Carnets décembre 2017

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4–

SEMAINE

du 27 décembre au 2 janvier

2017

Dimanche 31 décembre, les dernières séances de 21h ne seront pas assurées. Lundi 1er janvier, les séances ne seront assurées qu’à partir de 17h. C

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ALLEZ COUCHER lundi 1h45’ AILLEURS 19h30 de Howard Hawks

14h15 16h45 19h15 21h30

2h00’

14h15 16h45 21h30

2h10’

14h15 17h30 19h30

1h40’

14h00

14h00 19h00

DRÔLES DE PETITES BÊTES

de Antoon Krings et Arnaud Bouron

de Ridley Scott

de Éric Barbier

MYRTILLE ET LA LETTRE AU PÈRE NOËL 16h00 de Divers réalisateurs

À suivre.

LA SOURIS DU PÈRE NOËL de Vincent Monluc

1h40’ VF

L’ÉCHANGE DES PRINCESSES de Marc Dugain

À suivre.

1h30’

1h18’

KEDI

DES CHATS ET DES HOMMES 1h43’

LE PORTRAIT INTERDIT

de Rungano Nyoni

À suivre.

de Charles de Meaux

HEARSTONE UN ÉTÉ ISLANDAIS

THE FLORIDA PROJECT Sean Baker

1h45’

BIENVENUE À SUBURBICON de George Clooney

1h18’

19h30

LA FIANCÉE DU DÉSERT de Cécilia Atan

Débat avec Monique Carriat, association Entraide et Solidarités, Patrick Marot, Observatoire international des prisons.

de divers Réalisateurs

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50’

ERNEST ET CÉLESTINE EN HIVER

de Julien Chheng et Jean Christophe Roger

de Éric Till

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1h30’

LA NUIT DES MORTS VIVANTS

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COEURS A MODELER

17h00

14h30 1h45’ BIENVENUE 17h00 À SUBURBICON 19h45 de George Clooney 21h45 14h00 1h47’ LA VILLA 19h30 de Robert Guédiguian 21h30

1h42’

VO

14h30 VF 16h00 17h15 21h15 17h15 21h30

1h36’

mer-sam-dim

15h45 19h30

LES GARDIENNES 21h15 de Xavier Beauvois

de Nick Park

59’ VF

ATELIER : mercredi

LE MUSÉE DES MERVEILLES

14h15

mer-sam-dim

16h15 mercredi samedi dimanche

16h00 samedi dimanche

16h00 mercredi samedi dimanche

de Todd Haynes

17h30

PLONGER

17h15 21h15

de Mélanie Laurent

17h15 MARVIN OU LA BELLE ÉDUCATION 21h15 SAUF jeudi de Anne Fontaine

1h55’

1h27’

MAKALA

12 JOURS

de Emmanuel Gras

de Raymond Depardon

14h15 SEULE LA TERRE 19h15 de Francis Lee

mer-sam-dim

WALLACE ET GROMIT mercredi

de George A. Romero

1h44’

POUR LE RÉCONFORT

A

LUTHER

2h

10h00 C

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500e anniversaire de la Réforme luthérienne En partenariat avec l’Association culturelle protestante de Touraine

1h57’ VF

17h30 21h30

1h50’

PROBLEMSKI HOTEL

21h45

de Manu Riche

1h57’

21h45

de Vincent Macaigne

Le film imprévu : www.studiocine.com www.studiocine.com

ET LA LETTRE AU PÈRE NOËL

14h30 2h14’ 17h00 LES GARDIENNES de Xavier Beauvois 19h15

2h14’

1h31’

I

14h00

1h52’

Guamundur Arnar Guamundsson

C

MYRTILLE

de Catherine Rechard

1h15’

19h45

2017

42’ VF

16h15

de Philippe Condroyer

À suivre.

19h15

TINTIN

de Ceyda Torun

I AM NOT A WITCH

Un autre regard sur la prison

lundi 19h30

À suivre.

ET LES ORANGES BLEUES

du 6 au 12 décembre

CNP VISAGES DÉFENDUS jeudi dimanche

À suivre. 26’ VF

LA PROMESSE DE L’AUBE

2h09’

14h30 16h00

42’ VF

TOUT L’ARGENT DU MONDE

19h15

1h28’

1–

SEMAINE

Cases orangées : programmation Jeune Public : voir pages 34 et 35

14h15 UN HOMME INTÈGRE 1h36’ LES CONQUÉRANTES 21h45 SAUF lundi 19h15 de Mohammad Rasoulof de Petra Biondina Volpe Le film imprévu : www.studiocine.com Toutes les salles des Studio sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Cinémas Stu d io – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – www.studiocine.com


2–

SEMAINE

du 13 au 19 décembre

Les populismes, un danger pour l’avenir

POPULISME L’EUROPE EN DANGER CNP jeudi de Antoine Vitkine

85’

19h45 C

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Débat avec Évelyne Pieillier, Journaliste au Monde diplomatique

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LES RAISINS DE LA COLÈRE lundi 2h10’ de John Ford 19h30

Soirée proposée et présentée par les élèves de la Section cinéma et audiovisuel du lycée Balzac.

L’ÉCOLE DE LA VIE dimanche 1h22’ de Maité Alberti

10h15 Dimanche 17 décembre à 10h15 projection unique du film. Suivie d’une rencontre avec Bruno Malassignè, président de l’association Trisomie 21 Indre-et-Loire

dimanche 16h15

de Antoon Krings et Arnaud Bouron

LA FIANCÉE DU DÉSERT de Cécilia Atan

LES GARDIENNES de Xavier Beauvois

14h00 1h53’ MARIA BY CALLAS 19h30 de Tom Volf 1h36’

14h15

PLONGER de Mélanie Laurent

de Nick Park

MYRTILLE ET LA LETTRE AU PÈRE NOËL

mer-sam-dim

de Divers réalisateurs

Conte et film le mercredi

1h18’ VF KEDI DES CHATS ET DES HOMMES AVANT-PREMIÈRE

Samedi 16 décembre 14h15 Séance suivie d’un goûter

de Ceyda Torun

14h00 19h45

1h35’

L’INTRUSA de Leonardo di Costanzo

16h15

samedi 14h15

Bimestriel du cinéma africain de Tours – BCAT n°9

2017

Débat avec Jean-Luc Raharimanana, écrivain et Gilles Richard, historien.

14h15 16h45 19h15 21h45

2h10’

14h00 19h00

1h52’

14h15 19h30

1h43’

LA PROMESSE DE L’AUBE

1h30’ DRÔLES DE PETITES BÊTES

SAUF jeu-ven

de Antoon Krings et Arnaud Bouron

SAUF jeu-ven

MYRTILLE ET LA 16h15 SAUF LETTRE AU PÈRE NOËL jeudi

42’ VF

de Divers réalisateurs

de Éric Barbier

1h42’ VF

THE FLORIDA PROJECT

16h00

vendredi

17h45

TINTIN ET LE MYSTÈRE SAUF jeudi DE LA TOISON D’OR de Jean Jacques Vierne

vendredi

LES GARDIENNES de Xavier Beauvois

17h00 19h00

L’USINE DE RIEN

LE SENS DE LA FÊTE

19h30

de Pedro Pinho

de Éric Toledano et Olivier Nakache

de Sean Baker

2h14’

LE PORTRAIT INTERDIT de Charles de Meaux

2h57’

17h00 19h15 21h15

14h00 19h45

1h37’

16h00

1h35’

de Robert Guédiguian

17h30 21h45

SEULE LA TERRE

17h45 21h30

1h55’

Suivie d’un brunch africain, offert après la séance.

BIENVENUE À SUBURBICON

1h45’

1h47’

LA VILLA

1h44’

SAUF lundi

SAUF jeudi

MARVIN OU LA BELLE ÉDUCATION 19h30

1h55’

14h30 21h45

2h57’

Vendredi rencontre avec Anselm Jappe, protagoniste du film et Pedro Pinho réalisateur.

de Cristina Pinheiro

SAUF ven :

19h30

Cases orangées : programmation Jeune Public : voir pages 34 et 35

17h00

LA FIANCÉE DU DÉSERT de Cécilia Atan

1h53’

L’INTRUSA

MARIA BY CALLAS

de Leonardo di Costanzo

de Tom Volf

1h45’

BIENVENUE À SUBURBICON

17h15 21h30 17h15 21h30

1h47’

LA VILLA de Robert Guédiguian

de George Clooney

21h15

1h57’

1h36’

L’USINE DE RIEN 19h45 de Pedro Pinho

1h18’

MENINA

SAUF jeudi vendredi

de Anne Fontaine

Le film imprévu : www.studiocine.com www.studiocine.com

59’ de Danièle Rousselier & Corinne Godeau

dimanche FRONTIÈRES de Apolline Traoré 11h30

1h31’ + C. M.

du 20 au 26 décembre

L’INSURRECTION DE L’ÎLE ROUGE CNP jeudi

14h00

de Francis Lee

17h30 1h57’ UN HOMME INTÈGRE 21h30 de Mohammad Rasoulof

14h15 16h00 17h45

16h15

de Emmanuel Gras

1h42’

COEURS À MODELER

de George Clooney

MAKALA

mer-sam-dim

WALLACE ET GROMIT mer-sam-dim 42’ VF

16h00 19h30 14h30 2h14’

14h15 21h45

DRÔLES DE PETITES BÈTES

1h28’ VF

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Dimanche 24 décembre, les dernières séances de 21h ne seront pas assurées. Lundi 25 décembre, les séances ne seront assurées qu’à partir de 17h. Insurections oubliées dans les colonies françaises 1h28’ 14h15

20h00

Ciné Apéro et atelier

Rencontre avec Jean Pierre Améris, le réalisateur, après la projection.

14h30 1h18’

SAUF sam

dimanche 10h30 1h20’ VF de Sylvain Chomet 35’ VF QUEL CIRQUE ! dimanche 10h45 de Bretislav Pojar et Karel Zeman

59’ VF

de Jean-Pierre Améris

SEMAINE

L’ILLUSIONNISTE

JE VAIS MIEUX

mer-sam-dim

17h00 21h15

AVANT-PREMIÈRE

1h27’

2017

MAKALA de Emmanuel Gras

UN HOMME INTÈGRE 21h45 de Mohammad Rasoulof

Le film imprévu : www.studiocine.com Tous les films sont projetés en version originale (sauf indication contraire)

Cinémas Stu d io – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – www.studiocine.com


ISSN 0299 - 0342

CINÉMAS STUDIO : 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS

N°362 • Décembre 2017


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Décembre 2017 - n° 362

Édito

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CNP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

Le cirque, entre théâtre et cinéma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 BCAT. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

LES FILMS DE A à Z En bref

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6

Horaires d’ouverture : lundi : de 16h00 à 19h45 mercredi : de 15h00 à 19h45 jeudi : de 16h00 à 19h45 vendredi : de 16h00 à 19h45 samedi : de 16h00 à 19h45

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FERMETURE PENDANT LES VACANCES SCOLAIRES

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Gérée par l'association AIR (chantier d'insertion),

Cafétéria des Studio

Bande annonce

La migration…

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À propos de

Va, Toto !

Pour permettre au public une plus grande fréquentation de ses collections (les plus riches de région Centre), la bibliothèque propose de nouveaux horaires.

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elle accueille les abonnés des Studio tous les jours de 16h00 à 21h45 sur présentation de la carte.

Tél : 02 47 20 85 77 Interférences

Une vie violente/120 battements par minute/ L’Atelier/Le Jeune Karl Marx . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

EUROPA

Courts lettrages

L’Atelier

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REGROUPEMENT DES SALLES POUR LA PROMOTION DU CINÉMA EUROPÉEN

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AFCAE

À propos de

L’Atelier

Les STUDIO sont membres de ces associations professionnelles :

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Rencontre avec

Jean Odoutan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

ASSOCIATION FRANÇAISE DES CINÉMAS D’ART ET ESSAI

ACOR

Rencontre avec

Laurence Fereira Borbosa

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ASSOCIATION DES CINÉMAS DE L’OUEST POUR LA RECHERCHE (Membre co-fondateur)

À propos de

Faute d’amour

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Interférences

Une famille syrienne/La Belle et la meute/Detroit Jeune Public

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GNCR GROUPEMENT NATIONAL DES CINÉMAS DE RECHERCHE

ACC ASSOCIATION DES CINÉMAS DU CENTRE (Membre co-fondateur)

Film du mois de décembre : MAKALA (voir au dos des Carnets)

GRILLE PROGRAMME

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pages centrales Prix de l’APF 1998

Site : www.studiocine.com page Facebook : cinémas STUDIO

LES ÉDITIONS DU STUDIO DE TOURS - 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - Mensuel - Prix du numéro 2 €. ÉQUIPE DE RÉDACTION : Sylvie Bordet, Isabelle Godeau, Jean-François Pelle, Dominique Plumecocq, Éric Rambeau, Roselyne Savard, Marcelle Schotte, André Weill, avec la participation de Françoise Chapoton et de de la commission Jeune Public. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Éric Rambeau – MISE EN PAGES & EN IMAGES : Francis Bordet. ÉQUIPE DEgraphique RÉALISATION contribue : Éric Besnier, Guérineaude – DIRECTEUR : Philippe Lecocq – IMPRIMÉ par PRÉSENCE GRAPHIQUE, Monts (37) Présence à Roselyne la préservation l’environnement et atteste être reconnu IMPRIM’VERT.


éditorial

Place aux jeunes E

ntendez par là : les cinémas Studio accordent une vraie place aux jeunes spectateurs qui sont d’ailleurs, depuis une bonne trentaine d’années, de plus en plus nombreux à fréquenter nos salles obscures. C’est dire si l’objectif initial : former les spectateurs de demain prend là tout son sens… Nous avons désormais plus de 1 500 jeunes abonnés ! Notre public adulte sait-il qu’au cœur des Studio vit « un mini Studio » intégralement dédié au Jeune Public ? Intimement attaché aux mêmes valeurs et prenant appui sur les principes fondateurs de notre cinéma, en lien avec la plupart des autres commissions puisque transversal, il se remarque surtout au travers de ses actions concrètes, directement reliées à son public. Programmation spécifique pour les enfants de 3 à 11 ans, rédaction attentive des Carnets destinés aux jeunes lecteurs, conception et préparation d’ateliers originaux ou d’animations pour accompagner certains films (jouets optiques, expression d’impressions, quart d’heure du conteur…), participation aux festivals, mise en œuvre de projets-événements avec nos partenaires culturels, lancement et suivi chaque année des dispositifs scolaires Maternelle au cinéma et École et cinéma pour tout le département, voilà un très bref résumé de toutes les activités de la commission Jeune Public des Studio. Que les plus curieux d’entre vous demandent à l’accueil un dépliant JP et ils y trouveront l’inventaire quasi exhaustif de tout ce que nous proposons aux enfants. La raison majeure de tout ce travail tient en un slogan indémodable :

Entre fiction et découverte du monde, imaginaire et réalité, le plaisir unique du grand écran ! Toutefois, si nos objectifs sont ambitieux, nous pouvons maintenant y répondre plus aisément, tant l’offre cinématographique destinée aux enfants s’est améliorée et diversifiée. Dans un monde affolant où une multitude d’écrans diffusent n’importe quoi à tout va, à l’écart des peurs issues d’une actualité qu’il est impossible d’ignorer, nous espérons offrir au regard enfantin une part de l’évasion dont il a tant besoin pour se construire, que ce soit vers le rêve ou vers un monde plus humain. Au-delà du choix des films, les tranches d’âge que nous conseillons pour chacun d’eux sont d’ailleurs l’un des éléments forts de notre réflexion. Pour avoir vraiment conscience de tout ce qui est fait pour les jeunes aux Studio, pour l’apprécier, il faut sans aucun doute être un public directement concerné. C’est en tout cas ce qu’attestent jeunes parents et grands-parents à chacune des occasions de rencontre, là aussi plus fréquentes qu’il n’y paraît ! Et pour filer une métaphore liée au cinéma, c’est le monde souterrain très organisé et productif des souris d’Ernest et Célestine qui évoque assez bien l’univers Jeune Public des Studio : nous préparons l’avenir en tissant des liens forts avec « le monde d’en haut ». Et comme lui, nous ne souhaitons qu’une chose : Faire battre le cœur du [jeune] public…* FC, pour le Jeune Public * Carnets adultes, septembre 2017 : titre de l’édito.

– Les CARNETS du STUDIO

n°362 – Décembre 2017 –

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FILM DU MOIS

La date de validité de votre carte d’abonnement figure... sur chaque ticket qui vous est remis en caisse. N’oubliez pas qu’il est également possible de se réabonner en ligne, sur le site des Studio !

MAKALA France – 2017 – 1h36, de Emmanuel Gras

K

abwita vit dans un très grand dénuement avec sa famille dans une province reculée du Congo. Il y fabrique, seul, du charbon de bois qu’il doit ensuite aller vendre. Pour cela, il doit se rendre, à pied, dans la ville la plus proche (50 km tout de même) en poussant un vélo bringuebalant sur lequel il a chargé un amas assez inimaginable d’énormes sacs bourrés à craquer. Le tout sur une route empoussiérée au milieu des camions lancés à toute allure et qui ne se préoccupent guère des vélos... Divisé en trois parties et trois lieux (la campagne, la route, la ville), Makala n’est pas de ces documentaires qui restent collés au réel mais de ceux qui transfigurent les situations dont ils témoignent. Se suivant comme une fiction (avec rebondissements et suspense) tout en gardant son attention aux personnages et à la réalité, le film épate par son souffle et sa splendeur visuelle. L’arrivée en ville, entre autres, est un très grand moment qui mêle les sensations contradictoires, entre la beauté de la

lumière du matin, l’empathie pour Kabwita qui en bave comme il n’est pas permis et la terreur provoquée par les camions. Mais nous ne sommes jamais devant Makala (charbon en swahili) en position de contemplation béate, au contraire, le réalisateur se pose, et nous pose par la même occasion, de nombreuses questions. Comment filmer Kabwita en le respectant ? Comment ne pas intervenir quand il est en difficulté ? Comment éviter l’indécence ? Après 300 hommes et Bovines, Emmanuel Gras fait de son film une extraordinaire odyssée, une œuvre universelle allégorique qui met en scène, par l’intermédiaire d’un forçat de la terre, l’âpre cheminement de l’existence de chacun. En transformant le modeste Kabwita en héros discret, il en fait un personnage inoubliable et signe une grande réussite. Grand prix de la Semaine de la critique au dernier festival de Cannes. JF

LES CARNETS DU STUDIO – n° 362 – Décembre 2017 – 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - CPPAP n°0219 K 84305

www.studiocine.com – 08 92 68 37 01


JEUNE PUBLIC

France/GB – 1991 – 26 mn, film d’animation de Vincent Monluc.

VF

Gisèle, petite souris qui cueille les dents de lait, est sauvée des griffes d’un chat par Hans, un garçon pauvre au bon cœur. Courageusement, elle s’engage à réaliser le rêve du garçonnet : avoir un cheval à bascule... Un conte charmant, attachant, dans l’esprit de Noël, réalisé à partir de dessins de Jean-François Laguionie. À partir de 3 ans En avant-programme, deux courts métrages (11 mn). Tout public à partir de 6 ans

VF GB – 2017 – 59 mn, courts métrages d’animation de Nick Park.

Les inventeurs farfelus de Wallace et Gromit : Les Inventuriers sont de retour, tantôt boulangers amoureux, tantôt en éleveurs de moutons, pour vivre de nouvelles aventures improbables et rivaliser de maladresse et d’inventivité.

Mercredi 6 après la séance de 16h, atelier pâte à modeler pour comprendre l’animation des personnages. Inscription: monmarche@studiocine.com ou 02 47 20 27 00 France – 2017 – 48 mn, film d’animation de Julien Chheng et Jean-Christophe Roger.

Programme de quatre courts métrages qui mettent à nouveau en scène Ernest le gros ours et son amie Célestine la petite souris…

À partir de 3 ans

CINÉ APÉRO dimanche 17 décembre 10h30

France/GB – 2010 – 1h20, film d’animation de Sylvain Chomet.

VF

Tout public à partir de 8 ans

10h45 République Tchèque – de 1957 à 1983 35 mn, courts métrages d’animation de divers réalisateurs.

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Tarifs réduits

Tout public à partir de 3 ans

VF

Voir page 5


JEUNE PUBLIC

France/Luxembourg – 2017 – 1h17, film d’animation de Arnaud Bouron et Antoon Krings, avec les voix de Kev Adams, Virginie Efira… À partir de 5 ans

VF

Ce superbe film d’animation est un délice de nostalgie pour les enfants devenus grands et un grand moment de féérie pour les petits.

VF

Tout public à partir de 10 ans

USA – 2017 – 1h57, de Todd Haynes, avec Oakes Fegley, Millicent Simmonds, Julianne Moore, Michelle Williams...

Lettonie/France – 2017 – 42 mn, trois courts métrages d’animation de divers réalisateurs.

Voir page 10

VF

Une souris, un biscuit et une petite fille vont vivre d’étonnantes aventures... L’un de ces films aborde avec finesse et fraîcheur la question de l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite sœur dans la famille. Sources : Télérama LE QUART D’HEURE DU CONTEUR Mercredi 13 au début de la séance, Gaël Prioleau viendra dire l’un de ses contes. Turquie/USA – 2017 – 1h18, documentaire de Ceyda Torun.

À partir de 4 ans

Voir page 9

Tout public à partir de 10 ans

VO VF

Samedi 16 décembre 14h15 Séance suivie d’un goûter

France/Belgique – 1961 – 1h42, film en version restaurée de Jean-Jacques Vierne, avec Jean-Pierre Talbot, Georges Wilson, Georges Loriot…

Tout public à partir de 7 ans

et le mystère Son vieux compagnon lui ayant de la Toison d’or

légué un bateau, La Toison d’or, le capitaine Haddock se trouve embarqué dans une mystérieuse aventure avec son ami Tintin… France/Espagne – 1964 – 1h40, film en version restaurée de Philippe Condroyer, avec Jean-Pierre Talbot, Jean Bouise, Félix Fernandez…

VF

Tout public à partir de 7 ans

Tintin, le capitaine Haddock, Tournesol et Milou partent à la recherche d’une orange bleue envoyée par un savant et qui a mysté35 rieusement disparu une nuit à Moulinsart…


LE CIRQUE, ENTRE THÉÂTRE ET CINÉMA

jeudi 7 décembre - 19h45 Le Génepi (Groupement étudiant national pour l’enseignement aux personnes incarcérées), la Ligue des droits de l’homme et le CNP proposent :

UN AUTRE REGARD SUR LA PRISON Les prisons françaises, comme le montrent souvent les médias, ne respectent ni les droits humains ni les règles d’hygiène et de sécurité exigibles dans de tels établissements, et ce dans l’indifférence générale. Ces conditions de détention en disent long sur le regard que nous portons, entre l’indifférence et la défiance, sur la prison et ses habitants. Cette soirée préparée avec le concours de plusieurs associations propose de renverser la perspective et de s’intéresser à la vision que «nous», citoyens hors des murs, avons des détenus. C’est l’axe que choisit le documentaire de Catherine Rechard, Visages défendus, France – 2016 – 1h15, qui retrace le parcours d’ex-détenus confrontés à une réinsertion rendue difficile par ceux-là même qui seraient insérés, et interroge sur le rôle que nous avons tous dans ce processus de réintégration des personnes enfermées à la société. Intervenants : Monique Carriat, membre de l’association Entraide et Solidarités, Patrick Marot, membre de l’Observatoire international des prisons.

jeudi 14 décembre - 19h45 Le CNP, ATTAC et Les Amis du Monde diplomatique proposent :

LES POPULISMES : UN DANGER POUR L’AVENIR Pierre Rosanvallon, historien et sociologue contemporain, a dit : « Le populisme est une forme de réponse – que l’on peut juger mauvaise – aux dysfonctionnements de la démocratie ». La montée des inégalités, la précarisation des

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– Les CARNETS du STUDIO

n°362 – Décembre 2017

classes moyennes et la perte d’indépendance des démocraties nationales dans le contexte de la mondialisation sont de vrais problèmes. Les réponses proposées par les populismes sont souvent chimériques, démagogiques et dangereuses. Leur caractéristique principale est de prôner une exclusion de masse. Aujourd’hui la notion de populisme a un sens essentiellement polémique. Elle est la plupart du temps un euphémisme pour désigner l’extrême droite. On peut se poser cette question : Les politiques actuelles sont-elles toujours d’une manière ou d’une autre marquées par les populistes ?

Les cinémas Studio s’associent au Théâtre Olympia pour vous proposer une passerelle entre deux événements :

Au Théâtre Olympia : du 13 au 21 décembre * Dark Circus En direct, en musique, en vidéo, en dessin, en lumière, deux artistes nous embarquent dans un univers de surprise et de poésie… Magie et virtuosité au programme ! Tout public à partir de 8 ans – www.cdntours.fr

aux Studio : dimanche 17 décembre * 10h45 10h30

Quel cirque !

République Tchèque – de 1957 à 1983 – 35’, courts métrages d’animation de divers réalisateurs. VF

L’Illusionniste France/GB – 2010 – 1h20, film d’animation de Sylvain Chomet - VF

Film : Populisme, l’europe en danger d’Antoine Vitkine,France – 2014 – 1h25 Débat avec Evelyne Pieillier, journaliste au Monde diplomatique.

Les associations Touraine Madagascar, Réseau Afrique 37 et le CNP proposent :

Dans les années 50, le monde du music-hall s’effrite face à l’arrivée du rock’n’roll qui remplit alors les salles. Un vieil illusionniste tente de poursuivre son activité malgré tout… Embarquez avec lui pour un voyage outreManche et savourez ce récit aux dessins d’une grande beauté, qui vous conduira jusque dans les rues d’Édimbourg.

INSURRECTIONS OUBLIÉES DANS LES COLONIES FRANÇAISES

Plus qu’un film d’animation, un petit bijou et un tendre clin d’œil à Jacques Tati !

jeudi 21 décembre - 20h00

1945, fin de la 2e guerre mondiale à laquelle ont participé les troupes indigènes des colonies françaises. Années 60, années des indépendances en Afrique. Et entre les deux ? Des mouvements d’insurrection contre la présence coloniale éclatent dès l’après-guerre. Ils seront durement réprimés et pour certains passés sous silence. Mars 1947 : une insurrection éclate à Madagascar. Elle fera des dizaines de milliers de morts. 2017 : depuis soixante-dix ans, des deux bords le sujet est souvent esquivé, bien des zones d’ombre demeurent et des questions restent en suspens. À quand l’ouverture totale des archives sur tous ces « événements » ? Film : L’Insurrection de l’île rouge de Danièle Rousselier et Corinne Godeau, France – 1994 – 55’, suivi d’un débat animé par Jean-Luc Raharimanana, écrivain et Gilles Richard, historien.

– Monsieur Prokouk acrobate, de Karel Zeman – Deux cœurs en piste, de Zdenek Ostrcil – Le Petit parapluie, de Bretislav Pojar Un programme tendre et drôle, tout en couleur et en poésie, avec les signatures de trois grands maîtres de l’animation tchèque. Un régal pour tous ! Tout public à partir de 3 ans

Tout public à partir de 8 ans

LE QUART D’HEURE DU CONTEUR Au début de cette séance, Gaël Prioleau viendra dire l’un de ses contes.

Après ces projections, tous les enfants seront invités à découvrir nos jouets optiques. La matinée se terminera autour d’un apéro familial ! * Tarifs réduits : • au Théâtre pour les abonnés des Studio. • aux Studio, sur présentation des billets d’entrée à Dark Circus.

BCAT – dimanche 17 décembre - 11h30 Chers Cinéphiles Déjà la 9e édition du BCAT. Pour terminer cette année riche en couleurs, nous vous proposons un road movie à travers l’Afrique de l’ouest, avec le long métrage Frontières de Apolline Traoré.

Frontières

Burkina Faso – 201 – 1h31, de Apolline Traoré, avec Naky Sy Savane, Amélie Mbaye...

Quatre femmes se rencontrent dans un bus sur le trajet Bamako-Lagos via Ouagadougou. Pendant leur périple elles découvrent de beaux paysages de pays côtiers et sahéliens. Néanmoins, le voyage est un parcours du combattant. Entre pannes de voitures et autres aventures, ces femmes de courage seront obligées de se serrer les coudes et de prendre soin les unes des autres. Un duplex nous permettra d’échanger avec une actrice et peut être la réalisatrice. La séance sera suivie d'un ciné brunch.

Apillone Traoré aux Studio

Les CARNETS du STUDIO n°362 – Décembre 2017 –

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Sur le site des Studio (cliquer sur : PLUS D’INFOS, pour entrer dans la fiche film), vous trouverez des présentations signées des films que les rédacteurs auront vus après leur sortie en salle. Les fiches non signées ont été établies de manière neutre à partir des informations disponibles au moment où nous imprimons.

ment. Mais à mesure qu’approche la date du référendum organisé dans le pays sur le droit de vote des femmes, la voilà prise de doutes ; pire : ses idées se propagent chez ses voisines ! Les critiques, dans leur ensemble, saluent un film intelligent et riche dans lequel « l’humour fait bon ménage avec la tension dramatique et la satire sociale » et parlent d’« une très bonne surprise »… SB

Les films de A à Z AVANT LES FILMS , DANS

TOUTES LES SALLES , AU MOIS DE DÉCEMBRE :

Blue Maqams d’Anouar Brahem - Musiques sélectionnées par Éric Pétry de RFL 101.

Séance Ciné-ma différence : Kedi, des chats et des hommes : samedi 16 décembre- 14h15

12 jours France – 2017 – 1h27, de Raymond Depardon.

12 jours, c’est le délai imparti dans lequel les personnes hospitalisées en psychiatrie sans leur consentement doivent être présentées en audience, en application de la loi du 27 septembre 2013. Puis tous les six mois si nécessaire. Entre juge et patient naît un dialogue sur le sens du mot liberté et de la vie. Parmi les 72 audiences filmées à l’hôpital du Vinatier à Lyon, 12 Jours présente 10 de ces patients, en respectant leur anonymat comme celui des noms et des lieux. Avec un dispositif simple et efficace de champs-contrechamps et trois caméras, ce sont des patients éprouvés par la maladie qui témoignent avec dignité et sensibilité, en engageant leur avenir. Ce documentaire « magnifique et implacable », présenté au Festival de Cannes hors compétition, réunit toujours le même duo talentueux : R. Depardon à la réalisation et Claudine Nougaret au son et à la production.

souhaitant accéder à la propriété : tout y est propre, harmonieux, paisible. Pas un brin d’herbe plus haut que les autres. Enfin… jusqu’à ce que les Lodge soient victimes d’un cambriolage meurtrier, alors qu’une famille noire vient juste de s’installer dans le voisinage. Dans ce contexte explosif, la violence va se répandre comme une tache d’huile sur la paisible cité et permettre de révéler ce qui se dissimule derrière ses murs : les mensonges, les trahisons, les intérêts sordides ! Pour sa sixième réalisation George Clooney s’empare d’un scénario des frères Coen (sous la houlette desquels il a pu incarner à quatre reprises des crétins d’anthologie), en jachère depuis trente ans ! Alors forcément, avec de tels auteurs le film, tout en dénonçant le racisme et la bêtise, revendique des accents burlesques et d’humour noir dignes de Fargo !

Sources : divers articles de presse.

D E

Sources : articles de presse ; premiere.fr ; lefigaro.fr

Filmographie sélective : Confessions d’un homme dangereux (2002), Les Marches du pouvoir (2011), Monument Men (2014)

Sources : articles de presse, lesinrocks.fr.

Filmographie sélective : Urgences (1988), 10e Chambre, instants d’audiences (2004), Les Habitants (2016).

B

Bienvenue à Suburbicon USA – 2017 – 1h45, de George Clooney, avec Julianne Moore, Matt Damon, Oscar Isaac…

Suburbicon représente la cité idéale pour toute famille américaine des années 50

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Les Conquérantes

Suisse – 2017 – 1h36, de Pietra Biondina Volpe, avec Marie Leuenberger, Bettina Stucky…

1970 : Nous sommes dans le charmant petit village suisse d’Appenzel où la vague de libération consécutive à mai 68 n’a pas (encore) atteint Nora, mère au foyer exemplaire, qui n’envisage pas sa vie autre-

C

Drôles de petites bêtes Voir pages Jeune Public

L’Échange des princesses

France – 2017 – 1h40, de Marc Dugain, avec Anamaria Vartolomei, Juliane Lepoureau, Lambert Wilson, Catherine Mouchet…

En 1721 Louis XV, âgé de onze ans, va bientôt devenir roi. Si le conflit armé avec l’Espagne a enfin cessé, Philippe d’Orléans, le Régent, veut s’assurer par tous les moyens que cette paix soit pérenne. Alors quoi de mieux que de faire se contracter des unions entre princes et princesses des deux cours concernées : ainsi Mlle de Montpensier, sa propre fille, épousera l’héritier du trône d’Espagne, tandis que Louis XV s’unira à l’infante Anna Maria Victoria, âgée de quatre ans. C’est en grandes pompes qu’aura lieu l’échange des jeunes princesses sur une petite île au milieu de la Bidassoa, à la frontière franco-espagnole : la fin de l’insouciance pour de jeunes enfants sacrifiés sur l’autel des enjeux de pouvoir… Marc Dugain (Une exécution ordinaire), pour son second passage derrière la caméra, adapte le roman de Chantal Thomas. Tous ceux qui ont pu voir cette fresque tragique saluent la qualité de l’interprétation des jeunes comédiens, à l’intensité rare, et un travail particulière-

ment remarquable sur la photographie ! Sources : ecranlarge.com ; cinenews

L’École de la vie

France/Chili/Pays Bas – 2016 – 1h22, film documentaire de Maite Alberdi.

Anita, Rita, Ricardo et Andrés forment une bande de copains trisomiques qui partage les bancs de la même école depuis 40 ans. Mais ils aspirent à une autre vie. Ils voudraient juste pouvoir faire comme tout le monde : être autonomes, gagner de l’argent, se marier, fonder une famille. Bref, qu’à plus de 50 ans on ne les considère plus comme des enfants. Enfin ! Mais cette « école de la vie » leur permettra-t-elle de réaliser leurs rêves ? La réalisatrice nous plonge dans le monde méconnu des adultes atteints de trisomie. L’École de la vie est une merveille à tous points de vue : une belle esthétique, des personnages mûrs et touchants, un humour décapant, une vraie problématique sur l’autonomie des personnes handicapées, qui vaut aussi pour la France, et une grande colère devant l’impuissance des protagonistes à faire leur propre choix. Après une vaste tournée dans plusieurs festivals, le film a été couronné par de nombreuses distinctions. Sources : Handicap.fr

Dimanche 17 décembre à 10h15 projection unique du film. Séance suivie d’une rencontre avec Bruno Malassignè, président de l’association Trisomie 21 Indre-et-Loire (coordonnées de l’association : 02-47-66-07-25 hppt://geist.21.37.free.fr)

Ernest et Célestine en hiver Voir pages Jeune Public

La Fiancée du désert

Argentine/Chili – 2017 – 1h18, de Cecilia Atán et Valeria Pivato, avec Paulina Garcia, Claudio Rissi…

F

La fiancée, c’est Teresa, une femme de 54 ans. Après avoir travaillé durant des années au service de la même famille, rompue au même quotidien, elle se

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retrouve contrainte à accepter une place loin de Buenos Aires. Pour s’y rendre, Teresa doit en effet traverser l’immense et hostile désert argentin ! Mais le voyage, au fil des rencontres, pourrait finalement se révéler l’amorce d’une nouvelle vie… La Fiancée du désert, présenté au dernier Festival de Cannes dans le cadre de la sélection Un certain regard, est le premier long-métrage de fiction pour chacune de ses deux réalisatrices. « Nous avons souhaité réaffirmer l’importance de la quête, du temps qui passe – du travail nécessaire à notre épanouissement afin de trouver la place qui est la nôtre. » Source : telerama.fr, imdb.com

G

Les Gardiennes

France – 2017 – 2h14, de Xavier Beauvois, avec Nathalie Baye, Laura Smet, Iris Bry...

En 1915 les hommes se battent sur le front pour, paraît-il, faire vivre le pays et les femmes se battent à l’arrière... pour faire vivre leurs familles. Il en va ainsi d’Hortense qui fait tourner sa ferme comme elle peut et embauche Francine, une jeune femme élevée par l’Assistance publique. Pour Francine c’est l’occasion inespérée de trouver quelque chose qui ressemblerait à une famille. En adaptant ce roman un peu oublié d’Ernest Pérochon et en s’en tenant à une forme très classique, Xavier Beauvois semble renouer avec la veine sensible qu’il avait développée dans Des hommes et des dieux, une veine qui privilégie l’humain et les dilemmes auxquels il est régulièrement confronté. Sources : unifrance.org

H

Heartstone – Un été islandais

Islande/Danemark – 2016 – 2h09, de Guðmundur Arnar Guðmundsson, avec Baldur Einarsson, Blaer Hinriksson, Sveinn Olafur Gunnarsson…

Dans un petit village de pêcheurs pittoresque au fin fond de l’Islande, Thor et

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Christian, deux adolescents, vivent un été mouvementé. L’un essaie de conquérir le cœur d’une jeune fille, l’autre découvre qu’il éprouve de nouveaux sentiments envers son meilleur ami. À la fin de l’été il est temps de quitter l’enfance et, pour les deux jeunes garçons, d’accepter d’entrer dans l’âge adulte... Heartstone est un magnifique film sur la jeunesse, la découverte de la sexualité et l’homosexualité, des thèmes vus et revus mais traités avec subtilité et avec une maîtrise surprenante pour une première œuvre. Guðmundur Arnar Guðmundsson choisit de rester simple et vrai dans son approche au plus près des sentiments et émotions que les pré-ados peuvent ressentir dans cette période. Hearstone a été primé dans les festivals d’Annonay, Marrakech et Angers.

son premier film – relevant de la fable – sélectionné d’emblée au Festival de Cannes dans la Quinzaine des réalisateurs. Concernant les camps de sorcière, la réalisatrice déclare avoir seulement parfois exagéré, précisant notamment que le plus vieux camp de sorcières existe au Ghana. Sources : divers articles de presse, africtelegraph.com

L’Intrusa

Italie – 2017 – 1h35, de Leonardo di Costanzo, avec Raffaella Giordano, Valentina Vannino, Martina Abbate...

Naples, de nos jours. Face à la domination mafieuse, Giovanna, travailleuse sociale, gère un centre qui s’occupe d’enfants défavorisés. Un jour une jeune femme et ses deux enfants se réfugient dans le centre et demandent sa protection à Giovanna. Or c’est l’épouse d’un dangereux criminel de la Camorra. Giovanna se retrouve face à un dilemme... L’Intrusa aborde un sujet, la mafia, très souvent abordé, sous un angle original. Car chacun peut se retrouver dans le personnage principal et ses questionnements. Pourtant pas de lourds discours théoriques, on reste toujours dans l’humain et le concret. Leonardo di Costanzo est auteur de documentaires et on en retrouve beaucoup de traces ici, notamment dans la façon de décrire très justement la vie du centre et dans ce que l’on perçoit du quartier de Naples dans lequel elle se déroule. C’est son second long métrage de fiction et le précédent, L’Intervallo, était déjà une magnifique réussite. JF

Sources : articles de presse.

L’Illusionniste Voir page 5

I

I Am Not A Witch

Zambie – 2017 – 1h34 de Rungano Nyoni, avec Margaret Mulubwa, Henry B. J. Phiri, Nancy Mulilo…

Shula, 9 ans, se retrouve chassée de son village, accusée par ses habitants de sorcellerie. La fillette, envoyée alors dans un camp de sorcières, se retrouve sous la protection de femmes bienveillantes, elles aussi ayant dû subir un jour une semblable condamnation. Gagnée par la superstition, Shula croit à un terrible sortilège : si elle s’enfuit, elle sera maudite et se transformera en chèvre ! Préférerat-elle rester prisonnière au camp ou bien tenter le sort d’une vie libre comme une chèvre ? Après plusieurs courts-métrages primés, Rungano Nyoni passe à la réalisation de

santé, mais lorsque notre héros, à l’abord de la cinquantaine, se retrouve le dos bien coincé et que rien ni personne ne semble pouvoir y faire quelque chose, l’heure pourrait être venue de se demander que faire pour aller mieux... Jean-Pierre Améris est un habitué des Studio, il nous a rendu visite pour chacun de ses films. Sensible et terriblement humain, il sait naviguer de la comédie au drame avec toujours la même pudeur et la même délicatesse, pudeur et délicatesse qu’il met autant dans ses films que dans ses interventions en public. Sources : divers articles de presse.

Dimanche 17 décembre à 16h15, AVANT-PREMIERE et rencontre avec Jean-Pierre Améris, le réalisateur.

Kedi, des chats et des hommes

VO & VF

Turquie – 2016 – 1h19, documentaire de Ceyda Torun.

K

Mi-sauvages, mi-domestiqués, des centaines de milliers de chats vagabondent dans les rues d’Istanbul depuis des siècles. Sans maître véritable, les chats sont le meilleur miroir de la vie des Stambouliotes. Ce documentaire atypique raconte l’histoire de sept d’entre eux. La ville, autant que les félins, est le personnage principal de ce film, notamment à travers ces incessantes mutations. Ce premier long-métrage a été sélectionné dans de nombreux festivals autour du monde. Sources : articles de presse

Samedi 16 décembre à 14h15, AVANT-PREMIÈRE en VF, dans le cadre de la séance Ciné ma-différence. Séance suivie d’un goûter.

Voir pages Jeune Public

J

Je vais mieux

France – 2017 – 1h27, de Jean-Pierre Améris, avec Éric Elmosnino, Ary Abittan, Alice Pol...

Il est rare que l’âge s’accompagne d’une grande amélioration de notre état de

Makala

M

Film du mois, voir au dos du carnet Les CARNETS du STUDIO n°362 – Décembre 2017 –

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Maria by Callas

France - 2017 - 1h53, documentaire de Tom Volf, avec la voix de Fanny Ardant.

En 2013, Tom Volf ne connaissait rien à l’opéra. Après avoir assisté, par hasard, à un opéra de Donizetti, il n’aura de cesse de glaner le maximum d’informations sur le sujet, faisant ainsi la rencontre qui va changer sa vie : Maria Callas ! Il mobilise alors toute son énergie pour une exposition et pour ce film. Sa volonté : « remettre La Callas au centre du récit de sa vie, sa légende étant truffée de contre-vérités ». Au plus près de la diva mais aussi de la Maria intime, grâce à des documents inédits, notamment amateurs, où l’on entend aussi bien l’artiste que la femme privée s’exprimer ; des entretiens avec des proches comme son majordome et sa femme de chambre (auxquels le film est dédicacé) qu’elle considérait comme sa famille, elle qui se sentait si seule. On (re)découvre aussi bien l’icône dépassée par sa propre légende que la femme passionnée et vulnérable, brisée par l’abandon. Pour ne pas oublier l’inoubliable interprète de Norma et Tosca ! Sources : hautetcourt.com

Marvin ou la belle éducation France – 2017 – 1h55, d’Anne Fontaine, avec Finnegan Oldfield, Grégory Gadebois, Vincent Macaigne, Jules Porier, Charles Berling, Isabelle Huppert…

Martin Clément, né Marvin Bijou, a fui son village des Vosges, la tyrannie de son père et la résignation de sa mère. Il a fui le rejet et les brimades auxquels l’exposait tout ce qui faisait de lui un garçon différent. Il a pourtant trouvé des alliés en Madeleine Clément, la principale de collège qui lui a fait découvrir le théâtre, et Abel Pinto, un être bienveillant qui l’encouragera à raconter son histoire sur scène. Marvin, devenu Martin, prendra des risques pour créer ce spectacle, ce qui

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c’est de suivre dans les magazines la carrière de la star de cinéma Lillian Mayhew. Un jour elle décide de partir sur les routes pour rencontrer son étoile à New-York… 1977 : Ben, handicapé d’une oreille suite à un accident, se retrouve orphelin. Son père, il ne le connaît pas. Alors il décide de réaliser son rêve : le trouver… Deux enfants, deux souffrances, deux époques, deux trajectoires solitaires, deux quêtes, mais une même destination : New-York… La filmographie de Todd Haynes en atteste : la forme de ses films est toujours subtilement travaillée, en fonction de leur sujet bien entendu, mais aussi en référence aux maîtres du passé : avec cette adaptation du roman de Brian Selznick (auteur également de Hugo Cabret, adapté par Martin Scorsese en 2011), Todd Haynes parvient à faire revivre avec autant de force et de magie le cinéma noir et blanc de Sjöström et de Murnau que les couleurs si caractéristiques du cinéma des années 70 ! Il relève aussi brillamment la gageure de nous faire pénétrer dans l’univers de ceux qui n’entendent pas ou mal. Avec son Musée des merveilles il réussit à nous faire revivre ce moment de l’enfance où tout paraît simple et merveilleux ! Alors…

finira de le transformer… Réalisatrice imprévisible aussi à l’aise dans la comédie que le drame, A. Fontaine signe ici un film à la fois virtuose et bouleversant, servi par des acteurs tous exceptionnels. ER

Menina

France – 2017 – 1h37, de Cristina Pinheiro, avec Naomi Biton, Nuno lopes, Beatriz Batarda...

Luisa Palmeira a dix ans et est née en France de parents portugais. Elle est la seule à parler sans accent et ne sait si elle se sent plus française que portugaise, ou l’inverse. Prise entre deux cultures, elle est également écartelée entre ses parents dont le couple est en difficulté. Bientôt son père tombe malade... Ce premier long métrage autobiographique est une superbe surprise qui décrit très finement un personnage qui peine à trouver son identité et doit affronter la disparition de son père. Même si l’âge du personnage principal n’est pas le même, on retrouve ici des thèmes qui parcouraient déjà le beau Tous les rêves du monde, sorti en octobre dernier, notamment dans la question de l’immigration portugaise en France. Prenant comme référence Y aura-t-il de la neige à Noël ? de Sandrine Veysset (il y a pire), Cristina Pinheiro signe un coup d’essai qui s’avère un coup de maître. On y découvre une jeune actrice étonnante, Naomi Bitton, et on y retrouve aussi l’excellent Nuno Lopes, que l’on a vu dernièrement en boxeur dans Saint Georges de Marco Martins. JF

Le Musée des merveilles

USA – 2017 – 1h57, de Todd Haynes, avec Oakes Fegley, Millicent Simmonds, Julianne Moore, Michelle Williams… VF

1927 : Rose a dix ans et elle est sourde. La seule chose qui éclaire sa solitude,

Sources : avoir-alire.com, articles de presse

Filmographie sélective : Safe (1995), Velvet Goldmine (1998), Loin du Paradis (2002), I’m Not There (2006), Carol (2015)

Voir pages Jeune Public

Myrtille et la lettre au père Noël Voir pages Jeune Public

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Plonger

France – 2016 – 1h42, de Mélanie Laurent, avec Gilles Lellouche, Maria Valeverde, Noémie Merlant…

César, un ex-grand reporter de guerre, et Paz, une photographe espagnole, s’aiment d’un amour-passion mais évoluent

rapidement dans des directions contraires. Paz a soif d’expériences et de voyages, alors que César souhaite s’extraire du tumulte du monde. Paz, enceinte, s’éloigne jour après jour de César et elle part du jour au lendemain vers une destination inconnue, laissant César et l’enfant sans véritable explication. Quand Paz est mystérieusement retrouvée morte sur une plage, César mène l’enquête en remontant le fil de leur amour... Plonger est adapté du roman de Christophe Ono-dit-Biot, qui a obtenu le Grand prix du roman de l’Académie française ainsi que le Prix Renaudot des lycéens en 2013. Sources : divers articles de presse.

Le Portrait interdit

France/Chine – 2017 – 1h43, de Charles de Meaux, avec Fan Bingbing, Melvil Poupaud…

Nous sommes au cœur de la Cité interdite, dans la Chine du XVIIIe siècle. Le jésuite et peintre officiel de la cour impériale, Jean-Denis Attiret, se voit confier la tâche honorifique de faire le portrait de l’impératrice Ulanara, figure romantique au destin très particulier dont il ne restera que ce portrait à la sensualité énigmatique, qualifié de Joconde asiatique. Ce film est un véritable enchantement visuel : décors somptueux, costumes en soie brodés, mobiliers et vaisselles fidèles répliques d’époque quand il ne s’agit pas d’originaux. Quant à l’histoire de cette ancienne concubine devenue impératrice et tombée en disgrâce, elle ne laisse pas indifférent. Sources : divers articles de presse.

Pour le réconfort

France – 2017 – 1h31, de Vincent Macaigne, avec Pauline Lorillard, Emmanuel Matte, Pascal Rénéric, Laure Calamy…

Après avoir passé quelque temps à vagaLes CARNETS du STUDIO n°362 – Décembre 2017 –

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bonder de par le monde, un frère et une sœur reviennent dans la propriété familiale pour entreprendre de la vendre. L’acheteur potentiel est un ami d’enfance, né plus pauvre qu’eux mais qui est en train de s’enrichir à la tête d’une entreprise de BTP. Entre rancœurs de classes et repas arrosés, les inimitiés et différences politiques vont se faire jour, et parfois violemment. Qui, des héritiers gaspilleurs ou des petits arrivistes, a raison ? Est-il plus moral de se reposer sur une fortune héritée ou de chercher à s’approprier à bas prix une propriété que ces derniers n’ont pas « méritée » ? Il y a tout cela et plus encore dans Pour le réconfort, mais il y a surtout la patte Macaigne : un film tourné très vite, sans aucune aide financière, puis très long à monter (plusieurs années) pendant que l’acteur-réalisateur n’était pas occupé ailleurs. La presse décrit un film débordant d’engueulades, d’invectives mais, surtout, d’énergie.

rien ! On a ici affaire à un film étrange, qui frôle le surréalisme et entend plutôt réinventer le réel en lui infusant de la poésie et en faisant la part belle à l’absurde. Ce premier long métrage est unanimement salué comme une sorte d’ovni particulièrement réussi. Un film belge, donc ! Sources : cinenews.be ; filmdeculte.fr

La Promesse de l’aube

France – 2017 – 2h11, d’Eric Barbier, avec Pierre Niney, Charlotte Gainsbourg, Didier Bourdon…

Problemski Hotel Belgique – 2017 – 1h50, de Manu Riche,

De son enfance difficile en Pologne à son adolescence sous le soleil de Nice, jusqu’à ses exploits d’aviateur pendant la seconde guerre mondiale… la vie de Romain Gary est un roman qu’il nous a fait partager dans le livre éponyme (Gallimard, 1950). Cette deuxième adaptation au cinéma, après celle de Jules Dassin en 1971, est à la hauteur du romanesque de la destinée de l’écrivain aux mille vies. Le film est fort bien servi par un casting de choix : prestations saluées de Charlotte Gainsbourg, possessive en diable et qui incarne admirablement l’amour inconditionnel et la force de caractère et de Pierre Niney tout en nuances entre colère et fragilité.

avec Evgenia Brendes, Gökhan Girginol, Tarek Halaby...

Sources : divers articles de presse.

Sources : telerama.fr, liberation.fr…

À Bruxelles, dans un bâtiment abandonné,

un groupe de réfugiés sans papiers cohabite, formant une petite communauté disparate gravitant autour de Bipul, un homme mystérieux. Polyglotte et vieux routier des administrations locales, c’est un peu sur lui que tout le monde compte pour régler les nombreux problèmes du quotidien. Mais attention : présenté ainsi, on pourrait croire que Problemski Hotel est une sorte de documentaire sur le sort des migrants abandonnés de la société dans laquelle ils aimeraient trouver refuge. Or il n’en est

Quel cirque ! Voir page 5

Le Sens de la fête

France – 2017 – 1h57, d’Olivier Nakache et Eric Toledano, avec J.-P. Bacri, J-P Rouve, Gilles Lellouche, Suzanne Clément...

Personne ne sait mieux faire des fêtes que Max qui, depuis 30 ans, en organise en qualité de traiteur. Enfin... quand on sait que le fêtard en question est interprété par J.-P. Bacri, on comprend aisément qu’il est probablement plus doué pour Les fiches paraphées correspondent à des films vus par les rédacteurs.

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organiser des fêtes que pour y participer lui-même. Mais là, en plus, pour ce gros contrat qu’il vient de décrocher tout, absolument tout, tourne mal et il reste très peu de temps à l’équipe pour remettre la fête sur les rails. L’originalité de ce film réside en son point de vue : les catastrophes nous sont ici montrées du point de vue de ceux qui travaillent dur pour que les autres s’amusent. Sources : telerama.fr

Seule la terre

Angleterre – 2017 – 1h44, de Francis Lee, avec Josh O’Connor, Alec Secareanu, Gemma Jones, Ian Hart…

Q S

Dans un coin perdu et brumeux du West Yorkshire peu hospitalier, Johnny travaille dans la ferme de ses parents. Le soir venu, il noie son amertume au pub du coin, multipliant par ailleurs les aventures sexuelles sans lendemain. Jusqu’au jour où Gheorghe, travailleur saisonnier, arrive à la ferme pour le seconder. Johnny fait alors l’expérience de sentiments nouveaux, inconnus de lui. Entre les deux jeunes hommes une relation forte semble naître, qui pourrait changer la vie de Johnny… Après trois court-métrages, Francis Lee tourne dans les paysages de son enfance son premier film. L’histoire profonde et émouvante de Seule la terre a reçu de multiples prix à différents festivals prestigieux : Sundance : Prix de la mise en scène ; Berlin : Panorama ; Dinard : Grand prix du jury et Prix coup de cœur, … Source : divers articles de presse.

La Souris du Père Noël Voir pages Jeune Public

The Florida Project

États-Unis – 2017 – 1h52, de Sean Baker, avec Willem Dafoe, Caleb Landry Jones, Bria Vinaite, Brooklynn Kimberly Prince, Valeria Cotto…

T

Dans la banlieue d’Orlando, non loin du fameux Disney World, Moonee, une fillette, et Halley, sa jeune mère, vivent au Magic Castle Motel. Le motel, tenu par Bobby et jadis occupé par les touristes, est désormais habité par des familles précaires. Moonee, du haut de ses 6 ans, ne manque pas de caractère. Elle et sa petite bande de gamins intrépides et insolents vont mettre à profit leur grande liberté dans le motel, tandis que Halley recherche des plans pour assurer le quotidien… Après Tangerine (2015), primé à Deauville, Sean Baker nous plonge à nouveau dans un univers décalé avec un regard plein de sensibilité. Loin de la féerie enchanteresse de Disney, il nous révèle les dessous du rêve américain avec humanisme et sans pathos. Sources : lesinrocks.com

Tintin et les oranges bleues Tintin et le mystère de la toison d’or Voir pages Jeune Public

Tout l’argent du monde

USA – 2017 – 2h, de Ridley Scott, avec Michelle Williams, Mark Wahlberg, Christopher Plummer, Romain Duris…

En 1973, à Rome, des hommes masqués kidnappent le petit-fils de Paul Getty, un magnat du pétrole, l’homme le plus riche du monde. Connu pour son avarice, le vieil homme ne veut pas se séparer d’une partie de sa fortune. Gail va tout faire pour obtenir la libération de son fils. Avec un agent de la CIA, elle se lance dans une course contre la montre face à des ravisseurs particulièrement cruels…

Film proposé au jeune public, les parents restant juges. Les CARNETS du STUDIO n°362 – Décembre 2017 –

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Après le demi-succès d’Alien Covenant, Ridley Scott laisse de côté la science-fiction pour un film d’action basé sur un fait divers qui avait marqué son époque. Le père d’Alien, Blade Runner, Gladiator et autre Robin des bois, a été attiré par le côté tragique de cette histoire. « C’est un drame shakespearien qui soulève de nombreuses questions philosophiques sur le pouvoir, la filiation et surtout la puissance corrosive de l’argent. » Sources : divers articles de presse.

U

Un homme intègre

Iran – 2017 – 1h57, de Mohammad Rasoulof, avec Reza Akhlghirad, Soudabeh Beizaee…

Venu de Téhéran pour s’installer à la campagne avec sa femme directrice de collège et leur fils, Reza vit de l’élevage de poissons d’eau douce. Une compagnie privée qui veut récupérer son terrain passe des menaces à l’étranglement financier, puis aux voies de fait pour parvenir à ses buts. À ne rien vouloir céder on risque de payer le prix fort : peur, mise en danger de son couple… Un homme intègre, qui a obtenu le prix Un certain regard à Cannes, est un plaidoyer incroyable et courageux contre la corruption qui gangrène l’Iran : « C’est inscrit dans le mode de fonctionnement du pays… la population s’est résignée… Elle est obligée de payer des pots de vin et d’en faire payer » Aujourd’hui, comme en 2011 où il fut retenu dans son pays et ne put venir recevoir le Prix de la mise en scène que lui avait décerné le jury cannois pour son film Au revoir, Mohammad Rasoulof est de nouveau prisonnier des autorités. Accusé « d’activités contre la sécurité nationale » et « de propagande contre le

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régime », il encourt une très lourde peine.

fraternité qu’il avait bâti dans ce lieu magique, autour d’un restaurant ouvrier dont Armand, le fils aîné, continue de s’occuper. De nouveaux arrivants venus de la mer vont bouleverser leurs réflexions… En revenant à ses fondamentaux, mêlant l’histoire prolétarienne à la romance, l’autobiographie à la fiction brechtienne, le réalisateur marseillais « signe un film plein de grâce et d’émotion, d’intelligence sur l’époque. » En pleine forme, il entraîne le spectateur dans «un récit mélancolique

Sources : divers articles de presse.

L’Usine de rien

Portugal – 2017 – 2h57, de Pedro Pinho, avec Jose Vargas, Carla Galvao, Njamy Uolo Sebastiao...

Une usine est vidée de ses machines par sa direction. Les ouvriers découvrent alors qu’ils vont bientôt être licenciés et décident d’occuper les lieux. Mais la direction disparaît, laissant toute la place aux ouvriers. Ces derniers vont alors tenter d’imaginer de nouvelles façons de travailler... Projet vraiment original (à l’origine une comédie musicale pour enfants) et tourné en grande partie avec des amateurs, L’Usine de rien est le résultat d’un travail collectif né de la rencontre entre un groupe de cinéastes (Pedro Pinho, Luisa Homem, Leonor Noivo, Tiago Hespanha) et les ouvriers de l’usine choisie pour tourner leur scénario, qui retrouvaient dans le projet de nombreuses choses qu’ils avaient vécues. Le résultat de cette œuvre commune est un film totalement surprenant qui mêle les genres et les formes, qui donne à réfléchir et à s’amuser et dont la longueur ne doit surtout pas rebuter. JF

Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan, Anaïs Demoustier…

Dans une calanque près de Marseille, au creux de l’hiver, Angèle, Joseph et Armand se rassemblent autour de leur père vieillissant. C’est le moment pour eux de mesurer ce qu’ils ont conservé de l’idéal qu’il leur a transmis, du monde de

Sources : lemonde.fr – les inrocks.com

Filmographie sélective : À la vie à la mort ! (95) – Marius et Jeannette (97) – La Ville est tranquille (00) – Le Promeneur du Champ-de-Mars (05) – L’Armée du crime (09) – Une Histoire de fou (15)

Wallace et Gromit cœurs à modeler Voir pages Jeune Public

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PROCHAINEMENT : • • • • •

Vendredi 15 décembre à 19h30, rencontre avec Anselm Jappe, l’un des protagonistes du film et Pedro Pinho, le réalisateur.

La Villa France – 2017 - 1h47 – de Robert Guédiguian, avec Ariane Ascaride,

sur la fin d’une époque militante et collective, mais aussi plein d’espoir sur la toujours possible naissance de l’amour, de confiance dans la jeunesse, dans la foi d’une écologie nécessaire. »

V

Vers la lumière de Naomi Kawase Je vais mieux de Jean-Pierre Améris Abracadabra de Pablo Berger In the fade de Fatih Akin La Douleur de Emmanuel Finkiel

• • • • •

Normandie nue de Philippe Le Guay Cœurs pur de Roberto de Paolis• Si tu voyais son cœur de Joan Chemla Frost de Sharunas Bartas L'Enfant de Goa de Miransha Naik

Dimanche 10 décembre 10h00

Lundi 18 décembre 19h30

500e anniversaire de la Réforme luthérienne En partenariat avec l’Association culturelle protestante de Touraine.

de John Ford – 1940 – USA – Noir et blanc – 2h10, avec Henri Fonda

Luther

de Eric Till – 2008 – USA/GB/Allemagne – Couleurs – 2h, avec Joseph Fiennes, Jonathan Firth et Peter Ustinov.

Lundi 11 décembre 19h30

Les Raisins de la colère

Soirée proposée et présentée par les élèves de la section cinéma et audiovisuel du lycée Balzac.

Lundi 1er janvier 19h30

Allez coucher ailleurs

de Howard Hawks – 1949 – USA – Noir et blanc – 1h45, avec Cary Grant et Ann Sheridan

La Nuit des morts-vivants de George A. Romero – 1969 – USA - Noir et blanc – 1h30

FILM INTERDIT AUX MOINS DE DOUZE ANS.

Programme détaillé dans le dépliant disponible à l'accueil et sur www.cinematheque.tours.fr

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Bande annonce

Ici… ` LA MÔME N’EST PAS UN ANGE Marion Cotillard possède la grande qualité de ne pas se reposer sur ses lauriers : elle explore tous les registres, que ce soit en France ou ailleurs, avec des réalisateurs chevronnés ou des débutants, comme Vanessa Filho. Son premier long métrage, Gueule d’ange, suivra une jeune mère célibataire qui, une nuit, suite à une rencontre en discothèque, décide de partir et de laisser son enfant de huit ans livrée à elle-même. Il ne s’agira visiblement pas d’une comédie ! ` AU COMMENCEMENT ÉTAIT LA PIERRE Ferdinand Cheval (1836-1924), plus communément appelé le Facteur Cheval, a passé trente-trois ans à bâtir de ses mains et avec des moyens rudimentaires son Palais Idéal (à admirer à Hauterives dans la Drôme) : ce projet de vie unique et fascinant, démarré grâce à une pierre, a inspiré Nils Tavernier, qui a choisi Jacques Gamblin (déjà interprète de son Toutes nos forces), pour ressusciter cette personnalité fascinante et mystérieuse. Le comédien explique qu’il « a essayé de l’interpréter comme un homme qui a les pieds dans la terre et la tête dans les étoiles ». Laetitia Casta lui donnera la réplique. ` AVE CÉSAR Philippe Faucon (Fatima) tourne ordinairement peu avec des comédiens connus, mais il semblerait qu’Amin devrait changer la donne, puisque Emmanuelle Devos y tiendra l’un des premiers rôles. Mustapha Mbengue, le second premier rôle, interprétera quant à lui Amin, venu travailler en France pour faire vivre femme et enfants restés en Mauritanie. Il partage sa vie entre le foyer et les chantiers, mais sa rencontre avec Gabrielle va tout changer car ces deux-là vont tomber amoureux. Pendant sept ans Philippe Faucon a tenté de monter ce projet, en vain. C’est grâce aux César obtenus pour Fatima en 2015, qu’il a pu obtenir l’avance sur recettes et avoir, pour la première fois de sa carrière, un budget confortable pour faire un film.

et ailleurs… ` RACINES NOUEUSES Si elle a vu le jour en Argentine, jamais jusqu’alors Bérénice Bejo n’y avait tourné. Grâce à Pablo Trapero (El Clan) ce sera désormais chose faite ! La Quietud, un drame familial intimiste, mettra en scène l’affrontement de deux sœurs, réunies malgré elles après une longue séparation, en raison du mauvais état de santé de leur père. La sœur « ennemie » sera interprétée par la comédienne fétiche et épouse de P. Trapero, Martina Gusman. IG

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La migration est une fuite de gens apeurés, harassés, en danger de mort dans leur propre pays. (J.-M. G. Le Clézio)

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près un parcours long et sinueux, afin de fuir les menaces, les violences et les tortures, l’emprisonnement, certains migrants arrivent au CAO (Centre d’accueil et d’orientation) de Saint-Pierre-des-Corps. La fin du parcours de combattant pour vivre librement ? Comment décrire la suite, faite d’attentes pour s’habiller, pour consulter un médecin, pour obtenir des cours de français, remplir des dossiers afin d’obtenir des aides et enfin le graal : un titre de séjour ? Ça peut prendre des années. La course d’obstacles est pleine de méandres que notre administration a savamment élaborés pour éliminer le plus possible de candidats, et cela dans la plus grande discrétion. Comment douter quand notre État a démontré sa capacité à disperser en 24 heures aux quatre coins de la France en octobre 2016 les 11 000 habitants de la « jungle » de Calais. Les CAO ont été créés en 2015 par la DNA (Direction nationale d’accueil) qui coordonne l’ensemble des structures d’accueil des demandeurs d’asile, elle-même gérée par l’OFII (Office français d’immigration et d’intégration). L’OFII est aussi responsable du versement de l’ADA (Allocation pour demandeur d’asile). Au CAO le migrant, avec l’aide de travailleurs sociaux, de bénévoles et d’interprètes, établit son dossier de demande d’asile qui sera soumis à l’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides). Sur 85 726 demandes en 2016, 19 882 ont été accordées… On se demande comment cette infime proportion, une décimale de notre population, justifie le champ lexical de l’invasion dans nos médias et dans le discours de

NOUS

EN

la plupart de nos élus. Après les CAO, les demandeurs d’asile sont déplacés dans un CADA (Centre d’accueil pour demandeurs d’asile), si possible dans une autre ville, histoire de casser les liens que nos migrants avaient commencé à tisser. Les déboutés, assistés par un avocat, déposent un recours. L’État a créé les PRAHDA (Programme d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile) pour héberger les dublinés1 et les déboutés. C’est un HUDA (Hébergement d’urgence des demandeurs d’asile) mis en place pour pallier le manque de place dans les CADA… Après le PRAHDA (celui qui habille le diable ou l’antichambre de l’aéroport ?) ce sera le CRA (Centre de rétention administrative). Vous suivez ? Et, de là, le renvoi vers le pays européen où ils ont été pour la première fois enregistrés (en vertu de loi Dublin, aussi inhumaine qu’absurde). Le plus souvent l’Italie, d’où on les renverra très probablement en France, où ils seront rejetés à nouveau comme de vulgaires colis. Ils s’appellent Altom, Farid, Mouhamad, Omar, Radwan… L’État les bouge comme des pions. Comment accepter qu’ils soient ainsi traités ? L’État se charge de les détourner de notre regard et leur barrer l’accès à une vie libre. Pouvons-nous pour autant les ignorer ?

Collectif solidaire des réfugiés de Saint-Pierre-des-Corps et le CNP 1 Le règlement Dublin contraint les migrants à faire leur demande d’asile dans le pays où ils ont déposé leurs empreintes…

ARLERONS

PROCHAINEMENT…

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À propos de Va, Toto !

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oilà un film bien étrange, à cent lieues de toutes les règles susceptibles de lui assurer le succès, et pourtant très attachant par son parti pris marqué de liberté. Mais il ne faut pas s’y tromper, Va, Toto ! est très écrit, très pensé, pour ne pas dire rigoureux dans sa fantaisie. Son déroulé entrelace trois histoires d’amitié : les deux vieilles dames et le marcassin (Madeleine, Monette et Toto), Pierre le narrateur et Vincent (amitié amoureuse), Pierre et Joseph, le paysan habité par ses rêves. Les trois fils narratifs progressent en alternance non pas de façon chronologique ou logique — seule concession : au début Toto, assez minuscule marcassin pour passer par une simple chatière, apparaît à la fin tel un sanglier gigantesque — mais par un jeu subtil, parfois mystérieux, de correspondances et de ruptures, formant comme un réseau d’insolites rimes visuelles. L’utilisation fréquente du split screen y contribue pour beaucoup : l’écran divisé verticalement en deux permet toute une série de jeux d’analogie ou d’opposition, qu’il s’agisse des paysages, des personnages, des couleurs ou du noir et blanc, de la profondeur de champ etc. Il ne faut pas chercher systématiquement dans ces jeux une explication rationnelle, ils sont là aussi pour le simple plaisir des yeux, de la même façon qu’un beau vers peut émouvoir sans que sa signification soit nécessairement explicitable. Il y a là un esprit ostensiblement

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Interférences Une vie violente 120 battements par minute L’Atelier Le Jeune Karl Marx

ludique, parfois énigmatique ou ironique, un climat volontiers onirique. Dans un tel film on s’attend évidemment que les images soient belles et elles le sont, mais pas à la manière d’une contemplation esthétisante. Il s’agit plutôt de la recherche d’un langage cinématographique capable de transposer ce que perçoit un œil sensible aux moindres décalages avec la banalité : les gilets rouge vif des chasseurs faisant tache sur le camaïeu du paysage sylvestre, la lumière si particulière de l’aube ou du crépuscule, le regard éternellement scandalisé des poules… On pense à Richard Brautigan, romancier et poète hippie, et à sa définition de la poésie : « Imaginons que mon esprit soit un taxi et que soudain (« Bon Dieu, qu’estce qui se passe ? ») vous vous retrouvez à l’intérieur ». C’est exactement à ce genre d’expérience que nous invite Marcel Creton, moins raconteur d’histoire que poète au lyrisme aussi modeste et touchant que celui de Brautigan. La voix off — que ce soit celle de Pierre ou celle de Vincent — a surtout pour fonction de dévoiler une sensibilité, de faire partager des impressions fugaces plutôt que des faits, de sonder la saveur subtile du quotidien, de la terre, des animaux, des sentiments simples et nobles. Film inclassable, peut-être un peu longuet mais fort intéressant par son choix assumé d’être au cinéma de fiction ce que la poésie est au roman. AW

Une vie violente

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a première scène du film de Thierry de Peretti, ainsi que son titre Une Vie violente, tend à égarer son spectateur : dans un verger, au vu et au su des travailleurs saisonniers, a lieu, avec une froideur glaçante, l’exécution de deux inconnus, dans une voiture, avant que l’assassin n’y mette le feu et ne rejoigne ses complices, sans la moindre précipitation. Le spectateur ne peut comprendre ce qui vient de se passer et il a la sensation d’avoir pris pied dans un film d’action, avec mafia et règlements de compte... Or le film du réalisateur corse propose, au contraire, de longues scènes collectives, où la parole est reine, et qui demandent au spectateur une attention soutenue pour essayer de s’y retrouver, à la fois parmi les nombreux personnages et dans leurs propos complexes, parfois confus, contradictoires. De groupes d’amis en groupes de militants, le film raconte la radicalisation progressive d’un jeune étudiant de bonne famille bastiaise, les étapes d’une éducation politique, les culs-de-sac d’une vio-

lence où actions révolutionnaires et crimes crapuleux finissent par devenir pratiquement synonymes. Des mots aux morts… dans un cycle de vengeances devenant petit à petit incompréhensible. Et qui emprisonne le jeune héros comme le personnage d’une tragédie. Qui avance, dans les derniers plans du film, vers une fin nécessairement violente. Dans une scène remarquable et terrible, on retrouve des mères autour d’une table dans un jardin cossu un après-midi d’été. Des femmes qui parlent, sans la moindre empathie et la moindre pudeur, des hommes morts : leurs frères, leurs maris, leurs fils… Le 1er plan de 120 battements est éminemment pédagogique : on y explique d’emblée ce qu’est Act Up. Comme si l’on était un nouveau membre (dans le récit), comme si l’on n’avait que de vagues souvenirs (dans la vraie vie). C’est sans doute la partie la plus passionnante du film de Robin Campillo, cette plongée dans les assemblées de l’association, au milieu de

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débats d’autant plus enflammés qu’il ne s’agit pas uniquement d’en découdre pour le plaisir du bon mot mais parce que l’urgence de la situation donne un poids existentiel à chacune des propositions. Là aussi, de très longues scènes de discussions, techniques et complexes, pour déboucher sur de spectaculaires scènes d’actions revendicatives, contre les laboratoires. Des mots et des morts : les malades tombent comme des mouches, dans ce qui est la plus grande pandémie

funéraire lancées à la tête des participants d’un quelconque congrès. Un dernier pied de nez au bon goût et à la résignation. On retrouve Robin Campillo mais cette fois comme co-scénariste du troublant film de Laurent Cantet intitulé L’Atelier. Encore une fois le groupe. Et la parole qui court de l’un à l’autre. Dans un dispositif qui reproduit subtilement le propos du film : Marina Foïs, seule actrice professionnelle, connue et parisienne, au milieu

120 battements par minute

de l’histoire. Comment faire ? Quelle stratégie mettre en place, quelle action, quel slogan pourra enfin réveiller une opinion publique largement indifférente, pas concernée par une maladie qui ne frappe que des marginaux ? Comme l’auteur aime le faire, des scènes collectives, brillantes… Le récit se polarisera peu à peu sur une histoire d’amour et de mort, sur la tragédie individuelle d’un décès annoncé. Une veillée funèbre particulièrement touchante puis la dernière scène, violente et festive : les cendres de l’urne

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d’un groupe de jeunes gens du sud. De la Ciotat où, dans le récit, elle anime en tant que romancière à succès un atelier d’écriture organisé dans un cadre de réinsertion professionnelle. Avec son talent habituel, Cantet capte cette parole plurielle qui dit les fractures béantes de la société française, le sentiment de déclassement, la mémoire ouvrière et/ou émigrée, l’amertume, la colère. L’attention de l’animatrice se focalisera bientôt sur Antoine, un jeune garçon rejeté par le groupe, aux propos violents, aux amitiés proches de

L’Atelier

la droite extrême et qui semble la fasciner. Mais est-elle attirée par le jeune homme réel ou celui qui pourra nourrir le personnage du roman qu’elle en train d’écrire ? Le film glisse alors vers le thriller, dans d’inquiétantes scènes de nuit, mais les auteurs refusent de basculer dans le drame et le discours final d’Antoine, sur l’acte gratuit, rappelle celui de L’Étranger. À la lecture du dernier projet de Raoul Peck, même si l’on a beaucoup aimé son dernier film I’m not your negro, sur le poète James Baldwin, on se dit que c’est une très mauvaise idée de vouloir faire un biopic en costumes sur Le Jeune Karl Marx ! Mais le réalisateur haïtien y glisse d’emblée une volonté clairement iconoclaste : pour en finir avec l’imagerie plombante (et meurtrière) qui ornait les murs des pays communistes entre saint Lénine et saint Staline, retrouver la verve et l’insolence du jeune penseur en colère contre l’ordre social inique, redonner vie à une parole oubliée, celle qui contestait l’ordre Le Jeune Karl Marx

capitaliste en train de se mettre en place en Europe. Porté par des acteurs convaincants, c’est aussi le portrait d’une belle histoire d’amour avec sa femme Jenny et d’amitié avec Friedrich Engels, l’un et l’autre en rupture avec leur classe sociale d’origine. C’est aussi le récit passionnant d’un combat intellectuel où l’on croise Proudhon, Bakounine… et où les débats, fougueux, préparent les actions à venir, où l’on voit se créer l’Internationale communiste, en rejetant notamment le slogan Tous les hommes sont frères. On ne peut s’empêcher, bien sûr, de penser à ce que des tyrans ont fait de ces idées, en Russie, en Chine, au Cambodge… Des mots et des millions de morts !!! Rieur, joueur, souvent arrogant, le jeune Marx a des propos d’une modernité incroyable et qui semble parfaitement correspondre à notre époque, à la description du capitalisme financier triomphant. Mais, à l’heure où les classes populaires votent contre leurs intérêts, le travail idéologique semble entièrement à refaire tant l’antagonisme entre les classes apparaît à beaucoup comme définitivement obsolète. « La lutte des classes existe, nous l’avons gagnée, » déclarait le milliardaire Warren Buffett. Le marxisme, une idée neuve ? DP

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Les rédacteurs ont vu :

L’Atelier de Laurent Cantet

Très bon film, avec beaucoup de talent sur et derrière l’écran. Mais ces histoires d’ado rebelle petit à petit apprivoisé par un(e) adulte au grand cœur, vous ne commencez pas à en avoir un peu marre ? Moi si. AW

Et les discussions du début sur le rôle et le « contenu social » des polars m’a fait penser à une sorte de débat entre une école « Daeninckx » et une école plus « Quadruppani » ou « Jonquet »... et rien que ça, c’est jubilatoire ! ER

Laurent Cantet sait mieux que quiconque écouter la parole des autres et celle de la jeunesse en particulier. Écouter avec respect la parole multiple, rebelle, timide, imprévisible. On espère que cette parole libérée, débattue, permettra aux jeunes de L’Atelier de prendre un chemin de vie plus éclairé et moins douloureux. MS

Pas de doute, pour faire jouer avec autant de subtilité tout un groupe d’acteurs amateurs, il faut que le réalisateur ait un sacré talent ! Et pour faire un film politique, mêlant les discours et les souvenirs divergents, en révélant les vraies failles de la société française, sans être jamais donneur de leçons également ! Marina Foïs y est tout simplement formidable… DP

L’Atelier frôle souvent le cliché mais le jeu des acteurs/actrices et les nombreux décalages qui animent le scénario font que l’on est assez souvent pris à contre-pied.

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Un portrait de groupe complexe, à la fois sociologique et romanesque. À l’image du dispositif du film qui mêle une

actrice professionnelle (Marina Foïs, superbe) et des amateurs. Le cocktail est ambitieux, juste et très réussi. JF Court-lettrage oblige, je suis restée jusqu’à la fin du film : un sacrifice récompensé puisque j’ai pu m’informer sur l’histoire de La Ciotat grâce à des archives et des témoignages instructifs et m’extraire de mon ennui en entendant le magnifique texte d’Antoine sur l’ennui justement et la façon de trouver du sens à la vie. IG Pas étonnant de retrouver ici la patte du coscénariste de Laurent Cantet, Robin Campillo – 120 battements par minute – car les dialogues entre les jeunes, femmes comme hommes, fusent, rebondissent, percutent et touchent sou-

vent leur cible à L’Atelier ! La dynamique de ce groupe de par la solidité des dialogues, sans omettre le fond des propos et la création de liens qui en advient, offre un cadre au duo trouble et ambivalent Olivia/Antoine qui peut alors d’autant mieux s’installer pour s’opposer. RS Si les adolescents d’Entre les murs ont grandi, ils ne sont pas moins perturbés. Mais je retiendrai surtout de cette chronique la prestation de Marina Foïs, en pédagogue beaucoup plus convaincante que son prédécesseur, enthousiaste et déterminée, mais tout autant fragile, troublée et troublante. Grâce à sa magnifique prestation, le film, dont on redoutait une issue un peu trop attendue, se charge de tension et d’émotion jusqu’à devenir bouleversant. SB

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À propos de L’Atelier

L

aurent Cantet aime les groupes, aime filmer les groupes, être confronté à leur parole comme dans l’Atelier son dernier long métrage. Pourquoi cette répétition depuis de nombreuses années ? Laurent Cantet est passé par l’Idhec. Il y a travaillé en collaboration entre autres avec Robert Campillo (co-scénariste de L’Atelier), Gilles Marchand ou Dominik Moll. Du groupe se dégagent de l’énergie, une amitié, de la confiance, du plaisir de voir l’autre travailler. Ce démarrage dans le métier marquera le cinéma de Cantet, un cinéma du collectif, de la famille, du groupe. Quelques exemples tirés de sa filmographie : – Dans son premier court, Jeux à la plage, on retrouve la question de la relation au père. – Ressources humaines est un mélange de l’intime (la famille) et du politique. – L’Emploi du temps, l’histoire d’un individu qui échappe au groupe à travers le mensonge. – Entre les murs, film sur la parole, celle de l’enseignant et celle, spontanée, très créative, des jeunes d’une classe. – Foxfire, le gang de filles, un clan solidaire d’adolescentes. – Retour à Ithaque, retrouvailles

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– Les CARNETS du STUDIO

d’une bande de copains, d’anciens militants castristes. – L’Atelier : cinq garçons et deux filles sont réunis pour participer à un atelier d’écriture animé par Olivia, une écrivaine qui compte leur faire produire un roman publiable.

L’Atelier semble récapituler, rassembler toutes ces thématiques : le groupe, la transmission, la parole et les désirs. Être confronté au groupe, à sa parole, me plaît, dit Laurent Cantet. L’idée du film est née il y a 17 ans quand La Ciotat venait de perdre son chantier naval. 10 000 personnes se retrouvaient sans travail, avec une prime de départ ridicule. On ressentait une profonde injustice. La mission locale avait eu l’idée de monter un stage pour que les gens parlent du passé ouvrier récent chez eux. En tournant L’Atelier en 2017, les jeunes allaient-ils dire des choses de l’état du monde d’aujourd’hui ? Avant le tournage, pendant trois semaines, des ateliers d’improvisation ont eu lieu avec les jeunes. Ils ont contribué à enrichir le scénario et les dialogues. Cantet a posé un cadre offrant un espace de parole aux jeunes gens. Il les a laissés parler de ce qui les concernait comme le Bataclan, Nice, les relents identitaires, le rapport à la violence... Aucun des jeunes acteurs n’est profes-

sionnel. Seule Marina Foïs l’est. Son rôle était plus dur à assumer, c’est pourquoi Cantet s’est retourné vers une professionnelle. Elle a vécu toute la préparation du film. Elle a fait preuve d’écoute, d’attention, de compréhension, a eu une grande curiosité vis-à-vis des jeunes, ce qui fait qu’elle est juste dans le rôle d’Olivia. Matthieu Lucci (Antoine) a le deuxième rôle important. Il a peu de perspective. Pour qu’il se passe quelque chose, il se tourne vers l’extrême droite. Au cours de l’atelier d’écriture, filles et garçons apportent chacun leur pierre. La parole se libère. Comment démarrer le roman ? Par un meurtre ? Qui se passerait où ? L’une fait référence aux chantiers de La Ciotat où son grand-père, ouvrier maghrébin communiste, a travaillé toute sa vie. Un autre n’en a que faire et imagine un meurtre sur un yacht luxueux, comme dans les séries américaines. Et si le tueur était noir ? arabe ? S’en suivent des joutes verbales entre les participants où se mêlent terrorisme, racisme, discours extrémiste. On sent une évolution. Les relations entre les personnages ouvrent des portes. Ils réflé-

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L’Atelier

chissent et travaillent ensemble sur un même projet, ce qui amène à une perspective. Ce qui m’intéressait de regarder, c’est la confrontation de ces deux mondes : d’un côté ces jeunes gens qu’on a peu l’habitude d’écouter et qui là sont obligés de faire face à l’autre monde, le monde de la culture. (L. Cantet) Dans L’Atelier, Cantet explore une nouvelle fois ce qui se passe à l’intérieur d’un groupe, ses mécanismes, son énergie, les individualités fortes, les confrontations parfois violentes. En choisissant des jeunes qui manquent de repères, de reconnaissance et qui ont peur en l’avenir, il nous montre un certain état de la jeunesse d’aujourd’hui. Mais ce qui est intéressant, c’est que l’on sent chez ces jeunes des talents s’épanouir alors qu’on les en dit dénués. En les acceptant tels qu’ils sont, en étant attentif, l’adulte les aide à se construire, à réfléchir, à trouver une forme d’apaisement, une manière de sortir de la case dans laquelle la société les a enfermés. Et pour nous spectateurs, Laurent Cantet ne nous pousse-t-il pas à regarder l’Autre autrement ? MS

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Rencontre Jean Odoutan

Jean Odoutan aux Studio © Dominique Plumecocq

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n préambule le réalisateur nous a expliqué que son film avait pour cadre Ouidah, une ville qui est « l’incarnation même du vaudou ». Il nous conseillait d’être attentif aux images, notamment à tout ce qui est dans la profondeur de champ, car nous allions voir « beaucoup de belles choses » : la route de l’esclave, la porte du non-retour… « Comme je suis un peu professeur, à la fin, je fais une interrogation écrite pour savoir si vous avez tout bien regardé. »

Mais en guise d’interrogation, nous avons eu, lorsque les lumières se sont rallumées, une interprétation a capella de la chanson de Brassens Une jolie fleur dans une peau d’vache : « qui fait la belle et qui vous attache et qui vous mène par le bout

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– Les CARNETS du STUDIO

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Le dimanche 9 octobre avait lieu le premier rendez-vous de la saison du Bimestriel du Cinéma Africain de Tours, un rendez-vous autour de deux personnalités hors du commun, l’écrivain Birago Diop, l’un des pionniers des lettres africaines, dont la présence à la fois humble et rayonnante, dans ce reportage des années 70, donnait l’envie de découvrir les œuvres… et Jean Odoutan, le réalisateur, acteur, musicien, venu présenter son long-métrage intitulé Pim-pim tché, toast de vie. du cœur. » La chanson interprétée par une fanfare était dans le générique… et a accompagné tout le tournage qui fut assez compliqué. Jean Odoutan a tenu à être clair, d’emblée : « Ce n’est pas une histoire de toute l’Afrique, ni une histoire du Bénin, c’est une histoire de Jean Odoutan… il ne faut pas faire d’amalgame » (ce qu’on a souvent tendance à faire pour toutes les petites cinématographies). Lors du festival Quintessence (qu’il a créé), une jeune fille de 20 ans qui faisait à manger a raconté à l’équipe son histoire, sa rencontre avec un cinquantenaire qui travaillait pour la société Colas (qui s’occupe des routes africaines). Il rêvait d’avoir des enfants, il a trouvé la femme idéale. Quand il est reparti à Paris elle l’appelle pour lui annoncer qu’elle est

enceinte. Il arrive à Cotonou 9 mois plus tard. Elle l’accueille tout de noir vêtue et l’accompagne dans un cimetière de Ouida, devant une fausse tombe. La fille a reçu un pactole qui lui a permis de créer son salon de coiffure (qui périclita – « bien mal acquis… ») À travers l’histoire rocambolesque de sa jeune Chimène, Jean Odoutan a voulu faire « une ode à la débrouillardise ». Il a filmé ce long-métrage en argentique en 2008 (il en était à la fois auteur, réalisateur, scénariste, compositeur, producteur, distributeur…). Comme il n’avait pas d’argent du tout, il a enfermé son film dans son appartement de la région parisienne. Depuis il a emprunté beaucoup d’argent pour le numériser. Il parcourt la France en faisant des cinéconcerts et en proposant un CD qui reprend les chansons du film. Le film s’achevait sur une déclaration qui est le mot de passe du festival qu’il a créé : « La culture sans ma culture, c’est de l’acculturation. ». Comment expliquer

« ce que nous endurons pour mettre en place des choses » ? Pressé par le temps, Jean Odoutan a essayé de nous raconter une longue histoire, celle de Ouidah, port créé de toutes pièces par les Portugais au 16e siècle. En échange de flacons de whisky ou de parfum, la marchandise avançait, attachée, tournait autour de l’arbre de l’oubli, puis, amnésique, traversait la lagune puis partait par la porte du non-retour vers Bordeaux (« riche d’une richesse dont on ne sait pas d’où elle vient » !) puis traversait l’Atlantique vers les USA, le Brésil, Haïti… Mais certains restaient, les pas costauds. « Aux yeux de certaines personnes, nous sommes encore considérés comme des esclaves, résidus de résidus d’esclaves… Bien que je sois prof, que j’aie fait des études de sociologie, je me retrouve avec des gens qui me considèrent encore comme ça… » Comme à chaque fois, l’équipe du BCAT avait préparé un délicieux et plantureux brunch… avec de délicieux gâteaux de riz farci au bœuf, typique du Bénin, en l’honneur de Jean Odoutan. DP

Retrouvez une vidéo de cette rencontre sur le site des Studio dans la rubrique : Ça s’est passé aux Studio.

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Rencontre avec Laurence Ferreira Barbosa

Vendredi 20 octobre, les Studio accueillaient Laurence Ferreira Barbosa (Les Gens normaux n’ont rien d’exceptionnel) à l’occasion de la sortie de son sixième long-métrage, Tous les rêves du monde, portrait de Paméla, jeune fille franco-portugaise en puissance d’émancipation des traditions familiales et identitaires, mais aussi, plus généralement, et en tentant d’éviter les clichés inhérents au sujet, portrait des hommes et des femmes ayant quitté le Portugal pour travailler en France. Laurence Ferreira Barbosaaux Studio © Roselyne Guérineau

« Je ne suis rien. Jamais je ne serai rien. Je ne puis vouloir être rien. Cela dit, je porte en moi tous les rêves du monde » : si Laurence Ferreira Barbosa aurait bien aimé que ces quatre premiers vers du poème Bureau de Tabac de Fernando Pessoa constituent le titre complet de son film, longueur oblige, elle ne conservera finalement que l’ultime partie de ces vers exprimant selon elle ce qu’est l’âme portugaise et celle de son film. PARTIR REVENIR « Les Portugais sont très nombreux en France. On les connaît, sans les connaître. Ils sont très bien intégrés, mais en fait ils restent entre eux. Il n’existe pas beaucoup de films sur cette réalité. Si le Portugal a

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commencé à se vider à la fin des années 50, c’est pendant les années 60/70 qu’un nombre considérable de Portugais sont venus s’installer en France. Cette histoire reste extrêmement forte pour les Portugais. Ceux qui sont partis ne sont pas bien considérés au Portugal ; on considère qu’ils n’ont pas été solidaires. Et quand ils rentrent au pays ils veulent montrer qu’ils ont réussi, alors ils bâtissent de grandes maisons, flamboyantes et pas toujours de très bon goût. On les nomme « les Français », alors qu’en France ils sont des étrangers ; et en même temps on les envie. C’est compliqué. Particulièrement pour les femmes qui vivent beaucoup plus mal le retour définitif au pays : en effet, en France, elles se sont émancipées, elles ont pu exister autrement que comme épouse et mère. Après

avoir vécu en ville, elles habitent désormais de petits villages, où elles s’ennuient. En France les Portugais ne posent jamais de problème. Ils ne s’expriment pas dans l’espace public : ce sont les bons immigrés. Ils sont venus pour travailler et travaillent énormément : le travail au Portugal est une valeur suprême, au point qu’un certain nombre de Portugais passent à côté de leur vie. » FFF Le film interroge sur la transmission, le poids et le sens des traditions pour les jeunes générations. Certains se sentent complètement entravés par ce culte du passé, tandis que d’autres veulent non seulement s’en détacher, mais aussi en démontrer l’inanité : « Le Portugal a subi 50 ans de régime fasciste avec Salazar puis Caetano. Un fascisme paternaliste, avec un système quasi féodal, qui exaltait la culture populaire, et que l’on pouvait réduire au triple F : Folklore (ou Fado), Fatima, Football ! Tout cela se faisant au détriment de l’éducation, de la culture. Certains pensent qu’il faut en finir avec tout cela, mais les émigrés, eux, sont très attachés à ce folklore et se montrent particulièrement conservateurs à ce sujet : il faut que rien ne change ! Leur village est, pour eux, le paradis perdu ! Pourtant, peu à peu, les villages, dans le nord particulièrement, meurent car n’y vivent plus que des vieux. Dans deux ou trois générations les émigrés n’y viendront plus en vacances ».

RÉVÉLATION Paméla c’est le personnage principal, incarnée par l’étonnante Paméla Ramos, lumineuse révélation de ce film, dans lequel seuls deux comédiens sont professionnels : « Je n’avais pas de projet précis, mais je voulais dresser le portrait d’une jeune fille de la seconde génération. Je suis donc allée dans un lycée de Vitry pour rencontrer des filles afin qu’elles me parlent de leurs relations au Portugal. Mais, soit elles n’en avaient pas envie, soit elles avaient un discours lisse, impersonnel. Paméla a été la seule à se montrer intéressée, mais elle n’a pas osé l’exprimer devant les autres. Quand elle a demandé à me parler, ni elle ni moi n’aurions pu imaginer qu’elle deviendrait l’actrice du film ! Paméla, c’est une jeune fille sage, mais j’aimais bien ce qui se dégageait d’elle. Pour écrire je me suis inspirée de son histoire personnelle : elle voulait être médecin légiste, mais très émotive, manquant de confiance en elle et ayant le sentiment de ne pas être à égalité avec les autres, à un moment donné elle a perdu pied et s’est trouvée en échec. Il s’est écoulé cinq ans, entre le début du projet et le film, et pendant tout ce temps, nous sommes restées en contact. Paméla a une très grande cinégénie : elle est métamorphosée par la lumière… Ce film n’était pas envisageable avec des acteurs : je voulais des êtres dont le travail avait marqué le visage, les mains ; je voulais aussi des IG accents… » * Les Visiteurs du Soir de Marcel Carné.

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À propos de Faute d’amour

« Lorsque l’enfant paraît… … le cercle de famille / Applaudit à grands cris » : début d’un célèbre poème de Victor Hugo. Variante russe contemporaine dans Faute d’amour d’Andreï Zvaguintsev : lorsque l’enfant disparaît, le cercle de famille se déchire à grands cris. Les premières images du film annoncent d’emblée la couleur, ou plutôt l’absence de couleurs : de longs plans fixes, en noir et blanc, de paysages de forêt déserts sous la neige. Avec ce décor plus métaphorique que réaliste tout est déjà dit : l’hiver des sentiments, l’absence d’humanité, l’impénétrable taillis des égoïsmes. Allégorie de la Russie d’aujourd’hui ? Sans doute, tant le film apparaît comme le microcosme désespérant d’une société marquée par l’aigreur des comportements et des paroles, l’absence d’empathie, d’amour, de rêve, par la pauvreté — quand ce n’est pas l’inexistence — des relations interpersonnelles, remplacées par de pitoyables ersatz : smartphones, selfies, télévision allumée en permanence… Voir dans le train de banlieue tous les voyageurs penchés sur leur petit écran, isolés, enfermés dans leur quasi autisme, a quelque chose de glaçant. Andreï Zvaguintsev : « Je pense que le saut abrupt dans le capitalisme a rendu les gens différents : « l’autre » est devenu un ennemi, un concurrent. Il n’est plus un partenaire, un ami, un camarade. ».

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Et quand à la fin on voit Genia, la mère du petit garçon disparu, fixer d’un regard sombre le vide et, dans son survêtement marqué d’un grand « Russia », courir sans avancer d’un centimètre sur un tapis de course pendant que la télévision égrène de funestes informations sur la guerre en Ukraine, ce qu’on voit c’est l’image terrible d’une société bloquée dans ses impasses, rongée par ses poisons et qui inexorablement se lézarde. Crise de la société, mais d’abord crise du couple : Boris et Genia se détestent, leur divorce est en cours. L’agressivité hargneuse de leur relation est une torture pour leurs fils Aliocha qui, comprenant que tous deux cherchent à se débarrasser de lui, s’enfuit et disparaît de l’appartement, des écrans de contrôle, de la ville, mais également du film. Uniquement préoccupés d’eux-mêmes, ses parents mettront du temps à se rendre compte de sa disparition. Mais dès lors son absence déchaînera les rancoeurs et les haines, désinhibera toutes les lâchetés, toutes les bassesses. Genia s’était mariée sans amour, elle ne voulait pas d’enfant de Boris. Mais elle reproduit très exactement avec Aliocha ce qu’elle a vécu douloureusement ellemême avec son horrible mère : le rejet, la haine, la violence. Toute sa vie pourtant elle a cherché l’amour. Peut-être l’a-t-elle

Faute d’amour

à présent trouvé avec son amant prêt à l’épouser ? Mais non, ce sera un nouvel échec, une nouvelle impasse, une désespérante solitude à deux. Boris, lui, paraît modérément amoureux de sa maîtresse enceinte, dont il aura un fils qu’il traitera comme il a traité Aliocha : durement, avec une indifférence malveillante et brutale. Genia et Boris ne sont pas présentés comme des monstres, ce sont juste des gens…

Faute d’amour, au titre on ne peut plus pertinent, l’avatar 2017 d’Aliocha est également cet innocent qui sert de révélateur aux autres, mais sur un mode beaucoup plus sinistre, comme en négatif : sa disparition est le point de départ d’un véritable film catastrophe familial, révélant crument l’égoïsme féroce et l’intense noirceur de son père, de sa mère, de sa grandmère, noirceur d’une violence à peine concevable.

Aliocha, personnage principal paradoxal, centre absent d’un tourbillon de haines, pauvre petit garçon qui ne demandait qu’un peu de compréhension, de tendresse, et dont la vie est devenue un enfer… Ce n’est très probablement pas un hasard si Aliocha c’est aussi, dans le roman de Dostoïevski, le plus jeune des frères Karamazov, l’adolescent avide d’amour, celui qui écoute les autres avec empathie, les aide à confesser leur moi profond, à mettre leur âme à nu, à être eux-mêmes, l’innocent dans tous les sens du terme : l’esprit simple et sans malice, celui qui n’est coupable de rien. Dans

La fin du film montre les mêmes images, en couleurs cette fois, que le début, avec ses paysages de neige et son préau d’école vide, à deux détails près : les avis de recherche collés sur les murs et le ruban de plastique qu’Aliocha avait lancé et accroché à la branche d’un arbre, flottant librement au vent : symbole d’une légèreté, d’une liberté enfin trouvées ? Car le dénouement reste ouvert : est-il vivant ? en fugue et caché quelque part ? a-t-il été kidnappé ? s’est-il donné la mort ? Les années passent et le mystère reste entier… Au pays de la haine la vérité même n’existe plus. AW

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À propos de Une famille syrienne La Belle et la meute Detroit

P

our chaque réalisateur se pose nécessairement la question de ce qu’il va montrer et de ce qu’il va cacher. De ce qui apparaît dans le cadre et de ce qui reste définitivement hors champ. Dans son magnifique film Une famille syrienne, c’est la guerre que Philippe Van Leeuw a choisi de laisser hors de vue : à la fois réfugié et enfermé dans un appartement avec une famille apeurée, le spectateur n’a pas d’autre information que l’angoisse contagieuse que les combats, cachés, irriguent autour d’eux, en terrifiantes vagues sonores. Si ces combats restent invisibles – une mort absurde au petit matin aperçue entre les persiennes qui donnent sur la rue – le réalisateur choisit en revanche de filmer le viol de Halima par deux hommes dont on ne sait rien. Quelques jours plus tard, lors de l’avant-première, on pouvait constater que la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania avait fait le choix inverse, refusant de filmer le viol qui est le point de départ de son magistral La Belle et la meute. Qu’elle a préféré la force d’une ellipse radicale pour conduire son spectateur, en 9 stations et autant de virtuoses plans séquences, dans le labyrinthe insoutenable d’une résistance têtue au mensonge et à la peur. Pour l’un la dénonciation du viol comme arme de guerre et l’inconfor-

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La Belle et la meute

table position dans laquelle il place son spectateur, interdit, impuissant, dans celle de « ceux qui entendent tout, qui voient tout et ne font rien », pour l’autre la puissance de ce qui n’a pas été vu, de ce qu’on ne peut qu’imaginer – le viol d’une jeune fille par trois policiers, dans une voiture – et qu’on n’apercevra que dans un plan, alors que Mariam est tombée sur le sol, sur le smartphone d’un de ses agresseurs, sans que l’on puisse être, à aucun moment, dans une position de voyeur. Lors de la rencontre avec la réalisatrice, un spectateur tunisien regrettait que l’on filme cette réalité-là – la violence faite aux femmes, la corruption des policiers – (qu’il ne contestait pas) alors qu’il y avait tellement de belles choses à montrer en Tunisie… Que faut-il ou ne faut-il pas montrer ? Cette question peut se poser aussi certainement pour Detroit, le film de Katheryn Bigelow, qui réussit le pari difficile de rendre compte des émeutes de 1967 dans une dimension collective tout à fait impressionnante, tout en parvenant à se focaliser sur un groupe de personnages parfaitement identifiables. Une question double : faut-il continuer à dénoncer, de film en film (12 Years A Slave, Moonlight, Loving…), l’oppression des Afroaméricains, cette interminable histoire de ségrégation et d’humiliations… et faut-il le

faire de cette façon-là ? Pendant presque la moitié de ce film long (2h10), dans le huis clos tragique de l’Algiers Motel, filmé quasiment en temps réel, le spectateur assiste (forcément impuissant selon son statut de spectateur) à la torture, psychologique et physique, d’un groupes de jeunes hommes noirs innocents par trois policiers blancs, racistes et hyper violents, ainsi qu’au froid assassinat de deux d’entre eux. Écœurement, honte, colère, envie de vengeance, je me suis senti traversé par une suite de sensations d’autant plus fortes que la mise en scène, jamais caricaturale, est particulièrement efficace. Ne pas détourner les yeux de cette violence aveugle, qui refuse de reconnaître dans les « negroes » des êtres humains à part entière – c’est tellement vrai que, à l’instar du héros de Loving, les deux jeunes femmes blanches, sont instantanément « contaminées », « putes » bonnes à être elles-aussi violentées parce que dénuées brutalement de leur intouchabilité de femmes blanches ! La réalisatrice a eu l’idée de ce film bouleversant en 2015, lors de la mort de Michael Brown abattu par un policier blanc à Ferguson. Sans poursuite judiciaire. « Cette situation dure depuis des

Detroit

décennies sans que nous fassions le moindre progrès. Je me suis dit que je devais en parler… Je me sens de plus en plus le devoir d’utiliser le cinéma pour informer et tenter de faire évoluer les mentalités. »1 Forcer le spectateur à voir une réalité (qu’il refuse de voir)… en face. Mais Detroit a été un échec public aux États-Unis. On en revient souvent à une question désespérément sans réponse : que peut le cinéma ? Dans son dernier livre, Régis Debray notait : « Selon un sondage IFOP, dans la France de 1945, à la question : « Quelle est selon vous la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne ? », les Français répondaient l’URSS pour 55 % et les États-Unis pour 15 %. Le même sondage, en 2004, donne un résultat exactement inverse. C’est la grâce efficace du soldat Ryan : substituer au réel la perception du réel. (…) “Le commerce suit les films”. Oui. L’amnésie DP aussi. »2

1 Télérama

3534 – Comment nous sommes devenus Américains (p.121) 2Civilisation

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