Intervention du Président de l’Assemblée nationale, M. Claude Bartolone Signature de la déclaration franco-italienne sur les droits et devoirs numériques du citoyen Madame la présidente, Mesdames, Messieurs, Chers collègues, Je suis heureux d’être parmi vous, pour signer la déclaration franco-italienne sur les droits et devoirs numériques du citoyen, élaborée par les commissions ad hoc de nos deux assemblées. Madame la présidente, chère Laura, nous avons décidé de mettre en place, au même moment, une commission spécifique sur ce sujet. Heureuse concordance des temps ! Créée à la chambre des députés italienne, à votre initiative, la commission d’étude sur les droits et devoirs sur Internet a tenu sa première réunion en juillet 2014 à Montecitorio. Quelques jours plus tôt, je présidais, ici, la réunion constitutive de la commission de réflexion et de propositions sur le droit et les libertés à l’âge du numérique. Nos deux commissions se sont constituées de façon similaire. Parlementaires, elles ne sont pas pour autant exclusivement composées de députés. Nous les avons ouvertes à la société civile en y associant un collège de personnalités qualifiées,
spécialistes
du
droit
et
des
libertés
fondamentales
ou experts des nouvelles technologies informatiques et numériques.
Votre commission, Madame la Présidente, est coprésidée par vous-même et par le professeur Stefano Rodotà, éminent spécialiste des questions juridiques que soulève l’usage d’Internet. J’ai, pour ma part, confié au député Christian Paul, co-auteur d’un rapport remarqué sur la neutralité du net, le soin de coprésider notre commission avec Maître Christiane Féral-Schuhl, avocate, spécialiste reconnue du droit des technologies numériques. Si nos démarches ont été semblables, nos méthodes ont différé. Vous avez soumis un premier projet aux internautes, et élaboré un document au regard de leurs contributions et commentaires. Notre commission, quant à elle, s’est vue confier le soin d’élaborer une doctrine globale, qui permettra – je l’espère – aux parlementaires, de mieux appréhender les enjeux liés à la protection des libertés à l’âge du numérique, et de prévenir que nos lois ne deviennent incohérentes ou contradictoires. Plusieurs débats parlementaires nous ont encore récemment prouvé à quel point une telle grille de lecture était nécessaire. Je pense en particulier au débat sur la loi relative au renseignement. Je regrette, à ce titre, que la recommandation émise à cette occasion par notre commission, n’ait pas été davantage prise en compte. Pour le reste, la commission rendra son rapport dans quelques jours. Une chose est sûre : il est attendu. Madame la Présidente, chère Laura, la création concomitante de nos deux commissions n’est pas le fruit du hasard : elle traduit les mêmes préoccupations et surtout les mêmes espérances. Oui espérances, car en la matière je crois que, vous et moi, rejetons l’idée selon laquelle Internet serait simplement un espace de dangers. 2/4
On ne le dit pas assez souvent : Internet est, avant tout, une terre de liberté. Cette déclaration le proclame : Internet est un « bien commun mondial ». Il a engendré une révolution industrielle, économique, sociale, et démocratique. Il a ouvert, depuis une vingtaine d’années, de grandes perspectives dans l’exercice des libertés fondamentales comme dans l’accès à la culture et aux connaissances. Ce monde numérique, c’est notre monde. Il définit désormais notre quotidien. Il nous oblige à repenser nos droits, nos obligations, et nos responsabilités de citoyens. C’est pourquoi il est bienvenu de rappeler ensemble « que les libertés et droits fondamentaux reconnus à toute personne (…) sont aussi garantis sur internet ». Un monde porteur de nouvelles opportunités, à condition bien évidemment d’y avoir accès. Nous proclamons ainsi que « le droit d’accès à internet constitue aujourd’hui un droit fondamental qui facilite l’exercice d’autres droits fondamentaux, en particulier la liberté d’expression, le droit à informer et à être informé, la liberté d’entreprendre et d’innover, la liberté d’association ». Voilà pourquoi nous souhaitons que « soit expressément consacré, au plus haut niveau dans la législation, le principe de neutralité d’internet qui constitue le préalable indispensable à l’exercice effectif des libertés à l’âge numérique ». Un principe fondamental qui doit être, plus que jamais, gravé dans le marbre, car c’est de lui dont dépend l’exercice de la liberté de communication et de la liberté d’expression.
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Enfin, de même qu’il ne peut y avoir de République et de citoyen sans éducation, il ne peut y avoir de République et de citoyen numérique sans éducation numérique. Ainsi,
nous insistons sur « le caractère indispensable de l’éducation au
numérique » et le droit pour toute personne « d’acquérir les capacités nécessaires pour utiliser internet de manière responsable et avertie ». Garantir la pérennité des droits de chacun sur Internet, et permettre au plus grand nombre de jouir des avantages du nouveau monde, c’est le sens du travail de nos commissions, et c’est l’esprit de notre déclaration. Une déclaration qui est aussi une invitation adressée à tous les autres Parlements européens, qui souhaiteraient demain se joindre à nous. Une invitation destinée également au législateur européen. Une déclaration, que je suis très heureux, Madame la présidente, de cosigner avec vous. Je forme le vœu que nos gouvernements se penchent toujours davantage sur ces questions cruciales, aux échelons nationaux et européens. Et que nos deux Assemblées continuent à travailler ainsi au service des droits et des libertés, d’aujourd’hui et de demain. Je vous remercie.
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