Les ancêtres du futur by baptiste chevalier

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LES ANCÊTRES DU FUTUR BAPTISTE CHEVALIER



LES ANCÊTRES DU FUTUR Mémoire de Master de l’École de Design Nantes Atlantique et du CFA, promotion Niemeyer Spécialité : Management du Design et de l’Innovation Rédigé par : Baptiste CHEVALIER Déposé le : 11 avril 2014 Sujet : La mémoire dynamique Problématique : Comment l’identité des personnes peut-elle s’organiser autour de codes sociaux et environnementaux hétérogènes ?

Couverture créée par Baptiste Chevalier sur la base photographique de : Lena Johnson, Indian Reserve, Gowanda, NY © Rogovin Milton & Library Of Congress, 1963, Robopocalypse © Twentieth Century Fox & Steven Spielberg, 2013.

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“Les choses sont entendues, vues, touchées, senties simultanément. Leur bruit, leur son, leur forme, leur odeur, leur sensation au toucher vont tous ensemble, 2

forment un tout. Cette correspondance naît de l’expérience et des associations.” — Des yeux pour entendre, Olivier Sacks, 1996.


Remerciements Ce mémoire n’aurait jamais pu être écrit sans de nombreuses rencontres qui ont engendré des relations amicales, relations qui ont entraîné l’écriture. Ce mémoire doit tant aux personnes qui ont pris le temps de m’écouter, de m’aiguiller et de donner leur avis, notamment Madame Mottin directrice de la maison de retraite de la Guilmarais de Vitré et tutrice de mon projet de fin d’études ainsi que tout le personnel et les résidents. Ces écrits doivent beaucoup à la société MMO International et en particulier à Rémy Jaffrès, directeur recherches-développements et marketing, tuteur de mon apprentissage de designer au sein de l’entreprise. Je tiens à remercier les professeurs et intervenants de l’École de Design Nantes Atlantique, Madame Lauréline Vantorre mon encadrante, pour la réalisation de ce mémoire, pour ses conseils et son enthousiasme, JeanYves Chevalier, responsable de la formation Master en apprentissage, Management du Design et de l’Innovation, Laurent Neyssensas pour son aide et Philippe Blanchard, enseignant et chercheur en innovation, que je remercie particulièrement pour ses apprentissages et ce grand service rendu. Merci à Susan Burgess pour ses apports en anglais. Salutations aux membres de la M.D.I. promotion 2014 pour leurs multiples avis et moments de joie. Merci à ma Maman pour ses nombreuses corrections, à mon père et à sœur pour leurs soutien et leurs apports généraux.

Baptiste Chevalier, janvier 2014.

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Avant-propos Tout au long de mon parcours d’études, je me suis posé la question de la finalité de mes apprentissages. Pendant ces dernières années, beaucoup de personnes autour de moi m’ont répété que le cheminement est aussi important que le résultat. Je l’ai bien compris et c’est pourquoi aujourd’hui il m’est possible de résumer mes études en trois mots : Interpréter, Inspirer, Insuffler. En plaçant ces verbes dans une phrase cela donne : interpréter de l’information permet d’être inspiré pour insuffler des réponses. Mon regard, mon attention, mon écoute se portent au quotidien sur la société et ses usages. C’est une source d’informations qui ne s’épuisera à aucun moment permettant de constater des envies et besoins. Différents horizons s’ouvrent chaque jour par des simples choix comme quels vêtements vais-je mettre ce matin, mais aussi par des plus complexes. Le cas s’est posé lors de la définition du sujet de fin d’études sur lequel je travaille maintenant depuis six mois : La mémoire dynamique. La mémoire est définie par un “ensemble des faits passés qui reste dans le souvenir des hommes, d’un groupe”1 et je rajouterai même d’un lieu et d’un objet. tLa dynamique symbolise un 4

“ensemble de forces qui entraînent, provoquent un mouvement, une évolution à l’intérieur d’une structure en développement”2 et même une évolution dans le temps. Ce mémoire est une réflexion qui représente l’aboutissement de mes études allant du travail de la matière au design. Il est une médiation entre mes opinions, mes sentiments et des lectures d’ouvrages qui ont fait évoluer ma vision des choses. Son ensemble scénarise le processus de la mécanique mentale du designer. Il regroupe également des arguments justifiant l’utilité d’une personne innovante dans un projet complexe de rupture. Le titre de ce mémoire “LES ANCÊTRES DU FUTUR” se rattache à mon sujet “La mémoire dynamique” sur différents points. Le premier est que les ancêtres sont des seniors ayant un potentiel à étudier unique pour un designer car ils regroupent beaucoup de critères et de contraintes. Le second est le fait que la mémoire de ces “ancêtres” sera de plus en plus en mouvement à cause de l’évolution des technologies. Cette évolution vers le futur est le troisième point rejoignant la dynamique. Réfléchir à ce que seront les seniors dans 1. Dictionnaire, Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 2. Dictionnaire, Ibid.


le futur me pousse à m’intéresser non seulement aux seniors actuels mais également aux personnes plus jeunes. Le projet de fin d’études qui suit le mémoire concrétise une réflexion portée sur le sujet en répondant à une demande ou, dans mon cas, à l’anticipation d’un besoin. Cette réponse peut être caractérisée par différents moyens comme un produit, un service, une interface, un espace ou encore un graphisme. C’est le designer qui juge de la meilleure façon d’y répondre suivant ses opinions, ses affinités et sa logique. Bien évidement pour imaginer et créer une telle réponse la démarche de travail est complexe et nécessite une adaptation suivant le type de projet. Si je devais présenter les grandes lignes de ma démarche, je dirais qu’elle fait essentiellement appel à une réflexion psychologique puis à un travail de représentation. La première partie est une “image flash” dans l’esprit et la seconde nécessite un temps plus ou moins long pour l’exprimer. Le résultat pourra ainsi être conservé et présenté. Le mémoire est pour moi un état des lieux, une affirmation de ma position de designer et une projection dans le futur en émettant des hypothèses fondées sur des faits actuels réels. Le mémoire fonde la base du projet qui sera bâti brique par brique. Mon envie est de développer, à travers ce travail, une réflexion conséquente sur un sujet afin d’affirmer mon goût prononcé pour les composantes naturelles du monde, pour les mouvements de société. Cette réflexion me servira dans ma vie professionnelle future et je devrai continuer à la développer pour avoir des pensées visionnaires. Quelques lignes viennent d’être écrites et le mot design(er) apparaît cinq fois. Je me dois d’apporter une définition de ce terme. Cela permettra de mieux comprendre la suite de mes propos. Je vais citer six définitions du mot exprimées par des personnalités qui ont eu un impact significatif dans mon métier. Ensuite, du haut de mes vingt-cinq ans j’exprimerai la mienne. - Léonard de Vinci, né en 1452, homme d’esprit universel : Les détails font la perfection et la perfection n’est pas un détail. - Le Corbusier, né en 1887, architecte, urbaniste : Nos yeux sont faits pour voir les formes sous la lumière; les ombres et les clairs révèlent les formes; les cubes, les cônes, les sphères, les cylindres ou les pyramides sont les grandes formes primaires que la lumière révèle bien; l’image nous en est nette et tangible, sans ambiguïté. C’est pour cela que ce sont de belles formes, les plus belles formes. Tout le monde est d’accord en

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cela, l’enfant, le sauvage et le métaphysicien. - Raymond Loewy, né en 1893, designer industriel et graphiste : La laideur se vend mal. - Tomás Maldonado, né en 1922, designer et enseignant à l’école d’ULM : Le design est une activité créatrice qui consiste à déterminer les propriétés formelles des objets que l’on veut produire industriellement. Par propriétés formelles, on ne doit pas entendre seulement les caractères extérieurs, mais surtout les relations structurelles qui font d’un objet (ou d’un système d’objets) une unité cohérente. - Victor Papanek, né en 1923, designer responsable (écologie et social) : Le design est devenu l’outil le plus puissant avec lequel l’homme forme ses outils et son environnement. - Philippe Starck, né en 1949, designer : Anticiper est un devoir pour tout le monde. Qui n’anticipe pas est incapable de contrôler son présent. Évidemment, pour des gens comme moi qui interviennent sur la production, avec des délais, voire des mises en œuvre étendues sur plusieurs années, l’anticipation est une obligation. C’est même maladif chez moi, mon problème principal étant de ne vivre jamais l’instant 6

présent et d’être en permanence projeté dans un autre espace-temps. - Ma définition personnelle se tourne vers l’avenir, mais aussi vers le passé. Aujourd’hui tout va très vite comme les changements de mode ou encore la sensibilité des personnes. La voici donc : Le designer est une personne, un promoteur, un médiateur entre un marchand et un utilisateur. Son rôle est d’anticiper le futur dans le but de le rendre meilleur, plus responsable mais aussi de provoquer un public pour créer de l’intérêt. La société de consommation existe bel et bien et le designer l’enrichit en la modérant. C’est pourquoi, évaluer ses intentions est essentiel face aux usages de la société. Le designer est un créatif qui exprime des sentiments à travers des productions demandées. Il est amené à bafouer une demande pour innover et je pense qu’il est le meilleur des pires ouvriers. La personne que je suis est un miroir d’une société utopique à la quête de réponses. Cette définition que je propose est en perpétuelle évolution du fait de l’apparition de nouvelles technologies, de nouvelles coutumes qui font naître


les spécificités du métier. Le visuel ci-après met en avant le User Experience3 et les différentes pratiques du design.

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3.  Exprimé en 1990 par Donald Norman et, d’après la norme ISO 9241-210, le terme correspond “aux réponses et aux perceptions d’une personne qui résultent de l’usage ou de l’anticipation de l’usage d’un produit, d’un service ou d’un système”. GRENZINGER Y., “Qu’est-ce que l’expérience utilisateur ? “. Consulté le 29 juin 2013 et disponible sur Internet <http://blog.xebia.fr>.


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The Disciplines of User Experience Š Envis precisely GmbH, 2013.


Sommaire Avant-propos

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Introduction

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CHAPITRE I. L’HOMME QUI SAIT Les seniors : une identité innovante

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Induction d’une prise de décision : du conscient à l’inconscient

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D’une mémoire collective aux valeurs sociales

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Oublier, c’est possible? entre substitution, augmentation et transhumanisme

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CHAPITRE II. L’OBJET COMME ÉLÉMENT SOCIAL Un objet, des symboles

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La création sociale d’objets

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L’objet, un miroir de l’identité

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L’homme et l’objet dans l’environnement

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CHAPITRE III. UNE RESPONSABILITÉ POUR LES ANCÊTRES DU FUTUR Approche d’un design éthique

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L’éthique dans les avancées technologiques

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Des codes complexes : quels ancêtres du futur ?

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Conclusion

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Épilogue

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Bibliographie

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Introduction “Écrire de la fiction c’est se souvenir de ce qui n’a jamais eu lieu.” — Siri Hustvedt Un “Ancêtre” est un “précurseur lointain d’une personne notoire, initiateur d’une idée, d’une doctrine, ou, en parlant de quelque chose, réalisation qui en préfigure une autre”4. Ce mot valorise un objet ou une personne d’un attribut sacré, il évoque un lien de temporalité, de conservation5. L’ancêtre est un élément durable, persistant ainsi, c’est un participant de l’éternel, contrairement au mot “vieux” qui lui, exprime la péremption et la fragilité6. Du point de vue des philosophes, tel que Florence Nguyen-Rouault, l’ancêtre fait référence au premier âge de l’humanité, comme le premier âge d’une personne7. De mon point de vue, ce mot qualifie un élément ou une personne précurseur dans un domaine d’activité, qui est riche par sa vie passée. Un ancêtre serait pratiquement un pionnier en quête d’aventures rempli de sagesse. Étymologiquement, il provient du latin “antecessor” et fût cité l’une 10

des premières fois en 1803 dans une œuvre religieuse par François-René de Chateaubriand8. S’intéresser au futur nécessite de comprendre le présent contrairement à l’écriture d’une fiction d’après la citation de Siri Hustvedt. Les seniors représentaient 10% de la population mondiale en 2010 et devraient augmenter pour atteindre 21% d’ici 20509. En France, ils représentaient en 2010 23% de la population, en 2030 ils seront 26% et en 2050 33%10, soit un tiers des habitants. D’après l’Insee et sa projection de la population, entre 2005-2050,

4. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 5.  CHAMBRADE M. L., “Dynamique spatio-temporelle et environnement des sites néolithiques précéramiques de Syrie intérieure”, HAL, janvier 2014, p.125. 6. Dictionnaire, op. cit., p.10. 7.  NGUYEN-ROUAULT F., “Le culte des ancêtres dans la famille”, Hommes et Migrations, n°1232, Juillet 2001, p.26. 8.  Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, < http://www.cnrtl.fr>. 9.  Réseau Senior Strategic, “le Vieillissement de la population dans le Monde”. Consulté le 03 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.lemarchedesseniors.com>. 10.  UNDESA Population Division, “Population Ageing and Development 2012”, Consulté le 20 septembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.un.org>


l’espérance de vie serait entre 84 ans et 100 ans11. Les femmes seraient les plus représentées à partir de 88 ans. Les sociétés où vivent les populations vieillissantes se distinguent par des traditions, des valeurs et des usages particuliers12. Ces codes sont “considérés comme des systèmes conventionnels de symboles et de règles de combinaison, communs à des interlocuteurs et grâce auxquels le message peut être produit et interprété.” d’après le dictionnaire Le Petit Larousse. Je rajouterai qu’un code est porteur de valeurs13 et d’intentions14. Aujourd’hui, les personnes sont influencées par de nombreux codes n’étant en partie pas identifiés15. Des fragments sont analysés par la conscience des gens mais de plus en plus souvent par leur inconscience à cause de l’immédiateté des actions quotidiennes. Ce qui engendre une analyse des codes non contrôlés pour ensuite s’exprimer au travers d’impulsions et d’actes. C’est pourquoi il est possible de dire que leurs choix se font moins en fonction de leurs propres valeurs mais plus par ce qu’elles perçoivent à court terme. Les codes, à titre d’exemple, peuvent être formalisés au travers de sentiments, de formes, de couleurs, par des objets, des mannequins, des pictogrammes, ou encore par des spots publicitaires. Le lieu et le moment de diffusion sont choisis pour être perçus comme des éléments naturels. En réalité, ils sont intégrés à tout élément créé par l’homme pour transmettre une information, un sentiment ou une atmosphère et ce sont les intentions du créateur qui les rendent plus ou moins sensibles. Ces codes sont des repères identitaires pour l’homme : il peut ainsi établir des critères de choix qui sont évalués en fonction de ses valeurs. Mais depuis quelques années les valeurs acquises au fur et à mesure d’une vie sont remplacées par celles des codes. C’est là qu’une ambiguïté se pose car ils changent très rapidement au gré des modes et donc leurs valeurs de jugement également ; de ce fait les critères d’évaluation sont altérés et l’homme ne sait plus qui il est.

11.  Insee, “Projections de population pour la France métropolitaine à l’horizon 2050”. Consulté le 15 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.insee.fr>. 12.  NGUYEN-ROUAULT F., op. cit., p.10. 13.  Ce qui est posé comme vrai, beau, bien, d’un point de vue personnel ou selon les critères d’une société et qui est donné comme un idéal à atteindre, comme quelque chose à défendre. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 14.  Disposition d’esprit par laquelle on se propose délibérément un but. Dictionnaire, Ibid. 15.  CHABROL C., COURBET D., FOURQUET-COURBET M. P., “Psychologie sociale, traitements et effets des médias”, HAL, octobre 2005.

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Mais alors,

Comment l’identité des personnes peut-elle s’organiser autour de codes sociaux et environnementaux hétérogènes ? Cette problématique concerne tout être humain qui vieillit et me donne des terrains d’études diversifiés. Elle compte même les designers qui, pour nourrir leurs réflexions doivent changer constamment de point de vue. Elle est une confrontation entre l’homme et le changement. J’entends par “environnementaux” tous les éléments matériels conceptualisés par l’homme tels que l’architecture, les produits, les graphismes ou encore les interfaces numériques. Après cette introduction, la première partie de mon mémoire s’intitule “L’homme qui sait”. Mon but est de comprendre comment, chez une personne, les processus de réflexion et de choix construisent son identité. Je me focaliserai sur les valeurs de la personne et ensuite sur les valeurs collectives et sociales. J’ai nommé la deuxième partie “L’objet comme élément social” et j’y développerai le lien entre une personne et des objets dans un 12

environnement. Cette partie définira des codes sociaux et environnementaux. Dans la troisième partie, j’exposerai des notions de responsabilité et des réflexions éthiques, puis, introduirai les technologies de l’avenir. Une projection dans le futur de l’organisation de l’homme âgé autour des codes de vie sera faite. Ensuite, je conclurai ce mémoire et exposerai sa contribution dans le développement d’un projet d’innovation.


Exemples de spots publicitaires intégrants des codes :

METRO Cash And Carry : Green © Agence Leo Burnett, 2005.

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Hand to Hand © DDB & FedEx, 2009.


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chapitre I. L’HOMME QUI SAIT


Les sEniors : une identité innovante “Entendre une mélodie c’est à chaque instant, à la fois entendre, avoir entendu, et être prêt à entendre. Et ainsi le passé et le futur nous sont donnés avec le présent, et à l’intérieur même du présent. Et nous faisons l’expérience du passé et du futur avec celle du présent, à l’intérieur même du présent.” — The Sense of Music, Victor Zuckerkandl, 1959. Afin de qualifier les seniors, je vais présenter leur importance dans la société actuelle et quels sont leurs impacts dans les marchés technologiques et numériques. Il sera pertinent de souligner comment les codes sociaux et environnementaux sont intégrés à la relation senior/produit intelligent. Cet état de l’art va me permettre d’avoir un regard objectif sur la suite de mes réflexions et sur les ancêtres du futur. Une personne est considérée comme “senior” à différents moments de sa vie suivant les professionnels auxquels elle s’adresse. Dans le domaine médical, c’est à 70 ans qu’elle entre dans cette classe mais, au regard des pouvoirs publics cela est à 60 ans et dans le commerce, un senior a 50 ans16. Ce dernier statut est dû à un changement de vie modifiant les comportements d’achats. Ces tranches d’âges subissent des variations en fonction des zones géographiques mais une tendance générale est observée. Le vieillissement actuel de la population est un phénomène inédit dans l’histoire de l’humanité. Les seniors sont de plus en plus présents dans la société contemporaine mondiale mais à contrario les jeunes et les naissances diminuent. En effet le début du vingt-et-unième siècle est porteur d’un vieillissement des populations en comptant 2% de plus des personnes de 60 ans par rapport à 1950, soit 10% de la population au total en 200017. Cela permet d’estimer le nombre de seniors à 629 millions dans le monde. Ce vieillissement est causé par une augmentation de l’espérance de vie qui a gagné près de 20 ans depuis 1950, passant de 46 ans à 66 ans18. Ceci est dû à un meilleur confort social et environnemental mais aussi au développement d’équipements médicaux. 16.  Salon des seniors, “À quel âge est-on senior ?”. Consulté le 18 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.salondesseniors.com>. 17.  Réseau Senior Strategic, op. cit., p.10. 18.  Réseau Senior Strategic, op. cit., p.10.

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First visit with Ilona Š Ari Seth Cohen, 2011.


En France, les seniors représentent 23,8% de la population au 1er janvier 2013 soit 15,6 milliers et l’espérance de vie est de 81,6% en moyenne19. Bien que la population française continue de vieillir en raison de l’avancée en âge des générations du baby-boom, le pourcentage des plus de 60 ans est similaire à celui des jeunes de moins de 20 ans, soit 24,7% de la population20. Face à l’augmentation des seniors qui sera de plus en plus forte, l’État a depuis peu créé la filière “Silver Economy”. Celle-ci a pour but de générer un lien entre toutes les entreprises travaillant pour ou avec les personnes âgées, ainsi une organisation logique se mettra en place autour de services et de technologies. D’après l’État, ces biens et services personnalisés seront primordiaux pour la bonne évolution de la société et des activités professionnelles21. Au carrefour du numérique, de l’automatisme, de la robotique, de l’informatique et des objets connectés, la domotique dans les lieux intérieurs ou extérieurs est en train de doubler depuis 201022, soit environ 35% par an jusqu’en 2015. Le concept de “smart-home” va permettre notamment de faciliter le maintien à domicile des seniors. L’économie des seniors inclut également l’e-santé avec la téléassistance, la télémédecine et la m-health23. Le nombre de ces dernières technologies s’accroit par le développement des réseaux Internet et en raison de la désertification des médecins en zone rurale : ainsi les personnes se déplacent moins dans les cabinets et utilisent plus les nouvelles technologies24. De multiples startup se sont spécialisées dans les objets connectés et les applications dédiées “médicales” comme Jawbone ou le français Withings constituant un nouvel écosystème. La Silver Economy sera source de nouveaux emplois pour la France et le monde ces prochaines années : à titre d’exemple les États-Unis ont un taux de croissance sur ce marché qui est estimé à 12% par an25. 19.  INSEE, “Espérance de vie - Mortalité”. Consulté le 04 décembre 2013 et disponible sur Internet < http://www.insee.fr>. 20.  INSEE, “Population par âge”. Consulté le 04 décembre 2013 et disponible sur Internet < http://www.insee.fr>. 21.  Ministère des Affaires Sociales et de la Santé, “Silver économie”. Consulté le 03 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.social-sante.gouv.fr>. 22.  PIPAME-DGCIS, “Le développement industriel futur de la robotique personnelle et de service en France”. Consulté le 03 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.dgcis.gouv. fr>. 23.  Mobile Health : applications de santé pour les smartphones. 24.  République française, “Déploiement de la télémédecine : tout se joue maintenant”. Consulté le 12 octobre 2013 et disponible sur Internet <http://www.sante.gouv.fr>. 25.  Ministère des Affaires Sociales et de la Santé, op. cit., p.17.

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Le cas du bébé phoque thérapeutique “Paro” est un exemple de la robotique améliorant la qualité de vie des personnes âgées et intégrant de nombreux codes sociaux et environnementaux. Appelée également “healthbots”, cette catégorie tente de reproduire les effets de la zoothérapie par mimétisme d’animaux. Ainsi, elle permet de conserver les points positifs de l’animal tels que la relation homme/animaux et de mettre de côté les points négatifs comme leur hygiène. Paro, créé en 1993 par le Dr Takanori Shibata, emprunte les bénéfices liés à la zoothérapie permettant d’apporter des soins aux patients notamment dans des hôpitaux ou centres de long séjour (les animaux sont interdits dans ces lieux). La fourrure de Paro recouvre de nombreux capteurs lui permettant d’interagir avec la personne qui le tient dans ses bras : capteurs tactiles, audio, visuels, posturaux et thermiques. Ces technologies de captures intelligentes renvoient des signes comportementaux en réponse à celui qui le caresse ou lui parle. Les sens physiologiques sont largement représentés dans cet exemple, permettant à l’utilisateur de créer une réelle relation sentimentale et de ressentir des émotions : Paro est un vrai animal de compagnie en apparence. 18

Ses capteurs permettent également aux ergothérapeutes d’analyser et de faire un suivi psychologique des interactions entre le senior et l’animal afin de faire disparaître le sentiment de solitude. De nombreux tests viennent renforcer leur utilité, c’est ainsi que deux études-pilotes aux résultats positifs ont été publiés en 201326,27. D’autres sont en cours pour affirmer leur nécessité dans le domaine de la santé des personnes âgées. Ces robots ne remplaceront pas bien sûr l’affection humaine mais ils ont l’avantage d’être infatigables, inlassables... et toujours de bonne humeur !28 Les seniors ont une place de plus en plus importante au sein de la population mondiale et encore davantage en France. Ils sont porteurs de nouveaux marchés pour la filière “Silver Economy” introduite par l’État, notamment dans la robotique et les objets connectés. De jeunes entreprises françaises voient le jour grâce cette population qui augmente ses besoins 26.  ROBINSON H., et coll., “The psychosocial effects of a companion robot: a randomized controlled trial”, Journal of the American Medical Directors Association, mars 2013, p.2. 27.  BANKS M.R. et coll., “Animal-assisted therapy and loneliness in nursing homes: use of robotic versus living dogs.”, PubMed, n°3,mars 2008, p.6. 28.  RIVIERE J.P., “Études : un robot bébé phoque thérapeutique pourrait améliorer la qualité de vie des personnes âgées”. Consulté le 12 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www. vidal.fr>.


mais les contraintes de perceptions, de persuasion ou encore d’ergonomie sont importantes pour les seniors.

Personne jouant avec Paro © PARO Robots, 2010.

Paro en recharge © PARO Robots, 2009.

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Induction d’une prise de décision : du conscient à l’inconscient “La pensée consciente n’a duré et ne durera qu’un moment. La pensée n’est qu’un éclair au milieu d’une longue nuit. Mais c’est cet éclair qui est tout.” — La valeur de la science - La science et la réalité, Henri Poincaré, 2011. L’objectif de cette partie est de comprendre comment la conscience et l’inconscience interviennent dans la prise de décisions. Les choix d’un individu forgent son identité en exprimant des sentiments positifs ou négatifs. C’est pourquoi, il est intéressant de relever des éléments décisionnels pouvant être injectés dans le dessin d’une solution innovante. L’utilisateur, la personne âgée, pourra ainsi avoir des avis positifs en le voyant et en l’utilisant. Afin d’être précis dans mes explications, je vais citer les définitions de la conscience et de l’inconscience tirées du dictionnaire de psychologie. “La 20

conscience est la capacité de se percevoir, s’identifier, de penser et de se comporter de manière adaptée. Elle est ce que l’on sent et ce que l’on sait de soi, d’autrui et du monde. En ce sens, elle englobe l’appréhension subjective de nos expériences et la perception objective de la réalité. Par elle, enfin, nous est donnée la capacité d’agir sur nous-mêmes pour nous transformer.”29. “La notion universelle d’inconscient recouvre globalement tous les processus et activités psychiques qui, pour des raisons diverses, ne peuvent être ni perçus ni à plus forte raison contrôlés par la conscience. L’inconscient, qui s’exprime dans les rêves, les pulsions, les fantasmes, est un formidable moteur d’énergie psychique créatrice.”30. Imaginons le déroulement d’une action dans l’ordre des tâches A, B, C, comme l’ouverture d’une porte de maison : intervient en premier lieu la prise en main de la poignée, puis le mouvement de rotation de la main pour finir par le dégagement de la porte. Cet enchainement confère à l’inconscient un sentiment de sécurité31 car il est habituel. Je peux dire que c’est un code 29. Dictionnaire Le Petit Larousse de la psychologie [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 30. Dictionnaire, Ibid. 31.  WALSH V., “Visual perception: an orderly cue for consciousness”, Current Biology, n°19, décembre 2009, p.R1073.


subliminal32 puisqu’il est induit par une forme et une couleur spécifiques mais n’est pas représenté clairement. La prise de la décision de tourner la poignée et de pousser la porte est une action non réfléchie car les formes sont constantes et connues des seniors. Je m’explique : différents modèles de ces produits existent, c’est vrai, mais les formes générales qui les composent sont similaires leur procurant ainsi “stabilité, régularité et sens”33. Un réflexe est à l’origine de cette action, donc la décision a été inconsciente34. L’évocation d’éléments subliminaux dans une situation nécessitant une prise de décision stimule la mémoire affective35 des personnes âgées et est ainsi facilitée. Sur le même principe, un trajet réalisé quotidiennement comme celui emprunté pour se rendre au travail, subi des variations d’espace-temps : la première fois il parait plus long que les suivantes. Cela s’explique par une prise d’habitude inconsciente. L’étude “The effect of predictability on subjective duration”36, démontre qu’il est ainsi possible de manipuler le temps lors de la répétition de stimulus sensoriels : ils paraissent plus courts quand la personne est habituée à les percevoir. Là également, le temps de prise d’une décision peut-être réduit par la répétition quotidienne de certains stimulus comme l’odorat. Une personne est en ville et marche dans une rue commerçante, lorsque qu’elle voit une robe dans la vitrine d’une boutique. Malheureusement, elle n’a pas le temps d’y entrer pour l’acheter, et se dit que ce sera pour une prochaine fois. Quelques temps après, elle revoit cette robe dans une vitrine différente, sauf que cette fois-ci, elle lui parait moins jolie. Cette différence est due à l’effet de répétition et ainsi au passage de la conscience à l’inconscience des données perçues. En effet, l’objet est vu et enregistré dans sa mémoire donc c’est un acte conscient37. La sauvegarde passe dans le second état et c’est là que les données perçues subissent une variation temporelle et formelle38. 32.  Se dit d’une perception qui ne dépasse pas le seuil de la conscience. Dictionnaire, Ibid. 33.  GOFFMAN E., La mise en scène de la vie quotidienne, Paris : Editions de Minuit, 1973. p.60-75. 34.  MARSHALL H., “On the Reflex Function of the Medulla Oblongata and the Medulla Spinalis”, Phil. Trans. R. Soc. Lond., juin 1833, P.644. 35.  KARLSSON M., FRANK L., “Awake replay of remote experiences in the hippocampus.”, Nature Neuroscience, n°12, décembre 2009, p.913. 36.  PARIYADATH V., EAGLEMAN D.M., “The effect of predictability on subjective duration”, PLoS One, n°2, novembre 2007, p.1264. 37.  WU C.T., BUSCH N.A., FABRE-THORPE M., et coll., “The temporal interplay between conscious and unconscious perceptual streams”, Current Biology, n°19, décembre 2009, p.2003. 38.  WU C.T., Ibid, p.2003

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La décision se fait ainsi en fonction des données altérées et non du modèle initial. L’effet de répétition dans des situations ou des lieux différents permet de créer une faille dans la perception d’un élément. Ce dernier processus est exploité couramment dans la communication publicitaire et rend la mémoire des personnes dynamique l’obligeant à créer des liens entre ses souvenirs et ce qu’elle perçoit.

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Une fille devant la vitrine (5 rue Saint-Martin) © Roland Letore, 2010.

La conscience et l’inconscience ont un rôle important dans la décision. C’est pourquoi lors de la création d’une solution innovante, se poser la question du moment de décision de l’utilisateur face à celle-ci implique une réflexion sur son scénario d’usage. L’ergonomie, pour le designer, est un moyen de faire communiquer un produit à travers l’inconscience d’un senior39. Après avoir fait un prototype fini du produit, le faire tester par un utilisateur permet d’analyser comment il se l’approprie. Ainsi le designer pourra simplifier des tâches récurrentes pour donner l’impression qu’elles se font plus rapidement. L’utilisateur âgé se créera des réflexes qui rendront la décision pratiquement automatique et augmenteront sa confiance face à un produit innovant.

39.  Thomas, “8 critères ergonomiques pour évaluer la persuasion d’un site”. Consulté le 15 novembre 2013 et disponible sur Internet < http://www.adviso.ca>.


D’une mémoire collective aux valeurs sociales “Inscrire une représentation des pratiques n’est jamais neutre : c’est trier entre ce qui mérite d’être consigné et ce qui ne le sera pas et créer des formes qui anticipent les pratiques futures.” — Les harmoniques du Web : espaces d’inscription et mémoire des pratiques, Yves Jeanneret, MEI, 2011. La mémoire collective est une mémoire partagée par un groupe, un peuple, une nation, un pays ou un regroupement de pays. Elle constitue et modélise l’identité, la particularité, l’inscription dans l’histoire du groupe concerné. Selon la définition de Maurice Halbwachs, sociologue français, la “mémoire collective” est une théorie scientifique disant que l’on ne se souvient jamais seul40. Cela signifie que notre mémoire et nos souvenirs sont en partie structurés par la société. Il y a donc une mémoire collective et une multiplicité de mémoires individuelles se rattachant à des codes sociaux et environnementaux : celle des seniors renferme de nombreuses expériences vécues affirmant leur identité. Les personnes nées dans les années 1980-1990 ont actuellement 28 ans en moyenne et auront 80 ans en 2065 : elles ont grandi pendant le tissage de la toile à travers le monde. C’est pourquoi la mémoire collective les renvoie instinctivement à Internet. En raisonnant dans le sens inverse, une question se pose : quelle est la place d’Internet et son influence au sein d’une collectivité de jeunes adultes ? Sa réponse va mettre en évidence l’importance d’un tel “INTERnational NETwork” et l’impact qu’il aura quand ces personnes seront âgées. Ensuite pour rebondir, il est intéressant de se demander jusqu’où la mémoire collective influence la mémoire individuelle du point de vue d’un designer. À contrario, quelle utilisation le public fait-il de la mémoire collective et pour quels intérêts? Ces questionnements vont me permettre de faire ressortir des valeurs sociales ayant une influence sur les usages de l’homme jeune et âgé. Même si ce sont les serveurs qui sont dotés d’un pouvoir de mémorisation, Internet connecte leurs données et donc est une composante de la mémoire

40.  HALBWACHS M., La mémoire collective, Paris : Editions Albin Michel, 1950, p.80-110.

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collective41. Ce réseau international tel que nous le connaissons aujourd’hui a commencé à se répandre vraiment à partir de 1980. Puis, plus rien n’a arrêté son expansion jusqu’à modifier radicalement l’économie mondiale en donnant accès à l’information aux pays émergeants : les personnes âgées de cette époque n’en voyaient pas l’utilité mais pour les jeunes, c’était un espace à explorer42. En 1990, les blogs (Web-log : journal Web) sont apparus au Canada pour la première fois. Ce sont des sites Internet sous forme de journal “intime” public ouvrant de nouveaux modes de partage. Le 4 septembre 1998 est marqué par la création du moteur de recherche “Google” par Larry Page et Sergueï Brin. Et c’est pendant l’année 2000 qu’explose la Bulle Internet43 allumée par le désir de millions de familles voulant posséder la technologie à la maison. En 2003, les réseaux sociaux et les plates-formes de partages ont commencé à apparaitre avec MySpace, WordPress et LinkedIn, puis un enchainement incroyable de sites a eu lieu : TheFacebook.com, Flickr (2004), YouTube (2005), Twitter (2006)... Un constat peut être fait rapidement au vu de la courte biographie du Web que j’ai faite : peu de sites ont connu une utilisation majeure et leur développement s’est fait sur une courte période. Cela peut être expliqué par les valeurs qu’ils projettent mais également leur 24

organisation symbolique44 motivant l’utilisateur. En effet l’architecture d’un site et ses graphismes sont imaginés pour créer des codes afin d’augmenter l’expérience utilisateur. C’est cet élément qui permet à un site mais aussi à un objet et à un service de garantir sa pérennité. Appelé également “UX Design”, il vise principalement à anticiper un usage et les émotions de l’être humain. Cette compétence est fortement liée à l’identité psychologique de l’homme et à mon sens, c’est pour cela qu’elle est passionnante. Internet et de nombreux sites sont créés avec cette composante pour réunir des groupes sociaux. Certains sont créés par des personnes qui ont grandi en même temps que la toile, et étant maintenant âgées, elles continuent à fonder le Web mais en l’adaptant aux seniors.45 41.  OURY C., “L’explosion des données sur Internet révolutionne notre mémoire collective”. Consulté le 25 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.atlantico.fr>. 42.  MARC, “Eternally Contested Internet: The 1980’s”. Consulté le 27 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.meta-activism.org>. 43.  Wikipedia, “Histoire d’Internet”. Consulté le 27 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://fr.wikipedia.org>. 44.  JEANNERET Y., “Le procès de numérisation de la culture: Un défi pour la pensée du texte.”, Protée, n°32, 2004, p.9-18. 45.  Ideose, Accessibilité du Web pour les seniors : un « Web senior ». Consulté le 28 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.ideose.com>.


Map of the Internet 2.0. © Martin Vargic, 2014. Hugh Herr46 qualifie ce réseau numérique de sixième continent car il regroupe des communautés de personnes ayant une identité numérique. Il est un territoire culturel porteur de vie héritant d’un passé complexe de 2014 ans, créant un lieu de “socialisation sans précédent”47. L’humanisme numérique s’intègre dans le quotidien de nombreuses personnes utilisant Internet comme les seniors. De ce fait des valeurs de la vie réelle se transposent dans la vie digitale en les multipliant puisque chaque personne a le droit d’expression avec des pensées différentes. L’UNESCO reconnait qu’Internet a joué un rôle important dans la liberté d’expression48 libérant la société et ses habitants des codes de vie traditionnels. Ainsi, le réseau est devenu une jungle de données qui donne l’impression de vivre dans un perpétuel présent49 : Internet n’oublie pas! C’est pourquoi des groupes communautaires composés d’utilisateurs de tous âges et de leurs informations, restent tout le temps jeunes sur la toile. De 46.  Hugh Herr est le créateur des jambes bioniques reproduisant des fonctions naturelles des jambes. Il travaille au “Biomechatronics research group” au MIT Media Lab. <http://www.media. mit.edu>. 47.  DOUEIHI M., Pour un humanisme numérique, Internet : publie.net, 2012, p.20-35. 48.  UNESCO, “Liberté d’expression sur l’Internet”. Consulté le26 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.unesco.org>. 49.  HOOG E., Mémoire, année zéro, Paris : Seuil, 2009, p.10-30.

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la jungle de ces données, des milliards de signes sont propulsés. Et pour faire face à ce Big Data (grosse donnée), des outils innovants sont utilisés comme la représentation schématique et interactive de groupes de données50 montrant leurs anciennetés. Ainsi, le Oxford Internet Institue travaille sur de nombreux projets de ce type et visualisables à l’adresse suivante : http://wikiproject.oii. ox.ac.uk/networks/ En une phrase, pour résumer ce début de paragraphe : Internet est un territoire numérique jeune avec des groupes d’utilisateurs de tout âges exprimant des valeurs en masse issues d’un héritage culturel complexe. Internet est une partie intégrante d’une collectivité de jeunes adultes et même de la mémoire collective, ne pouvant en faire abstraction. Les personnes âgées rajeunissent leur identité en vivant des expériences interactives impliquant réellement leurs valeurs de vie.

26

Interactive visualisation of Wikipedia © Bernie Hogan & Wikiproject OII, 2009. La

conclusion

que

je viens

de

formuler impacte

profondément

l’innovation de nouveaux produits pour le designer. Alors de son point de vue, si des fragments de valeurs composent la mémoire collective, comment influencent-ils la mémoire individuelle? La mémoire collective a une hiérarchisation similaire à la biologique de l’homme, c’est-à-dire qu’une information est entendue, stockée et réémise

50.

GHITALLA F., “L’âge des cartes électroniques: outils graphiques de navigations sur le Web”,

Communication et langage, n°131, janvier 2002, p.66-80.


sous forme de souvenirs51. Dans la définition même de celle-ci, il est dit qu’elle se divise au sein d’un groupe, elle est donc le résultat de plusieurs personnes. C’est pour cela que si une personne est à la recherche d’information, elle ira demander aux autres. Ainsi, il m’est possible de dire que la mémoire collective est une orthèse cognitive de la mémoire individuelle puisqu’elle vient en soutien à un individu jeune ou âgé. Tout comme Internet est un système permettant de préserver de l’information. D’après Thierry Gobert, les outils digitaux sont des orthèses quand ils sont sensibles et sociaux52. Bruno Patino et Jean-François Fogel rajoutent dans leur livre53, qu’il n’y a plus de différence entre le virtuel et le réel : tout est réel. La condition humaine change car l’Internet, son Big Data et ses fragments de valeurs, sont aussi importants que la parole d’un expert. Je peux citer en exemple un récent phénomène : quand une personne est malade, elle va consulter Internet avant d’aller voir un médecin pour savoir s’il dira vrai54 : ce phénomène est notamment observable chez les seniors. La mémoire collective devient ainsi une source de références gratuites mais aux milliards d’avis, ce qui va modifier la prise de décision d’une personne riche en expériences vécues. Le design connait, lui aussi, des évolutions majeures avec de nouvelles tendances

créatives

collaboratives,

miroirs

des

codes

sociaux

et

environnementaux en évolution. Il devient plus ouvert en intégrant de multiples métiers dans son processus de développement. Internet permet aujourd’hui de réaliser des projets en ligne comptant des centaines de designers55. IDEO, une agence de design créée dans les années 90 est basée sur ce principe. À sa création, elle comptait une cinquantaine de professionnels, aujourd’hui elle rassemble cinq cents cinquante employés dans dix villes composées notamment de 25% de seniors56. Le nom de la méthode employée est le Design thinking.

51.  COMET G., LEJEUNE A., MAURY-ROUAN C., Mémoire individuelle, mémoire collective et histoire, Paris : Solal Editeurs, 2008. 52.  GOBERT T., “L’internet comme orthèse cognitive : nouveaux usages de la mémoire”, Médiation et Information : Mémoires & Internet, n°32, janvier 2011, p. 53-63. 53.  PATINO B., FOGEL J.F., La condition numérique, Paris : Grasset, 2013, p.20-30. 54.  WEARETHEWORDS, “Internet, le plus grand médecin du monde? Quid de l’internet médical?”. Consulté le 22 novembre et disponible sur Internet <http://www.wearethewords.com>. 55.  IDEO, “Open IDEO”. Consulté le 27 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www. openideo.com>. 56.  Wikipedia, “IDEO”. Consulté le 27 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://en.wikipedia.org>.

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L’évolution des processus collectifs change les modes de pensées de la plupart des personnes, jeunes ou âgées, et involontairement les amène à être plus individualistes pour défendre leurs idées. La facilité d’accès à l’information via les mémoires collectives ne force plus la personne à les retenir, ni à les entendre car elle est ubiquitaire57 créant ainsi, des trous dans les mémoires individuelles.

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Avantage du travail en équipe © IDEO, 2013. Il est intéressant de mettre l’utilisateur et son identité au centre de la mémoire collective, et de se concentrer sur l’utilisation qu’il en fait et pourquoi. Cette mémoire intègre largement l’information omniprésente dans l’environnement, mais aussi sur tout appareil technologique. Ainsi, un utilisateur possédant un smartphone peut avoir réponse à ses questions à tout moment. C’est la société en elle-même qui est demandeuse d’éléments ubiquitaires tels qu’avoir accès à ses données personnelles depuis toutes positions géographiques car les gens sont de plus en plus mobiles. En regardant les chiffres, trois groupes d’utilisateurs de technologies connectées apparaissent : les novices, les amateurs et les inités. Le classement se fait étonnamment, non pas en fonction de l’âge, ou de toute autre donnée

57.  Se dit de l’informatique lorsqu’elle est omniprésente dans un environnement. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>.


habituelle mais par rapport aux types de personnes qui entourent l’utilisateur58. Ainsi, ses pratiques et ses besoins sont conditionnés par l’influence de son entourage59 : il est motivé par des orthèses numériques et collectives. Ici, c’est la valeur d’appartenance qui est mise en avant : un senior qui est entouré par d’autres seniors se sentira vieux mais à l’inverse un senior entouré de jeunes se sentira beaucoup moins âgé. En conclusion, je dirai que les codes d’exploitation de l’information ne sont pas encore totalement définis et ne le seront probablement jamais du fait de la mouvance rapide de la technologie. Aujourd’hui, Internet fait partie du quotidien de nombreuses personnes : ce réseau international peut être visualisé en tant que sixième continent numérique porteur de liberté d’expression et faisant abstraction de l’âge des utilisateurs. Le designer répond à leurs souhaits en créant des expériences qui faciliteront l’accès à l’information. L’homme contemporain, actuellement, peut difficilement vivre sans technologie ; des personnes visionnaires réfléchissent pour savoir comment ces technologies peuvent intégrer encore plus l’identité de l’homme afin d’estomper les contraintes liées à la société et à l’environnement. 29

58.  GUITÉ F., “TIC : une typologie des utilisateurs”. Consulté le 17 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.francoisguite.com>. 59.  BIGOT R., “L’influence de l’entourage sur les attitudes et les opinions”, CRÉDOC, n°156, mars 2002, p.4.


Oublier, c’est possible ? entre substitution, augmentation et transhumanisme “L’acceptation de la réalité est une tâche sans fin [...] nul être humain parvient à se libérer de la tension suscitée par la mise en relation de la réalité du dedans et de la réalité du dehors ; nous supposons aussi que cette tension peut être soulagée par l’existence d’une aire intermédiaire d’expérience.” — Jeu et Réalité, Donald Winnicot, 2002. Oublier devient une notion vague par le fait d’avoir l’impression de vivre toujours dans le présent60. Les souvenirs et la mémoire sont porteurs de repères temporels, cependant les actuelles avancées technologiques permettent d’enregistrer la totalité de notre passé. Celui-ci est consultable à n’importe quel instant, je peux donc dire qu’il est augmenté vers le présent : cette notion est méconnue des personnes âgées. 30

Le confort et le progrès visent à augmenter physiquement et mentalement les conditions de l’homme61. Après avoir présenté rapidement ce qu’est concrètement l’augmentation des capacités humaines, j’introduirai la notion de transhumanisme. Cela va permettre d’avoir une vue globale du rapport que peut avoir l’homme avec la technologie. Ainsi, la question de l’utilité de cette évolution pour la société et les seniors peut être posée; serait-elle porteuse de nouvelles valeurs ? Le designer est intéressé par les concepts mêmes qui sont au cœur des relations homme-machine pour ainsi comprendre ce qui motive la population à aller dans cette voie. L’aboutissement de cette compréhension pourra être réinjecté lors d’une création de produits technologiques adaptés à l’identité des personnes âgées. Bien qu’il n’existe pas de définition claire de la formule “homme augmenté”, les deux termes peuvent être expliqués séparément : l’homme est un être humain ayant des capacités physiques et mentales, l’augmentation est un accroissement d’une valeur62. Historiquement, il est possible de 60.  HOOG E., op. cit., p.25. 61.  LELEU-MERVIEL S., ZREIK K., “Vision augmentée par HUD : pour une prise en compte des contraintes psychophysiologiques”, Journal of Human Mediated Interactions, Vol 10 - n°1, 2009. 62. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>.


dire que l’homme augmenté a existé depuis sa découverte de l’allumage du feu par le frappement de deux silex (estimé à -780 000 ans63). À partir de cet instant il a augmenté sa puissance et son confort. Cet exemple peut définir l’augmentation de capacités physiques. L’augmentation cognitive est apparue depuis la création de l’écriture datée à -5300 ans. Depuis ce temps, la mémoire humaine a pu être augmentée par sa restitution en écrits sur un support. Le Web, l’Internet et l’ordinateur ont ouvert une autre dimension de l’intelligence, de la mémoire augmentée. Ci-dessous l’exemple de deux “orthèses” qui augmentent les capacités de l’homme. Le BASEjump64 est une pratique sportive qui a été rendue possible par la mise au point de textiles ultra résistants. Les capacités physiques de l’homme sont augmentées en le faisant voler sans contraintes de gros matériels. Les Google Glass sont des lunettes avec un écran en réalité augmentée65 proposant toutes les fonctionnalités d’un smartphone : vidéo conférence, email, GPS, ... Elles augmentent les capacités cognitives. Au même titre que les exemples ci-dessus, la calculatrice, le lecteur MP3, la montre, le téléphone ou encore la tablette numérique sont des appareils qui accroissent les facultés de l’homme66. À contrario certaines technologies substituent un manque physique causé par un accident par exemple. Les prothèses visant à remplacer la perte d’un membre en sont un exemple comme ci-dessous. Mais cependant, elles-mêmes ont tendance à être des augmentateurs de capacités comme dans le sport : c’est un simple réglage67. D’après l’argument de Phèdre68 qui est en lien avec les propos précédents : il ne faut pas attendre de l’écriture qu’elle fasse en elle-même mémoire. Platon, dans cet exercice, met en avant l’assimilation de l’écrit à la pensée nécessitant un investissement humain. Cela reviendrait à dire que la technologie intellectuelle n’existe pas mais seulement les technologies de l’intellect69. 63.  VILLA P., “Les Européens n’ont maîtrisé le feu qu’il y a 400 000 ans”. Consulté le 15 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.cnrs.fr>. 64.  “B.A.S.E.” est un acronyme des termes anglais pour quatre catégories de points fixes “Buildings, Antennas, Spans, Earth”. <http://www.base-jump.org>. 65.  La réalité augmentée désigne la superposition d’éléments 2D ou 3D du monde virtuel sur la vision du monde réel. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 66.  CUSSET P.-Y., Centre d’analyse stratégique, “Les technologies d’amélioration des capacités humaines”. Consulté le 21 septembre 2013 et disponible sur Internet <www.strategie.gouv.fr>. 67.  CUSSET P.-Y., Ibid. 68. PLATON, Phèdre (Deuxième partie : rhétorique, critique de l’écriture et enseignement oral), Flammarion, 1989. 69. PLATON, Ibid.

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32

Aimee Mullins - athlète handisport, actrice et mannequin Š Howard Schatz, 2009.


Le mouvement transhumaniste70 est une pensée extrême mais réelle. En rejoignant celle de Platon, elle confronte l’homme au numérique. Voici sa définition d’après David Dalrymple, mathématicien au MIT : “Dépasser l’humanité signifie nous intégrer à l’intérieur du réseau. Ne plus limiter les simples avions que nous sommes à la seule communication Internet via un clavier avec les doigts, mais devenir partie intégrante du réseau en devenant une partie de la machine. C’est ça le transhumanisme”71. Cette définition visionnaire n’est pas complètement fausse compte-tenu des progrès rapides : Internet a été développé en seulement 25 ans. Le projet The Human Brain project72, initié par la commission Européenne, tente de modéliser en trois dimensions la totalité du cerveau dans l’objectif de transposer son mode de fonctionnement complexe dans un système numérique. Il sera possible alors d’avoir une continuité entre le cerveau biologique et le cerveau numérique. Cela permettrait de développer de nouveaux modes de recherches informatiques basés sur les émotions ou les cinq sens par exemple. Après cette présentation des possibles évolutions de l’homme face à la technologie, il est intéressant de comprendre quelles sont leurs utilités pour la société et pourquoi celle-ci serait demandeuse. Je vais reprendre les cas du BASEjump, des Google Glass et du transhumanisme pour mettre en avant leur concept, leurs utilités et leurs valeurs. De nouveaux besoins pourront ainsi être évoqués et adaptés aux valeurs des seniors actuels lors de la phase créative. Également, la réflexion menée sur ces trois exemples va permettre d’avoir une idée de l’éventuelle évolution des seniors et de leur comportement dans le futur.

Logo © humanity+. 70.  Humanity +, page d’accueil. Consulté le 14 mai 2013 et disponible sur Internet <http://humanityplus.org>. 71.  BORREL P., Un monde sans humains [film], ARTE France et Cinétévé, 2012. 72.  Commission Européenne, “Human Brain Project”. Consulté le 14 mai 2013 et disponible sur Internet <https://www.humanbrainproject.eu>.

33


Cas n°1 : le BASEjump

The Tianmen Mountain Grand Prix Wingsuit Race © World Wingsuit League, 2013. 34 Cette pratique sportive extrême a pour but de voler grâce à une combinaison appelée “wingsuit”. La personne saute d’un point fixe, comme d’une falaise de montagne et plane en jouant sur la position de ses bras, de son corps pour tourner et aller plus ou moins vite. La vitesse de vol va de 200kms/h à 360kms/h et peut s’étendre sur 23kms73. Seules les personnes ayant effectué un minimum de 200 sauts en parachute peuvent pratiquer ce sport. Le concept de cette discipline est de réaliser le plus vieux rêve de l’homme : voler comme un oiseau. La wingsuit procure au corps un degré de liberté jamais atteint avec le vide tout en le maitrisant. L’expérience physique et mentale de Soi est au centre de l’acte laissant à la personne le droit de ressentir toute forme de sensation et de jouissance. La vacuité “désigne la disposition qui résulte de l’abandon de ce que l’on tient pour vrai, au-dessus de toute appréhension ou absence d’appréhension. Le Bouddhisme énumère dix-huit sortes de Vacuité, dont la dernière se nomme : Vide de la Non-Pensée, de l’Immatérialité, et Non-substantialité de 73.  Wikipedia, “Vol en wingsuit”. Consulté le 30 novembre et disponible sur <http://fr.wikipedia. org>.


la Réalité”74. En faisant un saut en BASEjump la personne se libère de toute contrainte matérielle et identitaire : il n’y a qu’elle au milieu de rien, c’est peut-être vers ça que tend le futur, vers le stoïcisme75. Les sauts libres dans les airs permettent à l’homme d’explorer de nouvelles sensations peu connues. Dans cette situation les valeurs environnementales et sociales s’effacent, néanmoins elles peuvent être présentes par la seule volonté du BASEjumper. En effet, souvent il fixe une caméra sur son casque et filme sa performance, puis la met en ligne sur Internet76. C’est une façon de partager les sensations qu’il a ressenties. La publication de performances en tous genres est courante, l’homme étant à la recherche des valeurs d’affirmation, de démonstration et de socialisation. Le besoin d’affirmer son identité et sa personnalité est de plus en plus nécessaire au milieu d’un environnement aux codes complexes77. Les besoins de démonstration et de socialisation rejoignent la même raison. Ainsi, montrer que l’on est capable de faire telle ou telle action renvoie au phénomène actuel du “quantified self” (quantification de soi-même) qui vise à mesurer sa vie sociale, ses données biologiques78... D’après l’essayiste Pascal Bruckner, “l’individu était pris dans un ensemble de traditions, de cadres très hiérarchisés qui le définissaient : sa place dans une famille, dans un métier, dans un village, dans une région. En démocratie, nous sommes tous égaux, mais, du coup, nous sommes aussi tous invisibles. Notre valeur ne peut venir que du regard des autres, qui nous donne notre validation.”79

74.  Dictionnaire des symboles, 1997. 75.  ROMEYER-DHERBEY G., GOURINAT J.B., Les stoïciens, Paris : Librairie Philosophique Vrin, 2005, p.181. 76.  Phoenix Fly, “Wingsuit Basejumping - The Need 4 Speed: The Art of Flight”. Consulté le 1er décembre 2013 et disponible sur Internet <https://vimeo.com>. 77.  PEREA F., “L’identité numérique : de la cité à l’écran. Quelques aspects de la représentation de soi dans l’espace numérique”, Les Enjeux de l’information et de la communication, n°2010, décembre 2010, p.144. 78.

marianne.net, “Facebook, Twitter...la dictature de l’ego”. Consulté le 30 octobre 2013 et dis-

ponible sur Internet <http://www.marianne.net>. 79.

marianne.net, Ibid.

35


Cas n°2 : les Google Glass

36

The final frontier (campagne publicitaire des Google Glass) © Google - Vogue Max Braun, 2012. Les lunettes, l’accessoire de mode par excellence associé à la réalité augmentée permet de voir ce qui est inconnu, de voir ce qui est invisible, voir ce qu’est le futur. La photographie ci-dessus montre ce qu’une personne utilisant la fonctionnalité de communication voit. Les Google Glass font vivre à mi-chemin entre le virtuel et le réel uniquement par le regard. Elles sont équipées d’une caméra, d’un micro et d’un pavé tactile sur l’une des deux branches ou encore d’un écran et bien évidemment de la wi-fi80. Le concept de cet accessoire ultra technologique est avant tout de provoquer des discussions afin d’amener la société vers de nouvelles valeurs et de nouveaux codes de vie. Steve Lee, directeur produit des Google Glass dit “nous savions qu’elles allaient soulever des questions, autant en parler avant leur sortie”. Une immense campagne de publicité a été lancée par ses créateurs et se répand par le public à travers des hypothèses et des questionnements

80.

Google Inc., “Glass”. Consulté le 12 septembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.

google.com>.


pour provoquer un objet Unique81. L’usage des Google Glass représente une marche d’innovation importante pour aller encore plus haut, encore plus loin dans les rapports homme-technologie. Sergeï Brin, un des fondateurs de la firme, a récemment dit qu’il voulait faire de leur création (“Google”) “le troisième hémisphère de notre cerveau”82. Le dessin des lunettes est comme une prothèse de l’œil gauche. Les Glass procurent à l’utilisateur de nouvelles expériences avec l’environnement, c’est une façon de redécouvrir la réalité avec l’intervention du virtuel comme gage motivationnel. L’accessoire de mode de Google permet d’avoir une vue sur tout ce que l’on ne connait pas encore, sur tout ce que l’on ne voit pas. Il a des valeurs esthétiques futuristes par ses lignes sobres et ses matériaux ordonnés : le verre pour sa transparence, la branche de couleur selon le choix de l’utilisateur et la monture anodisée comme élément technique. Les Glass modifient les liens sociaux physiques par les interactions qu’elles offrent entre deux personnes, mais aussi relationnels par leur “buzz” sur Internet et les médias83. Mais, elles sont également provocantes par leur agression des codes de vie84 en ébranlant notre notion d’espace public et d’espace privé. Les personnes qui les portent sont des visionnaires et des expérimentateurs ce qui fait surgir un besoin de découverte de l’inconnu. Google anticipe des futurs besoins en créant un produit aux apparences inutiles, mais qui modifie les rapports identitaires entre les hommes85.

81.  Date de lancement du projet par le Google X Lab : 2001. Date de l’annonce officielle au Google I/O, phase de test : avril 2012. Date de sortie officielle : inconnue. 82.  FERAUD J.C., “L’homme augmenté selon Google”. Consulté le 12 juin 2013 et disponible sur Internet <http://owni.fr>. 83.  MARINA T., “Pourquoi les Google Glass font tant frémir”. Consulté le 12 septembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.latribune.fr>. 84.  euractiv.fr, “Les Google Glass soulèvent des questions sur la vie privée”. Consulté le 18 septembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.euractiv.fr>. 85.  RUSHKOFF D., Les 10 commandements de l’ère numérique, Paris : 1er, 2012.

37


Cas n°3 : le transhumanisme

38

Walking to the sky © Jonathan Borofsky, 2004. Ce mouvement est apparu en 1982 en Europe du Nord et aux ÉtatsUnis86. Il trouve ses sources dans l’association de la mémoire biologique, la mémoire numérique et de l’intelligence artificielle. Ce mouvement à la fois philosophique et scientifique, met en avant une culture du temps87 et une culture de la perfection. La réplique de Tom Mitchell, Professeur au département du Machine Learning à l’Université Carnegie Mellon à Pittsburgh, évoque un des principes de ce mouvement : être visionnaire. “La technologie change tout bien sûr. Qui nous sommes, ce que nous sommes, comment nous travaillons, comment nous nous percevons. Si nous sommes créatifs, si nous sommes intelligents nous décollerons de niveau en niveau pour atteindre le ciel”. Le mouvement transhumaniste appelé aussi “humanity+” a comme concept principal d’élever les capacités de perception, de cognition et de réflexion de

86.  Wikipedia, “Transhumanisme”. Consulté le 7 août 2013 et disponible sur Internet <http:// fr.wikipedia.org>. 87. Wikipedia, Ibid.


l’homme à un niveau supérieur par la fusion de composantes88. Ce troisième cas parait plus extrême que les deux précédents, plus le concept le sera et moins il convaincra de personnes car elles ont besoin de se rattacher à des éléments connus. En suivant le concept de l’Humanity+, si les nanotechnologies (atome), la génétique (ADN), la robotique (microtechnique), l’informatique (Bit) se regroupent, alors l’homme et le réseau ne feraient qu’un : le posthumain. Le rapport “NBIC89 : Converging Technologies for Improving Human Performance” commandité par la National Science Foundation et le Department Of Commerce aux E.U. en 2002, explore la totalité des possibilités d’actions. On peut en relever de nombreuses dans le milieu de la santé et notamment pour améliorer les conditions de vie des personnes âgées faisant évoluer nettement les codes sociaux et environnementaux. Une minorité de personnes est partisante de cette philosophie90 car elle est présentée comme une pensée supérieure, une pensée qui rejette la population. Contrairement aux deux cas précédents où la valeur sociale était présente, les transhumanistes paraissent individualistes formant une communauté de chercheurs. Néanmoins, ils prônent une vision radicale des droits de l’humain : la valeur du radicalisme peut être retenue91. Selon eux, l’humanité ne devrait avoir aucun scrupule à utiliser toutes les possibilités de transformation offertes par la science. La maladie et le vieillissement ne sont pas une fatalité, au contraire, ils sont une ouverture. Enfin le mouvement s’affirme par son universalité, par sa mise en connexion mondiale. Internet n’est qu’un premier pas, Google nous emmène vers une civilisation transhumaniste92. Avec sa dernière création d’entreprise, “Calico”, Google travaille sur la longévité de la vie93 et sur l’ADN humain avec “23andme” (23 chromosomes and me) une société de biotechnologie de la firme94.

88.  Humanity+, “Philosophy”. Consulté le 08 août 2013 et disponible sur Internet <http://humanityplus.org>. 89.  Nanotechnologies, Biotechnologies, Informatique et sciences Cognitives 90.  BORREL P., op. cit., p. 33. 91. Humanity+, op. cit., p. 33. 92.  MALEISSYE H., “Google, principal promoteur du transhumanisme nous promet “le meilleur des mondes”. Consulté le 30 avril 2013 et disponible sur Internet <http://www.indiciel.fr>. 93.  Google Inc., “Google announces Calico, a new company focused on health and well-being”. Consulté le 20 septembre 2013 et disponible sur Internet <http://googlepress.blogspot.fr>. 94.  23andme, “The largest DNA ancestry service in the world”. Consulté le 20 septembre 2013 et disponible sur Internet <https://www.23andme.com>.

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Après avoir abordé ce qu’est l’augmentation des capacités humaines et le transhumanisme, il a été possible d’avoir une vue de l’éventuelle évolution de l’homme et de ce que seraient les seniors du futur. Ces phénomènes de modes ont maintenant une utilité car des besoins ont été créés à l’initiative de marques mais aussi sur la demande indirecte des utilisateurs. Les valeurs qui s’en dégagent s’articulent principalement autour d’actions sociales, d’éléments innovants et d’expression de Soi : c’est ce qui motive les utilisateurs actuellement au regard de mes recherches précédentes.

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Can Google solve death ? Š TIME, 2013.


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CHAPITRE II. L’OBJET COMME ÉLÉMENT SOCIAL


Un objet, des symboles “Si dans nos sociétés différenciées et hiérarchisées, exister c’est être (ou se sentir) différent (rare, unique, singulier, élu, etc.), alors la culture aujourd’hui (comme la religion hier) est un puissant moyen de construire cette différence.” — La culture des individus : Dissonances culturelles et distinction de soi, Bernard Lahire, 2004. L’objet est porteur de multiples symboles ; après avoir déterminé ce qu’est un symbole, j’aborderai les vecteurs d’esthétique, de culturalité, de temps et de fonctions d’un objet. L’intérêt de cette première partie est de comprendre ce que représente un objet quelque soit sa définition : œuvre d’art, produit fonctionnel... Cettet analyse permettra d’évoquer les sensations qu’il peut transmettre chez un utilisateur jeune ou âgé. Un symbole est une représentation ou un élément qui évoque une autre chose que sa simple image95. Il conserve un lien naturel avec la réalité, comme le lion qui est l’emblème de la force par son physique bestial. De ce fait, la valeur symbolisée dans un logo ou un objet se trouve dans l’évocation d’un élément naturel et connu par une majorité de personnes. Le symbole peut être compris par une personne de différentes façons suivant ses valeurs esthétiques et sa tendance culturelle, données par le dessinateur. Le spectateur face à l’image fera des associations entre ce qu’il découvre et ce qu’il connait, ainsi sa compréhension du symbole lui procurera une émotion96.

Logo free hardeman lions © University Running Eagle. 95.  Définition, “Symbole”. Consulté le 05 Avril 2013 et disponible sur Internet <http://www. webphilo.com>. 96.  SUH J., RIVEST A.J., NAKASHIBA T., “Entorhinal cortex layer III input to the hippocampus is crucial for temporal association memory.”, Science, n°334, décembre 2011, p.1415.

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L’esthétique d’un objet est un facteur essentiel car il suscite à son contemplateur ou à son utilisateur des émotions motivées par la perception et la sensation du beau qui restent des appréciations personnelles d’où un jugement positif ou négatif97. La photographie ci-dessous montre une étagère de l’agence de design de Ross Lovegrove, designer reconnu pour le travail des formes insufflant des codes aériens. Le premier constat est la diversité des éléments, le second est la mise en valeur de la forme par les contrastes. Lovegrove est considéré comme l’un des designers industriels contemporains les plus importants. Son travail est inspiré des formes de la nature et de l’ergonomie. Ces dessins suscitent des émotions à l’utilisateur, ils sont ainsi, porteurs de poésie et d’identité98. C’est pourquoi porter une réflexion esthétique sur un objet permet d’évoquer un souvenir chez son utilisateur d’après Lovegrove.

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Bibliothèque d’objets au design organique © Ross Lovegrove, 2012. Le style étant le fruit de l’imagination humaine, il donne une identité à l’objet. C’est “la patte” du designer qui fait l’originalité et l’unicité d’un objet. Sa forme est pensée en globalité dès le début pour qu’il soit perçu et compris facilement99. Ici, le raisonnement se porte sur un produit individuel mais, au 97. SARRAUTE, Ère soupçon,1956, p. 143. 98.  LOVEGROVE R., Supernatural - The work of Ross Lovegrove, PHAIDON, 2007. 99.  BERGSON H., Matière et mémoire - Essai sur la relation du corps à l’esprit, Paris : Gallimard, 1896, p.167.


sein d’une collection, il est pensé différemment. Un détail commun à l’ensemble de la collection est identifié puis chaque produit est dessiné en intégrant cet élément. L’esthétique globale d’un ensemble de meubles donne à chacun une relation sentimentale et culturelle. Sans ce lien intime, les meubles seraient réduits à leur fonction propre : une chaise repose l’homme100. Les hommes et notamment les personnes âgées sont habitués à être projetés dans des ensembles cohérents leur créant ainsi des repères spatio-temporels101. L’objet subit inévitablement des influences culturelles par son dessinateur mais aussi par la population à laquelle il est destiné. La culture est avant tout une œuvre humaine rassemblant des manifestations de la pensée et de l’action. Ainsi, l’art, la technique, la science, la religion et le culte des morts mais aussi la langue, les institutions politiques, les mœurs sont des éléments constitutifs de la culture102. Si la culture est l’esprit d’une communauté, la socialité est l’esprit d’un groupe et la personnalité est l’esprit d’un individu103, alors l’esthétique d’un objet évoque l’identité d’une communauté. Prenons l’exemple d’un artisan ébéniste : il va choisir la matière, le décor, les formes d’un meuble en fonction de ce qu’il connait, en fonction de sa culture, de ses apprentissages et de ses expériences culturelles. Maintenant prenons l’exemple d’une industrie : ses choix de matières, de décors et de formes pour le dessin d’un meuble s’orienteront vers ce qui symbolise au mieux des codes culturels de ses futurs utilisateurs. Ces trois composantes sont également choisies en fonction de la culture de l’entreprise. Ces deux exemples montrent que l’initiateur d’un projet donne des codes culturels et une identité à ses créations. Le temps et les effets de mode sont des facteurs essentiels ; ils sont une source de symboles représentant souvent l’identité d’une population. Les médias jouent un rôle important dans cette boucle, en diffusant les objets et produits104. Les effets de modes sont le fruit du temps et sont créés par des métiers 100.  BIANCHI V., “Peter Kammermann, un décorateur à la conquête de Londres”. Consulté le 10 Avril 2013 et disponible sur Internet <http://www.prestigeimmobilier.ch>. 101.  GOMEZ A., “Se repérer dans l’espace pour mémoriser : Approche neuroanatomique du lien entre la mémoire et l’espace”, Université Pierre Mendès France, 2011. 102.  MANON S., “La culture”. Consulté le 10 Avril 2013 et disponible sur Internet <http://www. philolog.fr>. 103.  PINXTEN R., VERSTRAETE G., “Culturalité, représentation et auto-représentation”, Revista CIDOB d’Afers Internacionals, n°66-67, octobre 2004, p. 213. 104.  RAMIREZ S.K.J., “La publicité représente-t-elle la société et la culture d´un pays” [Th. Et.], Mexique : CESEM-UDLA, 2011, p.64 - 124.

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de haute prestance comme les créateurs de vêtements ou les créateurs de tendances. Ils déterminent les couleurs les plus adaptées aux futures saisons suivant les futurs envies de la population et les évènements sociétaux105. Paul Virilio qualifie ce phénomène “d’esthétique de la disparition”. La mode est une réflexion sur le visible, le mouvement et le temps : la réalité au quotidien. La vitesse du changement bouleverse nos idées préconçues, sans avoir de logique apparente106. C’est ainsi qu’il est possible de susciter l’envie et la motivation chez un utilisateur pour une meilleure expérience. Avec l’arrivée de nouvelles technologies, les effets de mode commencent à être créés par des marques de matériels “branchés” tels que les smartphones ou les ordinateurs, et de ce fait, les seniors actuels sont confrontés à des influences technologiques. En exemple, il m’est possible de citer Apple qui sait convaincre ses jeunes fans mais aussi les plus âgés, par l’esthétique de ses produits et ce qu’ils représentent : le cool, l’innovation107. Une personne fait souvent figure d’icone ou de mascotte afin d’affirmer l’identité de la marque. Ici, Steve Jobs était le “gourou” de la pomme croquée108. Les effets de mode et donc la marque mettent en avant une personne influente afin d’humaniser ses produits mais aussi pour symboliser ses valeurs. 46

Tout comme les créateurs de tendances et designers, les marques font renaître une cohérence entre la réalité intérieure des utilisateurs et la réalité extérieure de la société109 mais d’une façon différente. Les designers apportent de la poésie, du confort et de l’innovation dans ce qu’ils créent ainsi les usagers font évoluer les codes sociétaux110. Tandis que les marques pensent leurs stratégies et leurs communications afin que ce soit elles qui fassent évoluer les codes sociétaux et ainsi l’usager est confronté à la nouveauté111. Du point de vue de l’utilisateur, c’est l’ensemble des deux parties (designers et marques) qui forme une homogénéité : ils innovent et la société s’adapte. De 105.  RODI N., Fédération Française du Prêt à Porter Féminin, “Qu’est-ce qu’une tendance de mode ? - Tendances et communautés “. Consulté le 15 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.pretaporter.com>. 106.  VIRILIO P., Esthétique de la disparition, Paris : Editions Galilée, 1989, p.5-25. 107.  BRENNEISEN C.H., “Du Macintosh à l’Iphone, la stratégie de différenciation d’Apple” [mémoire], 2009, p.32-50. 108.  BRENNEISEN C.H., Ibid, p.34. 109.  GIEDION S., Mechanization takes command, Londres : W. W. Norton & Company, 1969, p.9-30 110.  RUBERA G., DROGE C., “Technology versus Design Innovation’s Effects on Sales and Tobin’s Q: The Moderating Role of Branding Strategy”, Journal of Product Innovation Management, n°30, mai 2013, p.448. 111.  RUBERA G., DROGE C., Ibid, p.449.


ce fait, l’esthétique est un mode de représentation de l’évolution et donc du temps par les valeurs stylistiques112.

Steve Jobs présentant le MacBook Air lors de la Keynote de la MacWorld Expo 2008 © Apple, 2008. La fonction d’un objet à travers le temps se confronte avec l’objet symbolique . En effet, on a vu que l’esthétique et sa symbolisation évoluaient 113

en fonction des pensées de la société, mais, la fonction d’un objet évolue-telle vraiment ? La fonction est le symbole de l’ordre vital, d’un mouvement organisé dévolu à un élément d’un ensemble ou à l’ensemble lui-même114. Dans ce sens, ce n’est pas sur la fonction en elle-même qu’il faut se concentrer mais sur l’évolution des modèles d’organisation : est-ce que l’homme s’organise différemment dans le temps ? D’après Jean-Daniel Reynaud, l’organisation est le miroir de la culture d’une personne (traditions, valeurs propres, qualifications de travail...)115 signifiant qu’une fonction change par rapport à la culture d’une personne. Dans un précédent paragraphe j’aborde l’influence de la culture sur l’objet et j’en détermine qu’une culture évolue 112.  COURNARIE L., COURNARIE N., “L’esthétique en questions”, Philopsis : Revue numérique. Consulté le 05 Avril 2013 et disponible sur Internet <http://www.philopsis.fr>. 113.  MERCIER J., “Les composantes de l’identité comme déterminants de l’engagement à la marque”, Université de Droit, d’Économie et des Sciences d’Aix Marseille - Université Paul Cézanne, W.P., n° 870, février 2010. 114.  Dictionnaire des symboles, Édition Robert Laffont, 1997. 115.  REYNAUD J.D., “Les régulations dans les organisations”, Revue française de sociologie, n°1, 1988, p.17.

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très lentement du fait de sa complexité. Ainsi, il m’est possible de dire qu’une fonction évolue peu mais que c’est la forme de l’objet qui évolue rapidement: c’est à dire son identité. Ce qui forme un produit fonctionnel est donc le regroupement d’un objet et de fonctions116. C’est pourquoi les personnes âgées acceptent les objets technologiques aussi facilement : la fonction leur est en partie commune contrairement à leur identité.

1.

2.

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3. 1. Tablette de vente de propriétés retrouvée à Shuruppak, XXVIe siècle av. J.-C © Musée du Louvre, 2011. 2. Cahier d’écolier de Louis Delaumône © Baptiste Chevalier, 2014. 3. Tablette tactile © Samsung, 2012.

Prenons l’exemple de l’action “écrire” qui se retrouve sur les trois supports ci-dessus. Seuls les objets changent mais pas la fonction et c’est ainsi que 116.  TEKMEN Y., “An analysis of the evolution of multi functional kitchen mixing tools” [Thèse], 2007, p. 27.


beaucoup de produits évoluent : un designer industriel définirait cela comme de l’innovation. Si une fonction inexistante venait à être créée avec un produit, le designer appellerait cela de l’innovation de rupture117. Cette dernière est complexe car il ne faut pas écouter ce que veut le public ; bien au contraire, dans ce cas le designer doit répondre à un besoin sans se focaliser sur les habitudes et le passé des futurs utilisateurs118. C’est par la communication et l’immersion que l’utilisateur âgé acceptera ce nouvel usage tout comme les Google Glass. L’objet, l’œuvre d’art ou le produit fonctionnel sont porteurs de symboles, d’éléments qui évoquent autre chose. Leurs esthétiques, perceptibles par le spectateur, transmettent des émotions de bonheur ou d’anxiété à une personne. Ces émotions sont voulues par son dessinateur mais aussi données par la société suivant sa culture. L’objet subit des changements identitaires rapides avec le temps, comme son style par rapport aux effets de mode. Les fonctions que l’on peut lui donner évoluent au contraire lentement, car une majorité d’utilisateurs a besoin de faire des associations avec ses souvenirs ainsi des jugements positifs sont émis. Ce cas de figure s’applique largement chez les seniors. L’innovation de rupture vise à créer de nouvelles fonctions ; pour que l’utilisateur les accepte il faut les lui montrer et le mettre dans une situation où il utilise ces nouvelles fonctions. Des souvenirs lui seront ainsi créés. L’objet représente le futur et le designer est son façonneur.

117.  GAREL G., MOCK E., La fabrique de l’innovation, Paris : Dunod, 2012, p.113. 118.  Usine Nouvelle, “L’Innovation en questions - Peut-on modéliser l’innovation ?”. Consulté le 22 septembre 2013 et disponible sur Internet <http://blog.usinenouvelle.com>.

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La création sociale d’objets “De façon générale, le problème des nouvelles technologies n’est plus aujourd’hui celui d’une fracture sociale, ni même d’une fracture générationnelle. C’est celui d’une fracture d’usage entre d’un côté des usagers qui sont capables de prendre du recul par rapport à ces nouvelles technologies, et d’un autre côté des usagers qui en sont incapables.” — Les Cahiers Dynamiques - Le danger de la fracture d’usage, Serge Tisseron, 2012. Après s’être intéressé à la symbolique d’un objet ou d’un logo, il parait inévitable d’aborder la création et la promotion du produit. C’est pourquoi dans la lignée de ma problématique, je vais me centrer sur les nouvelles pratiques sociales de création et d’innovation faisant évoluer les codes imaginatifs. Après avoir présenté ces méthodes, je vais mettre en avant l’importance du geste physique et mental des créateurs afin que ces créations 50

soient au mieux adaptées aux usagers qu’elles visent : les personnes âgées dans mon cas. Le travail créatif de designer se réalise couramment en groupe afin d’arriver à des propositions objectives. Le but étant de regrouper différentes compétences et ainsi couvrir un vaste champ d’action. Cependant les outils doivent être adaptés à un travail collaboratif aussi bien dans un lieu unique qu’à distance. Je vais séparer les pratiques créatives des pratiques promotionnelles intégrant les contraintes évoquées précédemment. L’analyse de ces méthodes va me permettre d’exposer une façon d’innover dans les codes de vie. Je les réinvestirai lors de ma phase créative à la suite de ce mémoire. Le numérique intervient beaucoup dans le processus de design imageant une personne devant son ordinateur avec la souris dans la main. Néanmoins les nouvelles pratiques ouvrent des possibilités plus sociales intégrant directement l’utilisateur jeune ou âgé. L’exemple ci-dessus est un processus créatif de pointe : analyse, planches tendances, innovation, dessin, test designer/utilisateur, prototypage, test utilisateur. Il met en scène une bague qui est un objet simple mais peut être


Parcours créatif innovant © Baptiste Chevalier, 2014. applicable à des concepts de rupture. L’analyse est l’étude d’éléments existants qui sont ensuite compilés en planches tendances, celles-ci formant un de cahier des charges esthétique. Les séances d’innovation se font à plusieurs personnes, soit physiquement avec des post-it ou numériquement par un logiciel des mind-mapping, ce qui permet de faire émerger des éléments inexistants. La phase de dessin se fait majoritairement sur informatique avec une tablette graphique pour faire des croquis directement en trois dimensions119. Cette méthode permet de dessiner en volume à la suite d’esquisses sur papier. Ainsi en gardant la base de ce dessin en volume, un lien solide est fait avec la modélisation en trois dimensions. Vient ensuite la première phase de tests par des rendus réalistes montrant une photographie du produit final. Sur ce visuel sont définis les matériaux, ici c’est de l’or et de la céramique. Dans la continuité intervient l’immersion en réalité virtuelle120 permettant de se mettre dans le contexte réel en essayant la bague sur soi : le designer ou l’utilisateur met un casque et est projeté dans un environnement virtuel où il peut interagir avec le produit modélisé en trois dimensions. Le but étant que le designer analyse l’expérience que l’utilisateur a vécue : émotions, ergonomies... Une fois cette phase finalisée, il est possible d’imprimer en volume121 la bague dessinée pour créer un prototype. Le designer puis l’utilisateur peuvent essayer à nouveau le produit mais cette fois-ci physiquement : des conclusions en sont déduites pour l’améliorer. Les tests utilisateurs permettent l’émergence des premières sensations face à la 119.  DASSAULT, “Dassault Systèmes Introduces Unique 3D Sketching Experience”. Consulté le 11 janvier 2013 et disponible sur Internet <http://www.3ds.com>. 120.  STEINICKE F., WIELAND P., “Self-Motion Illusions in Immersive Virtual Reality Environments”, Virtual Reality Conference (VR), 2011 IEEE, mars 2011, p. 39-46. 121.  BERCHON M., L’impression 3d, Paris : Eyrolles, 2013, p.14-16, 128-132.

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découverte du produit créé. Dans mon contexte, l’évolution identitaire des seniors dans de nouveaux codes sociaux et environnementaux, la création collective et l’implication des futurs utilisateurs permettent d’analyser les réactions de chacune des personnes. La promotion de la bague créée commence soit pendant le processus créatif soit après, suivant les contraintes imposées. Elle regroupe le financement du projet et sa communication auprès du public âgé. Le mouvement crowdfunding (financement participatif) trouve ses sources dans la recherche de dons par les ONG122 et s’est démocratisé avec le développement des NTIC123. Le but de cette méthode est de financer un projet par la mise en commun d’une multitude d’apports individuels. Le site “kickstater.com” en est le spécialiste : depuis 2009, 5,3 millions de personnes ont versé 913 millions de Dollars pour financer 53.000 projets124. On pourrait penser que cette méthode est réservée aux designers, créateurs et artistes indépendants mais non, des industries ont recours à celle-ci pour financer des projets d’innovations à long terme125. Outre les méthodes traditionnelles de publicité, le crowdfunding permet de communiquer et de sensibiliser les futurs utilisateurs afin de les préparer au renouveau mais également de connaitre leur réaction : c’est le modèle que je projette. 52

Revenons au projet de création de la bague et imaginons que celui-ci est innovant, alors il est nécessaire de préparer une bonne communication pour le promouvoir sur un site tel que Kickstarter. L’ensemble du projet doit être partagé avec les crowdfunders, tels que les membres de l’équipe, un plan de financement ou encore la méthode de développement126. La communication est alimentée au fur et à mesure de son avancement cependant cette initiative nécessite de protéger ses créations avant de les publier. Les mécènes visualisent les statistiques du financement du projet ce qui les motive à donner encore plus. Réaliser des projets innovants est coûteux et nécessite pour cela de les promouvoir pour acquérir des subventions. Le crowdfunding est une solution sociale mettant en avant une force collective interconnectée, mise en parallèle à l’évolution des pratiques sociales, le numérique et Internet faisant 122.  Organisation Non Gouvernementale. 123.  Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication. 124.  Kickstarter, “Seven things to know about Kickstarter”. Consulté le 12 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.kickstarter.com>. 125.  Philips Innovation Fellows Competition, Consulté le 13 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.newscenter.philips.com>. 126.  Kickstarter, “Most importantly, Kickstarter works”. Consulté le 12 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.kickstarter.com>.


renaitre une attitude coopérative127. L’acte du designer est important dans le processus novateur ; je vais m’intéresser plus particulièrement à la phase d’innovation en tant que geste mental et à la phase de dessin comme geste physique. Cela va permettre de qualifier les caractéristiques identitaires d’une personne face à la création. Lors des séances d’émergence de concept de rupture, la capacité cognitive à se représenter des éléments est mobilisée. C’est ce que l’on appelle l’imagerie mentale128 se définissant comme “une expérience qui ressemble à une expérience perceptuelle mais qui se produit en l’absence des stimuli ayant déclenché les perceptions correspondantes”129. Ce concept renvoie à trois aspects distincts mais complémentaires : le premier concerne son processus en lui-même “processus par lequel l’information sensorielle est représentée en mémoire de travail”130. Le second est le résultat de l’imagerie mentale soit “une représentation subjective atténuée d’une sensation ou d’une perception, sans la sollicitation sensorielle correspondante”131 comme la vivacité, la quantité ou l’élaboration. Enfin, le dernier aspect se porte sur la capacité des individus à former des images mentales132. Cela introduit de multiples variations dans les pratiques créatives chez les designers en fonction de leur personnalité, leur capacité intellectuelle et leurs connaissances antérieures... Tardif et Sternberg distinguent cinq caractéristiques liées aux images mentales : “l’imagination”, “la pensée métaphorique”, “l’utilisation de larges catégories et d’images”, “la communication non verbale” ainsi que “la création de visualisations internes”133. C’est pourquoi il est possible de dire que le processus d’innovation est avant tout un geste mental du cerveau qui est stimulé par la discussion au sein d’un groupe de personnes. Cette capacité à se représenter mentalement des situations s’active chez toutes les personnes plus ou moins consciemment et est propre à chaque identité. 127.  CORNU J.M., La coopération : nouvelles approches, Paris : cornu.eu.org, 2004, p.18. 128.  VELLERA C., “Créativité et capacité d’imagerie mentale : validation d’une relation”, HAL, SLS - 00849802, août 2013, p.9-13. 129.  Stanford Encyclopedia of Philosophy [en ligne], <http://plato.stanford.edu>. 130.  MACINNIS D.J., PRICE L.L.,”The role of imagery in information processing: review and extensions”, Journal of Consumer Research, n°13- 4, 1987, p. 473-491. 131.  HOLT R. R., “Imagery : the return of the Ostracized”, American Psychologist, n°19, 1964, p.254264. 132.  GORDON R., “An investigation into some of the factors that favour the formation of stereotyped images”, Journal British Psychology, n°39, 1949, p.156-167. 133.  TARDIF T. Z. ET STERNBERG R. J., The nature of creativity: Contemporary psychological perspectives, Cambridge : Cambridge University Press, 1998, p.429-440.

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Le geste physique du designer modélise celui de sa pensée pour former des signes et des valeurs, c’est ce qui fait sa particularité. Il est ainsi perceptible directement dans les produits qu’il dessine créant une expérience à vivre pour enrichir le quotidien de l’utilisateur. Le coup de crayon qu’il donne intègre les fonctions définies lors des séances d’innovation. Les images mentales permettent de s’imaginer un volume pour ensuite le représenter réellement. En faisant suite à l’exemple du processus créatif de la bague, des designers ont cherché à mettre davantage en avant leurs gestes physiques. À l’image du dessin en trois dimensions sur informatique, serait-il possible de dessiner physiquement une chaise dans un espace vide ? Le studio design Front a mis en place un système pour laisser la première esquisse devenir un objet, autrement dit “une méthode permettant de matérialiser des croquis à main levée”134. Ainsi, l’image mentale suivie du geste physique est directement mise en volume et représente l’essence même de son identité. Cette situation peut être comparée à l’effet de l’immédiateté des actions quotidiennes vers laquelle la société se tourne : pouvoir tout réaliser dans un court instant.

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Processus de dessin innovant © Front Design, 2009.

134.  LAGERKVIST S., Von der LANCKEN C., LINDGREN A., “Front project - Sketch furniture”. Consulté le 21 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.designfront.org>.


Henri Bergson dans son livre Matière et Mémoire135 met en avant ce lien entre la mémoire et l’objet : l’accumulation d’images mentales dans l’esprit fortifie la perception du volume qu’une personne s’imagine. Ainsi l’action, le geste et l’esquisse qu’une personne fera, seront davantage concrets. Il considère que l’esprit a une force d’agir et que le corps (volume) est le centre des actions. Ces actions sont réalisées non pas de façon aléatoire mais par une approche instinctive sous l’effet de la concentration d’images mentales et de la personnalité plus ou moins forte. De ce point de vue, je peux en déduire que le geste physique du designer permet d’interpréter un aggloméra de pensées et de connaissances. Ces deux composantes sont rendues possibles par la perception en amont de nombreuses références : la veille quotidienne de la parution de nouveaux produits, technologies ou encore d’œuvres d’arts permet la convergence d’images mentales innovantes. Le designer a une position centrale dans un processus d’innovation pour créer de nouveaux produits. Son raisonnement cognitif est complexe mais est compréhensible quand il commence à représenter ses intentions. C’est pourquoi la communication dans toute société est la base de la coopération reprenant ainsi des codes environnementaux. De nombreux moyens sont possibles pour cela, mais en faisant de nouvelles expériences de représentations; tout usager, tout designer est amené à penser différemment pour avoir des résultats nouveaux, en rupture.

135.  BERGSON H., Matière et mémoire - Essai sur la relation du corps à l’esprit, Paris : Gallimard, 1896, p.200-220.

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L’objet, un miroir de l’identité “Les objets du quotidien ont une vertu de permanence qui construit le concret et contrôle les errements de l’identité: ils jouent le rôle de garde-fou du soi.” — Le cœur à l’ouvrage - Théorie de l’action ménagère, Jean-Claude Kaufmann, 2005. L’objet constitue un aspect essentiel du cadre de vie social et donc de l’identité d’une personne jeune ou âgée. Après avoir présenté les formes d’identités existantes chez un individu, je vais m’intéresser aux interactions entre un utilisateur et des composantes matérielles et numériques. Tout d’abord du point de vue de l’usager, comment son identité s’adresse-t-elle à un objet ? Puis dans un second temps, sous l’angle de l’objet, comment intègre- t-il l’identité de son utilisateur ? Il est intéressant pour un designer d’explorer ces interactions pour imaginer un produit encore plus proche de son utilisateur. Les codes sociaux et environnementaux évoluent afin de considérer l’identité de chaque personne par le biais de données numériques. 56

L’identité est le “caractère permanent et fondamental de quelqu’un, d’un groupe, qui fait son individualité, sa singularité”

. Une personne compte

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trois identités: l’identité biologique, l’identité civile/sociale et l’identité numérique137. Dans le domaine de la biologie, l’identité se mesure avec l’acide désoxyribonucléique (ADN) et le groupe tissulaire HLA. Les empreintes digitales, l’iris des yeux et l’apparence physique sont propres à chaque être humain, ils définissent donc notre unicité. Le sexe fait partie de cette identité138. L’identité civile se base sur une partie de nos données biologiques mais aussi sur nos prénoms, nom, adresse, date de naissance et lieu de naissance. Le tout est regroupé sur une carte d’identité et sur un passeport139. L’identité numérique sur Internet et le Web est de plus en plus présente 136. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 137.  PEREA F., op. cit., p.35. 138. Dictionnaire, op. cit., p.56. 139.  CORNU G., Vocabulaire juridique, Ed. 10e édition, 2014.


dans la vie d’une personne. Celle-ci se divise en deux : l’identité civile du net et l’identité-écran. La première étant une réalité sociale numérique et la seconde une virtualité sociale. Elles se distinguent par le fait que l’une est référencée par l’État et la seconde par la personne elle-même. Une personne utilise un objet fonctionnel : des interactions se créent entre les deux parties. La personne transmet des informations, des émotions ou de l’énergie à l’objet et en contre-partie l’objet renvoie aussi de l’information, des émotions ou de l’énergie. D’après Jean-Claude Kaufmann, il “fonctionne comme un repère dans les enchaînements de gestes, les trajectoires et les rythmes familiers”140. Les produits intelligents s’adaptent à l’utilisateur en intégrant en partie son identité pour le rendre unique et intime. Ils peuvent également prendre en compte la physionomie, les goûts ou encore le passé de son propriétaire. Prenons le cas de la cafetière conceptuelle “Memory” imaginé par WenYao Cai pour le Electrolux Design Lab et du bracelet bienêtre “UP by JawBone”. Ces deux produits regroupent des fonctions existant dans d’autres objets mais en plus ils “parlent” à leurs utilisateurs, intègrent l’identité biologique, civile et numérique. 57 Cas n°1 : la cafetière Memory

interactions

IDENTITÉ de l’UTILISATEUR

CAFETIÈRE

Memory process © Wenyao Cai & Baptiste Chevalier, 2014.

140.  KAUFMANN J.C., “Le monde social des objets”, Sociétés Contemporaines, n°27, juillet 1997, p.111.


Ce produit se décompose en deux grandes parties : la cafetière et un écran tactile. La première est commune à ses semblables faisant d’elle un repère familier à l’utilisateur. La seconde technologie est également existante mais pas sur cet appareil et ne servant pas à cette fonctionnalité. Ici, l’usager utilise son identité biologique et ses empreintes digitales pour ouvrir une fiche personnelle regroupant ses goûts et ses habitudes concernant le café. En s’adressant à la cafetière à chaque fois qu’il souhaite un café, une interaction se créé. À la différence des autres cafetières, celle-ci retient les rituels quotidiens de son usager pour ainsi créer un profil numérique141. C’est à ce moment que l’intelligence de l’objet entre en interaction avec son usager en lui proposant des idées de cafés qu’il pourrait apprécier. La cafetière est dotée d’une mémoire (puces électroniques) et d’un mode de communication (une interface). Ainsi cela permet de transmettre à son utilisateur des sentiments et notamment celui de la confiance puisqu’elle lui propose ce qu’elle aime142. Il m’est possible de dire que cet objet est le miroir d’une partie de l’identité de son usager puisque des données personnelles sont mémorisées. L’interface est le reflet de la personne143 : elle voit sa photographie, ce qu’elle 58

aime, sa consommation... L’objet devient social144 par son savoir, ses modes de communication et les relations entretenues entre plusieurs individus afin d’intégrer des codes environnementaux. Ce principe pourrait trouver sa place auprès des objets quotidiens des personnes âgées et même démentes145.

141.  ROOSENDAAL A., “Digital Personae and Profiles as Representations of Individuals”, Privacy and identity management for life, n°320, janvier 2010, p.226. 142.  Electrolux, “Memory”. Consulté le 09 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www. electrolux.co.uk>. 143.  VACAFLOR N., “L’expression identitaire “mobile” des jeunes : vers une autre narration de soi”, Culture Numérique [en ligne], <http://culture.numerique.free.fr>, 2011. 144.  KAUFMANN J.C., op. cit., p.57. 145.  AQUINO J.P., BERARD A., GASPARD F., KENIGSBERG P.A. et Coll., “Maladie d’Alzheimer et autres maladies neurodégénératives : périmètre de cohérence”, France Alzheimer & Fondation Médéric, février 2013, p.7-10.


Cas n°2 : le bracelet UP by JawBone

interac tio

ns

IDENTITÉ de l’UTILISATEUR

BRACELET

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APPLICATION UP process © Jawbone & Baptiste Chevalier, 2014. UP est un bracelet à l’apparence sobre qui se porte au poignet 24h/24h observant la façon dont son utilisateur dort, bouge et mange. Une application smartphone l’accompagne pour visualiser les informations captées par l’objet intelligent. Son but est d’aider une personne à contrôler son activité pour garder la forme. L’identité biologique de l’usager est en interaction avec le bracelet et l’identité numérique avec l’application : ainsi UP est un relais entre elles deux. Le lien qui les unit permet de les solliciter toute la journée impliquant totalement la personne dans une sphère sociale et intime avec le produit. L’objet, vu en tant que tel, est connecté en permanence aux

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données biologiques et numériques de l’utilisateur, ainsi il est complètement autonome. Par sa forme propre au bracelet, il est pensé pour s’attacher et être oublié au poignet. Ce produit est représentatif de la théorie de l’attachement : “Son principe de base est qu’un jeune enfant a besoin, pour connaître un développement social et émotionnel normal, de développer une relation d’attachement avec au moins une personne adulte qui prend soin de lui de façon cohérente et continue”146. Ici, le produit remplace la “personne adulte” devenant social : il est un miroir numérique de l’identité biologique de son utilisateur jeune ou âgé. Des rappels et des contrôles sont faits par UP pour prendre soin de son utilisateur qui ressent ainsi des sentiments et notamment de la sécurité. Le designer trouve dans ces nouveaux produits intelligents un terrain de jeu incroyablement riche en émotions, mais aussi en interactions s’adaptant à chaque identité de l’utilisateur. Créer des solutions actives et non passives implique davantage l’usager, ce qui augmente sa motivation de “jouer” avec. Dans le sens inverse, l’adaptabilité des objets industriels à différentes identités 60

permet de les rendre singuliers. Bien sûr la part de responsabilité du designer s’intensifie en même temps, l’obligeant à intégrer des notions d’éthique pour que l’utilisateur reste maître de ses choix et de son identité : c’est une des composantes de l’environnement et notamment dans celui des seniors147.

146.  Wikipedia, “Théorie de l’attachement”. Consulté le 10 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://fr.wikipedia.org>. 147.  MAZEN N.J., ANCET P., “Vieillir dans la dignité. Un combat pour demain”, HAL, halshs-00566175, 2009.


L’homme et l’objet dans l’environnement “Kant a essayé de tracer une ligne de démarcation rigoureuse entre l’espace comme forme de l’expérience externe et les choses données dans cette expérience. Il ne s’agit pas bien entendu d’un rapport de contenant à contenu [...], l’espace n’est pas le milieu [...] dans lequel se disposent les choses mais le moyen par lequel la disposition des choses devient possible.” — Phénoménologie de la perception, Merleau-Ponty, 2002. L’objet est porteur de nombreux symboles dont le designer est en partie l’auteur par ses pensées créatives pour rendre ses intentions encore plus proches de l’identité de ses utilisateurs. À la suite des développements précédents, je vais élargir mon regard à l’environnement global réunissant l’homme et les objets. La notion d’environnement doit être définie puis ensuite je vais questionner le comportement de l’homme dans ce milieu hétérogène. La structure de cette notion est-elle importante pour un individu et comment l’influence t-elle ? Je tenterai de répondre à ces questionnements pour finir. L’environnement est “l’ensemble des éléments qui entourent un individu ou une espèce et dont certains contribuent directement à subvenir à ses besoins”148. Ces éléments se divisent en deux : les biotiques et les abiotiques. Le premier “se dit des facteurs liés à l’activité des êtres vivants et agissant sur la distribution des espèces animales et végétales” tel que le cosmos ; le second signifie le contraire “un milieu impropre à la vie”149 tel que le chaos. L’environnement est inséparable du temps et regroupe l’ensemble des repères autour d’un objet ou d’une position permettant de définir par exemple la droite de la gauche. Il représente également l’espace intérieur et extérieur, l’inconscience et la conscience chez l’homme ou encore l’infini sur une surface limitée “Et jamais, quelque soit le point d’où part le regard, n’est vue la totalité de l’espace”150. Les codes environnementaux sont porteurs de

148. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 149. Dictionnaire, Ibid. 150.  Dictionnaire des symboles, Édition Robert Laffont, 1997.

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valeurs importantes pour les seniors actuels. D’après Gabriel Moser, la psychologie de l’environnement est “l’étude des inter-relations entre l’individu et son environnement physique et social, dans ses dimensions spatiales et temporelles”151. Je peux ainsi exposer la décomposition de l’environnement en 4 éléments152. Le Micro-environnement est l’espace privatif et intime comme par exemple le logement d’une personne ou encore sa sphère familiale proche. Le second s’ouvre à l’environnement de proximité partagée appelé Méso-environnement : ce sont des espaces semi-publics où l’habitat collectif inclut les relations interindividuelles. Les Macro-environnements sont des composantes collectives publiques s’apparentant à des villes et des paysages. L’individu est ici en relation avec toute la collectivité ou la communauté créant une population, et y est même intégré. Kurt Lewin dit que le comportement humain doit être envisagé dans un champ global153, un Environnement Global où son “espace vital” forme un tout. Il réunit tous les éléments cités précédemment qu’ils soient manufacturés ou naturels. Ainsi, nous savons maintenant qu’une personne côtoie plusieurs environnements, ce qui lui procure une identité sociale, 62

culturelle et numérique. La psychologie environnementale trouve sa source dans la convergence de l’architecture, de l’urbanisme et du design influençant les comportements et les émotions, telles que la confiance et la peur. L’aménagement intérieur du TGV peut être cité comme exemple154. Les photos ci-dessous montrent le train avant sa reconfiguration et après le travail de psychologues environnementaux, de designers et d’ingénieurs. C’est l’expérience de l’utilisateur qui est au centre de la démarche créative, ainsi les professionnels ont cherché à apporter du plaisir, de l’élégance et de la confiance entre les passagers et l’environnement du train. L’ensemble du cadre est pensé, tels que la voix off qui annonce l’arrivée en gare, l’insonorisation, les textures et les couleurs ou encore la réduction des odeurs.

151.  MOSER G., Psychologie environnementale, les relations homme-environnement, Bruxelles : De Boeck ,2009, p. 19. 152.  MOSER G., Ibid, p. 32. 153.  Universalis, “L’univers psychologique”. Consulté le 17 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.universalis.fr>. 154.  BIRCK D. RFI, “A l’Est, du nouveau …”. Consulté le 20 octobre 2013 et disponible sur Internet <http://www.rfi.fr>.


AVANT

APRÈS

Intérieur du TGV avant et après le travail créatif de Christian Lacroix © SNCF & Jean-Marc Fabbro, 2007. La psychologie environnementale est un métier pensé par des psychologues et leur raisonnement se termine par des données scientifiques chiffrables et mesurables155. Il est intéressant de réinvestir cette pratique dans celle du design, ainsi ces résultats pourront en partie répondre à ma problématique. Cette réponse sera un processus de réflexion sur l’identité des seniors face à l’évolution des codes sociaux et environnementaux. L’environnement influence notre comportement, notre humeur et notre santé physique et mentale car, l’homme a besoin de se rattacher à des éléments, des objets. Les innovations technologiques pourraient nous faire croire qu’elles modifient les relations entre un individu et un environnement (connecté). Mais en réalité le jugement d’une personne envers un produit réel ou virtuel incrusté dans un espace physique et social est toujours le même : “Cela me donne-t-il une valeur?”, “Est-il facile d’utilisation?”, “Est-ce que je le recommanderais à d’autres?” et, enfin, “Est-ce que je l’utiliserais de nouveau, ou est-ce que je préfère l’éviter à l’avenir, ainsi que tout autre produit de cette entreprise?”156. La perception des futurs utilisateurs d’un produit dans son environnement est primordiale, ainsi l’objet fait partie d’une dimension spatio-temporelle. L’aspect humain, qu’il soit évoqué au travers d’un produit (intelligent, esthétique...) ou qu’il soit représenté réellement est essentiel. Afin d’exprimer 155.  MOSER G., op. cit., p. 32. 156.  GOULD J., “L’harmonie entre la fonctionnalité et l’émotion : le tao en design d’expérience utilisateur”, TC Media, juillet 2012.

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des codes de vie humains, il faut comprendre comment créer une structure environnementale logique et viable qui corresponde aux perceptions, aux émotions et aux comportements de l’utilisateur jeune ou âgé. Son expérience n’en sera que plus mémorable et satisfaisante : le ressenti émotionnel positif est la priorité dans chaque nouvelle création, même si elle est des plus simples. L’évolution des environnements aussi complexes qu’ils soient, par l’émergence de nouvelles technologies intelligentes, met en avant la perfection de modèles. Ainsi tout ce qui ne correspond pas à des profils types n’est pas perçu par l’utilisateur puisque ses émotions ont été éduquées pour s’exprimer face à certains codes157. Je pense que les émotions ne disparaissent pas, mais que leurs modes de déclenchement évoluent nettement. Si un environnement, un produit ou un service, en matière de simplicité, répondent aux besoins des utilisateurs ou les devancent alors ils vivront des expériences encore jamais ressenties158. C’est en d’autres termes, la découverte du point idéal, le tao du design, qui constitue la clé pour réussir la création d’un environnement global. Orange Lab et FaberNovel ont créé “Urban Mobs”159, un dispositif 64

numérique pour mettre en avant les échanges d’émotions lors des grands évènements populaires au travers des moyens de communication modernes. De nombreuses entreprises travaillent sur l’échange d’émotions au travers du numérique sur le modèle de Skype160. Les émotions vont être de plus en plus valorisées dans les années futures pour rendre ainsi la technologie plus proche de l’homme et plus transparente. Ainsi, les utilisateurs vieilliront avec des systèmes humanisés car c’est bien l’expression des émotions qui caractérise l’être vivant161.

157.  TAMINE L., BAHSOUN W., “Définition d’un profil multidimensionnel de l’utilisateur : Vers une technique basée sur l’interaction entre dimensions”, Laboratoire IRIT - HAL, février 2009, p.3-5 158.  République Française, “Consultation publique de la Commission européenne sur l’ « économie de l’expérience » comme industrie émergente”. Consulté 23 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.sgae.gouv.fr>. 159.  Orange Lab, FaberNovel, “Urban Mobs”. Consulté le 10 juin 2013 et disponible sur Internet <http://www.urbanmobs.fr>. 160.  Skype est un logiciel gratuit qui permet aux utilisateurs de passer des appels téléphoniques via Internet. Consulté le 10 juin 2013 et disponible sur Internet <http://www.skype.com>. 161.  MAGAI C., HAVILAND-JONES J., The Hidden Genius of Emotion: Lifespan Transformations of Personality, Cambridge : Cambridge University Press, 2010, p.55.


Urban Mobs, Paris - fête de la musique, 20.06 21/06/2008 © Orange & FaberNovel, 2008. En conclusion, “l’objet est un élément social” porteur de nombreux symboles perçus par les spectateurs différemment en fonction de leur culture et de leur âge permettant de faire des associations avec leurs souvenirs qui sont des points de repères. Le designer a une position centrale dans le processus d’innovation afin de faire émerger de nouveaux produits et de nouveaux symboles mais aussi pour guider l’utilisateur dans ses choix. Au travers de l’expérience utilisateur, il est possible de transmettre des émotions positives ou négatives : c’est une forme de communication comme l’esthétique d’un objet. L’intelligence des nouvelles technologies est source d’humanisation afin d’augmenter les capacités motivationnelles des utilisateurs. Ces capacités doivent être régies par des codes d’éthique pour que les individus jeunes ou âgés aient un réel choix en fonction de leurs convictions.

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CHAPITRE III. UNE RESPONSABILITÉ POUR LES ANCÊTRES DU FUTUR


Approche d’un design éthique “Technology is human behavior that transforms society and transforms the environment. Design is the cornerstone of technology. It is how we solve our problems, fulfill our needs, shape our world, change the future, and create new problems. From extraction to disposal in the life-cycle of a product, the design process is where we make the most important decisions; the decisions that determine most of the final product cost, and the decisions that determine most of the ethical costs and benefits. It is quintessentially an ethical process. Ethics is not an appendage to design but an integral part of it, and we advocate using the moral imagination to draw out the ethical implications of a design. We will stress and develop the social ethics paradigm, because design is an iterative social process for making technical and social decisions that may itself be designed at each stage with different people at the table, different information flows, different normative relationships, different authority structures, and different social and environmental considerations in mind.” — Design Ethics : The Social Ethics Paradigm, Richard Devon & Ibo Van De Poel, 2004. Après s’être intéressé à l’objet comme élément social, intelligent et miroir de l’identité humaine, il me semble important de développer la notion de responsabilité. Je vais expliquer ce qu’est l’éthique puis exposerai son intégration au sein du processus de design. Ceci nous conduira à la question de savoir comment elle est prise en compte dans les nouvelles technologies et ainsi quelle place a la part d’humanité. Les seniors se rattacheront à cette réflexion dans les chapitres suivants. L’éthique est ce qui concerne la morale et les mœurs162 dans une société. La discipline est une réflexion sur les impacts, les valeurs et les conditions 162. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>.

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qu’un projet véhicule. Elle a également pour but de mettre en avant les bons comportements à avoir face à une situation comme l’emploi de matériaux recyclables dans un projet de design de produits. La condition humaine et aussi de tout être vivant est centrale dans la réflexion éthique : quelles conséquences aura cette décision sur l’utilisateur, sur la faune, sur la flore et sur la planète. En cela, “l’éthique est une recherche d’idéal de société et de conduite de l’existence”163 évoluant dans le temps et selon les cultures auxquelles elle s’adresse. Peu de documents officiels engagent les designers dans une charte de responsabilité, cependant il est possible de citer la démarche de Ken Garland avec le “First things first, A manifesto”164 de 1964. Ce document signé par vingt-deux personnalités, vise à protéger les droits des designers graphistes. Il a été réédité en l’an 2000 protégeant davantage leurs savoir-faire face aux industries publicitaires. Richard Devon dit que l’éthique n’est pas un appendice au processus de conception et de design mais qu’il a une valeur influençant les fonctionnalités, l’ergonomie et le prix d’un produit165. Il parle d’un social ethics paradigm car ses principes moraux s’inscrivent dans des processus de projets itératifs d’objets sociaux. Un paradigme car c’est une représentation que l’on se fait du monde et une 68

manière dont on voit les choses d’après une réalité. Ce n’est donc pas un modèle calquable sur n’importe quel projet, en ce sens nous pouvons parler d’intention éthique. Je pense pouvoir dire que le but du design est de rendre la vie des usagers meilleure, plus agréable au quotidien, ainsi il y a donc bien une intention éthique dans notre discipline. La question que se pose idéalement un designer à chaque projet est “comment dois-je agir, comment dois-je élaborer et orienter mes intentions de solutions ?” Cette réflexion fait déjà partie des “théories parapluies”166 grâce auxquelles les professionnels donnent du sens à leur travail, mais est peu étoffée. Rabah Bousbaci, Professeur à l’École de design industriel de l’Université de Montréal, souligne que nous sommes en droit de se demander comment la considérer, peut-être par l’instauration de cours ou d’ateliers où cette intention éthique serait le sujet. Certes le 163.  CANTO-SPERBER M., Coll., Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, PUF, 2004, p.6. 164.  PRUSYNSKI M., “Ethics in Design”. Consulté le 22 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.meganpru.com>. 165.  DEVON R., Van De POEL I., “Design Ethics: The Social Ethics Paradigm”, TEMPUS Publications, Vol. 20 - n°3, 2004, p. 461 - 469. 166.  Expression introduite par SCHÖN D., The Reflective Practitioner : How Professionals Think in Action, États-Unis : Basic Books, 1983. p.30.


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First things first, A manifesto Š Ken Garland, 1964.


designer ne sera vraisemblablement jamais un expert en éthique, mais aux États-Unis le métier d’éthicien existe. Ainsi des cours d’éthique sont donnés aux étudiants en ingénierie ou en design167. Le premier point qui leur est appris est que l’utilisateur doit garder le pouvoir de décision. En France, nous sommes sensibilisés à l’écologie, à l’éco-conception et au développement durable : ce sont des composantes éthiques. Les normes ISO définissent des objectifs sur les éléments tangibles, mais très peu de mesures sont prises envers la dimension émotionnelle. Les objets, les environnements intelligents et les interfaces, comme je l’ai exposé dans les paragraphes précédents, se tournent de plus en plus vers la stimulation des émotions. En l’absence de normalisation il en va de la responsabilité du designer. Ainsi pour qu’il ressente de l’empathie envers les futurs utilisateurs de ses projets, il doit vivre et tester en amont les expériences de ses créations. Ces enjeux suscités ne sont pas réservés qu’au design mais également aux autres pratiques créatives et d’ingénierie. En guise d’exemple, l’agence IDEO est sensible à la prise en compte des envies de sa cible et investit ses projets d’intentions éthiques. Elle a créé un guide sur les possibilités d’intégrer la notion de responsabilité autour des impacts sociaux au sein des firmes industrielles168. Selon ses pratiques, 70

les intentions et les décisions doivent être mesurées pour connaitre l’impact qu’elles auront : “Nous construisons le long terme à partir du court terme”169. La réflexion éthique dans un projet de design est un vrai débat et doit être prise en compte ; bien sûr elle est variable suivant les cultures auxquelles on s’adresse et évolutive dans le temps. Rien n’est défini car c’est une pensée non tangible mais la stimulation des émotions doit être faite en se posant les bonnes questions. Les technologies sont de plus en plus transparentes pour être au plus près de l’homme sans contraintes d’utilisation. Cela simplifie la vie au quotidien mais, paradoxalement la décision des usagers devient complexe par leurs anticipations via la machine170.

167.  HAIK Y., SHAHIN T., Engineering Design Process, Stamford : Cengage Learning, 2011. 168. IDEO, Design for social impact, HOW-TO-GUIDE, Californie : The Rockefeller Foundation, 2008, p.7-36. 169.  POIRIER P.A., “Design social”, Poesis, Vol.2 n°2, mai 2007, p.6. 170.  YANG R., “Pour faciliter leur quotidien, le robot anticipe les gestes des hommes”. Consulté le 22 février 2013 et disponible sur Internet <http://www.atelier.net>.


L’éthique dans les avancées technologiques “Un train arrive à grande vitesse vers un aiguillage et il lui est impossible de freiner. Sur la voie de droite se trouvent cinq travailleurs en train d’effectuer des travaux d’entretien alors que sur la voie de gauche travaille une personne seule. Si vous étiez aux commandes de la locomotive, que feriez-vous ? Que ferait un ordinateur ou un robot dans un tel cas ?” — What Should We Want From a Robot Ethic, Peter M. Asaro, 2006. En première partie, une approche d’un design éthique dans laquelle je définis ce qu’est cette notion, a été faite. Il est maintenant intéressant de confronter cette réflexion aux objets intelligents, à la technologie en général et notamment à la robotique dévoilant une nouvelle facette des codes sociaux et environnementaux. Après avoir commencé par les interactions entre l’homme et la robotique, je développerai un positionnement éthique. Un robot est un appareil automatique capable de manipuler des objets ou d’exécuter des opérations selon un programme fixe, modifiable ou adaptable171. Les actuelles avancées dans ce domaine ont fait beaucoup de progrès et mettent davantage en avant les interactions entre l’homme et la machine. Le but des chercheurs est actuellement d’optimiser les capacités des robots pour les commercialiser, ainsi ils seront encore plus proches de l’humain. La Norwegian University of Science and Technology a mis au point un robot capable d’agir comme un être humain par mimétisme172 et l’Université Cornell a créé un robot pouvant prédire les actions d’un homme. Cette technologie, armée de capteurs, observe les mouvements du corps humain et les compare à des données préenregistrées. Ainsi, le but est de faire intervenir le robot en aide à une action qu’une personne s’apprête à réaliser : l’interaction homme-machine est plus fluide. Ce type de robot pourrait être utilisé dans les domaines de l’industrie, de l’hôpital ou encore chez les personnes âgées comme aide à domicile173. Une autre technologie 171. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 172.  Reproduction machinale, inconsciente, de gestes et d’attitudes des gens de l’entourage. Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. 173.  YANG R., op. cit, P.70.

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majeure ayant été trouvée au MIT vise à rendre le robot capable d’apprendre de ses erreurs174. Je m’explique : habituellement il fera toujours la tâche pour laquelle il a été programmé ; ici, il est programmé pour une tâche complexe et s’il n’arrive pas à l’exécuter du premier coup, son intelligence artificielle va calculer de nouveaux scénarios. Ici aussi, cette technologie pourra trouver ses fins dans de multiples domaines où une personne ne peut intervenir physiquement. Au regard de l’homme en général, les robots sont des objets qui font peur car la technologie est trop visible. Néanmoins depuis quelques années, les industries commercialisant des robots pour le grand public l’ont compris et habillent le robot avec élégance. Nao est l’exemple parfait du robot domestique : esthétiquement, il a les mêmes membres que nous, ainsi une part de réalité entre en interaction avec son utilisateur. Il a une apparence technologique par souci de miroir identitaire, ainsi son programmeur peut mieux se projeter en lui. Le coût de fabrication est une raison supplémentaire.

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Nao, robot de fabrication Française, à Paris - Jardin des Tuilleries © tofz4u & Flickr, 2013.

174.  CRUM C., “MIT is teaching robots how to learn from their mistakes”. Consulté le 22 février 2013 et disponible sur Internet <http://www.webpronews.com>.


Le robot domestique sera à mon sens de plus en plus présent dans nos vies car il peut réaliser toutes les tâches récurrentes comme passer l’aspirateur, débarrasser la table ou encore garder la maison. Une étude réalisée par l’Université de Duisburg Essen en Allemagne, démontre que la fonction cérébrale d’une personne réagit de façon similaire lorsqu’elle est en présence d’une personne ou d’un robot175. Cela signifie que nous accepterons bien plus facilement la présence de robots que nous le pensons: si l’objet communique, s’il transmet des émotions, s’il est intelligent et s’il s’adapte au choix de l’homme alors il sera accepté. Cette réflexion est mise en œuvre dans la majorité des nouveaux produits et l’identité des personnes vieillira avec ces nouveaux codes sociaux et environnementaux. Ces actuelles avancées technologiques posent beaucoup de questions éthiques auxquelles peu de temps est accordé. Les grands groupes développent des produits à une telle rapidité telle que les utilisateurs effleurent a peine leurs fonctionnalités que de nouveaux sont entre leurs mains. L’éthique de la robotique, “roboethics” en anglais, est le domaine qui recherche et traite les problèmes moraux par rapport aux robots. Cette réflexion est apparue aux États-Unis au moment de la seconde et de la troisième révolution industrielle mettant en premier plan les interactions Hommes/Machines. D’après l’IRIE176, les robots nous entourent progressivement dans le monde professionnel ainsi que dans notre sphère privée mais peu de connaissances existent sur les enjeux sociaux et éthiques causés. Afin de couvrir l’ensemble de ces robots, le collectif des docteurs de l’IRIE propose trois niveaux de réflexion : l’homme et l’environnement technologique, l’homme interférant avec la technologie et la vie des robots au quotidien177. Ces thèmes évoquent la question des valeurs identitaires et des codes sociaux et environnementaux développée dans les parties précédentes : • “Comment l’homme vit-il dans un environnement technologique?” est la question du premier niveau. Celle-ci introduit une réflexion sur l’acceptation au quotidien des systèmes techniques et numériques par l’être humain. Ce point est couramment source de discussions au sein des industries et des politiques publiques. 175.  ROSENTHAL-VON DER P. A., KRÄMER N., “Humans feel empathy for robots: fMRI scans show similar brain function when robots are treated the same as humans”. Consulté le 12 juin 2013 et disponible sur Internet <http://www.phys.org>. 176.  International Review of Information Ethics 177.  CAPURRO R., “Ethics in Robotics”, International Review of Information Ethics, n°6, décembre 2006, p.1-32.

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• “Comment l’homme interagit avec la technologie?” et “Comment la technologie est conçue par l’homme?” sont les questions au second niveau. Elles soulèvent les concepts, les théories et les moyens utilisés en robotique pour modéliser la relation entre l’identité de l’utilisateur et celle de la machine (partenaire/partenaire,

maître/esclave,

soignant/enfant,

propriétaire/

animal...). Ici sont également remises en question les façons de concevoir et de fabriquer la technologie en elle-même au détriment de la condition humaine. Les interrogations de politique de financement, les intérêts militaires et la représentation des médias sont centraux à ce niveau. • “Pourquoi devrions-nous vivre avec les robots ?”. L’IRIE dit que nos principales valeurs sont intégrées à tous les appareils technologiques qui nous entourent178. Cela vient appuyer mes précédentes recherches, alors l’interrogation qui en suit est : quelle sont les valeurs que l’homme du vingtet-unième siècle essaie de réaliser ? Si l’objet est un miroir de l’identité, les créatures artificielles et intelligentes sont bien plus et l’homme est en train de se redéfinir par rapport à elles. Le troisième niveau rassemble des réflexions qui doivent être menées à long terme pour anticiper des scénarios plausibles. 74

Alors il sera possible d’avoir un aperçu de ce que seront les ancêtres du futur. Ce plan introduit peu le point de la jurisprudence auquel je ne peux échapper. L’autonomie, la prise de décision et l’intelligence des robots vont croître, cela soulève des questionnements juridiques notamment sur la responsabilité en cas de problème. En droit, ne peut être tenu comme responsable qu’un agent moral, sans quoi c’est un accident179. Cela veut dire que seul un être ou un élément capable de respecter les règles sociales et les mœurs établies dans une société, et doté de capacités psychiques peut être désigné comme responsable. C’est pourquoi aujourd’hui, comme le dit Peter Asaro180, seul un fabricant ou un utilisateur peut porter ce poids. Cependant les chapitres précédents démontrent que l’intelligence artificielle sera dotée de capacités morales.

178.  CAPURRO R., Ibid., p.1-32. 179.  BOUCHET-SAULNIER F., Dictionnaire pratique du droit humanitaire, Éditions La Découverte, 2013, p.30. 180.  ASARO P. M., “Robots and responsibility from a legal perspective”, Proceedings of the IEEE, 2007.


Wired - Jimmy Fallon © Peter Yang, 2013. En conclusion, il faut retenir que l’homme créé des interactions, des relations avec la robotique inévitablement du fait de sa conception par biomimétisme181 à partir des être vivants. Les capacités de l’homme sont largement prises comme modèles pour imaginer de nouveaux robots, de nouveaux modes de vie. C’est pourquoi l’homme ressent des émotions similaires en présence d’un robot et d’une autre personne182. L’éthique-robotique est une réflexion veillant à ne pas inverser les rôles : l’homme reste maitre de ses décisions. Mais anticiper des scénarios est complexe du fait de la rapidité d’innovation et de la concurrence des entreprises. Ainsi, des questionnements plus ou moins complexes permettent de maintenir l’objectif, notamment dans le domaine de la santé et de la gérontologie. Les robots-thérapeutes apportent des bénéfices et des résultats évidents qui doivent être encore mesurés. Les technologies actuelles s’adaptent aux valeurs des seniors actuels mais le feront-elles par la suite? 181.  Défini par Janine BENYUS, le biomimétisme est une démarche d’innovation faisant appel au transfert et à l’adaptation des principes et stratégies élaborés par les organismes vivant afin de produire des biens et des services de manière durable. 182.  ROSENTHAL-VON DER P. A., KRÄMER N., op. cit., p.73.

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Des codes complexes : quels ancêtres du futur ? “Je crois en l’inconscient. C’est ça qui est mon guide. Mais pour trouver quelque chose en soi, dans l’inconscient, il faut être dans un certain état d’esprit : très ouvert et sans préjugés. On laisse alors les choses surgir. Quand on écrit, il faut laisser les choses se produire, et ne jamais se censurer : il ne faut pas, on n’a pas le droit de se censurer. Puis il faut savoir s’arrêter.” — Paul Auster, interview par François Busnel pour lexpress.fr, 2013. L’organisation de l’homme autour des codes sociaux et environnementaux est complexe mais induite par les technologies intelligentes : elles servent de garde-fou guidant les usages d’un utilisateur. En croisant les différents sujets de recherches précédents, il est possible d’émettre une hypothèse qualifiant les ancêtres du futur en 2050 et leurs valeurs de vie d’après les actuelles. Cette 76

projection a pour but d’anticiper de nouveaux produits et ainsi de répondre à des besoins novateurs. Ici, l’inconnue est “les futurs produits et leurs usages” : donc en partant des actuelles valeurs de vie, je peux les faire évoluer afin d’innover dans les usages d’un produit. Je vais développer uniquement la notion de “valeurs de vie” car la deuxième étape interviendra lors de mon projet de master M.D.I.183. La projection va se diviser en trois paliers de réflexion, en se basant sur la même construction du plan de l’IRIE : un questionnement va introduire chaque palier, ainsi ils pourront me servir dans mon travail professionnel futur : • Comment l’environnement intègre le savoir des seniors ? Ce premier palier de réflexion confronte l’environnement dynamique aux connaissances des ancêtres du futur et fait donc émergé l’écart générationnel entre les deux. Le savoir et les souvenirs servent de référence pour comprendre une situation ou une expérience vécue pour la première fois, ensuite ces souvenirs évoluent par des associations d’éléments. La technologie des matériaux, des appareils électroniques et de tout ce que l’on connait va évoluer ou être réinventé

183.  Management du Design et de l’Innovation.


signifiant que les modes de vie vont être différents des actuels. Comme l’intelligence artificielle des robots qui sera pratiquement comparable aux capacités cognitives de l’homme facilitant ainsi leur intégration intime. Les facultés psychologiques et le cerveau humain seront décryptables par informatique afin de guérir des maladies et de créer des bibliothèques de savoirs. Mais de nouveaux problèmes apparaîtront et les professionnels travailleront à leurs résolutions. Quelque soit le résultat d’un concept, son accessibilité intervient en premier plan afin de faciliter le moment de décision conscient ou inconscient. Il doit s’adresser à tous les utilisateurs et être compréhensible par tous en faisant l’expérience des associations : le “symbole” est le meilleur exemple, l’âge passe au second plan. • Comment interagissent les émotions et le bien-être social des seniors? Le second palier met en avant le confort émotionnel d’une personne au sein d’une communauté. Ainsi, comprendre la place de “Soi” au milieu d’un groupe d’individus ou de machines est important : cela permet de conserver et de faire évoluer son identité. Chaque senior doit se sentir valorisé rien que par leur présence. Les moyens de communication, d’après Virginie Gomez, passeront par des canaux encore peu expérimentés tels que la télépathie virtuelle184. Les capteurs d’émotions, la reconnaissance faciale ou oculaire permettront d’exprimer ce qu’une personne ressent soit à un autre être vivant, soit à un robot ou un automatisme connecté. Par conséquent, un lien social sera maintenu dans n’importe quel lieu pour valoriser le confort, la sécurité et l’existence. En parallèle, les capteurs biologiques préviendront de l’arrivée ou de l’aggravation de pathologies et viendront compléter des banques génomiques regroupant des maladies. Les émotions et les modes de communication non verbaux seront reconnus par de nombreux systèmes afin de valoriser chaque être vivant, senior. Cependant les échanges resteront conscients et l’exploitation des données autorisée pour rendre durable le bien-être social. • Comment le concept traduit les besoins et la condition humaine des seniors ? Ce troisième palier est dédié à l’humain en s’interrogeant sur ce que lui apporte un produit, un service, une interface, un graphisme... et de quelle façon est respectée sa dignité. En effet la réponse à un besoin comble une nécessité ou un souhait afin de rendre la vie quotidienne meilleure et 184.  GOMEZ V., “Rétablir le contact”. Consulté le 15 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.inrees.com>.

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plus plaisante. Mais, le respect d’une éthique, d’une décision ou de valeurs est primordial pour valoriser un ensemble de personnes. La présence de l’homme ne sera pas remplacée par la technologie mais celle-ci peut optimiser son rôle par des critères ergonomiques ou encore de rapidité. Ainsi, dans le cas de l’intervention du personnel de santé sur un lieu ou pour le travail à la chaîne dans une usine, l’augmentation de la présence de technologies innovantes est certaine à la condition qu’elles s’inscrivent harmonieusement avec la présence de l’homme. C’est ainsi que le vieillissement d’un senior ne doit pas être vu comme une fatalité mais comme une ouverture, une période d’épanouissement autonome. Du fait que les seniors de 2050 sont les personnes qui ont 20-30 ans actuellement, l’acceptation de nouveaux modes de vie intégrant la présence intime du numérique, de l’automatisme, de la robotique et des objets connectés aux activités quotidiennes se fera naturellement. La sincérité du rôle d’une technologie au sein d’une communauté est décisive dans l’acceptation. En se basant sur les recherches précédentes, ces trois paliers de réflexion sont une anticipation des besoins du futur. Bien que je les dédie aux ancêtres de 78

futur, ils peuvent être pris en compte pour les actuelles innovations puisque le futur se construit à partir du passé et donc ce que l’on construit aujourd’hui aura des répercutions. L’accessibilité, la durabilité et la sincérité d’un concept envers ses utilisateurs sont des valeurs à intégrer dans une création.


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Un robot serre la main à une personne âgée © Carsten Koall & AFP & Getty Images, 2014.


Conclusion La problématique centrale de ce mémoire “comment l’identité des personnes, peut-elle s’organiser autour des codes sociaux et environnementaux hétérogènes” a soulevé de nombreux points de recherches. Elle est une confrontation entre l’être humain et le changement pour anticiper les besoins des ancêtres du futur. Nous avons vu dans ce mémoire qu’une personne est considérée comme senior entre 50 et 70 ans suivant les différents acteurs auxquels elle s’adresse. La population vieillissant ainsi, 21% de celle-ci seront considérés en 2050 comme séniors, contre 10% en 2010. Les technologies robotiques et numériques se développent en même temps afin de répondre à de nouveaux besoins tout en intégrant des codes de vie des personnes âgées. Le designer considère des valeurs dans les solutions innovantes pour faire passer des messages identitaires. Ils sont perceptibles par les utilisateurs soit consciemment via la représentation de symboles ou soit inconsciemment comme avec l’ergonomie. Seulement, les modes de diffusion de l’information qui réveillent des émotions chez une personne jeune ou âgée sont complexes 80

à définir car ils sont en permanente évolution. Ces changements se mêlent à la mémoire d’une société, à une mémoire collective réunissant des valeurs sociales et environnementales comme des repères. En explorant des mouvements visionnaires comme le transhumanisme ou l’augmentation des capacités humaines mais aussi les tendances ou les modes actuelles, il a été possible de dire que les actions sociales, la découverte de produits et de services innovants et l’expression de “Soi” sont une source de motivations. Ainsi, une personne cherche à communiquer son identité par sa différence, par sa démonstration: c’est ce qui qualifie le vieillissement des futurs seniors tout en intégrant la notion de coopération. La culture d’une société interprète des symboles et des codes différemment suivant son passé historique et ses coutumes ancestrales, c’est pourquoi un objet se doit d’être adapté au vieillissement d’une culture. Celle-ci est déterminante dans l’acceptation d’une innovation, et pour y répondre les pratiques créatives des designers deviennent sociales. La prise en compte de multiples opinions et l’expérience de nouvelles technologies sont essentielles pour qu’une solution communique des valeurs par les émotions d’un utilisateur âgé. Afin de façonner le futur, afin que l’objet représente une


identité, l’appel à de multiples compétences permet de solidifier la prise de positions face aux besoins de personnes vieillissantes. Penser différemment oblige une personne créative à s’imaginer de multiples scénarios en intégrant des éléments que les utilisateurs connaissent afin qu’ils puissent s’accrocher à leurs souvenirs : ce sont des repères. L’objet, qu’il soit physique ou virtuel est un élément social et intelligent s’adaptant à l’identité de chaque utilisateur : il sera source d’humanisation dans un environnement qui vieillit. La responsabilité est un élément de recherche délicat face à l’invention de nouvelles technologies, notamment la robotique, dont les impacts sur l’identité humaine sont difficilement mesurables. Les personnes qui pourraient y répondre sont celles qui ont actuellement entre 20 et 30 ans : il est ainsi possible de les qualifier d’ancêtres du futur. La réflexion et les intentions éthiques dans un projet industriel sont encore peu intégrées car un faible pourcentage de personnes peut juger les bénéfices d’une technologie sur l’identité des générations futures. Ces intentions sont délicates par le simple fait que les lois sont différentes dans chaque pays en fonction de leur culture. Cependant avec la démocratisation mondiale de la robotique et du numérique, c’est peut-être avec les nano-technologies, la biologie et les sciences cognitives qu’il sera possible de faire des simulations. Ainsi les bénéfices de cette démocratisation pourront être étudiés et réinvestis dans l’organisation de l’identité des utilisateurs face aux codes sociaux et environnementaux. Le design comme tous les autres domaines créatifs se doit d’introduire des intentions éthiques pour qu’un ancêtre du futur, un utilisateur futur ait le choix. Les seniors sont dans le bain technologique ainsi, les robots-thérapeutes reprennent leurs valeurs et les font évoluer. Cette notion de responsabilité, se traduit essentiellement par des questionnements pour rendre une production meilleure : le futur se construit à partir du passé et du présent. Nous connaissons maintenant les mécanismes de l’évolution des codes de vie sociaux et environnementaux et savons l’importance pour les ancêtres du futur d’affirmer leurs identités biologique, civile et numérique. Ils sont amenés à se déplacer dans différents lieux et donc à avoir besoin de retrouver des repères pour partager leurs connaissances, leurs émotions et leurs envies. Une problématique se pose donc :

Comment les repères sociaux et spatiaux des seniors peuvent voyager et être partagés ?

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Celle-ci trouvera ses réponses lors des phases de recherches, de créativités et de développement sde mon projet de fin d’études.

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Épilogue Suite à ces nombreuses recherches et réflexions présentées dans ce mémoire, le designer a pour objectif de valoriser les enjeux d’un projet avec les précédentes conclusions. Le positionnement que j’ai développé dans la troisième partie “Une responsabilité pour les ancêtres du futur” permet d’affirmer mon rôle de designer dans le projet d’innovation que je mène. Celui-ci, à mon sens, est une rupture dans les habitudes de communications, d’échanges que les seniors connaissent. Ainsi, il est prospectif et servira à introduire les technologies futures au sein de communauté de seniors. La jeune filière “Silver Economy” a besoin de ce type de projet pour montrer son potentiel. Les enjeux sociaux s’affirment dans ce sujet par eux-mêmes car je cherche avant tout à qualifier les seniors peu autonomes dans un environnement tel qu’une maison de retraite. De ce fait l’être humain est central dans les expérimentations qui se feront par la suite. Celles-ci permettent en amont de tester différentes maquettes ou prototypes afin de répondre au mieux aux besoins anticipés. L’objectif est ici de valoriser l’identité et le savoir de chaque personne dans un groupe pour faire renaître chez chacune l’importance d’exister. Un autre facteur essentiel est l’autonomie de ce service impliquant les seniors et leur famille ainsi que les professionnels de la santé. L’idée principale, ici, est d’utiliser des technologies encore peu employées car leurs niveaux de développement ne permettent pas de les commercialiser. Elles peuvent se traduire par des matériaux, des systèmes électroniques ou encore énergétiques. Le second point de cette idée est d’utiliser des codes de vie connus et inconnus des seniors pour créer de nouvelles expériences d’échanges. Le produit développé pourra être accepté comme un élément inconnu mais aux valeurs connues. Ce mémoire est pour moi une chance de développer mes connaissances par des lectures scientifiques, mes compétences par la rencontre de professionnels spécialistes de domaines cognitifs et technologiques. La réflexion que j’ai menée au cours de cette rédaction a permis de faire évoluer ma vision du métier de designer et son importance dans des projets d’innovations. J’ai pu également acquérir des outils pour construire le dessein de mon projet de fin d’études. Le positionnement et les intentions sont vitaux dans ce type d’expérience afin de la promouvoir, je l’ai compris. Ces apprentissages vont impacter ma vie professionnelle de designer.

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Photographie d’une bibliothèque © Baptiste Chevalier, 2014.


Bibliographie Couverture Crédits :

Couverture créée par Baptiste Chevalier sur la base photographique de : Lena Johnson, Indian Reserve, Gowanda, NY © Rogovin Milton & Library Of Congress, 1963, Robopocalypse © Twentieth Century Fox & Steven Spielberg, 2013.

Avant-propos

Ouvrages :

Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue Française.

Pages Web :

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Crédits :

The Disciplines of User Experience © Envis precisely GmbH, 2013.

Introduction

Ouvrages :

Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue Française.

Articles :

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CHAPITRE I. L’HOMME QUI SAIT Ouvrages : COMET

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LEJEUNE

Antoine,

MAURY-ROUAN

Claire,

Mémoire

individuelle, mémoire collective et histoire, Paris : Solal Editeurs, 2008. “Pour [...] faire vivre les traces du passé et rechercher les interactions possibles entre la mémoire individuelle, la mémoire collective et l’histoire, nous avons voulu [...] envisager une convergence des sciences humaines et des neurosciences [...].” (Extrait de la quatrième de couverture).

Dictionnaire des symboles, 1997. “Mythes, rêves, coutumes, gestes, formes, figures, couleurs, nombres”. (Extrait de la quatrième de couverture). Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue Française. DOUEIHI Milad, Pour un humanisme numérique, Internet : publie.net, 2012. “L’humanisme numérique est [...] le résultat d’une convergence entre notre héritage culturel complexe et une technique devenue un lieu de sociabilité sans précédent.” (Extrait de la quatrième de couverture). GOFFMAN Erving, La mise en scène de la vie quotidienne, Paris : Editions de Minuit, 1973. “il construit [...] des interactions quotidiennes, extérieurement dissemblables” avec des “formes constantes qui leur confèrent stabilité, régularité et sens.” (Extrait de la quatrième de couverture). HALBWACHS Maurice, La mémoire collective, Paris : Editions Albin Michel, 1950. “Nos souvenirs demeurent collectifs, et ils nous sont rappelés par les autres, alors même qu’il s’agit d’événements auxquels nous seuls avons été mêlés, et d’objets que nous seuls avons vus.” (Extrait du livre). HOOG Emmanuel, Mémoire, année zéro, Paris : Seuil, 2009. “D’une mémoire laïque [...], nous passons à une mémoire-religion que cultivent toutes les politiques identitaires. Nous rentrons dans l’ère de la mémoire numérique où, noyée dans un océan de signes, [...] où tout peut se rappeler à nous-mêmes, dans un “perpétuel présent”.” (Extrait de la quatrième de couverture). IDEO, Design for social impact, HOW-TO-GUIDE, Californie : The Rockefeller Foundation, 2008, p.7-36. Ce guide s’interroge sur comment il est possible d’intégrer la notion de responsabilité autour des impacts sociaux au sein des firmes industrielles. PATINO Bruno, FOGEL Jean-François, La condition numérique, Paris : Grasset, 2013. “Une forme nouvelle de la condition humaine naît [...]. Il n’y a plus de virtuel ou de réel. Tout est réel. L’expérience numérique est devenue une veille sans fin, qui transforme tout : les mass médias, les loisirs, [...] et même l’idée que nous nous faisons de la vie.” (Extrait de la quatrième de couverture).

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RUSHKOFF Douglas, Les 10 commandements de l’ère numérique, Paris : 1er, 2012. “Internet, le web et les gadgets omniprésents que nous portons sur nous font désormais partie de nos vies. Mais ont-ils vraiment tenu toutes leurs promesses ? Sommes-nous pleinement satisfaits de ces technologies numériques sensées simplifier nos vies ?” (Extrait de la quatrième de couverture). Articles : BIGOT Régis, “L’influence de l’entourage sur les attitudes et les opinions”,

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la communication, n°2010, décembre 2010, p.144. “Dans l’espace du web social [...] l’internaute est omniprésent, inscrit dans une situation de communication caractérisée, [...] par la publicité [...], par l’absence [...], par des usages linguistiques et interactionnels [...].”(Extrait de l’abstract). WALSH Vincent, “Visual perception: an orderly cue for consciousness”, Current

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googlepress.blogspot.fr>. Google annonce aujourd’hui sa nouvelle filiale basée sur la santé et le bien-être afin d’exploiter la longévité de la vie et les maladies associées. GUITÉ François, “TIC : une typologie des utilisateurs”. Consulté le 17 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.francoisguite.com>. “Le centre Pew Internet propose une typologie des divers utilisateurs (Pew Internet : A Typology of Information and Communication Technology Users).” (Extrait du site). Humanity+, “Philosophy”. Consulté le 08 août 2013 et disponible sur Internet <http://humanityplus.org>. “Transhumanism is a class of philosophies of life that seek the continuation and acceleration of the evolution of intelligent life beyond its currently human form and human limitations by means of science and technology, guided by life-promoting principles and values.” (Max More 1990) “. (Extrait du site). IDEO, “Open IDEO”. Consulté le 27 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.openideo.com>.

Open IDEO est une plateforme d’open innovation

tournée vers la résolution de problèmes sociaux. LesEchos.fr, “Splendeurs et misères du design thinking : les écoles de design se réjouissent” <http://lecercle.lesechos.fr>. “Les programmes de formation se créent un peu partout sur la planète. Les meilleures business schools, américaines en particulier, semblent avoir découvert un nouveau credo pour le management.” (Extrait du site). MALEISSYE Hélène, “Google, principal promoteur du transhumanisme nous promet “le meilleur des mondes”. Consulté le 30 avril 2013 et disponible sur Internet


<http://www.indiciel.fr>. “Avez-vous déjà cherché 23andme (23 chromosomes et moi) sur Google ? Pour quelques centaines d’euros, ce site Internet vous propose un service inédit. Il vous offre la possibilité d’ouvrir la boite de pandore en vous vendant les arcanes de votre ADN.” marianne.net, “Facebook, Twitter...la dictature de l’ego”. Consulté le 30 octobre 2013 et disponible sur Internet <http://www.marianne.net>. “Nombre de followers sur Twitter ou d’amis sur Facebook, la quantification du moi a envahi nos vies. Que ditelle d’une société libérale où les liens sont de plus en plus virtuels et les évaluations, de plus en plus artificielles ?” (Extrait du site). MARINA Torre, “Pourquoi les Google Glass font tant frémir”. Consulté le 12 septembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.latribune.fr>. “En plein scandale de l’espionnage électronique, l’arrivée prochaine sur le marché des Google Glass attise bien des craintes, surtout sur la sécurité des données privées. Eclairage.” (Extrait du site). OURY Clément, “L’explosion des données sur Internet révolutionne notre mémoire collective”. Consulté le 25 novembre 2013 et disponible sur Internet <http:// www.atlantico.fr>. “Depuis l’apparition d’Internet, le volume de données à stocker n’a cessé d’augmenter à tel point qu’on pourrait bientôt avoir épuisé tous les mots pour le qualifier.” (Extrait du site). PLATON, “Les dangers de l’écriture - Phèdre”. Consulté le 06 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.webphilo.com>. “Voici l’invention qui procurera aux Egyptiens plus de savoir et de mémoire : pour la mémoire et le savoir j’ai trouvé le médicament qu’il faut “ - Et le roi répliqua : “ Dieu très industrieux, autre est l’homme qui se montre capable d’inventer un art.” (Extrait du site). Thomas, “8 critères ergonomiques pour évaluer la persuasion d’un site”. Consulté le 15 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.adviso.ca>. Présentation de critères de persuasion sur un site Internet publiés bientôt sur le site du laboratoire ETIC de l’université Paul Verlaine. UNESCO, “Liberté d’expression sur l’Internet”. Consulté le26 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.unesco.org>. “L’Internet fournit un volume de ressources sans précédent au service de l’information et du savoir et offre de nouvelles opportunités d’expression et de participation.” (Extrait du site). VILLA Paola, “Les Européens n’ont maîtrisé le feu qu’il y a 400 000 ans”. Consulté le 15 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.cnrs.fr>. “Les premiers hominiens arrivés en Europe il y a plus d’un million d’années ne disposaient pas du feu et ils l’ont domestiqué il y a 300 000 à 400 000 ans.” (Extrait du site). WEARETHEWORDS, “Internet, le plus grand médecin du monde? Quid de l’internet médical?”. Consulté le 22 novembre et disponible sur Internet <http://www. wearethewords.com>. “On estime qu’un patient sur cinq consulte Internet avant de

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voir son médecin. La majorité d’entre eux interroge directement un site spécialisé. Les autres encodent leurs symptômes dans un moteur de recherche [...].” (Extrait du site). Wikipedia, “Histoire d’Internet”. Consulté le 27 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://fr.wikipedia.org>. Présentation de l’histoire de l’Internet de sa création à aujourd’hui. Wikipedia, “IDEO”. Consulté le 27 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://en.wikipedia.org>. Présentation de l’agence internationale IDEO. Wikipedia, “Transhumanisme”. Consulté le 7 août 2013 et disponible sur Internet <http://fr.wikipedia.org>. Présentation du mouvement transhumanisme. Wikipedia, “Vol en wingsuit”. Consulté le 30 novembre et disponible sur <http:// fr.wikipedia.org>. Présentation de la discipline sportive du wingsuit. Films : BORREL Philippe, Un monde sans humains [film], ARTE France et Cinétévé, 2012. Développement du transhumanisme. “La technologie est partout. Elle régit nos rapports sociaux et va s’immiscer jusque dans nos corps. Mais jusqu’où laisserons-nous encore aller nos machines ?” (Extrait du film). Phoenix Fly, “Wingsuit Basejumping - The Need 4 Speed: The Art of Flight”.

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Consulté le 1er décembre 2013 et disponible sur Internet <https://vimeo.com>. Prise de vues entre 2009 et 2010 des basejumper en Europe. Crédits : Aimee Mullins - athlète handisport, actrice et mannequin © Howard Schatz, 2009. Avantage du travail en équipe © IDEO, 2013. Can Google solve death ? © TIME, 2013. Fille devant vitrine © Coquijac, 2010. Interactive visualisation of Wikipedia © Bernie Hogan, 2009. Logo © humanity+. Map of the Internet 2.0. © Martin Vargic, 2014. Ouverture d’une porte © Cajuomé, 2013. Paro en recharge © PARO Robots, 2009. Personne jouant avec Paro © PARO Robots, 2010. The final frontier (campagne publicitaire des Google Glass) © Google - Vogue - Max


Braun, 2012. The Tianmen Mountain Grand Prix Wingsuit Race © World Wingsuit League, 2013. Walking to the sky © Jonathan Borofsky, 2004.

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CHAPITRE II. L’OBJET COMME ÉLÉMENT SOCIAL Ouvrages : BERCHON Mathilde, L’impression 3d, Paris : Eyrolles, 2013, p.14-16, 128-132. “Un panorama complet des techniques d’impression de ce nouveau mode de fabrication pour les entreprises et les particuliers.” Cet ouvrage “explique pourquoi ce nouveau mode de fabrication risque d’avoir un formidable impact sur notre société, en remettant en cause toute la chaîne de production traditionnelle.” (Extrait de la quatrième de couverture). BERGSON Henri, Matière et mémoire - Essai sur la relation du corps à l’esprit, Paris : Gallimard, 1896. “Il y aborde [...] des relations du corps et de l’esprit [...], il fait dialoguer d’une manière singulière la métaphysique et la psychologie, l’analyse des concepts et les apports de la science, alors en plein renouvellement.” (Extrait de la quatrième de couverture). CORNU Gérard, Vocabulaire juridique, Ed. 10e édition, 2014. “Définir après les avoir identifiés, les termes juridiques de la langue française, tel est l’objet de ce Vocabulaire juridique.” (Extrait de la quatrième de couverture). Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue Française.

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GAREL Gille, MOCK Elmar, La fabrique de l’innovation, Paris : Dunod, 2012, p.113. “Comment éclot une innovation de rupture ? Comment les concepts et les connaissances s’influencent-ils réciproquement dans la fabrique de l’innovation ? Quels sont les « états mentaux » des innovateurs ?” (Extrait de la quatrième de couverture). GIEDION Sigfried, Mechanization takes command, Londres : W. W. Norton & Company, 1969. “Notre époque réclame un type d’homme capable de faire renaître l’harmonie entre la réalité intérieure et extérieure. Les relations entre l’homme et son environnement sont en perpétuel changement.” (Extrait de la quatrième de couverture). LOVEGROVE Ross, Supernatural - The work of Ross Lovegrove, Californie : PHAIDON, 2007. Présentation des travaux de Ross Lovegrove, un des designers contemporain les plus intéressants. MOSER

Gabriel,

Psychologie

environnementale,

les

relations

homme-

environnement, Bruxelles : De Boeck ,2009, p. 19. “Il traite de la relation de l’individu avec les espaces de proximité, la ville, la nature et l’environnement global en termes de perception, de représentations et de comportements”. (Extrait de la quatrième de couverture). TARDIF Zac,

STERNBERG Robert, The nature of creativity: Contemporary

psychological perspectives, Cambridge : Cambridge University Press, 1998, p.429440. Divers approches psychologiques sur l’étude de la créativité chez l’homme.


VIRILIO Paul, Esthétique de la disparition, Paris : Editions Galilée, 1989. “Réflexion sur le visible, le mouvement, la vitesse et le temps, bref sur la réalité “comme elle va”. L’esthétique de la disparition bouleverse nos idées sur les choses et conduit au terme de leur logique les propositions suggérées par la science contemporaine.” (Extrait de la quatrième de couverture). Articles : BRENNEISEN Charles-Henri, “Du Macintosh à l’Iphone, la stratégie de différenciation d’Apple” [mémoire], 2009, p.32-50. “Apple a toujours été vecteur d’innovation depuis sa création, très en avance sur ses concurrents et acteurs du marché. Ses innovations se sont révélées correspondre aux attentes des consommateurs [...].”(Extrait de l’abstract). COURNARIE Laurent, COURNARIE Nathalie, “L’esthétique en questions”,

Philopsis: Revue numérique. Consulté le 05 Avril 2013 et disponible sur Internet <http://www.philopsis.fr>. “Faut-il dire aborder l’esthétique sur le mode de la nostalgie, devant la perte des évidences, ou tout simplement lui dire « adieu » [...] ?” (Extrait de l’abstract). GORDON Rosemary, “An investigation into some of the factors that favour the formation of stereotyped images”, Journal British Psychology, n°39, 1949, p.156-167. Étude sur les stéréotypes de la représentation d’images mentales concernant l’attitude et l’opinion. GOULD Judah, “L’harmonie entre la fonctionnalité et l’émotion : le tao en design d’expérience utilisateur”, TC Media, juillet 2012. “Les entreprises outillées pour réussir sont celles qui offrent des produits et des services qui, en matière de facilité d’utilisation, répondent aux attentes des utilisateurs ou les surpassent, et qui fournissent une connexion émotionnelle.” (Extrait de l’abstract). HOLT Robert, “Imagery : the return of the Ostracized”, American Psychologist, n°19, 1964, p.254-264. “l’imagerie est l’un des principaux foyers de l’attaque de Watson dans les polémiques qui ont fondé le behaviorisme.” (Extrait de l’abstract). KAUFMANN Jean-Claude, “Le monde social des objets”, Sociétés Contemporaines, n°27, juillet 1997, p.111. “L’article analyse leurs caractères spécifiques dans les interactions avec les personnes ; comment ils stockent et restituent une mémoire sociale ou individuelle ; comment ils soutiennent et stabilisent les identités.” (Extrait de l’abstract). MACINNIS Deborah, PRICE Linda,”The role of imagery in information processing: review and extensions”, Journal of Consumer Research, n°13- 4, 1987, p. 473-491. “L’imagerie mentale reçoit une attention accrue dans la théorie du comportement du consommateur et de la recherche. Cet article décrit l’imagerie, qualifiant un mode de traitement dans lequel l’information multisensorielle est représentée sous forme de gestalt dans la mémoire de travail”. (Extrait de l’abstract). MERCIER Julie, “Les composantes de l’identité comme déterminants de

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l’engagement à la marque”, Université de Droit, d’Économie et des Sciences d’Aix

Marseille - Université Paul Cézanne, W.P., n° 870, février 2010. “Individuellement l’identification sociale et l’identification à la marque ont un lien [...]. L’influence de ces variables est plus forte lorsque nous sommes en présence de marques à images symboliques vs fonctionnelles.” (Extrait de l’abstract). PINXTEN Rik, VERSTRAETE Ghislain, “Culturalité, représentation et autoreprésentation”, Revista CIDOB d’Afers Internacionals, n°66-67, octobre 2004, p. 213. “Le cadre analytique distingue trois niveaux différents d’extension : l’action de l’individu, du groupe et de la communauté. Sur ces trois niveaux des identités sont construites en termes de trois dimensions : personnalité, socialité et culturalité.” (Extrait de l’abstract). RAMIREZ Samayoa K. J., La publicité représente-t-elle la société et la culture d´un pays [Th. Et.], Mexique : CESEM-UDLA, 2011, p.64 - 124. “Les médias généralement marchent ensemble avec les tendances d’évolution des attitudes, des valeurs, comportements [...]. Je pense que les mass médias “jouent” un rôle important [...] dans le changement des sociétés.” (Extrait de l’abstract). REYNAUD Jean-Daniel, “Les régulations dans les organisations”, Revue française

de sociologie, n°1, 1988, p.17. “L’analyse des organisations a montré que le système informel ne vise pas seulement le maintien d’un équilibre social interne, mais est aussi orienté vers les fonctions externes de l’organisation.” (Extrait de l’abstract).

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ROOSENDAAL Arnold, “Digital Personae and Profiles as Representations of Individuals”, Privacy and identity management for life, n°320, janvier 2010, p.226. “Ce document explore les concepts de personnages et les profils numériques et la façon dont ils représentent des individus réels.” (Extrait de l’abstract). RUBERA Gaia, DROGE Cornelia, “Technology versus Design Innovation’s Effects on Sales and Tobin’s Q: The Moderating Role of Branding Strategy”, Journal of

Product Innovation Management, n°30, mai 2013, p.448. “Étude sur les impacts de la performance des entreprises sur le marché de la technologie par rapport à l’innovation et de leur interaction potentiellement synergique.” (Extrait de l’abstract). STEINICKE Frank, WIELAND Phil, “Self-Motion Illusions in Immersive Virtual Reality Environments”, Virtual Reality Conference (VR), 2011 IEEE, mars 2011, p. 39-46. La perception émotionnelle dans un système d’immersion comme la réalité virtuelle est différente de celle du monde réel. SUH Junghyup, RIVEST Alexander, NAKASHIBA Toshiaki, “Entorhinal cortex layer III input to the hippocampus is crucial for temporal association memory.”,

Science, n°334, décembre 2011, p.1415. Étude faite sur des souris montrant que le cerveau de l’homme associe les données spatio-temporelles aux données sensorielles. TAMINE Lynda, BAHSOUN Wahiba, “Définition d’un profil multidimensionnel de l’utilisateur : Vers une technique basée sur l’interaction entre dimensions”,


Laboratoire IRIT & HAL, février 2009. “[...] une technique de construction du profil de l’utilisateur qui s’inscrit dans une approche statistique utilisant le comportement de l’utilisateur comme source permettant de prédire implicitement son modèle.” (Extrait de l’abstract). TEKMEN Yasemin, “An analysis of the evolution of multi functional kitchen mixing tools” [Thèse], 2007, p. 27. Étude des outils de cuisine de la création à l’industrialisation en passant par les développements technologiques et les effets de la mécanisation. VELLERA Cyrielle, “Créativité et capacité d’imagerie mentale : validation d’une relation”, HAL SLS - 00849802, août 2013. “L’implication d’individus créatifs dans les processus d’innovation est un enjeu majeur. Toutefois, leur repérage est particulièrement difficile. Or, l’imagerie mentale a souvent été soulignée en psychologie pour son implication dans les processus créatifs.” (Extrait de l’abstract).

Pages Web :

BIANCHI Vladimir, “Peter Kammermann, un décorateur à la conquête de Londres”. Consulté le 10 Avril 2013 et disponible sur Internet <http://www.prestigeimmobilier. ch>. “Il vient de réaliser deux projets à Londres. Ses décors à l’atmosphère chaleureuse jouent le métissage, mariant avec talent des inspirations fort différentes.” (Extrait du site). BIRCK Danielle - RFI, “A l’Est, du nouveau …”. Consulté le 20 octobre 2013 et disponible sur Internet <http://www.rfi.fr>. “Pour le nouveau TGV vitesse rime aussi avec style : les rames et les costumes des contrôleurs ont été relookés par le couturier Christian Lacroix, pour le confort et le plaisir des voyageurs mais [...].” (Extrait du site). DASSAULT, “Dassault Systèmes Introduces Unique 3D Sketching Experience”. Consulté le 11 janvier 2013 et disponible sur Internet <http://www.3ds.com>. Dassault annonce aujourd’hui CATIA Natural Sketching. Electrolux, “Memory”. Consulté le 09 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.electrolux.co.uk>. Interview avec le finaliste de l’Electrolux Design Lab 2012 : Wenyao Cai. Kickstarter, “Most importantly, Kickstarter works”. Consulté le 12 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.kickstarter.com>. “Kickstarter est un écosystème dynamique où les financiers aident les créateurs à apporter de nouvelles choses à la vie.” (Extrait du site). Kickstarter, “Seven things to know about Kickstarter”. Consulté le 12 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.kickstarter.com>. “Kickstarter est une nouvelle façon de financer des projets créatifs. Chaque projet est créé de façon indépendante. Ensemble, les créateurs et les bailleurs de fonds font des projets qui se produisent.” (Extrait du site).

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LAGERKVIST Sofia, Von der LANCKEN Charlotte, LINDGREN Anna, “Front project - Sketch furniture”. Consulté le 21 août 2013 et disponible sur Internet <http:// www.designfront.org>. “Est-il possible de laisser une première esquisse devenir un objet, de concevoir directement sur l’espace? [...] mise au point d’une méthode permettant de matérialiser des croquis à main levée.” (Extrait du site). MANON Simone, “La culture”. Consulté le 10 Avril 2013 et disponible sur Internet <http://www.philolog.fr>. “Dans l’échange chaque culture s’élargit et s’enrichit de la différence de l’autre.” (Extrait du site). Orange Lab, FaberNovel, “Urban Mobs”. Consulté le 10 juin 2013 et disponible sur Internet <http://www.urbanmobs.fr>. “Lors des grands événements populaires, les outils de communication modernes deviennent un vecteur privilégié pour partager ses émotions.” (Extrait du site). Philips “Innovation Fellows Competition”, Consulté le 13 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.newscenter.philips.com>. Célébration

de

l’innovation par Philips. République Française, “Consultation publique de la Commission européenne sur l’ « économie de l’expérience » comme industrie émergente”. Consulté 23 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.sgae.gouv.fr>. “Les industries émergentes sont guidées par un processus transformatif intervenant à la frontière entre les

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différents secteurs d’activité. Ce processus implique des liens entre secteurs d’activité et leurs sous-secteurs.” (Extrait du site). RODI Nelly, Fédération Française du Prêt à Porter Féminin, “Qu’est-ce qu’une tendance de mode ? - Tendances et communautés”. Consulté le 15 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.pretaporter.com>. “Une tendance de mode est aussi le reflet de la société dans laquelle elle s’inscrit. Elle constitue un acte créatif, un moyen d’expression pour un groupe déterminé, une communauté dont les codes permettent une identification immédiate.” (Extrait du site). Stanford Encyclopedia of Philosophy [en ligne], <http://plato.stanford.edu>. Encyclopedie de Standford. Universalis, “L’univers psychologique”. Consulté le 17 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.universalis.fr>. Présentation de l’univers psychologique. Usine Nouvelle, “L’Innovation en questions - Peut-on modéliser l’innovation ?”. Consulté le 22 septembre 2013 et disponible sur Internet <http://blog.usinenouvelle. com>. “Parti du principe que c’est l’absence de communication entre le monde de la recherche et celui de l’entreprise qui freine l’innovation, il propose de les rapprocher en mixant les expertises au sein d’équipes légères, baptisées générateurs technologiques.” (Extrait du site). VACAFLOR Nayra, “L’expression identitaire “mobile” des jeunes : vers une autre narration de soi”. Consulté le 09 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://


culture.numerique.free.fr>. “[...] les jeunes se servent de cet outil technologique pour « narrer » leur identité. Les jeunes donnent un sens authentique à leurs téléphones mobiles en dépassant largement l’appropriation des espaces intimes.” (Extrait du site). Wikipedia, “Théorie de l’attachement”. Consulté le 10 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://fr.wikipedia.org>. Présentation de la théorie de l’attachement. Crédits : Bibliothèque d’objets au design organique © Ross LOVEGROVE, 2012. Cahier d’écolier de Louis Delaumône © Baptiste Chevalier, 2014. Interface des Google glass © Google, 2012. Intérieur du TGV avant et après le travail créatif de Christian Lacroix © SNCF, 2007. Logo free hardeman lions © University Running Eagle. Memory process © Wenyao Cai & Baptiste Chevalier, 2014. Parcours créatif innovant © Baptiste Chevalier, 2014. Processus de dessin innovant © Front Design, 2009. Steve Jobs présentant le MacBook Air lors de la Keynote de la MacWorld Expo 2008 © Apple, 2008. Tablette de vente de propriétés retrouvée à Shuruppak, XXVIe siècle av. J.-C © Musée du Louvre, 2011. Tablette tactile © Samsung, 2012. UP process © Jawbone & Baptiste Chevalier, 2014.

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CHAPITRE III. UNE RESPONSABILITÉ POUR LES ANCÊTRES DU FUTUR Ouvrages : BOUCHET-SAULNIER Françoise, Dictionnaire pratique du droit humanitaire, Éditions La Découverte, 2013. “De “Accords spéciaux “ à “ Zones de sécurité “, ce dictionnaire balise le champ de l’action humanitaire et la responsabilité des différents acteurs de la gestion des crises et des conflits. Il propose la définition juridique et l’analyse de plus de 300 notions essentielles.” (Extrait de la quatrième de couverture). CANTO-SPERBER Monique, Coll., Dictionnaire d’éthique et de philosophie

morale, PUF, 2004. “Enracinée dans une tradition historique et philosophique qui remonte à l’Antiquité, l’éthique partage avec la philosophie morale la volonté de rendre intelligibles les multiples aspects de l’action humaine.” (Extrait de la quatrième de couverture). Dictionnaire Le Petit Larousse [en ligne], <http://www.larousse.fr>. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue Française. HAIK Yaik, SHAHIN Tamer, Engineering Design Process, Stamford : Cengage Learning, 2011. Livre sur le processus de développement d’un projet technologique en design et en ingénierie approuvé par l’ Accreditation Board for Engineering and Technology.

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IDEO, Design for social impact, HOW-TO-GUIDE, Californie : The Rockefeller Foundation, 2008, p.7-36. Ce guide s’interroge sur comment il est possible d’intégration la notion de responsabilité autour des impacts sociaux au seins des firmes industrielles. SCHÖN Donald, The Reflective Practitioner : How Professionals Think in Action, États-Unis : Basic Books, 1983. “son analyse de la rationalité technique et le modèle des cinq professions donne un cadre qui peut être appliqué à l’exercice de plusieurs autres professions. Les lecteurs de ce livre peuvent améliorer leur conscience de soi en tant que professionnels et artistes.” (Extrait de la quatrième de couverture). Articles : ASARO Peter, “Robots and responsibility from a legal perspective”, Proceedings

of the IEEE, 2007. Cet article explique comment un système juridique, ou une jurisprudence, pourrait être appliquée aux robots dans le but de savoir s’ils pourraient être reconnus comme responsables. BANKS Marian et coll., “Animal-assisted therapy and loneliness in nursing homes: use of robotic versus living dogs.”, PubMed, n°3,mars 2008. “La solitude est un problème commun aux établissements de soins à long terme et des travaux antérieurs ont montré que la thérapie assistée par l’animal (AAT) peut dans une certaine mesure briser cette solitude.” (Extrait de l’abstract). CAPURRO Rafael, HAUSMANNINGER Thomas, WEBER Karsten, WEIL Felix,


“Ethics in Robotics”, International Review of Information Ethics, n°6, décembre 2006, p.23-46. Développement d’un positionnement éthique dans des systèmes technologiques faisant appelles à des intelligences artificielles. Un avatar intelligent peut-il être responsable. DEVON Richard, Van De POEL Ibo, “Design Ethics: The Social Ethics Paradigm”,

TEMPUS Publications, Vol. 20 - n°3, 2004, p. 461 - 469. L’éthique n’est pas un appendice au processus de design et de conception mais une notion intégrée à ceux-ci. L’article met en évidence un paradigme éthique social, car le design est une démarche itérative et sociale permettant de prendre des décisions. ROBINSON Hayley, et coll., “The psychosocial effects of a companion robot: a randomized controlled trial”, Journal of the American Medical Directors Association, mars 2013. Étude des effets psychosociaux du robot compagnon Paro dans un cadre de maison de repos.

Pages Web :

CRUM Chris, “MIT is teaching robots how to learn from their mistakes”. Consulté le 22 février 2013 et disponible sur Internet <http://www.webpronews.com>. Des étudiants du MIT on mis au point un robot équipé d’une intelligence artificielle lui permettant d’apprendre de ses erreurs. GOMEZ Virginie, “Rétablir le contact”. Consulté le 15 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.inrees.com>. “On a retrouvé des jouets en forme d’animaux datant de l’Antiquité. Nos enfants grandissent avec l’imaginaire peuplé de héros animaliers : le pingouin d’Happy Feet en quête de destinée, Nemo le poisson-clown [...].”(Extrait du site). INSEE, “Espérance de vie - Mortalité”. Consulté le 04 décembre 2013 et disponible sur Internet < http://www.insee.fr>. “En 2011, l’espérance de vie à la naissance continue à progresser sur le même rythme que depuis le début des années 1970.” (Extrait du site). INSEE, “Population par âge”. Consulté le 04 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.insee.fr>. “Tous sexes confondus l’âge moyen en France dépasse 40 ans alors qu’il était tout juste inférieur à 37 ans il y a 20 ans.” (Extrait du site). INSEE, “Projections de population à l’horizon 2060”. Consulté le 18 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.insee.fr>. “Jusqu’en 2035, la proportion de personnes âgées de 60 ans ou plus progressera fortement, quelles que soient les hypothèses retenues sur l’évolution de la fécondité, des migrations ou de la mortalité. Cette forte augmentation est transitoire et correspond au passage à ces âges des générations du baby-boom.” (Extrait du site). Ministère des Affaires Sociales et de la Santé, “Silver économie”. Consulté le 03 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.social-sante.gouv.fr>. “L’enjeu est crucial : il s’agit de permettre et d’encourager les innovations qui vont nous accompagner dans notre avancée en âge et faire reculer la perte d’autonomie.” (Extrait

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du site). PIPAME-DGCIS, “Le développement industriel futur de la robotique personnelle et de service en France”. Consulté le 03 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.dgcis.gouv.fr>. “La robotique personnelle et de service est un champ d’application de la robotique en plein essor. L’action des entreprises du secteur en France, comme celle d’autres pays, est de plus en plus significative pour promouvoir des applications et des robots technologiquement perfectionnés”. (Extrait du site). PRUSYNSKI Megan, “Ethics in Design”. Consulté le 22 août 2013 et disponible sur Internet <http://www.meganpru.com>. Étude du mouvement éthique dans le design, son histoire, ses messages, et ses effets et présentation de l’un des documents les plus importants dans le mouvement éthique, le “First Things, First Manifesto”. (Extrait du site). République française, “Déploiement de la télémédecine : tout se joue maintenant”. Consulté le 12 octobre 2013 et disponible sur Internet <http://www.sante.gouv.fr>. “Dans son article 78, la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » (HSPT), du 21 juillet 2009, a reconnu la télémédecine comme une pratique médicale à distance mobilisant des technologies de l’information et de la communication (TIC).” (Extrait du site). Réseau Senior Strategic, “le Vieillissement de la population dans le Monde”. Consulté le 03 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.lemarchedesseniors.

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com>. Informations sur le marché des seniors et de la Silver Économy. RIVIERE Jean-Philippe, “Études : un robot bébé phoque thérapeutique pourrait améliorer la qualité de vie des personnes âgées”. Consulté le 12 décembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.vidal.fr>. “Le robot PARO, conçu pour interagir positivement avec les personnes âgées, dépendantes ou démentes, est testé depuis 2003 dans différents services hospitaliers ou médicalisés.” (Extrait du site). ROSENTHAL-VON DER Pütten A. and KRÄMER Nicole, “Humans feel empathy for robots: fMRI scans show similar brain function when robots are treated the same as humans”. Consulté le 12 juin 2013 et disponible sur Internet <http://www.phys. org>. ”Une étude réalisée par des chercheurs de l’Université de Duisburg Essen en Allemagne démontre que notre fonction cérébrale réagit de façon similaire lorsque nous sommes en présence d’humains et de robots.” (Extrait du site). Salon des seniors, “À quel âge est-on senior ?”. Consulté le 18 novembre 2013 et disponible sur Internet <http://www.salondesseniors.com>. “Il y a plusieurs appréciations de l’âge : celui de sa carte d’identité, celui que l’on ressent avoir, et celui que la société vous donne.” (Extrait du site). YANG Ruolin, “Pour faciliter leur quotidien, le robot anticipe les gestes des hommes”. Consulté le 22 février 2013 et disponible sur Internet <http://www.atelier. net>. “L’interaction homme machine atteint un autre niveau grâce à un robot qui aide l’homme dans ses activités en devinant ses mouvements à l’avance.” (Extrait du site).


Crédits : First things first, A manifesto © Ken Garland, 1964. First visit with Ilona © Ari Seth Cohen, 2011. Nao, robot de fabrication Française, à Paris - Jardin des Tuilleries © tofz4u & Flickr, 2013. Un robot serre la main à une personne âgée © Carsten Koall - AFP - Getty Images, 2014. Wired - Jimmy Fallon © Peter Yang, 2013

Épilogue

Crédits : Photographie d’une bibliothèque © Baptiste Chevalier, 2014.

Quatrième de couverture Crédits : Lucy Jarvis © Ari Seth Cohen, 2011.

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ABSTRACT Title: Ancestors of the future - dynamic memory University essay from École de Design de Nantes Atlantique & CFA, for getting Master Management du Design et de l’Innovation, in April 2014. Author: Baptiste Chevalier Keywords: Social codes - Environmental codes - Innovation - Technology - Senior - Ethics Identity - Experience - Emotion The population is getting older, and by 2050 every third person will be 60 years old according to INSEE. Social and environmental codes go through changes because of human choice and new technologies. As designers, we propose a confrontation between the identity of the persons and the change. Thus, we study the evolution of the organization of cultural values in relation to the users of products, services and interfaces. To compare young people and old people thanks to a study shows a difference in psychological reflection due to the used means. The scientific articles about sociology and ethics confirms our words. The Web especially the social networks is used to know the social organization of Internet users and their motivations. To conclude, we will broach the responsibility and ethics to promote the creation of new technologies including the user choice.


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