Bulletin 50

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Rivières sauvages Bulletin d’infos Mars 2011

n°50

Les nouvelles 1. Conseil Scientifique du saumon de Loire : au service d’un poisson d’exception. 2. En Corse, quelle cohérence pour protéger l’anguille ? 3. La Chine veut bétonner la rivière Nu, protégée par l’Unesco. 4. La Stratégie Nationale de Gestion des Poissons Migrateurs est sortie. 3. L’hydroélectricité énergie propre, un mythe.

Inscrire à neuf dans notre culture la naturalité des rivières et des fleuves.

Conseil Scientifique du saumon de Loire : au service d’un poisson d’exception. En 2006, le CNSS organisait un premier Conseil Scientifique international pour accompagner la restauration du saumon de la Loire, insuffisamment amplifiée dans le Plan Loire de 1994. Il n’y avait alors pas de structure pour questionner, valider les hypothèses, proposer des améliorations. Le conseil, composé de spécialistes de divers horizons (génétique, dynamique de populations, biologie, habitats, repeuplement) et pays (France, USA, Norvège, Angleterre, Irlande, Ecosse) est aujourd’hui piloté par la DREAL de bassin Loire. Il s’est réuni les 17 et 18 février à Orléans pour superviser l’état des lieux 2010 et faire des recommandations. Les faits : 226 saumons seulement ont franchi Vichy en 2010, c’est peu : en 1994, le Plan Loire prévoyait un retour de 3000 saumons pour 2004. La tendance positive à l’augmentation du poids des poissons se confirme. Les blessures observées depuis 10 ans ne sont pas liées à des problèmes sanitaires, mais à des obstacles physiques. Le programme international Salsea (www.salmonatsea.com), qui étudie les conditions marines a permis de pêcher au Spitzberg 39 « post smolts » français - sur 1732 prises - dont 10 de l’Allier. Une réflexion collective est en cours pour limiter les captures des marins pêcheurs au large de la Bretagne. Côté génétique, l’Inra poursuit la recherche lancée en 2007 sur 2415 poissons. Une thèse récente a montré que la population de l’Allier était unique : sur les 5 groupes de populations françaises, le groupe Allier est le plus différencié, mais avec une diversité faible. Une autre thèse en cours sur l’adaptation des populations montre que les poissons de l’Allier auraient une bonne plasticité. Les questions : la reproduction naturelle ne semble pas avoir beaucoup de succès ? Fautil poursuivre le programme sur l’Arroux, où les retours sont infimes ; sur la Dore, où 7 ouvrages ne sont pas équipés et où il a fallu interdire la consommation de poissons pollués ? Pourquoi un tel retard d’équipement sur les 24 barrages de la Sioule ? L’Onema avait dès 1999 recommandé leur aménagement rapide. 11 ans plus tard, presque rien n’a avancé. La Gartempe, avec ses 120 barrages est-elle le meilleur cours d’eau du bassin de la Vienne (sachant qu’il y a une moyenne d’1 barrage par 3,4 km sur le bassin de la Loire) ? Quelle chance ont les smolts nés en amont de Poutès (dont l’excellent potentiel en matière d’habitats a été rappelé) d’atteindre à temps l’estuaire ? Quelle nécessité de laisser remonter les adultes en amont ? Faut-il augmenter le prélèvement de géniteurs pour le CNSS à 100 individus par an - 14 captures en 2010- ? Peut-on continuer à tolérer une qualité d’eau très médiocre sur l’Allier amont (Langeac ne traite que 20 % de ses rejets) ? Le conseil a fait quelques recommandations : améliorer la qualité de l’eau ; mieux estimer les stocks dans l’estuaire; laisser monter les poissons en amont de Poutès, effacer rapidement l’ouvrage et … préparer plus en avance son travail. Connaissance, coopération, ouverture progressent, du bon augure pour le saumon. Prochaine réunion en 2012 à Nantes, sur l’estuaire.

En Corse, quelle cohérence pour protéger l’anguille ? La mise en œuvre du Règlement européen Anguille de 2007 oblige les Etats membres à prendre les mesures pour sauver les différentes sous populations, entre autres sur la Méditerranée. L’aménagement des fleuves, les pollutions diverses, les modifications océaniques, la pression de pêche souvent trop forte ont conduit à une réduction impressionnante des populations de ce migrateur et notre pays a une obligation de restauration des populations et des habitats. Il a adopté un Plan de gestion en décembre 2008. 1555 obstacles devront être rendus franchissables pour l’anguille d’ici 2015, pour atteindre l’objectif d’échappement de 40 % d’anguilles argentées, c’est-à-dire d’anguilles adultes qui vont pouvoir rejoindre l’océan et la Mer des Sargasses pour s’y reproduire. Côté protection, c’est un zéro pointé en Corse. Dans le sud d’une île qui s’abîme, le chantier du barrage du Rizzanese va bon train sur un des derniers fleuves côtiers méditerranéens avec un bon stock d’anguilles… L’échappement des argentées ? Les euros pour EDF, plutôt. L’avenir de l’anguille ? Coulé dans le béton. Par contre, à l’est de l’île, sur le bassin du Tavignano, l’association MRM, en lien avec l’Onema, a lancé un travail d’études bienvenu, pour estimer l’impact du barrage de Cardiccia. 26 seuils ont été expertisés au total, sur le Golo, le Bevionco, le Fium’Orbo, la Gravone. « L’ensemble de ces travaux vise à (…) mieux connaître les enjeux écologiques sur les


masses d’eau corses (…) levier indispensable à la préservation du patrimoine naturel de l’île ». Réparer est indispensable. Protéger les derniers trésors l’est plus encore. Rens. MRM Le Petit Migrateur N° 9 Janv 2011 - www.migrateursrhonemediterranee.org

La Chine veut bétonner la rivière Nu, protégée par l’Unesco. La Chine semble bien engagée sur la voie du saccage total de ce qu’il reste de son capital rivières intact, c’est-àdire déjà peu de chose. Rien ne sera épargné et Pékin veut revenir sur l’accord de protection de la rivière Nu, passé en 2004 suite à des protestations de personnalités chinoises et d’ONG du sud-est asiatique. La Nu, aussi appelée Salween, prend naissance dans l’Himalaya. Elle traverse le sud-ouest de la province du Yunnan, avant d’entrer en Birmanie et en Thaïlande. Sa beauté et sa richesse naturelles sont telles qu’elle bénéficie d’un label Unesco. La Nu est par ailleurs une des 21 dernières rivières du monde qui se jette dans la mer sans grand barrage, sur 177 grands fleuves de plus de 1000 km (Rivers at Risk, WWF, rapport 2005). Rien n’y fait : la Chine veut atteindre le pourcentage de 15 % « d’énergie verte » d’ici 2020, et continue de nier les impacts des barrages sur les fleuves, les hommes, la biodiversité. Elle veut construire 140 GW de nouvelles capacités hydrauliques dans les 5 ans qui viennent. C’est près de 6 fois ce que la France a installé en 100 ans. C’est insensé, mais l’ensemble du monde reste coi, puisque tout cela génère de la croissance, folle. Rens.. www.panda.org/dams

La Stratégie Nationale de Gestion des Poissons Migrateurs est sortie. Après un an de travail regroupant tous les acteurs : direction de l’eau et de la biodiversité, Onema, pêcheurs professionnels, récréationnels, acteurs économiques (hydroélectriciens, chambres d’agriculture, autres), ONG, le MEDDTL a publié en décembre 2010 sa « Stratégie nationale de gestion des poissons migrateurs amphihalins ». Articulée autour de 4 grands thèmes : 1. préserver et restaurer les populations et les habitats ; 2. Rénover la gouvernance de la politique des poissons migrateurs ; 3. Renforcer l’acquisition des connaissances, le suivi et l’évaluation ; 4 Développer le partage d’expériences, la communication et la formation autour des problématiques migrateurs. Cette stratégie, déclinée en 22 actions place enfin l’ambition de notre pays à la hauteur des enjeux, immenses. Le préambule du document est explicite : « Les populations de poissons amphihalins, dits aussi grands migrateurs (…) ont régressé des dernières années à un tel point que la majorité des espèces sont aujourd’hui inscrites dans le Livre Rouge des espèces menacées de l’UICN ». La disparition des poissons migrateurs n’est pas seulement un enjeu essentiel en terme de biodiversité. C’est aussi un enjeu économique majeur pour des centaines d’entreprises de pêche artisanale vivant pour partie de la capture d’une ressource autrefois abondante et qu’il est indispensable de restaurer. Les problèmes actuels autour de l’anguille, dont l’arrêt de la pêche, pour partie injustifié, menace de vider encore plus les ports français, est un révélateur des carences passées. Cette stratégie est donc un signal très encourageant adressé aux acteurs, Rens. www.developpement-durable.gouv.fr

L’hydroélectricité énergie propre, un mythe.

Calendrier. 11-12 mars 2011 : Bâle, réunion label hydroélectricité verte, l’exemple de Naturemade Star. sosloirevivante@rivernet.org 1 avril 2011 : 2e réunion des parties de la Convention pour une hydroélectricité durable. Paris. 9-10 avril : Salon Pêche Nature Fillinges Haute-Savoie www.salonpechenature.com 20 mai 2011 : Colloque sur la création du réseau de rivières sauvages à Annecy - Rens. www.rivieres-sauvages.com

Passez à Enercoop, l’énergie militante ! www.enercoop.fr

21-22 mai 2011 : 2e édition du Pandathlon, Mont Ventoux. Rens. www.pandathlon.fr 2011 : 40 ans des réserves de biosphère. Catherine.cibien@mab-France.org ALO : descente Langeac - St-Nazaire à la nage. Rens. www.aventure-allierloireocean.com 19-26 août : la grande dévalaison (titre provisoire). Rens. www.cnss.fr.

Coordination éditoriale : Martin Arnould, Chargé de programme « Rivières Vivantes » Tél : 04 77 21 58 24 - 04 78 27 39 95 (LYON) - marnould@wwf.fr Editeur : WWF - 1, Carrefour de Longchamp 75016 PARIS - Tél : 01 55 25 84 84 - www.wwf.fr

Document éco-conçu à imprimer si possible sur papier recyclé.

La FNPF, Fédération Nationale de la Pêche en France, vient de publier une plaquette de 6 pages : « L’hydroélectricité, une énergie stratégique indispensable grâce aux grands équipements ; mais un mythe : celui d’une énergie propre ». Le document récapitule les dommages des barrages sur les cours d’eau : perte de la continuité écologique, perturbation des migrations, blocage du transit sédimentaire, altération de la qualité des eaux ; augmentation de l’évaporation ; réduction des surfaces d’habitats, éclusées, impact sur les annexes hydrauliques, etc. Un schéma particulièrement explicite sur le bassin de la Dordogne, fait par la fédération de pêche de la Corrèze, montre à quel point ce bassin a été transformé en plomberie électrique, avec pas moins de vingt grands barrages, dont les ouvrages géants de Bort les Orgues, Marèges, L’Aigle, Le Chastang. Saisissant. La FNPF n’a pas signé, avec FNE, la « Convention pour une hydroélectricité durable ». et elle ne participe pas au groupe de travail sur la création d’un label d’électricité verte en France. Mais par delà la divergence sur la convention, il y a un consensus entre les ONG : il est temps de reconnaître, enfin, que l’hydroélectricité n’est pas « par nature » écologique et que nous devons entrer dans l’ère de la restauration des fleuves, des économies d’électricité, du développement d’autres énergies renouvelables. Rens. www.federationpeche.fr


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