À ma mère , À mon frère Jean-Jacques
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Table des matières 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 26 27
Introduction Bois Luzy La busserine Marins Pompiers Le club Cinéma Instinct Une Journée Particulière Les Saintes Barbes Commandant Brutus La Flamme Olympique 1992 Tremblement de terre Italie 1980 Tremblement de terre Mexico 1985 Tremblement de terre Arménie 1988 La Maison des têtes Toulon Le Cinquantenaire du Bataillon Nos Disparues Intervention Tout Seul L'informatique Expert en informatique Le Social La Religion Témoignages Des Jours sombres Anecdotes Les décorations Epilogue
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1 Introduction
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En écrivant ce livre, je voudrais me dévoiler aux yeux de mes petits-enfants, ils ont grandi si vite que je ne pouvais plus attendre. Lorsque j’ai cessé toute activité professionnelle, j’avais dans l’idée de leur dire qui était réellement leur grand-père. J’ai cinq petits-enfants : Kevin, Hugo, Morgan, Mathis, Manon.
Je n’aurais partagé de magnifiques moments qu’avec trois d’entre eux. Kevin et Morgane sont les enfants de mon fils Frédéric ; il s’est fâché avec moi pour une raison que j’ignore encore. La dernière fois que nous nous sommes parlé, c’était le dimanche 17 août 1997 : il était venu avec Stéphanie récupérer un vélo VTT dont je lui avais fait cadeau. -7-
Je l’ai revu en janvier 2014 devant un cinéma : Kevin avait 14 ans et Morgan 10. Stéphanie m’a présenté mes petits-enfants. Je pensais avoir fait un pas vers une réconciliation, mais Frédéric a fait savoir à Laetitia qu’il ne voulait pas renouer des liens avec moi. Au fur et à mesure que l’on écrit, on s’évade, on s’engage dans des chemins impossibles, les souvenirs reviennent pour certains. Pour les autres j’ai été obligé de faire appel à mon frère et à ma sœur ou à des amis pour que la relation des faits soit la plus exacte possible. Cet exercice m’a passionné : la nuit je me réveille, des souvenirs reviennent, je me lève pour les mettre tout de suite par écrit de peur de les oublier. J’ai tout au long de ma vie eu des expériences singulières, et ce dès mon jeune âge. J’ai rencontré des personnages exceptionnels tout au long de ma vie. Jacques Maillol, le plongeur de l’extrême : nous nous sommes rencontrés en 1991 pour la préparation du calendrier des marinspompiers. Nous sommes devenus amis. Nous mangions souvent ensemble soit à la caserne soit au CNM (Cercle des nageurs de Marseille) Jacques Mayol (1er avril 1927 à Shanghai, Chine - 22 décembre 2001 à Calone, île d'Elbe, Italie) était un plongeur apnéiste français. Pratiquant une gymnastique et une méditation inspirées du yoga, il est le premier plongeur au monde à descendre à une profondeur de 100 mètres en apnée, en novembre 1976, dans les eaux de l'île d'Elbe. Il a ouvert la voie à de nombreux plongeurs libres. Quand il plongeait, Mayol surprenait les scientifiques, car son rythme cardiaque pouvait passer de 70 à 20 pulsations par minute ; cette bradycardie aurait dû provoquer une syncope. -8-
C'était un personnage haut en couleur, le courant est passé tout de suite entre nous ; il me racontait ses plongées et moi je lui parlais de mes interventions. Nous nous sommes revus un an avant sa mort en 2001.
Ce conducteur de bus à Mexico qui pour me remercier du travail effectué lors du tremblement de terre m’a offert une pièce en argent de cinq pesos mexicains que je garde précieusement et qui reviendra à l’un de mes petits-enfants. Il admirait mon travail. Je me souviens, lorsque l'on a découvert le corps des enfants d'une école à Mexico, je me suis mis à l'écart car l'émotion de voir tous ces enfants m'avait pris à la gorge et j'avais une peine immense. Il est venu, il m’a parlé pour me réconforter. Les mots que je ne comprenais pas (langue mexicaine) me sont quand même allés droit au cœur.
Cette famille en Arménie qui m’a rappelé mes racines. Nous l’ avions rencontrée lors de la recherche du corps de l’un de leurs parents sur un chantier. Nous avons passé plusieurs heures et nous l’avons retrouvé. Pour nous remercier, ils nous ont invités à partager leur repas alors qu’ils étaient dans le besoin : j’ai vu la misère de ce peuple qui est le mien.
J’ai vécu des événements uniques : L’inauguration du circuit Paul Ricard (Le Castellet) en 1970. L’arrivée de la flamme olympique en 1992 à Marseille. Des tremblements de terre :
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1980 Italie 1985 Mexique 1988 Arménie (patrie de ma mère) 1989 La maison des têtes à Toulon
L’informatique D’une passion j’ai fait un deuxième métier grâce à Michèle qui m’a offert mon premier ordinateur et qui m’a toujours aidé. Les expertises informatiques arrivées par hasard marqueront une période importante dans ma vie et m’aideront à préparer ma retraite. Tous ces souvenirs, je vais les conter du mieux que je peux. C’est à vous que s’adresse ce livre, mes petits-enfants adorés, je veux vous faire profiter de mon expérience de la vie. Des regrets, on en a toujours. Le premier pour moi, c’est de n’avoir pas assez passé de temps avec ma mère. Je pense que ce qui m’arrive avec mon fils, je l’ai mérité. Le deuxième, c’est l’éloignement de mon fils. Il m’a manqué, il me manque et me manquera, et toutes ces années passées sans lui ne se rattraperont jamais. Au début, je pensais souvent à lui ; maintenant avec les années j’ai un pincement au cœur pendant la période de Noël et Michèle le sait très bien. Ses enfants, je ne les connaîtrai pas, et même si demain ils viennent, le temps a passé sur leurs plus belles années, celles de leur enfance. - 10 -
Nous avions Hugo et Mathis et puis est arrivĂŠ mon soleil, ma princesse Manon : elle a apportĂŠ le bonheur dans la maison.
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2-Bois Luzy
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Je suis né le 28 novembre 1952 à la maternité de Beauregard (ouverte en1947) à Marseille dans le XIIe. J’ai passé mes douze premières années au château de Bois Luzy.
Château de Bois Luzy (2015)
Mon père Mon père Louis Olivéro est né le 17 avril 1920 à Baucaire (Gard). Il est décédé à Avignon le 15 août 1976 le jour de la fête de ma mère. Il était artisan boiseur (charpente en bois). Je n'ai que de bons souvenirs de mon père : il n’était pas comme les pères d'aujourd'hui qui jouent avec leurs enfants. Chez nous il y avait un très grand respect pour lui. Il avait une voiture (Traction avant) une moto de marque Moto Confort. - 15 -
Nous l'attendions en bas du village et il nous remontait sur sa moto. Le samedi soir nous allions souvent au cinéma : certes les films qu'il choisissait étaient pour les parents, mais c'était la sortie qui nous fascinait. Lorsqu’il annonçait : « Ce soir on va au cinéma ! », Jean-Jacques, Yvonne et moi étions heureux. À table ma mère pouvait apporter n'importe quel plat, nous aimions tout. Mon père travaillait et passait le reste du temps à jouer aux cartes au bar Central de Bois Luzy. C'était l'époque ! Aujourd'hui ce n'est plus pareil : les pères rentrent à la maison après le travail et jouent avec leurs enfants. Je n'ai pas connu cette ambiance. Le père était respecté, aimé mais il y avait une barrière que nous ne pouvions pas franchir. Le dimanche mon père nous emmenait chacun son tour en moto au marché au puces à Saint-Lazare où il nous offrait des jeux. Ma mère Ma mère, Mariam (arménienne) est née le 5 février 1920 à Karpout (Asie Mineure). Elle nous a quittés le 10 février 1980. Elle était couturière à domicile, avait des patrons dans le centreville qui lui confiaient du travail. Nous la voyions partir en bus avec son carré noir (genre de drap dans lequel elle enveloppait son travail). Ma mère travaillait beaucoup, que ce soit à Bois Luzy ou à La Busserine elle avait sa machine à coudre Singer à pédale, puis électrique et pour finir elle a eu une machine professionnelle Pfaff. Elle s'est toujours occupée de nous, présente pour chacun de nos problèmes. Elle ne vivait que pour nous.
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Elle m’a guidé et a choisi quasiment tous les emplois que j'ai occupés. Je suis sûr que, si elle avait vécu plus longtemps, elle m'aurait guidé vers l'informatique. J’ai des milliers de souvenirs avec elle. Depuis qu’elle nous a quittés, j'ai et j'aurai toujours le regret de ne pas avoir passé plus de temps avec elle. Je sais qu'elle est partie de Marseille à Sainte-Maxime à cause de moi : dans son esprit je l'avais abandonnée lors de mon premier mariage. En un sens elle avait raison et même si je l'appelais tous les jours, elle n'avait pas ma présence.
Mon Père et ma Mère le jour de leurs mariage
Mon grand-père (Pépé) Je n'ai connu que mon grand-père maternel. C'était le Pépé. Il était le plus gentil de la terre. Il venait souvent nous voir, il habitait à Beaumont le quartier arménien de Marseille distant de 2 km du château.
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Je n'ai pas le souvenir d'être allé chez lui. À chaque visite, il avait une petite boîte de crème de marrons pour moi. Le dimanche, il apportait une pastèque. Comme je n’aimais pas, il m'apportait un petit melon de Cavaillon. Mon grand-père était devenu complètement aveugle. Un dimanche en 1963, alors que nous dînions ensemble, il avait les larmes aux yeux. Mon père lui a demandé ce qui se passait. Il nous a raconté que comme il était aveugle, les voisins lui causaient des problèmes. Mon père a pris la décision de faire venir définitivement mon grand-père à la maison et lui a aménagé une chambre. En 1964 lorsque l'on a déménagé pour La Busserine, il a eu aussi une chambre pour lui. Mon grand-père a donné l'argent nécessaire à ma mère pour faire installer un chauffe-eau à gaz, il a pris son premier bain dans une baignoire. Il nous a raconté que lorsqu'il était en Arménie, il avait une grande maison avec deux salles de bains et que depuis son départ en 1923 il n'avait plus connu cela. Il nous a quittés le 24 juin 1964 à 81 ans. La veille il était tombé du lit. Le médecin appelé en urgence nous avait dit qu'il avait un cœur de 20 ans. Il est enterré dans le caveau de ma tante.
Mon grand père avec ma grand-mère et ma mère ( 1923 )
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Aujourd'hui, j'ai la joie d'être grand-père et je repense souvent à mon pépé : il ne m'a laissé que de beaux souvenirs et j’ai toujours sa photo sur mon ordinateur. Ma grand-mère du côté de mon père était seule et malade à Vallabregues. Mon père l’a recueillie et elle a fini ses jours parmi nous : c’était ainsi à cette époque. Avec ce geste pour sa mère et pour mon grand-père, mon père a montré qu'il ne faut jamais abandonner ses parents. Mon frère Roger Roger Pauget est l’enfant d'un premier mariage. Il est né le 14 octobre 1944. L'écart d'âge (huit ans) entre nous a fait que nous n'avons eu que très peu de contacts. Aujourd'hui, je lui téléphone tous les jours et si je reste deux ou trois jours sans l'appeler, c'est lui qui le fait.
Roger devant l'école de Bois Luzy 1960
Ensemble nous commentons l'actualité et surtout celle de l'OM. Je n'ai quasiment pas de souvenirs d’enfance avec lui.
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Nous le voyions à tous les repas. Il dormait dans la salle à manger sur un petit lit à côté de la télévision. Lorsque nous le rencontrions au cinéma, il était toujours prévenant pour nous et nous payait un sirop et une glace. Il a travaillé comme maçon avec mon père. Par la suite au retour de l'armée il s’est dirigé en 1965 vers la RATVM (transport en bus) où il était poinçonneur. Il nous a quittés en 1966 pour s'engager dans l’armée de terre où il a fait carrière jusqu'à sa retraite. Il s’est marié en 1972 et il a eu quatre enfants : Sylvie, Nathalie, Roger et Virginie. Jean-Jacques Jean- Jacques est né le 28 avril 1950. Malheureusement il nous a quittés le vendredi 2 juillet 1982 suite à un grave accident de moto survenu le 31 mai 1981 (il est resté dans le coma jusqu'à sa mort). Dans mon esprit, c'est cette date que j'ai toujours retenue comme la date de décès.
Jean Jacques le jour de son mariage
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Mon frère Jean-Jacques Au moment où j'écris ce livre, mon frère est parti depuis 34 ans. Ma vie avec Jean-Jacques se compose en deux parties : la première de 1952 à 1964 La deuxième de 1964 à 1980. Première partie Avec Jean-Jacques nous étions toujours ensemble. Il construisait des carrioles pour mes copains et moi, avec des planches en bois et des roulements à billes. Il réparait mon vélo. Nous avons même fait du camping : la première fois, nous avions fabriqué une tente avec des couvertures (dans la nuit il y a eu un gros orage c’est mon père et mon frère Roger qui sont venus nous chercher). La deuxième fois, dans une Traction-avant rouge que mon père nous avais donnée. Il avait tout enlevé nous y avions installé des matelas. C'était notre repaire, nous y restions des heures entières. Un soir nous avons décidé de dormir dedans avec l'accord des parents. Nous y avons passé toute la nuit et c’est ma mère qui est venue le matin nous apporter le petit déjeuner. On était en 1962 : qui laisserait des enfants dans un pré devant la maison aujourd'hui ? Il n'aimait pas trop le cinéma mais venait de temps en temps avec nous.
Jean Jacques 1975 - 21 -
Deuxième partie Après notre arrivée à La Busserine, une séparation s'est effectuée : les filles avec les filles, les garçons entre eux en fonction de l'âge. Mon frère avait ses copains, j'avais les miens. En 1970, mon frère s'est marié il a eu le 9 avril un garçon qui s'appelle Stéphane. Nous avions très peu de relations, car il n'était pas sociable. Après l’accident de mon frère, nous ne l’avons plus jamais revu. Jean-Jacques était mécanicien. Il avait d'abord travaillé dans un garage rue Félix Pyat ensuite il a trouvé une place comme chef d'atelier au rapport GIR. En 1976 il s'est associé avec un gars (propriétaire de SURCASS, une société de pièces auto) et ils ont ouvert un garage boulevard Bezombe à La Pomme. Il m’a demandé de m'occuper de sa comptabilité, je l'ai fait avec plaisir. Il voulait me payer mais j'ai refusé.
Son deuxième garage, il l’a pris quelque temps avant son décès avec sa deuxième femme au boulevard Icard. Lorsque j'ai passé mon permis de conduire, je suis rentré chez moi ma mère m’a dit de me rendre chez mon frère pour lui annoncer la nouvelle. Mon frère m'avait préparé ma première voiture une Simca 1501, elle était assurée j'étais arrivé en mobylette et je suis reparti en voiture. Début janvier 1973 Jean-Jacques avait acheté une Simca 1000 Rallye 2. Le soir il venait me chercher et nous montions la Sainte Baume avec la Rallye 2. À l'époque j'avais une Autobianchi abarth. Au mois de juin il est venu à la caserne, a récupéré les clefs et les papiers de ma voiture me disant qu'il l'avait vendue. - 22 -
Comme je faisais une confiance absolue à mon frère, je n'ai rien dit. Le lendemain il me donnait sa Rallye 2 : il en avait acheté une autre. J'ai eu ma première voiture neuve en échange de mon Autobianchi abarth. Avec cette voiture nous avons, mon frère et moi, participé à des courses de côte avec le Simca Racing Team d'Aubagne. Au mois de juillet de 1973, on nous a demandé de faire l'ouverture d'une étape du tour de France entre Nice et Aubagne. Cela m’a laissé de bons souvenirs. Nous nous voyions au minimum une fois par semaine. Quand il savait que j'étais de repos, il m'appelait et me demandait de venir pour une affaire urgente : en réalité c'était pour que nous mangions ensemble. J'ai un souvenir – j'avais 15 ans – je revenais du cinéma : JeanJacques m’a croisé avec sa voiture. Il s'est arrêté, ils étaient quatre dans le véhicule. Il m’a dit de monter. Un de ses copains lui a fait remarquer que c'était complet, il l'a fait descendre en ajoutant : « Mon frère passe avant tout le monde. » Lorsqu'il est parti, j'ai mis plusieurs années avant de faire mon deuil. Ma sœur Yvonne est née le 14 septembre 1951. Avec elle, c'était des disputes en permanence mais nous avions une grande complicité. Elle a été couturière comme ma mère. Durant la période de 1959 à 1964, nous avons passé tous nos après-midis du jeudi et du dimanche au cinéma. Avec elle j’ai vu les derniers films sortis à cette époque. Une fois nous étions allés voir le film Les Trois Mousquetaires avec Gérard Barray. À la fin de la séance, nous nous sommes cachés, ma sœur et moi, dans les WC et nous avons assisté à la deuxième séance du film.
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Le problème, c'est que le film a fini vers 20 h 00 : il faisait déjà nuit. Lors de notre retour à la maison, mon père et ma mère nous attendaient très inquiets et nous avons eu droit à une punition (un mois sans cinéma). Sentence que ma mère a levée dès le jeudi suivant. Pendant l'été nous allions ensemble à la piscine du stade Vallier. Ma sœur s'est mariée le 30 janvier 1971, elle a eu deux enfants, Gérald et Corinne. J'ai toujours adoré ma sœur, nous nous appelons souvent. Parfois elle se met en colère contre moi pour des faits qui concernent mon frère Roger mais c'est comme cela : lui, on l’épargne !
Yvonne L'été L'été, ma mère, Jean-Jacques, Yvonne et moi nous allions à la mer (plage des Catalans). Nous prenions le bus numéro 6 à Bois Luzy et il nous laissait au bas de la Canebière. Nous faisions le reste du trajet à pied. Ma mère emportait dans son panier le repas du midi et le goûter.
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Nous passions toute la journée à la plage. Après le repas il fallait attendre 15 h 00 pour reprendre le bain, vers 14h 00 elle nous achetait une glace. Nous rentrions en général vers 18 h 00. Même trajet mais le panier était vide. La sortie pour la plage des Catalans se déroulait en général le 14 juillet.
Le cinéma Le cinéma de mon quartier s'appelait Le Lido, au Petit bosquet. À cette époque, il y avait des cinémas dans chaque quartier. Je pense que la disparition de ces salles au profit des complexes a contribué à l'éloignement des personnes car dans le quartier tout le monde se connaissait. La même chose est arrivée avec les centres commerciaux.
Cinéma le Lido (1960)
La séance de cinéma était un spectacle à elle toute seule ! Après les actualités nationales, des dessins animés, un courtmétrage et enfin les publicités, venait enfin le film de la semaine suivante et là on languissait d’être au dimanche pour le voir. Une bonne heure était déjà passée avant qu’enfin le film soit projeté sur l’écran. Ma sœur et moi, et quelquefois mon frère, nous y allions le jeudi et le dimanche après-midi. - 25 -
Au cinéma mon père préférait le balcon et à l'entracte nous avions droit à la glace de qualité. Il y avait un rideau rempli de publicités : ma sœur et moi nous jouions à rechercher une pub.
Les vacances À cette époque les vacances se déroulaient du 15 juin au 15 septembre. Nous allions chez des amis de mon père dans la ville de PortSaint-Louis-du-Rhône. Nous passions le plus clair de notre temps à la plage Napoléon. Pour arriver chez nos amis, nous passions par la ville de Martigues et souvent nous étions bloqués sur le pont qui traverse le Rhône. Le début d'après-midi était réservé à la sieste. Le soir il y avait des repas de famille qui duraient très longtemps. Le dernier jour nous ramassions à la plage des crabes appelés favouilles. Le soir ma mère nous préparait une bonne soupe avec des pâtes. Je me souviens qu’un dimanche nous nous promenions en Camargue lorsqu’un taureau a surgi sur la route et a démoli la voiture. Mon père est sorti de la voiture pour le faire fuir, mais le taureau chargeait : il est remonté rapidement. Le taureau est reparti. Il a fallu que mon père retourne au centreville à pied pour demander une dépanneuse : la voiture était hors d’usage. Les copains J’avais un camarade qui s'appelait Kakou. Avec lui et mon frère, nous jouions devant le château. Plus tard parmi les nouveaux voisins Nordine est arrivé. Nous étions toujours ensemble, mon frère, ma sœur et moi.
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Ma marraine C'est une voisine et amie de ma mère qui est devenue ma marraine. Elle habitait au-dessus de chez nous et elle était très gentille. Je la voyais régulièrement, elle participait aux fêtes et aux anniversaires. Elle a déménagé en 1962 et elle est partie vivre dans le quartier des Olives. J'ai le souvenir de vacances passées chez elle.
Le château photos de 1960 et 2015 Un peu d'Histoire C’est un château de style Second Empire, bâti sur une colline, dans un quartier calme et boisé, de Marseille le quartier de Bois Luzy. L'aménagement du domaine de Bois-Luzy qui comptait initialement 23 hectares avec pinèdes, vignes, oliviers et arbres fruitiers remonte au XVIIe siècle, avec la famille de Robert de Ruffi, qui était notaire. Pendant 6 générations, il restera dans leur patrimoine familial. Le château, dans sa forme actuelle, fut construit vers 1850 par Monsieur de Saint Alary. Sa construction dura plusieurs années. - 27 -
La mosaïque du hall central fut exécutée par une équipe de mosaïstes italiens, les mêmes qui réalisèrent les mosaïques de la Basilique de Notre Dame de La Garde, à cette époque. Le lustre de la Basilique de Notre Dame de La Garde provient du hall central du Château de Bois-Luzy : c'est la Marquise de Saint Alary qui en fit don lors de la vente du château. Le château, de dimensions relativement modestes, avec 380 m2 d'emprise au sol, s'élève sur 3 niveaux. Il est ceint d'une grande terrasse de 2 000 m2. Au début du XIXe siècle, la famille de Saint Alary s'en sépare. Plusieurs propriétaires, négociants et armateurs, se succèdent et transforment la propriété jusqu'à son acquisition en 1925 par une banque. La Société Générale Foncière ensuite la morcelle et en fait un des plus grands lotissements, pour l'époque, de Marseille. Le château deviendra ensuite propriété de la ville. Avant 1939, il fut aménagé en maison de repos pour la Police, mais non utilisé. En 1940, il fut réquisitionné et reçut successivement divers occupants, dont des unités de l'armée allemande. En 1947, la ville confia à une association à but non lucratif, gestionnaire d'auberges de jeunesse, le soin d'exercer son activité de tourisme social. En 1950, des squatters l'envahirent et n'en furent délogés que quelques années plus tard, par les services communaux. Le château devint alors ce qu'il est actuellement : une auberge de jeunesse accueillant les gens de tous les horizons qui voyagent. Sa fréquentation oscille entre 12 000 et 15 000 nuitées par an. Lors de notre séjour au château de Bois Luzy, nous avons changé deux fois d'appartement : le dernier en date se situait au premier étage. J’ai une photo de cette époque sur laquelle on aperçoit le château de Bois Luzy avec à la fenêtre les draps de la maison : j'ai fait appel à un peintre qui a effectué une reproduction. La maison se composait d'une salle à manger, une cuisine, deux chambres. Mon père et ma mère avaient leur chambre. JeanJacques, Yvonne et moi étions ensemble. - 28 -
Dans la cuisine se trouvait une cuisinière à bois et à charbon, elle servait pour le chauffage et la cuisine. Il y avait une réserve d'eau qui fournissait de l'eau chaude pour la vaisselle. Pendant l’hiver mon père récupérait du bois à son travail que des camions livraient au château. L'ensemble des habitants du château profitait de ce bois. Tout le monde participait à sa mise en place dans l’abri. Le charbonnier nous livrait du charbon que l'on plaçait dans la cave et qui faisait le tampon lorsqu'il n'y avait plus de bois. Ma mère y faisait la cuisine, elle préparait souvent des gâteaux. Il y avait une réserve d'eau qui chauffait en permanence. Le soir elle y plaçait des briques réfractaires qui nous servaient de bouillottes les soirs d'hiver. Devant le château se trouvaient des escaliers qui descendaient jusqu'à l'avenue de Bois Luzy Nous les empruntions pour descendre au village faire quelques courses. Le soir de Noël 1962 il avait neigé toute la journée. Ma sœur et moi, nous sommes descendus à la boulangerie chercher la bûche de Noël. Nous ne voyions pas les escaliers : ce qui n'était qu'une course était devenu une aventure.
Les voisins Au château Il y avait madame Zampa, la tante de Gaétan. Elle avait un fils Francis, ami intime de mon frère Roger. Monsieur Galipo, Monsieur et madame Piombino (ma marraine) qui avaient un fils Vincent avec qui j'étais copain, Le responsable de l'auberge de la jeunesse Guy Saint-Jean, Monsieur Cirillo, - 29 -
Monsieur Ahoudai Korchia, Monsieur Socamono (père de Kakou). L'école L'école se trouvait en face du château : on y allait à pied. Il y avait une entrée pour les filles et une autre pour les garçons : à cette époque les classes n’étaient pas mixtes. J'ai fréquenté cette école jusqu'en 1964, date du départ du château. J'étais un très bon élève : chaque année, j'avais un prix, en général le deuxième ou troisième, jamais le premier, car j'étais un élève turbulent. Ayant une très bonne mémoire j'étais premier dans ces matières : mathématiques, Histoire, géographie, sciences. En français j'étais moyen. En 1964 mes parents se sont quittés et le manque d'argent fait que je n'ai pas pu aller en sixième. À cette époque il n'y avait pas de bourse pour les élèves. Les mathématiques J’avais un plaisir à travailler les maths, en particulier le calcul mental. Je m’entraînais en permanence. J’apprenais par cœur n'importe quelle table de multiplication. En 1974, je ne connaissais pas l'algèbre. J’ai appris à résoudre des équations jusqu'à deux inconnues en deux mois. J’ai beaucoup de mémoire : je peux mémoriser un texte de 60 pages en six minutes et le retranscrire mot à mot. Exemple à Cherbourg : j’ai passé un oral de physique nucléaire. J’ai appris un quart d'heure avant et j'ai eu 18,5 sur 20.
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Pâques Ma mère avait un menu traditionnel : œufs mimosa, gigot d'agneau, rissoles (beignets de viande), gâteaux. Je n'ai pas souvenir de la chasse aux chocolats de Pâques, mais on avait chacun un œuf, une poule ou une cloche en chocolat. Mon grand-père participait souvent à cette fête. Il nous apportait des œufs de Pâques (œufs durs peints) ; dans le panier il y en avait toujours un frais. Ma mère confectionnait des sablés avec un œuf dur au milieu. Noël Chaque année ma mère achetait un sapin de Noël et mettait en place la crèche sur une petite table dans la salle à manger. Le jour du réveillon, c'était une journée magique pour nous. Ma mère allait faire les courses pour les fêtes dans le centre de Marseille (rue Longue des Capucins). Nous, nous pouvions regarder la télévision l'après-midi. Il n’y avait que des films pour enfant et des dessins animés. Mon père m'envoyait chercher M. Galipo notre voisin. Il disait : « Le soir du réveillon, on ne doit pas être seul ! » Le menu du réveillon Fruits de mer (huîtres, moules) ; Poisson, en général une daurade ; Riz sauce à la crème ; Treize desserts (j’ai toujours connu le panier avec les treize desserts il était sur une petite table à l’entrée). Le jour de Noël, dès notre réveil nous allions au sapin pour découvrir notre cadeau de Noël. Lorsque l'argent manquait, nous avions les almanachs de Mickey ou de Tintin. - 31 -
Nous partions ensuite pour assister à la messe. Au retour nous nous arrêtions pour prendre la bûche à la boulangerie. À midi nous mangions la dinde que ma mère avait farcie. Mon père travaillant au "Travaux du Midi" nous nous allions chaque année à l'arbre de Noël de l’entreprise. Cela se passait au théâtre de L'Alcazar à Marseille ou dans un théâtre rue Mazenod. Après un spectacle et un goûter, nous avions le cadeau de Noël. Lors du spectacle l’animateur demandait des enfants pour participer : seule ma sœur y allait et elle gagnait souvent (des bonbons ou des jouets). Les repas de famille Tous les dimanches, ma sœur, mon frère et moi nous allions à la messe à l'église de Bois Luzy, Sainte-Louise de Marillac. En sortant nous passions au bar Central récupérer notre père. Nous repartions dans sa voiture. Nous nous arrêtions à la boulangerie pour prendre le pain et les gâteaux. C'était le rituel du dimanche. Ce jour-là, mon grand-père venait souvent déjeuner avec nous. J'allais l'attendre en haut du château et l'accompagnais à la maison. Le dimanche après le déjeuner, le marchand de glaces passait dans le quartier, et il faisait sonner sa corne. Il avait une sorte de triporteur. Papa nous donnait l'argent, nous prenions des esquimaux, ma mère une tranche napolitaine et mon père une cassate. À table chacun avait sa place : mon père était en bout de table, ma place était à la droite de mon père. Lorsqu'il y avait Pépé, j'étais toujours à côté de lui Je perpétue cette coutume : mon premier petit-fils est toujours à ma droite. - 32 -
Lors des repas, s’il n'y avait que la famille, on pouvait parler à table, mais avec des invités on ne parlait que si on nous posait une question. Les repas se prenaient à midi et à 20 h 00. Mon père se mettait à table, ouvrait son opinel et le repas pouvait commencer. J’ai le souvenir que mon frère Roger était arrivé une fois à 20 h 05. Mon père lui a dit : « Ce n'est pas un snack ici ! Tu as mangé ! » Mon frère avait eu une montre pour son anniversaire, il la lui a reprise.
Les anniversaires Pour nos anniversaires ma mère préparait un gâteau. Le soir on fêtait l'anniversaire avec toute la famille. Ma marraine était toujours présente Nous avions chaque fois un cadeau.
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3- La Busserine
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Au mois de janvier 1964, nous apprenions par la Ville que le château de Bois-Luzy allait être vidé de ses locataires et que tout le monde serait relogé. Ma mère a choisi un appartement dans la cité de La Busserine. Un immeuble tout neuf, le bâtiment P au 5ème étage. Nous sommes arrivés au mois d'avril 1964. Le jour de notre arrivée, le camion de déménagement n'était pas encore là, c'est notre voisin Monsieur Azega qui nous a prêté des chaises pour nous asseoir. De ce jour il est devenu un ami et un très bon voisin. La visite de l’appartement a été pour nous une découverte inoubliable : nous avions chacun notre chambre. Il y avait une cuisine, une salle à manger, un WC indépendant et une salle de bains. Je ne savais pas que cela existait. Nous n’avions pas de chauffe-eau et c'est mon grand-père qui en a financé la mise en place. Une semaine après, nous avions l'eau chaude au robinet. Cela peut paraître anodin mais nous étions en 1964, j’avais onze ans et je découvrais ce luxe. Il n'y avait pas de téléphone. Il sera installé le 23 juin 1972, et uniquement car nous étions prioritaires à cause de mon appartenance au corps des marins pompiers. À la différence de Bois Luzy, à La Busserine chacun avait ses camarades. Ma sœur jouait avec les filles. Mon frère Jean-Jacques et moi avions des copains de notre âge. Les voisins que nous avions étaient très sympathiques : je n'ai pas souvenir d'une dispute dans notre bâtiment. Nous étions au 5ème et dernier étage. Au 4ème nous avions comme voisins des Italiens, les Lotta.
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Les parents ne parlaient pas français. Ils avaient deux fils et deux filles. Les Lotta avait gagné au tiercé. Ils ont acheté un cabanon à la Vesse sur la Côte bleue, il est devenu au fil des années une superbe villa. J’ai le souvenir de plusieurs séjours de vacances chez eux. Le matin, c'était plage. Après déjeuner, on préparait les coulis de tomates pour l'hiver. Ils avaient également acheté une télévision en couleurs. Ils étaient les seuls dans le bâtiment à en posséder et le soir lorsqu'il y avait un film, tous les habitants du P5 étaient conviés ! La mère Lotta préparait toujours des gâteaux pour tout le monde. Si nous ne venions pas, elle envoyait un de ses fils chercher les habitants. Vincent Lotta m’a emmené au cercle de Sainte-Marthe et m’a fait inscrire à la fanfare. J’ai fait un essai au tambour et après discussions avec le chef de la fanfare il m’a pris dans leurs rangs. Le mardi et je jeudi, nous répétions au cercle Ricard de SainteMarthe. Les manifestations principales de la fanfare : le 11 novembre, cérémonie de l'Armistice ; le dernier vendredi du mois de novembre, la Sainte-Cécile ; la fête des musiciens ; après un défilé dans le quartier de SainteMarthe, il y avait un banquet au Cercle Ricard et le repas était gastronomique. La fanfare participait à plusieurs sorties l'été pour des festivals folkloriques. Il y avait également la Philharmonique, orchestre classique qui se produisait seul ou avec nous.
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Le 19 avril 1970, j'ai avec la fanfare participé à l'inauguration du circuit Paul Ricard. Cette sortie a été suivie d'une soirée à l'île de Bendor (appartenant au groupe Ricard). Je me souviens qu’un des musiciens de la Philarmonique était tombé à l'eau lors de l'accostage et j'ai sauté à l'eau pour le secourir. Le chef de la fanfare m’a traité différemment à partir de ce jour : j’avais gagné son estime. J'ai arrêté la fanfare lors de mon entrée au marins-pompiers. Le sport Dans mon quartier, on pratiquait essentiellement le football. Je jouais au poste d'arrière-droit numéro 3. En 1967, nous avons avec le club gagné la coupe inter-quartiers. Notre entraîneur était monsieur Murati. Il était postier et s'occupait des jeunes. J'ai le souvenir que tous les habitants de La Busserine étaient présents autour du stade pour nous encourager. À la fin du match il y a eu la remise de la coupe et une fête dans le quartier (c’était comme si nous avions gagné la coupe du monde !)
Equipe de la Busserine 1965
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Pendant les vacances nous organisions des parties de foot avec les copains et nous jouions à la bouteille : l'équipe qui perdait offrait une bouteille de Québec (boisson gazeuse) au gagnant mais en général tout le monde buvait après le match. Après mon entrée au marins-pompiers nous participions aux tournois de sixte, nous avons fini en demi-finale en 1971. Scout J’ai été pionnier de France de 1965 à 1967 (c’est ma mère qui m’avait inscrit). La tenue se composait d'une chemise rouge avec un écusson, d'un foulard et d’un pantalon en velours marron. Il y avait mon copain Gilles ainsi que deux autres que je retrouverais aux pompiers. Nous avons participé à des camps d'été et d'hiver. Lors des camps d’été nous devions travailler chez les paysans. Le premier que l'on a fait se passait dans les Alpes. Nous sommes arrivés à la gare de Gap. Nous devions aller jusqu'à la station de ski d'Ancelle en passant par le col Bayard. Je me souviens que nous étions avec un camarade montés à l'arrière d'un semi-remorque. Nous allions travailler chez des fermiers qui nous servaient des goûters d'enfer. Le matin, à tour de rôle, nous allions chercher le lait chez le fermier et nous devions préparer le déjeuner pour tout le monde. Nous avons fait de l'escalade avec le frère du moniteur. Celui-ci a fait une chute de 10 mètres, je me suis occupé de lui en attendant les secours (on m'avait surnommé le pompier de service) le moniteur m’a exempté de corvée pendant toute la durée du séjour. L'hiver nous partions à la neige pour faire du ski et des randonnées. Je pense en écrivant ces mots que ma mère qui était seule et pas riche : elle s'est sacrifiée pour me faire participer à ces camps.
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Malheureusement certains d'entre eux nous ont quittés. Mais je reste très lié avec ceux qui sont encore parmi nous. Les loisirs Dans le quartier les loisirs étaient limités. Le jeudi on jouait au ballon. Le dimanche, mes copains et moi nous allions au cinéma de quartier :Le Canet, Le Saint-Gabriel, Le Plazza à Saint-Louis, Le Théâtre du moulin à Malpassé. C’était en général avec les copains.
Notre première expérience dans un cinéma du centre ville a eu lieu en 1966. Au cinéma Le Capitole sur la Canebière nous avons vu le film La planète des singes.
L'été pendant les vacances nous allions à la mer en vélo ou en vélomoteur, au Prophète sur la Corniche ou à la jetée dans le port. Nous sommes même allés à Carry-le-Rouet en mobylette 24 km. En 1966 dans le quartier s'est ouvert un club (ATOM) dirigé par M. Alain qui deviendra juge pour enfants. Dans ce club il y avait des jeux, un espace lecture et on nous projetait des films. J’ai fréquenté mes copains jusqu'en 1975, date de mon premier mariage.
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L'école Entre 1964 et 1967, j'ai fréquenté l'école de La Busserine. J’étais très bon élève. En 1967, j’ai passé mon certificat d'études que j'ai réussi avec mention. J'étais le seul de l'école à l'obtenir. Comme j'avais été très turbulent pendant l'année mon maître monsieur Delay m'avait mis quatrième au classement final (je n'avais pas droit à un prix). Après les résultats du certificat, le directeur m'a appelé dans son bureau pour me féliciter mais quand je lui ai dit que je ne participerais pas à la distribution, il a rajouté un quatrième prix (La guerre du feu). Le travail J ai exercé les métiers de magasinier dans l'alimentation de monsieur Garbit. En mai 1966, ma mère (vous verrez qu'elle a pratiquement toujours décidé pour moi) m’a fait entrer à la boucherie de Picon. Ma première expérience commence en mai 1966. Au mois de juillet 1966 démarre la Coupe du monde en Angleterre. Les rencontres importantes commençaient à 15 h 00 et finissait à 17 h 00. J'arrivais donc à 17 h 15 mais mes horaires étaient de 17 h 00 à 20 h 00. Après le deuxième match mon patron monsieur Colombey m’a mis à la porte. Je rentrais tranquille chez moi, mais ma mère et mon frère Roger m’ont donné une correction et depuis je ne suis plus jamais arrivé en retard au travail. En septembre 1966, j'ai repris le chemin de l'école pour ma dernière année en classe de fin d'études (la terminale de l'école primaire) - 42 -
En septembre 1967, ma mère (toujours elle) m’a fait entrer comme magasinier dans un magasin d'alimentation situé campagne Picon dirigée par monsieur Charbit. Deux mois plus tard il ouvrait une boucherie à la Cité Font vert et je retournais à la boucherie.
On travaillait du mardi au samedi de 6 h 00 à 13 h 00 et de 16 h 00 à 20 h 00. Le dimanche de 7 h 00 à 13 h 00. Le jeudi après-midi j'allais à l'école des bouchers, place du 4Septembre (près des Catalans) Après un mois d'école j'aidais les élèves ayant des difficultés en math. Grâce à cette fonction, je faisais ce que je voulais en classe. Le patron possédait une boucherie au Racati près de la gare où j’ai effectué un remplacement. En 1968, j'ai quitté cette boucherie pour aller travailler rue d'Aix dans le centre de Marseille à la Boucherie Provençale de Monsieur Vellon. Je me trouvais dans une très grande boucherie : il y avait trois ouvriers au comptoir, un ouvrier dans l’arrière-boutique où il préparait la viande pour la vente, une vendeuse et une caissière. Je travaillais à la préparation de la viande et à la vente. J'effectuais des livraisons pour des restaurants, des hôtels dans le centre. C'est sur un vélo (pesant près de 50 kg) que je parcourais les rues de Marseille. J'y suis resté un an, les ouvriers et le patron étaient très sympathiques mais j'en avais assez de la boucherie et je voulais faire autre chose. - 43 -
Début 1970 j'ai travaillé à l'huilerie Huilor aux Aygalades. J'étais manutentionnaire, c'était un emploi très pénible : toute la journée je récupérais des cartons d'huile du tapis roulant pour les placer sur une palette. En fin de journée le carton devait peser 20 kg. Au mois de mai 1970, ma mère m'avait inscrit pour passer un test d'embauche dans la société Silbert-Ripper spécialisée dans les médicaments. On devait préparer les livraisons pour les pharmacies. Lors du test j'avais une ordonnance et devais remplir un panier en 15 minutes. Je n'avais rien trouvé. Une des filles travaillant sur place m’a rempli mon panier. Le responsable d'embauche me félicita pour mon test et je lui avouais que je n’avais rien trouvé mais que l'on m’avait aidé. À ma surprise il m’a confirmé qu'il le savait car il nous observait depuis son bureau mais devant mon honnêteté il m’a proposé une place au stock. Au mois d'août 1970, ma mère m’a prévenu que le lundi suivant je devais passer une visite médicale en vue de mon inscription au concours d'entrée aux marins-pompiers de Marseille. Le concours a eu lieu à la caserne de Saint-Pierre au mois de septembre, concours passé avec succès pour une entrée le 2 novembre 1970.
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4 – Marins-pompiers
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J’ai donc réussi le concours d'entrée aux marins-pompiers : nous étions 180 ils en ont pris 44. Je suis rentré lundi 2 novembre 1970. Nous avions rendez-vous à la caserne de Strasbourg. Nous étions 44 apprentis, nous étions réunis dans la cafétéria où nous avons signé notre acte d'engagement de trois ans au sein des marins-pompiers de Marseille. C'est le Premier Maitre du service recrutement qui était responsable des engagements
Première étape : s'équiper Nous sommes passés au magasin qui se trouvait dans la caserne, on nous a remis toutes nos affaires militaires : tenue de sortie bleue et blanche, tenue de travail complète kaki, chaussures de sortie noires et blanches. Une valise, un sac marin, un maillot de bain. Nous avons fait connaissance avec nos camarades ; j’ai encore des liens privilégiés d'amitié après 45 ans.
Les camarades qui seront incorporés avec moi ABRARD Christian - BOURELY Frédéric - CABRILLAC Gilles - CHEILLAN Vincent - CHIARI Jean-Pierre -CIAPPA -Henri CIONCI Francis - DESI LL.E Serge - DUBAI, Jean-Luc GAILLARD Jean-Paul-GUYOT Patrick - HOUDIER Patrick JOLIBOIS Jean-Pierre - LEMASSON Jean-Pierre - LOPEZ Gilbert - MEIER Gilbert - MERY Georges - MONZO Christian MOSTAC CTOLI Jean -MURIER Richard - OLIVERO Bernard - ONDE Alain - PELLAT Jean-Pierre - PONTIER Serge - PRÎN ABEIL - RAMOS Patrick - RASPLUS Yvan - REVEL Georges ROUCHENIAN Claude - SANCHEZ Yves - SCARPARO Serge - SCHURDEWIN Futile - STREBLER Jean-Marie -BORIN
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Deuxième étape :connaissance des lieux L'étape suivante était l'arrivée à la caserne de Plombières où je devais passer dix ans. Nous avons fait connaissance avec nos instructeurs : Chef de cours Second Maitre Caddeo (il était au brevet supérieur on ne le verra jamais) Quartier-maître Descours QM Cuny QM Blanque QM Herzog. Chaque instructeur avait sa spécialité. Dans l'ensemble le cours était très dur mentalement et physiquement : cela m’a appris à vivre en communauté, chose que je ne connaissais pas. Cela nous a endurcis, ce qui a scellé notre camaraderie qui 45 ans après perdure toujours. Brevet élémentaire de marins-pompiers C’est une sorte d'apprentissage au métier de pompier. Après ce cours nous étions aptes à exercer le métier de marinpompier dans les différentes casernes de Marseille. Le cours durait six mois pendant lesquels nous allions vivre une aventure merveilleuse. À la fin du cours, nous aurions notre brevet élémentaire de marin-pompier avec le grade de matelot. Jusque-là nous ne serions que des apprentis. L’ensemble des cours se composait des matières suivantes : entraînement militaire (obligatoire : nous étions des militaires), secourisme (pour prendre l'ambulance), entraînement pompier (le métier), sport (pour maintenir la forme), prévention (obligatoire pour comprendre les risques). - 48 -
La formation militaire La formation militaire initiale du marin pompier réserviste vise à acquérir les bases du savoir militaire, à souscrire un engagement de trois ans et à servir au sein du bataillon de marins-pompiers. Les cours se composaient ainsi : connaissance de la marine nationale, déplacements militaires (on a appris à marcher au pas), composition, montage et démontage des armes, et maniement avec tir au CIAB Carpiannes (camp militaire). J’étais assez adroit au tir. Le secourisme Le secourisme désigne, en France, les premiers gestes d'urgence pratiqués par des personnes ayant les connaissances nécessaires, secouristes bénévoles ou pompiers. Il peut s'agir de secours avec ou sans matériel, en équipe organisée ou seul. Nous avions des cours importants qui devaient nous permettre d'être affectés sur les ambulances en qualité de secouriste. C’était un cours théorique et pratique. Plus tard dans ma carrière j’ai passé le brevet de secourisme ainsi que les différentes spécialités (réanimation - secours routier sauvetage déblaiement) Le monitorat de secourisme pour chacune de ces spécialités m’a permis de donner des cours à des élèves. Le pompier Toutes les écoles de formation de pompiers en France se servent du manuel du sapeur-pompier communal. Là également j'ai suivit des cours théoriques et pratiques. Les cours théoriques nous ont permis de connaître le matériel (tuyaux, lances à incendie, échelles et matériel divers), les véhicules de secours (ensemble des véhicules de pompier), les manœuvres (elles consistent à la mise en place de lance d'incendie) - 49 -
J'ai rapidement été l'un des meilleurs en théorie et en pratique.
Exercice à l'échelle à crochet pendant le cours
Une fois l'ensemble des données théoriques apprises, nous sommes aux manœuvres du matériel avant de nous occuper des manœuvres pour chaque véhicule : établissement des tuyaux et mise en eau. La mise en place des lances à incendie devait se faire le plus rapidement possible. Nous avons également étudié le réseau d'alimentation en eau de la ville de Marseille. C’est une leçon très importante, car sans eau on ne peut pas éteindre un incendie. Dans chaque rue se trouve des bornesincendie et nous avons appris à les localiser. Les manœuvres m’ont permis de connaître certains endroits des alentours de Marseille. Avant la fin du cours nous avons eu même droit à une visite du canal de Marseille. La prévention La prévention est un facteur important dans l'étude des risques d'incendie. Nous avons dû étudier l'atlas de la ville (encyclopédie de l'ensemble des rues avec un plan). - 50 -
C'était notre GPS des années 1970. Il fallait connaître la réglementation incendie de chaque type d'établissement, la numérotation des transports dangereux (plaque se trouvant à l'arrière des véhicules). Plus tard dans ma carrière je devrais faire des études d'établissement et pour finir, passer le brevet de prévention à Paris-Chaptal. Le sport Pour être pompier il faut avoir une bonne condition physique. On nous a entraînés dans ce sens : sport tous les matins (2 km de course à pied autour de la caserne), une matinée de sport sur un stade par semaine et chaque année, les épreuves du parcours pompier (monté à la corde -planche à pin). Certains de mes camarades ayant de bonnes performances rejoindront les équipes sportives du bataillon et pour certains la Marine nationale. Nous nous entraînions à être très rapides pour nous habiller. Nous avons très mal perçu ces entraînements, mais par la suite nous n’avons pas regretté de les avoir suivis. Car la nuit lorsque l'alerte sonnait, pour enfiler une combinaison et les bottes nous avions moins de deux minutes pour rejoindre notre engin et en 32 ans de carrière jamais un engin n'est parti sans moi. Le cours de brevet élémentaire de pompier se compose de deux périodes d’une durée de trois mois chacune : l’apprentissage, puis les stages. Nous avions alors des postes de feux sur les véhicules d’incendie. C’est là que j’ai fait l’expérience de mon premier feu. Je me le rappelle très bien, nous venions de commencer notre stage le matin, on nous donnait un poste de feu pour la journée. - 51 -
On m'avait attribué le poste de 1er servant sur le FP (fourgonpompe) il faisait partie de l'ensemble « générale ville ». PS - FP - ESP La sonnerie était un coup long, chaque engin avait sa propre sonnerie. Il était environ 15 h 00, je me trouvais dans la chambre du SM Ventre (instructeur), on passait une interrogation orale. Une sonnette a retenti dans sa chambre. Je lui demandais ce que c'était, il me dit : « C'est la générale ! » Je suis sorti rapidement et j’ai regagné mon poste sur le FP. Intervention : feu d'entrepôt boulevard Villecroze à Marseille. C’était l’établissement Berger (stockage et emballage de dattes Micasar). À notre arrivée la partie centrale de l'entrepôt brûlait. Le chef de garde a ordonné le commandement en reconnaissance. J’ai pris mon matériel et nous avons établi une petite lance incendie. Au cours de l'intervention, l'officier d'alimentation (un de nos instructeurs QM Cuny) a dit qu’il fallait établir l’échelle à coulisse : 35 kg. Je suis allé la prendre au FP fourgon-pompe qui se trouvait à 100 mètres et je l’ai établie. L’instructeur n'en revenait pas et a fait mon éloge. Nous sommes rentrés le samedi matin vers 8 h 00. Nous sommes partis en permission. L’apprentissage a commencé en novembre et s’est terminé fin janvier, cela s’est bien passé. Nous ne sommes pas sortis de la caserne le premier mois et c’est début décembre que nous avons eu nos premières permissions. Une bordée sortait le samedi de 13 h 00 à 24 h 00 la deuxième le dimanche de 8 h 00 à 24 h 00. Chaque vendredi nous avions un devoir écrit : si nous n'avions pas la moyenne, nous étions privés de sortie. J'avais un compagnon de classe qui n'arrivait pas à avoir la moyenne. J’ai passé mes soirées pendant un mois avec lui pour qu'il arrive à sortir. Ce qui a été fait.
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L'examen final pour devenir breveté élémentaire comprenait donc toutes ces spécialités. J’ai fini 6ème au classement général (avec toujours une mauvaise note de conduite, comme à l'école : je ne pouvais m'empêcher de « faire l'andouille » en classe). Pendant le cour je n’étais pas très sympa avec mes camarades il est vrai que je n’avais pas l’habitude de la vie en communauté par la suite je me suis amélioré et j'ai toujours des contacts avec des amis du cours et ceux 45 ans après. Après l'examen final lors des résultats, chacun était convoqué devant le jury qui se composait du commandant des instructeurs. On nous donnait notre classement, il y avait un tableau avec les places libres dans chaque caserne et on devait choisir son affectation J'ai choisi la plus grande caserne : Plombières. C'était une caserne polyvalente : on avait accès à tous les types d'incendie et de secours : feux de ville (appartement entrepôt), feux de forêt, feux de navires, VSAB (ambulance). La caserne de Plombières Je commence ma carrière dans cette grande caserne que je connaissais depuis six mois, mais en tant qu'apprenti. Là je suis le matelot Bernard Olivéro matricule 057018161. Dans chaque caserne le personnel est affecté à un poste d'entretien. Pour les matelots c’est garçon à la cafétéria ou au mess des officiers mariniers. J'ai donc débuté au mess des OM. On effectuait le service par tiers : jour de garde, jour de corvée, jour de repos. Voici l'emploi du temps de la journée : - 53 -
7 h 45 Arrivée des permissionnaires en caserne. On regardait le poste de feu que l'on avait, il était valable pour le jour de garde. Les gradés de service pouvaient à tout moment nous changer de poste. En général nous avions les postes de 2ème secouriste au VSAB (ambulance) ou servant sur les engins incendie de ville ou feux de forêt. La vie dans la caserne était organisée par le BSI (bureau du service intérieur).
ORGANIGRAMME CASERNE
COMMANDANT OFFICIER EN SECOND
OFFICIER EN TROISIEME
CAPITAINE D'ARMES ADJUDANT DE COMPAGNIE CHEF DE SERVICE 1er TIERS
2ème TIERS
3ème TIERS
PERSONNELS 8 h 00
Appel aux couleurs - 54 -
HORS TIERS
Le personnel du premier secours marchait au pas jusqu'au milieu de la cour. Le reste du personnel était en rang dans la cour par engins (poste de feu). Le chef de garde faisait hisser le drapeau sous le résonnement du clairon. 8 h 10 Inventaire des engins : chaque servant contrôlait l'état du matériel du véhicule sous les ordres du chef de l'engin Pour le VSAB on allait chercher le matériel manquant à l'infirmerie. 8 h 30 Appel au sport. Sous les ordres du gradé de service, on effectuait 30 minutes de sport. 8 h 45 Casse-croûte à la cafétéria : pain, pâté ou fromage. Il était important, car il se pouvait que l'on parte en intervention et que l'on manque le repas de midi. 9 h 00 Appel à la manœuvre de la garde. Chaque armement faisait une manœuvre pompier, c’est le responsable de l'instruction qui établissait le programme. Instruction : on participait à une leçon organisée par le gradé de service. 9 h 30 Chaque jour avait son thème. 10 h 00 Appel aux postes d'entretien. Nous rejoignions notre poste et nous préparions pour les garçons la table du midi. 11 h 15 Rationnaire repas du personnel des ambulances, les garçons, le planton, le standardiste et le gradé d'aubette(accueil des visiteurs) mangeaient à la cafétéria. 12 h 00 Repas de l'ensemble du personnel 13 h 30 Appel et mise au poste de travail 16 h 00 Sport 17 h 00 Repos du personnel 19 h 00 Appel aux postes du soir 6 h 30 Réveil du personnel appelait « branle-bas » 7 h 00 Appel au poste de propreté Chacun effectuait la propreté dans le local qu'on lui avait attribué. 7 h 45 Le personnel de sortie allait se changer pour partir en permission. J'ai tenu à vous expliquer le programme d'une journée type en caserne. Cet emploi du temps était valable pour l'ensemble des
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casernes et postes dans la ville de Marseille, mais pouvait être modifié en fonction des interventions. Il faut savoir que l'intervention était prioritaire et que lorsque l'alerte sonnait, le personnel désigné quittait son poste pour rejoindre au plus vite son engin. Mon deuxième poste d'affectation a été la coopérative (comptoir de vente). La caserne de Plombières possédait un poste avancé (le poste de Saint-Antoine). Dans un premier temps, ce poste se trouvait dans le poste des CRS de l'autoroute Nord. Le personnel désigné partait le matin avec un véhicule d'incendie (FPT). Les engins de la caserne de Plombières Feux de ville PS (premier secours) Armement 1970 (plus tard l'effectif des engins va diminuer en fonction du service du personnel). 6 hommes - chef d'agrès – l’équipe de trois hommes - conducteur – radio. J'ai occupé sur cet engin tous les postes sauf conducteur. J'ai commencé comme servant ou radio, mais rapidement au bout d’un an de service, je me suis retrouvé chef d'équipe grâce à mes compétences. J’avoue que lorsque j'ai réussi le concours d'admissibilité au grade de sous-officier en 1974, j'avais trois ans et demi de service. J'étais factionnaire. Le quartier-maitre d'aubette m'avait cherché des noises tout la journée. Je lui avais dit : « À ta place je ne ferais pas ça ». Le commandant revenant de l'état-major m’a demandé ce que je faisais comme factionnaire étant donné que j'étais gradé. Je me suis retrouvé chef d'agrès au premier secours : j'étais fier et heureux. - 56 -
J'ai fait de belles interventions, mais j'ai toujours demandé des renforts lorsque je jugeais que la situation était grave.
Véhicule sans eau en arrivant : la première chose à faire était de s'alimenter en eau sur des bouches à incendie. La connaissance de leurs emplacement était très importante, j'ai toujours voulu effectuer des rondes de bouches (contrôle des BI et PI). Armement 1970 : 12 hommes. Chef de garde – sous-officiers Attaque – sous-officier d'alimentation - deux équipes de trois hommes - liaison - radio conducteur.
Fourgon Pompe 4 Sur le Fourgon pompe d'une intervention pour feux de pharmacie à Saint-Louis, nous étions à 2 km du lieu de l'intervention lorsqu'un grand bruit s'est fait entendre : on venait de casser la boîte à vitesses. Le chef de garde nous a donné le commandement et nous sommes partis en courant avec le matériel rejoindre le lieu de l'incendie (l'armement de l'échelle sur porteur qui nous passait devant a récupéré une partie du matériel). La pharmacie était embrasée nous avons mis en place des lances à incendie et éteint le feu.
ESP (échelle sur porteur) EMP (échelle mécanique automatique) - 57 -
Quatre hommes - chef - sous-chef - servant – conducteur.
Echelle sur porteur
Je m'étais spécialisé dans la maîtrise de l'échelle sur porteur on faisait des concours en caserne. On désignait un point sur un bâtiment et dans un temps record on devait mettre en place l'échelle pile devant ce point. Lors d'une nuit particulièrement agitée il y où avait des feux dans toute la ville, nous nous sommes retrouvés vers 4 h 00 du matin à la Belle de Mai pour un feu de maison. Il fallait atteindre une toute petite fenêtre à 15 m de hauteur. J’ai effectué la manœuvre dans un temps record, nous avons pu sauver une personne âgée que j'ai redescendue sur mes épaules. Les engins feux de forêts Saxo (jeep de commandement), léger (jeep avec 300 litres d'eau), moyen (camion 600 litres) lourd (camion 3000 litres) Il y avait deux générales (ensemble d'engins) feux de forêts la rouge premier départ ,et la verte constituée de véhicules de la sécurité civile qui assurait le renfort lors de feux important.
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Les véhicules de secours aux blessés VSAB (ambulance) VRM (médecin)
VSAB (Ambulance) Chef d'agrès - deux secouristes - conducteur. Dès 1972 j'ai pris les fonctions de chef au VSAB. Nous faisions des interventions dans toute la ville, cela m'a permis de bien connaître toutes les rues de Marseille. Lorsque l'état de la victime le nécessitait, nous faisions appel au médecin de garde qui se déplaçait avec une VRM. Les engins spéciaux FPD (fourgon-pompe dévidoir avec 2000 mètres de tuyaux et un monitor (canon à eau). Lorsque nous partions avec cet engin, nous savions que le feu était très important. Il m'est souvent arrivé de mettre en œuvre ce canon à eau très puissant et je peux dire que l'on faisait un travail énorme.
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MGP (camion mousse pour les feux d'hydrocarbures) 1000 litres de produits. L'ensemble Mousse Grande Puissance spéciale pour les feux d'hydrocarbure se composait du FPD - MGP
Le PGP (poudre grande puissance) C'est un gros extincteur à poudre sur roue avec une cuve de 2000 kg de poudre. J'ai failli l'utiliser en intervention une fois. Nous étions partis en renfort de Saint-Antoine pour un feu de camion-citerne sur l'autoroute j'avais avec moi un VFR, deux engins-citernes et le PGP. Sur les lieux, le camion-citerne était en feu, les pompiers sur place avaient établi des lances à mousse. À Saint-Antoine le chef était Michel (un camarade qui nous a quittés depuis). J’ai pris la direction des secours et j’ai dit au PGP de ne pas intervenir. Arrive sur place un jeune lieutenant qui décide de faire intervenir le PGP ; je lui explique que cela ne sert à rien, mais il insiste.
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Je lui signale que percuter le PGP (mettre en route l'extincteur) nous coûterait très cher et il ne serait pas efficace, mais il donne l'ordre de le faire. Je lui demande de me l'écrire sur un papier que je lui donne. Il refuse ; alors je décide de ne pas exécuter cet ordre, il me menace des pires sanctions. Arrive le commandant en second du bataillon avec mon capitaine de compagnie. Il leur dit mon refus. Je livre mes explications à mon capitaine qui me donne raison (dans l'oreille il me dit que si j’avais percuté le PGP, c’aurait été ma fête). Le lieutenant se fait réprimander et on lui dit de faire confiance au jugement des anciens. Tout le long de ma carrière, je suis monté sur ces engins en passant d'un poste à l'autre en fonction de mes grades successifs. Le seul poste que je n'ai pas occupé est celui de conducteur. Dans la vie d'un marin-pompier, le poste suprême est celui de chef de garde au FP, poste que j'ai occupé de 1990 à 1997. Les interventions importantes Sur l'ensemble de ma carrière, j'ai été appelé à intervenir sur tous les types d'interventions : Feux de ville - feux de forêts - feux d'entrepôts - feux de dépôt pétrolier - feux de bateaux Premier feu Ma première intervention a eu lieu le vendredi 12 février 1971. J'étais apprenti et on armé les véhicules incendie. L'alerte était feux d'entrepôts établissement Berger.
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Feux de bateau Mon premier feu de bateau a été sur L'Anneker un navire céréalier. Je n'ai que de vagues souvenirs de cette intervention. Par contre je vais vous raconter mon intervention sur le navire Concokondis, un pétrolier grec (je ne suis pas très sûr de l’exactitude du nom). Nous recevons l'alerte vers 11 h 00 : feu de pétrolier. Adresse : môle Léon Gouret à Lavéra (à côté de Martigues) Je suis sur l'ensemble « Mousse grande puissance » (Le FPD et le GPP). Le chef du MGP où je me trouve entre en furie dans la cabine et nous annonce l'alerte feu de navire à l'Estaque. Nous démarrons et commençons à suivre le véhicule FPD qui prend l'autoroute (le conducteur demande au chef pour quelle raison on prend l'autoroute si on va à l'Estaque). Le chef nous a caché qu'il n'a pas pris le message d'alerte, il l’a lu par-dessus l'épaule du standardiste, il est parti tout de suite en camion. Il commençait à s'inquiéter, car le FPD allait de plus en plus vite et à cette époque il n'y avait pas de radio sur les tous les véhicules. L'adresse exacte était Lavéra un port pétrolier à côté de Martigues. Arrivés sur place, nous voyons que le pétrolier a été amené au large, car il risquait une explosion. Nous avons embarqué sur des pilotines. Il y avait des vagues de 6 m de haut, nous n’avions qu'une envie : arriver sur le bateau. Nous étions à 150 m de celui-ci quand le château a explosé. Pour accéder sur le pont principal, nous sommes passés par le bateau-pompe le Louis Collet. Sur place nous avons travaillé avec le personnel du bateau-pompe et réussi à éteindre l’incendie.
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Premiers feux de forêts Septèmes-les-Vallons. Le feu a brûlé 15 hectares. Il est parti de Septèmes, nous l’avons arrêté au Merlan (3 km). Poste : servant à la citerne de 8000 litres. Normalement notre rôle était de ravitailler les engins d'incendie. Pour cette intervention nous avons été bloqués sur un chemin. Le feu se dirigeait sur nous, le chef QM Paul a fait mettre la citerne dans un virage. Nous avons établi deux petites lances (45) et nous nous sommes protégés. Le chef de l'engin a souligné en rentrant le cran que j'avais eu lors de ce passage assez virulent. Par la suite nous combattrons des feux de forêts de toutes natures. Une anecdote sur un feu adresse : route de la télévision à Septème les Vallons En 1975 nous nous dirigions vers le haut de la vallée. J'ai vu que nous n’arriverions jamais avant le feu. J'ai arrêté mon Moyen (engin feux de foret ) dans un virage, nous avons juste eu le temps d'établir une lance à incendie, le feu se trouvait déjà sur nous. Le conducteur a été brûlé au bras. Un de mes jeunes s'échappait dans la colline, je l'ai rattrapé et jeté sous le camion. Avec la lance, nous nous sommes protégés, mais le camion a brûlé sur les côtés et la cabine aussi. Dès que j'ai pu, j'ai embarqué tout le monde sur le Moyen et sorti le véhicule du feu. En route j'ai récupéré le commandant de Plombières qui errait après s'être perdu. Le commandant m’a félicité pour mon action. Je lui ai dit que je n'avais pas le permis poids lourd Pour me remercier, il m'a inscrit au permis que j'ai obtenu.
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Premiers grands feux Lorsque je parle de grands feux, je pense surtout à des feux d'entrepôts. J'ai participé à plusieurs. Un des plus marquants restera la minoterie de Bougainville.
Feux de Minoterie 'je suis sur la grande échelle Nous sommes arrivés sur place : tout l'intérieur du bâtiment était en feu nous avons établi plusieurs grosses lances, nous avons demandé des renforts et ce sont trois casernes de pompiers qui sont arrivées à notre secours.
La carrière De ma rentrée au sein des marins-pompiers à mon départ en 2002, j'ai toujours eu des examens, des concours à passer, soit pour me perfectionner soit pour monter en grade. La carrière de pompier est en trois étapes : Le brevet élémentaire ; Le brevet supérieur ; Le brevet de maîtrise (ultime sommet qui nous amène aux fonctions d'officier de garde dans une caserne et c'est le rêve de tout marin-pompier.) Pour en arriver là, il faut avoir des bonnes connaissances en mathématiques et en français. - 64 -
Les mathématiques Dès mon enfance, j'ai su que j'étais doué pour les maths. À l'école j'étais toujours le premier et je faisais les calculs de tête avant le maître. C'est au BMP que j'ai perfectionné ce don : je comptais toutes les marches, les faïences sur les murs. Lorsqu’on a une oreille qui siffle, on doit dire un chiffre, trouver la lettre correspondante en divisant ce chiffre par 26 (le nombre de lettres de l'alphabet). Je me suis mis à apprendre la table de multiplication de 26 et je la savais par cœur. Pour passer au grade de sous-officier, il fallait savoir l'algèbre et je n'avais pas fait ma sixième. J'ai trouvé un apprenti pompier Philippe Janin qui était très fort sur ce sujet. Il m’a donné des cours et en un mois je maîtrisais cette matière et lors de l'examen écrit j’ai fini premier en math avec 20 sur 20. Les maths m’ont beaucoup servi lors de mes examens futurs ; Je me perfectionnais mentalement et j'étais capable d'effectuer mentalement des opérations, multiplications de deux chiffres par deux allant jusqu'à des multiplications de cinq chiffres par cinq chiffres. Pour les divisions, je faisais des concours en classe avec mes camarades : je leur proposais une division de 12 chiffres par 26, moi mentalement et eux avec leurs calculatrices. Je gagnais toujours, car les calculatrices n'avaient que 8 voire 10 chiffres affichés. J'arrivais même à effectuer mentalement des racines carrées de 10 chiffres. Dans le métier de pompier, il y a une matière importante lors de tous les examens c'est l’hydraulique. L'énergie hydraulique est fournie par le mouvement de l'eau, sous toutes ses formes.
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La mémoire Je me suis aperçu très vite que j'avais une très bonne mémoire : à l'école primaire je retenais très bien les leçons : l'histoire, la science, la géographie, les récitations. Cela m’a servi pour tous les examens que j'ai passés : j'avais la faculté d'apprendre rapidement – 15 minutes pour une leçon – j'avais de très bonnes notes en physique nucléaire, électricité, mécanique des forces alors que cela ne plaisait pas. Je me souvenais de plus de cent numéros de téléphone, je mémorisais une carte graphique. Lors de mon brevet élémentaire, j'ai appris toutes les manœuvres du pompier par cœur. J'étais matelot et lors d'une manœuvre de la garde du matin (la manœuvre du jour était inscrite au tableau d'instruction ) l’officier de garde m’a demandé quelle manœuvre on avait ce matin-là. Je ne savais pas, il a commencé à s'énerver et je lui ai répondu que je n'avais pas besoin de regarder le tableau, car je savais tout par cœur. Après l'exercice il m’a questionné avec son adjoint pendant 30 minutes. À la fin ils se sont regardés et ont dit : « Effectivement il sait tout. » Après ce jour j'ai eu des postes de feux de plus en plus importants. Affectations Je suis entré à l'école des marins-pompiers de Plombières le 2 novembre 1970. Je suivais le cours de brevet élémentaire des marins-pompiers pendant six mois. À la suite de ce cours j'ai été affecté à la caserne de Plombières. Je suis resté dans cette caserne jusqu'au mois de septembre 1975, date à laquelle j'ai rejoint pour une durée de six mois la caserne de la Madrague, caserne portuaire. Cela m’a permis de connaître le port de Marseille, ce qui est très important lors d'interventions.
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Je suis retourné à Plombières en février 1976. Au mois de juin de cette année j'ai présenté le concours pour accéder au brevet supérieur de marin-pompier. Je me suis classé 12ème sur 200 candidats. Le BS (le brevet supérieur nous amène l'échelle de solde 4) Cours à l'école de Saint-Pierre du 1er septembre 1976 au 26 février 1977. Je suis retourné à la caserne de Plombières. En 1980 j'ai rallié le poste de Saint-Antoine où j'ai pris les fonctions de chef de poste en remplacement du chef qui était en maladie. J'ai gardé cette fonction jusqu'au mois de mai 1981. Au mois d'octobre de cette année, j'ai été affecté à la caserne de Strasbourg. Sachant que j'irais au brevet de maîtrise en 1990, j'ai demandé après la célébration du Cinquantenaire des marins pompiers à être affecté à la caserne d'Endoume. De cette manière après mon cours je pourrais revenir à Plombières. En février 1990, j'ai rejoint le cours de brevet de maîtrise des marins-pompiers qui donne accès aux fonctions d'officier de garde dans une caserne ; ce cours dure 4 mois. Au mois de juin après l’obtention de ce brevet, j'ai rejoint la caserne de Plombières où j’ai rempli les fonctions de chef de garde. En mars 1997 j'ai rejoint l'équipe informatique du BMP comme adjoint au chef de service informatique du bataillon de marinspompiers. Le jour du 11 septembre 2001 (date des attentats de New York) j'ai signé ma demande de mise à la retraite. Le 30 novembre 2001 j'ai quitté le bataillon, ma retraite a été effective le 1er juillet 2002.
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Grade 1970 Apprenti 1971 Matelot 1971 Quartier-maître de 1ère classe (d’office après un an de service) 1974 Quartier-maître admissible (sur concours) 1977 Second maître 1979 Maître 1984 Premier maître 1991 Maître principal (avec le brevet de maîtrise)
Diplômes 1971 Brevet élémentaire de marin-pompier 1972 Brevet de secourisme - Réanimation 1972 Initiation Risques technologiques 1972 Équipiers Sauvetage Déblaiement 1973 Brevet Secourisme routier 1975 Chef d’équipe Sauvetage Déblaiement 1976 Brevet supérieur de Marin Pompier 1977 Moniteur Secourisme 1977 Moniteur Secourisme routier 1978 Chef de Section Sauvetage Déblaiement 1983 Brevet de prévention Chaptal Paris 1983 Brevet de pédagogue (enseignant) 1984 Brevet supérieur de sécurité (Cherbourg) 1985 Brevet officier sapeur-pompier volontaire 1989 Brevet Chef de section feux de forêt 1990 Brevet de maîtrise marins-pompiers 1992 Brevet Feux de navires
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Fonctions 1970 – 1971 Matelot Équipier sur tous les engins. 1971 - 1974 Quartier-maître de 1ère classe Chef d’équipe engins d’incendie Premier secours Fourgon-pompe 1er chef – 2ème chef Échelle sur porteur chef Échelle mécanique chef VSAB (ambulance) chef FC (feux de cheminée) chef Chef engins feux de forêt 1974 - 1979 Quartier-maître admissible second-maître Chef d’agrès Premier secours Chef d’agrès Fourgon-pompe Sous-officier Alimentation Échelle 45 m Chef d’agrès Chef de détachement feux de forêt (trois engins) 1979 -1990 Maître - 1er maître Chef d'agrès – sous-officier Attaque Chef d'engins spéciaux Chef de DIP (détachement préventif feux de forêts) 1990 - 2001 Chef de garde Chef de colonne (feux de forêt) Officier renseignement
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5 - Le Club CinĂŠma
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Depuis mon enfance je suis passionné de cinéma, en 1972 je m'occupais du comptoir des ventes de la caserne de Plombières. Dans la réserve à matériel, il y avait un projecteur cinéma 16 mm en bon état.
Avec deux camarades nous avons décidé de le faire fonctionner. Il y avait deux vieux films noir et blanc des années 1950. Il m’est venu l'idée de rechercher un endroit où l'on pourrait récupérer des films. La caserne du Muy abritait le service cinématographique des armées. J’ai pris contact avec le responsable qui m’a répondu que c'était avec plaisir qu'il nous prêterait des films assez récents. Deux problèmes restaient à régler : la salle de cinéma et le projectionniste. Pour la salle, les autorités de la caserne ont mis à notre disposition un local assez grand qui servait aux archives. Nous l'avons réaménagé avec des chaises pliantes, l'écran était fait avec des draps blancs. Le projectionniste devait obtenir le certificat dans une école militaire de Toulon. On a trouvé rapidement deux volontaires qui ont passé ce certificat. Un mois après nous avons ouvert la première salle de cinéma dans une caserne. La liste de films étant assez limitée, j'ai trouvé une société en qui louait d’encore plus récents et pour une somme modique. Je décidais de créer le premier club cinéma du BMP Marseille. Nous avons mis à la tête de ce club un gradé très sympa qui était également passionné de cinéma. - 73 -
Notre système de fonctionnement dans la compagnie (48 heures de travail pour 24 de repos). nous a conduits à louer deux films pour la semaine afin que tout le monde puisse les voir. Première mesure sociale : les jeunes matelots étaient exemptés de paiement. Nous avons fixé la cotisation à 5 francs par mois (0.80 centime d'euro). Devant le succès du club, les autorités de la caserne ont mis à disposition l'équipe d'entretien qui nous a fait une vraie salle de cinéma. Entre temps le cinéma Le Capitole (La Canebière) était rénové. La salle a changé ses fauteuils et nous a gracieusement offert les anciens. À cette époque les liens entre casernes étaient inexistants. J’ai pris contact avec la caserne de Saint-Pierre qui venait de créer son club et nous avons réussi à mettre en place un système de prêt qui faisait que pour la somme de 5 francs par mois on pouvait voir 4 films par semaine. Le club cinéma s'est arrêté en 1980. Il s'est transformé en club vidéo.
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6 - Instinct
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J'ai intitulé ce paragraphe l'instinct car dans ma vie j'ai eu la chance grâce à lui d'effectuer des sauvetages de personnes. À deux occasions, j'ai été poussé par une force inconnue qui m’a fait réagir et prendre des décisions. L’instinct est la totalité ou partie héréditaire et innée des comportements, tendances comportementales et mécanismes physiologiques sous-jacents des animaux. Présent sous différentes formes chez toutes les espèces animales, son étude intéresse nombre de sciences : biologie animale (éthologie et phylogénie), psychologie, psychiatrie, anthropologie et philosophie. Chez l'humain, il constitue la nature qui s'oppose traditionnellement au concept de culture. La première fois, elle m’a déroutée d'une intervention pour aller sur une autre. La deuxième, elle m’a conduit à bloquer une personne pour regarder l'enfant qu'elle avait dans les bras. Le tracker Au mois de juillet 1981, j'étais chef d'agrès au FPTL du poste de Saint-Antoine. Vers 15 h 00 alerte pour un ascenseur bloqué à La Viste. En chemin un tracker est passé au-dessus de nous : il partait pour un feu de broussailles au Rove. Lors de notre descente vers la Viste, nous avons entendu une explosion et nous avons aperçu une fumée sur notre droite située à proximité de Saint-André. . Mon instinct me forçait à changer de direction pour me diriger vers cette fumée. J'ai averti l'état-major de ma nouvelle direction en lui expliquant mes doutes sur cette fumée. À notre arrivée sur les lieux, la situation était la suivante : en bordure de la voie ferrée se trouvait la carcasse du tracker en feu. Des badauds regardaient le spectacle. - 77 -
À l'intérieur du cockpit se trouvait encore le pilote. J'ordonnais la mise en place de la lance à incendie et commençais le dégagement du pilote l'opération était très risquée, car il y avait le feu dans le cockpit. J’ai dit à mon chef d'équipe de m'arroser directement pendant l'opération. Avec mon couteau je sectionnais la ceinture de sécurité du pilote. Entre temps l'état-major m'avait envoyé des renforts incendie et médical assez importants. J’ai réussi à soustraire le pilote de son habitacle et l’ai placé à distance de l'incendie. J’ai prévenu les badauds du risque d'explosion du réservoir à carburant de l'avion. Il y a eu comme un départ de 100 m : les gens se sont sauvés à vitesse grande V. Je me suis aperçu par la suite que le réservoir avait était éjecté lorsque l'avion avait percuté le caténaire de la ligne de chemin de fer. Le pilote a été pris en charge par les services médicaux puis transporté à l'hôpital de garde. Pour cette opération j’ai reçu les félicitations du commandant. La petite fille Il était 18 h 00 lorsque nous sommes partis pour un feu d'appartement au 143 rue Félix Pyat, bâtiment A2. Se dirigent également sur nous EPSA PLB - FPT PLB - VRF STB. À notre arrivée une fumée assez importante se dégage du 4ème étage. Je commence à monter dans la cage d'escalier pendant que mon équipe s'occupe sur mon ordre de l'établissement d’une lance. Dans la cage d'escalier, je croise des personnes qui quittent l'immeuble.
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Je pense que c'est mon instinct qui a joué ce soir-là, car lorsque je croise une dame avec un enfant dans les bras, je l'ai arrêtée et j’ai examiné l'enfant. Je me suis aperçu tout de suite que celui-ci ne respirait pas. J’ai récupéré l'enfant et descendu les escaliers pour me diriger vers mon véhicule. C'est à ce moment que sont arrivés les renforts. J'ai expliqué rapidement la situation au chef de garde et demandé l'aide d'un camarade pour pratiquer les premiers soins à l'enfant dans l'espace arrière du FPTL. À deux nous avons pratiqué les premiers soins, moi le bouche à bouche et mon copain un massage cardiaque assez léger et ce, pendant plusieurs minutes. L'ambulance demandée est arrivée sur place. Nous y avons placé l'enfant. Le médecin de garde est arrivé également et a pris en charge les soins. Avec mon camarade nous sommes restés assis dans le fourgon à nous regarder. L'enfant a recommencé à respirer correctement dix minutes après son entrée dans l'ambulance. Pour nous l'attente a duré une éternité, mais les portes de l'ambulance se sont ouvertes et le médecin en nous regardant nous a dit : « Vous l'avez sauvé ! » L’enfant était une petite fille de deux ans. Avec mon copain nous étions fiers d'avoir sauvé cette petite vie. Voilà une journée qui avait commencé d'une façon bizarre mais qui s'est terminée en beauté. Nous avons reçu les félicitations du commandant.
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7 - Interventions particulières
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Grand froid En 1985 Marseille subit une vague de froid assez impressionnante avec des températures en dessous de zéro. En tant que pompier je vais vous raconter une journée assez particulière, avec trois interventions. Tout commence le matin vers 8 h 30 je venais de prendre le service à la caserne de Strasbourg, avec les fonctions de chef d'agrès au FPTL (fourgon-pompe léger). La température extérieure était de -12°. Le lycée Première alerte FPTL STB - EPSA PLB - FPT PLB - VRF STB Feu de classe au lycée Edgard-Quinet, en centre de ville de Marseille. Nous nous dirigeons sur les lieux avec le FPTL une EPSA (échelle mécanique). À notre arrivée, on aperçoit un feu assez important dans une classe. Je demande des renforts à l'état-major et ordonne la mise en place d'une lance d'incendie. C'est là que les ennuis commencent, car lorsqu' on met en place une lance, il y a toujours des fuites d'eau. Autour du camion se crée une patinoire assez importante. Nous arrivons à éteindre le feu, mais l'ensemble des tuyaux est gelé et il est impossible de démonter et ranger notre matériel. Le camion étant arrêté sur une pente, nous avons créé la première patinoire en centre- ville ! Il a fallu plusieurs heures pour rétablir la circulation, on a fait appel au service de salage de la ville.
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La pharmacie Vers 11 h 30 nous partons pour intervenir sur une congère menaçant de tomber au-dessus d'une pharmacie dans le quartier de la Belle de Mai. À notre arrivée le responsable de la pharmacie nous montre une congère de 15 m de haut menaçant sa réserve de matériel. On évalue les risques, je fais évacuer la pharmacie avant l'opération qui devait consister à couper petit à petit la congère en commençant par le haut. Je me trouve à l'extérieur avec le responsable lorsque l'opération commence et je lui dis qu'il n'y a aucun risque et que cela va être assez rapide. Dès que l'échelle se positionne, la congère se décroche et s’écrase sur le toit de la réserve.
Le responsable et moi, nous sommes restés bouche bée. Heureusement il n'y a eu aucun blessé et les dégâts sur la réserve n'étaient pas très importants. Je pense que ce sont les vibrations de l'échelle qui ont provoqué le décrochement de la congère. La leçon : il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir attrapé.
Sortie en ville Au mois de février j'étais de repos. Avec Michèle nous avons décidé d'aller au cinéma L’Ariel situé dans la rue Saint-Ferréol. Le film était Firestarter (un film de Stephen King) une histoire de fille qui a le pouvoir de mettre le feu lorsqu'elle est en colère. Nous avons garé la voiture au centre Bourse et nous sommes allés à pied au cinéma. En sortant du cinéma, nous avons constaté qu’il était tombé plus de 50 cm de neige. Nous avons rejoint la voiture
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et je me suis aperçu que l'on ne pouvait pas circuler, car les routes étaient saturées. Nous avons laissé la voiture et nous sommes rentrés à pied. En arrivant à la maison j'ai appelé Tante pour vérifier que Sébastien se trouvait bien avec elle. Il nous manquait Christophe : après des recherches nous l’avons retrouvé chez mon ami Henry. Vers 20 h 00 le gradé de garde à la caserne m’a appelé en renfort, car c'était la panique en ville. À mon arrivée j'ai organisé la distribution de couvertures et de nourriture pour les personnes qui était bloquées sur le pont de l'autoroute. Pendant trois jours Marseille s'est retrouvée bloquée par la neige. Nos déplacements se sont faits à pied. Pour l'anecdote : vers 23 h 00, nous nous trouvions devant la caserne lorsque nous avons entendu un bruit de dérapage. Nous nous sommes dirigés vers ce bruit : une personne avec une belle Mercedes blanche avait raté le virage devant la caserne et avait réussi à immobiliser sa voiture sans une éraflure. Nous la félicitions quand un autre dérapage a eu lieu et un camion a percuté la voiture. Il était 2 h 00 du matin lorsque je suis allé chercher ma voiture. J'ai enlevé la neige et je suis rentré tranquillement à la maison.
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Un lieu sous la terre Au mois de septembre 1979 nous sommes réquisitionnés par les services de police pour une intervention assez délicate . Récupérer un corps dans les galeries de mines de Gardanne. Il se trouve à 80 mètres sous terre. La section « Sauvetage déblaiement » intervient avec deux équipes. Une à l'entrée des mines au 80 chemin de Saint Joseph. L'autre 4 km plus loin vers un puit d'aération situé au abord du bassin de la Batarelle. Nous sommes habitués à remplir les missions les plus diverses mais celle qui a été confiée la dernière semaine de septembre à la section opérationnelle spécialisée « Sauvetage – Déblaiement » est assez extraordinaire. II s'agissait d'aller chercher à plus de 300 mètres sous terre le corps d'un mauvais garçon tué au cours d'un holdup. Fort heureusement les taupes n'avaient pas à creuser la galerie, elle existait déjà : c'est en effet dans le puits d'aération de la Mure, dans le tunnel de Gardanne que des complices avaient jeté la dépouille encombrante. Ce tunnel de quatorze kilomètres, qui n'est plus exploité, relie les mines de Gardanne au port ; creusé au siècle dernier il est tout d'un trait à l'exception d'un coude dû à une erreur de visée des équipes de mineurs qui l'ont creusé en descendant de Gardanne ou en montant de Marseille
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L'opération précédée d'une reconnaissance a été effectuée le 24 septembre 1979. Cette promenade commence par une descente de 80 mètres en ascenseur au puits St-Joseph ; un guide des Houillères de Provence nous accompagne non que nous risquions de nous tromper de chemin, mais enfin ! Les premiers 800 mètres sont entretenus et éclairés par le service des eaux qui dispose là d'une alimentation de secours de la Ville en pompant les eaux d'infiltration, puis soudain on se retrouve dans une ambiance à la Jules Verne, si ce n’est les supports de caténaires qui servaient au petit train d'évacuation du charbon. Nous pataugeons dans l'eau qui ruisselle de partout parfois en véritables sources. Des stalactites et des stalagmites décorent les parois et le sol. Si une grande taille est parfois avantageuse en l'occurrence, là, elle ne l'est pas, et le bruit mat des casques frappant le plafond ponctue notre avance. Quatre kilomètres sous terre de -80 à -325 mètres, c’est une expérience. À la hauteur du puits St-Joseph une galerie à gauche mène à son aplomb une toute petite tache de lumière en haut d'un grand tunnel nous rappelle l'existence du ciel. Après trois heures de marche tantôt debout, tantôt courbé suivant la hauteur du tunnel nous arrivons à l'emplacement du corps.
Le sol est couvert de gravats et d'objets variés : du scooter à la vieille bassine, et dans un coin gît le corps de l'infortuné gangster desséché par les ans. Le retrouver a permis d'inculper ses complices de recel de cadavre. I l y a des choses bien curieuses dans la vie.
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Castors Isabella Au cours de l'été 1972 j'étais chef d'agrès sur un engin « Feux de forêt (un moyen :2000 l d'eau). Vers 15 h 00 on part avec un détachement pour un feu de forêt aux Castors Isabella (Septèmes-les-Vallons). J'ai avec moi un conducteur et deux hommes. Les Castors Isabella sont un lotissement en construction à hauteur de l’embranchement des autoroutes A7 et A51. À notre arrivée sur les lieux, le feu couvre tout le bas de la zone boisée près des maisons. Le chef de détachement me désigne un emplacement avec mission de protéger une maison. Je fais placer mon engin incendie sur le côté et nous mettons en place une lance à incendie. Nous plaçons dans la maison le propriétaire et ses enfants pour les protéger. Nous contrôlons le feu qui arrive sur nous et je pense à ce moment-là que la partie est gagnée. Ce que je ne sais pas, c'est que le propriétaire a fait placer une citerne de 1000 l de gaz propane.
Avec le dégagement de chaleur, la citerne a implosé communiquant l'incendie à toute la zone autour de nous. Le souffle a déplacé le camion incendie de plusieurs mètres. Le conducteur du véhicule a été légèrement brûlé, nous nous sommes mis à l’abri, avec lui et mes deux pompiers sous le camion car le feu était virulent tout autour et sur le camion. Avec la lance à incendie nous avons réussi à nous protéger mais le camion a en partie brûlé. Le chef de détachement a immédiatement envoyé deux camions pour nous aider. Le propriétaire nous a dit avoir l'emplacement de cette citerne.
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oublié de nous signaler
Le Frigo
Lettre de fĂŠlicitations du Commandant
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Le frigo Par cette histoire je vais vous conter les méfaits d'un mauvais renseignement. Nous sommes un dimanche je suis chef de poste à Saint-Antoine Vers 13 h 00 nous prenons une alerte pour inondation au Groupe La Martine. Nous arrivons sur les lieux et constatons qu'au bâtiment B une quantité d’eau importante passe sous la porte d'un appartement du RDC. Une personne se présente comme étant la fille de la locataire. Nous lui disons que nous allons forcer la porte. Elle nous informe que l'on peut passer par une petite fenêtre se trouvant dans la cuisine et nous donne l'accord pour briser la vitre. Je fais placer l'échelle je monte casse la vitre et pénètre dans la cuisine. La fille me dit : « Vous verrez, le frigo est orange. » Il était blanc L'angoisse me prend. J'entends du bruit provenant de la pièce d'à côté, j'ouvre la porte et me trouve dans une salle à manger en présence d'un repas de famille Imaginez la tête des gens qui mangent tranquillement et voient entrer un pompier venu de la cuisine. Imaginez également ma tête à moi ! La conclusion de cette histoire : les propriétaires de l'appartement étaient très sympathiques, la fille a pris en charge le remplacement de la vitre et sa mère est arrivée : elle était au premier étage chez une amie.
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8 - Les Sainte- Barbe
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En 1981 j'étais affecté à la caserne de Strasbourg pour la fête de la Sainte-barbe (fête des pompiers). Un spectacle a été organisé dans le garage. Pour l'année 1982, j’ai soumis l'idée d'organiser un défilé dans le quartier. Le thème choisi était Astérix le Gaulois. J’ai réussi à trouver les costumes (auprès de la société Aristide Boyer qui louait des costumes) le responsable avait été transporté par nous-mêmes lors d'un accident de la circulation : il m’a m'ouvert les portes de son entreprise ; dès lors j’ai pu pour chaque spectacle avoir tous les costumes souhaités. Pour ce défilé j’ai fait appel à des paysans chez qui nous étions intervenus pour remettre sur pieds une jument de 1200 kg tombée dans un fossé. Ils m’ont aidé bénévolement. Au cours des années suivantes, j’ai été chargé de l'organisation du spectacle et du défilé, je m'occupais également de l'arbre de Noël. ANNÉE
THÈME
1982
ASTERIX LE GAULOIS
1983
NAPOLÉON
1984
LA RENAISSANCE
1985
BELLE ÉPOQUE
1986
LE MOYEN ÂGE
1987
LES INCORRUCTIBLES
1988
LA RÉVOLUTION
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Défilés Astérix - Napoléon - Moyen âge Voilà un aperçu des défilés, des spectacles et des arbres Noël que nous avons organisés pour les Sainte-barbe. Comment organiser ces événements ? Avec beaucoup de connaissances ! Maquillage École d'esthétique Suzanne Lacombe. Pour chaque spectacle je les voyais un mois à l'avance et leur expliquais ma demande. Chaque maquillage était effectué par les élèves de l'école, et il était noté comme travaux pratiques. Pour le maquillage de Thriller, la préparation prenait une heure pour chaque personnage.
Costumes Maison Aristide Boyer Comme je l’ai dit plus haut, Aristide Boyer avait été transporté par les marins-pompiers après un accident et avait une forte reconnaissance envers nous. Lorsque je les ai rencontrés la première fois, son frère ne voulait pas travailler avec nous : c'est lui qui nous a imposés.
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Je passais les voir avec mes idées, nous nous mettions d'accord sur le nombre de costumes Nous ne payions que le nettoyage. Chorégraphie La sœur d'un pompier était chorégraphe, je l'ai rencontrée et le courant est passé entre nous. Marie-Jo réglait toutes les chorégraphies. Nous nous voyions au mois de septembre. Je parlais de mon projet, elle réfléchissait et nous décidions ensemble la chorégraphie sur les musiques que j'avais choisies. Elle définissait le type de danse voulue, je désignais les camarades qui devaient accomplir la prestation et l'on passait aux répétitions. Une année, une chanson de Stéphane Eicher Combien de temps : il y a au démarrage de la chanson un morceau de musique classique. Je suis passé à l'Opéra où j'ai rencontré, Monsieur Pedro Consuegra (maitre de Ballet à l'Opéra de Marseille). Je lui ai expliqué mon idée. Il a été d'accord pour nous préparer une chorégraphie. J’ai rencontré une personne très humaine d'une grande gentillesse. Pendant un mois nous sommes allés le chercher à l'Opéra, il faisait travailler les pas de danse aux pompiers. Mon seul regret : à cette époque on ne filmait pas. Dommage on aurait eu des images magnifiques !. Nous avons été les précurseurs des spectacles des Enfoirés pour Les Restos du cœur. Sur une chanson j'inventais une chorégraphie et mes amis la réalisaient. Elle règlera la chorégraphie pour le spectacle de la flamme olympique en 1992. - 95 -
Après le Cinquantenaire, le commandant m'avait désigné pour m'occuper du SEDOS (service développement des œuvres sociales) car la ville de Marseille ne voulait plus organiser le spectacle de l'arbre de Noël des marins-pompiers. Je me suis dit : « Et si nous le préparions nous-mêmes ? » J’ai lancé le projet et prévenu Marie-Jo, toujours partante. Je voulais proposer à nouveau le spectacle réalisé en 1984 avec Sébastien, La Fugue du Petit Poucet. J'allais voir le responsable de l'Opéra de Marseille pour pouvoir utiliser la salle pour notre arbre de Noël il accepta avec plaisir.
J'avais sur scène une quinzaine de participants dont dix enfants. Nous avons répété pendant un mois, d'abord à la caserne, ensuite au Théâtre du Merlan.
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Le spectacle a fonctionné à merveille ; j'avais un budget assez important ; j'organisais les déplacements pour les répétitions, toujours suivies d'un goûter au Quick de Carrefour : les enfants étaient ravis. J’ai fait en sorte que chaque enfant ait un beau cadeau à la fin du spectacle (Walkman - Lecteur CD)
Par la suite j'ai même organisé un défilé de mode pour la directrice de l'école Suzanne Lacombe. Mes contacts avec les gens du cinéma m'ont fait rencontrer le responsable du Capitole à Marseille avec qui j'ai organisé l'avantpremière du film Les Incorruptibles avec Sean Connery. J'avais aussi trouvé un club avec des voitures des années 1920 : il y a eu un défilé sur La Canebière. Je les ai également retenues pour un défilé de la Sainte-barbe et pour le défilé de mode. Plus tard j'ai organisé l'avant-première du film Le Parrain III.
En 1991 l'amicale des marins-pompiers a fait éditer un calendrier. Le commandant du bataillon m’a convoqué et m’a demandé de préparer celui de l'année 1992. J’ai trouvé l'idée de faire des photos des pompiers avec les célébrités de la ville de Marseille. L'Olympique de Marseille - 97 -
Franck Fernandel Zizi Jeanmaire et Rolland Petit (les ballets de Marseille) Marcel Maréchal (Théâtre de La Criée) Guy Forget (tennisman) Jacques Maillol (plongeur) Pour éviter des problèmes juridiques avec l'OM, j'ai fait signer à Monsieur Berne (dirigeant de l'OM) une autorisation d'utilisation des photos. Pour l'année 1993, nous avons pris comme thème les capitales d'Europe.
Calendrier 1992 Les sommes récoltées par ce premier calendrier ont dépassé 500 000 fr (80 000 €). J’ai fait en sorte qu'une grande partie soit donnée à chaque caserne pour le bien-être du personnel. Pour le reste nous avons mis en place un système de location de studios à la neige avec une société de Pra-loup : chaque famille pouvait louer un studio pour une semaine - 98 -
pour la somme de 50 fr (8 €). Nous avons récupéré deux appartements dans les îles du Frioul, nous les avons aménagés (télévision, chauffage, tout le confort) et nous les louions au personnel. Nous avons organisé des voyages pour les enfants dans les parcs Eurodisney et Astérix, au Futuroscope. Chaque fois tout était gratuit (transport, logement et entrées). J'avais trouvé un client à Pra-loup qui voulait un logiciel de gestion : je le lui ai conçu j'ai négocié avec lui. En échange nous avons eu la location de studios pour une misère pendant quatre ans.
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9 - Commandant Paul Brutus
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Le 14 février 1989, je m'occupais à préparer les manifestations du Cinquantenaire des marins-pompiers de Marseille. Vers 10 h 00 un feu de forêt s'est déclaré aux Pennes-Mirabeau. Le BMP est parti en renfort des sapeurs-pompiers. Sur cette intervention un marin-pompier le capitaine de corvette Paul Brutus a perdu la vie. Vers 14 h 00 j'étais convoqué dans le bureau du commandant en second qui m’a désigné pour récupérer le corps du capitaine. J'ai pris contact avec les pompes funèbres de la ville qui devait nous fournir un véhicule avec du personnel et un cercueil. J'ai rejoint le service de la ville et en convoi nous nous sommes dirigés vers le lieu où se trouvait le corps. Arrivés sur place nous nous sommes aperçus que le corps, très gravement brûlé avait pris la forme d’un fœtus avec les jambes repliées et de ce fait ne pouvait pas rentrer dans le cercueil. J'en ai fait part au commandant en lui demandant l'autorisation de ligoter le corps avec un cordage, il m'a donné le feu vert. Nous avons pu placer le corps dans le cercueil. Ma deuxième mission était de rapatrier le cercueil à la caserne de la Grande Bigue (caserne portuaire). J'ai contacté la fleuriste que nous avions choisie pour les festivités du Cinquantenaire en lui demandant de préparer une chapelle ardente sur place. Elle devait se mettre en rapport avec le capitaine d'armes de la caserne. Notre problème essentiel était d'avoir l'autorisation de transporter le corps des Pennes-Mirabeau (commune du décès) à la caserne de Marseille. Un commissaire de police et un capitaine de gendarmerie se sont rendus sur place pour nous donner les autorisations nécessaires. Il
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a fallu que le commandant fasse intervenir le préfet pour avoir les autorisations rapidement. La consigne (de la police) était de fermer le cercueil alors que celle de mon commandant était de garder le cercueil ouvert. J’ai pris la décision de le fermer en présence de la police. Lorsque l'on a été proche de la caserne, j'ai fait arrêter le convoi et l'on a pu rouvrir le cercueil. Sur place le personnel de la caserne de la Bigue s’est occupé de transporter le corps du commandant vers la chapelle ardente. Vers 18 h 00 le commandant du BMP accompagné de Madame Brutus est arrivé sur place. L'épouse a demandé à voir le corps de son mari (j'ai pris à part le commandant pour lui expliquer l’état dans lequel se trouvait le corps). Le commandant a prévenu Madame Brutus. Nous nous sommes retrouvés à quatre dans la chapelle, Madame Brutus, le commandant, le capitaine d'armes de la caserne et moimême. Une fois le cercueil ouvert Madame Brutus a touché le corps elle a dit : « C’est mon mari vous pouvez refermer le cercueil. » En écrivant ces mots la peine m'envahit en pensant à Paul que je connaissais bien. Après mon départ de la caserne, je me suis mis à pleurer mon ami. Pour cette pénible mission, j'étais accompagné par le major adjoint du CSI. Celui-ci est resté dans la voiture et ne s'est occupé de rien. Le commandant voyant qu'il n'y avait que moi qui lui téléphonais m’a demandé pour quelle raison ce n'était pas le Major je lui ai dit la vérité, nous n’en avons jamais reparlé. - 104 -
Stèle du Commandant Paul BRUTUS Le lendemain le mercredi 15 février 1989 une commission a été désignée pour préparer les obsèques du commandant Brutus. Le commandant m’a fait appeler pour que j'y participe. J’ai soumis l'idée de la mise en place d'un service d'ordre avec un major à sa tête. Dans l'après-midi il y a eu la catastrophe de l'immeuble des Têtes à Toulon et je suis parti avec le détachement de Sauvetage Déblaiement.
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10 - la Flamme olympique
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Au mois de décembre 1991, je lis dans le journal Le Provençal un article sur le déplacement de la flamme olympique de la Grèce vers Albertville. Dans cet article il est dit que la Poste sera responsable de l'organisation du transport de la flamme. Je me rends directement au siège pour rencontrer la responsable pour les Bouches-du-Rhône. J'arrive à obtenir un rendez-vous avec cette personne et lui propose la chose suivante : les pompiers des Bouches-du-Rhône ouvriront la route de la flamme, dans tout le département avec les corps des sapeurspompiers et des marins-pompiers. Mon idée est acceptée tout de suite. Je lui explique que je monte le dossier et nous nous revoyons pour une réunion avec tous les participants. À ma rentrée en caserne je vais voir le commandant en lui présentant mon projet. Il est également d'accord. Il ne me reste que plus qu'à voir l'inspecteur départemental des services incendie.
Arrivée de la Flamme Olympique à Marseille
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Mon projet Faire ouvrir la route de la flamme par l'ensemble des corps de pompiers des Bouches-du-Rhône. Organiser des points de manifestation pour les enfants dans le centre de Marseille (animations et jeux sous l'égide des MP) Mettre en place un spectacle de danse par 150 enfants des écoles de danse de Marseille. Mettre en place une haie d'honneur composée des enfants des écoles pour l'arrivée de la flamme. Je vais voir l'IDSI des Bouches-du-Rhône (nous nous connaissons depuis plus de 15 ans), pour organiser cette manifestation. Lors de cette réunion, je fais désigner un officier avec lequel j'ai des affinités pour coordonner l'action des sapeurs. Parcours de la flamme olympique La flamme est arrivée dans les Bouches-du-Rhône le mercredi 29 janvier 1992 à La Ciotat, prise en charge par les sapeurspompiers. Le passage du relais avec les marins-pompiers s'est fait à la sortie de Cassis sur la Gineste. Nous avons parcouru 150 km en deux jours. Le passage de chaque relais entre les corps de sapeurs-pompiers se faisait avec remise du fanion du corps. La flamme nous a quittés à la sortie de Châteaurenard pour rejoindre Avignon dans le Vaucluse. Le soir une grande fête était organisée par la ville de Châteaurenard.
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Pour l'organisation des points d'animations dans le centre, j'ai fait appel à mes camarades en relation avec le service des sports du BMP et de la Ville pour la mise en place des jeux pour les enfants. La poste avait fourni des cadeaux pour les participants. Je pense que le plus difficile à réaliser a été le spectacle de danse des enfants. J’ai pris rendez avec ma chorégraphe et amie Marie-Jo avec qui j'avais monté les Sainte-barbe à la caserne de Strasbourg. Ensemble nous avons choisi une chanson du groupe Queen : The Show must go on.
Nous avons pensé à un groupe de 150 enfants. Pour les trouver nous avons fait appel à plusieurs écoles de danse à Marseille. Chaque fois que je rencontrais une directrice d'école, au départ elle était réticente, mais après explication de mon projet elles ont toutes été volontaires. Une fois l'ensemble du projet accepté, j’ai pris rendez-vous avec la responsable de La Poste pour lui soumettre un budget qu'elle a accepté tout de suite. Je voulais que chaque enfant ait le même survêtement bleu et blanc, couleurs de Marseille. Pour les répétitions de la danse, les cars du BMP effectuaient le ramassage des enfants dans les différents quartiers de la ville. Les répétitions ont eu lieu dans la cour de la caserne de Plombières, elles se terminaient par un goûter servi aux enfants. J'avais pris contact avec le comité olympique responsable de l'arrivée devant la marie : il était ferme sur le déroulement. Aucune source audio en dehors de la source officielle.
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La place devait être libérée de toute manifestation à 15 h 00. Pour la source audio je leur ai fourni une cassette dans le format demandé et ce sont eux qui ont diffusé la musique. Le matin de l'arrivée de la flamme vers 10 h 00 nous avons effectué avec les enfants une répétition. Le responsable ayant vu le spectacle des enfants m’a demandé de déplacer leur prestation de 15 h 00 à 18 h 00 soit une demi-heure avant l'arrivée. Il voulait également former une haie d'honneur avec les enfants pour l'arrivée de la flamme. Le soir l'ensemble de mon équipe était invitée à une grande fête organisée par La Poste. Le lendemain matin, rendez-vous était donné à 7 h 00 devant la mairie pour le départ de la flamme. La première escorte était composée d'une jeep et de deux véhicules lourds. Le trajet nous a menés dans les villes suivantes : Marseille, Le Rove, Châteauneuf-les-Martigues, Martigues, Istres, Miramas, Salon-de-Provence, Châteaurenard. Tout ou long de la route les enfants des villages traversés formaient des haies d'honneur et applaudissaient. Les sapeurs-pompiers des deux départements, les Bouches-duRhône et le Vaucluse, ont symboliquement fait une remise de fanion. Le soir, grande fête organisée par la ville de Châteaurenard.
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11- Tremblement de Terre Italie 1980
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Dimanche 23 novembre 1980 19 h 34
La terre s'est mise à trembler dans la région de Naples. L'ensemble de la région est touché. Le préfet de région minimise le drame et ne demande aucun secours extérieur. Les marins-pompiers de Marseille seront réquisitionnés le 26 novembre, soit trois jours après le séisme. Au mois d'octobre 1980 il y avait eu un tremblement de terre en Algérie dans la région de El-Asnam. Nous avions été mis en alerte. On avait même embarqué le matériel dans l'avion lorsque l’ordre a été annulé. Donc pour l'Italie nous n'y croyions pas trop, surtout que cela faisait déjà trois jours, mais nous avons embarqué le personnel et le matériel à bord d'un Transall (transport militaire) de l'armée française.
Cette fois nous partons... L'avion s'élève lentement et nous berce des vrombissements de ses moteurs. Pour certains des 45 passagers, c'est le baptême de l'air. Le moment des réflexions intimes est arrivé et chacun s'abandonne. Dans deux heures, Naples, but de notre voyage aérien. L'avion vient de se poser en douceur, il roule au sol puis s'immobilise. Qu'allons-nous découvrir en cette terre d'Italie ? Mais le moment n'est plus à la réflexion, déjà il faut s'affairer pour le déchargement. Après une brève réception par le consul de France et par l'attaché de l'Air français au N.A.T.O., nous prenons place dans les cars de la marine italienne et en convoi, avec les camions de matériel, nous quittons Naples pour Avelino, chef-lieu de préfecture.
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Premières opérations Nous voici arrivés au cœur de la zone sinistrée. Dans la caserne où siègent les autorités civiles et militaires, nous réussissons tant bien que mal à avaler notre première ration de combat. Sous le coup de l'émotion et de la tension nerveuse, les responsables italiens sont difficilement abordables. Après maintes démarches et palabres, nous obtenons une escorte et nous pouvons partir vers le village d'Andretta qui nous a été désigné comme lieu d'intervention. Stupeur, ce village est intact et ils n'ont pas besoin de nous. Il faut de nouveau raconter dix fois toute notre histoire. Les Italiens sont très friands de cela, tous se donnent de l'importance, mais les responsables ne sont pas légion. Finalement, par radio et grâce au carabinier qui nous guide, nous recevons la consigne de nous rendre à Lioni à 105 km de Naples. Nous y arrivons vers 21 h. II aura fallu 10 h pour parcourir 105 km. Quel retard supplémentaire ! Malgré la nuit, nous constatons que les destructions sont très importantes et c'est au travers de ruines, sur une route tracée au bulldozer que nous rejoignons le lieu de rassemblement des secours. Le silence règne dans les véhicules, tous sont frappés par cette vision d'apocalypse. II ne faudra pas compter sur un bon lit. Après une ration de guerre ingurgitée, chacun se case comme il le peut pour passer la nuit. II y a trente-six heures que nous n'avons pas dormi. Le jour se lève blafard. II pleut et il fait froid. Après un peu de boissons chaudes, les équipes sont rassemblées et la mission commence. C'est le cinquième jour après la catastrophe, il est bien tard !
Ville de Laviano - 116 -
On est le 28 novembre 1980, le jour de mes 28 ans. Avec mes amis nous avions trouvé une bouteille de cognac que nous comptions vider le soir même. Nous nous trouvions dans le campement lorsque nous avons entendu une femme crier. Nous sommes allés voir cette dame qui racontait que son fils était encore en vie sous les décombres dans le village voisin. Nous sommes partis rapidement avec deux véhicules légers en demandant aux autres de prendre le matériel et de nous suivre dans les camions. La situation sur les lieux était la suivante : un grand cratère avec au fond un trou de un mètre de large. Je suis descendu dans le cratère, attaché à un cordage et me suis rendu près du trou. Je pénétrais lentement dans un tunnel, mais suis ressorti rapidement, car on ne pouvait pas respirer à l'intérieur. Il y avait une forte odeur de chloroforme. À l'intérieur se trouvait un médecin. Il est ressorti et m'a expliqué la situation. Un enfant de huit ans prénommé Pablo était enseveli sous les décombres. Il avait la tête coincée dans une petite armoire, ce qui lui avait permis de rester en vie. J'ai évalué le travail à effectuer. Je suis sorti et j'en ai rendu compte à mon chef de détachement. Il m’a dit qu'il y avait des risques importants d'effondrement. Nous avons décidé que je resterais seul dans le tunnel. Mon premier contact avec Pablo a été assez stressant : il avait peur, son pouls était très rapide sa respiration saccadée. J'ai demandé à notre médecin de me préparer une seringue avec un décontractant et je l’ai administré à Pablo. Il s’est calmé. Je n'ai cessé de lui parler lui racontant mes souvenirs. Il me parlait également. J'ai compris de sa mère que son père était enseveli à proximité de lui sans vie mais cela, je ne le lui ai pas dit et lorsque il a commencé à pouvoir bouger, j'avais masqué - 117 -
avec des décombres le corps de son père. Il n’apprendrait sa mort que plus tard à l'hôpital.
Lionni emplacement de Pablo Je me suis efforcé de le calmer avec des paroles françaises, lui qui ne comprenait que l'italien. Au bout de deux heures j'ai demandé l'aide deux autres sauveteurs afin d'évacuer les décombres. Nous étions trois : deux à l'intérieur, un au début du tunnel qui récupérait les gravats. À un moment donné le corps entier du petit garçon était sorti il n'y avait que sa jambe droite qui était bloquée sous une table en formica. J'ai fait rentrer le médecin du BMP qui lui a donné les premiers soins notamment une perfusion de glucose pour le soutenir. Entre temps la terre a tremblé plusieurs fois. J'ai crié au personnel de faire attention au-dessus en pensant qu'il marchait sur les décombres. Le médecin m’a dit qu'il faudrait amputer l'enfant pour le sortir rapidement. Nous travaillions allongés avec très peu d'espace. J'ai refusé, et avec mon camarade nous avons découpé la table avec une petite scie à métaux cela a duré deux heures. - 118 -
Enfin nous avons pu sortir le petit sous les applaudissements de la foule qui s'était amassée. En sortant, un de mes camarades m’a raconté que lorsque la terre avait tremblé, des immeubles à proximité s’étaient écroulés il m'avaient demandé de sortir mais j'avais refusé. Mon chef m’a demandé si j'avais pensé à sortir lorsque la terre avait tremblé. Je lui ai rapporté que j’avais dit au petit Pablo : « Tu meurs, je meurs, si muore, di morire. » « Joyeux anniversaire, Bernard ! » m’ont souhaité mes camarades. J'avais eu un merveilleux cadeau. Nous en avions les larmes aux yeux et cela seul suffisait à justifier notre présence en cette terre de misère. Ce fait m’a valu la seule et unique médaille donnée lors de cette opération. J’ai été décoré en 1981 dans la caserne de L'UISC7 de Brignoles devant mes camarades. Médaille remise par le préfet du Var.
Ville de Calabrito II y a des instants où il faut « décompresser » après les visions d'horreur et les drames dont nous sommes témoins. Le lendemain nous avons reçu la mission de nous rendre à Naples avec une Renault 16 afin de récupérer du matériel en provenance de Marseille. - 119 -
Arrivés à Naples, nous avons dormi dans un hôtel avec un vrai lit : ce n’était que du bonheur. Nous avons changé l'étiquetage de deux caravanes que nous avons fait livrer à notre campement et nous avons pu dès le lendemain dormir dedans. Nous étions huit pour quatre places, mais c'était mieux que sous la tente avec des températures de - 15 degrés. Un soir je m'occupais à mettre à jour le journal de bord (journal regroupant tout le travail effectué par nos équipes). La caravane s’est mise à bouger de plus en plus fort, j’ai crié à mes camarades d'arrêter lorsque l'un d'entre eux m’a dit que c'était un tremblement de terre de force 5.5. La caravane s’est renversée. Heureusement que j'étais sorti ! J'assistais à un spectacle de catastrophe : les seuls bâtiments encore debout s'écroulaient les uns après les autres. Nous avons passé toute la nuit à secourir la population.
Ville de Calabrito Un matin nous partions vers un chantier à une trentaine de kilomètres de notre camp. Nous avons rencontré les équipes américaines. Il n'y avait que la route et des champs : le soir elles avaient construit une aérogare, un hôpital et un camp pour les 4000 soldats.
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Dans la journée, une reconnaissance dans les environs nous a fait découvrir toute l'ampleur du drame. Des dizaines de gros villages sont rasés, Calabrito, Senerchia, Laviano, Conza et bien d'autres font partie d'une longue liste de lieux martyrs. Nous ne pourrons tout couvrir, nous ne pourrons tout voir. Il faut faire un choix. Demain ce sera Calabrito. Quelle inspiration nous aura guidés ? Dieu seul le sait ! De cette décision, de cet instinct va dépendre le sauvetage d'une autre personne vivante. Alors c'est l'euphorie, nous voudrions pouvoir en faire plus. Les hommes ont chanté, les gens présents n'ont pas compris, nous avons dû leur expliquer tout ce que nous ressentions. Les jours vont se succéder. Toujours la pluie, le froid, la neige. Les hommes sont constamment trempés et il devient difficile d’enfiler les chaussures.
Ville de Laviano Au cœur du malheur II faut continuer, après Calabrito, nous allons en face sur le versant opposé de la vallée. Là, c'est Laviano, bourg martyr, s'il en est. Quel désastre, quelle catastrophe, plus rien d'intact, plus rien debout. Nous cheminons au niveau d'un deuxième étage, fait de pierres, de meubles, de sang et de misère. Là, nous creusons, nous écoutons les décombres avec l'espoir chevillé au corps, mais la vie a définitivement abandonné ces lieux et nous doutons de - 121 -
nous, de notre mission. Il faut remonter le moral des hommes, remettre la machine sur ses rails. Les deux dernières journées se passent en fausses alertes et en missions d'assistance. Tantôt les équipes récupèrent des biens pour des sinistrés présents, sortent des cadavres, tantôt d'autres ramènent à la surface et à l'air libre des animaux. Tous ont à cœur de rendre le maximum de services.
Avec le médecin et des volontaires italiens, nous visitons villages, hameaux et fermes isolées, portant vivres, vêtements, couvertures et donnant consultations et remèdes aux personnes malades. Cela nous oblige à accepter de modestes présents, toute leur richesse, verres de vin âpre et fruité, châtaignes, noisettes. Nous ne pouvons refuser, ce peuple frustré est fier et il ne veut aucun cadeau. Par respect, je ne vais pas décrire tous ces endroits, plus pauvres les uns que les autres. Combien nous sommes loin du XXe siècle et de la civilisation !
Cette fois, c'est terminé, nous sommes installés dans le train qui va nous ramener en France. Le voyage dure 24 heures de Naples à Marseille. À la frontière les douaniers sont montés dans le train, mais ils n'ont pas osé procéder à un contrôle. Déjà, la réalité d’hier fait place aux souvenirs. Nous voulons seulement nous rappeler les anecdotes et les moments les moins pénibles. II faut chasser nos visions de cauchemar. Maintenant tous sont heureux, ils ont représenté dignement la France et le bataillon des marins-pompiers de Marseille, ils vont pouvoir goûter à un repos bien mérité.
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DĂŠtachement du Bataillon de Marins Pompiers
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12- Tremblement de Terre Mexico 1985
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Jeudi 19 septembre 1985 Nous sommes mis en alerte par le CODIS Paris pour un départ du détachement Sauvetage Déblaiement du BMP Marseille à Mexico. Nous partons de Marseille-Marignane le 19 septembre (via Paris et Pointe-à-Pitre) L’équipe cynophile BMP de Gap nous a rejoints, ainsi que tous les moyens mis en œuvre. Le détachement se compose de marins-pompiers. La tenue est une salopette bleue. Bien entendu sur l'ensemble du détachement elles sont toutes dépareillées il y a une multitude de bleus différents. À Paris la brigade de sapeurs-pompiers est là aussi. Ils sont dans des treillis noirs tous identiques, on se croirait dans un film d'aventures.
Sur place se trouve également le personnel des télévisions Antenne 2 et TF1. Il me rapportera par la suite qu'il avait choisi d'accompagner la BSPP. C'est à l'arrivée à Mexico qu'il a changé d'avis. Lorsque le détachement est activé, le travail interne est assez important. Nous sommes plusieurs cadres à gérer la crise. Les tâches sont les suivantes : Etablir la liste du personnel pour le détachement. Préparer le matériel. Equiper le personnel. Arrive enfin l'ordre d'embarquement.
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Le trajet Paris-Pointe-à-Pitre s'effectue en 8 h 30. Il n'y a aucun repas servi à bord. Par la suite nous apprenons que les collations sont servies en fonction des fuseaux horaires : malheureusement pour nous, nous n’étions jamais dans le bon. Arrivés à Pointe-à-Pitre, nous nous sommes rués dans le petit restaurant de l'aéroport pour y déjeuner. La consigne était de mettre la note sur le compte de notre maire Gaston Defferre. Je propose de partir dans le centre-ville pour récupérer du ravitaillement pour le personnel. - 128 -
En sortant de l'aéroport, je réquisitionne une voiture comme dans les films et me fais accompagner avec mon camarade au supermarché le plus proche. Il est fermé, j'explique au vigile notre problème, il appelle le directeur qui nous ouvre avec plaisir le magasin. Nos prenons deux chariots que nous remplissons de victuailles. À la caisse le directeur nous informe que le magasin nous offre tout. Nous décidons de distribuer les rations dans l'avion. Après notre départ les hôtesses nous servent un repas chaud : le ravitaillement récupéré servira pour notre première nuit à Mexico.
Histoire de Mexico La ville de Mexico se trouve au centre du Mexique. Elle s'étend sur le territoire du District Fédéral, divisé en 24 "délégations" et regroupant 20 millions d’habitants en 2005 ; le District Fédéral n'est pas complètement urbanisé. Il est entouré par les États de Mexico et de Morelos. Les Mexicains distinguent en outre plusieurs entités géographiques qui débordent largement les limites de la ville de Mexico proprement dite : L’aire urbaine de Mexico, la troisième plus peuplée du monde, s’étale sur une surface de 60km sur 100km environ. La ville de Mexico se trouve dans un bassin endoréique de 9 500 km², plat sur près de 1 000 km2, à 2 240 mètres d’altitude5. La Vallée de Mexico (Valle de México) est entourée par plusieurs chaînes de montagnes : la Sierra de las Cruces (es) (sud-ouest), la Sierra de Ajusco-Chichinauhtzin (es) (au sud, 3 937 mètres, le point le plus haut du District fédéral), la Sierra de Guadalupe (au nord).
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Les deux principaux volcans se trouvent au sud-est de l'agglomération : l'Iztaccíhuatl (5 230 mètres) et le Popocatépetl (État de Puebla) (5 452 mètres) font partie de la Sierra Nevada (ou Cordillère néovolcanique qui parcourt le pays du Pacifique au Golfe du Mexique. Ils sont couverts de névés et de glaciers. La vallée de Mexico est rendue perméable par un ensemble d'argile, de vase de l'ancien lac, de laves et de cendres déposés au quaternaire5. Les fortes pentes et l’accélération de l’érosion favorisent les mouvements de masse et les glissements de terrain. Les tensions continuent de s’exercer et les chaînes volcaniques s’élèvent de 4,5 à 6 cm par an. Du fait de l’ajustement dynamique aux tensions, la cuvette est une zone de subsidence qui s’enfonce de plusieurs centimètres par an. Tous les écoulements se déversent vers la lagune de Texcoco, dont le niveau monte lors des précipitations concentrées en été. L’endoréisme favorise les inondations chroniques. Mexico s'étendait il y a 500 ans autour du lac Texcoco, et c'est sur une de ses îles que fut construite en 1325, MexicoTenochtitlan, capitale de l'empire aztèque et plus grande ville du continent américain, détruite et reconstruite par les Espagnols après la conquête de 1519-1521. De ce lac progressivement asséché il ne reste pratiquement que les canaux de Xochimilco. La ville moderne, Mexico, prit naissance sur une de ses îles. Au milieu du XIXe siècle, elle connut une grande modernisation.[réf. nécessaire]
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En 1985 Mexico compte environ 18 500 000 d'habitants pour seulement 800 pompiers. Pour comparer, à la même époque, Marseille dispose de 1000 pompiers pour 1 500 000 habitants, Paris de 7000 pompiers pour 7 000 000 habitants. Arrivé à Mexico le détachement rejoint le lieu de réception du matériel. On nous désigne un camion pour transporter le matériel. Sur le parking il y a une dizaine de camions de transports sur chaque pare-brise une pancarte avec le nom de l'unité. À côté de notre véhicule il y a en deux pour la BSPP, je récupère un panneau que je retourne et j’inscris au feutre BMP. Nos amis d'Antenne 2 filment la scène et décident de partir avec le BMP. Leur réflexion : « Ce sont des baroudeurs on va s'amuser avec eux. »
Première destination : le métro de Mexico Arrivé sur place le lieutenant fait préparer le parc à matériel (on place le matériel comme pour une exposition). Dès que je vois cela, je réprimande le gradé responsable : on est juste au pied d'une tour qui penche à 60 degrés. Il m'informe que l'ordre vient du lieutenant. Arrive notre lieutenant qui, avec une équipe de TF1, voudrait que l'on procède à une reconnaissance avec les appareils d'écoute dans le métro. Je lui dis qu'il est hors de question que j'expose mon équipe : il y a trop de danger, la structure menace de s'écrouler. Il invoque l’ordre donné. Je lui fais comprendre que devant le danger je lui prêterai le matériel et il pourra faire sa démonstration devant la télé.
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Il s'offusque, commence à s'énerver lorsqu’une petite secousse sismique fait tomber un ensemble de 30 m2 du métro. Le journaliste (Gérard Saint-Paul) que l'on retrouvera plus tard ne comprenait pas que l'on puisse refuser d'exécuter un ordre, mais après l'effondrement il savait qui avait l'expérience du terrain.
Métro de Mexico Le capitaine arrivant sur place me réprimande pour le mauvais emplacement du parc. Je lui explique la situation et lui raconte le problème avec le lieutenant. Il le prend à part et lui dit qu'à l'avenir il laisse faire les chefs de section. On nous attribue des véhicules légers pour chaque section. Je demande à la place un bus pour être en osmose avec mes hommes. Ma section se composait d’un chef de section, d’un adjoint, de deux seconds maîtres, d’onze hommes, d’un interprète, d’une équipe de l’Elis de Nîmes (3), d’un médecin BMP, d’un infirmier BMP.
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Première mission pour l'ensemble des trois sections : l'hôpital Juarez.
Hôpital Juarez
L'hôpital Juarez était l’un des plus grands établissements hospitaliers du Mexique. Il est considéré comme le berceau de la chirurgie. Il est devenu un hôpital militaire en 1947. Première reconnaissance : nous découvrons une victime qui répond à nos appels (c'est un médecin). Après estimation, elle se trouve à une douzaine de mètres de nous, sous des tonnes de gravats. Avec le capitaine et les chefs de section, nous établissons un plan pour le dégagement de la victime. On va creuser un tunnel jusqu'à elle.
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Cette opération nous prendra 14 heures avec des difficultés apparaissant au fur et à mesure de notre avancée.
Sortie d'une Victime Article VSC (10 - 1985)
Détails de l'intervention : chaque section travaille à tour de rôle pendant 5 heures. La deuxième section reste sur le terrain en attente et la troisième rentre à l'hôtel pour se reposer. Nous avons effectué ces rotations qui nous ont permis de toujours avoir une section de secours disponible et deux sections sur le terrain. Pour faire le tunnel il nous fallait étayer afin d'éviter un effondrement : c'est avec les matériaux existant sur place que nous avons travaillé. Avant d'enlever un élément du tunnel, on devait vérifier qu'il ne mettait pas en danger sa stabilité. Après 4 heures de travail l'équipe sur place se trouve face à une porte d'armoire métallique. Il fallait l'enlever. Nous nous sommes réunis, le capitaine et les trois chefs de section, afin de déterminer la méthode la plus sécurisante.
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J'ai proposé de percer des trouées sur la façade de l'armoire afin de déterminer et de voir ce qu'il y avait de l'autre côté (il y avait un vide). Le chemin était libre on pouvait continuer. Lors de notre progression on pouvait se trouver à 4 ou 5 sauveteurs dans le tunnel. En permanence on discutait avec la victime pour la rassurer, mais elle n'avait pas le moral elle était coincée entre deux cadavres. Depuis quatre jours. Nous étions presque à portée de la victime lorsque l'on a découvert un cadavre qui nous barrait le chemin.
Nous avons décidé de découper ce cadavre afin de passer. Il faut savoir que le Mexique est un pays très croyant. Il a fallu demander l'autorisation auprès des autorités de la ville pour procéder à cette opération. Ils nous ont envoyé un médecin qui devait découper le cadavre.
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Nous sommes entrés à deux chefs de section dans le tunnel avec le médecin. Il y avait de la place pour se tenir debout. Le médecin a commencé la découpe avec son scalpel, mais il a craqué immédiatement nous disant qu'il n'y arriverait pas. Nous lui avons demandé si nous pouvions découper nous-mêmes le cadavre. Il a accepté mais avec le scalpel qu'il avait, c'était impossible. Avec son accord nous nous sommes servis de la tronçonneuse. Pour la version officielle nous avons dit que c'était le médecin qui avait procédé à la découpe.
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Lors de la préparation de cette opération, je me trouvais avec les chefs de section devant le tunnel et j’expliquais comment nous allions procéder. Les journalistes d'Antenne 2 filmaient notre conversation sans comprendre. À la fin le journaliste Rachid Arhab (par la suite présentateur du journal de 20 h 00) me dit qu'il allait essayer de passer cette vidéo au journal. Cela ne me semblait pas une bonne idée : il me l’a confirmé lorsque je lui ai expliqué la teneur de cette conversation.
Copie d'écran vidéo Antenne 2 C’est après 14 heures de travail que nous avons la joie de voir sortir ce jeune médecin en vie : pour nous c'est la plus belle récompense.
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Le logement Chose importante : le bien-être du personnel. Dès notre arrivée à Mexico, on nous a dirigés vers un hôtel du centre-ville, Le Camino Reale. C'était un hôtel 5 étoiles de très grande qualité. Nous avons été logés dans des suites, trois par chambre. Les repas étaient pris dans une grande salle à manger. Nous avions des horaires assez étalés, car nous pouvions arriver à n'importe quelle heure, de jour et de nuit. Jamais on n’a refusé de nous servir, le service était magnifique. Je me rappelle que chaque fois que nous entrions dans la salle à manger, les clients présents se levaient et nous applaudissaient. Nous étions toujours servis en premier. Dans chaque chambre il y avait un bar fermé avec un cadenas. Le premier jour nous avons fait sauter les cadenas et nous avons vidé le bar. Le deuxième jour il n'y en avait plus, mais le bar était toujours réapprovisionné. Le personnel de l'hôtel récupérait notre linge sale qui était lavé et repassé pour le lendemain.
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Sur les chantiers, il y avait des endroits de repos où l'on pouvait manger et boire. Un jour, ma section devait se rendre en renfort de la BSPP. J'arrivais au bus, tout le monde avait le sourire. Je demandais à mon adjoint ce qui se passait. Il me dit : « Regarde à l'arrière ! » Dans le fond du bus il y avait une équipe de télévision. Ils étaient montés de force en prétextant que c'était la télé, je ne leur ai même pas parlé. J'ai dit à mes deux seconds maîtres : « Foutez-moi ça dehors ! » Il se sont fait plaisir et ont viré les journalistes. Mon adjoint leur a dit : « Avec Olivéro il faut toujours demander poliment. »
Le lendemain matin nous étions réunis à l'hôtel pour déjeuner et établir les missions de la journée. Le capitaine m’a demandé d'emmener une équipe de télévision avec ma section sur le terrain. Je lui ai dit qu'il n'y avait aucun problème. Il souhaitait que j’emmène le lieutenant. Là cela coinçait, car personne ne le voulait. Le capitaine a dit au lieutenant de ne s'occuper de rien et d'écouter Olivéro. Notre mission : visiter des écoles situées dans le centre de Mexico. Je suis arrivé à notre bus. Le présentateur Gérard Saint-Paul et son équipe m’ont demandé l'autorisation de monter. Je la lui accordais volontiers. Nous nous sommes mis d’accord : il filmait ce qu'il voulait, mais nous laissait travailler. Je lui ai adjoint un de mes seconds maîtres pour le guider sur le terrain et lui expliquer nos actions. Il faut savoir deux choses importantes lors d'un tremblement de terre : la date et l'heure exacte et les coutumes du pays.
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Le tremblement de terre de Mexico a eu lieu le jeudi 19 septembre 1985 à 7 h 19. Lorsque nous nous rendons sur le site des écoles la première pensée qui vient à l’esprit, c’est : « Vu l'heure, il n'y avait personne dans l'école. » Malheureusement au Mexique les gens les plus démunis vont à l'école de 7 h 00 à 9 h00. Ensuite les enfants en âge vont travailler. Donc pour notre visite nous nous sommes trouvés devant un effondrement en mille-feuilles (les plaques tombées à plat).
Pour organiser l'évacuation des plaques de béton, j'ai fait appel aux militaires mexicains présents sur place. Il nous ont fourni un bulldozer. Après avoir amarré une plaque, nous avons commencé à soulever. C’est alors que j'ai vu qu'un drame atroce avait eu lieu.
Emplacement de l'école
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Les premiers corps d'enfants étaient visibles. J'ai fait stopper l'opération nous avons expliqué au capitaine mexicain la situation. Je lui ai fait évacuer la place. Les secours seuls sont restés sur place et l'équipe de TF1 qui avait ordre de ne pas filmer les corps. Un général est arrivé sur place. Avec lui nous avons décidé de récupérer les corps des enfants et de les placer dans des cercueils blancs. Nous avons accompagné les cercueils jusqu'au stade de Mexico (où j’avais de bons souvenirs de la Coupe du monde de 1970 !). Et sous les caméras de TF1, nous avons avec l'armée mexicaine sorti une centaine d'enfants. La télévision a filmé, mais n'a passé que les images des pompiers. Cela a été une épreuve très pénible de prendre ses corps et de les placer dans les cercueils. Un prête est arrivé sur place il a effectué une bénédiction des enfants. Les images de cette opération ont été diffusées sur TF1. Une polémique a surgi à Marseille lors de la diffusion de ce reportage, car le journaliste me nommait à chaque fois comme responsable des pompiers alors qu'il y avait le lieutenant. Il y avait des images de moi dialoguant avec le général et le lieutenant se trouvant derrière à faire les cent pas. Arrivé à Marseille, le capitaine a expliqué au commandant le pourquoi de cette affaire.
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Image Vidéo Antenne 2 Je ne vais pas vous conter jour après jour nos interventions : je vais terminer avec cette histoire. Le soir chaque chef de section devait assurer la sécurité sur l'hôpital Juarez. Le soir de ma garde, j'étais uniquement avec mon adjoint et trois hommes. Vers 23 h 00 une autorité a demandé à me parler. Il voulait que l'on lui prête du matériel d'écoute (appareil servant à détecter les bruits sous les décombres). Je lui ai dit que ce matériel était assez technique et que, s’il voulait, nous ferions l'écoute pour eux. Il a refusé mon offre et nous a laissés. Il est revenu une heure plus tard, il avait l'accord de son supérieur Je lui demandais exactement quelles recherches il voulait que l'on fasse pour lui. Il nous a expliqué qu'il avait entendu des bruits provenant de l'emplacement de la maternité. Après quelques réticences il nous a indiqué le chantier et nous nous sommes mis en place. Situation La maternité se trouvait au quatrième étage de l'hôpital. Il devait il y avoir une trentaine de bébés dans des couveuses. Il avait entendu des cris de bébé. - 142 -
On a procédé à une première écoute. On a localisé des bruits à une quinzaine de mètre de nous. Je demandé le silence. Deuxième écoute, de mon adjoint qui me confirme entendre des pleurs provenant certainement d'enfants. Troisième écoute, je détermine le chemin le plus court et le plus sûr pour les sauveteurs. Les bruits nous donnent à penser qu'il y a plusieurs bébés vivants. Je lui ai proposé notre aide et lui ai dit que je pouvais faire venir sur place deux sections des marins-pompiers. Il m'a expliqué que la population mettait en doute les compétences des pompiers mexicains car ils n'avaient sauvé personne. Les consignes qu'ils avaient étaient de travailler tout seuls. Je lui ai proposé un marché : je prenais la direction du chantier avec mes quatre hommes et nous les emmenions directement devant les couveuses. Nous nous sommes effacés et ce sont eux qui ont sorti les bébés. Son supérieur étant d'accord, nous avons travaillé jusqu'à 8 h 00 du matin : neuf bébés sauvés.
Son supérieur a demandé que mon équipe et moi-même apparaissions devant la presse.
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Pendant une opération pour récupérer un bébé sous des gravats, un général américain est arrivé avec ses hommes et des bulldozers avec la ferme intention de tout déblayer rapidement. On lui a expliqué le travail que l'on effectuait mais il ne voulait rien savoir. J’étais en haut des gravats lorsque le lieutenant m’a dit qu'il fallait abandonner le chantier. Je lui ai dit que c’était hors de question. Il m’a répondu que c'étaient les ordres du général américain. Passablement énervé, je lui ai dit en descendant : « Je vais lui mettre un coup de boule à celui-là ! » Comprenant mes intentions, il a rapidement quitté le chantier. Il allait voir les autorités locales qui sont revenues avec lui, mais les sauveteurs mexicains présents sur place ont interdit l'accès aux autorités en leur demandant de laisser travailler les pompiers français.
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Nous avons sorti l'enfant et cela a calmĂŠ tout le monde
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Au moment du départ, quelle a été notre surprise de voir une foule venir nous dire merci à l'aéroport ! À notre arrivée à Paris le ministre de l'Intérieur Pierre Joxe nous a accueillis dans les salons de l'aéroport pour nous féliciter et nous remercier au nom de la France.
Photos aéroport Marseille Marignane
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Article du journal le Provenรงal 1985
Article le Provenรงal 1985
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13- Tremblement de terre ArmĂŠnie 1988
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Le séisme de 1988 en Arménie est de 6,9 sur l'échelle de Richter. Il dévaste la région de Spitak, le 7 décembre 1988 à 11 h 41 (heure locale). En moins de huit secondes, une faille s'est ouverte sur une longueur de 20 kilomètres. Les deux blocs de fracture en présence ont instantanément coulissé l'un sur l'autre, en biseau. Le phénomène a atteint une amplitude de 1,6 mètre. Selon les estimations, entre 25 000 et 30 000 personnes sont mortes, pour la plupart sous les décombres des bâtiments non conçus pour résister à un tel séisme. Les sauveteurs n'ont pu sauver que 80 personnes prisonnières des décombres. Il y a officiellement 15 524 blessés et 530 000 sans-abri. Sous l'impulsion de la diaspora arménienne dans le monde, les organisations humanitaires de tous les pays ont porté assistance aux sinistrés.
Le détachement des marins-pompiers de Marseille a été mis en alerte le 9 décembre 1988. J'ai été désigné comme chef de la section commandement du DICA.
Ma première mission a été de faire établir un visa et un passeport pour le personnel mobilisé. Chose assez compliquée, car les autorités soviétiques ne nous ont pas facilité la tâche. Mais après plusieurs aller-retour à l'ambassade de Russie, nous avons eu tous les visas nécessaires.
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Article le Méridional 1988
Article Le Méridional 1988
Nous sommes arrivés à l'aéroport d'Erevan en Arménie. Lors de chaque déplacement à l'étranger, une fois arrivés nous débarquions tout de suite. Là changement de programme : nous étions sur le territoire de Russie. Un soldat en armes de guerre et un commissaire russe ont fait irruption dans l'avion. Il a fallu montrer les visas et les passeports de tout le monde avec chaque fois appel du détenteur du visa. Juste avant nous ils avaient contrôlé la BSPP. Il manquait un visa et ils avaient bloqué tout le détachement parisien. Chez nous je me suis aperçu qu'il nous manquait également un visa pour un camarade. Nous avons fait un tour de passe-passe, ils n'ont rien vu. - 152 -
Tout cela nous a pris plus de deux heures. Nous avons embarqué le personnel et le matériel dans des camions direction Leninakan. Histoire Gyumri ou Gumri (en arménien Գյումրի) est la capitale et la principale ville du marz de Shirak, au nord-ouest de l'Arménie. Avec 146 969 habitants en 20083, elle est la deuxième ville de l'Arménie après la capitale Erevan. D'abord connu sous le nom de Kumaïri, le hameau, devenu « Gyumri », ne se développe vraiment qu'au XIXe siècle. En 1837, la ville est rebaptisée Alexandropol sous l'Empire russe puis, en 1924, Léninakan pendant la période soviétique. Après l'indépendance de l'Arménie en 1991 elle retrouve son nom de Gyumri. Le 7 décembre 1988, la ville est détruite à 60 % par un séisme de 6,9 sur l'échelle de Richter.
Le trajet a été très pénible. Il faut savoir que lors de notre départ de Marseille, il faisait 10 degrés. À Erevan la température était tombée à -25. Nous sommes arrivés vers 18 h 00, on nous avait attribué une école pour notre campement.
Le soir même nous nous sommes rendus au PC central pour récupérer les deux motos qui nous avaient été réservées : une BMW et une DAX Honda. Nous sommes débrouillés pour prendre deux BMW (une était prévue pour la BSPP). Pendant tout le séjour, ils ont recherché leurs motos que nous avons rendues le dernier jour en prétextant que nous nous étions trompés. Nous avons effectué des reconnaissances dans toute la région : c'était la désolation. - 153 -
Lorsque nous sommes arrivés sur place, il y avait plus de 6 jours que le séisme avait eu lieu : il n'y avait plus aucun espoir de retrouver des survivants. Nous avons porté secours aux personnes en les aidant à retrouver les corps de leurs familles. Le troisième jour de notre présence, il y a eu un feu de boulangerie dans le village. J'étais en patrouille avec une équipe, nous avons aidé les pompiers de la ville à éteindre l'incendie.
Ville de Léninakan C'est à cette occasion que j'ai travaillé sur le terrain avec le commandant Tromelin qui s'occupait du Cinquantenaire. Nous nous étions très bien entendus. Il œuvrait pour le bien du personnel et ne mettait pas les hommes à contribution pour des tâches inutiles. Lors d'une reconnaissance nous avions besoin d'un interprète. La voiture de Robert Vigouroux (maire de Marseille) étant à proximité : je l'ai bloquée, j’ai ouvert les portières et je lui ai dit : « Vous avez un interprète, j'en ai besoin, je le réquisitionne. »
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Compte Rendu du Commandant
Cette mission a été pour moi une épreuve particulière car arménien par ma mère, je partageais la souffrance de ce peuple. Le maire de Marseille Robert Vigouroux se trouvant en Arménie je lui demandais s’il était possible en partant de distribuer tout notre matériel de campement (lit pliants, couvertures) ainsi que les vivres qu'il nous restait. Il donna tout de suite son accord. Le matin du départ on vit arriver des camions de l'armée russe qui ayant eu vent de notre action voulait soi-disant faire eux-mêmes la distribution. Je leur ai dit que nous avions déjà distribué le matériel et les vivres. . - 155 -
Chaque jour je devais remplir le journal de bord (qui recense le déroulement de la journée ainsi que chaque incident).
Extrait du journal de bord Ma mère est née en Arménie de part son sang je me sens arménien de cœur lors de cette intervention sur les terres natales de ma mère et de mes grands parents je me suis dit il faut ramener de la Terre et la distribuer à toutes la famille.
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Pour cette opération on m'a attribué la médaille militaire à titre exceptionnel et une médaille pour acte de courage et de dévouement. Deux argent 1ère classe 1 étoile.
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14- La Maison des TĂŞtes Toulon 1989
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Ordre de mission
Nous sommes le mercredi 15 février 1989. C'est l'anniversaire de Michèle : ce soir j'ai des places pour aller voir Charles Aznavour au Dôme. Après j'ai réservé un restaurant pour fêter cet événement. Depuis 10 h 00 du matin je travaille à la commission d’organisation de notre ami le capitaine de corvette Brutus (décédé la veille lors d'un feu de forêts). - 161 -
Le 15 février 1989, la Maison des Têtes explose à Toulon. Bilan : 13 morts et 35 blessés. Il est 14 h 26. Une explosion vient de souffler un immeuble ancien du centre-ville, sur la place à l'Huile de Toulon. De la Maison des têtes, un bâtiment de cinq étages datant du XVIIIe siècle et classé monument historique, il ne reste presque plus rien. Juste des bouts de murs, des poutres suspendues dans le vide et quelques centimètres de plancher sur lequel des habitants se raccrochent à la vie. Un panache de fumée se répand alors dans les rues alentour. Il règne une atmosphère de fin du monde. Des rescapés surgissent, tels des fantômes, les corps recouverts de poussière et de sang, de cet amas de gravats qui s'est transformé en tombeau. Malgré des opérations gigantesques de secours mises en œuvre – plus de 450 sauveteurs et des bénévoles vont se relayer pendant des heures –, les dépouilles de treize personnes (dont des enfants) sont extraites de ce qu'il reste de l'édifice. Trente-cinq autres sont évacuées, blessées. Un cauchemar. En une fraction de seconde, tout a basculé. L'immeuble – qui comprenait une supérette au rez-de-chaussée, un laboratoire dentaire au premier, l'étude d'un huissier au second et des logements privés –s'est écroulé comme un château de cartes. Cause de l'accident : une explosion de gaz.
Suite à l'accident, le Codis 83 (centre de gestion du Var) demande l'aide du Codis (13). Le détachement Sauvetage Déblaiement est mis en alerte. Je me rends à la caserne de Plombières et prends les fonctions de chef du DICA. Le capitaine de la caserne prendra les fonctions de chef de détachement.
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Je forme rapidement les équipes, on prépare le matériel et moins d'une heure après l'alerte un détachement prend la route de Toulon. Départ 15 h 50, arrivée Toulon 17 h 30. À notre arrivée premier accrochage avec le chef de détachement : il rencontre un caporal sapeur-pompier et lui dit qu'il met la section sous ses ordres. J’affirme qu'il faut aller au PC de commandement pour prendre un secteur d'intervention. Là j'aperçois l'ampleur de la catastrophe.
Imaginez des décombres avec une marée humaine dessus. On nous affecte un secteur et nous commençons à déblayer un corps sans vie.
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Sur place se trouve le détachement Sauvetage Déblaiement du Var sous les ordres du colonel Fabre et du lieutenant Nicolas. Il vient de repérer grâce au chien d'un marin-pompier une victime encore en vie qui se trouve à une dizaine de mètres sous les décombres. Le lieutenant Nicolas m'aperçoit et me demande de lui donner mon avis sur la méthode à employer pour dégager la victime. Je fais le point de la situation et lui donne comme première consigne de sécuriser les abords du chantier. Je demande à ce qu'un médecin vienne parler à la victime pour avoir une idée de son état de santé. Il faut savoir qu’au mois de janvier je participais à la formation de chef de section Sauvetage Déblaiement et j'avais Nicolas parmi mes élèves.
Je lui donnais quelques conseils. Le colonel, en me voyant (il faut savoir que nous avions souvent participé à des formations ensemble en qualité d'instructeur et que nous nous apprécions mutuellement) a demandé au lieutenant si cela ne le gênait pas que je prenne la direction de l'opération. J’ai demandé à un de mes adjoints d'appeler une de nos équipes et nous avons travaillé ensemble pour sortir la victime. C'est après cinq heures d'effort que la délivrance est arrivée et que la victime a pu sortir à l’air libre.
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Wulfran Dherment, seul survivant du premier étage.
Voici son récit Cela fait maintenant cinq bonnes minutes que je m’applique sur mon travail. Puis, tout va extrêmement vite : brusquement, Alexandra se lève en criant : « Merde ! ». Ce comportement inattendu mêlé à l'instinct de survie déclenche chez moi une réaction étrange. Une peur viscérale m’envahit brutalement. Je sais que quelque chose de très grave va arriver maintenant, que ma vie est en danger. En une fraction de seconde, je fais un bond vers la porte du palier en me protégeant la tête avec mes bras. Un flash gigantesque m’éblouit. Je sens un fouettement brûlant dans le dos. Un souffle extraordinaire me balaye tel un fétu de paille. Je reçois un énorme choc à la tête alors que le sol se dérobe sous mes pieds. Tout explose. Un spectacle inimaginable s'offre à mes yeux : quelques morceaux de la maison sont restés debout, et un occupant est suspendu dans le vide, au troisième ou peut-être au quatrième - 165 -
étage. Son visage crispé est couvert de sang. Il hurle d'effroi : le morceau de plancher encore en place sur lequel il est coincé, menace de s'effondrer à tout moment. Il faut lui porter secours immédiatement. Sur le sommet de la montagne de gravats, un vieil homme reste immobile dans son fauteuil. Par miracle, il n'est que légèrement blessé et pleure. Des agonisants figés sont, ici et là, plantés dans les débris amoncelés. Mélange de chair et de pierre. C'est l'enfer, un cauchemar. De la maison de cinq étages, il ne reste plus qu'un immense amas de ruines... Et je suis dessous !... Et puis, il y a la douleur. Affreuse, envahissante, maîtresse de tout mon corps. Que s'est-il passé ? J’ai d'énormes difficultés à respirer. Ma bouche est pleine de terre, mes narines me brûlent, je sens une forte odeur âcre. Je crache et libère ainsi ma bouche. J’ai mal, très mal. Je ne réalise pas que je suis plié en deux au niveau de l'abdomen, écrasé, la tête entre les cuisses. Mes pieds se trouvent devant moi. Le gauche tout prêt de ma tempe. Je peux en toucher la semelle avec les doigts libres de ma main coincée. La position plus qu’inhabituelle de ce pied ne m’inquiète pas. J’ai conscience de la gravité des dégâts subis par mon corps, mais la priorité est ailleurs. De toute façon je n’y peux rien. Je suis coincé là et comme ça. Mon pied droit lui, me fait plus souffrir que le reste, il doit être broyé. Lentement, je prends conscience que mon corps a une disposition spatiale pour le moins anormale, mais je ne veux pas paniquer. Plus tard, j'apprendrai des pompiers que j'étais tassé dans une poche de survie mesurant 30 sur 70 cm ! Je n’ai plus peur de mourir. À mon âge, la mort, je n'y ai jamais pensé. Et aujourd’hui, sans prévenir, la voilà devant moi. Hideuse, elle paraît pourtant si douce comparée à cet enfer de souffrance. L’immeuble comprenait, en plus de la supérette au rez-dechaussée, du laboratoire au premier étage et de l'étude d'huissier au second, de nombreux logements privés. Il est impossible d’en - 166 -
recenser les occupants. Comment savoir quels sont ceux qui étaient chez eux au moment de l’explosion ? Peut-être avaient-ils eu de la visite de proches ou d’amis ! Le constat est accablant : un travail de titan attend les secouristes, et on ne sait pas combien de personnes se trouvent là-dessous. Ils s’attaquent maintenant au déblaiement, et c’est à la main qu’ils remplissent de grosses poubelles récupérées dans les immeubles voisins. Derrière eux, les deux blessés sont enfin évacués sur des brancards de toiles que les pompiers se passent au-dessus de leur tête casquée, pour les évacuer plus rapidement de cette immense fourmilière qu’est devenue la montagne de ruines. Des maîtres-chiens arpentent les décombres, en encourageant le travail de leurs animaux. Cet appui précieux doit permettre aux secouristes de localiser des victimes enterrées profondément. Sur un reste de façade, un sergent-chef tente de faire descendre, à l’aide d’une échelle à coulisse, un homme âgé et indemne, d’une partie non effondrée du deuxième étage. Encore sous le choc, bien que miraculeusement épargné, il refuse de bouger de son fauteuil, car sa femme, dit-il, se trouve dans la cage d’escalier. Il finit par entendre raison, réalisant que la cage d’escalier n’existe plus. Je me remémore un de mes cauchemars les plus marquants. Je me trouve sur un énorme amas de ruines. Je suis en sueur et couvert de poussière. Je suis pris de panique. Mes mains sont ensanglantées et très sales. Je retourne avec énergie tous les gravats, les pierres et les poutres, à la recherche de mon fils Adrien désespérément introuvable. Et cela dure toute la nuit. Je pleure, je hurle, je suis en colère, j’ai la haine. À aucun moment je ne faiblis dans mes recherches, et je redouble d’efforts malgré mes doutes, l’angoisse, la douleur et la peur. Mon fils est là quelque part. Je n’ai de cesse de m’employer à le retrouver. Plus je vais vite, plus je persiste, plus j’ai des chances de le trouver en vie. Le soleil se lève. Je soulève une énorme pierre qui ne peut résister à ma force décuplée par la hargne. Et là je découvre Adrien. Mon beau petit bébé, tout propre et rayonnant, confortablement installé dans son siège coque. Il me fait un - 167 -
grand sourire en me tendant les bras. Je me suis réveillé au petit matin, épuisé par la tâche, trempé de sueur et la tête pleine de sentiments mitigés. Finalement le cauchemar se terminait bien et j’en étais heureux. À l’instar de ce rêve, j’espère qu’un jour la vérité sur les origines de l’explosion de la Maison des Têtes sortira du crassier de mensonges et d’hypocrisies dans lequel elle est ensevelie. Même si cela doit prendre encore des années… Pour cette opération la préfecture du Var m’a décerné la médaille de bronze pour acte de courage et dévouement. Mais le plus beau cadeau, cela a été une carte postale de Wulfran pour les vœux de 1990 : il m’écrivait que c'était grâce à moi qu'il pouvait former des vœux. Après cette opération je me dirige vers le PC mobile (poste de commandement) lorsque le directeur des secours des Bouchesdu-Rhône m'interpelle me demandant de faire évacuer l'ensemble de nos véhicules se trouvant sur la rue de la République, car il allait rouvrir la circulation. Ironiquement il me dit qu'il s'adresse à moi, car mes chefs sont endormis dans leurs Renault 4L. J'appelle un de mes gradés et donne l'ordre de tout évacuer mais en silence pour ne pas réveiller les dormeurs ce qui a été fait promptement. Vers 6 h 00 nous nous trouvions au ravitaillement lorsque les dormeurs sont arrivés et la première chose que fait le capitaine, c'est d'agresser un matelot parce qu'il déjeunait. Le sang m’est monté à la tête et je l'ai remis à sa place, ce dormeur !
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Il m’a dit qu'il me signalerait au commandant. Je lui ai répondu que le pacha serait heureux de voir les dormeurs dans un véhicule seul au milieu de la rue de la République. L'affaire s'est arrêtée là, il n’a pas mentionné sur son rapport l'opération de sauvetage à laquelle j'avais pris part. Le commandant a été étonné lorsqu'il a reçu la proposition de médaille pour ma personne. Il m’a convoqué et je lui ai expliqué pour quelle raison il n'était pas au courant.
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15- Le Cinquantenaire des Marins pompiers de Marseille
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Au mois de juin 1988, j'ai eu un entretien avec un camarade (on l'appelait Coco). Il m’a demandé si j’étais au courant que l'année suivante on allait fêter le 50e anniversaire de la création du bataillon. Je me suis mis à réfléchir pendant les vacances et à la rentrée j'avais pensé à un programme des festivités.
Plaque du Cinquantenaire
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Voici le projet que j'ai prĂŠsentĂŠ au commandant.
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Il est vrai que le projet était assez ambitieux et qu'il fallait pour le réaliser avoir l'argent nécessaire. J'avais établi un budget prévisionnel.
Pour arriver à cette somme j'avais prévu uniquement des sponsors qui auraient leurs logos sur l'affiche officielle. Les sponsors étaient La Ville de Marseille ; le conseil régional ; le conseil général ; le Crédit agricole ; EDF ; Euromarché ; la Société des eaux ; Elf Aquitaine ; Aéroports de Marseille. L'affiche officielle
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Dans cette affiche il n'y a qu'un seul marin-pompier les deux autres sont des mannequins . Trouvez lequel est le vrai.
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Le projet a été accepté tout de suite, on a désigné un lieutenant (un de mes amis : nous avions passé le brevet supérieur de marinpompier ensemble). Les problèmes ont commencé : les marins-pompiers font un service de 36 heures de travail puis 36 heures de repos. J'ai demandé à être mis de côté pendant la durée de la préparation ce qui m’a été refusé par le commandant en second responsable du projet. J'ai donc continué à faire mon service normalement. Mais lorsque l'on contacte des entreprises privées, elles ne sont pas toujours disponibles le jour que l'on veut. Lorsque la responsable d'EDF est venue chez nous, le commandant a demandé pour quelle raison je n'étais pas là, car il ne connaissait pas suffisamment le projet. Il a exigé que je rentre tout de suite. J'ai fait en sorte que l'on ne me trouve pas et je suis rentré normalement le lendemain. J’ai alors été détaché de tout service jusqu'à la fin du Cinquantenaire. Il me manquait un véhicule : on m’en a affecté un tout de suite, j'étais donc autonome J'ai rajouté au projet une conférence de presse en présence de monsieur le maire, de l'amiral commandant de Marine de Marseille. J’ai préparé une maquette pour la disposition de la conférence et demandé la désignation d'un major afin de régler la cérémonie le jour venu. Je suis allé voir avec la maquette le commandant de la caserne de Plombières où se passerait la cérémonie pour lui en expliquer le déroulement. Il a refusé la maquette prétextant que c'était lui qui décidait pour sa caserne. Nous étions dans son bureau je lui ai demandé d'appeler le commandant et de me le passer (j'avais vu une scène identique dans le film Il était une fois un flic). Je lui ai alors - 179 -
expliqué que le commandant de Plombières nous causait des problèmes, il s'est pris une remontrance : après, c'était devenu un agneau.
La conférence de presse a été un grand succès : de ce jour le commandement en second a une confiance absolue en moi. Sur l'ensemble du projet, toutes les manifestations se sont déroulées sauf celle sur le Vieux-Port. Mon idée c'était de projeter un film sur le bataillon des marinspompiers dans le Vieux-Port. Sur un écran d'eau fait à partir du bateau-pompe Lacydon. Je suis allé voir la société CTS (Cinéma Télec services) qui gentiment a accepté de nous mettre à disposition un projecteur de 35 mm.
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Un soir du mois de juillet nous sommes allés à la caserne de la Grande Bigue sur le port. Ils ont mis en place le bateau pompe. Nous avons mis en place avec les lances à incendie un rideau d'eau de 15 m de haut. Dans un camion on avait placé le projecteur et le personnel de la caserne de la Bigue a pu assister à la projection du film Rocky IV. L'essai était très concluant, mais le projet a été abandonné. L'ensemble des sponsors a été contacté, a répondu présent et nous avons démarré notre préparation avec un million de francs.
Quelques anecdotes Le gâteau a été fabriqué par le lycée professionnel Corot. Les personnes avec qui j'ai traité m'aideront plus tard pour faire rentrer Sébastien à l'école de cuisine. Je leur ai fourni 250 kg de sucre et 250 kg de farine. Une planche de 4 m2.
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L'apothéose du Cinquantenaire a été la messe à la cathédrale de la Major pour 2000 personnes. On avait la musique des équipages de la flotte ainsi que des chorales venant de toute l'Europe (il y avait un festival à Marseille).
Le bal de prestige Le samedi 24 juin 1989 a eu lieu dans le hall 6 du parc Chanot la soirée de clôture du Cinquantenaire. La soirée était présidée par le commandant du bataillon en présence de 2000 personnes. L'orchestre Albert Frank a animé la soirée. Le champagne était du Moët et Chandon impérial. Pour la soirée nous avions acheté 1000 bouteilles. Lors de l'arrivée du gâteau d'anniversaire le commandant a sabré une bouteille.
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16 – Nos compagnons disparus
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Le corps des marins-pompiers de Marseille est une famille. Pendant mes premières années de présence, je pensais que chaque caserne était à part et qu'il n'y avait que très peu de lien entre elles. La première fois que des compagnons nous ont quittés lors d'un incendie, le choc a été violent. Cela se passait au mois de juin 1974. J'étais de repos. Dans l'après-midi en arrivant dans mon quartier, un de mes camarades m’a demandé ce qui s'était passé lors de l'accident qui avait coûté la vie à deux de mes compagnons. Je n'étais pas au courant et suis allé tout de suite à ma caserne. Il faut savoir que le métier que l'on pratique est très dur mentalement, on est confronté à la peine, à la mort en permanence. Le principe pour résister à cet état est de maintenir une ambiance assez joviale en caserne. Lorsque je suis arrivé, j’ai trouvé une caserne morte : aucun bruit, seulement des camarades qui erraient la tête basse. Nous venions de perdre deux amis dans un accident de circulation : leurs camions avaient versé dans un virage et s'étaient renversés sur eux. Un troisième avait eu la jambe sectionnée. Je me suis aperçu rapidement que ce n'était pas uniquement ma caserne qui était en deuil, mais tout le bataillon. La veille de l'accident c'était moi qui me trouvais à la même place sur le véhicule. Ma deuxième expérience a eu lieu pendant l'été 1979. Nous avions passé toute la journée et la nuit sur un feu de forêt. Nous étions heureux du travail accompli lorsque l'état-major m’a demandé de rejoindre le PC mobile (poste de commandement mobile) sur la route de la Gineste pour prendre une autre mission de protection.
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À notre arrivée j’ai découvert la même ambiance que lors du mois de juin 1974. J’ai compris de suite qu'il nous était arrivé un malheur. Effectivement on venait de payer un lourd tribut au feu. Malheureusement cela arriverait encore et encore. Le commandant de ma caserne a repris un texte du colonel Bigeard et l’a publié dans les journaux marseillais. Je me suis aperçu lors des obsèques que toute la ville de Marseille et les corps de pompiers de toute la France étaient en deuil.
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Texte écrit par L'Officier principal des Equipages CHAMFLY Commandant la caserne de Plombières
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17 - Interventions en solitaire
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Tout au long de ma vie, j'ai eu l'occasion d'accomplir des interventions de pompiers pendant mes vacances ou depuis que je suis à la retraite. La première fois cela se passait entre Paris et Valenciennes sur une route nationale. Nous étions en décembre 1972, je venais d'avoir mon brevet de secouriste et je prenais les fonctions de chef à l'ambulance. Avec un ami nous avions décidé de partir faire un voyage en voiture, de Paris à Valenciennes en passant par Verdun (une halte chez mon frère Roger). J'étais quartier-maître, mon copain était un jeune matelot. Nous avons assisté à un accident de la route assez important impliquant trois véhicules. Les gens étaient affolés et ne savaient pas quoi faire il y avait deux personnes incarcérées dans une Peugeot, un corps inerte sur la route, deux autres personnes étaient allongées sur le bascôté. J’ai pris tout de suite la situation en main et j’ai attribué aux personnes valides des tâches de secouristes. Je plaçais un garrot sur la personne sur la route, car elle avait une hémorragie importante à la jambe. J'arrivais à sortir les deux personnes incarcérées avec l'aide de mon camarade et je les plaçais en position de sécurité. Mon camarade a déconnecté les batteries des véhicules afin de prévenir un incendie. Mon plus gros problème venait d'une des personnes sur le bascôté, en arrêt cardiaque. J’ai pratiqué un massage cardiaque et un bouche-à-bouche. L'arrivée des secours m’a soulagé. J’ai fait un rapide compte rendu au responsable des pompiers et les ai laissé travailler. - 191 -
Le responsable m’a félicité, m’a demandé mes coordonnées et j'ai eu la surprise en reprenant mon service d'apprendre qu'il avait écrit à mon commandant pour signaler mon intervention : j’ai reçu ses félicitations. Au restaurant Avec mon épouse nous nous trouvions dans un restaurant de Carcassonne. Nous venions d'être servis lorsqu’on a entendu un grand cri : une dame demandait que l'on appelle les pompiers. Je me suis précipité au secours de cette personne et me suis trouvé devant la situation suivante : il y avait en plein milieu du salon-bar un puits de 30 mètres de profondeur, recouvert uniquement d'une plaque de polystyrène non fixé. Un enfant de six ans qui jouait à proximité était tombé dans le puits d'une hauteur de 8 mètres.
Un client se trouvant a proximité avait sauté dans ce puits pour le secourir mais était également en danger. J'ai analysé la situation et récupéré rapidement des cordes assez épaisses servant à tenir les tentures murales. Je les ai nouées ensemble et j’ai envoyé le tout dans le puits. J’ai ramené le petit garçon pris en charge par mon épouse et j’ai commencé avec l'aide de clients la remontée du sauveteur. Le patron de l'hôtel se faisait agressif avec la mère du garçon je l’ai remis en place et lui ai demandé pour quelle raison un puits se trouvait au milieu du bar. Le lendemain j’ai prévenu les pompiers du département pour qu'ils prévoient la visite d'une commission de sécurité dans cet établissement.
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À la plage
Avec mon épouse nous étions sur la côte Adriatique en Italie dans la ville de Cesenatico. Bel hôtel, personnel très serviable avec nous : il faut dire que nous sommes sociables, mon épouse et moi, et que nous engageons facilement la conversation, mais nous étions des clients comme les autres.
Sur l'Adriatique les plages sont remplies de rangées de parasols et de relax à perte de vue. Je passais mon temps à me baigner ou à observer les gens : j'adore cela. J'aperçois au loin une dame d'un certain âge qui effectue des ronds dans l'eau, je me demande à quel jeu elle joue et je m'aperçois qu'elle est en train de se noyer. Je me précipite vers elle. Il faut savoir que sur ces plages la hauteur d'eau ne dépasse pas 50 cm. Cette dame était tombée dans un trou d'eau et ne pouvait plus en sortir. Je la récupère, la sors du trou. Elle avait perdu connaissance, j'interpelle des nageurs et avec eux je la transporte sur le sable. Elle reprend vie, mon épouse la réconforte et là il se passe une chose incroyable : les personnes se trouvant à la plage prennent à partie le soi-disant sauveteur, perché sur une grande chaise et qui blaguait avec une touriste.
Les secours sont arrivés sur place, je les ai laissé faire : pour moi l'incident était clos.
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Je me suis bien aperçu que les secouristes discutaient avec une personne de l'hôtel, mais je n'y ai pas trop prêté attention. Le lendemain lors de notre descente pour le petit déjeuner, le personnel de l'hôtel était vraiment bienveillant avec nous. Des Italiens venaient me dire merci, je ne comprenais pas ce qu'il se passait. Le responsable de l'hôtel m’a alors montré l'article retraçant mon intervention dans le journal local. De ce jour et jusqu'à notre départ nous n’étions plus des clients comme les autres.
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18 - L'informatique
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En 1984 j'étais chef de tiers à la caserne de Strasbourg (étatmajor). L'officier en second de la caserne voulait introduire l'informatique au sein de notre BSI (Bureau du Service intérieur). Il a fait appel à moi pour m'occuper de cette mise en place avec l'aide du fils de notre commandant Joël Fays. Des amis-chefs TDF (télé diffusion de France) m’ont prêté un ordinateur Apple 2.
Joël m'a appris les bases de l'informatique avec cet ordinateur ; j'ai tout de suite aimé cela. J'ai commencé à me perfectionner sur les différents systèmes d'exploitation et la programmation en langage Basic. Nous avons créé une base de données pour la gestion du personnel. Mon épouse Michèle m'a fait cadeau pour mon anniversaire de mon premier ordinateur un Atari 64 K. Avec cet ordinateur j'ai commencé à travailler jusqu'à 18 heures par jour : j’ai appris à partir de livres le langage informatique ; j'ai lu toutes sortes d'ouvrage. C’était une période où l'informatique était un sujet assez complexe à aborder. Aujourd'hui tout le monde l’utilise. J'ai créé mes premiers programmes de gestion pour classer mes vidéos et gérer mon compte bancaire. Je me suis aperçu que le plus important lors de l'utilisation de logiciel était la maîtrise du clavier sur tous les programmes. La marche à suivre pour utiliser le logiciel était écrite sur l'écran en citant le nom de la touche à utiliser. Mais personne ne connaissait parfaitement le nom des touches. De la même façon, très peu de personnes connaissent parfaitement leur télécommande de téléviseur.
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J'ai donc écrit un petit fascicule pour bien comprendre tout le clavier au fur et à mesure de mon évolution, j'y ai rajouté l'ensemble des commandes pour la gestion des fichiers. Au fur et à mesure de ma progression je me suis équipé de matériel performant : une imprimante Epson LX80, un disque dur de 10 méga ( à cette époque avec un disque de 10 MO on était au top de l'informatique !). Avec mon Bull Micral 30 sans disque dur, j'avais deux lecteurs de disquettes 5 pouces 1/4 et je pouvais utiliser Windows et le logiciel Word. Une disquette servait pour le système, l'autre pour les données.
Dès le début je savais que je devais me former le plus possible à l'informatique pour plusieurs raisons : d’abord cela me passionnait et j'avais beaucoup de facilité à apprendre. Mon avenir était dans l'informatique. Lorsque l'on a qu'un seul travail on vit normalement, mais si on peut avoir une deuxième activité, on a la possibilité de pouvoir aborder l'avenir avec sérénité. À cette époque j'avais un salaire moyen sur lequel on devait prélever la pension alimentaire pour mes deux enfants. Avec l'informatique cela me permettrait de mieux vivre. En observant les besoins des utilisateurs, je me suis aperçu que ce qui leur manquait le plus, c’était la formation. Je décidais donc de créer un mode d'emploi très simple du clavier ainsi que des premières fonctions du système d'exploitation.
En 1987 je trouve par hasard mon premier client : le garage Trianon à La Belle de Mai.
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Michèle avait eu un accident avec la voiture et en discutant avec la patronne du garage, j’ai appris qu’elle elle voulait s'informatiser pour faire sa comptabilité. Je trouvais un revendeur informatique assez un logo bizarre " le nom du magasin était "aux Gay schtroumpfs" dans la galerie marchande du centre commercial Carrefour. Mon premier contrat informatique consistait à donner une formation pratique sur l'ordinateur et par la suite des cours de comptabilité. Nous sommes au mois d'août 1987. Sur notre compte en banque, nous sommes à découvert de 1500 fr. Je paye 4000 fr de pension alimentaire et nous avons 3500 fr de crédit pour l'achat d’une maison de campagne. La première rentrée d'argent nous a permis de remettre les comptes à flot. Nous sommes allés, Michèle et moi, au restaurant pour fêter l'événement. Au mois de juillet, j'avais emporté le logiciel de comptabilité. Un mois après, j'étais capable de travailler sur la compta jusqu'au bilan. À la fin de mon premier cours, la patronne du garage m’a dit que l'on voyait que j'avais fait des études de comptabilité… Mon premier investissement serait dans un PC Bull Micra 30.
J’ai continué à apprendre l'informatique à partir de livres ou de logiciels de formation : je voulais en savoir le plus possible sur les différents systèmes d'exploitation, sur le montage et le démontage des ordinateurs. Comme les militaires pour leurs armes, je pouvais monter et démonter un ordi dans le noir. - 199 -
Un jour j'ai eu une demande particulière d'un client : il n'arrivait pas à trouver le logiciel qui convenait à son entreprise. Et il m’a demandé de lui en créer un. C'était la première fois. Je lui ai fait établir un cahier des charges et à partir de là, j’ai créé mon premier logiciel de gestion des spectacles avec planning incorporé. Par la suite j'ai créé toutes sortes de logiciels : garage, transport, caisse pour une mercerie etc. En 1999 j'assistais pour un client à une démonstration d'un logiciel de gestion pour la vente de vêtement par la société CEGID. Lors de cette démo je posais des questions au conférencier sur les besoins en informatique pour ce logiciel et celui-ci ne trouvait pas les réponses à mes questions. Une personne dans la salle s’est levée et m’a demandé de la suivre dehors. Je me disais qu’il devait vouloir m’exclure de la réunion, mais non ! C'était le responsable de la société Volcom Europe.
Volcom est une marque de vêtement de sport californien basée à Costa Mesa, qui a vu le jour en 1991. Spécialisée dans les vêtements et accessoires de surf, skateboard et snowboard, elle appartient au groupe Kering. Créé en 1991 PDG Jason W Steris
Logo Volcom
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Je l’avais impressionné et il voulait que je m'occupe de son informatique. Il était en train de monter Volcom Europe dont le siège social se trouverait à Marseille. Par la suite je ferais le logiciel de gestion avec une innovation : la saisie des commandes de vêtements sur une même ligne. Lorsque l'on saisit la commande d'un article d’habillement, il faut une ligne par taille et une ligne par couleur. Dans le logiciel que j'avais créé, il n'y avait qu'une ligne de saisie.
Par la suite j’ai créé toutes sortes de logiciels, j'ai même travaillé pour la gestion de l'automate du cinéma Le Cézanne à Aix-enProvence. L'automate était piloté par un ordinateur qui lançait l'ensemble des commandes pour une salle de cinéma. Pour la société de mon regretté ami Bernard Bourelly, j'ai créé un logiciel de gestion de spectacles et d'arbre de Noël. En fonction de mes gains, j'ai toujours fait évoluer mon matériel que je revendais pour en prendre un plus puissant. J'ai eu mon premier ordinateur portable en 1989. Il avait la forme d'une machine à coudre, mais était très performant ; par la suite j'ai eu un Toshiba. En 1999 j’ai décidé de créer mon entreprise. Comme je ne pouvais être gérant, c'est Michèle qui a assumé ce rôle. Le nombre de clients augmentait chaque année : je ne pouvais plus assumer tout seul le travail J'ai embauché un jeune de talent, mais qui n'a pas fait l'affaire. C'est en 2001 que j'ai recruté Christophe très bon informaticien qui à ce jour est toujours avec nous. En 2000 nous avons acheté notre maison du Canet avec un atelier qui sert à la société. Lors de la création il fallait donner un nom à cette société : c'est Michèle qui a eu l'idée : - 201 -
JJBO Concept Jean Jacques Bernard Olivero
Je n'ai jamais recherché un client : c'est toujours le bouche-àoreille qui m’a envoyé mes clients. Le plus fidèle est CTS (Cinéma Télé Services) : depuis 1988 ! Le fait de créer des logiciels a fidélisé certains clients. À ce jour j'ai neuf logiciels en service : Transports Gestion commerciale Carrosserie Gestion de spectacle Gestion du matériel de cinéma Un logiciel est exploité en Algérie (Almex gestion commerciale) J'en ai eu un qui tournait en Suisse (Volcom Suisse) Le travail en informatique me prenait entre 17 et 18 heures par jour. Je me suis épuisé au travail pour en arriver à être tranquille lors de ma retraite. Je veux que mes petits-enfants réfléchissent à l'importance du travail dans la vie de tous les jours.
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19 - Expert en informatique
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En 1990 j'avais la maintenance d'un garage à Marseille. J'ai fait la connaissance d'une personne assez particulière. Fernand S. qui était selon ces dires chauffeur et garde du corps de JC président du conseil régional de la région Provence-Alpes-CôteD'azur. Nous avons sympathisé tout de suite. Il m'a demandé de lui créer un logiciel pour gérer le personnel qui travaillait avec lui, ce que j’ai fait. En décembre 1991 la police l'a arrêté pour malversation et escroquerie. Il est resté en prison pendant six mois. À sa sortie il avait perdu l'ensemble de ses amis. Je lui suis resté fidèle, car l'amitié est une vertu importante. Au mois de mai 1994, on a retrouvé son corps ainsi que celui de son frère dans leurs maisons de Tourtour. L'enquête a été confiée au juge Guénas à Draguignan, qui a fait appel à un expert en informatique, le professeur Jean Girerd. Lors de ces recherches, il a découvert que c'était moi qui avais fait l'installation de sa configuration informatique et de son logiciel de gestion. J'ai été convoqué par la gendarmerie de Marseille qui m’a interrogé sur mon implication dans cette affaire. Suite à cet interrogatoire, j'ai été convoqué au tribunal de Draguignan, pour un rendez-vous avec le juge d'instruction en tant que témoin. Lors de mon arrivée, c'est l'expert qui m’a reçu et interrogé sur le système informatique. Après deux heures de manipulations diverses, le juge a demandé à me voir.
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J'avais peur de la suite de cette affaire en pensant que je pourrais être mis en prison. Le juge m’a signifié qu'il croyait à ma bonne foi, il a modifié mon statut qui de témoin est devenu sapiteur (aide-expert) auprès de l'expert désigné. J’étais soulagé que cette affaire prenne cette tournure. Pendant six mois nous avons travaillé ensemble sur ma première expertise informatique. J'étais chargé de l'étude des données informatiques, le professeur du rapport. C'est avec cette affaire que ma carrière en tant qu'expert en informatique a commencé. La première expertise concernait un détournement de fonds entre un parti politique et une clinique privée, l'argent transitant par Israël. En 1995 j'ai été convoqué à une sélection d'experts, supervisée par le juge Murcianno, pour une affaire très importante. Nous étions une douzaine d'experts réunis dans les locaux d'un institut à Saint Raphaël. Je me suis retrouvé dans une salle avec des personnes en costume muni d'un attaché-case qui me dévisageaient : j’étais en jeans et polo, car nous étions au mois de mai et la température était élevée. Le test consistait à manipuler un ordinateur afin de pouvoir récupérer les données. J’étais en cinquième position. Quatre personnes se sont succédé, mais n'ont pas pu récupérer la moindre donnée : chaque fois, lors de la mise en route, le disque dur se mettait en sécurité et l'écran devenait noir. J'avais amené une petite unité et à la différence des autres je n'ai pas essayé d'allumer l'ordinateur. J’ai démonté cette unité, j’en ai
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extrait le disque dur que j’ai placé dans mon unité et j’ai pu commencer à récupérer les données.
J’ai donc été désigné en qualité d'expert pour une affaire de fraude sur les émissions de timbres.
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Le juge d'instruction avait une affaire de fraude assez importante mettant en cause une personne mineure ainsi que sa mère (personnalité très importante du tribunal de Cannes). Le prévenu avait piégé informatiquement les trois ordinateurs saisis, ce qui fait que le premier expert choisi avait effacé les données du disque dur lors de la manipulation. Pour éviter une erreur identique pour les deux autres ordinateurs
EXPERTISES INFORMATIQUES N°
Date
Tribunal TGI DE 1 19/05/1994 DRAGUIGNAN
Guémas
2 12/06/1995 TGI de Grasse
Mr Murciano
3 19/04/1996 TGI de Grasse 4 11/02/1997 TGI de Grasse
Mr Murciano Mr Murciano
5 29/05/1997 TGI de Grasse
Mad Gate
6 10/07/1997 TGI de Grasse
Mr Murciano
7 28/09/1998 TGI de Marseille
Mad Pena
8 28/09/1998 Marine Nationale 9 14/10/2008 TGI de Marseille
DPSD Marine Nationale Mad BARGOIN EXPERTISE AU SEIN D'AXA
10 2004/2010 AXA France
Juge d'instruction
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Affaire Affaire F Affaire des Cliniques Affaires Timbres Ville de Canne Fraude / Arnaque Affaire enfants Grand Banditisme BMP Marseille Viol Malversation d'agent
Chaque expertise était une aventure nouvelle. Je devais ressortir sur papier toutes les données attrayantes à l'enquête judiciaire. Je passais des heures à rechercher dans les disques durs la moindre information. C'est le Professeur Girerd qui mon enseignée l'art de rédiger un rapport d'expertise. Chaque phrase chaque mot doit être soigneusement réfléchie. Pour une expertise particulière (maltraitance sur des enfants de moins de 14 ans, nous n'avons jamais employé le mot réel. Les photos incriminées ont été classées dans « photos présentant une anomalie ». Pour cette expertise on s'est aperçu qu’il existait un réseau assez important de personnes suspectées d'accomplir des actes répréhensibles . Le réseau communiquait par mail, j'ai créé un cheval de Troie (fichier-espion) que j'ai envoyé à cette personne. Chaque message envoyé ou reçu se transférait automatiquement dans une boîte mail judiciaire. De ce fait la gendarmerie a procédé à une centaine d'arrestations.
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Chaque fois que l'on me donnait une mission, je devais prêter serment dans le bureau du juge.
Je ne peux pas rentrer en détail dans les expertises judiciaires que j'ai effectuées car je suis tenu par le secret professionnel. J'ai eu en ma possession toutes sortes de documents, dans le cadre d’affaires politiques, pornographiques, de grand banditisme etc. Dans une affaire on incriminait un génie en informatique qui avait ni plus ni moins piraté la Banque Directe.
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Il avait contrefait des chèques d'une valeur de plusieurs millions de francs avec cet argent qu'il se faisait virer sur son compte Crédit agricole (personne n'avait remarqué les sommes virées) il détournait des actions de la compagnie aérienne AOM. Il a attiré l'attention lorsqu'il a décidé d'acheter une maison chez le notaire. Il a fait un chèque de 600 000 fr (90 000€). Le notaire a appelé la gendarmerie, car il n'avait que 16 ans ! Lorsque j'ai commencé l'étude de sa configuration informatique, j'ai trouvé toutes sortes de document falsifiés : chèques de la Banque Directe, carte de police vierge. Il y avait des lettres concernant une relation assez poussée avec une femme d'un certain âge. Les propos tenus laissaient supposer une liaison torride. J'en ai fait part au juge qui m'a avoué que cette personne était sa mère (arrêtée tout de suite). J'ai conduit deux expertises tout seul : la première sur le grand banditisme, la seconde sur une affaire de viol. Lors de la première, j'ai assisté à une perquisition. J'ai été convoqué au tribunal. À mon arrivée il y avait dans le couloir le prévenu menottes aux poignets. La juge m'a expliqué le déroulement de l'opération. Je ne devais adresser la parole à personne sur place. Nous avons pris place dans deux véhicules de la police ; un commissaire nous accompagnait. Sur place les policiers ont effectué une fouille en règle de la maison. J’ai signalé à la juge qu'il devait y avoir un ordinateur portable dans le bureau (il avait laissé l'alimentation du portable). Le portable était caché à la cave, il nous l'a remis. - 211 -
Cette perquisition m’a mis mal à l’aise car c'était la première fois que je participais à ce genre d'événement. Pour ma deuxième expertise seul, il s'agissait d'une personne ayant drogué une fille afin d'abuser d'elle. Il avait tout filmé et j'ai retrouvé ce film sur l'ordinateur. Lors de mon investigation j'ai découvert une photo mettant en scène un enfant mineur. La photo avait était prise avec un téléphone portable en 2004. J'ai trouvé la marque du téléphone et la date de la prise de vue. Cette affaire n'étant pas liée avec la première, j'ai fait un rapport complémentaire. Deux ans après j'ai reçu une convocation d'expert pour le procès à la cour d'assises d'Aix-en-Provence. Je me suis préparé pour cette convocation. J'ai repris le dossier complet et les annexes. Le jour du procès, je me suis présenté au tribunal, on m'a fait entrer dans la salle d'audience (c'était un procès à huis clos). Nous étions trois experts convoqués, je pensais pouvoir observer les autres, mais je suis passé en premier.
Je peux vous dire que j'étais très impressionné. Le président du tribunal m'a appelé à la barre il m’a demandé de me présenter. Les premières questions avaient trait au rapport : on m’a demandé des précisions sur tel ou tel point. À un moment donné le président a montré une photo nue de la compagne du prévenu et m’a demandé qui avait pris cette photo. Je lui ai affirmé que c'était l'accusé : il niait. - 212 -
Je demandais au président de se rendre à la page suivante du rapport où l'on voyait le prévenu dans une glace en train de prendre cette photo. La veille le policier chargé de l'affaire m'avait appelé pour me dire qu’il avait eu des problèmes avec l'avocat de la défense et de me préparer à cet affrontement. J'étais inquiet quand le président lui a donné la parole, mais l'avocat a affirmé qu'il n'avait aucune question et que le rapport parlait de lui-même.
Chaque fois que j'étais nommé pour une expertise, j'avertissais ma hiérarchie militaire. Lors de l'affaire Yann Piat, le journal Le Monde indiquait qu'un adjudant-chef de la marine faisait partie des experts.
J'étais convoqué par le commandement pour m'expliquer. Lors de cette convocation j'avais prévenu le juge Murciano de mon problème : il a appelé directement le commandant du bataillon pour lui expliquer pour quelle raison il avait fait appel à moi. Le DPSD (Direction de la Protection et de la Sécurité de la Défense) m’a convoqué dans ses bureaux de l'Arsenal de Toulon. Pendant plus d'une heure ils m’ont interrogé sur mes connaissances en informatique ainsi que sur les différentes expertises que j'avais faites. Je leur ai expliqué comment j’avais appris l'informatique. Pour les expertises, je leur ai expliqué que j'étais sous le secret professionnel. J’ai été ensuite présenté au commandant responsable du DPSD sur la région qui m’a demandé si je voulais travailler avec eux : j'ai répondu par l'affirmative. - 213 -
De ce jour j’ai reçu l'habilitation « Secret Défense ». Il faut savoir que dans mon unité il n'y a qu'un nombre très restreint de personnes ayant cette habilitation. Elle donne accès à tous les locaux de la Marine sans restriction. J'ai travaillé avec le bureau DPSD de Marseille sur deux affaires, l’une à Marseille, l’autre à Paris. Je ne peux bien sûr en dire plus.
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Je vais vous raconter une expertise particulière. Au mois de mai 2008, je suis contacté par le responsable du personnel de la Chambre des métiers d'un département. À la demande de leurs avocats (avec qui j'avais déjà travaillé), il m’a demandé d'effectuer une expertise informatique suite à un piratage de leurs données sur le serveur. Je me suis rendu sur place. Il connaissait déjà l'auteur de ce délit : une secrétaire. J’ai récupéré la configuration informatique de cette personne et j’ai commencé mon expertise. Après une recherche approfondie, j’ai découvert effectivement l'intrusion de cette personne sur le serveur mais elle avait utilisé les codes du directeur. Je décidais d'effectuer une enquête interne pour déterminer comment elle s'était procuré les codes. Quelle a été ma surprise en voyant que tout le monde avait ces codes ! Lorsque j’ai rendu mon rapport, j’ai préconisé une expertise de sécurité de l'entreprise. Pour la personne incriminée, je ne voyais comment la sanctionner, car la faute incombait en priorité au responsable qui donnait ses codes à tout le monde. Le président de la Chambre des métiers a autorisé l'expertise. Et là cela a été l'apothéose. Tout le monde avait accès au serveur. Les codes de chaque utilisateur étaient écrits sur un post-it sur l'écran. Le logiciel gérant toute la Chambre était l'œuvre d'une seule personne. Il n'y avait aucune sécurité en cas d'absence (maladie - congé). - 215 -
Lorsque je l'ai contactée, elle m'a affirmé qu'elle n'était jamais malade et ne prenait jamais de congé. Je préconisais dans mon rapport de s'en séparer rapidement et de prendre une société avec du personnel informaticien. Et le meilleur pour la fin : un câble réseau partant de l'armoire de brassage sortait de l'établissement. Après recherche il allait chez la concierge pour lui fournir un accès internet. Elle avait l'accord du président de la Chambre (aux élections suivantes, ce forfait lui a coûté son fauteuil). Le responsable m'a appelé le 24 décembre : il avait l'intention de licencier le responsable informatique et de le remplacer par notre société. Je lui ai répondu qu’on ne « virait » personne le 24 décembre. Nous avons travaillé avec eux pendant deux ans afin de remonter un service informatique compétent. La personne qui avait gardé son poste m'en a été reconnaissante. Un ami responsable du service « Déontologie » de la société AXA m’a demandé plusieurs fois si je pouvais effectuer des expertises judiciaires sur des configurations informatiques d'agents indélicats. Ce que j’ai fait et j’ai été nommé expert informatique chez AXA Assurances. J'ai dû pratiquer une cinquantaine d'expertises qui m’ont mené dans plusieurs régions.
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Lors des expertises pratiquées, j'ai découvert toutes sortes de délits : vol sur les contrats des personnes (âgées de préférence), falsification de carte bleue (affaire communiquée à un juge d'instruction), trafics de toutes sortes. J’ai été confronté à des cas de suicide (suite à des malversations). J’ai toujours fait preuve d'humanisme en respectant les personnes.
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20 - Le social
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Pendant ma longue carrière, j’ai été confronté à la misère sociale. Dès que j'ai eu la possibilité d'aider les personnes, je m'y suis attaché. La première fois c'était en 1986. Je cherchais un ordinateur et j’ai été attiré par une annonce alléchante : une configuration informatique assez puissante à moitié prix. Je me suis rendu chez le vendeur. À mon arrivée j’ai senti comme un malaise dans cette famille. Tout le monde était triste. Je discutais avec l'épouse du vendeur, celui-ci n'était pas encore arrivé. Elle m'a expliqué qu'il était informaticien au chômage et il vendait son matériel pour pouvoir manger. Je n'ai pas eu le courage de l'acheter, je lui ai prêté une petite somme pour finir le mois, j'ai appelé un ami à TDF (Télé diffusion de France). Le lendemain il avait retrouvé un emploi. Il m’a remboursé le petit prêt et j'ai encore ce jour des contacts avec lui. En 1992 j'ai fais la connaissance d'un informaticien (Christian) il venait avec un ami de monter une société sur la région. Le courant est passé de suite avec lui. Il était seul sur Marseille le soir il venait mangé avec moi à la caserne avec Michèle on décidait de faire de lui un invité permanent . Sa société ne marchait pas il en était arrivé a distribuer le journal le Marseille sept dans le secteur. On décidait de le prendre en charge le soir il repartait avec le repas du lendemain dans des Tupperware. Il à finalement trouvé une bonne place sur Aix les Milles, il à même rencontré sa future épouse. Il est parti vivre au Canada avec sa famille qui se compose de Christian - Caroline - Emilie - Romain et Victor. C'était en 1992 on est en 2015 on se parle très souvent sur Skype et chaque fois qu'il revient en France il nous consacre une journée. - 221 -
J'ai travaillé avec le service social du bataillon, je m'occupais de trouver du travail aux personnes dans le besoin. Pendant cette période et grâce à l'ensemble de mes connaissances, j'ai fourni du travail à une trentaine de personnes. Je me suis aperçu que lorsqu’un marin pompier était blessé gravement, la caserne s'occupait de la famille pendant les premières semaines, mais qu'elle était abandonnée si cela durait trop longtemps. J'ai proposé la création d'un service d'aide aux blessés qui se mettrait en place uniquement lors d'accident. Mais cela nous a été refusé. Les Restos du cœur Pendant une année j'ai réussi à aider les Restos du cœur. Lorsqu'un feu se produisait dans un magasin, j'allais voir le responsable après l'incendie et lui demandais un don pour les restos. J'ai moi-même participé à une grosse intervention sur un feu d'entrepôt au Casino de Château- Gombert. Après l'incendie le directeur a fait un don en nourriture d'une valeur de 50 000 francs (8000€). J'ai utilisé les moyens des marins-pompiers pour récupérer et livrer la marchandise.
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21 - La religion
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Dans ma famille on est catholique. Ma mère était très croyante. On allait à la messe tous les dimanches, aux Rameaux, à Pâques et à Noël. Le 14 septembre 1951, ma mère a mis monde des jumelles, Yvonne et Éliane. Yvonne était très malade et au bout de 27 jours le docteur a dit à mes parents qu’elle ne passerait pas la nuit. Ma mère a envoyé mon père chercher le curé pour qu'il célèbre le baptême de mes deux sœurs. Ma sœur Yvonne a guéri et c’est ma sœur Éliane qui est partie. Nous allions tous les jeudis après-midi au catéchisme. Le prêtre nous racontait l'histoire de Jésus. Nous avions ensuite un goûter et un film de Laurel et Hardy. Une fois il nous avait emmenés en car au Caillol (quartier de Marseille) pour assister à la projection du film Les Dix Commandements (durée 3 h 30). À notre retour il était plus de 19h00 nous avions peur de nous faire gronder, mais ma mère était au courant. Mon frère Jean-Jacques, ma sœur Yvonne et moi-même avons fait notre communion solennelle.
Jean Jacques le jour de sa communion
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J'ai suivi le catéchisme à Bois-Luzy, mais suite à notre déménagement, ma communion solennelle a eu lieu à La Busserine avec le père Maurice. Lors de la préparation de la communion, nous étions partis trois jours sur le site de la Sainte- Baume. C’est à cette même période que Michèle a fait sa communion. C’est ainsi que lorsque j’ai connu la femme de ma vie j'avais 12 ans c'était en 1964. En1983, je l’ai retrouvée pour ne plus la quitter. Par la suite je n'ai pas eu beaucoup de contact avec la religion. J’ai commencé à devenir pratiquant quand j'ai connu Michèle car sa tante était sœur aux Dames réunies. Nous allions souvent à la messe. Pour Noël c’était à l'église Saint-Victor. Nous avions régulièrement des visites à Notre-Dame-de-la-Garde. Lorsque nous étions en vacances, nous assistions à des messes dans les villages que nous traversions. À cette époque j'ai connu monseigneur Blanc qui était le responsable de Notre-Dame-de-la-Garde.. Il a offert à ma demande un oratoire dédié aux marins-pompiers de Marseille. Il se trouve sur le chemin principal. Lorsque la Ville nous a demandé où nous voulions placer notre monument aux morts, j’ai discuté avec monseigneur Blanc qui m’a proposé un emplacement idyllique à Notre-Dame-de-laGarde. Malheureusement notre commandement n'a pas accepté et le monument se trouve face à la caserne de Strasbourg.
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22- TĂŠmoignage
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Je vous livre la copie d'un email que ma envoyé un ami d'enfance quand je lui ai dit que j'écrivais un livre sur ma vie. Mohamed Mosbahr jjbo@jjbo-concept.com De : "Philippe Mo" <mosbah.philippe@gmail.com> Date : mardi 24 mars 2015 22:26 À : <jjbo@jjbo-concept.com> Objet : Bribes de souvenirs lointains sur des interventions courageuses du jeune un peu fou et téméraire Bernard HagopianOlivero 25/03/2015 Je vous raconte ici des souvenirs très lointains qui se passent entre les années 1965 et 1968. Dans le bidonville de la Campagne Picon, dans l'après midi, un incendie se déclare dans quelques maisons construites en bois par des personnes venues d’Afrique du nord. Les attroupements se font rapidement et en attendant l'intervention des marins-pompiers, les personnes présentes éteignent le feu en se passant des seaux d'eau qu'ils remplissaient à partir d'une fontaine d'eau potable. Je revois Bernard Olivero sortir d'une maison avec un enfant dans les bras et la foule se presser autour de lui pour le soutenir et récupérer l'enfant. Je n'ai pas d'autres images de cette scène, j'avais pour ma part entre 11 et 14 ans. Je reste convaincu que cette action aujourd'hui aurait été saluée avec les honneurs, et que la vocation d'être marin-pompier est née ce jour-là pour Bernard Olivero.
Voilà malheureusement comment étaient logés les gens dans le Marseille de 1966. J'ai connu cela et j'espère ne plus le revoir. Pour l'histoire que raconte mon ami Mohamed, j’ai eu par un autre copain d'enfance la confirmation de ses dires. Pour ma part je n'ai que des bribes de souvenirs. - 229 -
Témoignage d'une école de danse que j'avais contactée et engagée pour le déplacement de la flamme olympique des jeux d'Albertville en 1992.
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Témoignage de Wulfran Dherment. Ce jeune homme était enseveli dans l'immeuble des Têtes à Toulon en 1989. Mail reçu le 10 juin 2015
Cher Monsieur Olivero, Aucun mot n’est assez fort pour exprimer ma gratitude envers les pompiers qui ont pour vocation de sauver la vie des autres. C’est donc à travers vous et pour vous que je fais parvenir mes remerciements les plus sincères, pour m'avoir porté secours avec votre équipe le 15 février 1989, car sans des hommes comme vous je ne serai plus de ce monde. Je vous serais éternellement reconnaissant. Avec toute ma gratitude. Wulfran Dherment.
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23- Des jours sombres
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Je vais vous raconter trois dimanches qui ont été pour moi des jours sombres. Le 10 février 1980 Ma mère était hospitalisée à la clinique Saint-bernard à Marseille elle était gravement malade. j'allais la voir tous mes jours de repos et lui téléphonais quotidiennement. Le 5 février elle avait fêté ses 60 ans, elle voulait manger des gambas à l'américaine que je lui avais donc préparées avec plaisir. Le samedi 9 février, je devais la voir vers 15 h 00, mais je ne suis arrivé que vers 17 h 00 elle m'a « passé un savon ». Le soir même mon frère Jean-Jacques m’a appelé pour me demander des nouvelles. Je lui ai dit la colère de Maman, il m’a répondu : « Cela veut dire qu’elle va bien ! » Le dimanche matin j’ai reçu un appel de la clinique : ma mère allait très mal. Je me suis rendu sur place et le médecin de garde m'a expliqué que c'était la fin. J'appelle mes frères Roger, Jean-Jacques et ma sœur Yvonne. Toute la journée nous sommes restés au chevet de ma mère. Mon frère Roger habitait assez loin, ma mère a attendu qu'il arrive pour partir.
Après le départ de ma mère Jean-Jacques m’a dit On n'a plus de Maman Ce mot maman que l'on ne prononcera plus.
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Le 31 mai 1981 Un an venait de s'écouler après le départ de ma mère. Le 25 avril mon frère s'était remarié, il était très heureux et avait acheté un garage, il revivait. Le 30 mai avec ma première épouse nous étions au marché de la Belle de Mai lorsque j'ai vu des champignons de Paris magnifiques. J'en ai acheté et j’ai dit : « Je vais appeler Jean-Jacques, il les adore ». Il était d'accord pour venir les manger le soir même. Vers 17 h 00 il m'a appelé pour me dire qu'il ne viendrait pas : sa voiture était en panne. Je lui ai proposé de venir les chercher. Je suis parti vers 18 h 30, mais je suis tombé en panne devant la passerelle des Chartreux. Je suis allé à la caserne des marins-pompiers qui se trouve en dessous et là je suis tombé sur un copain de garde. Il m’a réparé ma voiture et j'ai pu récupérer mon frère et sa femme. Nous avons passé une très belle soirée..De ce jour j'ai toujours protégé ce copain et ami, car grâce à lui j'ai pu avoir une dernière soirée avec mon frère. Le lendemain nous avons passé la journée avec la famille de mon ex-femme. Le soir on sonne à la porte c'était un camarade qui venait annoncer que j'avais eu un accident de la route très grave. Après dissipation de ce quiproquo je me suis rendu à l'hôpital Sainte-Marguerite où mon frère avait été transporté après un accident de moto. Il était inconscient, et ne se réveillerait plus jamais, il est décédé le 2 juillet 1982. Lors de la création de la société pour le garage boulevard Icard, Jean-Jacques avait voulu que j'apparaisse dans les statuts : il m’avait donné une quinzaine de parts. En 1984, la mère de son fils Stéphane est venue me voir à la caserne de Strasbourg. Elle m'a affirmé que selon les dires de sa femme, Jean-Jacques se serait réveillé et aurait demandé à signer la vente du garage - 236 -
(j’aurais été présent et aurais donné mes parts). De ce fait son fils n'avait droit à rien. Je lui ai affirmé que je n'étais pas au courant de cette histoire et je suis allé porter plainte au commissariat pour faux et usage de faux (il avait contrefait ma signature) Je n'ai jamais eu de nouvelles de cette affaire, mais j'ai su par la suite que Stéphane pensait que je l'avais spolié, ce qui est faux. Je tenais à parler de cette histoire pour rétablir la vérité.
Adieu Jean-Jacques, adieu mon frère Là où tu vas, ne m'oublie pas ! Et souviens-toi de la lumière Qui remplissait nos chants de joie. Si dans mes yeux, il y a des larmes, Ce n’est rien, tu sais, ça passera ; Il est des douleurs qui désarment, Des souvenirs qu'on n'oublie pas.
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Le 11 juillet 1982 Nous étions au camping de Tallard (Hautes-Alpes) il y avait mon ex-femme, mon fils Frédéric et ma fille Laetitia. Il était 13 h 00, nous venions de déjeuner. Frédéric a voulu aller remplir les bouteilles d'eau à la fontaine du camping. Il a emmené sa sœur avec lui, elle avait un petit maillot deuxpièces bleu. J'ai entendu crier. D'instinct je me suis précipité vers la fontaine. Il y avait un véhicule 4X4 arrêté. Dessous j'ai aperçu le maillot de ma fille. J’ai récupéré ma fille et demandé à ce qu'on appelle les pompiers. Je l’ai allongée sur le gazon, on m'a apporté une couverture. J'auscultais ma fille et je me suis aperçu qu'il y avait des traces sur son ventre. J'ai eu peur qu'elle ne soit passée sous les roues du véhicule. Je lui parlais sans arrêt. Les pompiers sont arrivés, ils l’ont emmenée avec sa mère à l'hôpital de Gap. Après leur départ, je me suis effondré en pleurs. Mon fils est venu à côté de moi. Le responsable du camping m’a dit qu'il avait vu en moi une autre personne qui réagissait comme un pompier non comme un père. La chance nous avait souri : ma fille n'avait que des brûlures superficielles. Depuis ce jour j'ai toujours et j'ai encore peur pour elle.
Ma fille Laetitia
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24 -Anecdotes
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Nicole Croisille Nicole Croisille est une artiste des années 1970. J'aime bien certaines de ces chansons. En 1975 j'étais de garde au poste de Saint-Antoine lorsque je reçois un appel de l'état-major. On me demande de me rendre au plan d'Aou (quartier de Marseille) pour faire une piqûre à l'artiste qui doit chanter le soir même. Je dois y être à 20 h 00, car le spectacle commence à 20 h 30. Au début je pense que c'est une blague d'un copain travaillant au PC, mais non c'est vrai. J’arrive à 20 h 00 au chapiteau. On me dirige vers la loge de l'artiste j'aperçois une personne âgée. Je lui demande où se trouve Nicole Croisille. Elle me répond : « Mais c'est moi ! » Je m'excuse (elle paraissait avoir 55 ans elle n'en avait 38 !) Elle m'explique qu'elle est aphone et qu’elle a besoin d'une piqure de cortisone. Effectivement elle a des difficultés à parler. Je prépare la seringue, elle me montre son derrière et je la pique. Elle me demande quand je commence, je lui dis que c'est fait, mais que je vais rester un quart d'heure avec elle en cas de complication. Dix minutes après elle parlait normalement le produit avait fait des miracles Elle m’a donné une photo d'elle en marquant : « À mon pompier qui m’a piquée sans me faire mal. »
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Julien Clerc Cela se passe en 1985 juste après l’intervention au Mexique. Je préparais le spectacle de la Sainte-barbe 1985. J'étais allé voir Julien Clerc au Palais des sports. J'avais été émerveillé comme d'habitude par sa prestation. Il faut dire que j'adore Julien et que je le suis depuis 1972, date du premier spectacle que j'ai vu à Paris lors d'un voyage avec un ami. L'ouverture du spectacle était magnifique, une musique qui allait crescendo. Et une chanteuse américaine qui annonçait Julien. Il m’est venu à l'idée de copier cette ouverture pour mon spectacle. Le deuxième soir, j'allais voir Julien dans sa loge (il faut dire qu'avec la tenue de pompier on passe partout). J’ai demandé à lui parler, je lui ai expliqué mon idée. Il a fait appeler le preneur de son et lui a dit : « Donne à ce pompier ce qu'il demande. » Le preneur de son m’a demandé ce que je voulais. J'ai dit : « Tout ! ». Le soir même il m'a enregistré tout le spectacle sur une cassette de qualité que j'ai toujours trente après : je la donnerai à l’un de mes petits-enfants.
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En 1985 à mon retour du tremblement de terre de Mexico, nous avons eu droit à une cérémonie militaire avec décoration devant la mairie de Marseille. J'ai eu le privilège d'être décoré de la médaille pour acte de courage et dévouement (Argent 1ère classe) par monsieur le maire de Marseille Gaston Defferre. L'année suivante, après un accident il nous a quittés le 7 mai 1986. J’ai été convoqué par mon capitaine de compagnie qui m’a demandé de m'occuper de la mise en place des piquets d'honneur pour la chapelle ardente mise en place à la mairie de Marseille. Je me suis occupé pendant cinq jours de la bonne marche de cette opération. J'ai vu défiler des centaines de personnes, certaines étaient émues avant et après, d'autres uniquement devant le corps de monsieur le maire : avant elle ne se souciaient guère du défunt. J'ai assisté à l'arrivée de monsieur le président de la République, très affecté par la perte de son ami.
Le jour des obsèques, je me suis occupé de la garde désignée pour porter le cercueil.
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Avant d’écrire ce souvenir, j'ai fait des recherches auprès de mes camarades afin de vérifier l'authenticité de cette histoire. Un peu d'histoire Le site archéologique du port antique, situé au fond du VieuxPort de Marseille, est la preuve matérielle de l’origine grecque de la ville dès 600 avant Jésus-Christ. En 1967, lors de travaux d’aménagement du quartier de la Bourse, les fouilles ont mis au jour le port antique de Marseille : nécropole et remparts d’époque grecque, quai, bassin d’eau douce, voie dallée d’époque romaine. Un musée a été intégré au rez-de-jardin sous le centre commercial et ouvert au public en 1983. Le projet de rénovation et d’agrandissement du musée lancé par la ville de Marseille a porté sur la restructuration de ces espaces. C'est grâce au travail commun, dès la conception du projet et la phase concours lancée en 2011, du cabinet d'architectes Carta associés, du studio de scénographie Adeline Rispal et de l'entreprise Léon Grosse que les principales singularités du projet ont été appréhendées : une réhabilitation lourde dans un site en exploitation nécessitant une organisation logistique pointue. Une mise en scène muséographique appuyée par des moyens multimédias innovants : une grande première pour l'entreprise Léon Grosse puisque jamais jusqu'alors la muséographie n'avait été intégrée dans ce type de procédure. Une réalisation de l'opération dans des délais très courts : un an et demi. Une contrainte majeure s'est imposée pendant toute la durée des travaux : l'épave monumentale du navire antique déjà exposée dans l'ancien musée s'est avérée intransportable ! Elle a été donc
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protégée dans un caisson étanche puis minutieusement restaurée pendant les 6 derniers mois du chantier.
En 1974 les marins-pompiers de Marseille sont demandés pour arroser le bateau antique. J'ai le souvenir de plusieurs nuits passées avec des camarades : notre mission était la mise en action de lances à incendie alimentées par des citernes d'eau de mer pour tenir toujours humide ce bateau antique.
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27 - DĂŠcorations
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Tout au long de ma carrière j'ai reçu des témoignages et des récompenses pour souligner les actes de courages effectués. Ces témoignages étaient sous forme de décorations ou de lettre de félicitations. J'ai totalisé 11 décorations Médaille de la défense nationale Bronze Médaille de la défense nationale Argent Médaille du courage et dévouement Bronze (3) Médaille du courage et dévouement Argent 1er Classe (2) Médaille du courage et dévouement Argent 2éme Classe Médaille Militaire Médaille commémorative d'Italie Médaille commémorative du Mexique
Médaille de la défense nationale La médaille de la défense nationale est une décoration militaire française. Elle a été créée par Charles Hernu, ministre de la Défense et mise en place par le décret n°82-358 du 21 avril 1982 abrogé et remplacé par le décret n°2014-389 du 29 mars 2014. Elle récompense les services particulièrement honorables rendus par les militaires (d'active et de réserve) pour leur participation aux activités opérationnelles ou de préparation opérationnelle des armées et les interventions au profit des populations. La médaille comporte trois échelons : or, argent et bronze. Elle comporte également des agrafes. On m’a décerné l'échelon bronze et argent.
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Médaille pour acte de courage et dévouement Cette distinction est destinée à marquer des actes de courage et de dévouement, à l’occasion, par exemple d’opérations de sauvetage. Qui peut en bénéficier ? La Médaille d’honneur pour acte de courage et de dévouement récompense toute personne qui, au péril de sa vie, se porte au secours d’une ou plusieurs personnes en danger de mort. Elle peut être attribuée collectivement aux unités d'intervention et de secours avec, pour les personnels en service au moment des faits récompensés, le droit au port d'une fourragère tricolore. Quels sont les critères à remplir ? Les règles de détail relatives à ces récompenses sont définies dans l'instruction n° 3918 du 18 septembre 1956 et la circulaire du 14 avril 1970 du ministère de l’Intérieur.
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Les actes récompensés doivent répondre à deux conditions : le sauveteur a mis sa vie en danger à l'occasion d'un acte précis de courage et de dévouement, un délai court s’est écoulé entre le fait et la demande de médaille (cette distinction ne récompense en aucun cas l’ensemble d’une carrière). La décision d'attribution peut être prise tout au long de l'année par arrêté du préfet. On m’a décerné cinq médailles :
Deux médailles de bronze pour mes interventions à Toulon (Var), au Mexique et en Italie. Deux médailles d’argent 1ère classe, interventions au Mexique et en Arménie. Une médaille d’argent 2ème classe, (UISC7).
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1 étoile
2 étoiles
pour les
pour l’Italie
Médaille commémorative Italie La médaille commémorative est une décoration militaire du pays concerné. Cette récompense est destinée à distinguer les personnes civiles et militaires qui ont participé à des missions menées hors du territoire national. Elle n'implique pas de faits de guerre individuels ou collectifs et peut être décernée aux forces de présence.
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Médaille militaire La médaille militaire est une décoration française, instituée le 22 janvier 1852 par Louis-Napoléon Bonaparte pour récompenser les militaires ou assimilés, non-officiers. Elle est parfois appelée Médaille des braves ou Bijou de la nation Elle récompense à la fois les soldats, gradés et sous-officiers, aspirants et à titre exceptionnel, les généraux ayant commandé en chef devant l'ennemi. La médaille militaire a été, depuis sa création, la récompense des campagnes du Second Empire à nos jours, elle a réuni sous sa devise : « Valeur et Discipline », les soldats les plus anonymes aux héros les plus populaires tels Georges Guynemer ou Jean Moulin. Elle compte parmi ses récipiendaires des chefs militaires français tels que les maréchaux Joffre, Foch, Pétain, Gallieni, Lyautey, Leclerc, de Lattre, Juin, etc. et alliés (les généraux Pershing, Montgomery...) ; à titre très exceptionnel quelques civils comme le président Roosevelt (à titre posthume) et Sir Winston Churchill. Dans la Marine elle est attribuée automatiquement après 25 ans de services je l'ai eu à 20 ans.. Cette médaille m'a été décernée à titre exceptionnel pour l'intervention en Arménie.
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28- Ă&#x2030;pilogue
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Voilà c’est fini. Je viens de terminer le livre sur une partie de ma vie dont j'ai écarté volontairement le volet familial. J'espère que mes petits-enfants le liront avec intérêt et découvriront qui était vraiment leur Pépé. Je n’ai pas pu écrire tout ce que j’ai fait le livre aurais été trop long. Les faits que je vous ai contés sont les plus marquants de ma vie. Tout ce que j'ai réalisé depuis 1983 je le dois à Michèle ma femme qui m’a apporté la sérénité dans ma vie de tous les jours.
Pour mes interventions en tant que pompier, j’ai cité les plus importantes ou celles qui présentaient un cas particulier. J'en ai fait beaucoup : des simples, des compliquées, des bizarres, des pénibles… Mais dans l’ensemble je les ai toutes effectuées avec l’amour que je portais à mon métier. En matière d’informatique, les expertises que j’ai pratiquées sont soumises au secret professionnel, je ne pouvais donc pas vous les conter en totalité. Je vous en ai offert des morceaux choisis. Je garde un très bon souvenir de cette expérience, également pour les expertises Axa qui m’ont permis de voyager dans toute la France. Elles étaient plus éprouvantes, car souvent nous étions confrontés à la détresse humaine : des gens malheureux ou des personnes qui se sachant traquées ont préféré quitter la vie que de subir le déshonneur. Pour tous ces gens-là je n’ai fait que mon travail d’expert sans trop les accabler. Je me suis toujours amusé à créer des spectacles pour les pompiers chaque fois c’a été un plaisir nouveau. J’ai pu arriver à faire ce que je voulais à cause des connaissances que j'avais accumulées en aidant des personnes qui m’en ont été reconnaissantes.
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Je pense à Aristide Boyer le fournisseur en costumes de l'ensemble des opéras de France à qui j’ai gracieusement mis en place son système informatique. J’ai eu l’aide de Marie-Jo une personne formidable qui m’a toujours suivi lorsque je voulais une chorégraphie pour un spectacle. Nous avons toujours eu une amitié et une complicité parfaites. L'ensemble des participants à mes spectacles étaient des marinspompiers, en général toujours les mêmes (Néné, Dédé, Guintchou), la personne chargée de l’éclairage (Serge) et surtout notre décorateur en chef et ami (Alain) qui malheureusement nous a quitté trop tôt. Pour les arbres de Noël je sollicitais surtout des enfants. Lorsque je faisais la demande auprès des parents, ils étaient tous partants pour jouer dans le spectacle. Je les choisissais et donnais des rôles secondaires aux enfants restants : je n’ai jamais refusé un enfant qui voulait participer. Encore ce jour lorsque je rencontre des parents ils me disent que leurs enfants parlent toujours de moi et gardent un très bon souvenir des spectacles auquel ils ont participé. Les amis « Les amis peuvent transformer les mauvais moments en bons souvenirs et les bons moments en souvenirs inoubliables. » J’ai toujours eu des amis depuis mon enfance jusqu’à aujourd’hui, de Bois Luzy à La Busserine en passant par les marins-pompiers. Dernièrement pour écrire ce livre j’ai revu deux amis Lhalmy et Mohamed. Je les connais depuis 1964 soit 51ans et lorsque nous nous sommes vus, on aurait dit que nous nous étions quittés la veille. J'ai également des amis pompiers dont je suis proche. Les autres, je les rencontre lors de départs à la retraite ou à d'autres manifestations. - 258 -
Parmi les amis, disons civils, je pense à Albert qui est comme un frère pour moi : il a toujours été là dans les moments difficiles. À Christine aussi et à sa fille Audrey qui m’ont aidé lors de l'absence de ma fille et de mes petits-enfants.
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Diaporama de famille
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Michèle & Bernard Olivero Ce livre est dédié à mes petits-enfants, je tiens, par ces lignes, à laisser une trace de ce que j'ai vécu de 1952 à ce jour. Au fur et à mesure que l’on écrit, on s’évade, on s’engage dans des chemins impossibles, certains souvenirs reviennent. Mais la mémoire fait parfois défaut : je n’ai alors pas hésité à faire appel à mon frère et à ma sœur ou à des amis afin de rendre la relation des faits la plus exacte possible.
Il y aura peut- être une suite qui sait ?