01.04 au 28.04 2015

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ISSN 0299 - 0342

CINÉMAS STUDIO : 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS

N°333 • avril 2015

de Jafar Panahi


CNP jeudi 19h45 C

I

du 22 au 28 avril

4

SEMAINE

2015

Hommage à René Vautier 1h25’ sans paroles 20’ AFRIQUE 50 et VOUS AVEZ DIT FRANÇAIS ? SHAUN 45’ de René Vautier RENÉ VAUTIER, CITOYEN CINÉASTE LE MOUTON

N

11’

de Yvan Petit & Franck Wolff

de Mark Burton & Richard Goleszowski

Débat avec Henri Traforetti

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1h45’ sans paroles

SEMAINE

14h15 16h00 SAUF jeu-ven

16h15

lundi 2hON CONNAÎT LA CHANSON LES CONTES DE LA MER SAUF de A. Zareba, G. Salguero & I. Ruiz jeu-ven 19h30 de Alain Resnais dim 11h ATELIER : mercredi 14h15 1h55’ EVERY THING 19h30 17h15-3D WILL BE FINE dim 11h

14h15 1h27’ 21h45 UNE BELLE FIN 16h00

SAUF jeu-ven

de Uberto Pasolini

dim 11h

de Richard Donner

À suivre.

14h30 1h41’ 19h15 1h27’

JAUJA

SAUF jeu-ven

dim 11h15 mercredi

Soirée libres courts Aux frontières du réel 19h45 En présence du réalisateur Paul Cabon

1h39’

HISTOIRE DE JUDAS 17h30

21h30

À suivre.

CROSSWIND

LA CROISÉE DES VENTS de Martti Helde

1h35’

LE SCANDALE PARADJANOV 19h45 SAUF

OU LA VIE TUMULTUEUSE D’UN ARTISTE SOVIÉTIQUE mercredi de Oleva Fetisova, Serge Avédikian

JAMAIS DE LA VIE 19h45 SAUF jeudi

de Pierre Jolivet 1h35’

JOURNAL D’UNE FEMME DE CHAMBRE 21h30 de Benoît Jacquot

1h22’ + court métrage 6’

17h45 TAXI TÉHÉRAN 21h45 de Jafar Panahi

I

N

lundi 19h30

1h35’

LOST RIVER

L’ASTRAGALE de Brigitte Sy

www.studiocine.com

LA RÉPUBLIQUE ET SES MONARQUES

21h45

Le film imprévu www.studiocine.com

Cases orangées : programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35

SHAUN LE MOUTON

de Michèle Dominici

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2h09’

L’ARNAQUE de George Roy Hill

de Mark Burton & Richard Goleszowski

1h58’ VF

de Benoît Jacquot

14h15 21h45

1h45’

BIG EYES de Tim Burton

14h15 17h45 19h30 mer-sam dim-lun 16h00

dim 11h15 mer-sam dim-lun

LE DERNIER LOUP 14h15 de Jean-Jacques Annaud dim 11h00

14h15 1h35’ 1h42’ VF 17h45 JOURNAL D’UNE LES NOUVEAUX 19h30 21h15 FEMME DE CHAMBRE HÉROS de Chris Williams & Don Hall

Festival Mauvais genre Ciclic & les Studio présentent :

mer-sam dim-lun

17h00 dim 11h00 17h30 jeudi

Court métrages animés Séance Jeune public, spéciale collégiens 10h00 19h45 (Séance gratuite)

14h30 1h20’ ARNAUD 19h45 FAIT SON 2e FILM 16h00

14h15 19h00 14h30 19h00 17h00 21h30

de Ryan Gosling

1h37’

17h30

C

2015

1h25’ sans paroles

5e

20h00 Débat avec Juliette Grange, professeur des universités

mer-sam-dim-lun

1h35’

de Lisandro Alonso

52’ Construire la 6e République

dim 11h15

Ciclic et les Studio proposent :

de Rabah Ameur-Zaimeche

14h30 2h07’ LE DOS ROUGE 19h15 de Antoine Barraud SAUF lundi

19h30

LES GOONIES

de Wim Wenders À suivre.

14h15 1h40’ 17h15 CAPRICE 19h30 21h30 de Emmanuel Mouret À suivre. dim 11h

17h45

1h30’ VF

CNP jeudi

du 1er au 7 avril

1

17h30 19h45

de Arnaud Viard, Vendredi 3 avril : rencontre avec Arnaud Viard, le réalisateur, après la séance de 19h45.

Centenaire du génocide arménien

LE SCANDALE PARADJANOV mardi de Oleva Fetisova, Serge Avédikian Rencontre avec le producteur, Gorune Aprikian, après la séance.

19h45

2h13’

HACKER de Michael Mann

1h36’

VOYAGE EN CHINE 17h30 de Zoltan Mayer

21h45

1h51’

SEA FOG

2h

LES CLANDESTINS

L’AFFAIRE SK1

de Sung Bo Shim

de Frédéric Tellier

1h52’

L’ENNEMI DE LA CLASSE de Rok Bicek

21h15 dimanche

11h00

1h44’

LA SAPIENZA

21h30

de Eugène Green

1h26’

À TROIS ON Y VA de Jérôme Bonnell

Le film imprévu www.studiocine.com

Toutes les salles des Studio sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Cinémas Studio – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com


SEMAINE

CNP jeudi 20h00 C I N É

du 8 au 14 avril

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2015

La Sécu : un droit pour nous. Quel avenir ? 1h25’ sans paroles SHAUN 53’ Courts métrages LE MOUTON Débat avec Evelyne Vanderheym de Mark Burton & Richard Goleszowski et André Grimaldi 1h34’ VO M A T H È Q U E

SEMAINE

14h15 17h45 19h30 mer-sam-dim

16h00

dim 11h15

mercredi

Festival LE SIGNE DE ZORRO samedi lundi du court métrage 14h15 de Rouben Mamoulian de courts métrages primés ou présentés 19h30 auSélection Festival du court métrage de Tours (1955-1971).

14h15 1h35’JOURNAL D’UNE 17h30 FEMME DE CHAMBRE 21h45 de Benoît Jacquot 14h15 1h35’ 17h30 19h45 dim 11h

LOST RIVER de Ryan Gosling

14h15 1h35’ 17h45 19h30

mer-sam-dim

JAMAIS DE LA VIE

16h00

14h15 1h37’ 19h15 L’ASTRAGALE mer-sam

de Brigitte Sy

16h00

14h30 2h17’ LEOPARDI FAVOLOSO 19h15 IL GIOVANE de Mario Martone 16h00

1h34’

Rencontre avec Antoine Rigot.

1h45’

19h45

BIG EYES de Tim Burton

LE DERNIER LOUP 17h00 de Jean-Jacques Annaud

21h15

dim 11h

1h28’ IL CASTELLO de Massimo D’Anolfi & Martina Parenti

mardi 18h30 vendredi

rencontre avec Patrick Laurent.

rencontre :

18h00 film : SUNSET BOULEVARD 19h45 de Billy Wilder 1h50’

1h20’

de Michael Mann

C

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de Zoltan Mayer

1h26’

21h45

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14h15 1h22’ 17h30 19h15 TAXI

mer-sam-dim

16h00

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Le film imprévu www.studiocine.com

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TÉHÉRAN

de Jafar Panahi

dim 11h

14h15 1h27’ 19h45

mer-sam-dim

16h00

de Mark Burton & Richard Goleszowski

dim 11h15

1h30’ VF

mer-sam dimanche

UNE BELLE FIN

47’ VF

Samedi 18 avril 14h15

LILLA ANNA

14h15 mer-sam dimanche

de Alicja Borg, Lasse Persson, Per Ahlin

16h15

1h50’ VO VF

VF-mer-sam dimanche

BILLY ELLIOT

de Uberto Pasolini

de Stephen Daldry

17h00 VO-dim 11h

1h39’

Soirée de clôture 14h15 HISTOIRE DE JUDAS vendredi Festival 48h Film Project à partir de 19h45 de Rabah Ameur-Zaimeche Animations et projections de courts métrages réalisés lors du marathon et remise des prix. 19h30 1h38’ + court métrage 5’ 14h30 1h35’ 17h45 19h15 LE PETIT HOMME LOST RIVER de Sudabeh Mortezai

de Ryan Gosling

21h45

1h35’

JOURNAL D’UNE 17h45 FEMME DE CHAMBRE 21h45 de Benoît Jacquot

17h15 21h15

1h37’

L’ASTRAGALE de Brigitte Sy

2h17’

LEOPARDI

IL GIOVANE FAVOLOSO

21h15

de Mario Martone 1h26’

19h45 21h45

14h15 SHAUN mer-sam-dim LE MOUTON 16h00

Centenaire du génocide arménien lundi LES DE FEU LES GOONIES 19h30 1h37’ deCHEVAUX de Richard Donner Sergueï Paradjanov

de Jérôme Bonnell

SEA FOG

M

14h30 1h31’ LE COUSIN JULES de Dominique Benicheti 19h15

VOYAGE EN CHINE 21h30

1h51’

É

2015

1h25’ sans paroles

de Angèle Diabang

Débat avec Louis Guinamard (journaliste)

16h15

de Sung Bo Shim

HACKER

52’

20h00

dim 11h00

1h36’ + court métrage 10’

À TROIS ON Y VA

CNP CONGO, UN MÉDECIN POUR SAUVER LES FEMMES jeudi

17h45

ARNAUD 21h30 + FAIT SON 2e FILM mer-sam-dim de Arnaud Viard,

Le viol comme arme de guerre

dim 11h15

Soirée Bibliothèque et Sans Canal Fixe

LES CLANDESTINS 2h13’

mer-sam-dim

mer-sam dimanche

1h58’ VO

SALTO MORTALE de Guillaume Kozakiewiez

dimanche

14h15 de Alicja Bjork, Lasse Persson, Per Ahlin 16h15 dim 11h15

LILLA ANNA

de Pierre Jolivet

dim 11h

dimanche

47’ VF

du 15 au 21 avril

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À TROIS ON Y VA de Jérôme Bonnell

17h45 1h35’ JAMAIS DE LA VIE 21h30 de Pierre Jolivet

1h20’

ARNAUD FAIT SON 2e FILM 21h00 de Arnaud Viard,

Le film imprévu www.studiocine.com

Tous les films sont projetés en version originale (sauf indication contraire) Cinémas Studio – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com www.studiocine.com

Cases orangées : programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35


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Édito

CNP

Soirée Bibliothèque

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Soirée Libres courts

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6

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7

Soirée Arménie

LES FILMS DE A à Z

En bref

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Pour permettre au public une plus grande fréquentation de ses collections (les plus riches de région Centre), la bibliothèque propose de nouveaux horaires.

Horaires d’ouverture : lundi : de 16h00 à 19h45 mercredi : de 15h00 à 19h45 jeudi : de 16h00 à 19h45 vendredi : de 16h00 à 19h45 samedi : de 16h00 à 19h45 FERMETURE PENDANT LES VACANCES SCOLAIRES

Cafétéria des Studio gérée par l'association AIR (chantier d'insertion),

Bande annonce

6e République

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Compte-rendu

accueille les abonnés des Studio tous les jours de 16h00 à 21h45 sur présentation des cartes abonné et cafétéria.

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Paradise Film Festival

Tél : 02 47 20 85 77

À propos de

Discount

Les STUDIO sont membres de ces associations professionnelles :

Courts lettrages

Snow Therapy

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Rencontre

Thomas Salvador, Vincent n’a pas d’écailles

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EUROPA REGROUPEMENT DES SALLES POUR LA PROMOTION DU CINÉMA EUROPÉEN

AFCAE

Interférences

Vincent n’a pas d’écailles/Birdman

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À propos de

Les Nouveaux sauvages

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Interférences

Les Nouveaux sauvages/Réalité

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ASSOCIATION FRANÇAISE DES CINÉMAS D’ART ET ESSAI

ACOR ASSOCIATION DES CINÉMAS DE L’OUEST POUR LA RECHERCHE (Membre co-fondateur)

GNCR

À propos de

American Sniper

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À propos de .......................................................................

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Vos critiques

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Jeune Public

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A Most Violent Year

FILM DU MOIS : TAXI TÉHÉRAN

GRILLE PROGRAMME

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GROUPEMENT NATIONAL DES CINÉMAS DE RECHERCHE

ACC ASSOCIATION DES CINÉMAS DU CENTRE (Membre co-fondateur)

36 Prix de l’APF 1998

pages centrales

Site : www.studiocine.com page Facebook : cinémas STUDIO

LES ÉDITIONS DU STUDIO DE TOURS - 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - Mensuel - Prix du numéro 2 €. ÉQUIPE DE RÉDACTION : Sylvie Bordet, Éric Costeix, Isabelle Godeau, Jean-François Pelle, Dominique Plumecocq, Claire Prual, Éric Rambeau, Marieke Rollin, Roselyne Savard, Marcelle Schotte, André Weill, avec la participation de la commission Jeune Public. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Éric Rambeau – MISE EN PAGES & EN IMAGES : Francis Bordet. ÉQUIPE DEgraphique RÉALISATION contribue : Éric Besnier, Guérineaude – DIRECTEUR : Philippe Lecocq – IMPRIMÉ par PRÉSENCE GRAPHIQUE, Monts (37) Présence à Roselyne la préservation l’environnement et atteste être reconnu IMPRIM’VERT.


éditorial

Liberté(s) A

près les massacres de janvier, des millions de citoyens montraient, dans les rues, leur attachement viscéral à la liberté d’expression et leur refus de céder à la panique que veulent provoquer les terroristes. Il était rassurant de voir la tranquillité de la foule et l’émotion provoquée, dans le monde entier, par l’assassinat de l’équipe de Charlie Hebdo. Très vite, cependant, on pouvait constater que la notion de liberté d’expression n’avait pas la même teneur urbi et orbi. Très rares furent les pays où les dessins de Charlie furent reproduits. On soutenait la liberté, certes, mais en floutant les caricatures ! Finalement, malgré le besoin de se sentir nombreux et unis, on voit bien que la conception laïque et la séparation stricte entre les domaines public et religieux qui en découle est une autre exception culturelle française. Face à la foule pacifique du 11 janvier défilaient les foules hostiles iconoclastes. Et l’on apprenait qu’en Iran, un concours de caricatures allait être organisé, ayant pour thème la Shoah, histoire de montrer, par l’abject, que tout ne peut pas être tourné en dérision… Le cinéma est sans doute l’exception culturelle hexagonale majeure. Et 2014, une année de tous les records :

jamais autant de spectateurs dans les salles ! Et une part de marché pour les films français jamais atteinte ! Est-il de bon aloi de jouer les rabat-joie en notant que, certes, le public a globalement augmenté, mais que dans les réseaux indépendants des salles art et essai, la fréquentation a baissé de près de 10 % ? Que les trois ou quatre gros succès du cinéma français qui ont fait se déplacer les foules enthousiastes masquent les problèmes de financement de très nombreux films, petits ou moyens, dont les budgets se réduisent, petit à petit, en peau de chagrin ? Comment ne pas se réjouir du succès du magnifique film Timbuktu à la cérémonie des Césars sans préciser que le cinéma africain (le peu qu’il en reste) est au cœur de cette diversité culturelle portée par des salles qui ont de plus en plus de mal à en (sur)vivre ? Que la liberté d’expression est la raison d’être des salles indépendantes étranglées par les appétits monopolistiques des grands groupes et par la neutralisation du goût du grand public, travaillé par des campagnes de communication massive des films porteurs ou des blockbusters ? Et que la liberté qui semble avoir le vent en poupe… est la liberté de commercer ! DP

Les CARNETS du STUDIO

n°333 •

avril 2015

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jeudi 23 avril - 19h45 jeudi 2 avril - 20h00 La Ligue des Droits de l’Homme (LDH) et le CNP proposent :

CONSTRUIRE LA 6e RÉPUBLIQUE : POURQUOI ? COMMENT ? La Ve République, c’est la concentration des pouvoirs dans les mains d’un seul homme qui peut trahir ses engagements de campagne et dont le mandat ne peut être remis en cause. Cela vaut pour son président-monarque comme pour les barons à la tête des exécutifs locaux. La rupture avec ce système pose de multiples questions. Comment placer les représentants élus sous le contrôle de leurs électeurs ? Quels mécanismes de démocratie directe introduire dans les institutions sans tomber dans le populisme qui flatte le peuple en lui confisquant sa souveraineté ? Quelle place faire à la démocratie délibérative ? Au tirage au sort ? Quels principes fondamentaux inscrire prioritairement dans une nouvelle constitution ? Après la projection du film La Ve République et ses monarques réalisé par Michèle Dominici (2013 – France – 52’), un débat aura lieu en présence de Juliette Grange, professeur des universités à François Rabelais, auteur d’un ouvrage sur l’idée de République.

jeudi 9 avril - 20h00 Les Amis du Monde diplomatique, le Collectif féministe Pcf/Front de Gauche, ATTAC, la Ligue des Droits de l’Homme (LDH), la Convergence services publics 37, le Collectif Notre santé en danger, le CNP proposent :

LA SÉCU : UN DROIT POUR TOI, POUR MOI, POUR NOUS. QUEL AVENIR ? 70 ans après sa création, la Sécurité sociale est menacée dans ce qui constitue sa raison d’être : la solidarité devant les risques majeurs de l’existence. La Sécu est-elle devenue un puits sans fond où s’engloutissent les cotisations ? Sa mort est-elle programmée par l’État soumis aux marchés financiers ? À l’origine, son fonctionnement respectait son principe fondateur : « Contribuer selon ses moyens et recevoir selon ses besoins ». L’État a rompu

cette logique au profit des mutuelles et des assurances privées, tout en faisant le choix d’exonérer très largement le patronat de cotisations sociales. Comment répondre aux nouveaux besoins ? Après la projection de courts-métrages, interventions d’Evelyne Vander-Heym, ancienne directrice de l’hôpital Les Bluets et co-animatrice du Collectif national Protection sociale-santé du PCF/Front de Gauche et d’André Grimaldi, ancien professeur de médecine à la Pitié-Salpêtrière, puis débat.

Le CNP propose :

HOMMAGE À UN CINÉASTE ENGAGÉ : RENÉ VAUTIER Rebelle, intellectuel, homme d’action, cinéaste, il fut tout cela et bien plus encore. Pour beaucoup son nom reste lié à la guerre d’Algérie à travers son film emblématique Avoir vingt ans dans les Aurès. Engagé dès 15 ans au sein de la Résistance, il ne cessera de dénoncer et combattre toutes formes d’injustice et d’exploitation à travers son cinéma militant : colonialisme, guerre

jeudi 16 avril - 20h00

Cette année, pour sa 9e édition, Mauvais Genre, le Festival international de cinéma de Tours, en partenariat avec Ciclic, propose une séance jeune public spécial collégiens, le jeudi 2 avril à 10h. Au programme des courts-métrages animés. (Entrée libre).

Le Café des Femmes, Osez le féminisme ! 37, le Mouvement du Nid, Peuples Solidaires de Touraine, Frères des Hommes (FDH), l’Association d’aide aux victimes en Syrie (AAVS), l’Association Echange et Développement (AED), le Collectif féministe Pcf/Front de Gauche, le Centre d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) et le CNP proposent :

vendredi 10 avril 2015 – 18h D’une écriture l’autre : du scénario au roman

LE VIOL COMME ARME DE GUERRE Le viol de guerre subi par les femmes est une redoutable arme qui détruit et humilie l’humanité entière : des millions de viols ont eu lieu durant la deuxième guerre mondiale. Plus récemment, 60 000 viols ont été perpétrés dans l’ex-Yougoslavie, 500 000 en République démocratique du Congo depuis 1998, sans oublier les 50 000 viols recensés à ce jour en Syrie. Ces quelques chiffres illustrent un fait indéniable : le viol est une arme de guerre. Par ailleurs, de nombreuses autres maltraitances sont infligées aux femmes en temps de guerre : enlèvement, prostitution, mariage forcé, esclavage ou bombe humaine… Ce n’est qu’en 2008 avec la résolution 1820 du Conseil de Sécurité de l’Onu que le viol a été reconnu comme arme de guerre. Film : Congo, un médecin pour sauver les femmes de Angèle Diabang (2014 - France 52’). Suivi d’un débat avec Louis Guinamard, journaliste, auteur de Survivantes. Femmes violées en République démocratique du Congo.

Cinématographe : du grec kinema /mouvement et graphe/écrire. Écriture du mouvement. Ce qui écrit au cinéma ce n’est pas la plume, c’est la caméra. Mais alors, le scénario, qu’est-ce que c’est ? De l’écriture ? De l’écriture technique ? Mais qu’est-ce que c’est qu’une écriture technique ? Et quels rapports entretient-elle avec celle du roman ? Notre invité, Patrick Laurent, a été scénariste pendant une trentaine d’années. Il se

– Les CARNETS du STUDIO n°333 –

avril 2015

consacre désormais à la littérature. Son premier roman, Comme Baptiste, a été publié chez Gallimard en septembre 2013. Le deuxième sortira prochainement chez le même éditeur. 19h45 : projection du film

Sunset Boulevard 1950, de Billy Wilde (voir page 14).

Rencontre avec Patrick Laurent.

Mardi 14 avril, 18h30 : SCF se fixe aux Studio ! Ce mardi 14 avril, les Studio ouvrent leur bibliothèque pour y accueillir l’équipe de Sans Canal Fixe, qui vient y projeter Il Castello. L’opération se répétera, de manière régulière, tous les deux mois et chacune sera suivie d’une rencontre avec le public.

Il Castello Italie – 2011 – 1h28, de Massimo D’Anolfi et Martina Parenti

Aéroport de Malpensa, Milan. Au fil de quatre

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d’Algérie, racisme, pollution... Actif dans les groupes Medvedkine après mai 1968, par ailleurs défenseur de l’autonomie bretonne, le cinéaste combattant nous a quittés le 4 janvier 2015, laissant derrière lui œuvre remarquable. Films : Afrique 50 (1950 – France – 20’), Vous avez dit : Français ? (1986 – France – 45’), René Vautier, citoyen cinéaste de Yvan Petit et Franck Wolff (2002 – France, – 11’), Sans Canal Fixe. Débat en présence de Henri Traforetti partenaire avec René Vautier dans le groupes Medvedkine de Besançon.

saisons, le récit dévoile une structure labyrinthique : une ville faite d’espaces aseptisés où les marchandises cohabitent avec les personnes, où l’orientation est mise à l’épreuve. Un lieu de départs et d’arrivées, de contrôles systématiques, d’interrogatoires et d’exercices. Mais aussi des personnes, qui ont fait de ce château leur domicile. Un film choral, symbole de notre présence dans ce monde.

Les CARNETS du STUDIO n°333 –

avril 2015 –

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Vendredi 17 avril Le festival du film en 48 heures débarque à Tours En avril, Tours accueillera pour la deuxième fois le Concours international de courts métrages : « 48 Hour Film Project » Le plus important marathon de courts métrages souhaite donner la chance à tous les amoureux du cinéma de se lancer un défi, avec comme toujours, un principe simple : réaliser un film en 48 heures chrono ! Pour sa deuxième édition à Tours, la compétition posera de nouveau ses valises du 3 au 5 avril 2015 ! Pour la société de production Les Films du loup blanc, c’était « une véritable évidence pour nous de voir débarquer ce marathon sur notre planète Tours. Une chance pour chaque jeune réalisateur de se dépasser et de se révéler... en 48 heures seulement ! Et une évidence également

de partager cet événement unique avec notre partenaire de cœur, les cinémas Studio ». Créativité, talent et passion sont les maîtresmots de cette compétition internationale. Tous les films seront projetés et les meilleurs seront récompensés lors de la finale du 17 avril à partir de 19h30 aux Studio. Une soirée pleine de rebondissements, d’animations et d’échanges. Un rendez-vous à ne surtout pas manquer ! www.48hourfilm.com/tours www.facebook.com/filmsloupblanc Les Films du loup blanc : bureau: 07.82.41.82.31 contact@flbprod.com - www.facebook.com/flbprod www.flbprod.com

Mercredi 22 avril à 19h45 Une séance de courts métrages proposée par les Studio et Ciclic. En présence de Paul Cabon, réalisateur de Tempête sur Anorak.

exerce le métier de montreur d’ombres itinérant. Un jour, il croise la sublime Ann dont il tombe immédiatement amoureux.

LIBRES COURTS : AUX FRONTIÈRES DU RÉEL À la lisière du fantastique, les films de cette sélection flirtent avec les codes du genre, jouant sur les figures de l’étrange, du mystère et des phénomènes inexpliqués. Empruntant parfois les archétypes de la science-fiction, comme le voyage dans l’espace ou la métamorphose, ils interrogent la normalité et l’ordre établi de notre monde. Les personnages évoluent dans des univers lointains ou bizarres, ou dans des espaces où le temps semble suspendu. Chaque histoire, qu’elle soit empreinte d’humour ou de poésie, fait ainsi vaciller notre réalité.

Nectar France - 2014 - 18’, de Lucile Hadzihalilovic

Dans un parc, une chambre ronde. À l’intérieur, des femmes se livrent à un rituel parfaitement rôdé.

Junior France - 2011 - 21’ , de Julia Ducournau

Justine, dite Junior, treize ans, est un garçon manqué un brin misogyne, qui va vivre une étrange métamorphose.

Tempête sur anorak France - 2014 - animation - 16’, de Paul Gabon

d’Anthony Vouardoux-Allemagne, Suisse - 2010 - 14’

Une tempête s’empare des côtes bretonnes. La nature s’affole, deux scientifiques se font prendre dans le tumulte.

Un astronaute, Yuri Lennon, part en mission vers Alpha 46, satellite fictif de Jupiter.

Planet Sigma

Yuri Lennon’s landing on Alpha 46

France - 2014 - animation, expérimental - 12’, de Momoko Seto

Shadow France - 2014 – 23’, de Lorenzo Recio

Planet Sigma abrite des créatures géantes endormies dans la glace.

w w w . s t u d i o c i n e . c o m Sur le site des Studio (cliquer sur : PLUS D’INFOS, pour entrer dans la fiche film), vous trouverez des présentations signées des films que les rédacteurs auront vus après leur sortie en salle. Les fiches non signées ont été établies de manière neutre à partir des informations disponibles au moment où nous imprimons.

Les films de A à Z www.studiocine.com AVANT LES FILMS, DANS LES SALLES, AU MOIS D ’ AVRIL

2015 :

• Songs for distingué lovers de Billy Holiday (Studio 1 2 4 5 6) • Black Messiah d’Angelo and the Vanguard Studio (studio 3-7) Musiques sélectionnées par Eric Pétry de RFL 101.

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L’Affaire SK1

Arnaud fait son deuxième film France – 2014 – 1h20, de Arnaud Viard,

Franck Magne, jeune inspecteur tout juste nommé au Quai des Orfèvres, se voit confier l’enquête sur l’assassinat d’une jeune fille. Pendant sept longues années, il va chercher le lien avec d’autres affaires similaires dans le mode opératoire, et traquer la moindre information, afin de mettre un nom et la main sur SK1, le Serial Killer n°1, qui pendant cette période, agressera encore moult jeunes femmes, dont sept périront sous ses coups. Jusqu’à ce que l’analyse ADN permette de confondre un dénommé Guy Georges… Le réalisateur explique avoir « une obsession : tenter de décoder le Mal… cette histoire me semblait emblématique pour le montrer, mais surtout observer comment la société, la police et la justice s’organisent face à lui ». Il s’est appliqué à être au plus près de la réalité, sans pour autant tomber dans le voyeurisme et a, pour écrire son scénario, étudié tous les les écrits concernant le sujet : « je ne pouvais pas faire de la fiction à partir d’un fait divers aussi atroce et aussi récent ». Et s’il ne se place jamais du point de vue du tueur, il tenait, comme l’avocate de Guy Georges, à « traquer l’homme derrière le monstre ».

Clara et moi, le premier et beau longmétrage d’Arnaud Viard, est sorti en 2003. Depuis, toutes ses tentatives pour en réaliser un second ont été des échecs. Découragé, il décide alors de changer de vie. Il se sépare de Chloé, avec laquelle il tentait de faire un enfant, et reprend son travail de professeur au cours Florent. Là, il rencontre Gabrielle... Le point de départ, autobiographique, narre, en mêlant élégamment réalité et fiction, les embûches auxquelles se confronte Arnaud Viard, qui joue son propre rôle. Bourré d’humour et de dérision, ironique et tendre, Arnaud fait son deuxième film est une œuvre délicate qui sait s’adresser à tous et pour laquelle le réalisateur a su très bien s’entourer, entre autres par la trop rare Irène Jacob et par l’excellent Mathieu Boogaerts à la musique. Souhaitons à Arnaud Viard de ne pas avoir besoin d’attendre aussi longtemps pour remettre son talent à l’œuvre dans Arnaud fait son troisième film. JF

France - 2014 - 2h00, de Frédéric Tellier, avec Raphaël Personnaz, Nathalie Baye, Olivier Gourmet…

avec Arnaud Viard, Irène Jacob, Frédérique Bel...

Vendredi 3 avril, rencontre avec Arnaud Viard, le réalisateur après la projection de 19h45.

Sources : dossier de presse

Taipei. Xiao Shou est un garçon timide qui Les fiches signées correspondent à des films vus par les rédacteurs.

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Les CARNETS du STUDIO n°333 –

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L’Astragale

France – 2015 – 1h37, de Brigitte Sy, avec Leila Bekhti, Reda Kateb, Esther Garrel, India Hair…

Une nuit d’avril 1957. Albertine, 19 ans, saute du mur de la prison où elle purgeait une peine pour hold-up. Dans sa chute, elle se brise douloureusement un petit os du pied : l’astragale. Rampant jusqu’à la route, elle est secourue par Julien, repris de justice, qui l’emmène et la cache chez une proche à Paris. Pendant sa convalescence, Julien, petit malfrat, sera arrêté. Ainsi séparée de cet homme dont elle s’est éprise, et toujours recherchée par la police, Albertine se planque et se prostitue pour survivre. Après Les Mains libres (2010), Brigitte Sy, également actrice et scénariste, propose son second long-métrage, basé ici sur le roman éponyme et autobiographique d’Albertine Sarrazin paru en 1965 (à lire !) L’Astragale confirme son talent de réalisatrice avec un superbe film réunissant un duo d’acteurs remarquable sur l’histoire véridique d’une jeune femme passionnément amoureuse, audacieuse et dotée d’une belle sensibilité d’écrivain. RS

À trois on y va

France – 2015 – 1h26, de Jérôme Bonnell. Avec Anaïs Demoustier, Félix Moati, Sophie Verbeeck.

Charlotte et Micha viennent de s’acheter une maison près de Lille pour y filer le parfait amour. Mais Charlotte trompe Micha avec Mélodie, tandis que Micha trompe Charlotte, également avec Mélodie… Vertiges du mensonge, et secrets sont au centre de ce triangle amoureux. Jérôme Bonnell est un jeune réalisateur talentueux. Certains se souviennent du Chignon d’Olga ou des Yeux clairs qui lui valurent le prix Jean Vigo. Plus récemment, il remporta un franc succès avec Le Temps de l’aventure (Emmanuelle Devos et Gabriel Byrne). Nous nous réjouissons déjà de retrouver la très douée Anaïs Demoustier et

le jeune Félix Moati dont la bonne humeur avait enthousiasmé les spectateurs lors de sa visite aux Studio à l’occasion de la présentation du film de Michel Leclerc Télé gaucho. Sources : dossier de presse

Big Eyes

USA – 2015 – 1h45, de Tim Burton, avec Amy Adams, Christoph Waltz, Krysten Ritter…

Walter Keane est devenu célèbre dans les années 1950-1960 pour ses tableaux d’enfants et d’animaux aux yeux démesurés, vendus bon marché dans toute l’Amérique et considérés aujourd’hui comme les premières œuvres d’art de masse. C’est en fait sa femme, Margaret, qui était la véritable artiste, comme elle finit par le faire savoir lors d’un procès retentissant… Maître du fantastique, excellent conteur et graphiste d’exception, Tim Burton a notamment signé la mise en scène de Batman 1 et 2 (1989, 1991), Edward aux mains d’argent (1990), Ed Wood (1994), Sleepy Hollow (1999), Charlie et la Chocolaterie (2005), Sweeney Todd (2007), Dark Shadows (2012). Ici, pas de vampire, d’extra-terrestres, ou d’araignées. Pourtant, avec la jolie palette de couleurs semblable à celle de Big Fish, il a, à nouveau, enthousiasmé son public.

Emmanuel Mouret reprend, dans Caprice, le rôle de prédilection d’amoureux romantique en perdition qu’il met en scène de film en film : Une autre vie, L’Art d’aimer, Un baiser s’il vous plaît… Clément, professeur

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Sources : telerama.fr, imdb.com

Le Cousin Jules

Le Dernier loup

Jules et Félicie vivent leur vie routinière d’octogénaires au cœur de la campagne bourguignonne. Forgeron, il passe ses journées à créer des objets en fer alors que sa femme s’occupe du potager et des tâches ménagères… Grâce au talent artistique de Dominique Benicheti, chacun de ses plans rappelle les peintres du 19e sièle, Van Gogh, Corot, Millet. « Associant objectivité et beauté, insensibilité et chaleur, le film est en fin de compte un hommage à la vie ellemême ». Magnifiquement restauré, ce chef d’œuvre du cinéma documentaire, « est un pur éblouissement qui transforme le geste de l’homme en véritable miracle cinématographique. » Sources : telerama.fr – festival-larochelle.com

Filmographie : La Revole (97) – La Grotte Chauvet (00) – L’Odyssée magique (09)

Voir pages Jeune Public

Caprice

Sources : dossier de presse

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Voir pages Jeune Public

Billy Elliot

France – 2015 – 1h40, de Emmanuel Mouret, avec Virginie Efira, Anaïs Demoustier, Laurent Stocker.

lettres à son mari demeuré en Estonie. Crosswind met, en quelque sorte, ces textes en scène à partir d’un dispositif aussi rigoureux qu’original : filmées en noir et blanc, les scènes sont des tableaux presque immobiles au milieu desquels la caméra se déplace, comme si les personnages avaient été « figés dans le temps, sidérés ». L’effet est esthétiquement très fort et le film en a parfois été jugé assez dérangeant : a-t-on en effet le droit d’esthétiser ainsi un acte de déportation ?

France – 1973 – 1h31, documentaire de Dominique Benicheti

Sources : dossiers de presse

Film proposé au jeune public, les parents restant juges.

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B

des écoles, a tout pour être heureux. Il admire une célèbre actrice du nom d’Alicia, qui devient sa compagne. Mais tout est chamboulé lorsqu’il rencontre Caprice, une jeune femme excessive qui s’éprend de lui tandis que son meilleur ami se rapproche d’Alicia. Dans ce triangle amoureux, notre héros a beau résister, il est toujours aussi maladroit, timide et dépassé par les événements… Du plaisir en perspective avec cette nouvelle comédie romantique truffée d’éléments comiques, voire burlesques.

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Les Contes de la mer Voir pages Jeune Public

CrosswindLa Croisée des vents Estonie – 2014 – 1h27, de Martti Helde, avec Laura Peterson, Tarmo Song, Mirt Preegel...

En 1941, Staline organise la déportation massive de familles estoniennes. Erna fait partie de ceux et celles qui ont été envoyés en Sibérie. Pendant 15 ans, elle enverra des

Le Dos rouge

France – 2014 – 2h07, de Antoine Barraud, avec Bertrand Bonello, Jeanne Balibar, Géraldine Pailhas, Joana Preiss, Pascal Greggory…

Un cinéaste reconnu prépare son prochain film autour du thème de la monstruosité. Il visite des musées pour en trouver des représentations, mais au fur et à mesure de ses recherches une tache rouge apparaît dans son dos et s’agrandit de jour en jour... Voilà un film totalement atypique, mêlant les genres et les repères, s’amusant à perdre le spectateur en étant à la fois très sérieux et plein d’humour (Jeanne Balibar, impayable en historienne d’art cintrée, par exemple). Trivial et érudit, Le Dos rouge repose sur plusieurs envies d’Antoine Barraud, le cinéaste : « filmer dans les musées, dresser un panorama personnel de la monstruosité à travers la peinture et montrer le monde et les chimères du cinéaste Bertrand Bonello. J’ai eu envie qu’il soit le protagoniste d’une histoire imaginaire, cousue de réel et d’inventé ». Interprété par Géraldine Pailhas, Pascal Greggory, Nicolas Maury, Joana Preiss, Valérie Dreville, entre autres, ce projet ambitieux, baroque et incongru, mystérieux et à la lisière du fantastique est le film idéal pour succomber au Syndrome de Stendhal. JF Les CARNETS du STUDIO n°333 –

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L’Ennemi de la classe Slovénie - 2013 - 1h52, de Rok Bicek, avec Igor Samobor, Natasa Barbara Gracner, Tjasa Zeleznik..

Une prof d’allemand attentive, conciliante, sympathique, part en congé de maternité. Elle est remplacée par un homme austère, intraitable, sans compromis, qui n’autorise que l’allemand pendant son cours. Rapidement son comportement provoque des tensions dans une classe peu habituée aux exigences de discipline. Quand une élève se suicide, ses camarades accusent le prof d’en être responsable. Leur rébellion prend la forme d’absences en cours, d’agressions, de critiques lancées sur la radio du lycée... Comment élèves, enseignants et système éducatif se sortiront-ils de cette impasse ? Le film est inspiré d’événements dont le réalisateur a été témoin. Il nous bouscule, nous dérange, en nous plaçant subtilement au cœur d’une micro société ballottée entre émotions, responsabilités de la part des élèves, des parents et des enseignants. Mais « rien n’est blanc, rien n’est noir » ! Prix du public au Festival Premiers plans d’Angers 2014, Prix Cineuropa entre autre. MS

Everything Will Be Fine

Allemagne.Canada/Norvège – 2D / 3D 2015 – 1h55, de Wim Wenders, avec James Franco, Charlotte Gainsbourg, Rachel McAdams, Marie-Josée Croze…

Alors qu’il vient de se disputer avec sa femme, Thomas, écrivain, erre en périphérie de la ville au volant de sa voiture. C’est une nuit d’hiver manquant de visibilité au sol enneigé et Thomas percute un jeune garçon qui traversait la route. Les années passent et cet horrible accident résonne toujours dans la vie de l’écrivain. Comment se pardonner quand on a commis l’impardonnable ? Tandis que ses relations et sa vie volent en éclats, Thomas trouve un chemin inattendu vers la rédemption. Mais il apprend aussi à ses dépens que certaines personnes n’en ont pas fini avec lui… Scénariste, producteur et photographe, réalisateur de films remarquables comme

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Paris, Texas (1984) et des documentaires tels que Le Sel de la Terre (2014) co-réalisé avec Juliano Ribeiro Salgado, Wim Wenders est un extraordinaire homme de création dont on attend avec impatience la nouvelle fiction.

R. Ameur-Zaïmeche a toujours fait des films hors normes qui saisissent par leurs partis pris, leur audace et la façon dont, quel que soit le contexte, ils ont des résonances politiques contemporaines très claires. Cette fois non plus, il ne déroge pas à cette règle, en nous offrant une vision très décalée de Judas, ce prototype du traître... Il affirme ici avoir voulu faire un film « plus poétique » (qualité omniprésente dans ses autres œuvres) « que politique ». Mais il n’y a nul doute que cette vision dans laquelle « il s’agit de rester aux aguets et de se méfier de toute parole d’Évangile qui prétend être vérité, afin de préserver le rêve qui est en nous, » va bousculer. Attention ! Le cinéma de Ameur-Zaïmeche ne sacrifie jamais la beauté formelle ou visuelle à la politique ! On attend cette sortie avec impatience !

Sources : dossier de presse

Les Goonies Voir pages Jeune Public

G

Séance Ciné-ma différence : samedi 18 avril à 14h15

Hacker

Etats-Unis – 2015 – 2h13, de Michael Mann, avec Chris Hensworth, Viola Davis, Lee-Hom Wang…

Entre Chicago et Los Angeles, Hong-Kong et Jakarta, le FBI et le gouvernement chinois cherchent à démanteler un puissant réseau de cybercriminalité, responsable du piratage de la plus ancienne bourse de commerce au monde, la Chicago Board Trade. Mais il leur faudra quémander l’aide du pirate informatique auteur du code à l’origine du désastre, qui purge sa peine en prison. Les films qui prennent pour racines le monde de la finance et ses dérives se font de plus en plus nombreux à mesure que les années (et la crise) passent. Après l’excellent Margin Call (J.C. Chandor, 2011) ou Le Loup de Wall Street de Scorsese (2013), c’est au tour de Michael Mann de se lancer. Le réalisateur de films aussi variés que Heat (1995), Le Sixième sens (1986) ou Le Dernier des Mohicans (1992) livre un thriller qui semble décoiffant. À vos écrans ! Sources : dossier de presse.

Histoire de Judas

France – 2014 – 1h39, de Rabah Ameur-Zaïmeche, avec Nabil Djedouani, Mohamed Aroussi, Rabah Ameur-Zaïmeche…

Après s’être retiré dans le désert, soutenu par son disciple Judas, Jésus retourne dans le monde pour y retrouver ses autres disciples. Son enseignement, radical, stupéfait les foules et attire l’attention de tous. Judas est, à ce moment-là, le gardien de sa parole...

H

Sources : Potemkine.fr, lemonde.fr

Filmographie : Bled Number One (2006) Le Dernier maquis (2008), Les Chants de Mandrin (2011)

J

Jamais de la vie

France – 2015 – 1h35 – de Pierre Jolivet, avec Olivier Gourmet, Valérie Bonneton, Julie Ferrier…

Franck est gardien de nuit dans un centre commercial de banlieue. Dix ans auparavant il était ouvrier spécialisé et délégué syndical, toujours prêt au combat. Aujourd’hui, spectateur résigné de sa vie, il s’ennuie. Une nuit, il voit un 4x4 qui rôde et sent que quelque chose se prépare... La curiosité le sort de son indifférence et il décide d’intervenir. Une occasion pour lui de reprendre sa vie en main. Pour son 15e long métrage, Pierre Jolivet a choisi un registre plus douloureux qui, au fil du récit, prend le rythme, la noirceur, la couleur d’un vrai polar. Et il trouve dans Olivier Gourmet un acteur exceptionnel, capable de donner la complexité et la grandeur de ce personnage dépassé qui finit par être une sorte de héros. Sources : dossier de presse

Jauja

Argentine – 2014 – 1h48, de Lisandro Alonso, avec Viggo Mortensen, Ghita Norby…

1882, fin fond de la Patagonie, le gouvernement argentin mène une campagne destructrice contre la population indigène locale. Le capitaine Gunnar Dinesen arrive du Danemark, avec Ingeborg, sa fille de quinze ans, pour occuper un poste d’ingénieur dans l’armée. Ingeborg tombe amoureuse d’un jeune soldat et s’enfuit. Son père part alors dans le territoire ennemi pour la retrouver... Lisandro Alonso est le réalisateur de Los Muertos, La Libertad et Liverpool. Ces trois films ont été autant d’expériences fascinantes pour les chanceux qui ont pu les voir. Jauja ne déroge pas à la règle et provoque le même effet, mais avec une nuance de taille, à savoir la présence, pour la première fois, d’un acteur immensément célèbre en tête d’affiche : Viggo Mortensen qui montre une nouvelle fois, après Loin des hommes, de David Oelhoffen, son envie de sortir des sentiers battus. Esthétiquement somptueux, il fait bon se perdre dans ce mystérieux voyage et suivre cette quête solitaire qui nous emmène dans un lieu inconnu, loin, vraiment loin de l’ordinaire du cinéma. JF

Journal d’une femme de chambre France – 2015 – 1h35 - de Benoît Jacquot, avec Léa Seydoux, Vincent Lindon…

Nouvellement arrivée de Paris, Célestine est engagée comme femme de chambre dans une maison bourgeoise tenue d’une main de fer. Elle y fait la rencontre de Joseph, un énigmatique jardinier qui la fascine. Elle est prête à tout pour échapper à la monotonie de son destin… 70 ans après Renoir, 50 ans après Buñuel, Benoît Jacquot ose proposer sa lecture du roman d’Octave Mirbeau, écrit en 1900. Comme dans Les Adieux à la reine, son précédent film en costumes, il refuse toute nostalgie, la caméra suivant le

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plus physiquement possible le personnage de Célestine. Par le détour du film d’époque, le réalisateur essaie d’avoir accès à quelque chose de notre réalité : la violence des rapports sociaux. Ce film « marxiste féministe » est magnifiquement porté par Léa Seydoux, entre soumission, rébellion et séduction, et rayonne d’un érotisme rare.

plongée hypnotique dans un monde en décomposition et c’est le premier opus de Ryan Gosling en tant que réalisateur. Sorte de conte de fées cauchemardesque, il ne peut renier ses références à de brillants prédécesseurs, au Twin Peaks de Lynch, par exemple. Il a obtenu 7 nominations au festival de Cannes, en 2014.

Sources : filmdeculte.fr – rfi.fr – nouvelobs.com

Sources: dossier de presse.

Leopardi

Italie – 2015 – 2h17, de Mario Martone, avec Elio Germano, Michele Riondino, Anna Mouglalis…

Leopardi est, après Dante, le poète italien le plus célèbre. En plus de ses Canti constamment réédités, il a laissé de nombreux essais philosophiques où s’exprime un pessimisme fondamental. Fortement handicapé par une maladie dégénérative, il mène, en ce début de XIXe siècle, une vie difficile, malheureuse, où son génie peut malgré tout s’exprimer. Le film de Mario Martone est un biopic très soigné, qui reconstitue avec une grande efficacité tout un pan de la société italienne de l’époque ainsi que la vie nomade du poète, sa souffrance physique et psychologique, en même temps que son exceptionnelle activité intellectuelle, lui dont on peut à proprement dire que « ses ailes de géant l’empêchent de marcher ». AW

Lilla Anna Voir pages Jeune Public

Lost River

Américain –2015 – 1h35, de Ryan Gosling, avec Christina Hendricks, Saoirse Ronan, Iain de Caestecker…

Dans une banlieue sinistrée de Detroit, où les maisons croulent et brûlent, une mère et ses deux fils luttent pour leur survie. La mère se livre à une forme étrange de prostitution, tandis que le fils aîné combat, symboliquement, ses démons. Ce film fantastique, au scénario apparemment simple, propose une

Les Nouveaux héros Voir pages Jeune Public

Le Petit homme

Autriche - 2013 - 1h38, de Sudabeh Mortezai, avec Ramasan Minkailov, Aslan Elbiev, Kheda Gazieva…

Ramasan a 11 ans, mais la mort de son père pendant la guerre en Tchétchénie l’a irrévocablement banni de l’enfance. Avec sa mère et ses deux jeunes sœurs, il rejoint Vienne et s’installe dans le camp de réfugiés de Macondo. Lorsque la mère part travailler, c’est lui qui prend en charge ses sœurs, c’est également lui qui fait des courses et qui lui sert d’interprète lors des démarches administratives. Mais quand Issa, un compagnon de combat de son père, fait irruption dans la cellule familiale et endosse petit à petit le rôle de chef de famille, Ramasan perd ses repères… Pour sa première œuvre de fiction, Sudabeh Mortezai, réalisatrice de documentaires, a choisi de ne travailler qu’avec des acteurs non-professionnels, auxquels elle a demandé d’improviser à partir des grandes lignes de la scène. Elle a, semble-t-il, relevé la gageure d’être au plus près et au plus vrai des émotions sans jamais tomber dans le pathos, ce qui est loin d’aller de soi avec un tel sujet. Sources : telerama.fr, filmdeculte.com, cineuropa.org

+ court métrage

Carn France – 2012 –Animation, 5’ , de Jeffig Le Bars, avec Jeffig Le Bars, .

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Salto mortale Suisse-France – 2014 – 1h35, documentaire de Guillaume Kozakiewiez.

Créateur avec sa femme de la compagnie Les Colporteurs, l’acrobate Antoine Rigot, funambule virtuose, a un accident en 2000, hors de la piste, qui lui fait perdre l’usage de ses jambes. Incapable d’accepter la fin de sa vie artistique, Antoine lutte peu à peu pour réapprivoiser son corps… qui devient le sujet et l’objet de ses nouveaux spectacles. Une plongée au plus près des corps, du travail qui s’interroge, avec sensibilité, sur le sens de l’équilibre. Une expérience de vie traumatisante qui devient une leçon de courage et de persévérance. Et une façon différente de regarder le corps handicapé. DP Dimanche 12 avril à 16h00, rencontre avec Antoine Rigot après la projection.

La Sapienza

France/Italie – 2014 – 1h44, de Eugène Green, avec Fabrizio Rongione, Christelle Prot Landman, Ludovico Succio, Arianna Nastro…

Alexandre, la cinquantaine, est un brillant architecte reconnu, animédu désir de procurer du bonheur aux gens qui habitent ses constructions. Alors qu’il remporte un concours, on lui demande pourtant de revoir son projet aux dépens de sa philosophie. Ressentant le besoin d’un temps de réflexion sur son travail et mû depuis longtemps par le projet d’écrire un texte sur l’architecte baroque Francesco Borromini, il part en Italie avec sa femme. Sur les berges du Lac Majeur, à Stresa, le couple fait la connaissance de jeunes frère et sœur. Cette rencontre va donner un tour imprévu à cette échappée italienne… Eugène Green était venu aux Studio présenter La Religieuse portugaise (2009). Après Lisbonne, le réalisateur, érudit en art baroque et également écrivain, nous emmène en Italie, via l’architecture et les doutes de

ses personnages, dans une diction un peu théâtrale. La Sapienza, en référence à une église romaine – chef-d’œuvre baroque – édifiée par Borromini, se révèle être comme un voyage lumineux, également intérieur. RS

Le Scandale Paradjanov Ukrainien, français –2015 – 1h 35, de Serge Avédikian, avec Serge Avédikian, Yuliya Peresild, Karen Badalov…

Ce documentaire, interprété avec malice par le réalisateur, trace le portrait de Sergueï Paradjanov, auteur de films cultes, tels Sayat-Nova ou Les Chevaux de feu, dans les années soixante. Le cinéaste, qui se nommait lui-même : « le clown triste de la Perestroïka », a passé cinq ans en prison, victime de diffamation, considéré comme anti-soviétique, homosexuel, compte tenu de son insoumission et de sa révolte contre un régime corrompu. Rien ne le fera jamais renoncer au cinéma, malgré 15 années passées sans pouvoir toucher à une caméra, à la recherche d’une esthétique et d’un goût de la métaphore, qui rompent avec les codes réalistes du cinéma socialiste. Ce biopic, récompensé dans plusieurs festivals, donne fortement envie de revoir ses œuvres ! Sources : dossier de presse

Mardi 7 avril à 19h45 – L’Union des Arméniens du Centre et les Cinémas Studio proposent une projection du film Le Scandale Paradjanov ou la vie tumultueuse d’un artiste soviétique dans le cadre de la commémoration du centenaire du génocide arménien perpétré par le gouvernement turc ottoman, que l’Union des Arméniens du Centre organise du 7 au 30 avril. La séance sera suivie d’une rencontre avec le producteur Gorune Aprikian en hommage à l’un des plus grands cinéastes arménorusso-géorgiens du xxe siècle. Révolté, rebelle, insurgé, homosexuel, Sergueï Paradjanov sublime l’âme des peuples du Caucase. (Programme des manifestations à consulter sur : www.armeniensducentre.org)

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Sea Fog - Les Clandestins Corée du Sud – 2014 – 1h45, de Sung Bo Shim, avec Yun-seok Kim, Park Yu-chun, Han Ye-Ri…

Kang est le capitaine d’un bateau de pêche que son propriétaire veut hélas revendre. Qu’à cela ne tienne, Kang décide alors de racheter lui-même le navire, ce qui lui permettra de conserver son travail ainsi que son équipage. Mais la pêche est de moins en moins fructueuse et l’argent vient à manquer… Kang prendra alors une décision difficile qui ne restera pas sans conséquences. Adapté d’une pièce de théâtre éponyme, Sea Fog pose d’épineuses questions, notamment celle de l’individu qui, dos au mur, fait face à un choix cornélien. Produit et co-scénarisé par Bong Joon Ho (The Host [2006], Snowpiercer [2013]), il promet une échappée à travers les méandres de l’âme humaine. Sources : dossier de presse

Shaun le mouton Grande-Bretagne 2015 – 1h25, de Mark Burton et Richard Starzak

Pensionnaire à la ferme de Mossy Bottom, où il exerce ses talents de mouton sous la surveillance inefficace du chien Bitzer, Shaun serait bien satisfait de sa vie pépère d’ovidé domestique s’il ne rêvait tout de même de plus grands horizons (« Tout le malheur des moutons vient de ce qu’ils ne peuvent pas demeurer en repos dans leur pré », aurait dit Pascal…) Aussi Shaun saute-t-il la barrière et se retrouve-t-il en ville, un milieu étrange et effrayant où tout va bien plus vite qu’à la ferme... Bonne nouvelle, l’équipe de Wallace et Gromit vient de faire un long métrage adapté de leur série télévisée ! Nous étions nombreux à attendre cela, tant ils savent toucher de cordes, y compris chez les adultes ! Sources : imdb.com

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nisé jusqu’à l’obsession, il accomplit son travail avec soin et compassion. Quand il apprend que son emploi va être supprimé, John décide de mettre toutes ses forces dans son dernier cas. Still life capte et montre les petits détails de la vie quotidienne, ceux que tout le monde néglige. Voilà un film incroyable, sans égal, où les larmes et les rires se mêlent, où la tristesse et la joie se croisent. Superbement écrit, réalisé et interprété, il nous captive jusqu’à la fin, aussi intense que touchante. Vous avez été nombreux à le plébisciter lors de sa sortie avancée aux Studio en janvier… Dernière chance pour ceux qui ne l’ont pas encore vu ! SB

Le Signe de Zorro Voir pages Jeune Public

Sunset USA Boulevard , Boulevard du crépuscule – 1950 – 1h50, de Billy Wilder, avec William Holden , Gloria Swanson , Erich von Stroheim…

Dans une somptueuse demeure du célèbre Sunset boulevard à Hollywood, le cadavre de Joe Gillis, scénariste fauché, flotte dans la piscine… La suite du film est un flashback destiné à remonter aux causes de cette mort suspecte. Il relate la rencontre de cet homme et de l’actrice, Norma Desmond, ex-superstar de cinéma dont la gloire remonte au temps du muet. Cette dernière, persuadée que son talent n’attend qu’un bon scénario pour être redécouvert, avait demandé à Joe qu’il l’assiste dans l’écriture d’un film qui serait taillé pour elle sur mesure. Dès lors, une relation tumultueuse et tourmentée naîtra de l’association inattendue de ces deux personnages aux tempéraments opposés. Dans ce film considéré à juste titre comme le chef-d’œuvre d’un des réalisateurs américains les plus talentueux, Billy Wilder règle ses comptes avec l’univers hollywoodien fait d’apparence, d’illusion et de cruauté. C’est aussi cynique que subtil, terrifiant, magnifique, inoubliable… SB

Taxi Téhéran Film du mois, voir au dos du carnet.

Une belle fin

Grande-Bretagne, Italie – 2015 – 1h27, de Uberto Pasolini, avec Eddie Marsan, Joanne Froggatt, Karen Drury.

John May est un modeste fonctionnaire municipal dans une banlieue de Londres. Sa mission est de retrouver les proches des personnes décédées dans la solitude et d’organiser leurs obsèques. Méticuleux et orga-

dans un accident en Chine. Pour rapatrier son corps, elle s’y rend pour la première fois de sa vie. Plongée dans cette culture si lointaine, ce voyage marqué par le deuil devient pour elle une véritable expérience initiatique. Ce sera aussi l’occasion de redécouvrir ce fils qu’elle ne voyait plus depuis longtemps. Photographe, acteur, musicien, essayiste... le réalisateur du moyen-métrage Hélium, remarqué à la Quinzaine des réalisateurs cannoise en 1997, est un artiste talentueux et original ! La rencontre dans le Sichuan de la prestigieuse Yolande Moreau avec cet « humaniste intemporel », tel que le qualifiait Henri-Cartier Bresson, est déjà une très belle invitation… Sources : dossier de presse, premiere.fr, vozimage.com.

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Voyage en Chine

+ court métrage semaine du 8 au 14 avril

Liliane, la cinquantaine, vit un drame. Elle doit faire face au décès brutal de son fils

France – 2012 – 10’, de Jérémy Azencott, avec Audrey Legrand, Eva Minko, Jérémy Azencott.

Lundi 6 avril - 19h30

Lundi 20 avril - 19h30

L’Arnaque

CENTENAIRE DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN

France – 2015 – 1h36, de Zoltán Mayer, avec Yolande Moreau, Qu Jing Jing, Lin Dong Fu…

de George Roy Hill (1973) USA Couleurs 1h50, avec Paul Newman, Robert Redford.

505 g

Les Chevaux de feu de Sergueï Paradjanov (1964) URSS Couleurs 1h37

Lundi 13 avril - 19h30 SOIREE FESTIVAL DU COURT MÉTRAGE DE TOURS Sélection de courts métrages primés ou présentés au Festival du court métrage de Tours (1955-1971), à l’occasion de la sortie du livre qui retrace l’histoire de ce grand rendez-vous du film court (Editions Anovi).

Lundi 27 avril - 19h30

On connaît la chanson

de Alain Resnais (1997) France Couleurs 2h, avec Agnès Jaoui, Sabine Azéma, Jean-Pierre Bacri, André Dussollier, Lambert Wilson, Pierre Arditi

Programme détaillé dans le dépliant disponible à l'accueil et sur www.cinematheque.tours.fr

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FILM DU MOIS

TAXI TÉHÉRAN Iran 2014 1h22, de Jafar Panahi, avec Jafar Panahi...

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inéaste délinquant multi-récidiviste, Jafar Panahi est peut-être l’un des seuls réalisateurs à être aussi bien (voire mieux ?) connus des services de police que du public... Condamné à plusieurs reprises en Iran (assignation à résidence, prison et interdiction de tourner...) il n’en a pas moins continué à faire des films clandestins et à réussir à les faire sortir du pays et distribuer à l’étranger (trois fois en quatre ans !)

Avec Taxi Téhéran, il nous embarque de manière semi-clandestine à bord d’un taxi de Téhéran, dont le chauffeur n’est autre… que lui-même. Comme il n’est pas vraiment chauffeur professionnel, il lui arrive de ne pas connaître ses itinéraires, de se tromper, encourant parfois la colère de ses passagers… Passagers qui se succèdent rapidement sur le siège arrière, parfois montent à plusieurs en même temps, se disputent, discutent politique, droit des femmes, charia, cinéma… Bref, toute une vie, toute une ville s’installent dans ce taxi-microcosme sans qu’il soit forcément facile de distinguer ce qui est mis en scène de ce qui relèverait de la caméra cachée.

Ten, qui suivait le même schéma, mais entretenait moins l’ambiguïté. Seulement voilà, Panahi n’est pas Kiarostami, Panahi a l’ironie mordante, le verbe haut (ou tout au moins ses personnages ont-ils verbe haut) et le script alerte. Aussi, même si ce n’est pas à proprement parler une comédie, Taxi est un film qui va vite, suscite le rire et multiplie les niveaux de lecture et d’interprétation, voire – aux dires de certains critiques – une franche jubilation devant le jeu auquel il nous invite. Grand habitué des festivals, qui ont systématiquement reconnu la qualité et l’originalité de ses films (Il a déjà reçu une Caméra d’or et un Prix du jury – Un certain regard – à Cannes, un Lion d’or à Venise, un Léopard d’or à Locarno, deux Ours d’argent à Berlin, excusez du peu !), Taxi Téhéran, sa dernière livraison vient de recevoir l’Ours d’Or à Berlin ! Il fait partie de ces cinéastes dont on attend toujours des nouvelles avec impatience, tant les films qu’il nous propose savent toujours se renouveler. Sources : filmdeculte.fr, imdb.com, lemonde.fr

Le procédé n’est pas vraiment nouveau, en 2004, Kiarostami nous avait déjà donné

Filmographie sélective : Ballon blanc (1995), Le Cercle (2000), Sang et or (2003), Hors-jeu (2006)

+ court métrage, semaine du 22 au 28 avril

Ascension France – 2013 – 6’, Animation, de Thomas Bourdis , Martin de Coudenhove, Caroline Domergue , Florian Vecchione , Colin Laubry.

LES CARNETS DU STUDIO – n° 333 avril 2015 – 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - CPPAP n°0219 K 84305

www.studiocine.com – 08 92 68 37 01


sans paroles Tout public à partir de 9 ans

VO

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Tout public à partir de 5 ans

Shaun décide de prendre un jour de vacances en quittant la campagne. Il est suivi par tout le troupeau... et surtout par le fermier ! Mais la vie à la ville n’est pas simple pour un mouton et encore moins pour un troupeau entier !

1969… Chen Zhen, jeune étudiant originaire de Pékin, est envoyé en Mongolie afin d’éduquer une tribu de bergers nomades. Alors qu’il s’enfonce dans la steppe, Chen tombe sur des loups. Fasciné, il capture un louveteau afin de l’apprivoiser. Une belle relation naît entre Chen et l’animal, mais un officier du gouvernement veut éliminer les loups de cette région...

JEUNE PUBLIC

JEUNE PUBLIC

France/Chine – 2015 – 1h58, de Jean-Jacques Annaud.

GB/France – 2015 – 1h25, film d’animation de Mark Burton, Richard Starzack, Richard Goleszowski.

Dernière réalisation des studios Aardman, après Wallace et Gromit, Chicken Run… VO

USA – 2015 – 1h42, film d’animation de Chris Williams et Don Hall. À partir de 7 ans

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Hiro Hamada, très jeune génie en robotique, va sauver sa ville des menaces criminelles de Yokai. Pour cela, il transformera ses amis en superhéros high-tech.

Tout public à partir de 8 ans

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En 1984 dans le Nord de l’Angleterre, Billy Elliot onze ans, devient adepte des cours de ballet délivrés dans le gymnase où il suivait des leçons de boxe. Alors que son père et son frère sont engagés dans la grève des mineurs, Billy se bat de son côté pour leur faire admettre sa passion pour la danse.

Ce film a été récompensé par de nombreux prix dont trois nominations aux Oscars en 2001.

Suède – 2015 – 47 mn, courts métrages d’animation de Per Ahlin, Lasse Persson et Alicja Björk Jaworski.

VF

Lilla Anna est une sympathique petite fille intrépide qui entraîne son oncle dans diverses aventures...

Adaptation d’une série de livres pour enfants, réalisée par les auteurs de Laban le petit fantôme.

À partir de 3 ans

GB – 2000 – 1h50, de Stephen Daldry.

• Le Petit bateau en papier rouge • Enco, une traversée à vapeur • Le Bonhomme de sable

sans paroles À partir de 4 ans

Allemagne/Chili/Estonie – 2015 – 45 mn, de Aleksandra Zareba, Ignacio Ruiz et Gabriela Salguero. Un programme de courts métrages d’animation, pour faire une jolie promenade en mer.

Mercredi 22 après la séance de 16h15, les enfants pourront continuer la balade en participant à un atelier pliage de papier. USA – 1985 – 1h30, de Richard Donner.

À partir de 8 ans

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France/Espagne – 1946 – 1h34, de Rouben Mamoulian.

Dans une petite ville de la Côte Ouest américaine, une bande d’enfants appelés les goonies découvrent la carte au trésor du pirate Willy le Borgne. Ils décident de partir à la recherche du butin. Mais ils ne sont pas les seuls…

VO Tout public à partir de 8 ans

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À force de courage et de combats, Zorro parviendra à rétablir l’ordre...

Samedi 18 avril 14h15

Reprise d’un célèbre film d’aventures américain.

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Bande annonce

Ic i… ` (IN)ATTENDU

force Que l’on goûte ou pas son cinéma, Léos de est de constater que tout film me sixiè Carax fait événement. Pour son eur isat long-métrage en trente ans, le réal éde Holy Motors va s’attaquer à la… com préle die musicale, si, si ! Mais, comme rks cisent les musiciens du groupe Spa pas it qui participent au projet, il ne s’ag add’« une comédie musicale du style Bro , ions way… C’est vraiment sans concess le ssib mais en même temps très acce c! selon nous. » À voir. Et à entendre don

tisés, ront des chasseurs de primes bap rer rent t Cochise et Gilou, qu'ils devraien urs acte dans le rang. Deux immenses in participeront à ce « western contempora gd’In he et métaphysique » : l’acteur fétic et ow, mar Bergman, Max Von Syd Michael Lonsdale.

et ai lle ur s… ` LA BELLE ANNÉE

pour 2015 sera une année fructueuse qu’il Isabelle Coixet (Ma vie sans moi) puis la tend y aura la sortie de Personne n’at du teur nuit : une biographie de l’explora use, Pôle Nord, Robert Peary et de son épo ne Byr Joséphine, interprétés par Gabriel le si ` VERSION ORIGINALE et par Juliette Binoche ; mais aus une , an ntis tournage de This Man, This Wom Après l’échec critique et public rete mais ier Oliv , aco Mon de ce Grâ son autre histoire d’amour et d’infidélité, sant de re le selle contemporaine cette fois. Si on igno Dahan est décidé à se remettre en e en e vell mm nom de celui qui interprétera l’ho rapidement et annonce une nou ses s de que question, on connaît déjà celui adaptation – après celle de Jac z Cru e eph prestigieuses partenaires : Penelop Doillon en 1975 – du roman de Jos lais t et Diane Kruger. Joffo : Un sac de billes. Ce qui peu l qu’i t c’es e, tiqu scep e voir r, geu ser son frères ` FAIRE LE MUR évoque pour cette histoire de deux de « ers Of juifs pendant l’Occupation alleman Après Christian Bale pour The Flow ant, traun musical surprenant ». Surpren War, Zhang Yimou va de nouveau e c’est bien le terme. vailler avec un acteur américain et mêm qui , l deux ! En effet pour The Great Wal de la tion créa la de èse S gen la CHE a ` APA raconter réa- Muraille de Chine, Matt Damon incarnera Pour son quatrième film en tant que pour un mercenaire voyageant à travers la lisateur, Bouli Lanners va retrouver part) Chine antique et se retrouvant au cœur la septième fois (sauf oubli de ma l’ont de la bataille opposant un clan de guerAlbert Dupontel. Ces deux-là, ils es. de riers et des créatures mythologiqu déjà maintes fois prouvé, ne sont pas l que us, Quant à Willem Dafoe, on ne sait ceux qui parcourent les sentiers batt que Les rôle lui incombera dans cette fres et ce n'est pas avec ce nouveau projet, terpré inte ils où , iers dern gigantesque ! IG Premiers, les

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« La France, c’est comme une mobylette : pour avancer, il lui faut du mélange »

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oici plus de 30 ans, sur fond de crise économique et de montée du chômage, la Marche pour l’égalité et contre le racisme (octobre-décembre 1983) et sa suite motorisée Convergence 84 (novembre 1984) ont marqué l’histoire des luttes de l’immigration et des quartiers populaires en France. Pourtant, malgré l’actualité toujours brûlante des revendications portées par les jeunes marcheuses et marcheurs de l’époque, la mémoire de leurs mobilisations ne s’est pas transmise aux nouvelles générations. Après la marche de 1983, interpellant les pouvoirs publics sur la question des crimes racistes et des violences policières, Convergence 84 s’adressait à l’ensemble de la société française, exigeant pour toute personne résidant sur le territoire l’égalité réelle, tant politique que sociale, à travers une citoyenneté enfin déconnectée de la nationalité. Les revendications spécifiques de cette jeunesse venaient reformuler celles des pères immigrés mobilisés pour la dignité, au sein du mouvement ouvrier et dans l’industrie automobile en particulier.

Sans jamais s’éteindre, ces luttes se sont émiettées, minées par le clientélisme, les récupérations et trahisons dont elles ont continuellement fait l’objet. Dès 1984, la petite musique à succès du slogan Touche pas à mon pote recouvrait le bruit des revendications égalitaires concrètes. Comble de l’ironie, en 2014 l’ancienne militante déçue de Convergence 84, Farida Belghoul, prenait la tête des réactionnaires Journées de retrait de l’école, contre la promotion de l’égalité des sexes à l’école. Voici plus de 30 ans que les pouvoirs publics n’en finissent plus de reconduire des politiques discriminatoires, répressives et liberticides, aggravant cyniquement, au nom du vivre ensemble, les conditions sociales du racisme. Il est grand temps de reconstruire un mouvement autonome des quartiers populaires nourri par la mémoire des luttes antérieures, et à même d’agréger la plus large solidarité, jusqu’à transformer politiquement la société française.

D’ailleurs Nous Sommes d’Ici

NOUS EN REPARLERONS PROCHAINEMENT…

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Compte-rendu

À propos de Discount

PARADISE FILM FESTIVAL, ELB, première édition Samedi 7 février 2015 - 16h00 & 19h30 Le 7 février dernier se tenait aux Studio la première édition d’un festival consacré aux courts-métrages : le Paradise Film Festival (dont le nom même est un écho à Cinéma paradiso, film de Giuseppe Tornatore (1988), véritable hommage à la magie du cinéma !

L’équipe des Loups blancs et la Vague jeune des cinémas Studio sont très heureux de vous y avoir comptés aussi nombreux ! Avec une vingtaine de films en sélection (11 pour la compétition, 9 hors compétition), cette première édition s’est ouverte par deux projections, suivies d’un entracte animé par les Swing and Shout, une aprèsmidi de partage, de rencontre et de sourires.

Quelques organisateurs

Le jury

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Swing and Shout

La remise des prix

« Dans l’intérêt de tous, il vaut mieux payer le prix des choses, car si l’on fait une très bonne affaire, à l’autre bout, il y a quelqu’un qui est volé. Et ce quelqu’un est tellement semblable à nous qu’il se pourrait bien que ce soit nous. » Philippe Val

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uelques rapides plans fixes pour définir l’espace commercial et c’est la ruée sauvage des consommateurs : bienvenue dans l’univers impitoyable de la consommation low cost ! Le discount comme stade ultime d’un capitalisme à bout de souffle ? Toujours moins : de droits sociaux, de travail, d’avenir pour les travailleurs souspayés, mais toujours plus de produits de basse qualité à des prix bradés. LouisJulien Petit nous fait découvrir les dessous de la mondialisation heureuse (« Souriez », le slogan cynique imposé aux salariés de l’entreprise), la vie quotidienne d’une équipe dans un magasin quelconque au milieu de nulle part. Et la mise en concurrence des uns et des autres sous couvert de modernité (ici, la mise en place de caisses automatiques). C’est un peu une version postmoderne d’Astérix : toute la Gaule était occupée (à détruire assez systématiquement les emplois) mais dans un Nord (qui ne ressemble pas vraiment à la pochade grotesque des Ch’tis) une équipe de cinq bras cassés (un panel d’abîmés de la vie qu’un bilan de compétences mettrait au

rebut) a décidé de se payer sur la bête ; pas de manif, pas d’occupation de l’entreprise. Une récupération sauvage. Comme le dit l’excellente Corinne Masiero : « Ce n’est pas un vol de voler les voleurs ! » Dans cet éloge de la débrouillardise se réinvente un vocable qui semblait définitivement bon pour les poubelles de l’histoire : la solidarité. Ce film, drôle et émouvant, porté par une excellente troupe de comédiens, fait, sans crier gare, le portrait de la France d’en bas que les élites ne veulent surtout pas voir : les déclassés, les gueules cassées de la guerre économique. Longtemps, on se lamentait de la complaisance des réalisateurs hexagonaux à ne filmer que des drames bourgeois dans des intérieurs cossus. Si on assiste à l’émergence de films qu’on pourrait classer dans la veine des indignations loachiennes (sous une forme dramatique ou comique), n’estelle pas le signe criant de l’ampleur de la crise sociale vécue au quotidien par de plus en plus de citoyens. Difficile de s’en réjouir… DP

On notera que le Prix du jury et celui du public sont allés à La Veilleuse, de Joan Borderie, dérangeante histoire d’un homme qui, parce qu’il ne peut plus dormir, embauche une femme en chair et en os pour lui servir de veilleuse (oui, oui, comme pour veiller sur le sommeil des petits enfants…) Une première édition dont on espère qu’elle sera suivie d’autres les années à venir !

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Les rédacteurs ont vu :

Snow Therapy de Ruben Östlund

Snow Therapy confirme ce que nous supposions depuis Shining : la poudreuse ne constitue pas le meilleur ciment pour consolider la cellule familiale ! IG Ça commence fort, avec une avalanche très cinégénique dans une séquence à la fois puissante et subtile. Après ce début réussi on s’attend logiquement à un film dense et prenant. Hélas le drame se délite rapidement et sombre dans un mélo pataud et bavard, qui se résout dans un dénouement confondant de mièvrerie et de bons sentiments, sans parler d’une scène finale sans cohérence avec le reste. La snow est belle mais le scénario, lui, aurait vraiment eu besoin d’une bonne therapy ! AW Ah ! La neige, la montagne, les vacances au ski… le rêve made in loisirs de l’homme moderne ! Oui, mais voilà, Ruben Östlund ne l’entend pas tout à fait comme ça, lui. Alors il nous dresse la chronique d’une crise de famille, entre monts enneigés, avalanches provoquées (et subies !) et urbanité d’un hôtel de luxe. Le tout savamment orchestré par une version classique (mais sans l’être) de l’Hiver de Vivaldi, administrée… à peu près quand bon lui semble, mais toujours plutôt judicieu-

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sement. Le tout donne lieu à un drôle de film, comédie dramatique aux accents loufoques, drapés d’un faux côté sage. Plutôt pas mal ! MR

Snow Therapy ou l’anti-carte postale : la blancheur luxueuse des pistes dénuées de skieurs devient le cadre angoissé d’une guerre du couple ponctuée par les coups de semonce des canons anti-avalanche. J’ai trouvé assez jubilatoire de voir le super mâle en prendre pour son grade ! DP Le cadre est idyllique : sommets blancs immaculés sur fond de ciel invariablement bleu, glisse sur une neige soyeuse… Mais quand les canons à neige se mêlent aux déclencheurs d’avalanche et que la musique de Vivaldi déraille, une impitoyable guerre conjugale se déclenche. L’esprit de Bergman souffle alors sur Snow Therapy… SB

Happiness therapy de David O. Russell ou Snow therapy de Ruben Östlund ? Entre le

bonheur et la neige, on a le choix pour se faire soigner. Mais attention, les titres sont trompeurs, car la thérapie du bonheur s’appelle, en version originale, Silver linings playbook, et celle de la neige, Turist en suédois et Force majeure en version internationale. L’invention des traducteurs est sans limites . JF Si vous pensez que dans la vie il vous arrive de croiser des super héros et des super nanas, le film vous montre bien que ça n’existe pas. Ici, et c’est rare, la faiblesse d’un homme est montrée très clairement. Alors qu’on a droit à l’image d’un couple formaté, l’avalanche sert de déclencheur pour en faire sauter le vernis. Mais peut-on blâmer l’attitude lâche de cet homme ? Que ferions-nous dans une situation de peur extrême ? Snow Therapy nous renvoie à nous-mêmes et le doute l’emporte sur la certitude. MS Malgré une photo idyllique – parents et enfants souriants en combinaison de ski – ce huis-clos froidement oppressant enferme pour un temps suspendu cette famille, unie dans la

couleur bleutée des sous-vêtements… mais tiraillée par ses peurs intestines. Le mythe protecteur de l’homme s’écroule pour Ebba. L’insécurité et le manque de confiance la gagnent et la contaminent. Quitter cette station des Alpes devient même une épreuve, engendrant peur panique ou passivité (voire sidération ?), c’est selon. Est-ce là la métaphore vertigineuse souhaitée par R. Ostlund sur le couple et la famille, leurs lignes de faille annonçant séparation et éclatement aux couleurs d’une avalanche émotionnelle qui n’en finit pas de sévir... ? RS Lourde, lourde démonstration sur la faillite du mâle occidental : malmené, ridiculisé, ce pauvre spécimen n’a finalement qu’une chose à faire : fuir ! Et n’est-ce pas le message subliminal de cette thérapie nébuleuse, pardon, neigeuse ? la récurrence des scènes de brossage de dents dans la salle de bain montre bien que du désir, il n’y en a plus guère de la part de sa femme. Alors, à quoi bon se couler dans l’étoffe du héros protégeant femme et enfants face à une avalanche et répondre ainsi à leur demande d’idéal ? Sauve qui peut, oui ! Malheureusement, le film est monté à l’envers : fuite d’abord, culpabilité et rédemption ensuite, pas assez cynique, donc… CP Les CARNETS du STUDIO n°333 –

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Rencontre avec Thoma Salvador

Rencontre avec Thomas Salvador mardi 3 février 2015

Thomas n’a pas d’écueils

Thomas Salvador aux Studio © Nicole Joulin

Le mardi 3 février, Thomas Salvador est venu présenter son premier long métrage intitulé Vincent n’a pas d’écailles, en partenariat avec l’agence régionale CiCliC qui avait aidé à la production d’un de ses courts métrages et qui, cette fois, l’a accompagné en lui attribuant un fonds d’aide à l’écriture. Une écriture commencée il y a huit ans…

L

a première question a porté sur le choix, pour un premier film, d’un personnage de super héros. Tout est parti d’une image : celle d’un type plongé dans un torrent surpris par une fille. « J’avais envie d’un personnage décalé et spectaculaire, d’un glissement entre ce que l’on connaît et l’étrange. J’aime le mouvement, le corps dans le cinéma, avec les acteurs burlesques, de Keaton à Moretti. J’aime la culture américaine du super héros. J’ai suivi mon envie assez folle sans vraiment me poser de questions. Vincent n’a aucune mission, il est responsable de lui seul. Il agit à son échelle humaine. Je tenais à ce que cette personne nous ressemble. Vincent est dans un continuel entre-deux, embarrassé par son pouvoir qui est à la fois une malédiction et une fierté. »

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Un spectateur a retrouvé le curieux alliage entre espace naturel et fantastique, un alliage rare que l’on retrouvait dans le dernier Alain Guiraudie, L’Inconnu du lac, et dans Les Combattants de Thomas Cailley. Thomas Salvador reconnaît ce cousinage avec Alain Guiraudie (avec lequel il animait un débat la veille) : « un côté bienveillant, avec un rapport au concret, sans grandiloquence, qui laisse de la place aux spectateurs. » Ils aiment tous deux ce rapport immédiat au cinéma : « des émotions, des sensations. Ce qui me transporte le plus – dans la musique, la peinture, la littérature – c’est ce dont j’ai le plus de mal à parler ! » Guiraudie et lui ont tourné dans le Verdon à trente kilomètres de distance…

Pourquoi avoir choisi d’interpréter le premier rôle ? « Je ne suis pas nageur mais alpiniste. Mais j’aime les challenges. Quand j’ai tourné mon premier court métrage en 97, j’étais très timide. Je n’ai pas pris d’acteur parce que j’avais peur d’être déçu et de ne pas oser le lui dire. J’ai fait un casting d’acrobates mais ça n’allait pas ; la France n’a pas une école d’acteurs physiques. J’étais excité par l’idée de faire tout ça ! Et le fait que je ne sois pas connu sert le film. »

Comment trouve-t-on de l’argent pour raconter l’histoire d’un homme qui se trempe dans l’eau pour se régénérer ? « Ça a été un financement compliqué parce que le film aborde plusieurs registres – drôle, mystérieux, fantastique – et les financeurs avaient peur que ce soit… grotesque. Moi aussi, lors des premières projections : les gens riaient et je croyais qu’ils se moquaient. La drôlerie vient sans doute de la proximité des scènes avec le réel.»

Les scènes de nage ont subjugué les spectateurs. Comment ont été faits les trucages ? « Sans recours au numérique. J’ai tout fait pour que ce soit vrai : créer de l’illusion avec des moyens simples (vérins hydrauliques, trampolines, fil de pêche accroché à une moto…) Je tenais absolument à cet effet de réel, à un côté très prosaïque. »

Nous aurons sans doute l’occasion de revoir Thomas Salvador, qui a de nombreux projets (une comédie musicale, une fiction en haute montagne, un film noir avec plein d’acteurs…) qui, espérons-le, seront aussi inattendus que son Vincent sans écailles, mais pas sans charmes. DP Les courts métrages de Thomas Salvador seront visibles sur le portail de CiCliC.

Retrouvez une vidéo de la rencontre sur le site des Studio, rubrique : Ça s’est passé aux Studio.

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Interférences Vincent n’a pas d’écailles Birdman

Grand écart C

ette semaine, les écrans des Studio voyaient projetés deux films que tout oppose du point de vue de la forme et de leur manière de s’adresser au spectateur même si, très loin enfoui dans leur prétexte, se trouve le mythe commun du superhéros ! Éloge d’un (relatif) ennui A ma gauche, Vincent n’a pas d’écailles, premier long métrage de Thomas Salvador ; histoire d’un homme un peu en marge de la société, doté d’un étrange pouvoir qui lui donne des forces sur-humaines… à condition qu’il soit mouillé. Dans l’eau, il évolue avec la grâce et la vitesse d’un dauphin, hors de l’eau, il est capable de balancer une bétonnière sur un pare-brise de voiture... pour peu qu’il se soit versé une bassine d’eau sur la tête... Le tout est servi par un acteur assez keatonien, avec de très longs silences, des dialogues très rares et des trucages à l’ancienne : les seuls effets numériques utilisés ayant consisté à retirer les câbles servant à tirer l’acteur lors de ses cascades. Il est d’ailleurs amusant de constater que le fait de savoir que les trucages sont faits à l’ancienne renforce le plaisir enfantin que l’on a à s’ébahir devant telle prouesse, écarquiller les yeux devant telle image impensable... une manière de renforcement de l’image-trace chère à André Bazin : ne pas

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pouvoir s’empêcher de se dire : « Ça s’est passé comme ça, devant la caméra, il a fait ça, ces bonds hors de l’eau, ces ondulations souverainement élégantes... » Et, pourtant, de temps à autre, se profile comme un léger ennui... on se prend à se dire que, peut-être, tel silence est un peu long ou insuffisamment meublé… Et, pourtant, on finit par s’en moquer un peu aussi, oublier, voire apprécier ces périodes où le film, au lieu de foncer comme un dauphin, flotte un peu, comme pour nous dire que la vie c’est aussi (surtout?) ça : des moments de pas grand-chose qui redonnent du poids et du sens aux moments remplis, à ces instants où la vie semble s’accélérer sans crier gare... Éloge d’une (relative) oppression À ma droite, Birdman, film multi-oscarisé, gros budget, grosse publicité, vedettes, bref, pour son cinquième long-métrage A-G Inarritu a sorti l’artillerie lourde... Ici, les effets numériques sont légion tandis que, de manière très perverse, le film joue aussi sur la déception de cette attente de l’imagetrace évoquée pour Vincent n’a pas d’écailles... En effet, l’ensemble de Birdman semble être filmé en un seul et unique planséquence, comme si la durée du film était égale à celle de l’action qu’il est censé couvrir. Mais, surtout, dès les premières secondes on réalise bien que nous sommes dans un anti-Vincent n’a pas d’écailles : ici

tout va très vite, les dialogues sont riches, quasi incessants, drôles, incisifs ; mais, plus encore, le mouvement incessant de la caméra et l’enchaînement des lieux, des déplacements d’une pièce à une autre, happent le spectateur qui, très vite, ressent une sensation proche de l’étouffement ou, tout au moins, de la saturation... Très vite, on se demande quand on va trouver le temps de respirer, d’échapper, pour quelques instants au moins, à la spirale de l’enchaînement des scènes. Quand sera-t-il possible de reprendre ses esprits ? Quand pourra-ton réfléchir un minimum pour reconstituer la topologie de ce théâtre labyrinthique, où des coursives aux cintres en passant par la scène, les loges et les toits, tout semble communiquer avec la plus parfaite fluidité ? La réponse est simple : si vous prenez ce temps, vous perdez quelque chose de l’action, des dialogues... alors (un peu comme dans Réalité de Quentin Dupieux, mais pour des raisons très différentes) on renonce, on s’abandonne, on se laisse manœuvrer, manipuler par l’époustouflante virtuosité du découpage, du scénario. On abandonne ses prérogatives de spectateur pensant (ou, tout au moins, pensif...) pour plonger dans ce maëlstrom de bruit et

de fureur en jouissant sans cesse de perdre pied, d’être souvent pris à contre-pied... Il paraît que cette option très post-moderne serait anti-artistique, qu’elle ramène l’œuvre filmique au statut d’attraction de fête foraine (G. Lucas, dans une interview, disait vouloir emmener le spectateur sur des montagnes russes). Peut-être, mais, entre ces deux pôles des possibilités offertes par le cinéma, je refuse de choisir, ne serait-ce que parce que Birdman, c’est bien plus que cela ; sans parler de réflexion sur la création, Birdman contient aussi des scènes où le rire vous secoue autant et au même moment que l’émotion vous gagne (ahurissante scène où Riggan, le héros, qui s’est retrouvé enfermé en peignoir à l’extérieur du théâtre pendant une représentation, revient sur scène par la salle (et non par les coulisses), en slip kangourou blanc (terriblement classe) et sans son pistolet, qu’il mimera de la main comme le font les enfants qui jouent). Je refuse de choisir entre la raison qui prend son temps et la déraison qui vous emporte tout en vous clouant dans votre siège. Parce que le cinéma, c’est tout cela à la fois ! ER

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À propos de Les Nouveaux sauvages

Interférences Les Nouveaux sauvages Réalité

L L

ourde, lourde coïncidence entre la sortie du film de l’Argentin Damian Szifron, Les Nouveaux sauvages, et les attentats en France, au Danemark et au Moyen Orient. Pourquoi ? Parce que le fond est le même, le refus, ou l’impossibilité, de contrôler sa propre haine de l’Autre et donc, le déchaînement de la violence. En Argentine, le film a remporté un franc succès, bien sûr, puisque la fiction ne s’est pas confrontée à la réalité. Au contraire, elle la désamorce, car le rire suscité par les différents sketches a une fonction sociale, fédératrice. Le rire doit être quelque chose de ce genre, une espèce de geste social, écrivait le philosophe Henri Bergson en 1899, en s’interrogeant sur la signification du comique, dans un essai intitulé Le Rire : tout d’abord, le rire est humain, en ce que seuls les humains rient et, de surcroît, exclusivement des humains et non pas des objets, ni de la nature. En synthèse, en suivant Bergson, la dimension comique provient de trois sources : le physique, c’est-à-dire l’aspect ou les mouvements d’un individu, comme les gestes de Charlie Chaplin dans Les Temps modernes ; la situation et les dialogues, par exemple dans les films cultes français, tels Les Tontons flingueurs ; enfin, le caractère, c'est-à-dire la mise en exergue d’un défaut, rouage essentiel de la comédie, et l’on pense à L’Avare de Molière. Quant aux procédés employés, les plus classiques sont la répétition, l’inversion des rôles, les quiproquos ou la dimension caricaturale.

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Ainsi, dans le film de Szifron, l’aspect comique est lié à la fois aux situations, aux dialogues et aux caractères : un banal rapport de force, au début, entre deux conducteurs de voiture sur une route déserte, un accident d’avion provoqué par un pilote dément qui a réuni tous ses ennemis dans la carlingue, le mariage somptueux d’un homme volage et d’une jeune femme déchaînée… tous les sketches fonctionnent de la même manière. Ils décrivent une situation banale qui s’envenime, pousse à bout les protagonistes et fait sauter les barrières sociales. Répétition, quiproquos, caricatures, tous les ressorts du comique sont présents, sauf que le fond est tragique, description plausible d’une société en décomposition, où le meurtre, la luxure et la scatologie représentent la seule issue. Plutôt humour noir donc, dans lequel le noir l’emporte, à mon sens, sur l’humour, le fond tragique sur la forme comique. Mais, dans la salle de cinéma, en France, les spectateurs rient, parce qu’ils sont ensemble et que ces fictions qui sont collées à l’actualité leur servent de catharsis, leur offrent un défoulement collectif, la possibilité de distancier les chocs émotionnels récents. Union par le rire devant un spectacle, union par l’émotion face à un événement dramatique, c’est ce qui tisse les liens entre les individus qui composent une société, ce qui donne le sentiment d’appartenir à un pays et d’y partager les mêmes valeurs. CP

a comédie fait rire ou sourire par sa légèreté de ton, sa dramaturgie dénuée d’esprit de sérieux, ses situations cocasses, ses dialogues percutants et spirituels, sans oublier son obligatoire happy end. On y rit de bon cœur, sauf lorsque, loin de la comédie romantique ou à visée purement comique, elle devient extrêmement caustique, voire féroce, comme dans Affreux, sales et méchants d’Ettore Scola ou dans la plupart des films de Pietro Germi. Il n’est alors plus simplement question d’amuser, de faire rire, d’attendrir, il s’agit de tout autre chose : d’humour noir.

vision pessimiste de l’homme et de la société, qui serait désespérante si elle n’était désamorcée et rendue acceptable par la dérision.

Les Nouveaux sauvages de Damian Szifron est un film à sketches qui se situe directement et ouvertement dans la lignée des Monstres et des Nouveaux monstres de Dino Risi. On y rit sans retenue certes, mais ce rire n’est pas franc ni insouciant car il prend pour cibles la violence, la méchanceté, l’hypocrisie, la cupidité, le cynisme, le mensonge et autres tares de la nature humaine. Si on ajoute la déveine, le rouleau compresseur d’une bureaucratie sourde et aveugle, la tyrannie des apparences et du snobisme, on aura une idée assez juste de ce que véhicule réellement l’humour, et plus particulièrement l’humour noir : une

silence. Ce cynisme généralisé apparaît tout aussi nettement mais sous une autre forme dans le dernier sketch. On y voit un repas de mariage, vaste et ridicule mascarade, dégénérer en une épouvantable algarade entre les deux jeunes époux. Leur couple finit par n’être plus qu’un champ de ruines dévasté par le mensonge, la trahison et la cruauté. Le pire cependant, c’est que ce paroxysme de haine et de ressentiment les soude finalement, comme s’ils étaient éblouis, conquis par leur incroyable capacité réciproque à se maltraiter et à se nuire !

Qu’on pense par exemple au sketch de l’accident de voiture mortel d’un fils de riches bourgeois. Tous les personnages, le père, la mère, le procureur, l’avocat, le jardinier, tous sont pourris jusqu’à l’os. Le seul finalement à conserver un minimum d’humanité et de sens moral, à vouloir se dénoncer, c’est, paradoxalement, le fils de famille, le responsable même de l’accident. Inutile de dire que son entourage le réduit très vite au

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À propos de American Sniper

On ne rit pas autant dans Réalité de Quentin Dupieux, moins que dans Wrong Cops par exemple, son précédent film. Le registre humoristique qui s’y manifeste est différent. Sans jamais se prendre au sérieux, le scénario et la mise en scène nous emmènent dans un univers insolite, de moins en moins sécurisant dans la mesure où sa logique échappe peu à peu à notre compréhension. On finit par ne plus savoir qui est qui, qui rêve quoi, on perd complètement pied entre réalité, fiction, rêve, fantasme, folie. On y voit même la projection dans une salle de cinéma d’un film qui n’a pas encore été tourné ! Tout se brouille, tout se mélange, les certitudes vacillent, la raison bascule, c’est toute notre compréhension du monde qui est remise en cause. L’étrange mésaventure de Jason, joué par un épatant Alain Chabat, est traitée avec un humour nonsensique là où il aurait été très facile d’en faire un film d’horreur comme The Ring de Hideo Nakata, auquel il fait clairement référence. La musique lancinante de Philip Glass, visiblement très inspirée ici de Terry Riley pour ses effets hypnotiques, contribue à créer cette atmosphère étrange, mais on est très loin de The Ring ou du Cabinet du docteur Caligari de Robert Wiene, prototype du genre. Le film fantastique joue sur l’ambiguïté au premier

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degré afin d’enfermer le spectateur dans une espèce de nasse angoissante suscitée par des situations et des personnages inexplicables, un sentiment d’inquiétante étrangeté, une menace sourde. Ce n’est pas le cas dans ce film, cauchemar gai qui ne génère ni malaise ni angoisse, bien au contraire ! L’impossibilité de démêler le vrai du faux interloque mais fait sourire, notamment grâce au jeu des acteurs (on revoit avec plaisir, à côté d’Alain Chabat, Élodie Bouchez et le truculent Éric Wareheim). On y retrouve un peu le sens du mauvais goût et de la provocation présents dans Les Nouveaux sauvages, mais un peu seulement puisque l’humour joue ici sur un autre registre, celui de l’ébranlement des certitudes, de la fausseté des apparences, de l’absurdité du monde. Dans les deux cas l’humour est noir, en ce sens qu’il traduit un pessimisme foncier en ne voyant jamais dans l’homme et la société un spectacle raisonnable, positif, sécurisant. Comme disait Jacques Sternberg : « L’humoriste est naturellement mal pensant ». Ambrose Bierce précisait : « L’humoriste est un grossier personnage dont la vision déformée voit les choses comme elles sont, non comme elles devraient être ». Damian Szifron et Quentin Dupieux sont eux aussi de grossiers personnages. AW

L

’homme, tireur d’élite, est allongé sur un toit poussiéreux ; dans la lunette de son fusil, une femme et un enfant. Il communique par radio avec sa hiérarchie : il a vu la femme donner une roquette à l’enfant, une patrouille s’approche, doit-il, a-t-il la permission de tirer ? La réponse de la hiérarchie est sans appel : c’est à lui de décider ! Dans le même temps, son collègue chargé de sa protection lui dit sans ambages : « Si tu te trompes, ils te rateront pas, tu iras pourrir dans une prison militaire. » Dès la première scène de American Sniper, dernier film de Clint Eastwood, le ton est donné : la question ne sera jamais de savoir s’il est justifié de tuer, mais s’il est justifié de tuer cette cible précise. Et c’est là que la bât blesse le plus dans cette œuvre très bien filmée, très bien montée, très bien tout (ou presque : on peut regretter l’utilisation d’une musique tout de même très redondante...) : l’absence de questions et, plus cruellement, l’absence de questions contextualisées. À aucun moment n'est posé le problème de savoir pourquoi les troupes américaines sont en Irak, question pourtant cruciale si l’on entend déterminer dans quelle circonstance ce droit de tuer peut légitimement s’exercer. À aucun moment ne sont évoqués les noms des responsables de cette guerre (qui, pourtant, aujourd’hui, pourrait être considérée comme l’une des causes principales du gigantesque chaos qui

secoue le moyen Orient !) : Colin Powell ? Connais pas ! Donald Rumsfeld ? Connais pas ! George Bush ? Connais pas ! Même Saddam Hussein est mis hors champ… La raison de cet aveuglement tient probablement à la question du point de vue adopté : de même que le tueur d’élite ne voit le monde que par le bout de sa lorgnette, nous spectateurs sommes embarqués avec lui, pris au piège de sa logique étroite. Cet enfermement logique et visuel est poussé à un tel point que, plus le temps passe et plus les séjours en Irak se résument à UN seul combat ; il n’y a plus d’ailleurs que le champ de bataille, il n’y a plus de temps autre que celui de la mort, qu’elle soit donnée à distance ou en combat rapproché. Par ailleurs, lorsque se pose la question non plus de l’engagement du pays mais de l’engagement individuel du soldat, la seule remise en cause à laquelle on ait droit vient de sa pauvre femme, délaissée, qui élève les enfants toute seule et a bien peur que son héros de mari ne revienne pas entier de ce front insaisissable où il exerce ses talents de tueur à distance. Elle pleurniche, elle boude et, pour nous, tout se passe comme si le monde était divisé en deux : celui du champ de bataille où s’exerce l’implacable et infaillible solidarité entre soldats, et le monde domestique où les nerfs du héros sont mis à tout aussi rude épreuve. ER

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À propos de A Most Violent Year

V

oilà un film qui réalise le quasi exploit d’être à la fois la satire très crédible d’un univers de louches pratiques commerciales, un polar serré et un feel good movie, un de ces films édifiants qui donnent foi en la nature humaine. Quoi de plus euphorisant en effet que cette lutte obstinée et finalement triomphante d’un héros intrépide qui refuse avec panache de se défendre contre ses peu scrupuleux rivaux avec les mêmes méthodes qu’eux : vols, armes à feu, détournements, organisation mafieuse etc. Même menacés directement, lui, sa femme et ses trois filles, il refuse de céder aux sirènes de l’auto-défense et à la tentation de la violence comme réponse à la violence. Sorte de Gandhi new-yorkais friqué et fringué avec recherche, Abel Morales est un homme assez courageux, assez fort pour mettre à bas tous ses ennemis grâce à sa seule ténacité et devenir, juste récompense, le distributeur de gas-oil le plus prospère de la ville. Avec lui triomphent la volonté, la force de caractère, la morale, le bien, le libéralisme bien compris, bref les valeurs fondamentales d’une Amérique qui croit au capitalisme vertueux et fraternel. C’est une ode à cette Amérique-là qui se retrouve ressassée ad nauseam dans la chanson du générique de fin, America for me. N’oublions pas par ailleurs que ce chevalier des temps modernes s’appelle Abel Morales ! Tout est dit : le gentil Abel a pris sa revanche sur le méchant Caïn, une revanche tout ce qu’il y a de plus morale puisqu’en espagnol (le per-

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sonnage est d’ascendance mexicaine) son patronyme a exactement la même consonance et les mêmes connotations qu’en français. Symbolisme pour les nuls ? Cette leçon d’éthique et de patriotisme est d’autant plus redoutable que le film est excellemment joué, tant dans ses rôles principaux que secondaires, et mis en scène avec un talent et une efficacité au-dessus de tout éloge. A Most Violent Year présente visiblement toutes les apparences de l’escroquerie idéologique de l’année. Eh bien non ! En réalité le film est d’autant plus subversif qu’il est classique dans sa forme. Après Margin Call le doute n’est guère permis : J.C. Chandor est un moraliste, pas un moralisateur. Ni ode au capitalisme triomphant, ni célébration du lonesome hero invincible parce qu’il est du bon côté de la force, ni chant d’amour aux vertus transcendantes d’une Amérique éclairant le monde, A Most Violent Year est certainement l’un des films les plus ironiques, l’une des charges les plus subtilement impitoyables contre toutes ces fadaises. Rarement, jamais peut-être, l’hypocrisie fondamentale de ces alibis moraux, de cette bonne conscience qui ne connaît pas le doute, n’a été montrée avec autant de finesse et de férocité. Qui est Abel Morales ? Un ambitieux forcené, un arriviste aux goûts clinquants, un égoïste intégral qui n’a qu’une seule véritable passion : la réussite, l’argent, la puis-

sance. Il aime sa femme et ses enfants mais ne prend pas la moindre mesure pour les défendre. Il parle beaucoup, mais jamais avec autant de conviction profonde que lorsqu’il s’agit de défendre son entreprise et son pognon. Chaque fois qu’il doit expliquer son attitude non violente le même et unique argument égocentré revient : c’est trop risqué, s’il y a un problème ça retombera sur moi, ça va me coûter trop cher, je vais aller en prison etc. On est à cent lieues d’un point de vue philosophique à la Gandhi. Il s’agit d’un intérêt strictement matériel vêtu d’oripeaux pacifistes, d’un humanisme de pacotille. Abel Morales ne fait que reprendre à son compte le précepte attribué à Mme de Maintenon : « Rien de plus habile qu’une conduite irréprochable ». Ce pseudo chevalier sans peur et sans reproche veut réussir sans se salir les mains, sans utiliser les méthodes de voyou de ses concurrents. S’il joue ainsi toujours cartes sur table, refuse magouilles, compromissions, violences de toute nature, c’est en réalité par pur calcul. Abel est indiscutablement courageux, pour ne pas dire indomptable, mais il est surtout malin : il y a beaucoup plus à perdre qu’à gagner à combattre

ses ennemis sur leur terrain. Abel est un tycoon pas meilleur que les autres, son seul objectif est de tuer la concurrence, de s’enrichir démesurément. Simplement c’est un tycoon plus intelligent et opportuniste que ses adversaires. Trois scènes à la fin du film montrent l’étendue de son insensibilité réelle, elles dévoilent explicitement le cynisme de ce héros. Certes, arrivé à ce stade du récit on n’a probablement déjà plus guère d’illusions, mais elles vont disparaître définitivement lorsque, sans s’expliquer, sans se justifier, Abel décide finalement d’utiliser l’argent détourné de son entreprise par sa femme Anna. On pourrait rétorquer que cet argent détourné est quand même le sien, qu’on ne peut pas se voler soi-même, mais l’argument ne tient pas. Taper dans la caisse, confondre argent de l’entreprise et argent personnel est un délit réprimé par la loi : cela s’appelle un abus de biens sociaux. Autre scène emblématique, celle où l’un de ses chauffeurs de camion agressés, Julian, traumatisé, psychologiquement détruit, va visiblement se suicider. Abel n’esquisse pas un geste, ne dit pas un mot pour essayer de

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Vos critiques l’en détourner. Il est vrai que Julian est devenu un problème pour lui, une entrave possible à son irrésistible ascension. Lorsqu’enfin celui-ci se tire une balle dans la tête, Abel ne semble pas plus catastrophé que cela. Son premier geste est de sortir son mouchoir pour aller boucher le trou que la balle a percé dans la cuve de gas-oil : ce serait vraiment cruchon de laisser perdre toute cette belle marchandise ! La scène finale met en présence le bel Abel et le procureur Lawrence, qui l’avait mis en examen entre autres — et, on l’a vu, de façon tout à fait justifiée — pour détournement de fonds. Le voilà qui devise à présent paisiblement avec l’accusé, en qui il reconnaît dorénavant, non plus un escroc, non plus un justiciable, mais un vainqueur, un industriel puissant, un homme potentiellement influent à qui il laisse entendre à mots couverts qu’ils pourraient tous deux mutuellement s’entraider dans leurs ambitions industrielles et politiques. Abel Morales répond par son habituel discours

moralisateur mais on sent bien qu’il ne ferme aucune porte et on peut même, sans grand risque, gager que le prix à payer par Lawrence sera élevé…

A Most Violent Year est un film dérangeant en ce qu’un personnage aussi peu recommandable, aussi manipulateur et cynique qu’Abel Morales est présenté comme le gentil de l’histoire, la victime malheureuse des méchants, un homme positif et sympathique. Cela nous rappelle qu’il ne faut jamais être complètement dupe des artifices du cinéma. J.C. Chandor croit visiblement en la lucidité et l’intelligence des spectateurs. Mais jouer sur le second degré est toujours un pari et il n’est jamais gagné d’avance car l’ironie est une arme à double tranchant. En ces temps troublés où la croyance a tendance à se substituer à la pensée, il nous rappelle qu’il faut rester vigilant et ne jamais se laisser berner par la bête qui veut se faire passer pour un ange. AW

UNE BELLE FIN de Uberto Pasolini Les Studio sont le seul cinéma de France à projeter en ce moment (en janvier) ce très beau film, ce qui signifie que la presse nationale n’en parle pas encore ! C’est fort dommage parce qu’il s’agit d’une vraie réussite, parce qu’il est difficile de ne pas rire de l’absurdité de certaines scènes tout autant qu’il est difficile de ne pas être très ému de l’extraordinaire humanité qui s’en dégage ! De la mise en scène au scénario et aux quelques belles surprises qu’il recèle, en passant par l’interprétation tout simplement impeccable de l’ensemble des acteurs, tout ici fait qu’il faut vraiment s’y précipiter ! Jérémie A. A partir d’un sujet particulièrement délicat qui aurait facilement pu virer au mauvais goût intégral ou bien au mélo larmoyant, U. Pasolini a réussi le grand écart : élégance de la mise en scène, délicatesse du traitement ET humour tantôt absurde, tantôt légèrement grinçant… Une vraie réussite ! […] Fanny H. Très beau film traitant d’un sujet sociétal délicat avec une pointe d’humour «anglais» […] Nicole H. LES NOUVEAUX SAUVAGES de Damian Szifron Six sketches et autant d’opportunités d’illustrer la férocité des rapports humains faits de vengeances, d’irascibilité, de révolte, de corruption, de jalousies dans nos sociétés civilisées. Le morceau final en constitue le bouquet, monstrueux de virtuosité.

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On devrait s’indigner, on en est à deux doigts mais l’habileté de la réalisation nous emmène au rire, voire au fou rire. En fin de compte on jubile ; honte à nous ! Hervé R. Un film à sketches d’une férocité presque jubilatoire. Une comédie noire qui démonte les mécanismes et l’engrenage de la violence. Quand les individus choisissent le conflit plutôt que la négociation, cela engendre des forces démoniaques... CP FELIX ET MEIRA, de Maxime Giroux […] Il y a non seulement deux communautés qui vivent côte à côte et qui s’ignorent, athées et ultra orthodoxes, mais aussi les deux membres du couple juif tout aussi proches et incapables de se comprendre, de se connaître… Il fait froid dans ce film, dans les rues, dans les cœurs, dans les maisons. Le père et le fils, le frère et la sœur, le mari et la femme, on ignore tout de l’autre pourtant si proche. Mais Meira, frêle et timide, va tout faire exploser avec une petite étincelle de vie. Il y a un beau propos dans ce film, les personnages existent bien, il y a beaucoup de gravité et de vérité, mais aussi beaucoup de pessimisme et de réalisme, il ne suffit pas d’être libre pour vivre heureux. Très belle mise en scène aussi, sobre, avec une belle lumière et enfin une bande-son qui n’est pas envahie par une musique omniprésente et larmoyante, ça fait du bien. Jacques C. Rubrique réalisée par RS

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