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7 jours sur 7

AU BUREAU D’ACCUEIL DE LA COURSIVE

du mardi au vendredi de 13h à 20h / samedi, dimanche et lundi de 14h à 20h PAR TÉLÉPHONE du lundi au dimanche de 14h à 18h 05 46 51 54 02 - 05 46 51 54 03 - 05 46 51 54 04 SUR INTERNET www.la-coursive.com horaires consultables et programme téléchargeable MÉDIAS Sud-Ouest • Sud-Ouest Dimanche • Sortir • France Bleu La Rochelle • La Charente-Libre • France 3 Poitou-Charentes et Atlantique • RCF • La Nouvelle République Niort • Le Phare de Ré • Radio Collège • TMV La Rochelle • UBACTO

Tarifs cinéma

TARIF NORMAL CARTE LA COURSIVE, PLUS DE 60 ANS LUNDI POUR TOUS MOINS DE 26 ANS, DEMANDEUR D’EMPLOI TARIF JEUNE MOINS DE 18 ANS TARIF GROUPES SCOLAIRES, CENTRES DE LOISIRS CARTE FIDELITE POUR LES TITULAIRES DE LA CARTE LA COURSIVE 10 séances (valable jusqu’au mercredi 28 juin 2017)

7€ 6€ 5€ 5€ 4€ 3,50 € 50 €

TARIFS CARTE LA COURSIVE Individuel, 13,50 € • Collectivité ou groupe (minimum 10 personnes), 12 € • Plus de 60 ans, 12 € • Moins de 26 ans, Demandeur d’emploi, 7 € Cinéma Art et Essai Recherche et Découverte, Jeune Public et Patrimoine et Répertoire, adhérent au Groupement National des Cinémas de Recherche, à l’Association Française des Cinémas d’Art et d’Essai, à l’Association des Cinémas de l’Ouest pour la Recherche, à l’Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion et à l’Agence pour le Développement Régional du Cinéma. Salle Europa Cinémas.

Cinéma jeune public

Tout film présenté dans le cadre de la programmation du mois peut faire l’objet de séances scolaires (tarif : 3,50€). FILMS TOUT PARTICULIEREMENT RECOMMANDÉS

L’ECOLE DES LAPINS de Ute von Münchow-Pohl Animation, Allemagne, 2017, 1h16, couleur, version française m à partir de 5 ans m Séances tout public : mer 26 avril 14h / jeu 27 avril 15h30 / ven 28 avril 14h / sam 29 avril 16h45 / mer 3 mai 14h15 / dim 7 mai 16h45 LES P’TITS EXPLORATEURS, programme de 4 courts métrages Animation, France/Suisse, 2015-2016, 49’, couleur m à partir de 4 ans m Séances tout public : mer 26 avril 15h30 / jeu 27 avril 14h15 / ven 28 avril 15h30 Séances suivies de la projection de Mon premier cours de langue des signes de Fanny Maugard (6’). Une initiation pour les jeunes spectateurs à la Langue des Signes Française produite par Folimage et Signe De Sens. POUR TOUT RENSEIGNEMENT SERVICE CINEMA : 05 46 51 54 00 Directeur de la publication Jackie Marchand Programmation et rédaction Edith Périn Réalisation maquette, photogravure Brigitte Bombaron Morisson Impression fabrication Imprimerie IRO Photo de couverture Rodin de Jacques Doillon


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Après la tempête / Kore-eda Hirokazu

Dès l’ouverture d’Après la tempête, on reconnaît la petite musique des films de Koreeda –Nobody Knows (2004), Tel père, tel fils (2013), Still Walking (2008)–, invariablement centrée autour d’un même thème, la famille. Dans une cuisine exiguë, une vieille mère (la sémillante Kirin Kiki, actrice fétiche du réalisateur, qui illumina récemment Les Délices de Tokyo de Naomi Kawase, 2015) et sa fille échangent quelques banalités, que les propos piquants de l’aïeule viennent relever, à la manière d’une épice. Comme dans une scène d’exposition au théâtre, où le portrait du héros filtre à travers les paroles de personnages secondaires avant qu’il n’apparaisse lui-même sur la scène, la conversation esquisse la situation précaire de leur fils et frère, Ryota, de ce ton mordant et sans concession qui n’est, dans ce nouveau film de Kore-eda, que la politesse de la tendresse… […] Ryota est un pur personnage tchekhovien: après avoir écrit un roman, passé inaperçu, il végète comme détective privé, tout en dilapidant ses maigres appointements à la loterie, au point de ne plus pouvoir payer la pension alimentaire de son fils, Shingo, qui vit désormais avec sa mère. Ce père, démissionnaire par la force des choses, va tenter de renouer avec son petit garçon. C’est tout l’enjeu des films de Kore-eda que d’essayer de «faire famille», par-delà les dissensions, les non-dits, les retournements de situation. Et c’est ici un adjuvant atmosphérique, un typhon, qui contraint les personnages à se réfugier pour la nuit dans l’appartement familial, qui va servir de catalyseur. Sous la houlette de la facétieuse et bienveillante grand-mère, qui ne souhaite rien tant que son fils renoue avec son ex-compagne, l’homme et la femme se trouvent réunis dans une chambre à coucher improvisée, où ils conversent avec cette sorte de détachement, de calme gonflé d’amertume, qui entérine la fin des couples. C’est l’heure des bilans, des petites piques, des règlements de comptes à fleurets mouchetés. Tout ceci pourrait être assez convenu si ne surnageait de ces scènes de la vie post-conjugale le touchant portrait d’un velléitaire qui souffre de n’être pas parvenu à coïncider avec l’homme qu’il voulait être: «Je ne sais pas comment ça a tourné comme ça» dit Ryota en spectateur blasé de sa vie. C’est l’insoutenable difficulté du «métier de vivre» que capte, l’air de rien, Koreeda, dans ce film où la famille est moins une planche de salut qu’un refuge temporaire. Après la tempête vient l’éclaircie, et il faut se séparer, se résigner à tracer son sillon seul, un peu plus au clair avec soi-même. Still Walking. Claire Micallef La Septième Obsession n° 9, avril-mai 2017

Umi Yorimo Mada Fukaku

Japon, 2016, 1 h 58, scope-couleur, v.o. Scénario et montage Kore-eda Hirokazu Photo Yamazaki Yutaka Décor Mitsumatsu Keiko Musique Hanaregumi Avec Abe Hiroshi, Maki Yoko Yoshizawa Taiyo, Kiki Kirin… CANNES 2016 : UN CERTAIN REGARD

DU 26 AVRIL AU 9 MAI SORTIE NATIONALE

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Mister Universo / Tizza Covi et Rainer Frimmel Les réalisateurs de «La Pivellina» emmènent sur les routes du nord de l’Italie un jeune dompteur de fauves qui veut retrouver le Monsieur Univers de 1957 –qui lui avait offert un fer à cheval, gage de chance et d’amour. Ces travailleurs du rêve maintiennent à bout de bras un univers (celui de «La Strada», de Fellini) dont le monde d’aujourd’hui n’a plus besoin. Ils sont filmés avec une justesse et un humour bienveillant qui font de ce film un pur moment de réconfort… Thomas Sotinel, Le Monde du 18 août 2016

Autriche / Italie, 2016, 1 h 30, couleur, v.o. Scénario, son, montage Tizza Covi Photo Rainer Frimmel Avec Tairo Caroli, Wendy Weber Arthur Robin, Lilly Robin… SOUTIEN GNCR LABEL EUROPA CINÉMAS FESTIVALS 2016 : LOCARNO /

MONTRÉAL / VIENNE…

DU 26 AVRIL AU 9 MAI

«Mister Universo» est à nouveau un film que l’on pourrait qualifier d’hybride, une fiction très proche d’une approche documentaire. Comment envisagez-vous le travail de réalisation, la part d’écriture, la part de réel et de hasard? TIZZA COVI et RAINER FRIMMEL: Pour nous, écrire des scénarios, ne signifie pas seulement transposer nos idées à l’écran. Nous écrivons aussi en pensant aux personnes qui nous ont inspirés et il est essentiel qu’elles s’identifient au récit. Nous utilisons la singularité de chacune d’entre elles, leur mode de vie, leur façon de parler, etc. Pendant le tournage, nos personnages portent leurs propres vêtements, ils jouent dans leur environnement quotidien, sur leur lieu de travail, entourés de leurs proches, au milieu de leurs caravanes. Ainsi, la frontière entre fiction et réalité se confond dès le premier jour du tournage. Une porosité renforcée par le fait que tous les dialogues du film sont improvisés. Quand avez-vous rencontré Tairo Caroli (Tairo)? Et qu’est-ce qui vous a donné envie de faire un film avec lui? T.C. et R. F.: En 2009 pour le tournage de La Pivellina, il avait quatorze ans. Depuis, nous sommes restés en contact et nous avons souvent parlé de retravailler ensemble sur un nouveau projet de film. C’est quelqu’un qui a le chic pour se mettre dans des situations compliquées, un personnage tragicomique avec une certaine mélancolie. Ces différents aspects de sa personnalité en font un personnage aussi ambivalent que sympathique et cela nous a donné envie d’aller à sa rencontre. Comment avez-vous travaillé avec Tairo, Wendy et leurs compagnons de chapiteaux? T.C. et R. F.: Nous avons réalisé le film chronologiquement afin que chacun puisse rentrer plus facilement dans l’histoire et développer de l’empathie pour son personnage. Nous les informions seulement la veille des scènes que nous allions tourner, de ce qu’ils devraient faire et ce afin que nous puissions capter au plus proche la nature de leurs personnages. De fait, il était important de ne pas multiplier les prises de vue. En moyenne, nous n’en faisions pas plus de trois par scène. Comment Tairo et ses compagnons ont-ils réagi en voyant le film? Où en sont-ils aujourd’hui? T.C. et R. F.: Tous étaient très émus… Ce film est comme un album photo, témoin de leurs anciennes vies. Car entre-temps, beaucoup de choses ont changé, notamment pour Tairo. Il a vendu sa caravane. Ses fauves sont morts peu après le tournage et son contrat avec le cirque Merano a pris fin. Aujourd’hui, il travaille dans un cirque ukrainien avec les animaux de son père. in Dossier de presse

SORTIE NATIONALE

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De toutes mes forces / Chad Chenouga Nassim est en première dans un grand lycée parisien et semble aussi insouciant que ses copains. Personne ne se doute qu’en réalité, il vient de perdre sa mère et rentre chaque soir dans un foyer. Malgré la bienveillance de la directrice, il refuse d’être assimilé aux jeunes de ce centre. Tel un funambule, Nassim navigue entre ses deux vies, qui ne doivent à aucun prix se rencontrer…

En 2001, «17, rue Bleue», votre premier film, puisait dans vos souvenirs d’une adolescence douloureuse, auprès d’une mère en perdition. «De toutes mes forces», c’est encore votre vie? CHAD CHENOUGA: Absolument. Il y a quelque chose de nécessaire pour moi à revenir sur ces événements de mon passé. Mais ce film n’est pas la suite de 17, rue Bleue et ce n’est pas un film d’époque. C’est une fiction co-écrite avec Christine Paillard, (également collaboratrice artistique sur le film), qui s’est nourrie des ateliers d’improvisation que j’ai faits avec des jeunes vivant en foyer, puis avec les acteurs pressentis pour le film. J’ai connu une trajectoire comparable à celle du héros, Nassim. Vous racontiez déjà votre placement en foyer dans «La Niaque», une pièce de théâtre que vous avez écrite et jouée en 2011. Quel rapport entre ce spectacle et «De toutes mes forces»? C.C.: Il reste un peu de ce spectacle dans le film. Je l’avais monté grâce à Jean-Louis Martinelli, qui dirigeait les Amandiers à l’époque. Il m’avait fait travailler comme comédien, et il avait aimé le texte que je lui avais fait lire par la suite. J’étais le seul acteur en scène et je m’adressais au public, je le haranguais presque! J’étais accompagné de danseurs de krump (danse de rue) pour montrer l’énergie de l’adolescence… Se plonger dans les études, c’était pour moi le seul moyen de m’en sortir… Comme un rapport presque mortifère aux études… La Niaque racontait ça. Quand ma mère est morte, j’ai été assailli d’émotions contradictoires:un sentiment de libération et une grande culpabilité. Et comme je n’avais plus de problèmes matériels, il ne me restait qu’une chose à faire: travailler. Un peu bêtement, je me disais que ma mère me regardait et qu’il fallait qu’elle soit fière de moi… Pourquoi avez-vous pensé à en faire un film? C.C.: J’avais envie de transmettre les énergies d’un groupe d’adolescents, au travers de la danse, de leurs meurtrissures cachées, de leurs parcours chaotiques. J’avais envie aussi de raconter les deux mondes séparés de Nassim, son environnement parisien feutré, mais aussi comment cette année de foyer allait le changer, lui permettre de grandir. Nous avons fait de multiples allers-retours entre mes souvenirs et les ateliers que j’ai dirigés dans des foyers. Ces séances ont nourri le travail sur les personnages et l’atmosphère que je cherchais pour le film… Tout au long du processus d’écriture, ma volonté était de prendre une certaine distance par rapport à ma propre histoire, mais en préservant la justesse de mon ressenti et de celle des personnages que l’on avait créés. Il s’agissait de ne surtout pas tout dire, de transmettre en priorité un sentiment de vitalité plus que raconter de bout en bout les parcours des uns et des autres. Quand j’ai proposé à Yolande Moreau le rôle de la directrice du foyer, Madame Cousin, elle m’a dit: «Cette histoire “ne raconte pas d’histoires”, j’y crois.» J’étais content. in Dossier de presse

France , 2016, 1 h 38, couleur Scénario Christine Paillard, Chad Chenouga Photo Thomas Bataille Son Xavier Griette, Agnès Ravez… Décor Brigitte Brassart Musique originale Thylacine Montage Pauline Casalis Avec Klaled Alouach, Yolande Moreau Laurent Xu, Daouda Keita Aboudou Sacko, Jisca Kalvanda… DU 3 AU 16 MAI SORTIE NATIONALE

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Retour à Forbach / Régis Sauder J’ai regardé hier soir le documentaire de Régis Sauder et depuis, j’ai l’impression d’être réellement allée à Forbach, et sûrement pas comme Hollande en coup de vent, d’avoir été immergée dans l’histoire morte de cette cité, les houillères, et le présent des gens, leur immense délaissement, leur désarroi, leurs souvenirs aussi. Il y a un souci constant de montrer les rues, les commerces, les immeubles, les pavillons, et puis les gens, qui portent les uns le passé, les autres le présent et l’avenir. C’est ça, non pas seulement vivre dans une ville, ici Forbach, mais «être» d’une ville comme Forbach, avoir le souvenir d’une cité rasée, de l’école, des amitiés, c’est s’être construit avec ça, comme dit une femme, et envisager d’y rester. La maison d’enfance vidée et à la fin vendue à Ahmed, très belle ouverture et beau final d’une nouvelle transmission. L’émotion n’est pas sollicitée, elle vient des images, des mots à la fois directs et pudiques sur la honte. Annie Ernaux, écrivain in Document édité par l’ACID Un tel titre en appelle d’autres, comme l’immense poème d’Aimé Césaire, Cahiers d’un retour au pays natal ou l’émouvant récit autobiographique de Didier Eribon, Retour à Reims. Le mot «retour» nous murmure aussi «aller». Il a bien fallu y aller pour en partir et y retourner, non? Régis ne dit pas grand chose sur sa naissance à Forbach et son rapport à cette maison parentale qu’il vide de ses meubles avec sa sœur. Il ne nous dit pas grand chose sur sa vie d’élève, ses copains, ses jeux d’enfants. Par contre, il s’attarde sur le relief collinaire de la ville, les grands arbres chargés de feuilles, la nature apaisante dans laquelle elle semble baigner et dont on devine difficilement le tohu-bohu usinier, le cri autoritaire des sirènes, les va-et-vient des ouvriers. On devine que l’économie locale est sinistrée, que les habitants de cette région confisquée par des dynasties industrielles ne savent plus trop quoi penser, que le ressentiment des uns s’articule au désespoir des autres.

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Régis est parti pour échapper au destin ouvrier local, pour aller voir ailleurs s’il s’y trouvait. Il a oublié Forbach. Il s’en est détaché. Il en avait honte, non pas à cause de ses origines sociales, mais de ce contexte paternaliste, violent, injuste et raciste. Et puis, peut-être à cause de l’extrême-droite qui s’empare des esprits de gens ordinaires, dont d’anciens condisciples. Jean-Jacques Harder soutient en 1678 sa thèse portant sur le «mal du pays» (Heimweh), en latin nostalgia, terme formé à partir du grec nostos («retour») et algos («mal») qui désigne ce «mal-être» qui s’empare des mercenaires suisses éloignés trop longtemps de chez eux et dont le seul médicament consiste à revoir leurs montagnes… La nostalgie est un sentiment cotonneux qui déclenche aussi bien les larmes que la colère. Forbach ne lui plaît plus. Tel Nestor (célèbre guerrier de la mythologie grecque dont le nom provient justement de nostos), après bien des périples, Régis est devenu plus sage mais pas pour autant serein. Avec sagesse, il apprécie les récits de celles et ceux qui sont restés tout en partant, de cette femme du grand ensemble devenue enseignante là même où elle a appris le français, de cet ouvrier dont la femme musulmane porte librement le voile. Ils sont partis de leur condition d’origine pour une autre destination dans la même localité. Ils sont partis en restant. Régis est resté en partant. A dire vrai, il n’a jamais vraiment pu partir, un bout de Forbach demeure en lui, telle une intranquillité muette. Thierry Paquot, philosophe de l’urbain, président d’Image de ville, in Document édité par l’ACID Pourquoi revenir à Forbach pour y tourner un film ? Quel a été le point de départ de votre projet? RÉIGIS SAUDER: Il n’y a pas eu un point de départ mais plusieurs. J’ai quitté Forbach après le Bac et j’y suis revenu régulièrement puis de moins en moins avec l’âge et ma vie ailleurs. C’est une succession de visites et de départs. Il y a dix ans dans le cadre de l’atelier documentaire de la Fémis, j’ai écrit un film qui s’appelait Libérez Régis. C’était une réflexion autour de l’héritage, un projet plus narcissique je crois. Je n’ai pas fait ce film, mais je crois que Retour à Forbach est né à ce moment-là. Entre temps, j’ai construit une manière cinématographique d’être au monde. J’ai réalisé Nous, Princesses de Clèves et Etre là. Mais l’idée de faire un film sur mon héritage ne m’a jamais quitté, et elle est liée au lieu d’où je viens et où tout a commencé. Le cinéma documentaire est une façon de transmettre et de partager une expérience, aussi intime soit-elle. C’était important de faire le point sur ce qu’on m’avait donné. Puis, il y a eu l’explosion du vote FN partout en France en 2014 et Forbach s’est retrouvé sous le feu des projecteurs. Philippot s’est présenté aux élections municipales et au premier tour, il est arrivé en tête. J’étais à Marseille à l’époque et cette stigmatisation de la ville m’a interpellé. Avec ce film, vous poursuivez votre exploration des zones de non-droit comme dans «Nous, Princesses de Clèves», situé dans les quartiers Nord de Marseille. Pourquoi ces territoires vous attirent-ils ? R. S.: Je ne procède pas par thématiques, mais par proximité. C’est-à-dire que dans Nous, Princesses de Clèves, j’ai fait un film dans le lycée où ma femme a enseigné pendant quinze ans. Il y avait la proximité de ce lieu. La façon dont ces territoires-là sont représentés me touche beaucoup. C’est vrai pour les quartiers Nord de Marseille, mais aussi pour Forbach dans les médias. Procéder à une autre forme de représentation de ces territoires m’importe. Forbach n’est pas un lieu anodin pour moi. J’y suis né, j’y ai grandi et une partie de ma famille y vit encore. Faire un film dans la ville de mon enfance, c’est parler d’un territoire qui m’est précieux et qui est traversé par des problématiques bien plus larges, universelles. in Document édité par l’ACID

Soirée-rencontre avec Régis Sauder mardi 9 mai à 20 h 30.

France, 2016, 1 h 18, couleur Photo Régis Sauder, Thomas Weber Son Pierre-Alain Mathieu Musique Deficiency Montage Florent Mangeot SOUTIEN ACID FESTIVAL CINÉMA DU RÉEL 2017

DU 9 AU 16 MAI EN EXCLUSIVITÉ

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Une famille heureuse Nana Ekvtimishvili et Simon Groß

Professeure dans un lycée de Tbilissi, Manana est mariée depuis vingt-cinq ans à Soso. Ensemble, ils partagent leur appartement avec les parents de Manana, leurs deux enfants et leur gendre. Une famille en apparence heureuse et soudée jusqu’à ce qu’à la surprise de tous, Manana annonce au soir de son cinquante-deuxième anniversaire sa décision de quitter le domicile conjugal pour s’installer seule.

Chemi Bednieri Ojakhi Géorgie / All., 2016, 1 h 59, coul., v.o. Scénario Nana Ekvtimishvili Photo Tudor Vladimir Panduru Son Andreas Hildebrandt Paata Godziashvili Décor Kote Japharidze Montage Stefan Stabenow Avec Ia Shugliashvili, Merab Ninidze Berta Khapava, Tsisia Qumsashvili Giorgi Khurtsilava, Giorgi Tabidze… SOUTIEN AFCAE

FESTIVALS 2017 : BERLIN / SUNDANCE

DU 10 AU 23 MAI

[…] En choisissant de déserter sans raison apparente ni fracas particulier son rôle de mère de famille et d’épouse afin de se retrouver et de se reconstruire, la jeune quinquagénaire géorgienne Manana, personnage principal de Une famille heureuse du duo Nana Ekvtimishvili-Simon Groß […] entre en résonance avec une myriade de destinées féminines se nouant et se dénouant à l’identique sur tous les continents. Mais réussir à traiter avec force et subtilité une histoire simple et universelle n’est pas à la portée des premiers venus, et c’est là que les talents discrètement éblouissants du duo de cinéastes révélé en 2013 à Berlin avec Eka et Natia, Chronique d’une jeunesse géorgienne, font toute la différence. […] Avec ses interprètes d’une très grande justesse dans le sillage de l’exceptionnelle Ia Shugliashvili qui porte tout le film sur ses épaules: Une famille heureuse est une belle démonstration d’un art cinématographique subtil de la dédramatisation afin de mieux restituer les nuances de la vie. […] S’appuyant sur un scénario très solide (écrit par Nana Ekvtimishvili), le film qui bénéficie également du talent du directeur de la photographie roumain Tudor Vladimir Panduru (récemment à son avantage avec Baccalauréat) et d’un montage très efficace confirme tout le potentiel d’un duo de cinéastes qui devrait rapidement grimper dans la hiérarchie mondiale. Fabien Lemercier, www.cineuropa.org, 23 janvier 2017 Dans une société patriarcale comme la Géorgie, il est couramment admis que les femmes ne peuvent pas vivre sans les hommes, sans eux elles seraient moins respectées, moins protégées et dans une plus grande précarité. Ceci est en partie vrai, non parce que les femmes valent moins que les hommes, mais parce que certains considèrent qu’elles valent moins. Ainsi, cette manière de penser s’impose comme la norme auprès de tous. Notre objectif en tant que cinéastes n’est pas de porter un jugement mais simplement de donner vie à nos personnages et ainsi permettre au public de passer un peu de temps au sein d’une famille géorgienne. Note d’intention in Dossier de presse

SORTIE NATIONALE

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Emily Dickinson. A Quiet Passion / Terence Davies Emily Dickinson n’a été reconnue qu’à titre posthume et je trouve cela profondément injuste. Je me demande toujours comment les grands artistes supportent cet état de fait. En tout cas, elle mérite d’être célébrée à jamais. Terence Davies

Nouvelle-Angleterre, XIXe siècle. Dans son pensionnat de jeunes filles de bonne famille, la jeune Emily Dickinson ne cesse de se rebeller contre les discours évangéliques qui y sont professés. Son père se voit contraint de la ramener au domicile familial, pour le plus grand bonheur de sa sœur Vinnie et de son frère Austin. Passionnée de poésie, Emily écrit nuit et jour dans l’espoir d’être publiée. Les années passent, Emily poursuit sa recherche de la quintessence poétique. La rencontre avec une jeune mondaine indépendante et réfractaire aux conventions sociales ravive sa rébellion. Dès lors, elle n’hésite plus à s’opposer à quiconque voudrait lui dicter sa conduite. Personnage mystérieux devenu mythique, Emily Dickinson (1830-1866) est considérée comme l’un des plus grands poètes américains. […] Porté par des dialogues littéraires pleins d’esprit mais traversé par une profonde mélancolie, Emily Dickinson. A Quiet Passion se met au diapason des humeurs de son héroïne, campée par Cynthia Nixon. A des années-lumière de son rôle de Miranda, la rousse flamboyante de la série Sex and the City, elle éblouit ici de retenue et de justesse. Tandis que la mise en scène de Davies, racée et raffinée, confère une vraie signature à cette biographie filmée. Ne tombant jamais dans la facilité du biopic hagiographique, refusant tout spectaculaire, Emily Dickinson. A Quiet Passion est un hommage amoureux par un vrai connaisseur de la poésie belle et torturée d’Emily Dickinson. Hubert Heyrendt, www.lalibre.be, novembre 2016

Royaume-Uni / Belgique, 2016, 2 h 04 scope-couleur, v.o. Scénario Terence Davies Photo Florian Hoffmeister Décor Merijn Seo Costumes Catherine Marchand Musique Ian Neil Montage Stefan Stabenow Avec Cynthia Nixon, Jennifer Ehle Jodhi May, Catherine Bailey Emma Bell, Ducan Duff… FESTIVALS 2016 : TORONTO / BERLIN / SAN SEBASTIAN

DU 17 AU 23 MAI EN EXCLUSIVITÉ

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Sayonara / Koji Fukada

Japon, 2015, 1 h 52, couleur, v.o. Scénario Koji Fukada d’après la pièce de Oriza Hirata Photo Akiko Ashizawa Son, musique Rana Eid, Julien Perez Montage Naohiro Urabe Avec Bryerly Long, Geminoïd F Hirofumi Arai, Makiko Murata Nijiro Murakami, Yuko Kibiki… SOUTIEN GNCR

DU 17 AU 23 MAI

Si le passage du lumineux Au revoir l’été au sombre Harmonium pouvait dérouter, c’est parce qu’une étape manquait entre ces deux films de Koji Fukada : l’insolite et hanté Sayonara, datant de 2015, était resté inédit chez nous. Son origine est intrigante puisqu’il s’agit d’une courte pièce d’Oriza Hirata où l’actrice américaine Bryerly Long avait pour seule partenaire Geminoïd F, créature du génial roboticien Hiroshi Ishiguro. De fait, son adaptation est bien le premier film où un acteur humain partage l’écran avec un véritable androïde… La SF intimiste de Fukada soulève des questions que négligent depuis longtemps les blockbusters: que représente l’introduction d’un être artificiel à l’intérieur d’un film? En quoi cela modifie-t-il notre rapport au vivant, à l’humain et au temps? Le vivant, dans Sayonara, est mis en péril de toutes les façons. Dans un futur indéterminé, le Japon vit une apocalypse : des terroristes font exploser les centrales nucléaires, provoquant l’exode des habitants. C’est dans ce pays déserté et une campagne irradiée que Tania, une jeune occidentale, attend d’être évacuée alors que sa santé décline. Elle a pour compagne, Leona, un androïde domestique, à ses côtés depuis l’enfance. Pour Fukada, il est crucial de reproduire le dispositif de la pièce d’Oriza Hirata: qu’une actrice en chair et en os interprète Leona ne changerait rien au récit, ni même sans doute à la mise en scène. Pourtant ce qui serait perdu serait le rapport réel et immédiatement perceptible entre une chair vivante et sa réplique artificielle, entre un organisme en déréliction et un autre inaltérable… […] Fukada ne figure pas l’humanité de l’androïde par l’anthropomorphisme mais par un travail visuel poétique et une palette de couleurs mordorées très éloignée des teintes froides de la SF. Le trouble de la vallée de l’étrange, ce n’est pas Tania qui l’éprouve en s’apercevant que l’androïde était sa dernière amie, mais Leona qui est confrontée à l’énigme du vivant. A la mort de sa compagne, elle observe l’apparition des lividités, la dissolution des chairs et le terrible écrasement du visage en une chose méconnaissable. La solitude de l’androïde veillant sa sœur humaine a-t-elle duré cent ans ou davantage? Combien de décennies, peut-être de siècles, a-t-elle erré dans un Japon désert, infesté par les radiations? Ce que nous fait éprouver Fukada, est un état rarement atteint dans le cinéma de science-fiction, celui d’un monde libéré de la présence humaine. De notre passage sur terre, seul demeure, comme un souvenir, presque une relique, le visage de Leona. Stéphane du Mesnildot, Cahiers du cinéma n° 732, avril 2017

EN EXCLUSIVITÉ

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I Am Not Your Negro / Raoul Peck […] «I Am Not Your Negro» de Raoul Peck est une assez majestueuse mise en images d’un manuscrit inachevé de James Baldwin, «Remember This House» (évocation des figures de Medgar Evers, de Martin Luther King et de Malcolm X), dit en voix off par Samuel L. Jackson. Le film échappe au didactisme, déjà par sa revisitation critique des imaginaires publicitaires et hollywoodiens des années 30 à 60, et surtout par les échos entre l’inachèvement du projet littéraire et un inachèvement encore plus poignant, celui des luttes pour les droits civiques, dont le mouvement Black Lives Matter est l’héritier… Joachim Lepastier Cahiers du cinéma n°731, mars 2017 Trois hommes. Medgar Evers, mort le 12 juin 1963 / Malcolm X, mort le 21 février 1965 / Martin Luther King, mort le 4 avril 1968. En cinq ans, ces trois hommes ont été assassinés. Trois grands hommes dans l’histoire des Etats-Unis d’Amérique et au-delà. Ils étaient noirs mais ce n’est pas la couleur de leur peau qui les rassemblait. Ils se sont battus pour des causes différentes, avec des outils différents. Mais finalement, les trois ont été considérés comme dangereux parce qu’ils levaient le voile sur le brouillard de la confusion raciale. James Baldwin portait également un regard critique sur la société américaine et il adorait ces trois figures. Il était déterminé à montrer les connections complexes entre leurs pensées. Il voulait écrire sur eux dans ce qui serait son dernier ouvrage : Remember This House. Je ne me suis intéressé à ces hommes et à leur assassinat que bien plus tard. Ces trois événements historiques, depuis leur point de départ, ces « témoignages » qui étaient nécessaires, pourrait-on dire, à une remise en question profonde et intime de ma propre mythologie politique et culturelle et de mes propres expériences du racisme et de la violence intellectuelle. Ces assassinats ont fait écho à mon histoire personnelle. Ces trois scènes de crime redessinaient mon itinéraire personnel entre l’Amérique, l’Afrique et l’Europe. Un voyage à travers un monde qui, comme l’a écrit Achille Mbembe, refuse de reconnaître qu’il existe « plusieurs histoires parallèles du monde » et que les dominants doivent arrêter de considérer l’histoire des autres peuples comme des notes en bas de page de leur propre histoire. Pourquoi James Baldwin? La pensée de James Baldwin m’a été fort utile, parce qu’il savait comment déconstruire ces histoires. Il m’a aidé à connecter l’histoire de l’indépendance d’Haïti à l’histoire moderne des Etats-Unis et son héritage douloureux et sanglant de siècles d’esclavage. Baldwin m’a donné une voix, des mots, une rhétorique. Tout ce que je sentais d’intuition et d’expérience, Baldwin lui a donné un nom et une forme. J’avais ensuite toutes les armes intellectuelles dont j’avais besoin. Il est l’un des plus grands écrivains nord-américains de la seconde partie du XXe siècle –un écrivain prolifique et un critique brillant de la société américaine. Il a préfiguré les tendances destructrices que nous voyons à l’œuvre aujourd’hui dans l’ensemble du monde occidental et au-delà, tout en gardant une vision humaniste pleine d’espoir et de dignité. Il a exploré les subtilités palpables– mais non dites – des distinctions raciales, sexuelles et sociales présentes dans les sociétés occidentales et les tensions inévitables, si on ne les nommait pas, autour des questions d’identité, d’incertitudes, d’aspirations et de quêtes personnelles. Il avait une incomparable compréhension de la politique et de l’histoire et surtout de la condition humaine. Sa prose est précise comme un laser… Chaque phrase est une grenade dégoupillée : quand on l’attrape au vol, on réalise qu’il est trop tard ; elle vous explose au visage. Et pourtant, il réussit toujours à rester humain, tendre, accessible. Aujourd’hui encore, les mots de James Baldwin nous prennent au dépourvu et nous frappent avec la même force et la même violence que quand il les a écrits, il y a plus de quarante ans… […] Jamais la voix de Baldwin n’a été aussi essentielle, puissante, radicale, et visionnaire. James Baldwin n’a jamais terminé Remember This House. L’ambition de ce film est de combler, en partie, ce manque. Raoul Peck in Dossier de presse

France / USA / Belgique / Suisse, 2016 1 h 33, noir et blanc, v.o. Ecrit par Raoul Peck, James Baldwin Photo Henry Adebonojo, Bill Ross… Son Valérie Le Docte, David Gillain Archives Marie-Hélène Barbéris Nolwenn Gouault Musique Alexei Aigui Montage Alexandra Strauss Avec la voix de Samuel L. Jackson FESTIVALS 2016 : TORONTO / CHICAGO HAMPTON / LOS ANGELES / BERLIN, PRIX DU PUBLIC, MENTION SPÉCIALE DU JURY ŒUCUMÉNIQUE…

DU 24 AU 30 MAI EN EXCLUSIVITÉ

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Rodin / Jacques Doillon A Paris, en 1880, Auguste Rodin reçoit enfin à quarante ans sa première commande de l’Etat: ce sera «La Porte de L’Enfer» composée de figurines dont certaines feront sa gloire comme «Le Baiser» et «Le Penseur». Il partage sa vie avec Rose, sa compagne de toujours, lorsqu’il rencontre la jeune Camille Claudel, son élève la plus douée qui devient vite son assistante, puis sa maîtresse. Dix ans de passion, mais également,dix ans d’admiration commune et de complicité. Après leur rupture, Rodin poursuit son travail avec acharnement. Il fait face au refus et à l’enthousiasme que la sensualité de sa sculpture provoque et signe avec son «Balzac», rejeté de son vivant, le point de départ incontesté de la sculpture moderne.

Comment avez-vous cheminé jusqu’à Rodin? JACQUES DOILLON: C’est accidentel. Lorsque mon film précédent, Mes séances de lutte, est sorti, deux

producteurs de documentaires m’ont contacté pour me dire qu’il leur avait fait penser à Rodin. Comme la célébration du centenaire de la mort du sculpteur se profilait, ils m’ont proposé d’envisager la réalisation d’un documentaire sur lui. Je connaissais son œuvre, mais sans plus. J’avais été quelquefois au musée, voilà tout. J’ai accepté dans un premier temps, mais assez vite, j’ai imaginé des scènes de fiction pour mieux «faire revivre l’animal». Au fur et à mesure de l’écriture, la fiction a pris de plus en plus de place, et je me suis aperçu que je n’étais pas intéressé ou capable de faire un film documentaire, qu’il me fallait des comédiens. J’ai donc décliné cette offre et j’ai continué à écrire, en me documentant, des scènes de «fiction». La première écriture terminée, je suis allé voir Vincent Lindon à qui le projet a plu. Vincent a mis en marche la machine : Kristina Larsen a souhaité le produire, et voilà…! La dimension physique et sensuelle de «Mes séances de lutte» fait écho à l’œuvre très charnelle de Rodin… J. D.: C’est qu’au cinéma, on est sur les visages et sur le verbe, mais les corps n’expriment souvent pas grand-chose, ils m’apparaissent fréquemment comme morts. J’ai toujours voulu que les corps de mes personnages parlent aussi. Il faut dire que l’on désire tourner aussi avec des acteurs dont on aime la façon de «bouger», la manière dont leurs corps s’expriment. Là, on se rapproche de Rodin: ses corps parlent énormément, et que l’on ait pu penser à moi pour un film sur lui ne me semble pas complètement incongru. 12


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La notion de travail est au cœur de votre film… J. D.: Rilke en a très bien parlé : «Si je suis venu chez vous, c’était pour vous demander: comment faut-

il vivre? Et vous m’avez répondu: en travaillant.» Je pense que tous, de Camille Claudel à Rilke et tant d’autres, sont venus chercher auprès de lui cette faculté… C’est d’ailleurs ce qu’a raconté Zweig, à qui Rodin faisait visiter son atelier, quand tout à coup il a retiré un linge humide d’une de ses maquettes et s’est mis à la retoucher. Zweig l’a admiré silencieusement. Et quand Rodin en a eu terminé, il est parti pour fermer la porte de son atelier, surpris soudain d’y trouver un inconnu ! Il avait totalement oublié la présence de l’écrivain. L’immense plaisir de tourner, c’est aussi cette surprise de découvrir la vérité d’une scène au bout de la dix-septième prise, par exemple, comme une chose absolument nouvelle et inconnue, parce qu’elle est devenue tellement crédible qu’elle me fait totalement oublier que je l’ai écrite et qu’on travaille dessus depuis deux ou trois heures. Je comprends donc bien le travail de Rodin, qui a mis sept ans à finir son Balzac, par exemple! Le noncontentement de soi et l’idée qu’avec du travail, de la réflexion, on va peut-être finir par trouver quelque chose qui soit satisfaisant me va très bien. Et je comprends aussi bien qu’après toutes ces années passées sur son Balzac, Rodin ait eu envie d’instantanés, de polaroids, avec ses dessins. Avec ses dessins, on est en dehors de toute pause, de toute affectation, on est dans le geste pur. Ses dessins sont d’une audace, d’une liberté et d’une beauté telles que l’on peut affirmer aujourd’hui que le dessinateur est aussi impressionnant que le sculpteur. Les rapports entre Rodin et Camille Claudel semblent abordés différemment de ce qu’on a pu voir jusqu’à maintenant. J. D.: On a beaucoup attribué jusqu’ici la fêlure de Camille Claudel à sa rupture avec Rodin, à la suite de la non-demande en mariage. Il est bien évident que la paranoïa de Camille prend ses sources bien plus loin, à commencer dans ses rapports avec sa mère, qui étaient désastreux. On connaît la détermination et l’ambition farouche de Camille à vouloir devenir sculptrice, elle dont toute la famille a déménagé à Paris pour qu’elle puisse vivre son art. Dès qu’elle a atteint une maîtrise qui aurait dû lui donner une juste reconnaissance, elle n’a pas supporté, et à juste raison, de toujours rester dans l’ombre de son maître et d’être seulement considérée comme son élève et sa maîtresse. Beaucoup de choses nous échappent évidemment sur les raisons de leur séparation, mais la question de la nonreconnaissance est, sans doute, la plus importante. De même, l’idée communément répandue d’un Rodin vampirisant le génie de Camille pour mieux la détruire n’est pas sérieuse si l’on s’intéresse à eux avec un peu d’honnêteté. Rodin, après la séparation initiée par Camille, a d’ailleurs fait beaucoup pour elle. Un seul exemple: sa volonté de proposer qu’une salle soit consacrée à Camille Claudel dans le futur musée Rodin. Prendre parti pour l’un contre l’autre me paraît extravagant. On parle souvent d’une relation catastrophique, alors qu’ils se sont aimés durant dix ans, que leur admiration et leur communion dans le travail leur ont permis de mieux poursuivre leur œuvre respective. Vincent Lindon est un acteur très physique. Son «ancrage au sol» était-il important pour vous? J. D.: Lorsqu’on regarde les sculptures de Rodin, on a le sentiment que beaucoup ont vraiment pris racine dans la terre. En simplifiant, ce sont soit des œuvres très ancrées dans le sol, soit qui aspirent à l’envol. Son Iris, messagère des dieux, elle vole! Comme son Nijinsky qui, lui, y aspire. Mais Les Bourgeois de Calais ou le Balzac, eux, sont indéracinables. Vincent Lindon appartient plutôt à cette dernière catégorie. Dans la scène où la jeune Anglaise vient informer Rodin que Camille est partie en Angleterre, Vincent était légèrement à contre-jour, avec les jambes écartées dans un plan assez large, comme un taureau massif qui va entrer dans l’arène. Curieusement, un peu plus tard, j’ai trouvé un dessin de Bourdelle représentant Rodin exactement dans cette position. Vincent était devenu Rodin, je comprends qu’il n’ait pas pu refuser le rôle, parce que Rodin, c’est Vincent. Définitivement. Pourquoi Izïa Higelin dans le rôle de Camille Claudel? J. D.: Elle s’est imposée à moi, car je voulais de la jeunesse et de la gaieté pour interpréter Camille Claudel. Je ne voulais pas la plomber d’entrée. Je ne l’avais pas vue jouer et ça m’allait bien. Je retrouvais les gènes virevoltants du père, avec qui j’avais travaillé vingt ans plus tôt. Elle avait une belle intensité, et une joyeuse vivacité ; ça me semblait très bien coller au personnage de Camille, à sa fantaisie joyeuse qui a tant séduit Rodin et à son exaltation qui pouvait vite tourner à l’orage. Elle a été une évidence tout de suite pour moi. in Dossier de presse

France, 2017, 1 h 59, couleur Scénario Jacques Doillon Photo Christophe Beaucarne Son Erwan Kerzanet Décor Katia Wyszkop Costumes Pascaline Chavanne Musique Philippe Sarde Montage image et son Frédéric Fichefet Avec Vincent Lindon, Izïa Higelin Séverine Caneele, Bernard Verley Anders Danielsen Lie, Olivier Cadiot… CANNES 2017 : SÉLECTION OFFICIELLE

DU 24 MAI AU 13 JUIN SORTIE NATIONALE

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L’Ecole des lapins / Ute von Mü-nchow-Pohl

Animation, Allemagne, 2017, 1 h 13 couleur, version française • à partir de 5 ans • DU 26 AVRIL AU 7 MAI EN EXCLUSIVITÉ

Max, un lapin des villes dégourdi, se retrouve piégé dans une école pour lapins aux méthodes un peu… anciennes. C’est là qu’est jalousement gardé l’œuf de Pâques en or convoité par une famille de renards rusés. Avec l’aide de l’adorable Emmy qui rêve de réussir son examen de lapin de Pâques et grâce aux leçons de Madame Hermione experte en arts martiaux mais aussi en préceptes de vie, Max apprendra l’art de la magie propre aux lapins de Pâques et il comprendra quelle est sa vraie famille… Il y a bien longtemps, il avait tellement neigé en hiver, que les animaux de la forêt ne trouvaient rien à manger. Ils durent compter sur l’aide des Humains pour se nourrir. A peine la neige commença-t-elle à fondre, que les animaux voulurent leur prouver leur gratitude. Les poules donnèrent leurs œufs, et chacun aida à les peindre pour les décorer, et les lapins agiles se chargèrent de les apporter aux enfants des Hommes. C’est ainsi qu’est née la fête de Pâques. in Dossier de presse

Les P’tits Explorateurs «Les P’tits Explorateurs» offre quatre histoires animées autour du thème de la différence et de la tolérance et invite les jeunes spectateurs à partager les aventures de héros sans cape ni pouvoir magique mais tous capables de découvrir le monde avec leur cœur! CHEMIN D’EAU POUR UN POISSON de Mercedes Marro (France / Espagne / Colombie, 2016, 8’, couleur)

Par une nuit étoilée, dans un quartier défavorisé quelque part en Amérique Latine, Oscar dort dans sa chambre lorsqu’une bourrasque de vent le réveille. Depuis sa fenêtre, il aperçoit… un poisson rouge dans une flaque d’eau boueuse! Deux chats l’observent, tapis dans l’ombre… Une sensibilisation ludique et poétique à la pénurie d’eau. LE RENARD MINUSCULE de Sylwia Szkiladz et Aline Quertain (France / Belgique / Suisse, 2015, 8’, couleur)

Au milieu d’un jardin foisonnant, un tout petit renard rencontre une enfant intrépide qui fait pousser des plantes géantes! Jusqu’où l’imagination des deux nouveaux amis ira-t-elle? LA CAGE de Loïc Bruyère (France, 2016, 6’, couleur)

Un ours, prisonnier dans sa cage, va se lier d’amitié avec un oiseau tombé de son nid. Tandis que l’ours permet à l’oiseau de voler, l’oiseau lui apprend à maîtriser sa voix jusqu’à savoir chanter! Animation, 2015-16, 49’, couleur • à partir de 4 ans • tarifs : enfant 4 € / adulte 5 €

CLÉ À MOLETTE ET JO de Stéphane Piera (France, 2015, 26’, couleur)

Clé à Molette, un petit robot tout droit venu de l’espace, découvre notre monde et la langue des signes grâce à Jo, un enfant sourd et solitaire. Mais le robot et ses bêtises vont aussi créer des amitiés inespérées entre Jo et les enfants entendants qui l’entourent. Faut-il se ressembler pour devenir amis?

SOUTIEN AFCAE JEUNE PUBLIC

DU 26 AU 28 AVRIL EN EXCLUSIVITÉ

Séances suivies de la projection de Mon premier cours de langue des signes de Fanny Maugard (6’). Une initiation pour les jeunes spectateurs à la Langue des Signes Française. 14


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SPECTACLES

EN

MAI

LE CAS SNEIJDER

Le Cas Sneijder D’APRÈS JEAN-PAUL

THEATRE

DUBOIS, MISE EN SCÈNE DIDIER BEZACE

Un auteur toujours passionnant, un metteur en scène, adaptateur qui s’est illustré sur les plus grandes scènes et un acteur, Pierre Arditi, dans le rôle de ce rescapé d’ascenseur qui cultive la politesse du désespoir. 2 au 13 mai / 13 représentations Mélanie De Biasio JAZZ VOCAL La Coursive et La Sirène s’associent pour programmer l’inclassable Mélanie De Biasio. La chanteuse et flûtiste belge propose un jazz gracieux, palpitant et profondément novateur. En coproduction avec La Sirène

vendredi 5 mai 20 h 30 / CONCERT À LA SIRÈNE, LA ROCHELLE

Nouvelles Pièces Courtes CRÉATION DE

DANSE

PHILIPPE DECOUFLÉ / 8 DANSEURS

Mais que va-t-il donc encore sortir de la tête de Philippe Decouflé? De retour de Broadway, où il mettait en scène le Cirque du Soleil, le chorégraphe-magicien débarque à La Rochelle pour une résidence de création qui s’annonce pour le moins… mystérieuse. Mais comme d’habitude, attendons-nous à être emportés vers des territoires inexplorés, farfelus et bariolés, transportés au pays des rêves malicieux du fou dansant.

NOUVELLES PIÈCES COURTES

mar 16, ven 19, sam 20 mai 20 h 30 - mer 17, jeu 18 mai 19 h 30 / CRÉATION À LA COURSIVE

Moby Mick.

La Merveille de la baleine. MICK HOLSBEKE

CRÉATION DE ET AVEC

CLOWN POUR TOUS PUBLICS À PARTIR DE 8 ANS

Après avoir éclaboussé de son talent le dernier spectacle du Cirque Plume, le clown-mimejongleur-acrobate-danseur-musicien Mick Holsbeke trace sa route en solo avec cette création hilarante, où l’escogriffe est coincé dans le ventre… d’une baleine ! mar 16, ven 19, sam 20 mai 20 h 30 - mer 17, jeu 18 mai 19 h 30

Totò La Momposina MUSIQUE DU MONDE Du haut de ses soixante ans de carrière, la reine Momposina n’en finit pas d’arpenter les scènes du monde avec la cumbia, cette musique festive et populaire venue de Colombie. Un concert à l’énergie fiévreuse, entêtée, au doux parfum de Caraïbes. mercredi 31 mai 20 h 30

m Réservation des places

MOBY MICK…

Ouverture 1 mois avant la représentation pour les spectateurs titulaires de la CARTE LA COURSIVE. Ouverture 15 jours avant la représentation pour les spectateurs NON titulaires de la CARTE LA COURSIVE. u Ouverture exceptionnelle des réservations pour tous publics sur les spectacles suivants: MÉLANIE DE BIASIO • NOUVELLES PIÈCES COURTES, Philippe Decouflé Tous les spectacles sont, dans la limite des places disponibles, accessibles aux spectateurs qui ne souhaitent ni prendre un abonnement, ni prendre la Carte La Coursive. u u


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M

A

I

DU 26 AVRIL AU 2 MAI

L’ECOLE DES LAPINS de Ute von Münchow-Pohl Animation, Allemagne, 2017, 1h16, couleur, version française LES P’TITS EXPLORATEURS, programme de 4 courts métrages Animation, France/Suisse, 2015-2016, 49 ’, couleur APRÈS LA TEMPÊTE de Kore-eda Hirokazu Japon, 2016, 1h58, scope-couleur, v.o. MISTER UNIVERSO de Tizza Covi et Rainer Frimmel Autriche/Italie, 2016, 1h30, couleur, v.o.

2

ME 26/4 JEU 27

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VEN 28 SAM 29

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14H

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14H

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14H15

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16H45 20H45 19H

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14H30 18H15 20H30

16H15 20H15 14H30 18H30

DU 3 AU 9 MAI

MER 3

JEU 4

VEN 5

SAM 6

DIM 7

L’ECOLE DES LAPINS de Ute von Münchow-Pohl DE TOUTES MES FORCES de Chad Chenouga France, 2016, 1h38, couleur APRÈS LA TEMPÊTE de Kore-eda Hirokazu

14H15 15H45 20H 17H45

18H30

16H45 18H30

MISTER UNIVERSO de Tizza Covi et Rainer Frimmel RETOUR À FORBACH de Régis Sauder • France, 2017, 1h18, couleur DU 10 AU 16 MAI

UNE FAMILLE HEUREUSE de Nana Ekvtimishvili et Simon Groß Géorgie/Allemagne, 2016, 1h59, couleur, v.o. RETOUR À FORBACH de Régis Sauder DE TOUTES MES FORCES de Chad Chenouga DU 17 AU 23 MAI

EMILY DICKINSON, A QUIET PASSION de Terence Davies Royaume-Uni/Belgique, 2016, 2h04, scope-couleur, v.o. UNE FAMILLE HEUREUSE de Nana Ekvtimishvili et Simon Groß SAYONARA de Koji Fukada Japon, 2015, 1h52, couleur, v.o. DU 24 AU 30 MAI

RODIN de Jacques Doillon France, 2017, 1h59, couleur I AM NOT YOUR NEGRO de Raoul Peck France/USA/Belgique…, 2016, 1h33, noir et blanc, v.o.

14H 18H 20H

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JEU 11

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14H 18H15 20H30 16H15

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DIM 14

18H45 14H30 20H30

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14H 18H 16H15 20H30 MAR 9

18H30

VEN 26 SAM 27

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MAR 2

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VEN 19 SAM 20

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LU 1er/5

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VEN 12 SAM 13

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16H30 20H30 18H45 14H30

20H15

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DIM 28

15H 17H30

15H

20H

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LUN 22 MAR 23

17H30

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14H

14H 18H45 16H30 21H

LUN 29 MAR 30

14H 16H15 20H30 18H30

16H 18H15 14H 20H30

Rencontre publique avec Régis Sauder à l’issue de la projection de son film Retour à Forbach, mardi 9 mai à 20h30. (Billetterie à partir du mar 2 mai.) LA COURSIVE SCENE NATIONALE /// 4, RUE SAINT-JEAN-DU-PEROT /// 17025 LA ROCHELLE CEDEX 1 /// TEL. 05 46 51 54 00


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