

“Chaque langue voit le monde d'une manière différente”. F. Fellini

Quentin,

Mann,

Audiard,

Haneke et tout le reste...

Elles@Centrepompidou

Doolittle

Metropolitain

Le Balzac


IL EST TEMPS DE FAIRE UNE PAUSE


ÉLITES,TORCHONS ET SANS-PAPIERS Avoir l’idée de faire renaître un fanzine ultra confidentiel n’est pas si compliqué. Lancer un nouveau magazine cinéma implique des difficultés bien plus concrètes. On pourrait même avouer que ce genre d’élan tient du suicide. D’autres s’y sont brûlé les ailes. Et les suivants sont attendus au tournant. Ceci étant dit, le pari mérite autant d’être tenu qu’il serait bête de garder nos dés brûlants dans le creux de la main. Car, ce que l’on ne mentionne pas et qui nous frappe pourtant chaque jour, c’est que l’état actuel de la presse cinéma dévoile un paysage quelque peu triste et en berne. Sous ces dehors colorisés, glacés et (presque) sereins, la critique cinéma semble atteinte d’une maladie qui, à l’inverse de la fièvre, tient davantage du vieillissement et de la place confortable qu’elle occupe. Le constat semble encore et toujours le même. Les magazines populaires couchent avec la frilosité pour ne pas froisser annonceurs et publicitaires. Les autres, élitistes et quasi-autistes, restent incapables de se remettre en question et dépasser les grilles d’une obsolète politique des auteurs. Bref, on s’ennuie ferme. D’ailleurs, nos regards se portent plutôt vers certains blogueurs ou jeunes sites Web qui n’ont pas à s’engager dans des compromis ridicules ni à brosser la rétine de leur lectorat (défait, aveugle ?) en poussant l’abstraction littéraire à son firmament. L’outil Internet comporte lui aussi ses travers (voir la foire à l’ego qui se joue à travers les longues files de commentaires critiques). Mais le Web reste un formidable portail à travers lequel chacun a la possibilité de s’exprimer et, s’il le souhaite, inventer. Car le problème réside ici. Non seulement économique, la crise frappe de plein fouet la presse. Le tsunami internet a quelque peu ravagé la quiétude de l’île où la presse s’étendait. Et le plus révoltant tient à ce que cette dernière n’ait rien fait pour se remettre en question et repenser ses bases. Le bateau coule, sauve qui peut la presse. Survivra qui pourra… Or ce constat, il reste aussi désagréable à lire qu’à écrire. La résignation est belle et bien révoltante. Et les temps qui courent demeurent un terreau fertile pour toute pensée qui émerge un tant soit peu de cette folle Babel. Alors n’oubliez pas que ce que vous tenez entre les mains n’est pas né dans les mêmes conditions que le journal gratuit que l’on vous tend fermement dans le métro. Ni même le magazine que vous achetez dans les kiosques peut-être par habitude. Derrière sa gratuité, un temps précieux a été dépensé. Et le noir et blanc, s’il permet des contrastes d’intensité, tient surtout à une économie de budget. D’un budget subventionné par une université (ici Paris 7) sur le dos de laquelle le pouvoir en place cherche aussi à réaliser de vastes économies. Romain Genissel


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LES BRÈVES DU MOIS ~ NÉKRO ~ VERSUS

Les brèves du mois

Des reprises, des reprises, des reprises, quelques navets et deux ou trois bonnes surprises...

David Cronenberg envisagerait de reprendre « La Mouche ». Personnellement, j’ai une délicieuse fondue de mardi dernier au frigo qui n’attend que d’être réchauffée. Les frères Coen voient tout en double ! Pour l’instant occupés avec Jeff Bridges sur « True Grit », un remake du western « 100 dollars pour un shérif », ils ont d’ores et déjà annoncé deux idées de projets. L’un s’attaquerait à la suite de « Barton Fink », l’autre se baserait sur la vie de Jésus, un des personnages de « The Big Lebowski ». (Vous y avez cru, hein ? Si, vous y avez cru.) Quoi qu’il en soit, il est déjà décidé que c’est leur fidèle acteur John Turturro qui interprétera le personnage principal. Le tournage de l’adaptation autobiographique de Pierre Perret a lieu pour l’instant dans le Midi-Pyrénées. Un aller-retour est offert à celui qui ira arrêter cette pathétique entreprise. C’est Cécile de France, de Belgique, qu’a choisi Clint Eastwood pour jouer la femme d’un couple français victime du Tsunami, dans son prochain film ! Grand écart sportif pour Anton Corbjin. Après son biopic « Control », il vient de claper le tournage de « The American », récit d’un tueur à gages que va interpréter un acteur situé à des kilomètres de Ian Curtis et sa bande, le caféinomane Georges Clooney. Attention ça va faire mal : Neve Campbell sera de nouveau Sydney Prescott dans « Scream 4 ». On vous avait prévenu. Et c’est pas fini. Allez, on arrache le pansement d’une traite : Robert Rodriguez est promis à « Spy Kids 4 » ; « L’Agence Tout Risque » sort au cinéma le 30 juin 2010. Rambo revient dans, je vous le donne en mille, « Rambo 5 » : ‘a y est ! Vous pouvez respirer. Catherine Deneuve sera la « Potiche » du prochain Ozon. À ses côtés, d’autres bibelots encombrants comme Gérard Depardieu et Fabrice Luchini. Vous avez toujours voulu connaître la vie des personnages principaux de « La Nuit des Morts-Vivants », avouez. Ce sera bientôt chose faite car le cinéaste Zebediah de Soto en fait le sujet d’un film d’animation en 3D qu’il réalisera. Également prévus en 3D : « Saw 7 », « The Ring 3 » et « Les trois mousquetaires », projet du réalisateur Paul W. S. Anderson (« Resident Evil »). Après Tarantino, Gondry ! Christoph Waltz a l’immense et mérité privilège de se coltiner les réalisateurs les plus loufoques de cette décennie. Il reprend en cours de route le rôle de Nicolas Cage, qui a inopinément quitté le navire, face au « Frelon Vert », actuellement en tournage.

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Park Chan Wook reprend « Le Couperet » de Costa-Gavras et on se dit que s’il le reprend, c’est qu’il a l’intention de faire mieux… Il est dit que Martin Scorsese veut faire un film sur la vie très mouvementée de Frank Sinatra. Leonardo est pressenti pour endosser le rôle du crooner. Oui, mais non. venom project

Paul Wernick, le co-scénariste de Zombieland, a déclaré que le studio Sony Pictures détenait actuellement deux versions du scénario dédié à l’ennemi juré de Spiderman. S’agissant d’un spin-off, on se demande encore si la route de ce film croisera celle de Spiderman 3. Pourvu que ce ne soit pas trop merdique. 3D-2D Peter Jackson a annoncé vouloir réaliser des versions 3D de sa trilogie du « Seigneur des Anneaux ». Dans le même mouvement, le producteur de James Cameron, Jon Landeau, confirme que Terminator 2 a déjà entamé sa lente phase de « 3Déïsation ». ron lovecraft et h.p howard

Le réalisateur à la filmographie éclectique a confirmé sa ferme intention d’adapter le comic-book The Strange Adventures of H.P. Lovecraft, un domaine dans lequel il n’a pas encore posé sa patte et au sujet duquel la sensation de challenge incontestable le motive plus que toute autre chose.

NÉKRO ~ Ghost a disparu ~ « Oooh myyy love, my Daaarling, I’ve hungered for your touch… » Le son est mauvais, l’image lessivée. La cassette VHS succombe sous les assauts répétés de la fameuse scène de la poterie que je me passe en boucle. J’ai 10 ans, ce sont les années 90 et Swayze crève l’écran. Subtil mélange de gentil garçon et de bête sexuelle, son déhanché unique et ses lèvres charnues ont été la genèse des premiers émois de toute une génération. Sa mort prématurée, ce 14 septembre 2009, le fige à jamais dans le rôle vintage du nice boy made in USA. Bien qu’il ait tourné jusqu’à la fin, sa carrière ne lui aura pas offert de retour sur le devant de la scène. Compilant les seconds rôles et les films de série B, Patrick ne se débarrasse pas de son image d’acteur/danseur de comédie romantique. Ses nécrologies soulignent son amour sans faille pour son épouse, Lisa Niemi, à qui il était marié depuis 34 ans et sa lutte exemplaire contre la maladie. À peine entachée par l’alcool, sa vie publique avait les accents du rêve américain. Avec son décès, c’est une partie des années bénies du début de l’adolescence qui claque la porte. C’est le moment de réinstaurer les soirées pyjama pour frissonner d’un plaisir mutin sur les langoureuses scènes de danse du beau Patrick. Et pour une fois, la VF est de mise !

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Dessins Valentin Szejnman

VERSUS

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Robert De Niro 17 / 08 / 1943 Little Italy, New York Brun, petit et épileptique. Souvent sec, une fois obèse, aujourd’hui ventru Acteur, Réalisateur (Il était une fois dans le Bronx et RaisonS d’État), Producteur Actor’s Studio Marlon Brando, la rumeur de N.Y.C, la « c » (la beuh ça fait tousser…) Daniel Day-Lewis, Joaquin Phoenix mais pas Di Carpaccio

Al Pacino DATE DE NAISSANCE NATIONALITÉ PHYSIQUE PROFESSION FORMATION INFLUENCES HÉRITIERS

comme Marilyn Monroe, un grain de beauté sur la joue gauche

SIGNES DISTINCTIFS

Taxi Driver, Voyage au Bout de l’Enfer, Raging Bull, Il était une fois en Amérique, Le Parrain 2, La Valse des Pantins, Le dernier Nabab, Mean Streets, Les Affranchis, 1900, Brazil, Casino, Les Incorruptbles, Heat, Jackie Brown…

MEILLEURS FILMS / RÔLES

Mafia Blues 2, la rechute (pas mieux comme titre)

PIRES FILMS / RÔLES

Johnny Boy, Travis Bickle, Michael, Vito Corleone, Jake La Motta, HenrY Noddles, Rupert Pupkin, Al Capone… Marty Scorsese. Malgré que ses personnages ne soient pas très amicaux, tout le monde veut être son ami le Viêt-Nam, les femmes, la folie, le machisme italien, les pubs Mastercard. « You’re talking to me ? You’re fuck my wife ? », « Je me rends compte à quel point elle est pareille aux autres, froide et distante. Y a beaucoup de gens comme ça, les femmes surtout, On dirait un syndicat », « Regarde moi... Jamais balancer les copains, et toujours la mettre en veilleuse ! » Harvey Keitel, Al Pacino, Christopher Walken, Jerry Lewis, Samuel L. Jackson, Marlon Brando, Liza Minelli, James Woods, John Cazale, Meryl Streep, Joe Pesci, Sean Connery… Un accessoire qui lui colle à la botte et aux poings. Et dans ses deux plus grands rôles, il porte même son arme sur la tempe (chargée ou pas).

PERSONNAGES

AMIS ENNEMIS

RÉPLIQUES CULTES

PARTENAIRES

ARME(S)

25 / 04 / 1940 New-yorkais d’abord, américain ensuite granitique surdoué Actor’s studio Dieu on l’attend un regard qui cloue sur place ; un visage qui a vu passer plusieurs ères de la Terre ; c’est Al la trilogie du Parrain, Serpico, Scarface, Heat, L’impasse, Le temps d’un week-end , Révélations , L’Enfer du Dimanche , S1mOne…

euuuh…Amours troubles… ? Michael Corleone, Serpico, Tony Montana; Vincent Hanna, Carlito Brigante... Manny Ribera ; Dr. Jeffrey Wigand; David Kleinfeld ; Neil Mc Cauley Sollozo, dit « Le Turc » ; Alejandro Sosa ; David Kleinfeld ; Neil Mc Cauley « Mon père lui a dit que sa signature ou sa cervelle serait sur le contrat », « Sois proche de tes amis, et encore plus proche de tes ennemis », « J’ai les mains faites pour l’or et elles sont dans la merde ! »

Marlon Brando, Robert De Niro, Andy Garcia, Sean Penn, Michelle Pfeiffer, Johnny Depp, Keanu Reeves, Val Kilmer, Jamie Foxx, Colin Farrell, Georges Clooney, Brad Pitt… on ne s’ennuie pas quand il ne dit rien (trouvez m’en 5 autres comme ça !) ; il est connecté à un variateur d’intensité sans bornes, modulable à volonté

Comme tout le monde, il vieillit.

FAIBLESSE(S)

comme tout le monde, doit payer ses impôts. Le dernier qui le lui a dit dort avec les poissons.

Oscar du meilleur acteur (Raging Bull) et Oscar du meilleur second Rôle (Le Parrain 2) et plein d’autres dont il ne sait que faire…

RÉCOMPENSES

Oscar du meilleur acteur pour Le Temps d’un week-end ; a tellement d’autres récompenses qu’il joue au ball-trap avec…

Produire, réaliser, tourner sous la direction de Marty et utiliser sa Mastercard sans sourciller.

AVENIR

tourner avec Andrew « Gattaca » Niccol (logique, il est au sommet de l’évolution…)

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INGLOURIOUS BASTERDS Réalisé par Quentin TARANTINO Avec Brad Pitt, Mélanie Laurent, Christoph Waltz... 2h33 / Sortie le 19 Août Par Sophie Boyens

Il y a toujours un peu de gêne après une partie de jambes en l’air réussie. Peutêtre parce que la jouissance est grimaçante, peut-être parce qu’on n’a pas très bien compris tout ce qu’il se passait ou parce que certaines paroles osées nous reviennent en mémoire. Et puis, peu importe ! Parce que c’était BON. C’est exactement la même impression que vous laisse Inglourious Basterds. Et pour les mêmes raisons.

attendez la crème !

La jouissance est bien au rendez-vous. Il suffit de se laisser prendre… Elle porte le masque vulgaire de la vengeance. Jubiler au bruit d’un scalp nazi qui s’arrache, d’un fond de Morricone dans une forêt humide, d’un rire sardonique sur grand écran, d’une marionnette hitlérienne secouée sous les coups de mitraillette, c’est primaire - peutêtre - mais ça marche. Ça fait du bien par où ça passe. Et puis fallait-il encore les trouver, ces « grossièretés », ces images, véritables symboles modernes assemblés avec une maestria dont seul Tarantino a la formule. Trop subtils pour les neurones, ils vous attrapent directement aux tripes. Inglorious Basterds, comme tous les autres films de Tarantino, a ce pouvoir de réveiller en vous des passions ancestrales, voire bestiales, et de tranquillement tourner la clef dans la serrure du cadenas, jusqu’à ce qu’il cède. Septième opus du jeune (46 ans) réalisateur, le film mélange une nouvelle fois les genres. Outre les nombreuses références cinématographiques, différents fils narratifs, langues et codes s’y enchevêtrent. C’est inclassable, c’est du Tarantino ! Malheureusement, si la théâtralité est maîtrisée et les virtuosités des jeux de langues - euh…de langages - tiennent du génie, les histoires, elles, s’embrouillent. On s’y perd, tout simplement. Et c’est là sans doute le seul bémol à l’extase. À l’instar de la course folle des spermatozoïdes vers l’œuf, seule une partie des éléments proposés par le scénario trouve son che-

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min. Les autres s’assomment entre eux, se dispersent ou disparaissent. Est-ce parce que le sujet avait, au départ, été conçu pour une suite de mini-séries ? Prêt à écrire douze heures de dialogues, c’est à la suite d’une discussion avec Luc Besson que Tarantino se ravise pour un long-métrage. Douze heures…condensées en deux heures et demie… Quentin a-t-il eu les yeux plus gros que le ventre ? Pas aussi bien « finie » que le reste de sa filmographie, cette œuvre-là a néanmoins le culot et la gloire d’être allée chercher plus profondément encore les ressources du réalisateur.

“ Il nous entraîne dans une immoralité drôle, forte et intelligente. Positivement populaire ” Par la voix des mots, notamment. Celui qui avoue - modestement ? - que « ce sont les personnages qui écrivent les dialogues. Je les laisse juste parler et je note ce qu’ils disent », s’est ici surpassé. Une réplique culte minimum par scène ! Au patrimoine des « Juste un doigt » ou « Une offre qu’il ne pourra pas refuser » et autres « Que la force soit avec toi », est entré désormais le phénoménal « Arriverderci ». Le talentueux Mister Tarantino revoit les plans de la Tour de Babel avec, en génial maître de travaux, l’éblouissant Christoph Waltz. Les personnages de Shoshanna et de son petit ami Marcel en font cependant les frais. Si Mélanie Laurent semble sortie d’un autre film, on ne peut pas non plus dire que les dons d’acteurs de Jacky Ido y soient pleinement


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Patchwork & Masterpiece Par Piera SIMON

révélés. Les subtilités de la langue allemande n’ont pas échappé au directeur d’acteur. Le français aurait-il élevé une trop haute barrière ? Étonnant pour ce fan absolu de la Nouvelle Vague qu’est Quentin Tarantino. Cette méprise minime, au regard de l’ampleur du film, justifie-t-elle l’accueil frileux de certains critiques chatouilleusement chauvins ? Comment ignorer l’importance de la démarche d’un américain d’imposer à Hollywood un film de guerre où, pour une fois, un Allemand parle Allemand ? Inglourious Basterds marque la fin du sempiternel récit du brave Boy, sans renier les attraits du blockbuster. Il nous entraîne dans une immoralité drôle, forte et intelligente. Positivement populaire. Une préquelle a été envisagée, en interview, par Tarantino lui-même. Ma main à couper que ça ne se fera pas : cet épileptique ne tient pas en place, il est déjà ailleurs. Alors quoi ? Un western ? Une série Z ? Des gangsters, à nouveau ? Faut bien avouer qu’ils nous manquent, ces hommes en noir… Alors quoi, Quentin ? On en veut encore ! Oh oui, ENCORE !

«Je crois que c’est mon chef-d’œuvre» confie Brad Pitt en se penchant vers la caméra, couteau sanguinolent en main. Noir. Générique de fin. Difficile d’oublier que Tarantino était au scénario. Alors, question : le chef-d’œuvre, est-ce le front de Christopher Waltz (après tout primé à Cannes cette année), le film, ou le spectateur cloué à son fauteuil ?

puis-je vous avouer quelque chose ? Au stade où la digestion des citations se fait décidément trop apparente pour ne pas créer l’envie d’aller voir tous les autres films -et donc pas celui-là-, ça me donne des envies de citations anachroniques : «Qui suit un autre, il ne suit rien : il ne trouve rien, voire il ne cherche rien» (Montaigne. Mais rassurezvous : il y a du Sénèque derrière…).

Tarantino a de l’humour et le sens de l’équivoque. Quand on croit le coincer à sa énième évocation d’un film ultra-classique - pof ! arrêt sur image et surimpression en lettres clignotantes digne des séries Z qu’il revendique idolâtrer. On en rit jaune, un poil vexé, mais surpris. Un peu comme « Merde, j’ai buté Marvin ! » (cf. Pulp Fiction), ou encore comme Christopher Waltz fluidifiant avec magnificence l’accent d’un « arrivederci » parfait face à Brad qui a l’air presque aussi con que dans Burn After Reading. Une philosophie de « l’intranquillité », de surprise en surprise et d’une question sans réponse à une autre (mais pourquoi ce plan zénithal ? on dirait Kill Bill...-l’abyme des joies de l’autocitation). Un patchwork donc. Cousu avec du fil bien solide, certes, mais qui se voit. Suffisamment pour gamberger le temps du film, mais à la sortie, je tourne à vide. En plus j’ai du mal à replonger dans le réel - l’Histoire est une fiction dans laquelle j’essaie de m’endormir... Alors quoi ? Dénoncer l’illusion mais la rendre souhaitable ? Tenter d’en prouver le pouvoir ? Pas de doute, Tarantino essaie de faire partager sa passion du cinéma - mais

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UN PROPHÈTE RÉALISÉ PAR Jacques Audiard Avec Tahar Rahim, Niels Arestrup, Adel Bencherif... 2h35 / Sortie le 26 août Par Laure GIROIR

Que dire d’un film dont on sait par avance, avant même de l’avoir vu, que la critique à son égard est unanime pour déclamer partout qu’il est le chef d’œuvre de l’année, que l’acteur principal, auparavant inconnu, est la révélation de la rentrée, qu’il fait florès auprès du public, que sa réception du Grand Prix du Jury à Cannes est amplement méritée… Rien avant d’aller le voir, surtout. Jacques Audiard, son réalisateur, le décrit comme un « antiScarface », peut-être parce que l’ascension de Malik, le personnage principal, n’est ni préméditée ni inéluctable, mais qu’elle se fera malgré tout, et de la façon la plus initiatique. Proie facile dès son arrivée dans le milieu carcéral divisé entre plusieurs clans (notamment des Corses et des musulmans), le jeune détenu est rapidement pris en main par César Luciani qui deviendra son parrain et protecteur attitré. L’univers est rude, sans pitié, partagé entre les repliements communautaires, l’administration corrompue, les règlements de comptes et trafics intérieurs. À la lisière du documentaire, sans en être réellement un, bien que très réaliste, « Un prophète » tient davantage de l’aventure humaine, dans cette prison devenue micro-société. Le renversement de situation est finement mené par Malik, qui arrive à se jouer des différents clans, intérieurs et extérieurs à la prison (lors de ses permissions de sortie), ainsi que de l’administration, pour saboter le système à sa racine en imbriquant les divers réseaux dans des micsmacs abracadabrants. Ses motivations tiennent pourtant davantage de l’instinct de survie que de la simple jouissance du pouvoir, dans ce microcosme sordide où chacun doit trouver sa place. Le jeune diamant noir Tahar Rahim couplé avec Niels Arestrup, acteur confirmé, forment un duo qui fait mouche. Tous deux se ressemblent dans la retenue de leur puissance et leur individualisme, mais se disjoignent quant à leurs caractères. Ainsi, César Luciani est dans la domination non dissimulée, la haine par àcoups, la puissance sourde, la majesté contenue. Malik, lui, nous offre une présence troublante de candeur, de détermination, de tranquillité feinte ; on sent de façon très palpable qu’il s’affirme et se raffermit au fil des épreuves qu’il traverse, passant de l’oisillon fragile au milan royal en quelques coups d’audace. « Un prophète » s’étend en longueur pour mieux nous permettre de subir les uppercuts qu’il nous assène. L’horreur macère, l’étau se resserre et l’on comprend très vite que le personnage est broyé d’avance dans une machination sans fin.

“l’horreur macère, l’étau se resserre”   10

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Néanmoins, le film dans son intégralité manque d’obstacles réels. Plus que des obstacles, j’évoquerais davantage des « dérapages ». En effet, comment est-il possible que tout fonctionne si bien, que les autorités soient si peu présentes, que son premier meurtre passe totalement inaperçu ? L’intrigue est ainsi teintée de mystères insolvables et manque cruellement de mordant, de « ratés », de rudesse… presque. Les années 90 ont connu « La Haine » et « American History X ». Les années 2000 auront eu « Hunger » et « Un prophète » pour terminer en beauté. En bon prophète, je dirais que les César ne sont pas bien loin…


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Public Enemies

Il y a aussi Marion Cotillard, qui ne trouve pas ici son meilleur rôle… A vrai dire, elle y a un jeu à deux vitesses. Dans les moments où la légèreté est de mise, elle ne parvient pas à incarner le fantasme de la femme de l’époque ; mais dans les moments où la force (d’une femme menacée par le personnage le plus antipathique du film) est de mise, et bien disons qu’on se rend tout de même compte qu’elle n’a pas reçu l’Oscar uniquement parce que l’Académie aimait Piaf…

RÉALISÉ PAR Michael Mann Avec Johnny Depp, Christian Bale, Marion Cotillard... 2H13 / SORTIE LE 8 JUILLET Par Cyril Shalkens

Cela peut représenter un fâcheux dilemme que de faire l’analyse du nouvel opus d’un grand réalisateur. Seuls les génies sont parfaits et sans reproche tout au long de leur œuvre, et encore n’appartient-il plus à notre époque plus scrutatrice que jamais de reconnaître telle perfection. On dira donc plus simplement que l’œuvre d’un artiste talentueux de l’entre-deux siècles ne saurait être homogène. Un bon réalisateur peut-il faire de mauvais films ? C’est fort rare ; de fait, Public Enemies est un bon film. Mais un mauvais Mann.

“un bon réalisateur peut-il faire de mauvais films ?”

Certes, tant Johnny Depp (impeccable, parce que Johnny Depp, quand même…) que son personnage sont charismatiques ; certes, le duel, quasiment toujours à distance, avec Christian Bale est intéressant, bien qu’à cent fois la distance Terre-Lune du duel Pacino-De Niro dans Heat, alors que les deux ont été comparés ; certes la (fausse, car historiquement vraie) trouvaille de la fin du film en forme de mise en abîme nous tire un sourire appréciateur.

Que retiendra-t-on de ce film ? Un hors-laloi monstre de coolitude, qui nous fait vibrer les entrailles de délectation. Une mise en scène perturbante dans le mauvais sens du terme. Une fin qui fait vibrer avec subtilité et justesse la corde sensible. Tout le problème est là : le cinéma auquel Mann nous a habitué est viscéral. Pas dans son impact, comme Fincher, mais dans son essence : il prend son sujet aux tripes. Hors, pendant deux heures et demi, trop peu les tripes de cette époque ou de ses contemporains nous sont présentées. On a l’impression que la pensée du réalisateur a simplement été : « Je vais faire un film ancien avec des moyens modernes ». Point barre. Il faudrait peut-être la redresser. Pour que cela soit mieux que bien.

Mais il y a également la caméra à l’épaule qui, si elle collait parfaitement à l’âme de Collateral et y engendrait des frissons de plaisir, ici donne juste une impression… « acontextuelle ». Sans pour autant être un adorateur du classicisme, on ne peut néanmoins apprécier le procédé dans les deux films à la fois.

(500) jours ensemble RÉALISÉ PAR Marc Webb, avec Joseph Gordon-Levitt, Zooey Deschanel... 1h36 / Sortie le 30 septembrE Par Charlotte PILOT

Une fille. Un garçon. Ceci n’est pas une histoire d’amour. C’est le pari simple qu’introduit la voix rieuse du narrateur. L’histoire des 500 jours de la relation déséquilibrée que vont vivre Tom Hansen, profession : architecte raté devenu « mec qui écrit les messages des cartes de vœux », et Summer, la jolie secrétaire de son patron. Outre une narration non linéaire, le montage et la photographie soignée font de ce divertissement de rentrée un agréable moment. Les couleurs chaudes associées au naïf Tom, et celles froides, apanage de la glaciale Summer recréent une esthétique des variations que subissent les rapports entre les amants. Une amitié amoureuse, un amour à sens unique, là est la petite originalité du scénario, qui se mue en faiblesse sur une fin pas si invraisemblable mais aussi vite expédiée

que grossièrement soulignée à la mode hollywoodienne. Dommage pour une comédie se réclamant du cinéma US indépendant. Autre bémol, si elle possède une fraîcheur certaine lorsqu’elle joue les jeunes femmes décalées, Zooey Deschanel semble réticente à interpréter cette secrétaire hautaine et distante. La construction éclatée aidant, ce petit défaut se fait oublier, de même qu’une certaine tendance bobo East Coast (étrange pour Los Angeles) diffuse bien qu’un peu trop ancrée dans le ton du film. Servi par une B.O. assez réjouissante, cette comédie dramatique reste légère, sans autre prétention que de divertir et émouvoir (un peu) son public. Pari tenu.

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Fish Tank Ecrit et réalisé par Andrea Arnold Avec Katie Jarvis, Michael FassbendeR... 2h02 / Sortie le 16 septembre Par Natacha Steck

Après Red Road en 2006, l’anglaise Andrea Arnold récidive   en  décrochant une nouvelle fois le Prix du Jury cannois avec Fish Tank, portrait social d’une jeunesse à la dérive. Loin des soirées branchées et des « it   girls » londoniennes, c’est dans une banlieue populaire de l’Essex-bocal dans lequel nous enferme ostensiblement la réalisatrice que nous rencontrons Mia, adolescente effarouchée, interprétée avec une sensibilité à fleur de peau par l’éblouissante Katie Jarvis. Hypnotisant. À 15 ans, Mia est en conflit constant avec le monde autour d’elle, réagissant au quart de tour à tout élément pouvant l’agresser. Elle méprise la frivolité des filles de son âge, dénigre sa petite sœur et sa mère, jeune femme célibataire pas vraiment prête à assumer un rapport parental avec ses filles, et s’évade dans l’alcool. Elle trouve son échappatoire en dansant le hip-hop dans un appartement vide de sa barre d’immeuble et en préparant un concours pour devenir danseuse. Là où l’histoire pourrait virer à l’american dream convenu

J’ai tué ma mère écrit et réalisé par Xavier Dolan, avec Xavier Dolan, Anne Dorval, Suzanne Clément...

1h40 / Sortie le 15 juillet Par Roseline TRAN

Xavier Dolan, jeune montréalais de vingt ans, réalise avec maîtrise un premier long-métrage remarqué au festival de Cannes, où il a remporté trois prix. J’ai tué ma mère ou comment meurtrir et assassiner symboliquement l’être qui vous a mis au monde. Le film est une pure catharsis ; 1h40 de répliques féroces, 1h40 de ton cassant et de méchanceté, 1h40 de violence… pour, finalement, faire mourir l’enfance et renaître adulte, trouver la rédemption. Face à la nourriture qui reste coincée à la commissure des lèvres de sa mère (Anne Dorval), Hubert Minel (Xavier Dolan) personnifie l’agacement. Entre incompatibilité d’humeur, conflit de génération ou pure irritation, tous deux se rongent et multiplient les disputes violentes. Dolan, petit prince de la réplique féroce, met en scène un couple mal assorti qui se détruit dans un huis-clos étouffant – Hubert trouve refuge chez son petit ami, où tout est plus lumineux. Le jeune réalisateur détient le génie de filmer une exécration brutalement drôle qui repose sur la hargne du jeu vif et furieux de Xavier Dolan, l’incompréhension irascible de sa mère et – tabernacle !- les charmes de la langue québécoise. Pourtant, Hubert n’est pas qu’un adolescent exaspéré et désespéré. Au-delà de la crise, il est définitivement lucide sur son « matricide » ; Dolan choisit d’alterner scènes dévastatrices et confessions en noir et blanc sur une relation ambigüe : il aime sa mère et la déteste. De ce dilemme presque schizophrénique où il veut s’arracher à sa 12

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de la fille perdue qui dépasse sa condition, Andrea Arnold reste ancrée à la réalité. Mia n’est qu’une adolescente au corps raide qui se noie dans des rêves aussi illusoires qu’impossibles à atteindre et qui la laissent en marge. C’est alors qu’arrive Connor, nouveau petit ami de sa mère, qui va troubler la jeune fille en contournant, l’air de rien, le mur d’animosité qui la sépare habituellement des autres. Figure virile au magnétisme étrangement apaisant, il va sublimer la fragilité de Mia et lui faire miroiter un avenir, pour le meilleur - lui donnant une image d’elle-même d’une douceur inattendue - mais pour le pire aussi. Les illusions sont démantelées une à une et, pour une fois, c’est pour une fin certes moins sensationnelle, mais plus sereine pour la jeune fille. Cette chronique sociale est superbement menée par la fraîcheur impulsive de la débutante Katie Jarvis et l’énigmatique Michael Fassbender, devant la caméra incisive d’Andrea Arnold. La découpe carrée inhabituelle de l’image donne un effet très « polaroïd » au film, soulignant son hyperréalisme. Mais loin de paraître amateurs ou faciles, les images révèlent un soin extraordinaire de la mise en scène et des lumières. Doré, en contre-jour, lors de la démonstration fébrile de danse de Mia pour Connor ; d’un rouge sulfureux dans le troublant plan subjectif de l’adolescente observant à son insu son désiré beau-père la couchant ; bleuté et angoissant lors de l’enlèvement désespéré de la petite fille, l’éclairage subtil soutient avec une grande finesse l’ambiguïté des situations et des sentiments. Sans fioritures ni concession, Andrea Arnold nous livre un film d’une maîtrise esthétique fascinante qui nous plonge au cœur même de la vie de Mia, une jeunesse désemparée, coincée dans un « aquarium » (traduction littérale de fish tank) dont les parois laissent entrevoir la liberté de l’océan à l’extérieur mais l’en privent.

mère mais n’y parvient pas, Dolan tire le portrait d’une jeunesse en mal de vivre, qui a peur de grandir ; l’homosexualité libérée contre le traditionalisme, la solitude dans la foule, l’aliénation de la ville. Le jeune cinéaste rejette toute forme de conformisme et fait référence aux marginaux tels que James Dean ou Jackson Pollock. Mais avant tout, J’ai tué ma mère parle de cet amour maternel si difficile à définir. Il faut aimer sa mère mais est-on un monstre si on la hait à en mourir ? Tout le film constitue un énorme blâme, une satire efficace contre cette figure de la mère aux mœurs trop usuelles et aux goûts kitsch suspects. Toutefois, J’ai tué ma mère est une violente déclaration d’amour-la demande en mariage onirique ou les plans ralentis à la Wong Kar-Wai illustrent une fascination détournée, celle de l’enfant à sa mère. L’ultime rendez-vous crépusculaire au bord du fleuve Saint-Laurent balance une nostalgie poignante, où ce qui est tué n’est pas la mère mais l’enfance en l’occurrence.


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Non ma fille, tu n’iras pas danser De Christophe Honoré, avec Chiara Mastroianni, Marina Foïs... 1h45 / Sortie le 2 septembre Par Charlotte. Pilot

“corps raide qui se noie

dans ses rêves aussi illusoires qu’impossibles à atteindre” fish tank

“accent porté sur la dimension orale, inégalement maîtrisée ici” non ma fille...

“mais avant tout, j’ai tué ma mère parle de cet amour maternel si difficile à définir” j’ai tué ma mère

Sixième long-métrage du réalisateur Christophe Honoré, coiffé d’un titre à rallonge comme les aime le cinéma français, Non ma fille, tu n’iras pas danser marque, après la trilogie parisienne, un retour vers les cieux moins pollués de Bretagne. Retour en terre natale donc ; Léna (Chiara Mastroianni), parisienne divorcée se rend avec ses enfants dans la maison familiale, où petites rivalités et grandes hésitations vont mettre à mal son fragile équilibre.

Et l’accueil n’est pas des plus chaleureux, pour la «rebelle» de la famille. Refusant l’aide intrusive de ses proches, Léna semble perdre la faible emprise qu’elle parvient difficilement à maintenir sur sa vie depuis son divorce, et ses repères avec. La première partie la montre insoumise, s’agitant jusqu’à l’épuisement pour défendre ses choix. Mise en abîme de l’histoire de Léna, l’audacieux court-métrage au cœur du film mettant en scène des danses bretonnes casse un rythme trop lâche, pourtant point fort du réalisateur dans ses récentes productions. Cet interlude cristallise l’énergie réprimée des deux parties du film, et permet de retrouver une vivacité charmeuse. Le baiser de Pol Gornek, la marque du diable des contes populaires bretons, qui tente les tentatrices Léna et Katell, vole à cette dernière son souffle - et celui du film avec. Suit une deuxième partie aux scènes bavardes et d’un réalisme un peu morne associé à une mise en scène effacée qui rappelle un théâtre filmé plutôt ennuyeux et bridé. Quoiqu’on se mette toujours volontiers à poil chez Honoré, ce qui souligne paradoxalement la pudeur élégante avec laquelle la souffrance sourde des personnages est traitée. Échappe à la règle Léna, personnage qui a valu à Chiara Mastroianni de passer une bonne heure du film le visage inondé de larmes. Dommage, l’effet est de rendre ses rébellions indécises et maladroites assez antipathiques bien que parfois touchantes. Sa performance s’intègre dans la dynamique salvatrice du trio qu’elle forme avec sa sœur (Marina Fois) et sa mère, la trop rare Marie-Christine Barrault, très juste en matriarche au caractère bien breton. Honoré aborde par leur intermédiaire la transmission romanesque de la vie par la famille, d’où l’accent porté sur la dimension orale, inégalement maîtrisée ici. Évolution nécessaire dans la carrière d’Honoré, le réalisateur s’écarte volontairement d’une référentialité littéraire qui étouffait quelque peu certains de ses longs-métrages (Ma Mère). Le processus ne semble pourtant pas avoir atteint sa complète maturité. Alors non, ce film n’est pas pour les spectateurs impatients, le temps entre le début de la deuxième partie et sa fin semble long. Il reste qu’Honoré est un réalisateur possédant une démarche pensée, qui s’oppose au cinéma français de divertissement mou et populiste tant apprécié par une majorité du public. Un cinéma d’auteur, avec les travers qu’il comporte certes, mais qui a encore des choses à dire et à montrer ; un cinéma qui mérite d’être défendu.

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Thirst,

ceci est mon sang Réalisé par Park Chan-wook Écrit par Jung Seo-gyung & Park Chan-wook Avec Song Kang-ho, Kim Ok-bin, Shin Ha-kyun... 2h13 / Film produit en 2008, sorti le 30 Septembre 2009 Par Pierre-Louis Coudercy

Appliqué dans l’exercice de sa foi catholique, le prêtre coréen Sang-hyun se porte volontaire pour servir de cobaye à un vaccin expérimental, destiné à contrer un virus mortel. C’est à l’instar des 499 autres sujets qu’il décède, à ceci près qu’une transfusion sanguine aux origines inconnues le ressuscite miraculeusement. Alors que Sang-hyun se voit incessamment sollicité par des souffrants venus pour recevoir une de ses bénédictions, le prêtre constate en lui des métamorphoses effrayantes : le voilà devenu un être nocturne invincible et assoiffé de sang. En retrouvant un ancien ami déjà marié, Sang-hyun ne peut réfréner les violentes pulsions charnelles qui l’assaillent à la vue de Tae-joo, la jeune épouse... Hésitantes et partagées seraient les expressions appropriées pour qualifier les réactions du public cannois, interrogé à la volée lors de la célèbre projection festivalière. L’on s’accorde à dire que sexe et hémoglobine rivalisent d’exubérance. Certes, mais ne serait-ce pas oublier que ces deux domaines ont jalonné le film de vampires depuis des décennies, et ce indépendamment du fait que le cinéma de Park Chan-wook ait souvent versé dans l’extrême ? Héritier de la nouvelle vague du cinéma sud-coréen, et placé dans la continuité du segment « Cut » du film à sketches « 3 Extrêmes », la dernière oeuvre de l’auteur du tonitruant « Old Boy » semble ne s’être imposée aucune restriction concernant les pauvres règles de bon goût et de bienséance auxquelles nous avons tous été plus ou moins accoutumés. Aussi virevoltant d’ambiance soit Park Chan-wook entre « Lady Vengeance », « Je suis un Cyborg » et « Thirst », force est de reconnaître que sa réalisation ne s’est jamais départie de cette folie de la caméra, libérée à l’écran depuis la vengeance du vieux garçon... C’est ici que le style visuel très affirmé du metteur en scène

“le cinéma de park chan-wook est constamment intrigant et indéniablement vampirisant” thirst

peut prendre de l’ampleur, en retranscrivant très littéralement à l’écran les effets d’un saut de plusieurs mètres de haut, ou bien lors d’une scène laissant émerger cette folie destructrice qui scarifie le personnage de Tae-joo (étonnante et méconnaissable Kim Ok-bin), avec le sadisme intentionnel de tenir le spectateur dans les griffes d’un suspense facile mais efficace. Si l’on peut grincer des dents devant les plaisirs coupables de Park Chan-wook, tels que l’attribution de pouvoirs surhumains d’une franche extravagance à ses créatures de la nuit (auxquels la qualité des effets spéciaux ne répond pas toujours présente), l’on pourrait tout aussi bien froncer des sourcils devant l’éternelle cinéphilie du réalisateur, celle-ci le poussant à reprendre encore et toujours plus de scènes issues de ses références, jusqu’à former une toile aux motifs décidément étranges. Mais peut-on y tenir un véritable reproche lorsque la toile en question, aussi mutante soit-elle, formera toujours une création aussi dérangeante que fascinante ? Le cinéma de Park Chan-wook est véritablement cela, constamment intrigant et indéniablement vampirisant.

36 VUES DU PIC SAINT-LOUP De Jacques rivette, Avec Jane Birkin, Sergio Castellitto, André Marcon... 1h24 / Sortie le 9 septembre Par Laure GIROIR

“trois vieux clous, une toile tendue et un rien de poudre d’escampette” 36 vues...

Jacques Rivette, dont le court-métrage Le coup du berger en 1956 signait l’acte de naissance de la Nouvelle Vague, nous étonne aujourd’hui avec ses 36 vues du pic Saint-Loup, une œuvre toute en pudeur. Trois vieux clous, une toile tendue et un rien de poudre d’escampette suffisent à constituer un décor de pacotille pour clowns en mal de rire. Le film commence sur un paysage de carte postale, à l’image de son titre énigmatique, par Jane Birkin (Kate) sur le bord de la route, secourue par un inconnu. Cette dernière vient réintégrer la troupe de cirque qu’elle a quittée depuis de longues années, après la mort accidentelle de son amant durant un numéro.

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“verdict ? belle démonstration de sa grande maîtrise technique” le ruban blanc

Le Ruban

Blanc

Réalisé par MICHAEL HANEKE Avec Christian Friedel, Ernst Jacobi, Leonie Benesch... 2h24 / sorti le 21 OCTOBRE Par Natacha Steck

D’entrée de jeu, la carte du romanesque est tirée. Cependant, cette grande famille est loin d’être constituée de héros modernes. Au contraire, l’on assiste à une cérémonie d’êtres brisés, une parade d’âmes en peine, dans cette œuvre peuplée de présences fantomatiques. Pour rompre la malédiction, il fallait une perturbation, légère ondée sur mer d’huile. Ce sera l’italien Sergio Castellitto (Vittorio), superbe dans ce rôle de catalyseur au sang chaud. Fine omniprésence néanmoins rémanente, il agit comme un guérisseur auprès de chacun, essayant de démêler les nœuds qui sont apparus, années après années, dans ce microcosme circassien. Son action d’apprivoisement est subtile et patiente face aux nombreuses dérobades. La maigre troupe entame une nouvelle tournée et présente de piteuses clowneries devant un public ridiculement maigre. C’est Vittorio qui brisera enfin le frimas avec un premier éclat de rire. Le numéro retrouve alors sa raison d’être, les personnages une raison de vivre, et le film commence... La question de la première lueur se pose alors, tout autant que celle du premier geste, naissance de l’arbre des possibilités.

On attend toujours avec une certaine excitation la sortie en salle d’une Palme d’Or. Verdict ? On ne criera pas au chefd’œuvre, mais il faut avouer que Michael Haneke nous fait une belle démonstration de sa grande maîtrise esthétique au service d’une intrigue qui pêche un peu sur l’originalité mais ouvre une réflexion intéressante sur les conséquences néfastes d’une éducation basée sur l’autoritarisme et le traumatisme. En voix-off, un homme âgé, à l’intonation désabusée, évoque le village allemand bercé dans la tradition et le protestantisme dans lequel il était jeune enseignant au début du 20e siècle. On s’immisce dans l’intimité des familles avec une dureté étonnamment crue comparée à l’approche gauche et lunaire du professeur. Décalage intéressant qui permet un regard à la fois interne et externe sur ce village qui va être le théâtre d’une série d’événements étranges et effroyables à la veille de l’assassinat de François Ferdinand. Haneke cherche à nous montrer les causes de la naissance du nazisme dans l’éducation rigide reçue par toute une génération d’Allemands. Nous tomberons d’accord sur le fait que les formes éducatives répressives génèrent rarement les meilleures natures ; cela dit, il manque un peu de précision pour étayer sa thèse et on pourrait rétorquer que de semblables pratiques ont aussi été répandues au Royaume-Uni, où l’on a au contraire assisté à la naissance d’une des plus importantes formes de démocratie. Le principal attrait du film reste donc l’image. Le noir et blanc révèle une grande richesse de teinte et les portraits sont particulièrement réussis. Malheureusement si une exposition photographique aurait été très poignante, les images sont animées pour 2h25 de film et, sur une intrigue qui sonne le déjà-vu (mélange germanisé du Nom de la Rose et des Magdalena Sisters), cela fait un peu long.

Le film, réalisé avec peu de moyens, rappelle à-demi la règle de la triple unité propre au théâtre classique. Les personnages sont démunis, l’intrigue modeste et le retour aux sources notoire. Une leçon de simplicité et d’humilité qui sonne juste. Elle évoque le fragile fil de la vie sur lequel nous tentons de rester en équilibre, mais aussi l’amour fou, fané et ressuscité, l’absence et la tristesse diffuse qui en découlent, sans pour autant sombrer dans le pathétique ou la langueur.

Michael Haneke se prête donc plus à un exercice de style -qu’il mène avec une maîtrise technique indéniable- qu’à une révolution du genre cinématographique.

Rivette nous parle du cheminement artistique, des origines de la création, de l’univers du spectacle, brûlures comprises... et tout fait sens.

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LA Danse De Frederick Wiseman , Avec Brigitte Lefèvre, Emilie Cozette, Aurélie Dupont... 2h38 / Sortie le 7 septembre Par Nicolas THYS

ment délaissé ses ouvrages et son bureau pour aller observer par lui-même les rouages de son objet d’étude théorique. Wiseman offre donc un aperçu, quelques miettes d’une situation à une époque donnée et un demi-siècle d’institutions est donc passé devant l’objectif de sa caméra. Les classiques : un tribunal (Juvenile Court), un commissariat (Law and order), l’aide sociale (Welfare et Public Housing) ou encore, à deux reprises et 26 ans d’intervalle, un lycée (High School en 1968 et High School II en 1994). Les plus rares, tabous car dérangeantes : un hôpital psychiatrique (Titicut Folies), les soins intensifs d’un centre hospitaliers (Near death) ; ou les institutions culturelles, souvent oubliées avec deux bien de chez nous : La Comédie Française en 1996 et aujourd’hui l’opéra de Paris dans La Danse.

L’Opéra de Paris : art, institution et politique Premiers plans : un montage sec et serré nous entraine d’une vue aérienne de Paris aux sous-sols de l’opéra ; d’une vue d’ensemble à une simple corde isolée, le tout avec une rigidité photographique étonnante. Pourtant le programme est là : partir du général pour atteindre le particulier. Scruter l’ensemble pour terminer sur le détail. La Danse de Wiseman ne sera jamais un traité sur la danse mais plutôt une entrée dans un monde habituellement clos, celui des répétitions et des coulisses, de toutes les coulisses. Depuis les essais et balbutiements de quelques corps graciles à la perfection finale du mouvement sur les scènes de l’opéra Bastille et de l’opéra Garnier. Avec sa méthode habituelle Wiseman nous entraine à la découverte d’un univers insoupçonné, d’un monde reclus sur lui-même avec ses propres règles de vie. Un monde où l’art et le politique doivent pourtant cohabiter car au-delà des corps virevoltants, le cinéaste aborde sans détour le problème des retraites, les réformes en cours du service public ou le financement de certains programmes. Tout y est. La caméra pénètre dans chaque sphère et le micro écoute chaque Depuis maintenant plus de 40 ans, le quasi octogénaire, Frederick conversation sans jamais intervenir, sans rien demander. Wiseman scrute la société Nord Américaine, ses institutions les L’institutionnel ne lui échappe pas et, même si on sent Wiseman capplus diverses et leurs mécanismes les plus intimes. Sans critique, tivé par les danseurs et leur préparation, chaque corps de métier sans militantisme direct mais avec un simple regard posé sur le est représenté, même en filigrane. Des professeurs aux balayeurs monde – celui de sa caméra qu’il entraine partout avec lui – son en passant par l’apiculteur du toit de l’opéra ! Le cinéaste se livre à œuvre dresse un panorama évolutif et toujours en mouvement de un recensement des individus qui participent au fonctionnement du la manière dont fonctionne un univers social. lieu mais aussi à une cartographie de ce dernier, alignant salles de Rappelons toutefois pour les plus naïfs qui imagineraient encore le cours, bureaux ou espaces scéniques sans omettre les longs couloirs, documentaire comme une simple monstration du réel : le regard les escaliers sinueux, les extérieurs, et les sous-sols et souterrains n’exclut jamais une mise en scène, un cadrage, un montage ; en débouchant sur l’immense réservoir d’eau connu des amateurs de somme un discours logique organisé par l’auteur même. Une inter- Gaston Leroux et de son fantôme. prétation. Et, malgré sa méthode, le cinéma direct ou cinéma vérité, L’ensemble est parfaitement intégré à une mise en scène voyante à la manière de Richard Leacock ou D.A. Pennebaker, ses prédémais prodigieuse et qui ne cherche aucunement la transparence. Alicesseurs, ou de Raymond Depardon, son contemporain direct, qui gnant les plans séquences et les micromouvements de caméra afin de s’inscrit dans une démarche accrue d’objectivité Wiseman ne fait saisir au vol et de suivre au mieux chaque geste et chaque posture, que donner un point de vue et jamais celui-ci ne sera totalement accordant une importance égale aux enseignants et à leurs élèves à neutre. travers des jeux de miroirs qui permettent de comprendre les diProche de la démarche des sociologues de l’école de Chicago (celle rectives du premier, chaque pas des seconds et de montrer la quasi de Goffman ou Becker), qui laissent la priorité à l’observation des intégralité des lieux, Wiseman, dans un travail de captation des plus interactions sans a priori ni questionnement initial, Wiseman, à tra- réaliste, tout sauf rigide et qui laisse le choix au spectateur de poser vers les thématiques de ses films, dresse un certain portrait d’une son regard où il le préfère sans aucune lecture préalable, dresse un certaine Amérique et, plus récemment, d’une culture française fabuleux tableau du ballet de l’opéra de Paris et de son appareil insconsidérée comme élitiste. Il supprime notamment tout discours titutionnel unique. oral autre que celui des intervenants. Nulle question du cinéaste ne La Danse est à la fois un exercice exemplaire de cinéma direct, un guidera les protagonistes dans telle ou telle direction. Aucune musitableau général et complet de l’Opéra, de ses singularités et, plus que additionnelle ne vient amplifier un quelconque propos. simplement, un film réussi puisqu’il nous donne envie, sinon de danOn perçoit nettement dans son travail de documentariste son par- ser, au moins de courir voir l’un de ses spectacles. cours originel : ancien étudiant et professeur de droit, il a simple-

Un cinéaste, une méthode

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CLASSIK

My Own Private Idaho

(Au loin s’en vont les nuages) Réalisé par GUS VAN SANT Avec River Phoenix, Keanu Reeves, James Russo 1h45 / DATE DE SORTIE 15 JANVIER 1992 DATE DE REPRISE CINÉMA 16 SEPTEMBRE 2009 Par Piera SIMON

Un road movie à la structure complexe, circulaire, comme la caméra entourant le personnage et entraînant le spectateur dans le monde des visions de ses crises de narcolepsie : nuages qui filent au gré des vents, maison intemporelle isolée, film d’amateur en 16 mm au rythme haché, un enfant, un visage. La beauté douce d’un River Phoenix un peu paumé, baladé sur les routes par Keanu Reeves et ses initiatives rigolardes. Parce que Phoenix s’endort doucement quelque part pour se réveiller sans cesse ailleurs (à Rome, à Portland, au milieu du désert), on se laisse glisser d’un lieu à l’autre, d’un personnage à l’autre, pas sûr de les retrouver. On oublie l’histoire pour épouser la trame, Phoenix s’échappe en ligne droite de chez Lumet pour que la caméra épouse les arabesques de ses chutes. Comme il faut bien survivre, ces jeunes gens se prostituent, sous l’égide d’un personnage paternel et shakespearien, barbu

et imposant, aimé et moqué par sa troupe piaillante qui s’envole légèrement dès que la police apparaît. Reeves est en train d’apprendre à devenir adulte en fuyant son père, mais la certitude du temporaire de l’expérience fausse la donne : il s’amuse et cherche autre chose, sans vraiment échapper à ses origines. Reconnaître un père rendra l’autre indésirable au point de lui tourner impitoyablement le dos. Phoenix erre lui aussi à la recherche de ses origines, bien plus confuses ; il tente de se raccrocher à des certitudes que la caméra, le temps, et même Reeves lui dérobent. Van Sant tourne toujours autour de ses thèmes de prédilection : corps jeunes et adolescence éperdue, drogue et perte de conscience, homosexualité et prostitution, visions et paysages désertiques. Reeves et Phoenix se prêtent à lui corps et âmes, et la route rectiligne déchire le paysage que la caméra rend circulaire et infini.

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CLASSIK

Vol au-dessus d’un nid de coucou De miloŠ forman, Avec Jack Nicholson, Louise Fletcher, William Redfield... 2h09 / Date de sortie cinéma 1 mars 1976 Date de reprise cinéma 16 septembre 2009 Par Magdalena Krzaczynski & Nicolas Thys

pour éviter la prison. Nous ne saurons rien de son incarcération dans l’asile, nous ne le reverrons qu’à sa sortie. De l’autre côté, un afro-américain perpètre des attentats juste pour qu’on lui rende sa voiture dans son état initial ! Pourtant Vol au-dessus d’un nid de coucou est un film où Forman se consacre exclusivement à filmer ces corps, ces visages atrophiés, pour nous faire entrer dans ce monde où l’humanité est réduite à un simple corps. Dans ce film, la folie se porte comme un masque sur chaque visage. George Bernard Shaw écrivait qu’un bon acteur est un acteur qui saurait tout jouer avec un masque. Cette conception renvoie particulièrement au jeu des acteurs du burlesque, Buster Keaton en tête, ainsi qu’au théâtre de marionnettes, cher aux tchèques.

Années 1960, Tchécoslovaquie. MilosForman rencontre l’acteur Kirk Douglas. Celui-ci lui propose de tourner un film traitant des hôpitaux psychiatriques. Cinq ans plus tard, Amérique. Après l’insuccès de son premier film tourné aux Etats-Unis, Taking off, Douglas fils, Michael, lui propose d’adapter le livre de Ken Kesey, One flew over the cuckoo’s nest. Troublante coïncidence... La légende veut que le livre envoyé par Douglas père ait été confisqué par la douane tchèque et qu’il soit finalement arrivé dans les mains de Forman grâce au fils. Ainsi ce survol au-dessus d’une maison de fous (qu’on appelle « coucous » dans l’argot anglais) permit à Forman de rencontrer son premier succès à Hollywood et son tout premier Oscar. Si Scorsese est considéré comme le cinéaste qui s’est le plus intéressé à des marginaux névrosés, Forman, certes plus discrètement, file également le thème tout au long de sa filmographie. Amadeus commence par l’entrée du prêtre dans un asile de fous, mais la caméra ne s’attarde pas sur ces hommes enchaînés, emprisonnés dans des cages, complètement déformés. Aucun arrêt, aucun gros plan, comme si la caméra voulait marquer le manque d’intérêt qui leur est porté. Il en est de même pour la sortie du prêtre. Dans Les Fantômes de Goya, on voit les marginaux défigurés par la torture, sous prétexte de ne pas adhérer à l’Église Catholique, de ne pas se comporter comme les autres. Renvoyés au stade animal, humiliés et déshumanisés, ces images, bien que courtes, choquent par leur dureté et leur caractère évasif. Dans Ragtime, la folie est double. D’un côté, un homme plaide la folie 18

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Et justement, l’hôpital peut être perçu comme un théâtre de marionnettes, déshumanisant ceux qui l’intègrent, volontairement ou non. Chaque patient, Jack Nicholson à part puisqu’il cherche à se faire passer pour fou afin d’éviter la prison, a un visage pratiquement figé. Danny de Vito, petit gros souriant, Christopher Lloyd, au visage tirant sur Le Cri de Munch, Vincent Schiavelli et son air fantomatique, mais surtout l’indien, roc immuable. L’ensemble est mené à la baguette par une Louise Fletcher au visage aussi impassible mais dont la folie, latente, consistera à conserver ses poupées dans leur posture initiale, en leur faisant croire qu’ils sont sur la voie de la guérison. Elle le fera avec Brad Dourif au moment où il commencera à s’humaniser lors de la séquence finale. Elle emprisonne ceux-là même qui pourrait s’en aller, puisqu’entrés de leur plein gré dans cette maison de fous. Nicholson sera leur guide mental sur le chemin de la liberté et de la vie. Brisant le cadre cellulaire, au point de les enlever, il les emmènera pêcher. Autre acte transgressif et pourtant trivial : regarder la télévision. Interdit par l’infirmière, Nicholson, face à un écran noir, commente un match de football américain comme s’il se déroulait sous leurs yeux. Ces deux actions folles menées par Nicholson les conduiront à un bref re-

tour à la normalité. Il leur organise enfin une orgie sous les yeux dépités de Scatman Crothers, le gardien de nuit. Les deux acteurs se retrouveront par la suite dans le Shining de Kubrick, film qui les poussera au-delà des limites de la folie, vers le fantastique. Seul l’indien, qui a recouvré un certain degré d’humanité par le langage, poursuivra la quête de Nicholson, mais lorsque celui-ci sera retourné à l’état de pantin.

Porté par la musique cristalline et aérienne de Jack Nitzsche, l’indien retrouve sa liberté dans un élan vital, et les autres quelque chose de leur individualité. L’harmonica de verre, instrument rare à la sonorité atypique, entraînant les autres instruments symphoniques avec lui, s’échappe du reste de l’orchestre de la même manière que l’indien fuit ce théâtre de fous.


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« Le reportage gonzo conjugue la vivacité de plume du reporter confirmé, l’acuité visuelle du photographe de guerre et les couilles du quarterback au moment du lancer » Hunter S. Thompson


KULTUUR DU NAVET

Neuilly Sa Mère Par Romain Genissel & Cyril Shalkens

Au départ c’est une blague lancée sur un site communautaire. « Neuilly sa Mère, meilleur titre de l’année ? ». Mais depuis que Micmacs à tire-larigot a fait son entrée au hitparade, force est de constater que le titre ultra-populiste de Jeunet a totalement balayé la force de frappe du premier. Donc Neuilly sa Mère, il fallait se le faire. L’envie irrépressible d’aller fouiller derrière ce titre plein de promesses nous avait contaminés. Après une queue interminable pour le non-détenteur de la carte illimitée et une blague lancée à un jeune banlieusard qui se rend avec sa belle voir Little New York et profiter du velours bleuté (ou l’inverse), nous voilà dans la pénombre, bien accroché face à l’inconnu. Enfin, on a raté le début. Les premiers pas en banlieue. En même temps ce lieu nous intéresse moins. On y a déjà mis les pieds (voire habité). Non, on cherche plutôt à voir Neuilly. Et on pourra dire qu’on a mis les deux pieds dedans… sa mère.

En fait, le tout pourrait être vu comme un mélange (avec un trait un peu plus gros) entre Tout le monde n’a pas eu la chance d’avoir des parents communistes (à droite) et La vie est un long fleuve tranquille (chez les riches). (si par chance (?) ce film devenait culte, les De Chazelle rejoindraient les Groseille au rang des familles, disons… « marquantes ») On passera sur le père qui a des rapports post-divorce avec son ex-femme plus qu’intéressants, et sur la fille qui symbolise tout ce qu’on peut trouver à la fois d’innocent et d’exaspérant chez le bobo de base. Car LA star, au-delà même de Sami, c’est son cousin : il est à espérer qu’un enfant de cet âge ne puisse être autant de droite (voire politisé tout court), ou c’est la porte ouverte à toutes les fenêtres…Dans sa chambre, sur fond de Carla Bruni, Sarkozy, Chirac, Tony Blair et Berlusconi (!) remplacent Zizou, Britney, Sinik ou TP (le premier et le dernier sont néanmoins présents dans le film, mais pas de la meilleure manière…) et sa conception de la vie de famille ressemble à celle d’un conseil des ministres.

Le jour où sa mère trouve un emploi sur un paquebot, Sami Benboudaoud, 14 ans, est obligé de quitter ses « zincou » de sa téci de Chalon-sur-Saône. Comme un roumain privé de sa jungle, il est alors débarqué à Neuilly, chez sa tante qui a épousé Stanislas de Chazelle (Podalydès), bourgeois lettré (pas de télévision) et décomplexé. Sami parviendra-t-il à faire oublier son nom (que les profs écorchent évidemment), à tacler la racaille du collège privé SaintExupéry ? D’entrée une blague bien sentie provoque l’hilarité (pas générale). Samy est sommé de laisser son survêt’ au vestiaire pour un costume derrière lequel il pourrait faire oublier sa couleur. L’uniforme sur le dos Sami l’a un peu mauvaise et, revanchard, lance un : « J’ressemble à l’autre baltringue des Choristes, là ! » à apprendre dans toutes les écoles.

Ajoutez à cela une directrice d’établissement en forme de Josiane Balasko sarkozyste (notez l’antithèse) mais juste à la fin (sûrement chiraquienne repentie…), une bande de pieds nickelés gosses-deriches-têtes-à-claque qui sont ce que le film a de plus « méchant » et une belle damoiselle qui persuade notre héros qu’il reste quelque chose à sauver à Neuilly, et vous obtenez en tout un film qui s’il est « nanar » par la caricature, vaut la peine d’être vu, parce que c’est une comédie, et qu’on y rit de bon coeur.( pour tout dire on est plié de rire pendant 85 % du film !) Voir ce film est un plaisir coupable, comme le soda marron à base d’extraits végétaux : ça fait pas avancer le monde, mais qu’est-ce que ça peut être bon !


Le Forum des Images, c’est quoi ? Par Sophie BOYENS

C’est central et sympa Fatigué de vous traîner jusqu’au désert de Bercy pour vous rendre à la Cinémathèque ? Le Forum des Images, au cœur des Halles, est ouvert du mardi au dimanche. Finis les grands courants d’air qui vous glaçaient le dos entre deux bâtiments. Les fauteuils du Forum vous ouvrent les bras, ambiance psyché, branchée, feutrée.

C’est éphèmère (Alors, c’est le moment d’y aller !) En plus des cours de cinéma, prévus tous les vendredis soirs par un intervenant différent, le Forum organise des rendez-vous et des évènements aussi riches que variés. Des avant-premières, des Master Class, des festivals internationaux, des débats, des ateliers pédagogiques et… la Malle au Trésors de Bertrand Tavernier.

C’est permanent Une

bibliothèque et vidéothèque entière-

ment consacrée à l’audiovisuel. de cinéma.

Cinq salles Une salle des Collections.

> La bibliothèque, pourtant très fréquentée, profite du silence olympien de ses utilisateurs. Bien fournie, elle dispose surtout d’ouvrages à peine sortis dans le commerce. La vidéothèque, elle, a encore besoin de se remplir un peu mais tous les grands noms y sont répertoriés, prêts à recevoir les œuvres de leur maître. > Les salles de cinéma sont d’un confort rare. La programmation suit des cycles, qui durent environ un mois. Après le cycle du Désir et celui de la Vengeance, septembre nous emmène dans la thématique de la Parole. Park Chan Wook, Chabrol, Capra, Gondry,… tout le monde y passe ! > Une place de cinéma achetée (au tarif unique de 5 euros) vous donne droit à deux heures gratuites dans la salle des Collections. Espace unique à Paris, à découvrir de préférence en amoureux, cette salle vous plonge dans la version lounge du vaisseau rétro de Star Trek. Silence religieux, lumières tamisées, tons chauds, différents canapés de deux à sept personnes sont installés face à des écrans individuels. Écouteurs à disposition. Là, dans un catalogue de 6500 films, vous pourrez choisir selon des catégories ce que vous souhaitez. La majorité du catalogue est dédiée à Paris, à travers les fictions et les documentaires qui y ont été tournés. L’autre partie regorge de documents rares, anciens ou neufs. Quatre heures de visionnage sont comptées pour un forfait de 5 euros également.

LE FORUM DES IMAGES C’était… - LES MASTER CLASS DE : Claude Miller, Benoît Jacquot, Walter Salles, James Gray, Claude Chabrol, Rithy Panh, Gérard Depardieu. - LES COURS CINÉMA AUTOUR DE : La puissance du rêve, Rire ou ne pas rire, Le goût de la peur,… - DES CYCLES CINÉMATOGRAPHIQUES : New-York, Désir, Vengeance et Parole (actuellement et jusqu’au 31 novembre). - DES AVANT-PREMIÈRES (en collaboration avec le magazine Positif) : Le Ruban Blanc, de Michael Hanneke

Ce sera… - Jacques Audiard, le 11 octobre 2009 - Francis Ford Coppola, le 11 novembre 2009 - Isabelle Huppert, le 16 décembre 2009 - Gilles Deleuze, Kubrick, Truffaut,… tout les vendredi à 18h30. - Tel-Aviv, le Paradoxe, du 4 novembre au 6 décembre - , d’Alain Resnais, le 1er octobre 2009 - Chéries-Chéris (Festival de Films Gays et lesbiens, Trans et +++ de Paris), du 16 au 22 novembre 2009 - Cinéma du Québec, du 7 au 13 décembre 2009

- DES FESTIVALS : Pocket Films, Cinéma au Clair de Lune, l’Étrange Festival,… BABEL

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KULTUUR

THÉÂTRE ~ EXPO ~ BD ~ DVD ~ ÉDITION ~ MUSIQUE ~ PROJEKTEUR SUR UN CINÉMA

Philoctète & Saturne, ou le culte de la douleur

Par Natacha STECK

L’Odéon a-t-il choisi de mettre sa rentrée sous le signe du masochisme ? Deux pièces se partagent l’affiche en octobre : Les Enfants de Saturne, dernière création d’Olivier Py – directeur du théâtre en question –, et Philoctète, variation autour de la tragédie de Sophocle par le poète Jean-Pierre Siméon, mise en scène par Christian Schiaretti. La solitude, la famille, la transmission et la répudiation sont autant de thèmes qui opposent ces deux pièces, trouvant cependant leur point de résonance dans une certaine culture de la douleur et de l’automutilation. Sombre histoire que nous propose Olivier Py. Saturne, un patriarche sur le déclin voit disparaître l’œuvre de sa vie, un journal : La République. Dépité par ses enfants plus névrosés les uns que les autres, il va faire un pacte funeste avec son fils illégitime, Ré, qui achèvera de les consumer tous dans leur douleur. Ans (Amira Casar) et Paul s’aiment d’un amour charnel, mais ne pouvant assumer l’enfant qui doit naître de cette union, ils vont sombrer avec désespoir dans des délires autodestructeurs. Quant à l’aîné, Simon, interprété par le toujours remarquable Philippe Girard, il est torturé par une passion dévorante pour son fils Virgile. Ce désir incestueux, il l’assouvira sur un autre, un être lumineux, Nour, si dévoué à la mémoire de son père mort qu’il acceptera la torture physique. La fin de La République annonce le début de l’anarchie et les tourments de chacun sont poussés à leur paroxysme. Au service de cette pièce qui mêle le politiquement incorrect au lyrisme dont sait faire preuve l’écriture d’Olivier Py, ce dernier signe une mise en scène magistrale. Au cœur de la salle, le gradin lui-même se met à tourner et emporte les spectateurs dans le tourbillon délirant de l’apocalypse. Si l’on retrouve en filigrane les thèmes récurrents d’Olivier Py, tels la religion ou l’homosexualité, Les Enfants 22

oct. 09

de Saturne est sans doute sa pièce la plus sombre, mais aussi la plus réussie. Si Olivier Py s’attache aux désastres de la famille, c’est à la figure de l’homme seul que fait référence Philoctète. Le directeur du TNP, Schiaretti, fait appel à Jean-Pierre Siméon, poète associé au fameux théâtre de Villeurbanne, pour peindre un nouveau visage à ce personnage mythique de Sophocle. Philoctète, compagnon d’Héraclès, hérite de son arc invincible, mais mordu par un serpent maléfique, son pied sera voué à pourrir et à le faire souffrir inlassablement. Abandonné sur une île désertique par Ulysse en route pour Troy, il vivra neuf années durant dans la solitude et la souffrance, aigri par la trahison. Mais seul son arc est capable de donner la victoire aux Grecs sur Troie, et le stratège Ulysse envoie Néoptolème, fils du défunt Achille, pour tromper Philoctète et voler son arme. Cependant, le jeune homme sera touché par l’infini déchirement de ce vieillard humilié. Qui mieux que Laurent Terzieff pouvait porter avec autant de génie ce personnage ? Si la mise en scène ne brille pas d’un éclat inoubliable, on se délecte toujours avec une certaine jubilation du spectacle qu’offre Terzieff, qui fait avec Philoctète la démonstration de son talent incomparable, allant de la plainte la plus abyssale à l’éructation foudroyante en passant par un humour presque dandystique et sarcastique. S’il faut avoir vu Laurent Terzieff une fois dans sa vie, Philoctète est l’occasion idéale. Les Enfants de Saturne, aux Ateliers Berthier-Odéon, jusqu’au 24 Octobre Philoctète, Théâtre de l’Odéon, jusqu’au 18 Octobre


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TROIS PLANCHES

À NE PAS RATER Pour bien commencer l’année, nous vous proposons un petit tour d’horizon de trois pièces à voir ou à revoir et risquant d’êtres évoquées dans ces pages durant les prochains mois.

Par Léa GERMAIN

Après la fantastique fable Peer Gynt, le scénographe et metteur en scène Stéphane Braunschweig poursuit son travail à la Colline avec deux pièces plus politiques du norvégien Ibsen : Une maison de poupée et Rommersholm. Ces pièces aux thèmes et aux tonalités diverses comportent au moins un point commun : la recherche par les personnages de leur moi profond et l’aspiration à une vie différente, à rebours de la norme. Nous vous conseillons donc grandement de ne pas rater Une maison de poupée, critique acerbe des rôles traditionnels des hommes et des femmes au XIXe. Nora vit enfermée dans son mariage, comme une poupée à qui son mari donne tout en même temps des directives et des surnoms mielleux. Elle réalise un jour qu’elle doit partir et éprouver le monde par elle-même pour revenir en adulte et faire de leur vie commune un véritable mariage. Ibsen dans cette pièce se découvre en féministe avant l’heure, qui condamne cette société d’hommes jugeant les femmes d’un point de vue masculin. La modernité et l’audace de cette dernière lui ont d’ailleurs value d’être adaptée de nombreuses fois au cinéma. 14 novembre 16 janvier à la colline.

a voir du au

Autre grand classique, Soudain l’été dernier sera mis en scène par René Loyon au théâtre de la Tempête (Cartoucherie de Vincennes). Il s’agit d’une œuvre de Tennessee Williams, brillant écrivain et dramaturge américain, caractérisé entre autre par son homosexualité, son alcoolisme et ses troubles psychiatriques et auteur du célèbre Un tramway nommé Désir, il fut adapté au cinéma par les plus grands, dont Mankiewicz qui signa l’adaptation de Soudain l’été dernier. L’histoire débute avec la mort inexpliquée de Sebastien Venable, héritier d’une famille de notables de Cabeza-de-Lobo. Sa cousine Catherine, seule témoin du drame, sombre dans la folie pendant que madame Venable nourrit le dangereux projet de lobotomiser cette dernière. Le docteur méfiant opère une plongée dans le psychisme de Catherine et fait éclater au grand jour des vérités secrètes sur le défunt, qui vont libérer Catherine mais obliger Mme Venable à trouver refuge dans un monde imaginaire. Sur un fond d’une Nouvelle-Orléans fantasmée, moite et suffocante, Tennessee Williams aborde ainsi ses thèmes favoris, à savoir les marginaux, la folie, l’homosexualité et la relation ambiguë de l’homme blanc avec l’étranger, entre désir et dégout.

Enfin, après un coup de foudre en août dernier pour Quai ouest de Bernard Marie Koltès au théâtre du Gymnase Marie-Bell, on attend impatiemment l’arrivée à la Colline de Combat de nègres et de chiens mis en scène par Michael Thalheimer, histoire de ce « petit monde blanc qui vit en Afrique de l’Ouest, retranché derrière ses palissades » comme il le disait lui même, et qui permettra de faire écho à l’œuvre de Tennessee Williams évoquée précédemment. Koltès c’est d’abord un texte comme un bijou brut, à la fois très stylisé mais d’une violence et d’une justesse troublantes, et puis c’est aussi un panel de personnages fascinants entre animalité et humanité extrême. a voir donc, du

26 mai au 25 juin Colline.

au théâtre de la

a la cartoucherie du

13 novembre au 13 décembre.

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KULTUUR

ELLES@CENTREPOMPIDOU

Par Laure GIROIR

Cette année, elle s’intitule Elles@centrepompidou, a lieu du 27 mai 2009 au 24 mai 2010 et nous dévoile plus de 500 œuvres de 200 artistes allant du début du XXe siècle à nos jours : une première mondiale ! Cette exposition au concept unique rassemble les artistes par affinités artistiques, dans des pièces allant des « Pionnières » (dont Frida Kahlo) aux « Immatérielles » (avec Louise Campbell), en passant par « Feu à volonté » (représenté notamment par Niki de SaintPhalle), « Corps-slogan » (d’Orlan), « eccentric abstraction » (dont Louise Bourgeois), « une chambre à soi » (titre d’un roman de l’anglaise Virginia Woolf et comprenant, entre autres, Sophie Calle) ainsi que « Le mot à l’œuvre » (par Barbara Kruger). On retrouve des figures emblématiques de l’art actuel ayant récemment fait l’objet d’expositions monographiques temporaires au Centre Pompidou (telles que les artistes contemporaines Sophie Calle, Annette Messager ou encore Louise Bourgeois). Surréalistes, primitives, abstraites, conceptuelles, post-modernes,... ces artistes-femmes, amazones de leur temps, ont toutes, à leur façon, participé à l’histoire de l’art. Ce nouvel accrochage rend hommage aux créatrices féminines en reconnaissant à sa juste valeur leur place dans l’histoire de l’art. Un statut qui n’a pas toujours été évident à acquérir, quand on pense par exemple que l’entrée à l’école Beaux-arts ne leur fut accordée qu’en 1897, suivant de près d’un siècle les hommes.

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En effet, si la place des femmes dans les écoles et les galeries d’art s’est stabilisée pour devenir satisfaisante, elles restent très peu nombreuses à être exposées à une plus haute échelle. Ainsi, seuls 16% des collections de Beaubourg sont l’œuvre d’artistes-femmes. L’intention de rattrapage de l’institution face à cette béance notoire est donc fort louable. Minoritaires dans ce milieu essentiellement masculin, les artistes-femmes ont toujours cherché à se démarquer en créant des œuvres très personnelles, à partir d’une démarche hautement subjective. Ces dernières, souvent subversives et issues de meurtrissures, parfois incisives ou indomptables, mais toujours sensibles, revendiquent l’émancipation de la femme, dénoncent l’utilisation abusive de leur corps, renoncent aux images traditionnelles de la famille, du couple et du quotidien. Elles@centrepompidou réussit donc le pari et parvient fidèlement à retranscrire l’histoire de la production artistique féminine à travers les mouvements culturels et sociaux. L’on peut néanmoins regretter que les artistes-femmes des années 60-70, celles à qui l’on doit pourtant le plus cette émancipation d’après-guerre, ne soient pas davantage mises en avant, et qu’au contraire, le féminisme soit si présent et pressant, que l’on en vienne à tiquer souvent. À celles et ceux qui se demandent encore si l’art a un sexe...


KULTUUR

“Got me a movie, I want you to know/ Slicing up eyeballs/ I want you to know” DOOLITTLE de Pixies (1989)

Par Romain Genissel

Vous savez peut être que le groupe Pixies a donné deux concerts au Zénith de Paris le 15 et 16 octobre 2009. Ils y ont joué l’intégralité de leur second album Doolittle ainsi que des faces B et quelques tubes en rappel. Je n’y étais pas. J’ai pris peur. Je vais vous expliquer pourquoi, je vais expliquer comment. La première fois que les Pixies ont frappé mon oreille, je les ai refusés. Tout l’inverse d’une révélation. Un ami revenait de vacances où il avait récupéré le Graal, un live des Pixies en K7 audio. En véritable assassin sonique, j’ai arrêté la bande. Et sans doute créé des frustrations. Les pulsions adolescentes ne s’expliquent pas. Ce concert je l’ai écouté plus tard. Il est pur. Il a été enregistré à Amsterdam en 1990. Il existe même un DVD. Le concert auquel je me refuse d’aller se déroule, lui, en

du parolier Black. Surtout, en farouche indébarassé des schémas et Si vous ne connaissez pas les logiques de marché (voir Pixies, vous avez sans doute déjà les pochettes sur lesquels entendu leur tube « Where is my ils n’apparaissent jamais), Mind ? ». Cette chanson approles Pixies inventent cette che la perfection pop. Mais je ne structure Couplet suspenpeux plus (vraiment) l’écouter. du / Refrain urgent avec laDe toute façon vous l’écoutez à quelle Nirvana s’envolera. ma place. C’est un bon deal. VoDu martial « Debaser » à tre premier Where is my Mind ?, l’ultime « Gouge Away », vous l’avez a priori vécu en écho d’immeubles Black et sa bande vous envoient des ondes qui explosent sur la B.O du film  Fight Club. turbulentes (« Dead ») et ces uppercuts géComme vous, j’ai été frappé devant le défilé niaux (« Hey ») qui côtoient les plages les plus édeniques («La la love you»). Les râles les plus stroboscopique des images de bestiaux («Tame») couchent Fincher. L’ecchymose s’est ra“Votre premier avec des accents faussement pidement effacée. «  Where is my Mind ? », rêveurs (« Here Comes your Cette superproduction savonvous l’avez a priori man »)… neuse glisse aujourd’hui sur 2009. Il est impur. Je vais vous expliquer pourquoi.

vécu en écho

mes rétines et ne libère plus Et pour que toutes ces beaud’immeubles qui qu’un vague sourire amusé. Le tés restent intenses, pour explosent sur la B.O film ne creuse pas, il n’est bon que ce compact reste intact, du film Fight Club.” qu’à détruire et revendiquer je m’y refuse… L’image des qu’Hollywood ne produit plus Pixies en 2009 n’est pas celle de rêve et que le Système sait produire de que je veux préserver. Triste sentence. La l’alternatif. Du frisson en boites qu’Hollywood plupart sortiront émerveillés, fiers d’avoir été a comme toujours très bien récupéré et qu’il chahutés et goûté un ultime frisson. Pendant aurait d’ailleurs pu vendre avec un stick (fluo) ce temps, en véritable puriste convaincu, je du style : « Le remède à vos frustrations  ». ferme les yeux et suis la route du singe qui acEt pour en revenir à « Where is my Mind ? », il est déconcertant que les images de Fincher soient entrées en collision avec un titre qui ne le méritait pas. Comme plus tard, désagréable fut la vision d’étudiants utilisant ce morceau en tant que caution « tourmentée » de leurs « petits moments de théâtre »... « I Bleed ». Ces lointaines images gravées dans ma mémoire restent inacceptables. Comme j’ai l’intime conviction que voir les Pixies jouer Doolittle vingt ans après sa sortie risque de produire de malheureuses visions. Après leur premier(s) effort(s) Surfer Rosa & Come on Pilgrim, les Pixies sortent, début 89, un album définitif, fondamental. Révélé à la fin d’une décennie où Sonic Youth, The Replacements rallumaient à coups de distorsions et de cris étranglés les cendres du Punk new-yorkais, le quatuor de Boston avait tout ingurgité pour mieux le recracher. Dirigé par un lutin brailleur au physique de bûcheron canadien (Francis Black), la formation reposait sur la rythmique d’un cogneur martien (David Lovering), les soli incisifs d’un psycho-killer (Joey Santiago) et les lignes gracieuses, obsédantes de la bassiste (et choriste) la plus cool du monde (Kim Deal). Enregistré en six semaines sous la houlette de Gil Norton, Doolittle devient cette vague mutilée d’une décennie qui, se terminant, allait fortement éclabousser la suivante. Boudé outre-Atlantique, l’album est en Europe chéri par une frange révélée par les sonorités abrasives et les textes abstraits

cède à un paradis sonore et immaculé (« Monkey goes to Heaven »).

nota

>

après

4

albums et une discographie

proche de la perfection beatles, les membres de pixies apprennent à la radio par la voix de francis black que le groupe est fini. Ils se détestent. sous les demandes des organisateurs de festivals, les pixies se reformeront en

2004

et jetteront plus tard les bandes d’un album qu’ils jugent impubliable.

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retribution Écrit et réalisé par Kiyoshi Kurosawa Avec Koji Yakusho, Riona Hazuki, Ryo Kase 1h 39 / Film produit en 2006 DVD édité en 2008 chez HK Video

Par Pierre-Louis Coudercy Des cadavres sont retrouvés noyés dans de l’eau salée, et plusieurs indices portent à croire qu’il s’agirait du même auteur. Tokyo et sa baie deviennent aussi menaçantes que ne peut déjà l’être cette eau salée, qui s’apprête à inonder toujours un peu plus les vieux quartiers désaffectés de la ville à chaque nouveau tremblement de terre. Enquêtant sur les crimes, le détective Yoshioka se retrouve bientôt dans une situation surréaliste lorsqu’il se rend compte que les indices le pointent tous du doigt, et que les apparitions d’une femme vêtue de rouge le hantent jour et nuit. Quatrième production de la série Jap’Horror, accordant par principe carte blanche aux cinéastes nippons experts du registre de l’épouvante, Retribution ne saurait être mis dans le même panier que la plupart des autres histoires de fantômes japonais. Essentiellement parce qu’il s’agit de Kiyoshi Kurosawa en personne, et que son travail développe pleinement les pistes thématiques du genre au lieu de les survoler. Bien au-delà de l’icône de l’esprit vengeur popularisée entre autres par Sadako (Ring), la femme vêtue de rouge incarne le passé d’un inconscient collectif. Tantôt perdus dans les méandres de leur mémoire, tantôt gangrenés par une dégénérescence des relations humaines, les personnages de Retribution ne souhaitent qu’aller de l’avant et faire table rase de ce qui est révolu, quitte à nier leurs dettes envers le passé et à l’écraser sous de faux projets d’avenir et sous la perspective de la modernité. Cependant, le mal-être généralisé d’un Japon victime d’excroissance précipitée ne peut être refoulé de la sorte. C’est d’ailleurs à travers une étonnante séquence où le fantôme surgit avec fracas d’une large fissure murale que la culpabilité de chacun surgit de leur propre intérieur et leur rappelle qu’il n’est pas permis de fuir ses responsabilités, ni d’oublier ses torts. À l’image de ce cri profondément troublant que pousse la femme-fantôme, la prise de conscience du passé se mue en une douleur déchirante, inexprimable, et le chemin de la rédemption implique un prix terrible à payer...

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KULTUUR

Blood Rain Réalisé par Kim Dae-seung Écrit par Kim Seong-jae & Lee Won-jae Avec Cha Seung-won, Park Yon-woo, Ji Sung 1h 54 / Film produit en 2005 DVD édité en 2008 chez HK Video

ycreduoC siuoL-erreiP raP Dans la Corée féodale du 19è siècle, le brutal assassinat d’un marin secoue tous les habitants de la petite île de Donghwa, renommée pour sa fabrique de papier. Pire, le navire des marchandises est brûlé le même soir, lors de la fête locale. L’enquêteur Lee Won-kyu est aussitôt dépêché par le gouvernement, afin d’élucider ce sombre mystère. Mais même après son arrivée, les meurtres se poursuivent, plus sanglants les uns que les autres. Parmi les habitants terrorisés, on chuchote qu’il s’agirait de la vengeance post-mortem de quelqu’un connu de tous... Blood Rain fait sans nul doute partie de ces agréables surprises ayant injustement réalisé de discrètes entrées, que ce soit sur son territoire ou à l’étranger. La qualité du film ne tient pas nécessairement à la mise en scène de son jeu de piste et de fausses pistes, car si les vingt premières minutes font effectivement étalage d’une entrée en matière assez concrète dans le registre du thriller criminel, les niveaux de lecture viennent progressivement se superposer les uns aux autres, aussi sûrement que se multiplient les différents meurtres, et aussi méthodiquement que s’enchaînent les retournements de situation. Bien plus qu’un polar en costumes coréen saupoudré de surnaturel, le film de Kim Dae-seung dresse le portrait d’une société féodale où la lutte des classes sociales entre l’aristocratie et la bourgeoisie n’a d’égale que l’emprise encore tenace de la superstition sur la masse populaire. De même, la façon de penser résolument moderne de l’enquêteur Lee Won-kyu se confronte violemment aux mentalités insolemment conservatrices du pouvoir préétabli. Plus le dénouement approche, et moins il semble question de retrouver le mystérieux coupable que de débattre sur ce que doit être la Justice, et ce sur quoi doit se fonder son jugement. À l’image de cette dominante chromatique rouge qui imprègne immédiatement les premières scènes diurnes du film, l’odeur du sang laisse planer son omniprésente menace, et les scènes de meurtre, d’une violence rare et montrées sans aucune restriction, n’en sont que les vannes de décompression, laissant le trop-plein se déverser avec fracas. L’on pourrait y voir sans détour la métaphore d’une culpabilité collective qui n’en deviendrait que d’autant plus palpable, là où le système féodal, figé par des traditions ancestrales, empêcherait la société de tourner la page sur ses erreurs passées...

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KULTUUR

Entre Histoire et cinéma... Le Tombeau de Tommy d’Alain Blottière, NRF

Par Piera Simon À l’heure où le film de Guédiguian sort en salle, les résistants immortalisés par l’affiche rouge (tout d’abord la vraie, et plus tard celle d’Aragon, chantée ensuite par Léo Ferré) ont aussi les honneurs de l’actualité littéraire : dans Le tombeau de Tommy, Alain Blottière s’attache à raconter l’histoire du tournage d’un film consacré à l’un des FTP-MOI (Francs Tireurs Partisans - Main d’Œuvre Immigrée), Thomas Elek, dit Tommy. En ces temps politiques, il est sans doute de bon ton de souligner le « I » de MOI ; Blottière en tout cas insiste : le blond Elek, quoique juif et d’origine hongroise, passera longtemps pour un petit angelot inoffensif et français. Ce qui ne l’empêchera pas d’être aussi âpre au combat que ses camarades orphelins à cause de leurs cheveux un peu trop noirs et frisés. Mais l’intérêt principal du livre réside sans doute dans le va-et-vient entre le récit de l’histoire d’Elek (plus ou moins exacte, appuyée sur une recherche soi-disant importante, mais en partie fantasmée par le réalisateur à l’origine du scénario qu’on lit en italique) et l’histoire du tournage. Le réalisateur, utilisant la première personne, raconte le tournage et surtout les affres de son interprète principal, Gabriel, qui fait de plus en plus corps et âme avec son personnage. C’est un peu comme si on lui demandait d’imaginer un petit juif déporté : malgré (ou à cause de) ses 17 ans, Gabriel souffre de cette identification de plus en plus importante. Même si on peut lui reprocher une tendance à trop verser dans l’émotion, le livre de Blottière interpelle : que se passe-t-il lorsqu’une partie d’un livre finit par gangrener l’autre ? Lorsque la linéarité d’un texte rend floues des frontières temporelles pourtant marquées ? Lorsque personnages fictionnel et historique se mêlent ? Lorsque l’acteur se prend trop à son jeu ? Lorsque la littérature s’essaye à parler de cinéma ?

Le Roman de l’été de Nicolas Fargues, P.O.L

Par Sonia DESCHAMPS

Le roman de l’été est comme l’été justement, fugace, il passe beaucoup trop vite. Ce roman fait partie de ces écrits qui « se lisent tout seuls ». Alors bien sûr, l’expression ne veut littéralement pas dire grand-chose, mais l’image est là. On lit, lit, lit, sans voir le temps passer et la fin arrive bien trop vite. Et cette volonté de ne pas voir l’histoire se terminer est d’ailleurs bien la preuve du caractère agréable de la lecture. La fin pourrait tout aussi bien ne pas arriver d’ailleurs, puisque celle-ci est on ne peut plus ouverte. Mais après tout, préférons un sentiment de « pas assez », à un sentiment de « trop » Les histoires contées sont celles de la vie quotidienne. Ici, aucun destin miraculeux, aucune situation rocambolesque. Tout ce qui arrive aux différents personnages pourrait tout aussi bien arriver au lecteur ou tout du moins à des personnes de son entourage. Et c’est bien là la force des romans de Nicolas Fargues, parler du quotidien, le rendre passionnant quand bien même ce qui se déroule ne l’est pas. Il y a dans la façon d’écrire du romancier un fort pouvoir d’identification. Le lecteur a l’impression de connaître les personnages qu’il voit évoluer. Oui, qu’il « voit » évoluer, parce qu’au fur et à mesure qu’il lit les pages, ce sont des images qui se présentent à lui. Parmi les personnages, il y a John qui, à 55 ans, se décide à écrire un roman (qui ne s’est pas déjà dit « oh ! Et si j’écrivais quelque chose ? »), mais qui réalise vite que la tâche n’est pas aussi aisée qu’il y paraît. Il se demanda : « Comment, par exemple, écrire sans platitude ce que je viens de penser là ? Avec quels mots ? Et en commençant par quoi ? Pourquoi certains arrivent à donner l’impression que c’est si simple ? Qu’ils peuvent se permettre d’écrire n’importe quoi, d’écrire comme ils parlent, d’écrire comme ils respirent : ça donnera toujours de la littérature ? Comment écrire sans paraître convenu ? Sans se référer à des formes littéraires déjà éprouvées ? Comment faire table rase de toutes ses influences, de tous les tics de langage de tout le monde pour laisser venir ses propres mots ? Comment être soi-même tout en s’assumant héritier d’un langage universel ? Comment écrire tout à fait librement, sans complexes, au culot ? Est-ce que cela s’apprend ? Comment ne pas trop se poser de questions sur la forme et se mettre enfin au boulot ? « Et puis il y a sa fille, Mary, qui décide de venir lui rendre visite pour les vacances, accompagnée de son petit ami et d’une jeune Italienne rencontrée en vacances qu’elle apprécie toujours plus... (Ah le pouvoir de ces « … » !) Il y a aussi le voisin - haut en couleurs – et sa famille : son fils (flanqué d’une femme qui n’a de cesse de râler), sa propre femme… Au final, le roman présente toute une galerie de personnages que le lecteur prend toujours plaisir à retrouver. Le roman de l’été est un livre léger sans être creux, définitivement agréable à lire.

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oct. 09


KULTUUR

Transmetropolitan Par Marie Beaunay

Âmes sensibles s’abstenir ! Encore peu connue dans l’Hexagone, l’œuvre de Warren Ellis vaut le détour. Tout d’abord pour le coup de crayon de Darick Robertson : soignées et détaillées, les planches croulent sous les détails, provoquant une immersion quasi-immédiate dans l’histoire. Mais aussi et surtout pour son scénario et ses personnages hauts en couleurs ; et notamment le héros Spider Jerusalem, journaliste adulé et haï qui est une référence directe à Hunter S. Thompson, le célèbre journaliste gonzo, auteur de Las Vegas Parano. Courez donc découvrir cette perle rare qui détonne au milieu des niaiseries si courantes dans les comics actuels et rejoignez la toile de Spider.

transmetropolitan

1 : le come-back du siècle collection « vertigo big books », 2007 tome

panini

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Projekteur sur un cinéma

KULTUUR

A la découverte

des cinémas

parisiens A deux pas des Champs-Elysées, Le Balzac. Rencontre avec Jean-Jacques Schpoliansky qui en est le directeur… Un vrai personnage !

Les origines « Création du Balzac en 1935, par mon grand-père. Mon père reprend la salle en 46. Jusqu’en 70, c’est la grande salle d’exclusivité, pour les films français, avec Jour de fête, Les vacances de Monsieur Hulot, La ronde, Casque d’or, Manège, A bout de souffle, Les tontons flingueurs, La guerre des boutons… C’est vraiment extraordinaire ! Et en 70, hop ! Les circuits ont pratiquement tout pris sur les Champs Elysées, et mon père se retrouve seul. Et à sa mort, en 73, j’arrive ! Voilà ! Et à ce moment-là, j’ai une salle, mais plus de films… Donc il a fallu me démener pour aller plus loin et trouver des films, donner envie de venir au Balzac et arriver à être encore là ! 35 ans après ! » « Le » film « Il y a un film qui m’a toujours suivi dans la vie, qui s’appelle Vol au-dessus d’un nid de coucou, de Monsieur Milos Forman, qui m’a éclairé sur l’ambition d’un cinéma et je crois que c’est ça qui m’a donné envie de communiquer avec le public ». Un directeur-animateur « Je présente les films depuis 22 ans, tous les jours, et puis je fais beaucoup d’animations, que ce soient des animations musicales, que ce soient des animations gastronomiques et que ce

soient des animations avec, justement, des ciné-concerts, pour les enfants, on n’arrête pas de faire des animations, on fait plus de 100 événements par an, à coté des films que nous passons traditionnellement bien sûr ». Un rôle pour le cinéma « Il y a une baisse de fréquentation c’est évident, mais nous faisons un travail particulier – en tout cas j’estime, moi, faire un travail particulier - qui mérite que ça perdure et je fais tout pour continuer ce travail, avec des films… Que ce soient des films d’auteurs moins connus ou des films d’auteurs un peu plus connus, mais tout ceci pour la bonne cause ! Donner envie au public de sortir de chez lui, de voir encore la magie du cinéma, avec le rideau qui s’ouvre, la lumière qui s’éteint… En commun ! Et pas simplement avec « Bobonne passe-moi le CocaCola entre deux pubs, etc. Non, le cinéma c’est autre chose et c’est ça qui me fait plaisir : être toujours présent pour que le public ait envie de sortir de chez lui. C’est un lieu de vie le Balzac en fait, c’est un lieu où les gens ont envie d’être ensemble, et je crois que c’est ça demain qui sera fondamental. Qu’il y ait encore des lieux fédérateurs, pour que le public ait envie de vivre des moments ensembles. C’est ça qui fera que le monde changera peut-être un petit peu ! » Recueillis pas Sonia DESCHAMPS

Prochainement au Balzac : Le lundi 9 novembre : Soirée hommage à Rostropovitch (deux films et un concert). Le mardi 10 novembre : Ciné-concert, Les quatre cavaliers de l’Apocalypse de Rex Ingram. Le dimanche 22 novembre : Ciné-concert, Voyages extraordinaires et autres films de Georges Méliès. Le lundi 23 novembre : Ciné-concert, Faust de Murnau.

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“Donner envie au public de sortir de chez lui, de voir encore la magie du cinéma, avec le rideau qui s’ouvre, la lumière qui s’éteint…”

Le Balzac 1 rue Balzac / 75008 Paris www.cinemabalzac.com


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The Limits of Control de Jim Jarmusch, sortie le 2 décembre 2009

Les auteurs : Marie Beaunay Cyril Shalkens Sophie Boyens Laure Giroir Sonia Deschamps Charlotte Pilot Léa Germain Romain Genissel Pierre-Louis Coudercy Magdalena Kraczynski Elise Le Corre Nicolas Thys Roseline Tran Natacha Steck Piera Simon Conception éditoriale : Romain Genissel Conception graphique : Fabien Fery Dessins : Valentin Szejnman Correcteurs : Loup Coudray Le texte est composé en : Humanist Cochin Helvetica Neue Garage Merci à Jessy Baudin & Serge Perri, Photographes CONTACTS : polepresse.cinesept@gmail.com BABEL wanted : Annonceurs, Publicitaires, mécènes et des kilomètres de papier pour s’étendre un peu partout. Vous voulez recevoir les prochains numéros de BABEL : Inscrivez-vous sur la mailing list aboquartierlibre@gmail.com Prochain numéro : Décembre 2009


“Chaque langue voit le monde d'une manière différente”. F. Fellini


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