Discours de Claude Bartolone Journées parlementaires du groupe EELV Angers Le 26 septembre 2013
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Mes chers Amis, Pour conclure ces journées parlementaires, j’ai envie de vous parler de « nous ». Nous, socialistes et écologistes. D’où nous venons, où nous en sommes, et vers où nous allons. J’ai envie de vous parler de rassemblement. Pas d’addition de suffrages ou de fusion de plateformes programmatiques. Simplement d’une alliance d’amour, de raison et d’avenir. Nous avons finalement des cultures politiques assez comparables… A la fois nous revendiquons la volonté de gouverner pour transformer la société, et dans le même temps nous entretenons un rapport d’amour vache avec le pouvoir. Nous nous en méfions toujours un peu. Nous craignons qu’il nous éloigne de ce pour quoi nous nous sommes engagés. Et par-là, nous partageons le même défi : assumer la gestion du pays tout en conservant notre ADN de gauche. C’est ce que j’ai envie d’appeler – et ne m’en voulez pas de détourner cette expression – le défi de l’alter-réformisme. L’alter-réformisme, c’est dire qu’un autre monde est possible par le recours à la réforme progressive. C’est dire, après des années de droite qui ont laissé croire que la réforme est par nature punitive, qu’une autre réforme est possible. C’est dire que l’idéal et le réel peuvent vivre ensemble. Que l’utopie a droit de citer dans l’action publique. Et la voilà notre responsabilité commune : réconcilier, dans notre esprit et dans celui des Français, le mot réforme avec le mot progrès. C’est le ciment de notre union. Notre rassemblement, il est entré dans nos mœurs politiques et dans notre quotidien au travers des collectivités territoriales que nous gérons ensemble. Page 2 sur 2
J’en suis convaincu, il est la clé de l’avenir de la gauche qui agit. C’est la Gauche durable. Et je suis venu vous parler des deux conditions qui doivent permettre à la gauche de durer. La première, elle est d’ordre stratégique. Ne me faites pas les gros yeux, la stratégie, ce n’est pas sale ! Nous voulons changer la France, l’Europe et le monde, et nous savons que pour changer, il faut d’abord gagner et durer. Nous devons avoir une stratégie d’alliance durable. En toute clarté et en absolue franchise. Il ne s’agit évidemment pas de taire nos différences. Le rassemblement de la gauche, ce n’est pas la gémellité ! L’unité politique, ce n’est pas le clonage ! Si nous étions les mêmes, nous serions militants de la même organisation politique ! Et nous savons même que dans nos propres mouvements, ce ne sont pas les débats qui manquent ! Assumons simplement nos différences. Ne paniquons pas à la moindre anicroche. Mes amis, on peut citer une demi-douzaine de points sur lesquels nous avons des différences. Mais citez m’en un seul qui nous rende incompatible… Par ailleurs, ne rééditons pas les erreurs d’hier. La gauche, ça ne se saucissonne pas ! Par le passé, nous avons trop souvent donné le sentiment de découper notre programme de gouvernement en tranches : l’écologie pour les écologistes, le social pour les communistes, la laïcité pour les radicaux et… les tracas de la gestion pour les socialistes !
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Dans le nouveau monde, où tout est dans tout, un tel cloisonnement n’a plus de sens. Pire, il nous cantonne dans des jeux de rôles qui donnent à croire que le PS serait un parti de profs, et Europe-Ecologie-Les-Verts un parti de bobos parisiens… La Gauche durable doit s’appuyer sur une tout autre logique. Ce n’est pas une juxtaposition de couleurs, mais une vision de société commune que nous devons mettre au pot commun. J’y viens. Car la deuxième condition de la Gauche durable, c’est la vision de société commune. Plus que cela, c’est le « temps d’avance ». C’est à nous, socialistes et écologistes, d’être porteurs du temps d’avance. Je dois vous dire que, sur un certain nombre de sujets, je ne me remets toujours pas que nous ayons été devancés par la droite. Ce n’est pas normal que ce soit Jacques Chirac qui ait été le premier président de la République à nommer un ministre issu de l’immigration. C’était à nous de le faire ! Pas normal que, même si ce n’était au final qu’un vaste coup de com’, ce soit Sarkozy qui ait lancé le Grenelle de l’environnement, lui qui est pourtant bien moins proche de la nature que du CAC 40. C’était à nous de le faire ! Par le passé, nous avons trop souvent eu du mal à assumer notre modernité, à assumer notre temps d’avance. C’est le défi qui nous est proposé aujourd’hui.
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Déjà, nous avons voté le mariage pour tous. Après des années de tergiversations, on peut enfin se dire que l’on s’aime devant Monsieur ou Madame le Maire, quelle que soit son identité sentimentale et sexuelle. Nous avons encore 4 ans, et si nous sommes bons, 9 ans, pour avancer main dans la main sur quelques autres grands sujets.
La transition énergétique, bien sûr. Je le répète : on peut vivre avec 4% de déficit, pas avec 4 degrés de plus. Nous avons une responsabilité devant les générations qui viennent : nous sommes dépositaires de la transition écologique, d’une nouvelle façon de consommer, de comportements animés par le devoir d’achat et le savoir d’achat. Dépositaires aussi d’une certaine philosophie – et j’y tiens. Le processus de transition énergétique, ce n’est pas subordonner la question sociale à la question écologique. Ce n’est pas l’inverse non plus. C’est faire en sorte que l’une se nourrisse de l’autre. Parce que le combat écologique, c’est d’abord un combat au nom des humbles – qui sont précisément les premières victimes des inégalités énergétiques. Nous pouvons avoir des débats sur le chemin à emprunter, voire même sur la durée du voyage. Mais nous avons en partage la destination à rejoindre : une société plus solidaire, plus sobre, plus responsable, plus durable.
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L’Europe, évidemment. Voilà sans aucun doute ce par quoi tout commence et là vers où tout doit converger. Le combat européen, c’est la mère de toutes les batailles. Mettons fin une bonne fois pour toute à la pensée unique qui n’est au fond qu’un vieux dogme au nom duquel l’austérité matin midi et soir serait notre grand dessein commun. Plus que jamais, nous avons une confrontation politique à mener. C’était vrai la semaine dernière ; ça l’est davantage encore depuis la réélection de Mme Merkel. Nous avons 4 ans de stabilité au sein du moteur franco-allemand pour construire un compromis combatif qui mette fin à l’Europe de la rigueur. La démocratie, enfin. Et c’est par-là que je veux conclure. Mes amis, nous ne venons pas de nulle part. Nous sommes les fils et les filles d’une culture politique qui s’est toujours trouvée du côté du parlement. Parce que le parlement, c’est le lieu du débat démocratique. Le parlement, c’est le refus de la personnification du pouvoir, au bénéfice des idées et de l’énergie collectives. Le parlement, c’est le théâtre de l’action publique, la fiction en moins. La culture parlementaire, elle fait partie de notre identité, et ce serait une faute de notre part de ne pas mettre à profit cette législature pour la réhabiliter. Alors pratiquons la 5e République autrement, et ancrons la démocratie parlementaire dans les faits. Si nous, socialistes et écologistes, ne le faisons pas, qui d’autre le fera ? Président de l’Assemblée nationale, je me tiendrai toujours du côté de l’initiative parlementaire. Je ne vous reprocherai jamais de lancer un débat. Je ferai tout pour faire entendre la voix du parlement, apporter ma contribution au
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rééquilibrage des pouvoirs, améliorer l’image de l’Assemblée nationale, défendre la dignité des députés. *** Voilà, chers Amis, les quelques messages que je souhaitais vous adresser. Notre alliance, elle est un peu comme la démocratie : elle ne s’use que quand on ne s’en sert pas. Alors, en cette rentrée, servons-nous-en. Servons-nous-en pour gagner et durer, bien sûr. Mais surtout pour porter fièrement nos valeurs socialécologiques qui ne sont rien d’autre que les valeurs de la République. La Liberté. De penser, de dire, de contredire. De respirer, aussi. De léguer à nos gamins autre chose qu’une planète en miettes. De transgresser la pensée unique qui voudrait faire croire qu’aucun autre monde n’est possible. Nous voulons toujours, et même plus que jamais, changer le monde ! L’Egalité, c’est-à-dire le devoir de mettre fin aux injustices qui rongent nos sociétés. Le droit de réussir sa vie quel que soit le côté du périphérique où l’on nait. Le devoir aussi de se tenir aux côtés des peuples qui souffrent, le refus de laisser crever des continents entiers au nom des lois d’airain de la mondialisation financière. La Fraternité, précisément celle qui nous permet depuis si longtemps de réaliser le miracle français. Parce que c’est ce miracle qui permet de faire vivre ensemble des femmes et des hommes qui ne partagent ni la même opinion, ni la même religion, ni la même origine, ni la même couleur de peau. Ces valeurs, elles sont le patrimoine de notre alliance, et elles sont son avenir. Préservons ce patrimoine et préparons cet avenir. Page 7 sur 7