01.06 au 28.06 2016

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ISSN 0299 - 0342

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t i u ncinéma

CINÉMAS STUDIO : 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS

N°346 • Juin 2016

016 2 u d Samedi 11 juin 15 films de 18h à l’aube

avec un village d’associations pour les pauses gourmandes

studiocine.com


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Juin 2016 - n° 346

Édito CNP

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Partenariat CCNT : Compagnie Non de nom Cinéma africain

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Partenariat CHRU : Les addictions

Pour permettre au public une plus grande fréquentation de ses collections (les plus riches de région Centre), la bibliothèque propose de nouveaux horaires.

Horaires d’ouverture : lundi : de 16h00 à 19h45 mercredi : de 15h00 à 19h45 jeudi : de 16h00 à 19h45 vendredi : de 16h00 à 19h45 samedi : de 16h00 à 19h45 FERMETURE PENDANT LES VACANCES SCOLAIRES

LES FILMS DE A à Z En bref

gérée par l'association AIR (chantier d'insertion),

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accueille les abonnés des Studio tous les jours de 16h00 à 21h45

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Rencontre

Eugène Green

sur présentation des cartes abonné et cafétéria.

Tél : 02 47 20 85 77

Hommage

Ronit Elkabetz Courts lettrages

Merci patron

Cafétéria des Studio

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Les STUDIO sont membres de ces associations professionnelles : EUROPA

Interférences

Merci patron/La Sociologue et l’ourson

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REGROUPEMENT DES SALLES POUR LA PROMOTION DU CINÉMA EUROPÉEN

Rencontre

AFCAE

Étienne Chaillou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

ASSOCIATION FRANÇAISE DES CINÉMAS D’ART ET ESSAI

Rencontre

Sébastien Betbeder

..................................

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ASSOCIATION DES CINÉMAS DE L’OUEST POUR LA RECHERCHE

À propos de

Les Ardennes

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(Membre co-fondateur)

GNCR

Rencontre

Élie Kheir pour Homeland, Irak année zéro . . . . . . . . . 30 À propos de .....................................

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Midnight Special Jeune Public

ACOR

GROUPEMENT NATIONAL DES CINÉMAS DE RECHERCHE

ACC ASSOCIATION DES CINÉMAS DU CENTRE (Membre co-fondateur)

FILM DU MOIS : Le Lendemain GRILLE PROGRAMME

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pages centrales

Prix de l’APF 1998

Site : www.studiocine.com page Facebook : cinémas STUDIO

LES ÉDITIONS DU STUDIO DE TOURS - 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - Mensuel - Prix du numéro 2 €. ÉQUIPE DE RÉDACTION : Sylvie Bordet, Isabelle Godeau, Jean-François Pelle, Dominique Plumecocq, Éric Rambeau, Roselyne Savard, Marcelle Schotte, André Weill, avec la participation de la commission Jeune Public. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Éric Rambeau – MISE EN PAGES & EN IMAGES : Francis Bordet. ÉQUIPE DEgraphique RÉALISATION contribue : Éric Besnier, Guérineaude – DIRECTEUR : Philippe Lecocq – IMPRIMÉ par PRÉSENCE GRAPHIQUE, Monts (37) Présence à Roselyne la préservation l’environnement et atteste être reconnu IMPRIM’VERT.


32e

éditorial

Nuit des Studio

samedi 11 juin de 18h à l’aube

C

’est reparti pour une 32e nuit cinéphile… 15 films, buffets pour pauses gourmandes entre chaque séance, surprises et bonne humeur sont au programme. Comme tous les ans nous avons concocté une programmation de cinématographies, époques et genres variés qui vous fera voyager de l’Australie à l’Argentine en passant par l’Italie, la Chine ou les USA, de la comédie aux films du patrimoine, du drame au polar. Vous pourrez choisir entre

Astérix et Obélix : mission Cléopâtre France – 2002, d’Alain Chabat, avec Gérard Depardieu, Jamel Debbouze, Monica Bellucci…

Aya de Yopougon 2013, film d’animation français de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie.

Buried USA / Espagne – 2010, de Rodrigo Cortès avec Ryan Reynolds, Erik Palladino…

Crazy Kung-Fu Chine – 2004, de Stephen Chow, avec Stephen Chow, Wah Yuen…

Les Promesses de l’ombre GB, USA, Canada – 2007, de David Cronenberg, avec Naomi Watts, Viggo Mortensen…

L’Incompris Italie – 1967, de Luigi Comencini, avec Stefano Colagrande, Simone Giannozzi…

King Kong USA – 1933, de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack, avec Fray Wray, Bruce Cabot…

Mad Max Australie - 1979, de George Miller, avec Mel Gibson, Joanne Samuel...

Muriel Australie/France - 1994, de P. J. Hogan, avec Toni Collette, Bill Hunter…

Les Nouveaux sauvages Argentine/Espagne - 2014 - 2h02, de Damian Szifron, avec Ricardo Darin, Oscar Martinez…

Sin City USA - 2005, de Robert Rodriguez et Frank Miller, avec Bruce Willis, Benicio Del Toro…

The Servant GB - 1964, de Joseph Losey, avec Dirk Bogarde, Sarah Miles …

Delicatessen France – 1991, de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro, avec Dominique Pinon, Karin Viard, Jean-Claude Dreyfus…

Le Doulos France/Italie – 1962, de Jean-Pierre Melville avec Jean-Paul Belmondo, Serge Reggiani…

Les Dimanches de Ville d’Avray France – 1962, de Serge Bourguignon, avec Hardy Kruger, Patricia Gozzi…

Les pass sont en vente à l’accueil des Studio au même tarif que l’an dernier (il n’y a pas de vente à la séance !) : 13 euros pour les abonnés, 19 pour les non abonnés. Il est vivement conseillé de s’y prendre tôt pour éviter la cohue du dernier moment… Attention : bien évidemment, la programmation de la semaine n’a pas cours ce soir-là dans nos salles. SB Bonne nuit !

Les CARNETS du STUDIO n°346 – Juin 2016 –

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SEMAINE

du 22 au 28 juin

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Du dimanche 26 au mercredi 29 juin

1h17’ VF

FIEVEL ET LE NOUVEAU MONDE

Tarif unique pour tous : 4 € la séance sur toute la durée de la fête du cinéma.

14h15 17h45 19h45 mer-sam-dim

1h38’

TOUT DE SUITE MAINTENANT

16h00

14h15 LA NOUVELLE VIE SNEIJDER 19h15 DE PAUL de Thomas Vincent 14h30 19h30

1h39’

LA LOI DE LA JUNGLE de Antonin Peretjatko

À suivre.

L’HOMME QUI 14h15 RÉPARE LES FEMMES 1h52’

19h30

de Don Bluth

samedi à 14h15

de Thierry Michel Mardi 28 rencontre débat avec le professeur Jacques Lansac après la projection de 19h30.

14h30 1h30’ LOVE AND 19h45

14h15

LA TORTUE ROUGE

de Michaël Dudok De Wit Ciné Apéro musical

43’

VOYAGES DE RÊVE de divers réalisateurs Ciné Apéro musical

1h54’ VF

LE CHASSEUR ET LA REINE DES GLACES de Cedric Nicolas-Troyan

dimanche

10h00

+ dimanche

de Savina Dellicour

de Whit Stilman À suivre. 16h00 14h15 1h49’ LA FORÊT À suivre. 17h45 DE QUINCONCES 19h45 de Grégoire Leprince-Ringuet

FOLLES DE JOIE

mercredi samedi dimanche

17h15

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A

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www.studiocine.com

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1h35’ VF

KUNG FU PANDA 3

14h15

LE VOYAGE DE FANNY

21h15

de Mohamed Hamidi

de Lola Doillon

SÉANCE CCNT / STUDIO

14h30 LE LENDEMAIN 19h45 de Magnus von Horn

21h30

21h45

14h15 19h00 14h30 19h45

Cases orangées : programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35

19h15

de Pascale Houbin Compagnie Non de nom (Paris) Projection suivie d’une rencontre.

16h15

2h04’

17h00 21h15

1h

ELLE de Paul Verhoeven

de Jay Roach

1h56’

1h38’

JULIETA de Pedro Almodovar

LA SAISON DES FEMMES de Leena Yadav

2h02’

MA LOUTE 1h54’

de Bruno Dumont

A WAR de Tobias Lindholm

1h44’

MEN & CHICKEN 1h36’

de Anders Thomas Jensen

APPRENTICE de Boo Junfeng

M de Joseph Losey

17h30 21h45 17h30 21h30 17h45 21h45

1h38’

CAFE SOCIETY de Woody Allen

1h28’

Le film imprévu www.studiocine.com

LE GESTE EXILÉ dimanche

DALTON TRUMBO

de Fernando Leon de Aranoa

1h51’

mercredi samedi dimanche

LA VACHE 1h41’

14h15 19h45

21h45

14h15 17h15

1h34’

1h45’

À suivre.

U

mercredi samedi dimanche

de Jennifer Yuh

de Julio Medem

17h30 DANS LES FORÊTS DE SIBÉRIE 21h30 de Safy Nebbou

Q

1h32’

17h45 21h45

1h46’

MA MA

de Vincent Kesteloot

SUR UN CITOYEN lundi ENQUÊTE AU-DESSUS DE TOUT SOUPÇON de Elio Petri 1h35’ 19h30 Soirée de clôture présentée par Louis D’orazio

1h57’

17h00 THE NEON DEMON 21h30 de Nicolas Winding Refn

É

ROBINSON CRUSOÉ

de François Tosquelles Ciné-débat

20h00

14h15 2h10’ 17h00 19h30

de Paolo Virzi

A PERFECT DAY

40’

10h30

1h27’

TOUS LES CHATS SONT GRIS

LA SOCIÉTÉ LOZÉRIENNE CNP D’HYGIÈNE MENTALE jeudi

mer-sam-dim

16h15

2016

François Tosquelles 1912-1994, psychiatre, catalan, marxiste 1h26’ VF

C

1h56’

FRIENDSHIP

mer-sam-dim

mercredi samedi dimanche

du 1 au 7 juin

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SEMAINE

1h20’ sans paroles

de Pascal Bonitzer À suivre.

1h54’

2016

21h45

Le film imprévu www.studiocine.com

Toutes les salles des Studio sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Cinémas Studio – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com


du 8 au 14 juin 2016 Samedi 11 juin : 32e NUIT DU CINÉMA 15 films de 18h à l’aube ! SEMAINE

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Seules les séances de 14h15/30 sont maintenues. Les suivantes sont remplacées par la programmation spéciale de la Nuit des Studio. Pass en vente à l’accueil depuis le 18 mai : abonnés 13 €: non abonnés : 19 €

14h15 1h54’ 17h00 LA NOUVELLE VIE 19h15 DE PAUL SNEIJDER de Thomas Vincent 21h30

1h46’ VF

mer-sam dimanche

LE LIVRE DE LA JUNGLE

14h15

de Jon Favreau

17h15

mer-dim

43’

14h15 1h57’ 17h00 THE NEON DEMON 19h15 de Nicolas Winding Refn 21h30 14h15 17h15 19h30

VOYAGES DE RÊVE

mercredi dimanche

de divers réalisateurs

16h15

1h54’

A WAR de Tobias Lindholm

FOLLES DE JOIE

APPRENTICE de Boo Junfeng

ELLE

19h15

de Paul Verhoeven

17h45 21h45

1h38’

JULIETA

14h30 17h30 19h30

17h00 21h30

1h36’

2h10’

14h30

de Pedro Almodovar

1h51’

21h45

MA MA de Julio Medem

et Niels Schneider (comédien), après la séance de 19h45.

www.studiocine.com

dimanche 10’ UNE AFRICAINE SUR SEINE

11h30 1h30’

de Ndeye Marame Gueye

MORBAYASSA

LE CHASSEUR ET LA REINE DES GLACES

de Cheick Fantamady Camara

Soirée CHRU : les addictions

jeudi UN DERNIER POUR LA ROUTE 19h45 1h47’ de Philippe Godeau

de Cedric Nicolas-Troyan

1h46’ VF

LE LIVRE DE LA JUNGLE

1h54’

14h30 1h57’ THE NEON DEMON 21h30 de Nicolas Winding Refn

mercredi samedi dimanche

14h15 mercredi samedi dimanche

de Jon Favreau

17h00

VOYAGES DE RÊVE

mercredi dimanche

Soirée animée par des professionnels de la santé.

14h30 LA NOUVELLE VIE SNEIJDER 19h15 DE PAUL de Thomas Vincent

2016

1h54’ VF

43’

de divers réalisateurs

16h15

Présentation de films réalisés par des classes élémentaires

samedi

Courts d’écoles

16h00

14h15 1h45’ DANS LES FORÊTS 17h15 DE SIBÉRIE 19h15 de Safy Nebbou 14h15 1h39’ LA LOI DE LA JUNGLE 17h45 de Antonin Peretjatko 19h45 14h15 1h27’ 19h45 TOUS LES CHATS + mer-sam-dim SONT GRIS 16h00 de Savina Dellicour 14h15 21h15

1h51’

MA MA de Julio Medem

1h56’

FOLLES DE JOIE de Paolo Virzi

LE LENDEMAIN

21h45

19h15

Mr GAGA SUR LES PAS D’OHAD NAHARIN 1h30’

de Tomer Heymann

17h00 21h30

2h10’

ELLE

19h00

de Paul Verhoeven

1h33’

BELLADONNA de Eiichi Yamamoto

17h30 21h45

1h55’

DIAMANT NOIR

1h41’

DIAMANT NOIR

14h30 de Arthur Harari 19h45 Jeudi 9, rencontre avec le réalisateur

Cinéma africain

de Arthur Harari

de Magnus von Horn

1h55’

du 15 au 21 juin

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Séance gratuite ouverte à tous.

1h56’

de Paolo Virzi

SEMAINE

21h30

1h52’

L’ANGE BLESSÉ

21h30

de Emir Baigazin

1h34’

Le film imprévu www.studiocine.com

Cases orangées : programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35

17h45 ROYAL ORCHESTRA de Heddy Honigmann

Le film imprévu www.studiocine.com

Tous les films sont projetés en version originale (sauf indication contraire)

Cinémas Studio – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com


jeudi 2 juin - 20h00 La Bibliothèque Pour la Psychanalyse à Tours et le CNP proposent : CINÉ-DÉBAT :

des internes qu’il a formés sont devenus célèbres, Jean Oury, Frantz Fanon, Roger Gentils, Yves Racine, etc. Quels sont les retentissements de cette œuvre sur les pratiques actuelles ? Film : La Société lozérienne d’hygiène mentale (1957 – France – 40’). François Tosquelles tourne et monte un film sur l’organisation des soins à l’hôpital de Saint-Alban-sur-Limagnole en Lozère en 1957. Suivi d’un débat avec le groupe de lecture des archives de François Tosquelles à Tours en présence de l’éditrice.

FRANCOIS TOSQUELLES 1912 – 1994, PSYCHIATRE, CATALAN, MARXISTE. Pour lui, « les maladies nerveuses sont essentiellement des troubles des rapports de ce qui constitue le contact des uns avec les autres »*. Il faut « soigner l’hôpital pour soigner les malades ». Il participe au grand mouvement de

En présence de Sophie Legrain, éditrice de l’œuvre complète de François Tosquelles.

refondation des soins psychiatriques en France après la deuxième guerre mondiale. Certains

* Page 40, Trait-d’union, journal de Saint Alban, François Tosquelles.

nous propose l’histoire de Bella : Une magnifique jeune femme guinéenne que la vie a mise dans une impasse douloureuse, est impliquée dans un réseau mafieux. La lutte pour quitter ce milieu est violente mais signe enfin la renaissance de Bella, qui se met

Les addictions : comment en parler ? comment aider ? Partenariat CHRU/Studio

Le Dernier pour la route France – 2009 – 1h47, de Philippe Godeau, avec François Cluzet , Mélanie Thierry , Michel Vuillermoz…

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atron de presse miné par l’alcool, Hervé décide de faire face... Il n’y arrivera pas seul, l’aide lui est indispensable...

Pascale Houbin, Compagnie Non de nom (Paris) À l’occasion de la Journée internationale contre l’abus et le trafic de drogues le CHRU de Tours et les Studio cinémas vous proposent une discussion sur les addictions après la projection du film. Cet échange permettra

Dimanche 5 juin-16h15 – CCNT / Cinémas Studio Le Geste exilé 1h – 2015 – Réalisation : Pascale Houbin

Projection suivie d’une rencontre

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e film délicat et sensible signé Pascale Houbin est né d’une commande de l’association Travésias. Le fil rouge du projet, autour de la question de la transmission intergénérationnelle chez les femmes d’origine étrangère ayant immigré en Bretagne dans les années 1960-1980, se situe, selon la chorégraphe, « dans le corps en mouvement et plus particulièrement dans les mains ». Comme le titre l’évoque, le corps, à travers ses gestes, est porteur d’histoires et de significations. « À l’origine de toute culture, il participe au socle de la tradition et témoigne de la fusion entre l’habileté, le savoir-faire et la mémoire

d’une personne. Le geste n’est hérité que pour être transmis » précise Pascale Houbin. Quels sont alors ces gestes que ces femmes, souvent coupées de leurs racines, ont pu transmettre à leurs petits-enfants comme souvenirs de leur propre enfance ? Dans la lignée de sa collection de portraits de gestes, filmés « à blanc », Pascale Houbin livre, au-delà des mots, un témoignage saisissant autant qu’une œuvre poétique. À l’issue de cette seule et unique projection, le CCNT vous propose de rencontrer Pascale Houbin et Éric Foucault, directeur artistique d’Eternal Network, pour prolonger l’histoire de cette merveilleuse aventure… Irène Filiberti

L

a 2e édition du BCAT (Bimestriel du Cinéma africain de Tours) sera clôturée par un brunch africain.

Une Africaine sur Seine est un court-métrage de 10 mn réalisé par Ndeye Marame Gueye, une jeune réalisatrice séné-

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– Les CARNETS du STUDIO

n°346 – Juin 2016

galaise. Elle décide de réaliser son film de fin d’études (à la Femis) en hommage à Paulin Soumanou Vieyra (réalisateur d’Afrique sur Seine).

Morbayassa

est un long métrage de Cheick Fantamady Camara. Pour son deuxième long métrage, ce Guinéen

Jeudi 16 juin-19h45 d’aborder les addictions dans toutes leurs composantes : drogues licites ou illicites et addictions comportementales comme le jeu pathologique, les achats compulsifs, l’addiction à l’alimentation... Les objectifs seront d’aider à repérer et à aborder ces questions avec nos proches et de rencontrer des professionnels du département. Rencontre après la projection avec des intervenants en addictologie, représentant les différentes structures du Département.

w w w . s t u d i o c i n e . c o m Sur le site des Studio (cliquer sur : PLUS D’INFOS, pour entrer dans la fiche film), vous trouverez des présentations signées des films que les rédacteurs auront vus après leur sortie en salle. Les fiches non signées ont été établies de manière neutre à partir des informations disponibles au moment où nous imprimons.

Les films de A à Z www.studiocine.com AVANT LES FILMS , DANS LES SALLES , AU MOIS DE JUIN : Chet Baker Sings de Chet Baker (Studio 1-2-4-5-6) • Autour de Chet de Yaêl Naîm, Charles Pasi… (Studio 3-7) Musiques sélectionnées par Éric Pétry de RFL 101.

4€/6€ houbin-nondenom.com – eternalnetwork.fr – studiocine.com

Cinéma africain – Dimanche 19 juin-11h30

dès lors en quête de son enfant abandonné, témoin de son passé douloureux. Bella retrouve une belle adolescente, Vanessa, désormais adoptée par un couple de Parisiens. Comment tisser un lien avec cette enfant qui ignore tout de cette mère venue d’Afrique ?

Séance Ciné-ma différence : Fievel et le nouveau monde, samedi 25 juin - 14h15

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L’Ange blessé

Kazakhstan/France/Allemagne – 2016 – 1h52, de Emir Baigazin, avec Nurlybek Saktaganov, Madiar Aripbai...

Deuxième volet d’un triptyque dont le premier, Leçons d’harmonie, fut très remarqué à sa sortie, le film raconte en fait quatre histoires d’anges blessés. Celle de Jaras, qui doit nourrir sa famille.

Devra-t-il devenir voleur, comme son père qui, sortant de prison, ne trouve pas de travail ? Celle de Balapan, dont la vocation est de devenir chanteur mais qui doit subir les humiliations quotidiennes des petites frappes de son école. Quant à Aslan, il veut devenir médecin mais est confronté à de graves problèmes lorsque

Les CARNETS du STUDIO n°346 – Juin 2016 –

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sa petite amie se retrouve enceinte. Zhaba, lui, fouille ruines et égouts à la recherche de métaux à revendre et tombe sur trois illuminés qui lui parlent d’un trésor caché. Quatre destins d’adolescents, quatre contes moraux qui disent la difficulté à construire sa vie, au risque de s’y perdre. Sources : dossier de presse

A Perfect Day

s’avère un exécutant très appliqué. Quand Suhaila apprend quel est le nouveau poste occupé par son frère, elle se vexe. Aiman n’a pas bonne conscience et ses véritables motivations vont le rattraper peu à peu. Prendra-t-il la relève en devenant le futur bourreau ? Apprentice est présenté cette année au festival de Cannes dans la section Un certain regard.

B

Sources : dossier de presse.

Sources : imdb.com

Apprentice

Singapour/Allemagne/France – 2016 – 1h36, de Junfeng Boo, avec Fir Rahman, Gerald Chew, Wan Hanafi Su, Crispian Chan...

Le jeune Aiman, 28 ans, vit dans un lotissement modeste avec sa sœur Suhaila. Il est gardien dans une prison de haute sécurité. Sur son lieu de travail, il côtoie Rahim, un sergent charismatique mais néanmoins bourreau en chef qui accompagne les derniers jours des condamnés. Aiman devient l’apprenti de Rahim et

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– Les CARNETS du STUDIO

n°346 – Juin 2016

A War

Danemark – 2016 – 1h54 – de Tobias Lindholm, avec Pilou Asbaek, Tuva Novotny, Dar Salim…

Alors que la guerre fait rage en Afghanistan, Claus, commandant de compagnie au dossier militaire exemplaire, prend la décision de bombarder une zone après qu’un de ses soldats eut été grièvement blessé lors d’une attaque des talibans. Les corps de onze femmes et enfants sont retrouvés sous les ruines. Il ne rentrera pas en héros au Danemark, où sa femme Maria se bat pour élever seule ses trois enfants, mais en coupable, qui devra affronter la justice militaire. Les accusations contre les troupes déployées en Afghanistan et en Irak ne sont pas rares. Tobias Lindholm, connu au Danemark pour avoir co-écrit la série Borgen, choisit de nous montrer une réalité complexe dans laquelle il est parfois bien difficile de faire un choix, mais aussi le sort des familles de combattants qui subissent les conséquences de décisions politiques qu’ils ne maîtrisent pas. War est un film rigoureux et captivant.

Les fiches paraphées correspondent à des films vus par les rédacteurs.

Japon – 1973 – 1h33, de Eiichi Yamamoto.

Adaptation d’un récit de Jules Michelet, Belladonna raconte comment une paysanne, Jeanne, ne pouvant épouser son amoureux (Jean), est ensuite violée par le seigneur qui leur a refusé le droit de se marier. Elle s’enfuit pour retrouver Jean qui ne veut plus d’elle après le viol qu’elle a subi. Ainsi rejetée, Jeanne va plonger du côté des forces du Mal, pactiser avec le diable pour devenir sorcière et chercher à se venger. Film d’animation, Belladonna est souvent classé du côté films érotiques, ce qui ne correspond que partiellement à ce qu’il est véritablement puisqu’il contient également une forte dose de fantastique. Mais, là aussi, s’en tenir à ces deux catégorisations serait passer à côté des principales qualités du film, qui tiennent notamment à son graphisme : très éloigné du style manga ; celui-ci lorgne beaucoup plus vers le psychédélisme et n’hésite pas à alterner animation et images fixes, le tout porté par une musique très seventies et dans une version restaurée ; une vraie rareté... ER

Espagne / France / USA – 2015 – 1h46, de Fernando León de Aranoa, avec Benicio Del Toro, Tim Robbins, Mélanie Thierry, Olga Kurylenko...

Pendant la guerre de Yougoslavie une équipe de travailleurs humanitaires composée de membres chevronnés et de débutants doit se dépêcher d’extraire un cadavre d’un puits, avant qu’il ne contamine la seule source d’eau potable du village. Cela pourrait être facile mais va s’avérer source d’innombrables complications qui donnent à ce film un caractère basculant régulièrement du comique au tragique et qui, sans tourner réellement en dérision les efforts de cette équipe humanitaire peu efficace, permet de jeter une lumière décalée sur l’une des dernières grandes tragédies européennes de la fin du 20e siècle.

Belladonna

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Cafe Society

Usa – 2016 – 1h36, de Woody Allen, avec Jesse Eisenberg, Kristen Stewart, Steve Carell, Blake Lively…

Dans le New York des années 30, Bobby Dorfman vit modestement chez ses parents, entre son frère – redoutable gangster – et la petite bijouterie familiale. Face à ce manque de perspective et avec le soutien de sa mère qui le recommande à Phil, son oncle, qui n’est rien d’autre qu’un puissant et célèbre agent de stars

à Hollywood, Bobby débarque sur la côte ouest rempli de rêves ! Quand Phil lui trouve un poste dans l’agence, il rencontre la ravissante Vonnie qui lui fait découvrir la ville. Tombant rapidement amoureux de la jeune femme, celle-ci hélas lui annonce qu’elle n’est pas libre… jusqu’à une rupture qui relance ses espoirs. Mais avec Woody Allen – Blue Jasmine (2013) et L’Homme irrationnel (2015) – il faut s’attendre à quelques rebondissements ! À savourer comme un délicieux cocktail qui pétille : dialogues enlevés, jazz, satire des différents microcosmes… avec une drôlerie qui ne masque pas toute son amertume. RS

Le Chasseur et la Reine des glaces Voir pages Jeune Public

Dalton Trumbo USA – 2015 – 2h04, de Jay Roach, avec Bryan Cranston, Michael Stuhlbarg, Diane Lane…

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Il ne faisait pas bon être soupçonné de sympathie communiste dans l’Amérique des années 40. En 1947, la chasse aux sorcières est ouverte et nombre de personnalités du cinéma sont convoquées à Washington pour répondre aux questions inquisitrices de la Commission des activités antiaméricaines. Dalton Trumbo, scénariste, invoquera, comme dix autres prévenus, le premier amendement concernant la liberté d’expression et de réunion pour refuser de répondre à la question concernant son appartenance au Parti Communiste. En le condamnant à une peine de prison et en l’inscrivant sur la honteusement célèbre liste noire

Les CARNETS du STUDIO n°346 – Juin 2016 –

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pour l’empêcher de travailler, on attend de Trumbo qu’il disparaisse. Mais c’était sans compter sur la force vitale et le talent de l’auteur de Johnny Got His Gun…Ce biopic nous donne à suivre le parcours édifiant d’un homme de convictions face à un système implacable, qui aura échoué à le briser mais que lui, aura réussi à berner ! Sources : Dossier de presse, histoire.presse.fr

DansFrance les– 2016 Forêts de Sibérie – 1h45, de Saffy Nebbou, avec Raphaël Personnaz, Evvgeniy Sidikhin…

Pour fuir une vie citadine trop superficielle et assouvir ses besoins de liberté, Teddy décide de partir loin de tout, seul, en plein hiver, dans une cabane perdue au bord du lac Baïkal. Une nuit, perdu dans le blizzard, il est sauvé par Alekseï, un homme qui se cache dans la forêt sibérienne depuis des années en attendant que son crime soit prescrit. Entre ces deux hommes que tout oppose, va naître une grande histoire d’amitié… Adapté du récit de Sylvain Tesson, qui a reçu le prix Femina essai et connu un grand succès public, sur une musique d’Ibrahim Maalouf, le film de Safy Nebbou dont on avait pu voir L’Empreinte de l’ange (08), l’Autre Dumas (10) et Comme un homme (12) se veut un poème écologique au cœur de la nature hostile, un film qui prône la réconciliation entre les êtres et les éléments qui les entourent. Sources : dossier de presse

Diamant noir

France/Belgique – 2016 – 1h55, de Arthur Harari, avec Niels Schneider, August Diehl, Hans Peter Cloos Abdel Hafed Benotman…

Paris. Pier Ulmann vivote entre chantiers et larcins qu’il commet pour le compte de Rachid, sa seule famille. Il est rattrapé

– Les CARNETS du STUDIO

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Sources : dossier de presse

F

Fievel et le nouveau monde Voir pages Jeune Public

Folles de joie

Italie/France – 2016 – 1h56, de Paolo Virzi, avec Valeria Bruni Tedeschi, Micaela Ramazzotti, Anna Galiena…

Sources : dossier de presse, site ciel.ciclic.fr.

Jeudi 9 juin, Ciclic et les Cinémas Studio proposent une rencontre avec Arthur Harari, le réalisateur et Niels Schneider (comédien), après la projection de 19h45.

Elle

France 2016 2h10, de Paul Verhoeven, avec Isabelle Huppert, Laurent Lafitte, Anne Consigny, Virginie Efira, Charles Berling...

Peu de films peuvent s’enorgueillir de faire couler beaucoup d’encre avant même leur diffusion. Elle est de ceux-là. Il faut dire que la personnalité de son réalisateur est hors-normes et qu’il a eu l’habitude de défrayer la chronique, de ses premiers films en Hollande (Spetters, Le Quatrième homme), à sa reconnaissance internationale aux États-Unis (Basic Instinct, Total Recall). Et comme on était sans nouvelles de lui depuis le superbe Black Book en 2006, c’est dire si l’attente est grande. Film proposé au jeune public, les parents restant juges.

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Elle est adapté de Oh... de Philippe Djian et porté par une magnifique distribution avec à la clé un nouveau rôle marquant pour Isabelle Huppert. Le synopsis annonce effroi et sensualité à travers le personnage de Michèle, une femme à la main de fer, patronne d’une grande entreprise, dont la vie bascule le jour où elle se fait agresser chez elle. Retrouvant le mystérieux inconnu, elle se met alors à le traquer en retour. Un jeu trouble et qui peut facilement dégénérer s’installe alors...

par son histoire le jour où son père est retrouvé mort dans la rue, après une longue déchéance. Écarté de sa famille – de riches diamantaires à Anvers –, il ne lui laisse rien… ou presque : son bannissement par les Ulmann et une soif amère de vengeance. Alors, quand son cousin Gabi invite Pier à Anvers pour rénover les bureaux de la prestigieuse firme Ulmann, Rachid lui confie une consigne simple : « Tu vas là-bas pour voir, et pour prendre… » Arthur Harari – également acteur, comme dans La Bataille de Solférino (2013) – avait déjà tourné plusieurs courts métrages : Des jours de la rue (2005), La Main sur la gueule (2007) récompensé du Grand Prix du Festival de Brive, Peine perdue (2013). Diamant noir est son premier long-métrage en tant que réalisateur et co-scénariste.

E

Après Les Opportunistes, en 2014 qui avait raflé toutes les récompenses du cinéma en Italie (l’équivalent de nos Césars), Paolo Virzi retrouve Valeria Bruni Tedeschi. Cette fois, elle campe une mythomane, excessive et passionnée, à tendances suicidaires. Placée dans une institution psychiatrique pour femmes, elle y fait la connaissance de Donatella, fragile et introvertie. Toutes les deux, bien décidées à retrouver leur liberté et à inventer une forme de bonheur ensemble, s’enfuient : c’est dans une campagne italienne baignée de soleil que nous allons suivre leur périple. Les deux actrices excellent dans cette épopée qui n’est pas sans rappeler Thelma et Louise. Ce beau film un peu déjanté, qui navigue entre rire et larmes, est sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes.

La Forêt de Quinconces

France – 2016 1h49, de Grégoire Leprince-Ringuet, avec Grégoire Leprince-Ringuet, Pauline Caupenne, Amandine Truffy, Thierry Hancisse, Antoine Chappey, Marilyne Canto...

Paul et Ondine se séparent et Paul se jure de ne plus aimer. Pour se le prouver, il choisit de séduire Camille pour mieux la délaisser, mais Camille l’envoûte... Grégoire Leprince-Ringuet, que l’on connaît comme acteur chez Christophe Honoré ou Robert Guédiguian entre autres, signe un premier long-métrage qui sort de l’ordinaire. « J’ai écrit ce scénario en poursuivant le désir d’un cinéma qui renoue avec une magie oubliée. Il m’est apparu que nombre de films français, en dépit d’autres qualités insignes, ont dénigré le plaisir de jouer avec les formes au profit d’un réalisme pur. C’est ce désir de jouer qui m’a donc poussé à écrire, ce désir de surprendre. » Ce qui l’a amené notamment à versifier certains passages pour « faire resurgir l’émotion des rimes dans le langage parlé », et ça marche, tout à la fois surprenant et extrêmement séduisant. Ce conte aux éléments merveilleux, aussi sentimental que contemporain, est une très belle surprise. JF

L’Homme qui répare les femmes : La colère d’Hippocrate Belgique/Congo/USA - 2015 - 1h52, de Thierry Michel.

H

Plus de vingt ans qu’inlassablement le docteur Mukwege reconstruit, psychologiquement et physiquement, des milliers de femmes et enfants de tous âges, violés par des soudards hutus, tutsis ou congolais. Si la République Démocratique du Congo est un des pays les plus pauvres du monde, son sous-sol, lui, est extrêmement riche et suscite des convoitises mul-

Sources : dossier de presse

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tiples. Dans ces conflits pour s’emparer de ces richesses et donc du pouvoir, le viol collectif devient une arme de guerre. Denis Mukwege, (Prix Sakharov 2014) ne se bat pas seulement dans la salle d’opération, il utilise sa renommée internationale pour dénoncer l’impunité dont jouissent les coupables, la corruption du pouvoir et le machisme social ; prises de position qui dérangent et en font la cible de tentatives d’assassinat répétées… Ce trentième documentaire de Thierry Michel (Zaïre, le cycle du serpent) en mettant en lumière la figure impressionnante du docteur Mukwege et en faisant de ces femmes, des héroïnes positives, a été couronné de multiples prix partout dans le monde.

longtemps appelé Silencio) « parle du destin inéluctable, du complexe de culpabilité et de ce mystère insondable qui fait que nous abandonnons les personnes que nous aimions, que nous les effaçons de notre mémoire comme si elles n’avaient jamais rien signifié. Et de la douleur que cet abandon engendre chez la personne qui en est victime. » Les deux actrices Adriana Ugarte et Emma Suarez joueront Julieta en 1985 et en 2015.

totalement déconnectées du contexte. Antonin Peretjatko a choisi de traiter sur le mode d’une comédie baroque de réalités pas forcément drôles par ellesmêmes : la loi de la jungle, c’est celle de « la jungle urbaine, la jungle administrative, la jungle des carrières, la jungle économique, la jungle tropicale, la jungle de la loi ». Marc Châtaigne n’est pas au bout de ses aventures et de ses mésaventures…

Sources : dossier de presse

Source : dossier de presse

Filmographie sélective : Matador (85) – Talons aiguilles (91) – La Fleur de mon secret (95) – Tout sur ma mère (99) Volver (06) – La piel que habito (11)

Love and Friendship

Irlande/France/Pays-Bas – 2015 – 1h32, de Whit Stilman, avec Kate Beckinsale, Chloë Sevigny, Xavier Samuel, Stephen Fry…

Kung Fu Panda Voir pages Jeune Public

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Angleterre, fin du 18e siècle. L’arrivée annoncée de Lady Susan Vernon dans sa famille préoccupe les esprits. En effet, cette ravissante veuve est devancée par sa réputation de séductrice. Confrontée à d’importantes difficultés financières et devant pourvoir à l’éducation de Frederica, sa fille adolescente, Lady Susan Vernon se met en quête d’un riche époux aristocrate. Soutenue dans ses manigances par Alicia, son amie fidèle, c’est une femme intelligente, déterminée et sans vergogne qui croise d’abord le jeune et charmant Reginald DeCourcy… Le réalisateur de Metropolitan (1990) et de Little Green Men (2008) a choisi de réaliser avec Love and Friendship une adaptation libre du roman Lady Susan de Jane Austen. Il en advient une intrigue aristocratique ne manquant pas d’humour. RS

Sources : dossier de presse, telerama.fr

Mardi 28 juin après la séance de 19h30, rencontre avec le Professeur Jacques Lansac, Président du Fonds pour la santé des femmes.

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Julieta Espagne – 2016 – 1h36, de Pedro Almodovar, avec Emma Suarez, Adriana Ugarte, Rossy de Palma…

Julieta, professeure âgée de 55 ans, décide d’écrire à sa fille Antia tout ce qu’elle a gardé secret depuis 30 ans. Des années 80 qui furent les meilleures de sa vie à sa vie actuelle, catastrophe sans solution où elle tente de survivre au bord de la folie… Une fois sa confession écrite, Julieta ne sait pas quoi en faire car elle est sans nouvelles de sa fille depuis 12 ans, depuis qu’elle l’a quittée à 18 ans… Elle continue à la chercher par tous les moyens mais ne finit par découvrir que la distance qui les sépare… Pour son 20e long-métrage, le réalisateur madrilène revient à un drame sombre et intimiste, moins baroque que certains de ses films précédents. Julieta (qui s’est

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Le Lendemain

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Film du mois voir au dos du carnet

Le Livre de la jungle Voir pages Jeune Public

La Loi de la jungle

France – 2016 – 1h39, d’Antonin Peretjatko, avec Vincent Macaigne, Vimala Pons, Pascal Legitimus…

En tant que département français d’outremer, la Guyane fait partie de l’Union européenne et doit donc se conformer à ses normes, ce qui pose évidemment d’énormes problèmes. La situation est d’autant plus absurde qu’il s’agit d’implanter en pleine jungle une piste de ski indoor ! Il incombe donc à un malheureux stagiaire au Ministère de la Norme, Marc Châtaigne, incarné par Vincent Macaigne, de faire respecter des réglementations

M

M

USA – 1951 – 1h28, de Joseph Losey, avec David Wayne, Howard Da Silva...

Un tueur en série rôde, kidnappe et tue des petites filles. La police et la pègre

locale échouent à le retrouver et le mécontentement des habitants gronde. Une chasse à l’homme débute... Mais oui, il existe un remake de M le Maudit de Fritz Lang, signé Joseph Losey, s’il vous plaît, qui contredit en beauté l’axiome qui voudrait que tout remake d’un chef-d’œuvre soit voué au ratage. Car M est une une grande réussite de l’auteur de The Servant ou Monsieur Klein, entre autres. De plus, le film préfigure de façon troublante la chasse aux sorcières que ne tardera pas à subir le réalisateur qui sera contraint de quitter son pays pour trouver refuge en Europe et y continuer sa brillantissime carrière. Possédant sa propre originalité, M est un film noir puissant aux dimensions sociales et politiques indéniables. Cette rareté est en tout point une splendeur. JF

Ma Loute

France – 2015 – 2h02, de Bruno Dumont, avec Juliette Binoche, Valeria Bruni-Tedeschi, Fabrice Luchini…

Dans la baie de la Slack, en cette année 1910, les habitants de cette région du Nord ont peur : les disparitions se multiplient. Et le fait que l’enquête soit confiée à l’Inspecteur Machin n’est pas fait pour les rassurer, ce dernier donnant manifestement des signes de… démence ! Suite à la disparition de Billie, benjamine de la famille Van Peteghem, grands bourgeois lillois, et celle de Ma Loute, fils aîné d’une famille de pêcheurs, deux mondes n’ayant, a priori, rien en commun vont se rencontrer… Qui l’eût cru ? Bruno Dumont, le réalisateur de L’Humanité, réalise une comédie et pour ce grand changement, a mitonné un scénario aux allures de conte horrifique, drolatique et grinçant Pour interpréter cette partition

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burlesque, il a choisi de s’entourer de pointures du cinéma (alors que généralement, il préfère travailler avec des comédiens non professionnels) : dans les images disponibles du film, F. Luchini, V. Bruni-Tedeschi et J. Binoche sont méconnaissables. Jamais on ne les a vus, jusqu’alors, dans un registre aussi délirant ! Et c’est jubilatoire ! Sources : dossier de presse, premiere.fr, lavoixdunord.fr

Filmographie sélective : La Vie de Jésus (1997), L’Humanité (1999), Twentynine Palms (2003), Camille Claudel 1915 (2013)

Ma Ma Espagne/France - 2015 - 1h51, de Julio Medem, avec Penélope Cruz, Luis Tosas, Alex Berendmühl…

Entre la perte de son poste d’enseignante, le départ de son mari avec une autre et sa tendance à ne pas s’apitoyer sur son sort, Magda a trop tardé à aller consulter le médecin pour une grosseur au sein. Le diagnostic n’est pas bon, mais le choc passé, elle prend le parti de ne pas baisser les bras et de miser sur le futur. Dans le même temps, elle fait la connaissance d’Arturo qui, lui-même, vit un drame personnel… Pour son retour en Espagne, Penélope Cruz a opté pour un pur mélo, « une histoire d’amour dans son sens le plus profond ». Comme l’indique le réalisateur, elle apporte à Magda sa fraîcheur, son humour, son authenticité, et sa vitalité : quasiment présente dans tous les plans, elle illumine le film ! IG

Men and Chicken

Danemark – 2015 – 1h44, de Anders Thomas Jensen, avec Mads Mikkelsen, David Dencik, Nicolas Bro…

Après la mort de leur père, deux frères, Elias, impulsif et obsédé, et Gabriel, plutôt craintif, découvrent qu’ils ont été adoptés. Malgré leurs différences et leurs

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désaccords, ils décident de partir ensemble rencontrer leur père biologique, Evelio Thanatos. Celui-ci est un généticien qui mène ses expériences loin de tous, sur une île mystérieuse. À leur arrivée, Elias et Gabriel découvrent une étrange fratrie et des origines familiales qui ne le sont pas moins ! Anders Thomas Jensen, réalisateur des films Adam’s Apples (2005) et Les Bouchers verts (2003), est aussi scénariste, notamment pour Lars von Trier et Suzanne Bier. Avec Men and Chicken, il nous propose une comédie dramatique noire et très décalée, empruntant au monstrueux et au fantastique, provoquant bien des rires grinçants, mais pas seulement. À découvrir, un Mads Mikkelsen inattendu !

lité hors du commun, une découverte à ne pas rater pour ceux qui ne connaissent pas encore O. Naharin et un plaisir pour ceux qui le connaissent déjà. Sources : imdb.com

N La Nouvelle vie de Paul Sneijder France, Canada – 2016 – 1h54, De Thomas Vincent, avec Thierry Lhermitte, Géraldine Pailhas, Guillaume Cyr…

Adaptation du roman de Jean-Paul Dubois Le Cas Sneijder, le film de Thomas Vincent raconte la métamorphose de Paul qui ouvre les yeux sur la réalité de sa vie après un grave accident d’ascenseur. Cadre supérieur dominé par sa femme qui le trompe, méprisé par ses deux fils, il décide de devenir promeneur de chiens… Thomas Vincent, dont on avait aimé Karnaval (1999), Je suis un assassin (2004), Le Nouveau protocole (2008), renoue avec le grand écran après plusieurs téléfilms. C’est au Canada qu’il met en scène Thierry Lhermitte, lui aussi plus rare ces derniers temps au cinéma. Le livre de Jean-Paul Dubois, aussi désespéré que drôle, est un des meilleurs de l’auteur. On attend le film avec impatience.

Source : dossier de presse, critique-film.fr, avoiralire.com, lejournaldessorties.com.

Mr Gaga sur les pas de Ohad Naharin Israël – 2015 – 1h30, de Tomer Heymann, avec O. Naharin, T. Naharin...

Gaga est le nom de la technique chorégraphique que le danseur israélien Ohad Naharin (probablement l’une des plus fortes et originales personnalités de la danse contemporaine) a mise au point. De son enfance en kibboutz il a tiré un sens du collectif qui permet peut-être d’expliquer l’extraordinaire puissance visuelle des nombreux extraits de ses spectacles, qui donnent vie et forme à ce documentaire qui n’hésite pas à regarder aussi du côté d’une face un peu plus sombre de O. Naharin, qui n’est pas toujours facile avec ses danseurs. Alternant interviews, images d’archives et extraits de spectacles, Mr Gaga sur les pas de Ohad Naharin s’annonce comme un saisissant documentaire sur une personna-

Sources : dossier de presse

R

Robinson Crusoé Voir pages Jeune Public

documentaristes au monde, a choisi de suivre les musiciens virtuoses en Argentine, en Afrique du Sud ou en Russie. Nous plongeons avec délice dans l’intimité de l’orchestre. La réalisatrice part à la rencontre de tous les passionnés de musique, auditeurs et spectateurs. Ne manquez pas ce magnifique documentaire musical ! Nul besoin de maîtriser le sujet. Sources : dossier de presse.

La Saison des femmes

Inde – 2015 – 1h56, de Leena Yadav, avec Radhika Apte, Sayani Gupta, Tannishtha Chatterjee…

Les quatre héroïnes de ce film en ont vraiment soupé de la domination masculine : qu’elles soient battues, vendues en mariage forcé, méprisées parce que prétendument stériles, elles sont toujours celles sur qui retombent toutes les frustrations masculines. Jusqu’au jour où la coupe déborde et où elles se révoltent ; avec humour, teigne et optimisme ! Trois qualités que ce film partage, et qu’il nous sert avec une image particulièrement soignée, dans un récit en montagnes russes, grâce à des « ruptures de ton qui font passer, en un instant, de l’effroi au rire, en désamorçant sans cesse le pathos. » Sources : telerama.fr, imdb.com

The Neon Demon

Danemark 2016 1h57, de Nicolas Winding Refn, avec Elle Fanning, Christina Hendricks, Keanu Reeves, Karl Glusman...

Royal Orchestra Pays Bas/Finlande/suède/Australie – 2015 – 1h34, de Heddy Honigmann.

À l’occasion de son 125e anniversaire, le prestigieux Orchestre royal du Concertgebouw d’Amsterdam part pour une tournée exceptionnelle de cinquante dates, à travers le monde. Heddy Honingmann, considérée comme l’une des plus grandes

S

T

Jesse est jeune et jolie, elle arrive à Los Angeles avec le rêve de devenir mannequin. Très vite recrutée, son ascension est fulgurante. Mais elle suscite les jalousies et certaines de ses collègues sont prêtes à tout pour lui voler sa beauté... Après l’excellent Drive, The Neon demon signe les retrouvailles de Nicolas Winding

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Refn avec Los Angeles. Entouré de Christina Hendricks (Mad Men, Drive) et de Keanu Reeves, le personnage incarné par Elle Fanning (Somewhere, Twixt) nous prévient : dans la bande annonce du film, « Je suis dangereuse ». Elle promet un choc à la fois esthétique (à base d’ambiance nocturne et de néons éclaboussants) et émotionnel (du sang sur les podiums de la mode). Choc que le fidèle compositeur Cliff Martinez présente comme un mélange de La Vallée des poupées et d’un film horrifique. Vivement le 8 juin pour vérifier tout ça. Sources : Dossier de presse

La Tortue rouge Voir pages Jeune Public

Tous les Chats sont gris Belgique – 2015 – 1h27, de Savina Dellicour, avec Bouli Lanners, Manon Capelle, Anne Coesens…

Dorothy, 16 ans, est en pleine crise identitaire. Paul, la quarantaine, sait qu’il est le père biologique de l’adolescente. Éloigné de Dorothy, il porte ce secret depuis des années. Revenu à Bruxelles, Paul observe la jeune fille sans jamais l’approcher. Cela aurait pu sans doute continuer ainsi longtemps si Dorothy n’avait pris un jour la décision de partir en quête de son père biologique. Or, ayant entendu parlé des activités de détective de Paul, c’est à sa porte qu’elle vient sonner pour être aidée… Savina Dellicour, après avoir réalisé des courts métrages – Ready et Strange Little Girls – ainsi qu’une dizaine d’épisodes de la série anglaise Hollyoaks, nous propose son 1er long-métrage. Tous les chats sont gris connaît des débuts prometteurs,

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ayant reçu notamment le Magritte du Meilleur premier film, celui de la Meilleure actrice dans un second rôle et des Prix aux Festivals d’Annonay et de Santa Barbara. Sources : dossier de presse, site lesmagritteducinema.com.

Tout de suite et maintenant France/Luxembourg – 2016 – 1h38, de Pascal Bonitzer, avec Agathe Bonitzer, Vincent Lacoste, Lambert Wilson…

Maya et Nora sont deux sœurs que tout oppose. L’ambitieuse Maya est embauchée dans une firme financière spécialisée dans les « fusac » (fusions-acquisitions), dirigée par Arnaud Barsac, dont elle apprend qu’une profonde hostilité les oppose, lui et sa femme Solveig, à son père Serge. La situation se complique encore avec les relations difficiles qu’elle entretient avec Xavier, un de ses nouveaux collègues. Les différents fils de l’intrigue se tressent sur le principe des duos-duels et, à travers rancoeurs passées, manipulations professionnelles et intrigues sentimentales, apparaît peu à peu le dessous des cartes. La distribution est somptueuse avec, en plus des acteurs déjà cités, JeanPierre Bacri, Isabelle Huppert, Pascal Greggory.

enfin arrive l’invitation se pose un vrai problème : les frais de voyage ne sont pas pris en charge. Qu’à cela ne tienne, les villageois se cotisent mais cela ne pourra payer que le prix du bateau. Arrivés à Marseille, Fatah et Jacqueline entament une traversée de la France à pied, qui ménagera bien des surprises. Les critiques insistent sur la drôlerie, la poésie, le caractère touchant et attachant de ce road movie d’un genre un peu particulier. Apparemment un film vachement bien.

mêmes, traqués par l’ennemi, ils vont tenter de gagner la frontière suisse. Commence alors, au risque de leurs vies, un périlleux voyage à travers la France, ponctué de pièges mais aussi de rencontres inattendues. Animé de peurs et de fous rires aussi, le groupe d’enfants découvre la solidarité, l’amitié et expérimente l’indépendance… Après Et toi, t’es sur qui ? (2007) et Contre toi (2011), la photographe et actrice Lola Doillon se confirme comme réalisatrice et scénariste.

Sources : dossier de presse

Sources : dossier de presse, telerama.fr.

Le Voyage de Fanny

Belgique/France – 2016 – 1h34, de Lola Doillon, avec Léonie Souchaud, Cécile De France, Stéphane De Groodt, Fantine Harduin…

1943. La France est occupée par les Allemands. Du haut de ses 12 ans, Fanny est déjà une jeune adolescente courageuse. Cachée dans un foyer éloigné de ses parents, elle s’occupe de ses deux petites sœurs. Devant fuir précipitamment face à l’occupant, Fanny va prendre la tête d’un groupe de huit enfants. Livrés à eux-

Voyages de rêve Voir pages Jeune Public

m e.co ocin i d u st

Sources : dossier de presse

La Vache

France/Maroc – 2016 – 1h32, de Mohamed Hamidi, avec Fatsah Bouyahmed, Jamel Debbouze, Lambert Wilson…

Le film conte d’abord la vie de Fatah dans un petit village algérien, entouré de ses deux filles et de sa femme Naïma, qu’il a cependant tendance à négliger au profit de Jacqueline. La Jacqueline en question est une vache qu’il rêve depuis longtemps de présenter à Paris, au Salon de l’Agriculture de la Porte de Versailles ! Quand

V

Lundi 6 juin – 19h30 Partenariat Cinémathèque/Studio

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon Italie – 1970 – 1h30, de Elio Petri, couleurs

Dans les années 70, un commissaire de la police politique égorge sa maîtresse Augusta car elle lui préfère un jeune contes-

tataire et que cela trouble l’ordre établi. Il met ensuite tout en œuvre pour prouver que personne n’aura l’audace de le soupçonner. Un film mordant et grinçant sur la face cachée du pouvoir. Soirée présentée par Louis D’Orazio.

Programme détaillé dans le dépliant disponible à l'accueil et sur www.cinematheque.tours.fr

Les CARNETS du STUDIO n°346 – Juin 2016 –

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FILM DU MOIS

Le Lendemain Suède – 2015 – 1h41, de Magnus von Horn, avec Ulrik Munther, Mats Blomgren, Alexander Nordgren...

J

ohn, encore lycéen, revient chez lui après une longue absence. Il a purgé une peine de prison et retourne dans son lycée. Mais personne n'a oublié son crime : rejeté par ses anciens amis, sa présence va attiser chez chacun les pulsions les plus noires... Direction la Suède pour ce premier long métrage d'un jeune réalisateur trentenaire qui a étudié le cinéma en Pologne à la très réputée école de Lodz. Joué par le jeune Ulrik Munther dans son premier rôle, même s'il est une star de la chanson dans les pays scandinaves ainsi qu'au Japon et aux États-Unis, il se situe dans un décor villageois propret et une campagne dont les couleurs sont une déclinaison de pastels gris bleu où tout paraît calme et tranquille. Mais, on le sait, il ne faut pas se fier aux apparences. Un meurtrier qui revient sur les lieux de son crime et qui, rejeté par sa communauté, doit se battre pour retrouver sa dignité : le thème est connu, mais Le Lendemain l'aborde de façon prenante et originale. Tout d'abord parce qu'il s'agit d'un adolescent et que sa communauté, c'est essentiellement son lycée. S'il est peut-être naïf (et sa famille aussi) en imaginant pouvoir continuer ses études sur le lieu même

du drame, John n'a en tous cas pas pris en compte la peur qu'il inspire désormais à ses anciens amis. Peur qui amène un rejet quasi total qui va tourner à la chasse à l'homme. La grande force du film, c'est de nous positionner aux côtés du « coupable » et de ne pas le lâcher. On est en même temps horrifié par ce que l'on découvre sur John mais tout autant effrayé par les réactions de ceux qu'il retrouve. Les repères sont brouillés, ya-t-il des bons ? Y-a-t-il des méchants ? John agit comme un révélateur et il questionne la société en général. Le Lendemain nous met donc dans une position inconfortable, certes, mais complexe, passionnante et riche car il questionne notre propre humanité, notre propre rapport au pardon, à la morale, au droit à la rédemption. D'une puissance rare, le film est économe en effets et peut paraître froid. Mais sous la glace, il bouillonne de tant de sentiments contradictoires, de violence rentrée et d'espoirs contenus qu'il est impossible d'y rester indifférent. En se concentrant sur l'essentiel, aucune fioriture ici, le film marque son empreinte et laisse des souvenirs très forts. JF

LES CARNETS DU STUDIO – n° 346 – Juini 2016 – 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - CPPAP n°0219 K 84305

www.studiocine.com – 08 92 68 37 01


Belgique – 2016 – 1h30, film d’animation de Vincent Kesteloot et Ben Stassen.

JEUNE PUBLIC

JEUNE PUBLIC

Robinson Crusoé À partir de 6 ans

Après une violente tempête, Robinson échoue sur une plage où il est découvert par le perroquet Mardi et ses amis, une bande d’animaux étranges n’ayant jamais vu d’homme. Cette première rencontre promet des moments épiques…

VF

Tout public à partir de 6 ans

Une nouvelle adaptation du célèbre roman de Rudyard Kipling. Jon Favreau, le réalisateur du premier Iron Man, met en scène un seul acteur en chair et en os, le jeune Mowgli, interprété par Neel Sethi, qui évolue dans des images de synthèse.

VF

L’histoire de Robinson Crusoé racontée par les animaux de l’île (pas si) déserte.

USA – 2016 – 1h46, de Jon Favreau, avec les voix de Lambert Wilson, Leïla Bekhti, Eddy Mitchell, Cécile de France...

USA – 2016 – 1h35, film d’animation de Jennifer Yuh et Alessandro Carloni.

Tout public à partir de 9 ans

VF

À partir de 6 ans

Voir page 15

France – 2016 – 1h34, de Lola Doillon, avec Cécile de France, Léonie Souchaud, Fantine Harduin, Juliane Lepoureau...

Po retrouve son père ; ensemble ils rejoignent le village des pandas. Pour combattre Kaï le maléfique, Po doit transformer des pandas maladroits en experts d’arts martiaux…

Humour, action, tendresse à partager en famille ! Tout public à partir de 11 ans

Divers pays – 2016 – 43 mn, programme de cinq courts métrages d’animation.

sans paroles

VF À partir de 3 ans

Rêver, c’est voyager… Voyager, c’est rêver… Les héros de ces histoires décident un jour d’enchanter leur quotidien en s’évadant depuis leurs fauteuils ou en faisant le grand saut !

De très jolies escapades imaginaires et animées. Tout public à partir de 8 ans

France/Belgique/Japon – 2016 – 1h20, film d’animation de Michaël Dudok De Wit.

Rythmé par des combats spectaculaires et une bonne dose d’humour, ce spectacle épique dispose, en plus, d’un casting royal. En redoutable guerrière, Jessica Chastain s’impose désormais aussi dans le registre de l’action. Toutefois, certaines scènes peuvent heurter la sensibilité des très jeunes spectateurs. (Sources : dossier de presse) Samedi 25 juin 14h15

Les grandes étapes de la vie d’un être humain à travers l’histoire d’un naufrage.

Tout public à partir de 6 ans

VF

USA – 1986 – 1h17, film d’animation réalisé par Don Bluth. sans paroles

Un film humaniste d’une grande beauté esthétique !

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USA – 2016 – 1h54, de Cedric Nicolas-Troyan avec Charlize Theron, Chris Hemsworth, Emily Blunt, Jessica Chastain…

Dimanche 26 après la projection de ces deux films, nous vous invitons à un ciné apéro musical et festif : Marie et Lucie prolongeront le voyage avec des chants des Balkans…

En 1885, la famille Souriskewitz, persécutée par les chats, décide d’émigrer de Russie aux États-Unis. Après une traversée difficile, la petite souris Fievel arrive seule et la réalité est toute autre !

Courts d’écoles Le festival Courts d’écoles, c’est le rendez-vous de la création audiovisuelle pour les classes d’Indre-et-Loire qui réalisent un court métrage. Une projection gratuite des films des écoliers aura lieu le samedi 18 juin à 16h00.

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Rencontre

Rencontre avec

Eugène Green

Ici…

Le Fils de Joseph

` LE DROIT DU PLUS FAIBLE On attend toujours les films de Lucas Belvaux avec beaucoup d’intérêt, car on sait qu’il réussira forcément à nous surprendre par le fond et/ou la forme choisis, avec quasi à coup sûr une réflexion soci(ét)ale et politique, cf La Loi du plus faible, 38 témoins… Chez nous ne devrait pas déroger à la règle puisqu’il s’agira de l’histoire d’une infirmière devenant candidate aux élections municipales, pour un parti d’extrême-droite baptisé Le Bloc. Le réalisateur retravaillera à cette occasion avec Émilie Dequenne, son héroïne de Pas son genre. Elle aura pour partenaire André Dussolier, Anne Marivin et Catherine Jacob. ` À MOURIR POUR MOURIR Pas de raison qu’elle y échappe : Barbara, disparue en 1997, va avoir son film biographique ! C’est Mathieu Amalric qui s’y colle, et sa Femme piano sera incarnée par Jeanne Balibar ! En fait, l’idée est de raconter l’histoire d’un réalisateur (Mathieu Amalric luimême) qui veut faire un film sur… Barbara.

et ailleurs… ` VOICI VENU LE TEMPS DES RÉPLICANTS Quand Blade Runner de Ridley Scott sort en 1982, cette histoire relatant la guerre opposant les blade runners, unités spéciales de la police et les réplicants, des androïdes rebelles, était censée se dérouler en… 2019 ! C’est-à-dire maintenant ! Peut-être ce qui a donné envie à Denis Villeneuve (Sicario) de ranimer la franchise mythique. Le décidément inoxydable Harrison Ford reprendra du service avec de nouveaux partenaires : Robin Wright (House of Cards) et Ryan Gosling (Drive). On ne sait pas si Rutger Hauer sera de nouveau de la partie. ` HOMME OBJET En 1971, dans Les Proies, Don Siegel livrait, quasiment, pieds et poings liés, le beau Clint Eastwood, aux désirs d’une horde de femmes frustrées, pendant la Guerre de Sécession ; film d’autant plus (d)étonnant qu’il était le fruit de la collaboration de deux adeptes d’un cinéma dopé à la testostérone ! Le sujet est de nouveau inspirant, puisque Sofia Coppola annonce qu’elle va en donner une nouvelle version. On sait déjà que Nicole Kidman et Kirsten Dunst seront les dirigeantes du pensionnat de jeunes filles où se réfugie l’officier blessé, tandis que Elle Fanning (Somewhere) interprétera, elle, une des élèves. Quant à l’objet du désir, il demeure, pour l’instant, inconnu ! IG

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C’est à l’occasion de la sortie de son dernier film Le Fils de Joseph que le réalisateur Eugène Green est venu à la rencontre du public nombreux le soir du 12 avril 2016. Le film raconte l’histoire de Vincent, un adolescent, élevé avec amour par sa mère Marie. Celle-ci a toujours refusé de lui révéler le nom de son père. Le jour où Vincent découvre qu’il s’agit d’Oscar Pormenor, un éditeur parisien égoïste et cynique, il met au point un projet de vengeance... Mais sa rencontre avec Joseph va changer sa vie. Eugène Green au Studio © Nicole Joulin

A

près visionnage du film, on sent l’influence évidente de Robert Bresson sur le cinéma d’E. Green. Il a fait partie de sa culture cinématographique dès l’âge de 19 ans avec la découverte du Journal d’un curé de campagne. Après avoir vu tous ses films, E Green a assimilé Bresson puis a suivi son propre chemin. « La culture, c’est un peu comme la nourriture. Le corps, c’est ce qu’on a mangé. » Au nom de R. Bresson s’ajoutent ceux de deux autres personnes phares pour lui : Antonioni et Ozu. Le réalisateur possède un langage stylistique personnel commun à tous ses films : la diction, le maintien des corps, les regards vers la caméra et la musique baroque. Le fait que les films comportent ces éléments distinctifs ne facilite pas leur production, leur existence même. Pour preuve, les frères Dardenne ont participé à la production, ce qu'aucune chaîne française n'a accepté. L’aide du CNC (l’avance sur recette) est de 20% du budget du film. L’État exige que l’argent public ne dépasse pas 50%. On

peut penser que l’État ne veut plus soutenir ce genre de film. « Aux Studio, ce soir, il y a du public. C’est exceptionnel. » Quand on parle des films d’E. Green, on évoque la grâce, la spiritualité. Son cinéma prend pour matière brute une autre réalité. « Les cinéastes que j’aime font voir un aspect de la réalité qui était caché et qui est de l’ordre du spirituel. Dans le film, je cherche à capter la réalité cachée. Je cherche l’essentiel. Je cherche la simplicité qui vient spontanément. » L’équipe du film, le directeur de la photo et la majorité des acteurs, ont participé à tous ses films. Les trois principaux acteurs étaient tout à fait conscients de ce qui les attendait.Ce qu'il voulait faire comprendre à ses collaborateurs venait donc simplement. Est-ce au nom de la simplicité qu’une scène d’amour n’est pas montrée ?... Mais uniquement les ressorts du canapé sur lequel ça se passe ? « Au théâtre, on utilisera le dialogue. Dans mes films, il n’y a

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Hommage

À Viviane, Judith et toutes les autres… pas de scènes explicitées. Ce n’est pas montré. Pour le jeune Vincent caché sous le canapé, l’expérience est terrible. Il voit le cynisme de son père et la façon dont il traite sa femme et ses enfants. C’est pourquoi la scène est réduite. Vincent ne voit que les pieds, entend les ressorts et son visage porte le résultat. » Le jeu des acteurs est singulier. Le ton emprunté semble décalé. On a l’impression que les personnages ne jouent pas. « Ils ne jouent pas en effet comme dans les séries ou les autres films. Je ne veux pas qu’ils composent une histoire. J’insiste pour que les intonations soient naturelles, qu’ils parlent comme s’ils se parlaient à euxmêmes. Quand je filme une personne, il y a la présence physique mais je veux qu’on sente l’intériorité. Quand les personnages sortent du cadre, comme il y a eu osmose dans le lieu, on le ressent. » Pour le choix de Vincent, le jeune acteur, le réalisateur n’a pas eu besoin d’analyse psychologique, mais d’un rapport de confiance, d’amitié permettant de travailler en parfaite harmonie. La question de la genèse du film est posée. « Le noyau arrive comme ça, avec le titre. Je ne sais pas d’où ça vient. Par rapport à la culture antique, on pensait que les poètes étaient possédés par une divinité. Le poète était le véhicule d’une énergie. Moi je me sens comme un véhicule de l’idée de départ. Dans la vie vécue, je connais plusieurs cas comme Vincent et Marie : une femme qui élève seule son enfant car le père n’a pas voulu le reconnaître. C’est venu avec le nom Le Fils de Joseph. Ma pensée est mythique, c’est-à-

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dire que je crois à la fiction comme la façon la plus forte d’exprimer la vérité. C’est-àdire que je crois à une histoire inventée qui porte des vérités. Je laisse développer, puis plusieurs sens sortent, adviennent. Ensuite, se sont imposés des parallèles avec des épisodes bibliques, la structuration en chapitres, la résonance avec des tableaux dont un du Caravage et deux autres qui sont au Louvre. « La culture baroque est importante pour moi. C’est une nourriture culturelle que j’ai assimilée. » E. Green est méfiant vis-à-vis de la Modernité, mouvement culturel de la fin du XIXe siècle, car elle est fondée sur la destruction de quelque chose d’établi. « Je pense qu’on ne crée rien à partir de rien. On a besoin de notre passé. On a besoin de renouveler à partir de nos racines culturelles. » Le travail d’E. Green est de résister par le travail artistique à la déshumanisation, à la perte de la culture européenne. Ce sont deux gros chantiers importants pour lui. « Il faut transformer les esprits, ne pas accepter ce qui est imposé, faire quelque chose de plus vivant, de porteur de vie. » Tout au long du film et à plusieurs reprises, le public a remarqué l’utilisation du mot frais. « C’est un acte de résistance contre les termes anglais ou pseudo anglais. Les spectateurs doivent en trouver la traduction… » L’idée de résistance est alors reprise par une spectatrice pour clore le débat : « Résistez et revenez aux Studio : c’est tellement frais* ! » MS * Cool

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e me souviens, le talentueux réalisateur Amos Gitaï lui avait proposé des rôles dans Milim (1996) et Alila (2003). Elle avait commencé à connaître la célébrité hors de ses frontières israéliennes grâce à Mariage tardif avec le personnage de Judith (Dover Kosashvili ; 2001). Keren Yedaya lui confiait le rôle de Ruthie dans Mon trésor (2004), primé de la Caméra d’Or. Je me souviens, à la fin des années 90, en pleine célébrité au Proche-Orient, Elle quittait pourtant Israël pour Paris, se lançant un nouveau défi de créativité personnelle, éloignée de tout repère familier. Elle frappait à la porte d’Ariane Mnouchkine au Théâtre du Soleil, acceptant de faire la plonge, faute de rôle alors disponible. Puis Elle expérimentait le Festival d’Avignon grâce à Ellen Melaver, lui offrant le rôle de Martha Graham sur scène. Je me souviens, Elle tenait un café dans Le Voyage de la fanfare (Eran Kolarin ; 2007), ou comment un ensemble de musiciens de la police égyptienne s’égarait dans un village israélien perdu en plein désert. Magnifique ! Je me souviens, Elle incarnait Viviane dans l’émouvante et absolument superbe trilogie inspirée de la vie de sa propre mère – Prendre femme (2004), Les Sept jours ou Shiv’ah (2008) et Gett, Le Procès de Viviane Amsalem (2014), présenté à Cannes – qu’elle avait coécrit et coréalisé avec son frère, Shlomi E.. Un quatrième volet se préparait, déjà en cours d’écriture ! Je me souviens, Elle a joué pour le cinéma français avec André Téchiné pour La Fille du RER (2009), Fanny Ardant dans Cendres et Sang (2009), et Brigitte Sy avec Les mains libres (2010), notamment.

Je me souviens, Elle incarnait récemment Nadia dans la série Trepalium de Antarès Bassis et Sophie Hiet (2015) sur la chaîne Arte. Je me souviens, Elle était cette étonnante comédienne, à la longue chevelure brune qui embrasait l’écran au point qu’en 2008 dans ces mêmes Carnets, nous faisions le parallèle avec d’autres grandes comme Maria Casarès, Irène Papas et la Callas. La Callas, justement, sur laquelle elle espérait concrétiser un projet cinématographique, artiste disparue également prématurément. Elle apportait une dimension dramatique évoquant les destinées d’héroïnes antiques. Je me souviens, Elle a reçu de nombreux prix ; Elle a présidé le jury de la 54ème Semaine de la Critique au Festival de Cannes 2015. Je me souviens, c’était seulement hier encore… ou presque : c’était une femme engagée politiquement, une artiste militante et accomplie, actrice, scénariste et réalisatrice bousculant et osant dénoncer des us archaïques et machistes. Plusieurs réalisateurs évoquaient une actrice sensible et lumineuse, pleine d’humour et douée d’une grande finesse intellectuelle ! Souvenons-nous, Elle nous laisse une galerie de femmes intenses et complexes, fortes et fragiles, avec Dina, troublante tenancière israélienne d’un café accueillant des musiciens égyptiens, Viviane, en quête vitale de liberté, Ruthie, mère prostituée à la dérive, Martha, malade et alcoolique, Nadia, femme ministre du Travail dans une société où le travail devient une souffrance, Judith, amante amoureuse et mère divorcée, … A travers ces personnages, ce sont autant de portraits de familles dressés en miroir des sociétés où ces femmes tentent de s’émanciper pour exister.Souvenez-vous, Elle s’appelle Ronit Elkabetz. RS

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Les rédacteurs ont vu :

MERCI PATRON de François Ruffin

Cinématographiquement parlant c’est une très bonne comédie sociale, pleine d’allant, d’humour et d’humanité. Politiquement c’est plus ambigu, le récit finalement d’une belle arnaque, qui plus est au profit d’une seule famille victime de l’ultra-capitalisme de LVMH, privant par là même les centaines d’autres pareillement lésées de tout espoir de réparation. Michael Moore, à qui on compare volontiers François Ruffin, menait des combats plus généreux… AW Beaucoup plus élaboré qu’un film des Charlots, un peu moins corrosif que les dialogues d’Audiard (on y pense pourtant), la démonstration de Merci patron ! est d’une facture malicieuse faussement naïve qui séduit par l’audace intelligente et facétieuse d’un Robin des Bois et de complices militants. On jubile ! C’est déjà ça ! RS

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Avec un humour ravageur, François Ruffin met en scène la revanche roublarde des Petits contre les Puissants. Est-ce une raison pour attendre un message politique construit de cette comédie documentaire réussie qui devient, d’une façon inattendue, le symbole d’un ras-lebol généralisé face à l’oligarchie régnante ? Peut-on lui reprocher d’utiliser des méthodes moralement douteuses contre ceux dont c’est le quotidien (évasions fiscales, délocalisations, parachutes dorés…) et qui possèdent par ailleurs l’ensemble des médias pour se défendre ? DP « Salauds de pauvres ! »* qui n’hésitent pas à avoir recours à des méthodes iniques pour extorquer de l’argent à l’entrepreneur préféré des Français (selon un sondage BVA) ! Des Sans-dents infichus de faire l’acquisition, ne serait-ce que

d’une seule Rolex au cours de leur existence, mais qui n’ont aucun scrupule à ridiculiser, devant la France entière, un homme, auquel on peut guère reprocher de n’avoir goût que pour le luxe, le calme et la volupté ! Mais dans quel monde vivons-nous ? IG * Gabin dans La Traversée de Paris

La dimension jouissive est indéniable, découvrir des personnages comme celui de l’homme de main est stupéfiant. Mais le film interroge et provoque parfois la gêne en faisant se poser la question de la fragile frontière entre le soutien et l’instrumentalisation. JF Zorro revisité par Ruffin : le justicier d’aujourd’hui n’est pas masqué mais peroxydé, il ne signe plus ses forfaits à la pointe de l’épée mais avec sa caméra et continue de déjouer les complots. Bernard (Arnault) est parfait dans le rôle du

sinistre et cruel gouverneur Montero. Suspense et émotion intacts… SB Film coup de poing où le petit mange le gros, le ridiculise, le met à jour avec culot, malice et pugnacité. On rit, on applaudit. On soupire, on serre les dents. Le suspense est présent comme dans un thriller. La conclusion réjouissante concerne quelques individus. À quand une résolution collective ? MS Faisons fi des critiques parfois adressées à ce film ! Ce qu’il nous raconte est digne de grandes fictions, jusqu’au bout on se pince en se disant que ça n’est pas possible, que ça ne peut pas marcher ! Et pourtant... Et pourtant si ! À lui seul, ce suspense et cet humour expliquent largement le grand succès populaire d’un film qui n’a guère profité de la promotion des grands médias. ER

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Rencontre

Rencontre avec

Johann Elbory Merci patron

Johann Elbory au Studio © Nicole Joulin

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e récit d’une aussi ahurissante revanche prise sur un patron pose évidemment la question de savoir ce qu’il en a été des autres salariés licenciés de cette même usine... « En fait, lorsque F. Ruffin a commencé son film, cela faisait plusieurs années que l’usine avait fermé ; il y avait eu une lutte, qui n’avait pu éviter les licenciements, mais le collectif de lutte avait disparu ; la question s’est bien sûr posée pendant le tournage de savoir ce qu’allaient penser les autres licenciés... Leur réaction, lors des projections, a toujours été positive. »

Vous semble-t-il possible de reproduire une telle aventure ? « Ça sera évidemment difficile, la direction de LVMH a compris la leçon, mais leur souci d’image reste leur point faible ; ils ont peur de la médiatisation de leurs pratiques ; B. Arnault s’est ainsi construit une image très lisse ; on parle peu de lui lorsqu’il y a des licenciements chez LVMH ou l’une de ses filiales ; il apparaît plus dans les pages people des magazines… Le film montre tout de même que ces grands patrons, très puissants et peu nombreux, ont un grand pouvoir de nuisance tout en pouvant se révéler assez faibles… Mais, oui, le but du film est de faire en sorte que cela se reproduise, qu’on recommence à s’en prendre à cette oligarchie. » À propos d’image : Savez-vous comment LVMH a réagi devant le film ? « L’équipe de Fakir (le journal pour lequel travaille F. Ruffin) a été très déçue : B. Arnault n’est venu à

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C’est devant un Studio 3 bien plein que Johann Elbory, militant local, est venu discuter avec le public de Merci patron ! le documentaire de François Ruffin qui a défrayé la chronique (et rempli les cinémas en France) en montrant comment un couple du Nord, licencié par B. Arnault lors d’une délocalisation, réussit à le faire chanter et obtenir un dédommagement en espèces sonnantes et trébuchantes en échange d’un silence... que B. Arnault n’obtiendra pas puisque le film est sorti ! aucune des projections où il a été invité... Le seul qui soit venu, c’est M-A Jamet (à la fois secrétaire général de LVMH et député PS, il intervient dans le film à plusieurs reprises... rarement à son avantage...) qui s’est invité à une projection à Rouen, où il a été copieusement hué... » Un autre acteur clef du film est l’inénarrable M. Dijon : responsable sécurité pour LVMH, c’est lui qui est chargé des négociations avec les Klur, le couple que F. Ruffin aide à faire chanter B. Arnault ; on pourrait croire qu’il est capable de céder, de virer de bord... « Non, pas du tout, c’est un pro de la sécurité, un ancien de la DGSI (ce qui peut laisser des doutes quant aux compétences de ces services...), il est là pour négocier, donc s’il faut dire un peu de mal de son patron pour faire passer la pilule, il peut... Sa vraie faiblesse a surtout été de croire qu’il avait affaire à des ploucs ; de traiter les Klur par le mépris, donc de ne pas assez se méfier : mais, fondamentalement, il demeure un homme de main, qui fait ce pour quoi on le paye. » Quels moyens y a-t-il pour profiter de la dyna-

mique actuelle ? Les syndicats et les mouvements comme Attac font un peu peur aux pouvoirs économiques, mais comment donner de l’écho à toutes ces luttes ? « Il y a aujourd’hui peu de médias indépendants, qui n’appartiennent pas à un grand groupe et ne dépendent pas de la publicité pour leurs revenus.

Une dizaine de personnes contrôlent la quasi totalité de la presse française ; il y a peu de radios indépendantes, pas de chaîne de télévision... Donc, il faut utiliser les médias sociaux, les chaînes youtube, par exemple, peuvent offrir une grande visi-

bilité à des discours différents, plus revendicatifs. Merci patron est un autre exemple de rapide médiatisation : il a servi à faire la une du New York Times pour un article sur les mouvements sociaux en France, a démarré avec 70 copies en France, mais en est aujourd’hui à plus de 200... et est en ce moment le film qui fait le plus fort taux de remplissage des salles où il est projeté ! » Il faut bien reconnaître que, par les temps qui courent et avec l’agitation sociale que connaît le pays en ce moment, ce documentaire tombe à pic pour réinjecter un peu d’optimisme ! ER

Interférences La sociologue et l’ourson Merci patron

D

eux films dits documentaires ont créé la surprise en avril : Merci patron et La Sociologue et l’ourson. Petits chefs d’œuvre bricolés avec des bouts de ficelles, ils confirment que l’économie de moyens peut être un sacré gage d’inventivité, à condition de trouver l’art et la manière. Le premier défraya la chronique et fut unanimement encensé par les médias et les spectateurs : « audacieux, courageux… ». Le deuxième, moins médiatique, a enthousiasmé de la même manière la critique et ceux qui ont eu le bonheur de le voir. Pourtant tous les deux abordent des sujets graves : l’omni-puissance des multinationales qui jouent avec les salariés kleenex ; le débat de société engendré avec la loi du mariage pour tous. On n’ose imaginer ce qu’auraient pu donner ces problématiques abordées dans le cadre des docus télé bien policés et sen-

tencieux que l’on peut voir sur le petit écran ! Car s’ils sont des témoignages percutants et indispensables pour comprendre la société dans laquelle nous vivons, Merci patron et La Sociologue et l’ourson sont très éloignés de ce genre de production. En premier lieu, ils savent prendre une distance ludique avec leurs sujets : si François Ruffin ne se prive pas d’une certaine roublardise, elle semble beaucoup plus sereine dans La Sociologue et l’ourson. Dans les deux œuvres, les ressorts du théâtre sont utilisés pour créer cette distance. Alors que Merci patron met en scène un improbable jeu de rôles mené avec brio par des comédiens on ne peut plus amateurs, La Sociologue et l’ourson se présente comme un petit théâtre de marionnettes où les opposants se déchirent.

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Rencontre

Rencontre avec

Étienne Chaillou La Sociologue et l’ourson

Ensuite, s’ils sont instructifs, aucun des deux ne se veut donneur de leçons : pourtant, la fraude fiscale, les délocalisations, les comportements désastreux des puissants sont habilement mis en évidence dans Merci patron ; et les théories et démonstrations de la sociologue Irène Théry, apparemment complexes, deviennent claires grâce au film de Chaillou et Théry. Face à une opposition violente à l’ampleur inattendue, la nécessité de la loi au nom des minorités ne fait plus de doute. Impossible de ne pas évoquer le militantisme de ces deux documentaires, leurs prises de position politique. François Ruffin opte pour un propos très percutant : les messages de la réhabilitation syndicale – avec le très beau portrait d’une militante CGT – et de l’innovation sociale passent beaucoup mieux que n’importe quel discours. Tout aussi efficace et engagé mais présenté de façon moins polémique est celui transmis par les auteurs de La Sociologue et l’ourson qui défend les droits d’une société en pleine mutation.

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Pour réaliser ces deux films justes, nécessaires, souvent tendres et parfois émouvants, il a suffi à François Ruffin d’une caméra, de quelques feuilles de papier pour écrire des lettres, d’enveloppes, d’une teinture de cheveux et à Étienne Chaillou et Mathias Théry d’associer des vidéos en prise réelle avec des petits décors bricolés en carton devant lesquels évoluent des figurines jouets. L’humour, l’insolence et le culot font le reste. Merci patron et La Sociologue et l’ourson rivalisent de drôlerie avec une succession de séquences hilarantes voire décoiffantes. Comment ne pas se réjouir de voir un groupe comme LVMH et son patron se faire ridiculiser à ce point ? Comment résister aux invectives ridicules d’une éléphante trop maquillée à la voix de Frigide Barjot ? Deux films à la même énergie joyeuse et communicative qui apportent au cinéma et à la triste période que nous vivons un souffle de liberté qui fait du bien. SB

C’est dans un Studio 1 bondé que nous avons accueilli, vendredi 22 avril, Étienne Chaillou, coréalisateur avec Mathias Théry du formidable film La Sociologue et l’ourson. Retour aux sources pour ce jeune Tourangeau rappelant avec un brin de malice que le présentateur de la soirée, Philippe Perol, fut son prof de maths !

L

a fiction est absente dans ce documentaire tourné en 2012 et 2013 alors que la France est en plein débat sur le Mariage pour tous. Au départ, les recherches de la sociologue Irène Théry : elle travaille depuis 30 ans sur le couple, son évolution dans la société et est l’auteure de nombreux ouvrages qui font référence. Les questions que lui posent le duo de réalisateurs ont été préparées, écrites mais posées à l’improviste, le plus souvent au téléphone dans les situations les plus variées. Les réponses sont d’une grande spontanéité et d’une grande clairvoyance.

Débarrassé du jargon sociologique et grâce au fait qu’avec un seul plan de cinéma on peut expliquer le réel aussi

clairement que le ferait un long texte écrit, tout devient limpide, évident : la lisibilité du projet de loi, ce qui l’a rendu nécessaire. Le travail complexe de la sociologue, pour laquelle les réalisateurs ne cachent pas leur admiration, est ainsi résumé au mieux. Informés par Irène Théry que le débat allait être le sujet de l’année et profitant de la complicité mère/fils (Mathias est le fils d’Irène), les jeunes réalisateurs ont tout suivi depuis le début et pu être très réactifs face aux événements qui se sont enchaînés ; car, si l’opposition à la loi était prévisible, nul n’avait imaginé qu’elle prendrait cette ampleur. Dès le début du tournage, il a semblé évident qu’il était difficile de faire un film

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Rencontre

Rencontre avec linéaire en raison de l’importance des enjeux, et du grand nombre d’éléments qui se mêlaient : droit, traditions, rapport du pays avec l’institution du mariage… Après deux mois de tournage d’entretiens avec Irène Théry, l’idée de ne conserver que la voix et de montrer sa marionnette – une oursonne confectionnée pour l’occasion – s’est imposée petit à petit : on entend mieux ce qui est dit... Pour les autres protagonistes, il a suffi de puiser dans une grande malle dans laquelle avaient été entassés poupées, peluches et personnages de jouets divers, en s’efforçant de se freiner sur les représentations des anti pour ne pas tomber dans la caricature ! Ce subterfuge permet d’expliquer les choses de façon ludique, de les rendre claires en mettant une distance ironique. Et ça fonctionne ! Ces séquences très découpées alternent avec les longs plans filmés live : à l’Elysée, où l’enjeu est de ne pas arrêter la caméra jusqu’à ce que la porte de la salle de réunion très privée se referme, à l’Assemblée nationale, où toutes les ruses sont utilisées pour s’infiltrer. Loin du lieu policé que l’on nous montre à la télévision, les réalisateurs y découvrent

« un vrai cirque… ça hurlait de partout… » ! Quant à la séquence montrant un échange dans une loge de télévision entre une Irène Théry très peu rassurée et Frigide Barjot, elle n’avait pas été calculée. Au moment de sa capture, les contre devenaient menaçants et les pour n’osaient plus aller sur les plateaux télé.

Sébastien Betbeder Marie et les naufragés

C’est donc dans un genre très innovant que La Sociologue et l’ourson décortique tout ce qu’implique la loi du mariage pour tous, y compris les sujets de l’adoption, des mères porteuses… jusqu’à la manière dont « on fait les bébés », avec une animation désopilante ! La démonstration est magistrale, le film plein d’humour : les interventions des spectateurs ont toutes rendu hommage à sa qualité et son originalité. On regrette qu’au niveau national, malgré des critiques unanimement élogieuses, le film ait été peu vu : à sa sortie le 6 avril, il était distribué dans moins de 20 salles ; le même jour Les Visiteurs 3 disposaient de plus de 700 écrans ! Souhaitons que le bouche à oreille, s’il est encore temps, répare cette injustice. SB

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rois ans après nous avoir présenté Deux automnes, trois hivers, que nous avions beaucoup aimé aux Studio, Sébastien Betbeder nous revient pour Marie et les naufragés. Dès le titre est évoquée une idée d’aventure. Nous sommes là dans une fiction, un conte, avec des personnages moins proches du réalisateur que ceux de son film précédent. Ceux-ci se racontent. S. Betbeder nous confie avoir été marqué par une interview de Resnais, qui prônait d’écrire le plus complètement possible la biographie des différents protagonistes avant et de la leur faire raconter pour qu’ils habitent complètement ceux qu’ils incarnent. Ces monologues s’insèrent dans le mouvement du film et s’intercalent sans se suivre. L’envie d’un ailleurs, de l’isolement, complète ces récits qui se croisent. Pour choisir les acteurs, le réalisateur évite les castings et se refuse à penser à un comédien en particulier, ce qui serait trop limitatif : « Je vois beaucoup de films et parfois certains acteurs me marquent ». Dans le scénario, Antoine (Éric Cantona) devait avoir le même âge que Siméon (Pierre Rochefort) et un caractère très opposé. « Puis, j’ai eu l’idée de Cantona et il m’a fallu vieillir le personnage » … « J’aime bien que les comédiens ne se connaissent pas trop pour

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que l’intimité se crée sur le plateau… Pendant les essais on parlait le moins possible et travaillions plus sur le corps ». Le réalisateur est amateur de danse contemporaine, art de l’abstraction et de l’émotion : la scène chorégraphiée que l’on voit est due à un vrai travail de chorégraphe. Plus sensorielle qu’intellectuelle, elle conclut le séjour des personnages sur cette île. Quant à la musique, elle fut écrite par Sébastien Tellier au cours du tournage : de nombreuses séquences sont live et répondent à la musique que compose Oscar (Damien Chapelle) au fil de l’intrigue. C’est de la même manière qu’Antoine écrit son livre. « Je voulais que les deux univers de la musique et de la littérature soient présents ». L’adéquation entre tournage et création musicale est très stimulante. « Et la musique que créée Oscar, à la fois triste et dansante, est à l’image des personnages, en plein questionnement existentiel et un peu loufoque en même temps ». Pour Sébastien Betbeder, un genre ne se suffit pas à lui-même : la comédie se donne le droit de naviguer vers plus de mélancolie… Avec la dernière phrase du film : « Et après qu’est-ce qu’on fait ? », rien n’est clos. Chacun va continuer son histoire. « Ce qui me touche, c’est que les personnages poursuivent leurs vies quand je quitte la salle. Chacun nous a raconté et montré ce qu’il a bien voulu nous dire et nous montrer ; ça ne sert à rien d’asséner des réponses ! » Inutile de préciser que pour défendre le projet devant une commission alors qu’il n’y a pas de héros vraiment identifié ni vraiment de début et de fin, ce n’était pas gagné. On avait déjà reproché au réalisateur « la démocratie des personnages » dans Deux automnes, trois hivers ; l’indéniable succès de cet opus précédent à la construction très proche a sans nul doute aidé à financer ce joli film atypique. SB

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À propos de Les Ardennes

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on, l’apport de la Belgique à la culture ne se limite pas à la bière et aux moules-frites une fois ! Le pays, bien qu’encore très jeune, a déjà eu le temps de briller dans de multiples domaines : la chanson (Brel), la BD (Philippe Geluck), le journalisme (Charline Vanhoenacker), tous plus ou moins héritiers de leurs ascendants surréalistes (Magritte), et c’est sans compter le cinéma, extraordinairement vivace et inspiré : André Delvaux, les frères Dardenne, Jaco van Dormaël, Michaël Roskam, Lucas Belvaux, Bouli Lanners, qui ont révélé Benoît Poolvoerde, Cécile de France, Jérémie Rénier, François Damiens, Mathias Schoenaerts, Émilie Dequenne… Et ce n’est pas fini : voici que nous découvrons Robin Pront et son premier film, Les Ardennes.

Michaël Roskam, avec Bullhead, nous avait déjà montré une Belgique sombre, où le drame oscille entre sordide et tragique, à travers un film d’une remarquable efficacité. On retrouve cette même intensité dans Les Ardennes qui, loin d’être une riante promenade touristique, nous montre l’envers du décor : délinquance, boîtes louches, précarité, combines, amours à problèmes,

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meurtres. C’est un film très noir, marqué par quelques motifs récurrents : la pluie, la voiture surtout, omniprésente : nombre de scènes se passent dans celle de Dave, lui et son frère Kenny travaillent dans une station de lavage d’autos et la longue scène finale, tendue, intense, se déroule dans une casse de voitures et autres véhicules. De la voiture à la casse, tout un programme… Lorsque Dave va chercher son frère Kenny qui sort de prison, c’est à travers le rétroviseur de sa voiture que nous voyons la scène. Même dispositif quand Kenny, plus tard, espionne son frère. Quand ils discutent, la caméra les filme le plus souvent à travers les vitres du véhicule ou à travers celles d’un restaurant, comme si les deux frères ne pouvaient jamais se voir et se parler directement, naturellement. La métaphore est juste : trop de rancoeurs et de mensonges les séparent douloureusement et sans remède. Ils se guettent mais ne se voient pas, se parlent mais ne se disent rien. Ces trois motifs (pluie, voiture, écran de verre) sont prégnants sans être lourds, ils

sont la marque indubitable d’un style. Ajoutons à cela un montage tranchant, conférant à la narration des embardées surprenantes, une bande-son pertinente, une dose ébouriffante de surréalisme (l’attaque des autruches dans la casse) et un coup de théâtre final dont la logique laisse pantois, et on aura là tous les ingrédients d’un excellent film noir. Mais que raconte finalement cette sombre histoire ardennaise ? Deux frères, Dave et Kenny, accompagnés de Sylvie, la compagne de Kenny, foirent complètement un cambriolage qui coûte quatre ans de prison à Kenny, qui n’a pu s’échapper mais ne les dénonce pas. À sa sortie les choses ont bien changé : Dave et Sylvie se sont mis en ménage, Sylvie est enceinte. La situation est d’autant plus étouffante qu’ils n’osent pas avouer la vérité à Kenny, être violent et ingérable. L’engrenage tragique dès lors est en marche, et c’est dans la description même de cet engrenage que Les Ardennes se révèle pour ce qu’il est : un film beaucoup plus profond et intéressant qu’un excellent polar, sondant avec une grande intelligence les abîmes de l’âme humaine. « Nous tendons d’instinct à imaginer le rapport fraternel comme une affectueuse unité, mais les exemples mythologiques, littéraires et historiques qui viennent à l’esprit sont presque tous des exemples de conflit : Caïn et Abel, Jacob et Esaü, Etéocle et Polynice, Romu-

lus et Rémus, Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre etc. […] Ce n’est pas dans les mythes seulement que les frères sont à la fois rapprochés et séparés par une même fascination, celle de l’objet qu’ils désirent ardemment tous les deux et qu’ils ne veulent ou ne peuvent partager. […] Le désir est essentiellement mimétique, il se calque sur un désir modèle ; il élit le même objet que ce modèle. […] La mimesis se jette aveuglément sur l’obstacle d’un désir concurrent ; elle engendre son propre échec. […] Il n’y a pas de conflit plus fréquent dans les mythes que le conflit fraternel. Il aboutit généralement au fratricide. […] La violence qu’ils [les frères] paraissent fatalement appelés à exercer l’un contre l’autre ne peut jamais se dissiper que sur des victimes tierces, des victimes sacrificielles. » Toutes ces citations sont extraites d’un des monuments de la pensée du XXe siècle : La Violence et le sacré de René Girard. Si l’on ne savait que ce texte fondateur a été publié en 1972, on jurerait qu’il est une exégèse du film. Sans vouloir céder à la tentation de la surinterprétation il semble quand même bien évident que Robin Pront s’en est nourri, nous offrant ainsi un film d’une richesse insoupçonnée au départ. Qu’un film policier soit aussi réussi dans son aspect fictionnel que profond dans la pensée qui le sous-tend n’est vraiment pas chose courante… AW

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Rencontre

Deux images Comment faire disparaître un pays ? En détruisant sa mémoire.

Rencontre avec

Élie Kheir

Lors de l’invasion américaine, le musée de Bagdad a été systématiquement pillé. Les trésors de l’une des plus anciennes civilisations dispersés. La vision de ce char dans l’entrée du musée est bouleversante. Comme cette scène où un acteur bagdadi parcourt les studios de cinéma détruits alors que le matériel est anéanti, les films fondus ou brûlés, toute la mémoire d’un peuple disparue.

Homeland – Irak année zéro

A

Élie Kheir aux Studio © Dominique Plumecocq

Avec un titre qui fait référence à la fois aux Heimat de Edgar Reitz et à Allemagne année zéro de Rosselini, le réalisateur franco-irakien Abbas Fahdel proposait un documentaire exceptionnel (par sa durée, près de six heures, et par sa force émotionnelle et l’intelligence de son propos) en deux parties intitulées Avant et Après la chute. Cent trente spectateurs ont tenté l’expérience en assistant aux séances programmées les samedi 16 et dimanche 17 avril. Elie Kheir (chercheur à l’École des Hautes études en sciences sociales) a introduit le film en rappelant le contexte historique puis en organisant un débat le dimanche soir…

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bbas Fadhel a filmé les faits et gestes de sa famille entre 2002 et 2003, juste avant et juste après l’invasion américaine. Il a enregistré 120 heures d’images parce qu’il avait peur qu’avec cette nouvelle guerre, l’Irak perde tout le contexte de vie qu’il avait connu jusque-là. Il voulait garder les paysages, la culture de son pays. Élie Kheir a rappelé qu’il y avait eu trois guerres du Golfe : la 1re, de 1980 à 88 entre l’Iran et l’Irak qui a fait plus d’un million de morts. Saddam Hussein, luttant contre l’Iran islamique, avait alors le soutien des États-Unis, des pays du Golfe et de l’Europe (qui fermaient les yeux sur l’utilisation d’armes chimiques). Il pensait qu’avoir fait « le sale travail » lui donnait un leadership régional incontournable. Son pays au bord de la banqueroute, il demanda au Koweït d’an-

nuler ses dettes. Devant son refus et alors que les États-Unis l’assuraient ne pas vouloir s’impliquer dans les conflits entre pays arabes, il envahit l’émirat. Ce qui déclencha l’opération Bouclier du désert en 1991, menée par une coalition de 32 pays. L’embargo décidé par l’Onu dura 12 ans et appauvrit terriblement l’Irak. Sous le prétexte (qui s’avéra fallacieux) que Saddam Hussein possédait des armes de destruction massive, George Bush décidait d’envahir l’Irak en 2003. Après les six heures passées au cœur de la famille du réalisateur, les spectateurs furent nombreux à retrouver Élie Kheir dans la bibliothèque pour de passionnants échanges géopolitiques. Comment, sous couvert de promouvoir la stabilité, la prospérité, la démocratie, cette guerre préventive a abouti, plus de 10 ans plus tard, à la destruction de la société irakienne qui vit sous une multiple tutelle (États-Unis, Iran, Turquie) et où les Chiites, les Kurdes et les Sunnites n’imaginent un avenir que séparément. En 2003, avec l’affaiblissement de l’URSS, l’hégémonie américaine était totale. L’un des personnages du film le souligne : tous les ministères ont été détruits sauf celui… du pétrole. Le frère de A. Fahdel

le proclame : « L’Irak était bien plus heureuse avant d’avoir du pétrole » et la colère gronde : « On est passé de la dictature de Saddam à celle des USA ». On s’est aussi interrogé sur les racines de la violence qui ravage la région. Sont-elles dues aux dictatures qui ont maintenu sous cloche les peuples ? Aux interventions étrangères ? Pour le réalisateur : « l’appauvrissement d’une population amène la violence et la délinquance. (…) L’embargo a engendré des monstres, sans éducation et sans conscience. (…) Les bandes de criminels se sont converties en milices religieuses et politiques. » Le débat a également porté sur l’aspect humain. Voir une famille pendant des heures, au jour le jour, permet d’observer une humanité universelle, loin des fantasmes sur les populations de ces régions, loin des discours actuels et de leur diabolisation simpliste. On le sait : l’histoire est écrite par les vainqueurs. Filmée par les occupants. Les films américains sont centrés sur des Américains. Les Irakiens sont hors-champ. Homeland est « le hors-champ des films américains. », « L’antidote salutaire aux poisons racistes d’American sniper ! » comme le postait le réalisateur Jonathan Nossiter. DP

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À propos de Midnight Special

déplace le centre de gravité du récit vers un ailleurs spatial et/ou temporel. Sauf à jouer sur la désinvolture assumée ou le kitsch, le cinéaste se doit de soigner particulièrement les images de synthèse afin de rendre cet univers imaginaire — donc arbitraire — crédible.

M

idnight Special débute dans la nuit par l’enlèvement d’un enfant aux yeux couverts de lunettes de plongée bleues. Aucune violence mais le début d’une traque du kidnappeur, de son complice — tous deux armés — et de l’enfant. Celui-ci ne présente aucun signe de peur et lit tranquillement à l’arrière de la voiture avec une torche et à travers ses lunettes bleues un comics, en l’occurrence Superman. La voiture fonce tous feux éteints, son conducteur affublé lui aussi de grosses lunettes, à vision nocturne celles-ci.

L’entame du film est intrigante, assez énigmatique pour créer un malaise qui laisse augurer d’un récit aussi tendu et prenant que Take Shelter, un des précédents opus de Jeff Nichols. L’incompréhension est une arme des plus puissantes pour happer le spectateur. Le crescendo est parfait jusqu’à un premier point d’orgue : les yeux d’Alton (le petit garçon) deviennent tout à coup intensément lumineux, aveuglants, et créent un champ de force qui manque démolir la maison où ils se trouvent. À ce moment-là deux options narratives se présentent : le fantastique et la science-fic-

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tion. Dans la première les protagonistes — et à travers eux les spectateurs — sont confrontés à des événements d’autant plus déstabilisants que leur nature même est incompréhensible, en rupture avec les lois connues qui régissent le fonctionnement de notre univers. Take Shelter par exemple jouait fondamentalement sur l’ambiguïté normal/anormal, tant en ce qui concerne la situation que la psyché du personnage principal. Film passionnant, amenant sans faillir le spectateur dans sa zone d’inconfort en misant sur le concept freudien d’« inquiétante étrangeté », en s’appuyant donc sur le réalisme le plus pointilleux car l’effet est d’autant plus troublant que la situation de départ est plus ordinaire, plus terre à terre, plus propice à l’identification du spectateur aux personnages. La réussite d’une œuvre fantastique doit beaucoup à la banalité du contexte, à la familiarité des décors. Deuxième option : la science-fiction. Le film se focalise sur les super-pouvoirs d’Alton, peut-être sur leur origine. Dès ce moment les effets spéciaux deviennent primordiaux et orientent la narration vers des explications et des événements présupposant qu’on accepte cette forme d’exotisme qui

La notion même de genre tend à s’estomper. Il s’avère toutefois que ces deux-là, par exception, s’ils sont voisins ne sont pas miscibles, on peut même dire qu’ils font très mauvais ménage. Leurs contenus narratifs et leurs objectifs ne sont pas conciliables : entre le fantastique forcément réaliste et la science-fiction forcément créatrice d’un univers autre il faut choisir. L’entame de Midnight Special, on l’a vu, est insolite, assez tordue pour que les questions qu’on se pose suscitent une forme de suspense, voire d’anxiété, parce que justement sans réponses rationnelles rassurantes. L’apparition des effets spéciaux modifie la substance même du récit et son impact sur le spectateur par le choix explicite de l’option SF. Dès lors le mystère s’effiloche, tout devient clair et on se retrouve dans une sorte de mix entre un E.T.1 revisité et un Abyss 2 sur terre ferme, c’est-à-dire un film de science-fiction assumé comme tel, avec cependant l’impression un peu pénible d’une redite sans grande envergure ni

originalité. Question de budget probablement. Toujours est-il que les longs travellings de ce qui devait constituer un grandiose bouquet final donnent vraiment l’impression de s’étirer inutilement en un fourbi certes très décoratif, mais tape-àl’oeil et dépourvu de nécessité dramatique. Les images sont bien léchées mais peinent à convaincre : créer un univers narratif imaginaire dans un monde lui-même résolument imaginaire peut se révéler bluffant. Le faire dans un monde présenté comme réel est beaucoup plus périlleux. Dans Gravity 3 ou Interstellar 4 les images de synthèse ne posent pas problème car ces films se situent dans un univers qui appartient à la fantasy. On y entre de plain-pied sans difficulté, tout ou presque y est acceptable parce qu’inclus dans une élaboration imaginaire globalement cohérente. Il n’en va pas de même avec Midnight Special censé se passer réellement, ici et maintenant, et qui finit par imposer une imagerie à prendre au pied de la lettre, prête à consommer passivement, mais évidemment gratuite et plaquée, incapable donc de semer trouble ou fascination. L’imaginaire du cinéaste doit nourrir celui du spectateur, pas s’y substituer. AW

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Film de Steven Spielberg de James Cameron 3 Film d’Alfonso Cuaron 4 Film de Christopher Nolan 2 Film

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Belgique – 2016 – 1h30, film d’animation de Vincent Kesteloot et Ben Stassen.

JEUNE PUBLIC

JEUNE PUBLIC

Robinson Crusoé À partir de 6 ans

Après une violente tempête, Robinson échoue sur une plage où il est découvert par le perroquet Mardi et ses amis, une bande d’animaux étranges n’ayant jamais vu d’homme. Cette première rencontre promet des moments épiques…

VF

Tout public à partir de 6 ans

Une nouvelle adaptation du célèbre roman de Rudyard Kipling. Jon Favreau, le réalisateur du premier Iron Man, met en scène un seul acteur en chair et en os, le jeune Mowgli, interprété par Neel Sethi, qui évolue dans des images de synthèse.

VF

L’histoire de Robinson Crusoé racontée par les animaux de l’île (pas si) déserte.

USA – 2016 – 1h46, de Jon Favreau, avec les voix de Lambert Wilson, Leïla Bekhti, Eddy Mitchell, Cécile de France...

USA – 2016 – 1h35, film d’animation de Jennifer Yuh et Alessandro Carloni.

Tout public à partir de 9 ans

VF

À partir de 6 ans

Voir page 15

France – 2016 – 1h34, de Lola Doillon, avec Cécile de France, Léonie Souchaud, Fantine Harduin, Juliane Lepoureau...

Po retrouve son père ; ensemble ils rejoignent le village des pandas. Pour combattre Kaï le maléfique, Po doit transformer des pandas maladroits en experts d’arts martiaux…

Humour, action, tendresse à partager en famille ! Tout public à partir de 11 ans

Divers pays – 2016 – 43 mn, programme de cinq courts métrages d’animation.

sans paroles

VF À partir de 3 ans

Rêver, c’est voyager… Voyager, c’est rêver… Les héros de ces histoires décident un jour d’enchanter leur quotidien en s’évadant depuis leurs fauteuils ou en faisant le grand saut !

De très jolies escapades imaginaires et animées. Tout public à partir de 8 ans

France/Belgique/Japon – 2016 – 1h20, film d’animation de Michaël Dudok De Wit.

Rythmé par des combats spectaculaires et une bonne dose d’humour, ce spectacle épique dispose, en plus, d’un casting royal. En redoutable guerrière, Jessica Chastain s’impose désormais aussi dans le registre de l’action. Toutefois, certaines scènes peuvent heurter la sensibilité des très jeunes spectateurs. (Sources : dossier de presse) Samedi 25 juin 14h15

Les grandes étapes de la vie d’un être humain à travers l’histoire d’un naufrage.

Tout public à partir de 6 ans

VF

USA – 1986 – 1h17, film d’animation réalisé par Don Bluth. sans paroles

Un film humaniste d’une grande beauté esthétique !

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USA – 2016 – 1h54, de Cedric Nicolas-Troyan avec Charlize Theron, Chris Hemsworth, Emily Blunt, Jessica Chastain…

Dimanche 26 après la projection de ces deux films, nous vous invitons à un ciné apéro musical et festif : Marie et Lucie prolongeront le voyage avec des chants des Balkans…

En 1885, la famille Souriskewitz, persécutée par les chats, décide d’émigrer de Russie aux États-Unis. Après une traversée difficile, la petite souris Fievel arrive seule et la réalité est toute autre !

Courts d’écoles Le festival Courts d’écoles, c’est le rendez-vous de la création audiovisuelle pour les classes d’Indre-et-Loire qui réalisent un court métrage. Une projection gratuite des films des écoliers aura lieu le samedi 18 juin à 16h00.

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