02.04 au 29.04 2014

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ISSN 0299 - 0342

CINÉMAS STUDIO : 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS

N°322 • avril 2014


S

O

M

M

A

I

R

E

avril 2014 - n° 322

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3

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4

Éditorial

CNP

Soirée Libres Courts

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5

.....................

5

Festival du film en 48 h

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6

Soirée CHRU, Le cancer

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6

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7

Soirée bibliothèque, Pierre Prévert

Soirée Mauvais genre

LES FILMS DE A à Z

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Homophobie et sport

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lundi : mercredi : jeudi : vendredi : samedi :

de 14h00 à 19h00 de 14h00 à 17h00 de 14h00 à 17h00 de 14h00 à 19h00 de 14h30 à 17h00

8

En bref . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 Bande annonce

Horaires d’ouverture :

18

Cafétéria des Studio gérée par l'association AIR (chantier d'insertion),

accueille les abonnés des Studio tous les jours de 16h00 à 21h45 sur présentation des cartes abonné et cafétéria.

Interférences

Belgian Lovers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

Tél : 02 47 20 85 77

Courts lettrages

Dallas Buyers Club . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

Interférences

Les STUDIO sont membres de ces associations professionnelles :

22

EUROPA

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23

REGROUPEMENT DES SALLES POUR LA PROMOTION DU CINÉMA EUROPÉEN

......................................

26

Only Lovers Left Alive/Goltzius, The Pelican Company

......

Face à face

L’Amour est un crime parfait

AFCAE

Interférence

Ida/12 Years A Slave Interférence

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28

....................................

30

Vos critiques

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33

Jeune Public

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34

Minuscule/Le Vent se lève Rencontre

Festival Désir… Désirs

ASSOCIATION FRANÇAISE DES CINÉMAS D’ART ET ESSAI

ACOR ASSOCIATION DES CINÉMAS DE L’OUEST POUR LA RECHERCHE (Membre co-fondateur)

FILM DU MOIS : PELO MALO

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36

GNCR GROUPEMENT NATIONAL DES CINÉMAS DE RECHERCHE

ACC

GRILLE PROGRAMME

.......................

pages centrales

Site : www.studiocine.com et un lien vers notre page Facebook : cinémas STUDIO

ASSOCIATION DES CINÉMAS DU CENTRE (Membre co-fondateur)

Prix de l’APF 1998

LES ÉDITIONS DU STUDIO DE TOURS - 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - Mensuel - Prix du numéro 2 €. ÉQUIPE DE RÉDACTION : Sylvie Bordet, Éric Costeix, Isabelle Godeau, Jean-François Pelle, Dominique Plumecocq, Claire Prual, Éric Rambeau, Marieke Rollin, Roselyne Savard, Marcelle Schotte, André Weill, avec la participation du CNP et de la commission Jeune Public. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Éric Rambeau – MISE EN PAGES & EN IMAGES : Francis Bordet. ÉQUIPE DE RÉALISATION : Éric Besnier, Roselyne Guérineau – DIRECTEUR : Philippe Lecocq – IMPRIMÉ par PRÉSENCE GRAPHIQUE, Monts (37)

Présence graphique contribue à la préservation de l’environnement et atteste être reconnu IMPRIM’VERT.


éditorial

Critique Une étymologie ambivalente

S

i l’on en croit le Nouveau dictionnaire étymologique et historique paru chez Larousse en 1962, rédigé, entre autres sommités, par Henri Mitterand, le mot critique apparaît en français vers 1327. Il s’inscrit alors dans l’univers médical, adjectif signifiant : difficile, décisif. Nul n’ignore, en effet, qu’être dans un état critique ferme la porte à un avenir radieux ! En latin, criticus, lui-même emprunté au grec kritikos, dérivé de krinein, veut dire discerner, au sens médical et littéraire. Autrement dit, à l’origine, ce verbe n’implique pas de jugement de valeur, mais simplement une analyse, une recherche. Basculement, en 1552, Rabelais l’utilise comme synonyme de diminuer. Un certain Cotgrave, en 1661, renchérit encore : critiquer, c’est relever un défaut.

Mais, si l’on s’arrime aux origines, une petite lueur subsiste : critiquer, c’est faire preuve de discernement, chercher ce qui fait la particularité d’une œuvre, et ainsi s’approcher au plus près de l’imaginaire de l’autre, le créateur…

Vous vous demandez sans doute où je veux en venir, tout en bâillant ostensiblement devant ces digressions sémantiques ?

Alors, dans les Carnets des Studio, nous avons fait un choix, celui de laisser libres les sensibilités des uns et des autres, libres de les croiser sans les entrechoquer : certains d’entre nous choisissent des films qui leur permettent d’exprimer leur admiration, d’autres soulignent les manques, quelques uns cherchent à cerner les thèmes communs, à établir des liens, la palette est vaste ! Et c’est ce qui vous permet, à vous lecteurs, de choisir vos films, à travers un kaléidoscope de points de vue. C’est le but exclusif de cette publication mensuelle. CP

Je voulais en avoir le cœur net : oui ou non, la critique, littéraire, musicale, cinématographique ou artistique, implique-telle de dévaloriser l’objet, la création ? D’autant que « la critique est aisée et l’art est difficile », écrivait Néricault-Destouches. Or donc, si l’on suit l’évolution de la langue, aucun doute n’est possible : critiquer, c’est juger une œuvre, et de préférence, de façon négative !

Et nous abordons là un terrain dangereux, celui des rapports entre critiques et artistes, celui du déploiement de la subjectivité humaine, avec son élégance ou ses petitesses. Car il n’y a pas de savoir constitué sur l’art, tout au plus une accumulation de connaissances, aucune loi, aucune morale, ne permet de juger de la beauté ou de la laideur. Le critique, quoi qu’il puisse en dire, ne peut donner qu’une opinion, plus ou moins séduisante, plus ou moins argumentée…

Les CARNETS du STUDIO

n°322

avril 2014

3


SEMAINE

du 23 au 29 avril

4

Les Cinémas Studio, l’Institut universitaire de cancérologie et le CHRU de Tours proposent :

N

É

M

A

T

H

È

Q

U

1h37’

DANS LA COUR de Pierre Salvadori

dim 11h00

À suivre.

14h15 1h38’ 19h15 UNE PROMESSE de Patrice Leconte 21h15

14h30 17h00 19h15

samedi à 14h15

TERRE DES OURS 36’ sans paroles

LA PIE VOLEUSE de Emanuele Luzzati & Giulio Gianini

TOM À LA FERME de Xavier Dolan

1h36’

STATES OF GRACE

de Kelly Reichardt À suivre.

1h48’

de Destin Cretton À suivre.

LA LIGNE DE

14h30 PARTAGE DES EAUX de Dominique Marchais À suivre. 19h30 Rencontre avec le réalisateur,

16h00 17h30 16h00 dimanche

11h15

1h45’

2h00’

dim 11h00

CNP jeudi L’ÉTERNELLE MAREE NOIRE I

A

T

H

È

Q

ENTR’ACTE de René Clair

dim 11h00

14h15 17h15 19h30

14h15 19h30

E

45’

APPRENTI GIGOLO de John Turturro

17h45 21h45

14h15 19h45

LEGO

14h15

dim 11h15

LE PARFUM DE LA CAROTTE

de Arnaud Demuynck & Rémi Durin ATELIER : mercredi

1h38’ VF

LA TRAVERSÉE DU TEMPS de Mamoru Hosoda

À suivre.

REAL

de Alexander Payne

de Kyoshi Kurosawa

2h08’

EASTERN BOYS

2h06’

HER

de Robin Campillo

de Spike Jonze

1h22’ 1h25’

GERONTOPHILIA

WRONG COPS

de Bruce Labruce

1h33’ + court métrage 3’

PELO MALO de Mariana Rondon

NOOR de Cagla Zencirci & Guillaume Giovanetti

16h00

dim 11h15 mercredi samedi dimanche

17h15 17h15 21h15 19h00 21h30 21h45 + mer-sam

dimanche

16h00

1h52’

LE GRAND CAHIER 21h30 de Janos Szasz

1h35’

21h30

14h30 19h45

45’ 1h54’

MILLE SOLEILS de Mati Diop

de Sophie Audier

1h18’

mercredi samedi dimanche

2h07’

NEBRASKA

À suivre.

LES CHÈVRES DE MA MÈRE

mercredi samedi dimanche

de Chris McKay & Chris Miller

de Quentin Dupieux

1h27’ + court métrage 7’

14h15 L’ÉTÉ DES POISSONS VOLANTS 19h45 de Marcela Said

www.studiocine.com

U

2 courts métrages de Jean Mitry

22’

14h30 1h55’ 17h00 19h15

17h45 21h45 16h00

M

SYMPHONIE MÉCANIQUE IMAGES POUR DEBUSSY

dim 11h00

dim 11h00

+

É

avec Jacques Viers

14h30 1h48’ AIMER BOIRE 17h00 ET CHANTER 21h30 de Alain Resnais

17h15 21h30

mer-sam dimanche

DÉBAT

N

lundi 19h30

LA GRANDE AVENTURE

de Yann Le Gléau et Sébastien Mesquida

20h00

2014

1h41’ VF

1h30’

vendredi 25 après la séance de 19h30

14h15 19h45

3D

de Guillaume Vincent

À suivre.

NIGHT MOVES

Responsabilités des entreprises et droits humains 23’ NIGERIA,

C

1h27’

L’HOMME lundi QUI EN SAVAIT TROP 19h30 1956 - de Alfred Hitchcock

dim 11h00

11h15

E

2h00’

14h15 17h45 19h45 21h45

dimanche

de Reinhard Klooss

DÉBAT avec des professionnels de la santé

I

14h15

TARZAN

du 2 au 8 avril

1

SEMAINE

1h34’ VF

jeudi HAUT LES COEURS 19h45 1h50’ de Solveig Anspach Voir page 6 C

2014

LECONS D’HARMONIE

21h30

de Emir Bagaizin

1h20’

Le film imprévu www.studiocine.com

Programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35

17h45

TOUKI BOUKI de Djibril Diop Mambety

Le film imprévu www.studiocine.com

Toutes les salles des Studio sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Cinémas Studio – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com


du 9 au 15 avril

2

SEMAINE

OCTOBRE À PARIS

I

DÉBAT

N

lundi 19h30

14h30 19h15

de Jacques Panigel

1h10’

20h00 C

LE PETIT LORD FAUNTLEROY

É

M

de Jack Gold

avec Laurent Garreau A

T

H

È

Q

U

E

L’ACCORDÉON 1h06’ de Igor Savtchenko Soirée présentée par Donatien Mazany 1h48’

AIMER BOIRE ET CHANTER de Alain Resnais

14h30 1h30’ 17h15 19h15 APPRENTI GIGOLO 21h15 de John Turturro dim 11h15

14h15 1h58’ 19h15 MONUMENTS MEN dim 11h00

de George Clooney

14h15 19h30

1h35’ + court métrage 11’

MY SWEET PEPPER LAND

dim 11h15

14h15

dim 11h00 3D mercredi samedi

1h41’ VF

LA GRANDE AVENTURE

dimanche

LEGO

17h30

de Chris McKay & Chris Miller

dim 11h00

Rencontre avec Jean-Pierre Pagliano 18h00

VOYAGE SURPRISE 19h45 de Pierre Prévert Voir page 5

Débat

1h55’

NEBRASKA de Alexander Payne

2h08’

EASTERN BOYS de Robin Campillo

1h33’

PELO MALO

de Hiner Saleem

de Mariana Rondon

vendredi

17h00 21h15 17h00 21h30 17h45 21h45

1h36’

14h15 TOUT EST PERMIS 19h45 de Coline Serreau 14h15 19h45

C

I

TERRE DE SUMUD

TERRE DES OURS

de Stéphane Valentin

DÉBAT

É

M

A

de Guillaume Vincent

avec Olivia Elias T

H

È

Q

U

E

L’HOMME lundi QUI EN SAVAIT TROP 19h30 1934 - de Alfred Hitchcock 1h24’

Soirée Libres Courts

En terre(s) inconnue(s) Voir page 5 DÉBAT

avec Arnaud Hée, critique

14h15 1h45’ 17h15 TOM À LA FERME 19h15 de Xavier Dolan

dim 11h00

36’ sans paroles

dim 11h00

14h30 1h30’ 17h30 19h30 APPRENTI GIGOLO +mer-sam-dim 16h00 de John Turturro

14h30 21h15

dim 11h15

1h43’ VF

LE PETIT LORD FAUNTLEROY

de Alain Resnais

de Jack Gold

Ouverture du Festival mauvais genre

jeudi

WOLF

14h15

Soirée de clôture du

vendredi

Animation avant la séance projections des CM réalisés lors du marathon Voir page 6 et remise des prix

19h00

de Jim Taihuttu Voir page 6

Festival 48h Film Project 18h00 1h35’

MY SWEET PEPPER LAND

1h36’ + court métrage 3’

TOUT EST PERMIS de Coline Serreau

HER

1h55’

21h30

de Spike Jonze

19h15

NEBRASKA de Alexander Payne

EASTERN BOYS de Robin Campillo

de Amat Escalante

1h25’

QUI A PEUR DE VAGINA WOLF

21h45

14h15 19h45

de Bruce Labruce

Le film imprévu www.studiocine.com

LES CHÈVRES DE MA MÈRE de Sophie Audier

14h15 19h00

17h00 21h45 21h15

1h45’

HELI de Amat Escalante

1h22’

GERONTOPHILIA

1h35’

17h30 21h30

2h08’

1h45’

HELI

17h45 SAUF jeudi vendredi

de Hiner Saleem

AIMER BOIRE ET CHANTER

16h15

de Emanuele Luzzati & Giulio Gianini

dim 11h00

1h48’

jeu-ven

dim 11h15 SAUF jeu-ven

2h03’

14h15 1h38’ 17h45 UNE PROMESSE 19h45 de Patrice Leconte 21h45

14h15 16h00 SAUF

LA PIE VOLEUSE

2h06’

de Anna Margarita Albelo

17h45

52’

N

19h45

2014

L’économie palestinienne sous occupation 1h27’

20h00

mercredi

Rencontres de la Bibliothèque

1h25’

CNP jeudi

du 16 au 22 avril

3

SEMAINE

mercredi samedi dimanche

1h43’ VF

Censure et films interdits

CNP jeudi

2014

21h30

2h28’

LES TROIS SŒURS DU YUNNAN de Wang Bing

Le film imprévu www.studiocine.com

Tous les films sont projetés en version originale (sauf indication contraire) Cinémas Studio – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com www.studiocine.com

Programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35


jeudi 3 avril – 20h00 Le CNP, Amnesty International, Peuples solidaires, la CIMADE et le Collectif Palestine 37 proposent :

Responsabilités des entreprises et droits humains Adidas en Indonésie, Mattel en Chine, Shell au Nigeria, Véolia en Palestine… La liste est longue des entreprises qui se développent en faisant passer leurs intérêts financiers avant les droits humains et politiques des populations locales. Soutenues le plus souvent par les autorités, elles exploitent les richesses naturelles, avec des conséquences environnementales dramatiques, et les travailleurs, souvent immigrés, en condition de quasi-esclavage. Face à cela, des citoyens et des associations se mobilisent pour rappeler les entreprises à leurs devoirs en matière de respect des droits fondamentaux. FILM : Nigeria, l’éternelle marée noire de Yann Le Gléau et Sébastien Mesquida (2010 – 23’). DÉBAT avec Jacques Viers, responsable de la commission Entreprises à Amnesty International.

jeudi 10 avril – 20h00 Le CNP propose :

Censure et films interdits Le cinéma a toujours dérangé. Politiciens, ligues morales ou gendarmes de la bien-pensance, profiteurs financiers, tous ont utilisé les ciseaux d’Anastasie depuis 1895. Des films ont rencontré des oppositions au tournage, au montage, à la diffusion. Leurs affiches mêmes sont la cible des manieurs de ciseaux. Des pouvoirs imposent l’interdiction des films qui les contrarient : refus de visa d’exploitation, limitations à certains âges, scènes coupées, projections interdites par arrêtés municipaux

4

– Les CARNETS du STUDIO

n°322

avril 2014

ou par manifestations hostiles, affiches censurées, partiellement masquées ou maculées par des groupements de vertu… Projection du FILM Octobre à Paris de Jacques Panigel (1h10) réalisé et aussitôt censuré en 1962, première distribution d’une copie amputée en 1973, diffusion de la version intégrale en 2011. DÉBAT avec Laurent Garreau, auteur de Archives secrètes du cinéma français (1945 – 1975) – Et Dieu créa la censure. Exposition d’affiches censurées. Exposition d’affiches censurées avec la participation de la bibliothèque des Studio.

jeudi 17 avril – 20h00 Le CNP et le Collectif Palestine 37 proposent :

L’économie palestinienne sous occupation Depuis 1967, Israël a instauré un système de contrôle de l’économie palestinienne, interdisant la mise en place d’une véritable économie de production. Pourtant, les ressources naturelles existent et le niveau d’instruction du peuple palestinien est assez remarquable. Les aides importantes apportées par des ONG et différents pays ne doivent pas faire non plus illusion en effaçant la réalité d’une occupation militaire qui asphyxie l’économie palestinienne. L’idée que l’on puisse construire une économie sous occupation, comme certains l’ont espéré après les accords d’Oslo, est un mensonge qui peut faire croire à la non-nécessité d’une solution politique. Projection du DOCUMENTAIRE Terre de Sumud de Stéphane Valentin (2009 – 52’). DÉBAT avec Olivia Elias, économiste, auteure de Le Développement économique de la Palestine (2013).


Soirée Libres Courts – Séance de courts métrages Mercredi 16 avril, 19h45 en présence d’Arnaud Hée, critique

En terre(s) inconnue(s)

T

errain privilégié d’exploration des genres et des thèmes, le court métrage se pare ici des couleurs de l’autre et de l’ailleurs, mettant en scène des personnages et des paysages insolites : du Japon au Groenland, en passant par la Belgique ou l’île de Tristan da Cunha. Tantôt vues par le prisme de la comédie (Welkom, Inupiluk), du documentaire (Arekara) ou évoquées dans une dimension plus poétique (37°4 S, La Lampe au beurre de yak), les questions du territoire et de l’altérité se retrouvent ainsi au cœur de ce

programme et résonnent comme un hymne à la différence et à la rencontre. Au programme (1h37) : • WELKOM de Pablo Munoz Gomez • LA LAMPE AU BEURRE de Yak de Hu Wei • 37°4 S d’Adriano Valerio • AREKARA de Momoko Seto • INUPILUK de Sébastien Betbeder (auteur de 2 automnes, 3 hivers, très remarqué aux Studio cette saison).

Les Rencontres de la Bibliothèque Vendredi 11 avril Voyage Surprise et Rencontre avec Jean-Pierre Pagliano • 18h00 : échanges avec Jean-Pierre Pagliano dans la Bibliothèque • 19h00 : dédicace • 19h45 : projection du film Voyage Surprise de Pierre Prévert, suivie d’un débat.

P

our cette nouvelle rencontre, nous recevons J.-P. Pagliano, historien du cinéma, spécialiste du film d’animation, et particulièrement de Paul Grimault. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et articles sur le Groupe Octobre, Paul Grimault, Brunius et les frères Prévert ! Au cours de cette soirée, il présentera son livre Le Roi et l’Oiseau. Voyage au cœur du chef-d’œuvre de Prévert et Grimault, accueilli comme l’ouvrage définitif sur le sujet par les spécialistes.

VOYAGE SURPRISE France - 1946 - 1h25, de Pierre Prévert, avec M. Carol, M. Baquet, J. Sinoël…

Des surprises, il va s’en produire pendant ce voyage censé creuser la différence entre les cars Piuff et leurs concurrents : les participants ne savent ni où ils vont, ni quelles seront les étapes pour y arriver. Et quand on sait qu’un anarchiste (Jacques Prévert fait partie des scénaristes !) va se mêler aux passagers, que les rivaux des Piuff vont tout faire pour faire capoter le projet, qu’un complot politique menace le Duché de Stombolie… on se doute que ce voyage n’aura rien de reposant, à l’image de ce film « pas comme les autres », voulu par le réalisateur. Burlesque et surréaliste encore et toujours. IG

Les Studio accueillent le festival Mauvais genre

D

ans le cadre de la huitième édition de Mauvais Genre, le festival international de cinéma de Tours, qui se tiendra du 16 au 21 avril, les Cinémas Studio accueilleront le jeudi 17 avril, en matinée, la séance scolaire lycéens proposant en avant-première le nouveau film d’animation de Bill Plympton : Les Amants élec-

triques et, à 14h15 : Wolf de Jim Taihuttu, le premier long-métrage, inédit/avant-première, en version originale sous-titrée, qui ouvrira la compétition internationale 2014. Tarif unique pour cette séance : 5 euros. On vous attend ! Les CARNETS du STUDIO

n°322

avril 2014 –

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Le festival du film en 48 heures débarque à Tours Animation, projection et remise de prix : vendredi 18 avril à partir de 18h00 Ce mois d’avril verra la ville de Tours accueillir pour la première fois le concours international de courts métrages : 48-Hour Film Project Compétition, mais aussi véritable phénomène mondial, le 48-Hour Film Project est devenu un rendez-vous incontournable pour les amoureux du cinéma. Pour la première fois, ce marathon posera ses valises à Tours du 4 au 6 avril 2014 avec, comme toujours, un principe simple : réaliser un film en 48 heures chrono ! Pour Alex Guéry de la société de production Les Films du Loup Blanc, c’était « une véritable évidence de voir débarquer ce marathon sur notre planète Tours. Une chance pour

chaque jeune réalisateur de se dépasser et de se révéler… en 48 heures seulement ! Et une évidence également de partager cet événement unique avec notre partenaire de cœur, les cinémas Studio ». Créativité, talent et passion sont les maîtresmots de cette compétition internationale. Tous les films seront projetés et les meilleurs seront récompensés lors de la finale du 18 avril aux Studio... Parmi les membres du jury, on comptera notamment Philippe du Janerand et Aurélia Poirier. Une soirée pleine de rebondissements, d’animations et d’échanges. Un rendez-vous à ne surtout pas manquer ! www.48hourfilm.com/tours www.facebook.com/flbprod

Soirée CHRU : Haut les cœurs ! Jeudi 24 avril à 19h45

L

es Cinémas Studio, l’Institut universitaire de cancérologie (www.iuc-cvl.fr) et le CHRU organisent cette soirée ciné-débat sur le thème du cancer. Parce qu’un tiers de l’activité du CHRU se concentre sur le diagnostic et le soin aux patients atteints de cancer, et parce que les équipes hospitalo-universitaires du CHRU mènent des travaux de recherche clinique et fondamentale de pointe, les professionnels de santé vous donnent rendez-vous pour faire le point sur le cancer au CHRU de Tours : diagnostic, thérapeutiques et recherche. En présence de : Professeur Olivier Hérault, coordinateur de l’IUC, Professeur Gilles Body, chirurgien gynécologue, Professeur Philippe Bougnoux, médecin oncologue, Professeur Gilles Calais, radiothérapeute.

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– Les CARNETS du STUDIO

n°322

avril 2014

Haut les cœurs (France – 1998), de Solveig Anspach, avec Karin Viard, Laurent Lucas…

Emma apprend qu’elle est atteinte d’un cancer au moment même où elle est enceinte de son premier enfant. On lui conseille un avortement car le traitement anti-cancéreux ne serait pas compatible avec la gestation, mais les avis divergent et Emma finit par décider de continuer sa grossesse, se disant qu’elle se bat maintenant pour deux vies. Première fiction de S. Anspach, Haut les cœurs est un film d’une extraordinaire puissance, d’une vitalité rare. ER


w w w . s t u d i o c i n e . c o m Sur le site des Studio (cliquer sur : PLUS D’INFOS, pour entrer dans la fiche film), vous trouverez des présentations signées des films que les rédacteurs auront vus après leur sortie en salle. Les fiches non signées ont été établies de manière neutre à partir des informations disponibles au moment où nous imprimons.

Les films de A à Z 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com AVANT LES FILMS , DANS LES SALLES, AU MOIS DE MARS

2014 :

• Blood From Stars de Joe Hemy (studio 1-2-4-5-6) • Hubergam-deux de John Scofield (studio 3-7)

Musiques sélectionnées par Eric Pétry de RCF St Martin.

A

Aimer, boire et chanter

France – 2014 – 1h48, de Alain Resnais, avec Sabine Azéma, Sandrine Kiberlain, Caroline Silhol, André Dussolier, Michel Vuillermoz, Hippolyte Girardot

À quatre-vingt-dix ans passés, quelques mois seulement après la sortie de Vous n’avez encore rien vu, Alain Resnais s’est remis à tourner… Son nouvel opus présenté en compétition au festival de Berlin est une adaptation de Life Of Riley du dramaturge britannique Alan Ayckbourn - comme l’étaient, Smoking/No smoking et Cœurs. Dans la campagne anglaise du Yorkshire, la vie de trois couples est bouleversée quand ils apprennent que leur ami George n’a plus que quelques mois à vivre. Persuadant ce dernier de se joindre à leur troupe de théâtre amateur, ils vont vite être surpris du comportement de George qui exerce une étrange séduction sur les trois femmes… Pour notre plus grand plaisir, « la famille Resnais » affiche presque complet (il manque Arditi et Wilson) pour nous parler une nouvelle fois (et une dernière fois...) d’art, d’amour et de mort. Avec la même énergie et la même fantaisie que dans ses films précédents ? Sources : dossier de presse

Apprenti gigolo

USA – 2014 – 1h30, de John Turturro, avec John Turturro, Woody Allen, Vanessa Paradis…

Murray, vendeur de livres en faillite, septuagénaire, arrive à convaincre Floravante, fleuriste, de devenir le gigolo de femmes new yorkaises célibataires. Murray sera son mac, rabatteur de jolies recrues. Le film est drôle et sans vulgarité, et c’est l’amour que Floravante

va découvrir, à travers ce métier improbable. Pour la petite histoire, John Turturro avait parlé de ce scénario à son coiffeur, qui avait comme autre client… Woody Allen. C’est ainsi que les deux réalisateurs se sont retrouvés autour de ce projet, John Turturro ayant déjà joué dans des films de Woody Allen et ce dernier n’ayant plus été acteur pour quelqu’un d’autre depuis une dizaine d’années. Le casting féminin est à la hauteur des réalisateurs, avec Vanessa Paradis dont c’est le premier film en anglais, Sharon Stone et Sofia Vergara. Le film sera présenté au festival de Toronto en septembre.

Les Chèvres de ma mère France – 2014 – 1h35, documentaire de Sophie Audier, avec Maguy Audier, Anne-Sophie et les chèvres...

C

Sur un plateau isolé des gorges du Verdon, Maguy travaille depuis 40 ans à produire du fromage de chèvre dans le respect de la nature et des animaux. A l’heure de la retraite, elle doit céder son troupeau. Un parrainage s’engage alors avec Anne-Sophie, une jeune agricultrice discrète et obstinée qui souhaite s’installer. Derrière la caméra, Sophie, la fille de Maguy, filme au fil des saisons, le processus de transmission : douloureux renoncement pour l’une et difficile apprentissage pour l’autre. Peut-on encore aujourd’hui transmettre le goût de la liberté ? Avec une simplicité presque déroutante, Les Chèvres de ma mère déroule sous nos yeux le fil fragile d’une histoire belle et forte qui en dit long sur le monde agricole mais aussi sur la

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beauté de l’âme humaine, sur l’importance du partage, sur les étapes d’une vie, ses forces, ses failles, ses élans, ses lassitudes. « Il y a dans ce documentaire bouleversant autant de choses à aimer que de beautés à contempler, autant de leçons à apprendre que de cailloux sur le plateau venté. » Sources : Festival international du film d’environnement

D

Dans la cour

France – 2014 – 1h37, de Pierre Salvadori, avec Catherine Deneuve, Gustave Kervern, Feodor Atkine…

Un chanteur, la quarantaine, fatigué de sa vie, décide de tout quitter et trouve un petit emploi de gardien d’immeuble. Mathilde, jeune retraitée, s’investit à fond dans les œuvres caritatives en délaissant son mari. Suite à la découverte d’une fissure dans son appartement, elle est persuadée que l’immeuble va leur tomber sur la tête. Un couple surprenant se forme : dans la cour, deux âmes se reconnaissent. Après avoir été l’auteur de nombreuses comédies à la fois hilarantes et saluées par la critique, Pierre Salvadori a délaissé le registre purement comique pour cette comédie dramatique sur l’amitié, les choix de vie, les crises existentielles et la vieillesse… «C’est même un film très sombre. Même s’il est également drôle, je l’espère, ce n’est pas une comédie, plutôt une chronique, comme pouvait l’être Les Apprentis… ». Face à un Gustave Kervern bouleversant, Catherine Deneuve rayonne, avec de superbes éclipses dépressives. Pierre Salvadori semble avoir de nouveau frappé juste. Sources : toutelaculture.com – clap.ch

Filmographie : Cible émouvante (93) – Les Apprentis (95) – Comme elle respire (98) – Après vous (03) – Hors de prix (06) – De vrais mensonges (10)

Les fiches signées correspondent à des films vus par les rédacteurs.

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Eastern Boys

France – 2013 – 2h08, de Robin Campillo, avec Olivier Rabourdin, Kirill Emelyanov...

Près d’une gare, un homme discret, Muller, a repéré un jeune homme, Marek, à qui il donne rendez-vous le lendemain chez lui. Mais quand on sonne à sa porte, Muller n’a aucune idée de ce qui l’attend... Difficile de réduire Eastern boys à ce point de départ, tant il est bien plus que cela. Car, en envoyant valser les préjugés et le manichéisme, le film n’impose aucun système de pensée. Les situations et les personnages sont complexes et le réalisateur mélange les genres avec naturel et brio, passant du documentaire à la romance ou au thriller. Il a le chic pour déjouer nos attentes avec élégance et reste constamment surprenant. Et le tout est soutenu par une mise en scène somptueuse ; des séquences comme celles de l’invasion de l’appartement ou de l’hôtel de banlieue resteront longtemps dans nos mémoires. Après le très bon Les Revenants, Robin Campillo nous propose un voyage, sans pantoufles, peut-être, mais d’une très grande classe. Bref, le haut du panier d’un cinéma d’auteur français à son meilleur. Grand prix de la section Orizzonti à Venise. JF

L’Été Chili des poissons volants - 2013 - 1h35, de Marcela Said, avec Gregory Cohen, Francisca Walker...

Fille d’un riche propriétaire foncier, Manena est une adolescente qui découvre, au cours d’un été, ses premiers émois mais aussi un monde qui existe silencieusement dans l’ombre du sien : celui des indiens Mapuche qui revendiquent l’accès aux terres, et s’opposent à son père... Sans faire de bruit, par touches impressionnistes, Marcela Said donne l’impression d’avancer sur la pointe des pieds. Au sein d’une nature luxuriante et quasi fantastique sur laquelle plane une odeur de mort, la réalisatrice pose un regard tout autant acéré que

E


délicat. D’une grande finesse d’écriture et loin de tout cliché, L’Été des poissons volants ne montre jamais frontalement la violence, mais est néanmoins d’une force peu commune. De plus, picturalement somptueux, il parvient à dire des choses très justes sur les rapports de classe ou l’adolescence entre autres. Un film d’apparence humble mais qui se révèle éclatant au final. JF + COURT MÉTRAGE

Leave not a cloud behind France – 2010 – 7’ – de Pablo Gonzalez, avec Pia Zima, Martin Stange, Lili Schackert, Michel Schumacher…

G

Gérontophilia

Canada – 2013 – 1h22, de Bruce LaBruce, avec Pier-Gabriel Lajoie, Walter Borden, Katie Boland...

Lake, dix-huit ans et une petite amie de son âge, découvre son attirance pour les hommes âgés. Engagé pour l’été dans une maison de retraite, il y rencontre M Peabody... Ne pas tomber dans la mièvrerie, savoir émouvoir et rester léger sur un sujet apparemment scabreux, ça paraît impossible ? Pourtant, il semble bien que Bruce LaBruce y soit parvenu et les critiques dans leur ensemble louent le culot et le tact du film. Pourtant l’auteur de L.A. Zombie ou de Hustler white, ne renie en rien ses dimensions provocatrices et politiques (notamment quand il aborde la dictature de la jeunesse et de la beauté). Subversif aussi parce qu’il raconte son histoire marginale en utilisant les codes policés et faciles d’accès de la comédie romantique. Ironique, peut-être, mais surtout très fort car il arrive à transformer la norme de ce genre en une arme plutôt qu’en une prison. Sources : filmdeculte.com, arte.tv

La Grande aventure Lego Voir pages Jeune Public

Le Grand cahier

Hongrie – 2013 – 1h52 – de Janos Szasz, avec Andras Gyemant, Laszlo Gyemant, Piroska Molnar…

Inspiré du roman éponyme d’Agota Kristof (1986), le film raconte le dur apprentissage de la vie, de la guerre, de la cruauté humaine des deux frères jumeaux Egyik et Masik, envoyés à la campagne à la fin de la seconde Guerre mondiale afin d’échapper aux bombardements et aux destructions. Leur mère les confie à leur grand-mère, qu’ils ne connaissent pas, une vieille femme méchante, sale et avare, surnommée La Sorcière par les villageois. Elle les exploite, les maltraite et les deux enfants apprennent à surmonter la faim, le froid, la douleur et les cruautés quotidiennes d’un monde dévasté. Le « grand cahier » du titre est celui dans lequel ils consignent, le plus objectivement possible, leurs apprentissages et leurs découvertes. On y voit la perte de l’innocence mais aussi de la conscience morale. Leur histoire terrible et inoubliable est aussi celle d’un peuple tout entier démoli et perverti par la guerre et les luttes de pouvoir. Film présélectionné aux Oscar 2014. Sources : dossier de presse

Heli

Mexique, Allemagne, Pays-Bas, France – 2013 – 1h45, de Amat Escalante, avec Armando Espitia, Andrea Vergara, Linda Gonzalez Hernandez…

H

Le ton est donné d’entrée : des tortionnaires pendent, en le faisant basculer d’un pont, un homme qu’ils viennent d’exécuter. Au Mexique la peur et la violence n’épargnent personne. Estela, 12 ans, est amoureuse d’un jeune policier qui, afin de pouvoir l’épouser, détourne un lot de cocaïne. Le cartel de la drogue ne peut évidemment laisser faire et enlève Estela, son frère Heli, ainsi que son fiancé. Telle est la méthode d’Escalante : montrer la violence de manière violente. C’est pour lui une question de morale et un parti pris antihollywoodien. Jacques Mandelbaum, dans Le

Film proposé au jeune public, les parents restant juges.

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Monde, parle d’une « histoire superbement composée dans le temps et dans l’espace » et souligne en plus une musique « langoureuse, belle à pleurer, [qui] traverse le film à la façon d’un improbable miracle ». Prix de la mise en scène au festival de Cannes 2013. Sources : dossier de presse

Filmographie : Sangre (05) - Los Bastardos (08)

cents peuvent provoquer une souffrance insoutenable, allant jusqu’à métamorphoser les victimes… Premier long-métrage du réalisateur, également scénariste et chef-monteur, ce film a obtenu le prix de la contribution artistique pour le cadrage, au festival de Berlin en 2013, ainsi que le Prix du jury au festival Premiers Plans d’Angers, en janvier 2014. Sources : dossier de presse.

Her USA – 2013 – 2h06, de Spike Jonze, avec Joaquin Phoenix, Scarlett Johansson, Amy Adams, Rooney Mara...

Theodor est au bout d’un divorce et passablement seul. Le nouvel ordinateur qu’il vient de s’acheter contient un système d’exploitation intelligent baptisé Samantha. Samantha, donc, est très intelligent(e), peut-être même un peu trop pour notre homme en perte de repères, qui va vite se prendre au jeu de la séduction... Comment plaire à une machine ? Une machine intelligente peut-elle vraiment aimer ? Tromper ? Et, surtout, peut-on se fier à ses conseils en matière de séduction... pour se trouver de nouvelles partenaires ? On imagine assez bien ce que l’auteur de Dans la peau de John Malkovich peut bien tirer d’une idée pareille, lui qui n’aime rien tant que mélanger le vrai et le faux, les apparences et le réel... surtout pour ce film, son premier vrai bébé puisqu’il en a aussi signé le scénario... Sources : dossier de presse, theglobeandmail.com, filmcomment.com

L

Leçons d’harmonie

Kazakhstan – 2014 –1h44, de Emir Balgazin, avec Timur Aidarbekov, Aslan Anarbayev, Muktar Andassov…

Aslan vit chez sa grand-mère, dans un petit village du Kazakhstan. Alors que cet adolescent de 13 ans est plutôt honnête et perfectionniste, il se heurte au collège à la violence et à la corruption de ses camarades, sans que les adultes interviennent. Humilié lors de la visite médicale, il est dès lors harcelé par Bolat, chef de gang. Aslan prépare sa vengeance, qui sera féroce. Ce drame montre comment les rapports de force entre adoles-

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La Ligne de partage des eaux France – 2013 – 1h48, un documentaire de Dominique Marchais.

La Ligne de partage des eaux s’inscrit dans le périmètre du bassin versant de la Loire, de la source de la Vienne, sur le plateau de Millevaches, jusqu’à l’estuaire. Cet espace irrigué s’étend bien au-delà de la Loire elle-même, comprenant aussi les zones d’activités et les zones humides, les fossés et les autoroutes, les chantiers… Car l’eau est partout, dans les nappes, dans l’air, se métamorphosant et reliant les territoires entre eux, dans une interdépendance. Après Le Temps de grâce (2009), une enquête sur le monde agricole français, premier volet Histoire d’un diptyque sur la France rurale, D. Marchais livre ici la partie Géographie. Cette ligne de partage des eaux désigne une ligne à la fois géographique entre bassins versants, et politique reliant des groupes et des individus. Avec un film ouvert, le réalisateur espère « décalcifier les habitudes de pensée » sur une question intéressant toute une communauté ayant en partage l’eau, un territoire, un paysage… Sources : dossier de presse, festival-entrevues.com, senscritique.com.

Vendredi 25 avril, Ciclic et les Cinémas Studio proposent une rencontre avec Dominique Marchais après la projection de 19h30.


M

Mille soleils

My Sweet Pepper Land 2013 – 1h35 – de Hiner Saleem,

France – 2013 – 45 minutes, documentaire de Mati Diop.

avec Golshifteh Farahani, Suat Husta...

Fille du musicien sénégalais Wasis Diop, plasticienne, actrice chez Claire Denis (35 rhums), Mati Diop s’est tournée vers la réalisation (4 courts métrages en 4 ans)… et a redécouvert une figure familiale incontournable, son oncle, le réalisateur légendaire Djibril Diop Mambety (mort à Paris à 53 ans, en 1998). « C’est parti d’une conversation avec mon père. Il m’a parlé de mon oncle et de Touki-bouki dont mon grand-père disait qu’il contenait toute notre histoire. Ça a fait naître un désir chez moi. Retrouver l’histoire d’un film. Savoir d’où il vient. Quelles traces il laisse… » Son film « sans domicile fixe, ni long, ni court, ni vraiment documentaire, ni tout à fait fiction », au ton très personnel, a été « la découverte ensorcelante » du Festival international du documentaire de Marseille où il a reçu le Grand prix. Et il permet de redécouvrir le magnifique film de son ainé. (Voir la fiche du film Touki bouki)

Au Kurdistan, à la frontière de l’Iran, l’Irak et la Turquie, dans un village où se croisent toutes sortes de trafics, un officier de police a la ferme intention de faire revenir l’ordre ; ancien combattant de l’indépendance kurde, il ne craint pas le conflit mais va avoir à faire face au caïd local, Aga Azzi, qui règne en maître absolu sur la région. Dans sa lutte pour le retour à la légalité, il va trouver une alliée de circonstance en la personne de Govend, une institutrice elle aussi en butte à la population locale. Après une comédie dramatique très réussie (Si tu meurs, je te tue), Hiner Saleem a choisi de retravailler avec l’extraordinaire Golshifteh Farahani (A propos d’Elly, Syngue sabour) pour un film au propos plus âpre et à l’atmosphère plus tendue pour lequel ce réfugié kurde irakien a décidé de ne pas nous proposer une version idyllique de cette région en proie à nombre de conflits...

Sources : telerama.com – afrik.com

Sources : dossier de presse, canalplus,fr

Monuments Men

+ COURT MÉTRAGE semaine du 9 au 15 avril

En pleine Seconde Guerre mondiale, sept hommes qui sont tout sauf des soldats – des directeurs et des conservateurs de musées, des artistes, des architectes et des historiens d’art – se jettent au cœur du conflit pour aller sauver des œuvres d’art volées par les nazis et les restituer à leurs propriétaires légitimes. Mais elles sont cachées en plein territoire ennemi… Cette plus grande chasse au trésor du 20e siècle est inspirée de faits qui se sont réellement passés... Impossible d’ignorer ces Monuments men au casting de stars maniant un humour tantôt burlesque tantôt absurde au service d’un sujet passionnant. Un film aussi généreux et séduisant que son réalisateur…

France – 2009 – 11’, de Izu Troin, avec Serge Avédikian.

USA – 2014 – 1h58, de George Clooney, avec George Clooney, Matt Damon, Bill Murray…

Sources : Le Monde, Télérama, Positif…

Filmographie sélective : Good night and good luck (05) - Les Marches du pouvoir (11)

Le bûcheron des mots

N

Nebraska

USA – 2014 – 1h50, d’Alexander Payne, avec Bruce Dern, Will Forte, June Squibb…

Woody Grant est un vieil homme persuadé qu’il a gagné le gros lot (1 million de dollars) à un improbable tirage au sort par correspondance. Partant du Montana, il cherche à rejoindre le Nebraska pour y recevoir son gain, à pied puisqu’il ne peut plus conduire. Un de ses deux fils se décide finalement à l’emmener en voiture chercher ce chèque auquel personne ne croit. À mi-chemin, ils s’arrêtent dans la ville natale de Woody, chez une vieille tante, où son nouveau statut de millionnaire fait de lui une vedette locale. Et c’est ici que tout dérape…

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Scénariste, Jurassic Park III (01) de Joe Johnston et producteur, Alexander Payne est aussi réalisateur : Monsieur Schmidt (03), L’Arriviste (00), et surtout The Descendants (11), comédie douce-amère sur un père, interprété par George Clooney, qui essaie de reconstruire sa famille après l’accident de son épouse. Il réalise ici une brillante comédie, tournée en noir et blanc à travers quatre États des USA, qui mélange acteurs professionnels et amateurs et reflète l’humeur et le rythme nonchalants de l’Amérique profonde. Sources : dossier de presse

vécue par Noor, l’interprète principal du film éponyme) et onirisme, le film prend la forme d’un conte. Dans son camion qui ressemble à un arbre de Noël, Noor nous propose un voyage initiatique épuré qui nous entraîne dans des contrées inexplorées. Intrigant, dépaysant. À la fois quête identitaire et recherche de l’autre, le film parle de liberté, de respect de l’autre, et nous touche au plus profond. JF

Le Parfum de la carotte Voir pages Jeune Public

P

Night Moves

USA – 2014 – 1h47, de Kelly Reichardt, avec Jesse Eisenberg, Dakota Fanning, Peter Sarsgaard...

Josh travaille dans une ferme biologique en Oregon. Au contact d’activistes qu’il fréquente, ses convictions écologiques se radicalisent. Déterminé à agir, il s’associe à Dena, une jeune militante, et à Harmon, un homme au passé trouble, pour exécuter l’opération la plus spectaculaire de leur vie : l’explosion d’un barrage hydroélectrique... Night Moves est à la fois un film d’actualité et un véritable thriller écologique. Les deux parties qui le composent - la préparation méticuleuse de l’action et ses conséquences - sont aussi intrigantes l’une que l’autre. Grâce à un casting impeccable, une mise en scène travaillée, une écriture et un montage de pointe ce film captivant a obtenu le Grand Prix du dernier festival du cinéma américain de Deauville. Une référence ! Sources : site du Festival de Deauville

Noor

Pakistan/France – 2013 – 1h18, de Çagla Zencirci, Guillaume Giovanetti, avec Noor, Uzma Ali...

Noor est un ancien Khusra, la communauté des transgenres du Pakistan, qui veut redevenir un homme. Son rêve : avoir une barbe et des moustaches et trouver l’amour d’une femme. Un vieux sage va lui indiquer le chemin, celui d’un lac sacré et magique, où les souhaits sont réalisés. Mais la route est longue et périlleuse... Entre réalité (l’histoire est l’expérience vraie

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Pelo Malo Film du mois, voir au dos du carnet + COURT MÉTRAGE semaine du 2 au 8 avril

Viejo pascuero France – 1993 – 3’, de Jean-Baptiste Huber, avec Valeska LincoleoRenault, Oscar Renault-Manriquez.

Le Petit Lord Fauntleroy La Pie voleuse Voir pages Jeune Public

QuiUSAa– 2013 peur de Vagina Wolf – 1h25, de Anna Margarita Albelo, avec Anna Margarita Albelo, Agnes Olech, Carrie Preston…

Et si son quarantième anniversaire était le point de départ d’une nouvelle vie ? C’est le vœu pieux d’Anna, cuvant lendemain de fête et gueule de bois dans le costume de sa créature, Vagina Wolf, au bord d’une piscine hollywoodienne, mais surtout au bord de la déprime. Car la réalité c’est qu’elle squatte depuis des mois le garage d’une amie, qu’elle a vingt kilos à perdre et qu’elle veut rencontrer l’amour. Alors quand elle croise le regard de braise de Katia, elle s’enflamme : elle va enfin réaliser son film ; une version lesbienne de

Q


Qui a peur de Virginia Woolf ?. Tout un programme ! Cette comédie foutraque, douceamère, est à l’image de son auteure, venue présentée son film lors du festival Désir… Désirs (cf. le site des Studio) : sincère, dynamique et chaleureuse ! IG Voir sur le site : Ça s’est passé aux Studio

R

Real

Japon – 2013 – 2h07, de Kiyoshi Kurosawa, avec Takeru Sato, Haruka Ayase, Keisuke Horibe…

Atsumi est une dessinatrice de mangas pleine de talent. Mais, depuis un an, elle est plongée dans le coma après avoir tenté de mettre fin à ses jours. Koichi, son petit ami, est dans l’incompréhension de cet acte insensé, d’autant qu’ils s’aimaient passionnément. Pour tenter de la ramener dans le réel et découvrir les raisons de son acte, une solution se présente sous la forme d’un programme novateur permettant de pénétrer dans l’inconscient humain. Koichi se lance dans l’aventure… Mais le système l’envoie-t-il vraiment là où il croit ? Adapté de la nouvelle d’Inu Rokuro, Real emprunte au fantastique, parfois mélancolique, également merveilleux. Le prestigieux réalisateur de Cure (1997), de Tokyo Sonata (2008) et de Shokuzai (2012) nous livre une science-fiction nous transportant dans l’inconscient d’une créatrice, dans son imaginaire, ses rêves… Un nouvel univers de Kurosawa à découvrir ! Sources : dossier de presse, cinema.ch, eastasia.fr.

S

centre va jeter le trouble et la déstabiliser... En 2008, Destin Cretton avait déjà réalisé un court métrage du même nom, inspiré de son passé d’éducateur spécialisé. States of Grace, premier long métrage, a remporté pas moins de trois Prix du public et Brie Larson a reçu le Prix de la meilleure interprétation féminine au festival de Locarno pour sa magnifique prestation. Venez la découvrir ! MS

States Of Grace

USA – 2013 – 1h36, de Destin Cretton, avec Brie Larson, John Gallagher jr, Kaitlyn Dever. . .

Grace dirige un centre de jeunes à problèmes. Elle travaille au sein d’une équipe d’éducateurs énergiques et sensibles. Pour chaque dérapage d’un pensionnaire, Grace intervient avec fermeté et justesse. Elle est très présente et sait recueillir les confessions de chaque adolescent en détresse. Alors qu’elle semble gérer tranquillement son travail et sa vie privée, l’arrivée d’une nouvelle jeune fille dans le

T

Tarzan Terre des ours Voir pages Jeune Public

Tom à la ferme

France/Québec – 2014 – 1h45, de et avec Xavier Dolan, Pierre-Yves Cardinal, Elise Roy…

Un jeune publicitaire voyage jusqu’au fin fond de la campagne pour des funérailles et constate que personne n’y connaît son nom ni la nature de sa relation avec le défunt. Lorsque le frère aîné de celui-ci lui impose un jeu de rôles malsain visant à protéger sa mère et l’honneur de leur famille, une relation toxique s’amorce bientôt pour ne s’arrêter que lorsque la vérité éclatera enfin, quelles qu’en soient les conséquences. Pour son quatrième long-métrage, le jeune prodige québécois a souhaité sortir de ses « zones de confort », comme il le confie, afin d’aborder d’autres sujets et d’autres ambiances que celles liées à un amour impossible, sujet plus ou moins central de chacun de ses précédents films. Après le superbe Laurence Anyways, c’est donc dans d’autres sphères que Xavier Dolan a souhaité inscrire son film. Thriller aux scènes parfois malsaines et au dénouement inattendu, Tom à la ferme promet de révéler d’autres aptitudes du jeune cinéaste, et sans doute de confirmer un talent qui n’est plus à débattre. Sources : dossier de presse, critiques web.

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Touki Bouki

Sénégal – 1973 – 1h35, de Djibril Diop Mambety, avec Magaye et Mareme Niang…

Mory, un berger venu à Dakar vendre son troupeau de vaches, rencontre Anta, une étudiante à l’université. Chevauchant une moto hérissée d’un crâne de vache, ils rêvent de quitter le Sénégal, de découvrir Paris, prêts à tout pour trouver l’argent du voyage. Troisième film du réalisateur, ce voyage initiatique a gardé toute la force de ses images surréalistes. Loin de la linéarité du cinéma africain de l’époque, il nous plonge dans une spirale d’images et de sons d’une grande beauté, où s’opposent la tradition et la modernité. Incantatoire et poétique, primé à Cannes et à Moscou en 1973, ce film culte est classé 52e parmi The 100 Best Films Of World Cinema. Une découverte à ne pas manquer. DP PS : voir la fiche du film Mille soleils Filmographie sélective : Contra’s City (69) – Hyènes (92) – La Petite vendeuse de soleil (98)

Tout est permis France – 2014 – 1h36, documentaire de Coline Serreau.

Le permis à points a 20 ans, les radars routiers encore plus, les morts de la route, eux, se comptent par dizaines de milliers depuis encore bien plus longtemps… L’auteure de Trois hommes et un couffin, Pourquoi pas ? ou bien encore Solutions locales pour un désordre global, a fait pénétrer sa caméra dans les stages de sensibilisation, où des Français très ordinaires, souvent persuadés d’être victimes d’une injustice, voire d’un racket, viennent tenter de récupérer les points perdus… Entre humour et tragique, le film, traversé d’une énergie et d’une volonté de convaincre saisissantes, nous renvoie à nos incivilités routières plus ou moins avouées, plus ou moins avouables et, fruit d’une démarche politique revendiquée, met, de manière assez crue, la lumière sur les désinformations que

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répandent divers lobbies tels que alcooliers, constructeurs automobiles ou constructeurs téléphoniques. Pour reprendre les paroles d’une spectatrice venue assister à la rencontre du 6 mars : « 1h30 passée dans la salle devant le film, c’est 16 heures de stage de rattrapage de points économisées… » ER Voir sur le site : Ça s’est passé aux Studio

+ COURT MÉTRAGE semaine du 16 au 22 avril

A la mémoire du rock France – 1963– 11’, Documentaire, de François Reichenbach.

La Traversée du temps Voir pages Jeune Public

Les Trois sœurs du Yunnan Chine – 2012 – 2h28, de Wang Bing.

Trois toutes jeunes sœurs, abandonnées par leur mère, vivent seules dans un village d’une grande pauvreté. Lorsque le père revient les chercher, il laisse pourtant l’aînée au village… Mélodrame ? Non, documentaire par l’un des plus rigoureux documentaristes chinois, qui sait toujours prendre le temps d’imposer son rythme d’observation au spectateur pour mieux le faire entrer dans l’univers qu’il décrit. Ici, on est prié de suspendre un temps son envie de juger pour s’en tenir au rôle d’observateur. Filmographie sélective : À l’ouest des rails (2003), Fengming, chronique d’une femme chinoise (2007)

Une promesse

Belgique/France – 2014 – 1h38, de Patrice Leconte, avec Rebecca Hall, Alan Rickman, Richard Madden, Toby Murr...

Changement de registre pour le prolifique réalisateur tourangeau qui, après un film d’animation (Le Magasin des suicides), adapte en anglais l’œuvre de Stefan Zweig, Le Voyage dans le passé. Allemagne, 1912. Un jeune diplômé, d’origine

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modeste, devient le secrétaire particulier d’un homme âgé et malade, patron d’une usine de sidérurgie. L’épouse de ce dernier est une femme de trente ans, belle et réservée. Le jeune homme s’éprend d’elle, sans oser révéler ses sentiments. Alors que, dans le huis clos de la demeure, couve cette passion amoureuse, le patron décide d’envoyer son protégé au Mexique, afin d’y superviser l’exploitation de mines de fer. Deux ans de séparation et une promesse de l’épouse désespérée… « J’ai cherché à être au plus près des personnages, de leurs tourments, des enjeux émotionnels très forts que Zweig décrit si bien. J’ai été heureux de tourner un film dans lequel les silences ont autant d’importance que les mots, un film peu bavard, mais où tout est dit. » Sources : dossier de presse

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Wrong Cops

France – 2014 – 1h22, de Quentin Dupieux, avec Mark Burnham, Eric Judor, Steve Little…

Oizo, (Q. Dupieux lui-même) Wrong cops est une fresque comique, où s’entremêlent les destins de flics au comportement malsain et dérangé : Duke, pourri et mélomane, deale de l’herbe et terrorise les passants ; ses collègues sont un obsédé sexuel, une flic maître chanteur, un chercheur de trésor au passé douteux, un borgne difforme se rêvant star de techno… Leur système fait de petites combines et de jeux d’influence se dérègle lorsque la dernière victime de Duke, un voisin laissé pour mort dans son coffre, se réveille. Dans ce film tourné aux USA : « Je ne parle absolument pas de l’Amérique… C’est un regard léger sur les misères de nos sociétés, un regard attendri et méprisant sur l’être humain. Mes idées sont un magma de plein de choses. » (Q. Dupieux). À consommer sans modération si vous aimez l’univers parfaitement déjanté d’un artiste-réalisateur inclassable (Rubber – 2010, Wrong – 2012). Sources : dossier de presse festival de Deauville

Rythmé par la musique électronique de Mr

lundi 7 avril -19h30 En partenariat avec l’Atelier Super 8

CYCLE MUSIQUE

ET CINÉMA

Symphonie mécanique Images pour Debussy

Deux ballets d’images réelles, montées en synchronisme avec la musique.

Entr’acte

de René Clair (1924), France Noir et Blanc 22’

lundi 14 avril -19h30 L’Accordéon de Igor Savtchenko (1934), URSS Noir et Blanc 1h06, avec Zoïa Fedorova, Piotr Savie.

Soirée présentée par Donatien Mazany.

lundi 21 avril -19h30 L’Homme qui en savait trop de Alfred Hitchcock (1934), GB Noir et Blanc 1h24, avec Leslie Banks, Peter Lorre, Pierre Fresnay.

Tout public à partir de 12 ans.

Programme détaillé dans le dépliant disponible à l'accueil et sur www.cinematheque-tours.fr

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FILM DU MOIS

Pelo Malo Venezuela – 2013 – 1h33, de Mariana Rondón, avec Samuel Lange, Samantha Castillo, Nelly Ramos…

J

unior a neuf ans. Il vit seul avec son petit frère et sa mère à Caracas, dans un quartier très défavorisé. Junior a les cheveux très frisés de son père (pelo malo, ou mauvais cheveux ), mais rêve de les avoir lisses comme sa mère. Car ce que Junior aime dans la vie, c’est chanter : il se rêve habillé d’un costume trop grand pour lui, comme les stars qu’il entend à travers le son médiocre d’une radio de bus. Il aime danser, aussi. Sa mère, elle, n’y voit que les lubies peut-être dangereuses d’un petit garçon en recherche d’identité. Le voir chanter ou danser, elle le refuse. Et quand Junior emploie divers stratagèmes, tous plus étonnants les uns que les autres, pour rendre ses cheveux lisses comme il les voudrait, elle se met en colère. Junior, lui, se trouve presque perdu, entre cette mère fatiguée et lassée d’une vie compliquée, chahutée par les absences et les refus ; et cette grand-mère qui l’habille d’une robe, croyant avoir compris ce qu’il veut... Il ne trouve un peu de réconfort qu’auprès de sa camarade rondouillette, habitant à deux pas de chez lui, entre robes de princesse et rêves de miss. Ensemble, ils repeignent leur univers aux couleurs qu’ils affectionnent… Ce n’est pas un sujet facile qu’aborde Pelo

Malo, mais Mariana Rondón a su en faire une fresque qui, malgré ses traits durs, révèle une certaine douceur à travers le visage et les rêves de son protagoniste. Les contrastes entre l’enfance et l’âge adulte y sont interrogés à maintes reprises, à l’occasion des conflits agitant Junior et sa mère. Alors que celle-ci s’affaire dans les rues d’une ville grouillante, son fils se cherche, observe les balcons des immeubles alentour, erre un peu. Mais, ce dont le film se fait le mieux l’écho, c’est bien de cette recherche d’identité dans un monde normé et parfois presque dogmatique. Pelo Malo ne traite pourtant pas de théorie de genre ou quoi que ce soit de véritablement analogue, mais bien de la construction d’un individu parfois malmené par les carcans familiaux ou sociaux. Les deux acteurs principaux, Samuel Lange et Samantha Castillo, y sont d’une justesse plus que convaincante, à laquelle s’ajoute celle des seconds rôles, excellents également. Couronné par le Concha d’or au Festival de San Sebastián en 2013, ce film vénézuélien, troisième long-métrage de Mariana Rondón, est d’un touchant parfois rare au cinéma de nos jours, porté par une photographie superbe et une mise en scène maîtrisée. MR

LES CARNETS DU STUDIO – n° 322 avril 2014 – 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - CPPAP n°0219 K 84305

www.studiocine.com – 08 92 68 37 01


JEUNE PUBLIC

La Grande aventure Lego USA – 2014 – 1h40, de Phil Lord et Chris Miller.

2D 3D

VF

Tout public à partir de 6 ans

Les briquettes colorées s’animent sur nos écrans. Emmet, petit Lego travailleur, mène une vie monotone. Mais un jour tout bascule ! Notre bonhomme va devenir un héros bien malgré lui et va tenter de sauver sa planète en compagnie de Batman, Wonderwoman...

,

La Traversee du temps Japon – 2006 – 1h38, film d’animation de Mamoru Hosoda.

VF

Tout public à partir de 8 ans

Plusieurs fois primé, ce joli film d’animation nous montre une adolescente capable de jouer avec le temps qui passe. À partir de 4 ans France – 2014 – 45 mn, quatre courts métrages d’animation de divers réalisateurs.

Des histoires pour les petits autour de la gourmandise, de l’amitié, de l’enfance.

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Mercredi 2 après la séance, atelier De films en livres avec Libr’enfant : Rachel viendra raconter des histoires de lapins et de carottes…


VF Tout public à partir de 7 ans

Cedric Errol vit modestement avec sa mère à New York. Sa vie est bouleversée par l’arrivée de Havisham, chargé de le ramener en Angleterre auprès de son grand-père, le comte de Dorincourt…

Tarzan

À partir de 6 ans

Allemagne – 2014 – 1h34, film d’animation de Reinhard Kloss.

La dernière adaptation de Tarzan, légende de la jungle, avec une technique nouvelle : la motion capture.

La

VF

Pie voleuse Italie – 1965 à 1973 – 36 mn, courts métrages en papier découpé de Emanuele Luzzati et Giulio Gianini.

sans paroles

À partir de 3 ans

Trois fabuleuses adaptations des opéras de Rossini, réalisées par un peintre et un cinéaste.

France – 2014 – 1h27, documentaire de Guillaume Vincent, raconté par Marion Cotillard.

L’immense Kamtchatka est le territoire des grands ours bruns sauvages. Nous les suivons au milieu de magnifiques paysages, de l’ourson espiègle à l’adulte protecteur ou brutal… Tout public à partir de 6 ans

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JEUNE PUBLIC

GB – 1980 – 1h39, version restaurée de Jack Gold, avec Ricky Schroder, Alec Guinness…


En bref…

Ici… ` NOCES DE SANG Duras et le cinéma c’est une longue histoire d’amour : ses écrits ont été maintes fois adaptés pour le grand écran par divers réalisateurs, comme Hiroshima mon amour par A. Resnais (ce n’est qu’après la sortie du film que le scénario a été publié), Moderato Cantabile par Peter Brook, L’Amant par J.-J. Annaud… et ellemême est passée à de multiples reprises derrière la caméra avec notamment La Femme du Gange, India Song, Le Camion… Dix heures et demie du soir, grâce à Fabrice Camoin, vient désormais compléter la liste ! Ce sera encore une histoire d’amour qui finit mal (l’amour n’est pas gai chez Duras) puisqu’elle narre la fuite d’un homme après qu’il eut assassiné sa femme et l’amant de celle-ci. Marina Foïs et Sami Bouajila seront les protagonistes de ce crime passionnel, en compagnie de Louis-Do de Lencquesaing et Valérie Donzelli. ` ENAMOURET L’amour et ses tribulations ne finissent pas de tarabuster Emmanuel Mouret. Caprices, son prochain long, exploitera le même filon. Cette fois ce sont Virginie Effira et Anaïs Demoustier qui accapareront les pensées du héros, interprété, cette fois encore, par le réalisateur lui-même. ` RENAISSANCE Après Adieu Gary en 2009, Nassim Amaouche revient à la réalisation avec Des Apaches, pour lequel il sera même interprète. Laetitia Casta et André Dussolier l’aideront à donner corps à l’histoire de Samir qui va faire l’expérience de la liberté en s’affranchissant du poids de la famille et des traditions, après le décès de sa mère et la première rencontre avec son père. ` L’HEURE DU BILAN Quatre ans après Les Mains en l’air, Romain Goupil revient derrière et devant la caméra pour Le Jour venu. À cette occasion il retrouvera Valeria Bruni-Tedeschi qui lui donnait déjà la réplique dans ce même film et Noémie Lvovsky qui était sa partenaire dans Les Mains libres de Brigitte Sy. Ce nouveau film semble être celui du bilan d’un homme, du chemin parcouru avec ses hauts, ses bas, les frémissements de la première rencontre, le temps écoulé depuis… R. Goupil a construit son film en dix chapitres : Pôle emploi, L’Argent, L’Idée, Le Fils… qu’il fera s’entrecroiser, à l’image de ce qui se passe dans la « vraie » vie. ` S’IL N’EN RESTE QU’UN… Mathieu Kassovitz n’est pas du genre à éviter la polémique. Il l’a montré notamment avec son controversé L’Ordre et La Morale, sur la prise

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d’otages d’Ouvéa en 1988. Pour sa prochaine réalisation, il persiste et signe, en s’attaquant à la version officielle sur les attentats du 11 septembre 2001 : « Cette version officielle, on ne l’accepterait pas d’un gouvernement russe ! Toutes les grandes entrées en guerre de l’Histoire se sont basées sur un mensonge initial. Faire un film sur le 11 septembre, ce serait le résultat de huit ans d’enquête, car ce qu’on nous dit sur le sujet n’est pas vrai. » On peut facilement augurer que le financement ne va pas être simple, et la distribution en salles non plus.

Et ailleurs… ` MÉMOIRE DE NOS PÈRES Sofia Coppola est en train d’adapter Fairyland : A Memoir Of My Father d’Alysia Abbott, la biographie de Steve Abbott. Dans les années 70, cet écrivain et activiste bisexuel s’installera avec sa petite fille de deux ans, dans un San Francisco en pleine lutte pour les droits des homosexuels, sous l’impulsion, entre autres, de l’emblématique Harvey Milk (cf. le film de Gus Van Sant). En accompagnant son père partout, la jeune Alysia rencontrera nombre d’artistes, d’écrivains, de penseurs, dont les rangs vont être dévastés par le Sida. Après Somewhere, la réalisatrice explore un nouveau pan des relations père/fille. On se demande bien pourquoi elle serait concernée par une telle thématique ! ` LE DERNIER NABAB Plus de dix ans que Warren Beatty a déserté les écrans. En même temps, sa dernière prestation était pour Potins mondains et amnésies partielles, un film n’ayant pas vraiment marqué les mémoires. Pour son retour, de réalisateur et d’interprète, il évoquerait un personnage qui aurait beaucoup à voir avec le milliardaire mythique, Howard Hughes. ` LA GRANDE BOUCLE Avec son impressionnante prestation dans Dallas Buyers Club, Matthew McConaughey est devenu un très grand comédien (nous ignorons au moment de la rédaction de ces lignes, s’il a décroché l’Oscar du meilleur acteur), après des années d’interprétations faiblardes dans de sirupeuses comédies romantiques. Depuis Soderbergh avec Magic Mike, des réalisateurs tels W. Friedkin, L. Daniels, J. Nichols, M. Scorsese et J.-M. Vallée donc (que des grandes pointures) lui ont fait confiance et ont permis d’attester que ce changement de registre n’était pas un feu de paille. Un sansfaute que McConaughey confirme en ajoutant à cette liste, les noms de C. Nolan et de G. Van Sant. Et puis, ultime preuve qu’il est désormais devenu une référence, c’est que son parcours singulier va être transposé au cinéma. La boucle est bouclée. IG

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Bande annonce

« On n’est pas des pédés ! » Le sport a-t-il un problème particulier avec l’homosexualité ?

P

our les sportif-ve-s LGBT (lesbiennes, gays, bi et transgenres), il est commun de cacher son orientation sexuelle, et de s’afficher avec des personnes du sexe opposé. Des directives parfois imposées par ses propres sponsors ou qu’on se donne pour se protéger. Mentir pour ne pas choquer, ne pas heurter ses concurrents ou ses coéquipiers. Comment être sportif-ve et homosexuel-le ? Comment le dire ? Faut-il le dire ? Quelles sont les conséquences dans les sports collectifs ? Dans les vestiaires ? Quel est le regard des autres lorsqu’on préfère une personne du même sexe et que l’on pratique un sport dit « viril » ? Être homo et athlète, est-ce incompatible ?

Un rapport d’Anthony Mette, psychologue du sport, est paru en 2011 et l’on peut y lire que les sportifs hommes pratiquant une discipline dite masculine sont les plus enclins à adopter une attitude ambiguë ou négative envers les homosexuels. Selon l’étude, les caractéristiques dites masculines (agressivité et force par exemple) exigées dans certains sports pourraient créer

un contexte favorisant l’homophobie. Elle montre aussi que les sportifs de compétitions de haut niveau, par opposition aux amateurs, sont plus homophobes. Le sport est régulièrement mis en avant pour ses vertus et valeurs d’égalité, de partage, de générosité et d’ouverture à l’autre. Cependant même si le sport peut être un puissant vecteur d’intégration, il peut aussi être un lieu d’exclusion, d’oppression et de discriminations. Parmi celles-ci, les questions de genre et d’orientation sexuelle occupent une place toute particulière de par les formes qu’elles prennent, ou la violence par laquelle elles peuvent s’exprimer. « Le racisme, tout le monde est contre. L’homophobie, il y a des gens qui ne comprennent même pas pourquoi on travaille dessus », s’étonne ainsi Pascal Brèthes, président du Paris Foot Gay. L’homophobie, comme le racisme, n’a pas sa place dans le sport et c’est cela qu’il nous faut combattre aujourd’hui, ensemble. Sébastien Tüller, pour le Centre LGBT de Touraine.

NOUS EN REPARLERONS PROCHAINEMENT…

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Interférences

Belgian Lovers E n son temps, personne n’a pu échapper à la nouvelle – l’existence de réfugiés fiscaux au cœur du plat pays – le plus connu d’entre eux étant à la fois un symbole national (tombé dans la potion quand il n’était pas aussi volumineux) et grande gueule notoire (qui prouve que l’abus d’alcool peut être dangereux pour la clarté des propos). La périphrase « pays outre Quiévrain » se lit naturellement dans les deux sens et désigne, pour les Wallons, la France. Pas étonnant qu’il existe donc, symétriquement, des réfugiés qui, eux, seraient plutôt… artistiques. Vu le faible volume de la production belge (même si les tax shelter font que tous les films français sont désormais également belgo-luxembourgeois), ils ont trouvé refuge sur les grands écrans hexagonaux avec un incontestable talent. Je veux parler de Benoît Poelvoorde, François Damiens et Bouli Lanners*. Ils se sont fait connaître soit par la télévision, soit par la réalisation, et le plus souvent sur un mode essentiellement comique. Les deux premiers sont également de très bons clients pour les plateaux télé où ils savent faire le spectacle en étant à la fois drôles et incongrus. Même si le seul film qui les regroupe dans le même casting est Rien à déclarer (de Dany Boon), essai raté de remake du succès des Chtis, petit à petit, la notoriété aidant, ils se sont vu offrir des rôles plus

graves, dans des films d’auteur, où ils excellent. Malgré des physiques assez communs (ils n’ont rien du top model bodybuildé), ils sont parvenus à incarner des figures de séducteurs assez atypiques : le séducteur timide (BP dans Les Émotifs anonymes de Jean-Pierre Améris) ou inquiétant (BP encore dans Une histoire d’amour d’Hélène Filières), le séducteur quelconque (FD dans La Délicatesse des frères Foenkinos), le séducteur grand frère un peu paumé (BL dans Lulu femme nue de Solveig Anspach). Des personnages qui ont étreint Isabelle Carré, Laetitia Casta, Audrey Tautou, Karine Viard ! Qu’est-ce qui fait le charme de ces Belges sans accent ? La fille de Lulu se le demande : non seulement il est vieux mais en plus il est gros ! Et pourtant, comment le dire autrement : Bouli Lanners est beau dans ce film ! Beau dans le regard de cette femme perdue. Beau dans celui de ces deux pieds nickelés de frères. Beau dans l’objectif aimant de la réalisatrice. Peut-être parce que dans l’improbable film Louise Michel de Delépine et Kervern, il jouait le rôle d’une femme (et Yolande Moreau celui d’un homme), il se dégage de son visage (pourtant sérieusement barbu) et de son sourire timide une douceur presque féminine. Irrésistible. DP * Sans oublier le génial Olivier Gourmet.

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Courts lettrages Les rédacteurs ont vu : Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée

On voit d’abord un film calibré pour que son interprète principal, Matthew McConaughey, soit oscarisé. Il faut dire qu’il a à la fois un abattage et une finesse de jeu assez sidérants. Jared Leto est lui aussi impressionnant. Mais petit à petit on est pris par une histoire qui va bien audelà des simples performances d’acteurs. Les exactions des laboratoires pharmaceutiques, l’attitude ambigüe de la FDA (Food and Drugs Administration) prennent de plus en plus d’importance. Plus profondes, plus fondamentales encore, les interrogations sur la notion même de principe de précaution, qui oppose ici recherche médicale encadrée, rigoureuse mais lente, très lente, et pratiques empiriques non contrôlées mais visiblement efficaces. Un film vraiment très intéressant à tous points de vue. AW

Lors d’une hospitalisation, Ron Woodroof occupe le box voisin du troublant et sensible Rayon (alias Jared Leto, superbe acteur notamment remarqué en 2001 dans Requiem for a dream, de Darren Aronofsky), jeune transgenre et toxico. Cette scène de leur rencontre est très significative lorsque Ron réagit violemment face à l’attitude de Rayon qui s’approche de lui pour se présenter et échanger, puis pour tenter de le soulager d’une crampe douloureuse en lui massant le mollet. Peur de la maladie (dont il est pourtant porteur lui-même) et/ou surtout peur épidermique de cette différence que représente Rayon aux yeux du cow-boy au Stetson ?! Ce genre de machos intolérants ne s’échappe malheureusement pas de ses stéréotypes sexistes et homophobes ! Et bravo au duo Oscarisé ! RS

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Dans la période actuelle troublée et troublante où la simple image d’un sexe fait crier au scandale, Dallas Buyers Club, dès les premières minutes, donne le ton avec un mélange détonnant de sexe, alcool et drogue. Jared Leto et Matthew McConaughey mènent magistralement la danse. J’ai d’abord été choquée, puis émue par la métamorphose et, enfin, conquise par le combat engagé contre les lobbies médicaux ! MS

Life is strange, chante Marc Bolan en conclusion de cette fresque portée par un McConaughey magistral. Life is strange, c’est ce que semble se dire Ron Woodroof tout au long du film. Comment lui, macho assumé à la ravissante moustache, pourrait-il avoir contracté le VIH, et développé le SIDA ? « I’m not a queer, motherfucker ». Pas queer et pourtant, bel et bien terrassé par le mal nouveau sévissant dans ces années 80. Obligé de faire avec. Et finalement emporté dans ce parcours quasi-initiatique qui donnera un sens à sa vie. Dallas Buyers Club avait peut-être d’avance tout pour plaire : beau (et gros !) casting, sujet sensible (restant d’actualité…), bande son séduisante… Mais s’il est aussi réussi, c’est bien car la force de sa mise en scène et de son écriture servent absolument une justesse extrême, à côté de laquelle il était pourtant si risqué de passer. MR Film manichéen, accumulant poncifs et stéréotypes autant sur l’homosexualité et l’homophobie que sur l’industrie pharmaceutique et


la FDA, par un réalisateur québécois tournant en langue anglaise (un comble !) De fait, sous l’apparence d’un humanisme racoleur, on ne peut que soupçonner le cinéaste de mercantilisme, à l’image de son héros, dont la conversion semble peu crédible (du moins à l’écran. Ceci dit, c’est peut-être vrai dans la réalité puisqu’il s’agit d’un fait réel, mais le film ne sert malheureusement pas le propos). EC

Se déguiser, se transformer, être un autre, forcément, les acteurs aiment ça. Et Matthew McConaughey n’échappe pas à la règle, mais ici, il tire très fort sur la corde en ayant maigri plus que de raison. Du coup est-ce vraiment son jeu que l’on admire ou ce corps décharné (et les trente kilos qui lui manquent) qui nous fascine ? JF

Ce film nous donne à voir deux mutations incroyablement bluffantes : celle d’un crétin abyssal, un tocard d’anthologie, que la maladie, la confrontation à la toute puissance et à l’hermétisme de la médecine, transforment en être pensant, responsable et militant. Mais aussi, celle d’un comédien, bellâtre insipide voué aux comédies romantiques sans intérêt, en un acteur de composition, désormais capable de relever les paris les plus audacieux. Deux raisons (mais pas les seules) essentielles, attestant l’excellence de ce film. IG

De même que même les paranoïaques ont des ennemis, ce n’est pas parce qu’un film s’en

prend à un système comme celui de l’administration américaine qu’il faut tout de suite hurler à la grosse machination... Au-delà du caractère très hollywoodien qui nous dépeint la lutte d’un homme seul contre tout un système, il ne faut pas perdre de vue que l’administration américaine et les industries pharmaceutiques n’ont pas été d’une exceptionnelle clairvoyance dans les débuts de la lutte contre le Sida... et c’est un euphémisme. ER

Rodéo entre la vie et la mort (qui chevauche de gros poncifs mais reste en selle grâce à la tenue des acteurs), c’est l’histoire d’une rédemption par la maladie (ou comment s’ ingérer de la tolérance en intraveineuse) ! DP

Incroyable ! Je suis sortie de cette séance médusée par la transformation radicale d’un acteur, Matthew Mac Conaughey. Celui qui ne savait qu’exhiber ses pectoraux dans les années 2000 et que, pour ma part, j’avais trouvé peu crédible dans Mud, devenait déjà plus inventif dans une séquence de 2 minutes dans le film de Scorsese, Le Loup de Wall Street, où il prônait la nécessité de se masturber à outrance. Pour incarner Rob Woodroof, histoire vraie d’un homme atteint du Sida dans les années 80, il a perdu 23 kilos en 4 mois, redoutable identification à un malade. Que s’est-il passé dans la vie de ce superbe séducteur pour qu’il parvienne à vivre ce film comme une mission, à s’y engager corps et âme et nous happer totalement ? Formidable ! CP

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Interférences Only Lovers Left Alive Goldzius et la compagnie du pélican

Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux.

rond n E

Eugène Ionesco

A

u commencement d’Only Lovers Left Alive, de Jim Jarmusch, une main pose le bras d’un électrophone sur un disque vinyle : le récit débute donc en musique. La caméra, au plafond, tourne avec le 45 tours, sur les deux héros de cette histoire minimale, Adam, allongé dans son salon musée de Détroit et Eve, dans sa chambre d’hôtel de Tanger. Dans Goltzius & la compagnie du pélican, de Peter Greenaway, c’est tout le générique qui suit ce mouvement rotatif, dans une accumulation excessive comme les aime le réalisateur, la presse de l’imprimerie, la scène en bois octogonale (puisqu’ici tout ne sera que théâtre), la ronde des musiciens. Le premier tableau mis en scène par la compagnie présentera une version passablement hérétique de la Genèse avec un Dieu d’apparence plutôt grécoromaine et de nouveau Adam et Eve… qui nomment le monde en tirant des cartes : au commencement était le Verbe. Ce qui n’est pas le cas des deux réalisateurs : leur scénario tient pratiquement en une seule phrase. Adam et Eve se retrouvent pour poursuivre leur idylle, vieille de plusieurs siècles, lorsque débarque Ava, une petite sœur incontrôlable… Pour obtenir le financement de son imprimerie, la compagnie de Goltzius doit divertir le marquis d’Alsace pendant six nuits… Ni l’un, ni l’autre n’ont jamais été passionnés par le récit en lui-même. Les images

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et la musique sont la vraie matrice de leur cinéma. Les deux films sont obsessionnellement remplis de signes culturels : les tableaux au mur, la collection de guitares et de 45 tours d’Adam, les livres d’Eve, les tableaux, les gravures, les calligraphies, les discours dont Greenaway sature l’écran en couches successives. Immédiatement, on reconnaît l’univers de l’auteur et le spectateur est fasciné par le charme mélancolique du duo de vampires abstinents et par la magie par prolifération de Goltzius. Puis vient une certaine lassitude : l’impression d’un système qui tourne en rond, enfermé sur ses propres codes, sur des clés qu’il ne partage plus vraiment avec celui qui regarde le film. C’était particulièrement le cas du dernier film de Jarmusch, The limits of control, glaciale variation purement formelle. C’était le cas de La Ronde de nuit de Greenaway, pâtisserie pédante et indigeste. Est-ce la vengeance du récit (ou plutôt de son absence) ? Pourtant, cette fois-ci, la ballade des vampires dans Détroit anéanti et dans le labyrinthe des rues de Tanger, garde un charme indéniable. Peut-être parce que, malgré la raréfaction du sang, le cœur bat encore… alors que chez Greenaway, la chair est triste hélas, pas bandante pour un sou, les amours pitoyables, les humains grotesques et ne reste qu’un pur jeu intellectuel et sans affect… qui semble tourner à vide. DP


Face à face L’Amour est un crime parfait

Le corps du deni L’assassinat a ceci de comparable avec l’acte sexuel qu’il est souvent suivi de la même question : que faire du corps ? Amélie Nothomb

S

ous son titre alléchant, avec son casting impeccable et ses décors sublimes, le dernier film des frères Larrieu est un objet lisse à la fois intrigant et fascinant. Au-delà d’une pseudo enquête à laquelle on n’arrive pas vraiment à croire, (pas plus en tout cas que le lieutenant affable qui y déambule en souriant), se déroule quelque chose de trouble, sous la surface des apparences. « Qu’est-ce qui ne va pas, Marc ? » lui demande sa sœur et telle pourrait être l’interrogation sourde qui travaille le récit. Dès le magnifique générique où on le suit dans les lacets enneigés qui mènent à son chalet, éclairés par les phares de son vieux 4x4, on sait que l’on aura affaire à une histoire labyrinthique, glaciale et sombre, où les désirs seront mis en scène (« Tu n’as pas froid ? » demande Marc. « Je suis toute chaude ! » répond Barbara.) Prologue provocant. Le réveil est brutal. Comique. Marc ne se souvient pas du prénom de la brune excitante, essaie les prénoms : Nina, Nadia… sans parvenir à la tirer du sommeil. Puis le corps disparaît dans un trou du récit. Dans le hors champ qui commencera à contaminer toute l’histoire. L’inquiétude gagne peu à peu Marc qui n’a rien de qu’il veut paraître : un calme professeur qui fait des phrases en vapotant devant un parterre d’étudiantes

séduites. Tout est un jeu d’apparences trompeuses : la splendeur des paysages enneigés, la faculté avec son architecture irréelle, les hordes de jeunes femmes qui y défilent lascivement. Est-ce un récit purement fantasmatique ? Prisonnier de ses pulsions, Marc se retrouve coincé entre Anna, la trop jolie femme délaissée, l’étrange et séduisante belle-mère de la disparue, Annie, l’étudiante hystérique dont le père mafieux fait régner une violence incompréhensible et Marianne, la sœur avec laquelle il entretient des relations incestueuses. Petit à petit, tout devient cauchemardesque. Les symptômes physiologiques s’accentuent : maux de tête, saignements de nez, amnésie et somnambulisme. Au volant de sa voiture, il est comme un animal blessé. (Lorsque sa sœur le découvrira nu et ensanglanté, sous la douche, il évoquera une scène primitive : le meurtre d’un sanglier par des loups.) Mais où et comment a-t-il tué le motard qui le contrôlait ? La scène où il porte le cadavre sur son dos dans la blancheur immaculée de la neige devient totalement irréelle. Puis il le fera basculer dans le gouffre glacé où il redécouvrira le corps de Barbara avant de l’y jeter définitivement. Mystérieux et ironique, le récit s’achève sur

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Face à face L’Amour est un crime parfait

les auteurs courent toujours... un étrange épilogue en queue de poisson. Anna se révèle être une policière, infiltrée dans leur authentique, lui assure-t-elle, histoire d’amour. Lors d’un week-end en tête à tête dans le cadre idyllique d’un nid d’amour design en bord de lac, Marc lui apprend qu’enfants, leur mère les battait, lui et Marianne, et qu’il avait fait disparaître ses parents dans un incendie criminel jamais suspecté. L’histoire s’achève de la même façon, dans un brutal embrasement final : tout part en fumée, sur la dernière cigarette de Marc qui fait exploser, en l’allumant, le gaz qui s’échappait de la cheminée, dans un spectaculaire geste suicidaire. Il ne laissera rien derrière lui (comme il avait effacé les corps de ses parents), uniquement cette sentence énigmatique en forme d’épitaphe : L’amour est un crime parfait. DP

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O

n peut aborder ce film sous plusieurs angles : polar, étude de mœurs, psychologie, psychanalyse… et c’est une richesse, mais à condition de maîtriser tous ces niveaux de lecture. Ce n’est malheureusement pas le cas et on sort frustré de la projection tant les auteurs semblent être passés à côté de leur sujet. Le film possède pourtant d’indéniables atouts : un récit tendu, imaginatif, des paysages magnifiques, une distribution de choix mais, hélas, tout s’écroule comme un château de cartes, faute d’une véritable mise en scène. Et pourtant ils s’y sont mis à deux ! Mais ne sont pas les frères Coen qui veut. Il manque à ce film pour être crédible plus d’attention au scénario et surtout un véri-


table point de vue sur les personnages. Or ceux-ci sont mal dessinés, caricaturaux, bancals. Alfred Hitchcock avait coutume de dire que pour faire un bon film il faut 1) une bonne histoire, 2) une bonne histoire, 3) une bonne histoire. Nous avons ici une bonne idée d’histoire, mais seulement une bonne idée, pas un vrai scénario. Trop de situations et de personnages invraisemblables empêchent qu’on se prenne au jeu : le Don Juan irrésistible pour qui toutes les femmes sont prêtes à se damner, la femme-flic infiltrée comme espionne auprès du suspect dans une simple affaire criminelle, et qui bien sûr sera incapable de résister au charme ravageur de cet homme fatal, la nymphette fille de mafioso, étudiante en écriture littéraire, raide dingue elle aussi de ce prof mal fringué, vapotant et veule, le gendarme motard sans équipier, son meurtre en plein air qui passe totalement inaperçu. On en oublie peut-être. Quoi qu’il en soit, impossible de se laisser embarquer dans une histoire aussi mal ficelée, où les coutures sont aussi apparentes.

On pourrait encore à la rigueur passer sur ces énormes maladresses scénaristiques, mais que dire de la direction d’acteurs, livrés à eux-mêmes et décidément à la dérive. Mathieu Amalric a du métier mais il n’est vraiment pas fait pour le rôle, il ne peut y être pris au sérieux. Et que dire de l’excellente Karin Viard et de sa grotesque moumoute blonde ! En névrosée incestueuse elle fait tout ce qu’elle peut mais le personnage est vraiment trop ingrat, trop dur à défendre. Quant à Maïwenn, de film en film elle fait encore et toujours du Maïwenn, avec sourire craquant et regard mouillé ! Et la pauvre Sara Forestier, vraiment pas gâtée à devoir défendre un personnage caricatural à la limite du ridicule… Seul Denis Podalydès tire son épingle du jeu, mais c’est le métier très sûr du comédien de théâtre qui lui permet de donner de la cohérence à son personnage. Non, décidément ce sombre brouet ne passe pas. On est quand même en droit d’attendre moins de désinvolture de la part de cinéastes ambitieux. AW

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Interférence Ida 12 Years A Slave

Improbable rencontre : comme un objet qui lui serait presque extérieur, voire étranger. Ses pulsions sexuelles non maîtrisées faisaient de son corps un objet de torture pour lui-même.

D

Avec 12 Years A Slave (mais pourquoi diable obliger les spectateurs à demander à la caisse un titre anglais difficile à prononcer, alors que « 12 ans d’esclavage » serait tout aussi élégant?) S. McQueen continue son travail d’exploration de l’utilisation possible des corps à l’écran . Ici, le corps est utilisé comme corps du délit, objet de démonstration visible des effets de certaines des pires mortifications possibles, les coups de fouet inlassablement répétés et distribués au bon vouloir des maîtres esclavagistes.

Dans Hunger, il était notamment question de traduire à l’écran, par les marques que la grève de la faim impose sur le corps de Bobby Sands, l’horreur des enfermements vécus par les prisonniers de l’IRA. Dans Shame, Brandon, le héros, réifiait son corps pour l’utiliser

Les scènes de flagellation sont insupportables : il n’y a pas grand-chose d’aimable à voir éclater la chair ou gicler le sang de l’un de ses semblables. Mais leur nécessité n’apparaît pas évidente... est-il besoin (à grands renforts de raccords et de gros plans) de nous rappeler que fouetter un esclave c’est pas gentil ? Est-il vraiment nécessaire de remettre sous notre nez les sévices infligés pour nous convaincre que c’est très laid de faire du mal à un autre homme ? Steve McQueen, cinéaste doué et efficace, est par exemple beaucoup plus convaincant lorsqu’il nous dépeint l’esclavage chez un propriétaire presque humain que lorsqu’il déplace son héros chez un pur psychopathe. Il est en effet beaucoup plus fructueux de s’interroger sur la nature même des relations maître/esclave lorsque celles-ci ne sont pas fondées sur une

ès Hunger, on avait compris que Steve McQueen, artiste plasticien de son état et très reconnu par la profession, était particulièrement fasciné par les corps et, surtout, par ce que les corps peuvent révéler à l’écran de ce qui habite les personnages qu’ils habillent. Au-delà de cette utilisation du corps malmené comme révélateur, il s’en servait également comme d’un artefact ou d’un objet destiné à violenter le spectateur, à l’amener au bord du malaise (effet apparemment réussi, la projection de Hunger à laquelle j’ai assisté ayant dû être interrompue pour évacuer un spectateur littéralement pris de malaise...)

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Interférences

haine et un mépris radical de l’autre, le nègre, l’esclave, le sous-homme, appelez-le comme vous voudrez. À ce titre, le premier propriétaire de Solomon constitue un cas d’observation bien plus intéressant que le sadique incarné par Michael Fassbender puisqu’il a l’air assez sincèrement soucieux d’aider et de préserver son esclave... jusqu’à un certain point... Pratiquement à l’autre bout de spectre cinématographique, le hasard des programmations fait que nous avons pu voir Ida, film polonais, sans aucune star, en noir et blanc et filmé presque exclusivement en plans fixes... Or, les deux films ont un point commun non négligeable : tous deux tournent autour d’un crime contre l’humanité qui a déjà largement été évoqué au cinéma ou dans la littérature : l’esclavage pour 12 Years… et le massacre des Juifs par les Nazis pour Ida. Comme nous venons de le dire, du point de vue formel, tout oppose ces deux films et, comme la forme n’est bien souvent séparée du fond que par une mince couche de conventions, tout les oppose aussi dans ce qu’ils ont à nous dire de ces scandales (in)humains que furent l’esclavage et l’extermination des Juifs. Là où Steve McQueen entend être aussi démonstratif et explicite que possible, à tel point que l’on pourrait croire qu’il prend le spectateur pour un semidemeuré à qui il faut tout souligner, tout (ré)expliquer, Pawel Pawlikowski, lui, procède systématiquement à l’inverse : son héroÎne n’est même pas au courant qu’elle est juive et le découvre de manière fortuite ; lorsque, accompagnée de sa tante, une juge communiste grand teint (mais passablement alcoolisée), elle se met en devoir de retrouver la maison de son enfance puis la tombe de sa famille, rien n’est montré (d’ailleurs, il ne reste pas grand-chose à montrer) ; nul flashback sur les camps, sur les pogroms, sur l’exil forcé de cette famille dans une cabane

perdue au fond des bois sous la protection de celui qui reprendra leurs terres une fois que la famille aura été exécutée... L’exhumation même des crânes est à peine visible et l’on se concentre bien plus sur les doigts nus des mains qui creusent la terre que sur les quelques bouts d’os très furtivement entraperçus… Et tout cela marche, tout cela vous serre la gorge bien autant que le claquement des fouets et les grimaces des suppliciés de 12 Years A Slave… La démonstration n’en est pas moins implacable ; elle l’est peut-être même un peu plus du fait qu’elle ne nous sommes pas de nous indigner. Elle l’est peutêtre aussi du fait qu’aucun des deux personnages principaux ne peut emporter une totale adhésion (la juge rigoriste et alcoolique, responsable sans remords de procès politiques, la jeune bonne sœur un peu godiche, assez loin de bien saisir les enjeux dont sa famille s’est retrouvée prisonnière puis victime). Et cette économie de moyens, cette retenue dans les effets vaut bien l’assez inattendu succès que ce film a rencontré (parmi les records d’affluence aux Studio cette année…), il prouve amplement que l’on peut faire confiance au public, qu’il n’est pas obligatoirement nécessaire de le frapper à l’estomac pour provoquer sa réflexion et son émotion. ER

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Interférences Minuscule,

la vallée des fourmis perdues

Le Vent se lève

Le Vent se lève de Hayao Miyazaki

Du dessin animé au film d’animation

L

es enfants ont bon dos ! Combien de parents n’ont-ils pas pris le prétexte d’accompagner leurs enfants pour savourer, sans culpabiliser, les dessins animés de Tex Avery, voire de Walt Disney ? Aujourd’hui les longs-métrages d’animation se multiplient, sont devenus souvent de grosses machines à cash, les techniques évoluent radicalement. Sur ce plan-là on peut sans grand risque affirmer que Le Vent se lève constitue non seulement le testament cinématographique de Miyazaki mais également peut-être le chant du cygne d’un genre, le dernier grand dessin animé de technique traditionnelle. À l’inverse Minuscule pourrait bien symboliser l’innovation technologique (animation d’images de synthèse sur décors réels) avec toute l’immaturité d’une technique tâtonnante générant un graphisme et une esthétique encore rudimentaires. Cela ne signifie nullement que, dans cette fausse confrontation entre anciens et modernes, l’un soit supérieur à l’autre. Risquons quand même un postulat, discutable

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comme tous les postulats : Minuscule est un film pour enfants intéressant pour les adultes, Le Vent se lève un film pour adultes sans intérêt pour les enfants. Déjà par sa longueur : 2h10. Ensuite et surtout par l’histoire qu’il raconte, improbable mix de success story industrielle à l’américaine et de romance lacrymale niaise. Mais il faut être juste : les deux films seraient tous deux d’affligeants nanars s’ils étaient filmés avec des acteurs de chair et d’os. Leur intérêt est évidemment ailleurs. Il faut faire abstraction des facilités narratives et des stéréotypes dont tous deux sont farcis pour apprécier leurs qualités : leur force principale réside dans la forme et non dans le fond, même si cette catégorisation reste évidemment artificielle. L’image prime ici le sujet. Le Vent se lève procure un plaisir visuel indéniable, malgré le sempiternel et pauvre graphisme de manga infligé aux visages, mais les couleurs, la composition des plans, les paysages sont en revanche souvent enchanteurs, proches des estampes de


Hiroshige ou de Hokusaï. Les séquences de rêve en particulier, surtout dans la première heure, sont magnifiques, fascinantes. En revanche certains aspects du film embarrassent. Au-delà d’évidentes longueurs, les lieux-communs abondent : la jeune fille pure, le héros parfait, l’adulte bourru, grommelant, cassant mais au cœur gros comme ça, le symbolisme pataud et appuyé (la femme aimée meurt pile au moment du décollage réussi de l’avion inventé par le héros), et puis il ne faut pas oublier une facette plutôt douteuse du film : Jiro, le héros au look d’Harry Potter, le pur, l’idéaliste, le sensible, l’honnête Jiro sans peur et sans reproche, invente rien moins que les avions-suicide des kamikazes de 1945. Cet aspect n’est pas entièrement passé sous silence, mais tient bien peu de place à côté de l’exaltation du héros jeune, beau, génial, sympathique et malheureux. Un adulte peut faire la part des choses, pas un enfant. Minuscule est beaucoup plus modeste. Son scénario simpliste se révèle très inventif dans le détail, drôle (les enfants rient beaucoup) et bourré de clins d’œil cinématographiques : Fitzcarraldo, Jurassic Park, KingKong, Les Dents de la mer, Le Seigneur des anneaux, Stars Wars, les films de sabre et même Psychose ! Si les enfants y perdent un peu (comme dans les Astérix), si les adultes s’amusent mais restent sur leur faim question scénario, à la fin tout le

monde, petits et grands, y trouve son compte et de quoi s’amuser. Les enfants verront dans les féroces fourmis rouges les méchants qui perdront évidemment à la fin, les adultes apprécieront ces rouges aux yeux bridés qui leur rappelleront la belle époque de leur jeunesse, celle du péril jaune et de la guerre froide ! En outre, dans leur terrier géométrique et orthonormé, les fourmis rouges se déplacent en colonnes strictes qui évoquent les défilés nazis de Nuremberg. Le manichéisme est clair, assumé, salutaire. Il n’en reste pas moins que voilà deux films d’animation qui, visant deux publics différents, risquent de n’en satisfaire pleinement aucun. Vouloir s’adresser à la fois aux petits enfants et aux adultes demeure une gageure difficile, dont on se demande d’ailleurs pourquoi elle reste une sorte d’impératif inhérent au genre. L’incontestable réussite d’un film comme Valse avec Bachir d’Ari Folman en est la meilleure preuve : à côté de ceux qui s’adressent spécifiquement aux enfants, le public adulte est en droit d’attendre des films d’animation qu’ils s’assument en tant que tels, sans l’alibi des petits qu’il faut accompagner. Il est temps que ce type de cinéma accomplisse sa révolution culturelle, comme la bande dessinée l’a fait depuis déjà pas mal de temps, et revendique sans complexe d’être enfin, dans tous les sens du terme, adulte. AW Minuscule, la vallée des fourmis perdues de Hélène Giraud et Thomas Szabo

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Compte-rendu Désir… Désirs

Rencontre avec Ventura Pons, le 15 février 2014, dans le cadre du festival Désir… Désirs

A

rrivé le jour même de Barcelone, Ventura Pons est venu présenter deux films, son dernier, Ignasi M, et Ami/amant, celui qui a certainement le plus fait pour sa notoriété. Incompréhensiblement méconnu en France, alors que son œuvre est montrée et appréciée dans le monde entier, cette rencontre avait quelque chose d’exceptionnel. Dans un très bon français, le réalisateur revient sur la genèse de Ignasi M, son troisième documentaire sur un total de vingtcinq films. Au départ, un groupe d’amis qui se connaissent depuis plus de vingt-cinq ans et dont Ignasi et Ventura font partie, et l’envie de filmer ce personnage flamboyant auquel, peut-être, personne ne croirait s’il était le héros d’une fiction. Ignasi est un expert reconnu, qui travaille pour les musées du monde entier, homosexuel, séropositif, père de deux enfants issus de son mariage avec Carme, handicapée, victime de la poliomyélite dans son enfance et, qui, depuis qu’ils sont séparés, vit désormais avec une femme. Avec son énergie débordante et son humour contagieux, Ignasi, nous fait découvrir une famille non traditionnelle (crée il y a trente-deux ans) et qui continue à fonctionner même après son éclatement ; un magnifique pied de nez à tous ceux qui croient que la famille n’a qu’un moule.

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Tourné en secret (aucun des autres membres du groupe d’amis n’était au courant), et fait avec rien (auto-financé et filmé avec sa propre caméra numérique), Ventura Pons retrouve dans Ignasi M des thèmes qu’il a souvent abordés comme celui de la transmission, de la continuation, de l’héritage, biologique et/ou intellectuel. « Mes trois documentaires parlent de choses importantes pour moi. Je raconte et me mets au service d’une histoire, toujours, que ce soit une fiction ou un documentaire. Je trouve cet homme touchant, c’est quelqu’un qui ne cache rien et chez qui sincérité, courage, malheur, humour se mêlent et dont se dégage une humanité exceptionnelle. C’est l’histoire d’un type très libre et très indépendant ». C’est aussi l’histoire d’un homme très fort qui endure beaucoup de douleur (il porte des doses de morphine dans le dos), et qui, pour continuer à vivre, ingurgite des quantités hallucinantes de médicaments. Ce type haut en couleurs (au sens propre, les vêtements d’Ignasi sont un festival vivement coloré), se « presse de rire de tout, de peur d’être obligé d’en pleurer ». Un chic type dont le seul regret, dit-il avec humour, est « aucun de mes fils n’est gay ». Merci à Ventura Pons et au festival Désir, désirs, de nous avoir permis de le rencontrer. JF


Corps en tous genres

C

omme annoncé dans son intitulé, Cuerpos, cette vingt-et-unième édition du Festival Désir… Désirs, se proposait de mettre le corps en question, mais aussi le genre et la sexualité, présentés et analysés aussi bien dans leur aliénation aux représentations sociales que dans la revendication de l’émancipation à ces codes normatifs. La programmation était elle aussi multiple : documentaires, films de fiction ou d’autofiction, conférences et rencontres avec des réalisateurs ou des chercheurs, du rires, des larmes… une diversité propre aux questionnements et aux coups de cœurs. Tu seras un homme mon fils

NE PAS LIRE AVANT D’ALLER VOIR MALO.

PELO

Mais c’est quoi un homme ? Pour Junior, le jeune héros de Pelo Malo (Cheveux rebelles), c’est être chanteur avec des cheveux lisses. Pour sa mère, qui vit seule avec ses deux enfants, dans la société pauvre de Caracas, c’est avoir un travail, un certain pouvoir et surtout de l’argent. Le problème de Junior : n’être jamais celui que les autres veulent qu’il soit. Sa mère le trouve efféminé et donc voué à l’homosexualité, tandis que sa grandmère l’instrumentalise et croit voir en lui une fille. Sa mère ne (se) reconnaît pas (dans) cet enfant qui ne correspond pas à ce que doit être « normalement » un garçon. Il va souffrir, arrive-t-elle à dire au

médecin pour expliquer ses questionnements et son incapacité à lui manifester de l’affection, comme elle le fait volontiers avec son bébé. Si (é)perdue dans sa volonté de remettre son fils sur le droit chemin qu’elle lui donne à voir une scène primitive, censée lui faire comprendre ce qu’est la normalité en matière de sexualité : l’amour entre un homme et une femme. Alors qu’en l’occurrence Junior voit sa mère boire et se vendre à son patron parce qu’acculée financièrement. Pour ne pas aller vivre chez sa grandmère, Junior promet de ne plus chanter et de couper ses cheveux. Vaillant petit Samson, il s’exécute sans ciller. Seules les apparences seront sauves. Je ne t’aime pas./Moi non plus, lui répond sa mère. Petit focus sur une scène du film Celle où Junior crée de petits personnages avec des allumettes qu’il dispose avec application dans les alvéoles de la balustrade du balcon. Elles sont toutes différentes et chacune, contrairement à Junior, a droit à une place. Dans ce modèle réduit des immeubles qui barrent le champ de vision et l’espace, les figurines sont davantage sujets que les occupants de ces tours. Implacable ! Mon sexe est-il mon genre ? Après la projection de Gueriller@s, documentaire regroupant les témoignages de

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Compte-rendu Désir… Désirs

militantes de Pour La Lutte transsexuelle et transgenre, Emmanuelle Novello, chercheuse et bénévole au Centre LGBT (Lesbiennes Gays Bi Trans) de Touraine, prenant appui notamment sur les travaux de Judith Butler (Troubles dans le genre), a exposé et expliqué en quoi le genre était une construction sociale : « Il n’existe pas d’essence de la féminité : les femmes ne sont pas douces et élégantes par nature. De même pour les caractéristiques que l’on associe généralement à la masculinité. Mais ces comportements sont attendus de chacun tout au long de sa vie. Le genre est un processus en devenir. Il n’existe pas de lois naturelles entre le genre, le sexe et la sexualité… », sujet complexe, impossible et vain à résumer, en quelques lignes. Une spectatrice formule cette requête simple et essentielle : « Donner la possibilité aux gens qui sont transgenres d’avoir une vie vivable. Ne pas avoir à jouer la comédie toute notre

vie dans un genre qui nous est imposé. » Après la projection du foutraque mais sympathique Qui a peur de Vagina Wolf ?, Anna Margarita Albelo, auteur de cette autofiction burlesque a expliqué, entre autres, et avec une autodérision certaine, la difficulté pour produire et distribuer une comédie lesbienne, mais encore bien davantage quand celle-ci ne donne pas à voir de scènes de sexe entre des filles belles et sexys. Avec une conférence sur la Mise en scène des corps et des genres à l’écran, Elise Pereira-Nunes, nous a démontré, elle, que la question du genre se posait dès les débuts du cinéma, comme par exemple en 1914 dans Florida Enchantment. Cette année encore, le festival a prouvé, par sa capacité à embrasser le monde dans sa diversité tant géographique qu’humaine, à quel point il était plus que nécessaire. IG

Qui a peur de Vagina Wolf ?

Retrouvez une vidéo de la rencontre sur le site des Studio, rubrique : Ça s’est passé aux Studio.

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Vos critiques

DALLAS BUYERS CLUB de Jean-Marc Vallée

12 YEARS A SLAVE de Steve McQueen

Ron, magnifique dans sa lutte pour survivre et pour qui tous les moyens sont bons, et Rayon, fragile et troublant… Leur rencontre improbable, leur cheminement chaotique, et l’amour/amitié qui se tisse au delà des barrières de leurs mondes que tout oppose… On sort de ce film en se disant que ces deux là vont nous hanter longtemps… […] Elisabeth B.

Steve McQueen n’a pas d’égal pour rendre compte de la violence que peuvent ressentir ceux qui sont victimes d’une oppression qui va jusqu’à nier leur humanité. On ne ressort jamais indemne de ses films. N’oublions pas que sur celle qu’il nous montre aujourd’hui, repose la construction de la plus grande économie mondiale. […] Monsieur HR

[…] On comprend qu’il [Ron Woodroof] n’a pas changé, il est toujours le texan macho, petit truand, qu’il était au début. C’est la force de ce film : le personnage évolue, s’enrichit (dans les deux sens, psychologique et financier), mais il reste fondamentalement le même. Sans tricherie scénaristique, en somme. Mais c’est aussi le danger de ce film : nous faire accroire que l’individualisme capitaliste est au fond humain et que, bien canalisé, il peut amener des exploits qui changent le monde positivement. Ron est un salaud, mais il a contribué à la lutte contre le sida, et donc quelque part à nous sauver. Le capitalisme serait utile : inquiétant, non ? CdP […] C’est intéressant de voir comment ce personnage très antipathique est rendu passionnant par son comédien et comment ce type part d’une quête individualiste pour se soigner, puis faire du business et se retrouve finalement soutenu par des groupes minoritaires et va aller contre certains préjugés. Le film doit beaucoup à son casting mais il est aussi intéressant pour son traitement de la question du sida. […] L.

L’esclavage vu de l’intérieur comme rarement. Atmosphère poignante et tendue d’un bout à l’autre du film, de grands acteurs, des plans séquences à couper le souffle et une BO digne de tout ça. Chapeau ! Jérôme IDA de Pawel Pawlikowski Il est heureux de voir qu’il existe encore des cinéastes qui savent cadrer leurs images et utiliser la lumière en se servant du noir et blanc. C’est encore mieux quand, comme ici, ils mettent ce savoir-faire esthétique au service d’un très beau récit. Les trajectoires tragiques que nous donne à suivre Ida ouvrent des réflexions qui sont loin d’être épuisées quand la salle retrouve la lumière. Hervé R. Un beau portrait de femme en quête de ses origines. Le noir et blanc apporte de l’élégance et de la subtilité à ce récit original. Le rôle de Ida est interprété avec beaucoup de grâce et de charisme. Très bon choix pour le film du mois. CP Rubrique réalisée par RS Les CARNETS du STUDIO

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