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Des défis persistants
SEMESTRE EUROPÉEN 2022
Des défis persistants, alors que la transition environnementale se fait plus pressante
TEXTE Sidonie Paris, Affaires économiques, Chambre de Commerce PHOTOS Jens Willebrand pour l’École Européenne et Gonz DDL/Unsplash
01. 02. Lutter contre les inégalités scolaires dues aux disparités de milieu socio-économique et linguistique des élèves et trouver des sources d’énergie alternative au fossile figurent parmi les priorités relevées par la Commission européenne pour le Luxembourg.
Le 23 mai, la Commission européenne a publié son Paquet «Semestre européen» du printemps 2022, comprenant notamment les rapports par pays et les recommandations du Conseil pour les 27 États membres. Ces documents font le point sur la mise en œuvre des recommandations adoptées par le Conseil de 2019 à 2021 et récapitulent les principaux défis insuffisamment couverts dans les plans nationaux pour la reprise et la résilience (PRR). L’économie du Luxembourg a bien résisté au choc de la pandémie et les effets escomptés à court terme de la guerre en Ukraine devraient être essentiellement indirects. Cela étant, la hausse de l’inflation (plus importante que dans d’autres pays européens) s’ajoute à la liste de défis récurrents qui vont en s’amplifiant, à savoir la poursuite de la forte hausse des prix du logement et le niveau d’endettement élevé des ménages qui en découle, les pénuries de main-d’œuvre tant pour les emplois peu que très qualifiés, un risque de pauvreté en hausse, ainsi qu’une productivité qui stagne depuis plusieurs années.
Le rapport 2022 pour le Luxembourg, publié par la Commission européenne, dresse le bilan de la mise en œuvre du PRR luxembourgeois et évalue ses avancées par rapport aux recommandations par pays adoptées par le Conseil de 2019 à 2021.
Bien que l’accroissement des problèmes d’offres, accentué par le conflit en Ukraine, couplé à la hausse des prix, devrait ralentir la reprise économique post-Covid (le STATEC table sur 2% de croissance en volume pour 2022, contre 3,5% fin 2021), l’économie luxembourgeoise reste dynamique, portée par un marché de l’emploi toujours en hausse. Sur le court terme, le conflit en Ukraine devrait avoir des répercussions indirectes sur les performances économiques, principalement liées à la hausse de l’inflation, portée par l’envolée des prix de l’énergie. La stabilité macroéconomique du pays et son niveau de productivité sont également des points forts, fragilisés cependant par la détérioration relative des finances publiques au cours des cinq dernières années, et un niveau de compétence de base des élèves inférieur à la moyenne de l’Union européenne (UE). Par ailleurs, la Commission européenne salue les progrès accomplis dans le secteur de la finance verte, et, plus largement, sur la transition environnementale. S’agissant des objectifs de développement durable de l’Organisation des Nations Unies, le Grand-Duché affiche de très bonnes performances sur les aspects de durabilité environnementale, bien qu’il demeure en dessous de la moyenne de l’UE sur les émissions de CO2 et la part d’énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale.
« Nombre de difficultés étaient déjà recensées dans le cadre du Semestre européen dans le passé, notamment la lutte contre le blanchiment de capitaux et le fort taux d’endettement des ménages, conséquence de la hausse rapide des prix du logement ces dernières années ».
Semestre européen dans le passé. C’est notamment le cas s’agissant de la lutte contre le blanchiment de capitaux et du fort taux d’endettement des ménages, conséquence de la hausse rapide des prix du logement ces dernières années. À cela s’ajoutent les défis environnementaux et climatiques et les faiblesses dans le secteur de la santé mises en avant durant la pandémie. Enfin, l’accent est mis sur l’acquisition, respectivement le renforcement des compétences et la reconversion professionnelle sur le long terme, visant notamment l’amélioration de l’employabilité des seniors (un sujet qui revient périodiquement dans les rapports de la Commission, et un indicateur sur lequel le Luxembourg a une grande marge de progression dans les classements de compétitivité internationaux).
La Commission note également une série de défis qui ne figurent pas – ou que partiellement – dans le PRR. Il s’agit, entre autres, de la viabilité du système de pensions, des vides juridiques pouvant bénéficier aux multinationales faisant usage de pratiques de planification fiscale agressives, d’un système éducatif qui renforce les inégalités, des problèmes de mobilité et des goulets d’étranglement possibles qui accompagneront l’abandon progressif des énergies fossiles. Sur ce dernier point, la Commission européenne souligne que le Grand-Duché sera confronté à la hausse de la demande d’électricité et à sa forte dépendance aux importations d’énergie (le pays importe près de 90% de l’énergie qu’il consomme). La mise en œuvre d’une transition énergétique équitable, d’autant plus pressante depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et le besoin de diversifier l’approvisionnement des pays européens nécessite, selon la Commission, une intensification de la mutualisation des efforts entre le Luxembourg et les autres États membres de l’UE. Une exploitation accrue des sources d’énergie alternatives telles que la géothermie, ou encore la révision des mesures d’incitation, au-delà de la taxation du carbone, pour encourager l’utilisation des transports publics à l’échelle nationale et régionale, sont également préconisées.
Recommandations du Conseil de l’Union européenne
Au regard de l’évaluation de la Commission européenne, le Conseil de l’UE a soumis une série de recommandations sur le programme national de réforme, ainsi que sur le programme de stabilité du Luxembourg pour 2022.
Les recommandations pour 2022 et 2023 portent sur trois thèmes clés:
La soutenabilité des finances publiques: le Conseil invite le Grand-Duché à augmenter dès à présent les investissements publics en faveur de la transition écologique et numérique et de la sécurité énergétique. Par ailleurs, pour 2023, il recommande une croissance des dépenses courantes maîtrisées et une politique budgétaire prudente. L’amélioration de la viabilité à long terme du système de pensions figure également parmi les recommandations, tout comme l’adoption de mesures pour lutter efficacement contre l’évasion fiscale.
La réduction des inégalités dans le système scolaire et universitaire: le Conseil plaide pour la réduction des inégalités observées en fonction du milieu socio-économique et linguistique des élèves, et pour la promotion de l’égalité des chances pour tous.
La réduction de la dépendance du pays aux combustibles fossiles: afin de diminuer la dépendance aux énergies fossiles tout en accélérant le développement des énergies renouvelables, le Conseil souligne l’importance de parvenir à une capacité de transport suffisante de l’électricité et le besoin d’augmenter les investissements en termes d’efficacité énergétique. Il s’agit également d’aider les municipalités à déployer les énergies renouvelables (en particulier, éolienne et photovoltaïque), via l’élaboration de plans locaux détaillés. Enfin, le Luxembourg est invité à promouvoir davantage les transports électriques et à investir dans les réseaux et infrastructures de transport public.