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Coordination éditoriale et iconographie : Nathalie Courtois Conception graphique et réalisation : Agnès Boulmer Assistante éditoriale : Charlotte Blazy © le cherche midi éditeur 2012 23, rue du Cherche-Midi 75006 Paris Vous pouvez consulter notre catalogue général et l’annonce de nos prochaines parutions sur notre site : www.cherche-midi.com

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Sommaire

7 e c ço a n f a r é F r P de e r i a éd c é b a ’ L 75 1 s e g a n g Témoi Biographie 217 Le musée Ray mond

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Raymond Devos a 22 ans quand il pose pour la première fois dans les studios Harcourt (haut). Il y retournera dix ans plus tard, en 1956 et 1958.

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Préface

Il manquait un ouvrage illustré sur Raymond Devos. À quelques mois de l’ouverture du musée qui lui est consacré dans sa maison de Saint-Rémy-lès-Chevreuse, nous sommes heureux de vous faire découvrir ce très beau livre. Raymond Devos, ce diable d’homme, a rempli les salles de 1955 à 1999. Pendant quarante-cinq ans ! Nous ne compterons pas ses années de théâtre, depuis son rôle dans L’Étourdi au théâtre de la Fenice de Venise en 1947 jusqu’au Pierrot de La Famille Arlequin en 1955. Nous ne ferons que rappeler que, en 1961, ses « Pupitres » firent 400 représentations, qu’entre 1964 et 1989 il présenta quelque 1 000 représentations dans divers théâtres parisiens, d’Hébertot à Montparnasse en passant par le Théâtre de la Ville. En 1994, il se produisit lors de 46 soirées à l’Olympia puis, en 1999, à l’âge de 77 ans, lors de 22 soirées dans ce même temple du music-hall ! Il ne faut pas s’étonner qu’il ait reçu deux molières ! Entre-temps, il tournait en province, pardon en régions, en Belgique, en Suisse, au Québec, en Afrique, dans toute la francophonie… C’est pour cela qu’il s’insurgeait quand on lui parlait de « faire sa rentrée » ! « Mais je ne suis jamais sorti », assurait-il avec justesse ! Quels voyages extraordinaires dans l’imaginaire nous a-t-il fait faire ! Nous ajouterons aussi que ses textes figurent dans les livres scolaires depuis « Mon chien,

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c’est quelqu’un », en 1975, et qu’il est encore étudié en 2012 dans les classes ! Des théâtres, des salles, des écoles, des rues, un collège portent son nom. Quel patrimoine ! Quelle vie ! Écrivain, mime, conteur, acrobate, musicien, jongleur, chanteur, magicien, clown, monocycliste, funambule… que manquait-il à sa palette ? Qu’aurait-il été s’il avait suivi les études qu’il n’avait pu poursuivre passé l’âge de 14 ans ? Il apprit tout par « heures supplémentaires », se plaisait-il à dire. « Il suivit sa pente en montant », comme disait Gide ! C’est pourquoi il reçut, à son grand étonnement d’ailleurs, les plus hautes distinctions : Grand Prix du théâtre de l’Académie française, commandeur de l’ordre du Mérite, commandeur des Arts et Lettres, commandeur de la Légion d’honneur. Nous allons retrouver tout cela dans cet ouvrage conçu sous la houlette de François Morel, ce bonhomme au sens noble de l’acception (mon Deschiens, c’est quelqu’un !), qui nous rappelle aussi que le cinéma, Raymond Devos en tâta. D’« Absurde » à « Zygomatiques » en passant par « Dieu », voici quelques mots dits, et fort joliment dits. Les nombreux amis de Raymond Devos – qu’ils soient de sa génération ou plus jeunes – livrent aussi dans ces pages leurs meilleurs souvenirs et leur admiration pour l’artiste. Qu’ils en soient ici tous remerciés ! Pierre Herran, président de la fondation Raymond-Devos (reconnue d’utilité publique le 14 janvier 2009) 7

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Dans la loge de Bobino, en dĂŠcembre 1959.

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Septembre 1964, dans les coulisses du Théâtre des Variétés.

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Janvier 1963, Raymond Devos se produit au cabaret parisien La Tête de l’art.

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Ce serait absurde d’écrire un abécédaire autour de Raymond Devos sans évoquer le mot « absurde ». Comme un rond-point cerné de sens interdits. Comme une mer démontée. Comme la vie d’un homme qui ne sait pas ce qu’il fait sur terre. Comme un homme qui cherche à comprendre le monde. Avec sa logique bien à lui, il donne des réponses qui font rire tant elles semblent absurdes, mais les réponses des philosophes, des théologiens, des penseurs sont-elles moins absurdes ? Ce serait absurde de tenter de définir l’absurde de Devos. (Voir « Non-sens ».)

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Je ne sais pas si vous croyez à la sorcellerie. Moi, je ne voulais pas y croire jusqu’au jour où je me suis aperçu que j’étais possédé du percepteur. Oui ! Possédé ! Envoûté par mon percepteur ! Depuis quelque temps, déjà, je le voyais qui rôdait autour de ma maison. Il allait et venait… Il semblait dessiner tout en marchant des figures géométriques. En fait, il prenait des mesures fiscales ! « Le possédé du percepteur » Raymond Devos

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Qui tuer ? Raymond Devos Un jour, en pleine nuit… mon médecin me téléphone : – Je ne vous réveille pas ? Comme je dormais, je lui dis : – Non. Il me dit : – Je viens de recevoir du laboratoire le résultat de nos deux analyses. J’ai une bonne nouvelle à vous annoncer. En ce qui me concerne, tout est normal. Par contre, pour vous… c’est alarmant. Je lui dis : – Quoi ?… Qu’est-ce que j’ai ? Il me dit : – Vous avez un chromosome en plus… Je lui dis : – C’est-à-dire ? Il me dit : – Que vous avez une case en moins ! Je lui dis : – Ce qui signifie ? Il me dit : – Que vous êtes un tueur-né ! Vous avez le virus du tueur… Je lui dis : – … Le virus du tueur ? Il me dit : – Je vous rassure tout de suite. Ce n’est pas dangereux pour vous, mais pour ceux qui vous entourent… ils doivent se sentir visés. Je lui dis : – Pourtant, je n’ai jamais tué personne ! Il me dit : – Ne vous inquiétez pas… cela va venir ! Vous avez une arme ? Je lui dis : – Oui ! Un fusil à air comprimé. Il me dit : – Alors pas plus de deux airs comprimés par jour ! Et il raccroche ! Toute la nuit… j’ai cru entendre le chromosome en plus qui tournait en rond dans ma case en moins. Le lendemain, je me réveille avec une envie de tuer… irrésistible ! Il fallait que je tue quelqu’un. Tout de suite ! Mais qui ? Qui tuer ? Qui tuer ? Attention ! Je ne me posais pas la question : « Qui tu es ? » dans le sens : « Qui es-tu, toi qui cherches qui tuer ? » ou : « Dis-moi qui tu es et je te dirai qui tuer. » Non !… Qui j’étais, je le savais ! J’étais un tueur… et un tueur sans cible ! (Enfin… sans cible, pas dans le sens du mot « sensible » !) Je n’avais personne à ma portée. Ma femme était sortie… Je dis : – Tant pis, je vais tuer le premier venu ! Je prends mon fusil sur l’épaule… et je sors. Et sur qui je tombe ?

Sur… le premier venu ! Il avait aussi un fusil sur l’épaule… (Il avait un chromosome en plus, comme moi !) Il me dit : – Salut, toi, le premier venu !… Je lui dis : – Ah, non ! Le premier venu, pour moi, c’est vous ! Il me dit : — Non ! Je t’ai vu venir avant toi et de plus loin que toi ! Il me dit : – Tu permets que je te tutoie ? Je te tutoie et toi, tu me dis tu ! Je me dis : « Si je dis tu à ce tueur, il va me tuer ! » Je lui dis : – Si on s’épaulait mutuellement ? D’autant que nous sommes tous les deux en état de légitime défense ! Il me dit : – D’accord ! On se met en joue… Il me crie : – Stop !… Nous allions commettre tous deux une regrettable bavure… On ne peut considérer deux hommes qui ont le courage de s’entre-tuer comme des premiers venus ! Il faut en chercher un autre ! J’en suis tombé d’accord ! Là-dessus, j’entends claquer deux coups de feu et je vois courir un type avec un fusil sur l’épaule… Je lui crie : – Alors, vous aussi, vous cherchez à tuer le premier venu ? Il me dit : – Non, le troisième ! J’en ai déjà raté deux ! Et tout à coup, je sens le canon d’une arme s’enfoncer dans mon dos. Je me retourne. C’était mon médecin… Qui me dit : – Je viens vous empêcher de commettre un meurtre à ma place… Je lui dis : – Comment, à votre place ? Il me dit : – Oui ! Le laboratoire a fait une erreur. Il a interverti nos deux analyses. Le chromosome en plus, le virus du tueur, c’est moi qui l’ai ! Je lui dis : – Docteur, vous n’allez pas supprimer froidement un de vos patients ? Il me dit : – Si ! La patience a des limites. J’en ai assez de vous dire : « Ne vous laissez pas abattre ! » Je lui dis : – Vous avez déjà tué quelqu’un, vous ? Il me dit : – Sans ordonnance, jamais ! Mais je vais vous en faire une !

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Je te tutoie et toi, tu me dis tu ! Je me dis : « Si je dis tu à ce tueur, il va me tuer ! »

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Si l’on considère exclusivement Devos comme un amoureux des mots, un comique lexical, un intellectuel de la rigolade, on a tort. Car l’homme n’est pas seulement un pur esprit, il est aussi un pur physique. À 15 ans, il devint champion de barres parallèles. À 70 ans, messieurs dames, cet homme faisait le poirier. À 80 ans passés, il jonglait toujours avec les mots, bien sûr, mais aussi avec les balles, les quilles et tout ce qui lui tombait sous la main. L’école du mime Decroux lui avait appris la science du geste juste. S’il ne s’était cassé le sternum, on l’aurait vu voler dans les airs. Dans une grange de sa propriété de Saint-Rémylès-Chevreuse, il avait installé un trampoline. Des sportifs de haut niveau lui ont donné des cours. C’est qu’il rêvait de s’envoler, Raymond, de se délester de la réalité, de monter vers le ciel et de rejoindre Icare et son rêve. Hélas ! comme l’a dit Georges Brassens, un autre génial humoriste : « La loi de la pesanteur est dure mais c’est la loi ! »

BATE

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