2016 | N°07

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L'ACOR est une association inter-régionale implantée dans six régions de l'Ouest de la France – Bretagne, Centre, Haute-Normandie et Basse-Normandie, Pays de la Loire et Poitou-Charentes.

C O M M U N I Q U É A s s o c i a t i o n d e s c i n é m a s d e l ' o u e s t p o u r l a r e c h e r c he

N°07 Vendredi 9 septembre 2016 p.1 > Soutien ACOR p.2 > Soutien ACOR ; soutien GNCR p.3 et 4 > Soutiens et recommandations GNCR p.5 > Soutien GNCR / ACID, soutiens ACID p.6 > Soutiens AFCAE Actions-promotion p.7 > Soutiens AFCAE Actions-promotion / Soutien AFCAE Patrimoine - répertoire p.8 > Infos distributeurs

Elle regroupe des structures tournées vers la défense de l'art et essai et de la recherche dans le cinéma.

Directeur de publication : Yannick Reix, président de l'ACOR • rédaction : Catherine Bailhache et Soizig Le Dévéhat • contact@lacor.info • www.lacor.info Avec le soutien du CNC et des DRAC des régions Centre, Pays-de-la-Loire, Poitou-Charentes, Bretagne, Haute-Normandie, Basse-Normandie

••• SOUTIENS ACOR ••• FUOCOAMMARE, PAR-DELÀ LAMPEDUSA

de Gianfranco Rosi

Documentaire • France / Italie • 2016 • 1H49 | 28 septembre 2016 • Météore films Berlinale 2016 : Ours d’Or, Prix du Jury Oecuménique, Prix Amnesty International

Le film est également soutenu par l'AFCAE | Site distributeur ici Site de l'ACOR ici Samuele a 12 ans et vit sur une île au milieu de la mer. Il va à l'école, adore tirer et chasser avec sa fronde. Il aime les jeux terrestres, même si tout autour de lui parle de la mer et des hommes, des femmes, des enfants qui tentent de la traverser pour rejoindre son île. Car il n'est pas sur une île comme les autres. Cette île s'appelle Lampedusa et c'est une frontière hautement symbolique de l'Europe, traversée ces 20 dernières années par des milliers de migrants en quête de liberté.

Dans le cadre de son soutien, l'ACOR > a commandé un texte sur le film à Marie Anne Guerin (Biographie ici), qui peut intervenir en salle pour accompagner le film. > a crée un partenariat ACOR / SOS Méditérranée : possibilité de faire intervenir des personnes de SOS Méditérranée (membres du CA, sauveteurs, bénévoles ou permanents) en région dans les salles adhérentes (en Bretagne, Normandie et Pays-de-la-Loire où des

antennes locales existent, et selon les disponibilités pour les régions Centre Val de Loire et Poitou Charentes). Conditions d'intervention : prise en charge par la salle des trajets, hébergement et repas. Si vous êtes intéressés, merci de contacter l'ACOR : contact@lacor.info 2 spots de sensibilisation et un diaporama (format DCP) réalisés par SOS Méditérranée sont également disponibles pour une diffusion en salle. > a réalisé un site sur le film ici

Extraits du texte de Anne-Marie Guerin • texte intégral ici Fuocoammare, (« le feu à la mer »), sixième documentaire de Gianfranco Rosi, raconte en profondeur. Il ouvre le récit. Le film met en lumière à l’intérieur de cadres méticuleux et inspirés, un sujet brûlant, souvent mis à la une et sous-traité par les medias : l’accueil et la perception, ici, depuis l’île de Lampedusa (20 kilomètres carrés, 6 000 habitants), de l’afflux de populations migrantes qui abandonnent leur pays d’Afrique et du Moyen Orient, chassées par la violence des guerres qui déchirent leurs pays, qui ont détruit leur mode de vie, éradiqué leurs traditions, leurs cultures et les besoins vitaux de leurs habitants. […] Rosi met en scène Lampedusa, « l’île aux lampes », comme un territoire incarné, sous la forme d’une sentinelle qui guette l’invisible . Fuocoammare enregistre les perceptions de l’île, la personnifie, en fait un territoire de portraits des habitants (les Autochtones) et des étrangers (les Migrants), jamais confrontés les uns aux autres. C’est à la radio que les habitants apprennent les naufrages et les sauvetages en mer. Rosi guette ces êtres de passage sur l’île pour qu’ils passent aussi par les plans de cinéma. La caméra de Rosi (il filme seul, sans équipe) donne une noblesse d’acteur à chacune de ses âmes errantes, les protège en enregistrant leur passage par les plans, en les accompagnant. Elle n’est pas inquisitrice, et ne pose pas de question : elle regarde et elle écoute. [...] Fuocoammare est le résultat d’un long travail d’approche du cinéaste qui a séjourné plusieurs mois à Lampedusa avant de commencer à filmer, pour rencontrer les instances de l’île et les personnages de son film. Puis trois semaines à bord d’un vaisseau militaire, lui ont permis de filmer « une soixantaine d’opérations de sauvetage en mer ». (...) La seule chose inventée par Rosi, c’est le découpage, en plans séquences, ou pas, toujours extrêmement attentif, à la recherche de la bonne distance. Il nous donne accès à des récits circonstanciés, même si peu bavards, tellement précieux, de la vie de personnes et de familles qui se retrouvent sans rien, et finissent, pour ceux qui auront résisté à l’inhumanité du voyage, par accoster, poches et mains vides, mais parfois ensemble, en terre inconnue. Chez nous.

À l’occasion de la sortie du film au cinéma, Météore Films sort le 28/09/2016 les trois premiers films de Gianfranco Rosi, inédits en salles : BOATMAN (1993 • 55') BELOW SEA LEVEL (2008 • 1H53) EL SICARIO – ROOM 164 (2010 • 1H20) Bénarès (Inde), dernier sanctuaire de la vie avant d’entreprendre l’ultime traversée. Voguer le long du Gange avec Gopal le passeur, c’est un peu comme s’aventurer à la croisée des mondes ; aussi bien entre la vie et la mort qu’entre l’Orient et l’Occident.

À 300 kilomètres au sud-est de Los Angeles et 35 mètres sous le niveau de la mer, un groupe de marginaux vit au milieu du désert. Il ne s’agit pas d’une communauté de hippies, seulement de gens qui ont tourné le dos à la société autant qu’ils en ont été exclus.

Nous avons rendez-vous avec un tueur du cartel des narco-trafiquants mexicains. Véritable expert en torture et en kidnapping, cet homme qui a tué des centaines de personnes a connu une première vie professionnelle dans les forces de police locales. Quand la caméra recueille son témoignage, c’est un fugitif recherché par ses anciens patrons, prêts à payer 250 000 dollars à qui le ramènera mort ou vif.


TA'ANG de Wang Bing Chine / Hong-Kong / France • 2016 • 1H49 | Acacias distribution • 26 octobre 2016 Festival de Berlin 2016 - Forum | Festival international du film de la Rochelle 2016

Le film est également soutenu par le GNCR Site distributeur ici Les Ta'Ang, minorité ethnique birmane, sont au cœur d'une guerre civile à la frontière chinoise. Depuis début 2015, de violents conflits ont contraint des milliers d'enfants, de femmes et de personnes âgées à s'exiler en Chine. Ta'Ang raconte l'histoire de ces réfugiés qui espèrent un jour rentrer chez eux.

[…] C’est dans la sélection parallèle Forum qu’on a pu voir Ta’ang, le plus saisissant documentaire sur la condition migrante. Le cinéaste chinois Wang Bing, à qui l’on doit quelques chefs-d’oeuvre tels qu’A l’ouest des rails, les Trois Soeurs du Yunnan et récemment A la folie, se rend dans la région frontalière entre la Chine et la Birmanie, où se trouvent différents camps de réfugiés de l’ethnie Ta’ang installés dans la vallée côté chinois. Les Ta’ang sont une des minorités de cette fraction du Triangle d’or, des villageois montagnards pris au piège des intérêts du gouvernement birman dans la région, entre richesse du sol en matières premières et connivences avec les mafias de la drogue. Un front armé de libération des Ta’ang, dont les rangs depuis vingt ans n’ont cessé de grossir, lutte périodiquement contre les troupes régulières de l’armée birmane, et les villageois n’ont souvent d’autres choix que de prendre leurs jambes à leur cou, emportant le minimum nécessaire et dévalant la montagne par les chemins boueux pour s’entasser en bas, sous bonne garde de militaires chinois qui les méprisent et ne s’occupent d’eux qu’à contrecoeur. Dès la première image, on voit d’ailleurs un soldat chinois donner un coup de pied à une femme assise entourée d’une myriade d’enfants. Fidèle à sa manière immersive, Wang Bing n’interroge pas, ne commente pas, il observe, absorbe la matière pure du temps qui s’écoule dans l’attente et la désorientation. L’unique téléphone portable passe de main en main pour essayer de comprendre où se trouvent les différents membres dispersés d’une même famille. Les nuits se passent à se remémorer collectivement les épuisantes marches hagardes et la crainte de tomber sur une patrouille en arme. Une bonne partie de Ta’ang est nocturne, et Wang Bing se concentre sur les visages baignés de la chaude lumière des feux de camp avec, comme dans les Trois Soeurs, une attention éperdue aux enfants. Le film devient sublime quand deux réfugiés sourds muets se racontent des anecdotes en langage des signes, réveillant d’un geste protecteur de la main la flamme d’une bougie, seul moyen pour eux de continuer à se parler puisqu’ils ne peuvent échanger dans l’obscurité complète. (…) Didier Péron • Libération ici

Dans le cadre de son soutien, l'ACOR > a commandé un texte sur le film à Raphaëlle Pireyre (rédactrice en chef adjointe du site Critikat.com. Elle collabore régulièrement aux revues Images documentaires, Bref et Images de la culture. Elle intervient également pour les dispositifs d’éducation à l’image auprès des enseignants et des élèves.) Texte disponible fin septembre. Elle peut intervenir en salle pour accompagner le film.

> a commandé un texte sur le film à Emmanuel Burdeau (biographie ici). Texte bientôt disponible > poursuit ses entretiens avec Alain Bergala (biographie ici) sur l'oeuvre de Wang Bing. (entretien disponible début octobre) > a réalisé un site sur le film (bientôt en ligne ici)

SOUTIENS GNCR SONITA de Rokhsareh Ghaem Maghami

Iran / Allemagne / Suisse • 2016 • 1H31 | Septième Factory • 12 octobre 2016 Sundance 2016 : Grand prix du jury, Prix du jury

Edition d'un document d'accompagnement GNCR Site distributeur ici | site du film ici Dossier pédagogique réalisé par e-media.ch ici Réfugiée afghane clandestine en Iran, elle habite depuis dix ans dans la banlieue pauvre de Téhéran. Sonita rêve de devenir une artiste, une chanteuse en dépit des obstacles auxquelles elle est confrontée en Iran et dans sa famille. En effet, sa mère lui réserve un tout autre destin : celui d’être mariée de force et vendue pour la somme de 9000 dollars. Mais Sonita n’entend pas se soumettre : téméraire et passionnée, elle bouscule les codes de cette culture conservatrice et décide de se battre pour vivre sa vie.

[…] La réalisatrice iranienne Rokhsareh Ghaem Maghami attache ses pas à Sonita pendant trois ans. D’abord intéressée par le talent de la jeune afghane, elle découvre les menaces qui pèsent sur elle. (...) «Vous connaissez le problème: si vous voulez aider, que se passera-t-il avec le film et si vous n’aidez pas qu’arriverat-il à cette relation humaine? Comment pouvais-je rester assise là et voir qu’ils l’enlevaient. » Elle paie donc 2000 dollars à la mère pour qu’elle accorde à sa fille un sursis de six mois. Son documentaire commence de façon classique, mais peu à peu, elle s’immisce dans le film. D’abord par des questions en voix off qui incitent Sonita à s’expliquer, à préciser, puis par l’image, montrant ainsi le lien qui s’est tissé pendant le tournage et le parti pris par la cinéaste. Pour autant, elle ne s’impose pas, donnant toute la part à Sonita et à ses projets. Rokhsareh Ghaem Maghami illumine la belle personnalité de l’adolescente. Le film montre plus que l’itinéraire tourmenté de la jeune afghane. La vie des enfants migrants à Téhéran en occupe une part, ainsi que le centre d’aide et ses méthodes pour les libérer de leurs traumatismes, son généreux soutien dans un pays plus libéral, sur certains points, que celui où règnent les Talibans. La tutelle des coutumes y éclate, la force impassible de l’obscurantisme quand il s’agit de les respecter. Leur remise en question, même prudemment esquissée, se heurte à un «c’est comme ça», l’argument de l’ultime recours quand tous les autres ont été réfutés par la raison. Cela donne la mesure de l’opiniâtreté dont l’être humain est capable, incapable discuter le sens des rites les plus barbares, par crainte de voir s’effondrer un système. Devenir adulte, dans ces conditions, c’est accepter ou résister. Sonita, artiste dans l’âme, trouve la force de tenir tête à sa mère car elle veut chanter; le rap qu’elle écrit se construit sur l’absurdité de ce qu’on lui impose. Mais sans l’aide tenace de la réalisatrice iranienne, elle n’y serait jamais parvenue. Ce qui fait apparaître le documentaire comme un échange permanent entre l’auteur et le sujet. La situation de Sonita évolue avec le film, ils se nourrissent l’un l’autre, aboutissent chacun grâce à l’autre. (...) Geneviève Praplan • www.cine-feuilles.ch ici


L'ULTIMA SPIAGGIA

de Thanos Anastopoulos & Davide Del Degan

Italie / Grèce / France • 2016 • 2H15 | Arizona Films • 23 novembre 2016 Festival de Cannes 2016 sélection officielle - hors compétition | Festival de la Rochelle 2016

Edition d'un document d'accompagnement GNCR Site distributeur ici Au Pedocìn, plage populaire de Trieste, hommes et femmes sont séparés par un mur de béton. Bienheureux dans l’entre soi, chacun amène sa vie avec lui et nourrit ce lieu unique et pittoresque. Réflexion sur les frontières, les identités et les générations, L’ultima Spiaggia est une tragi-comédie sur la nature humaine.

[…] Il n'est pas impératif de connaître sur le bout des doigts la longue et mouvementée histoire de Trieste, drôle de ville passée entre les mains de toutes les grandes puissances d'Europe au cours des derniers siècles, pour saisir le charme indolent du documentaire du Grec Thanos Anastopoulos et de l'Italien Davide Del Degan. Ici, dans l'intimité d'une plage payante, comme beaucoup en Italie, se rejoue chaque jour une histoire faite de souvenirs douloureux, de perspectives pas très gaies et d'un présent aussi changeant que la météo capricieuse. Des vieux bonshommes attendent, en se chamaillant ou en nourrissant des chats errants, l'instant proche où ils passeront l'arme à gauche. Des femmes viennent chanter, cancaner, rire et baigner leurs enfants. Certains parlent de leurs origines slaves, quand Trieste était le seul port de l'empire Austro-Hongrois, d'autres évoquent leur attachement au dialecte triestin qui, bien entendu, fout le camp. Au milieu de la plage, un mur de démarcation poursuit sa course blanche jusque dans la mer. Il sépare depuis des décennies l'espace des hommes et celui des femmes. C'est la toute dernière plage de ce genre en Italie et même en Europe et, manifestement, cela va durer encore longtemps. Au gré des vents glacés ou du soleil de plomb, une vingtaine de visages inconnus deviennent, peu à peu, familiers. Avec leurs défauts, leurs outrances, leurs habitudes et leurs fêlures. Le passé et l'avenir de Trieste est là, devant nous, presque nu et sans fard . Si le film s'attarde souvent en route, trouvant sans cesse un personnage, une situation, un détail à filmer, faisant parfois trouver le temps long, c'est aussi parce que l'attachement des auteurs à leurs héros anonymes est assez fort pour leur faire renoncer à couper dans les images glanées. Et souvent, le film prouve qu'ils ont eu raison. Bruno Icher • Télérama ici

L'ORNITHOLOGUE de Joao Pedro Rodrigues

Portugal / France / Brésil • 2015 • 1H57 • avec Paul Hamy, João Pedro Rodrigues, Xelo Cagiao, Han Wen, Juliane Elting | Epicentre Films • 30 novembre 2016 Festival de Locarno 2016 : Prix de la mise en scène

Edition d'un document d'accompagnement GNCR Site distributeur ici Fernando, un ornithologue, descend une rivière en kayak dans l’espoir d’apercevoir des spécimens rares de cigognes noires. Absorbé par la majesté du paysage, il se laisse surprendre par les rapides et échoue plus bas, inconscient, flottant dans son propre sang.

L'Ornithologue est une merveille […] C'est d'autant plus paradoxal que les films vus à Locarno cette année - du moins pour quelqu'un qui, comme nous, y aura passé quatre jours en toute fin de festival, ont été placé sous le signe du plus grand plaisir. Il y a même longtemps que le cinéma d'auteur n'avait pas marié avec autant d'aisance le moment presque sensuel de la projection et la recherche formelle. A ce titre, c'est incontestablement L'ornithologue, de João Pedro Rodrigues, qui aura symbolisé, et dominé, cette édition. Le portugais commence son film comme une sorte de remake de Delivrance ; un ornithologue (le beau Paul Hamy, acteur qui ne cesse de monter) qui chasse l'espèce rare le long des fleuves, dans un canoë, est entraîné dans des rapides. Il doit la vie sauve à deux jeunes chinoises. Jusqu'ici tout va bien. Mais il se réveille au petit matin sanglé de cordelettes, attaché comme un modèle japonais des photos bondage d'Araki. La suite, qu'il serait vain de raconter en détail, est délirante. C'est une série de métamorphoses, où progressivement celui qui était chasseur devient le fétiche de tout le monde - et ils sont nombreux, et plus fous les uns que les autres. Mais en laissant quelque chose de lui à chacun d'eux, il réinvente son histoire, la charge de rencontres tour à tour dangereuses, sexys, amoureuses, menaçantes, il se décharge de celui qu'il était jusqu'ici jusqu'à atteindre une sorte de sainteté absolue: c'est en Saint Antoine de Padoue qu'il finira sa course. C'est dément. A peine arrivé à Locarno, c'était autour de l'Ornithologue une véritable bataille d'Hernani. Une partie de la critique disait ne rien comprendre à ce que cherchait, à travers la religion, la sensualité et la mystique, Joã Pedro Rodriges (alors que son cinéma, depuis O Fantasma jusqu'à Mourir comme un homme n'a cessé de mêler le sexe, la transformation des corps, et l'élévation spirituelle. Il y a du Bataille en lui). L'autre camp parlait du film avec des étoiles dans les yeux. C'est ce camp que l'on a rejoint. Marchant une heure dans la ville quasi vide, à la sortie d'une projo nocturne, flottant, ne voulant plus qu'une chose : que ce film recommence ou ne s'arrête jamais. Il sort en novembre, et au même moment un hommage complet sera rendu, à Beaubourg, à son réalisateur. On en reparlera à ce moment là. [...] Philippe Azoury • Grazzia ici

LE GOUFFRE de Vincent Le Port

France • 2015 • 52' • Stank production | Contact : stank.films@gmail.com Festival Côté Court - Pantin 2016 : Prix GNCR / Prix Jean Vigo 2016 du court métrage | Festival de ClermontFerrand : Mention Spéciale du Jury et Prix de la Presse Télérama | Rencontres du moyen métrage de Brive : Prix du Public

Finistère nord. Fin octobre. La morte-saison. C’est le dernier jour de travail pour Céleste, gardienne d’un camping en bord de mer. Elle s’apprête à partir quand un enfant disparaît.

[…] Pourquoi ce court aujourd'hui ? Je me suis inspiré des légendes bretonnes, et j’avais envie non pas d’en adapter une, mais d’en inventer une nouvelle, plus contemporaine, tout en utilisant certains codes et en recréant l’atmosphère typique de ces légendes. J’avais aussi le désir de filmer les personnes que l’on voit dans le film, qui ne sont pour la plupart pas des comédiens, et de les filmer à ce moment-là de leur vie. J’ai écrit la plupart des personnages en m’inspirant d’eux, et j’avais sans doute inconsciemment le désir de les réunir tous ensemble dans un même film. Et puis il y avait aussi le désir, pour moi qui tourne pas mal de documentaires ou de films à mi-chemin entre le docu et la fiction, de faire un « pur film de fiction, et même de tendre un peu vers le film de genre. Citez trois cinéastes ou trois films qui vous ont donné envie de faire du cinéma / qui vous ont influencé ? La liste serait trop réductrice du coup je vais plutôt nommer trois films qui m’ont d’une manière ou d’une autre influencé pour Le Gouffre : Vaudou de Jacques Tourneur, Pique-nique à Hanging Rock de Peter Weir, et Un homme qui dort de Bernard Queysanne. […] extraits d'un entretien paru dans Télérama ici


MA'ROSA de Brillante Mendoza

Philippines • 2016 • 1H50 • avec Jaclyn Jose, Julio Diaz, Felix Roco, Andi Eigenmann

Pyramide • 30 novembre 2016 Festival de Cannes 2016 – Compétition : Prix d'interprétation féminine pour Jaclyn Jose

Edition d'un document d'accompagnement GNCR Site distributeur ici Ma’Rosa a quatre enfants. Elle tient une petite épicerie dans un quartier pauvre de Manille où tout le monde la connaît et l’apprécie. Pour joindre les deux bouts, elle et son mari Nestor y revendent illégalement des narcotiques. Un jour ils sont arrêtés. Face à des policiers corrompus, les enfants de Rosa feront tout pour racheter la liberté de leurs parents.

Premier plan (bref) du film : des pièces de monnaies qu’une main essaie de grappiller. Deuxième plan : un panneau publicitaire annonçant ironiquement "Aujourd’hui est votre jour de chance". Troisième plan : le grondement de l’orage qui s’apprête à exploser. Bam. En trois plans et quelques secondes seulement, Brillante Mendoza livre les clefs de la tragédie à venir, et plonge le spectateur dans un incroyable maelstrom. Cinéaste de l’urgence et de la survie, Mendoza plonge ici encore plus loin que d’habitude dans un réel bouillonnant. Dans un décor incroyable, un coin de ruelle où les maisons ressemblent à des bourbiers, on crie, chante, bouffe et sniffe dans un même élan , même sous la pluie diluvienne qui menace même de noyer la caméra (un saisissant effet proche de la 3D rappelant la pellicule qui brûlait dans Serbis). Ladite caméra est collée au réel comme un vêtement trempé. C’est le chaos, mais tout l’art de Mendoza est d’y naviguer tête baissée avec virtuosité. Rosa n’a pas le temps de se poser pour faire tenir sa famille debout, et chaque magouille est bonne quand on doit payer même un verre d’eau. Le crystal meth, consommé par son mari ou revendu sans état d’âme aux toxicos du coin, est rangée dans une vieille boite en carton, au milieu des cahiers d’enfants et des sucettes de son étal. On n’a pas le temps de se poser non plus (on est toujours dans les premières minutes du film) que débarque la police : Rosa est embarquée manu militari. Commence alors la nuit la plus longue : sa famille n’aura que quelques heures pour récupérer de quoi payer sa caution. Mendoza suit ses personnages sans jamais les lâcher : dans les voitures, dans le commissariat (...), dans leur quête nerveuse pour le moindre billet. A la différence de ses films précédents, Mendoza n’utilise ici jamais les codes du mélodrame. Ses personnages habituels de mère courage (Lola, Thy Womb...) laissent ici place à une famille indigne, où tout le monde s’insulte. Tous les rapports sont déshumanisés : les flics sont tout aussi corrompus, et l’on se dénonce entre voisins. Mendoza ne filme plus des héros luttant contre l’adversité, il montre un serpent qui se mord la queue : une société où pour survivre, chacun est obligé de jouer des coudes et d’empiéter sur la liberté de l’autre, sur la loi. Cette absence de morale n’empêche pas l’émotion, comme le montre le puissant crescendo final, qui fait serrer les poings sur les accoudoirs. (…) Fauché mais radical, mis en scène sans répit et avec une ardeur rare, Ma’Rosa possède à plus d’un moment la puissance immersive du Fils de Saul. Gregory Coutaut • Filmdeculte ici

*** PROCHAINS SOUTIENS GNCR *** HOMO SAPIENS de Nikolaus Geyrhalter (ASC • 19/10/16) présenté dans le communiqué ACOR N°04 LETTRES DE LA GUERRE d'Ivo M. Ferreira (Memento • 08/02/17)

RECOMMANDATIONS GNCR DEAD SLOW AHEAD de Mauro Herce Espagne • 2015 • 1H15 | Potemkine • 5 octobre 2016 Festival de Locarno 2015 : Prix spécial du jury | DocLisboa 2015 : Prix du meilleur premier film

Site distributeur ici Un cargo, l’océan et la cadence hypnotique des machines qui tournent en continu, dévorant les hommes dont le geste ancestral disparait sous l’impersonnelle pulsation mécanique du néocapitalisme du XXIe siècle. Peut-être un bateau à la dérive, ou juste le dernier représentant d’une espèce en voie de disparition, dont les moteurs tournent, inexorablement.

Mauro Herce a imaginé filmer « le dernier navire de l’espèce humaine : un vaisseau à bord duquel l’équipage aurait échappé à la fin du monde, poursuivant ses actions mécaniques et soumis aux exigences de ce monstre d’acier qu’il continue d’entretenir jusqu’à l’inconscience. Dead Slow Ahead dessine les contours de ce cauchemar très contemporain, sans toutefois le condamner ou le dénoncer. Je cherche avant tout à capter les images les plus primitives et essentielles de cet univers où l’homme est tout petit face à une machine de métal qui fait peser sur lui une sentence immense et accablante.» Propos du réalisateur extrait du dossier de presse

MANUEL DE LIBÉRATION de Aleksander Kuznetsov

France 2016 • 1H20 | Nour Films • 19 octobre 2016 Visions du réel 2016 : Prix du jury Régionyon et Mention spéciale du jury interreligieux | Festival International du Film de Nancy-Lorraine : Grand prix du jury

Site distributeur ici En Sibérie, Yulia et Katia ont été transférées de l’orphelinat à l’internat neuropsychiatrique et ont été privées de tous leurs droits de citoyennes : pas de liberté, pas de travail, pas de famille. Ensemble, elles entament un combat pour que l’Etat leur restitue leurs droits et rende possible leur émancipation. Entre espoirs et déceptions, Manuel de libération est le récit de ce chemin vers la liberté.

[...] On est vraiment impressionnés par le talent d’Alexander Kuznetsov et sa capacité d’écoute et d’observation. Le film a une formidable progression narrative, simple et implacable. La caméra est toujours à la juste distance et, à travers sa captation des espaces, nous donne la vraie dimension du drame que les protagonistes vivent. Elle reste par ailleurs très pudique quant à leurs émotions, comme dans les scènes finales, où tout se dit dans la luminosité d’un regard ou dans l’espace vide d’une fenêtre fermée. Un saisissant « manuel de libération ». Luciano Barisone • www.visionsdureel.ch ici

[…] Parfaitement construit et proche de ses « héroïnes » dont il saisit les moments d’inquiétude comme le moindre frémissement d’espoir, Alexander Kuznetsov signe un film poignant dans lequel une bureaucratie obtuse broie les individus comme à l’époque soviétique. […] François Ekchajzer • Télérama


SOUTIEN ACID / SOUTIEN GNCR LE VOYAGE AU GROENLAND de Sébastien Betbeder

France • 2016 • 1H38 • avec Thomas Blanchard, Thomas Scimeca, François Chattot, UFO distribution • 21 décembre 2016 | Sélection ACID Cannes 2016

Edition d'un document d'accompagnement ACID Site distributeur ici | site ACID ici | projet transmedia ici Thomas et Thomas cumulent les difficultés. En effet, ils sont trentenaires, parisiens et comédiens… Un jour, ils décident de s’envoler pour Kullorsuaq, l’un des villages les plus reculés du Groenland où vit Nathan, le père de l’un d’eux. Au sein de la petite communauté inuit, ils découvriront les joies des traditions locales et éprouveront leur amitié.

Sous le signe de Jankélévitch et d’Hergé (Texte de soutien par Cati Couteau) Le Voyage au Groënland est un film lumineux où l’émotion est d’autant plus forte qu’elle sourd d’un subtil décentrement du quotidien. Variation betbederienne autour de ses figures de paumés perchés, l’épopée drolatique de Thomas et Thomas, jeunes gens lunaires parachutés sur une terre lunaire, se déroule sous le patronage conjoint du philosophe et du dessinateur de BD. Sous les auspices malicieux du premier, un je-ne-sais-quoi flotte comme un charme dans ce village inuit, sorte d’idéal écolo : pas d’électricité, on charrie l’eau selon les besoins, les toilettes sont sèches, les équipements techniques sont modestes, collectifs et souvent en panne, on y pratique le footing comme aux Buttes Chaumont. La luminosité particulière de ce territoire gelé éclaire le tragique familier de leur précarité et de leur maturité indécise de façon plus aigüe qu’observées dans leur écosystème habituel. Un je-ne-sais-quoi d’infime, ici, décale la banalité des petits riens par lesquels, sur la fine crête de l’instant, on surprend les vibrations et les altérations qui traversent les deux Thomas. Quand ni la langue de l’autre ni ses codes ne sont intelligibles, quand la proximité amicale obture la connaissance de l’autre (…), l’altérité devient miroir et l’expérience de l’amitié se déploie, aussi paradoxalement que la relation au père se tisse dans la distance pudique. C’est sous le signe du second que les aventures de T &T au Groënland imposent leur expressivité poétique, une limpidité qui a tout à voir avec la ligne claire : précision, rigueur et lisibilité. Les séquences sont structurées et cadrées comme des planches de bande dessinée. La chasse au phoque est à ce titre exemplaire : l’absence d’ombre sur la banquise renvoie à la quasi absence d’ombre dans les dessins d’Hergé, l’expressivité graphique des silhouettes des deux Thomas, le temps suspendu du final (viser/tirer) qu’on voudrait prolonger en revenant à son début, comme dans la relecture fébrile d’une page de BD pour en prolonger la fin… la jubilation d’un récit en soi. (...) Le voyage excelle à déployer la palette des rêveries douces-amères des deux héros. Merveilleux comédiens, très contemporains dans l’incertitude de leur statut social et affectif, Thomas Blanchard et Thomas Sciméca résistent au tragique familier avec une mélancolie souriante et une légèreté élégante. Ils distillent une émotion de haute intensité et s’en reviendront de cette contrée au froid revigorant avec une maturité nouvelle.

SOUTIEN ACID LE PARC de Damien Manivel

France • 2016 • 1H11 • avec Naomie Vogt-Roby, Maxime Bachellerie, Sessouma Sobere Shellac • 4 janvier 2016 | Sélection ACID Cannes 2016

Edition d'un document d'accompagnement ACID Site distributeur ici | site ACID ici C’est l’été, deux adolescents ont leur premier rendez-vous dans un parc. D’abord hésitants et timides, ils se rapprochent au gré de la promenade et tombent amoureux. Vient le soir, l’heure de se séparer...

Un diamant scintille dans la nuit cannoise. Un petit film réalisé avec trois fois rien, qui possède le charme artisanal du cinéma des origines, et brille des feux colorés que peut aujourd’hui produire la technologie numérique. Le Parc, deuxième long-métrage de Damien Manivel (...), met en scène une rencontre amoureuse dans un parc, et ses conséquences, en basculant insensiblement d’un naturalisme prosaïque à un climat fantastique envoûtant. […] Pour son film, il n’a eu besoin que de trois acteurs, trouvés au terme d’un long casting sauvage, et d’un parc dont il fallait, pour que le charme opère, qu’il présente suffisamment de relief, de diversité de paysages, de caractère. Car ce parc est le personnage principal du film, une divinité protectrice mais potentiellement dangereuse, dont le récit minutieusement chorégraphié œuvre à révéler les formes, les mouvements, l’inquiétante étrangeté. Tout commence par une belle journée d’été. Dans le parc, un garçon seul semble attendre quelqu’un. Une fille le rejoint, s’assoit à côté de lui sur un banc. C’est leur premier rendez-vous amoureux. Ils sont timides. Mais à mesure qu’ils s’enfoncent dans ce parc qui pourrait être la version française de la jungle qui borde les villages dans les films d’Apichatpong Weerasethakul, leur parole se libère. Il lui parle de Freud, elle lui parle de gymnastique. Et les gestes suivent. (...) Arrivés dans le bois, à l’abri des regards, ils peuvent enfin se toucher, s’embrasser, coller leurs peaux l’une contre l’autre. Confiants comme les héros glorieux d’un conte de fées, les jeunes amants se projettent dans un amour éternel. L’après-midi touche à sa fin, le garçon s’en va, la fille reste, allongée dans l’herbe, lui envoie un SMS. Et c’est la douche. Le garçon se rétracte. Il regrette. Le texte des messages s’inscrit à même l’écran dans des lettres de couleur vive tandis que la douleur et le dépit effacent le sourire de la jeune fille, et que le jour cède la place à la nuit. « J’aimerais revenir en arrière, pour que rien de tout cela n’ait existé. » Comme un médecin des âmes, le bois accouche la parole, qui se traduit en actes. Après ce dernier message, la jeune fille se lève, se met en marche pour refaire, à reculons, le chemin qu’ils ont accompli ensemble dans la journée. Mais, dans le bois, elle se perd et un gardien à la peau noir ébène et au regard inquiétant l’entraîne loin des rivages du réel, dans la lumière magique d’une lune artificielle. Quelque part entre La Reine des pommes, de Valérie Donzelli, et La Nuit du chasseur, de Charles Laughton, ce petit film se déploie pendant une heure et dix minutes avec la grâce d’un funambule. (…) Isabelle Régnier • Le Monde ici


SOUTIENS AFCAE ACTIONS PROMOTION TANNA de Bentley Dean, Martin Butler

Vanuatu/Australie • 2016 • 1H44 • avec Marie Wawa, Mungau Dain, Marceline Rofit

Urban Distribution • 16 novembre 2016

Mostra de Venise - Semaine de la critique : Prix du Public / Meilleure Photographie | BFI London Film Festival : Félicitations du Jury | Zaghreb Film Festival : Mention spéciale

Edition d'un document AFCAE | Site du distributeur ici Dans l'une des dernières tribus traditionnelles du monde, une jeune fille rompt son mariage arrangé pour s'enfuir avec l'homme qu'elle aime. Les amoureux déclenchent ainsi une guerre qui menace leur clan. Tanna est l’histoire vraie qui bouleversa la vie des habitants d’une petite île du Pacifique et fit réviser la constitution d'un pays..

Projet singulier, TANNA tient à ce que sa genèse soit évoquée. A priori de facture très classique, la première fiction réalisée par les documentaristes Bentley Dean et Martin Butler met en scène un épisode clé dans l’histoire de « Tanna », une petite île du Pacifique où les aborigènes ont décidé de vivre selon leurs traditions et la culture de la « Kastom ». Ecrit avec la complicité du peuple Yakel, le scénario nous confronte à une romance dans le caractère absolu contraint les sages à mettre en question les lois ancestrales des mariages arrangés. Un récit pittoresque et universel. Le premier mouvement du film nous plonge dans une période d’insouciance, lorsque Wawa n’a d’yeux que pour Dain qui quitte le village pour devenir un homme. Le temps s’évapore le temps d’une ellipse et la narration prend alors place. A l’inverse de sa petite soeur espiègle, Wawa a intégré les gestes qui sont l’ordinaire des femmes. D’ailleurs, le rite célébrant sa maturité se prépare. C’est dans ce contexte que Dain rentre au village et autant dire que malgré leur silence les deux tourtereaux ne songent qu’à convoler. Mais aussi absolue soit-elle la passion qui les réunit n’a rien d’ordinaire. Parallèlement à la romance, le scénario évoque maladroitement les tensions entre les différentes tribus qui conduisent à l’ouverture d’un conflit. La résolution de ce dernier nous confronte alors à un rituel ancestral consistant en l’arrangement d’un mariage entre les tribus en signe de paix. Alors que le passage à l’âge adulte de Wawa se célèbre, celle est décidée à convoler avec celui pour qui son coeur bat est sacrifié sur l’autel de l’honneur . Lorsque Dain et Wawa refusent leur destin, le récit bascule en une ultime mouvement où se confrontent la tradition et la modernité « coloniale » toute proche… Le choix porté par les amoureux, animés par un feu à leurs yeux aussi sacré que celui du volcan Yahul, se doit-il d’être tragique ? (...) l’approche présente l’originalité d’avoir pour décor l’île même où se déroule l’action et comme acteurs les membres de la tribu Yakel ou de tribus voisines. Choisis par ses pairs parce qu’il est le plus beau, Dain (alias Mungau Dain) transcende proprement l’écran tout comme la sublime Marie Wawa. (...) Rendant proprement hommage à un mode de vie et à la culture de la « Kastom » (ouverte à l’évolution au coeur de la tradition), les réalisateurs filment avec sensibilité les acteurs dont le principal devient le coeur-même de l’île, le volcan dont le bouillonnement (ou simplement le cadre) conduit à quelques scènes d’une beauté hypnotisante. Nicolas Gilson • Ungrandmoment.be ici

UNE SEMAINE ET UN JOUR de Asaph Polonsky

Israël • 2016 • 1H38 • avec Shai Avivi, Evgenia Dodina, Tomer Kapon, Alona Tamari

Sophie Dulac • 14 décembre 2016

Sélection Semaine de la critique Cannes 2016 : Prix Fondation Gan à la diffusion 2016

Edition d'un document AFCAE | Site du distributeur ici A la fin du Shiv’ah - les 7 jours de deuil dans la tradition juive - l’existence doit reprendre son cours. Tandis que Vicky, sa femme, se réfugie dans les obligations du quotidien, Eyal, lui, décide de lâcher prise… Avec un ami de son fils défunt, il partage un moment de liberté salvateur et poétique, pour mieux renouer avec les vivants...

On ne peut pas dire que le pitch faisait rêver (...) De quoi redouter un nouveau film sur le deuil comme il s’en voit beaucoup en festival, et la perspective d’un traitement cocasse (…) n’avait rien pour nous rassurer, laissant craindre un objet un peu hypocrite, faussement enjoué alors que rien dans la situation ne s’y prête. Dès les premières minutes, One week and a day lève ces préventions : plus ferme, plus affûté qu’on ne le pensait. Le père, Eyal, enferme ses voisins dans le jardin, leur reprochant leur absence au pire de la crise, sans se départir d’une sorte d’humour pince-sans-rire peu amène révélant une douleur qu’on imagine immense. Ce n’est pas forcément nouveau, ce refus de l’émotion derrière un cynisme bourru. Ce qui l’est plus est peut-être, d’une certaine manière, le refus du refus. Le scénario aurait pu s’amuser beaucoup plus avec son personnage principal, plaisamment odieux (...), en faire un anti-héros truculent. S’amuser plus aussi avec cette histoire de joint (...). Au lieu de quoi, ne recherchant ni le pathos ni le rire systématique (même si l’humour opère indéniablement), il offre finalement peu de prises, ne pouvant que constater que tout est incertain, et branlant, ce qui était probablement la solution la plus honnête. Il est difficile de dire, par exemple, si le couple des parents est prêt à rompre, ou profondément soudé sous une certaine rudesse. Difficile de dire aussi si la défunte destinée à occuper la concession voisine de celle du fils est aussi admirable, aussi solide que dans le portrait qui nous en est fait. [...] Là où le film passionne, c’est dans sa manière de souligner le caractère indispensable des échappatoires. Cette histoire de joint n’est pas le cœur du film, ou un cœur ponctuel. Pas non plus un prétexte, parce que le temps de quelques heures, voire quelques jours, il s’agit effectivement de l’unique objectif qui paraisse à Eyal valoir le coup d’être poursuivi sérieusement. Mais bientôt, un autre but, guère moins dérisoire, viendra s’y substituer, puis encore un autre. A un moment, le film se décentre, de manière étonnante (c’est sans doute sa plus grande qualité, cette faculté de nous refuser le passage attendu : en guise de scène de défonce, un homme qui joue avec deux chatons puis se couche en chien de fusil au côté de sa femme ; la vidéo de deux enfants, le fils décédé et celui du voisin, chantant You can call me Al de Paul Simon ? on ne la verra pas), pour se consacrer au deuil d’un autre homme. On le voit notamment, comiquement, mettre toute son énergie à laver sa voiture salie par un caca d’oiseau, sans résultat, manière peut-être un peu explicite de la part du cinéaste de souligner l’importance de ces petits buts qu’on se fixe et qui seuls permettent de tenir. Le dire n’est rien, le constat psychologique est banal. Ce qui l’est moins, c’est d’avoir imaginé un film qui, par son rythme, épouse ce mouvement-là. Nicolas Truffinet • Accreds ici


NERUDA de Pablo Larraín

Chili / Argentine / France / Espagne • 2016 • 1H48 • avec Luis Gnecco, Gael García Bernal, Mercedes Morán | Wild Bunch • 4 janvier 2017 Quinzaine des Réalisateurs 2016

Edition d'un document AFCAE | Site du distributeur ici 1948, la Guerre Froide s'est propagée jusqu'au Chili. Au Congrès, le sénateur Pablo Neruda critique ouvertement le gouvernement. Le président Videla demande alors sa destitution et confie au redoutable inspecteur Óscar Peluchonneau le soin de procéder à l'arrestation du poète. Neruda et son épouse, la peintre Delia del Carril, échouent à quitter le pays et sont alors dans l'obligation de se cacher. Neruda joue avec l'inspecteur, laisse volontairement des indices pour rendre cette traque encore plus dangereuse et plus intime. Dans ce jeu du chat et de la souris, il y voit l'occasion de se réinventer et de devenir à la fois un symbole pour la liberté et une légende littéraire.

“Neruda”, de Pablo Larrain : antibiopic éblouissant et épique (…) A la fin des années quarante, le fameux poète communiste chilien Pablo Neruda est déclaré traître au régime populiste en place. Il doit fuir, se cacher. L'épisode historique – du moins le début de la cavale, entre 1947 et 1949 – inspire au réalisateur Pablo Larrain un grand poème visuel, tissé de scènes courtes, insolites, caustiques et rêveuses. Le poète se déguise et déclame des vers dans une soirée mondaine. Le poète se moque d'un adversaire politique dans une pissotière… C'est Luis Gnecco, comédien impérial et malicieux, qui habite ce rôle pourtant écrasant avec une légèreté, une rondeur et un charisme étonnants. Dans cet antibiopic éblouissant (…) le cinéaste détricote tout, et d'abord la figure du grand homme. Il s'agit moins de montrer les faits que l'effet : l'imaginaire de Neruda, son impact sur tout un peuple, des enfants perdus aux femmes pâmées, sa puissance créative, s'échappent et débordent dans le film, truquent le réel, dévient les trajectoires et la narration. A la poursuite de l'artiste, mystère immense, à la fois grandiose et facétieux, le film lance un drôle de flic. Raide comme la mort, d'une sinistre drôlerie, Gael Garcia Bernal le rend à la fois pathétique et inquiétant, un personnage en lignes claires, presque un méchant de bande dessinée. L'individu s'appelle Oscar Peluchonneau, qui commente en voix off l'étrange jeu de cache-cache qui se déploie des coulisses du pouvoir de Santiago aux espaces infiniment blancs de la cordillère des Andes. Partout le flic, ce poignant Dupont sud-américain, arrive trop tard, échoue dans sa tentative d'enfermer, de définir, de simplifier. Partout Neruda laisse son sillage de magie et de fascination, et aussi un livre, quelques miettes de mots pour narguer son poursuivant. D e Santiago 73, Post Mortem à El Club, en passant par No, on connaissait la noire dérision de Pablo Larrain, son goût pour les tranches d'humanité découpée au scalpel. S'il a gardé, ici, toute son ironie, s'il s'amuse par moments à déguiser son film en polar à l'ancienne, il se laisse aussi emporter comme jamais, enivré par le souffle épique du sujet. (...) Sur ce tableau fantasque et libre d'une époque où les poètes étaient plus grands que la vie, où ils promettaient, avec une confiance effrontée, des lendemains fraternels, plane aussi l'ombre de la dictature. La traque de Neruda ressemble à la répétition générale du drame politique à venir que Pablo Larrain n'a cessé de scruter, dans toute son œuvre.(...) Cécile Mury • Télérama ici

*** PROCHAIN SOUTIEN AFCAE Actions-promotion *** 3000 NUITS de Mai Masri (JHR films • 4 janvier 2017)

SOUTIEN PARTENARIAT AFCAE PATRIMOINE RÉPERTOIRE Rétrospective DEREK JARMAN Malavida • janvier 2017 | Site distributeur ici | Document d'accompagnement édité par le distributeur

[…] Proche du cinéma expérimental, Derek Jarman est un des cinéastes les plus extrêmes du cinéma britannique, et surtout un des seuls à être resté en dehors des circuits commerciaux. Véritable novateur, Jarman est une figure essentielle de l’histoire du cinéma anglais, notamment grâce son action en faveur de la communauté gay. Il a su utiliser l’Histoire comme métaphore de la société de l’époque, et faire passer des messages pacifistes à travers l’art et la culture en montrant les homosexuels de manière positive. N’ayant jamais abandonné la peinture, Jarman est également réputé pour son esthétique singulièrement poétique, et son attention aux décors qui participent véritablement à l’atmosphère du film. [...] cineclubdecaen.com ici

JUBILEE Royaume-Uni • 1978 • 1h46 • avec Jenny Runacre, Nell Campbell, Toyah Willcox.

La reine Élisabeth 1ère est envoyée dans le futur par l'occultiste John Dee. Elle débarque dans l'Angleterre tumultueuse de la fin des années 1970. Elle évolue dans le décor d'une ville en pleine décadence sociale et matérielle, en observant les agissements d'une bande de nihilistes, Amyl Nitrate, Bod, Chaos, Crabs et Mad

LA TEMPÊTE Royaume-Uni • 1979 • 1h35 • avec Peter Bull, David Meyer, Neil Cunningham

La tempête se déchaîne, vengeance de l'ancien duc de Milan, Prospero, miraculeusement échoué dans une île magique douze ans auparavant avec sa fille Miranda, après avoir été exilé par son frère usurpateur, Antonio.

LAST OF ENGLAND Royaume-Uni • 1988 • 1h35 • avec Tilda Swinton,Spencer Leigh, Mark Adley

La fin d'une société dans une vision futuriste et violente d'une Angleterre post-thatchérienne. Un film anarchiste et violent, qui a marqué une génération.

SEBASTIANE Royaume-Uni • 1976 • 1h26 • avec Leonardo Treviglio, Barney James, Neil Kennedy

Au IVe siècle après J.-C., le magnifique Sebastiane est membre de la garde personnelle de l'Empereur Dioclétien. Quand il essaye d'intervenir pour arrêter une exécution, Sebastiane est dégradé puis exilé dans une garnison éloignée dans un lieu désertique où les soldats, en manque de femmes, s’adonnent parfois à l’homosexualité...


INFO DISTRIBUTEUR LE MYSTÈRE JÉRÔME BOSCH de José Luis Lopez-Linares

Espagne / France • 2016 • 1H24 • avec Salman Rushdie, Orhan Pamuk, Cai Guo Qiang, Michel Onfray, William Christie

Epicentre films • 26 octobre 2016

Site distributeur ici 500 ans après sa disparition, Jerome Bosch, l’un des plus grands peintres flamands continue à intriguer avec une œuvre aussi fascinante qu’énigmatique, aux interprétations multiples. A travers « le Jardin des Délices », historiens de l’art, philosophes, psychanalystes en cherchent le sens et rendent un hommage vibrant à un artiste qui défie le temps.

Comment définiriez-vous votre documentaire ? S’agit-il d’une enquête, d’un film pédagogique? Comme l’affirmait le réalisateur et biologiste français Jean Painlevé, le premier commandement pour un cinéaste est de ne faire que des films qui l’intéressent. En ce qui concerne mon travail, je m’efforce d’incarner les choses et les gens parce qu’ ils m’intéressent avant tout. Ici, j’essaie de comprendre le tableau, d’en savoir plus sur Bosch et cette soif de connaissance est intégrée dans mon documentaire. A l’arrivée, cela donne aussi une idée de ce que ce triptyque représente pour moi. Dans le même temps, c’est un médiateur entre le spectateur et le tableau. Il donne des clés de compréhension pour pénétrer son mystère, s’y confronter et l’apprécier. Comme l’écrivaine brésilienne Nélida Pinon le dit « pour expliquer le mystère Jérôme Bosch, nous devons inventer des mots ». D’une certaine manière, je dois aussi inventer un film qui commence comme un documentaire pour bifurquer vers des contrées plus personnelles. Votre démarche était-elle celle d’un « archéologue des images », tentant de décrypter le sens des visions de Jérôme Bosch ? Ma démarche était plutôt celle d’un « archéologue des émotions ». Les faits, les dates ne m’intéressent pas tellement. Bien sûr, nous en avons besoin pour parler des tableaux et il nous faut être précis. Mais je me sens davantage comme quelqu’un qui transmet des idées et des émotions. Je suis un storyteller qui raconte l’histoire et les découvertes de quelques « archéologues de l’image ». […] Iconique, le tryptique de Jérôme Bosch inspire aussi bien les écrivains que les musiciens ou les chanteurs, comme on peut le voir dans votre film. Comment expliquez-vous ce phénomène ? C’est une immense oeuvre d’art et les personnes qui se trouvent face au tableau, même si elles ne le comprennent pas, sont touchées par ce chefd’oeuvre. Comme le dit Salman Rushdie dans le film, le triptyque est très moderne et happe celui qui le regarde. Toutes ces couleurs - les bleus et rose pastels -, l’imagination qu’il suscite, son mystère impénétrable contribuent à le rendre très attirant. Le peintre commence par séduire et envoûter le spectateur. C’est la première étape. Une fois attiré, le spectateur peut entrer dans le tableau. Bien sûr, beaucoup de personnes ne rentreront jamais dedans mais elles peuvent sentir la démarche et se sentir impliquées. […] Extrait d'un entretien avec le réalisateur • dossier de presse


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