bulletin 48

Page 1

Rivières sauvages Bulletin d’infos décembre 2010

n°48

Les nouvelles 1. C’est Noël : le fonds de dotation « rivières sauvages est créé. 2. Protéger les dernières rivières sauvages des Alpes : une priorité du programme EALP du WWF. 3. Vallée d’Aspe : avis défavorable des services de l’Etat pour les projets de microcentrales. 4. Projet de barrage géant de Belo Monte : alerte sur l’Amazonie

Inscrire à neuf dans notre culture la naturalité des rivières et des fleuves.

C’est Noël : le fonds de dotation « Rivières Sauvages » est créé. Ca y est. Après un an de gestation, interrogations juridiques variées, tant l’instrument est neuf dans le paysage français et flou pour la plupart, le fonds de dotation « rivières sauvages » a été créé, quelques semaines avant Noël. Ce fonds, doté de 40 000 euros offerts par un généreux donateur, est l’aboutissement de 4 années de travail du WWF et de divers partenaires, entre autres l’AAPPMA du Pays de Quimperlé, les PNR des Bauges (Chéran) et du Haut Jura (Valserine). Rappelons que ce projet a reçu l’appui du MEEDDM, de l’Onema et qu’il est un des enjeux de la « Convention pour une hydroélectricité durable » qui prévoit bien, dans le cadre du Grenelle, de protéger les cours d’eau patrimoniaux. Le fonds a été constitué par 19 membres fondateurs issus de structures attentives à la conservation du capital rivières : ONG (FNPF, SOS Loire Vivante, WWF), institutions (CNSS, PNR, Onema) soit un éventail représentatif, mais encore insuffisant de la société civile à la recherche d’instruments neufs pour accélérer les efforts de conservation/valorisation de la « nature sauvage ». Rappelons qu’une démarche similaire, « Forêts sauvages » a été initiée en 2004, qui a permis de fructueux rapprochements entre acteurs pour valoriser la naturalité. Le fonds de dotation, enregistré en Rhône-Alpes (région prioritaire pour le WWF) est doté d’un conseil scientifique regroupant, entre autres, Gilbert Cochet, auteur d’un ouvrage sur les « rivières sauvages », Jean René Malavoi, hydromorphologue à l’Onema, Arnaud Caudron, chercheur à l’INRA. Il a élu un bureau, présidé par Roberto Epple, engagé de longue date dans le combat pour les rivières, avec Mélanie Taquet comme secrétaire et Martin Arnould comme trésorier. Des programmes de travail concrets sont lancés, sur le Chéran, la Semine-Valserine ; des prospections en cours sur de petits cours d’eau méditerranéens. Un site internet est en cours de finalisation et la recherche de partenaires/mécènes commence. A terme, le fonds de dotation pourrait devenir une fondation indépendante. Un colloque fondateur est prévu pour le 20 mai 2011, à Annecy.

Protéger les dernières rivières sauvages des Alpes : une priorité du programme EALP du WWF. Les rivières des Alpes ont été sévèrement abîmées au cours des deux siècles passés, entre autres par le développement de l’hydroélectricité. On estime que le linéaire à peu près naturel représente aujourd’hui moins de 10 % du total et l’heure est à la « revitalisation ». En Autriche, 6 programmes ont été conduits, grâce à un partenariat « Ensemble pour nos rivières », entre les ministères de l’agriculture, de la forêt, de l’environnement et le WWF qui ont permis de restaurer des dizaines de kilomètres de rivières, notamment l’Inn. En Suisse, où 90 % des rivières sont artificialisées (90 % des amphibiens sur la liste rouge, 60 % des rivières sans débits réservés), divers programmes, dont celui de la « 3ème correction du Rhône », visant à redonner au fleuve 850 ha d’espace de liberté sont en chantier. Dès 2011, la confédération et les cantons vont débloquer 120 millions de francs par an pour améliorer les conditions de production de l’hydroélectricité (passes à poissons, transfert des sédiments, éclusées) et accélérer la renaturation. En Allemagne, un projet de restauration de la continuité écologique et de protection de la dernière partie sauvage de la rivière Ammer, un affluent de l’Isar, 80 km avec le seul canyon du sud du pays a été lancé avec des agriculteurs, pêcheurs, kayakistes. L’Italie s’efforce aussi de protéger, renaturer. La France, qui a massivement aménagé, commence également à réparer, dans le cadre du programme national d’effacement de 1200 ouvrages ou seuils d’ici 2015. Des opérations de modernisation énergétique de cours d’eau déjà équipés peuvent également offrir des opportunités, par exemple sur la Romanche, un affluent du Drac au sud de Grenoble. 5 vieux barrages (et 6 usines) doivent être effacés par EDF et remplacés par un seul ouvrage apportant à la fois un gain énergétique substantiel (+25 %, soit 100 GWh /an, soit l’équivalent de 50 à 100 micro centrales nouvelles) et un sérieux gain environnemental. Mais l’élan global vers la restauration des rivières alpines reste insuffisant. L’artificialisation pourrait même s’étendre. Au nom de la « lutte contre les changements climatiques »., les projets fleurissent. En Autriche, une centaine de nouveaux barrages sont prévus, dont 60 de grande taille. Le WWF, les pêcheurs, les kayakistes, les randonneurs ont lancé la campagne « Flüsse voller Leben », qui a permis de définir et cartographier les rivières à protéger en priorité et d’unir les forces. En Suisse, 820 projets de petites centrales hydrauliques et plusieurs grands projets de barrages ont été recensés. Le WWF, qui y soutient l’hydroélectricité labellisée (Naturemade Star) réfléchit avec plusieurs grands producteurs (Axpo, BKW, Sol-e, group-e) à


une critérisation des projets, avec un slogan simple : « l’hydroélectricité verte au mauvais endroit n’est pas de l’électricité verte ». Il a lancé avec d’autres ONG et les pêcheurs le programme « Riverwatch » et accompagne 9 projets de restauration sur quatre rivières emblématiques, Rhône, Aare, Linth et Rhin. Sur ce dernier, les acteurs se mobilisent pour le retour du saumon dans la Thur, la Limmat, la Reuss. En Italie, la campagne « Libera Fiumi » vise à protéger une trentaine de fleuves et rivières, dont le Tagliamento, un des joyaux des Alpes, toujours menacé par une série de barrages. Seule l’Allemagne, avec le « Renewable Energy Act » interdit, clairement, la construction de nouveaux barrages dans les dernières parties intactes de rivières. Dans les Alpes françaises, 300 projets de microcentrales seraient dans les cartons! Le programme « EALP, Ecological Alpine Programme », lancé en 2005 permet une mutualisation utile à l’échelle de l’écorégion. Powerpoints disponibles au WWF. Dani.heusser@wwf.ch

Vallée d’Aspe : avis défavorable des services de l’Etat pour les projets de microcentrales. Il reste peu de rivières sauvages, patrimoniales. Les cours d’eau encore non équipés sont rares. D’où l’attention grandissante portée par le corps social pour protéger les ultimes refuges en « excellent état écologique ». Cette attention entre en conflit avec la logique classique d’aménagement et de création de valeur à partir de l’hydroélectricité. Trois cours d’eau en haute vallée d’Aspe, le Larry à Urdos, l’Ansabère et le Lauga à Lescun illustrent ce conflit entre d’un côté des producteurs (SHEM, filiale du groupe Suez, Serhy) et de l’autre des ONG, des scientifiques, les services de l’Etat (DDT, DREAL, Onema) qui prennent au sérieux la question de la conservation de la « biodiversité ultime » et préparent les classements de ces cours d’eau dans le futur SDAGE. Rappelons-le, les barrages, seuils, digues, aménagements constituent toujours des atteintes au fonctionnement des rivières : des siècles d’aménagement en témoignent. Deux modèles économiques s’affrontent donc : d’un côté, des vallées fragilisées par un vieil exode rural et les crises du monde agricole - entre autres parce que notre pays a détruit sa petite paysannerie, ce monde rural qui générait de la richesse - avec des élites dépassées qui pensent que les revenus de l’hydroélectricité sont la solution miracle. De l’autre, un modèle qui repense, fondamentalement, l’avenir de tels territoires, dans lesquels la question de l’énergie hydroélectrique est une option de développement parmi d’autres. Ces projets sont un test intéressant pour la « Convention pour une hydroélectricité durable » qui demande d’améliorer la concertation globale sur les ouvrages hydroélectriques (1.2), qui a renforcé le principe de protection des secteurs les plus riches, encore épargnés (4.3) et pour la mise en place du Label EVE, qui rassemble producteurs, fournisseurs et ONG, entre autres autour du principe de respect des ultimes « réservoirs biologiques ». Nous avons besoin d’électricité, certes. Nous avons aussi besoin de qu’il reste de nature sauvage. Rens. Anne Darrouzet, miressou@gmail.com

Si nous n’y prenons garde, nous allons tout simplement perdre l’Amazone, 1/5ème du flux d’eau douce planétaire et l’Amazonie qui, avec 60 % des forêts tropicales de la Terre, est menacée par la déforestation directe et par une centaine de projets de grands barrages : « Les plans pour le développement énergétique du Brésil pour l’avenir sont basés sur l’hydroélectricité de l’Amazone. Nous allons construire tous les barrages que nous pouvons avec la législation actuelle », a déclaré M.. Altino Ventura Filho, ministre des Mines et de l’Energie. Comme l’a exprimé Ulrich Eichelmann, d’Eca-watch, au récent séminaire du WWF à Sarajevo, « nous assistons à un tsunami de grands barrages, avec environ 1000 grands ouvrages programmés ». Après des années de ralentissement du rythme de construction, suite au formidable rapport de la Commission Mondiale sur les Barrages, la frénésie d’aménagement reprend. Et, dans un pays où l’industrie des barrages est une quasi religion, l’ouvrage de Belo Monte, projeté sur le Xingu, relève de l’acte de foi aveugle. Le barrage de 11 000 MW (11 tranches nucléaires !) et 17 milliards de dollars menace d’empiéter sur la plus grands réserve forestière tropicale du monde, le Parc National de Xingu, en affectant 1550 km2. Il porterait atteinte aux modes de vie de 20 000 personnes, nécessitant le déplacement de 12 000 indiens, 20 peuples de langues et de culture différentes, dont les indiens Xikrin-Kayapo, emmenés par le chef Raoni Metuktire, qui a rendu visite au WWF-France en mai dernier et obtenu le soutien de Serge Orru, Directeur Général. James Cameron, le réalisateur d’« Avatar » soutient les indiens et la forêt. « La construction du barrage de Belo Monte n’est pas une réponse adéquate. Je lance au président Lula le défi d’être un héros pour mener le Brésil vers un nouveau modèle de développement durable » a-t-il déclaré à Brasilia, le 13 avril 2010. Belo Monte n’est pas encore construit, il faut dire non à ce symbole de la mégalomanie hydraulique. Le WWF et d’autres organisations demandent que soit organisée rapidement une table ronde autour des alternatives. D’autant plus urgentes que les émissions de gaz à effet de serre des barrages sont loin d’être négligeables, comme vient de le montrer un nouvelle étude de l’Eawag, en Suisse. Rens. www.Internationalrivers.org - www.amazonwatch.org - www.dams.org

Calendrier. 4 décembre 2010 : MNHM Journée thématique « fleuves et rivières ». Rens. heitz@mnhm.fr 13 décembre 2010 : Quimperlé, Ellé. Présentation Réseau Rivières Sauvages.

Passez à Enercoop, l’énergie militante ! www.enercoop.fr

2011 : 40 ans des réserves de biosphère. Catherine.cibien@mab-France.org 50 ans du WWF

1er mai 2011 : Allier Loire Océan. Langeac St Nazaire Descente à la nage de l’Allier et la Loire. Rens. Fabien.docet@gmail.com

29 janvier au 6 février 2011 : Ramsar, journée mondiale des zones 20 - 21 août 2011 : humides. « Les forêts : vitales pour l’eau Langeac - Nantes en canoé. et les zons humides ». www.ramsar.org Rens. p.martin@cnss.fr Rens. contact@pole-tourbieres.org

Coordination éditoriale : Martin Arnould, Chargé de programme « Rivières Vivantes » Tél : 04 77 21 58 24 - 04 78 27 39 95 (LYON) - marnould@wwf.fr Editeur : WWF - 1, Carrefour de Longchamp 75016 PARIS - Tél : 01 55 25 84 84 - www.wwf.fr

Document éco-conçu à imprimer si possible sur papier recyclé.

Projet de barrage géant de Belo Monte : alerte sur l’Amazonie.


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.