Les entreprises au cœur du système Todt Près de 200 firmes allemandes interviennent en France comme maîtres d’œuvre tandis que 1 500 entreprises françaises sont leurs sous-traitants. Celles-ci jouent un rôle essentiel dans la réalisation de travaux de génie civil et militaire allemands. Elles bénéficient des marchés confiés par l’Organisation Todt qui ravitaille leurs chantiers en matériaux et en main-d’œuvre, et contrôle l’avancement de leurs travaux. Une aubaine pour les entreprises allemandes
Collection Roger Soulieux
Avec un budget de plusieurs milliards de reichsmarks et ses 3 17 millions de m de béton, le mur de l’Atlantique représente e le programme de construction le plus ambitieux du 20 siècle. Les plus grandes entreprises du bâtiment et des travaux publics, ainsi qu’un grand nombre de petites et moyennes entreprises allemandes, se voient confier par l’Organisation Todt les travaux à réaliser en France. De grandes firmes allemandes de bâtiment et travaux publics s’installent à proximité des futurs chantiers de la forteresse du secteur du Havre : Harald Rittmann, Karl Stohr, Carl-Brandt, Oltsch et Cie, Polensky & Zoellner, ou encore Emmrich. Dans un premier temps, elles embauchent directement leurs ouvriers ou par l’intermédiaire de recruteurs, parfois privés, payés en fonction des postes pourvus.
ECPAD – Collection Jean-Paul Dubosq
Bon de commande de l’entreprise havraise Thireau-Morel daté de mai 1944. Son chiffre d’affaires allemand s’élèvera à plus de 97 millions de francs sur un total de près de 223 millions sur la période 1942-1944.
Sur un chantier de construction, des ouvriers poussent un wagonnet sur une voie ferrée de type Decauville. De nombreux travaux exécutés par les requis se font manuellement, rendant le travail à la fois pénible et dangereux.
Jusqu’au début de l’année 1944, les entreprises allemandes utilisent également, dans une très large mesure, en soustraitance, des entreprises françaises de travaux publics. Ces dernières sont autorisées à conclure des marchés directement avec l’Organisation Todt alors que les destructions en Allemagne mobilisent les entreprises du Reich. Selon les données allemandes et celles recueillies par les services de renseignement britanniques, on compte en 1944 entre 1 000 et 1 500 entreprises françaises intervenant sur des chantiers allemands. La nécessité d’assurer leur survie, l’attrait de profits élevés à court terme, la menace d’une réquisition des machines et de la main-d’œuvre et, plus rarement, une proximité idéologique les poussent à travailler pour les autorités allemandes. Ces motifs peuvent se cumuler et coexister.
Collection Roger Soulieux
Les entreprises françaises : des sous-traitants
Bulletin de paie émis par l’entreprise de travaux publics Henri Bouqueau. En 1942, un ouvrier qualifié peut gagner entre 1 000 et 1 500 francs par mois. S’il travaille pour la Todt, son salaire peut passer à 3 000 francs avec un avantageux système de primes. Le Havre, batterie du Nice-Havrais.Des ouvriers exécutent une démolition de béton armé au marteau piqueur. Au fond, les musoirs des digues nord et sud. Été 1943. Collection Jean-Paul Dubosq
29 entreprises havraises recrutées Au Havre, le rapport de l’Office régional du travail (ORT) recense 29 entreprises engagées dans des travaux allemands en février 1943. Parmi celles-ci, l’entreprise Thireau-Morel, la plus importante du Havre dans le bâtiment et les travaux publics à la veille de la guerre. Elle compte alors 625 ouvriers. Elle se voit confier des travaux de sous-traitance par Schöttle et Schuster, Rittmann, Polensky & Zoellner et en direct, par l’Organisation Todt. Elle construit, pour l’armée allemande, plusieurs dizaines de bunkers du secteur défensif du Havre et exécute des travaux à l’intérieur du port.
Le Havre, sas Vétillard. Des ouvriers procèdent au terrassement en vue de la réalisation d’un mur de protection de la machinerie de l’écluse. Derrière l’octroi de L’Ilet, on distingue les grues du quai de Pondichéry le long du bassin Bellot. ECPAD – Collection Jean-Paul Dubosq