26.02 au 01.04 2014

Page 1

ISSN 0299 - 0342

CINÉMAS STUDIO : 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS

N°321 • mars 2014

Festival de cinéma asiatique de Tours

Heimat de Edgar R ei tz

17-26 mars 2014 (Voir page 5)


S

O

M

M

A

I

R

E

mars 2014 - n° 321

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3

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4

Éditorial

CNP

.................

5

.........................................

7

Festival de cinéma asiatique de Tours Soirée Vague jeune

LES FILMS DE A à Z

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8

En bref . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 Bande annonce ...............................

18

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19

L’économie palestinienne Humeur

Une sorte de blues

lundi : mercredi : jeudi : vendredi : samedi :

de 14h00 à 19h00 de 14h00 à 17h00 de 14h00 à 17h00 de 14h00 à 19h00 de 14h30 à 17h00

Cafétéria des Studio

Courts lettrages

Philomena . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

Hommage

Dominique Sanda

..........................................

22

..........................................

24

gérée par l'association AIR (chantier d'insertion),

accueille les abonnés des Studio tous les jours de 16h00 à 21h45 sur présentation des cartes abonné et cafétéria.

Tél : 02 47 20 85 77

À propos

Le Géant égoïste Interférence

.............

26

.................................................

27

2 automnes, 3 hivers/Casse-tête chinois

Les STUDIO sont membres de ces associations professionnelles : EUROPA

Interférence

Quel père ? À propos de

Le Loup de Wall Street

...................................

À propos de

28

..........................

29

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30

Jacky et le royaume des filles Rencontre

Fleur Albert

Horaires d’ouverture :

Rencontre ..........................................

30

Vos critiques

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33

Jeune Public

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34

Charlotte Garson

FILM DU MOIS : HEIMAT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

GRILLE PROGRAMME

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pages centrales

Site : www.studiocine.com et un lien vers notre page Facebook : cinémas STUDIO

REGROUPEMENT DES SALLES POUR LA PROMOTION DU CINÉMA EUROPÉEN

AFCAE ASSOCIATION FRANÇAISE DES CINÉMAS D’ART ET ESSAI

ACOR ASSOCIATION DES CINÉMAS DE L’OUEST POUR LA RECHERCHE (Membre co-fondateur)

GNCR GROUPEMENT NATIONAL DES CINÉMAS DE RECHERCHE

ACC ASSOCIATION DES CINÉMAS DU CENTRE (Membre co-fondateur)

Prix de l’APF 1998

LES ÉDITIONS DU STUDIO DE TOURS - 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - Mensuel - Prix du numéro 2 €. ÉQUIPE DE RÉDACTION : Sylvie Bordet, Éric Costeix, Isabelle Godeau, Jean-François Pelle, Dominique Plumecocq, Claire Prual, Éric Rambeau, Marieke Rollin, Roselyne Savard, Marcelle Schotte, André Weill, avec la participation de Lucie Jurvilier, du CNP et de la commission Jeune Public. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Éric Rambeau – MISE EN PAGES & EN IMAGES : Francis Bordet. ÉQUIPE DE RÉALISATION : Éric Besnier, Roselyne Guérineau – DIRECTEUR : Philippe Lecocq – IMPRIMÉ par PRÉSENCE GRAPHIQUE, Monts (37)

Présence graphique contribue à la préservation de l’environnement et atteste être reconnu IMPRIM’VERT.


éditorial

H 15e festival international de

cinema asiatique de Tours - FICAT Voyages, voyages 15 ans, le bel âge. Nous fêtons cette année le 15e anniversaire du festival. Les festivals sont comme certains animaux, pour eux le temps n’a pas la même valeur. Ce n’est pas la crise de l’adolescence mais plutôt l’âge de maturité. Nous ne sommes pas encore assez nostalgiques pour nous retourner vers les premières années du festival, nous préférons regarder vers le futur.

Mer de Chine méridionale grâce à des films, de la musique, des dessins d’écoliers vietnamiens… Le voyage ne sera pas que cinématographique, la photographie et la peinture seront des compagnons de route. EXPOSITIONS • Aux Studio : voyage pictural vers l’Asie ; exposition collective des peintres Jérémie Bruand, Guy Romer, Rodal, Alain Wahl. La vie quotidienne à travers le regard d’écoliers vietnamiens, exposition de dessins. • À L’espace Parfum Culture : Respirations, photographies de Pierre Fuentes. • À L’instant Ciné : Novembre à Ebisu, photographies de Chloé Volmer-Lo. • Au Nyanko Café : Vues du Japon à 139°6, photographies de Thomas Roux.

Aller de l’avant pour découvrir de nouveaux films, de nouveaux cinéastes, travailler avec de nouveaux partenaires, le Nyanko Café, mais continuer notre marche avec les anciens : la Cinémathèque de Tours, Work in Progress, Parfum Culture, L’Instant Ciné et Collège au Cinéma 37.

Et quel sera cette année le voyage de la Toile de Lumière, œuvre du peintre Guy Romer, qui sera remise par le jury au lauréat ? L’an dernier : le Japon, l’année précédente : la Corée, le Vietnam il y a 3 ans. Bon voyage à tous les festivaliers. LJ

En compagnie de Touraine-Vietnam, nous parcourrons les confins occidentaux de la

PS : Mardi 25 mars, soirée de clôture avec remise des prix du jury et du public.

Pour les informations de dernière minute, consulter les sites : http://cineasia37.wordpress.com – www.studiocine.com

Les CARNETS du STUDIO

n°321

mars 2014

3


SEMAINE

CNP jeudi

20h00 C

I

N

lundi 19h30 mardi 19h30

du 26 mars au 1er avril

5

Prostitution et pornographie : 50’ enjeux de société ?

M

1h28’

A

T

H

È

Q

U

E

LES YEUX SANS VISAGE de Georges Franju

samedi à 14h15

ET LE MONDE INVERSÉ

17h30

45’

À suivre. mer-dim

En présence de l’équipe de la série.

de Arnaud Demuynck & Rémi Durin

HER

1h54’

LEÇONS D’HARMONIE de Emir Baigazin

À suivre.

de Spike Jonze À suivre.

• CHRONIQUE D’UN RÊVE 1h47’ • L’EXODE 2h08’

1h25’

WRONG COPS

21h45

17h30 21h45 +mercredi sam-dim

de Quentin Dupieux

16h00

1h28’’

THE GRAND BUDAPEST HOTEL

21h30

1h24’ + court métrage 10’

DIPLOMATIE

À suivre.

17h45

de Volker Schlöndorff

1h22’

GERONTOPHILIA de Bruce la Bruce À suivre.

(MAINTENANT C’EST MA VIE)

SON ÉPOUSE de Michel Spinosa

É

M

A

T

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Q

U

Cycle Musique et cinéma

Le film imprévu www.studiocine.com

Toutes les salles des Studio sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

E

lundi SOUS LA PLUIE 19h30 CHANTONS 1h42’ de Stanley Donen

14h15 1h20’ 16h00 19h45 14h30 19h45

WEEK ENDS

2014

46’ sans paroles

LE PIANO MAGIQUE 14h30 Programme de courts métrages

1h29’

MINUSCULE,

LA VALLÉE DES FOURMIS PERDUES

36’ VF

LES AMIS ANIMAUX 16h30 dimanche de Eva Lindstrom 11h15

1h34’

JACK

ET LA MÉCANIQUE DU CŒUR de Mathias Malzieu & Stéphane Berla

TANTE HILDA de Benoît Chieux & Jacques Rémy Girerd

de Pawel Pawlikowski

2h03’

AMERICAN BLUFF

21h15

2h18’

de David O Russell

1h24’

LES GRANDES ONDES 21h45

1h39’

de Lionel Baier

BETHLÉEM de Yuval Adler

1h56’

GOLTZIUS

& LA COMPAGNIE DU PÉLICAN

17h45 21h30

1h50’

de Peter Greenaway

GLORIA de Sébastien Lelio

www.studiocine.com

16h00 dim 11h15

de Jim Jarmusch

TONNERRE

14h15 1h28’ LE SENS 19h30 DE L’HUMOUR +mercredi sam-dim de Maryline Canto 16h00

ONLY LOVERS LEFT ALIVE

+ jeu-ven lun-mar

17h30 21h30

1h45’ de Guillaume Brac

14h15 16h00 19h45 dim 11h15 17h45

1h25’

IDA

15h45

de Hélène Giraud & Thomas Szabo

de Anne Villacèque

21h30

de Kevin MacDonald

1h47’

N

17h45 21h45

1h46’

HOW I LIVE NOW

I

14h15 1h30’ 17h45 19h30 +mer-sam-dim 16h00 dim 11h

de Julie Bertuccelli

de Kyoshi Kurosawa

Débat avec J.L. Desplat, F. Levevre & M. Bel.

14h30

de Wes Anderson

REAL

20h00

14h30 1h40’ THE GRAND 17h30 19h30 BUDAPEST HOTEL 21h30 de Wes Anderson dim 11h

17h30

À suivre.

de Edgar Reitz

1h05’ de Fabien Liagre & Nicolas Girardin

14h15 mer-sam-dim 16h15 dim 11h15

1h29’

LA COUR DE BABEL

L’agroforesterie, une agriculture innovante ? AGROFORESTERIE, PRODUIRE AUTREMENT

CNP jeudi C

PATÉMA

5 épisodes de la série

2h06’

11h15

1h29’ VF

LE PARFUM DE LA CAROTTE

14h15 2h07’ 19h15

19h15

dimanche

de Yasuhiro Yoshiura

LA LAZY COMPANY

HEIMAT

14h30 19h45

de Michel Ocelot

Débat avec l’auteur et Karima Bellamine.

14h30 1h49’ LE GRAND CAHIER 19h30 de Janos Szasz À suivre. 17h30 19h30

14h15

de Philippe Decourroux

14h15 1h48’ AIMER BOIRE 17h15 ET CHANTER 19h15 de Alain Resnais À suivre. 21h15

14h15 17h00 21h30

AZUR ET ASMAR

du 26 février au 4 mars

1

SEMAINE

samedi

1h39’

LE NOUVEL ESCLAVAGE É

2014

21h45 SAUF jeudi lundi

Le film imprévu www.studiocine.com

Programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35

Cinémas Stu d io – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com


SEMAINE

du 5 au 11 mars 2014

2

1h36’

jeudi 19h45

AVANT-PREMIÈRE

TOUT EST PERMIS de Coline Serreau Rencontre avec la réalisatrice

C I N É M A T H È Q U E

LE ROMAN lundi D’UN TRICHEUR 1h40’

14h15 JACK ET LA 16h00 MÉCANIQUE DU CŒUR SAUF lun-mar de Mathias Malzieu & Stéphane Berla dim 11h15 1h34’

SAUF lun-mar

36’ VF

LES AMIS ANIMAUX

16h15

SEMAINE

3

du 12 au 18 mars 2014

Le Doit international à géométrie variable

CNP HISTOIRE DU DROIT D’ASILE jeudi 20h00

LA MONDIALISATION DE LA JUSTICE Débat avec un spécialiste

C I N É M A T H È Q U E

Festival de cinéma asiatique

SAUF lundi mardi

LA COMPLAINTE lundi 1h55’ SENTIER 19h30 deDU Satyajit Ray

14h15 1h40 THE GRAND 1h25’ 17h15 BUDAPEST HOTEL TANTE HILDA 15h50 SAUF lundi 21h15 de Wes Anderson de Benoît Chieux mardi

Soirée présentée par Denis Jourdin

19h30

de Sacha Guitry Soirée présentée par Raphaëlle Moine

de Eva Lindstrom

Jacques Rémy Girerd

14h15 1h24’ 1h52’ 17h30 17h15 19h15 DIPLOMATIE 21h15 de Volker Schlöndorff MON ONCLE dimanche

dim 11h15 de Jacques Tati 14h15 1h33’ 17h45 19h30 UN WEEK-END 2h03’ mer-sam-dim

16h00 dim 11h00

À PARIS

ONLY LOVERS LEFT ALIVE 21h15

de Roger Michell

14h30 1h42’ 17h45 ARRÊTE OU 19h45 JE CONTINUE dim 11h00

14h30 19h30

de Sophie Fillières

de Jim Jarmusch

1h28’

LE SENS DE L’HUMOUR 21h45 de Maryline Canto

1h52’

À CIEL OUVERT

1h30’ + court métrage 12’

17h30 WEEK-ENDS 21h30 de Anne Villacèque

de Mariana Otero

1h39’

14h30 FREE FALL CHUTE LIBRE) 19h45 (EN de Stephan Lacant 16h15

11h00

GLORIA de Sébastien Lelio

1h18’

SAUF lun-mar

IDA

19h15

de Pawel Pawlikowski

www.studiocine.com

1h40’

14h15 THE GRAND 17h15 BUDAPEST HOTEL 21h15 de Wes Anderson

21h30

Le film imprévu www.studiocine.com

mer-sam dimanche

LE TABLEAU 14h15 de Jean-François Laguionie Atelier le mercredi

36’ VF

LES AMIS ANIMAUX de Eva Lindstrom

1h34’

20h00 Débat avec C. Darde & P. Connil

SAUF ET LA jeu-lun MÉCANIQUE DU CŒUR dimanche

11h15

19h15 LES RAYURES 14h15 1h24’ ZÈBRE dimanche 19h15 DIPLOMATIE DU 11h15 de Benoit Mariage de Volker Schlöndorff 21h15 1h33’ UN WEEK-END 17h15 14h30 1h47’ À PARIS 21h30 17h30 de Roger Michell ÉPOUSE 19h30 SON dim 11h de Michel Spinosa 1h30’ + court métrage 10’ WEEK-ENDS 21h45 14h30 1h46’ HOW de Anne Villacèque 17h45 I LIVE NOW (MAINTENANT, C’EST MA VIE) 19h45 dim 11h de Kevin MacDonald 1h42’ ARRÊTE OU 17h45 14h15 1h29’ JE CONTINUE 21h45 19h45 LA COUR de Sophie Fillières 16h00

DE BABEL

de Julie Bertuccelli

2h18’

14h15 LES CHIENS 19h00 ERRANTS de Tsai Ming Liang

Tous les films sont projetés en version originale (sauf indication contraire).

Retraites, assez de mensonges !

mercredi samedi dimanche

17h15

1h46’

HIPOTESIS 21h30 de Hernan Goldfrid

Le film imprévu www.studiocine.com www.studiocine.com

Voir page 5

cinema asiatique de Tours

CNP

16h00

2014

15e festival international de

11h15

JACK

de Mathias Malzieu & Stéphane Berla

du 19 au 25 mars

4

dimanche

1h20’

mer-sam dim

1h50’

1h15’

SEMAINE

1h29’

mer-sam-dim

RETRAITES RAS, Festival de cinéma asiatique POUR SE SOUVENIR PATÉMA jeudi CONCERT 55’ de Daniel Coutant ET LE MONDE INVERSÉ

14h15 VO 17h45

de Yasuhiro Yoshiura

11h15

C I N É M A T H È Q U E

Festival de cinéma asiatique

lundi LE MONDE D’APU 19h30 1h46’de Satyajit Ray Soirée présentée par Denis Jourdin

14h30 17h00 19h15 21h30

VF

VF dimanche

mercredi 36’ sans paroles Festival de cinéma asiatique sam-dim

LES PETITS CANARDS 16h00 DE PAPIER dimanche de Yu Zhegang

Atelier le mercredi

2h06’

11h15

1h40’

HER de Spike Jonze

dim 11h

THE GRAND BUDAPEST 19h15 HOTEL de Wes Anderson

14h30 1h46’ HOW 21h15 I LIVE NOW

1h42’

11h00

ARRÊTE OU 17h15 JE CONTINUE

dimanche (MAINTENANT, C’EST MA VIE) de Kevin MacDonald

de Sophie Fillières

HEIMAT

de Edgar Reitz

17h30 19h30

1h24’

• CHRONIQUE D’UN RÊVE • L’EXODE 2h08’

1h47’

1h33’

14h15 21h45 14h15 19h45

mer-sam dim

16h00 dim 11h 14h15 19h30

mer-sam dim

16h00

TRAP STREET de Vivian Qu

1h25’

WRONG COPS

DIPLOMATIE de Volker Schlöndorff

14h30 21h45

1h47’

SON ÉPOUSE 17h45 de Michel Spinosa

21h45

1h33’ + court métrage 4’

de Quentin Dupieux

1h29’

LA COUR DE BABEL de Julie Bertuccelli

UN WEEK-END À PARIS

21h30

de Roger Michell

Le film imprévu www.studiocine.com

Programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35

Cinémas Stu d io – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com


deuxième partie: Quelles évolutions a apportées la Cour pénale internationale depuis sa création en 2002 ? (2010 - 12’)) Débat avec un spécialiste du droit international.

jeudi 27 février – 20h00 Le CNP et la SEPANT proposent :

L’agroforesterie… une agriculture innovante ! Produire en polluant moins ; respecter la vie des sols et la biodiversité ; face aux changements climatiques, stocker durablement du carbone… tels sont des défis pour l’agriculture. En marge des filières conventionnelles, des agriculteurs et chercheurs inventent des systèmes de production reposant sur la complémentarité des espèces et réintroduisent l’arbre dans les cultures. C’est l’agroforesterie ! Film : AGROFORESTERIE, PRODUIRE AUTREMENT de Fabien Liagre et Nicolas Girardin (France – 2008 - 1h05) Débat avec Jean-Luc Desplat (agriculteur), François Lefevre et Michel Bel (SEPANT).

jeudi 20 mars – 20h00 Le CNP, ATTAC 37, NPA, Convergence services publics 37, collectif Notre santé en danger, proposent :

Retraites: assez de mensonges ! Au nom d’une fatalité démographique, les retraité(e)s actuel(-le)s et futur(e)s devraient se soumettre à la paupérisation. A moins, bien sûr, de souscrire au capitalisme patrimonial: la retraite par capitalisation. Pour y voir plus clair, prenons de la hauteur! Une civilisation se juge aussi par le sort qu’elle accorde à ses anciens. Film : RETRAITES RAS, CONCERT POUR SE SOUVENIR de Daniel Coutant (2012 - 55’). Débat avec Claude Darde («Notre santé en danger») et Philippe Connil (ATTAC 37)

jeudi 27 mars – 20h00 jeudi 13 mars – 20h00

Le CNP, le Mouvement du Nid, CIDFF 37 et Osez le féminisme 37 ! proposent :

Le CNP, le Collectif Palestine 37, la Ligue des droits de l’homme, Peuples solidaires, Association d’Aide aux Victimes Syriennes, France-Palestine Solidarité présentent :

Prostitution et pornographie : enjeux de société ?

Le droit international à géométrie variable

La France, abolitionniste, précise actuellement sa position dans une proposition de loi. Nous sommes dans un enjeu de société ! Nous, citoyen-ne-s, nous interrogeons, considérant deux aspects distincts : le système prostitutionnel et celui des personnes. Un seul élément est hâtivement extrait de cette loi : la pénalisation du client, fermant ainsi le débat ! Nous élargirons ce débat en débattant aussi de la pornographie, envahissant écrans et esprits…

Des résolutions qui ne résolvent rien, ou si peu… Des traités internationaux qui « garantissent » les droits humains fondamentaux, souvent bafoués. Des peuples qui appellent au secours et ne sont pas entendus. Des populations en danger auprès desquelles la communauté internationale tarde moins à s’engager, au point qu’on hésite entre «devoir d’ingérence» et «néo-colonialisme» pour qualifier son intervention. Autant de questions qui se posent dans notre monde globalisé. Films : HISTOIRE DU DROIT D’ASILE d’Alain Jaumier (2009 - 10’) et LA MONDIALISATION DE LA JUSTICE de Frédéric Lernoud (première partie : Peut-on parler aujourd’hui d’une justice internationale effective et globale ? (2010 – 12’),

4

– Les CARNETS du STUDIO

n°321

mars 2014

Film : LE NOUVEL ESCLAVAGE (2013 - 50’) de Philippe Decourroux. Débat avec l’auteur, chanteur, réalisateur engagé contre le trafic humain, contre toutes violences faites aux femmes, et avec Karima Bellamine, directrice et juriste du CIDFF 37.


H

15e festival international de

cinema asiatique de Tours - FICAT MERCREDI 19 MARS – 16H00

Les Petits canards en papier Chine – 1960 à 1980 – 36 mn, trois courts métrages réalisés par Yu Zheguan

Sans paroles à partir de 3 ans Un programme de 3 courts métrages d’animation en papiers découpés des Studios de Shanghai mettant en scène des petits canards malins, des chats, des lapins et des… choux ! Après la séance de 16h, lecture de contes chinois MERCREDI 19 MARS – 17H30

Vies de sable ( Doi Cat) Autour du Vietnam Vietnam – 1999 – 1h30, de Nguyên Thanh Vân avec Don Duong, Mai Hoa, Hong Anh, Cong Ninh…

Après la libération totale du Sud, Monsieur Canh quitte son poste de combattant pour revenir dans sa région natale auprès de sa femme qui attend son retour. Mais tout ne va pas se passer comme prévu… Prix Le meilleur film du 47e festival du film d’Asie-Pacifique. Lotus d’or du Festival du film vietnamien 2001.

17-26 mars 2014

sa fille de onze ans, pour aller vivre sur une petite île chez son oncle et sa tante. De son père, Momo a gardé une lettre avec seulement deux mots : Chère Momo.... Que voulait-il vraiment lui dire ? Un jour, alors qu’elle fouille le grenier, elle trouve un vieux livre et des phénomènes surprenants commencent à se produire... JEUDI 20 MARS – 17H30

Song of Silence (Inédit – Compétition) Chine – 2012 – 1h55, de Chen Zhuo, avec Li Qiang, Yin Yanning, Wu Bingbin, Yu Xuan...

Jing, une jeune fille sourde, vit avec sa mère, son grand-père et son oncle dans un village de pêcheurs. Cette vie lui pèse. Elle décide de rejoindre son père alors que celui-ci vit une relation amoureuse avec une jeune musicienne. La confrontation entre les deux femmes s’annonce difficile. L’une communique par des mélodies que l’autre ne peut pas entendre. Ce 1er film récompensé au festival de Hong Kong pose la question de l’ouverture aux autres et au monde. JEUDI 20 MARS – 19H30

MERCREDI 19 MARS – 19H15 – OUVERTURE DU FESTIVAL MERCREDI 19 MARS – 19H30 Un été à Quchi (Avant-première – Compétition) Taïwan – 2013 – 1h49, de Chang Tso-Chi avec Yang Liang-Yu, Kuan YunLoong, Wen Hui-Ming…

With Mom 15 mn, court-métrage de Kim Young Jin

El Condor Pasa (Inédit – Compétition) Corée – 2012 – 1h41, de Jeon Soo-Il avec Cho Jae-Hyun, Bae Jeong-Hwa...

Bao, 12 ans, est envoyé à Quchi chez son grand-père car ses parents envisagent de divorcer. Il intègre une école primaire où une élève de sa classe a le même surnom que lui : Bear. Des amitiés vont se nouer entre les enfants et permettre à Bao de grandir en se confrontant aux réalités de la vie. Film d’une grande délicatesse par un auteur qui a déjà été sélectionné dans le festival pour Soul of a Demon.

Soo-Hyun, une adolescente, est assassinée sur le chemin de retour de l’église. Park, prêtre très proche de la jeune fille, se sent coupable et décide de rencontrer la sœur de la victime. Engagée dans la douleur, cette relation va devenir intime et sexuelle. Le prêtre se trouve confronté à un dilemme : comment concilier la foi et le désir ? Il décide donc de partir rejoindre un ancien ami prêtre au Pérou. Nous retrouvons dans ce film la patte de Jeon Soo-Il : rigueur et beauté des cadrages. Rencontre avec Jeon Soo-Il et Kim Young Jin (sous réserve)

JEUDI 20 MARS – 9H15 EN PARTENARIAT AVEC COLLÈGE AU CINÉMA 37 Séance réservée aux scolaires

Scenery (Inédit – Compétition)

Lettre à Momo Japon – 2012 – 2h, film d’animation de Hiroyuki Okiura

À la mort de son mari, Ikuko quitte Tokyo avec Momo,

VENDREDI 21 MARS – 17H30 Corée – 2013 – 1h35, de Zhang Lu

Dans ce documentaire sur les travailleurs immigrés en Corée, Zhang Lu suit dix d’entre eux originaires de Chine, Sri Lanka, Népal... Les CARNETS du STUDIO

n°321

mars 2014 –

5


15e festival international de

cinema asiatique de Tours - FICAT Les paysages du titre sont à la fois extérieurs (les paysages gelés et neigeux de l’hiver coréen) et intérieurs, puisque l’originalité du film est de faire raconter à ces hommes et à ces femmes leurs rêves et leurs cauchemars nocturnes. Les fictions de Zhang Lu nous avaient habitués à suivre des exilées coréennes perdues aux confins de la Chine ou de la Mongolie alors que cette fois, il inverse le processus : la Corée est le lieu de l’exil. Pour Grain In Ear, en 2006, Zhang Lu avait reçu le Prix du jury et le Prix du public. VENDREDI 21 MARS – 19H30

Ugly (Avant-première) Inde – 2013 – 2h05, de Anurag Kashyap avec Rahul Bhat, Tejaswini Kolhapure, Ronit Roy…

Pour retrouver sa fille kidnappée, Kali, Rahul joue un jeu de plus en plus dangereux avec la police, en particulier avec son chef, le nouveau mari de son ex-épouse. Qui a kidnappé Kali ? Pourquoi ? Qui piège qui ? Cet excellent polar au scénario tortueux est un document passionnant sur l’Inde des grandes villes. Rencontre avec Amandine D’Azevedo, spécialiste du cinéma indien. SAMEDI 22 MARS – 11H

Le Silence des rizières, Autour du Vietnam France – 2006 – 1h30, de Fleur Albert

André est un de ces communistes qui croyaient à l’Internationale communiste et qui ont lutté contre le colonialisme pendant la guerre d’Indochine. Aujourd’hui il reste muet sur le sujet. Mai, sa fille, part avec sa mère, Thuy Cam, au Vietnam à la recherche d’une histoire individuelle qui se mêle à l’histoire collective : celle d’une guerre d’indépendance. Rencontre avec Fleur Albert Brunch après la rencontre

The Suspended Step est le 1er long métrage de Yang Xiao qui s’interroge sur la place de la jeunesse dans la société chinoise contemporaine. SAMEDI 22 MARS – 19H30

Détective Dee 2-La légende du dragon des mers (Avant-première) 3D Chine – 2014 – 2h14, de Tsui Hark, avec Mark Chao, Angela Baby, Carina Lau, Andy Lau...

Le jeune détective Dee a l’ambition de servir la loi. Dans la capitale, des rumeurs de monstres marins circulent et l’impératrice fait appel au grand détective Yuchi. Ce dernier repère le jeune Dee et lui demande de l’aider... Ce nouveau film du grand Tsui Hark promet de nous en mettre plein les mirettes tout en pensant à nous divertir intelligemment. Entièrement conçu pour la 3D, ce mélange d’action, de fantastique et d’humour, s’annonce particulièrement alléchant. DIMANCHE 23 MARS – 10H30

Les Trois soeurs du Yunnan (Avant-première) Chine – 2012 – 2h28, de Wang Bing

Trois toutes jeunes sœurs, abandonnées par leur mère vivent seules dans un village d’une grande pauvreté ; lorsque le père revient les chercher, il laisse pourtant l’aînée au village... Mélodrame ? Non, documentaire par l’un des plus rigoureux documentaristes chinois, qui toujours sait prendre le temps d’imposer son rythme d’observation au spectateur pour mieux le faire entrer dans l’univers qu’il décrit. DIMANCHE 23 MARS : 11H15 DIMANCHE ET 16H

Les Petits canards en papier Voir page 35 DIMANCHE 23 MARS – 16H Autour du Vietnam : concert de jazz vietnamien avec le groupe Phù Sa Band. DIMANCHE 23 MARS – 17H30

Our Sunhi (Compétition – Avant-première) SAMEDI 22 MARS – 16H

Les Petits canards en papier SAMEDI 22 MARS – 16H Autour du Vietnam : démonstration de calligraphie vietnamienne. Dégustation de thés. SAMEDI 22 MARS – 17H30

The Suspended Step (Inédit – Compétition)

Corée du Sud – 2013 – 1h28, de Hong Sang-Soo, avecYu-Mi Jeong, SeonGyun Lee...

Sunhi, diplômée en cinéma, souhaite une lettre de recommandation d’un professeur pour aller étudier aux Etats-Unis. En lui rendant visite, Sunhi revoit Munsu, son ex-petit ami, et Jaehak, un cinéaste issu de la même école. Curieusement, ils parlent de Sunhi comme si ils ne la connaissaient pas vraiment… Le réalisateur de In Another Country a reçu ici le Prix de la mise en scène au Festival de Locarno.

Chine – 2013 – 1h15 de Yang Xiao avec Cheng Jialang, Liu Ling, Ron Ziqing…

Zhang Xin travaille pour un journal de Nankin. Au moment où il souhaite démissionner, son patron l’envoie couvrir un festival de cinéma dans sa ville natale de Guilin. C’est l’occasion de retrouver ses anciens amis dont Xiao Ping dont il était amoureux au collège. Va-t-il retourner à Nankin ou rester à Guilin pour se consacrer à l’écriture de ses romans ?

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DIMANCHE 23 MARS – 19H30

La Lune au fond du puits (Trang noi day gieng) Autour du Vietnam France/Vietnam – 2008 – 2h06, de Nguyen Vinh Son avec Hong Anh Hoang Thanh De, Hieu Anh, Lan Phuong…

Bafouée et trahie par son mari qu’elle adulait, une jeune femme stérile cherche le réconfort et l’amour


15e festival international de

dans le monde des esprits qui lui permet de revivre virtuellement les instants de bonheur disparus. D’après la nouvelle de Tran Thuy Mai. Lotus d’argent et Cerf-volant d’or du cinéma vietnamien. Prix de la réalisation du film asiatique du festival de Madrid. Prix d’interprétation féminine du festival de Dubai.

cinema asiatique de Tours - FICAT MARDI 25 MARS – 19H15 Clôture du Festival – Remise des Prix. MARDI 25 MARS – 19H30

Real (Avant-première) Voir page 13. LUNDI 24 MARS – 17H30

Le Roi des singes démasque la sorcière Chine – 1986 – 1h30, de Te Wei, Lin Wen Xiao, Yan Dingxian.

Film d’animation des studios de Shanghai Au coeur des montagnes sauvages, une diablesse, déguisée en jolie jeune femme, tente de s’emparer du moine Xuan Zang pour le dévorer. Ceui-ci se laisse facilement abuser par les apparences mais heureusement Sun Wukong, le roi des singes est doué de grands pouvoirs magiques. Le roi des singes, indépendant et fier, rebelle à toute autorité est un héros qu’on aime à tous les âges. LUNDI 24 MARS – 19H30

Ningen (Inédit – Compétition) Japon/Turquie/France – 2013 – 1h44, de Ça la Zencirci et Guillaume Giovanetti avec Masahimo Yoshino, Masako Wajima, Xiao-Mu Lee...

Il y a longtemps le Renard et le Raton-Laveur ont fait un pari : prendre forme humaine afin de voler la richesse d’un humain. Aujourd’hui, le PDG Yoshimo, qui doit sauver son entreprise de la faillite, a poussé ses limites jusqu’à ce que son équilibre mental soit en jeu ; sa vie est-elle en fait liée à ce pari légendaire ? Noor, le 1er film de ce duo de réalisateurs, sort cette année . Rencontre avec les réalisateurs. MARDI 25 MARS – 17H30

TOUS LES JOURS – 14H15 ET 21H45

Trap Street Voir page 14. 17H45 VO tous les jours – DIMANCHE 11H15 VF MERCREDI-SAMEDI-DIMANCHE – 14H15 VF

Patéma et le monde inversé Japon – 2014 – 1h39, de Yasuhiro Yoshiura avec Yukiyo Fujii, Shinya Fukumatsu. VO/VF à partir de 10 ans

Une partie de la planète a explosé et la moitié vit en inversé, c’est-à-dire en apesanteur contraire… Deux adolescents qui rêvent d’aller dans le monde inversé de chacun se rencontrent. Ils sont obligés de rester soudés l’un à l’autre pour se déplacer. Un scénario original et passionnant dans de très beaux décors travaillés à la japonaise En partenariat avec la Cinémathèque de Tours LUNDI 17 MARS – 19H30 La Complainte du sentier (Pather Panchali) Inde – 1955 – 1h55, de Satyajit Ray

Au Bengale, la famille Ray vit pauvrement dans une maison ancestrale. La mère met au monde son deuxième enfant, qui se nomme Apu. Mais elle va bientôt être bouleversée. Premier volet de la Trilogie d’Apu, premier film de Ray, qui obtint un prix à Cannes. Soirée présentée par Denis Jourdin. LUNDI 24 MARS – 19H30

Koan de printemps Autour du Vietnam

Le Monde d’Apu (Apur Sansar)

Corée /France/Vietnam– 2013 – 1h14’ de Lu Ma Ho avec Jim Adhi Limas, Tapa Sudana, Fang Hsuan Chiu…

Inde – 1959 – 1h46, de Satyajit Ray

Maître Truong, le vieux maître d’armes de l’empereur, arrive à la fin de sa vie et n’a toujours pas trouvé son successeur. Le pays devant se préparer à la guerre, l’empereur lui donne quinze jours pour en trouver un. Il se rend alors chez un général devenu simple pêcheur qui vit avec ses fils et sa fille autour d’un lac légendaire. Une fable sur la beauté intérieure, la simplicité, la sincérité.

Faute d’argent, Apu interrompt ses études pour trouver du travail. Son ami Pulu l’invite au mariage de sa cousine Aparna. Mais le fiancé s’avère fou et la mère d’Aparna refuse le mariage. Pulu demande à Apu d’épouser sa cousine. Troisième volet de la Trilogie d’Apu, dans lequel la poésie se mêle au réalisme du récit. Soirée présentée par Denis Jourdin.

Soirée The Lazy Company - Mardi 1er avril à 19h30 Après le succès des premiers épisodes, la série déjantée The Lazy Company nous revient pour une seconde saison. Avant sa diffusion officielle, Ciclic et les Cinémas Studio vous proposent de la découvrir en avant première et sur grand écran ! Nous avons sélectionné pour votre plus grand plaisir cinq épisodes (20 minutes chacun). Venez nombreux voir ou découvrir cette série 100% régionale pour une soirée exceptionnelle le vendredi 28 mars à partir de 19h30 en présence de l’équipe de la série. Nous finirons par un moment convivial autour d’un verre. Les CARNETS du STUDIO

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w w w . s t u d i o c i n e . c o m Sur le site des Studio (cliquer sur : PLUS D’INFOS, pour entrer dans la fiche film), vous trouverez des présentations signées des films que les rédacteurs auront vus après leur sortie en salle. Les fiches non signées ont été établies de manière neutre à partir des informations disponibles au moment où nous imprimons.

Les films de A à Z 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com AVANT LES FILMS , DANS LES SALLES , AU MOIS DE MARS

2014 :

• Extented Circle de Tord Gustavsen Quartet Studio (studio 1-2-4-5-6) • Live At Lagny Jazz Festival de Carmen Souza (studio 3-7)

Musiques sélectionnées par Eric Pétry de RCF St Martin.

A

À ciel ouvert

USA – 2013 – 2h18, de David O Russell, avec Jennifer Lawrence, Christian Bale, Amy Adams, Robert De Niro…

Alysson observe son corps avec méfiance. Evanne s’étourdit jusqu’à la chute. Amina ne parvient pas à faire sortir les mots de sa bouche. À la frontière franco-belge, existe un lieu particulier qui prend en charge ces enfants en difficulté. Jour après jour, les adultes essaient de comprendre l’énigme que représente chacun d’eux et inventent, au cas par cas, sans jamais rien leur imposer, des solutions qui les aideront à vivre apaisés. C’est ce que filme Mariana Otero et l’on a de cesse de s’attacher aux regards et aux sourires innocents croisés. Les questions de distinction entre « névrose/psychose » sont interrogées de façon judicieuse à plusieurs reprises, et jamais de façon imposante et trop tranchée. Un petit voyage qui vaut le détour, malgré un sujet difficile à évoquer et à traiter… MR

Inspiré d’une histoire vraie, American Bluff raconte comment un petit escroc assez doué et l’une de ses compagnes, très sexy, vont se trouver contraints de collaborer avec le FBI pour piéger quelques hommes politiques corrompus en même temps qu’une jolie brochette de mafieux. L’agent du FBI qui mène l’opération n’est pas forcément un modèle de sérénité et n’est peutêtre pas non plus tout à fait rompu à toutes les manœuvres de manipulation et d’intimidation possibles, de sorte que l’histoire devient assez vite une sorte de jeu de poupées russes, dans lequel une manipulation en contient une autre, qui recèle elle-même une jolie traîtrise et ainsi de suite... et tout cela sans compter les inévitables grains de sable qui peuvent salement griper tout une belle machinerie... Scénario retors, acteurs... bluffants ! Un vrai moment de bon cinéma ! ER

Aimer, boire et chanter

France – 2014 – 1h48, de Alain Resnais, avec Sabine Azéma, Sandrine Kiberlain, Caroline Silhol, André Dussolier, Michel Vuillermoz, Hippolyte Girardot…

À quatre-vingt-dix ans passés, quelques mois seulement après la sortie de Vous n’avez encore rien vu, Alain Resnais s’est remis à tourner… Son nouvel opus présenté en compétition au festival de Berlin est une adaptation de Life Of Riley du dramaturge britannique Alan Ayckbourn – comme l’étaient, Smoking/No smoking et Cœurs. Dans la campagne anglaise du Yorkshire, la vie de trois couples est bouleversée quand ils apprennent que leur ami George n’a plus que quelques mois à vivre. Persuadant ce dernier de se joindre à leur troupe de théâtre amateur, ils vont vite être surpris du comportement de George qui exerce une étrange séduction sur les trois femmes… Pour notre plus grand plaisir, la famille Resnais affiche presque complet (il manque Arditi et Wilson) pour nous parler une nouvelle fois d’art, d’amour et de mort. Avec la même énergie et la même fantaisie que dans ses films précédents ? Sources : dossier de presse

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American Bluff

France, Belgique – 2013 – 1h52, documentaire de Mariana Otero…

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Les Amis animaux Voir pages Jeune Public

Arrête ou je continue

France – 2013 – 1h42, de Sophie Fillières, avec Emanuelle Devos, Mathieu Amalric, Anne Brochet...

Couple déjà ancien à défaut d’être vraiment vieux, Pomme et Pierre ronronnent et routinent. La vie manque un peu de sel mais ils font de régulière ballades en forêt. Puis, un beau jour, Pomme décide de ne pas rentrer, de planter là son mari plus vraiment si chéri et de rester dans la forêt... L’auteure de Grande petite et de Gentille semble ici avoir tenu à mélanger au moins deux registres quelque peu contradictoires, la comédie de mœurs et la fable (qui pourrait bien, par moments, presque virer au fantastique ou au conte – après tout, la forêt est une terre d’inconnu…) Sources : dossier de presse


Azur et Asmar

La Cour de Babel France – 2014 – 1h29, documentaire Julie Bertuccelli.

Voir pages Jeune Public

B

Bethléem

Israël, Allemagne, Belgique – 2014 – 1h39, de Yuval Adler, avec Tsahi Halevi, Sahdi Marei…

Dans le sud de Jérusalem, un jeune Palestinien, Sanfur, est recruté comme informateur par Razi, un agent du Shin Bet, les services secrets israëliens. Se noue une relation quasi filiale de confiance, voire d’amitié, d’autant plus menacée et ambigüe que le propre frère de Sanfur est un responsable des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa actif et recherché pour attentats. Dans ce film sombre, complexe, tendu, tout le monde ment, tout le monde vit dans la peur et l’ambiguïté, quel que soit le camp. Les repères clairs et commodes ont disparu : les bons, les méchants, la vérité, la loyauté, l’idéal, la cause juste… Yuval Adler a co-écrit le scénario avec un journaliste musulman, Ali Waked, après une longue enquête auprès du Shin Bet, du Hamas et des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa. D’ores et déjà couvert de récompenses, le film représentera Israël aux Oscars 2014 dans la catégorie Meilleur film étranger. Sources : dossier de presse.

C

Les Chiens errants Taïwan – 2013 – 2h18 – de Tsai Ming Liang, avec Lee Kang-Shen, Lee Yi-Cheng, Lu Yi-Ching…

Un père, son fils et sa fille survivent plus qu’ils ne vivent dans la grande ville tentaculaire et indifférente (Taipei), souvent battue par le vent et la pluie, grouillante de véhicules motorisés mais quasi vide d’humains, sauf dans l’univers froid et déshumanisé d’une grande surface commerciale. Quelques scènes ont pour cadre la nature mais elle n’est guère plus hospitalière, tout aussi grouillante mais tout aussi vide d’humains. Les chiens errants, ce sont ces trois personnages qui luttent pour conserver leur dignité. La violence du réel transparaît à travers de longs plans fixes, souvent nocturnes. Très peu de dialogues, aucune musique, tout passe par des sensations visuelles et auditives. À un moment le père récite puis chante De colère mes cheveux se dressent/Tandis que la pluie s’apaise/S’élève vers le ciel un cri strident/Mon cœur vaillant s’exaspère. Tout le propos du film tient dans ces paroles. Grand prix du jury à la Mostra de Venise 2013. AW Les fiches paraphées correspondent à des textes dont le rédacteur a vu le film

Ils ont entre 11 et 15 ans, viennent d’arriver en France, sont irlandais, serbes, brésiliens, tunisiens, chinois ou sénégalais et entament une nouvelle scolarité (une nouvelle vie) dans la classe d’accueil d’un collège parisien. Pendant un an, Julie Bertuccelli les a filmés dans le microcosme de la classe de Brigitte Cervoni. Elle est visiblement tombée sous le charme de cette enseignante remarquable qui sait mettre en valeur les différences et donner le goût d’apprendre à ces adolescents déracinés, matures, courageux et souvent chargés de lourdes responsabilités. Les questions de l’exil et de l’intégration, mais aussi leur regard neuf et critique sur notre monde actuel et sur notre société qu’ils découvrent, résonnent dans cette classe d’une manière singulière. « Je montre peut-être un sas protecteur et idéal, une utopie en action, mais je montre aussi un petit théâtre de notre monde où l’énergie de l’espoir peut faire des miracles tout comme la confiance et l’accueil prodigués à ces jeunes », déclare la réalisatrice. SB

Diplomatie

Allemagne/France – 2013 – 1h24, de Volker Schlöndorff, avec Niels Arestrup, André Dussollier, Burgart Klaussner…

D

Paris, la nuit du 24 au 25 août 1944. Hitler a donné l’ordre de faire sauter la capitale. Le Général Von Choltitz se prépare à l’exécuter. Issu d’une longue lignée de militaires prussiens, le général n’a jamais eu d’hésitation quand il fallait obéir aux ordres. Les ponts sur la Seine et les principaux monuments – Le Louvre, NotreDame, le Sénat, la Tour Eiffel… – sont déjà minés, prêts à exploser. C’est bien ce qui préoccupe le consul suédois, Raoul Nordling, qui se rend, par l’escalier secret, dans la suite de l’hôtel Meurice où est installé le général. Le diplomate va user de tout son art afin de le persuader de ne pas exécuter l’ordre de destruction. Diplomatie est l’adaptation de la pièce de théâtre de Cyril Gély, dans laquelle jouait déjà ce duo remarquable Dussolier-Arestrup. Nul doute que la confrontation de ces deux hommes confère à l’histoire une atmosphère dramatique fascinante, filmée par un cinéaste prestigieux. Un grand moment de cinéma en perspective ! Sources : dossier de presse.

Filmographie sélective : L’Honneur perdu de Katharina Blum (1975), Le Tambour (1979), Un amour de Swann (1984), Le Neuvième jour (2004).

Film proposé au jeune public, les parents restant juges.

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+ COURT MÉTRAGE semaine du 26 au 1er avril Paths of hate Pologne – 2010 – 10’, animation de Damian Nenow

F

Free Fall (En chute libre) Allemagne – 2013 – 1h39, de Stephan Lacant, avec Hanno Koffler, Max Riermelt, Attila Borlan...

Marc est un jeune policier et vit avec Bettina. Ils viennent de s’installer dans une maison en attendant la naissance de leur premier enfant. Lors d’un stage de formation il rencontre Kay, un nouveau collègue. Sans oser se l’avouer, Marc est attiré par Kay... Comment accepter ce que l’on ressent profondément et les changements qui vont en découler ? Free Fall suit Marc écartelé entre sa vie confortable, toute tracée, et des sentiments nouveaux qui risquent de bouleverser sa vie. Avec justesse, sans caricaturer ni idéaliser et aidé par deux acteurs formidables, Stephan Lacant (dont c’est le deuxième long métrage, mais le premier, Fireflies, n’est jamais sorti en France) nous entraîne En chute libre. Et c’est tout sauf désagréable. JF

G

Gloria

Chili – 2012 – 1h45, de Sebastian Lelio, avec Paulina Garciam, Sergio Hernandez…

Lake, dix-huit ans et une petite amie de son âge, découvre son attirance pour les hommes âgés. Engagé pour l’été dans une maison de retraite, il y rencontre M. Peabody... Ne pas tomber dans la mièvrerie, savoir émouvoir et rester léger sur un sujet apparemment scabreux, ça paraît impossible ? Pourtant, il semble bien que Bruce LaBruce y soit parvenu et les critiques dans leur ensemble louent le culot et le tact du film. Pourtant l’auteur de L.A. Zombie ou de Hustler white, ne renie en rien ses dimensions provocatrices et politiques (notamment quand il aborde la dictature de la jeunesse et de la beauté). Subversif aussi parce qu’il raconte son histoire marginale en utilisant les codes policés et faciles d’accès de la comédie romantique. Ironique, peut-être, mais surtout très fort car il arrive à transformer la norme de ce genre en une arme plutôt qu’en une prison.

Mères de deux grands enfants, divorcée et femme encore active, Gloria, à 58 ans, n’a renoncé ni au bonheur ni à l’amour. Cette jolie brune aux jambes de gazelle aime sortir le soir pour danser la salsa. Un soir, elle rencontre le timide Rodolfo. Sans oublier ni son âge, ni son passé, Gloria connaît de nouveau les tourbillons de la passion… Pour son 4e film après La Sagrada familia (05), Navidad (09) et L’Année du tigre (11), le talentueux réalisateur chilien a choisi de tracer, avec générosité et humanisme, le portrait d’une femme aimante et libre dans la société chilienne actuelle. « Gloria est comme Rocky, quand elle prend un coup, elle se relève et elle continue », dit le réalisateur, décrivant le fil conducteur de son film comme « la vie et une poésie au quotidien, avec un équilibre entre rire et pleurs, doux et douloureux comme la bossa nova ». Dans une forme parfaitement maîtrisée, alliant réalisme et rythme réussi, Gloria a trouvé dans Paulina Garciam une interprète lumineuse, récompensée par le Prix de la meilleure actrice au festival de San Sébastien et à la dernière Berlinade. « Un film aussi bouleversant que stimulant. »

Sources : filmdeculte.com, arte.tv

Sources : toutelaculture.com - abusdecine.com

Gerontophilia

Canada – 2013 – 1h22, de Bruce LaBruce, avec Pier-Gabriel Lajoie, Walter Borden, Katie Boland...

Goltzius et la compagnie du Pélican Pays-Bas/France/Royaume-Uni/Croatie – 2012 – 2h08, de

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cien Testament regroupant les contes érotiques tel celui de Loth et ses filles… Avant de parapher un contrat, le Margrave, entouré de sa cour, exprime d’autres exigences. La Compagnie du Pélican devra le réjouir six soirs durant d’un amusement qui devra aussi satisfaire Ebola, la nourrice royale. Six tabous sexuels, tel le voyeurisme, seront alors mis en scène. Ces histoires érotiques ne se dérouleront pas sans quelques remous… et provocations ! Le réalisateur des fameux The Pillow Book (1996) ou bien encore Meurtre dans un jardin anglais (1982) articule la peinture, la création d’images, le livre et l’érotisme. L’espace visuel, riche, fourmille de références artistiques. Il faut savoir s’abandonner à cet univers maniériste, et parfois dérangeant, de Peter Greenaway… RS

Le Grand cahier

Peter Greenaway, avec Ramsey Nasr, F. Murray Abraham, Kate Moran…

Hongrie – 2013 – 1h49 – de Janos Szasz, avec Andras Gyemant, Laszlo Gyemant, Piroska Molnar…

Pays-Bas. 16e siècle. Hendrik Goltzius est un célèbre peintre et graveur d’œuvres érotiques. Souhaitant ouvrir une imprimerie dédiée à l’édition de livres illustrés, il sollicite le Margrave (Marquis) d’Alsace pour obtenir de substantielles subsides et lui promet un livre extraordinaire avec des images et des histoires de l’An-

Inspiré du roman éponyme d’Agota Kristof (1986), le film raconte le dur apprentissage de la vie, de la guerre, de la cruauté humaine des deux frères jumeaux Egyik et Masik, envoyés à la campagne à la fin de la seconde Guerre mondiale afin d’échapper aux bombardements et aux destructions. Leur mère les confie à leur grand-

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mère, qu’ils ne connaissent pas, une vieille femme méchante, sale et avare, surnommée « la Sorcière » par les villageois. Elle les exploite, les maltraite et les deux enfants apprennent à surmonter la faim, le froid, la douleur et les cruautés quotidiennes d’un monde dévasté. Le grand cahier du titre est celui dans lequel ils consignent, le plus objectivement possible, leurs apprentissages et leurs découvertes. On y voit la perte de l’innocence mais aussi de la conscience morale. Leur histoire terrible et inoubliable est aussi celle d’un peuple tout entier démoli et perverti par la guerre et les luttes de pouvoir. Film présélectionné aux Oscar 2014. Sources : dossier de presse.

Les Grandes ondes

France – 2013 – 1h24, de Lionel Baier, avec Valérie Donzelli, Michel Vuillermoz, Patrick Lapp...

Avril 1974. Deux journalistes de la radio suisse sont envoyés au Portugal pour réaliser un reportage sur l’entraide suisse dans ce pays. Accompagnés d’un technicien en pré-retraite, et de Pelé, un jeune traducteur recruté sur place, nos Pieds Nickelés vont parcourir la campagne portugaise récoltant d’improbables témoignages. Mais entre Julie, féministe, et Cauvin, grand reporter roublard, le courant ne passe pas. Jusqu’à ce qu’ils soient emportés par l’élan de la contestation populaire qui souffle. Ils se retrouvent alors à Lisbonne au cœur de la révolution des œillets... Après Garçon stupide, Comme des voleurs et Un autre homme, Lionel Baier surprend. Les Grandes ondes est un film intelligemment récréatif, fait avec légèreté et sérieux, qui mêle avec énormément d’humour, réflexion sur les médias, petite et grande histoire. Adoptant ruptures de ton, incorporant danse et chant, le réalisateur fait mouche. Son film est irrésistible et vraiment très drôle. JF

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elle vraiment aimer ? Tromper ? Et, surtout, peut-on se fier à ses conseils en matière de séduction... pour se trouver de nouvelles partenaires ? On imagine assez bien ce que l’auteur de Dans la peau de John Malkovich peut bien tirer d’une idée pareille, lui qui n’aime rien tant que mélanger le vrai et le faux, les apparences et le réel... surtout pour ce film, son premier vrai bébé puisqu’il en a aussi signé le scénario... Sources : dossier de presse, theglobeandmail.com, filmcomment.com

Hipòtesis

Argentine – 2014 – 1h46, de Hernán Goldfrid, avec Ricardo Darín, Alberto Ammann, Calu Rivero…

Un soir, sur le campus d’une université de Buenos Aires, une jeune femme est retrouvée sauvagement assassinée. Elle a été battue, violée et découpée en morceaux : un meurtre horrible qui bouleverse Roberto Bermudez, d’autant plus qu’elle était étudiante dans la faculté où il enseigne le droit pénal. Grâce à une accumulation d’indices (comme le formol, un collier en forme de papillon), le professeur pense que le meurtre a été méticuleusement pensé et préparé. Il finit par soupçonner le brillant et ambigu Gonzalo Ruiz Cordera, l’un de ses meilleurs élèves. Plus il avance dans son enquête, plus le jeu de manipulation entre eux s’intensifie… Après avoir réalisé une comédie romantique, Musica en Espera (2009), Hernàn Goldfrid change complètement de registre avec la réalisation de ce thriller psychologique. Adaptation du roman de Patricio Vega, Thèse sur un homicide, ce thriller brillant s’inspire formellement de David Fincher. Polar classique mais terriblement efficace, le film a été primé au Festival international du film policier de Beaune. Sources : dossiers de presse.

How I Live Now

USA/GRande-Bretagne – 2013 – 1h46, de Kevin McDonald, avec Saoirse Ronan, Tom Holland, George MacKay...

Heimat 1 - Chronique d’un rêve Heimat 2 - L’Exode Films du mois, voir au dos du carnet.

Her

USA – 2013 – 2h06, de Spike Jonze, avec Joaquin Phoenix, Scarlett Johansson, Amy Adams, Rooney Mara...

Theodor est au bout d’un divorce et passablement seul. Le nouvel ordinateur qu’il vient de s’acheter contient un système d’exploitation intelligent baptisé Samantha. Samantha, donc, est très intelligent(e), peut-être même un peu trop pour notre homme en perte de repères, qui va vite se prendre au jeu de la séduction... Comment plaire à une machine ? Une machine intelligente peut-

Daisy, une jeune Américaine pas forcément très bien dans sa peau, est envoyée passer l’été chez des parents britanniques et, comme cela arrive parfois l’été aux jeunes gens... elle tombe amoureuse... Elle tombe amoureuse d’Edmund, et tout pourrait très bien se passer si une attaque nucléaire ne venait quelque peu compliquer leur romance. L’armée commence à parquer les populations dans des camps et, dans ce monde où les adultes sont devenus des ennemis, retrouver Edmund va être aussi compliqué qu’indispensable. Le réalisateur du très brillant Dernier roi d’Écosse a donc choisi pour son nouveau film de nous conter une histoire qui mêle à la fois l’intime et le collectif, la souffrance, l’amour et l’horreur. S’il a choisi d’éviter la surcharge d’effets spéciaux, il n’en a pas moins réussi à dépeindre Les CARNETS du STUDIO

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une Angleterre dévastée et n’a pas non plus voulu éviter la représentation des violences qu’une telle situation génère inévitablement. Sources: theglobeandmail.com, thestar.com

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Ida

Pologne – 2014 – 1h20, de Pawel Pawlikowski, avec Agata Trzebuchowska, Agata Kulesza…

En 1962, en Pologne, Ida est une orpheline qui n’est jamais sortie du couvent où elle a été élevée. Avant qu’elle ne prononce ses vœux, la mère supérieure la convainc de rencontrer pour la première fois sa tante, le dernier membre de sa famille encore en vie. Celle-ci lui apprend que ses parents étaient juifs. Elle l’emmène sur les traces de son passé… Couvert de prix à travers le monde , Ida est un film magnifique qui construit ses personnages à travers les images plutôt qu’à travers les dialogues dans des plans, fixes et en noir et blanc, extraordinaires. Quête d’une vérité enfouie, Ida est également un film bouleversant porté par un duo d’actrices exceptionnelles. DP Filmographie : The Stringer (98), Last Resort (00), Transit Palace (01), La Femme du Ve (11).

J Jack et la mécanique du cœur France – 2012, 1h34 film d’animation de Stéphane Berla et Matthias Malzieu, avec les voix de O. Ruiz, Grand Corps Malade, J. Rochefort…

Pendant l’hiver glacial de 1874 à Edimbourg, Jack est abandonné par sa mère. Il a si froid que son cœur gèle. Il devra sa survie au docteur Madeleine, qui lui greffe une horloge mécanique à la place de ce cœur défaillant. Mais ce bricolage ne peut tenir le coup et Jack ne peut continuer à vivre que si trois conditions sont scrupuleusement respectées : ne pas toucher les aiguilles, ne pas se mettre en colère et ne pas tomber amoureux. Quand il rencontre Miss Acacia, chanteuse de rues myope, la mécanique de son cœur va s’emballer… M. Malzieu (Dyonisos) est véritablement l’auteur de cette histoire d’abord mise en chansons dans un album concept, puis en images dans un album illustré et désormais, en images animées. Dans cette œuvre poétique et mélancolique, il rend ouvertement hommage à Tim Burton et au Romantisme anglais. Sources : telerama.fr ; dossier de presse

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Sources : dossier de presse.

Minuscule, la vallée des fourmis perdues Mon oncle Only Lovers Left Alive

Allemagne, Grande-Bretagne, France – 2013 – 2h03, de JimJarmusch, avec Tom Hiddleston, Tilda Swinton, Mia Wasikowska…

Sources : dossier de presse.

Patéma et le monde inversé

Leçons d’harmonie Kazakhstan – 2014 –1h50, de Emir Balgazin,

Les Petits canards de papier

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Adam, un musicien underground, retrouve Êve, son amante, une femme endurante et énigmatique. Leur histoire d’amour dure depuis plusieurs siècles, mais leur idylle débauchée est bientôt perturbée par l’arrivée de la petite sœur d’Êve, aussi extravagante qu’incontrôlable. Ces deux êtres en marge, sages mais fragiles, peuvent-ils continuer à survivre dans un monde moderne qui s’effondre autour d’eux ? Le nouveau film de Jim Jarmusch promet de nous replonger dans ses atmosphères poétiques, avec une BO qui n’est pas sans rappeler celle de Dead Man (1995). À partir d’un scénario librement inspiré du dernier livre de Mark Twain, La Vie privée d’Adam et Êve, Jarmusch a souhaité livrer un conte métaphorique : « C’est aussi l’histoire de deux êtres d’exception en marge qui […] ont un authentique recul sur l’histoire de l’humanité, de ses plus incroyables réalisations à ses échecs cinglants. » Une belle promesse !

Le Parfum de la carotte

avec Timur Aidarbekov, Aslan Anarbayev, Muktar Andassov…

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Aslan vit chez sa grand-mère, dans un petit village du Kazakhstan. Alors que cet adolescent de 13 ans est plutôt honnête et perfectionniste, au collège, il se heurte à la violence et à la corruption de ses camarades, sans que les adultes interviennent. Humilié lors de la visite

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médicale, il est dès lors harcelé par Bolat, chef de gang. Aslan prépare sa vengeance, qui sera féroce. Ce drame montre comment les rapports de force entre adolescents peuvent provoquer une souffrance insoutenable, allant jusqu’à métamorphoser les victimes… Premier long-métrage du réalisateur, également scénariste et chef-monteur, ce film a obtenu le Prix de la contribution artistique pour le cadrage, au festival de Berlin en 2013, ainsi que le Prix du jury au festival Premiers plans d’Angers, en janvier 2014.

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Le Piano magique Voir pages Jeune Public

Les Rayures du zèbre Belgique – 2014 – 1h20, de Benoît Mariage, avec Benoît Poelvoorde, Marc Zinga, Tatiana Rojo...

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José est agent de footballeurs et s’est fait une spécialité dans le repérage en Afrique des futurs talents. Quand il découvre Yaya, il l’emmène illico en Belgique pour en faire un champion car il est persuadé d’avoir trouvé la poule aux œufs d’or. Mais rien ne va se passer comme prévu... Vous êtes allergique au foot ? Ne fuyez pas car ce dernier est surtout « Un prétexte pour parler des relations Nord/Sud » dit le réalisateur. Pour cette quatrième collaboration avec Benoît Poelvoorde après Le Signaleur, Les Convoyeurs attendent et Cowboy, Benoît Mariage retrouve des thèmes qui lui sont chers et le ton qui lui est particulier qu’il explique ainsi, « J’aime profondément cette culture de l’ironie douce que l’on cultivait au magazine Strip-tease où j’ai débuté. J’aime parler de choses graves avec légèreté. Je voudrais que le film soit perçu comme une fable. » Sources : Dossier de presse.

Real Japon – 2013 – 2h07, de Kiyoshi Kurosawa, avec Takeru Sato, Haruka Ayase, Keisuke Horibe…

Atsumi est une dessinatrice de mangas pleine de talent. Mais, depuis un an, elle est plongée dans le coma après avoir tenté de mettre fin à ses jours. Koichi, son petit-ami, est dans l’incompréhension de cet acte insensé, d’autant qu’ils s’aimaient passionnément. Pour tenter de la ramener dans le réel et découvrir les raisons de son acte, une solution se présente sous la forme d’un programme novateur permettant de pénétrer dans l’inconscient humain. Koichi se lance dans l’aventure… Mais le système l’envoie-t-il vraiment là où il croit ? Adapté de la nouvelle d’Inu Rokuro, Real emprunte au fantastique, parfois mélancolique, également merveilleux. Le prestigieux réalisateur de Cure (1997), de Tokyo Sonata (2008) et de Shokuzai (2012) nous livre une science-fiction nous transportant dans l’inconscient d’une créatrice, dans son imaginaire, ses rêves… Un nouvel univers de Kurosawa à découvrir ! Sources : dossier de presse, cinema.ch, eastasia.fr.

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Le Sens de l’humour

France – 2014 – 1h28, de Marilyne Canto, avec Marilyne Canto, Antoine Chappey, Samson Dajczman…

Élise vit avec Léo, son fils de dix ans, après la mort du père de celui-ci. Ce deuil ne facilite guère les relations qu’elle entretient avec son amant, Paul, très ambivalentes. Paul résiste vaillamment aux sautes d’humeur d’Élise et le lien qui se tisse entre Léo et lui désarmera Élise au fil du temps… Ce premier long métrage de Marilyne Canto, réalisatrice et actrice, offre une suite au court-métrage Fais de

beaux rêves, primé en 2007. Film délicat sur la difficulté de se reconstruire et de former un couple après un traumatisme, c’est une œuvre autobiographique et, de surcroît, tournée avec un partenaire qui est aussi son compagnon dans la vie : « Cela m’intéressait de filmer le couple que je formais ». Sources : dossier de presse.

Son épouse

France – 2012 – 1h47, de Michel Spinosa, avec Yvan Attal, Charlotte Gainsbourg, Janagi, Mahesh…

Gracie, jeune femme vivant près de Pondichéry, est victime de profonds troubles du comportement, depuis le jour de son mariage : elle est hantée, au sens propre du terme, par un esprit, un « pey », qui serait celui de Catherine, son amie française, mystérieusement disparue lors d’un séjour en Inde, un an auparavant. Joseph, époux de Catherine, décide de rencontrer Gracie, pour tenter de comprendre ce qui se passe, mais aussi pour réparer ses propres erreurs… M. Spinosa a tenu à ce que l’Inde ne soit pas qu’un décor, mais qu’elle imprègne profondément le film, et pour ce faire, a travaillé notamment avec des comédiens et techniciens locaux, également, moyen revendiqué de participer à la lutte contre les discriminations dont les Tamouls sont encore victimes. Sources : dossier de presse, Tax Shelter Films Funding, Allocine : secrets de tournage

Filmographie sélective : La Parenthèse enchantée (2000), Anna M. (2007)

T

Le Tableau Tante Hilda ! Voir pages Jeune Public

Hotel Budapest Grand– 2013 TheUSA/Allemagne – 1h40, de Wes Anderson, avec R. Fiennes, B. Murray, O. Wilson, A. Brody, T. Revolori…

Réjouissons-nous : voilà de nouveau réunie la famille de doux-dingues de W. Anderson ! Entraînée, cette fois, pendant l’entre-deux guerres, dans un sélect palace européen, cadre délirant de la rencontre entre un concierge aguerri et policé (R. Fiennes, nouveau membre de la tribu) et un jeune groom novice, bien justement prénommé, Zéro ! Ces deux-là, mêlés à des histoires de vol de tableau, d’héritage et aux grands bouleversements secouant l’Europe de l’époque, vont devenir inséparables ! Notons que pour trouver le ton de cette nouvelle comédie du non-sense, le réalisateur s’est particulièrement inspiré de To Be or Not to Be, de Lubitsch, que le moindre rôle est tenu par un grand

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comédien Andersonien, et que l’on peut même croiser dans le hall de l’hôtel quelques vedettes hexagonales… Sources : dossier de presse, Le Figaro.fr Filmographie sélective : La Vie aquatique (2003), À bord du Darjeeling limited (2007), Moonrise Kingdom (2012)

Tonnerre

France – 2013 – 1h40, de Guillaume Brac, avec Vincent Macaigne, Solène Rigot, Bernard Ménez…

Un rockeur trop sentimental, une jeune femme indécise, un vieux père fantasque. Dans la petite ville de Tonnerre, les joies de l’amour ne durent qu’un temps. Une disparition aussi soudaine qu’inexpliquée et voici que la passion cède place à l’obsession… Après Un monde sans femmes en 2011, Guillaume Brac revient avec un nouveau long-métrage, et une nouvelle fois Vincent Macaigne, acteur charismatique du moment. À travers le vent hivernal de la petite ville de Tonnerre se dessine l’histoire d’une passion au goût mélancolique, portée par l’extrême justesse et le charme de ses deux acteurs principaux. Le regard aux accents rohmeriens de Guillaume Brac donne au film cette luminosité charmante et délicieuse, dont on se régalera quel que soit le moment. MR

Tout est permis (La France au volant) France – 2014 – 1h36, documentaire de Coline Serreau.

Le permis de conduire à points est instauré depuis plus de 20 ans. Les auteurs d’infractions sont contraints de suivre des stages de récupération : véritables lieux de mixité sociale et culturelle, ces stages sont l’occasion pour beaucoup d’entre eux d’y exprimer leur révolte mais aussi de se raconter… Coline Serreau a parcouru la France pour recueillir les témoignages de ces stagiaires. Elle dresse un portrait tragi-comique de notre société où l’individualisme et les petites habitudes de chacun mettent en péril le bonheur de tous et constate que le rapport à la loi évolue vers une même valeur, celle de l’individualisme. La réalisatrice évoque : « Un film assez drôle qui scanne la France à travers ce lieu d’une violence inouïe qu’est la route. C’est aussi un monde touchant, celui des petites gens avec leur petite auto... » Sources : dossier de presse.

Avant première : jeudi 6 mars à 19h45 en présence de Coline Serreau, rencontre avec le public après la séance.

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Trap Street

Chine – 2013 – 1h33, de Vivian Qu, avec Lu Yulai, Wenchao He, Yong Hou...

Li Qiuming est géomètre dans une entreprise de cartographie numérique. Il est chargé de relever les rues de la ville, en constante évolution, afin de maintenir le système à jour. Pour joindre les deux bouts, il installe des caméras vidéos dans des lieux publics et privés. Un jour il croise une femme qui disparaît dans une ruelle isolée. Mais cette ruelle ne figure pas sur les cartes, comme si elle n’avait jamais existé... Ce premier film mérite que l’on s’y arrête ; mystérieux et léger, inquiétant sans violence, il est tout aussi atypique que séduisant. Trap Street est la chronique d’un amour dont les deux protagonistes ne vivent pas du tout de la même façon l’omniprésence technologique. Et, comme c’est aussi un regard fin et juste sur une société déboussolée, il est très plaisant de se perdre dans cette rue piège. JF

UnGBweek-end à Paris – 2013 – 1h33, de Roger Mitchell, avec Jim Broadbent, Lindsay Duncan…

U

Un couple de professeurs anglais vient fêter ses 30 ans de mariage à Paris où ils avaient passé autrefois leur lune de miel. Sur ce synopsis minuscule, le scénariste Hanif Kureishi a imaginé une comédie tendre et amère sur le couple et l’angoisse de la vieillesse qui brille par la vivacité de ses dialogues rivalisant avec ceux d’un Woody Allen. Réflexion sur l’usure du couple et la perte de la passion, il fait de Paris un personnage à part entière. « Un film sincère et touchant sur le temps perdu et la recherche du bonheur. » Sources : legenoudeclaire.com – mulderville.net Filmographie sélective : Coup de foudre à Notting Hill (1998), Dérapages incontrôlés (2002), The Mother (2003), Morning Glory (2010) + COURT MÉTRAGE semaine du 19 au 25 mars Conte de faits France/Corée – 2011 – 4’, de Yumi Yoon Animation.

Week-ends

France – 2013 – 1h30, de Anne Villacèque,avec Noémie Lvovsky, Jacques Gamblin, Karin Viard, Ulrich Tukur...

Au départ, il y a deux couples : Christine et Jean, Sylvette et Ulrich. Ils sont voisins, ont été amis. Maintenant, ils ont surtout des rituels ou des habitudes. Et puis, l’un des couples se défait. Ce sont des choses qui arrivent. La question devient alors de savoir si l’autre couple va résister à la désintégration du couple de voisins. Au départ, il y a deux couples. Et après, à l’arrivée,

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combien va-t-il en rester ? Après Petite chérie, entre rire et dents qui grincent, Anne Villacèque porte sa caméra dans de petites plaies que nous connaissons tous, mais la caméra agit comme un verre grossissant et, forcément, les petites plaies en sortent grandies. Nous, les humains, peut-être un peu moins... Ceci dit, rien que pour les acteurs, on pourrait y aller les yeux fermés si ça ne nuisait pas à la vision du film... Sources : dossier de presse. + COURT MÉTRAGE semaine du 5 au 11 mars 3e B, 4e gauche France – 2010 – 12’, de Stéphanie Vasseur, avec Olivier Rosemberg, Alysson Paradis, Salomé Godin.

+ COURT MÉTRAGE semaine du 12 au 18 mars Schengen France – 2012 – 10’, de Annarita Zambrano, avec Florent Arnault, Claudia Tagbo, Anne Marie Mestre, Marie-Christine Orry, Rabah Nait Orfella.

Wrong Cops

France – 2014 – 1h30, de Quentin Dupieux, avec Mark Burnham, Eric Judor, Steve Little…

Rythmé par la musique électronique de Mr Oizo, (Q. Dupieux lui-même) Wrong Cops est une fresque comique, où s’entremêlent les destins de flics au comportement malsain et dérangé : Duke, pourri et mélomane, deale de l’herbe et terrorise les passants ; ses collègues sont un obsédé sexuel, une flic maître chanteur, un chercheur de trésor au passé douteux, un borgne difforme se rêvant star de techno… Leur système fait de petites combines et de jeux d’influence se dérègle lorsque la dernière victime de Duke, un voisin laissé pour mort dans son coffre, se réveille. Dans ce film tourné aux USA : « Je ne parle absolument pas de l’Amérique… C’est un regard léger sur les misères de nos sociétés, un regard attendri et méprisant sur l’être humain. Mes idées sont un magma de plein de choses » Q. Dupieux. À consommer sans modération si vous aimez l’univers parfaitement déjanté d’un artiste-réalisateur inclassable (Rubber, 2010 ; Wrong, 2012). Sources : dossier de presse festival de Deauville

lundi 17 mars -19h30 FESTIVAL

lundi 3 mars -19h30 CYCLE MUSIQUE

ET CINÉMA

Chantons sous la pluie Stanley Donen (1952) – USA Couleurs 1h42, avec Gene Kelly, Debbie Reynolds, Jean Hagen.

Tout public à partir de 10 ans.

lundi 10 mars -19h30 CARTE BLANCHE À L’ASSOCIATION HENRI LANGLOIS

Le Roman d’un tricheur

Sacha Guitry (1936) – France Noir et Blanc 1h40, avec Sacha Guitry, Jacqueline Delubac, Pauline Carton.

Tout public à partir de 12 ans.

Soirée présentée par Raphaëlle Moine, professeur de cinéma, auteur de livres sur le cinéma.

DU CINÉMA ASIATIQUE

La Complainte du sentier

Satyajit Ray (1955) – Inde Noir et Blanc 1h55, avec Kanu Bannerjee, Karuna Bannerjee, Subir Bannerjee.

Tout public à partir de 12 ans.

Soirée présentée par Denis Jourdin.

lundi 24 mars -19h30 Le Monde d’Apu Satyajit Ray – Inde Noir et Blanc 1h46, avec Soumitra Chatterjee, Sharmila Tagore.

Soirée présentée par Denis Jourdin.

lundi 31 mars -19h30 Les Yeux sans visage

Georges Franju (1959) – Fr.-It. Noir et Blanc 1h28, avec Pierre Brasseur, Edith Scob.

Soirée présentée par Alain Bonnet.

Programme détaillé dans le dépliant disponible à l'accueil et sur www.cinematheque-tours.fr

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FILM DU MOIS

Heimat – 1. Chronique d’un rêve / 2. L’Exode Allemagne/France – 2013 – Chronique d’un rêve : 1h47 / L’Exode : 2h08, de Edgar Reitz, avec Jan Dieter Schneider, Antonia Bill, Maximilian Scheidt, Marita Breuer, Rüdiger Kriese, Philine Lembeck, Mélanie Fouché, Eva Zeidler, Reinhard Paulus…

1842-1844. L’histoire de la famille Simon au village de Schabbach dans la région du Hunsrück. Il y a Johann le père forgeron, Margret la mère, Lena la fille ainée avec Walter son époux, Jakob le fils cadet, et le frère Gustav, parti au service militaire dans l’armée prussienne. En ce milieu du 19e siècle, des milliers d’Allemands accablés par les famines et les abus des gouvernants, décident d’émigrer en Amérique du Sud. La famille Simon ne manque pas de courage. Le jeune Jakob, lui, ruse pour échapper aux contraintes paysannes. Il enchaîne les livres qu’il peut se procurer sur l’Amérique du Sud. Ses lectures alimentent l’espoir d’un monde meilleur et son rêve d’aventure, ailleurs. Il décide donc d’émigrer. Mais le retour de Gustav du service militaire va déclencher différents évènements mettant fortement à l’épreuve autant son projet que ses amours… bref, son existence-même ! En 1984, Heimat était une série télévisée, qui devint par la suite une trilogie avec d’autres épisodes couvrant finalement le 20e siècle, de 1919 à 1982. Avec Heimat – Chronique d’un rêve et L’Exode, le réalisateur livre une histoire se déroulant au milieu du 19e siècle sur trois années. Heimat désigne à la fois le pays où l’on est né, la ville ou le village où l’on a grandi, comme encore la maison de son enfance ou le lieu où l’on se sent «chez soi», voire la patrie… Qu’en est-il alors du Heimat en ces différents temps de l’Histoire ? Ce dernier opus s’inscrit

au plus près du quotidien de ces villageois. Alors que le service militaire de Gustav rappelle que la région du Hunsrück fut intégrée dans le Royaume de Prusse en 1815, on est encore loin de l’Allemagne unifiée. Les paysans, souffrant vers 1840 de récoltes catastrophiques, sont écrasés d’impôts à verser aux seigneurs locaux. Heimat est un film d’un superbe noir et blanc avec quelques beaux effets couleur sur des éléments isolés comme un louis d’or, des fleurs… Reitz prend le temps de s’attarder sur les réalités quotidiennes, nous amenant à observer ces villageois : le père à la forge, des femmes au rouet, un soir de bal, des repas de famille… comme les paysages qui les entourent. Des sentiments se dévoilent aussi. À travers le rêve de Jakob et le départ envisagé par certains, le réalisateur souligne que la misère et la faim n’étaient pas les seuls leviers de l’émigration. Une idée totalement nouvelle se propageait alors dans les esprits, celle d’un droit au bonheur. Après des siècles de soumission à l’Église et aux autorités seigneuriales, une page s’ouvrait, incitant l’individu à prendre en main son destin au regard de ses utopies. Il ne faut pas en dévoiler davantage. Les images de Heimat envoûtent rapidement, éloignées pourtant de tout suspense trépidant. C’est véritablement un très grand moment de cinéma et cela suffit en soi ! RS

LES CARNETS DU STUDIO – n° 321 mars 2014 – 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - CPPAP n°0214 G 84305

www.studiocine.com – 08 92 68 37 01


JEUNE PUBLIC

sans paroles Tout public à partir de 5 ans

Le Piano magique Divers pays – 2014 – 45 mn, courts métrages d’animation de Martin Clapp...

Deux enfants trouvent un vieux piano. Il se transforme, comme par enchantement, en un engin volant magique qui leur fait survoler l’Europe… France – 2014 – 1h29, film d’animation de T. Szabo et H. Giraud.

Dans une paisible forêt, une guerre sans merci se déclare entre deux bandes rivales de fourmis.

Tout public à partir de 6 ans

Tout public à partir de 8 ans

France – 2014 – 1h25, film d’animation de Jacques-Rémy Girerd, Benoît Chieux, avec les voix de Josiane Balasko, Sabine Azéma, François Morel…

Tante Hilda, passionnée de botanique, se trouve confrontée à la création par des industriels d’une céréale miracle sensée mettre un terme à la faim dans le monde…

Le s Amis a nima ux

Suède – 2014 – 36 mn, trois courts métrages d’animation de Eva Lindström.

VF À partir de 3 ans

Ce moyen métrage nous conte des histoires fantastiques et poétiques au milieu d’une nature généreuse et colorée. Dessins simples et aquarelles douces...

Jack et la mécanique du cœur

Tout public à partir de 9 ans

France – 2014 – 1h34, film d’animation de S. Berla et M. Malzieu, avec les voix de Mathias Malzieu, Olivia Ruiz, Grand Corps Malade, Jean Rochefort…

Jack naît un jour de très grand froid et son cœur gèle. Pour le maintenir en vie, le docteur Madeleine lui greffe une horloge. Jack survivra à condition de ne pas tomber amoureux, mais il rencontre Miss Acacia… France – 1958 – 1h58, de Jacques Tati, avec Alain Becourt, Jacques Tati… Tout public à partir de 7 ans

Mon oncle

Gérard, assis à l’arrière du Solex de son oncle... Quel plaisir de retrouver Monsieur Hulot, personnage rêveur et plein de fantaisie, faisant découvrir sa ville à son neveu !

Ne ratez pas ce chef d’œuvre, Oscar du meilleur film étranger en 1959.

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Le Tableau

JEUNE PUBLIC

Tout public à partir de 7 ans

France – 2011 – 1h16, film d’animation de Jean-François Laguionie.

Un tableau inachevé et abandonné par son peintre provoque des conflits entre ses personnages, mais aussi un nouvel équilibre.

Un film à multiples facettes...

Patéma et le monde inversé

Tout public à partir de 10 ans

VO

VF

Japon – 2014 – 1h39, de Yasuhiro Yoshiura, avec Yukiyo Fujii, Shinya Fukumatsu.

Une partie de la planète a explosé et chaque moitié vit en apesanteur contraire. Deux adolescents, qui rêvent d’aller dans le monde de l’autre, se rencontrent…

Un scénario original et passionnant dans de très beaux décors travaillés à la japonaise. À partir de 3 ans

sans paroles

Les Petits canards de papier Chine – 1960 à 1980 – 36 mn, trois courts métrages d’animation inédits des studios d’art de Shanghai, réalisés par Yu Zheguang.

Un programme en papiers découpés des studios d’art de Shanghai. Mercredi 19 après la séance, lecture de contes chinois.

Azur et Asmar

FESTIVAL DE CINÉMA ASIATIQUE DE TOURS

Mercredi 12, les Studio fêteront le Printemps des Poètes avec un atelier animé par Anne Rocheteau de la Cie des Chats Pitres.

Tout public à partir de 6 ans

France – 2004 – 1h39, film d’animation de Michel Ocelot.

Azur et Asmar, élevés comme deux frères, sont brutalement séparés. Devenus grands, ils partent chacun de leur côté, à la recherche de la fée des Djinns dont la légende a marqué leur enfance. Mais leur éducation dans des milieux bien différents les oppose…

Le Parfum de la carotte

France – 2014 – 45 mn, quatre courts métrages d’animation de divers réalisateurs.

À partir de 4 ans

Des histoires pour les petits autour de la gourmandise, de l’amitié, de l’enfance. Les CARNETS du STUDIO

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En bref…

Ici… ` CHRONIQUE DE LA HAINE ORDINAIRE (P. Desproges) Si le cinéma se (com)plait à faire rimer « amour » avec (presque) « toujours » , tout en plaçant judicieusement obstacles et rebondissements sur son parcours, il demeure cependant friand des romances qui se muent en guerre des tranchées où tous les coups sont permis. Après les affrontements d’anthologie de Qui a peur de Virginia Woolf ?, Le Chat, et La Guerre des Rose, on va assister à ceux de Démons en compagnie de Marina Foïs et Romain Duris. Le film s’inspire d’une pièce de Lars Noren, que l’éditeur définit ainsi : « Ils jouent le jeu qui est le jeu de milliers d’autres couples. Elle dit une phrase qui contient une attaque plus ou moins cachée. Lui, en revanche, ne peut pas séparer cette nuance agressive du contenu de la phrase et charge lui-même sa réponse d’agressivité… ». ` LA NOUVELLE ÈRE Si Catherine Corsini s’intéresse toujours aux sentiments, il semblerait qu’elle ait fait le tour des tourments et autres turpitudes des passions humaines, La Nouvelle Ève, Les Ambitieux et Partir notamment, et que désormais elle ait davantage envie d’en parcourir la face « sud ». Les ondes positives ne devraient pas manquer puisqu’elle a misé sur la lumineuse Cécile de France pour éclairer La Belle saison, qu’elle voit comme « un film beaucoup plus solaire où tous les personnages sont des gens plutôt bons. Dans Trois Mondes, il y avait beaucoup de mauvais sentiments, de culpabilité. Là, il y a des problèmes d’affect mais ce sont des gens qui sont assez courageux et qui sont confrontés à leur désir et comment ils vont réussir à les vivre. » Adèle Haenel, vue dans Suzanne, sera également du voyage. ` DÉJÀ VU

C’est l’histoire d’un truand qui séquestre et tabasse le policier qui l’a pincé trois ans auparavant, afin d’apprendre le nom de sa balance : un film des années 70/80 avec Delon et/ou Belmondo, dans lequel flic et voyou sont interchangeables ? Que nenni ! C’est un film de 2014, avec Niels Arestrup et Gérard Lanvin, où le premier est le gangster (il a un peu l’habitude : il était tout simplement terrifiant dans le rôle du parrain d’Un prophète) et le second, forcément, le flic ; notons tout de même que l’inverse aurait tout aussi bien fonctionné… C’est Frédéric Schoendoerffer qui met en scène ce viril face à face de 96 heures, la caution féminine étant apportée par Sylvie Testud et Anne Consigny. ` L’USINE À RÊVES

Dans l’univers de Michel Gondry, chacun a droit au rêve, à la création, à la réinvention. Son monde est peuplé de

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drôles d’hurluberlus maladroits, touchants et pleins de poésie. Désormais, tout un chacun pourra mettre en application avec de vrais moyens (prêt de matériel, de costumes, de décors… ) et gratuitement ce que le Géo Trouvetout du cinéma préconisait dans Soyez sympas, rembobinez : passer à l’acte de la réalisation ! L’Usine à films amateurs devrait voir le jour dans une ancienne manufacture d’Aubervilliers, d’ici deux ans ! Le réalisateur qui a déjà testé ce concept ailleurs mais sur un temps limité, souhaiterait maintenant pérenniser ce projet : « C’est comme un parc d’amusement, les gens pourront venir faire des films, faire émerger leur créativité. C’est important pour moi que ce soit gratuit. » ` ACTEUR DE VARIÉTÉ

Après son appropriation de La créature de La Belle et La Bête pour Christophe Gans, sous l’œil apeuré puis séduit de Léa Seydoux, le prolifique Vincent Cassel devrait tourner avec Emmanuelle Bercot sous la direction de Maïwenn, sans qu’on en sache davantage sur le contenu du projet. Il travaillera ensuite avec le réalisateur de Gomorra, Matteo Garrone, dans The Tale of Tales, avec cette fois Salma Hayek pour partenaire.

Et ailleurs… ` HOMMES DE FOI

À peine son Loup de Wall Street projeté, le maestro Scorsese enchaîne avec Silence, son vingt-quatrième long-métrage ; occasion d’opérer un de ces grands écarts dont il a le secret, en s’intéressant cette fois à deux missionnaires portugais du XVIIe siècle, entreprenant un voyage au Japon, pour tenter de secourir des chrétiens accusés d’un crime. Ken Watanabe (Inception) et le désormais très courtisé Andrew Garfield (The Amazing Spider Man) ont été désignés pour endosser la robe de bure et effectuer ce dangereux périple. ` L’INVASION DES PROFANATEURS

Steven Spielberg, autre hyperactif du cinéma, annonce quant à lui, son trentième long-métrage avec Cortez : un drame situé au XVIe siècle, autour de la figure de Fernando Cortes de Monroy Pizarro Altamirano, plus couramment nommé Hernán Cortes, explorateur à l’origine de la chute de l’empire aztèque. Spielberg s’appuierait sur un scénario écrit par Dalton Trumbo (Johnny Got His Gun) à la demande de Kirk Douglas, au début des années soixante. Pour cette adaptation-là, le rôle du conquistador devrait être tenu par le toujours étonnant Javier IG Bardem !

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Bande annonce

L’économie palestinienne ou comment subordonner l’économie d’un pays aux ambitions politiques d’un autre

E

n 1948, 750 000 Palestiniens sont expulsés de leurs villages ; des infrastructures (ports, …) sont détruites ou accaparées. Depuis 1967, Israël occupe militairement les territoires palestiniens : les restrictions apportées aux déplacements (check-points, routes réservées...) et le morcellement du territoire portent atteinte aux libertés et au potentiel productif du pays.

Israël use de la force et met en place des mécanismes précis : (1) contrôle de la terre et de l’eau, au profit de l’extension des colonies, (2) administration militaire de l’économie, (3) contrôle des importations qui interdit de fait aux Palestiniens de produire certains biens (manque de certaines matières premières), (4) manque très important d’investissements productifs (crédits insuffisants), (5) collecte par Israël des taxes d’exportation des produits palestiniens, leur restitution constituant un levier de pression politique à disposition permanente de l’occupant.

exportés vers Israël. Les produits industriels représentaient seulement 8% du PNB palestinien en 1989 (contre 25% en Jordanie). Pour « replâtrer » cette économie empêchée et sous dépendance, plusieurs pays donateurs assurent 35% du budget palestinien, mais cette aide n’est pas gratuite : les Palestiniens doivent se plier aux exigences politiques de ces pays, en entretenant par exemple un appareil de sécurité disproportionné, satisfaisant essentiellement les « impératifs » sécuritaires d’Israël. Enfin, ces aides extérieures, distribuées par l’Autorité Palestinienne, conduisent à la mise en place de filières de distribution des crédits, comme autant d’incitations à la corruption. La stratégie politique d’Israël est de mettre en place tous les mécanismes qui permettent d’asphyxier l’économie palestinienne pour la reconfigurer en fonction de ses intérêts. L’économie palestinienne ne peut être expliquée et comprise sans la replacer dans la stratégie politique du pays occupant.

Développer une économie de production est très difficile. Les produits palestiniens sont à faible valeur ajoutée, 80% d’entre eux étant

NOUS EN REPARLERONS PROCHAINEMENT…

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Collectif Palestine 37


Humeur

Une sorte de blues

C

’est comme un écho. Quelques notes à peine esquissées… On se dit « C’est pas vrai ! » et pourtant, si : quand l’accroche de la pub tombe enfin (c’est pour de l’énergie mais ce pourrait être pour des couches culotte, un aliment pour chien, le dépistage du cancer du colon ou une nouvelle formule de prêt à porter funéraire… tant, dans le paradigme publicitaire, tout se vaut/tout se vend !) les premières notes de Kind of blues de Miles Davis résonnent. Sacrilège : l’une des plus belles musiques du 20e siècle sacrifiée sur l’autel du Veau d’or de la consommation ! Que la publicité pille sans remord dans l’énorme héritage de la culture mondiale, on s’y fait malgré nous, mais que l’on abuse des délicates notes de cette musique confidentielle, mal aimée du grand public, il y a franchement de l’abus ! Cette petite indignation personnelle, et qui n’intéresse sans doute pas grand monde, semble décidément définitivement obsolète à l’heure où la publicité ne se contente plus de nous aguicher, de nous amuser, de nous surprendre, de nous choquer, de nous faire le complice de ses clins d’œil égrillards, mais s’est emparée de la plupart de nos secrets. Nous sommes nombreux à avoir vibré en 2006, et plus tard, en voyant le magnifique film de Florian Henckel von Donnermarck La Vie des autres. Mais les infâmes méthodes de la Stasi semblent bien artisanales quand on apprend comment les services secrets américains écoutent, en toute bonne conscience, les conversations du monde entier, des puissants, des supposés terroristes, des pékins ordinaires, nous, vous, toi et moi. La vie des autres, c’est désormais la nôtre. Et si nous n’étions surveillés que par les agents secrets

(ont-ils le physique de Sean Connery ou de Jean Dujardin ?), ce ne serait qu’un moindre mal, mais nous le sommes au moins autant par le pouvoir publicitaire. « Qui veut gérer des milliards de clients doit collecter leurs données personnelles. Des méthodes mathématiques, qui s’avèrent de très loin supérieures aux méthodes jadis utilisées par les techniciens de la domination politique des polices secrètes, servent à cela. » « La publicité a ainsi adopté une nouvelle dimension politique. Car les groupes américains qui dominent l’Internet sont des alliés des États dans l’État. Les relations qu’ils entretiennent avec les services secrets reposent sur de solides intérêts communs ; groupes industriels comme services secrets ont besoin de toutes les informations disponibles permettant de contrôler la population. » écrit Hans Magnus Enzenberger1. L’agent de la Stasi joué par le bouleversant Ulrich Mühe finissait par entrer en empathie avec les dissidents qu’il devait surveiller. La surveillance totale mise en place par les sociétés globales veut également notre bien : connaître nos goûts, nos désirs, nos plaisirs les plus intimes… pour pouvoir les satisfaire aussitôt, sans une forme sonnante et trébuchante. Et rien ne semble pouvoir s’opposer DP au pouvoir des marchands.2 1 Le Monde du 27-28 octobre 2013 – Le Terrorisme publicitaire. 2 « Partout le septième art retentit des assauts des multiplexes en chœur qui ont crié haro sur la culture vécue comme un trésor commun. À Tours nord et ailleurs ils ont les cartes en main », déclamait Gérard Mordillat lors de sa venue aux Studio en janvier 2013.

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Courts lettrages Les rédacteurs ont vu : PHILOMENA de Stephen Frears

Brillamment interprété, soulevant le spectateur d’une juste indignation, Philomena est un mélo filmé comme un polar : cela devrait donner un mauvais mélo et un mauvais polar. Comment expliquer qu’au contraire cette confusion des genres aboutisse à un film aussi remarquable ? Estce dû à un troisième ingrédient qui lie (comme on lie une sauce) les deux autres : l’humour ? Un humour fin qui apparaît toujours aux moments où le mélo risquerait de l’emporter, où l’enquête risquerait d’occulter le reste. Un vrai miracle d’équilibre. Ce film humaniste ne révolutionnera certes pas le septième art, on ne peut même pas dire qu’il traite d’un sujet neuf, mais il fait honneur au cinéma. AW Le syndrome Lars Von Trier a encore frappé : Philomena n’est autre que la version « censurée avec l’accord de l’auteur » du film de Peter Mullan, The Magdalene Sisters. JF Ah ! Judy Dench, actrice fétiche des films de James Bond, toujours opiniâtre, et là plus encore, à la recherche de son fils, enfant vendu à de riches étrangers par des nonnes sûres d’accomplir la volonté divine, en punissant ainsi une pécheresse… Le regard bleu de la vieille dame transcende cette histoire vraie et sa dignité évite le basculement dans le mélodrame. Judi… cieux choix de Stephen Frears ! CP

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La figure tragique et sublime de grandeur de la Philomena de Stefen Frears ne témoigne pas seulement d’un drame singulier, mais de celui de toutes celles qui ont subi semblable calvaire, là ou ailleurs : comme en Espagne, où sous Franco, plus de trente mille enfants ont été arrachés à leur famille au nom d’une idéologie délirante parée de vertu religieuse. Universalité de l’horreur. IG Au-delà des faits de l’horreur indicible de cet arrachement injustifiable, Judi Dench, la grande Dame shakespearienne, épate par son talent qui dote Philomena d’une noblesse de cœur opportune. La décision finale de la mère de faire savoir, sans pour autant renoncer à son pardon, pouvait difficilement être entendue sans l’accompagnement du jeu sensible de la comédienne, en parallèle du scénario. Ce n’est pas toujours le cas… RS Harmonieux dosage entre éclats de malices, humour léger, et grave quelquefois, mélancolie et tristesse creusées par les méandres de l’Histoire que raconte l’histoire…


Sans jamais verser dans le pathos, Stephen Frears a su donner à ses personnages ce caractère charismatique et charmeur, qui nous emporte dès les premiers plans. Judi Dench y est d’un attachant sans équivoque et Steve Coogan d’un cynisme touchant, jamais gênant. Une petite réussite qui mérite de grands bravos ! MR La religion chrétienne est, comme on sait, une religion de tolérance et d’amour... mais au delà de l’ émotion et de la dénonciation des vols d’enfants, le film vaut surtout par le numéro de duettistes (l’octogénaire catho et prolo & le quinqua cynique et bobo) et la distance humoristique qu’il procure. DP Stephen Frears livre ici une remarquable démonstration : il est possible d’être tout à fait classique ET pertinent, même aujourd’hui ! On continue de s’étonner que, depuis My Beautiful

Laundrette ou Prick Up Your Ears, son cinéma ait perdu son caractère abrasif... mais c’est oublier que ses deux premiers films pour le grand écran, rugueux dans leur propos, étaient aussi (déjà) d’une facture très classique ! ER Une des grandes forces du film de Frears est d’avoir réussi la confrontation improbable de deux personnages que tout oppose. Le vainqueur est sans conteste la pétillante Philomena, qui non seulement pardonne l’impardonnable et renonce à la colère mais illumine le film de sa verve et de sa générosité. Le summum est atteint quand, dans les trajets en voiture elle raconte les romans à l’eau de rose qu’elle affectionne à son co-équipier blasé : savoureux ! SB

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Hommage Dominique Sanda

Mon amour, hélas, le temps passe P

ar la suite, elle sera beaucoup plus filiforme ; pour l’instant, elle a encore les joues rondes, le corps un peu potelé de l’adolescence. C’est un modèle comme Robert Bresson aimait en créer et on ne sait pas encore si cette Femme douce joue vraiment ou si elle est juste une des figures si chères au réalisateur. En (re)découvrant ses débuts on ressent, en la voyant, que quelque chose résiste, que quelque chose accroche dans sa voix grave et décalée, dans son corps qui ne se donne pas réellement, dans ses gestes un peu malhabiles. Au delà du rôle, elle semble butée, forte, incapable de se plier et ne voulant surtout pas en rester là, contrairement à beaucoup de ses acolytes ayant débuté avec le même réalisateur. Mais, pour le moment, Dominique Sanda dans Une femme douce, c’est une apparition. Une véritable apparition de cinéma, venue de nulle part, sans être passée par la case seconds rôles. Dominique Sanda c’est une ciné-génie exceptionnelle, une distinction naturelle, une façon de capter la lumière, une carnation, une présence singulière, un phrasé particulier qui font qu’elle est immédiatement, et à la fois, une image magnifique et un être de chair. Effectivement, elle ne va pas en rester là. Dominique Sanda, dans les années soixantedix et quatre-vingt va collectionner grands rôles et grands films qui feront d’elle une figure aussi atypique que marquante. Elle brille en Italie, tout particulièrement, avec Bernardo Bertolucci (Le Conformiste, 1900), Vittorio de Sica (Le Jardin des Finzi-Contini), Mauro Bolognini (L’Héritage), Liliana Cavani (Au delà du bien et du mal), Dino Risi (Valse d’amour) et même Luchino Visconti pour une apparition proustienne et inoubliable dans

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Violence et passion. On la trouve aussi aux États-Unis chez John Huston (Le Piège), John Frankenheimer (L’Impossible objet), et en France, rarement dans des films grand-public (L’Indiscrétion de Pierre Lary ou Sans mobile apparent de Philippe Labro ne comptent pas parmi ses plus grandes réussites) mais dans ce qui se fait de plus exigeant. Philippe Garrel (Le Berceau de cristal), Benoît Jacquot (Les Ailes de la colombe, Corps et biens), Marguerite Duras (Le Navire night), Michel Deville (Le Voyage en douce), Frank Cassenti (La Chanson de Roland), Edgardo Cozarinsky (Guerriers et captives), René Allio (Le Matelot 512), entre autres. Sans oublier l’une de ses plus belles incarnations, Édith, bourgeoise folle d’amour pour un métallurgiste (comme sa voyante le lui a prédit), et qui, dans les rues de Nantes en grève, marche nue sous son manteau de vison (parce qu’elle n’a plus rien à se mettre). L’Édith de Nantes comme se plaisait à l’appeler Jacques Demy, le réalisateur d’Une chambre en ville. Les ressorties concomitantes de ce dernier et d’Une femme douce remettent en lumière ces deux films superbes, mais ils permettent aussi de se rappeler de l’importance de cette actrice. Au-delà de sa plastique impeccable, elle a toujours su se démarquer et apporter de l’ambiguïté, voire de la dureté, à nombre de ses rôles, comme si elle voulait à tout prix contredire le titre du film de Robert Bresson dans lequel elle a débuté. Son personnage y était passif, elle subissait et finissait par se suicider. Par la suite, Dominique Sanda n’a pratiquement jamais joué les victimes, les femmes qu’elle a incarné ont rarement été du genre à se laisser faire. Et puis, peu à peu, à partir de la fin des


années quatrevingt, elle s’est effacée, les rôles se sont réduits jusqu’à ce qu’elle disparaisse des écrans. Et même, si on la savait active au théâtre, en Italie, toujours, ou en Argentine où elle s’est installée depuis longtemps, on ne l’avait plus croisée sur un écran depuis un bail. « Le temps passe et court, en battant tristement dans mon cœur si lourd, et pourtant j’attendrai ton retour », dit la chanson, alors nous avons attendu, patiemment. Jusqu’à ce que Nicole Garcia ait la très bonne idée de l’inviter dans son dernier film. Las, après une aussi longue absence, les retrouvailles provoquent un choc car Dominique Sanda y joue… une grand-mère ! Certes, elle en a l’âge et le physique, et contrairement à beaucoup d’actrices du même âge, ceux-ci s’accordent. Bien sûr, elle est toujours superbe, mais voir Un beau dimanche c’est comme retrouver un ami perdu de vue depuis longtemps. C’est un miroir qui nous est tendu et nous fait réaliser un jour, même si c’est Un beau dimanche, que le temps passe… JF *Dans la merco Benz (Benjamin Biolay)

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À propos À propos de Vie d’Adèle LeLa Géant égoïste

Égoïsme géant D

ans le premier film de fiction de Clio Barnard, on est d’emblée en territoire cinématographiquement connu, quelque part entre Kes et Raining stones de Ken Loach : le nord de l’Angleterre, sa violence sociale, ses enfants perdus, son incompréhensible accent, ses déprimants paysages urbains. Son histoire est portée par un formidable duo de jeunes acteurs dont c’est le premier rôle : Arbor, véhément garçon de 13 ans, belliqueux parce que toujours à vif, terrassé régulièrement par de brutales crises de nerfs et Swifty, un ado plus débonnaire, véritable paria du lycée parce que considéré comme un gitan, sale et pauvre. Le film commence lorsque les deux amis se font mettre à la porte du lycée, exclusion cette fois-ci recherchée (en tout cas par Arbor) et vécut comme la porte ouverte vers la liberté et l’école de la débrouille… À l’origine du projet de la jeune réalisatrice, le désir d’adapter au Bradford d’aujourd’hui

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un conte éponyme d’Oscar Wilde en transformant le jardin du géant victorien en chantier de récupération de ferrailles et celui-ci en ferrailleur avide, faisant bosser les gamins du quartier dans des trafics douteux. Et dangereux. Devant le talent de ses jeunes interprètes, la réalisatrice a eu la bonne idée de refocaliser son récit autour des deux garçons, faisant du géant un personnage presque périphérique. Malgré la proximité avec celui-ci des films de Ken Loach, le monde qu’elle montre semble cependant différent : plus de trace de la solidarité et de l’entraide qui semblait encore faire la force d’une classe ouvrière déjà en décrépitude ; l’adjectif du titre sonne particulièrement pertinent, chacun essaie de s’en sortir seul et ne peut compter que sur lui-même. Même l’amitié des deux copains a bien du mal à résister à des intérêts divergents.


D’autre part, le décor post industriel propose un curieux mélange entre des quartiers en déshérence et des espaces de friche où la nature reprend peu à peu le dessus. La centrale électrique hors d’usage, ce mélange de modernité en ruines et de chevaux tirant des charriots, rappelaient des images d’un premier film d’une jeune réalisatrice venue elle-aussi du documentaire, La Terre outragée de Michale Boganin, la première fiction tournée près de Tchernobyl, dans le stupéfiant décor de la ville fantôme de Pripiat. Quel rapport entre les images venues d’Ukraine et celles des Midlands ? Entre ces régions irradiées où survivent ceux qui sont revenus s’installer malgré les interdits et ces régions sans emploi où tentent de survivre les anciennes familles ouvrières ? À Tchernobyl, bien sûr, la catastrophe est mondialement connue. Celle qui a frappé l’Angleterre des années 80 est beaucoup moins reconnue (on a pu le constater lors du décès de Margareth

Tatcher, le 8 avril dernier !). La révolution conservatrice mise en branle par la Dame de fer fut pourtant réellement catastrophique pour une partie de la société britannique… et au-delà (comme l’a montré Naomi Klein dans son livre La Stratégie du choc : la montée d’un capitalisme du désastre dont Michael Winterbottom fit un documentaire). La dérégulation financière est l’une des conséquences directes de cette révolution. Cet arrière plan politique est l’une des raisons qui ont poussé Clio Barnard à conserver le titre d’Oscar Wilde : « L’égoïsme du titre évoque pour moi d’autres thèmes cruciaux du film : la cupidité, l’individualisme. Et tout cela est très contemporain. Lorsque des gens tout en haut de l’échelle se mettent à voler (et beaucoup considèrent l’évasion fiscale, la fraude aux notes de frais ou la dérive des marchés financiers comme du vol), alors ces pratiques illicites sont reproduites tout en bas de la hiérarchie, là où se trouve Kitten. » (le patron ferrailleur). DP

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Interférence 2 automnes 3 hivers Casse tête chinois

Amour toujours ? L

e couple, pardon, les couples et leurs vicissitudes : que se passe-t-il entre la rencontre d’un homme et d’une femme et leur séparation programmée ?

Il se passe deux automnes et trois hivers, affiche Sébastien Betbeder, mais de toutes façons c’est un Casse-tête Chinois assène Cédric Klapisch ! Dans ces deux films français, le ton est donné d’emblée : aimer, c’est bref et compliqué, pour la génération des trentenaires en passe de devenir quadragénaires. Au dix-neuvième siècle, tout était simple : nécessité économique faisant loi et morbidité limitant la durée, un ménage durait, statistiquement, 13 ans et n’était aucunement dicté par les sentiments, encore moins par le désir. Au vingtième siècle, avec les progrès de la médecine et l’émancipation matérielle des femmes, saupoudrés de quelques échappées Freudiennes, tout bascule : le genre humain tente de fonder les relations sur l’affect et /ou la pulsion! Après l’an 2000, les héritiers de ces divagations errent, en quête d’un sens et déçus par les sens. Après le feu de la rencontre, tout semble bien morne et policé, on se quitte sans trop savoir pourquoi, sans l’expliquer ni à l’autre, ni à soi-même, genti-

ment, sans faire d’histoires. Dans le film de Betbeder, son deuxième long-métrage, les personnages font part de leurs états d’âme au spectateur, face à la caméra, car il est bien entendu que leur partenaire ne les comprendrait pas. Mais ce procédé drôlatique, très bien servi par les acteurs, nous laisse pantelants devant tant de solitude. Klapisch reprend, dans un troisième opus, après L’Auberge espagnole et Les Poupées russes, les mêmes personnages : ils se connaissent déjà, se quittent ou se reprennent, déménagent d’une capitale à l’autre pour suivre leurs enfants ou leurs amours. Rien n’est stable, rien n’est simple, pas plus chez les homos que chez les hétéros, et le sexe, comme la procréation assistée, sont banalisés à l’extrême. C’est un peu humoristique ? Non, ça fait froid dans le dos quand on imagine que le réalisateur nous servira le même plat dans dix ans, quand ils auront tous cinquante ans ! Rappelez-vous les contes de fée qui débutaient par d’infinies séquences de séduction, entrecoupées de multiples épreuves, jusqu’au triomphe de l’Amour et qui escamotaient la suite, avec un définitif : ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants. Eh bien, dorénavant, c’est l’inverse ! CP

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Interférences

Quel père ? sable par amour pour sa craquante petite fille, le père toujours sur la route de Suzanne (il est camionneur) mais qui sait pourtant être une présence réconfortante et tendre, le père obsessionnel de Prisonners qui veut être le gardien en armes de sa famille et qui est prêt à toutes les horreurs pour (soi disant) la protéger d’un monde extérieur nécessairement hostile, le père copain de Casse tête chinois prêt à tout laisser tomber pour suivre ses enfants de l’autre côté de l’Atlantique et ne pas les abandonner au calme et au luxe de leur nouvelle vie, le père fantasmé du Géant égoïste, qui règne impitoyablement sur son empire de ferrailles et dans lequel Arbor puisera un modèle d’être au monde solitaire et dénué d’affects. Le cinéma a l’art de donner un supplément d’âme aux chansons populaires (dernièrement, la magnifique version de Il est trop tard de Moustaki dans 2 automnes 3 hivers), on pourrait donc finir cette variation sur les pères sur grand écran par les paroles du tube de Stromae auquel on a pu difficilement échapper :

Karin Viard aux Studio © Nicole Joulin

Célibataire sans enfant, l’héroïne d’Un château en Italie, décide à 40 ans, presqu’à son corps défendant d’avoir un enfant grâce à une fécondation in vitro. À l’hôpital, à cause d’une inversion dans les noms, la scène vire à l’hystérie burlesque et angoissante dont Valéria Bruni-Tedeschi a le secret. Dans Casse tête chinois, on passe de l’autre côté de l’éprouvante éprouvette en suivant Xavier, 40 ans lui aussi, qui a bien du mal à parvenir à donner… son sperme… afin que son amie lesbienne puisse donner un enfant à sa compagne stérile. Deux scènes comme des échos fictionnels du trouble de la société française autour de l’idée de paternité qui s’est exprimé récemment, et plutôt violemment, dans les manifestations contre le mariage pour tous et l’adoption pour les couples de même sexe. Qu’est-ce qu’un père ? C’est la question qui traverse le beau film de Kore-Eda Tel père, tel fils. A partir d’un scénaristiquement déjà-vu échange de bébés à la naissance, le réalisateur japonais propose deux versions paternelle antinomiques : un père absent, glacial, maniaque et super exigeant et un père présent, chaleureux et bordélique. Le fils sera-t-il à l’image de son père parce qu’il a vécu avec lui, parce qu’il s’est imprégné, jour après jour, de ce modèle (ou contre modèle) masculin ou parce que, avant même sa naissance, il a été marqué par le bagage génétique de son géniteur ? Des images paternelles, le cinéma nous en offre toute une galerie : le père adulescent de Fruitvale station qui n’aura jamais le temps de s’acheter une conduite respon-

Serons-nous détestable ? Serons-nous admirable ? Des géniteurs ou des génies ? Dites-nous qui donne naissance aux irresponsables Tout le monde sait Comment on fait des bébés Mais personne sait Comment on fait des papas DP

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À propos de Le loup de Wall Street

Portrait du salaud en héros C

e film remarquable (du grand Scorsese), emporté par un Leonardo di Caprio de feu, montre tout au long de trois heures qui semblent beaucoup plus courtes que bien des films d’une heure et demie, l’ascension, l’apothéose et la chute d’un financier véreux. Schéma ultra-classique, typique des films de Scorsese comme il l’était des tragédies de Shakespeare, mais qui pose ici une question intéressante : qu’est-ce qu’un héros ? Définition du Petit Robert : « Tout homme digne de l’estime publique, de la gloire, par sa force de caractère, son génie, son dévouement total à une cause, une œuvre ». Même avec beaucoup d’indulgence, il est impossible de voir en Jordan Belfort un personnage répondant à cette définition, de voir en lui le modèle moralement irréprochable, le pôle positif du couple habituel bons/méchants auquel le spectateur est invité, consciemment ou inconsciemment, à s’identifier. Présent dans pratiquement toutes les scènes, Jordan Belfort est pourtant le personnage principal, pivot, moteur et raison d’être de toute la narration. Il est donc le héros du film mais n’est pas un héros : c’est un escroc, un drogué, un mauvais mari, un mauvais père, un homme cynique objectivement indéfendable.

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Peut-on se passionner pour un film si l’on ne se projette pas dans un personnage dont on vit par procuration les aventures, les expériences ou le destin ? Sans doute non. Mais se fondre dans ce personnage-là estil vraiment innocent ? Comment s’identifier et en même temps se situer à la bonne distance de quelqu’un auquel on ne voudrait surtout pas ressembler ? Si le salaud est sympathique, comme l’est finalement à sa manière Jordan Belfort, comme l’est aussi le banquier suisse, que campe sans grande conviction il faut bien le dire, Jean Dujardin, l’effet produit n’est-il pas un peu pervers, un brin schizophrénique ? Les scènes de comédie (parfois irrésistibles), le brio époustouflant du personnage peuvent-ils faire oublier sa réalité morale ? C’est là qu’on voit que le cinéma est un art adulte : esthétique et éthique ne font décidément pas bon ménage. Mieux même : c’est peut-être en montrant les pires représentants de l’espèce humaine qu’on fait les bons films. Et l’hypocrite alibi de la dénonciation doit cesser de nous voiler la face : au cinéma, comme dans le roman, les héros les plus intéressants sont (parfois ? souvent ? toujours ?) des salauds. AW


À propos de Jackie et le royaume des filles

L’homme voilé

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ans un article formidablement ironique1, l’écrivaine Pierrette Fleutiaux concluait : « La dignité de l’homme exige qu’il porte la burqa.» Après avoir rappelé que la femme était naturellement « faible, soumise à toutes les tentations », « concupiscente », elle constatait : « La femme en burqa continue de voir. On imagine quelles turpitudes alors peuvent agiter son esprit. » et proposait de voiler l’homme pieux pour « briser net l’élan pervers de la femme.» Elle ajoutait que voiler les femmes pour les protéger du désir masculin est une croyance mécréante : « Elle accrédite l’idée que l’homme a été créé libidineux, violeur par nature et faible devant ses désirs. » D’où son implacable conclusion : « La burqa est faite pour l’homme. » Ce qui n’était qu’une idée provocatrice, Riad Satouff l’a non seulement imaginée, mais il l’a mis en images : un monde gynocratique, cocktail drolatique et inquiétant entre le régime de Pyongyang et celui des ayatollahs. Dirigé par femmes enrégimentées, Bubunne est une dictature où les hommes sont obligés de porter le voile et vivent sous la coupe de leur femme. Systématiquement, le réalisateur a inversé tous les comportements et les codes sexués : les femmes y sont autoritaires, violentes, prédatrices (notamment sexuellement), détentrices de tous les pouvoirs et les hommes coquets, doux, superficiels, bavards, soumis. Dans un décor géorgien glaçant (un village de déplacés d’Ossétie et un palais dans la ville natale de Staline), les images des foules d’hommes en burqua sont aussi violemment absurdes que celles des femmes vues dans les

films iraniens. Comédie burlesque pas toujours drôle, souvent angoissante dans sa noirceur assumée2, Jackie et le royaumes des filles travaille aussi sur le langage, tant il est vrai que les dominations sont toujours également verbales, en imposant une novlangue où le genre des mots s’inversent : les mots porteurs sont féminisés (les voileries, les blasphèmeries, de l’argenterie) alors que les mots vils sont masculinisés (un culottin, un merdin, un couillard). Cette version cauchemardesque (pour la plupart des hommes sans doute) de Cendrillon a un final politiquement ambigu (comme dans le film Transperceneige3 : arrivé au sommet de l’état, le rebelle accepte l’ordre établi qui désormais le sert ; grand couillon de la nouvelle générale, Jackie partage son règne. Mais, c’est sans compter l’épilogue, complètement inattendu, et violemment blasphématoire. Devant la foule mixte qui les acclame, le couple dictatorial se met à nu, dévoilant des attributs sexuels inattendus, retrouvant par ce geste la provocation des Femen et de la blogueuse égyptienne Aliaa Magda Elmahdy qui utilisent la nudité comme un paradoxal instrument de résistance. DP 1 Le

Monde du 4 juillet 2009 noirceur du film vient sans doute de l’enfance du réalisateur, en Syrie communiste dans une zone sans magasins où toutes les maisons étaient identiques, et du traumatisme subi à la mort de sa cousine, enceinte hors mariage, étouffée par son père et enterrée dans un champ avec l’aide de ses cousins. 3 Autre rapprochement : la matière dont on nourrit le peuple. De la purée de cafards dans l’un, de la merde vitaminée dans l’autre. 2 La

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Rencontre

Rencontre avec Fleur Albert vendredi 17 janvier 2014

Fleur Albert Studio © Nicole Joulin

Le 17 janvier dernier, la première avant-première de Stalingrad Lovers, en partenariat avec Ciclic, fut l’occasion d’une rencontre avec sa réalisatrice, Fleur Albert. À la fin de celle-ci suivit une discussion de près d’une heure, questions du public à l’appui, qui put ainsi revenir sur l’œuvre, qui, malgré ses allures de documentaire, n’en était pas un… ou du moins, pas tout à fait !

Les oubliés de la rue magnifiés

F

leur Albert explique que ce n’était pas ce qui l’intéressait en premier lieu, même si la démarche l’ayant menée jusqu’au projet final s’y est apparentée. À la suite d’un fait divers (la mort d’un jeune homme, Olivier) somme toute malheureusement commun pour le milieu sur lequel elle a travaillé (les marginaux toxicomanes), elle est allée à la rencontre de ces individus, souvent oubliés de notre société, dans une démarche presque anthropologique. Au fil des rencontres, elle s’est trouvée face à « une espèce de navire de vies, de gens aux origines

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sociales très différentes, qui avaient des parcours très chaotiques ». De là est née son envie d’approcher le sujet pour raconter les histoires entremêlées qui lui étaient contées ; tout en adoptant un point de vue relevant davantage de la fiction. Fleur Albert n’a pas voulu dresser des portraits d’une façon naturaliste. Par le biais de son attachement tout particulier à filmer les visages, les corps, les mouvements, elle a préféré adopter un « regard d’une certaine douceur, qui permette de regarder autrement ». Les anecdotes du tournage sont nom-


breuses, mais il en est une qui ne trompe pas : la rencontre de ce jeune garçon, persuadé que Fleur Albert racontait là l’histoire de son propre frère, disparu. « Il fallait faire avec des choses de la réalité, et celle-ci nous rattrapait ! ». Et cette réalité toute particulière de composer avec des comédiens non-professionnels et toxicomanes, de surcroît : la difficulté de travailler avec eux quand leur état ne leur permettait pas, deux gardes à vue durant le tournage, des maladresses dans le jeu, qui parfois « rendaient bien, mais parfois pas du tout ! »… On oscille bien là entre deux façon de traiter le récit, et il est évident que si le film n’est pas documentaire, beaucoup de ses composantes le lient malgré tout à une réalité très loin d’être fictive… La question de la disparition, était celle qui la préoccupait le plus : « Qu’est-ce qu’un être disparu, que devient un corps disparu, dans le cas des morts de la rue ? ». De ces interrogations en sont nées d’autres, sur lesquelles elle a travaillé avec ses acteurs : « Qu’est-ce que c’est pour toi la frontière, qu’est-ce que c’est que le droit ? Qu’est-ce que l’amour ? Tout de suite, il y a une espèce de porte vers un imaginaire, vers une poétique. » Cette poétique dont elle parle apparaît tout au long du film, et demeure irrémédiablement liée à la question de son esthétique… Chose sur laquelle elle a tenu à travailler également. Notamment sur des préoccupations de lumières et de couleurs ; elle cite Sokourov et Bresson comme influences, Le Caravage, aussi. La question de la musique est également

évoquée : tout au long du film se succèdent des sonorités parfois très éloignées les unes des autres, mais qui accompagnent toujours superbement le récit. Et pour cause : « J’ai réalisé que ce que je décrivais n’était pas un monde univoque, avec des états linéaires. Il y a des moments de grande confusion. Les réduire à un seul univers musical, ce n’était pas cohérent, par rapport à leur imaginaire… Ça faisait partie de la partition des corps. Le côté blues américain, jusque la musique improvisée plus abstraite, le côté jazz, illustraient la force du film. Il fallait que ça swingue aussi ! » Une vraie réussite pour cette cinéaste qui dit « être venue au cinéma à cause de la musique ». La question du travail avec des comédiens non professionnels est également revenue à plusieurs reprises. Le tournage ayant été réalisé dans l’ordre chronologique, « ils deviennent comédiens sous nos yeux ! » « Une force et une faiblesse du film », selon elle, mais qui lui donne pourtant ce charme en plus. Une expérience humaine profondément riche, comme elle le précise tout au long de ses réponses. C’est donc un essai réussi, comme s’accorde à le faire ressentir le public touché par le film, pour cette réalisatrice française membre de l’Acid, et ancienne assistante de… Jean-Luc Godard ! « À la fin de ma collaboration avec lui, il m’a donné une caméra et m’a dit : “Faites des films pour les gens que vous aimez”. C’est ce que j’essaie de faire ». Et le pari est absolument réussi. MR

Retrouvez une vidéo de la rencontre sur le site des Studio, rubrique : Ça s’est passé aux Studio.

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Rencontre

Rencontre avec Charlotte Garson lundi 13 janvier 2014 – Cinémathèque

Charlotte Garson aux Studio © André Weill

à propos des Amours d’une blonde (1965), de Miloš Forman

C

harlotte Garson, journaliste aux Cahiers du cinéma et à France Culture, a tout d’abord situé dans son contexte biographique, historique et culturel ce film qui, sans être ouvertement politique, montre diverses formes d’oppression dans la société tchécoslovaque de l’époque : des hommes sur les femmes, des plus âgés sur les plus jeunes, des conventions politiques et morales sur l’aspiration à la liberté. Thème récurrent dans les films de Miloš Forman : l’innocence et la fragilité de héros qui tentent malgré tous les obstacles de se rebeller. Mais déjà on sent dans la mélancolie provinciale qui baigne la petite ville, dans le désespoir latent de toute une génération sacrifiée, l’impossibilité de s’évader, de se transcender : bientôt les chars russes entreront dans Prague pour étouffer toute velléité d’échapper à ce système oppresseur et oppressant. L’être humain est réduit à un simple rouage de la société, il est réifié, écrasé. Kafka, autre Praguois, n’est pas loin.

Le film ne renie pas ses influences : le néoréalisme, la Nouvelle Vague, le surréalisme même, mais présente une profonde originalité par son aspect hybride, caractéristique de cette première période du cinéma de Forman : fiction construite comme un documentaire, lyrisme et humour, acteurs professionnels et non professionnels, scénario extrêmement travaillé et improvisation, désespérance et gags… Cette méthode est seule capable, selon l’auteur, de capter la vie, de la préserver sur l’écran. L’humour, qui va parfois jusqu’au burlesque, est omniprésent, véritable arme de résistance. Comme dans Le brave Soldat Chveïk et dans la culture tchèque en général, la (fausse ?) naïveté permet seule, au moins provisoirement, d’échapper à l’oppresseur. À la fin cependant Milda, le jeune amoureux, est repris en main par ses parents ; Andula, l’héroïne qui a voulu conquérir sa liberté, revient à son point de départ ; rien n’a changé, l’horizon reste aussi désespérément bouché. Elle a perdu son innocence mais n’a rien conquis en échange. Même si le jazz est peu présent en tant que musique de film, son influence est évidente : le tempo syncopé de la narration, les cadrages inattendus, les ruptures de ton, rythment l’action, tentative évidente de se libérer de la dramaturgie et du réalisme soviétique pesant, didactique, moralisateur. Il n’y a plus de héros édifiant, juste une génération perdue qui voudrait vivre… Charlotte Garson, en répondant aux nombreuses questions et observations des spectateurs, a su montrer toute la richesse et finalement la complexité d’un film apparemment simple et linéaire. Ce fut très éclairant. AW

Retrouvez une vidéo de la rencontre sur le site des Studio, rubrique : Ça s’est passé aux Studio.

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– Les CARNETS du STUDIO

n°321

mars 2014


Vos critiques LE GÉANT ÉGOÏSTE de Clio Barnardlire la suite L’histoire effroyable d’une amitié entre deux jeunes adolescents (une interprétation à couper le souffle) mise en péril par la recherche effrénée de l’accumulation de l’argent qui manque tant à la maison où le père a disparu. On peut s’interroger sur une vision qui peut paraître excessivement misérabiliste, mais il semble bien que l’Angleterre post Thatcher et post Blair offre de telles situations avec la désindustrialisation et la disparition de l’État Social qui résulte de leurs réformes. Histoire effrayante donc, mais pas complètement désespérante grâce précisément à cette amitié, à la relation privilégiée de l’un d’entre eux avec le cheval et aussi grâce au remord final qui submerge totalement celui des deux qui va survivre. Hervé R. TEL PÈRE, TEL FILS de Hirokazu Kore-Eda lire la suite Une très belle réflexion sur l’amour filial et l’apprentissage de la paternité ! Les liens du sang prévalent-ils sur les liens du temps ? Les parents sont bouleversants et les enfants irrésistibles. Un moment de cinéma à ne pas rater. Maïte N. […] Les liens familiaux sont décrits de façon très pertinente. D’un côté, une éducation qui recherche l’excellence en permanence, de l’autre, une éducation plus bohème pleine de tendresse. C’est un film touchant et bien interprété. CP

2 AUTOMNES, 3 HIVERS de Sébastien Betbederlire la suite Voilà une comédie française qui fait preuve d’originalité. Avec Vincent Macaigne (l’acteur qu’on voit partout en ce moment dans les courts et les longs métrages) fidèle à luimême c’est à dire à côté de ses basq mais touchant. L’originalité du film tient à sa forme : des scènes qui nous sont contées par leurs protagonistes, des personnages qui interrompent leurs actions pour nous dire ce qu’ils ressentent… Allez-y ! Céline G. PHILOMENA de Stephen Frears Avec The Magdalene Sisters, Peter Mulan nous dévoilait le sort qui était réservé aux jeunes irlandaises, à la moralité jugé douteuse, des années 50. En se penchant sur la vie de Philomena, sexagénaire impuissante face au silence des institutions religieuses, Stephen Frears aborde le même sujet et choisi de traiter l’après. Philomena recherche vainement le fils qu’elle a eu 50 ans plus tôt au couvent de Roscrea, que les sœurs lui ont arraché pour l’offrir à l’adoption d’une riche famille américaine. Martin, journaliste cynique et fraichement sans travail accepte de l’aider dans sa quête […] Frears a su mêler l’humour au tragique. […] Judi Dench et Steve Coogan composent des personnages sobres et attachants Le film est traité avec beaucoup d’humanité et de pudeur. Quand le générique tombe, on se demande comment les Hommes – sous couvert des principes d’une religion – ont-ils pu sacrifier des vies sans jamais faire preuve d’aucune miséricorde. Christel G

Rubrique réalisée par RS

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