carXpert Note - 2014 - No 1

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W e l c o m e 02

elcome publication CGBM Evolution parc d’activite de signe 24, avenue de paris 83870, signes france

redaction aurelie drouard

calisto.ac@gmail.com

mise en page anne-sophie lucas

annesophie.lucas@hotmail.fr

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sommaire

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Les visages de Technomag-carXpert Racing Team en 2014

Parcours des deux pilotes suisses Dominique Aegerter et son coéquipier Robin Mulhauser.

paddock : SUZUKA 1987, l’an24 Retro nee de mon premier GP Outre-mer Gilles Bigot, directeur technique chez Technomag-carXpert nous raconte l’aventure de son premier Grand Prix Outre-mer.

36 Du cote de la technique :

Comment prepare-t-on un weekend de GP ?

Matthieu Grodecoeur, ingénieur de Dominique Aegerter, nous parle de l’organisation des Grands Prix.

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Tests hivernaux :

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Presentation de nos partenaires Techniques :

Points faibles et points forts avant le début de saison.

Description des différents partenaires et sponsors.

XPERT NOMINATIONS :

L’HOMME DU PADDOCK :

Stan Wawrinka et l’Equipe de France de Handball

Jean-Claude Schertenleib, journaliste suisse

LES JO DE SOTCHI

LA BANDE DESSINEE D’AMAËL

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L’HEURE EST MAINTENANT A LA CONFIRMATION !! Pour notre équipe Technomag-carXpert, après une année d’apprentissage, une année si riche en émotions et en résultats, il faut maintenant que notre structure confirme ses belles prédispositions lors de la saison à venir. La transition dans ce genre de cas n’est jamais aisée. Nous avons emmagasiné beaucoup d’expériences lors de notre première saison et nous devons poursuivre nos efforts. Notre ligne de conduite nous permet à l’heure actuelle d’avoir des bases solides pour envisager notre futur. Une des forces de notre groupe est la solidarité. Nous sommes une équipe familiale et qui travaille extrêmement dur. C’est important de trouver l’équilibre et une bonne cohésion pour être très performant.

Robin Mulhauser, notre petit nouveau fraîchement débarqué du championnat d’Europe Superstock, apporte avec lui sa joie de vivre et son esprit de compétition. Le staff en place sera sans aucun doute un atout pour une intégration réussie de Robin dans ce championnat de

Par Fred Corminboeuf

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très haut niveau. Lors des tests hivernaux, il nous a montré sa volonté d’apprendre et surtout il partage les valeurs de notre groupe. « Nous gagnons ensemble, nous perdons ensemble ». Notre devise reste la même.

une opération relativement lourde. Après un mois de pause et un mois de rééducation, il a attaqué la phase intensive pour revenir en forme au plus vite. Il sera à 100% pour le début de la saison et aura toutes les cartes en main pour défendre ses chances.

Nous nous réjouissons de l’ouverture de cette nouvelle saison et de continuer à brandir haut la bannière de Technomag-carXpert aux quatre coins du monde dans ce championnat Moto2 au niveau si relevé. A l’aube de cette nouvelle saison, notre Domi national sait que la confirmation des résultats est attendue par tout le monde: les médias, les sponsors et bien évidemment le team. Nous savons aussi que confirmer de bons résultats est souvent très difficile, mais l’équipe est prête à relever le défi. Pour lui et avec lui. A la mi-novembre, Dominique a subi


ÂŤ Nous gagnons ensemble, nous perdons ensemble Âť.


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Les visages de

T ec hn om ag-c ar X pert Racing Team en 2014 Le Team Technomag-carXpert comptera à nouveau deux pilotes au sein de son box pour cette nouvelle saison du Championnat du Monde Moto2. Si Dominique Aegerter prolonge son engagement dans l’équipe, Robin Mulhauser fait figure de nouveau visage. L’occasion de revenir sur le palmarès de notre numéro 77 avant de découvrir le parcours de celui qui portera le numéro 70.

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Aegerter : Parcours d’un as de la regularite

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’est en 2007 dans la catégorie 125cc que Dominique Aegerter dispute son premier Championnat du Monde après y avoir fait ses débuts grâce à deux wildcards à la fin de la saison 2006. Le suisse originaire de Rohrbach (Canton de Berne) a fait ses premières armes dans l’ADAC Junior Cup et le Championnat d’Allemagne 125cc. Recruté par Ajo Motorsport en 2008 puis par Interwetten Ajo en 2009, il progresse régulièrement et s’engage en Moto2 avec le Team Technomag-CIP en 2010. Il terminera cette première saison au guidon de la Suter en quinzième position et grimpera à la huitième place l’année suivante, place au classement général qu’il occupera de nouveau en 2012 tout en inscrivant un podium à son palmarès lors de la dernière course de l’année à Valence (Espagne). En 2013, le Team Technomag-carXpert voit le jour. Dominique Aegerter fait naturellement partie de cette nouvelle aventure dans laquelle il s’affirme encore un peu plus aux avant-postes. Il monte à nouveau sur le podium à Assen et termine à la 5ème place du classement général avec un total de 157 points. Il achève également cette saison comme premier représentant du châssis Suter et premier 11


S’il est un détail qui aura fait parler le paddock cette saison, outre les départs « canons » dont Dominique a désormais le secret incontesté, c’est surtout son incroyable série ininterrompue de 33 courses “dans les points” ! Il faut en effet remonter au début de la saison 2012 pour retrouver une course où le Suisse n’a marqué aucun point. Fort de cette constante croissance, Aegerter opéré cet hiver d’une épaule capricieuse, est déterminé à reprendre cette saison au plus haut niveau et atteindre son objectif premier: re m p o r t e r d e s c ou r se s a i n si q u e l a c ou ro n n e m o n d i a l e .

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Dominique Aegerter 30.09.1990 Rohrbach

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Robin Mulhauser, 07.11.1991, Fr ibourg

« Quand tu veux, tu peux ».

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Mulhauser : le petit jeune qui impressionne

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obin Mulhauser débute lui aussi la compétition durant l’année 2007 dans le Championnat suisse de pocket bike en catégorie Junior B, dans lequel il terminera 10ème au classement. L’année suivante, il fait ses premiers pas dans la catégorie 125cc en s’engageant dans le Championnat d’Allemagne IDM 125 où il restera pendant trois saisons afin de parfaire son apprentissage. En 2011, Robin participe à la Yamaha-R6 Dunlop Cup dans laquelle il est classé 6ème tout en ayant dû renoncer à disputer quatre courses pour cause d’examens de fin d’études. En 2012 et 2013, le jeune Fribourgeois dispute le Championnat European Superstock 600. Pour sa première participation dans cette catégorie il termine à la 20ème place. Fort de cette expérience acquise, il achève sa deuxième année en 7ème position du classement des pilotes après être monté sur la troisième marche du podium à Silverstone (Angleterre). En Septembre 2013, en compagnie d’autres jeunes espoirs suisses (le Vaudois Adrien Pittet et le Jurassien Stéphane Frossard) Robin réalise un premier test avec l’équipe Technomag-carXpert lors d’essais privés sur le circuit Paul Ricard au Castellet. Deux semaines après cette découverte du pilotage de la Suter MMX2, Robin a de nouveau l’occasion de remonter sur cette moto pour pallier à l’absence de Randy Krummenacher, blessé, lors du Grand-Prix d’Aragon (Espagne). Sa 23ème place en course, laissant derrière lui un certain nombre de pilotes expérimentés, a confirmé un potentiel détecté par l’équipe Technomag-carXpert depuis sa rencontre avec le jeune pilote. Son calme et son sérieux face au travail à accomplir ont séduit le Team qui a décidé d’engager avec lui une collaboration sur plusieurs saisons. 15


Ainsi la saison 2014 va s’ouvrir pour nos deux pilotes, deux représentants Suisses portant fièrement les couleurs de l’équipe Technomag-carXpert à travers les différentes étapes que comporte le Champion n a t d u M onde M o t o 2.

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X pert nomination

Stan Wawrinka et l’Equipe de France de Handball

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Le 26 janvier dernier fut une journée particulièrement intense pour tous les amateurs de sports. Point commun entre la France et la Suisse ce jour là? Chacun de ces deux pays a pu assister à la victoire d’un de ses représentants. Le 26 janvier dernier fut une journée particulièrement intense pour tous les amateurs de sports. Point commun entre la France et la Suisse ce jour là? Chacun de ces deux pays a pu assister à la victoire d’un de ses représentants.

Ainsi la journée a débuté par la victoire de Stan Wawrinka sur Rafael Nadal lors de la finale de l’Open d’Australie. Dans ce match remporté 6-3, 6-2, 3-6, 6-2, le Suisse a démontré que son travail acharné a fini par payer. Le tennisman, qui remportait pour la première fois de sa carrière un tournoi du grand chelem, est désormais 3ème joueur au classement ATP. Belle réus20

site pour celui que la Suisse a désigné comme la personnalité de l’année 2013. A 28 ans, Wawrinka est le deuxième suisse à remporter un titre dans un tournoi international après Roger Federer. Si pendant longtemps, l’ombre du géant Federer a plané, Wawrinka peut désormais être sûr de son potentiel et ne plus avoir à rougir des performances de son célèbre compatriote.

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amais personne n’avait réussi à battre Djokovic et Nadal dans un même tournoi et pourtant lui, il l’a fait ! Sa détermination pour atteindre le plus haut niveau force le respect. En reprenant l’avantage et en retrouvant son calme et sa concentration dans cette finale, Wawrinka a su vaincre son plus redoutable ennemi : lui-même. Se ressourcer quand en plein match les doutes assaillent c’est parfois ce qui a pu lui faire défaut mais aujourd’hui il semble plus que jamais avoir trouvé ce qui lui manquait pour être le meilleur, tant sur le cours que dans son esprit. Dans le sport comme dans bon nombre d’autres disciplines, la force mentale est un atout voire la clef de la réussite. Dans le cas du sport individuel, l’athlète est seul face à lui-même, il doit puiser au plus profond de lui pour trouver la sérénité et le courage nécessaire. En revanche, dans le sport collectif, les athlètes ont cet avantage de pouvoir trouver de l’énergie grâce à l’équipe et à la cohésion. C’est exactement ce à quoi le public a pu assister lors de la finale de la Coupe d’Europe de Handball au Danemark le 26 janvier dernier.


d n a t Qu i ! t a i t e d e r i s e a u e o n n i v r d u r o on o j a e r t t t e x c e e t u n q e m e v

i t r spo

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Revenons sur ce second évènement. Les Bleus ont été les auteurs d’une performance exceptionnelle. Vainqueur par neuf buts d’écarts (41-32), l’équipe de France a brillé dans ce Championnat alors que pour beaucoup, cette équipe était « trop vieille » pour être championne.

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eur palmarès a beau être impressionnant (Championnat d’Europe, Championnat du monde, Jeux olympiques), à chaque compétition, le même refrain retentit. Plutôt que de répondre à leurs détracteurs par des mots qui dans ces circonstances ne réussissent pas à convaincre, les joueurs de l’Équipe de France de Handball ont préféré se concentrer sur leur jeu. Dans ce dernier match, les Danois, tenants du titre, n’ont pas réussi à remettre en cause la domination des Bleus. Il faut dire que dès les premières minutes du match le cadre était posé. Thierry Omeyer empêchait tous les ballons adverses de rentrer dans sa cage; Cédric Sorhaindo et Luka Karabatic marquaient leur ligne de défense et en attaque, Michaël Guigou, Valentin Porte, Daniel Narcisse et Nikola Karabatic ont marqué, passé, défendu avec tout le talent qu’on leur connaît. Une équipe présente sur tous les fronts, qui n’a jamais rien lâché et montré un esprit d’équipe à tout épreuve. 22


Claude Onesta, l’entraineur des Bleus, privilégie les hommes aux techniques de jeu et ce même si elles font nécessairement partie de sa méthode de management. Ce qui importe pour ce coach, c’est l’harmonie humaine au sein de son équipe. Ainsi, lorsque les joueurs parlent les uns des autres, ils le font avec respect, cohésion et simplicité. Dans cette équipe, les “jeunes” profitent de l’expérience des joueurs plus âgés et les “anciens” accueillent la fraîcheur des petits nouveaux dans le seul but d’avancer ensemble. C’est grâce à cet esprit d’équipe et à la puissance que cela dégage qu’ils ont atteint leur but.

Stanislas Wawrinka et l’Equipe de France de Handball ont eu en commun lors de cette journée du 26 janvier dernier de nous faire rêver et de donner envie à bon nombre de jeunes sportifs de travailler encore plus dur pour atteindre leurs objectifs.

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Retro paddock : SUZUKA 1987,

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on premier Grand-Prix en Outre-mer s’est déroulé au Japon, à Suzuka plus précisément. Ça ne date pas d’hier me direz-vous puisque nous étions le 29 mars 1987. Pour moi, ce circuit était très loin des circuits habituels que je connaissais. Ce fut ma première course dans ce pays et un grand retour pour le MotoGP qui n’y était pas revenu depuis près de 20 ans. A cette époque, il n’y avait pas de Dorna et c’était la première année d’existence de l’IRTA. Les courses de MotoGP se professionnalisaient petit à petit mais nous étions encore bien loin du confort et de l’assistance actuels. Aujourd’hui, les caisses sont transportées de l’atelier au circuit et enlevées par un transporteur agréé, puis stockées dans un endroit sécurisé et les carnets A.T.A. (le carnet A.T.A. est utilisé pour faciliter les échanges internationaux en simplifiant les formalités douanières tout en réduisant les coûts de ces opérations) sont pris en charge par le transporteur lui-même. En fait en dehors de la confection du carnet A.T.A., tout a été très simplifié. Mais en 1987, nous devions établir nous même notre carnet A.T.A. Ce fameux sésame indispensable pour passer les frontières, ce qui voulait dire des heures d’attente interminable dans les bureaux de la douane surtout en Europe ( je me souviens d’avoir dû patienter jusqu’à 10h entre la Hongrie et

l’Autriche ou la nuit entière si vous arriviez après 22h). Et concernant le transport des caisses, là aussi point de transporteur, nous devions nous en charger nous même. Lors de cette première épreuve au Japon, notre unique caisse se résumait à une caisse de transport de moto Honda, démontable pour le transport et fermée par des plaques de contre-plaqué de 5mm pour le poids. A l’intérieur : une moto seule, un carénage, un jeu de roues supplémentaires, quelques pièces et les outils indispensables. Rien à voir avec tout ce que nous transportons de nos jours ! Si l’on compare le transport de l’époque à celui d’aujourd’hui, on peut dire que c’était le parcours du combattant. Pour pouvoir embarquer la moto dans l’avion il fallait d’abord aller jusqu’à l’aéroport. Ensuite, trouver un transitaire, passer aux douanes pour y faire enregistrer le carnet A.T.A., assembler la caisse et y mettre la moto plus les diverses pièces détachées et l’outillage. Après cela, il fallait courir (croyez moi, le mot est juste !) après un cariste pour qu’il daigne transporter la caisse jusqu’au secteur de fret où la moto devait être embarquée et une fois tout cela accompli, nous pouvions souffler et surtout monter nous même dans l’avion.

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e vol était aussi bien plus long qu’aujourd’hui, notamment parce qu’Air France utilisait la “route polaire” pour rejoindre le Japon, en passant par Anchorage en Alaska ! J’ai d’ailleurs le souvenir d’un ours empaillé gigantesque à l’aéroport d’Anchorage ou bien encore le survol de la banquise qui reste gravé dans ma mémoire. Nous voilà enfin arrivés à Suzuka. Nous sommes accueillis par une imposante réception de très grande qualité dans les salles du Suzuka Circuit Hotel. Une anecdote plus incroyable se déroula sur le chemin du circuit où nous passions dans le parc d’attractions pour accéder au paddock. Nous décidons de faire un petit arrêt dans une boulangerie. Et 26

là, surprise, le boulanger est Français ! Il s’appelle Dominique Doucet et est venu au Japon faire découvrir le pain à la française et la pâtisserie. Dominique est resté au Japon et possède aujourd’hui plusieurs boulangeries ainsi qu’un restaurant dans lequel j’ai diné bien des années plus tard. Retour au box avec notre Honda stock dans lequel nous sommes bien entourés avec Sito Pons d’un coté sur une moto d’usine et Stéphane Mertens sur la Sekitoba Honda (châssis carbone) avec moteur officiel. Nous sommes un peu seuls dans notre box mais il y a une bonne ambiance et le magasin HRC étant sur le paddock, on y achète des pièces de rechange pour la Honda RS250R pour la moitié du prix en France ! Nous sommes le 29 mars à Su

zuka. Jour de course. Il fait froid, il pleut, le circuit est difficile, notre moto n’est pas très véloce et notre classement final est assez loin du vainqueur Masaru Kobayashi, qui pilote une Honda NSR250 usine, chaussée de pneus Bridgestone. Ce fût d’ailleurs la première victoire de Bridgestone en moto GP. Kobayashi remporte la victoire avec 27 secondes d’avance sur Sito Pons qui lui-même termine second. Un bien beau souvenir que mon premier Grand-Prix Outre-mer.


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Tpointse sfaibles t set points h iforts v eavantr nle debut a udexsaison: 30


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Des séances d’essais transformées en simple roulage

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raditionnellement, le mois de Février est le synonyme de l’ouverture de la pré-saison. Après une longue période sans rouler, les pilotes sont à nouveau autorisés à reprendre la piste, ce qui sous-entend que le Championnat est en passe de reprendre ses droits. Nos essais ont ainsi commencé sur le circuit Paul Ricard, le 1er février dernier. Au programme pour nous, trois journées de tests mais malheureusement Dame Météo n’a pas joué le jeu. Pour notre première sortie malgré une piste un peu froide, nos deux pilotes ont pu effectuer plusieurs runs afin de se familiariser avec leur nouvelle monture version 2014. Pour cette occasion, nous avions sélectionné une configuration de circuit différente pour mieux apprécier le comportement des motos. Sans une bonne température de piste, le niveau d’adhérence n’est pas optimum et ne donne pas de bonnes sensations aux pilotes. Cette première journée a finalement été un roulage plus qu’un vrai test. Le deuxième jour, la situation météorologique ne s’est guère améliorée. Pluie et température basse n’ont pas permis aux pilotes de prendre la piste car le risque de chute était trop élevé. Nous avons donc du attendre le troisième jour et cette fois-ci la température était un peu plus haute et la piste sèche. Nous avons pu effectuer deux runs avant d’être contraint de stopper les essais suite à une courte 32

averse. Décidément, le temps n’était vraiment pas avec nous ! La piste s’est alors trouvée légèrement mouillée mais pas suffisamment pour rouler avec des pneus pluie qui n’auraient pas fonctionner. Ainsi s’est achevé notre premier test avant de prendre la direction d’Aragón en Espagne. En arrivant à Aragón, nous avions espoir de pouvoir enfin commencer à réellement travailler sur la moto. Malheureusement, le vent était très présent ce qui n’aide pas beaucoup pour que la piste puisse monter en température. Lors de la première journée

nous avons eu 1h30 de piste correcte pour que les pilotes puissent ressentir de meilleures sensations ce qui fut très insuffisant pour travailler. Le deuxième jour, le ciel était couvert et la piste encore plus froide. Une température avoisinant à peine les 10° augmente le manque d’adhérence et empêche les pneumatiques de monter en température. Pour finir une averse a mouillé la piste. Il ne nous restait alors plus qu’à charger le camion et filer vers Valencia pour le premier test officiel IRTA des Moto3

et Moto2, en espérant cette fois-ci de vrais essais et en finir avec les simples roulages. Sur le circuit Ricardo Tormo de Valencia (Espagne), la rigueur de l’hiver rendait la piste fraîche et le fond de l’air très froid si l’on en juge notamment par le look très « emmitouflé » de notre staff technique ! Notre plan de travail prévoyait différentes étapes pour ce premier test IRTA. Les pilotes devaient prendre leurs marques sur la moto et ressentir un bon feeling. Pour Dominique, l’idée était de ne pas trop forcer et d’y aller crescendo. Pour Robin, c’est l’apprentissage jour après jour. Pour la deuxième journée de test IRTA, la météo s’est montrée plus clémente offrant ainsi de meilleures conditions en piste pour les pilotes. Tous deux ont ainsi poursuivi leurs progressions. La troisième journée clôturait le premier test IRTA de l’année et nous permettait de dresser un premier bilan. Quelques jours à peine pour nous rendre sur le circuit de Jerez de la Frontera et nous reprenions le travail avec le deuxième test IRTA.


Se donner du temps : la clef de la réussite

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erez de la Frontera est un circuit mythique, composé de freinages appuyés, de virages serrés et de courbes rapides. Il n’est pas spécifiquement un des circuits les plus faciles à maitriser. Il faut donc pouvoir trouver un bon équilibre avec le châssis et la suspension. Il faut bien dire aussi que depuis 2010 en Moto2, ce circuit de Jerez n’est pas la tasse de thé de Dominique, et pour Robin il fallait redécouvrir ce circuit avec une moto2. Pour l’un comme pour l’autre, il y avait donc pas mal de travail. Pour Robin, le but est d’enchaîner les kilomètres, trouver des sensations, comprendre la moto, son fonctionnement, apprendre à la maitriser. Un travail assez basic en résumé. Malheu-

reusement, une chute lors de la troisième journée mettra une fin prématurée à ses tests. Dominique, pour sa part, a eu un peu de mal à trouver des sensations le premier jour. Il a débuté son programme par un travail sur la suspension afin de générer des sensations différentes et essayer trois sortes de gommes en pneumatique. Cette phase effectuée, nous sommes passés au premier changement de géométrie lors du deuxième jour afin de trouver plus d’adhérence à l’accélération. Petite précision à connaître. Lors de ces essais, nous utilisons la même gomme pour le pneumatique arrière afin de mieux gérer les divers changements. Cela s’accompagne de réglages de suspensions et de premières améliorations notables mais insuffisantes. Nous avons donc essayé une nouvelle configuration qui a semblé apporter un léger mieux. Du côté de WP (les suspensions), nous avons essayé diverses solutions en hydraulique

pour l’amortisseur ainsi que pour la fourche et de ce point de vue c’est aussi positif. Dominique voulait plus de grip en sortie de virage, les chronos se sont alors améliorés et surtout la constance était là. Certes, il manque encore quelques dixièmes mais d’après les datas il y a des améliorations sur certains virages. Pour le moment, nous sommes toujours confrontés à un manque de performance dans trois courbes rapides, au niveau de la vitesse de passage pour être plus précis, et c’est un point sur lequel nous allons devoir travailler lors des prochains essais qui auront lieu sur ce même circuit courant Mars. Ces essais permettent avant tout d’essayer différentes combinaisons, d’affiner, de tester et pour cela il faut se donner du temps et s’armer de patience. Entre temps, notre programme de travail prévoit une nouvelle journée d’essais sur le circuit Paul Ricard en espérant, cette fois-ci, une bonne météo.

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Matthieu Grodecoeur, ingĂŠnieur Data de Dominique Aegerter. 36


Du cote de la technique : Comment prepare-t-on un week-end de GP ? Dans chaque numéro de ce magazine, nous allons essayer de nous plonger au cœur de quelques détails techniques qui font partie intégrante du quotidien de notre équipe. Nous allons donc tout d’abord nous intéresser à la préparation d’un weekend de GP d’un point de vue purement technique, ou comment l’exploitation des données venant de la moto ou des feuilles de chronométrage peut permettre aux ingénieurs et aux pilotes d’être totalement opérationnels avant même de pénétrer dans l’enceinte du circuit.

1- L’analyse de performance La première étape consiste à établir des statistiques précises provenant des résultats des années antérieures. En dépouillant les données de chaque séance, on peut ainsi mettre en lumière un rythme de course en fonction des différentes conditions de piste (température ambiante, température au sol, force et direction du vent) et surtout pour chacune des motos. On pourra alors très clairement déterminer si un circuit est plus favorable à une Suter ou une Kalex par exemple. On peut aussi analyser l’écart qui nous sépare des leaders. Cette étape est longue et fastidieuse mais elle permet d’accélérer le processus d’analyse des données provenant de notre propre moto. En effet, bien qu’après chacune des courses nous analysions les données « à froid », parfois, lorsque l’on y revient avec une année d’expérience supplémentaire, de nouvelles choses nous sautent aux yeux. Ainsi, peut-on faire ressortir des points d’amélioration tant au niveau des réglages de la moto que pour le pilote lui même. En cas de doute, nous pouvons toujours recouper nos informations avec le visionnage des séances d’essais ou de la course elle-même. L’objectif de l’analyse de perfor-

mance est de fournir un état des lieux très précis de la situation de l’an passé : tour le plus rapide, écart avec le premier, rythme de course, écart avec le vainqueur et des points précis sur lesquels le pilote doit travailler. L’objectif second, pour nous en ce qui concerne la partie technique, est de se remémorer les problèmes de setup ou avaries techniques s’il y en a eu.

2- Préparation du setup La préparation du setup est un savant mélange entre ce qui existait la saison passée et ce que l’on connait désormais de notre nouvelle moto. D’une année sur l’autre, Suter fait évoluer son matériel. Les essais hivernaux puis le fil des courses nous permettent d’affiner un réglage optimum pour notre pilote. L’idée de base est donc de mélanger l’ensemble pour faire ressortir ce que l’on pense être le setup optimum. Parfois, on dégrade volontairement notre setup idéal. Ce qui peut surprendre et mérite une explication. Pour donner un exemple concret, parlons du Qatar. Le Qatar est un circuit particulier. Il y a très peu de roulage pendant l’année et de nombreuses tempêtes de sable viennent balayer le circuit. Il est donc capital de se préparer à des conditions d’adhérence très faible en début de week-end. On adapte ainsi notre setup en fonction de ces paramètres et en sachant qu’on peut progressivement revenir vers un setup de plus en plus efficace. 37


Si l’on arrive sur un nouveau circuit comme ce fut le cas l’an passé avec Austin, ou comme cela sera le cas avec l’Argentine, l’information capitale pour un setup de départ va être notre rapport de démultiplication (c’est-à-dire le choix du pignon moteur et de la couronne à la roue arrière), conditionnant notre vitesse maximale théorique et aussi notre capacité d’accélération. Un circuit avec de longue ligne droite nous oblige à avoir un rapport long, qui par corollaire impose une accélération plus faible. Étant donné qu’en moto2, il est interdit de changer l’étagement de la boite, on peut dire que dans cette catégorie, il s’agit-là d’un des seuls facteurs moteur que l’on puisse régler. Pour nous permettre de simuler de nombreuses combinaisons, incluant par exemple l’utilisation du premier rapport ou non, nous avons développé nos propres logiciels de calcul.

3- Préparation des cartographies moteurs Au-delà du rapport de démultiplication, nous pouvons jouer sur les cartographies d’injection et d’allumage du moteur. Pour faire simple, il s’agit pour l’injection de la quantité d’essence que l’on va donner au moteur en fonction de la position de la poignée de gaz et du régime. De la même manière, on peut régler l’avance à l’allumage en fonction de la position de la poignée de gaz et du régime. Concernant l’allumage, notre marge de manœuvre est très limitée pour des raisons de fiabilité, Honda préférant ne courir aucun risque. Pour l’injection, on procède en 2 38

temps. On commence par compiler les données de l’année passée grâce à un module d’exportation de données élaboré par nos soins. Ensuite, on établit la cartographie ‘lue’ lors de la course de l’an passé. Sur la moto nous disposons d’un capteur de régime, de position de la poignée de gaz et surtout d’un capteur ‘Lambda’

permettant de mesurer le taux d’oxygène compris dans les gaz d’échappement. Cette mesure donne une indication claire si la moto reçoit trop d’essence ou à l’inverse pas assez. s ingénieurs, permettant de comparer nos données à une cartographie voulue. Le logiciel nous donne alors des Le seul problème restant que


Il faut donc mettre en relation les corrections nécessaires pour la moto antérieure avec l’évolution de notre package. Cela donnera nos cartographies de départ qui seront ensuite sans cesse améliorées tout au long du week-end.

Nous voilà fin prêt pour accéder au circuit ! Comme vous pouvez le constater, la moto2 est une catégorie assez fermée du point de vue technique, il faut donc travailler au niveau des détails. C’est la somme de tous ces petits détails justement et de ce travail acharné qui peut, à terme, faire la différence entre une moto victorieuse ou non.

Une fois les données compilées, nous pouvons les traiter à l’aide d’un autre logiciel, encore une fois conçu par nos ingénieurs, permettant de comparer nos données à une cartographie voulue. Le logiciel nous donne alors des directions de corrections. Le seul problème restant que d’une année sur l’autre nous faisons évoluer petit à petit nos conduits d’alimentation d’air à la boite à air, ou la forme et la longueur des échappements. 39


Presentation de nos partenaires Techniques

Depuis cette année, WP est notre partenaire pour les suspensions de la moto, travaillant en étroite collaboration avec Suter.

AFAM nous fournit les pignons et couronne necessaire pour adapter l’accélération de notre moto à chaque configuration de circuit, alors que ThreeD nous fournit les

notre partenaire pour les échappement titane sur mesure de notre Suter MMX.

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Honda Suisse nous fournit toutes les pièces d’origine Honda pour les CBR 600. Par exemple, une saison de GP représente environ 600 disques d’embrayage !

nous fournit les bulles ‘AeroMax’ pour affiner l’aerodynamique de notre moto2.

est notre partenaire pour les leviers, demi-guidon et certain élements de freinage.

est notre partenaire pour les plaquettes de frein.

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Les JO de Sotchi

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Les Jeux Olympiques de Sotchi: La Suisse en force

Cérémonie d’ouverture

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es 22ème Jeux Olympiques d’hiver se sont ouverts le 7 février dernier à Sotchi, ville russe bordée par la mer Noire à proximité du massif du Caucase et se termineront le 23 février prochain. Historiquement, c’est la deuxième fois que les Jeux Olympiques se déroulent en Russie, après les Jeux Olympiques d’été de Moscou en 1980. Après une cérémonie d’ouverture riche en couleurs et en féérie, 44

c’est la magie du sport qui a pris place avec 98 épreuves pour 15 disciplines différentes dans 7 sports olympiques. Pas moins de 3000 athlètes sont présents pour tenter d’entrer dans l’histoire du sport, ce qui représente 88 nations différentes. Les sommes engagées par la Russie pour l’organisation de ces Jeux sont vertigineuses. Pour certain, c’est la folie des grandeurs, pour d’autre, la volonté de se mettre en avant. Peu importe, ce qui compte c’est le résultat et la pos-

sibilité offerte aux sportifs de participer aux Jeux Olympiques dans de bonnes conditions.


Du côté des français …

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es représentants français sont à l’heure où nous écrivons ces lignes en douzième position du classement des pays, titulaires de 4 médailles : deux en or et deux en bronze. Ce sont les biathlètes Martin Fourcade et Jean-Guillaume Béatrix qui ont offert, le 10 février, ses premières médailles à la France, respectivement en or et en bronze. A 18 ans seulement, Coline Mattel a décroché, le mardi 11 février à Sotchi, une médaille de bronze en saut féminin à ski, avec deux vols maîtrisés (à 99,5 mètres puis 97,5 mètres) malgré une petite faute technique. Elle a ainsi offert sa troisième médaille à la France.

Le 13 février, Martin Fourcade renouvèle l’exploit et remporte à nouveau une médaille d’or

lors de l’épreuve des 20 km (biathlon). Parce que s’il semble si aisé à la faveur d’un Martin Fourcade d’enchainer les succès, ce sont pourtant des heures et des heures de travail qui se cachent derrière l’exploit. Et parfois la déception est énorme quand

l’acharnement ne paie pas. C’est le cas pour Brian Joubert qui met un terme à sa carrière après ces JO et qui ne remportera pas de titre olympique. C’est aussi le cas de du porteur de drapeau de l’équipe de France, Jason Lamy-Chappuis. Le Jurassien a perdu son titre en combiné nordique. 8ème après le saut, il a sombré en ski, échouant à la 35ème place, très loin, bien trop loin du médaillé d’or de l’épreuve.

Ma rti n Fo urc ad e

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Du côté des suisses … Nous sommes à une semaine de la fin des Jeux et la Suisse se porte plutôt très bien au classement des médailles puisqu’elle figure en bonne deuxième place. Avec sept médailles au compteur dont 5 en or, les athlètes suisses se révèlent dans une très grande forme.

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es exploits sont venus tout d’abord de Dario Cologna (27 ans). Déjà vainqueur du skiathlon dimanche 9 février, le Suisse a décroché sa deuxième médaille d’or à Sotchi en remportant aisément le 15km classique au ski de fond vendredi 14 février. Une heure plus tard, en ski alpin, l’épreuve de super-combiné messieurs est remportée par un autre suisse, Sandro Viletta (28 ans). Outsider parmi les

représentants de la discipline, le Grison a sorti le grand jeu dans cette finale. Lui qui n’est monté qu’une seule fois sur un podium en Coupe du monde, remportant le super-G de Beaver Creek en décembre 2011, a fait sensation et offert une nouvelle médaille à la Suisse. Ce ven46

dredi 14 février aura décidément porté chance à la Suisse puisque Selina Gasparin décroche à son tour une médaille d’argent lors du 15 km en biathlon. Plus tôt dans les Jeux, Dominique Gisin et Lara Gut avaient elles aussi ramené les précieux sésames dans l’escarcelle suisse. Dominique Gisin s’est en effet imposée ex aequo avec la Solvène Tina Maze dans la catégorie Descente

du Ski alpin tandis que Lara Gut prenait la troisième place. Enfin en snowboard Halfpipe, Iouri Podladtchikov (Suisse originaire de Russie) a lui aussi remporté la médaille d’or, venant battre le favori de la discipline, double vainqueur olympique, le légendaire américain Shaun White. Celui qui est surnommé

« I-Pod » s’est imposé grâce à une figure qu’il a lui-même créé le « Yolo» — You Only Live Once (On ne vit qu’une fois). Tout un symbole. Le porteur de drapeau de l’équipe de Suisse, Simon Ammann n’a pour le moment pas réussi a décroché de médaille.

Voici le bilan que l’on peut dresser pour le moment de ces Jeux Olympiques. Espérons pour la France comme pour la Suisse que le compteur continuera de s’élever !


Selina Gasparin

Sandro Viletta

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Palmarès des différents pays au JO de Sotchi :

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L’homme du paddock : Jean-Claude Schertenleib, journaliste suisse Jean-Claude Schertenleib est une figure bien connu des paddocks MotoGP. De ses débuts, ce journaliste émérite a conservé sa passion du sport automobile, celle née à l’époque où il écrivait dans la “ Feuille d’Avis de Neuchâtel “. Il a ensuite dirigé la rubrique sportive du “ Journal du Jura “ et pris son indépendance journalistique en 1985. Depuis cette date, il suit l’intégralité des courses du Championnat du Monde pour le quotidien suisse « Le Matin » dont il est devenu en 2000, l’adjoint du chef de la rubrique sportive. Auteur de deux livres consacrés à Jacques Cornu, il a également lancé depuis 1997 le livre « l’Année Grands Prix Moto » retraçant saison après saison le feuilleton de chacune des courses. Ce voyageur infatigable aime aussi se ressourcer dans sa maison au Brésil. Jean-Claude Schertenleib a embrassé le métier de journaliste sportif depuis de nombreuses années maintenant et il a été le témoin privilégié des changements apportés à la course moto. L’occasion nous a été donnée de lui demander son avis notamment sur les évolutions de ce milieu et si finalement pour lui, ce n’était pas « mieux avant ».

Que pensez-vous de l’évolution du milieu MotoGP ? Jean-Claude Schertenleib : Je commence cette année ma trentième saison de Grands Prix et j’en ai vu de toutes les couleurs. Trente ans, c’est une génération, c’est donc dire que le monde a beaucoup changé durant cette période. Nous sommes passés d’une époque rock and roll à un sport très professionnalisé même si, malheureusement, il y a encore beaucoup trop de monde, dans ce milieu, qui croit qu’être professionnel, c’est dépenser beaucoup d’argent. L’évolution était nécessaire, parce qu’on ne peut pas aller à l’encontre du temps, mais je ne suis malheureusement pas persuadé que tous les moyens investis le sont à bon escient. 50

Pour vous, cette évolution est-elle positive ou non ? JCS : Même si les années passent, jamais je ne dirai: «C’était mieux, avant.» Avant, c’était juste différent. L’évolution est-elle positive? Elle l’est assurément au niveau de l’image, car le «produit» MotoGP moderne est très bien ficelé, il est très attrayant. Ce qui m’ennuie un peu plus, ce sont les présences politico-financières de représentants de certains pays qui n’ont pas le niveau requis. Il faut certes élargir le panel «consommateurs», mais il ne faut pas oublier qu’on a affaire à un sport extrêmement dangereux et on a vu notamment la saison dernière en Moto2 des choses qui ne devraient pas exister. Mais, comme j’aime le dire: «Au restaurant, celui qui commande la tournée, la paie. Dans la vie, c’est celui qui paie, qui commande.»


Que pensez-vous des représentants suisses engagés dans le Championnat du monde ? JCS : Quatre pilotes d’un si petit pays dans la catégorie la plus relevée du championnat du monde, c’est une chance inouïe. Cette chance, on la doit à plusieurs facteurs. Celui qui a tout déclenché, c’est bien sûr l’arrivée en GP, en 2002, de Thomas Lüthi, aidé par Daniel-M. Epp; ce projet et les succès qui ont suivi ont prouvé à nos compatriotes qu’il était possible pour un Suisse de se faire une place en GP. Et le premier qui a parfaitement saisi ce message, c’est M. Olivier Métraux, qui avait été imprégné des odeurs et des bruits de la course lorsqu’il accompagnait son regretté père, Michel, sur les circuits. Qu’un chef d’entreprise aussi important décide d’investir dans un sport qui, pour les grands médias, reste secondaire, c’était un nouveau signe fort. La suite, on l’a connaît. Il y a du talent et de l’envie dans ce pays et aussi bien Dominique Aegerter, Randy Krummenacher et, aujourd’hui, Robin Mulhauser ont parfaitement compris le message: oui, c’est possible. Rendez-vous compte: l’an dernier, on a eu deux Suisses parmi les six premiers de la classe Moto2 et cette année, je suis persuadé qu’on retrouvera parfois les deux mêmes sur le même podium. Quel est l’évènement qui vous a le plus marqué depuis que vous arpentez les paddocks et pourquoi ? JCS : Il y en a eus plusieurs. Des très tristes et des très joyeux. J’ai été le témoin des accidents mortels d’Ivan Palazzese, de Noboyuki Wakai, de Daijiro Kato, de notre très cher Shoya Tomizawa et de Marco Simoncelli; dans ces moments, même si l’on se trouve dans un milieu de très forte concurrence, généralement empreint de jalousies, j’ai chaque fois été frappé combien la mort pouvait devenir rassembleuse. Dans les moments beaucoup plus joyeux, il y a eu les victoires de Jacques Cornu, celles de Thomas Lüthi, son titre extraordinaire, puis le premier podium de Dominique Aegerter. Mais l’événement qui m’a peut-être le plus marqué ne s’est pas déroulé dans le paddock, mais bien sur une colline californienne, début 1994; j’ai toujours été très proche de Wayne Rainey et j’ai été le premier journaliste européen à lui rendre visite, chez lui, après le terrible accident de Misano 1993, qui l’a condamné à la chaise roulante. En montant en direction de sa maison, je me suis arrêté trois fois,

chaque fois avec l’envie de faire demi-tour: «Ce que tu viens faire ici, c’est du voyeurisme, j’aurais honte», me disais-je. Mais j’ai continué. Et quand je suis arrivé devant la grande terrasse, Wayne était là, qui souriait; c’est lui qui m’a réconforté. Ce jour-là, s’il y avait un «handicapé» parmi nous, ce n’était en tous les cas pas lui! Depuis la tragédie des 24 heures du Mans en 1955, les autorités suisses ont interdit les courses en circuit à caractère public sur le territoire. Selon vous, cette situation doit-elle évoluer ou non ? JCS : Elle doit évoluer, mais elle n’évoluera pas, malheureusement. Le message que nous devons tenter de faire passer ne doit pas parler de GP, de courses importantes, mais bien de la nécessité de disposer d’une installation où les gens pourraient apprendre, puis perfectionner leur conduite. Où ils pourraient, aussi, venir prendre du plaisir, mais toujours dans un cadre strict, avec un entourage professionnel. Chaque année, des centaines de milliers de francs sont dépensés par des Suisses qui vont vivre leur passion sur des circuits, à l’étranger; l’équilibre économique d’un projet sérieux peut être assuré. Et une fois ce travail de base réalisé, une fois que l’on aura prouvé le bien-fondé d’un tel outil de travail, alors oui, on pourra tenter de demander plus Que pensez-vous de la composition du Team Technomag-carXpert cette saison ? JCS : L’expérience – Dominique Aegerter – alliée à la soif d’apprendre – Robin Mulhauser -, c’est un cocktail qui me paraît idéal. Dominique est toujours dans une phase ascendante, ce garçon ne cesse de me bluffer parce que, chaque fois qu’il rencontre un nouvel obstacle, il est capable de le surmonter. Sa régularité est désormais une base solide, sur laquelle il doit continuer à construire; il en est capable… à condition qu’il ne se focalise pas sur un adversaire particulier (on ne va pas le citer, mais tout le monde l’a reconnu). Robin, lui, est un garçon intelligent, mû par un enthousiasme de tous les instants; il est naturellement doué et donc parfaitement capable de digérer ce nouvel échelon – très important – dans sa carrière. Sur un plan médiatique, avoir dans une équipe à la fois un Suisse alémanique et un francophone est bien sûr idéal.

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