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Un nouveau départ

MIKAËL BOWES

Ȃge : 19 ans. Ville natale : Saint-Lin-Laurentides QC

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PLAT : PÂTÉ CHINOIS FILM : THE GREATEST SHOWMAN (LE MAÎTRE DE LA SCÈNE) ANIMAL : GRENOUILLE

COUPS DE CŒUR

Je m’appelle Mikaël.

En réalité, peu de gens connaissent mon nom à la naissance et c’est sûrement mieux ainsi. Durant toutes les 12 premières années de ma vie, je me trouvais très bizarre d’aimer les choses de garçons, les voitures et toutes ces petites bricoles-là, mais j’en avais totalement le droit.

Le problème c’est qu’on met des œillères aux enfants; aime les fleurs et le rose, tu es une fille, aime le bleu et des camions si tu es un garçon.

J’ai toujours trouvé étrange que je doive préférer une couleur à une autre, car au fond ce n’est justement qu’une couleur. Par contre, je peux affirmer que j’adore le vert!

Je ne pense pas que je sois tellement différent des autres, car je ne me suis jamais associé à ces couleurs bidons, au contraire, je suis comme vous tous. J’adore la pizza, j’adore la poutine, j’aime l’extérieur et je suis étudiant, comme la plupart de vous. La plus grande différence entre nous tous, c’est que moi je ne suis pas capable de faire autant de sport que vous!

J’ai été chanceux en quelque sorte de vivre ici, car la majorité des gens transgenres n’osent pas dire leurs vrais noms et assumer qui ils sont, par peur. Qui peut les blâmer?

À l’échelle mondiale, en 2019, 311 personnes transgenres ont été tuées. Ce n’était pas un hasard, car elles étaient à la mauvaise place au mauvais moment, c’était intentionnel, cruel, violent et tellement futile à la fois.

Je ne comprends pas comment une personne peut tuer de sang-froid, mais comment une personne peut tuer à cause d’un prénom ou d’un pronom, ça me perd encore plus.

En fait, cette peur est simplement un amas de choses terrifiantes arrivées aux gens dans notre situation qui crée une boule d’angoisse impossible de décoller de notre peau. En d’autres mots, c’est comme avoir des aiguilles qui entrent lentement dans notre ventre, à cause d’une voix qui nous dit « ne fais pas ça, tu pourrais te faire frapper ». QUÉBEC ET À L’EXTÉRIEUR DU CANADA

Car malheureusement, c’est ce qui m’effraie aussi. Je sais bien que les gens n’ont rien contre moi et qu’ils vont me laisser vivre, mais cette peur accrue s’installe à cause de la minorité de gens qui, justement, ne se sont pas occupés de leurs affaires. Durant un défilé de la fierté gaie, des gens portent une pancarte invitant la population à respecter les personnes transgenres et leurs droits.

La transition, c’est quelque chose de tellement spécial. Nous avons la chance de renaître, de changer et de faire de nous quelqu’un de meilleur, mais en même temps, c’est l’une des choses les plus horribles qui soient.

Nous avons l’impression de faire l’un de vos tests : ramper dans la boue, s’écorcher tout le corps sur des obstacles interminables et toujours avoir l’impression que la ligne d’arrivée s’éloigne de nous. Chaque pas nous essouffle, nos poumons se resserrent quand les gens nous critiquent en disant qu’on ne va pas assez vite, et par-dessus tout, on essaie d’atteindre la ligne d'arrivée.

C’est vrai, la transition a l’air horrible avec tous ces renseignements déprimants. Heureusement, il y a de bons côtés.

Par exemple, je suis présentement en processus de changement de nom. C’est comme si je faisais un sprint à l’envoi des papiers, mais qu’ensuite, avec l’attente, mes pieds s’accrochent au sol de plus en plus, que je ralentis et que je dois forcer mes jambes pour avancer.

Je crois que tout le monde a ce problème, je veux dire, s’accrocher uniquement à l’avenir. Nous oublions trop souvent de fermer les yeux et juste nous dire : « je me suis rendu ici, je suis fort. »

Mais à la place, nous ne faisons que se dire qu’il en reste beaucoup trop à courir, et que les prochains obstacles sont insurmontables, qu’on n’y arrivera pas et que c’est trop dur.

Mais je crois que nous devrions nous retourner pour regarder plus souvent derrière nous, car tu ne l’as sûrement jamais remarqué, mais toi aussi tu as sûrement déjà escaladé le mur le plus haut.

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