Du musée au XXIe siècle

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DU MUSÉE AU XXIe SIÈCLE Le Centre Pompidou, marchand de culture ? Boris Papeians

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Mémoire de fin de cycle dans le but de l’obtention du grade de master en architecture. Étudiant : Boris Papeians Promoteur : Pablo Lhoas 2016 - 2017 Faculté d'architecture La Cambre Horta Université Libre de Bruxelles


À la lumière de l'histoire des musées, est-il juste de considérer le Centre Pompidou comme un marchand de culture ? Une tentative de compréhension de l'attitude de cette institution au sein de notre société contemporaine, à travers la diffusion de ses collections et sa politique d'exportation.

Centre Pompidou Musée Exportation Culture Marchandisation

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I. Sommaire

I.

Introduction

II. Définitions

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Muséologie 17 Muséographie 19 Expographie 20 Scénographie 20 Musée 20

III.

Du mouseîon au musée

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Mouseîon 24 Collectionnisme et cabinets

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Le musée public

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Le musée monument

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L’ICOM – Conseil International des Musées

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IV.

Révolution Pompidolienne

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Anti-monument 39 Musée et anti-musée

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La Bpi & l’Ircam

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Le musée universel

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V.

Exportation du musée La bulle des musées

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Effet Bilbao et Pompidou Metz

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Le Centre Pompidou Mobile

68

Les projets présents et futurs

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VI. 8

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Pop-Up Culturel

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D’internet au musée, glissement sémantique

81

Marchandisation de la culture?

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Le musée comme symbole

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VII.

Exposition et collection

Les collections du Centre Pompidou

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Centre Pompidou Virtuel

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La fin de l’exposition temporaire ?

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VIII. Conclusion

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IX. Bibliographie

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X. Iconographie

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I. Introduction

Depuis son apparition, le musée a eu un rôle majeur dans nos sociétés occidentales. Son évolution s’est faite sur des centaines d’années, voire des milliers d’années selon certains historiens. Aujourd’hui, à l’ère du numérique et des diverses crises qui touchent nos sociétés, la culture semble prendre de plus en plus d’importance. Le nombre de musées dans le monde a augmenté de 250% entre 1975 et 20111, les grands musées sont invités à s’exporter et à s’implanter partout dans le monde2. Le musée grandit, s’exporte, se diversifie, se visite, se conforme, s’écarte. Il se vend, se consomme et se marchandise. Intemporel, il fascine, étonne et conquit. Immuable, il dérange, dénonce et ose. Au cœur de nos sociétés actuelles, le musée est comme la ville qui l’entoure : vivant. Il évolue, change, s’agrandit et se déplace ; il (se) fâche et fait couler l’encre de tous : journalistes, politiques, professeurs, étudiants et citoyens, chacun y va alors de son avis. Et même si autant d’entre eux existent, il s’en construit encore et toujours de nouveaux, dont certains sont plus grands, et plus majestueux que les précédents. Si la grande majorité est de dimensions modestes et locales, une partie sort du lot par leur qualité, leur dimension internationale, leur collection, leur histoire. Tous doivent pourtant s’adapter à une société toujours changeante afin de ne pas disparaître. Cela oblige à repenser 1 UNESCO [en ligne] http://fr.unesco.org/themes/musées [en date du 5 juillet 2017] 2 BENSAHEL, Nathalie, 2007. «L’exportation des musées se banalise» Libération [en ligne] http://www.liberation.fr/evenement/2007/01/06/l-exportation-des-musees-sebanalise_81229 [en date du 5 juillet 2017]

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le musée au sein des missions qui se sont développées durant son histoire. Les sociétés se diversifient et le paysage muséal en a parfois fait les frais, n’étant pas toujours capable de suivre au même rythme.

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Le nombre de musées continue à croître partout dans le monde depuis les années 1980, attirant toujours plus de visiteurs en leur sein. Anciennement considérés comme de véritables temples de l’art où seuls les érudits et les initiés s’aventuraient, les musées contemporains cherchent à attirer un public toujours plus cosmopolite et varié. Des préoccupations liées à la démocratisation, la mondialisation, le tourisme culturel, et les nouvelles technologies1 viennent s’ajouter aux missions fondatrices du musée : la conservation, l’étude, la classification et la présentation2 . L’idée ici ne sera pas de faire une critique vaine du musée et de l’industrie qui l’entoure, mais plutôt d’essayer de les comprendre. Pour cela, le choix a été fait de se focaliser sur le Centre Pompidou et ses extensions, et ce principalement au travers de la vision du musée qu’il véhicule par le Musée national d’art moderne/Centre de création industrielle. Si le musée en est arrivé là où il est aujourd’hui, ce n’est qu’après une histoire longue et mouvementée, au sein de laquelle le Centre eut un impact particulier. Avant de vouloir comprendre un sujet, un peu d’histoire et de définitions s’imposent, sans quoi il est facile de se tromper. C’est pourquoi la première partie de cet ouvrage se focalisera sur cela. La terminologie liée au musée est vaste, elle sera donc limitée ici à quelques termes principaux, qui amèneront à la question de la polysémie du mot musée et de son parcours au cœur de l’Histoire ; jusqu’à la transition vers l’idée du musée moderne, vision la plus similaire à celle existant aujourd’hui3. Cette histoire étant longue et complexe, il n’en sera retracé que les 1 GOB, André, DROUGUET, Noémie, 2006. La muséologie : Histoire, développements, enjeux actuels. 2e édition. Paris : Armand Colin. p.41 2 ICOM [en ligne] http://icom.museum/la-vision/definition-du-musee/L/2/ [en date du 5 juillet 2017] 3 François Mairesse propose par ailleurs le terme de musée universel pour parler de l’institution après les années 2000. Il en sera fait mention dans ce travail.


grandes lignes, d’autres ouvrages traitant de manière plus précise et profonde du sujet. Il existe en effet de nombreuses histoires du musée, selon les périodes, les styles, les thématiques. Après un siècle d’existence – si le premier est considéré comme apparaissant à la fin du XVIIIe –, le musée a du mal à se renouveler, notamment par la difficulté qu’ont les arts modernes à être accepter en son sein. Héritage du XIXe siècle, le musée monument a fini par percuter certaines théories de l’architecture. En crise durant la période de l’entre-deux-guerres et jusqu’à la fin des années 1950, le musée fait peau neuve, avec, notamment, l’apparition du concept d’écomusée. C’est aussi à ce moment qu’une renaissance s’opère, avec le début d’une nouvelle muséologie, portée notamment par Georges-Henri Rivière. Le Centre Pompidou vient, en 1977, relancer une nouvelle fois la machine. Profitant d’un consensus et d’un ras-le-bol de la part de la population française à l’encontre d’un musée devenu accumulateur de poussière et d’histoire, il propose une vision nouvelle du projet muséal. Son arrivée dans le paysage des musées aura un impact significatif et sera considérée par beaucoup comme un moment clé de l’évolution de la notion de musée. Interrogeant une variété de sujets tels que la place du musée dans la société, la notion de musée elle-même, et la pluridisciplinarité de l’institution, le Centre Pompidou poussa d’une certaine manière le musée tel qu’il existait dans ses retranchements. Suit alors une période de prolifération muséale, à savoir les années 1980 et 1990. Des centaines de musées ouvrent leurs portes partout dans le monde, diversifiant leurs architectures, leurs thématiques, leurs fonctionnements. Un grand coup est marqué par la fondation Guggenheim avec l’ouverture à Bilbao en 1997 de leur second musée. L’effet Bilbao est né, et il fera couler beaucoup d’encre et de béton. Se confortant dans la réussite du projet américano-basque, les politiques n’hésitent pas et se lancent dans de grands projets culturels. Si les infrastructures industrielles étaient la direction à prendre depuis la Révolution du même nom, la Révolution Culturelle est maintenant en marche, et elle est globale. Le Centre Pompidou n’est pas à la traîne, profitant d’une nouvelle dynamique pour à son tour ouvrir un

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nouveau bâtiment à Metz, tout en lançant en parallèle le « premier musée nomade au monde »1 : le Centre Pompidou Mobile. Suite à cela s’ouvrira le premier Pop-Up Pompidou à Málaga, premier d’une série de projets prévus pour s’implanter partout dans le monde, dans un but de collaboration et d’entraide entre les institutions.

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Cette dynamique semble être la solution trouvée par les gestionnaires du Centre pour permettre à la deuxième plus grande collection d’art moderne et contemporain du monde d’être exposée. C’est aussi un moyen d’éviter les trous et les retards dans la collection et de la compléter, le directeur Serge Lasvignes admettant lui-même que des lacunes existent au sein de celle-ci2. Et si sa collection est importante, ce n’est pas uniquement pour cela que le Centre s’exporte. Le musée peut être difficile à définir, mais la symbolique qui lui est liée existe. Riche d’une histoire telle que la sienne, il est devenu, au fil des siècles, un symbole. Par sa présence, la simple mention de son nom ou encore par le fait d’y penser, il est porteur d’une idée, d’un renouveau. C’est le cas du Centre Pompidou qui profitera de sa renommée et de son nom pour commencer petit à petit une nouvelle politique d’exportation. Bien qu’étant un acteur important, il n’est ni le premier ni le seul à s’exporter, d’autres grandes institutions suivant le même schéma. Ce n’est pas pour autant que c’est la seule manière qu’a un musée pour se renouveler. La manière dont il gère ses collections et dont il les expose est la première étape pour attirer le public. C’est le cas du Centre Pompidou qui, dès le début, interrogea la manière dont les objets sont exposés, ainsi que pour combien de temps. Si au début les musées exposaient l’ensemble de leur collection de manière permanente, aujourd’hui ils sont nombreux à faire tourner leur collection de manière plus régulière. L’affichage du Musée national d’art moderne par exemple change de plus en plus souvent, et une nouvelle stratégie dans le domaine des expositions temporaires a été développée depuis 1 CENTRE POMPIDOU, 2012. Bilan d’activité. p.15 2 AZIMI Roxana, REGNIER Philippe, 2015. « Il faut un Centre Pompidou qui s’engage dans les grands débats de société » Le Quotidien de l’Art [en ligne] https://www. lequotidiendelart.com/articles/7898--il-faut-un-centre-pompidou-qui-s-engagedans-les-grands-debats-de-societe.html [en date du 28 juillet 2017]


la fin de la première décennie des années 2000. La programmation dans un lieu fixe, tel que le bâtiment principal à Paris ou celui à Metz, permet une vision à plus long terme et offre une certaine stabilité, non seulement pour les gestionnaires, mais aussi pour les visiteurs. La volonté de vouloir toucher le plus de monde possible, de faire venir un public toujours plus nombreux et divers est un élément clé du développement du Centre. Mais quel est le public qu’il touche actuellement, et comment gère-t-il celui-ci? L’importance de la médiation et de la pédagogie – surtout envers le public plus jeune – a toujours été présente dans l’esprit des gestionnaires du Centre, et ce depuis sa création. Certains voient l’identité – et la raison même d’exister du musée – comme indissociable de sa collection, mais ce n’est pas de l’avis de tous. Une collection peut être homogène ou hétéroclite, classée et exposée de diverse manière. Elle suit souvent une tendance ou un goût particulier de la part d’un conservateur ou collectionneur. La donation – avec ou sans instructions – est souvent synonyme d’ouverture d’un musée ; mais il se peut que le projet muséal se développe en amont de la constitution de la collection qu’il abritera. Si collection – ou absence – il y a, cela n’implique pas pour autant une mise en espace qualitative. C’est là que prend toute l’importance des rôles de muséographe et de scénographe. Il y aura donc ici pour but de questionner la notion de musée, d’en dessiner les grandes lignes et d’essayer de le comprendre. Il n’est par contre pas question de traiter de tous les musées pour autant, il en existe trop de différents. Il sera ici privilégié un des acteurs principaux de cet univers : le Centre Pompidou. Bien plus qu’un simple musée d’art moderne et contemporain, il est aussi un moteur d’action et de renouveau constant au sein du paysage muséal. Cette limite n’implique pas pour autant qu’une solution ou une réponse s’offrira en fin de lecture. Le but ici sera de tendre vers une meilleure compréhension

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de la complexité et du développement de cette institution, centrale à notre société occidentale contemporaine.

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II.

Définitions

Quelques précisions terminologiques semblent nécessaires afin de mieux comprendre le sujet traité en ces pages.

Muséologie La théorie des musées est née en parallèle au développement des cabinets de curiosités au XVIe et XVIIe siècle, mais n’était alors pas encore appelée muséologie. Son existence terminologique sera précédée dans son apparition par celle de la muséographie. Précédant le terme de muséologie d’un siècle, c’est avec l’ouvrage Museographia écrit par Caspar F. Neickel (ou Jenckel) en 1727 qu’un premier ensemble de conseils sont donnés pour la bonne organisation d’un cabinet de curiosités. Ce n’est qu’en 1839 qu’apparaîtra pour la première fois le terme muséologie, sous la plume de Georg Rathgeber dans l’ouvrage Aufbau der niederländischen Kunstgeschichte und Museologie (Reconstruction de l’histoire de l’art et de la muséologie néerlandaise). Ces deux termes ont alors des significations fort similaires et sont généralement utilisés de manière non distincte. Ce n’est qu’en 1960 que la muséologie et la muséographie seront définies indépendamment l’une de l’autre. La première sera vue dans un premier temps comme « la science ayant pour but d’étudier la mission et l’organisation du musée » et la seconde

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comme « l’ensemble des techniques en relation avec la muséologie »1. En 1981, Georges-Henri Rivière – premier directeur de l’ICOM, de 1948 à 1965, et considéré comme le père de la muséologie française – définissait la muséologie en ces mots : « [C’est] une science appliquée, la science du musée. Elle en étudie l’histoire et le rôle de la société, les formes spécifiques de recherche et de conservation physique, de présentation, d’animation et de diffusion, d’organisation et de fonctionnement, d’architecture neuve ou muséalisée, les sites reçus ou choisis, la typologie, la déontologie. »2 18

Cette définition a évolué depuis, suivant le développement de la pratique du travail en musée, mais reste globalement la même aujourd’hui. Elle se situe, selon certains, à la croisée de diverses disciplines des sciences humaines ; à savoir la sociologie, la pédagogie, les sciences de la communication, et l’histoire. Pour d’autres cette vision reste trop limitative. Il existe donc des chercheurs – principalement en Europe centrale – prônant « une vision plus large et plus théorique de la muséologie »3 . D’autres encore réfutent le fait que la muséologie soit une science (humaine), de par le fait que les musées existent en trop de variations différentes. Ceux-là préfèrent donc la voir comme, d’abord, une historiographie : une étude de l’histoire de chaque musée ; ensuite comme une « pratique générale et quotidienne dans les musées. »4 S’il existe de nombreux types de musées, il existe aussi de nombreux types de muséologie. Certaines sont d’ordre général, d’autres historiques, ou encore spécialisées selon qu’elles traitent d’un type précis de musée. La muséologie néanmoins reste une « discipline qui a pour champ de recherche la notion de musée, la réflexion théorique et historique 1 RIVIERE, Georges-Henri, 1960. Stage régional d'études de l'Unesco sur le rôle éducatif des musées (Rio de Janeiro, 7-30 sept. 1958). Paris : Éd. Unesco. In. DESVALLEES, André, MAIRESSE, François, 2005 Sur la muséologie. In: Culture & Musées, n°6. p. 134. 2 GHR, p. 84, in GOB, DROUGUET, op.cit. p. 18 3 GOB, DROUGUET, op. cit. p. 17 4 ibid. p. 19


sur sa nature, son rôle et ses diverses formes. Englobe tous les types de musées et d’approches pour les étudier. »1 Dès lors, elle ne traite pas des aspects pratiques liés à un musée, tels que la conservation ou l’exposition. Il lui sera préféré – dans ce cas là – le terme muséographie.

Muséographie Si la muséologie est l étude de la partie théorique des musées, la muséographie en est le pendant pragmatique. Bien que la muséographie classique ait, pendant longtemps, restreint ses limites en promouvant une pratique « privilégiant la collection et avare de support explicatif [qui] s’appuie sur l’acquis culturel du visiteur pour faire fonctionner l’exposition » 2, elle a – tout comme la muséologie –, grandement évolué. Aujourd’hui, elle est considérée comme « [l’]activité intellectuelle tournée vers l’application pratique, celle qui consiste à définir ou à décrire et analyser la conception d’une exposition (qu’elle soit permanente ou temporaire), sa structure, son fonctionnement. »3 Pour André Desvallées, qui a longtemps travaillé avec GeorgesHenri Rivière, le terme est souvent utilisé – à tort – pour désigner uniquement « l’art – ou les techniques – d’exposition »4. La muséographie ne se limite pourtant pas uniquement à ces aspectslà, mais regroupe aussi les questions techniques de conservation, de sécurité, etc. C’est pourquoi apparut, sous la plume d’André Desvallées5, le terme expographie.

1 LOUVRE [en ligne] http://www.louvre.fr/definitions/museologie-museographie [en date du 11 mai 2017] 2 GOB, DROUGUET, op. cit. p. 69 3 ibid. 4 ibid. p. 19 5 DESVALLÉES, André, 1998. Cent quarante termes muséologiques ou petit glossaire de l’exposition, in DE BARY, Marie-Odile, 1998 Manuel de muséographie. Petit guide à l’usage des responsables de musée. Biarritz : Séguier/Option Culture. pp. 205-251

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Expographie Si la muséographie est l’étude globale des aspects pratiques d’une exposition, l’expographie est, selon son créateur, l’art d’exposer, désignant par là la mise en espace des expositions; sans toutefois toucher aux aspects traités par la muséographie. « Elle vise à la recherche d’un langage et d’une expression fidèle pour traduire le programme scientifique d’une exposition. »1 Bien que voulant faire en sorte que le terme muséographie ne soit plus usé à mauvais escient, la signification du terme expographie a eu tendance à le confondre avec celui de scénographie. 20

Scénographie Plus pratico-pratique encore que l’expographie, « la scénographie regroupe les aspects proprement formels et matériels de l’exposition : cimaises, couleurs, vitrines, éclairages… »2 Bien souvent, celle-ci est considérée comme purement décorative et esthétique. Bien que cela reste un aspect important du travail réalisé afin de faciliter la compréhension d’une exposition, son rôle ne s’arrête pas là. Comme il est possible de le voir, les définitions de ces différents termes se chevauchent et permettent une certaine perméabilité entre chacun selon la situation et la personne utilisant le terme.

Musée Définir ce qu’est un musée est chose ardue, si pas impossible. Tout comme l’expliquait Platon dans sa Théorie des Formes, il existe sans doute un archétype du musée sur lequel se base la vision que nous en avons. Il existe du coup autant de visions de la chose que de personnes pour l’imaginer. Dès lors, il faut convenir du côté délicat de s’aventurer sur le terrain d’une définition générale et exhaustive du terme musée. 1 GOB, DROUGUET, op. cit. p. 19 2 ibid.


Il existe par ailleurs de nombreux types de musées : d’art, de sciences naturelles, d’ethnologie, d’archéologie, d’histoire, etc. Comme il a été expliqué dans l’introduction, l’histoire des musées est tumultueuse et complexe. Rien que l’étymologie et la polysémie du mot musée permettent de se rendre compte de l’évolution de la notion au fil des siècles. Au regard de cette histoire, il est naturel que des désaccords et des divergences apparaissent lors de la définition du mot. Bien que multiples, les différentes définitions disponibles du terme musée permettent, fort heureusement, d’isoler des éléments communs et discernables. Le musée est un établissement permanent. Afin de pouvoir assurer sa mission de conservation – une des missions principales assignées au musée –, un environnement spécifique est obligatoire. Cela n’intègre donc pas les salles d’exposition ne possédant ni collection ni thématique permanentes, ou encore les organisations éphémères, créées pour une occasion particulière. Il se doit d’être sans but lucratif et de viser l’intérêt général. L’idée n’est pas de générer du profit, mais de remplir des missions au service de la société. Cela n’empêche pas pour autant au musée d’avoir un statut privé (association, fondation), ou encore d’avoir des activités commerciales (vente de tickets, boutiques). Dans son obligation de remplir des missions au service de la société, le musée se doit d’être ouvert au public. Une collection privée et non accessible ne peut donc pas être considérée comme tel. Non seulement il y a nécessité d’une collection, mais celle-ci doit être « classée, étudiée et faire l’objet de recherches »1. Un lieu de stockage ne peut s’apparenter à un musée, surtout si sa collection n’est ni inventoriée ni étudiée. Les objets placés dans un tel lieu peuvent être alors considérés comme perdus.

1 ibid. p. 39

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Si le musée ne peut être uniquement un lieu de stockage, il se doit donc d’exposer ses avoirs au public. Le rôle d’un tel établissement n’est pas celui d’une banque ou d’un coffre-fort, mais un lieu d’ouverture et de présentation d’un patrimoine. Réduire celui-ci à sa seule composante économique n’est pas envisageable quand il est propriété d’un musée. Il est intéressant de voir qu’une distinction entre musée et institution muséale a été introduite par certains auteurs et autres législations. Cette nouvelle expression « désigne alors des institutions proches des musées, mais qui n’en possèdent pas toutes les caractéristiques. »1 22

1 ibid. p. 41


III. Du mouseîon au musée

Le musée est une entité vivante et évolutive qui s’est développée sur des centaines d’années, dans et avec nos sociétés occidentales. D’aucuns pourraient croire qu’aujourd’hui la notion de musée est définie, figée, connue. La vérité est, en réalité, toute autre ; et la première erreur serait de croire que le mot musée a toujours signifié la même chose. Au cours des quelque 24 siècles depuis la création du célèbre Mouseîon d’Alexandrie – et sa bibliothèque, plus connue encore –, le terme musée et ce qu’il représente ont évolué jusqu’à devenir ce qu’ils sont aujourd’hui. D’ailleurs, que représentent-ils donc? Si l’on en croit les nombreuses définitions trouvées dans les dictionnaires, les encyclopédies, et même selon l’ICOM, les raisons d’êtres principales du musée sont la conservation et la diffusion d’un patrimoine à l’attention du public. Ces définitions sont par ailleurs généralement limitées à des aspects fonctionnels (de conservation, d’acquisition, de mise en valeur, de présentation au public…) qu’autre chose ; ceux-ci étant plus facilement identifiable et jugeable. Il est difficile de porter un jugement sur la forme, le fond ou ce qui fait l’identité d’un musée, d’autant plus que, malgré ses 30 000 membres, la définition de l’ICOM – le Conseil International des Musées – ne fait pas pour autant l’unanimité dans le monde. La Museums Association1 britannique et l’American Alliance of Museums2 ont chacune leur définition de ce qu’est un musée, qui diffère 1 Fondée en 1889, c’est la plus vieille association de musée au monde. 2 Fondée en 1906 sous le nom American Association of Museums. Elle changea de nom en 2012.

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parfois fortement de celle de l’ICOM. Et si ces différentes associations et conseils sont apparus entre la fin du XIXe et le milieu du XXe siècle, le musée quant à lui ne les a pas attendus pour se développer au cours de l’Histoire.

Mouseîon

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Remontant pour beaucoup aussi loin qu’au IIIe siècle avant notre ère, le musée est alors plus apparenté à nos universités actuelles qu’à nos institutions contemporaines. Sans doute fortement inspiré de l’Académie de Platon et du Lycée d’Aristote1, le Mouseîon avait alors pour vocation de rassembler les intellectuels et leurs savoirs en un endroit commun : l’Alexandrie d’Égypte ptolémaïque2. Ce Mouseîon n’est ni le premier ni le dernier à être apparu ; il a eu par contre un rayonnement intellectuel et culturel sans pareil, jusqu’à sa destruction partielle en -47. Il est risqué de trop rapidement projeter ce que sont nos visions du musée contemporain sur ce que représentaient alors ces premières institutions intellectuelles. Celles-ci ont d’abord été des temples dédiés aux Neuf Muses, et des sortes « d’institut de recherche, fondation royale construite à proximité du palais et de ses dépendances, bénéficiant de moyens financiers considérables grâce à la générosité des souverains et servant en retour leur prestige »3 ; du moins pour ce qui est de certains de ces Mouseîa. D’autres de ces temples, étaient plus des sanctuaires et lieu de religion – comme certaines recherches archéologiques l’ont démontré – et « comprenait essentiellement un autel monumental, un ou plusieurs portiques, un théâtre rustique et, répartie sous les ombrages du bois, de part et d’autre du Permessos, une foule d’exvoto4 »5. La différence entre ces édifices et celui d’Alexandrie est donc non seulement leur destination, mais aussi leur agencement et 1 SCHAER, Roland, 1993. L’invention des musées, Gallimard. p. 13 2 Les Lagides (ou Ptolémées) sont une dynastie pharaonique ayant régné sur une partie du bassin méditerranéen entre 323 av. J. -C. et 30 av. J. -C. 3 PRÉAUX, Claire. n.d. 4 Offrandes dédiées à un dieu afin de lui demander une grâce, ou pour le remercier d’en avoir octroyée une. 5 ROUX, Georges, 1954. Le Val des Muses, et les Muses chez les auteurs anciens. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 78. pp. 22-48


fonctionnement. Malgré le fait qu’aucune trace archéologique n’ait été retrouvée du fameux haut-lieu alexandrin, le géographe grec Strabon le décrira en son époque, projetant dessus « les principes qui animaient le Lycée d’Aristote, et, au-delà, l’Académie de Platon : ceux d’une communauté exclusivement consacrée à la recherche du vrai, c’est-à-dire au culte des Muses. »1 Il en dira ainsi : « […] on peut compter aussi comme faisant partie des palais royaux le Muséum, avec ses portiques, son exèdre et son vaste cénacle qui sert aux repas que les doctes membres de la corporation sont tenus de prendre en commun. On sait que ce collège d'érudits philologues vit sur un fonds ou trésor commun administré par un prêtre, que les rois désignaient autrefois et que César désigne aujourd'hui. »2 Ces Mouseîa continuèrent à exister -à plus petite échelle- après la destruction partielle de celui d’Alexandrie, puis de sa fermeture et de son éventuel déménagement3. La construction en 359 d’un musée à Égine par Ampelios4 en est un exemple. Ces nouvelles instances de l’institution privilégièrent petit à petit l’éducation et la recherche médicale et scientifique, avant que le terme musée ne tombe petit à petit dans l’oubli au fil des siècles. Il réapparaîtra à la Renaissance, mais son sens ne sera plus le même, ou du moins se sera-t-il fortement élargi. Dans leur Encyclopédie, Diderot et D’Alembert écrivent l’histoire – synthétisée – du musée et le définissent par rapport au Mouseîon d’Alexandrie. De plus, avant de parler de l’Ashmolean Museum, ils acceptent que, déjà à leur époque, « le mot de musée a reçu depuis un sens plus étendu, & on l’applique aujourd’hui à tout endroit où sont renfermées des choses qui ont un rapport immédiat aux arts &

1 SCHAER, op.cit. p. 14 2 TARDIEU, Amédée, 1867. Traduction Nouvelle. Géographie de Strabon. Livre XVII. Chapitre I. p.266 3 WATTS, Edward J., 2008. City and School in Late Antique Athens and Alexandria, University of California Press. pp. 147-150 4 BERNARD, André, 1998. Alexandrie la Grande, pp. 156-157

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aux muses »1. Il est intéressant de voir qu’ils renvoient directement à l’entrée cabinet, dont ils définissent que c’est « sous ce nom [qu’] on peut entendre les pièces destinées à l’étude, ou dans lesquelles l’on traite d’affaires particulières, ou qui contiennent ce que l’on a de plus précieux en tableaux, en bronzes, livres, curiosités, etc. »2.

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Selon André Gob, cette entrée musée de l’Encyclopédie dénote « la volonté, dans une démarche antiquisante, de rationaliser l’origine et l’usage du mot, et de le placer dans la perspective des Lumières. »3 Il déclare aussi qu’« à l’exception du nom, qu’ils doivent l’un et l’autre à celui des Muses, il n’y a aucun rapport entre le Mouseîon et le véritable musée moderne [comprendre le musée tel qu’il est connu depuis la fin du XVIIIe siècle]. »4

Collectionnisme et cabinets Avant l’apparition des premiers musées publics, c’est au sein des plus prestigieuses maisons et cours d’Europe que l’attrait pour l’art et les collections se développe. Le regain d’intérêts pour les choses de l’Antiquité – une des caractéristiques de la Renaissance – pousse les plus fortunés à s’entourer d’artistes, d’art et de merveilles. « François Ier, premier grand roi collectionneur »5 sera suivi par nombreux autres souverains dans cette quête d’œuvres issues des Beaux-Arts – ceux-ci comprenant l’architecture, la peinture, la sculpture et la gravure. Paula Findlen6 et Marcin Fabianski7 ont étudié en profondeur l’emploi du mot musée, et de ses divers dérivés latins et vernaculaires, dans la 1 DIDEROT, D’ALEMBERG, 1751-1772. Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. Vol. 10, pp.893-894. 2 ibid. Vol. 2, p. 488 3 GOB, André, n.d. «Le ‘Mouseion d’Epictéta’. Considérations sur la polysémie du mot musée», Les Cahiers de Muséologie, p.11 [En ligne] http://popups. ulg. ac. be/24067202/index. php?id=146. [en date du 24 mai 2017] 4 ibid. 5 VANDER GUCHT, Daniel, 1998. L’art contemporain au miroir du musée. Bruxelles : Lettre volée. p.13 6 FINDLEN, Paula, 1989. “The Museum : its classical Etymology and Renaissance Genealogy», in Journal of the History of Collections, I, 1. 7 FABIANSKI, Marcin, 1990 : «Musea in written Sources of the fifteenth to eighteenth centuries», in Opuscula Musealia, fasc. IV (Universitas Iagellonica. Acta Scientiarum Litterarumque, CMXLVIII).


littérature du XVIe au XVIIIe siècle. Selon Paula Findlen, il existe une série de termes interchangeables couvrant un large champ sémantique : « D’un point de vue philologique, son [musaeum] expansivité remarquable a permis de croiser et de se confondre avec les catégories intellectuelles et philosophiques de bibliotheca, thesaurus et pandechion, avec des structures visuelles telles que cornucopia et gazophylacium, et des structures spatiales comme studio, casino, cabinet/gabinetto, galleria et theatro, créant ainsi une terminologie riche et complexe qui décrivait des aspects significatifs de la vie intellectuelle et culturelle des débuts de l’Europe moderne, tout en faisant référence à sa configuration sociale. »1 À ces termes, elle ajoute ceux-ci : arca, cimelarchio, scrittoio, pinacotheca, metallotheca, Kunst- und Wunderkammer et Kunstschrank. Et pour André Gob2 il est encore possible d’y ajouter : stanza, camera, chambre, guardaroba, studiolo, tribuna, et – selon lui le principal –, la collection, raccolta. Il précise tout de même que celle-ci « seule ne justifie pas l’étendue extrême de ce champ. Elle n’est en fait qu’un des supports, un des objets de l’étude personnelle, privée, l’activité qui sous-tend et explique cet ensemble de termes qui en recouvre les lieux, les objets et les moyens. »3 Comme dit plus haut dans le texte, le cabinet est un lieu destiné alors à l’étude, dans lequel il était possible de retrouver divers objets plus ou moins précieux. Pourtant ce n’est pas la seule chose que ce terme signifie. Il peut aussi – en plus du lieu de retraite et d’étude – désigner : un lieu de rangement de divers paperasses et objets ; un meuble à tiroir ou clayettes ; tous les objets contenus dans le cabinet. Cette vision du cabinet se retrouve dans plusieurs éditions du Dictionnaire de l’Académie

1 FINDLEN, op.cit. p.59 2 GOB, n.d., op. cit. p.6 3 ibid.

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Française1 entre la fin du XVIIe à la fin du XVIIIe siècle, ainsi que dans le Dictionaire critique de la langue française2 de Jean-François Féraud.

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Si l’histoire des musées passe par les cabinets – et autres Wunderkammer allemandes et studiolo italiens –, il est intéressant de noter que jamais le lien n’est fait entre ces derniers et le terme musée, et ce dans tous les textes jusqu’à l’arrivée de la fameuse Encyclopédie de Diderot et D’Alemberg et l’entrée musée dans celle-ci. Durant les XVIe et XVIIe siècles, l’entité du musée n’existe donc pas réellement, et les premiers ne seront au début qu’une mise à disposition auprès du public de collections privées sorties des cabinets de curiosités – notamment l’Ashmolean Museum qui présentera les collections des cabinets des Tradescant, père et fils, et celles d’Elias Ashmole3. Déjà pourtant se dessinaient les prémices de la muséographie, comme vu plus haut et ainsi que le montre l’entrée cabinet dans la même Encyclopédie : « Toutes ces collections sont rangées par ordre méthodique, & distribuées de la façon la plus favorable à l’étude de l’Histoire naturelle. Chaque individu porte sa dénomination, & le tout est placé sous des glaces avec des étiquettes, ou disposé de la maniere la plus convénable. »4 Si certains collectionneurs de la Renaissance faisaient montre de leur cabinet de curiosité et des raretés contenues en leur sein ; qu’ils éditaient et publiaient des guides, des itinéraires et des catalogues ; qu’ils faisaient visiter par des voyageurs de passage ou des visiteurs de marques5 ; cela ne permet pas de dire pour autant que musée – tel qu’il est connu depuis la fin du XVIIIe siècle – il y avait.

1 À savoir la 1re édition de 1694, la 4 e édition de 1762, et la 5 e édition de 1798. 2 FÉRAUD, Jean-François, 1787-1788. Dictionaire critique de la langue française, Marseille, Mossy. 3 ASHMOLEAN, n.d. ”History of the Ashmolean” [en ligne] http://www.ashmolean.org/ about/historyandfuture/ 4 DAUBENTON, DIDEROT, 1751-1772. Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. Vol. 2, p.490. 5 SCHAER, op.cit. 27


Le musée public La dimension publique du musée est importante – si pas fondamentale –, c’est ce qui le différencie des collections privées qui, pourtant, ont pu lui ressembler durant des siècles. Le British Museum, fondé en 1753 – par exemple –, peut difficilement être considéré comme premier musée, n’ayant été ouvert au public qu’à partir du XIXe siècle. L’Ashmolean Museum à Oxford, par contre, est peut-être la plus ancienne institution à prendre en compte cette dimension d’ouverture au public; « pour que le peuple voie et s’instruise »1. Construit en 1683 et ouvert au public en 1685, il s’agit avant tout d’un musée universitaire, de sorte qu’il n’est pas toujours considéré comme premier musée. Il s’en rapproche pourtant beaucoup, et sera une des premières étapes d’une longue et lente transition du collectionnisme vers le musée tel qu’il existe aujourd’hui. Alors qu’une collection composée d’objets rares et précieux permettait à son propriétaire une certaine reconnaissance sociale2 – notamment au travers d’un important aspect de communication de celle-ci ainsi que par la visite de visiteurs de marque –, la donne change entre l’ouverture de l’Ashmolean Museum et la fin du XVIIIe siècle. C’est durant cette période qu’apparut une propension de la part des monarques et des fortunés à ouvrir leurs collections selon des horaires fixes et permettant au public d’y accéder. Les premières apparitions d’un musée moderne3 dans l’histoire remontent à la fin du XVIIIe siècle avec à Rome le Museo Pio-Clementino (17711796), à Dresde la Gemälde Galerie (1786), à Düsseldorf la Kurfürtliche Galerie (vers 1770) et à Paris le Louvre (1793). L’apparition de ceux-ci dans une Europe en proie à la tourmente révolutionnaire semble inéluctable, notamment en France où la nouvelle Assemblée crée la 1 Pierre Ier le Grand (1672-1725), premier empereur de Russie et grand amateur d’art. Après ses premiers voyages en Europe Occidentale, il considéra de son devoir de monarque éclairé de protéger les arts et la culture. 2 SCHAER, op.cit. p. 27 3 Qui s’apparente à la vision que l on en a aujourd hui: ouvert au public et ayant un but de diffusion du savoir.

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Commission des Monuments dont le but fût d’établir les premières règles de conservation et d’inventaire des monuments. Cette même Assemblée déclare la création d’un Muséum afin de protéger ces monuments du vandalisme révolutionnaire.

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« Ces premiers musées marquent volontairement une rupture nette avec le collectionnisme et affirment d’emblée des caractéristiques que l’on retrouve aujourd’hui dans la définition officielle du musée, celle de l’ICOM. S’ils rassemblent et conservent des collections patrimoniales, c’est pour les mettre à la disposition du public en vue de son éducation et son enrichissement intellectuel, faire progresser les connaissances et contribuer au développement de la société. »1

Le musée monument Sur la fin du XVIIIe et durant le XIXe siècle, le musée se développa sur des idées basées sur les philosophies des Lumières. Il se présente alors « autant comme monument que comme collection publique. En tant que collection, le musée impose une attitude de recueillement. En tant que monument, le musée (…) s’impose comme outil de propagande et bientôt de divertissement. »2 Tout comme les religions ont leur lieu de culte, qui de l’église, qui de la synagogue, qui encore du temple ; la culture n’est, à ce niveau, pas en reste, possédant elle aussi sont lieu de culte : le musée. Cela peut se lire au travers de la plume de Jean Clair, qui déclarait en 1975 : « Il fallait qu’aller au musée fût cette communion laïque des dimanches après-midi où, sous le regard mort des gardiens vêtus de noir et d’or, le silence, la lenteur obligée des mouvements et la patiente procession d’œuvre en œuvre marquassent la dévotion à ce corpus d’objets 1 GOB, op. cit. pp. 10-11 2 VANDER GUCHT, op.cit. p.17


précieux, les uns confisqués à la royauté déchue et les autres acquis par guerre et par pillage. Et c’est sans doute parce que la bourgeoisie n’avait en droit rien possédé de ces objets, mais se les était appropriés de fait qu’il lui fallut inventer l’histoire et, avec elle, la fiction humaniste de la culture. »1 Actant auparavant comme le clergé culturel du XVIIIe, les académiciens étaient alors seuls décideurs de la manière dont fonctionnaient le Musée et l’Académie. Ils seront remplacés au cours du siècle suivant par une génération possédant une vision évoluée, plus penchée sur l’érudition et fortement influencée par l’histoire républicaine découlant de la Révolution Française. Le musée se sépare de l’Académie et ne sera plus le lieu d’étude des maîtres anciens qu’il était auparavant, mais un lieu de classification, d’inventaire et d’exposition des objets de l’histoire. Pourtant mû par une nouvelle vision, et un intérêt public, le musée n’en reste pas moins fort similaire. Il semble avoir changé de main, mais n’en reste pas moins un outil de validation d’une classe dirigeante ; l’élite s’efforçant de trouver dans l’histoire une justification à leur grandeur. Le musée comme salle de classe des étudiants de l’Académie voyait ses objets déplacés selon les besoins du moment, et n’était accessible qu’un quart du temps par le public ; le musée comme temple de la culture ouvre ses portes, fige ses objets et développe une muséographie de l’abondance. Tout se montre, copies comme originaux. Les collections sont hétéroclites et s’accumulent, bien que la tendance à la classification, née au XVIIIe siècle, se continue. Le musée raisonné en est à ses débuts, « les peintures sont classées par écoles, les spécimens naturalisés par genres et espèces… »2 L’architecture et l’apparence du musée se font alors grandioses et majestueuses. Les premiers musées sont nés dans les palais ; les suivants en prennent l’apparence, sur base des modèles du passé : « solennité de 1 CLAIR, Jean, 1975. “Beaubourg”, in L’Arc, 63, p. 47, in VANDER GUCHT, op. cit. p.17 2 GOB, DROUGUET, op. cit. p. 32

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style néogrec ou néoromain, colonnades, frontons et sculptures à l’antique »1. Ainsi se construisent British Museum à Londres de 1823 et 1847, l’Altesmuseum à Berlin de 1824 à 1828, ou encore la façade du Metropolitan Museum of Art à New York en 1902.2

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fig. 1 - Le Musée Royal, aujourd'hui appelé Altes Museum, a ouvert en 1830 sur une île de la Spree. Il est le premier musée public à Berlin. © bpk / SMB / Jörg P. Anders

fig. 2 - Le British Museum en 1852, photographié par Roger Fenton. 1 LAROUSSE. [en ligne] http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/musée/72220 [en date du 18 mai 2017] 2 ibid.


fig. 3 - Façade du Metropolitam Museum of Art by Simon Fieldhouse.

Ces musées, dont il existe alors au moins trois grandes catégories1 – les musées d’art, les musées de sciences naturelles ou muséums, et les musées d’histoire –, commencent donc à être de plus en plus présents en Europe au début du XXe siècle. Une première période de création frénétique de musées commence alors, voyant l’apparition de nouvelles thématiques2, telles que l’archéologie, l’art contemporain, l’art industriel, ou encore l’ethnographie. Les musées d’art étant alors encore caractérisé par son élitisme, il se crée « en Europe des musées locaux (…) d’un esprit plus bourgeois, voire plus populaire »3. Les musées d’art quant à eux étaient caractérisés par une présentation « solennelle, avec des effets répétés de symétrie » qui rendait leur visite « si épuisante, voire fastidieuse, que, dès le début du XX e siècle, le plan intérieur des musées est repensé, privilégiant les petites salles au décor moins riche et à la distribution asymétrique »4. Le musée – malgré la dimension publique qu’il a acquise après la Révolution Française, ainsi que l’idée que tous les hommes sont libres et égaux –, n’en reste pas moins bourgeois; et le reste du peuple se doit d’être cadré5. Cela se fait, entre autres, via l’architecture, qui rappelle « les familistères, les

1 GOB, DROUGUET, op.cit. p.30 2 ibid. 3 ibid. p.31 4 LAROUSSE. [en ligne] http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/musée/72220 [en date du 18 mai 2017] 5 MAIRESSE, 2010. op.cit. p.45

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grands magasins, les parcs publics et parcs d’exposition », et qui permet au public d’avoir « tour à tour le rôle de visiteur et de surveillant »1. Les musées continueront à se développer de manière explosive durant le XIXe siècle, et s’ils sont nés en Europe2, ils vont rapidement se diffuser dans le monde; notamment en Égypte en1857, et aux ÉtatsUnis en 1869 avec le Metropolitan Museum of Art et l’American Museum of Natural History en 1871.

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Le ras-le-bol de l’académisme des musées vers la fin du XIXe siècle poussera à l’apparition de l’idée d’un musée d’art moderne dans les années 1920. Cette notion peinera à prendre racine au niveau des États. Les pratiques muséographiques héritées du siècle précédent sont fortement remises en cause à partir de l’entre-deux-guerres, et ce jusqu’aux années 1950. La diffusion de l’idée d’un musée d’art moderne se fait rapidement et on peut voir apparaître en l’espace de 15 ans de plus en plus de lieux dédiés à l’art des artistes vivants, mis sur le côté par les grands musées classiques. En novembre 1929 se tient la première exposition dédiée à ceux qui seront « consacrés comme fondateurs de l’art moderne » : Cézanne, Gauguin, Seurat et Van Gogh3. Le public fût fort réceptif, ce qui conforta les organisateurs dans leur idée d'ouvrir un musée d'un nouveau genre ; et permit la naissance du MoMA. En France, il faut attendre 1937 pour que l’État décide de faire construire un lieu similaire sur son territoire. À cause de la guerre, ce n’est finalement que 10 ans plus tard – le 9 juin 1947 – qu’ouvrent enfin les portes du Musée national d’art moderne. C’est d’ailleurs à la même période qu’apparaît petit à petit l’idée d’une nouvelle muséologie. L’intérieur des salles s’épure, les œuvres se décrochent et vont quelle dans une réserve, quelle dans une galerie spécialisée, « le musée [n’ayant] plus à fournir – en tout cas au visiteur non-spécialiste – une matière d’étude aussi abondante que possible »4. Toutes ces questions liées au musée vont pousser à la création d’un Office international des musées en 1926. Celui-ci est alors sous l’égide 1 ibid. 2 GOB, DROUGUET, op.cit. p.32 3 SCHAER, op.cit. p.102 4 ibid. p.104


de la Société des Nations. Il sera remplacé par l’ICOM au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. Ce nouveau Conseil International des Musées fonctionne au sein de l’UNESCO et reste, à ce jour, la plus grande et la seule organisation de la sorte à l’échelle mondiale. « Aussi, depuis 1945 notamment, une nouvelle orientation s’est-elle dessinée, tant dans les lieux traditionnels (installation de laboratoires scientifiques, fréquentes redistributions des collections, ouverture des réserves, politique d’échanges d’œuvres à l’échelon national et international, organisation d’expositions temporaires et itinérantes) que dans les espaces modernes. Le champ d’action s’est élargi. En prise directe avec la création contemporaine sous toutes ses formes, le musée est devenu un centre actif d’information (édition de catalogues et de journaux, développement de salles de documentation et de bibliothèques), de communication (débats, rencontres entre les artistes et le public), d’animation et d’éducation interactives. »1

L’ICOM – Conseil International des Musées La mise en place de l’ICOM en 1946 va relancer la discussion sur le musée, qui peinait à changer depuis la fin du siècle précédent. Entre 1947 et 1968, sept conférences sont tenues entre les nouveaux membres du Conseil fraîchement créé. Durant cette période, trois domaines sont au centre des préoccupations : « l’éducation par les musées, les expositions et la circulation internationale des biens culturels, la conservation et la restauration des biens culturels »2. Viens ensuite une période de crise – financière et institutionnelle – qui durera jusqu’à la fin des années 1970. Durant ces années, le Conseil est forcé d’opérer une transition et finit par accepter plus de membres en son sein ; ce 1 LAROUSSE. [en ligne] http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/musée/72220 [en date du 18 mai 2017] 2 ICOM, ”Histoire de l’ICOM” [en ligne] http://icom.museum/lorganisation/histoire/L/2/ [en date du 20 août 2017]

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pour des raisons entre autres économiques, mais pas uniquement. En 1974, à Copenhague, une nouvelle réforme est acceptée, « l’esprit démocratique a prévalu, tout membre de la profession dispose du droit de vote et peut-être éligible »1. Alors que le Centre Pompidou ouvrait ses portes en France, l’ICOM décide d’ouvrir les siennes au monde. L’idée est d’aider à « la formation du personnel de musée et des restaurateurs »2 dans les pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique Latine. Une nouvelle politique des musées au service de la société et de son développement est mise au point dans les 10 années qui suivent.

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Après plus de 40 années d’existence, l’ICOM est stable financièrement et parvient à garder « l’universalité, la souplesse et l’imagination »3 ce qui lui permet de toujours assurer son rôle auprès de la communauté des musées. C’est aussi à ce moment-là qu’une nouvelle politique du patrimoine naît, « conforme à l’idée que le développement économique est inséparable des facteurs culturels. »4 Au tournant du millénaire, la bête noire de l’ICOM se révèle être le trafic illicite d’œuvres et biens culturels. En parallèle à cette lutte, de nouveaux moyens sont mis en place dans un but de prévention en cas de catastrophes naturelles ou causées par l’homme. L’ICOM cherche à mieux inclure l’Asie dans les discussions, notamment en organisant en 2004 une première Conférence générale à Séoul, et en signant la Charte de Shanghai en 2002. L’Exposition Universelle de 2010 marqua aussi le coup, en ce sens qu’elle fût la première à laquelle l’ICOM participait. Le musée tel qu’il existe aujourd’hui est donc la résultante d’un enchaînement d’événements sur une longue période, menant à une vision nouvelle des arts, des patrimoines, de leur valeur, mais surtout de leur diffusion. Apparaissant notamment dans un but de validation d’un nouvel ordre social, le musée continue à évoluer aujourd’hui. La 1 ibid. 2 ibid. 3 ibid. 4 ibid.


vision des premiers musées a fort changé, mais est-elle pour autant encore suffisante dans un monde touché de plein fouet par de multiples crises – économique, sociétale, sociale, culturelle –, et au sein d’une ère fortement liée à des notions de globalisation et de consommation ? Si près de 55 000 musées sont recensés dans le monde, seule une centaine de musées superstars – pour reprendre l’expression de Frey & Meyer1 – semblent être à la barre de ce navire qu’est l’univers muséal. Pour autant, certains ne se laissent pas faire et on sut « créer leurs propres “niches”, développant avec des moyens parfois extrêmement réduits une approche originale de l’exposition. »2 Comme dit plus haut, il est intéressant de voir qu’une distinction entre musée et institution muséale a été introduite par certains auteurs et autres législations. Il est par ailleurs intéressant de voir avec quelle hésitation certains acteurs utilisent le mot musée. Ce mot, lourd de son histoire et de ses multiples interprétations, est parfois utilisé à mauvais escient – par exemple si certains points de la définition de l’ICOM ne sont pas respectés –, voir pas utilisé, lui étant préféré le terme centre d’art, qui pour certains semblent plus approprié à notre époque. Il serait presque tentant de croire – ou d’imaginer – qu’un nouveau moment charnière est en cours, tout comme l’ont été les années 1960-70, le ras-le-bol des musées monuments accumulateur d’histoire et l’apparition – entre autres – du Centre Pompidou. Celui-ci s’est voulu être un antimonument, venant bousculer l’idée du musée comme accumulateur de temps et de poussière. Il a fini par devenir le monument et fer de lance de ce nouveau mouvement, Davis Douglas parlant d’un avant et d’un post-Pompidou Age.

1 FREY, Bruno, MEIER, Stephan, 2006. The Economics of museums. p. 1017-1050. in : MAIRESSE, François, 2010. «Un demi-siècle d’expographie». In: Culture & Musées, n°16. La (r)évolution des musées d’art (sous la direction de André Gob & Raymond Montpetit) p. 225 2 MAIRESSE, 2010, op.cit. p.225

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IV. Révolution Pompidolienne

De nombreuses tendances sont donc identifiables dans l’histoire du musée, mais deux semblent se faire miroir : le musée monument (aussi appelé musée temple ou musée palais), qui est un héritage du XIXe siècle, et la machine à exposer (ou encore boîte, usine), apparue durant la deuxième moitié du XXe siècle. Aujourd’hui, notamment dus à des questions de globalisation, de consommation et de communication, nombreux sont les musées qui s’inscrivent dans une troisième catégorie : le musée universel.

Anti-monument Les prémices de la dynamique pluridisciplinaire du Centre Pompidou peuvent se retrouver dans d'autres institutions, tel que le MoMA, ou encore les premières maisons de la culture. Déjà présentes en Belgique depuis la fin du XIXe siècle, elles furent réintroduite en France après la création du ministère des Affaires culturelles en 1959, avec à sa tête André Malraux. Les considérants comme des « modernes cathédrales »1, elles devaient permettre à tous d’avoir accès à la culture, et ce partout sur le territoire français. Pierre Moinot, membre du cabinet de Malraux, écrit en 1961 à propos de celles-ci et déclare qu’elles doivent offrir « la tentation de la culture » pour tous, 1 «Religion en moins, les maisons de la culture sont les modernes cathédrales», discours d’André Malraux, à l’Assemblée nationale, 1966

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et « organiser une rencontre »1. Bien que maigre succès – seules 11 maisons de la culture sont ouvertes en France entre 1961 et 1983 –, cette idée sera précurseuse, permettant l’ouverture de nombreux lieux dédiés à la culture suivant un schéma similaire. « De cette rencontre peut naître une familiarité, un choc, une passion, une autre façon pour chacun d’envisager sa propre condition. Les œuvres de la culture étant, par essence, le bien de tous, et notre miroir, il importe que chacun y puisse mesurer sa richesse, et s’y contempler. »2 40

L’apparition du Centre Beaubourg dans l’esprit des pouvoirs politiques français se retrouve 10 ans avant l’inauguration du Centre, lors des premières revendications qui menèrent à Mai ’68. Suite au déclin de la confiance populaire en la politique de l’époque et de la place de Paris en tant que première ville culturelle mondiale en faveur de New York3, il fut imaginé la mise en place d’un ensemble monumental consacré à l’art contemporain sur l’emplacement du plateau Beaubourg. En 1969, le programme devait alors inclure : le Musée national d’art moderne (Mnam), le Centre de création industrielle (Cci) – qui seront regroupés en 1993 –, et la Bibliothèque publique d’information (Bpi). À cela sera plus tard ajouté l’Institut de Recherche et Coordination Acoustique/Musique (Ircam), suite à la volonté de Georges Pompidou lui-même4. Ainsi, dès le début, la volonté était là de faire de ce nouvel établissement un lieu entièrement dédié à la culture, et ce dans sa globalité la plus absolue et non pas uniquement celle alors trouvée dans les musées. En date du 23 juin 1970, Georges Pompidou, président de la République écrit à Jacques Chaban-Delmas, Premier ministre : 1 GIRARD, Augustin, 17 février 1999, «1961. Ouverture de la première maison de la culture», Infolettre no 43, ministère de la Culture et de la Communication 2 ibid. 3 CICCARELLI, Lorenzo, 2017. De Beaubourg à Pompidou vol. 1, Les architectes (1968 1971), Paris, édition B2. p. 112 4 INA, Institut National de l’Audiovisuel – Ina.fr, "L’IRCAM" [archive], sur Ina.fr, 16 octobre 1980 [en date du 30 juillet 2017]


« Au cours du Conseil interministériel que j’ai présidé le 11 décembre 1969, l’implantation d’un musée des Arts contemporains sur le plateau Beaubourg a été envisagée. Les études menées depuis lors ont permis de constater que la Bibliothèque de lecture publique dont l’installation était précédemment prévue à ce même lieu pourra trouver place dans l’édifice abritant le musée. La réalisation de cet ensemble peut difficilement se concevoir en dehors de l’opération de rénovation des Halles. » Le concours international est lancé en décembre 1970 et est le plus grand jamais vu alors, avec pas moins de 1660 inscrits et 680 propositions remises. Lorsque, quelques mois plus tard, les architectes Renzo Piano et Richard Rogers gagnèrent le concours, ils étaient loin d’imaginer les conséquences qu’une telle réalisation aurait sur leur vie, leur pratique architecturale et celle de nombreuses autres personnes. Seulement trois mois et demi après le début de leur collaboration, les deux architectes sont sélectionnés parmi l’ensemble des participants; ils étaient alors loin de s’imaginer chambouler le monde architectural à ce point. « Je voudrais passionnément (…) que Paris possède un centre culturel comme on a cherché à en créer aux États-Unis avec un succès jusqu’ici inégal, qui soit à la fois un musée et un centre de création, où les arts plastiques voisineraient avec la musique, le cinéma, les livres, la recherche audiovisuelle, etc. Le musée ne peut être que d’art moderne, puisque nous avons le Louvre. La création, évidemment, serait moderne et évoluerait sans cesse. La bibliothèque attirerait des milliers de lecteurs qui du même coup seraient mis en contact avec les arts. »1 Voilà comment s’exprimait, en 1972, Georges Pompidou à propos du projet de ce qui deviendra le Centre Georges Pompidou. Et du côté des architectes, Renzo Piano déclara « avoir voulu démolir 1 interview accordée au journal Le Monde, 17 octobre 1972

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l’image d’un bâtiment culturel qui fait peur. C’est le rêve d’un rapport extraordinairement libre entre l’art et les gens, où l’on respire la ville en même temps ». Certaines influences évidentes de l’imaginaire anglais et italien se retrouvent dans les réflexions du jeune bureau d’architecture. Le Fun Palace de Richard Price et la piazza italienne eurent une grande influence dans la mise en place du programme considérable demandé par le concours. C’est d’ailleurs l’unique projet à avoir proposé un espace public, toutes les autres propositions faisant usage de l’ensemble de la parcelle pour développer le bâti.

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Selon la loi no 75-1 du 3 janvier 1975 portant création du centre national d’art et de culture Georges-Pompidou, le Centre est un « établissement public national à caractère culturel ». Il a pour objet de « favorise[r] la création des œuvres de l’art et de l’esprit, [de] contribue [r] à l’enrichissement du patrimoine culturel de la nation, à l’information et à la formation du public, à la diffusion de la création artistique et à la communication sociale […] [et d’] assure[r] le fonctionnement et l’animation, en liaison avec les organismes publics ou privés qui lui sont associés, d’un ensemble culturel consacré à toutes les formes de la création artistique, notamment dans le domaine des arts plastiques, de la recherche acoustique et musicale, de l’esthétique industrielle, de l’art cinématographique, ainsi qu’à la lecture publique » (article 1er). Il n’a donc pas pour but d’être un musée, mais bien plus que cela. L’arrivée du Centre Pompidou dans l’univers artistique, culturel et architectural à l’époque de sa construction eut l’effet d’une bombe. Les critiques à l’encontre de cette nouvelle conception architecturale dans le quartier du Marais pleuvaient et les habitants eurent parfois du mal à supporter les travaux durant les longues années qu’ils durèrent. En 1977, lors de l’inauguration du nouveau bâtiment, c’est une critique divisée qui l’accueille. D’aucuns sont révoltés et surnomment le centre Notre-Dame de la Tuyauterie, ou encore le Pompidolium. Un accueil dur est fait au hangar de l’art, à l’usine à gaz, la raffinerie de pétrole, le fourretout culturel ou la verrue d’avant garde1. On stigmatise un équipement 1 MOULIN, François, PROUVÉ, Jean, 2001. Jean Prouvé. Le maître du métal, Nuée bleue, p. 189


dispendieux qui absorbe, l’année de son inauguration, 120 millions de francs, soit un septième du budget de la Culture1. Malgré une critique acerbe, le centre fonctionne, et plutôt bien. Premier de ce genre et précurseur d’une série d’autres postulats dans l’univers de l’architecture muséale, le centre accueillera bien plus de monde que prévu quotidiennement, que ce soit pour des expositions, mais aussi pour sa bibliothèque et sa médiathèque. Si les services de sécurité limitent le nombre de personnes présentes dans le bâtiment à 4 500 environ2, l’histoire nous a montré que ce chiffre n’a pas été respecté. 21 127 en 1977, 21 726 en 1978, 22 975 en 1979, et 24 923 en 1980 3 . Chaque année le nombre de visiteurs moyen par jour augmente, et rien que la première année il est déjà quatre fois plus élevé que la limite de sécurité. Dans un premier temps, ce ne sont sans doute pas uniquement les expositions qui attirent, mais aussi la curiosité4 pour ce nouvel objet dont « toutes les circulations verticales, personnes et fluides sont confinées sur la façade : les tuyaux extérieurs colorés constituent une particularité du bâtiment. Les conduites d’air climatisé sont bleues, les tuyaux d’eau sont verts et les lignes électriques sont jaunes. Les ascenseurs sont rouges. Les canalisations blanches sont des gaines de ventilation pour les parties souterraines. Même les poutres métalliques qui composent la structure sont apparentes. »5

Musée et anti-musée « Un musée, c’est toujours une idée du musée. Proposition initiale d’importance, car il s’agit de ne pas confondre le Musée 1 Maryvonne de Saint, 2009. Culture et communication. Les missions d’un grand ministère, Gallimard, p. 24 2 REY, Anne, 30 déc. 1976. "Beaubourg prêt à appareiller", Le Monde, in PINTO, Louis & al. 2017, De Beaubourg à Pompidou. Vol. III, La Machine (1977-2017). p.8 3 annexe 10 du rapport d’activité 2006 du Centre Pompidou, in : HASQUENOPH, Bernard, 2009. “Centre Pompidou, qu’es-tu donc devenu ?” Louvre pour tous. [en ligne] http:// www.louvrepourtous.fr/Centre-Pompidou-qu-es-tu-donc,386.html [en date du 31 juillet 2017] 4 REY, op.cit. p.8 5 ANONYME, 2017. "Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou" Wikipédia, l’encyclopédie libre. [en ligne] https://fr.wikipedia.org/wiki/Centre_national_d%27art_ et_de_culture_Georges-Pompidou [en date du 20 juillet 2017]

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national d'art moderne avec le musée, ou avec la collection. Le Musée national d'art moderne, c’est une idée du musée, et au-delà de la belle collection qui le caractérise, c’est aussi un usage de la collection. » 1

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Avec ses plateaux libres de 7 500m², le Centre ne correspond pas aux idées traditionnelles du musée; ne fut-ce qu’en termes d’exposition des œuvres. « L’architecture impliquait donc un parti-pris antimuséal qui pouvait clairement relever d’une forme d’utopie : le musée comme non-musée. »2 Et si un musée est fait d’espaces d’exposition, il est aussi fait de ses réserves et ateliers, ce que le Centre ne possédait pas lors de sa création. Si peu pensés comme un musée traditionnel, les employés du Centre durent conquérir petit à petit les espaces du bâtiment pour pouvoir avoir un atelier de restauration. Les travaux de 1997 à 2000 sont mémorables, mais le Centre eut déjà besoin en 1985 – huit ans seulement après l’inauguration – d’une importante réorganisation du Musée national d’art moderne. La vision des architectes de plateaux libres dont les cimaises servent à l’accrochage ( fig. 4) est jugée inadéquate et il est fait appel à Gae Aulenti pour réaménager les espaces. C’est alors que s’installent des parois et des salles qui reconstituent la logique rassurante d’un musée à l’ancienne ( fig. 5). Si le gain de place est évident – le nombre d’œuvres exposées double entre l’ancien parcours et le nouvel agencement –, l’essentiel est ailleurs. Dans un article de G. Breerette paru dans Le Monde, la journaliste écrit à propos des travaux effectués par l’architecte italienne : « Tour de passe-passe, magie, peut-être miracle, en tout cas quelque chose qu’on n’attendait pas, qu’on n’osait même pas imaginer : la réalisation à l’intérieur du Centre Georges-Pompidou d’un vrai musée, avec de vraies salles, de vrais murs, de vraies cimaises bien éclairées. Un musée comme on les aime aujourd’hui, et comme on 1 LAUXEROIS, Jean, 1996. L’Utopie Beaubourg, vingt ans après. Nouvelle édition [en ligne]. Paris : Éditions de la Bibliothèque publique d information, p.73 2 ibid.


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fig. 4 - Plans des collections permanentes du Musée national d'art moderne, 1977. - Surface intérieure des Collections permanentes : 8 200 m2 4ème Sud : 2 700 m2 4ème Nord : 3 500 m2 3ème Sud : 2 000 m2 - Surface des terrasses 4ème Sud : 640 m2 4ème Est : 520 m2 (Présentation de sculptures) 4ème Nord : 270 m2 (Présentation de sculptures) - Hauteurs des cimaises : 2,80 m ; 3,50 m ; 4,30 m - longueur 1,71 m - Entrée et sortie des Collections permanentes au 3ème étage


risque de les aimer encore un bon bout de temps, parce qu’il est de coupe sobre et classique. »1 Cet article rappelle au lecteur que ce qui faisait la particularité du Centre jusqu’à là, c’était justement sa position d’anti-musée, disposé sur des plateaux libres dans une volonté de modularité constante. Les nouveaux aménagements « nous ramènent à l’essentiel »2. « Finie la désorientation des plateaux. Qu’est-ce qu’un vrai musée ? sinon celui qui répond à l’image de ce qui est déjà avéré, révéré, bref l’ancien dans le nouveau. »3 46

Après 20 années d’activités, le centre décide de fermer ses portes afin de permettre sa rénovation. La fréquentation, année après année, a usé le bâtiment qui n’avait jamais été prévu pour tant de personnes. Les travaux, cette fois-ci dirigés par Renzo Piano lui-même, dureront 27 mois et de nombreux changements de l’architecture originale auront lieu. Ceux-ci verront une partie des services administratifs déplacés dans des bâtiments environnants, la suppression des doubles niveaux afin d’agrandir les surfaces d’exposition, le déplacement de l’entrée de la Bpi, etc. 80 000 personnes furent présentes durant le premier weekend après la réouverture qui eut lieu le 1er janvier 2000. Les visiteurs découvrirent alors les nombreuses modifications faites au Centre : des espaces agencés différemment et plus grands, de nouveaux services et une distribution des espaces modifiée.4

La Bpi & l’Ircam Si le Centre Pompidou fait aujourd’hui souvent parler de lui, c’est principalement à cause de sa collection, de l’exportation de celle-ci, et de l’ouverture d’autres musées, à la fois sur le territoire français 1 BREERETTE, G., 1985. «Un nouveau musée sur un plateau», Le Monde, 31 mai 1985 in LAUXEROIS, op. cit. p.75 2 LAUXEROIS, op. cit. p.75 3 ibid. 4 ANONYME, 2017. "Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou." Wikipédia, l'encyclopédie libre. [en ligne] https://fr.wikipedia.org/wiki/Centre_national_d%27art_ et_de_culture_Georges-Pompidou [en date du 20 juillet 2017]


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fig. 5 - Plans des collections permanentes du Musée national d'art moderne, 1985. - Surface intérieure des Collections permanentes : 8 200m2 4ème Sud : 2 700 m2 4ème Nord : 3 500 m2 3ème Sud : 2 000 m2 - Surface des terrasses où seront présentées des sculptures 4ème Sud : 640 m2 (accessible par l'extérieur en novembre) 4ème Est : 520 m2 (accessible par l'intérieur en novembre) 4ème Nord : 270 m2 - Hauteur des cimaises : 5m - longueur 2.340m - Entrée et sortie des Collections permanentes : 4ème étage - Accès des Collections contemporaines directement par l'entrée du 4ème (escalier mécanique) - Accès spécialement réservé aux groupes sur R V :3ème étage


et en dehors. Pourtant, celui-ci n’est pas limité au Mnam/Cci, et est composé de deux autres pôles : la Bpi, et l’Ircam.

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La première, la Bibliothèque publique d’information, est créée avant que l’idée du Centre n’émerge. C’est Julien Cain, ancien directeur des bibliothèques de France et de la lecture publique de 1946 à 1964 qui lui donnera son premier élan, dans « un contexte de crise de la lecture »1. Le projet démarre en 1963 avec l’idée de créer des salles de lecture publique dans le quartier des Halles, dans le cadre du projet de rénovation du quartier (transfert du Marché de Paris à Rungis). En 1967, le ministère de l’Éducation nationale, par le biais d’Alain Peyrefitte, approuve le projet de création d’une grande bibliothèque de lecture publique. Le projet est par la suite précisé par Jean-Pierre Seguin qui rêve « d’une bibliothèque entièrement “automatisée”, offrant au public la possibilité d’effectuer lui-même ses recherches sur ordinateur »2. Ce nouvel équipement aurait alors pour vocation « l’information plus [que] la simple lecture, cette information consistant alors à permettre aux usagers de disposer d’un inventaire tenu à jour des fonds des autres bibliothèques, d’analyser le contenu des documents acquis, de bibliographies sélectives, et d’un service de réponses par téléphone »3 . Si cela s’avère être compliqué au début – les technologies n’étant pas encore au point – le rêve se développa malgré tout, et prit logiquement sa place au sein du nouveau projet de centre culturel de Georges Pompidou. Elle déménagera plusieurs fois entre sa création et l’ouverture du Centre, et n’en sortira que brièvement durant les grands travaux de 1997 à 2000. Tout comme le reste du Centre, le succès de la bibliothèque est immédiat, attirant près de 12 000 personnes par jour durant les vingt premières années. À l’ouverture, la bibliothèque occupe 15 000 m² sans mur ni cloison sur trois niveaux, reliés entre 1 CENTRE POMPIDOU, n.d. «L’identité visuelle du Centre Pompidou» [en ligne] http:// mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-identite-visuelle/identite01. html [en date du 20 juillet 2017] 2 ibid. 3 SEGUIN, Jean-Pierre, 1987. Comment est née la Bpi ? Invention de la médiathèque, Paris, Bibliothèque publique d’information.


eux par un escalator. Après les travaux, l’entrée de la Bpi est séparée des autres activités du Centre. La bibliothèque offre alors 2 000 places sur 10 000 m² répartis sur trois niveaux – 17 000 en contant les espaces non accessibles au public –, et comprend deux zones de collections et des espaces spécifiques. La bibliothèque ne se limite pas uniquement à l’univers de la lecture, offrant aussi des espaces de protection et de conférence, ainsi que l’accès à des films, des archives sonores, de la musique, etc. Elle ressemble ainsi plus à une médiathèque qu’à une bibliothèque. L’Institut de recherche et de coordination acoustique/musique est une association autonome. Il est le seul des quatre éléments du programme du concours qui n’est pas intégré à l’architecture du Centre, pour des raisons techniques et pratiques. Le besoin d’espaces spécifiques en termes d’acoustique le situe ainsi en souterrain entre le bâtiment du Centre et l’église Saint-Merri, sous la place Stravinsky.

fig. 6 - Maquette de l'Institut de recherche et de coordination acoustique/musique.

Il est lancé grâce à Pierre Boulez, et s’engage dès le début dans une recherche interdisciplinaire sur l’exploration et la production de son. Aujourd’hui, il est « l’un des plus grands centres de recherche publique au monde se consacrant à la création musicale et à la recherche scientifique »1. De plus, « une politique de recherche scientifique et 1 IRCAM [en ligne] https://www.ircam.fr/lircam/ [en date du 20 juillet 2017]

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musicale doublée d’une dimension pédagogique permet à de jeunes artistes de venir y travailler en résidence »1. L’Ircam, s’il est un outil de diffusion et de sensibilisation du public auprès de la musique et du son de manière générale, est aussi un institut scientifique de haut niveau. Ainsi, « l’Unité mixte de recherche STMS (Sciences et technologies de la musique et du son), hébergée par l’Ircam, bénéficie (…) des tutelles du CNRS et de l’université Pierre et Marie Curie »2; et de nombreux partenariats internationaux sont actifs entre l’Ircam et divers centres de recherches, universités, entreprises, et institutions culturelles et artistiques partout dans le monde. 50

Si le Centre rayonne d’une part grâce à son musée, le reste de ses acteurs n’est pas en reste pour autant, permettant au Centre de continuer à être un acteur central et important sur la scène mondiale.

Le musée universel « Le musée, on l’a vu, est issu d’un modèle européen. Dans sa forme initiale, il reflète la société aristocratique d’Ancien Régime. À partir du XIXe siècle et la création du Louvre, il participe à l’édification du sentiment national dans les grandes nations traditionnelles puis dans les jeunes nationalités qui aspirent à l’indépendance (…). »3 Selon François Mairesse4, quatre moments de la muséographie sont définissables entre les années 1960 et 2010, année durant laquelle il écrivit son article. La dernière – dans laquelle nous serions – est celle du musée universel, en réponse à une globalisation et à un marché du tourisme culturel grandissant toujours plus. Malgré la nette évolution des grandes institutions muséales d’une dynamique de musée monument vers une de machines à exposer, une autre question serait : « Le musée lui-même serait-il devenu une œuvre 1 CENTRE POMPIDOU, n.d. op. cit. 2 IRCAM, op.cit. 3 GOB, DROUGUET, op. cit. p. 78 4 MAIRESSE, 2010. op. cit.


d’art ? »1 En effet, l’architecture s’expose dans les musées, pourquoi alors devrait-elle être différenciée des œuvres qu’elle contient? Si Eddy Dewilde, longtemps conservateur au Stedelijk Museum à Amsterdam, haut lieu de l’art contemporain en Europe et dans le monde, affirmait : « Je conçois le musée de l’avenir comme un hangar pourvu de tous les moyens techniques et non comme un monument »2, d’autres « prétendent vouloir d’un bâtiment muséal qui soit une œuvre d’art, voire un chef-d’œuvre »3 . Ainsi Richard Meier décrète : « En tant qu’architectes, nous devons faire des musées qui soient des œuvres d’art pour procurer du plaisir aux visiteurs »4. Quant à Frank Gehry, il déclare : « Par définition, un bâtiment est une sculpture puisque c’est un objet en trois dimensions »5 . Le musée universel – et la diversification des thèmes et des formes de l’institution muséale – est le fruit de différents facteurs : la démocratisation, la mondialisation, le tourisme culturel, et les nouvelles technologies.6 L’arrivée d’un nouveau public moins ou peu initié à la culture musée, et ayant des attentes différentes de ce que le public habitué avait, a poussé à revoir la manière dont les musées opéraient, notamment en termes de communication. La diffusion mondiale du musée, remontant à la fin du XIXe siècle, l’a confronté à des cultures et des sociétés différentes qui ont fait leur cette nouvelle institution, l’adaptant aux réalités et besoins locaux. Une nouvelle diversité de formes et de thématique naquit alors. Quand le touriste a commencé à s’intéresser au musée, et qu’il s’est engouffré dans les salles d’exposition en amenant avec lui toute sa diversité, une nouvelle approche a dû être tenue afin de faciliter l’exploitation touristique. La communication et la diffusion font partie intégrante des musées aujourd’hui, mais une transition a dû être opérée afin d’y parvenir. Celle-ci a été possible notamment grâce à l’apparition de nouvelles technologies. 1 USTINOV, Clara, 2007. “Quel musée pour l’art contemporain ?», in : Muséologies 12, p. 24. 2 DEWILDE, Eddy. in FOULON, Pierre Jean, 2001. Architecture et musée : actes du colloque organisé au Musée royal de Mariemont, les 15 et 16 janvier 1998. Renaissance du livre. Tournai. Esprit des choses. p.54 3 FOULON, op. cit. p.16 4 MEIER, Richard. in FOULON, op.cit 5 GEHRY, Franck. in FOULON, op.cit 6 GOB, DROUGUET, op. cit. p. 41

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Ces différents points se retrouvent dans la politique du Centre Pompidou. Le travail significatif en termes de médiation et de pédagogie d’une part, tel qu’il est clairement visible au travers des dossiers d’expositions, ou encore du Centre Pompidou Mobile dont il sera question plus bas. D’autre part, le Centre prend aussi grand soin de sa communication. Cela peut se voir dans le travail titanesque réalisé dans la mise en place et la refonte de l’ensemble de ses plateformes web en 2012, qui continuent à être tenues à jour. Cette ère du numérique, le Centre a bien l’intention de s’en servir au meilleur de ses capacités. Aujourd’hui, « plus de 467 000 ressources (dont environ 141 000 reproductions d’œuvres, 875 captations vidéo, 265 bandesannonces, etc.) sont actuellement en ligne »1. Ces ressources continuent à être indexées, permettant à chacun d’effectuer une recherche dans l’énorme collection disponible en lignes, mais ne représentant encore qu’une partie de la collection totale du Centre. Cette disponibilité passe aussi au travers de la nouvelle application pour smartphone qui fut lancée en 2015, permettant l’accès aux informations disponibles sur le site, mais aussi à des podcasts réalisés en partenariat avec Arte Radio, et depuis mars 2016, à la web-série Mon Œil conçue pour les enfants. Les réseaux sociaux n’ont pas été oubliés non plus, le Centre Pompidou étant « en deuxième place des musées français sur Twitter et Instagram, et en quatrième place sur Facebook »2. La volonté d’un renouvellement se retrouve au cœur du Centre Pompidou et de sa politique. Pour ses 40 ans, l’idée n’a pas été de se fêter lui-même et de se glorifier. Comme le dit son directeur, Serge Lavisgnes : « J’ai souhaité que le 40e anniversaire du Centre Pompidou soit la fête de la création artistique partout en France. Qu’il témoigne de la vitalité des institutions culturelles qui partagent l’esprit du Centre Pompidou. Qu’il permette de célébrer les liens noués avec les artistes, les musées, les centres d’art, les scènes de spectacle, les 1 CENTRE POMPIDOU, 2016. Bilan d’activité [en ligne] http://bilan-activite-2016. centrepompidou.fr/ [en date du 22 juillet 2017] 2 ibid.


festivals, de développer et d’enrichir une longue histoire de projets communs au service de l’art et de la création. Qu’il soit l’occasion d’aller à la rencontre de ceux qui aiment le Centre Pompidou depuis 40 ans comme audevant de nouveaux publics. L’anniversaire du Centre Pompidou est placé sous le signe du territoire, à travers des manifestations très variées, pour susciter, accompagner, favoriser, faciliter des projets. » C’est pourquoi le Centre compte s’exporter encore, ayant mis en place des partenariats avec 40 villes françaises, il (co) organise 50 expositions et 15 spectacles/concerts/performances entre la fin de l’année 2016 et le début de l’année 2018 sur le territoire français. Il prévoit aussi de continuer – et d’augmenter – les nombreux échanges, prêts et autres partenariats internationaux qu’il effectue depuis sa création.

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V.

Exportation du musée

Le Centre Pompidou, en suivant les politiques lancées par les différents présidents depuis la fin des années 1990, compte bien continuer à élargir ses horizons au travers d’échanges, de prêts, de partenariats et d’ouverture de nouvelles entités sœurs, comme celle à Metz et à Málaga. Cette dynamique datant de la première décennie du XXIe siècle semble être le résultat d’un long développement du musée et de l’institution muséale dans son ensemble, allant graduellement d’un environnement plus privé – lié au collectionnisme et aux cabinets de curiosités – à un plus public – lié à l'ouverture des premiers musées publics.

La bulle des musées Selon les chiffres de l’UNESO, entre 1975 et 2011 le nombre de musées dans le monde est passé de 22 000 à 55 000 ; ce qui représente une augmentation de 250 % en 36 ans1. Aujourd’hui ce chiffre n’a pu qu’augmenter encore plus, les recensements disponibles sur le site de l’European Group on Museum Statistics, montrant qu’il y aurait près de 20 000 2 Musée situé sur le continent, distribué entre 30 pays ; tandis qu’en 2014, l’Institute of Museum and Library Services recense pas moins

1 UNESCO, op. cit. 2 EGMUS - The European Group on Museum Statistics [en ligne] http://www.egmus.eu/ nc/en/statistics/complete_data/ [en date du 29 juillet 2017]

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de 35 0001 musées en tout genre sur le territoire américain, contre 17 500 dans les années 1990. Si ces chiffres sont impressionnants, près de 50 % de ces musées sont divisés entre trois catégories qui ne font sans doute pas partie de celles recensées en Europe, à savoir Historical Societies, Historic Preservation, & Historic Houses and Sites (48 %), Zoos, Aquariums, & Wildlife Conservation (1,4 %), et Arboretums, Botanical Gardens, & Nature Centers (2,4 %). Rien qu’entre ces deux chiffres, qui totalisent 37.500 – si l’on considère que les catégories susmentionnées ne rentrent pas en compte –, il est évident que le nombre de musées n’a pu qu’augmenter depuis ces 6 dernières années ; et que le musée est donc résolument devenu une entité mondiale. 56

S’il est né en Europe2 à la fin du XVIIIe siècle, il commença à se diffuser ailleurs dans le monde au courant de la deuxième moitié du XIXe siècle. C’est d’ailleurs grâce à cette diffusion qu’apparaissent de nouveaux caractères muséologiques jusqu’alors non-existent en Europe ; et que la transition d’une politique individualiste3 à une politique expansionniste de la part de certains grands musées voit le jour, notamment grâce à la fondation Guggenheim qui exporta une partie de sa collection en faisant construire un deuxième musée à Bilbao. « (…) c’est à partir des années 1980 que les musées d’art contemporain deviennent véritablement les fers de lance du renouveau muséologique. Qu’il s’agisse de la réaffectation de bâtiments industriels ou commerciaux, dont les vastes espaces indifférenciés offrent un environnement idéal à la création contemporaine, ou de nouvelles constructions confiées aux plus grands architectes, les musées d’art moderne ou contemporain qui s’ouvrent depuis 25 ans cherchent dans une 1 IMLS - Institute of Museum and Library Services, 2014. «Government Doubles Official Estimate: There Are 35,000 Active Museums in the U.S.» [en ligne] https://www.imls. gov/news-events/news-releases/government-doubles-official-estimate-there-are35000-active-museums-us [en date du 29 juillet 2017] 2 GOB, DROUGUET, op. cit. p. 32 3 Bien entendu, une entre-aide entre musée existe depuis longtemps, notamment via le prêt d’œuvres, les expositions itinérantes, etc.


architecture d’exception l’attractivité auprès du grand public que leurs collections, souvent d’un abord ardu, n’attirent pas toujours. Le musée Guggenheim de Bilbao fait figure d’emblème de ce renouveau. »1 Le hold-up culturel mondial, du à l’augmentation continue du volume des collections des grands musées, y compris celle du Centre Pompidou, et la quasi non-visibilité de celle-ci – par faute d’espace d’exposition – a donc fini par pousser certain d’entre eux à s’étendre, qui au travers d’une extension du bâtiment, qui au travers de l’ouverture d’un bâtiment délocalisé, afin de remédier au problème. Ce schéma – qui n’est pas nouveau, les musées ont depuis longtemps construit de nouvelles ailes afin de satisfaire le besoin toujours plus grand d’espaces d’exposition – a connu une nette évolution depuis les années 1980. En créant de nouveaux bâtiments en des lieux différents, ces premières institutions ont créé un précédent dans l’histoire. Parmis celles-ci, peuvent être mentionnées le Grand Louvre en 1993, le Guggenheim à Bilbao en 1993 et à Abu Dhabi pour 2017, les exportations de la Tate – St Ives en 1983, Liverpool en 1988, Modern en 2000 et 2016 –, les travaux d'extension du MoMA en 1939, 1968, 1984, 1996, et ceux prévu pour être terminé fin 2019 ; peuvent aussi être mentionnés les exportations du Musée de l'Hermitage à Las Vegas en 2001 (en partenariat avec la fondation Guggenheim), à Amsterdam en 2004, à Kazan (Tatarstan, Russie) en 2005, à Ferrara en 2007, et un projet d'ouverture à Barcelone pour 2019. Ainsi, c’est sous la forme d’une marque qui se dissémine de par le monde petit à petit que le futur de certains musées tend. Déjà lors des grands travaux de réaménagement et d’agrandissement du Centre entre 1997 et 2000, et afin que les collections puissent rester visibles durant les quelque 27 mois qu’ils durèrent, de nombreuses expositions eurent lieu dans différentes villes françaises, ainsi qu'à l'étranger. Allant aussi loin que les Etats-Unis et le Japon, le succès de cette expérience poussa les gestionnaires du Centre à se poser la question du futur de l’institution. Les expositions « Hors les Murs » 1 GOB, DROUGUET et CHAUMIER, op. cit. p. 34

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attireront 1,2 million entre septembre 1997 et septembre 19981, et plus de 2,5 millions de visiteurs au total. C’est d’ailleurs le succès de ce programme, totalisant une trentaine d’expositions en France et à l’étranger, qui offrit un nouvel horizon au Centre Pompidou, celui de créer un autre Centre Pompidou en région2.

Effet Bilbao et Pompidou Metz

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« Le soi-disant “effet Bilbao” réfère à l’utilisation d’un bâtiment phare (par exemple un musée, un opéra, une salle de concert, un théâtre) caractérisé par une architecture iconique et dessiné par un “architecte star” comme moyen de revitalisation axée sur la culture d’une ville ou d’une région délabrée en un lieu attrayant, visible nationalement et internationalement pour le tourisme, les affaires ou les industries culturelles et créatives. »3 Comme dit plus haut, les premiers à avoir effectué cette transition sont les Américains avec le Guggenheim de Bilbao. Du moins c’est ce projet qui eut l’impact le plus significatif dans le domaine de l’exportation. Les effets de développement induits par l’association ville/culture sont, selon Chris Hamnet et Noam Shoval4, bien antérieurs à ce projet. En 2010, c’est au tour des Français de prendre le pied avec l’ouverture, à un peu plus de 3 heures de route de Paris, de leur premier musée satellite, sous l’égide du fameux Centre Pompidou. Il sera suivi du Louvre-Lens en 2012, du Centre Pompidou de Málaga en 2015 et des projets du Louvre Abou Dhabi prévu pour fin 2017 et du futur 1 CENTRE POMPIDOU, 1998. Bilan d'activité. pp.9-12 2 CENTRE POMPIDOU METZ, «Les grandes étapes» [en ligne] http://www. centrepompidou-metz.fr/les-grandes-etapes [en date du 24 juillet 2017] 3 HEIDENREICH, Martin, PLAZA, Beatriz, 2015. “Renewal through Culture? The Role of Museums in the Renewal of Industrial Regions in Europe”. European Planning Studies. 3 août 2015. Vol. 23, n° 8, pp. 1441‑1455. [notre traduction] 4 HAMNETT, Chris, SHOVAL, Noam. 2003. “Museums as ‘Flagships’ of urban development”, in BOQUET, Mathias, 2014. « L’impact touristique des nouveaux musées : analyse des relations entre l’environnement urbain et la spatialisation de l’impact à travers les exemples du Centre Pompidou- Metz et du Louvre-Lens », Belgeo [En ligne] http:// belgeo.revues.org/12600 [en date du 09 juillet 2016.]


Centre Citroën à Bruxelles1. Ces quelques projets ne sont que des exemples, et de nombreux autres sont en cours de discussion dans de nombreux pays. Cette frénésie fait notamment suite à la réussite du musée à Bilbao. Celui-ci – utilisé afin de justifier la création d’un nouveau musée – est pourtant souvent mal interprété. En effet, bien qu’il ait eu une part de responsabilité, ce n’est pas uniquement le nouveau musée qui est à l’origine de la visibilité internationale de la ville basque. Durant 10 années avant que l’idée même d’un musée ne traverse l’esprit des dirigeants, ceux-ci avaient commencé de longs, lourds et gros travaux afin d’effectuer la transition d’une ville au passé industriel vers une nouvelle identité urbaine. La tendance a pourtant été de se focaliser sur l’apparition du nouvel objet architectural signé Franck Gehry comme élément central de ce renouveau à Bilbao. Depuis, nombreuses sont les villes qui ont tenté le pari en s’offrant leur propre musée, signé de la main d’un des grands noms de l’architecture contemporaine2. Les pouvoirs publics et les fondations privées s’arrachent donc les grands architectes, autrement connus sous la dénomination d’architectes stars, à coup de gros budget afin de justifier une nouvelle direction culturelle tenue par leur ville. Si l’on peut se réjouir de la reconnaissance de l’architecture comme moteur économique, identitaire et culturel d’une ville, il ne faut pas pour autant tomber dans le travers de croire qu’elle seule est source de renouveau. Notons par ailleurs que souvent le but de la construction d’un musée d’art moderne ou contemporain « est de témoigner, de manière métaphorique, de la foi d’un pays, ou d’une ville, en son avenir, de sa capacité à l’innovation et de sa certitude d’atteindre dans le domaine culturel et artistique un rayonnement international gagé, en quelque sorte, sur sa puissance politique, économique ou

1 Celui-ci ne sera pas à proprement parlé une succursale du Centre Pompidou, mais il lui est lié au travers d'un parrainage entre le l'institution parisienne et le futur Centre bruxellois. Selon le directeur du Centre Pompidou, il est à comparer avec le Louvre à Abu Dhabi pour lequel un grand musée aide à la création d’un autre musée à l’étranger. 2 AMA, 27 août 2015. "Art in the 90s: Starchitecture and the Bilbao Effect", Art Media Agency [en ligne] https://en.artmediaagency.com/113524/art-in-the-90s-starchitecture-andthe-bilbao-effect/ [en date du 9 juillet 2017]

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financière »1. Cette compétition semble être de bon présage pour ce qui est de l’intérêt pour la culture, mais la réalité est-elle la même ?

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Si certains des musées ayant ouvert leurs portes suite à la frénésie Bilbao n’ont pas su tenir le coup, le Centre Pompidou Metz semble tenir la route. Prévue à l’origine pour 2008, la deuxième itération du Centre n’ouvrira finalement ses portes que deux ans plus tard. S'il arrive que certains de ces nouveaux phares culturels soient – pour reprendre les mots de Carl Grodach – « des espaces isolés et exclusifs qui sont dessinés pour servir les visiteurs avant les habitants et qui sont séparés de tout processus de planification publique »2, ce n’est heureusement pas le cas ici. Il ne faut pas oublier non plus le caractère sans précédent de la chose : c’est la première décentralisation d’une grande institution culturelle nationale en France. L’idée fut lancée en 2003, par JeanJacques Aillagon, l’ancien directeur du Centre et alors ministre de la Culture et de la Communication. Il n’y avait pour but non pas de créer une antenne du Centre Pompidou, mais bien « une institution “sœur” du Centre Pompidou, un lieu de culture autonome, avec une programmation singulière d’expositions temporaires et d’événements pluridisciplinaires »3 . Plus fort encore, ce n’est pas un musée ! Il ne possède pas de collection propre, mais peut par contre bénéficier « des atouts de son “grand frère” parisien : son nom, son savoir-faire, et bien sûr un accès privilégié à [sa] collection »4. Ainsi le Centre à Metz n’est « ni succursale, ni antenne du Centre Pompidou »5 , mais est à considérer comme un organisme associé, au même titre que le sont la Bpi et l’Ircam. Sa réussite passe notamment par la manière dont le grand frère traite l’implantation lorraine. Loin de vouloir en faire un lieu secondaire permettant uniquement à aérer ses collections, ou encore à les entreposer, l’idée est de créer un lieu fort et en lien avec les communautés présentes sur place. 1 CEYSSON, Bernard, 1998. "Le musée d'Art moderne Grand-Duc Jean" in FOULON, op.cit. p.54 2 GRODACH, Carl, 2010. “Beyond Bilbao: Rethinking flagship cultural development and planning in three California cities”, in HEIDENREICH, PLAZA, op. cit. 3 CENTRE POMPIDOU, 2012. op.cit p.42 4 ibid. 5 ibid.


Plusieurs villes furent considérées suite à l’idée d’une décentralisation du Centre, parmi elles se trouvent Caen, Montpellier, Lyon, Nancy, Lille, et Metz. C’est cette dernière qui fut choisie, pour des raisons d’accessibilité – à tous les niveaux, local, régional, national et international –, de volonté politique de la part de la ville, financière, et urbanistique ; le projet s’inscrivant dans un projet d’urbanisation du nouveau quartier de l’Amphithéâtre. Un mois après que la décision de localiser le nouveau bâtiment dans la ville de Metz fût prise, un concours international fut lancé, pour lequel 157 propositions furent soumises. De celles-ci, 6 furent sélectionnées et finalement une fut réalisée : celle des bureaux de Shigeru Ban ( Japon), Jean de Gastines (France), et Philippe Gumuchdjian (Angleterre). Un programme similaire à celui du Centre est mis en place : des espaces d’exposition, un auditorium, un studio de création, une librairie boutique, un centre de ressources, un café et un restaurant.1 Les espaces d’expositions sont divisés en deux types : les galeries et la Grande Nef, qui ensemble offrent plus de 5 000 m² de surface d’exposition. Au nombre de trois, les galeries effectuent une rotation de 45° à chaque niveau, autour d’un pilier central rassemblant les circulations verticales. Elles permettent aussi de structurer l’espace intérieur, fort différent de ce que le volume extérieur peut laisser paraître. Identiques les unes aux autres, ces galeries avaient pour but d’être des espaces neutres, des white cubes, et se devaient de permettre une grande flexibilité sans pour autant rivaliser avec l’exposition. Audacieuses par leur simplicité et uniformité, elles doivent malgré tout s’appuyer fortement sur les aménagements temporaires des expositions pour fonctionner2. Chacune de ces galeries offre au visiteur une vue imprenable sur la ville de Metz grâce aux grandes baies vitrées (14 mètres par 5 mètres) placée aux extrémités de ces espaces. Le grand 1 CENTRE POMPIDOU METZ, "Un concours international" [en ligne] http://www. centrepompidou-metz.fr/un-concours-international [en date du 24 juillet 2017] 2 SELF, Ronnie, 2014. «The Architecture of Pompidou Metz: An Excerpt from ‘The Architecture of Art Museums – A Decade of Design: 2000 – 2010’». Archdaily [en ligne] http://www.archdaily.com/507596/the-architecture-of-pompidou-metz-an-excerptfrom-the-architecture-of-art-museums-nil-a-decade-of-design-2000-nil-2010 [en date du 2 août 2017]

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fig. 7 - plan Centre Pompidou-Metz, ĂŠtage 0

fig. 8 - plan Centre Pompidou-Metz, ĂŠtage 1


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fig. 9 - plan Centre Pompidou-Metz, ĂŠtage 2

fig. 10 - plan Centre Pompidou-Metz, ĂŠtage 3


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fig. 11 - coupe du Centre Pompidou-Metz.

fig. 12 - coupe du Centre Pompidou-Metz.


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fig. 13 - Forum du Centre Pompidou-Metz. Photo par Didier Boy de la Tour.

fig. 14 - Chapeau chinois.

fig. 16 - Maquettes test de la structure du toit du Centre Pompidou-Metz

fig. 15 - Maquette test de la structure du toit du Centre Pompidou-Metz

fig. 17 - DĂŠtail de la structure du toit du Centre Pompidou-Metz


espace d’accueil/forum appelé la Grande Nef offre une hauteur sous plafond allant de 6 à 21 mètres, qui permet l’accrochage ou la mise en place d’œuvres qui ne peuvent, par leur taille, tenir sous les 5,5 mètres disponibles sous les plafonds du bâtiment parisien.

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fig. 18 - Vue vers la cathédrale Saint-Étienne à Metz. Photo par Didier Boy de la Tour.

Afin de connecter tous ces espaces entre eux, une grande toiture aux airs souples couvre l’ensemble. L’histoire voudrait que Shigeru Ban ait été inspiré par modèle de chapeau chinois pour le dessin de la structure de la couverture. Vrai ou faux, cela n’enlève rien à la beauté du résultat et l’ingéniosité nécessaire pour y parvenir ; même si le chapeau est maintenant exposé dans le bâtiment. Le toit continu et courbe est l’élément qui demanda le plus d’étude et de réflexion afin qu’il soit faisable structurellement et économiquement. La structure de bois crée un treillis hexagonal qui est continu sur l’ensemble du bâtiment – sur parfois près de 40 mètres –, et repose sur quatre colonnes formées du même treillis allant jusqu’au sol, les deux dernières colonnes étant en acier pour des raisons budgétaires. Recouvert d’une membrane fine en fibre de verre, la couverture permet une belle qualité lumineuse dans le bâtiment. Le résultat n’est pas léger, mais l’utilisation du bois donne à l’espace un caractère humain et chaleureux. Si l’agencement des espaces ne le laisse pas transparaître, l’organisation du programme entre le projet à Metz et le Centre à Paris est fort


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fig. 19 - plan d'implantation du Centre Pompidou-Metz


similaire. Dans les deux cas, une large place publique légèrement inclinée, une piazza, amène le visiteur vers l’entrée du bâtiment. Une fois à l’intérieur, un forum mène vers les circulations verticales. Celles-ci sont des éléments forts de l’architecture, et connectent des espaces d’expositions identiques, superposés et flexibles. Finalement, les espaces et les conduites techniques sont placés sur les façades est des deux bâtiments, même si dans le cas du Metz celle-ci est située du côté des voies de train.

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L’architecture représente ici un lien symbolique entre les deux institutions, marquées par des gestes audacieux et inédits pour leur époque ; chacune avec sa personnalité, deux « machines à exposer », selon les mots d’Alain Seban1. Pourtant, comme son grand frère parisien, le Centre à Metz donne l’impression d’être accessible à tous.2

Le Centre Pompidou Mobile « Il faut attendre les années trente pour trouver les premières expériences de diffusion culturelle à partir d’unités mobiles. Atteindre des publics défavorisés, hors des circuits habituels, tels sont les objectifs du cinéma et de la lecture. Les années de paix qui suivent le deuxième conflit mondial voient l’émergence aux États-Unis de tentatives similaires, mais cette fois-ci dans le domaine des sciences naturelles. » 3 En 2011, alors que Metz venait d’accueillir le Centre en son sein, un autre projet prenait déjà la route : le Centre Pompidou Mobile, dessiné par Patrick Bouchain. La première thématique de cette expérience – parce qu’il en faut bien une – était celle de La Couleur. Clin d’œil à l’usage de celle-ci dans l’architecture du centre ? Très certainement. 1 CENTRE POMPIDOU, 2010. Bilan d'activité. p.47 2 SELF, 2010. op.cit. 3 BARY, M.O., SAADE, W. 1985. Muséologie Nouvelle et Expérimentation Sociale (M.N.E.S) Info, Bulletin de formation n°5, p.1 in. SEBAN, Alain, 2013. "Dynamiser la circulation des collections publiques sur l'ensemble du territoire national", Rapport à Madame Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la Communication


D’ailleurs, elle fut amplement employée dans le dessin de la structure itinérante de Bouchain, composé de trois chapiteaux qui ne sont pas sans rappeler le cirque et les arts forains. Cette référence est ce qui a poussé le Centre à « offrir cet équipement au Centre international des arts en mouvement, centre culturel dédié aux arts du cirque, installé à Aix-en-Provence »1. Forte de 14 œuvres couvrant l’entièreté du XXe siècle, la première saison s’arrêta dans les villes de Chaumont, Cambrai et Boulogne-sur-Mer, à chaque fois pour trois mois. La deuxième saison quant à elle avait pour thème Cercles et Carrés, et s’est elle aussi arrêtée en trois villes : Libourne, Le Havre et Aubagne. Comme pour la première saison, les arrêts étaient d’une durée de trois mois durant la deuxième.

fig. 20 - Le Centre Pompidou Mobile à Cambrai, en 2012. © Cyrille Weiner, Construire, Philippe Migeat

Ce « premier musée nomade au monde »2 avait pour but premier d’aller « au-devant de ceux qui ne vont jamais au musée et invite, gratuitement, un public souvent éloigné de l’offre culturelle 1 CENTRE POMPIDOU, 2013. Bilan d'activité. p.23 2 CENTRE POMPIDOU, 2012. op.cit. p.14

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traditionnelle à faire l’expérience de la rencontre avec l’œuvre d’art originale dans un environnement à la fois attrayant et muséal »1. Cette démarche on ne peut plus bienveillante et démocratique semble avoir porté ses fruits selon le Centre ; mais pas selon ses détracteurs.

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La médiation autour de cet événement itinérant était fort axée vers ces populations, ainsi que vers les groupes scolaires. En lisant les dossiers pédagogiques réalisés pour les deux saisons, il est facile de s’en rendre compte. Chaque œuvre y est décrite et explicitée brièvement, ainsi que la vie de l’artiste. À cela est ajoutée toute une série de textes liés à la thématique, écrits par ou à propos des artistes exposés, par des poètes, et par des théoriciens. Un ensemble d’approches est ensuite explicité afin de faire le lien entre l’exposition et les programmes scolaires de différents types et années d’enseignement.

fig. 21 - Espace d'entrée du Pompidou fig. 22 - Exposition sur la thématique Mobile © Cyrille Weiner, Construire, Couleurs au Pompidou Mobile Philippe Migeat © Cyrille Weiner, Construire, Philippe Migeat

D’après les rapports d’activités du Centre Pompidou pour les années 2012 et 2013, la première année d’itinérance a attiré 127 145 visiteurs ; 102 430 individuels et 24 715 en groupes, dont 17 382 scolaires (dont 8 768 élèves du premier degré et 8 614 élèves du second degré). La deuxième année a quant à elle attiré 119 794 visiteurs ; 96 203 en individuels et 23 591 en groupes, dont 17 409 scolaires.

1 ibid. p.15


À en croire les chiffres publiés par le Centre au travers de ces bilans d’activité, le Centre Pompidou Mobile est une réussite. Selon le directeur Alain Seban, « le succès était “énorme” en termes de fréquentation », et de surenchérir quelques mois plus tard, déclarant « [qu’] on note une réelle diversité de publics avec, pour beaucoup de visiteurs, un premier contact avec des œuvres d’art originales »1. Même la ministre de la Culture et de la Communication de l’époque – Aurélie Filipetti – en parlait en termes élogieux, disant du projet qu’il était « une opération exemplaire »2 lors de l’inauguration de la deuxième saison. Cette mise en valeur des chiffres comme critère de réussite sera pourtant remise en cause par cette même ministre quelques mois plus tard, alors qu’elle demandait « d’être innovants et surtout de sortir de la logique du chiffre qui a contaminé tous les secteurs [de la culture] ces dernières années. On juge le succès d’une exposition, d’une pièce de théâtre au nombre de visiteurs. Mais il faut aussi avoir une analyse qualitative. »3 D’ailleurs, ces mêmes chiffres qui valent la réussite de l’expérience selon le Centre pourraient aussi prouver le contraire. Comme le souligne Bernard Hasquenoph dans son article pour le site d’information Louvre pour tous, « les enquêtes commandées par le Centre Pompidou à l’institut de sondages TNS Sofres pour chaque ville visitée par le musée nomade démontrent le contraire de la version officielle : “Les visiteurs sont plutôt des habitués des musées”, est-il écrit noir sur blanc. »4 Pour comprendre ce que cela signifie, il faut remonter au début des années 1970. Depuis ces années, le ministère de la Culture et de la Communication réalise régulièrement l’enquête Pratiques Culturelles afin de s’informer de la relation entre les Français et les domaines de la culture et des médias. La dernière de ces études date de 2008, et elle 1 PARIS NORMANDIE, 2013. 2 FILIPPETTI, Aurélie, 15 nov. 2012. Inauguration du Centre Pompidou Mobile à Libourne. in : MONTANGUON, Alain, 2012. «Aurélie Filippetti au Pompidou mobile». Sud Ouest [en ligne] http://www.sudouest.fr/2012/11/16/aurelie-filippetti-au-pompidoumobile-880276-639.php [en date du 2 août 2017] 3 FILIPPETTI, Aurélie, janvier-février 2013. MOUVEMENT, 4 HASQUENOPH, Bernard, 2013. «Centre Pompidou mobile, l'illusion du succès». Louvre pour tous [en ligne] http://louvrepourtous.fr/Centre-Pompidou-mobile-lillusion,754.html#nh6 [en date du 28 juillet 2017]

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fait transparaître que seul 30 % des Français avait fréquenté ne fut-ce qu’une fois un musée – quel qu’il soit – au courant de l’année écoulée ; et 24 % pour ce qui est d’une exposition temporaire de peinture ou de sculpture. Ces chiffres ne varient pas énormément selon la tranche d’âge : 7 % d’écart maximum pour le premier, et 5 % pour le second. Il est par contre beaucoup plus grand selon le niveau de diplôme des sondés : 57 % d’écart pour le premier cas entre les personnes sans aucun diplôme (15 % avaient visité un musée dans l’année) et ceux ayant au minimum un bac+4 (72 % avaient visité un musée dans l’année) ; et 49 % d’écart dans le second cas où 12 % des personnes sans aucun diplôme avaient visité une exposition temporaire de peinture ou de sculpture sur les 12 derniers mois, contre 61 % pour ceux ayant au minimum un bac+4. Une fois ces chiffres en tête, il devient évident que ceux ressortis des enquêtes effectuées pour le Centre Pompidou Mobile durant la première saison ne collent pas exactement à ce que le Centre écrit dans son bilan d’activité annuel. Ces enquêtes montrent qu’à Chaumont : « 83 % des visiteurs du CPM ont déjà visité un musée dont 54 % durant l’année écoulée » ; à Cambrai : « 95 % des visiteurs du CPM ont déjà visité un musée dont 57 % durant l’année écoulée » ; et à Boulognesur-Mer : « 83 % des visiteurs du CPM ont déjà visité un musée dont 60 % durant l’année écoulée ». Mais si la majorité des visiteurs ont déjà une pratique muséale, le nombre de primo visiteurs est bien plus élevé qu’au Centre Pompidou, ce qui peut marquer une certaine réussite. Quand à Paris seuls 1,7 % et 2,4 % des visiteurs n’ont jamais mis les pieds dans un musée, à la même période le CPM affiche une moyenne de 14,5 % de primo visiteurs1. De plus, le profil socioprofessionnel est bien plus varié et démontre donc une réussite à ce niveau-là. Les enquêtes montrent que dans chaque ville de la première saison, l’écart entre les visiteurs de catégorie socioprofessionnelle « moins »2 1 SEBAN. op. cit. p.44 2 Les catégories socioprofessionnelles sont divisée en deux : les CSP- (Employés, Personnels de service, Ouvriers); et les CPS+ : Artistes, Enseignants, Agriculteurs, Cadres supérieurs, Professions libérales, Artisans, Commerçants, Chefs d'entreprise, Cadres moyens, Professions intermédiaires (descriptif Sofres)


et ceux de catégorie socioprofessionnelle « plus » restent de 3 %, alors qu’environ deux tiers de la population fait partie de la catégorie socioprofessionnelle « moins ». Si la répartition des groupes sociaux en France1 et la gratuité totale du Centre Pompidou Mobile y sont sans doute pour quelque chose, le résultat n’en reste pas moins positif. Il est toutefois étonnant de voir la direction qu’à prise le Centre, le coût d’usage du CPM atteignant facilement les 600 000 € par déplacement, dont un tiers était couvert par les villes d’accueil. Un coût moindre aurait sûrement été atteint si les œuvres eussent été prêtées aux musées présents dans chaque ville-étape, « ce qui aurait au moins garanti que les publics visés en auraient franchi le seuil, gage de la possibilité de les fidéliser à l’avenir »2. Cette solution a beau avoir des avantages, elle n’est pas aussi événementielle et unique en son genre que la structure mobile du CPM, ce qui était un élément clé de la venue du public. Le résultat semble mitigé quand il est comparé aux volontés établies lors de la mise en place du dispositif, mais il reste tout de même une belle tentative de la part du Centre. Il permit entre autres de mettre de répondre « à un réel besoin en régions, où l’offre culturelle est indubitablement moins riche qu’en Ile-de-France »3 . Quant au travail de médiation et de pédagogie, il fut exemplaire et permit tout de même de faire venir 34 791 scolaires sur les 6 étapes qu’a duré l’aventure, ce qui représente 14 % des visites totales. Cela est d’ailleurs totalement en accord avec les objectifs du Centre qui depuis longtemps cherche à familiariser et sensibiliser les plus jeunes à l’art, notamment par de nombreux ateliers ciblés, des événements, des visites, etc.

Les projets présents et futurs Le Centre Pompidou, bien qu’ayant aujourd’hui plusieurs localisations à son actif, n’est pas en reste pour autant. Comme mentionné plus haut, 1 INSEE, 2007. Répartition des différents groupes sociaux dans les régions. 2 TOBELEM, Jean-Michel, 2013. «Les choix problématiques du Centre Georges Pompidou (suite)». Option Culture [en ligne] http://www.option-culture. com/?p=6066&lang=fr [en date du 28 juillet 2017] 3 HASQUENOPH, 2013. op.cit.

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une série de partenariat ont été signés pour fêter ses 40 ans d’existence. Ces partenariats ne dureront qu’un temps, mais l’idée n’est pas de s’arrêter à ceux-ci. Déjà sous le précédent président du Centre, une politique d’exportation et d’ouverture au monde avait été développée. Celle-ci n’a pas l’air d’avoir été mise de côté pour autant, et bien que certains projets n’aient pas porté leurs fruits, d’autres sont toujours en marche ; les ouvertures du Centre Pompidou à Metz en 2010 et du Pop-up Pompidou à Málaga en 2015 n’en sont que les premières étapes. Si l’idée de décentralisation et d’ouverture d’antennes nationales et internationales date d’il y a plus de 10 ans, deux présidents du Centre plus tard les projets ont continué à se développer. 74

Un des premiers projets à avoir été divulgué – avec celui à Metz – est sans doute celui d’une exportation à Shanghai, prévue à l’origine pour 2010. Ce projet tombera finalement à l’eau suite à l’annonce anticipée du projet durant une conférence de presse en octobre 2006, lors de la visite du ministre de la Culture et de la Communication, Renaud Donnedieu de Vabres1. L’arrondissement de Luwan – dans lequel le projet devait se développer – devait tout d’abord obtenir les autorisations de la ville, mais surtout celles du gouvernement central chinois. D’après un connaisseur du projet sur place, « si c’est un projet commercial, il n’y a pas de problème. Si c’est un projet culturel, c’est beaucoup plus compliqué. »2 Depuis lors, le projet est à nouveau sur pied, tout comme une série d’autres. Fin 2016, Serge Lasvignes annonce que « le projet le plus avancé est celui de Séoul »3 . Le partenaire sud-coréen est une entreprise privée spécialisée dans l’organisation d’expositions, tandis qu’en Chine, c’est avec un groupe parapublic que le Centre est en négociation. La 1 PEDROLETTI, Brice, GUERRIN, Michel, 2007. « Le projet d’antenne du Centre Pompidou à Shanghaï se heurte aux réalités chinoises». Le Monde Culture. [en ligne] http://www. lemonde.fr/culture/article/2007/09/11/le-projet-d-antenne-du-centre-pompidou-ashanghai-se-heurte-aux-realites-chinoises_953809_3246.html [en date du 28 juillet 2017] 2 ibid. 3 CULTURE BOX (avec AFP), 2016. «Le ‘Centre Pompidou provisoire’ prospecte en Asie : bientôt à Séoul, et pourquoi pas Shanghai». Culture Box [en ligne] http://culturebox. francetvinfo.fr/ar ts/expos/le-centre-pompidou-provisoire-bientot-a-seoul-etpourquoi-pas-shanghai-241477 [en date du 28 juillet 2017]


première antenne asiatique était censée ouvrir au premier semestre de l’année 2017, mais la crise politique qui frappa la Corée du Sud à la fin 2016 bloqua le projet dans les starting-blocks. Si le projet coréen n’a pas pu se faire, rien ne dit qu’une nouvelle tentative n’aura pas lieu dans les années qui viennent, comme a pu le prouver le projet à Shanghai. Il lui aura fallu plus de 10 ans, mais celui-ci est finalement prévu pour le début de l’année 2019. Un communiqué émanant du Centre Pompidou en date du 18 juillet 2017, annonce que « le West Bund Group et le Centre Pompidou ont signé un protocole d’accord portant sur la réalisation d’un projet de coopération culturelle unique (2019-2024) entre la France et la Chine. Cet accord constitue le plus important projet d’échange de long terme dans le domaine culturel entre les deux pays. »1 L’idée – comme pour chaque partenariat de ce genre –, est que « le Centre Pompidou [apporte] son expertise et [exerce] une mission de conseil et d’assistance »2. Le but n’est pas pour autant d’arriver en conquérant, mais bien d’établir un rapport d’échange et faire en sorte que « pendant ces cinq années de partenariat, une vingtaine de manifestations diverses [soient] présentées dans l’espace de Shanghai ». Si une des ambitions est de pouvoir exposer la très large collection du Centre, « une place majeure sera donnée à la création contemporaine chinoise »3 . « À travers ces implantations, le Centre Pompidou propose de faire découvrir à un nouveau public sa collection de référence, l’excellence de sa programmation, la vitalité du croisement des disciplines artistiques et sa capacité d’innovation. L’institution collabore étroitement avec le partenaire pour concevoir ses programmes en dialogue avec la scène artistique locale. Le Centre 1 CENTRE POMPIDOU, 2017a. Communiqué de presse - Shanghai. p. 1 [en ligne] https:// www.centrepompidou.fr/en/content/download/76024/949926/version/1/file/CP_ Centre_Pompidou_Shanghai_West_Bund.pdf [en date du 28 juillet 2017] 2 ibid. 3 LAUTREAMONT, Agathe, 2017. «Un Centre Pompidou Shanghai pour 2019?» exponaute [en ligne] http://www.exponaute.com/magazine/2017/07/21/un-centre-pompidoushanghai-pour-2019/ [en date du 28 juillet 2017]

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Pompidou va ainsi au-devant de publics nouveaux et tisse des liens avec une nouvelle géographie de l’art et de la création. »1 Un autre projet est en cours : celui du Centre Pompidou/Citroën à Bruxelles. En projet depuis plusieurs années, c’est finalement avec l’institution parisienne qu’un accord est trouvé. Annoncé officiellement à la fin de l’année 2016, un concours international est lancé quelques mois plus tard, le 28 avril 2017. Avec 92 participations et déjà 7 candidats désignés à l’issue du premier tour, le projet est en bonne voie. 76

Le Centre, malgré ces quelques projets en voie de finalisation, ne s’arrête pas pour autant. Une deuxième antenne nationale était en cours de discussion début 2015, cette fois-ci selon le modèle « PopUp ». C’est avec la ville de Libourne que se tenait la discussion, après qu’elle ait reçu le Centre Pompidou mobile du 24 octobre 2012 au 20 janvier 2013. Le problème : les 5,8 millions d’euros à trouver pour la réaffectation d’un ancien bâtiment militaire en lieu approprié pour l’installation du Centre. Depuis début 2015 et l’annonce de la part des représentants de la ville d’un intérêt pour le projet, il ne semble pas avoir eu suite, du moins publiquement. La ville n’en reste pas moins un des lieux choisis par le Centre pour fêter ses 40 ans, accueillant une exposition sur le travail de Joan Miró de la mi-mai à la mi-août 2017. En 2014, le Conseil Stratégique Franco-Mexicain publiait un premier rapport explicitant les décisions et initiatives déjà prises, et celles encore à l’état de proposition. Parmi ces dernières, l’idée d’un Pop-Up Pompidou était énoncée, dans l’idée de resserrer les liens entre les deux pays pour ce qui est de la culture. Tout comme pour Libourne, aucune suite n’a été donnée publiquement quant à cet ambitieux projet. Serge Lasvignes, dans une interview pour Le Quotidien de l’Art en septembre 2015, déclarait que son « objectif est de construire un dialogue avec des scènes étrangères. Ce dialogue permettra de préparer nos collections de demain, d’éviter les trous et les retards. Je vois par exemple que 1 CENTRE POMPIDOU, 2017a op.cit. p.3


nous avons très peu d’œuvres d’artistes mexicains, et maintenant leurs œuvres sont beaucoup trop chères pour que l’on puisse les acquérir. »1 Cela laisse à croire que l’idée d’un partenariat reste envisageable. En 2007, les Centre Pompidou à Metz et à Shanghai n’étaient encore qu’à l’étape de projet. Bruno Racine, directeur du Centre depuis presque 5 ans et interviewé par Le Monde, répondait à la question d’une éventuelle troisième implantation en ces mots : « Non. Il faut éviter la fuite en avant. Mais il faudra penser à l’Inde. »2 Depuis la question de l’exportation a été gérée autrement par les directeurs successifs ; et si l’Asie reste au centre de la stratégie du directeur actuel, l’Inde n’est pas encore ressortie comme lieu d’exportation potentiel. Par contre, l’Afrique commence à faire les yeux doux aux institutions du monde entier, y compris le Centre Pompidou qui collabore déjà avec une fondation sud-africaine. Mais comme le dit Serge Lasvignes : « il faut voir où on peut se poser, et puis il y a le problème des moyens financiers »3 . Déjà approchée avec le Mexique, la scène outre-Atlantique intéresse aussi le Centre. Certaines pistes existent, notamment aux États-Unis où une collaboration avec une université de Chicago est en cours, et en Colombie, où la scène artistique est suivie de près par les dirigeants du Centre4. Pour le moment, seul deux de ces projets ont ouvert leurs portes. L’un – réelle antenne permanente – se trouve à Metz. L’autre se situe à Málaga et devrait rester ouvert jusqu’en 2020 minimum. Mais si l’établissement du Metz fonctionne, Serge Lasvignes ne pense pas que de nombreux autres verront le jour. Quant au modèle Pop-Up, il lui semble être un bon outil à l’international, mais peu adapté sur

1 AZIMI, REGNIER, 2015. op.cit. 2 GUERRIN, Michel, DE ROUX, Emmanuel, 2007. “Un Centre Pompidou en Chine d’ici à 2010” Le Monde Culture [en ligne] http://www.lemonde.fr/culture/article/2007/01/15/ bruno-racine-un-centre-pompidou-en-chine-d-ici-a-2010_855568_3246.html [en date du 28 juillet 2017] 3 AFP Relax News, 2016. ”Séoul, Shanghai...: le Centre Pompidou veut essaimer en Asie”. RTBF Culture [en ligne] https://www.rtbf.be/culture/arts/detail_seoul-shanghai-lecentre-pompidou-veut-essaimer-en-asie?id=9331342 [en date du 28 juillet 2017] 4 ibid.

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le territoire français, pour lequel une amélioration de la politique interinstitutionnelle serait une meilleure direction à prendre.1

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Si la machine de l’exportation semble être lancée pour le Centre Pompidou – et pour le reste des grands musées du monde2 –, ce n’est pas la seule manière qu’il a choisie pour relancer l’intérêt pour la culture, ainsi que sa diffusion. Le prix Marcel Duchamps, par exemple, est organisé chaque année par Association pour la diffusion internationale de l’art français en partenariat avec le Centre depuis 2000. Les 15 premières années, le/la lauréat.e du prix voyait son œuvre exposée durant 2 mois au sein du Centre. Depuis 2016, quatre des artistes sélectionnés pour le prix sont exposés durant trois mois dans l’espace de 650 m² de la Galerie 4. Le Centre n’est pas uniquement un lieu d’exposition, il a aussi pour vocation d’être un lieu de création et de bouillonnement culturel. C’est pourquoi, sous l’impulsion du nouveau directeur, une biennale ayant pour but la création artistique a été créée. Celle-ci aura lieu pour la première fois du 18 octobre au 18 décembre 2017, au sein même du bâtiment Beaubourg. Sous le nom de Cosmopolis, cette plateforme aura pour but de donner « une visibilité aux diverses géographies de l’art contemporain, à des démarches et des expériences enracinées dans un contexte local, en réseau au niveau international et concernées par des questions de traduction culturelle. »3 Dans la volonté du Centre de s’ouvrir au monde – et d’ouvrir le monde à lui-même –, cette première édition sera « consacrée aux collectifs d’artistes, dont les formes et les projets se sont multipliés cette dernière décennie, en particulier sur les scènes artistiques d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie. »4 En effet, sur les 14 collectifs invités à participer, seuls deux sont européens. 1 AZIMI, REGNIER, op.cit. 2 BENSAHEL, 2007. op.cit. 3 CENTRE POMPIDOU, 2017b. Communiqué de presse - Cosmopolis #1 : Collective Intelligence. p.1 4 ibid.


Nombreuses sont aujourd’hui les institutions qui s’exportent, « preuve que la mondialisation s’applique aux beaux-arts, des collections classiques au contemporain »1. Pourtant, si le modèle de l’exportation semble avoir fonctionné au tournant du millénaire, il semblerait que d’autres tendances commencent à faire leur chemin dans l’esprit des décideurs culturels.

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1 BENSAHEL, 2007. op.cit.


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VI. Pop-Up Culturel

Avec l’apparition du Centre Pompidou de Málaga, l’institution propose un nouveau type de musée, le musée limité dans le temps. Après la fin précipitée du musée itinérant du Centre (entre 2011 et 2013, dans 6 villes de France), le Centre décide de s’exporter à nouveau, cette fois-ci à l’étranger. Cette nouvelle politique est due au nouveau président Alain Seban, et de son désir d’attirer « de nouveaux publics en France et à travers le monde, tout en renforçant l’image mondiale de la marque Pompidou »1. On peut voir ici la nouvelle dynamique du Centre, totalement en accord avec une société de consommation et de tourisme culturel. Le Centre Pompidou s’assume comme marque et cherche à exporter son image de par le monde.

D’internet au musée, glissement sémantique Le terme pop-up vient de l’univers internet et de la création à la fin des années 1990 d’une nouvelle forme de publicité. Ethan Zuckerman créa ce qui deviendra selon ses dires « un des outils les plus haïs dans la boîte à outils du publicitaire : la publicité pop-up. »2 Pourquoi le Centre Pompidou, ainsi que les journalistes, utilisent-ils un tel mot ? 1 MUÑOZ-ALONSO, Lorena, 2014. “The Centre Pompidou Pops Up in Málaga” artnet News [en ligne] https://news.artnet.com/art-world/the-centre-pompidou-pops-up-inmalaga-92798 [en date du 09 mai 2017] (notre traduction) 2 ZUCKERMAN, Ethan, 2014. « The Internet’s Original Sin» The Atlantic. [en ligne] https:// www.theatlantic. com/technology/archive/2014/08/advertising-is-the-internetsoriginal-sin/376041/?single_page=true, 14 août 2014. [en date du 17 mai 2017]

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Le terme pop-up a, en plus d’être utilisé sur internet, été repris dans la société sous la forme de magasins du même nom, souvent initiés par de grandes marques afin d’en faire la publicité au travers un événement unique à ne pas manquer. Certains thèmes se dégagent de ce terme : la temporalité courte, la notion de surprise et le côté envahissant. Bien que les notions liées au terme puissent être vues comme négatives ou péjoratives, le pop-up peut aussi avoir des qualités. Il dynamise un lieu pour une période donnée, lieu qui peut être abandonné, mal exploité ou dont l’usage n’est pas bien défini. La transformation d’une friche en espace de jeux dans l’attente de travaux, la mise en place d’un bar temporaire sur une place, l’ouverture d’une enseigne temporaire pour le lancement d’un nouveau produit, tous sont des moyens mis en place pour créer une offre (voire parfois la demande qui va avec). Comme le musée, « le magasin est devenu un média à part entière et le magasin éphémère permet à toute marque d’en bénéficier ». Il fait « vivre une expérience, (…) crée interaction et lien [avec son public], (…) il fait venir son public »1. Si chacun de ces points est positif, et le lien avec les institutions culturelles pouvant se faire sans trop d’erreurs, il est plus alarmant de voir que si « le magasin permanent se donne en représentation, le magasin éphémère se donne en spectacle »2. L’idée derrière ce coup de marteau médiatique est le lancement – dans un futur proche et moins proche – d’une série d’apparitions d’autres annexes pop-up. Prévu en France et ailleurs dans le monde, le modèle pop-up commence petit à petit à faire son nid. Cette nouvelle politique d’exportation, déjà lancée par son prédécesseur, fut le fer de lance de la politique du directeur du Centre, Alain Seban, entre 2007 et 2015. Au travers de différents projets, le Centre Pompidou cherche à relever sans cesse un défi, « celui de construire un réseau global pour faire vivre, valoriser et enrichir une collection à caractère véritablement universel. »3 Aller au-devant de la scène artistique internationale, établir de nouvelles connexions avec les scènes émergentes de l’art 1 http://www. mypopupstore. fr/concept-magasin-ephemere-13. html [en date du 11 mai 2017] 2 ibid. 3 CENTRE POMPIDOU, 2015. Bilan d'activité, p.118


contemporain pour mieux développer et faire rayonner la collection du Centre Pompidou, tels sont les buts principaux de ce nouvel instrument du Centre. La première instance de ce Pop-Up Pompidou se trouve donc à Málaga, dans le sud de l’Espagne. Ici encore, ce n’est pas un geste architectural et culturel vain qui est proposé, mais une volonté forte de la part de la ville de se placer sur le radar international en tant que « capitale culturelle du sud de la péninsule ibérique »1. Málaga compte une offre très riche qui fait d’elle la troisième offre culturelle du pays après Madrid et Barcelone, avec de nombreux musées, un centre d’art contemporain, un centre de création et de production artistique, des festivals, etc. Elle est aussi est un centre touristique important, idéalement situé près de la pointe sud de l’Europe et accueillant près de dix millions de touristes par an. Par son histoire, sa situation géographique, et sa volonté politico-économique de faire de la culture un élément clé de son offre, la ville natale de Picasso était un choix clair pour les dirigeants du Centre Pompidou. Le projet de centre culturel s’inscrit dans une réponse plus globale à la problématique de l’aménagement urbain du port. Vivant depuis longtemps le dos tourné à la mer, notamment à cause d’une activité maritime qui a gardé le port clos et séparé de la ville, le nouveau projet du bureau L35 a pour but de réaménager le quai principal afin que les habitants puissent se promener, contempler et profiter d’un nouvel espace. Une série d’équipements publics et privés ont donc été prévus, et une nouvelle place et une promenade ont été offertes à la ville. Le bâtiment à Málaga est donc idéalement situé dans la ville, non loin du centre et au cœur d’un réaménagement territorial. La difficulté était moins dans sa localisation que dans sa présence sur l’espace public, étant donné que la majeure partie du bâtiment est en sous-sol. Cela est contrecarré par l’élément qui donna son surnom au nouveau Centre : un grand cube en verre et en métal de 12 mètres de côté qui a reçu une touche de couleur grâce à l’intervention de l’artiste 1 CENTRE POMPIDOU MALAGA, 2015. Dossier de Presse, p.20

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fig. 23 - Plan d'implantation du projet Muelle Uno à Málaga. © L35

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fig. 24 - Vue aérienne du projet Muelle Uno à Málaga. © Nicolás Pinzón


Daniel Buren. Appelé El Cubo, ce nouveau lieu culturel de la ville offre plusieurs choses : une exposition semi-permanente de 90 œuvres tirées de la très large collection du Pompidou, des expositions temporaires au rythme de deux à trois par an, un espace d’atelier et d’exposition pour jeune public, un auditorium, ainsi que les toujours présents café et librairie-boutique. L’architecture extérieure est ici moins marquante qu’en France, le seul élément phare étant un large cube en verre surplombant l’espace public. Par contre, l’intérieur est bien plus marqué. Il est développé autour de deux éléments : un espace semi-extérieur non accessible, et l’espace d’exposition principal. Tout comme en France, l’espace public se prolonge encore une fig. 25 - intérieur du Cubo © Jesús Granada fois au sein du bâtiment et amène ici le visiteur dans un parcours continu qui lui permet de découvrir, d’abord par bribes, les œuvres exposées. L’usage de différents matériaux – à savoir le bois, le béton, et le verre – donne aux espaces d’exposition un caractère fort différent de l’aspect industriel présent à Beaubourg, et la neutralité des boîtes à Metz. Selon les architectes, l’agencement intérieur est conçu comme un espace fluide dans lequel les visiteurs se rapprochent des zones d’exposition, « en les préparant émotionnellement à passer du “monde extérieur” bruyant vers un espace qui permet “une expérience intérieure” qui est l’endroit où nous voulons que la visite soit focalisée. »1 Dans ce but, les espaces se dilatent et se contractent, les vues sont tantôt libres, tantôt filtrées, afin d’amener les visiteurs dans des endroits différents, et de leur permettre de découvrir chaque espace dans son ampleur réelle. 1 L35, n.d. « Centre Pompidou Málaga / Javier Pérez De La Fuente, Juan Antonio Marín Malavé» Archdaily. [en ligne] http://www.archdaily.com/788272/centre-pompidoumalaga-javier-perez-de-la-fuente-juan-antonio-marin-malave [en date du 5 juillet 2017]

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L’espace semi-extérieur au centre du bâtiment n’est pas accessible, mais son but n’est pas là, étant plus un marqueur urbain et un moyen de conserver une relation entre l’intérieur et l’extérieur. Au travers du cube placé au-dessus, il est une fenêtre permettant de regarder vers l’intérieur. La culmination du parcours architectural est l’espace dédié à l’exposition semi-permanente. Des vues vers celui-ci sont offertes tout au long du trajet du visiteur au travers de lattes verticales en bois, qui se retrouvent aussi autour de l’espace semi-extérieur et permettent un dialogue architectural entre eux. Tout comme à Metz, une généreuse hauteur sous plafond de 8 mètres donne une dimension non négligeable à cet espace d’exposition. 86

fig. 26 - Salle pour les expositions semi-permanentes. © Javier Orive

Les circulations verticales ont encore une fois un rôle important dans l’architecture du bâtiment. Partant de la place au-dessus du bâtiment, une rampe amène le promeneur sur celle qui se situe devant l’entrée.


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fig. 27 - Plan Centre Pompidou-Málaga. étage 0 © L35

fig. 28 - Plan Centre Pompidou-Málaga. étage -1 © L35


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fig. 29 - Escalier intérieur en bois, Centre Pompidou-Málaga. © Ian Caldwell

De là, une pente douce mène à l’intérieur du Cubo, d’où partent deux rampes – une de chaque côté de l’espace semi-extérieur – afin d’amener le visiteur au cœur du bâtiment. Dans un bâtiment principalement blanc et gris à cause des matériaux utilisés – si l’on omet les touches de couleurs amenées par l’installation de Buren sur le cube – l’utilisation du bois pour certains espaces amène une certaine chaleur. C’est le cas du grand escalier amenant le visiteur d’un étage à l’autre, ainsi que l’espace d’accueil et le café.

La crainte principale des détracteurs de ce premier Pop-Up Pompidou est de savoir si l’affectation culturelle perdurera, même après le départ du Centre Pompidou. Inscrit dans un projet plus large de réaménagement, il devrait subsister dans la mesure où la vocation culturelle du nouvel édifice est inscrite dans la convention de cession signée en 2004 entre le port et la municipalité. Mais si cette volonté existe, elle ne suffira sans doute pas à faire venir les visiteurs pour autant, la marque Pompidou étant, comme pour les autres projets, un des éléments clés permettant leu réussite.

Marchandisation de la culture? Déjà lors de l’ouverture du Centre, Jean Baudrillard déclarait que « Beaubourg est pour la première fois à l’échelle de la culture ce que l’hypermarché est à l’échelle de la marchandise »1. Avec les mutations que nos sociétés ont vécues depuis l’ouverture du Centre et la 1 BAUDRILLARD, Jean, 1977. L'Effet Beaubourg. Implosion et dissuasion, Galilée, p. 32-33


démocratisation d’un tourisme culturel et d’un tourisme de masse, les musées et autres centres culturels ont dû se mettre à jour. La réalisation du rôle sociétal et économique du musée à la fin du siècle passé permit aux institutions culturelles de prospérer. En effet, c’est à ce moment-là que les budgets publics nécessaires au renouvellement et à la création de musées se débloquent, et qu’a lieu la « bulle » des musées.1 Avec l’ouverture d’une première institution partenaire à Metz, puis d’une seconde à Málaga, et en vue de la série de projets similaires prévus pour les années à venir, l’aspect financier de tout cela reste important. Les budgets de fonctionnement du Centre, en augmentation entre sa réouverture et l’état des lieux de 2009, l’ont forcé à mettre en place une stratégie de redressement. La décision fut donc prise d’accroître les ressources propres du Centre, les subventions de fonctionnement n’augmentant pas à la même vitesse que les charges de structures. Ainsi chaque année le déficit devait être couvert par un prélèvement dans les recettes propres du centre, qui passa de 3,7 millions en 2000 à 9,1 millions en 20092. Quant au compte financier de l’année 20163, il montre que 40 % viennent d’autres ressources que les subventions de fonctionnement, soit 45 millions d’euros. Sur un marché de l’art où les prix flambent, et face à des institutions au portefeuille mieux garni, le Centre ne peut être en compétition s’il ne trouve pas une solution. Ainsi depuis 2007, selon une politique d’accroissement de ses ressources propres, le Centre a multiplié les stratégies pour rester compétitif avec les autres grands musées et centres culturels dans le monde. Une des solutions trouvées est celle de l’exportation à l’étranger. En effet, tout comme les expositions itinérantes, l’implantation d’un Centre Pompidou provisoire se fait contre paiement. Si l’argent n’est pas disponible en France, il suffit d’aller le chercher là où il est : à l’étranger. Ainsi pour chaque année d’exploitation, « les villes paient 1,5 million à l’institution parisienne pour utiliser son nom et pour 1 GOB, DROUGUET et CHAUMIER, op. cit. p. 35 2 CENTRE POMPIDOU, 2012. op.cit. p.124 3 CENTRE POMPIDOU, 2016. Bilan d'activité [en ligne]

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bénéficier de son expertise. »1 Et si le Centre prête sa marque, ce n’est pas dans le but uniquement d’en faire « une machine à cash »2. Comme le dit Serge Lasvignes : « On ne fait pas de clés en main, une implantation provisoire permet d’avoir plus de relations avec la scène locale, plus de diversité dans les choix »3. Une des raisons pour lesquelles la ville de Metz et sa région ont d’ailleurs été choisies est la promesse de supporter le coût du projet et des finances saines4. Si l’argent est le nerf de la guerre, il est aujourd’hui aussi celui de la culture. Mais à qui la faute ? Et est-ce une faute ? Le problème n’est pas dans l’argent, mais dans la manière dont il est obtenu. Cette manie des chiffres, critiquée par l’ancienne ministre française de la Culture et de la Communication début 2013, était pourtant fierté d’Alain Seban, précédent directeur du Centre. La problématique de la marchandisation de la culture remonte pourtant à bien plus que ces dix dernières années. L’ouverture du Centre Pompidou, suivie dans un deuxième temps par le Guggenheim à Bilbao permet la réalisation par les politiques de l’influence économique et touristique des équipements culturels dans une ville. L’augmentation du nombre de musées dans le monde, comme vu plus haut, se fait en parallèle d’une normalisation de la visite d’un musée comme sortie culturelle5. Avec l’apparition du tourisme culturel, c’est la manière de consommer le musée qui change. Lors de la réouverture du Centre Pompidou début 2000, l’entrée devient payante, comme elle l’est de plus en plus dans les musées autrefois gratuits. La 1 LE GALL, Pauline, 2016. «Le centre Pompidou s'exporte en Chine et en Corée du Sud”. News of the art world [en ligne] http://www.newsoftheartworld.com/centre-pompidousexporte-chine-coree-sud/ 2 Culturebox (avec AFP), 2016. « Le “Centre Pompidou provisoire” prospecte en Asie : bientôt à Séoul, et pourquoi pas Shanghai». Culturebox. [en ligne] http://culturebox. francetvinfo.fr/ar ts/expos/le-centre-pompidou-provisoire-bientot-a-seoul-etpourquoi-pas-shanghai-241477 [en date du 5 juillet 2017] 3 ibid. 4 TRONCHU, Emilie, 2010. «Ouverture du Centre Pompidou Metz. Le troisième type». [en ligne] http://evene.lefigaro.fr/lieux/actualite/centre-pompidou-metz-beaubourglouvre-musee-2706.php [en date du 5 juillet 2017] 5 mission musée du XXIe siècle


gratuité pourtant revient à la mode ces dernières années, contre une augmentation des prix des expositions temporaires. Pour Philippe Samyn, il ne faut pas confondre le musée avec une galerie d’art, un simple lieu d’exposition, d’animation culturelle, un lieu de tourisme ou de shopping1. Le changement apporté par le Centre Pompidou pousse pourtant à considérer une nouvelle manière de faire le musée, plus semblable à ces dernières visions qu’à celle d’un musée plus classique. Un élément critiqué par un salarié du Centre est le prix Marcel Duchamp dont il a été fait mention plus haut. S’il est vrai que comme le dit Alain Seban, « en règle générale, les expositions au Centre Pompidou consacrent une carrière » et qu’il est dès lors délicat de décider de la légitimité de choisir tel jeune artiste plutôt qu’un autre pour une exposition, il est vrai aussi qu’une distinction se faisait entre le marché et l’institution d’État. Cette dynamique se perd d’après le témoignage de ce salarié du Centre, pour qui « le prix Marcel Duchamp, c’est la solution de facilité. Beaubourg reçoit les jeunes artistes sans avoir besoin d’aller les chercher et tout est payé par les galeries »2. Enfin, les moyens financiers du Centre ne peuvent rivaliser avec ceux des fondations privées. En voulant jouer sur le même tableau que celles-ci, l’artiste P. Nicolas Ledoux prédit que le Centre va « se faire humilier s’ils ne repensent pas leur programmation. On vit les derniers soubresauts d’une économie institutionnelle flamboyante qui n’a plus les moyens de son ambition. »3 Et de l’ambition il en a, cela se voit par la dynamique lancée pour les 40 ans. Sortant d’une longue crise financière et devant de plus en plus souvent faire appel à des mécènes, il est difficile d’entrevoir un futur dans lequel une compétition effective peut avoir lieu avec ces institutions qui ont des moyens plus élevés. 1 SAMYN, Philippe, 1998. "Sustainable Museum - Réflexion sur les musées de demain". in FOULON, 1998. op.cit. 2 HASQUENOPH, Bernard, ROUSSET, Marion, 2017. "Le centre Pompidou, une utopie rouillée" Revue du Crieur, no7. [en ligne] https://www.mediapart.fr/journal/cultureidees/150617/le-centre-pompidou-une-utopie-rouillee?onglet=full [en date du 19 juillet 2017] 3 ibid.

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Le musée comme symbole

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Le Centre Pompidou n’est pas uniquement un centre pluriculturel, c’est avant tout un symbole. Un symbole d’un renouveau dans l’univers muséal, qui est venu bousculer la manière dont le musée était architecturé, vécu, vendu et mis en scène. Sa simple présence semble obnubiler les foules, et l’idée de son implantation lui ouvre les portes auprès de bien des politiques. Aller à New York implique une visite du Guggenheim de F. L. Wright, ou du MoMA ; un détour par Paris est synonyme d’une visite du Louvre ou du Centre Pompidou ; un voyage à Bilbao se fait souvent dans le but d’aller voir le musée dessiné par F. Gehry. Depuis quelques décennies maintenant, les musées – du moins certain – sont devenus des destinations à part entière, ou du moins des étapes obligatoires au cours d’un voyage, telles des étapes le long d’un pèlerinage. Le musée est, aujourd’hui plus que jamais, lié à de nombreuses préoccupations de différents ordres. La question de savoir ce qu’est un musée est au centre des discussions, comme le prouve la large littérature qui se constitue d’année en année autour de celle-ci avec des ouvrages aux titres fortement similaires, tels que Towards a New Museum (NEWHOUSE , 1998), The Museum in Transition (HEINE , 2000), Reimagining the Museum (WITCOMB, 2003), Reinventing the Museum (A NDERSON, 2004), Le Nouvel âge des musées (TOBELEM, 2005), Vers une redéfinition du musée ? (M AIRESSE et DESVALLÉE , 2007), Museums in Motion (A LEXANDER , 2008). Si pour le moment aucune réponse définitive ne peut être donnée à cette question, le caractère symbolique du musée reste communément admis et important. Comme il l’a été dit pour les maisons de la culture lors de leur création, les musées ont d’une certaine manière « hérité en partie de la fonction religieuse. »1 Tout comme les cathédrales, les musées apparaissent toujours plus grands, toujours plus impressionnants, toujours plus incroyables ; du moins pour certains d’entre eux. C’est cet aspect que les architectes ont voulu défaire en dessinant et construisant le Centre Pompidou. Alors que 1 FOULON. op.cit. p. 65


dans certains musées « on n’entre pas n’importe quand, ni n’importe comment », un des buts d’avoir utilisé un vocabulaire architectural proche du supermarché était justement de faire de ce nouveau lieu un endroit facilement accessible, à la fois physiquement, mais aussi intellectuellement. Pourtant la visite, bien qu’elle ne dût pas être une cérémonie, doit malgré tout s’accompagner « d’une préparation, d’une mise en condition mentale et physique. » Bien que le Centre Pompidou fut qualifié de tel, « le musée n’est pas un drugstore d’information culturelle », mais doit être un lieu qui permet d’interpeller le visiteur, et le mettre dans un état de réceptivité1. Durant le processus créatif pour le bâtiment de Shigeru Ban à Metz, une des volontés était justement de faire de ce nouveau lieu quelque chose d’accueillant et qui n’effraierait pas les visiteurs. Le but pour un musée est de faire venir le public, tant au travers de l’architecture que de la programmation. Le risque pourtant – et il existe dans nos sociétés capitalistes comme dans d’autres systèmes économique, sociologique et politique – est de faire de l’art un prétexte, et qu’il fasse alors « l’objet de manipulations cyniques, commerciales ou spéculatives. »2 S’il est difficile de nier l’importance de la culture et de l’art en tant que vecteur social et économique, comme ils ont su le prouver mainte fois, il ne faut pas pour autant oublier que le musée joui d’un statut spécial, d’une certaine forme de respectabilité comme le prouve la manière dont il est consommé. Du moins c’était le cas, aujourd’hui l’homme vit dans une société qui a fortement évolué et il ne se satisfait plus d’un bâtiment et « d’un programme didactique rempli de symbolisme. » Le musée est devenu « un moment poétique dans le chaos de la ville. » La vie dans le quartier Beaubourg a été bouleversée avec l’apparition du nouveau Centre, mais elle l’a été encore plus durant les 27 mois de sa fermeture au tournant du millénaire. Si l’apparition d’un musée permet de nombreuses améliorations, son absence peut avoir de lourdes répercussions aussi. Dans un article du 12 janvier 1998, Laure Pele faisait état de la situation d’un quartier Beaubourg qui « pleure 1 ibid. 2 ibid. p.67

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Pompidou ». Les commerçants et restaurateurs craignaient pour leurs établissements, tous étant touché par l’absence des visiteurs du Centre. Un sentiment d’insécurité commençait à voir le jour dans ce quartier auparavant si plein de vie, et qualifié de « glauque », « sordide », et « malfamé » seulement trois mois après le début des travaux. Ce n’était pas dû à un accroissement d’une population qualifiée par les riverains de drogués et de vagabonds, mais plutôt suite à la désertification de la zone par les touristes qui rendait cette même population plus visible.

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Enfin, le caractère symbolique du musée permet que par son implantation « il donne au lieu une nouvelle valeur, une importance dérivée non pas de la manière dont il éduque, inspire ou amuse les visiteurs, mais simplement par le fait que c’est un musée et qu’il est là. »1

1 HEIDENREICH, Martin et PLAZA, Beatriz, 2015. Renewal through Culture? The Role of Museums in the Renewal of Industrial Regions in Europe. European Planning Studies. 3 août 2015. Vol. 23, n° 8, pp. 1441‑1455.


VII. Exposition et collection

Les collections du Centre Pompidou Les collections possédées par le Centre Pompidou datent de bien avant les premières esquisses du projet. Héritage des collections situées au musée du Luxembourg, créé en 1818, et par la suite au musée du Jeu de Paume, l’idée derrière la création de ceux-ci était l’acquisition par l’État français d’œuvres d’artistes vivants, et la constitution d’une collection d’art moderne et contemporain. Aujourd’hui, cette collection est la plus grande d’Europe et une des plus grandes du monde, totalisant – selon les sources – entre 100 000 et 120 000 œuvres. Le développement de cette impressionnante collection est un exploit, qui permet notamment une recherche qualitative et profonde de multiples périodes et courants artistiques majeurs. Celleci reste malheureusement majoritairement cachée aux yeux du public, seulement 10% des œuvres étant en moyenne exposées chaque année. Le Palais de Tokyo, premier emplacement du nouveau Musée national d’art moderne, poursuivait une volonté de créer un nouveau lieu dédié à l’art indépendant, déjà exposé dans d’autres musées européens – le musée de Grenoble en 1919, le musée Folkwang d’Essen en 1927, le musée d’art de Łódź en 1930, puis le musée Kröller-Müller d’Otterlo en 1938 –, et même outre-Atlantique, avec l’ouverture du MoMA en 1929. Après 15 ans de labeur, l’ouverture officielle du Palais de Tokyo a lieu le 9 juin 1947. Il fallut ensuite attendre 30 ans avant que ne déménage

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le musée vers le nouveau bâtiment de Piano et Rogers, embarquant avec lui toute les œuvres datant d’après 1905.

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Bien que déjà largement complétée par le premier directeur du musée, Jean Cassou, c’est à l’arrivée au sein du Centre que s’opère un changement radical dans la politique d’acquisition. « La vocation pluridisciplinaire de l’institution, résolument tournée vers la création la plus actuelle marque profondément la politique d’acquisition du Centre Pompidou en accueillant les artistes contemporains et en s’ouvrant à l’art international. »1 Cette nouvelle attitude permet l’acquisition d’une série d’œuvres d’artistes, toujours plus actuels, et l’inclusion d’autres formes d’art. L’intégration, dans un premier temps, de la photographie, de la vidéo et de films expérimentaux, ouvre le champ d’acquisition, permettant l’intégration – dès 1993 – de la création industrielle et de la collection architecture et design. Dans une volonté de diffusion de la culture, le Centre fait tourner ses œuvres en changeant l’affichage tous les 2 ans, et prête une partie de sa collection à ses partenaires ainsi qu’à d’autres musées dans le monde. Ainsi, entre 2010 et 2016, ce sont 26 055 œuvres qui furent prêtées, dont 11 748 en France – soit 45% des prêts effectués sur les 7 années. En s’intéressant à la politique de prêts du Centre, un accroissement de leur nombre peut se voir au cours de ces 7 dernières années. Le Centre cherche à consolider ses relations, et même à les augmenter dans le cadre de ses 40 ans. Les collections, elles aussi, ne font que s’agrandir. Selon les rapports d’activité du Centre, le nombre d’œuvres est passé de 75 108 en 2011 à 106 076 en 2016. La collection a donc augmenté d’un peu plus de 140% en 5 ans, tandis que le nombre de prêts a augmenté de 125%. Le nombre d’œuvres en prêt en 2011 représentait alors 5% de la collection totale, sensiblement la même chose que pour l’année 2016.

1 [en ligne] https://www.centrepompidou.fr/fr/Collections/L-histoire-des-collections


Les pics de 2010 et 2013 représentent quant à eux l’ouverture, respectivement, du nouveau bâtiment à Metz, et du Pop-Up Pompidou à Málaga. Le premier représente le prêt le plus large jamais réalisé par l’institution, à hauteur de 800 œuvres, tandis que 90 œuvres ont été prêtées pour les expositions semi-permanentes et temporaires à Málaga. La collection du Centre, en plus d’être une des plus grandes du monde en termes d’art moderne et contemporain, est aussi une des plus complètes, et est souvent qualifiée d’encyclopédique. Divisées en plusieurs thématiques, elles couvrent les domaines des arts plastiques, du dessin, de la photographie, des nouveaux médias, du cinéma expérimental, de l’architecture, du design et de la prospective industrielle. La première source d’œuvre – en terme chronologique – vient des anciennes collections qui étaient exposées au Palais de Tokyo et regroupant des artistes d’art moderne (nés avant 1920), et d’art contemporain (né après 1920). Depuis les années 1990, une nouvelle branche des collections traite de la création contemporaine et prospective. Celle-ci couvre les artistes nés après 1960, et dont la production artistique commence en 1990 jusqu’à nos jours. C’est aussi au Centre Pompidou que se trouve la collection la plus importante d’Europe pour ce qui traite de la photographie. Ce fonds riche de 40 000 épreuves et de plus de 60 000 négatifs est constitué d’ensembles historiques majeurs. Cette collection est aujourd’hui l’un des rares ensembles au monde apte à présenter une histoire complète de la photographie moderne et contemporaine dans toute sa diversité. Ici encore se trouve la preuve de la qualité et de l’exhaustivité des collections du Centre. Le design et l’architecture trouvent leur place suite à la fusion entre le Centre de création industrielle et le Musée national d’art moderne. Le Cci, bien qu’il n’existe plus en tant qu’organe indépendant, est sans doute à la source de l’idée du Centre1. Bien qu’étant deux organes 1 LAUXEROIS, Jean. 1996. L’Utopie Beaubourg, vingt ans après. Nouvelle édition. Paris : Éditions de la Bibliothèque publique d'information, p.77

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distincts lors de la fondation du Centre, le Musée national d’art moderne et le Centre de création industrielle ne forment plus qu’un depuis la fin de l’année 1992. Alors qu’il était le fer de lance de l’art contemporain dans les années 1970, le Cci ne parviendra jamais à « définir son identité »1, ce qui le mènera finalement à sa perte.

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« Le Cci était l’utopie à soi seul, dans la mesure où, assumant l’héritage de son fondateur, il pouvait être en permanence le lieu de l’échange absolu : échange entre les arts, échange entre les arts et la société, entre les arts et la technique, les arts et l’industrie, échange encore entre les créateurs et le public, entre les créateurs et le Centre, entre la parole et l’image, entre la fonction et l’usage... et la liste est ouverte, au terme de laquelle il ne reste plus rien ! »2 Lorsqu’en juillet 1973, le Cci intégra définitivement le Centre Pompidou, son directeur d’alors – François Mathey – décida de passer la main à son successeur. Celui-ci devait être François Barré, qui assumait la responsabilité effective du Cci. Pourtant, en 1976, il ne fut pas nommé directeur et alla même jusqu’à être démis de ses fonctions pour « manquement au devoir de réserve »3 ; c’est la crise. Celle-ci montre clairement la manière dont le Cci fut perçu par « les grands commis de l’État, et par nombre des conservateurs du Mnam, qui n’avaient pas les mêmes références ni les mêmes objectifs que les gens du Cci »4. La vocation du Cci fut très rapidement une qui se voulait critique. Voulant absolument se différencier radicalement de ce qui se trouvait sous le nom de Design Center en Allemagne ou en Hollande. Le travail du Cci était donc orienté sur la production et la création. Cela passait notamment au travers d’une littérature propre à lui-même, tel que les revues Traverses et les Cahiers du Cci encore salués aujourd’hui. 1 HULTEN, Pontus. in. LAUXEROIS, 1996. op. cit. 2 ibid. 3 LAUXEROIS, 1996. op. cit. 4 ibid.


Fort de son rapport au public, le Cci s’attacha « à produire des fiches, à établir des catalogues d’objets, et à mettre en place des tiroirs dotés d’échantillons et d’adresses »1. Ces éléments définissent la forte originalité et la dimension critique du Cci, expliquant aussi ses rapports avec le Centre. En effet, le Cci, « à la fois méprisé et révolté contre l’hégémonie du Mnam »2, est longtemps maintenu dans une sorte de ghetto. Et s’il participe à l’élaboration d’expositions en partenariat avec le Musée, leur relation se dégrade jusqu’à ce que le Cci ne soit plus qu’un prestataire de service, comme ce fut le cas pour l’exposition Vienne en 1986, et non plus un partenaire. Pontus Hulten est catégorique : le Cci n’a jamais trouvé son identité. Pourtant sa cohésion interne et la force de ses choix auraient dû permettre la création de celle-ci. En cause, la succession rapide de directeurs qui pousse à la création de « baronnies » au sein du Cci, qui ne permit pas de garder une ligne claire. Les visions et bagages des directeurs successifs n’aidèrent pas non plus. Paul Blanquart lança une direction basée sur « une vision sociale surtout marquée par le Tiers-Monde »3, tandis que son successeur François Burckhardt eut maille à partir avec les architectes du département, en étant lui-même de cette formation. Ce sera grâce à lui que les relations avec le Mnam s’amélioreront pour un temps. À deux avec le directeur de celui-ci, ils tentèrent de relancer « la vieille idée, très oubliée, d’une collection de design et d’architecture [...] dans l’optique de l’exposition de la correspondance des arts. »4 Le projet d’exposition n’aboutira pas, mais l’idée de la collection perdurera, bien que fortement repensée selon une perspective patrimoniale. Finalement le Cci, à bout de souffle, laissa sa réflexion disparaître peu à peu, une réflexion basée « sur [lui-même], sur le Centre, sur la société française et son évolution, sur la crise de la société de consommation »5. Les collections du Centre, et son histoire au demeurant, ne s’arrêteront 1 ibid. p.78 2 CHAPELLE, Josée. in. LAUXEROIS, 1996. op. cit. 3 ibid. p.79 4 ibid. 5 ibid.

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pas en même temps que le Cci, qui par ailleurs existe encore, bien que certains l’aient qualifiée de « version feutrée et consensuelle »1 à la fin des années 1990. Grâce au Cci, les collections d’architecture et de design ont pu enfin voir le jour après près de vingt années d’existence du Centre. Dès 1976, Pontus Hulten le premier directeur du Mnam commandait une programmation intitulée « Une histoire du cinéma », forte de cent films. Ceux-ci constitueront la base sur laquelle se construira la collection cinéma du Centre, rassemblant aujourd’hui près de 1 300 œuvres. Cette collection couvre une partie de l’histoire du 100

cinéma depuis le début du XXe siècle, au travers de pratiques cinématographiques expérimentales et artistiques qui se sont développées en marge du cinéma industriel.

Si la collection complète du Centre est la deuxième plus grande au monde, sa collection de nouveaux médias est quant à elle la plus large avec « 160 installations multimédias et près de 2000 multiples (bandes vidéos, bandes sonores, CD-ROM, sites internet) datés de 1963 à nos jours. »2 Si une telle chose a été possible, c’est grâce à l’intérêt précurseur de l’institution pour ce genre d’installation, et ce dès le début de son existence. En plus de toutes ces collections, une dernière existe : la collection d’art graphique. Celle-ci rassemble les œuvres sur papier du Centre Pompidou, et est composée de 20 000 dessins et estampes couvrant la majeure partie du XXe siècle, avec une part d’œuvres contemporaines obtenues au travers d’une politique d’acquisition forte, couplée à la générosité des donateurs et artistes. Ces collections se sont vues augmentées année après année au travers de dations, dons, donations et achats. La politique d’acquisition du Centre vise à compléter au mieux les collections afin de les rendre les plus complètes et exhaustives possible et permettre la traduction et la transmission correctes de l’histoire de l’art moderne et contemporain dans le monde. C’est d’ailleurs pour cela que de nombreux partenariats 1 ibid. p.77 2 CENTRE POMPIDOU, n.d. “Les œuvres” [en ligne] https://www.centrepompidou.fr/fr/ Collections/Les-oeuvres [en date du 8 août 2017]


entre les institutions de par le monde ont lieu, et dont les Centre Pompidou temporaires font partie. Ceux-ci permettent une relation nouvelle, des échanges plus profonds basés sur une entraide et la mise en place de structures permettant le développement de scènes locales et internationales pour l’art contemporain et l’expérimentation. Si les collections du Centre Pompidou forment le plus large ensemble dédié à l’art moderne et contemporain dans le monde, il est intéressant de voir que les extensions ou partenaires ne sont pas, pour le moment du moins, en mesure de développer leurs propres collections. Le Centre à Metz n’étant pas un musée, il est obligé de se reposer sur des emprunts dans la collection parisienne, ou des prêts de la part d’autres institutions. Ce fonctionnement basé uniquement sur des expositions temporaires fait que l’offre varie selon la période de l’année. L’ancienne ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, désavouait à moitié la stratégie du nouveau Centre, déclarant en 2013 que celle-ci créait « une certaine déception chez les visiteurs qui viennent dans une période sans expositions temporaires »1. Depuis, un changement important s’est opéré pour l’institution messine : la mise en place d’une section semi-permanente2, comme sera retrouvé à Málaga. Cette zone d’exposition mise en place grâce à des œuvres prêtées par la maison mère permet d’éviter au bâtiment d’être (en partie) vide entre deux expositions temporaires. Pour le président de Metz Métropole, cette volonté de rester un lieu d’art vivant et de ne pas devenir un musée à proprement parler, avec toutes les implications que cela aurait, reste au centre de la gestion du bâtiment lorrain3 .

1 LEXPRESS.fr avec AFP, 2013. “Centre Pompidou-Metz: Aurélie Filippetti remet en cause son mode de fonctionnement". L'Express [en ligne] http://www.lexpress.fr/ culture/art/centre-pompidou-metz-aurelie-filippetti-remet-en-cause-son-mode-defonctionnement_1284677.html [en date du 5 août 2017] 2 BOMMELAER, Claire, 2013a. “Le Centre Pompidou-Metz change de dimension”. Le Figaro.fr Culture [en ligne] http://www.lefigaro.fr/culture/2013/09/24/0300420130924ARTFIG00652-le-centre-pompidou-metz-change-de-dimension.php [en date du 8 août 2017] 3 LEXPRESS.fr avec AFP, 2013. op.cit.

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Pour ce qui est de la gestion des œuvres et des collections, la France fonctionne selon la logique d’inaliénabilité. Cela signifie que les collections des musées nationaux ne peuvent être vendues ou échangées, qu’il est donc impossible de s’en défaire. Les collections d’œuvres s’agrandissant plus rapidement que les mètres carrés disponibles pour les exposer, et dans un second temps pour les entreposer, les musées sont forcés à s’agrandir, à déménager, à déplacer leurs entrepôts, à s’exporter. D’autres voudraient que cet argument d’inaliénabilité soit revu, et qu’une nouvelle gestion des collections soit possible.

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S’il est vrai que la collection du Centre est telle que seuls 10 % des œuvres sont exposés en moyenne par année, l’idée de se séparer d’une partie d’entre elles ne plaisait pas à Alain Seban. Ainsi lors d’une interview en 20131, il prenait la défense du Centre – et des autres musées dans le même cas – en expliquant qu’une partie des œuvres ne pouvait tout simplement pas être exposée durant des périodes trop étalées, par crainte de les abîmer. À cette époque, 23 % des collections étaient composées de dessins, 12 % de plans et de maquettes, sans compter le large fonds de photographie et de négatifs. Pour lui, il n’y a pas d’intérêt de vendre, car cela signifierait soit que l’œuvre n’a pas de valeur, soit qu’elle en a, mais alors pourquoi s’en séparer? Ce qui fait la force des collections du Centre est aussi son caractère d’exhaustivité. La valeur des séries et des ensembles est inestimable, tout simplement, car ils sont en un même lieu qui permet une recherche scientifique incomparable ; et impossible s’ils venaient à être séparé. Les solutions pour permettre à ces collections de sortir de leur entrepôt sont nombreuses. Dans un premier temps le Centre a décidé de dynamiser son accrochage permanent. Changeant celui-ci à la vitesse d’un étage par an, cela leur permet d’être renouvelés tous les 2-3 ans environ. Ensuite viennent les prêts d’œuvres et d’expositions. Les prêts entre musées se font gracieusement depuis longtemps déjà, et permet la mise en place de larges expositions temporaires, quelle sur un artiste, 1 BOMMELAER, Claire, 2013b, "Faut-il autoriser les musées à vendre leurs œuvres d’art ?" Le Figaro.fr Culture [en ligne] http://www.lefigaro.fr/arts-expositions/2013/05/03/0301520130503ARTFIG00236-faut-il-autoriser-les-musees-a-vendre-leurs-oeuvres-d-art. php [en date du 8 août 2017]


quelle sur un mouvement, qui ne seraient pas imaginables si location il y avait. Quant au prêt, voire la location d’expositions temporaires, c’est une pratique qui se diversifie de plus en plus. Elle permet ainsi à de belles expositions de voyager et d’être découvertes à différents endroits dans le monde sans que le travail soit à refaire à partir de zéro. Si le prêt d’œuvre se fait généralement gracieusement – comprendre gratuitement, mis à part des frais de transport, d’assurances, etc. –, les prêts d’expositions sont plus rares et les musées ou villes bénéficiaires doivent généralement s’acquitter d’un prix.

Centre Pompidou Virtuel Une autre manière de faire connaître les collections aujourd’hui est sous le format numérique. Tout comme d’autres grandes institutions, le Centre mène des campagnes de numérisation de ses collections. Ainsi, il contribue à la sauvegarde du patrimoine dont il a la charge ainsi qu’à sa diffusion, pour laquelle il utilise aujourd’hui tous les moyens offerts par la technologie. Avec la mise en place en 2012 de ce qu’ils appellent le Centre Pompidou Virtuel, c’est un grand coup qui est frappé dans l’univers de la culture. Défini par Alain Seban comme « un centre de ressources, une plateforme de diffusion de contenus, un nouvel espace de partage et de connaissance, intuitif, participatif et résolument nouveau », ce nouvel outil n’est pas là spécifiquement pour le (futur) visiteur du Centre, mais est à considérer comme une entité à par entière, comme le sont le Centre Pompidou-Metz, le Centre Pompidou Mobile ou le Centre Pompidou-Málaga. Son but est d’offrir une expérience différente et nouvelle des contenus et documents produits par le Centre. Précurseur dans le domaine, cette nouvelle plateforme web est à l’image du bâtiment : évolutive et en symbiose avec l’espace numérique qui se développe. La plateforme permet au visiteur du Centre Pompidou Virtuel de s’informer de l’actualité des expositions et événements, mais aussi de découvrir les œuvres, leur histoire, leur auteur, et même de participer à

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l’élaboration de la plateforme elle-même. Pensée comme une expérience à part entière, mais qui cherche à se défaire de l’image existante des musées virtuels, la navigation est fluide et permet de facilement s’y retrouver. Se basant sur le principe du web sémantique, la recherche est facilitée par un catalogage systématique des œuvres numérisées. Celui-ci catalogue est fait de telle manière que la navigation peut emmener le visiteur dans une visite entre les différents contenus sur base de mot-clés, et donc de passer d’un tableau à une conférence liée au même sujet, puis à un film, une chanson, des photographies, etc.

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Parmi l’ensemble des exigences liées au projet, deux sont particulièrement importantes. L’indexation qui permet aux œuvres d’être cataloguées de la manière la plus fluide possible et sans hiérarchie, et la libération de l’ensemble des droits liés aux œuvres, celles-ci ne l’étant généralement pas. Grâce à cela tous les parcours imaginables sont possibles sur cette nouvelle plateforme virtuelle. Tout comme il le voulait pour le Centre, ce nouveau système s’apparente très bien à ce lieu « où les arts plastiques voisineraient avec la musique, le cinéma, les livres, la recherche audiovisuelle, etc. » comme décrit par Georges Pompidou. Ce n’est pas forcément l’existence d’une collection antérieure à l’apparition du lieu qui doit en définir l’architecture ou le fonctionnement, mais cela peut au contraire être une volonté de discours ou de thématique. Lors de la création d’un nouveau centre culturel en lieu et place de l’îlot insalubre numéro 5, ce n’était pas les collections déjà existantes qui en définir l’aspect, mais la volonté de faire quelque chose de nouveau, quelque chose qui viendrait ébranler les fondations mêmes de ce qui était communément admis comme musée. Et s’il arrive qu’en construisant le bâtiment avant d’acquérir la collection cette dernière pèche souvent « par faiblesse numérique de la collection »1, ce n’est pas le cas du Centre Pompidou aujourd’hui. Il arrive aussi qu’un bâtiment soit tel qu’il suscite l’attention de tous pour ce qu’il est, son contenu passant alors parfois au second plan. C’est le 1 LAUXEROIS, 1996. op. cit. p.76


cas par exemple du Musée Juif de Berlin dessiné par Daniel Libeskind qui pendant 2 ans entre sa livraison et la mise en place de l’exposition permanente fut laissé vide, le visiteur déambulant à l’intérieur et laissé en proie à ses émotions et son ressenti. Ces cas de figure sont rares, mais ils existent et le Centre Pompidou, bien que jamais laissé vide, peut être considéré comme tel de par son architecture qualifiée plus d’une fois d’utopique. L’apparition des différents organes les plus récents dans l’histoire du Centre questionne l’objet en tant qu’objet, notamment par sa dématérialisation sur le Centre Pompidou Virtuel.

La fin de l’exposition temporaire ? À partir de la deuxième moitié du XX siècle, les musées – partout dans le monde – commencent à entrer dans ce qu’on a appelé l’ère de la communication. Ce ne sont alors plus les collections et leur gestion qui priment, mais la manière d’amener le public en grand nombre. Ainsi, petit à petit, les musées mettent leurs moyens dans l’organisation d’expositions temporaires, aux dépens de l’affichage classique lié à l’exposition permanente. Certains grands musées – y compris celui faisant partie du Centre Pompidou – vont jusqu’à décider de faire tourner leurs collections dans un affichage de moyenne durée, le modifiant une fois tout les uns à trois ans. Si les musées qui ont plus de moyens peuvent se permettre l’organisation de telles expositions temporaires d’envergure, ce n’est pas le cas de tous. Certains musées (se) sont contraints à passer par le prêt ou la location des expositions organisées par leurs confrères. e

L’impact de cette dynamique depuis les 35 dernières années est conséquent sur la manière dont les musées fonctionnent. D’une volonté de conservation et de transmission de patrimoines et de collections, les musées en sont venus à devoir considérer l’attraction du public le plus large comme mission première. Le visiteur est donc mis en avant dans les nouveaux schémas de développement des musées, et « le projet

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scientifique de l’institution se double d’un projet culturel qui inclut une politique des publics »1.

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Tout cela a forcément eu un impact significatif sur l’organisation des institutions muséales. De chercheur et spécialiste, le conservateur se mute en concepteur ou commissaire d’exposition ; la communication prend un rôle de plus en plus central dans le rythme des musées ; de nouveaux services des publics voient le jour ou prennent plus d’importance. Ces éléments poussent à la diversification des outils de médiation selon les différents publics visés. Sont-ce de mauvaises choses ? Bien du contraire, cela permet aux musées de mieux connaître leurs publics, ce qu’ils attendent et la manière de les faire revenir ; ou encore d’en faire venir de nouveaux. C’est ce qu’a tenté de faire le Centre Pompidou dans diverses tentatives de médiation, et notamment avec le Centre Pompidou Mobile et les exportations temporaires. Pourtant, ce n’est pas à la fin du XXe siècle qu’apparaissent les premières expositions temporaires. À en croire son histoire, « c’est dans la première moitié du XIXe siècle qu’apparaissent à Londres les premières véritables expositions temporaires d’envergure qui rassemblent des œuvres d’art ancien en provenance de différentes collections privées et de musées. La British Institution, fondée en 1805, joue un rôle de pionnier dans ce domaine en organisant de grandes expositions dans ses trois salles sur Pall Mall (également appelée British Gallery) »2. Et s’il est vrai que les 35 dernières années, comme l’a montré Francis Haskell3 , furent fortement portées par l’essor des expositions temporaires, Daniel Jacobi parle aujourd’hui de sa fin. Pour comprendre cette position, un petit retour en arrière s’impose. Avec l’amélioration des moyens de communication, les musées commencent à se pencher sur la question dès les années 1960. Dès les années 1980, les pratiques communicationnelles s’accélèrent et se généralisent, résultant de changements profonds au sein des sociétés 1 JACOBI, Daniel, 2013. "Exposition temporaire et accélération : la fin d'un paradigme ?". La Lettre de l’OCIM no150. p.16 2 GOB, DROUGUET et CHAUMIER, op. cit. p. 3 3 cf. HASKELL, Francis, 2002. Le Musée éphémère : les maitres anciens et l'essor des expositions, Gallimard.


européennes, et ici principalement la société française. Cela se traduit par « l’allongement du temps des loisirs, l’augmentation du niveau d’éducation, le développement de la communication et l’apparition des moyens de transport rapides, et bien sûr la généralisation des déplacements touristiques… »1, qui poussent à repenser les patrimoines, musées, festivals, etc. comme atouts économiques. Ainsi, il n’y a guère d’intérêt pour les musées et autres d’avoir de larges collections si c’est pour qu’elles restent cachées aux yeux du public. Pour autant la qualité des collections et de leur présentation peut être présente, la question de les redynamiser et de faire venir un nouveau type de public habituellement absent de tels lieux se pose. C’est à ce moment-là qu’une recrudescence des expositions temporaires prend lieu dans le paysage culturel français. Celles-ci permettent un renouvellement similaire à ce que peuvent offrir d’autres secteurs de la culture (cinéma, théâtre, opéra, littérature, musique, etc.). Plusieurs aspects sont à mettre en avant en termes d’innovation. Dans un premier temps, l’exposition temporaire est une innovation muséale en ça qu’elle pousse à une nouvelle réflexion sur l’agencement des œuvres, sur leur pertinence au sein d’une thématique. Elle permet aussi de découvrir des ensembles encore jamais exposés ensemble, suite à des prêts entre institutions. Libérés des contraintes inhérentes à l’exposition permanente, une interprétation innovante et un discours neuf peuvent être mis en place. Dans un second temps, l’exposition permanente permet de coller à des éléments d’actualité – impossible à traiter par une exposition permanente –, ou de répondre à une commande. Ensuite, c’est la qualité de la mise en valeur des œuvres qui est jugée, et qui permet de mettre en avant la personne ayant mis en place celle-ci. Tel un auteur, le commissaire, le conservateur ou le concepteur gère l’écriture – la muséographie – de l’exposition au travers d’un travail réalisé en collaboration avec d’autres professionnels. En dernier lieu, « l’exposition temporaire est avant tout une innovation médiatique. »2 Les visiteurs affluent pour voir un ensemble d’œuvres 1 JACOBI, 2013. op.cit. 2 JACOBI, 2013. op.cit

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mis en scène de manière nouvelle et unique pour un moment seulement, avant que plus jamais une telle chose ne se reproduise ; du moins pour une période donnée, en un lieu donné.

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Cette nouvelle tendance pousse donc de nombreux corps de métiers à se greffer sur l’univers des musées. La communication passe par des professionnels qui mettent en avant la qualité de la nouvelle exposition, au détriment parfois des expositions permanentes. Cela passe aussi bien par des communiqués de presse et que par des dossiers pédagogiques. Graphistes, scénographes, architectes, menuisiers, décorateurs, tant de nouveaux métiers appelés à la rescousse dans l’organisation et la mise en place de ce nouveau format d’exploitation coûtent de l’argent, plus que pour une exposition permanente. Cela oblige une certaine rentabilité afin de rentrer dans les frais, et donc de faire en sorte que le public le plus large possible accoure. Cela ne suffit malheureusement pas toujours, et il est de plus en plus souvent fait appel à des mécènes pour couvrir une partie des frais d’exploitation. Cela transforme aussi la figure du conservateur, autrefois chef du musée, qui dans un premier temps est doublé d’un gestionnaire, avant de muter lui-même pour en devenir un. L’exposition temporaire change aussi le rythme du musée. Autrefois lent, ce qui le poussa à être vivement critiqué à la fin des années 1960, le rythme s’accélère grâce aux multiples expositions temporaires organisées chaque année. L’exposition précédente n’est pas encore terminée que déjà les regards sont tournés sur la suivante. Celle-ci se doit d’ailleurs d’être pensée de manière à faire venir la plus grande audience possible, afin de rentrer dans les frais, mais aussi dans un but de validation de la qualité. Alain Seban, par exemple, était fier de pouvoir dire qu’entre son arrivée et son départ, les communiqués de presse ne se faisaient plus qui si l’exposition en question allait atteindre les 400 000 visiteurs1, contre 180 000 lors de son arrivée. 1 HASQUENOPH, Bernard, ROUSSET, Marion, 2017. "Le centre Pompidou, une utopie rouillée" Revue du Crieur, no7. [en ligne] https://www.mediapart.fr/journal/cultureidees/150617/le-centre-pompidou-une-utopie-rouillee?onglet=full [en date du 19 juillet 2017]


Pour en revenir au postulat de Daniel Jacobi selon lequel l’exposition permanente serait vouée à disparaître, il faut essayer de comprendre pourquoi ce serait le cas. Tout d’abord, les institutions commencent à être réticentes en ce qui concerne le prêt de leurs chefs-d’œuvre, et il est donc difficile de les faire venir en un lieu commun pour les exposer. De manière pragmatique, il faut aussi souligner le coût de ces expositions temporaires qui ne cessent de grimper, entre les frais de transport, d’assurance, de gestion, etc., et la scénographie qui se doit d’être originale. Pour achever l’exposition temporaire, c’est l’avènement de la logique événementielle qui est utilisée, ainsi que l’effet de banalisation selon lequel leur nombre est tel « qu’il devient difficile d’attirer l’attention avec l’ouverture de la énième exposition temporaire de la saison… »1 S’il est vrai qu’il n’y a plus d’expositions permanentes au sens premier du terme, elles n’ont pas disparu pour autant. Forcées d’opérer une mutation, celles-ci s’étalent maintenant sur des périodes moyennes allant selon les établissements de 2-3 ans à 8-10 ans pour les plus longues. Quant à la dimension temporaire de l’exposition, elle ne verra pas de si tôt sa fin. Le Centre Pompidou tablant sur celle-ci pour continuer l’exploitation de ses collections. Toute la dynamique d’exportation du Centre se base par ailleurs sur ces temporalités courte et moyenne, qui permettent aux œuvres de sortir de leur tombeau auquel pourrait être comparé leur entrepôt. C’est aussi le cas de l’ensemble des partenariats mis en place pour les 40 ans du Centre, avec de nombreuses institutions françaises et étrangères.

1 JACOBI, 2013. op.cit. p.19

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VIII. Conclusion

La raison principale de mon intérêt pour ce sujet était le fait qu’il me permettait de traiter d’architecture et d’art, et finalement de bien d’autres choses aussi. Le musée a toujours été quelque chose de fascinant à mes yeux, ne fût-ce que par la multiplicité d’interprétation possible de celui-ci. Si aujourd’hui l’existence du musée semble être une évidence, l’histoire nous montre bien à quel point le chemin qu'il a parcouru est complexe. L’art a suivi bien des tendances au cours des millénaires, et la notion d'en faire un médium pour la transmission d'idées et de volonté envers les masses est présente depuis longtemps. Si aujourd’hui il est possible – et bien souvent considéré normal – de trouver des papyrus remplis d'hiéroglyphes dans la section égyptienne du Louvre, ou encore des bijoux datant des civilisations sumérienne, grecque ou romaine, il n’en a pourtant pas toujours été de même. Les premiers à pouvoir posséder ce genre d’objets étaient – mis à part leurs premiers utilisateurs – les élites et les classes dirigeantes. Ce n’est pas l’apparition du musée qui empêchera cette tendance de continuer à exister et à se développer. L’ostentatoire et le collectionnisme sont encore des moyens de représentation de la richesse et du pouvoir, comme ils l’étaient durant des siècles. L’histoire du musée, comme elle a été vue en ces pages, est multiple, non linéaire, complexe et porteuse de beaucoup de sens. D’abord né sur les berges du Nil sous les traits d'une recherche du savoir et de la

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connaissance par des intellectuels est révolu. Cette vision du musée s’est perdue pour ne renaître que bien plus tard, transformée. Les dynamiques mises en place par le Centre Pompidou ont souvent été précurseuses. Premier lieu revendiquant une pluriculturalité et voulant mettre en un même endroit des fonctions autrefois séparées, il est aujourd’hui un acteur majeur dans la redéfinition de la transmission de la culture. Sa volonté de permettre à un public plus large est aujourd’hui communément partagée, et sa manière de faire se retrouve dans d’autres grandes institutions. Celle-ci est-elle pour autant inscrite dans une dynamique de marchand de culture ? En venant questionner la manière de diffuser la culture et l’architecture – dans le sens le plus global du terme – de cette diffusion, le Centre Pompidou s’est imposé comme un des éléments phares de cette nouvelle tendance. Souvent précurseur, le Centre Pompidou trace de nouvelles voies et tente de nouvelles expériences pour faire découvrir les arts au plus grand nombre possible. Pour cela, le Centre a dû se réimaginer plusieurs fois, se poser des questions sur son fonctionnement, et trouver des solutions à des problèmes très actuels. Mais revenons un instant sur le titre. Centre Pompidou, marchand de culture ? Quelles sont les significations et implications de ce mot ? Un marchand est une « personne dont la profession est d’acheter (plus rarement de fabriquer) et de revendre une ou plusieurs sortes de produits en en tirant un bénéfice. » 1 La marchandisation de la culture, comme il a été fait mention plus haut, implique cet aspect de vouloir tirer du bénéfice sur base de celle-ci. Si chercher à rentrer dans ses frais lors d’une exposition temporaire ou d’un événement est logique et ne peut être considéré comme étant une marchandisation, leur location ou export y ressemble déjà bien plus. En effet, c’est sous la forme d’une marque Pompidou que se passent ces exportations, et bien qu’elle soit gage de qualité, elles semblent tomber dans un aspect mercantile. Pour autant, comment en vouloir à ces institutions ? En 1 ATILF - CNRS & Université de Lorraine. "marchand" TLFi : Trésor de la Langue Française informatisé [en ligne] http://stella.atilf.fr/Dendien/scripts/tlfiv5/advanced. exe?8;s=601651845; [en date du 11 août 2017]


cherchant à promouvoir la culture et les arts, c’est bien à la fonction première du musée qu’elles font réponse. La volonté du Centre Pompidou de permettre à une transversalité des arts dans le monde et en son sein a toujours fait partie de ses règles du jeu. Le Centre Pompidou a toujours cherché à repousser les limites, et continue à le faire aujourd’hui en continuant sur sa lancée. En faisant face à une crise financière durant les années 2000, et voyant les budgets alloués à la culture diminuer, il a été obligé de trouver une solution ailleurs. Malgré la location de ses expositions, de son nom, de son savoir-faire et de ses avoirs, son but n’est pas de faire du profit. Et s’il a eu des erreurs de parcours et des moments de faiblesse, il continue encore et toujours d’œuvrer pour son public et la culture. Ne fût-ce que par sa prise de position quant à la manière de fêter ses 40 ans d’existence, il prouve encore être là non pas pour lui-même et sa gloire personnelle, mais pour fêter la culture dans tous ses aspects les plus variés.

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X.

Iconographie

fig. 1 - Le Musée Royal, aujourd'hui appelé Altes Museum, a ouvert en 1830 sur une île de la Spree. Il est le premier musée public à Berlin. © bpk / SMB / Jörg P. Anders [en ligne] https://www.preussischerkulturbesitz.de/ueber-uns/profil-der-spk/preussisches-kulturerbe. html fig. 2 - Le British Museum en 1852, photographié par Roger Fenton. [en ligne] http://www.britishmuseum.org/about_us/management/ about_us.aspx fig. 3 - Façade du Metropolitam Museum of Art by Simon Fieldhouse. [en ligne] https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Metropolitam_ Museum_of_Art_by_Simon_Fieldhouse.jpg?uselang=fr fig. 4 - Plans des collections permanentes du Musée national d'art moderne, 1977. MUSEE NATIONAL D'ART MODERNE, CENTRE POMPIDOU, mai 1985. [en ligne] ht t ps://w w w.cent repompidou.f r/med ia/docu ment/7b/ c2/7bc2e36e7fc6adfb5a262d725b160197/normal.pdf fig. 5 - Plans des collections permanentes du Musée national d'art moderne, 1985. MUSEE NATIONAL D'ART MODERNE, CENTRE POMPIDOU, mai 1985. [en ligne] ht t ps://w w w.cent repompidou.f r/med ia/docu ment/7b/ c2/7bc2e36e7fc6adfb5a262d725b160197/normal.pdf

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fig. 6 - Maquette de l'Institut de recherche et de coordination acoustique/musique. [en ligne] https://www.ircam.fr/lircam/lebatiment/ fig. 7 - plan Centre Pompidou-Metz, étage 0. [en ligne] http://www. archdaily.com/490141/centre-pompidou-metz-shigeru-banarchitects fig. 8 - plan Centre Pompidou-Metz, étage 1. [en ligne] http://www. archdaily.com/490141/centre-pompidou-metz-shigeru-banarchitects 132

fig. 9 - plan Centre Pompidou-Metz, étage 2. [en ligne] http://www. archdaily.com/490141/centre-pompidou-metz-shigeru-banarchitects fig. 10 - plan Centre Pompidou-Metz, étage 3. [en ligne] http:// www.archdaily.com/490141/centre-pompidou-metz-shigeru-banarchitects fig. 11 - coupe Centre Pompidou-Metz. [en ligne] http://www.archdaily. com/490141/centre-pompidou-metz-shigeru-ban-architects fig. 12 - coupe Centre Pompidou-Metz. [en ligne] http://www.archdaily. com/490141/centre-pompidou-metz-shigeru-ban-architects fig. 13 - Forum du Centre Pompidou-Metz. Photo par Didier Boy de la Tour. [en ligne] http://www.shigerubanarchitects.com/ works/2010_centre-pompidou-metz/index.html fig. 14 - Chapeau chinois. [en ligne] http://www.jdg-architectes.com/ projet/centre-pompidou-metz/ fig. 15 - Maquette test de la structure du toit du Centre PompidouMetz. [en ligne] http://www.jdg-architectes.com/projet/centrepompidou-metz/ fig. 16 - Maquettes test de la structure du toit du Centre PompidouMetz. [en ligne] http://www.jdg-architectes.com/projet/centrepompidou-metz/


fig. 17 - Détail de la structure du toit du Centre Pompidou-Metz [en ligne] http://www.jdg-architectes.com/projet/centre-pompidoumetz/ fig. 18 - Vue vers la cathédrale Saint-Étienne à Metz. Photo par Didier Boy de la Tour. [en ligne] http://www.shigerubanarchitects.com/ works/2010_centre-pompidou-metz/index.html fig. 19 - plan d'implantation Centre Pompidou-Metz [en ligne] https:// www.amc-archi.com/photos/equerre-d-argent-2010-nomineshigeru-ban-et-jean-de-gastines-centre-pompidou-metz,2280/ axonometrie-centre-pompidou.10 fig. 20 - Le Centre Pompidou Mobile à Cambrai, en 2012. © Cyrille Weiner, Construire, Philippe Migeat [en ligne] http://www.chloebodart.fr/projets/le-centre-pompidou-mobile fig. 21 - Espace d'entrée du Pompidou Mobile © Cyrille Weiner, Construire, Philippe Migeat [en ligne] http://www.chloe-bodart. fr/projets/le-centre-pompidou-mobile fig. 22 - Exposition sur la thématique Couleurs au Pompidou Mobile © Cyrille Weiner, Construire, Philippe Migeat [en ligne] http:// www.chloe-bodart.fr/projets/le-centre-pompidou-mobile fig. 23 - Plan d'implantation du projet Muelle Uno à Málaga. © L35 [en ligne] http://www.l35.com/fr/proyecto.php?id_prj=196 fig. 24 - Vue aérienne du projet Muelle Uno à Málaga. © Nicolás Pinzón [en ligne] http://www.l35.com/fr/proyecto.php?id_prj=196 fig. 25 - intérieur du Cubo © Jesús Granada [en ligne] http://www. archdaily.com/788272/centre-pompidou-malaga-javier-perez-dela-fuente-juan-antonio-marin-malave fig. 26 - Salle pour les expositions semi-permanentes. © Javier Orive [en ligne] http://www.archdaily.com/788272/centre-pompidoumalaga-javier-perez-de-la-fuente-juan-antonio-marin-malave

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fig. 27 - Plan Centre Pompidou-Málaga. étage 0 © L35 [en ligne] http://www.archdaily.com/788272/centre-pompidou-malagajavier-perez-de-la-fuente-juan-antonio-marin-malave fig. 28 - Plan Centre Pompidou-Málaga. étage -1 © L35 [en ligne] http://www.archdaily.com/788272/centre-pompidou-malagajavier-perez-de-la-fuente-juan-antonio-marin-malave fig. 29 - Escalier intérieur en bois, Centre Pompidou-Málaga. © Ian Caldwell [en ligne] http://www.ianthearchitect.org/centrepompidou-opens-its-first-outpost-in-malaga-spain-in-el-cubo/ 134


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Je tenais ici à remercier l'ensemble des personnes que j'ai rencontrées tout au long de mon parcours. C’est grâce à elles que je suis devenu qui je suis aujourd'hui. Merci à mes amis, qui me supportent et me soutiennent chaque jour, vous êtes géniaux. Merci à Pablo Lhoas avec qui j'ai depuis le début eu un contact facile et des discussions intéressantes qui m'ont permis d'évoluer dans ma réflexion. Merci à mon frère et mes sœurs, avec lesquels j'ai toujours l'occasion de parler de choses sérieuses et moins sérieuses. Enfin, merci à mes parents. Merci de m'avoir (sup)porté jusqu'à maintenant. Merci de m'avoir aidé durant toutes mes études, et de m'avoir poussé à toujours donner le meilleur de moi-même. Et puis merci à toi, lecteur, si tu m'as fait l'honneur de lire ce travail en entier. J'espère qu'il t'aura offert ce que tu cherchais, et dans le cas contraire n'hésite pas à me dire pourquoi.

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