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Faire face aux peurs de l’enfant
Aucun parent n’aime voir souffrir son enfant et la peur peut provoquer de la souffrance, donc les parents vont légitimement chercher à éviter que leur enfant ait peur. Cependant, malgré la meilleure volonté du monde, il est impossible d’y parvenir complètement et peutêtre même que cela n’est pas souhaitable. Mais il y a peur et peur, lesquelles sont normales et lesquelles doivent alerter les parents ? Sally El Sibahi, psychologue du développement tout au long de la vie en libéral à Castelnaudary, nous aide à y voir plus clair.
Quelles
De 0 à 8 mois, c’est surtout la peur des étrangers, de l’abandon, l’angoisse de la séparation. L’enfant a peur des autres, des visages inconnus, mais il peut aussi avoir peur des chutes, peur de tomber et peur des bruits soudains.
Entre 8 mois et 1 an, il aura surtout peur des bruits du quotidien un peu trop forts, le téléphone, l’aspirateur.
De 1 à 2 ans, c’est la peur des monstres et du noir qui commence. Il a peur du trop grand calme quand on le met dans son lit, de la porte fermée…
Entre 2 et 5 ans, ce sont des peurs passagères qui peuvent viser les gros animaux (surtout s’il n’en a pas à la maison), les orages, les clowns, les fantômes, les sorcières et parfois même le père Noël.
Entre 5 et 12 ans, l’enfant s’approche de l’âge de raison ou l’a passé, et ses peurs se portent sur des événements du réel : les kidnappeurs, les voleurs, le médecin, le dentiste, les accidents. Il commence aussi à avoir peur de la mort, de diverses situations sociales comme le rejet à l’école, prendre la parole en public…
les éléments déclencheurs ?
C’est très aléatoire, il est difficile de savoir quand et si une peur apparaîtra, mais il y a des peurs classiques qui sont liées au développement de l’enfant et qui sont normales. Elles peuvent survenir à mesure que l’enfant découvre de nouvelles choses.
Il y a aussi des peurs acquises qui sont liées à l’expérience. Par exemple, s’il assiste à une bagarre entre chats et qu’il découvre à ce moment-là les chats, il risque d’avoir peur des chats parce qu’il y assimile de la violence et aura une mauvaise première expérience.
Les peurs acquises peuvent aussi être copiées sur les réactions de l’entourage. L’enfant est une éponge à émotions, il est normal qu’il reproduise nos attitudes. Si sa figure de référence a une peur quelconque, l’enfant risque de reproduire cette peur.
Peut-on prévenir ces angoisses, ces peurs ?
Il est difficile de voir venir une peur, mais il faut faire attention à ce que nos enfants regardent. Il est important de respecter les tranches d’âges recommandées pour les films et autres divertissements. Le site Filmspourenfants.net peut aider les parents pour cela.
Il est bon de porter attention à nos propres réactions et peurs afin de ne pas les transmettre à nos enfants. Un parent et son enfant n’ont pas le même vécu, ils n’auront pas les mêmes peurs.
Je mettrais aussi en garde les parents à propos des jeux qui font peur. Certes, on ne peut éviter la peur chez nos enfants, mais de là à la créer, ce n’est pas forcément une bonne idée. Un papa, par exemple, est censé être protecteur, s’il provoque la peur chez son enfant pour une « farce », même si c’est sous forme de jeu, cela peut perturber celui-ci.
Je déconseille aussi aux parents de faire intervenir des notions qui visent à faire peur à l’enfant, comme lui faire croire que s’il n’est pas sage une sorcière ou un méchant monsieur va venir le gronder.
Autre point important, même si c’est plutôt contreintuitif, il ne faut pas surprotéger son enfant. Il faut veiller à sa sécurité, bien sûr, mais il doit faire ses propres expériences. Par exemple, quand il commence à marcher, si on lui dit sans arrêt de faire attention, qu’il risque de tomber ou de se faire mal, il sera en hypervigilance alors qu’il n’y a pas de raison qu’il le soit. Autre exemple, si les parents refusent de le laisser seul à un anniversaire et qu’ils ne font pas confiance à d’autres adultes (de manière excessive), l’enfant croira qu’il sera en danger s’il se retrouve sans ses parents. Si les parents font trop attention à la place de l’enfant, il n’apprendra pas à faire attention lui-même.
Comment peuvent s’exprimer les peurs chez l’enfant ? Va-t-il les verbaliser ?
Tout dépend de l’âge, mais certains vont verbaliser et d’autres non.
Il faut savoir que les peurs se logent souvent la nuit, qui est un « nid à angoisses ».
Si l’enfant verbalise, ce sera plus facile. S’il ne verbalise pas, il faut tenter de détecter des indices physiologiques et comportementaux.
Les signes physiologiques seront par exemple l’accélération du rythme cardiaque, des tremblements, des sueurs… Les indices comportementaux sont généralement de trois ordres : l’immobilisation, l’enfant aura tellement peur qu’il ne pourra plus bouger, la fuite, qui peut être une fuite physique, mais aussi une fuite des situations, comme ne plus vouloir aller à l’école ou au parc, et enfin, le combat, des gestes et des attitudes agressives. Il ne faut pas hésiter à consulter, parce qu’il n’est pas toujours facile d’interpréter certaines attitudes.
Comment réagir ? Comment le rassurer et faire en sorte qu’il ait moins peur ?
La règle d’or, et cela concerne la plus petite comme la plus grosse peur : on ne se moque pas, on ne rigole pas. Le seul cas de figure où on peut faire entrer le rire, c’est pour rire de ce qui fait peur. Par exemple, si un enfant a peur des voleurs, on peut tourner en ridicule un voleur qui serait assez bête pour tenter d’entrer dans la maison alors que les parents sont là pour la protéger. Il faut trouver un juste milieu entre dédramatiser et entrer dans son jeu.
Et il faut faire la nuance entre les peurs qui relèvent de l’imaginaire de l’enfant, et qui par conséquent ne sont pas rationnelles, et celle qui sont réalistes. Par exemple, s’il a peur d’un éventuel monstre sous son lit, il ne faut pas trop en faire et vérifier continuellement sous le lit s’il est là ou pas. Dans ce cas, il vaut mieux rassurer l’enfant en lui disant que les parents sont là pour le protéger. En revanche, s’il a peur qu’un voleur s’introduise dans la maison, là on peut lui montrer que les portes et les fenêtres sont bien fermées.
Il faut toujours parler avec l’enfant de ce qui lui fait peur. Il peut y avoir des solutions simples. S’il a peur du noir, on peut mettre une veilleuse, s’il a peur de rester seul dans sa chambre au moment de dormir, on peut faire en sorte qu’il nous entende vivre dans les autres pièces, cela peut le rassurer.
Enfin, il est inutile de lui demander de ne pas avoir peur, il faut plutôt lui expliquer pourquoi il ne doit pas avoir peur. Ne pas minimiser la peur, mais le rassurer, sans pour autant entrer dans son jeu.
manière impressionnante, mais sont normales et sans danger. Elles surviennent surtout entre 20 mois et 4 ans et deviennent très rares après 5 ans. Il faut savoir que lorsque cela survient, l’enfant n’a pas conscience de la présence de ses parents parce qu’il est dans une phase de sommeil profond, même s’il a l’air éveillé. Cela dure entre 1 et 5 minutes. À son réveil, l’enfant ne s’en souviendra pas. À la différence d’un cauchemar, l’enfant peut crier, et même hurler, sembler terrifié, il peut être agressif et parler avec un discours qui n’a pas de sens et les manifestations peuvent s’accentuer si on le touche. Même s’il peut s’asseoir dans son lit, ce n’est pas du somnambulisme, il ne se déplacera pas. Les causes peuvent être héréditaires, mais ça se produit le plus souvent lorsque l’enfant est fatigué et se couche plus tard que d’habitude ou lorsqu’il est dans une période de transition ou de changement, un déménagement ou une séparation, par exemple. Cela peut aussi coïncider avec un changement dans les habitudes de sommeil, par exemple s’il a arrêté les siestes. Cela peut survenir aussi lorsque l’enfant est malade et fait de la fièvre, surtout s’il est sujet à ce genre de phénomène. Les crises peuvent être accompagnées d’énurésie.
Il peut y avoir plusieurs raisons. Les enfants très couvés, qui n’ont pas vécu beaucoup d’expériences, qui n’ont pas été gardés ou qui ne sont pas entrés tôt en collectivité, se montreront souvent plus craintifs.
Mais ça peut aussi simplement être lié à leur personnalité, s’ils sont plus sensibles, par exemple.
Cela peut aussi venir de l’éducation. En particulier si les parents nient les peurs de leur enfant, celui-ci n’apprendra pas à les dépasser, il en aura honte. Pour vaincre une peur, il faut l’affronter.
Mon enfant aime se faire peur, est-ce normal ?
Oui, c’est normal, entre 3 et 4 ans, ils aiment avoir de petites frayeurs, ça leur permet de les découvrir. C’est un peu comme un entraînement, ils créent euxmêmes les peurs, et de ce fait ils savent qu’ils peuvent les dépasser. Cela leur apprend à gérer les peurs. Par exemple, en jouant à chat, ils apprennent à fuir un agresseur. Cela peut cacher une peur de l’agression. Ou bien jouer au super-héros qui sauve tout le monde, ça peut cacher une peur de ne pas être à la hauteur. En revanche, pour ce qui est de regarder des choses qui font peur, là il faut faire attention puisque ce n’est plus eux qui créent la peur. Dans ce cas, c’est contrôle parental+++.
Il est important de ne pas essayer de le réveiller ni de lui parler ou le toucher. À son réveil, il faut essayer de ne pas avoir l’air aussi terrorisé que lui l’était et ne pas en parler le lendemain parce que ça ne servirait à rien.
Si ça apparaît après l’arrêt des siestes, il faut remettre la sieste au programme, même s’il ne dort pas, au moins qu’il ait un temps calme.
À quel moment faut-il s’inquiéter ?
Il est impératif d’écouter le discours de l’enfant et de voir si la peur est adaptée à son âge. S’il parle de choses qu’il n’a pas pu vivre au regard de son stade de développement et que c’est récurrent, il faut s’alarmer et observer ce qu’il vit dans la journée.
Et appliquer la règle des 6 mois. Si le problème dure pendant 6 mois avec la même intensité, il faut réagir, ou si ça fait moins de 6 mois, mais que les réactions sont très intenses, au point de devenir handicapantes pour l’enfant (s’il ne veut plus sortir…).
Les points à surveiller sont donc l’intensité, le contexte, la cohérence et la durée.
Avez-vous un dernier conseil à donner aux parents ?
D’abord, il ne faut pas les confondre avec les cauchemars. Les terreurs nocturnes sont vécues de
Il est normal de vouloir protéger son enfant de la peur, mais il a besoin de la connaître et de l’éprouver pour se construire. C’est essentiel. S’il n’a pas peur, il fera tout et n’importe quoi. Il faut le laisser aller, tout en le surveillant. On ne doit pas oublier que la peur est là pour nous indiquer qu’il y a un danger. Il ne faut pas avoir peur que son enfant ait peur !