Antoine au Pays de Coqualane

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ANNA BAMBADE

Antoine au pays de Coqual창ne Illustrations de ANTOINE TIMOTHEE

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La Fève Magique

Le

bon vent du matin accueillit joyeusement Antoine dans la rue. Il lui soufflait que la journée serait miraculeusement intéressante, même s’il n’allait que faire des courses avec sa mère. Dans un grand magasin, pendant le temps que sa mère remplisse le caddie, Antoine se baladait entre les rayons avec différentes sortes de produits. Il remarqua sur une étagère tout en bas une boite qui brillait d'un air magique. Il était sûr qu’il n'en avait jamais vue de pareille avant. Et pourtant, c'était tout simplement une boite de fèves. Curieux, il la prit et la secoua de toutes ses forces. 3


Soudainement, elle lui échappa et tomba à terre. En faisant un de ces tintamarres des fèves partirent dans toutes les directions. Et alors, mon petit coco ! On s’amuse bien ! ? Eh ! ?

Un grand barbu avec un balai dans les mains surgit devant Antoine. Sa voix grave et menaçante fit peur au garçon. Oh la-là ! Excusez-nous, monsieur ! s’exclama sa mère.

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L'air mécontent, celui-ci rassembla les fèves avec son balai tandis qu'Antoine réussit à en récupérer une et à la mettre dans sa poche. S’il te plaît mon minou, ce serait mieux de ne toucher à rien ici, lui dit sa mère. Viens plutôt jouer dans ta voiture préférée ! Au milieu du magasin, il y avait un endroit, spécialement aménagé pour les enfants, avec une voiture de course, une moto et une vache à roulettes pour les tout petits. A ce moment il n'y avait personne et Antoine courut vers la voiture de course. Sois sage ! lui rappela maman. Je vais me dépêcher de faire les courses. Puis elle s'éloigna avec le caddie. Ça, c’est chouette, pensa Antoine en s'installant dans la voiture de course.

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Il adorait cette voiture aux lumières clignotantes, pleine de boutons faisant des bruits bizarres. Bien évidemment, pour la faire bouger, il fallait mettre une pièce dans une espèce de bouche, que maman appelait la fente. Antoine chercha dans ses poches, mais il n’y avait rien que la fève. Alors, il poussa la fève dans la fente. Ce n'était pas si facile, mais il finit par réussir. « Broum ! Broum ! » Avec toutes ses ampoules allumées la voiture quitta sa place et partit tout droit au fond du magasin. Antoine remarqua qu'elle prenait la direction «jouets », où derrière des montagnes d'étagères se dressait un château avec de grandes tourelles décorées de drapeaux.

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Le Vieux Lapin

Passant

tout près d’une grande maison de poupée Antoine aperçut sur la terrasse un Vieux Lapin, qui se balançait dans un fauteuil, en train de lire une feuille de choux.

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Stupéfié Antoine appuya sur les freins pour arrêter la voiture. Dites donc, voyez-moi ça ! C’est ça leur annonce, alors ? lut le Vieux Lapin à haute voix. Allez donc chercher midi à quatorze heures ! A mon avis, ils exagèrent, ces oiseauxlà ! Et puis il regarda le garçon à travers ses lunettes. Oh, la-là ! Vous êtes en retard, mon cher ! Je pense que tout le monde est déjà arrivé, ajouta -t- il. Quelqu’un m’attend ? s'étonna Antoine qui ne s'attendait pas du tout à ce que des lapins parlent et mènent une vie civilisée. Mais oui, jeune homme, justement, midi à quatorze heures, voyons ! Dans le château du Grand Duc ! fit le Vieux Lapin en mangeant entre-temps toute entière sa feuille de choux. 9


Ce n’est pas le château qu'on voit là-bas ? lui demanda alors Antoine, qui n’en croyait toujours pas ses oreilles. Oui, c'est par-là ! Tout droit, et puis aux Quatre coins il faut prendre le petit chemin à l’envers, c’est un raccourci, lui conseilla le Vieux Lapin en pointant vers les montagnes d’étagères. A cet instant, l’air occupée la Mère Lapine apparut à la fenêtre. Les carottes sont cuites ! annonça-t-elle. Le Vieux Lapin disparut dans la maison dans un seul bond, ce qui était assez étonnant pour son âge...

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Galopin

Encore plus surpris, Antoine vit

un petit lapereau sauter dans la voiture, chantant et tapotant des pattes : Boum ! Boum ! Boum ! Mais qui es-tu donc ? lui demanda le garçon. Je m’appelle Galopin, se présenta-t-il en regardant avec inquiétude vers la fenêtre. Et comment ça se fait que tu parles ? continua de l'interroger Antoine. Voyons, Galopin le regarda étonné, je ne suis tout de même pas

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un poisson ! Vas-y, démarre vite, avant que ma mère ne me voie ! Il sautillait d’impatience. Je veux aussi aller avec toi au Château du Grand Duc ! Et tu sais peut-être ce qu'on va faire là-bas ? demanda Antoine. La Galette des Rois ! Galopin tapota dans ses pattes. Et après on va faire la fête : « Boum » ! Eh... réfléchit Antoine, qui se souvenait qu’il fallait rester sage. Mais l'idée de visiter le Château du Grand Duc lui semblait vraiment très attirante… Bon, on y va ! accepta-t-il. Galopin lui montra le chemin Prenons d’abord la route Poivrée à droite. Ils passèrent devant des étagères avec différentes formes de boîtes de sel et toutes sortes de poivres et d’épices.

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Et maintenant ici à gauche, par le passage de l’Arbre Sec, dit Galopin en pointant de sa patoche le rayon des plantes, dans une grande galerie vitrÊe.

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Jeu à Chat

Mais soudainement :

« Broum ! Broum ! Psh ! » La voiture s’arrêta au milieu du passage, entre des rangées des pots avec différentes plantes, grandes et petites, avec et sans fleurs. Devant eux, sur une pelouse verte on pouvait voir aussi, dans un grand pot, un arbre tout desséché... Antoine avait beau tourner le guidon en sautillant de toutes ses forces, la voiture ne voulait plus bouger. Eh, Galopin ! C'est encore loin ? demanda-t-il. On peut peutêtre y aller à pied ? Sinon, il faut chercher une pièce ou … une autre fève. 14


Un bruit et un chuchotement retentirent derrière l’arbre desséché. Coucou ! Galopin ! entendirentils une toute petite voix. Mais c’est qui cet oiseau-là ? Antoine regardait tout autour d'eux. Un coucou ? Boum ! Ce sont des copains, une bande de lapins ! Galopin bondit vers des arbustes plantés dans des grands bacs autour de la pelouse, comme s'il avait déjà oublié Antoine et leur voyage. Attends-moi ! l'appela Antoine en sortant de la voiture. Chat ! Chat ! On joue à chat ! criaient les lapins en courant partout entre les plantes. Antoine se lança à la poursuite de Galopin, qui s'éloignait à grands bonds. Ah, toi aussi, tu joues ! entendit Antoine. Il vit un des lapins courir après lui. 15


Gare à ta peau ! l'avertit Galopin. Rejoins la perche tout de suite ! Mais c’était trop tard. Le lapin cria « Chat ! » en touchant Antoine. Le pauvre garçon vit apparaître des poils gris sur ses bras. En un instant, il se transforma en véritable chat avec une fourrure des plus soyeuses, des pattes douces et même une queue ! Je ne veux plus jouer à votre jeu ! s'écria-t-il horrifié. Boum ! Galopin galopa vers lui pour le consoler. N’aie pas peur ! Il n’y a pas de loup ici ! Dis donc, mais qu'est-ce que va dire maman ? Antoine se regarda désespérément. Je veux redevenir un garçon normal et sage, comme avant ! Eh, pour cela il faut appeler un chat un chat, lui expliqua Galopin. Trouve un vrai chat parmi les lapins. 16


Antoine regarda à droite et à gauche. Les lapins, perchés sur les pots de plantes, l’observaient. Mais il n’y a pas un chat ici, ditil d’un air boudeur. Il y en a un, lui chuchota Galopin. Il a été vendu au marché comme lapin. Chat ! Chat ! Vas-y, débrouilletoi ! Á nouveau les lapins partirent à la débandade. Quant à Antoine, il pleurait presque.

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La Souris Blanche

« Clic ! Clic ! »

Des cliquetis venaient d’en bas. Antoine baissa la tête et vit une petite souris blanche, qui courait entre les herbes en faisant de petits cliquetis avec son sac. Le plus étonnant n’était pas sa jupe rouge à pois blancs, mais le fait qu’elle parlât toute seule : Oc ! Oc ! Je suis en retard ! Je vais encore être en retard chez les Gardes des Sous. Puis elle sortit une petite lampe de poche, afin d’éclairer son chemin. « Clic ! Clic ! » cliquetait son sac à main. 18


Antoine n’en croyait ni ses yeux ni ses oreilles. En trottant la petite souris blanche continuait de marmotter : Oc ! Oc ! Qu’est ce qu’ils vont dire ces messieurs à la banque ? Puis la souris s’arrêta et ouvrit son petit sac rouge de ses pattes. Mais elle compte des sous ! s’étonna Antoine en se penchant

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pour mieux voir les pièces. Son ombre couvrit la souris. Celle-ci s’effraya : Le chat ! Le chat ! Au secours ! Oc ! Oc ! Affolée, elle se précipita entre les herbes, en perdant des pièces. Je ne suis pas un chat, objecta gentiment Antoine. J’étais plutôt un minou, comme dit souvent maman… Mais la souris avait déjà disparu entre les herbes des pots. Antoine regarda les pièces de monnaie par terre. Etonnante, cette souris, pensat-il. Il faut que je lui rende ses pièces. Des pièces ! Des pièces, dont il avait justement tant besoin pour redémarrer sa voiture ! Ce n'est pas grave si je lui en emprunte quelques-unes, du moins jusqu’à ce que ma dent tombe… décida-t-il. 20


Minou Perché

Entre temps une idée géniale lui vint à l’esprit. Retournant vers la pelouse, à ses risques et périls, Antoine cria : Je donne ma langue au chat ! Pour être explicite, il tira fort sa langue. Et ça marcha ! Un brave lapin courut vers lui. Tout de suite Antoine le toucha en criant : Chat ! Chat ! Effectivement, en miaulant «miaou ! » le lapin se transforma en chat, tandis qu’Antoine, en un clin d'œil, redevint garçon. 21


Il mit les pièces dans la poche et puis examina ce chat tout bleu. Apparemment, le chat n’était pas sauvage. Il faisait des câlins en se frottant contre les pieds d’Antoine. Je vais t’appeler Minou Perché, décida-t-il. Le caressant, il vit soudainement une puce accrochée à l’oreille du chat. Pouah ! Tu as des poux ! lui fitil remarquer. Miaou ! C’est ma puce de compagnie, miaula Minou Perché fièrement. Je l’appelle Sauttise Electronique, elle est très intelligente. 22


La puce sautait sur place en saluant Antoine de sa petite patte. Eh ! Bonjour Sauttise ! fit Antoine. Boum ! Boum ! Galopin galopa vers eux. Alors, qu'est ce que tu fais là ? On y va ? ! Antoine sortit ses pièces et invita aussi bien le chat que sa puce à les suivre. Voulez-vous nous accompagner ? leur demanda-t-il. De la monnaie !

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La puce Sauttise sursauta sur la tête du chat, dès qu'elle vit les pièces Je connais le chemin du Marché aux puces. Ça saute là-bas ! On y va ! Vous ne le regretterez pas ! Tu veux qu'on y cherche encore des petites bêtes ? demanda Antoine. Miaou ! Nous y retrouverons Mémé, que j'avais perdue, se réjouit aussitôt Minou Perché. Alors allons-y vite, et que ça saute ! s'excita Sauttise en sautillant sur la tête du chat. D’accord, d’accord... si vous voulez, céda Antoine, mais seulement un petit tour et puis on s'en va… Après avoir traversé toute la galerie des plantes, Antoine suivit la flèche «bonnes affaires », comme le lui conseilla à l’oreille la puce Sauttise.

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Marché aux Puces

Au

marché, tout grouillait pêlemêle... Il y avait beaucoup de monde, d’apparence diverse.

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Les puces minuscules sautaient, à pas de puce, à gauche et à droite entre les marchands et les acheteurs… Allez, allez, il est bon, il est bon mon jambon ! criait un charcutier. Prenez le meilleur morceau, le plus beau ! Chou blanc ! Chou blanc ! Pas cher ! criait un autre marchand. Une feuille de laitue pour madame la Tortue ? ! Et avec ceci ? Discrètement, Galopin voulut tirer une carotte de son stand, mais il le remarqua aussitôt et le chassa. Ouste ! Pas de carotte, petit lapin ! La tête d’Antoine ne cessait de tourner de droite à gauche. De tous côtés, il entendait : Un coup d’œil ! Pas cher ! Un coup de pouce ! Pas cher ! Et avec cela ? 26


Chemin faisant, entre les stands, Antoine fasciné s’arrêta près du marchand du sable. Celui-ci vendait de jolis sabliers, remplis de sables de toutes formes et couleurs, qui comme un temps imaginaire s'écoulaient devant les yeux ! Nouveau ! Sable coquillier ! cria le marchand. Un rêve ! Il vendait aussi du sable fin, très fin, et aussi du gros sable, du sable jaune, rouge, blanc, gris… Cela donnait vraiment envie à Antoine de faire le château de ses rêves…

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Minou en Danger

Messieurs, dames, approchezvous ! appela d’une voix forte une bergère en face. Minou Perché s’approcha tout de suite, en regardant le lait et le fromage d’un petit air fripon. Si tu y mets la patte, tu auras du bâton ! prévint la bergère en colère. Miaou ! C'est une folle ! miaula Minou Perché en se retirant. Á côté des produits fermiers, un autre marchand vendait des spécialités italiennes et différentes sortes de pâtes. Ce sont des macaronis ! Les macaronis ! cria-t-il. 28


Mais dès qu’il entendit la fermière en colère, il attrapa le chat. Oh, là, là ! Antoine, viens vite ! appela Galopin. Minou Perché est en danger ! Antoine se retourna. La voix du marchand était assourdissante : Achetez ! Achetez un chat en sac ! Pas cher ! Pas cher ! Monsieur, monsieur, mais c’est mon chat ! protesta Antoine devant lui. Mais c’était en vain, car le marchand l’ignorait complètement. Allez, laissez vite mon chat et que ça saute ! Excitée, Sauttise sauta sur le marchand, qui faisait semblant de ne pas la voir non plus. Mais tout à coup une vieille dame apparut dans la foule. Minou ! Minou ! Mon gentil minou ! appelait-elle.

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Elle demanda aussitôt au marchand, pleine d’espoir : Mon chat n’est pas perdu, monsieur, vous l’avez donc trouvé ? Confus, le marchand s’arrêta aussitôt de crier et se tourna vers la dame. Eh... Donnez une récompense, madame, et il vous sera rendu ! répondit-il en espérant gagner quand

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même un peu d’argent, mais la dame le surprit avec un baiser. L’air gêné, le marchand vida immédiatement son sac. Miaou ! C’est la Mémé ! Minou Perché, heureux, se retrouva dans les bras de la vieille dame, tandis que Sauttise sauta à son tour sur l'oreille d'Antoine. Au revoir, Antoine ! miaula Minou Perché. Tu peux garder ma puce de compagnie, si tu veux. Salut Minou ! cria Sauttise. Porte-toi bien et que ça saute !

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Le Fleuve du Temps

Antoine

se baladait au marché avec Galopin et Sauttise. Gentil coquelicot, mesdames, gentil coquelicot nouveau ! chanta une fleuriste. Boum ! Ça alors, c’est le Bouquet ! s’exclama Galopin. C'est mon Papy. Effectivement, parmi les bouquets posés dans les seaux d'eau, Antoine aperçut le Vieux Lapin, qui tenait une grande horloge entre les pattes. C'était une vieille horloge avec un magnifique cadran plein d’images et deux grandes aiguilles.

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Je vous ai attendu ici une heure d’horloge, leur dit-il en montrant le cadran, où une aiguilles pointait sur l’image d’un petit poussin en couronne d’or. Vous nous faites perdre notre temps ! C’est grave ? s’inquiéta Antoine, qui, à vrai dire, ne pouvait pas comprendre l’heure qu’il montrait.

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Non, ce n'est pas grave, le calma Galopin. Et de toute façon, chez nous nous pouvons toujours rattraper le temps perdu. Eh ? ! Comment ça alors ? s'intéressa Antoine. Comment ? Tu ne le sais pas ? ! Sauttise sautilla sur son oreille. C’est simple pourtant : il faut juste reprendre le temps quand il vient ! Et vous savez, bien sûr, d’où il vient ? demanda Antoine. Chez nous, c'est par le Fleuve du Temps, lui expliqua le Vieux Lapin. Celui qui coule dans le pré. La bonne heure est là-bas, ajouta Sauttise en sautant sur son épaule. Si tu veux, on y va ! proposa-t-elle. Alors ça, on ne peut pas manquer de le visiter ! décida Antoine. Mais d'abord, je voudrais

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acheter une gourde pour prendre un peu de temps dans ce Fleuve. Il empoigna quelques pièces dans sa poche. Ah, oui ! Tu peux prendre tout ton temps là -bas, confirma le Vieux Lapin.

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Vendeur de Coquilles

Antoine acheta une gourde à un marchand qui était en réalité un Gros Escargot. Il vendait différentes sortes d’objets, et aussi des coquilles vides.

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A qui vendez-vous vos coquilles, monsieur ? Antoine était très surpris de voir toutes ces coquilles vides aux tailles, formes et couleurs différentes. Aux perdus du pays, mon grand, répondit l’Escargot. Tu n’es pas du pays, toi ? En fait, ici, c’est quel pays, monsieur ? l'interrogea Antoine, qui avait l’impression d’avoir quitté l’espace du magasin déjà depuis quelque temps. Nous sommes au Pays de Coqualâne, mon grand, expliqua l’Escargot. Tu sais, tout est possible dans notre pays : même une toute petite bête peut devenir une grande bête, comme par exemple un âne. Et toi, tu es de quel pays ? Je suis de mon pays… fit Antoine.

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Mais il est où, ton pays ? redemanda l’Escargot, curieux lui aussi. Je ne sais pas… A vrai dire, Antoine ne savait pas comment l'expliquer. Eh, voilà un pauvre enfant qui a perdu son pays ! constata une Limace, qui se trouvait à ce moment à côté d'Antoine. Elle avait entendu toute leur conversation. Et moi, hélas, j’ai perdu ma maison ! soupira-t-elle avec une grimace.

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Madame la Limace

Pour une perdue, deux de retrouvées ! On a de jolis lots ! lui proposa l’Escargot devant ses coquilles. Alors la Limace se glissa sur le stand en examinant des jolies coquilles. Mais oui, ma petite dame, l’Escargot retourna vers elle en lui faisant la causette. Ce n’était pas très prudent de quitter sa coquille un jour de pluie ? ! La Limace lui fit une grimace. Mais je ne pouvais plus rester enfermée dans une coquille toute la journée, fit-elle. Bien sûr ma chère, c’est une bonne raison ! continua l’Escargot. Mais par exemple mon cousin Frérot 39


Jacques, lui, ne quitte jamais sa coquille. Vous avez raison. C’était tellement triste de perdre sa maison ! La Limace fit encore une grimace. Antoine regarda de près la Limace. Avez-vous perdu la raison, madame ? lui demanda-t-il. De quoi parlez-vous ? On parle de la pluie et du beau temps, mon grand, répondit l'Escargot à la place de Limace, qui était occupée à essayage d'une énorme coquille rose. Faisant de drôles de grimaces, la limace se retourna vers Antoine. A l’époque, quand j’étais mince, je me glissais sans effort dans ma porte, lui raconta-t-elle. Hélas, un jour après la pluie j'avais tellement grossi que je n’arrivais plus à y rentrer. Elle se faufila finalement dans la coquille rose. 40


Ah ! Ça c’est une coque ! se réjouit-elle enfin. Vous pensez que la couleur me va bien L’Escargot lui montra un miroir. Très jolie ! Et de plus, rose bonbon, ça n'attire pas trop l'attention des corbeaux.

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Elle est très légère cette coquille, alors je pourrai la porter partout avec moi ! La Limace se tourna de tous les côtés devant le miroir. Contente de son achat, elle glissa de son sac avec ses cornes une pièce pour l’Escargot. Quelle idée folle d’aller se promener sous la pluie, marmonna Antoine, qui entre-temps aperçut parmi les coquilles un grand œuf doré.

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Le Coquelet Guénolé

L’œuf brillait au soleil. Le garçon voyait une ombre bouger l'intérieur. Quel œuf ! dit-il, admiratif.

à

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C’est Margot la Pie qui l'a trouvé près du jardin du meunier. C'est ce qu'elle m'a dit, en tout cas. Avec ses cornes l’Escargot roula l'œuf vers lui, le montrant de tous les côtés. Si tu as une pièce, achète-le. De toute façon, il est occupé. Antoine lui donna une pièce et prit l’œuf. Il était chaud et lisse. Mais brusquement il bougea dans ses bras et puis le poussin brisa sa coque. C’était un drôle d’oiseau ! Tout jaune avec une petite écharpe rouge. De plus, ce petit coquin faisait le pied de grue dans sa coque, en observant Antoine à son tour. Mais c’est Coq Ci Grue ! L'Escargot le regarda l’air étonné. Immédiatement, la foule se serra autour d'eux, car tout le monde voulait voir le poussin.

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C’est Coq Ci Grue du Grand Cru ! s'exclama la Limace dans sa coquille rose. Oui, exacte, c’est le fils de la Poule Blanche ! confirma une vendeuse de volailles, qui s'était approchée pour mieux le voir. Le petit poussin se mit sur ses petits ergots et cria :

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Coc-corico ! Je m’appelle Guénolé ! Pauvre petit, fit Mémé, qui apparut dans la foule avec Minou Perché. C’est lui le roi ! déclara l’Escargot. Le petit poussin hocha de la tête. - Coc ! Coc ! Surpris par ces événements, le garçon avec le poussin dans ses bras se tourna vers la foule. Mais quel roi ? leur demanda-til. Vive le nouveau Roi du pays de Coqualâne ! Vive la famille des Coqs Ci Grue du Grand Cru ! cria la foule autour d'eux.

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Histoire des Coqs Ci Grue du Grand Cru

Assourdi

par tous ces cris, Antoine ne comprenait rien. Alors la Limace se glissa vers lui et commença à lui expliquer : Nous avons déjà eu trois rois. Le premier, Lascoq, était surtout connu pour ses gribouillages sur les

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murs du marché, que tu peux toujours voir par ici, mais hélas ! Elle fit une triste grimace. Il a mal terminé, précisa Galopin. Les animaux sauvages n’aimaient pas ses images, et boum ! Ce coq d'Art, ils ont fini par le manger ! Le deuxième roi, continua la Limace avec un grand soupir, c’était Cocorix, Grand Roi de l’espèce gauloise. Tous les jours il picorait des fèves sur le champ de bataille. Mais, hélas, elle fit une autre triste grimace. Une fois il est tombé sur une espèce de Faisan romain. Il avait crié « Gare à tes pattes ! ». Et Boum ! raconta Galopin, et il a aussi mal terminé. Et enfin, le bon Roi Bagarreur ! La Limace fit une fière grimace. Pour trouver la fève, il se battait sur tous les champs, comme un petit coq, à tors et à travers. 48


Il parait qu’il vivait comme un coq en pâte jusqu’au jour de Noël, ajouta l’Escargot. Et puis « Boum » ! Sa vie est terminée dans une espèce de casserole dorée. Galopin clôt l'histoire. Hélas ! Depuis, nous n’avons plus de Roi, soupira la Limace encore une fois avec une triste grimace. De plus, tous les Coqs Ci Grues de la famille royale sont partis. Ce sont peut-être des migrateurs ? donna son avis Antoine.

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Le Jour de Roi

Le pire dans tout cela, protesta l'Escargot, c'est que des oiseaux violents ont maintenant envahi le château du Grand Duc ! C'est le règne des sauvages ! ajouta Mémé avec Minou Perché dans ses bras. Espérons que ça va changer à partir d’aujourd'hui. Et pourquoi aujourd’hui ? demanda Antoine. Parce que, aujourd’hui c'est le Jour de Roi ! déclara à haute voix l'Escargot. Et selon la tradition de chez nous, ce midi à quatorze heures, le nouveau roi devrait trouver la fève dans la galette des rois. 50


De part la loi de notre nature, seulement une espèce de Coq peut servir à faire un Roi, précisa la Limace en faisant une gentille grimace à Antoine, qui tenait le petit poussin dans ses bras. Dommage pour Guénolé, c'est pourtant lui l'héritier, soupira l'Escargot. Mais hélas ! Le temps vous manque… Oh, que non ! Ce serait même trop dangereux pour un si petit poussin d'apparaître ! s'écria Mémé, l’air bouleversée. Les vilains oiseaux pourraient le manger… Vous savez bien de quoi ils sont capables ! En route et que ça saute ! La puce Sauttise sursauta sur l’épaule d’Antoine. On va arrêter le temps pour être à l’heure au château ! Coc-corico ! Au château ! cria de joie Guénolé.

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Moulin à Paroles

Antoine

chercha encore des pièces dans sa poche. Il ne lui en restait qu’une et il la mit dans la fente. En quittant le marché, ils prirent la route du Jour. Elle les emmena vers le Fleuve, où commençait le Chemin des Temps. Le suivant, ils arrivèrent vers un moulin, avec une grande roue du temps.

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Toutes ses meules tournaient et leur joli chant disait : « Toc ! Tic ! Toc ! » Boum ! Tu entends des paroles ? s’adressa Galopin à Antoine. Des paroles ? dit Antoine surpris. J’entends surtout le tic-tac d’une horloge et quelques bruits bizarres… C’est le moulin à paroles ici, renseigna Galopin. Elles s’envolent comme des papillons, papillons blancs et papillons noirs. Regarde, elles papillonnent ici, dans le pré ! Et c’est quoi comme paroles ? L’air intéressé Antoine observait les papillons. De belles paroles, des paroles douces, continua le petit lapin, l’air rêveur. Souvent, quand il m’en manque une, je viens ici pour écouter. 53


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Effectivement Antoine entendait de plus et plus clairement des paroles : « ... et maintenant le temps... après le mauvais temps arrivera un temps calme, et puis le beau temps nous attend… » C’est la radio ! devina Antoine en arrêtant la voiture devant le moulin. Ils descendirent tous et s'approchèrent de la maison du Meunier. Antoine frappa à la porte. Pas de réponse. Ils remarquèrent que derrière la maison, il y avait un jardin, entouré d'un mur en pierres. Tout en bas du mur Galopin trouva un trou. La puce Sauttise y sauta immédiatement. Galopin regarda à l’intérieur.

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Un Jardin Cultivé

Alors, qu'est ce que tu voies ? lui demanda Antoine. Boum ! Il y en a des pieds ici ! s'exclama avec une voix étonnée Galopin en s’enfonçant dans le trou. 56


Quels pieds ? questionna Antoine. Ecoute, je vois des pieds de loup et à côté, des pieds de veau, répondit le petit Lapin. J’espère qu’il ne le mangera pas ? ! s'inquiéta Antoine. Boum que non ! Ce sont des plantes ! Et puis des poireaux, continua Galopin. Et plus loin sont plantés des pieds de poules et des pieds d’oiseau, dont de jolis pieds d’alouette et même une patte-d'oie rouge. Etonnant comme jardin, remarqua Antoine. Avec un petit effort, le petit lapin entra finalement par le trou dans le jardin. Quant au garçon, il s'assit près du mur et attendit avec impatience. Quand Galopin ressortit, il mâchouillait quelques pensées bleues.

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C’est vraiment chouette ici ! Il a même planté des choux, apprécia-t-il. Tu veux des capucines ? Il lui en proposa un bouquet. C’est bien beau tout ça, dit Antoine, en goûtant aussi quelques fleurs, mais le Meunier alors, où estil ?

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Meunier Endormi

Boum ! Galopin tapa sur sa tête. Il n'est pas là. Attends, je vais jeter un coup d'œil en bas de la porte, suggéra -t- il. Ils retournèrent tous vers le moulin. La porte était toujours fermée mais il avait un espace en bas, juste assez pour que Galopin puisse glisser le nez et les yeux. Je voie des pieds de chèvres, commença-t-il à raconter. Très intéressant ! Et des pieds de Meunier, tu en vois, oui ou non ? demanda Antoine impatient.

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Boum ! Oui voilà, des pieds de Meunier près des pieds de biche, se réjouit Galopin. Alors, qu’est ce qu’il fait avec tous ces bêtes ? Antoine était intrigué par les réponses de Galopin. A mon avis, il dort. Répondit le petit lapin. 60


Il faut le réveiller pour qu’il arrête son moulin, dit le garçon. Mais oui, sursauta Sauttise sur son oreille, comme ça on aura le temps d’arriver au Château ! Les attendant, le poussin Guénolé restait perché sur le portillon du beau jardin, où il admirait les lilas en fleurs. Coc-corico ! Regardez, on dirait que le temps s'est déjà arrêté ici ! chantait-il charmé. Il paraît que tous les oiseaux du monde viennent faire leurs nids ici : la caille, la tourterelle et la jolie perdrix, et la jolie colombe qui chante jour et nuit. Antoine sursauta en jetant une pierre dans le jardin, pour faire du bruit et réveiller le Meunier. Les oiseaux s’envolèrent en criant sur Antoine, mais malgré ses fracas le Meunier continua de dormir profondément.

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Jaques le Crustacé

Soudainement, Galopin, qui

mâchouillait encore quelques pensées blanches du jardin, se tapa encore la tête : - Boum ! Je pense qu’il faut chercher frérot Jacques ! - Et pourquoi le penses-tu ? demanda Antoine. - Parce que je le pense, c’est tout ! Galopin avala le reste de ses pensées. Il faut qu’il sonne ! Boum ! Avec curiosité, Antoine regarda autour d'eux : Eh, mais qui va donc faire le Jacques ici ?

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Tu te souviens du cousin de l’Escargot ? lui rappela la puce Sauttise à l'oreille. Celui qui s’enferme toujours dans sa coque ? Je me demande, dit Antoine, hésitant, comment un crustacé fait-il pour sonner ? Ils se dirigèrent néanmoins,

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ensembles vers une grande coquille fermée au bord du Fleuve. Le garçon tapa sur la coquille. Toc ! Toc ! Ouvrez-nous la porte, appela-t-il. On cherche le Meunier ! Ce n’est pas le moulin, ici, entendit-il répondre. S’il vous plaît Jacques, pourriezvous sonner pour réveiller le Meunier ! C’est urgent ! crièrent Antoine et Galopin ensemble. D’accord, d’accord, je vais sonner. Répondit enfin Jacques le Crustacé. Aussitôt le téléphone sonna : « Dingue-dongue ! ».

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L’Eveil de Meunier

Antoine

et ses amis coururent alors au moulin. La porte était enfin ouverte et les amis entrèrent à l’intérieur. Dans la pièce sombre, Antoine vit des araignées au plafond et quelques cafards par terre. Ma fois ! C’est le coquelet Guénolé ! s’exclama un petit bonhomme avec une grande barbe blanche, assis à la table aux pieds de biches. Coc-corico ! salua de sa tête Guénolé.

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Je le savais ! Ce sont les pies qui ont volé l’œuf ! raconta le Meunier. L’autre jour, quand je suis descendu dans mon jardin, j’ai trouvé la pie au nid. Vilains oiseaux ! Justement nous allons au château du Grand Duc, commença Antoine. Monsieur le Meunier, pourriez-vous arrêter un peu votre roue du Temps ? Sinon, nous serons en retard. Coc ! confirma Guénolé. Sauttise sautillait sur l'épaule d'Antoine : Ça va sauter là-bas ! Boum ! ajouta Galopin. Le Meunier les regarda l’air pensif. Puis il parla. Attendez que les temps changent. Je suis sûr qu’un jour les Coqs Ci Grue reviendront… leur ditil. Vous savez, c'est une histoire d'oiseaux migrateurs.

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Un jour ? ! Quel jour ? ! Je ne peux pas rester grandir ici ! Que dirait ma maman ? ! protesta Antoine. Coc-corico ! Il faut absolument qu’on aille au château, insista Guénolé. Je dois trouver la fève ! C’est moi le nouveau Roi du pays de Coqualâne ! Mais si vous ne trouvez pas la Fève du Roi, vous risquerez vos vies, prévint le Meunier. Je vous rappelle qu'il y a de vilains oiseaux, qui mangent les poussins. Et de plus, n’oubliez pas la Gueule Noire ! C’est qui ça, encore ? demanda Antoine. C’est le chef de la bande, on dit que c’est une bête féroce, répondit le Meunier. Bon, ce n’est pas grave, fit Antoine. On verra ça sur place. Bonne chance, alors !

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Le Meunier prit une échelle avec des pieds de chèvres, et monta au plafond pour arrêter la grande roue du temps. Dépêchez-vous ! Je ne peux pas la retenir éternellement, leur dit-il. Et prenez donc la pièce sur la table, c’est la dernière qui me reste. Merci, monsieur le Meunier ! Je voudrais aussi prendre un peu d’eau de temps pour ma mère, dit Antoine. Cela lui fera plaisir, car elle n’a jamais le temps. Il sortit de la maison et remplit sa gourde dans le Fleuve du Temps. Il ressentit aussitôt des petites gouttelettes tomber sur ses genoux. Boum ! Elle fuit ta gourde, remarqua Galopin. C’est vrai qu’il nous échappe toujours, le temps… confirma le Meunier sous le plafond.

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C’est pas grave ! dit Antoine. Si nous nous dépêchons, il en restera quand même un peu pour ma mère. Puis le garçon mit la pièce dans la fente et redémarra sa voiture.

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Sur la Bonne Route

J’espère que nous sommes sur la Bonne Route ! Antoine regardait autour de lui. Il lui semblait que maintenant, la voiture roulait sur un chemin forestier. 70


Regardez ces jolies violettes, et voilà de l’aubépine, et de l’églantier, lança Galopin en tentant d’attirer l’attention. A son tour Antoine remarqua une cigale sur une brindille et arrêta la voiture.

Coc ! dit Guénolé, si la Cigale y dort, il ne faut pas la blesser. C’est le chant du rossignol qui viendra la réveiller, chantonna Sauttise à l'oreille du garçon. En effet, dès que le Rossignol chanta tout là-haut dans le ciel, la Cigale, à 71


son tour, se mit à jouer une musique folle et assourdissante. Coc-corico ! Je voudrais bien inviter la Cigale et le Rossignol à mon château, déclara Guénolé. Comme cela, on pourra faire une grande fête royale, avec un concert d'oiseaux, lui suggéra Antoine. Dans ce cas-là, n’oublie pas non plus la Fauvette, avec son doux gosier, conseilla la puce Sauttise, leur montrant un petit oiseau gris sur une branche d’églantier qui les observait l’air curieux. Les oiseaux et la Cigale rejoignirent ainsi la compagnie. Tout le monde continua le route en chantant : - Mou-che - Mou-che-let-te ! Demain c'est la fê-te ! Boum ! Boum !

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Dans un Coin Perdu

La

voiture s’enfonça dans la

forêt. « Broum ! Broum ! Psh… » et voilà qu’elle s’arrête devant un grand chêne. 73


Antoine chercha en vain dans ses poches, il n’avait plus de pièce pour redémarrer. Des papillons noirs voletaient en l’air. Du haut du grand chêne, un grand hibou sombre sortit de son nid et lança : Bou-bou ! Ça c’est chouette ! Il leur jeta un mauvais regard. Loup ! Loup ! Où es-tu ? Viens vite ici ! cria-t-il d'une voix méchante. Entends-tu ? Que fais-tu ? Il cherche sa culotte, lui répondit Antoine en ramassant une pierre par terre. Tais-toi ! Et il lui jeta la pierre pour l’effrayer. Puis il demanda à Galopin : Où sommes-nous ? Boum ! Dans un Coin Perdu, répondit d'une voix tremblante le petit lapin, qui n’était vraiment pas rassuré à cause du loup...

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N’aie pas peur, il n’y a pas de loup ici, essaya de dire Sauttise pour le calmer. S’il y avait un loup, il nous mangerait tous, chantèrent le Rossignol et la Fauvette.

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L’Aiguille dans le Foin

Il faut quand même vite trouver la sortie, s’inquiéta Antoine en regardant dans sa gourde. Il restait encore assez de temps. Et à ce moment, le poussin Guénolé se mit sur ses petits ergots et cria : Coc-corico ! Coc-corico ! Regardez, ça alors ! Aux pieds du grand chêne ils virent, assis, sur une botte de foins, le Vieux Lapin avec son horloge. Une aiguille est tombée, expliqua-t-il avec grande inquiétude, et je ne sais plus quelle heure il est. On dirait bien un temps mort… 76


Il leur montra son horloge, où une seule aiguille pointait vers l’image d’un loup noir en chapeau blanc. Je trouverai l’aiguille. Et que ça saute ! Et d’un seul mouvement la petite puce plongea dans la botte de foin. En cherchant de la sorte, je ne sais pas bien ce qu’elle trouvera, commenta le Vieux Lapin. A ce moment précis, la puce sortit avec une fève. Hour-ra ! se réjouit Antoine en la prenant. Un instant, s'il vous plaît ! dit la puce. Je repars chercher l’aiguille, pour que le Vieux Lapin puisse réparer son horloge. Démarre ta voiture, Antoine ! Et allez par-là, dit le Vieux Lapin en leur montrant la flèche sur le chêne, où il était marqué : « Toutes directions ».

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Tous les chemins mènent d’ici aux Quatre Coins, et puis ensuite, vous prendrez le raccourci à l’envers, expliqua-t-il. Attendez-moi ! Je l’ai ! J’ai trouvé l’aiguille ! cria la puce en sautant au milieu du foin. Le Vieux Lapin la fixa immédiatement sur le cadran de son horloge. Dépêchez-vous ! Maintenant le temps n’attend plus du tout ! En roulant tout droit, ils arrivèrent finalement aux Quatre Coins, où il y avait quatre flèches : Coin Perdu, Bon Coin, Coin d’un Bois, le Petit Coin. Le château du Grand Duc était dans la direction du Bon Coin. Ayant remarqué un petit chemin en sens interdit, Antoine fit un demi-tour avec sa voiture et prit ce chemin à contresens.

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Au Ch창teau du Grand Duc

Le

petit poussin se mit sur ses petits ergots et chanta : 79


Coc-corico ! Coc-corico ! Enfin, nous sommes dans un Bon Coin ! Galopin sauta de joie : Boum ! Boum ! Sauttise sautilla sur la tête de Galopin : Ça va sauter ! Antoine accéléra vers le château du Grand Duc dont les portails étaient grand ouverts pour laisser entrer les visiteurs. Les drapeaux avec une image de coq couronné flottaient sur les tourelles. Sans hésitation, Antoine entra dans la cour et se gara près d'un pont. Entre cris et caquetage il regarda autour de lui. On aurait dit que la cour était remplie de crêtes de coq. Des corbeaux, des corneilles et des pies survolaient cette basse-cour improvisée. Il y en a du monde pour chercher une fève ! remarqua Antoine en descendant de sa voiture. 80


Que ça saute ici ! s'excita la puce Sauttise. Mais seulement un coq peut être le Roi ! C'est ça la loi ! Les pies et les corbeaux ne le pourront pas ! chanta le Rossignol. Regardez-moi ça : Coq Héron et Coq Huppé sont là, leur montra Galopin avec sa patte. Et Coq Faisan ! En voici un coquin, ajouta Sauttise. Regardez ce Coq des Bois, et làbas un Coq de Roche et puis un Coq de Marais ! On les connaît tous, chantèrent le Rossignol et la Fauvette. Il y a même le fameux Coq d’Inde, qui est farci de blagues, remarqua la Cigale. J’espère qu’il ne va pas nous jouer des tours. La dernière fois que je l'ai vu, il a fait d'une mouche un éléphant, confirma Galopin.

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La Galette des Rois

Une

crevette rose se présenta devant eux. Je m'appelle Sali Coque, dit-elle. Je suis hôtesse d'accueil. C’est par-là l’entrée ! En traversant la cour sous des regards curieux, elle les accompagna dans une grande salle à l'intérieur du château. Comme la cour, la salle était remplie d'oiseaux et de bêtes de toutes sortes. - Ça, c’est du gâteau ! exclama le petit lapin. Galopin, admiratif, fixa des yeux une énorme galette sur la grande table ronde, autour de laquelle tous les chercheurs de fèves s’installèrent, chacun à sa 82


manière. Avec des regards menaçants, une bande de corbeaux noirs et de choucas, ayant survolé la salle, se posa sur la table. En voilà une Galette des Rois ! Antoine s’approcha aussi de la grande table.

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J’aime la galette quand elle est bien faite, surtout quand il y a une fève dedans ! chanta-t-il. Mais qu’est ce que t’a dit Maman : « Ne touche à rien ici ! » Antoine s'étonna en voyant le Vieux Lapin sur une grande chaise. Sa vieille horloge était posée près de sa chaise, et Antoine remarqua que les deux aiguilles pointaient presque vers une galette avec sa couronne d’or. Tu as rattrapé l’heure ! Bravo ! le félicita celui-ci. Et il en reste même encore pour Maman, dit Antoine en regardant dans sa gourde. Puis-je avoir une part de la galette ? Fais plutôt attention, lui répondit le Vieux Lapin. Tout peut changer très vite ici et même tourner mal…

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Choucas Noir

Antoine

s'assit avec coquelet Guénolé, à coté du Vieux Lapin. Galopin prit une autre chaise. En face de Guénolé se posa aussitôt sur la table un grand oiseau noir.

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Lui lançant des regards noirs de son œil perçant, celui-ci commença à nettoyer son long bec noir pointu. C’est un choucas ! devina Antoine. Coc ! Je n’aime pas ces oiseaux si nombreux ! Ils vont trouver la fève avant nous ! paniqua Guénolé. Le Vieux Lapin retourna vers Antoine. Sais-tu chercher la fève à la mode de chez nous ? questionna-t-il. Quelle mode ? demanda Antoine Evidement, avec les pattes ou le nez, expliqua Galopin. Pouah ! C’est dégoûtant ! remarqua Antoine. Ils vont manger la galette avec leurs sales pattes et leurs becs ? ! Coc ! Il faut absolument que je trouve la fève, s’inquiéta Guénolé dans ses bras. Sinon je sens que les choses tourneront mal. 86


Sinon tu passeras à la casserole, dit le Vieux Lapin en leur montrant la porte de la cuisine, et d'où on voyait une grande bête sortir avec une casserole entre les pattes et un chapeau de cuisinier sur la tête. Le loup ! chouchouta Galopin blanc de peur. Le loup était habillé d’une chemise, et portait aussi un pantalon, des bottes et même des lunettes de soleil. Il avait plus que tout une effroyable gueule noire. Grrr ! Appelez-moi Maître Coq, tout simplement ! se présenta-t-il à tout le monde. A ce titre, je vais donc chercher la fève comme tous les autres coqs ! Hé-hé ! La bête rit de sa voix rauque, contente de sa blague. C'est ça son astuce ! comprit le Vieux Lapin. Galopin se tressaillait de peur. La Gueule Noire ! lamenta-t-il. 87


Il me semble bien voir là le Méchant Loup, confirma Antoine. Le Vieux Lapin, le seul, garda son sang froid. A l’heure sonnée on commencera. Préparez-vous, dit-il en regardant son horloge. Prêts ? !

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A l'Heure Sonnée

Dingue-dongue ! Dinguedongue ! sonna la vieille horloge au son éraillé. L’heure a sonné ! déclara le Vieux Lapin. Et que ça saute ! ajouta Sauttise. La foule des oiseaux se lança sur la galette. Les miettes partaient dans tous les sens comme pendant une tempête de sable. Affolé, Galopin se cacha sous sa chaise. Protégeant sa tête des oiseaux avec les mains, Antoine se coucha sur la galette devant lui. Allez ! Dépêchez-vous ! ordonna-t-il à Guénolé et Sauttise. 89


Cherchez-la, pendant que je vous couvre. Ce n’est pas un jeu de puce ici, remarqua Sauttise en sautant dans la galette. Guénolé la suivit. Antoine les attendait en chassant les oiseaux qui s’approchaient. Un moment plus tard Sauttise réapparut toute seule. Je l’ai vue ! Je l'ai trouvée ! ditelle à l'oreille d’Antoine. Elle est là la fève ! Mais Guénolé n’arrivera pas à la sortir tout seul. Il est encore petit. Bon, montre-moi où est la fève, dit Antoine, dégageant une de ses mains et l'enfonçant dans la galette derrière la puce Sauttise. A travers la pâte d'amande qui lui arrivait maintenant jusqu'au coude, il sentit finalement quelque chose de dur… Ça y est ! Je la tiens !

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Antoine hissa Guénolé au bout de ses bras et l’assit sur la fève en forme de coq en couronne d’or. Le petit poussin se mit sur ses petits ergots et cria : Coc-corico ! Vive le roi Guénolé ! chantèrent le Rossignol et la Fauvette, qui après avoir fait un tour de salle, s'envolèrent par la fenêtre. Les autres oiseaux chantaient la bonne nouvelle en survolant le pays : Vive le Roi du pays de Coqualâne ! Vive le Roi Guénolé de la famille des Coqs Ci Grue du Grand Cru ! La Cigale partit aussitôt chercher l’orchestre de cigales et de grillons pour que la fête commence.

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La Gueule Noire

Le

mêlée sur la galette s’arrêta d’un coup. Quelqu’un a déjà trouvé la fève ! ? criaillait le Coq Faisan. Il est grand, le roi ? s’intéressa à son tour le petit Coq de Roche. Un poids de coq, évidemment, lui répondit le Coq d’Inde. Et qu’est ce que va dire maintenant la Gueule Noire ! ? demanda le Coq des Marais.

Grrr ! Pas si vite, mon petit coco ! rugit la Gueule Noire. Que le garçon rende la fève de Grue couronnée, et en échange 92


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je lui donnerai… Le Loup se tut pour réfléchir. Karr ! Des pois ? lui suggéra la Corneille. Grrr ! Non, pas ça… brailla la Gueule Noire. Karr ! De beaux yeux ? crailla le Corbeau Noir. Un tas de billes ! jacassa Margot la Pie. De jolies billes brillantes et lisses ! Jamais ! ! ! dit fermement Antoine. Et voilà ! Il ne veut pas ! jacassa la Pie. Grrr ! Alors, tous les deux à la casserole ! hurla la Gueule Noire de sa voix rauque, en donnant l’ordre aux corbeaux de les rattraper. Les corbeaux s'envolèrent dans la salle. Karr ! Cherchons à quelle sauce l’enfant sera mangé ! croassa le Corbeau. 94


Karr ! On va le mettre à frire ! criailla la Corneille. Karr ! On voudrait le fricasser ! croassa le Choucas. Ce sera un bon coquelet ! jasa la Pie. Ah, non pas ça ! s’exclama Galopin, en tirant Antoine avec Guénolé hors de la salle. La Gueule Noire, armée de sa casserole, les poursuivit. Protégeant Guénolé dans ses bras, Antoine courrait, comme un lapin, de toutes ses forces à côté de Galopin. La voiture était garée juste après le pont, qui était déjà envahi par la foule. Tout le pays, averti par les oiseaux, avait arrivé pour danser et fêter le nouveau roi. L’orchestre des cigales jouait une musique joyeuse et dansante.

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Pour éviter la foule, la Gueule Noire galopait sur le bord du pont. Antoine entendait des pas de loup derrière lui. Mais à ce moment quelqu'un bondit de la foule. C'était le Minou Perché, qui sauta sur la gorge du loup. Surpris par ce chat à la gorge, celui-ci perdit l’équilibre et tomba à l'eau. Il roula dans le ruisseau, hurlant de rage. Grrr ! Tous à la casserole ! Attrapez-les ! s'égosillait-il. Du calme ! Du calme ! Elle meurt de soif de vengeance, la grosse bête ! Sur le pont, Mémé lui tendit le gobelet : Bois la tasse ! La Gueule Noire but la tasse et avala un crapaud avec, ce qui lui coupa complètement la parole. Entre-temps Antoine et ses amis regagnèrent la voiture.

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Dans le Champ des Fèves Magiques La bande des corbeaux noirs poursuivait la voiture. Antoine l’accéléra vers la route des Champs qui traversait le champ de fèves.

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En roulant, il ramassa une poignée de fèves fraîches, ainsi il espérait pouvoir rouler longtemps. Attention, au milieu du champ, il y a un trou noir, prévint Galopin. Mais de l’autre coté, les oiseaux n’osent pas voler dedans ! Antoine avait toujours peur dans le noir, mais les vilains oiseaux ne cessaient de les poursuivre, et il décida à rouler vers le milieu du champ.

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- A vrai dire, je ne sais pas où mène ce trou noir. Hésité, Galopin scruta le ciel avec inquiétude. 99


Oh, non, pas ça ! lamenta-t-il soudainement. Ils virent en face d’eux un gros nuage sombre s’approcher à grande vitesse. Nous sommes pris au piège, nous n’arriverons pas au trou, désespéra Antoine. Ce sont aussi de vilains oiseaux ! A l'étonnement général, cette nuée de grands oiseaux étranges attaqua la bande de corbeaux et de pies et la prit en chasse… Coc-corico ! chanta Guénolé en battant des ailes. Ils sont revenus, tous les Coqs Ci Grue ! Un, deux, trois… Le petit poussin décolla vers les Coqs Ci Grues, qui avaient fait demitour pour l’attendre. Hourra ! Et que ça saute ! se réjouirent Galopin et Sauttise, en sautant de la voiture dans le champ de fèves. 100


Hourra ! Hourra ! Vive le roi Guénolé ! chantaient le Rossignol et la Fauvette haut du ciel. Antoine regarda le ciel en sautillant, lui aussi, dans sa voiture. Il ne remarqua pas qu'il se trouvait déjà au beau milieu du champ. La voiture tomba dans le trou noir… Ah, maman ! cria Antoine en fermant les yeux de peur.

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Midi à Quatorze Heures

Antoine, tu m'entends ! l'appela Maman. Mais comment donc as-tu réussi à démarrer cette voiture, d’autant plus que tu n’avais pas de pièce, je me demande bien ? Et c'est quoi cette vieille gourde ? Est-elle vide ? Antoine ouvrit les yeux et vit maman avec son caddie plein d’achats. Il était seul dans la voiture de course, devant la grande maison de poupée. Il desserra sa main et il vit une fève, en forme de coq en couronne d’or. Ils sont revenus les Coqs Ci Grues ! dit-il. 102


Qu’est ce que tu dis ? lui demanda Maman. J’ai rencontré des Coqs Ci Grues ! Ils sont revenus ! Antoine descendit vite de la voiture et regarda par la fenêtre à l’intérieur de la maison de poupée. Elle était vide. Seul un fauteuil se balançait comme si on venait de le quitter, et les deux grandes aiguilles de l’ancienne horloge montraient soit midi, soit quatorze heures...

FIN

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SOMMAIRE ANNA BAMBADE _____________________________ 1 Antoine au pays de Coqualâne _____________ 1 Illustrations de ANTOINE TIMOTHEE __________ 1 La Fève Magique ____________________________ 3 Le Vieux Lapin _____________________________ 8 Galopin___________________________________ 11 Jeu à Chat _________________________________ 14 La Souris Blanche____________________________18 Minou Perché ______________________________ 21 Marché aux Puces ___________________________ 25 Minou en Danger____________________________28 Le Fleuve du Temps _________________________ 32 Vendeur de Coquilles ________________________ 36 Madame la Limace___________________________39 Le Coquelet Guénolé ________________________ 43 Histoire des Coqs Ci Grue du Grand Cru _________ 47 Le Jour de Roi______________________________50 Moulin à Paroles____________________________52 Un Jardin Cultivé ___________________________ 56 Meunier Endormi ___________________________59 Jaques le Crustacé ___________________________ 62 L’Eveil de Meunier __________________________ 65 Sur la Bonne Route __________________________ 70 Dans un Coin Perdu _________________________ 73 L’Aiguille dans le Foin ________________________76 Au Château du Grand Duc ____________________ 79 La Galette des Rois__________________________ 82 Choucas Noir_______________________________85 A l'Heure Sonnée ___________________________ 89 La Gueule Noire ____________________________92 Dans le Champ des Fèves Magiques _____________ 97 Midi à Quatorze Heures _____________________ 102

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