sur les systèmes dialogiques
Je vais vous raconter des histoires pour m’interroger avec vous sur nos accords collectifs de comment on vit ensemble.
Au cours des 23 dernières années au Brésil, mes collègues et moi nous sommes interrogés sur comment on peut reprendre notre pouvoir et s’organiser socialement ensemble, particulièrement dans les domaines de la justice, l’éducation, le partage des ressources et le soutien mutuel.
23 ans, ça peut sembler long, mais en fait si on considère ce qu’on fait, c’est très court, c’est juste une ébauche que je vais vous montrer et ça change au fil de l’apprentissage.
C’est important de rendre clair que ce n’est pas un travail, quoique… et je ne propose pas qu’on en fasse plus. J’ai commencé parce que je ne pouvais pas ne pas le faire, j’ai remarqué que beaucoup des systèmes ne fonctionnent plus bien dans le sens où ils ne satisfont plus les besoins qu’ils sont censés satisfaire, mais aussi parce qu’ils portent du tort aux personnes qui les mettent en œuvre ainsi qu’aux bénéficiaires. Donc ils ne sont pas durables.
Et je me sens concerné parce qu’ils se délitent, soit par leurs contradictions internes, soit par le changement si rapide du monde, comme chacun a du mal à se tenir à jour, si on se laisse distraire de ce qui est vraiment important.
Je ne pense pas que nos petits enfants nous demanderont si le Brexit était nécessaire, mais « comment vous avez pu vous convaincre que c’était ça la question importante ? » Par exemple si l’on considère qu’il ne reste plus que 35 récoltes en France, plus d’insectes, d’abeilles, les vents et la chaleur qui changent... S’il n’y a plus d’humus, plus de nourriture. Mais on n’en parle pas aux journaux.
Au fur et à mesure qu’on s’est occupés des conséquences, on a vu les bases du système social.
4 histoires différentes pour clarifier les idées sur la manière dont on utilise notre pouvoir collectif, quand on ne dépend plus des sphères privées ou de l’état. Je suggère que ce qui est public n’est ni étatique, ni privé, donc c’est une invitation à redécouvrir ce qu’il y a derrière le mot public, ensemble.,
1ère histoire : le partage des ressources :
On peut faire un jeu expérienciel avec l’argent pour avoir un avant-goût de notre pratique. Ici, voici 2 paniers. Cet événement a une caractéristique étrange : ce n’est ni gratuit ni payant. Pas payant parce que nous voulons que toutes les personnes puissent venir et parce que quand je fais payer, l’état d’esprit change. Et j’ai décidé il y a 15 ans que je n’étais pas à vendre, vous ne pouvez pas m’acheter, je veux faire ce qui a le plus de sens pour moi et non ce pourquoi on me paye. Mon travail n’a pas de prix : pas de valeur numérique et inestimable.
Donc depuis 15 ans, je ne fais pas payer ce que je fais… mais comment je fais pour m’occuper de ma fille et mes factures ? Je fais ce qui a de plus de sens pour moi et je rappelle aux personnes que, s’ils en ont envie, ils peuvent mettre de l’argent dans le panier. Vous pouvez avoir envie de mettre de l’argent pour payer les fleurs ou vous vous demandez d’où vient le soutien des bénévoles, ou qui a payé l’avion du Brésil...ou vous préoccuper des personnes qui ont rendu cette rencontre possible. Peut-être qu’au moment de partir, ce sera le bon moment pour vous. Nous compterons ce qu’il y a dedans et nous nous rassemblerons autour, entre tous ceux qui ont permis que cet événement existe, et nous déciderons ensemble comment on le partage. Si l’un se réjouit de ce qu’il a appris, il pourra décider de donner plus, et inversement. L’argent est un pauvre moyen pour donner des retours, mais c’est pratique pour payer un billet de train. On distribuera pour continuer à faire ce qui a le plus de sens dans nos vies.
Le 2ème panier, c’est pour s’assurer que des événements comme ceci soient possibles pour tout le monde, peutêtre que queen n’est pas venu parce qu’il n’avait pas d’argent, vous pourrez lui dire la prochaine fois qu’il y a
un 2ème panier. Si vous avez des coûts qui vous ont été nécessaires pour venir ce soir, personne ne comptera ce panier, c’est juste pour mettre de l’argent et en prendre si vous en avez besoin.
Depuis 15ans, ça a énormément enrichi les relations avec mes collègues, ça concerne notre engagement ensemble et pour redécouvrir une solidarité palpable dans ce monde changeant.
D’abord, 4 images pour s’échauffer :
1 : Paolo Freré, éducateur brésilien, très influent, le 3ème auteur le plus cité dans le secteur des sciences humaines dans le monde entier, principale source d’inspiration pour Marshall Rosenberg. « Si la structure ne permet pas le dialogue, la structure doit changer »
C’est inévitable que la structure change, parce que le monde change en permanence, donc tout ce qui rejette le dialogue devient périmé et ne fonctionne plus.
Mais quand elle refuse le dialogue, elle provoque des souffrances, donc c’est urgent. C’est notre thème de ce soir.
2 : On a le choix entre être perdu et être très perdu. C’est un apprentissage artisanal qui vient de notre engagement de communauté, on agit tout le temps, dès le début, sans savoir ce qu’on fait. Je ne le sais toujours pas 23 ans après:)
3 : Marshall Rosenberg, de qui j’ai appris pendant 18ans avec lui, m’a donné les concepts et le vocabulaire pour comprendre ce que je faisais. Sur cette photo, il joue avec un enfant qui n’a pas encore intégré le concept de domination, comme aujourd’hui, c’est du jeu, pas du travail. Il a dit « connexion avant éducation » : à l’intérieur de nous-même, entre nous-même et les autres et dans la manière dont on vit en société, dans la vie sociale, collective et systémique.
4 : Voilà un graphique qui montre que depuis 116 ans, on constate une tendance importante à des changements non violents. Ça n’apparaît pas dans les livres d’histoire mais je veux montrer ça pour rappeler qu’on n’est pas tout seuls.
Maintenant une petite histoire avec 3 amis au Brésil :
Dans le quartier d’Ana et ses 2 copains, la ville assure la collecte des ordures mais pas le recyclage. Ils s’unissent pour voir les cqs négatives de ce manque en rapport avec la communauté qui n’est plus une question d’affiliation ou de géographie, ce ne sont pas des gens que j’aime, qui votent comme moi, qui ont le même compte en banque, parlent la même langue… mais selon notre intention de partager un risque en commun.
C’est ça qui donne notre sentiment d’appartenance. On a tellement souffert au nom du risque, on a travaillé très fort pour diminuer le niveau de risque ! Quand je viens ici, je remarque que je peux m’asseoir dans un bus et je peux me détendre. A Rio, je regarde l’arrêt de bus quand j’arrive, il y a des personnes qui peuvent monter dans le bus et prendre des gens en otage...c’est super qu’il y ait moins de risques, mais une conséquence, c’est que je ne parle plus à mon voisin et il y a aussi des risques à cela.
Lors d’une grève des conducteurs de camions, qqch de très intéressant s’est produit : on a eu des fruits durant 3 jours, des légumes frais 5 jours, et après mon voisin, avec qui je n’avais pas parlé depuis 10 ans, m’a invité à dîner...c’est rapide...mais c’est dommage de devoir attendre un désastre pour réaliser qu’on vit ensemble.
Ana et les autres ont réfléchi avec 3 questions :
1 :que faisons-nous déjà ? qu’est-ce qui fonctionne bien ?
Questions étranges pour les ONG ou le business qui vont analyser le problème, chercher des solutions ailleurs pour les ramener, mais ils dépensent beaucoup d’énergie pour convaincre les gens d’utiliser une stratégie qui ne leur ressemble pas. En non-violence, Gandhi appelait ça « le génie du lieu », curieux de savoir ce que les gens faisaient là où il y avait le problème. Comme si à la racine du problème, on trouve le sol le plus fertile. Si on avait seulement la lumière de notre attention sur tout ce qui se passe à cet endroit.
On ne demande pas : « c’est quoi le problème ? et comme ça se passe à l’extérieur ? » ni réfléchir à comment apprendre aux gens la bonne manière. On écoute plus qu’on donne des instructions comme le « connect before educating » de Marshall
Tout ce qu’on va faire, c’est avec les gens.
2 : Qu’est-ce que nous faisons déjà et que nous voudrions éviter, un mauvais usage de notre temps et de notre énergie ?
3 : si les choses fonctionnent comme nous aimerions le plus, à quoi ça ressemblerait ? Quand ma fille a rencontré pour la première fois sa grand-mère, elle voulait lui montrer fièrement Rio. Mais si on était aussi fiers de notre système social. Attention : ne poser cette question que si vous avez déjà décidé de construire quelle que soit la réponse parce que ça demande beaucoup d’efforts de regarder à l’intérieur ce qu’on veut vraiment. Si on reste superficiels, les personnes enterrent la réponse profondément et parfois ne se souviennent même plus de ce qu’elles aimeraient faire. Si nous oublions notre rêve, on a un gros problème.
Exercice : partager nos rêves
Invitation à discuter avec des personnes à côté de partager doutes, rêves 5 minutes
2ème histoire : un autre modèle éducatif
conséquences d’une conversation avec ma fille : il y a 5 ans, un dimanche soir, elle est assise à crier sur ses devoirs, stupides, ennuyeux, pénibles… et je me souvenais des miens, donc je pouvais sympathiser facilement, je la laissais tranquille et je suis allé à la cuisine. Mais de retour elle était toujours aussi en colère. On avait pris un accord : si elle voulait prendre une journée libre, elle pouvait me le dire. Elle ne l’a fait que rarement, donc je lui ai rappelé, mais elle eut un visage consterné :
- Tu en comprends pas, il faut que je fasse mes devoirs ,
- pourquoi ?
- parce que je dois passer un niveau !
- Pourquoi ?
- Parce que je dois passer à l’année suivante !
- Pourquoi ?
- Pour aller à l’université !
- Pourquoi ?
- Pour avoir un diplôme !
- Pourquoi ?
- Pour avoir un bon travail !
- Pourquoi ?
- Pour avoir un salaire décent !
- Pourquoi ?
- Pour enfin être libre d’acheter la robe que j’aime !
Elle avait 13 ans et devrait attendre ses 26 ans pour l’acheter, renoncer à 13 ans pour être « libre », j’étais choqué.
Je me suis souvenu de ces questions / travail sur la justice restaurative et, authentiquement curieux, j’ai demandé :
- Est-ce qu’il y a qqch à l’école qui fonctionne pour toi ? Qqch qui te soutient à devenir la personne dont tu rêves ?
- oui …
mais la liste n’était pas longue
2ème question :
- qqch ne marche pas ?
- oui ….
et s’ensuit une très longue liste de choses qui n’allaient pas pour elle.
3ème question, elle m’a décrit l’incroyable école, tellement extraordinaire d’une communauté apprenante. J’ai écrit tout ce qu’elle disait. Elle s’est sentie mieux et est repartie faire ses devoirs, pendant que j’étais assis
devant cette liste « mon dieu, qu’est-ce que j’ai fait ! Je dois construire cette école ! j’ai jamais été à l’université, j’ai été exclu, je suis au Brésil où tout est tellement plus compliqué ! » C’est ce que j’ai essayé de construire pendant 1an et demi.
QQ découvertes au fil de diapos : le mot grec école = loisir, suspension des règles, aucune loi imposée. Ces conditions ne sont pas négociables pour la découverte, l’innovation, l’apprentissage du nouveau et de l’éternel.
Nous avons choisi comme nom, le mot portugais espaço beta, comme une tentative d’école possible, réponse incomplète « « beta car nous savons que nous ne savons pas, c’est une expérience en chemin. C’est tout un système avec 3 écoles qui fonctionnent et une en cours, en partenariat avec le gouvernement.
Ma fille est arrivée le jour de la rentrée avec un T shirt « je déteste l’école » : Quelle école tu détestes ? Celle d’avant ou la nouvelle ? Heureusement, c’était l’ancienne. Aujourd’hui, elle est à l’université.
Quand MR m’a dit « les recherches dans l’éducation montrent que, quand ils ont le choix, les étudiants préfèrent apprendre d’un autre étudiant que d’un professeur »
Quand ma fille est arrivée à l’école, elle n’avait pas une idée claire de ce qu’elle voulait faire, mais le point commun c’était les signes et les symboles, les moyens non verbaux de communiquer du sens. La seule question c’est : « quelles sont les conditions dont tu as besoin pour vivre ton rêve et souvent la première = que qqn s’intéresse sérieusement à ton projet »
Quand un adulte demande à un ado - qu’est-ce qui t’intéresse ? - rien !
parce que c’est rien qui plaise à l’adulte, mais si la question vient d’un autre ado, la réponse est différente. Nous avons fait faire une liste par les étudiants et des enseignants de tout ce qu’ils aiment et veulent partager, elle a regardé la liste et a choisi l’imprimerie sur soie. Les étudiants choisissent leur professeur et le virent quand ils estiment avoir la compétences. Certains professeurs viennent ponctuellement. Maintenant, les élèves ne détestent plus faire leurs devoirs et aiment s’aider.
Pendant une rencontre de planification, pour le jardinage : « d’abord, on plante, ensuite on cuisine, ensuite on mange ! »
Donc ils ont repris leurs cours de biologie pour apprendre à planter, ils ont invité qqn qui s’y connaît, se sont rencontrés et sur un toit de Rio ont décidé d’utiliser des trucs déjà sur le toit, des feuilles, des pierres, un vieux réservoir à eau. Ils ont transformé les feuilles en humus sous la pression de pierres, avec le caca d’oiseau qui contient des graines. Les enfants étaient fascinés. Ce n’est pas juste une leçon de biologie, c’est de la nourriture pousse.
Ici, tout le monde reçoit et donne de l’attention, sauf le professeur qui en sourit : il planifie ses leçons mais quand il arrive, il sait qu’il y a déjà une conversation, qu’il n’interrompt pas parce que ce qu’il apporte n’est pas forcément utile. Il essaye d’adapter ce qu’il a prévu pour que ça ait du sens avec ce qui est en cours.
Mais au Brésil, il existe une forme d’apartheid, donc il est important de passer du temps où il n’y pas d’air conditionné, de femme de ménage...pour que les enfants grandissent en étant responsables et non racistes.
Une élève est arrivée abîmée dans sa dignité qui ne voulait rien faire / maths. Elle rencontre les personnes, le fonctionnement et elle a sa première idée : faire une jupe !
« Tu peux aller à la salle couture et rencontrer celle qui propose d’expliquer. »
Louisa lui explique les différentes étapes, notamment mesurer sa taille, ce qui la bloque d’abord, à cause des maths, puis surprise, elle ose le faire, et fabrique sa propre jupe...qu’elle porte dès le jour suivant. Elle montre à une autre élève comment faire, même l’équation mathématique de la veille. Est-ce qu’elle déteste les maths ou ce qu’elle est obligée d’apprendre qqch qui n’a pas de sens dans sa vie ?
Sur les photos, on ne peut pas dire qui est le prof et qui est l’étudiant. La différence est très importante : les profs font un travail important et sont traités de manière terrible. C’est d’autant plus précieux d’offrir sa sagesse de cette manière. Mais sans rapport de pouvoir, juste entre êtres humains.
On a interagi avec un des plus grands mouvements sociaux du Brésil où les étudiants ont occupé leurs lycées, en créant un emploi du temps qui ressemblait beaucoup au nôtre. Ils étaient fascinés de découvrir notre école, soutenue par des profs.
3 ans 1/2 est un temps long pour un projet mais très court pour un système social et qui se perd si rapidement ! Les élèves s’ennuient beaucoup et souvent et nous demandent ce qu’il faut faire, mais notre accord, c’est de trouver ensemble ce qui a le plus de sens, être dialogiques. C’est un travail difficile car aucun endroit ne ressemble à ça. Mais on continue à poser ces questions et à découvrir les conditions pour que qqch qui a du sens arrive et les résultats sont incroyables.
Questions-réponses :
? : quelles instructions pour la posture des enseignants ?
- toutes les personnes qui travaillent comme ça ont un système de soutien très fort, inhabituel et tellement important
? : quels accords entre profs et élèves ?
- le prof va donner son savoir au service du projet de l’enfant pour qu’il puisse faire ce qu’il veut faire
? : les profs sont bénévoles ?
- grande question : comment faire pour que l’état soit d’accord pour financer une école comme ça, car ce serait une tragédie si c’était réservé aux riches, en excluant les personnes qui sont toujours exclues et rendant les élèves racistes, par peur de la différence. Comment trouver une manière de créer une école non excluante et payer les profs ?
//« Ne travaille jamais avec des enfant ou des animaux car ils sont beaucoup plus intéressants à regarder et ils ne regardent pas vers moi »
3ème histoire : Les cercles restauratifs et la justice restaurative :
Il y a 23 ans, je me posais des questions sur les incroyables violences dans la société à Rio, les gens me disaient « ne va pas là, ne parle pas à ces gens, … c’est dangereux. » J’avais commencé à prendre ce danger au sérieux et à restreindre mes choix.
Quand Gandhi parlait de l’opposé de la non violence, il évoquait la soumission à la peur.
Pour créer une paix intérieure, se contenter d’un espace privatisé calme au milieu du chaos, ce n’est pas pérenne. Allez dans une grotte, le conflit vous y attend. A l’intérieur de nous, entre nous et collectivement, nous sommes invités à faire un mouvement pour se libérer de la peur.
Comme une conversation qui part de travers : moins des personnes se comprennent, plus elles parlent fort, pour compenser la distance symbolique dans leur relation...jusqu’à violer l’intégrité physique de l’autre pour revendiquer la relation… mais c’est terriblement inefficace car l’autre va fuir. Le choix de la non-violence n’est pas une question morale, c’est parce que la violence n’est pas durable car elle abîme la relation.
Donc j’ai changé ma stratégie : au lieu de m’éloigner de ce que les autres me signalaient comme dangereux, je mes suis rapproché du conflit car s’éloigner rend le conflit encore plus violent. Cette idée semble folle mais je l’ai testée et vérifiée : j’ai pris le bus jusqu’au terminus vers la banlieue et j’ai marché vers la favela la plus proche. Vous imaginez avec 40 mots de portugais ?! Certaines personnes ont été assez généreuses me parler pour que je puisse trouver ce qu’un gringo cherche d’habitude dans un favela : de la drogue. Devant mon refus, les adultes se sont désintéressés de moi.
J’ai trouvé un groupe d’enfants et des portes se sont ouvertes pour mon enquête, ils m’ont présenté aux grands frères et sœurs, armés par les gangs de drogue, qui sont les plus gros employeurs à Rio. Le nouveau président veut mettre des snipers sur les toits et ne pas punir les policiers qui tuent... Quand j’ai célébré la victoire de son équipe avec un jeune, on a partagé l’appartenance et l’enthousiasme, j’étais plus en sécurité. L’entraînement à considérer les conflits comme dangereux est très fort. Le conflit est une conséquence naturelle de n’importe quelle relation qui vaut le coup.
Pour se réjouir ensemble, c’est assez facile, mais que faire si l’autre raconte une histoire triste, difficile ? Comment je peux partager son expérience même si la mienne est différente ?
On était assis un moment et l’un racontait une bataille avec sa sœur. Sa mère était domestique et son patron l’avait gardée pour cuisiner un soir. Elle n’avait aucun droit à l’époque. Donc aucune nourriture pour ce jeune homme qui ne savait pas cuisiner et qui s’est énervé contre sa sœur qui avait refusé. Il raconte en jouant les personnages.
9 ans après, je reçois une invitation du ministère de la justice pour partager les cercles restauratifs où chaque personne est impliquée, se réunissant librement et parlant à propos de ce qui s’est passé.
Aujourd’hui 48 pays les pratiquent : en Inde, Corée du sud / harcèlement entre enfants, communauté d‘intention aux USA, à l’éducation nationale à Rio où un enfant témoignait : « Je sais qu’il vaut mieux se parler, c’est juste que j’oublie »
Après avoir passé plusieurs semaines à construire un système restauratif dans une école, en posant à chacun des questions, ils décident de leur système avec plein de détails : salle, déclencheur, facilitateur, début des cercles… et un certain nombre d’élèves ont vécu un petit conflit et ont voulu faire un cercle mais ils hésitaient : « ça prend du temps : mettre un bout de papier dans une boite, attendre que le facilitateur organise demain »… Mais comme les enfants voulaient le faire maintenant, ils se sont occupés de leur conflit eux-mêmes.
Récemment, nous sommes passés en direct à la TV. Il y a 2 ans, le ministère de Justice a décidé de monter un système restauratif dans chaque tribunal. Une résolution qui est partie d’un gringo qui a rencontré des enfants et qui n’a jamais étudié à l’école.
Ces choses sont possibles mais ce sera probablement enlevé par notre nouveau gouvernement qui mettra la prison et le tir en premiers.
Pour rendre pérennes ces systèmes, ils reposent sur des process : mettre de l’argent dans les paniers, s’asseoir autour de l’argent, utiliser l’intelligence de dialogue pour le répartir. Si possible avec les personnes qui ont mis l’argent dans le panier pour qu’elles voient là où va l’argent.
Voilà comment les étudiants ont décidé comment financer l’école : pendant 3 semaines, ils ont conçu un panier pour poser de l’argent et en prendre pour tous les usages courants. Un compte en banque où les parrains financeraient le fonctionnement, partagé entre les profs, le bâtiment… Ils l’ont fait en se posant les 3 questions. Pour partager, on a divisé le papier qui représentait l’argent et tous viennent.
4ème histoire : les systèmes de soutien empathique :
De quoi ont besoin les profs pour survivre dans cette école ? De quoi auriez-vous besoin si vous installez un système de soutien dans votre famille, travail… autre que le système de justice mais cohérent / ce que vous sentez comme juste et qui rendrait votre société plus sûre ?
Que se passerait-il si vous ne faisiez plus payer ce que vous faites ?
Pour le soutien intra personnel : exemple d’une « occupation » de l’espace public. Remarque préalable : si la place était vraiment publique, ils diraient que « les citoyens utilisent leur place ». Donc elle n’est pas publique, ça ne nous appartient pas. Ces désobéisseurs civiles utilisent un système de soutien basé sur la contemplation : ils méditent non pas pour fuir la réalité, mais pour se soutenir, pour ne pas déshumaniser les personnes en uniforme : on n’a plus le temps de se payer le luxe d’avoir un ennemi. S’ils essayent de résister au conflit parce qu’ils ont peur, ça rendra la situation dangereuse. Quand on commence à avoir peur du conflit, on rêve de solutions autoritaires et même si on culpabilise à ce sujet, on vote pour ces solutions.
Pour le soutien interpersonnel : « Tu es tout ce dont j’ai besoin pour aller au-delà du problème que tu m’as causé » : certains d’entre nous pensent que les relations avec famille, collègues, amis...sont notre système de soutien mais on a besoin de soutien pour survivre à ces relations qui sont les plus importantes pour nous et dans lesquelles il y aura des conflits.
Tout va très bien, d’un seul coup, tu fais qqch qui me choque...je cherche du soutien...et je choisis la dernière personne au monde qui peut me soutenir car elle essayera de se défendre de ma réaction et de moi : toi ! Et si tu ne me soutiens pas, j’appelle un ami et je remets notre relation en question.
SVP : au lieu de penser que vos relations intimes résoudront tout, créez les conditions nécessaires pour que ces relations survivent ! Ne demandez pas à vos enfants de vous soutenir mais trouvez des soutiens extérieurs.
Pour le soutien systémique : Quand Gandhi marche jusqu’à la mer, avec des 100aines de personnes, il s’agenouille et prend une poignée de sel, il lève la main et la met aux enchères. Et le plus grand empire au monde va trembler, qui contrôlait les 4/5 des humains. On va appeler Gandhi Mahatma = grande âme, comparé aux âmes des autres pour signaler un surhomme.
Cette action est la conséquence de 78 personnes qui vivent pendant 15 ans ensemble pour produire ce moment. 15 ans de vie ensemble avec des conflits sans arrêt ! Ils ont survécu et créé les conditions pour que ce moment arrive. Gandhi est une personne normale avec un système de soutien incroyable. Idem pour MLK / réseau d’églises, Rosa Parks / activiste depuis 20 ans qui a refusé de donner son siège et qui était soutenue par une communauté qui lui a permis de survivre.
Claudette Colvin = 1ère personne noire qui a refusé de laisser son siège réservé aux blancs en 1855, elle avait 15 ans, enceinte et le groupe a analysé qu’elle n’avait pas assez de soutien pour survivre aux pressions… Rosa Parks fut la 5ème femme arrêtée pour avoir refusé son siège… et on a maintenant une station de métro à son nom à Paris. Le plan pré-construit s’est mis en route : aller voir le pasteur MLK… c‘est toujours un groupe de femmes qui est à l’origine.
Mais on continue de voir un héros solitaire...
Ceux qui restent seuls et servent de symboles, sont faciles à tuer...à remplacer par un collectif pour prendre le relais. Maintenant au Brésil, ils élisent un groupe de personnes qui occupent des lieux plutôt qu’une personne. C’est très important d’amener les choses dans la rue, mais il faut rentrer à la maison à un moment. Il faut qu’on approfondisse notre compréhension pour que ça passe dans notre vie courante.
A quoi devons-nous renoncer ?
L’absence de dialogue est fatale : la compréhension mutuelle meurt, puis la relation, puis la vie. contatodominic@gmail.com
Ateliers : 1er jour 18 et 19
Accueil par Nathalie et Dieudonné Dard
Mercis aux personnes qui organisent et leur groupe de soutien, notamment le groupe de pratique et recherches. Accueil des personnes qui viennent de partout, révélateur de ce qui est en commun et nous motive
Dominic :
La raison pour laquelle on va faire sans micro, c’est qu’on est là pour dialoguer, donc si qqn a un micro, tout le monde doit avoir un micro. Ce n’est pas un cours mais une conversation. C’est essentiel qu’on puisse s’interrompre les uns et les autres. Il est important d’apprendre à interrompre le discours dominant, ce qui est plus compliqué si l’orateur a un micro et pas vous.
Je suis reconnaissant à tous ceux qui nous permettent d’être ici, tellement de détails réalisés par un grand nombre pour faciliter les choses et commencer.
Dans ce genre d’événements, il faut un certain nombre de gens qui rendent les choses simples pour un plus grand nombre. C’est simple mais pas toujours facile de rendre les choses fonctionnelles. Par ex, quand on est arrivés, la plupart n’ont pas pensé aux architectes de la salle, seulement pensé aux sièges, comment faciliter l’audition et la vision… Pendant ces 2 jours, j’aimerais vous inviter à regarder comment on a conçu les structures de notre société et de nos vies et qui nous permet de vivre des choses facilement comme ça, pas juste l’infrastructure pour 2 jours mais qui se perpétue chaque jour, conçue de façon spécifique pour prendre soin de nos besoins.
Quand j’utilise le mot design, je parle de la projection d’un espace comme ici, quand je parle de système, je parle d’une orchestration de différentes forces qui nous permettent d’aller de l’avant. Et quand je parle de qqch de dialogique, je fais référence aux moyens collaboratifs qui s’appuient sur un pouvoir partagé et dont le résultat attendu émerge.
Qqn m’a dit à Paris, ce nom de « design du système dialogique », c’est très élaboré car c‘est compliqué à comprendre, elle avait peur que les gens viennent pour ensuite s’en vanter auprès des copains. Donc c’est important de clarifier les 3 termes, même inhabituels, c’est surtout le travail ensemble qui est inhabituel.
On a déjà 5 systèmes sociaux en miniature qui fonctionnent dans cette pièce, 5 opportunités pour apprendre ensemble : il y a des chances pour que vous reteniez plus en le vivant qu’en entendant.
1er
système : l’éducation
: le 1er est un système d’éducation, dans une classe, avec les chaises en cercle mais vous savez que le pouvoir est déséquilibré : 2 personnes sont debout et usent des mots, le 1er est un homme blanc et européen. Quel choc ! Du jamais vu ! Quelle coïncidence...ou pas…
C’est un espace où on va pouvoir se concentrer sur l’expérience du Brésil, partager nos expériences et nos questions. Je proposerai aussi des exercices dynamiques et une intention sur ces 2 jours ensemble : pour pratiquer notre manière de mettre en place des systèmes dialogiques, à la base des pratiques de non violence. Pourquoi ? Parce qu’elles promeuvent des modes de relation à l’intérieur de nous, tous ensemble et à l’extérieur. Et dans chacune de ces 3 sphères : inter, interpersonnel et le politique-social-systémique.
L’intention = diminuer l’oppression au service de la vie.
La non violence n’est pas le fait de ne pas utiliser la force mais de libérer la vie dans un sens holistique.
Dans cette classe, on ne va pas se concentrer sur comment prendre soin de soi pour soi-même : la prière ou la méditation peut nous couper du reste du monde, on monte la montagne jusqu’à une grotte pour vivre en paix et isolé, mais un conflit nous attend au sommet : « bonjour ! Je savais que tu en pourrais pas vivre sans moi… » Parfois ça peut être tentant de dire : « viens, on va faire entre nous parce que c’est tellement terrible dehors, donc je préfère regarder ce qui se passe pour toi...donc tu pourras t’occuper des moi parce que c’est très confus
aussi ! » En général ça marche 20 minutes, on ressent la même chose au même moment...mais à un moment ça s’arrête parce que ce n’est pas possible de ne pas regarder à l’’intérieur de soi et cette idée incroyable qu’il n’y ait que nous 2 au monde, on l’a pas inventée, on l’a reçue du collectif.
Donc on ne va pas perdre notre temps à croire qu’on va changer les choses de manière systémique juste en mettant notre attention sur une relation interpersonnelle, que s’entendre à 2 suffit. Changer et corriger notre langage pour ne pas se blesser ou tout autre truc durable et qui finalement devient une autre forme d’oppression.
En plus, certains sont des vétérans : « suivez-moi, on va tout changer, et SVP ne me demandez pas comment je vais à l’’intérieur ou autour de moi, ce sont des distractions contre révolutionnaires, d’abord on va tout changer socialement ! »
C’est incroyablement séduisant, tellement génial si ça marchait... mais tous ceux qui sortent dans la rue sont des individus complexes à l’intérieur et quand on ne traite que l’interpersonnel sans être aligné avec le monde qu’on veut créer...on n’y arrive jamais. On finit par se reprocher qu’il n’arrive pas et on perd toute énergie.
Ici, jusqu’à demain, la pratique de la non violence impliquera chaque instant et changera à l’intérieur de moi, avec vous et tous ensemble dans un seul mouvement.
Ce sera souvent confus, déstabilisant, on va décaler l’orientation, mais se sentir désorienté est un bon signe. Si qqn part en disant qu’il a tout compris, je serai très déçu de moi-même comme enseignant.
Dans notre premier mini cercle système social autour de l’éducation, on aura conversation, questions, images, films…
Le 2ème système : vivre avec les enfants
si on n’avait rien anticipé, ceux qui n’avaient pas de moyens de garde se seraient exclus eux-mêmes, ou dans le couple qqn se serait dévoué. Alors que cet événement veut prendre soin de la vie.
La règle est : quand les parents apprennent, les enfants doivent être absents.
A Berlin un jour, une amie venait passer 4 jours autour des cercles restauratifs et elle est venue avec ses 2 enfants. A un moment, son plus jeune lui a demandé :
- qu’est-ce qu’on va faire cet aprem ?
- on va revenir ici !
L’enfant était assez surpris, puis très calme et pendant la pause :
- Maman, qu’est-ce qu’on va faire demain ?
- on va revenir ici…
toujours surpris et calme. Au déjeuner, :
- maman, est-ce qu’il faut que j’aille à l’école maintenant que je suis jeune parce qu’on oublie d’apprendre ?
Parce que tu m’avais expliqué le cercle dans la famille en 10 minutes (et non pas 4 jours)
Peut-être qu’on n’aime pas la présence des enfants quand on apprend, parce qu’ils sont plus rapides !
La vraie raison de leur présence avec nous, c’est qu’on n’exclut pas les personnes qui veulent s’occuper de leurs enfants, et ça permet de profiter d’un bon moyen d’apprentissage parce que l’invitation n’est pas simplement que les parents soient avec leurs enfants, mais que nous tous puissions partager cette coresponsabilité d’avoir des enfants ici dans cette pièce. A n’importe que moment vous pouvez aller voir comment vont les enfants. Si vous voyez le même adulte auprès d’eux, peut-être par relation parentale et vérifier, et lui proposer de le relayer, ou les rejoindre ou être avec les enfants et que vous souhaitez revenir, vous pouvez nous interrompre ici : « j’aimerais changer, qui aimerait passer du temps avec les enfants ? »
Donc certains vont se sentir à l’aise avec cette manière de procéder mais pour d’autres ça peut être plus compliqué « oh non ! Je ne vais rien faire du tout ! » ou « j’ai assez donné » ou « j’adorerais le faire mais peur de faire qqch qui ne va pas ». Donc l’idée qu’on a tous des enfants, qu’on ait donné naissance ou pas, peut être complexe, une leçon fabuleuse en non violence car beaucoup des plus jeunes font des choses considérées comme inconstantes : ils disent la vérité. Nos relations sociales s’appuient beaucoup sur l’insincérité, c’est un apprentissage fantastique pour les systèmes dialogiques qui prennent leur force de résilience et de pertinence dans l’élan interne d’être authentique avec ce qui est le plus important pour eux dans leur vie.
Beaucoup de nos systèmes sociaux dissuadent la sincérité, et on reçoit des punitions corporelles quand on est sincères à propos des choses que les personnes qui ont le pouvoir n’ont pas envie d’entendre. Passer du temps avec les enfants est aussi un apprentissage important. Une autre conséquence est que parfois on entendra des mots qui n’apparaissent pas dans le dictionnaire et malgré le manque de sens officiel, on peut partir du principe que tous les sons ont un sens. Il n’y a aucune raison pour que ces personnes parlent plus doucement que nous, indépendamment de leur taille ou de leur âge. Peut-être qu’on fera une pause et on pourra essayer de lire le sens de ces sons. Si vous aimeriez être dans un système dialogique au sein d’une classe, un cercle… vous découvrirez que le sens est exprimé de nombreuses manières, verbalement ou pas, et certaines choses importantes ne possèdent pas encore leurs propres mots ou les mots existaient au départ mais ils ont été cooptés par des organismes de pouvoir. On ne peut même plus les utiliser.
Ex de mot confisqué : « non violence » qui signifie aujourd’hui être doux, neutre, ne pas blesser les autres, ignorer le complexe d’injustice. On a confondu la non violence avec la passivité et l’acceptation comme les esclaves utilisaient « la volonté de Dieu ». En fait, c’est radicalement différent : le non n’est pas l’absence d’utilisation de la force mais l’impossibilité de réduire la non violence à une technique, une liste de mots… ou toute tentative d’atteindre un résultat.
Le 3ème système : La proposition de manger ensemble
très simple, comme on a toujours fait, ça nous rappelle la signification du mot compagnie = étymologiquement partager le pain tous ensemble.
Mais si nous ne l’avions pas précisé, on aurait eu une pause plus longue et les personnes qui ont un peu plus d’argent seraient allées au resto, et les autres seraient restés avec les restes de la pause café. Ceux qui sortent ne sauront jamais que d’autres restent pour manger les biscuits. On passe 2 jours pour rassembler les gens et on utilise des mots comme « communauté », mais quand on parle de notre coexistence pendant 2 jours, on est séparés en 2 groupes. Bien sûr les portes ne sont pas fermées si vous voulez sortir et manger ailleurs, personne ne dira rien, mais l’invitation spécialement pour notre apprentissage est que nous restions et mangions ensemble.
Vous avez remarqué qu’il n’y a aucune charge ni planification de la nourriture, pas de page excell… quand on est ensemble on ne sait pas s’il y aura assez, si on pourra manger ce qu’on veut. Je peux prédire que la nourriture que nous avons, nous allons la partager avec tous et dans ce processus, ton corps sera nourri par qqch de très important qui n’apparaît jamais dans les listes d’ingrédients : la vitamine solidarité !
La disponibilité de prendre soin de tout le monde.
Quand on aura une pause pour un café ou pour manger, 2 fois chaque jour, ce n’est pas juste l’opportunité de s’emparer du dernier morceau de chocolat, mais de réfléchir au sens de manger avec d’autres personnes, en compagnie. Et peut-être avec cette pratique, on va pouvoir redécouvrir le sens original de communauté et non être semblable, penser pareil, vivre pareil… mais on comprendra plus profondément que c’est la disponibilité de s’ouvrir pour partager le risque et le potentiel pour la prospérité.
La nourriture sera pour le corps mais aussi pour se nourrir collectivement, peut-être que ce sera complexe, on réfléchira, qquns ont des préférences ou intolérances, peut-être qu’on décidera de noter ce qu’on apporte demain...mais ce qui est intéressant, c’est le processus pour organiser ça et, comme avec les enfants, ça se passera sur les 3 sphères : en nous (peurs, satisfaction...), avec d’autres (découvrir le partage de la nourriture dans la relation, médiation pour le chocolat…c’est une façon fantastique d’augmenter l’intimité) et tous ensemble (découvrir comment se mettre d’accord pour prendre soin de toutes les individualités).
Le 4ème système : comment on va distribuer les ressources matérielles pour soutenir l’événement et les organisateurs. Brièvement, je veux vous remercier d’être venu à un événement qui n’est ni gratuit ni payant, ce qui peut être nouveau, certains nous écrivent « merci, c’est très intéressant cette façon de voir l’argent mais pouvez-vous nous dire combien ça coûte ? ». Difficile de le connaître sans l’avoir vécu. C’est notre accord pour le système
Côté financier : un panier avec enveloppes : à tout moment vous êtes invités à prendre une enveloppe, mettre de l’argent et tout mettre dans le panier, avant la grande pause demain. Si vous participez pour plusieurs personnes, mettez le nombre de personnes pour lesquelles vous participez. Au début de la grosse pause demain, on prendra le panier, avec cérémonie, de façon visible, surtout quand c’est nouveau et inhabituel.
D’abord, on comptera le nombre d’enveloppes / le nombre de personnes inscrites, le nombre de participants à l’événement. Ensuite on donnera le total dans les enveloppes car quand je prends l’avion pour rentrer au Brésil, c’est le seul numéro qui intéresse la compagnie aérienne ( j’essaye toujours de leur dire comment j’ai reçu cet argent, mais ils ne sont jamais intéressés, ils veulent juste la somme!). Enfin, on dira la différence entre la contribution la plus petite et la contribution la plus large, pas les chiffres des contributions mais leur différence.
Ça me rappelle quand je trouve 2 ou 5000 euros sans savoir qui a donné le plus : si une personne donne 2 euros et a 10 euros, c’est 1/5ème de ce qu’elle a. Je ne connaîtrai jamais la signification symbolique de ce qui est dans l’enveloppe et ça me rappelle que je ne sais pas et j’apprécie chaque contribution.
Cet argent va couvrir les frais et pour vous aider à décider combien vous voulez contribuer, on vous dira les montants : le voyage, la bougie, les enveloppes, des choses logistiques...mais ça n’inclut pas les êtres humains qui ont travaillé pour cet événement, parfois depuis plusieurs semaines. Et peut-être voudrez-vous soutenir les vies des personnes qui ont organisé, et c’est très beau, car moi je vis de ça, c’est mon salaire, le sel que vous mettez là.
La 3ème raison pour contribuer peut-être, parce que je ne suis pas venu seul, je suis ici avec des milliers de personnes avec qui je travaille au Brésil depuis quelques années et j’aime l’idée de ramener au Brésil de l’argent pour nourrir les projets, particulièrement précieux pour moi car pendant plusieurs siècles, dû à un processus bizarre, d’énormes ressources sont allées de ce qu’on appelle le sud vers le nord. C’est beau de voir que, consciemment on essaye de changer la direction de ces ressources et qu’on les rende au Brésil.
Mais il y a un 2ème panier dont l’intention est de fournir des ressources pour le groupe lui-même, pour couvrir les frais que vous avez peut-être afin d’être présents. Vous pouvez y mettre de l’argent, sans enveloppe et vous pourrez en prendre, on ne va pas compter, ni regarder, c’est libre pour tous pour vous aider avec vos frais. Les communautés utilisent ce processus de plus en plus et plus on l’utilise, plus on baisse les barrières à la participation. Peut-être que qqn qui habite un peu loin peut emprunter cet argent de façon plus sereine, en sachant qu’il y aura de l’argent et qu’il pourra peut-être rembourser.
C’est les 2 façons de jouer avec l’argent pour notre apprentissage. Pour certains ce sera facile, pour d’autres plus difficile, complexe et douloureux parce que toute notre vie, on a mélangé notre valeur et la valeur monétaire. Nous sommes blessés dans cela, nous avons des rêves de contribution et la croyance qu’on ne pourra pas payer nos frais de base. Peut-être qu’en prenant une enveloppe, tu remarques que la personne à côté fait la même chose mais avec une cascade de larmes car c’est dur et elle aimerait mieux que je lui dise simplement combien ça coûte et elle n’aurait pas cette responsabilité de faire un choix. Faire ce processus simple est un défi à l’intérieur de nous, entre nous aussi peut-être. Voir si on peut soutenir un événement comme celui-ci, même avec queen qui arrive d’un autre continent et pour ne pas exclure la participation des présents.
Je ne dis pas que tout sera confortable, surtout parce que c’est critique avec nos habitudes, on sera peut-être mal à l’aise. On commencera à le faire dans le groupe, et le lendemain, on peut regarder l’autre moitié de ce processus : qu’est-ce qu’on fait quand on met l’argent ensemble et comment les personnes qui ont créé l’événement partagent. Qqn veut voir ça ?
5ème système social : le système de soutien
J’aimerais que vous reteniez surtout celui-ci, le plus important pour moi : c’est le système de soutien. Notre première pratique est de prendre au sérieux la possibilité que ces personnages historiques très fameux qui ont tant fait pour changer le cours de l’histoire ont pu faire ça, non parce qu’ils étaient exceptionnels mais qu’ils avaient des systèmes de soutien exceptionnels.
On ne va pas voir Rosa Parks comme une personne isolée, une femme au foyer fatiguée qui ne voulait pas laisser son siège pour un blanc, mais une militante depuis 20 ans, branchée à un système dans sa ville, ou MLK seul mais avec un réseau d’églises, ou Gandhi comme un avocat irrité qu’on a jeté du train qui a créé une communauté intentionnelle assez forte pour soutenir une transformation en lui-même, entre les personnes et dans une situation de pression collective très grande. C’est pareil pour tous nos héros : prendre ça vraiment au sérieux dans notre vie, construire un système de soutien pour être capable de vivre des choses exceptionnelles et survivre à des événements exceptionnels.
fais rien tout seul, même avec des gens super qui me sourient tout le temps. Je commence toujours avec une conversation, même rapide, Diana, Nathalie, Dieudonné font partie de mon système de soutien et ce n’est pas un luxe, c’est pour vous protéger, vous, de moi, quand je n’ai pas assez de ressources et c’est mon devoir d’être intéressant jusqu’à 21h30.
On a tous été élèves, à refaire les mêmes choses irritantes chaque jour, tirer les tresses de la voisine, jeter des boules de papier...lundi, mardi...et la prof a fini par exploser l jeudi et t’envoyer chez le directeur et encore aujourd’hui tu ne comprends toujours pas pourquoi elle a explosé ! Pas parce qu’elle n’aime pas son boulot ou qu’elle n’est pas professionnelle, ou qu’elle ne vous aime pas, mais être éthique ne suffit pas pour s’isoler du reste du monde. Peut-être que les jours précédents, son voisin lui a dit bonjour mais le jeudi, elle a reçu une facture plus chère, un autre prof ne lui a pas répondu… pas de système de soutien. Nous sommes tellement habitués à fonctionner sans système de soutien qu’on en souffre
Gandhi : « ne confondez jamais ce qui est normal et ce qui est naturel »
On a pensé que c’était naturel de vivre sans soutien, surtout de présence empathique. Nous avons tous besoin de comprendre ce que signifie « soutien » pour nous. Moi je ne connais que le soutien dont j’ai besoin pour construire.
Je vais parler ces 2 jours de l’empathie, autrement que l’utilisation actuelle « marcher dans les pas de l’autre, ressentir ce que l’autre ressent »...mais originellement, la motivation spécifique est la description physiologique. Une des façons de pratiquer est, pendant les pauses et les exercices, de remarquer cette dynamique que vous expérimentez plusieurs fois par jour, vous marchez qq part, vous voyez qqn et votre corps pense « elle a besoin d’aide ... il ne va pas bien » et une voix arrive, socialement apprise : « occupe-toi de tes oignons ! Comment tu sais ? Peut-être qu’il sera offensé ! Ta vie est déjà bien compliquée ! »
Comme expérience pendant ces 2 jours, vous pouvez prendre au sérieux la 1ère voix et dire à cette personne : « puis-je faire qqch pour toi ? »
Aucune garantie qu’elle ne sera ni vexée ni dérangée, mais tu sais que nous faisons partie d’un groupe temporaire où les gens sont prêts à expérimenter ça, de façon un peu plus visible, qu’il y a des océans de soutiens autour de nous que nous ne voyons pas à cause des accords sociaux.
Nous pouvons aussi compléter notre mission secrète : jusqu’à 21h30 demain soir, arriver à prendre le numéro de téléphone de 3 à 5 personnes que vous ne connaissez pas encore, et faire un accord que dimanche matin à 11h30, ou lundi soir, ou mercredi à midi… vous allez vous appeler pendant 10, 30, 90 minutes avec une certaine qualité d’attention que nous allons pratiquer ensemble.
Exercice d’empathie :
Question avant la pause : quelle question est la plus fréquemment posée au monde ?
- Comment ça va ?
Aucune différence selon les cultures, de façon verbale ou non, ce qui est curieux c’est qu’on le demande encore plus aux personnes qu’on connaît. A Bordeaux en 2019, comment se porte cette question ?
Habituellement c’est un accord qu’on ne répond pas sincèrement et les conséquences sont énormes : d’un côté, j’explique toujours à ma fille qu’il vaut mieux dire la vérité, je critique les politiciens ou FB, ...mais je réponds toujours de façon insincère à cette question !
Au retour de cette pause, pour augmenter notre capacité à dialoguer, pratique de la demander pour de vrai ! 20’ : première expérience avec la nourriture...et bonne chance avec le chocolat !
En fait, on passe nos accords ensemble et plus tard, ils se cristallisent comme consignes ou règles, plus stables mais c’est problématique car ils sont déconnectés de la vie qui est changement. Plutôt que de poser des règles que tous doivent suivre, ou on ne passe aucun accord et tout reste spontané tout le temps, on explore les conditions nécessaires pour qu’on puisse élaborer ensemble nos accords et qu’on continue à leur prêter attention au fur et à mesure de leur évolution. Les temps de partages sont un mini exemple.
Qu’est-ce que ça vous a fait d’être comme ça autour de la nourriture ? Qqch de différent ? - super mais moins convivial que tous autour d’une table
adoré me laisser surprendre par la créativité
- adoré les partages
- photographié le buffet et son opulence
- frustré de ne pas savoir qui a fait quoi pour en parler
- dans le tram ce matin, j’étais zen mais personne ne se parlait et ici, j’ai nourri l’enfant en moi qui aime jouer.
- expérience un peu moins festive, difficile de circuler entre les tables, je voulais faire le tour pour voir avant de choisir et le temps de revenir, y’avait plus ce que je voulais. Comme je suis petite, et comme les gens restent devant le buffet à parler, c’était compliqué pour passer. Pas trop convivial car plein de dos et d’épaules
Dominic : au final, nous allons construire l’architecture de notre espace.
Il y a 2 jours, j’étais dans une école dans la banlieue de Paris : je suis en visite, dans un pays que je connais peu, je marche dans la rue, je vois le bâtiment et je pense aussitôt : « ça ressemble à une prison » et ce n’est pas une coïncidence. La logique pour construire ainsi est proche entre une école et une prison.
La différence qu’on expérimente ici, il faudra qu’on puisse la traduire dans des formes physiques différentes, ce qui prendra un peu de temps. Cet espace pourrait être organisé différemment, avec des murs, des fenêtres, un espace à partager entre différents âges, plus grand, plus large, ouvert, pour partager la nourriture même avec les plus petits… C’est intéressant pour chacun de remarquer les espaces dans lesquels on ne se sent pas à l’aise parce que c’est ce malaise qui va nous aider à donner la forme de l’espace qu’on voudrait pour vivre.
Exercice : sur cette question « comment ça va ? » peut-on mettre un peu de vie dans cette question pour avoir une expérience semblable ? il y a une urgence car c’est une des clés pour être vraiment ensemble : MLK : « A partir du moment où on arrête de dire la vérité à propos des choses importantes, on commence à mourir. »
Puisqu’il n’est plus avec nous et comme il avait une rhétorique incroyable, c’est tenant de penser que « mourir » est un effet dramatique, donc rappelons-nous le contexte de cette phrase : un groupe de personnes est venu vers lui en disant « je préférerais mourir qu’aller dormir ce soir, opprimé comme ce matin ». Ils étaient prêts au sacrifice ultime. Mais il ne s’est pas rétréci devant ça, il voulait défier ce qu’ils disaient. « Vous voulez mourir ? Etes-vous vivants ? Parce que sinon on ne verra pas vraiment la différence. Si vous voulez que votre mort serve à qqch et il faut que vous nous manquiez. Si on ne dit pas la vérité à propos des choses importantes, on commence à mourir »
Suggestion : vous vous tournez vers la personne qui est à côté de vous, qqn que vous connaissez depuis 8 ans ou jamais vue, aucune importance et vous demandez : « comment tu vas, là, maintenant, pour de vrai ? » et vous écoutez leur réponse. Vous serez peut-être un peu nerveux, si vous ne connaissez pas la personne à côté, vous pourrez sentir qu’on ne lui a jamais posé cette question pour de vrai, elle aura peut-être besoin de 4-5h pour répondre alors que vous aviez prévu de faire d’autres choses. Je surveille le temps et je lèverai la main, vous finirez votre phrase, lèverez la main et resterez en silence.
Puis encore 10 secondes supplémentaires en silence ensemble, en portant votre attention à l’autre.
Enfin, vous pourrez alterner.
Ça marche si vraiment vous êtes partant pour augmenter le degré de sincérité au-delà de la norme, de ce qui est confortable, de ce que vous pensez être convenable ou de ce que vous avez pu apprendre.
Pareil pour la personne qui écoutera, autorisez-vous à entendre des choses qu’habituellement on fait croire qu’on ne remarque pas. Si on commence à mourir quand on voit que la vérité s’exprime, peut-être qu’on commencera à vivre un peu plus, quand on commencera à dire la vérité sur ce qui se passe véritablement… bonne chance !
Partage en 1-2 mots sur ce que vous avez appris ?
- j’ai appris qqch de l’autre et envie d’en savoir plus
- plus rien n’existait autour
- mettre des mots sur une sensation diffuse que je ne prenais pas le temps d’analyser
- j’avais pas la consigne du temps et j’ai trouvé ça court, j’ai commencé par parler sur le physique et j’aurais aimé continuer… et pour écouter, le temps m’a paru très long
- regarder l’autre en silence est beaucoup plus intimidant
- 10 secondes dans les yeux, ça suggère beaucoup
- pas l’habitude donc gêne de se regarder dans les yeux jusqu’à rougir
ça permet de rougir et de pleurer (remarque ensemble : Dominic n’avait pas précisé de se regarder dans les yeux!)
Certains ont-il remarqué qqch entre vous ?
- une chaleur sur mon cœur et mutuellement on a eu le besoin de se remercier et de se serrer dans les bras - avant, c’était juste qqn que je respectais, mais maintenant il y a un lien, je prends soin d’elle, elle est importante pour moi
Un peu plus d’écoute, beaucoup plus de vie, expérience concrète d’intimité, avec des personnes qu’on pensait même connaître très bien ou pas du tout, c’est la base pour être capable d’avancer ensemble. Et pourtant, c’est encore possible que ces personnes ne se soient pas rencontrées autant qu’elles l’ont pensé, on sait ce qu’on a dit, mais on ne connaît pas encore la réponse à la 2ème question : « Qu’as-tu entendu ce que j’ai dit ? Tu compris ? Tu me suis ? Ça fait sens pour toi ? »
Parfois on le dit de façon détournée « tu dois te dire que c’est idiot… ! » = manière de dire « qu’est-ce que tu m’as entendu partager ? »
J’ai pas réussi à rencontrer les personnes qui ont déterminé que c’était la 2ème question la plus courante ni comment ils ont pris cette mesure, mais ça a beaucoup de sens pour moi car je sais ce que j’exprime, mais je ne sais pas ce que toi, tu entends. Je ne peux pas communiquer seul, seulement ensemble, avec toi.
La manière la plus simple de tester ça est de changer de langage. Si je parle portugais par exemple, seulement 3 personnes me comprendront, les autres ne pourront pas savoir si c’est intéressant ou ennuyeux. Donc quand on parle et quand on écoute, nous co-créons du sens ensemble. Fondamentalement, c’est la rencontre de ces 2 sens qui produit l’effet de ce que vous venez de partager. Ce ne sont pas les mots parce que certaines personnes ont décrit l’impact de rester juste en silence, plein de sens. De l’autre côté, il y a une autre personne et alors que qqn lui a demandé comment elle se sentait et que manifestement leur vie est complètement changée depuis !
2ème version de l’exercice : Il est temps de vous tourner de l’autre côté et de faire le même exercice...avec une différence : pendant les 10 secondes de silence, l’écoutant émettra une seule phrase qui résume l’essence de ce que la personne vient de vous partager, comme si elle avait terminé son propos en disant « Qu’est-ce que tu m’as entendu dire ? »
Quand je fais ce résumé, probablement qu’il ressentira un grand désir de me répondre « mais oui bien sûr, c’est exactement ça ! » ou « oui, mais aussi... » parce que j’aurais résumé qu’une partie. Mais peut-être, parce que toutes les réactions se valent, peut-être qu’elle vous dira « non, Dominic a demandé d’écouter, tu n’as rien compris ! » et peut-être qu’elle aura envie de résumer elle-même pour me donner une 2ème occasion d’entendre.
Je laisserai un peu plus d’espace, je lèverai à nouveau ma main et vous pourrez alterner.
Une dernière chose : certains ont-ils repéré une différence dans la structure entre la 1ère et la 2ème. La 2ème fois, j’ai laissé plus de temps : la première pendant 2’40 et la seconde pendant 3’50 minutes. C’est un énorme changement et la plupart d’entre vous ne s’en sont pas rendu compte.
Ça fait 20ans que je fais cet exercice dans 23 pays différents et les gens ne le remarquent pas. Parce que quand on commence à se connecter sincèrement à queen, quand on augmente notre sincérité en parlant ou en écoutant, la notion de temps change : c’est un temps de vérité, de connexion. A chaque fois qu’on agit de manière non violente, le temps et l’espace commencent à changer. Le temps tel qu’on le conçoit et qu’on l’utilise dans les systèmes dialogiques est très différent du temps sous le dieu qu’on appelle productivité. Parce que nos systèmes sociaux en ce moment adorent la productivité et la déifient, on nous demande de nous sacrifier nous-mêmes de produire plus et plus encore.
J’ai commencé hier en disant que ce n’est pas du travail supplémentaire, on a tous bien assez de travail à faire. Quand on augmente notre degré de sincérité, on commence à reprendre notre temps et notre espace. Et donc on demande à nos systèmes de reprendre le rythme cellulaire de notre corps et non pas la pression de la montre.
Je vais laisser 3 minutes par personne. Mème chose avec la nouvelle question après 10 secondes de silence pour résumer. Bonne chance.
Qu’avez-vous appris ?
- même bulle de présence et canal d’énergie
- la reformulation a éclairé certains points que je n’avais pas forcément vu lors de l’émission
- évolution entre la 1ère et 2de personne, je n’étais plus dans le même état, j’étais libéré et j’ai partagé qqch de différent
- être écouté m’a permis de trouver une solution et d’être rassurée sur une solution
- semblé plus long d’écouter
- le 2ème m’a permis d’aller plus en profondeur que le 1er
Est-ce que certains ont fait l’expérience d’être bien entendu ?
- presque tous
Avez-vous remarqué que parfois vous pensiez à d’autres choses ? On nous a appris qu’écouter qqn vidait de façon magique toutes les pensées … mais en fait réellement, en écoutant on a plein d’idées :
- « toi tu penses que ta vie est dure, tu vas voir à mon tour !... » = comparaison, ou réaction
- « Yahoo ! Juste comme moi ! Quelle coïncidence incroyable qui traverse les mêmes expériences de vie ? Même si la mienne est plus compliquée ! »
- ou des choses qui n’ont rien à voir « que faire demain matin ? Il va pleuvoir ? »…
- évaluations, jugements…
et comment c’est possible que l’autre se soit senti entendu ? Ou peut-être qu’on nous a appris que si on juge, on ne peut pas écouter...pourquoi ? On peut faire différentes choses au même moment : conduire, voir le policier, cacher son téléphone, passer devant le policier, reprendre sa conversation et remarquer la vieille dame qui traverse…
On nous apprend que les jugements rendent l’écoute impossible, ils se racontent qu’ils ne sont pas de bons écoutants et ils n’essayent même plus. Essayer de ne pas juger, c’est comme essayer d’arrêter es ongles de pousser et le temps passé à essayer d’arrêter de juger est perdu..D’autant que la base est elle-même un grand jugement : on ne peut pas écouter en jugeant.
Ici, on s’intéresse à ce que vous venez de vivre qui a créé une sensation d’être entendu : à chaque idée, vous la lâchiez pour revenir à la personne devant vous. La suggestion de ne pas juger a peut-être été très mal traduite au XXème siècle : ce n’est pas arrêter le cerveau mais ne pas confondre vos idées avec la personne en face, ou vous, ou le collectif.
La différence quand on construit ces systèmes dialogiques, c’est qu’on ramène notre attention à la personne. A la fin, vous n’écouterez pas vraiment ce que l’autre dit, mais vous l’écoutez parler. On écoute la personne, pas seulement ce qu’elle raconte.
On ne va pas s’inquiéter des jugements, mais on va s’intéresser à notre capacité à rester concentrés sur notre relation. Ce n’est pas un changement : avant je m’écoutais moi-même et maintenant je vais l’écouter, c’est soit je m’écoute soit j’écoute l’autre... mais plutôt, je vais écouter la possibilité du nous, pas comme une addition de toi et moi, mais nous comme une nouvelle unité, une nouvelle base pour compter.
Transition d’une relation interpersonnelle vers notre premier système dialogique
/ 3 questions fondamentales qui les font émerger et regarder 5 aspects particuliers qui vont nous aider à les élaborer et garder à l’esprit : « comment changer le système où je travaille ? »
Portrait affiché Paolo Fréré : Notre nouveau gouvernement au Brésil a dit la semaine dernière qu’un de ses buts était de se débarrasser de Paolo Fréré dans le système d’éducation. Donc en le regardant, je fais ma propre petite manifestation pour ne pas oublier ce qu’il a fait, vécu et réalisé.
A cause de cette citation : « Si la structure ne permet pas le dialogue, alors la structure a à changer parce tant qu’elle continue, elle provoque des souffrances, parce que là où il y a un manque de dialogue, il y a un manque de sensibilité à l’autre, de volonté de changer, de relation. »
Si une structure résiste au changement, il est inévitable qu’elle se rompra parce qu’elle ne servira plus sa fonction d’origine, de répondre aux besoins pour lesquels elle existe : le système de justice ne sera plus juste, le système éducatif n’enseignera plus, le système de santé ne sera plus en santé et ne protégera plus la santé et le système économique (en grec : prendre soin de notre maison et de ceux qui prennent soin de notre maison) ne prend plus soin ni de la maison ni des personnes qui en prennent soin.
Donc les systèmes qui ignorent le dialogue changent car ils ignorent leur raison d’être et à cause de la souffrance qu’ils produisent dans les personnes qui sont à leur service.
L’école que nous avons construite : dès le 1er jour, j’ai reçu 2 communications du ministère de l’éducation. J leur avais écrit en disant qu’on allait créer une école qui ne suivrait pas les préceptes de l’éducation nationale. Respectueusement, nous vous en informons.
1ère réponse : « vous ne pouvez pas faire ça, arrêtez ! » mais 2 autres de personnes qui travaillent à l’intérieur m’écrivaient en même temps : « c’est tellement fascinant ce que vous faites, restez avec nous pour nous dire comment ça marche ! » Ils en savaient assez pour m’écrire, en tant que personnes, étaient peut-être les mêmes rédacteurs que le message formel d’arrêter. Même les personnes qui font marcher la machine ne l’aiment pas.
Le travail produit par la structure se sabotera lui-même.
Quelle est la forme la plus intelligente et subtile dans une société à système de punition ? comment saboter une machine sans se faire remarquer ?
- la dépression, le burn out, les maladies mystérieuses...c’est brillant : personne ne vous arrêtera, mais c’est triste quand c’est lié à un problème médical. La plupart des choses que nous appelons dépression, sont simplement un renoncement total à être au service de qqch qui n’a pas de sens. La fatigue d’être menacé, corrompu afin de faire des choses qui n’ont aucun sens. Pour toutes ces raisons, la structure commence à changer. Quand on fait ce travail, on a l’expérience de beaucoup de désorientations, ce n’est pas académique : plus tu étudieras, plus ton apprentissage sera correct. Ce n’est pas nécessaire pour faire le travail, de comprendre le travail (coudre, cuisiner…) donc notre choix est entre être perdu ou complètement perdu. C’est pourquoi on a besoin de soutien car notre culture impose de tout savoir tout le temps.
En anglais, knowledge avec « kn », comme le mot science « sc », vient de la même racine : kn en germain, gn en grec, sc en latin = couper qqch avec un couteau pour voir ce qu’il y a dedans.
C’est la connaissance, le gnose, la science : briser les choses et les remettre de façon différente.
Par exemple ils envoient une machine à laver, ça voyage pendant 9 ans vers Pluton et on peut voir les images sur notre portable. Mais cette façon de voir n’est pas efficace pour comprendre le flux des choses, accompagner des processus, seulement pour voir des objets.
Je ne suis pas un être humain, je suis un être en devenir. Ça ne marche pas de voir la vie avec la perspective d’un couteau. Donc la manière d’être disponible pour se perdre, nous rappelle que la connaissance est incroyable mais ça ne permet pas l’accès à un autre monde.
Les systèmes dialogiques exigent de nous de nous ouvrir à la possibilité de ne pas savoir.
Petit croquis pour nous rappeler que ce qu’on fait ici questionne le travail qui arrive par magie : en haut qqn dit à l’autre :
- comment tu fais pour dessiner si bien ?
- de la pratique !
- ça doit être un don de naissance ? De Dieu ?
- de la pratique !
- je ne comprendrai jamais comment certains ont autant de talent !
Photo de Marshall Rosenberg : « connexion avant éducation »C’est la même chose avec tout.
// Histoire des 3 amis qui s’interrogeaient sur le recyclage et les 3 questions (p 2) quand un problème est identifié par une communauté, tentation d’aller chercher ailleurs
1 : quelle sagesse on a déjà ? qu’est-ce qu’on connaît déjà bien ? qu’est-ce qu’on fait déjà bien ?
Ça devient un acte révolutionnaire d’arrêter de poser des étiquettes mais plutôt d’apprendre avec humilité de ce qui est en train de se passer.
Cf cercles restauratifs : rapidement un processus concentré sur la manière qu’a une communauté de résoudre sa propre violence. C’est comme chercher une solution sur une étagère de supermarché offrant des réponses prédéterminées avec un mode d’emploi et une origine authentique et exotique. Ça peut demander beaucoup d’énergie si ce n’est pas relié à la sagesse locale, remonté des personnes elles-mêmes… Quand on pose cette question, on arrêt de suggérer, on écoute et on apprend et les choses changent profondément.
2 : qu’est-ce qui, dans tout ça, ne fonctionne pas si bien ?
Là, facile car nous sommes plus échauffés à savoir comment se plaindre
3 : si ça se passait comme on aimerait, à quoi ça ressemblerait ? Quels seraient les principes actifs ? Les procédures? Si vous parlez en CNV: qu’est-ce qui serait au service de nos besoins ? Si votre école, ou la manière de gérer un conflit au boulot… si c’était la première chose que vous montreriez à des amis en visite, comment vous lui en parleriez ?
Exercice : sur quel système ?
J’aimerais que vous identifiez une place particulière dans votre vie où vous aimeriez créer un système social différent ? Famille ? Amis ? Voisinage ? Travail ? Engagement dans une structure politique ? Avec quel besoin vous partez ou que des personnes que vous aimez ont… commencez à imaginer cet endroit, avec les autres pendant le repas, entre vous et votre cahier ou dans votre tête. Soyez capable d’identifier ces endroits pour qu’on les construise au moins dans votre esprit, avant que je vous partage mes endroits.
Voici une longue pause pour manger et pour vous connaître, accomplir votre mission secrète et s’entraîner à être plus honnête en vérifiant comment vont les autres. Certains peuvent se souvenir que ça peut être serré audedans, donc y aller progressivement, vérifiez comment ça se passe avec les enfants, participez au processus de coresponsabilité financière…
repas : 1h10 jusqu’à 20h25
Je ne recommande à personne d’arriver avec sa solution. Hier pendant la conférence, j’ai partagé mes expériences mais aujourd’hui c’est différent. La présentation à Paris était très intéressante, mais Bordeaux c’est différent etc.
Ce qui est dangereux, c’est de partir de l’idée que vous savez ce qui est juste et que vous allez l’enseigner. Le plus efficace est de poser ces questions et du principe que vous êtes d’accord de construire le système à partir des réponses à la 3ème question
Quand on commence, on rencontre à peu près 5 parties qui demandent de l’attention et en regardant, les personnes vont poser des questions, je pourrai partager mon expérience et les propositions initiales changeront. Pas parce que je dis quoi faire mais parce qu’ils prennent de+ en + confiance dans leur expression et dans le sens de ce qu’ils mettent en place. Ils deviennent plus précis sur l’articulation de leur rêve et fur et à mesure leur système se construit sur la base du dialogue.
J’étais en réunion il y a quelques mois avec un étudiant avec qui j’avais passé du temps, qui m’avait écouté, observé et intellectuellement il était plus ou moins d’accord. Au moment de construire un système de justice, au sein du service de biologie de son université, il est arrivé très étonné : avant : « Je t’écoute et je me dis que je comprends ce que tu dis mais, malgré ça, au fond de moi, il faudra leur dire comment faire les choses bien, même un tout petit peu. »
après : « J’ai pris un grand risque quand j’ai posé la question et le résultat était moins punitif que ce que j’imaginais. J’ai construit mais sans y croire vraiment. On a commencé à faire attention aux 5 zones, ils ont questionné eux-mêmes leur vision et dit qu’en tant qu’étudiants radicaux, ils aiment passer des heures ensemble pour parler et à la fin, sans que j’ai rien eu à dire, le système qu’on a construit était juste celui dont on avait parlé. Bien qu’il y ait des choses qui me gênent encore, je m’habitue au fait que, dans des conditions favorables, ils redécouvrent les mêmes choses tout le temps, ils mettent à jour les détails, ils les ajustent au lieu, moment et personnes mais basiquement le système finit par être très similaire. »
C’est une clé pour savoir où porter notre attention : 5 zones :
- l’action : la décision d’agir et comment?
Entente de la communauté sur la décision d’agir, la portée et la nature de système social à développer. Exemples : photo d’une famille qui vit dans un immeuble sur habité. Elle se réunit à propos d’un problème et a donc la volonté d’agir.
Ou Groupe de profs sur un système de justice, ou 2 élèves de notre école qui discutent du rapport financier pour le rendre pérenne sans soutien de l’état ni un montant fixe pour les familles : ils découvrent le vrai sens du mot « public », non ce qui appartient à l’état ?
Remarque qu’en France, il n’y a aucune école publique, juste gouvernementale, car elle devrait appartenir à la communauté elle-même. Pendant 3 semaines, les élèves ont travaillé : qu’est-ce que vous savez ce qui va bien…
Je me focalise sur ce que les gens disent avec ces 3 questions à l’esprit pour voir s’ils y répondent même si je ne les pose pas. Les parents d’un enfant ne payaient pas parce qu’ils ne savaient pas combien, un autre n’avait rien à leur demander car ils étaient pauvres, donc ils ne pouvaient facturer des sommes pour les parents. J’ai résisté à jouer les sauveurs et je me suis appuyé sur mon système de soutien, je me suis assis en silence avec eux et j’ai savouré l’inconfort.
Un enfant a dit qu’il fallait trouver un moyen pour n’exclure personne. Une longue pause, chacun est allé à ses occupations.
Après quelques minutes, l’un s’est souvenu d’une collecte pour une fête. Pause pendant 3 semaines, et à chaque fois qqn venait et répondait à la 1ère, la 2ème puis la 3ème question progressivement, très précautionneusement car c’est très vulnérable de partager votre rêve, surtout pour les adolescents qui parlent à des adultes.
La plupart du temps, quand ils partagent un rêve, l’adulte ne l’écoute pas ou le casse. Ils ont trouvé un processus très similaire à ce qu’on fait ici, même si aucun d’eux n’avait participé à un projet avec moi…quand l’un a partagé un événement avec moi, il a pensé que je leur avais piqué l’idée :)
ex d’un lycée occupé par les étudiants au Brésil : à la fin de chaque jour, ils se réunissaient pour discuter de la journée et de leurs projets du lendemain, en système dialogique : ils vérifiaient constamment leurs accords, le sens, ils changeaient l’emploi du temps entre les cours pour passer leurs examens et les assemblées, et ils ont ajouté des cours sur la dictature contemporaine, l’histoire de l’art, la méditation, la CNV ..., avec un jour libre. A l’école beta aussi on ne travaille pas le vendredi, sans s’être concertés.
- l’espace : lieu et l’utilisation du temps
Quand vous construisez un bâtiment pour une école, voulez-vous qu’il soit construit pour un autre type d’école ? Que la communauté reconnaisse que c’est une école ou montrer qu’on peut changer radicalement l’école ?…
Les communautés ont été très sensibles pour choisir des bâtiments qui avaient une mémoire, par ex où qqch de terrible s’était passé en réponse à une réponse punitive...ou qqch d’extraordinaire…
A Brasília, les personnes ont choisi un bâtiment où les gens ont eu une rare qualité de silence et j’ai mentionné comment ça avait changé notre travail. Et j’ai appris que ce bâtiment était utilisé par la dictature qui choisissait là qui allait être tué ou torturé.
Un endroit aussi où on peut organiser les chaises, décorer les murs, toutes ces choses présentent comment le pouvoir sera partagé dans ce lieu et ça influence la manière dont on va passer du temps.
Entre soi, on dit qu’on va prendre un café, c’est un code. Planifier le temps pour oublier le temps et juste être ensemble. Ce sujet est tellement important qu’il faut planifier un moment pour en parler...ou « garder du temps pour rester avec soi-même ». Tout cela est une condition pour illustrer le changement de rapport au pouvoir.
- l’hôte : pasteur, animateur…
tous les rituels circulaires ont un rôle d’hôte qui reçoit : prêtre pour un mariage, médiateur politique, DJ en boite…
Chacun a déjà une connaissance liée aux cercles, mais peut-être pas très conscient, comme les habitudes de célébrations en famille, ou une chaise vide pour un absent, parler d’un absent pour le rendre présent « As-tu vu Dieudonné depuis ?... »
Le design de système dialogique a besoin de certains de ces aspects. Il y a toujours une personne qui est au service du système, et elle a besoin de soutien et d’inspiration. On doit être précautionneux car son rôle ne peut être réduit à un boulot, ce qui déséquilibrerait les pouvoirs car on laisserait tomber notre part de responsabilité dans le cercle en attendant que l’hôte prenne les décisions pour nous.
- la diffusion : faire passer le mot comment notre pratique est accessible ? Pour notre système monétaire, chacun doit savoir où trouver le panier, ou pour notre système pour les enfants, pour la justice, l’éducation…
- l’accès au processus
Le conflit est devenu douloureux : où est le bouton ou le téléphone, la place où laisser un message etc, pour avertir la communauté qu’il s’est passé qqch qui concerne la décision de régler de façon ? Quand tu veux appeler les pompiers, tu sais que le 18 est gratuit, de tout téléphone. On a rêvé ça autrefois : une façon, pour n’importe qui, d’avoir du soutien quand on a une urgence.
Exercice de communauté : par petits groupes 2-3 : amenez la communauté où vous voudriez apporter une système dialogique : quelles sont les pratiques que vous voudriez voir apparaître, les changements spécifiques ? Pour quels résultats ? C’est juste une esquisse, toutes les suggestions sont bonnes, tout est intéressant à creuser et en même temps essayez d’être aussi spécifique que possible : quelles procédures, comment vous aimeriez voir que ça fonctionne concrètement possible ?
Mettez ce qui vous reste d’énergie dans ce temps excitant et partagez votre meilleure créativité avec 2-3 personnes 15’
en groupe : questions aux enfants de 6 et 7ans sur leur école idéale : se sentir libres, et en sécurité, pouvoir bouger, apprendre quand ils veulent, avoir le temps de jouer et apprendre aux autres. Que tout émane des participants (de 3 à 333 ans), avec la confiance dans le mimétisme.
Quelques partages ?
- on a travaillé sur une école associative en Périgord et on a fait le choix par défaut de faire cette école payante et on a construit le paiement par mois des enfants en demandant aux enseignantes avec combien elles pouvaient vivre a minima la première année et on a construit tout l’aspect financier de l’école à partir de ce chiffre. Donc aujourd’hui : comment tendre vers la participation libre pour les familles. Aujourd’hui les profs sont payées 900 euros net par mois, les parents payent 200 / mois sur 12 mois. On veut payer plus des profs sans augmenter les paiements. On est partis de ce qui nous semble correct à nous, direction de l’école. Donc intéressant de voir comment ces questions font émerger des réponses différentes. - projet de monnaie libre, comme un logiciel libre, basée sur un revenu universel.
Bilan financier côté coûts : Avant de se quitter, on a dépensé 1659,20 euros, pour un événement de 170 personnes, c’est très peu, surtout avec un vol international compris. Aucune rémunération des organisateurs.
Avant de finir, j’aimerais avoir un témoignage de qqn qui a passé du temps avec les enfants ? - vrai bonheur, les enfants sont très autonomes, merveilleux, envie d’ouvrir une école avec eux-mêmes- j’ai proposé mes services aux enfants, ils ont répondu « peut-être plus tard mais pas maintenant... »
Si on pouvait commencer un peu plus à l’heure, même arrivez 15 ou 20 minutes avant et quand vous amenez à manger, peut-être écrire les ingrédients. Concentrez-vous sur votre repos, buvez beaucoup d’eau et revenez avec l’énergie pour qu’on puisse faire tout ce qu’on a planifié pour demain ! Merci de votre intérêt et de votre concentration
Atelier 2ème jour
? / partage des enregistrements : Dominic : OK pour partager ce qui est général, sans les histoires et les témoignages des participants pour 2 raisons : je veux pouvoir parler ouvertement et librement sur des situations complexes où je vis, surtout depuis 3 semaines (élection du nouveau président) donc j’ai envie de continuer mes relations avec différentes personnes, notamment le gouvernement et il y a un philtre très fort sur ce qu’on peut ou pas faire. Je veux aussi mesurer le risque auprès de ma famille : j’ai des accords, même avec des accords signés, par rapport à ce que je dis ou pas. C’est une question de sécurité. J’aimerais raconter des histoires d’autres personnes sans risquer leur sécurité.
La 2ème raison : avec la CNV, la justice restaurative..., vous pouvez dans votre enthousiasme pour ce travail, raconter à tout le monde l’histoire en oubliant qu’il faut qu’on créé nos propres histoires d’abord. Si ces histoires sont assez fortes, celles de Marshall par ex, elles peuvent durer plusieurs générations et être déconnectées de la racine et devenir une liste d’instructions de ce qu’il faut ou pas faire. Je ne veux pas que vous fassiez ce que je dis aujourd’hui, je raconte et je partage mes questions et, si ça a du sens pour vous, j’espère que vous allez faire pour vous et vous pourrez raconter vos histoires. Mais ce serait dommage de raconter ce que vous avez appris de moi. C’est inévitable, donc nous avons besoin de beaucoup de soutien pour gérer l’enthousiasme que nous créons.
Exercice sur l’expression authentique dans un système de soutien :
Notre échange parle de l’art de dire les choses avec lesquelles on est mal à l’aise. Répondre aux 3 questions, surtout la 3ème, demande de retrouver la sécurité d’articuler des choses qui ne devraient pas être dites, ça nous désoriente / désir de rester vrai, de prendre soin des autres et de nos relations. Le mot « vérité » partage la racine avec le mot « virer », ça aide à comprendre une des conséquence de la vérité : toutes les choses qui bougent créent un champ de force, des petites vagues qui déstabilise. C’est le bordel.
Cette instabilité n’est pas prévisible, donc on fait attention pour prendre soin, donc c’est difficile. Notre relation avec la vérité est devenue ambiguë : énorme principe d’honnêteté et en même temps on ne sait pas trop.
Mon corps a été créé pour vivre dans une forêt vraiment sauvage, d’où nous sommes sortis depuis peu relativement, et déjà on projette toutes nos peurs dans cette forêt sauvage malgré notre envie.
Mon corps a été créé pour la vérité mais j’en ai peur. Je suis en dehors depuis qq années et déjà je la traite comme qqch de dangereux : faire des choses incroyables ou exploser de façon imprévisible.
Ça, c’est l’énergie que nous avons besoin de contacter pour recréer les fondations d’un pacte social, d’une communauté, une base assez forte pour soutenir des systèmes sociaux qui peuvent nous servir.
On peut commencer notre travail aujourd’hui en reprenant notre capacité qui n’est pas limitée à l’individu, la mienne, la tienne. Beaucoup de personnes nous avertissent contre le fait de confondre croyances et vérité. Si Platon arrivait il dirait « Je vous avais prévenu »
Ne pas gaspiller notre temps avec ta et ma vérité, sans parler des vérités qui deviennent opprimantes comme des « il faut aimer comme ça, penser comme ça... » Si on peut récupérer la sensation de la vérité, qui est nécessairement supra personnelle, valable pour tous.
Exercice :
Comment exprimer certaines de ces choses et ce qu’on peut en faire ?
Ce n’est pas recommandé de faire ça sans un système de soutien fort. J’aimerais créer un exercice par 3 pour avoir le début d’un système de soutien qui soit imbriqué dans ce qu’on fait. 2 personnes pour jouer avec moi ?
Pour A : Pense à une relation qui n’est pas dans la salle et que tu penses à qqch que tu ne peux pas dire à cette personne, pas une opinion mais nommer un fait dans votre relation. Le fait est toujours limité par ta perception, ce n’est jamais vraiment que la chose en elle-même, c’est la chose filtrée par ton point de vue. Peux-tu nommer la chose en elle-même et pas l’impact sur toi?
Quand tu imagines de dire ça à cette personne, as-tu une idée de sa réponse, sa réaction ?
Peux-tu dire à ton collègue la réaction sans donner aucune précision sur la personne ni la situation ?
Peux-tu lui donner suffisamment d’infos pour qu’il puisse te dire cette phrase avec l’expression anticipée ?
B : répète la phrase jusqu’à ce que l’expression soit proche de ce que A anticipe.
A : une des choses particulière avec la vérité implicite est que c’est pas vraiment un secret, l’accord n’est pas de ne pas savoir mais de ne pas le dire. Donc la règle que tu es en train d’enfreindre, c’est d’admettre.
Trouvez-moi un prof ou un élève qui pourrait dire que l’éducation n’est pas douloureuse pour tous ? Tout le monde le sait déjà. Idem pour un directeur de prison qui dirait sincèrement « bien sûr, la punition transforme le monde et l’individu ! » On le sait que ce n’est pas vrai, mais on ne le dit pas car, si on le faisait, il faudrait y remédier et c’est pas facile de vivre avec ça.
Donc si on va faire qqch à propos de ça, il faut être capable d’avoir vraiment l’élan d’être la source d’une confusion énorme dans la vie des gens en leur disant ce que, jusqu’à présent, on avait convenu de ne pas dire. Dans la façon de répondre à leurs réactions, on va vérifier notre congruence, et c’est cette congruence qui va nous permettre de transformer et d’inspirer la collaboration.
J’ai été expulsé du lycée, je n’ai aucun diplôme… pourquoi le ministre de la justice du Brésil dit : « SVP, venez et changez notre manière de rendre la justice » ?
J’ai inventé un lycée parce que ma fille n’avait pas envie de faire ses devoirs et 3 ans plus tard, une municipalité importante du Brésil me demande d’utiliser un bâtiment vide pour créer une école en partenariat.
Ça, ce sont des risques énormes. Une seule explication : parce que je suis un tout petit peu moins non congruent que les personnes autour de lui. Je ne sais pas comment être congruent dans notre société, quand 65 % des cotons qu’on porte ont été produits par des enfants esclaves… ? Mais on peut l’être un tout petit peu plus, quand on prend soin de la vie.
Je peux être un tout petit peu plus congruent dans ma manière de répondre aux peurs, car je suis prêt à nommer les choses implicites.
La seule raison pour laquelle je te propose de dire des choses interdites, c’est parce qu’hier tu as démontré que tu étais capable de résumer ce que l’autre avait dit, indépendamment de son expression ?
On pratique un muscle que tout le monde possède mais qui est souvent atrophié car il n’a jamais été utilisé. Un gros morceau d’une bonne vérité interdite, une réaction un peu flippante et je te demande de résumer l’essentiel.
Chacun résume jusqu’à que B ait un petit espace pour comprendre ton expérience, alors tu pourras amener une autre partie de la vérité.
B improvise et A résume l’essentiel de ce qu’il entend.
Attention, ce n’est pas facile, ce serait plus facile si A s’était préparée avec un système de soutien avant d’affronter le dragon.
Merveilleusement, A a apporté son ange empathique (C), qqn volontaire qui se place juste à côté de A. Si A se sent un peu gelé et que son attention revient sur ce qu’elle se raconte plutôt que sur B, le défi sera de rester concentré sur la vie.
Car c’est l’avenir du système social qui sera construit sur cette relation : le système ne pourra pas supporter que tu te sacrifies pour les autres, ni que tu enseignes comment les autres devraient te traiter pour que tes besoins soient satisfaits. Il ne tolère que le nous.
Il sera alors nécessaire de tourner ton attention sur toi-même, mais pas seule, tu peux regarder ton ange et, de façon incroyable, le temps sera suspendu pour B qui n’entendra rien de ce que tu diras à ton ange (C), donc tu peux vider ce que tu as sur le cœur : « Ce salop n’en a rien à foutre de moi... »
L’ange ne va entendre que l’essentiel de ce que tu diras et il te renverra cet essentiel, s’il décide de parler. C va faire pour A ce que A va faire pour B.
La plupart des A feront peut-être un peu de résumé de B, un peu de soutien auprès de C etc. ou passer le plus de temps avec C parce que c’est trop dur de dire à B…
Aujourd’hui, c’est un exercice pour voir ce que c’est que d’avoir un petit ange tout le temps, un téléphone pour appeler une personne avec qui j’ai un accord. Si elle me dit « c’est super violent ! » ou « ne te pends pas toute suite, attends que j’arrive ! », ça ne m’aide pas, contrairement à la simple présence empathique, quand elle se relie à l’essentiel derrière ce que je dis : elle n’écoute pas mes mots, elle m’écoute moi.
Exemple joué
Écouter l’autre permet de lui faire une démonstration de ce que c’est que d’écouter une partie de la vérité. Dans la vraie vie, on crée une chaîne d’anges : quand l’ange est démuni, il a lui aussi un ange etc.
On essaye de démontrer le monde qu’on veut construire : il y a un fil qui relie la graine et l’arbre. Ce tout petit moment silencieux de congruence inspire la personne de collaborer avec nous, et c’est comme ça que les choses changent.
A la fin, A va libérer B et C de leurs rôles.
La personne qui a un tout petit peu plus de congruence peut former un champ de vérité pour authentiquement créer la possibilité pour répondre à la question 3 sur le rêve. Dans ce cas, c’est A.
Peu importe qui commence mais souvenez-vous de ne pas attendre de l’autre qu’il réponde de manière significative.
C’est délicat mais c’est possible : exemple d’une rencontre avec un directeur d’école, je frappe à la porte : « merci d’accepter de me rencontrer, j’ai remarqué qu’après les gardiens de prison, les profs ont le plus besoin de soutien. Pour moi, l’éducation c’est très important et j’aimerais vous proposer un système pour soutenir... »
En amont, important d’avoir mon propre système de soutien pour m’accompagner quand je mets le doigt dans la plaie de l’autre !
Si je fais tout ça, ce n’est pas parce que j’ai un truc secret génial, c’est grâce à mon système de soutien avant, pendant et après l’entrevue.
Lors d’une rencontre face à une juge qui me demandait des formations (moyen qui change peu le monde mais qui dépense l’argent public), j’ai choisi de commencer par une vérité implicite sur la prison et elle a commencé à pleurer, inhabituel face à qqn d’ordinaire ! Et ensuite on a monté un projet qui a duré 4 ans pour construire un espace de médiation communautaire dans toutes les stations de police près des favelas. Impossible sans mon système de soutien, avec 3-4 personnes qui savaient d’avance que j’avais besoin de leur disponibilité : « j’ai 20 secondes, je suis au tribunal, qqch peut se passer, j’ai peur de tout rater et de tout faire foirer !!! » Je reçois juste cette attention bienveillante, aucune compétence ni talent, l’intention d’être avec l’autre même si tu ne sais pas ce qui se passe, et juste occasionnellement vérifier ce que tu as entendu et si c’est bien ça : de petites phrases qui résument ce que l’autre a dit, sans raison ni tort.
Par groupe de 3 : A dit la vérité, B improvise une réponse même s’il ne sait rien de la situation, C est l’ange, puis qq minutes pour parler de ce qui s’est passé, puis changement. Ceci ne marche que si vous êtes dans la dynamique sans la commenter. Souvenez-vous que c’est une manière de dire qu’on n’a pas assez de soutien pour ce défi = « je ne peux pas, je ne suis pas capable de, je ne sais pas comment faire » . Ce n’est pas un manque de la personne, ce n’est pas une
faute, ce n’est pas parce que vous n’avez pas assez d’expérience ou de compétence. C’est juste dire que vous n’avez pas assez de soutien, un ange qui est là pour vous comprendre.
3x5 minutes
Petit espace de feed-back sur n’importe quel aspect, surtout sur ce que ça vous fait de nommer ce qui n’est pas à nommer, d’’avoir un ange, un petit exemple de ce que peut être un système concret à l’avenir. - je fais de la CNV depuis 2 ans et j’ai du mal à demander de l’empathie, ça m’encourage - l’ange aide à ralentir, ou avoir de l’espace, pour réaliser ce que l’autre a dit et ce que ça me fait même si c’est dérangeant car parfois je reproche qqch que je suis en train de faire Dominic : ça permet d’intervenir dans ce que vous êtes en train de coconstruire ensemble donc ça te donne une opportunité de proposer une alternative, en faisant ça pour ta propre intégrité et non pour changer l’autre. J’ai pas changé à l’intérieur de moi, ça me demande juste la volonté de nommer et de dire ce qui se passe en moi et de demander du soutien.
S’il y avait un état de conscience préalable avant que je commence à travailler, je n’aurais jamais rien fait. Paolo Fréré disait : « une chose nécessaire pour que rien ne change : c’est de penser que je ne suis pas complet et que c’est un problème » Je n’ai pas besoin d’être non violent, j’ai juste à être authentique avec le fait que je sui violent et aller chercher du soutien. Tout le monde le sait, et moi aussi.
- Quand je me suis exprimé, je voulais une relation authentique et j’en ai oublié que j’avais l’ange et l’ange s’est signalé et je me suis demandé ce qu’il voulait, mon cerveau avait une amnésie. J’ai un fort réseau de soutien mais oser y faire appel n’est pas évident.
Dominic : au-delà des mots, il y a une distinction entre réseau et système : la plupart on a un réseau de soutien mais pas de système : un réseau qui est rendu vivant par des accords, mis en action par ces accords. Il y a 2 sortes d’accords : 1 quand vous allez échanger régulièrement une certaine qualité de présence pour accueillir ce qui est présent, si dialogique, c’est en changement tout le temps. Une ou 2 fois par an, je mesure combien de fois j’ai besoin de soutien par jour : environ 5-7fois. Donc je me déconnecte de moi-même au moins 5-7 fois par jour, même si je continue à marcher, je ne me souviens plus là où je vais, je perds le contact avec la vie.
Autre possibilité = système de soutien d’urgence, un petit groupe de personnes que vous pouvez appeler à n’importe quel moment, et si ça peut être dans d’autres pays, vous pouvez les appeler n’importe quand. Pour moi, le code est : le numéro 3 = appelle moi dès que tu peux, 2 = arrête ce que tu fais et appelle-moi tout de suite, 1 = je suis en haut du bâtiment et je vais sauter ! Plusieurs personnes reçoivent mon message en même temps et ça augmente mes chances d’être entendu.
Vous pouvez vous en inspirer mais plutôt suivre votre créativité et si vous copiez qqn sans le célébrer, vous ne créez pas de communauté, vous ne soutenez pas la créativité des autres. J’aime quand vous prenez le truc, le changez comme le vôtre et dites à tout le monde où vous avez trouvé cette idée, célébrez et étendez la célébration de ce que vous avez reçu et prenez la responsabilité de votre action et des résultats.
- difficulté avec l’amorce : le fait est une bombe à la tête de l’autre, prendre la responsabilité de ça et savoir comment faire était un peu dur, donc j’ai parlé de moi. C’est tout le temps tu, alors que tout le monde le sait.
Dominic : c’est pour ça qu’on a besoin de 2 jours, de s’entraîner, de relations de soutien, une culture en miniature qui nous soutient pour être responsable de parler. On a aussi la responsabilité de ne pas parler, avec ses conséquences et on évalue à chaque moment pour faire le choix.
Nous sommes en déséquilibre : on se soutient beaucoup pour ne pas réagir, mélangé avec ne pas agir, donc quand il faut répondre, ça libère beaucoup d’énergie, ça fait du bien.
Quand tout à coup on parle, c’est merveilleux mais c’est un peu chaotique ce qu’on propose concrètement. Je propose une pratique journalière de dire des choses que notre société nous encourage à taire et gérer la réponse qui revient, exemple :
- Je ne t’aime plus
- moi non plus !
- tu vois ! j’avais raison ! ...
ça n’a aucun sens de dire une vérité sans gérer la réaction.
Transition avant la pause pour passer au 1er système social que nous avons construit au Brésil et que je veux vous montrer, avec des diapos et je vais vous offrir une plongée un peu plus profonde dans ce système et répondre à vos questions sur comment ça s’est passé, en se concentrant sur les 5 conditions préalables.
Pause pour prendre un café, rencontrer de nouvelles personnes, aller voir comment les enfants ou participer financièrement, rdv dans 20 minutes
Transition vers l’empathie :
étymologie : le mot empathie ne vient pas du domaine d la psychologie mais de l’art.
Un directeur artistique, Louis Jouvé, disait : « le public partage l’expérience de l’acteur . Mon état d’être est contagieux si vous avez envie de me donner votre attention. »
En Allemagne au milieu du XIXème siècle, des personnes cherchent comment fonctionne le processus esthétique : comment c’est possible d’être touché et changé face à une peinture ?
Une personne qui enquêtait là-dessus a écouté un concert et a remarqué que son corps changeait de forme, ce qui produisait une expérience de vie en relation avec l’expérience du compositeur au moment d’écrire sa musique. Il a amené le mot qu’on a traduit comme empathie. Puis, les psychologues l’ont utilisé dans un contexte clinique. Depuis, d’autres domaines ont utilisé ce mot et à chaque transition, il s’est éloigné du sens originel.
Je suggère comme définition d’empathie = focalisation de l’attention qui enlève les blocages vers l’action, qui enlève les blocages qui nous empêchent d’avoir accès … C’est différent de l’usage usuel, je l’utilise dans ce contexte spécifique pour mettre en marche un changement dans la sphère collective.
L’empathie ici n’est pas ce que fait l’ange, c’est le mouvement de la personne A qui se ré-engage vers B. L’ange a un impact pour réveiller mon corps, plus attentif à moi, l’énergie recommence à couler, mon imagination à marcher avec la même urgence créative qu’ont les enfants qui créent constamment de nouvelles possibilités, je peux alors me ré-engager.
Il n’y a que de l’auto-empathie. Ce qui bloque l’action, c’est que je suis déconnecté de moi-même. Je n’ai pas besoin de mon ange pour agir, mais de moi-même, alors mon ange sert à focaliser mon intention sur ce que nous partageons et ça me révèle.
Ce n’est pas la question de « comment ça marche ? », même si c’est fascinant, mais le résultat est qu’à chaque conversation où il y a une vérité, avec la qualité d’attention empathique, une nouvelle action se produit.
Espace Bêta est un système d’éducation communautaire et dialogique. Il soutient la création d’écoles publiques, pas de ville ou d’état, qui facilitent l’interaction entre les prototypes de l’apprenant et la sagesse artisanale de l’enseignant.
Nous avons commencé à Rio, il y a 3-5 ans, avec le lycée. Il y a maintenant 3 écoles similaires en développement.
L’idée même d’une chose m’empêche de voir la chose et la mémoire qui me dit ce que je vois, interfère dans mon observation. On essaye de créer un espace avec de la connaissance sans domination, avec curiosité, questionnements, ce qui menace l’idée qu’on a des enseignants comme dépositaires de toute la connaissance et qui généreusement, avec force, donnent cette connaissance aux étudiants. Paolo Fréré parlait de « banque de l’éducation » : tu fais un dépôt de connaissance dans l’étudiant qui est supposé être vide.
Jusqu’ici nous mettons en place plusieurs éléments d’un système éducatif, d’abord un lycée puis d’autres âges. On focalise pour construire des écoles publiques, non étatiques ni privées, créées pour faciliter la rencontre entre le prototype de l’étudiant, ce qu’il est en train de tester « espace bêta », connaissance artisanale, et ceux qui ont déjà l’expérience de cette connaissance. Dire aux adultes : « tu as un savoir-faire et non un boulot » : et donc leur faire prendre conscience de leurs capacités, car souvent ils disent « je ne savais pas que ce que je faisais pouvait être utile aux autres »
Quelle école détestent les étudiants ?
Exemple d’une école, d’un système de justice qu’on a construits.
Les étudiants préfèrent apprendre d’autres étudiants, qui viennent de l’apprendre eux-mêmes :le savoir est encore frais, il n’a pas encore tué la curiosité. Je veux que les enseignants sachent plus que moi, mais aussi qu’ils partagent le voyage, l’exploration avec moi.
Quand un étudiant arrive à un moment de crise et qu’il lui manque qqch pour faire le prochain pas, une de nos pratiques est la création d’une liste disponible à tous, des adultes qui sont disponibles pour partager leur savoir aux étudiants : nom, contact, qu’est-ce que tu fais de bien , qu’est-ce que tu aimes partager ? Et non ton diplôme ni pour quoi on te paye ?
Souvent on rencontre les personnes et elles ont souvent un diplôme et un métier complètement différent. Parfois ils ne peuvent partager leur passion qu’avec les étudiants de Bêta. Du coup les profs se plaignent de ne pas être assez appelés.:)
J’ai aussi des messages d’étudiants pendant les vacances qui se plaignent que l’école leur manque pour revenir plus tôt.
J’utilise le mot prototype pour éviter le mot projet qui signifie implicitement que c’est bon de le compléter, d’aller jusqu’au bout. Alors qu’un prototype, les personnes comprennent que ce qui compte ce n’est pas ce que tu fais mais l’apprentissage que tu reçois en le faisant. Donc aucun jugement si les étudiants abandonnent un prototype et même on le célèbre car ils arrêtent quand ça n’a plus de sens.
100% d’enthousiasme et 1 % d’engagement chez les adolescent !
En entreprise on leur dira : « on voudrait que vous oubliiez tout ce que vous avez fait depuis 12 ans et utilisez votre imagination et créez qqch de nouveau ! ». On veut donc qu’ils restent naturellement avec la chose qui est la plus engageante et intéressante, quitte à changer d’un sujet à l’autre car ils cherchent ce qui a le plus de sens pour eux.
?/ croyance de papillonner, d’être partout et nulle part.
Dominic : si vous ouvrez le carton dans lequel j’étais enfermé, je serai aussi un papillon. Il faudra du temps pour passer la peur d’une ruse (« tu peux sortir un peu puis je referme la porte » ), pour croire, pour tester parfois de façon qui me demande beaucoup de soutien par ailleurs. C’est donc un temps à passer, le temps qu’ils reprennent confiance.
Quand ils sont perdus, c’est intéressant et ce n’est pas surprenant car moi aussi, je suis perdu dans ce monde aujourd’hui.
70-75 % du temps passé avec l’étudiant, c’est de l’écoute empathique car ils sont confus / eux-mêmes, entre eux, avec nous, / avenir…
J’avais peur de dire publiquement qu’on passait autant de temps pour ça et ça a été une des sources d’attention avec les personnes qui dirigent l’école et certaines sont partis / cette réalité.
Puis j’ai appris qu’on avait évalué à 15-20 % le temps que les étudiants apprennent à l’université !
D’un coup, qqch chez l’étudiant se réveille pour créer qqch, un changement en lui, dans ses relations et dans le collectif. Notre tâche est d’observer ça, comme quand ils sont petits « maman ! Regarde ! Je peux faire ça ! Ça ne marche pas si tu ne regardes pas ! c’est urgent ! Que tu regardes complètement ce que je fais ! »
Certains étudiants d’autres écoles viennent faire leurs devoirs dans notre école.
Beaucoup d’activités sont manuelles // récentes études qui montrent que ça guérit notre anxiété, ça développe nos compétences. Nos étudiants arrêtent de se droguer, de prendre des médicaments.
Ils ont construit un jardin sur un toit et plusieurs mois après, les habitants ont fait des travaux en oubliant de préciser l’existence du jardin ...qui a été complètement détruit ! Les étudiants étaient beaucoup moins bouleversés que je l’avais imaginé. Pour eux, c’était une perte mais ils continuent à avoir tout l’espace et le temps du monde pour refaire autrement.
Je suis arrivé très dramatique « qqch d’horrible s’est passé ! Ils ont détruit le jardin ! » Et les jeunes ont répondu « ah ! qu’est-ce qu’on va faire aujourd’hui ? » avec beaucoup de résilience, signe de confiance de leur liberté de refaire les choses, sans appeler l’animateur. Ils avaient reçu ce qu’ils attendaient de lui, ils l’avaient en eux, sans peur de le perdre.
Se rappeler des conditions privilégiées qu’on a pour apprendre : l’espace est propre, avec la clim…grâce à l’esclavage... mais c’est possible d’utiliser des espaces où il n’y a pas ça et trouver les moyens de créer ces conditions nous-mêmes.
Un jour nous sommes allés dans un lieu avec un vieux frigo cassé et 2 étudiantes ont passé 2 semaines à apprendre comment le réparer, avec le sens de leurs propres capacités : « C’est peut-être différent de l’image que vous avez d’une fille, mais changez-la car moi j’ai la preuve que je peux le faire »
Exemple de la jeune qui s’est réconciliée avec les maths pour faire sa jupe et l’a ensuite enseigné aux autres : elle détestait qu’on lui mette la pression pour apprendre qqch qui n’avait pas de sens pratique pour elle. Après 2 ans, je l’ai revue et j’ai demandé si elle était diplomate comme dans son rêve : elle ne se souvenait pas de ce projet. Aujourd’hui elle est une incroyable cuisinière qui crée des choses végan fantastiques.
On rit beaucoup, on traîne de manière empathique ensemble. Ce n’est pas linéaire, j’ai besoin de beaucoup de soutien pour gérer l’idée qu’il ne se passe rien, « il faut qu’il se passe qqch et il faut qu’ils fassent qqch pour justifier mon après-midi et ce que je vais dire aux parents ! »
La relation entre élèves et enseignants peut exister sans domination. On a visité une école occupée par des étudiants et quelle surprise de voir à quel point ce qu’ils créaient ressemblait à notre réalité quotidienne, sans avoir à se battre contre la police, les enseignants ou les parents.
Une élève aide à programmer le travail pour le prochain trimestre avant de passer 1an dans une école étrangère. J’avais envie de découvrir si on créait des petits monstres incapables d’être en relation avec d’autres personnes avec les règles normales de la société.
Elle nous envoyait des messages pour raconter ses premières journées : elle était dans une classe, elle voulait aller aux WC et l’enseignant était choqué qu’elle se lève sans demander la permission, elle a partagé que c’était une surprise de voir que c’était pas normal, elle a essayé de comprendre la position de l’enseignant. C’était un grand soulagement pour moi d’entendre que ça n’avait pas été une expérience folle car elle était capable de maintenir sa dignité même dans un environnement pas si simple.
? : avez-vous vraiment supprimé toutes les règles imposées par les adultes ?
Dominic : l’idée des adultes était de se rencontrer de 13 à 17h du lundi au jeudi. Parfois les étudiants ont changé ces heures, puis ils y sont revenus : ils ont initié un dialogue entre eux : « Arriver à 13h n’est pas confortable pour moi car je n’ai pas assez de temps pour digérer mon repas », c’est une observation d’un fait.
? : partage : après de longues études, je ne savais pas quoi faire et je galère toujours à savoir ce que je veux faire parce que j’ai toujours appris à faire ce qu’on me disait de faire. J’en voulais à mes parents de m’avoir laissée libre, de ne pas aller à l’école, de ne pas m’avoir appris la persévérance. Aujourd’hui je leur suis reconnaissante et quand j’entends des éducateurs qui disent que c’est bon de forcer les enfants, je suis effondrée et quand je vois l’école que tu proposes j’ai beaucoup d’espoir et je joie, et de tristesse qu’il n’y ait pas ça partout tout de suite. Je comprends que les éducateurs ont peur que si on n’apprend pas tout aux enfants, ils ne s’en sortiront pas plus tard : ils ont besoin de beaucoup d’empathie et de confiance que les enfants sont capables, ont des ressources.
? : que s’est-il passé entre la discussion avec ta fille et l’ouverture de l’école ?j ’imagine que tu vas dire « beaucoup de soutien »…
Dominic : ce dimanche soir avec ma fille, j’ai posé les 3 questions et elle a dessiné une école extraordinaire, elle avait 13ans, il me restait l’année devant moi plus 1an avant qu’elle ne commence le lycée et je ne savais pas quoi faire. J’ai commencé par écouter une de ses amies pour voir si la réponse était similaire, et oui. J’étais assez choqué parce que je connaissais ses amis assez bien, on avait une bonne relation et je n’avais jamais remarqué ce changement entre 11 et 13ans où ils avaient renoncé à leurs rêves, ils s’étaient raconté que ce n’était pas possible, juste qu’il fallait faire un boulot qui allait leur rapporter de l’argent, c’était très rapide. Pour eux, c’était juste évident qu’on ne pouvait rien y faire.
1 mois après, je donnais des cours de médiation à Rio, après le départ des étudiants, je parlais avec 2 collègues et j’ai demandé comment s’en sortaient leurs enfants qui étudiaient dans l’ancienne école de ma fille. J’ai réalisé que je cachais mon idée d’école pour éviter leurs jugements, je projetais sur eux ma peur et la projection de mon incompétence.
me rappelle combien ça abîme, quand on croit qu’il faut savoir avant d’agir. Tout ce qui m’est arrivé de bien dans ma vie est venu à la base de mon incompétence ou de mon ignorance. Mon intention de ne pas savoir. Une possibilité d’ouverture.
J’ai parlé à ma fille et une de mes amies qui voulait aussi construire une école pour de plus jeunes enfants. On s’est accrochés l’un à l’autre comme dans Titanic, et on a partagé tous nos projets, dont un bus qui emmenait les enfants partout où ils voulaient dans la ville pour apprendre. La meilleure idée est retombée quand ils ont réalisé qu’ils ne pouvaient pas avoir de bus. Alors que nous, qui n’avions pas d’idée a priori, nous avons construit avec ce qui se présentait.
3 groupes de personnes se sont rencontrés pendant 1an pour échanger des idées et à regarder la loi, terrifiés d’être arrêtés, mis en prison car le fait d’étudier à la maison n’est pas légal car ce serait sans doute utilisé pour dissimuler le travail des enfants. Beaucoup de temps à rêver d’occuper un espace tous ensemble. Mon amie avait envie de commencer et elle l’a fait, elle a trouvé un espace dans un grand bâtiment et après 3 semaines les voisins ont compris ce qu’elle faisait et ils l’ont mise dehors. Mais les parents ont servi de réseau de soutien, elle a trouvé un autre, puis un autre espace et finalement celui qu’elle occupe encore et à chaque fois elle grandissait et apprenait.
? : votre système d’écoles bêta est-il compatible avec la persévérance, le goût de l’effort et du plaisir différé ?
Dominic : il est trop tôt pour le dire, je suis aussi curieux de savoir. Ce n’est pas dans mon expérience de croire que les êtres humains sont contre l’effort, on adore les défis. Mais y’a pas de pouvoir humain qui contrôle ce qui excite notre persévérance. Ce n’est pas que nos étudiants n’apprendront pas ça, mais ils seront plus résistants à recevoir des ordres.
Ce n’est pas une école alternative où on ne donne pas de notes ni d’examen, on n’a aucune objection idéologique à faire quoi que ce soit qui puisse être au service des élèves. On ne dit pas « il faut coopérer, pas de compétition ! » quand un étudiant demande des notes, une compétition ou un examen, on lui donne.
? : comment viennent les élèves ? Je vois surtout des filles..
Dominic : la plupart arrive envoyés par d’autres étudiants, ou des parents viennent en premier. Une fois des parents ont voulu obliger leur fille, ...qui n’est jamais venue...conflit dans la famille, le père a avoué qu’il aurait aimé aller dans cette école et qu’il avait oublié de lui demander.
C’est vrai qu’on a une majorité de filles, on essaye de comprendre pourquoi, peut-être qu’elles sont un peu plus mûres… Les parents au Brésil ont tendance à être plus partants à faire des expériences éducatives avec les fille...peut-être parce que les premiers étaient surtout des filles et que les premiers garçons se sont sentis désavantagés…
? : pistes pour les écoles pour plus petits ? Différences / plus grands ?
Dominic : la pratique du 1er lycée avait l’intention de ne rien offrir au-delà du temps et de l’espace. La 6ème condition : l’hôte, l’information pour que les gens puissent nous trouver et la possibilité d’accès un contact. C’est la décision qu’on a prise.
On a décidé que notre pratique serait : on sera présent au numéro 13 de la rue X, de telle heure à telle heure. Pas de wifi, pas de tables, pas de papier, pas de craies… et on va voir ce qui se passe. Parce que ce qu’on ne savait pas, c’est combien c’était inutile, combien de choses interféraient : on ne savait pas ce qu’on était en train de faire et qui pouvait être opprimant : on a commencé avec rien, c’était radical sans doute de façon pas forcément nécessaire, pour les chaises par exemple.
Puis nous avons organisé selon la demande. Les étudiants de 15-16-17ans ont créé à partir de là, en dialogue avec nous.
Donc comment préparer un espace pour les plus jeunes : c’est un espace que vous pouvez utiliser sans qu’on vous dirige, même de façon silencieuse, ou signifier que peut-être que j’ai des compétences que je vais faire semblant de ne pas avoir, autre fausse direction. « La tyrannie du manque de structure » rend la chose impossible pour que qqn puisse dire non. Difficile de gérer ça, on veut être honnête et soutenir un étudiant : c’est un défi de lâcher une structure imposée sans rentrer dans le vague et permissif, trouver cette rencontre dialogique au milieu.
On essaye avec les plus jeunes et on a découvert c’est que si je suis très vrai et fasciné par qqch et que j’amène ça aux enfants, c’est un endroit intéressant pour commencer à explorer avec eux. Pareillement, par rapport à un apprentissage que j’aimerais partager, ils peuvent être très ouverts pour comprendre pourquoi c’est important pour moi. Équilibre entre honnêteté et empathie, toujours en déséquilibre du côté de l’empathie…
: comment vous avez les profs avant le commencement, sans garantie de structure...
Dominic : grand mystère qu’on n’a pas eu besoin de faire des efforts, c’est eux qui nous ont trouvés. En même temps, la plupart des gens qui constituent notre liste n’arrivent pas à gérer qu’ils essayent d’enseigner.
? : économiquement c’est stabilisé ?
Dominic : J’ai dit que nous avons un système économique, je n’ai pas dit que ça marchait bien. Nous voulons traiter mieux les profs qu’ailleurs. Avec les cercles restauratifs, il nous a fallu 9 ans pour que ça devienne matériellement stable. Avec les écoles, ça nous a pris 3ans 1/2 pour que les bases soient assurées : on est passé dans un autre espace qui nous coûte plus cher et donc c’est à nouveau instable. C’est normal quand c’est nouveau.
Ce qui rend possible, c’est le panier ici. Notre stabilité aujourd’hui repose sur la participation à ces événements publics et nous y portons beaucoup d’attention et nous ne sommes pas loin, sans doute l’année prochaine… Notre prochain projet, un espace pour des personnes en extrême difficulté, un espace sécurisé pour se cacher et être nourri, sera j’espère être durable encore plus rapidement. Notre expérience avec un système politique devrait être durable dès le départ. Je crois qu’il y a des personnes qui ont besoin de ça pour croire que c’est possible.
? : combien d’élèves au lycée ? Classes selon les âges ?
Dominic : 84 étudiants. Les classes se forment autour de l’intérêt des étudiants, sans vraiment ressembler à des classes car souvent 8-9 étudiants travaillent sur un prototype en même temps. Ils nous envoient des messages pour prévenir qu’ils arrivent ou repartent. Je les invite à enregistrer ce qu’ils apprennent, comme un journal de bord, comme pour les enseignants, on consigne ses apprentissages et on a accès aux journaux des autres. L’espoir est de pouvoir créer un porte folio que l’université reconnaîtrait comme la preuve de leurs apprentissages. Qquns sont allés à la fac mais ils ont dû passer un examen d’entrée. On est tous en train d’apprendre à chaque fois. Si on commence à accepter des personnes plus âgées, entre 21-25ans, on commencera padr les séparer au départ parce qu’il semble qu’ils attirent beaucoup d’attention sur eux-mêmes et nécessitent un accompagnement différent : je ne veux pas qu’ils nous détournent de l’attention qu’on veut offrir aux ados.
Attention à la tendance de dire : « j’ai envie d’une école comme ça »...pour copier la pratique ou « j’ai pas envie » et la rejeter...sans comprendre les conditions préalables au système et qui fait sens. Je suggère d‘éviter n’importe quelle mise en pratique importée sans conditions systémiques et sans autoriser les changements. Si vous avez envie de le maintenir, contre les personnes qui veulent dialoguer et la changer, vous deviendrez répressifs. Si vous faites ça, vous inverserez. J’attire votre attention sur les conditions structurelles qui permettent à toutes ces choses excitantes et horribles de se passer.
Une discussion honnête, inhabituelle entre un père et sa fille, partagée avec d’autres, une aspiration mutuelle, une petite communauté, la décision d’agir, une description initiale de ce qu’on va faire, un endroit pour se réunir, la volonté d’une personne qui va jouer l’hôte, la diffusion du message de ce qu’on va faire, les commérages empathiques et finalement la rencontre.
Les personnes pourront nous trouver avec l’élan de les recevoir. C’est moins excitant mais c’est la compréhension dont on a besoin. Des millions de personnes ont faim et il y a peu de cuisiniers et beaucoup d’entre vous sont généreux pour cuisiner pour ceux qui ont faim mais peu ont l’élan de construire une cuisine. J’ai essayé d’être un cuisinier héroïque, malgré la cuisine déplorable dont je dispose, et je finirais par un burn out et les personnes n’auront pas à manger. Je garde mon attention sur la façon de construire des cuisines.
Qq part dans votre esprit : « super ce prof, mais je ne vais pas faire ça, il est fatigué... super mais j’ai pas envie de prendre ces risques ». Beaucoup de gens n’ont pas envie de cuisiner parce qu’il n’y a pas assez de cuisines construites. J’ai entendu parler d’écoles extra dans d’autres pays, j’étais très inspiré et ce n’est que quand j’ai marché dans les couloirs d’une école qui était différente, qu’une idée que je ne savais même pas que j’avais et qui bloquait mon action m’est venue : je ne croyais pas vraiment que c’était possible. Mon rêve c’est que c’est la dernière fois que vous avez besoin de qqn parler de ça au lieu que ce soit vous qui parliez généreusement. J’aimerais d’autres personnes visitent l’école que vous avez construite. Comme l’enfant, vous apprendrez en 10 minutes ce qui nous faut 2 jours pour apprendre à faire.
Quand on revient de notre repas, je voudrais qu’on regarde spécifiquement à des cuisines qui ont été créées pour créer des conflits.
Tout dépend de notre volonté à tomber amoureux du conflit, comme opportunité pour approfondir l’intimité. c’est vraiment extra de faire partie d’une communauté où nous avons le même niveau de confort de s’asseoir pour vivre un conflit que pour partager un repas ensemble. Parce que de manière consistante, ça nous nourrit et ça nous rapproche et quand on est ensemble, on fait des trucs fantastiques. Pour comprendre le conflit, je propose qu’on a besoin de comprendre l’argent aussi, qui est le moyen par lequel on fait des choses qui ont beaucoup de sens pour moi.
Quand on revient, on partage ce qu’il y a dans ce panier et on vous fait goûter le processus de partager l’argent. Repas
Retour sur les 5 conditions préalables : l’action
L’espace : exemple d’occupation de la rue face à un centre culturel fermé par l’État // abrogation du ministère de la culture, un lieu pour la procédure symboliquement significatif, concrètement fonctionnel et commun. L’occupation de l’espace est un élément-clé pour rendre tangible l’expérience de ces personnes sans communauté et pour qui l’idée même de communauté est fragile sans espace qu’on puisse dire « à nous ». Ce qui est révolutionnaire est moins l’espace en soi que la possibilité d’arrêter le temps chronologique pour redécouvrir le temps humain.
L’hôte qui suit et soutient les accords et la pratique : L’identification, l’encadrement et le soutien continu des personnes qui facilitent les pratiques validées par la communauté.
processus délicat à comprendre car ça semble évident mais ces personnes utilisent, non pas leurs propres compétences, elles n’improvisent pas mais leur disponibilité est de suivre les accords de la communauté.
Le prêtre n’invente pas mais veut bien agir dans une structure pour créer une possibilité collective d’approfondir notre conscience, en lien avec nous-même et avec les autres.
Exemple d’une situation où un groupe a décidé d’utiliser une structure d’aquarium pour parler des défis dans les relations homme-femme. Voici un cercle de femmes entouré d’un cercle d’hommes : les femmes parlent et les hommes observent et écoutent en silence. Ensuite, on a changé et une des choses qui a rendu cet événement efficace, c’était un facilitateur dans chaque cercle.
Photo avec un grand patron dans un cercle à écouter une femme de ménage de son entreprise : on cherche ce genre d’ouverture chez un hôte.
Exemple d’un événement collectif où Dominic animait mais était invisible : l’ouverture à être licencié et s’en amuser.
Diffusion : accès, à l’échelle communautaire, à l’information nécessaire pour comprendre et mettre en œuvre les pratiques que le système soutient.
Exemples des plans d’évacuation visibles dans chaque bâtiment. quand vous partagez des infos sur votre système de conflit, vous pourrez vous inspirer de ceci : peu de mots, images claires
Accès : un accès stable pour la communauté entière aux pratiques que le système social soutient et valide. Exemple d’un panneau aux USA avec 2 boutons pour alerter les pompiers ou la police. N’importe quand tu peux appeler, une personne te répond, sans te demander ton nom ou ta situation, ils demandent seulement l‘adresse et l’urgence.
Exemple d’une boite dans une communauté intentionnelle où mettre les signalements, une personne chargée de ça regarde une fois par jour et contacte la personne pour commencer le processus de restauration.
Film d’un cercle restauratif :
Dans la salle à côté de celle du tribunal, on regarde une situation de conflit douloureux : le jeune homme attendait à un arrêt de bus avec un ami qui avait une arme. Ils ont vu un homme qui marchait vers sa voiture pour partir et ils savent que, quand on est dans une situation de vie comme chez eux, que quand on stationne sa voiture ou quand on sort d’une place de parking, l’étendue de ton attention diminue à l’espace qu’occupe ta voiture. C’est un moment super pour le prendre en otage, de façon éclair. Ils sont allés vers cet homme avec
leur arme et ils lui ont dit de sortir de la voiture, ils ont regardé s’il avait une arme, l’ont mis derrière et se sont assis devant. Or c’était un officier militaire avec une arme cachée dans le dos. Il a dit dans le cercle qu’il était assis derrière et il se demandait : « comment je vais les tuer sans mettre du sang partout ? », « faire la chose naturelle »= expression des policiers là-bas pour « exécuter » ces 2 jeunes.
Quand le jeune a tourné la tête, sa ressemblance physique avec son propre fils l’a empêché de tuer. Il a été très critiqué par ses collègues qui vont devoir gérer les 2 jeunes maintenant, comme marque de faiblesse et manque de solidarité.
Alors il leur dit, « je suis policier », les jeunes flippent et sautent de la voiture et celui qui était du côté passager, celui qui ressemblait à son fils, commence à courir et le policier lui envoie 3 balles dans la jambe.
Comment on en arrive là ?
Après plusieurs semaines d’hôpital, ce jeune arrive au tribunal où le juge lui dit « on fait les choses différemment ici, tu as l’option, si tu veux, de rencontrer ta victime et voir avec lui ce que vous allez faire par rapport à cette situation ».
C’est le point d’accès pour ce jeune homme.
Remarques sur l’accès : pas l’idéal ici car c’est un être humain et je préfère les points accès non humains qui ne pourront pas juger, car un humain peut avoir la tentation de dire « vraiment ? Maintenant ? Je suis sûr que ça peux attendre lundi ! » donc ce serait une prise de pouvoir sur l’autre. Et lentement et silencieusement, les jeunes vont comprendre que ce n’est pas vraiment un processus communautaire, que les adultes essayent juste d’être sympas car ils se sentent coupables d’utiliser leur pouvoir sur eux. Chaque fois qu’on pense qu’ils ignorent ce qu’ils ont fait ou que les personnes n’utilisent pas le système, interrogez quel message vous avez pu transmettre.
Notre pratique ici prend en compte nos rencontres initiales, les avant-cercles, avec les 3 participants du conflit. Attention de ne pas entendre ce qu’il faut faire dans un cercle restauratif car il n’y a pas de réponse hors de ce que votre communauté va décider.
Le 1er groupe réunit les personnes qui ont commis l’acte, qu’on appelle normalement l’offenseur. Quand on pose les 3 questions, les personnes qui travaillent au tribunal répondent à la 2ème question que les punitions ne résolvent pas la complexité du conflit, quand ils disent offenseur et victime, ils oublient plusieurs niveaux du conflit. Beaucoup de personnes ont le ressenti d’être une victime. Ils voulaient développer un processus qui gérait cette difficulté, d’être précautionneux avec notre langage et, dès la première rencontre, ils ont décidé d’appeler « auteur » et « receveur »
Notre défi était : qui doit décider qui participe, qui fait partie de ce conflit de façon factuelle et qui a besoin d’être présent pour stimuler le changement et non pas ceux que certains voudraient voir présent ? Le contexte du crime n’est pas présent dans la résolution qui ne sera ni complète ni viable.
Lors de l’avant-cercle ici, on lui a demandé « qui a besoin d’être là ? », il va nommer des personnes qui viendront avec le facilitateur à sa demande. On va demander aux personnes les unes après les autres, reconnues comme participantes au conflit : le jeune (auteur), son père, la copine du père, le policier (receveur), sa femme et son fils, une personne qui travaille au tribunal, un collègue qui apprend à faciliter (meilleure façon d’apprendre à faciliter, plus que d’écrire des brochures, comme des leçons théoriques pour nager ou faire du vélo...et ça donne plus envie aussi), la grand-mère du jeune homme : tous appartenant à la communauté du conflit.
Remarquez l’affiche qui explique les étapes du cercle, visible par tous, avec plus de dessins que de mots, pour diminuer le réflexe de penser que le facilitateur a la vérité et la connaissance.
Le père explique que c’est dur de voir son fils en prison, il se sent impuissant mais c’est comme ça le système, il lui dit « j’espère que tu apprendras, avec des buts dans la vie. Je te pardonne et j’espère que tu pardonneras au autres aussi ».
Le fils du policier parle de son expérience dans la rue et dit : « après ce que tu as fait, tu es étiqueté, tout le monde te verra comme la personne qui a fait ça et la vie sera dure pour toi. »
Le jeune parle de ce qu’il a fait, ses ressentis.
Sa grand-mère parle de la manière dont elle a essayé de l’élever après la mort de la mère, et c’est un momentclé car il y a un silence.
Je recommande au facilitateurs de vérifier qu’ils sont capables de supporter le silence.
Le collègue stagiaire a juste regardé dans son 1er cercle, dans le 2ème il participe aux questions et dans le 3ème il va poser les questions et le collègue plus expérimenté sera juste là comme soutien.
Mais celle-ci n’était pas à l’aise avec le silence et a commenté ce moment en disant « c’est pour ça que tu l’as fait, c’est ça ? Parce que ta mère te manquait ? » Donc en voulant l’aider, elle niait la responsabilité de son acte. Les gouvernements der gauche reconnaissent le contexte jusqu’à enlever la responsabilité et ceux de droite insistent sur la responsabilité personnelle.
Le cercle aurait pu dévier, dans un contexte hiérarchique, et le jeune homme aurait accepté cette offre, abandonnant sa responsabilité et son pouvoir pour avoir moins de punition. Dans un environnement où le pouvoir est partagé, pas seulement parce que les chaises sont en cercle mais qu’il y a une disponibilité partagée : le jeune dit : « j’ai pensé à ça mais je pense qu’il ne vaut mieux pas y penser. » et il a commencé à parler des besoins qui n’étaient pas comblés dans cette situation.
En les articulant, tous peuvent collaborer pour construire un plan d’action, spécifiquement créé pour restaurer les relations, réparer et réintégrer dans la communauté.
L’échéance ici, l’après-cercle évalue et, grâce à un accord avec le procureur qui ramènera l’accord au juge qui le considère comme sentence.
A un moment, le jeune dit :
- une des actions que je veux faire, c’est aller au commissariat et expliquer aux policiers que j’ai appris, que je ne le referai plus
- ce ne serait pas une bonne idée, je crains qu’ils ne puissent pas voir que tu as changé, répond le policier - j’aimerais faire un petit film sur ma vie pour tes collègues qui ne te font pas confiance et pour que ce soit sécurisé pour toi
- moi je veux te visiter dans ton centre de détention jusqu’à l’après-cercle
Ceci a permis aux personnes du même système, qui ne savent rien de leurs vies respectives, de voir ce qui se passe dans la vie de l’autre. Petite blague en plus : la coïncidence du nom du policier : M Brésil ! Du coup, quand aune personne dit : « tu ne peux pas voir comment le Brésil souffre ? » on a entendu que ce cercle impliquait 200 millions de personnes sur un acte qui a 500 ans:)
Partage des participations financières :
Qq instants sur un système différent : on pourrait étaler tout l’argent au milieu, mais je voudrais imprimer un billet avec la totalité de l’argent collecté. ..mais comme c’est pas légal, je vais me contenter de le dessiner:)
160 personnes ont confirmé leur présence + 13 en liste d’attente
163 personnes dans cette pièce, mais ce nombre fluctue en permanence.
141 personnes ont signé ce matin
150 enveloppes dans le panier donc je suis content de savoir que certains ont compris que c’est un processus volontaire et que les autres ont participé volontairement.
9.414 euros dans les enveloppes
la différence entre la plus petite et la plus grande participation est de 295 euros. Je ne sais pas quelles elles étaient mais je connais la différence.
D’après vous, dans un cadre normal, combien coûterait ce genre d’événement ?
- Disons 200 euros. P
armi vous, combien de personnes se seraient exclues,
- quasiment les 3/4 des personnes
mais l’avion aurait coûté la même somme d’argent… pour 30 ou 40 personnes… c’est quand même plus drôle et plus intéressant d’avoir une salle remplie !
Je vais dessiner un billet de 9.414 euros au centre et j’invite les personnes qui ont rendu cet événement possible, ou qui sont vues comme telles, à venir au milieu et les autres à former un cercle de soutien autour.
Je laisse cet espace vide pour que chacun d’extérieur (où le principe est de rester silencieux sans prendre part) peut entrer dans ce cercle, pas pour poser une question à propos du processus, mais pour prendre une part active sur ce qui se passe ici.
La meilleure façon de faire que je connaisse, surtout avec des personnes que je connais peu, est de poser une question sur leur situation financière (et j’ai besoin de soutien pour ça car je préférerais parler politique, sexe ou religion:)
Ce n’est pas facile de confondre l’argent avec la gratitude ou des critiques. Si je pense « l’éclairage était fantastique, Danielle je vais te remettre 45 euros car je suis content de l’éclairage », l’argent est un très mauvais substitut de la gratitude, plutôt que de regarder Danielle dans les yeux en lui disant combien le bel éclairage m’a permis d’être pluss heureux, plus énergique, de voir les enfant au fond etc. je lui donne les 45 euros pour l’aider à payer sa facture d’électricité. C’est une bonne manière de répartir les ressources et l’amour n’en fait pas partie.
Si j’ai envie de donner de l’argent à qqn, je vais écrire sur un papier 45, je le déchire et je le pousse vers la personne et je soustrais la somme du total, et je l’écris sur le papier. Il reste 9369 euros et ainsi de suite…
Tout ce qui se passe peut bouger tant que ça continue. Qqn peut prendre ces 45 et les donner à qqn d’autre, le couper en 2...
Je donne autant à tel pour le film qu’il a fait. As-tu besoin d‘argent pour le faire ? Combien ça coûte d’acheter le matériel dont tu as besoin pour continuer ton activité ?
Nous n’allons pas continuer maintenant mais si ça vous intéresse, vous pourrez assister demain car nous avons besoin d’un temps libre et il est l’heure de ranger la salle.
Je vais donner mes coordonnées, en général les gens ne m’écrivent pas pour ne pas me surcharger mais mon énergie baisse quand je n’ai pas de retours sur ce qui a été vécu. Les questions sont les bienvenues mais ce que j’aime vraiment c’est vos histoires, je n’aime pas la présomption de croire que je vais répondre.
Je tiens aussi à m’engager à soutenir votre apprentissage, je suis prêt à revenir et continuer à revenir pour vous aider à une condition, ce n’est pas ma condition mais du travail : si vous établissez au préalable un système de soutien, entre maintenant et 6 mois, vraiment, essayez réellement, 4-5-6 fois par semaine, en échangeant des soutiens, quoi qui soit soutenant pour vous. Essayez réellement pour goûter à nouveau à cette qualité d’empathie qu’on a goûtée ici.
Ce sera la condition nécessaire pour le pas suivant, sans mettre de pression mais c’est important pour moi pour aller pus loin et plus profond.
Notes perso :
communauté = notre intention de partager un risque en commun.
3 questions : Gandhi appelait ça « le génie du lieu », curieux de savoir ce que les gens faisaient là où il y avait le problème.
1 :que proposent les services actuels et que faisons-nous déjà pour recycler ? et qu’est-ce qui fonctionne bien ?
2 : Qu’est-ce que nous faisons déjà et que nous voudrions éviter, un mauvais usage de notre temps et de notre énergie ?
3 : si les choses fonctionnent comme nous aimerions le plus, à quoi ça ressemblerait ?
Attention : ne poser cette question que si vous avez déjà décidé de construire quelle que soit la réponse parce que ça demande beaucoup d’efforts de regarder à l’intérieur ce qu’on veut vraiment. Si on reste superficiels, les personnes enterrent la réponse profondément et parfois ne se souviennent même plus de ce qu’elles aimeraient faire. Si nous oublions notre rêve, on a un gros problème.
La seule question c’est : « quelles sont les conditions dont tu as besoin pour vivre ton rêve et souvent la première = que qqn s’intéresse sérieusement à ton projet »
Quand Gandhi parlait de l’opposé de la non violence = la soumission à la peur.
Pour créer une paix intérieure, un espace privatisé calme au milieu du chaos, ce n’est pas pérenne. Aller dans une grotte, le conflit est vous y attend. A l’intérieur de nous, entre nous et collectivement, faire un mouvement pour se libérer de la peur.
Comme une conversation qui part de travers : moins des personnes se comprennent, plus elles parlent fort, pour compenser la distance symbolique dans leur relation.
La manière la plus efficace est de violer l’intégrité physique avec comme fonction de revendiquer la relation… mais c’est terriblement inefficace car l’autre va fuir. Le choix de la non-violence n’est pas une question morale, c’est parce que la violence n’est pas durable car elle abîme la relation.
L’entraînement à considérer les conflits comme dangereux est très fort. Le conflit est une conséquence naturelle de n’importe quelle relation qui vaut le coup.
Ces désobéisseurs civiles utilisent un système de soutien basé sur la contemplation : ils méditent non pas pour fuir la réalité, mais pour se soutenir, pour ne pas déshumaniser les personnes en uniforme : on n’a plus le temps de se payer le luxe d’avoir un ennemi. S’ils essayent de résister au conflit parce qu’ils ont peur, ça rendra la situation dangereuse. Quand on commence à avoir peur du conflit, on rêve de solutions autoritaires et même si on culpabilise à ce sujet, on vote pour ces solutions.
quand je parle de qqch de dialogique, je fais référence aux moyens collaboratifs qui s’appuient sur un pouvoir partagé et dont le résultat attendu émerge.
des systèmes dialogiques, à la base des pratiques de non violence. Pourquoi ? Parce qu’elles promeuvent des modes de relation à l’intérieur de nous, tous ensemble et à l’extérieur. Et dans chacune de ces 3 sphères : inter, interpersonnel et le politique-social-systémique.
L’intention = diminuer l’oppression au service de la vie. La non violence n’est pas le fait de ne pas utiliser la force mais de libérer la vie dans un sens holistique.
Donc on ne va pas perdre notre temps à croire qu’on va changer les choses de manière systémique juste en mettant notre attention sur une relation interpersonnelle, que s’entendre à 2 suffit. Changer et corriger notre langage pour ne pas se blesser ou tout autre truc durable et qui finalement devient une autre forme d’oppression.
Ici, jusqu’à demain, la pratique de la non violence impliquera chaque instant et changera à l’intérieur de moi, avec vous et tous ensemble dans un seul mouvement.
Ce sera souvent confus, déstabilisant, on va décaler l’orientation, mais se sentir désorienté est un bon signe. Si qqn part en disant qu’il a tout compris, je serai très déçu de moi-même comme enseignant.
beaucoup des plus jeunes font des choses considérées comme inconstantes : ils disent la vérité. Nos relations sociales s’appuient beaucoup sur l’insincérité, c’est un apprentissage fantastique pour les systèmes dialogiques qui prennent leur force de résilience et de pertinence dans l’élan interne d’être authentique avec ce qui est le plus important pour eux dans leur vie.
Si vous aimeriez être dans un système dialogique au sein d’une classe, un cercle… vous découvrirez que le sens est exprimé de nombreuses manières, verbalement ou pas, et certaines choses importantes ne possèdent pas encore leurs propres mots ou les mots existaient au départ mais ils ont été cooptés par des organismes de pouvoir.
l’empathie, autrement que l’utilisation actuelle « marcher dans les pas de l’autre, ressentir ce que l’autre ressent »...mais originellement, la motivation spécifique est la description physiologique. Une des façons de pratiquer est, pendant les pauses et les exercices, de remarquer cette dynamique que vous expérimentez plusieurs fois par jour, vous marchez qq part, vous voyez qqn et votre corps pense « elle a besoin d’aide ... il ne va pas bien » et une voix arrive, socialement apprise : « occupe-toi de tes oignons ! Comment tu sais ? Peut-être qu’il sera offensé ! Ta vie est déjà bien compliquée ! »
Comme expérience pendant ces 2 jours, vous pouvez prendre au sérieux la 1ère voix et dire à cette personne : « puis-je faire qqch pour toi ? »
Aucune garantie qu’elle ne sera ni vexée ni dérangée, mais tu sais que nous faisons partie d’un groupe temporaire où les gens sont prêts à expérimenter ça, de façon un peu plus visible, qu’il y a des océans de soutiens autour de nous que nous ne voyons pas à cause des accords sociaux.
En fait, on passe nos accords ensemble et plus tard, ils se cristallisent comme consignes ou règles, plus stables mais c’est problématique car ils sont déconnectés de la vie qui est changement. Plutôt que de poser des règles que tous doivent suivre, ou on ne passe aucun accord et tout reste spontané tout le temps, on explore les conditions nécessaires pour qu’on puisse élaborer ensemble nos accords et qu’on continue à leur prêter attention au fur et à mesure de leur évolution. Les temps de partages sont un mini exemple.
Paolo Fréré : « Si la structure ne permet pas le dialogue, alors la structure a à changer parce tant qu’elle continue, elle provoque des souffrances, parce que là où il y a un manque de dialogue, il y a un manque de sensibilité à l’autre, de volonté de changer, de relation. »
Quand on fait ce travail, on a l’expérience de beaucoup de désorientations, ce n’est pas académique : plus tu étudieras, plus ton apprentissage sera correct.
Ce n’est pas nécessaire pour faire le travail, de comprendre le travail (coudre, cuisiner…) donc notre choix est entre être perdu ou complètement perdu.
Ce qui est dangereux, c’est de partir de l’idée que vous savez ce qui est juste et que vous allez l’enseigner. Le plus efficace est de poser ces questions et du principe que vous êtes d’accord de construire le système à partir des réponses à la 3ème question.je pourrai partager mon expérience et les propositions initiales changeront. Pas parce que je dis quoi faire mais parce qu’ils prennent de+ en + confiance dans leur expression et dans le sens de ce qu’ils mettent en place. Ils deviennent plus précis sur l’articulation de leur rêve et fur et à mesure leur système se construit sur la base du dialogue.
Les 5 zones d’attention :
- l’action
- l’espace-temps : un lieu pour la procédure symboliquement significatif, concrètement fonctionnel et commun. L’occupation de l’espace est un élément-clé pour rendre tangible l’expérience de ces personnes sans communauté et pour qui l’idée même de communauté est fragile sans espace qu’on puisse dire « à nous ». Ce
qui est révolutionnaire est moins l’espace en soi que la possibilité d’arrêter le temps chronologique pour redécouvrir le temps humain.
- l’hôte : On doit être précautionneux car son rôle ne peut être réduit à un boulot, ce qui déséquilibrerait les pouvoirs car on laisserait tomber notre part de responsabilité dans le cercle en attendant que l’hôte prenne les décisions pour nous. Besoin de soutien et d’inspiration des autres. Capcacité à animer et rester invisible : l’ouverture à être licencié et s’en amuser.
- la diffusion : // plans d’évacuation : peu de mots, images claires pour être su de tous les membres de la communauté
- l’accès
Le mot « vérité » partage la racine avec le mot « virer », ça aide à comprendre une des conséquence de la vérité : toutes les choses qui bougent créent un champ de force, des petites vagues qui déstabilise. C’est le bordel.
Mon corps a été créé pour la vérité mais j’en ai peur. Je suis en dehors depuis qq années et déjà je la traite comme qqch de dangereux : faire des choses incroyables ou exploser de façon imprévisible.
Ça, c’est l’énergie que nous avons besoin de contacter pour recréer les fondations d’un pacte social, d’une communauté, une base assez forte pour soutenir des systèmes sociaux qui peuvent nous servir.
Ne pas gaspiller notre temps avec ta et ma vérité, sans parler des vérités qui deviennent opprimantes comme des « il faut aimer comme ça, penser comme ça... » Si on peut récupérer la sensation de la vérité, qui est nécessairement supra personnelle, valable pour tous.
Comment toues ces réussites ?
Une seule explication : parce que je suis un tout petit peu moins non congruent que les personnes autour de lui. Je ne sais pas comment être congruent dans notre société, quand 65 % des cotons qu’on porte ont été produits par des enfants esclaves… ? Mais on peut l’être un tout petit peu plus, quand on prend soin de la vie. Je peux être un tout petit peu plus congruent dans ma manière de répondre aux peurs, car je suis prêt à nommer les choses implicites.
Souvenez-vous que c’est une manière de dire qu’on n’a pas assez de soutien pour ce défi = « je ne peux pas, je ne suis pas capable de, je ne sais pas comment faire » . Ce n’est pas un manque de la personne, ce n’est pas une faute, ce n’est pas parce que vous n’avez pas assez d’expérience ou de compétence. C’est juste dire que vous n’avez pas assez de soutien, un ange qui est là pour vous comprendre.
S’il y avait un état de conscience préalable avant que je commence à travailler, je n’aurais jamais rien fait. Paolo Fréré disait : « une chose nécessaire pour que rien ne change : c’est de penser que je ne suis pas complet et que c’est un problème » Je n’ai pas besoin d’être non violent, j’ai juste à être authentique avec le fait que je sui violent et aller chercher du soutien. Tout le monde le sait, et moi aussi. Je me rappelle combien ça abîme, quand on croit qu’il faut savoir avant d’agir. Tout ce qui m’est arrivé de bien dans ma vie est venu à la base de mon incompétence ou de mon ignorance. Mon intention de ne pas savoir. Une possibilité d’ouverture. on a partagé tous nos projets, dont un bus qui emmenait les enfants partout où ils voulaient dans la ville pour apprendre. La meilleure idée est retombée quand ils ont réalisé qu’ils ne pouvaient pas avoir de bus. Alors que nous, qui n’avions pas d’idée a priori, nous avons construit avec ce qui se présentait.
Je suggère comme définition d’empathie = focalisation de l’attention qui enlève les blocages vers l’action, qui enlève les blocages qui nous empêchent d’avoir accès … C’est différent de l’usage usuel, je l’utilise dans ce contexte spécifique pour mettre en marche un changement dans la sphère collective. Il n’y a que de l’autoempathie. Ce qui bloque l’action, c’est que je suis déconnecté de moi-même. Je n’ai pas besoin de mon ange pour agir, mais de moi-même, alors mon ange sert à focaliser mon intention sur ce que nous partageons et ça me révèle.
le résultat est qu’à chaque conversation où il y a une vérité, avec la qualité d’attention empathique, une nouvelle action se produit.
Paolo Fréré parlait de « banque de l’éducation » : tu fais un dépôt de connaissance dans l’étudiant qui est supposé être vide.
Une discussion honnête, inhabituelle entre un père et sa fille, partagée avec d’autres, une aspiration mutuelle, une petite communauté, la décision d’agir, une description initiale de ce qu’on va faire, un endroit pour se réunir, la volonté d’une personne qui va jouer l’hôte, la diffusion du message de ce qu’on va faire, les commérages empathiques et finalement la rencontre.
Des millions de personnes ont faim et il y a peu de cuisiniers et beaucoup d’entre vous sont généreux pour cuisiner pour ceux qui ont faim mais peu ont l’élan de construire une cuisine. J’ai essayé d’être un cuisinier héroïque, malgré la cuisine déplorable dont je dispose, et je finirais par un burn out et les personnes n’auront pas à manger. Je garde mon attention sur la façon de construire des cuisines.
Qq part dans votre esprit : « super ce prof, mais je ne vais pas faire ça, il est fatigué... super mais j’ai pas envie de prendre ces risques ». Beaucoup de gens n’ont pas envie de cuisiner parce qu’il n’y a pas assez de cuisines construites. J’ai entendu parler d’écoles extra dans d’autres pays, j’étais très inspiré et ce n’est que quand j’ai marché dans les couloirs d’une école qui était différente, qu’une idée que je ne savais même pas que j’avais et qui bloquait mon action m’est venue : je ne croyais pas vraiment que c’était possible. Mon rêve c’est que c’est la dernière fois que vous avez besoin de qqn parler de ça au lieu que ce soit vous qui parliez généreusement. J’aimerais d’autres personnes visitent l’école que vous avez construite. Comme l’enfant, vous apprendrez en 10 minutes ce qui nous faut 2 jours pour apprendre à faire.