Novembre 2015

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ISSN 0299 - 0342

CINÉMAS STUDIO : 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS

N°339 • novembre 2015

Rencontres du cinéma en Région Centre-Val de Loire du 20 au 22 novembre (voir page 6)


éditorial

Rendez-vous C

haque cinématographie a son histoire propre, ses références, ses structures de production et de diffusion et ne peut se résoudre – comme on essaie de nous en convaincre au niveau économique, depuis des décennies – à un vaste ensemble où les biens (ici culturels) peuvent circuler librement, sans obstacle.

L’Europe, même si elle n’atteint pas les productions astronomiques du continent asiatique (Inde, Chine et Japon) continue à être un espace où la production de films reste importante. La France arrive en tête à la fois en nombre d’entrées et nombre de films réalisés, mais les autres grands pays européens continuent à produire de nombreux films : entre 2005 et 2010, la France a tourné 220 films en moyenne, l’Allemagne 180, le Royaume Uni 100, l’Italie et l’Espagne de l’ordre de 80. Sur les 933 millions d’entrées en Europe en 2012, le cinéma européen ne représente que 33,6 % du marché (largement dominé par le cinéma français (13,6 %) et britannique (8 %). Dans de nombreux pays, le cinéma national est peu ou très peu vu en salle, souvent parce que les écrans sont regroupés dans de vastes complexes qui diffusent essentiellement du cinéma américain. (Ainsi, en Allemagne, les 4 617 écrans sont répartis sur 1 652 salles alors qu’en France, les 5 465 écrans se répartissent dans les 2 047 salles de l’hexagone). Certaines cinématographies ne peuvent plus être vues sur grand écran, hors cinéclubs et festivals ; c’est le cas par exemple du cinéma portugais. Les trois tomes des Mille et une nuits de Miguel Gomez par exemple ne seront pratiquement pas vus malgré l’engagement de ses producteurs.

La part du cinéma national dans l’ensemble du box-office est très variable : si elle représentait 43% des entrées en France en 2014, elle n’est que de 31% au Royaume Uni, de 28% en Italie, de 26,6% en Allemagne, de 13,5% en Espagne… Grâce à l’action du CNC et des nombreuses instances d’accompagnement des films, le cinéma européen (et français) est facilement accessible pour le spectateur hexagonal même s’il n’habite pas dans une grande ville. Parmi ces instances, l’ACC1 occupe une place importante en Région Centre-Val de Loire. Créée en 1995, subventionnée par la Région et la Drac, cette association a pour objectif d’animer et faire vivre un réseau de salles indépendantes et de proximité et de favoriser, sur l’ensemble de la Région Centre-Val de Loire, la rencontre d’un cinéma de qualité et d’un large public. Après les Journées Jeune Public de l’Afcae2 à l’automne dernier, c’est également aux cinémas Studio que se dérouleront, du 20 au 22 novembre, les Rendez-vous de Cinéma en Région Centre-Val de Loire de l’ACC, rencontres professionnelles axées sur la formation, les pratiques professionnelles et l’échange sur les films projetés en avantpremière, certaines ouvertes au public (lire p. 5). DP

1ACC : Association des cinémas du Centre compte 45 structures adhérentes, des circuits itinérants, des salles associatives, municipales et privées, situées dans les six départements de la Région.

2Afcae : Association française des cinémas d’art et d’essai fédère plus de 1 000 salles en France.

Attention, le vendredi 20 novembre, la cafétéria de AIR sera fermée. Les CARNETS du STUDIO

n°339 •

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Novembre 2015 - n° 339

Édito CNP

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Il était cinq heures dix

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Soirée Partenariat CHRU, École de sages femmes . . 6 ....

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Rencontres du cinéma en Région Centre-Val de Loire

LES FILMS DE A à Z

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Cinémathèque En bref

Pour permettre au public une plus grande fréquentation de ses collections (les plus riches de région Centre), la bibliothèque propose de nouveaux horaires.

Horaires d’ouverture : lundi : de 16h00 à 19h45 mercredi : de 15h00 à 19h45 jeudi : de 16h00 à 19h45 vendredi : de 16h00 à 19h45 samedi : de 16h00 à 19h45 FERMETURE PENDANT LES VACANCES SCOLAIRES

Cafétéria des Studio gérée par l'association AIR (chantier d'insertion),

Bande annonce

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accueille les abonnés des Studio tous les jours de 16h00 à 21h45

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sur présentation des cartes abonné et cafétéria.

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Rencontres avec

Mahmoud Fkir

Tél : 02 47 20 85 77 Interférences

Le tout nouveau Testament/Les Chansons que mes frères… 19 Les STUDIO sont membres de ces associations professionnelles :

Courts lettrages

Youth . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 Rencontres avec

Louis Garrel

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22

AFCAE

À propos de

Les Deux amis

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24

À propos de

Django. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 À propos de

La Cité des dangers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 À propos de ..............................

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30

Cemetery of Splendour À propos de

Dheepan

EUROPA REGROUPEMENT DES SALLES POUR LA PROMOTION DU CINÉMA EUROPÉEN

Vos critiques

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Jeune Public

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34

ASSOCIATION FRANÇAISE DES CINÉMAS D’ART ET ESSAI

ACOR ASSOCIATION DES CINÉMAS DE L’OUEST POUR LA RECHERCHE (Membre co-fondateur)

GNCR GROUPEMENT NATIONAL DES CINÉMAS DE RECHERCHE

ACC ASSOCIATION DES CINÉMAS DU CENTRE (Membre co-fondateur)

FILM DU MOIS : Le Fils de Saül GRILLE PROGRAMME

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pages centrales

Prix de l’APF 1998

LES ÉDITIONS DU STUDIO DE TOURS - 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - Mensuel - Prix du numéro 2 €. ÉQUIPE DE RÉDACTION : Sylvie Bordet, Isabelle Godeau, Jean-François Pelle, Dominique Plumecocq, Éric Rambeau, Roselyne Savard, Marcelle Schotte, André Weill, avec la participation de Françoise Chapoton, Dominique Chenu et de la commission Jeune Public. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Éric Rambeau – MISE EN PAGES & EN IMAGES : Francis Bordet. ÉQUIPE DEgraphique RÉALISATION contribue : Éric Besnier, Guérineaude – DIRECTEUR : Philippe Lecocq – IMPRIMÉ par PRÉSENCE GRAPHIQUE, Monts (37) Présence à Roselyne la préservation l’environnement et atteste être reconnu IMPRIM’VERT.


SEMAINE

CNP jeudi

20h00

5 du 25 novembre au 1er décembre 2015 MOIS DU FILM DOCUMENTAIRE

51’

L’histoire de la palestine avant 1948 : comprendre ce qui s’y passe aujourd’hui

NEIGE

14h15

Programme de courts métrages

mercredi sam-dim

À LA RENCONTRE D’UN PAYS PERDU ET LES ARBRES MAGIQUES de Maryse Gargour

62’

Rencontre avec Sandrine Mansour

C I N É M A T H È Q U E

lundi TRAINS ÉTROITEMENT SURVEILLÉS 19h30 1h32’ de Jiri Menzel ALOUETTES, LE FIL À LA PATTE 21h15 1h32’ de Jiri Menzel

mercredi sam-dim

1h13’ VF

LA COURSE DU SIÈCLE

de Ute von Munchow-Pohl

16h00

mercredi samedi dimanche

14h30 19h00

UNE HISTOIRE DE FOU

1h53’

LES AMITIÉS INVISIBLES

de Robert Guédiguian

de Christoph Hochhäusler

1h47’

19h45

LE FILS DE SAÜL

17h30 21h45

1h41’

LES ANARCHISTES 21h45

de Laszlo Nemes

de Elie Wajeman

14h30 19h15

1h57’

À suivre.

CHANT D’HIVER de Otar Iosseliani

www.studiocine.com

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Le film imprévu www.studiocine.com

Cases orangées : programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35

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du 28 octobre au 3 novembre

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Centenaire de la Grande Guerre

lundi LES CROIX DE BOIS 19h30 1h50’ de Raymond Bernard SÉANCE CINÉ LANGUES

mercredi 1h26’ 17h15 MANOS SUCIAS

2015

1h34’ VF

PORCO ROSSO

de Hayao Miyazaki ATELIER : mercredi, à partir de 8 ans

mardi

ADAMA de Simon Rouby

Soirée Bibliothèque et Sans canal fixe 39’ sans paroles

18h30 1h44’

SANS SOLEIL

de Chris Marker Soirée présentée par Emmanuel Chicon

14h30 1h53’ BELLES FAMILLES 19h00 de Jean-Paul Rappeneau 14h30 2h06’ 17h00 NOTRE PETITE SŒUR de Hirokazu Kore-Eda 19h15 14h15 1h58’ THE LOBSTER 17h15 de Yorgos Lanthimos 19h30 14h15 21h45

1h28’

SAMETKA

54’ VF

LE VOYAGE DE TOM POUCE

Programme de Courts métrages

PHANTOM BOY de Jean-Loup Felicioli & Alain Gagnol

17h45 SAUF lun-mar

16h15

16h15

SAUF lun-mar mercredi

10h15

SAUF mer-lun-mar

16h15 SAUF lun-mar mercredi

10h00

1h36’

L’HOMME IRRATIONNEL de Woody Allen

2h04’

MON ROI de Maïwen

1h33’

CHRONIC

2h00’

Le film imprévu www.studiocine.com

SAUF lun-mar

14h15

1h24’

de Luc Jacquet

14h30 1h22’ LE BOUTON DE NACRE 19h45 de Patricio Guzman

14h15

SAUF LA CHENILLE QUI DANSE lundi de Zdenek Miler mardi

LA GLACE ET LE CIEL

14h15 ELSER, UN HÉROS ORDINAIRE 19h30 de Oliver Hirschbiegel

mercredi

16h00

1h22’

de Josef Wladyka

16h00

À suivre. 1h26’ 14h15 1h55’ mercredi MUNE 21 NUITS 17h00 samedi LE GARDIEN DE LA LUNE dimanche AVEC PATTIE 19h15 de Benoit Philippon 21h30 de Arnaud et Jean-Marie Larrieu 17h30 & Alexandre Haboyan L’École de sage-femmes/CHRU et les Studio 14h15 1h37’ LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES-3 courts dont : L’HERMINE 17h00 AVANT QUE DE TOUT PERDRE mercredi de Xavier Legrand 30’ de Christian Vincent 21h30 19h45 À suivre. Rencontre avec Xavier Legrand et des professionnels de la santé 14h15 1h58’ jeu-ven 1h36’ lun-mar 17h15 KNIGHT OF CUPS JE SUIS UN SOLDAT 14h15 de Terrence Malick + 19h30 À suivre. de Laurent Larivière 21h45 1h31’ 1h53’ 14h15 IXCANUL 17h30 MACBETH de Jayro Bustamante 19h45 de Justin Kurzel 21h30 À suivre.

2h14’

SEMAINE

de Michel Franco

17h15 21h15 17h15 19h30 21h30 17h45 21h45

1h56’

AGENT TRÈS SPECIAUX, 21h45 CODE U.N.C.L.E. de Guy Ritchie

1h19’

FATIMA de Philippe Faucon

21h45

Toutes les salles des Studio sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Cinémas Stu d io – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com


SEMAINE

CNP jeudi 20h00

2 du 4 au 10 novembre 2015

MOIS DU DOCUMENTAIRE 1h45’ AVRIL 52’ LUNGONE

DROMENCA

de de Marie-Christine Duchalet de Franck Ekinci,Christian Desmares, Jacques Tardi & Pierre Gadrey Débat avec les réalisateurs

C I N É M A T H È Q U E

1h22’

ADAMA

1h26’

de Simon Rouby

lundi LES SENTIERS 19h30 DE LA GLOIRE

54’ VF

de Stanley Kubrick

LE VOYAGE DE TOM POUCE

14h15 1h47’ 17h15 LE FILS 19h15 DE SAÜL 21h15 de Laszlo Nemes

Programme de courts métrages

1h24’

PHANTOM BOY

1h53’

14h15 BELLES 19h30 de FAMILLES Jean-Paul Rappeneau

de Jean-Loup Felicioli & Alain Gagnol

MADAME BOVARY

mercredi samedi dimanche

16h00 mercredi samedi dimanche

16h15 mercredi samedi dimanche

17h45

1h28’

LA GLACE ET LE CIEL 17h45 1h33’

CHRONIC

de Sophie Barthes

19h45

2h04’

FESTIVAL PLUMES D’AFRIQUE

92’ CNP EXAMEN D’ÉTAT de Dieudo Hamadi

C I N É M A T H È Q U E

Hommage à Mahamat-Saleh Haroun

lundi 1h20’

19h30

ABOUNA

rencontre avec Mahamat Saleh Haroun

mardi

19h30 1h35’ DARATT SAISON SÈCHE 21h30 1h30’UN HOMME QUI CRIE

14h15 2h14’ HISTOIRE 17h00 UNEDE FOU 21h30 de Robert Guédiguian 14h15 1h47’ 17h15 LE FILS DE SAÜL 21h30 de Laszlo Nemes 14h15 1h41’ 17h15 LES ANARCHISTES 19h15 de Elie Wajeman 1h10’

14h30 LE CARAVAGE de Alain Cavalier 19h45 samedi à 14h30

de Michel Franco

1h58’

14h30 19h15

3 du 11 au 17 novembre 2015

jeudi 19h15 19h45 Débat avec Anne-Cécile Robert

de Luc Jacquet

1h58’

14h15 19h15

ET LE 14h15 MONDE TRUQUÉ 17h15

SEMAINE

17h00 MON ROI THE LOBSTER 1h28’ de Maïwen de Yorgos Lanthimos 21h30 14h30 FRANCOFONIA, SOUS L’OCCUPATION 19h15 LEdeLOUVRE 2h06’ 1h22’ Alexandre Sokourov 17h00 NOTRE 14h30 LE BOUTON 1h33’ PETITE SŒUR 21h30 NACRE 14h15 L’ÉTAGE de Hirokazu Kore-Eda 21h45 deDE Patricio Guzman DESSOUS 19h45 DU de Radu Muntean

2h00’

ELSER

1h10’

vendredi

19h45

UN HÉROS ORDINAIRE

LE CARAVAGE

21h15

de Oliver Hirschbiegel

de Alain Cavalier Rencontre avec Alain Cavalier, réalisateur, après la séance.

Le film imprévu www.studiocine.com www.studiocine.com

1h36’

L’HOMME IRRATIONNEL 21h45 de Woody Alen

1h58’

19h15 THE LOBSTER de Yorgos Lanthimos

Le film imprévu www.studiocine.com

Cases orangées : programmation Jeune Public: voir pages 34 et 35

SEMAINE

4 du 18 au 24 novembre 2015

1h45’

L’Association des cinémas du centre, l’ACC, propose LES RENDEZ VOUS DU CINÉMA EN RÉGION C ENTRE-VAL DE LOIRE

AVRIL ET LE 14h15 MONDE TRUQUÉ

de Franck Ekinci,Christian Desmares, Jacques Tardi

1h13’ VF

17h15

mercredi dimanche

LA COURSE DU SIÈCLE de Ute von Munchow-Pohl 16h00 54’ VF

LE VOYAGE DE TOM POUCE

Programme de Courts métrages

1h22

ADAMA de Simon Rouby

mercredi samedi dimanche

16h00 mercredi samedi dimanche

17h15

programmation spéciale sur 3 jours Voir page 6 et le site des Studio

Torture : l’impossible justification 26’

LES MOTS CNP jeudi DE LA TORTURE 20h00

d’Aurine Crémieu & Malek Sahraoui

Débat avec Joël Jovet, Amnesty International

MUNE

PRIMA DELLA lundi 1h55’RIVOLUZIONE de Bernardo Bertolucci

19h30

de Benoit Philippon & Alexandre Haboyan

1h13’ VF

de Franck Ekinci,Christian Desmares, Jacques Tardi

1h41’

17h30

de Hirokazu Kore-Eda

21h45

LE FILS DE SAÜL de Laszlo Nemes

MARYLAND 19h30 de Alice Winocour

1h28’ SAUF samedi FRANCOFONIA, + LE LOUVRE SOUS L’OCCUPATION de Alexandre Sokourov

14h30 1h10’ SAUF

2h04’

MON ROI

21h15

de Maïwen

1h59’

LE 19h30 CARAVAGE SAUF

sam-dim ven-sam

de Alain Cavalier

2h14’

17h30 21h30

14h15 UNE HISTOIRE DE FOU 19h00 de Robert Guédiguian

NOTRE PETITE SŒUR 21h15

14h30 LES AMITIÉS 19h30 deINVISIBLES Christoph Hochhäusler

MADAME BOVARY de Sophie Barthes

2h06’

de Hirokazu Kore-Eda

1h45’

SANGUE DEL 17h45 MIO SANGUE 21h30 de Marco Bellocchio

1h53’

1h36’

14h15 JE SUIS UN 19h45 de SOLDAT Laurent Larivière

16h00

AVRIL ET LE MONDE TRUQUÉ 17h15

14h15 MACBETH 19h15 de Justin Kurzel

52’ de Pauline Jardel

mercredi

1h45’

BERTRAND BELIN vendredi IL ÉTAIT CINQ HEURES DIX 20h00

En partanariat avec Le Temps Machine & CICLIC

mer-dim

16h00

LA COURSE samedi DU SIÈCLE dimanche

Soirée présentée par Louis D’Orazio de Ute von Munchow-Pohl

14h15 1h37’ 17h15 L’HERMINE 19h15 21h15 de Christian Vincent

mer-sam dimanche

LE GARDIEN DE LA LUNE 14h15

C I N É M A T H È Q U E

1h53’

SOIRÉE VAGUE JEUNE

1h26’

vendredi samedi dimanche

2h06’

NOTRE PETITE SŒUR 17h30 1h47’

17h00 21h30

1h41’

17h30 LES ANARCHISTES 21h30 de Elie Wajeman

1h28’

21h30 VIERGE SAUF SOUS SERMENT ven-sam de Laura Bispuri

1h33’

L’ÉTAGE DU DESSOUS 21h45 de Radu Muntean

Le film imprévu www.studiocine.com

Tous les films sont projetés en version originale (sauf indication contraire)

Cinémas Stu d io – 2 rue des ursulines - 37000 TOURS (derrière la cathédrale) – 08 92 68 37 01 – www.studiocine.com


Cinq femmes Roms, vivant en France et en Allemagne, racontent les raisons qui les ont fait fuir du Kosovo, là où elles ont toutes leurs attaches, leurs familles, leurs souvenirs. Plusieurs années après leur départ, ces femmes relatent avec force la guerre, les violences, l’humiliation, le racisme envers les Roms mais gardent en elles l’espoir de vivre en paix, en famille. À travers ce film, nous voulons rendre ces femmes plus visibles, plus proches de nous. Débat en présence des réalisateurs.

TORTURE : L’IMPOSSIBLE JUSTIFICATION La torture n’est plus, depuis longtemps, l’apanage des dictatures. La France lors de la bataille d’Alger, les États-Unis à Guantanamo, le Mexique dans sa lutte contre les narco-trafiquants… la liste est longue des démocraties qui, tout en affichant leur attachement aux droits humains, n’hésitent pas à sacrifier leurs valeurs sous prétexte de lutter contre le crime ou le terrorisme. Pourtant, aucune circonstance ne saurait justifier la torture, ni autres mauvais traitements, contre quiconque. Partout où elle est utilisée elle doit être dénoncée, en brisant le silence et en combattant l’impunité qui sont toujours ses meilleurs alliés. La projection de Les Mots de la torture d’Aurine Crémieu et Malek Sahraoui (2000 - France – 26’) et de Détention au secret : le cas Muhamad El Assad de Amnesty International (2006 - France – 15’) sera suivie d’un débat avec Joël Jovet, de la coordination Syrie-Liban à Amnesty International.

jeudi 12 novembre - 19h45

jeudi 26 novembre - 20h00

Dans le cadre du festival Plumes d’Afrique, Le Réseau Afrique 37, le CID-MAHT, Les Amis du Monde Diplomatique et le CNP proposent :

Dans le cadre du mois du documentaire, Le CNP et le Collectif Palestine 37 proposent :

jeudi 5 novembre - 20h00 Dans le cadre du mois du documentaire, Le CNP propose :

LUNGONE DROMENÇA, Longue route Film de Marie-Christine Duchalet et Pierre Gadrey (2013 France – 52’), produit par Z ‘images Productions

AFRIQUE : CROISSANCE ET/OU DÉVELOPPEMENT ? De nombreux états africains connaissent une forte croissance économique, mais cette croissance s’accompagne-t-elle d’un développement humain pour tous ? La question du développement est ici posée à travers l’école. Nous suivons le parcours de jeunes lycéens congolais qui vont passer leur Examen d’État (équivalent du baccalauréat français) à Kisangani (RDC). Parcours semé d’embûches tout au long de la préparation, entre renvois de l’école parce qu’ils n’ont pu payer la « prime des enseignants», révisions dans les « maquis » (maisons communes) et rues chaotiques où ils cherchent « leur vie ». Film : Examen d’État de Dieudo Hamadi (2014 – République Démocratique du Congo – 92’), suivi d’un débat avec Anne-Cécile Robert, spécialiste de l’Afrique et journaliste au Monde Diplomatique.

jeudi 19 novembre - 20h00 Amnesty International, l’Association d’aide aux victimes en Syrie (AAVS), la Ligue des Droits de l’Homme (LDH) et le CNP proposent :

L’HISTOIRE DE LA PALESTINE AVANT 1948 : COMPRENDRE CE QUI S’Y PASSE AUJOURD’HUI. Encounter with a lost land, À la rencontre d’un pays perdu Ce film de Maryse Gargour (2013 - France/Liban – 62’) raconte les histoires de Français, nés à Jaffa, Bethléem, Jérusalem. Leurs parents sont consuls, chirurgiens, commerçants, dans la Palestine des années 1920-1930 où ils ont grandi en toute sérénité. Leurs récits révèlent l’ardeur de la vie quotidienne et nous plongent au cœur des évènements qui nous mènent jusqu’aux années 50. Basé sur des correspondances personnelles, des archives diplomatiques, des journaux de l’époque et des archives audio-visuelles inédites, ce film montre une page d’histoire peu connue : la Palestine existait bien avant la création de l’État d’Israël. Débat avec Sandrine Mansour, historienne, collaboratrice historique

jeudi 3 décembre - 20h00 Le Comité Féministe PCF 37, ATTAC Convergence Services Publics 37, Les Amis du Monde Diplomatique et le CNP proposent :

COUP D’ÉTAT FINANCIER CONTRE LES GRECS ? Documentaire suivi d’un débat

Mercredi 28 octobre, à 17h15

Séance Ciné Langues Manos Sucias Colombie – USA - 2015- 1h24, de Josef Wladyka, avec Christian James Advincula, Jarlin Martinez, Hadder Blandon, Manuel David Riascos, Andrés Reina Ruiz

À 19 ans, Delio bosse sur un chantier mais a les rêves et les enthousiasmes de son âge (faire la fête, chanter du rap). À Buenaventura, l’une des

villes les plus dangereuses de la côte Pacifique colombienne, pour sortir de la misère, il faut travailler pour les narcotrafiquants : Delio est chargé de convoyer 100 kilos de cocaïne avec deux comparses. Commence alors un boatmovie qui sera pour Delio une plongée dans la violence et la perte de l’innocence et pour le spectateur celle dans un monde jamais filmé.

Niveau : lycée Projection gratuite pour les enseignants d’espagnol souhaitant amener des classes au troisième trimestre. Inscription impérative à l’adresse suivante : monmarche@studiocine.com

Mardi 3 novembre à 18h30

les Studio accueillent Sans canal fixe pour une projection à la bibliothèque

S

ans Canal Fixe propose un ensemble de films qui abordent la grande Histoire par le bout de la lorgnette individuelle. Car, «là où on voudrait nous faire croire qu’il s’est forgé une mémoire collective, mille mémoires d’hommes [...] promènent leurs déchirures personnelles dans la grande déchirure de l’histoire» comme le remarquait déjà C. Marker dans Sans soleil. Avec pour théâtres d’opérations le Moyen-Orient, Port Royal, l’ex-URSS, la Bosnie ou encore l’Algérie...

Sans soleil

France – 1982 - 1h44, de Chris Marker

Des lettres d’un cameraman, Sandor Krasna (un des pseudonymes de Chris Marker), sont lues par une femme inconnue. Parcourant le monde, il demeure attiré par deux « pôles extrêmes de la survie », le Japon et l’Afrique. Le cameraman s’interroge sur la représentation du monde dont il est l’artisan, et le rôle de la mémoire qu’il contribue à forger. Un sommet du film-essai par un réalisateur pour qui le cinéma devait fonctionner comme une « machine à repriser le tissu du temps ». Projection présentée par Emmanuel Chicon, programmateur à Sans Canal Fixe et au festival Visions du réel.

SOIRÉE VAGUE JEUNE – Vendredi 13 novembre à 20h00

Il était cinq heures dix de Bertrand Belin, Collection La Française des airs, 2014 – 52’ – réalisatrice : de Pauline Jardel

U

ne plongée dans l’univers de Bertrand Belin et de sa musique. Le chanteur nous livre petit à petit quelques clés de son monde. Quand il ne chante pas, il déclame des poèmes dans une langue bien à lui, danse dans une ruine, écrit un livre… et en dit long sur lui.

Pauline Jardel sera présente pour répondre à vos questions en fin de séance. Tarifs : 5 € & 3,10 € pour les abonnés au cinéma Studio En partenariat avec Ciclic et Le Temps-Machine

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– Les CARNETS du STUDIO

n°339 – novembre 2015

Les CARNETS du STUDIO n°339 –

novembre 2015 –

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w w w . s t u d i o c i n e . c o m

Mercredi 25 novembre à 19h45

Soirée en partenariat avec le CHRU et l’École de sages-femmes L’école de sages-femmes et le CHRU s’investissent dans la lutte contre les violences faites aux femmes, et organisent ce 25 novembre un ciné-débat afin d’informer et d’échanger sur ce sujet crucial. Aider les professionnels sanitaires et sociaux à dépister et prendre en charge ces femmes qu’ils reçoivent dans leurs cabinets et informer les femmes, telle est l’ambition de cette soirée. Trois courts métrages seront présentés et discutés lors de cet événement : deux d’entre-eux Anna 15’, et Élisa 15’, de Johanna Bedeau et Laurent Benaim ont été réalisés à la demande de la Mission interministérielle pour les

Sur le site des Studio (cliquer sur : PLUS D’INFOS, pour entrer dans la fiche film), vous trouverez des présentations signées des films que les rédacteurs auront vus après leur sortie en salle. Les fiches non signées ont été établies de manière neutre à partir des informations disponibles au moment où nous imprimons.

Les films de A à Z www.studiocine.com

femmes victimes de violences et ont pour vocation première, tout en étant très cinématographiques, d’éveiller les professionnels au repérage des violences.

AVANT LES FILMS , DANS LES SALLES , AU MOIS DE NOVEMBRE : Blues Singer de Buddy Guy (Studio 1-2-4-5-6) • Shadows/Songs of Nat King Cole de Hugh Coltman (Studio 3-7) Musiques sélectionnées par Éric Pétry de RFL 101.

Xavier Legrand, réalisateur du troisième court métrage : Avant que de tout perdre, César du meilleur court métrage, nommé aux Oscars), sera présent pour prendre part aux débats aux côtés d’un médecin, d’un(e) représentant(e) de la justice et d’une psychologue travaillant auprès des femmes victimes de violences.

Séance Ciné-ma différence : Le Caravage, samedi 14 novembre-14h30

21 nuits avec Pattie

Agents USA très spéciaux, code U.N.C.L.E – 2015 – 1h56, de Guy Ritchie,

En plein mois d’août, Caroline laisse en urgence sa petite famille à Paris, pour aller dans le sud de la France afin de s’occuper des funérailles de sa mère, avec laquelle les liens étaient plus que distendus. Il faut dire que leurs choix de vie respectifs n’avaient rien à voir : la mère était libre et libérée, alors que la fille ne sait plus qu’être une mère. Caroline va d’autant plus être chamboulée pendant ce séjour que le corps de sa mère va mystérieusement disparaître et qu’elle va faire la connaissance d’une amie de celle-ci, Pattie, qui va lui raconter avec délectation sa vie sexuelle débridée… Si les frères Larrieu ont régulièrement abordé la question de la sexualité dans leurs films, ils ont cette fois voulu « développer un érotisme parlé » et donner la parole aux femmes.

Années 60… Contre toute attente l’agent Napoleon Solo (CIA) et Illya Kuriakine (KGB) se retrouvent à travailler ensemble sur une mission de la plus haute importance puisqu’il s’agit de contrer les plans d’une mystérieuse organisation criminelle qui entend faciliter la distribution d’armes nucléaires… Humour et flegme britannique au rendezvous pour un film d’action qui sait prendre ses distances.

France - 2015 - 1h55, de Arnaud et Jean-Marie Larrieu, avec Isabelle Carré, André Dussollier, Karin Viard, Sergi López, Denis Lavant…

Les Rendez-vous du cinéma en région Centre-Val de Loire les 20, 21 et 22 novembre 2015 aux Studio

Organisés par l’Association des cinémas du Centre (ACC) et les Studio. L’ASSOCIATION DES CINÉMAS DU CENTRE a été créée en 1995 par les salles de cinéma souhaitant mutualiser leurs idées et leurs moyens pour développer la diffusion des films art et essai sur le territoire régional. L’ACC compte 45 adhérents, des circuits itinérants, des salles associatives, municipales et privées, situées dans les 6 départements de la Région. Ses actions • Soutenir la diffusion et favoriser la diversité des programmations par la mise en circulation de copies. • Organiser la programmation annuelle 1, 2, 3…Ciné ! en direction du jeune public. • Organiser la programmation annuelle de Ciné Culte pour la diffusion de films de répertoire. • Organiser des prévisionnements chaque mois. • Organiser des rencontres professionnelles comme Les Rendez vous du cinéma en région Centre-Val de Loire chaque année. • Mettre en place des rencontres-débats, des animations jeune public, des ciné-concerts…

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Les Rendez-vous du cinéma : trois journées consacrées au cinéma Les Rendez-vous du cinéma sont des rencontres professionnelles, organisées autour d’une douzaine de projections en avant-première de films art et essai. Au programme des 3 jours : des projections, des échanges avec les équipes des films et les distributeurs. Les séances sont accessibles au public dans la limite des places disponibles. Dès maintenant, nous vous annonçons les venues (sous réserve) de Michel Leclerc pour La Vie très privée de Monsieur Sim, Nicolas Pariser pour Le Grand jeu et Benoit Forgeard pour Gaz de France. Le programme détaillé (avec des horaires parfois inhabituels) est à votre disposition à l’accueil des Studio. – Les séances sont animées par Thierry Méranger, enseignant en cinéma à Dreux et Paris et membre des Cahiers du cinéma. – Un jury d’une dizaine de lycéens participe à l’ensemble de la manifestation et remet son Prix des lycéens à l’un des films de la sélection. – Le vendredi après-midi est consacré à trois ateliers de réflexion autour de thématiques liées à l’exploitation et à la diffusion. Ces ateliers sont réservés aux exploitants de salles. Nous vous attendons nombreux à la 6e édition des Rendez-vous du cinéma pour participer aux séances et aux échanges sous le signe de la convivialité ! MS

Sources : dossier de presse, cineman. ch

Filmographie sélective : Un homme, un vrai (2003), Peindre ou faire l’amour (2005), Les Derniers jours du monde (2009), L’Amour est un crime parfait (2013)

A

Adama Voir pages Jeune Public Film proposé au jeune public, les parents restant juges.

avec Henry Cavill, Armie Hammer, Alicia Vikander…

Sources : nyt.com, telerama.fr

Les Amitiés invisibles

Allemagne – 2015 – 1h52, de Christoph Hochäusler, avec Florian David Fitz, Lilith Stangenberg, David C. Bunners...

Journaliste de haut vol pour un journal à scandale, Fabian, qui a quelques problèmes avec le jeu se voit chargé un jour d’enquêter sur des soldats qui, revenus d’Afghanistan, semblent souffrir de sérieux problèmes psychiques et d’empoisonnement liés à des substances toxiques. À partir de là et, en grande partie contre ses envies personnelles, Fabian va se trouver plongé dans une enquête qui le dépasse tant elle met en cause des tenants et des aboutissants que personne n’aurait pu croire liés. C. Hochäusler semble avoir signé ici un polar particulièrement réussi, qui mêle l’intime et le politique, la douleur et l’incomLes CARNETS du STUDIO n°339 –

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préhension... On peut signaler que le titre original se traduit par : Les Mensonges des vainqueurs… Sources : exberliner.com, wbairadiowomen.com

Les Anarchistes

France – 2015 – 1h41, d’Elie Wajeman, avec Tahar Rahim, Adèel Exarchopoulos…

En 1989, à Paris, Jean Albertini, orphelin sans le sou devenu agent de la paix débrouillard, est recruté pour infiltrer les communautés d’ouvriers aux idées « dangereuses ». Il fait la connaissance d’un groupe d’anarchistes qui squattent un grand appartement et qui prônent de passer de la parole aux actes, notamment par le vol des bourgeois. Il y fréquente plusieurs personnages hauts en couleurs dont Judith, aux charmes effrontés de laquelle il succombe peu à peu… Après Alyah, un très beau premier film sorti en 2012, le second film d’Elie Wajeman a été présenté en ouverture de la Semaine de la critique à Cannes. « Plus qu’un film politique, Wajeman a le bon sens de proposer une intrigue amoureuse, où dominent l’amitié, l’amour, la passion et la trahison ». Sans viser la fresque historique, il a réuni un très beau couple d’acteurs et trouve pour jouer son leader charismatique un magnifique acteur, Swann Arlaud, une révélation. « On ressort de ce film, non pas avec l’envie d’aller foutre le feu à la banque du coin (encore que...), mais plutôt avec celle d’aimer passionnément quelqu’un. » Sources : telerama.fr – lalibre.be

Avril et le monde truqué

France – 2015 – 1h45, de Frank Ekinci et Christian Desmares Film d’animation avec les voix de Marion Cotillard, Jean Rochefort…

Paris, 1941. Napoléon V est au pouvoir et l’évolution semble s’être arrêtée au XIXe siècle : le monde ignore radio, voitures, électricité, télévision, aviation etc. même s’il connaît quelques étranges avatars comme une Tour Eiffel double. Il faut dire que depuis 1871 tous les savants et inventeurs disparaissent…

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– Les CARNETS du STUDIO

n°339 – novembre 2015

Une jeune fille, Avril, part à la recherche de ses parents enlevés sous ses yeux, des scientifiques justement, aidée par Darwin, un chat doué de parole et Julius, un jeune vagabond. Dangers, mystères, aventures, attendent cet improbable trio. Scénario efficace, décors et personnages dessinés par le grand Jacques Tardi, voix assurées par des acteurs prestigieux : Avril et le monde truqué constitue une véritable création cinématographique qui a fait forte impression sur les rares spectateurs qui l’ont déjà vue.

Le Bouton de nacre Chili – 2015 – 1h22, documentaire de Patricio Guzman

Dans son film précédent, le magnifique Nostalgie de la lumière le réalisateur chilien interrogeait les secrets du désert d’Atacama, ses télescopes braqués vers le ciel et ses arpenteurs du désert cherchant des traces des disparus de la dictature de Pinochet. Avec Le Bouton de Nacre, il nous emmène 4 000 km plus bas, où il interroge à la fois la mémoire de l’eau et celle des Indiens qui ont habité la Patagonie et qui y ont été exterminés. C’est là aussi que Pinochet faisait disparaître les opposants à la dictature. Ce film «précis, posé, bouleversant d’intelligence » a reçu l’Ours d’argent du meilleur scénario à la Berlinade 2015.

Sources : dossier de presse

Voir pages Jeune Public

Belles familles

France - 2014 - 1h40, de Jean-Paul Rappeneau, avec Mathieu Amalric, André Dussolier, Nicole Garcia, Gilles Lellouche, Guillaume de Tonquedec, Karin Viard…

Pour Jérôme, c’est acquis, sa vie est définitivement à Shanghai. Lors d’un voyage professionnel en Europe, il retrouve sa mère et son frère pour un dîner à Paris et apprend, au cours du repas, que leur ancienne maison de famille n’est pas encore vendue en raison d’un conflit local qui semble insoluble. Il décide alors d’aller à Ambray pour se rendre compte, par lui-même, de la situation. Une fois sur place, il va se trouver confronté à des enjeux familiaux, des secrets plus ou moins enfouis et à des sentiments inattendus qui vont bouleverser sa vie. Jean-Paul Rappeneau explique qu’il a voulu réaliser une sorte « d’autobiographie imaginaire puisqu’au fond, dans ce qui est raconté, tout a un lien avec moi mais rien n’a de lien avec ma véritable vie ». Une chose est sûre, avec huit films en quarante-neuf ans, un film de Rappeneau est forcément un événement, d’autant plus qu’il a un don certain pour choisir ses comédiens et les mettre en scène ! Sources : dossier de presse, canalplus.fr, le figaro.fr, europe1.fr

Filmographie sélective : La Vie de château (1966), Les Mariés de l’An II (1971), Cyrano de Bergerac (1990), Le Hussard sur le toit (1995), Bon voyage (2003)

B

Sources : telerama.fr – trigonfilm.org – cinelationo.org

C

Le Caravage France - 2015 - 1h10, documentaire de Alain Cavalier.

Chant d’hiver

France/Géorgie – 2010 – 1h57, d’Otar Iosseliani, avec Rufus, Amiran Amiranashvili, Pierre Etaix, Mathieu Amalric, Tony Gatlif…

Des ressemblances peuvent troubler, comme celle de ce noble guillotiné, pipe au bec, pendant la Terreur, ou encore celles d’un aumônier militaire au torse tatoué, d’un clochard parisien et d’un concierge lettré et trafiquant d’armes ! La majorité de ces personnages se rencontrent dans un même immeuble et au sein de ce microcosme agité, se ménagent des espaces de rêve avec des histoires d’amour et d’amitié. Avec une distribution plus qu’alléchante, Otar Iosseliani semble vouloir nous nourrir d’espoir pour des lendemains meilleurs par ce Chant d’hiver au titre repris « d’une vieille chanson géorgienne qui dit : "C’est l’hiver, ça va mal, les fleurs sont fanées, mais rien ne nous empêchera de chanter." D’ailleurs, on peut aussi chanter Chant d’hiver en été ». Sources : dossier de presse.

Alain Cavalier est LE réalisateur libre par excellence : il filme comme il en a envie ce dont il a envie, à son rythme ! Après Le Paradis et Cavalier Express en 2014, il a voulu capter les liens exceptionnels, intenses qui unissent Bartabas, l’hommecheval du théâtre équestre Zingaro, et son partenaire favori, Le Caravage : un duo « fait de rythmes et de mélodies musculaires qu’il faut capter à la seconde… une conversation silencieuse entre deux corps, dont l’un pèse huit cents kilos ». Connaissant la capacité de Cavalier (le bien nommé) à capter l’intime et son souhait que ses « films fassent frémir une eau dormante à l’intérieur d’un cœur », on peut augurer que Le Caravage corresponde à une expérience singulière et forte à la fois. Sources : dossier de presse

Filmographie sélective : Le Combat dans l’île (1962), Thérèse (1986), Le Filmeur (2001), Pater (2011)

Vendredi 6 novembre, rencontre avec Alain Cavalier après la projection de 19h45.

Chronic

Mexique/USA – 2015 - de Michel Franco, avec Tim Roth, Robin Bartlett, Michael Cristofer, Sarah Sutherland…

David est un aide-soignant qui s’est spécialisé dans le suivi de malades en phase terminale. Efficace et très compatissant, il fait un travail remarquable... mais, fragile et perturbé dans sa vie personnelle, il a peutêtre autant besoin de ses patients qu’eux ont besoin de lui, au point d’exercer sur eux une sorte de surveillance intrusive. Qui manipule qui ? Qui utilise qui ? Le réalisateur du très cruel Despues de Lucia, qui évoquait le harcèlement adolescent, livre ici, avec le concours de l’immense Tim Roth, un film qui s’annonce tout aussi dérangeant que le précédent, nous amenant à repenser le rapport à la souffrance et à la mort. Sources : abusdecine.com, charlie’s blog Les fiches signées correspondent à des films vus par les rédacteurs.

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La Course du siècle Voir pages Jeune Public

E

Elser, un héros ordinaire Allemagne – 2015 – 1h54de Oliver Hirschbiegel, avec Christian Friedel, Katharina Schuttler…

Le 8 novembre 1939, alors qu’Adolf Hitler vient de prononcer un discours devant les dirigeants de son parti dans une brasserie munichoise, une bombe explose. Indigné par la brutalité croissante du régime nazi, Georg Elser, modeste menuisier, est le seul auteur de cet attentat qui a échoué car Hitler et ses lieutenants avaient déjà quitté les lieux. Rattrapé au cours de sa fuite vers la Suisse, arrêté et torturé par les nazis qui le croient membre d’un complot fomenté par une puissance étrangère, il devient un héros ordinaire pour tous les résistants... « Je voulais créer un sentiment de malaise continu, sentiment que je ressens depuis que je me passionne pour l’histoire du Troisième Reich. Tout le pays était comme enfermé sous une cloche de verre. C’est ce que j’ai voulu montrer sans jamais juger ni dénoncer, en dépeignant la vie des campagnes allemandes de cette époque à travers une communauté villageoise traditionnelle, progressivement infiltrée par les nazis. » Sources : dossier de presse

L’Étage du dessous Roumanie – 2015 – 1h33, de Radu Muntean,

conscience, on est ici dans l’anti-spectaculaire, ce qui n’empêche pas d’être happé et intrigué par cette histoire tortueuse dans laquelle on ne peut s’empêcher de voir un reflet de la société roumaine contemporaine. Une belle réussite, très prenante, par le réalisateur de Mardi après Noël et de Boogie. JF

Fatima

France – 2015 – 1h19, de Philippe Faucon, avec Soria Zeroual, Zita Hanrot, Kenza Noah Aïche...

Fatima fait le portrait de Fatima et de ses deux filles. Nesrine a 18 ans et commence des études de médecine, Souad, 15 ans, plus en difficulté, est en révolte permanente. Fatima parle mal le français et est femme de ménage, mais un jour elle a un accident. En arrêt de travail, elle se met à écrire dans un cahier, en arabe, tout ce qu’elle n’arrive pas à dire... Un des thèmes principaux du film est celui de la barrière linguistique. Philippe Faucon montre parfaitement comment l’absence de la maîtrise de la langue française est pour Fatima source d’isolement et d’enfermement, aussi bien par rapport à ses filles qu’à la société en général. Le film est discret, pudique, modeste mais plein d’acuité, de justesse, de précision. Dans un style naturaliste mais non documentaire, Fatima est un accomplissement, une épure ; son apparente simplicité est tout sauf simpliste. JF

deviendrait Paris sans son Louvre ? Au-delà de ce qui les oppose, Jacques Jaujard, directeur du Louvre et le Comte Franz Wolff-Metternich, chef de la commission allemande pour la protection des œuvres d’art en France, vont s’allier afin de protéger ces trésors artistiques. Avec Francofonia…, plébiscité lors de sa présentation à la Mostra de Venise 2015, Alexandre Sokourov ne livre pas seulement son portrait du Louvre. Il lève le voile sur des faits méconnus tout en proposant une méditation humaniste sur l’art et le pouvoir.

F

Sources : dossier de presse, culturebox.etfrancetvinfo.fr.

G

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– Les CARNETS du STUDIO

n°339 – novembre 2015

France – 2015 – 1h28, de Luc Jacquet.

Dès 1956, Claude Lorius passe un an en Antarctique et découvre que chaque bulle d’air prisonnière de la glace témoigne de l’époque où elle fut capturée. En 22 expéditions et 10 ans passés au pôle, il fore inlassablement la glace jusqu’à remonter à l’atmosphère qui prévalait il y a plus de 400 000 ans ! Tout au long de sa vie, Claude Lorius a essayé d’alerter le monde sur les dangers que l’homme fait peser sur la planète, dangers rendus évidents par l’hallucinante progression depuis le début du XXe siècle de la courbe de CO2 contenu dans les glaces. Le film de Luc Jacquet retrace la vie extraordinaire de cet homme aujourd’hui âgé de 82 ans, sa passion et son engagement dans lesquels lui-même se reconnaît pleinement. La Glace et le Ciel a été présenté hors compétition en clôture du dernier festival de Cannes. Il est le premier documentaire à avoir eu cet honneur.

avec Teodor Corban, Iulian Postelnicu, Oxana Moravec...

L’étage du dessous c’est celui où a eu lieu un meurtre et c’est celui où, précédemment, Patrascu a entendu les bruits d’une violente dispute amoureuse dans un appartement d’où il a vu Vali, un voisin, sortir. Et même s’il le soupçonne d’être l’assassin, Patrascu ne dit rien à la police, mais peu à peu, Vali s’immisce dans sa vie et sa famille... Tension et angoisse pour un film d’auteur ni psychologique ni explicatif, à la mise en scène soignée. Questionnant le thème de la

La Glace et le ciel

Le Fils de Saül FILM DU MOIS, voir au dos du carnet.

Francofonia , le Louvre sous l’Occupation France/Allemagne/Pays-Bas – 2014 – 1h28, d’Alexandre

Sources : dossier de presse, lexpress.fr

L’Homme irrationnel

USA – 2015 – 1h37, de Woody Allen, avec Joaquin Phoenix, Parker Posey, Emma Stone…

Professeur de philo dépressif et alcoolique, Abe arrive dans une nouvelle université où sa réputation l’a précédé et où de nombreuses femmes semblent très disposées à succomber à son charme. Mais Abe est vraiment dépressif et n’en a cure : la philo, pour lui, n’a pas de prise sur la vie et ce qu’il veut c’est changer le monde... au moins un peu... Une conversation entendue dans un café va peut-être lui ouvrir de nouveaux horizons, des horizons peu moraux mais très excitants… vraiment très… Woody Allen est de retour avec un film assez différent de ce qu’il a pu faire jusqu’alors, une sorte de comédie plutôt noire et jubilatoire où le cynisme a la part belle, où les dilemmes moraux peuvent se trouver tranchés de façon très radicale et en apparence presque joyeuse… ER

Sources : dossier de presse.

Sokourov, avec Louis-Do de Lencquesaing, Benjamin Utzerath…

1940. Paris, sous l’Occupation. La crainte est immense de voir des chefs-d’œuvre tels que La Joconde et La Vénus de Milo disparaître sous les bombardements. Que

tances atténuantes, le prévenu avec lui en prendra forcément pour plus de dix ans. Aigri, réac et misanthrope (c’est son interprète, Fabrice Luchini, qui le définit ainsi), Racine va être extrêmement déstabilisé quand, lors de l’énumération des noms des membres du jury retenus pour juger un homme soupçonné d’homicide, il entend celui d’une femme qu’il a aimée six ans auparavant et qu’il n’a jamais oubliée… Pour son interprétation, toute en nuances, de cet homme que les circonstances vont pousser à se remettre profondément en question, Fabrice Luchini a reçu la Coupe Volpi à la Mostra de Venise, tandis que Christian Vincent s’est vu récompensé, lui, pour son scénario.

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L’Hermine France - 2014 - 1h37, de Christian Vincent, avec Fabrice Luchini, Sidse Babett Knudsen…

Michel Racine est un président de cour inflexible : peu importe l’histoire, les circons-

Ixcanul

France/Guatemala - 2014 - 1h32, de Jayro Bustamente avec Maria Mercedes Coroy, maria Telon, Manuel Antun...

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Maria, jeune Maya de 17 ans, vit avec père et mère sur les flancs d’Ixcanul, un volcan actif. Sa famille a arrangé son mariage avec Les CARNETS du STUDIO n°339 –

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Ignacio, le propriétaire des plantations de café dans lesquelles elle travaille. Elle pense ainsi garder un toit. Maria, elle, rêve de partir de l’autre côté du volcan, aux États-Unis, en suivant son ami Pepe. Mais rien ne se passera comme elle le désire... Jayro Bustamente décrit avec minutie les coutumes issues d’un autre âge et les croyances d’une communauté semblant vivre hors du temps. Comme dans un système féodal, la loi du maître rend impuissants les paysans. Vous ne serez pas prêts d’oublier le même plan fixe et serré qui commence et termine le film ! L’Ours d’argent Alfred-Bauer à la Berlinale 2015 et l’Abrazo d’or ainsi que le Prix de la Critique internationale au festival de Biarritz ont été décernés à l’émouvant Ixcanul. MS

J

Je suis un soldat

France – Belgique – 2015, 1h37, de Laurent Larivière, avec Louise Bourgoin, Jean-Hugues Anglade, Anne Benoît...

Contrainte de retourner vivre chez sa mère, Sandrine se fait embaucher par un oncle dans un chenil, qui se révèle très vite être une plaque tournante pour un trafic de chiens volés en provenance de l’est de l’Europe. Charismatique et peu impressionnable, Sandrine se taille vite une place de choix dans ce milieu éminemment machiste... jusqu’au jour où les choses prennent une autre tournure et où elle s’affirmera encore plus... Je suis un soldat est signalé par plusieurs critiques comme faisant l’objet d’une réalisation très efficace et, surtout, comme donnant à Louise Bourgoin l’occasion d’exploser... l’un d’eux n’hésitant pas à la comparer à la révélation que fut Mathias Schoenharts dans Bullhead (dont le sujet se rapproche, d’ailleurs...) Sources : lebillet.ch, liveforfilms.com, film-forward.com

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Knight of Cups USA – 2014 – 1h58, de Terrence Malick, avec Christian Bale, Cate Blanchett, Natalie Portman, Antonio Banderas…

Il était une fois un jeune prince envoyé en

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– Les CARNETS du STUDIO

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Egypte pour y trouver une perle… Ce conte, le père de Rick le lui racontait lorsqu’il était enfant. Devenu depuis un scénariste célèbre, Rick aspire à autre chose qu’au faste hollywoodien, sans savoir vraiment vers où se tourner. Hanté par la mort de son frère Billy, Rick recherche la compagnie des femmes, souvent pour des rencontres sans lendemain. Rien ne semble lui convenir. Pourtant, chaque femme, chaque homme croisé dans sa vie lui a servi de guide… Aura-t-il assez de courage pour commencer le voyage ? Sous une caméra toujours virtuose, dans un patchwork de voix-off et d’images grandioses, T. Malick, réalisateur ô combien baroque et talentueux – voire entre autres Les Moissons du ciel (1978), Le Nouveau monde (2005), The Tree of life (2011) – nous emmène dans les errances de Rick, déboussolé, en pleine quête de sens.

Madame Bovary

Sources : dossier de presse, lesinrocks.com, senscritique.com.

Macbeth

GB-France-USA – 2015 – 1h53, de Justin Kurzel, avec Michael Fassbender, Marion Cotillard...

M

Mon roi

Allemagne/Belgique/USA - 2014 - 1h58, de Sophie Barthes avec Mia Wasikowska, Paul Giamatti, Rhys Ifans, Olivier Gourmet…

France – 2015 – 2h04, de Maiwenn, avec Vincent Cassel,Emmanuelle Bercot, Louis Garrel, Isild Le Besco, Patrick Raynal…

Quand la jeune Emma Rouault sort du couvent, c’est pour épouser Charles Bovary, médecin dans la campagne normande. Mais, très vite, elle se rend compte que le réel n’a pas plus à voir avec les romans qui exaltent son imagination que son époux avec les gentilshommes raffinés qui hantent ses rêves. Madame Bovary n’aura de cesse d’échapper à sa frustration et à son ennui… La destinée tragique de la créature de Gustave Flaubert n’en finit pas de séduire le cinéma : Sophie Barthes (Âmes en stock) en propose la dix-septième adaptation, avec la volonté de rester au plus près du roman, même si le choix a été fait de condenser l’histoire sur une seule année. Des réalisateurs aussi différents que Renoir, Minnelli, Chabrol et, plus récemment, Anne Fontaine avec son Gemma Bovery, ont su apporter un éclairage particulier à cette histoire emblématique. Souhaitons la même réussite à Sophie Barthes !

Après une grave chute de ski, Tony, avocate de profession, séjourne dans un centre de rééducation. Alors que ses blessures physiques la rendent dépendante du personnel médical et des antidouleurs, elle repense à Georgio avec qui elle a vécu une histoire d’amour passionnel. Mais qui était véritablement cet homme parvenu à la soumettre à ce lien destructeur ? Pourquoi se sont-ils aimés ? Entravée par son corps blessé, Tony amorce une difficile reconstruction qui lui permettra peut être aussi de se libérer définitivement… La talentueuse réalisatrice de Polisse (2011) et du Bal des actrices (2009) nous propose l’histoire d’une passion étouffante incarnée par un superbe duo d’acteurs. L’occasion également de revoir Louis Garrel, récemment venu aux Studio pour une soirée mémorable. Il endosse ici le rôle (d’importance) du frère de Tony, Solal… Mon roi va plaire, déranger, amuser et vraisemblablement transporter le spectateur « sur les montagnes russes de l’émotion » !

Sources : dossier de presse, culturebox

Macbeth est l’une des plus sombres tragédies de Shakespeare, l’histoire d’un couple que l’ambition mène à la trahison et au crime avant de sombrer lui-même dans la folie et la mort. Après Orson Welles, Akira Kurosawa, Roman Polanski — pour ne citer que les plus célèbres — c’est au tour de Justin Kurzel de livrer sa version de la pièce, avec un double parti pris : respecter le texte de Shakespeare, sa langue, ses vers (même si le texte n’est évidemment pas conservé dans sa totalité) et en même temps l’adapter aux thématiques du monde contemporain, approfondir l’interaction entre Macbeth et Lady Macbeth et la société qui les a produits et façonnés. Le film a été très bien accueilli au festival de Cannes. La critique unanime souligne l’exceptionnelle performance de Michael Fassbender.

Vincent, ancien soldat – victime de stress post-traumatique – doit assurer la sécurité de Jessie, la ravissante femme d’un riche homme d’affaires libanais. À Maryland, la propriété du couple sur la Côte d’Azur, le garde du corps, malgré des angoisses et des hallucinations qui l’assaillent, assure la protection de cette femme qui le fascine. Le calme règne à Maryland… Pourtant, Vincent sent planer une menace extérieure… Après Augustine (2012), Alice Winocour – co-scénariste du superbe Mustang – propose ici son second film. Ce huis-clos, en sélection officielle Un certain regard au festival de Cannes 2015, se révèle « aussi physique que mental […] aussi bon dans la tension diffuse que dans l’action ».

Sources : dossier de presse

Sources : dossier de presse, lesinrocks.com.

Maryland

Sources : dossier de presse, telerama.fr.

France/Belgique – 2015 – 1h38, d’Alice Winocour, avec Matthias Schoenaerts, Diane Kruger, Paul Hamy…

Mune, le gardien de la lune Neige et les arbres magiques Voir pages Jeune Public

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Notre petite sœur

Japon – 2014 – 2h06, de Hirokazu Koreeda, avec Haruka Ayase, Masami Nagasawa, Kaho...

Trois sœurs vivent ensemble dans une grande et vieille maison à Kamakura. À l’enterrement de leur père, qui les a abandonnées quinze années auparavant, elles font connaissance de leur demi- sœur de 14 ans et l’invitent à venir vivre avec elles... Le film est concentré sur la vie quotidienne du quatuor. On pénètre dans le huis clos, dans l’intimité de ces femmes, baignée de tenLes CARNETS du STUDIO n°339 –

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dresse mais aussi de souffrances tues. On retrouve les thèmes favoris du réalisateur : les liens familiaux, le deuil, la séparation... traités avec justesse, délicatesse et poésie. MS

P S

Phantom Boy Porco Rosso Sametka, la chenille qui danse Voir pages Jeune Public

Sangue del mio sangue

Italie/France/Suisse – 2015 – 1h45, de Marco Bellocchio,avec Roberto Herlitzka, Piergiorgio Bellocchio jr, Lidiya Liberman...

À Bobbio, en 1630, une religieuse subit l’Inquisition pour avoir poussé au suicide un moine fou d’amour pour elle. Un soldat, jumeau du suicidé, la rencontre pour lui faire avouer son geste. Il se retrouve lui aussi plongé dans les mêmes affres que son frère. À Bobbio, aujourd’hui, un inspecteur des impôts souhaite acheter le couvent devenu une prison abandonnée où s’étiole une sorte de vampire errant... Religion, politique, mœurs : Marco Bellocchio dit le fond de sa pensée et rappelle qu’il n’a rien perdu de son mordant ni de son savoir-faire. Il signe une œuvre inclassable traitée comme une somptueuse toile de maître. Sources : la-croix.com, l’express.fr

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The Lobster

USA/Grèce – 2015 – 1h58, de Yorgos Lanthimos, avec Colin Farrell, Rachel Weisz, Jessica Barden...

Dans un futur si proche qu’il ressemble beaucoup au monde que nous connaissons, il est interdit d’être célibataire... ceux et celles qui contreviennent à cette loi encourent de sérieux ennuis... Lorsque David se fait plaquer par son épouse, il est donc immédiatement emmené vers un étrange

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– Les CARNETS du STUDIO

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puisque on ne se bat pas pour dire qu’on est vivant. On dit : « On a été mort et ditesnous qu’on a été mort ». C’est une chose absolument tragique et unique dans la recherche d’identité. » Le couple formé par Ariane Ascaride et Grégoire Leprince-Ringuet semble complètement bouleversant.

hôtel, d’où il aura 45 jours pour se trouver une partenaire... Après quoi, c’est la relégation dans les bois... avec les autres Bêtes... comme on nomme ceux qui ont persisté dans le célibat... Le nom est choisi avec raison, puisqu’ils sont effectivement transformés en animaux ! La bonne nouvelle, c’est que l’on peut choisir sa réincarnation et David choisit le homard (lobster en anglais) parce qu’il peut vivre 100 ans sous l’eau... et demeurer fertile... On voit que depuis le très étrange et très dérangeant Canine, Y. Lanthimos n’a pas renoncé à son humour noir et grinçant ni à son goût des situations absurdes qu’il pousse dans leurs derniers retranchements... Le Village Voice dit que, pour une fois, l’expression « un film comme vous n’en avez jamais vu » est entièrement méritée...

Sources : lemonde.fr – blog.mediapart.fr

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Vierge sous serment Italie/Albanie – 2014 – 1h27, de Laura Bispuri, avec Alba Rohrwacher, Flonja Kodheli…

Hana a grandi dans un petit village de montagne d’Albanie où la condition des femmes est rude. Afin d’échapper à la tutelle patriarcale, elle décide de suivre une tradition ancestrale qui lui permet de vivre comme un homme, en contrepartie du ser-

ment de rester vierge. Hana est alors autorisée à porter un nom et des vêtements masculins, à se joindre aux conversations des hommes… tandis qu’elle voit les autres femmes vivre leur sexualité. Après Blondina (2010), en adaptant librement un roman d’Elvira Dones, Laura Bispuri dresse le parcours d’une jeune femme en quête de sa liberté comme de son identité, voire de sa féminité. Sélectionné en Compétition officielle au Festival de Berlin 2015, Vierge sous serment a été primé au Festival de Tribeca. Sources : dossier de presse, telerama.fr.

Le Voyage de Tom Pouce Voir pages Jeune Public

Sources : thevillagevoice.com, abusdecine.com

Mardi 17 novembre

Une histoire de fou

France – 2015 – 2h14, de Robert Guégiguian, avec Simon Abkarian, Ariane Ascaride, Grégoire Leprince Ringuet, Robinson Stevenin…

Le film commence par le procès en 1921, à Berlin, de Soghomomon Tehlirian qui tua d’une balle dans la tête le ministre de l’intérieur du gouvernement turc, l’un des ordonnateurs du génocide de 1915. 60 ans plus tard, Aram, une jeune Marseillais, membre de l’Armée de Libération de l’Arménie, fait sauter à Paris la voiture de l’ambassadeur turc. Gilles, un jeune cycliste est gravement blessé… Anouch, la mère d’Aram, vient voir Gilles qui a perdu l’usage de ses jambes pour lui demander pardon au nom du peuple arménien… À travers ce film, scindé en deux époques, Guédiguian n’a voulu faire ni une fresque ni une épopée ni une leçon d’histoire. Il retrouve le ton de L’Armée du crime (2009), son film sur le groupe Manouchian, pour entretenir « une discussion passionnée et souvent passionnante sur le souvenir et la vengeance, la justice et le pardon. » Et sur l’Arménité : « C’est un paradoxe absolu,

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Une soirée, deux films PARTENARIAT CINÉMATHÈQUE/STUDIO

19h30- Daratt saison sèche (2006) Tchad France Couleurs 1h35.

Centenaire de la Grande guerre

Lundi 2 novembre - 19h30

21h30- Un homme qui crie (2010) Tchad Couleurs 1h30

Les Croix de bois de Raymond Bernard (1931) France Noir et blanc 1h50 avec Pierre Blanchar, Antonin Artaud et Charles Vanel.

Lundi 23 novembre - 19h30 Cycle Nouvelle vague & Avant-garde

Lundi 9 novembre - 19h30

Les Sentiers de la gloire (1958) USA Noir et blanc, 1h26,

Prima della Rivoluzione de Bernardo Bertolucci (1964) Italie Noir et blanc1h55 avec Adriana Asti, Morando Morandini, Francesco Barilli

avec Kirk Douglas, Adolphe Menjou

Soirée présentée par Louis D’Orazio

Lundi 16 novembre - 19h30

Lundi 30 novembre

PARTENARIAT CINÉMATHÈQUE/STUDIO Dans le cadre du Festival Plume d’Afrique Hommage à Mahamat-Saleh Haroun en sa présence

Une soirée, deux films

19h30- Trains étroitement surveillés

Abouna

21h30- Alouettes, le fil à la patte

France Tchad (2003) Couleurs 1h20

de Jiri Menzel (1966) Tchécoslovaquie Noir et blanc 1h32

de Jiri Menzel (1969) Tchécoslovaquie Couleurs 1h35

Programme détaillé dans le dépliant disponible à l'accueil et sur www.cinematheque.tours.fr

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Tout public à partir de 8 ans

JEUNE PUBLIC

JEUNE PUBLIC

France/Belgique – 2015 – 1h24, de Jean-Loup Felicioli et Alain Gagnol, avec les voix de Édouard Baer, Jean-Pierre Marielle, Audrey Tautou…

Un mystérieux gangster défiguré blesse Alex, un inspecteur de police lancé à ses trousses. À l’hôpital, Alex se lie d’amitié avec Léo, un jeune garçon de onze ans qui possède la faculté de sortir de son corps. Invisible de tous, il s’envole et passe à travers les murs…

Tout public à partir de 8 ans

Japon – 1992 – 1h33, film d’animation de Hayao Miyazaki.

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Mercredi 28 après la projection : atelier exceptionnel de grattage sur pellicule avec un professionnel de l’animation (à partir de 8 ans - durée : 2 h). Inscription obligatoire par mail auprès de Jérémie: monmarche@studiocine.com

Tout public à partir de 9 ans

Voir page 8 Dans l’entre-deux-guerres quelque part en Italie, le pilote Marco, aventurier solitaire, vit dans un repaire qu’il s’est trouvé sur une île déserte de l’Adriatique. À bord de son splendide hydravion rouge, il vient en aide aux personnes en difficulté… À partir de 5 ans

France/Belgique/Canada – 2015 – 1h30, film d’animation de F. Ekinci et C. Desmares, avec les voix de M. Cotillard, J. Rochefort, P. Katerine.

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• Une princesse qui ne riait pas • Le Pêcheur Marsicek • Le Voyage de Tom Pouce

Un programme qui fera voyager toute la famille.

République tchèque – 2015 – 54 mn, trois courts métrages d’animation de divers réalisateurs.

Petit Corbeau est de retour ! Pour aider ses amis de la forêt à reconstituer le stock de nourriture qu’il a lui-même détruit accidentellement, il veut gagner les cent pièces d’or du Grand prix de la course dans la forêt. Pas si facile, même pour un champion comme lui...

Allemagne – 2015 – 1h13, film d’animation de Ute von MunchowPohl et Jesse Sandor. À partir de 4 ans

MUNE, le gardien de la Lune France – 2015 – 1h26, film d’animation de Benoît Philippon et Alexandre Heboyan.

République tchèque – 2015 – 39 mn, deux courts métrages d’animation de Zdenek Miler.

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n°339 •

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sans paroles

Deux histoires de rencontres, d’amitié et de danses enchantées dans l’univers drôle, poétique et coloré de Zdenek Miler, le père de la Petite Taupe, de Poupi et du Criquet.

À partir de 3 ans

Tout public à partir de 8 ans

France – 2015 – 1h22, film d’animation de Simon Rouby

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1916… Un petit Africain de l’Ouest part à la recherche de son frère disparu. Sa quête va le mener au-delà des mers, jusqu’aux lignes de front de la Grande Guerre…

L’histoire fantastique et poétique de trois personnages que tout oppose : le gardien du Soleil, le gardien de la Lune et la fragile Cire… Tout public à partir de 7 ans

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Tigres à la queue leu leu La Petite pousse One, two, tree Neige

Un magnifique conte hivernal et trois histoires charmantes et insolites…

France – 2015 – 51 mn, quatre courts métrages d’animation de divers réalisateurs

À partir de 5 ans

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FILM DU MOIS

Le Fils de Saül Hongrie – 2015 – 1h47, de László Nemes, avec Géza Röhrig, Levente Molnár, Urs Rechn...

1944, Auschwitz-Birkenau au sein du Sonderkommando, un groupe formé de déportés choisis par les SS pour accompagner les arrivants, les faire se déshabiller, entrer dans les chambres à gaz, puis extraire les cadavres, les brûler et nettoyer les lieux avant l’arrivée d’un autre convoi... Le temps de leur mission, ces hommes bénéficient d’un relatif traitement de faveur mais ils sont éliminés et remplacés rapidement car il ne doit rester aucune trace de l’extermination. Saül en est un des membres. Un jour, dans un des crématoriums, il découvre, au milieu des morts, un jeune garçon qu’il dit être son fils. Saül va se battre pour sauver le corps des flammes et lui offrir une digne sépulture. Événement du dernier festival de Cannes où il a reçu le Grand prix, Le Fils de Saül est un véritable choc, émotionnel et esthétique. Les qualificatifs se bousculent pour décrire les sensations ressenties à sa vision, on en sort secoué, un peu hébété, assez littéralement tourneboulé. László Nemes nous embarque dans un périple où l’on ne lâche jamais Saül d’un pas. C’est secouant, rude ; la description du fonctionnement du camp est très

concrète mais tout en gardant une certaine distance, « Je ne voulais pas héroïser qui que ce soit, pas choisir le point de vue du survivant, mais pas non plus tout montrer, trop montrer de cette usine de mort », dit le réalisateur. Expérience visuelle très impressionnante, le film est aussi un incroyable voyage sonore expliqué ainsi, « Il faut rendre compte de l’atmosphère sonore de cette usine des enfers, avec de multiples tâches, des ordres, des cris et tant de langues qui se croisent, entre l’allemand des SS, les langues multiples des prisonniers, dont le yiddish, et celles des victimes qui viennent de toute l’Europe. Le son peut se superposer à l’image, parfois aussi prendre sa place, puisque certaines manquent et doivent manquer. » C’est un écrivain et poète hongrois, Géza Röhrig, qui incarne Saül. L’accompagner dans son voyage c’est vivre un moment de cinéma qui marquera cette fin d’année 2015, mais c’est aussi se rappeler Bertolt Brecht, ne pas oublier et se dire, encore et toujours : « Il est encore fécond le ventre d’où a surgi la bête immonde. » Un de ces films dont l’empreinte se tatoue en vous. JF

LES CARNETS DU STUDIO – n° 339 novembre 2015 – 2 rue des Ursulines, 37000 TOURS - CPPAP n°0219 K 84305

www.studiocine.com – 08 92 68 37 01


Bande annonce

Ici… ` L’HÉRITIER Melville était de ces réalisateurs qui avaient un flair incroyable pour choisir leurs interprètes et leur donner des partitions inhabituelles pour eux : ce fut le cas pour Lino Ventura dans L’Armée des ombres, Bourvil dans Le Cercle rouge, et Belmondo dans Léon Morin prêtre. Le Zébulon du cinéma français y est à la fois d’un charme, d’une douceur et d’une intensité incroyables ! On comprend qu’Emmanuelle Riva/Barny ait du mal à résister à la tentation. Pour sa nouvelle adaptation du roman de Béatrix Beck, Nicolas Boukhrief a choisi Romain Duris, comédien au vaste registre d’interprétation également. Dans le rôle de Barny, la jeune veuve en plein questionnement spirituel, Marina Vacth révélée par François Ozon dans Jeune et jolie.

et ailleurs… ` LA VIE ET RIEN D’AUTRE ? François Ozon enchaîne les projets qui ne se ressemblent pas ! Après avoir proposé son ressenti sur la question du genre avec Une nouvelle amie grâce aux subtiles interprétations de Romain Duris et d’Anaïs Demoustier, il s’intéresse maintenant à l’après-Première Guerre mondiale : Frantz mettra en scène la rencontre d’une jeune Allemande venant tous les jours se recueillir sur la tombe de son fiancé mort au combat, avec Adrien, un jeune Français fleurissant lui aussi cette tombe, pour des raisons mystérieuses. La présence de cet « ennemi » dans cette petite ville allemande va forcément avoir quelques conséquences. Le décidément très couru Pierre Niney incarnera Adrien ; ses partenaires seront allemands. ` ISABELLE HYPER La grande Isabelle Huppert n’est pas du genre à se reposer sur ses lauriers, bien au contraire elle continue insatiablement à explorer tous les territoires du septième art. Souvenirs de Bavo Defurne l’entraînera au Luxembourg, où elle se glissera dans la peau d’une ouvrière travaillant dans une fabrique de pâté. Un jeune homme, amoureux d’elle (interprété par le prometteur Kévin Azaïs, découvert dans Les Combattants) va comprendre que, dans les années 70, elle a été chanteuse et est arrivée à la deuxième place derrière Abba au concours de l’Eurovision. Et si cette rencontre était le coup de pouce du destin pour lui permettre de faire son retour sur scène ! ` L’ÉPOUX DE CLAIRE Tremblez Rohmerolâtres : Le Beau mariage d’Éric Rohmer a, visiblement, tant emballé un jeune réalisateur américain, Dori Oskowit, qu’il s’est lancé dans son adaptation ! Le film s’appellera Claire. Jena Malone devrait reprendre la partition de Béatrice Romand, tandis que celle d’André Dussolier devrait l’être par Alex Karpovsky ; mais est-ce raisonnable d’imaginer qui que soit pour succéder à la sémillante et inoxydable Arielle Dombasle ? IG

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Les migrants en France... et à Tours, entre accueil et rejet C

haque année environ 60 000 étrangers non européens arrivent en France pour y solliciter l’asile. À ce nombre s’ajoutent les 24 000 personnes que le gouvernement s’est engagé à accueillir sur deux ans. Mais cet effort, minime au regard des besoins de protection, ne concerne que ceux qui viennent de Syrie, d’Irak, d’Érythrée et du Soudan. On les désigne comme des « réfugiés » sans attendre les résultats des procédures d’asile. Au terme d’une instruction éclair de leur dossier, ils obtiendront leur statut de réfugiés, le droit de travailler et les droits économiques et sociaux qui s’y attachent, conformément aux valeurs de protection des persécutés dont la France s’honore. Pour eux, tout va aller vite et finir bien. Mais pour eux seulement. Qu’advient-il des autres, des demandeurs d’asile à qui ne seront épargnés ni les démarches longues de plusieurs années, ni

les défaillances du système d’accueil – avec les campements spontanés, à Calais, à Paris et à Tours. Beaucoup, privés d’accompagnement social et juridique, se voient refuser le bénéfice d’une protection par la France. 70 % des demandeurs d’asile – plus encore s’ils viennent de pays que des décisions politiques arbitraires cataloguent comme pays « sûrs » – sont déboutés de leur demande de protection, se voient alors privés de tout hébergement et de toute aide matérielle. Ce système injuste du non asile n’est qu’une fabrique de sans papiers, expulsables à tout moment du territoire. Face à la politique officielle qui prive les exilés déboutés du droit de vivre parmi nous, se dressent les citoyens qui luttent au quotidien pour maintenir dans notre pays, contre vents et marées, et en marge des manipulations médiatiques, un accueil solidaire digne et respectueux des personnes. RESF 37 (Réseau Éducation sans frontières)

NOUS EN REPARLERONS PROCHAINEMENT…

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Rencontre avec Mahmoud Fkir

Interférences Le Tout nouveau Testament Les Chansons que mes frères…

Rencontre avec Mahmoud Fkir

Mhmoud Fkir aux Studio © Nicole Joulin

Much Loved Vendredi 18 septembre 2015 Le vendredi 18 septembre, après la séance de 19h45, Mahmoud Fkir est venu rencontrer les spectateurs du passionnant film Much Loved pour donner un éclairage militant sur le film de Nabil Ayouch, interdit de projection au Maroc, pour « outrage grave à la femme marocaine et à l’image du Maroc » alors même que la commission de censure ne l’avait pas encore vu.

AUTOUR DE NOHA, RANDA, SOUKAINA ET HLIMA

M

ahmoud Fkir a précisé de prime abord qu’il n’était ni spécialiste de cinéma, ni de Nabil Ayouch mais qu’il se proposait de donner son point de vue de militant associatif. Première affirmation : bien qu’elle soit niée par le pouvoir, sujet donc d’aucun débat, la prostitution est une réalité, non seulement dans le Marrakech by night que montre Ayouch mais partout, dans toutes les classes de la société marocaine, dans les villages… Le réalisateur a mené plus de 200 entretiens avec des prostituées de Marrakech. Cette prostitution est la résultante d’une situation économico-sociale. Les média relèvent les progrès du PIB (4 % de croissance, 9 % de chômage) dans une démocratie en construction mais cette augmentation des richesses ne veut pas dire leur juste répartition. Une hausse du PIB ne veut pas dire que le peuple vit mieux. Les richesses sont détenues essentiellement par la famille royale, par quelques grandes familles marocaines et par les banques… françaises. Le SMIC est à 228 € pour 44 h hebdomadaires. Le Maroc est un des rares pays à ne pas avoir signé les traités internationaux sur le droit syndical. L’indice de développement de l’ONU le place au 129e rang sur 187

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(Algérie 93e – Tunisie 90e). L’éducation est un échec avec 10 millions d’analphabètes (dont 54 % de femmes). Il n’y a que 46 médecins pour 100 000 habitants. Pendant le printemps arabe, il y a eu des millions de manifestants mais les médias marocains n’en ont pas parlé et ceux de France ont eu un silence complice. Est-ce que la société marocaine est schizophrène ou amnésique ? La prostitution n’existe pas. Ni la sexualité. Ni la consommation d’alcool (131 millions de litres d’alcool y sont pourtant vendus tous les ans), ni la drogue (alors qu’elle occupe des milliers d’hectare dans le Rif). Le roi est le commandeur des croyants, descendant du prophète. La laïcité y est donc constitutionnellement impossible. En 2004, l’institution du code de la famille, une vraie avancée dans le droit des femmes, n’a pas été un cadeau royal mais le résultat de longues luttes des féministes. Mahmoud Fkir a tenu à rendre hommage au courage des actrices du film qui ont subi de nombreuses pressions et menaces. Malgré ce tableau assez sombre, la soirée s’est terminée par la mise en relief de la solidarité qui unit les quatre femmes de Much loved. Et par l’enthousiasme d’un spectateur pour la fin du film qu’il trouvait « belle comme du Fellini » ; sur la plage d’Agadir, face à l’océan, tous les espoirs sont encore possibles. DP

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a est la fille de Dieu. Celui-ci pourrait être le diable, tant il est malveillant, pervers et violent. Interprété par un Benoît Poelvoorde très à l’aise dans la malignité, accompagné par Yolande Moreau, sublime en femme soumise, aux yeux d’une insondable vacuité. Donc, ils ont une fille, adolescente, juge et rebelle, qui cherche à réparer les méfaits du père et à quitter leur paradis claquemuré. Pénétrant par effraction dans le saint des saints, c’est-à-dire le bureau-prison de Dieu le père, Ea parvient à modifier le cours des choses chez les humains. En trafiquant son ordinateur, elle réussit à prévenir tous les possesseurs de téléphone mobile, presque tout le monde, donc, de la seconde exacte de leur mort. Et puis elle s’enfuit sur terre, via le conduit occulte de la machine à laver familiale. Fou de rage après cette trahison, Dieu la poursuit, abandonnant sa femme, alors passive, mais qui, elle aussi, fera dévier le destin des hominidés, plus tard, après moult péripéties… Tel est le début du film de Jaco van Dormael, Le Tout nouveau testament. Le synopsis en est inventif, voire délirant, la réalisation plus caduque.

Jashaun a 13 ans et ne connaît du monde que la réserve indienne de Pine Ridge, dans le Dakota du sud. Son père est mort, sa mère s’adonne avec mauvaise conscience au sport local, l’alcoolisme, son frère Johnny vit du trafic des breuvages illicites et cherche à partir à Los Angeles avec sa petite amie. D’autres frères ou sœurs, 25 peut-être, plus ou moins assumés, via la mère ou le père, croupissent en prison ou s’enthousiasment pour la mécanique automobile, entre autres. Depuis Sitting Bull, c’est la septième génération, celle qui doit porter le flambeau de l’identité indienne. Nulle rébellion pourtant dans le regard de Jashaun, empreint de bienveillance et d’amour pour ceux avec lesquels elle vit, sa

mère et son frère Johnny. Dans ces paysages magnifiques, la vie peut être à la fois sublime et désespérante. Sublime parce que dans la nature sauvage, on est libre, libre de parcourir l’espace à dos de chevaux indomptés, ou de participer à des rodéos, rapidement éjecté par les taureaux furieux ; désespérante parce que rien ne se passe, tout est sclérosé. Même si les rituels, chants, danses et costumes, se transmettent toujours, grâce aux anciens, la violence, l’alcoolisme se propagent tout autant, grâce à la contrebande et à la répression policière… Chloé Zhao, réalisatrice chinoise de ce film, Les chansons que mes frères m’ont apprises, a passé quatre années en immersion totale à Pine Ridge, sans idée préconçue sur l’histoire à raconter. Cela donne une balade poétique et pointilliste dans un univers poignant et attachant. • Changer le monde dès la fiction originelle, telle est la mission brouillonne que se donne Ea, la fille de Dieu. Comme si la connaissance du terme de l’existence pouvait améliorer le sort humain, mythe de la caverne platonicienne revisité. Sa rêveuse de mère va plus loin, en choisissant d’éradiquer le mal, mais dans une approche carrément mièvre. La Création, vue par le féminin, ce n’est guère plus pertinent que la proposition de Dieu le père… dans le film ! • Accepter le monde, tel qu’il est dans cette réserve indienne, Jashaun amène son frère à faire ce choix, parce que leurs racines sont là et que l’amour, ailleurs, ne suffirait pas. Sagesse immémoriale de cette adolescente, qui sait composer avec une vie difficile et, peut-être, en grandissant, la transformer… Deux films que tout oppose apparemment, mais dont le cheminement se fait à travers le regard de deux jeunes filles sur ceux qui les ont engendrées… CP

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Les rédacteurs ont vu :

YOUTH de Paolo Sorrentino

Déjà le plaisir de retrouver des acteurs exceptionnels, Harvey Keitel et Michael Caine en tête, mais aussi Rachel Weisz, Paul Dano, Jane Fonda ou même l’interprète de l’inénarrable, monstrueux et virtuose Diego Maradona… Outre de très belles idées de cinéma (le concert des vaches, le magasin de coucous en hommage au Limier de Mankiewicz, avec le même Michael Caine, etc.) on trouve tout dans ce film : intelligence, humour, émotion et une science du tempo très sûre. Combien de metteurs en scène ne savent pas couper un plan, arrêter une scène au moment juste ! On ne dira jamais assez à quel point la qualité d’un film se joue aussi au montage. Youth en est la brillante illustration. AW Sous le regard d’entomologiste de Sorrentino s’agite la faune d’un luxueux microcosme helvète. Au-delà de la grande maîtrise formelle et de la beauté des plans, j’ai aimé les envolées oniriques : les très hautes eaux de la place Saint Marc, le concerto pour rumeurs champêtres et la magnifique scène de jonglage avec une balle de tennis du cétacéen sosie du Pibe de oro. DP

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Au-delà d’une très belle photo, ennui et intérêt alternent sans ouvrir sur une réelle satisfaction cinématographique. Toutefois, ce microcosme glaçant est émaillé de multiples clins d’oeil proposés par Sorrentino, plus ou moins réjouissants, au-delà de l’artifice. L’incarnation du compositeur retraité, Fred Ballinger, par Michael Caine rejoint la réalité lorsque l’on sait que celui-ci a été également anobli par Elisabeth II (en 2000). RS

Qu’as-tu fait de tes talents ? tel est pourrait être le titre de ce film, qui s’articule autour d’une réflexion plus ou moins drôle ou cynique sur la vieillesse de deux hommes, célèbres dans le monde des arts. Les deux acteurs portent le film, mais le réalisateur est loin de l’onirisme de Tarkovski et de la profondeur intellectuelle d’Hermann Hesse dans le curiste. Bref, on s’ennuie ! CP On se laisse, peu à peu, gagner par une espèce de langueur (ce qui ne veut pas dire ennui, ni apathie) : sans doute les vertus du cocktail air pur-massages-

balnéothérapie, état qui nous permet de parcourir, sans a priori, les divers sentiers que nous propose de suivre Sorrentino : parfois l’excursion en valait la peine, comme lorsque l’on assiste aux échanges entre Fred et Mick (Caine et Keitel plus qu’excellents), parfois on ne saisit pas bien le but de l’escapade comme celle, bruyante, avec Paloma Faith. Mais au bout du compte, on se dit que ce voyage (intérieur) en valait la peine. IG C’est exactement ce que j’ai ressenti et exactement ce que j’ai tenté d’écrire. Mais comme Jean-Baptiste Morain dans Les Inrockuptibles l’a déjà bien mieux fait que moi, autant le citer. « Mick et Fred se glorifient d’avoir pondu des œuvres populaires et immortelles... Hélas, la grande scène finale – censée nous révéler enfin, dans son apothéose, tout le génie de Fred – accouche pour le spectateur d’une souris bien maigrichonne, une pièce musicale horriblement emphatique, surgonflée avec des violons lacrymaux. Une métaphore du film ? » Ma réponse est oui, cent fois oui. JF

Assez inégal, pas toujours très bien « boulonné », Youth recèle pourtant de vrais beaux moments de cinéma... on peut tout de même regretter que P. Sorrentino fasse un peu trop l’artiste... il est meilleur quand il fait simplement confiance à ses personnages et ses acteurs, souvent excellents ici... ER Deux artistes vieillissants et narcissiques – un réalisateur et un musicien – devisent dans le cadre somptueux d’un palace. Certes Harvey Keitel est aussi touchant que Michael Caine remarquable ; l’image magnifique offre entre autres des plans de la montagne suisse d’une beauté à couper le souffle ; la mise en scène est d’une telle élégance qu’elle semble presque trop soignée… Et pourtant, je ne me suis pas sentie concernée. Entre les postures nombrilistes des uns et des autres, les apparitions surréalistes de Maradona, Hitler ou miss Univers, le tout s’enchaînant comme des saynètes sans lien les unes avec les autres, je me demande encore ce que Sorrentino a voulu nous dire. Jusqu’à l’ultime séquence du concert, larmoyante voire grotesque. SB Les CARNETS du STUDIO n°339 –

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Rencontre avec Louis Garrel

Rencontre avec Louis Garrel Les Deux amis Mardi 8 septembre 2015

Quelle belle soirée nous avons passée ce mardi 8 septembre 2015 ! La salle du Studio 7 était pleine à craquer. Nous étions dans l’attente de découvrir en avant première Les Deux amis, premier long métrage de Louis Garrel.

On fait un film comme on raconte une histoire... Louis Garrel aux Studio © Nicole Joulin

O

n peut en résumer l’histoire ainsi : Clément (alias Vincent Macaigne) est amoureux de Mona (alias Golshifteh Farahani) qui se montre insaisissable, se dérobant à ses avances. Alors Clément fait appel à son ami Abel (alias Louis Garrel) pour conquérir la jeune femme... La réalisation des Deux amis, fait suite à deux courts : Mes copains (en 2008), La Règle de trois (Prix Jean Vigo 2012) et un moyen métrage Petit tailleur (en 2010). Au début de la rencontre, Louis Garrel se dit très impressionné par le chiffre de plus de 350 000 spectateurs par an aux Studio : Vous

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êtes très nombreux alors qu’au théâtre, on joue souvent devant une salle vide aux deux tiers. L’argument de départ des Deux amis, c’est la pièce de Musset, Les Caprices de Marianne, qui elle-même a inspiré le très beau film de Jean Renoir, La Règle du jeu. Louis Garrel a repris le thème du ménage à trois. Alors que dans ses précédents courts métrages il était question de camaraderie, ici c’est une relation entre amis avec tout ce que ça entraîne de sentiments de possessivité, de fusion, de trahison et de culpabilité.

Dès le début du film, on sait que Mona est en prison. On sait dans quelle galère elle se trouve alors que les deux garçons l’ignorent, ce qui fait qu’ils imaginent des choses terribles. Ils vont vivre comme des adolescents, des Pieds Nickelés. Le fait que l’on sache tout crée un effet, un intérêt dramatique. Les deux garçons vivent en interdépendance. Ils sont toujours ensemble ; quand il est question de rupture, ils sont charmants mais aussi pathétiques. C’est comme s’ils étaient toujours ados, qu’ils n’avaient toujours pas fini de grandir. Ils vivent une amitié amoureuse, sans sexualité. Ils n’arrêtent pas de se courir après. Ils sont ridicules car l’un comme l’autre n’ont pas de souffle. C’est comme dans une figure de BD. Ils courent pour échapper à la culpabilité mais dans un registre burlesque, hybride. L’un essaie de stopper la course de l’autre en renversant des poubelles sur son passage mais il ne réussit pas. C’est un plan ringard, comme dans nos séries B françaises. J’aime les films variété de seconde zone. Les deux amis est un film d’amour, vécu, montré en dehors de la crise. Le cinéma raconte le monde mais Louis Garrel avait envie de faire un film plaisant avec ce qui lui plaît le plus : l’amour. Le geste de faire un film est un geste primitif. Louis Garrel sait s’entourer dans son travail. Il a construit le scénario avec Christophe Honoré, dont on peut dire qu’il est l’acteur fétiche. Quant à la scène où Mona danse avec des gestes bizarres, il a fait appel à une chorégraphe et un jeune musicien pour créer une musique forte, un rock agressif. Le résultat est que les spectateurs adorent cette scène ! Une autre scène a frappé l’esprit du spectateur : celle de l’église, dans un registre tendu. Louis Garrel avoue : J’aime les églises, le silence. Je me détends. Je suis comme pris en charge.

Je me suis dit que pour tenir les spectateurs, il faut qu’on ne sache jamais à quoi s’attendre. Il y a le silence. Des personnes très croyantes qui prient. Abel et Mona ont une voisine toute proche qui se recueille. En entendant la conversation décalée du couple, elle se lève et part... Les spectateurs rient. Philippe Sarde, qui n’est pas moderne, a renforcé l’esprit naïf par ses mélodies. Quand on fait un film, on le fait avec plein de films, et là c’est avec une esthétique démodée. Vincent Macaigne avait une idée forte du film. Il a un jeu complet d’acteur. Il est tragicomique. Il sait être décalé et très à vif. Il y a peu ou pas d’improvisation pour que les dialogues soient rythmés. Louis Garrel est réalisateur et acteur à la fois. C’est plus de travail mais il y a de la concentration d’équipe qui donne une cohésion. L’envie de passer derrière la caméra vient du théâtre. Louis Garrel a assisté à de nombreuses répétitions avec un metteur en scène quand, jeune, il accompagnait sa mère. C’est la mise en scène qui l’attirait, au Conservatoire aussi. J’ai toujours eu envie d’aiguiller les acteurs sur un chemin. Quand je suis l’acteur, je sais ce qu’il faut faire car j’ai une approche scolaire. Je répète mon texte, je le connais bien car j’ai tellement répété... Personne ne m’aiguille vraiment, parfois la scripte, parfois Vincent, personne vraiment. Pour clore la soirée, une spectatrice a tenu à remercier les Studio qui rendent plus accessibles les acteurs ou les réalisateurs et offrent un lieu pour le faire. Ainsi, l’image de Louis Garrel, grand ténébreux, bobo, romantique, s’est brisée ce soir-là pour faire place à celle d’un homme simple, nature, plein d’humour aussi envers lui-même. C’est avec un grand plaisir que nous le reverrons à l’occasion de la sortie de son prochain film sous la direction de Nicole Garcia. MS

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À propos de Les Deux amis

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on dernier court métrage s’appelait La Règle de trois et pour son premier long, Les Deux amis, Louis Garrel l’applique à nouveau : le même trio d’acteurs (Golshifteh Farahani, Vincent Macaigne et luimême), le même dispositif (deux amis avec une femme entre eux) et un récit qui se déroule en trois jours et trois nuits et qui s’achève à l’hôtel des Trois Saisons. A partir d’un argument classique qu’il avait expérimenté, ado, au théâtre (chez Marivaux), Louis Garrel nous surprend avec cette comédie atypique qui sait être drôle et émouvante et qui nous entraîne du côté de la tradition d’un cinéma français qu’on n’attendait pas chez lui (César et Rosalie, Jules et Jim). L’excellente idée scénaristique est de nous mettre d’emblée (une magnifique première scène où elle se douche avant de découvrir, le plan s’élargissant, dans le cadre d’un établissement pénitentiaire) du côté de Mona, de son secret que les deux amis ne découvriront que sur beaucoup plus tard et qui donne au spectateur un temps d’avance sur eux. La de nouveau radieuse actrice d’origine iranienne expliquait que, en général, pour toute actrice, la nudité se joue du côté de la séduction et que, pour elle, c’était toujours du côté de la politique. Le réalisateur

À propos de Django

a voulu la regarder autrement, la débarrasser du poids d’être la représentante de la femme orientale. D’être sans cesse ramenée à ses origines. À l’Iran qu’elle a quitté depuis plus de six ans. Ainsi, du passé de Mona, nous ne saurons rien. Ni pour quelle raison elle est en prison. Sans en avoir l’air, le film est le récit d’une évasion. Hors des strictes contraintes horaires de la mise à l’épreuve pénitentiaire. Hors d’une amitié qui finit par devenir sclérosante. Fusionnels, Clément et Abel le sont depuis toujours, depuis une enfance qu’ils n’arrivent pas vraiment à quitter. «Lointains héritiers de Laurel et Hardy » comme les qualifie le réalisateur, ils forment un improbable duo de clowns pas vraiment drôles, pas très gais non plus (en plus réussi de ce qu’avait essayé de mettre en place Xavier Beauvois dans La Rançon de la gloire avec le duo Poelvoorde-Zem). Une amitié adolescente qui se met au péril du désir pour la délicieuse Mona, au risque du mensonge et du chantage. Avec pas mal d’autodérision, sans en avoir l’air et à partir d’une situation assez classique (le trio amoureux), Louis Garrel invente une figure assez inédite, peu présente en tout cas dans les films ou dans les romans, celle de la rupture, non pas amoureuse, mais amicale. DP

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lus boueux, plus pouilleux, plus inhospitalier ça existe peut-être mais faut bien chercher. Le bled pourri qui sert de cadre au Django de Sergio Corbucci semble sorti tout droit d’un cauchemar de psychopathe sous LSD. On s’enfonce dans le film, la vase, la pluie et le drame mais avec quelle délectation ! D’un côté le pistolero infaillible, Django — Franco Nero, hallucinant sosie de Terence Hill — mâchoire carrée, regard bleu magnétique, visage impassible, gestes rares et paroles définitives. De l’autre l’infâme, raciste, machiste, bigot fanatique, sadique assumé major Jackson, lippe dédaigneuse, rictus cruel, regard torve. Les autres personnages sont eux aussi bien en place : le cabaretier pittoresque, l’indispensable gourdasse blonde choucroutée, les Mexicains luisants, rigolards et débraillés, sans oublier la bande de méchants à têtes de bouledogues caractériels qui n’attendent qu’un froncement de sourcils de notre héros pour s’abattre morts avec de grands moulinets de bras. Ils sont venus, ils sont tous là.

Quel ravissement de (re)voir ce Django inspiré qui inspirera celui du grand Tarantino, où Mexicains et Texans pratiquent un italien que ne désavouerait pas un aristocrate florentin, de savourer avec gourmandise outrances, clins d’œil et approximations désinvoltes. Ainsi dans une embuscade qui va bien faire dans les trente morts — 10 %

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du total ? — on entrevoit le haut du crâne d’un technicien traverser incongrument le champ. Mieux encore : le major arrive en ville accompagné de deux acolytes. Ils descendent de cheval et, miracle de la parthénogénèse, les deux sont à présent cinq. Dans la séquence suivante ils sont six, puis à nouveau cinq. De toute façon deux, cinq ou six peu importe, ils se feront tous massacrer par un Django au meilleur de sa forme bien que très légèrement diminué par une quasi noyade dans la vase, un très féroce passage à tabac et un esquintage en règle de ses deux mains à coups de crosse et de piétinement de chevaux, au point qu’il n’est même plus capable de tenir un revolver dans ses moignons sanguinolents. Il en faut quand même un petit peu plus pour l’empêcher d’atomiser les six hommes armés, sans stress et sans être lui-même ne serait-ce qu’égratigné. Merci au festival À Tours de bulles de nous avoir offert ce bijou de western spaghetti en ouverture de son programme. Merci également de nous avoir permis de découvrir un jeune créateur, Mickaël Paris, dont le courtmétrage Spawn – The Recall, inspiré de la BD de Todd McFarlane, révèle un talent extrêmement prometteur. La soirée s’est terminée autour de savoureux petits plats préparés par AIR et de bulles… d’un autre genre. AW

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es restaurations de films d’un passé plus ou moins lointain et l’opportunité de les (re)voir sur grand écran réservent des surprises. Si la copie magnifique de Rocco et ses frères vue au mois d’août permet de confirmer l’ampleur et la magnificence de l’œuvre de Luchino Visconti, d’autres ressorties sont plus surprenantes. Ainsi la résurrection d’un film un peu oublié de Robert Aldrich, La Cité des Dangers (dont le titre original, Hustle, évoque autant la bousculade que l’escroquerie et le fait de faire le trottoir) Los Angeles, 1975. Phil est flic et vit le plus naturellement du monde avec Nicole, une prostituée. Quand elle n’est pas dans les lits de certains de ses clients (dont Phil connaît un grand nombre), elle tient, avec les autres, des conversations érotiques au téléphone, en général à l’heure de l’apéro, tout en sirotant un whisky avec le flic de son cœur. Les rapports entre Phil et Nicole sont sexuels (le film ne fait pas dans la périphrase) mais aussi tendres, amoureux, complices (tel un Sésame, « Bingo » dit que l’autre a raison et termine souvent leurs dialogues) et empreints d’une immense franchise. Leurs échanges sont surprenants. Phil, d’astreinte, est appelé en urgence au travail, « Je t’aurais emmenée voir le match au

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Colisée stadium, je t’aurais exhibée dans l’allée sur un ou deux aller-retour. En regardant tous les types qui t’auraient reluquée, je me serais dit, gros balourds elle est à vendre / Comme tout le monde au Colisée. » À propos de Nancy, son ex-femme, « Elle a le don de me faire sentir coupable de l’avoir abandonnée / Mais c’est ce que tu as fait / C’est pas joyeux de trouver sa femme avec les jambes nouées autour du dos d’un autre / Je suis une pute alors ça ne fait rien, mais elle, c’est ta femme, alors c’est grave ? C’est une profession vénérable, plus ancienne que la tienne et puis je t’ai fait don d’une grande partie de mes services. » Sur le métier de Nicole, « Je n’ai pas le droit de me faire des idées sur toi mais c’est ce qui arrive, je ne supporte plus la situation et ce que tu fais / Mais tu comprends que c’est ton problème, pas le mien ? » Los Angeles est montré comme un endroit parfois idyllique (la maison de Nicole à flanc de colline) mais hors de ce cocon c’est le lieu de toutes les turpitudes. Les flics y sont violents et on y croise, entre autres, des assassins, des violeurs, des avocats véreux particulièrement corrompus, des propriétaires de bars à strip-tease proxénètes. On y rencontre aussi un fétichiste des chaussures, un tueur en série extrêmement dangereux inexplicablement relâché de prison, un

homme qui a découpé son petit ami en morceaux et qui ne peut s’empêcher de rire (« On pense qu’il a avalé un vibromasseur » dit l’agent de police qui l’escorte). Peu de second degré dans La Cité des dangers, on y parle clair, cru. Le cadavre d’une jeune fille révèle que « Elle avait du sperme en elle, partout, dans tous les trous. » Un collègue de Phil est encore au travail, « Tu n’es pas encore parti à la chasse ? / Le gibier commence à manquer / Garçons ou filles ? / Ce que je trouve. » D’une très grande noirceur, le film est une plongée dans le monde du trouble, les limites entre le bien et le mal, entre la légalité et l’illégalité sont très floues jusqu’à se brouiller totalement à la fin. « Parfois on ne distingue pas bien les chrétiens des lions » dit Phil. Mais il ne faut pas croire le film seulement brutal, d’une mélancolie profonde, il est beaucoup plus fin et cultivé que ce qu’il paraît. Parangon viril en apparence, Phil (Burt Reynolds, tous poils dehors) sait montrer ses faiblesses et son désarroi à Nicole, il sait aussi reconnaître ses torts, « Vous avez raison, on aurait dû la couvrir » dit-il au père qui vient de le frapper parce qu’on lui a présenté, pour identification, le corps de sa fille entièrement nu. On y a comme héros Humphrey Bogart et John Garfield, on y cite Moby Dick, « On cherche tous une baleine blanche, et quand on la trouve, la plupart du temps elle nous tue ». Tourné vers l’Europe, et pas seulement parce que Nicole est française, on y entend Charles Aznavour chanter Yesterday when I was young

et on va au cinéma voir Un homme et une femme. Le vieux monde y est considéré comme un ultime eldorado, un dernier rempart à la barbarie, un paradis perdu vers lequel les deux héros rêvent de partir, « J’ai entendu dire qu’il allait y avoir un McDonald’s sur les Champs-Elysées / Jamais. Paris se protège des hamburgers comme une forteresse. » Hum... quarante ans plus tard, la forteresse a depuis longtemps rendu les armes, le cinéma américain en aurait-il fait autant ? Car c’est assez stupéfiant de (re)voir un film tel que La Cité des dangers aujourd’hui, de (re)découvrir, dans ce qui se présente comme un polar de consommation courante, autant d’audace, de liberté de ton, de force et de beauté. Bien sûr, la qualité du film tient pour beaucoup à son réalisateur, le grand Robert Aldrich, dont on retrouve le style, l’efficacité et la profondeur, mais plus largement en se penchant sur les films de cette époque on constate combien on a perdu. Aujourd’hui peu de films américains (mais peut-être pas seulement) atteignent cette hauteur, pourtant, La Cité des dangers n’appartenait ni au cinéma dit indépendant, ni à celui d’art et essai. En le regardant une chose saute aux yeux, c’est qu’il s’adresse, réellement, à des spectateurs adultes. Ce n’est malheureusement plus guère le cas actuellement. En voulant ratisser large et en visant un public essentiellement adolescent, le cinéma américain d’aujourd’hui, du moins le plus populaire, a énormément perdu en profondeur et en intelligence. JF

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© Dominique Plumecocq

À propos de La Cité des dangers

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À propos de Cemetery of Splendour

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es lumières s’éteignent. Le film commence. Il ne se passe rien, l’écran reste vide, d’un gris incertain. Petit à petit, de très loin, sourd doucement un grondement, très atténué, d’abord à peine audible. L’écran est toujours vide. Apparaît alors le générique, minimaliste, sur fond de pelleteuse éventrant un terrain, image qui reviendra à plusieurs reprises, à l’instar de quelques autres scènes récurrentes, énigmatiques.

Jen est une femme d’âge mûr se déplaçant difficilement avec des béquilles, sa jambe droite étant plus courte de dix centimètres que la gauche. L’école dont elle fut jadis l’élève a été transformée en une sorte d’hôpital où dorment des soldats qui, parfois, se réveillent fugitivement puis se rendorment, sans qu’on sache jamais de quoi ils souffrent ni s’ils se réveilleront un jour pour de bon. Jen s’occupe bénévolement d’un de ces soldats. Une jeune médium, Keng, lit dans leurs pensées. Sa complicité avec Jen ira en s’approfondissant tout au long du film. Sur cette base scénaristique insolite s’échafaude une histoire toute simple en apparence, toute linéaire, faite essentiellement de dialogues souvent très terre à terre mais qui vont tisser un entrelacs de situations de plus en plus déconcer-

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Interférences La Belle saison Coup de chaud

tantes. Jen rencontre deux belles jeunes filles qui se prétendent déesses et lui apprennent que l’école dont elle fut, petite fille, l’élève, devenue par la suite hôpital, fut construite sur un ancien cimetière royal, recouvrant lui-même les ruines d’un palais, et que les esprits de ces morts aspirent l’énergie des soldats endormis pour continuer à se battre : les soldats ne guériront jamais. Jen ellemême se souvient de s’être souvent endormie quand elle était petite, pendant la classe… Rêve ? Folie ? Hallucination ? Et de qui : des jeunes filles ou de Jen ? Ou bien contamination du réel par le mythe ? La situation est d’autant plus indécidable que Keng, la jeune médium, fait visiter à Jen, dans le parc de l’école-hôpital, l’ancien palais : ici le seuil, il faut lever les pieds pour le franchir et baisser la tête car le plafond est bas, là le salon de musique, ici le trône de marbre rose… Keng caresse de la main le contour de ces lieux et de ces objets absents. Les textes sibyllins et les plans obscurs du cahier qu’à d’autres moments Jen parcourt en sont-ils d’une manière ou d’une autre la représentation ? Les scènes énigmatiques, toujours traitées avec le réalisme le plus dépouillé

(plans fixes, absence totale d’effets spéciaux, de dispositifs scéniques complexes), se multiplient. Décors nocturnes dont l’éclairage colorise la nuit en vert, rouge, bleu… Lampes installées à côté des lits des dormeurs, sortes de longs becs recourbés, lumineux, aux couleurs changeantes, qui confèrent à la scène une atmosphère étrange, à la fois familière et troublante… Installations de petites roues à aubes qui brassent l’eau du lac et la font gicler sans utilité visible… Chassés-croisés de promeneurs qui s’assoient sur des bancs, se lèvent, échangent leur place, s’en vont… L’image la plus mystérieuse reste cependant ce plan unique, rapide, d’une sorte de paramécie géante dans un ciel nuageux, image dérangeante parce qu’ininterprétable mais d’autant plus frappante qu’elle est absolument la seule à s’aventurer dans des confins oniriques, fantasmagoriques ou surréalistes. À un moment Jen dit : « Je crois que je rêve, je voudrais m’éveiller. » Rêvait-elle donc ? Mais de quoi ? D’hommes endormis qui rêvent ? Dans quel monde erret-elle ? Et nous spectateurs, qu’avonsnous vu jusque-là ? Le réalisme obstiné de la mise en scène ne peut logiquement nous amener à penser que ce que nous

avons eu sous les yeux tenait simplement du fantasme. Serions-nous plongés dans une version moderne de la parabole de Tchouang-tseu qui ne sait en se réveillant s’il s’est rêvé papillon ou s’il est un papillon rêvant qu’il est Tchouang-tseu ? La dernière image de Jen est celle d’une femme aux yeux exorbités, au regard fixe, qui regarde sans les voir des gamins jouer au ballon sur le terrain défoncé par la pelleteuse. Structure circulaire du film qui se termine par où il a commencé, ces excavations que Jen, sidérée, comme hypnotisée, semble découvrir ou redécouvrir. Que voit-elle au juste ? Des enfants qui jouent dans le parc de l’hôpital en chantier ? Une image de son lointain passé d’élève de l’école au moment de sa transformation en hôpital ? Une image du présent, avec des enfants en récréation, l’hôpital n’ayant jamais existé que dans son imagination ? Rien n’est sûr, la réalité s’échappe dans l’indécision de ce regard, et à travers lui c’est notre regard même qui vacille. Toutes ces scènes et ces images résistent à notre raison, à notre besoin d’orthonormer le monde. Et si c’était ça justement le cinéma, cette espèce de magique entredeux où tout est à la fois et incompréhensiblement réel et irréel ? AW

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À propos de Dheepan

À

la sortie de la salle obscure, on le sait bien, sauf unanimité finalement rarissime, on a souvent l’impression de ne pas avoir vu le même film tant les perceptions divergent, tant ce qui semble pour l’un une qualité rare devient un indépassable défaut pour l’autre… Une certaine schizophrénie semble pareillement toucher la majorité des spectateurs qui, à la fois, trouvent qu’une compétition dans le domaine artistique n’a pas beaucoup de sens, tout en regrettant que les films français ne soient pas plus souvent récompensés… Et quand ils parviennent à obtenir la récompense suprême, la Palme d’or du festival de Cannes, ils sont au coeur de violentes polémiques. Entre les murs de Laurent Cantet, en 2008, réveilla la guerre toujours plus ou moins latente entre les pédagos et les traditionalistes, entre les défenseurs de l’enfant au cœur des savoirs et les déclinistes militants. En 2013, La Vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche fut pris dans les relents nauséabonds des Manifs pour tous et déclencha une autre polémique autour des conditions de tournage, portée à la fois par une actrice vedette (avec des détails autour des scènes de sexe assez surréalistes) et par les techniciens intermittents du spectacle autour des conditions de tournage et de la rémunération

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des heures supplémentaires : on était alors assez loin de l’image glamour de la Croisette. Cette année, c’est Dheepan, le film de Jacques Audiard, qui est mis sur la sellette. Pourtant, à première vue, tout le monde s’accorde sur l’originalité du projet : après les réussites du Prophète et De rouille et d’os (son plus large succès public) personne n’attendait Audiard dans un film qui a pour point de départ une guerre de l’autre bout du monde dont on a peu entendu parler, interprété par trois non professionnels et tourné en langue tamoul. Une prise de risque reconnue par ses plus fervents détracteurs : « Sur le papier et en termes de production, l’audace est réelle : un film sur des réfugiés politiques avec deux inconnus dans les rôles principaux. »1 L’histoire de ces trois êtres que rien ne relie si ce n’est la volonté de fuir un passé terrifiant et un présent sans avenir divise aussitôt. Dans la longue et lente première partie si inattendue chez ce réalisateur qui aime l’action, on se trouve « quelque part entre les Dardenne et Ken Loach à son meilleur, le réalisateur semble se réinventer » car « tout concourt à un vrai cinéma de regard(s), inquiet et précis »2. « Tout cela est assez remarquablement enlevé, empreint de finesse et d’humour »3, « chacune de ces étapes est ici le rouage d’une mécanique dramatique puissante, qui force l’intérêt. »4 ou alors « Le lancement vériste se transforme en un sujet type Fox News. »5

« La dramaturgie du film emprunte une autoroute rectiligne, celle qui mène du faux au vrai, de la conjugalité feinte au désir amoureux, de l’opportunisme manipulateur à la haute responsabilité de chef.»6 « Dheepan ne fonctionne que par signaux et stimuli. »1 La brutale rupture de ton entre la première partie et la seconde, apocalyptique,

ainsi. »7 Ce basculement vers le cinéma de genre agace - «une parade amoureuse testiculée, grand guignol sanguinaire à gros bouillon. »5 – et permet le développement de critiques plus pointues : « L’idéologie dans le cinéma d’Audiard paraît toujours un peu accidentelle, passive, balle perdue d’un bétonnage scénaristique qui soumet tellement le sens à l’effet, la cohé-

pose problème, même à ceux qui ont aimé le film : « L’impression que le film se dérobe, au profit d’un autre, nettement plus convenu »2. « Audiard, s’il avait eu le temps pour cela, en aurait peut-être modifié le montage, un peu abrupt dans la dernière partie, mais voilà, la palme d’or a rendu toute modification impossible. Et, tout compte fait, c’est très bien

rence d’une vision à la batterie de précédés, qu’il finit par dire mais sans le vouloir, un peu n’importe quoi. »6 Dheepan, plus qu’un film, devient le symbole d’un cinéma détesté : « Le recours au cinéma de genre sur le dos de situations politiques. Dheepan (…) en est désormais l’étalon. Colportant les plus gros clichés sur les banlieues Dheepan est le parfait

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Vos critiques résultat, conscient ou non, de la « BFMisation des cerveaux »1. « Dheepan condense à la fois les principaux défauts d’un cinéma d’uber-auteur ultranarcissique et d’un formatage d’industrie lourde. Un tel paradoxe valait bien une Palme d’or. »6 Mais n’est-ce pas un contresens de demander à Audiard d’être un cinéaste politique à l’heure où le vide politique reproché au cinéma français touche l’ensemble de la société française et notamment ses partis politiques ? « On peut se demander ce que ça dit politiquement, mais ça ne m’intéresse pas énormément ». « J’ai envie de prendre la réalité pour du cinéma. »8 « Audiard est bien plus intéressé par la dimension mythologique des lieux et milieux qu’il filme que par leur description précise et minutieuse, plus proche en cela du cinéma américain que du réalisme français. Et malgré une intrigue et des personnages bien identifiés, le film revêt une dimension abstraite en harmonie avec le regard étranger que porte Dheepan et sa fausse famille sur la banlieue dans laquelle ils sont envoyés. »9 Un dépassement du réalisme social qui permet une lecture autre de la violence de la scène guerrière : « Filmée de manière lacunaire, elle prend un caractère onirique, au point qu’on pourrait presque se

demander si elle n’est pas sortie des souvenirs et des regrets de l’ancien Tigre »4. « Dheepan redevient le guerrier qu’il avait cessé d’être pour sauver Yalini, dans une séquence filmée comme un cauchemar sombre et désincarné. »9 Peut-être qu’en palmant Dheepan le jury du festival de Cannes a récompensé un réalisateur plus qu’un film (qui n’est sans doute pas son meilleur). N’est-il pas cependant un peu excessif de vouloir en faire le porte-drapeau d’un combat qui le dépasse ? « Ou les films proposent même inconsciemment la reconduction de la domination et ils appartiennent à la police. Ou les films proposent une voie pour l’émancipation, et ils deviennent politiques »1. Dans son déséquilibre, le film répond finalement à de tout autres interrogations : « Combien faut-il à un homme de mensonges, de trahisons, d’usurpations, de violences faites à luimême et à autrui, de réconciliation peutêtre aussi, pour espérer un jour, enfin pacifié, être lui-même ? »3 DP

1 Stéphane Delorme, Les Cahiers du cinéma. 2 Louis Guichard, Télérama. 3 Jacques Mendelbaum, Le Monde. 4 Thomas Sotinel, Le Monde. 5 Guillaume Tion, Libération. 6 Jean-Marc Lalanne, Les Inrocks. 7 Pascal Mérigeau, Le Nouvel Obs. 8 Interview au Monde. 9 Jean-Dominique Nuttens, Positif.

DHEEPAN, l’homme qui n’aimait pas la guerre, de Jacques Audiard • Je pense qu’il faut dépasser les critiques négatives que l’on peut lire sur ce film car c’est un récit fort et beau, remarquablement interprété. Dans un premier temps, Dheepan et sa famille fictive souhaitent avant tout la paix et cherchent à se fondre dans leur nouvel environnement. Ils doivent s’apprivoiser mutuellement et trouver leurs marques. Au fur et à mesure s’installent incompréhension et peur. Cette terre d’asile est aussi ravagée par une autre forme de violence, celle des banlieues faisant écho à celle qu’ils ont fuie. La question des réfugiés et des migrants, de leur insertion, avec tous les traumatismes liés, est plus que d’actualité. Souhaitons que la France, terre d’accueil, soit encore capable d’aider ces derniers en toute humanité, contrairement à ce que nous laisse croire Jacques Audiard à la fin de son film, de façon assez simpliste. CP YOUTH de Paolo Sorrentino • […] un vieux chef d’orchestre finit par assumer, dans une magnifique scène finale, le malentendu à l’origine de sa notoriété et par céder aux pressions de la couronne britannique. C’est de bon goût, très brillant, plein de virtuosité mais c’est tout de même un peu vain (en tout cas plus que Welles ou Kubrick). […] Pour ce qui est de l’approche sociologique des résidents évoquée par certains critiques, je crois qu’elle est nettement moins rigou-

reuse et instructive que la lecture des ouvrages du couple Pinçon / Charlot. HR • […] Michael Caine et Harvey Keitel cabotinent, mais on ne peut s’empêcher de les trouver géniaux. La mise en scène est très théâtrale, le réalisme importe peu ici, Sorrentino assume, on est en plein divertissement, et ça marche. De quoi parle-t-on dans cette fiction ? Du temps qui passe, assassin, de la fin de vie donc, des regrets (d’où le titre, Youth), mais aussi, des affres de la création artistique, du nombril des stars, Sorrentino contemple tout ça avec ironie et humour. […] JC LES MILLE ET UNE NUITS – Vol. 3 : L’ENCHANTÉ de Miguel Gomes • Avec L’Enchanté s’achève le cycle de nos rendez-vous périodiques de l’été avec un Miguel Gomes s’échinant à « filmer des fables intemporelles » tout en étant « engagé dans le présent ». Alors qu’elle craint que son pouvoir de fascination ne soit vacillant, face au pouvoir et aux turpitudes sanguinaires de son royal époux, tant ses derniers récits sont apparus inquiétants et désolants, Shéhérazade n’a plus comme seule ressource que de mêler les mythes […]. Ce troisième opus est, on le voit, marqué du signe de l’ironie et de la malice. […] Exit la crise ? Pas vraiment puisque l’on peut au même moment entendre la foule en colère entonner « Grandola villa morena » qui appelle à ce que « seul le peuple ordonne ». […] Merci à Miguel Gomes pour ce voyage tourmenté et inspiré dans le temps et dans l’espace. HR Rubrique réalisée par RS

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n°339 – novembre 2015

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