Chantier de villages anticipés, Népal

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CHANTIER DE VILLAGES ANTICIPÉS

DÉCENTRALISATION DE LA GESTION URBAINE ET PAYSAGÈRE AU NÉPAL

Colomban de Mascarel Projet de fin d’étude Enseignant: Jean Patrice Calori


RÉSUMÉ DE PROJET

CHANTIER DURABLE DE LA CONSCIENCE COLLECTIVE Abritant sur ses terres l’une des plus anciennes civilisations d’Asie, le Népal possède un patrimoine culturel inestimable et encore bien conservé malgré un séisme récent. Ces architectures qui font la fierté des Népalais, monopolisent aujourd’hui toute l’attention et deviennent, inconsciemment, un frein dans la gestion de l’étalement urbain. Le Népal n’ayant qu’une seule grande métropole urbaine autour de la ville de Katmandou ,subit une grave crise environnementale,celle-ci est aggravée par l’accroissement de la population et une pollution exponentielle. l’instabilité politique n’arrange pas ce phénomène, mais cette faiblesse a amené les habitants à s’émanciper. Les structures sociales des villes traditionnelles permettent déjà cette décentralisation politique, comme dans les zones rurales, où la préservation des sites naturels est gérée localement. Pour palier à cette ingestion territoriale, l’objectif sera de planifier un scénario de décentralisation démocratique de la gestion urbaine et paysagère de la vallée. Ma zone d’étude se dessine donc entre la ville de Patan, cadré par un gigantesque périphérique toujours en travaux, et la campagne qui s’étend jusqu’au montagnes. Cette banlieue sud qui se déploie en demi-cercle autour de la capitale offre un paysage agricole habitent par un étalement urbain informel qui se développe le long des routes radiales, reliant la ville à la campagne. Sur un rayon de cinq kilomètres environ une série de neuf villages traditionnels rythment le paysage et dessinent une toute autre urbanité, qui de par sa structure particulière permet au tissu social d’exister. Dans une stratégie d’anticipation à long terme, je proposerai de connecter ces communes par deux infrastructures, routières et piétonne qui offriont l’opportunité de penser de nouvelles densités, inscrite dans un réseau de parcs périurbains. «Il faut arrêter de penser quelle planète nous laisseront à nos enfants et se demander quels enfants nous laisseront à notre planète.» Pierre Rabhi, La sobriété heureuse Cette phrase, certe un peu naïve, résume la démarche de projet dans lequel je souhaite m’inscrire. Comme l’écologie, la politique peut être perçue sous deux angles complémentaires. Le premier, cherche à s’adapter au système en place et apporter des réponses directes et concrètes. La seconde, sur laquelle j’axe ma démarche est plus abstraite. Elle consiste à porter notre attention sur les véritables acteurs et dirigeants de demain, pour apporter une réponse durable en favorisant une révolution positive des consciences qui habitent le territoire. Pour cela, l’éducation devient le pilier du changement. Soutenue par la recherche éthique et la diffusion libre de la connaissance, les dispositifs de réponses, qu’ils soient modernistes ou vernaculaires, suivront naturellement ce processus.


STRATÉGIE CIRCULAIRE DE LA GESTION TERRITORIALE Mon projet sera de positionner stratégiquement dans le territoire un réseau de pôles administratifs et éducatifs, permettant de réunir les différents acteurs du développement de la vallée:. Après avoir repéré des entités paysagères qui structurent cette vallée fertile, l’objectif sera de penser des équipements publics, capables de générer de nouvelles communes, susceptibles elles de préserver ces mêmes structures paysagères. Chaque village deviendrait ainsi un chantier d’expérimentation urbaine et architecturale et les parcs périurbains se verront devenir le terrain de développement de nouvelles formes agricoles tels que l’agro-foresterie, afin de réparer les zones boisées et faire respirer tant bien que mal l’air de la vallée. Ces bâtiments doivent ainsi être dessinés comme de véritables espaces publics favorables à la structuration de communauté car seule une société forte peut agir de manière durable et responsable sur son environnement et seuls de véritables espaces urbains sont susceptibles de générer cette force collective consciente. Ce réseau circulaire de villages satellites sera connecté physiquement par des infrastructures, visuellement par le paysage, politiquement par les prises de décisions, économiquement par la connaissance et enfin, spirituellement par la prise de conscience commune face aux enjeux environnementaux et urbains. Afin de redonner aux individus leur rôle de médiateur dans ce processus de développement, il est essentiel que le territoire agisse comme la vitrine de ce grand projet commun, en favorisant une meilleure perception des relations entre zones urbanisées, parcs, villages et campagne. La restructuration physique et mentale du territoire permettra de s’opposer à l’étalement continue et homogène de la ville. Cette notion plus abstraite peut se matérialiser par des dispositifs architecturaux simples et autonomes, des architectures régénératrices d’écosystème culturel, entre elles, et naturel, autour d’elles. Après avoir mis en place ce projet de décentralisation, je m’attarderai à mettre en application cette stratégie de développement, sur un site que je connais bien, le plateau d’Imadol, en banlieue Sud Est de la ville de Patan Un premier exercice de composition urbaine sera appuyé d’une étude des différents tissus des villages traditionnels et modernes. Ce travail plus théorique permettra de définir une logique de réflexion dé-contextualisée puis appliquée à la densification d’une entité paysagère remarquable. Le second exercice de composition architecturale sera appuyé d’une analyse symbolique et formelle des équipements publics traditionnels, qui encore aujourd’hui sont les piliers des structures sociales contemporaines. Ce travail sera accompagné d’une réflexion sur la réinterprétation de l’architecture vernaculaire dans une réponse contemporaine innovante afin d’amorcer un processus de formation et de revalorisation des savoir-faire constructifs locaux.



ÉTUDE INTRODUCTIVE Quel sont les enjeux du développement urbain au Népal ?

UN PAYSAGE EN TRANSITION Comment restructurer le paysage péri-urbain de la vallée de Katmandou, par l’autonomie de ses habitants ?

STRATÉGIE TERRITORIALE Comment planifier la décentralisation de cette gestion urbaine et paysagère du territoire ?





ÉTUDE INTRODUCTIVE

Quel sont les enjeux du développement urbain de la vallée de Katmandou ?



LE NÉPAL Un pays de résilience

Enclavé entre l’Inde et la Chine, le Népal et ses 30 millions d’habitants compte parmi les pays les plus pauvre de la planète. Isolé du monde jusque dans les années cinquante, le Népal a conquis très vite une existence internationale mesurée par l’intérêt de la protection et de l’exploitation d’un héritage culturel unique au monde. D’un point de vue physique, le Népal peut être divisé en trois zones: Les hautes montagnes au climat froid et sec, les basses montagnes où y règnent un climat tempéré, et la région des plaines tropicales du Teraï. Cette situation géographique offre donc une très grande variété de paysages et de climat que se sont appropriées plus de soixante populations ethniqus différentes. Les Newars, considérés comme les premiers habitants de la vallée de Katmandou, comptent pour 5 % de la population népalaise.


LES VILLES AU NEPAL Au Népal une ville est une agglomération qui comptent plus de 5 000 habitants. Il y a une cinquantaine d’années, 47 % de la population de la vallée vivaient en ville, pour seulement 3 % dans tout le pays. Aujourd’hui la population urbaine à atteint les 20% et même dans ces villes l’agriculture est présente, au pied de chaque maison et dans le quotidien, de chaque habitant. Malgré la contribution importante des zones urbaines au PIB et à la réduction de la pauvreté, l’urbanisation rapide s’est accompagnée d’une croissance économique plus faible au Népal que dans d’autres pays. Le manque de stimuli économique combiné à la situation politique instable a entraîné un exode massif de la main-d’œuvre productive népalaise. À cette période critique du développement économique du Népal, la gestion de l’urbanisation rapide est essentielle pour améliorer la compétitivité de l’économie népalaise et accélérer la croissance dans un développement durable et équilibré. Mais le manque d’infrastructure constituent un des obstacles majeurs à l’expansion des activités économiques non agricoles, ainsi que la cause principal de la pollution grandissante dans la vallée. Ces zones péri-urbaines ont donc le potentiel de stimuler la croissance économique. La préservation et l’exploitation positive de ses différents héritages sont donc essentielles pour dessiner l’avenir de cette région.




LA VALLÉE FERTILE DE KATMANDOU Les enjeux d’une métropole

La vallée de Katmandou, qui correspond plus ou moins à la zone administrative de la Bagmati , du nom de la rivière sacrée qui la traverse, se situe dans la région centre-orientale du Népal, à l’altitude moyenne de 1 350 mètres, et couvre une superficie d’environ 600 kilomètres carrés. Elle comprend la capitale du pays, Katmandou, une des trois anciennes villes royales de la vallée avec Patan (aussi appelée Lalitpur), qui jouxte Katmandou au sud de la rivière Bagmati, et Bhaktapur, à une quinzaine de kilomètres à l’est. Avec une population de 2,5 millions de personnes, qui augmente de 4% par an, la vallée de Kathmandu est l’une des régions métropolitaines de l’Asie du Sud à la plus forte croissance démographique. Cette situation amène la région à faire face aux défis sans précédent de l’urbanisation rapide


L’ÉTALEMENT URBAIN INCONTRÔLÉ Katmandou est désavantagée par sa situation géographique qui a favorisé son l’asphyxie progressive. L’espace en forme de bol inversé creusé entre les collines empêche la circulation de l’air, et ce phénomène s’aggrave encore durant les mois d’hiver où les vents venus de l’Himalaya sont stockés dans la vallée sous une couche d’air plus chaud qui empêche les gaz polluants de s’échapper. Alors que le Népal a été placé en 2014 deuxième pays le plus pollué de la planète, rien ne semble devoir inverser la tendance. La ville continue de s’étendre sans aucune planification urbaine cohérente. Les fleuves Bagmati et Bishnumati sont des égouts, et le débit de l’approvisionnement en eau est totalement insuffisant avec une demande désormais trois fois supérieure à l’offre. La planification privée et hétéroclite de certains terrains est un élément prégnant à intégrer dans le développement de la vallée. Il est en effet nécessaire de contrôler ce phénomène qui, aujourd’hui, déstructure les formes traditionnelles de la vie urbaine. Les parcelles agricoles sont remplacées petit à petit par des quartiers de terrains constructibles, planifiés sous l’influence de la rentabilité maximale. Ce système de planification privée risque de s’aggraver, d’autant plus que les prix des terrains dans certaines zones ont augmenté de 500% en six ans, et reprendront de la valeur dans les prochaines années, avec l’arrivée des infrastructures. Si aucun contrôle n’est appliqué aux zones en développement, la vallée sera bientôt une vaste banlieue résidentielle, sans autre repère spatial que ses tristes rues perdue parmi tant d’autres. «On ne légifère pas l’avenir. Tout ce qu’on peut, c’est en deviner les tendances essentielles et leur déblayer le chemin» Pierre Kropotkine




LA BANLIEUE AGRICOLE Étude d’un Paysage urbanisé

«Il faut arrêter de penser l’urbanisme en terme règle et de compas, le vrai plan est la résultante de civilisation de communauté et d’époque» et «réintégrer l’homme, l’espace et le temps concrets et complets dans la démarche de planification.» Geddes Plutôt que de chercher à quantifier, mesurer, planifier, mon objectif est d’aborder l’analyse urbaine en vivant sur place, discutant avec les commerçants, et ainsi participer à ma manière à la vie de quartier, au cœur du quotidien des habitants. C’est donc par une étude sociologique informelle que je cherche à découvrir et comprendre la culture qui caractérise ce site. Cette ville périurbaine est la production d’une urbanisation informelle et anarchique et dans cette même logique, l’espace urbain ne doit pas être étudié de manière globale, unidirectionnelle, mais comme une succession de séquences spécifiques, composées de matières et d’activités. Celles-ci peuvent être matérielles, spatiales, sensorielles, mais elles englobent aussi l’activité humaine, et les interactions qui en découlent font vivre et évoluer la ville.


RÉFLEXION URBAINE Avant propos

«Tous les esprits pensent la ville de l’avenir en terme de modèle, comme un objet reproductible et non pas comme un processus ou un problème. Elle est arrachée à la temporalité concrète et devient utopique, c’est à dire, nulle part.» Francoise Choay En identifiant les différents mouvements qui ont marqué la planification de nos villes ces deux derniers siècles, il est essentiel de ne plus se résoudre aux différents systèmes de valeurs: fois dans le progrès et la toute puissance des technique ; aversion pour la société mécanisée et nostalgie des anciennes communautés culturelles ; ou encore nostalgie d’une relation formatrice avec la nature. Il existe trop de facteurs indéfinis dans l’espace et le temps pour avoir la présomption de concevoir et construire la ville. Elles se construisent par elle même, par ses habitants, pour ces habitants. Cela implique d’étudier comment la ville en tant qu’entité matérielle, est perçue par les consciences qui l’habitent, afin de redonner au individus leur rôle de médiateur dans la planification de leur ville. L’urbaniste se doit donc d’élaborer des stratégies d’aménagement qui ,au lieu de répondre aux fonctions élémentaires d’un homme théorique, intégreraient dans leur richesse et leur diversité les besoins des hommes réels. Je chercherai donc dans ce projet de diplôme à mêler une expertise objective et sensible du territoire pour accompagner et guider le développement durable de la ville.




LE SITE PLATEAU D’IMADOLL

Me voila de retour, installé paisiblement devant cet oasis de champs en gradin entourée du village de Sanogan. Cette enceinte composée de maisons traditionnelles et de nouvelles constructions bétonnées, cadre une grand canyon agricole qui s’engouffre au loin dans l’immensité de la vallée. Le plateau d’Imadol se situe sur les hauteurs sud qui surplombe la vallée et laisse place à une saisissante vue sur les trois anciens royaumes qui aujourd’hui ne forment qu’un grand ensemble construit. La ville qui s’active et fourmille dans le calme est cadrée cette fois par les pics enneigés de la chaîne Himalayenne. Les cheminées des usines de brique crachent leur fine fumée noire, qui se disperse devant les colline avoisinantes. La nuit tombe, et efface petit à petit ce doux spectacle pour ne laisser que les lumières parsemées de la ville en mouvement. Cette courte description permet de résumer les différentes éléments qui structurent le paysage et donnent cette ambiance si particulière que je vais chercher à étudier.


LA RELATION VILLE - CAMPAGNE «La sagesse de la nature ne pourra pas se révéler à l’homme tant qu’existera cette séparation inconsciente, entre la société et la nature» Ebenezer Howard Pour Howard ni les avantages de la ville et ni le confort de la campagne, réalisent complètement le but d’une vie vraiment conforme à la nature. L’homme a besoin de jouir à la fois de la société et des beautés de la nature afin d’élargir le champs d’initiative et d’accomplissement. L’objectif est de comprendre l’étalement urbain de la vallée par le vide. En se développant la ville a laissé de magnifiques oasis verdoyantes, des poches agricoles qui donnent à ce site une beauté très particulière. Les rues et chemins se sont créés naturellement sur les hauteurs, ce qui a permis à l’espace construit de surplomber légèrement la nature et par moment de s’y infiltrer. Cette urbanisation provoque une infinie succession de séquences particulièrement riches qui se déroulent le long de ces corridors. Par cette approche, on ne cherche pas à tout régler, mais en favorisant, les qualités obserées dans ces situations périurbaine tout en les restructurant à l’exemple des villes anciennes, une réponse se dessinera naturellement. Je m’attarderai donc à observer ce qui créer cette harmonie visuel entre ville et campagne pour chercher à le révéler, le guider, le contrôler.






UNE VALLÉE EN TRANSITION

Comment restructurer le paysage péri-urbain par l’autonomie de ses habitants ?


CULTIVER POUR REFAIRE DU LIEN «La nature est une bibliothèque, lisez-la au lieu de la brûler». Gunter Pauli Le Biomimétisme transcende le conflit d’intérêt entre croissance et nature, puisque si l’on décide d’exploiter la nature comme une source de connaissance plutôt que de matières premières, alors il existe une possibilité pour concilier croissance infinie et préservation de l’environnement. Lorsque l’homme aura réellement conscience de la richesse des écosystèmes qui nous entourent, il sera capable de remettre en cause son comportement, et en s’inspirant de la nature dans tous les domaines de la vie, rentrer dans une logique de développement durable, non pas imposé mais fondé. La pensée écologique est en effet bien plus sophistiquée et moderne que la pensée artificialisante. Les grandes exploitations sont rentrées dans une logique à court terme, où les investissements considérables doivent être rentabilisés rapidement et dans cette logique toute alternative semble impossible. A l’inverse, les terres agricoles de la vallée sont principalement cultivées par de petits exploitants et chaque parcelle vacante peut être utilisée librement par les habitants. Cette dynamique à échelle humaine est favorable aux alternatives plus durables. Les ressources sur lesquelles nous avons fondé notre économie sont épuisables, tandis que le savoir ,lui est infini. La dimension éducative est donc essentielle pour favoriser la transition souhaitée . Il est nécessaire de penser comment ces initiatives locales vont pouvoir fédérer de manière plus globale pour partager échanger et générer une économie stable fondée sur la transmission des connaissances et des savoir faire. L’utilisation massive de la chimie à détruit le rapport fondamental entre l’écologie et l’agriculture, le savoir pourra peut -être le réinstaurer.



STRUCTURE PAYSAGÈRE


PATRIMOINE NATUREL Entourée de toute part de montagnes, la topographie de la vallée de Kathmandu offre une richesse de structures paysagères de montagnes, collines, corridors naturels. Les situations sont très variées. Malheureusement la préservation des zones boisées dans la vallée a été catastrophique et leur destruction cause aujourd’hui un véritable problème environnemental et cette dénaturation risque de s’amplifier face à l’étalement de la capitale. L’urbanisation controlée doit ainsi devenir un élément moteur dans la préservation et la réparation de ce territoire. PATRIMOINE AGRICOLE Près de 70% des Népalais ont au moins un pied dans la culture de la terre et pour beaucoup le travail aux champs constitue une activité secondaire, que l’on pratique après le travail ou l’école. L’agriculture est inscrite dans le quotidien de chacun et chacun joue son rôle dès le plus jeune age dans cette activité familiale. Ce lien étroit entre cette nature agricole et l’habitant se retranscrit magnifiquement dans le paysage urbain. Cette proximité avec les villes ouvre un potentiel de développement dans ce secteur. D’autre part la présence majoritaire de petis exploitants est propice à la transition écologique telle que l’agroforesterie et la parmaculture.


District de Lalipur année 2000

District de Lalipur année 2016



Étalement urbain de la périphérie actuelle

LA CAMPAGNE HABITÉE Étalement urbain des villes traditionnelle


L’URBANISATION INFORMELLE «La sculpture qui orne la maison de votre ami augmente l’effet que peut produire celle qui décore la vôtre. Les deux maisons ne forment qu’une masse, plus grande encore s’il ajoute une troisième, si toutes les rue de la ville unissent leurs sculptures en harmonie solennelle» John Ruskin Cette phrase illustre parfaitement le sentiment qu’on éprouve devant ces nouvelles formes urbaines qui émergent dans les banlieues de la vallée. Chaque maison propose une volumétrie, des ornementations et des couleurs très différentes. Ces caractéristiques, prises individuellement, semblent sans logique ni qualités architecturale mais dans une vue d’ensemble cette masse bâtie fait ressortir une harmonie visuelle très riche, sublimée dans ce paysage naturel et agricole. Voici dans quoi réside la beauté de ces banlieues nouvelles et non pas dans le jugement de valeur de cette étrange esthétique architecturale. C’est aussi dans ce sens qu’il est difficile d’analyser cet urbanisme nouveau, car chaque maison est construite indépendamment des autres. Elles poussent aléatoirement, au milieu des champs et s’inscriront dans une vision plus globale quand les parcelles voisines se construiront. Cette logique consiste donc à construire avec deux murs pignons dans l’optique de s’intégrer dans une rue imaginaire planifiée. Cette structure informelle induit cette richesse organique où les apports successifs de l’histoire ont permis de tenir compte des particularités du site. Mon objectif est d’imaginer un ou plusieurs scénarios, flexibleS, permettant de structurer et densifier ces futurEs ville sans imposer une planification figée, mais en intégrant le temps et l’énergie des habitants dans le dessin de ce scénario.


LA VILLE ANCIENNE

Ces villes, en se pliant au sinuosités naturelles du terrain, aux incidences du soleil et des vents dominants impliquent un caractère imprévisible et divers qui lui donne toute sa force visuelle. Le climat mental de ce modèle est rassurant et stimulant car il est favorable à l’intensité et la multiplication des relations inter-personnelles. Ces modèles urbains qui nous semblent aujourd’hui dénués de sens et de logique sont pourtant bien plus structurés et adaptés au développement d’une communauté urbaine que nos villes contemporaines. Au Népal, tant pour le logement que pour les constructions publiques, le rez de chaussée est ouvert au habitants et dédié aux activités de la communauté. Dans l’habitat, cette typologie permet à chaque habitant de développer son activité au sein de son logement et de commercer avec la ville en fonction de son métier. Les entrées des maisons se situent dans les petites ruelles couvertes, où un escalier mène à l’espace privé de chaque habitation. C’est à partir de ce seuil, au premier étage, que l’on ôte ses chaussures. Cette particularité de l’architecture newar se retrouve dans les temples, les monastères, les maisons publiques, et le sol de la ville entière devient un espace public où se côtoient et échangent quotidiennement les citoyens. Cette caractéristique architecturale renforce donc la structure des relations économiques et sociales, en favorisant la vie en communauté, plutôt que l’entre soi. « Le trait dominant du caractère néwar, c’est le goût de la société. Le néwar ne vit jamais isolé ; il aime à loger, un peu comme le Parisien, dans des maisons à plusieurs étages et grouillantes de population, quitte à demeurer à l’étroit, aussi bien en ville qu’au village » Sylvain Lévi xixe siècle



STRUCTURE URBAINE


PATRIMOINE CULTUREL Le patrimoine immatériel qui fleurit dans les villes( l’art, la musique, la danse et les célébrations publiques et religieuses,)ajoutent de la vitalité et du sens au patrimoine bâti et urbain. La conservation de ce patrimoine unique peut être un catalyseur de la revitalisation urbaine en préservant l’habitabilité de la ville et en créant un large éventail d’opportunités de revenus, en particulier pour les pauvres.

PATRIMOINE ARCHITECTURAL De nombreuses villes anciennes qui entourent les capitales, sont riches en patrimoine bâti, et se situent au milieu d’une beauté naturelle inégalée. Cet héritage est un véritable trésor national pour le pays et les népalais y sont très attachés. En effet, ces monuments et espaces publics sont encore aujourd’hui le théâtre de la vie citoyenne et religieuse et n’ont jamais subi de musééification.


Village de Sanagau , annĂŠe 2000

Village de Sanagau , annĂŠe 2016



Densification urbaine comptemporaine

LA VILLE Densification urbaine traditionelle


STRUCTURE ECONOMIQUE LOCALE

Partout au Népal, le commerce de proximité est roi, chaque habitation propose un service, chaque rue est un espace de transaction, d’achat, d’échange, chaque parcelle vide est cultivée et chaque champs abandonné est utilisée pour l’élevage. Même l’espace public permet de stocker et vendre les matériaux de construction. Ainsi, il n’y a pas de monopole, pas de Mall ou supermarché, pour les besoins du quotidien. Cela n’en fait pas une marque de sous-développement, au contraire ce système économique local date depuis plusieurs siècles ce qui en fait un élément marquant dans l’urbanisation et l’évolution des typologies d’habitat. Une société de travail intégré est une société où chaque individu est producteur à la fois de travail manuel et intellectuel, il est ouvrier aux champs et en atelier pour qu’il produise et consomme la plus grande partie de ses produits agricoles et manufacturés. Contrairement à notre modèle où l’économie politique insiste sur la division du travail, la distinction entre production et consommation, au Népal , en particulier dans ces zones périurbaines et rurales, l’activité économique locale permet de maintenir cet esprit de collaboration évident, et de s’inscrire dans un système de développement durable. C’est entre eux qu’il commerce pour entretenir cette économie local,e où chacun à son rôle dans l’équilibre global. Cette notion d’économie durable est accentuée par ce caractère social qu’il engendre. Les habitants sont investis d’une responsabilité directe envers leurs voisins, car c’est à eux, qu’il vendent leurs produits et leurs services. On peut donc parler de concurrence positifve qui n’est pas liée au rendement mais au produit directement.





STRATÉGIE TERRITORIALE

Comment planifier la décentralisation de cette gestion urbaine et paysagère du territoire ?





INTENTION DE PROJET

Au Népal, la faiblesse et l’instabilité du gouvernement à amener les habitants à s’émanciper et s’organiser par eux même. Les structures sociales des villes traditionnelles permettent déjà cette décentralisation politique, comme dans les villages reculés où la préservation des sites naturels est gerée localement. A l’inverse, dans un système où l’état providence est roi, les citoyens sont totalement dépendants de leur gouvernement, et n’ont plus le pouvoir d’agir. Cela engendre le sentiment d’impuissance et de distance entre les habitants passifs et les acteurs politiques. Le phénomène d’individualisation est lié à cette dissociation entre le citoyen et les enjeux décisionnels. Il est donc nécessaire de penser comment structurer et renforcer les centres de décision tout en gardant cette autonomie positive et donc, comment en tant qu’architecte urbaniste, planifier non pas la ville mais les stratégies de développement naturel de celle ci. Ma zone d’étude se dessine donc entre la ville de Patan, cadrée par un gigantesque périphérique toujours en travaux, et la campagne qui s’étend jusqu’aux montagnes. Cette banlieue sud qui se déploie en demi cercle autour de la capitale offre un paysage agricole habité par un étalement urbain informel qui se développe le long des routes radiales, reliant la ville à la campagne. Sur un rayon de cinq kilomètre environ une série de dix villages traditionnels rythme le paysage et dessine un tout autre tissu structuré et délimité. Ce travail d’anticipation à long terme permettra d’inscrire ces nouvelles densités dans un réseaux de parcs périurbains entretenus et exploités par les habitants directement, et les réponses concrètes ne peuvent que suivre naturellement ce processus



RELIER LE TERRITOIRE

Ma démarche sera de positionner stratégiquement dans le territoire un réseau de pôles administratifs, permettant de réunir les différents acteurs du développement de la vallée. Le premier point sera de connecter les villages existants et futurs par une route modeste (deux voies) mais parfaitement viable. Cette infrastructure (ici en rouge) permettra de relier les radiales partant de la capitale et ainsi de désengorger le périphérique de la ville qui est l’unique passage aujourd’hui pour relier deux points de la vallée. Cette route accompagnera le développement économique de ces densités, favorisant les échanges commerciaux Un deuxième réseau piéton permettra d’inscrire ces villages dans une grande promenade périurbaine rythmée par les futurs parcs agricoles à protéger. Celle ci offrira une liaison piétonne pour les habitants dans un pays où l’effort et la marche sont inscrits dans les gènes de chacun. Mais ce «treck périurbain» proposera un nouveau circuit touristique de deux ou trois jours, à la découverte de ce patrimoine agricole, industriel et architectural.



NEUF VILLAGES EXISTANTS

Pour redonner aux individus leur rôle de médiateur dans ce processus de développement, il est essentiel que le territoire agisse comme la vitrine de ce grand projet commun, en favorisant une meilleure perception des structures paysagères. Dans cette logique le travail des limites visuelles entre zone urbaine, parc, village et campagne peut être un élément de la réponse pour s’opposer à l’étalement continu et homogène de la ville,par la restructuration physique et mentale de l’espace. Cette notion plus abstraite peut se matérialiser par des dispositifs architecturaux simples et autonomes, des architectures régénératrices d’écosystèmes culturels entre eux et naturels autour d’eux. Ces futurs villages, par leur structure et leur implantation guideront naturellement le développement urbain de certaines zones et la préservation de leur environnement.





NEUF STRUCTURES PAYSAGÈRES A HABITER

Ces bâtiment doivent ainsi être dessinés comme de véritables espaces publics favorables à la structuration de communauté car seule une société forte peut agir de manière durable et responsable sur son environnement et seuls de véritables espaces urbains sont susceptibles de générer cette force collective consciente. Ces bâtiments publics seront ainsi les maisons de chantier ,des nouvelles densités urbaines, de nouveaux villages au milieu d’un paysage agricole à entretenir et préserver. Ce réseau circulaire de villages satellites sera connecté physiquement par des infrastructures, visuellement par le paysage, politiquement par les prises de décision, économiquement par la connaissance et spirituellement par la prise de conscience commune face aux enjeux environnementaux et urbains.



EXERCICE DE COMPOSITION URBAINE

Comment planifier une stratégie de développement d’un village ?



LE MANDALA COMME STRUCTURATION DE L’ESPACE La population de la vallée était composée de bouddhistes et d’hindous, mais les rois Néwar étaient tous hindous instaurant l’hindouisme comme religion d’état, qui par ses concepts et ses pratiques a structuré l’espace urbain. Ce modèle de ville traditionnelle et régie par quelques grand principes: Enceinte fermé, double axialité, damier des rues et des îlots, portes au quatre point cardinaux, voie circulaire autour de la ville... . L’organisation des sanctuaires et des temples se fait suivant la forme un schéma spatial orienté, un mandala. A partir du centre de la ville, et, idéalement, en cercles concentriques. Les divinités protège la ville au quatre points cardinaux et aux quatre points intermédiaires. Le centre correspondant au neuvième point du cercle, le temple de la divinité centrale du mandala et non pas le palais royale. Mais les dieux sont aussi implantés au niveau du royaume. Les textes parlent de leur installation ou de la construction de temples dans différentes localités en dehors de la capitale, opérée là encore à partir du centre. Dans les croyance bouddhiste toute notre existence est défini par cinq énergies qui symbolisent la forces des éléments qui nous entoure. Le mandala est donc structuré par ses cinq énergies hiérarchiser dans les 4 points cardinaux, avec au centre, l’espace, symbolisé par le Bouddha. Dans l’hindouisme cette organisation se fait par succession de cercle concentrique avec au centre le Brahma, créateur de l’univers. Le Bouddha étant pour les hindous, la réincarnation de Brahma, ces représentation sont étroitement liée. Pour revenir à l’application urbaine de ces croyances, la ville repose sur un réseau octogonal de rues et de ruelles entre lesquelles viennent s’insérer les différents quartiers, les bazars, les temples et les bâtiments publics. Les rues qui vont d’est en ouest sont en nombre paire, tendis que celles qui vont du nord au sud sont en nombres impairs. Les concept fondamentaux de la pensée Hindoue imprègne la structure général des cités et leur confèrent un sens symbolique très fort. Le Centre ville est organisé comme un gigantesque espace public, protéger par les divinité et les temple qui l’occupe. Ce résumé d’analyse cherche à mettre en avant l’importance du sacrée dans l’urbanisation. L’objectif n’est pas d’essayer de reproduire maladroitement ce type de structure mais de prendre conscience de l’importance de la religion dans un pays ou le quotidien de chaque habitant et rythmée par celles-ci.


DE L’ÎLOT A LA VILLE

Il est essentiel de comprendre qu’il existe une relation directe entre la formation d’un îlot et d’une ville dans l’aménagement de l’espace newar. L’ordonnance urbaine reprend la référence commune au maisons au place et au quartier et chacun de ses espaces participent à la représentation globale de la cité. Cette pensé urbaine permet d’organiser, amplifier et unir la société, plutôt que de la juxtaposé. La formation de ces villes ancienne sont donc composé en référence à un seul et même concept matérialisé à différents échelles qui à permis à la société newar de prospérer. Malgré la petite taille de ces ville, leur structure permet de diviser le système administratif afin de favoriser l’autonomie des habitants. Cette décentralisation des taches citoyenne, donne la possibilité au habitant de générer leur propre vie politique et économique, à leur échelle. Ces structures urbaine entraines dans le même sens la division du système religieux pour accentuer le sentiment d’unité autour des rites et festivité Hindouiste et Bouddhiste. Dans la vallée de Kathmandu, il n’y a pas de différence morphologique entre l’habitat rural et l’habitat urbain ; les maisons sont identiques, les localités ont une forme compacte et resserrée et les quartiers, consistant en un ensemble de cours bordées d’habitations, sont toujours disposés autour de temples ou de sanctuaires.






EXERCICE DE COMPOSITION ARCHITECTURAL

Comment réinterpréter les architectures publics de la ville ancienne ?


UN CHANTIER DE VILLAGES ANTICIPÉS Entre espace sacrés, royaux ou simplement publics, la ville traditionnelle Newar a développé un langage de l’espace urbain sous différentes formes, qui encore aujourd’hui sont les piliers des structures sociales contemporaines. A l’exemple des cités royales, l’urbanisation de la banlieue doit être anticipée par des équipements qui accompagneront, dans un premier temps, le chantier et la planification des densités à venir et dans un second temps, la formation durable de communautés urbaines. Ces bâtiments publics seront ainsi les maisons de chantier, de nouvelle densité urbaine, de nouveaux villages au milieu d’un paysage agricole à entretenir et préserver. Chaque village devient ainsi un espace d’expérimentation, urbaine et architecturale, régi par une réglementation souple et propre à chaque situation, et les parcs périurbains se voient devenir le terrain de développement de nouvelles formes agricoles. C’est donc par leur dimension physique et symbolique que je chercherai à réinterpréter l’architectures traditionnelle dans une composition contemporaine et adaptée aux usages actuels. Le symbole n’est plus lié à la religion ni à la royauté, mais à la volonté de redéfinir l’espace politique, économique et social des futures polarités périurbaines. « L’originalité si ce mot peut être pris dans un sens affirmatif, ne consiste pas à forger des mots nouveaux, mais à bien se servir des mots anciens. Ils peuvent suffire à tout. » August Perret


LE TEMPLE LE TEMPLE LE TEMPLE

ALISATION DE LA NATURE

RE

MONASTER

RESTAURANT PUBLIC MONASTERE

RESTAURANT PUBLIC

LA PORTE

L'ENCEINTE

PUIT PUBLIC

BASSIN PUBLIC

L'ENCEINTE

PUIT PUBLIC

LA PORTE MONASTERE

PUIT PUBLIC

BASSIN PUBLIC

LE TEMPLE

SACRALISATION DE LA NATURE MONASTERE

RESTAURANT PUBLIC

LA PORTE

L'ENCEINTE

PUIT PUBLIC

BASSIN PUBLIC

LE TEMPLE

LE TEMPLE

SACRALISATION DE LA NATURE

RESTAURANT PUBLIC

PUIT PUBLIC

MONASTERE

BASSIN PUBLIC

EXEMPLE ILOT E-7 ILOT DE 54 m de coté TRAME 9/9 carré QUADRILAGE 6/6 m

ESPACE PUBLIC DES VILLES ANCIENNES

LA PORTE SACRALISATION DE LA NATURE L'ENCEINTE

RESTAURANT PUBLIC PUIT PUBLIC









CONCLUSION

Les Népalais ont voté en mars 2017 un référendum visant à renouveler la classe politique local et réinstaurer une véritable démocratie dans le pays. Après des années de guerre civile et un séisme dévastateur, le pays commence à se reconstruire mais cette longue restructuration doit se penser dès maintenant pour éviter une nouvelle crise anthropique, celle environnementale déjà à l’œuvre dans la vallée de Katmandou. Avec un peu de recule, ce projet cherche simplement à réinscrire la notion d’urbanisme dans le débat politique et populaire en générant de nouveaux pôles administratifs locaux susceptibles de renforcer l’action collective et autonome des habitants. Pour cela, l’architecture doit être génératrice de cette transition et chercher à redéfinir de véritables espaces publics, favorables à la structuration de communautés prospères, car seule une société forte peut agir de manière durable et responsable sur son environnement et seul de véritables espaces urbains sont susceptibles de générer cette force collective consciente. La réponse à l’étalement urbain se dessinera donc par les acteurs qui habitent ce territoire et ma démarche est de déclencher ce processus de décentralisation en guidant le développement naturelle d’une ville par ses habitants.


REMERCIEMENT Je tiens à remercier Rakeash Shakya, mon ami et hote du Népal; Jean Patrice Calori, mon enseignant responsable, Jeanne de Mascarel et Malcolm Onifadé pour leurs photographies; mes Parents, Isabelle et Francois de Mascarel pour leurs soutiens; Lisa, Baptiste, Abel, Brieuc Baudouin et tous les autres pour leurs conseils et leurs aides, et enfin Arthur et Lucas mes compagnons de travail.

BIBLIOGRAPHIE Francoise Choay, L’urbanisme Utopie et Réalités Ricardo Bofill, L’architecture des villes Pierre Frey, Learning From Vernacular Bernard Rudofsky, Architecture sans architecte: Bernard Steigler, Réenchanter le monde Idriss Aberkane , Libérez votre cerveau Pierre Rabhi, Vers la Sobriété Heureuse, Daniel Odier, Nepal Patrick Berger, Panauti une ville au Népal Viggo Brun, Fired Earth, Wolfang Korn, The Traditional Architecture of Kathmandu Valley,




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