Les debuts du Tour de France L Tour 1904 ressemble comme un frère à celui de l’année précédente : même nombre d’étapes, Le même lieu de départ, mêmes grands favoris : Garin et Aucouturier. Mais sur le plan sportif, ce e m édition se résume à un long et monotone duel entre Garin et Pothier, l’un courant dans le sillage é de l’autre. À l’arrivée de la cinquième et avant-dernière étape, les deux hommes sont séparés d par un écart infime : 28 secondes. Dans la dernière, Garin s’assure l’avantage décisif, prenant p aau total près de 3 minutes et demie à son jeune rival. Les autres finissent très loin. « Le Tour est termine... » Sans suspense pour le classement final, le Tour 1904 se voit, en revanche, singulièrement animé quant à son déroulement. On s’aperçoit que le service d’ordre, mis en place par l’autorité publique, n’a pas les moyens de contenir les débordements populaires qui se produisent çà et là. C’est ainsi qu’à la sortie de Saint-Étienne, dans le col de la République, une bande de voyous s’en prend aux concurrents. Puis, on va jusqu’à découvrir que des coureurs ont utilisé des raccourcis ou même des moyens de transport autres que le vélo. Desgrange, en plein désarroi, annonce : « Le Tour est terminé et sa seconde édition, je le crois, aura été la dernière. Il sera mort de son succès, des passions aveugles qu’il aura déchaînées ». Mais le créateur du Tour se ressaisit. Il se trouve conforté par l’Union vélocipédique de France dont le couperet tombe quatre mois après l’arrivée, le 30 novembre : déclassement des quatre premiers – les frères Maurice et César Garin, Lucien Pothier et Hippolyte Aucouturier – pour violation des règlements. La victoire revient à Henri Cornet, 20 ans, qui sera le plus jeune vainqueur du Tour de France, victoire à laquelle sa valeur ne le prédestinait pas. Maurice Garin sera suspendu deux ans et Lucien Pothier, à vie.
Publicité des années 1920 pour la marque de cycles Alcyon.
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Henri Cornet au contrôle de Lyon, dans l’étape Besançon-Grenoble du Tour de France 1905.
L’année suivante, le Tour connaît encore des turpitudes. Ainsi, si Louis Trousselier légitime ses prétentions en remportant la première étape, ce jour-là, la moitié du parcours est parsemée de clous et pas un coureur ne compte moins de dix crevaisons. Desgrange souhaite, une nouvelle fois, arrêter le Tour mais les participants insistent pour continuer. Le nombre des engagés ne cesse en effet de croître, il s’élève à plus de cent en 1907. Le tirage de L’Auto également, et, en 1910, durant toute la course, le journal dépasse les 300 000 exemplaires. Le Tour de France est bien lancé…
De nouveaux velos Les machines sont bientôt poinçonnées. Il s’agit d’une opération mystérieuse qui se déroule dans les locaux du journal L’Auto. Un garçon de bureau est chargé de prendre le vélo du coureur, de le monter au premier étage où les officiels plombent les moyeux des deux roues par plomb et fil métallique. Ils poinçonnent aussi la boîte de pédalier, la tête de fourche et apposent ensuite un signe distinctif secret. Le garçon de bureau restitue alors le vélo à son propriétaire à qui l’on refuse le droit d’assister à l’opération. De 1909 à 1912, après la domination des cycles La Française et Peugeot, on assiste à l’emprise de la marque Alcyon. Peu à peu, le matériel s’allège. En 1912, malgré le froid et la neige au Galibier, malgré la pluie qui transforme les routes en ruisseaux, voire en torrents, tous les records de vitesse sont battus dans les Alpes, où dominent le Belge Odile Defraye, Octave Lapize et Eugène Christophe. Lapize abandonne dans les Pyrénées.
Publicité de 1908 pour la marque de cycles Peugeot.
Il grimpe pourtant avec aisance le Portet-d’Aspet quelques secondes derrière Defraye mais soudain fait demi-tour et repart en direction de Saint-Girons. « Comment lutter dans de telles conditions ? déploret-il, tous les Belges aident Defraye et du même coup la marque Alcyon ». Lapize entraîne dans son abandon celui de toute son équipe La Française. L’attitude du « Frisé » n’est pas passée inaperçue à Henri Desgrange qui, de son côté, avait déjà remarqué la collusion au sein des équipes de marques.
César Garin, Lucien Pothier et Maurice Garin au Vélodrome du Parc à Bordeaux lors du Tour de France 1904.
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