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Chapitre 1 | Le serviteur souverain
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Jean 13:1-35 Le serviteur souverain
J’ai dû prononcer un «message d’adieu» aux Églises où j’ai servi et ce, à trois reprises dans mon ministère. Cela n’a rien d’aisé. Je ne sais pas si j’y suis parvenu, mais mon objectif était toujours de les préparer à ce qui était devant eux. J’y incluais un avertissement et des instructions. Ils appelleraient un nouveau pasteur et entreraient dans une nouvelle phase du ministère, et je voulais qu’ils soient à leur avantage.
Jean 13 à 17 est une sorte de «message d’adieu» de notre Seigneur à ses disciples bien-aimés. Ce message culmine avec sa prière d’intercession pour eux et pour nous. D’autres discours d’adieu ont été prononcés dans les Écritures: par Moïse (Deut. 31 à 33), Josué (Josué 23 et 24) et Paul (Actes 20). Jésus ajoute cependant un «atelier pratique» important à son message, lorsqu’il lave les pieds de ses disciples. C’est une leçon de vie qu’ils n’oublieront jamais.
Ce passage montre notre Seigneur impliqué dans une quadruple relation: avec son Père céleste (Jean 13:1-5), avec Simon Pierre (Jean 13:6-11), avec tous les disciples (Jean 13:12-17) et avec Judas (Jean 13:18-35). Chacune de ces parties délivre un message spécial, une vérité spirituelle qui va nourrir votre propre vie chrétienne.
L’humilité: Jésus et le Père (13:1-5)
Jésus est entré à Jérusalem le dimanche, et le lundi, il a nettoyé le temple. Le mardi, un conflit a éclaté avec les chefs religieux, lorsque ceux-ci cherchent à le trom-
per pour obtenir de quoi l’arrêter. Ces événements sont consignés en Matthieu 21 à 25. Le mercredi semble être un jour de repos, mais le jeudi, il retrouve ses disciples dans la chambre haute afin d’observer la Pâque. En Jean 13, les versets 1 à 3 mettent l’accent sur ce que notre Seigneur sait et les versets 4 et 5 sur ce que notre Seigneur fait.
Tout d’abord, ce que notre Seigneur sait. Jésus sait que son «heure était venue». De tous les auteurs des Évangiles, Jean est celui qui insiste sur le fait que Jésus suit un «calendrier céleste» synchronisé sur la volonté du Père. Notez le développement de ce thème: – 2:4 «Mon heure n’est pas encore venue». – 7:30 «Son heure n’était pas encore venue». – 8:20 «Son heure n’était pas encore venue». – 12:23 «L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié». – 13:1 «Jésus sachant que son heure était venue» (NEG). – 17:1 «Père, l’heure est venue».
Quelle est cette «heure» convenue par Dieu? C’est le moment où Jésus sera glorifié par sa mort, sa résurrection et son ascension. D’un point de vue humain, nous saisissons la souffrance qu’elle implique, mais du point de vue divin, cette heure signifie la gloire. Il quittera bientôt ce monde et retournera chez le Père qui l’a envoyé, Jésus ayant achevé son œuvre sur la terre (Jean 17:4). Lorsque le serviteur de Dieu demeure dans la volonté de Dieu, il est immortel jusqu’à ce que son œuvre soit achevée. Ils ne pouvaient même pas arrêter Jésus, et encore moins le tuer, avant que la bonne heure soit arrivée.
Jésus sait aussi que Judas le trahira. Judas est mentionné huit fois dans le récit de Jean, plus que dans aucun autre récit de l’Évangile. Satan est entré dans Judas (Luc 22:3), et lui inspire à ce moment-là une idée qui va mener à l’arrestation et à la crucifixion
du Fils de Dieu. L’expression «mis au cœur» (Jean 13:2) signifie littéralement «lancer». Elle rappelle les flèches enflammées du méchant (Éph. 6:16). Judas ne croit pas (Jean 6:64-71), il ne peut donc pas se servir du «bouclier de la foi» pour repousser les attaques de Satan.
Enfin, Jésus sait que le Père lui a tout donné (Jean 13:3). Cette déclaration fait écho à celle de Jean 3:35 et rappelle aussi Matthieu 11:27. Même dans sa position d’humilité, notre Seigneur possède tout par son Père. Il est pauvre et pourtant riche. Parce que Jésus sait qui il est, d’où il vient, ce qu’il a et où il va, il maîtrise parfaitement la situation. En tant que croyants, vous et moi savons que nous sommes nés de Dieu, que nous allons un jour vers Dieu et que nous avons tout en Christ. Par conséquent, nous devrions pouvoir suivre l’exemple de notre Seigneur et servir les autres.
Ce que Jésus sait va déterminer ce qu’il fait (Jean 13:4-5). Les disciples doivent être sidérés de voir leur Maître se lever, déposer ses vêtements extérieurs, envelopper sa taille d’une serviette, prendre une bassine d’eau et laver leurs pieds. Les serviteurs juifs n’avaient pas pour habitude de laver les pieds de leurs maîtres, c’était le rôle des esclaves non juifs. C’était une tâche ingrate… que Jésus a pourtant accomplie! Il pouvait arriver qu’un hôte (ou une hôtesse) lave les pieds d’un invité, pour lui témoigner son affection, mais la pratique était rare dans la plupart des foyers.
Jésus connaît l’esprit de compétition qui anime ses disciples. D’ailleurs, dans les minutes qui suivent, ils vont se disputer pour savoir lequel d’entre eux est le plus grand (Luc 22:24-30). Jésus leur donne une leçon d’humilité mémorable. Son initiative dénonce leur égoïsme et leur orgueil. Plus on y réfléchit, plus cette scène prend tout son sens. Elle illustre parfaitement ce que Paul écrira des années plus tard en Philippiens 2:1-16. Pierre s’est sûrement rappelé cet événement lorsqu’il a écrit sa première épître où il exhortait ses lecteurs à «se vêtir d’humilité» (1 Pierre 5:5).
Nous confondons trop souvent «le pauvre en esprit» (Matt. 5:3) avec un «simple d’esprit». Nous confondons une personne sincèrement humble avec la timidité et l’infériorité. L’écrivain britannique de génie Samuel Johnson avait été invité à préparer un sermon à l’occasion du décès d’une fille. Il a demandé quelles étaient ses vertus et on lui a répondu: «Elle était gentille avec les personnes qui lui étaient inférieures». Il a dit que c’était une qualité admirable, mais qu’il serait difficile de déterminer qui étaient ses inférieurs!
Le Père a tout remis entre les mains du Fils, mais Jésus prend une serviette et une bassine! Jésus n’est pas humble parce qu’il vient d’une famille pauvre, mais parce qu’il est riche. Il est riche, mais il se fait pauvre (2 Cor. 8:9).
L’Évangile selon Jean révèle de façon remarquable l’humilité de notre Seigneur tout en magnifiant sa divinité: «Le Fils ne peut rien faire de lui-même» (Jean 5:19, 30); «Je suis descendu du ciel pour faire, non ma volonté» (Jean 6:38); «Mon enseignement n’est pas de moi» (Jean 7:16); «Moi, je ne cherche pas ma gloire» (Jean 8:50); «La parole que vous entendez n’est pas de moi» (Jean 14:24). Son humilité, il l’a démontrée d’une manière ultime en mourant à la croix.
Jésus était le souverain, mais il a pris la place d’un serviteur. Il avait tout entre ses mains, mais il a pris une serviette. Il était Seigneur et Maître, mais il a servi ses disciples. Être humble, ce n’est pas penser du mal de soi, c’est simplement ne pas penser à soi. La véritable humilité découle de notre relation avec le Père. Si nous souhaitons connaître et faire la volonté du Père afin de glorifier son nom, alors nous ressentirons la joie de suivre l’exemple de Christ et de servir les autres.
Comme les disciples, cette nuit-là, nous avons profondément besoin de cette leçon d’humilité. L’Église est remplie de l’esprit du monde, un esprit de compétition et de critiques. Les croyants se disputent pour savoir qui est le plus grand. Nous grandissons en connaissance, mais pas en grâce (voir 2 Pi. 3:18). Andrew Murray a
écrit: «l’humilité est le seul sol dans lequel les grâces prennent racine» et: «Le manque d’humilité est à l’origine de chaque défaut et de chaque échec».
L’humilité et l’amour ont poussé Jésus à servir ses disciples. Comparez Jean 13:1 avec 1:11 et 3:16 – Jésus est venu «chez les siens» et ils ne l’ont pas reçu. «Car Dieu a tant aimé le monde.» Dans la chambre haute, Jésus sert ses disciples avec amour, et ils le reçoivent, lui et ses paroles. Le texte grec dit: «Il les a aimés au plus haut point».
La sainteté: Jésus et Pierre (13:6-11)
À mesure qu’il regarde le Seigneur laver les pieds de ses amis, Pierre est de plus en plus troublé. Il a du mal à comprendre. En lisant la vie de Christ dans les Évangiles, vous remarquez la façon de parler de Pierre. Souvent impulsif. Souvent par ignorance. Jésus le corrige à plusieurs reprises. Pierre s’est opposé à ce que Jésus aille à la croix (Matt. 16:21-23). Il a essayé de gérer les affaires de notre Seigneur lors de la Transfiguration (Matt. 17:1-8). Il a attesté la foi des disciples (Jean 6:66 – 71) sans se rendre compte que l’un d’eux était un traître.
Le mot traduit par «laver» (Jean 13:5-6, 8, 12, 14) est niptô: «laver une partie du corps». Mais le mot traduit par «baigné» (Jean 13:10) est louô: «se laver complètement». La distinction est de taille, car Jésus va l’utiliser pour enseigner à ses disciples l’importance d’une marche sainte.
Lorsque le pécheur se confie en son Sauveur, il est «complètement baigné». Ses péchés sont lavés et pardonnés (voir 1 Cor. 6:9-11; Tite 3:3-7; Apoc. 1:5). «Et je ne me souviendrai plus de leurs péchés ni de leurs iniquités» (Hébreux 10:17). Le croyant se souille facilement lors de sa marche dans ce monde. Il n’a pas besoin de se laver complètement de nouveau. Il a simplement besoin que cette saleté soit nettoyée. Dieu promet de nous purifier lorsque nous confessons nos péchés (1 Jean 1:9).
Pourquoi est-il si important de «garder nos pieds propres»? Parce que si nous sommes souillés, nous ne jouirons plus de la communion avec notre Seigneur: «Si je ne te lave, tu n’as point de part avec moi» (Jean 13:8). Une part (en grec meros) renvoie à une «participation», au fait «d’avoir une part dans quelqu’un ou quelque chose». Lorsque Dieu «nous lave complètement» dans le salut, il initie notre union avec Christ. C’est une relation établie qui ne changera jamais (le verbe «baigné» en Jean 13:10 est dans un temps qui signifie une action effectuée une fois pour toutes). Quant à notre communion avec Christ, elle dépend de notre volonté de nous garder «des souillures du monde» (Jacques 1:27). Si nous autorisons des péchés non confessés dans notre vie, nous entraverons notre marche avec le Seigneur. Nous aurons alors besoin de laver nos pieds.
Cette vérité fondamentale de la vie chrétienne est magnifiquement illustrée par le sacerdoce de l’Ancien Testament. Le jour de la consécration du sacrificateur, il était complètement lavé (Exode 29:4), une fois pour toutes. Au cours de son service quotidien, toutefois, il arrivait qu’il se souille, il devait donc se laver les mains et les pieds à la cuve d’airain dans la cour (Exode 30:18-21). C’est seulement à ce moment-là qu’il pouvait entrer dans le lieu saint pour arranger les lampes, manger le pain sacré ou brûler l’encens.
Le Seigneur nous purifie par le sang de Christ, c’està-dire par son œuvre à la croix (1 Jean 1:5-10) et par l’application de sa parole à notre vie (Ps. 119:9; Jean 15:3; Éph. 5:25-26). «L’eau de la parole» peut garder nos cœurs et nos esprits propres pour nous préserver des pollutions de ce monde. Mais si nous péchons, nous avons un avocat qui nous aime et qui plaide en notre faveur. De sa gloire, il entend nos prières de confession et nous pardonne (1 Jean 2:1-2).
Pierre ne comprend pas l’acte de son Seigneur, mais sans attendre une explication et de manière impulsive, il tente de conseiller le Seigneur. Le texte grec de Jean 13:8 comporte une double négation. Le spécialiste
Kenneth Wuest a traduit la déclaration de Pierre ainsi: «Tu ne me laveras jamais les pieds, non, jamais». Pierre le pense vraiment! Puis, il se rend compte que refuser la proposition du Seigneur nuirait à leur communion. Alors, il change diamétralement d’avis et demande un bain complet!
Tirons une leçon importante du comportement de Pierre: ne remettons pas en question la volonté ou l’œuvre du Seigneur et n’essayons pas de les changer. Le Seigneur sait ce qu’il fait. Pierre a eu du mal à accepter que Christ le serve parce qu’il n’était pas encore prêt à servir les autres disciples. Il faut de l’humilité et de la grâce pour servir les autres, mais aussi pour laisser les autres nous servir. Un esprit de soumission a ceci d’extraordinaire qu’il peut donner et recevoir à la gloire de Dieu.
Jean fait bien de préciser que Pierre et Judas entretiennent une relation différente avec Jésus. Oui, Jésus a lavé les pieds de Judas, mais ce bain de pieds n’a pas été bénéfique à Judas, car il n’avait pas été complètement lavé. Certaines personnes enseignent que Judas était sauvé et qu’il a perdu son salut, mais Jésus ne l’a pas dit. Notre Seigneur a affirmé que Judas n’avait jamais été purifié de ses péchés et qu’il était un incroyant (Jean 6:64-71).
Quel bonheur d’approfondir notre relation avec le Seigneur! Toutefois, soyons honnêtes envers lui et envers nous-mêmes… et gardons nos pieds propres.
Le bonheur: Jésus et les disciples (13:12-17)
Jean 13:17 est la clé: «Si vous savez cela, vous êtes heureux, pourvu que vous le mettiez en pratique». Il est important de suivre cet ordre: humilité, sainteté et enfin bonheur. Aristote définit le bonheur comme «la bonne fortune associée à la vertu […] une vie à la fois agréable et sûre». Cette définition peut convenir à un philosophe, mais un chrétien ne s’en contentera jamais! Le bonheur
est le corollaire d’une vie selon la volonté de Dieu. Nous sommes heureux lorsque nous servons humblement les autres, marchons dans les sentiers de la sainteté et obéissons à Dieu.
Jésus demande aux disciples s’ils ont compris son acte. Il semble que non. Alors, il le leur explique: il a montré, par l’exemple, qu’il faut servir en toute humilité. Le monde pense que le bonheur arrive quand les autres nous servent, mais la vraie joie vient de ce que nous servons les autres au nom du Christ. Le monde poursuit constamment le bonheur, mais c’est comme courir après une ombre: il s’éloigne à mesure que l’on s’en rapproche.
Ils doivent servir Jésus puisqu’il est leur maître, mais au lieu de cela, c’est lui qui les sert! Il leur montrait l’exemple du vrai service chrétien. En trois ans, il leur a souvent enseigné l’humilité et le service, il passe désormais à la pratique. Les disciples se souviennent peutêtre de sa leçon au sujet de l’enfant (Matt. 18:1-6) ou de ses reproches à Jacques et Jean lorsqu’ils ont demandé des trônes (Matt. 20:20-28). Les choses se mettent peu à peu en place.
Le serviteur (esclave) n’est pas plus grand que son maître: si le maître devient esclave, où se trouvera l’esclave? Au même niveau que le maître! En devenant serviteur, notre Seigneur ne nous a pas abaissés: il nous a élevés! Il a rendu ses lettres de noblesse au sacrifice et au service. Rappelez-vous que les Romains n’étaient pas humbles et les Grecs méprisaient le travail manuel. Jésus a associé ces deux aspects lors du lavage des pieds de ses disciples.
Le monde demande: «Combien de personnes travaillent pour toi?», mais le Seigneur demande: «Pour combien de personnes travailles-tu?» Lorsque j’enseignais à une conférence au Kenya, un croyant africain a partagé un proverbe avec moi: «Le chef est le serviteur de tous». Comme nous avons besoin de dirigeants qui serviront et de serviteurs qui dirigeront! G. K. Chesterton a déclaré qu’un grand homme est celui
qui fait en sorte que les autres se sentent grands. Jésus l’a fait avec ses disciples en leur enseignant à servir.
Il ne suffit cependant pas de connaître cette vérité, nous devons la mettre en pratique. Jacques déclare que l’on est béni quand on met la parole en pratique, pas quand on l’écoute seulement (Jacques 1:22-27). Wuest a traduit la dernière phrase de Jacques 1:25 ainsi: «Cet homme prospérera spirituellement par son action». L’étude de cette section de l’Évangile selon Jean peut bien nous toucher dans nos émotions ou éclairer notre intellect, elle ne peut pas nous bénir spirituellement tant que nous n’avons pas mis en pratique les recommandations de Jésus. C’est la seule façon de connaître un bonheur qui dure.
Assurons-nous d’appliquer ces leçons dans cet ordre: humilité, sainteté, bonheur. Soumettons-nous au Père, menons une vie sainte et servons les autres. Voilà la formule de Dieu pour la vraie joie spirituelle.
L’hypocrisie: Jésus et Judas (13:18-35)
Une ombre plane au-dessus de la scène alors que Jésus se tourne vers Judas, le traître. Judas n’était pas un vrai croyant, mais un hypocrite – c’est important de le comprendre. Il n’a jamais cru en Jésus (Jean 6:64-71). Il n’a pas été complètement lavé (Jean 13:10-11). Il ne fait pas partie des élus que le Père a donnés au Fils (Jean 13:18; 17:12). Son exemple montre qu’une personne peut être très proche du salut, mais rester perdue pour toujours! Judas était même le trésorier du groupe (Jean 12:6) et certainement tenu en haute estime par ses compagnons.
À ce moment-là, Jésus est complètement pris par deux grandes préoccupations: accomplir la parole de Dieu (Jean 13:18-30) et glorifier Dieu (Jean 13:31-35).
Jésus cite Psaumes 41:10: «Celui-là même avec qui j’étais en paix, qui avait ma confiance et qui mangeait mon pain, lève le talon contre moi». Quand David a écrit
ce psaume, il faisait probablement allusion à son conseiller Ahithophel, qui l’avait trahi et rejoint le rebelle Absalom (voir 2 Sam. 15 à 17). Judas et Ahitophel se sont tous deux suicidés par pendaison (2 Sam. 17:23; Matt. 27:3-10; Actes 1:18). Judas ne s’est toutefois pas suicidé pour accomplir la prophétie biblique, car cela ferait de Dieu l’auteur de son péché. Judas était responsable de ses propres décisions, et ces décisions accomplissaient la parole de Dieu.
Jésus craint que la trahison de Judas n’affaiblisse la foi des disciples. C’est pourquoi, il l’associe avec la parole de Dieu: lorsque les disciples verront l’accomplissement de toutes ces choses, leur foi sera affermie (voir Jean 8:28). Judas s’est montré déloyal, mais Jésus s’attend à ce qu’ils soient loyaux envers lui et sa cause. Il est tout de même Dieu le Fils, envoyé par Dieu le Père et eux sont les représentants choisis du Christ; qui les reçoit reçoit le Père et le Fils. Quel merveilleux privilège d’être les ambassadeurs du Roi!
Fait surprenant: les autres disciples à table ignorent que Judas est un incroyant et un traître. Jusqu’au dernier moment de sa trahison, Judas est protégé par le Sauveur qu’il trahira. Si Jésus avait révélé ouvertement ce qu’il savait sur Judas, les autres se seraient probablement retournés contre lui. Souvenez-vous de la réaction de Pierre à l’égard de Malchus lorsqu’il est venu arrêter Jésus!
Depuis le début, Jésus sait ce que Judas fera (Jean 6:64), mais il ne le contraint pas à le faire. Judas a bénéficié des mêmes privilèges spirituels que les autres disciples, mais ils ne lui ont pas été salutaires. Le soleil qui fait fondre la glace est le même qui durcit l’argile. Malgré les propos du Seigneur au sujet de l’argent, et toutes ses mises en garde sur la convoitise, Judas a continué à voler et à se servir dans la bourse. Judas a continué à rejeter Jésus en dépit de tous les avertissements de notre Seigneur concernant l’incrédulité. Jésus a même lavé les pieds de Judas, mais son cœur a continué de s’endurcir.
Jésus avait déjà parlé d’un traître (Jean 6:70), mais les disciples n’y avaient pas prêté attention. Maintenant qu’il en parle ouvertement à table, ils sont perplexes.
Pierre fait signe à Jean, qui est le plus proche de Jésus à table, et lui demande de découvrir qui est le traître. La réponse du Seigneur n’est probablement pas entendue par tous les autres disciples. Et pour cause, ils discutent entre eux pour savoir qui est le traître (Luc 22:23). Lorsque Jésus donne le pain à Judas, cela est interprété comme un acte d’amour et d’honneur.
En fait, Judas est assis à la place d’honneur, d’où cette façon d’interpréter les actions de notre Seigneur. Il accorde un honneur particulier à Judas. Pas surprenant qu’après le départ de Judas, les disciples se mettent à débattre pour savoir qui est le plus grand (Luc 22:24-30).
Jean est sûrement très surpris par cette révélation, mais avant qu’il réagisse, Jésus demande à Judas de mettre ses plans à exécution. Même si Satan est entré dans Judas, c’est Jésus qui dicte le tempo. Il suit un calendrier divin, et il veut accomplir la Parole. Judas est le trésorier et les autres disciples pensent tout naturellement que le Seigneur lui a confié une mission spéciale. Judas avait exprimé un intérêt simulé pour les nécessiteux (Jean 12:4-6), il va peut-être remplir un devoir de charité envers les pauvres.
Judas est conscient de ses actes et il les pose délibérément. Il a déjà convenu avec les autorités religieuses juives de les conduire à Jésus sans créer d’émeutes (Luc 21:37 à 22: 6). Il a entendu Jésus dire: «Mais malheur à cet homme-là par qui le Fils de l’homme est livré! Mieux vaudrait pour cet homme n’être jamais né» (Matt. 26:24). Toutefois, il persiste dans son incroyance et sa trahison.
La petite phrase de Jean – «il faisait nuit» – revêt un impact puissant quand on sait que la lumière et les ténèbres sont des images spirituelles de premier plan dans ses écrits. Jésus est la lumière du monde (Jean 8:12), mais Judas a rejeté Jésus et est sorti dans les
ténèbres. Alors, pour Judas, il fait encore nuit! Les personnes qui font le mal haïssent la lumière (Jean 3:18-21). Judas n’a pas suivi l’avertissement de notre Seigneur en Jean 12:25-26. Cet avertissement reste lettre morte pour les pécheurs perdus à l’heure actuelle. Ce sont des gens qui se dirigent vers le même endroit que Judas à moins qu’ils se repentent et se confient en leur Sauveur.
L’atmosphère redevient respirable dès le départ de Judas. Jésus enseigne alors ses disciples et les prépare pour sa crucifixion et son retour au ciel. C’est après le départ de Judas que Jésus institue la cène, un repas auquel Judas ne pouvait prendre part en tant qu’incroyant. Judas se retrouve dehors, en pleine nuit, contrôlé par le prince des ténèbres, Satan. Jésus, lui, est dans la lumière, partageant l’amour et la vérité avec ses disciples bien-aimés. Quel contraste!
Il est question maintenant de la gloire de Dieu (Jean 13:31 – 35). Du point de vue humain, la mort de Christ était un acte sordide qui impliquait des souffrances et des humiliations atroces. En revanche, du point de vue divin, c’est la révélation de la gloire de Dieu: «L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié» (Jean 12:23). Le titre «Fils de l’homme» apparaît douze fois dans cet Évangile et celui de Jean 12:31 est la dernière occurrence. Daniel 7:13 considère ce titre comme messianique, et Jésus l’utilisait parfois de cette façon (Matt. 26:64).
Que signifiait pour Jésus le fait de glorifier le Père? Il dit dans sa prière «Je t’ai glorifié sur la terre; j’ai achevé l’œuvre que tu m’as donnée à faire» (Jean 17:4). C’est ainsi que nous glorifions tous Dieu, en mettant en pratique fidèlement ce qu’il nous demande. Dans le cas de notre Seigneur, la volonté du Père était que le Fils meure pour les pécheurs perdus, ressuscite des morts, monte au ciel. Le Fils a glorifié le Père et le Père a glorifié le Fils (Jean 17:1, 5).
Le moment viendra où le Fils sera glorifié par ses disciples (Jean 17:10), mais ils ne peuvent pas encore
le suivre. Pierre se vantait de pouvoir suivre le Seigneur jusqu’à la mort (Luc 22:33), mais il a malheureusement fini par le renier à trois reprises.
Jésus avait dit aux Juifs à deux reprises qu’ils le chercheraient, mais sans pouvoir ni le trouver ni le suivre (Jean 7:33-36; 8:21-24). Notez qu’il n’a pas dit à ses disciples qu’ils ne pourraient pas le trouver; il l’a dit aux Juifs incroyants. Le jour viendra où ses disciples iront auprès de lui (Jean 14:1-3). Ils le verront également après sa résurrection. Mais durant la période de sa souffrance et de sa mort, ils ne devaient pas essayer de le suivre.
J’ai entendu des prédications vibrantes sur le péché de Pierre qui a «suivi au loin» (Luc 22:54). Les prédicateurs étaient d’avis qu’il aurait dû le suivre de plus près. Mais en réalité, il n’aurait pas dû le suivre du tout! La déclaration en Jean 13:33 est une preuve suffisante, et lorsque vous ajoutez Matthieu 26:31 (cité en Zacharie 13:7) et les paroles de notre Seigneur en Jean 18:8, la preuve est irréfutable. Pierre a eu des soucis pour n’avoir pas tenu compte de cette mise en garde.
Les disciples étaient chargés de s’aimer les uns les autres comme le Christ les avait aimés. Cet amour leur sera utile dans les heures à venir, lorsque leur Maître leur sera enlevé et que Pierre, leur courageux porteparole, laissera tomber Jésus et les autres disciples. En fait, ils vont tous échouer, et la seule chose qui les réunira sera leur amour pour Christ et pour les autres.
Le mot «amour» n’apparaît que douze fois dans les chapitres 1 à 12, mais quarante-quatre fois dans les chapitres 13 à 21! C’est un mot-clé du message d’adieu de Christ à ses disciples. C’est aussi un sujet qui pèse dans sa grande prière sacerdotale (Jean 17:26). Le mot «nouveau» ne signifie pas «nouveau dans le temps», car l’amour est important pour le peuple de Dieu depuis l’Ancien Testament (voir Lév. 19:18). Il signifie «nouveau dans l’expérience, inédit». C’est le contraire de «usé». Le mot «amour» prendrait un nouveau sens et une nouvelle puissance à cause de la mort du Christ sur
la croix (Jean 15:13). L’arrivée du Saint-Esprit apporte une nouvelle puissance à l’amour dans leur vie.
Cette section commence et se termine avec l’amour: l’amour de Jésus pour les siens (Jean 13:1) et l’amour des disciples les uns pour les autres. L’amour est la véritable preuve que nous appartenons à Jésus-Christ. Tertullien, un chef de l’Église (155–220 apr. J.-C.) a cité les païens qui disaient au sujet des chrétiens: «Voyezvous comme ils s’aiment?» Comment manifestonsnous cet amour? En imitant Jésus: en donnant nos vies pour le prochain (1 Jean 3:16). Pour commencer, il faut nous abaisser et nous laver les pieds les uns aux autres, nous rendre des services qui coûtent.